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HAL Id: tel-01681272 https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-01681272 Submitted on 11 Jan 2018 HAL is a multi-disciplinary open access archive for the deposit and dissemination of sci- entific research documents, whether they are pub- lished or not. The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers. L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destinée au dépôt et à la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, émanant des établissements d’enseignement et de recherche français ou étrangers, des laboratoires publics ou privés. L’utilisation des technologies de l’information et de la communication à l’hôpital face au droit Laora Tilman To cite this version: Laora Tilman. L’utilisation des technologies de l’information et de la communication à l’hôpital face au droit. Droit. Université du Droit et de la Santé - Lille II, 2017. Français. NNT: 2017LIL20008. tel-01681272

L'utilisation des technologies de l'information et de la

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Page 1: L'utilisation des technologies de l'information et de la

HAL Id tel-01681272httpstelarchives-ouvertesfrtel-01681272

Submitted on 11 Jan 2018

HAL is a multi-disciplinary open accessarchive for the deposit and dissemination of sci-entific research documents whether they are pub-lished or not The documents may come fromteaching and research institutions in France orabroad or from public or private research centers

Lrsquoarchive ouverte pluridisciplinaire HAL estdestineacutee au deacutepocirct et agrave la diffusion de documentsscientifiques de niveau recherche publieacutes ou noneacutemanant des eacutetablissements drsquoenseignement et derecherche franccedilais ou eacutetrangers des laboratoirespublics ou priveacutes

Lrsquoutilisation des technologies de lrsquoinformation et de lacommunication agrave lrsquohocircpital face au droit

Laora Tilman

To cite this versionLaora Tilman Lrsquoutilisation des technologies de lrsquoinformation et de la communication agrave lrsquohocircpital faceau droit Droit Universiteacute du Droit et de la Santeacute - Lille II 2017 Franccedilais NNT 2017LIL20008tel-01681272

ComUE Lille Nord de France

Thegravese deacutelivreacutee par

LrsquoUniversiteacute de Lille Droit et Santeacute

Ndeg attribueacute par la bibliothegraveque

__|__|__|__|__|__|__|__|__|__|

THEgraveSE

Pour obtenir le grade de Docteur en Droit public

Preacutesenteacutee et soutenue publiquement par

Laora TILMAN

Le 28 septembre 2017 agrave 14h30

Lrsquoutilisation des technologies de lrsquoinformation et de la communication agrave

lrsquohocircpital face au droit

JURY

Directeur de thegravese Madame Johanne SAISON-DEMARS Professeur des universiteacutes

Universiteacute Lille 2 Droit et Santeacute

Membres du jury Madame Ceacutecile MANAOUIL Professeur des universiteacutes Universiteacute

de Picardie Jules Verne Rapporteur

Monsieur Marcel MORITZ Maicirctre de confeacuterences des universiteacutes

Universiteacute Lille 2 Droit et Santeacute Suffragant

Monsieur Franccedilois VIALLA Professeur des universiteacutes Universiteacute

Montpellier 1 Rapporteur

Madame Caroline ZORN Docteur en droit priveacute

Suffragante

LrsquoUniversiteacute de Lille 2 nrsquoentend donner aucune approbation ni improbation

aux opinions eacutemises dans cette thegravese Elles doivent ecirctre consideacutereacutees comme propres agrave

leur auteur

Remerciements

Jrsquoadresse drsquoabord mes remerciements agrave Madame Johanne Saison- Demars qui mrsquoa

accordeacute sa confiance et a accepteacute de diriger mes travaux de recherche Son soutien sa

disponibiliteacute et ses conseils mrsquoont permis drsquoarriver au terme de cette thegravese

Je remercie les membres du jury qui mrsquoont accordeacute le privilegravege de leur preacutesence

Madame le Professeur Ceacutecile Manaouil Monsieur Marcel Moritz Monsieur le Professeur

Franccedilois Vialla et Madame Caroline Zorn

Je tiens agrave remercier lrsquoAssociation Nationale de la Recherche et de la Technologie

(ANRT) pour le soutien financier qursquoelle mrsquoa accordeacute Je remercie eacutegalement le CHRU de

Lille pour son accompagnement

Jrsquoexprime ma profonde gratitude agrave Monsieur Paul Barincou ancien Directeur des

Affaires Juridiques du CHRU de Lille qui mrsquoa permis de preacuteparer cette thegravese dans le cadre

drsquoune CIFRE Ces travaux nrsquoauraient pas vu le jour sans lrsquoopportuniteacute qursquoil mrsquoa accordeacutee Je

remercie eacutegalement Madame Marie-Charlotte Dalle Directrice des Affaires Juridiques du

CHRU de Lille pour son soutien et sa bienveillance au quotidien

Je tiens agrave exprimer ma reconnaissance agrave lrsquoeacutegard de mes proches mes parents qui

mrsquoont soutenue au long de mes eacutetudes de droit et ma sœur pour son eacutecoute sans faille Je

remercie sincegraverement mon conjoint pour sa preacutesence sa patience ses encouragements

La thegravese est un travail long et prenant Dans ce contexte lrsquoappui et le soutien de mes

amis a eacuteteacute une aide preacutecieuse Je leur en suis extrecircmement reconnaissante

Je tiens enfin agrave remercier mes relecteurs Alice dont les bons mots ont eacutegayeacute mes

corrections Elise qui mrsquoa accompagneacutee tout au long de ma thegravese Emmanuelle Franccedilois et

Marie qui ont pris le temps de mrsquoeacutepauler et de srsquointeacuteresser agrave mes travaux Heidi pour sa

rigueur et ses conseils aviseacutes Rodolphe qui a pris le temps de ponctuer sa relecture de

remarques preacutecieuses

1

Sommaire

PREMIERE PARTIE Le cadre juridique de lrsquoutilisation des TIC agrave lrsquohocircpital un cadre

incomplet

Titre 1TIC et informatisation des donneacutees de sante un cadre parfois inadapteacute

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des

informations relatives aux patients

Titre 2 TIC et prise en charge meacutedicale un cadre en eacutevolution

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

SECONDE PARTIE Les voies de seacutecurisation de lrsquoutilisation des TIC agrave lrsquohocircpital

Titre 1 Lrsquoimpulsion de la seacutecurisation au niveau national

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une

prioriteacute

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

Titre 2 Les eacutetablissements de santeacute acteurs cleacutes de la seacutecurisation de lrsquoutilisation des

TIC agrave lrsquohocircpital

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs

pratiques

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

3

Principales abreacuteviations

AJDA Actualiteacute Juridique Droit Administratif

AN Assembleacutee nationale

Ass Pleacuten Assembleacutee pleacuteniegravere

Bull crim Bulletin des arrecircts de la Cour de cassation chambre criminelle

CAA Cour administrative drsquoappel

CC Conseil constitutionnel

CE Conseil drsquoEtat

Cass civ Cour de cassation chambre civile

Cass crim Cour de cassation chambre criminelle

Cass soc Cour de cassation chambre sociale

Chron Chronique

CHU Centre hospitalier universitaire

CJUE Cour de justice de lrsquoUnion europeacuteenne

Comm Commentaires

Concl Conclusions

CPOM Contrats pluriannuels drsquoobjectifs et de moyens

D Recueil Dalloz

DDS Droit deacuteontologie et soin

DGOS Direction geacuteneacuterale de lrsquooffre de soins

DMP Dossier meacutedical partageacute

eacuted Edition

Fasc Fascicule

Gaz Pal Gazette du palais

GHT Groupement hospitalier de territoire

Ibid Mecircme ouvrage agrave la mecircme page

Id Mecircme ouvrage

In Dans

INS Identifiant national de santeacute

Infra Ci-dessous

JCP Jurisclasseur peacuteriodique (La semaine juridique)

4

JORF Journal officiel de la Reacutepublique franccedilaise

LGDJ Librairie Geacuteneacuterale de Droit et de Jurisprudence

LPA Les petites affiches

ndeg Numeacutero

NIR Numeacutero drsquoinscription au reacutepertoire

Obs Observations

Op cit Opere citato (dans lrsquoouvrage preacuteciteacute)

PUF Presses universitaires de France

PUN Presses universitaires de Nancy

RDP Revue de droit public

RDC Revue de droit des contrats

RDS Revue Droit et santeacute

RDSS Revue de droit sanitaire et social

Rec Recueil Lebon

RF adm publ Revue franccedilaise drsquoadministration publique

RFDC Revue franccedilaise de droit constitutionnel

RGDM Revue geacuteneacuterale de droit meacutedical

RTD civ Revue trimestrielle de droit civil

s Suivant

S Recueil Sirey

Supra Ci-dessus

TA Tribunal administratif

TC Tribunal des conflits

TGI Tribunal de grande instance

TIC Technologies de lrsquoinformation et de la communication

V Voir

vol Volume

7

Introduction Geacuteneacuterale

laquo Dans le domaine de la santeacute le XIXegraveme siegravecle avait connu la reacutevolution pasteurienne le

XXegraveme celle entraicircneacutee par la deacutecouverte de la peacutenicilline il est probable que le XXIegraveme en

connaicirctra deux la geacuteneacutetique et linteacutegration agrave la meacutedecine des nouvelles technologies de

linformation qui vont bouleverser en profondeur lorganisation et la conception que nous

nous faisons de la meacutedecine raquo1

1 Lrsquointroduction reacuteussie des Technologies de lrsquoInformation et de la Communication

(TIC) dans la pratique meacutedicale repreacutesente un enjeu important dans la reacutenovation du systegraveme

de santeacute franccedilais Les TIC apparaissent en effet comme lrsquooutil ideacuteal permettant de reacutepondre

aux deacutefis majeurs que rencontre notre systegraveme de santeacute aujourdrsquohui Drsquoabord elles participent

agrave une meilleure coordination des soins en ameacuteliorant le recueil des informations relatives aux

patients et la communication de celles-ci entre les professionnels de santeacute Elles permettent

eacutegalement drsquoassurer un accegraves aux soins agrave certains patients situeacutes dans certaines zones du

territoire mal doteacutees en termes drsquooffre de soins Il srsquoagit en effet drsquooutils capables de

laquo reacutepondre aux situations drsquoisolement et drsquoeacuteloignement geacuteographique dues agrave la rareacutefaction

des meacutedecins geacuteneacuteralistes et speacutecialistes dans certaines reacutegions raquo mais permettant eacutegalement

drsquoatteacutenuer laquo les effets du cloisonnement et de la complexiteacute de lrsquoorganisation des soins et des

aides sociales notamment agrave la sortie de lrsquohocircpital lorsque lrsquoeacutetat du patient neacutecessite une

teacuteleacutesurveillance meacutedicale agrave domicile et des aides non meacutedicales raquo2 Ensuite leur utilisation est

source drsquoeacuteconomies non neacutegligeables en matiegravere de deacutepenses de santeacute Enfin les TIC en santeacute

garantissent un accegraves eacutelargi agrave lrsquoensemble du territoire aux expertises meacutedicales de pointe

2 Le dictionnaire Larousse deacutefinit les Technologies de lrsquoInformation et de la

Communication comme lrsquolaquo ensemble des techniques et des eacutequipements informatiques

permettant de communiquer agrave distance par voie eacutelectronique raquo Les TIC peuvent eacutegalement

1 DIONIS du SEJOUR Jean ETIENNE Jean-Claude laquo Les teacuteleacutecommunications agrave haut deacutebit au service du

systegraveme de santeacute raquo rapport de lrsquooffice parlementaire deacutevaluation des choix scientifiques et technologiques

2004 p 8 2 LABORDES Pierre laquo La teacuteleacutesanteacute un nouvel atout au service de notre bien-ecirctre raquo La Documentation

franccedilaise p 39

Introduction geacuteneacuterale

8

ecirctre deacutefinies comme les technologies qui laquo englobent toutes les technologies numeacuteriques

facilitant la saisie le traitement le stockage et lrsquoeacutechange eacutelectroniques drsquoinformations raquo3

Dans le domaine plus speacutecifique de la santeacute lrsquoutilisation des TIC est multiple Ces outils sont

utiliseacutes dans de nombreuses situations assez diverses et derriegravere lrsquoexpression de TIC en

santeacute nous retrouvons de nombreuses pratiques telle que la e-santeacute les activiteacutes de

teacuteleacutemeacutedecine (ou parfois appeleacutees plus largement teacuteleacutesanteacute) lrsquoinformatisation des donneacutees de

santeacute par le biais de la creacuteation de dossier meacutedicaux informatiseacutes mais eacutegalement le dispositif

SESAM-Vitale (dans le cadre de la mise en place de la teacuteleacutetransmission des feuilles de soins)

le deacuteveloppement des cartes puce (carte Vitale carte CPS) les sites drsquoinformation en santeacute

sur Internet ou encore plus reacutecemment le deacuteveloppement des objets connecteacutes en santeacute

3 Face agrave la multipliciteacute et agrave la complexiteacute du sujet nous avons fait le choix de concentrer

notre recherche plus speacutecifiquement sur lrsquoutilisation des TIC dans la pratique meacutedicale crsquoest-

agrave-dire lrsquoutilisation des TIC comme outils intervenant directement dans la prise en charge

meacutedicale drsquoun patient par les professionnels de santeacute et plus particuliegraverement dans le cadre

drsquoactes de soins de diagnostic ou de preacutevention

4 Lrsquohocircpital4 de par ses missions

5 et son organisation apparait alors comme eacutetant le

terrain ideacuteal de notre eacutetude Le systegraveme de santeacute franccedilais se caracteacuterise par la coexistence de

plusieurs types drsquoeacutetablissements de santeacute les eacutetablissements publics de santeacute drsquoune part et

les eacutetablissements priveacutes drsquoautre part Parmi ces derniers nous retrouvons les eacutetablissements

de santeacute drsquointeacuterecirct collectif (ESPIC) et les eacutetablissements poursuivant un but lucratif Les

3 GAGNON Marie-Pierre BRETON Erik laquo Lrsquoinfluence des technologies de lrsquoinformation et des

communications sur le maintien en poste des infirmiegraveres raquo Santeacute Publique 20133 (Vol 25) p 126 4 Le dictionnaire Larousse deacutefinit lrsquohocircpital comme eacutetant un laquo eacutetablissement public ou eacutetablissement priveacute ayant

passeacute certaines conventions avec lEacutetat et ougrave peuvent ecirctre admis tous les malades pour y ecirctre traiteacutes raquo 5 Lrsquoarticle L 6111-1 du Code de la santeacute publique preacutevoit que laquo les eacutetablissements de santeacute publics priveacutes

dinteacuterecirct collectif et priveacutes assurent dans les conditions preacutevues au preacutesent code en tenant compte de la

singulariteacute et des aspects psychologiques des personnes le diagnostic la surveillance et le traitement des

malades des blesseacutes et des femmes enceintes et megravenent des actions de preacutevention et deacuteducation agrave la santeacute Ils

deacutelivrent les soins le cas eacutecheacuteant palliatifs avec ou sans heacutebergement sous forme ambulatoire ou agrave domicile le

domicile pouvant sentendre du lieu de reacutesidence ou dun eacutetablissement avec heacutebergement relevant du code de

laction sociale et des familles Ils participent agrave la coordination des soins en relation avec les membres des

professions de santeacute exerccedilant en pratique de ville et les eacutetablissements et services meacutedico-sociaux dans le cadre

deacutefini par lagence reacutegionale de santeacute en concertation avec les conseils deacutepartementaux pour les compeacutetences

qui les concernent Ils participent agrave la mise en œuvre de la politique de santeacute et des dispositifs de vigilance

destineacutes agrave garantir la seacutecuriteacute sanitaire Ils megravenent en leur sein une reacuteflexion sur leacutethique lieacutee agrave laccueil et la

prise en charge meacutedicale Ils peuvent participer agrave la formation agrave lenseignement universitaire et post-

universitaire agrave la recherche et agrave linnovation en santeacute Ils peuvent eacutegalement participer au deacuteveloppement

professionnel continu des professionnels de santeacute et du personnel parameacutedical raquo

Introduction geacuteneacuterale

9

eacutetablissements publics de santeacute quant agrave eux sont des personnes morales de droit public

doteacutees drsquoune autonomie administrative et financiegravere6 Le secteur public se caracteacuterise par une

regraveglementation abondante et diversifieacutee portant sur lrsquoorganisation des eacutetablissements leur

fonctionnement ou encore la gestion de leur personnel Crsquoest notamment pour cette speacutecificiteacute

que nous avons fait le choix de concentrer nos recherches sur les eacutetablissements publics de

santeacute

5 Dans ce contexte lrsquointroduction des TIC a ouvert de nombreuses possibiliteacutes de prises

en charge innovantes (Paragraphe I) en permettant notamment le deacuteploiement de la

teacuteleacutemeacutedecine Neacuteanmoins lrsquoutilisation de ces nouveaux outils peut eacutegalement ecirctre source de

deacuterives et de nombreuses questions se posent quant agrave lrsquoencadrement de leur mise en place

(Paragraphe II) Le droit apparait alors comme un outil incontournable pour accompagner

lrsquoexpansion de lrsquoutilisation des TIC en santeacute Cependant il va eacutegalement se reacuteveacuteler ecirctre dans

certaines situations un frein au deacuteveloppement peacuterenne des TIC dans la pratique meacutedicale

soit par ses lacunes soit par son excegraves de rigueur et geacuteneacuteralement par son caractegravere inadapteacute

Notre eacutetude va ainsi srsquoattacher agrave preacutesenter le caractegravere lacunaire du cadre juridique de

lrsquoutilisation des TIC en santeacute avant de reacutefleacutechir aux pistes de seacutecurisation possibles

(Paragraphe III)

sect1 Les multiples possibiliteacutes offertes par lrsquointroduction des TIC dans la

pratique meacutedicale

laquo Lessentiel cest dabord cette conviction que nous partageons tous que la teacuteleacutesanteacute nest pas

un sujet comme un autre mais le systegraveme qui dans les anneacutees agrave venir va transformer les

pratiques meacutedicales voire la maniegravere mecircme dont nous concevons la santeacute raquo7

6 Qualifieacutee de laquo nouvelle reacutevolution meacutedicale raquo8 lrsquointroduction des TIC dans la pratique

meacutedicale repreacutesente le renouveau de lrsquoactiviteacute meacutedicale et le deacuteveloppement croissant de leur

utilisation ouvre de nouvelles possibiliteacutes dans la prise en charge et le suivi agrave distance des

6 Article L 6141-1 du Code de la santeacute publique

7 Deacuteclaration de Mme Roselyne Bachelot Ministre de la santeacute de la jeunesse des sports et de la vie associative

sur lutilisation des technologies de linformation et de la communication au service de la santeacute Paris le 4

novembre 2008 Disponible sur [httpdiscoursvie-publiquefr] 8 LABORDES Pierre laquo La teacuteleacutesanteacute un nouvel atout au service de notre bien-ecirctre raquo op cit p 39

Introduction geacuteneacuterale

10

patients Celles-ci sont nombreuses et certaines drsquoentre elles ont retenues plus

particuliegraverement notre attention Veacuteritable espoir pour les zones geacuteographiques mal

desservies mais eacutegalement pour les populations isoleacutees les TIC permettent lrsquoaccegraves agrave des

expertises de pointe (A) Par ailleurs lrsquoutilisation des TIC preacutesente eacutegalement un inteacuterecirct dans

la mise en œuvre de politiques de preacutevention au travers du deacuteveloppement des objets

connecteacutes (B) Deux possibiliteacutes qui meacuteritent que nous nous y attardions

A Les TIC nouvel espoir pour les prises en charges difficiles

7 La reacutepartition de lrsquooffre de santeacute sur le territoire franccedilais est ineacutegale A titre

drsquoexemple en 2015 alors que la reacutegion Ile-de-France comptait plus de 3000 cabinets

meacutedicaux la Picardie nrsquoen comptait qursquoentre 500 et 1000 et la Corse moins de 5009 Bien que

les effectifs de meacutedecin aient augmenteacute jusqursquoen 2008 lrsquoabaissement du numerus clausus

dans les anneacutees 90 a pour conseacutequence depuis 2009 une baisse du nombre de meacutedecins qui

devrait continuer jusqursquoen 2019 et qui sera accompagneacute agrave compter de 2025 drsquoun deacutepart

massif agrave la retraite de meacutedecins provoquant ainsi une baisse de 10 de leur nombre10

Ces

deacuteparts risquent de fragiliser grandement certains territoires deacutejagrave mal desservis Dans ce

contexte difficile la teacuteleacutemeacutedecine qui srsquoest deacuteveloppeacutee gracircce agrave lrsquointroduction des TIC dans la

pratique meacutedicale apparait comme un des outils agrave privileacutegier afin de maintenir un eacutegal accegraves

aux soins sur le territoire Drsquoailleurs le Ministegravere de la santeacute lors du lancement du pacte santeacute

territoire11

ndeg2 en 2015 a preacutevu au titre de ses dix nouvelles actions un investissement de

plus de 40 millions drsquoeuros pour deacutevelopper la teacuteleacutemeacutedecine en ville en particulier pour les

patients chroniques et les soins urgents

8 La teacuteleacutemeacutedecine preacutesente des avantages multiples elle facilite lrsquoaccegraves agrave des soins de

qualiteacute pour des personnes situeacutees dans des zones isoleacutees et contribue au maintien de lrsquooffre

de soins de proximiteacute tout en apportant une expertise de pointe accessible via les TIC Elle

permet eacutegalement le suivi agrave distance des populations fragiles ou chroniques limitant ainsi

9 DGOS laquo Les chiffres cleacutes de lrsquooffre de soin raquo eacutedition 2015 p 4 Disponible sur [httpwwwfnehadfr]

consulteacute le 2 mai 2017 10

LABORDES Pierre laquo La teacuteleacutesanteacute un atout au service de notre bien-ecirctre raquo op cit p 46 11

Lanceacute en 2012 et compleacuteteacute en 2015 le Pacte Santeacute Territoire a pour objectifs de lutter contre la deacutesertification

meacutedicale et drsquoassurer une meilleure reacutepartition des meacutedecins sur le territoire

Introduction geacuteneacuterale

11

leurs deacuteplacements et ameacuteliorant leur qualiteacute de vie Lrsquointroduction de la teacuteleacutemeacutedecine dans la

pratique des professionnels de santeacute va eacutegalement rendre le temps meacutedical plus efficient12

Enfin la prise en charge de certaines urgences vitales va ecirctre ameacutelioreacutee la teacuteleacutemeacutedecine

permettant aux services drsquourgence de recueillir plus facilement et plus rapidement des avis

speacutecialiseacutes neacutecessaires Crsquoest le cas par exemple de lrsquoaccident vasculaire ceacutereacutebral ischeacutemique

(AVC) pour lequel lrsquoavis drsquoun neuroradiologue est neacutecessaire Le recours agrave la teacuteleacuteexpertise

dans ce cas permet alors drsquoeacutetablir rapidement un diagnostic et drsquoenvisager la suite de la prise

en charge du patient en limitant ainsi toutes pertes de chance

9 Crsquoest pourquoi degraves 2011 la Direction Geacuteneacuterale de lrsquoOffre de Soins (DGOS) en

charge du pilotage de la strateacutegie nationale de deacuteploiement de la teacuteleacutemeacutedecine sur le territoire

avait identifieacute cinq theacutematiques consideacutereacutees comme prioritaires Il srsquoagissait de la permanence

des soins en imagerie meacutedicale de la prise en charge des accidents vasculaires ceacutereacutebraux

(AVC) de la santeacute des personnes deacutetenues de la prise en charge dune maladie chronique (et

notamment lrsquoinsuffisance reacutenale chronique lrsquoinsuffisance cardiaque diabegravete ) et des soins

en structure meacutedico-sociale ou en hospitalisation agrave domicile (HAD)

Ainsi plusieurs projets de teacuteleacutemeacutedecine ont eacuteteacute deacuteveloppeacutes en France autour de ces

probleacutematiques LrsquoANAP dans un guide publieacute en mai 2012 avait drsquoailleurs dresseacute un

premier bilan de 25 projets srsquoinscrivant dans les cinq theacutematiques prioritaires et identifieacutes

comme suffisamment matures pour servir drsquoexemple aux acteurs souhaitant deacutevelopper un

projet de teacuteleacutemeacutedecine

10 Dans ce contexte les eacutetablissements publics de santeacute apparaissent ecirctre les acteurs

centraux de la majoriteacute des projets de teacuteleacutemeacutedecine actuellement recenseacutes13

De nombreux

exemples pourraient ecirctre citeacutes14

nous faisons le choix de nous attarder sur deux projets

speacutecifiques qui deacutemontrent bien agrave notre sens les enjeux de la teacuteleacutemeacutedecine

12 SIMON Pierre laquo Comment deacutevelopper la teacuteleacutemeacutedecine Ougrave raquo disponible sur

|httpesantegouvfractustelemedecine] Consulteacute le 15 mai 2017 13

laquo Le recensement des activiteacutes de teacuteleacutemeacutedecine raquo rapport de la DGOS deacutecembre 2012 14

V notamment en ce sens HERVIEU-BEGUE Marie GIROUD Maurice BEJOT Yannick laquoUn reacuteseau

de teacuteleacutemeacutedecine pour AVC raquo Soins Aides-Soignantes Volume 14 2017 p 13-14 Le BŒUF Dominique

laquo La teacuteleacutemeacutedecine en France du concept agrave la pratique raquo Soins Volume 61 2016 pp 28-30 PERRIER-

BONNET Sabine laquo Une consultation de teacuteleacutemeacutedecine dans le cadre drsquoun reacuteseau plaies et cicatrisation raquo La

Revue de lInfirmiegravere Volume 65 2016 pp 35-37

Introduction geacuteneacuterale

12

11 Le premier est un projet de teacuteleacutepsychiatrie deacuteveloppeacute par le centre hospitalier de

Rouvray degraves 200715

Cet eacutetablissement psychiatrique dispose drsquoun service de psychogeacuteriatrie

comprenant notamment une eacutequipe mobile intervenant au sein de diffeacuterents EHPAD Un

projet de teacuteleacutepsychiatrie pour les sujets acircgeacutes srsquoest deacuteveloppeacute initialement sur cinq sites (le

CHR de Rouvray 3 CMP un EHPAD et une uniteacute drsquoaccueil familial theacuterapeutique) Les

premiers retours de cette expeacuterimentation eacutetant positifs lrsquoactiviteacute de teacuteleacutepsychiatrie a eacuteteacute

maintenue et srsquoest accentueacutee Ainsi le nombre des teacuteleacuteconsultations assureacutees par les cinq

psychiatres deacutedieacutes agrave lrsquoactiviteacute ont augmenteacute passant de pregraves de 100 teacuteleacuteconsultations en 2012

agrave 462 en 2014 Pour les eacutequipes mobiles cet outil a permis drsquoeacutetendre leur couverture

territoriale et drsquoameacuteliorer leur reacuteactiviteacute diminuant ainsi le recours aux services drsquourgences

Cette expeacuterience qui srsquoinscrit dans le contexte particulier de la baisse de lrsquooffre de soins

psychiatriques dans certaines zones rurales et de la prise en charge de populations fragiles agrave

mobiliteacute reacuteduite (les personnes acircgeacutees) deacutemontre lrsquointeacuterecirct et la plus-value de la teacuteleacutemeacutedecine

dans ce type de prise en charge

12 Le second est un projet de teacuteleacuteexpertise pour les urgences neurochirurgicales

deacuteveloppeacute par le CHRU de Lille le reacuteseau TELURGE Ce dispositif est un pionnier en la

matiegravere puisque le reacuteseau composeacute de 22 centres hospitaliers a eacuteteacute creacuteeacute en 1996 Le principe

consiste en lrsquoobtention agrave distance pour les services drsquourgences des diffeacuterents centres

hospitaliers de lrsquoavis drsquoun neurochirurgien du CHRU de Lille ou depuis 2012 du Centre

hospitalier de Valenciennes Le neurochirurgien sur la base drsquoun dossier meacutedical et drsquoexamen

drsquoimagerie transmis agrave distance va formuler un avis veacuteritable aide agrave la deacutecision diagnostique

et theacuterapeutique pour lrsquoeacutequipe prenant en charge le patient Ce dispositif permet donc agrave vingt

et un centres hospitaliers de beacuteneacuteficier drsquoune expertise de pointe et drsquoassurer ainsi une prise

en charge optimale pour leurs patients arrivant parfois dans des situations critiques telles que

les heacutemorragies ceacutereacutebrales ou les traumatismes cracircniens Par ailleurs cette expertise permet

drsquoeacuteviter au patient un transfert inutile et de limiter toute perte de chance

13 Ces deux exemples16

permettent agrave notre sens de deacutemontrer que lrsquointroduction des

TIC dans la pratique meacutedicale au travers de la teacuteleacutemeacutedecine ameacuteliore de maniegravere

15 DESBORDES Marie laquo La teacuteleacutemeacutedecine en psychiatrie du sujet acircgeacute enjeux et perspectives

La teacuteleacutemeacutedecine en psychiatrie du sujet acircgeacute enjeux et perspectives raquo NPG Neurologie - Psychiatrie -

Geacuteriatrie Volume 15 2015 pp 270-273 16

Deacutefinition de la HAS Disponible sur [httpwwwhas-santefr] consulteacute le 15 mai 2017

Introduction geacuteneacuterale

13

consideacuterable lrsquooffre de soin existante Elle permet de reacutesoudre certaines difficulteacutes rencontreacutees

dans un contexte de diminution de lrsquooffre de santeacute en zone rurale et de vieillissement de la

population mais eacutegalement de faire beacuteneacuteficier aux patients des meilleurs soins et des

expertises les plus pointues et ce sans avoir agrave les deacuteplacer inutilement La teacuteleacutemeacutedecine

permet ainsi de gommer certaines ineacutegaliteacutes dans lrsquoaccegraves aux soins et agrave ce titre permet

drsquoassurer le droit agrave la protection de la santeacute tel que preacutevu par lrsquoalineacutea 11 du preacuteambule de la

Constitution de 1946

B Les TIC outil majeur dans la mise en place drsquoactions de preacutevention en

santeacute

14 Inscrite parmi les missions des eacutetablissements publics de santeacute17

la preacutevention en

santeacute repreacutesente un enjeu essentiel des politiques de santeacute en France Or comme le soulignait

lrsquoavis du conseil eacuteconomique social et environnemental la politique sanitaire actuelle est

encore trop centreacutee sur le curatif18

Selon la Haute Autoriteacute de Santeacute (HAS) la preacutevention

consiste agrave laquo eacuteviter lapparition le deacuteveloppement ou laggravation de maladies ou

dincapaciteacutes sont classiquement distingueacutees la preacutevention primaire qui agit en amont de la

maladie (ex vaccination et action sur les facteurs de risque) la preacutevention secondaire qui

agit agrave un stade preacutecoce de son eacutevolution (deacutepistages) et la preacutevention tertiaire qui agit sur les

complications et les risques de reacutecidive raquo19

15 Les actions de preacutevention pour ecirctre efficaces neacutecessitent une adheacutesion voire comme

le soulignait le conseil une appropriation de celles-ci par les patients en tant qursquoacteur de leur

santeacute Lrsquoutilisation des TIC au sein de projets de preacutevention en santeacute et plus particuliegraverement

des objets connecteacutes en santeacute devient alors un moyen efficace pour diffuser des politiques de

preacutevention en obtenant lrsquoadheacutesion des usagers Ces objets connecteacutes sont des objets mobiles et

communicants qui permettent par le biais drsquoune connexion Internet laquo drsquoidentifier capter et

17 Lrsquoarticle L 6111-1 dispose que laquo les eacutetablissements de santeacute publics priveacutes dinteacuterecirct collectif et priveacutes

assurent dans les conditions preacutevues au preacutesent code en tenant compte de la singulariteacute et des aspects

psychologiques des personnes le diagnostic la surveillance et le traitement des malades des blesseacutes et des

femmes enceintes et megravenent des actions de preacutevention et deacuteducation agrave la santeacute [] raquo 18

GROS Jeannette laquo Santeacute et nouvelles technologies de linformation raquo JORF avis et rapports du Conseil

eacuteconomique et social 2002 p 4 19

Deacutefinition de la HAS disponible sur [httpswwwhas-santefr] consulteacute le 25 mai 2017

Introduction geacuteneacuterale

14

transmettre des informations provoquer une interaction avec lrsquoenvironnement et alimenter

une application preacutesente sur une interface (par exemple un smartphone)raquo20

16 En la matiegravere les assureurs et les mutuelles font figure de pionniers A titre

drsquoexemple en 2013 la socieacuteteacute AXA en partenariat avec la socieacuteteacute WITHINGS proposait

drsquooffrir aux 1000 premiers souscripteurs drsquoune nouvelle compleacutementaire santeacute un objet

connecteacute permettant de tracer lrsquoactiviteacute physique mais eacutegalement le rythme cardiaque et la

qualiteacute de sommeil de son porteur Lrsquoassureur compleacutetait eacutegalement son offre en proposant un

chegraveque laquo meacutedecine douce raquo drsquoune valeur de 50 euros pour les clients reacutealisant plus de 7000

pas par jour Selon Dimitri CARBONNELLE21

laquo [les objets connecteacutes] sont une formidable

opportuniteacute pour les assureurs car cela leur permet de vendre de nouveaux services raquo

17 Les eacutetablissements de santeacute commencent eacutegalement agrave deacutevelopper des actions de

preacutevention en santeacute par le biais de lrsquoutilisation drsquoobjets connecteacutes en santeacute Ainsi un

Professeur des Universiteacutes Praticien Hospitalier (PU-PH) du CHRU de Lille a deacuteveloppeacute

avec lrsquoappui du Ministegravere de la santeacute le projet intituleacute laquo 10 000 pas le deacutefi pour la vie raquo Il

srsquoagit drsquoun programme de preacutevention de lrsquoactiviteacute physique piloteacute par le Professeur Philippe

AMOUYEL et ayant pour but de lutter contre la seacutedentariteacute afin de preacutevenir le

deacuteveloppement de maladies telles que le diabegravete les cancers ou encore les maladies

cardiovasculaires Ainsi afin drsquoaugmenter leur nombre de pas quotidiens un kit composeacute

drsquoun podomegravetre et drsquoune application smartphone a eacuteteacute distribueacute agrave certains agents du CHRU

de Lille volontaires pour srsquoinscrire dans la deacutemarche Le podomegravetre enregistre de maniegravere

quotidienne les performances de son porteur et celui-ci peut gracircce agrave lrsquoapplication smartphone

relieacutee et speacutecialement conccedilue pour ce programme se fixer des objectifs suivre son eacutevolution

et lancer des deacutefis aux autres participants du programme Des conseils dieacuteteacutetiques sont

eacutegalement dispenseacutes de maniegravere reacuteguliegravere Ce programme drsquoabord diffuseacute au niveau reacutegional

a pour but drsquoecirctre eacutetendu ensuite au niveau national

20 CAMBON Linda laquo Objets connecteacutes mobiles communicants en preacutevention deacutepasser lrsquooutil penser

lrsquointerventionhellip raquo Santeacute Publique vol 28 ndeg 1 2016 pp 5-6 21

CARBONELLE Dimitri laquo Les objets connecteacutes transforment le secteur de lrsquoassurance raquo Le monde eacuteconomie

15 juin 2015

Introduction geacuteneacuterale

15

18 Les TIC en santeacute ont donc un rocircle important agrave jouer dans la preacutevention en santeacute La

santeacute mobile (ou m-Health) qui repose sur des dispositifs mobiles se deacuteveloppe en effet de

maniegravere consideacuterable22

Le leacutegislateur srsquoest mecircme reacutecemment attacheacute agrave deacutefinir certaines

notions qui entourent la santeacute mobile Ainsi la notion drsquoautomesure connecteacutee est-elle

apparue au sein drsquoun avis de la commission drsquoenrichissement de la langue franccedilaise publieacute au

Journal Officiel du 4 mars 201723

Celle-ci est deacutefinie comme une laquo pratique consistant pour

une personne agrave mesurer elle-mecircme agrave laide dobjets connecteacutes des variables physiologiques

la concernant relatives notamment agrave sa nutrition agrave ses activiteacutes physiques ou agrave son

sommeil raquo

Les TIC en santeacute et notamment les objets connecteacutes vont donc ecirctre ameneacutes agrave jouer un

rocircle majeur dans la preacutevention en santeacute

sect2 Les TIC des outils sources de risques eacutethiques et juridiques majeurs

19 Bien que lrsquoutilisation accrue des TIC dans la pratique meacutedicale preacutesente de nombreux

inteacuterecircts indeacuteniables elle srsquoaccompagne eacutegalement de risques Leur deacuteveloppement doit se

faire dans le strict respect des regravegles juridiques et deacuteontologiques qui srsquoappliquent agrave lrsquoexercice

de la meacutedecine Or ces nouvelles pratiques vont srsquoaccompagner de lrsquoapparition de nouveaux

risques qui vont peser aussi bien sur les patients et plus particuliegraverement sur leurs donneacutees de

santeacute (A) que sur la pratique meacutedicale drsquoune maniegravere geacuteneacuterale (B)

A Les risques pesant sur la vie priveacutee du patient

20 Lrsquoutilisation des TIC dans la pratique meacutedicale va modifier les modaliteacutes de prise en

charge des patients Neacuteanmoins la distance et la deacutemateacuterialisation des eacutechanges fondements

mecircme de ces nouvelles pratiques meacutedicales ne doivent pas aller agrave lrsquoencontre des droits

fondamentaux des patients

22 DESMARAIS Pierre laquo Santeacute mobile - Quel reacutegime pour la m-Health raquo Communication Commerce

eacutelectronique ndeg 3 Mars 2013 eacutetude 5 23

Avis de la commission denrichissement de la langue franccedilaise vocabulaire de la santeacute JORF ndeg0054 du 4

mars 2017 texte ndeg 92

Introduction geacuteneacuterale

16

21 La loi du 4 mars 200224

dite loi Kouchner a consacreacute des droits individuels aux

patients tels que le droit au respect de la digniteacute le respect de la vie priveacutee et du secret des

informations le droit agrave la seacutecuriteacute des soins le droit agrave linformation le respect du

consentement ou le droit drsquoobtenir communication de son dossier meacutedical Ces droits sont

aujourdrsquohui bien ancreacutes dans les pratiques courantes et ne doivent pas ecirctre neacutegligeacutes au profit

du deacuteveloppement des TIC dans la prise en charge meacutedicale Or comme le souligne Merav

GRIGUER laquo si le secteur de la santeacute vit actuellement sa transformation digitale les

utilisateurs manifestent encore un certain scepticisme Parmi leurs principales

preacuteoccupations figurent le respect du secret meacutedical la protection de leurs donneacutees

personnelles et de leur vie priveacutee la seacutecurisation des donneacutees la transparence et le controcircle

de lutilisation de leurs donneacutees raquo25

22 Lrsquoutilisation des TIC en santeacute conduit de fait agrave un accroissement consideacuterable du

nombre de donneacutees personnelles deacutemateacuterialiseacutees Ces donneacutees sont ensuite partageacutees entre

professionnels par le biais des TIC et ce plus facilement et surtout plus rapidement

qursquoauparavant Cependant le secret professionnel et la protection des donneacutees personnelles du

patient essentiels au maintien de la relation de confiance entre un professionnel de santeacute et

son patient ne doivent pas ecirctre neacutegligeacutes au profit drsquoune technique certes efficace mais

neacuteanmoins risqueacutee En effet si la laquo multiplication exponentielle raquo des donneacutees de santeacute peut

offrir de reacuteelles opportuniteacutes elle repreacutesente aussi certains risques pour le respect de la vie

priveacutee et la confidentialiteacute de ces donneacutees raquo26

Leur protection est donc essentielle afin de

preacuteserver le respect de la vie priveacutee du patient et assurer le maintien du secret professionnel

Mais au-delagrave de la crainte drsquoune mauvaise protection des donneacutees subsiste la crainte drsquoun

meacutesusage des donneacutees collecteacutees Les TIC apparaissent ici comme un danger pour le respect

de la finaliteacute de ces donneacutees pouvant mener agrave une utilisation agrave mauvais escient voir pire une

marchandisation de celles-ci Il apparait alors eacutevident que lrsquoensemble des utilisations qui

pourraient aller agrave lrsquoencontre de lrsquointeacuterecirct du patient doivent alors ecirctre interdites27

Toutefois

ces interdictions doivent ecirctre mises en perspective avec lrsquointeacuterecirct que preacutesentent certaines

24 Loi ndeg 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et agrave la qualiteacute du systegraveme de santeacute JORF du 5

mars 2002 p 4118 25

GRIGUER Merav laquo Quel cadre leacutegal pour lrsquoe-santeacute raquo Cahiers de droit de lentreprise ndeg 5 2016 prat 25 26

VAYR Jonathan laquo Les donneacutees de santeacute un enjeu pour le futur raquo LPA septembre 2016 ndeg 185-186 p 4 27

Ibidem

Introduction geacuteneacuterale

17

donneacutees Finalement toute la difficulteacute repose dans les finaliteacutes pour lesquelles ces donneacutees

deacutemateacuterialiseacutees vont ecirctre utiliseacutees

B Les risques laquo drsquoubeacuterisation raquo de la meacutedecine la nouvelle crainte

Lrsquointroduction des TIC en santeacute a eacuteteacute immeacutediatement accompagneacutee de multiples

craintes de la part des professionnels de santeacute et plus speacutecifiquement de la communauteacute

meacutedicale

23 Le Conseil National de lrsquoOrdre des Meacutedecins (CNOM) srsquoattache ainsi depuis

plusieurs anneacutees agrave suivre de pregraves lrsquoeacutevolution des TIC dans la pratique meacutedicale nrsquoheacutesitant

pas agrave reacutealiser de nombreuses eacutetudes et rapports sur le sujet Consideacuterant que laquo par son rocircle de

feacutedeacuterateur des meacutedecins de toutes disciplines et de tous secteurs reacuteunis autour des mecircmes

principes deacuteontologiques [il] a la responsabiliteacute de sengager dans les projets de systegraveme

dinformation de santeacute au nom de lavenir scientifique mais dans le respect absolu des

liberteacutes individuelles raquo28

mais eacutegalement que laquo le respect absolu de la vie priveacutee et des

liberteacutes individuelles est un impeacuteratif premier dans lexamen du deacuteveloppement utile des

moyens informatiques raquo29

lrsquoordre accompagne les eacutevolutions techniques qui viennent

bouleverser lrsquoexercice meacutedical

24 Lrsquointroduction des TIC dans la relation de soin a drsquoabord fait naitre chez les

meacutedecins la crainte drsquoune deacuteshumanisation de lrsquoacte meacutedical Les TIC apparaissaient aux

yeux des meacutedecins comme une barriegravere entre leurs patients et eux creacuteant de la distance et

pouvant ainsi deacuteteacuteriorer le colloque singulier neacutecessaire agrave la prise en charge du patient

