15
Les théories cognitivistes de l’apprentissage par Johanne Rocheleau Ph.D. 5 octobre 2009

par Johanne Rocheleau Ph.D. · l’ergonomie cognitive provenant de la psychologie gestaltiste ou encore des nombreuses études du domaine de la linguistique et des neurosciences

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: par Johanne Rocheleau Ph.D. · l’ergonomie cognitive provenant de la psychologie gestaltiste ou encore des nombreuses études du domaine de la linguistique et des neurosciences

Les théories cognitivistes de l’apprentissage

par

Johanne Rocheleau Ph.D.

5 octobre 2009

Page 2: par Johanne Rocheleau Ph.D. · l’ergonomie cognitive provenant de la psychologie gestaltiste ou encore des nombreuses études du domaine de la linguistique et des neurosciences

L’apport des théories cognitivistes de l’apprentissage

Johanne Rocheleau, 2009 2

Table des matières

Introduction .................................................................................................................................................... 2 Les postulats néo-béhavioristes de Tolman .................................................................................................... 3 Les apports de la Gestalt ................................................................................................................................. 4 Les trois cerveaux (Triune Brain) de Paul McLean (1973 ; 1978) ................................................................. 5

Cerveau et apprentissage ............................................................................................................................ 9 Les principes de l’étude du langage ..............................................................................................................10 Les postulats et principes cognitivistes de l’apprentissage ............................................................................12 Les postulats cognitivistes contemporains .....................................................................................................13 Conclusion .....................................................................................................................................................14 Références .....................................................................................................................................................15

Site à consulter pour en savoir plus ...........................................................................................................15

Introduction

Lorsque Hull a commencé à s’intéresser à ce qui se passait dans la tête d’un apprenant, il était

bien loin de se douter qu’il mettait le doigt sur une pierre d’achoppement qui allait faire naître tant

et tant de recherches et d’expériences complexes sur le cerveau humain!

Contrairement à l’approche béhavioriste,

l'approche cognitiviste de l'apprentissage met

l’accent sur les facteurs du processus

internes d'acquisition de la connaissance

dans le cerveau et accorde beaucoup moins

d'importance aux facteurs environnementaux

que l'approche béhavioriste. Elle considère

l'apprentissage comme un processus actif de

construction de la connaissance, reconnaît la

présence de processus cognitifs complexes

dans l'apprentissage, la nature cumulative de

l'apprentissage et le rôle des connaissances antérieures. L'approche cognitiviste s'intéresse à la

représentation et l'organisation des connaissances dans la mémoire et elle se préoccupe de

l'analyse de la tâche d'apprentissage et de la performance en termes de processus cognitifs

impliqués dans l'apprentissage. Au contraire des théories béhavioristes, les théories cognitivistes

du traitement de l'information décrivent l'apprentissage comme une série de transformations de

l'information qui s'opèrent à travers les structures du cerveau, d’où l’importance de se pencher

sur son anatomie et son fonctionnement.

Figure 1 Le cerveau, la matière grise

Page 3: par Johanne Rocheleau Ph.D. · l’ergonomie cognitive provenant de la psychologie gestaltiste ou encore des nombreuses études du domaine de la linguistique et des neurosciences

L’apport des théories cognitivistes de l’apprentissage

Johanne Rocheleau, 2009 3

De nombreuses théories composent l’approche cognitiviste qui repose sur plusieurs postulats1

dont certains datent des années 30, grâce aux études de Edward Chace Tolman (1932, 1938,

1942, 1959). Certains postulats sont issus d’autres théories de l’apprentissage mais ont été

adoptés par les cognitivistes, comme c’est le cas de plusieurs principes du domaine de

l’ergonomie cognitive provenant de la psychologie gestaltiste ou encore des nombreuses études

du domaine de la linguistique et des neurosciences. L’approche cognitiviste est beaucoup plus

complexe que l’approche béhavioriste et son évolution débute avec les apports des néo-

béhavioristes.

Dans ce texte, nous examinerons les différentes théories constituantes de l’approche

cognitivistes pour en dégager les principes et les postulats utiles pour l’enseignement-

apprentissage. Nous procéderons de manière chronologique afin de faire ressortir les différents

apports et de les mettre en relation les uns avec les autres pour démontrer les influences et les

évolutions qu’a connu l’approche cognitiviste de l’apprentissage. Afin d’alléger le texte, les

principales références bibliographiques ont été retirées. Cependant, vous les retrouverez à la fin

du présent document.

Les postulats néo-béhavioristes de Tolman

Les premiers postulats cognitivistes sont nés en réaction à certains postulats béhavioristes. Le

premier chercheur à se distinguer de l’approche béhavioriste traditionnelle après Hull (le premier

néo-béhavioriste) fut Tolman, dont la théorie est appelée « purposive behaviorism ». Bien qu’il

conduise des études dont les sujets sont encore des animaux (rats), Tolman parvient à dégager

les premiers postulats cognitivistes :

1. Le comportement se situe dans une dimension plus globale. Tolman soutient que l’intention et la signification d’un comportement ne peuvent s’expliquer dans la relation stimuli-réponses parce que d’autres facteurs influencent le comportement.

2. L’apprentissage peut se produire sans renforcement. Tolman renie l’importance accordée au renforcement en démontrant que ce dernier peut tout aussi nuire à l’apprentissage. Par des études comparatives et empiriques sur trois groupes de rats, Tolman démontre que les rats n’ayant pas reçu de renforcement ont démontré des performances supérieures aux autres groupes de rats ayant reçu des renforcements administrés de manières différentes. Il conduit ensuite plusieurs recherches et conclut que le renforcement n’est pas un facteur critique pour l’apprentissage mais qu’il peut influencer la performance.

