Proposition de réalisation d’un projet pilote préalable au déploiement de Voisins solidaires au Québec

Un projet du Réseau québécois de Villes et Villages en santé

Novembre 2011

Les photos de ce documents ont été envoyées par des citoyens, dans le cadre de la Fête des voisins

3

Table des matières

1. L’origine de Voisins solidaires 5

2. Les défi s du vivre-ensemble et de la cohésion sociale 7

3. La pertinence de l’approche 9 3.1 La pertinence de l’approche sur la dynamique globale des communautés 10

3.2 La pertinence de l’approche auprès de populations spécifi ques 12

4. Le concept 16 4.1 Défi nition du concept 16

4.2 Conditions de réussite 18

4.3 Des balises à respecter 18

4.4 Conditions d’engagement pour les municipalités 19

4.5 Des pratiques municipales à infl uencer 19

5. Le projet-pilote au Québec 20 5.1 Principaux paramètres 20

5.2 Des conditions favorables 20

5.3 Le processus de mise en œuvre 21

5.4 Le calendrier de réalisation 21

6. Outils et actions pouvant être appliqués dans les communautés 22

7. Les principaux paramètres de l’évaluation 23

Liste des références 24

Résumé

En 2006, le Réseau québécois de Villes et villages en santé (RQVVS) lançait la Fête des voisins au Québec pour développer la convivialité et la solidarité dans les voisinages. Elle a suscité une mobilisation impressionnante. Largement relayée par les médias, la Fête des voisins est devenue un événement incontournable, déclencheur d’une nouvelle dynamique de voisinage plus convivial. Comment poursuivre tout au long de l’année cet état d’esprit ? Nous proposons de le faire avec l’initiative Voisins solidaires : les bons côtés d’être à côté.

Beaucoup d’initiatives existent dans les communautés pour développer la vie communautaire et la participation, mais très peu le font en agissant spécifi quement sur le voisinage. Il s’agit d’une voie prometteuse et inexploitée pour contribuer à la fois à la santé des personnes (sou-tien social) et aussi pour stimuler la participation citoyenne (en ouvrant un espace d’implica-tion autre que le bénévolat ou la participation à des projets collectifs).

Au Québec, de façon générale, le voisinage n’est pas un territoire naturel d’entraide et d’inclusion. C’est précisément cette situation que nous souhaitons infl uencer. Au bénéfi ce de tous et des clientèles vulnérables en particulier (aînés, immigrants, personnes handicapées, jeunes familles, etc.) ainsi que pour le bénéfi ce de nos communautés en nourrissant des dynamiques de participation et de citoyenneté par une voie nouvelle.

Le projet, d’une durée de 3 ans, consiste à réaliser cinq projets-pilotes dans des communau-tés (municipalité, arrondissement ou quartier) de nature variée. Le projet comporte un volet évaluation afi n de documenter les effets des projets-pilotes sur les relations de voisinage et d’analyser la pertinence et l’effi cacité de la stratégie de mise en œuvre. Au terme des trois ans, si les résultats sont concluants, un dispositif national sera mis en place.

Le RQVVS s’appuie sur un certain nombre d’acquis en vue de conduire à terme cette démons-tration; ce sont la crédibilité développée avec le milieu municipal, les organismes relais et les institutions autour de la Fête des voisins, l’expertise de contenu concernant les liens entre le voisinage, la santé et la participation, la liaison avec les initiatives de Voisins solidaires en France, la présence et l’intérêt des citoyens et citoyennes déjà mobilisés dans la Fête des voisins ainsi qu’un certain nombre de municipalités en attente et disposés à s’investir dans Voisins solidaires.

4

L’origine de Voisins solidaires

Créé en 1988, le RQVVS regroupe 200 municipalités membres, soit plus de 70 % de la population qué-bécoise. Le Réseau a pour mission « de promouvoir et de soutenir, à travers tout le Québec, le dévelop-pement durable de milieux de vie sains. Il mise, pour ce faire, sur les échanges et le partage entre les municipalités, sur l’engagement des décideurs municipaux en faveur de la qualité de vie et sur leur capacité à mobiliser leurs partenaires et les citoyens dans l’action concrète1 »

Le RQVVS appuie son intervention sur le territoire municipal puisque c’est le niveau de gouvernement le plus près des citoyens et celui que les citoyens interpellent en premier pour toutes questions en lien avec les conditions et la qualité du milieu de vie. C’est également au niveau municipal ou dans les quartiers que la mobilisation et la participation des citoyens sont le plus susceptibles de faire la diffé-rence dans la vie quotidienne. L’appartenance des citoyens à leur communauté constitue un ancrage privilégié pour l’exercice de la citoyenneté.

L’action de Villes et Villages en santé est largement diversifi ée. Elle présente un visage multiforme selon les caractéristiques, les besoins et les priorités défi nies par les citoyens des différentes commu-nautés. Le réseau comme tel est un outil au service de la mobilisation et de la participation.

Dans cet esprit visant à rendre disponibles des moyens favorisant la prise en charge de leur commu-nauté par les citoyens, le RQVVS s’est inspiré de l’expérience européenne de la Fête des Voisins pour ajouter une avenue supplémentaire à son offre de services.

La Fête des voisins est née en France, plus précisément à Paris dans le 17e arrondissement, en 1999, à l’initiative d’un élu municipal, Monsieur Atanase Périfan. En moins de neuf ans, les initiatives issues de la Fête des voisins se sont multipliées à grande vitesse et ont rapidement débordé les frontières françaises pour couvrir plus d’une trentaine de pays sur la planète. Elle s’appuie sur le fait que, au-delà du territoire local, municipalités ou quartiers, la vie des citoyens s’ancre d’abord dans un voisinage immédiat – immeuble, pâté de maisons, rue ou rang selon la taille et la dispersion de l’habitat - voisi-nage qui peut être le lieu premier de la convivialité, de la solidarité et plus largement de la citoyenneté.

5

1

Photo : Richard Phaneuf, Montréal

La Fête des voisins ne dispose pas d’un cadre formel,

« Elle est une idée, une invitation, dit Périfan, qui peut se moduler de multiples manières selon les lieux, les contextes, les cultures. Il s’agit que, sous l’effet de la promotion faite par des organisations et de quelques outils de soutien, des citoyens prennent l’initiative de s’inviter et de fêter à leur façon. La fête ici, est le prétexte au développement de la convivialité, de la fraternité, et de l’entraide entre les voisins. Rien ne doit être imposé, la fête agit sous le principe de la contamination, de l’exemple, pour faire germer une façon différente de vivre un peu plus que côte à côte, mais dans une proximité respectueuse et solidaire »2.