Mais au-delagrave de ce risque lieacute au changement des pratiques professionnelles la communauteacute

meacutedicale au travers du CNOM a reacutecemment exprimeacute une crainte quant agrave laquo lrsquoubeacuterisation de la

santeacute raquo constatant laquo un risque de deacuterive vers du commerce eacutelectronique non reacuteguleacute qui

28 laquo Lrsquoinformatisation de la santeacute raquo Livre blanc du CNOM 2008 p 1

29 laquo Teacuteleacutematique de santeacute raquo CNOM 2006 Disponible sur [httpswwwconseil-nationalmedecinfr] p 1

consulteacute le 15 mai 2017

Introduction geacuteneacuterale

18

reacuteduirait la pratique meacutedicale agrave une simple prestation eacutelectronique moyennant reacutetribution

via des plateformes du secteur marchand raquo30

25 La notion drsquo ubeacuterisation est tregraves reacutecente et ne possegravede pas de reacuteelle deacutefinition Elle

peut ecirctre vue comme laquo une strateacutegie de contournement des regravegles par lutilisation optimale

des Technologies de lInformation et de la Communication et ce afin de fournir un accegraves

faciliteacute plus rapide et en principe moins coucircteux agrave un service raquo31

Dans le domaine de la

santeacute lrsquoubeacuterisation se reacutevegravele par lrsquoapparition au sein de lrsquooffre numeacuterique de services

meacutedicaux qui srsquoaffranchissent du cadre leacutegal actuellement en place (notamment en ce qui

concerne la teacuteleacutemeacutedecine) Parmi ces offres dires ubeacuteriseacutees nous trouvons principalement

des offres de teacuteleacuteconseil et de teacuteleacuteconsultation A titre drsquoexemple lrsquoassureur AXA propose

dans le cadre de ses contrats drsquoassurance santeacute compleacutementaire un service de

teacuteleacuteconsultation disponible 7 j7 et 24h24 permettant au patient de pallier lrsquoindisponibiliteacute

(aveacutereacutee ou supposeacutee) de son meacutedecin traitant Ces offres souvent agrave la limite de la leacutegaliteacute

viennent concurrencer lrsquooffre existante Par ailleurs ces offres contreviennent totalement agrave

certains principes deacuteontologiques fondamentaux qui srsquoimposent aux meacutedecins et notamment

lrsquointerdiction de pratiquer la meacutedecine comme un commerce32

26 A ce sujet le CNOM srsquoinquiegravete drsquoune tendance agrave lrsquoaugmentation des laquo offres en ligne

qui correspondent agrave du commerce eacutelectronique non reacuteguleacute et qui tendent agrave reacuteduire la pratique

meacutedicale agrave une simple prestation eacutelectronique moyennant reacutetribution via des plateformes du

secteur marchand raquo33

En effet certaines offres dites de teacuteleacuteconseils tendent agrave se deacutevelopper

Cette activiteacute laquo consiste agrave mettre en relation des internautes qui se connectent agrave un site avec

un meacutedecin qui leur fournit secondairement agrave lrsquooccasion drsquoun entretien teacuteleacutephonique des

informations personnaliseacuteesraquo34

Or le teacuteleacuteconseil ne fait pas partie des cinq actes de

teacuteleacutemeacutedecine aujourdrsquohui reconnus et encadreacutes par le deacutecret drsquooctobre 201035

Se pose alors la

question du cadre juridique deacuteontologique mais eacutegalement eacutethique dans lequel cette

30 CNOM laquo Teacuteleacutemeacutedecine et autres prestations meacutedicales eacutelectroniques raquo rapport de mission adopteacute lors de la

session du Conseil national de lrsquoOrdre des meacutedecins de feacutevrier 2016 p 2 31

LEQUILLERIER Cleacutementine laquo Lrsquoubeacuterisation de la santeacute raquo Dalloz IPIT 2017 p 155 32

Article R 4127-19 du Code de la santeacute publique 33

CNOM laquo Teacuteleacutemeacutedecine et autres prestations meacutedicales eacutelectroniques raquo op cit p 4 34

Disponible sur [httpswwwconseil-nationalmedecinfrarticleteleconseil-personnalise-1155] Consulteacute le 15

mai 2017 35

Deacutecret ndeg 2010-1229 du 19 octobre 2010 relatif agrave la teacuteleacutemeacutedecine JORF ndeg0245 du 21 octobre 2010 texte ndeg

13

Introduction geacuteneacuterale

19

prestation pourrait srsquoinscrire Pour le CNOM le teacuteleacuteconseil reste quoi qursquoil en soit soumise

aux dispositions du Code de deacuteontologie meacutedicale en tant que prestation meacutedicale Il

considegravere cependant que laquo lrsquooffre marchande repose pour une large part sur la confusion

qursquoil est possible drsquoentretenir aupregraves du grand public entre la teacuteleacutemeacutedecine ndash notamment la

teacuteleacuteconsultation ndash deacutesormais deacutefinie par la loi et des activiteacutes qui srsquoen reacuteclament mais qui il

faut le souligner clairement nrsquoentrent pas dans le champ des nouveaux textes

reacuteglementaires raquo36

27 Face agrave ce pheacutenomegravene le CNOM tente drsquointerpeller les pouvoirs publics se

demandant agrave juste titre si lrsquoEtat pouvait laquo continuer de produire des textes reacuteglementaires

normatifs appliqueacutes agrave lrsquoexercice de la meacutedecine utilisant des moyens numeacuteriques et laisser

prospeacuterer des offres numeacuteriques non reacuteguleacutees sur le marcheacute de la e-santeacute raquo En effet

lrsquoordre demande depuis plusieurs anneacutees maintenant agrave ce que ce secteur soit reacuteguleacute afin

drsquoeacuteviter toutes deacuterives commerciales Le CNOM souhaite que laquo le flou juridique soit leveacute Il

considegravere que lrsquoexercice du teacuteleacuteconseil devrait donner lieu agrave une reacuteglementation sanitaire

speacutecifique et agrave des obligations contraignantes assurant la seacutecuriteacute des informations donneacutees agrave

lrsquointernaute la protection des donneacutees personnelles de santeacute et leur caractegravere non

marchandisable raquo37

Nous pouvons alors observer les premiegraveres limites du cadre juridique des TIC en santeacute la

laquo reacuteglementation trop stricte de cette pratique [ayant] nui agrave son deacuteveloppement et [ayant]

preacuteciseacutement favoriseacute leacutemergence doffres ubeacuteriseacuteesraquo38

28 Enfin le deacuteveloppement de cette offre ubeacuteriseacutee en plus drsquoaccentuer les risques deacutejagrave

existants pour la protection des donneacutees du patient (les prestataires srsquoaffranchissant des

contraintes mises en place dans le cadre de la teacuteleacutemeacutedecine) aura tendance agrave creacuteer une offre

de santeacute agrave deux vitesses renforccedilant les ineacutegaliteacutes existantes deacutejagrave en la matiegravere Or utiliseacutees agrave

bon escient les TIC peuvent au contraire reacuteduire ces ineacutegaliteacutes

36 laquo Deacuteontologie meacutedicale sur le web raquo Le Livre blanc du Conseil national de lrsquoOrdre des meacutedecins deacutecembre

2011 p 29 37

Idem p 30 38

LEQUILLERIER Cleacutementine laquo Lubeacuterisation de la santeacute raquo op cit

Introduction geacuteneacuterale

20

sect3 Probleacutematique de la thegravese

29 Notre probleacutematique est partie drsquoun constat celui des difficulteacutes pour les TIC en

santeacute de se deacutevelopper de maniegravere peacuterenne A titre drsquoexemple alors que laquo malgreacute les

ambitions et les incitations la geacuteneacuteralisation de la teacuteleacutemeacutedecine progresse lentement raquo39

le

Dossier Meacutedical Partageacute (DMP) projet phare des pouvoirs publics institueacute par la loi ndeg2004-

810 du 13 aoucirct 200440

peine agrave se deacutefaire de son eacutetiquette drsquoArleacutesienne

30 Se pose alors la question de savoir quels peuvent ecirctre les freins agrave ce deacuteveloppement

Au-delagrave des aspects purement eacuteconomiques de certains projets (les TIC coucirctent chers) et des

difficulteacutes agrave obtenir lrsquoadheacutesion des acteurs face agrave des changements de pratiques parfois tregraves

ancreacutees de nombreuses difficulteacutes juridiques jalonnent la voie du deacuteveloppement des TIC

dans la prise en charge meacutedicale En effet quand on en vient agrave reacutefleacutechir aux aspects juridiques

lieacutes agrave la mise en place des TIC dans la pratique meacutedicale nous ne pouvons que constater tregraves

rapidement que le droit occupe une place importante De nombreuses questions vont se poser

Celles-ci ont trait agrave la pratique elle-mecircme qui sous sa nouvelle forme deacutemateacuterialiseacutee va

poser des difficulteacutes en termes de responsabiliteacutes mais eacutegalement de droit des patients Mais

les questions concernent eacutegalement lrsquoencadrement de la mise en œuvre de ces pratiques quel

cadre applique-t-on agrave lrsquoutilisation de ces nouveaux outils Comment seacutecurise-on et encadre-t-

on ces pratiques Drsquoailleurs doit-on les encadrer Enfin lrsquointroduction des TIC dans la

pratique meacutedicale a des impacts juridiques Crsquoest notamment le cas de lrsquoinformatisation

massive des donneacutees de santeacute conseacutequence directe de lrsquoutilisation des TIC et dont la gestion

juridique sera neacutecessaire mais complexe

31 Finalement le Droit se dresse parfois devant ces nouvelles pratiques comme un

obstacle Les initiatives innovantes peuvent se trouver alors freineacutees par ce Droit complexe

rigide et parfois inadapteacute Pourtant celui-ci est loin drsquoecirctre insurmontable Des solutions

peuvent ecirctre apporteacutees afin de faire du Droit non plus le frein mais bien lrsquoaccompagnateur si

ce nrsquoest mecircme le moteur du deacuteveloppement de lrsquoutilisation des TIC dans la pratique meacutedicale

39 VIOUJAS Vincent laquo La teacuteleacutemeacutedecine entre expeacuterimentations reacuteussies et geacuteneacuteralisation au ralenti raquo RDSS

2015 p 681 40

Loi ndeg 2004-810 du 13 aoucirct 2004 relative agrave lassurance maladie JORF ndeg0190 du 17 aoucirct 2004 p 14598

Introduction geacuteneacuterale

21

32 Avec ces travaux nous tenterons drsquoeacutetablir que si le cadre juridique actuel nrsquoest pas

propice au deacuteveloppement serein et peacuterenne de lrsquoutilisation des TIC dans la pratique meacutedicale

des solutions existent afin de permettre aux eacutetablissements de santeacute de seacutecuriser leurs

pratiques Ainsi dans un premier temps nous eacutetudierons de maniegravere critique le cadre

juridique qui srsquoapplique aujourdrsquohui agrave lrsquoutilisation des TIC dans la pratique meacutedicale

(Premiegravere partie) avant drsquoenvisager les diffeacuterentes pistes de seacutecurisation de ces pratiques

permettant drsquoassurer leur deacuteveloppement dans un contexte propice (Seconde partie)

PREMIERE PARTIE

LE CADRE JURIDIQUE DE LrsquoUTILISATION

DES TIC A LrsquoHOcircPITAL UN CADRE

INCOMPLET

24

laquo [La] technique ne doit pas progresser plus vite que son controcircle raquo41

33 En posant ce principe de base simple et logique le deacuteputeacute M Jean FOYER mettait en

exergue ce qui est un des plus grands problegravemes lieacutes agrave lrsquoutilisation des technologies

drsquoinformation et de communication dans la pratique meacutedicale En effet aujourdrsquohui alors que

la technique se deacuteveloppe reacuteguliegraverement et que les socieacuteteacutes proposent des solutions toujours

plus innovantes le leacutegislateur se montre quant agrave lui peu reacuteactif et tarde agrave donner aux

Technologies de lrsquoInformation et de la Communication le cadre regraveglementaire neacutecessaire agrave

leur bon deacuteveloppement Car il est certain que lrsquoinformatisation croissante de la pratique

meacutedicale ne peut ecirctre que beacuteneacutefique pour la prise en charge du patient et les avanceacutees en la

matiegravere offrent de nouvelles possibiliteacutes chaque jour A titre drsquoexemple deacutesormais les

radiographies sont plus souvent numeacuteriseacutees et conserveacutees sur des logiciels speacutecialiseacutes De

mecircme les hocircpitaux investissent deacutesormais dans des logiciels de gestion informatiseacutee des

dossiers meacutedicaux et la prescription informatiseacutee se deacuteveloppe de plus en plus les Agences

Reacutegionales de Santeacute (ARS) incitant agrave leur utilisation par le biais des contrats de bon usage

notamment42

34 Toutefois force est de constater que le leacutegislateur nrsquoa pas su accompagner en temps et

en heure ce deacuteveloppement fulgurant Alors que la France se posait comme lrsquoun des

preacutecurseurs en la matiegravere en adoptant en 1978 une leacutegislation encadrant le traitement des

donneacutees agrave caractegravere personnel elle a ensuite perdu sa longueur drsquoavance tardant agrave transposer

la directive europeacuteenne de 199543

et proposant ensuite des cadres incomplets difficiles agrave

respecter voire mecircme pour certains totalement inapplicables

35 A lrsquoheure actuelle lrsquoencadrement leacutegislatif et regraveglementaire propre agrave lrsquoutilisation des

TIC dans la pratique meacutedicale preacutesente un visage flou et complexe En ce qui concerne la

41 FOYER Jean laquo Rapport au nom de la commission des lois constitutionnelles de la leacutegislation et de

ladministration geacuteneacuterale de la reacutepublique sur le projet de loi (ndeg 2516) relatif agrave linformatique et aux liberteacutes la

proposition de loi (ndeg 1004) de Pierre-Bernard Cousteacute tendant agrave creacuteer une commission de controcircle des moyens

dinformatique afin dassurer la protection de la vie priveacutee et des liberteacutes individuelles des citoyens la

proposition de loi (ndeg 3092) de Franccedilois Villa et plusieurs de ses collegravegues sur les liberteacutes les fichiers et

linformatique raquo Assembleacutee Nationale t1 ndeg 3125 Paris 1977 p 13 42

Deacutecret ndeg 2015-355 du 27 mars 2015 relatif au contrat de bon usage des meacutedicaments et des produits et

prestations mentionneacute agrave larticle L 162-22-7 du code de la seacutecuriteacute sociale JORF du 29 mars 2015 p 5763 43

Directive 9546CE du Parlement europeacuteen et du Conseil du 24 octobre 1995 relative agrave la protection des

personnes physiques agrave leacutegard du traitement des donneacutees agrave caractegravere personnel et agrave la libre circulation de ces

donneacutees JO ndeg L 281 du 23 novembre 1995 p 31

25

gestion globale et lrsquoutilisation des donneacutees du patient le cadre de leur traitement informatique

peut paraitre trop geacuteneacuteral et par conseacutequent inadapteacute (titre premier chapitre premier) tandis

que les regravegles relatives agrave leur heacutebergement et leur communication peuvent sembler illisibles et

parfois insuffisantes (titre premier chapitre second) Lrsquoutilisation des TIC dans le cadre de la

prise en charge des patients ne beacuteneacuteficie pas non plus drsquoun encadrement adeacutequat drsquoune part

le deacuteveloppement de la deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux montre les limites des regravegles

en place (titre second chapitre premier) drsquoautre part la reacutealisation drsquoactes de soins via les

TIC souffre drsquoun cadre incomplet quand il nrsquoest pas inexistant (titre second chapitre second)

TITRE 1

TIC ET INFORMATISATION DES DONNEES

DE SANTE UN CADRE PARFOIS

INADAPTE

28

36 Les donneacutees relatives au patient qursquoil srsquoagisse des donneacutees strictement administratives

telles que leur nom leur adresse ou encore leur numeacutero de seacutecuriteacute sociale ou des donneacutees

meacutedicales les concernant sont fondamentalement neacutecessaires agrave la bonne prise en charge de

celui-ci Elles doivent donc ecirctre recueillies ordonneacutees et conserveacutees Ces donneacutees sont un

bien preacutecieux pour les professionnels de santeacute agrave de nombreux eacutegards Elles leur permettent

drsquoapporter aux patients les meilleurs soins possibles seacutecuriser leur diagnostic et assurer la

bonne coordination des soins Les donneacutees constituent eacutegalement une source de matiegravere

premiegravere pour les recherches meacutedicales

37 Aujourdrsquohui lrsquointroduction des TIC dans la pratique meacutedicale va avoir pour

conseacutequence une informatisation massive de ces donneacutees qui vont ecirctre deacutemateacuterialiseacutees

enregistreacutees stockeacutees et partageacutees par le biais de systegravemes informatiques Cette

informatisation de donneacutees particuliegraverement sensibles doit ecirctre accompagneacutee drsquoun cadre

juridique adeacutequat afin drsquoassurer aux patients une protection efficace de leur vie priveacutee

38 Notre reacuteflexion va nous amener agrave nous pencher dans un premier temps sur

lrsquoencadrement juridique du traitement informatiseacute des donneacutees cadre de droit commun

parfois inadapteacute aux TIC en santeacute (chapitre 1) Puis dans un second temps nous nous

pencherons sur les modaliteacutes actuellement en place en matiegravere de conservation et de

communication des informations du patient (chapitre 2)

29

Chapitre 1

Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

39 Le traitement systeacutematique des donneacutees relatives au patient nrsquoest pas nouveau Les

toutes premiegraveres traces de dossier meacutedical datent du IXegraveme

siegravecle RHAZES meacutedecin arabe

avait lrsquohabitude de conserver les cas qursquoil estimait inteacuteressants dans un registre intituleacute

laquo observation de lrsquohocircpital raquo Lrsquoensemble a ensuite eacuteteacute publieacute dans lrsquoouvrage laquo continens raquo La

notion de dossier meacutedical pour chaque patient nrsquoapparaicirct qursquoagrave la fin du XVIIIegraveme

siegravecle mais

son contenu reste succinct Ce nrsquoest qursquoau XIXegraveme

siegravecle que le dossier meacutedical en tant que tel

apparaicirct il contient alors les donneacutees meacutedicales ainsi que les donneacutees administratives du

patient Les meacutedecins de ville vont eux aussi formaliser petit agrave petit des fiches drsquoinformation

relatives agrave leurs patients Aujourdrsquohui la tenue drsquoun dossier meacutedical est pour les

eacutetablissements de santeacute une obligation regraveglementaire codifieacutee agrave lrsquoarticle R 1112-2 du Code

de la santeacute publique44

Un dossier meacutedical doit ecirctre constitueacute pour chaque patient contenant a

minima certaines informations obligatoires (et notamment les motifs de lrsquohospitalisation les

conclusions de lrsquoeacutevaluation clinique initiale les reacutesultats des diffeacuterentes examens et analyses

le dossier de soins infirmiers) Ce dossier meacutedical doit drsquoailleurs ecirctre conserveacute pour une dureacutee

de 20 ans apregraves le dernier passage du patient agrave lrsquohocircpital

40 Depuis plusieurs anneacutees lrsquointroduction puis le deacuteveloppement massif des TIC agrave

lrsquohocircpital a transformeacute le traditionnel dossier papier en dossier informatiseacute Parfois craint

souvent appreacutehendeacute ce passage au tout informatique ne creacutee pas forceacutement de risques

nouveaux Toutefois une attention particuliegravere doit ecirctre porteacutee aux traitements des donneacutees du

patient Pour cela leur protection est un preacutealable neacutecessaire (section I) Celle-ci est assureacutee

par un corpus de textes eacutepars dont lrsquoefficaciteacute peut se reacuteveacuteler relative De mecircme leur partage

est soumis au respect de certaines conditions qui vont ecirctre diffeacuterentes selon le but rechercheacute

par leur utilisation (section II)

44 Lrsquoarticle R 1112-2 du Code de la santeacute publique preacutevoit qursquolaquo un dossier meacutedical est constitueacute pour chaque

patient hospitaliseacute dans un eacutetablissement de santeacute public ou priveacute raquo

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

30

Section 1 La protection des donneacutees du patient

41 En matiegravere de protection des donneacutees du patient il faut se reacutefeacuterer agrave la leacutegislation de

droit commun qui existe en la matiegravere agrave savoir la loi Informatique et Liberteacutes En effet les

principes geacuteneacuteraux eacutedicteacutes par cette loi trouveront agrave srsquoappliquer en matiegravere de donneacutees de

santeacute (paragraphe I) mecircme si celle-ci est compleacuteteacutee par quelques dispositions particuliegraveres

aux donneacutees de santeacute Toutefois cet eacutetat des lieux pointe les lacunes des protections mises en

place (paragraphe II)

sect1 La leacutegislation de droit commun agrave disposition du droit de la santeacute

42 La loi ndeg 78-16 du 6 janvier 1978 dite laquo loi Informatique et Liberteacutes raquo45

a eacuteteacute lrsquoune des

premiegraveres lois proteacutegeant les donneacutees agrave caractegravere personnel en encadrant leur traitement en

Europe Cette loi reacuteformeacutee en 200446

affiche une volonteacute drsquoapporter une protection forte (A)

En ce qui concerne les donneacutees de santeacute cette protection est toutefois compleacuteteacutee par des

dispositions speacutecifiques agrave ces donneacutees (B)

A La loi Informatique et Liberteacutes pilier de lrsquoencadrement

43 La France est une pionniegravere en matiegravere drsquoencadrement des traitements de donneacutees agrave

caractegravere personnel (1) et la loi Informatique et Liberteacutes marque la volonteacute du leacutegislateur

drsquoinstaurer une protection forte (2)

1) La France parmi les preacutecurseurs

44 Au cours des anneacutees 1970 lrsquoutilisation de lrsquoinformatique se deacuteveloppe notamment

dans les administrations publiques Toutefois lrsquoopinion publique craint une augmentation des

45 Loi ndeg 78-17 du 6 janvier 1978 relative agrave lrsquoinformatique aux fichiers et aux liberteacutes JORF du 7 janvier 1978

p 227 46

Loi ndeg 2004-801 du 6 aoucirct 2004 relative agrave la protection des personnes physiques agrave leacutegard des traitements de

donneacutees agrave caractegravere personnel et modifiant la loi ndeg 78-17 du 6 janvier 1978 relative agrave linformatique aux

fichiers et aux liberteacutes JORF du 7 aoucirct 2004 p 14063

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

31

atteintes aux liberteacutes publiques ainsi qursquoune violation de la sphegravere priveacutee Cette crainte est

particuliegraverement bien exprimeacutee dans lrsquoarticle de Philippe BOUCHER intituleacute laquo SAFARI ou

la chasse aux franccedilais raquo47

Celui-ci expose au grand jour un projet deacutenommeacute Systegraveme

automatiseacute pour les fichiers administratifs et le reacutepertoire des individus (SAFARI) laquo qui

devait permettre agrave partir du reacutepertoire national drsquoidentification des personnes physiques de

faciliter les intercommunications entre les fichiers qui auraient recours au numeacutero national

drsquoidentiteacute soit comme base de classement soit comme eacuteleacutement de reacutefeacuterence raquo48

Or comme le

reacuteveacutelait lrsquoarticle de Pierre BOUCHER et contrairement aux recommandations eacutemises par le

Conseil drsquoEtat le Premier Ministre de lrsquoeacutepoque Pierre MESSMER avait eacutecarteacute tout projet de

deacutebat public sur les projets drsquoinformatisation du gouvernement Lrsquoopinion publique vivement

eacutemue amena le Premier Ministre agrave constituer une commission preacutesideacutee par le vice-preacutesident

du Conseil drsquoEtat Bernard CHENOT et chargeacutee de proposer des mesures permettant de

garantir que le deacuteveloppement de lrsquoinformatique dans les secteurs public semi-public et priveacute

se reacutealise dans le respect de la vie priveacutee des liberteacutes individuelles et des liberteacutes publiques

Le rapport49

de cette commission reacutedigeacute par Bernard TRICOT et le Professeur Pierre

CATALA fut remis le 27 juin 1975 Crsquoest sur la base de ce rapport que le projet de loi relatif

agrave lrsquoinformatique et aux liberteacutes fut reacutedigeacute

45 Pour autant la France bien qursquoen avance sur de nombreux pays nrsquoeacutetait pas le premier

agrave leacutegifeacuterer sur le sujet En effet avant cela lrsquoAllemagne avait adopteacute une loi relative au

traitement automatiseacute des informations nominatives en octobre 1970 Elle fut rapidement

suivie par la Suegravede qui adopta une loi sur le mecircme sujet en 1973 Hors Europe les Etats-Unis

adoptegraverent quant agrave eux un Privacy Act en 1974 dont lrsquoapplication est toutefois limiteacutee aux

fichiers deacutetenus par les administrations feacutedeacuterales

46 En France plusieurs propositions de loi relatives au sujet vont ecirctre deacuteposeacutees

successivement aupregraves de lrsquoAssembleacutee Nationale la premiegravere eacutemanant de Pierre-Bernard

47 BOUCHER Pierre laquo SAFARI ou la chasse aux franccedilais raquo Le Monde 21 mars 1974

48 FOYER Jean laquo Rapport au nom de la commission des lois constitutionnelles de la leacutegislation et de

ladministration geacuteneacuterale de la reacutepublique sur le projet de loi (ndeg 2516) relatif agrave linformatique et aux liberteacutes la

proposition de loi (ndeg 1004) de Pierre-Bernard Cousteacute tendant agrave creacuteer une commission de controcircle des moyens

dinformatique afin dassurer la protection de la vie priveacutee et des liberteacutes individuelles des citoyens la

proposition de loi (ndeg 3092) de Franccedilois Villa et plusieurs de ses collegravegues sur les liberteacutes les fichiers et

linformatique raquo op cit 49

CATALA Pierre TRICOT Bernard laquo Rapport de la commission Informatique et Liberteacutes raquo La

Documentation franccedilaise Paris 1975

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

32

COUSTE et tendant agrave creacuteer une commission de controcircle des moyens informatiques afin

drsquoassurer la protection de la vie priveacutee et des liberteacutes individuelles des citoyens et une autre

eacutemanant de Franccedilois VILLA et plusieurs de ses collegravegues sur les liberteacutes les fichiers et

lrsquoinformatique De mecircme un projet de loi relatif agrave lrsquoInformatique et aux Liberteacutes va

eacutegalement ecirctre preacutesenteacute Ces trois textes feront lrsquoobjet drsquoun rapport commun de la commission

des lois constitutionnelles de la leacutegislation et de lrsquoadministration geacuteneacuterale de la Reacutepublique50

47 La loi relative agrave lrsquoinformatique aux fichiers et aux liberteacutes va ecirctre adopteacutee le 6 janvier

1978 Elle comporte alors des dispositions organiques (creacuteation de la commission nationale de

lrsquoinformatique et des liberteacutes ndash CNIL) ainsi que des dispositions mateacuterielles51

Tregraves

symbolique lrsquoarticle premier de la loi dispose laquo lrsquoinformatique doit ecirctre au service de

chaque citoyen Son deacuteveloppement doit srsquoopeacuterer dans le cadre de la coopeacuteration

internationale Elle ne doit porter atteinte ni agrave lrsquoidentiteacute humaine ni aux droits de lrsquohomme

ni agrave la vie priveacutee ni aux liberteacutes publiques ou individuelles raquo

48 Au niveau international une crainte du deacuteveloppement de leacutegislations trop protectrices

est alors apparue Ainsi lrsquoOrganisation de Coopeacuteration et de Deacuteveloppement Economique

(OCDE) le 23 septembre 1980 arrecircta des lignes directrices reacutegissant la protection de la vie

priveacutee et les flux transfrontaliers de donneacutees agrave caractegravere personnel deacutenueacutees de force

obligatoire mais ayant pour ambition drsquoeacuteviter que la protection des donneacutees personnelles

nrsquoentrave la libre circulation de lrsquoinformation ainsi que le deacuteveloppement des relations

eacuteconomiques et sociales des pays membres Le Conseil de lrsquoEurope adopta quant agrave lui la

convention pour la protection des personnes agrave leacutegard du traitement automatiseacute des donneacutees agrave

caractegravere personnel dite laquo convention 108 raquo signeacutee le 28 janvier 1981 et ayant pour but de

concilier la protection de la vie priveacutee avec la libre circulation de lrsquoinformation entre les

peuples52

50 FOYER Jean laquo Rapport au nom de la commission des lois constitutionnelles de la leacutegislation et de

ladministration geacuteneacuterale de la reacutepublique sur le projet de loi (ndeg 2516) relatif agrave linformatique et aux liberteacutes la

proposition de loi (ndeg 1004) de Pierre-Bernard COUSTE tendant agrave creacuteer une commission de controcircle des moyens

dinformatique afin dassurer la protection de la vie priveacutee et des liberteacutes individuelles des citoyens la

proposition de loi (ndeg 3092) de Franccedilois Villa et plusieurs de ses collegravegues sur les liberteacutes les fichiers et

linformatique raquo op cit 51

V Infra ndeg 52 et s 52

Convention ndeg 108 du Conseil de lrsquoEurope pour la protection des personnes agrave leacutegard du traitement automatiseacute

des donneacutees agrave caractegravere personnel 28 janvier 1981 disponible sur [httpwwwcoeintfr] consulteacute le 15 mai

2017

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

33

49 En 1995 afin de reacuteduire les divergences qui peuvent exister entre les leacutegislations des

diffeacuterents Etats lrsquoUnion Europeacuteenne adopta la directive 9546CE relative agrave la protection des

donneacutees personnelles et agrave la libre circulation de ces donneacutees53

Lrsquoambition de cette directive

eacutetait de prendre en compte trois eacutevolutions majeures en matiegravere drsquoinformatisation des

donneacutees agrave savoir la marchandisation des donneacutees lrsquointernationalisation des flux et le

pheacutenomegravene de traccedilabiliteacute54

Les Etats membres avaient alors jusqursquoau 25 octobre 1998 date

drsquoentreacutee en vigueur de la directive pour la transposer

50 Toutefois en France la proceacutedure va srsquoaveacuterer tregraves longue Le 12 septembre 1997 le

Premier Ministre de lrsquoeacutepoque confie agrave Guy BRAIBANT un travail preacuteparatoire agrave lrsquoeacutelaboration

drsquoun avant-projet de loi en vue de la transposition de la directive de 1995 Le 3 mars 1998

Guy BRAIBANT remet son rapport55

dans lequel il expose notamment les enjeux de la

transposition mais formule eacutegalement plusieurs propositions afin de maintenir un haut niveau

de protection des liberteacutes Puis entre le 5 octobre et le 5 deacutecembre 1999 une consultation

publique est lanceacutee sur le futur projet de loi intituleacute laquo socieacuteteacute de lrsquoinformation raquo Le projet de

loi relatif agrave la protection des donneacutees agrave caractegravere personnel est preacutesenteacute agrave lrsquooccasion drsquoun

conseil des ministres le 18 juillet 2001 Toutefois suite aux diffeacuterents examens la loi

nrsquoentrera en vigueur que le 7 aoucirct 2004 et la France sera parmi lrsquoun des derniers pays agrave

transposer la directive Ainsi la loi ndeg 2004-801 du 6 aoucirct 2004 relative agrave la protection des

personnes physiques agrave lrsquoeacutegard des traitements de donneacutees agrave caractegravere personnel remanie

profondeacutement la loi du 6 janvier 1978 De faccedilon tregraves symbolique lrsquoarticle premier de la loi a

eacuteteacute conserveacute

51 A lrsquoheure actuelle la protection des donneacutees personnelles reste un sujet tregraves important

en France et en Europe La CNIL a depuis plusieurs anneacutees fait connaicirctre sa volonteacute de

renforcer ce principe de protection des donneacutees personnelles en preacuteconisant notamment une

constitutionnalisation du principe Au niveau europeacuteen une reacutevision du cadre existant a par

ailleurs eacuteteacute initieacutee en 2012 avec une proposition de regraveglement europeacuteen reacuteformant le cadre de

53 Directive 9546CE du Parlement europeacuteen et du Conseil du 24 octobre 1995 relative agrave la protection des

personnes physiques agrave leacutegard du traitement des donneacutees agrave caractegravere personnel et agrave la libre circulation de ces

donneacutees JOUE ndeg L 281 du 23 novembre 1995 p 31 54

DESGENS-PASANAU Guillaume laquo La protection des donneacutees agrave caractegravere personnel raquo Lexis-Nexis 2egraveme

eacutedition Paris 2016 p 5 55

BRAIBANT Guy laquo Donneacutees personnelles et socieacuteteacutes de lrsquoinformation Rapport au premier ministre raquo La

Documentation franccedilaise 1998

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

34

la protection des donneacutees agrave caractegravere personnel56

adopteacutee le 25 janvier 2012 par la

Commission Europeacuteenne Afin drsquoinstaurer une politique plus geacuteneacuterale et coheacuterente en matiegravere

de protection des donneacutees agrave caractegravere personnel le leacutegislateur europeacuteen a fait le choix

drsquoutiliser le regraveglement comme instrument juridique En effet lrsquoarticle 288 du traiteacute sur le

fonctionnement de lrsquoUnion Europeacuteenne preacutevoyant lrsquoapplicabiliteacute directe des regraveglements

lrsquoutilisation de cet outil permet drsquoeacuteviter les transpositions limiteacutees et surtout tregraves longues

comme ce fut le cas avec la directive de 1995 Les deacutebats ont tout de mecircme dureacute quatre ans

puisque ce nrsquoest qursquoen avril 2016 que ce texte a eacuteteacute deacutefinitivement adopteacute57

Nous ne nous attarderons pas ici sur les apports particuliers de cette proposition de

regraveglement en matiegravere de protection des donneacutees agrave caractegravere personnel ces eacuteleacutements eacutetant

abordeacutes tout au long de ces travaux Il est simplement neacutecessaire agrave ce stade de constater la

volonteacute au niveau europeacuteen drsquoinstaurer un cadre unifieacute et solide et ce dans un but double

proteacuteger les donneacutees agrave caractegravere personnel et favoriser lrsquoutilisation des Technologies de

lrsquoInformation et de la Communication

2) Une protection forte

52 La loi Informatique et Liberteacutes avait pour ambition drsquoapporter un cadre tregraves protecteur

au traitement des donneacutees agrave caractegravere personnel Les modifications subies par la loi initiale

suite agrave la transposition de la directive europeacuteenne 9546CE du 24 octobre 1995 vont

eacutegalement en ce sens Avec la loi ndeg 2004-801 du 6 aoucirct 2004 relative agrave la protection des

personnes physiques agrave leacutegard des traitements de donneacutees agrave caractegravere personnel et modifiant la

loi ndeg 78-17 du 6 janvier 1978 relative agrave linformatique aux fichiers et aux liberteacutes le

leacutegislateur montre une reacuteelle volonteacute drsquoinstaurer une protection forte vis-agrave-vis de ce type de

donneacutees Pour ce faire il est preacutevu agrave la fois une protection a priori et une protection a

posteriori

56 Proposition de regraveglement du parlement europeacuteen et du conseil relatif agrave la protection des personnes physiques agrave

lrsquoeacutegard du traitement des donneacutees agrave caractegravere personnel et agrave la libre circulation de ces donneacutees ndeg20120011 25

janvier 2012 57

Regraveglement (UE) 2016679 du Parlement europeacuteen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif agrave la protection des

personnes physiques agrave leacutegard du traitement des donneacutees agrave caractegravere personnel et agrave la libre circulation de ces

donneacutees et abrogeant la directive 9546CE (regraveglement geacuteneacuteral sur la protection des donneacutees) JOUE L 119 du 4

mai 2016 p 1

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

35

53 La protection a priori relegraveve agrave la fois de lrsquoencadrement mis en place par les textes

mais eacutegalement des formaliteacutes agrave accomplir preacutealablement agrave tout traitement de donneacutees agrave

caractegravere personnel Certaines conditions de liceacuteiteacute des traitements sont poseacutees degraves les

premiers articles de la loi Ainsi lrsquoarticle 6 dispose que laquo les donneacutees sont collecteacutees de

maniegravere loyale et licite [hellip] pour des finaliteacutes deacutetermineacutes explicites et leacutegitimes et ne sont pas

traiteacutees ulteacuterieurement de maniegravere incompatible avec ces finaliteacutes [hellip] elles sont adeacutequates

pertinentes et non excessives [hellip] elles sont exactes complegravetes et si neacutecessaire mises agrave

jour[hellip] elles sont conserveacutees sous une forme permettant lrsquoidentification des personnes

concerneacutees pendant une dureacutee qui nrsquoexcegravede pas la dureacutee neacutecessaire aux finaliteacutes pour

lesquelles elles sont collecteacutees et traiteacutees raquo

54 Nous pouvons constater que lrsquoaccent est mis ici sur le respect du principe de

proportionnaliteacute Ce principe bien qursquoil ne figure pas dans la Constitution est reacuteguliegraverement

invoqueacute par le Conseil constitutionnel dans ses deacutecisions Les donneacutees collecteacutees doivent

avant tout reacutepondre agrave une finaliteacute bien preacutecise et ne pas ecirctre disproportionneacutees par rapport au

but rechercheacute Le principe de proportionnaliteacute apparaicirct eacutegalement au travers de lrsquoobligation de

conserver ces donneacutees pour une dureacutee limiteacutee et adapteacutee aux besoins du traitement Les

donneacutees ne peuvent ecirctre conserveacutees que pour une dureacutee strictement deacutefinie La leacutegislation

consacre ici le principe de droit agrave lrsquooubli58

Ce principe de proportionnaliteacute permet drsquoassurer

un certain eacutequilibre entre droits des personnes concerneacutees par les donneacutees traiteacutees et inteacuterecircts

du responsable du traitement

55 La seconde exigence preacutealable agrave tout traitement est poseacutee agrave lrsquoarticle 7 de la loi

Informatique et Liberteacutes laquo un traitement de donneacutees agrave caractegravere personnel doit avoir reccedilu le

consentement de la personne concerneacutee raquo Cette exigence permet de srsquoassurer drsquoune part que

les personnes concerneacutees par les donneacutees sont au courant de lrsquoutilisation qui va en ecirctre faite et

drsquoautre part qursquoils en sont drsquoaccord Toutefois il est utile de preacuteciser que ce mecircme article qui

preacutevoit lrsquoobligation de consentement introduit immeacutediatement une liste drsquoexceptions Ainsi

le consentement de la personne concerneacutee par les donneacutees traiteacutees ne sera pas neacutecessaire si le

traitement satisfait agrave lrsquoune des conditions suivantes laquo le respect drsquoune obligation leacutegale

incombant au responsable du traitement la sauvegarde de la vie de la personne concerneacutee

58 DESGENS-PASANAU Guillaume laquo La protection des donneacutees agrave caractegravere personnel raquo op cit p 41

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

36

lrsquoexeacutecution drsquoune mission de service public dont est investi le responsable ou le destinataire

du traitement lrsquoexeacutecution soit drsquoun contrat auquel la personne concerneacutee est partie soit de

mesures contractuelles prises agrave la demande de celle-ci la reacutealisation de lrsquointeacuterecirct leacutegitime

poursuivi par le responsable du traitement ou par le destinataire sous reacuteserve de ne pas

meacuteconnaitre lrsquointeacuterecirct ou les droits et liberteacutes fondamentaux de la personne concerneacutee raquo En

outre le responsable du traitement devra le deacuteclarer aupregraves de la CNIL Diffeacuterentes formes de

deacuteclarations existent et celle qui devra srsquoappliquer deacutependra de la finaliteacute poursuivie par le

traitement et non pas de lrsquoapplication utiliseacutee pour mettre en œuvre le traitement Ces

diffeacuterents reacutegimes sont traiteacutes au sein du chapitre IV de la loi Informatique et Liberteacutes intituleacute

laquo Formaliteacutes preacutealables agrave la mise en œuvre des traitements raquo Le reacutegime de droit commun est

celui de la deacuteclaration normale deacutecrite agrave lrsquoarticle 23 de la loi Informatique et Liberteacutes et

applicable agrave tous les traitements qui ne relegraveveraient pas drsquoune proceacutedure speacutecifique Il srsquoagit

en reacutealiteacute drsquoun engagement de la part du responsable du traitement qui certifie que son

traitement est conforme aux exigences de la CNIL

56 Afin de geacuterer au mieux les diffeacuterentes deacuteclarations mais eacutegalement de faciliter les

traitements de donneacutees dont la mise en œuvre nrsquoest pas susceptible de porter atteinte agrave la vie

priveacutee et aux liberteacutes il est eacutegalement preacutevu que la CNIL puisse eacutetablir des normes afin de

simplifier les obligations de deacuteclaration A titre drsquoexemple la norme simplifieacutee ndeg 50 relatif agrave

la gestion des cabinets meacutedicaux et parameacutedicaux59

permet aux professionnels de santeacute

libeacuteraux de deacuteposer une simple deacuteclaration de conformiteacute agrave cette norme afin drsquoecirctre en regravegle

avec la leacutegislation Cette norme srsquoapplique agrave la gestion courante des cabinets meacutedicaux qursquoil

srsquoagisse des dossiers meacutedicaux de la teacuteleacutetransmission des feuilles de soins ou encore de la

comptabiliteacute La CNIL peut eacutegalement en vertu des dispositions preacutevues agrave lrsquoarticle 24 de la

loi Informatique et Liberteacutes deacutecider que certaines cateacutegories courantes de traitements dont la

mise en œuvre nrsquoest pas susceptible de porter atteinte agrave la vie priveacutee ou aux liberteacutes compte

tenu de leur finaliteacute de leur destinataire des donneacutees agrave caractegravere personnel traiteacutees de leur

dureacutee de conservation et des cateacutegories de personnes concerneacutees peuvent ecirctre dispenseacutees de

deacuteclaration La liste de ces traitements est publieacutee au Journal Officiel Crsquoest le cas par

exemple de la dispense accordeacutee aux organismes publics pour la deacutemateacuterialisation des

