Analyser l’impact d’un projet de microfinance : l’exemple d’ADéFI à Madagascar (AFD/2005)

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    Analyser limpact dun projetde microfinance :

    lexemple dADFI Madagascar

    AGENCE FRANAISE DE DVELOPPEMENT, 20055 rue Roland Barthes - 75598 Paris cedex 12

    Tl : 33 (1) 53 44 31 31 - Fax : 33 (1) 44 53 99 39 - Internet : www.afd.fr

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    Analyser limpact dun projetde microfinance :

    lexemple dADFI Madagascar

    Flore GubertFranois Roubaud

    IRD-Paris, DIAL

    en collaboration avec

    Faly Rakotomanana

    INSTAT-Madagascar

    et

    Irne Ravelosoa Rabemananjara

    Consultante

    AVERTISSEMENT

    Les analyses et conclusions de ce document sont formules sous la responsabilit de ses

    auteurs.Elles ne refltent pas ncessairement le point de vue officiel de lAgence Franaise

    de Dveloppement.

    Remerciements

    Les auteurs tiennent exprimer leur reconnaissance au directeur

    d'ADFI, M. Ramaroson Adriamangazoto, pour sa contribution

    au bon droulement de cette tude.

    Ils remercient Marie-France L'hriteau, en charge du projet

    ADFI l'AFD et l'origine de cette publication, ainsi que

    Sarah Marniesse qui a suivi le droulement de l'tude et sa

    finalisation pour le compte du Dpartement de la Recherche de

    l'AFD. Ils remercient galement Denis Castaing, directeur del'agence d'Antananarivo, et Emmanuel Haye pour leur accueil

    chaleureux, ainsi que Jacky Amprou et Vronique Sauvat pour

    leur relecture attentive. Enfin, cette tude n'aurait pu tre mene

    bien sans le formidable travail sur le terrain des enquteurs et

    superviseurs malgaches.

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    SommaireAbstract . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .8

    Rsum . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .9

    Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .11

    1. Impact de la microfinance : tat de la recherche . . . . . . . . . . . . . . . . . . .17

    1.1. Impacts gnraux de la microfinance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .19

    1.2. Impact de la microfinance sur la pauvret . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .22

    2. La microfinance Madagascar : tat des lieux et positionnement

    d'ADFI . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .392.1. L'offre et la demande de microcrdit Madagascar . . . . . . . . . . . . . . . .41

    2.2. Prsentation de l'activit d'ADFI et de ses adhrents . . . . . . . . . . . . . .56

    3. Analyse de l'impact . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .77

    3.1. Prsentation de la mthodologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .77

    3.2. Impact des financements accords par l'IMF sur les performances des micro-

    entreprises . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .83

    3.3. Impact des financements accords par l'IMF sur les conditions de vie du

    micro-entrepreneur et de sa famille . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .104

    4. Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .107

    Annexe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .109

    Bibliographie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .113

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    Abstract

    This study aims at assessing the impact of a microfinance insti-tution serving micro-entrepreneurs in Antananarivo (Madagascar).

    It starts by reviewing the recent literature on the socioeconomic

    impact of microfinance, then moves on to describe the current

    state of supply and demand of micro-credit in Madagascar. Finally,

    the results of the examination of the impact of ADFI financing on

    micro-enterprises are presented. The methodology consists of com-

    paring the situation of a representative sample of micro-enterprise

    ADFI clients with a control group, constructed in an almost expe-

    rimental way through a standard matching technique. Overall, theresults indicate a positive impact of the project. Taken as a snap-

    shot, the studies conducted in 2001 and 2004 indicate that the

    micro-enterprises financed recorded better average performance

    than informal production units without funding. With a dynamic

    perspective however, the results were more nuanced. If the positive

    effect of the project is clear during growth phases, its effect during

    contractions appears less certain.

    Rsum

    Cette tude sattache analyser l'impact d'une institution demicrofinance oprant auprs de micro-entrepreneurs Antananarivo

    (Madagascar). Elle dbute par un passage en revue de la littrature

    rcente consacre limpact socio-conomique de la micro-

    finance. Elle dcrit ensuite succinctement ltat de loffre et de la

    demande de micro-crdit Madagascar. Elle prsente enfin les

    rsultats de l'analyse de l'impact des financements accords par

    ADFI. La mthodologie retenue consiste comparer la situation

    dun chantillon de micro-entreprises clientes dADFI reprsenta-

    tives de lensemble de la clientle de linstitution celle dungroupe de contrle construit de faon quasi-exprimentale par une

    technique standard dappariement. Dans lensemble, les rsultats

    des analyses concluent un impact positif du projet. En statique,

    les valuations conduites en 2001 et 2004 montrent que les micro-

    entreprises finances enregistrent de meilleures performances en

    moyenne que les UPI non finances. En dynamique, les analyses

    menes sont plus nuances. Si l'impact positif du projet est

    clairement tabli en phase de croissance, son effet en priode de

    rcession parat plus incertain.

    8 9

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    Introduction

    A la suite des expriences pionnires de la Grameen Bank auBangladesh et de la Banco Sol en Bolivie, la microfinance sest

    tendue travers le monde et toucherait aujourdhui quelque 80

    millions de personnes. Ce dveloppement trs rapide a t forte-

    ment encourag et soutenu par les organisations internationales et

    les agences de coopration multi- et bilatrales. Leur soutien sest

    notamment traduit par le lancement, en fvrier 1997, dune cam-

    pagne mondiale visant aider, par le microcrdit, 100 millions de

    familles parmi les plus pauvres lhorizon 2005. Un an plus tard,

    en 1998, lAssemble gnrale des Nations unies a proclam 2005

    anne internationale du micro-crdit. Lors du Xe sommet de la

    Francophonie de Ouagadougou, en 2004, un certain nombre de

    chefs dEtat et de gouvernements des pays du Sud se sont engags

    soutenir les institutions de microfinance (IMF) et faciliter leur

    insertion dans les circuits financiers classiques. Aprs vingt ans de

    structuration et dinstitutionnalisation, la microfinance est ainsi pr-

    sente comme lun des outils privilgis de la lutte contre la pauvret.

    Cet engouement quasi gnralis pour la microfinance contraste

    toutefois avec ltat parcellaire des connaissances sur son efficacit.

    Rpond-elle aux objectifs de dveloppement qui lui sont assigns ?

    On lignore, comme latteste cette remarque extraite dune publica-

    tion rcente : MFI field operations have far surpassed the research

    capacity to analyze them, so excitement about the use of microfinance for

    poverty alleviation is not backed up with sound facts derived from rigorous

    11

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    suprieure, conformment la cible thorique dADFI) et dim-

    pact (positif et significatif sur le chiffre daffaires ou la production).

    Il est toutefois apparu la fois utile et intressant de prolonger

    cette tude statique, dautant plus que le contexte statistique

    malgache sy prtait parfaitement : outre les enqutes rptes surles entreprises clientes de linstitution de microfinance, deux

    enqutes reprsentatives du tissu de micro-entreprises de la capitale

    malgache ont en effet t ralises ces quatre dernires annes,

    offrant lopportunit, rare dans les pays du Sud, dutiliser une

    mthodologie sophistique de mesure dimpact partir de donnes

    dynamiques .

    Cette seconde tude mobilise ainsi des donnes reprsentatives

    des entreprises clientes de linstitution et de lensemble des

    micro-entreprises dAntananarivo, diffrents moments dans le

    temps. Elle permet ainsi de prciser les rsultats de la premire

    tude (notamment sur les aspects dynamiques) et den amliorer la

    qualit grce (i) la prise en compte de variables non observables

    en statique et (ii) lamlioration de lappariement entre micro-

    entreprises clientes et micro-entreprises non clientes.

    Elle est structure de la manire suivante : une premire partie

    dresse un bilan des avances et des limites de la mesure dimpact des

    projets de microfinance telles quelles ressortent de la littrature

    acadmique sur le sujet. Une deuxime partie prsente la situation

    de la microfinance Madagascar ainsi que lactivit et le position-

    nement dADFI, et en particulier les caractristiques compares de

    sa cible . Enfin, une troisime partie tente dtablir un bilan le

    plus fiable possible, en statique et en dynamique, de lintervention

    de linstitution de microfinance prs de dix ans aprs sa cration.

    research. Given the current state of knowledge, it is difficult to allocate

    confidently public resources to microfinance development (Zeller M. et

    R.L. Meyer, 2003). Cet tat de fait tient dune part un manque

    de donnes fiables et, dautre part, la difficult de mesurer de

    faon rigoureuse limpact dun projet de microfinance toutes chosesgales par ailleurs.

    La prsente tude, qui porte sur limpact de linstitution

    malgache de microfinance ADFI, sinscrit prcisment dans la

    double perspective de produire des donnes fiables sur la porte

    dun projet de microfinance et de les analyser selon une mthode

    scientifique robuste.

    Une premire valuation de limpact dADFI avait t ralise en

    2003 par un consortium compos du GRET, de DIAL et du projet

    MADIO, la demande conjointe du Directeur gnral dADFI et de

    lAgence Franaise de Dveloppement.

    La mthodologie employe dans le cadre de cette premire

    valuation consistait comparer la situation dun chantillon de

    micro-entreprises clientes dADFI reprsentatives de lensemble

    de la clientle de linstitution celle dun groupe de contrle

    construit de faon quasi-exprimentale par une technique standard

    dite dappariement. Le principe de cette mthode est dtaill dans

    la prsente tude.

    Lvaluation quantitative, qui stait appuye sur un dispositif

    assez lourd denqutes, avait t complte par une analyse quali-

    tative de limpact dADFI partir dentretiens ouverts auprs dun

    petit nombre de micro-entrepreneurs dADFI.

    Des conclusions encourageantes avaient t tires de cette

    premire tude en terme de cible (micro-entreprises de la frange

    12 13

    ANALYSERLIMPACT DUN PROJET DE MICROFINANCE : LEXEMPLE DADFI MADAGASCAR INTRODUCTION

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    15

    Sources dinformation

    Encadr 1

    14

    micro-entreprise Antananarivo ; (2) de disposer dun fichierreprsentatif de micro-entreprises non bnficiaires de linter-

    vention dADFI (utile pour la constitution du groupe tmoin) ;

    les diffrents passages de lenqute quantitative de

    suivi/valuation, raliss respectivement en septembre 2001,

    mars 2003 et fin 2004. Cette enqute porte sur un groupe

    dentreprises reprsentatives des clients dADFI en 2001 et

    un groupe dentreprises tmoins identifies partir de

    lenqute 1.2.3. ralise en 2001. Lobjectif de ce dispositif

    denqutes en panel est de suivre lvolution de la situation

    des clients dADFI et du groupe de contrle. Afin dviter

    quun trop grand nombre dunits de production informelles

    (UPI) sortent du panel (comme cela fut le cas lors du

    deuxime passage, en mars 2003), les enquteurs ont eu

    pour charge, lors du troisime passage, de retrouver la trace

    des personnes responsables des UPI ayant chang dactivit,

    dmnag ou encore disparu au cours de la priode consi-

    dre. Grce ce travail de tracking, il a t non seulement

    possible de suivre la dynamique des micro-entreprises

    clientes et non clientes dADFI mais aussi de savoir si le

    taux de disparition des UPI tait plus faible au sein de la

    clientle ADFI quau sein des non clients, ce quaucune

    tude dimpact ntait jusqu prsent parvenu montrer ;

    lenqute auprs dun chantillon renouvel de clients

    dADFI, ralise fin 2004.

