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Analyse Documentaire_suzanne Waller

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Page 1: Analyse Documentaire_suzanne Waller
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Le traitement électronique du document : cours INRIA, 2-7 octobre 1994, Aix-en-l'iwence.ouvrage coordonné par Jean-Claude Le Moal et Bernard Hidoine. 1994

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Valeur et compétitivité de l'information documentaire : l'analyse de la valeur en documentation.par Jean Michel et Eric Sutter. 2e édition mise à jour, 1991

Mise au point du présent manuscrit : Isabelle Kersimon

SOMMAIRE

Avant-propos

Introduction 13

Chapitre IL'ANALYSE; DOCUMENTAIRE; : DÉFINITION ET PRATIQUES 15Qu'est-ce qu'analyser ? 15Qu'est-ce que l'analyse documentaire ? 16L'analyse dans le cadre des opérations documentaires 18Analyse et politique documentaires 19Annexe pédagogique 33

Chapitre 11LA LECTURK DOCUMENTAIRE : LIRE ET OBSERVER 35

Les conditions de la lecture documentaire 36Petit détour par la « lecture rapide » 37Observer avant de lire 3gAnnexe pédagogique 45

Chapitre 111LA LECTURE DOCUMENTAIRE : LIRE ET COMPRENDRE 49

Les textes et leurs caractéristiques 49Les textes et leur contenu 58Comment lire ? 54Annexe pédagogique 7 J

Chapitre IVLA LECTURE DOCUMENTAIRE : STRUCTURE ET VOCABULAIRE 73

Trouver l'information uti le : la recherche d'un plan 73L'élaboration de grilles de lecture 75Trouver l ' information ut i le : l'aide du vocabulaire 84

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Mise au point du présent manuscrit : Isabelle Kersimon

SOMMAIRE

Avant-propos

Introduction

7

13

Chapitre IL'ANALYSE DOCUMENTAIRE : DÉFINITION ET PRATIQUES 15

Qu'est-ce qu'analyser ? 15Qu'est-ce que l'analyse documentaire ? 16L'analyse dans le cadre des opérations documentaires 18Analyse et politique documentaires 19Annexe pédagogique 33

Chapitre II

LA LECTURE DOCUMENTAIRE : LIRE ET OBSERVER 35

Les conditions de la lecture documentaire 36Petit détour par la « lecture rapide » 37Observer avant de lireAnnexe pédagogique 45

Chapitre III

LA LECTURE DOCUMENTAIRE : LIRE ET COMPRENDRE 49

Les textes et leurs caractéristiques 49Les textes et leur contenu 58Comment lire ? 64Annexe pédagogique 71

Chapitre IV ,LA LECTURE DOCUMENTAIRE : STRUCTURE ET VOCABULAIRE 73

Trouver l'information utile : la recherche d'un plan 73L'élaboration de grilles de lecture 75

Trouver l'informatinn u t i le - l 'n iHp du vnrsihnïaïrp

Page 4: Analyse Documentaire_suzanne Waller

Chapitre VANALYSE DOCUMENTAIRE ET RECHERCHE DOCUMENTAIRE 95La recherche documentaire 96Place de l'analyse documentaire dans les banques de données 101Aspects techniques de la recherche documentaire informatisée 107La recherche documentaire en texte intégral 1 1 1La recherche d'informations sur Internet 118

Chapitre VILE RÉSUMÉ DOCUMENTAIRE 121

Opfînïtirm I ~ï 1L'CI 1111UUU I Z I

Usages et usagers 122Les différentes formes de résumés 124Les résumés documentaires 127Le rôle du résumé documentaire dans une banque de données 128Comment réaliser un résumé documentaire 128Derniers conseils 137Annexe pédagogique 141

Chapitre VIIINDEXATION 149Qu'est-ce qu'indexer ? : 41-;usage et applications i j iRôle de l'indexation dans une banque de données 152Comment indexer? 153Comment évaluer l 'indexation ? 160L'indexation en 10 conseils 169

Chapitre VI I ILES LANGAGES DOCUMENTAIRES I 75

Un peu d'histoire 175Les autorités 176Les langages documentaires 182Les langages documentaires de type classificatoire 186Les langages documentaires de type combinatoire 195Les vrais langages à structure combinatoire :lexique et thésaurus 203

Compatibilité des langages d'indexationQuel avenir pour les langages documentaires ?

Conclusion

218219

223

Annexe I :Textes et articles

Annexe 2 :Corrigés des exercices

Références bibliographiques

227

267

307

Page 5: Analyse Documentaire_suzanne Waller

AVANT-PROPOS

À la fin des années soixante-dix, l'ADBS intégra à son programme deformation un stage sur l'« analyse documentaire » sans qu'il y ait eualors une véritable étude de besoins. Manifestement, l ' in tui t ion étaitjuste puisque ce stage perdure. Dès l'origine, cette formation a étéconçue dans une perspective méthodologique, de façon à dépasser lesmodes et l'évolution des techniques. Tout en évoluant d'année en année,la structure du stage a été enrichie sans être fondamentalementmodifiée. Une capitalisation pédagogique réalisée et déposée à l'ADBSen 1996 est à l'origine de cet ouvrage, conçu d'abord comme un guideà l'usage des formateurs.

L'avis de plusieurs professionnels et l'assistance plus qu'efficace deClaudine Masse m'ont conduite à approfondir certains aspects et àintroduire des éléments de réflexion qui sous-tendaient la formation,sans être tout à fait exprimés. J'ai beaucoup hésité avant d'entreprendrece travail. L:n effet, comment parler d'analyse documentaire à l'heured'Internet ' ? Quelle vision passéiste engagerait des auteurs, un éditeur,à publier un ouvrage que le plus grand nombre des lecteurs potentielsestimerait dépassé ? Serait-ce inconscience ? provocation ? ou naïvetési profonde qu'on le jugerait avec une indulgente condcscendanee...Quelques raisons, pourtant, jouent en faveur de l'existence du présentmanuel.

L'analyse documentaire reste une pratique courante et nécessaire parle fait que, même si leur nombre décroît, il existe encore des servicesde documentation n'ayant pas accès aux outils les plus modernes.

En outre se posent fréquemment des questions de terminologie : endocumentation, on utilise un certain nombre de concepts sans trop lesdéfinir, et les opérations qui en découlent en souffrent, par manqued'approfondissement : « Le développement de la science de l'infor-mation a longtemps reposé sur des concepts ambigus, polyvalents , à latransparence trompeuse. 2 » Si les chercheurs ont le souci du termejuste, qu'en est-il dans la vie professionnelle ? Quel dialogue peut

Page 6: Analyse Documentaire_suzanne Waller

AVANT-PROPOS

s'instaurer entre usager et documentaliste lorsque chacun attribue unsens différent au même vocable ? Y a-t-il, y compris dans l'enseigne-ment et la formation, une prise en compte suffisante de la réalité d'unconcept ? Quel(s) sens donner au mot « information » ? Qu'entend-onpar « recherche » ? Que veut-on dire par « survol », « lecture en diago-nale » ? Que fait l'étudiant quand on lui demande de rédiger une « fiche

de lecture » ?La vie professionnelle n'est pas assujettie à la seule technologie. Si

les services de documentation sont de mieux en mieux équipés, n'est-ilpas nécessaire de maîtriser l'information en amont des machines, ainsique le rappelait récemment l'Unesco : « Avant d'investir dans lesmoyens techniques, il importe de comprendre les flux et les besoinsd'information [...] la technologie a rarement réponse atout. Une bonnegestion de l'information exige que le personnel comprenne ce qu'estl'information, comment elle peut être recueillie, traitée et employée àtelle ou telle fin. [L'émergence des industries de l'information] a donnénaissance à une nouvelle catégorie de professionnels de l'information,à savoir les chercheurs et les analystes de l'information. ' »

Dans la pratique professionnelle, en admettant que l'analyse de textesen amont disparaisse, à court ou moyen terme, une analyse des ques-tions, trop souvent éludée au bénéfice des outils permettant d'y répon-

dre, demeurera néanmoins nécessaire.

La numérisation n'est pas appliquée à toute la production imprimée.« Pendant quelques années encore et beaucoup plus suivant les domai-nes, les mondes du document numérique et du document papier vontcoexister. Tout ce qui a été imprimé ne sera pas numérisé. Pour l'utili-sateur, le support n'importe généralement pas. Ce qu'il désire, c'est untexte validé et disponible facilement [...] Les bibliothèques et centresde documentation doivent rester, à travers leurs sites web, des lieux demédiation de la connaissance et des sources d'informationpertinentes. 4 » Pour assurer la médiation de la connaissance et resterperformant dans un univers de plus en plus teclmiciste, il n'est pas inu-tile de reconsidérer les techniques classiques à la lumière des nouvelles

AVANT-PROPOS

Ces techniques classiques ont elles-mêmes besoin d'être « dépous-siérées », car nombre d'idées fausses entourent l'analyse documentaire,à commencer par la représentation qui en est faite sous la forme durésumé. Ce manuel a donc l'ambition d'éclairer ce qu'est vraimentl'opération d'« analyse documentaire », toujours liée à sa finalité : larecherche documentaire. Qu'en est-il donc de cette recherche via lesnouvelles technologies ?

Si l'on compare les accès aux banques de données classiques et lespages d'accueil d'Internet, on ne peut que constater que ces dernièresbrillent et séduisent ; la navigation entre les écrans est rapide, simple,conviviale. Quelques décideurs pressés en déduisent donc que,puisqu'il suffit de cliquer, les banques de données, les services dedocumentation, et plus encore les documentalistes sont inutiles. Or,« Internet est le contraire d'une banque de données documentaire, dansla mesure où son objectif est de diffuser et d'échanger de l'information— et non de la chercher. Internet n'est pas une bibliothèque, c'est un

kiosque à journaux amélioré ! ' »

Source ininterrompue de renseignements de toute espèce, Internetsouffre, aux yeux du chercheur, des deux obstacles principaux à larecherche documentaire :

- le bruit, car la multiplicité des réponses ne correspond pas toujours,ni précisément, à la question posée ;

- le silence, dans la mesure où il est impossible de savoir si ledocument le plus pertinent est inaccessible ou s'il est inexistant.

« Utiliser des moteurs de recherche et autres index thématiquessatisfait parfois notre demande mais leurs réponses nous noient souventsous un grand nombre de pages ou de sites web dont nous ne sommesgénéralement pas en mesure de connaître la validité. A une époque oùle temps semble si précieux, ne serait-il pas préférable de privilégier lalogique qualitative à la logique quantitative ? " »

Que l'on ne se méprenne cependant pas : notre propos n'est pas desous-estimer Internet, moyen sans égal de communication mondiale.Ce manuel n'a pas d'autre ambition que clarifier la place, l'intérêt et leslimites des opérations documentaires, spécifiquement l'analyse, en tant

Page 7: Analyse Documentaire_suzanne Waller

AVANT-PROPOS AVANT-PROPOS

que point de départ de la recherche documentaire. L'un de ses objectifsest de rappeler à quel point la qualité du traitement documentaire est lapremière valeur ajoutée que Von attend des documentalistes.

Les études actuelles sur la recherche documentaire, le plus souventorientée vers les sources électroniques, portent aussi sur le traitementde ces sources — et ne sont pas menées sous le seul angle technique.Les travaux de l'International Society for Knowledge Organization ' entémoignent de façon exceptionnelle, car ils cherchent à allier les deuxapproches : « Very central in this réorientation in information scienceare both a newfocus on meaning and a newfocus on thé social envi-ronment ofboîh users and Systems. " » D'autres articles récents prou-vent, s'il en était besoin, l'importance de la réflexion face aux change-ments qui modifient considérablement nos modes de fonctionnement ',

La deuxième conférence du chapitre français de l'ISKO '" a pourthème « L'indexation et les métadonnées à l'ère d'Internet ». Le texted'appel aux communications assure que « l'indexation reste un desdomaines les plus actifs en recherche d'informations. Avec l'introduc-tion d'Internet, ce champ est appelé à se renouveler. L'abondance dedocuments disponibles conduit à la fois à l'impossibilité d'une indexa-tion autre qu'automatique et à la nécessité d'un outil puissant de sélec-tion de l'information ». En attendant que la recherche, dont on ne peutque souhaiter le développement, aboutisse à des résultats applicables,réfléchir à des pratiques abolies pour certains, mais utiles à d'autrespour quelques années encore, semble s'imposer comme une nécessité.

Ce manuel se présente comme un outil pédagogique propre à initier,former des étudiants ou des débutants dans la fonction, en leur appor-tant un certain nombre de connaissances et une méthodologie. En cher-chant à approfondir la pratique professionnelle, il propose quelquespistes de réflexion pour les enseignants, les formateurs, ainsi que lesresponsables de services de documentation et d'information.

L'aspect pédagogique étant privilégié, on trouvera ici une alternanced'apports théoriques et d'exercices pratiques. Les propositions de cor-rection et les commentaires sur les exercices, placés en fin de volume.

ne prétendent pas répondre à toutes les questions dans la mesure oùl'analyse documentaire n'est pas une science exacte, mais ils saurontorienter le lecteur dans sa démarche d'apprentissage. Dans un souci decohérence, certains développements, comme ceux concernant lessciences cognitives, n'ont pas été effectués. Quant à l'analyse des ima-ges fixes ou animées, voilà un sujet propre à l'élaboration d'un autremanuel...

11 me reste à remercier tant de personnes que je ne citerai que quel-ques noms, de peur d'en oublier beaucoup ; mais que tous ceux qui sontabsents ici sachent qu'ils sont présents dans mon esprit — et souventdans mon cœur : tous les professionnels de la documentation que j'aicroisés et dont les remarques, réflexions, questions ont enrichi quoti-diennement ma pratique et mes propres questionnements ; tous ceux,particulièrement, qui se posaient et se posent encore de vraies questionspédagogiques : ils se reconnaîtront à ce terme. Ensuite, ma reconnais-sance va vers les innombrables étudiants et stagiaires qui, depuis plusde vingt-cinq ans, en France, en Europe, en Afrique, ont travaillé avecmoi sur l'analyse documentaire ; qu'ils sachent qu'ils m'ont donné plusqu'ils n'ont reçu.

Je tiens aussi à remercier spécialement Claire Guinchat, sans l'aideamicale et efficace de laquelle ce manuel n'aurait pas pu voir le jour,Daniélc Degcz, qui a inspiré tout ce qu'il y a de bon dans le chapitre surles langages documentaires, et Jean-Claude pour son infinie patience.Ht bien sur Claudine Masse, associée à la conception et à la rédactionde cet ouvrage, dont la compétence, la disponibilité et la précieuseamitié m'ont accompagnée et soutenue sans relâche tout au long d'unparcours qui ne fut pas sans défaillance.

Et pour que ma reconnaissance soit complète, je tiens à dédier cetravail à la lumineuse mémoire d'Aline Puget et de Jacqueline Viaux.

S. W.

Page 8: Analyse Documentaire_suzanne Waller

AVANT-PROPOS

NOTES

1 Le Dictionnaire encyclopédique de l'Information et de la Documentation

[30], publié sous la direction de Serge Cacaly, chez Nathan, en 1997, ne pro-pose aucune entrée au terme « analyse documentaire », alors que cet ouvrageprésente à l'heure actuelle le meilleur état de la science et des techniques

concernant ces domaines.

2. Source : [49].

3. Source : [65], p. 298.

4. Source: [51], p. 6 et 7.

5. Source :[!!].

6. Source: [5l], p. 6.

7.1SKO-FRANCE, 61 rue de la Corvée, 21000 DIJON.

8. Source: [42], p. 16.

9. Voir : [9], p. 75-82 ; [78], p. 83-86 ; [8], p. 139-143.

10. Lyon, 21 et 22 octobre 1999.

Les références bibliographiques se trouvent en fin d'ouvrage, pages 307-312.

INTRODUCTION

« Dans notre service, nous ne faisons plus d'analyse car cela coûtetrop cher, mais nous indexons tous nos documents.

— Et vous indexez comment ?— Eh bien, c'est classique, nous avons un thésaurus [variantes : une

liste de mots clés, un index, un langage documentaire...] et nous choi-sissons les mots caractéristiques du contenu...

— Et comment se passe la recherche ?— Oh... Vous savez bien que cela ne va jamais tout seul ; mais c'est

normal, tout le monde en est là... »

Combien de fois avons-nous entendu ces propos, de la bouche mêmede professionnels résignés à l'insuffisance de leurs résultats ! Lorsqu'ilssont confrontés à des audits d'analyse de la valeur, les documentalistesdécouvrent le déséquilibre entre les fonctions techniques et lesfonctions de production, c'est-à-dire entre le temps passé à fabriquerl'outil de production et ce qui en découle : des effets médiocres, desinsatisfactions et, finalement, un certain fatalisme... Comment en est-on arrivé là ?

Ce manuel n'a pas pour vocation de conter l'histoire d'un certaindésenchantement, lié à une routine qui menace tout le monde, et spécia-lement le monde de la documentation. C'est tellement sécurisant decontinuer comme l'on a toujours fait : progressivement, traiter ledocument devient la finalité du travail et l'on oublie tout aussi graduel-lement à qui et à quoi ce travail était destiné.

L'un des objectifs que nous nous sommes fixés est de rétablirquelques vérités : l'analyse documentaire, ce n'est pas faire desrésumés. L'indexation, ce n'est pas chercher des mots dans un langagedocumentaire. L'analyse documentaire, c'est l'opération pivot de laqualité ou de la non-qualité de la recherche documentaire qui en estl'aboutissement. C'est l'opération par laquelle des auteurs vont pouvoircommuniquer avec une multitude de lecteurs intéressés, par la trans-mission de leurs œuvres. C'est la façon de répondre à la question : qui

Page 9: Analyse Documentaire_suzanne Waller

INTRODUCTION

a pu écrire quoi pour qui ? Et ce quoi n'est pas n'importe quoi ! L'ana-lyse documentaire consiste à extraire d'un texte tout son sens pour le

transmettre à qui en a besoin.

Nous proposons donc une méthodologie visant à réussir cette trans-mission ' en définissant d'abord de quoi l'on parle. Qu'est-ce qu'ana-lyser ? Et qu'est-ce qu'analyser dans un contexte documentaire ? Quelssont les éléments qui influent sur cette opération ? Une attention parti-culière sera portée à la connaissance des textes (« Les spécialistes dessciences de l'information n'ont pas porté beaucoup d'attention au pro-cessus de compréhension et de rédaction de textes2 »), à leur approche :comment lit-on ? Pourquoi lit-on ? Comment trouver le sens du texte etles informations que l'on juge utiles? Peut-on parler d'une lecturedocumentaire propre à l'usage qui en sera fait ? Comment cette lecturepeut-elle aider l'écriture ? Comment, après avoir repéré le sens à trans-mettre, le formuler soit en résumant, soit en indexant ?

Nous prenons parti pour une réhabilitation du résumé, non pas unrésumé long et difficile à écrire, mais un résumé tout simple dont le butest d'aider la sélection au moment de la recherche. L'existence d'unrésumé simplifie la formulation de l'indexation, en général surinvestie.Notre souci premier est de situer l'analyse dans la complexité des opé-rations documentaires, tout en simplifiant son approche ; nous souhai-

tons ainsi en faciliter l'exercice.

NOTES1. Cette méthodologie n'a rien d'original ; elle est élaborée à partir d'apporis

multiples, lectures, échanges, expériences, retours d'expériences. Certains yreconnaîtront leurs idées. C'est pourquoi ce manuel est plein de références detoutes sortes et, sans aucun doute, il en manquera un grand nombre. Ainsipourrait-on parler d'ingratitude (cf. Alain Ficnkiclkraut) alors qu'il n'y a là quele témoignage vivant de tout ce que l'on doit à ceux qui ont précédé nos efforts

et les ont nourris.

2. Source : [64], p. 56.

CHAPITRE IL'ANALYSE DOCUMENTAIRE : DÉFINITION ET PRATIQUES

L'une des bases de la méthodologie appliquée à l'analyse documen-taire consiste à veiller attentivement et méticuleusemcnt au vocabulairedes textes étudiés. Il est donc juste de commencer par préciser la termi-nologie qui sera utilisée dans ce manuel.

Qu'est-ce qu'analyser ?

Pourquoi avoir nommé une opération documentaire « analyse » ? Etque signifie ce mot dans le langage tel qu'il est fixé par les diction-naires les plus util isés ?

Le Robert ' (entre autres) part du grec analuxis et en exploite les deuxsens : décomposition et résolution.

Dans le sens de « décomposition », il nous propose six acceptions :«- didact. : opération intellectuelle consistant à décomposer une

œuvre, un texte en ses éléments essentiels, afin d'en saisir les rapportset de donner un schéma à l'ensemble (V abrégé, sommaire) ;

«- gram. : division d'une proposition en mots, ou d'une phrase enpropositions dont on détermine la nature et la fonction ;

« - chim. ; action de décomposer un mélange dont on sépare lesconstituants, ou une combinaison dont on recherche ou dose les élé-ments, déterminant la nature, les proportions des constituants ;

« - phys. : analyse spectrale : décomposition de la lumière blanchepar réfraction ou diffraction ;

« - élèv. : décomposition d'une image à transmettre en éléments

séparés ;« - économ. : décomposition et reclassement des tâches du travail :

analyse des tâches, du travail... »

Quel que soit le domaine d'étude auquel ce terme s'appliqua, il existeune simil i tude dans l 'action : division, séparation d'un corps, d'un en-semble, d'une phrase, d'un texte, d'un raisonnement en autant d'été-

Page 10: Analyse Documentaire_suzanne Waller

DÉFINITION ET PRATIQUES

ments qui le constituent, ces éléments faisant l'objet d'étude, de mesure,

d'identification.Dans le sens de « résolution », deux définitions nous sont proposées :« - math. : méthode de démonstration consistant à déduire de la pro-

position à démontrer d'autres propositions jusqu'à ce qu'on parvienne à

une proposition reconnue comme vraie ;« - log. : opération intellectuelle consistant à remonter d'une propo-

sition à d'autres propositions reconnues pour vraies d'où l'on peutensuite la déduire. Méthode de raisonnement analytique, de la consé-quence au principe. L'analyse est une régression. [...}

« Un raisonnement régressif vu des conséquences aux principes.« Une résolution est une opération intellectuelle consistant à décompo-

ser un tout en parties^ou une proposition en propositions plus simples. »

Toutes ces définitions aident à préciser le sens, à construire unei/nage de l'analyse documentaire. Celle-ci est une opération profession-nelle technique, certes, mais c'est d'abord une démarche intellectuelle.

Qu'est-ce que l'analyse documentaire ?

Selon l'AFNOR, « l'analyse documentaire est l'opération qui consisteà présenter sous une forme concise et précise des données caractérisantl'information contenue dans un document ou un ensemble de

documents2 ».Si l'on applique à cette phrase une méthode d'analyse, on peut la

reformuler de différentes façons, d'abord en élargissant, grâce au dic-tionnaire, le sens des mots ou propositions (voir ci-contre). On pourraitmultiplier ce genre d'exercices afin d'élargir encore l'image de l'analysedocumentaire qui se dégage de ces développements sémantiques.Chaque analyste a ainsi la possibilité d'élaborer, dans son propre voca-bulaire, la définition qui correspond le mieux à l'environnement danslequel il travaille, aux produits qu'il doit fournir, et à la politiquedocumentaire à laquelle il participe.

QU'EST-CE QUE L'ANALYSE DOCUMENTAIRE ?

opération...

.. (qui consiste) à présenter...

... (sous une forme) concise

et précise...

... des données...

... caractérisant...

... l'information...

... (contenue) dans un documentou un ensemble de documents

acte ou série d'actes (matériels ou intellec-tuels) supposant réflexion et combinaisonde moyens en vue d'obtenir un résultatdéterminé

[tel que]- mettre sous les yeux (ou à la portée) dequelqu'un- faire connaître au public- remettre quelque chose à quelqu'un envue d'un examen, d'une vérification, d'unjugement

[de façon]- brève, courte, dense, sobre, succincte

•-claire, définie, explicite, qui ne laisseplace à aucune indécision dans l'esprit

- ce qui est admis, connu ou reconnu et quisert de base à un raisonnement, de point dedépart pour une recherche

- définissant, déterminant, spécifiant

- un renseignement, un message

[extraits de]- tout écrit qui sert de preuve ou derenseignement

Ensuite, en envisageant l'opération sous un angle propre à l'activitédu documentaliste :

opération...

... (qui consiste) à présenter...... (sous une forme) concise

et précise...

... des données caractérisantl'information...

observation, identification, compréhensiond'un texte, selon des normes, méthodes etpratiques,

dans le but de rendre utilisables...

. . . les thèmes, sujets, personnalitésidentifiés dans un texte... '

.. (contenue) dans un document ... et issus de monographies, articles,ou un ensemble de documents \, rapports, etc.

Page 11: Analyse Documentaire_suzanne Waller

DÉFINITION ET PRATIQUES

L'analyse dans le cadre des opérations documentaires

• Dans l'enseignement documentaire classique, l'analyse documen-taire s'applique uniquement au traitement du contenu d'un texte oud'une image et aboutit à un résumé, une indexation ou une synthèse.

• Dans l'enseignement bibliothéconomique, ce terme n'existe pas ;c'est une phase du catalogage qui concerne aussi bien la cotation que lechoix des vedettes-matières. Mais il s'agit bien encore du traitementd'un contenu, en identifiant un thème ou un sujet.

• En archivistique, l'analyse est « l'étape essentielle de la descriptionarchivistique qui consiste à présenter, sous une forme organisée,concise et précise, les données d'ordre historique et diplomatique [ausens de science auxiliaire de l'histoire] contenues dans un document ouun ensemble de documents (de la pièce au fonds)' ».

• Dans la pratique courante des banques de données, l'analysedocumentaire couvre le traitement global du document, c'est-à-dire :• l'aspect formel, l'extérieur ou le contenant : ce qui est propre à la des-

cription bibliographique, au catalogage, éventuellement à la cotation ;• l'aspect fondamental ou le contenu : ce qui est propre aux opéra-

tions d'indexation, de condensation.

Dans ce dernier cas, l'analyse documentaire assure :• le repérage de toutes les informations utiles à l'exploitation d'un

document (aspect formel) ;• la condensation des informations (au sens documentaire, c'est-à-

dire conceptuel) contenues dans le document, c'est-à-dire le fait detrouver, repérer, extraire, mettre en lumière ce que l'auteur a rédigé, etsélectionner dans le texte ce qui est jugé important pour une utilisation

ultérieure.

• Dans les banques de données en texte intégral, l'analyse documen-taire paraît absente ; en fait, elle est déléguée aux systèmes internes derecherche — le plus souvent basés, actuellement, sur les analyses sta-tistique, morphologique, syntaxique et sémantique des textes (cf.p. 111-120). L'expérience est trop courte pour assurer que ces systèmes

ANALYSE ET POLITIQUE DOCUMENTAIRES

sont capables de remplacer intégralement l'analyse dite manuelle, enopposition à l'analyse dite automatique. Tous ces termes sont bientrompeurs : l'analyse automatique exige des programmes préalables desplus sophistiqués, tandis que l'analyse manuelle fait d'abord appel à lamatière grise de l'analyste...

Quelle qu'en soit cependant la pratique, le terme « analyse documen-taire » est le plus souvent appliqué à la recherche des informationscontenues dans un document, en distinguant bien analyse du contenu etanalyse de contenu. L'analyse du contenu consiste à repérer l'informa-tion explicite, ce qu'a écrit l'auteur et ce que lit l'analyste. L'analyse decontenu travaille sur des messages et consiste à repérer l 'informationimplicite, ce qu'on lit « entre les lignes ». C'est le domaine des psycho-sociologues, non celui des documentalistes.

Analyse et politique documentaires

Quels que soient sa nature, son importance, son effectif, un servicede documentation ne peut vivre (et survivre) sans une politiquedocumentaire explicite, basée sur des objectifs régulièrement évalués etadaptés aux besoins de l ' institution dans laquelle il est inséré.

Les opérations documentaires évoluent parce que de nouvellestechnologies y invitent les services les plus nantis. L'analyse documen-taire est une opération traditionnellement appliquée à l'enrichissementd'une banque de données, à la mise en valeur d'un stock d'informations.Il semble que l'avenir soit davantage orienté vers les flux que vers lesstocks.

Mais de quels flux s'agit-il : quantitatifs ou qualitatifs ? Acceptera-t-on longtemps des réponses vagues pour la raison qu'elles Çonl rapideset nombreuses ? Envisage-t-on, ici comme ailleurs, un accès à l'infor-mation à deux vitesses : précis et rapide pour les spécialistes qui u t i l i -

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DÉFINITION ET PRATIQUES

sent entre eux un vocabulaire limité au cadre de leurs recherches,rapide sûrement mais infiniment large et aléatoire pour le grand publicconfronté aux banques de données de taille maintenant mondiale ?

La meilleure évolution des sources d'information, de quelque naturequ'elles soient, ne tient-elle pas au fait qu'elles répondent aussi précisé-ment que possible à la politique du lieu où elles sont élaborées et/ou

utilisées ?

Selon les lieux, l'analyse documentaire est plus ou moins mise enœuvre. Elle dépend d'un certain nombre d'éléments à prendre encompte et à mettre en interaction pour définir la politique documentaireà appliquer selon les cas. En effet, pourquoi analyser des documents ?

Pourquoi analyser tel document ?

Toute politique documentaire est basée sur l'équilibre entre le fondsdu service et l'usage qui en est fait. Il serait même plus juste de préciserque c'est l'usage qui détermine la composition et la qualité du fonds.Les questions préalables à la détermination de la politique documen-taire concernant l'analyse vont suivre un ordre à peu près logique (àceci près qu'il est toujours nécessaire de pratiquer l'itération) :

- Quel en est le but ?- Pour qui la fait-on ?- Pour quoi ?- Sur quoi ?- Avec quels moyens ?

FINALITÉ DE L'ANALYSE DOCUMENTAIRE

Cette question, souvent posée au début d'une session de formation àdes participants déjà engagés dans la vie professionnelle, recueille desréponses assez diverses, mais le plus souvent orientées sur l'action elle-même : « décomposer les éléments d'un texte, restituer le sens général,les idées directrices, principales, essentielles, dégager les mots clés,rechercher, mettre en évidence, en valeur les principaux thèmes, lesarticulations logiques, trouver le sens d'un texte »...

ANALYSE ET roirriQUE DOCUMENTAIRES

Ces réponses sont proches de la définition officielle, centrée surl'opération documentaire et non sur sa finalité. Or, on ne résume pas,on n'indexe pas pour le plaisir d'indexer ou de résumer L'analyste agitdans un but bien défini. En tant que lecteur professionnel, il veille à ceque ses produits soient intelligibles pour et utilisables par toute autrepersonne que lui-même (cf. chapitre m, p. 49-71).

On a beaucoup parlé d'« explosion documentaire » : ce n'est pas unvain mot. Les chercheurs, les utilisateurs de toute nature n'ont pu faireface à fa surinformation envahissante, quel que fût leur champ d'études.L'opération d'« analyse documentaire » est née de cet état de fait, carles utilisateurs ne pouvaient raisonnablement pas prendre connaissancede tout ce que leurs activités les obligeaient à lire, voire seulement àsurvoler.

Orientée vers la satisfaction des usagers, l'analyse documentaire estnécessaire dans plusieurs activités documentaires :

- elle est préalable à la recherche par la voie de {'indexation et durésumé dans les banques de données ;

- elle est à la base de .synthèses, ou documents rédigés sur un thèmeou un sujet précis en s'appuyant sur plusieurs sources de naturesdiverses ;

- enfin, c'est sur elle que repose la cotation d'un ouvrage si celui-cifait l'objet d'un classement conceptuel.

DESTINATAIRES DE L'ANALYSE DOCUMENTAIRE

Le statut et la nature de l'institution pour laquelle travaillent lesdocumentalistes exigent-ils l'opération d'analyse documentaire ? Quelssont les domaines d'études ? les champs d'application ? les pratiques derecherche des services et des utilisateurs ? Dans une entreprise, il estindispensable d'intégrer sa culture, son langage1, les besoins desuti l isateurs et de leurs secteurs d'activités. « A snhject analysis imftliesan interprétation of thé potential of thé document in relation to théknowledge intérêts ofa given information xystem, and this analysis isundertaken in a given historical, cultural, professional context. * » Un

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DÉFINITION ET PRATIQUES

bureau d'étude ne peut pas se passer de l'analyse, alors qu'un service devente n'en a aucun besoin. C'est donc à l'intérieur d'entreprises ou deservices bien définis que l'on peut aller plus loin dans la connaissancedes usagers.

La classique analyse des besoins des utilisateurs paraît à présent unpeu limitée. Pour suivre une terminologie très rigoureusementprécisée6, il faut distinguer l'utilisateur de l'usager, du consommateurou du client.

Dans les services de documentation où la recherche est effectuée eninterne, où le documentaliste côtoie quotidiennement ses utilisateurs(ou usagers), on effectue des analyses de besoins régulières en vue defournir l'information pertinente. Ces études sont adaptées, réviséesrégulièrement pour que la politique documentaire soit toujours enadéquation avec la demande, tout en sachant que « les usagers inven-tent, détournent » 7 et que l'étude de besoins présente toujours un carac-tère aléatoire. L'utilisateur se sert d'un outil ; il profite des services defaçon plutôt passive. L'intérêt d'une étude de besoins bien conduite estde « transformer l 'utilisateur en usager »", c'est-à-dire faire de lui unvéritable partenaire, capable de se passer des services du documen-taliste au moment de la recherche, mais intéressé par le travail en amontafin que l'analyse effectuée soit de mieux en mieux ciblée.

Si l'analyse est destinée à un « grand public » innombrable et dont lesattentes précises sont difficiles, sinon impossibles à cerner, l'étude debesoins classique est inutile. Il n'y a plus, dans ce cas, d'utilisateurs oud'usagers, mais des consommateurs et des clients. L'enjeu est économi-que autant qu'intellectuel, et l'étude de besoins doit se transformer enétude de marche. On peut, bien sûr, cerner des catégories par discipli-nes, niveaux de compétence, centres d'intérêt, mais les besoins restentde nature générale et l'usager réel demeure inconnu. On sait, parailleurs, que tous les sondages doivent prendre en compte une marged'erreur, à intégrer dans l'élaboration de la politique de vente. La poli-tique d'analyse est donc encore plus aléatoire. C'est plutôt la cohérenceinterne du produit qui en assure alors la qualité.

ANALYSE ET POLITIQUE DOCUMENTAIRES

La pratique de l'analyse documentaire sera donc différente selonqu'elle est destinée à une clientèle innombrable et potentielle ou à unpetit groupe d'usagers connus dont on peut suivre avec attention lesbesoins et, surtout, l'évolution de ces derniers. Toutefois, il faut êtreconscient du fait qu'une banque de données interne est toujours suscep-t ible de s'ouvrir à l'extérieur, ce qui détruit l'argumentaire des paragra-phes précédents... Il s'agit, à nouveau, d'une décision politique à pren-dre en connaissance de cause, après étude approfondie des besoinsdirects (utilisateurs internes) et éventuels (domaine peu exploité, parexemple).

PRODUITS Dt-: L'ANALYSE DOCUMENTAIRE

Les responsables de la politique documentaire ont à distinguer entreles produits à court ou à moyen terme. Selon les publics à satisfaire,l 'analyse documentaire peut revêtir différentes formes : résumé, indexa-tion ou synthèse.

Par exemple, est-il opportun d'élaborer des résumés - activitéexigeant du temps — pour des revues de presse dont le principal intérêtest de fournir 1res vite l 'information jugée essentielle tel jour ou tellesemaine, alors qu'on sait fort bien que ce produit connaît une durée devie plus qu'éphémère ?

L'analyse documentaire prend toute sa valeur sur le long terme. C'estpourquoi la méthodologie ici présentée privilégie le résumé et l'indexa-tion destinés à une banque de données. C'est à partir de celles-ci quel'on peut éditer des bulletins bibliographiques, chronologiques, théma-tiques, etc., établir des diffusions sélectives et ciblées, élaborer rapide-ment des bibliographies ou des dossiers sur un sujet précis, et répondreaux questions posées, ce qui — ne l'oublions pas — est l'objectifprioritaire de tout service de documentation.

La partie bibliographique des revues comporte généralement des ré-sumés. La plupart du temps, ces résumés sont signés, ce qui indique uneprise de position des analystes vis-à-vis du document dont ils rendent

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DÉFINITION ET PRATIQUES

compte. Il s'agit alors de résumés critiques requérant une excellenteconnaissance du domaine et de son environnement bibliographique. Ceproduit échappe, en général, au travail courant du documentaliste-

analyste.

Ces opérations de résumé et d'indexation seront détaillées au coursdes prochains chapitres. Notons, cependant, que la rédaction de syn-thèses ne sera pas abordée dans la mesure où un excellent ouvrage est

déjà paru sur ce sujet1.

LE FONDS DOCUMENTAIRE;

Comment l'établir et l'alimenter ?

Le fonds documentaire est établi en fonction des besoins de l ' inst i tu-tion et de ses usagers, en ne négligeant aucune des questions suivantes :

• Quelle est la nature des documents à analyser ? On ne traite pas dela même façon des collections répertoriées, stockées, à caractère plusou moins unique (documents internes à une entreprise, par exemple), etdes documents dont la valeur d'usage est immédiate, mais très vite

obsolète (la presse, par exemple).

• Quels sont les types de supports et leurs champs disciplinaires ? Desmonographies (générales, spécialisées) ? des articles de journaux(revues « grand public » ou scientifiques et techniques) ? des brevets ?des cédéroms ? Le fonds est-il de nature encyclopédique ou très

spécifique ?

• Quel est le pourcentage de documents en langue étrangère ? Etcombien de langues différentes ?

• Quel est le volume d'alimentation du service ? Quel est le nombrede documents distincts à traiter par jour, par semaine, par mois ?

C'est seulement après avoir clarifié le cadre dans lequel doivent s'ins-crire le fonds et son alimentation que l'on passe à la politique de sélection.

ANALYSE ET POLITIQUE DOCUMENTAIRES

Comment le sélectionner ?

Choisir est une activité délicate : garder un document signifie qu'onen rejette un ou plusieurs autres. Les documentalistes éprouvent desdifficultés à sélectionner, c'est-à-dire à jeter. En expliciter les raisonspeut aider à surmonter la crainte de mal faire.

11 y a peu encore, le documentaliste devait compter uniquement surson fonds pour répondre aux questions des utilisateurs. L'interrogationdes banques de données n'était pas une pratique si courante, pour desraisons budgétaires certainement, mais aussi par manque de formationet de pratique. De ce fait, tout document revêtait un intérêt, mêmeminime, et cette part minime plaidait en sa faveur : on le gardait, on letraitait , on l'insérait dans la banque de données locale. Compter sur sonseul fonds est également le signe d'un isolement, réel dans certains cas,fictif dans d'autres. Il existait et il existe encore une mauvaise complé-mentarité entre services, par méconnaissance parfois, par défiancesurtout. Et c'est ainsi que l'on traite les mêmes documents, que l'ondépouille les mêmes revues dans deux blocs d'immeubles contigus,quand ce n'est pas dans la même tour.. . Les restrictions budgétairesd'une part, le travail en réseau d'autre part ont aidé les documentalistesà combler leur ignorance et à dépasser des réactions de repli sur soi,dommageables à plus d'un titre.

Il y aurait une étude à mener sur le comportement de ceux qui « nejettent rien parce que ça pourra toujours servir... » et, à l'intérieur decette étude, sur un sous-ensemble concernant les documentalistes, sinombreux à manifester ces symptômes. Ces attitudes ne sont pasrationnelles, et le plus raisonnable des professionnels est d'accord sur lefait que, dans les piles de Journal officiel ou de Moniteur des travauxpublics encombrant des couloirs, des caves ou des greniers, on nepourra jamais entreprendre une recherche efficace.

Ce ne sont pas seulement les couloirs qui sont encombrés, mais aussila banque de données. La quanti té rassure, même si elle est inutile. Ilest vrai que les services de documentation vivent, depuis'plusieursannées, une mutation plus ou moins rapide entre le réel et le virtuel. Lesréactions des documentalistes sont plus compréhensibles, dans la

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DÉFINITION ET PRATIQUES

mesure où ils affirment que les usagers souhaitent encore obtenir ledocument primaire, plutôt que le texte sur l'écran. Il faudra, sans doute,encore quelque temps pour que l'accès à la documentation virtuelle soitaccepté par tous. Mais pourquoi traiter tout ce que l'on garde ? Pourquoine pas identifier les autres sources de recherche présentant lesdocuments de son fonds sans encombrer sa banque de données ? C'estune autre façon de jouer les complémentarités, qui ne sont plus alorsgéographiques mais thématiques. Et si l'on n'est pas véritablementsatisfait des notices consultées, pourquoi ne pas les télédécharger etmodifier, par exemple, le seul champ d'indexation pour le rendreconforme aux habitudes des usagers ? A terme, face à la multiplicitédes sources d'information, chaque service ne devrait plus avoir à traiterque la littérature grise de son entreprise, en jouant ainsi un rôle irrem-

plaçable de dépôt légal.

Enfin, il existe un autre encombrement, de nature qualitative, quipose le problème réel de la cohérence scientifique des banques dedonnées. « La plupart des banques de données sont aujourd'huicomparables à d'immenses machines à enregistrer qui additionnent lesdocuments en les empilant les uns sur les autres sans souci d'animationou de coordination de ces documents entre eux [...] L'addition sanssynthèse régulière des savoirs humains.. . ouvre ainsi sur le gaspillagedu travail documentaire et du travail scientifique. I 0 »

La question de la sélection, importante pour l'image même de laprofession, sera traitée à plusieurs reprises dans ce manuel.

LES MOYENS DU SERVICE

Les moyens matériels

Une minorité de services de documentation ne dispose pas encored'outils informatiques. Mais ceux qui sont informatisés ont-ils eu lechoix du logiciel, ou leur a-t-on imposé des SGBD standard ou unlogiciel « maison » dont on sait que la maintenance est rarementassurée ? Peuvent-ils compter sur des outils informatiques souples et

ANALYSE ET POLITIQUE DOCUMENTAIRES

fiables, paramétrés selon les vrais désirs des documentalistes ? Sont-ilsmaîtres du budget global de leur service (et pas seulement de celui desacquisitions) ? Peut-on dire de ce budget qu'il est au moins correct ?Sont-ils assez autonomes pour gérer aussi régulièrement que possibleleurs propres activités, en tenant compte, par exemple, du rythme destransactions (questions, recherches, diffusion, etc.) à assurer par jour,par semaine, par mois ?

L'étude précise des moyens dont on dispose est en fait l'élémentdécisif d'une politique documentaire. Trop souvent, les documentalistesrêvent au lieu de compter ; ils sont ensuite déçus de ne pouvoir allerjusqu'au bout de leurs rêves et cela leur coûte très cher... Ce n'est pasabdiquer devant les gestionnaires que d'être réaliste face à la limite deses moyens, en n'entreprenant que ce que l'on pourra mener à bien.

Les moyens intellectuels

Quel est l'effectif du personnel disponible? sa polyvalence? sacompétence ? 11 n'est pas inutile de s'interroger sur les qualités requisespour effectuer l'analyse documentaire.

Très souvent, il est demandé à l'analyste une compétence dans ledomaine ou dans la discipline propres à l'activité de l'entreprise. Celaest juste dans certains cas, tels qu'un laboratoire pharmaceutique, unservice d'analyse économique, un centre de recherche nucléaire — danstout lieu où la compréhension précise du contenu est indispensablepour sélectionner, valider et transmettre l'information. Il est préférablealors qu'un spécialiste du domaine se forme aux techniques del'analyse. Mais si cette option n'est pas acceptée par l'entreprise, il resteau documentaliste à passer ses capacités au crible de trois questions :« Que sais-je sur le sujet ? », « Que sais-je sur les besoins de l'entre-prise ? », « Que sais-je sur moi-même ? »

• « Que sais-je sur le sujet ? » Si la réponse est « peu de choses »,il est indispensable de trouver un recours dans l'entreprise,, ce qui nesignifie pas qu'on se sente dévalorisé. Le documentaliste est embauchépour traiter et diffuser l'information utile et non pour être aussi

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DÉFINITION ET PRATIQUES

économiste ou biologiste, ou spécialiste de tout autre discipline qu'ileût fallu expliciter au moment de l'embauche (et de la détermination dumontant du salaire...). Le documentaliste a le droit et le devoir dedemander une aide à un spécialiste du domaine dans lequel il doitopérer, sans en posséder le savoir : « La compétence du destinatairen'est pas nécessairement celle de rémetteur." » Peu à peu, il acquerrales grands traits, la terminologie et la connaissance du milieu. « Untexte repose sur une compétence mais, de plus, il contribue à laproduire. " » Le plus souvent, ce n'est pas la connaissance du domaineou de la discipline qui est prioritaire pour l'analyste, mais celle de lalittérature propre à ce domaine ou à cette discipline. Selon les cas, endeux, trois ou six mois, un documentaliste digne de ce nom (c'est-à-direpourvu d'une intense curiosité intellectuelle) saura repérer les auteurs,les collections, les revues, les éditeurs reconnus dans le domaine. 11saura déjà sélectionner, puis valider avant de transmettre. De plus, saposition dans l'entreprise l'obligera à s'intéresser à toutes les périphériesdu domaine principal ; il est rare qu'un documentaliste n'ait pas à élargirle cadre de ses compétences ; c'est du reste l'un des aspects les plusfascinants de la fonction. « C'est un des rôles de la culture générale quede préparer des généralistes, c'est-à-dire des spécialistes de la traduc-tion, de la transposition, de l'inter-relation, qui, plongés ou non dansune ou plusieurs spécialités, restent ouverts à toutes et capables de les

articuler à l'objet commun. " »

• « Que sais-je sur les besoins de l'entreprise (dans le cadre d'unservice interne) ? » Si la réponse est « ce que tout le monde en saitdans le service », c'est sans doute insuffisant. Ce qui peut arriver depire à un analyste, c'est de ne faire que des analyses ; c'est le meil leurmoyen de s'enfermer dans un monde de plus en plus abstrait en perdantle contact avec les vrais besoins. Ceux-ci sont repérables chaque jouren écoutant les questions des utilisateurs. L'idéal pour un documen-taliste-analyste, c'est l'alternance entre les périodes centrées sur lestextes et les périodes ouvertes sur les questions. Les deux activités senourrissent l'une l'autre et avivent leurs qualités respectives. L'infor-mation sélectionnée, validée à partir du texte, devient aussi utile face

aux questions.

ANALYSE ET POLITIQUE DOCUMENTAIRES

• « Que sais-je sur moi-même ? » Autrement dit : « Quelle est macapacité de recul lorsque je lis un texte, à quelle place se situe ma sub-jectivité ? » II est illusoire de considérer l'objectivité comme acquisedans l'opération de traitement d'un texte, quel qu'il soit. Or il n'est pasquestion pour l'analyste de faire l'impasse sur ses opinions (comment lepourrait-il ?), mais au contraire d'en avoir une connaissance précise, demanière à ne pas être piégé par toute lecture « pour ou contre ». Lasituation la plus difficile est du reste d'avoir à sélectionner des articlesdans une revue dont on partage les opinions : comment accepter qu'ilsne soient pas tous le reflet de la (de ma) vérité ? Le problème de la sub-jectivité n'est pas négligeable et on ne peut pas l'évacuer par uneboutade. La vigilance est encore plus exigible lorsqu'on analyse la litté-rature en sciences humaines ou sociales, les sciences exactes étant (etencore,..) plus à l'abri des interprétations... Il est alors important defaire appel au jugement d'autrui, de confronter des opinions différentes.Lorsque l'obstacle paraît trop grand, lorsque discerner devient diff ici le ,il est conseillé, dans la mesure du possible, de « laisser reposer » : il estfréquent que les lendemains matins apportent la clarté attendue, surtoutsi l'on a pu exposer ses difficultés au cours d'un échange professionnel(ou non) fructueux. Qu'ajouter, sinon qu'il ne s'agit pas ici de compé-tences techniques ou intellectuelles, mais d'introspection personnellepour laquelle il existe d'autres manuels que celui-ci ? Toutefois, cetaspect du travail sera à nouveau évoqué, en particulier dans les exerci-ces et leur corrigé.

Le terme « analyse documentaire » couvre uniquement les opérationsintellectuelles (comprendre, formuler) préalables à l'action dont lesproduits les plus visibles sont le résumé et l'indexation. Pour en aborderla pratique, plusieurs phases préparatoires sont indispensables :

- être très au clair sur la finali té et les conditions du travail, c'est-à-dire avoir réfléchi et répondu aux questions concernant la, polit iquedocumentaire (</.' p. 19-20). On doit savoir pour qui, pourquoi l'ontravaille et quel en sera le produit ;

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DÉFINITION ET PRATIQUES

- s'interroger sur la façon dont on lit, dont on repère le sens et levocabulaire d'un texte ;

- considérer les différentes facettes des documents ;- repérer les différentes formes d'information qu'ils contiennent ;- identifier les différentes pratiques de recherche documentaire.

Pour l'étudiant débutant, il est nécessaire de passer par ces étapespour parvenir à résumer et indexer dans une optique documentaire.

Le professionnel exercé accomplit de façon globale tout ce qui estdétaillé dans les chapitres suivants : observer, comprendre, structurer,formuler, résumer, indexer. C'est pour lui une activité qu'il cherche àaméliorer chaque jour, comme le sportif à l'entraînement. Mais, toutcomme le sportif, il peut lui être utile de disséquer très précisémentchaque phase de l'action, en vue de découvrir en quoi et comment il estpossible de l'améliorer et en y découvrant le passage incessant des opé-rations mentales (et non techniques) de l'analyse à la synthèse, et viceversa.

NOTES

1. Toutes ces définitions sont extraites de [29].

2. Source : [7].

3. Extrait de la dernière version du Dictionnaire de Terminologie archivisttque,à paraître en Tan 2000.

4. Source : [77], vol. 33, n° 2, p. 86-88.

5. Source : [2], vol. 24, n° 3, p. 142.

6. Source : [50], p. 56.

7. Source : [74]. p. 31.

ANALYSE ET POIFTIQUE DOCUMENTAIRES

8. Source : [50], p. 19.

9. Source : [16].

10. Source : [14], p. 70-71. Cet ouvrage sera souvent exploité car il abonded'idées vivifiantes pour notre profession. Que l'auteur soit ici spécialementremerciée pour la qualité de son apport à la pensée documentaire.

11. Source: [33]. p. 64.

12. Source: [33]. p. 69.

13. Source: [32], p. 135.

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ANNEXE PÉDAGOGIQUE

Exercice n° 1

Le lecteur désireux de tester ses possibilités peut, à présent,rédiger un résumé documentaire tel qu'il le ferait pour sonentreprise, ou selon l'idée qu'il s'en fait, puis l'indexer, c'est-à-direchoisir des mots clés qu'il juge significatifs pour caractériser lecontenu.

Le texte proposé (Liliane Lurçat. — Les effets violents de la télé-vision. — Esprit, juillet 1994, n° 7), présenté en page 227, a étéchoisi en fonction de sa bonne lisibilité et de son sujet, un intérêtque l'on peut juger commun à tous. Sa bonne tenue intellectuellea aussi influencé le choix : on ne résume pas n'importe quoi endocumentation.

Il servira plusieurs fois au cours de ce manuel ; c'est pourquoi ilest recommandé de garder sous la main ce premier travail afin dele confronter aux différentes phases qu'il illustrera : typologie etcaractéristiques d'un document (p. 35-47), grille de lecture (p. 73-93), correction de résumés sous l'aspect formel et rédaction derésumés (p. 121-148), enfin indexation (p. 149-173).

Il peut être intéressant de mesurer le temps passé à ce premierexercice afin de le comparer aux progrès certainement réalisés enfin de parcours.

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CHAPITRE IILA LECTURE DOCUMENTAIRE : LIRE ET OBSERVER

En se basant sur la définition de la politique documentaire, l'analystesélectionne les documents qui alimenteront la banque de données. Lapremière phase de l'analyse documentaire consiste à prendre connais-sance de chaque document et à sélectionner ce qui est jugé intéressantpour le produit à fournir. Ce premier travail suppose la lecture et l'iden-tification précise du document.

On peut dire du documentaliste qu'il n'arrête pas de lire ; dans lemême temps, il se plaindra qu'il ne lit plus. Comment expliquer ceparadoxe '? Sans doute par l'idée commune qui voit dans la lecture undivertissement. Chacun à leur manière fort différente, Proust, Borges etPennac ont écrit des pages éblouissantes sur le plaisir de lire. Qui peutnier l'existence de ce plaisir, le bonheur et la fascination qu'il procure ?Cependant, le jeune étudiant choisissant la profession de bibliothécaireou de documentaliste parce qu'il « aime lire » découvrira vite uneréalité tout autre : dans .su vie professionnelle, le documentaliste ne litplus pour lui, mais pour d'autres ; il ne choisit pas ce qu'il a à lire etne lit plus jamais un texte dans son intégralité.

Dès lors, la question cruciale se pose : que signifie « lire » pour ledocumentaliste-analyste ? Comment ce professionnel saura-t-il « neplus lire » et, paradoxalement, exploiter ses non-lectures pour en ex-traire matière à réponses, sachant que « tout lecteur a trois tâches à ac-complir : visuelle (mise en pages, calligraphie), intellectuelle (compré-hension, mémorisation), affective (intérêt, curiosi té . . . ) ' » ? L'équil ibreintellectuel que nécessite cette pratique particulière et la réalisation deces trois tâches seront analysés tout au long de ce manuel. L'approchevisuelle cl l'approche intellectuelle seront directement étudiées. Quantà l'aspect affectif— dont on penserait volontiers qu'i l importe peu dansle travail du documentaliste, obligé, de par son métier même, de lire destextes qu'i l n'aurait certainement pas choisis par plaisir — ,'il se révèleomniprésent dans le rapport subjectivité-objectivité que nous avonsévoqué en page 29 et dont il sera de nouveau question plus avant.

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bRE ET OBSERVER

Les conditions de la lecture documentaire

SE CONCENTRER ET EN TROUVER LES MOYENS

Avant toute autre considération, l'analyste doit trouver l'environne-ment et le temps favorisant la concentration, assertion aux allures dequadrature du cercle, tant est varié le travail du documentaliste et

tenace l'idée de sa totale disponibilité.

Comment, en effet, prendre connaissance d'un texte et de ses infor-mations primordiales, alors qu'on est installé au milieu d'une salle delecture bruyante et passante, et qu'on peut être sollicité à tout momentpar les utilisateurs, des appels téléphoniques, un collègue demandantde l'aide ou manifestant simplement le besoin d'un moment de détente ?Pourtant, parce que cette situation est habituelle, elle est considéréecomme normale. Pourrait-on porter un regard critique sur cet état de

fait et trouver le moyen d'y remédier ?

La réponse est simple : l'analyste doit pouvoir disposer de une oudeux heures de tranquillité absolue, sans sollicitation extérieure, à despériodes régulières correspondant à une charge de travail décidée dansle cadre de la politique documentaire.

Cette solution présente de nombreux avantages, et spécialement

ceux-ci :- un travail suivi permet l'approfondissement de la tâche, une

meilleure qualité du produit, ainsi qu'un gain de temps ;- le fait d'exiger le respect d'une opération la valorise. Or la lecture

documentaire, insérée parmi d'autres opérations, est actuellementconsidérée comme quasiment négligeable.

(Cette dernière remarque vaut pour un grand nombre d'opérationsdocumentaires qui exigent par nature une attention soutenue et uneconcentration importante. Elles sont, malheureusement, souvent exé-cutées comme des tâches bureaucratiques répétitives et considéréescomme telles par l'encadrement de l'entreprise.)

LES CONDITIONS DE LA LECTURE DOCUMENTAIRE

CONNAÎTRE SES i.IMITES

L'activité d'analyste, donc, requiert une grande attention. Un peucomme pour l'entraînement sportif, il est recommandé à chacun desuivre son propre rythme, sachant qu'il n'est ni mesure standard nicomparaison possible entre analystes. S'il existe une forme de compé-t i l ion , c'est avec soi-même et non vis-à-vis d 'autrui . Il importe de restertoujours un peu en deçà de ses possibilités, ce qui permet le plus sûre-ment de les améliorer régulièrement. Comme pour l'ensemble desactivités intellectuelles, il faut «savoir respirer», ne serait-ce qu'ens'accordant deux à trois minutes de véritable détenle entre deuxdocuments. Ces pauses permettent de régénérer les facultés de concen-tration, et, par conséquent, de gagner du temps — non d'en perdre.

ORGANISER SA LECTURE

Les piles de documents présentent souvent un caractère dissuasif.sinon découragcanl ! Par l'observation préalable (cf. p. 3K-44), quipermet d'affecter une priorité à tel type de documents, ou à tellesrevues, ou à tel domaine, le documentaliste peut alléger sa tâche demanière significative. Quelques mesures faciles à mettre en œuvrecontribuent à cet allégement des bureaux ainsi que des esprits, tellesque se débarrasser très vite des revues au contenu superficiel ou auxsujets simples et faciles à traiter; grouper et analyser à la suite lesdocuments couvrant des domaines à peu près similaires ; traiter lesdocuments plus difficiles ou plus importants lorsque la qual i té del'attention et de la concentration est la plus grande.

Petit détour par la « lecture rapide »

Les méthodes dites de « lecture rapide » sont basées sur dc's exercicesprogressifs de perception oculaire ; les mécanismes ainsi mis en placepermettent d'augmenter la vitesse d'appréhension de la vision. Elles

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LIRE ET OBSERVER

'

présentent des avantages certains pour un public déjà conscient de cequ'est l'acte de lecture — le Robert donne, du verbe lire, une premièredéfinition ainsi formulée : « suivre des yeux en identifiant (des

caractères, une écriture...) ».

Pour le jeune étudiant, habitué aux exercices universitaires, il peuts'agir d'une prise de conscience bénéfique de ce qu'est le déchiffrement,activité oculaire à partir de laquelle cessent malheureusement de pro-gresser ceux qui deviennent des illettrés. Une série de méthodes et/outechniques — appelées souvent « écrémage », « repérage », « survol »ou « mémorisation » — suivent généralement, plus ou moins bien expli-citées selon la qualité des ouvrages et des formations. L'important est demesurer ce qu'apporté la « lecture rapide » à la vie professionnelle.

S'il s'agit de tout lire très vite, de façon mécanique, on en devinel'absurdité, stigmatisée par Woody Allen lorsqu'il s'affirme capable delire les Frères Karamazov en quinze minutes chrono... En revanche, sices méthodes permettent d'appréhender un ensemble de documents envue de les sélectionner plus vite et de repérer ainsi ceux qui exigerontplus de temps (cf. page précédente), alors la lecture rapide, prenanttoute sa raison d'être, devient lecture efficace, quelquefois même

appelée « lecture adulte2 ».

Le professionnel exercé élabore souvent sa propre méthode, sans êtrecapable, généralement, d'en préciser la teneur. L'essentiel est qu'il restelucide sur sa pratique de lecture et qu'il cherche toujours à l'améliorer.

Observer avant de lire

OBSERVER UN DOCUMENT

Quand on survole un paysage, on en a une vue panoramique.Survoler, pour ce qui nous concerne, signifie donc observer globale-ment le document comme un objet doté d'un volume, d'un poids, d'une

couleur, d'une forme.

OBSERVER AVANT DE LIRE

La typologie

C'est un premier repère. On n'analyse pas un article de revue men-suelle comme un quotidien, un brevet comme un texte législatif, unemonographie comme une note technique. Le regroupement dessupports par type est un bon moyen d'entrer dans un processus delecture.

Chaque type présente des caractères formels spécifiques. Une mono-graphie a toujours un titre, quelquefois un sous-titre, toujours une tabledes matières, souvent une bibliographie et un index, et elle peut fairepartie d'une collection. Une revue nécessite un dépouillement, à moinsqu'il ne s'agisse d'un numéro spécial ou consacre à un sujet. Un rapportpeut être assimilé à une monographie. Les notes techniques sont (géné-ralement) toujours présentées de la même façon. Feuilleter rapidementpermet d'évaluer les conditions de l isibi l i té (cf. p. 40-44) et les caracté-ristiques propres à chaque document.

Les caractéristiques

Un autre repère comprend les caractéristiques d'un document, c'est-à-dire l'ensemble des éléments visibles et repérables permettant déjà desélectionner :

• Que connaît-on de l'auteur, de son œuvre (cf. « œuvres du mêmeauteur» sur les pages de garde) ou de son affiliation (organisme derattachement, niveau de responsabilité) ?

• Quelle est la revue ? Quelle est son ancienneté ? Quelle est sa pério-dicité 7 Comment est-elle financée? Provient-elle d'un groupe depresse? d'une société savante? d'une association professionnelle?d'une municipal i té ? d'un ministère ? Quelle est son orientation ?

• Qui est l'éditeur ? Que produit-il habituellement ? Est-ilspécialisé 7 généraliste ? Peut-on prendre connaissance de Ses produitspar des catalogues complets, régulièrement mis à jour ? Quelles sontses tendances scientifiques, économiques, politiques, etc. ?

Page 22: Analyse Documentaire_suzanne Waller

-

LIRE ET OBSERVER

• Le document a-t-il pour origine un organisme officiel ou para-public ou associatif ? Est-il facilement accessible ou relève-t-il de ceque l'on appelle « littérature grise », c'est-à-dire tous les documents

produits sans objectif de commercialisation ?

• Le document fait-il partie d'une collection ? Qui en est le directeurscientifique? Quel est son objectif? L'analyste a-t-il déjà étudié

d'autres monographies de cette même collection ?

• Quelle est la date du document ? Est-ce une réédition, c'est-à-direune mise à jour, ou une refonte du contenu garantissant son actuali-sation (à ne pas confondre avec une réimpression, qui n'est qu'unenouvelle mise sur le marché de la dernière édition parue) ?

• Est-ce une traduction ? De quelle langue et de quel pays ? A-t-on

connaissance du titre original, du premier éditeur ?

11 apparaît donc ici clairement qu'il ne s'agit pas de lire, mais bien derepérer les éléments constituants qui permettent de se faire une idée de

l'objet et d'entrer rapidement dans le sujet.

L'identification bibliographique permet de répondre à quelques-unesde ces questions grâce aux zones préconisées par les normes decatalogage : auteur, adresse bibliographique, date, collection, etc.

En renseignant les champs de description de sa banque de données(cf. p. 101-102), l'analyste s'approprie le document et approche peu à

peu l'information qu'il détient.

OBSERVER LA MISK EN PAGES : LIL RKPÉRAGI-: visu KL

Cette phase d'observation, hélas ! souvent négligée par les documen-talistes, est pourtant le point de départ essentiel pour l'analyse ducontenu, la compréhension des textes et la sélection des informationsutiles. Elle est, de surcroît, un excellent out i l pour une meilleure gestion

du temps.

OBSERVER AVANT DE LIRE

Exercer un repérage visuel consiste à survoler, feuilleter undocument. Il n'est pas question de lire le texte, mais d'observer certainséléments de présentation qui le constituent :

- la typographie ;- la présentation (organisation des chapitres, titres, sous-titres, notes

en bas de page...) ;- les illustrations (photographies, dessins, couleurs, légendes...) ;- l'importance des paragraphes, des alinéas, des espaces (marges,

interlignes simple, double...) ;- la ponctuation.

Le regard doit parcourir rapidement l'ensemble et en appréhender« l'architecture » avant même de lire (voir page suivante).

Tous les textes n'étant pas systématiquement présentés de façon aussilisible, il paraît utile de rappeler brièvement les fonctions desparagraphes et des signes de ponctuation pour comprendre l'intérêt derévélation rapide que possèdent ces entités au moment du repéragevisuel.

Le paragraphe

Le paragraphe est un ensemble signifiant composé d'une suite dephrases ou subdivisions du discours possédant une cohérence séman-tique. Une unité d'information est privilégiée, perçue comme essen-tielle, toutes les autres s'accrochant à cette unité, en entretenant desrapports sémantiques les unes avec les autres. Entre la fin d'un paragra-phe et le début du suivant se situe la phrase de transition.

Les signes île ponctuation

Tous les signes de ponctuation ont un sens et exercent une fonctionprécise1 :

- le point (.) indique la fin d'une phrase, celle-ci exprimant un senscomplet ; .

- la virgule (,) sépare, au sein d'une phrase, des éléments semblables(mots ou propositions) ;

Page 23: Analyse Documentaire_suzanne Waller

LIRE ET OBSERVER

Introduction indiquantle nombre de parties

double interligne

Première partie : 1

simple interlignePremière partie : 2

simple interlignePremière partie : 3

simple interligneParagraphe de transition

double interligne

Deuxième partie ; 1

simple interligneDeuxième partie : 2

simple interligneParagraphe de transition

double interligne

Troisième partie : 1

simple interligne

etc.

OBSERVER AVANT DE LIRE

- le point-virgule (;) sépare des propositions de même nature à l'inté-rieur d'une même phrase ;

- les deux-points (:) annoncent une énumération ou une citation ;- les parenthèses () intercalent, à l'intérieur de la proposition, une

indication explicative ou accessoire ;- le tiret (—) sépare du contexte de la phrase des mots ou des pro-

positions ;

- le point d'interrogation (?) exprime la demande, le questionne-ment direct ;

- le point d'exclamation (!) clôt une phrase exprimant un sentimentspontané ou violent ;

- les guillemets (« ») encadrent une citation ou un discours direct ;- les points de suspension ( . . . ) indiquent l'inachèvement non de la

phrase, mais de la pensée exprimée. Lorsque les poinis de suspensionsont encadrés par des crochets carrés ([...]), ils indiquent une sup-pression clans une citation ;

l'alinéa s'emploie pour passer d'un groupe d'idées à un autre.

De l'utilité du repérage visuel

Grâce au repérage visuel, l'analyste est donc, avant lecture, enmesure de se faire une idée de la composition du texte. En général, onconsidère que l'abus des paragraphes longs et lourds dénote l'impuis-sance à organiser les idées et à les exposer clairement, alors qu'un sur-plus d'alinéas prouve la difficulté à hiérarchiser des idées afin de lesprésenter en ensembles cohérents. Toutefois, l'écriture est sensible, elleaussi, aux effets de mode. Ainsi le style journalistique actuel fait-il bientrop souvent l'impasse sur les verbes, moteurs de la phrase. Ceux-cisont normalement repérables grâce aux points et points-virgules quiséparent des propositions normalement constituées. De même, lespoints d'interrogation peuvent indiquer les questions que se posel'auteur. Y répond-il dans le texte (voir exercice n° 5, p. 47) ? Peut-on ydiscerner l'amorce d'un plan ?

Tout en pratiquant le repérage visuel, l'analyste passe rleu à peu del'observation à la lecture. Il peut ainsi identifier le domaine, la grandediscipline, dans lequel se situe le texte et le type auquel il appartient :

Page 24: Analyse Documentaire_suzanne Waller

LIRE ET OBSERVER ANNEXE PÉDAGOGIQUE

savant (paragraphes denses, tableaux légendes...), et/ou technique(schémas, chiffres...), ou encore « grand public » (encadrés, illustra-tions, couleurs...), sans attribuer, pour autant, à ces observations un

caractère immuable.

Le repérage visuel donne, certes, une idée que l'on peut qualifier

d'« extérieure » du texte, mais il ne s'agit pas pour amant de détailsanodins : la mise en pages et l'application des règles de lisibilité son!

des garanties d'intérêt. Sans affirmer que médium et message ne fontqu'un, force est de reconnaître que le premier contribue fortement à la

diffusion et à la compréhension du second.

Cette première phase d'appréhension du document est égalementutile pour la gestion du temps car il devient alors possible d'affecter unordre au travail du jour : des textes les plus faciles, rapidement traités,

aux plus complexes, demandant davantage d'attention.

NOTES

1. Source: [76].

2. Voir à ce sujet : [ 54].

3. Toutes ces définitions sont extraites de [38].

Les différents exercices proposés n'ont qu'un objectif : entraînerà voir avant de lire. Ils exigent donc une certaine discipline indivi-

duelle pour s'observer en train d'observer !

Étudiants ou professionnels sont invités à faire ces exercices enchronométrant très fidèlement le temps passé ou en s'aidant d'un

compte-minutes.

En effet, tout doit être terminé dans un temps défini, afin deconjurer toute tentation d'entrer dans le contenu des documents.

Exercice n° 2 - Typologie et caractéristiques

Réunissez de façon aléatoire (ou trouvez) un grand nombre dedocuments textuels sans vous soucier de leur origine, en vue de lestrier par type (ouvrages et revues édités commercialement etlittérature grise ; textes officiels, notes techniques internes à unorganisme), puis de les comparer et d'opérer une distinction, par

exemple :- par date ;- par langue d'origine ;- par types d'éditeurs, pour les revues. Leur périodicité et leur

origine éditoriale doivent être relevées car elles pourront servir de

critères de sélection.

Chacun doit pouvoir imaginer des catégories selon ses propres

objectifs de lecture et de travail.

L'intérêt est de faire cet exercice à intervalles réguliers et deminuter son temps pour un même nombre de documents. On doitaller de plus en plus vite, tout en acquérant un regard de plus en

plus aigu sur l'aspect extérieur des documents.

Page 25: Analyse Documentaire_suzanne Waller

LIRE ET OBSERVER

ANNEXE PÉDAGOGIQUE

Exercice n° 3 - Caractéristiques d'un document

L'objectif est de repérer les éléments caractéristiques d'undocument apportant des critères de sélection autres que le

contenu.

Utilisez l'article « Les effets violents de la télévision », proposé enpage 227. En se basant sur les questions soulevées p. 39-40, peut-on en savoir plus sur la revue et sur l'auteur ? En admettant que lesujet soit intéressant, quels sont les éléments extérieurs au contenuqui peuvent influer — ou non — sur la sélection de cet article ?

Temps maximum si la revue est connue : 2 minutes ; si la revue

n'est pas connue : 5 minutes. Correction en page 267.

Exercice n° 4 - Repérage visuel des paragraphes d'un texte

Prenez un article de revue et ne le lisez surtout pas, mais

observez-le en vous posant les questions suivantes :- combien de parties cet article comprend-il ?- existe-t-il des paragraphes de transition ?- peut-on en faire le schéma comme en page 42 ?- peut-on en déduire quels sont les paragraphes à sélectionner

pour la lecture ?

Renouvelez l'exercice de façon régulière, en variant les articles et

les revues.Rappelons encore une fois qu'il s'agit de regarder, et non de lire.

Cette situation inhabituelle est, certes, très difficile à supporter,mais l'intérêt de cet exercice est de développer cette approcheessentielle, et sa répétition est nécessaire pour qu'elle deviennefamilière. Une fois cette pratique acquise, plus question de selaisser impressionner par des articles longs et sans intertitres !