59 Deacutelibeacuteration ndeg 2005-296 du 22 novembre 2005 portant adoption drsquoune norme simplifieacutee relative aux

traitements automatiseacutes de donneacutees agrave caractegravere personnel mis en œuvre par les membres des professions

meacutedicales et parameacutedicales exerccedilant agrave titre libeacuteral agrave des fins de gestion de leur cabinet JORF ndeg7 du 8 janvier

2006 texte ndeg 19

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

37

marcheacutes publics60

La CNIL peut eacutegalement dans le cas de traitement relevant drsquoun mecircme

organisme ou ayant des finaliteacutes identiques ou lieacutees entre elles autoriser les responsables du

traitement agrave proceacuteder agrave une deacuteclaration unique61

57 Pour les donneacutees consideacutereacutees comme eacutetant plus sensibles une autorisation preacutealable

de la CNIL sera neacutecessaire Ce reacutegime particulier srsquoapplique aux donneacutees sensibles citeacutees aux

III et IV lrsquoarticle 8 de la loi62

mais eacutegalement laquo aux traitements automatiseacutes portant sur des

donneacutees geacuteneacutetiques agrave lrsquoexception de ceux drsquoentre eux qui sont mis en œuvre par des meacutedecins

ou des biologistes et qui sont neacutecessaires aux fins de la meacutedecine preacuteventive des diagnostics

meacutedicaux ou de lrsquoadministration de soins ou de traitements aux traitements portant sur des

donneacutees relatives aux infractions condamnations ou mesures de sucircreteacute aux traitements

automatiseacutes susceptibles drsquoexclure des personnes du beacuteneacutefice drsquoun droit drsquoune prestation ou

drsquoun contrat en lrsquoabsence de toute disposition leacutegislative ou reacuteglementaire aux traitements

automatiseacutes ayant pour objet lrsquointerconnexion de fichiers relevant drsquoune ou de plusieurs

personnes morales geacuterant un service public et dont les finaliteacutes correspondent agrave des inteacuterecircts

publics diffeacuterents lrsquointerconnexion de fichiers relevant drsquoautres personnes et dont les finaliteacutes

principales sont diffeacuterentes les traitements portant sur des donneacutees parmi lesquelles figure le

numeacutero drsquoinscription des personnes au reacutepertoire national drsquoidentification des personnes

physiques et ceux qui requiegraverent une consultation de ce reacutepertoire sans inclure le numeacutero

drsquoinscription agrave celui-ci des personnes les traitements automatiseacutes de donneacutees comportant des

appreacuteciations sur les difficulteacutes sociales des personnes les traitements automatiseacutes

comportant des donneacutees biomeacutetriques neacutecessaires au controcircle de lrsquoidentiteacute des personnes raquo

58 Contrairement agrave la proceacutedure de deacuteclaration normale le traitement envisageacute va faire

lrsquoobjet drsquoun examen de la part de la CNIL qui dispose drsquoun deacutelai de deux mois renouvelable

une fois sur deacutecision motiveacutee de son preacutesident pour se prononcer et autoriser ou non la mise

en œuvre du traitement En lrsquoabsence de reacuteponse de la part de la CNIL dans le deacutelai imparti la

demande drsquoautorisation est reacuteputeacutee rejeteacutee et le responsable du traitement pourra engager un

recours en annulation aupregraves du Conseil drsquoEtat

60 Deacutelibeacuteration ndeg 2005-003 du 13 janvier 2005 deacutecidant la dispense de deacuteclaration des traitements mis en œuvre

par les organismes publics dans le cadre de la deacutemateacuterialisation des marcheacutes publics JORF ndeg 55 du 6 mars

2005 texte ndeg 32 61

Article 24 II de la loi Informatique et Liberteacutes 62

V Infra ndeg 63

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

38

59 La protection mise en place par la loi Informatique et Liberteacutes passe eacutegalement par la

conseacutecration de droits fondamentaux pour les personnes concerneacutees par les donneacutees traiteacutees

Ces droits exposeacutes au sein du chapitre V de la loi sont au nombre de quatre droit

drsquoinformation droit drsquoaccegraves droit de rectification et de radiation et le droit drsquoopposition Le

droit drsquoinformation preacutevu agrave lrsquoarticle 32 de la loi consiste pour la personne concerneacutee par les

donneacutees agrave ecirctre informeacutee drsquoune maniegravere geacuteneacuterale sur le traitement dont ses donneacutees vont faire

lrsquoobjet Elle doit notamment ecirctre informeacutee sur lrsquoidentiteacute du responsable du traitement de la

finaliteacute du traitement du ou des destinataires des donneacutees des droits qursquoil deacutetient en vertu de

la loi Informatique et Liberteacutes et le cas eacutecheacuteant du transfert des donneacutees au sein drsquoun eacutetat non

membre de lrsquoUnion Europeacuteenne Ce droit nous apparaicirct comme essentiel puisqursquoil va

permettre agrave la personne concerneacutee par le traitement drsquoune part de donner un consentement

eacuteclaireacute au traitement et drsquoautre part drsquoecirctre clairement informeacutee des autres droits qursquoelle

deacutetient agrave lrsquoeacutegard de ses donneacutees

La loi Informatique et Liberteacutes preacutevoit eacutegalement le droit pour toute personne

physique de srsquoopposer agrave ce que ses donneacutees fassent lrsquoobjet drsquoun traitement et ce agrave condition

drsquoavoir des raisons leacutegitimes Lrsquoopposition devra donc ecirctre motiveacutee et lrsquoappreacuteciation du

caractegravere leacutegitime ou non de lrsquoopposition reviendra donc au responsable du traitement Cette

notion de laquo motifs leacutegitimes raquo nrsquoest malheureusement pas deacutefinie dans les textes et ni la

CNIL ni le juge nrsquoont eu agrave se prononcer agrave ce sujet pour lrsquoinstant

Le droit drsquoaccegraves poseacute agrave lrsquoarticle 39 de la loi Informatique et Liberteacutes permet agrave toute

personne physique justifiant de son identiteacute drsquointerroger le responsable drsquoun traitement afin

drsquoobtenir confirmation que ses donneacutees font ou ne font pas lrsquoobjet drsquoun traitement

Enfin il est preacutevu que toute personne physique ait droit drsquoexiger que ses donneacutees

soient laquo rectifieacutees compleacuteteacutees mises agrave jour verrouilleacutees ou effaceacutees raquo Toutefois les

donneacutees concerneacutees doivent ecirctre inexactes incomplegravetes peacuterimeacutees ou encore eacutequivoques ou

tout simplement frappeacutees drsquoune interdiction de traitement

60 Avec la loi Informatique et Liberteacutes le leacutegislateur a donc essayeacute de mettre en place la

protection des donneacutees agrave caractegravere personnel la plus complegravete possible garantissant aux

personnes concerneacutees par un traitement de donneacutees des droits fondamentaux assurant un

controcircle a priori et a posteriori des traitements effectueacutes Ces garanties ont drsquoailleurs eacuteteacute

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

39

jugeacutees comme preacutesentant un caractegravere approprieacute par le Conseil drsquoEtat dans une deacutecision

rendue le 19 novembre 199263

B La protection speacutecifique des donneacutees de santeacute

61 Les donneacutees de santeacute sont des donneacutees agrave caractegravere personnel assez particuliegraveres En

effet elles touchent de tregraves pregraves agrave lrsquointimiteacute de la personne et leur communication rend la

personne qursquoelles concernent vulneacuterable Cette particulariteacute leur vaut drsquoappartenir agrave une

cateacutegorie speacutecifique de donneacutees puisqursquoelles sont consideacutereacutees par la loi Informatique et

Liberteacutes comme eacutetant des donneacutees sensibles (1) En compleacutement des protections instaureacutees

par la loi Informatique et Liberteacutes les donneacutees de santeacute beacuteneacuteficient ainsi de protections qui

leurs sont propres (2)

1) Les donneacutees de santeacute des donneacutees sensibles

62 Bien qursquoil soit depuis longtemps acquis que les donneacutees de santeacute sont des donneacutees

particuliegraverement sensibles la deacutefinition leacutegale de la notion de donneacutees de santeacute nrsquoest apparue

que tregraves reacutecemment

63 La loi Informatique et Liberteacutes deacutefinit clairement la notion de donneacutees agrave caractegravere

personnel comme eacutetant laquo toute information relative agrave une personne physique identifieacutee ou qui

peut ecirctre identifieacutee directement ou indirectement par reacutefeacuterence agrave un numeacutero drsquoidentification

ou agrave un ou plusieurs eacuteleacutements qui lui sont propres raquo Toutefois elle ne revient pas

preacuteciseacutement sur la notion de donneacutees de santeacute Elle se contente juste de preacuteciser dans son

article 8 qursquo laquo il est interdit de collecter ou de traiter des donneacutees agrave caractegravere personnel [hellip]

qui sont relatives agrave la santeacute raquo La directive europeacuteenne de 1995 nrsquoest pas beaucoup plus

preacutecise sur la notion de donneacutees de santeacute Crsquoest un arrecirct de la CJCE en date du 6 novembre

2003 qui a apporteacute les premiegraveres preacutecisions sur cette notion64

En lrsquoespegravece le Goumlta hovraumltt

(Suegravede) avait poseacute par ordonnance du 23 feacutevrier 2001 sept questions preacutejudicielles sur

lrsquointerpreacutetation de la directive 9546CE La quatriegraveme de ces questions demandait agrave la Cour

de preacuteciser si laquo lrsquoindication sur une page drsquoaccueil qursquoun collegravegue de travail mentionneacute par

63 CE 18 novembre 1992 LICRA ndeg 115367 Rec 1992 p 411 AJDA 1993 p 213

64 CJCE 6 novembre 2003 affndegC-10101 Suegravede c Lindqvist

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

40

son nom srsquoest blesseacute au pied et est en congeacute de maladie partiel est-elle une donneacutee agrave

caractegravere personnel relative agrave la santeacute qui aux termes de lrsquoarticle 8 paragraphe 1 ne peut

faire lrsquoobjet drsquoun traitement raquo Face agrave cette question la CJCE va apporter une reacuteponse

simple laquo Eu eacutegard agrave lrsquoobjet de cette directive il convient de donner agrave lrsquoexpression donneacutees

de santeacute employeacutee agrave son article 8 paragraphe 1 une interpreacutetation large de sorte qursquoelle

comprenne des informations concernant tous les aspects tant physiques que psychiques de la

santeacute drsquoune personne raquo La CJCE se montre par conseacutequent assez large sur la deacutefinition de la

notion de donneacutees de santeacute Et elle nrsquoest drsquoailleurs pas la seule dans ce cas

64 Dans sa transposition de la directive 9546CE le Grand-Ducheacute du Luxembourg

contrairement agrave la France a deacutefini les donneacutees relatives agrave la santeacute comme eacutetant laquo toute

information concernant lrsquoeacutetat physique et mental drsquoune personne concerneacutee y compris les

donneacutees geacuteneacutetiques raquo65

La deacutefinition est leacutegegraverement plus large en ce qursquoelle regroupe

expresseacutement les donneacutees geacuteneacutetiques Cette inteacutegration est compreacutehensible bien que les

donneacutees geacuteneacutetiques qui regroupent les caractegraveres heacutereacuteditaires drsquoun individu ne concernent

pas agrave proprement parleacute un aspect de la santeacute drsquoun individu mais touchent en revanche

indeacuteniablement agrave son intimiteacute

65 Le Groupe de lrsquoarticle 2966

se montre eacutegalement tregraves large dans la deacutefinition qursquoil

donne de la notion Ce groupe srsquoest pencheacute agrave plusieurs reprises sur la probleacutematique lieacutee agrave la

protection des donneacutees de santeacute Ainsi dans un document de travail sur le traitement des

donneacutees agrave caractegravere personnel relatives agrave la santeacute contenues dans les dossiers meacutedicaux

eacutelectroniques adopteacute le 15 feacutevrier 2007 le groupe de travail reprend la deacutefinition poseacutee par

lrsquoarrecirct Lindqvist et la complegravete en preacutecisant que laquo cette deacutefinition srsquoapplique eacutegalement aux

donneacutees agrave caractegravere personnel lorsqursquoelles preacutesentent un lien clair et eacutetroit avec la

description de lrsquoeacutetat de santeacute drsquoune personne les donneacutees sur la consommation de

65 Loi du 2 aoucirct 2002 relative agrave la protection des personnes agrave lrsquoeacutegard du traitement des donneacutees agrave caractegravere

personnel Art 2 g) du journal officiel du Grand-Ducheacute du Luxembourg laquo Recueil des leacutegislations raquo A ndeg 91

du 13 aoucirct 2002 66

Le groupe de lrsquoarticle 29 ou Article 29 data protection working party est un organe consultatif europeacuteen

indeacutependant sur la protection des donneacutees et de la vie priveacutee eacutetabli en vertu de lrsquoarticle 29 de la directive ndeg

9546CE Ce groupe consultatif et indeacutependant est composeacute de repreacutesentants des autoriteacutes nationales chargeacutees

de la protection des donneacutees agrave caractegravere personnel drsquoun repreacutesentant de lrsquoautoriteacute creacutee pourhellipet drsquoun

repreacutesentant de la commission europeacuteenne Ses missions sont deacutefinies agrave lrsquoarticle 30 de la directive Il srsquoagit

principalement de donneacutee des avis sur les questions relatives agrave la protection des donneacutees agrave caractegravere personnel

mais eacutegalement promouvoir et contribuer agrave une application uniforme de la directive

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

41

meacutedicaments drsquoalcool ou de drogue et les donneacutees geacuteneacutetiques sont incontestablement des

donneacutees agrave caractegravere personnel relatives agrave la santeacute [hellip] en outre toutes autres donneacutees ndash par

exemple des donneacutees administratives (numeacutero de seacutecuriteacute sociale date drsquoadmission agrave

lrsquohocircpital) ndash contenues dans les documents meacutedicaux relatifs au traitement drsquoun patient

doivent ecirctre consideacutereacutees comme sensibles raquo Le Groupe de lrsquoarticle 29 franchit un cap

suppleacutementaire en inteacutegrant les donneacutees administratives agrave la cateacutegorie des donneacutees de santeacute agrave

partir du moment ougrave celles-ci sont contenues dans les dossiers meacutedicaux Il justifie sa position

au regard de la pertinence preacutesumeacutee de ces donneacutees dans le cadre de la prise en charge du

patient Nous pouvons noter ici le lien entre la deacutefinition de la notion de donneacutees de santeacute que

tente drsquoesquisser le Groupe de lrsquoarticle 29 et le champ couvert par le secret professionnel En

effet lrsquoarticle L 1110-4 du Code de la santeacute publique preacutevoit que le secret laquo couvre

lensemble des informations concernant la personne venues agrave la connaissance du

professionnel de santeacute raquo Il nous semble degraves lors raisonnable drsquoaffirmer si ces donneacutees sont

couvertes par le secret professionnel crsquoest bien du fait de leur caractegravere sensible Degraves lors la

deacutefinition des donneacutees de santeacute ne peut pas ecirctre moins vaste que cela A ce sujet drsquoailleurs le

Groupe Europeacuteen drsquoEthique dans une deacutecision rendue le 30 juillet 1999 avait deacutefini le

peacuterimegravetre des donneacutees de santeacute comme englobant laquo un large eacuteventail drsquoinformations qui

touchent agrave la vie priveacutee de la personne concerneacutee Elles incluent non seulement les donneacutees

meacutedicales de base [] mais aussi des donneacutees individuelles sensibles telles que celles

relatives agrave lrsquoeacutetat psychique de la personne agrave ses anteacuteceacutedents familiaux agrave ses habitudes de

vie y compris sa vie sexuelle agrave sa situation sociale et eacuteconomique ainsi que des donneacutees de

nature administrative raquo

66 Le regraveglement europeacuteen relatif agrave la protection des donneacutees personnelles67

adopteacute en

avril 2016 donne enfin une deacutefinition leacutegale agrave la notion de donneacutee de santeacute Ainsi selon les

dispositions de lrsquoarticle 4 de ce regraveglement les donneacutees concernant la santeacute sont deacutefinies

comme laquo les donneacutees agrave caractegravere personnel relatives agrave la santeacute physique ou mentale dune

personne physique y compris la prestation de services de soins de santeacute qui reacutevegravelent des

informations sur leacutetat de santeacute de cette personne raquo

67 Regraveglement 2016679 du Parlement europeacuteen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif agrave la protection des

personnes physiques agrave leacutegard du traitement des donneacutees agrave caractegravere personnel et agrave la libre circulation de ces

donneacutees et abrogeant la directive 9546CE JOUE du 4 mai 2016

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

42

67 Cette deacutefinition tregraves succincte srsquoinscrit dans la ligneacutee de celles proposeacutees jusqursquoalors

dans le sens ougrave elle se veut le plus large possible Toutefois nous pensons qursquoil aurait eacuteteacute

preacutefeacuterable drsquoinclure de maniegravere explicite les donneacutees administratives comme crsquoeacutetait le cas

dans la deacutefinition avanceacutee par le Groupe de lrsquoarticle 29 ou encore par le Groupe Europeacuteen

drsquoEthique Toutes les donneacutees relatives au patient et servant de maniegravere directe ou non agrave sa

prise en charge devraient pouvoir beacuteneacuteficier de la mecircme protection renforceacutee du fait de leur

sensibiliteacute mais eacutegalement afin drsquoassurer une certaine coheacuterence

68 Le caractegravere particuliegraverement sensible de ces donneacutees a ameneacute le leacutegislateur agrave adopter

des dispositions speacutecifiques agrave celles-ci Ainsi le traitement de ces donneacutees est en principe

interdit laquo il est interdit de collecter ou de traiter des donneacutees agrave caractegravere personnel qui font

apparaicirctre directement ou indirectement les origines raciales ou ethniques les opinions

politiques philosophiques ou religieuses ou lrsquoappartenance syndicale des personnes ou qui

sont relatives agrave la santeacute ou agrave la vie sexuelle de celles-ciraquo68

69 Toutefois agrave chaque principe son exception et les dispositions de la loi Informatique et

Liberteacutes ne deacuterogent pas agrave la regravegle Cette exception est drsquoailleurs poseacutee tout de suite apregraves le

principe69

En effet le II de lrsquoarticle 8 de la loi Informatique et Liberteacutes dresse une liste de

68 Article 8 de la loi Informatique et Liberteacutes

69 Lrsquoarticle 8 II de la loi Informatique et Liberteacutes dispose laquo Dans la mesure ougrave la finaliteacute du traitement lrsquoexige

pour certaines cateacutegories de donneacutees ne sont pas soumis agrave lrsquointerdiction preacutevue au I

1deg Les traitements pour lesquels la personne concerneacutee a donneacute son consentement expregraves sauf dans le cas ougrave la

loi preacutevoit que lrsquointerdiction viseacutee au I ne peut ecirctre leveacutee par le consentement de la personne concerneacutee

2deg Les traitements neacutecessaires agrave la sauvegarde de la vie humaine mais auxquels la personne concerneacutee ne peut

donner son consentement par suite drsquoune incapaciteacute juridique ou drsquoune impossibiliteacute mateacuterielle

3deg Les traitements mis en œuvre par une association ou tout autre organisme agrave but non lucratif et agrave caractegravere

religieux philosophique politique ou syndical

- pour les seules donneacutees mentionneacutees au I correspondant agrave lrsquoobjet de ladite association ou dudit organisme

- sous reacuteserve qursquoils ne concernent que les membres de cette association ou de cet organisme et le cas eacutecheacuteant

les personnes qui entretiennent avec celui-ci des contacts reacuteguliers dans le cadre de son activiteacute

- et qursquoils ne portent que sur des donneacutees non communiqueacutees agrave des tiers agrave moins que les personnes concerneacutees

nrsquoy consentent expresseacutement

4deg Les traitements portant sur des donneacutees agrave caractegravere personnel rendues publiques par la personne concerneacutee

5deg Les traitements neacutecessaires agrave la constatation agrave lrsquoexercice ou agrave la deacutefense drsquoun droit en justice

6deg Les traitements neacutecessaires aux fins de la meacutedecine preacuteventive des diagnostics meacutedicaux de

lrsquoadministration de soins ou de traitements ou de la gestion de services de santeacute et mis en oeuvre par un

membre drsquoune profession de santeacute ou par une autre personne agrave laquelle srsquoimpose en raison de ses fonctions

lrsquoobligation de secret professionnel preacutevue par lrsquoarticle 226-13 du Code peacutenal

7deg Les traitements statistiques reacutealiseacutes par lrsquoInstitut national de la statistique et des eacutetudes eacuteconomiques ou lrsquoun

des services statistiques ministeacuteriels dans le respect de la loi ndeg 51-711 du 7 juin 1951 sur lrsquoobligation la

coordination et le secret en matiegravere de statistiques apregraves avis du Conseil national de lrsquoinformation statistique et

dans les conditions preacutevues agrave lrsquoarticle 25 de la preacutesente loi

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

43

huit exceptions pour lesquelles le traitement drsquoune donneacutee a priori sensible peut toutefois ecirctre

autoriseacute Ainsi mecircme si les donneacutees sensibles sont frappeacutees drsquoune interdiction de traitement

comme nous pourrons le constater dans la suite de notre reacuteflexion ce sont bien les exceptions

qui trouveront agrave srsquoappliquer la majeure partie du temps

2) Des meacutecanismes de protection propres aux donneacutees de santeacute

70 La loi Informatique et Liberteacutes nrsquoest pas le seul texte organisant la protection des

donneacutees de santeacute et drsquoautres protections les concernant existent au sein du Code de la santeacute

publique Toutefois bien que preacutesentes au sein drsquoun mecircme code celles-ci sont eacuteparses et il

nrsquoexiste pas reacuteellement de coordination entre les diffeacuterents textes Nous ne nous attarderons

pas ici sur lrsquoencadrement speacutecifique qui existe en matiegravere drsquoheacutebergement des donneacutees de santeacute

et de confidentialiteacute ces cas speacutecifiques faisant lrsquoobjet drsquoun deacuteveloppement ulteacuterieur70

et

preacutefeacuterons concentrer notre reacuteflexion sur les protections de droit commun relatives aux

donneacutees de santeacute

Deux dispositions doivent donc ecirctre eacutetudieacutees la protection des donneacutees assureacutee par le

secret professionnel et le rocircle joueacute par le meacutedecin responsable de lrsquoinformation meacutedicale

71 laquo Il nrsquoy a pas de soins sans confidences de confidences sans confiance de confiance

sans secret raquo71

Comme le rappelle Bernard HOERNI le secret meacutedical est le pilier de la

relation entre le meacutedecin et son patient car il permet de preacuteserver le colloque singulier

neacutecessaire agrave lrsquoinstauration drsquoune relation de confiance La jurisprudence a tregraves tocirct affirmeacute le

caractegravere absolu du secret meacutedical Dans une deacutecision rendue le 9 deacutecembre 1885 connue

sous le nom de lrsquoarrecirct WATELET la Cour de cassation avait deacutecideacute que lrsquoobligation de

secret professionnel srsquoimposait aux meacutedecins comme un devoir de leur eacutetat qualifiant cette

obligation de geacuteneacuterale et absolue personne ne pouvant les en affranchir72

Aujourdrsquohui

lrsquoobligation de secret meacutedical a eacuteteacute introduite au Code de la santeacute publique et elle srsquoimpose

8deg Les traitements neacutecessaires agrave la recherche dans le domaine de la santeacute selon les modaliteacutes preacutevues au

chapitre IX raquo 70

V Infra ndeg 155 et s 71

HOERNI Bernard laquo Ethique et deacuteontologie meacutedicale raquo 2egraveme

eacutedition Masson Juin 2000 72

Cass crim 19 deacutecembre 1885 Watelet Bull crindeg 363 et S V eacutegalement en ce sens Cass Crim 8 mai

1947 Decraene Bull Crim ndeg 124

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

44

aussi bien aux meacutedecins qursquoagrave toutes les personnes intervenant dans la prise en charge du

patient

72 Ainsi lrsquoarticle 4 du Code de deacuteontologie meacutedicale transposeacute agrave lrsquoarticle R 4127-4 du

Code de la santeacute publique preacutevoit laquo le secret professionnel institueacute dans linteacuterecirct des

patients simpose agrave tout meacutedecin dans les conditions eacutetablies par la loi Le secret couvre tout

ce qui est venu agrave la connaissance du meacutedecin dans lexercice de sa profession cest-agrave-dire

non seulement ce qui lui a eacuteteacute confieacute mais aussi ce quil a vu entendu ou comprisraquo La loi du

4 mars 2002 relative aux droits des malades et agrave la qualiteacute du systegraveme de santeacute73

a renforceacute le

secret meacutedical et lrsquoa eacutetendu agrave toutes les personnes participant de maniegravere directe ou indirecte agrave

la prise en charge du patient Ainsi lrsquoarticle L 1110-4 du Code de la santeacute publique preacutevoit

laquo toute personne prise en charge par un professionnel de santeacute un eacutetablissement ou service

un professionnel ou organisme concourant agrave la preacutevention ou aux soins dont les conditions

dexercice ou les activiteacutes sont reacutegies par le preacutesent code le service de santeacute des armeacutees un

professionnel du secteur meacutedico-social ou social ou un eacutetablissement ou service social et

meacutedico-social mentionneacute au I de larticle L 312-1 du Code de laction sociale et des familles

a droit au respect de sa vie priveacutee et du secret des informations le concernant Excepteacute dans

les cas de deacuterogation expresseacutement preacutevus par la loi ce secret couvre lensemble des

informations concernant la personne venues agrave la connaissance du professionnel de tout

membre du personnel de ces eacutetablissements services ou organismes et de toute autre

personne en relation de par ses activiteacutes avec ces eacutetablissements ou organismes Il simpose

agrave tous les professionnels intervenant dans le systegraveme de santeacute [hellip] raquo Ainsi du secret

meacutedical nous sommes passeacutes au secret professionnel dont la violation peut entrainer des

sanctions civiles disciplinaires et peacutenales A ce titre le Code peacutenal sanctionne la violation du

secret professionnel drsquoun an emprisonnement et de 15 000 Euros drsquoamende74

73 La protection apporteacutee par le secret meacutedical vient renforcer celle offerte par la loi

Informatique et Liberteacutes Il faut toutefois srsquoattarder sur la diffeacuterence qui existe entre la notion

drsquoinformation concernant la personne couverte par le secret professionnel selon les

dispositions de lrsquoarticle L 1110-4 du Code de la santeacute publique et la notion de donneacutees agrave

73 Loi ndeg 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et agrave la qualiteacute du systegraveme de santeacute JORF du 5

mars 2002 p 4118 74

Article 226-13 du Code peacutenal

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

45

caractegravere personnel relatives agrave la santeacute (ou donneacutees de santeacute) dont la protection est assureacutee par

la loi Informatique et Liberteacutes75

Il faut faire attention agrave ne pas aller trop vite et consideacuterer

comme reacutefeacuterant agrave la mecircme chose deux notions qui en reacutealiteacute ne se recoupent pas

totalement76

Une information peut ecirctre deacutefinie comme eacutetant toute laquo indication

renseignement preacutecision que lrsquoon donne ou que lrsquoon obtient sur quelqursquoun ou sur quelque

chose raquo77

tandis que la donneacutee est deacutefinie comme eacutetant une laquo repreacutesentation drsquoune

information sous forme conventionnelle destineacutee agrave faciliter son traitement raquo78

La donneacutee est

donc une information valoriseacutee qui possegravede une valeur ajouteacutee drsquoordre technologique79

Ainsi

alors que la simple information meacutedicale ne sera proteacutegeacutee que par le secret professionnel

(crsquoest le cas par exemple de lrsquoinformation orale donneacutee par le patient agrave son meacutedecin qui ne

serait pas retranscrite au dossier meacutedical) la donneacutee de santeacute se verra offrir une double

protection celle preacutevue par la loi Informatique et Liberteacutes drsquoune part et celle assureacutee par

lrsquoobligation de secret professionnel drsquoautre part Cette double protection veacuteritable garantie

pour le patient peut toutefois srsquoaveacuterer pesante pour le professionnel de santeacute qui devra

srsquoassurer que toutes les obligations vis-agrave-vis drsquoune seule et mecircme donneacutee soient remplies

sous peine de voir sa responsabiliteacute engageacutee

74 Lrsquoautre protection majeure garantie aux donneacutees de santeacute est celle assureacutee par le

meacutedecin responsable de lrsquoinformation meacutedicale Ce dispositif preacutevu au Code de la santeacute

publique srsquoinscrit dans un cadre particulier qui est celui de lrsquoutilisation des informations

meacutedicales dans un but drsquoanalyse de lrsquoactiviteacute le Programme de Meacutedicalisation des Systegravemes

drsquoInformation ou PMSI instaureacute par lrsquoordonnance du 24 avril 199680

75 Un laquo praticien responsable de lrsquoinformation meacutedicale raquo doit ecirctre deacutesigneacute dans tout

eacutetablissement de santeacute par le directeur geacuteneacuteral apregraves avis de la commission meacutedicale

drsquoeacutetablissement81

Les conditions exactes de sa deacutesignation et les modes drsquoorganisation de la

fonction auraient ducirc ecirctre fixeacutees par un deacutecret qui nrsquoa pas eacuteteacute publieacute Bien que ces modaliteacutes ne

75 LAUDE Anne TABUTEAU Didier laquo Droit de la santeacute raquo PUF 2007 p 321

76 DE LAMBERTERIE Isabelle LUCAS Henri-Jacques laquo Informatique liberteacutes et recherche meacutedicale raquo

CNRS eacuted 2001 p 68 77

Deacutefinition du dictionnaire Larousse 78

DE LAMBERTERIE Isabelle laquo Qursquoest-ce qursquoune donneacutee de santeacute raquo RGDM ndeg speacutecial 2004 p 12 79

Id p 13 80

Ordonnance ndeg 96-346 du 24 avril 1996 portant reacuteforme de lhospitalisation publique et priveacutee JORF ndeg98 du

25 avril 1996 p 6324 81

Article L 6113-7 du Code de la santeacute publique

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

46

nous semblent pas indispensables les dispositions du Code de la santeacute publique eacutetant

suffisamment claires pour que les eacutetablissements de santeacute puissent prendre leurs dispositions

quant agrave la nomination du praticien responsable de lrsquoinformation meacutedicale nous ne pouvons

que deacuteplorer encore une fois le manque de rigueur du leacutegislateur qui ne nous offre que des

dispositions partielles sur un sujet pourtant important qursquoest lrsquoencadrement de lrsquoinformation

meacutedicale

76 La mission principale du meacutedecin responsable de lrsquoinformation meacutedicale est de

collecter les informations puis de traiter les donneacutees neacutecessaires agrave lrsquoanalyse de lrsquoactiviteacute

meacutedicale et agrave sa facturation que doivent lui transmettre les praticiens hospitaliers Divers

textes preacutecisent les autres missions de ce praticien responsable de lrsquoinformation meacutedicale

conseiller les praticiens pour la production des donneacutees et veiller agrave la qualiteacute de ces donneacutees

en les confrontant si neacutecessaire avec les dossiers meacutedicaux et les fichiers administratifs82

assurer la sauvegarde et la copie des donneacutees puis leur conservation durant cinq ans83

diffuser

ces donneacutees aupregraves de la direction de lrsquoeacutetablissement du preacutesident de la Commission

meacutedicale drsquoeacutetablissement (CME) ou de la commission elle-mecircme selon des modaliteacutes

arrecircteacutees apregraves avis de la CME84

Le meacutedecin responsable de lrsquoinformation meacutedicale transmet agrave

la direction de lrsquoeacutetablissement ainsi qursquoau preacutesident de la CME les informations neacutecessaires agrave

lanalyse de lactiviteacute de leacutetablissement soit dans son ensemble soit pour chacune des

structures meacutedicales de maniegravere systeacutematique ou agrave leur demande mais toujours dans des

conditions garantissant la confidentialiteacute des donneacutees et lrsquoanonymat des patients Il peut aussi

transmettre ces informations aux praticiens ayant dispenseacutes des soins Le meacutedecin responsable

de lrsquoinformation meacutedicale doit ecirctre informeacute de lrsquoobjectif des traitements de lrsquoinformation qui

lui sont demandeacutes Il doit ensuite participer agrave lrsquointerpreacutetation de leurs reacutesultats

77 Dans le cadre des controcircles relatifs agrave la facturation les meacutedecins inspecteurs de santeacute

publique et les meacutedecins conseils des organismes drsquoassurance maladie ont accegraves aux fichiers

concernant les informations drsquoactiviteacute et de facturation par lrsquointermeacutediaire du praticien

82 Article R 6113-4 du Code de la santeacute publique

83 Arrecircteacute du 22 feacutevrier 2008 relatif au recueil et au traitement des donneacutees dactiviteacute meacutedicale et des donneacutees de

facturation correspondantes produites par les eacutetablissements de santeacute publics ou priveacutes ayant une activiteacute en

meacutedecine chirurgie obsteacutetrique et odontologie et agrave la transmission dinformations issues de ce traitement dans

les conditions deacutefinies agrave larticle L 6113-8 du Code de la santeacute publique JORF ndeg0051 du 29 feacutevrier 2008 p

3577 84

Article R 6113-8 du Code de la santeacute publique

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

47

responsable de lrsquoinformation meacutedicale Ce dernier doit dans le cadre drsquoun controcircle informer

les praticiens responsables des structures meacutedicales concerneacutees preacutealablement agrave toute

confrontation drsquoun enregistrement de fichier avec un dossier meacutedical Il appartient eacutegalement

au praticien responsable de lrsquoinformation meacutedicale de conseiller le directeur geacuteneacuteral en ce qui

concerne la dureacutee de conservation des dossiers85

Ainsi il doit ecirctre consulteacute par le directeur

geacuteneacuteral avant que ce dernier deacutecide drsquoeacuteliminer un dossier meacutedical dont le deacutelai de

conservation est deacutepasseacute Il lui appartient eacutegalement de donner son avis sur lrsquoopportuniteacute de

fixer des dureacutees de conservation exceacutedant vingt ans pour certaines cateacutegories de dossiers En

tant que garant de la protection des donneacutees nominatives il reccediloit les demandes des usagers

concernant leur droit drsquoaccegraves et de rectification preacutevu par la loi Informatique et Liberteacutes du 6

janvier 1978 et conseille le directeur geacuteneacuteral en ce qui concerne les droits drsquoaccegraves aux

donneacutees meacutedicales nominatives Il est eacutegalement consulteacute concernant les modaliteacutes

drsquoattribution et de controcircle des autorisations drsquoaccegraves

78 Force est de constater que ce meacutedecin responsable de lrsquoinformation meacutedicale beacuteneacuteficie

de nombreuses preacuterogatives afin de lui permettre de remplir au mieux son rocircle de garant de la

protection des donneacutees personnelles Toutefois cette fonction est souvent restreinte au sein

des eacutetablissements de santeacute aux simples missions relatives au PMSI Or lrsquoanalyse des textes

nous montre bien une volonteacute drsquoinstaurer un gardien de lrsquoinformation meacutedicale agrave la fois

garant de la bonne application des dispositions de la loi Informatique et Liberteacutes mais

eacutegalement du respect du secret professionnel

85 Article R 1112-7 du Code de la santeacute publique

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

48

sect2 Une protection agrave lrsquoefficaciteacute relative

79 La loi Informatique et Liberteacutes a doteacute la CNIL de nombreux pouvoirs afin que celle-ci

puisse mener agrave bien les missions de controcircle qui lui sont confieacutees Toutefois il convient de

srsquointerroger sur lrsquoefficaciteacute de ces pouvoirs (A) tout comme sur les limites de la protection

accordeacutee aux donneacutees de santeacute (B)

A Le controcircle et la sanction du non-respect de la loi Informatique et

Liberteacutes des mesures disproportionneacutees

80 La CNIL srsquoest vue doteacutee par le leacutegislateur drsquoun statut particulier accompagneacute des

pouvoirs qursquoil estimait neacutecessaire agrave la reacutealisation de ses missions (1) Il est eacutegalement preacutevu

que le non-respect des dispositions de la loi Informatique et Liberteacutes entraine la mise en

œuvre de sanctions qui nous semblent toutefois disproportionneacutees et donc difficiles

drsquoapplication (2)

1) La CNIL une autoriteacute administrative indeacutependante doteacutee drsquoun pouvoir de controcircle

neacutecessaire

81 Le chapitre III de la loi Informatique et Liberteacutes encadre le fonctionnement et

lrsquoorganisation de la Commission Nationale de lrsquoInformatique et des Liberteacutes Celle-ci fut la

premiegravere a beacuteneacuteficieacute du statut particulier drsquoAutoriteacute Administrative Indeacutependante (AAI) Lors

des deacutebats relatifs agrave la loi de 1978 srsquoeacutetait en effet poseacutee la question du statut agrave donner agrave ce qui

aller devenir la CNIL Initialement il avait eacuteteacute envisageacute de faire de la CNIL soit un

eacutetablissement public sur lequel nrsquoaurait peseacute qursquoune tutelle alleacutegeacutee soit un simple service du

Ministegravere de la justice Mais le contexte particulier86

dans lequel est neacutee la loi Informatique et

Liberteacutes et donc la CNIL a justifieacute la creacuteation drsquoune nouvelle structure les AAI Toutefois

ce nrsquoest que plus tard que cette deacutenomination speacutecifique est apparue Crsquoest le Conseil

constitutionnel dans une deacutecision en date du 26 juillet 198487

et relative agrave la haute autoriteacute

86 V Supra ndeg 44

87 Conseil constitutionnel deacutecision ndeg 84-173 DC du 26 juillet 1984 JORF du 28 juillet 1984 p 2496

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

49

audiovisuelle qui va pour la premiegravere fois mettre un nom sur le concept laquo la deacutesignation

drsquoune autoriteacute administrative indeacutependante du gouvernement pour exercer une attribution

aussi importante [hellip] constitue une garantie fondamentale pour lrsquoexercice drsquoune liberteacute

publique raquo La doctrine srsquoeacutetait cependant essayeacutee agrave la theacuteorisation du concept auparavant88

Les AAI ont eacuteteacute creacuteeacutees pour reacutepondre principalement agrave trois objectifs89

le premier est drsquooffrir

aux citoyens lrsquoassurance drsquoune certaine impartialiteacute en ce qui concerne les interventions de

lrsquoEtat En effet les AAI ont cette particulariteacute de sembler laquo pareacutees degraves leur naissance drsquoune

onction qui les ferait beacuteneacuteficier drsquoune irreacutefragable preacutesomption drsquoimpartialiteacute raquo90

Dans les

domaines touchant de pregraves aux droits et liberteacutes fondamentaux comme crsquoest le cas pour la

protection des donneacutees agrave caractegravere personnel lrsquoEtat peut ecirctre reacuteputeacute partial il lui appartient

alors de confier ses responsabiliteacutes en la matiegravere agrave des autoriteacutes exteacuterieures et indeacutependantes

dont les avis et deacutecisions ne seront pas remis en cause La deuxiegraveme justification tient agrave la

volonteacute drsquoassocier des professionnels agrave la mise en place des regravegles applicables dans des

domaines techniques Enfin la troisiegraveme justification avanceacutee est la meilleure efficaciteacute drsquoune

AAI notamment en matiegravere de sanction le juge pouvant sembler parfois plus lent agrave ce niveau

mais eacutegalement en matiegravere de prise de deacutecision le circuit eacutetant plus simple qursquoau sein drsquoune

administration classique

82 La volonteacute initiale du leacutegislateur en creacuteant la CNIL nrsquoeacutetait pas drsquoinstaurer une

nouvelle cateacutegorie juridique mais simplement de srsquoassurer que la commission qursquoil allait

creacuteer ne serait pas une eacuteniegraveme structure deacutenueacutee de tout pouvoir Selon les dispositions de la

loi Informatique et Liberteacutes la CNIL dispose de missions speacutecifiques qui pourront ecirctre

meneacutees agrave bien gracircce aux pouvoirs que lui accorde la loi lrsquoensemble eacutetant deacutefini au sein de

lrsquoarticle 11 de la loi

83 La CNIL est avant toute chose investie drsquoune mission drsquoinformation et de conseil

puisque qursquoelle doit informer les citoyens et les responsables de traitements de leurs droits et

obligations Au titre de sa mission de conseil elle doit eacutegalement eacutepauler les pouvoirs publics

et les juridictions en reacutepondant agrave leurs demandes drsquoavis Cette mission lrsquoamegravene par ailleurs agrave

88 V notamment en ce sens SABOURIN Pierre laquo Les autoriteacutes administratives indeacutependantes une cateacutegorie

nouvelle raquo AJDA 1983 pp 275-295 89

laquo Consideacuterations geacuteneacuterales les Autoriteacutes Administratives Indeacutependantesraquo Rapport public du Conseil drsquoEtat

2001 p 275 90

Ibid

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

50

donner un avis sur tout projet de loi ou de deacutecret portant sur la protection des personnes agrave

lrsquoeacutegard des traitements automatiseacutes Elle peut aussi collaborer avec drsquoautres AAI en matiegravere

de protection de donneacutees mais eacutegalement ecirctre associeacutee agrave la preacuteparation et agrave la deacutefinition de la

position franccedilaise en la matiegravere La CNIL constitue ainsi une reacuteelle cellule drsquoappui et de

conseil en matiegravere de protection des donneacutees

84 Sa deuxiegraveme mission consiste agrave assurer la protection des donneacutees agrave caractegravere

personnel Elle se doit donc de veiller agrave ce que les traitements de donneacutees soient mis en œuvre

de maniegravere conforme agrave la loi Pour mener agrave bien cette mission le leacutegislateur nrsquoa pas heacutesiteacute agrave

doter la commission drsquoun double pouvoir de controcircle controcircle a priori et controcircle a

posteriori Au titre de son pouvoir a priori elle doit instruire les deacuteclarations de traitement

ainsi que les demandes drsquoautorisation ou drsquoavis qui lui sont soumises Au titre de son pouvoir

de controcircle a posteriori elle est destinataire des reacuteclamations peacutetitions et plaintes relatives agrave

la mise en œuvre des traitements auxquelles elle deacutecide des suites agrave donner Elle dispose

eacutegalement drsquoun pouvoir drsquoenquecircte au sein des entreprises Elle peut agrave ce titre diligenter des

perquisitions Cela lui permet de recueillir tout renseignement utile ou drsquoobtenir la

communication de tout document qursquoelle estimera neacutecessaire agrave la reacutealisation de sa mission91