    Cette tude mobilise diffrentes sources dinformation la foisreprsentatives des micro-entreprises clientes dADFI et du tissu

    de micro-entreprises dAntananarivo :

    le fichier clientle dADFI-Antananarivo diffrents

    moments du temps, le dernier datant du 30 septembre 2004 ;

    la phase 2 des enqutes 1.2.3. de 2001 et 2004. Lenqute 1-

    2-3 est une enqute statistique en plusieurs phases, visant

    apprhender lemploi et les activits conomiques des

    mnages, notamment dans le secteur informel. La premire

    phase est une enqute sur les conditions dactivit de la

    population (Phase 1 : enqute sur les conditions dactivit

    des mnages). La deuxime phase consiste en la ralisation

    dune enqute auprs des chefs dunits informelles sur les

    conditions de production et les rsultats conomiques de

    leur tablissement (Phase 2 : enqute auprs des units de

    production informelles) qui permet de reprer les chefs

    dunits informelles souvent absents des bases de donnes

    officielles. Enfin, la troisime phase est compose de deux

    enqutes articules dont lobjectif principal est de mesurer le

    poids du secteur informel dans la consommation des

    diffrentes catgories de mnages (Phase 3 : enqute sur les

    conditions de vie des mnages). Lexistence de la phase 2

    facilite considrablement lanalyse de limpact de linterven-

    tion dADFI en permettant (1) de resituer la place des

    entreprises appuyes par ADFI dans le contexte gnral de la

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    1. Impact de lamicrofinance :

    tat de la recherchePour mesurer limpact dun programme de microfinance, deux

    questions doivent tre examines :

    Quels sont la cible et lobjectif du projet en question ? Certes,

    le microcrdit a t conu pour permettre aux plus pauvres

    daccder un crdit leur permettant de possder un outil de

    travail pour gagner leur vie1

    .

    Mais, dans des contextes o lemarch bancaire fonctionne de manire trs imparfaite, les

    pauvres ne sont pas les seuls tre exclus du crdit. Le public

    susceptible dtre intress par un microcrdit va au-del des

    plus pauvres. Paralllement, les institutions de microcrdit

    ont intrt prter aux emprunteurs les plus fiables , au

    dtriment des populations les plus pauvres. Il y a donc de la

    place pour des institutions de microcrdit diriges vers des

    populations qui ne sont pas les plus pauvres, et en particulier

    pour une frange de micro-entrepreneurs intresss par desmicrocrdits pour financer leurs fonds de roulement ou du

    petit matriel. Par exemple, si les associations de crdit et

    17

    1. Mohamed Yunus, le fondateur de la Grameen Bank raconte qu'il a eu l'ide du

    microcrdit la suite de sa rencontre avec une marchande de paniers, enfermedans une trappe pauvret car elle ne pouvait pas obtenir le crdit qui lui auraitpermis d'acheter le bambou ncessaire la fabrication de ses paniers. Sans ce

    crdit, elle tait dpendante d'un fournisseur qui lui rachetait ses paniers un prixdrisoire.

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    ce type de mthodologie. Aprs une synthse densemble telle

    quelle ressort de la littrature existante, nous nous centrerons sur

    un type dimpact spcifique, savoir la rduction de la pauvret. En

    effet, les travaux les plus rcents et les plus solides se sont surtout

    focaliss sur cette question, entre autres parce que les programmes

    de recherche des conomistes du dveloppement sont intimement

    lis aux orientations majeures des politiques publiques.

    1.1. Impacts gnraux de la microfinance

    Notre revue de littrature sur lvaluation dimpact de la micro-

    finance mobilise principalement des travaux publis dans des

    revues acadmiques. Peu nombreux, ils restent cependant une

    rfrence privilgie en raison du systme de validation par les pairs

    qui leur garantit un minimum de rigueur. Bien sr, il convient ce

    stade de souligner le rle jou par des tudes ralises dans le cadre

    de projets spcifiques, comme le projet AIMS (Assessing the Impact

    of Microenterprise Services) de lUSAID, moteur dans la multiplica-

    tion des tudes dimpact de la microfinance depuis plus dune

    dcennie. Les travaux entrepris dans ce cadre constituent de loin la

    principale source dinformations sur ce thme dans les pays en

    dveloppement. Mais si ce projet a incontestablement fait avancer

    ce champ dinvestigation, notamment en posant clairement les

    conditions mthodologiques minimales requises pour que lon

    puisse rellement parler dvaluation dimpact ou en promouvant de

    nombreux travaux de ce type, les tudes entreprises dans ce cadre

    sont restes un stade que nous qualifierons de littrature inter-

    mdiaire . Il sagit dans la plupart des cas de rapports de projets qui

    nont pas donn lieu publication dans des revues acadmiques.

    dpargne (loans and savings associations) sadressent souvent

    aux femmes les plus dmunies pour des besoins exclusive-

    ment sociaux, dautres organismes comme ADFI visent

    davantage un objectif de soutien ou de dveloppement des

    micro-entreprises. Ce deuxime type de soutien peut videm-

    ment en retour, avoir des effets sociaux ; mais le premier

    impact valuer est de nature conomique (trajectoire des

    micro-entreprises).

    Quelle est la mthodologie qui permet didentifier de manire

    aussi rigoureuse que possible limpact dun projet de micro-

    finance relativement lobjectif fix ? Lvaluation de limpact

    dun projet de microfinance est un exercice complexe, en

    raison des multiples facteurs qui peuvent, au del du projet,

    expliquer les volutions constates. Une valuation consistant

    par exemple observer lvolution des revenus dun groupe

    demprunteurs ne renseigne en rien sur limpact du projet car

    lvolution des revenus peut tre dtermine par dautres fac-

    teurs que le seul projet de microfinance. Pour quil en soit

    autrement, lvaluateur a besoin dun contrefactuel, i.e. dune

    estimation de ce que serait le niveau de revenu de lemprun-

    teur (ou de tout autre impact potentiel) sil navait pas

    emprunt. Rpondre cette question exige concrtement que

    lvaluateur puisse identifier un groupe de non-emprunteurs

    (ou groupe tmoin) prsentant des caractristiques analogues

    celles des emprunteurs afin de comparer lvolution de leurs

    situations respectives.

    Lobjectif de cette premire partie est de dresser un panorama

    des tudes dimpact de projet de microfinance rcentes mobilisant

    18 19

    ANALYSERLIMPACT DUN PROJET DE MICROFINANCE : LEXEMPLE DADFI MADAGASCAR IMPACT DE LA MICROFINANCE : TAT DE LA RECHERCHE

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    relativement faible et porte plus sur la charge horaire des micro-

    entrepreneurs ou des travailleurs en place (notamment les aides

    familiaux) que sur lembauche de nouveaux salaris. Limpact en

    termes de changement technologique et de diversification des

    activits productives est galement limit. Il semble que seul un

    nombre restreint dentreprises, plutt mieux dotes que la

    moyenne des clients et ayant bnfici de nombreux prts, russis-

    sent enclencher un processus dinnovation.

    Les ressources prsentant un niveau lev de fongibilit lchelle

    des mnages, limpact du micro-crdit est galement important ce

    niveau. Un accroissement des revenus et de la consommation, ainsi

    que des actifs dtenus est le plus souvent attest, ce qui joue vi-

    demment sur la rduction de la pauvret montaire (voir ci-dessous).

    Plus finement, trois des six tudes qui abordent cette question mon-

    trent que la part budgtaire consacre lalimentation ou aux biens

    de premire ncessit a tendance se rduire, indice que le crdit

    permet de sloigner de stratgies de pure subsistance. En revanche,

    les rsultats sont moins probants en matire de qualit de la dite

    quotidienne et de nutrition, de sant et dducation des enfants.

    Dans tous les cas, limpact est au pire nul et jamais ngatif.

    Quant aux tudes abordant les questions de dynamique intra-

    familiale, moins nombreuses et plus complexes mettre en uvre,

    elles tendent montrer que les programmes de microcrdit auraient

    galement un impact au niveau individuel. Le crdit jouerait positive-

    ment sur le pouvoir des femmes (empowerment), leffet tant plus mar-

    qu en Asie quen Afrique. Dailleurs, le genre apparat beaucoup

    dauteurs comme une entre essentielle, non seulement parce que

    nombre de projets la retiennent comme critre dallocation du fait du

    Parmi les travaux acadmiques publis ces dernires annes,

    nous retiendrons en particulier la synthse propose par Sebstad et

    Chen (1996). Bien que ce travail ait presque 10 ans, il reste ce

    jour le plus important dans ce domaine. De plus, lactualisation de

    cette tude (voir bibliographie) montre que ses rsultats nont pas

    t remis en question depuis. Lanalyse couvre un chantillon de 32

    tudes dimpact, portant sur 41 projets diffrents dans 24 pays

    dAsie, dAfrique et dAmrique latine. Le type dimpacts considrs

    concerne bien sr lactivit de lentreprise, ce qui historiquement a

    constitu le principal objectif des premires valuations, mais

    galement et de plus en plus, le bien-tre des bnficiaires, au

    niveau individuel ou des mnages, voire mme des communauts

    auxquelles ils appartiennent. Du point de vue des mthodes

    employes, les auteurs ont cherch privilgier les tudes mettant

    en uvre les mthodologies les plus appropries pour traiter de

    la question de limpact, notamment en tentant disoler leffet

    spcifique des projets de lensemble dautres facteurs exognes. Si

    lanalyse comprend quelques tudes de cas et des valuations de

    type avant-aprs , 19 tudes sur les 32 sont bases sur des

    protocoles denqutes quasi-exprimentaux.

    Les rsultats obtenus peuvent tre classs suivant lunit de

    base sur laquelle limpact est mesur. Cest au niveau de lunit de

    production que limpact est le plus souvent considr comme

    positif, comme en attestent 26 des 32 tudes. En gnral, le crdit

    accrot significativement les variables doutput (chiffre daffaires,

    production, valeur ajoute, profit) et laccumulation du capital. Les

    rsultats sont plus mitigs en ce qui concerne lemploi. Bien que

    la plupart des tudes identifient un effet positif, celui-ci est

    20 21

    ANALYSERLIMPACT DUN PROJET DE MICROFINANCE : LEXEMPLE DADFI MADAGASCAR IMPACT DE LA MICROFINANCE : TAT DE LA RECHERCHE

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    Quel est le rapport cots-bnfices de la microfinance compar

    celui dautres interventions en matire de lutte contre la

    pauvret ?