Selon la longueur et la complexité de l'article, le temps peut-varier de 30 secondes à 2 minutes (ce qui est très long).

Exercice n° 5 - Repérage visuel à l'aide des signes typographiques

L'objectif est de repérer rapidement des ponctuations servant debalises pour entrer dans le contenu.

Regardez (sans le lire) le texte ci-dessous en vue de déterminercombien de parties seront développées après ce paragraphe.

Extrait de : Guy Le Boterf. — De la compétence à la navigationprofessionnelle, -- Paris : Éditions d'Organisation, 1997 (§ 1,

chap. I).

La réponse doit être donnée dans les 5 secondes. Correction en

page 268.

Pourquoi cet appel croissant à In notion df professionnalisme ? Qjieltfs sont lesraisons qui poussent acttuBement 1rs responsables des entreprises et ries organi-sations à rechercher des professionnels et à mettre en place des dispositifs de pro-fes.sionnalisa.lion ? Comment expliquer cet effarement progressif de la figure del'ouvrier qualifié ou de l'homme de métier au profit de relie du professionnel ? f>changement de langage est-il dû à des effets de modes passagers ou réf>ond-il à denouvelles exigences des situations et des organisations du travail ?

OParts : Éditions d'Organisation, 1997

Page 26: Analyse Documentaire_suzanne Waller

CHAPITRE IIILA LECTURE DOCUMENTAIRE : LIRE ET COMPRENDRE

Le repérage visuel a rendu l'objet familier et l'analyste est, plus oumoins consciemment, progressivement « entré » dans le document, enidentifiant ainsi le contenu principal, ou domaine d'intérêt.

De la visibilité, il passe à la lisibilité, puis à la lecture au sens de« faire du sens avec des signes ». Les signes étant repérés, les plus im-portants étant sélectionnés, il reste à « fabriquer » du sens, c'est-à-direà entrer dans le processus de compréhension des textes en commençantpar en identif ier les principales caractéristiques.

Les textes ci leurs caractéristiques

Si le repérage visuel a permis d'inscrire le texte dans son domaine, lelire s'impose désormais pour déterminer ce que l'on nomme soit « caté-gorie d'intérêt », soit « typologie des informations ». Il importe donc,maintenant, de se poser les questions suivantes ;

• Pour qui le texte a-t-il été écrit ? Quels niveaux ou types decompétence requiert-il pour être exploité (quelquefois, l'existence et lecontenu d'une bibliographie apportent des éléments de réponses) ?

• Que peut-on en extraire ? description de faits uniquement ? ou éga-lement réflexions, commentaires sur ces faits ? expériences confirméesou témoignages hâtifs ? démonstrations ? état de la question, etc. ?

Selon les lieux documentaires, une typologie des informationspermet de repérer rapidement l'intérêt, la valeur d'usage de tel ou teltexte. Ainsi, par exemple, une banque de données de presse propose-t-elle interview, biographie, chronologie, enquête, etc. ' (cf. p. 102-105).

Une lecture plus approfondie aide à caractériser le contenu sousdifférents aspects. Tout texte est écrit pour atteindre non seulement unpublic, mais aussi un but.

Page 27: Analyse Documentaire_suzanne Waller

LIRE ET COMPRENDRE

Avant de chercher de quoi le texte traite, l'analyste peut repérercomment il se présente et quel objectif intellectuel s'est fixé l'auteur.Pour simplifier, on peut classer tes textes en deux grands types : des-

criptif et problématique.

LES TEXTES DESCRIPTIFS

Ils présentent les éléments d'un événement dans un temps et dans unespace ; ils décrivent une situation statique ou évolutive. On distingue

quatre types différents.

Texte narratif

11 décrit le déroulement, l'évolution, la transformation d'une action,souvent de façon imaginaire (roman, nouvelle, théâtre). Si ce texte n'estpas de nature scientifique et technique, il ne peut être l'objet d'une ana-

lyse documentaire.

Texte explicatif

II décrit, lui aussis une action ou une idée sous les mêmes aspects,mais il s'agit souvent d'événements réels (description d'une expérience,explication d'une notion ou d'une théorie, relation d'un voyage, d'unerencontre...) dont les éléments sont reliés plus ou moins logiquement.

Texte didactique

C'est un texte descriptif explicatif où l'auteur a pour objectif defaciliter la compréhension du contenu ; il y a volonté d'enseigner, detransmettre un savoir (manuels scolaires ou universitaires,..).

Texte normatif

II impose le contenu de ses informations comme règles : lois, consi-gnes, normes, textes officiels, mais aussi notices techniques, Code de laroute, recettes de cuisine... Certains textes normatifs (comme les textes

LES TEXTES ET LEURS CARACTÉRISTIQUES

législatifs) font l'objet d'une réécriture explicative pour le public nonjuriste. Le meilleur exemple est celui des publications Liaisons sociales.Ces textes, d'origine normative, deviennent alors des textes didactiques.

LES TEXTES PROBLÉMATIQUES

Ils décrivent une situation dans laquelle existent ou co-existent un ouplusieurs problèmes. Le mot « problème » doit être ici compris commeexpose de la complexité d'une situation, d'une idée ou d'un raison-nement. Un texte problématique se compose toujours d'une partiedescriptive, en général située au début.

Texte problématique simple

Dans un texte problématique simple, l'auteur du texte décrit lasituation complexe, expose les idées différentes, apporte quelquefoisdes éléments de solution sans, cependant, prendre position ; il demeuretoujours extérieur aux problèmes énoncés.

Texte argument al if

Dans un texte argumcntatif ou critique, l'auteur défend sa thèse, sonopinion face au(x) problème(s) décrit(s) ; il prend explicitement parti.

Texte polémique

Un texte polémique est un texte argumentatif dans lequel l'auteur veutconvaincre son lecteur par tous les moyens.

LES TEXTES THÉORIQUES

I I convient de réserver un paragraphe complet aux textes purementthéorique.1; où sont exposées des constructions intellectuelles per-mettant l'approfondissement des sciences, qu'elles soient exactes,sociales ou humaines. « Les théories visent à atteindre des connaissan-

Page 28: Analyse Documentaire_suzanne Waller

LIRE ET COMPRENDRE

ces nouvelles. Une théorie en remplace une autre parce qu'elle rendmieux compte du passé, mais surtout parce qu'elle ouvre l'avenir.2 ».Les textes théoriques sont descriptifs dans leur relation aux idées, maisils ouvrent et délimitent un champ d'investigation porteur de dimen-sions problématiques.

La distinction entre ces types de textes ne revêt pas seulement unaspect didactique ; elle sous-tend véritablement un mode de lecture etd'usage :

- les textes descriptifs (et théoriques) sont construits logiquement ;leur plan est relativement facile à retrouver (cf. p. 76-79). Ils ne sus-citent pas une lecture trop subjective. Ils servent principalement àl'apprentissage, à la confirmation, à la recherche de preuves ;

- les textes problématiques confrontent des opinions diverses etpeuvent ainsi troubler la subjectivité de l'analyste. Il est indispensable,alors, d'identifier les systèmes de valeur tant de l'auteur que du lecteurpour atteindre l'objcctivation nécessaire. Ce type de textes apporte desinformations complémentaires, aide à poursuivre ou approfondir uneréflexion, à infirmer ou confirmer des points de vue, à infléchir desdécisions1.

Repérer la typologie des informations contenues dans un texte etémettre des hypothèses sur les intentions de l'auteur facilite la compré-hension et, par suite, favorise l'analyse. Les textes suivants sontproposés comme exercices et illustrations.

LES TEXTES ET LEURS CARACTÉRISTIQUES

Exercice 6 - Reconnaître un type de texte

Indiquez à quel type appartiennent chacun des quatre textessuivants (extraits de S. Neveu, D. Lemaître. — Vers la maîtrise dutexte. — Hachette, e Éditions Hachette).

6.1 - Ce texte est-il de type :

DESCRIPTIF Q PROBLÉMATIQUE LJ

narratif LJ argumentatif LJ

explicatif LJ polémique LJ

didactique LJ

normatif Q

l^es jeux sont innombrables et de multiples espèces : jeux de. société, d'adresse, dehasard, de plein air, df patience, de. construction, etc. Malgré cette diversité pres-que infinie et avec une remarquable constance, le moi -jeu » appelle les mêmesidées d'aisance, de risque ou d'habileté. Surtout, il entraine immanquablementune atmosphère de délassement ou de divertissement, il repose et il amuse. Il évo-que une activité sans contrainte, mais aussi snn.s conséquence pour la vie réelle.Il s'oppose au sérieux de celle-ci et se voit ainsi qualifié de frivole.. Il s'opposed'autre part au travail comme le temps perdu au temps plein employé. En effet, lejeu ne produit rien : ni biens ni œumes. Il est essentiellement stérile. À chaque nou-velle partie, et joueraient-iLs toute, leur vie, If s joueurs se retrouvent à zéro et dansles mêmes conditions qu'au premier début. Issjeux d'argent, paris ou loteries, nefont pas exception : iis ne créent pas de richesses, ils les déplacent seulement.Cette gratuité fondamentale du jeu est Inen le, caractère qui le. discrédite le plus.C'est elle aussi qui permet, qu'on s'y livre avec insmtdancf et qui le maintient isolédes activités fécondes. Chacun, dès l'abord, se persuade de cette manière que le jeun'est rien que fantaisie agréable et distraction vaine, quels que soient le soinqu'on y apporte, les facultés qu'il mobilise., ta rigueur qu'on exige.. On le sent biendans la phrase suivante de. Chateaubriand : - La géométrie spéculative a ses jeux,ses inutilités, commet les autres sciences. »

(Extrait de Roger CAILLOIS. -- les Jeux et les Hommes. -Gallimard, 1967.)

© Édition; Gallimard

Page 29: Analyse Documentaire_suzanne Waller

'•

LIRE ET COMPRENDRE

6.2 (Deux extraits du Journal officiel. Annales de la Chambre desdéputés, 1908 : extraits des discours de 1) Maurice Barrés; 2)

Aristide Briand).

Ces textes sont-ils de type :

DESCRIPTIF Q PROBLÉMATIQUE Cl

narratif Q argumentatif Q

explicatif Cl polémique Q

didactique Q

normatif Cl

1 - Si nous supprimons la peine de. mort, si nous faisons cette expérience de désar-mement, au risque de qui serait-elk faite ? Il faut bien le constater : ce sont lespauvres que nous découlerons, ce sont eux qui pâtiront d'abord. Qjioi qu'on fasse,il est bien certain que la police protégera toujours mieux les riches que Ifs pauvres

/.../Cette suppression de la peine de mort sera-t-elle, un ennoblissement de notre civili-sation ? Si quelques-uns sont disposés à U croire, c'est qu'ils désirent mettre, deplus en plus, notre soâété d'accord avec les données que nous fournit Ifi science.Nous écoutons les médecins qui nous disent en regardant le.s assassins : « Ils sontnécessité. Celui-ci tient son crime de. son atavisme, cet autre If tient du milieu

dans lequel il a été plongé >• [... /Pour ma part, je demande que l'on continue à nous dél>arrasser de ces dégradés,de ces dégénérés dans les conditions légales d'aujourd'hui, en tenant compte desindications qui nous sont fournies par les hommes de science compétents, quandils nous disent que celui-ci relève des asiles plutôt que de la punition. Je crois qu'il

y a lieu de recourir à la punition exemplaire.C'est par amour de la santé sociale, que je rote le maintien et l'nftfiliration de lapeine, capitale. En tout cas, qu'il me snit permis de vous dire en terminant, quecette mesure que vous croyez une mesure de générosité, c'est une générosité que

nous ferons aux dépens des autres.

2 - Recherchons si la peine de mort présente les qualités que doit avoir unchâtiment dans une société civilisée. Elle dei'iait être tout à hijots moralisatrice

et intimidante.

LES TEXTES ET LEURS CARACTÉRISTIQUES

Moralisatrice ? H n 'est personne parmi les partisans de la peine de mort qui aitosé soutenir que la peine de mort soit moralisatrice.Elle l'est si peu, que ceux qui en demandent le maintien sont d'accord pour qu 'ellesoit appliquée dans l'obscurité. De même que le meurtre privé se cache par crainte,vous demandez que le meurtre social se cache par honte f . . . ]La peine de mort est-elle du moins exemplaire ? On vous a rappelé comlnen decriminels, au moment de l'exécution, ont avoué avoir assisté antérieurement à detels spectacles.Je suis arrivé au point If plus intéressant du problème : la peine de, mortexercerait-elle une intimidation sur les malfaiteurs ? Si la peine de mort a unepuissance d'intimidation, sa suppression doit amener immédiatement unerecrudescence des crimes ; si cette, recrudescence ne. se manifeste pas, c'est quel'abolition demeure sans effet.Or, c'est la conclusion à laquelle, on aboutit quand on considère les différents paysoù la peine de mort a été supprimée, et quand on ne prend pas les chiffres d'uneannée pour les opposer arlntrairement à ceux d'une autre année, quand on prenddes périodes suffisamment longues, des périodes de dix ans, par exemple [...].

O Journal officiel

6.3 - Ce texte est-il de type :

DESCRIPTIF G PROBLÉMATIQUE Q

narratif CJ argumentatif Q

explicatif CJ polémique Cl

didactique CJ

normatif CJ

L'automobile est un excellent et agréable, engin de transport rapide d'un point aun autre, mais un détestable moyen d'investigation. Jamais on n'a tant voyagé,et jamais aussi fe.s gens n 'ont moins profité de leurs voyages. Ces malheureux, quiavalent pêle-mêle des kilomètres et des sauces sophistiquées dans des aubergesd'opéra-comique, traversent la moitié de la Erancf, six provinces, trente villes,quatre cents villages, vingt siècles d'histoire, de coutume, de vieux1 terroir, definesse paysanne, sans en retirer d'autres souvenirs que ceux d'un embarrasgastrique et de trois fmeux crevés.

Page 30: Analyse Documentaire_suzanne Waller

LIRE ET COMPRENDRE LES TEXTES ET LEURS CARACTÉRISTIQUES

C'est presque une banalité de répéter que la seule manière adéquate de visitercertaines régions, c'est de les parcourir à pied. D'abord parce que la marche enelle-même aiguise à la fois l'appétit et l'intellect autrement que les coussins d'uneautomobile, et plact naturellement le. voyageur dans un état de réceptivité quimultiplie l'intérêt de. tout ce qu'il rencontre.Ensuite, parce que ce moyen-là est lent, il exige un effort personnel, permetd'entrer en contact avec, les choses et les gens d'une manière progressive et. intime.Et ceciest encore plus agréable qu'ailleurs en montagne, où l'extrême diversité desaspects, l'abondance des détails pittoresques ou humains sont dignes d'attirer àchaque instant l'attention de l'observateur.À pied, un arbre est un arbre, avec sa peau rugueuse, une fourmillière peut-êtreentre deux racines et un écureuil charbonnier dans les branches. En voiture, c'estune ombre parmi des centaines d'ombres toutes pareilles, quelque chose qui nemérite même pas un regard. A pied, tout prend un sens, tout chante son petitcouplet. Chaque brin d'herbe a son criquet ; une montée monte. Une source, c'estune aubaine délicieuse. Un faucheur dans un pré, c'est un homme et non unvague accessoire à peine entrevu, fs. monde se subdivise à l'infini, révêle à chaqueseconde des visages dont on ne soupçonnait même pas l'existence, éveille l'intérêtpar cent détails inattendus. Mais la vitesse unifie tout...

(Extrait de Samivel. — l'Amateur d'abîmes. — Stock, 1981).© Éditions Stock

6.4 - Appliquez la même grille au texte « Les effets violents de latélévision » (p. 227). Commentaires en page 269.

CARACTÈRES GÉNÉRAL ET SPÉCIFIQUE

Une dernière phase d'analyse d'un texte en distingue le caractèregénéral, spécifique et temporel.

Texte de type générai

Un tel écrit traite d'un sujet dans sa globalité, hors du temps ou del'espace. La situation décrite est large, « relativement universelle », etpeut être comprise sans qu'il soit besoin de connaître la personnalité del'auteur ou les circonstances qui l'ont conduit à écrire. Il s'agit le plussouvent d'un texte de type descriptif n'exigeant pas de l'analyste uneconnaissance préalable du sujet. Par exemple, dans les Jeux et lesHommes, Roger Caillois traite du jeu sous toutes ses formes et tous sesaspects ; le jeu est ici thème d'étude exclusif.

Texte de type spécifique

11 traite d'un sujet dans des circonstances qui exigent de le situer dansun contexte historique, économique, culturel, etc. pour en comprendretoute la portée. L'analyste doit tenir compte de la personnalité del'auteur et des références éventuelles à la situation particulière décrite.Par exemple, dans un grand nombre de ses ouvrages sur le développe-ment psychologique des enfants, Jean Piaget traite du jeu comme aideà ce développement ; dans cet esprit, il expose quels jeux sont favora-bles à quels âges et pour quels développements. Notons que le contenudu texte peut traiter du passé, du présent, se projeter dans le futur oucouvrir l 'un, l'autre ou les trois ensemble.

L'étude du document (contenant ou signifiant) et du texte (contenu ousignifié) permet à l'analyste d'identifier l'environnement culturel de cequ'il doit traiter. Avant de résumer et/ou d'indexer, l'analyste peuts'interroger sur :

- la place propre de l'auteur dans la façon de transmettre l'infor-mation (ou contenu) ;

- la place propre du lecteur dans la façon de recevoir, comprendre etréduire l'informât ion.

Page 31: Analyse Documentaire_suzanne Waller

LIRE ET COMPRENDRE

Les textes et leur contenu

Après avoir identifié la forme du document et l'intention de sonauteur, l'analyste doit s'attacher à la compréhension du texte et au

public auquel il est destiné.

LA COMPRÉHENSION DU CONTENU

La question a déjà été posée (cf. p. 27-28) : que sait-on sur le sujet '?L'aide d'un spécialiste, nécessaire au début, doit permettre d'élargir laquestion à : «Que pouvons-nous connaître» quand nous lisons4?Quand il décrit la posture du « lecteur modèle », Umberto Eco parle des« mouvement coopératifs actifs et conscients de la part du lecteur »,coopératifs car « un texte est un mécanisme paresseux qui vit sur laplus-value de sens qui y est introduite par le destinataire [...] un texteveut que quelqu'un l'aide à fonctionner [...] un texte est émis pour quel-qu'un capable de l'actualiser' ». Dans sa première lecture, dans sa ren-contre avec le texte, l'analyste met en activité non seulement la struc-ture de ses connaissances acquises, mais aussi tout un processus psy-chologique de perception, de mémorisation, d'inférenceh.

PerceptionLe repérage visuel, première appréhension d'un texte, induit la per-

ception d'une forme, mais aussi de signes, et l'analyste, comme tout bonlecteur professionnel, reconnaît dans un même temps les « signesconnus dans les signes vus7 ». Cette reconnaissance s'appuie sur unesorte de banque de données personnelle, ce qu'Eco appelle « sa propreencyclopédie », variable selon les cultures et les expériences.

MémoiresCette banque de données mentale, comme toutes les autres, est

activée au moment où l'on en a besoin, en faisant appel à la mémoire.. Mais s'agit-il véritablement de mémoire ? Ne s'agit-il pas de remémo-

LES TEXTES ET LEUR CONTENU

ration ? En effet, le rôle du documentaliste n'est pas d'accumuler desconnaissances pour lui-même, mais de les reconnaître, de les sélection-ner et de les mettre en forme pour autrui.

La mémoire du lecteur spécialiste (chercheur, ingénieur, etc.) sélec-tionne les savoirs dans un certain domaine de recherche ou d'intérêt, lescompare aux acquis, les assimile ou les rejette. C'est une capitalisationen vue d'un projet personnel qui fait appel à une mémoire longue (ou àlong terme) et approfondie. Celle-ci constitue un stock de connaissan-ces de longue durée, alimenté et renforcé régulièrement.

La mémoire du documentaliste est d'une autre nature. La sélectiondes savoirs s'effectue en vue d'ajouter de nouvelles références à unensemble documentaire organisé. C'est une mémoire de travail, courtemais étendue, enfouie après chaque traitement, mais réactivée parchaque nouveau texte. Avec l'expérience, la mémoire du documenta-liste devient souvent une mémoire longue.

Inférence

La perception et l'activation de la mémoire entraînent l'inférence, lesrelations entre savoirs, la mise en route d'une connaissance documen-taire de plus en plus organisée, consciente, construite, à l'opposé d'une« culture mosaïque : morcellement des connaissances qui, privées deleur cadre, ne permet pas de caler les éléments de la mosaïque entreeux, de reconstruire celle-ci, c'est-à-dire d'établir des relations entre les

choses sues* ».

La compréhension des textes repose donc sur un processus intel-lectuel complexe, éclairé par les sciences cognitives. Isabelle Mondayexplique bien comment les schémas intellectuels que chacun se fabri-que « font office de structure de la mémoire humaine. Ils permettentaux individus d'encoder sous une forme ou une autre la* réalité lesentourant et, par le fait même, d'emmagasiner l'information perçue.

Page 32: Analyse Documentaire_suzanne Waller

LIRE ET COMPRENDRE

Aussi la somme de connaissances de chaque individu résulte-t-elle decet encodage [...] continuellement stimulé par son environnement,l ' individu incorpore à ses schémas personnels l'information perçue

dans son milieu ' ».

Le champ de la compréhension est donc plus large que le savoir brut.Au fur et à mesure que l'expérience professionnelle s'intensifie ets'approfondit, l'analyste augmente sa capacité de perception, de mémo-risation et d'infércnce. Il devient, de ce fait, plus à même d'anticiper, depondérer, de relativiser l'importance de tel ou tel texte, de repérer lesvraies innovations, de sélectionner l'information utile.

L'USAGE DU CONTENU

Ce paragraphe pourrait tout aussi bien s'intituler « Essai de défini t ion

de l'information documentaire »...

... « Apprendre à lire, c'est apprendre à comparer, extrapoler, anticiper,induire, déduire, argumenter [...] il s'agit bien, lorsque je lis un texte, desavoir ce que j'en lis.I0 » « Ce que j'en lis » ou « Ce que je vais tirer decette lecture en vue de son usage », ce qui — dans le texte — peut êtreconsidéré comme information, et comme information documentaire.

Le mot « information » fait partie du langage courant et le grandpublic assimile le plus souvent « les informations » aux journaux

télévisés.

Mais on parle aussi des « industries de l'information », de la « sociétéde l ' information», du «coût de l ' information» sans oublier la« désinformation », la « surinformation » ou la « sous-information »...Ce concept a été et sera étudié et approfondi dans des cadres plusélaborés que celui de ce manuel.

On peut ici, toutefois, tenter de définir ce que pourrait précisémentêtre l 'information documentaire dans le contexte d'une dé f i n i t i on del'analyse documentaire, et en quoi cette information documentairedifférerait d'autres types d'informations".

LES TEXTES ET LEUR CONTENU

L'histoire d'un terme en éclaire la teneur : né du latin, l'ancien fran-çais enformer signifie à la fois « donner une forme à » et « instruirede ». Entre le xne et le xvr siècle, le mot véhicule les deux sens :« façonner, donner une forme » et, au figuré, « représenter idéalement,former dans l'esprit, se faire une idée de ».

Si, au fil du temps, le premier sens a été oublié, le second trouve sonessor d'abord dans le vocabulaire juridique : l ' information est « enquêtejudiciaire ». « renseignement obtenu de quelqu'un ». De cette dernièredéfinition, on arrive à « renseignement obtenu sur quelqu'un », « actionde prendre des renseignements... que l'on porte à la connaissance dupublic ». d'où l'introduction du terme dans le monde de la presse.

Puis, en anglais, information donne naissance à « élément ou systèmepouvant être transmis par un signal ou une combinaison de signaux »,définition composante de la théorie de l 'information puis de l'infor-matique et, par là, résurgence de la « forme » '•.

Le terme est employé dans de nombreux champs disciplinaires(systémique, cybernétique, écologie, biologie, génétique...) et porte,chaque fois, l'ambiguïté native de la forme et de l'idée. Peut-on les dis-socier ?

Les chercheurs de la Gestaltlheorie rappellent que tout signeperceptif est subordonné à une structure, une forme. La linguistique aformalisé le signifiant (forme) et le signifié (idée). Par exemple, le mot« chaîne » évoque de mult iples représentations (collier, bracelet, maisaussi forçat, arpentage ou amarrage...), alors que son seul et uniquesignifiant est formé d'une « chaîne » de caractères !

Si l'on tenle d'identifier la spécificité de l'information documentaire.c'est certainement en insistant sur l'aspect du sens, de l'idée, en tant quesignification, élément de connaissance.

Pour l 'information documentaire, le signifié est plus important que lesignifiant (à la différence de l'informatique), l'énoncé est porteur desens et non seulement de codes (à la différence de la cybernétique).L'élément de connaissance n'est pas détérioré par le temps (à ladifférence du journalisme) et n'a pas pour principal objectif d'apporter

Page 33: Analyse Documentaire_suzanne Waller

LIRE ET COMPRENDRE

une preuve (à la différence du droit). Enfin, l'information documen-taire, en devenant virtuelle, prend une forme numérique ou optique etse dissocie de la contingence du document classique (à la différencedes bibliothèques et des archives, lieux de conservation et de traitement

des objets formels).

Les énoncés porteurs de sens sont-ils tous de l'ordre de l'informationdocumentaire ? et de quel sens s'agit-il ? Rien n'est mieux partagé quele sens commun, ou le bon sens, né d'une information perçue à partird'une réalité immédiate et sensible, subjectivement jugée.

Ainsi l'opinion publique, renforcée par des médias aux investigationslimitées, verse des larmes sur la destruction des forêts d'Amazonie,« poumons de la terre », et prédit l'asphyxie lente mais sûre de notrepauvre planète. Or, en l'état des connaissances actuelles, « des forêtscomme l'Amazonie ou la forêt tropicale africaine, en réalité, ne pro-duisent pas d'oxygène [à l'ensemble de la planète], mais se contententde le recycler, en même temps que le carbone. Prétendre qu'ellesfournissent de l'oxygène consiste à confondre la forêt avec son feuillageen ignorant son sol réducteur"». Cet exemple illustre la différenceentre une pseudo-information commune véhiculée sans vérification, etla véritable connaissance justifiée par des scientifiques qui y engagent

leur responsabilité.

La connaissance sensible manque, en effet, d'esprit critique et devérification. Marie-France Blanquet inclut, dans ce type de connais-sance, les informations publicitaires et journalistiques ainsi que lespseudo-sciences, en les opposant aux informations relevant de laconnaissance scientifique, qui s'applique à « réduire le sensible à

l'intelligible M ».

En développant avec clarté les trois genres de connaissance -sensible, scientifique et philosophique (tels que les a distinguésSpinoza) —, Blanquet souligne la « matière première fort complexe »sur laquelle les documentalistes ont à travailler. Mais elle distinguebien la connaissance implicite -— « non énoncée [...] née de l'affec-tivité, de la croyance, de l'expérience ou de l ' intuit ion » -- des« connaissances explicitées et inscrites », rcconnaissables par « la

LES TEXTES ET LEUR CONTENU

forme, la nature, le volume »15. Elle fait la différence avec la connais-sance explicite qui s'applique à l'information scientifique et techniquevérifiée mais qui n'est pas toujours enregistrée, « inscrite », formelle,comme l'est la science de la documentation.

Peut-on mesurer l'information documentaire en fonction de sonimpact ou de sa valeur ?

Dans une excellente étude, Michel J. Menou propose un intéressantmodèle conceptuel de mesure et d'évaluation de l'usage de l'infor-mation. Mais c'est la façon dont il cherche à en élargir le concept quinous intéresse ici. Il s'appuie sur les cinq degrés de la pyramide deMaslow "' concernant les besoins essentiels de l'être humain, en mettanten regard les différents niveaux d'intérêt de l'information, de la simplereproduction à l'aide qu'elle apporte à chacun, puis aux possibilités declarification et d'enrichissement qu'elle propose dans le cadre social ouindiv idue l , enf in à la possibilité pour toute personne d'écrire, deproduire de l'information et d'en tirer un sentiment de satisfaction etd'accomplissement. Pour lui, l 'information est latente, repérable parceux qui en ont vraiment besoin, et sa valeur documentaire est fonctionde la façon dont on en tirera du sens : « A message recognized only atthé semantic and syntactics levels wil! hâve no, or limited, e/Jéct.IT »C'est bien le sens qui constitue le pivot de son intérêt, mais le sensutilisable et utilisé.

La sélection des textes à traiter repose donc sur l'identification d'uneinformation documentaire vérifiée, analysée, et mémorisée en vue de sadiffusion. Cette information ne peut être isolée, mais située dans unensemble d'autres informations de même type, traitées de façoncohérente ; elle n'a d'intérêt que porteuse de sens en vue de répondreà des besoins déclarés.

Comment, alors, à partir d'une « matière première complexe »,chercher un sens repérable par chaque individu, en fonction de sesbesoins propres ? Considérée ainsi, l'analyse documentaire revêt tousles caractères d'une gageure. Chaque analyste est encouragea soutenirce défi, à l'aide de quelques méthodes et techniques, mais surtout grâceà ses propres qualités de réflexion.

Page 34: Analyse Documentaire_suzanne Waller

.

LIRE ET COMPRENDRE

Comment lire ?

Selon l'expression consacrée, l'analyste est invité à « survoler » lecontenu d'un texte. Mais survoler ne signifie pas jeter un coup d'œilrapide et aléatoire. La lecture documentaire exige au contraire qu'on« lise » vraiment certains passages du texte choisis en connaissance decause, puisque l'on en survole ensuite l'ensemble île façon consciente.

Chaque support requiert un mode de lecture différent : on n'analysepas de la même façon l'article d'une revue scientifique et unemonographie. Toutefois, il existe certaines constantes qu'il est utile derappeler, dont le but est la recherche des idées directrices.

Comment définir l'idée principale ou directrice ? Isabelle Mondaypose cette question dès le début de son article déjà cité et elle y réponden insistant sur l'importance des processus cognitifs. Ceux-ci ont étésuccinctement exposés au paragraphe précédent. Il s'agit maintenant depropositions beaucoup plus concrètes, mais qui n'ont de valeur queliées aux réflexions précédentes.

LECTURE DOCUMENTAIRE D'UN ARTICLE

La lecture documentaire d'un article (document le plus souventanalysé en documentation) exige, en premier lieu, d'observer lecontenant (cf. p. 38-44).

Cette pratique, qui peut sembler rébarbative au début, devientprogressivement naturelle et entre dans la méthode d'analyse sansmême qu'on en soit conscient, à la manière de Monsieur Jourdain quis'émerveillait de parler en prose.

Puis on feuillette l'ensemble du texte pour évaluer sa constructiontypographique, ce qui permet de déceler immédiatement la présenceéventuelle d'un résumé d'auteur, de sous-titres ou intertitres, de motssoulignés, de toutes sortes d'accrochés qui attirent l'œil.

COMMENT LIRE ?

Cette pratique permet, en outre, à l'analyste de mesurer saconnaissance de la littérature d'un domaine, en repérant très vite quetelle revue développe une politique éditoriale pertinente tandis que telleautre cultive une certaine fantaisie. On découvre alors que certainesrevues d'apparence rébarbative sont beaucoup plus faciles à traiter,grâce à leur rigueur, que d'autres, au premier abord plus séduisantes.

Le résumé d'auteur

Le résumé d'auteur doit être lu s'il existe, mais il ne saurait remplacerle résumé documentaire (cf. p. 125). Il sert de point de départ en expo-sant le sujet de l'article, selon son auteur. L'analyste commence ainsi àconstruire une trame de contenu, d'autant plus qu'il est, normalement,capable de distinguer s'il s'agit d'un texte de type descriptif, probléma-tique ou théorique.

Le chapeau

Dans la presse et, de plus en plus, dans les revues scientifiques, onpeut trouver un chapeau présentant le contenu des articles jugés impor-tants. Dans certaines revues, ce chapeau suffit à résumer l'article.

Les intertitres

Ayant ainsi pris connaissance du ou des sujets exposés par l'auteur,l'analyste en vérifie la conformité avec les intertitres. Ceux-ci peuventservir de guide efficace ou, au contraire, mettre en vedette des élémentsinsignifiants mais accrocheurs (attention aux articles de presse !). Leurintérêt est donc aléatoire.

Les mots en exergue

Les mots soulignés ou en italique sont assimilables aux intertitres : ilspeuvent indiquer le sujet principal d'un paragraphe, se révélant trèsutiles sur ce plan, mais ils peuvent également valoriser une opinion ouun aspect soulignés par l'auteur, et dans ce cas détourner l'analyste dela recherche de l'information principale.

Page 35: Analyse Documentaire_suzanne Waller

LIRE ET COMPRENDRE

Les paragraphes de tête

La présence de ces éléments ne dispense cependant pas de lire lestrois premiers paragraphes, le dernier, et éventuellement l'avant-dernierparagraphe de l'article.

Les paragraphes d'introduction doivent normalement présenter, dansl'ordre ou le désordre :

- les idées directrices qui seront développées ainsi que les intentions,les objectifs de l'auteur ;

- le contexte dans lequel ces idées sont présentées ;- quelques exemples pour les illustrer (surtout dans la presse).

Si l'analyste ne parvient pas à repérer les points importants d'un texteà la fin du troisième paragraphe, il est probable que l'ensemble del'article manque de corps et de rigueur, et qu'il témoigne d'un phénomènecouramment appelé «délayage», entraînant une perte d'informationpour le lecteur, et une perte de temps pour l'analyste. Un article préala-blement sélectionné en raison de son titre prometteur doit, à ce moment-là, être banni du traitement. Cependant, il peut exister certaines excep-tions, en particulier si l'article en question a été écrit par un membre del'entreprise ; cela ne devra pas, pour autant, faire oublier à l'analyste que,en l'occurrence, le champ « auteur » sera le plus interrogé, et que leschamps « résumé » et « indexation » peuvent être simplifiés.

Les paragraphes de fin

Les derniers paragraphes, ou paragraphes de conclusion, font engénéral écho à ceux de l'introduction, mais ils ont été enrichis parl'apport de l'article, ce qui fait dire à certains qu'il est préférable de lirela conclusion avant l'introduction. Malheureusement, les conclusionssont souvent rapides et pleines de tous les regrets de l'auteur : on ytrouve fréquemment les idées « à venir » et non pas celles qui ont étéexposées.

C'est pourquoi la conclusion ne représente pas obligatoirement cequ'il faut lire absolument, alors que l'introduction permet à l'analyste deposer des « hypothèses de lecture » (cf. p. 68-69).

COMMENT LIRE ?

Exercice 7 - Lecture documentaire d'un article

Pour les deux textes proposés, la consigne est la même : lisez defaçon documentaire (voir les deux chapitres précédents) et repérezles idées directrices des trois premiers paragraphes.

7.1 - Texte : « Les effets violents de la télévision » (cf. p. 227).

7.2 - Texte : « Les droits d'auteur des œuvres numériques ». -Pour la Science, septembre 1996, n° 227.

Depuis 1926, des millions de lecteurs ont adoré l'histoire de Winnie l'Ourson etde ses amis. Aussi n'est-il pas surprenant que James Milne (enseignant del'Université de. l'iowa, sans relation avec A. Milne qui créa ces histoires) aitvmtlu mettre Winnie l'Ourson sur le Web, le réseau d'information mondialvéhiculé par Internet : dans un ordinateur relié au réseau, il plaça quelquesfichiers de texte et d'image, permettant ainsi à tous Ifs enfants équipés d'ordi-nateur de découvrir ces charmantes histoires. En avril 1995, peu de temps aprèsla création de ce. site weh, J. Milne reçut une lettre polie de la société E. Du/ton,qui détient les droits d'exploitation du texte et des images de Winnie l'Ourson ; ily était indiqué que, smis peine de poursuites judiciaires, If site devait être fermé.

Vers la même éf>oque, un livre narrant la vie privée de François Mitterrand étaitinterdit de diffusion en France. Il réapparut sur Internet peu de, temps après, sansque personne puisse s'opposer à sa dissémination numérique.

Comment la loi doit-elle réglementer If, fonctionnement du réseau ? Certainsfanatiques du réseau Internet prônent une. liberté totale de l'information, maisil'autres pionniers du réseau soutiennent que son avenir passe par le contrôle etla facturation de chaque information qui y transite. Comment les institutionslégales et culturelles réagiront-elles ? ]f.s lecteurs de demain seront-ils encoreautorisés à feuilleter les livres numériques sur Ifs réseaux informatiques comme ilsle font pour les livres et magazines classiques dans les librairies ? Pourront-ilsemprunter des ouwages dans des bibliothèques virtuelles ? lœs auteurs, leséditeurs, les bibliothèques et les Etats débattent encore ces questions. t

6 Pour la science

Voir commentaires en pages 270-271.

Page 36: Analyse Documentaire_suzanne Waller

'

LIRE ET COMPRENDRE

LECTURE DOCUMENTAIRE D'UNE MONOGRAPHIE

La lecture documentaire d'une monographie est plus aisée. Aprèsavoir pris connaissance du titre (et du sous-titre, quelquefois plus expli-cite), du nom du ou des auteurs, de la date (est-ce une nouvelle édi-tion ?), de l'éventuelle collection, d'une mention éventuelle de traduc-tion, on dispose presque toujours d'une table des matières ou d'un som-maire qui présente le plan de l'ouvrage, sa colonne vertébrale en quel-que sorte, sur laquelle repose toujours le travail de repérage de l'infor-mation utile (cf. chapitre iv, p. 73-93). La lecture de l'introduction doitconfirmer l'organisation du sommaire. Les notices de quatrième decouverture ont un objectif commercial ; qu'elles soient lues attentive-ment ou survolées n'a pas de rapport avec leur crédibilité.

Il peut être intéressant de sonder des passages de deux ou trois cha-pitres. Si l'on connaît le sujet, on peut évaluer la qualité de l'exposé ; sion ne le connaît pas, on peut juger au moins la clarté de la prèsentalion,la précision du vocabulaire et le degré de compréhcnsibilité.

Toutes les monographies, cependant, ne présentent pas de table desmatières explicite. Une lecture plus approfondie devient alors irnpé-rative et doit être incluse dans l'organisation du travail et la gestion dutemps. Cette lecture presque complète sera de moins en moins néces-saire à mesure qu'augmentera l'expérience de l'analyste. Mais les débu-tants doivent l'accepter, et même la considérer comme un investisse-ment pour le futur. Les hypothèses de lecture se révèlent alors trèsprécieuses.

LES HYPOTHÈSES DB LECTURE

II y a hypothèses de lecture quand un texte est lu en fonction desréponses qu'il peut apporter... car un texte ne répond que si on l'inter-roge. C'est le repérage visuel (mise en pages, ponctuation), puis l'étudeprogressive du contenu (catégorie d'intérêt, types de textes, recherchedes idées directrices) qui apportent à l'analyste ces hypothèses sur le

COMMENT LIRE ?

sens général développé par l'auteur et sur les informations utiles à pré-senter dans le résumé ou l'indexation. Le survol du texte est donc sou-tenu par ces premières impressions et a pour objectif de les confirmerou de les infirmer. Dans ce dernier cas, la recherche des idées directri-ces n'a pas été bien menée, ou le texte est mal construit, ce qui ne plaidepas en sa faveur.

Le survol est donc une activité dynamique : l'analyste est sur unepiste et il doit en contrôler la vraisemblance ; il part d'hypothèses et nond'affirmations. 11 va interroger le texte pour obtenir des réponses, ce quiest la meilleure façon de l'exploiter. Chaque texte est une découverte ;chaque lecture est singulière ; chaque analyse correspond à un objectif.Celui qui aborde tous les textes de la même manière, sans tenir comptede leur spécificité ou des réponses particulières qu'ils peuvent offrir, seconduit tel le client pressé qui consomme tous les plats offerts par unrestaurateur comme un même brouet sans goût. L'analysie doit semettre dans la situation de l'utilisateur final, et c'est bien ce qu'on attendde lui car un texte est un réservoir de réponses, et c'est dans cet espritqu'il doit être lu.

NOTtS

1. Source : (30], p. 285.

2. Préface de Louis Armand pour [82].

3. Toutes ces définitions doivent beaucoup à quelques manuels de languefrançaise, parmi lesquels : [67], [68], [48],

4. Source : [14]. p. 23 et suiv.

5. Source : [33], p. 63-64. « Le lecteur modèle », chapitre Ml de cel ouvrage,mérite une lecture approfondie.

6. Source : [27].

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LIRE ET COMPRENDRE

"

7. Source : [72],

8. Source : [14], p. 53.

9. Source : [64], p. 57.

10. Source : [79], p. 65-66.

11. Voir en particulier [41], p. 13 et suiv.

12. Source : [31].

13. Source : [36], p. 200. Les mots sont en italique dans le texte original.

14. Source : [14], p. 32 et suiv.

15. Source : [14], p. 48 et suiv.

16. Source : [60].

17. Source: [62], p. 482.

ANNEXE PÉDAGOGIQUE

Exercice 8 - Lecture documentaire d'une monographie

Pour vous exercer à lire de façon documentaire une mono-graphie, comparez les ensembles présentés en pages 233-245,extraits de :

- Gros temps sur la planète (Jean-Claude Duplessis, Pierre Morel.- Éditions Odile Jacob, 1990) ;-Le grand remue-ménage : la crise de la famille (Evelyne Sullerot.

-Fayard, 1997);- La Méditerranée : l'espace et l'histoire (sous la dir. de Fernand

Braudel. — Flammarion, 1995).

Ces trois extraits correspondent à peu près au survol des livreseux-mêmes (page de titre, sommaire, avant-propos ou introduc-tion). Il vous est demandé de :

* Comparer ces extraits.

• Formuler des hypothèses de contenu à partir des élémentsfournis.

• Faire cet exercice en 6 minutes maximum.

• Choisir la monographie qui semblerait la plus facile à analyser.

Commentaires en pages 271-273.

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CHAPITRE IVLA LECTURE DOCUMENTAIRE :

STRUCTURE ET VOCABULAIRE

La lecture documentaire — survol et compréhension — permet deposer des hypothèses de contenu. Le lecteur professionnel qu'estl'analyste est prêt à interroger le texte comme il le ferait d'une personne.Pour approfondir l'étude, il va s'aider de la construction grammaticale.Celle-ci est liée à des modalités propres à certains textes (juridiques,médicaux, etc.) ; elle est matérialisée par des mots de liaison, véritablesindicateurs du déroulement du discours, permettant de repérer laconstruction logique (dialectique, déductive, inductive), préalable à larecherche du plan. L'énoncé utilise un vocabulaire représentatif ducontenu, les verbes soutenant l'action et les substantifs les thèmes.

Cette interrogation du texte poursuit également un but défini : en quoice contenu, ces thèmes vont-ils être utiles aux usagers ? Peuvent-ilsenrichir un sujet, conforter une opinion, apporter une opinion contrairepar la confrontation de différents points de vue ? Le texte inutile auraitdéjà été rejeté, mais ce texte sélectionné, quel est son véritable intérêt ?

Trouver l'information utile : la recherche d'un plan

Un premier survol a permis de repérer le type de texte en le situantdans un environnement documentaire connu, c'est-à-dire dont ledomaine, ou la notoriété de l'auteur, de la revue, de la collection, etc.,assurent un intérêt réel pour son utilisation future.

La recherche de l'information utile dans un texte s'appuie d'une partsur les mots, fa formulation des idées, c'est-à-dire l'étude du vocabu-laire employé, d'autre part sur les phrases, les paragraphes, Vorganisa-tion des idées, c'est-à-dire la structuration, le plan de l'article. En fait,les deux opérations mentales d'analyse (identification des mots) et desynthèse (repérage du plan) sont exécutées de pair, dans un vaîet-vientincessant entre les deux lobes du cerveau. Quel que soit le texte,l'opération se déroule en trois temps.

Page 39: Analyse Documentaire_suzanne Waller

STRUCTURE ET VOCABULAIRE

1. Lire, observer, comprendre :- lire l'introduction (normalement clé du texte, dans la mesure où elle

annonce les points essentiels qui seront développes) ;- à partir de cette lecture, identifier les idées directrices et poser des

hypothèses ;- vérifier ces hypothèses en observant l'organisation typographique

du texte, puis par un survol rapide du contenu.

2. Repérer l'organisation des idées directrices :- chaque idée directrice repérée est considérée comme une unité

d'information ou un « item » ;- chaque item fait partie d'un champ lexical à identifier grâce à des

mots ou phrases clés (vocabulaire) ;- chaque item est articulé au suivant grâce à des mots de liaison ou à

des tournures de phrase annonciatrices du déroulement logique (plan).

3. Préparer l'écriture documentaire :- le texte primaire imprimé étant destiné à d'autres lecteurs, il ne doit

jamais être surchargé d'aucun signe ;- selon les types de textes, les choix personnels, ou encore l'expé-

rience acquise, on peut élaborer des grilles de lecture, prendre desnotes, souligner les passages importants au crayon à mine de plomb, enn'oubliant pas d'effacer toute marque visible à la fin du travail.

A l'issue de la deuxième phase, l'analyste est en mesure de maîtriserles « structures sémantiques du texte » ' :

- la micro-structure, ou le niveau primaire du discours ;- les liens lexicaux entre les termes ;- la cohérence sémantique assurée par les mots d'articulation (cf. p. 84) ;- la progression thématique, ou développement logique du discours ;- enfin, la macro-structure ou organisation générale du texte.

Pinto-Molîna3 parle également des structures du texte et en distinguetrois niveaux :

- la micro-structure, ou structure de surface, qui est effectivement letexte primaire imprimé ;

- la macro-structure, ou structure profonde, ce qu'elle appelle la« sève » du texte, après avoir comparé celui-ci à un arbre ;

L'ÉLABORATION DE GRILLES DE LECTURE

- la superstructure, ou structure rhétorique : « type of conventionalproduction scheme to which texf is adapied », ce qui nous renvoie d'unepart à un essai de taxonomie des textes (cf. p. 49-57), et d'autre part àl'idée que ces textes sont construits selon des schémas, ce que Mondayappelle des « grammaires du récit »,

11 est vrai que la séquence type d'une recherche expérimentale vasuivre à peu près le schéma suivant : sujet, objectifs, méthodologie.expérimentation, hypothèses, résultats, conclusion... Selon les types detextes et les champs disciplinaires, on peut repérer des « grammaires durécit » en chimie, en pharmacie, en médecine, en statistiques, en écono-mie, par exemple. Mais chaque domaine peut se prévaloir de schémasclassiques, ou au contraire toujours renouvelés, ce qui est surtout le casdans les sciences humaines.

H peut être intéressant pour les unités documentaires très spécialiséesd'élaborer des grilles de lecture adaptées à leur type d'informationdominant. Pour l'étudiant, il est recommandé de commencer par desgrilles de lecture standard.

L'élaboration de grilles de lecture

L'analyste débutant doit pouvoir s'aider de quelques outils qui facili-teront sa démarche. Au fur et à mesure qu'il acquiert de l'expérience, ilpourra soit les abandonner, soit les modifier pour son usage propre,selon son champ disciplinaire, la typologie des documents et des infor-mations à traiter, les produits à fournir, les besoins à couvrir.

Les trois grilles ci-après sont chacune suivies d'un exemple per-mettant une claire visualisation de leur principe. Les textes en questionont été choisis car ils ont l'avantage d'être courts et faciles à lire ; ilssont donc propices à l'illustration.

Toutefois, on ne traite jamais de façon aussi approfondie des articlesde ce niveau parce qu'ils n'ont pas vocation à être conservés, sauf dans

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STRUCTURE ET VOCABULAIREL'ÉLABORATION DE GRILLES DE LECTURE

des services de documentation de presse dont les politiques documen-taires diffèrent des services de documentation à vocation scientifique.

GRILLE DE LECTURE POUR UN TEXTE DESCRIPTIF{INSPIRÉE DE [24])

La structuration d'un texte descriptif est généralement la plus facile àrepérer. L'analyste relève les idées directrices (ou items principaux) aufur et à mesure de leur apparition dans le texte. Si l'introduction a faitapparaître deux items, on fait l'hypothèse de deux têtes de chapitre. Lagrille de lecture correspondante est présentée ci-contre.

L'introduction

L'introduction permet d'identifier les unités d'information, ou items,qui seront soumis à divers enrichissements :

- exposition-formulation : chaque item est formulé et représenteune partie des idées qu'exposé l'auteur ; chacun est lié au précédent etau suivant dans l'enchaînement du plan sous-jacent ;

reformulation : tout item important est répété sous une autreforme. La redondance est un signal donné par l'auteur ;

- complément d'information : tout item peut être complété par dessous-items dépendants dont le sens est lié à celui de l'item principal (cf.hiérarchisation des idées, notions, sous-notions, etc.) ;

illustration de l'information : tout item peut être illustré par descitations, expériences, preuves, exemples, schémas, images, anecdo-tes... (jamais repris dans un résumé, sauf rares exceptions).

La conclusion

La conclusion est, quant à elle, partielle pour chaque item, servantquelquefois de transition, mais complète pour la fin du texte, ayantvaleur de synthèse et d'ouverture grâce aux nouveaux approfondisse-ments apportés par l'auteur au thème.

1.21.21

1" item exposé1" item rejbf mule

- 1" item complété (1" complément)

- - 1er complément du l t f item illustré- \" item complété 12' complément)

2e complément du 1" item, lui-même complété

TRANSITION (souvent un très court paragraphe)concluant le premier item et annonçant le second

2* item exposé2' item reformulé- 2e item complété (1e1 complément)

etc.

Application de celte grille au texte : « Le brevet d'invention ». — LeMonde, mars 1984.

Si le Français a la réputation d'être débrouillard ilest moins sûr qu'il soit véritablement inventif. Eneffet, seuls 25 % des brevets déposés chaque annéeen France appartiennent aux nationaux. LesAllemands déposent chez eux trois fois plus de bre-vets ; les Américains près de six fois plus. Pourtant,le brevet d'invention est une arme déterminante dansla compétition industrielle.

Toute personne physique, l'inventeur, ses héritiers,ses ayants droit, ou toute personne morale légale-ment déclarée, peut déposer un brevet. Mais atten-tion : une idée, même géniale, n'esl pas protégeableen tant que telle si elle ne répond pas à certainesconditions. lit pour qu'une demande aboutisse à unbrevet, i l faut qu'elle décrive très exactement le pro-blème envisage, la solution inventée et les moyensde réalisation technique de celle-ci Qu'est-ce qui estbrevetahle '.' « Ttiute invention ntiinvllc qui implique

INTRODUCTIONcontexte de l'article : siluation quan-

tilative de la France face aux puis-

sances occidentalesimportance du brevet d ' invention

dans la compétition industrielle

ITEM ! - Dépôt d'un brevet

Conipl. 1 . 1 : qui peut déposer ?

Compl- 1.2 : conditions de dépôt

Compl. 1.3 : que peut-on déposer ?

Page 41: Analyse Documentaire_suzanne Waller

-

STRUCTURE ET VOCABULAIRE

une activité inventive par apport à ta technique elqui est susceptible d'application industrielle. » C'estl'INPI (Institm national de la propriété industrielle),organisme de service public placé sous la tutelle duministère de l 'Industrie et de la Recherche, qui apour mission d'enregistrer et d'examiner les deman-des, de délivrer el conserver les brevets.

Les moyens d'information mis à la disposition dupublic par l'INPI ont été considérablement déve-loppés, et c'est à cet organisme qu'il faut s'adresseren priorité pour se procurer le Guide du déposant debrevet, ainsi que tous tes textes législatifs envigueur.

Trois titres permettent de protéger une invention :le brevet d'invention assure une protection de vingtans (renouvelable) à dater du |our du dépôt de lademande, sous réserve du paiement d'une taxeannuelle pour son maintien en vigueur. Dans ce cas,un avis documentaire établi par l ' INPI cite les anté-riorités susceptibles d'affecter la breviabilité de l ' in-vention. Ce document est important : lui seul permetd'apprécier l'opportunité d'effectuer d'autres dépôtsde brevets à l'étranger. On peut néanmoins s'entenir au certificat d 'ut i l i té : la protection, sans avisdocumentaire, ne dîne alors que six ans. Le certifi-cat d'addition rattaché au brevet ou au certificatd'utilité protège un perfectionnement de l'inventionprincipale.

Combien coûte un brevet d'invention français ?2 900 francs de taxes de dépôt el d'établissementd'avis documentaire, auxquels viennent s'ajouter lataxe de délivrance (500 francs) et les taxes annuelles(progressives) pour le maintien du brevet.

Ceux que les formalités relatives à l'obtention dubrevet d'invention rebutent peuvent, recourir à unmandataire professionnel. Les conseils en brevetjouent ce rôle : leur profession est organisée pardécret et ils sont groupés au sein d'une compagnienationale (liste sur demande auprès de l ' INPI).Il faut envisager des honoraires de 3 000 à 5 000francs pour rémunérer l'intervention de ces spécia-listes. Les inventeurs qui nourrissent d'autres ambi-tions peuvent également demander une protectioneuropéenne qui confère à son t i tulaire , dans chacundes pays contractants pour lequel il a été délivré, lesmêmes droits qu'un brevet national délivré dans cepays. L'ANVAR (Agence nationale pour la valorisa-tion de la recherche) vient en aide financière auxinventeurs à condition qu'ils aient pour objectif l'ex-

Compl. 1.4 : où dcpose-t-on ?

1.41 : rôle de l ' INPI

ITEM 2 - Protection d'un brevet

Compl. 2.1 : brevet d'invention

Compl. 2.2 : certificat d 'ut i l i té

Oonipl. 2.3 : certificat d'addition

ITEM 3 - Coût d'un brevet

Compl. 3.1 : taxe de dépôt

Compl. 3.2 : taxe de délivrance

Compl. 3.3 : taxe de maintien

ITEM 4-Aides

Compl. 4.1 : conseils

Compl. 4.2 : protection européenne

(voir aussi ITEM 2)

Compl. 4.3 : aide financière

L'ÉLABORATION DE GRILLES DE LECTURE

ploitalion industrielle ou commerciale de l'inven-tion. Cet organisme agit également comme conseilet permet aux inventeurs et au» peines entreprisesde mieux appréhender les problèmes que soulèvel'exploitation de leurs trouvailles. Ces di f f icul téssont nombreuses... Des fortunes ont certes cléconstruites à partir d'invenlions parfois technique-ment simples, qu'il s'agisse de la fermeture à curseur(4 mill ions de kilomètres produits chaque annéedans le monde) ou de l'attache trombone (produc-tion mondiale : 26 milliards d'unité). Mais les en-thousiasmes impétueux risquent fort d'être déçus :sur cent brevets déposés à l 'INPI, un .seul est réelle-ment exploité.

CONCLUSION

[illustrations]

G Le Monde

GRILLF, DE LECTURE POUR UN TEXTE PROBLÉMATIQUE(INSPIRÉE DE [22])

La grille précédente renvoie aux plans classiques d'organisationlogique du discours, très repérable grâce aux mots d'articulation (cf.p. 84). La plupart des textes descriptifs suivent ce plan sans variantesexcessives, donc applicable au texte problématique en l'assortissant desquestions suivantes :

Quelle est la situation décrite ?

• En quoi est-elle problématique ?Quel(s) est (sont) 1c(s) problème(s) ?

• Y a-t-il recherche des causes, expo-sition des conséquences du (des) pro-blème(s) ?

• Y a-t-il propositions de solutions ?

• Y a-t-il exposition explici te desvaleurs que l'auteur défend face àce(s) problème(s) ?

normalement perceptible dès l ' in-troduction

exposes comme items principaux

selon les cas, à identifier comme :

- compléments d ' informat ion(accompagnés, éventuel lement ,d'illustrations)

- ou comme items principaux(accompagnés de complémentset illustrations)

Page 42: Analyse Documentaire_suzanne Waller

STRUCTURE ET VOCABULAIRE

La dernière question est importante pour éclairer le plus possible lesprises de position, les opinions, les points de vue, toutes les argumenta-tions qui risquent de peser sur la subjectivité de l'analyste. C'est la raisonpour laquelle il est si important d'observer le document dans son ensem-ble et spécialement ses caractéristiques (cf. p. 39-40). Toutes ces mesu-res aident à la distanciation nécessaire. Ci-dessous figure un exemple degrille de lecture appliquée à un texte problématique. Les passages en ita-lique indiquent la correspondance entre les unités d'information, leurscompléments et illustrations.

Les juges des mineurs « dénoncent » le monde des adultes. - LeJournal de Genève, 3 avril 1997.

Dana leur rapport sur l'administration de la jus-lice. André Karlen cl Jean Zermatten. les jugesraUn» des mineurs, sonl formels : « En 1996.nous avons ouvert plus île 1 000 dossiers concer-nant des mineurs. Un chiffre supérieur à la moyennedes affaires suivies depuis la création du Tribunaldes mineurs. » Malgré ce constat, les magistratsenregistrent une .fiabilité du nombre de délax com-mis ce.î cinq dernières années. Par contre, la natureet la gravité des infractions inquiètent la justice.

« Les délinquants deviennent de plus en pluseffrontés et même malveillants, confie AndréKarlen. Autrefois, les jeunes commettaient un vol encachette. Aujourd'hui, ils n'hésitent plus à arracherun sac à main en plein jour. Les cas que noussommes amenés à traiter reflètent l'évolution desjeunes dans nos sociétés modernes. Ce constat nediffère guère d'un canton .suisse à l'autre. »

Les affaires dénoncées restent prioritairement lesinfractions contre le patrimoine et, parmi celles-ci.les vols et dommages à la propriété. Or le rapport, lamodification du Code pénal suisse et la nouvellejurisprudence du Tribunal fédéral oni fixé la pour-suite d'office des vols à l'étalage pour une somme de300 francs. H Quelle signification cela a-t-i l pour lesenfants ? Tout simplement que l'on peut suhtiliserdes objets sans grande valeur, sans risque. Pourtantla somme de (00 francs constitue déjà, pour la plu-part, un montant important », commentent les deuxjuges.

Exposé de la situation

Situation problématique 1

Rcformulation par i l lustration

Complément 1

Développement e( illustration

L'ÉLABORATION DE GRILLES DE LECTURE

Le Tribunal des mineurs enregistre également uneaugmentation îles violations dans le domaine de.sstupéfiants, alors que les dénonciations pour lesinfractions à la législation sur la circulation routièresont en baisse sensible. Pour les magistrats, l'ouver-ture de vitrines où l'on vend le parfait nécessaire dupetit fumeur ne favorise pas !e respect de la loi sur lesstupéfiants. « Certains étals de marchés proposentdes tisanes, des huiles et autres friandises à base can-nabique, alors qu'ailleurs dans certaines campagnes,d'énormes champs de chanvre deviennent accessiblesà tous. Autant de tentations et d'occasions pour lesjeunes qui souhaitent goûter au fruit défendu. Labanalisanon de ces produits sème incontestablementla confusion che7 les enfanls. »

Fin réalité, la difficulté des magistrats réside moinsdans le /ait d'appliquer lu loi. t/u? dans celui îlefaîiv tlisfMrvitrf tfs causes à l'origine de la délin-quance. « Nous nous trouvons de plus en plus face àîles jeunes que l'on qualifie de sauvages, dans lesens qu'ils .se sont élevés pratiquement 'nui seuls,qu'ils n'ont quasiment jamais eu lie règles sociales àrespecter et qu'ils n'ont pas \ubi de frustrations.Cette situation est supportable jusqu'à l'entrée dansl'adolescence. L'enfant sympathique à qui l'on pas-sa» ses caprices devient alors exigeant, menaçant,capable de recourir au chantage, et surtout habile àdéborder les l imites dans tous les domaines. »

Selon les juges, cette évolution provoque des phé-nomènes de rejet familial et de renvm scolaire. Faceà un délit, /c tribunal ne peut plttx .se contenter deiu%vr uniquement l'acte interdît /mi' la lin. '< De plusen plus, nous devons faire en sorte que les condi-tions à l'origine du délit soient modifiées pour que lejeuic délinquant ne réitère pas son acle. Danx nosdécisions, nous devenons ainsi les partenaires de laréinsertion du mineur, avec la famrllc . les institu-tions spécialisées et les éducateurs. Dans cettesociété du lout, et tout de suite, nous avons île plttxen plus de difficulté.'! à jouer ce rôle d'intégra-teurs. »

Complément 2Illustration

Situation problématique 2

Causes23

Conséquences1 , 23

Conclusion

C Le Journal de Genève

EXEMPLE D'UNI- GRILLE DE LECTURE STANDARD

À ces deux grilles de lecture, on peut en ajouter une troisième, plusbanale, plus courante. Elle est basée sur la question à se poser avanttoute analyse : « De quoi s'agit-il dans ce texte » ? Cette grille aide à laprécision des réponses.

Page 43: Analyse Documentaire_suzanne Waller

STRUCTURE ET VOCABULAIRE

Les jeunes néonazis refont surface. — Construire, 16 avril 1997, n° 16.

Les jeunes néonazis refont surface

À Zurich, des skinheads ont terrorisé tout un quartier sans que la policeintervienne. Et l'on craint d'autres manifestations du même type.

- Juerg Ffîschknecht, vous êtes journaliste,politologue, spécialiste de l'extrême-droiteen Suisse. Après les derniers événements deZurich, peut-on s'attendre à une recrudes-cente de ce type de manifestations enSuisse ?- Depuis novembre 1995, les skinheadss'étaient montrés 1res discrets.Aujourd'hui, on a l'impression qu'ils soinen (rain de se réorganiser. Et il est fortprobable qu'ils se manifestent à nouveau.Il ne faut pas oublier que le 20 avril -l 'anniversaire d 'Hi t le r - est une dateimportante pour eux.C'est, par ailleurs, ta première fois qu'ilsont été aussi nombreux, une centaine, àdéfiler dans les rues de Zurich. Certainsvenaient d'Allemagne. Cela montre qu'ilssavent nouer des contacts au niveauinternational.

- Ils ont tabassé des passants, scandé desslogans racistes, mais n'ont pas été inquiétéspar la police. Y a-t-il eu complicité de la part

'I - ~ r -

des forces de l'ordre ?- Certains policiers uni peut-être des.sympailiies d'extrême-droite. Mais o.n doitse garder de généraliser. Dans le casprécis, il y a eu erreur manifeste d'appré-ciation. La polire a failli à sa mission. Une

immédiatement obtempéré.

- Convient-il de prendre ces mouvements ausérieux ?- Politiquement, les skinlicads n'ont guèrerie poids. Ils représentent toutefois un

potentiel de violence qu'il faut prendretrès au sérieux. l-a société .se doit de leurimposer des barrières. Et les forces del'ordre ont, dans cette optique, un rôleimportant à jouer.

- Le débat actuel sur l'or nazi et les fondsjuifs favorise-t-il l'émergence de cesmouvements racistes?- Ce genre de débat réveille dessent iments racistes et antisémites quiétaient jusqu'ici latents, cachés. Ile telsmouvements en profi lent pour lesexprimer au grand jour. Cette a t t i t udereste toutefois très minoritaire.

- Et en Suisse romande ? Doit-on égalementcraindre les groupes de jeunes néonazis ?- 11 y a aussi des skinheads eu Suisseromande. Un facteur les différenciecependant de leurs compères de -Suissealémanique : ils oni gardé des liens avecl 'anc ienne générât ion des m i l i t a n t sd'ex ire trie-droite, représentée, parexemple, par le Vaudois Gaston-ArmandAmaudruz.

- Qui sont ces jeunes skinheads?- Contrairement à ce qu'on pourraitpenser, il ne s'agit pas de jeunes chômeursou de jeunes marginaux. Ils ont presquetous un travail stable. Ils vivent chez leursparents, dans de petites villes ou à lacampagne, et n'ont en général pas depetite amie.Ils ont dans leur majm ité moins de 20 ans.Mais ne sous-estimous pas le danger qu'ilspeuvent représenter pour la société !

Marie-Jeanne Krill

© Construire

L'ÉLABORATION DE GRILLES DE LECTURE

De quoi s'agit-il dans ce texte ?

QUI

ACTION

QUOI

QUAND

COMMENT

COMMENTcela s'est-il passé ?

POURQUOI

EN VUE DE QUOI

ou sujetqui peut êtreune personneune institution

un conceptun fait

ou verbe

objet

espacelieux

tempscirconstances

méthodesmoyens

résultatsconséquences

causeraison

butobjectif

Le texle en regard illustre com-ment util iser cette grille, de deuxfaçons différentes :

1 - une centaine déjeunes2 - le racisme

1 - ont manifeste2 - est à l'origine

2 - des manifestations

1 - à Zurich2 - de Zurich

1 - en avril 19972 - le mois dernier

- violemment

1 - racisme e! antisémitisme

Exercice 9 - Analyser une monographie et un article

Choisissez et appliquez une grille de lecture pour les textes cités.

9.1 - Monographie : extrait de « Le grand remue-ménage » ( p. 236).*

9.2 - Article : « Les effets violents de la télévision » ( p. 227).

Commentaires et corrigés en pages 273-287.

Page 44: Analyse Documentaire_suzanne Waller

STRUCTURE ET VOCABULAIRE

Trouver l'information utile : l'aide du vocabulaire

La recherche de l'information utile s'appuie sur l'étude de laformulation des idées — le vocabulaire —, et sur celle de l'organi-sation des idées — le plan. On aurait tout aussi bien pu discuter cettequestion en début de chapitre car, dans la pratique, toutes ces phasessont combinées.

L'étude d'un vocabulaire documentaire aide :- la lecture documentaire, dans la recherche des champs lexicaux et

dans l'articulation du discours ;- l'écriture documentaire, tant dans sa forme résumé (texte rédigé)

que dans sa forme indexation (choix de mots clés).

Même si ce chapitre est consacré encore à la lecture, il préfigure ceque celle-ci peut apporter à l'écriture et doit donc être lu dans les deuxperspectives.

LES MOTS D'ARTICULATION

La langue française est riche en termes indiquant des modes d'arti-culation très spécifiques. L'analyste doit maîtriser la forme et la place :

- des termes d'amorce : introduction, énuméraîion. illustration ;- des termes de liaison : addition, insistance, cause, conséquence,

restriction, opposition ;- des termes de rappel ;- des termes conclusifs.

Le choix et la place de ces mots assurent la cohérence sémantique dudiscours et facilitent normalement le repérage du plan.

L'exercice proposé ci-contre a pour objectif de rappeler la fonctionprécise de ces termes et, ainsi, de discerner rapidement les différentesparties d'un plan. Cette aide à la lecture documentaire sert également àl'écriture documentaire dans la mesure où son utilisation dans la rédac-tion des résumés sera tout à fait exacte.

TROUVER L'INFORMATION UTILE : L'AIDE DU VOCABULAIRE

Exercice n° 10 - Travailler sur les mots d'articulation

Cet exercice a pour objectif de rappeler la fonction précise de cesmots et, ainsi, de discerner rapidement les différentes parties d'unplan. Cette aide à la lecture documentaire sert également à l'écrituredocumentaire, dans la mesure où leur utilisation dans la rédactiondes résumés sera tout à fait appropriée. La liste suivante présente 47mots d'articulation présentés dans l'ordre alphabétique. Inscrivezchacun de ces mots dans les 11 cadres indiquant leur fonction ; unnombre très minime peut appartenir à plusieurs cadres.

Correction et commentaire en page 288.

AinsiAu contraireAussiAvant toutCarCependantC'est-à-direC'est pourquoiD'abordDans un premier tempsD'autant plus

Effectivement

En définitiveEn effetEn outreEn premier lieuEn résuméEn revancheEncoreEnfinEnsuite

De plus MaisDonc MêmeD'où

Introduction

Opposition

Conséquence

Rappel

Néanmoins

Énumération

Restriction

Insistance

Conclusion

___^__^

Notamment

Par conséquent

Par exemplePar le fait queParce quePour conclurePour toutes ces raisonsPourtantPremièrement

PuisqueTout d'abord

Addition

Cause

Illustration

Page 45: Analyse Documentaire_suzanne Waller

STRUCTURE ET VOCABULAIRE

LA NATURE DES MOTS

Plus que sur l'étude classique des registres du langage (soutenu,courant, familier...), l'analyste est invité à réfléchir sur la nature du

vocabulaire usuel.

Entre les 216 mots relevés par la compagnie BELL, représentatifsd'une journée de communications téléphoniques aux États-Unis, et les24 800 mots du langage shakespearien ', où se place le vocabulaire

documentaire ?

Une langue est un organisme vivant. Les mots naissent et meurent defaçon inéluctable, mais on peut toutefois discerner des constantes oùl'on remarque 4 :

- des mots-vides, c'est-à-dire les mots nécessaires à l'articulationd'une phrase, mais que l'on peut exclure sans en altérer le sens. Ce sontles mots que l'on excluait des télégrammes à l'époque où l'on enenvoyait encore. I! en existe une centaine dans la langue française ;

- les mots du vocabulaire courant, appris de façon intuitive, commetoute langue maternelle, surtout composé de termes concrets et deverbes d'action (environ 4 000) ;

- les mots du vocabulaire scientifique de base que l'on acquiert desles études secondaires et qui augmente en importance et en précision aufur et à mesure que l'on approfondit le champ scientifique (4 000 éga-

lement) ;- enfin les mots du vocabulaire scientifique et technique

spécialisé, propre à chaque discipline, science ou pratique (médecine,philosophie, mais aussi chaudronnerie, pratique du ski, etc.). Il estimpossible de les dénombrer, d'autant plus que c'est parmi eux que l'oncompte le plus de « naissances ». Pour tenter d'en donner une échelle,rappelons simplement qu'il existe actuellement 90 000 noms d'insectesidentifiés — et beaucoup d'autres qui ne le sont pas...

Si l'on pose la question suivante : « Combien de mots la languefrançaise comprend-elle ? », les interlocuteurs restent en généralpantois et indécis, et les réponses vont de 2 000 à 1 million. 11 est inté-ressant de rappeler que le Robert annonce à peu près 80 000 mots (voir

TROUVER L'INFORMATION UTILE : L'AIDE DU VOCABULAIRE

les dernières éditions), mais que les milliers de mots qui constituentnotre langue ne sont pas utilisés de la même façon et que l'on peut illus-trer leur différence en les schématisant ainsi, toujours en s'inspirant destravaux de A. Moles (voir schéma en page suivante).

Ce schéma, capable d'illustrer plusieurs notions importantes et uti lesà l'indexation (voir chapitre vu, p. 149-173) et à la compréhension deslangages documentaires (voir chapitre vin, p. 175-222) est infinimentriche. Il s'impose comme un outil indispensable à avoir en mémoire :

- lors du premier survol, pour identifier les termes univoqucsporteurs de sens qui serviront également lors de la rédaction durésumé ;

- lors de l'indexation en langue naturelle, pour situer les mots cléschoisis et vérifier leur zone de « dangerosité » (voir chapitre vu, p. 163-168).