Elle possegravede un important pouvoir reacuteglementaire en vertu duquel elle est habiliteacutee agrave eacutelaborer

des normes simplifieacutees mais eacutegalement des regraveglements types et ce afin drsquoassurer la seacutecuriteacute

des systegravemes Toutefois la CNIL nrsquoa que tregraves peu utiliseacute ce pouvoir puisqursquoun seul regraveglement

de ce type a eacuteteacute eacutetabli jusqursquoagrave aujourdrsquohui92

Enfin elle beacuteneacuteficie drsquoun pouvoir de sanction agrave

lrsquoencontre des responsables de traitements93

85 La CNIL dispose bien entendu de moyens propres afin de mener agrave bien lrsquoensemble des

missions qui lui sont confieacutees son budget relevant du budget de lrsquoEtat Toutefois en 2008

face agrave la faiblesse de ses moyens la commission a reacutefleacutechi agrave la possibiliteacute drsquoinstaurer un autre

mode de financement La CNIL avait donc preacutesenteacute au Seacutenat en 2007 un projet de

diversification des sources de financement de la commission94

dans lequel il envisageait une

91 DESGENSPASANAU Guillaume laquo La protection des donneacutees agrave caractegravere personnel raquo op cit p 63

92 Deacutelibeacuteration CNIL ndeg81-094 du 21 juillet 1981 portant adoption drsquoune recommandation relative aux mesures

geacuteneacuterales de seacutecuriteacute des systegravemes informatiques 93

V Infra ndeg 86 et s 94

DEacuteTRAIGNE Yves ESCOFFIER Anne-Marie laquoLa vie priveacutee agrave lheure des meacutemoires numeacuteriques Pour une

confiance renforceacutee entre citoyens et socieacuteteacute de linformation raquo Rapport dinformation fait au nom de la

commission des lois ndeg 441 27 mai 2009

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

51

contribution de la part de chaque acteur geacuteneacuterant des traitements de donneacutees agrave caractegravere

personnel tout en excluant des contributeurs les particuliers et le petits organismes Toutefois

celui-ci nrsquoa agrave lrsquoheure actuelle pas abouti Nous estimons que cette mesure bien que

permettant de renforcer les moyens de la CNIL pourrait ecirctre agrave double tranchant drsquoun cocircteacute

certains organismes pourraient ecirctre tenteacutes de ne pas deacuteclarer leurs fichiers afin de ne pas avoir

agrave srsquoacquitter de la redevance mais drsquoun autre cocircteacute nous pourrions assister agrave une plus grande

implication des organismes contributeurs dans la protection des donneacutees Dans tous les cas il

est vrai que le manque de moyens de la CNIL face agrave lrsquoaugmentation constante du traitement

des donneacutees agrave caractegravere personnel et du deacuteveloppement de nouvelles situations agrave risque

(deacuteveloppement des proceacutedeacutes de biomeacutetrie notamment) pousse agrave reacutefleacutechir aux nouveaux

modes de financement de cette commission

Le pouvoir de controcircles accordeacute agrave la CNIL par la loi Informatique et Liberteacutes est

compleacuteteacute par un pouvoir de sanction qui preacutesente cependant quelques limites

2) La limite des sanctions preacutevues par les textes

86 Depuis la reacuteforme de la loi Informatique et Liberteacutes intervenue en 2004 la CNIL srsquoest

vue accorder un pouvoir de sanction administrative dispositif qui est venu compleacuteter les

sanctions peacutenales deacutejagrave en place

Lrsquoensemble des sanctions encourues en cas de non-respect de la loi Informatique et

Liberteacutes est deacutecrit au sein de chapitre VII et VIII de la loi traitant respectivement des

sanctions prononceacutees par la CNIL et des sanctions peacutenales Il existe une gradation dans les

sanctions pouvant ecirctre mises en œuvre par la CNIL Un premier niveau est preacutevu avec la

possibiliteacute de prononcer un avertissement ou une mise en demeure de faire cesser les

manquements agrave lrsquoencontre du responsable drsquoun traitement qui nrsquoaurait pas respecteacute les

obligations deacutecoulant de la loi Informatique et Liberteacutes Si le responsable ne se conforme pas

agrave la mise en demeure et apregraves la mise en œuvre drsquoune proceacutedure contradictoire la CNIL

pourra alors prononcer agrave lrsquoencontre du responsable du traitement deacutefaillant soit une sanction

peacutecuniaire (sauf srsquoil srsquoagit drsquoun traitement mis en œuvre par lrsquoEtat) soit une injonction de

cesser le traitement ou un retrait de lrsquoautorisation qui avait eacuteteacute deacutelivreacutee La loi preacutevoit

eacutegalement une proceacutedure drsquourgence qui permet agrave la CNIL apregraves une proceacutedure contradictoire

et dans lrsquohypothegravese ougrave le traitement porterait atteinte agrave lrsquoidentiteacute humaine aux droits de

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

52

lrsquohomme agrave la vie priveacutee ou encore aux liberteacutes individuelles ou publiques de deacutecider de

lrsquointerruption de la mise en œuvre du traitement pour une dureacutee maximum de trois mois (sauf

pour certains traitements speacutecifiques mis en œuvre par lrsquoEtat) deacutecider le verrouillage de

certaines donneacutees agrave caractegravere personnel pour une dureacutee maximale de trois mois (sauf pour les

traitements qui inteacuteressent la sucircreteacute de lrsquoEtat la deacutefense ou la seacutecuriteacute publique ou qui

concernent la preacutevention la recherche la constatation ou la poursuite drsquoinfractions peacutenales

dans ce cas la CNIL en informera le Premier Ministre qui prendra le cas eacutecheacuteant les mesures

neacutecessaires pour faire cesser la violation constateacutee) ou enfin en cas drsquoatteinte grave et

immeacutediate aux droits et liberteacutes le Preacutesident de la CNIL peut demander par le biais drsquoun

reacutefeacutereacute aupregraves de la juridiction compeacutetente drsquoordonner sous astreinte toutes les mesures de

seacutecuriteacute neacutecessaires agrave la sauvegarde de ces droits95

Ces deacutecisions doivent ecirctre motiveacutees et

notifieacutees au responsable du traitement Elles sont susceptibles de recours devant le Conseil

drsquoEtat Enfin la CNIL peut deacutecider de rendre publics ou non les avertissements qursquoelle

prononce ou en ce qui concerne les autres sanctions en cas de mauvaise foi du responsable

du traitement deacutecider de les faire publier au sein de journaux ou tout autre support de son

choix

87 Les sanctions peacutenales reacuteprimant les infractions aux dispositions de la loi Informatique

et Liberteacutes sont reacuteprimeacutees aux articles 226-16 agrave 226-24 du Code peacutenal96

Drsquoune maniegravere

geacuteneacuterale nous pouvons constater que toutes les infractions agrave la loi Informatique et Liberteacutes

sont punissables drsquoune peine de cinq ans drsquoemprisonnement et de 300 000 Euros drsquoamende et

dans tous les cas lrsquoeffacement des donneacutees agrave caractegravere personnel traiteacutees de maniegravere illeacutegales

peut ecirctre ordonneacute97

A noter que le fait drsquoentraver lrsquoaction de la CNIL est puni drsquoun an

drsquoemprisonnement et 15 000 euros drsquoamende98

88 Les sanctions administratives peacutecuniaires quant agrave elles doivent ecirctre proportionnelles

aux manquements constateacutes et prises en fonction de la graviteacute du manquement constateacute Elles

ne peuvent exceacuteder la somme de trois millions drsquoeuros99

95 Article 46 de la loi Informatique et Liberteacutes

96 Article 50 de la loi Informatique et Liberteacutes

97 Article 226-22-2 du Code Peacutenal

98 Article 51 de la loi Informatique et Liberteacutes

99 Il est inteacuteressant de preacuteciser que ce plafond a eacuteteacute introduit par lrsquoarticle 65 de la loi ndeg2016-1321 du 7 octobre

2016 pour une Reacutepublique numeacuterique Avant cela les sanctions administratives peacutecuniaires eacutetaient gradueacutees et

ne pouvaient deacutepasser la somme de 150 000 euros lors du premier manquement et 300 000 euros en cas de

manquement reacuteiteacutereacute

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

53

89 Ces sanctions preacutevues par la loi soulegravevent de nombreuses interrogations La premiegravere

est celle de savoir quelle peut ecirctre lrsquoarticulation entre sanctions peacutenales et sanctions

administratives prononceacutees par la CNIL En pratique rien dans le texte nrsquoempecircche une saisine

des deux juridictions de maniegravere simultaneacutee Le parallegravele ici peut ecirctre fait avec ce qui

srsquoapplique en matiegravere de responsabiliteacute meacutedicale la responsabiliteacute peacutenale du praticien peut

ecirctre mise en cause sans que cela nrsquoempecircche le Conseil de lrsquoOrdre de mettre en œuvre une

proceacutedure disciplinaire Un seul beacutemol est apporteacute par le Conseil constitutionnel100

agrave ce sujet

le cumul des sanctions prononceacutees ne peut pas deacutepasser le montant le plus eacuteleveacute drsquoune des

sanctions encourues De mecircme la loi Informatique et Liberteacutes elle-mecircme preacutevoit que

laquo lorsque la Commission Nationale de lrsquoInformatique et des Liberteacutes a prononceacute une

sanction peacutecuniaire devenue deacutefinitive avant que le juge peacutenal ait statueacute deacutefinitivement sur les

mecircmes faits ou sur des faits connexes celui-ci peut ordonner que la sanction peacutecuniaire

srsquoimpute sur lrsquoamende qursquoil prononce raquo

90 La deuxiegraveme reacuteflexion qursquoil est utile drsquoaborder agrave ce stade concerne lrsquoefficaciteacute reacuteelle

des sanctions preacutevues Pour cela nous devons deacutevelopper notre reacuteflexion en deux temps

drsquoabord se pencher sur les sanctions peacutenales et ensuite se focaliser sur le pouvoir de sanction

propre agrave la CNIL

91 Les sanctions peacutenales sont-elles efficaces Cela est fortement remis en question par la

doctrine101

En effet avant la reacuteforme intervenue en 2004 le contraste entre la seacuteveacuteriteacute des

textes et les condamnations prononceacutees eacutetaient frappant Ce constat avait drsquoailleurs eacuteteacute

effectueacute par Guy BRAIBANT dans son rapport remis au Premier Ministre en 1998 puisqursquoil y

preacutecisait que laquo le reacutegime reacutepressif franccedilais en matiegravere de fichiers informatiques ndash dont la

coheacuterence avec drsquoautres dispositions du Code Peacutenal comparables est sujette agrave caution ndash se

caracteacuterise par une grande seacuteveacuteriteacute dont le contraste avec une jurisprudence pusillanime est

frappant raquo102

La directive europeacuteenne de 1995 laissant carte blanche aux diffeacuterents Etats en

100 Deacutecision du Conseil constitutionnel ndeg 89-260DC du 25 juillet 1989 Rec p 59 V eacutegalement en ce

sens Deacutecision du Conseil constitutionnel ndeg 97-395DC du 30 deacutecembre 1997 Rec p 33 101

V en ce sens LEPAGE Agathe laquo Loi du 6 aoucirct 2004 Reacuteflexions de droit peacutenal sur la loi du 6 aoucirct 2004

relative agrave la protection des personnes agrave lrsquoeacutegard des traitements de donneacutees agrave caractegravere personnel raquo

Communication commerce eacutelectronique 2005 ndeg 2 eacutetude ndeg 9 102

BRAIBANT Guy laquo Donneacutees personnelles et socieacuteteacute de lrsquoinformation rapport au Premier ministre sur la

transposition en droit franccedilais de la directive numeacutero 95-46raquo La Documentation franccedilaise 1998 p 119

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

54

ce qui concerne les sanctions agrave mettre en œuvre103

le leacutegislateur aurait pu profiter de la

reacuteforme de 2004 pour refondre le reacutegime de sanction peacutenale Il aurait pu envisager par

exemple comme une partie de la doctrine pouvait lrsquoeacutevoquer une deacutepeacutenalisation104

les

sanctions peacutecuniaires prononceacutees par la CNIL se substituant aux sanctions peacutenales105

Le

leacutegislateur aurait eacutegalement pu suivre les preacuteconisations de Guy BRAIBANT Celui-ci

constatant lrsquoabsence drsquoune reacuteelle politique peacutenale dans un domaine laquo ougrave les moyens

drsquoinvestigation humain et mateacuteriels de la police judiciaire sont insuffisants et sous

dimensionneacutes eu eacutegard agrave lrsquoampleur de lrsquoactiviteacute eacuteconomique lieacutee agrave lrsquoinformatique raquo

proposait drsquoassouplir la reacutepression en distinguant les cas ougrave la violation des dispositions de la

loi Informatique et Liberteacutes eacutetait destineacutee agrave porter atteinte agrave la liberteacute des cas ougrave il nrsquoy avait

qursquoune violation des regravegles de forme Dans la premiegravere hypothegravese la sanction aurait eacuteteacute une

peine correctionnelle et dans la seconde une peine contraventionnelle Cette solution aurait

permis de rendre la loi et la reacutepression plus efficaces

92 Toutefois le leacutegislateur a choisi une autre direction lors de la reacuteforme de 2004 en

accordant il est vrai plus de pouvoirs agrave la CNIL mais en nrsquoapportant que peu de nouveauteacutes

en ce qui concerne les sanctions peacutenales La preuve en est le leacutegislateur se contente drsquoutiliser

la technique du renvoi agrave la loi de 1978 Or comme le souligne tregraves bien Caroline ZORN-

MACREZ laquo ce proceacutedeacute facteur drsquoinflation leacutegislative du fait de sa faciliteacute est eacutegalement

facteur drsquoinstabiliteacute juridique car il contribue agrave perdre dans ses meacuteandres le leacutegislateur

comme le citoyen raquo106

Loin de la simplification procircneacutee notamment par Guy BRAIBANT

certains auteurs y ont mecircme vu un renforcement de la peacutenalisation107

responsable drsquoune

inefficaciteacute des sanctions preacutevues du fait de leur disproportion Car force est de constater que

les peines actuellement preacutevues trop seacutevegraveres si ce nrsquoest mecircme disproportionneacutees perdent de

leur pouvoir dissuasif et donc de leur efficaciteacute A titre de comparaison il est inteacuteressant de

signaler qursquoalors que laquo le fait y compris par neacutegligence de proceacuteder ou de faire proceacuteder agrave

103 Directive ndeg9546CE du 24 octobre 1995 article 24 laquo Les Etats membres prennent les mesures approprieacutees

pour assurer la pleine application des dispositions de la preacutesente directive et deacuteterminent notamment les

sanctions agrave appliquer en cas de violation des dispositions prises en application de la preacutesente directive raquo 104

V notamment en ce sens FRANCILLON Jacques laquo Infractions relevant du droit de lrsquoinformation et de la

communication raquo revue de science criminelle et de droit peacutenal compareacute 1995 ndeg 1 105

BRAIBANT Guy laquo Donneacutees personnelles et socieacuteteacute de lrsquoinformation rapport au Premier ministre sur la

transposition en droit franccedilais de la directive numeacutero 95-46raquo op cit p 119 106

ZORN-MACREZ Caroline laquo Donneacutees de santeacute et secret partageacute raquo PUN 2010 p 214 107

BRAIBANT Guy laquo Donneacutees personnelles et socieacuteteacute de lrsquoinformation rapport au Premier ministre sur la

transposition en droit franccedilais de la directive numeacutero 95-46raquo op cit p 119

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

55

des traitements de donneacutees agrave caractegravere personnel sans quaient eacuteteacute respecteacutees les formaliteacutes

preacutealables agrave leur mise en œuvre preacutevues par la loi est puni de cinq ans demprisonnement et

de 300 000 euros damende raquo lrsquohomicide involontaire est quant agrave lui puni de trois ans

demprisonnement et de 45 000 euros damende108

Il est alors facilement compreacutehensible que

le juge peacutenal face agrave une infraction agrave la loi Informatique et Liberteacutes heacutesite agrave prononcer une

peine trop lourde alors que lrsquoatteinte causeacutee ne constitue ni une atteinte physique ni une

atteinte aux biens109

et que le veacuteritable preacutejudice subi par la victime sera difficile agrave chiffrer

93 Nous sommes ici face agrave ce que Caroline ZORN-MACREZ considegravere comme laquo un

droit non-reacutealiste raquo110

difficilement susceptible drsquoecirctre sanctionneacute Tout repose alors sur

lrsquoefficaciteacute de la CNIL et des sanctions qursquoelle prononce Le fait de disposer de pouvoirs de

sanction nrsquoest pas rare pour les autoriteacutes administratives de ce type Le Conseil constitutionnel

srsquoeacutetait drsquoailleurs deacutejagrave prononceacute sur la possibiliteacute qursquoune AAI puisse exercer un pouvoir de

sanction dans la mesure ougrave la sanction susceptible drsquoecirctre prononceacutee reste exclusive de toute

privation de liberteacute et que lrsquoexercice de ce pouvoir demeure assorti par la loi de mesures

destineacutees agrave sauvegarder les droits et liberteacutes constitutionnellement garantis111

Mais la CNIL a

ducirc attendre la reacuteforme de 2004 et le deacutecret drsquoapplication du 20 octobre 2005112

avant de

pouvoir disposer de telles preacuterogatives Et il a fallu attendre encore deux ans apregraves lrsquoadoption

de cette reacuteforme avant que la CNIL ne se deacutecide agrave faire usage de son nouveau pouvoir113

et

prononcer sa premiegravere sanction peacutecuniaire114

Depuis entre 2006 et 2015 la CNIL aura

prononceacute en tout 122 sanctions dont 58 sanctions peacutecuniaires115

Ce nombre qui peut nous

paraitre assez bas srsquoexplique par la proceacutedure drsquoeacutelaboration des sanctions elle-mecircme En effet

comme nous avons pu le constater preacuteceacutedemment ce nrsquoest que srsquoil ne se conforme pas agrave la

mise en demeure prononceacutee agrave son encontre et qursquoil maintient son deacutelit que le responsable

drsquoun traitement se verra sanctionneacute A titre drsquoexemple en 2011 65 mises en demeures ont eacuteteacute

108 Article 221-6 du Code Peacutenal

109 MATTATIA Franccedilois laquo CNIL et tribunaux concurrence ou compleacutementariteacute dans la reacutepression des

infractions agrave la loi Informatique et Liberteacutes raquo Revue de science criminelle 2009 p 317 110

ZORN-MACREZ Caroline laquo Donneacutees de santeacute et secret partageacute raquo op cit p 216 111

Deacutecision du Conseil constitutionnel ndeg 89-260 DC du 28 juillet 1989 112

Deacutecret ndeg 2005-1309 du 20 octobre 2005 pris pour lapplication de la loi ndeg 78-17 du 6 janvier 1978 relative agrave

linformatique aux fichiers et aux liberteacutes modifieacutee par la loi ndeg 2004-801 du 6 aoucirct 2004 JORF ndeg 247 du 22

octobre 2005 p 16769 113

FOREST David laquo Pouvoirs de la CNIL le reacuteveil soudain de la belle endormie raquo Recueil Dalloz 2007 p

94 114

Deacutelibeacuteration CNIL ndeg2006-173 du 28 juin 2006 115

Chiffres consulteacutes le 3 mai 2016 sur [httpwwwcnilfr]

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

56

adopteacutees par la CNIL contre seulement 19 sanctions prononceacutees116

Ainsi contrairement aux

cas dans lesquels le traitement litigieux serait ameneacute devant un tribunal le responsable du

traitement beacuteneacuteficie drsquoune possibiliteacute de reacutegulariser sa situation117

Le pouvoir de sanction

accordeacute agrave la CNIL nous apparaicirct donc ecirctre plus efficace et plus facilement applicable que

devant une juridiction de droit commun

En parallegravele de ce pouvoir de sanction la loi Informatique et Liberteacutes instaure comme

nous lrsquoavons vu une protection speacutecifique aux donneacutees de santeacute Cependant dans les faits

celle-ci preacutesente certaines limites

B La protection limiteacutee des donneacutees de santeacute

94 La loi Informatique et Liberteacutes se veut aux premiers abords protectrice des donneacutees

de santeacute reacuteputeacutees sensibles Toutefois celles-ci peuvent quand mecircme faire lrsquoobjet drsquoun

traitement automatiseacute (1) De mecircme le consentement de la personne concerneacutee par les

donneacutees nrsquoa pas lrsquoimportance ni le poids que lrsquoon pourrait attendre de lui (2)

1) Les limites de lrsquointerdiction de traitement des donneacutees sensibles

95 En transposant la directive europeacuteenne 9546CE le leacutegislateur a fait entrer les

donneacutees de santeacute dans la cateacutegorie des donneacutees sensibles cateacutegorie qui est par principe

frappeacutee drsquoune interdiction de traitement Toutefois agrave chaque principe son exception lrsquoarticle

8 II vient dresser une liste de plusieurs cas dans lesquels le traitement des donneacutees sensibles

va ecirctre autoriseacute Nos travaux portant plus particuliegraverement sur les donneacutees de santeacute nous ne

nous attarderons pas sur les dispositions qui ne srsquoappliquent pas agrave celles-ci

96 Pas moins de six exceptions trouvent agrave srsquoappliquer aux donneacutees de santeacute La premiegravere

est eacutenonceacutee au 1deg du II de lrsquoarticle 8 de la loi Informatique et Liberteacutes laquo les traitements pour

lesquels la personne concerneacutee a donneacute son consentement expregraves sauf dans le cas ougrave la loi

preacutevoit que lrsquointerdiction viseacutee au I ne peut ecirctre leveacutee par le consentement de la personne raquo

116 Rapport drsquoactiviteacute 2011 de la CNIL p 68

117 MATTATIA Fabrice laquo CNIL et tribunaux concurrence ou compleacutementariteacute dans la reacutepression des

infractions agrave la loi Informatique et Liberteacutes raquo Revue de science criminelle 2009 p 317

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

57

Cette premiegravere exception amegravene plusieurs reacuteflexions Drsquoabord la loi exige un consentement

expregraves de la part de la personne concerneacutee par les donneacutees Ainsi les consentements

preacutesumeacutes ne seront pas suffisants contrairement agrave certaines hypothegraveses ougrave seule la non

opposition suffit Concernant la forme la loi nrsquoimpose pas drsquoobligation de consentement eacutecrit

mais dans la pratique il sera plus prudent pour le responsable du traitement drsquoobtenir une

preuve du consentement de la personne concerneacutee par les donneacutees sous peine de se voir

sanctionneacute peacutenalement118

97 Le consentement ne sera pour autant pas toujours suffisant agrave lever lrsquointerdiction de

traitement des donneacutees sensibles puisque la loi laisse la possibiliteacute au leacutegislateur de preacutevoir

que le consentement de la personne concerneacutee par les donneacutees ne soit pas suffisant pour lever

lrsquointerdiction de traitement des donneacutees Cette possibiliteacute a eacuteteacute introduite par la directive

europeacuteenne 9546CE en son article 8 II point a laquo le paragraphe 1 ne sapplique pas

lorsque la personne concerneacutee a donneacute son consentement explicite agrave un tel traitement sauf

dans le cas ougrave la leacutegislation de lEacutetat membre preacutevoit que linterdiction viseacutee au paragraphe 1

ne peut ecirctre leveacutee par le consentement de la personne concerneacutee raquo Le leacutegislateur franccedilais a

repris cette disposition telle quelle Toutefois il nrsquoen nrsquoa pas fait application concernant les

donneacutees de santeacute Or cette interdiction de traiter des donneacutees sensibles malgreacute le

consentement de la personne concerneacutee aurait pu permettre drsquoinstaurer une protection

suppleacutementaire vis-agrave-vis de certaines situations susceptibles de repreacutesenter un risque pour la

personne sans que celle-ci ne puisse totalement srsquoen rendre compte Cela aurait constitueacute une

forme de garde-fou contre la personne elle-mecircme La CNIL quant agrave elle se montre reacuteticente

agrave lrsquoutilisation du consentement de la personne comme unique justification du traitement des

donneacutees consideacuterant que le consentement risque drsquoecirctre parfois forceacute et devenir en quelques

sortes une laquo solution de faciliteacute raquo pour le responsable du traitement119

Ainsi nous estimons

que cette possibiliteacute aurait pu ecirctre utiliseacutee notamment dans le cas des dossiers meacutedicaux

proposeacutes par certaines socieacuteteacutes120

En effet nous pensons que les personnes ne mesurent pas

toujours les conseacutequences du traitement de certaines de leurs donneacutees et qursquoelles doivent donc

beacuteneacuteficier drsquoune protection suppleacutementaire

118 JOB Jean-Marie laquo La loi Informatiques et liberteacutes et les donneacutees de santeacute raquo RLDI ndeg 34 2008 p 87

119 Ibid

120 ZORN-MACREZ Caroline laquo Donneacutees de santeacute et secret partageacute raquo PUN 2010 p 230

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

58

98 La deuxiegraveme exception agrave lrsquointerdiction de traitement des donneacutees de santeacute est poseacutee au

2deg du II de lrsquoarticle 8 laquo les traitements neacutecessaires agrave la sauvegarde de la vie humaine mais

auxquels la personne concerneacutee ne peut donner son consentement par suite drsquoune incapaciteacute

juridique ou drsquoune impossibiliteacute mateacuterielleraquo Cette exception rejoint celle existant dans le

cadre des soins et instaureacutee par la loi Kouchner de 2002 (lrsquoarticle L 1111-4 du Code de la

santeacute publique preacutevoit que laquo aucun acte meacutedical ni aucun traitement ne peut ecirctre pratiqueacute

sans le consentement libre et eacuteclaireacute de la personne et ce consentement peut ecirctre retireacute agrave tout

moment Lorsque la personne est hors deacutetat dexprimer sa volonteacute aucune intervention ou

investigation ne peut ecirctre reacutealiseacutee sauf urgence ou impossibiliteacute raquo) La notion de sauvegarde

de la vie de la personne concerneacutee a eacuteteacute preacutefeacutereacutee agrave celle drsquointeacuterecirct vital qui eacutetait utiliseacutee dans

la directive europeacuteenne Comme le souligne agrave juste titre Alex TUumlRK dans son rapport121

la

notion drsquointeacuterecirct vital est la traduction litteacuterale de lrsquoexpression anglaise vital interest terme

ambigu en ce qursquoil peut deacutesigner eacutegalement un inteacuterecirct essentiel qui ne se rattache pas pour

autant agrave la survie de la personne Lrsquourgence dispense donc drsquoobtenir le consentement de la

personne dans lrsquohypothegravese ougrave le traitement serait neacutecessaire agrave la sauvegarde de la vie de la

personne concerneacutee par les donneacutees Cette exception est en reacutealiteacute double ce qui rend son

application tregraves limiteacutee122

De plus comme le souligne Jean-Marie JOB il srsquoagit de situations

qui sont deacutejagrave couvertes par la troisiegraveme deacuterogation beaucoup plus geacuteneacuterale123

99 La troisiegraveme exception concerne les laquo traitements neacutecessaires aux fins de la meacutedecine

preacuteventive des diagnostics meacutedicaux de lrsquoadministration de soins ou de traitements ou de la

gestion de services de santeacute et mis en œuvre par un membre drsquoune profession de santeacute ou par

une autre personne agrave laquelle srsquoimpose en raison de ses fonctions lrsquoobligation de secret

professionnel preacutevue par lrsquoarticle 226-13 du Code peacutenal raquo (article 8 II 6deg) Pour que cette

exception puisse srsquoappliquer deux conditions cumulatives doivent ecirctre respecteacutees le

traitement doit reacutepondre agrave une finaliteacute speacutecifique et ecirctre mis en œuvre par un professionnel de

santeacute ou tout autre professionnel tenu au secret professionnel Cette condition permet ainsi de

srsquoassurer que les donneacutees qui seront traiteacutees dans ce cadre seront soumises agrave une autre

121 TUumlRK Alex laquo Rapport fait au nom de la commission des Lois constitutionnelles de leacutegislation du suffrage

universel du Regraveglement et drsquoadministration geacuteneacuterale sur le projet de loi adopteacute par lrsquoAssembleacutee Nationale

relatif agrave la protection des personnes physiques agrave lrsquoeacutegard des traitements de donneacutees agrave caractegravere personnel et

modifiant la loi ndeg 78-17 du 6 janvier 1978 relative agrave lrsquoinformatique aux fichiers et aux liberteacutes raquo Seacutenat 2003

p 57 122

ZORN-MACREZ Caroline laquo Donneacutees de santeacute et secret partageacute raquo op cit p 236 123

JOB Jean-Marie laquo La loi Informatique et Liberteacutes et les donneacutees de santeacute raquo op cit p 87

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

59

protection celle du secret professionnel Cette exception renvoie agrave la relation patient

meacutedecin classique au cours de laquelle le patient communique un certain nombre

drsquoinformations agrave son meacutedecin neacutecessaires agrave sa prise en charge124

Comme le soulignait le

seacutenateur Alex TUumlRK cette exception permet de compenser le fait que les donneacutees de santeacute

soient de par leur qualification de donneacutees sensibles interdites de traitement tout en offrant

un cadre strict et seacutecuriseacute pour la personne concerneacutee par les donneacutees traiteacutees125

100 La quatriegraveme exception est beaucoup plus speacutecifique puisque le 8deg du II de lrsquoarticle 8

vise laquo les traitements neacutecessaires agrave la recherche dans le domaine de la santeacute selon les

modaliteacutes preacutevues au chapitre IX raquo Cette disposition concerne les traitements mis en œuvre

dans le cadre des recherches meacutedicales qui sont soumis agrave une proceacutedure particuliegravere deacutecrite

au sein du chapitre IX de la loi Informatique et Liberteacutes

101 La cinquiegraveme exception vise eacutegalement un cas tregraves speacutecifique puisque le III de

lrsquoarticle 8 de la loi dispose laquo si les donneacutees agrave caractegravere personnel viseacutees au I sont appeleacutees agrave

faire lrsquoobjet agrave bref deacutelai drsquoun proceacutedeacute drsquoanonymisation preacutealablement reconnu conforme aux

dispositions de la preacutesente loi par la Commission nationale de lrsquoinformatique et des liberteacutes

celle-ci peut autoriser compte tenu de leur finaliteacute certaines cateacutegories de traitement selon

les modaliteacutes preacutevues agrave lrsquoarticle 25 Les dispositions des chapitres IX et X ne sont pas

applicables raquo Les donneacutees doivent donc ecirctre anomymiseacutees crsquoest-agrave-dire transformeacutees afin

qursquoil ne soit plus possible de les relier mecircme indirectement agrave la personne concerneacutee126

on

parlera alors drsquoanonymisation irreacuteversible Celle-ci doit intervenir agrave bref deacutelai cette notion

nrsquoest pas deacutefinie par la loi Informatique et Liberteacutes et il appartiendra donc agrave la CNIL lors de

lrsquoeacutetude de la demande drsquoautorisation drsquoappreacutecier le deacutelai proposeacute par le responsable du

traitement Comme il est preacuteciseacute cette exception ne srsquoapplique pas dans le cadre de la

recherche meacutedicale mais trouvera agrave srsquoappliquer notamment dans le cadre de traitements mis

en œuvre par des entreprises priveacutees du secteur de la santeacute comme par exemple les

mutuelles

124 DE LAMBERTERIE Isabelle laquoLa place du consentement dans la collecte et le traitement des informations

sensibles La situation en France raquo RGDM ndeg 13 2004 p 62 125

TUumlRK Alex laquo Rapport fait au nom de la commission des Lois constitutionnelles de leacutegislation du suffrage

universel du Regraveglement et drsquoadministration geacuteneacuterale sur le projet de loi adopteacute par lrsquoAssembleacutee Nationale

relatif agrave la protection des personnes physiques agrave lrsquoeacutegard des traitements de donneacutees agrave caractegravere personnel et

modifiant la loi ndeg 78-17 du 6 janvier 1978 relative agrave lrsquoinformatique aux fichiers et aux liberteacutes raquo op cit p 63 126

JOB Jean-Marie laquo La loi Informatique et Liberteacutes et les donneacutees de santeacute raquo op cit p 88

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

60

102 Enfin la loi Informatique et Liberteacutes dans son article 8 IV preacutevoit que les donneacutees

sensibles pourront faire lrsquoobjet drsquoun traitement si celui-ci est justifeacute par lrsquointeacuterecirct public et

apregraves autorisation de la CNIL127

Cette exception ouvre de nombreuses possibiliteacutes et trouve agrave

srsquoappliquer dans des situations diverses La loi ne deacutefinit pas preacuteciseacutement cette notion

drsquointeacuterecirct public Nous adheacuterons neacuteanmoins agrave la deacutefinition proposeacutee par Caroline ZORN-

MACREZ128

et agrave la deacutefinition du vocabulaire juridique de Geacuterard CORNU laquo ce qui est agrave

lrsquoavantage de tous raquo129

La directive europeacuteenne vient nous apporter quelques preacutecisions quant

aux situations pouvant beacuteneacuteficier de cette exception Ainsi elle cite les domaines de la santeacute

publique et de la protection sociale130

On peut penser par exemple agrave la teacuteleacutetransmission des

feuilles de soins preacutevue agrave lrsquoarticle L 161-29 du Code de la Seacutecuriteacute Sociale131

Ainsi les responsables de traitement disposent de plusieurs exceptions leur permettant

de mettre en œuvre un traitement portant sur des donneacutees de santeacute Au final ces exceptions

de par leur nombre et leur champ drsquoapplication font du principe drsquointerdiction la veacuteritable

exception

2) Le consentement mis agrave mal

103 La condition du consentement preacutealable au traitement des donneacutees est poseacutee agrave lrsquoarticle

7 de la loi Informatique et Liberteacutes Cette neacutecessiteacute nrsquoexistait pas dans la version anteacuterieure de

la loi En effet initialement elle ne preacutevoyait qursquoune possibiliteacute drsquoopposition de la personne

concerneacutee par les donneacutees132

La loi de 2004 modifiant la loi initiale fait deacutesormais du

consentement une des conditions permettant la mise en œuvre drsquoun traitement automatiseacute de

donneacutees personnelles Cependant le consentement nrsquoest envisageacute que comme une alternative

parmi drsquoautres agrave disposition du responsable du traitement pour leacutegitimer son traitement et non

127 Article 8 IV laquo ne sont pas soumis agrave lrsquointerdiction de traitement preacutevue au I les traitements automatiseacutes ou

non justifieacutes par lrsquointeacuterecirct public et autoriseacutes dans les conditions preacutevues au I de lrsquoarticle 25 ou au II de lrsquoarticle

26 raquo 128

ZORN-MACREZ Caroline laquo Donneacutees de santeacute et secret partageacute raquo op cit p 238 129

CORNU Geacuterard laquo Vocabulaire juridique raquo PUF coll laquo Quadrige Dicos Poche raquo 8eacuteme eacuted 2007 130

La directive 9546CE preacutevoit en son consideacuterant 34 laquo Les Etats membres doivent eacutegalement ecirctre autoriseacutes

agrave deacuteroger agrave lrsquointerdiction de traiter les cateacutegories de donneacutees sensibles lorsqursquoun motif drsquointeacuterecirct public important

le justifie dans des domaines tels que la santeacute publique et la protection sociale raquo 131

ZORN-MACREZ Caroline laquo Donneacutees de santeacute et secret partageacute raquo op cit p 239 132

Article 26 de la loi Informatique et Liberteacutes

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

61

pas une condition neacutecessaire133

(lrsquoarticle 7 preacutevoit laquo un traitement de donneacutees agrave caractegravere

personnel doit avoir reccedilu le consentement de la personne concerneacutee ou satisfaire agrave lrsquoune des

conditions suivantes [hellip] raquo) Ainsi nonobstant le consentement de la personne concerneacutee le

traitement pourra quand mecircme ecirctre licite srsquoil remplit une des autres conditions eacutenonceacutees agrave

lrsquoarticle 7

104 La qualiteacute et la forme du consentement ne sont quant agrave elles pas preacuteciseacutees

Contrairement agrave ce qui est preacutevu en matiegravere de donneacutees sensibles le leacutegislateur nrsquoexige pas de

consentement expregraves Ainsi il pourrait ecirctre possible de preacutesumer qursquoune simple non

opposition pourrait ecirctre suffisante Toutefois il ne nous semble pas que cela soit la volonteacute du

leacutegislateur Le Groupe de travail de lrsquoarticle 29 srsquoest pencheacute sur la question et a apporteacute

quelques pistes de reacuteflexions134

Ainsi le consentement de la personne concerneacutee par les

donneacutees doit ecirctre un consentement eacuteclaireacute et comme le preacutecise la directive europeacuteenne en son

article 2 il doit ecirctre une laquo manifestation de volonteacute libre speacutecifique et informeacutee raquo

105 Le consentement ne beacuteneacuteficie pas drsquoun poids important dans le traitement des donneacutees

agrave caractegravere personnel dans la mesure ougrave drsquoautres hypothegraveses vont venir leacutegitimer le traitement

des donneacutees sans que le consentement de la personne ne soit neacutecessaire Il srsquoagit du respect

drsquoune obligation leacutegale incombant au responsable du traitement (crsquoest le cas par exemple de

la mise en place drsquoun dossier meacutedical rendu obligatoire par lrsquoarticle R 1112-2 du Code de la

Santeacute Publique) de la sauvegarde de la vie de la personne concerneacutee de lrsquoexeacutecution drsquoune

mission de service public dont est investi le responsable ou le destinataire du traitement de

lrsquoexeacutecution soit drsquoun contrat auquel la personne concerneacutee est partie soit de mesures

preacutecontractuelles prises agrave la demande de celle-ci ou enfin de la reacutealisation de lrsquointeacuterecirct leacutegitime

poursuivi par le responsable du traitement ou son destinataire sous reacuteserve de ne pas

meacuteconnaicirctre lrsquointeacuterecirct ou les droits et liberteacutes fondamentaux de la personne concerneacutee

106 Il est inteacuteressant ici de srsquoarrecircter sur la derniegravere exception lrsquointeacuterecirct leacutegitime du

responsable du traitement Nous ne pouvons que deacuteplorer cette disposition qui nous apparaicirct

133 DE LAMBERTERIE Isabelle laquo La place du consentement dans la collecte et le traitement des informations

sensibles La situation en France raquo op cit p 61 134

Groupe de travail laquo article 29 raquo sur la protection des donneacutees laquo Document de travail sur le traitement des

donneacutees agrave caractegravere personnel relatives agrave la santeacute contenues dans les dossiers meacutedicaux eacutelectroniques (DME) raquo

Commission europeacuteenne 2007

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

62

trop large En effet la loi ne propose aucune deacutefinition de ce que pourrait ecirctre lrsquointeacuterecirct

leacutegitime Pour sa part la directive europeacuteenne se contente dans son consideacuterant 30 de donner

quelques exemples tels que la gestion courante des entreprises la prospection commerciale ou

encore la prospection par une association caritative Force est de constater que cette exception

donne au responsable du traitement une marge de manœuvre assez large avec pour seules

limites le respect de lrsquointeacuterecirct ou des droits de la personne concerneacutee Alex TUumlRK avait

deacuteploreacute dans son rapport le caractegravere tregraves geacuteneacuteral de cette deacuterogation laquo drsquoune porteacutee

exceptionnellement large raquo qui selon lui laquo fragilise substantiellement la porteacutee du principe du

consentement de la personne qui ne saurait donc ecirctre consideacutereacute comme constituant la regravegle

en matiegravere de traitement des donneacutees raquo Il appartient donc agrave la CNIL gracircce agrave ses pouvoirs de

controcircle de srsquoassurer que lrsquoeacutequilibre entre lrsquointeacuterecirct leacutegitime du responsable du traitement et le

respect des droits de la personne concerneacutee est eacutetabli

107 Ces exceptions et notamment la derniegravere fragilisent fortement le consentement de la

personne concerneacutee par les donneacutees et sa valeur srsquoen trouve amoindrie Dans les domaines

relatifs au traitement des donneacutees de santeacute rares seront les hypothegraveses ougrave le consentement du

patient sera neacutecessaire En effet agrave titre drsquoexemple la constitution drsquoun dossier meacutedical agrave

lrsquohocircpital reacutepond agrave une obligation leacutegale (exception ndeg 1) Drsquoune maniegravere geacuteneacuterale les

traitements des donneacutees de santeacute par un eacutetablissement de santeacute deacutecoulent directement de sa

mission de service public qui est le soin (exception ndeg 3) mais permettent eacutegalement la

sauvegarde de la vie de la personne concerneacutee (exception ndeg 2)

De mecircme si nous poussons notre raisonnement les compagnies drsquoassurance

pourraient invoquer un inteacuterecirct leacutegitime agrave la collecte et au traitement de donneacutees de santeacute ce

qui pourrait srsquoaveacuterer reacuteellement preacutejudiciable pour le patient

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

63

Conclusion de la Section

108 La France srsquoest tregraves tocirct sentie concerneacutee par la probleacutematique du deacuteveloppement de

lrsquoinformatique et des traitements automatiseacutes des donneacutees agrave caractegravere personnel Sa leacutegislation

Informatique et Liberteacutes essaie drsquoinstaurer un cadre se voulant le plus protecteur possible pour

les donneacutees personnelles Les donneacutees de santeacute consideacutereacutees comme des donneacutees sensibles

beacuteneacuteficient en theacuteorie drsquoune protection renforceacutee au titre de la loi Informatique et Liberteacutes

mais eacutegalement au titre de dispositions du Code de la Santeacute Publique la plus importante

drsquoentre elles eacutetant bien entendu le secret professionnel

Toutefois une eacutetude approfondie des dispositions de la loi Informatique et Liberteacutes nous a

permis drsquoeacutetablir que le principe drsquointerdiction de traitement des donneacutees sensibles eacutetait

fortement fragiliseacute par les nombreuses exceptions qui y sont preacutevues De mecircme le

consentement de la personne concerneacutee par les donneacutees nrsquoa pas autant drsquoimportance qursquoon

aurait pu lrsquoespeacuterer

Ces donneacutees de santeacute faisant lrsquoobjet drsquoun traitement vont ensuite ecirctre partageacutees par les

diffeacuterents professionnels intervenant dans la prise en charge du patient Il est donc important

de srsquoarrecircter sur lrsquoencadrement reacuteserveacute au partage de ces donneacutees sensibles