    1.2.1. La microfinance atteint-elle les plus pauvres ?

    Bien que la plupart des IMF affichent un objectif daccessibilit

    largie des pauvres aux services financiers, rares sont celles qui

    mnent une politique de ciblage volontariste en faveur de cette

    catgorie de population. Les oprateurs jugent en effet souvent

    inutile de dresser une liste de critres stricts dligibilit, consid-

    rant que les caractristiques des prts quils octroient (prts de

    faible montant et court terme, remboursements rapides et fr-

    quents, etc.) nintressent pas les populations les plus favorises,

    induisant de ce fait naturellement leur auto-exclusion 3. Mais

    cela signifie-t-il pour autant que le micro-crdit atteindrait en

    priorit les plus pauvres ?

    Quelques tudes se sont attaches comparer le niveau de

    pauvret de la clientle des IMF celui de leur territoire dinter-

    vention. Ltude de Navajas et al. (2000) sur la Bolivie, par

    exemple, compare le niveau de pauvret dun chantillon de 588

    clients de cinq IMF (BancoSol, Caja Los Andes, FIE, Sartawi et

    PRODEM) avec le niveau de pauvret de la population de La Paz.

    Lindicateur de pauvret retenu est un indicateur composite de

    satisfaction des besoins fondamentaux comportant quatre l-

    ments : lhabitat (type de matriaux utiliss pour le sol, les murs et

    le toit, nombre de personnes par pice), laccs aux services publics

    23

    IMPACT DE LA MICROFINANCE : TAT DE LA RECHERCHE

    3. La BRAC et la Grameen Bank font partie des IMF qui mnent une politique deciblage volontariste en n'autorisant pas (en principe) les mnages dots de plus de

    0,5 acre de terre accder leurs services financiers.

    caractre sexu trs prononc des activits informelles, mais aussi

    parce que limpact du crdit nest pas toujours le mme suivant le sexe

    du bnficiaire.

    Cela tant, plus que dans sa composante analytique, le principal

    enseignement de cette revue de la littrature porte sur les dficiences

    mthodologiques de nombreuses valuations, qui limitent la porte

    des conclusions obtenues. Comme le met clairement en lumire

    Karlan (2001) dans une revue des travaux raliss linstigation du

    projet AIMS, mais dont la porte est bien plus gnrale, les problmes

    non correctement traits de biais de slection de la clientle comme

    des groupes tmoins, lattrition non alatoire des enqutes passages

    rpts, le manque de contrle de la dynamique des institutions

    (changements dans lidentification et le choix des clients au cours du

    temps, des modalits doctroi des services fournis) ou de lvolution

    conjoncturelle (croissance ou rcession) entachent srieusement

    nombre de rsultats des valuations disponibles.

    1.2. Impact de la microfinance sur la pauvret

    Les tudes sintressant limpact de la microfinance sur la

    pauvret sont beaucoup plus nombreuses. Afin de contrler au mieux

    la validit des rsultats obtenus, nous nous limitons galement aux

    travaux les plus rigoureux dun point de vue mthodologique 2 et

    abordons les trois points les plus souvent dvelopps.

    La microfinance atteint-elle les plus pauvres ?

    La microfinance contribue-t-elle faire sortir durablement les

    populations de la pauvret ?

    22

    ANALYSERLIMPACT DUN PROJET DE MICROFINANCE : LEXEMPLE DADFI MADAGASCAR

    2. Tout en garantissant une certaine homognit mthodologique, ce choix a l'incon-

    vnient de conduire un biais rural et asiatique dans la mesure o les publicationsretenues portent massivement (mais non exclusivement) sur les expriences de

    microfinance rurale au Bangladesh.

  • 8/6/2019 Analyser limpact dun projet de microfinance : lexemple dADFI Madagascar (AFD/2005)

    12/60

    atteindre ceux qui sont vulnrables dans lun des deux villages

    (le plus pauvre). En poussant davantage lanalyse, les auteurs mon-

    trent que les mnages la fois pauvres et vulnrables ne sont pas

    touchs par lintervention des IMF dans le village le plus pauvre.

    Dans une autre tude portant sur une seule de ces trois institu-

    tions (la BRAC) mais ralise une chelle gographique plus large

    et retenant une dfinition plus extensive de la pauvret (Evans et

    al., 1999), deux faits styliss mergent : (1) les mnages les plus

    pauvres ont une plus forte probabilit dtre membres de lIMF et

    sont donc sur-reprsents au sein de la clientle ; (2) la majorit des

    mnages pauvres, tout en tant ligibles, ne sont pas membres de

    lIMF. Ce faible taux de couverture nest pas seulement li une

    insuffisance de loffre de services financiers de la part de lIMF,

    mais galement un phnomne dauto-slection au sein des popu-

    lations ligibles. Les mnages de petite taille, ne possdant aucune

    terre et dont la femme nest pas ou peu instruite se caractrisent

    ainsi par un faible taux de participation.

    Une dernire tude (Coleman, 1992), portant sur des projets de

    microfinance dans le nord-est de la Thalande, montre quen dpit

    dune volont affiche de cibler prioritairement les mnages les plus

    pauvres, ces projets touchent majoritairement les mnages qui

    taient les mieux dots en terre au moment de leur implantation

    dans les villages. En outre, aucun des villageois enquts ne semble

    percevoir les projets comme des interventions prioritairement

    destines aux pauvres.

    Le bref aperu qui vient dtre donn des tudes rcentes

    consacres lanalyse des caractristiques des clients des IMF

    montre quils ne sont pas ncessairement parmi les plus pauvres. Il

    25

    IMPACT DE LA MICROFINANCE : TAT DE LA RECHERCHE

    (accs llectricit, source dapprovisionnement en eau, etc.),

    lducation (nombre dannes de scolarisation acheves, frquenta-

    tion scolaire, etc.) et la sant. Les rsultats obtenus sont les

    suivants : (1) les cinq IMF prises dans leur ensemble ne touchent

    pas les plus pauvres des pauvres, mais les individus qui se situent

    soit juste au-dessus, soit juste en-dessous de la ligne de pauvret ;

    (2) les oprations de prts des groupes de caution solidaire attei-

    gnent davantage les plus pauvres que les oprations de prts des

    individus ; (3) les IMF intervenant en milieu rural touchent davan-

    tage les plus pauvres que celles intervenant en milieu urbain.

    Dans une tude sur deux villages situs au nord du Bangladesh,

    Amin et al. (2001) examinent quant eux dans quelle mesure les

    membres de trois programmes de microfinance (Grameen Bank,

    BRAC et ASA) taient, avant leur adhsion, dans une situation de

    plus grande pauvret et de plus grande vulnrabilit que les indivi-

    dus ntant pas membres de ces institutions. Pour ce faire, les

    auteurs mobilisent deux enqutes : lune ralise en 1991/1992,

    avant que les trois IMF ne soient vritablement prsentes dans les

    villages ; lautre ralise en 1995, aprs implantation effective des

    trois IMF. Lindicateur de pauvret retenu est un indicateur de

    pauvret montaire. Lindicateur de vulnrabilit, quant lui,

    mesure la capacit des mnages se protger contre la variabilit de

    leurs revenus 4. Les rsultats de ltude suggrent que les IMF

    parviennent atteindre les mnages pauvres mais quelles chouent

    24

    ANALYSERLIMPACT DUN PROJET DE MICROFINANCE : LEXEMPLE DADFI MADAGASCAR

    4. L'auteur rgresse la variation de la consommation par tte des mnages sur la varia-tion de leur revenu et une variable de choc agrg. Le coefficient estim de la

    variable de revenu, compris entre 0 et 1, constitue l'indicateur de vulnrabilit.Compte tenu de cette dfinition, la proportion de mnages vulnrables peut tre tout

    aussi importante au sein des mnages riches qu'au sein des mnages pauvres,mme si l'incapacit des premiers se protger contre un choc de revenu a sans

    aucun doute des consquences moins dsastreuses que chez les seconds.

  • 8/6/2019 Analyser limpact dun projet de microfinance : lexemple dADFI Madagascar (AFD/2005)

    13/60

    Bangladesh) 7. Pour chacune des tudes, deux vagues denqute ont

    t ralises, en 1989 et 1993, auprs dun chantillon alatoire de

    150 emprunteurs et dun groupe de contrle prsentant des caract-

    ristiques similaires en termes de niveau de revenu, dactifs et daccs

    aux infrastructures. Dans lensemble, les tudes concluent un

    impact positif de lintervention des IMF sur le revenu des emprun-

    teurs pauvres. Laugmentation moyenne du revenu des emprun-

    teurs par rapport celui des non emprunteurs varie entre 10-12 %

    (Indonsie) et 30 % (Bangladesh et Inde). Les rsultats suggrent

    par ailleurs que lefficacit des IMF augmente avec le niveau de

    revenu initial des clients. Autrement dit, le revenu des emprunteurs

    non pauvres augmente en moyenne davantage que celui des

    emprunteurs se situant en dessous du seuil de pauvret. Pour le

    groupe des plus pauvres, limpact des prts serait ainsi en moyenne

    faible, voire ngatif. La raison invoque par les auteurs est que les

    individus trs pauvres contracteraient des prts de faible montant

    pour assurer leur subsistance et non pour investir dans une activit

    conomique, acqurir du capital ou recruter de la main-duvre.

    Ces rsultats ont t contests par dautres chercheurs. Morduch

    (op.cit.) dnonce notamment la manire dont ont t constitus les

    groupes de contrle. Il montre par exemple que, dans certaines

    tudes de cas (notamment celle portant sur la BRI, en Indonsie),

    la situation du groupe de contrle tait ds le dpart trs diffrente

    de celle du groupe demprunteurs, avec un diffrentiel de revenuentre les deux groupes de 40 % en moyenne au profit des emprun-

    teurs. Limpact mesur ne serait donc que le reflet de la persistance

    27

    IMPACT DE LA MICROFINANCE : TAT DE LA RECHERCHE

    7. Bien que les treize IMF en question aient toutes pour mission de faire reculer lapauvret, la proportion de clients pauvres en leur sein est extrmement variable

    puisqu'elle va de 7 % pour la BRI (Indonsie) et SACA (Malawi) largement plus de50 % pour les organismes du Bangladesh.

    y a plusieurs raisons cela. Tout dabord, et contrairement une

    ide communment admise, les caractristiques des produits finan-

    ciers proposs ne semblent pas, dans les faits, conduire

    naturellement lexclusion des populations relativement plus

    aises. Ce fait est mettre en parallle avec les difficults daccs

    au systme bancaire formel, qui exclut y compris des mnages

    considrs comme non-pauvres. Ensuite, toutes les IMF nont pas

    pour objectif prioritaire de cibler les plus pauvres. Cette remarque

    rappelle quil convient dtudier les performances dune institution

    de microfinance non pas laune dun critre unique de rduction

    de la pauvret mais relativement celle de leurs propres objectifs.