LA RICHESSE DES MOTS : POLYSEMIE, MONOSÉMIE

Par l'expression « richesse des mots », nous entendons leurs qualitésde polysémie (ou homographie) ou de monosémie1. Tous ces mots sontporteurs de sens, mais de façon tout à fait différente.

Le vocabulaire courant

II est doublement trompeur :- éminemment polysémique, il ne peut servir au repérage du sens

qu'intégré à la phrase qui le détermine ;- principalement composé de mots concrets, il donne à « voir » le

sens de façon immédiate : le mot voiture, comme tous ses nombreuxsynonymes, évoque le sens « mode de transport ». En revanche, le motcanon possède près de quinze significations différentes...

« Un terme est en soi incomplet quand bien même il recevrait unedéfinit ion en termes de dictionnaire minimum. Le dictionnaire nous ditqu'un brigantin est un navire, mais il laisse impliciter par navired'autres propriétés sémantiques." »

Page 46: Analyse Documentaire_suzanne Waller

STRUCTURE ET VOCABULAIRE TROUVER L'INFORMATION UTILE : L'AIDE DU VOCABULAIRE

-•

Dans un premier cercle se trouvent les mols-tides.environ une centaine.

Le deuxième cercle concerne les 4 000 mots duv n c a h u l a i r i C M i i r : i n 1

Le troisième cercle comprend aussi environ 4000mots : ceux du vocabulaire scientifique de base

II n'y a pas de quatrième cercle, mais une série defaisceaux à l'intérieur desquels on trouve le vocabu-laire scientifique et technique spécialisé, propre àchaque discipline, science ou pratique, etc. Tous lesautres mots du vocabulaire français se repartissentdans ces faisceaux.

Les mots les plus courants sonl le plus souvent por-teurs de plusieurs sens : on les dit polysémique*(«plusieurs sens», selon la racine grecque). Lestermes les plus spécifiques sont en général appliquésà une notion ei une seule ; on les dit tinivttques (« uneseule voix », selon la racine latine).Le cercle « vocabulaire scientifique de base » eslcelui qui comporte le plus de termes généraux, c'est-à-dire ceux qui ne peuvent jamais être employésseuls pour indexer un texte.

On peut bien comprendre !a notion de champ séman-tique (dans un thésaurus, on appelle ainsi l'ensembledes termes relatifs à un domaine d'intérêt et choisispour l'indexation) en se demandant, par exemple,dans quel cercle mettre le mot si nus Les réponsesvarient du vocabulaire courant au vocabulaire scien-tifique de base. Mais le mot xinux évoque deux sensprincipaux s'il es! exclu de son conlexie d'utilisation.Si l'on dessine deux secteurs à partir d'un premierfaisceau (trigonométrie, ou mathématiques) et d'undeuxième faisceau (anatomie). dans lesquels ontrouve le mol sinus, celui-ci devient alors univoquc,puisque inscrit dans son champ sémantique. Cetteimage est utile tant à l'indexation qu'à l'interrogation.

Le vocabulaire scientifique de hase

I I comprend un 1res grand nombre de termes dits « généraux » ou« athématiques », tels que : fonction, modèle, opération, système, etc.,que l'on retrouve souvent dans la partie « mots outils » des thésaurus,car ils ne peuvent pas s'insérer seuls dans un champ sémantique déter-miné. Ils sont de ce fait polysémiques et porteurs de sens divers. Cen'est donc pas le vocabulaire prioritairement utile à l'analyste.

Le vocabulaire scientifique et technique spécialisé

11 est en fait le plus intéressant pour l'analyste, car il est composé determes désignant une chose et une seule et par là même univoques. Unécrit de Michel Tournier (le Vent Paraclet, Gallimard, 1977) à son sujetnous éclaire davantage encore.

Un écrivain, homme arbitres et philosophe, approfondit ces ilijférences : -II y n troisactivité* de célébration qui sont la philosophie. If roman et la poésie. Elucider la{mu lion, le fonctionnement et les relations de ressemblance et de différence de ces genresserait l'objet d'unf élude difficile et de longue haleine. Notons amplement qtir le mutel l'idée changent de poids respectifs d'un genre ti l'autre. Dam un poème. />• motl'rmpotte sur l'idée, laquelle mit comme elle petit ou ne snit pas du tout. IM musiquedes rimes est première. L'enchaînement des lignifications si-i-onflaire. Au contraire,pour un philosophe l'idée l'emporte absolument sur le mot. (slui-ci n'est jamais CMW-subordonné à l'idée, an point que le philosophe est constamment amené à créer destri mr\ pou r mieux exprimer sa pensée.

De là le jargon philosophique dont les niais ont grand tort <\e se plaindre. I) 'uhoxlpar (/IIP le vocabulaire technique est If f>mf>re de. toute discipline — médecine, biologie,physique, mathématique — et on ne voit pas pourquoi seule la philosophie dn<rait s'niabstenit Ensuite parce que le terme technique est la promesse — généralement tenue •—qu'une fois comprise el assimilée sa définition ne changera plus et jouera comme uneclé irremplaçable pour comprendre le texte. Il y a certes des philosophes qui écriventavec les mois de tout le monde. Cf. sonl les plus flous, les plus ingrats, en un mot lesplus fli/Jinlf.s. Comparons par exemple l'un d'eux, Descartes, avec Kunt dontl'arsenal terminologique effarouche souvent le. nouveau venu. Isirsque Kanl pni/r tirsriK'tmtlisme traiiscctuliintal, il emploie une expression qu'il a forgée et dont il adonné ah inilio une définition coulée dans le bronze. Des expressions de cettf sorte, ily en a dans son enivre une vingtaine, pas davantage, et la maîtrise de ce petit lexique— évidemment indispensable — livre à elle seule {a moitié du kantisme. Au contraire.

Page 47: Analyse Documentaire_suzanne Waller

STRUCTURE ET VOCABULAIRE TROUVER L'INFORMATION UTILE : L'AIDE DU VOCABULAIRE

lorsque Desrartes parle des « idées flaires et distinctes -, il marie Irai* mots dont ladéfinition nt. se trouve nulle part dans son cruvre, et varie sans doute noltihlrmenld'une page, à l'autre. Tout au plus ces mots de tout le monde donnent-ils au lecteurparesseux l'illusion qu'il a compris d'emblée et qu'il peut s'en aller. Une interprétationexigeante des textes cartésiens soulève les pires difficultés et se wldf par des résultaissovvent ktillanls mais toujours disnitabUs... -

© Éditions Gallimard

LA RICHESSE DES MOTS : DÉNOTATION, CONNOTATION

La richesse sémantique et symbolique du vocabulaire sous-tendl'expression de la pensée et de la connaissance. Elle révèle les méca-nismes complexes de l'acquisition et de la structuration du savoir. « Onecan consider human knowledge on a sensual levé! (through four ele-mentary variables : sensation, perception, imagination ami memory)and at an intellectuel levé! (covering ihrce realilit's : concept forma-tion, jitdgment and rcasoning).1 »

Chaque mot de la langue française peut être étudié et comprisdifféremment. Dans la pratique professionnelle, « dénotation » et« connotation » font plutôt partie du vocabulaire de l'analyse del'image", mais sont également présents dans l'analyse de textes.

Dénotation

Sous l'angle de la dénotation, la définition d'un mot donnée dans undictionnaire assure le consensus de tous ses utilisateurs ; sa signifi-cation est objectivée. Dénoté, un mot devient un terme déf in i , à ten-dance monosémique (ou univoque). La dénotation repose sur desfaits, des définitions, des descriptions liés au pôle cognitif de l'êtrehumain. Les termes monosémiques et univoques (un seul sens quelqu'en soit l'emploi) sont le plus souvent issus du vocabulairescientifique et technique spécialisé. Ils sont majoritaires dans leslangages contrôlés.

Connotation

Sous l'angle de la connotation, chaque mot possède des sensnombreux, perceptibles par chaque individu de façon personnelle ; sasignification est suhjectivée. Connoté, un mot reflète une multiplicitéde points de vue, d'opinions ; il est porteur d'imaginaire, de poésie(« Words. words... »). La connotation induit les points de vue, lesopinions liés au pôle sensible de l'être humain. Les mots sont souventsoumis à la polysémie (plusieurs contenus, plusieurs valeurs) et/ou àl'cquivocité (contenus égaux, mais pouvant être interprétés différem-ment). Ces mots sont issus du vocabulaire poétique (langue recherchée)ou courant (langue naturelle).

Exemples

On peut illustrer l'importance de ces aspects, dans la pratique del'analyse, par la relation d'un exercice conduit à plusieurs reprises aucours de formations à l'analyse documentaire de textes. À partir d'unmot écrit au tableau, les participants doivent immédiatement, de façontotalement spontanée, en écrire un ou plusieurs autres que ce premierévoque ; puis chacun de ces mots est inscrit au tableau par l'animateurselon quatre critères, non explicités tout d'abord. Le mot volcan donnetoujours d'excellents résultats pour illustrer ce propos. Les termes lesplus fréquemment relevés sont (dans le désordre de l'expression, maisdans l'ordre de l'exploitation) :

1 ) lave, cratère, magma ;2) montagne, éruption ;3 ) Vésuve, Fitna, Auvergne, Tazicff (montagne Pelée, SoufTrière aux

Ant i l l e s . , . ) ;4) peur, feu, flamme, souffle, fumée, rouge, dévastation, etc.

Les deux premiers groupes s'intègrent facilement dans les champsdénotes d'un langage contrôlé : le premier comprend des termesappartenant à un éventuel champ sémantique « volcanologie ».domaine particulier dans lequel ils ont un sens spécifique et univqque ;le second est nomme «champ thématique», étant plus large et pluspolysémique que le premier : un volcan est bien une montagne, mais

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STRUCTURE ET VOCABULAIRE

toutes les montagnes ne sont pas des volcans ; « éruption » ne peut pasêtre employé seul et exige de devenir « éruption volcanique » pour êtreaccepté dans le champ sémantique.

Les deux autres groupes sont de l'ordre de la connotation. Les motsproposés entrent d'une part dans un champ culturel, selon les lieux oules milieux où ils sont utilises, d'autre part dans un champ symbolique :les mots suggèrent plus qu'ils ne définissent ou ne sont définis.

L'analyste doit être très conscient de la distinction entre terme (précis,contrôlé, pertinent, le plus univoquc possible) et mot (naturel, sujet à lapolysémie et au flou), dès la lecture du texte à analyser. L'auteur choisitégalement son vocabulaire en fonction de ses options. Il est intéressantde relire le troisième paragraphe de l'article « Les droits d'auteur desœuvres numériques» (cf. p. 253) dans lequel « ... \es fanatiques...prônent une liberté totale de l'information, mais d'autres pionniers duréseau soutiennent que son avenir passe par le contrôle et la facturationde chaque information qui y transite... » Sans aller plus loin, onconnaît déjà l'opinion de l'auteur.

Comme il ne peut y avoir de lecture objective, il est recommandé delire en état d'alerte, c'est-à-dire conscient de toutes les déviations pré-sentes dans la relation entre auteur et lecteur. Pour se les rappeler, onpeut relire la très vieille légende indienne des six aveugles et de l'élé-phant : « Le premier aveugle, palpant une défense, déclare que c'est làune lance ; le second, touchant les flancs de l 'animal, prétend qu'il s'agitbien plutôt d'une muraille. Le troisième, qui explore des doigts unepatte, croit avoir affaire à un arbre, tandis que le quatrième, tâtant latrompe de l'éléphant, pense que c'est un serpent. Le cinquième, lui,s'agrippe à une oreille de la bête, lui trouve une ressemblance certaineavec un éventail, et le sixième aveugle, attrapant l'éléphant par laqueue, est sur d'avoir une corde entre les mains.'1 »

En découvrant l'ambiguïté du vocabulaire à la lecture, l'analysteprend conscience de sa responsabilité lors de la rédaction du résumé etdu choix des mots clés. L'art de l'analyse documentaire repose sur cetaller-retour entre le texte et ce qui en sera fait.

TROUVER L'INFORMATION UTILE : L'AIDE DU VOCABULAIRE

Observer, lire, comprendre, repérer l'organisation du texte (de lamicro-structure à la macro-structure), identifier le vocabulaire perti-nent sont les opérations propres à l'analyse documentaire, indispensa-bles pour rédiger un résumé documentaire et sélectionner des mots clés.Mais toutes ces opérations ne sont effectuées que dans un seul etunique but : favoriser et faciliter la recherche documentaire.

NOTES

1. Source : [64J, p. 60.

2. Source : [70], p. 225-226.

3. Cité par Georges Stciner, au cours de l'émission « Bouillon de cul ture»diffusée le 23 mai 1997.

4. Ces catégories sont inspirées de [63].

5. Sur la différence enire ces deux termes, voir chapitre vin, p. 183.

6. Source : [33], p. 65.

7. Source : [70], p. 229.

8. Voir en particulier [45] et [47].

9. Extrait de [66].

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CHAPITRE VANALYSE ET RECHERCHE DOCUMENTAIRES

L'analyse documentaire a pour but d'apporter des réponses auxdemandeurs d'information, de différentes manières et sous différentesformes, la plus répandue étant la constitution de banques de donnéesdans lesquelles les champs de recherche sont classiquement — maisnon exclusivement — les champs de résumé et d'indexation.

En effet, i) convient de ne pas confondre recherche, recherchedocumentaire et renseignement. La recherche, ou recherche scientifi-que, couvre l'ensemble des efforts, des travaux effectués pour appro-fondir ou renouveler la connaissance ; c'est l'activité des chercheurs, àquelque domaine qu'ils se consacrent.

On appelle recherche documentaire « l'action, les méthodes et procé-dures ayant pour objet de retrouver dans des fonds documentaires lesréférences des documents pertinents?), et recherche de l'information« l'action, les méthodes et procédures ayant pour objet d'extraire d'un en-semble de documents les informations voulues » '. Le terme anglaisinformation retrieval ne fait pas de différence entre les deux ; obtenir uneréférence complète est la première étape d'une recherche d'information etc'est dans ce sens que l'on parlera ici de « recherche documentaire ».

A l'écoute d'une question posée, il est bon de s'interroger d'abord surle type d'information demandée. Le documentaliste est souventconfronté à une simple demande de renseignement, et la consultationd'un annuaire ou d'une encyclopédie, en ligne ou imprimés, suffit àtrouver facilement la réponse. Il est alors pourvoyeur d'une informationrapide et simple, et non pas à la recherche de références correspondantaux lextes sélectionnés et intégrés à la banque de données.

C'est ainsi que Albrechtsen & Hj0rland3 établissent une typologie etdistinguent les « non-documentary searches » des « document seekingand -retrieval ». Le premier type est effectivement de l'ordre du rensei-gnement : où cueillir des champignons, où trouver la liste de stationsthermales... Le deuxième type est séparé en « known item retrieval et

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ANALYSE ET RECHERCHE DOCUMENTAIRES

identification of itnknown item(x) » ; la progression proposée, de lavérification des documents à la recherche d'informations contribuant àla résolution de problèmes, peut naturellement être plus détaillée, oumême différente.

Ce qui est important dans cet exemple, c'est l'essai d'une caractéri-sation de ce que l'on appelle communément la recherche documentaireen tant qu'auxiliaire de la recherche scientifique. C'est à ce titre quesont étudiés ses rapports avec l'analyse documentaire :

• Quelle est la nature de cette opération documentaire ?

• Comment sont constituées les banques de données pour donnerpleinement satisfaction ?

• Quels sont les aspects techniques de la recherche dans les banquesde données ?

• Comment l'analyse documentaire contribue-t-elle à « l'objectifessentiel de la documentation : mettre en communication ceux quicherchent des sources d'information sur un sujet précis et les auteurssusceptibles de les satisfaire' » ?

La recherche documentaire

Dans un article déjà ancien4, Gilles Deschâtelets décrivait la situationdu « end-mer », installé devant son micro, tentant d'entrer en commu-nication avec un « supermarket » de banques de données, se battantavec un protocole aussi rigide qu'ésotérique, choisissant une banque dedonnées sur l'avis de trois lignes de description, posant sa question entermes supposés normaux mais immédiatement refusés pour êtrecomparés à d'autres, apparemment meilleurs (pour la banque, non pourl'usager), avec pour résultat quelques titres peu engageants, puis ànouveau confronté à des commandes barbares pour obtenir l'affichagepartiel ou complet qui ne lui donne guère plus de certitudes. Passonssur ce qui se passe ensuite, quand l'usager parti à la bibliothèque

LA RECHERCHE DOCUMENTAIRE

demander ces documents (« and I will avoid any unpleaxant remarkabont that process ») constate avec douleur qu'i ls ne seront pas dispo-nibles avant plusieurs semaines...

Cette description quelque peu kafkaïenne est rendue obsolète grâce àInternet et à la possibilité des commandes en ligne. Mais est-on sûr queles nouvelles technologies ne vont pas créer d'autres situations toutaussi dommageables pour l'utilisateur final, dont on parle beaucoupsans toutefois se mettre à sa place ?

LA PLACE DE L'UTILISATKUR DANS LE PROCESSUS

DR [.A RECHERCHE DOCUMENTAIRE

« Les utilisateurs ne savent pas poser les questions ! » Combien defois les documentalistes se désolent-ils de cet état de fait ? Sans doutey a-t-il un peu de vrai dans cette déclaration, et on peut en chercherl'origine notamment dans la coutume pédagogique très française quiconsiste à opposer un « enseigné-écoutant » à un « enseignant-parlant ».

Le questionnement pédagogique, seule source de réel apprentissage,prend progressivement sa place dans l'enseignement, mais il n'est pasencore suffisamment intégré aux pratiques de tous pour porter desfruits très visibles.

Or, toute recherche commence par un questionnement, et tout ques-tionnement est le reflet d'une problématique. Une mauvaise questionest la preuve que le problème n'est pas clair en amont, ou que la formu-lation des données du problème a besoin d'être clarifiée.

Le dialogue qui s'instaure entre le demandeur et le documentalistedoit aider ce dernier dans sa pratique de l'analyse documentaire. C'estpourquoi il est indispensable que le documentaliste puisse, de façonrégulière, confronter son travail solitaire d'analyse au resultat.de celle-ci, à savoir l'adéquation entre le texte analysé et la question à laquelleil pourra répondre.

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ANALYSE ET RECHERCHE DOCUMENTAIRES

C'est par ce processus que pourront être constituées des banques dedonnées que l'utilisateur final interrogera et qui lui donnerontsatisfaction.

QUI EST LE DEMANDEUR ?

Dès que la demande est complexe, le documentaliste ne peutrépondre sans avoir identifié le demandeur dans sa fonction et dans soncontexte de travail. Lorsque l'utilisateur fait partie de l'entreprise, cetteidentification est en principe aisée, le documentaliste devant norma-lement connaître ses usagers potentiels — ou, tout au moins, lesservices dans lesquels ils travaillent. Lorsque l 'ut i l isateur est étranger àl'entreprise, il doit justifier de ses droits à la demande ; si ceux-ci sontpayants, il devient un client à satisfaire et le dialogue qui s'engage enest le premier moyen.

QUELLES SONT LES DONNÉES DU PROBLÈME ?

Tout problème est constitué d'un certain nombre de propositionsconnues permettant d'en trouver une ou plusieurs autres, inconnues. Àpartir de la question posée, il est indispensable de clarifier ce que saitle demandeur pour déterminer ce qu'il ne sait pas. Évoquons ici le« paradoxe de la connaissance » ainsi exposé par Platon : « H n'est paspossible à un homme de chercher ni ce qu'il connaît ni ce qu'il neconnaît pas. En effet, ce qu'il connaît, il ne le chercherait pas parce qu'ille connaît et, le connaissant, n'a aucun besoin d'une recherche ; et cequ'il ne connaît pas, il ne le chercherait pas non plus, parce qu'i l nesaurait même pas ce qu'il devrait chercher' » qui, plus avant, précise :« Penses-tu qu'il entreprendrait de chercher ou d'apprendre ce qu'ilcroyait savoir et qu'il ne sait pas avant d'avoir pris conscience de sonignorance ?* » On peut ici parler du « paradoxe de la recherche » quirepose sur le constat suivant : je sais au moins ce que je ne sais pas. Larecherche part de ce que l'on sait pour découvrir ce que l'on veut savoir,ce qui est une autre facette d'une situation problématique7.

LA RECHERCHE DOCUMENTAIRE

QUEL EST LE BUT DU QUESTIONNEMENT ?

De même qu'il existe une différence entre renseignement etrecherches, il est possible d'affiner la nature de ces dernières en s'inter-rogeant sur les raisons du questionnement, tn effet, on peut poser unequestion et effectuer une recherche documentaire :

• Pour apprendre quelque chose : Qu'est-ce qu'un traitement antipara-sitaire ? Comment le met-on en place ? Dans quelles circonstances ?...

• Pour actualiser une connaissance acquise : Y a-t-il eu de nouvellespratiques culturales en zone sahélienne ?

• Pour confirmer une connaissance incertaine : « II me semble quel'on fait ainsi, mais je veux vraiment être sûr »...

• Pour confronter, comparer des avis, des expériences, des idées : X aagit ainsi et Y autrement. Comment savoir ce qui serait préférable danstelle situation ?

• Pour prendre des décisions, ce qui correspond à la rechercheultime : « Après avoir appris, confirmé, actualisé, confronté, je suis enmesure de décider. »

On approfondit ainsi le dialogue, en prenant connaissance nonseulement de ce que sait le demandeur, mais aussi de sa propresituation vis-à-vis de la demande.

QUELLE EST LA FORME DU QUESTIONNEMENT ?

Si la question est formulée en termes généraux (« Qu'avez-vous surl ' ag r i cu l t u r e? ) ) ) , le problème n'est pas posé et aucune réponsesatisfaisante ne peul être fournie. Soit le demandeur cherche seulementune vague information, soit il ne veut pas exprimer ce qu'il cherche,pour différentes raisons.

Il n'est pas interdi t de penser que certains usagers souhaitent ne pasdévoiler ce qu'i ls ne savent pas — même inconsciemment. Si une rela-

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ANALYSE ET RECHERCHE DOCUMENTAIRES

lion de confiance ne s'établit pas entre l'usager et le service (soit unepersonne, soit une machine), aucune vraie recherche ne peut aboutir.

Quoi qu'il en soit, le demandeur s'exprime à partir de son universmental el culturel et utilise ses propres mots. La formulation d'unequestion passe par un vocabulaire dont on sait déjà qu'il est porteur desens et d'expression multiples (cf. p. 87-93). L'écoute active dudocumentaliste doit susciter le plus souvent la reformulation, l 'cxplici-tation de la demande pour arriver à la précision.

Quand la question est devenue plus précise (« Quels sont les traite-ments antiparasitaircs de la culture du coton en zone sahélienne ? »), laformulation du problème est amorcée, mais elle ne sera opératoire quelorsqu'on aura ident i f ié ce que le demandeur sait déjà sur le sujet (cf.p. 98) et ce qu'il veut en faire (cf. p. 99). Est-on sûr, toutefois, depouvoir vraiment répondre de façon totalement satisfaisante ?

QUELLES SONT LIES LIMITES DE LA RECHERCHE DOCUMENTAIRE ?

Si l'on parvient, dans le dialogue, à affiner la question, c'est-à-dire àposer les différentes propositions du problème, on peut déterminer cequi manque au demandeur pour parfaire son objet de connaissance.C'est précisément ce manque qui va orienter la recherche documen-taire.

Mais le documentaliste doit être conscient de la différence fonda-mentale existant entre la demande et l'éventuelle réponse. En effet, chezl'utilisateur, la question jai l l i t de l'apparition d'une faille dans laconstruction de sa pensée ; celle-ci est vivante, mouvante et c'est l'unedes raisons profondes de cette difficulté qu'éprouvent certains utilisa-teurs à exprimer vraiment ce qu'ils cherchent.

La réponse prend la forme d'une compilation de documents, de textesqui, dans leur ensemble, ne présentent aucun caractère construit. Or, lesavoir est une construction de la pensée et non une accumulation deréférences, si bien choisies soient-elles. La relation usager-documen-tation est très souvent décevante, pour les uns et pour (es autres, et cela

PLACE DE L'ANALYSE DOCUMENTAIRE DANS LES BANQUES DE DONNÉES

d'autant plus que les banques de données manquent très souvent decohérence interne, accentuant par là ce désappointement. Cette consta-tation ne doit pas décourager les acteurs de la recherche documentaire,mais les éclairer sur leur champ respectif de compétence.

Le documentaliste ne peut pas se mettre à la place de l 'u t i l i sa teur etcelui-ci ne peut pas attendre de la banque de données qu'elle lasse sonpropre travail. C'est en reconnaissant à chacun son territoire que l'oncrée les conditions d'un dialogue efficace.

Il va sans dire que cette situation est propre à la véritable recherchedocumentaire et non à la fourniture de renseignements qui font partiedu travail documentaire, mais ne requièrent pas autant d'exigence.

Place de l'analyse documentaire dans les banques de données

Même si la recherche documentaire connaît des limites propres à sanature, elle doit pouvoir compter sur toutes les possibilités qu'ofirentles banques de données. Avant d'étudier les caractéristiques propres à larecherche en texte intégral (cf. p. 111-118), il est opportun de détaillerles différents champs des banques de données classiques, encore pré-pondérantes dans un grand nombre de services. Chaque documenttraité est présent dans la banque de données sous forme d'une notice etchaque notice est constituée de différents champs (ou zones).

LES CHAMPS DES BANQUES DE DONNÉES

II existe trois grands types de champs dans les banques de données.

• Les champs de gestion, tels que « numéro de la notice », « date decréation/de modification de la notice », « identification de l'analyste »,etc., ne sont interrogeables que par l 'administrateur de la base et neprésentent aucun intérêt pour la recherche documentaire.

Page 53: Analyse Documentaire_suzanne Waller

ANALYSE ET RECHERCHE DOCUMENTAIRES PLACE DE L'ANALYSE DOCUMENTAIRE DANS LES BANQUES DE DONNÉES

•'

• Les champs de description ou d'information. Ils apportent les élé-ments nécessaires à l'identification du document : « auteur », « titre »,« éditeur ou source », « collection », « date », « nombre de pages »,« illustration », « langue », etc. Selon le système, ces champs sont plusou moins interrogeables, mais certains doivent l'être dans tous les cas :« auteur », « ti tre », « date », par exemple.

• Les champs de contenu, enfin, sont ceux qui pourront répondre àtoutes les questions posées à partir d'un sujet. Ils sont, pour la plupart,issus de l'analyse documentaire.

LES CHAMPS DE CONTENU

Classiquement, on considère comme champs de contenu les champs« résumé » et « indexation » ; et comme on fait de moins en moins derésumé, la majorité des recherches par sujets repose sur l 'indexation. Enfait, il peut exister plusieurs champs de contenu dont la complémen-tarité garantit la qualité de la recherche.

Titre

Le titre est le premier champ de contenu. Choisi normalement parl'auteur, rédigé en langue naturelle, il doit fournir les termes de larecherche. En fait, il est sujet à caution dans la mesure où le marketingéditorial impose souvent le principe de l'accroche commerciale plutôtque celui de l'information pertinente. L'identification du document estun premier indice : le titre d'une thèse est plus fiable que celui d'unemonographie, même signée d'un nom prestigieux, mais éditée par uneentreprise commerciale et généraliste (cf. p. 125).

Cotation

La cotation, si elle s'appuie sur une classification conceptuelle, est unchamp de contenu ; clic indique le lieu de rangement du document,mais également le champ de connaissance dans lequel il s'inscrit. La

plupart du temps, malheureusement, les cotes sont peu compréhensi-bles par l'usager. Par ailleurs, un grand nombre de documents (tels lesarticles) ne présentent aucune cote indicative de contenu.

Domaine

Un tel champ de contenu est préconisé dans deux cas :- le service de documentation produit un bulletin bibliographique.

Les domaines indiqués représentent les têtes de chapitres ou de rubri-ques et sont édités automatiquement ;

- la base de données est riche, encyclopédique et/ou polyvalente ; letri par domaine permet une première sélection. C'est valable pour lessecteurs de la presse, de la politique, mais aussi dans certains secteursapparemment plus précis. Le développement rural, par exemple, couvrel'agronomie, la géographie, l'économie, la sociologie, l'ethnologie. lapédagogie, parmi d'autres domaines à explorer.

Indexation

Le champ « indexation » (ou mot clé, ou descripteur...), bien sûr, nepeut pas être absent, mais son importance doit être relativisée en fonc-tion de tous les autres champs interrogeables en même temps que lui. Leterme « mot clé » n'a pas été vainement choisi : chaque mot sélectionnépour l'indexation ouvre une porte ; le demandeur a-t-il besoin de tant deportes, de tant de pièces, de tant de clés ? Ce champ est en général tropfourni et, de ce fait, remplit un rôle inverse de celui qu'on en attend.L'opération d'indexation est développée au chapitre vu, p. 149-173.

Résumé

Le champ « résumé » est indispensable pour aider le demandeur àsélectionner les documents à lire. II répond à la question : « Ce qui memanque pour résoudre mon problème est-il dans ce texte, oui ounon ? » C'est également, avec le titre, le seul champ de contenu rédigéen langue naturelle ; c'est un atout pour le demandeur qui , souvent,n'aime pas la contrainte d'un langage impose ; l'analyste qui rédige doitavoir en mémoire cette caractéristique (cf. chapitre vi, p. 121-148).

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ANALYSE ET RECHERCHE DOCUMENTAIRES PLACE DE L'ANALYSE DOCUMENTAIRE DANS LES BANQUES DE DONNÉES

"

Typologie de l'information

Ce champ est (trop) rare, bien qu'il aide puissamment à la sélection.Sa terminologie est en général confondue avec les termes d'indexation,ce qui augmente la confusion de ces derniers. Si la question posée estcelle-ci : « Je cherche des statistiques sur la mortalité des nouveau-nésau Bangladesh », il est bien évident que le terme « statistique » estl'objet de la demande, et non le sujet vu sous son aspect médical, démo-graphique ou autre. Or, il y a fort à parier que le mot statistique soitprésent dans le champ « indexation » en tant que sujet. Ce documentrisque donc d'apparaître sur un listing où la recherche porteraitvraiment sur la « statistique », moyen imparable d'augmenter le bruit

(cf. p. 111) .

Chaque service peut établir une liste des types d'information les plussouvent demandés ; l 'étude systématique de la formula t ion desquestions doit aboutir à quelques termes qui sont automatiquementversés dans le champ ad hoc après avoir été sélectionnés au moment del'analyse. C'est ainsi qu'un important service parlementaire a définiplus de vingt types de textes officiels. Dès 1955, le Laboratoire depsychologie sociale de la SorbonneB préconisait de distinguer, dans lecontenu, ce qui relevait de la « théorie verbale », de la « théorie mathé-matique », de la « méthodologie métrique » ou « statistique ». etc.

Sans créer un champ de contenu comme celui-ci, certains servicesmettent en place des systèmes similaires. Ainsi la chambre de com-merce et d'industrie de Paris demande-t-elle aux analystes de la banquede données Delphes d'utiliser, dans le résumé, des expressions norma-lisées qui ne sont pas des descripteurs et qui sont accessibles à larecherche en langage libre : « elles permettent la sélection plus rapidede documents comportant les caractéristiques indiquées" », telles que« données chiffrées », « données prospectives », « données juridiques »,etc. Il s'agit bien ici d'une typologie de l'information qui, ainsi traitée,allège considérablement le champ de l'indexation. Une proposition demême nature est suggérée par François Feyler pour les établissementsde l'Éducation nationale '".

Le champ « typologie de l'information » ne doit pas être confonduavec le champ de description « typologie du document », utile pourdistinguer les articles de presse des communications de congrès, lesmonographies des thèses, les cartes des plans, etc.

COMPLÉMENTARITÉ DHS CHAMPS ot CONTENU

Chaque champ de contenu, ainsi que le rôle qui lui est propre, estidentifié clairement. C'est de cette façon uniquement qu'il sera possibled'en reconnaître, au moment de la recherche, la fonction précise ainsique la complémentarité avec les autres champs.

La possibilité de croiser les champs de contenu dépend essentielle-ment des logiciels utilisés. Certains, très lourds, obligent à l'interro-gation champ par champ ; de ce fait, chacun de ceux-ci doit être rensei-gné, même si c'est inutile.

En revanche, s'il y a possibilité d'interroger toutes zones confondues,on peut alors valablement laisser certains champs — considérés tradi-tionnellement comme obligatoires — non renseignés, comme l ' i l lustrel'exemple présenté en page suivante. Toutefois, l'interrogation touteszones n'est pas sans danger car elle peut favoriser le bruit.

Est-ce pour cette raison que les documentalistes eux-mêmes n'ont pasencore intégré pleinement la chance que représente la complémenta-rité ? On se réfugie derrière les possibilités des logiciels, alors queceux-ci deviennent de plus en plus souples et performants et qu'il doitêtre possible de paramétrer des interrogations « tous champs » quiferaient gagner beaucoup de temps, en amont comme en aval.

L'analyste n'est pas responsable du champ « titre », même si celui-ciest le seul champ véritablement obligatoire. Si le titre (le cas échéantcomplété par le sous-titre) est suffisamment porteur de sens, si saformulation comprend tout le vocabulaire représentatif du contenuutile, à quoi bon répéter les mêmes termes dans les champs« indexation » et « résumé » ?

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ANALYSE ET RECHERCHE DOCUMENTAIRES

Dans une banque de données dont l'anonymat sera préservé, on peutprendre connaissance de la notice suivante :

Titre : Principes généraux concernant la résonance magnétique nucléaire

Auteur : Callaghan, P. T.

Descripteur : Résonance magnétique nucléaire

Résumé : Ce livre présente la technique et les applications de l'imagerieRMN. Après une introduction aux principes généraux de la RMN, l'auteurexplore les thèmes les plus spécifiques de l'imagerie RMN.

Fallait-il vraiment remplir les champs « descripteur » et « résumé » ?

Cet exemple, bien sûr, est valable dans le cas des logiciels permettant

l'interrogation toutes zones.

En revanche, l'analyste est pleinement responsable du champ« résumé » puisqu'il est rédigé en langue naturelle, comme l'est le titre.Si celui-ci est insuffisamment explicite, le résumé doit en compléter lateneur, en utilisant un vocabulaire équivalent, mais différent, de façonà augmenter les chances de recherche par le demandeur. Dans; l'exem-ple ci-dessus, il fallait énumérer « les thèmes les plus spécifiques » defaçon à savoir tout de suite si celui qui était cherché s'y trouvait ou

non.

La formulation du champ « indexation » est soumise à l'usage deslangages documentaires (cf. chapitre vin, p. 175-222). L'analyste doitdonc choisir les mots clés en fonction de la formulation du titre, durésumé et de la richesse du langage d'indexation. Normalement, larédaction du résumé précède le choix des mots clés, mais dans la pra-tique, les deux opérations dont effectuées en parallèle, ce qui leurdonne, du reste, toute leur valeur (cf. chapitres vi et vu, p, 121-173).

Les champs « domaine » et « cotation » sont facultatifs. Mais si lechamp « domaine » existe, c'est l'occasion pour le champ « indexation »

d'éviter les termes trop généraux.

ASPECTS TECHNIQUES DE LA RECHERCHE DOCUMENTAIRE INFORMATISÉE

Enfin le champ « typologie de l'information » est obligatoire chaquefois que le sens du texte l'exige. Si un article expose les aspects juridi-ques de l'adoption d'un enfant, par exemple, le sens « adoption d'unenfant » sera dans le champ « indexation », mais le sens « droit » ou« réglementation » ne doit pas s'y trouver, car il peut alors être combinéavec tous les autres termes choisis. C'est dans cet esprit que le champ« typologie » est fortement conseillé pour maintenir la rigueur duchamp « indexation ».

L'analyse documentaire n'est donc efficace qu'effectuée à la lumièrede la recherche qui peut en découler. La délimitation stricte des rôles dechacun des champs de contenu ne doit pas être perçue comme unecontrainte, mais au contraire comme une aide tant en amont (al imen-tation de la banque de données) qu'en aval (interrogation de ta banquede données).

Aspects techniques de la recherchedocumentaire informatisée

Parmi les outils de la recherche documentaire informatisée, certainssont indépendants de l'analyse documentaire :

- les troncatures ou les masques, qui peuvent remplacer un ouplusieurs caractères ;

- les opérateurs de recherche numérique (inférieur, supérieur, égal,compris entre), particulièrement utiles pour affiner la recherchechronologique ;

- les operateurs de proximité (adjacence, distance, etc.), indiquant ladistance entre les mots, particulièrement utiles pour la recherche entexte intégral ".

La recherche documentaire dans les banques de données utilise aussitoutes les ressources de l'algèbre de Boole, permettant le croisementdes différents opérateurs syntaxiques que sont les clés d'accès ou ter-mes interrogeables tels que auteur, titre, date, etc. On peut ainsi recher-

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ANALYSE ET RECHERCHE DOCUMENTAIRES ASPECTS TECHNIQUES DE LA RECHERCHE DOCUMENTAIRE INFORMATISÉE

cher une référence en croisant un auteur et un mot du titre, un type dedocument et un mot clé, plusieurs mots clés, etc. Le choix et le nombrede ceux-ci ne sont donc pas indifférents au travail de l'analyste.

LES OPÉRATEURS BOOLÉENS

Le but de ce manuel n'est pas d'expliquer l'algèbre de Boole et sesincidences sur la recherche documentaire, mais de rappeler rapidement

quels sont les operateurs booléens les plus utilisés.

L'intersection

11 s'agit de l'intersection de deux ou plusieurs ensembles, en reliantles termes qui doivent se trouver dans le document recherché. Si l'oncherche des documents sur la musique folklorique de la Grèce, oncroise l'ensemble des références sur la musique, sur le folklore, sur laGrèce, l'intersection des trois ensembles devant normalement offrir desnotices portant sur le sujet. L'opérateur d'intersection s'écrit ET ouAND, selon le système en vigueur. L'équation de recherche prendra laforme illustrée par la figure 1, ci-contre.

L'union

II s'agit de l'union de deux ou plusieurs ensembles, en reliant lestermes dont l'un, l'autre ou les autres doivent être présents dans ledocument recherché. Admettons que, dans l'exemple précédent, le lan-gage d'indexation propose à la fois « musique folklorique » et « musi-que populaire ». Dans ce cas, toutes les références indexées par l'un,l'autre ou les deux termes peuvent être utiles à la recherche documen-taire. L'équation de recherche prendra la forme indiquée ci-contre parla figure 2.

Figure l - Intersection :musique ET folklore ET Grèce

Figure 2 - Union ;(musique folklorique OU musique populaire) ET Grèce

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ANALYSE ET RECHERCHE DOCUMENTAIRES

L'exclusion

II s'agit de l'exclusion d'un ensemble, en reliant des termes dont l'unne doit pas se trouver dans les références recherchées. Si la question neconcerne que la musique folklorique et populaire, mais pas en Grèce,l'équation sera ainsi formulée :

Figure 3 - Exclusion :(musique folklorique OU musique populaire) SAUF Grèce

Pour la majorité des recherches documentaires, on utilise les opéra-teurs booléens. Tout documentaliste doit avoir cette réalité présente àl'esprit au moment de choisir des mots clés en relation avec tous lesautres termes des champs de contenu. Dans la mesure où il suffit d'unmauvais croisement pour obtenir un résultat égal à zéro, on comprendvite l'importance du choix des termes ; on comprend également qu'unnombre trop important de termes mène rapidement au même résultat.Ce travers de la surindexation sera étudié au chapitre vu, p. 163-168.

U RECHERCHE DOCUMENTAIRE EN TEXTE INTÉGRAL

LE BRUIT ET LE SILENCE

Dans le jargon documentaire, on appelle « bruit » toute réponseobtenue n'ayant aucune pertinence au regard de la question posée, et« silence » le fait de ne pas obtenir de réponses alors que les documentspertinents sont dans la banque de données. Le premier inconvénienttient au fait qu'on a choisi un trop grand nombre de mots clés dans unregistre trop large, et le second tient à une carence de mots clés ou à unchoix de mots clés trop spécifiques. Le bruit et le silence sont princi-palement dus à une mauvaise indexation. Certains logiciels permettentl'autopostage (cf. p. 217-218), qui atténue principalement les risques desilence.

La recherche documentaire en texte intégral

RECHERCHE SUR FICHIER INVERSE

Les banques de données documentaires dites en « texte intégra! »comprennent le texte des documents eux-mêmes, généralement associéà une notice documentaire composée de champs comparables à ceuxdétaillés en pages 101 à 105. On pourrait penser que la présence dutexte, dans son intégralité, dispense de l'élaboration de cette notice. Enfait, il existe toujours des informations que le texte lui-même ne peutapporter et qui sont propres aux champs de description : « auteur »,« date », « source », « type du document », etc.

Mais la pratique de la recherche documentaire a poussé un certainnombre de documentalistes à créer également des champs de contenupour pallier les insuffisances ou les erreurs dues au texte intégral. Eneffet, les outils de recherche les plus répandus aujourd'hui portent surles mots du texte ; à partir d'un fichier inverse, c'est-à-dire d'un indexde tous les mots du texte, moins les mots vides (prépositions, "articles,etc.), ces moteurs de recherche, qui existent depuis de nombreusesannées, permettent de retrouver les concepts exprimes grâce à une

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ANALYSE ET RECHERCHE DOCUMENTAIRES U RECHERCHE DOCUMENTAIRE EN TEXTE INTÉGRAL

coïncidence exacte entre les mots de la question et ceux du document.Mais comme ils ne sont capables de reconnaître ni la morphologie ni lasyntaxe d'une langue, on en mesure tout de suite les limites. C'est pour-quoi, par exemple, les documentaliste du quotidien Le Monde {dont labanque de données est en texte intégral) élaborent un champ appelé« titre complémentaire », comparable à un petit résumé, puis indexentles articles à l'aide d'un thésaurus. II est vrai que la presse ne fournitguère de titres sûrs ; face aux difficultés d'accès par ce biais, la recher-che dite sur « titre » est en fait toujours effectuée sur « titre complé-mentaire », puis sur la zone d'indexation, et en dernier lieu sur le texteintégral.

En effet, si l'on cherche uniquement, dans le texte intégral, les articlesconcernant la transmission de la maladie de la vache folle aux chats, onobtient le résultat suivant : « vache folle » et « chat » = 12 documentsdont 2 pertinents.

Pour obtenir le meilleur résultat et uniquement des articles pertinents,il faut poser l'équation suivante :

[dans le titre - complémentaire -] : « vache folle » et[dans le texte intégral] (transmet ou transmettent ou transmettre ou

transmis ou transmise ou transmises ou transmission)adj4 (chat ou chats)

= 4 réponses toutes pertinentes.

I l est nécessaire de mentionner la notion de transmission en l'appro-chant de la notion de chat (adj4), sinon l'on risque d'obtenir desdocuments sur la transmission de la maladie à l'homme. La combinai-son du titre complémentaire et du texte intégral permet à la deuxièmerequête d'aboutir à un meilleur résultat.

On voit que l'interrogation du seul texte intégral génère beaucoup debruit, surtout quand on ne peut pas compter, dans cette opération, surla pertinence des titres ; pour en donner un aperçu, plusieurs articles surla vache folle sont présents dans Le Monde sous les titres suivants :« Après minui t , fais ce qu'il te plaît », « Maladies à prions », « Lespouvoirs publics doivent passer aux actes », « L'inaccessible généalogiedu vivant »...

La recherche documentaire en texte intégral ne peut donc pas fairel'économie d'un traitement en amont si l'on veut la rendre performante,et le documentaliste a toujours un rôle à jouer pour améliorer la perti-nence des recherches. 11 est, du reste, assez logique de penser qu'untexte est écrit en utilisant toutes les ressources de la langue naturelle, etqu'il faut beaucoup de chance pour trouver rapidement le terme qui per-mettra l'accès direct aux différentes et légitimes formulations suivantes(qu'elles soient au singulier ou au pluriel), du type : « élection présiden-tielle », « élection du président de la République », « élection du chefde l'État », « échéance électorale présidentielle »...

RECHERCHE PAR L'INTERMÉDIAIRE D'OUTILS UNGUISTIQUES

L'exemple précédent démontre la difficulté de la recherche en texteintégral. Depuis déjà longtemps, existaient quelques logiciels prati-quant les techniques statistiques afin de classer les réponses par ordrede pertinence, ceci grâce au calcul de la cooccurrencc des mots pourprésenter en premier les documents considérés comme répondant lemieux (ou le plus ?) à la question.

Ces outils linguistiques ont été particulièrement améliorés. Ilsreconnaissent la structure des mots et des phrases grâce aux trois étapesde l'analyse linguistique qui s'applique à la forme des mots grâce àl'analyse morphologique, à l'agencement grammatical grâce à l'analysesyntaxique, et au sens grâce à l'analyse sémantique.

La forme des mois

Cette première étape permet de résoudre les difficultés dues :- aux expressions (pomme de terre, Amérique latine) ;- aux singuliers et pluriels (cheval - chevaux, social - sociaux) ;- aux formes verbales (transmet, transmettent, transmis, transmise,

transmises sont ramenées à transmettre). ,

Toutes les flexions, verbales ou nominales, subissent une opérationde lemmatisation qui leur assure une forme et une seule.

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ANALYSE ET RECHERCHE DOCUMENTAIRES LA RECHERCHE DOCUMENTAIRE EN TEXTE INTÉGRAL

Cette opération peut être illustrée par l'exemple suivant : une recher-che portant sur « la réhabilitation des logements sociaux » a été formu-lée dans ces termes en interrogeant les rapports en texte intégral de laCour des Comptes (interrogeables soit sur cédérom, soit par le siteInternet de la Cour : http://www.ccomptes.fr). L'outil logiciel a analyséla question et l'a reformulée en prenant en compte les mots choisis sousles différentes formes suivantes :

logements : locataireslogements : localiflogements : locationlogements : logementlogements : logerlogements : logeurlogements : logeurslogements : louablelogements : louerlogements : loyerlogements : relogerlogements : relouersociaux : socialsociaux : socialementsociaux : socialisationsociaux : socialisersociaux : socialisteréhabilitation logements ; réhabilitation locatifréhabilitation logements : réhabilitation logementréhabilitation logements ; réhabiliter logementlogements sociaux : locataire sociallogements sociaux : locatif sociallogements sociaux : location sociallogements sociaux : logement sociallogements sociaux : logeur social

A la différence de la recherche sur le texte sans outil d'analyse, cetravail est effectué automatiquement par le logiciel. Même si certaineséquivalences n'entrent pas dans le cadre de la question posée (socia-liste, socialiser), l'outil logiciel utilisant l'analyse morphologique per-met de retrouver des documents de façon beaucoup plus efficace quepar le seul fichier inverse.

l

L'agencement grammatical

Cette deuxième étape de l'analyse linguistique détermine la naturegrammaticale des mots : nom, verbe, adjectif,... On peut ainsi distin-guer or en tant que nom ou préposition, avions en tant que substantifpluriel ou imparfait de l'indicatif, etc. Grâce à l ' identification précisedes mots ou groupes de mots constituant la requête, les outi ls linguisti-ques actuellement disponibles permettent d'accorder à ceux-ci un poidsdifférent. Les réponses apparaissent par ordre de pertinence car lelogiciel s'appuie aussi sur une analyse statistique, donc sur un ordred'occurrence des termes employés. Ainsi dans la requête : « la réhabili-tation des logements sociaux », tout le poids de la question porte sur legroupe de mots « logements sociaux », puisque la requête posée sousla formulation « rénovation des logements sociaux » donne le mêmepremier lot de résultats ; les termes « réhabilitation » et « rénovation »sont pris en compte dans un deuxième temps. Dans ce dernier cas. lesrésultats sont proches, mais l'ordre de présentation des documentsdevant répondre à la question est modifié.

L 'out i l l inguistique analyse la question et non plus le document. Plusla question est formulée de façon précise, plus il y a d'informations àtraiter et plus le logiciel parvient à trier et présenter les résultats parclasses pertinentes. A la requête : « le financement des travaux de réha-bilitation des logements sociaux », le logiciel répond par plus de dixréponses classées par ordre de pertinence (voir en page suivante).

La première réponse est pertinente, puisque tout le poids est donné ausens « travaux de réhabilitation des logements locatifs sociaux », lanotion de financement ayant un poids secondaire.

La seconde réponse pondère en trois degrés : d'abord « financementdes travaux de réhabilitation », puis « logements locatifs », enfin« sociaux ». Le document consulté porte bien sur tous ces aspects, saufqu'il est limité au financement de travaux dans le domaine de l'eau. Leterme « eau » n'apparaissant pas dans la requête, on a là une excellenteillustration de la l imite d'un système qui interroge la requête et non pasle document.

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ANALYSE ET RECHERCHE DOCUMENTAIRES

1 - Document contenant le(s) lcnnc(s) :

2 - Documenl contenant le(s) lenne(s) :

3 - Document contenant le(s) terme(s) :

4 - Document contenant le(s) tcrme(s) :

5 - Document contenant le(s) terme(s) ;

6 - Document contenant le(s) terme(s) :

7 - Document contenant le(s) terme(s) :

8 - Document contenant le(s) terme(s) :

9 - Document contenant ]e(s) terme(s) :

10 - Documenl contenant le{s) tcrmc(s) :

(ra\i ta l ion-logement slocatifs-sociaux, financement

financemcnt-travaux-réliabilitatron. loge-ments-locatifs, sociaux

financement-travaux, logements locatifs-sociaux, réhabilitation

travaux-réhabilitation, logements locatifs,financement, sociaux

logements-locatifs-sociaiix. financement,travaux, réhabilitation

financement-travaux, locatifs sociaux,réhabilitation, logements

[ogcmcnls-locatifs-sociaux, financement,travaux

réhabilitai ion-logements, financement,travaux, sociaux

financement-travaux, localils-socraux,logements

réhabilitation-logements, financement,travaux

Si la troisième réponse renvoie à un document pertinent. la quatrièmelimite le terme « social » à « l'objet social » d'une société...

Selon la formulation de la question, l'ordre des documents proposésest modifié. Si la requête se présente ainsi : « les problèmes financiersliés aux travaux d'amélioration du parc de logements locatifs d'HLM »,les résultats sont très proches des précédents, la troisième réponsearrivant alors en première position.

Ce type d'outil linguistique recourt à des outils d'analyses morpho-logique, syntaxique et statistique des textes ; il permet d'obtenir desréponses correspondant à la question posée, ee qui provoque souventdu bruit mais évite le silence.

Le sens

L'analyse sémantique, cette troisième étape de l'analyse linguistique,met en œuvre des réseaux sémantiques utilisant des dictionnaires deconnaissances. Ces outils s'attachent principalement à la compréhen-

LA RECHERCHE DOCUMENTAIRE EN TEXTE INTÉGRAL

sion des mots et permettent de retrouver des informations qui ne sontpas formulées avec la terminologie employée dans le texte même, et dedistinguer les termes homographes (cf. p. 183-184), donc de retrouverle mot canon en tant que pièce d'artillerie, forme musicale ou règleecclésiastique, etc.

L'exemple proposé est extrait de la banque de données de l'Institutnational de la propriété industrielle (INPI) consacrée aux brevets(http://www.inpi.fr). La première formulation a été : « machines pourrécolter les prunes » et le premier résultat : « machines à dénoyauter lesfruits ou à extraire des fruits les parties contenant les pépins, caractéri-sées par leur dispositif d'extraction » ; les autres résultats concernaienttoutes sortes de machines {dont les moissonneuses.,.) et, enfin, endixième position, la réponse a été : « cueillette de fruits, légumes, hou-blon ou de produits similaires : dispositif pour secouer les arbres ouarbustes ».

Si la question est formulée « machine à cueillir des prunes », laréponse passe de la dixième à la quatrième position ; si l'on demande« machines pour secouer les prunes », en deuxième position et enfin enpremière position si la requête est formulée ainsi : « secouer des arbrespour cueillir des fruits ». L'expérience montre que le résultat est meil-leur si l'on privilégie dans la demande le procédé à mettre en œuvre :« secouer » et un terme générique : « fruit » au lieu de « prune ».

Toutefois, les dictionnaires de connaissances permettent de trouverune réponse alors même qu'aucun des termes utilisés dans la requête nefigure dans la réponse. Ainsi, à la demande « machines à récolter desprunes », la réponse est : « cueillette de fruits, légumes, houblon ou deproduits similaires : dispositif pour secouer les arbres ou arbustes » ;l'utilisation automatique des dictionnaires permet d'associer le terme« récolter » à « cueillette » et « prunes » à « fruits ».

L'association de l'analyse linguistique de la question et des diction-naires de connaissances permet de trouver la réponse à une questionqui, dans un .système booléen, n'aurait pas abouti. Ces logiciels depilotage du texte intégral sont de plus en plus performants, surtout surdes corpus importants. Connaissant un large développement, ils sont

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ANALYSE ET RECHERCHE DOCUMENTAIRES

souvent interrogés, sur cédérom ou Internet, sans que l'utilisateur ensoit même conscient. Ils s'attachent, comme on l'a vu ci-dessus, à lacompréhension des mots. La recherche s'emploie actuellement àdévelopper des prototypes pour comprendre le texte.

La recherche d'informations sur Internet

On a vu qu'Internet n'était pas actuellement un outil pour la recherchedocumentaire stricto sensu. Mais son développement entraîne déjà —et ce phénomène ne fera que croître — les recherches pour améliorerson utilisation. À l'heure actuelle, deux types d'outils sont mis à ladisposition des usagers : les moteurs et les répertoires.

LES MOTRURS DE RECHERCHE

Les moteurs de recherche sur Internet (Altavista, Excite, Ecila, etc.)fonctionnent en mode recherche sur les mots du texte, comme indiquéci-dessus. S'y ajoutent des algorithmes statistiques qui permettent le trides réponses par ordre de pertinence. La pondération qui est effectuéetient compte d'une part de la place des mots dans la page (présence dansle titre, dans le début de page, dans les métatags,..), et d'autre partd'éléments difficiles à connaître car ils relèvent du secret commercialde chaque moteur.

Les difficultés liées à la recherche d'information sur Internet sontmultiples. Une même question posée avec divers moteurs donne desrésultats très différents. Ceci n'est pas seulement dû au mode de fonc-tionnement du moteur lui-même, mais aussi au fait que chaque moteurn'indexe pas les mêmes parties du Web et ne le fait pas de la mêmemanière. Une façon d'améliorer la recherche est l 'utilisation de « méta-moteurs », c'est-à-dire de robots qui combinent l'utilisation de plusieursmoteurs et permettent d'améliorer la pertinence des résultats.

LA RECHERCHE D'INFORMATIONS SUR INTERNET

LES RÉPERTOIRES

Les répertoires (Yahoo, Nomade, Voilà, etc.) ont été créés pour faireface à la difficulté de la recherche des informations sur le Web. Cesannuaires sont constitués par des documentalistes qui, en amont,indexent les sites et proposent à l'utilisateur une possibilité de consulta-tion hiérarchisée, sur le mode classificatoire.

AUTRES OUTILS

Certains sites proposent des « plans de site » : l'information présentedans le site est organisée selon un plan défini à l'avance. Ceci nousramène à la problématique du classement — un document peut êtrerangé à différents endroits — et de la classification — un concept peutêtre compris et interprété de diverses façons.

Parfois, un moteur de recherche interne au site est mis en place ; ilutilise des techniques de traitement automatique du langage naturel(TALN) qui intègrent tous les outils linguistiques déjà décrits ci-avant,plus des dictionnaires très puissants, enrichis de relations sémantiquesproches du thésaurus (cf. p. 203-205), ce qui permet de retrouver, parexemple, des documents concernant les « impôts en matière de succes-sion » alors que le texte indique seulement « la fiscalité patrimoniale ».

Face à ces nouveautés qui ne font que s'améliorer et se diversifier demois en mois, on pourrait douter de la pérennité du travail d'analysedocumentaire. Mais l'étude attentive de la mise en œuvre de serveursweb démontre au contraire que cette opération perdure sous une formerelativement stable; à plus forte raison dans un site (Internet ouIntranet) spécifique, au sein duquel les modalités de la recherche seramènent à ce qui a été précédemment exposé dans ce chapitre.

En effet, on intègre au document numérisé lui-même des méta-données qui ressemblent — quant au contenu — aux champ*s debanques de données classiques (cf. p. 101-102). Qu'on en juge parl'extrait du Guide pour les producteurs d'information d'EUROPA,

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ANALYSE ET RECHERCHE DOCUMENTAIRES

serveur web de l'Union européenne^ qui distingue dix métadonnéesobligatoires : référence, titre, source, langue, producteur d'information,type, date de publication, date-alarme, classification, mots clés. Si l'onexclut la date-alarme qui indique quand il faut mettre le document àjour ou l'éliminer, on se retrouve en terrain connu, même si les règlesd'écriture diffèrent — ce qui n'exige qu'un apprentissage complémen-taire. Nui doute que les métadonnées « classification » et « mots clés »ne posent les mêmes problèmes que ceux exposés tout au long de ce

manuel.

NOTES

1. Source: [30].

2. Source: [2], p. 137.

3. Source: [56], p. 214.

4. Source : [26], p. 126.

5. Source: [71], p. 152.

6. Idem, p. 164. L'ensemble du chapitre du Menon consacré au paradoxe de la

connaissance a été très bien commenté par Bertrand Sajus [73].

7. Pour qui voudrait approfondir la notion de problème, voir l'ancien mais

toujours inégalé [17].

8. Source : [69].

9. Source: [19], p. 17.

10. Source : [35].

11. Pour en savoir plus sur ces outils, voir [53] p. 63 et [59].

12. Source: [18].

CHAPITRE VILE RÉSUMÉ DOCUMENTAIRE

L'ensemble du travail d'analyse effectué en amont sur les textes aexige du documentaliste un effort important de réflexion et de compré-hension dont l'aboutissement, à ce stade, représente quelques notesmais pas la moindre phrase. C'est donc maintenant que de lecteur atten-tif il devient producteur de résumé, d'indexation et/ou de synthèse,selon les besoins du service et les finalités décidées par la politiquedocumentaire. C'est le résumé que nous allons étudier dans le présentchapitre, ce résumé documentaire qui est de moins en moins présentdans les banques de données. L'explication de cette désaffection estd'ordre économique : rédiger un résumé prend du temps et coûte donccher. Or, étant donné qu'il est impossible de faire l'impasse sur lecontenu, on attend de l'indexation qu'elle joue le rôle du résumé. Ilsemble que cette confusion mène à d'étranges dysfonctionnements,dont on prend conscience au moment de la recherche documentaire.L'un des buts de ce chapitre est d'aider à une réflexion plus large sur lerôle propre du résumé dans une banque de données, en vue d'enréhabiliter l'usage.

Définition

Pour le Robert, résumer consiste à abréger, écourter, réduire, conden-ser. Ce dernier verbe, de nature scientifique, renvoie à la définition dela condensation en physique : action par laquelle un gaz, une vapeurdiminue de volume et augmente de densité par rapprochement de sesmolécules.

Si l 'AFNOR' définit le résumé documentaire comme « l a présen-tation plus ou moins concise du contenu d'un document », on peut doncrapprocher les deux idées : abréger un texte en augmente la densité. Lespublicitaires, qui ne rédigent pas de résumé documentaire, en ontmesuré l'impact depuis longtemps.

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LE RÉSUMÉ DOCUMENTAIRE

Les documentalistes doivent donc être pleinement conscients querésumer un texte, c'est bien condenser son contenu en vue de mettre enévidence l'information utile et nécessaire pour les usagers éventuels dece texte. On ne résume pas un texte pour le texte, mais pour qu'il puisserépondre, à un moment donné, à une question donnée. C'est bien ainsique l'AFNOR en précise le sens dans la norme consacrée au sujet2 :« Le résumé est un texte concis reflétant fidèlement, sans interpré-tation ni critique, le contenu du document. Il a pour but d'aider lelecteur à cerner la pertinence du document vis-à-vis de l'information

recherchée. »

Usages et usagers

Puisque le résumé ne saurait être une fin en soi, il faut avoir constam-ment à l'esprit l'usage qui en sera fait et l'usager auquel il est destiné.

ALIMENTATION D'UNE MÉMOIRE DOCUMENTAIRE

Les documentalistes remplissent les champs « résumé » des banquesde données internes et externes. Le but est d'augmenter la richesseinformative d'une référence dans son fond (complément aux autreschamps de contenu) et dans sa forme (utilisation de la languenaturelle). Ces résumés servent aux utilisateurs dans le cadre de recher-ches documentaires, sur un sujet précis, dans un but et sur une durée

bien délimités.

ACCOMPAGNEMENT DE RÉFÉRENCESDANS LES BULLETINS BIBLIOGRAPHIQUES

II est d'usage de faire suivre les références bibliographiques d'unrésumé du contenu. Le but est le même que l'alimentation d'une banquede do'nnées, mais le cadre est différent : le lecteur cherche à se tenir au

USAGES ET USAGERS

courant, de façon suivie, de la littérature propre à son centre d'intérêt.La situation de recherche n'est plus ponctuelle, mais courante. L'utili-sateur est le plus souvent un spécialiste du sujet.

ACCOMPAGNEMENT DE RÉFÉRENCES DANS LA PARTIE BIBLIOGRAPHIQUEDE REVUES GÉNÉRALES OU SPÉCIALISÉES

Ces résumés ont beaucoup de points communs avec les précédents,mais la majorité d'entre eux présentent un commentaire critique. Les uti-lisateurs, souvent spécialistes, cherchent, outre l'actualisation de leursconnaissances, des opinions, voire des confrontations d'opinions. On nepeut donc parler, dans ce cas, de résumé documentaire stricto sensu.

AUTRES USAGES

Des résumés peuvent également accompagner :- des actes de congrès, colloques ou réunions, afin de donner un

aperçu de chacune des communications ;- des bibliographies thématiques, des dossiers documentaires : ils

sont alors comparables aux résumés des banques de données, voiresimplement issus de celles-ci ;

- des revues de presse : ils sont alors comparables à ceux desbanques de données ; ils sont rédigés dans la hâte pour un documentdont la valeur n'est qu'éphémère, ce que l'on peut considérer comme unvrai luxe. Ne vaut-il pas mieux concentrer son énergie sur les résumésd'une banque de données, dont la raison d'être est de durer ?

La rédaction des résumés repose, bien sûr, sur la connaissance desdestinataires (cf. p. 21-23) soit en tant que personnes, soit en tant quegroupes dont les catégories d'intérêt sont bien définies. Il n'est pirerésumé que celui effectué pour un groupe indéterminé tel que « publicmoyen non iden t i f i é ». S'il existe des « non-destinataires » d'un résume.il revient à l 'auteur de retrouver, dans le résumé, les idées principalesqu'il a souhaité transmettre. C'est ensuite à l'analyste lui-même de

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LE RÉSUMÉ DOCUMENTAIRE US DIFFÉRENTES FORMES DE RÉSUMÉS

maîtriser sa subjectivité et de rédiger sans plaisir ni déplaisir.Cependant, il importe que le documentaliste-analyste soit régulièrementen contact avec la recherche documentaire, devenant par là même usagerde ses propres résumés. Il n'existe, en effet, pas meilleur enseignementque la confrontation personnelle avec ses erreurs, ni meilleure gratifi-cation que l'heureuse constatation de ses réussites...

Les différentes formes de résumés

Le mot « résumé» est plus polysémique qu' i l n'y paraît. Avant deprésenter ce qu'est vraiment un résumé documentaire, il est nécessairede définir la fonction des formes qui s'en approchent.

LE TITRE

Le titre est le premier résumé choisi par l'auteur (cf. p. 102). En tantque premier texte lu, il situe généralement l'article ou l'ouvrage dansson domaine d'intérêt et peut susciter une première hypothèse delecture ; « La traite des esclaves vers les Mascareignes au xvni1 siècle »répond ainsi à ce que l'on peut attendre d'un titre.

Mais cet élément pourtant essentiel est souvent insuffisant. Un texteayant pour titre « La canne à sucre » traitera-t-il des techniques agrico-les ? de la production ? de la transformation ? de l'économie ? de l'en-semble ? « Auvergne et Velay » sont-ils vus sous l'angle de l'histoire ?de l'architecture ? du tourisme ? de la gastronomie ?

Pire, le titre est trompeur. On a déjà observé ce fait à propos de lapresse, mais les ouvrages offrent aussi de bons exemples. Ainsi lesÉpaves antiques ne font-elles rêver qu'un temps : il s'agit, en réalité,d'un traité uniquement technique sur la façon de repêcher les amphores,illustré par l'une des expéditions Cousteau en Méditerranée. Quant à

Message de saule sur roue, ce n'est pas un encouragement au noble artde la bicyclette, mais un traité sur l'amélioration de l'approvision-nement en eau par de nouvelles méthodes d'assainissement pour lapopulation rurale de Colombie...

LE RÉSUMÉ D'AUTEUR

La première version de la norme Z 44-004 ' était consacrée aux résu-més d'auteurs et en précisait le but et le caractère. Le résumé d'auteurest le plus souvent rédigé par celui qui a écrit l'ensemble du texte origi-nal. On peut donc estimer qu'il n'est meilleur résumé que celui qu'arédigé la personne connaissant parfaitement le sujet. Mais l'auteur estcentré sur le contenu, et non sur l 'utilisation de ce contenu ; de plus,étant donné qu'il souhaite que les lecteurs prennent entière connais-sance de son texte, son résumé sera souvent persuasif. Par conséquent,bien que l'analyste ait tout intérêt à s'inspirer de cet écrit, il ne peut leconsidérer comme un véritable résumé documentaire.

LE RÉSUMÉ D'EDITHUK

Le résumé d'éditeur concerne les monographies et se situe en généralen quatrième de couverture. Quelquefois rédige par l'auteur, mais leplus souvent par le service marketing de la maison d'édition, il a pourbut de vendre le livre. S'il présente le contenu, et si l'analyste peut s'eninspirer (hypothèses de lecture), son style est de pure persuasioncommerciale. À nouveau, il ne peut s'agir de résumé documentaire.

LE COMPTE RENDU

Le compte rendu, ou analyse critique, accompagne souvcrU la partiebibliographique des revues spécialisées. Il est rédigé par un spécialistedu domaine ayant les capacités déjuger et la forme et le contenu. Dansla mesure où des jugements sont portés sur la valeur du texte, cette

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LE RÉSUMÉ DOCUMENTAIRE

forme de résumé est toujours signée. L'analyste doit prendre connais-sance du compte rendu critique en gardant ses distances face aux juge-ments de valeur exprimés, sans le considérer, en conséquence, comme

un résumé documentaire4.

LE DIGEST

Le digest est un texte réécrit de façon plus condensée pour « raconterl'histoire » ; c'est une forme vulgarisée du contenu, souvent proche dustyle journalistique. Ces textes entrent dans la catégorie des « connais-sances sensibles»5, insuffisamment solides pour apporter une infor-

mation vérifiée.

L'EXTRAIT

L'extrait reproduit des parties du texte original, les passages jugéssecondaires ayant été rejetés. Ce qui est présenté comme le contenuintéressant est, en fait, coupé de son contexte et peut faire l'objet detoutes les manipulations de sens imaginables. L'analyste ne peut juger

ni de la véracité ni de la réalité du contenu.

LA CONTRACTION DE TEXTE

Cet exercice de style oblige les candidats, pour certains examens ouconcours, à réduire un nombre de mots au 1/100. Cette opération estcentrée sur les capacités des candidats (analyse et synthèse, richesse duvocabulaire} et à aucun moment sur le texte, encore moins sur les ut i l i -sateurs possibles. Si les méthodes de contraction de texte sont valablespour acquérir des réflexes de réduction, le résultat ne s'apparente enrien au résumé documentaire. Les ouvrages relatifs au résumé dans lecadre de la préparation aux concours administratifs sont légion etsouvent redondants ; on peut recommander la lecture de [431.

LES RÉSUMÉS DOCUMENTAIRES

Les résumés documentaires

Que peut-on donc qualifier de « véritable résumé documentaire » ?Dans la formation des documentalistes, on distingue traditionnellementtrois types de résumés. Les deux premiers sont seuls retenus par lanorme, qui en donne la définition suivante.

LE RÉSUMÉ INKORMATIF

« Le résumé infonnatif est une représentation abrégée du document,renseignant sur les informations quantitatives ou qualitatives apportéespar l'auteur. » L'enseignement traditionnel ajoute que ce résumé déve-loppe tous les points essentiels, toutes les informations contenues dansle texte. De plus, i l devrait permettre à l 'uti l isateur de ne pas lire ledocument original.

LE RÉSUMÉ INDICATIF

« Le résumé indicatif se contente de signaler le ou les thèmesd'études. Il concerne les documents qui, par leur nature ou leurampleur, ne se prêtent pas à l'établissement d'un résumé infonnatif. »On ne fait pas de différence entre les types de textes ; un résumé indi-catif cite, énumèrc, indique les points essentiels, les informations utilesque contient le texte. Il est rapide et global, il explicite un titre tropcourt ou incomplet.

RÉSUMÉ SÉLECTIF

Le résumé sélectif est le produit des deux ; citant tous |es pointsessentiels et développant ceux qui intéressent une catégorie spécialed'utilisateurs, il modifie l 'équilibre du texte, mais répond à des besoinsidentifiés.

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LE RÉSUMÉ DOCUMENTAIRE

Rôle du résumé documentaire dans une banque de données

Dans la réalité, ces distinctions sont parfaitement théoriques. C'estsans doute pour les avoir prises au pied de la lettre qu'un grand nombrede services ont décidé de suspendre l'élaboration de résumés dans leurbanque de données. En effet, qui peut raisonnablement envisager d'ex-traire « tous les points essentiels, toutes les informations contenuesdans le texte » ? Qui pense réellement qu'un résumé peut remplacer letexte original ? Le souci du perfectionnisme a poussé les documenta-listes à choisir le résumé informatif et à y consacrer beaucoup d'éner-gie, dans un rapport temps-efficacité qui n'a jamais pu être vraimentévalué. Puis, par souci d'économie (en amont), les résumés ont étéabandonnés et l'on a demandé à l'indexation de remplir leur rôle.

Or, on a vu (cf. p. 105-107) que chaque champ a son rôle et safonction. Une suite, une accumulation de mots clés ne remplacent pasune phrase, même succincte : un poteau indicateur permet de choisir laroute à prendre ; il n'informe pas sur l'intérêt de la ville vers laquelle onse dirige ; on sait simplement qu'on est sur le bon chemin. Ainsi en est-il de l'indexation, qui oriente, et du résumé, qui informe. Mais l'infor-mation véhiculée par le résumé a un objectif unique : aider l'usager àsavoir si ce qu'il cherche se trouve ou non dans le texte, c'est-à-dire àsélectionner les références obtenues après l'interrogation des champs decontenu. Un résumé documentaire ne peut pas remplacer le texte origi-nal ; il ne peut pas apporter toute l'information utile, ni la réponseimmédiate. Il est seulement l 'outil de la sélection, et c'est dans cet espritque sont proposées maintenant quelques réflexions pour l'élaborer.