3. Il peut y avoir apprentissage sans que des changements soient constatés dans le comportement. Tout comme les tenants des approches humanistes de l’apprentissage, Tolman constate que des apprentissages peuvent être réalisés sans qu’ils se manifestent dans les comportements. Il nomme ces apprentissages « apprentissages latents ».

1 Un postulat est une croyance, une assise fondamentale à laquelle on adhère. Un postulat donne naissance à de

nombreux principes qui à leur tour, se composent de règles que l’on peut décomposer en normes.

Principe

VISA à

éviter!

Page 4: par Johanne Rocheleau Ph.D. · l’ergonomie cognitive provenant de la psychologie gestaltiste ou encore des nombreuses études du domaine de la linguistique et des neurosciences

L’apport des théories cognitivistes de l’apprentissage

Johanne Rocheleau, 2009 4

4. Plusieurs variables d’intervention doivent être considérées. Tolman soutient tout comme Hull que la motivation, l’habitude et l’intention jouent des rôles essentiels dans l’apprentissage. Il ajoute que des états physiologiques et cognitifs affectent les comportements observés. Il reconnaît l’importance des différences individuelles dans l’apprentissage.

5. Le comportement est intentionnel. Pour Tolman, l’apprentissage n’est pas qu’une réaction à un environnement ; il vise l’atteinte d’un but pour agir sur l’environnement.

6. Les attentes affectent le comportement. Lorsque quelqu’un a appris qu’un certain type d’actions ou de comportements engendre certaines conséquences précises, des attentes se manifestent par rapport à ces conséquences. Tolman soutient alors que ce n’est pas le renforcement qui affecte la réponse, mais l’expectative de cette conséquence précise (qui pourrait être un renforcement) qui affecte la réponse qu’elle précède.

7. L’apprentissage est le résultat d’un corps organisé d’information. Toujours avec ses rats, Tolman a démontré que l’apprentissage est une somme d’informations organisées, les rats ayant intégré l’expérience d’un labyrinthe A pour en déduire le chemin à parcourir dans un labyrinthe B. En s’inspirant des travaux de la psychologie Gestalt allemande, il élabore le concept de schèmes mentaux (cognitive map).

Si Tolman respecte le principe d’équipotentialité des béhavioristes (ce qui s’applique aux

animaux s’applique aussi à l’homme), il apporte cependant un éclairage nouveau sur le

fonctionnement du cerveau humain et le rôle qu’il joue dans l’apprentissage. Il inspirera de

nombreux autres chercheurs qui apporteront leurs contributions à l’élaboration de l’approche

cognitiviste, dont deux grandes tendances se dégageront :

1. les neurosciences ou psychophysiologie, qui tenteront d’expliquer les comportements humains à partir des mécanismes physiques de fonctionnement du cerveau, notamment par la psychologie gestaltiste et la théorie des trois cerveaux de McLean ;

2. la psychologie cognitive qui visera l’établissement de méthodes pédagogiques facilitant le traitement de l’information en s’appuyant sur les résultats des recherches en neurosciences.

Les apports de la Gestalt

Les tout premiers à s’intéresser au fonctionnement du cerveau ont été les gestaltistes. Le mot

allemand « Gestalt » signifie « forme ». La psychologie gestaltiste met l’accent sur l’importance

des processus organisationnels dans la perception, l’apprentissage et la résolution de problème

et croit que les individus sont prédisposés pour organiser l’information d’une manière particulière.

Voici les principaux postulats de cette approche :

1. La perception est souvent différente de la réalité. Par exemple, certains effets lumineux peuvent modifier la perception d’objets et ainsi laisser croire à une impression de mouvements, appelé le phénomène phi.

2. Le tout est plus grand que la somme de ses parties. Les gestaltistes croient que l’expérience humaine ne peut être étudiée par la conduite de recherches sur différents volets isolés. Une combinaison des éléments peut démontrer un modèle complètement différent de l’étude d’éléments isolés. L’importance de l’interrelation entre les éléments a donné naissance au principe de transposition qui stipule que des relations entre des éléments peuvent être transposées à d’autres éléments dans d’autres situations.

Page 5: par Johanne Rocheleau Ph.D. · l’ergonomie cognitive provenant de la psychologie gestaltiste ou encore des nombreuses études du domaine de la linguistique et des neurosciences

L’apport des théories cognitivistes de l’apprentissage

Johanne Rocheleau, 2009 5

3. L’individu structure et organise ses connaissances. Un individu essaie d’imposer une structure et une organisation à une situation afin de lui donner une signification à partir de ses propres expériences.

4. L’individu est prédisposé à organiser ses expériences d’une certaine manière. Malgré les différences individuelles, certains mécanismes perceptuels sont communs à tous les individus. De ce postulat découlent plusieurs principes :

a) le principe de proximité, qui dit que les individus ont tendance à percevoir des éléments regroupés étroitement dans l’espace comme étant une seule unité ;

b) le principe de similarité, qui stipule que les individus ont tendance à reconnaître une unité par une ressemblance avec une autre unité ;

c) le principe de Prägnanz (aussi appeler principe de closure), selon lequel les individus ont tendance à compléter simplement les images qu’ils voient dont certains éléments pourraient être manquants afin de reformer un ensemble signifiant ;

d) l’apprentissage suit le principe de Prägnanz, ce qui implique la formation de traces dans la mémoire qui deviennent plus précises mais plus simples, concises et complètes au fur et à mesure que des expériences sont vécues par un individu. Ce même principe expliquerait aussi les distorsions et les différences de perception entre plusieurs individus.

e) la résolution de problème implique la restructuration et l’intuition, ce qui signifie que la résolution de problème implique la combinaison et la recombinaison des divers éléments d’un problème jusqu’à ce qu’une structure qui résout ce problème soit élaborée.