    Troisimement, lintroduction de critres stricts dligibilit dans les

    procdures des IMF qui affichent une volont de cibler les plus

    pauvres ne suffit pas carter dfinitivement les plus riches 5.

    Enfin, il arrive que certains groupes de population parmi les plus

    pauvres, pourtant ligibles, sexcluent deux-mmes des pro-

    grammes de microfinance.

    1.2.2. La microfinance contribue-t-elle faire sortir

    durablement les populations de la pauvret ? 6

    Frquemment cit dans la littrature portant sur la microfinance,

    louvrage de Hulme et Mosley, publi en 1996, rassemble les

    tudes dimpact de treize IMF intervenant dans sept pays (la

    Bolivie, lIndonsie, le Kenya, le Malawi, lInde, le Sri Lanka et le

    26

    ANALYSERLIMPACT DUN PROJET DE MICROFINANCE : LEXEMPLE DADFI MADAGASCAR

    5. Cf. notamment Morduch J. (1999). L'auteur montre qu'au sein de la Grameen Bank,

    de la BRAC et de la BRDB, 18 32 % des membres ne remplissent pas les critresd'ligibilit inscrits dans les procdures de ces institutions.

    6. Cette section s'appuie sur un article prsent lors de la confrence de l'AsianDevelopment Bank Institute sur le thme Microfinance and poverty reduction ,

    Tokyo, dcembre 2003, qui s'intitule : Microfinance and poverty reduction in Asia:what is the evidence? .

  • 8/6/2019 Analyser limpact dun projet de microfinance : lexemple dADFI Madagascar (AFD/2005)

    14/60

    Evaluation d'impact par double-diffrence

    Encadr 2

    L'valuation de l'impact du projet par double diffrence

    consiste oprer le calcul suivant :

    DDIFF = [E(Yt=1|T=1,E=1)] - [E(Yt=1|T=0,E=1)] -

    [E(Yt=0|T=1,E=1)] - [E(Yt=0|T=0,E=1)],

    o E(Yt=1) dsigne l'esprance du revenu en t = 1 (aprs

    intervention) et E(Yt=0) dsigne l'esprance du revenu en t = 0

    (avant intervention).

    29

    dun cart de revenu entre les deux groupes, et non leffet du crdit.

    Dans une contribution plus rcente et encore prliminaire, Morduch

    remet galement en question lexistence dune relation inverse entre

    les gains obtenus grce au crdit et le niveau initial de revenu.

    Outre cet ouvrage, la ralisation denqutes linitiative du

    Bangladesh Institute of Development Studies (BIDS) et de la Banque

    mondiale au cours des annes 1990 a donn lieu la publication

    dun certain nombre de travaux portant sur limpact de trois grands

    programmes de microfinance intervenant au Bangladesh (Grameen

    Bank, BRAC et BRDB), dont une synthse est propose par

    Khandker (1998). Dun point de vue mthodologique, limpact est

    mesur laide dune approche par double diffrence (diffrence

    entre les mnages ligibles et non ligibles dune part ; diffrence

    entre villages bnficiant et ne bnficiant pas de lintervention

    dautre part) (cf. encadr 1). Lun des principaux rsultats des

    analyses mobilisant la premire vague denqutes, en 1991/92, est

    que lintervention des trois IMF a un impact positif sur la consom-

    mation des mnages, et que cet impact est plus marqu lorsque

    lemprunteur est une femme. Un emprunt de 100 taka contract

    par une femme conduirait, ainsi, une augmentation nette de la

    consommation annuelle du mnage de 18 taka. Plus gnralement,

    lintervention des IMF permettrait chaque anne 5 % des partici-

    pants de sortir de la pauvret. Khandker (2003) poursuit lanalyse

    en profitant dune seconde vague denqutes effectue, en1998/1999, auprs des mmes mnages. Il trouve l encore un

    impact positif de lintervention des IMF sur la consommation des

    mnages lorsque les emprunteurs sont des femmes, mais ne trouve

    en revanche pas dimpact significatif lorsque les emprunteurs sont

    28

    ANALYSERLIMPACT DUN PROJET DE MICROFINANCE : LEXEMPLE DADFI MADAGASCAR

  • 8/6/2019 Analyser limpact dun projet de microfinance : lexemple dADFI Madagascar (AFD/2005)

    15/60

    conomtriques sur des chantillons de clients et de tmoins plus

    comparables, il conclut que lintervention des IMF est sans effet

    sur la consommation des mnages. Lautre rserve qui a t mise

    repose sur le constat que 30 % des mnages qui taient membres

    dune IMF en 1991/1992 ne ltaient plus en 1997/1998. Ce pour-

    centage relativement lev laisse penser que certains mnages ont

    vu leur situation se dgrader au cours de la priode et que cela

    les a contraints interrompre leur participation lun des pro-

    grammes. Ce sont typiquement des tudes sur ce type de mnages,

    susceptibles davoir mal gr un emprunt, qui font dfaut.

    La littrature compte dautres tudes dont les conclusions

    quant la contribution de la microfinance la rduction de la pau-

    vret sont nuances. A titre dillustration, ltude de Coleman

    (op. cit.) sur la Thalande montre non seulement que les villageois

    les plus riches ont une probabilit plus forte de participer un pro-

    gramme de microfinance mais aussi que limpact estim des crdits

    qui leur sont octroys est plus fort que celui des crdits octroys

    aux moins riches. Ce dernier rsultat semble confirmer que les

    mnages disposant dj dun certain niveau de ressources sont ceux

    qui bnficient le plus de lintervention des IMF, comme laffirment

    Hulme et Mosley. Mais lauteur ne semble pas exclure quil puisse

    tre aussi le reflet dune stratgie de rcupration du programme

    par les mieux nantis.

    Pour finir, plusieurs tudes portant l encore exclusivement surle Bangladesh se sont attaches examiner limpact des pro-

    grammes de microfinance sur lmancipation (empowerment) des

    femmes. Leurs conclusions sont contrastes. Hashemi et al. (1996),

    par exemple, retiennent huit indicateurs dempowerment : (1) la

    31

    IMPACT DE LA MICROFINANCE : TAT DE LA RECHERCHE

    des hommes. Il estime par ailleurs que lintervention des IMF a per-

    mis au taux de pauvret au sein des participants de diminuer de 8,5

    points de pourcentage entre 1991/1992 et 1998/1999 et au taux de

    pauvret extrme de diminuer de 18 points de pourcentage au cours

    de la mme priode 8. Pour finir, lauteur exploite la dimension en

    panel des donnes pour tester la prsence dexternalits positives. Il

    montre que les IMF amliorent galement le sort des non partici-

    pants, notamment de ceux en situation de grande pauvret.

    La mme base de donnes a t mobilise pour valuer limpact

    de lintervention des IMF sur la sant et lducation. Ltude de Pitt

    et Khandker (1998) trouve un impact positif et souvent significatif

    sur la scolarisation des filles comme des garons. Celle de Pitt et al.

    (2003) montre que les crdits octroys aux femmes contribuent

    amliorer sensiblement les indicateurs de sant de leurs enfants,

    tandis que ceux attribus aux hommes semblent sans effet 9.

    Cet ensemble de rsultats forts et positifs sur le Bangladesh

    constitue sans aucun doute ce jour la mesure la plus convaincante

    de lefficacit de la microfinance en matire de lutte contre la pau-

    vret. Pourtant, quelques rserves sur la validit des conclusions de

    ces tudes ont t a et l mises. Morduch (op. cit.) a notamment

    dmontr que les rsultats de Pitt et Khandker auraient t bien

    moins concluants si les auteurs avaient tenu compte des erreurs de

    ciblage des programmes 10. En rpliquant toutes leurs estimations

    30

    ANALYSERLIMPACT DUN PROJET DE MICROFINANCE : LEXEMPLE DADFI MADAGASCAR

    8. Le seuil de pauvret est calcul sur la base d'une ration quotidienne de 2 112 calories ;

    celui de la pauvret extrme sur la base d'une ration quotidienne de 1 739 calories.

    9. La littrature rcente compte d'autres tudes ayant cherch valuer l'impact deprojets de microfinance sur la sant et l'ducation dans des contextes diffrents [voirnotamment Panjaitan-Drioadisuryo et Cloud (1999) sur l'Indonsie et Maldonado et

    al. (2003) sur la Bolivie].

    10. Nombre de mnages thoriquement non ligibles (i.e. dots de plus de 0,5 acre deterre) participent aux programmes.

  • 8/6/2019 Analyser limpact dun projet de microfinance : lexemple dADFI Madagascar (AFD/2005)

    16/60

    ressources au remboursement dun prt dont elle na pas bnfici.

    Dans le troisime scnario, celui qui contrle effectivement lusage

    du crdit refuse deffectuer lui-mme les remboursements. Dans ce

    dernier contexte, non seulement le crdit na pas conduit lempo-

    werment de la femme, mais il est aussi source de tensions entre

    membres du mnage. Kabeer (2001) examine quant lui les

    raisons qui expliquent que les conclusions des tudes dimpact sur

    la question de lmancipation des femmes soient aussi divergentes.

    La premire est dordre mthodologique : les tudes ayant un

    verdict ngatif se concentrent gnralement sur les questions rela-

    tives laccs, lusage et au contrle des fonds emprunts, tandis

    que celles ayant un verdict positif se focalisent davantage sur la

    question plus en aval des retombes de ces ressources financires.

    La seconde raison tient selon lui au fait que les auteurs des tudes

    ont une comprhension diffrente des relations de pouvoir et des

    processus de dcision au sein des mnages. Lauteur montre

    ensuite tout lintrt dune valuation reposant sur une approche

    participative. Limplication active des femmes dans la dmarche

    valuative leur permet en effet de faire valoir leur propre point de

    vue et leur propre perception du concept dempowerment.

    1.2.3. Quel est le rapport cot-efficacit de la micro-

    finance ?