Comment réaliser un résumé documentaire

Les chapitres précédents ont contribué à répondre à cette question. Eneffet, toutes les activités décrites jusqu'ici reposent sur un aller et retourentre les opérations mentales d'analyse et de synthèse : du particulier au

COMMENT RÉALISER UN RÉSUMÉ DOCUMENTAIRE

général, du simple au complexe, du détail à la globalité — et vice versa.Ainsi, l'appréhension visuelle du document (cf. p. 35-47) précède une lec-ture plus approfondie (cf. p. 49-71), le vocabulaire (cf. p. 84-93) aide à laperception du plan (cf. p. 73-83), des hypothèses de lecture (cf. p. 68-69}sous-tendent la compréhension que l'on doit à présent maîtriser. Résumeret indexer illustrent cette correspondance : l'opération mentale est globalemais les produits sont différents. Ils sont présentés dans deux chapitresdistincts mais, dans la pratique, ils sont élaborés en même temps.

On l'a vu, l'opération d'analyse documentaire comporte trois phases.Ainsi en est-il du résumé : compréhension, sélection, construction.

COMPRÉHENSION

La première phase consiste à observer et comprendre un texte avec unobjectif documentaire ; à partir d'un élément concret (le texte), on va dansl'abstrait (sa signification dans un cadre donné), pour retrouver le concret(l'écriture d'un résumé). C'est ce que Pinto-Molina* appelle le cyclicalprocess. Celte première phase de lecture/compréhension, absolumentessentielle, repose sur une véritable conception de la lecture documen-taire, riche des connaissances du contenu, du document qui le supporte etde tout son paratextc (voir les travaux de Gérard Genctte, principalementorientés sur les œuvres littéraires, à adapter, bien sûr, au contexte del'information scientifique et technique), riche également des compétencesde l'analyste (connaissances, expérience). Cette lecture esl toujours orien-tée vers son util isation ultérieure par un nombre x de personnes, connuesou non. Grâce à cette phase de recherche de la structure profonde du texteet du vocabulaire pertinent (dénoté et univoque), la sélection peut débuter.

SÉLECTION

I

À la question « De quoi s'agit-il dans ce texte ? », une ou plusieursréponses ont été apportées. Peu importe, du reste, sous quelle forme etdans quel style. À cette étape, i l est essentiel de ne pas se préoccuper

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de la tournure des phrases, d'oublier les acquis préconisant l'emploid'un « beau style », et de ne pas chercher à rédiger sous une forme défi-nitive. !1 s'agit simplement ici de réduire T (le texte) en t (le résumé),

en ayant en mémoire les règles suivantes7 :« / conserve le contenu informât!f de T ;

« les éléments de T qui ne sont pas dans t ne nuisent pas« à la cohérence de T ;

« ce qui est vrai pour t l'est pour T. »

Les textes de l'information scientifique et technique, majoritairementrédigés par des auteurs ayant, peu ou prou, pratiqué l'enseignement, onttendance à présenter plusieurs fois et de façon différente les mêmesnotions. Robert Escarpit* estime à 50 % le (aux de redondance de lamajorité des textes écrits. On se rappelle que la reformulation (cf. p. 76)est un signal donné par l'auteur : s'il réitère un élément de son discourssous une autre forme, c'est qu'il tient à le communiquer. Le documen-taliste sait donc qu'il devra retenir l'information ainsi transmise, maisnon la répéter. Résumer, c'est donc déjà éliminer d'un texte ce qui a été

écrit plusieurs fois, de différentes manières.

La grille de lecture proposée pages 76 à 79 indique bien l'articulationentre les « items », à retenir, et les compléments d'information, à sérierselon leur importance dans l'objectif documentaire. S'il s'agit d'élé-ments secondaires d'information, on peut les éliminer dans le résumé

final,

Enfin, la même grille met en lumière certains éléments intéressantsdans le fil du discours, maïs non pertinents, donc inutiles pour lacompréhension du sens, tels que les illustrations, les citations, etc.

Complémentsd'information

COMMENT RÉALISER UN RÉSUMÉ DOCUMENTAIRE

Cette phase de sélection-élimination réduit l'écrit à ses élémentsjugés pertinents en regard du texte lui-même et de son objectifdocumentaire. Ces éléments doivent alors être reconstruits.

CONSTRUCTION

Pour un certain nombre de chercheurs en science de l'information,cette phase est souvent appelée « phase d'interprétation » ; « Onceselected (contractée, reduced and condensée) lext nnist be interprcted,a.ssigning it a content.*' » « Qu'en est-il d'un texte écrit, que l 'auteurgénère et confie ensuite à divers actes d'interprétation, comme on jetteune bouteille à la mer ? '" » Ce terme gêne l'analyste, qui se veut tou-jours à l'abri d'un quelconque commentaire sur l'œuvre résumée. Maislo interpret signifie également «traduire». I I existe de nombreuxpoints communs entre le travail de l'analyste et celui du traducteur, cequi nous remet en mémoire l'adage italien traduttore, tradifore. Letraducteur est-il toujours un traître ? L'analyste peut-il toujours être sûrde ne pas interpréter ? Ou peut-on affirmer que l'analyse documentaire,bien qu'elle ne relève pas des sciences exactes, a quelque chose à voiravec la logique floue : « The t\vo main sets offoofs for interpreling areinverse and complementary : déduction and induction, reasoning andinference, Reasoning involves security ; inference involves probability.The basic activities tnay be improved when applied in a furzvnumner. " »

« Le résumé est une construction nouvelle mais qui suppose entrel'auteur et le lecteur un savoir commun. | : » C'est donc pendant cettephase que l'analyste doit serrer au plus près l'objectif documentaire durésumé, pour mettre en lumière le sens utilisable, tout en respectantautant que possible les principes suivants :

- linéarité : le résumé doit suivre l'ordre de l'énoncé ;- homogénéité : le résumé doit respecter l'importance de critique

partie du texte ;-fiabilité : le résumé doit présenter le sens du texte, non un commen-

taire ou un jugement de valeur sur le contenu ou les idées exprimées.

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LE RÉSUMÉ DOCUMENTAIRECOMMENT RÉALISER UN RÉSUMÉ DOCUMENTAIRE

Selon les lieux et les objectifs, la construction peut suivre un schémapréétabli. C'est le cas de certains laboratoires de recherche fondamen-tale ou appliquée. Robert Pages, directeur du Laboratoire de psycho-logie sociale de la Sorbonne, demandait à ses analystes de rédiger lesrésumés selon l'ordre suivant : contexte, but (objectif de l'auteur), thè-mes (spécifications du problème, notamment variables et hypothèses),arguments (moyens de démonstration dans le cadre d'une démarcheformelle), procédures (démarche et moyens matériels), résultats,discussion. On peut s'inspirer de ce schéma ou en construire d'autres,en fonction de la nature des textes à résumer.

En fait, la construction d'un résumé repose beaucoup sur la recherchedu plan (cf. p. 73-83), sur la structuration interne du texte lui-même. Lerepérage d'ensembles cohérents permet de hiérarchiser, après les avoirsélectionnés, les items exposés. Ce travail de mise en place des ensem-bles facilite la rédaction. L'exercice 15 (p. 148) illustre bien la néces-sité de cette phase préalable de structuration.

RÉDACTION

Cette étape est souvent appelée « synthèse », dénomination pertinentepuisqu'il s'agit d'utiliser les éléments sélectionnés dans le texte et deconstruire, à partir d'eux, un ensemble cohérent et lisible. Toutefoisl'emploi de ce terme est vivement déconseillé, dans la mesure où il peutentraîner une confusion entre la synthèse documentaire, effectuée àpartir de plusieurs documents sur le même sujet, et la rédaction d'unrésumé documentaire, qui s'applique à un texte unique.

Rédiger un résumé documentaire nécessite une certaine aptitude àl'expression écrite. D'excellents manuels sur ce sujet | l peuvent aider lesnéophytes ou les documentalistes qui ont perdu l'habitude d'écrire ; laprofession, en morcelant ses activités, provoque malheureusement detelles déperditions. La métaphore sportive se révèle, ici encore,adaptée : écrire quotidiennement est la meilleure façon de trouver etd'entretenir sa forme.

Il convient cependant de garder toujours à l'esprit que la finalité de larédaction n'est pas le « beau style », mais bien la lisibilité, garante del'impact qu'aura le texte résumé sur le lecteur final, sans oublier que lacompétence du destinataire n'est pas nécessairement celle de l'émet-teur : « Le scriptcur doit anticiper, à travers sa propre lecture du textequ'il produit, l'activité de lecture de celui auquel il s'adresse. M » Cecine doit pas occulter le fait que le résumé est un simple passage entre letexte original (l'émetteur) et celui qui le lira (l 'utilisateur), l'analyste sesi tuant dans ce cadre comme un lecteur-scripteur intermédiaire géné-rant, lui aussi, un texte (le résumé) : « Générer un texte signifie mettreen œuvre une stratégie dont font partie les prévisions des mouvementsde l'autre — comme dans toute stratégie. l? »

Alors, quelle stratégie mettre en œuvre ? Sourions, au passage, àpropos de la réflexion de Jean-Luc Godard '" qui, après avoir lu l'édito-rial d'un quotidien, demandait au rédacteur en chef s'il rédigeait, luiaussi, en colonnes avant de donner son papier à la composition... Onrédige pour être lu, certes. Mais comment être lu ? Quatre maximes'7peuvent être méditées :

<( - maxime de la quantité : fais en sorte que ta contribution soit infor-mative autant que le requiert la situation d'échange ;

« - maxime de la qualité : ne dis pas ce que tu crois être faux et neparle pas de ce dont tu n'as pas de preuves adéquates ;

« - maxime de la relation : ne parle pas pour ne rien dire ;« - maxime de la manière : évite les expressions obscures, l'ambi-

guïté, sois bref, sois conséquent. »

Ce viatique en tête, on peut aborder les formes possibles d'un résumédocumentaire.

Style télégraphique ?

« Bien sûr que non ! », s'exclament les puristes. Et pourquoi pas, si letcxle le permet ? La décision de recourir à ce style doit être'prise trèsrapidement. Si la réponse à la fameuse question « De quoi s'agit-il ? ».s'exprime naturellement sous forme de phrases non verbales, pourquoine pas les accuei l l i r (elles quelles ? Certains textes, par exemple tous

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LE RÉSUMÉ DOCUMENTAIRE

les textes descriptifs, s'y prêtent plus que d'autres. Ecrire en styletélégraphique (qui envoie encore des télégrammes ?) revient à changerla syntaxe et à pratiquer ce que les linguistes appellent la « thémati-sation ». Ainsi la phrase suivante IR : « Giraudoux écrivait avec éléganceet même avec un peu d'affectation ; il aimait les expressions nouvelles,les mots rares, les belles cadences... » est thématisée en : « style deGiraudoux ». La thématisation est, du reste, une opération classique

préalable à l'indexation.

Il est sans doute plus difficile d'écrire en style télégraphique quand untexte, de type problématique, rend compte d'opinions complexes et deconfrontations d'idées. Mais il est peut-être plus simple de commencerle résumé par une phrase introductive telle que « Comparaison entre Xet Y sur les domaines suivants : . . .» que par des phrases alambiquéesd'où ne se dégageront pas tout de suite la clé et l'enjeu du texte original.La seule règle à appliquer est la suivante : quel que soit le choix opéré,il faut le maintenir ; style télégraphique ou style rédigé, mais maintenudu début à la fin. Il ne saurait être question de variations ou d'alternance.

Style rédigé

Existe-t-il un style propre au résumé documentaire ? Peut-on parlerd'écriture documentaire, ou simplement renvoyer aux règles de lacommunication scientifique^, donc à un style froid, objectivé et distan-cié ? En effet, l'auteur du texte original énonce directement, tandis quel'analyste rend compte de l'énoncé T. Quelques recommandationss'imposent, par conséquent :

- éviter les tournures personnalisées (« nous nous trouvons », « nous

pensons », « nous devons ») ;- entrer directement dans le sujet sans commencer par : « l'auteur

présente », « dans cet article » ;- faire ressortir, grâce à l'écriture, à la ponctuation et au rythme des

phrases, le nombre d'items exposés. Il est inutile d'écrire « dans la pre-mière partie », « dans la deuxième partie », alors qu'il existe des motsd'articulation (cf. p. 84) aussi utiles à la lecture qu'à l'écriture ;

- utiliser le vocabulaire de l'auteur dans la mesure où il présente uncaractère permanent, ce qui ne signifie pas faire des collages de cita-

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lions. « Si l'auteur a explici té de façon concise des notions complexes,il ne faut pas hésiter à employer telles quelles des phrases (ou des élé-ments de phrases) présentes dans le texte plutôt que de chercher mala-droitement à le paraphraser.2" »

Concision des phrases

Un résumé documentaire efficace repose sur la concision des phraseset la précision du vocabulaire. La façon dont les phrases du résumé sontconstruites dépend beaucoup de la structure du texte original. Lerésumé peut donc avoir un caractère :

- chronologique. Il indique une succession de faits dans le temps :« le bilan 1993... le bilan 1994»;

- ènumératif. Il indique une succession de faits, de situations dcnonvbrables successivement « premièrement, deuxièmement, troisième-ment », ce qui est différent de «première partie, deuxième partie».L'éiuimération s'applique ici aux faits ou aux idées, et non à la façondont ils sont présentés ;

- logique. Il ind ique une organisation raisonnée du discours dans unenchaînement cohérent des idées : « d'abord, puis, ensuite, enfin »." p u i s q u e , donc » ;

- alternatif. Il propose deux idées possibles : « soit, soit », « ou, oubien » ;

- antithétique. Il oppose deux idées, rapprochées pour amplifierl'effet de contraste : « au contraire, en revanche », « d'un côté, del'autre ».

Si une phrase concise est courte, elle doit pourtant rendre compte,sans trop de coupures, de la structure logique du raisonnement et del'articulation des idées. C'est la ponctuation (cf. p. 41-43) qui assurealors la lisibilité. A nouveau, la lecture est complémentaire de l'écri-ture. Si le point, la virgule, le point-virgule et les deux-points sont bien-venus dans un résume documentaire, il faut restreindre l'usage desparenthèses, des guillemets, des lirets grammaticaux, et éviter absolu-ment les points de suspension et d'exclamation.

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LE RÉSUMÉ DOCUMENTAIRE

Précision du vocabulaire

À la concision de la phrase doit correspondre la précision du vocabu-laire. L'idéal serait de choisir un maximum de termes dans le vocabu-laire scientifique et technique spécialisé (cf. p. 86-87) dont le caractèremonosémique garantit la juste transmission du sens entre auteur etlecteur. Mais l'essentiel est d'éviter tous les termes porteurs de conno-tation. 11 conviendra, par exemple, de préférer « accident » à « catastro-phe », « difficulté » à « crise », même si l'auteur a choisi ces termes.

Quant à cette phobie bien française de la répétition des termes, si ellepeut être justifiée pour les textes rédigés en « beau style », elle provo-que de nombreux contresens ou faux-sens dans des écrits de naturescientifique et technique, et tout particulièrement dans les résumésdocumentaires. Voilà pourquoi il est vivement recommandé, pour cesderniers, de préférer la répétition à un supposé synonyme désastreux.

Enfin, il convient de choisir les mots du résumé en fonction desautres champs de contenu (cf. p. 102-107) ; il est préférable de ne pasréutiliser les mots du titre et de l'indexation, tout au moins sous lamême forme. En s'équipant d'un bon dictionnaire de langue, l'analysteaugmente la richesse de son vocabulaire et la souplesse de sa rédaction.

Un résumé n'est pas une œuvre littéraire. Autrement dit, le style doitêtre correct, bien sûr, mais il faut toujours garder à l'esprit sa vocationpremière : transmettre le sens du texte original.

Présentation formelle

Un résumé documentaire n'est jamais isolé de l'identification biblio-graphique du texte primaire. Dans une banque de données, les champsde description (cf. p. 102) accompagnent le champ du résumé. Dans unbulletin bibliographique, la notice bibliographique, rédigée selon lesnormes ou les spécifications de l'unité documentaire, précède toujoursle résumé documentaire.

Le résumé documentaire se présente sous la forme d'un paragrapheunique,.sans alinéa ni numérotation. «C'est essentiellement un texte

COMMENT RÉALISER UN RÉSUMÉ DOCUMENTAIRE

sans tableau ni illustration et en principe sans diagramme ni formulecompliquée.21 » Son contenu doit être rapidement et globalement perçu.

Décider a priori combien de mots doit comprendre un résumédocumentaire n'a aucune raison d'être. Cette contrainte vaut, certes,pour les exercices de contraction de texte (cf. p. 126), mais leur finalitén'a aucun point commun avec celle du résumé documentaire. Un textedoit être résumé en fonction de la richesse du sens qu'il véhicule, nonen fonction du nombre de mots utilisés, ïl fut un temps où les systèmesinformatisés imposaient un nombre limité de caractères, mais c'est deplus en plus rare. À moins d'être encore soumis à cette sujétion, iln'existe aucune raison pour soumettre la rédaction d'un résumédocumentaire à une longueur préalablement déterminée.

Derniers conseils

POUR ASSURER LA PERTINENCE

• Adapter chaque terme à la fois à l'expression des notions contenuesdans les documents primaires et à l'usage normal du vocabulaire.

• Ne pas dévier le sens de l'information : faux-sens (conformité).

• Ne pas dénaturer le sens de l'information : contresens (véracité).

• Choisir chaque terme non seulement en fonction du contenuinformatif du texte — prioritaire — mais aussi en fonction des profils,motivations, centres d'intérêt et niveau de compréhension desutilisateurs.

POUR AUCiMIiNTER L'HFRCACITR

• S'assurer que tous les termes choisis sont utiles.

• Vérifier qu'une notion est exprimée par un seul terme.

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LE RÉSUMÉ DOCUMENTAIRE

• Contrôler qu'un terme ne sert à exprimer qu'une seule notion.

• Ne jamais utiliser les mots généraux ou athématiques (« rôle »,« principe », « type », etc.) seuls.

POUR TENDRE VERS L'OBJECTIVITÉ

• Choisir les termes dans un souci de neutralité.

• Éviter les termes subjectifs ou relatifs au temps (« renouveau »,« décadence », « ancien », « moderne », « contemporain », « récent »,etc.).

• Éviter les termes porteurs d'options, de valeurs.

» Résister aux variations de vocabulaire qu'entraîné la mode.

NOTES

1. Source : [7].

2. Source : [3].

3. Source : [3].

4. La norme Z 44-004 de décembre 1984 indique expressément que ce genrede résumé ne fait pas partie du travail documentaire.

5. Source : [14], p. 32.

6. Source : [70], p. 225.

7. Source : [25].

8. Source : [34].

9. Source: [70], p. 231.

COMMENT RÉALISER UN RÉSUMÉ DOCUMENTAIRE

10. Source : [33], p. 68.

1 1 . Source : [70], p. 233.

12. Source : [3].

13. Pour tout ce qui concerne le résume documentaire, voir, en particulier, lespetits manuels de la collection « Profil-Formation » des éditions Hatier.

14. Source; [76]. p. 151.

15. Source: [33], p. 70.

16. « À voix nue ». entretien entre Jean-Luc Godard et Noël Simsolo, France-Culture, vendredi 3 avril 1998.

17. Source : [39]. (Maximes conversationnelles, extraites de [33], p. 86.)

18. Source : [25].

19. Parmi beaucoup d'autres, voir [80].

20. Source : [35], p. 27.

21. Source : [3].

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ANNEXE PÉDAGOGIQUE

Exercice n° 11 - Lecture critique de résumés sous l'angle formel

L'objectif est de repérer, dans des résumés existants (ils ont étérédigés par des personnes susceptibles de changer de fonction dansleur entreprise et ayant reçu une formation très brève sur le résumédocumentaire), les erreurs de forme à éviter.

Lisez d'abord le texte suivant (Alain Lebaube. — Le temps du désé-quilibre permanent. — Le Monde, supplément Initiatives, mai 1995)en appliquant la lecture documentaire (cf. p. 35-71), sans chercher àrepérer les idées directrices puisque la consigne consiste seulement àvérifier si les recommandations des pages 132 à 137 ont été suivies.

LES METAMORPHOSES DU TRAVAIL- Le temps du déséquilibre permanent

Sous ce qu'on a appelé abusivement « la crise » (depuis le temps, le terme necorrespond plus à la réalité), les mutations souterraines ont amorcé une recompo-sition du marché du travail

D'abord, il faut e.n finir avec l'idée selon laquelle tous ces mouvements ne seraientque le fruit d'une adaptation conjoncturelle, donc réversible.. Le retour en arrièrene se produira pas, à supposer que la croissance retrouve ses rythmes d'antan, carles conditions technologiques de production interviennent désormais dans unenvironnement bouleversé, de compétition internationale. Au contraire, noussommes bien dans un changement dont le caractère structurel se confirme jouraprès jour. Un nouvel équilibre se dessine, dont le mode de fonctionnement instau-rerait, justement, le déséquilibre permanent.

Trois axes convergent pour le signifier. Autrefois hégémonique dans sa fonctionproductive comme dans sa gestion sociale, l'entreprise s'éclate. Pour être plusperformante et pour coller à un contexte de turbulences, elle distingue le cœur decible de ses activités, son « métier », de toutes les autres fonctions ou missionsqu'elle n'intègre, plus. Entourée de cercle concentriques, de la filiale à la sous-traitance, des partenaires au recours aux indépendants, elle organise une formede précarité entrepreneuriale.

Il est temps d'admettre que cette gestion en flux tendus, durable, coïncide, plusqu'on ne le pensait, avec l'éclatement de l'emploi lui-même. Là aussi, selon unparallèle saisissant, l'ancien modèle dominant de l'emploi à temps plein, à durée

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LE RÉSUMÉ DOCUMENTAIRE

indéterminée et à statut, tend à perdre de sa superbe. A côté dit noyau dur dusalariat se développent les formes satellites de l'emploi qui giavitent sur des orbitesplus ou moins éloignées. Du travail à temps partiel, en pleine explosion, auxcontrats à durée déterminée, à l'intérim, aux stages, au travail indépendant etmême au travail au noir, toute la palette existe, qui associe le plus souventprécarité et vulnérabilité, non pas dans le désordre, mats bien dans un esprit desystème. C'est-à-dire, que, de la réponse à des difficultés immédiates, on en est passéà une utilisation régulière de formules pour une optimisation des résultats.

Quand (rien même, cette double rencontre d'offportunités devait de toute façonavoir Heu, en raison d\tn troisième fadeur. A savoir, l'inéluctable évolution dutravail proprement dit, dont le contenu est éclaté sous le double effet de l'introduc-tion des nouvelles technologies et de la tendance à la « tertiarisation », qui s'estétendue des services à l'industrie. Les contours de ce qui fait un travail sont deve-nus imprécis, et les rapports au temps comme à l'espace se sont distendus dans denombreuses activités professionnelles. Désormais, on ne peut plus prétendre que letemps de travail reste l'instrument intangible de mesure de la valeur ajoutéefabriquée ou vendue. De même, l'usine et le, bureau ne constituent pas forcémentles lieux exclusifs où s'exercent les métiers et sont d'autant plus concurrencés quequantité de travailleurs manient quotidiennement des notions abstraites.

En fonction de ces trois causes, qui se complètent et se recouvrent, nous assistonsà la mise en place des fondements d'une nouvelle société, voire d'une autre civili-sation. Ce qui suppose, un changement des mentalités, pour s'adapter, quiprendra des générations alors que les problèmes à résoudre sont urgents.

De, quoi s'agit-il ? D'apprendre, à vivre dans un univers incertain, où l'entreprisepourra être virtuelle ou diffuse, oit l'emploi sera mobile, souple et indépendant,réclamant de l'initiative individuelle, et où le travail, à son tour, aura uncontenu à la fois peu palpable et cependant relié aux informations venues de toutela planète. Bref, il faudra être suffisamment fort pour exister sans repères etaccepter de gérer en permanence l'incertitude. Par ailleurs, il est égalementmanifeste que tout pousse à relativise} la place et la valeur du travail, ainsi qu 'entémoigne l'aspiration au temps libre, que nous aurons à admettre que le niveaude diplôme ne, corresponde plus automatiquement à un niveau d'emploi et qu'ilsera nécessaire de substituer la notion de professionnalisation, servant à désignerles compétences exigées par la tertiarisation, à la. notion de qualification, qui resteconfondue avec l'ère industrielle absolue.

Vaste programme ! Mais la recomposition en cours signifie sans doute que le tra-vail ne sera plus la préoccupation centrale, quoique indispensable,, et que l'éduca-tion aura encore plus pour mission de préparer à une vie d'homme, au sens plein.

Ai AIN /jf/M(.w;

© Le Monde

ANNEXE PÉDAGOGIQUE

Prenez ensuite connaissance des neuf résumés de ce texte etrelevez les erreurs de forme en vous basant sur les éléments despages 132 à 137.

1 — La « crise » du travail est bien réalité.Il ne faut plus croire que cela est le fruit d'une adaptation à

caractère conjoncturel mais plutôt structurel.Cela pour trois raisons. Aujourd'hui l'entreprise s'éclate. Elle

organise une forme de précarité entrepreneuriale. Le travail àtemps partiel, les contrats à durée déterminée, l'intérim, les stages,le travail indépendant et même le travail au noir se développent.

Le troisième facteur sera la tendance à la tertiarisation.En raison de ces trois causes, il faudra changer de mentalité, mais

il faudrait d'abord résoudre les problèmes urgents.Il faudra être suffisamment fort pour exister sans repère.Pour se préparer à une vie d'homme, l'éducation sera

indispensable.

2 — D'après Alain Lebaube, en mai 1995, le changement dumarché du travail se confirme par la précarité de l'entreprise, dutravail et de son contenu. L'homme devra accepter le fait que letravail occupe une moindre place dans sa vie. L'éducation devra l'yaider.

3 — Décomposition du marché du travail. Nous sommes dans unchangement dont le caractère structurel se confirme jour aprèsjour, le déséquilibre permanent.

Trois axes convergent pour le signifier.1/ L'entreprise s'éclate pour être plus performante et pour coller

au contexte de turbulences.2/ L'éclatement de l'emploi avec l'emploi à temps plein, les CDI,

tend à perdre de sa superbe. L'explosion du temps partiel, les CDD,les intérims... toute la palette existe qui assure précarité et vulnéra-bilité.

3/ Le contenu du travail est éclaté avec la tendance à la « tertia-risation ».

En fonction de ces trois causes, nous assistons à la mise en placed'une nouvelle société qui prendra des générations malgré

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LE RÉSUMÉ DOCUMENTAIRE

l'urgence. L'éducation aura encore pour mission de préparer à unevie d'homme au sens plein, le travail n'étant plus la préoccupationcentrale, quoique indispensable.

4 — Dans un contexte de turbulence et d'éclatement desentreprises, les nouvelles technologies et la tertiarisationentraînent le plus souvent la précarité et la vulnérabilité desemplois. L'urgence de la situation ne peut attendre un changementde mentalité des individus qui doivent être suffisamment forts pours'adapter dans cet univers incertain.

Dans l'avenir, l'éducation devra préparer à une vie d'homme dontla préoccupation principale ne sera plus le travail.

5 — Le monde du travail évolue, l'entreprise et l'emploi, demême que la nature du contrat de travail : tout mute pour donnernaissance à une autre approche de l'activité professionnelle.L'approche même de celle-ci s'en trouve modifiée par unchangement quant aux valeurs humaines : les repères, la profes-sionnalisation, la qualification seront à intégrer pour faire face àune nouvelle éducation pour une nouvelle génération.

6 — D'abord il faut en finir avec l'Idée selon laquelle un retouren arrière est possible, les mutations souterraines ont amorcé unerecomposition du marché du travail.

Trois axes convergent pour le signifier :L'entreprise s'éclate : pour être plus performante et pour

coller à un contexte de turbulences, elle organise une forme deprécarité entrepreneuriale par le biais de la sous-traitance. Onassiste à l'éclatement de l'emploi lui-même. C'est-à-dire que l'onest passé à une utilisation régulière de formules telles que CDD,intérim, stage, qui associent donc précarité et vulnérabilité.

L'inéluctable évolution du travail dont le contenu est éclatésous le double effet des nouvelles technologies est un autrefacteur.

En fonction de ces trois causes, nous assistons à la mise enplace d'une nouvelle société, voire d'une autre civilisation. Lesproblèmes à résoudre sont urgents et pourtant si l'on suppose unchangement des mentalités, cela prendra des générations !

ANNEXE PÉDAGOGIQUE

Bref, il faudra être suffisamment fort pour exister sans repèreset accepter de gérer en permanence l'incertitude. Le travail ne seraplus la préoccupation centrale et l'éducation aura pour mission demieux le préparer à une vie d'homme.

7 — La « crise » ou recomposition du marché du travail présenteun caractère structurel et non conjoncturel. La précarité del'entreprise, l'éclatement de l'emploi, l'évolution du travail lesignifient. Emploi souple, mobile et indépendant caractérise lanouvelle société. Celle-ci suppose des changements de mentalitépour faire face à l'incertitude. Cette recomposition du travail, lanécessité d'y être préparé, conduiront à un renforcement de lamission éducative de la société.

8 — L'éclatement de l'entreprise, de l'emploi et du travail met lasociété en déséquilibre. Pour s'adapter au changement permanent,il est recommandé de savoir gérer l'incertitude, de relativiserl'importance du travail, de préférer la qualification à la profession-nalisation et de miser sur l'éducation.

9 — La recomposition du marché du travail n'est plus de natureconjoncturelle, mais structurelle. Le déséquilibre permanent de lasociété est dû à trois mutations : l'entreprise n'intègre plus sesfonctions classiques, s'organise en filiales, utilise des sous-traitances, des partenaires indépendants ; l'emploi connaît desformes diversifiées, temps partiel, CDD, intérim, stages, travailindépendant, travail au noir ; le contenu du travail lui-même estremis en cause par l'arrivée des nouvelles technologies et latendance à la « tertiarisation ». Une nouvelle société exige larésolution urgente des problèmes alors que les changements dementalité s'étendent sur plusieurs générations. Il faut se préparer àexister sans repères, gérer l'incertitude, relativiser la place et lavaleur du travail, et à substituer la notion de professionnalisation àla notion de qualification. L'éducation peut nous y aider.

Commentaires en pages 289-290.

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LE RÉSUMÉ DOCUMENTAIRE

Exercice n° 12 - Écriture : rétablir la ponctuation d'un texte

L'objectif est de mesurer l'importance d'une ponctuationadaptée pour rendre un texte intelligible et lisible.

Rétablissez la ponctuation d'un paragraphe. Vous pouvez tenterd'appliquer une grille de lecture pour trouver la logique de lapensée.

L'une des Mythologies (éditions du Seuil, 1957, coll. « Points ») deRoland Barthes est intitulée « Romans et enfants ». Le premierparagraphe est transcrit intégralement. Le deuxième l'est sansponctuation ni majuscule.

A en croire Elle, qui rassemblait naguère sur une même, photographie soixante-dix romancières, la femme de lettres constitue une espèce zoologique, remarquable :elle accouche pêle-mêle de romans et d'enfants. On annonce par exempte :

Jacqueline I^enoir (deux filles, un roman) ; Marina Grey (un fris, un roman) ;Nicole, Dutreil (deux fils, quatre romans), etc.

qu'est ce que cela veut dire ceci écrire est une conduite glorieuse mais hardiel'écrivain est un artiste on lui reconnaît un certain droit à la bohème comme ilest chargé en général du moins dans la France d'Elle de donner à la société lesraisons de sa bonne conscience il faut bien payer ses services on lui concèdetacitement le droit de mener une vie un peu personnelle mais attention que lesfemmes ne croient pas qu'elles peuvent profiter de ce pacte sans s'être d'abordsoumises au statut éternel de la féminité les femmes sont sur terre pour donnerdes enfants aux hommes qu'elles écrivent tant qu'elles veulent qu'elles décorentleur condition mais surtout qu'elles n'en sortent pas que leur destin biblique nesoit pas troublé par la promotion qui leur est concédée et qu'elles payent aussitôtpar le tribut de leur maternité cette bohème attachée naturellement à la vied'écrivain

© Éditions du Seuil, 1957

Correction et commentaires en page 290.

ANNEXE PÉDAGOGIQUE

Exercice n° 13 - Écriture : reconstituer un texte

L'objectif est de retrouver l'ordre logique d'un texte, ce quipermet de réviser les mots d'articulation (cf. p. 84). Remettez dansle bon ordre six paragraphes mélangés d'un même texte. (Extraitde : Gilberte Niquet. — Écrire avec logique et clarté. — Paris, Hatier,1996.)

1 — D'autre part, la gymnastique volontaire est une occasion decontacts. Des personnes de métiers et de genres très divers s'yretrouvent. J'y ai rencontré, par exemple, un juge des enfants quim'a parlé de sa profession et m'a beaucoup intéressé.

2 — La gymnastique volontaire est maintenant très répandue, etje m'en réjouis car elle offre de nombreux avantages.

3 -- La gymnastique volontaire procure enfin une excellentedétente. Grâce à elle, chacun s'évade de son univers quotidien pourne plus vivre qu'avec son corps dans un cadre sympathique.

4 - - D'abord, elle apporte une compensation salutaire à lasédentarité de nos vies. Nous marchons peu, en effet, pour nousrendre au travail, que nous utilisions pour ce faire les transports encommun ou un engin individuel. Par ailleurs, notre activité profes-sionnelle est bien souvent statique. La gymnastique volontaire, quimobilise chacun de nos muscles, nous permet de compenser cettesédentarité et de rendre à notre corps son équilibre.

5 — Pour toutes ces raisons, je pense que la gymnastiquevolontaire est une belle réalisation sociale. Facteur d'équilibre, derencontres et d'enrichissement, elle est sans nul doute à pratiquer.

6 — Ces possibilités de contacts ouvrent des horizons. C'est ainsique je me suis mise à fréquenter la piscine grâce à des membres demon club de gymnastique qui m'y ont entraînée. Avec d'autrespersonnes, j'ai visité un musée local que je ne connaissais pas.

© Éditions t-fatier, 1996

Corrigé en page 291.

Page 76: Analyse Documentaire_suzanne Waller

LE RÉSUMÉ DOCUMENTAIRE

Exercice n° 14 - Rédaction d'un résumé documentaired'un texte déjà étudié

Résumez (enfin !) le texte « Les effets violents de la télévision »(en page 227) en utilisant tous les exercices précédents, etparticulièrement la phase de structuration (voir exercice et corrigédu chapitre iv, p. 83 et 278-287).

Essayez de le rédiger dans l'optique d'une banque de donnéesd'un service de la recherche d'une chaîne de télévision.

Propositions de corrigés et commentaires en pages 292-293.

Exercice n° 15 - Rédaction d'un résumé documentaired'un texte nouveau

Le texte « Des objectifs pour le journalisme » (Claude-JeanBertrand, Études, septembre 1993, en page 246) est nouveau dansce manuel. Il a été choisi pour sa qualité, mais aussi pour sonapparente structuration. On choisira, pour travailler, le contexte dela banque de données d'une école de journalisme.

Il doit faire l'objet de toutes les étapes précédentes : repéragevisuel, caractéristiques du texte, lecture documentaire (les troispremiers paragraphes) amenant à des hypothèses de lecture, à larecherche de la structuration, du vocabulaire.

Cet exercice peut être conduit de deux façons :- soit vous rédigez immédiatement et vous comparez votre

résultat avec ceux qui sont proposés en pages 293 à 298. (Cesrésumés ne sont pas du tout des modèles et il est donc importantde relever leurs erreurs, tant dans la forme que dans le fond.) ;

- soit vous prenez connaissance de ces résumés avant de rédigeret, après les avoir critiqués, proposez votre propre version.

Structuration et deux corrigés possibles en pages 298-300.

CHAPITRE VIIINDEXATION

L'indexation est certainement l'opération la plus fréquente, et donc laplus banalisée du travail documentaire ; elle est même parfois confon-due avec la cotation, en particulier en bibliothéconomie. Elle estpourtant « largement méconnue, du fait de la complexité et de la variétédes notions et des traitements qu'elle met en œuvre » '. Il est utile d'enréviser les objectifs, les formes, les usages et les exigences.

Qu'est-ce qu'indexer ?

A partir des travaux préparatoires des comités techniques de l'ISO{International Standard Organization) et de l'Unesco, l'AFNOR aélaboré, en 1978, une norme2 en vue d'« établir des méthodologiesvalables et cohérentes pour la description et la caractérisation desdocuments à l'aide de représentations de concepts (mots clés, descrip-teurs, indices, etc.) ». En simplifiant la formulation, on peut retenir decette norme :

• Une définition : l'indexation est l'opération destinée à représenterpar les éléments d'un langage documentaire ou naturel des donnéesrésultant de l'analyse du contenu d'un document ou d'une question.

• Une finalité : l'indexation indique rapidement, sous une formeconcise, la teneur d'un document ; elle « permet une recherche efficacedes informations contenues dans un fonds de documents ». Il est bienspécifié que cette recherche est possible «par indexation de laquestion, opération analogue [c'est nous qui soulignons] à l'indexationdu fonds », c'est-à-dire des informations qui y sont contenues.

• Un processus en deux étapes :

« - la reconnaissance des concepts contenant l ' information dans lesdocuments à indexer... ;

« - la représentation de ces concepts dans le langage documentaire ».

Page 77: Analyse Documentaire_suzanne Waller

INDEXATION

La norme insiste bien sur la nécessité d'exprimer le contenu dans unlangage libre avant d'utiliser un langage contrôlé. En fait il existe véri-tablement trois étapes, car la reconnaissance des concepts impliqued'abord leur compréhension.

En 1984, l'ISO a lancé un projet de norme internationale \s parla Grande-Bretagne *. Les termes sont sensiblement les mêmes queceux de la norme AFNOR. Ainsi que le suggère le titre, ces deuxprojets sont essentiellement centrés sur l'examen du document, la défi-nition de son contenu, l'identification des notions principales expri-mées et leur expression en langages d'indexation, et non sur une finalitéliée à la recherche documentaire. En ce sens, la norme AFNOR, anté-rieure, garde toute sa valeur.

En effet, l'indexation n'a d'intérêt que dans son utilisation principale :aider la recherche, inspirer la requête. C'est une opération dynamiqueet non statique, centrée sur l'usage et non sur la description, même sicelle-ci est nécessaire. C'est « l'opération centrale de tout systèmedocumentaire pour le stockage et la recherche des informations. Lesproduits de l'indexation servent à retrouver l'information et à la sélec-tionner pour répondre aux besoins des utilisateurs - ». Une étude trèscentrée sur les possibilités de l'indexation automatique en fait la condi-tion première : « L'indexation est, dans tous les cas de figure, un préala-ble indispensable à la recherche documentaire, et il ne convient pasd'opposer les logiciels de recherche documentaire classiques à ceuxbasés sur le texte intégral. * »

Une définition dynamique de l'indexation pourrait être de dire quelorsque l'on indexe, on cherche dans un texte des réponses à des ques-tions susceptibles d'être posées. Ceci implique que l'information obte-nue par cette voie soit porteuse de sens, sans quoi il n'y aura pas deréponses, mais seulement du bruit ou du silence. « Nous savons codi-fier et automatiser l'information : il n'en va pas de même du sens...l'information ne fait plus l'objet d'aucune hiérarchie et perd son sens...Les métiers de l'information ne consisteront plus à mettre de l'informa-tion à disposition, mais à la hiérarchiser et à lui donner du sens.7 » Cesquelques phrases donnent à réfléchir sur la façon habituelle d'indexer.

USAGE ET APPLICATIONS

Les paragraphes suivants exposent les méthodes classiques et tententd'en montrer les limites, à partir d'une interrogation toute simple :comment fournir du sens uniquement avec des mots ?

Usage et applications

Selon la norme AFNOR de 1978, l'indexation sert à la « confectiond'outils de recherche documentaire tels que des index de livres ou debul le t ins bibliographiques, des catalogues organisés de matières ouencore des fichiers manuels, mécaniques ou automatiques ». Outre queles systèmes informatisés ont beaucoup modifié ces usages, il existeune différence importante entre l'index d'un livre et l'indexation d'unfichier matière, quelle qu'en soit la forme.

L'INDEX D'UN LIVRLi

L'index d'un livre est le résultat de choix effectués par l'auteur quidécide d'aider le lecteur à entrer dans son œuvre par le biais de termesdivers : noms propres de personnes, d'institutions, de lieux, d'événe-ments ; noms communs présents dans le texte et correspondant à diffé-rents sujets, qu'ils soient jugés importants ou accessoires.

Ces index renvoient aux pages du texte courant. Les meilleursexemples sont ceux des grandes encyclopédies qui ne présentent pas derubriques à tous les sujets mais permettent, par le biais d'un volumed'index, d'orienter le lecteur vers la rubrique où tel sujet est présenté àla faveur d'un autre.

Ainsi, l'index de la Grande Encyclopédie Larousse indique qu'unarticle de quatre pages traite de la « délinquance » et de la « délin-quance juvénile », mais renvoie à onze autres entrées {adolescence,alcoolisme, arriération mentale, criminologie, etc.) où « délinquance »et « délinquance juvénile » apparaissent aussi.

Page 78: Analyse Documentaire_suzanne Waller

INDEXATION

L'indexation du texte d'un document, effectuée le plus fréquemmentpar un documentaliste-analyste, a pour vocation d'alimenter un fichierde recherche intégré de plus en plus souvent à une banque de donnéesdont l'un des champs de contenu est le champ « indexation ». C'est danscette perspective que l'opération d'indexation sera présentée ici.

Rôle de l'indexation dans une banque de données

Parmi les champs de recherche, et spécialement les champs decontenu (cf. p. 102-105), le champ « indexation » sert à retrouver uneinformation à partir de son sujet, caractérisé par un ou plusieurs motsclés. « Théories in information retrieval présuppose thé concept ojmatch and of similarity between a request and a set of documents. * »

Le mode d'indexation suit les politiques documentaires décidées enamont. L'informatisation a modifié et modifiera ces politiques, encoretrop tributaires des fichiers classiques qui nécessitaient un nombreimportant d'accès-matières. Ce n'est plus le cas puisqu'on peut combi-ner tous les champs de description et de contenu, ou tout au moins ondevrait pouvoir le faire de façon plus large (cf. p. 105-107), et parcequ'il faut encourager le maintien ou l'introduction des résumés, si courtssoient-ils. On ne saurait trop insister sur le rôle d'ouverture que doitjouer l'indexation : une clé dans la bonne porte ! Pour reprendre lamétaphore du poteau indicateur placé à un carrefour, rappelons que lepoteau donne la direction à suivre mais n'informe ni sur l'histoire de laville ni sur le nombre d'habitants ou les bons hôtels ; ces indications neseront fournies que plus tard, lorsque la bonne route aura été empruntée.

Lors de la requête, l'utilisateur pose une question à l'aide d'une phraseou de quelques mots ; cette question doit naturellement être reformuléepour que l'on soit sûr du sens réel de la demande (cf. p. 96-101). C'està partir des termes porteurs du sens requis (les mots clés) que la

COMMENT INDEXER ?

question est posée. Ces mots clés doivent naturellement être pertinentsen regard du texte, en fonction de la demande, mais ils ne doiventsurtout pas être trop nombreux. En effet, s'il y a trop de clés, commentsavoir quelle est la bonne porte ? On verra plus loin (p. 163-168) quel-ques aspects pervers de la surindexation.

Comment indexer ?

La norme AFNOR insiste bien sur un processus en deux étapesconsistant à comprendre le texte et à en traduire le contenu avec sonpropre langage avant d'utiliser un langage documentaire, quel qu' i l soit.

L'étude de la première étape a déjà été approfondie précédemment,particulièrement au chapitre vi . On se souvient aussi que les réponsessur le contenu du texte sont construites à l'aide d'un vocabulaire pré-senté au chapitre iv (nature, richesse et organisation des mots) que nousallons maintenant analyser plus en détail. À cette phase de l 'indexation,qui n'utilise que la langue naturelle, il est effectivement question demots et non encore de termes.

Toutefois, bien que le langage ne soit pas encore contrôlé, il estpossible de l'épurer. Une règle à suivre dans l'établissement des langa-ges documentaires consiste à choisir des substantifs masculins singu-liers comme termes d'indexation en langue naturelle. Un adjectif nesera admis que dans un mot clé composé. On peut opter pour des motsisolés ou Unitermes tels que « traitement » ou « parasite », ou préférerdes expressions composées comme « traitement parasitaire ». Dans lepremier cas, le choix de deux mots clés distincts entraîne une post-coordination, c'est-à-dire que, au moment de la recherche, il faudraobligatoirement combiner ces deux termes, par ailleurs totalementindépendants l'un de l'autre. Dans le deuxième cas, c'est la pré-coordination qui a été choisie, et « traitement parasitaire » correspondalors à un mot clé et un seul, que l'on devra utiliser tel quel au momentde la recherche. Il est vrai que la formulation des mots clés et le choix

Page 79: Analyse Documentaire_suzanne Waller

INDEXATION

entre pré-coordination ou post-coordination sont soumis aux langagescontrôlés qu'il faudra utiliser (cf. p. 188-193, 196-198, 203-205), maisil n'est pas inutile d'être déjà tout à fait au clair sur ces choix, même enlangue naturelle.

Comment faire pour choisir ce ou ces mots qui serviront de clé(s) ?Comment éliminer les intrus ?

ÉLIMINER, COMMENT ?

Il est toujours intéressant de s'appuyer sur des exemples concrets pourexposer clairement les techniques d'indexation. Nous exploiterons doncles résultats d'un entraînement proposé à des documentalistes débutantslors d'une formation sur le sujet. 11 s'agissait d'indexer le texte (bienconnu) « Les effets violents de la télévision » ; aucune consigne précisen'avait été donnée quant au traitement à exécuter, sinon qu'il s'agissaitde la première étape, donc d'un choix en langage libre. L'ensemble desparticipants, même les plus inexpérimentés, travaillaient dans unservice de documentation ; on pouvait, par conséquent, raisonnable-ment espérer qu'ils avaient eu l'opportunité d'y observer quelques prati-ques valables. Le texte ayant déjà été travaillé, ils bénéficièrent de dixminutes pour choisir les mots clés jugés utiles à la caractérisation ducontenu du texte. Ces mots furent relevés et listés par ordre alphabéti-que, puis distribués à chaque participant dans l'attente de leurs étudeset remarques, le souhait du formateur étant que les principales anoma-lies fussent remarquées par les stagiaires eux-mêmes (voir ci-contre).

L'exploitation de ce premier exercice a permis de constater un certainnombre de phénomènes.

• À propos de la forme :- un texte de 5 pages et 48 formulations différentes : c'est la preuve

immédiate de la nécessité d'un langage contrôlé pour une justeindexation, même s'il existe des équivalences ( 1 1 / 1 2 , 20/22, 37/39,19/41). L'équivalence 18/45 est d'une nature spécifique qui sera étudiéeultérieurement (cf. p. 176-181) ;

COMMENT INDEXER ?

1. Agressivité2. Automatisme3. Connaissante effets4. Contagion émotionnelle5. Contagion mentale6. Délinquance7. Déontologie8. Déontologie de la télévision'). Détachement émotionnel

10. Données statistiques1 1 . Emotion12. Émotivité13. finfant14. Enfants15. Enfants - adolescents16. Enquête17. Esclavage télévisuel18 États-Unis1*). Fascination20. Hypnose21. Hypnose télévisuelle22. Hypnotisme23. Illusion24. Images subliminales

25. Images subliminales et inconscient26. Imaginaire27. Imitation28. Immédiatcté29. Imprégnation30. Manipulation31. Médias32. Mimétisme33. Mimétisme et manipulation34. Psychanalyse des foules35. Psychologie36. Publicité37. Réalité38. Réceptivité psychique39. Réel40. Kclativisation des émotions41. Séduction42. Soumission43. Suggestion44. Télévision45. U.S.A.46. Violence47. Violence et télévision48. Violence juvénile

- la présence du même mot au singulière! au pluriel (13,14) : ce n'estpas forcément important au moment de la recherche puisque l'on peututiliser des troncatures, mais cela peut générer des index quelque peudésordonnés ;- des juxtapositions et des ensembles qui forment un obstacle à la

recherche (3,15) : l 'u t i l i sa teur devra-t-il chercher à « enfants » ou i\ adolescents » 7

- l 'utilisation de et (25, 33, 47) : cette conjonction est à proscrire danstout mot clé à cause des confusions possibles dues aux équationsbooléennes ;

- des termes généraux (athématiques) porteurs de sens mul t ip les s'ilssont employés isolément (2, 7, 27, 29, 30, 41, 42, 43) : ce sont

Page 80: Analyse Documentaire_suzanne Waller

INDEXATION COMMENT INDEXER ?

typiquement des mots « Uniterme », c'est-à-dire des mots isolés quidevraient normalement se suffire à eux-mêmes pour désigner le sensvoulu. Si l'on choisit le mot clé « automatisme », cela signifie que letexte en parle comme étant l'un des sujets principaux ; est-ce le cas ici ?Les mots athématiques ont donc besoin d'être accompagnés d'un ou deplusieurs autres mots pour former un terme pré-coordonné (cf. ci-avantet chapitre vin, p. 175-222);

- des expressions littéralement issues du texte (4, 5,9, 17, 21, 34, 38,40, 48) : c'est le péché mignon des débutants qui ne maîtrisent pas ladistanciation nécessaire face au texte étudié, et qui picorent ça et là desformulations qui les frappent ou qui leur paraissent représentatives d'uncontenu. Cet exemple le prouve encore : ces expressions sont souventliées à l'affect beaucoup plus qu'à la raison.

- À propos du fond :

Toute la difficulté pour les débutants est de bien saisir la différenceentre les mots qui décrivent et ceux qui interrogent. Une manière de larésoudre est de garder à l'esprit, au moment du choix des termes perti-nents, une série de questions qui conduisent à l'élimination relativementfacile des mots inutiles. En passant la liste au crible, on questionne :

- si je cherche des informations sur la publicité (36), qu'est-ce que cetexte m'apporte ?

- si j'interroge la banque sur le problème de la délinquance (6),qu'est-ce que ce texte m'apporte vraiment ?

- qu'est-ce que ce texte m'apprend sur le mimétisme (32) ? sur lesÉtats-Unis (18), etc. ?

- II importe aussi de mettre en lumière les mots se rapportant à laforme d'une partie du texte, et non à son contenu : même si l'onrapporte les données statistiques (10) d'une ou de plusieurs enquêtes(16), ce texte ne livre aucune information sur ce qu'est une enquête ousur ce que sont des données statistiques.

L'exploitation de cet exercice attire l 'attention sur les principaleserreurs qui peuvent être commises au moment de l'indexation. L'élimi-nation progressive des mots clés incorrects permet de choisir en meil-leure connaissance de cause ceux qui peuvent à nouveau être étudiés.

CHOISIR : POURQUOI ?

Ayant ainsi « nettoyé » la liste, on peut de nouveau poser la question :« De quoi s'agit-il dans ce texte ? »

Les mots enfant/enfance, adolescent/adolescence, télévision, vio-lence apparaîtront en premier. Ils sont assez représentatifs du contenuet peuvent, en conséquence, servir de mots clés pour entrer dans le lan-gage contrôlé. Ils ne suffisent cependant pas à identifier le contenuintégral du texte, mais cette fonction est celle du résumé. II ne faut pastransformer l'indexation en « résumé du pauvre » mais garder à l'espritque sa raison d'être est de cibler l'essentiel.

Le choix des termes d'indexation en langage libre repose doncentièrement sur les deux points clés de l'opération : Quelles sont lesinformations utiles contenues dans le texte ? Comment pourra-t-il êtreinterrogé ? Ou, en d'autres termes, quel sens véhicule le texte etcomment le traduire ? Pourquoi tenter d'exprimer ce sens uniquementavec des mots ? On a vu que le résumé constituait une grande zone deliberté pour l'analyste; pourquoi ne pas conserver cette liberté danscette phase de l'indexation, puisque la formulation, jusqu'à présent.peut être faite en langage libre ? Si l'on avait demandé aux analystesnovices d'indexer le texte précédent en répondant à la question « Dequoi s'agit-il ? » par une courte phrase plutôt que par des mots, n'aurait-on pas fait l'économie d'un nombre important des formulationsincriminées ci-dessus ?

Cette habitude d'indexer avec des mots renvoie à l'époque où leslangages contrôlés n'étaient pas toujours en vigueur mais, dans unebanque de données, le champ « indexation » est maintenant toujourscontrôlé ; les mots choisis l ibrement, qu'ils soient isolés ou extraitsd'une phrase, doivent donc être confrontés au langage d'indexation enusage dans le service (cf. p. 175-222). S'il y a adéquation entre le choixet le langage, aucun problème ne se pose. Si les mots choisis librementjie font pas partie du langage contrôlé, il convient de chercher lestermes les plus proches sémantiquement, en veillant très attentivementà ce qu'ils ne dévient pas trop du sens requis.

Page 81: Analyse Documentaire_suzanne Waller

INDEXATION

Comme il faut tenir compte de la complémentarité des champs decontenu (cf. p. 105-107), c'est à ce moment-là qu'intervient larédaction définitive du résumé où il faut veiller à introduire les termesabsents du langage documentaire. En effet, il existe forcément desanalogies de contenu entre toutes ces formulations. Plus il en existedans les champs interrogeables, et plus l'éventail est ouvert pour l'utili-sateur qui pose ses questions avec son propre vocabulaire. Il est inté-ressant d'introduire des mots équivalents dans les champs « titre »,« résumé » et « indexation » qui sont les sources prioritaires de larecherche documentaire. Deux de ces champs sur trois sont de la res-ponsabilité du documentaliste.

Enfin, le choix définitif doit être en cohérence avec la banque dedonnées. L'idéal serait d'interroger celle-ci à chaque indexation pourêtre sûr de l'homogénéité des textes et de la façon dont ils sont traités,idéal bien sûr illusoire à cause de la pression du temps. Mais il estsouhaitable de le faire ;

- en amont, à tout moment d'hésitation ou d'insatisfaction dans lapremière phase ;

- en aval, et de façon régulière, sur quelques termes qui « bloquent »au moment de l'interrogation.

LES DIFFÉRENTS CHAMPS D'iNDF.XATION

Certaines banques de données proposent à l 'indcxeur la possibilité desérier les champs d'indexation. Selon les systèmes, on peut donctrouver des champs :

- sujet principal ;- sujet secondaire ;- heu géographique ;- date ;- nom de personnes ;- nom d'entreprises ;- nom de marques ;- indexation libre (ou candidats-descripteurs), etc.

COMMENT INDEXER ?

Ces distinctions sont valables si elles correspondent aux modescourants d'interrogation : une banque exige des noms d'entreprises, uneagence de publicité des noms de marques, une agence de voyages desnoms de lieux. Mais il faut également que le système d'interrogationsoit adapté, c'est-à-dire que l'on puisse croiser les mots clés, quels qu'ensoient les champs, avec la plus grande rapidité possible.

En revanche, on doit émettre de fortes réserves sur les notions desujet principal zi sujet secondaire. En effet, l'indexeurse retrouve tentéde « viser plusieurs cibles à la fois », ce qui risque de conduire à biendes excès, comme il en sera question plus avant. Au moment de larecherche, les documents choisis prendront-ils en compte l'aspectsecondaire de telle ou telle référence, face à un utilisateur pressé et, parconséquent, relativement insatisfait du résultat ?

Enfin, quelques banques de données ouvrent un champ « indexationlibre » offrant à l'analyste la possibilité d'y inscrire les mots qu'il n'a pastrouvés dans le langage d'indexation et qui lui semblent indispensablespour décrire le contenu du texte. Cette option est. la plupart du temps,celle des banques de données sans résumé. Faut-il rappeler que, dansl'optique choisie depuis le début de ce manue l , ce champ est unehérésie ? En effet, les mots nécessaires à l'interrogation peuvent libre-ment être insérés dans le champ « résumé », le champ « indexation »n'étant qu'une ouverture. Mais cette affirmation ne signifie pas qu'unlangage d'indexation ne puisse être augmenté, modifié, adapté auxbesoins d'une expression scientifique qui évolue toujours. L'analysteexpérimenté estimant qu'un terme absent du langage contrôlé doitabsolument s'y trouver peut l'y introduire grâce aux différents moyensmis en oeuvre pour la maintenance du langage (cf. p. 215).

LA PROFONDEUR DE L'INDEXATION : EXHAUSTIVITÉ ? SÉLECTIVITÉ ?

Les normes insistent beaucoup sur les notions d'exhaustivité et desélectivité, c'est-à-dire le fait que l ' indexation retiennne toute l'informa-tion utile, et uniquement l'information utile. Tout le monde s'accordera,bien entendu, sur le principe. Mais quelle forme lui donner ?

Page 82: Analyse Documentaire_suzanne Waller

INDEXATION COMMENT ÉVALUER L'INDEXATION ?

L'exhaustivité, ou profondeur étendue, choisit de ne donner aucunelimite au nombre de concepts retenus, à condition qu'ils soient porteursde sens, évidemment. Cette option favorise le bruit et diminue lesilence. La sélectivité, ou profondeur restreinte, limite le nombre dedescripteurs, ce qui provoque l'effet inverse : on freine le bruit, mais onrisque le silence.

Ne s'agit-il pas d'un faux problème ? Le nombre de concepts retenusdoit servir à entrer dans le document. La règle classique est toujours dechoisir les mots les plus précis correspondant au sujet. Mais si la préci-sion existe déjà dans le titre, pourquoi renseigner le champ « indexa-tion » ? Celui-ci ne devrait plus être obligatoire à partir du moment oùil peut être considéré comme un champ complémentaire aux autres etnon plus comme le seul champ important et prioritaire à l'interrogation.

Une autre question est souvent posée : peut-on indexer avec destermes faisant partie du même champ sémantique, sur la même lignehiérarchique (cf. p. 175-222)? Par exemple, un manuel sur le rizpeut-il également être indexé à « céréales » (à condition, bien sûr,que le terme existe dans le langage d'indexation) ? La réponse dépenddes autres champs interrogeables : à nouveau, les champs « titre »,« domaine » et « résumé » complètent le champ « indexation » surlequel ne devrait plus peser l'entière responsabilité de la recherche.

Enfin, la plupart des logiciels proposent l'autopostage qui permet, àpartir d'un terme du langage contrôlé, de naviguer sur sa ligne séman-tique, en ascendant ou en descendant (cf. p. 217-218). Ces nouvellesapproches de l'indexation devraient abolir toute question sur le choixentre l'exhaustivité et la sélectivité.

Comment évaluer l'indexation ?

Les normes AFNOR et ÏSO présentent les mêmes critères de contrôlede qualité dans l'opération d'indexation, dépendant de deux facteurs :l'indexeur et l'outil d'indexation.

QUALITÉ DL: L ' INDHXEUR

Le rêve absolu est évoqué : quel que soit l'indexeur, un même textedevrait toujours être indexé de la même façon ; de surcroît, un mêmeindcxeur devrait choisir les mêmes mots clés pour le même texte àplusieurs jours ou plusieurs mois d'intervalle.

La réalité est connue : on ne peut exaucer ces deux vœux, et pour desraisons tout à fait valables. Le même texte est lu par des indexeurs quin'ont pas forcément des objectifs d 'uti l isation semblables ou des langa-ges d'indexation similaires. Le même indexeur, d'une part, affine sonmode de fonctionnement et modifie son approche d'un texte, d'autrepart s'enrichit au fur et à mesure de son activité professionnelle de tousles besoins diversifiés de ses utilisateurs. Le « cas idéal » évoqué parles normes non seulement, donc, n'existe pas en soi, mais ne devraitjamais exister — sous peine d'uniformiser ce qui ne peut pas l'être.

En revanche, demander aux indexeurs de tendre à l'impartialité,d'approfondir leur connaissance des domaines traités, d'établir et entre-tenir des contacts directs avec les utilisateurs, tout cela constitue desgaranties de qualité, sans toutefois suffire à assurer totalement celle-ci.

QUALITÉ DES OUTILS

L'outil d'indexation, compris par les normes comme étant le langagedocumentaire, doit effectivement être non seulement adapté à lasituation, mais suffisamment souple pour évoluer en fonction desbesoins. On verra plus avant que, pour les rendre utilisables, il estnécessaire de maintenir à jour les langages d'indexation.

Un autre outil existe, que les normes ne mentionnent pas : le systèmeinformatisé en place. Ses possibilités techniques et la vitesse d'interro-gation dont i l est capable sont des éléments importants pour l'augmen-tation de l'efficacité de la recherche. Cela devrait influencer, en amont,la qualité de l'indexation si les documentalistes ont bien pris consciencedes atouts que leur donnent les performances des logiciels.

Page 83: Analyse Documentaire_suzanne Waller

INDEXATION

Enfin il faut évoquer la pondération, les liens, les indicateurs de rôle,tous moyens d'affecter aux termes d'indexation des caractéristiquescapables de lever les ambiguïtés possibles. L'exemple classique estcelui du document indexé par les quatre descripteurs « Histoire »,«Technique », « Documentation », « Enseignement » qui peut produirevingt-quatre combinaisons différentes". Cet exemple est tout ausi théo-rique (puisqu'il suffit, en effet, de choisir des mots plus précis et moinsnombreux pour lever le problème) que les études qui n'ont pas, jusqu'àprésent, débouché sur des applications pratiques satisfaisantes, maisqui facilitent les projets en cours concernant les logiciels d'interroga-tion en texte intégral (cf. p. 111-118).

LES TESTS POSSIBLES

Les normes préconisent, enfin, de procéder à « une analyse des résul-tats de recherche documentaire [...] à l'aide du calcul des taux de rappelet de précision ». Ces mesures de performance sont très bien exposéesdans l'article de D. SoergelI0 qui distingue :

- le rappel : « Recall can be seen as thé probability oj an item heingretrieved, gtien that it is relevant. » ;

- la précision : « The fraction of relevant items in thé itemsretrieved. » ;

- le déchet : « The complément of discrimination is fallout, théfraction of ail irrelevant documents incorrectly retrieved. » ;

- la discrimination : « Discrimination can he seen as thé probabilityofan item being rejected, given that it is not relevant. »

Des sondages statistiques de ce type peuvent effectivement être effec-tués pour contrôler la cohérence interne d'une banque de données :

- combien de documents pertinents retrouvés en fonction du nombrede documents pertinents existants ?

- combien de documents pertinents retrouvés en fonction du nombrede documents extraits ?

- combien de documents non pertinents extraits en fonction du nom-bre de documents extraits ?

COMMENT ÉVALUER L'INDEXATION ?

- combien de documents non pertinents extraits en fonction du nom-bre de documents non pertinents existants ?

Ce modèle de sondage peut se trouver dans tous les articles etmanuels traitant de l'indexation". Dans la réalité, ont-ils souvent étéappliqués ?

En revanche, il est important de pratiquer régulièrement des étudesd'occurrence des termes d'indexation : tous les trois ou six mois, onpeut vérifier, par sondage, combien de fois tel terme a été utilisé ou telautre n'a pas été choisi. Ces tests, souvent appliqués dès qu'il existe unemaintenance régulière d'un langage contrôlé, prouvent qu'un indexeurmal formé utilise environ 20 % des possibilités offertes par le langaged'indexation.

C'est une illustration de la « loi du moindre effort », ainsi nomméepar le linguiste américain George K. Zipf pour rendre compte duphénomène suivant : si l'on classe les différents mots d'un texte par rangde fréquence décroissante, le produit du rang par la fréquence estconstant, c'est-à-dire que la fréquence d'un mot est inversement propor-tionnelle à son rang.

Dans le cas d'un langage d'indexation, l 'indcxeur novice (ou insuffi-samment formé) utilise toujours les mêmes termes, n'effectuant aucunerecherche pour savoir si d'autres existent, qui seraient plus pertinents.

C'est pourquoi ces tests d'occurrence doivent être effectués avecbeaucoup de finesse. L'utilisation trop fréquente d'un terme d'indexa-tion — ou, au contraire, son absence dans les index — ne signifie pastoujours que le langage est mauvais mais qu ' i l peut être mal utilisé.

LA SURINDEXATION

La surindcxation consiste à choisir et à retenir plus de mots clés qued'informations contenues dans le texte étudié. La peur du silence (oublid'un mot cléjjedinent) a entraîné le choix du bruit. La nécessité déonto-logique de ne jamais répondre « non » a provoqué trop de mauvais

Page 84: Analyse Documentaire_suzanne Waller

INDEXATION COMMENT ÉVALUER L'INDEXATION ?

« oui ». Cet argument cache une réalité moins noble : le bruit ne gêneque l'utilisateur final, le documentaliste fournissant son listing ou sonpaquet de documents avec le sentiment du devoir accompli — le nom-bre est encore souvent source de satisfaction. Le silence, en revanche,met le documentaliste mal à l'aise ; il lui renvoie l'idée que son systèmen'est pas valable, ou que son travail n'a pas abouti comme il le désire.Combien de fois n'est-on pas sûr d'avoir eu en main un document répon-dant exactement à la question posée, face à un écran désespérémentvide... Le silence est proprement insupportable pour le professionnel del'information qui se doit d'avoir réponse à tout (ou presque !).

Les causes de la surindexation

À l'époque où les utilisateurs ne pouvaient guère diversifier leurssources de recherche, on pouvait éventuellement trouver quelquesexplications justifiant ces excès.

Maintenant que les accès se sont mul t ip l iés et que les sources se sontdiversifiées et étendues internationalement, i l ne peut plus y avoird'excuse à la surindexation, qui a plusieurs causes :

- les mauvaises habitudes acquises ;- la difficulté de réviser ses modes de fonctionnement ;- l'inexistence ou la disparition des résumés, et l'illusion que l'indexa-

tion peut les remplacer ;- le manque de formation et de réflexion d'un grand nombre d'ana-

lystes novices partant du principe que plus i l y a de mots clés, plus onaugmente les chances de retrouver le texte ;

- la répartition des rôles dans les grands services : celui qui analysen'est pas celui qui interroge, et vice versa ;

- le manque fréquent d'une politique cohérente et suivie de la banqueen tant que mémoire documentaire.

Toutes ces raisons ont fait des ravages dans les banques de données.Par peur du silence, on a favorisé le bruit. Cet état d'esprit prouve à quelpoint l'on est éloigné des exigences actuelles des vrais usagers, quidésirent la réponse et non l'encombrement. L'évaluation de l'indexationne se fait pas au poids, mais à la précision.

l

Les conséquences de la surindexation

Le problème est posé nettement par les meilleurs spécialistes de laprofession ; « Nous nous interrogeons ici sur le sens à donner aux tita-nesques additions de textes condensés ou intégraux amassés dans lesbanques de données [...] La mission [de la science de l'information]est-elle d'activer une mémoire intelligente ou de construire des banquesgéantes et agrégatives, au point de faire courir à l 'humanité les risquesliés à tout fonctionnement de mémoire mal organisée : la sur-informa-tion ou la sous-information ? l 2 » M.-F. Blanquet, déjà citée à propos dela nécessité de sélectionner en amont (cf. p. 25-26), souligne le fait que« l'agrégation sans intelligence des textes entre eux a pour effet delaisser coexister dans une mémoire donnée des informations "vraies" etdes informations "fausses" ».

On peut ajouter à la validation des informations le manque desélection des documents traités : informations vraies ou non vérifiées,informations nécessaires cl durables noyées au milieu de textes occa-sionnels, répétitifs et inutiles. Les mauvais choix des textes et des motsnuisent à la recherche documentaire.

Les deux exemples proposés en page suivante (extraits d'une banquede données qui restera anonyme) peuvent illustrer les dangers de lasurindexation. On y trouve, certes, de très bons passages, mais aussid'importantes erreurs d'écriture. Les termes d'indexation ont été choisisen fonction d'un langage préétabli qui permet l'utilisation de motsathématiques (administrat ion, fonds, évolution...), mots encombrantset n'apportant pas de sens utile (cf. p. 211-215). Puisqu'ils existent,l'indexeur les ut i l ise . . . Mais a-t-il réfléchi aux conséquences ?

• Les risques de la combinatoire

La recherche documentaire informatisée est basée sur lacombinatoire et l'utilisation des équations booléennes. Si l'on cherchedes informations sur l 'administrat ion au Québec, qu'est-ce que lepremier texte .apprend ? Et si l'on interroge le deuxième sur l'évolutiondu Québec en faveur des handicapés ? Ces questions feront sortir des

Page 85: Analyse Documentaire_suzanne Waller

INDEXATION

Exemples commentés de surindexation

Première notice :

Titre : Le réseau informatise des bibliothèques gouvernementales : unmaillon de la chaîne documentaire du QuébecAuteur : Daniel AllaireSource : Documentation et bibliothèques, vol. 40, n° 2, avril-juin 1994,p. 61-66Résumé : L'administration publique québécoise compte un peu moins d'unecentaine de bibliothèques spécialisées constituées en majorité de petitesunités de trois employés ou moins. On y retrouve près de 3,6 millions dedocuments de tout genre. Au cours des cinq dernières années, ces biblio-thèques ont informatisé leur fonctionnement à l'aide du logiciel Best-Selleret l'exploitation de la documentation se fait maintenant en réseau. Leregroupement des bibliothèques gouvernementales dispose désormais d'uninstrument lui permettant de rationaliser la gestion des ressourcesdocumentaires de l'État.Indexation : Administration - Réseau bibliothèque - Bibliothèque spécia-lisée - Informatisation bibliothèque - Logiciel - Québec - BEST-SELLER

Deuxième notice :

Titre : La bibliothèque Braille ou une odyssée de 95 ansAuteur : Michelle BrûléSource : Documentation et bibliothèques, vol. 40, n° 2, avril-juin 1994,p. 81-86Résumé : Cet article présente une bibliothèque unique en Amérique duNord, la bibliothèque Braille de l 'Institut Nazareth-ct-Louis-Braille, àLongueil, son histoire presque centenaire, son fonctionnement, l'état de sacollection, ses projets. L'auteur de l'article est aujourd'hui présidente etdirectrice de la Bibliothèque Jeanne-Cypihot, corporation sans but lucrat i favec laquelle l ' Inst i tut et diverses instances gouvernementales ont entreprisune réflexion concernant un éventuel transfert de la collection Braille. Cenouvel organisme diffusera sous peu, sous forme de prêt, des livres-disquettes en Braille, produits à partir des fichiers-sources d'éditeurs qué-bécois.Indexation : Bibliothèque spécialisée - Handicapé - Ponds - Support infor-mation - Besoin util isateur - Evolution - Québec - BRAILLE

COMMENT ÉVALUER L'INDEXATION ?

articles qui n'ajouteront que du bruit à la liste. Il n'a pas fallu beaucoupde temps pour trouver ces deux exemples ; d'autres pourraient êtreprésentés et encombrer inutilement ce chapitre. Le lecteur est renvoyéà ses prochaines recherches pour renforcer l'argument... Plus il y a determes dans le champ « indexation », plus la combinatoire risque d'êtrefaussée, et plus on produit de bruit à l'interrogation.