Bien sur, ces principes gestaltistes sont trop simplets pour expliquer l’apprentissage humain,

mais ils s’avèrent efficaces lorsque réservés aux mécanismes perceptuels humains et sont utiles

dans l’élaboration de matériel didactique. De nombreuses expériences ont été conduites par des

neuroscientistes à partir de ces postulats, si bien qu’aujourd’hui un volet entier de la technologie

éducative est consacré à l’ergonomie cognitive, pour optimiser le traitement de l’information

perçue par l’apprenant.

Les trois cerveaux (Triune Brain) de Paul McLean (1973 ; 1978)

L’un des apports les plus importants des neurosciences pour l’éducation est certainement la

théorie des trois cerveaux (ou cerveau triune) de Paul MacLean. D’après MacLean, nous ne

disposons pas d’un seul cerveau mais de trois cerveaux distincts en parfaite harmonie : le

complexe reptilien, le système limbique (ou paléo-mammalien) et le néo-cortex (ou cerveau néo-

mammalien). Comprendre le fonctionnement de cet ensemble le plus important du corps humain

peut apporter un éclairage important pour établir un environnement d’apprentissage adéquat pour

nos élèves tout en leur permettant de mieux traiter l’information. Le cerveau total, c’est l’organe

de l’apprentissage. C’est sur ce postulat fondamental que s’appuient les approches cognitives de

l’apprentissage. Voyons les rôles de ces trois cerveaux, puis discutons de l’importance de chacun

dans le processus d’apprentissage.

Le cerveau est

économe!

Page 6: par Johanne Rocheleau Ph.D. · l’ergonomie cognitive provenant de la psychologie gestaltiste ou encore des nombreuses études du domaine de la linguistique et des neurosciences

L’apport des théories cognitivistes de l’apprentissage

Johanne Rocheleau, 2009 6

Le cerveau le plus ancien est le complexe reptilien. Situé à la base du crâne, le complexe

reptilien assume les fonctions vitales de l’homme tout en synchronisant les mécanismes

involontaires de maintien de l’équilibre et du métabolisme (les homéostats, c'est-à-dire les

régulateurs du corps) tels que la température, la déglutition, la digestion, la respiration, la

pression sanguine, le battement et le rythme cardiaques, l’éveil et le sommeil, etc., les influx

nerveux moteurs et sensoriels, les réflexes localisés, l’équilibre du corps, la coordination des

mouvements volontaires Tous les animaux possèdent un cerveau reptilien qui nous provient

d’aussi loin que de l’ère des dinosaures. C’est pourquoi le principe d’équipotentialité des

béhavioristes – le comportement de l’animal s’appliquant aussi à l’homme – s’applique lorsque

l’on discute de ce vieux cerveau. Douze répertoires de comportements sont régis par le complexe

reptilien tels que (1) s’alimenter (chasser, reconnaître ses proies et les aliments), (2) s’abreuver

(y compris trouver de l’eau potable), (3) se reproduire, (4) se protéger et se vêtir, (5) se loger ou

s’abriter, (6) se regrouper (hiérarchiquement, avec d’autres membres de son espèce), (7) se

repérer dans l’espace et (8) s’orienter, (9) se réchauffer, (10) se reposer, (11) s’isoler et se

concentrer, et (12) se sauver (dans tous les sens du terme), bref, tout ce qui est essentiel à la

survie de l’homme. Quand on parle d’instinct, en fait, on parle du complexe reptilien. Le complexe

reptilien réagit très rapidement, mais il s’acquitte de ses tâches de manière grossière. Il n’est

capable d’aucun sentiment mais obéit à l’instinct grégaire c'est-à-dire la hiérarchie de la meute,

du troupeau, etc. D’ailleurs, c’est parce qu’il est si rudimentaire qu’il ne suffit pas pour permettre

l’évolution des espèces.

Au cours de l’évolution apparaissent les

mammifères et avec eux le cerveau paléo-

mammalien2 aussi appelé système limbique.

La raison en est simple : puisque les femelles

portent et nourrissent leurs petits, une relation

affective se développe, relation qui n’a pas sa

place dans le – trop grossier – cerveau

reptilien. Le complexe reptilien se recouvre

alors d’une couche de cellules qui forment le

système limbique. Le système limbique est le

siège de l’affectif. Quand on parle d’émotions,

on parle du système limbique : amour, amitié,

joie, mais aussi peur, inquiétude, tristesse,

etc. Il est aussi le siège de la mémoire ce qui

2 Signifiant pendant le développement des premières mamelles, avant la constitution du néo-cortex. Ici, le préfixe

« paléo » revêt sa signification anthropologique de transition entre deux états anté et néo.

Figure 2 Fonctions des différentes aires corticales

Page 7: par Johanne Rocheleau Ph.D. · l’ergonomie cognitive provenant de la psychologie gestaltiste ou encore des nombreuses études du domaine de la linguistique et des neurosciences

L’apport des théories cognitivistes de l’apprentissage

Johanne Rocheleau, 2009 7

permet entre autres la reconnaissance de la progéniture et la faculté de jouer. Parce que

mémoire et émotions se côtoient dans le système limbique, les cognitivistes sont persuadés

qu’on ne peut séparer le cognitif de l’affectif et que des connaissances apprises dans un climat

où s’établissent des relations affectives sont plus faciles à récupérer de la mémoire à long terme.