    Compte tenu de difficults mthodologiques videntes et dunmanque de donnes fiables, trs peu dtudes ont cherch com-

    parer les bnfices attendus dun programme de microfinance avec

    les cots engendrs La principale contribution sur cette question

    est celle de Khandker (1998). Lauteur propose une valuation du

    mobilit physique (frquence des dplacements au march, en

    ville, etc.) ; (2) la scurit conomique (actifs immobiliers ou pro-

    ductifs possds, pargne, etc.) ; (3) la capacit raliser de petits

    achats ; (4) la capacit raliser de gros achats ; (5) la participation

    aux prises de dcision du mnage ; (6) le statut au sein de la famille ;

    (7) la conscience politique ; (8) la participation la vie publique

    (participation des manifestations, etc.). En contrlant pour lauto-

    slection (i.e. en tenant compte du fait que les femmes mancipes

    ont sans doute une probabilit plus forte de participer un pro-

    gramme de microfinance), les auteurs trouvent que laccs au crdit

    favorise lmancipation des femmes. Il semble en outre tre associ

    une moindre incidence de la violence lencontre des femmes.

    Ces conclusions sont quelque peu contradictoires avec celles de

    Goetz et Sen Gupta (1996). Ces derniers utilisent le degr de

    contrle des femmes sur les emprunts quelles contractent comme

    indicateur d mancipation conomique . Ils montrent que dans

    63 % des cas, les femmes, notamment celles qui sont maries, nont

    aucun contrle ou quun contrle limit sur lusage des emprunts

    quelles contractent en leur nom. Les auteurs poursuivent en envi-

    sageant trois scnarios de remboursement possibles et en montrant

    que tous ont des implications ngatives pour les femmes. Dans le

    premier scnario, celui qui contrle effectivement lusage du crdit

    effectue lui-mme les remboursements. La femme qui a emprunt

    nest donc pas pnalise, mais lobjectif dempowerment traverslaccs au microcrdit nest pas atteint. Dans le deuxime scnario,

    celui qui contrle effectivement lusage du crdit est dans lincapa-

    cit deffectuer lui-mme les remboursements. La femme qui a

    emprunt est dans ce cas contrainte de consacrer une partie de ses

    32 33

    ANALYSERLIMPACT DUN PROJET DE MICROFINANCE : LEXEMPLE DADFI MADAGASCAR IMPACT DE LA MICROFINANCE : TAT DE LA RECHERCHE

  • 8/6/2019 Analyser limpact dun projet de microfinance : lexemple dADFI Madagascar (AFD/2005)

    17/60

    Grameen Bank est moins lev lorsquil est mesur sur cette clientle

    que lorsquil est mesur sur la clientle masculine. Une autre tude

    consacre la seule Grameen Bank (Schreiner, 1999) estime que pour

    un cot global de 107 millions de dollars, la banque est parvenue

    dlivrer un montant cumul de prts de 500 millions de dollars sur la

    priode 1983-1997. En appliquant ce montant le mme taux de ren-

    dement que celui estim par Khandker (1998, op. cit.), on peut ainsi

    estimer le rapport cot-efficacit de la Grameen Bank 1,15. Burgess

    et Pande (2003) proposent quant eux une estimation du rapport

    cot-efficacit dun programme dexpansion de rseaux bancaires en

    Inde rurale. Ils valuent 2,72 rupees le cot que reprsente un gain

    de revenu de 1 rupee au profit dun mnage pauvre.

    Bien sr, ces quelques chiffres ne sont que des estimations

    grossires et ont t obtenus en simplifiant considrablement la

    ralit 11. En se focalisant sur le supplment de consommation

    constat court terme, ils font par exemple abstraction de la dyna-

    mique des gains obtenus grce au crdit. Mais ils montrent nan-

    moins que la question de savoir si la microfinance est ncessaire-

    ment moins coteuse que dautres types dintervention ne trouve

    pas de rponse vidente.

    A lissue de ce rapide tour dhorizon, nous retenons dabord

    quen dpit du fort engouement pour la microfinance, son impact

    social ou conomique est loin dtre solidement tay. Plus prci-

    sment, trois conclusions nous semblent pouvoir tre avances : en gnral, les tudes concluent un impact positif du micro-

    crdit, bien que celui-ci soit trs fluctuant suivant la variable

    rapport cot-efficacit dun certain nombre de programmes de

    microfinance intervenant au Bangladesh et les compare au rapport

    cot-efficacit dinstitutions financires plus formelles ou dautres

    interventions ciblant les pauvres. Dans son travail, le rapport cot-

    efficacit est dfini comme le cot d1 taka (unit montaire)

    supplmentaire de consommation au profit dun mnage pauvre. Les

    rsultats de cette valuation sont prsents dans le tableau 1. Tous

    reposent sur lhypothse dun ciblage parfait vers les pauvres (lau-

    teur suppose en dautres termes quaucun mnage situ au-dessus du

    seuil de pauvret ne bnficie de lun des programmes concerns).

    Les chiffres suggrent qu efficacit quivalente, linterventionde la Grameen Bank est bien moins coteuse que celle de la BRAC et

    dautres programmes destins aux pauvres. Limpact positif des

    crdits sur la consommation tant en outre plus marqu au sein de

    la clientle fminine, le rapport cot-efficacit de lintervention de la

    34 35

    ANALYSERLIMPACT DUN PROJET DE MICROFINANCE : LEXEMPLE DADFI MADAGASCAR IMPACT DE LA MICROFINANCE : TAT DE LA RECHERCHE

    11. En comparant le cot-eff icacit de diffrentes IMF, Khandker fait notammentl'hypothse forte que toutes offrent exactement le mme type de services et qu'un

    dollar prt par l'une est comparable un dollar prt par l'autre.

    Tableau 1Rapport cot-efficacit (*) de diffrents programmes ciblant

    les pauvres au Bangladesh (annes 1990)

    Source : Khandker (1998), tableaux 7.2 et 7.3, tirs de Kurmanalievaet al. (2003), Microfinance and Poverty reduc-

    tion in Asia : what is the evidence? , ADB Institute.

    (*) Rapport entre le cot de l'intervention et le supplment de revenu qu'elle occasionne au profit d'un mnagepauvre.

  • 8/6/2019 Analyser limpact dun projet de microfinance : lexemple dADFI Madagascar (AFD/2005)

    18/60

    Dans ltude dimpact qui suit, nous privilgions donc une

    approche mthodologique rigoureuse, dans un contexte, il est vrai,

    trs favorable : nous disposons en effet Antananarivo des bases de

    donnes requises pour sa mise en uvre.

    37

    IMPACT DE LA MICROFINANCE : TAT DE LA RECHERCHE

    dintrt considre, le type dIMF et ses modalits dinterven-

    tion, la population-cible effective, le pays et la zone dactivit

    (urbain, rural), etc ;

    lampleur de limpact est inversement proportionnelle la

    rigueur du protocole dvaluation mis en place : les dispo-

    sitifs les plus simples et lgers qui montrent les effets les plus

    favorables sont galement les plus trompeurs. Pour tout une

    srie de raisons dordre mthodologique, lies notamment la

    constitution et au suivi du groupe tmoin (biais de slection,

    attrition, etc.), les valuations ont tendance imputer au pro-

    jet des effets qui rsultent en fait de facteurs exognes ;

    si les rsultats des valuations dimpact sont dpendantes du

    contexte dans lequel elle ont t ralises, elles sont encore

    plus dpendantes de la mthodologie mise en uvre. Or,

    force est de constater que trs peu dentre elles ont pu relle-

    ment mettre en place une mthodologie rigoureuse permet-

    tant dimputer sans ambigut limpact estim au projet. Ce

    manque de rsultats probants sexplique, en partie, par le fait

    que tous les moyens nont sans doute pas t mobiliss pour

    avancer dans cette direction, mais galement parce que, du

    point de vue de la recherche, la mthodologie de lvaluation

    dimpact reste un chantier en cours dexploration.

    Ces conclusions nous invitent privilgier la prudence et larigueur, seules garantes de rsultats de porte scientifique. Une

    tude moins rigoureuse serait certes moins coteuse mais gale-

    ment beaucoup moins utile puisque ses conclusions ne seraient pas

    fiables.

    36

    ANALYSERLIMPACT DUN PROJET DE MICROFINANCE : LEXEMPLE DADFI MADAGASCAR

  • 8/6/2019 Analyser limpact dun projet de microfinance : lexemple dADFI Madagascar (AFD/2005)

    19/60

    2. La microfinance Madagascar : tat des

    lieux et positionnementdADFI

    Avec un revenu par tte de 290 dollars environ, Madagascar

    (16 millions dhabitants) appartient la catgorie des pays les

    moins avancs (PMA). Aprs une trs longue priode de rcession

    conomique entre 1960 et 1995 (le produit intrieur brut par habi-

    tant a chut de 36,8 % et la consommation prive de 46,8 % entre

    ces deux dates), Madagascar a renou avec la croissance partir de

    1996. Celle-ci est alle en sacclrant au cours des cinq annes

    suivantes jusqu frler les 7 % en 2001, avant dtre srieusement

    mise mal par la crise politique de 2002. Cette crise politique

    semble toutefois navoir t quune parenthse puisquen 2003,

    anne marque par le retour la stabilit politique, le taux de crois-

    sance a atteint 9,6 %.

    Parmi les contraintes structurelles, sur lesquelles bute le proces-sus de transition amorc depuis 1996, figurent les dfaillances du

    march du crdit. Bien que constitu de sept banques commerciales

    prives, le secteur financier formel reste en effet peu dvelopp en

    milieu rural et quasiment inaccessible aux petits producteurs. Les

    39

  • 8/6/2019 Analyser limpact dun projet de microfinance : lexemple dADFI Madagascar (AFD/2005)

    20/60

    2.1. Loffre et la demande de microcrdit

    Madagascar

    2.1.1. Les institutions de microfinance Madagascar13

    Le secteur de la microfinance Madagascar comprend trois

    types dorganisations :

    les institutions base de membres et/ou autogres, majo-

    ritairement mutualistes, qui pratiquent la collecte de

    lpargne et loctroi de crdit leurs membres ;

    les institutions base de clients qui sont des organisations

    ayant comme activit principale la distribution de crdit et

    qui ne lient pas lemprunt la constitution dune pargne

    pralable ;

    les projets volet crdit et les ONG ou associations qui ne

    font pas du crdit leur activit principale, le crdit tant

    souvent considr comme une composante parmi dautres des

    projets mis en oeuvre.

    Les institutions base de membres et/ou autogres

    Les rseaux base de membres et/ou autogres actuellement

    en activit sont au nombre de cinq. Ils sont implants dans cinq

    provinces sur les six que compte le pays.