• Les ternies donnant l'illusion de l'information

On ne saurait trop rappeler que l'indexation, clé d'accès à une infor-mation pleine, doit fournir des références à des documents qui appor-tent du contenu et non pas seulement des citations : ainsi, si l'oncherche des informations sur les caractéristiques du logiciel Best-Seller, l'interrogation de la banque de données fournit la première réfé-rence, et le résumé indique seulement que ce logiciel est utilisé dans lesbibliothèques gouvernementales du Québec.

• Les répétitions abusives et les choix pertinents

Son regard fixé sur le texte et sur le langage contrôlé en vigueur,l'indexeurpcrd souvent le sens d'une simple réalité. La deuxième noticeest un bon exemple de surindexation et de mauvais choix de vocabu-laire. Le t i t re de l'article indique bien qu'il s'agit d'une « bibliothèquespécialisée » {mot clé) et de son histoire, présentée métaphoriquementen tant qu'« odyssée de 95 ans », mots inutiles pour l'interrogation. Seulle nom propre « Braille » peut être considéré comme univoque, évoca-tcur d'un certain style d'écriture et de lecture, pour une population toutà fait ciblée. En tant que nom propre, le vocable « Braille » apparaîtdeux fois dans le résumé, et en tant que système, deux autres fois. Pourfaire bonne mesure, il est repris comme terme d'indexation.

En revanche, c'est le terme plutôt générique « handicapé » quireprésente la population spécifique visée ; le terme « support informa-tion » double i nu t i l emen t le nom « Bra i l l e », déjà abondammentprésent. Sans doute le langage contrôlé ne donnait aucune autrepossibilité.'Âïors, pourquoi les mots « cécité » ou « aveugle » n'appa-

Page 86: Analyse Documentaire_suzanne Waller

INDEXATION L'INDEXATION EN 10 CONSEILS

raissent-ils pas, d'une façon ou d'une autre, dans le résumé ? Malgré lenombre imposant de mots clés inutiles, c'est un bel exemple de silenceen vue.

On voit donc que la surindcxation n'exclut pas les risques de silence ;il ne suffit pas de « mettre » beaucoup de mots ; encore faut-il qu'ilssoient choisis judicieusement. On trouve bien ici la coupure existantentre analyse et recherche. Dans l'enseignement de la profession, onpeut constater que les opérations booléennes font le plus souvent partiedu cours sur la recherche automatisée, sans aucun rapprochement avecles cours sur l'analyse et l'indexation. Cette tradition perdure jusquedans la pratique professionnelle quotidienne. Si les analystes n'interro-gent pas les banques de données de façon régulière et réfléchie, si lesrecherchistes ne se confrontent pas à la difficulté du travail d'analyse,les banques de données deviendront de plus en plus ces mastodontessans âme que leur masse condamne à l'immobilisme.

• Le coût de la surindexation

Un dernier aspect nocif de la surindexation tient à son coût. On parletrès souvent et ajuste titre du coût de l'analyse, mais circonscrit au tempspassé à la rédaction du résumé et au choix des termes d'indexation.« L'analyse coûte cher », répète-t-on et, sans doute, est-ce l'une desraisons des recherches actuelles pour augmenter l'utilisation des interro-gations en texte intégral ou de tous les autres systèmes visant à terme àsupprimer l'analyse dite manuelle (!). Ces recherches sont légitimes, àcondition de prendre aussi en compte le coût de l'interrogation quin'aboutit pas. L'économie d'une transaction repose sur l'amont et surl'aval : tout ce qui n'est pas fait au départ doit être fait à l'arrivée, etcomment ? Faut-il reporter sur l'utilisateur final le soin de se tirerd'affaire, alors qu'il vient avec sa seule demande, sans avoir normalementexploré le vocabulaire existant comme sait le faire tout documentaliste ?

L'indexation n'est certainement pas une science exacte, mais ellerépond à quelques règles dont il faut tenir compte avant d'aborderl'étude des langages contrôlés, passage obligé pour paracheverl'opération.

L'indexation en 10 conseils

1. Tenir compte du destinataire final et de l'environnementdocumentaire.

2. Prendre connaissance du texte et l'interroger. (De quoi s'agit-il ?)

3. Écrire une courte phrase faisant ressortir le(s) sujet(s) essentiel(s).

4. Caractériser ce(s) sujet{s) en langue naturelle : avoir à l'esprit toutce qui est sous-jacent à la formulation d'un mot (vocabulaire courant /spécialisé, champ sémantique / symbolique, etc.) et vérifier ceux qui setrouvent déjà dans d'autres champs de contenu.

5. Se poser la question : si j'interroge à partir de ce(s) mot(s),quellc(s) information(s) suis-je susceptible de récupérer ?

6. Distinguer les termes d'indexation portant sur le sujet principal destermes d'indexation caractérisant les aspects sous lequel le sujet esttraité. Exemple :

Politique sociale communautaire SujetDroit communautaire Aspect législatif

7. Consulter le langage contrôlé (cf. chapitre vin, p. 175-222) pourchoisir les termes d'indexation.

8. Si les termes sont nombreux, les passer au crible des opérateursbooléens pour éviter les croisements fâcheux.

9. Consulter la banque de données pour vérifier l'utilisation de cestermes en vue de maintenir une cohérence interne.

10. Choisir définitivement et sans état d'âme les seuls termesd'indexation utiles à la recherche documentaire.

Page 87: Analyse Documentaire_suzanne Waller

INDEXATION

NOTES

1. Source : [52], p. 51.

2. Source : [4].

3. Source : [46].

4. Source: [15].

5. Source : [40].

6. Source : [52], p. 4.

7. Source: [8], p. 143.

8. Source : [2], p. 142.

9. Voir : [58] (malgré sa date, ce texte n'a rien perdu de son intérêt) et [751p. 591.

10. Source : [75], p. 590.

11. Voir, entre autres, [20], p. 44-50.

12. Source: [14], p. 70-71.

ANNEXE PÉDAGOGIQUE

Les exercices de ce chapitre, plus encore que les autres, nepeuvent faire l'objet de corrections précises. En effet, l'indexationest principalement tributaire : de la politique documentairedécidée en amont ; du langage contrôlé employé en aval ; del'existence (ou non) d'un résumé.

Politique et langage sont propres à chaque unité d'informationdocumentaire et ce manuel ne peut qu'y rester extérieur. Lescommentaires insisteront donc sur les erreurs à éviter et nepourront pas donner un résultat définitif, tant sont différentes lespratiques et possibles les interprétations.

Exercice 16 - Identifier des erreurs d'indexation

Le texte proposé au chapitre précédent comme exercice derésumé (Claude-Jean Bertrand. — Des objectifs pour le journalisme.— Études, septembre 1993. Voir p. 246) a été indexé par un groupenovice au cours d'une formation initiale. 54 mots clés ont étérelevés (voir page suivante). En vous inspirant des pages 154 à 158,vous devez déceler et analyser les erreurs, puis les éliminer. Vousproposerez les mots clés que vous conserveriez, ou d'autres quivous paraîtraient plus justes.

Commentaires en page 300.

Exercice 17 - Indexation en langage libre

1 - Lisez, page 253, le texte de Ann Okerson. — Les droits* d'au-teur des œuvres numériques. — Pour la science, septembre 1996,n° 227. Leltrois premiers paragraphes de ce texte ont été proposés

Page 88: Analyse Documentaire_suzanne Waller

INDEXATION

dans l'exercice 7 comme application de lecture documentaire d'unarticle ; on se rappelle que les deux premiers paragraphes illustrentle titre et que le troisième pose un certain nombre de questionspouvant servir d'hypothèses de lecture.

2 - Indexez cet article en langage naturel, soit en choisissant desmots caractéristiques du contenu et susceptibles d'être interrogés,soit en répondant par une courte phrase à la question : « De quois'agit-il dans ce texte ? »

Commentaires en page 302.

Liste des mots clés de l'exercice 16 :

1. actualité2. amélioration journalistique3. argent4. barrière à l'information5. communication (x4)6. conception du journalisme7. connaissance8. conscience des gens de presse9. débat public10. démocratie11. déontologie (x3)12. déontologie des journalistes13. développement de la presse14. diffusion (x2)15. éducation16. États-Unis17. éthique18. information (x9)19. information continue20. intérêt21. journalisme (x4)22. journaux (x2)23. liberté (x3)24. liberté de la presse25. libertés26. livraison de l'information27. média (x5)

28. médias (x5)29. minorité30. moralité31. moyens32. nouvelles33. nouvelles compréhensibles34. objectif35. partialité36. politique37. presse (x3)38. profession39. pseudo-événements40. public (x2)41. publicité42. qualité (x3)43. réalité44. rédaction45. réforme (x2)46. rôle47. service public48. scientifique49. tradition50. traduction51. traitement de l'information52. transformation (x2)53. transformations (médias (et))54. vérité

ANNEXE PÉDAGOGIQUE

Exercice 18 - Indexer en langage libre

1 - Lisez, en page 260, le texte : Didier Dubrana. — Haute tensionsous les lignes. — Science & Vie, février 1993, n° 905.

2 - Indexez cet article en langage naturel en répondant par unecourte phrase à la question : « De quoi s'agit-il dans ce texte ?

Commentaires en page 305.

Page 89: Analyse Documentaire_suzanne Waller

CHAPITRE VIIILES LANGAGES DOCUMENTAIRES

I I ne peut y avoir communication sans langage, de quelque type qu'ilsoit. Dans le cadre de l'analyse documentaire, les exemples et exercicesd'indexation proposés dans les chapitres précédents montrent spectacu-lairement les limites de la langue naturelle et prouvent l'absoluenécessité d'un langage contrôlé. Si « les langues naturelles reposent surdes conventions partagées au sein d'une communauté1», quellesconventions les langages documentaires sous-tendent-ils ?

Un peu d'histoire

L'importance accordée aux langages contrôlés est relativementrécente ; la recherche de documents a longtemps été effectuée par nomsd'auteurs, comme en témoigne le catalogue des imprimés de laBibliothèque nationale. Ce passage d'une recherche de documentsréservée aux érudits (il fallait savoir qui avait écrit sur quoi) à larecherche documentaire ouverte à tous, grâce aux accès par sujets ouaccès-matières, s'est déroulé en plusieurs étapes :

- vers la fin du xixc siècle, aux Etats-Unis, les bibliothèques univer-sitaires ont ouvert leurs rayons aux étudiants en classant les ouvragespar grandes disciplines : ce fut la naissance des classifications, sous-jacentes au classement ;

- vers les années trente, toujours sous l'impulsion nord-américaine,les bibliothèques publiques, outre le classement des ouvrages par sujet,ont établi des fichiers analytiques de matière, à l'intérieur desquels desfiches classées alphabétiquement indiquaient le sujet de l'ouvrage,d'abord d'après les mots significatifs du titre, puis selon un lexique plusou moins élaboré ; •- au cours des années cinquante, la mise en place de fiches perforées

a permis les premiers essais de combinaison de termes, puis l'informa-

Page 90: Analyse Documentaire_suzanne Waller

LES LANGAGES DOCUMENTAIRES

tisation a pris le relais, les outils linguistiques correspondants assuranttoutes les possibilités de la combinatoire, de la liste la plus simple authésaurus le plus perfectionné.

Ce survol plus que rapide montre que les premiers langagesdocumentaires étaient appliqués aux champs de contenu, spécialementau champ d'indexation, qui était effectivement le plus employé pour larecherche documentaire. Les progrès de l'informatisation permettant lacombinatoire, les langages documentaires contrôlent maintenantl'ensemble du vocabulaire de tous les champs interrogeables, sauf ceuxrédigés en langage libre, à savoir les champs « titre » et « résumé ».

Tout langage contrôlé est un langage d'« autorité », c'est-à-dire unlangage normalisant l'aspect formel des accès. Cependant, l'usagedistingue les langages documentaires - affectés à la recherchedocumentaire par sujet — des listes d'autorité concernant les autreschamps, en particulier ceux où se trouvent des noms propres commeles champs « auteurs personnes physiques ou collectivités ». En effet,comment saisir les noms arabes, africains, orientaux ? Doit-on choisir« C N R S » ou «Centre national de la recherche scient if ique»,« U.S.A. » ou « États-Unis » ? Et si les saisies varient, comment effec-tuer (et réussir) une recherche ?

La notion d'autorité est le plus souvent affectée aux champs decatalogage. Elle est insuffisamment connue et utilisée dans les servicesde documentation qui réinventent quelquefois ce qui existe déjà parailleurs. Les pages suivantes ont pour objectif de mieux en faireconnaître la teneur, l'intérêt et l'application tout à fait possible auxchamps d'indexation.

Les autorités

Les champs de description des banques de données (cf. p. 101-102)suivent à peu de choses près un même canevas ; les éléments propres àl'ISBD {International Standard Bibliographical Description) y sont

LES AUTORITÉS

obligatoirement présents. On peut donc distinguer les autoritésreconnues par tous et officiellement utilisées, des autorités internes,choisies et élaborées pour tel ou tel usage.

LES AUTORITÉS OI-FIC!F,LLES

La Bibliothèque nationale publie sous forme de microfiches mises àjour deux fois par an des « fichiers d'autorité » pour les noms d'auteurs(personnes physiques, collectivités-auteurs) et pour les titresuniformes.

La Bibliothèque du Congrès établit ses autorités sous forme denotices ; auteurs (physiques et collectivités), titres uniformes etcollections sont disponibles en ligne et/ou sur cédéroms mis à jourtrimestriellement. Ces notices couvrent la littérature mondiale, donc lesauteurs, titres et collections en langue française sont fortementprésents.

L'ISO2 publie une liste d'abréviations pour les lieux géographiques etles langues des publications'. Ces outils linguistiques assurent l'harmo-nisation des données, indispensable pour tout échange de notices etpour une interrogation efficace des banques de données internationales.Entre autres, ils résolvent les problèmes posés par la translittération deslangues non romanes et ils donnent une forme immuable aux nomspropres : personnes, collectivités, lieux, etc.

L'exemple suivant peut en illustrer l'application. Des étudiants ontrécemment indexé l'article « Le parc naturel régional Scarpe-Escautprépare son avenir» (Le Monde, 21 janvier 1998, p. 13). Cet articledescriptif donne un rapide aperçu de l'historique du parc, ainsi que deson environnement géographique et politique. Un petit lexiquepréétabli a été fourni aux étudiants ; il ne contenait aucune formulationde lieu. La consigne de l'exercice (qui excluait le résumé) leurpermettait de proposer des mots clés candidats susceptibles de préciserle contenu et d'aider la recherche. Les vingt-cinq formulations géogra-phiques relevées méritent d'être présentées :

Page 91: Analyse Documentaire_suzanne Waller

LES LANGAGES DOCUMENTAIRES

Belgique

Escarpe-Escaut

Escault

Escaut

Hainaull

Hainaut

Nord- Pas de Calais

Nord-Pas-de-Calais

Parc des plaines de laScarpe et de l'Escaut

Parc du Hainaull

Parc du Hainaut

« Parc du Hainaut »

Parc naturel des plainesde l'Escaut

Parc naturel régionalScarpe-Escaut

PNR

P.N.R.

P N R

Province du Hainaut

Scarp Escaut

Scarpe

Scarpe Escaut

Scarpe-Escaut

SCARPE-ESCAUT

Vallées de la Scarpe etde l'Escaut

Wallonie

Deux notices d'autorité peuvent être consultées (voir ci-contre). Lapremière provient de la Bibliothèque nationale de France, et la secondeest issue de la Bibliothèque du Congrès (Washington). La première serachoisie par toutes les grandes bibliothèques institutionnelles françaises,mais un service de documentation indépendant pourra lui préférer laseconde, plus proche du langage courant — à condition, bien sûr, de s'yconformer ensuite de façon régulière. Intégrée dans l'index des collec-tivités-auteurs, cette formulation constante simplifie le travail del'analyste et assure une cohérence globale à la banque de données.

LES AUTORITÉS PROPRES À DES BESOINS SPÉCIFIQUES

Chaque service de documentation doit répondre, en revanche, à desbesoins spécifiques. Les champs de description et de contenu sontinterrogeables et l'on peut en créer autant que de besoin — à condition,bien sûr, qu'il ne s'agisse pas de gadgets... Évoquons ici un champ dedescription « couleur du document »... qui laissait rêveurs les usagers !

LES AUTORITÉS

Espace naturel régional (Nord-Pas-de-Calais)

EP* ENREP Association pour l'espace naturel régional (Nord-Pas-de-Calais)EP Association Espace naturel régional (Nord-Pas-de-Calais)

*[:P = employé pour

Parc naturel régional Nord-Pas-de-Calais (France)

EP Audomarois (France : Park)EP Nord-Pas-de-Calais Régional Nature ParkVA* Natural areas, FranceVA Parks, France

Sources : Work Catalogue : Insti tut géographique national (France), 1997Michel in road atlas France, 1987

•VA = voir aussi

Quels sont donc, parmi les champs de contenu classiques, ceux quinécessitent des autorités ?

• Si la cotation répond à un système conceptuel, elle suit un plan declassification (cf. p. 186-195).

• Les champs « domaine » et « indexation » représentent les sujets,donc sont soumis aux langages d'indexation (cf. p. 195-218).

• La typologie de l'information dépend, bien sûr, des centres d'intérêtel des modes d'interrogation du lieu ; on a déjà parlé des dix-neuf typesde publications officielles. Une banque de données de presse asélectionné huit types en indiquant bien leur utilisation :

bibliographie : l 'article comprend une bibliographie du sujet traité ;même dénomination pour filmographie, discographie, etc. ;

Page 92: Analyse Documentaire_suzanne Waller

LES LANGAGES DOCUMENTAIRES LES AUTORITÉS

" '

- biographie : l'article présente des informations biographiques sur uneou des personnes, en indiquant au moins fonction, date de naissance oude prise de fonction, etc. Môme dénomination pour les nécrologies ;

- chronologie : l'article présente la succession d'un ou de plusieursévénements dans le temps ;

- entretien (à distinguer de l'interview) : l 'article est composé d'unediscussion entre différentes personnes ayant à peu près le même niveaude compétence ;

- gouvernement : l'article présente la composition ou la modificationd'un gouvernement ;

- interview {à distinguer de l'entretien) : un journaliste interroge unepersonne compétente dans le sujet traité ;

-statistique : l'article présente des données chiffrées utilisables par lelecteur. Ces données chiffrées ne sont pas nécessairement présentéessous forme de tableau ;

- synthèse : l'article présente un sujet de la façon la plus complète etla plus à jour possible.

Cette liste n'a qu'une valeur d'exemple; elle ne présente aucuncaractère d'« autorité » pour d'autres services similaires. Il revient àchacun de tester ses choix, d'ajouter ou de retrancher en fonction desbesoins réels. Par exemple, cette banque de données de presse n'a pasretenu un champ « rubrique », tandis qu'une autre l'a créé -« économie », « société », « sports »4 —, certainement pour favoriserson mode de recherche documentaire. Le choix de ces autoritésinternes offre donc une grande liberté, mais l'important est ensuite des'y plier régulièrement, de façon à leur garder tout leur intérêt.

MÉCONNAISSANCE OU RÉTICENCE ?

Les services de documentation ont intégré sans peine les autoritéspropres à leurs besoins. L'exemple donné en page précédente peut êtrecomplété par des index concernant la typologie des documents, deslistes de sigles, des codes internes — tous les éléments relativementrépétitifs et requérant une forme immuable.

Ces mêmes services, cependant, méconnaissent encore trop lesautorités officielles, considérées comme réservées aux grandescentrales documentaires ou aux bibliothèques encyclopédiques(nationales, universitaires, etc.). Or, tout service de documentation estappelé à faire, si ce n'est pas déjà le cas, du déchargement de notices.On peut môme avancer l'hypothèse que moins il a de moyens, plus estintéressant pour lui ce mode d'enrichissement de sa banque de données.Cela entraine obligatoirement des règles communes dont on constateque si elles sont reconnues et admises lorsqu'il s'agit de PISBD, elles lesont beaucoup moins lorsqu'il s'agit des autorités propres à la for-mulation des noms d'auteurs — personnes physiques ou morales —,des noms de lieux, de collection, etc.

La source de ces autorités est bibliothéconomique et elle est surtoututilisée pour les champs de la description bibliographique. Est-ce uneraison pour l'y cantonner, alors que l'on peut si rapidement — et defaçon quasi universelle — trouver un moyen de se mettre d'accord surla façon de choisir les noms propres dans les champs de contenu ?

Quelle différence d'écriture entre le champ caractérisant un texte de« Tchekov » et le champ caractérisant un texte sur « Tchekov » ? Cetexemple n'est pas anodin, car il soulève les problèmes de translité-ration, que les autorités officielles aplanissent également.

Il est possible, sans faire preuve de beaucoup d'imagination, de sereprésenter ce que peut donner la formulation d'un champ d'indexationgéographique pour un ouvrage traitant de l'Angleterre, sachant qu'onpeut également choisir Grande-Bretagne ou Royaume-Uni, que l'onpeut trouver des abréviations, choisir entre les tirets, les espaces...Quelle recherche est ainsi facilitée ? Quelle forme auraient les éditionsvenant de diverses sources ?

Les autorités officielles ne résolvent pas tous les problèmes, bien sûr,mais en règlent un grand nombre. Il est temps pour les documentalistesd'utiliser sans réticence ces outils encore trop peu ou mal connus.'Quede temps gagné tant à l'indexation qu'à la recherche, et quelle facilitépour un échange international des données !

Page 93: Analyse Documentaire_suzanne Waller

LES LANGAGES DOCUMENTAIRES

Les langages documentaires

DÉFINITION

L'AFNOR définit les langages documentaires comme des « langagesartificiels constitués de représentation de notions et de relations entreces notions, destinés, dans un système documentaire, à formaliser lesdonnées contenues dans les documents et dans les demandes des utilisa-teurs- ». On peut donc appliquer cette définition à toutes les données :noms d'auteur, de lieux, comme contenu, matière, thèmes ou sujets.

L'usage a établi une distinction entre les autorités et les langages ditsdocumentaires, plutôt orientés vers l'indexation. Pour simplifier, disonsque tous ces langages sont contrôlés et qu'ils servent à la recherchedocumentaire, chacun selon sa nature. Toutefois, lorsqu'il s'agit d'unerecherche par thème ou par sujet (réponse à la question clé : de quois'agit-il dans ce texte ?), ces langages sont appelés de façon générique« langages documentaires ». Dans ce cas, ils interviennent dans latroisième phase du processus d'indexation (cf. p. 149-151) :

- compréhension du texte et de son contenu informatif ;- représentation verbale de ce contenu informatif ;- représentation de ces concepts dans le langage documentaire.

Outre les problèmes déjà identifiés au cours des chapitres précédents,la langue naturelle génère des problèmes et des obstacles, définis dansle paragraphe suivant, qui sont à l'origine de la création des langagescontrôlés. Ces derniers tendent à formaliser le contenu informatif d'untexte au moyen de codes servant de pont entre le texte et ses éventuelsusagers. Ces codes peuvent être des symboles ou des mots.

LES OBSTAC'LES DUS À LA LANGUE

On a vu que la langue, en tant qu'ensemble de caractères, conventionsou règles, présente des caractéristiques faisant obstacle à latranscription aisée de l'information. Ce manuel n'a pas pour objet

LES LANGAGES DOCUMENTAIRES

d'étudier de manière exhaustive l'ensemble de ces obstacles linguis-tiques, mais on retiendra les plus courants dans la pratique documen-

taire.

Synonymie

La synonymie se définit comme une équivalence entre des motsdifférents véhiculant le même sens ou des sens rapprochés : Exode Ifuite I émigration, Emotion I émotivité. Hypnose I hypnotisme, Agressi-vité des jeunes / violence juvénile.

Polysémie

La polysémie, quant à elle, est le « fait, pour un mot, d'avoir plusieurssens ou acceptions : pont désigne une partie du navire et une construc-tion entre les deux rives d'un cours d'eau h », les deux signifiés de cemot ayant la même étymologie (du latin pons, ponds). Il en va de mêmed'« expérience » (du latin experientia) : pratique, habitude, épreuve,

essai, connaissance, savoir.

On peut utiliser ce terme dans tous les cas où un mot (signifiant) peutêtre porteur de plusieurs sens (signifiés), mais il existe des différencessubtiles et les linguistes distinguent la polysémie véritable, ci-dessusdéfinie — où les mots porteurs de sens différents ont une môme étymo-logie et des traits sémantiques communs — de ['homonymie — quiprésente les mêmes caractéristiques que la polysémie, moins les traitssémantiques communs. La classe des homonymes se subdivise en :

- mots homophones présentant une seule prononciation, plusieurssens et, le plus souvent, une graphie différente : saint, sain, sein, seing ;

- mots homographes présentant une même graphie et plusieurs sens :cirque, canon. L'homographie se distingue de la polysémie selon l'éty-mologie des mots. Ainsi, canon a pour sens « pièce d'artillerie » selonl'origine latine et « décret » selon l'origine grecque.

Le terme « homographe » est utilisé de plus en plus fréquemment pourcaractériser les problèmes dus à l'existence d'un seul signifiant pourplusieurs signifiés, sachant que l'homophonie n'introduit pas d'ambi-

Page 94: Analyse Documentaire_suzanne Waller

LES LANGAGES DOCUMENTAIRES

guïté, actuellement, dans l'élaboration et l'utilisation des langagescontrôlés. Si l'analyse automatique de la parole intervient un jour dansla recherche documentaire, il faudra étudier de près ce nouvel obstacle.

USAGES ET DIFFICULTÉS D'USAGE

On a comparé plus haut le langage documentaire à un pont entre letexte et son éventuel lecteur. Le documentaliste-analyste est le média-teur en amont. Ainsi :

L'analyste :- comprend et décode les infor-mations contenues dans le texte ;- caractérise ces informations enutilisant le langage d'indexationchoisi.

L'usager :- pose une question en langagelibre ;- la transcrit en langage d'indexa-tion pour effectuer la recherchedocumentaire.

L'existence d'un langage contrôlé n'aplanit toutefois pas les difficultésdu dialogue entre documentaliste et usager, ni les embûches de la recher-che documentaire. Théoriquement, tout est fait pour unifier les deux bords,dans la pratique : « Information retrieval langnage can affect thé sitbjectanafysis [...]. The fact that thé langitage affecte thé suhject analyste mayhâve both positive and négative effects. 1 » II n'est pas rare qu'au momentde l'indexation le documentaliste-analyste connaisse les affres du choix :quel est vraiment le sens, et comment le formaliser ? La tentation estgrande, alors, de faire l'impasse sur les deux premières phases de com-préhension et de formulation. L'histoire vraie de l'analyste non fonné cher-chant d'abord si les mots du titre se trouvaient dans le langage d'indexa-tion, et se contentant de cela, illustre bien cette lâcheuse tendance, appa-remment, hélas !, assez répandue... Cette « loi du moindre effort » (cf.p. 162-163) semble bien rassembler de nombreux disciples. Il est égale-ment vrai que certains langages présentent des insuffisances ou des rigi-dités propres à rebuter les indexeurs. Dans un tel cas, si par hasard i l existeun champ « indexation libre », c'est la porte ouverte à tous les excès.

LES LANGAGES DOCUMENTAIRES

Et du côté de l'usager, qu'en est-il ? Comment les langages contrôléspeuvent-ils favoriser la recherche documentaire ? En effet, l'usager n'aqu'un seul but : trouver le plus rapidement possible le documentrépondant à sa question. L'utilisation des langages contrôlés ne lui estpas familière et il serait illusoire — surtout à l'heure d'Internet -- deprétendre l'obliger à s'y soumettre. En même temps, sans doute déçupar les limites de ce réseau, il souhaitera trouver dans les banques dedonnées structurées des réponses plus précises et validées. 11 est trèsimportant, pour l'y aider, d'observer ses stratégies. Ira-t-il du général auparticulier, du particulier au général en utilisant un cheminementlogique ? Ou au contraire, de façon complètement aléatoire, va-t-ilnaviguer ici ou là, s'inspirant de ce qu'il découvre pour rebondirailleurs, sans que l'on puisse — de l'extérieur — suivre vraiment sadémarche ?

On peut décrire mille variations à partir de ces deux thèmes et, selonles cas, pour l 'analyste comme pour l 'utilisateur, les langagesd'indexation peuvent effectivement être une aide ou un obstacle.

TYPOLOGIE DES LANGAGES DOCUMENTAIRES

On distingue couramment deux grands types de langages documen-taires : classificatoires et combinatoires. « Les langages documentairesdécoupent les champs de la connaissance selon deux types différentsdont les unités sémantiques élémentaires ont chacune un gabaritparticulier : les classifications, où l'unité documentaire est le sujet, etles langages postcoordonnés, où l'unité élémentaire est le concept. Lespremières sont énumératives et arborescentes. Dans les seconds, lessujets sont exprimés par la combinaison des termes élémentaires. * »

De nombreux et très bons ouvrages ' se sont employés à décrire defaçon détaillée les grands langages documentaires. Si la nature et lastructure de ces derniers sont rappelées dans ce chapitre, c'est pourmettre en lumière leur apport et leur limite dans les opérationsd'indexation et de recherche documentaire.

Page 95: Analyse Documentaire_suzanne Waller

LES LANGAGES DOCUMENTAIRES

Les langages documentaires de type classificatoire

PRINCIPES DE BASE

Le langage documentaire de type classificatoire est basé sur leprincipe d'une subordination logique à l'intérieur d'un système depensée qui va du général au particulier, du générique au spécifique etrépond au processus d'inclusion :

Général Particulier

Inspiré de la logique classique, i l subdivise une collection d'élémentsen un nombre limité de classes. Chaque classe comprend un ensembled'objets ayant au moins un caractère commun et peut se subdiviser enautant de sous-classes comprenant un autre ensemble d'objets ayant aumoins un caractère commun, etc.

Ainsi, on peut subdiviser la notion ou classe « Sciences appliquées »en autant de sous-classes qu'il existe de sciences appliquées, parexemple « Médecine », « Sciences de l'ingénieur », « Agronomie »,« Commerce », « Industrie », « Industrie métallurgique », etc. On peutensuite subdiviser chacune de ces sous-classes de la même façon, etl'arborescence pourrait alors ainsi être présentée (voir ci-contre). Cetexemple s'applique à des éléments concrets et mesurables. Les langagesclassificatoires constituent l'une des expressions des systèmes scienti-fiques et philosophiques. De Platon à Auguste Comte, nombreuses sontles représentations organisées et abstraites des connaissances humai-nes. « Une classification est une répartition systématique en classes, en

LES LANGAGES DOCUMENTAIRES DE TYPE CLASSIFICATOIRE

SCIENCESAPPLIQl'tES

Médecine

Sciencesde l'ingénieur

Agronomie —

- Commerce

Industriechimique

- Industriemétallurgique

I k

AgricultureExploitationagricole

Recolles

ArboricultureHorticultureZootechnieEtc.

Céréales

Racines

Etc.

Blé- Sarrasin- Avoine- R i z

Etc.

Plantesfourragères

Légumineuses | LuzerneL Trèfle

Etc.

- BetteravesNavetsEtc.

catégories, d'êtres, de choses ou de notions ayant des caractères com-muns, notamment af in d'en faciliter l'étude.I0 » C'est sur ces bases queLinné a conçu et organisé le système explicatif des règnes animal,végétal et minéral en embranchement, classe, ordre, famille, genre.espèce, variété, auquel tous les scientifiques se réfèrent pour identifierles éléments de la nature. Mais c'est aussi sur ces principes que les uni-versités du xnc siècle organisèrent leur enseignement, fondé sur troisarts (trivium) — grammaire, rhétorique, dialectique — et quatre dis-ciplines (quadrivium) — arithmétique, musique, géométrie, astrono-mie —. chacune de ces notions étant subdivisée en sous-notions, sous-sou s-not ions,'elt.

Page 96: Analyse Documentaire_suzanne Waller

LES LANGAGES DOCUMENTAIRES

APPLICATIONS POUR LE CLASSEMENT

Les langages classificatoires sont nés d'une situation concrète : com-ment organiser un classement d'ouvrages par grandes disciplines pourpermettre aux étudiants de trouver rapidement les livres correspondantà leur centre d'intérêt ? C'est donc à cause de l'opération matérielle declassement que sont nées les classifications : « Système prédéterminéde notions logiquement structurées, ayant chacune reçu un code identi-ficateur. Ce code est attribué à des notions ou à des ouvrages enfonction de la correspondance des sujets. " » Chaque notion est codi-fiée, selon un ordre décimal. Dans l'exemple de la page précédente, sile code 600 est affecté aux Sciences appliquées, 610 à la Médecine, 620aux Sciences de l'ingénieur, l'Agronomie sera codifiée en 630 ; puis oncontinue à partir de 630, pour codifier les Récoltes en 633, puis lesCéréales en 633.1, puis le Blé en 633.11 (ces codifications sont issuesde la Classification décimale de Melvil Dewey), etc. Une classificationbibliologique se présentera ainsi (voir ci-contre).

Pratiquement, tous les ouvrages traitant d'agronomie seront classéssous le même code 630, des céréales sous 633.1 et du riz sous 633.18.En bibliothéconomie, ces codes sont appelés « notations », ou pluscouramment « indices de classification ».

Une classification bibliologique a pour but principal de classer lesouvrages sur rayon selon leur sujet, en suivant un plan logique préala-blement déterminé. Ce plan est souvent appelé « plan de classement »car la classification (outil conceptuel) est le support du classement(opération matérielle).

APPLICATIONS POUR L'ANALYSE

Le principe d'arborescence propre aux langages classificatoires al'avantage de structurer la pensée, de hiérarchiser les données et defaciliter l'organisation d'un corpus. L'analyste est donc aidé par uncadre préétabli dans lequel il trouve, à l'intérieur d'une classe, tous leséléments propres à cette classe, présentés du général au particulier.

LES LANGAGES DOCUMENTAIRES DE TYPE CLASS1FICATOIRE

600 :

S<ï KM CES

APPLIQUEES

-610 -Médecine

-620 -Sciencesde l'ingénieur

tin- OJ1I

Agronomie

Etc.

- 630 -Agriculture

-63! -Exploitationagricole

-632-...611Récoltes

634-Arboriculture

r*rtLtc.

611 1 -Céréales

-633-2 -Plantesfourragères

631 1Légumineuses

fin \fc»*'-t

Racines

Eic.

-633.11 -Blé

-633.12 -Sarrasin

-633 .13-AvoineEtc.

-633-31 -Luzerne

- 633.32 -TrèfleEtc.

633 41 -Betteraves

-633.42-NavetsEtc.

Ces langages ont immédiatement servi au classement, mais ils ont étéégalement à l'origine des catalogues systématiques de matières, àl'intérieur desquels plusieurs fiches pouvaient présenter le mc'inedocument ; l 'indice principal — représentatif du sujet prioritaire -servait aussi pour constituer la cote, et des indices secondaires permet-taient d'indiquer des sujets plus précis. Un document complet sur les« écluses » était classé et indexé à l'indice 626.4 l2, mais une autre ficheportait l'indice 627.45, indice secondaire représentatif de la notion« écluses en rivièftïs ».

Page 97: Analyse Documentaire_suzanne Waller

LES LANGAGES DOCUMENTAIRES

Toutefois, quelques difficultés majeures ont freiné l'usage de ceslangages. L'une de ces difficultés est l'éclatement des sujets selon leurdomaine d'application. Si l'on doit trouver un indice caractérisant lanotion d'« enfant », on tombe sur l'impressionnant index présenté ci-contre.

Comment indexer un ouvrage ou un article de synthèse sur le simplesujet « Enfant » ? Il est vrai qu'un langage classificatoire ne doit pasêtre utilisé à partir de son index, mais de sa structure hiérarchique, ainsique le préconise l'édition de 1990 dans son introduction : « Parmi lesclasses principales on retient celle où le symbole recherché devraitnormalement figurer et l'on explore cette classe par éliminationsuccessive... » Dans ce sens, le mode classificatoire est rassurant. Si lesujet traite de la délinquance juvénile, peu importent les mots àemployer. L'indexation suivra un cours logique :

Délinquance entre dans le grand cadre des sciences socialesclasse 3

ni en sociologieni en statistiqueni en politiqueni en économieen droiten droit généralni en droit internationalni en droit constitutionnelen droit pénal

mais n'existe

mais existen'existe pas

mais existe

3031323334340341342343

On glissera rapidement sur les procédures pénales, les infractions etleurs différentes formes, pour repérer enfin en criminalité (343.9) lesespèces diverses de délinquants et criminels (343.91) pour aboutir à343.915 : Enfants, mineurs délinquants. Délinquance juvénile.Précisons que, dans la logique de ce langage, il n'existe pas d'entrée àl'index au terme « délinquance juvénile ».

Si l'éclatement des notions pose un problème, l'absence d'indice pourun sujet en pose un autre. Or, une classification de type encyclopé-dique, comme la CDU ne peut tout exprimer. L'introduction précise

LES LANGAGES DOCUMENTAIRES DE TYPE CLASSIFICATOIRE

ENFANT. Attitudes. PsychologieENFANT. Descriptions. PsychologieENFANT. Développement intellectuelF.NFANT. Développement mentalENFANT EN AGE DE SCOLARITEENFANT. PresseENFANT. PsychologieENFANT. Représentation. PsychologieENFANT. StatutENFANTS ABANDONNES. ÉducationENFANTS ADOPTES- Division de personnesENFANTS ANORMAUX. PsychologieENFANTS BATARDS. Division de personnesENFANTS. BibliothèqueENFANTS BLESSES. Division de personnesENFANTS. Cruauté envers les. Droit pénalENFANTS. Cruauté envers les. MoraleENFANTS DE BATELIERS. ÉducationENFANTS DE DIEU. SectesENFANTS DE DIPLOMATES. ÉcolesENFANTS DE GITANS. ÉducationENFANTS DE MILITAIRES ÉcolesENFANTS DE NOMADES. ÉducationENFANTS DF. TROUPE. École militaires d1

ENFANTS DELINQUANTSENFANTS. Documents pour les. Division de formeENFANTS. EfTels de l'autorité parentale sur les hiens des. Droit c iv i lENFANTS. EfTels de l'autorité parentale sur les. Droii civilENFANTS EN AGE PRESCOLAIRE. Division de personnesENFANTS EN AGE SCOLAIRE EN GENERAL. Division de personnesENFANTS EN QUALITE DE CONSOMMATEURSENFANTS. Épargne en généralENFANTS. HabitsENFANTS ILLEGITIMES. Division de personnesENFANTS ILLEGITIMES. ÉducationENFANTS LEGITIMES. Droit civilENFANTS. Livres pour les. Division de formeENFANTS. Mauvais traitements inf l igés aux. Droit pénalE.NFANTS NATURELS. Division de personnesENFANTS NATURELS. Droit c iv i lENFANTS NECESSITANT UNE AIDE. Infractions contre Droit pénalENFANTS PLACES EN NOURRICE. Division de personnesENFANTS. Protection contre l'autorité parentale. Droit civilENFANTS. Rapt. Droit pénalENFANTS KEJKTES. ÉducationE.NFANTS. Responsabilité de personnes non enseignantes ayant encharge des. Droit civilENFANTS RETARDES MENTAUX PsychologieENFANTS RE1ARDES PHYSIQUES. PsychologieENFANTS SANS MILIEU FAMILIAL. Éducation[ • N E A N T S - PARtNJS. Relat ions. Morale

159.922.74

159.922.75159.922.72159.922.73

371.212070.445159.922.7

159.922.75392.37

376.56-058.H65159.922.76

-05 R.868

027.625-056.262-053.2

343.62179.2376.662989

37.018.55376.6637.018.55376-66355.231.1343.915(0.053.2)347.636

347.635-053.4-0535

366-055.2336.722.142-053.2

391.3;-05R.868

376.64

347.631(02.053.2)343.62 :

058.868347.632343.62-05H.866

347.637343.62376 56

347.5153159.922.76159.922766376.64173.6

Page 98: Analyse Documentaire_suzanne Waller

LES LANGAGES DOCUMENTAIRES

bien « qu'une indexation sera réputée correcte lorsque le symboledécouvert exprime le contenu de l'ouvrage ou, à défaut, le contient ».L'exemple donné est qu'il faut indexer (et chercher) «pap i l l on» à« lépidoptères ».

L'index présenté ci-dessus donne l'exemple de la pré-coordinationmaximale : chaque terme est inscrit dans une formulation déterminéeen fonction du grand cadre dans lequel il s'inscrit. Si des enfants sontvictimes, ce langage classificatoire oblige à choisir entre l'aspect juri-dique ou l'aspect moral, car les classes 1 et 3 préexistent et imposentleur loi. On se trouve devant un maximum de rigidité et une totaleabsence de souplesse.

Enfin on constatera, à la lumière de l'extrait ci-dessous, qu'il existetrès peu de liens entre les indices. Aucun signe n'indique que la notion« enfant » apparaît dans bien d'autres endroits que sous le 343.915.

343.9 Criminologie. Sciences criminelles.Criminalistique- 343.2

343.9.018 Méthodes de recherches criminologiques343.91 Types de criminels, de délinquants343.911 Délinquants d'habitude. Récidivistes. Délinquants

irrécupérables. Délinquants professionnels343.912 Délinquants impulsifs. Délinquants occasionnels,

accidentels343.913 Délinquants perturbés mentalement. Malades mentaux

crimineîs. Aliénation, irresponsabilité criminelle343.914 Femmes délinquantes. Délinquance féminine343.915 Enfants, mineurs d'âge délinquants. Délinquance juvénile343.916 Militaires délinquants. Délinquance militaire343.917 Délinquants politiques. Terroristes politiques343.919 Délinquants particuliers. Affaires criminelles célèbres.

Procès criminels célèbres343.92 Influence du milieu physique sur la criminalité. Effets de

l'environnement physique, des saisons, de la localisationgéographique, etc.

343.93 Anatomie des délinquants. Signes extérieurs dedélinquance. Types de délinquants. Anthropométriecriminelle-* 572.5; 611

343.94 Physiologie et biologie des délinquants343.95 Psychologie criminelle. Psychologie médico-légale

- 159.9; 343.8

LES LANGAGES DOCUMENTAIRES DE TYPE CLASSIFICATOIRE

Les catalogues systématiques ont décliné bien avant l'arrivée del'automatisation, à cause de la rigidité du système. En effet, le principemoine de la hiérarchisation freine, sinon empêche l'évolution normaledu langage scientifique ou technique ; la codification devient de plusen plus fine, et en même temps, de moins en moins lisible ; les quelquesrelations existant entre indices sont de plus en plus difficiles à gérer, demême que l'index alphabétique nécessaire pour s'y retrouver. Et lasouplesse requise pour l'indexation, on l'a vu, est inconnue du système.En revanche, les systèmes classificatoires sont toujours utilisés pour laprésentation des bulletins bibliographiques (analytiques ou signalé-tiques).

Surtout, le principe d'arborescence est toujours indispensable àl'organisation d'un ensemble de connaissances. C'est ainsi que « laconception d'une arborescence thématique propre à Nomade, domainepar domaine, catégorie par catégorie [...] [a permis] une véritableorganisation de l'information sur Internet H ». Et l'on remarquera que lamajorité des sites web présentent leurs données sous une forme classi-ficatoire hiérarchisée (voir, en page suivante, un exemple extrait du siteNomade : http://www.nomade.fr).

APPLICATIONS POUR LA RLCHL-RCEIL

. Les atouts et les inconvénients des langages classificatoires, détaillespour l'analyse, se retrouvent au moment de la recherche. Au début d'unerecherche, lorsqu'il s'agit d'explorer largement un domaine, l'accès à uncorpus organisé est tout à fait satisfaisant. Les classifications encyclopé-diques (Dewey, CDU, Library of Congress) répondent à ce type derecherche et, de ce fait, connaissent toujours un réel succès. En effet « thcstructure may even assist thé user in thinking ahouî thé problem anddiscovering ramifications and new aspects I4 ». L'arborescence permet demonter et descendre, en toute sécurité, dans le domaine de recherche.

Lorsque la recherche est plus précise, les d i f f icu l tés apparaissentassez vite. Une arborescence stricte impose de suivre une ligne et uneseule ; les relations entre les sous-classes sont peu nombreuses et

Page 99: Analyse Documentaire_suzanne Waller

LES LANGAGES DOCUMENTAIRES

Actualité, médiaArts et culture

• Infos générales, références• Congrès, salons, conférences• Centres, organismes, associations culturelles

- Alliances françaises- Belgique

- Canada- etc.

• Cinéma• Histoire de l'art• Art populaire, folklore, régionalisme• Manifestations culturelles• Musées, monuments, patrimoine• Bibliothèques, documentation, archives• Musique• etc.

Formation, emploiEntreprise, industrieService publicFamille, santéetc.

n'aident pas le passage d'une branche à une autre. Plus l'on descenddans la hiérarchie et plus la codification devient difficile à lire,quasiment impossible à mémoriser. De plus, derrière les codes, lesnotions sont la plupart du temps pré-coordonnées, les termesd'indexation sont donc une fois pour toutes accolés les uns aux autres,du fait du langage en amont — et non pour aider la recherche en aval.Ainsi, l'indice 621.69 couvre-t-il toutes les informations sur les« appareils pour la production de froid intense et pour la liquéfactiondes gaz », ce qui est tout à fait intéressant lorsque l'on descend la chaînedepuis les techniques du froid (621.5) et la mécanique industrielle(621), mais qui n'apparaît pas comme un modèle de clarté, de primeabord. Les professionnels s'y retrouvent, mais pas l'utilisateur final.

LES LANGAGES DOCUMENTAIRES DE TYPE COMBINATOIRE

Enfin, la recherche repose de plus en plus sur la mult idiscipl inari té ,ce qui requiert l'usage de passerelles fréquentes entre les domainesd'intérêt. Les grandes classifications sont en général encyclopédiques,et présentent chaque discipline académique (philosophie, droit,sciences physiques, beaux-arts, etc.) selon une stricte hiérarchie quis'accommode mal des besoins de transversalité et de navigation entreles sciences15.

Toutefois, les grandes classifications et leur principe d'organisationdes connaissances sont loin d'être abandonnés : « L'utilisation de laclassification dans la recherche en ligne par sujets est une des grandespistes actuelles de réflexion [...] des études, américaines en particulier,ont montré que la structure hiérarchique et arborescente d'une classifi-cation comme la Dewey, permet un balayage plus systématique dessujets et apporte des résultats complémentaires à la recherche par mots.Cette piste prometteuse est en cours d'approfondissement. "' »

Ce qu'il faut donc abandonner, c'est l'idée d'une indexation fineut i l i sant ce type de langage. En revanche, le principe classificatoire estinscrit dans la pensée humaine occidentale et, dans ce sens, il reste unpuissant moteur pour la structuration d'un système ou d'une recherche.

Les langages documentaires de type combinatoire

Dans ces langages, les notions sont présentes sous forme de termes etnon plus de codes. Les termes se succèdent par ordre alphabétique, cequi entraîne automatiquement une dispersion des sujets. Selon lesdifférents langages de type combinatoire, il existe des liens plus oumoins élaborés entre les termes. M est sans doute utile de rappeler queles termes (ou mots clés choisis pour l'indexation) peuvent être : ,

- Unitermes : un mot égale une notion ; par exemple « forêt »,« exploitation ». Chaque Uniterme garde sa valeur tant qu'il n'est pasintégré dans une fornïulation pré-déterminée, ou pré-coordonné ;

Page 100: Analyse Documentaire_suzanne Waller

LES LANGAGES DOCUMENTAIRES

- complexes ; plusieurs mots représentent une notion ; par exemple«exploitation forestière». Chaque terme complexe est considérécomme un ensemble insécable.

Pour accéder aux notions contenues dans les documents classés selonune classification donnée, les premiers utilisateurs consultaient l'indexrenvoyant à la notation (ou code identificateur). Très vite, les catalo-gues systématiques furent doublés par des catalogues analytiques dematière, présentant en clair les notions symbolisées par une notation.En prenant l'exemple de la classification décimale de M. Dewey, lesnotices des ouvrages portant l'indice 633.1 pouvaient être trouvées aumot « céréales », celles à l'indice 633.11 à « blé », 633.18 à « riz », etc.De ce fait, les notices étaient dispersées, puisque intercalées par ordrealphabétique. Pour les notions complexes, plusieurs termes étaientchoisis et juxtaposés et l'on faisait autant de fiches que de termes, clas-sées selon l'ordre alphabétique. Ainsi sont nées les listes de vedettes-matières qui gardent encore de leur origine de fortes tendances à la pré-coordination. L'usage qui en est fait dans les bibliothèques, les logicielsqui les pilotent n'exploitent pas, malheureusement, les possibilités decombinaison qu'ils possèdent.

La mécanographie et l'usage des fiches perforées à sélection visuellemarquent le vrai début de la combinaison de termes, dont toutes lespossibilités, dues à l'algèbre de Boole, explosent avec l'automatisationet la création des thésaurus qui sont, avec les lexiques, de vraislangages combinatoires.

LES LISTES DE VEDETTES-MATIÈRES OU LES LANGAGES QUI P O U R R A I E N T

ÊTRE COMBINATOIRES...

Principes de base

Les listes de vedettes-matières sont basées sur l'ordre alphabétiquedes notions représentatives d'un contenu, ou mots clés. Le mot clé estappelé « vedette-matière ». Système pragmatique, utilisable par toutepersonne lisant un alphabet, il implique une dispersion des sujets

LES LANGAGES DOCUMENTAIRES DE TYPE COMBINATOIRE

puisqu'il n'y a plus ni structure ni classes, et exige donc des règles deconstruction des différentes vedettes. Toutes les vedettes apparaissentdans leur ordre alphabétique. Certaines peuvent être mises enrelation :

- s'il y a équivalence entre deux termes ; le terme exclu renvoie à lavedette choisie : « Gâteau voir Pâtisserie », « Catastrophe voirSinistre » ;

- s'il y a orientation vers d'autres vedettes, chaque terme renvoie à unou plusieurs autres : « Gastronomie voir aussi Cuisine ». « Activitéprofessionnelle voir aussi Emploi ».

Les vedettes sont souvent pré-coordonnées, c'est-à-dire combinées àl'avance avec d'autres termes jugés utiles pour l'indexation et larecherche. La pré-coordination n'empêche pas la construction devedette-matière avec des subdivisions de lieu, de temps et de forme l7.

Vedetles-matièrcs

GarrigueGastriteGastro-entërologie

voir aussi Digestif (appareil)Gastronomie

voir aussi CuisineGâteau

voir Pâtisserie

voir aussi GauchismeGauche, idéologieGauche, nom de lieu, datesGauche, parti polit ique

voir aussi au nom des partisGauche, théorieGauche/DroiteGauche (extrême)

GaucherGaucher, rééducation

GauchismeGaule

Gaule, Art, voir Arl gauloisGaule, civilisation

GaullismeGaulois (peuple)etc

Remarques

renvoi d'orientation

renvoi d'orientation

renvoi d'équivalence au terme choisi

renvoi d'orientationpré-coordinationindique possibilité et ordre des subdivisionspré-coordinationrenvoi d'orientationpré-coordinationpré-coordinationpré-coordination

pré-coordination

renvoi d'équivalence au terme choisipré-coordination

pré-coordination

Page 101: Analyse Documentaire_suzanne Waller

LES LANGAGES DOCUMENTAIRES

La construction des vedettes complexes suit le principe de la concaté-nation, en juxtaposant les termes qui peuvent l'être, selon un ordrerigoureux.

La juxtaposition n'est pas obligatoire ; elle répond à la précisionvoulue pour une indexation plus complète. Si l'on reprend l'exempledes ouvrages sur les « appareils pour la production de froid intense etpour la liquéfaction des gaz », on choisit le sujet principal comme mot-vedette, les sujets annexes étant considérés comme sous-vedettes. Onpeut imaginer, dans ce cas, des vedettes ainsi construites : « Froidintense, Production, Appareil » et « Gaz, Liquéfaction, Production,Appareil », à condition que les subdivisions de vedettes de sujets soientacceptées par le langage.

En France, RAMEAU (Répertoire d'autorité-matière encyclopédiqueet alphabétique unifié) est un répertoire terminologique créé et mis àjour par la Bibliothèque nationale et le ministère de l'Enseignementsupérieur et de la Recherche. Il est basé sur la liste d'autorité de l'uni-versité Laval (Québec), celle-ci se présentant comme la version fran-çaise des LCSH (Library of Congress Stihject Headings). RAMEAUest utilisé dans un très grand nombre de bibliothèques encyclopédiquesen France et dans les pays francophones. Il est consultable en versionimprimée, sur microfiches, cédérom ou en ligne1".

APPLICATIONS POUR L'INDEXATION

Ces langages sont surtout adaptés aux bibliothèques encyclopédiqueset aux agences bibliographiques nationales. En effet, un langagespécialisé supporte difficilement le manque d'organisation des connais-sances qu'induit l'ordre alphabétique. Apparemment simple dans son

LES LANGAGES DOCUMENTAIRES DE TYPE COMBINATOIRE

principe, ce type de langage pose de vrais problèmes d'indexation, dusessentiellement à la pré-coordination et à l'aléa des renvois. Les listesde vedettes-matières ne sont pas du tout faites pour les services dedocumentation, aussi n'étudierons-nous pas ce sujet de façon trèsapprofondie. À titre d'exemple, qu'il soit simplement proposé au lecteurd'indexer un livre donnant des recettes en cuisine végétarienne à l'aidedes extraits suivants '" :

ALIMENTAliment : Voir aussi Produit alimentaire et ;ui nom des aliments

Aliment : préparation Voir Cuisine et DiététiqueAliment ; valeur nutritiveAliment : valeur nutritive Voir aussi DiététiqueALIMENT TRANSGÉNIQUEALIMENTATIONAlimentation Voir aussi NutritionAlimentation : carence Voir Carence alimentaire

Alimentation : régimeAlimentât ton : troublesALIMENTATION ANIMAI.!: Voir Animal : alimentation

ART CORPORELART CULINAIRE Voir Cuisine : recettesART D'ÉCRIRE

Cuir : industrieCuir : métiersCUISINECuisine Voir ait\si Gastronomie et au nom des plats

Cuisine : recettesCuisine : régimeCl.'ISINF, VÉGÉTARIENNECUrVRECuivre : alliage

DIESELDIETETICIENDlETETfQUCDiététique Voir aussi au domaine d'application

Page 102: Analyse Documentaire_suzanne Waller

LES LANGAGES DOCUMENTAIRES

GASTRO-UGaslro-entérologie Voir aussi Digestif (appareil)GASTRONOMIEGastronomie Voir aussi CuisineGastronomie : histoireGATT AU Voir Pâtisserie

RECETTI- BUDGÉTAIRE Voir Budget : recettesRECETTE DE CUISINE Voir Cuisine el au nom des receltesRECHERCHE

RKCil l - Voir au domaine d'applicationRÉGIMERégime Voir &\\e d'application ex : Alimentation : régimeRÉGION

VHJISME Voir BrahmanismeVÉGÉTARIENVégétarien : recetleVégétarien : régimeVÉGÉTATION Voir aussi Botanique. Écologie végétale et Flore

II est visible qu'en allant rapidement, un indexeur choisira « Cuisinevégétarienne », qu'un autre ne verra que « Végétarien, recettes » etqu'un troisième s'obligera à prendre les deux formulations. On objec-tera que cet exemple est trop spécialisé, mais il suffit de se promenerdans les rayons « vie quotidienne et pratique » d'une bibliothèque muni-cipale pour constater que les analystes rencontrent ce genre deproblème. De ce fait, et avec la meilleure volonté du monde, la pré-coordination et le manque de renvois troublent le travail en amont et lerésultat en aval, en proposant aux utilisateurs une banque de donnéesmanquant de cohérence.

Si le problème n'est pas trop lourd dans les bibliothèques municipalesoù les recherches sont relativement simples, il devient grave lorsquel'utilisateur doit effectuer une recherche documentaire précise, dansune banque de données normalement faite pour cela. Les documenta-liste s .doivent peu indexer avec RAMEAU, mais sans nul doute ils ont à

LES LANGAGES DOCUMENTAIRES DE TYPE COMBINATO1RE

interroger en utilisant ce langage. Selon les logiciels qui le pilotent etla façon dont il a été utilisé pour l 'indexation, différents problèmespeuvent apparaître, exposés au paragraphe suivant.

APPLICATIONS POUR LA RECHERCHE

Apparemment le nombre et la précision des termes d'une liste devedettes-matières peuvent faire penser à une recherche facilitée. Maisle plus souvent, de par leur nature, ces listes compliquent plus qu'ellesne simplifient la dC-marche du chercheur. En effet, la juxtaposition destermes oblige à chercher au premier choisi ; les inversions ne sont paspropres au langage courant et il est plus normal de poser la questionsous ta forme «industrie agro-alimentaire» que «agro-alimentaire.industrie». Il s'agit bien d'une convention, à peine plus transparentequ'un code de classification ; la logique des professionnels n'est pasforcément celle des utilisateurs.

Avant l'automatisation, à l'époque des catalogues sur fiches, il étaitsouvent fait autant de fiches que de vedettes choisies. Une recherchesur les Brigades rouges pouvait être indexée à «Terrorisme, Italie,Thèse » et faire l'objet de trois fiches intercalées respectivement parordre alphabétique. Cette inflation de fiches (et d'intercalations...) necorrespondait nullement à une information supplémentaire maispermettait au chercheur de trouver par l'un ou l'autre mot.

On pouvait imaginer que la recherche informatisée abolirait cettepratique aussi désuète qu'inutile. Or les premiers logiciels qui pilotaientRAMEAU, ainsi que les règles de ce langage, ne permettaient pas lacombinaison de la suite des vedettes, ni l'accès direct à une sous-vedette. Ainsi, en consultant l'index-matière de la Bibliographiebourguignonne de 1996 :", il n'y a aucune entrée principale à la vedette« Sceau », présente pourtant au moins cinq fois, mais en sous-vedette.Cette sous-vedette est précédée des vedettes principales, les noms desabbayes, pour lesquelles chaque sceau fait l'objet d'une étude*. Cetterigidité oblige les analystes à multiplier les entrées matière, comme autemps où la combinatoire n'existait pas.

Page 103: Analyse Documentaire_suzanne Waller

LES LANGAGES DOCUMENTAIRES

C'est ainsi qu'un article traitant des artisans dijonnais du textile auxxive et xve siècles est indexé comme suit :

- Textiles et tissus - Industrie et commerce - France - Dijon (Côte d'Or) - Histoire - xiv' siècle

-Textiles et tissus - Industrie et commerce - France - Dijon (Côte d'Or) - Histoire - xv[ siècle

- Inventaire (droit) - France - Dijon (Côte d'Or) - Histoire - xiv' siècle

- Inventaire (droit) - France - Dijon (Côte d'Or) - Histoire - XV siècle

- Dijon (Côte d'Or) - Conditions économiques - xiv< siècle

- Dijon (Côte d'Or) - Conditions économiques - xv siècle

II serait malséant d'incriminer l'analyste qui se trouve dans l'obli-gation de répéter 4 fois « Histoire », 4 fois « France », 3 fois xive et xv*siècles, 6 fois Dijon (Côte d'Or) pour indexer correctement selon lesrègles imposées par RAMEAU, c'est-à-dire l'archétype d'une pré-coordination plus rigide que rigoureuse, aussi éloignée de la démarchede l'utilisateur moyen qu'il est possible d'imaginer.

Les logiciels sont maintenant plus souples et permettent de combinervedette et sous-vedettes. Ainsi l'équation Sport et Droit permet-elle derécupérer des ouvrages indexés ainsi : « Sports - Droit - France ». Cesont les logiciels qui peuvent faire entrer les listes de vedettes-matièresdans le champ des langages combinatoires.

Malheureusement, si l'interrogation est améliorée, les règlesd'indexation restent contraignantes. Donc, les analystes des fondsspécialisés multiplient les vedettes-sujets en tentant de moduler lesdifférentes entrées de façon à former une sorte de résumé, tout en étantobligés de choisir les termes de RAMEAU, ce qui est frustrant lorsqueles termes n'existent pas.

C'est ainsi que l'analyste chargée du fonds Gastronomie (pôle associéde la Bibliothèque nationale de France) à la bibliothèque d'étude deDijon, devant indexer un article très intéressant sur les « officiers debouche » et les « officiers tranchants » — sujet rarement traité —, n'aeu aucun moyen de faire ressortir ces particularités. Une fois encore,l'indexation ne peut remplacer le résumé ; celui-ci doit pouvoir existerlorsque le besoin d'un langage libre se fait ardemment sentir.

LES VRAIS LANGAGES À STRUCTURE COMBINATOIRE

Les vrais langages à structure combinatoire :lexique et thésaurus

LES LEXIQUES SPÉCIALISÉS

Sans chercher à construire un langage d'indexation très élaboré, ungrand nombre de services de documentation se sont trouvés dans l'obli-gation de créer des lexiques adaptés à leurs besoins. En effet, l'indexa-tion libre a fait les ravages que l'on peut imaginer à la lumière des quel-ques exemples et exercices précédents.

Ces lexiques rendent obligatoires l'usage de certains termes, établis-sent au moins des renvois d'équivalence et suivent de près les fluctua-tions du langage. Ainsi, le Centre de documentation scientifique ettechnique du CNRS a réalisé plusieurs lexiques correspondant auxdifférentes rubriques de ses bu l l e t in s bibliographiques. A titred'exemple, voici un extrait du lexique français-anglais de Pascal -Sciences de l'Information :

Descripteurs Remarques

Abonnement - Subscription

Abréviation - Abbreviation

Accès à distance - Remote access

Accès direct - Direct accessAccès document - Document access

-- Fourniture document

Accès information - Information access

- - Diffusion information

Accès libre rayon - Open access

Accès par sujet - Subjcct accessAccroissement

-*• Augmentation

Acquisition - Acquisition= Entrées -i-

pré-coordination

pré-coorclinalion

pré-coordination

- - renvoi d'orientalion

pré-coordination

- - renvoi d'orientation

pré-coorcfi nationpré-coordination

-» renvoi d'équivalence du terme exclu au (crme

choisi (donc, pas de traduction anglaise)

= renvoi d'équivalence du terme choisi au terme

exclu

Lk

Page 104: Analyse Documentaire_suzanne Waller

LES LANGAGES DOCUMENTAIRES

L'INIST (Institut de l'information scientifique et technique duCNRS) est également à l'origine d'une initiative intéressante, que l'onpeut rapprocher des lexiques spécialisés, parfaitement bien exposéedans l'article « Grilles d'indexation et de préindexation : l'exemple dePascal»21 . Il s'agit effectivement de grilles ou de listes de termeschoisis en raison de leur fréquence d'apparition à l'indexation et de leurpertinence. Ces grilles présentent une organisation logique et sémanti-que des termes. « Élaborées pour assurer homogénéité et rapidité d'in-dexation », elles permettent aux indexcurs de disposer, dans chaquedomaine spécifique traité, d'un ensemble structuré et préétabli de ter-mes. Avec 300 termes environ par grille, 35 grilles en science de la vie,32 grilles en sciences exactes et sciences de la terre, l 'INIST a forgé unlexique spécifique, « élément essentiel pour l'élaboration des bases deconnaissance : catégorisation des termes selon l'information séman-tique qu'ils véhiculent, combinaison sémantique de ces catégories ». Ceprojet, intellectuellement très intéressant, n'a pas encore donne lieu àune application pratique.

Applications pour l'indexation

Pourtant, les exemples présentés et les domaines choisis (médecine,pharmacie, chimie) offrent l'immense avantage d'utiliser des termes duquatrième cercle (cf. p. 88), le plus souvent univoques et peu porteursd'ambiguïté.

Il existe également, dans un centre de recherche de l'INRA, une basede connaissance ayant recensé toutes les variétés de tomates, toutes lesmaladies pouvant les affecter, tous les moyens culturaux, chimiques, etc.pouvant les soigner ou même prévenir ces maladies. Dès que Ton setrouve devant des objets concrets, des phénomènes, des processus, despropriétés, des équipements et des conditions opératoires descriptibles etobjectiva blés, l'indexation devient presque facile. Matériaux, phénomè-nes, processus, etc. sont les facettes utilisées dans certains thésaurus (cf.p. 207-210) qui, tous, s'appliquent aux sciences exactes ou appliquées.

De ces remarques, on ne doit pas déduire qu'un lexique spécialisé ensciences humaines est impossible à élaborer. Au contraire, i l est

LES VRAIS LANGAGES À STRUCTURE COMBINATOIRE

d'autant plus uti le que les domaines abordés sont par nature suscep-tibles d'être différemment interprétés. Mais on peut douter de latranscription du modèle présenté pour Pascal (banques de données dessciences exactes), vers Francis (banques de données des scienceshumaines), par exemple...

Un lexique, si simple soit-il, est le point de départ de tout langagecombinatoire quelque peu élaboré. Selon les lieux ou les domaines, unesimple liste présentant les équivalences et strictement tenue à jour peuttrès valablement aider une indexation rigoureuse. Il est préférable decommencer ainsi, plutôt que d'attendre le thésaurus perfectionné àl'extrême qui ne verra peut-être jamais le jour. Et tout vaut mieuxqu'une indexation en langage l ibre. . .

Applications pour la recherche

Les lexiques spécialisés sont normalement les meilleurs auxiliairesde la recherche, en ce sens qu'ils sont (ou devraient être) normalementélaborés à partir du vocabulaire courant des utilisateurs, autant sinonplus que des textes à indexer. Leur adaptation au milieu est le meilleurgarant de leur qualité.

Toutefois, il est indispensable qu'on leur assure autant de renvoisd'équivalence entre termes quasi synonymes qu'il est nécessaire.Certains jeunes analystes, au moment de l'élaboration d'un tel langage,sont heurtés par le fait que des non-descripteurs soient quelquefois plusnombreux que les descripteurs, alors qu'il s'agit là d'une preuve dequalité. Chacun doit pouvoir interroger avec son mot clé et admettrequ'il renvoie à un autre — pourvu que l'information soit au bout de larequête.

Il va sans dire qu'un véritable lexique admet la combinatoire et larecherche booléenne (cf. p. 108-111). 11 n'est pas rare que, progressi-vement, certaines parties du lexique deviennent plus structurées qued'autres, que^des renvois d'orientation soient précisés ; c'est le signed'un langage vivant et le point de départ du langage d'indexation parexcellence : le thésaurus.

Page 105: Analyse Documentaire_suzanne Waller

LES LANGAGES DOCUMENTAIRES

LE THÉSAURUS

Principes de base

Construit sur le principe combinatoire, basé sur l'intersection, lacombinaison des notions et/ou des classes à partir des opérations boo-léennes (cf. p. 108-111), un thésaurus est un « vocabulaire contrôlé etdynamique, de termes ayant entre eux des relations sémantiques etgénériques, qui s'applique à un domaine particulier de la connaissance[...] ; en tant qu'instrument de contrôle de la terminologie, il est uti l isépour transposer en langage plus strict le langage naturel employé dansles documents, par les indexeurs ou les util isateurs.2 2» Une autredéfinition, plus simple et plus concrète, rend compte de la spécificitéde ce langage d'indexation : « Le thésaurus est une liste normalisée etstructurée de termes acceptés à l'indexation [...]. Ces termes sontcombinés entre eux pour décrire les documents et écrire les questionslors de l'interrogation d'une banque de données.2 '» Plus riche derelations, de notations, de modes d'entrée, le thésaurus est l'outild'indexation par excellence ; il donne, en outre, une vision structuréedu vocabulaire d'une discipline et joue un rôle pédagogique essentiel,tant pour l'analyste novice que pour l'utilisateur débutant. 11 s'agit biendu vocabulaire d'une discipline ; en effet, il est extrêmement dangereuxd'envisager la création d'un thésaurus généraliste.

Toutefois, il existe bien des thésaurus de type encyclopédique, dontle plus connu est le macro-thésaurus de l'OCDE. Touchant toutes lesdisciplines, ce thésaurus a bien été conçu comme « macro », c'est-à-dire un métalangage structuré, contrôlé, mais n'entrant pas dans ledétail de chaque domaine. Cette structure a permis, en revanche, lacréation sur le même modèle de thésaurus spécialisés dans ie domainede l'éducation, du travail, de l'audiovisuel, etc. Que font les services dedocumentation ayant pour mission de s'intéresser à tous les domaines ?Certains refusent tout langage élaboré comme, par exemple, certainsservices de documentation de presse pour lesquels les sujets évoluenttrop vite ; la recherche se fait surtout par noms de personnes, de lieux,par périodes ou par grands événements, et impasse est faite sur unlangage impossible à mettre à jour.

LES VRAIS LANGAGES À STRUCTURE COMBINATOIRE

Pour d'autres, le choix des descripteurs est effectué en fonction de lapopulation d'usagers. Ainsi EUROVOC, thésaurus créé par et pour leParlement européen, suit tous les sujets liés aux domaines politique etjuridique dans l'optique des parlementaires. MOTBIS, utilisé dans tousles lycées et collèges français, couvre l'ensemble des programmesd'enseignement selon les besoins des lycéens et des collégiens (plusque selon ceux des professeurs, du reste). Ces deux thésaurus sonteffectivement encyclopédiques quant à leur contenu, mais spécialisésselon leur usage — et ils ne seraient absolument pas interchangeables.

Outil d'indexation et de recherche, commun à l'indexeur et à l 'u t i l i -sateur, le thésaurus met en rapport l'utilisateur interrogeant et l'infor-mation pertinente caractérisée, ce qui est l'objectif de tout langaged'indexation, et particulièrement de ceux qui utilisent la véritablecombinatoire. En quoi le thésaurus diffère-t-il donc d'un bon lexiquespécialisé ?