Plus raffiné que le complexe reptilien, le système limbique est cependant moins rapide, mais il

contribue au maintien de l’équilibre du corps avec le complexe reptilien. En fait, le système

limbique nous permet de maintenir une certaine vitesse de croisière. Mais le système limbique

est incapable de prendre une décision, de planifier quoi que ce soit. Arrive alors le néo-cortex

pour pallier ces difficultés.

Le néo-cortex ou cerveau néo-mammalien ne se retrouve que chez l’humain, ce qui en fait un

être unique. C’est pourquoi les cognitivistes rejettent le principe d’équipotentialité si cher aux

béhavioristes. Très raffiné, voire pointilleux, le néo-cortex est le siège de la cognition. Sa vitesse

d’exécution est très lente, mais il s’acquitte de multiples tâches d’un très haut niveau de

complexité : production du langage symbolique (lecture, écriture, arithmétique, etc.),

discrimination et interprétation des situations, pensée abstraite et invention, etc. Il décode les

situations et transmet les informations au système limbique, qui à son tour évalue s’il est utile de

les acheminer au complexe reptilien. Certaines aires ont été précisément identifiées et il est

possible d’en décrire les fonctions et les conséquences de lésions (accidents ou maladies – voir

figure 2). Tout apprentissage implique le néo-cortex.

Le cerveau est l’organe qui s’est raffiné pendant l’évolution pour répondre à de nouveaux besoins

comme on peut le constater dans le tableau synthèse qui suit :

Tableau 1- Tableau-synthèse des caractéristiques du cerveau triune

Complexe reptilien Cerveau paléomammalien (système limbique)

Cerveau néomammalien (néo-cortex)

Esprit instinctuel Esprit émotionnel Esprit rationnel

Grossier personnage Bon vivant, s’accommodant de ses deux voisins

Personnage raffiné et pointilleux

Pilote automatique Co-pilote Pilote

Contrôle des fonctions vitales Siège des émotions et de la mémoire

Siège de la pensée humaine (cognition et encodage des

émotions)

Régule les réactions physiques et des archétypes – mécanismes de

survie

Préserve l’espèce et ses descendants – mécanismes

affectifs

Articule des fonctions complexes d’évaluation, de détection et

d’implantation de programmes en regard de situations précises – le

plus important des 3 cerveaux

Douze répertoires de comportements – peu complexe

Communique avec le cerveau reptilien et le néo-cortex – plus

complexe que le cerveau reptilien

Est capable d’apprendre (lecture, écriture, arithmétique), de

raisonner, de réviser et de planifier – très complexe

Vitesse de réaction très vive Vitesse de réaction plus lente Vitesse de réaction très lente

Page 8: par Johanne Rocheleau Ph.D. · l’ergonomie cognitive provenant de la psychologie gestaltiste ou encore des nombreuses études du domaine de la linguistique et des neurosciences

L’apport des théories cognitivistes de l’apprentissage

Johanne Rocheleau, 2009 8

Les trois cerveaux forment un ensemble dont l’importance est plus grande que la somme de ses

parties parce que s’y ajoutent toutes les relations et les influx nerveux entre ces trois cerveaux.

De plus, chaque partie recueille plus d’informations que si elle était isolée, parce qu’elle peut

compter sur les deux autres pour les interpréter. Certains mécanismes du cerveau ne sauraient

exister sans ces échanges. C’est le cas du processus de rétrogradation. Mario Richard (1988)

donne l’exemple suivant :

« Prenons l’exemple d’une menace perçue par un individu dans une situation donnée. À l’occasion d’une promenade dans un champ, le néo-cortex de cet individu distingue le signal « taureau méchant qui s’approche ». Cette information est transmise au cerveau paléomammalien qui lui élabore l’émotion « peur » afin de changer le réglage de l’homéostat contrôlant les biais corporels. Le cerveau reptilien reçoit l’ordre (l’émotion) du système limbique, sélectionne le programme « lutte » et règle le biais à « urgence », augment le taux d’adrénaline, la pression sanguine, la pulsation cardiaque, etc., afin de permettre un effort maximal à court terme. La personne court à toute vitesse jusqu’à la clôture la plus proche, saute par-dessus pour s’effondrer de l’autre côté. Graduellement, l’homéostat rétablit les biais à un rythme normal. »

Le processus de rétrogradation s’enclenche aussitôt qu’une menace est perçue pour n’importe

lequel des douze répertoires du cerveau reptilien, empêchant du coup toute transaction cognitive.

C’est donc dire à quel point il est important de fournir à l’apprenant un environnement

d’apprentissage libre de toute menace ou de contrainte (stress). Reprenons l’exemple du

taureau, mais avec une menace pour un élève cette fois et comparons :

Tableau 2 - Processus de rétrogradation du cerveau triune

Néo-cortex

(esprit rationnel, c'est-à-dire perception, décodage – cognition

– logique)

Taureau méchant qui s’approche Stress : Si tu ne …, alors tu … !

Système limbique (réaction émotive)

peur, lutte, urgence

colère, tristesse (re : estime de soi), pleurs, incapacité de parler

(le motton !)

Complexe reptilien (réaction physique)

adrénaline, rythme cardiaque ,

pression sanguine

vomissements , violence

Un élève stressé est incapable d’apprendre.

On voit bien que tout stress a des conséquences physiques et que ce phénomène s’explique par

la rétrogradation du néo-cortex vers le cerveau reptilien. C’est pourquoi l’établissement d’un

climat d’apprentissage favorable et motivant est si cher aux cognitivistes. Les élèves doivent se

sentir défiés, non menacés, le défi impliquant l’intérêt à apprendre. Un enseignant cognitiviste

accorde beaucoup d’importance à la motivation de l’apprenant. Si le néo-cortex peut émettre

des signaux de détresse aux deux autres cerveaux qui nuisent à l’apprentissage, de quelle

manière traite-t-il l’information pour favoriser l’apprentissage?