    Le rseau des Caisses dEpargne et de Crdit Agricole Mutuelle

    (CECAM), compos de huit Unions rgionales, se caractrisepar une architecture trois niveaux : caisses de base, unions

    rgionales et lunion inter rgionale qui constitue la caisse

    41

    LA MICROFINANCE MADAGASCAR: TAT DES LIEUXET POSITIONNEMENT DADFI

    13. Cette partie s'inspire trs largement du document de stratgie nationale demicrofinance (DSNMF) 2004-2009 consultable sur http://www.smbmada.net/

    documents/IMFStrategieNationale.pdf

    marchs financiers ruraux sont ainsi domins par des prteurs

    informels (paysans voisins, ngociants, commerants et propri-

    taires fonciers) qui consentent aux paysans en difficult financire

    des prts en argent ou en nature (paddy), des taux dont la valeur

    actualise, variable selon les liens entre le prteur et lemprunteur,

    peut atteindre 400 % lan. La situation est galement proccupante

    en ville o le manque de dynamisme de loffre est en partie attribu

    la faiblesse du montant des crdits accords aux entreprises par les

    banques. Cet tat de fait a t lorigine de la cration, en 1990, des

    premires institutions de microfinance Madagascar. Trois groupes

    dacteurs ont favoris cette mergence : le gouvernement, par len-

    tremise de sa politique en faveur de la promotion dun secteur

    financier au service du dveloppement agricole, avec notamment le

    concours de la Banque mondiale ; les bailleurs de fonds (Agence

    Franaise de Dveloppement, Banque mondiale, Coopration

    allemande, Fonds dquipement des Nations unies, Union

    europenne, etc.) qui ont mis en uvre plusieurs programmes de

    crdit ds 1990 et les oprateurs techniques spcialiss (ACEP,

    CIDR, DID, WOCCU, IRAM, FERT, ICAR) 12, qui ont apport

    leur savoir-faire et les expriences issues de leurs interventions en

    Afrique et sur dautres continents.

    La discussion qui suit vise donner un aperu du paysage de la

    microfinance Madagascar : (nombre et caractristiques des institu-

    tions en prsence, niveau dactivit et taux de couverture) de manire y situer lIMF qui nous intresse plus particulirement, savoir ADFI.

    40

    ANALYSERLIMPACT DUN PROJET DE MICROFINANCE : LEXEMPLE DADFI MADAGASCAR

    12. ACEP : Alliance de Crdit et d'Epargne pour la Production ; CIDR : Centre

    International de Dveloppement et de Recherche ; DID : Dveloppement Interna-tional Desjardins ; WOCCU : World Council of Credit Unions ; IRAM : Institut de

    Recherche et d'Application des Mthodes du Dveloppement ; FERT : Fondationpour l'Epanouissement et le Renouveau de la Terre ; ICAR : International de Crdit

    Agricole et Rural.

  • 8/6/2019 Analyser limpact dun projet de microfinance : lexemple dADFI Madagascar (AFD/2005)

    21/60

    30 milliards Fmg la fin de lexercice 2003. La faiblesse des

    OTIV demeure cependant lampleur de leur portefeuille

    risque qui reprsentait, cette priode, 22 % de leur encours

    de crdit et 82,5 % des crances en souffrance du secteur.

    Le rseau des AECA (Association des Caisses dEpargne et

    de Crdit Autogres) est constitu de deux unions implan-

    tes dans la seule province de Mahajanga. Avec lappui du

    CIDR, ce rseau a introduit le systme dautogestion auprs

    de ses membres. Cependant, les performances des deux

    unions demeurent modestes et la viabilit de leurs oprations

    trs alatoire. Dans lensemble, lpargne collecte par ce

    rseau, tributaire du dveloppement conomique de la

    rgion, reste un niveau faible et ne reprsente que 0,3 % du

    total de lencours de crdit au 31 dcembre 2003. Laccs des

    membres du rseau au crdit est essentiellement favoris par

    le refinancement bancaire.

    Le rseau des Caisses TIAVO (Tahiry Ifamonjena Aminny

    Vola) est implant dans la province de Fianarantsoa et couvre

    plusieurs communes autour de la capitale rgionale et du

    littoral Sud-Est. Ce rseau, appuy par lIRAM qui a relay le

    WOCCU, comptait 36 caisses de 24 mutuelles regroupant

    environ 13 954 membres au 31 dcembre 2003. TIAVO

    affiche une attitude plutt prudente en matire de crdit : 4,4

    milliards de Fmg contre un volume de dpts de 6 milliardsde Fmg fin 2003.

    Enfin ADFI (Action pour le Dveloppement et de Finance-

    ment des micro-entreprises) fait partie de cette catgorie

    dinstitutions. Elle a t la premire IMF mutualiste

    43

    LA MICROFINANCE MADAGASCAR: TAT DES LIEUXET POSITIONNEMENT DADFI

    centrale du rseau. Cette dernire a opt pour un statut dta-

    blissement financier. Au 31 dcembre 2003, ce rseau comptait

    169 caisses de base avec 57 783 adhrents. Il occupe la pre-

    mire place en terme doctroi de crdit avec un encours de

    42 milliards de Fmg 14 au 31 dcembre 2003, soit 43 % des

    risques totaux des IMF base de membres. En matire de

    collecte de lpargne, le rseau CECAM soriente vers la col-

    lecte des dpts auprs de grandes entreprises et particuliers

    selon la formule de lappel public lpargne. Ces dpts sont

    bloqus sous forme de dpts terme et rmunrs des taux

    crditeurs largement suprieurs aux taux pratiqus par les

    banques. La qualit du portefeuille reste apprciable avec un

    taux de portefeuille risque ne dpassant pas 10 % de len-

    cours de crdit 30 jours et plus. Le rseau CECAM est

    appuy par ICAR, un organisme rsultant de la coopration

    de lONG FERT avec le Crdit Agricole franais.

    Appuys techniquement par DID (Dveloppement Interna-

    tional Desjardins), les rseaux des OTIV (Ombona Tahiry

    Ifampisamborana Vola) interviennent dans trois provinces de

    Madagascar (Diego Suarez, Toamasina et Lac Alaotra, et

    Antananarivo) et comptent cinq rseaux distincts et indpen-

    dants. Au 31 dcembre 2003, les OTIV comptaient 112 caisses

    et regroupaient 100 435 membres, soit plus de la moiti de

    leffectif total dadhrents des IMF base de membres. Avecun encours de dpts de lordre de 76 milliards de Fmg cette

    mme date, les OTIV brassent environ 77 % du total des

    dpts du secteur. En ce qui concerne la distribution de crdit,

    les OTIV se trouvent en deuxime position avec un encours de

    42

    ANALYSERLIMPACT DUN PROJET DE MICROFINANCE : LEXEMPLE DADFI MADAGASCAR

    14. En dcembre 2003, le taux de change tait de 7 000 Fmg pour 1 euro.

  • 8/6/2019 Analyser limpact dun projet de microfinance : lexemple dADFI Madagascar (AFD/2005)

    22/60

    de 30 km. Cette institution sest spcialise dans loctroi de

    crdit aux petits et micro-entrepreneurs. La SIPEM reoit des

    appuis ponctuels de lAPEM et la Socit dInvestissement et de

    Dveloppement International (SIDI), tous les deux actionnaires

    de linstitution. Avec louverture dun bureau Mahajanga, la

    SIPEM compte actuellement six bureaux permanents. En 2003,

    la SIPEM a octroy 12,5 milliards Fmg de crdits 753 clients.

    Avec un taux de remboursement lchance de lordre de

    98,7 %, elle a su prserver la qualit de son portefeuille. Depuis

    1998, cette institution affiche un rsultat net bnficiaire.

    VOLA MAHASOA, mis en oeuvre partir de 1993 avec lappui

    technique de lAPEM et du CIDR, demeure la seule IMF

    intervenant dans la province de Tular. En 2003, le volume de

    crdit octroy par cette institution sa clientle slve 4,8

    milliards Fmg pour quelque 7 900 clients.

    LAPEM (Association pour la Promotion de lEntreprise

    Madagascar), cofondateur de rfrence de la SIPEM et

    matre douvrage de Vola Mahasoa, intervient directement

    dans le financement des groupes vulnrables principalement

    travers PAIQ, lAssociation Foi et Progrs, Avitech. Fin 2003,

    lencours de crdit tait de 995 millions Fmg au profit de

    2 238 clients.

    Les ONG ou associations ayant un volet crditUne quinzaine dONG et dassociations oprent dans le sec-

    teur de la microfinance malgache. On retiendra essentiellement :

    CDA, CEFOR, HARDI, Haingonala, EAM (Entreprendre

    Madagascar), ODDER Mahampy, Programme Tsinjoaina, etc.

    dpargne et de crdit agre en 1999. Elle bnficie de

    lappui de lACEP-Dveloppement et compte huit antennes

    rgionales implantes dans quatre chefs lieux de province et

    quatre autres grandes villes. ADFi sest spcialise dans le

    financement des micro-entreprises urbaines. Elle distribue du

    crdit ses clients travers 31 bureaux de crdit. Ses finan-

    cements se font travers deux guichets : un guichet TPE avec

    des montants de crdits plafonns 30 millions de Fmg sur

    une dure de 3 18 mois et un guichet PME pour des mon-

    tants de crdits se situant dans la fourchette de 30 millions et

    100 millions de Fmg pour des priodes de 18 36 mois. En

    termes dactivit, cette institution peut tre classe au troisime

    rang des IMF avec un encours de crdit de lordre de 21,5

    milliards de Fmg au 31 dcembre 2003. La qualit du porte-

    feuille dADFi reste apprciable avec un taux de portefeuille

    risque de 4,4 %. Depuis 1998, ADFi a atteint son auto-

    nomie oprationnelle. Cette institution prvoit de changer de

    statut ds que le permettra la loi (cf. ci-aprs).

    Les institutions base de clients

    Ce sont toutes les institutions qui ont choisi une forme juri-

    dique autre que mutualiste, qui ont un statut particulier ou qui,

    travers leurs activits financires classiques, ont un volet micro-

    finance. Elles sont en attente dune loi qui les rgira. Les institu-tions les plus importantes sont au nombre de trois.

    La SIPEM SA (Socit dInvestissement pour la Promotion

    des Entreprises Madagascar) structure capitaux privs,

    intervient Antananarivo et dans ses environs dans un rayon

    44 45

    ANALYSERLIMPACT DUN PROJET DE MICROFINANCE : LEXEMPLE DADFI MADAGASCAR LA MICROFINANCE MADAGASCAR: TAT DES LIEUXET POSITIONNEMENT DADFI

  • 8/6/2019 Analyser limpact dun projet de microfinance : lexemple dADFI Madagascar (AFD/2005)

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    mutualiste, amlioration de lhabitat) connaissent un dbut

    de financement et certains prts sont accords pour des

    besoins sociaux ou de consommation ;

    la dure des crdits nexcde gnralement pas 12 mois. Cette

    situation sexplique en partie par linsuffisance de ressources

    financires stables pour raliser des crdits dinvestissement

    moyen terme. Cependant, les rseaux ADFi et CECAM

    peuvent octroyer des prts dune dure atteignant respective-

    ment 36 et 72 mois ;

    les garanties exiges par les IMF sont variables : pargne

    bloque ou nantie, nantissement et caution solidaire ;

    les taux dintrt nominaux affichs varient entre 2 % et 4 %

    par mois ;

    mme si lon ne peut gnraliser, le portefeuille des institutions

    a tendance se dgrader. Cette situation ne peut pas tre uni-quement imputable aux effets de la crise socio-politique qua

    connue le pays au cours de lanne 2002 : elle dcoulerait ga-

    lement du manque de professionnalisme de certains acteurs

    du secteur, notamment dans la matrise de leur croissance ;

    enfin, les produits dpargne sont peu diversifis : ils sont vue et

    terme. Les dpts vue qui constituent la plus grande partie de

    lpargne mobilise ne sont pas rmunrs tandis que les dpts

    terme sont rmunrs dans une fourchette entre 3 % et 6 % lan

    par certaines IFM.