Les relations

Première grande différence avec un simple lexique, un thésaurus estcaractérisé par la nature et le nombre de relations existant entre lestermes. Après avoir collecté le vocabulaire dans le domaine particulieroù sera utilisé le thésaurus, on rassemble une liste de mots appeléscandidats-descripteurs. En guise d'illustration, et sans donner à aucunmoment l'idée que l'on fabrique un thésaurus avec 40 mots (!), voiciquelques termes rassemblés sur le thème général de la musique :

catiliqucchansonchanson de marchechanson de routechanson cnfanlinechant choralchant de Noëlchant patriotiquechant religieuxchœurdictée musicaleécriture musicaleéducation musicale

histoire de la musiquehymne nationalinitiation à la musiqueinstrument à percussioninstrument de musiquejeu musicallecture musicalemélodiemélodie populairemélhode pour instrument de musiquemétriquemusiquemusique écrite

musique de filmmusique instrumentalemusique pour orchestremusique religieusemusique sacréemusique vocaleorchestrepartition musicalerythme musicalsensibilité musicajesolfègethéorie de la musiquetradition musicale

Page 106: Analyse Documentaire_suzanne Waller

LES LANGAGES DOCUMENTAIRES

C'est à partir d'une liste de ce type (dont l'arbitaire est revendique) quel'on partage les candidats entre descripteurs et non-descripteurs. L'épu-ration est l'opération au cours de laquelle les candidats-descripteurs vontêtre examinés un à un à travers plusieurs cribles, en partant du principeque le thésaurus ne doit autoriser que le nombre de descripteurs néces-saires et suffisants pour couvrir le domaine considéré. Cette phase extrê-mement importante est le point de départ de la normalisation du vocabu-laire collecté. À chaque concept correspond un seul descripteur.

• La première relation est la relation d'équivalence et concerne levocabulaire. Déjà présente dans les listes de vedettes-matières et leslexiques spécialisés, elle aide à lever l'ambiguïté du langage, participeà la recherche du mot univoque, permet de distinguer les descripteursdes non-descripteurs. À nouveau, le choix entre terme choisi et termeexclu peut relever de l'arbitraire, mais il tient compte, le plus souvent,du niveau de langage et du contexte documentaire dans lequel le thé-saurus est utilisé (voir ci-contre, en haut de page, les équivalences quel'on peut proposer à partir de l'exemple ci-dessus).

• La deuxième relation établit une hiérarchie entre les termes choisiset crée les champs sémantiques. Elle structure les descripteurs soit engrandes familles sémantiques à l'intérieur desquelles elle établit deshiérarchies de type arborescent entre mots de sens proche, soit en gran-des catégories ou facettes (objet, action, processus, produit), déjà évo-quées. Les facettes, très prisées par les Anglo-Saxons, sont plusadaptées aux domaines scientifiques, ou tout au moins concrets li. Lesesprits plus cartésiens adoptent plus facilement les structures arbores-centes presque inconsciemment familières. Quelle que soit leur nature,ces relations hiérarchiques expriment les rapports de subordinationentre les notions exprimées par les descripteurs, constituent l'ossatured'un thésaurus, assurent la cohérence interne en contrôlant son organi-sation et permettent de trouver un document traitant de notions très spé-cifiques à partir d'une question très générale, ou inversement. On peutimaginer que l'exemple précédent présente les descripteurs en deuxchamps sémantiques à l'intérieur desquels les termes sont reliés selonle mode arborescent, ce qui est une autre façon d'introduire l'organi-sation classificatoire ci-contre (bas de page).

LES VRAIS LANGAGES À STRUCTURE COMBINATO1RE

Termes choisis, ou descripteurs

chansonchanson de marchechanson enfantinechant de Noëlchant religieuxchoeurdictée musicaleécriture musicaleéducation musicalehistoire de la musiqueliymiie nationalins t rument à percussioninstrument de musiquejeu musicallecture musicalemélodiemélodie populaireméthode pour instrument de musiquemétriquemusiquemusique île f i lmmusique instrumentalemusique pour orchestremusique sacréemusique vocaleorehcstrepartition musicalerythme musicalsensibilité musicalesolfègethéorie de la musiquetradit ion musicale

Termes exclus ou non-descripteurs

chanson de roule

cantiquecriant choral

initiation à la musique

chan t patriotique

musique religieuse

musique écrite

l i r champ sémantiqueéducation musicale

histoire de la musiqueinstrument de musique

instrument à percussionméthode pour instrument de musiqueorchestre

jeu musicalsensibilité musicalesolfège

dictée musicaleécriture musicalelecture musicalerythme musical

métriquethéorie de la musique

2' champ sémantiquemusique

mélodiemélodie populaire

musique de filmmusique instrumentalemusique pour orchestremusique sacrée

chant religieuxmusique vocale

chansonchanson de marchechanson enfantinechant de Noël

crucurhymne national

parti t ion musicaletradition musicale

Page 107: Analyse Documentaire_suzanne Waller

LES LANGAGES DOCUMENTAIRES

• Pour assouplir ce qu'une relation hiérarchique implique de rigueur,une troisième relation dite d'association met en rapport des descrip-teurs de sens ou d'usage voisins, situés dans des champs sémantiquesdifférents. Cette relation indique des analogies de signification entre lestermes, établit une correspondance entre des sujets différents mais queleur usage rapproche. Elle implique théoriquement la réciprocité : unequestion posée à partir d'un descripteur peut trouver une autre forme deréponse dans un descripteur associé. C'est la plus efficace des relationsd'ouverture, mais elle est établie davantage sur l'usage que sur lathéorie ; elle est donc particulièrement tributaire du lieu où l'on utilisele thésaurus et apparaît toujours arbitraire à l'utilisateur extérieur.

Pour poursuivre l'exemple, on suppose que les termes associesproposés existent dans d'autres champs :

Termes descripteurs

éducation musicalehistoire de la musiqueinstrument de musique

instrument à percussionméthode pour instrument de musiqueorchestre

jeu musicalsensibilité musicalesolfège

dictée musicaleécriture musicalelecture musicalerythme musical

métriquethéorie de la musique

musiquemélodie

mélodie populairemusique de filmmusique instrumentalemusique pour orchestremusique sacrée

chant religieuxmusique vocale

chansonchanson de marchechanson enfantinechant de Noël

chœurhymne national

partition musicaletradition musicale

Termes associés

éducation artistique

méthode d'enseignement

jeu éducatif

rythme

art

folklorecinéma

religion

littérature enfantineNoël

patriotisme

ethnologie

LES VRAIS LANGAGES À STRUCTURE COMB1NATOIRE

Les notes

Tout descripteur doit représenter une notion et une seule. S'il y a ambi-guïté possible, on rédige une note d'application sous le descripteurretenu, pour en définir les modalités d'emploi, afin de supprimer les der-nières ambiguïtés pouvant gêner l'indexation ou le questionnement.Ainsi le thésaurus du Bureau international du travail distingue-t-il bien :

Descripteur :

Note d'application

ALIMENTATION A N I M A L E

à utiliser pour toute discussion relative auxproblèmes et aux méthodes d'alimentation desanimaux. S'agissant de la nourriture même,utiliser :ALIMENT POUR ANIMAUX

La date de création ou de modification de chaque descripteur estsignalée ; l'analyste peut ainsi vérifier l'ancienneté, ou non, du descrip-teur choisi.

Les notes n'ont aucun point commun avec les définitions d'un dic-tionnaire. Elles sont, au contraire, entièrement tributaires de l'utilisationdu thésaurus. Cela explique pourquoi on ne présente pas d'exemples denotes à partir de la liste précédente — qui n'est proposée que pourillustration.

Les différents modes d'entrée

Un thésaurus comporte toujours une introduction détaillée permet-tant son utilisation rapide et efficace. Il est intéressant d'y trouver unpetit historique, le contexte dans lequel il a été fait, le nom des per-sonnes ou des écjuipcs qui en sont les créateurs, les choix méthodo-logiques qui ont présidé à son élaboration, les modalités d'emploi, demise à jour, et tout ce qui en facilite l'accès.

Page 108: Analyse Documentaire_suzanne Waller

LES LANGAGES DOCUMENTAIRES

Normalement un thésaurus comprend trois entrées principales :

I ) La liste alphabétique des descripteurs et non-descripteurs. Le non-descripteur renvoie au descripteur choisi. À la grande différence deslexiques, aucun descripteur n'apparaît isolé, mais au contraire enrichide son environnement sémantique, comprenant :

- l'éventuelle note d'application, la date de création ;- le ou les non-descripteurs qu'il remplace ;- son terme générique et ses termes spécifiques ;- ses termes associés.

La liste structurée de l'exemple commencerait ainsi :

cantiqueEM CHANT RELIGIEUX

CHANSONTG MUSIQUE VOCALETS CHANSON DE MARCHE

CHANSON ENFANTINECHANT DE NOËL

CHANSON DE MARCHEEP chanson de routeTG CHANSON

chanson de routeEM CHANSON DE MARCHE

CHANSON ENFANTINETG CHANSONTA LITTERATURE ENFANTINE

chant choralEM CHŒUR

CHANT DE NOËLTG CHANSONTA NOËL

chant patriotiqueEM HYMNE NATIONAL

CHANT RELIGIEUXTG MUSIQUE SACREETA RELIGION

CHŒUREP chant choralTG MUSIQUE VOCALE

EM est l'abréviation de Employer et lie un non-descripteur au descripteur retenu

TG - Terme Générique, indique la notion supérieureTS = Terme Spécifique, indique la notion inférieure

EP - Employé Pour, lie le descripteur au non-descripteur qu' i l remplace

TA * Ternie Associé, renvoie au descripteur d'un autrechamp sémantique

LES VRAIS LANGAGES À STRUCTURE COMBINATOIRE

2) La présentation structurée en champs sémantiques. Cette présenta-tion varie selon les éditions, listes, schémas, arbres, terminogrammes,etc.

3) L'index permuté de tous les termes, permettant de trouver non seu-lement les descripteurs Unitermes, mais aussi l'accès au deuxième ou autroisième terme d'un descripteur composé. Dans le cas des thésaurusmultilingues, il existe un index pour chaque langue utilisée. L'indexpermute de l'exemple commencerait ainsi :

S*

cantiqueEM CHANT RELIGIEUX CHANSON

CHANSON DE MARCHE

chanson de routeEM CHANSON DE MARCHE

CHANSON ENFANTINEchant choral

EM CHŒURCHANT DE NOËLchant patriotique

EM HYMNE NATIONALCHANT RELIGIEUX

CHŒURchant choral

EM CHŒURDICTÉE MUSICALE

musique écriteEM PARTITION MUSICALE

ÉCRITURE MUSICALEÉDUCATION MUSICALE

CHANSON ENFANTINE

MUSIQUE DE FILMHISTOIRE DE LA MUSIQUEHYMNE NATIONALinitiation à la musique

EM ÉDUCATION MUSICALEINSTRUMENT À PERCUSSIONINSTRUMENT DE MUSIQUE

•THODE POUR INSTRUMENT DE MUSIQUEMUSIQUE INSTRUMENTALE

JEU MUSICAL

Page 109: Analyse Documentaire_suzanne Waller

LES LANGAGES DOCUMENTAIRES

LECTURE MUSICALECHANSON DE MARCHE

MÉLODIE

MÉLODIE POPULAIRE

MÉTHODE POUR INSTRUMENT DE MUSIQUE

MÉTRIQUE

JEU MUSICAL

RYTHME MUSICAL

DICTÉE MUSICALE

ÉCRITURE MUSICALE

ÉDUCATION MUSICALE

LECTURE MUSICALE

PARTITION MUSICALE

SENSIBILITÉ MUSICALE

TRADITION MUSICALE

MUSIQUE

musique écrile

EM PARTITION MUSICALE

MUSIQUE DE FILM

MUSIQUE INSTRUMENTALE

etc.

Enfin, des listes annexes peuvent rassembler plusieurs types determes identificateurs. Ces termes n'étant pas subordonnés aux champssémantiques structurés, dans la mesure où ils peuvent préciser !econtenu de n'importe lequel de ces champs, on peut les considérercomme descripteurs indépendants :

• Les mots-outils, ou termes généraux ou athématiques, sontreconnaissables au fait qu'ils sont Unitermes et abstraits : « cas »,« condition », « manière », « système » sont effectivement des mots quine peuvent être utilisés seuls ; ils ne peuvent s'intégrer à aucun champsémantique particulier étant donné leur homographie; de ce fait, ilspeuvent être choisis comme descripteurs indépendants, selon l'intérêtqu'ils présentent pour préciser un contenu. « Exploitation » peuts'appliquer à toutes sortes de situations et n'est porteur d'aucun sensspécifique, mais « exploitation forestière » devient un descripteur àpart entière, du seul fait que le mot devient terme. Certains mots, consi-dérés comme outils en général, peuvent être tout à fait porteurs de sensselon les domaines, comme « base » en chimie ;

US VRAIS LANGAGES À STRUCTURE COMB1NATOIRE

• Les noms propres : personnes physiques ou morales, collectivités,pays ou régions, marques, sigles, etc., sont proposés dans certainsthésaurus en listes annexes, sans être assujettis à la structuration deschamps sémantiques. Ils ne relèvent pas toujours d'une gestion rigou-reuse. C'est pourquoi l'utilisation des listes d'autorités déjà existantesest fortement préconisée (cf. p. 176-181) ;

• D'autres descripteurs indépendants dépendent des domaines desthésaurus, mais répondent toujours à la même définition et au mêmeusage.

Maintenance du thésaurus

Comme tous les outils linguistiques, le thésaurus doit suivrel'évolution du langage. Moins rigide qu'une classification, plus struc-turé qu'un lexique, il nécessite une maintenance régulière et organisée.De la même façon qu'il ne peut être créé que par des équipes pluridisci-plinaires, il évolue en fonction des besoins diversifiés qui apparaissent,tant au moment de l'indexation qu'au moment de la recherche. Il estindispensable qu'une personne ou une petite équipe soit responsable deces transformations, pour développer harmonieusement et gardervivant un langage toujours adapté aux besoins.

Les systèmes informatisés qui permettent de remplacer automa-tiquement telle formulation par une autre ont beaucoup aidé ces misesà jour, qui doivent répondre à des besoins réels, et non à une modepassagère.

La création, l'utilisation et la maintenance d'un thésaurus en font unoutil coûteux ; comment mesurer l'intérêt de l'investissement ? Pourcertains, un thésaurus ne peut jamais être amorti, d'autant plus qu'ilnécessite une maintenance permanente. Pour d'autres, c'est un outilheuristique de communication à nul autre pareil, chaque interrogationdonnant une réponse pertinente étant un signe de réussite. C'est (Jonc àl'application qui en sera faite par les analystes et les utilisateurs que l'onpourra vraiment mesurer sa valeur.

Page 110: Analyse Documentaire_suzanne Waller

LES LANGAGES DOCUMENTAIRES

Applications pour l'indexation

Plus encore que le lexique spécialisé, le thésaurus est l 'outi l linguis-tique le mieux adapté à l'indexation. En effet, lors des deux premièresphases, le contenu du texte est identifie et formulé en langage libre ; ilsuffit de confronter les mots retenus au vocabulaire du thésaurus.Toutefois, selon le degré de compétence de l'analyste et la facilitéd'emploi du thésaurus, celui-ci peut effectivement être l'outil linguis-tique par excellence, ou au contraire se trouver dévalué par manqued'exploitation réelle.

Que font les indexeurs novices (ou insuffisamment formés) ? Ils secontentent de consulter l'index alphabétique permuté, ou la liste alpha-bétique, pour chercher si les mots retenus sont présents dans le thésau-rus en tant que descripteurs ou non-descripteurs. S'ils les trouvent, ils leschoisissent et les introduisent dans les champs « descripteurs » de labanque de données. S'ils ne les trouvent pas et qu'il existe un champ« descripteur libre », c'est la porte ouverte à l'anarchie et on ne voit plustrès bien l'intérêt d'un langage d'indexation dans ce cas de figure. C'estsouvent à partir de ces cas, malheureusement, que l'on juge le thésauruscomme un outil inutile, donc encore plus coûteux !

En fait, cette erreur de jugement est le résultat d'une mauvaiseconception de l'indexation, encore comprise comme l'opération où l'onrecherche des mots, alors que le but est de trouver et formuler le sens.C'est pourquoi, même si les mots de la phrase représentative du senssont présents dans la ou les listes alphabétiques, l'indexeur doit d'abordconsulter la présentation thématique pour juger de la place des des-cripteurs dans le ou les champ(s) sémantique(s) correspondant(s) ausens. Il navigue d'une présentation à l'autre, ce qui lui permet deconfirmer son premier choix, ou de découvrir d'autres termes plusprécis auxquels il n'avait pas pensé et qui vont enrichir l ' indexationfinale. Le premier avantage du thésaurus est donc d'aider l'analyste àpréciser et, en même temps, à élargir son champ d'indexation. I l enexiste deux autres :

- l'analyste intègre dans le résumé les ternies choisis en langage libreafin d'augmenter les possibilités de recherche ;

LES VRAIS LANGAGES À STRUCTURE COMBINATOIRE

- s'il le juge utile, il peut proposer ces mêmes termes afin de les inté-grer en non-descripteurs dans le thésaurus.

La pratique prouve que certains thésaurus sont utilisés au vingtièmede leur richesse, en particulier à cause de la « loi du moindre effort ».Peut-on accabler les indexeurs, souvent insuffisamment formés et aux-quels sont demandés plus de résultats quantitatifs que qualitatifs ? Laconséquence immédiate est le manque d'équilibre de la banque dedonnées dans laquelle certains descripteurs sont sur-utilisés, et perdentdonc leur valeur, alors que d'autres sont quasiment ignorés. Le manquede formation des analystes en est une cause, mais la plus importante estdue à de mauvaises priorités dans la politique documentaire.

Il revient au comité de maintenance de surveiller l'état d 'uti l isationdes descripteurs. Les contrôles d'occurrence ne doivent pas seulementaboutir à changer en non-descripteurs des descripteurs insuffisammentutilisés, mais à vérifier les modes d'indexation, à promouvoir desréunions de travail et des temps de formation, en vue d'élargir à la foisl'horizon des analystes, l'usage du thésaurus et les possibilités de

recherche.

Applications pour la recherche•

I I est rare que les thésaurus soient mis à la disposition des utilisateurs,surtout s'ils n'existent qu'en ligne et que les éditions papier ne sont pasmises à jour. Même si ces dernières existent, les utilisateurs sont sou-vent rebutés par l'aspect un peu ésotérique de ce vocabulaire et n'envoient pas forcément l'intérêt pour leur recherche. I I est vrai que chaquerecherche est précise, alors que le thésaurus couvre l'ensemble d'undomaine. Pourtant, il est possible d'en préciser l'usage dans le guide duservice, afin que l'utilisateur puisse élargir la formulation de sa requête,voire de sa recherche elle-même, en naviguant de descripteur en des-cripteur, de champ sémantique en champ sémantique.

La recherche est également tributaire des logiciels utilisés quipermettent, de plus en plus, le paramétrage des possibilités d'auto-postage ; il S'agit d'une fonctionnalité permettant, sur une arborescence,d'aller du générique au spécifique, ou inversement. Si le descripteur

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LES LANGAGES DOCUMENTAIRES

choisi ne répond pas, ou répond imparfaitement à la question, l'interro-gation peut automatiquement — et selon la demande — passer auxniveaux inférieurs ou supérieurs.

Cette facilité est également une aide pour l'analyste qui peut proposerune indexation fine, en général risque de silence, sachant que le sys-tème permettra de monter ou descendre automatiquement lors del'interrogation.

Les thésaurus bénéficient des expériences passées ; de plus en plusadaptés aux besoins d'un service et d'une collectivité de chercheurs, ilssont également mieux présentés et plus conviviaux. C'est l 'utilisationqui en est faite, proche des usagers, qui en assure l'évolution. L'élabo-ration et la maintenance d'un thésaurus sont basées sur un travailcommun. Ces échanges et retours d'expérience permettent d'approfon-dir le langage d'une entreprise, donc de prendre de la distance vis-à-visdes modes. En tant qu'outil de structuration et d'affinement du vocabu-laire, le thésaurus bien employé est un gage de qualité.

Compatibilité des langages d'indexation

Face aux échanges internationaux de données, les documentalistes setrouvent confrontés à la diversité des langages utilisés. Lorsqu'ilsinterrogent des banques de données uniquement pour la recherchedocumentaire, cette diversité les renvoie à leur connaissance des logi-ciels et à leur capacité d'adaptation. En revanche, lorsqu'ils souhaitentalimenter leur propre banque en déchargeant des notices venant de tousles horizons possibles, le problème apparaît dans toute son ampleur. Siles champs de l'ISBD répondent en général aux normes internationales,les champs de contenu présentent des disparités très fortes — y comprisles champs qui pourraient bénéficier des autorités officielles. En fait,lorsque l'on pratique les champs de contenu des très grandes sourcesinternationales, on constate que l'indexation reste à un niveau très

I

QUEL AVENIR POUR US LANGAGES DOCUMENTAIRES ?

générique. La bibliothèque du Congrès en est un exemple ; la majoritédes termes d'indexation n'apporte guère plus que les cotations selon lesdeux classifications les plus couramment utilisées : la classification duCongrès et la classification de M. Dewey. Peut-on parler & indexa-tion dans ce cas, et ce champ ne peut-il être assimilé à un champ« domaine », utile dans certains cas ? D'autres sources, comme la Biblio-thèque nationale de France, utilisent RAMEAU On pourrait imaginerque ce langage puisse répondre à davantage de services, surtout s'il estpiloté par des logiciels performants ; mais il faudrait aussi l'épurer plusque l'augmenter, et assouplir des règles d'un autre âge...

Mais quoi qu'il en soit, la fusion des données -- qui peut êtreconsidérée comme un gain de temps et d'argent considérable pour lesservices de documentation — se heurte au problème de la compatibilitédes langages d'indexation. S'il faut effectivement réindcxer chaquenotice avec son propre langage, le temps gagné est vite reperdu.Plusieurs études ont cherché à approfondir la question et à apporterquelques éléments de solution. L'une des plus remarquables, et des plusoriginales, renvoie non pas à l'harmonisation des langages, tropcoûteuse, mais à « l'harmonisation automatique des formules d'indexa-tion à partir de tables de concordances pré-établies25 ». Cela nousrenvoie aux modalités d'indexation et aux espoirs soulevés par desétudes comme celle de Dominique Ménillet 2ft.

Quel avenir pour les langages documentaires ?

Face à cette question, plusieurs tendances s'affrontent actuellement.Ceux qui considèrent Internet comme un gisement d'informationsdocumentaires n'ont pas tous conscience de la nécessité d'un langagecontrôlé ; mais on a vu que, jusqu'à présent, Internet ne doit pas êtreconfondu ave<ç une banque de données. Les moteurs de recherchefonctionnent sur le principe de la recherche en texte intégral (cf.p. 1 1 1 - 1 1 8 ) , maïs la nécessité d'offrir un accès plus structuré à l1 in for-

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LES LANGAGES DOCUMENTAIRES

mation est vite apparue, aussi bien au sein des applications spécifi-quement « documentaires » que sur le plan de la recherche généraled'information sur le Web.

Paradoxalement, ce sont les vieilles classifications datant de la fin duxixc siècle, en usage dans les grandes bibliothèques encyclopédiques,qui ont servi de support aux structurations des répertoires (cf. p. 119) :non pas les classifications elles-mêmes, mais les principes classifica-toires, toujours utiles pour l'organisation de la pensée, des concepts etdes informations à transmettre. Ainsi, derrière ces écrans brillants etces accès rapides, travaillent toujours des documentalistes qui mettentau point des classifications adaptées pour indexer les sites. On appelleencore cela P« indexation manuelle ».

L'ingénierie linguistique est à la base de toutes les recherches concer-nant le traitement automatique du langage naturel. Les analyses l inguis-tiques et sémantiques sont sous-jaccntes dans tous les logiciels pilotantla recherche en texte intégral. S'il existe des langages contrôlés, ce sontbien ceux-ci, mais comme ils restent transparents pour l 'utilisateurfinal, ce dernier a rarement conscience des recherches importantes dontils sont l'objet.

Enfin, dans cette période intermédiaire où les nouveaux outils ne sontpas encore destinés à tous (coût, intérêt limité aux corpus importants),les langages d'indexation, et particulièrement les thésaurus, sonttoujours utilisés, et nécessaires, dans les unités documentaires. Pourcombien de temps encore ? Nul ne peut estimer si, « dans un mois, dansun an » — ou davantage — tous les langages décrits dans ce chapitreseront, ou non, relégués au magasin des accessoires encombrants. Maisnul ne peut affirmer que les constructions intellectuelles sur lesquellesils ont été bâtis ne perdureront pas dans les pratiques professionnelles.

QUEL AVENIR POUR LES LANGAGES DOCUMENTAIRES ?

NOTES

1. Source ; [55]. p. 7.

2. Fichiers d'autorité de la Bibliothèque nationale de France : Service de ventedes publications, 2 rue Vivienne. 75084 Paris Cedex 02 — 01 47 03 88 98.

3. Distributeur en France du cédérom des notices d'autorité de la Bibliothèquedu Congres : Doc&C'o. 56 rue Dombasle. 75015 Paris -- 01 56 56 62 20.

mcl [email protected]

4. Source : [30], p. 285.

5. Source : [7].

6. Source : [38].

7. Source: (2 ) . p. 143.

8. Source: [56], p. 215-216.

9. Voir [83], [57]. [ 1 ] et [44].

10. Source : [ S I ] .

1 1 . Source : [7].

12. Source : [23]. Tous les exemples suivants en sont extraits.

13. Source : [37], p. 176.

14. Source : [75], p. 595.

15. Cet aspect est bien exposé et développé dans [10].

16. Source : [30], p. 138.

17. Exemples extraits de [ 13].

18. Voir [12]. Renseignements auprès de l'Agence bibliographique de l'ensei-gnement supérieur (ABBS), BP 4367, 34196 Montpellier cedex 5.

19. Extrait de [13].

Page 113: Analyse Documentaire_suzanne Waller

LES LANGAGES DOCUMENTAIRES CONCLUSION

20. Source : [21].

21. Voir: [61],

22. Source ; [6].

23. Source : [30], p. 577.

25. Source ; [56],

26. Source : [61].

II est écrit quelque part dans les pages précédentes qu'une conclusionest pleine des regrets de l'auteur. Pourquoi celle-ci ferait-elleexception ?

Faut-il rappeler que la méthodologie proposée n'en est qu'une parmibeaucoup d'autres et que le lecteur est vivement encouragé à inventerson propre cheminement, adapté à ses besoins professionnels et à sonpropre tempérament ? Faut-il insister sur le fait que rédiger des résuméset/ou indexer des documents nécessitent un entraînement comparableaux exercices sportifs, progressifs mais surtout réguliers ? Les exer-cices sont proposés dans cette perspective : la recherche du plan d'untexte (cf. p. 73-75) peut être considérée comme un exercice contrai-gnant, inconcevable dans la pratique. C'est vrai. Mais nous invitons toutanalyste, confronté à des textes qui « résistent » à la première lecture,à s'y exercer au moins deux ou trois fois, afin d'en découvrir lescapacités opératoires. Il suffit quelquefois d'entrouvrir une porteinconnue pour détecter les facultés latentes que l'on possède sans lesavoir.

Tout ce manuel a été élaboré à partir des opérations documentaireselles-mêmes. C'est pourquoi il y est question d'analyse documentaire,bien sûr, mais aussi d'information documentaire, de lecture documen-taire, d'écriture documentaire, de recherche documentaire, de langagedocumentaire.

La lecture documentaire est une activité dynamique. Un texte estvivant. Tout auteur dit quelque chose à un lecteur et celui-ci doit ytrouver ce qu'il y cherche : détente dans le loisir, bonheur dans le style,information(s) dans le texte qui est — insistons — un réservoir deréponses. À nous de savoir l'interroger.

La complémentarité lecture-écriture a-t-elle été assez soulignée ? Ledocumentaliste qui ' l i t beaucoup perd souvent la pratique de l'écriture.La recherche du « beau style » et le souvenir des sanctions scolaires y

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CONCLUSION

sont sans doute pour quelque chose. L'écriture documentaire est trèsdifférente de l'écriture académique ; elle est sans doute plus facile pourle professionnel déjà engagé dans l'action que pour l'étudiant littérairebaignant encore dans les grands textes ; quant à l'étudiant scientifique,il comprend et analyse vite mais, le plus souvent, a perdu l'habitude derédiger plusieurs phrases à la suite. Or, nous sommes de plus en plusconfrontés à l'obligation d'écrire à cause de l'extension des messagesélectroniques. Certains se suffisent du « parlé-écrit », mais d'autresnécessitent une rédaction plus élaborée. Peut-on rêver qu'à la place del'international bad english communément admis, on arrive à commu-niquer dans sa propre langue en se faisant comprendre grâce à la conci-sion du style et à la précision du vocabulaire : les deux règles d'or durésumé et de l'indexation documentaires ?

Quant à la recherche documentaire, le plus souvent absente des écritssur l'analyse, le résumé et l'indexation, elle tient une place prioritairepuisqu'elle est l'enjeu de l'opération. Une dernière fois, qu'il nous soitpermis de répéter qu'il ne peut pas exister d'indexation de qualité sanssavoir à qui et à quoi elle peut servir. L'indexation à la chaîne quecertaines entreprises sous-traitent alimente des banques de données surle seul critère de la quantité ; les fameux monstres évoqués plus haut ensont les résultats. Quel rapport entre ces usines à gaz et l'outil derecherche dont les vrais utilisateurs ont besoin ?

La richesse de la langue est infinie ; elle est une source intarissabled'inspiration pour tous les poètes (dont nous pouvons être du reste).Mais l'analyse documentaire exige la rigueur d'un vocabulaire sansambiguïté grâce auquel l'usager cherche et trouve ce qu'il souhaite. I Iest certain qu'Internet permet de trouver rapidement une ou plusieursréponses à partir d'un ou de plusieurs mots servant de requête ; lesrésultats immédiats cachent ce qu'une interrogation plus fine pourraitapporter : c'est là à la fois l'attrait et le danger d'Internet.

Puisque l'on évoque l'importance du vocabulaire, concluons sur unexemple. Au terme « polysémie » est actuellement préféré son prétendusynonyme «homographie». Cela veut dire que l'on glisse de :

CONCLUSION

« plusieurs sens » à : « même écriture » (ou « même signe » ou « mêmecaractère »). En faisant ce choix, ne donnons-nous pas l'avantage à laforme du terme plus qu'à son sens ? À nouveau, répétons que le lan-gage est plus que le langage et que l'usage d'un terme le dépasse. C'estainsi que, en toute bonne conscience, nous pouvons opter pour une voiequi n'est pas forcément la nôtre. Utilisons avec vigilance toutes lespossibilités du monde électronique mais restons maîtres de notre objec-tif premier, à savoir être les médiateurs du sens.

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ANNEXE 1 - TEXTES ET ARTICLES

Liliane Lurçat. — « Les effets violents de la télévision ». — Esprit.n°203, juillet 1994.

ESPRIT

Revue internationale212, tue Saint-Martin, 7S003 Paris

Rédaction: 48 04 92 90Administration, abonnements, société des lecteurs 48 04 08 33

Fondée en 1912 par r'mminucl Mounwr. lJimi-Mirit niwwnirh M

rc%uc f >,'"' a élê dirigée par \lhtM BcguinW l47hH'l Fiul Thihiurt (1177.I1RRI

DiRxtcur de la rédaction : Olivier Xltingin

ROdiictcurs en chef Pierre BourcI/, /rie Conan.

.Inêl Roman, Jcan-l.nuh Schlrurl

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Dircctrtci: iidjomlc pour la gestion : Mireille de Situai

Conseiller pour la gestion : Alain Mallarl

Comilc de rédaction

Journal : Daniel Lindetiherg

/tontimic : Bernard Perret

Mreurs. société Alain Khrcngerg, Jean-François l.aé. Patrick Mignon

Vcraniquc N'abitum-tirappc. Jacqucr Scdal, (leorgcs \'igaretlo

KnM'ii>nenient : f .m Coq. I .il Delannm

Pohiiquc. justice Pierre ("hanihat, François Colcomhel. Jacques Don>elot

Antoine Carapon. Ipuillaume Malaurie. Hernanl Manîn

Michel Marian, Marc Osouf

internaiicmal : Gilles Bataillon. André F.negrén. Ttiicrrj Kabre

Marc l.asar, Jnseph Maïla. Jean-l.LC Pnuthicr

Luc Koscn/wcig, Olivier Roy

Luropt Nicole ( riiesiitio. Pierre Hasaner

AlekMiniler Smnlar, l'aul Thiliaud

Sciences, techniques Jean-Michel Bernier. Dominique Bourg

Jean-Pierre Dupiiy. Jean-Luc Cirilione, Pierre T.évv

Rcligiona Olii ier Abel. Alc\, Jean-Claude F*lin

l^dition Onminique Bourel, Jean-Marc Ferry

Philippe Kaynaud. Jean-Loup Thébaud

l.eitrcs. arts . Jacques Darras, Jean-Philippe DnmecqI i.in.di.i ( i.iill.n (I. < lande Hahih. \nnc Laurent, pierre Mayol

Bujiir Nedekoiici, Ihîerry Paqunl. Alfred Simon

r Images, médias : Vincent Amiel, Michel Mesnil

n° 203. juillet 1994

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ANNEXE 1 - TEXTES ET ARTICLES

Les effets violentsde la télévision

Les particularitésde la situation télévisuelle

l. La télévision in t rodu i t la viepubl ique au foyer sous la formed'images. C'est à une forme transposéedu monde que les enfants accèdent : carla télévision n'est pas le monde, maisune illusion du monde dont on ne voitque des images ( l ) . Cetle sorte d'ini-f i a t i on s'accompagne d'un éloignementdu réel . En effet, le jeune enfant,spectateur et auditeur, est plongé dansune situation où il se sert exclusivementde la vue et de l'ouïe. Ce rapport média-tisé aux élres et aux choses qu'imposé latélévision domestique, dès les débuts del'existence, a modifié les étapes de l ' ini-tiation. C'est là le paradoxe de la situa-tion télévisuelle, elle donne l ' i l lus ion derapprocher les gens de la réalité, mais enfai t , elle les sépare, elle les en coupe. Leraccord au réel nécessite ['activité,l'usage des cinq sens, l'action sur leschoses, et le rapport direct avec lesautres (2).

2. Daniel Boorstin a réservé unchapitre de sa vaste fresque Histoire desAméricains (3) aux transformationsapportées par la télévision, qu'ilcompare à un cataclysme modifiant pro-gressivement le rapport à la réalité : « Latélévision a introduit un halo d'incer-t i tude autour de l'expérience quotidienne

1. L. Lurçat. le Jeune Knfani devant les ap/xiiÏ-HCC.Vtélévitiielles. ESF, 19B4.

2. L. Lurçat. « Imprégnation télévisuelle et alliludcsscolaires ». in les 2-7 ans à {'/tenir de VEumpt,lïrfrr iln ct>l/<njitt'. Nathan. 1991.

3. D Uoor.sUn. Histoire lies Américain*, cu i l .« Moiiquins ». l.alïmil. _V partie, diapiire 44. I W I .

[...]. L'expérience directe conitiiciiçail àfaire défaut . [...] Dans ce supermarché,où se débitaient les succédanés del'expérience direcle, les v ie i l l es lignes dedémarcation s'effaçaient. [ • - • ] Une brumenouvelle, qu'aucune machine n 'axai t pujusqu'alors fabriquer, enveloppaitl 'univers télévisé et finissait par envahirle monde réel lui-même. Les Américainss'accoutumaient si bien à ce brouillard,ils se sentaient si à l'aise dans ce flou ras-surant, réconfortant, que la réalité elle-même, avec ses arêtes vives, les distinc-tions tranchées qu'elle opérait entre lesgens, les l ieux, les dates et les conditionsmétéorologiques, f inissait par avoirquelque chose de vaguement i r r i tant . »

3. Le rapport médiat isé au réelfavorise l 'habitude de croire plutôt qued'analyser et chercher à comprendre :l'image porte en elle sa propre crédi-bil i té , sans que la référence à une quel-conque réalité extérieure soit nécessaire,La distinction entre le réel et l ' imagi-naire, entre le vrai et le faux s'estompe.El le n'est pas nécessaire pour la jouis-sance du téléspectateur, elle ne l'est pasnon plus intellectuellement, car l 'attitudecr i t ique n'est pas en éveil : on n'a pasbesoin de comprendre pour se laisserabsorber par l'image.

4. La télévision crée une ambiancefavorisant un unisson émotionnel (4).F:lle a un effet puissant sur la sensibi l i té .î'on impact émotionnel peut se com-prendre si l'on considère l'ensemble destéléspectateurs comme une fouleimiiense, émiettée devant les écrans, etressentant simultanément les mêmesémotions, sans se connaître ni se ren-contrer, partageant les mêmes impl ic i teset les mêmes références. Le thème dessuggestions et des contagions dans les

« LES EFFETS VIOUNTS DE LA TÉLÉVISION »

foules et les publ ics a été trai te au siècledernier et au début de ce siècle, princi-palement par des médecins commeLiébeault (5) cl Bcrnheim (6), et desauteurs de formations variées, commeGustave Le Bon (7) et Tarde (8).

5. Georges Dumas est l'auteur d'unemise au point sur la contagion mentale(9). La contagion est un concept médi-cal : « La contagion est la transmission.d'une maladie d'un individu à un autrepar un contact immédiat ou médiat ».Quand i l s'agit de faits psychologiques,on parle de contagion morale ou men-tale : « Le contact est immédiat quand lesuggestionné subit directement par lavue, l'ouïe ou par correspondance épisto-laire l'influence d'un contagionneur. Lecontact reste médiat lorsque l ' influencenocive s'exerce par la voie de la presse etdu livre, comme i l arrive souvent pour lacontagion de la morphinomanie ».

6. J 'utilise personnellement le conceptde contagion émotionnel le (10) pourparler de l'action contagieuse de la télé-vision par le biais des émotions. Le lienentre l'émotion et la suggestion était bienconnu des savants qui ont u t i l i s él'hypnose, comme Pierre Janct ( I I ) :

5. A. Liébeauh, le Sommeil prowquf et /cv étatsanaingitei, Oclave [loin. I9K9.

9 (i. Dumas, » l a contagion mentale », Reniepliih.v/'iiit/iic. 36' année, t. LXXI . janvier-juin

« quand on étudie le mécanisme de lasuggestion, on note toujours quel'émotion y joue un grand rôle, et qu' i lest u t i l e d'émotionncr le sujet pour luifaire accepter une suggestion ».

7. Si le rapport au réel est médiatisé,le vécu télévisuel engendre une conta-gion émotionnelle immédiate. C'est ainsiqu'on peut parler de la puissance d'actionde la télévision sur les émotions. Ellerend possibles les mimétismes ou imi-tations inconscientes et les imi ta t ionsconscientes induites par sa puissancesuggestive. Tout ce qui est montré estimprégné d'émotions et rend crédiblesles informations mises en scène ou toutautre événement dont la présentationsemble objective et neutre. L'illusion devérité provient de l ' i l l u s ion d'immé-diateté de l'événement, accréditée par lacharge émotionnelle.

8. Cette puissance suggestive de latélévision est exploitée par la publici tétélévisuelle. Selon Guy Durandin (12),la publ ic i té constitue une part impor-tante des ressources des médias : 40 % etplus pour un quotidien et jusqu'à 100 %pour une chaîne de télévision privée. Ledéveloppement de la science psycho-logique contemporaine, écr i t - i l , commela réflexologie de Pavlov, la psychologiedes profondeurs, la psychanalyse desfoules, a suscité la mise en œuvre detechniques d'influence qui se voulaientscientifiques. Vance Packard! ( 1 3 ) l'aremarquablement montré en analysantles travaux de ceux qu'i l nomme lesgrands maîtres de la persuasionclandestine. La psychanalyse des foules,écrit-il, est devenue dans les campagnesde persuasion le fondement d'une

12. (i. Durnnilin. l'Information, la né.tiitfm-mantin etla Réalité. Puf. 1993.

13. V Packard lu PCI-SIMMI»! fliinth-itiiii: PI.19X9(1" éd. IC>«1

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ANNEXE 1 - TEXTES ET ARTICLES « LES EFFETS VIOLENTS DE LA TÉLÉVISION »

industrie puissante dans le domainecommercial puis dans le domainepolitique, quand les partis ont fait appelaux « persuadeurs » professionnels aumoment de l'élection présidentielle de1956 aux États-Unis. C'est toujours lemême principe : «On agit plusfacilement sur les attitudes des gens parleurs émotions que par leur inte l l i -gence. »

9. C'est d'ailleurs Vance Packard qui lepremier a dénoncé l'usage des imagessubliminales. Il s'agit d'une st imulat ionsubconsciente ou subliminale, se situanten dessous du seuil de perceptionconsciente. Elle est fondée sur la décou-verte que le cerveau peut enregistrer desimages ultra-brèves et des sons mur-murés sans que nous en ayonsconscience. L'industrie publici taires'appuie en partie sur les travaux deshypnotiseurs. On peut lire dans la Revuede l'hypnotisme de 1902 (14) unedéfini t ion de l'hypnotisme qui paraît trèsmoderne : « l'hypnotisme est un nompour un groupe de moyens empiriquespar lesquels nous pouvons arriver àprendre possession des facultés sublimi-nales ».

Effets mimétiques cr actes suggérés

10. On peut comprendre l 'actionviolente de la télévision avec leséléments dont nous disposons à présent :Premièrement, l'effet de déréalisationpar un rapport médiatisé au réel,permettant toutes sortes de confusionsou d'amalgames en noyant les dis-tinctions indispensables à l'exercice dujugement rationnel. Deuxièmement, les

14. M. Miingm. Le mécanisme de la mggd'après les travaux de K Mycrs de Cambridge.de rhri'nntisme. 1902, p. 259.

contagions par l'action immédiate desimages et de l'ambiance sur les émo-tions. Troisièmement, renforçant ceseffets de la si tuat ion télévisuelle, lamanipulation sophistiquée des désirs etdes mobiles. Cette manipulation ut i l i sedes techniques psychologiques induisantl ' imi ta t ion automat ique par l 'actionsubconsciente ou subliminale, et l'imi-tation plus ou moins consciente par lasuggestion.

//. Dans les débats sur la violence, onattribue parfois la responsabilité deseffets aux téléspectateurs, trop jeunes outrop impressionnables. La télévisionserait alors te révélateur de la faiblessehumaine et non l ' inducteur d'effet?néfastes, ce qui annule toute discussionsur les contenus. I l n'y a u r a i t pas d'exem-ples suggestifs mais uniquement desgens fragiles qui devraient se connaîtrecomme tels, et fermer le poste. On metainsi de côté le rôle essentiel de l ' imita-tion, en particulier aux âges sensibles del'enfance et, bien sûr. de tous tes effetscalculés mis au point grâce auxméthodes sophistiquées de la manipula-tion du désir.

12. Il nous faut comprendre commentle spectacle de la violence montré demanière répétitive peut déboucher surl ' imitation impulsive, ou encore suggérerdes actes violents réalisés de manièreconsciente, c'est-à-dire provoquer l ' imi-tation à ses deux niveaux : l ' imitat ionmimétique inconsciente d'elle-même, etl ' imitation consciente

L'existence des effets violents

13. L'augmentation des actes agressifset criminels, notamment chez les moinsde quinze ans, a été observée très tôt auxÉtats-Unis, en même temps que se géné-ralisait la télévision. Ce qui a été

constamment discuté, et l'est encore,c'est la responsabilité de la télévisiondans cette augmentation. Seuls les actesmimétiques qui décalquent des chosesvues à la télévision peuvent lui êtreimputés avec certitude.

14. Aux États-Unis, des enquêtesofficielles sont entreprises de manièrerégulière. C'est le secrétaire général à laSanté qui assure la publ icat ion des« Rapports sur la télévision et le com-portement social ». Déjà, en 1972,quatre sur les cinq volumes ainsi éditéssont consacrés à des études traitant deseffets des programmes de violence à latélévision. Ils montrent notamment que.entre 1952 et 1972, selon les chiffres duFBI. le nombre des jeunes arrêtés pourdélits graves et violents a augmenté de1 600 %. Cela correspond à la période aucours de laquelle la télévision a pris uneimportance croissante.

15. Marie Winn, qui rapporte ces faitsdans son livre TV Drogue (15) , écrit :« L'avènement de la télévision dans lesfoyers américains a amené la pire desépidémies de violence juvénile qu'aitconnu le pays ». L'aspect qui l'a spécia-lement frappée, c'est la transformationbrutale des enfants, passant soudaine-ment plus de trente heures par semaine àla t é l év i s ion , première générationaméricaine d 'enfants téléspectateurs.«Cette situation estompe, écrit-elle, ladifférence entre rêve et réalité. » « C'estcomme si notre société avai t engendréun nouveau type en la personne del 'enfant meurtrier qui ne ressent aucunremords et qui est à peine conscient deses acles ». Marie Winn écrit encore :« Le facteur commun qui caractérise cesgosses changés qui tuent, qui torturent etqui violent, semble être une forme de

15 M WJnn. JVDragut, Hcurus. I97<).

détachement émotionnel qui leur permetde commettre des crimes incroyablesavec une absence totale de sentiments« normaux » comme celui de culpabilitéet de remords ».

16. Des enquêtes plus récentes ontconfirmé ces analyses, avec toujours cesstatistiques inquiétantes sur l'augmen-tation de l'agressivité et de la criminalitédes jeunes. Joshua Meyrovvitz ( 16) citelui aussi les chiffres du FBI. Entre 1951et 1981. on note les augmentations sui-vantes observées chez les moins dequinze ans : arrestations pour meurtre.500 % ; vols à main armée, 1 750 % ;viols, 4 000 %.

17. La télévision exerce un effet defascination sur les jeunes enfants quid'ordinaire sont actifs et remuants. Elleles immobilise et ils demeurent captéspar elle. L'immobilisation favorise l ' im-prégnation par ce qui est regarde réguliè-rement. L'imprégnation est un modepuissant d'apprentissage opérant surtoutdans les premières années de la vie, maisaussi dans toute situation où il n'est pasnécessaire de savoir qu'on apprend. Lapersonne apprend sans le savoir, ni parconséquent sans savoir ce qu'elleapprend. La violence de la situation télé-visuelle se manifeste dans cette sorte decapture de celui qui regarde et qui nepeut se détacher sans effort. Par la seuleréception, il s'imprègne alors de thèsesauxquelles il n'adhérerait pas nécessaire-ment de manière volontaire. La télé-vision crée un état de réceptivité psy-chique spéciale par sa nature et par sonprestige. Son action s'apparente à unesuggestion permanente.

H). J. Mtyrowit?. l'Knlani mlitltf ri l'.-liiiilii-1•nfunlLa III^IIHI i/c's li.ijo il l'ère iU' Iii ù-li'\i\i«n. in li /'imvcl ttin avenir. Es\ai\ la tradition et l'cn-ici-ifnt'tHfiir, revue le 7i'"i/n tte lu ri'lh'\ion. VI,Gallimard 19R5.

Page 118: Analyse Documentaire_suzanne Waller

ANNEXE 1 - TEXTES ET ARTICLES« GROS TEMPS SUR LA PLANÈTE »

18. Marie Winn parle d'étal hypno-tique chez ces enfants qui regardent silongtemps la télévision. Elle parle d'unesorte d'extase. Selon nombre de parentsqu 'e l l e a interviewés, l 'enfant paraîtsombrer dans une « véritable cata-lepsie ». Nous retrouvons là le vocabu-laire des hypnotiseurs du siècle dernier.

19. C'est à la faveur de cette fascina-tion que peut jouer la charge émotion-nelle des productions aux effets calculés,uti l isant la vitesse et la violence pouraccrocher le téléspectateur. L'émotion aune grande force de contagion et l 'enfantplus que l'adulte est la proie des conta-gions émotionnelles. A la télévision,c'est par le biais des contagions émotion-nelles que la violence agit, pouvantengendrer des mimétismes. On peutcomprendre ainsi les épidémies déclen-chées par certains spectacles ou certai-nes mises en scène des informations. Lesuicide mimétique à la télévision a éténommé effet Werther ( 1 7). La projectiondu f i lm Decr Hunier (« Voyage au boutde l 'enfer »). qui comporte une séance deroulette russe, a poussé vingt-neuf jeu-

11. Af'/'mi'he tulnm-llc et éducative an prvNèmt ticla iwlcnce. Conseil de l'Europe, document 5013-KStrasbourg, 1983.

nés Américains, âgés de 8 à 3l ans, à setirer une balle dans ta tête.

20. Les effets de suggestion, indépen-damment de ceux obtenus par la publi-cité, sont parfois observés après coup,pour des séries qui, en elles-mêmes,paraissent de bonne quali té . Le dernierexemple connu est celui d'un jeunegarçon prénommé Romain qui a imitéMac Gyver donnant la recette réalisted'un explosif de fortune, mais très effi-cace, au point que lui cl son camarade sesont tués. Dans ce cas, l 'induction àl ' imitat ion est obtenue par la séductionqu'exercé le héros.

21. Les mimétismes s'observent chezl 'homme et aussi chez l 'animal , ce sontdonc des conduites archaïques. La sug-gestion est proprement humaine car cl icpasse par le langage. A la télévision, il ya induction d'actes automatiques sousforme de mimétisme et d ' imitat ion parsuggestion.

22. Il faudrait réfléchir à une déonto-logie des médias, en se basant sur unemeilleure connaissance des effets voulusou non voulus sur la sensibilité cl sur lesconduites-

Li l iane Lurçat

Jean-Claude Duplessis, Pierre Morel. — Gros temps sur la planète.— Éditions Odile Jacob, 1990.

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Page 119: Analyse Documentaire_suzanne Waller

Avant-propos

A l'approche de l'an mil, la population médiévale de l'Europetrouvait dans le ciel des signes précurseurs de l'Apocalypseannoncée par !a Bible. À l'aube du troisième millénaire, lesmédias se sont faits les hérauts d'une nouvelle peur obsidionale,celle d'une catastrophe planétaire résultant de la dévastation del'environnement naturel par l'Homme.

Dans nos sociétés occidentales, les regards accusateurs desécologistes se tournent vers la technique et l'industrie, jugéesresponsables de la pollution globale de l'air et de l'eau. On neparle que de l'effilochage de la couche d'ozone et de l'emballe-ment de I'effet de serre. Sur la base d'informations scientifiquesincomplètes ou à demi comprises, on prédit avec emphase laruine de notre planète.

Les scientifiques, dépassés par l'ampleur des réactions média-tiques et politiques, restent le plus souvent à l'écart, perplexeset silencieux. Et pourtant le savoir, accumulé principalementdepuis les dernières décennies, est riche et fascinant.L'extension des réseaux d'observation terrestres et la multipli-cation des satellites artificiels donnent, depuis dix à vingt ans,une vision globale de l'atmosphère planétaire et bientôt del'océan. Les extraordinaires progrès de l'analyse chimique etisotopique ont apporté une information précise sur la chronolo-gie et l'ampleur des changements climatiques passés, au coursélectronique a fourni le moyen de traiter d'immenses quantités

S Gros temps sur la planète

de données numériques, au point de rendre praticable une simu-lation réaliste, sur ordinateur, des phénomènes physiques etchimiques qui se déroulent à l'échelle de notre planète.

Ce vaste progrès des connaissances, fruit de la coopération decentaines de savants et de techniciens, nous permet d'entrevoirla Terre comme une entité dynamique, un gigantesque systèmeinteractif, fait d'une multitude de mécanismes enchevêtrés dontnous commençons tout juste à dérouler l'écheveau. La scienceet la technique nous ont hissé jusqu'à un belvédère d'où l'onpeut embrasser le panorama des phénomènes qui régissentl'environnement terrestre. Rien d'étonnant si l'on découvreaussi quelques précipices effrayants. Mais le simple fait de voirou de prévoir les dangers ne justifie pas l'affolement.

Bien au contraire, il faut se féliciter de l'intérêt nouveau quesuscitent ces problèmes de l'environnement planétaire. 11 seraiten effet préférable que les choix à long terme de nos sociétéshumaines soient fondés sur la connaissance de la réalité objec-tive plutôt que sur l'illusion anthropocentrique.

Faire partager au mieux les connaissances spécialiséesacquises dans leur discipline est une partie du contrat des scien-tifiques. Les phénomènes du climat sont concrets, tangiblesdans leurs conséquences quotidiennes. Ils sortent néanmoins duchamp familier de l'expérience courante, tant par l'énormité desquantités mises enjeu que par la complexité de l'enchaînementdes causes et des effets- Les auteurs ont voulu apporter au lec-teur le complément d'informations empiriques et les explica-tions théoriques nécessaires pour comprendre les principes quirégissent le fonctionnement du « système Terre » et son évolu-tion probable dans le futur.

4' page de couverture

Gros temps sur la planèteÀ l'aube du troisième millénaire, faut-il craindre une catastropheplanétaire ? Est-il vrai que l'homme, apprenti sorcier, a couvert laTerre d'un épais couvercle de polluants et de poussière '.'réchauffement dû à cet « effet de serre » entraînera-t-il !a fonte desglaces, noyant les continents ? Enfin, nuage le plus sombre deceux qui s'accumulent au-dessus de nos lêles, l'« hiver nucléaire »nous menace-t-il ?Ces inquiétudes légitimes de l'opinion, entretenues par les médias,font plus que jamais obligation aux scientifiques d'exposer claire-ment ce qu'ils savent. Jean-Claude Duplessy et Pierre Morel nouslivrent ici une véritable « notice pour les usagers de la Terre >une description de cette prodigieuse machine, dont nous sommesà la fois des pièces et, pour une part, les maîtres.

Jean-Claude DuplessyGéochimiste, dirige un laboratoire mixte du CNRS et du CEA aG if-sur-Yvette, dont les recherches en paléoclimatologie fontmondialement autorité.

Pierre MorelProfesseur à l'université Pierre-et-Marie-Curie de Paris, est le ton-dateur du Laboratoire de météorologie dynamique (CNRS) et lesecrétaire du Programme mondial de recherche sur le climat.

© Éditions Odile Jacob, 1990.

• F.ditions du Seuil. 1992.

Page 120: Analyse Documentaire_suzanne Waller

Du même auteur

La Presse féminine, Armand Colin, 1963.Histoire de la presse féminine, Armand Colin, 1964.La Vie des femmes, Gonthier-Denoël, 1965.Demain les femmes, Laffont, 1965.

Histoire et Sociologie du travail féminin, GonthierDenoël, 1965.

La Femme dans le monde moderne, Hachette, 1970.Les Françaises au travail, Hachette, 1973.Histoire et Mythologie de l'amour, huit siècles d'écrits

féminins, Hachette, 1974, couronné par l'Académiefrançaise.

Le Fait féminin, ouvrage collectif dirigé par E. Sullerot,préface de André Lwoff, prix Nobel, Fayard, 1978,ouvrage couronné par l'Académie des Sciencesmorales et politiques.

L'Aman, roman, Fayard, 1981.

Pour le meilleur et sans le pire, Fayard, 1984, couronnépar l'Académie française.

L'Âge de travailler, Fayard, 1986.L'Enveloppe, roman, Fayard, 1987.

Quels pères ? quels fils ?, Fayard, 1992.Alias, roman, Fayard, 1996.

Evelyne Sullerot

Le grand remue-ménageLa crise de la famille

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Fayard

Librairie Arthème Fayard. 1997.

AVANT-PROPOS

Que nous soyons partisans de « la famille » au singulier ou« de nouvelles formes plurielles » des séquences de vie privée,pour le mariage ou pour l'union libre, nous sommes tous nésd'un père et d'une mère et la plupart d'entre nous ont ou aurontdes enfants. Nous sommes tous inscrits dans la chaîne desgénérations qui se sont succédé durant ce dernier demi-siècle.Nous avons tous subi et nous avons tous fait l'histoire récentede la famille en France. Nous ne sommes cependant pas d'ac-cord sur ce que représente la famille ici et maintenant, à l'aubedu xxr' siècle.

La famille est-elle, comme tendent à le prouver de très nom-breux sondages, la « valeur » la plus appréciée des Français detoutes tendances politiques, leur refuge contre la solitude, leurrempart contre les aléas de la vie, le but de leurs efforts quoti-diens, la source principale de leur bonheur individuel ?

Ou bien la famille est-elle le cheval de Troie qui ramènel'ordre moral, l'increvable survivance du pétainisme triom-phant, la forme la plus pernicieuse de la mise au pas de l'indi-vidu qui y perd sa liberté, enchaîné par la marâtre Nature, soussa forme modernisée qu'est la génétique ?

C'est à peine, c'est tout juste s'il y a accord sur un diagnos-tic : la famille est en crise. Faut-il s'en lamenter ou s'en réjouir ?Doit-on et peut-on permettre à la famille, cellule de base de lasociété, de se rétablir, pour éviter une implosion ? Ou bien la

Page 121: Analyse Documentaire_suzanne Waller

Le grand remue-ménageAvant-propos

société française entre-t-elle dans une nouvelle phase de sonorganisation qui se passera de ce groupe intermédiaire entrel'individu et l'Etat, et faut-il aider une telle évolution ?

On ne peut répondre à cette question, ni même faire un pro-nostic, sans envisager le passé récent et la manière dont se sontconstituées les familles dont nous sommes issus et celles quenous avons fondées ; sans analyser comment et pourquoi cer-taines ont duré, comment et pourquoi certaines ont éclaté, com-ment aujourd'hui se présentent celles qui vont aborder le sièclenouveau. Pour comprendre ces changements et leurs causes, ilfaut les replacer dans la durée.

Composées d'individus et composant une société, les famillesforment un ensemble complexe auquel il faut réserver uneapproche systémique : on ne peut retracer leur histoire qu'enmultipliant les éclairages et en variant les angles de prise de vue.

Car la famille est un fait de nature et un fait de culture. Toutêtre humain a deux parents qui lui confèrent son identité biolo-gique. Les découvertes récentes de la génétique ont permisd'établir à la fois que chaque être est unique et qu'il existe desliens indéniables, inaltérables et infalsifiables entre père etenfant, entre mère et enfant, entre frères et sœurs. Ces lienssont indépendants de toutes formes institutionnelles comme lemariage ou l'adoption. Ils perdurent toute la vie. Mais la culturea entouré ces liens biologiques de relations fortes d'amour, detendresse, de fidélité, de protection, de responsabilité, de trans-mission, d'éducation qui donnent à la famille humaine sonincomparable richesse. Elle n'est pas seulement le cadre de lareproduction de l'espèce. Elle est un espace de culture et unvéhicule de ta civilisation.

Car la famille est affaire privée et affaire publique. Elle sesitue dans le champ de la vie privée de chacun, mais elle estobjet de politique publique. Elle est concernée à la fois parl'histoire des dispositions protégeant l'individu, sa sexualité, sesamours, son chez-soi, son histoire propre, ses secrets ; et parcelles qui intéressent le devenir collectif de la nation, sa popu-lation, la reproduction des générations, ou le vieillissement deia structure par âge, la protection et l'éducation des enfants etdes jeunes, les pensions de retraite des vieux, la répartition desaides sociales.

Procédant de la nature et de la culture, concernant l'individuprivé et le destin de la communauté nationale, la famille n'a paséchappé à l'institutionnalisation par le droit. Le droit a définil'identité juridique de ses membres, leurs statuts, rôles, droits etdevoirs réciproques. Le droit a régi les unions et les désunions,les filiations, les transmissions des noms et des biens, enca-drant les naissances, les enfances, les amours et les décès. Ceslois ont été confrontées ces dernières années à des avancées dela science génétique et des techniques precréâtiques. Elles ontdû s'adapter, ou elles ont vieilli, obsolètes.

On trouvera tout cela, entrelacé, interagissant, dans cette his-toire de la famille. D'abord, les évolutions démographiques ; lesfacteurs économiques, les attitudes face au travail, les modali-tés de la consommation ; mais aussi les opinions sur l'amour, lesexe, les hommes, les femmes, le mariage, l'union libre, laconception et la contraception, l'éducation des enfants, les rela-tions avec les parents qui ont accompagné ces évolutions, ainsique les mots nouveaux, le vocabulaire à la mode par lequel sesont exprimées les mentalités. On trouvera les réponses de la

10Le grand remue-ménage

société institutionnalisée, la libéralisation des lois régissant lemariage, la procréation, la filiation, l'autorité parentale, ledivorce — et les crispations de certains juristes et magistratsdevant cet aggiornamenlo. On y trouvera aussi l'histoire de lagrande politique familiale française surgie de la Libération,puis l'on verra s'affaiblir la volonté politique qui l'animait, sediversifier et se dénaturer ses modes d'intervention, se dévalo-riser ses moyens.

Ces changements ne suffisent pas à eux seuls à expliquer lacrise que traverse aujourd'hui la famille. Il faudra égalementfaire entrer en scène les francs-tireurs puis les bataillons qui ontattaqué la famille : du persiflage innocent au terrorisme politi-caily correct, les dénigreurs, les saboteurs bien placés dansl'appareil d'État, les doctrinaires antifamille. En face, il faudramentionner les reculades sans gloire et les indignations ineffi-caces des derniers fantassins fami lia listes.À quoi tout cela mène-t-il ? Comment fera-t-on face aux coûtsfinanciers, humains et sociaux des désintégrations familiales ?Que pourra être une démocratie d'individus déconnectés ?

Table des matières

AVANT-PROPOS

CHAPITRE [" : 1939-1945 : la famille refugeChantage aux maris et fils prisonniers, 12. - La mère aupinacle dans la famille intense fermée, 13. - La clandestini-té domestique, 15. -Tout est incertain, donc on s'engage, onse marie..., 16. - ... Et on fait des enfants, 17.

CHAPITRE II : 1945-1955 : le familialisme consensuel 21Une politique familiale révolutionnaire, 2 - Deuils,retrouvailles, séparations, deux années de désordre, 23. -Repeupler le pays, volonté unanime, 25. - On n'a rien, doncrien à perdre d'avoir des bébés, 27. - Mystique du « couple »et rajeunissement des mariés, 28. - Première entrée en scènedes « psy ». 30. - Les jeunes mères sont épuisées, 32.

Page 122: Analyse Documentaire_suzanne Waller

282Le grand remue-ménage

CHAPITRE III :1955-1965 : grands problèmes féminins 33

La peur des grossesses, la grand'peur d'aimer, 33. -Catholiques et communistes contre la contraception, 37. -Les hommes abandonnent les « précautions » aux femmes,39. - Une femme mariée peut-elle travailler « au dehors » ?,40. - De moins en moins de femmes au travail, 43. - Ventsd'Est, vents d'Ouest, grande querelle sur l'éducation despetits, 44. - Une doctrine de l'éducation « démocratique »hors famille, 45. - Plus un sou pour la mère au foyer, 48. -La « condition » de la femme dans la famille, 50.

CHAPITRE IV : 1965-1975 : la grande cassure 53Un nouveau modèle de famille, 53. - L'éducation par la fra-trie en voie de disparition, 55. - L'épisode des conceptionsprénuptiales 1965-72, 57. -Avances sur mariage ? mariagesforcés ? divorces ?, 59. - Cohabitation ? concubinage ?union libre ?, 61. - Report du mariage ou refus du maria-ge ?, 62. - Une classe d'âge en rupture, 63. - De la consom-mation familiale aux consommateurs concurrents, 65. -Malaise de la communication et coupure de générations, 66.- D'une révolte égalitaire à l'implosion individualiste, 68. -Inventer la vie hors de la famille, 69. - Contre la famille, lescommunautés, 71. - Que chacun découvre et épuise sesdésirs !, 73.

CHAPITRE V : 1965-1975 : toutes les lois changent 75Le grand chantier du droit de la famille : égalité des époux,75. - Remise en cause de la famille à propos de l'adoption,

Table des matières283

77. - Pour l'harmonie des couples ou pour la liberté sexuelledes femmes ?, 79. - Mort de la puissance paternelle, 83. - Lapuissance maternelle dans la famille naturelle, 85. -Tous lesenfants naissent égaux, 87. - Les « ados » sont majeurs, 90. -IVG, une loi pour les femmes, 9l. - Un divorce sans rigueur.93. - Divorce avec enfants : le juge tranche dans la famille, 95.- Les remises en cause de la politique familiale, 97. - De moinsen moins familiale, de plus en plus sociale, 98. - Choix de vieprivée contre la famille, 100.

CHAPITRE VI :1975-1985 : la décennie du narcissisme 103

Les « comportements » modifient l'équilibre démogra-phique, 104. - Indéterminations personnelles des généra-tions « bulldozers », 106. - La gauche refoule la famille versla droite, 107. - Comment rétablir un équilibre démogra-phique rompu, 108. - Les célibataires ne se marient plus, lesdivorcés ne se remarient plus, 110. -Tout ira très bien, disentles optimistes, 113. - Les nouvelles familles hors mariage.115. - « Les hommes deviennent entièrement privés »,117.— Moi, ma personne, je m'accomplis, 119. - Leschantres de l'individualisme tiennent l'information. 120. - Lafamille écrasée entre hédonisme et socialisme, 122. - Ne pasparler de la famille biologique, 123. - Parole « libératrice »de l'Église réformée. 125. -Renoncera la famille « lignée »comme à un péché. 126. - L'Église catholique face au « cou-plisme », 128. - L'amour plus « pur ». plus « authentique »des cohabitants, 129. - 11 n'y a plus que des individus. 131.

284Le grand remue-ménageTable des matières285

CHAPITRE VII:1975-1985 : les mères jouent les premiers rôles

Les femmes à l'assaut du travail, 135. - Les femmes deman-dent le divorce et gardent les enfants, 138. - II n'est questiondes pères qu'à la forme négative, 141. - On parle de l'intérêtde l'enfant, mais on exonère les parents, 142. - Promotiondes « bons » divorces et des « bonnes » familles recompo-sées, 144. - Des techniques de procréation qui dissocient lecouple parental. 146. - Un géniteur anonyme à jamais incon-nu de la femme fécondée, 147. - De l'hétéro-inséminationaux banques de sperme congelé, 148. - Éthique et pratiquedes CECOS, 150. - Les manipulateurs de sperme ne croientpas au père génétique, 152. - Les enfants ne sauront jamais,153. - La mère biologique est génitrice et gestatrice, 154. -Porter l'enfant, en accoucher, c'est la vraie maternité, 156. -Alors, les mères porteuses ?, 158. - Désir d'enfant, droit àl'enfant, 159. - Ébranlement de tout le système de parenté,160. - Avènement de la preuve biologique absolue et per-plexité..., 162. - Les concubins ne passent pas devant lemaire, mais devant notaire, 162. - Échec d'une politiquefamiliale démocratiquement choisie, 164. - Une politiquesociale népprogressiste sous Giscard, 166. - Ambiguïtés anti-famille et fraudes des usagers, 168. - Les socialistes renon-cent à tout changer et aident les femmes divorcées. 171.

CHAPITRE VIII :La fin du siècle et le démaillage familial

Des grands-parents mariés aux grands-parents divorcés, 174.- Des parents contents d'eux-mêmes. 175. - Ne pas parler des

familles à problèmes ni des laissés-pour-compte, 177thèmes et diffamations pleuvent sur les tenants de la famille. 180.- Le pays le plus féministe du monde se remet à faire des entants.182. - En Suède, on prône la coparentalité. 184. -Tout s'écrouleen Suède et en France. 186, - L'Enquête sur les situations fami-liales (ESF), 187. - Les enfants séparés de plus en plus toi d'unde leurs parents. 189. - Pères et enfants séparés n'émeuvent pasl'opinion, 190. - Deux fois plus de « ménages recomposés » pourles enfants, 193. - Le vocabulaire de la famille est en pleine« recomposition », 194.

CHAPITRE IX :La fin du siècle : entre le droit et la génétique

Doit-on maintenir la famille naturelle dans le matriarcat '.'197. - Pour l'égalité des droits et devoirs des père et mère, 199.- Une solution de compromis ridicule. 201. - II faut mieuxresponsabiliser les parents naturels, 202. - Pour une moder-nisation de la filiation : principes et questions, 204. - Accordunanime sur les « parents de cœur », 206. - La Conventioninternationale des Droits de l'enfant ratifiée mais contredite.208. - Le « droit au secret » entre au Code civil. 209. -sénateurs dressent des chicanes devant la vérité, 210. - II fau-dra bien libérer l'accès à la vérité des filiations, 212. - Le droitcouvre l'anonymat du géniteur et punit les révélations, 213.-En Suède, on veut ménager l'avenir, en France, on verrouille215. - Les deux fronts de la guerre entre le droit et la ventegénétique, 216. - Recherche de ses origines par l'enfantadopté, 217. - Les enfants du malheur et les intervenantssociaux. 220. - Qu'est-ce qui fait le père ?, 223. Propositions

Page 123: Analyse Documentaire_suzanne Waller

286Le grand remue-ménage

pour le xx* siècle, 225. - La famille procède du vivant, 226. -Nous ne pourrons plus mentir, 228. - La génétique n'est ni dedroite ni de gauche, 229. - Donner la vie à un enfant donné, 230.- Versions télévisées des relations choisies, 232.

CHAPITRE X : Choix du passé contre l'avenir 235Gauche ou droite, une grande continuité, 236, - L'argent dela Famille va à la Vieillesse car les vieux votent, 238. - Lespolitiques familiales ont été inspirées par des sceptiques dufait familial, 239, - La politique familiale française n'estplus la première en Europe, 241. - Quelques mesures entre1985 et 1993, 242. - Un rapport qui réveille l'Assemblée,244. - 1994. Une loi cache-misère, 246. -Va-t-on aller jus-qu'à fiscaliser les allocations, 247.

CHAPITRE XI : La montée du désarroi 251Un courant antimariage, un courant CUCS, 252. - La paren-talité et l'éducation au centre du dispositif, 255. - Décalageentre principes et propositions, 256. - Encourager la solida-rité familiale, 258. - Un code, un ministère, un observatoi-re, 259. - Coût financier des instabilités familiales. 261. -Coût humain : retentissement sur la santé physique et psy-chique, 262. - Violences à l'école : que font les parents ?,264. - La famille, une chance pour l'intégration, 266. - Lafamille, prévention de l'exclusion, 268. - Réhabiliter le rôlepaternel, 270. - Sans famille, la galère pour les jeunes, 271.- L'enchaînement chômage-divorce ou divorce-chômage,273. - Prévenir les ruptures, promouvoir des accords, 274.- Famille et démocratie, 276.

Dans la même collection

Fernand BRAUDEL - Georges

DUBY

LA MÉDITERRANÉE

Les Hommes et l'Héritage (sous ladirection de Fernand Braudel).

Fernand BRAUDELÉcrits sur l'Histoire.

LA MÉDITERRANÉE

L'ESPACE ET L'HISTOIRE

sous la direction deFERNAND BRAUDEL

La Méditerranée, t'Espace etl'Histoire a été publié pour la pre-mière fois en 1977 par Arts eMétiers Graphiques dans une édi-

tion illustrée.

ilÛJ Q.

o 5 D 0lC

Georges DUBYL'économie rurale et la vie des

campagnes dans l'Occident médié-

val (2 vol.)Saint Bernard. L'art cistercien.L'Europe au Moyen Âge.