Les municipalités et organismes assurent la promotion locale de la Fête simultanément à la promotion lancée à l’échelle nationale par le RQVVS. La promotion se traduit essentiellement par une invitation à prendre l’initiative de la Fête dans son milieu. Les municipalités offrent souvent un certain nombre d’ou-tils (affi ches, ballons, services techniques pour la fermeture d’une rue, etc.) pour encourager et soutenir les initiatives. La Fête se déroule généralement le même jour, soit le premier samedi de juin au Québec.

L’expérience québécoise a créé une mobilisation impressionnante. Largement relayée par les médias, la Fête des Voisins est devenue un événement incontournable, déclencheur d’une nouvelle dynamique de voisinage plus convivial.

L’expérience européenne a évolué rapidement vers Voisins solidaires. Cette nouvelle initiative, en continui-té avec la Fête des voisins, vise simplement à étendre l’esprit de la Fête à longueur d’année. Plus précisé-ment, Voisins solidaires vise à renforcer la convivialité au quotidien et à favoriser l’entraide dans un rapport égalitaire et libre, de personne à personne. D’une cer-taine façon, Voisins solidaires, c’est le plaisir de vivre tout près en comptant sur la solidarité naturelle et spontanée, avant la solidarité des réseaux formels et institutionnels. Le thème, Les bons côtés d’être à côté, en illustre bien l’esprit. C’est le même type de prolongement que le RQVVS voudrait implanter au Québec parce que la lecture actuelle du vivre ensemble au Québec montre des tendances qui vont davantage dans le sens de l’anonymat et parfois même de l’isolement des personnes.

Une défi nition du voisinageLe voisinage, c’est… la communauté géographique la plus immédiate, celle qui apparaît la plus à portée de main… ce sont les lieux d’habitation les plus proches… ce sont les personnes que l’on croise le plus régulièrement ne serait-ce que furtivement. Georges Letarte 3.

Voisins solidaires vise à renforcer la convivialité au quotidien et à favoriser l’entraide dans un rapport égalitaire et libre.

6Photo : arrondissement St-Laurent, Montréal

Les défi s du vivre-ensemble et de la cohésion sociale

Dans un livre publié en 2005, Périfan4 décrit de nombreuses situations qui, au quotidien, témoignent de l’isolement social de personnes coupées de liens sociaux. Il relate cette histoire de la personne âgée qui meurt seule et incognito et qu’on ne retrouvera que beaucoup plus tard même si elle vit dansun immeuble. Pour Périfan, tous les petits gestes au quotidien, comme faire les courses d’une per-sonne âgée ou garder les enfants de la voisine, peuvent faire la différence et contribuer à développer une société plus conviviale et solidaire.

Les sociétés modernes sont en processus de mutation forte et particulièrement accélérée.Autant les citoyens que les observateurs des mouvements sociaux peinent à voir dans quelle direction nous nous dirigeons. La mul-tiplication des crises économiques, sociales et environnementales, la multiplicité et la vitesse des changements semblent amplifi er une forme de désenchantement, la perte de confi ance et un certain décrochage dans la vie publiquecomme le montre la diminution constante du taux de participation électorale. Simultanément, certains phénomènes comme la montée fulgurante des réseaux sociaux et des mouvements spontanés comme« Occupied Wall Street » illustrent la recherche de nouvelles convivialités et solidarités.

Il est aussi intéressant de relever que le progrès des sociétés ne se mesure plus à la seule aune de la croissance économique. Un rapport récent de l’Organisation pour la coopération et le développement

économique (OCDE-2011) « Mea-suring the progress of societies »5

montre d’ailleurs comment le progrès d’une société dépend davantage dequestions d’ordre qualitatives comme la cohésion sociale que quantitative comme la croissance économique.Le rapport suggère que la croissance économique n’est pas en soi signe de satisfaction et de progrès et que la cohésion sociale est plus porteuse debonheur et de bien-être.

PoPourur GGiddenss6,, lala mm dodernité eelllle-emêmême crée deess auautotomamatitismes où leless rerelalatitions interprperersosonnnnelelleles ne sonontt

Les sociétés modernes sont en processus de mutation forte et particulièrement accélérée.

7

2

Photo : Stéphane Lahoud, Rimouski

plus nécessaires dans le mode de vie. On procède quotidiennement à toutes sortes de transactions sans passer par un lien relationnel. Nous faisons confi ance à des systèmes impersonnels et automati-sés, mais c’est comme si nous savions de moins en moins comment nous comporter dans la relation sociale. Cette ignorance des modes relationnels engendrerait davantage de méfi ance envers les autres et le repli sur soi.

Cyrulnik opine dans le même sens en affi rmant que « c’est incontestable, plus la solidarité est administrative, plus le désert affectif se développe »7. Char-bonneau fait état également de la mon-tée de l’individualisme où « les individus retranchés dans leurs espaces privés… s’intéressent aux autres que pour re-trouver leur alter ego » tout comme « l’indifférence et l’apathie sociale vont… de pair avec l’exigence croissante d’une responsabilisation extrême de l’individu dans la construction de son propre destin »8.

L’éloignement des lieux de résidence, de travail et de loisirs, l’appartenance à des réseaux sociaux délocalisés, le travail atypique, la durée de vie des ménages, la diminution du nombre d’enfants, la dispersion des familles sur une large échelle géographique rendent plus ténue la solidarité. Il en va également du modèle même d’aménagement du territoire et des milieux de vie qui favorise souvent la ségrégation sociale, contribuant à isoler les individus et même les générations. Au Québec plus spécifi quement, les changements sociaux ont été fort rapides. D’une société traditionnelle et conformiste, nous sommes passés à une société ouverte, libérée des modèles traditionnels intrusifs et tournée vers l’avenir, certains diront au détriment de valeurs fondamentales. La réaction à un modèle tra-ditionnel où l’individu ne pouvait tracer son destin, mais simplement prendre une place dans un modèle prédéterminé explique probablement une certaine méfi ance envers une proximité sociale forte. Ainsi, on a appris un peu plus « à nous mêler de nos affaires » et à ne pas intervenir dans celles des autres, de peur d’être intrusif et de voir les autres empiéter sur notre intimité. Maints auteurs (Dumont9, Giddens10, Grand-Maison11, Havel12) parlent d’une dérive de la société de droits et de l’autonomie individuelle qui

ont amené une forme d’individua-lisme coupé de liens sociaux.