    Ampleur de lactivit

    Trs rapide et soutenue, la croissance des activits des IMF au

    cours des dernires annes sest traduite par le dveloppement de

    47

    LA MICROFINANCE MADAGASCAR: TAT DES LIEUXET POSITIONNEMENT DADFI

    EAM existe depuis mars 1990. Cette ONG multi-services

    intervient dans toutes les rgions du pays travers ses directions

    rgionales bases Antananarivo, Antsirabe, Fianarantsoa,

    Antsiranana, Toamasina, Mahajanga et Toliara. EAM a octroy 29

    milliards Fmg de crdit pour 32 000 clients de 1997 2003. Au 31

    dcembre 2003, lencours de crdit est 3,05 milliards Fmg.

    2.1.2. Aperu de lactivit des IMF 15

    Caractristiques des produits et services offerts

    Loffre des IMF intervenant Madagascar prsente les

    caractristiques suivantes :

    la taille est fonction des zones dintervention des IMF. En

    milieu urbain, les montants moyens des prts ADFI et

    SIPEM varient entre 4,6 et 16 millions de Fmg (le plafond decrdit atteint 100 millions Fmg pour les micro et petites

    entreprises et les PME), ceux des mnages pauvres touchs

    par les ONG ou associations varient entre 50 000 Fmg

    400 000 Fmg. En milieu rural, en dehors des prts CECAM

    et OTIV dune valeur moyenne de lordre de 2 000 000 Fmg,

    les autres institutions (TIAVO et AECA) ont des niveaux de

    prts moyens qui se situent autour de 400 000 Fmg. Ces cr-

    dits sont essentiellement destins aux secteurs productifs

    (agriculture, transformation, pche, levage), au commerce,aux activits de transport, lartisanat. Cependant, des prts

    dquipement (acquisition de petits matriels, location-vente

    46

    ANALYSERLIMPACT DUN PROJET DE MICROFINANCE : LEXEMPLE DADFI MADAGASCAR

    15. Cette partie s'inspire trs largement du document de stratgie nationale de micro-finance (DSNMF) 2004-2009 consultable sur http://www.smbmada.net/

    documents/IMFStrategieNationale.pdf.

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    ministre malgache de lIndustrialisation et de lArtisanat. A la cl-

    ture du projet, en juin 1999, lAgence Franaise de Dveloppement

    a repris le financement du plan de dveloppement dADFI de mi-

    1999 2002 pour un montant de 1,372 million deuros. Cette

    premire subvention tait destine financer lextension des activits

    de crdit court terme. Au dbut de lanne 2002, une seconde

    convention, portant sur un montant de 1,6 million deuros a t

    signe pour mener une exprimentation sur les crdits moyen

    terme et dvelopper un service dinformation (NTIC) au profit des

    petites et moyennes entreprises.

    Par des crdits court terme (environ 10 mois), de petits mon-

    tants, rptitifs et progressifs, ADFI vise faciliter laccs au crdit

    des micro-entreprises exclues du crdit bancaire traditionnel. Ces

    crdits servent financer du fonds de roulement, du petit matriel

    ou lamlioration des locaux. Paralllement, depuis 2002, AdFI aouvert un guichet PME, pour rpondre aux besoins de micro-entre-

    prises dj clientes qui avaient grandi et faisaient part de nouveaux

    besoins ou pour satisfaire une nouvelle clientle, galement exclue

    du systme financier traditionnel. Ces prts sont plus long terme

    (36 mois), de montants plus importants et destins financer de

    plus gros investissements, ventuellement un dveloppement de la

    PME.

    ADFI dispose aujourdhui dune assise financire solide assu-

    rant son autonomie financire et technique ainsi que sa prennit.Prsente dans cinq grandes villes (Antananarivo, Antsirabe,

    Toamasina, Fianarantsoa, Mahajanga) et trois villes secondaires

    (Ambatolampy, Ambositra, Moramanga) de Madagascar travers

    un rseau de 31 agences de quartier, ADFI avait octroy, sur la

    imaginent probablement moins sature (cf. les contraintes de

    dbouchs souvent dplores). Les autres dclarent quils amlio-

    reraient leurs machines (18,5 %), leur local (15,9 %), leur stock de

    matires premires (14 %) ou encore quils engageraient des

    dpenses en dehors de leur tablissement (6,7 %). En revanche,

    pratiquement aucun chef dtablissement nenvisage dembaucher.

    Ainsi une politique de financement du secteur informel facilitant

    laccs au crdit dunits de production dj existantes aurait a

    priori un impact de court terme ngligeable sur lemploi.

    2.2. Prsentation de lactivit dADFI et de ses

    adhrents

    2.2.1. Prsentation gnrale

    ADFI (Action pour le Dveloppement et le Financement desMicroentreprises) est une institution de microfinance mutualiste

    prive spcialise dans le financement des trs petites entreprises

    urbaines. Premier organisme avoir t agr en qualit dInstitu-

    tion Financire Mutualiste par la Commission de Supervision

    bancaire et financire de la Banque centrale de Madagascar, son

    statut actuel, dans lattente de la nouvelle loi sur la microfinance,

    est celui dune association mutualiste dpargne et de crdit, rgie

    par la loi 96 020 du 4 septembre 1996.

    ADFI a t cre en 1995 Antsirabe dans le cadre du ProjetdAppui aux Micro-entreprises, financ par le ministre franais

    des Affaires trangres (Service de Coopration et dAction

    Culturelle / Fonds dAide et de Coopration (FAC) de 8,5 millions

    de francs franais 18) et conduit sous la tutelle technique du

    56 57

    ANALYSERLIMPACT DUN PROJET DE MICROFINANCE : LEXEMPLE DADFI MADAGASCAR LA MICROFINANCE MADAGASCAR: TAT DES LIEUXET POSITIONNEMENT DADFI

    18. 1,3 million d'euros.

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    - garanties (60 130 % du montant accord) : nantissement

    de matriels, gage de voiture, caution solidaire, caution sur

    salaire, promesse dhypothque, etc. ;

    - dpt de garantie (au choix) : 20 % du crdit Plus bonifi

    accord.

    Caractristiques des crdits moyen terme :

    - fourchette : 30 000 000 Fmg 100 000 000 Fmg ;

    - objet : investissements (achat de matriels dexploitation,

    construction atelier, etc.) ;

    - dure : 24 36 mois ;

    - dlai de grce (fonction de lactivit) : 1 6 mois ;

    - taux dintrt : 16 % par an calcul sur capital investi ;

    - chances : mensuelles fixes et constantes, tous les 15 du mois ;

    - intrts et pnalits de retard : 2 % du montant en retard +

    50 000 Fmg ;- garanties (130 % du montant accord) : nantissement de

    matriels, gage de voiture, caution solidaire, caution sur

    salaire, promesse dhypothque, etc. ;

    - dpt de garantie : 5 % du montant accord ;

    - possibilit de bnficier dun autre crdit parallle court terme.

    Le tableau 8, dont les chiffres ont t calculs partir du fichier

    clientle dADFI-Antananarivo, indique le nombre moyen de

    prts reus par micro-entrepreneur, selon la date de leur adhsion.

    En toute logique, plus ladhsion est ancienne, plus le nombremoyen de prts reus ( la date du 30 septembre 2004) est lev.

    La progressivit du montant des crdits octroys est sans aucun

    doute un des facteurs qui incite les micro-entrepreneurs contracter

    plusieurs emprunts de suite auprs dADFI.

    61

    LA MICROFINANCE MADAGASCAR: TAT DES LIEUXET POSITIONNEMENT DADFI

    2.2.2. Lactivit de prt 19

    Rappelons quADFI dveloppe actuellement deux types de

    crdit : le crdit court terme et le crdit moyen terme. Les petits

    entrepreneurs ayant besoin dun crdit sadressent lagence de

    quartier proche du lieu de son activit. Pour devenir membre et acc-

    der aux services de lassociation, ils doivent y adhrer, moyennant le

    paiement dun droit dadhsion de 3 000 Fmg et dune cotisation

    annuelle, adosse au crdit approuv, dun montant de 1 000 Fmg.

    Les crdits sont octroys de faon rptitive et progressive, pour des

    montants adapts aux capacits de gestion de lentrepreneur. Les

    remboursements se font par chances mensuelles constantes. Chaque

    crdit est assorti de frais de dossier quivalent 1 % du montant accor-

    d et dun fonds de garantie mutuel dcs, proportionnel la dure du

    crdit (0,3 % 1,7%).

    Caractristiques des crdits court terme :- fourchette : de 250 000 Fmg 28 000 000 Fmg ;

    - objet (crdit productif) : fonds de roulement, extension / am-

    nagement atelier, achat / complment dachat de matriels

    dexploitation, etc. ;

    - dure : 3 18 mois ;

    - dlai de grce (fonction de lactivit) : 1 6 mois ;

    - taux dintrt (fonction de la dure) : 18 % par an calcul

    sur capital investi ;

    - chances : mensuelles fixes et constantes, chaque fin dumois ;

    - intrts et pnalits de retard : 2 % du montant en retard +

    10 000 Fmg ;

    60

    ANALYSERLIMPACT DUN PROJET DE MICROFINANCE : LEXEMPLE DADFI MADAGASCAR

    19. Cette partie reprend pour une large part les informations fournies par ADFI sur sonsite internet (http://www.adefi.org/activite.asp).

  • 8/6/2019 Analyser limpact dun projet de microfinance : lexemple dADFI Madagascar (AFD/2005)

    31/60

    dinsertion de la main-duvre sur le march du travail, lentre sur

    ce segment du secteur informel ncessitant peu de qualificationsspcifiques. Elle peut galement tre lie au fait que les micro-

    entreprises ayant une activit industrielle sont sur-reprsentes au

    sein des clients en contentieux. On peut ds lors penser quADFI

    a adopt une attitude prudente vis--vis de cette clientle au profit

    des micro-entreprises intervenant dans dautres secteurs dactivit.