FLAMMARION1985

Page 124: Analyse Documentaire_suzanne Waller

Sommaire

1LA TERRE

Fernand Braudel2

LA MERFernand Braudel

3L'AUBE

Fernand Braudel4

ROMEFilippo Coarelli

5L'HISTOIRE

Fernand Braudel6

ESPACESMaurice Aymard

Méditerranée

Dans ce livre, les bateaux naviguent ; lesvagues répètent leur chanson ; les vigne-rons descendent des collines des CinqueTerre, sur la Riviera génoise ; les olivessont gaulées en Provence et en Grèce ; lespêcheurs tirent leurs filets sur la laguneimmobile de Venise ou dans les canaux deDjerba ; des charpentiers construisent desbarques pareilles aujourd'hui à cellesd'hier... Et cène fois encore, à les regar-der, nous sommes hors du temps.

Ce que nous avons voulu tenter, c'estune rencontre constante du passé et duprésent, !e passage répété de l'un à l'autre,un récital sans fin conduit à deux voixfranches. Si ce dialogue, avec ses pro-blèmes en écho les uns des autres, animece livre, nous aurons réussi dans notrepropos. L'histoire n'est pas autre chosequ'une constante interrogation des tempsrévolus au nom des problèmes et curio-sités - et même des inquiétudes et desangoisses - du temps présent qui nousentoure et nous assiège. Plus qu'aucunautre univers des hommes. la Méditer-ranée en est la preuve, elle ne cesse de se

8 LA MÉDITERRANÉE

raconter elle-même, de se revivre elle-même. Par plaisir sans doute, non moinspar nécessité. Avoir été, c'est une condi-tion pour être.

Qu'est-ce que la Méditerranée ? Millechoses à la fois. Non pas un paysage, maisd'innombrables paysages. Non pas unemer, mais une succession de mers. Nonpas une civilisation, mais des civilisationsentassées les unes sur les autres. Voyageren Méditerranée, c'est trouver le monderomain au Liban, la préhistoire enSardaigne, les villes grecques en Sicile, laprésence arabe en Espagne, l'islam turc enYougoslavie. C'est plonger au plus pro-fond des siècles, jusqu'aux constructionsmégalithiques de Malte ou jusqu'aux pyra-mides d'Egypte. C'est rencontrer de trèsvieilles choses, encore vivantes, quicôtoient l'ultramoderne : à côté de Venise,faussement immobile, la lourde agglomé-ration industrielle de Mestre ; à côté de labarque du pécheur, qui est encore celled'Ulysse, le chalutier dévastateur desfonds marins ou les énormes pétroliers.C'est tout à la fois s'immerger dans l'ar-chaïsme des mondes insulaires et s'éton-ner devant l'extrême jeunesse de trèsvieilles villes, ouvertes à tous les vents dela culture et du profit, et qui. depuis dessiècles, surveillent et mangent la mer.

LA MÉDITERRANÉELA MÉDITERRANÉELA MEDITERRANEE

Tout cela parce que !a Méditerranée estun très vieux carrefour. Depuis des millé-naires, tout a conflué vers elle, brouillant,enrichissant son histoire : hommes, bêtesde charge, voitures, marchandises, navi-res, idées, religions, arts de vivre. Etmême les plantes. Vous les croyez médi-terranéennes. Or, à l'exception de l'olivier,de la vigne et du blé - des autochtonestrès tôt en place - elles sont presquetoutes nées loin de la mer. Si Hérodote, lepère de l'histoire qui a vécu au v siècleavant notre ère, revenait mêlé aux tou-ristes d'aujourd'hui, il irait de surprise ensurprise. Je l'imagine, écrit LucienFebvre, « refaisant aujourd'hui son péri-ple de la Méditerranée orientale. Qued'étonnements ! Ces fruits d'or, dans cesarbustes vert sombre, orangers, citron-niers, mandariniers, mais il n'a pas le sou-venir d'en avoir vu de son vivant. Parbleu !Ce sont des Extrême-Orientaux, véhicu-lés par les Arabes. Ces plantes bizarresaux silhouettes insolites, piquants,hampes fleuries, noms étrangers, cactus,agaves, aloès, figuiers de Barbarie - maisil n'en vit jamais de son vivant. Parbleu !Ce sont des Américains. Ces grandsarbres au feuillage pâle qui. cependant.portent un nom grec, eucalyptus ;oncques. n'en a contemplé de pareils.Parbleu ! Ce sont des Australiens. Et les

cyprès, jamais non plus, ce sont desPersans. Tout ceci pour le décor. Mais,quant au moindre repas, que de surprisesencore - qu'il s'agisse de la tomate, cettepéruvienne ; de l'aubergine, cette indien-ne ; du piment, ce guyannais ; du maïs, cemexicain ; du riz. ce bienfait des Arabes,pour ne pas parler du haricot, de la pommede terre, du pécher, montagnard chinoisdevenu iranien, ni du tabac. » Pourtant,tout cela est devenu le paysage même de taMéditerranée : « Une Riviera sans oranger,une Toscane sans cyprès, des éventairessans piments... quoi de plus inconcevable,aujourd'hui, pour nous ? » (Lucien Febvre,Annales, XII, 29).

Et si l'on dressait le catalogue deshommes de Méditerranée, ceux nés surses rives ou descendant de ceux qui, autemps lointain, ont navigué sur ses eauxou cultivé .ses terres et ses champs en ter-rasses, puis tous les nouveaux venus quitour à tour l'envahirent, n'aurait-on pas lamême impression qu'en dressant la listede ses plantes et de ses fruits '.'

Dans son paysage physique commedans son paysage humain, la Médi-terranée carrefour, la Méditerranée hété-roclite se présente dans nos souvenirscomme une image cohérente, comme unsystème où tout se mélange et se recom-pose en une unité originale. Cette unité

évidente, cet être profond de la Méditer-ranée, comment l'expliquer ? Il faudra s'yefforcer à plusieurs reprises. L'expli-cation, ce n'est pas seulement la naturequi, à cet effet, a beaucoup œuvré ; cen'est pas seulement l'homme, qui a tout liéensemble obstinément ; ce sont à la foisles grâces de la nature ou ses malédictions- les unes et les autres nombreuses - etles efforts multiples des hommes, hiercomme aujourd'hui. Soit une sommeinterminable de hasards, d'accidents, deréussites répétées.

Le but de ce livre, c'est de montrer queces expériences et ces réussites ne secomprennent que prises dans leurensemble ; plus encore qu'elles sont à rap-procher les unes des autres ; que la lumiè-re du présent leur convient très souvent,que c'est à partir de ce que l'on voit au-jourd'hui que l'on juge, que l'on comprendhier - et réciproquement. La Méditer-ranée est une belle occasion de présenterune « autre » façon d'aborder l'histoire.Car la mer. telle que l'on peut la voir etl'aimer, est, sur son passé le plus étonnant,le plus clair de tous les témoignages.

Fernand Braudel

© Flammarion, 1985

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ÉtudesSeptembre 1993Des objectifs pour le journalisme *

Claude-Jean Bertrand

ENDANT des siècles, la livraison de l'informationa été gênée par des obstacles matériels ; puis par

des obstacles politiques : aussitôt que la presse est née, sondéveloppement a été freiné par les gouvernements et les tri-bunaux. Depuis le début du xxc siècle, une autre barrière àl'information est apparue : l'obstacle économique. Trop depatrons de médias, et tous les annonceurs, traitent les médiasseulement comme des moyens de gagner de l'argent.Pourtant, ces trois facteurs ne sont pas seuls responsables dela désinformation. Et même, ces trois facteurs ne sont pas lespires - car ils sont bien connus et sont souvent dénoncés. Lapire menace vient sans doute des professionnels des médiaseux-mêmes, qu'il s'agisse de leurs péchés propres ou de leurtolérance vis-à-vis des péchés des patrons de médias.2 Je suis persuadé que les médias sont meilleursaujourd'hui qu'ils n'ont jamais été. Ils restent néanmoinsmédiocres. Et leur amélioration n'est pas simplement sou-haitable : le sort de l'humanité en dépend. Il est des Occiden-taux pour penser que pour obtenir des médias de qualité, ilsuffit d'étendre la liberté politique à la presse de tout leglobe. Or la liberté est nécessaire mais elle n'est pas suffi-sante. C'est une condition ; ce n'est pas le but. Le but, c'estl'existence de médias qui servent bien les citoyens, tous les

* Bon nombre des idées présentées dans ce texte son! empruntées à la EarlEngltsh U'diire. 1992. conférence que j'ai été invité à taire à la Faculté dejournalisme de l'Université du Missouri en avril 1992.

(D

citoyens. Partout dans l'Occident industrialisé, les médiascommerciaux ont joui de la liberté politique depuis long-temps, et pourtant, bien souvent, ils ont fourni un servicedéplorable.3 Je présenterai ici douze objectifs pour des journa-listes : douze améliorations possibles. La plupart de cesaméliorations sont liées à une redéfinition du produitmédiatique et des informations. Je reprends ici ces points.faisant remarquer d'emblée que l'obstacle interne à unebonne information ne consiste pas, comme on le prétendparfois, en l'existence de quelques reporters malhonnêtes,mais dans la combinaison de propriétaires de médias bor-nés, de journalistes mal formés et, principalement, dequelques traditions puissantes au sein du journalisme.4 Ne pas imposer aux informations une taille on uneheure fixe. - Naguère encore, quand les médias partici-paient de l'industrie traditionnelle, ils ont pris l'habitude defabriquer un produit de taille presque identique tous lesjours, à la même heure, avec le même mélange d'ingré-dients. Ils continuent d'agir ainsi, sans tenir compte de cequi vient de se passer dans le monde. Ils rétrécissent ou ral-longent les « nouvelles » ; selon le cas, ils occultent desinformations importantes ou font du rembourrage, afind'emplir sans déborder l'espace ou le temps dont ils dispo-sent. Le compte rendu de l'actualité en est déformé.5 Ceci est évitable : le remède tient dans une redéfini-tion des « nouvelles » et dans l'utilisation de la technologiedisponible pour une distribution continue de l'information.Des paquets de nouvelles préparés par des journalistes peu-vent désormais être taillés par ordinateur de façon à satis-faire les besoins et les goûts, réguliers ou exceptionnels, dechaque uSager. La taille des paquets peut aussi varier selonl'actualité, et ils peuvent être livrés par des canaux divers endes lieux divers. Ce mode de fabrication et de distribution

n'a qu'à peine commencé. L'évolution est ralentie par leconservatisme de la profession.6 De même, on doit cesser de penser que le « journal »est à publier à des moments déterminés. Il faut offrir aucitoyen le type d'information continue qui s'est répandu auxÉtats-Unis, pour la radio dans les années 70, grâce aux sta-tions « Ail News » (modèles de France-Info), et dans lesannées 80 pour la télévision, à commencer par CNN.L'usager doit aussi pouvoir passer commande à desbanques de données audio et vidéo, en vue d'obtenir sonpropre mélange de « nouvelles », ou plutôt d'informations,à tout moment, sur tout sujet.7 Distinguer le divertissement de l'information. - Ondistingue traditionnellement entre journaux populaires etjournaux de qualité. On ferait mieux de distinguer entrefeuilles de divertissement et feuilles d'information. Mais ilest encore difficile de faire admettre aux journalistes quel'usager consomme beaucoup de ce qu'ils croient être des« nouvelles » comme du divertissement. Par là, je ne fais pasallusion seulement à un divorce à la cour d'Angleterre, maisaussi aux résultats sportifs, à une attaque contre une banque,à l'éruption d'un volcan lointain, à un accident d'avion, etmême à certaines guerres pourvu qu'elles aient lieu assezloin, comme la guerre du Golfe. Loin de moi l'idée que ledivertissement médiatique soil méprisable. Le divertisse-ment est crucial dans la société moderne et il est fourni sur-tout par les médias : c'est là une de leurs fonctions majeures.Mais, dans la mesure où c'est possible, on doit distinguer ledivertissement et l'information sérieuse. Il ne faut pas laisserle premier éliminer la seconde ou la « futiliser » ( 1 ).

(1) Un mémorable exemple de « Invialisation » : en 1976. après que le futurPrésident Jimmy Carter au donne une excellente interview à Ptayhoy. ou i!exposait son programme, tous les médias états-umens ont monté en épingleson bref épilogue un peu coquin.

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8 éviter les omissions dues à la partialité. - L'omis-sion est le pire des péchés des médias. Certes, elle peut êtredue à la nature du média (la radio, par exemple, ne disposeque de 24 heures par jour) ou à un irrémédiable manque deressources ; mais elle peut aussi être due à la rapacité despropriétaires et à des tares chez les journalistes. Un exem-ple tiré d'une presse qui est souvent citée en exemple.Chaque fois qu'on lit un quotidien de grande ville états-unienne, on est choqué de constater l'énorme proportion depublicité (2) et l'infime proportion de nouvelles interna-tionales.9 Le progrés que je souhaite à cet égard est lent à seréaliser, malgré la pression des diverses minorités dans lapopulation de chaque pays. Même les meilleurs médias ontdu mal à abandonner leurs préjugés, filtres à informationqui, selon les cas, sont ceux des patrons de médias, desannonceurs, des « hommes jeunes blancs cultivés » quipeuplent les salles de rédaction, de la partie riche de lapopulation, ou encore, simplement, de la majorité dans lepays. Tous ces acteurs de la communication sociale fontdonc obstacle à une bonne information, mais, au bout ducompte, les professionnels, les journalistes, sont respon-sables.10 Deux exemples de distorsion et d'omission. LesFrançais sont les plus gros consommateurs de boissonsalcoolisées au monde ; il est rare que leurs médias traitentdu coût véritable de l'alcoolisme. Tous les médias occiden-taux, d'autre part, occultent des maladies tropicales quituent depuis longtemps davantage que le sida, et auxquelleson consacre peu d'argent et de recherche.11 Changer la définition de l'information. - Mêmequand ils n'omettent rien, les médias s'occupent avant tout

(2) 60 % de la surface des quotidiens en moyenne.

des « nouvelles ». qui ne constituent souvent qu'une imbé-cile mosaïque de petits événements. Ils devraient se soucierd'information. Cela implique plus d'un changement.12 D'abord, il faut mettre davantage l'accent sur le« verre à demi plein », les événements positifs. Les bonnesnouvelles sont-elles dépourvues d'intérêt : telle la fin de laseconde guerre mondiale, la découverte de la pénicilline,l'arrivée d'hommes sur la lune ou l'écroulement du commu-nisme ?13 Par ailleurs, l'actualité ne doit pas consister seule-ment dans les nouvelles qu'apprécié la minorité des richesou la minorité au pouvoir, clients, sources ou amis despatrons des médias. L'information de qualité, c'est tout ceque chacun des groupes dans la population juge importantpour son bien-être. Et ce ne sont pas, comme le voudrait latradition, les seules nouvelles politiques, c'est-à-dire desnouvelles sur le gouvernement, local ou national.14 L'échec des médias classiques dans ce secteur a étéévident aux Etats-Unis à l'époque où ils ne donnaient rien,ou presque, sur la minorité noire, avec pour effet lesgrandes émeutes en chaîne dans les ghettos à la fin desannées 60. Ni la paresse, ni l'avarice, ni un souci myope deplaire à l'usager, ni la tradition ne doivent empêcher lesmédias d'informer sur le monde entier, chaque nation etchaque groupe qui le constituent, et aussi l'évolution qui amené au présent état de fait (3).

(3) Je trouve remarquable qu'un hebdomadaire au été lancé en I*W], enFrance, sous le litre Courrier international, qui choisi! et iraduit rapidementdes articles tirés d'autres quotidiens et périodiques du monde entier, destextes qui donnent au lecteur français un point de vue différent sur lesaffaires de son propre pays et des autres. A la même époque, toujours enFrance, la télévision publique FR3 avait une émission du matin intituléeContinentales, qui présentait, avec de;, sous-litres, des journaux rdé'.i^é'-étrangers de la veille.

15 Faire apparaître les pseudo-événements pour cequ'Us soni. ~ Un défaut de l'information a été signalédepuis de nombreuses années : beaucoup de ce qu'on publiecomme « nouvelles » est fabriqué par ceux qui profitent dela publication. Daniel Boorstin les a baptisées des « pseudo-événements » (4) : conférences de presse présidentielles,festivals de cinéma, défilés de protestation... De tels événe-ments ont l'avantage, aux yeux des patrons de presse, d'être(pour la plupart) annoncés bien à l'avance et parfaitement« conditionnés » pour leur usage par les médias. Bien sûr.il arrive que des nouvelles de ce genre aient de l'impor-tance, mais elles doivent être soigneusement sélectionnéeset commentées : les usagers doivent pouvoir en connaître lavraie source et la nature.16 Chercher la réalité sous les apparences. - De deuxfaçons. D'abord, les médias doivent s'efforcer de discernerl'actualité réelle, au lieu de se faire l'écho des positions offi-cielles. Prenons un exemple : deux avions de ligne sud-coréens ont eu, à plusieurs années d'intervalle, des ennuisavec les Soviétiques On a beaucoup parlé du deuxième,abattu par deux chasseurs au-dessus du Pacifique. Le pre-mier, lui, se trouva déboussolé au-dessus du pôle et. au lieude voler vers les États-Unis, se dirigea vers l'URSS ; il futrepéré au-dessus d'une base militaire, poursuivi et endom-magé par des chasseurs, mais continua sa route vers le sudsur plusieurs centaines de kilomètres, jusqu'à se poser tran-quillement sur un lac gelé. Un incident international banal '.'Bien sûr que non ! Il démontrait que l'Union soviétique(Vêtait pas la formidable forteresse qu'on prétendait. Maisvoilà qui était désagréable pour ceux qui avaient intérêt à la

poursuite de la Guerre froide. Comment expliquer autre-ment que ce premier incident sud-coréen ait été si peu traitéalors et jamais plus mentionné ensuite ?17 II y a une autre façon plus importante pour lesmédias de chercher la réalité derrière l'apparence (5). c'estde manifester l'existence de phénomènes graves maisencore invisibles, hors des feux de l'actualité, sous la sur-face de la réalité, et d'identifier des mouvements profondsavant qu'ils n'émergent sous la forme de problème^ sérieux,sinon de catastrophes. Il n'est pas difficile de trouver desexemples de tendances majeures qui n'ont pas été repéréesà temps : quels grands médias en France ont enquêté dansles années 70 sur les ghettos de banlieue où s'accumulaientMaghrébins et Africains, et ont prévu la criminalité et lesémeutes qui s'ensuivraient, et annoncé la conséquente mon-tée d'une extrême-droite fasciste ?18 Rendre les nouvelles compréhensibles. - Les gens deplus faible culture trouvent les médias d'informationennuyeux, particulièrement la presse écrite, surtout parcequ'ils ont du mal à les comprendre : ils ne connaissent pasbon nombre des mots et des concepts que les médias utili-sent. Mais la plupart des citoyens, même intéressés, ne peu-vent souvent pas comprendre les antécédents d'un événe-ment, son contexte, sa signification, ses éventuelles consé-quences. Une raison de cette carence : la formation insuffi-sante des gens de presse. Une autre : la vieille habitude des'adresser à une élite, de tenir pour acquise une vasteconnaissance du monde.

(5KPhilip

C'ûtaii là un but majeur des techniques réunies ttons les années 70 parip Me\er sous le nom de juvcisiiin îaurnalixm ou .1 journalisme vaenii-

|4| Daniel J. Boorstin. Chc liante I limS*w York, Atheneurn. l%l lùdmon deI97U.

'iv/i/.ï m \nn-rn\t.MHIS-UIIC ,i|OUIL-

i nuip .Mi:\ur MIUS ii. ni'iii uv ,.... ,. , _.,t'iquc a, i:oiiMSl:ii\ à appliquer les méthodes des sciences sociales et la puis-sance îles ordinateurs à l'analyse d'arehivo ou d'enquêlcs {\itir The Vi'ir

•ni, Bloommgton, Indiana DP. 1941).

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19 Rendre intéressantes les nouvelles importantes, -Les médias doivent non seulement rendre compréhensiblesles informations importantes, mais aussi les rendre intéres-santes pour tous.Si l'on veut que la société fonctionne bien, il faut que tousses membres aient une idée juste du vaste monde, qu'ils ysoient ou non naturellement enclins. S'ils n'y sont pasenclins, il faut que les médias stimulent leur intérêt, enmontrant, par exemple. l'effet que tel événement peut avoirsur leur vie personnelle. La réalisation n'est pas facile (6).20 Montrer gué des nouvelles intéressantes sont impor-tantes aussi...- Pour montrer qu'un fait divers ne relève pasuniquement du divertissement, on n'a pas seulement besoinde savoir-faire et de temps, mais aussi d'une conception dif-férente du journalisme. Par exemple : un homme a abattu safemme et ses six enfants avec un pistolet mitrailleur. Jolimassacre avec du sang, des cris et des larmes ; mais que dit-il sur la société où il a eu lieu ? À quoi est-il dû ? À l'al-coolisme, à un manque de surveillance psychiatrique, auchômage, à l'obtention trop facile d'armes automatiques ?21 Traduire le discours scientifique. - Les médias doi-vent interpréter e( faire connaître les découvertes, les sou-cis et les pensées des chercheurs et savants. La descentegoutte à goutte de l'information, depuis la revue savantejusqu'au quotidien local, est fort lente et incomplète. Le peuque font les newsmagaiines et les documentaires de télévi-sion est insuffisant. Tous les journaux, imprimés ou audio-visuels, devraient publier chaque jour une chronique claire.

(6) Le Daily Mirror, quotidien national populaire anglais, y érait parvenudans les années 60 avec une rubrique intitulée « Mirrorscope ». Mais RupertMurdoch. magnat australien, a tait glisser alors la presse britannique plusbas qu'elle n'avait jamais été, avec un régime de seins nus. de comméragesdiffamatoires, do crimes, de sports et de chauvinisme exacerbé - autrementdit. à coups de divertissement

stimulante, sur la recherche et les réalisations dans un sec-teur ou l'autre de la science et de la technologie. Les médiasdoivent ainsi se comporter non seulement en messagers,mais aussi en explorateurs et initiateurs. Diversifier etaiguiser l'appétit est presque aussi important que de fournirde la nourriture. Il y a de moins en moins de différenceentre journalistes et enseignants : les deux contribuent à laformation continue indispensable pour tous.22 Animer le débat public, — Les médias devraientconsidérer comme une de leurs fonctions d'encourager à laparticipation dans la vie sociale ; d'exciter la pensée etl'imagination de chaque citoyen au sujet de son environne-ment, de promouvoir des débats publics vigoureux sur lesquestions d'intérêt général. Hélas, ils ont la mauvaise habi-tude de céder à la majorité ou à des groupes de pression.D'une manière générale, ils ont peur des idées neuves, nonconformistes ou extrêmes. Il faudrait au contraire qu'ilsencouragent la discussion de questions brûlantes, avec laparticipation des minoritaires de toute espèce, même deceux que la majorité trouve répugnants.23 Dans ce style, USA Today {quotidien national états-unien né en 1982) a innové en publiant tous les jours sur lamême page des « libres opinions » systématiquement oppo-sées à son éditorial. Bien avant cela, la télévision françaiseavait pris l'habitude de faire débattre avec des journalistes,à des heures d'assez bonne écoute, des politiciensd'extrème-gauche et d'extrême-droite.24 Faire campagne pour des réformes. - C'est une desfonctions des médias que de dénoncer les tares sociales (7).En 1991, \ePMladelphia tnquirer a publié une remarquable

(7) Cela est clairement énoncé dans un des meilleurs codes américains dedéonrologie, celui de l'APME, l'Associated Press Managing EditorsAssociai ion.

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18) ., Amenca Wh» Wcm Wrong " . .L'Aménque : «q«-

lement, l'humanité.Claude-Jean BERTRAND

Institut français de presseUniversité de Pans-ll

ANNEXE» *> Ils sont environ une

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des médias élaborent par consensus ; - des critiquesinternes et des « commissions d'évaluation des contenus »(comme celles qui ont été mises en place par des quotidiensjaponais dès les années 1920) pour scruter les journauxchaque jour et s'assurer que la déontologie n'est pas violée ;- les journalistes spécialistes des médias (média reporters)qui observent toute l'industrie d'un œil critique ; - de dis-crets organismes de liaison mis en place par les médias etquelque profession avec laquelle ils sont presque inévita-blement amenés à entrer en conflit ; - \'ombudsman depresse, salarié par un journal, une slation de radio ou detélévision, pour recevoir et traiter les plaintes des usagers ;- des conseils de presse locaux, occasions de rencontrepour les professionnels des médias locaux et des représen-tants de la population ; - des conseils Je presse régionauxet nationaux, organismes d'arbitrage (comprenant patrons,professionnels et usagers) mis en place par les médias àl ' intent ion des citoyens qui ont un grief contre une publica-tion ou une station.

Certains autres « M.A.R.S. » ne sont pas d'ordinairemis sur le même plan que ceux dont i l vient d'être question :- les encadrés de correction très visibles ; - le courrier deslecteurs et les tribunes libres ; - les enquêtes d'opinionrégulières ; - la présentation systématique d'opinionscontradictoires au sujet de toutes les questions d'intérêtpublic ; - Information continue des professionnels (grâce àdes ateliers d'un jour, des séminaires d'une semaine, despériodes universitaires de plusieurs mois) ; - des livresécrits par des professionnels et des revues spécialisées dansla critique des médias (comme, aux États-Unis, la Washing-ton JR ou la St Louis JR).

D'autres « M.A.R.S. » sont extérieurs au monde desmédias : - la recherche non commerciale, initiée par desuniversitaires, sur des sujets comme la distorsion volontaire.

les perceptions du public, les contenus et surtout certainesabsences de contenu, c'est-à-dire les omissions ; - les asso-ciations de consommateurs et d'usagers des médias ; - etsurtout l'enseignement universitaire.

Enfin, certains « M.A.R.S. » sont presque inconnuset rarement mentionnés d'un côté comme de l'autre del'Atlantique : - les questionnaires d'exactitude et d'équitépostés ou publiés à certaines époques par quelques petitsjournaux états-uniens ; - la société des rédacteurs, uneassociation de journalistes travaillant pour une publicationou une entreprise de radiotélévision, qui souvent possèdedes actions dans le capital de la compagnie et donc unevoix dans l'établissement de la politique rédactionnelle. Lapremière à attirer l 'attention fut, en 1951, celle du quotidienLe Momie : - la société de lecteurs, encore plus rare, estune association d'usagers qui a acheté des actions dans unmédia et exige d'avoir son mot, même modeste, à dire dansla f ixat ion de la pol i t ique générale de l'entreprise.

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©Études, 1993

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ANNEXE 1 - TEXTES ET ARTICLES

aux échanges numériques sont devenuesconsidérables. Aux États-Unis, au débutdes années I990, les branches d'activitéliées au droit d'auteur, qui couvrent prin-cipalement les secteurs de l 'édition, del'audiovisuel et de la musique, annon-çaient un chiffre d'affaires annuel deplus de mille mil l iards de francs, soitapproximativement 3.6 pour cent du pro-duit intérieur brul américain. En 1993,lorsque les sociétés QVC et Viacom sedisputèrent la Paramount, l'enjeu étaitles droits d'auteur des films d'archives.Depuis 1981, la Société américaine desauteurs a poursuivi en justice des socié-tés d'édition comme celle du New YorkTimes pour la vente non autorisée decopies informatiques des œuvres de sesmembres. Même les universités cher-chent aujourd'hui à augmenter leursrevenus en conservant les droits des tra-vaux qu'elles produisent, plutôt que deles laisser aux éditeurs.

La majeure partie des droits de repro-duction concerne des produits de grandediffusion comme les livres, les films etles produits dérivés (le roman JurassicPark, par exemple, a donné naissance àun fi lm, à une cassette vidéo, à une cas-sette audio, à des T-shirts, à des jouets età divers produits). Aux États-Unis, lespublications universitaires et littéraires,qui sont la mémoire scientifique, cri-tique et artistique de ia société, ne repré-sentent qu'un demi pour cent de l'en-semble, soit cinq milliards de francs paran environ. Les publications financéespar l'État et distribuées librement jouentun rôle négligeable dans ce marche.

Les chercheurs et les enseignants pré-fèrent souvent la large diffusion de leurtravail à des rémunérations. Le réseauInternet leur convient bien, parce qu ' i ltransmet les informations plus rapide-ment que les supports imprimés et à un

coût infér ieur ; de surcroit, la copienumérique d'un document ou d'un pro-gramme est en tous points identique àl 'original.

Toutefois, ces auteurs ne sont que lespassagers d'un gigantesque paquebot detransferts de données, obligés de s'adap-ter à des lois communes. L'enthousiasmedes éditeurs pour les nouveaux produitsest tempéré par la crainte qu'une seulevente, à une bibliothèque ou à un parti-culier, ne soit suivie de la reproductiondu document sur tout le réseau Internet,ruinant les espoirs d'exploitation com-merciale et de développements ulté-rieurs.

Les problèmes posés par l 'applicationdes lois sur la propriété littéraire et artis-tique dans l 'u t i l isat ion des nouveauxmédias sont nombreux. Dans que l lemesure les œuvres sont-elles protégéessur les réseaux? Le cyberespace est-ilun Far West moderne où chacun peutpiller les créations des autres en numéri-sant les images ou en copiant desfichiers ? De nombreuses œuvres sont lefruit de collaborations : à qui appartien-nent-elles et qui peut y avoir accès ?Comment peut-on déterminer l'étenduede la propriété de chacun, en supposantmême que la notion de propriété ail unsens ? Comment peut-on dédommager lepropriétaire d'une œuvre lorsque son tra-vail est dispersé mot par mot, phrase parphrase ou même, pour la musique, notepar note 7 Quelle est la responsabilitédes opérateurs du réseau Internet, quidevraient être attentifs aux risques deviolation de la loi par le nouvel out i lqu'ils mettent à la disposition du public ?En France, l'Office parlementaire deschoix scientifiques et technologiquesn'a, à ce jour, rien publié sur les réseauxinformatiques au regard des droits d'au-teur, mais, aux États-Unis. l'Office des

«POURl.A SCIENCE. N" 227 Sl-.PHlMIiRP 1W

« LES DROITS D'AUTEUR DES ŒUVRES NUMÉRIQUES »

choix techniques américain (Office ofTechnology Assessment) recommandait,en 1986, de renoncer à la protection surle droit d'auteur tel que nous le connais-sons aujourd'hui et de chercher de nou-veaux principes.

L'état de la loi

L'origine des lois sur le droit d'auteur estancienne, et l'évolution de ce droit a ététortueuse. L'un des tout premiers conflitseut lieu au vr siècle, en Irlande : saintColomba avait recopié un manuscrit del'auteur latin Psalter, alors que le pro-priétaire de l'original, Finnian de DruimFinn, y était opposé. Le roi arbitra en cestermes : « De même que le veau appar-tient à la vache, la copie appartient àl'original », Une guerre un résulta, queles « pirates » remportèrent, conservantleur copie ; celle-ci devint l'ouvragefétiche du clan Colomba, aujourd'huiconservé à la bibliothèque de l'Acadé-mie royale irlandaise, à Dublin.

Le décret de la reine Anne (statut? ofAnne), promulgué en 1710 en Angle-terre, fut la première loi moderne pourla protection des droits d'auteur : aupa-ravant, certains auteurs et éditeurs béné-ficiaient de privilèges royaux particu-liers. Cette loi reconnaissait des droitsaux auteurs et l im i t a i t leur durée. Elleservit de modèle pour la rédaction de lapremière loi régissant les droits d'auteuraux États-Unis, en 1790. Les premièreslois françaises furent deux textes révo-lutionnaires, l'un relatif aux spectacles,en 1791. et l'autre aux droits de pro-priété des auteurs d'écrits ; des composi-teurs, des peintres et des dessinateurs,en 1793. Des deux côtés de l 'Atlantique,les lois sur la protection des auteursfurent un compromis entre les intérêtsprivés et le besoin d' information de la

société. Aujourd'hui encore, aux États-Unis, les règles qui définissent la pro-priété littéraire et artistique sont fondéessur leurs capacités à promouvoir lesprogrès des sciences, des arts et deslettres.

En France et aux États-Unis, au fil desréformes, les parlements ont augmentéla durée de la protection des auteurs,étendu le champ d'application de la loi àde nouveaux types d'oeuvres et ratifiédes accords internationaux comme laconvention de Berne. 1826. Les signa-taires de cette convention s'engageaientà protéger légalement, dans leur pays,les auteurs dont les œuvres de l'espritentrent dans le champ d'application decette convention.

En 1976, la dernière réforme de la loiaméricaine sur la propriété littéraire etartistique a complété la précédente. Elleconcerne les livres, les compositionsmusicales, les œuvres dramatiques, lespantomimes, les œuvres chorégraphi-ques, les œuvres de dessin, de peinture,d'architecture, de sculpture, de lithogra-phie, les œuvres cinématographiques etautres créations audiovisuelles (les bre-vets et les marques sont régis par des loisspéciales, tout comme les secrets defabrication).

La loi protège le ti tulaire d'une œuvrede l'esprit en lui octroyant le droit d'in-terdire à quiconque de la reproduire, del'adapter à un autre mode d'expression,de procéder à la commercialisation d'unecopie de l'œuvre, de la représenter ou del'exposer sans autorisation préalable.

La loi l imite toutefois les droits d'au-teur de plusieurs manières. La plusimportante de ces limitations est lareconnaissance de l'« usage loyal » (fairuse), qui autorise, sous certaines condi-tions, la duplication sans paiement dedroits ni de permission. L'usage loyal

«1POI RIASCIF.NCI N"2?7

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ANNEXE 1 - TEXTES ET ARTICLES

permet de faire des copies à des fins derecherche, d'enseignement, de journalis-me, de critique, de parodie ou de conser-vation par tes bibliothèques.

La propriété littéraire el artistique estchaudement débattue dans tous les paysdepuis plusieurs années, notammentparce que l'usage de la photocopie ou duprêt en bibliothèque ont rendu caducs lesaccords anciens. Cependant, le cyberes-pace s'est initialement développé enmarge des secteurs au le droit d'auteurétait protégé. De nombreux textes etimages d'origines diverses transitaientvers le monde informatique, alors quepeu d'œuvres informatiques faisaient lechemin inverse. Cette dissymétrie a rapi-dement évolué, et la rapide colonisationdu réseau Internet par les autres médias,au milieu des années I990, a montré queles frontières étaient tombées. Le rapportd'une commission d'experts américains.en l9')4, a avivé le débat.

Le grand débat

Par courrier, par télécopie et par courriel-électronique, cette commission, dirigéepar Bruce Lehman, a reçu les réactions àla présentation de son premier rapport.Les principaux acteurs du marché desdroits d'auteur envoyèrenl ainsi plus (JeI 000 pages de commentaires. En sep- .tembre 1995, le groupe a remis la ver-sion définitive de son rapport sous laforme d'un livre blanc qui contient despropositions pour réactualiser les loissur le droit d'auteur. Naturellement, lesdébats qui onl eu lieu aux Etats-Unis ontété largement commentés dans les autrespays membres de l'Union de Berne.

D'une manière générale, les industriesde l'information ont accueilli les recom-mandations du livre blanc avec enthou-siasme et soulagement : la commission

flPCH'R LA SCIENCE . N° 227 SI.PII'MMRI I')')(.

Lehman a rejeté le pire des scénarios,qui ferait baisser les revenus des éditeurset des auteurs au point que ces derniersn'auraient plus intérêt à produire de nou-veaux ouvrages et à les mettre sur lemarché. F.n effet, la Commission recom-mande des contrôles stricts de la dupli-cation par moyens informatiques. Enrevanche, les bibliothèques et les ser-vices éducatifs, les serveurs de réseau oules particuliers sont hostiles aux proposi-tions, craignant un monde où plus rienne sera accessible, lisible ou reproduc-liblc sans autorisation préalable ou paie-ment. De nombreuses bibliothèques ontdéjà des difficultés avec les coûts de l'in-formation, particulièrement ceux deslivres scientifiques, qui augmenterontd'environ dix pour cent chaque année.

Le budget de l'obtention d'informationspar les réseaux, qui permettent auxbibliothèques e( aux écoles d'accéder àdes documents dont elles ne disposentpas directement, est devenu supérieur aubudget consacré à l'achat des livres cl desmagazines. Aussi les bibliothécairesvoient-ils d'un mauvais itil que l'on pré-conise une généralisation des licencesd'utilisation. Du point de vue du prix, dela responsabilité et de la durée de pro-priété, les licences d'utilisation avanta-gent les fournisseurs d'information. Si lesaccords contribuent à maintenir un prixexcessif pour l'utilisation de l'informationélectronique, les opérateurs des réseauxprospéreront, mais les bibliothèques n'au-ront plus les moyens d'y avoir accès et lesfournisseurs péricliteront. Un compromisdoit donc cire trouvé.

De surcroît, aux yeux de nombreuxcitoyens et de représentants du milieuéducatif, les propositions de la com-mission Lehman modifient l'équilibreque la loi actuelle avait instauré entre lerespect des droits des auteurs et de la

« LES DROITS D'AUTEUR DES ŒUVRES NUMÉRIQUES »

liberté des utilisateurs. La Commissionpropose, par exemple, que chaque infor-mation, dès lors qu'elle transite, pour untemps aussi court soit-il. sur la mémoired'un ordinateur, soit considérée comme« fixée » au regard du droit d'auteur. Enrevanche, la loi actuelle sur la propriétélittéraire et artistique ne protège que lesœuvres de l'esprit originales fixées sousune forme tangible, c'est-à-dire lorsqueleur forme est suffisamment stable pourleur permettre d'être vues, reproduitesou communiquées.

Cette distinction est fondamentale. Siles recommandations de la Commissionsont suivies, chaque personne qui trans-mettra, entre deux ordinateurs, uneinformation protégée, sans avoir l'autori-sation du possesseur violera la loi. F.neffet, le groupe de travail recommandeque la loi soit modifiée pour reconnaîtreque la transmission est du ressort exclu-sif du possesseur des droits. Dans cesconditions. la seule consultation d'unepage web, qui implique la transmissionentre un serveur et un ordinateur person-nel, sera considérée comme un acte illé-gal si clic n'est pas précédée d'une auto-risation.

La Commission refuse égalementd'étendre aux duplications électroniquesla notion d'épuisement du droit par lapremière vente : toute personne quiachète un livre ou un magazine peutrevendre ou donner cet exemplaire sanspayer de droits supplémentaires. Cettepossibilité serait interdite pour l'infor-mation numérique.

C'ette recommandation, i I logique enapparence, est fondée sur la constatationque, lors d'un transfert électronique,le fichier est physiquement présent surau moins deux ordinateurs, ne fût-ceque quelques millisecondes, et se trouve

donc dupliqué plutôt que.transféré. Lesmoyens légaux par lesquels le posses-seur de la copie électronique d'uneœuvre pourrait la vendre ou la donner,un geste parfaitement légal pour un livreimprimé, restent à définir. Il en résulteque, dans le monde informatique, la pos-sibilité de se faire une opinion en jetantun coup d'ceil sur un ouvrage (ce qui estadmis dans les bibliothèques ou dans leslibrairies) disparaîtrait. Feuilleter desouvrages «en ligne», sans autorisationpréalable, serait considéré comme uneviolation de la loi.

Les universités et les autres organismesqui fournissent des accès au réseauInternet sont particulièrement préoccu-pés par cette proposition de la Commis-sion, qui prévoit qu'ils seraient responsa-bles des infractions à la législation surles droits d'auteur commises par leursutilisateurs. Cette situation les obligeraità faire la police informatique, en lesobligeant de vérifier la légitimité dedonnées que les étudiants, le personnelou les utilisateurs lisent ou publient.

Un équilibre nécessaire

Si la Commission propose un futur trèséloigné de la tradition d'un accès publicaux données, des moyens techniques trèssimples pourraient contourner ces obs-tacles. La Commission insiste sur lesaspects techniques de transmission et derésidence des données, mais de nom-breux spécialistes trouvent leur analyseinsuffisante sur ce plan. Un examen pluscomplet des possibilités techniques detransfert de fichiers, qui inclut lesméthodes de codage pour limiter lenombre de copies permanentes lors dutransfert, pourrait étendre les travaux delu Commission.

«> PUl'R l.\E M • 127 SI PT1 MHRf- IW

Page 131: Analyse Documentaire_suzanne Waller

ANNEXE 1 - TEXTES ET ARTICLES

D'autre part, pour que l'accès auxdocuments informatiques sans paiementsystématique de droits soit admis danscertains cas, on doit se préoccuper del'usage loyal du copiste et tenir compte

de ce droit pour déterminer un compro-mis entre le respect des droits des auteurset ceux des utilisateurs. Un tel compro-mis fut déjà recherché dans le cas de laphotocopie des ouvrages imprimés.

La définition de l'usage loyal ducopiste reste toutefois ambiguë dans le

cadre des réseaux informatiques. LaCommission l'envisage peu, bien qu'elleprécise que la notion d'usage loyal doitperdurer dans le monde des connexionsinformatiques, et que la nécessité dimi-nuera avec la généralisation des licenceset d'autres moyens de paiement automa-tique. Les représentants des utilisateurset des lecteurs regrettent ces impréci-sions troublantes. Si la Commission apris une position ferme en faveur desdroits des auteurs, elle n'a pas su clari-fier les droits des utilisateurs.

Elle a cependant continué à réunirinformellcment, chaque mois, des utili-sateurs, des auteurs, des bibliothécaires,des avocats et des représentants des édi-teurs, pour essayer d'élaborer des recom-mandations précises sur la notiond'usage loyal. Les premières réunionsont montré qu'un accord ne sera sansdoute pas atteint avant les discussionsdevant les députés.

Pourtant, ce désaccord n'est peut-êtrepas mauvais. Certes, les deux campscraignent qu'en l'absence de recomman-dations claires sur la notion d'usage loyal,les utilisateurs, (elles les universités,seront gênés par l'ambiguïté de la loi.Toutefois, les lois doivent être élaboréesdans le calme et la réflexion. L'absencede réglementation spécifique permet aux

éditeurs, aux bibliothèques et aux autres

organismes universitaires de procéder àdes expériences sur la consultation élec-tronique de documents, généralementdans le cadre d'accords écrits.

Les détenteurs des droits d'auteur sem-blent encore loin de poursuivre en justiceles bibliothèques et les écoles. Les scien-tifiques ou les enseignants qui créent despages web sont parfois, formellement,dans l'illégalité, mais ils sont rarementpoursuivis. Et s'ils l'étaient plus qu'au-

jourd'hui, l'avenir de la distribution élec-tronique de l'information s'assombrirait.

Pour de nombreux participants desgroupes informels de discussion, lesdésaccords méritent d'être entretenus.Beaucoup pensent que la technique n'estpas suffisamment au point pour que l'onétablisse des directives claires sur lanotion d'usage loyal. Ils rechignent à

faire des recommandations législativestant que toutes les implications ne sontpas claires. Il faudra encore attendrepour parvenir à un compromis accep-table sur la notion d'usage privé.

Malgré toutes les critiques que certainsaspects du rapport Lehman ont suscitées.un certain consensus existe. Dans de

nombreux cas. les réactions provoquéespar les recommandai ions ne concer-naient pas leur adéquation au fond duproblème, mais jusqu'à quel point ellesdevaient être codifiées dans les textes deloi. Si presque tout le monde juge illicitele piratage des programmes conçus pourempêcher la copie d'une œuvre, lesseules questions posées concernaientl'étendue des sanctions encourues pource délit et la possibilité de présumerl'existence d'une faute.

De même, à l'exception de la petiteminorité qui refuse les droits d'auteur surInternet, tout le inonde s'accorde àreconnaître qu'il est urgent de mieuxinformer les citoyens sur leurs obliga-

C POUR LA SCIENCE . N* 227 SEPTEMBRE 19%

« LES DROITS D'AUTEUR DES ŒUVRES NUMÉRIQUES »

lions face à la loi. A une époque où cha-cun est un éditeur potentiel pourvu qu'ilpossède un ordinateur et un modem, lestextes qui régissaient le comportementde quelques entreprises s'appliqueront àdes millions de personnes.

La prochaine loi sur la protection desdroits d'auteur déterminera l'avenir destechniques d'information. La puissance

de ces nouvelles techniques bouleverseles habitudes de travail du monde créatif

et les moyens par lesquels les auteurs etles éditeurs publient les œuvres. Peut-on

simultanément satisfaire les utilisateurs.qui veulent accéder simplement à uneinformation bon marché, et les auteurs etéditeurs, qui entendent tirer des publica-tions les moyens honorables de leur sub-sistance ? Nous devons agir sagementpour que tous les acteurs et les utilisa-teurs des nouvelles techniques profitentde la révolution de l'information.

Ann OKERSON, bibliothécaire adjointede l'université de Yalc, travaille sur laconsultation électronique des ouvrages.

B. EDELMAN, La propriété littéraire et

artistique. Coll. «Que sais-je?», PUF.

A. LUCAS, Propriété littéraire et artis-tique. Coll. «Connaissance du droit»,

Dalloz, 1994.

P. SIRINELLI, Industries culturelles etnouvelles techniques. Rapport deCommission, ministère de la Culture etde la Erancophonie/La Documentation

Française, 1994.

O. ITEANU, Internet et le droit. Aspectsjuridiques du commerce électronique,Eyrolles. 1996.

P. GOLDSTEIN, Copyright'.* Higliway :From Gutenherg tu Ihe CelestîalJukebox, Hill and Wang. 1994.

Pour plus d'informations sur les loisaméricaines concernant les droits d'au-teur :h t t p : / / w w w . l i b r a r y . y a l e . e d u /okerson/copyproj.html

Légendes des illustrations

(non reproduites)

1. DANS LI-S UHRAIRIES I-T LI-.S Bllil IOTIII (Jl I S.

un admet la consultation gratuite desouvrages. Des modifications de In loi sur laprotection des droits d'auteur limiteraient lespossibilités analogues d'exploration électro-nique el pourraient même les inlcrdirc. saufaprès oblcntion d'un accord préalable. Bienqu'il paraisse improbable qu'un éditeur inlcr-disc complèiement aux utilisateurs de se pro-mener dans leur calaloguc de publications, lesauteurs craigncn! qu'une ouverture même par-tielle ne les pénalise.

2. Dt:. NUMRRHJSFS COP1KS D'i'N TI.XT1- IW'OH-MArigui sont parfois réalisées lors de sontransfert entre deux sites du réseau Internet. Ilarrive, par exemple, qu'un fichier traverse 13ordinateurs dilTéreiits, d'un silc de Fobscrvi-toire de Meudon jusqu'à un ordinateur situé àSophia-Antipolis (identifies par leur nom etleur localisation approximative) lors de sonparcours. Certains spécialistes des droitsd'auteur estiment que chaque copie ne peutêtre créée qu'après accord du détenteur desdroits. Dans l'état actuel de la loi. les proprié-taires de toutes les machines intermédiairespeuvent être tenus pour responsables de louteviolation de la loi.

3. À (JUI APPARni-.NNI-.NT I CS Ml >R( I AL 'X '.* Les

créations multimédias sont composées detextes, d'images et de sons d'origines diver-ses. Ainsi une fiagc web peut-elle appartenir àplusieurs propriétaires. Les problcmes*de pro-priété et de rétribution sont alors compliqués,ec qui peut mettre en danger la création.

«POl'R LA SCIENCE . N° 227 SrPThMBRf IWh

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ANNEXE 1 - TEXTES ET ARTICLES

Didier Dubrana. — Haute tension sous les lignes. — Science & Vie.février 1993.

HAUTE TENSIONSOUS LES LIGNESLes lignes à haute tension provoquent-elles des cancers ?Cette question tourne à l'obsession chez les habitantsde certains villages de France, dominés par des lignesvéhiculant 400 000 volts. Elle est prise très au sérieuxpar des scientifiques suédois et canadiens. Deux rapportsimportants viennent d'être publiés à Stockholm à cesujet, un troisième au Québec. La diffusion des résultatsd'une enquête franco-canadienne a été retardée. Leproblème semble même plus vaste, puisque certainsmettent en cause les champs électromagnétiques émanantdes appareils électroménagers.

P sychose à Coutiches. Ce villagede 2 000 habitants, situé àvingt-cinq kilomètres de Lille,

vit dans la hantise de la nouvelle ligneà très haute tension (deux fois 400 000volts) installée en 199l par EDF. Celteligne passe à moins de 120 mètresd'une zone habitée, et certains câblespendent même à moins de 10 mètres(nous l'avons vérifié) au-dessus de lachambre des enfants de la familleRyckcbusch. « Les grésillements de laligne sont insupportables ! »,s'exclame Michel Ryckebusch. « Etlorsque le vent souffle dans les câbles,leur vrombissement est comparable àcelui d'un avion survolant le village.On ne dort plus ». Il y a plus grave :

tous les Coutichois ont entendu parlerde ces inquiétantes enquêtes épidé-miologiques sur l 'augmentation dunombre de cancers chez les « riverainsdes lignes électriques» et tout parti-culièrement chez les enfants.Les médecins ont constaté des casd'ec/éma et d'insomnie, et le malaisegagne la campagne Certains parentsconsignent leurs enfants dans les mai-sons tandis que les familles les plusinquiètes envoient leur progéniture auloin. Le père du petit Antoine a mêmedéplacé le lit de son enfant : en effet,celui-ci se trouvait dans la partie de fapièce la plus exposée aux champsélectromagnétiques produits par laligne qui surplombe la maison. « Mon

« HAUTE TENSION sous LES LIGNES »

enfant dort dans un champ électroma-gnétique d'une valeur de 27 mîlligauss,alors que. d'après les enquêtes cpidé-miologiques, les risques de leucémieapparaissent lors d'expositions chro-niques à un champ de 3 mil l igauss ! »,s'alarme Michel Ryckebusch. Penduen haut d'un poteau électrique, unmannequin de chiffon se balance dansle vent glacial qui balaye les rues deCoutiches. Sur son torse, un slogan àl'encre rouge résume le sentiment deshabitants : « Cobaye d'HDF ».

Mais, du côté du monopole public,l 'affaire est entendue : « La ligne àhaute tension ne sera pas déplacéepuisqu'il n'y a aucun risque pour lasanté». Directeur du comité des étu-des médicales d'F.DF, Jacques Lam-brozo lance : « Ceux qui veulent partirpeuvent le faire puisque EDF s'engageà acheter leur maison ». El il ironise :« L'un des habitants vivant sous laligne a même proposé que nous ache-tions sa maison pour la lui relouerensuite. Preuve qu'il n'a pas aussi peurque ça pour la santé de ses enfants... »Une brèche a cependant été ouvertedans le système de défense de l'entre-prise : « Les habitants de Coutichesont obtenu, pour la première fois enFrance, qu'un suivi médical soit réaliséauprès des 65 familles vivant dans uncouloir de 250 mètres de part et d'autrede la l igne» , indique Michel Loscto,de SOS Environnement, l'associationluttant pour le déplacement de la ligneEDF. Ce protocole d'accord, cosigné le29 jui l le t I991 par EDF, la municipa-l i té et SOS Environnement, intéresseI I O volontaires qui seront soumis àdes examens sanguins et urinaires tousles six mois. Mais, en dépit de ses en-gagements, EDF retarde la mise enplace de ce suivi médical : aucun pré-lèvement sanguin n'a encore été fait...

La révolte coutichoise n'est pasisolée. La France est parcourue d'unevague de protestations contre leslignes à haute tension. Dans pas moinsde 26 « points chauds ». des Françaiss'opposent à EDF. Alors, oui ou non,l'électricité est-elle dangereuse pour lasanté ?

Si l'on en croit une récente enquêteépidémiologique publiée par le célèbreinst i tu t Karolinsk», de Stockholm, laréponse ne peut être aussi tranchée,mais il y a de quoi s'inquiéter ( l ).Cette enquête, dirigée par MariaFeychting et Anders Ahltoni, concer-nait un demi-mill ion de personnes(436 503 exactement) dont le pointcommun était de résider à moins de300 m d'une ligne à haute tension entre1960 et 1985. Toutes ces personnesavaient moins de 70 ans. Les cher-cheurs ont calculé la dose moyenneannuelle d'exposition à laquelle a étésoumis chaque résident. Pour cela, il afallu tout d'abord mesurer la distanceentre les habitations et les lignes àhaute tension. En effet, la valeur duchamp électromagnétique diminue enfonction du carré de la résistance. Parexemple, sous une ligne de 400 000volts dans laquelle passe un courantd'une intensité de 2 000 ampères, lavaleur du champ est de 130 mîlligauss(mG). À 30 m de la ligne, le champ estde 80 mG et à 200 m. de 1 mG (soitencore 5 fois plus important que lechamp magnétique naturel moyen).Comme la valeur du champ varie avecl'intensité du courant passant dans laligne, les chercheurs ont demandé auxcompagnies électriques de leur fournirle relevé quotidien de l'intensité ducourant circulant dans chaque lignependant toute la période d'étude : ilsont donc pu calculer pour chaque jourde l'année, pendant vingt-cinq ans, lavaleur du champ émis par ces lignes.

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ANNEXE 1 - TEXTES ET ARTICLES

Enfin, en reconstituant l'historique dutemps approximatif passe à son domi-cile par chaque habitant, Feychtung etAhlbom ont défini la dose moyenneannuelle reçue.Quatre fois plus de risques de déve-lopper une leucémie, c'est ce qu'en-courent, d'après les résultats de cetteétude, les enfants de moins de 15 ansvivant dans les maisons exposées à unedose de radiations électromagnétiquesde 3 mG. Même à 2 mO, le risque esttriplé : l'incidence de la maladie, quiest normalement de 1 sur 20 000, pas-serait à 3,8. Il faut descendre à 1 mGpour retrouver l'incidence normale.Les chercheurs n'ont, en revanche,trouvé aucune preuve d'une menaceaccrue de cancer chez les adultes. Pourl'épidémiologiste Michel Goldberg.directeur de l'unité 88 de l'INSERM,« sur le plan méthodologique, c'estl'enquête épidémiologique la plusconvaincante jamais publiée à ce joursur ce sujet. » Pour la première fois, lesépidémiotogistes établissent un lienentre la dose du champ électromagné-tique et son effet sur la santé.

L'enquête suédoise est évidemmentcontestée. En effet, la corrélation entreles cancers et l'exposition aux ondesélectromagnétiques n'existe que chezles personnes vivant dans des pavil-lons. Feychting et Ahlbom n'ont puprouver ce lien pour les familles vivantdans des appartements. Pourquoi ? Lesdeux chercheurs devraient répondre àcette question dans une prochainepublication. À l'INSERM, MichelGolberg avance une hypothèse : « Lespavillons étudiés sont à la campagne,les appartements en ville. Or, enmilieu urbain, la variabilité du champélectromagnétique est très grande,compte tenu des nombreuses sourcesd'émission ; ce qui brouille d'autant laprécision des mesures d'exposition

dans chaque résidence et de surcroît,les données statistiques recueillies.Ainsi, cette imprécision pourrait expli-quer l'absence de corrélation entrel'exposition des appartements et l'ap-parition des leucémies ». Autre hypo-thèse : les matériaux de constructiondes appartements pourraient faireécran aux champs électromagnétiques.

Voilà près d'un siècle que les cher-cheurs s'affrontent sur la question del'impact des champs électromagnéti-ques sur la santé.La polémique, elle, démarre en1979, lors de la publication d'uneenquête de deux sociologues améri-cains de l'université du Colorado.Nancy Werthcimcr et Ed Leeper. Ilsavancent que les enfants de la régionde Denvcr habitant près des réseaux dedistribution électrique (lignes et trans-formateurs) courraient deux fois plusde risques de mourir de leucémie.Depuis, bien d'autres enquêtes sontvenues confirmer ou infirmer cesconclusions. En 1986, l'enquête menéepar le Suédois Lcnnart Tomcnius,médecin épidêmiologislc de Stock-holm, constate un accroissement dunombre des tumeurs du système ner-veux chez les enfants habitant dans desmaisons situées près d'installationsélectriques. Mais, un an plus tôt. l'An-glais Alan Myers, biologiste à l'univer-sité de Leeds, avait déclaré, au termed'une étude portant sur 339 cas de can-cer chez des enfants de moins de 15ans, « ne pas observer d'associationsignificative entre la proximité desmaisons avec les lignes de transportélectrique et le risque de cancer ».Version nouvelle de l'adage ancien,« Hippocratc dit oui, mais Galicn ditnon ».

Néanmoins, les récentes conclusionsde l'institut Karolinska sont prises ausérieux par le gouvernement suédois.

« HAUTE TENSION sous LES LIGNES »

qui envisage d'établir des normesd'exposition aux champs électroma-gnétiques. Car, pour l'instant, iln'existe aucune norme inlcrnalionalc,ni nationale. Les seules données en lamatière sont les seuils maximum d'ex-position - très élevés - conseillés parl'International Radiation ProtectionAssociation et l'Organisation mondialede la santé. Les seuils considérés sontde 5 000 mG par jour en milieu pro-fessionnel, et de I 000 mG par jourpour l'ensemble de la population. Bienqu'aucun riverain d'une ligne à hautetension ne reçoive de telles doses, lesSuédois sont suffisamment impres-sionnés par l'enquête de l'institutKarolinska pour entreprendre une car-tographie des écoles se situant près deslignes à haute tension en vue de sur-veiller la santé des écoliers.

11 faut dire que les résultats de cetteenquête viennent à l'appui des conclu-sions d'une autre étude émanant, elle,de l'institut national suédois de méde-cine du travail, qui dénonce l'augmen-tation du nombre de leucémies chroni-ques lymphocytaircs che/. les travail-leurs exposés aux champs électroma-gnétiques (2). Cependant, cette en-quête, qui portait sur l'observation de250 cas de leucémie et 261 cas de can-cer du cerveau survenus entre 1983 et1987 dans deux régions de Suède n'apas permis de définir un niveau cri-tique.De l'autre côté de l'Atlantique, legouvernement du Québec a demandé,en 1989. la mise en place d'un comiléde suivi des études sur les effets deslignes à haute tension sur la santé.Lequel n commandé un rapportcomplet sur l'état Oc touics lesrecherches scientifiques e 11 cet néesdans ce domaine. Dans ce rapport,public en janvier 1991. GillesThériault, directeur de l'Ecole de santé

au travail, de l'université Mac Gili àMontréal, conclut en ces termes (enfrançais du Québec) : « Même si lesévidences associant les excès de can-cer à l'exposition aux champs électro-magnétiques ne sont pas encore trèssolides, il faut reconnaître que leséludes les plus récentes et souvent lesplus perfectionnées n'ont pas contreditles premières effectuées sur le sujet.Les dernières études réalisées en labo-ratoire sur la cellule et l'animal ontaussi renforce la plausîbilité de telseffets. Il n'y a donc pas certituded'effets cancérigènes mais possibilitéde tels effets, particulièrement chez lesenfants et les travailleurs ». Publiésous l'autorité du département de santécommunautaire du centre hospitalierde l'université Laval, ce rapport jetteun discrédit supplémentaire sur lescertitudes affichées par le servicemédical d'EDF.

D'autant que Gilles Thériault n'estautre que le coordinateur d'une autreenquête lancée conjointement par EDFet deux compagnies d'électricité cana-diennes (Ontario-Hydro et Hydro-Québec) pour connaître l'impact deschamps électromagnétiques sur lasanté des iravailleurs de l'électricité.Nous avions évoqué cette étude il y atrois ans (3). Les résultats auraient dûêtre publiés en 1991. On nous assureaujourd'hui qu'ils seront renduspublics vers le mois de juin prochain...Cette enquête, effectuée sur un échan-tillon de 150 000 personnes, devaitdire si l'exposition des travailleurs auxondes électromagnétiques des lignesélectriques augmente le risque de can-cer. En France, il s'agit, bien entendu.des salariés d'EDF.

Comme le montre le rapport cana-dien, nombre de systèmes biologiquessont effectivement modifiés parl'exposition à des champs électroma-

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ANNEXE 1 - TEXTES ET ARTICLES

gnétiques. Ainsi, ces derniers modifie-raient la perméabilité de la membranecellulaire aux ions calcium, ce quipourrait entraîner une modificalion dela synthèse protéique. Par ailleurs, enI983 et I988, l'équipe américaine deDaniel Lyle, de la Food and DrugAdministration (4), a mis en évidence,chez la souris, une diminution del'efficacité du système immunitaireproportionnelle à l'intensité du champélectromagnétique. Lyle constate unediminution de la cytotoxicité des lym-phocytes T, cette variété de globulesblancs qui attaque les antigènes et cer-taines cellules cancéreuses. Il sembleque les champs électromagnétiques nesoient pas directement mutagènes. Enrevanche, ils pourraient stimuler uncancer latent. En effet, on constate uneaugmentation de la concentrationd'une enzyme, l 'ornithine décarboxy-lase, dans les cellules humaines expo-sées aux champs (5). Or, cette enzymejoue un rôle dans la croissance cellu-laire. L'augmentation de sa productionpourrait stimuler les cellules cancé-reuses.

Récemment, l'attention des cher-cheurs s'est centrée sur une petiteglande située à la partie postérieure dutronc cérébral, en avant du cervelet : laglande pînéalc . Celle-ci produitnotamment la mélatonine. Cette hor-mone est sécrétée la nuit, avec un picmaximal entre minui t et 4 heures dumatin. La glande s'arrête de sécréter lejour lorsque la lumière imprègne larétine. Ainsi la production de cettehormone suit fidèlement le rythme desjours et des nuits au gré des saisons, enréglant les rythmes circadiens, c'est-à-dire les cycles de sommeil, les cycleshormonaux, etc. Or, d'après les récen-tes expériences réalisées sur les ratspar Russel Reitcr, professeur de neuro-endocrinologie au centre scientifique

de santé de l'université du Texas à SanAntonio, les champs électromagnéti-ques auraient le même effet que lalumière : ils entraveraient la sécrétionde mélatonine, ce qui entraînerait unemodification des rythmes biologiques,Cette diminut ion de la sécrétion demélatonine pourrait être responsablede défaillances immunitaires, d'insom-nies ou de changements d'humeur.Reitcr va plus loin : « Si, comme celaest suggéré, l'exposition aux champsélectromagnétiques est associée àl'apparition de cancers, cela peut êtrela conséquence de la réduction de pro-duction de mélatonine ».

Il faut se rendre à l'évidence : lesoupçon que les ondes électromagné-tiques sont capables de nuire à la santése renforce au fil des enquêtes et desexpérimentations, Didier Dubrana

( I ) Magne/if ficld ami cant'ff in peoplt rfxiding

ni-ar .Vim/n/r high voilage />rtuvr ltin-\,Stockholm. IW2.

(2) FkxJerus B.. Onii/'alitinol ev/w.ture ll> flec~

triimagnetic /ields in relaliiin ta leiikcmia arul

hmin lumnrs. Départirent nf Ncwonicdccine,

National Insiitulc of Occupât ion al Health. Solna,

Sweden, I992.

(3) Voir .ScKror.s <! lïc, n° K68, p. 40.

(4) Lyle PD. et al.. « Suppression of T-lymphocy-

tc cytotoxicily fullowing exposurc lo smusoidally

ampli lutte-modulaicd filcds >.. Bioctectm-magneiwa. vol. 4. p. 303-313. 1983.

(5J Gain CD. fiai. « Efforts nf M) M? fiekls im

ornithinc dccarhoxyfase aclivily in hone cclls and

fibroblasls », Cnniractor'x Review Mi't'ling.

DOE/EPKI, Dcnver. novembre I9K6.

O Science & Vie, 1993

« HAUTE TENSION sous LES LIGNES »

Légendes des illustrations(non reproduites)

Seront-ils malades demain fC'est en (oui cas ce que craignent les habi-tants de Coutiches, petil village du Nordqui vit sous un treillis de lignes à haute ten-sion. 1:I)F s'est engagée à mettre sur piedun suivi médical des 65 familles les plusconcernées, A ce jmir. aucune prise tic sang

n'a encore été faite...

Maléfiques, les baguettes de la fée Elec-

tricité 1Sous une ligne à très haute tension, lechamp électrique est tellement élevé qu' i lgénère une différence de potentiel entre laligne et le sol suffisante pour allumer untube à néon tenu à bout de bras - commel'ont vérifie les habitants du village deBorrowby. dans le Yorkshire «.irandc-Fïrclagnc). À Cmitichcs, on vit en perma-

nence sous un tel champ.

l :i tension moineSur 26 sites accueillant des lignes de hauteou très haute tension, des associations deprotection de l'environnement accusentLDF de « détruire le paysage » (pylônes

verts sur la carte) ou de mettre en péril lasanté des habitants (pylônes rouges).

Un métier à risquesLes travailleurs de l'électricité sont-ils par-ticulièrement exposes aux risques de can-cer '? Une enquête cpidémiologique, réali-sée par EDF et deux compagnies d'électri-cité canadiennes, devrait répondre à cettequcsiion. Mais sa publication, annoncéepour 1991, a déjà été rcpoussée à juin

1993...

Les champs des lignesLorsqu'un courant électrique passe dans unfil, il produit un champ électrique cl un

champ magnétique. L'association de cesdeux champs orthogonaux crée ce que l'onappelle un champ électromagnétique.Unfin, le passage du courant génère un

« effet couronne ».Le champ électrique naît de l'écart depotentiel entre le conducteur et le milieuenvironnant. Ce champ est proportionnel àla tension de la ligne. Il s'exprime en voltspar mètre. Son intensité au sol dépend prin-cipalement de la tension et de la hauteurde la ligne. Il est modifie par n'importe quelobjet conducteur, de la végétation auxbâtiments en passant par les accidents de

terrain.Le champ magnétique apparaît lors du pas-sage du courant dans un conducteur. Hdépend de l'intensité de ce courant et de ladistance au conducteur. L'induction magné-tique lice au champ qui traverse un milieude perméabilité donnée s'exprime habituel-lement en gauss ou en lesla (un tcsla égale104 gauss). Mais l'unité légale d'intensitéde champ magnétique dans le systèmeinternational est l'ampère par mètre.Le champ magnétique traverse sans êtremodifié tous les corps organiques (bois,feuille, peau, etc.), une grande partie desroches (pierre, brique, ciment, de.) et laplupart des métaux. En revanche, il estmodifié par les métaux dit ferromagné-tiques (fer, nickel, cobalt) et par beaucoupde leurs alliages (aciers simples, aciersinox, céramiques dites ferrites, etc.).L'effet couronne est dû à un faible passagedu courant à travers l'air, qui s'ionise sousl'action du champ électrique exisiant entredeux fils d'une ligne à haute tension. Cepassage s'accompagne d'une luminescencede l'air, qui peut, alors, s'étaler en trailslumineux ramifiés. Ces derniers sont res-ponsables du brui t de friture caractéristiquedes lignes à haute tension.

Page 135: Analyse Documentaire_suzanne Waller

ANNEXE 2CORRIGÉS DES EXERCICES

CHAPITRE 1

Exercice n° 1 : Résumé de l'article « Les effets violents de la télé-

vision »

La correction en sera faite au fur et à mesure de l'utilisation de cetexte dans différents chapitres.

CHAPITRE 2

Exercice n° 3 : Caractéristiques d'un document

Questions concernant la revue :

•Quelle est son ancienneté? Fondée en 1932, donc durable etstable puisqu'elle en est, en 1994, à son cinquième directeur ensoixante-deux ans.

• Quelle est sa périodicité ? On peut supposer une périodicitémensuelle, à partir de la date indiquée : juillet 1994.

• Quel est son financement ? Impossible à déduire des éléments enprésence.

• Quelle est son origine éditoriale ? L'adresse dit peu ; on peuttoutefois évacuer des éditeurs officiels (ministère, municipalité...).

• Quelle est son orientation ? Le nom d'Emmanuel Meunier devraitmettre sur la piste du mouvement personnaliste...

Page 136: Analyse Documentaire_suzanne Waller

ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES

L'ancienneté, l'importance du comité de rédaction, quelques nomspeut-être reconnus par d'anciens étudiants (D. Bourg, P. Lévy), deslecteurs du Monde ou des auditeurs de France-Culture (B. Perret, V.Nahoum-Grappe, G. Vigarello, M. Lazar, J.-P.Domecq, etc.), lapériodicité mensuelle, le nombre de références bibliographiquesfont pencher pour une revue d'étude et de recherche, plutôtorientée vers les sciences humaines.

Questions concernant l'auteur : « Qui est fauteur ? »

• Elle ne fait pas partie du comité de rédaction.

• Quatre références (sur 17) sont signées de son nom; la plusancienne date de 1981.

• Elle a participé à un colloque (réf. n° 2) sur la petite enfance.

On peut donc la considérer comme ayant déjà traité et étudié lesujet. Un auteur confirmé écrivant dans une revue d'étude laissepenser que l'article n'avance pas d'idées non argumentées.

Cette étude des caractéristiques fait pencher la balance pour lasélection de l'article. C'est une première façon de valider l'infor-mation, avant même d'avoir pris connaissance du contenu.

Exercice n° 5 : Repérage visuel à l'aide des signes typographiques

Quatre points d'interrogation devant être immédiatement vuspermettent de poser des hypothèses de contenu. La lecturedocumentaire est sous-tendue par une recherche de ces quatreparties.

La rapidité est essentielle pour donner à cet exercice son impact. Ànouveau, il s'agit de regarder et non pas de lire. La façon de fairehabituelle va rendre hésitants les lecteurs chercheurs de sens, alorsque l'habitude du repérage visuel permet, d'un seul regard, departir à la recherche de ces quatre parties, en rendant le survoldynamique.

ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES

Naturellement, on ne peut jamais faire une confiance totale auxauteurs... Il ne s'agit pas de dire ici que ce chapitre comporteautomatiquement 4 parties, mais que le survol n'est plus linéairemais actif, et que l'analyste se met en position de questionnement.Un texte ne répond que si on l'interroge (cf. chapitre 111).

CHAPITRE 3

Exercice n° 6 : Les textes et leurs caractéristiques

6.1. Extrait de Roger Caillots : type descriptif, éventuellementexplicatif ou didactique. Certaines expressions — « le caractère quile discrédite le plus », « distraction vaine » — peuvent induire uneautre orientation et servir d'arguments pour juger ce texte problé-matique. Ceux-ci s'effacent dès que l'on se trouve devant un texte

véritablement problématique.

6.2. Extraits des discours de Maurice Barrés et d'Aristide Briand : cesdeux textes sont de type polémique. Le choix est révélateur desoptions personnelles : si un texte est jugé polémique, l'autre estalors purement explicatif... C'est un bon miroir de la lecture

subjective.

6.3. Extrait de Samivel : de type problématique (ou argumentatifpour qui connaît l'auteur). Si le choix a été « polémique », celasignifie que ce texte a servi d'exutoire aux textes précédents !

6.4. Le texte de L. Lurcat est de type problématique.

Cet exercice a pour but d'insister sur la différence entre textesdescriptif et problématique, sachant que ce dernier engage lelecteur de façon personnelle. Le reconnaître permet de se'mettreen éveil vis-à-vis de soi-même, première étape de la lutte contre la

subjectivité.