Jetté13 précise que c’est la façon de percevoir et de construire ces relations de vivre-ensemble et ces « horizons de sens » qui s’est pro-fondément modifi ée avec l’entrée de nos sociétés dans la « moder-nité avancée »14. Cela ouvre large-ment la porte à la créativité pour des initiatives comme Voisins soli-daires, nombre de citoyens recher-chant de nouvelles avenues pour vivre ensemble sans retourner aux modèles contraignants qu’ils ont connu auparavant et redoutent.

... on a appris un peu plus « à nous mêler de nos affaires » et à ne pas intervenir dans celles des autres, de peur d’être intrusif et de voir les autres empiéter sur notre intimité.

8

Photo : Sylvie Héroux, Lawrenceville

La pertinence de l’approche

Nous croyons que la solidarité doit reposer sur trois piliers complémentaires : la solidarité institution-nelle, la solidarité familiale et la solidarité de voisinage.

Au Québec, la solidarité institutionnelle - celle provenant des organismes étatiques et des organismes à but non lucratif - demeure forte. Le réseau familial pour sa part, malgré les mouvances dans la structure des familles, demeure un pôle d’ancrage signifi catif et le réseau des amis et collègues de travail occupe souvent une place plus importante que la famille même.

Le champ du voisinage semble plus complexe à cerner. Il peut être proche, soutenant, ou encore irritant et même destructeur à moins qu’il ne soit tout simplement qu’un lieu d’indifférence. Chose certaine, c’est l’environnement le plus à portée de main et il peut infl uencer considérablement notre quotidien. Le rendre convivial et solidaire permettrait de renforcer le tissu social.

Comme l’indique Baillargeau, « Le lieu où l’on demeure, en plus d’être un espace domiciliaire, représente pourtant, en prin-cipe, une possibilité de créer des liens sociaux avec ses voisins. Il peut y avoir une inscription forte dans un micro territoire qui devient alors un milieu d’appartenance. Il s’agit d’un enjeu so-cial considérable au moment où nombre de réseaux sociaux déterminants sont déterritorialisés et où, pourtant, les politiques sociales mises sur la communauté pour recréer des solidarités »15

.

Enfi n, pour les citoyens qui ne s’engagent pas dans des structures de participation communautaire - et cela est légitime - le voisinage est un lieu d’action potentiellement signifi catif et mobilisateur, pouvant même éventuellement conduire à des changements de représentations sociales quant à son rôle dans la société et quant à l’importance de la communauté locale dans sa vie.

Institutions et organismes locaux

Familleet amis

Voisinage

Les trois piliersde la solidarité

9

3

L’approche de Voisins solidaires contribue-t-elle effectivement à renforcer le plaisir de vivre ensemble, l’entraide et la solidarité? Montminy16, qui a examiné le lien entre la santé et le voisinage, indique que les auteurs consultés et les situations observées tendent à établir ce lien. L’étude sur les effets de la Fête des voisins (Letarte17) va dans la même direction. Nous nous inspirons abondamment de ces deux sources et examinons les impacts sur les communautés comme telles et celles sur des populations spécifi ques.

3.1 La pertinence de l’approche sur la dynamique globale des communautésL’Organisation mondiale pour la santé (OMS) considère l’environnement social comme un déterminant majeur de la santé. Le Ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec (MSSS) appuie égale-ment son intervention de santé publique en partie sur l’importance de renforcer le réseau social des individus et la cohésion sociale. Le MSSS (2007) reconnaît, à la lumière d’études, que le réseau social « joue un rôle protecteur sur la santé18», physique et non seulement mentale. La cohésion sociale joue également un rôle positif sur la santé. Selon le MSSS (2007) « il est prouvé qu’il existe un lien entre la confi ance qui lie les membres d’une communauté et divers indicateurs de santé»19.

Dans la même veine, le MSSS souligne que la cohésion sociale est aussi associée à nombre d’effets positifs et qu’elle contribue même au développement économique. La littérature sur le développement social20 a d’ailleurs illustré que les communautés ayant une meilleure cohésion sociale sont mieux équi-péws pour faire face aux crises économiques et assurer leur développement.

L’action sur le voisinage ne peut que favoriser et renforcer le réseau social et la cohésion sociale. Cer-tains projets sociaux, au Québec et ailleurs, ont par ailleurs mis en lumière que les voisins sont d’incon-tournables partenaires pour la résolution de plusieurs problématiques sociales, dont la lutte contre la pauvreté, l’amélioration des environnements physiques, le développement de saines habitudes de vie21. Mais bien avant la résolution des problématiques sociales, l’intérêt de Voisins solidaires est que l’action se situe d’abord dans une optique de promotion et de prévention en agissant sur les déterminants de la santé par la présence de saines relations de voisinage.

L’exemple d’un HLMPlusieurs HLM québécois ont mis en place des activités de voisinage qui ont démontré rapidement leur impact dans l’amélioration de la qualité de vie des résidents. C’est le cas du HLM Hypolite-Bernier à Lévis. Ici, le voisinage, ce sont les résidents d’un même édifi ce auparavant reconnu pour des problématiques sociales importantes : délin-quance, négligence, confl its entre résidents.

L’intervention, Tous ensemble pour agir, consistait à amener les locataires et leurs enfants à devenir responsables de leur milieu de vie et à en être fi ers. Ce projet a été démarré sous l’impulsion de l’OMH de Lévis, du CLSC Desjardins et de certains des locataires du HLM. Un travailleur de corridor a notam-ment été dégagé pour intervenir sur place et soutenir la prise en charge de leur milieu de vie par les résidents eux-mêmes.

« il est prouvé qu’il existe un lien entre la confi ance qui lie les membres d’une communauté et divers indicateurs de santé »

10

Les résultats ont été signifi catifs : une meilleure réputation des locataires auprès de la collectivi-té; une diminution du vandalisme, une améliora-tion remarquable de la propreté, une importante croissance de la participation des résidents dans la plupart des activités proposées, incluant l’amé-nagement d’un parc communautaire. On a égale-ment constaté une amélioration du rendement scolaire chez les enfants et un retour aux études de plusieurs adultes. (voir étude de Bergeron22).