    Rpartition des micro-entreprises par taille

    En termes de taille, mesure ici par le nombre demploys

    permanents, le fichier clientle permet dtablir qu Antananarivo,80 % des UPI finances par ADFI comptent moins de quatre

    employs et 95 % moins de dix employs. Ces chiffres confirment

    que les UPI finances sont pour la plupart des petites entreprises. La

    confection est le secteur dactivit o le nombre moyen demploys

    2.2.3. Caractristiques des adhrents Antananarivo

    Le fichier clientle dADFI-Antananarivo autorise une analyse

    succincte des caractristiques des micro-entreprises membres de

    linstitution et de leurs dirigeants.

    Rpartition des micro-entreprises selon le secteur dactivit

    Prs de 40 % des micro-entreprises membres dADFI exercentune activit de service, dont la moiti dans les transports. Les 60 %

    restants se rpartissent galement entre lindustrie et le commerce.

    En outre, deux tiers des micro-entreprises industrielles travaillent

    dans la confection.

    La rpartition des micro-entreprises selon le secteur dactivit a

    toutefois connu une volution marque depuis le dmarrage de

    lactivit dADFI Antananarivo. En effet, alors que prs de 45 %

    des adhrents de 1997 avaient une activit industrielle, cette pro-

    portion nest plus que de 20 % au sein des micro-entreprises ayantadhr en 2004. A linverse, la part des units de production ayant

    une activit commerciale est en augmentation forte chez les

    adhrents rcents. Cette volution peut rsulter dune monte en

    puissance du secteur informel commercial comme mode privilgi

    62 63

    ANALYSERLIMPACT DUN PROJET DE MICROFINANCE : LEXEMPLE DADFI MADAGASCAR LA MICROFINANCE MADAGASCAR: TAT DES LIEUXET POSITIONNEMENT DADFI

    Tableau 8Nombre moyen de prts reus par micro-entrepreneur,

    selon la date dadhsion (Antananarivo)

    Source : Fichier clientle ADFI-Antananarivo.

    Graphique 2Rpartition de la clientle selon le secteur dactivit

    Source : Fichier clientle ADFI-Antananarivo.

  • 8/6/2019 Analyser limpact dun projet de microfinance : lexemple dADFI Madagascar (AFD/2005)

    32/60

    dun local technique (22 %) ou dun atelier bien structur (21 %).

    Ces chiffres sont cependant variables selon le secteur dactivit :

    dans la confection, par exemple, 72,3 % des UPI sont domicilies

    ladresse personnelle du micro-entrepreneur alors quelles ne sont,

    logiquement, que 39 % dans la restauration.

    Rpartition des micro-entrepreneurs selon le genre

    Lanalyse de la structure de la clientle selon le genre rvle une

    prdominance des femmes (58 %, soit 3 596 femmes sur les 6 217

    clients). Le recours des dlgations de responsabilit, marginal aux

    dires dADFI, ne peut expliquer lui seul cette prdominance.

    Ds lors, trois hypothses peuvent tre mises : (1) il y a

    Antananarivo, plus de femmes micro-entrepreneurs que dhommes

    (cette hypothse sera leve infra) ; (2) compte tenu des types dactivi-

    t quelles dirigent, les femmes sont plus nombreuses que les hommes demander un crdit ADFI ; (3) dans sa politique de prt, ADFI

    pratique une discrimination positive en faveur des femmes 20.

    En croisant la variable genre avec la branche dactivit, les

    femmes apparaissent trs largement sur-reprsentes dans la

    confection (activit par ailleurs trs reprsente dans la clientle

    dAdFI) et la restauration (respectivement 71 % et 69 % des

    micro-entrepreneurs intervenant dans ces deux secteurs sont des

    femmes), tandis quelles sont sous-reprsentes dans les transports

    (secteur au demeurant galement trs reprsent dans la clientledADFI), la rparation et lindustrie hors confection. En termes de

    taille, les micro-entreprises diriges par des femmes comptent en

    par UPI est le plus lev (6,6). Inversement, les transports et le

    commerce de produits primaires sont les deux secteurs dactivit o

    le nombre moyen demploys par UPI est le plus faible (1,8 et 2

    respectivement).

    Rpartition des micro-entreprises selon le type de local dans lequel

    lactivit est exerce

    Les micro-entreprises sans local dont lactivit est ambulanteou exerce un poste sur la voie publique nappartiennent officiel-

    lement pas la cible dADFI. Elles sont donc absentes de la

    clientle. Pour la majorit des clients dADFI (57 %), lactivit

    prend place au domicile du micro-entrepreneur. Les autres disposent

    64 65

    ANALYSERLIMPACT DUN PROJET DE MICROFINANCE : LEXEMPLE DADFI MADAGASCAR LA MICROFINANCE MADAGASCAR: TAT DES LIEUXET POSITIONNEMENT DADFI

    Graphique 3volution du secteur dactivit selon la date dadhsion

    Source : Fichier clientle ADFI-Antananarivo.

    20. Seul un recensement exhaustif de l'ensemble des personnes ayant fait une demande

    de prt ADFI (que cette demande ait t satisfaite ou non) permettrait de tester cesdeux hypothses, mais ce recensement n'a pas t ralis.

  • 8/6/2019 Analyser limpact dun projet de microfinance : lexemple dADFI Madagascar (AFD/2005)

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    entrepreneurs majoritairement fminins, relativement duqus, dans

    des secteurs bien spcifiques. Il convient maintenant daffiner cetteanalyse de la cible dADFI par une tude compare des clients de

    lIMF et des micro-entreprises informelles dAntananarivo.

    2.2.4. La cible dADFI : caractristiques compares

    des clients de lIMF et des micro-entreprises informelles

    Antananarivo

    La discussion qui suit sappuie sur trois sources de donnes :

    la phase 2 de lenqute 1-2-3, qui porte sur plus de 1 050

    micro-entreprises reprsentatives de lensemble du secteur

    informel (ralise fin 2004) ;

    lenqute ralise auprs dun chantillon reprsentatif de 306

    micro-entrepreneurs clients (ou anciens clients) de lIMF

    (ralise fin 2004) ;

    67

    LA MICROFINANCE MADAGASCAR: TAT DES LIEUXET POSITIONNEMENT DADFI

    moyenne 3,5 employs contre 2,9 au sein des micro-entreprises

    diriges par des hommes. Cette supriorit numrique, statistique-

    ment significative, sobserve dans toutes les branches dactivit.

    Rpartition des micro-entrepreneurs selon le niveau dinstruction et le

    type de formation suiviUne proportion trs marginale de micro-entrepreneurs clients

    dADFI est analphabte (0,5 %) et moins de 15 % ont t lcole

    primaire seulement. La grande majorit des autres (prs de 66 %)

    a tudi jusquau secondaire, sans que lon puisse savoir si elle a

    achev le cycle ou non. Les adhrents rcents se distribuent de

    faon assez gale dans chacune de ces catgories.

    Ces proportions ne diffrent pas sensiblement entre les femmes

    et les hommes, mme si la proportion de femmes micro-entrepre-

    neurs ayant frquent lenseignement suprieur est lgrementinfrieure celle des hommes. Pour finir, lorsque lon croise la

    variable de niveau dinstruction avec la branche dactivit, les

    micro-entrepreneurs apparaissent en moyenne moins instruits

    lorsquils exercent une activit commerciale (hors commerce de

    gros) ou quils travaillent dans la restauration. Ils sont en revanche

    plus instruits en moyenne lorsquils ont une activit de services

    (hors rparation et restauration)

    En matire de formation, enfin, plus de 50 % des micro-

    entrepreneurs ont appris leur mtier sur le tas. Seuls 11,2 % ont

    suivi une formation professionnelle. L encore, ces proportions ne

    varient pas sensiblement entre les hommes et les femmes.

    En premire analyse, ADFI semble toucher, conformment sa

    mission, de trs petites entreprises urbaines, diriges par des micro-

    66

    ANALYSERLIMPACT DUN PROJET DE MICROFINANCE : LEXEMPLE DADFI MADAGASCAR

    Graphique 4Rpartition de la clientle selon le niveau dinstruction

    Source : Fichier clientle ADFI-Antananarivo.

  • 8/6/2019 Analyser limpact dun projet de microfinance : lexemple dADFI Madagascar (AFD/2005)

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    souvent une comptabilit que la moyenne, elles nen appartiennent

    pas moins au secteur informel, au sens o il est dfini dans la phase

    2 de lenqute 1-2-3 21. Seule une trs petite minorit possde en

    effet la fois un numro denregistrement et une comptabilit crite.

    Sans que cela soit explicitement spcifi dans les objectifs de lIMF,

    les micro-entreprises du secteur formel (i.e. qui sont enregistres etqui tiennent une comptabilit) ne font pas partie de sa clientle.

    Faute dinformations sur les demandes dadhsion rejetes par

    lIMF, nous ne sommes pas en mesure de savoir si cette caractris-

    tique provient du fait que les micro-entreprises formelles ne sadres-

    sent pas linstitution ou si ellel rsulte dun ciblage volontaire de la

    part de lIMF parmi les micro-entreprises. 22 Toujours est-il que

    cette spcificit est plutt favorable du point de vue de la lutte

    contre la pauvret dans la mesure o le secteur informel est de loin

    le moins rmunrateur. De plus, elle lgitime lusage de la phase 2comme univers de rfrence de la clientle de lIMF.

    Branches dactivit

    La rpartition des UPI selon la branche dactivit montre que

    les micro-entreprises clientes de lIMF sont sur-reprsentes dans

    les secteurs du transport, de la confection et du commerce de produits

    primaires, tandis quelles sont sous-reprsentes dans les secteurs du

    BTP, du commerce de produits transforms et desservices aux mnages

    et aux entreprises. Ce rsultat est li au fait quun certain nombre

    le fichier clientle dADFI ( la date du 30 septembre 2004).

    Outre la reprsentativit statistique de leurs univers respectifs

    (secteur informel dune part et clients de lIMF de lautre), les deux

    enqutes mentionnes ci-dessus prsentent un double intrt : le

    premier est quelles ont accord une attention toute particulire la

    reconstitution des agrgats conomiques (chiffre daffaires, valeurajoute, etc.) des entreprises, sachant que la grande majorit

    dentre elles ne tiennent pas de comptabilit. Le second est davoir

    appliqu des questionnaires rigoureusement identiques et davoir

    t ralises aux mmes dates. Grce ces deux sources de

    donnes, il est possible de comparer les caractristiques moyennes

    des micro-entreprises informelles dAntananarivo avec celles des

    micro-entreprises composant la clientle dADFI.

    Il convient demble de noter que si les micro-entreprises

    finances par AdFI sont plus souvent enregistres ou tiennent plus

    68 69

    ANALYSERLIMPACT DUN PROJET DE MICROFINANCE : LEXEMPLE DADFI MADAGASCAR LA MICROFIN