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

64

Section 2 Les modaliteacutes de partage des donneacutees relatives au patient

109 Les donneacutees relatives agrave un patient qursquoil srsquoagisse de donneacutees de santeacute ou tout

simplement de donneacutees administratives sont neacutecessaires agrave sa bonne prise en charge que ce

soit pour la preacutevention le diagnostic le soin ou encore pour la recherche meacutedicale Ces

donneacutees sont donc comme nous lrsquoavons vu preacuteceacutedemment collecteacutees conserveacutees et ensuite

partageacutees entre les diffeacuterents professionnels qui en auraient besoin Lrsquoutilisation deacutesormais

quasi systeacutematique des technologies drsquoinformation et de communication ameacuteliore et facilite ce

partage En effet gracircce agrave lrsquoinformatisation des donneacutees le partage se fait plus rapidement et il

est plus complet La consultation des dossiers meacutedicaux dans leur version informatiseacutee est

eacutegalement plus simple Toutefois ces donneacutees sont des donneacutees sensibles et surtout

confidentielles Leur partage ne peut donc pas avoir lieu sans que certaines dispositions soient

prises notamment en ce qui concerne la seacutecuriteacute des donneacutees Force est de constater que les

regravegles existantes en la matiegravere sont des regravegles drsquoordre geacuteneacuteral qui ne srsquoadaptent pas toujours

correctement aux speacutecificiteacutes des technologies drsquoinformation et de communication

Lrsquoencadrement du partage des donneacutees du patient doit prendre en compte deux dimensions

la seacutecurisation physique des donneacutees et lrsquoencadrement du partage en tant que tel de maniegravere

agrave deacutelimiter quand avec qui et sous quelles conditions les donneacutees peuvent ecirctre partageacutees

Crsquoest bien cette derniegravere notion qui va particuliegraverement nous inteacuteresser ici En la matiegravere il

nrsquoexiste pas de regravegle speacutecifique reacutegissant lrsquoencadrement du partage des donneacutees de santeacute par

le biais des TIC Il faut donc se tourner une fois de plus vers les regravegles geacuteneacuterales applicables

en la matiegravere (paragraphe I) regravegles geacuteneacuterales qui peuvent se montrer parfois limiteacutees En

matiegravere de recherche meacutedicale toutefois un corpus de regravegles speacutecifiques agrave la matiegravere existe

(paragraphe II) qui demeure neacuteanmoins incomplet

sect1 Les regravegles geacuteneacuterales

110 Lrsquoencadrement du partage des donneacutees de santeacute nous pousse agrave nous demander quelles

donneacutees peuvent ecirctre partageacutees et avec qui Cette question nous oblige donc agrave reacutefleacutechir dans

un premier temps agrave la notion de proprieacuteteacute des donneacutees (A) On peut constater que mecircme srsquoil

nrsquoexiste pas aujourdrsquohui de reacuteponse claire et deacutefinitive sur la question plusieurs pistes de

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

65

reacuteflexion srsquooffrent agrave nous Or des droits attacheacutes aux donneacutees de santeacute et au dossier meacutedical

vont deacutecouler certaines regravegles relatives agrave leur partage (B)

A La deacutelicate question de la proprieacuteteacute des donneacutees de santeacute

111 Avant de savoir comment peuvent ecirctre utiliseacutees les donneacutees de santeacute et notamment les

conditions de leur partage il est inteacuteressant de chercher drsquoabord agrave savoir qui possegravede des

droits sur ces donneacutees En effet la question de la proprieacuteteacute des donneacutees meacutedicales se pose tregraves

souvent Les patients drsquoun cocircteacute estiment que les donneacutees les concernent et sont donc leur

proprieacuteteacute (1) Les professionnels de santeacute agrave lrsquoinverse pensent parfois qursquoils possegravedent un

droit sur ces donneacutees qursquoils ont recueillies formaliseacutees et conserveacutees (2)

1) La recherche drsquoune qualification du droit des individus sur leurs donneacutees

112 Afin de comprendre comment peuvent se partager les donneacutees de santeacute et notamment

qui peut deacutecider quelles donneacutees sont partageacutees avec quelles personnes il faut commencer par

rechercher quels droits possegravedent les individus sur leurs donneacutees Car il nrsquoest pas rare

drsquoentendre un patient reacuteclamer lrsquointeacutegraliteacute de son dossier meacutedical non pas parce que la loi lui

octroie un droit drsquoaccegraves135

mais surtout parce qursquoil considegravere son dossier meacutedical comme

eacutetant un bien dont il serait le proprieacutetaire

113 Drsquoune maniegravere geacuteneacuterale la recherche de la qualification du droit que deacutetient lrsquoindividu

vis-agrave-vis de ses donneacutees fait lrsquoobjet drsquoun vieux deacutebat au sein de la doctrine En effet la

question qui nous inteacuteresse agrave savoir quels droits existent sur lrsquoinformation de santeacute srsquoinscrit

dans un deacutebat beaucoup plus large qui est celui du statut de lrsquoinformation136

Nous ne nous

attarderons toutefois pas ici sur le concept large drsquoinformation qui peut deacutesigner tout autant

les ideacutees drsquoune personne que les informations plus geacuteneacuterales sur un eacuteveacutenement Nous

135 Lrsquoarticle L 1111-7 Code de la santeacute Publique dispose laquo Toute personne a accegraves agrave lensemble des

informations concernant sa santeacute deacutetenues agrave quelque titre que ce soit par des professionnels et eacutetablissements

de santeacute qui sont formaliseacutees ou ont fait lobjet deacutechanges eacutecrits entre professionnels de santeacute notamment des

reacutesultats dexamen comptes rendus de consultation dintervention dexploration ou dhospitalisation des

protocoles et prescriptions theacuterapeutiques mis en oeuvre feuilles de surveillance correspondances entre

professionnels de santeacute agrave lexception des informations mentionnant quelles ont eacuteteacute recueillies aupregraves de tiers

nintervenant pas dans la prise en charge theacuterapeutique ou concernant un tel tiers raquo 136

MALLET-POUJOL Nathalie laquo Appropriation de lrsquoinformation lrsquoeacuteternelle chimegravere raquo Dalloz 1997

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

66

preacutefeacuterons nous concentrer sur lrsquoinformation personnelle en tant que donneacutee relative agrave la

personne

114 Face agrave un risque de marchandisation de lrsquoinformation personnelle notamment dans un

but de prospection certains auteurs ont souhaiteacute srsquoorienter vers le droit de proprieacuteteacute en

preacuteconisant une appropriation de lrsquoinformation personnelle137

Cette theacuteorie soutenue

notamment par LHUNTER et JRULE a eacuteteacute deacuteveloppeacutee afin que chaque individu puisse ecirctre

proprieacutetaire des droits drsquoexploitation commerciale des renseignements le concernant138

Elle

preacutesente lrsquoavantage drsquooffrir agrave la personne un droit de controcircle absolu sur ces donneacutees et sur

lrsquoutilisation qui peut en ecirctre faite Toutefois ce raisonnement semble pour certains auteurs

impossible agrave maintenir Ainsi Nathalie MALLET-POUJOL qualifie cette theacuteorie

drsquo laquo excessivement dangereuse raquo en ce qursquoelle instaure pour lrsquoindividu une possibiliteacute de

disposer de lrsquoinformation qui le concerne laquo quand seule la jouissance de cette information est

veacuteritablement en jeu raquo ce qui pour reprendre ses termes laquo hypothegraveque le principe de digniteacute

de la personne raquo139

Pour illustrer ses propos lrsquoauteur reprend agrave juste titre lrsquoexemple de

lrsquoinformation geacuteneacutetique et cite le raisonnement deacuteveloppeacute par Loiumlc CADIET140

agrave ce sujet

Pour lrsquoauteur lrsquoinformation geacuteneacutetique de par son caractegravere intrinsegravequement lieacute agrave la personne

doit ecirctre consideacutereacutee comme eacutetant un eacuteleacutement du corps humain agrave part entiegravere Lrsquoinformation

geacuteneacutetique relegraveverait donc de la cateacutegorie des personnes et beacuteneacuteficierait agrave ce titre des mecircmes

droits Lrsquoinformation geacuteneacutetique au mecircme titre que le corps humain se verrait donc appliquer

le principe de non-patrimonialiteacute141

115 Cette proximiteacute des liens entre la personne et ses informations nrsquoest pas toujours aussi

trancheacutee que dans le cas des donneacutees geacuteneacutetiques Toutefois certaines informations peuvent

ecirctre facilement assimileacutees agrave la personne Crsquoest le cas du nom qui comme le dit si bien

CAPITANT est une eacutemanation de la personne142

Ainsi nous estimons qursquoil en va de mecircme

137 MALLET-POUJOL Nathalie laquo Droit agrave et droit sur lrsquoinformation de santeacute raquo RGDM 2007 pp 77-95

138 L HUNTER J RULE laquo Vers un droit de proprieacuteteacute des renseignements personnels raquo Communication au

congregraves de lrsquoassociation canadienne franccedilaise pour lrsquoavancement de la science Montreacuteal 1994 139

MALLET-POUJOL Nathalie laquo Appropriation de lrsquoinformation lrsquoeacuteternelle chimegravere raquo op cit 140

CADIET Loiumlc laquo La notion drsquoinformation geacuteneacutetique en droit franccedilais raquo in La geacuteneacutetique humaine de

lrsquoinformation agrave lrsquoinformatisation Ed TheacutemisLitec diffusion 1992 p52 Citeacute par MALLET-POUJOL Nathalie

laquo Appropriation de lrsquoinformation lrsquoeacuteternelle chimegravere raquo op cit 141

Article 16-1 du Code Civil 142

CAPITANT laquo Introduction agrave lrsquoeacutetude du droit raquo 3eacuteme Ed Paris 1902 p 97 citeacute par MALLET-POUJOL

Nathalie laquo Appropriation de lrsquoinformation lrsquoeacuteternelle chimegravere raquo op cit

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

67

pour les donneacutees de santeacute drsquoune personne qui comme nous avons pu le voir preacuteceacutedemment

touchent de tregraves pregraves agrave son intimiteacute Degraves lors les informations personnelles doivent donc ecirctre

consideacutereacutees comme eacutetant des choses hors commerce En effet nous adheacuterons agrave la conception

de Nathalie MALLET-POUJOL qui considegravere qursquoun rapport proprieacutetaire objet de proprieacuteteacute

de la part drsquoun individu sur ses donneacutees personnelles est inenvisageable car cela reviendrait agrave

remettre en cause la digniteacute mecircme de la personne Le droit de lrsquoindividu sur ses donneacutees

personnelles entrerait donc dans la classification des droits de la personnaliteacute143

De fait la

question ici nrsquoest pas tant de proteacuteger les donneacutees personnelles que lrsquoindividu lui-mecircme

116 Quand on se penche sur la question du droit des personnes sur leurs donneacutees il est

eacutegalement inteacuteressant de srsquoarrecircter sur le principe drsquoautodeacutetermination informelle Ce concept

est neacute drsquoune deacutecision du tribunal feacutedeacuteral drsquoAllemagne qui en 1983144

est venu preacuteciser que

le traitement de donneacutees personnelles neacutecessitait une justification Le droit agrave

lrsquoautodeacutetermination informelle ou laquo Recht auf informationelle Selbstbestimmung raquo est apparu

avec cette deacutecision le tribunal feacutedeacuteral allemand en faisant un droit fondamental de la

personne humaine Le droit agrave lrsquoautodeacutetermination informelle peut ecirctre deacutefini comme eacutetant le

droit pour une personne de maicirctriser pleinement les informations la concernant en deacutecidant

notamment agrave qui ces informations pourront ecirctre transmises Il est eacutegalement deacutefini par

certains auteurs comme laquo le droit de tout individu agrave maicirctriser lrsquoimage qursquoil donne de lui-

mecircme dans la socieacuteteacute raquo145

Ce droit agrave lrsquoautodeacutetermination informelle se retrouve dans la loi

Informatique et Liberteacutes avec le principe poseacute agrave lrsquoarticle 7 selon lequel tout traitement de

donneacutees agrave caractegravere personnel doit avoir reccedilu le consentement preacutealable de la personne

concerneacutee Toutefois comme nous avons pu le voir preacuteceacutedemment cette regravegle connaicirct

quelques exceptions qui viennent fragiliser le poids du consentement et donc ce droit agrave

lrsquoautodeacutetermination informelle Il existe des cas dans lesquels lrsquoindividu verra ses donneacutees

faire lrsquoobjet drsquoun traitement sans qursquoil ne puisse en deacutecider autrement146

117 La theacuteorie de lrsquoautodeacutetermination informelle preacutesente lrsquoavantage comme le souligne

Caroline ZORN-MACREZ147

de rendre lrsquoindividu responsable des deacutecisions qursquoil prendra

143 MALLET-POUJOL Nathalie laquo Appropriation de lrsquoinformation lrsquoeacuteternelle chimegravere raquo op cit

144 Tribunal constitutionnel allemand 15 octobre 1983 citeacute par ZORN-MACREZ Caroline laquo Donneacutees de santeacute

et secret partageacute raquo op cit p 231 note 2 145

POULLET Yves LEONARD Thierry laquo Les liberteacutes comme fondement de la protection des donneacutees

nominatives raquo in La vie priveacutee une liberteacute parmi les autres Larcier Bruxelles 1992 p 233 146

V Infra ndeg 230 147

ZORN-MACREZ Caroline laquo Donneacutees de santeacute et secret partageacute raquo op cit p 233

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

68

concernant ses donneacutees celles-ci eacutetant totalement en sa maicirctrise Toutefois nous estimons

qursquoune application absolue de ce principe pourrait srsquoaveacuterer trop dangereuse notamment en ce

qui concerne des donneacutees sensibles telles que les donneacutees de santeacute les individus nrsquoayant pas

toujours conscience des conseacutequences du partage ou de la communication de leurs donneacutees

118 Nous estimons qursquoil est inconcevable drsquoenvisager les patients comme eacutetant

proprieacutetaires de leurs donneacutees meacutedicales Le droit de proprieacuteteacute ne peut srsquoappliquer agrave des

donneacutees aussi sensibles que les donneacutees de santeacute sans que cela ne porte atteinte agrave la digniteacute de

la personne concerneacutee Tout au plus disposent-ils drsquoune certaine maicirctrise sur leur utilisation

Cependant cette maicirctrise de lrsquoindividu sur lrsquoutilisation qui peut ecirctre faite de ses donneacutees de

santeacute est relative et le jeu des principes et des exceptions agrave lrsquointerdiction de traitement des

donneacutees de santeacute148

fait que les seuls cas dans lesquels lrsquoindividu pourra deacutecider srsquoil souhaite

ou non partager ses donneacutees seront des cas dans lesquels il aurait eacuteteacute preacutefeacuterable selon nous

que le leacutegislateur intervienne afin de rendre lrsquoautodeacutetermination informelle de lrsquoindividu

inapplicable149

2) Tentative de qualification du droit des professionnels de santeacute sur le dossier meacutedical

119 Si les patients ne disposent pas drsquoun droit de proprieacuteteacute sur leurs donneacutees meacutedicales

qursquoen est-il des professionnels de santeacute et des eacutetablissements de santeacute qui alimentent les

dossiers meacutedicaux A lrsquoorigine le dossier meacutedical nrsquoeacutetait constitueacute que de quelques notes sur

des fiches cartonneacutees que le meacutedecin de famille conservait preacutecieusement en son cabinet La

pratique a eacutevolueacute et la technique aussi Les eacutetablissements de santeacute ont eacuteteacute leacutegalement tenus

de constituer un dossier meacutedical150

Ainsi depuis quelques anneacutees les systegravemes drsquoinformation

hospitaliers se deacuteveloppent et avec eux les dossiers meacutedicaux informatiseacutes Des simples

fiches nous sommes passeacutes agrave des dossiers informatiseacutes et structureacutes contenant de nombreuses

informations sur le patient La question se pose alors de savoir si les professionnels de santeacute

qui alimentent les dossiers meacutedicaux ou les eacutetablissements de santeacute qui mettent en place et

conservent ces dossiers vont beacuteneacuteficier de droits particuliers sur ces derniers

148 V infra ndeg 95 agrave 102

149 Comme nous lrsquoavons vu preacuteceacutedemment la loi Informatique et Liberteacutes laisse au leacutegislateur la possibiliteacute de

preacutevoir des cas ougrave mecircme le consentement de la personne concerneacutee par les donneacutees ne pourra pas venir lever

lrsquointerdiction de traitement dont fait lrsquoobjet les donneacutees sensibles 150

Lrsquoarticle R 1112-2 du Code de la santeacute Publique dispose laquo un dossier meacutedical est constitueacute pour chaque

patient hospitaliseacute dans un eacutetablissement de santeacute public ou priveacute raquo

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

69

120 Le Code de la santeacute publique nrsquoapporte pas reacuteellement de preacutecisions agrave ce sujet (mis agrave

part lrsquoarticle R 4127-45 relatif au dossier professionnel ou fiche drsquoobservation tenu par le

meacutedecin)151

Il nous faut donc faire appel agrave une autre branche du droit en lrsquooccurrence le droit

de la proprieacuteteacute intellectuelle pour tenter de qualifier les droits des professionnels et des

eacutetablissements de santeacute sur les dossiers meacutedicaux

121 Le dossier meacutedical en tant que recueil formaliseacute drsquoun ensemble de donneacutees peut-il

ecirctre consideacutereacute comme une base de donneacutees et beacuteneacuteficier agrave ce titre de la protection speacutecifique

mise en place par le Code de la proprieacuteteacute intellectuelle Et si tel est le cas qui des praticiens

alimentant le dossier ou de lrsquoeacutetablissement serait gardien de la structure mecircme du dossier

La base de donneacutees est deacutefinie par le Code de la proprieacuteteacute intellectuelle comme laquo un recueil

drsquoœuvres de donneacutees ou drsquoautres eacuteleacutements indeacutependants disposeacutes de maniegravere systeacutematique

ou meacutethodique et individuellement accessibles par des moyens eacutelectroniques ou par drsquoautres

moyens raquo152

A ce titre il est donc possible drsquoenvisager le dossier meacutedical comme eacutetant une

base de donneacutees celui-ci eacutetant bien un recueil de donneacutees qui sont accessibles de maniegravere

individuelle Une nuance pourrait ecirctre apporteacutee sur la question de savoir si ces donneacutees sont

bien disposeacutees de maniegravere systeacutematique agrave savoir selon un ordre deacutetermineacute agrave lrsquoavance ou

encore de faccedilon meacutethodique crsquoest-agrave-dire selon un ensemble ordonneacute de maniegravere logique153

Le Code de la Santeacute Publique nrsquoimpose pas il est vrai de classification speacutecifique du dossier

meacutedical Toutefois lrsquoarticle R 1112-2 du mecircme code deacutetaille le contenu a minima du

dossier meacutedical et des recommandations de lrsquoAgence Nationale drsquoAccreacuteditation et

drsquoEvaluation en Santeacute (ANAES) relatives au contenu du dossier meacutedical ont eacuteteacute publieacutees154

Le dossier meacutedical nous semble donc correspondre suffisamment agrave la deacutefinition du Code de la

proprieacuteteacute intellectuelle pour ecirctre qualifieacute de base de donneacutees

151 Cet article preacutevoit laquo Indeacutependamment du dossier meacutedical preacutevu par la loi le meacutedecin tient pour chaque

patient une fiche drsquoobservations qui lui est personnelle [hellip] les notes personnelles du meacutedecin ne sont ni

transmissibles ni accessibles au patient et aux tiers raquo Toutefois cette disposition ne concerne que le cas

particulier des notes personnelles du meacutedecin et non lrsquoensemble du dossier meacutedical 152

Article L 112-3 Code de la proprieacuteteacute intellectuelle 153

Selon la deacutefinition du dictionnaire Larousse 154

Agence Nationale drsquoAccreacuteditation et drsquoEvaluation en Santeacute laquo Dossier du patient ameacutelioration de la qualiteacute

de la tenue et du contenu reacuteglementation et recommandations raquo juin 2003 disponible sur [httpwwwhas-

santefr] Consulteacute le 5 mai 2017

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

70

122 Les bases de donneacutees beacuteneacuteficient de la protection relative aux droits drsquoauteurs ainsi

que drsquoune protection sui generis poseacutee au titre IV du Code de la proprieacuteteacute intellectuelle et

relative aux droits des producteurs des bases de donneacutees Ce droit srsquoexerce drsquoailleurs

indeacutependamment des droits drsquoauteurs ou drsquoautres droits qui pourraient srsquoexercer sur la base de

donneacutees

123 Le droit drsquoauteur va proteacuteger plus particuliegraverement la structure de la base de donneacutees

et pour en beacuteneacuteficier celle-ci devra preacutesenter un critegravere drsquooriginaliteacute Il faut ainsi apporter la

preuve que la seule forme de la base de donneacutees est originale Par exemple il est neacutecessaire

de deacutemontrer que laquo le choix et la disposition sont originaux raquo155

Dans le cas des dossiers

meacutedicaux informatiseacutes la structure mecircme du dossier va deacutependre du logiciel de gestion utiliseacute

par lrsquoeacutetablissement de santeacute Or dans la majoriteacute des cas ce logiciel va ecirctre la proprieacuteteacute drsquoune

socieacuteteacute prestataire sauf agrave envisager que lrsquoeacutetablissement de santeacute ait creacuteeacute son propre logiciel

Cela nous paraicirct difficilement envisageable et il faut donc recentrer notre reacuteflexion sur

la protection sui generis des bases de donneacutees Celle-ci va beacuteneacuteficier au producteur de la base

de donneacutees qui est deacutefini agrave lrsquoarticle L 341-1 du Code de la Proprieacuteteacute Intellectuelle comme

eacutetant laquo la personne qui prend linitiative et le risque des investissements correspondants raquo Il

peut alors beacuteneacuteficier laquo dune protection du contenu de la base lorsque la constitution la

veacuterification ou la preacutesentation de celui-ci atteste dun investissement financier mateacuteriel ou

humain substantiel raquo Le producteur reconnu drsquoune base de donneacutees se verra ainsi donner la

possibiliteacute drsquointerdire laquo lextraction par transfert permanent ou temporaire de la totaliteacute ou

dune partie qualitativement ou quantitativement substantielle du contenu dune base de

donneacutees sur un autre support par tout moyen et sous toute forme que ce soit la reacuteutilisation

par la mise agrave la disposition du public de la totaliteacute ou dune partie qualitativement ou

quantitativement substantielle du contenu de la base quelle quen soit la forme raquo156

Ainsi la question qui se pose agrave nous est celle de savoir qui agrave lrsquohocircpital prend

lrsquoinitiative et le risque des investissements correspondants agrave la creacuteation de la base de donneacutees

Une chose est certaine les professionnels de santeacute ne peuvent en aucun cas ecirctre consideacutereacutes

comme les producteurs de la base de donneacutees dans la mesure ougrave ce ne sont pas eux qui

155 TGI Paris 3

e ch 1eacutere sect 13 avril 2010 ndeg0903970 Steacute Optima on line JurisData ndeg 2010-010806

156 Article L 342-1 du Code de la proprieacuteteacute intellectuelle

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

71

pourront attester drsquoun investissement financier humain ou mateacuteriel157

Lrsquoeacutetablissement de

santeacute peut-il alors ecirctre consideacutereacute comme le producteur du dossier meacutedical base de donneacutees

Le Code de la proprieacuteteacute intellectuelle preacutecise que le producteur de la base prend lrsquoinitiative et

le risque des investissements Or la mise en place drsquoun dossier meacutedical pour chaque patient

eacutetant une obligation leacutegale peut-on reacuteellement parler drsquoinitiative agrave proprement parler De

mecircme que les investissements financiers mis en œuvre pour le deacuteveloppement des dossiers

meacutedicaux informatiseacutes ne se feront pas entiegraverement sur les deniers de lrsquoeacutetablissement celui-ci

beacuteneacuteficiant de fonds publics dispenseacutes dans le cadre de plans tels que le plan Hocircpital 2012 ou

encore le programme Hocircpital numeacuterique Degraves lors on ne peut pas consideacuterer que

lrsquoeacutetablissement de santeacute reacuteponde aux critegraveres du producteur de bases de donneacutees

124 Ni les eacutetablissements de santeacute ni les professionnels de santeacute ne disposent donc drsquoun

droit de proprieacuteteacute intellectuelle sur les dossiers meacutedicaux Toutefois les regravegles relatives aux

archives hospitaliegraveres nous apportent des preacutecisions quant aux droits que possegravedent les

eacutetablissements de santeacute sur les dossiers meacutedicaux

Lrsquoarrecircteacute du 11 mars 1968 portant regraveglement des archives hospitaliegraveres deacutefinit le

contenu des archives hospitaliegraveres comme eacutetant laquo lrsquoensemble des titres concernant les biens

droits et obligations des eacutetablissements publics hospitaliers [hellip] y compris les registres et

papiers eacutemanant de lrsquoadministration et des services meacutedicaux et chirurgicaux de ces divers

eacutetablissements raquo158

Ainsi selon les termes de cet arrecircteacute les dossiers meacutedicaux font partie

inteacutegrante des archives hospitaliegraveres Aucune disposition relative aux archives publiques ou

aux archives hospitaliegraveres ne vient preacuteciser que les eacutetablissements publics soient proprieacutetaires

de leurs archives Toutefois lrsquoarrecircteacute du 11 mars 1968 preacutecise en son article 3 que le directeur

de lrsquoeacutetablissement deacutetient la garde et la responsabiliteacute des archives hospitaliegraveres Degraves lors

lrsquoeacutetablissement de santeacute peut ecirctre consideacutereacute comme eacutetant responsable du dossier meacutedical

qursquoil se doit de conserver sous sa protection mais en aucun cas proprieacutetaire159

157 Nous tenons agrave rappeler ici que notre travail est accegraves sur lrsquoutilisation des TIC et non sur la creacuteation du dossier

meacutedical informatiseacute en eacutetablissements de santeacute Notre reacuteflexion diffeacutererait certainement dans le cas des dossiers

meacutedicaux en cabinet de ville 158

Arrecircteacute du 11 mars 1968 portant regraveglement des archives hospitaliegraveres JORF du 25 octobre 1968 p 10039

159 GENOT-POK Isabelle laquo Des archives publiques aux archives hospitaliegraveres points de droit raquo Actualiteacutes

JuriSanteacute ndeg 69 2010 p 6

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

72

B La difficile application des regravegles relatives au secret partageacute

125 Le partage des donneacutees du patient va ecirctre neacutecessaire dans lrsquointeacuterecirct du patient afin

drsquoassurer la continuiteacute des soins et la coordination de sa prisE en charge Pour cela le

leacutegislateur a ameacutenageacute des deacuterogations au secret professionnel (1) afin de permettre et

simplifier le partage des donneacutees entre professionnels Toutefois lrsquointeacutegration des TIC dans la

pratique courante vient compliquer lrsquoapplication concregravete des regravegles theacuteoriques (2)

1) Le secret partageacute une deacuterogation au secret professionnel strictement encadreacutee

126 La notion de secret partageacute nrsquoest pas une notion reacutecente Tregraves tocirct la jurisprudence a

deacuteveloppeacute ce concept neacutecessaire agrave la bonne prise en charge du patient Degraves 1953160

le Conseil

drsquoEtat reconnaissait la possibiliteacute du partage des donneacutees meacutedicales agrave condition que celui-ci

soit neacutecessaire agrave la continuiteacute de la prise en charge du patient161

Toutefois la jurisprudence

restait impreacutecise voire parfois eacutequivoque162

et le secret partageacute ne beacuteneacuteficiait pas de base

leacutegale suffisante agrave son bon deacuteveloppement La loi du 4 mars 2002 en introduisant lrsquoarticle L

1110-4 au Code de la santeacute publique preacutesente lrsquointeacuterecirct de remeacutedier agrave cette situation en

inscrivant dans un cadre preacutecis le partage de donneacutees au sein drsquoune eacutequipe de soins Cet

article modifieacute depuis disposait alors laquo Lorsque la personne est prise en charge par une

eacutequipe de soins dans un eacutetablissement de santeacute les informations la concernant sont reacuteputeacutees

confieacutees par le malade agrave lensemble de leacutequipe raquo Ce texte preacutesentait neacuteanmoins jusque tregraves

reacutecemment une lacune importante aucune deacutefinition preacutecise nrsquoeacutetait apporteacutee concernant la

notion drsquoeacutequipe de soins Certains auteurs consideacuteraient mecircme la notion comme eacutetant une

laquo coquille vide raquo163

qui ne renvoyait agrave rien de preacutecis la composition de chaque eacutequipe devant

ecirctre eacutetudieacutee au cas par cas afin de conserver une souplesse drsquoaction Drsquoautres consideacuteraient

que lrsquoeacutequipe de soins devait obligatoirement ecirctre composeacutee de professionnels effectuant des

actes de soins et donc de professionnels de santeacute ayant compeacutetence leacutegalement reconnue pour

effectuer ce type de soins164

Cette deacutefinition eacutetait selon nous trop reacuteductrice De fait il est

160 CE sect Soc 2 juin 1953 Bull ord Meacuted 1952-1954 p 194

161 ZORN-MACREZ Caroline laquo Donneacutees de santeacute et secret partageacute raquo op cit p 119

162 JONAS Carol laquo La loi du 4 mars 2002 et la pratique meacutedicale quotidienne apports et incertitudes raquo

Meacutedecine et droit ndeg 56 2002 163

ZORN-MACREZ Caroline laquo Donneacutees de santeacute et secret partageacute raquo op cit p 119 164

BOILEAU Chrystelle laquo Lrsquoeacutequipe meacutedicale une existence eacutevidente pour le professionnel de santeacute mais

discutable pour le juriste raquo RGDM 2004 ndeg 14 p 34

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

73

important de ne pas restreindre la composition de lrsquoeacutequipe de soins aux seuls professionnels

de santeacute stricto sensu En effet certains professionnels de santeacute nrsquoeffectuent pas de soins

(comme les ambulanciers) et certains soins ne sont pas dispenseacutes par des professionnels de

santeacute165

Comme le souligne agrave juste titre Caroline ZORN-MACREZ166

il est plus important

de se concentrer sur le contenu des eacutechanges qui interviennent entre les diffeacuterents

professionnels plutocirct que sur la qualiteacute de ces derniers La notion drsquoeacutequipe de soins doit donc

srsquoentendre de maniegravere large et certains professionnels agrave lrsquoinstar des assistantes sociales

doivent pouvoir faire partie pleinement drsquoune eacutequipe de soins et donc partager les donneacutees de

santeacute drsquoun patient si la prise en charge de celui-ci le neacutecessite

127 Crsquoest ce que le leacutegislateur a entendu faire en deacutefinissant dans le cadre de la loi de

modernisation de notre systegraveme de santeacute167

la notion de lrsquoeacutequipe de soins

Deacutesormais lrsquoarticle L 1110-4 est modifieacute et preacutevoit en son point III laquo lorsque ces

professionnels appartiennent agrave la mecircme eacutequipe de soins au sens de larticle L 1110-12 ils

peuvent partager les informations concernant une mecircme personne qui sont strictement

neacutecessaires agrave la coordination ou agrave la continuiteacute des soins ou agrave son suivi meacutedico-social et

social Ces informations sont reacuteputeacutees confieacutees par la personne agrave lensemble de leacutequipe raquo

Lrsquoarticle L 1110-12 quant agrave lui dispose laquo pour lapplication du preacutesent titre leacutequipe de

soins est un ensemble de professionnels qui participent directement au profit dun mecircme

patient agrave la reacutealisation dun acte diagnostique theacuterapeutique de compensation du handicap

de soulagement de la douleur ou de preacutevention de perte dautonomie ou aux actions

neacutecessaires agrave la coordination de plusieurs de ces actes et qui

1deg Soit exercent dans le mecircme eacutetablissement de santeacute au sein du service de santeacute des armeacutees

dans le mecircme eacutetablissement ou service social ou meacutedico-social mentionneacute au I de larticle L

312-1 du Code de laction sociale et des familles ou dans le cadre dune structure de

coopeacuteration dexercice partageacute ou de coordination sanitaire ou meacutedico-sociale figurant sur

une liste fixeacutee par deacutecret

165 ZORN-MACREZ Caroline laquo Donneacutees de santeacute et secret partageacute raquo op cit p 126

166 ZORN-MACREZ Caroline laquo Chronique martienne des donneacutees de santeacute numeacuteriseacutees Bregraveves observations

sur une reacuteglementation surreacutealiste raquo RDS ndeg 36 2010 p 336 167

Loi ndeg 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre systegraveme de santeacute JORF ndeg0022 du 27 janvier

2016

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

74

2deg Soit se sont vu reconnaicirctre la qualiteacute de membre de leacutequipe de soins par le patient qui

sadresse agrave eux pour la reacutealisation des consultations et des actes prescrits par un meacutedecin

auquel il a confieacute sa prise en charge

3deg Soit exercent dans un ensemble comprenant au moins un professionnel de santeacute

preacutesentant une organisation formaliseacutee et des pratiques conformes agrave un cahier des charges

fixeacute par un arrecircteacute du ministre chargeacute de la santeacute raquo

128 Preuve que cette notion est difficile agrave cerner le texte nous apparaicirct comme eacutetant reacutedigeacute

de maniegravere complexe proposant finalement plusieurs deacutefinitions dans la deacutefinition geacuteneacuterale

de lrsquoeacutequipe de soins Cependant cet article srsquoinscrit bien dans le sens preacutevu initialement par

les motifs de la loi agrave savoir la promotion drsquoune prise en charge deacutecloisonneacutee entre les

diffeacuterents acteurs intervenant dans la prise en charge drsquoun patient les professionnels des

secteurs sanitaire et meacutedico-social y eacutetant directement inteacutegreacutes Par ailleurs le partage des

donneacutees de santeacute en ville ou dans le cadre drsquoune collaboration ville hocircpital doit satisfaire agrave

drsquoautres conditions elles aussi exposeacutees au sein de lrsquoarticle L 1110-4 du Code de la santeacute

publique laquo un professionnel peut eacutechanger avec un ou plusieurs professionnels identifieacutes des

informations relatives agrave une mecircme personne prise en charge agrave condition quils participent

tous agrave sa prise en charge et que ces informations soient strictement neacutecessaires agrave la

coordination ou agrave la continuiteacute des soins agrave la preacutevention ou agrave son suivi meacutedico-social et

social [hellip]Le partage entre des professionnels ne faisant pas partie de la mecircme eacutequipe de

soins dinformations neacutecessaires agrave la prise en charge dune personne requiert son

consentement preacutealable recueilli par tout moyen y compris de faccedilon deacutemateacuterialiseacutee dans

des conditions deacutefinies par deacutecret pris apregraves avis de la Commission nationale de

linformatique et des liberteacutes raquo Dans ce cas le consentement preacutealable du patient est

neacutecessaire avant tout partage drsquoinformations Nous sommes ici dans une hypothegravese ougrave

lrsquoinformation relative au patient va sortir du cadre strict et deacutelimiteacute de lrsquoeacutequipe de soins Les

donneacutees vont ecirctre communiqueacutees dans ce cas agrave un professionnel exteacuterieur agrave lrsquoeacutequipe voire agrave

lrsquoeacutetablissement Contrairement agrave lrsquoancienne reacutedaction de lrsquoarticle L 1110-4 qui jusqursquoen

janvier 2016 preacutevoyait une non opposition de la part des patients avant tout eacutechange de

donneacutees le concernant168

le Code de la santeacute publique preacutevoit deacutesormais la neacutecessiteacute drsquoun

consentement ducircment recueilli et donc formaliseacute Les professionnels prenant en charge le

168 BOSSI Jeanne laquo Le cadre juridique du partage drsquoinformation dans les domaines sanitaires et meacutedicosocial

Etat des lieux et perspectives raquo Meacutedecine et droit 2013 p 6

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

75

patient et souhaitant partager ses donneacutees avec un autre professionnel devront donc srsquoassurer

de dispenser une information claire au patient afin de lui laisser lrsquoopportuniteacute de consentir ou

non agrave cet eacutechange Bien que cette disposition aille dans le sens drsquoun renforcement du secret

professionnel il nous faut cependant deacuteplorer en pratique lrsquoaspect contraignant pour les

professionnels de la neacutecessiteacute de recueillir le consentement systeacutematique avant tout eacutechange

de donneacutees

2) Les limites de lrsquoapplication du secret partageacute aux TIC

129 Lrsquoapplication des regravegles relatives au secret partageacute ne pose pas reacuteellement problegraveme

quand il srsquoagit pour deux professionnels drsquoeacutechanger agrave lrsquooral Toutefois lrsquoexercice se

complique degraves lors que lrsquoutilisation des TIC entre en jeu En effet dans le cas du dossier

meacutedical informatiseacute par exemple il va falloir srsquoassurer que seule lrsquoeacutequipe de soins au sens de

lrsquoarticle L 1110-4 du Code de la santeacute publique puisse acceacuteder aux donneacutees du patient Il va

donc ecirctre neacutecessaire que le professionnel srsquoidentifie dans un premier temps puis srsquoauthentifie

ensuite Il srsquoagit bien ici de deux actions diffeacuterentes une au cours de laquelle le professionnel

va deacutecliner son identiteacute et une autre qui va permettre au professionnel de prouver qursquoil est

bien celui qursquoil preacutetend ecirctre

130 Pour ce faire a eacuteteacute creacuteeacutee la Carte de Professionnel de Santeacute (CPS) Beaucoup plus

reacutepandue chez les professionnels libeacuteraux cette carte peine toutefois agrave se deacutevelopper dans le

secteur hospitalier La CPS qui contient les donneacutees drsquoidentification de son porteur ainsi que

ses conditions drsquoexercice permet agrave son deacutetenteur de srsquoauthentifier et de signer

eacutelectroniquement les diffeacuterentes opeacuterations qursquoil effectue (par exemple la reacutedaction drsquoun

compte rendu drsquohospitalisation) Initialement mise en place pour lrsquoauthentification des

professionnels de santeacute dans le cadre de la transmission deacutemateacuterialiseacutee des feuilles de soins169

son utilisation a ensuite eacuteteacute eacutelargie agrave toutes les transmissions de donneacutees de santeacute par voie

eacutelectronique Le deacutecret confidentialiteacute du 15 mai 2007170

ajoute donc au Code de la santeacute

169 Lrsquoarticle L 161-33 du Code de la Seacutecuriteacute Sociale dispose laquo Dans le cas de transmission eacutelectronique par les

professionnels organismes ou eacutetablissements dispensant des actes ou prestations remboursables par lassurance

maladie lidentification de leacutemetteur son authentification et la seacutecurisation des eacutechanges sont assureacutees par une

carte eacutelectronique individuelle appeleacutee carte de professionnel de santeacute raquo 170

Deacutecret ndeg 2007-960 du 15 mai 2007 relatif agrave la confidentialiteacute des informations meacutedicales conserveacutees sur

support informatique ou transmises par voie eacutelectronique et modifiant le Code de la santeacute publique JORF 113

du 17 mai 2007 p 9362

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

76

publique un article R 1110-3 qui preacutevoit qursquo laquo en cas daccegraves par des professionnels de santeacute

aux informations meacutedicales agrave caractegravere personnel conserveacutees sur support informatique ou de

leur transmission par voie eacutelectronique lutilisation de la carte de professionnel de santeacute

mentionneacutee au dernier alineacutea de larticle L 161-33 du Code de la seacutecuriteacute sociale est

obligatoire raquo Cette carte est actuellement distribueacutee par lrsquoAgence des Systegravemes

drsquoInformation Partageacutees en santeacute (ASIP santeacute)

131 Plusieurs beacutemols doivent ecirctre apporteacutes agrave ce systegraveme a priori seacutecuriseacute Le premier tient

agrave son manque de diffusion au sein des eacutetablissements de santeacute En effet agrave lrsquoheure actuelle

selon les chiffres de lrsquoASIP santeacute171

sur les 592 828 cartes CPS en circulation seulement

120 408 ont eacuteteacute distribueacutees au sein des eacutetablissements de santeacute Il devient alors compliqueacute

pour les professionnels de ces eacutetablissements de respecter les obligations instaureacutees par le

deacutecret confidentialiteacute dans le cas du partage de donneacutees de santeacute par voie eacutelectronique De

plus ces cartes sont uniquement agrave destination des professions regraveglementeacutees au titre du

chapitre IV du Code de la Santeacute Publique Or en eacutetablissement de santeacute le partage de

donneacutees nrsquoest pas restreint agrave ces professions172

Pour pallier ce problegraveme lrsquoASIP santeacute a mis

en place des cartes de la famille de la CPS On trouve ainsi la CDE (carte de directeur

drsquoeacutetablissement) destineacutee aux directeurs deacutetablissement de santeacute Le directeur peut

eacutegalement deacuteleacuteguer ces tacircches en deacutesignant des mandataires deacuteleacutegueacutes De mecircme a eacuteteacute creacuteeacutee

la CPE (carte de personnel drsquoeacutetablissement) destineacutee aux salarieacutes non professionnels de santeacute

des structures libeacuterales et des eacutetablissements de santeacute Lagrave encore ces cartes ne sont pas

encore suffisamment reacutepandues au sein des eacutetablissements de santeacute pour permettre drsquoassurer

la seacutecuriteacute preacutevue par les textes (sur les 497 590 cartes CPE 203 987 eacutetaient distribueacutees en

secteur hospitalier au 20 feacutevrier 2017)173

132 Les freins agrave lrsquoapplication des regravegles en matiegravere de partage des donneacutees de santeacute dans

le cadre de lrsquoutilisation des TIC sont ducircs principalement aux limites de la technologie actuelle

en matiegravere de traccedilabiliteacute des accegraves ou pour ecirctre plus preacutecis aux difficulteacutes pour les

eacutetablissements de disposer drsquoun systegraveme agrave la fois performant et en conformiteacute avec des textes

parfois utopistes A ce sujet nous pouvons reprendre une expression de Caroline ZORN-

171 Chiffres disponibles sur [httpesantegouvfr] Consulteacutes le 15 mai 2017

172 V Supra ndeg 127

173 Chiffres disponibles sur [httpesantegouvfr] Consulteacutes le 15 mai 2017

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

77

MACREZ qui illustre parfaitement le problegraveme actuel en parlant de laquo secret partageacute coinceacute

dans la bulle informatique raquo174

sect2 Le cas particulier de la recherche meacutedicale des regravegles de protection

speacutecifiques

133 La speacutecificiteacute de la recherche meacutedicale a ameneacute le leacutegislateur agrave inteacutegrer au sein de la

loi Informatique et Liberteacutes des dispositions propres au traitement de donneacutees agrave caractegravere

personnel dans le cadre de la recherche meacutedicale

Avant drsquoeacutetudier de maniegravere preacutecise ces dispositions (B) il est important de nous

arrecircter sur la particulariteacute de la recherche meacutedicale et du cadre qui lrsquoentoure cadre pouvant

parfois se montrer complexe agrave appreacutehender et ce malgreacute une reacuteforme reacutecente (A) Lrsquoeacutetude de

lrsquoensemble de ces dispositions nous permettra de nous interroger sur la force de la protection

accordeacutee aux donneacutees de santeacute issues de la recherche (C)