Motivation

Climat

Page 9: par Johanne Rocheleau Ph.D. · l’ergonomie cognitive provenant de la psychologie gestaltiste ou encore des nombreuses études du domaine de la linguistique et des neurosciences

L’apport des théories cognitivistes de l’apprentissage

Johanne Rocheleau, 2009 9

Cerveau et apprentissage

Le premier devoir du néo-cortex est de percevoir l’information. Le néo-cortex décode les

informations qui lui proviennent de l’environnement. Il est donc sensible et capable de capter un

bon nombre d’informations. Lorsqu’un message est décodé, le néo-cortex recherche des

schémas similaires et active un programme permettant de réaliser la bonne procédure au bon

moment. C’est alors qu’intervient la motricité. La sensibilité qui nous permet de percevoir et la

motricité qui nous permet d’agir occupe des parties importantes du cerveau, comme le démontre

l’illustration suivante :

Figure 3 Aire motrice primaire et aires somesthésiques tirés de Marien, E.N. et G. Laurendeau. (1993) Anatomie et

physiologie humaines. St-Laurent (Québec) : Éditions du renouveau pédagogique, p. 387

Entre la perception et l’action se déroule une quantité d’opérations mentales. Lorsque les

informations sont perçues, le cerveau recherche des schémas similaires dans la mémoire à long

terme. Il les détecte et les reconnaît de manière innée, en procédant du général au particulier

(animal chien Basset Hound Sir William le chien de Johanne). Lorsque nous sommes

exposés à une notion nouvelle, une nouvelle chose, nous n’arrivons pas à en tirer un sens. C’est

pourquoi les cognitivistes considèrent que le rappel des connaissances antérieures de

l’apprenant est essentiel dans toute activité de formation. Cependant, par association,

comparaison ou adaptation, on peut parvenir à décoder le sens d’un élément nouveau. C’est

Page 10: par Johanne Rocheleau Ph.D. · l’ergonomie cognitive provenant de la psychologie gestaltiste ou encore des nombreuses études du domaine de la linguistique et des neurosciences

L’apport des théories cognitivistes de l’apprentissage

Johanne Rocheleau, 2009 10

alors qu’il y a apprentissage. Le cerveau active alors le(s) membre(s) nécessaire(s) à la

réalisation de l’activité d’apprentissage. La compétence acquise sera répertoriée dans la

mémoire avec ses outils (sensoriels et moteurs), ce qui permettra plus tard de récupérer cette

procédure ou ce savoir.

Les compétences emmagasinées dans la mémoire, qu’elles soient déclaratives ou procédurales,

constituent des programmes, qui peuvent parfois inclure une bonne part d’automatismes. Peut

importe ce que nous faisons, nous agissons toujours de la même manière, dictée par le cerveau :

(ÉVALUATION DÉTECTION) IMPLANTATION

On évalue la situation en percevant, on détecte ensuite le schéma correspondant ou répondant le

plus à la situation et on implante le programme. Lorsque le programme est inexistant, le

programme le plus ressemblant est détecté, des modifications sont apportées pour

permettre une implantation. Le processus est raffiné jusqu’à ce que le nouveau programme

corresponde aux besoins de la situation. C’est ce que l’on appelle le montage de la compétence.

Lorsqu’un programme est implanté plusieurs fois avec succès, on dit qu’il est rodé. Le rodage

implique la pratique dans différentes situations, le réinvestissement des connaissances.

Lorsque plusieurs programmes sont implantés de manière satisfaisante, la confiance en soi

augmente. Lorsque plusieurs programmes échouent, l’estime de soi est atteinte.

En résumé, la motivation, le montage et le rodage des connaissances et des compétences sont

les étapes suggérées par les certains cognitivistes (dont Brien, 1997) pour favoriser

l’apprentissage. Bien sur, un climat libre de contrainte et de stress est essentiel pour éviter le

processus de rétrogradation. Pour plus d’information sur le cerveau triune et les théories

cognitivistes de l’apprentissage, consultez les sites suivants :

Les principes de l’étude du langage

Si les béhavioristes ont pu expliquer plusieurs comportements à partir de leurs observations sur

des animaux, certains phénomènes typiquement humains ne trouvaient pas de réponse, comme

l’ont démontré les linguistes. Le langage est humain, et par conséquent, il ne peut faire l’objet

d’études ayant pour sujets des animaux. Ce postulat va à l’encontre du postulat béhavioriste

d’équipotentialité. Même si plusieurs linguistes des années 1930 à 1960 rejettent en bloc

l’approche béhavioriste, plusieurs chercheurs de ce domaine ont tenté d’expliquer l’apprentissage

du langage en observant la séquence SR, pour l’apprentissage sériel3 et l’apprentissage par

3 Consistant en l’apprentissage de suite d’éléments dans l’ordre.

Montage

Rodage

Page 11: par Johanne Rocheleau Ph.D. · l’ergonomie cognitive provenant de la psychologie gestaltiste ou encore des nombreuses études du domaine de la linguistique et des neurosciences

L’apport des théories cognitivistes de l’apprentissage

Johanne Rocheleau, 2009 11

association4, tout en mettant l’accent sur les processus cognitifs de la mémoire. Ils démontrent

hors de tout doute que quelque chose se passe dans le cerveau humain. En découle une série

de principes concernant les capacités pour la mémoire à court et à long terme et la

reconnaissance des mots :

- L’apprentissage sériel se caractérise par un modèle particulier. Ce principe s’appuie sur des courbes de croissance dans l’apprentissage. On a en effet observé que les individus apprennent mieux les premiers et les derniers items d’une liste, alors que ceux situés au centre de la liste sont plus facilement oubliés. Ce postulat a donné naissance à deux règles, celle de l’effet primaire et celle de l’effet de récence. Si des concepts ou des mots sont présentés en premier lieu ou en dernier lieu dans une liste de mots, ils seront plus facilement retenus. D’où l’importance, lors de la présentation d’information dans une page-écran, de porter l’attention sur les premiers et les derniers concepts présentés et de réserver ces espaces pour les informations les plus importantes.