Les retombées d’un bon voisinageL’étude réalisée par Letarte pour le compte de Ressources humaines Canada, en 2008, a évalué les retombées de la Fête des voisins au Québec après la troisième édition de celle-ci.

Ces retombées sont les suivantes :• une meilleure convivialité, se traduisant par une plus grande présence de gestes de courtoisie et

de respect, et des initiatives dans la communauté ;

• l’intégration de nouveaux arrivants et création de liens intergénérationnels ou avec des citoyens d’autres origines ;

• l’augmentation de la vigilance des citoyens pour assurer la sécurité et notamment la protection du milieu, et des équipements publics dans les parcs ;

• la création de liens entre les enfants qui développent des réseaux d’amis connus et rassurants pour les parents.

Si ces résultats peuvent être engendrés à partir d’un événement annuel dans le voisinage, on peut imaginer dès lors l’impact potentiel d’une action qui vise à

ancrer davantage cet esprit dans l’environnement immédiat. Il y a ici un ingrédient actif pour renforcer le tissu social et l’entraide de manière non

contraignante, spontanée et volontaire.

« N’achète pas une maison, achète un voisin! »

Proverbe turc

11Photo : Jane Mitchel, Donnacona

3.2 La pertinence de l’approche auprès de populations spécifi ques Bien que tout le monde puisse tirer des bénéfi ces d’un bon voisinage, certaines populations et situa-tions particulières peuvent bénéfi cier davantage de la solidarité de proximité.

Les famillesÀ l’heure où la conciliation travail-famille se présente comme un défi de société, la solidarité de proximité peut être un atout précieux.

Les familles ne peuvent que bénéfi cier d’environnements sains, sécuritaires et conviviaux. Les parents peuvent éventuellement compter sur l’entraide de leurs voisins pour participer à la sur-veillance du milieu; ils savent ainsi que leurs enfants sont en meilleure sécurité dans l’environnement où ils se déplacent par-ticulièrement lorsqu’ils sont peu âgés.

Ils peuvent également échanger des services, alléger leurs tâches et en partager certaines avec des voisins, comme la garde des enfants dans des situations imprévues et le trans-port. Les enfants eux-mêmes peuvent évoluer encore mieux dans un milieu convivial et solidaire. Rappelons l’adage africain repris par Hilary Clinton à savoir qu’il faut tout un village pour élever un enfant. C’est plus que la sécurité qui est assurée ici, c’est un milieu favorable et soutenant pour les enfants et les parents, où les voisins peuvent être des repères signifi catifs.

L’expérience citée précédemment dans un HLM, comme d’autres, a bien montré que des changements de comportements favorables au développement des enfants peuvent résulter d’un environnement sain et stimulant.

Les personnes âgéesParmi les populations susceptibles de bénéfi cier le plus de Voisins solidaires, les personnes âgées se retrouvent au premier rang. Elles occupent proportionnellement et numériquement une place de plus en plus importante et différents facteurs contribuent à isoler nombre de ces personnes. Notons la diminu-tion de la taille des familles et leur éloignement ainsi que la hausse des incapacités affectant la mobilité.

Cette question a été soulignée par Clément et al. qui indiquent que :« Les recherches récentes ont montré que la norme familialiste tend à reculer face aux mo-dèles du vieillir indépendant, fondé sur l’autonomie de la personne ou du couple âgé à l’égard de leurs descendants, lesquels font aussi une place plus marquée aux relations de proximité et notamment de voisinage. » 23

Dans sa recension des écrits sur le voisinage, Montminy souligne que de nombreuses études portant sur les effets de l’isolement ou de la participation sociale des personnes âgées ont montré que les voisins proches constituent une source importante de soins, de sécurité et d’entraide dont l’impact est

12

mesurable, notamment en ce qui concerne la capacité de maintien à domicile.

Une étude américaine souligne d’ailleurs que : « No age group relies as much as older people do on the capacity of social connections or community resources to maintain health and community resi-dence (Cannuscio, Block, & Kawachi, 2003)»24.

La vague de chaleur qu’a connu Paris il y a quelques années et qui a causé plu-sieurs centaines de décès, surtout chez les personnes âgées isolées, a été une occa-sion de prendre conscience de l’importance d’une forme de réseautage, en douceur et sans contrainte, où chacun se préoccupe de l’autre. Frapper à la porte du voisin que l’on ne voie plus alors qu’il fait normalement sa marche de santé tous les jours peut être l’occasion unique de lui porter secours, ou même de lui sauver la vie.

La littérature toutefois, à notre avis, ne fait pas suffi samment cas de la contribution active des per-sonnes âgées à la vie du voisinage. Elles ne sont pas qu’un groupe de personnes nécessitant l’atten-tion des autres; elles peuvent, occasionnellement ou régulièrement, rendre service : arroser les plantes, nourrir les chats, faire de l’aide aux devoirs, etc. N’oublions pas qu’elles sont une source inta-rissable de mémoires et de savoirs et que de nombreux enfants, éloignés de leurs propres grands-parents, bénéfi cieraient largement d’un contact plus régulier et affectueux avec les personnes âgées. En retour, les personnes âgées y gagnent un sentiment d’utilité sociale essentiel à la santé mentale.

Voisins solidaires s’inscrit dans la gratuité de la relation et sous le signe du plaisir de vivre ensemble, l’initiative ne doit pas devenir un réseau formel d’entraide à sens unique bien qu’elle pourrait favori-

ser la naissance de tels réseaux complémen-taires.

Les situations d’urgenceLa situation évoquée des vagues de chaleur n’est pas anodine. Les changements clima-tiques semblent aller dans le sens d’une aug-mentation et d’une aggravation des catas-trophes naturelles.

Outre la vague de chaleur à Paris à laquelle nous avons référé, une situation analogue à Chicago a fait l’objet d’une étude et a montré que la vulnérabilité de certaines populations est liée à un ensemble de facteurs dont l’in-suffi sance des liens sociaux.

Selon de nombreuses études, les voisins proches constituent une source importante de soins, de sécurité et d’entraide dont l’impact est mesurable, notamment en ce qui concerne la capacité de maintien à domicile.