A Le cadre juridique des recherches impliquant la personne humaine

134 La difficulteacute principale rencontreacutee lors de lrsquoeacutetude et lrsquoapplication des regravegles en matiegravere

de partage des donneacutees dans le cadre de la recherche meacutedicale provient du manque de

lisibiliteacute des textes encadrant la recherche meacutedicale En effet la recherche meacutedicale est

strictement reacuteglementeacutee par diffeacuterentes lois codifieacutees au sein du Code de la santeacute publique

tandis que lrsquoencadrement des traitements de donneacutees dans ce cadre fait lrsquoobjet comme nous

venons de le voir de dispositions speacutecifiques au sein de la loi Informatique et Liberteacutes Pour

certains auteurs nous sommes ici confronteacutes agrave une dualiteacute de qualification175

et le responsable

drsquoun traitement va devoir commencer par qualifier juridiquement sa recherche avant de

pouvoir chercher agrave trouver quelles seront les deacutemarches agrave effectuer en vue drsquoencadrer son

traitement de donneacutees agrave caractegravere personnel

174 ZORN-MACREZ Caroline laquo Chronique martienne des donneacutees de santeacute numeacuteriseacutees Bregraveves observations

sur une reacuteglementation surreacutealiste raquo Revue droit et santeacute ndeg 36 2010 p 335 175

BAHR Anne BULACH Claudette FABER Steacutephanie laquo Comment appliquer la loi Informatique et Liberteacutes

agrave la recherche meacutedicale raquo op cit p 49

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

78

135 Cette deacutemarche constitue une premiegravere difficulteacute En effet les recherches meacutedicales

sont encadreacutees par diffeacuterents textes Jusque 2012 la recherche meacutedicale eacutetait encadreacutee pour

lrsquoessentiel par la loi ndeg 88-1138 du 20 deacutecembre 1988 relative agrave la protection des personnes

se precirctant agrave des recherches biomeacutedicales connue sous le nom de loi Huriet-Seacuterusclat176

Cette loi a deacutefini pour la premiegravere fois les recherches biomeacutedicales comme eacutetant des laquo essais

ou expeacuterimentations organiseacutes et pratiqueacutes sur lrsquoecirctre humain en vue du deacuteveloppement des

connaissances biologiques ou meacutedicales raquo Plusieurs modifications ont ensuite eacuteteacute apporteacutees

notamment par la loi ndeg 2004-806 du 9 aoucirct 2004 relative agrave la politique de santeacute publique177

qui a transposeacute les dispositions de la directive 200120CE du 4 avril 2001 relative agrave

lrsquoapplication de bonnes pratiques cliniques dans la conduite drsquoessais cliniques de

meacutedicaments agrave usage humain A ces dispositions srsquoajoutaient celles contenues au sein des lois

bioeacutethiques et notamment la loi ndeg 2004-800 du 6 aoucirct 2004 relative agrave la bioeacutethique178

reacuteviseacutee

par la loi ndeg 2001-814 du 7 juillet 2011179

En effet ces lois dont le contenu a eacuteteacute codifieacute au

sein du Code de la santeacute publique encadrent les dons des eacuteleacutements et produits du corps

humain Ainsi dans le cadre drsquoune recherche non interventionnelle portant sur une collection

biologique drsquoeacutechantillons humains le promoteur de la recherche devait effectuer drsquoune part

les deacutemarches relatives agrave la mise en œuvre de la recherche en elle-mecircme et drsquoautre part

celles relatives agrave la mise en place de la collection drsquoeacutechantillons Or les diffeacuterents dispositifs

sont difficiles agrave mettre en œuvre car il nrsquoexiste pas de reacuteelle coordination et le chercheur se

retrouve alors face agrave laquo une multipliciteacute des guichets drsquoautorisation et drsquoenregistrement raquo180

136 Le manque de coheacuterence des diffeacuterents textes ainsi que leur caractegravere incomplet ont

eacuteteacute de nombreuses fois critiqueacutes par la doctrine181

et crsquoest pourquoi un travail de refonte de la

leacutegislation applicable avait eacuteteacute mis en œuvre celui-ci ayant abouti agrave lrsquoadoption de la loi ndeg

176 Loi ndeg88-1138 du 20 deacutecembre 1988 dite Huriet relative agrave la protection des personnes qui se precirctent agrave des

recherches biomeacutedicales JORF du 22 deacutecembre 1988 p 16032 177

Loi ndeg 2004-806 du 9 aoucirct 2004 relative agrave la politique de santeacute publique JORF ndeg185 du 11 aoucirct 2004 p

14277 178

Loi ndeg 2004-800 du 6 aoucirct 2004 relative agrave la bioeacutethique JORF ndeg182 du 7 aoucirct 2004 p 14040 179

Loi ndeg 2011-814 du 7 juillet 2011 relative agrave la bioeacutethique JORF ndeg0157 du 8 juillet 2011 p 11826 180

CHEMTOB-CONCE Marie-Christine CAILLEUX Anne laquo Lrsquoimpact des nouvelles dispositions de la loi

relative aux recherches impliquant la personne humaine raquo meacutedecine et droit 2013 pp 30-35 181

V notamment en ce sens BOYER-BEVIERE Beacuteneacutedicte laquo Les principales reacuteformes de la loi ndeg 2011-300 du

5 mars 2012 sur les recherches impliquant la personne humaine RGDM ndeg 44 2012 pp 225-238 LEMAIRE

Franccedilois laquo Pourquoi faut-il encore reacuteformer la leacutegislation de la recherche biomeacutedicale raquo Meacutedecine et droit

2011 LAIGNEAU Jean-Franccedilois laquo Seacutecuriteacute et deacuteveloppement des recherches de la loi Bertrand agrave la loi

Jardeacute raquo meacutedecine et droit 2012

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

79

2012-300 du 5 mars 2012 sur les recherches impliquant la personne humaine182

plus

communeacutement appeleacutee loi JARDE Cependant le deacutecret drsquoapplication de cette loi

longtemps attendu nrsquoa eacuteteacute publieacute qursquoen novembre 2016183

137 Cette loi a permis drsquounifier le cadre juridique applicable agrave la recherche meacutedicale et ce

notamment afin de simplifier les deacutemarches des chercheurs En effet face au laquo mille-feuille

leacutegislatif raquo184

que constituent les diffeacuterentes lois encadrant la recherche le leacutegislateur a

souhaiteacute offrir agrave la recherche meacutedicale un cadre juridique plus lisible et surtout plus eacutequilibreacute

Olivier JARDE avait notamment reprocheacute lrsquoexcegraves de reacuteglementation qui existait pour

certaines recherches tandis que drsquoautres eacutetaient meneacutees dans laquo quasi-vide juridique raquo185

La

refonte de la reacuteglementation a donc consisteacute en la mise en place de diffeacuterentes cateacutegories de

recherches disposant drsquoun cadre juridique commun Deacutesormais trois cateacutegories de recherches

cohabitent les recherches interventionnelles qui comportent une intervention sur la personne

non justifieacutee par sa prise en charge habituelle les recherches interventionnelles qui ne portent

pas sur des meacutedicaments et qui ne comportent que des risques et des contraintes minimes et

les recherches non interventionnelles dont tous les actes sont pratiqueacutes et les produits utiliseacutes

de maniegravere habituelle Pour ces trois types de recherches la loi propose un cadre juridique

minimum applicable dans tous les cas Ainsi toutes les recherches devront faire lrsquoobjet drsquoun

avis du comiteacute de protection des personnes Cela permettra notamment agrave certains chercheurs

de publier leurs reacutesultats plus facilement186

138 Toutefois ces nouvelles dispositions ne font pas lrsquounanimiteacute au sein de la doctrine Si

certains feacutelicitent le leacutegislateur pour les efforts de simplification accomplis par la loi JARDE

et soulignent lrsquoimpact positif que ces dispositifs pourraient avoir sur le deacuteveloppement de la

182 Loi ndeg 2012-300 du 5 mars 2012 sur les recherches impliquant la personne humaine JORF ndeg 0056 du 6 mars

2012 p 4138 texte ndeg 1 183

Deacutecret ndeg 2016-1537 relatif aux recherches impliquant la personne humaine JORF ndeg 0267 du 17 novembre

2016 184

JARDE Olivier laquo Rapport fait au nom de la commission des affaires sociales sur la proposition de loi

modifieacutee par le Seacutenat relative aux recherches cliniques ou non interventionnelles impliquant la personne

humaine raquo Assembleacutee Nationale 7 avril 2000 185

LAIGNEAU Jean-Franccedilois laquo Seacutecuriteacute et deacuteveloppement des recherches de la loi Bertrand agrave la loi Jardeacute raquo

op cit p 166 186

BOYER-BEVIERE Beacuteneacutedicte laquo Les principales reacuteformes de la loi ndeg 2012-300 du 5 mars 2012 sur les

recherches impliquant la personne humaine raquo RGDM 2012 ndeg 44

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

80

recherche187

drsquoautres au contraire nrsquoheacutesitent pas agrave critiquer avec veacuteheacutemence cette loi qui nrsquoest

laquo pas plus digeste et compreacutehensible raquo188

que les preacuteceacutedents textes deacutenonccedilant une

laquo patheacutetique obscuriteacute des textes raquo189

Au-delagrave du cadre organisant les modaliteacutes de mise en œuvre drsquoune recherche

impliquant la personne humaine la particuliegravere sensibiliteacute du sujet a ameneacute le leacutegislateur agrave

preacutevoir un cadre speacutecifique applicable aux donneacutees de santeacute faisant lrsquoobjet drsquoun traitement

automatiseacute dans ce contexte

B Lrsquoencadrement particulier des traitements des donneacutees de santeacute dans le

cadre de la recherche

139 Conscient du domaine deacutelicat de la recherche et de lrsquoimportance drsquoeacuteviter les deacuteviances

et les abus le leacutegislateur a tregraves tocirct encadreacute lrsquoutilisation et le partage des donneacutees de santeacute dans

le cadre de la recherche Ainsi la loi ndeg 94-548 du 1er

juillet 1994 relative au traitement de

donneacutees nominatives ayant pour fin la recherche dans le domaine de la santeacute et modifiant la

loi ndeg 78-17 du 6 janvier 1978 relative agrave linformatique aux fichiers et aux liberteacutes190

est

venue compleacuteter la loi Informatique et Liberteacutes afin drsquoy inteacutegrer un chapitre consacreacute aux

traitements de donneacutees agrave caractegravere personnel dans le domaine de la recherche meacutedicale

Troisiegraveme volet du triptyque relatif agrave la bioeacutethique191

cette loi a fait lrsquoobjet drsquoune longue

maturation et eacutetait tregraves attendue des acteurs de la recherche meacutedicale192

140 Plus reacutecemment la loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute a modifieacute le cadre

applicable aux traitements des donneacutees agrave caractegravere personnel ayant pour fin la recherche dans

le domaine de la santeacute refondant ainsi le chapitre IX de la loi Informatique et Liberteacutes qui

pose les principes applicables aux traitement de donneacutees agrave caractegravere personnel dans le cadre

187 V en ce sens Marie CHEMTOB-CONCE Marie-Christine CAILLEUX Anne laquo Lrsquoimpact des nouvelles

dispositions de la loi relative aux recherches impliquant la personne humaine raquo op cit p 30 188

LEROYER Anne-Marie laquo Loi ndeg 2012-300 du 5 mars 2012 relative aux recherches impliquant la personne

humaine raquo RTD Civ 2012 p 384 189

Ibid 190

Loi ndeg 94-548 du 1er

juillet 1994 relative au traitement de donneacutees nominatives ayant pour fin la recherche

dans le domaine de la santeacute et modifiant la loi ndeg 78-17 du 6 janvier 1978 relative agrave linformatique aux fichiers et

aux liberteacutes JORF ndeg152 du 2 juillet 1994 p 9559 191

TUumlRK Alex laquo Rapport au nom de la Commission des lois raquo Seacutenat 19931994 p 87 192

MARLIAC-NEGRIER Claire laquo La protection des donneacutees nominatives informatiques en matiegravere de

recherche meacutedicale raquo Tome 1 Presses universitaires drsquoAix-Marseille 2001 p 106

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

81

de la recherche (1) Par ailleurs la CNIL a modifieacute sa meacutethodologie de reacutefeacuterence applicable

aux recherches biomeacutedicales (MR001) et en a adopteacute une nouvelle (MR003) (2) simplifiant

ainsi les deacutemarches pour les chercheurs souhaitant mettre en place un traitement de donneacutees

1) Les principes applicables aux traitements de donneacutees agrave caractegravere personnel dans le

cadre de la recherche meacutedicale

141 Par principe les traitements ayant une finaliteacute drsquointeacuterecirct public de recherche drsquoeacutetude ou

drsquoeacutevaluation dans le domaine de la santeacute doivent ecirctre autoriseacutes par la CNIL Lrsquoautoriteacute prend

sa deacutecision apregraves avoir recueilli drsquoune part lrsquoavis du Comiteacute de Protection des Personnes

(CPP) en ce qui concerne les recherches impliquant la personne humaine telles que deacutefinies agrave

lrsquoarticle L 1121-1 du Code de la santeacute publique ou du Comiteacute drsquoExpertise pour les

Recherches les Etudes et les Evaluations dans le domaine de la Santeacute (CEREES) pour les

demandes relatives agrave des recherches nrsquoimpliquant pas la personne humaine ou relatives agrave des

eacutetudes ou des eacutevaluations Ce comiteacute dont la composition exacte a eacuteteacute preacuteciseacutee par deacutecret193

doit rendre son avis dans un deacutelai drsquoun mois agrave compter de sa saisine deacutelai qui peut ecirctre

rameneacute agrave quinze jours en cas drsquourgence Cet avis portera sur laquo la meacutethodologie retenue sur la

neacutecessiteacute du recours agrave des donneacutees agrave caractegravere personnel sur la pertinence de celles-ci par

rapport agrave la finaliteacute du traitement et sil y a lieu sur la qualiteacute scientifique du projet raquo Le

comiteacute va apporter une caution eacutethique au projet de recherche

142 A noter que ce comiteacute vient remplacer lrsquoancien Comiteacute Consultatif sur le Traitement

de lrsquoInformation en matiegravere de Recherche dans le domaine de la Santeacute (CCTIRS) qui avec la

loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute disparaicirct Cette suppression du CCTIRS au

profit drsquoun comiteacute rebaptiseacute mais ayant les mecircmes missions peut intriguer Cependant le

deacutecret ndeg 2016-1872 du 26 deacutecembre 2016194

qui vient preacuteciser le fonctionnement du

CEREES tend agrave deacutemontrer que le leacutegislateur a souhaiteacute organiser celui-ci de maniegravere plus

preacutecise

193 Deacutecret ndeg 2016-1872 du 26 deacutecembre 2016 modifiant le deacutecret ndeg 2005-1309 du 20 octobre 2005 pris pour

lapplication de la loi ndeg 78-17 du 6 janvier 1978 relative agrave linformatique aux fichiers et aux liberteacutes JORF

ndeg0301 du 28 deacutecembre 2016 texte ndeg 34 194

Ibid

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

82

143 A ces formaliteacutes administratives le chapitre IX de la loi Informatique et Liberteacutes

ajoute drsquoautres obligations agrave la charge du responsable du traitement Ainsi une liste

drsquoinformations agrave fournir preacutealablement agrave la collecte des donneacutees et de maniegravere individuelle

aux personnes concerneacutees est dresseacutee agrave lrsquoarticle 57 de la loi Informatique et Liberteacutes195

Cette

obligation drsquoinformation nrsquoest pas absolue et deux exceptions sont preacutevues la premiegravere

concerne lrsquoimpossibiliteacute de retrouver le patient encas de recherche reacutetrospective la seconde

concerne lrsquohypothegravese dans laquelle le meacutedecin traitant estime pour des raisons leacutegitimes que

le patient doit ecirctre laisseacute dans lrsquoignorance du diagnostic

144 A ce sujet il est inteacuteressant de signaler que ces dispositions sont aujourdrsquohui en

contradiction avec la reacuteforme du Code de deacuteontologie intervenue le 7 mai 2012196

En effet le

Code de deacuteontologie preacutevoyait en son article 35 la possibiliteacute pour le meacutedecin de tenir un

patient dans lrsquoignorance drsquoun diagnostic ou drsquoun pronostic graves et ce pour des raisons

leacutegitimes qursquoil appreacuteciait en conscience En preacutevoyant une possibiliteacute de non divulgation de

lrsquoinformation par le praticien le Code de deacuteontologie eacutetait en opposition avec lrsquoarticle L

1111-2 du Code de la Santeacute Publique qui ne preacutevoit que trois exceptions agrave lrsquoobligation

drsquoinformation lrsquourgence lrsquoimpossibiliteacute drsquoinformer la volonteacute du patient drsquoecirctre tenu dans

lrsquoignorance Cette possibiliteacute est deacutesormais supprimeacutee et remplaceacutee par la disposition suivante

laquo toutefois lorsqursquoune personne demande agrave ecirctre tenue dans lrsquoignorance drsquoun diagnostic ou

pronostic sa volonteacute doit ecirctre respecteacutee sauf si des tiers sont exposeacutes agrave un risque de

contamination raquo Degraves lors il est leacutegitime de se demander quelles vont ecirctre les dispositions qui

preacutevalent

De notre point de vue le Code de deacuteontologie a eacuteteacute modifieacute afin drsquoecirctre mis en

conformiteacute avec les dispositions du Code de la santeacute publique et renforcer ainsi le droit agrave

lrsquoinformation des patients Dans cette optique cette possibiliteacute de tenir le patient dans

195 Cet article dispose laquo Les personnes aupregraves desquelles sont recueillies des donneacutees agrave caractegravere personnel ou

agrave propos desquelles de telles donneacutees sont transmises sont avant le deacutebut du traitement de ces donneacutees

individuellement informeacutees

1deg De la nature des informations transmises

2deg De la finaliteacute du traitement de donneacutees

3deg Des personnes physiques ou morales destinataires des donneacutees

4deg Du droit daccegraves et de rectification institueacute aux articles 39 et 40

5deg Du droit dopposition institueacute aux premier et troisiegraveme alineacuteas de larticle 56 ou dans le cas preacutevu au

deuxiegraveme alineacutea de cet article de lobligation de recueillir leur consentement raquo 196

Deacutecret ndeg 2012-694 du 7 mai 2012 portant modification du Code de deacuteontologie meacutedicale JORF ndeg0108 du 8

mai 2012 p 8479

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

83

lrsquoignorance drsquoun diagnostic ne devrait plus exister non plus dans le cadre de la recherche

meacutedicale sauf agrave admettre que la recherche puisse beacuteneacuteficier drsquoun cadre plus souple du fait des

buts poursuivis Or nous estimons que les donneacutees du patient et drsquoune maniegravere plus geacuteneacuterale

les droits du patients doivent ecirctre proteacutegeacutes de la mecircme maniegravere que le patient soit pris en

charge dans le cadre dlsquoune activiteacute de soins et de diagnostic ou dans le cadre drsquoune recherche

meacutedicale

145 Parmi les obligations incombant au responsable du traitement se trouve lrsquoobligation

drsquoanonymiser les donneacutees agrave caractegravere personnel obligation agrave laquelle il ne peut plus ecirctre

deacuterogeacute197

Enfin il faut souligner que la loi Informatique et Liberteacutes soumet toutes les

personnes ameneacutees agrave mettre en œuvre les traitements ou ayant accegraves aux donneacutees sur

lesquelles celui-ci porte au secret professionnel tel que deacutefini agrave lrsquoarticle 226-13 du Code

peacutenal Lrsquoensemble de ces deacutemarches constituent les formaliteacutes preacutealables agrave la mise en place

Cependant des formaliteacutes simplifieacutees existent par le biais des meacutethodologies de reacutefeacuterence

2) Les Meacutethodologies de Reacutefeacuterences MR001 et MR003

146 La version initiale de la loi du 1er

juillet 1994 preacutevoyait la possibiliteacute pour le Preacutesident

du CCTIRS de mettre en œuvre une proceacutedure simplifieacutee198

applicable aux traitements de

donneacutees agrave caractegravere personnel ayant pour finaliteacute la recherche en santeacute Toutefois ces

dispositions ne contenaient pas plus de preacutecisions quant aux recherches concerneacutees ou aux

modaliteacutes de mise en œuvre de cette proceacutedure simplifieacutee199

Neacuteanmoins la CNIL et le

CCTIRS avaient adopteacute un reacutegime simplifieacute de deacuteclaration des essais cliniques en 1998200

Cette proceacutedure simplifieacutee eacutetait applicable aux recherches entrant dans le champ drsquoapplication

197 Lrsquoarticle 55 de la loi Informatique et Liberteacutes dans sa version anteacuterieure au 26 janvier 2016 preacutevoyait

laquo lorsque ces donneacutees permettent lidentification des personnes elles doivent ecirctre codeacutees avant leur

transmission Toutefois il peut ecirctre deacuterogeacute agrave cette obligation lorsque le traitement de donneacutees est associeacute agrave des

eacutetudes de pharmacovigilance ou agrave des protocoles de recherche reacutealiseacutes dans le cadre deacutetudes coopeacuteratives

nationales ou internationales il peut eacutegalement y ecirctre deacuterogeacute si une particulariteacute de la recherche lexige La

demande dautorisation comporte la justification scientifique et technique de la deacuterogation et lindication de la

peacuteriode neacutecessaire agrave la recherche raquo Ces dispositions ont eacuteteacute supprimeacutees par la loi de modernisation de notre

systegraveme de santeacute 198

Lrsquoancienne version de lrsquoarticle 40-1 loi Informatique et Liberteacutes alineacutea 3 preacutevoyait la chose suivante laquo le

preacutesident du comiteacute consultatif peut mettre en œuvre une proceacutedure simplifieacutee raquo 199

PERRAY Romain laquo Traitement de donneacutees personnelles dans le cadre de recherches meacutedicales vers un

alleacutegement des formaliteacutes raquo Revue Lamy droit de lrsquoimmateacuteriel 2007 ndeg 24 pp 64-66 200

Proceacutedure simplifieacutee adopteacutee par le Comiteacute consultatif le 3 feacutevrier 1998 relative aux traitements

informatiques de donneacutees nominatives collecteacutees dans le cadre de recherches biomeacutedicales

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

84

de la loi du 20 deacutecembre 1988 modifieacutee sur la protection des personnes qui se precirctent agrave des

recherches biomeacutedicales

147 La loi du 6 aoucirct 2004 modifiant la loi Informatique et Liberteacutes initiale dans un premier

temps puis la loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute plus reacutecemment ont preacuteciseacute

cette possibiliteacute drsquoinstaurer des proceacutedures simplifieacutees Lrsquoarticle 54 IV preacutecise deacutesormais

laquo pour les cateacutegories les plus usuelles de traitements automatiseacutes de donneacutees de santeacute agrave

caractegravere personnel agrave des fins de recherche deacutetude ou deacutevaluation dans le domaine de la

santeacute la Commission nationale de linformatique et des liberteacutes peut homologuer et publier

des meacutethodologies de reacutefeacuterence destineacutees agrave simplifier la proceacutedure dexamen Celles-ci sont

eacutetablies en concertation avec le comiteacute dexpertise et des organismes publics et priveacutes

repreacutesentatifs des acteurs concerneacutes raquo Ces proceacutedures vont permettre aux responsables de

traitement en souscrivant agrave un engagement de conformiteacute vis-agrave-vis drsquoune meacutethodologie de

reacutefeacuterence drsquoeacuteviter de formuler une demande drsquoautorisation aupregraves de la CNIL Dans ce cas

les traitements peuvent ecirctre mis en œuvre degraves lors qursquoils respectent les conditions fixeacutees par la

Meacutethodologie de Reacutefeacuterence (conditions en termes de seacutecuriteacute du traitement notamment mais

eacutegalement en termes de dureacutee de conservation des donneacutees)

148 Conformeacutement agrave ces dispositions la CNIL avait donc adopteacute en 2006 une

meacutethodologie de reacutefeacuterence applicable aux traitements de donneacutees personnelles mis en œuvre

dans le cadre des recherches biomeacutedicales201

Lrsquoadoption de cette meacutethodologie de reacutefeacuterence a

eacuteteacute justifieacutee par le fait que les recherches biomeacutedicales sont deacutejagrave encadreacutees de maniegravere stricte

et selon des meacutethodologies standardiseacutees La MR-001 qui a eacuteteacute reacutecemment modifieacutee par la

deacutelibeacuteration CNIL ndeg 2016-262 du 21 juillet 2016202

srsquoapplique aux essais cliniques de

meacutedicaments agrave lrsquoexception des essais cliniques dits par grappe203

aux recherches

biomeacutedicales aux recherches interventionnelles qui comportent une intervention sur la

201 Meacutethodologie de reacutefeacuterence MR-001 pour les traitements de donneacutees personnelles opeacutereacutees dans le cadre des

recherches biomeacutedicales 202

Deacutelibeacuteration ndeg 2016-262 du 21 juillet 2016 portant modification de la meacutethodologie de reacutefeacuterence pour les

traitements de donneacutees personnelles opeacutereacutes dans le cadre des recherches biomeacutedicales (MR-001) JORF ndeg0189

du 14 aoucirct 2016 texte ndeg 76 203

GIRAUDEAU Bruno laquoLrsquoessai clinique randomiseacute par grappes raquo disponible sur [httpipubli-

inserministfr] Consulteacute le 22 feacutevrier 2017 Pour lrsquoauteur laquo un essai clinique randomiseacute par grappes (cluster

randomization trial) est un essai dans lequel on ne randomise pas individuellement des sujets mais des groupes

de sujets qursquoon appelle des laquo grappes raquo (clusters) Ces uniteacutes de randomisation peuvent ecirctre des hocircpitaux des

meacutedecins des familles des villages des entreprises autant drsquouniteacutes sociales pour lesquelles les sujets qui

composent une uniteacute ne peuvent ecirctre consideacutereacutes comme indeacutependants les uns des autres raquo

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

85

personne non justifieacutee par sa prise en charge habituelle aux recherches interventionnelles qui

ne portent pas sur des meacutedicaments et qui ne comportent que des risques et des contraintes

minimes (la liste de ces recherche a eacuteteacute fixeacutee par un arrecircteacute en date du 3 mai 2017204

) et les

recherches neacutecessitant la reacutealisation drsquoun examen des caracteacuteristiques geacuteneacutetiques

La Meacutethodologie de Reacutefeacuterence ndeg3 (MR003) quant agrave elle a eacuteteacute adopteacutee avec la deacutelibeacuteration

CNIL du 21 juillet 2016 et publieacutee le 14 aoucirct 2016205

Elle srsquoapplique aux essais cliniques de

meacutedicaments dits par grappe les recherches visant agrave eacutevaluer les soins courants et les

recherches non interventionnelles

Le leacutegislateur a donc preacutevu plusieurs dispositions venant encadrer lrsquoutilisation des

donneacutees de santeacute dans le cadre de la recherche meacutedicale Cependant il apparait opportun de

srsquointerroger sur la force de cette protection

C Les donneacutees de santeacute utiliseacutees dans le cadre de la recherche des donneacutees

moins bien proteacutegeacutees

149 Les donneacutees de santeacute du fait de leur statut de donneacutees sensibles beacuteneacuteficient drsquoune

protection speacutecifique Ainsi les donneacutees utiliseacutees dans le cadre des recherches meacutedicales eacutetant

eacutegalement des donneacutees de santeacute au sens de la deacutefinition que nous avons pu eacutetudier

preacuteceacutedemment206

devraient beacuteneacuteficier du mecircme degreacute de protection Force est de constater

que cela nrsquoest toujours pas le cas En effet afin de faciliter le travail des chercheurs certaines

mesures deacuterogatoires ont eacuteteacute eacutetablies qui fragilisent la protection instaureacutee autour des

donneacutees de santeacute utiliseacutees dans le cadre de la recherche

150 La premiegravere protection eacutecorneacutee est celle relative au secret meacutedical Les regravegles de droit

commun applicables en matiegravere de secret partageacute ne permettent normalement pas aux

meacutedecins cliniciens de partager leurs donneacutees avec des meacutedecins chercheurs ceux-ci ne

204 Arrecircteacute du 3 mai 2017 fixant la liste des recherches mentionneacutees au 2deg de larticle L 1121-1 du Code de la

santeacute publique JORF ndeg0107 du 6 mai 2017 texte ndeg 30 205

Deacutelibeacuteration ndeg 2016-263 du 21 juillet 2016 portant homologation dune meacutethodologie de reacutefeacuterence relative

aux traitements de donneacutees agrave caractegravere personnel mis en œuvre dans le cadre des recherches dans le domaine de

la santeacute ne neacutecessitant pas le recueil du consentement expregraves ou eacutecrit de la personne concerneacutee (MR-003) JORF

ndeg 0189 du 14 aoucirct 2016 texte ndeg 77 206

V Supra ndeg 63 agrave 69

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

86

faisant pas partie de lrsquoeacutequipe de soins207

Lrsquoarticle 55 de la loi Informatique et Liberteacutes vient

donc instaurer une exception au secret professionnel preacutecisant que laquo nonobstant les regravegles

relatives au secret professionnel les membres des professions de santeacute peuvent transmettre

les donneacutees agrave caractegravere personnel quils deacutetiennent dans le cadre dun traitement de donneacutees

autoriseacute en application de larticle 53 raquo Il peut donc ecirctre deacuterogeacute au secret professionnel srsquoil

srsquoagit pour des professionnels de partager des donneacutees de santeacute initialement collecteacutees afin

drsquoassurer la prise en charge du patient mais dont les chercheurs pourraient avoir besoin dans

le cadre de recherches reacutetrospectives Il est utile de preacuteciser que cette utilisation secondaire

des donneacutees nrsquoest pas contraire dans ce cas au principe de finaliteacute poseacutee par lrsquoarticle 6 de la

loi puisque ce mecircme article preacutevoit qursquoun traitement ulteacuterieur agrave des fins de recherche

scientifique est possible si celui est reacutealiseacute dans le respect de certaines dispositions preacutevues

par la loi et notamment celles du chapitre IX relatif au traitement des donneacutees agrave caractegravere

personnel ayant pour fin la recherche dans le domaine de la santeacute

151 Lrsquoarticle 55 essaie toutefois de compenser cette deacuterogation au secret professionnel en

instaurant une anonymisation obligatoire de ces donneacutees laquo Lorsque ces donneacutees permettent

lidentification des personnes leur transmission doit ecirctre effectueacutee dans des conditions de

nature agrave garantir leur confidentialiteacuteraquo Cela permet de justifier lrsquoexception au secret

professionnel dans la mesure ougrave les donneacutees transmises ne seront plus des donneacutees

personnelles A noter que jusqursquoau 27 janvier 2016 date drsquoentreacutee en vigueur de la loi de

modernisation de notre systegraveme de santeacute lrsquoarticle 55 preacutevoyait deux exceptions agrave cette

obligation drsquoanonymisation lorsque le traitement de donneacutees eacutetait associeacute agrave des eacutetudes de

pharmacovigilance ou si une particulariteacute de la recherche lexigeait Avec la loi de

modernisation de notre systegraveme de santeacute ces deacuterogations ont disparu

152 Lrsquoautre protection importante dont les donneacutees de santeacute issues de la recherche ne

beacuteneacuteficient pas est celle relative agrave lrsquoheacutebergement agreacuteeacute En effet face agrave lrsquoaugmentation de la

deacutemateacuterialisation des donneacutees de santeacute les eacutetablissements de santeacute ainsi que les

professionnels de santeacute nrsquoont pas eu drsquoautre choix que drsquoexternaliser le stockage de ces

donneacutees Afin de seacutecuriser cette pratique la loi du 4 mars 2002 a donc instaureacute un cadre

speacutecifique relatif agrave lrsquoheacutebergement des donneacutees de santeacute Ainsi lrsquoarticle L 1111-8 du Code de

207 V Supra ndeg 127

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

87

la santeacute publique dispose que laquo toute personne qui heacuteberge des donneacutees de santeacute agrave caractegravere

personnel recueillies agrave loccasion dactiviteacutes de preacutevention de diagnostic de soins ou de suivi

social et meacutedico-social pour le compte de personnes physiques ou morales agrave lorigine de la

production ou du recueil desdites donneacutees ou pour le compte du patient lui-mecircme doit ecirctre

agreacuteeacutee agrave cet effet Cet heacutebergement quel quen soit le support papier ou eacutelectronique est

reacutealiseacute apregraves que la personne prise en charge en a eacuteteacute ducircment informeacutee et sauf opposition

pour un motif leacutegitime raquo Nous nrsquoentrerons pas dans les deacutetails des questions que peut poser

lrsquoheacutebergement des donneacutees de santeacute celles-ci faisant lrsquoobjet drsquoun deacuteveloppement ulteacuterieur

Nous preacutefeacuterons nous pencher ici sur la question des donneacutees viseacutees par ces dispositions

En effet lrsquoarticle L 1111-8 du Code de la santeacute publique vise les donneacutees de santeacute

recueillies ou produites agrave lrsquooccasion des activiteacutes de preacutevention de diagnostic ou de soins

Ainsi les donneacutees collecteacutees dans le cadre de recherches biomeacutedicales ne sont pas

directement viseacutees par le texte Faut-il consideacuterer que celles-ci ne doivent pas ecirctre heacutebergeacutees

obligatoirement aupregraves drsquoun heacutebergeur agreacuteeacute Ougrave srsquoagit-il drsquoun oubli malheureux de la part

du leacutegislateur Les travaux parlementaires ne nous eacuteclairent pas agrave ce sujet Lrsquoapplication

stricto sensu de lrsquoarticle L 1111-8 du Code de la Santeacute Publique nous amegravenerait donc agrave

consideacuterer que les donneacutees collecteacutees dans le but drsquoeffectuer une recherche meacutedicale qui

nrsquoest ni un acte de preacutevention ni de diagnostic ni de soin nrsquoauraient pas agrave ecirctre heacutebergeacutees

chez un heacutebergeur agreacuteeacute Pour la CNIL cette position se justifie par le fait que ces donneacutees

auraient un caractegravere indirectement identifiant208

Toutefois comme nous venons de lrsquoeacutetablir

preacuteceacutedemment cela nrsquoest toujours pas le cas La secreacutetaire geacuteneacuterale de lrsquoASIP santeacute de

lrsquoeacutepoque Jeanne BOSSI a apporteacute une preacutecision lors drsquoune preacutesentation relative au deacutecret

heacutebergeur en expliquant que laquo le champ drsquoapplication de la proceacutedure drsquoagreacutement srsquoapplique

agrave toute base de donneacutees recueillies ou produites agrave lrsquooccasion des activiteacutes de preacutevention de

diagnostic ou de soins recherche secteur assurantiel raquo209

Mais contrairement agrave ce

qursquoavancent certains auteurs nous ne pensons pas que cette indication signifie que toutes les

donneacutees de santeacute quelles qursquoelles soient doivent ecirctre conserveacutees chez un heacutebergeur agreacuteeacute La

situation avanceacutee par Jeanne BOSSI fait uniquement reacutefeacuterence aux donneacutees qui auraient dans

un premier temps eacuteteacute recueillies pour des activiteacutes de soin de preacutevention ou de diagnostic

208 BRAC DE LA PERRIERE Marguerite FERRE Elise laquo Lrsquoheacutebergement des donneacutees de santeacute des textes agrave la

pratique raquo Gaz Pal 2011 ndeg 204 p 21 209

Preacutesentation disponible sur [httpwwwsantegouvfr] Consulteacutee le 15 mai 2017

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

88

puis reacutecupeacutereacutees ensuite agrave des fins drsquoutilisation secondaires Cela reacutevegravele au contraire que selon

le type de recherche les donneacutees de santeacute seront soumises agrave une protection diffeacuterente les

donneacutees de santeacute utiliseacutees dans le cadre de recherches reacutetrospectives seront mieux proteacutegeacutees

car initialement collecteacutees dans le cadre viseacute agrave lrsquoarticle L 1111-8 que celles collecteacutees dans le

seul but drsquoeffectuer une recherche meacutedicale

Nous estimons qursquoil est dommage que les donneacutees issues de la recherche ne soient pas

concerneacutees par ces dispositions car elles ne sont en aucun cas moins sensibles que drsquoautres

Nous pensons donc qursquoune eacutevolution de la reacuteglementation en ce sens devrait avoir lieu

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

89

Conclusion de la section

153 Pour assurer la qualiteacute et la continuiteacute des soins de leurs patients les professionnels de

santeacute doivent reacuteguliegraverement partager les donneacutees de santeacute qui les concernent Ce partage ne

peut se faire dans nrsquoimporte quelles conditions et le leacutegislateur a entendu lrsquoencadrer

Dans le cadre du soin tout drsquoabord en introduisant notamment la notion de secret partageacute

mais en permettant eacutegalement aux professionnels de santeacute qui nrsquoappartiendraient pas agrave une

mecircme eacutequipe de soins de partager des donneacutees concernant leur patient sous certaines

conditions

Dans le cadre de la recherche meacutedicale ensuite pour lequel un corpus leacutegislatif et

regraveglementaire strict existe afin de permettre le partage et lrsquoutilisation de donneacutees de santeacute agrave

caractegravere personnel dans ce contexte particulier

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

91

Conclusion du chapitre

154 Dans le cadre de lrsquointroduction des TIC dans la pratique meacutedicale les traitements

informatiseacutes des donneacutees de santeacute se sont consideacuterablement deacuteveloppeacutes Dans ce contexte

une protection toute particuliegravere doit ecirctre garantie agrave ces donneacutees consideacutereacutees comme sensibles

par la loi Informatique et Liberteacutes Crsquoest justement cette loi qui constitue le premier pilier de

cette protection De fait ce texte de droit commun consacre des dispositions speacutecifiques aux

traitements de donneacutees de santeacute qui devront ecirctre mis en place avant tout traitement

automatiseacute Toutefois cette protection peut apparaitre comme eacutetant limiteacutee les nombreuses

exceptions agrave lrsquointerdiction de traitement des donneacutees de santeacute fragilisant le dispositif en place

Par ailleurs le leacutegislateur a entendu encadrer strictement les modaliteacutes de partage de ces

donneacutees particuliegraveres Ainsi le secret professionnel obligation preacutevue par de nombreux

textes devient le second pilier de la protection offerte aux donneacutees de santeacute Cependant

lrsquoapplication de ces regravegles dans le cadre de lrsquoutilisation des TIC peut parfois srsquoaveacuterer

deacutelicate Enfin le cas particulier des donneacutees de santeacute utiliseacutees dans le cadre de la recherche

nrsquoa pas eacuteteacute oublieacute et fait lrsquoobjet de dispositions leacutegislatives speacutecifiques Cependant ces

donneacutees peuvent apparaitre parfois moins bien proteacutegeacutees que les donneacutees de santeacute recueillies

dans le cadre du soin

Une fois les donneacutees de santeacute ayant fait lrsquoobjet drsquoun traitement automatiseacute sur support

informatique celles-ci vont devoir ecirctre conserveacutees et eacuteventuellement partageacutees par le biais des

TIC Le leacutegislateur a souhaiteacute dans ce cadre mettre en place une reacuteglementation propre aux

TIC en santeacute

93

Chapitre 2

Les modaliteacutes de conservation et de communication

des informations relatives aux patients

laquo La notion mecircme drsquoeacutequipe suppose le partage de lrsquoinformation dans le respect des droits

des patients Crsquoest pourquoi le plus grand risque serait aujourdrsquohui de continuer agrave deacuteployer

des systegravemes drsquoinformation non communiquants raquo210

155 Comme le souligne judicieusement le Dr Jacques LUCAS211

en matiegravere de soins la

prise en charge en eacutequipe preacutevaut deacutesormais Celle-ci se deacuteveloppe notamment par le biais de

lrsquoutilisation des TIC dans la pratique quotidienne Le partage seacutecuriseacute des donneacutees de santeacute

informatiseacutees ainsi que leur conservation sont donc devenus un enjeu majeur

156 Bien que certains puissent voir dans le deacuteveloppement de lrsquoinformatisation en

meacutedecine un risque drsquoaller agrave lrsquoencontre de lrsquohumanisme qui caracteacuterise le meacutetier de

meacutedecin212

il nrsquoen reste pas moins une formidable avanceacutee pour les professionnels de santeacute

comme pour les patients Car force est de constater que lrsquointroduction des TIC dans la

pratique meacutedicale permet drsquoameacuteliorer la coordination des soins par le biais de la mise en place

drsquoune communication faciliteacutee des informations en santeacute

Tout comme il existe un cadre relatif agrave la collecte et au traitement informatiseacute des

donneacutees de santeacute leur archivage et leur communication par voie informatique sont eacutegalement

encadreacutes Or ce cadre est multiple En effet les donneacutees de santeacute produites par les

eacutetablissements publics de santeacute qursquoelles soient informatiseacutees ou non vont ecirctre consideacutereacutees

comme des archives publiques et agrave ce titre leur archivage sera soumis aux dispositions du

Code du patrimoine (Section I Cependant de par leur informatisation lrsquoheacutebergement et la

communication de ces donneacutees de santeacute archives publiques vont devoir ecirctre soumis au

210 Livre blanc de lrsquoAssociation franccedilaise des heacutebergeurs agreacuteeacutes de donneacutees de santeacute 2014 consultable sur

[httpwwwdsihfr] p 13 211

Le Docteur Jacques LUCAS est Vice-Preacutesident du Conseil National de lrsquoOrdre des Meacutedecins 212

FAROUDJA Jean-Marie laquo Questions sur lrsquoinformatisation des dossiers meacutedicaux le partage et

lrsquoheacutebergement des donneacutees raquo rapport de la commission nationale permanente adopteacute lors des assises du Conseil

National de lrsquoordre des meacutedecins du 18 juin 2005 p 3

94

respect de dispositions particuliegraveres Pourtant comme nous le verrons ces dispositions nous

apparaissent agrave lrsquoheure actuelle quelque peu limiteacutees (Section II)