- Un matériel sur-appris est plus facilement retenu pour une plus longue durée. Ce principe est semblable au principe de répétition des béhavioristes. Les linguistes ont observé que des listes de mots sont retenues pour des périodes supérieures à un mois lorsqu’elles ont été sur-apprises. Bien que l’apprentissage par cœur ne soit pas très fréquent dans nos écoles maintenant, certaines informations ont avantage à être mémorisées pour faciliter des apprentissages subséquents. C’est le cas de certaines connaissances factuelles en sciences (par exemple, la combinaison des éléments chimiques des sous-groupes du tableau périodique) préalables à la réalisation de plusieurs expériences en sciences. La présentation de plusieurs types différents d’activités d’apprentissage d’un SAMI sur ce contenu pourrait en faciliter la rétention des diverses réactions chimiques et contribuer à éviter des accidents.

- La pratique distribuée est en général plus efficace que la pratique massive. Plusieurs sessions d’apprentissage permettent une meilleure rétention des informations qu’une session massive de formation. Plus encore, mieux les sessions de formation sont réparties dans le temps, plus l’information sera retenue. Ce principe peut servir de fondement à la répartition des activités d’apprentissage d’un SAMI.

- L’apprentissage dans une situation donnée influence l’apprentissage et la récupération d’information dans une autre situation. Les théoriciens de l’apprentissage du langage ont observé que lorsque des individus tentent d’apprendre deux listes de mots associés en paires, l’apprentissage de la deuxième liste nuit à la rétention de la première, un phénomène qu’ils appellent l’inhibition rétroactive. Plus encore, les individus ne parviennent pas à se souvenir de la deuxième liste, phénomène appelé l’inhibition proactive. De ces phénomènes découlent deux règles : la règle de la facilitation rétroactive et la règle de la facilitation proactive. Si les mots associés de la première liste sont liés de manière significative, alors ils seront retenus. Si les mots de la deuxième liste sont associés de la même manière significative que ceux de la première liste, ils seront mieux retenus. Pour la conception de matériel didactique, ce principe peut s’avérer utile lors de l’apprentissage des continents et des pays qui les composent de même que l’apprentissage pour ces différents pays et leurs capitales, etc.

- Les caractéristiques du matériel pédagogique affectent la rapidité avec laquelle les individus peuvent faire l’apprentissage de ce matériel. Les chercheurs de l’apprentissage du langage ont fait plusieurs constats dont découlent plusieurs règles qui seront utiles pour fournir des conseils concernant la rédaction des textes à l’écran :

1. Les mots sont plus facilement appris lorsqu’ils sont signifiants.

2. Les mots sont plus facilement appris lorsqu’ils sont faciles à prononcer.

4 Consitant en l’apprentissage de paires d’éléments.

Page 12: par Johanne Rocheleau Ph.D. · l’ergonomie cognitive provenant de la psychologie gestaltiste ou encore des nombreuses études du domaine de la linguistique et des neurosciences

L’apport des théories cognitivistes de l’apprentissage

Johanne Rocheleau, 2009 12

3. Les mots évoquant des objets concrets (ex. : tortue, marteau) sont plus faciles à mémoriser que les mots évoquant des concepts abstraits (ex. : vérité, joie) parce qu’ils peuvent être visualisés mentalement.

- Les individus imposent leurs significations lorsqu’ils apprennent de nouvelles informations. Des chercheurs ont découvert que certains individus qui tentaient d’apprendre des listes de mots sans signification (DUP – TEZ) parvenaient à les retenir en leur associant un sens (deputize) leur permettant de rétablir. Cette stratégie pourrait être conseillée pour la conception des activités d’apprentissage visant des contenus factuels.

- Les individus organisent ce qu’ils apprennent. Par exemple, pour apprendre, certaines personnes vont établir des catégories d’informations alors que d’autres utiliseront un ordre alphanumérique, etc. Quoi qu’il en soit, l’information est rarement retenue sous sa forme initiale de présentation. Si on désire que des informations soient retenues sous leur forme initiale, cette forme doit être significative pour l’apprenant.

- Les individus utilisent des stratégies de codage pour retenir l’information. Certaines personnes tenteront de visualiser les mots ou leur associer des synonymes de même que toutes sortes de mnémotechniques pour faciliter leur. Lorsque des stratégies sont suggérées pour apprendre certains contenus, des recherches ont démontrées un accroissement dans la rétention des informations. Cette stratégie peut être conseillée pour la conception des activités d’apprentissage et des consignes.

- Les individus tendent à apprendre des concepts globalement plutôt que mot à mot. Les idées sont plus facilement et rapidement retenues lorsque perçues globalement. Les détails et les mots justes sont plus souvent ignorés. Il s’agit d’une dimension importante dont il faut tenir compte dans la présentation des concepts.