13

Photo : Richard Phaneuf, Montréal

« The US Centers for Disease Control and Prevention did a thorough study of individual-level risk factors for heat wave victims, and they came up with a list of conditions of vulnerability: living alone, not leaving home daily, lacking access to transportation, being sick or bedridden, not having social contacts nearby, and of course not having an air conditioner. »25

La Société canadienne de la Croix-Rouge, dans une publication intitulée « Affi rmer le rôle du secteur bénévole dans les interventions sanitaires d’urgence », veut contribuer à préparer la population en cas de désastre ou d’urgence en visant la résilience des populations, prenant en compte les atouts d’une communauté, dont les relations de voisinage qui permettent justement de développer la résilience collective.

Le gouvernement du Québec s’y prépare également. Une étude récente, intitulée Étude de besoins sur des outils d’information destinés à la population âgée lors d’événements météorologiques extrêmes26, a montré que, à partir des propos recueillis auprès de personnes âgées, il a été possible de mettre en lumière trois constats dont le premier révèle l’importance des réseaux, de l’entraide et du bon voisinage comme mode de prévention des effets néfastes des événements météorologiques extrêmes. Ceci va également dans le sens qu’un milieu bénéfi ciant déjà d’un bon réseau social et d’entraide est mieux en mesure de faire face aux imprévus et d’assurer la protection des personnes les plus vulnérables.

La pandémie appréhendée de grippe A (H1N1) de l’automne 2009 a été une occasion de mettre en lumière le rôle possible du voisinage comme moyen de mitigation face à des situations d’urgence. Dans le cadre de la pandémie, le RQVVS a réalisé une campagne intitulée « S’entraider entre voisins face à la pandémie de grippe A (H1N1) » qui a mis en circulation un message totalement absent du discours: l’entraide entre voisins peut aider à mieux traverser ce moment particulier. Les objectifs de la campagne étaient les suivants :

» inciter à l’entraide entre voisins pour mieux faire face à la pandémie. » assurer un meilleur soutien aux gens plus vulnérables.

» informer qu’il est possible de s’entraider sans se contaminer.

L’intégration sociale des nouveaux résidents et des immigrants

Les travaux de Unger et Wandersma (1978) ont permis de constater que de saines rela-tions de voisinage engendraient plusieurs impacts positifs sur ce qui ne s’appelait pas encore « déterminants » de la santé. Ils ont montré que les activités de voisinage sont associées à l’intégration des résidents dans l’ensemble résidentiel (le bloc); qu’elles constituent une importante source d’aide à court terme entre eux et même qu’elles permettent aux citoyens, collectivement, de modifi er leur environnement en fonction de leurs besoins.

14

Photo : Émilie Bordat, Montréal

Nul doute que l’intégration des nouveaux arrivants peut être facilitée par un voisinage accueillant. Bien que les relations interculturelles soient relativement harmonieuses au Québec, les relations quotidiennes dans les divers milieux de vie peuvent être affectées par les préjugés envers certaines communautés culturelles. Les personnes qui participent à des activités de rapprochement intercul-turel peuvent ainsi mieux résister à ces préjugés, relativiser les différences culturelles, faire une analyse plus adéquate des situations et adopter des comportements plus respectueux des droits de tous.

Dans le contexte où la société québécoise doit intégrer annuellement une proportion importante d’immigrants, Voisins solidaires pourraient permettre de briser le mur de l’ignorance qui s’installe trop souvent en présence de personnes issues de cultures différentes. L’évaluation de la Fête des Voisins avait d’ailleurs recensé quelques situations allant dans cette direction comme celle de l’im-migrant qui joue un instrument traditionnel seul sur son balcon et qu’on invite à se faire entendre lors de la Fête, créant le début d’un rapprochement et éventuellement des liens plus signifi catifs et une meilleure intégration.

La santé mentalePeu de gens contesteront qu’un voi-sinage problématique peut engendrer des tensions et avoir des répercussions importantes sur la vie au quotidien. Les confl its, le bruit, la négligence générale de l’environnement, les com-portements abusifs peuvent exacerber les tensions et dégénérer rapidement. Certains voisinages ont d’ailleurs mau-vaise réputation dans la communauté plus large et sont parfois qualifi és d’in-désirables. Pour les citoyens qui n’ont guère le choix que d’y résider notam-ment pour des considérations fi nan-cières, leur santé mentale peut en être affectée.

Montminy cite une étude de Capelle-Fillion27 démontrant que le mauvais voisinage peut avoir des effets négatifs sur la santé mentale. Les résultats confi rment que les confl its de voisinage ont plusieurs incidences sur la santé mentale particulièrement sur l’anxiété, l’insomnie, les dysfonc-tions sociales, et enfi n, les symptômes relatifs à la sphère somatique. De nombreuses expériences, comme celle citée plus haut du HLM Hypolite-Bernier à Lévis, démontrent que l’action sur le voi-sinage peut changer radicalement la donne. À Montréal, un processus en cours aux Habitations Jeanne-Mance présente des résultats qui vont dans le même sens.

15

Photo : Christopher Schoch, Saint-Lambert

Le concept 4.1 Défi nition du concept

Voisins solidaires, c’est essentiellement une action de promotion et l’application d’une pédagogie du bon voisinage agissant sur deux déterminants majeurs de la santé soit le réseau de soutien social et les environnements sociaux, en favorisant la création de milieux de vie inclusifs.

Voisins solidaires, s’inscrit dans la ligne d’un MOUVEMENT social en faveur de l’intégration sociale des citoyens - quels que soient le sexe, l’âge, la race, l’état civil, l’orientation sexuelle, le handicap - en favorisant leur appartenance et leur participation sociale libre, en créant la fi erté d’être enraciné dans un milieu donné et en développant leur capacité à créer un milieu de vie soutenant par la convivialité et l’entraide.

Voisins solidaires, repose sur une pédagogie du bon voisinage dont la stratégie envisage l’ouver-ture à l’autre de façon graduelle. Le point de dé-part est la cordialité (on se dit bonjour, on échange quelques nouvelles), celle-ci peut ensuite engen-drer de la convivialité (on partage un repas, on joue de la musique ensemble), pour ensuite passer éventuellement à de l’entraide (garde des enfants, soutien en cas de maladie) et éventuellement à une culture de la solidarité (chacun est responsable de tous).

Au cœur de cette démarche se trouvent les citoyens à qui il revient d’amorcer ce processus de rappro-chement, dans un esprit de gratuité (pas de compte à rendre) et de réciprocité (on sort de la relation aidant-aidé, tout le monde peut agir). Les municipalités, leurs partenaires et le RQVVS ont un rôle de promotion afi n de rendre désirable cette façon de vivre-ensemble et de soutien en rendant accessible des outils et des façons de faire pour créer des rapprochements entre voisins.