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

95

Section 1 La conservation des donneacutees de santeacute en tant qursquoarchives

hospitaliegraveres

157 Les donneacutees de santeacute recueillies agrave lrsquooccasion drsquoun acte meacutedical vont ecirctre

preacutecieusement conserveacutees au sein de son dossier meacutedical afin notamment drsquoassurer la

continuiteacute des soins du patient A lrsquohocircpital la conservation des donneacutees de santeacute est soumise agrave

une reacuteglementation stricte et preacutecise qui peut parfois paraicirctre complexe agrave articuler En effet

les textes applicables en la matiegravere sont multiples et les obligations pesant sur les

eacutetablissements de santeacute tout aussi nombreuses

Les donneacutees de santeacute produites par les eacutetablissements publics de santeacute vont ecirctre

qualifieacutees drsquoarchives hospitaliegraveres et agrave ce titre ecirctre reacutegies par des dispositions du Code du

patrimoine (Paragraphe 1) Toutefois du fait de leur sensibiliteacute toute particuliegravere les donneacutees

de santeacute ne peuvent pas ecirctre conserveacutees et stockeacutees sans srsquoassurer au preacutealable de la mise en

place de dispositifs permettant de preacuteserver leur seacutecuriteacute et leur confidentialiteacute (Paragraphe 2)

sect1 Les regravegles speacutecifiques aux archives publiques

158 La loi ndeg 2008-696 du 15 juillet 2008213

modifie lrsquoencadrement relatif aux archives

publiques Cette loi qui srsquoinscrivait dans un mouvement de transparence engageacute par le

leacutegislateur franccedilais depuis plusieurs anneacutees214

avait pour but drsquoameacuteliorer la protection des

archives et drsquoen faciliter lrsquoaccegraves

Les dossiers meacutedicaux produits par les eacutetablissements publics de santeacute personnes

morales de droit public entrent dans la cateacutegorie des archives publiques Lrsquoensemble des

dispositions qui les concerne et notamment la loi de 2008 va donc trouver agrave srsquoappliquer agrave ces

dossiers (A)

213 Loi ndeg 2008-696 du 15 juillet 2008 relative aux archives JORF ndeg0164 du 16 juillet 2008 p 11322

214 GARREC Reneacute laquo Rapport sur le projet de loi relatif aux archives raquo rapport fait au nom de la commission

des lois Seacutenat ndeg 146 19 deacutecembre 2007

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

96

Les dossiers meacutedicaux restent cependant soumis agrave une reacuteglementation speacutecifique

preacutevue par le Code de la santeacute publique Cela a pour conseacutequence de provoquer des

oppositions entre les diffeacuterentes regravegles drsquoapplication mais eacutegalement des difficulteacutes

drsquointerpreacutetation (B)

A Les conseacutequences de la qualification drsquoarchives publiques

159 Le Code du patrimoine deacutefinit de maniegravere exhaustive quels sont les documents qui

relegravevent des archives publiques (1) Ces deacutefinitions emportent plusieurs conseacutequences

juridiques notamment en matiegravere de dureacutee de conservation et de modaliteacutes drsquoeacutelimination des

documents (2) mais eacutegalement en matiegravere drsquoarchivage eacutelectronique des donneacutees de santeacute (3)

1) Deacutefinitions leacutegales

160 Lrsquoarchivage peut ecirctre deacutefini comme laquo lrsquoaction de conserver et de classer des

documents ne preacutesentant plus un inteacuterecirct immeacutediat raquo215

Lrsquoheacutebergement quant agrave lui consiste

en informatique en lrsquoaction laquo drsquoaccueillir sur un serveur un service ou des pages Web pour

les rendre accessibles aux utilisateurs raquo216

En ce qui concerne plus speacutecifiquement

lrsquoheacutebergement des donneacutees de santeacute cela consiste donc agrave leur fournir un site de sauvegarde

Notre exercice de deacutefinition doit ecirctre pousseacute un peu plus loin et il est neacutecessaire de se pencher

plus attentivement sur la notion drsquoarchive Crsquoest la loi du 3 janvier 1979 sur les archives217

qui

a donneacute pour la premiegravere fois dans son article initial une deacutefinition geacuteneacuterale de ce que sont

les archives Ainsi aux termes du Code du patrimoine laquo les archives sont lrsquoensemble des

documents quels que soient leur date leur forme et leur support mateacuteriel produits ou reccedilus

par toute personne physique ou morale et par tout service ou organisme public ou priveacute

dans lrsquoexercice de leur activiteacuteraquo218

Comme le souligne Catherine MORIN-DESSAILLY ce

nrsquoest donc pas lrsquoancienneteacute du document qui fait de lui une archive219

215 Deacutefinition du dictionnaire Larousse

216 Ibid

217 Loi ndeg79-18 du 3 janvier 1979 sur les archives JORF du 5 janvier 1979 p 43

218 Article L 211-1 du Code du patrimoine

219 MORIN-DESAILLY Catherine laquo Avis sur le projet de loi relatif aux archives raquo avis rendu au nom de la

commission des affaires culturelles Seacutenat ndeg 147 19 deacutecembre 2007 p 10

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

97

161 Le leacutegislateur distingue les archives publiques des archives priveacutees et les deacutefinit

comme laquo les documents qui procegravedent de lrsquoactiviteacute dans le cadre de leur mission de service

public de lrsquoEtat des collectiviteacutes territoriales des eacutetablissements publics et des autres

personnes morales de droit public ou des personnes de droit priveacute chargeacutees drsquoune telle

mission raquo220

Le leacutegislateur fait la distinction entre trois acircges des archives publiques221

lrsquoacircge

courant qui correspond agrave la peacuteriode pendant laquelle les donneacutees sont agrave la disposition des

personnes qui les ont collecteacutees lrsquoacircge intermeacutediaire qui correspond agrave la peacuteriode pendant

laquelle les donneacutees ne sont plus utiliseacutees mais sont toutefois conserveacutees par lrsquoadministration

notamment pour des raisons de preuve ou de suivi lrsquoacircge deacutefinitif qui concerne une petite

partie des archives publiques qui mecircme si elles ne preacutesentent plus drsquointeacuterecirct pour

lrsquoadministration qui les a produites conservent neacuteanmoins un inteacuterecirct historique scientifique

ou patrimonial222

Cette distinction est cruciale puisque de lrsquoacircge des archives vont deacutependre ensuite leur

modaliteacutes pratiques de conservation (notamment en termes de dureacutee) et de leur destruction

162 Il est important de souligner que le leacutegislateur a creacuteeacute des sous-cateacutegories drsquoarchives

publiques parmi lesquelles se trouvent les archives hospitaliegraveres Ces derniegraveres sont

reacuteglementeacutees par lrsquoarrecircteacute du 11 mars 1968223

qui preacutecise en son article 1 que laquo les archives

hospitaliegraveres consistent dans lrsquoensemble des titres concernant les biens droits et obligations

des eacutetablissements publics hospitaliers eacutenumeacutereacutes agrave lrsquoarticle 1er

du deacutecret ndeg 957 du 3 aoucirct

1959 des eacutetablissements de soins et des eacutetablissements de cure y compris les registres et

papiers eacutemanant de lrsquoadministration et des services meacutedicaux et chirurgicaux de ces divers

eacutetablissements raquo Degraves lors tout document reacutepondant agrave cette deacutefinition se verra appliquer les

regravegles prescrites par lrsquoarrecircteacute du 11 mars 1968 Traditionnellement une distinction est faite

220 Article L 211-4 du Code du patrimoine

221 Deacutecret ndeg 79-1037 du 3 deacutecembre 1979 relatif agrave la compeacutetence des services darchives publics et agrave la

coopeacuteration entre les administrations pour la collecte la conservation et la communication des archives

publiques JORF du 5 deacutecembre 1979 p 3056 et Deacutecret ndeg 2009-1124 du 17 septembre 2009 modifiant le deacutecret

ndeg 79-1037 du 3 deacutecembre 1979 relatif agrave la compeacutetence des services darchives publics et agrave la coopeacuteration entre

les administrations pour la collecte la conservation et la communication des archives publiques JORF ndeg0216

du 18 septembre 2009 p 15251 222

BANAT-BERGER Franccediloise laquo Archives et protection des donneacutees personnelles raquo RLDI 2013 ndeg95 p 93 223

Arrecircteacute du 11 mars 1968 JORF du 25 octobre 1968 p 10039

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

98

entre drsquoune part les archives hospitaliegraveres qualifieacutees drsquoadministratives et drsquoautre part celles

qualifieacutees drsquoarchives meacutedicales Enfin notre exercice de deacutefinition peut ecirctre conclu avec la

preacutecision suivante le leacutegislateur ne fait pas de diffeacuterence selon les supports retenus pour

lrsquoarchivage Ainsi les documents numeacuteriques audiovisuels les bases de donneacutees constituent

des archives au mecircme titre que les documents papiers

2) Conseacutequences juridiques

163 La qualification drsquoarchives publiques et plus particuliegraverement celle drsquoarchives

hospitaliegraveres va avoir des conseacutequences juridiques en matiegravere de dureacutee de conservation des

donneacutees (a) et en matiegravere drsquoeacutelimination des donneacutees (b)

a) Les conseacutequences relatives agrave la dureacutee de conservation des donneacutees

164 Les archives publiques sont comme nous lrsquoavons vu preacuteceacutedemment encadreacutees par des

textes preacutecis En ce qui concerne leur dureacutee de conservation le jeu de lrsquoapplication des

diffeacuterents textes de la loi agrave la simple circulaire peut paraicirctre un peu perturbant drsquoautant plus

que certains desdits textes sont anciens

165 La qualification drsquoarchives publiques entraicircne avant toute chose lrsquoobligation de

conserver ces donneacutees En effet lrsquoarticle L 211-2 du Code du patrimoine dispose que laquo la

conservation de ces documents est organiseacutee dans lrsquointeacuterecirct du public tant pour les besoins de

la gestion et de la justification des droits des personnes physiques ou morales publiques ou

priveacutees que pour la documentation historique de la recherche raquo En ce qui concerne plus

preacuteciseacutement les archives hospitaliegraveres les deacutelais de conservation vont reacutesulter agrave la fois des

textes relatifs aux archives publiques des textes relatifs agrave la conservation du dossier meacutedical

et de textes reacuteglementaires compleacutementaires intervenus pour fixer la dureacutee de conservation de

certaines cateacutegories de donneacutees de santeacute Lrsquoarrecircteacute du 11 mars 1968 classe dans son annexe

les archives hospitaliegraveres en diffeacuterentes cateacutegories auxquelles sont associeacutees des dureacutees de

conservation Ainsi agrave titre drsquoexemple dans la seacuterie Q qui concerne la population malades

hospitaliseacutes on trouve notamment les registres drsquoentreacutees et de sorties qui doivent ecirctre

conserveacutes indeacutefiniment tandis que dans la seacuterie K qui concerne le personnel on trouve les

mouvements du personnel administratif qui doivent ecirctre conserveacutes cinq ans Les archives

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

99

hospitaliegraveres dites administratives ont vu quant agrave elles leur dureacutee de conservation preacuteciseacutee

par plusieurs circulaires publieacutees entre 1993 et 1994224

166 Plus reacutecemment la loi du 4 mars 2002225

a introduit une dureacutee leacutegale de conservation

du dossier meacutedical226

Ces regravegles sont eacutedicteacutees agrave lrsquoarticle R 1112-7 du Code de la santeacute

publique Par principe le dossier meacutedical est conserveacute pendant une dureacutee de vingt ans agrave

compter de la date du dernier seacutejour de son titulaire dans leacutetablissement ou de la derniegravere

consultation externe en son sein Pour un patient mineur si la dureacutee de conservation dun

dossier sachegraveve avant le vingt-huitiegraveme anniversaire de son titulaire celle-ci est prorogeacutee

jusquagrave cette date Enfin pour les patients deacuteceacutedeacutes le dossier est conserveacute pendant une dureacutee

de dix ans agrave compter de la date du deacutecegraves

A noter que ces deacutelais sont suspendus par lintroduction de tout recours gracieux ou

contentieux tendant agrave mettre en cause la responsabiliteacute de leacutetablissement public de santeacute ou

de professionnels de santeacute en raison de leurs interventions au sein de leacutetablissement Enfin

certaines donneacutees de santeacute comme les donneacutees relatives aux transfusions sanguines ou les

donneacutees relatives agrave lrsquoaide meacutedicale agrave la procreacuteation auront une dureacutee de conservation

diffeacuterente de celles du dossier meacutedical traditionnel

167 Le but ici nrsquoest pas de dresser une liste exhaustive des deacutelais de conservation de

chaque type de donneacutees Nous souhaitions simplement souligner qursquoen tant qursquoarchives

publiques les archives hospitaliegraveres doivent reacutepondre agrave une obligation de conservation dont le

deacutelai deacutepend de la nature des informations archiveacutees Or en la matiegravere force est de constater

qursquoil existe presque autant de deacutelais diffeacuterents qursquoil y a de types de documents Une

harmonisation et surtout une mise agrave jour de lrsquoensemble de ces deacutelais serait souhaitable En

effet agrave lrsquoheure actuelle du fait de cette obligation de conservation mais eacutegalement du

224 Circulaire AD 93-4 du 14 mai1993 Archives des eacutetablissements publics drsquohospitalisation Circulaire AD 94-

2 du 18 janvier 1994 Tri et conservation des archives des eacutetablissements publics de santeacute documents produits

apregraves 1968 par les services administratifs chargeacutes de la gestion des hospitalisations et consultations Circulaire

AD 94-6 du 18 juillet 1994 Tri et conservation des archives des eacutetablissements publics de santeacute documents

produits apregraves 1968 par les services chargeacutes de la gestion du personnel et de la formation Circulaire AD 94-11

du 20 octobre 1994 Tri et conservation des documents produits apregraves 1968 par les eacutetablissements publics de

santeacute archives de lrsquoadministration geacuteneacuterale de lrsquoeacutetablissement (Seacuterie L de lrsquoinstruction annexeacutee agrave lrsquoarrecircteacute du 11

mars 1968) 225

Loi ndeg 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et agrave la qualiteacute du systegraveme de santeacute JORF du

5 mars 2002 p 4118 226

Le dossier meacutedical est deacutefini agrave lrsquoarticle R 1112-2 du Code de la santeacute publique

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

100

passage parfois difficile227

du papier au numeacuterique les eacutetablissements publics de santeacute

doivent faire face agrave des difficulteacutes de stockage qursquoelles soient physiques ou techniques De

mecircme comme nous le verrons ulteacuterieurement les supports de conservation informatique

proposeacutes actuellement ne garantissent pas la peacuterenniteacute neacutecessaire pour reacutepondre aux deacutelais

leacutegaux de conservation Les eacutetablissements se trouvent donc reacuteguliegraverement dans lrsquoobligation

pour plus de seacutecuriteacute de conserver les versions papiers en plus des versions informatiques de

certains documents afin de satisfaire aux obligations leacutegales

En matiegravere drsquoarchivage des documents hospitaliers un travail relatif au cadre leacutegal

qui prendrait en compte les nouvelles contraintes techniques auxquelles doivent faire face les

eacutetablissements publics de santeacute devrait donc ecirctre initieacute par le leacutegislateur

b) Les conseacutequences relatives agrave la suppression des donneacutees

168 En matiegravere drsquoeacutelimination des archives hospitaliegraveres il nous plaicirct agrave emprunter

lrsquoexpression de Caroline ZORN-MACREZ qui nous parle de laquo paradoxe de la

suppression raquo228

En effet dans ce domaine plusieurs dispositions vont venir se superposer

voire srsquoopposer creacuteant alors de grandes difficulteacutes drsquointerpreacutetation des textes

169 Classiquement les archives publiques qui ont atteint le troisiegraveme acircge peuvent faire

lrsquoobjet drsquoune destruction sous reacuteserve du respect de certaines conditions strictes preacutevues au

Code du patrimoine Une destruction des archives en dehors de ces regravegles entraicircne la

responsabiliteacute de lrsquoeacutetablissement Crsquoest drsquoailleurs ce qursquoa rappeleacute la Cour administrative

drsquoappel de Marseille dans une deacutecision du 25 juin 2009229

En lrsquoespegravece un centre hospitalier

nrsquoeacutetait pas en mesure de communiquer agrave un usager et ce malgreacute un avis de la CADA en ce

sens les bandes drsquoenregistrement du SAMU celles-ci ayant eacuteteacute deacutetruites Le centre

hospitalier estimait qursquoaucune faute ne pouvait lui ecirctre reprocheacutee aucun texte leacutegislatif ou

reacuteglementaire nrsquoimposant la conservation de ces bandes

La Cour drsquoappel de Marseille a consideacutereacute que lrsquoenregistrement des eacutechanges

teacuteleacutephoniques entre le meacutedecin reacutegulateur du SAMU et ses interlocuteurs constituait un

227 V infra ndeg 191 et s

228 ZORN-MACREZ Caroline laquo Chroniques martiennes des donneacutees de santeacute numeacuteriseacutees raquo RDS ndeg 36 juillet

2010 p 340 229

CAA Marseille 25 juin 2009 ndeg 07MA02024

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

101

document produit par lrsquohocircpital dans lrsquoexercice de ses activiteacutes et reacutepondait donc agrave la deacutefinition

des archives publiques Degraves lors la destruction des enregistrements eacutetant intervenue en dehors

de prescriptions preacutevues au sein de lrsquoarticle 16 du deacutecret ndeg 79-1037 du 3 deacutecembre 1979 la

destruction devait ecirctre consideacutereacutee comme fautive peu importe si celle-ci preacutesentait un

caractegravere intentionnel ou non Drsquoune maniegravere geacuteneacuterale comme le rappelle une instruction

ministeacuterielle du 14 aoucirct 2007230

lrsquoeacutelimination des archives publiques est subordonneacutee au visa

du directeur des archives deacutepartementales territorialement compeacutetent qui peut choisir drsquoen

conserver certaines de maniegravere deacutefinitive afin de documenter la rechercheToutefois

lrsquoeacutetablissement public de santeacute a toujours la possibiliteacute de choisir de conserver les archives

mecircme si la direction deacutepartementale des archives preacuteconise leur eacutelimination231

170 En ce qui concerne le cas plus speacutecifique des archives meacutedicales lrsquoarticle R 1112-7

du Code de la santeacute publique preacutevoit que laquo la deacutecision deacutelimination est prise par le

directeur de leacutetablissement apregraves avis du meacutedecin responsable de linformation meacutedicale

Dans les eacutetablissements publics de santeacute et les eacutetablissements de santeacute priveacutes participant agrave

lexeacutecution du service public hospitalier cette eacutelimination est en outre subordonneacutee au visa

de ladministration des archives qui deacutetermine ceux de ces dossiers dont elle entend assurer

la conservation indeacutefinie pour des raisons dinteacuterecirct scientifique statistique ou historique raquo

La question qui pourrait se poser ici et qui nrsquoest pas directement encadreacutee par les textes est

lrsquohypothegravese dans laquelle un patient en raison du droit agrave lrsquooubli dont il dispose demanderait

lrsquoeacutelimination de son dossier meacutedical et ce dans sa totaliteacute

171 A ce sujet il est avant tout neacutecessaire de tenter de deacutefinir ce qursquoest le droit agrave lrsquooubli

Actuellement il nrsquoen nrsquoexiste aucune deacutefinition Des infractions sont bien preacutevues par le Code

peacutenal en cas de conservation laquo des donneacutees agrave caractegravere personnel au-delagrave de la dureacutee preacutevue

par la loi ou le regraveglement par la demande drsquoautorisation ou drsquoavis ou par la deacuteclaration

preacutealable adresseacute agrave la CNIL raquo232

De mecircme lrsquoarticle 40 de la loi Informatique et Liberteacutes

preacutevoit bien pour toute personne concerneacutee par un traitement automatiseacute de donneacutees agrave

caractegravere personnel le droit drsquoobtenir que soient effaceacutees les donneacutees personnelles la

230 Instruction interministerielle NdegDHOSE1DAFDPACI 2007322 et NdegDAFDPACIRES2007014 du 14

aoucirct 2007 relative agrave la conservation du dossier meacutedical non parue au JORF 231

GARREC Reneacute laquo Rapport sur le projet de loi relatif aux archives raquo Rapport fait au nom de la commission

des lois Seacutenat op cit 232

Article 226-20 du Code peacutenal

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

102

concernant et qui seraient inexactes incomplegravetes eacutequivoques peacuterimeacutees ou dont la collecte

lrsquoutilisation la communication ou la conservation est interdite Enfin plus reacutecemment le

regraveglement europeacuteen a preacutevu dans son article 17 la possibiliteacute pour une personne dont les

donneacutees agrave caractegravere personnel feraient lrsquoobjet drsquoun traitement drsquoobtenir lrsquoeffacement de ces

donneacutees dans les meilleurs deacutelais mais dans la limite de certaines hypothegraveses strictement

preacutevues233

172 Toutefois il ne srsquoagit jamais drsquoune possibiliteacute pure et simple drsquoobtenir lrsquoeacutelimination

complegravete drsquoun traitement automatiseacute Au mieux le patient dispose-t-il drsquoun droit agrave

rectification au sujet de donneacutees erroneacutees Mais agrave qui appartient alors la possibiliteacute

drsquoappreacutecier si une donneacutee de santeacute est erroneacutee La loi Informatique et Liberteacutes reacutepond agrave cette

question puisque toujours dans son article 40 elle preacutecise qursquoil appartient au responsable de

traitement en cas de contestation de la demande de rectification ou de suppression de

donneacutees drsquoapporter la preuve que ces donneacutees ne sont pas fausses sauf srsquoil est eacutetabli que les

donneacutees ont eacuteteacute communiqueacutees par lrsquointeacuteresseacute ou avec son accord De plus la creacuteation drsquoun

dossier meacutedical eacutetant une obligation leacutegale pour lrsquoeacutetablissement et la loi speacuteciale deacuterogeant

au droit geacuteneacuteral une telle demande nous semble impossible agrave autoriser Pourtant la CNIL qui

a deacutejagrave eu agrave se prononcer sur une telle demande srsquoest montreacutee favorable agrave lrsquoapplication stricte

de lrsquoarticle 40 Ainsi elle a consideacutereacute comme eacutetant leacutegitime la demande drsquoun patient qui

exigeait que soit effaceacute lrsquoensemble des documents conserveacutes sur support informatique et

concernant ses diffeacuterentes hospitalisations Le patient invoquait le fait qursquoil eacutetait atteint drsquoune

affection qursquoil ne souhaitait pas reacuteveacuteler agrave sa famille et il craignait qursquoun membre de sa famille

233 Lrsquoarticle 17 du regraveglement europeacuteen preacutevoit laquo La personne concerneacutee a le droit dobtenir du responsable du

traitement leffacement dans les meilleurs deacutelais de donneacutees agrave caractegravere personnel la concernant et le

responsable du traitement a lobligation deffacer ces donneacutees agrave caractegravere personnel dans les meilleurs deacutelais

lorsque lun des motifs suivants sapplique

a) les donneacutees agrave caractegravere personnel ne sont plus neacutecessaires au regard des finaliteacutes pour lesquelles elles ont eacuteteacute

collecteacutees ou traiteacutees dune autre maniegravere

b) la personne concerneacutee retire le consentement sur lequel est fondeacute le traitement conformeacutement agrave larticle 6

paragraphe 1 point a) ou agrave larticle 9 paragraphe 2 point a) et il nexiste pas dautre fondement juridique au

traitement

c) la personne concerneacutee soppose au traitement en vertu de larticle 21 paragraphe 1 et il nexiste pas de motif

leacutegitime impeacuterieux pour le traitement ou la personne concerneacutee soppose au traitement en vertu de larticle 21

paragraphe 2

d) les donneacutees agrave caractegravere personnel ont fait lobjet dun traitement illicite

e) les donneacutees agrave caractegravere personnel doivent ecirctre effaceacutees pour respecter une obligation leacutegale qui est preacutevue

par le droit de lUnion ou par le droit de lEacutetat membre auquel le responsable du traitement est soumis

f) les donneacutees agrave caractegravere personnel ont eacuteteacute collecteacutees dans le cadre de loffre de services de la socieacuteteacute de

linformation viseacutee agrave larticle 8 paragraphe 1 raquo

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

103

meacutedecin dans lrsquohocircpital ougrave il eacutetait pris en charge consulte le systegraveme informatique et deacutecouvre

ainsi sa pathologie234

173 Bien qursquoil faille remarquer ici qursquoil ne srsquoagissait pas drsquoune demande drsquoeacutelimination

portant sur lrsquointeacutegraliteacute du dossier meacutedical lrsquoavis de la CNIL sur ce sujet nous paraicirct

neacuteanmoins dangereux agrave plusieurs titres Drsquoune part nous estimons que la CNIL remet en

question lrsquoefficaciteacute des regravegles relatives au secret professionnel En effet la deacutecision de

supprimer des donneacutees de santeacute par anticipation sur un eacuteventuel accegraves frauduleux agrave celles-ci

laisse agrave penser que la CNIL nrsquoa pas confiance dans les regravegles existantes en matiegravere de partage

de lrsquoinformation meacutedicale regravegles qui srsquoappliquent aux professionnels de santeacute La CNIL

semble oublier qursquoen matiegravere de secret professionnel les mecircme regravegles sont opposables qursquoil

soit question de donneacutees de santeacute papier ou informatiseacutees Drsquoautre part accepter la

suppression de donneacutees informatiseacutees au motif que lrsquoeacutetablissement public de santeacute possegravede

toujours la possibiliteacute de les conserver sur support papier va agrave lrsquoencontre du mouvement

actuel qui tend agrave une informatisation complegravete des dossiers meacutedicaux Ce genre de situation se

reacutevegravele donc tregraves bloquant pour les eacutetablissements publics de santeacute freinant consideacuterablement

le deacuteveloppement des TIC dans la pratique meacutedicale

Or de telles demandes ne peuvent que se multiplier dans les anneacutees agrave venir sous la

double pression de la peur de lrsquooutil informatique et de la crainte de lrsquoouverture agrave tous des

archives dont le deacutelai de conservation serait eacutecouleacute Nous pensons que la CNIL bien que

garante des droits des personnes dont les donneacutees font lrsquoobjet drsquoun traitement informatiseacute

devrait toutefois faciliter lrsquoinstauration drsquoun climat de confiance de lrsquooutil informatique

B Archives publiques archives hospitaliegraveres et secret meacutedical des regravegles

parfois en opposition

174 Suite agrave la loi du 15 juillet 2008235

reacuteformant les regravegles relatives aux archives des

interrogations quant agrave la communicabiliteacute des archives hospitaliegraveres et donc des dossiers

meacutedicaux ont vu le jour Ce questionnement fait suite agrave une disposition issue de cette loi et

234 Quinziegraveme rapport drsquoactiviteacute de la CNIL 1995 citeacute par SAMARCQ Nicolas BRIOIS Seacutebastien laquo Donneacutees

de santeacute agrave caractegravere personnel les enjeux de la diffusion des TIC raquo Expertises 2010 p 385 235

Loi ndeg 2008-696 du 15 juillet 2008 relative aux archives JORF ndeg0164 du 16 juillet 2008 p 11322

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

104

codifieacutee au Code du patrimoine agrave lrsquoarticle L 213-2 Ce texte dispose que laquo les archives

publiques sont communicables de plein droit agrave lrsquoexpiration drsquoun deacutelai de (hellip) vingt-cinq ans agrave

compter du deacutecegraves de lrsquointeacuteresseacute pour les documents dont la communication porte atteinte au

secret meacutedical raquo Le texte ajoute que laquo si la date du deacutecegraves nrsquoest pas connue le deacutelai est de

cent vingt ans agrave compter de la date de naissance de la personne en cause raquo Face agrave cette

disposition le directeur du centre hospitalier de Lorquin a saisi la CADA afin drsquoobtenir un

conseil concernant lrsquoapplication de ces dispositions aux dossiers meacutedicaux

175 Dans un conseil rendu le 16 avril 2009236

la CADA tient le raisonnement suivant en

application de lrsquoarticle L 211-4 du Code du patrimoine les documents des eacutetablissements

publics de santeacute sont des archives publiques archives qui au titre de lrsquoarticle L 213-2 du

mecircme code sont communicables de plein droit vingt-cinq ans agrave compter du deacutecegraves de

lrsquointeacuteresseacute pour les documents dont la communication porte atteinte au secret meacutedical ou cent

vingt ans agrave compter de la date de naissance de la personne en cause Elle poursuit son

raisonnement en preacutecisant que les dossiers meacutedicaux ayant le caractegravere drsquoarchives publiques

sont donc librement communicables dans les conditions preacutevues agrave lrsquoarticle L 212-2 du Code

du patrimoine La CADA ajoute enfin que le dernier alineacutea de lrsquoarticle L 1110-4 du Code de

la santeacute publique237

qui encadre les modaliteacutes de communications des informations drsquoune

personne deacuteceacutedeacutee agrave ses ayants droit nrsquoest alors plus applicable Selon la CADA les dossiers

meacutedicaux passeacute un certain deacutelai pourraient donc ecirctre librement communicables agrave nrsquoimporte

quelle personne qui en formulerait la demande Face agrave cet avis la DHOS a via une circulaire

du 21 aoucirct 2009238

rappeleacute lrsquoeacutetat du droit en matiegravere de communication des informations de

santeacute relatives agrave une personne deacuteceacutedeacutee ayant eacuteteacute hospitaliseacutee dans un eacutetablissement public de

santeacute ou un eacutetablissement priveacute chargeacute drsquoune mission de service public La DHOS preacuteconise

aux eacutetablissements de santeacute lrsquoorganisation de lrsquoeacutelimination des dossiers meacutedicaux et ce

laquo avec une particuliegravere attention raquo En effet par le truchement des articles du Code du

patrimoine preacuteciteacutes et des dispositions du Code de la santeacute publique relatives agrave la dureacutee de

236 CADA conseil ndeg 20091205 seacuteance du 16 avril 2009

237 Cet alineacutea dispose laquo le secret meacutedical ne fait pas obstacle agrave ce que les informations concernant une

personne deacuteceacutedeacutee soient deacutelivreacutees agrave ses ayants droit dans la mesure ougrave elles leur sont neacutecessaires pour leur

permettre de connaicirctre les causes de la mort de deacutefendre la meacutemoire du deacutefunt ou de faire valoir leurs droits

sauf volonteacute contraire exprimeacutee par la personne avant son deacutecegraves raquo 238

Circulaire ndeg DHOSE12009271 du 21 aoucirct 2009 relative agrave la communicabiliteacute des informations de santeacute

concernant une personne deacuteceacutedeacutee ayant eacuteteacute hospitaliseacutee dans un eacutetablissement public de santeacute ou un

eacutetablissement de santeacute priveacute chargeacute drsquoune mission de service public non publieacutee au JORF

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

105

conservation des dossiers meacutedicaux la DHOS estime que lrsquoeacutelimination systeacutematique des

dossiers meacutedicaux eacutevitera leur communication au public

176 Comme une partie de la doctrine nous pensons que cette nouvelle disposition

introduite par la loi de 2008 relative aux archives ne srsquoapplique pas aux dossiers meacutedicaux

De fait bien qursquoil soit exact que les dossiers meacutedicaux soient des archives publiques au sens

de lrsquoarticle L 213-4 du Code du patrimoine ce sont eacutegalement et avant tout des documents

administratifs au sens de la loi du 17 juillet 1978 portant diverses mesures dameacutelioration des

relations entre ladministration et le public et diverses dispositions dordre administratif social

et fiscal239

aujourdrsquohui codifieacute au Code des relations entre le public et les administrations

Ainsi la lecture attentive des articles L 311-5 agrave L 311-8 de ce code nous permet de tenir une

position diffeacuterente de celle de la CADA et la DHOS Ces articles distinguent trois cateacutegories

de documents administratifs les documents non communicables les documents

communicables uniquement agrave lrsquointeacuteresseacute et enfin les documents non communicables qui

peuvent neacuteanmoins lrsquoecirctre agrave titre drsquoexception et notamment dans les conditions et deacutelais

preacutevus aux articles L 213-1 et L 213-2 du Code du patrimoine Ainsi une interpreacutetation

stricte de ces dispositions240

nous permet drsquoaffirmer que seuls les documents dont la liste est

dresseacutee agrave lrsquoarticle L 311-5 du Code des relations entre le public et les administrations seraient

exceptionnellement communicables dans les deacutelais et conditions preacutevus agrave lrsquoarticle L 213-2 du

Code du patrimoine Or les dossiers meacutedicaux sont consideacutereacutes aux termes de lrsquoarticle L 311-

6 du Code des relations entre le public et les administrations comme uniquement

communicables aux personnes inteacuteresseacutees Ceci est drsquoailleurs en adeacutequation avec les

dispositions de lrsquoarticle L 1111-7 du Code de la santeacute publique relatives agrave lrsquoaccegraves agrave son

dossier meacutedical par lrsquousager article drsquoailleurs expresseacutement citeacute par les dispositions de la loi

Dans cette hypothegravese les documents laquo dont la communication porte atteinte au secret

meacutedical raquo seraient tous ceux deacutetenus par lrsquoeacutetablissement de santeacute mais non preacutesents au dossier

meacutedical A titre drsquoexemple il est possible de citer les documents de facturation ou encore les

carnets de rendez-vous

239 Loi ndeg 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures dameacutelioration des relations entre ladministration et

le public et diverses dispositions dordre administratif social et fiscal JORF du 18 juillet 1978 p 2851 240

BEAUJEAN Isabelle laquo Lrsquoinquieacutetant devenir des dossiers patients conserveacutes par les eacutetablissements publics de

santeacute au-delagrave de 25 ansraquo RDS ndeg 45 2012 p 236

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

106

177 Cette circulaire eacutetonnante en plusieurs points nrsquoa toutefois susciteacute que peu de

commentaires au sein de la doctrine Ceux qui existent sont assez trancheacutes Certains estiment

que cette circulaire relegraveve laquo drsquoun emballement rocambolesque raquo critiquent le raisonnement de

la DHOS et estiment qursquoil y a laquo urgence agrave ne pas appliquer cette recommandation raquo241

Drsquoautres affirment tout simplement que laquo la position de la CADA et de la DHOS semble

critiquable raquo preacutecisant qursquoen tout eacutetat de cause lrsquoavis de la CADA et la circulaire

interpreacutetative de la DHOS ne revecirctent aucunement un caractegravere obligatoire242

Au-delagrave des regravegles applicables aux archives publiques lrsquoutilisation des TIC en matiegravere de

conservation des donneacutees de santeacute a ameneacute le leacutegislateur agrave creacuteer un cadre speacutecifique relatif agrave

lrsquoheacutebergement de ces donneacutees sensibles

sect2 La conservation agrave lrsquoegravere des TIC le cadre de lrsquoheacutebergement des

donneacutees de santeacute

178 La conservation des donneacutees de santeacute sur support informatique doit respecter un cadre

reacuteglementaire preacutecis instaureacute par le leacutegislateur dans un souci de proteacuteger agrave la fois la

confidentialiteacute et la seacutecuriteacute de ces donneacutees Ainsi lrsquoheacutebergement des donneacutees de santeacute et

notamment lrsquoheacutebergement externaliseacute aupregraves de tiers reacutepond agrave un cadre strict (A) instaureacute

depuis plusieurs anneacutees et reacutecemment reacutenoveacute

Toutefois la probleacutematique majeure aujourdrsquohui reste lrsquoopposition de la technique et

de son eacutevolution aux regravegles juridiques (B)

A Lrsquoheacutebergement des donneacutees de santeacute de lrsquoagreacutement agrave la certification

179 Lrsquoactiviteacute drsquoheacutebergement de donneacutees de santeacute est strictement encadreacutee depuis

plusieurs anneacutees Les regravegles instaureacutees ont toutefois mis du temps avant drsquoecirctre pleinement

applicables (1) et lrsquoagreacutement dont la proceacutedure est vite apparue comme lourde (2) a eacuteteacute

241 ZORN-MACREZ Caroline laquo Les dossiers meacutedicaux des deacutefunts des archives publiques non

communicables raquo RLDI ndeg 56 2010 p 63 242

BEAUJEAN Isabelle laquo Lrsquoinquieacutetant devenir des dossiers des patients conserveacutes par les eacutetablissements

publics de santeacute au-delagrave du deacutelai de 25 ans raquo op cit p 36

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

107

remplaceacute par une certification instaureacutee par la loi de modernisation de notre systegraveme de

santeacute243

et compleacuteteacutee par une ordonnance de janvier 2017244

(3)

1) Des regravegles agrave la mise en place laborieuse

180 La possibiliteacute pour un eacutetablissement ou un professionnel de santeacute drsquoexternaliser

lrsquoheacutebergement des donneacutees de santeacute informatiseacutees aupregraves drsquoun tiers agreacuteeacute a eacuteteacute instaureacutee par

la loi du 4 mars 2002245

Celle-ci a inseacutereacute au Code de la santeacute publique un article L 1111-8

qui preacutevoit246

les dispositions suivantes laquo toute personne qui heacuteberge des donneacutees de santeacute agrave

caractegravere personnel recueillies agrave loccasion dactiviteacutes de preacutevention de diagnostic de soins

ou de suivi social et meacutedico-social pour le compte de personnes physiques ou morales agrave

lorigine de la production ou du recueil desdites donneacutees ou pour le compte du patient lui-

mecircme doit ecirctre agreacuteeacutee agrave cet effet Cet heacutebergement quel quen soit le support papier ou

eacutelectronique est reacutealiseacute apregraves que la personne prise en charge en a eacuteteacute ducircment informeacutee et

sauf opposition pour un motif leacutegitime raquo Il est inteacuteressant de preacuteciser que jusque tregraves

reacutecemment le texte visait expresseacutement les eacutetablissements de santeacute et les professionnels de

santeacute ou la personne concerneacutee par les donneacutees comme deacutebiteurs de cette obligation

drsquoheacuteberger les donneacutees aupregraves drsquoun tiers agreacuteeacute Depuis la loi de modernisation de notre santeacute

cette obligation incombe aux laquo personnes physiques ou morales agrave lrsquoorigine de la production

ou du recueil desdites donneacutees raquo et porte sur les donneacutees de santeacute ainsi que sur les donneacutees

relatives au suivi social ou meacutedico-social drsquoune personne La formulation finalement retenue

est donc plus vaste

181 Cette disposition du Code de la santeacute publique qui a fait lrsquoobjet de sept modifications

successives entre 2002 et 2016 est compleacuteteacutee par le deacutecret du 4 janvier 2006247

Celui-ci

preacutecise les modaliteacutes propres au dossier de demande drsquoagreacutement au comiteacute drsquoagreacutement ainsi

qursquoau modegravele du contrat qui doit ecirctre signeacute entre lrsquoheacutebergeur et lrsquoeacutetablissement de santeacute ou le

243 Loi ndeg 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre systegraveme de santeacute JORF ndeg0022 du 27 janvier

2016 texte 1 244

Ordonnance ndeg 2017-27 du 12 janvier 2017 relative agrave lheacutebergement de donneacutees de santeacute agrave caractegravere

personnel JORF ndeg0011 du 13 janvier 2017 texte ndeg 17 245

Loi ndeg 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et agrave la qualiteacute du systegraveme de santeacute JORF du

5 mars 2002 p 4118 246

Lrsquoarticle L 1111-8 du Code de la santeacute publique a eacuteteacute modifieacute par lrsquoarticle 96 de la loi ndeg 2016-41 du 26

janvier 2016 de modernisation de notre systegraveme de santeacute 247

Deacutecret ndeg2006-6 du 4 janvier 2006 relatif agrave lheacutebergement de donneacutees de santeacute agrave caractegravere personnel et

modifiant le Code de la santeacute publique JORF ndeg4 du 5 janvier 2006 p 174

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

108

professionnel de santeacute qui externalise les donneacutees de santeacute recueillies Or la mise en place de

ces dispositions nrsquoa pas eacuteteacute simple En effet le deacutecret preacutevoyait initialement une mise en

œuvre des modaliteacutes pratiques drsquoagreacutement des heacutebergeurs au 1er

janvier 2007 Toutefois la loi

du 30 janvier 2007248

suspend la proceacutedure drsquoagreacutement des heacutebergeurs et ce pour une peacuteriode

de 2 ans agrave compter du 2 feacutevrier 2007 En effet lrsquoarticle 25 IV de la loi preacutevoyait laquo sauf

lorsquelle sapplique agrave des demandes dagreacutement portant sur lheacutebergement des dossiers

meacutedicaux personnels preacutevus agrave larticle L 161-36-1 du Code de la seacutecuriteacute sociale la

proceacutedure dagreacutement preacutevue agrave larticle L 1111-8 du Code de la santeacute publique est suspendue

pendant une peacuteriode de deux ans agrave compter de la publication de la preacutesente loi raquo La raison

principale de cette suspension eacutetait la neacutecessiteacute pour assurer une bonne mise en œuvre de ces

dispositions drsquoadopter au preacutealable des reacutefeacuterentiels de seacutecuriteacute et drsquointeropeacuterabiliteacute la

proceacutedure drsquoagreacutement eacutetant difficile agrave mettre en œuvre tant que ces reacutefeacuterentiels permettant

aux candidats drsquoobtenir une certification aupregraves drsquoorganismes accreacutediteacutes nrsquoeacutetaient pas

adopteacutes249

Lagrave encore le leacutegislateur a montreacute son incapaciteacute agrave reacuteagir suffisamment rapidement

face au deacuteveloppement des technologies et le deacutecalage entre technologie et encadrement

juridique a conduit pendant deux anneacutees agrave un flou regraveglementaire dangereux pour les donneacutees

sensibles que sont les donneacutees santeacute A noter que durant cette peacuteriode de suspension les

heacutebergeurs eacutetaient tenus de satisfaire aux dispositions de la loi Informatique et Liberteacute et agrave ce

titre obtenir un avis favorable de la CNIL250

182 Crsquoest le GIP-DMP251

qui a eacuteteacute chargeacute pendant cette peacuteriode de deacutefinir le reacutefeacuterentiel

de constitution des dossiers de demande drsquoagreacutement Cette eacutelaboration a eacuteteacute effectueacutee en

concertation avec les opeacuterateurs les industriels et les maicirctrises drsquoouvrages reacutegionales du

secteur de la santeacute Lrsquoobjectif afficheacute de ce reacutefeacuterentiel eacutetait drsquoassurer aux candidats agrave

lrsquoheacutebergement laquo un traitement eacutequitable et efficace lors de leurs candidatures raquo252

mais

eacutegalement laquo de traduire de faccedilon concregravete les exigences drsquoun texte reacuteglementaire long et