Ces constats, formulés sous formes de principes et de règles peuvent être d’une grande utilité

pour la rédaction des textes pédagogiques ou la formulation des activités d’apprentissage de

même que pour la formulation de consignes de réalisation de ces activités. Plusieurs concernent

la conception microstructure des textes à l’écran et fournissent des pistes dans l’élaboration des

pages-écrans et des activités d’apprentissage, qui même en provenant d’études empiriques

d’origine béhavioristes peuvent être utiles dans une démarche constructiviste d’apprentissage.

Les postulats et principes cognitivistes de l’apprentissage

Les tenants de l'approche cognitiviste cherchent, au contraire des béhavioristes, à mettre en

lumière les processus internes de l'apprentissage. Pour les cognitivistes, l'apprenant est un

système actif de traitement de l'information, semblable à un ordinateur : il perçoit des

informations qui lui proviennent du monde extérieur, les reconnaît, les emmagasine en mémoire,

puis les récupère de sa mémoire lorsqu'il en a besoin pour comprendre son environnement ou

résoudre des problèmes. En effet, rappelons, de manière très simplifiée, que les chercheurs en

psychologie cognitive attribuent les grandes composantes suivantes au système humain de

traitement de l'information :

- Système d'enregistrement sensoriel. L'élève reçoit des stimuli visuels, auditifs, tactiles, olfactifs, etc. provenant de l'environnement. Des processus complexes de reconnaissance de formes et de filtration de l'information (puisqu'il y a des limites à ce qu'un individu peut percevoir à la fois) sont mis en oeuvre.

Page 13: par Johanne Rocheleau Ph.D. · l’ergonomie cognitive provenant de la psychologie gestaltiste ou encore des nombreuses études du domaine de la linguistique et des neurosciences

L’apport des théories cognitivistes de l’apprentissage

Johanne Rocheleau, 2009 13

- Mémoire à court terme. L'information perçue est transférée dans une mémoire à court terme, qui a une durée et une capacité très limitée (7 plus ou moins 2 informations ou « groupements d'informations » peuvent y être maintenus à la fois, pendant quelques secondes).

- Mémoire à long terme. L'information est ensuite emmagasinée dans cette mémoire permanente et de capacité illimitée. Des processus de récupération de l’information lui permettront par la suite de retrouver des informations dans cette « base de connaissances ».

Pour les cognitivistes, comme pour les béhavioristes, il existe une réalité objective externe, mais

ici l’élève doit intégrer cette réalité à ses propres schémas mentaux (plutôt qu’à acquérir des

comportements observables). C’est donc un changement dans les structures mentales de l’élève

qui caractérise l’apprentissage.

La vision de l'éducation qui en découle en est une qui met de l'avant l'importance d'un

engagement mental actif des élèves durant l'apprentissage afin qu’ils puissent traiter les

informations en profondeur et non pas uniquement en surface. Ainsi, l’enseignant utilisera des

stratégies d’enseignement visant :

- à aider l’apprenant à sélectionner et à encoder l’information lui provenant de l’environnement, par exemple, en l’encourageant à utiliser le soulignement pour identifier les idées importantes dans un texte, en lui enseignant des stratégies mnémoniques* ou des stratégies d’élaboration*, en lui présentant des schémas organisateurs au moment d’aborder un nouveau contenu, en l’aidant à faire des liens avec ses connaissances antérieures, en lui présentant un nouveau contenu dans de multiples contextes, etc.;

- à organiser, produire, diffuser et intégrer cette information (par exemple, en lui présentant des cartes cognitives, en l’encourageant à prendre des notes, à modéliser les concepts ou procédures appris, en l’aidant à se former des images mentales significatives, en lui demandant de produire des résumés, en suscitant un auto-questionnement, etc.);

- à recouvrer des informations de sa mémoire à long terme en lui fournissant, par exemple, divers indices ou des analogies.

De plus, la méthode d’enseignement favorisée laisse place à de multiples cheminements

d’apprentissage afin de tenir compte des différentes variables individuelles pouvant influencer la

manière dont les élèves traitent l’information. L’enseignant cognitiviste sera porté à utiliser des

NTIC qui permettent une grande interactivité avec les élèves, telles que des tutoriels intelligents*

ou des simulateurs* (ou simulations informatisées) de même que des progiciels de modélisation

(comme MOT).

Les postulats cognitivistes contemporains

Jusqu’à maintenant, il a été question de postulats, principes et règles béhavioristes et néo-

béhavioristes dont l’évolution a conduit vers le développement d’un autre point de vue sur le

fonctionnement du cerveau : le processus de traitement de l’information. Les béhavioristes se

sont concentrés sur le comportement, les néo-béhavioristes ont constaté qu’il se passait quelque

chose dans la boîte noire en analysant les écarts entre les stimuli et les réponses, les gestaltistes

se sont intéressés aux phénomènes perceptuels, les neurologues au fonctionnement du cerveau

Page 14: par Johanne Rocheleau Ph.D. · l’ergonomie cognitive provenant de la psychologie gestaltiste ou encore des nombreuses études du domaine de la linguistique et des neurosciences

L’apport des théories cognitivistes de l’apprentissage

Johanne Rocheleau, 2009 14

et les linguistes aux phénomènes d’acquisition du langage. C’est tout cela qui mena les

cognitivistes à s’interroger sur le mode de fonctionnement du cerveau : comment l’information

est-elle perçue, décodée, encodée, traitée dans la mémoire à court terme et à long terme?