4

Schéma illustrant la pédagogie du bon voisinage 16

Défi nition de « Mouvement »: action collective qui tend à produire un changement (Dictionnaire du français Plus)

VOISINS SOLIDAIRES, c’est un voisin… > qui vient prendre un café avec une personne âgée isolée chez elle ;

> qui téléphone à tous les jours à une personne seule en convalescence pour vérifi er si tout va bien ;

> qui ramasse le courrier pendant les vacances d’un autre voisin et s’assure de la sécurité ;

> qui amène l’enfant d’un parent seul sans auto à une activité sportive en même temps que son propre enfant ;

> qui fait des biscuits en plus pour la petite fi lle d’à côté qui vient lui dire bonjour et jouer au scrabble avec elle de temps à autre ;

> qui invite ses voisins à une corvée de nettoyage de l’environnement.

Ce peut être également…

> un babillard dans un immeuble ou un réseau internet sur lequel on fait part de besoins particuliers et d’offre d’échanges de services ;

> et toutes autres initiatives…

Le concept de Voisins solidaires se décline de la façon suivante :

• une action nationale et municipale de promotion de l’esprit Voisins solidaires ;

• une invitation aux citoyens à développer des attitudes et comportements favorables à la convi-vialité et à l’entraide de voisinage ;

• des outils en soutien à l’action des citoyens et des organismes relais ;

• des actions de reconnaissance de l’engagement des citoyens, non seulement dans le bénévolat organisé, mais dans la présence et l’action informelle au jour le jour dans son environnement immédiat.

17Photo : Audrey Duchesne, Sainte-Brigitte-de-Laval

4.2 Conditions de réussiteL’expérience européenne de la Fête des Voisins et l’évaluation qui en a été faite au Québec ont permis d’identifi er des critères de succès à l’implantation et à la diffusion de la Fête. Nous reprenons cinq de ces conditions qui nous apparaissent être des éléments signifi catifs dans le développement de Voisins solidaires.

• L’absence d’obligations et la liberté de décider de la manière de faire soi-même ;

• La présence d’outils stimulants qui donnent des idées et ouvrent le champ à des initiatives ;

• L’échelle territoriale la plus à portée de main, le voisinage, qui peut prendre une forme différente selon l’environnement géographique : un bout de rue, un îlot, un immeuble, un noyau villageois de très petite taille, un rang ;

• La reconnaissance publique de l’engagement des citoyens ;

• La prise de conscience concrète à l’effet que des modifi cations d’attitudes et de comportements peuvent changer la qualité de vie; la stratégie de communication prendra largement appui sur l’illustration de ces éléments.

4.3 Des balises à respecterCertes, de l’engagement libre dans son voisinage, peut naître le désir d’en faire davantage et, par exemple, de s’engager dans une action collective, mais là n’est pas le but. En ce sens, il faut ici souli-gner l’importance de respecter deux balises essentielles.

Premièrement, la stratégie doit souligner que même dans la convivialité et l’entraide, la vie privée et l’intimité peuvent être respectées. Deuxièmement, Voisins solidaires ne doit pas être un outil pour faire pression et contingenter les citoyens dans des projets ou démarches municipales, comme une campagne municipale d’embellissement. On doit éviter de créer une pression visant à transformer les citoyens en aidant naturel ou en travailleur social de quartier malgré eux.

L’absence de respect de ces balises pourrait produire l’effet contraire à celui escompté, confi rmant le besoin de certains de s’isoler davantage. Si des situations particulières, comme une catastrophe naturelle, commandent de faire appel à l’entraide et à la solidarité, l’appel à la mobilisation profi tera évidemment de la solidarité créée dans le milieu et il sera plus facile de recruter des bénévoles. L’ingré-dient essentiel de Voisins solidaires, la gratuité du geste, doit toutefois rester au centre de la stratégie.

18

4.4 Conditions d’engagement pour les municipalitésDe façon plus stratégique, en lien avec l’implantation de Voisins solidaires en milieu municipal, quelques conditions particulières s’imposent.

• L’adhésion par les élus et les gestionnaires municipaux des principes qui président à l’action plus globale de Villes et Villages en santé, soit la participation citoyenne, le partenariat avec la com-munauté dont les autres organismes et institutions qui interviennent sur le territoire, le leadership municipal favorable a la santé et la prise en considération particulière des clientèles vulnérables.

• Un engagement ferme de la municipalité se traduisant par une résolution du conseil municipal et la signature d’un protocole de partenariat avec le RQVVS.

• L’implication des organismes du milieu dans l’implantation du projet.

• La disponibilité minimale de ressources humaines et fi nancières de la municipalité pour la mise en oeuvre locale de la démarche, la coordination et la production d’outils spécifi ques à la muni-cipalité

• La mise en place d’un comité local de coordination et de suivi de la démarche, comité intégrant des représentants d’organismes et des citoyens ou encore la prise en charge par un comité exis-tant (éviter de multiplier les comités).

• La validation des messages et outils de communication par le RQVVS pour s’assurer du respect de l’esprit de Voisins solidaires.

4.5 Des pratiques municipales à infl uencerOn doit rappeler ici la continuité de Voisins solidaires avec la Fête des voisins et l’importance de respecter le volontariat des citoyens. Comme Montminy l’a souligné dans ses travaux sur le voisi-nage, l’organisation d’une petite fête locale est un exercice de développement de l’empowerment individuel: une ou quelques personnes, déjà reconnues comme leaders formels ou informels, ou tout simplement en ayant le potentiel, prennent l’initiative d’organiser une Fête et d’y inviter leurs voisins. Il faut laisser les gens développer ce leadership en leur fournissant les informations, les outils, l’en-couragement et le soutien de la municipalité sans céder à la tentation d’organiser la fête à leur place.

En ce sens, tant la Fête des voisins que Voisins solidaires font appel

à un certain changement de culture en milieu municipal où la tradition

va davantage dans le sens d’organiser pour les citoyens plutôt que

de soutenir les initiatives provenant des citoyens.

Le même esprit inspire Voisins solidaires, c’est la somme des initiatives individuelles et collectives qui participent à la création des conditions favorables à la naissance d’environnements plus conviviaux et solidaires.