Page 137: Analyse Documentaire_suzanne Waller

ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES

Exercice n° 7 : Lecture documentaire d'un article

7. /. « Les effets violents de la télévision »

Par repérage visuel, on a déjà remarqué le sous-titre et lesorientations de l'auteur à travers les références bibliographiques(cf. exercice du chapitre n).

Les deux premières phrases du 1Fr paragraphe introduisent tout desuite l'idée : télévision = images = illusion du monde. Les deux der-nières complètent l'idée paradoxale : illusion pour les téléspectateursde se rapprocher de la réalité, alors qu'ils en sont séparés, coupés.

Le 2F paragraphe est une illustration par une citation.

Le 3e paragraphe apporte une idée supplémentaire : habitude decroire, plutôt que d'analyser et chercher à comprendre.

La densité du texte laisse supposer qu'il faudra lire aussi le 4*paragraphe pour délimiter vraiment le propos de l'auteur ; mais enfeuilletant, on verra qu'il y a trois sous-titres et qu'en particulier ladeuxième partie courte (« Effets mimétiques et actes suggérés »)peut être éventuellement une partie de transition ; en lisant rapi-dement, on découvre alors que ce paragraphe central est le pivotde l'article : « On peut comprendre l'action de la télévision avec leséléments dont nous disposons à présent : premièrement... deuxiè-mement... troisièmement... »

On verra plus tard comment aller encore plus loin dans la structu-ration de cet article, et comment, par la lecture des 3 ou 4 premiersparagraphes, on devine déjà comment lire de façondocumentaire — ce texte en vue de l'analyser.

7.2. « Les droits d'auteur des œuvres numériques »

Le 1er paragraphe raconte une histoire sur une « belle histoire ». Le2* paragraphe fait de même à propos d'une moins belle histoire.

Ces deux premiers paragraphes d'illustration posent le problèmedes droits d'auteur appliqués aux œuvres numériques : ils dévelop-pent le titre en mettant immédiatement le lecteur dans le sujet.

ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES

Le 3r paragraphe rappelle l'exercice sur la ponctuation. Il y a 4points d'interrogation : il reste à vérifier si les réponses sontdonnées dans le corps de l'article.

Même si Pour la Science est une excellente revue de vulgarisationscientifique, son objectif est davantage grand public que la revueEsprit, d'où l'accroche des paragraphes initiaux qui, indéniable-ment, mettent rapidement le lecteur sur la voie de ou des idéesdirectrices (l'article entier sert d'exercice au cours du chapitre vu).

EXERCICE N° 8 : LECTURE DOCUMENTAIRE DE MONOGRAPHIES

8.1 Premier extrait :

Titre : Gros temps sur la planèteAuteurs : Ce que nous dit la 4e page de couverture :Jean-Claude Duplessy Géochimiste, dirige un laboratoire mixte

du CNRS et du CEA à G if-sur-Yvette dontles recherches en paléoclimatologie fontmondialement autorité.

Pierre Morel Professeur à l'université Pierre-et-Marie-Curie de Paris, fondateur du Laboratoirede météorologie dynamique (CNRS) etsecrétaire du Programme mondial derecherche sur le climat.

Éditeurs : Odile Jacob et SeuilDate : 1990Collection : « Points », série Odile Jacob

L'affiliation des auteurs, la notoriété de l'éditeur et le sérieuxhabituel de la collection contredisent le caractère fantaisiste dutitre ; cela nous engage à aller plus loin et à regarder la table desmatières ; les 9 chapitres sont entièrement consacrés à l'étudedu climat et de son environnement.

Page 138: Analyse Documentaire_suzanne Waller

ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES

Le domaine étant défini, déjà induit par la personnalité desauteurs, l'avant-propos composé de 6 paragraphes introduit lecontenu et expose les intentions des auteurs :1" et 2* § : contexte du sujet : quelle représentation est donnée,dans l'histoire et par les médias, de la dégradation de l'environ-nement ?

3e, 4e et 5e § : amorce du contenu : place de la recherche scienti-fique face à ces propos

6e § : intentions des auteurs : les quatre dernières lignes,auxquelles on pourra ajouter les termes scientifiques de la tabledes matières, forment déjà un résumé documentaire possiblepour cet ouvrage.

8.2. Deuxième extrait :

Titre : Le grand remue-ménageSous-titre : La crise de la familleAuteur : Evelyne SullerotÉditeur : FayardDate: 1997

Même si l'on n'a pas la 4* page de couverture sous les yeux, onpeut prendre connaissance de fa bibliographie de l'auteur,presque entièrement consacrée à la sociologie de la femme, puisde la famille.

Le titre est une accroche sans aucun contenu informatif précis,mais le sous-titre indique que ce « remue-ménage » s'appliqueà la famille.

La table des matières, apparemment complète, est en faitdécevante si l'on cherche la logique de l'auteur ; trop détaillée,trop linéaire, elle n'aide pas à avoir un regard global surl'ensemble.

If faut donc lire l'avant-propos et en comparer la progressionavec celle de la table des matières.Ce texte sera repris au chapitre iv, pour en étudier la structu-ration.

ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES

8.3 Troisième extrait

Titre : La MéditerranéeSous-titre : L'espace et l'histoireAuteur et éditeur scientifique : Fernand BraudelÉditeur : FlammarionDate : 1985Collection : « Champs »

Les noms de Fernand Braudel et Georges Duby suffisent à situerle niveau du texte et le domaine dans lequel il s'inscrit. Le titreindique la Méditerranée à la fois dans son espace et son histoire.Le sommaire est aussi concis que celui de l'ouvrage précédentétait prolixe. Il faut donc lire l'avant-propos pour en savoir plus.Dès le 2e paragraphe, l'auteur annonce son intention : « ce quenous avons voulu tenter... ». Mais l'obstacle tient à la forme poé-tique, presque narrative, de ce texte pourtant lourd d'intentions.Les illustrations-exemples sont enchevêtrés avec les caractèrespurement informatifs. Ce texte est sûrement le plus long à appré-hender des trois, même si son thème peut sembler le plus attirant.

CHAPITRE 4

Exercice n° 9 : Structuration de textes et recherche de plans

Bien que les textes soient tous deux de type problématique, il estproposé une application de la grille problématique pour la mono-graphie et une application de la grille descriptive pour l'article. Plusque de corrections, il convient de parler de propositions de structu-ration. En effet, toutes les divergences sont acceptables, dans lamesure où l'on retrouve le même fil conducteur et les mêmesgrandes unités d'information — ou idées directrices.

9.1 « Le grand remue-ménage » et 9.2 « Les effets violents de latélévision » : voir pages suivantes.

Page 139: Analyse Documentaire_suzanne Waller

AVANT-PROPOS

Que nous soyons partisans de « la famille » au singulier ouJe nouvelles formes plurielles » des séquences de vie privée

pour le manage ou pour l'union libre, nous sommes tous nésd'un père et d'une mère et la plupart d'entre nous ont ou aurontdes enfants. Nous snmrn^ tous in^rin dans la rh^ ^,

Sénémlions qui se sont succédé durant ce dernier demi-siècleNous avons tous subi et nous avons tous fait l'histoire récente

; la famdle en France. Nous ne sommes eepenHant r»< #**.£Qrd sur ce que représente la famil le ici ei maintint à l'aubedu xxie siècle.

La famille est-elle, comme tendent à le prouver de très nom-breux sondages, la << valeur » |a pi..s apPrériéP ̂ v™^ de

toutes tendances polittques, leur !$&& contre la solitude leurtemearî contre les aléas de la vie, le but de leurs efforts quoti-JlenS' la Source prinrjpale de l?»r h»nheiir inriiviH.,»| ?

Ou bien la famille est-elle le cheval de Troie qui" ramène -fiEdajDQOL l'increvable survivance du pétainisme triom-

phant, la forme la plus pernicieuse de la mise au pa« H - r i n H ; .vidu qui y perd sa liberté, enchaîné par la marâtre Nature, soussa forme modernisée qu'est la génétique ?

C'est à peine, c'est tout juste s'il y a accord sur un diagnos-tic : la famille est m rrisp. Faut-il s'en lamenter ou s'en réjouir ?

INTRODUCTION : ON POSE UN PROBLÈME

• Constat

Problème

complété

1) représentation positive

2) représentation négative

(cf. sous-titre : « La crise de la famille »)

Dojt-on et peut-on permettre à la famille, cellule de basejjela_socjété. de se rétablir, pour éviter une implosion,? Ou bienla société francaise_gntre-t-elle_dans une nouvelle phase de ionorganisation qui se passera de ce groupe Intermédiaire entrel'individu et l'État, et faut-il _aijjer une_telle évolution^

On ne peut répondre à cette question, ni même faire un pro-nostic, sans envisager le passé récent et la manière dont se sontconstituées les familles dont nous sommes issus et celles quenous avons fondées ; sans analyser comment et pourquoi cer-taines ont duré, comment et pourquoi certaines ont éclaté, com-ment aujourd'hui se présentent celles qui vont aborder le sièclenouveau. Ppur_comprendre ces changements_gt leurs causes, ilfautjes replacer .dans la durée.

Composées d'individus et composant une société, les famillesforment un ensemble complexe auquel il faut réserver uneapproche systémique : on ne peut retracer leur histoire qu'enmultipliant les éclairages et en variant les angles de prise de vue.

Car la famille est un fait de nature et un fait de culture. Toutêtre humain a deux parents qui lui confèrent son identité biolo-gique. Les découvertes récentes de la génétique ont permisd'établir à la fois que chaque être est unique et qu'il existe desliens indéniables, inaltérables et infalsifiables entre père etenfant, entre mère et enfant, entre frères et sœurs. Ces lienssont indépendants de toutes formes institutionnelles comme lemariage ou l'adoption. Ils perdurent toute la vie. Mais la culturea entouré ces liens biologiques de relations fortes d'amour, detendresse, de fidélité, de protection, de responsabilité, de trans-mission, d'éducation qui donnent à la famille humaine sonincomparable richesse. Elle n'est pas seulement le cadre de lareproduction de l'espèce. Elle est un espace de culture et unvéhicule de la civilisation.

Formulation du problème

MÉTHODOLOGIE DE L'ETUDE

1) regard historique

2) regards multipleset approche systémique

, CORPS DE L'ÉTUDE, DÉVELOPPEMENTDU SUJET :1} Les changements intervenus dans la famillesous les aspects :

- biologique

- culturel

Page 140: Analyse Documentaire_suzanne Waller

Car la famille est affaire privée et affaire publique. Elle sesitue dans le champ de la vie privée de chacun, mais elle estobjet de politique pubfïque. Elle est concernée à la fois parl'histoire des dispositions protégeant l 'individu, sa sexualité, sesamours, son chez-soi, son histoire propre, ses secrets ; et parcelles qui intéressent le devenir collectif de la nation, sa popu-lation, la reproduction des générations, ou le vieillissement dela structure par âge, la protection et l'éducation des enfants etdes jeunes, les pensions de retraite des vieux, la répartition desaides sociales.

Procédant de la nature et de la culture, concernant l'individuprivé et le destin de la communauté nationale, la famille n'a paséchappé à l'institutionnalisation par le droit. Le droit a définil ' identitéjuridique de ses membres, leurs statuts, rôles, droits etdevoirs réciproques. Le droit a régi les unions et les désunions,les filiations, les transmissions des noms et des biens, enca-drant les naissances, les enfances, les amours et les décès. Ceslois ont été confrontées ces dernières années à des avancées dela science génétique et des techniques procréatiques. Elles ontdû s'adapter, ou elles ont vieilli, obsolètes.

On trouvera tout cela, entrelacé, interagissant, dans cette his-toire de la famille. D'abord, les évolutions démographiques ; lesfacteurs économiques, les attitudes face au travail, les modali-tés de la consommation ; mais aussi les opinions sur l'amour, lesexe, les hommes, les femmes, le mariage, l'union libre, laconception et la contraception, l'éducation des enfants, les rela-tions avec les parents qui ont accompagné ces évolutions, ainsique les mots nouveaux, le vocabulaire à la mode par lequel sesont exprimées les mentalités. On trouvera les réponses de la

- privé

- public

- juridique

démographique

économique

sociologique

société institutionnalisée, la libéralisation des lois régissant emariage la procréation, la f i l ia t ion, l'autorité parentale, ledivorce — et les crispations de certains juristes et magistratsdevant cei aggiornamento. On y trouvera aussi l'histoire de lagrande politique familiale française surgie de la Liberation,puis l'on verra s'affaiblir la volonté politique qui l'animait sediversifier et se dénaturer ses modes d'intervention, se dévalo-riser ses moyens.

Ces changements ne suffisent pas à eux seuls a expliquer lacrise que traverse aujourd'hui la famille. Il faudra égalementfaire entrer en scène les francs-tireurs puis les bataillons qui ontattaqué la famille : < l . i persifla^ innocent au terrorismej^cath- fffV", w Hpnifrreurs. les saboteurs bien places dansl'appareil d'Étgt lft« Hnrtrinaires aniifamilk. En face, il faudramentionner les reculades sans gloire et les indignations ineffi-caces des derniers fantassins familialistes. —À quoi tout cela mène-t-il ? Comment fera-t-on . ̂ _^f „ .;»,-L- hi.m-.ins pt sociaux des H':'S'""iLg™tions familiales .Iinancicrs, [imuania *.' j\fvi"f^ w *-m

Oue Dourractre

- politique

2) Les adversaires de la famille

démocratie d'indn id"* Hémnneclés

EN FORME DE CONCLUSION

les termes du problème

Page 141: Analyse Documentaire_suzanne Waller

ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES

Les effets violentsde la télévision TITRE GLOBAL

Les particularitésde la situation télévisuelle I. Première unité d'information

/. La télévision, introduit la viepublique au foyei so_us_ l_a_ formed'images. C'est à une forme transposéedu monde que les enfants accèdent : carla télévision n'est pas le monde, maisune illusion du monde dont on ne voitque des images ( 1 ). Ce tte _sorle_d' i nitja-tion s'accompagne d'un élojgngment duréej. En effet, le jeune enfant, spectateuret auditeur, est plongé dans une situationoù il se sert exclusivement de la vue etde l'ouïe. Ce rapport médiatisé aux élreset aux choses qu'imposé la télévisiondomestique, dès les débuts de l'exis-tence, a modifié les étapes de l ' ini t iat ion.C'est là le paradoxe de la situation télévi-suelle, elle donne l'illusion de rappro-cher les gens de la réalité, mais en fait,elle les sépare, elle les en coupe. Leraccord au réel nécessite l'activité,l'usage des cinq sens, l'action sur leschoses, et le rapport direct avec lesautres (2).

2. Daniel Boorstin a réservé unchapitre de sa vaste fresque Histoire desAméricains (3) aux transformationsapportées par la télévision, qu'il com-pare à un cataclysme modifiant progres-sivement le rapport à la réalité : « Latélévision a introduit un halo d'incer-titude autour de l'expérience quotidienne

1 . L, Lurçat. le Jeune Enfant devant /p.i apparencestélévisuelles, ESK. 1984.

2. L, Lurçal. « Imprégnation télévisuelle et altitudesscolaires», in le* ï-leauàfiiaméeFEwpt, actesdu coIlt-c/Hf, Nathan. 109],

3. D. Boorstin. Histair? des Américains, coll.« Rouquins », LalTont. .V partie, chapitre 44. 1991.

1.1

I 1

illustration par citation

ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES

[...]. L'expérience directe commençait àfaire défaut. [...] Dans ce supermarché,où se débitaient les succédanés del'expérience directe, les vieilles lignes dedémarcation s'effaçaient. [...] Une brumenouvelle, qu'aucune machine n'avait pujusqu'alors fabriquer, enveloppait l'uni-vers télévisé et finissait par envahir lemonde réel lui-même. Les Américainss'accoutumaient si bien à ce brouillard,ils se sentaient si à l'aise dans ce flou ras-surant, réconfortant, que la réalité elle-même, avec ses arêtes vives, les distinc-tions tranchées qu'elle opérait entre lesgens, les lieux, les dates et les conditionsmétéorologiques, f in issa i t par avoirquelque chose de vaguement irritant. »

3. Le rapport médiatise au réelfavorise l'habitude de croire plutôt qued'analyser et chercher à comprendre :l'image porte en elle sa propre crédibi-lité, sans que la référence à une quel-conque réalité extérieure soit nécessaire.La distinction entre le réel et l'imagi-naire, entre le vrai et le faux s'estompe.Flic n'est pas nécessaire pour la jouis-sance du téléspectateur, elle ne l'est pasnon plus intellectuellement, car l'attitudecritique n'est pas en éveil : on n'a pasbesoin de comprendre pour se laisserabsorber par l'image.

4. La télévision crée une ambiancefavorisant un unisson émotionnel (41.Elle a un effet puissant sur la sensibilité.Son impact émotionnel peut se com-prendre si l'on considère l'ensemble destéléspectateurs comme une fouleimmense, émiettée devant les écrans, etressentant simultanément les mêmesémotions, sans se connaître ni se ren-contrer, partageant les mêmes impliciteset les mêmes références. Le thème dessuggestions et des contagions dans les

1.2

1.3

illustrations

4. L. Lurçal, À tinq ans, seul avec Ciiiliiiirak, Syros.1981

Page 142: Analyse Documentaire_suzanne Waller

ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES

foutes et les publics a été traité au siècledernier et au début de ce siècle, princi-palement par des médecins commeLiébeault (5) et Bemheim (6), et desauteurs de formations variées, commeGustave Le Bon (7) et Tarde (8).

5, Georges Dumas est l'auteur d'unemise au point sur la contagion mentale(9). La contagion est un concept médi-cal : « La contagion est la transmissiond'une maladie d'un individu à un autrepar un contact immédiat ou médiat ».Quand il s'agit de faits psychologiques,on parle de contagion morale ou men-tale : « Le contact est immédiat quand lesuggestionné subit directement par lavue, l'ouïe ou par correspondance épisto-laire l'influence d'un contagionncur. Lecontact reste médiat lorsque l'influencenocive s'exerce par la voie de la presse etdu livre, comme il arrive souvent pour lacontagion de la morphinomanie. »

6. J'utilise personnellement le conceptde contagion émotionnelle (10) pourparler de l'action contagieuse de la télé-vision par le biais des émotions. Le lienentre l'émotion et la suggestion était bienconnu des savants qui ont utilisé l'hyp-nose, comme Pierre Janet ( M ) : « Quand

5. A. Liébe.iult, le Sommeil /rmvoqiic el les étatsanalogues. Octave Doin, 1989.

6. H. Bernheim, De la suggestion et de sesapplications à la fhàrnpeiilique. Octave Doin, 1891.

7. G. Le Bon, Psychologie des foules. 1983 (l'cd.1895).

8. C. Tarde. l'Opininn el h Foule, PUF. 1989 ( 1 " éd.1901)

9. G. Dumas, <i La contagion mentale ». Revuephilosophique. 36' année, t. LXXI. janvier-juin1911.

10. L. Lurçat. Violence à la lélé. L'enfant fasciné,Syros. 1989.

11. P Janet, De l'angoisse à l'extase, I. Il, FélixAlcan. 1928.

par références

par citations

1.3

reformulation

ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES

on étudie le mécanisme de la suggestion.on note toujours que l'émotion y joue ungrand rôle, et qu'il est utile d'émotionnerle sujet pour lui faire accepter unesuggestion. »

7. Si le rapport au réel est médiatisé,le vécu télévisuel engendre une conta-gion émotionnelle immédiate. C'est ainsiqu'on peut parler de la puissance d'actionde la télévision sur les émotions. Ellerend possibles les mimctismes ouimitations inconscientes et les imitationsconscientes induites par SJL puissancesuggestive. Tout ce qui est montré estimprégné d'émotions et rend crédiblesles informations mises en scène ou toutautre événement dont la présentationsemble objective et neutre. L'illusion devérité provient de l'illusion d'immé-diatcté de l'événement, accréditée par lacharge émotionnelle.

8. Cette puissance suggestive de latélévision est exploitée par la publicitétélévisuelle. Selon Guy Durandin (12),la publicité constitue une part impor-tante des ressources des médias : 40 % etplus pour un quotidien et jusqu'à 100 %pour une chaîne de télévision privée. Ledéveloppement de la science psycho-logique contemporaine, écrit-il, commela rcflexologie de Pavlov, la psychologiedes profondeurs, la psychanalyse desfoules, a suscité la mise en œuvre detechniques d'influence qui se voulaientscientifiques. Vancc Packardi (13) l'aremarquablement montré en analysantles travaux de ceux qu'il nomme lesgrands maîtres de la persuasion clandes-tine. La psychanalyse des foules, écrit-il.est devenue dans les campagnes depersuasion le fondement d'une industrie

1 2. ( i. Durandin. rinlnimatinii. In t)c.\tnf,irntulit>n cllu Kt'iililt; Puf. 1993.

1 .1. V Packard /»[I" cil. l'JSH).

c. PUF. I9H9

1.3

complément

illustré par exemple et citation

Page 143: Analyse Documentaire_suzanne Waller

ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES

puissanle dans le domaine commercialpuis dans le domaine politique, quandles partis ont fait appel aux « persua-deiirs » professionnels au moment del'élection présidentielle de 1956 auxÉtats-Unis. C'est toujours le mêmeprincipe : « On agit plus facilement surles attitudes des gens par leurs émotionsque par leur intelligence. »

9. C'est d'ailleurs Vance Packard qui lepremier a dénoncé l'usage des imagessubliminales. Il s'agit d'une stimulationsubconsciente ou subliminale, se situanten dessous du seuil de perceptionconsciente. Elle est fondée sur la décou-verte que le cerveau peut enregistrer desimages ultra-brèves et des sons murmu-rés sans que nous en ayons conscience.L'industrie publicitaire s'appuie en partiesur les travaux des hypnotiseurs. On peutlire dans la Revue de l'hypnotisme de1902 (14) une définition de l'hypnotismequi paraît très moderne : « L'hypnotismeest un nom pour un groupe de moyensempiriques par lesquels nous pouvonsarriver à prendre possession des facultéssubliminales. »

Effets mimétiques et actes suggérés

10. On peut cojnpiendre_ l'actionviolente de la télévision _avec JgsélémenlsjjoritngjjsjlisrjQsgns à présent :Premièrement, l'effel_de déréalisalionpar uj/apport-médiatisé an réel, permet-tant toutes sortes de confusions oud'amalgames en noyant les distinctionsindispensables à l'exercice du jugementrationnel. Deuxièmement, les conla-gions_parJ^aclJQn immédiate,des imageset de l'ambiance sur_lcs_ _érnoti.ons.

14, M Mangin, Le mécanisme de la suggestiond'après les travaux de F Myers de Cambridge. RenieJel'hypmriisme. 1902. p. 259,

rappel du titre principal

reformulation des § 1 à 9

ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES

Troisièmement, renforçant ces effets dela situation télévisuelle, la manipulationsophistiquée des désirs et des__mobiles.Cette manipulation utilise des tech-niques psychologiques induisant l'imi-tation automatique par l'action sub-consciente ou subliminale, et l'imitationplus ou moins consciente par lasuggestion.

//. Dans les débats sur la violence, on-attribuc parfois la responsabilité deseffets aux téléspectateurs, trop jeunes outrop impressionnables. La télévisionserait alors le révélateur de la faiblessehumaine et non l'inducteur d'effetsnéfastes, ce qui annule toute discussionsur les contenus. Il n'y aurait pys d'exem-ples suggestifs mais uniquement desgens fragiles qui devraient se connaîtrecomme tels, et fermer le poste. On metainsi de côte le rôle essentiel de l'imita-tion, en particulier aux âges sensibles del'enfance et, bien sûr, de tous les effetscalculés mis au point grâce aux métho-des sophistiquées de la manipulation dudésir.

12. Il nous faut comprendre,commentle spectacle de: la violence montré demanicrg_ répétitive peut déboucher surl'imilalionjmpulsivc. ou encore suggérerdes actes .violents réalisés de manièreconsciente^ c'est-à-dire provoquer l'imi-tation à ses, deux niveaux : l'imitationmimétique inconsciente d'elle-même, etl'imitation conscicntc-

introduction de la deuxièmeunité d'information

L'existence des effi'ts violents

13. L'augmentation des actes agressifset criminels, notamment chc/ les moinsde quinze ans. a clé observée très tôt auxEtats-Unis, en même temps que se géné-ralisait la télévision. Ce qui a étéconstamment discuté, et l'est encore,c'est la responsabilité de la télévision

Page 144: Analyse Documentaire_suzanne Waller

ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES

dans cette augmentation. Seuls les actesmimétiques qui décalquent des chosesvues à la télévision peuvent lui êtreimputés avec certitude.

14. Aux Etats-Unis, des enquêtesofficielles sont entreprises de manièrerégulière. C'est le secrétaire général à laSanté qui assure la publication desa Rapports sur la télévision et le com-portement social ». Déjà, en 1972,quatre sur les cinq volumes ainsi éditéssont consacrés à des études traitant deseffets des programmes de violence à tatélévision. Ils montrent notamment que,entre 1952 et 1972, selon les chiffres duFBI, le nombre des jeunes arrêtés pourdélits graves et violents a augmente deI 600 %. Cela correspond à la période aucours de laquelle la télévision a pris uneimportance croissante.

/5. Marie Winn, qui rapporte ces faitsdans son livre TV Drogue (15), écrit :« L'avènement de la télévision dans lesfoyers américains a amené la pire desépidémies de violence juvénile qu'ailconnu le pays. » L'aspect qui l'a spécia-lement frappée, c'est la transformationbrutale des enfants, passant soudaine-ment plus de trente heures par semaine àla télévision, première génération améri-caine d'enfants téléspectateurs. « Cettesituation estompe, écrit-elle, la diffé-rence entre rêve et réalité. » « C'estcomme si notre société avait engendréun nouveau type en la personne del'enfant meurtrier qui ne ressent aucunremords et qui est à peine conscient deses actes ». Marie Winn écrit encore :« Le facteur commun qui caractérise cesgosses changés qui tuent, qui torturent etqui violent, semble être une forme dedétachement émotionnel qui leur permetde commettre des crimes incroyables

15. M. Winn. Tl-'Drogue. Fleurus. 1979.

illustrations par enquêteset mesures...

ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES

avec une absence totale de sentiments« normaux » comme celui de culpabilitéet de remords ».

16. Des enquêtes plus récentes ontconfirmé ces analyses, avec toujours cesstatistiques inquiétantes sur l'augmen-tation de l'agressivité et de la cr iminal i tédes jeunes. Joshua Meyrowitz (H>) citelui aussi les chiffres du KBI. Entre 1951et 1981, on note les augmentations sui-vantes observées chez les moins dequinze ans : arrestations pour meurtre.500 % ; vols à main armée, I 750 % ;viols, 4 000 %.

17. La télévision exerce un effet defascination sur les jeunes enfants quid'ordinaire sont actifs cl. remuants. Elleles immobilise et ils demeurent captéspar elle. L'immobilisation favorise l'im-prégnation par ce qui est regardérégulièrement. L'imprégnation est unmode puissant d'apprentissage opérantsurtout dans les premières années de lavie, mais aussi dans toute situation où iln'est jas nécessaire de savoir qu'onapprend. La personne apprend sans lesavoir, ni par conséquent sans savoir cequ 'e l le apprend. La violence de lasituâtkjrj[télévisuelle se manifeste danscette sorte de capture de ccluLJjujregarde et qui ne peut se détacher sanscl ton l'ar l a '-eulu réception, i ls'imprègne alors de thèses auxquelles iln 'adhérerait pas nécessairement demanière volontaire. La télévision créeun état de réceptivité psychique spécialepar sa nature et par son prestige. Sonaction s'apparente à une suggestion

compléments :« suggestion »« imprégnation »

l 'reformulation...

16. J. Mi:yriiwit7. l'I-lnfanl uilutie cl l'iirlullc ,-n/tini

/.il III\H>II i A \s à l'i-n- ,li- lu ick-vi\um. in /r /Vi.\M-

fl \im awnir. A"ivui\ la tradition cl l'i'itM'i-

Vtit'metti. ccrm1 IL- Tcnt/iM tic lu réflexion, VI.

Gallimard, I<)K5

Page 145: Analyse Documentaire_suzanne Waller

ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES

18. Marie Winn parle d'état hypnoti-que chez ces enfants qui regardent silongtemps ta télévision. Elle parle d'unesorte d'extase. Selon nombre de parentsqu'elle a interviewés, l 'enfant paraitsombrer dans une « véritable catalep-sie ». Nous retrouvons là le vocabulairedes hypnotiseurs du siècle dernier.

19. C'est à la faveur de cette fascina-tion que peut jouer la charge émotion-nelle des productions aux effets calculés,ut i l i sant la vitesse et la violence pouraccrocher le téléspectateur. L'émotion aune grande force de contagion et l'enfantplus_que l'adulte_est la proie des conta-gions émotionnelles. À la télévision,c'est par le biaisdes contagions émotion-nelles que la violence agit, pouvantengendrer des mimétismes. On peutcomprendre ainsi les épidémies déclen-chées par certains spectacles ou certai-nes mises en scène des informations. Lesuicide mimétique à la télévision a éténommé effet Werther ( 1 7), La projectiondu fi lm Dci'r Hunier (« Voyage au boutde l'enfer »). qui comporte une séance deroulette russe, a poussé vingt-neuf jeu-nes Américains, âgés de 8 à 31 ans, à setirer une balle dans la tête.

20. Les effets de suggestion, indépen-damment de ceux obtenus par la publi-cité, sont parfois observés après coup,pour des séries qui, en elles-mêmes.paraissent de bonne qualité. Le dernierexemple connu est celui d'un jeunegarçon prénommé Romain qui a imitéMac Gyver donnant la recette réalisted'un explosif de fortune, mais très effi-cace, au point que lui et son camarade sesont tués. Dans ce cas, l'induction àl ' imitation est obtenue par la séductionqu'exercé le héros.

17. Appnx-hc fiillurcllc cî éducative <>i< finiMcme îlela violence. Conseil de l'Europe, document 5013-F.Slrashoiirgr I9R3.

... et illustrations

I 2

compléments« émotion »« mimétisme »

illustration

reformulation de 11.1

ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES

21. Les mimétismes s'observent chezl'homme et aussi chez l'animal, ce sontdonc des conduites archaïqucs. La sug-gestion est proprement humaine car ellepasse par le langage. À la télévision, il ya induction d'actes automatiques sousforme de mimétisme et d'imitation parsuggestion.

22. Il faudrait réfléchir à une déonto-logie des médias, en se basant sur unemeilleure connaissance des effets voulusou non voulus sur la sensibilité et sur lesconduites.

Lil iane Lurçat

CONCLUSION

reformulation générale

souhaits

Page 146: Analyse Documentaire_suzanne Waller

ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES

Exercice n° 10 : Les mots d'articulation

Cet exercice a été construit à partir de la Nouvelle grammairefrançaise : applications. — Maurice Grévisse et André Goosse. — 3e

éd. — Paris ; Louvain : Duculot, 1995.

Ainsi : conséquence, illustration,

rappel

Au contraire : opposition

Aussi : addition

Avant tout : introduction

Car : cause

Cependant : restriction

C'est-à-dire : illustration

C'est pourquoi : conséquence

D'abord : introduction

Dans un premier temps :

énumération

D'autant plus : insistance

De là : conséquence

De même : rappel

De plus : insistance

Donc : conséquence, conclusion

D'où : conséquence, rappel

Effectivement : cause

Également : addition

Encore : addition, insistance

En définitive : conclusion

En effet : cause

Enfin : conclusion

En outre : addition

En premier lieu : énumération

En résumé : conclusion

En revanche : opposition

Ensuite : addition

Et : addition

Finalement : conclusion

Mais : restriction

Même : insistance

Néanmoins : restriction

Notamment : illustration

Or : rappel

Parce que : cause

Par conséquent : conséquence

Par contre : opposition

Par exemple : illustration

Par le fait que : cause

Pour conclure : conclusion

Pourtant : restriction

Pour toutes ces raisons :

conséquence, conclusion

Premièrement : énumération

Puis : addition

Puisque : cause

Tout d'abord : introduction

Toutefois : restriction

ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES

CHAPITRE 6

Exercice n° 11 : Lecture critique de résumés sous l'angle formel

Principales remarques concernant l'aspect formel des résumés :

1) ne pas inscrire dans un résumé les données des champs dedescription : auteur et date de l'article (2)

2) rédiger en bloc, sans alinéa (1, 3, 4, 5, 6)

3) respecter le style choisi et ne pas mélanger styles rédigé et

télégraphique (3)

4) s'il y a 3 axes, ou 3 causes, ne pas l'annoncer tel quel (1, 3, 6),

mais l'intégrer dans l'énoncé (7, 8, 9)

5) on peut utiliser les expressions de l'auteur lorsqu'elles sontporteuses de sens (caractère conjoncturel, structurel,...) et nonfigures de style : « vie d'homme », « perdre de sa superbe »,

« turbulence », « palette », ...

6) respecter les guillemets voulus par l'auteur si l'on utilise lenéologisme « tertiarisation » : comparer 1,4 et 3,9- ne pas employer de point d'exclamation (6)

7) Faiblesses de style :- ne pas personnaliser : « nous sommes, nous assistons... » (3)- éviter les injonctions trop répétées : « il faut... il faudrait... il

faudra... » (1)- ne pas commencer par « d'abord... bref... » (6)- le substantif « mutation » supporte difficilement le passage à laforme verbale : « tout mute... » (5)

8) sans entrer vraiment dans le fond, on peut remarquer que lenombre important de termes généraux dans (5) empêche cerésumé d'être représentatif d'un contenu clair.

Page 147: Analyse Documentaire_suzanne Waller

ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES

Enfin, il est permis de critiquer les trois derniers résumés, rédigésrespectivement par trois formateurs dont un seul était documen-taliste t

Exercice n° 12 - Exercice d'écriture :rétablir la ponctuation d'un texte

Romans et enfants. — Roland Barthes — extrait des Mythologies.Éditions du Seuil, 1957 (Points, 10}

À en croire Elle, qui rassemblait naguère sur une même photographiesoixante-dix romancières, la femme de lettres constitue une espècezoologique remarquable : elle accouche pêle-mêle de romans et d'enfants.On annonce, par exemple : Jacqueline Lenoir (deux filles, un roman) ;Marina Grey (un fils, un roman) ; Nicole Dutreil (deux fils, quatreromans), etc.Qu'est-ce que cela veut dire ? Ceci : écrire est une conduite glorieuse, maishardie ; l'écrivain est un « artiste », on lui reconnaît un certain droit à labohème ; comme il est chargé, en général, du moins dans la France d'£7/e,de donner à la société les raisons de sa bonne conscience, il faut bien payerses services : on lui concède tacitement le droit de mener une vie un peupersonnelle. Mais attention : que les femmes ne croient pas qu'ellespeuvent profiter de ce pacte sans s'être d'abord soumises au statut éternelde la féminité. Les femmes sont sur terre pour donner des enfants auxhommes ; qu'elles écrivent tant qu'elles veulent, qu'elles décorent leurcondition, mais surtout qu'elles n'en sortent pas : que leur destin bibliquene soit pas troublé par la promotion qui leur est concédée, et qu'elles payentaussitôt par le tribut de leur maternité cette bohème attachée naturellementà la vie d'écrivain.

Après la première phrase interrogative, l'auteur répond par 3phrases (bien indiquées par 3 points) : la première s'intéresse àl'écrivain, la deuxième est une phrase de transition qui introduit latroisième, où il est question de la femme écrivain. La ponctuationintermédiaire soutient l'ordre du discours.

ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES

Exercice n° 13 - Exercice d'écriture : reconstituer un texte

1. D'autre part, la gymnastique volontaire est une occasion de contacts. Despersonnes de métiers et de genres très divers s'y retrouvent. J'y ai rencontre parexemple un juge des enfants qui m'a parlé de sa profession et m'a beaucoup

intéressée.

2. La gymnastique volontaire est maintenant très répandue, et je m'en réjouiscar elle offre de nombreux avantages.

3. La gymnastique volontaire procure enfin une excellente détente, Grâce àelle, chacun s'évade de son univers quotidien pour ne plus vivre qu'avec soncorps dans un cadre sympathique.

4. D'abord, elle apporte une compensation salutaire à la sédentarité de nosvies. Nous marchons peu, en effet, pour nous rendre au travail, que nous u t i l i -sions pour ce faire les transports en commun ou un engin individuel. Parailleurs, notre activité professionnelle est bien souvent statique. La gymnas-tique volontaire, qui mobilise chacun de nos muscles, nous permet de compen-ser cette sédentarité et de rendre à notre corps son équilibre.

5. Pour toutes ces raisons, je pense que la gymnastique volontaire est une belleréalisation sociale. Facteur d'équilibre, de rencontres et d'enrichissement, elleest sans nul doute à pratiquer.

6. Ces possibilités de contacts ouvrent des horizons. C'est ainsi que je me suismise à fréquenter la piscine grâce à des membres de mon club de gymnastiquequi m'y ont entraînée. Avec d'autres personnes, j'ai visité un musée local que

je ne connaissais pas.

Ordre des paragraphes : 2 - 4 - 1 - 6 - 3 - 5

La facilité de cet exercice tient à sa brièveté, à la simplicité ducontenu et à la bonne place des mots d'articulation.

Page 148: Analyse Documentaire_suzanne Waller

ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES

Exercice n° 14 : Rédiger le résumé documentaired'un texte déjà étudié

Résumé et indexation ne relevant pas des sciences exactes, il nepeut pas exister un résumé parfait. C'est pourquoi cinq versionssont ici proposées, et aucune d'entre elles n'est exempte d'erreurs.En comparant votre résumé à ceux-ci, vous pourrez sans douterelever vos propres erreurs d'interprétation. Quant aux erreursformelles, vous n'en faites plus depuis le premier exercice !

Les effets violents de la télévision. -- Liliane Lurçat. -- Esprit,n° 203, juillet 1994, p. 175-179

1. La TV initie l'individu à la vie publique en le coupant de la réalité et en lerendant passif. Les effets émotionnels et de suggestion de la TV sur les indivi-dus sont décrits avec de nombreuses illustrations. Elle induit un mimétismeimpulsif ou conscient qui rend souhaitable la création d'une déontologie desmédias.

Bon essai de condensation, mais :- « individu », écrit deux fois, ne rend pas l'idée du public fragilecomposé de l'enfant et de l'adolescent, dont il est question dans letexte ;- la troisième phrase commence par « Elle » : quel est le sujet ?- dans un texte aussi court, « TV » — abréviation acceptable ? — estrépété deux fois ;- toujours dans un texte aussi court, doit-on donner tant de place à ladernière phrase de conclusion : phrase de souhaits et non d'infor-mation.

2. La télévision a plusieurs répercussions sur le comportement du spectateur :elle favorise l'habitude de croire plutôt que d'analyser, elle a un puissant effetsur la sensibilité, elle rend possibles les imitations inconscientes et conscien-tes. Il s'agit de comprendre comment le spectacle de la violence montré demanière répétitive peut déboucher sur l ' imitation impulsive et quels sont leseffets de suggestion de fa télévision.

Ce résumé est mieux rédigé que le précédent, mais l'« individu » estdevenu « spectateur » sans préciser de quel public il s'agit vraiment.

3. Effets de la télévision sur les enfants : passivité, contagion émotionnelle,imitations conscientes et/ou inconscientes pouvant déboucher sur des délitsplus ou moins graves et violents.

ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES

Cet essai de style télégraphique marque la limite du genre. Même sil'on comprend à peu près de quoi il est question, le texte méritait une

rédaction plus approfondie.

4. Le rapport médiatisé aux choses éloigne le jeune enfant du réel. Celui-cipeut être amené, par fascination émotionnelle et mimétisme, à commettre des

actes violents. 11 faudrait réfléchir à une déontologie des médias.La première phrase, trop vague, sous-entend qu'on a lu l'article. Ladeuxième phrase est bonne. La troisième est inutile et dispropor-tionnée : à nouveau on ne trouve aucune information sur ce sujet dansle texte, sauf sous forme d'un souhait.

5. En éloignant le public de la réalité, l'image télévisuelle favorise l'émotionplus que la réflexion et rend possibles les mimétismes inconscients comme lesimitations conscientes. De nombreuses enquêtes prouvent que les spectaclesviolents à la télévision peuvent avoir un réel impact sur un public fragile,particulièrement les enfants fascinés, imprégnés par des images pouvant

engendrer des mimétismes dangereux.Certainement le meilleur des cinq, quoique cherchant sans doute à endire trop. Si les deux grandes parties du texte sont bien indiquéespuisque ce résumé est composé de deux phrases, la seconde phrase est

meilleure que la première.

Exercice n° 15 : Rédiger le résumé documentaire

d'un texte nouveau

Des objectifs pour le journalisme. -- Claude-Jean Bertrand. -

Études, septembre 1993

1) Étude critique de six résumés n'ayant aucune valeur d'exem-

plarité ; selon l'exercice choisi, on peut :- soit comparer avec le résumé déjà rédigé ;- soit les étudier pour en relever les aspects positifs puis rédiger le

résumé ; '- soit les étudier de façon critique, prendre connaissance desremarques faites en pages 295 à 298, puis rédiger le résumé.

Page 149: Analyse Documentaire_suzanne Waller

ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES

1. Les médias face à l'amélioration de la qualité. Avec 12propositions, présentation pour un journalisme actuel qui proposeune information à la fois sérieuse, commentée, qui suscite l'intérêtdu plus grand nombre et encourage à une vie sociale également dequalité.

2. Pendant des siècles, l'information a été gênée par des obstaclesmatériels et politiques. Depuis le début du xx* siècle, une autrebarrière à l'information est apparue : l'obstacle économique. Cesfacteurs ne sont pas seuls responsables de la désinformation.L'amélioration des médias est souhaitable : le sort de l'humanité endépend. Douze possibilités d'amélioration possibles sont présen-tées pour les journalistes :

- ne pas imposer aux informations une taille ou une heure fixes ;- distinguer le divertissement de l'information ;- éviter les omissions dues à la partialité ;- changer la définition de l'information ;- faire apparaître les pseudo-événements pour ce qu'ils sont ;- chercher la réalité sous les apparences ;- rendre les nouvelles compréhensibles ;- rendre intéressantes les nouvelles importantes.

3. Depuis ses origines, la diffusion de l'information a été entravéepar des obstacles d'ordre matériel, politique (gouvernements,tribunaux, etc.) et économique (pressions des patrons de vente etannonceurs). Pourtant ces facteurs ne sont pas considérés commeseuls responsables de la désinformation. Il y en a un plus graveprovenant des professionnels eux-mêmes qui pratiquent l'auto-censure, ce qui engendre la médiocrité. Douze propositions ou butsà atteindre sont développés dans cet article pour remédier à cetétat de fait.

4. Le sort de l'humanité dépend de l'amélioration des médias...Douze objectifs liés principalement à la transformation de la redéfi-nition du produit médiatique et des informations apporteraientdouze améliorations nécessaires.

5. Douze améliorations possibles des médias liées à une redéfi-nition du produit médiatique et des informations.

ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES

6. Au fil des temps l'information a dû surmonter des obstaclesmatériels, politiques, économiques. Afin d'arriver à produire uneinformation valable, il est nécessaire de remplir un certain nombred'objectifs qui sont de :- ne pas diffuser une information à intervalle régulier ;- distinguer le divertissement de l'information ;- éviter les omissions dues à la partialité ;- intéresser un maximum de lecteurs ;- donner aux événements la place qu'ils méritent ;- savoir discerner l'actualité réelle ;- rendre les nouvelles compréhensibles, intéressantes, et endémontrer l'importance ;- interpréter de façon claire les recherches et découvertes scienti-fiques ;- encourager les débats ;- dénoncer les tares sociales.

Trois facteurs permettent de voir ces transformations s'amorcer etla mentalité des journalistes évoluer :- la croissante complexité des sociétés ;- le niveau d'éducation des populations ;- le progrès des sciences.

L'élaboration d'une éthique pourrait servir de contrôle de qualité.

2) Quelques critiques concernant les six résumés précédents sontproposées ci-après.

1. Les médias face à l'amélioration de laqualité. Avec 12 propositions, présen-tation pour un journalisme actuel quipropose une information à la foissérieuse, commentée, qui suscite l'intérêtdu plus grand nombre et encourage à unevie sociale également de qualité.

- faux style télégra-phique

- ce résumé est malrédigé, mais ttentehonnêtement de rendrecompte de l'essentiel ducontenu

Page 150: Analyse Documentaire_suzanne Waller

ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES

2. Pendant des siècles, l'information a étégênée par des obstacles matériels et poli-tiques. Depuis le début du xxc siècle, uneautre barrière à l'information est apparue :l'obstacle économique. Ces facteurs nesont pas seuls responsables de la désinfor-mation. L'amélioration des médias est sou-haitable : le sort de l'humanité en dépend.Douze possibilités d'amélioration possiblessont présentées pour les journalistes :- ne pas imposer aux informations unetaille ou une heure fixes ;- distinguer divertissement et information ;- éviter les omissions dues à la partialité ;- changer la définition de l'information ;- faire apparaître les pseudo-événementspour ce qu'ils sont ;- chercher la réalité sous les apparences ;- rendre les nouvelles compréhensibles ;- rendre intéressantes les nouvelles im-portantes.

- 10 lignes pour résumerle premier paragraphe

- cette phrase est lereflet d'une opinion ;elle ne doit pas paraîtredans un résumé

12 propositions sontannoncées, mais 8 seule-ment sont citées

3. Depuis ses origines la difiùsion del'information a été entravée par des obsta-cles d'ordre matériel, politique (gouverne-ments, tribunaux, etc.) et économique(pressions des patrons de vente et annon-ceurs). Pourtant ces facteurs ne sont pasconsidérés comme seuls responsables de ladésinformation. II y en a un plus grave, pro-venant des professionnels eux-mêmes quipratiquent l'autocensure, ce qui engendre lamédiocrité. Douze propositions ou buts àatteindre sont développés dans cet articlepour remédier à cet état de fait.

- à nouveau l'essentieldu résumé concerne lepremier paragraphe

- ce qui fait le corps del'article est annoncé,mais aucune informa-tion n'est donnée

ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES

4. Le sort de l 'humanité dépend de l'amé-lioration des médias... Douze objectifsliés principalement à la transformation dela redéfinition du produit médiatique etdes informations apporteraient douzeaméliorations nécessaires.

- « Le sort de l'huma-nité » a visiblement im-pressionné les rédac-teurs... Cf. remarque aurésumé n°2

- les 12 objectifs ne sontpas détaillés, cependantleur orientation est plusclaire que dans lerésumé précédent

5. Douze améliorations possibles des _ pour faire court on amédias liées à une redéfinition du produit f a j t court ! Point tropmédiatique et des informations. n'en faut. . .

6. Au fil des temps l 'information a dûsurmonter des obstacles matériels, politi-ques, économiques. Afin d'arriver à pro-duire une information valable, il estnécessaire de remplir un certain nombred'objectifs qui sont de :

- ne pas diffuser une information à inter-valle régulier ;- distinguer le divertissement de l'infor-mation ;- éviter les omissions dues à la partialité ;- intéresser un maximum de lecteurs ;- donner aux événements la place qu'ilsméritent ;- savoir discerner l'actualité réelle ;

Ayant fait le choix d'unecertaine exhaustivité, lerédacteur a réussi untrès bon travail, dans lamesure où l'équilibreentre les différentesparties est bien res-pecté.

La formulation desobjectifs a été plusieursfois modifiée, de façonsouvent intéressante...

Page 151: Analyse Documentaire_suzanne Waller

ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES

- rendre les nouvelles compréhensibles, in-téressantes et en démontrer l'importance ;- interpréter de façon claire les rechercheset découvertes scientifiques ;- encourager les débats ;- dénoncer les tares sociales.

Trois facteurs permettent de voir cestransformations s'amorcer el la mentalitédes journalistes évoluer :- la croissante complexité des sociétés ;- le niveau d'éducation des populations ;- le progrès des sciences.

L'élaboration d'une éthique pourrait servirde contrôle de qualité.

... en particulier danscette phrase qui couvretrois objectifs proches

En revanche, ceci estrestrictif en regard duparagraphe résumé

Mais ce très bonrésumé, sous l'angle ducontenu, souffre de laprésentation en alinéasqui ne sont pas accep-tables dans un résumédocumentaire.

3) Rédiger un résumé documentaire : proposition de corrigés.

Des objectifs pour le journalisme. -- Claude-Jean Bertrand. -Études, septembre 1993.

La structuration de ce texte est l'étape de travail la plus importantepour arriver au résumé. En effet, les 12 objectifs donnent l'impres-sion de former le plan, mais l'intérêt est de procéder aux regroupe-ments proposés dans le tableau suivant. On est bien dans un pro-cessus de hiérarchisation des idées et d'organisation d'ensembles

ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES

cohérents. À partir de quatre parties (et non de douze), on peutfournir un résumé très court (mais informant sur l'essentiel :premier résumé) ou développer les quatre parties (second résumé).La rédaction utilise beaucoup les verbes, donnant ainsi le sensdynamique du texte original.

§1 à 3

4à6

7 à 1 7 + 20

18, 19 et 20

22 à 24

25 à 29

STRUCTURATION

INTRODUCTION

1" Ul*

2e Ul

y ui

4'UI

CONCLUSION

THÉMATISATION

Mauvaise image des médias àaméliorer

- en changeant la forme

- en choisissant et en définissantmieux les informations à trans-mettre

- en ayant un rôle pédagogique

- en participant au débat public

Ce qui motive et aide ces transfor-mations

Ul : Unité d'Information

Premier résumé :Les médias souffrent d'une mauvaise image. Plusieurs idées sontavancées pour améliorer la qualité de l'information journalistique :des modifications de forme, une définition plus fine de ce qui doitêtre transmis, une prise en compte d'un rôle pédagogique, uneparticipation au débat public.

Second résumé :Les médias souffrent d'une mauvaise image, due jadis à desobstacles matériels, politiques et économiques, actuellement aumauvais usage d'une large liberté. Douze idées sont avancées pouraméliorer la qualité de l'information journalistique. En modifier laforme : assouplir le principe des délais immuables, utiliser toutes les

Page 152: Analyse Documentaire_suzanne Waller

ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES

ressources de la technologie pour varier l'envoi des nouvelles et lesrythmes de publication. Définir davantage l'information à trans-mettre : distinguer le divertissement de la véritable information,éviter les omissions dues souvent à la partialité, valoriser l'aspectpositif des nouvelles plutôt que le spectaculaire et le convenu,repérer les phénomènes porteurs d'avenir. Prendre en compte lerôle pédagogique de la presse : rendre intéressantes les nouvellesimportantes, dépasser l'événementiel pour atteindre l'essentiel,rendre intelligible le discours scientifique. Participer au débatpublic : rendre possible la participation à la discussion, à la viesociale, à la mise en place de réformes sur des sujets plus prochesdes vrais besoins que majoritairement admis. La croissantecomplexité des sociétés, l'élévation du niveau d'éducation, leprogrès de la conscience des journalistes doivent aider les médias àengager ces transformations, permettant d'augmenter le prestigeet l'influence de la profession.

CHAPITRE 7

Exercice 16 : Identifier des erreurs d'indexation

Cette liste donne la preuve qu'indexer n'est pas un don ! À ladécharge de ce groupe, le travail de réflexion sur l'indexation entant que moyen de recherche n'avait pas encore été abordé — cequi fut fait à partir de cette liste et a donné, bien sûr, d'excellentsrésultats.

élimination :

- des simples erreurs de forme :-pas d'adjectif (48)- pas de pluriel (23/25, 27/28)- pas de tournure alambiquée (53)

ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES

• des termes généraux qui n'ont aucun sens lorsqu'ils sont em-ployés seuls (et dont beaucoup sont peu porteurs d'information) :1, 7, 10, 15, 20, 23, 25, 29, 31, 34, 35, 36, 42, 43, 45, 46, 49, 52

• des expressions copiées du texte : 2, 4, 6, 8, 12, 19, 33, 39

• des termes qui ne sont pas porteurs d'information : 3, 16, 41, 50

Réflexions avant élimination ou choix :

Certains termes cherchent à traduire :• le sujet principal de l'article consacré au journalisme, vu sousl'aspect d'une nécessaire amélioration (ce que 2 dit maladroi-tement) : 5, 26, 32, 44, 51. Mais tous sont trop généraux et peuventmême entraîner des faux sens (32, 44, 51). On peut même — horscontexte — considérer 32 comme un adjectif féminin pluriel ;• la responsabilité des journalistes : 11, 17, 30 ;• un seul aspect du texte : 9, 24, 47.

On peut tous les éliminer sans état d'âme, car ils ne devraient queprovoquer du bruit à l'interrogation.

Restent les suivants qui visent directement le sujet principal endiversifiant les formulations :

18 : information22 : journaux21 : journalisme (présent dans le titre)

27/28 : média(s)37 : presse

- exige un adjectif qui le qualifie- journaux ou journalisme ?

justes, mais tellement généraux

Ces termes ne sont pas faux, mais éloignés du sens véhiculé par letexte. Que faire ? Il est certain que tous les exercices de ce chapitreauront un goût d'inachevé, puisque l'on ne peut pas proposer unlangage contrôlé adapté à chacun. Donc, partir de la phrase-sésame : « De quoi s'agit-il dans ce texte ? » et de la réponse,présente dans les résumés : « Comment améliorer la qualité de

Page 153: Analyse Documentaire_suzanne Waller

ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES

l'information journalistique ? ». Selon le langage contrôlé utilisé,on cherchera à traduire le sens de cette phrase avec le vocabulaireexistant.

Si l'on se met à la place de l'utilisateur qui cherche un article sur cesujet, il interrogera sur le terme le plus central : journalisme, presse,média. C'est au résumé de l'aider à la sélection.

Exercice 17 : Indexer en langage libre

Les droits d'auteur des œuvres numériques. — Ann Okerson. -Pour la science, septembre 1996, n° 227

À nouveau, il est difficile de proposer une correction pour cetarticle. En revanche, vous pouvez comparer votre indexation avecle résultat obtenu dans une session de formation au cours delaquelle 14 personnes ont d'abord choisi des mots clés, puis ontrépondu à la question : « De quoi s'agit-il dans ce texte ? »

1) Liste de mots clés : voir ci-contre.

On retrouve dans cette liste les mêmes erreurs que dans l'exerciceprécédent.

- À éliminer d'office :- l'erreur de forme (pluriel) : 13- les termes généraux : 3, 20, 24, 28, 30, 31, 34- une expression copiée du texte : 35- des termes non porteurs d'information dans ce contexte : 1, 18, 32- des termes porteurs d'information après avoir lu le texte : 2, 22, 29- des termes ne caractérisant qu'un aspect du texte : 4, 5, 7, 10, 14,15, 16, 17,21,

- Restent deux ensembles correspondant aux deux éléments duproblème :

- la protection des droits d'auteur : 8, 9, 11, 12, 13, 23, 25, 26, 27-face à la diffusion sur Internet : 6, 19, 33

ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES

1. Bibliothèque2. Commission Lehman3. Coût4. Coût de l'information5. Diffusion de l'information (x 2)6. Diffusion électronique de l'information7. Document numérisé8. Droit d'auteur (x 5)9. Droit d'auteur sur Internet10. Droit de l'information (x 2)11. Droit de reproduction (x 3)12. Droit de reproduction sur Internet13. Droits d'auteur (x 3)14. Éditeur15. Édition (x 2)16. États-Unis (x 3)17. France18. Informatique numérique19. Internet (x 12)20. Législation (x 2)21. Législation américaine22. Lehman23. Loi sur la propriété intellectuelle24. Œuvre numérique (x 5)25. Propriété intellectuelle26. Propriété littéraire et artistique (x 3)27. Protection des droits d'auteur (x 6)28. Protection des œuvres29. Rapport Lehman30. Réglementation31. Réglementation du réseau32. Réseau informatique (x 6)33. Réseau Internet34. Transmission35. Usage loyal

Page 154: Analyse Documentaire_suzanne Waller

ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES

2. Réponses à la question : « De quoi s'agit-il dans ce texte ? »

Six réponses ont été choisies sur les 14 proposées :

1. Projet de loi pour la protection des droits d'auteur suite à la diffusiond'oeuvres sur le réseau Internet

- le texte n'est pas un projet de loi- le terme « œuvres » est trop général

2. Nécessité d'une réglementation sur les droits d'auteur concernant les œuvresnumériques

- à « œuvres numériques » (copie du titre), préférer « création littéraireet artistique »

- le problème posé par la diffusion sur Internet n'apparaît pas

3. Problèmes de propriété littéraire et artistique et de droits d'auteur posés parl'apparition des documents numériques

- bon début, mais c'est la diffusion de ces documents sur Internet quipose surtout un problème

4. Protection des œuvres littéraires et artistiques en respectant les droitsd'auteur dans le cadre d'Internet

- bon

5. La création artistique sur Internet et le respect des droits d'auteur

- bon, mais il faut deviner qu'« artistique » couvre au«i « littéraire »

6. Les droits d'auteur et les problèmes posés par l'édition électronique et ladiffusion sur le réseau Internet. Rappel historique sur la législation, / étatactuel de la réflexion et propositions de la commission Lehman

- jusqu'à / très bonne réponse. « État actuel de la réflexion » n'apporteaucune information. « Proposition Lehman » devrait plutôt apparaîtredans le résumé, pour les utilisateurs qui en auraient connaissance

II est spectaculaire d'observer qu'un grand nombre de mots inutilesn'apparaissent pas dans ces phrases et qu'en tenant compte desquelques remarques faites, les mots choisis sont presque tousporteurs du sens principal.

ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES

Toutefois, ce texte est difficile à indexer car il est principalementproblématique, à l'exception de la partie historique. Il est clair quedes termes isolés (même de formulation composée) ne peuvent quetrès difficilement rendre compte d'une confrontation entre deséléments complexes. La nécessité d'un résumé documentaires'impose, d'autant plus que le chapeau est bien peu informatif.

Exercice 18 : Indexer en langage libre

Haute tension sous les lignes. — Didier Dubrana. — Science & Vie,février 1993, n° 905

Étudiez les 5 réponses suivantes en les comparant à votre propreproposition :

1. Les risques pour la santé causés par les lignes à haute tension

2. Impact des champs électromagnétiques dus aux lignes à hautetension sur la population. Rappel historique des recherches

3. Enquêtes et rapports sur la polémique des effets des lignes àhaute tension sur la santé de l'humain

4. Les effets des lignes à haute tension sur la santé

5. Risques pour la santé par exposition aux champs électromagné-tiques générés par les lignes à haute tension

Quelques commentaires :

• Aucune de ces phrases ne fait honneur à la langue française, maisce n'est pas important à ce stade du travail.

• Malgré leur forme différente, le sens global est le même. *

• Si l'on compte les occurrences des termes les plus fréquents, onretient :

Page 155: Analyse Documentaire_suzanne Waller

ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES

- lignes à haute tension (x 5)- santé (x 4)- champs électromagnétiques (x 2)

On ne peut s'empêcher de comparer ces résultats à la liste suivante,obtenue après « indexation traditionnelle » :

1. Canada (x 4)2. Cancer (x 4)3. Champ électromagnétique (x 3)4. Coutiches (x 3)5. EDF (x 3)6. Électricité (x 2)7. Enfant8. Enquête9. Enquête épidémiologique (x 2)10. Épidémiologie11. États-Unis (x 2)12. France (x 2)13. Haute tension14. I.R.P.A.

15. Leucémie (x 3)16. Ligne à haute tension (x4)17: Maladie18. Mélatonine19. Miligauss20. O.M.5.21. Onde électromagnétique22. Polémique23. Recherche24. Risque pour la santé25. Santé publique26. Suède (x 2)27. Suivi médical

Peut-on parler d'acharnement à fournir des mots, comme si lenombre compensait la compréhension ? On ne reprendra pas cetteliste pour relever les erreurs, faciles à détecter après les deuxderniers exercices. On ne peut que souligner la spectaculaire diffé-rence entre les deux modes d'indexation (les groupes ayant produitces résultats étaient de niveau similaire).

L'indexation n'est pas achevée pour autant : on n'apprend rien desérieux dans cet article sur les « champs électromagnétiques » :faut-il le conserver comme terme d'indexation ? M peut être àl'origine de bruit si l'on recherche vraiment des documents sur cesujet.

Il est vrai aussi que cet article n'a pas un niveau scientifique outechnique suffisant pour être intégré à une banque de données. Ilfaut le considérer comme un bon support d'exercice.

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TABLE DES MATIÈRES

Avant-propos

Introduction

7

13

Chapitre IL'ANALYSE DOCUMENTAIRE : DÉFINITION ET PRATIQUES

QU'EST-CE QU'ANALYSER ?

QU'EST-CE QUE L'ANALYSE DOCUMENTAIRE ?

L'ANALYSE DANS LE CADRE DES OPÉRATIONS DOCUMENTAIRES

ANALYSE ET POLITIQUE DOCUMENTAIRESFinali té de l'analyse documentaireDestinataires de l'analyse documentaireProduits de l'analyse documentaireLe fonds documentaire

Comment l'établir et l 'alimenter?Comment le sélectionner?

Les moyens du serviceLes moyens matérielsLes moyens intellectuels

ANNEXE PÉDAGOGIQUE

15

15

16

18

19202123242425262627

33

Chapitre IILA LECTURE DOCUMENTAIRE : LIRE ET OBSERVER

LES CONDITIONS DE LA LECTURE DOCUMENTAIRE

Se concentrer et en trouver les moyensConnaître ses l imitesOrganiser sa lecture

PHTIT DÉTOUR PAR LA « LECTURE RAPIDE »

OBSERVER AVANT DE LIRE

35

36363737

37

38

Page 159: Analyse Documentaire_suzanne Waller

Observer un document 38La typologie 39Les caractéristiques 39

Observer la mise en pages: le repérage visuel 40Le paragraphe 41Les signes de ponctuation 41De l'utilité du repérage visuel 43

ANNEXE PÉDAGOGIQUE 45

Chapitre IIILA LECTURE DOCUMENTAIRE : LIRE ET COMPRENDRE 49

LES TEXTES ET LEURS CARACTÉRISTIQUES 49

Les textes descriptifs 50Texte narratif 50Texte explicatif 50Texte didactique 50Texte normatif 50

Le texte problématique 51Texte problématique simple 51Texte argumentatif 51Texte polémique 51

Les textes théoriques 51Caractères général et spécifique 57

Texte de type général 57Texte de type spécifique 57

LES TEXTES ET LEUR CONTENU 58

La compréhension du contenu 58Perception 58Mémoires 58Inférence 59

L'usage du contenu 60

COMMENT LIRE ? 64Lecture documentaire d'un article 64

Le résumé d'auteur 65Le chapeau 65Les intertitres 65Les mots en exergue 65Les paragraphes de tête 66Les paragraphes de fin 66

Lecture documentaire d'une monographieLes hypothèses de lecture

ANNEXE PÉDAGOGIQUE

6868

71

Chapitre IVLA LECTURE DOCUMENTAIRE :STRUCTURE ET VOCABULAIRE

TROUVER L'INFORMATION UTILE : LA RECHERCHE D'UN PLAN

L'ÉLABORATION DE GRILLES DE LECTUREGrille de lecture pour un texte descriptif

L'introduction

La conclusionGrille de lecture pour un texte problématiqueExemple d'une grille de lecture standard

TROUVER L'INFORMATION UTILE : L'AIDE DU VOCABULAIRE

Les mots d'articulationLa nature des motsLa richesse des mots: polysémie, monosémie

Le vocabulaire courantLe vocabulaire scientifique de baseLe vocabulaire scientifique et technique spécialisé

La richesse des mots: dénotation, connotation

DcnolutionConnotationExemples

73

73

7576767679X I

8484868787898990909191

Chapitre VANALYSE ET RECHERCHE DOCUMENTAIRES

LA RECHERCHE DOCUMENTAIRE

La place de l 'util isateur dans le processus de la recherche documentaire

Qui est le demandeur ?Quelles sont les données du problème ?Quel est te but du questionnement ?Quelle est la forme du questionnement ?Quelles sont les limites de la recherche documentaire ? '

PLACE DE L'ANALYSE DOCUMENTAIRE DANS LES BANQUES DE DONNÉES

Les champs des banques de données

95

969798989999

100

101l o i

Page 160: Analyse Documentaire_suzanne Waller

Les champs de contenuTitreCotationDomaineIndexationRésuméTypologie de l 'information

Complémentarité des champs de contenu

ASPECTS TECHNIQUES DE LA RECHERCHE DOCUMENTAIRE INFORMATISÉE

Les opérateurs booléensL'intersectionL'unionL'exclusion

Le bruit et le silence

LA RECHERCHE DOCUMENTAIRE EN TEXTE INTÉGRAL

Recherche sur fichier inverseRecherche par l'intermédiaire d'outils linguistiques

La forme des motsL'agencement grammaticalLe sens

LA RECHERCHE D'INFORMATIONS SUR INTERNET

Les moteurs de rechercheLes répertoiresAutres outils

Chapitre VILE RÉSUMÉ DOCUMENTAIRE

DÉFINITION

USAGES ET USAGERSAlimentation d'une mémoire documentaireAccompagnement de références dans les bullet ins bibliographiquesAccompagnement de références dans la partie bibliographique

de revues générales ou spécialiséesAutres usages

LES DIFFÉRENTES FORMES DE RÉSUMÉS

Le titreLe résumé d'auteurLe résumé d'éditeur

102102102103103103104105

107108108108110

1 1 11131 1 3115! 16

118118119119

121

121

122122122

123123

124124125125

Le compte rendu 125Le digest 126L'extrait 126La contraction de texte 126

LES RÉSUMÉS DOCUMENTAIRES 127

Le résume informât!f 127Le résumé indicatif 127Le résumé sélectif 127

LE RÔLE DU RÉSUMÉ DOCUMENTAIRE DANS UNE BANQUE DF DONNÉES 128

COMMENT RÉALISER UN RÉSUMÉ DOCUMENTAIRE 128Compréhension 129Sélection 129Construction 131Rédaction 132

Style télégraphique? 133Style rédigé 134Concision des phrases I 35Précision du vocabulaire 136Présentation formelle 136

DERNIERS CONSEILS 137Pour assurer la pertinence 137Pour augmenter l'efficacité 137Pour tendre vers l'objectivité 138

ANNEXE PÉDAGOGIQUE 141

Chapitre VIIINDEXATION 149

QU'EST-CE QU'INDEXER ? 149

USAGE ET APPLICATIONS 151L'index d'un livre 151L'indexation du texte d'un document 152

RÔLE DE L'INDEXATION DANS UNE BANQUE DE DONNÉES 152

COMMENT INDEXER ? 153Éliminer , comment? » 154Choisir: pourquoi? 157Les différents champs d'indexation 158La profondeur de l ' indexat ion: exhaustivité? sélectivité? 159

Page 161: Analyse Documentaire_suzanne Waller

COMMENT ÉVALUER L'INDEXATION ?Qualité de l'indexeurQualité des oulilsLes tests possiblesLa surindexation

Les causes de la surindexationLes conséquences de la surindexationExemples commentés de surindexation

L'INDEXATION EN 10 CONSEILS

ANNEXE PÉDAGOGIQUE

Chapitre VIIILES LANGAGES DOCUMENTAIRES

UN PEU D'HISTOIRE

LES AUTORITÉSLes autorités officiellesLes autorités propres à des besoins spécifiquesMéconnaissance ou réticence?

LES LANGAGES DOCUMENTAIRES

DéfinitionLes obstacles dus à la langue

SynonymiePolysémie

Usages et difficultés d'usageTypologie des langages documentaires

LES LANGAGES DOCUMENTAIRES DE TYPE CLASSIFICATOIRE

Principes de baseApplications pour le classementApplications pour l'analyseApplications pour la recherche

LES LANGAGES DOCUMENTAIRES DE TYPE COMBINATOIRE

Les listes de vedettes-matièresou les langages qui pourraient être combinatoires

Principes de baseApplications pour l 'indexationApplications pour la recherche

160161161162163164165166

169

171

175

175

176177178ISO

182182182183183184185

186186188(88193

195

196196198201

LES VRAIS LANGAGES À STRUCTURE COMBINATOIRE :

LEXIQUE ET THÉSAURUS

Les lexiques spécialisésApplications pour l'indexationApplications pour la recherche

Le thésaurusPrincipes de baseLes relationsLes notesLes différents modes d'entréeMaintenance du thésaurusApplications pour l'indexationApplications pour la recherche

COMPATIBILITÉ DES LANGAGES D'INDEXATION

QUEL AVENIR POUR LES LANGAGES DOCUMENTAIRES ?

Conclusion

ANNEXE 1 - TEXTES ET ARTICLESLes effets violents de la télévisionGros temps sur la planèteLe grand remue-ménageLa Méditerranée: l'espace et l 'histoireDes objectifs pour le journalismeLes droits d'auteur des œuvres numériquesHaute tension sous les lignes

ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES

Références bibliographiques

203203204205206206207211211215216217

218

219

22.?

227227233236243246253260

267

307

Page 162: Analyse Documentaire_suzanne Waller

Liste des textes reproduits dans cet ouvrage,avec l'aimable autorisation de leurs éditeurs

Les effets violents de la télévision / Liliane Lurçat. Esprit, ju i l le t 1994, n° 203

De la compétence à la navigation professionnelle / Guy Le Boterf. Éditionsd'Organisation, 1997

Les Jeux et les Hommes / Roger Caillois. Gallimard, 1967

L'amateur d'abîmes/ Samivel. Stock, 1981

Les droits d 'auteur des reuvres numériques / Ami Okerson. Pour la science, septembre1996, n° 227

Gros temps sur la planète / Jean-Claude Duplessis et Pierre Morel. Éditions OdileJacob. 1990 et Éditions du Seuil (pour la quatrième de couverture), 1992

Le grand remue-ménage: la crise de la famille / Evelyne Sullerot. Fayard, 1997

La Méditerranée : l'espace et l 'histoire / sous la direction de Fernand Braudel.Flammarion, 1985

Le brevet d'invention. Le Monde, mars 1984

Les juges des mineurs « dénoncent » le monde des adultes. Le Journal de Ccnèvc. 3avril 1997

Les jeunes néo-nazis refont surface / Marie-Jeanne Kril l . Construire, 16 avril 1997,n° 16

Le vent Paraclet / Michel Tournier. Gallimard. 1977

Les métamorphoses du travail : le temps du déséquilibre permanent / Alain Lebaube.Le Monde, supplément Initiatives, mai 1995

Mythologies / Roland Barthes. Seuil, 1957

Écrire avec logique et clarté / Gilbcrte Niquct. Huiler, 1996

Des objectifs pour le journalisme / Claude-Jean Bertrand. Éludes, seplembre 1993

Haute tension sous les lignes / Didier Dubrana. Science <5 Vie, février 1993, n° 905