Comment favoriser l’apprentissage? Voyons les postulats qui se sont dégagés pour former

l’approche cognitiviste de l’apprentissage :

- Certains processus mentaux n’appartiennent qu’aux humains. Tout comme pour les théoriciens du langage, les cognitivistes ont soutenu que si certaines habiletés sont uniques à une espèce, cette espèce est probablement unique. Dès lors, il est inutile de conduire des recherches sur des espèces animales, et les théories émergentes des recherches conduites avec des humains ne peuvent être généralisables aux animaux.

- Les processus cognitifs sont au centre des préoccupations. Des événements mentaux sont certainement impliqués dans le processus d’apprentissage humain. Tous les individus étant différents, ils apprendront donc différemment même dans un contexte identique.

- Les observations systématiques et objectives des comportements ne devraient pas être le centre d’intérêt de la recherche scientifique; plutôt, des inférences concernant des processus mentaux inobservables peuvent être déduites des comportements. Bien sur, les cogniticiens s’entendent sur des résultats de recherche fiables et valides, mais conçoivent que des conclusions puissent être tirées sur la nature des processus internes à l’origine de certaines réponses.

- Les individus sont actifs dans leur processus d’apprentissage. Plutôt que de répondre simplement à des stimuli de l’environnement, les individus contrôlent leur propre apprentissage en déterminant comment ils vont traiter l’information qu’ils reçoivent et si cette situation est susceptible de leur fournir un apprentissage.

- L’apprentissage implique la formation d’associations mentales qui ne sont pas nécessairement reflétées par des changements dans le comportement. Ce postulat est identique à celui d’apprentissage latent de Tolman.

- Les savoirs sont organisés. Tout comme les gestaltistes, les cognitivistes croient que les connaissances sont des ensembles organisés qui ne sont pas dissociables des émotions, des croyances et des attitudes.

- L’apprentissage est un processus d’établissement de relations entre les nouvelles informations et les connaissances déjà acquises. Les cognitivistes soulignent l’importance des connaissances antérieures dans l’acquisition des connaissances et l’établissement de relations entre les nouvelles connaissances à acquérir et celles déjà emmagasinées dans la mémoire. Ce postulat sera plus tard nuancé par les constructivistes pour qui la continuité est toutefois possible. Cependant le constat d’une rupture, d’un vide de connaissances à combler par l’apprenant serait plus générateur d’apprentissage pour les constructivistes.

De ces postulats découlent un ensemble de principes et de modèles d’enseignement-

apprentissage.

Conclusion

Ce document a permis de situer les différents apports théoriques ayant contribué au

développement de l’approche cogntiviste de l’apprentissage. Des apports de la Gestalt et des

linguistes, nous retenons un intérêt marqué vers les capacités perceptuelles individuelles qui

permettent à l’apprenant d’entrer en contact avec des contenus variés. Des neurosciences, nous

en retirons une compréhension du fonctionnement physique global du cerveau et de son

Page 15: par Johanne Rocheleau Ph.D. · l’ergonomie cognitive provenant de la psychologie gestaltiste ou encore des nombreuses études du domaine de la linguistique et des neurosciences

L’apport des théories cognitivistes de l’apprentissage

Johanne Rocheleau, 2009 15

influence sur les mécanismes psychologiques du fonctionnement humain. À partir de tous ces

concepts se sont élaborées des modèles pédagogiques qui servent de fondements pour

l’enseignement. L’établissement d’un climat d’apprentissage favorable, la motivation, le montage

et le rodage des connaissances sont les concepts de base à partir desquels les activités

d’apprentissage sont définies pour s’inscrire dans un ensemble cohérent d’activités qui

respectent le processus de traitement de l’information de l’apprenant.

Références

Basque, J., Rocheleau, J. et L. Winer. (1998). Une approche technologique pour l’école

informatisée. Montréal: École informatisée Clés en main du Québec inc., 37 p.

Brien, R. (1996). Science cognitive et formation. 3e édition. Ste-Foy (Québec) : Presses de

l’Université du Québec.

Elis Ormrod, Jeanne. (1999). Human Learning. (3e edition). Upper Saddle River (NJ) :

Merrill/Prentice Hall.

Marien, E.N. et G. Laurendeau. (1993) Anatomie et physiologie humaines. St-Laurent (Québec) :

Éditions du renouveau pédagogique.

MacLean, Paul. (1973). A Triune Concept of the Brain and Behavior. In T. Borg and D.

Campbell (éd.). The Hinks Memorial Lectures. Toronto: University of Toronto Press,

1973, p. 9-10

McLean, Paul. (1978). A Mind of Three Minds : Educating the Triune Brain. In Jeanne S. Chall

et Allan F. Minsky (éd.) Education and the Brain : 77th Yearbook for the Study of

Education. Chicago: University of Chicago Press, 1978. pp. 308-309.

Richard, Mario. (1988). Les trois cerveaux dans le processus d’apprentissage. In Vie

pédagogique, no. 54, avril 1988

Rocheleau, J. (1995). «Le concept de média d’apprentissage». Dans Revue de l’éducation à

distance (Vol. X, no. 2. Automne 1995, p. 1-16).

Rocheleau, J. (1997). Stratégies d’intégration des technologies de l’information et des

communications dans l’école : une approche systémique. Ste-Foy : Centre de formation

sur mesure, Télé-université.

Smith, P. L. et T. J. Ragan. (1993). Instructional Design. New York: Macmillan Publishing.

Office national du film du Canada. (1983) Les Trois Cerveaux. Réalisation : Thérien, Gilles.

Production Marc Beaudet et Hélène Verrier. 29 minutes 40 secondes. Montréal : ONF.

Site à consulter pour en savoir plus

Cognitivo (cours de psychologie de l’apprentissage du professeur Robert Brien):

http://www.fse.ulaval.ca/fac/dpt/cours/ten62630/