19

Le projet-pilote au Québec

La proposition du RQVVS consiste à réaliser un projet-pilote visant à identifi er les conditions favorables et requises avant d’en proposer l’implantation à l’échelle québécoise. De nombreux facteurs peuvent intervenir en cours de route et il est souhaitable de les documenter dans un premier temps et de prévoir des modes d’intervention appropriés. Le concept lui-même qui, nous l’avons dit, consiste à s’inscrire dans un large mouvement social, diffère des expériences habituelles de mobilisation dans un projet défi ni et structuré et il importe de mieux en défi nir les pourtours.

5.1 Principaux paramètres • L’identifi cation de cinq sites (municipalités, arrondissements ou quartiers) ayant des caractéristiques

territoriales et populationnelles différentes. Type de communautés pilotes envisagées : deux zones urbaines denses et socialement diversifi ées, une banlieue en développement de niveau socio-éco-nomique plus élevé, deux petites municipalités l’une en croissance et l’autre en dévitalisation, dont une en zone rurale de très faible densité.

• Une durée de trois ans pour être en mesure de suivre l’évolution du processus et l’observation de changements dans les unités de voisinage.

• Une coordination du projet-pilote et un accompagnement des municipalités par le RQVVS.

• Une évaluation d’implantation et des résultats observables.

• L’élaboration d’une stratégie d’implantation à l’échelle québécoise.

5.2 Des conditions favorablesLe projet-pilote bénéfi cie d’ores et déjà de conditions favorables à sa mise en œuvre :

1. le Réseau québécois de Villes et Villages en santé a développé une grande crédibilité et prend appui sur un large partenariat avec le milieu municipal, des organismes relais et des institutions, partena-riat construit progressivement depuis plus de deux décennies.

2. le RQVVS bénéfi cie d’une expertise professionnelle reconnue et a développé une expertise spéci-fi que en matière de contenu et de communication avec l’implantation et l’animation de la Fête des voisins.

3. le RQVVS est également en lien avec les initiatives de Voisins solidaires ailleurs dans le monde et en mesure de partager et de profi ter de l’expertise développée sur le terrain.

4. les citoyens et citoyennes qui se sont mobilisés dans la Fête des voisins constituent un large poten-tiel humain susceptible d’être intéressés à poursuivre leur action dans Voisins solidaires.

5. Et cinquièmement, des municipalités québécoises sont déjà en attente et disposés à s’investir dans Voisins solidaires.

20

5

5.3 Le processus de mise en œuvre

La stratégie de mise en œuvre comporte une dimension nationale et une dimension locale.

Au plan national, les étapes majeures sont les suivantes :1. recrutement des ressources humaines ;2. identifi cation des sites du projet-pilote ;3. élaboration d’un protocole de partenariat municipalité-RQVVS ;4. signature du protocole de partenariat avec les 5 pilotes ;5. production d’un outil précisant le cadre opérationnel du projet au niveau local ;6. élaboration du cadre d’évaluation ;7. développement d’une boîte à outils : présentation de VS, plan local de communication,

sondage local, messages pour les citoyens, trucs du bon voisinage, etc. ;8. soutien local à l’implantation et le suivi des projets ;9. production du rapport d’évaluation ;

10. production de la stratégie d’implantation à l’échelle québécoise.

Au plan local, les étapes se présentent ainsi :a. sensibilisation et adhésion des élus, des gestionnaires municipaux et des organismes partenairesb. signature du protocole de partenariat avec le RQVVSc. la mise en place du comité local de coordinationd. établissement de la stratégie localee. implantation, suivi, développement d’outils locauxf. participation à l’évaluation

5.4 Le calendrier de réalisation

21

Outils et actions pouvant être appliqués dans les communautés

Suite à l’analyse de chacun des milieux pilotes, diverses mesures pourront être mises en œuvre pour stimuler les solidarités de voisinage. En voici un apperçu.

Outils généraux• Consultation locale : « Vous et vos voisins ». Via sondage (7 ou 8 questions) dans le journal munici-

pal et via site de la municipalité. Pour mieux cerner les attentes des citoyens (enthousiaste, réservé, pas d’intérêt…) et commencer à constituer une liste de citoyens intéressés.

• Identifi er un ou des porte-paroles locaux qui contribuent à mobiliser (personnalité ou vedette locale).

• Proposer aux citoyens de se doter d’un bottin des voisins.

• Rendre accessible une identifi cation résidentielle Voisins solidaires.

• Créer une page Web :

» Idées, témoignages, outils.

» Inscription des citoyens

» Envois périodiques

» Facebook, Twitter

• Proposer un outil Web (de type page Facebook) pour utilisation par les voisins intéressés pour promouvoir les échanges de services et les gestes d’entraide dans son voisinage. (Je cherche une gardienne, j’ai des vivaces à donner, etc.).

• Identifi er des actions spécifi ques pour les clientèles vulnérables. Exemple : expérimenter la mise en place de réseau de voisinage de soutien pour les aînés. Parrainage des voisins pour l’intégration des immigrants et des nouveaux arrivants dans un quartier, etc.

• Développer des actions de valorisation et d’échanges pour les citoyens qui s’engagent.

Actions saisonnières et thématiques• Promotion de la Fête des voisins et s’assurer d’une importante mobilisation des organismes et des

citoyens.

• Tenir un week-end spécial: le 48 heures Voisins solidaires.

• Promouvoir L’été « Voisins solidaires » (voisins en vacances, organiser la garde d’un animal domes-tique, l’arrosage des plantes, la surveillance des lieux, un calendrier de présence pour une personne âgée…)

• Promotion d’initiatives de voisinage pendant le temps des Fêtes.

• Promotion d’initiatives de solidarité de voisinage lors de catastrophes ou crises (H1N1, verglas, chaleur accablante, etc.)

• Éco-voisins (des voisins se mettent ensemble pour composter, jardiner, nettoyer, etc.)

22

6

Les principaux paramètres de l’évaluation

L’objectif de l’évaluation du projet-pilote est de pouvoir en tirer les enseignements nécessaires à un dé-ploiement à l’échelle québécoise. Un expert en cette matière sera recruté pour en défi nir avec précision la démarche et les paramètres d’évaluation. D’emblée, on peut déjà penser qu’il sera important d’éva-luer les retombées de l’approche Voisins solidaires sur la vie des personnes concernées par le projet, de même que les conditions de réussite d’une telle approche, notamment sur le soutien à l’implantation.

Les impacts à long terme ne pouvant être évalués dans une aussi courte période de temps, l’évaluation tentera plutôt de suivre l’évolution du projet à partir de dimensions (ce qu’est Voisins solidaires pour les différents acteurs) qui seront à déterminer de manière plus spécifi ques, tant par le Comité respon-sable de l’ensemble du projet-pilote qu’avec les comités de chacun des sites participants. La collecte des données pourrait se faire par le biais de journaux de bord dans les comités locaux, d’entrevues ou de courts questionnaires auprès des citoyens. De manière générale toutefois, l’approche utilisée sera la plus participative possible, c’est-à-dire que chaque comité local sera mis à contribution tant dans la collecte des données que dans l’analyse de celles-ci, ainsi que le Comité national pour l’analyse trans-versale des cinq expériences.

Étant donné le caractère évolutif du projet-pilote Voisins solidaires et le fait que les communautés sont appelées à adapter elles-mêmes la démarche Voisins solidaires à leur contexte, il est diffi cile de préci-ser davantage le type d’évaluation de même que les dimensions précises à observer. L’évaluation, bien qu’elle proposera une démarche similaire aux cinq communautés afi n de pouvoir tirer des conclusions d’ensemble, devra s’ajuster aux modes de fonctionnements qui seront décidés localement, d’où la nécessité d’impliquer tous les niveaux d’acteurs dans la défi nition du devis d’évaluation, démarche qui sera entreprise dès le démarrage du projet-pilote.

23

7

Liste des références

1 RÉSEAU QUÉBÉCOIS DE VILLES ET VILLAGES EN SANTÉ. Qui sommes-nous, [En ligne], [www.rqvvs.qc.ca/fr/qui-sommes-nous/reseau-mission-et-objectifs].2 LETARTE, Georges. Évaluation des effets de l’expérience québécoise de la fête des voisins, Québec, 2009, Étude produite à la demande de Ressources humaines et développement des compétences Canada. Page 9.3 Idem, page 21.4 PÉRIFAN, Atanase. Pas de quartier pour l’indifférence. Pour en fi nir avec la France dépressive. Éditons La Table ronde, Paris, 2005, 170 p.5 ORGANISATION DE COOPÉRATION ET DE DÉVELOPPEMENT, Measuring the progress of societies, [En ligne], Newsletter publiée le 9 juillet 2011. [http://www.wikiprogress.org/images/Newsletter-Issue_9-July.pdf].6 GIDDENS, Anthony. The consequences of the modernity. Stanford Univesity Press, Stanford (California), 1990,186 p.7 CYRULNIK, Boris. Citation notée et transmise par Atanase Périfan. 23 décembre 2008.8 CHARBONNEAU, Johanne. « Lien social et communautés locales : quelques questions préalables». Lien social et politiques. Numéro 39, printemps 1998, p.115-125.9 THÉRIAULT, Joseph Yvon. Conférence prononcée à la Cérémonie de présentation à la Société royale du Canada, [en ligne], samedi 26 novembre 2005, Salle du sénat, Université d’Ottawa. [www.mondecommun.com/uploads/PDF/TexteTheriaultLieuSociologie.pdf]10 GIDDENS, Anthony. Op.cit.11 GRAND’MAISON, Jacques. Questions interdites sur le Québec contemporain, Montréal, 2003, 51 p. (Collec-tion Les classiques des sciences sociales).12 HAVEL, Vaclav. Méditations d’été, Édition de l’aube, 1991, 165 p.13 JETTÉ, Christian. Lien social et modernité: de nouvelles exigences pour les intervenants de l’action collective. [Intervention au Congrès international des formateurs en travail social et des professionnels francophones de l’intervention sociale], Namur, 2007.14 Idem, page 11.15 BAILLARGEAU, Évelyne. L’habitation comme vecteur du lien social, Presses de l’Université du Québec, Qué-bec, 2008, P.5, (Collection Problèmes sociaux et interventions sociales).16 MONTMINY, Paul. Santé et Solidarités de voisinage : synthèse des connaissances et des bonnes pratiques, Institut national de santé publique, Québec, 2011. 17 LETARTE, Georges. Op.cit.18 MINISTÈRE DE LA SANTÉ ET DES SERVICES SOCIAUX DU QUÉBEC. La santé autrement dit : pour espé-rer vivre plus longtemps et en meilleure santé. Québec, 2007, page 16.19 MINISTÈRE DE LA SANTÉ ET DES SERVICES SOCIAUX DU QUÉBEC. La santé autrement dit : pour espé-rer vivre plus longtemps et en meilleure santé. Québec, 2007, page 16.20 BÉLANGER, J.P., Robert B. SULLIVAN et Benoît SÉVIGNY. Capital social, développement communautaire et santé publique, Association pour la santé publique du Québec, 2000, 224 p.21 MONTMINY, Paul. op.cit. page 3.

24

22 BERGERON, André, Michel MOREL et Isabelle THÉRIEN. Portrait d’initiatives du milieu pour lutter contre la pauvreté. C. BOUCHARD et M. F. RAYNAULT (dirs.), rapport de recherche soumis au ministère de l’Emploi et de la Solidarité sociale, OMISS, Montréal, 2002, 46 p.23 CLÉMENT, Serge, Jean MANTOVANI et Monique MEMBRADO. « Du bon voisinage aux solidarités de proxi-mité », Solitude et isolement des personnes âgées, CIRUS, CNRS - Université de Toulouse-Le Mirail, 2004, pages 105-138.24 CAGNEY, Kathleen A. et Ming WEN. Social Capital and Aging-Related Outcomes. New York, NY Springer, 2007.25 « KLINENBERG, Eric [Entrevue]», Auteur de Heat Wave: A Social Autopsy of Disaster in Chicago. [En ligne], Chicago, 2002, [http://www.press.uchicago.edu/Misc/Chicago/443213in.html]26 INSTITUT NATIONAL DE SANTÉ PUBLIQUE. Étude de besoins sur des outils d’information destinés à la population âgée lors d’événements météorologiques extrêmes, [En ligne], 2011 [http://www.inspq.qc.ca/pdf/publications/1284_BesoinOutilsInfoPersAgeesMeteoExtreme.pdf]27 CAPELLE-FILLION, Lara. Relations de voisinage et impact sur la santé mentale. Mémoire (M.A.) - Université Paris V– René Descartes, institut de psychologie, 2011, [En ligne]. [http://laracap.free.fr/memoire.pdf].

25