248 Loi ndeg 2007-127 du 30 janvier 2007 ratifiant lordonnance ndeg 2005-1040 du 26 aoucirct 2005 relative agrave

lorganisation de certaines professions de santeacute et agrave la reacutepression de lusurpation de titres et de lexercice illeacutegal

de ces professions et modifiant le Code de la santeacute publique JORF ndeg27 du 1 feacutevrier 2007 p 1937 249

BALLET Philippe laquo Ougrave en est la proceacutedure drsquoagreacutement des heacutebergeurs de donneacutees de santeacute agrave caractegravere

personnel raquo Gaz Pal ndeg 109 2007 p 20 250

Loi ndeg 2007-127 du 30 janvier 2007 ratifiant lordonnance ndeg 2005-1040 du 26 aoucirct 2005 relative agrave

lorganisation de certaines professions de santeacute et agrave la reacutepression de lusurpation de titres et de lexercice illeacutegal

de ces professions et modifiant le Code de la santeacute publique JORF ndeg27 du 1 feacutevrier 2007 p 1937 texte ndeg 1 251

Aujourdrsquohui devenu lrsquoAgence des Systegravemes drsquoInformation Partageacutee en santeacute (ASIP Santeacute) 252

BOSSI Jeanne laquo Le rocircle de lrsquoAgence des systegravemes drsquoinformation partageacutes de santeacute dans la proceacutedure

drsquoagreacutement raquo Actualiteacutes Jurisanteacute ndeg 74 juillet 2011 p 9

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

109

compliqueacute raquo253

A la reprise de la proceacutedure drsquoagreacutement les heacutebergeurs ont eacuteteacute tenus de

deacuteposer un dossier de demande drsquoagreacutement et drsquoobtenir celui-ci afin de pouvoir maintenir

leur activiteacute A lrsquoheure actuelle254

une centaine drsquoagreacutements ont eacuteteacute deacutelivreacutes par le comiteacute

Ceux-ci concernent parfois une mecircme socieacuteteacute qui propose plusieurs types drsquoactiviteacute

drsquoheacutebergement diffeacuterents Lrsquoactiviteacute du comiteacute est neacuteanmoins ameneacutee agrave disparaitre puisque

lrsquoordonnance du 12 janvier 2017255

substitue agrave la proceacutedure drsquoagreacutement une proceacutedure de

certification

2) Lrsquoagreacutement des heacutebergeurs une proceacutedure critiqueacutee

La proceacutedure drsquoagreacutement des heacutebergeurs est deacutecrite tregraves preacuteciseacutement au sein du deacutecret

dit heacutebergeur (a) Celle-ci preacutesente un certain nombre de lacunes (b) sources de critiques

reacuteguliegraveres

a) Points essentiels de la proceacutedure

183 Le but principal de la proceacutedure instaureacutee par le deacutecret du 4 janvier 2006 est

drsquoorganiser et drsquoencadrer le deacutepocirct la conservation et la restitution des donneacutees de santeacute agrave

caractegravere personnel et ce dans des conditions qui vont permettre de garantir la confidentialiteacute

et la seacutecuriteacute des donneacutees De ce fait le deacutecret heacutebergeur a mis en place une proceacutedure stricte

et formaliseacutee applicable agrave toute personne ou entreprise degraves lors qursquoelle conserve des donneacutees

de santeacute de personnes pour lesquelles elles nrsquointerviennent pas dans la prise en charge

meacutedicale La proceacutedure se deacuteroule en plusieurs temps Le dossier de demande drsquoagreacutement

formaliseacute selon le reacutefeacuterentiel de constitution des dossiers mis en place par lrsquoASIP santeacute sera

drsquoabord soumis agrave la CNIL qui dispose drsquoun deacutelai de deux mois renouvelable une fois afin

drsquoappreacutecier laquo les garanties preacutesenteacutees par le candidat en matiegravere de protection des personnes

agrave lrsquoeacutegard des traitements de donneacutees de santeacute agrave caractegravere personnel et de seacutecuriteacute de ces

donneacutees raquo256

La demande est ensuite transmise avec lrsquoavis de la CNIL le cas eacutecheacuteant au

comiteacute drsquoagreacutement des heacutebergeurs257

qui dispose drsquoun deacutelai drsquoun mois renouvelable une fois

253 Ibid

254 Chiffres en date du 25 novembre 2016 veacuterifieacutes sur le site de lrsquoASIP santeacute

[httpesantegouvfrservicesreferentielssecuritehebergeurs-agrees] 255

Article 1er

de lrsquoordonnance ndeg 2017-27 du 12 janvier 2017 relative agrave lheacutebergement de donneacutees de santeacute agrave

caractegravere personnel JORF ndeg0011 du 13 janvier 2017 texte ndeg 17 256

Article R 1111-10 du Code de la santeacute publique 257

Ce comiteacute placeacute aupregraves du ministre chargeacute de la santeacute a eacuteteacute creacuteeacute par le deacutecret de janvier 2006 Ces membres

qui sont nommeacutes pour 5 ans par arrecircteacute du ministre en charge de la santeacute sont les suivants un membre de

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

110

pour rendre un avis sur le dossier de candidature agrave lrsquoagreacutement Sur demande du secreacutetaire

geacuteneacuteral du Ministegravere chargeacute des Affaires Sociale lrsquoASIP Santeacute a eacuteteacute chargeacutee drsquoinstruire

preacutealablement les dossiers de demandes drsquoagreacutement afin de faciliter le travail du Comiteacute

Ainsi un comiteacute drsquoinstruction interne agrave lrsquoASIP Santeacute a eacuteteacute mis en place en 2009 ayant pour

mission de reacutediger un rapport ainsi que des recommandations globales qui sont transmis

ensuite au comiteacute drsquoagreacutement Enfin une fois lrsquoavis du comiteacute rendu le ministre chargeacute de la

santeacute dispose drsquoun deacutelai de deux mois pour prendre sa deacutecision Passeacute ce deacutelai la demande est

reacuteputeacutee rejeteacutee

184 Une fois agreacuteeacutes les heacutebergeurs srsquoengagent agrave rendre chaque anneacutee un rapport drsquoauto-

eacutevaluation Cette proceacutedure qui repose principalement sur une relation de confiance est

toutefois compleacuteteacutee par de possibles controcircles de la CNIL A titre drsquoexemple en 2011 la

CNIL a prononceacute un avertissement agrave lencontre dun heacutebergeur de donneacutees de santeacute suite agrave

une deacuteclaration mensongegravere contenue dans son dossier de demande dagreacutement En lrsquoespegravece

la socieacuteteacute preacutetendait chiffrer les donneacutees meacutedicales heacutebergeacutees par le biais drsquoun proceacutedeacute de

chiffrage fort258

ce qui nrsquoeacutetait pas le cas Lors drsquoun controcircle sur place reacutealiseacute en 2011 la

CNIL a constateacute que les donneacutees nrsquoeacutetaient pas chiffreacutees et qursquoelles eacutetaient de plus accessibles

aux administrateurs informatiques de la socieacuteteacute Dans lrsquoavis rendu par la CNIL celle-ci srsquoest

prononceacutee sur les garanties preacutesenteacutees par le candidat en matiegravere de seacutecuriteacute des donneacutees de

santeacute faisant lrsquoobjet drsquoun traitement informatiseacute et avait estimeacute que lrsquoheacutebergeur ne respectait

pas lrsquoobligation poseacutee agrave lrsquoarticle 6-1 de la loi Informatique et Liberteacute agrave savoir traiter les

donneacutees de maniegravere licite

b) Une proceacutedure remise en cause

La proceacutedure drsquoagreacutement des heacutebergeurs de donneacutees de santeacute a fait lrsquoobjet de plusieurs

critiques

lrsquoinspection des affaires sociales de repreacutesentant des associations compeacutetentes en matiegravere de santeacute 2

repreacutesentants des professionnels de santeacute et de 3 personnaliteacutes qualifieacutees dans les domaines de lrsquoeacutethique et du

droit de la seacutecuriteacute des systegravemes drsquoinformation et dans le domaine eacuteconomique et financier 258

Le chiffrement est une des quatre fonctions assureacutees par la cryptologie Le chiffrement de donneacutees consiste agrave

rendre illisibles et inaccessibles ces donneacutees Seules les personnes deacutetenant une cleacute speacutecifique pourront alors

acceacuteder aux donneacutees Il existe plusieurs techniques de chiffrement le chiffrement symeacutetrique et le chiffrement

asymeacutetrique

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

111

185 La premiegravere concerne bien eacutevidemment les deacutelais de proceacutedure Ceux-ci peuvent en

effet sembler assez longs la proceacutedure officielle pouvant durer entre cinq et huit mois sans

compter la proceacutedure drsquoinstruction preacutealable des dossiers par le comiteacute drsquoinstruction de

lrsquoASIP Santeacute En aoucirct 2011 le comiteacute drsquoagreacutement des heacutebergeurs a rendu son premier rapport

drsquoactiviteacute couvrant les anneacutees 2006 agrave 2011 Apregraves avoir rappeleacute le cadre et le deacuteroulement de

la proceacutedure le comiteacute dresse un bilan de son activiteacute Il en ressort que cet encadrement et la

deacutemarche drsquoagreacutement sont globalement perccedilus de maniegravere positive par les professionnels du

secteur Toutefois le comiteacute drsquoagreacutement pointe du doigt le fait que les expertises meneacutees par

lrsquoASIP Santeacute drsquoune part et par la CNIL drsquoautre part portent en partie sur des points

identiques Cela geacutenegravere des coucircts importants en termes de ressources humaines et financiegraveres

Le comiteacute drsquoagreacutement souligne eacutegalement que les heacutebergeurs doivent faire face agrave une

contrainte pratique suppleacutementaire qui est celle des dates de reacuteunion du comiteacute drsquoagreacutement et

des seacuteances de la CNIL Cette volonteacute drsquoalleacuteger la proceacutedure afin de la rendre plus fluide

nous paraicirct ecirctre effectivement une solution pragmatique agrave adopter rapidement Enfin le

comiteacute drsquoagreacutement srsquointerroge agrave juste titre sur laquo le type drsquoeacutecosystegraveme qui va se mettre en

place si les proceacutedures drsquoagreacutement se complexifient raquo259

preacutecisant que lrsquoactiviteacute

drsquoheacutebergement des donneacutees de santeacute pourrait alors ecirctre de fait reacuteserveacutee aux socieacuteteacutes

industrielles de grande taille eacuteloigneacutees du patient et de ses probleacutematiques

186 Lrsquoautre critique qui peut ecirctre formuleacutee agrave lrsquoencontre du deacutecret heacutebergeur concerne

lrsquoabsence drsquoadeacutequation entre les textes juridiques et les aspects techniques drsquoaujourdrsquohui En

effet comme le souligne la secreacutetaire geacuteneacuterale de lrsquoASIP Santeacute260

les modegraveles pris par le

leacutegislateur dans le deacutecret de 2006 ne reflegravetent pas la reacutealiteacute concregravete et opeacuterationnelle des

offres actuelles sur le marcheacute et certaines exigences juridiques sont de fait inadapteacutees aux

caracteacuteristiques des technologies actuelles Le risque principal de cette inadeacutequation serait

selon lrsquoauteur drsquoamener lrsquoASIP Santeacute agrave eacutetudier des demandes drsquoagreacutement portant sur une

application meacutetier speacutecifique qui manipule des donneacutees de santeacute alors que seul lrsquoheacutebergement

de ces donneacutees est soumis agrave agreacutement De mecircme les documents qui selon le deacutecret doivent

accompagner le dossier drsquoagreacutement ne sont pas toujours pertinents A titre drsquoexemple la

nature des documents reacuteclameacutes afin de veacuterifier la capaciteacute financiegravere de lrsquoheacutebergeur ne permet

259 Premier rapport drsquoactiviteacute du comiteacute drsquoagreacutement des heacutebergeurs 2006-2011 p 27

260 BOSSI Jeanne laquo Le rocircle de lrsquoAgence des systegravemes drsquoinformation partageacutes en santeacute dans la proceacutedure

drsquoagreacutement raquo op cit p 13

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

112

pas toujours selon Jeanne BOSSI drsquoavoir une vision preacutecise et nette de la veacuteritable situation

financiegravere du candidat Le deacutecret dispose en effet que le candidat agrave un agreacutement fournisse

laquo un document preacutesentant les comptes preacutevisionnels de lactiviteacute dheacutebergement et

eacuteventuellement les trois derniers bilans et la composition de lactionnariat du demandeur

ainsi que dans le cas dune demande de renouvellement les comptes de reacutesultat et bilans lieacutes

agrave cette activiteacute dheacutebergement depuis le dernier agreacutement raquo261

187 Drsquoune maniegravere geacuteneacuterale nous adheacuterons agrave la vision pragmatique de la secreacutetaire

geacuteneacuterale de lrsquoASIP Santeacute alors que le deacutecret heacutebergeur expose les objectifs agrave atteindre par

les heacutebergeurs il appartient aux reacutefeacuterentiels drsquoexposer les moyens agrave mettre en œuvre pour les

atteindre Crsquoest pourquoi Jeanne BOSSI avait proposeacute de revoir le deacutecret heacutebergeur en

preacutevoyant notamment un renvoi systeacutematique aux reacutefeacuterentiels afin que le texte ne devienne

pas rapidement obsolegravete Une des solutions avanceacutee agrave la fois par le comiteacute drsquoagreacutement des

heacutebergeurs dans son premier rapport drsquoactiviteacute et rappeleacutee dans le second262

mais eacutegalement

par la secreacutetaire geacuteneacuterale de lrsquoASIP Santeacute eacutetait de srsquoorienter vers une proceacutedure de

certification meneacutee par des organismes accreacutediteacutes en srsquoinspirant notamment de ce qui peut

exister dans le domaine bancaire Crsquoest drsquoailleurs dans cette direction que srsquoest orienteacute le

leacutegislateur avec la loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute et lrsquoordonnance ndeg2017-27

du 12 janvier 2017 relative agrave lrsquoheacutebergement des donneacutees de santeacute agrave caractegravere personnel263

c) Lrsquoadoption deacutefinitive drsquoune proceacutedure de certification

188 Lrsquoarticle 204 de la loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute preacutevoit que dans les

12 mois suivant la promulgation de la loi le gouvernement est autoriseacute agrave prendre par voie

drsquoordonnance plusieurs mesures visant entre autres agrave laquo remplacer lagreacutement preacutevu au

mecircme article L 1111-8 par une eacutevaluation de conformiteacute technique reacutealiseacutee par un

organisme certificateur accreacutediteacute par linstance nationale daccreacuteditation mentionneacutee agrave

larticle 137 de la loi ndeg 2008-776 du 4 aoucirct 2008 de modernisation de leacuteconomie ou par

lorganisme compeacutetent dun autre Etat membre de lUnion europeacuteenne Cette certification de

conformiteacute porte notamment sur le controcircle des proceacutedures de lorganisation et des moyens

261 Ibid

262 Rapport drsquoactiviteacute 2013-2013 du Comiteacute drsquoAgreacutement des Heacutebergeurs consultable en ligne sur

[httpesantegouvfr] Consulteacute le 15 mai 2017 263

Ordonnance ndeg 2017-27 du 12 janvier 2017 relative agrave lheacutebergement de donneacutees de santeacute agrave caractegravere

personnel JORF ndeg0011 du 13 janvier 2017 texte ndeg 17

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

113

mateacuteriels et humains ainsi que sur les modaliteacutes de qualification des applications

heacutebergeacutees raquo

189 Lrsquoordonnance du 12 janvier 2017 a instaureacute cette proceacutedure de certification en

remplacement de la proceacutedure drsquoagreacutement telle qursquoelle existait Deacutesormais les prestataires de

service drsquoheacutebergement externaliseacute de donneacutees de santeacute devront ecirctre certifieacutes par des

organismes de certification accreacutediteacutes par lrsquoinstance franccedilaise drsquoaccreacuteditation ou lrsquoinstance

nationale drsquoaccreacuteditation drsquoun autre Etat de lrsquoUnion europeacuteenne Un deacutecret pris en Conseil

drsquoEtat doit encore venir preacuteciser les conditions dans lesquelles seront deacutelivreacutes ces certificats

Cependant lrsquoordonnance nrsquoest pas applicable immeacutediatement En effet le leacutegislateur a preacutevu

un temps de transition pendant lequel la proceacutedure drsquoagreacutement reste applicable Ainsi par

principe lrsquoordonnance entrera en vigueur agrave une date fixeacutee par deacutecret et au plus tard au 1er

janvier 2019 Dans lrsquointervalle les demandes drsquoagreacutement ou de renouvellement drsquoagreacutement

deacuteposeacutees avant lrsquoentreacutee en vigueur de lrsquoordonnance continuent drsquoecirctre eacutetudieacutees au titre de

lrsquoagreacutement Par ailleurs les organismes agreacuteeacutes conservent le beacuteneacutefice de leur agreacutement

jusqursquoagrave leur terme Si celui-ci arrive agrave eacutecheacuteance dans les douze mois suivant lrsquoentreacutee en

vigueur de lrsquoordonnance ils disposeront drsquoun certain deacutelai fixeacute par deacutecret pour se mettre en

conformiteacute et obtenir une certification

190 Cette nouvelle proceacutedure devra permettre laquo daccroicirctre la seacutecuriteacute des donneacutees de santeacute

heacutebergeacutees en compleacutetant les audits documentaires par des audits sur site de reacuteduire les deacutelais

dinstruction des demandes des heacutebergeurs aujourdhui trop importants et de faire beacuteneacuteficier

les acteurs concerneacutes de la visibiliteacute du dispositif agrave linternational par une reacutefeacuterence agrave des

certifications ISO largement reacutepandues agrave leacutechelle europeacuteenne et mondiale raquo264

B La reprise de lrsquoexistant lrsquoeacuteventualiteacute de la numeacuterisation des dossiers

papier

191 La numeacuterisation eacuteventuelle des anciens dossiers papier est une hypothegravese qui illustre

bien lrsquoopposition qui peut exister entre les contraintes techniques et les contraintes juridiques

Ainsi cette hypothegravese ne pourra ecirctre envisageacutee qursquoagrave certaines conditions strictes (1) et

264 Rapport au Preacutesident de la Reacutepublique relatif agrave lordonnance ndeg 2017-27 du 12 janvier 2017 relative agrave

lheacutebergement de donneacutees de santeacute agrave caractegravere personnel JORF ndeg 0011 du 13 janvier 2017 texte ndeg 16

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

114

soulegravevera en tout eacutetat de cause la question du devenir des dossiers papiers (2) dont la porteacutee

nrsquoest pas neacutegligeable

1) Les conditions de la numeacuterisation des dossiers existants

192 Face au deacuteveloppement massif des dossiers meacutedicaux informatiseacutes une question

majeure se pose que va-t-il advenir du dossier papier Comme nous lrsquoavons vu la

conservation des dossiers meacutedicaux qursquoils soient papiers ou eacutelectroniques est soumise agrave des

conditions de deacutelais strictes Ainsi pour que les dossiers soient parfaitement complets et les

regravegles respecteacutees deux choix srsquooffrent agrave lrsquoeacutetablissement public de santeacute soit conserver en

parallegravele un dossier papier et un dossier informatiseacute soit numeacuteriser lrsquoensemble des dossiers

papier afin de les inteacutegrer au dossier informatique

193 La premiegravere solution est dans les faits la plus simple mais neacuteanmoins la plus

encombrante pour les eacutetablissements de santeacute De plus elle ne se reacutevegravele pas la plus pratique

pour les professionnels de santeacute obligeacutes de consulter les deux dossiers meacutedicaux afin

drsquoobtenir tous les eacuteleacutements relatifs au patient Enfin cette solution est contraire agrave la logique

actuelle qui tend agrave une informatisation complegravete des archives hospitaliegraveres de tout type pour

des raisons pratiques mais eacutegalement de deacuteveloppement durable La seconde solution

permettrait un passage deacutefinitif au dossier informatiseacute Toutefois cette reprise de lrsquoexistant

via une numeacuterisation de lrsquoensemble des dossiers papier preacutesente des difficulteacutes agrave la fois

techniques et juridiques

194 Du point de vue technique il faut reconnaicirctre que cette opeacuteration va se reacuteveacuteler

fastidieuse voire irreacutealisable dans certains eacutetablissements publics de santeacute au vu de la

quantiteacute de documents que repreacutesentent les dossiers meacutedicaux De plus il va ecirctre neacutecessaire

de stocker tous ces documents numeacuteriseacutes sur des serveurs ce qui induit une capaciteacute de

stockage en interne ou externaliseacutee conseacutequente et donc un coucirct suppleacutementaire Drsquoun point

de vue juridique une question inteacuteressante doit ecirctre souleveacutee quelle sera la valeur de ce

document numeacuteriseacute Pendant longtemps la reacuteponse agrave cette question eacutetait quelque peu

incertaine et il eacutetait neacutecessaire de se tourner vers les regravegles de droit commun pour tenter drsquoy

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

115

reacutepondre (a) Mais reacutecemment lrsquoordonnance ndeg2017-29 du 12 janvier 2017265

prise en

application de lrsquoarticle 204 de la loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute266

est venue

y apporter une reacuteponse preacutecise (b)

a) Les regravegles applicables en droit commun

195 Pour reacutepondre agrave cette interrogation il nous faut drsquoabord nous tourner vers les textes

applicables en matiegravere de droit de la preuve dans la mesure ougrave lrsquoeacutecrit eacutelectronique nrsquoest

envisageacute par le leacutegislateur que sous lrsquoangle probatoire La validiteacute comme preuve juridique

drsquoun document numeacuterique est reconnue depuis 2000 Crsquoest la loi ndeg 2000-230267

qui est venue

modifier le Code civil Celui-ci preacutevoit deacutesormais que laquo leacutecrit eacutelectronique a la mecircme force

probante que leacutecrit sur support papier sous reacuteserve que puisse ecirctre ducircment identifieacutee la

personne dont il eacutemane et quil soit eacutetabli et conserveacute dans des conditions de nature agrave en

garantir linteacutegriteacute raquo268

Deux conditions cumulatives sont poseacutees par le leacutegislateur Dans un

premier temps la personne de qui eacutemane le document doit pouvoir ecirctre identifieacutee Pour cela

la personne a la possibiliteacute de signer eacutelectroniquement le document La signature eacutelectronique

est preacutevue agrave lrsquoarticle 1367 du Code civil laquo la signature neacutecessaire agrave la perfection dun acte

juridique identifie son auteur Elle manifeste son consentement aux obligations qui deacutecoulent

de cet acte Quand elle est apposeacutee par un officier public elle confegravere lauthenticiteacute agrave lacte

Lorsquelle est eacutelectronique elle consiste en lusage dun proceacutedeacute fiable didentification

garantissant son lien avec lacte auquel elle sattache La fiabiliteacute de ce proceacutedeacute est preacutesumeacutee

jusquagrave preuve contraire lorsque la signature eacutelectronique est creacuteeacutee lidentiteacute du signataire

assureacutee et linteacutegriteacute de lacte garantie dans des conditions fixeacutees par deacutecret en Conseil

dEtat raquo Il srsquoagit en pratique drsquoun proceacutedeacute retenu pour garantir lrsquoauthenticiteacute des documents

numeacuteriques et reposant sur un proceacutedeacute cryptographique269

En matiegravere de donneacutees de santeacute

cette signature est apposeacutee par le biais de la Carte de Professionnel de Santeacute (CPS) deacutelivreacutee

265 Ordonnance ndeg 2017-29 du 12 janvier 2017 relative aux conditions de reconnaissance de la force probante des

documents comportant des donneacutees de santeacute agrave caractegravere personnel creacuteeacutes ou reproduits sous forme numeacuterique et

de destruction des documents conserveacutes sous une autre forme que numeacuterique JORF ndeg 0011 13 janvier 2017

texte ndeg 21 266

Loi ndeg 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre systegraveme de santeacute JORF ndeg 0022 27 janvier

2016 texte ndeg 1 267

Loi ndeg 2000-230 du 13 mars 2000 portant adaptation du droit de la preuve aux technologies de linformation

et relative agrave la signature eacutelectronique JORF ndeg 62 du 14 mars 2000 p 3968 268

Article 1366 du Code civil 269

Pour plus de deacutetails sur la signature eacutelectronique voir le Meacutemento eacutediteacute par le bureau conseil de la Direction

Centrale de la Seacutecuriteacute des Systegravemes drsquoInformation et consultable en ligne sur [httpwwwssigouvfr]

Consulteacute le 15 mai 2017

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

116

par lrsquoASIP Santeacute270

La carte CPS est une carte qui contient les donneacutees drsquoidentification du

professionnel qui en est le porteur (identiteacute numeacutero RPPS modaliteacutes drsquoexercice) Cette carte

permet aux professionnels de santeacute entres autres drsquoapposer leur signature eacutelectronique sur les

documents qursquoils produisent

196 La seconde condition poseacutee agrave lrsquoarticle 1366 du Code civil est celle de lrsquointeacutegriteacute du

document Cette notion qui nrsquoest pas deacutefinie par la loi meacuterite que nous la preacutecisions Garantir

lrsquointeacutegriteacute drsquoun document consiste agrave srsquoassurer qursquoil ne soit pas alteacutereacute271

que ce soit par le biais

drsquoune manipulation ulteacuterieure ou par une deacutegradation de son support de conservation et donc

de sa lisibiliteacute Lrsquoinformation doit ecirctre maintenue dans son inteacutegraliteacute De mecircme le support

de conservation doit apporter les garanties neacutecessaires en termes de peacuterenniteacute lrsquoinformation

ne doit pas ecirctre modifieacutee ou pire disparaicirctre Finalement lrsquointeacutegriteacute drsquoun document deacutepend

beaucoup de la qualiteacute de son archivage Il est donc neacutecessaire de mettre en place un

processus fiable de gestion du cycle de vie du document272

197 Toutefois ces conditions de validiteacute ne srsquoappliquent qursquoaux documents creacuteeacutes

eacutelectroniquement et non pas aux documents papier originaux dont une copie serait ensuite

conserveacutee sur informatique par le biais de la numeacuterisation Qursquoen est-il de ces documents

En matiegravere de force probante drsquoune copie lrsquoarticle 1379 dispose que laquo la copie fiable a la

mecircme force probante que loriginal La fiabiliteacute est laisseacutee agrave lappreacuteciation du juge

Neacuteanmoins est reacuteputeacutee fiable la copie exeacutecutoire ou authentique dun eacutecrit authentique Est

preacutesumeacutee fiable jusquagrave preuve du contraire toute copie reacutesultant dune reproduction agrave

lidentique de la forme et du contenu de lacte et dont linteacutegriteacute est garantie dans le temps

par un proceacutedeacute conforme agrave des conditions fixeacutees par deacutecret en Conseil dEacutetat Si loriginal

subsiste sa preacutesentation peut toujours ecirctre exigeacutee raquo

198 En ce qui concerne plus particuliegraverement les copies numeacuteriseacutees la Cour de cassation

avait deacutejagrave en 2008 apporteacute un eacuteclairage sur le sujet Dans un arrecirct en date du 4 deacutecembre

2008273

la Haute juridiction preacutecisait la chose suivante laquo lorsqursquoune partie nrsquoa pas conserveacute

270 V Infra ndeg 244

271 RAYNOUARD Arnaud laquo Le droit de lrsquoeacutecrit eacutelectronique raquo LPA 2001 ndeg 65 p 15

272 RENARD Isabelle laquo Preuve informatique ndash valeur juridique du document numeacuterique raquo Expertises 2010 p

215 273

Cass 2egraveme

civ 4 deacutecembre 2008 ndeg 07-17622

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

117

lrsquooriginal drsquoun document la preuve de son existence peut-ecirctre rapporteacutee par la preacutesentation

drsquoune copie qui doit en ecirctre la reproduction non seulement fidegravele mais durable [hellip] Lrsquoeacutecrit

sous forme eacutelectronique ne vaut preuve qursquoagrave condition que son auteur puisse ecirctre ducircment

identifieacute et qursquoil soit eacutetabli et conserveacute dans des conditions de nature agrave en garantir lrsquointeacutegriteacute

raquo En lrsquoespegravece la CPAM de la Marne avait pour apporter la preuve de la deacutelivrance drsquoune

information produit ce qursquoelle preacutesentait comme eacutetant la copie informatique drsquoun courrier La

Cour de Cassation a casseacute la deacutecision drsquoappel rappelant alors les critegraveres permettant

drsquoaccepter une copie eacutelectronique comme eacuteleacutement de preuve Les premiers critegraveres poseacutes par

la Cour avait trait agrave la copie en elle-mecircme qui se devait drsquoecirctre la reproduction fidegravele et

durable de lrsquooriginal Rien drsquoexceptionnel dans ces critegraveres qui sont ceux opposables agrave

nrsquoimporte quelle copie qursquoelle soit papier ou eacutelectronique Nous rappellerons simplement

qursquoune copie fidegravele signifie que celle-ci doit ecirctre lrsquoexacte reproduction de lrsquooriginal (par

exemple si le document original eacutetait signeacute manuellement cette signature doit apparaitre sur

la copie) En ce sens la numeacuterisation drsquoun document papier permettait de remplir ce critegravere

de copie fidegravele Les seconds critegraveres concernaient plus particuliegraverement quant agrave eux la copie

sous forme eacutelectronique Celle-ci doit permettre drsquoidentifier son auteur et doit ecirctre conserveacutee

dans des conditions permettant de garantir son inteacutegriteacute Concernant lrsquoindentification de

lrsquoauteur du document ce qui importait eacutetait finalement de savoir agrave qui il pouvait ecirctre

imputable Se posait alors la question de savoir si cela impliquait que le document soit

forceacutement signeacute Pour certains auteurs ce nrsquoeacutetait pas le cas un simple papier agrave en-tecircte ou

logo distinctif permettant de savoir de qui eacutemane le document274

199 Cependant ce raisonnement montrait vite ses limites selon nous En effet il est

aujourdrsquohui tregraves simple de falsifier un logo ou un papier agrave en-tecircte surtout quand il srsquoagit drsquoun

document eacutelectronique Le deacutecret ndeg 2016-1673 du 5 deacutecembre 2016275

relatif agrave la fiabiliteacute des

copies et pris pour lapplication de larticle 1379 du Code civil pose de maniegravere preacutecise et

deacutefinitive les critegraveres que doivent remplir les copies numeacuteriques pour ecirctre consideacutereacutees comme

fiables Ainsi selon les dispositions de lrsquoarticle 1er

du deacutecret laquo est preacutesumeacutee fiable au sens

du deuxiegraveme alineacutea de larticle 1379 du Code civil la copie reacutesultant

274 RENARD Isabelle laquo Preuve informatique ndash valeur juridique du document numeacuterique raquo op cit p 215

275 Deacutecret ndeg 2016-1673 du 5 deacutecembre 2016 relatif agrave la fiabiliteacute des copies et pris pour lapplication de larticle

1379 du Code civil JORF ndeg0283 du 6 deacutecembre 2016 texte ndeg 61

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

118

- soit dun proceacutedeacute de reproduction qui entraicircne une modification irreacuteversible du support de

la copie

- soit en cas de reproduction par voie eacutelectronique dun proceacutedeacute qui reacutepond aux conditions

preacutevues aux articles 2 agrave 6 du preacutesent deacutecret raquo

200 Les articles 2 agrave 6 du deacutecret fixent des conditions tregraves strictes Le texte exige que le

proceacutedeacute de reproduction par voie eacutelectronique permette drsquoapporter des informations lieacutees agrave la

copie afin de lrsquoidentifier Le contexte de numeacuterisation et la date de creacuteation de la copie

doivent ecirctre preacuteciseacutes Par ailleurs lrsquointeacutegriteacute de la copie doit ecirctre attesteacutee laquo par une empreinte

digitale qui garantit que toute modification ulteacuterieure de la copie agrave laquelle elle est attacheacutee

est deacutetectable raquo Pour ce faire le texte exige que les eacutetablissements de santeacute fassent le choix

entre un systegraveme drsquohorodatage qualifieacute drsquoun cachet eacutelectronique qualifieacute ou drsquoune signature

eacutelectronique tel que preacutevu par le regraveglement (UE) ndeg 9102014 du Parlement Europeacuteen et du

Conseil du 23 juillet 2014 sur lidentification eacutelectronique et les services de confiance pour

les transactions eacutelectroniques au sein du marcheacute inteacuterieur Enfin laquo la copie eacutelectronique est

conserveacutee dans des conditions propres agrave eacuteviter toute alteacuteration de sa forme ou de son

contenu Les opeacuterations requises pour assurer la lisibiliteacute de la copie eacutelectronique dans le

temps ne constituent pas une alteacuteration de son contenu ou de sa forme degraves lors quelles sont

traceacutees et donnent lieu agrave la geacuteneacuteration dune nouvelle empreinte eacutelectronique de la copie raquo

Cette derniegravere disposition preacutesente lrsquointeacuterecirct drsquoecirctre selon nous parfaitement adapteacutee aux

contraintes des techniques informatiques actuelles En effet aujourdrsquohui peu de techniques

sont suffisamment fiables pour permettre de garantir une conservation integravegre et durable des

documents eacutelectroniques276

Ainsi en preacutecisant que les opeacuterations laquo requises pour assurer la

lisibiliteacute de la copie eacutelectronique dans le temps raquo nrsquoaltegraverent pas la fiabiliteacute de la copie le

leacutegislateur permet drsquoenvisager la mise en place des opeacuterations de conversion des formats

informatiques au greacute des eacutevolutions techniques sans que cela nrsquoentache la valeur probante de

la copie

201 La numeacuterisation de lrsquoensemble des dossiers meacutedicaux papier afin de les inteacutegrer aux

dossiers informatiseacutes serait donc juridiquement possible sous reacuteserve de se plier agrave un certain

276 En pratique il est conseilleacute drsquoutiliser des disques WORM (Write Once Read Many) qui sont reacuteinscriptibles

Crsquoest le cas par exemple des disques optiques numeacuteriseacutes Il faut eacutegalement privileacutegier des formats eacutelectroniques

standardiseacutes du type XLM PDF ou TIFF

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

119

nombre de contraintes strictes Toutefois en pratique il srsquoagit drsquoun chantier tregraves important

pour les eacutetablissements publics de santeacute qui induit un coucirct financier et humain non

neacutegligeable A noter qursquoune ordonnance de janvier 2017277

prise en application de lrsquoarticle

204 de la loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute a deacutefinitivement acteacute au sein du

Code de la santeacute publique la possibiliteacute pour des documents contenant des donneacutees de santeacute

drsquoecirctre numeacuteriseacutes tout en conservant une force probante278

Cependant le leacutegislateur ne fait

que rappeler au sein du Code de la santeacute publique les dispositions du Code civil Aucune

nouveauteacute ni simplification donc mais la preacutecision que ces dispositions du droit commun

srsquoappliquent bel et bien aux documents comportant des donneacutees de santeacute

2) Le devenir des dossiers papier numeacuteriseacutes

202 Une fois les dossiers meacutedicaux papier numeacuteriseacutes ceux-ci deviennent redondants avec

le dossier informatiseacute Une suppression de ceux-ci est-elle pour autant envisageable Cette

question qui est commune agrave de nombreuses administrations a eacuteteacute freacutequemment poseacutee aux

Archives deacutepartementales Les Archives de France avaient ainsi dans un premier temps poseacute

un cadre de commun agrave lrsquoeacutelimination anticipeacutee drsquoarchives publiques papier qui auraient eacuteteacute

numeacuteriseacutees (a) Cependant face aux nombreuses demandes des eacutetablissements de santeacute en

faveur notamment drsquoun cadre plus adapteacute le leacutegislateur srsquoest empareacute du sujet (b)

a) La reacuteponse des Archives de France

203 Crsquoest par le biais drsquoune instruction de 2005279

relative aux modaliteacutes de deacutelivrance du

visa drsquoeacutelimination des documents papiers transfeacutereacutes sur support numeacuterique ou micrographique

que les Archives de France ont apporteacute une premiegravere reacuteponse agrave la question du devenir du

papier numeacuteriseacute Cette instruction rappelait la neacutecessiteacute pour lrsquoadministration qui souhaitait

deacutetruire ses archives papiers avant la fin de leur dureacutee de conservation drsquoobtenir une

autorisation drsquoeacutelimination de la part de la direction deacutepartementale des archives et ce mecircme

277 Ordonnance ndeg 2017-29 du 12 janvier 2017 relative aux conditions de reconnaissance de la force probante des

documents comportant des donneacutees de santeacute agrave caractegravere personnel creacuteeacutes ou reproduits sous forme numeacuterique et

de destruction des documents conserveacutes sous une autre forme que numeacuterique JORF ndeg0011 du 13 janvier 2017

texte ndeg 21 278

Le nouvel article L 1111-26 du Code de la santeacute publique preacutevoit que laquo la copie numeacuterique drsquoun document

mentionneacute agrave lrsquoarticle L 1111-25 remplissant les conditions de fiabiliteacute preacutevues par le deuxiegraveme alineacutea de

lrsquoarticle 1379 du Code civil a la mecircme force probante que le document original sur support papier raquo 279

Instruction DITNDPACIRES2005001 du 14 janvier 2005 sur les modaliteacutes de deacutelivrance du visa

deacutelimination des documents papiers transfeacutereacutes sur support numeacuterique ou micrographique Archives de France

non publieacutee au JORF

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

120

si une copie a eacuteteacute reacutealiseacutee sur un autre support Cette instruction preacutecisait les cas (au nombre

de trois) dans lesquels cette autorisation pouvait ecirctre deacutelivreacutee Le premier cas concernait les

documents qui sont normalement eacuteliminables au terme de leur dureacutee drsquoutiliteacute administrative

Dans ce cas un visa drsquoeacutelimination anticipeacute pouvait ecirctre accordeacute Le deuxiegraveme cas concernait

les documents qui devaient ecirctre conserveacutes en totaliteacute et de maniegravere deacutefinitive au terme de

leur dureacutee drsquoutiliteacute administrative pour ces documents les documents papier une fois

numeacuteriseacutes pouvaient ecirctre verseacutes aux archives deacutepartementales de maniegravere anticipeacutee si leur

conservation posait laquo des problegravemes particuliegraverement aigus raquo agrave lrsquoadministration concerneacutee

Enfin si les documents concerneacutes eacutetaient normalement soumis au tri par eacutechantillonnage une

combinaison des deux preacuteceacutedentes regravegles devait alors srsquoappliquer une autorisation

drsquoeacutelimination anticipeacutee pouvait ecirctre deacutelivreacutee pour les documents normalement eacuteliminables agrave

terme tandis que lrsquoeacutechantillon retenu eacutetait conserveacute en version papier et pouvait ecirctre deacuteposeacute

aux archives deacutepartementales au besoin

204 Dans tous les cas lrsquoautorisation drsquoeacutelimination anticipeacutee devait ecirctre assortie de

recommandations Il eacutetait notamment recommandeacute agrave lrsquoadministration de reacutealiser avant

drsquoenvisager la destruction des archives papier une analyse juridique Celle-ci avait pour but

de deacuteterminer les potentiels besoins en matiegravere de preuve les risques de contentieux et donc

chercher agrave savoir si les copies numeacuteriseacutees qursquoelle souhaitait reacutealiser respectaient les critegraveres

neacutecessaires afin de conserver une valeur probante suffisante Les Archives de France

preacutecisaient que pour assurer une meilleure seacutecuriteacute juridique il pouvait eacuteventuellement ecirctre

neacutecessaire de conserver certaines archives papiers et ce jusqursquoagrave la fin de leur dureacutee drsquoutiliteacute

administrative Les Archives de France conseillaient enfin aux administrations qui

srsquoorientaient vers une numeacuterisation de lrsquoensemble de leurs archives papier de suivre une

proceacutedure rigoureuse garantissant la qualiteacute de leur deacutemarche

205 Plusieurs possibiliteacutes srsquooffraient alors aux administrations Celles-ci pouvaient

appliquer les principes poseacutes par Dominique PONSOT dans son rapport intituleacute laquo Valeur

juridique des documents conserveacutes sur support photographique ou numeacuterique raquo280

opeacuterer

dans un cadre systeacutematique crsquoest-agrave-dire traiter de la mecircme faccedilon tous les documents

appartenant agrave la mecircme cateacutegorie etou remplissant la mecircme fonction probatoire dater la copie

280 PONSOT Dominique laquo Valeur juridique des documents conserveacutes sur support photographique ou

numeacuterique raquo Rapport de septembre 1995 La Documentation franccedilaise p 37

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

121

srsquoassurer drsquoeffectuer une copie reproduisant le plus grand nombre de caracteacuteristiques

physiques du document (par exemple les annotations manuscrites) et enfin dans le but de se

preacute-constituer une preuve de lrsquoopeacuteration reacutealiseacutee preacutesenter de maniegravere preacutecise le processus de

numeacuterisation mis en place Les administrations pouvaient aussi srsquoinspirer de normes

existantes En la matiegravere on trouvait par exemple la norme AFNOR NF Z 42-013 intituleacutee laquo

recommandations relatives agrave la conception et agrave lrsquoexploitation de systegravemes informatiques en

vue drsquoassurer la conservation et lrsquointeacutegriteacute des documents stockeacutes dans ces systegravemes raquo

La suppression des archives papier qui auraient eacuteteacute numeacuteriseacutees eacutetait donc possible

Cependant les eacutetablissements publics de santeacute devaient rester prudents et reacutealistes face aux

exigences poseacutees par les Archives de France La loi de modernisation de notre systegraveme de

santeacute srsquoest depuis pencheacutee sur le sujet

b) Les apports de la loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute

206 Lrsquoarticle 204 de la loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute preacutevoyait la

possibiliteacute pour le gouvernement de leacutegifeacuterer par voie drsquoordonnance afin drsquo laquo encadrer les

conditions de destruction des dossiers meacutedicaux conserveacutes sous une autre forme que

numeacuterique quand ils ont fait lrsquoobjet drsquoune numeacuterisation et preacuteciser les conditions permettant

de garantir une valeur probante aux donneacutees et documents de santeacute constitueacutes sous forme

numeacuterique raquo Lrsquoordonnance en question a eacuteteacute adopteacutee en janvier 2017281

et vient ainsi

encadrer la destruction des documents papiers numeacuteriseacutes Ce texte insegravere au sein du Code de

la santeacute publique une nouvelle section intituleacutee laquo conditions de reconnaissance de force

probante des documents comportant des donneacutees de santeacute agrave caractegravere personnes creacuteeacutes ou

reproduits sous forme numeacuterique et de destruction des documents conserveacutes sous une autre

forme que numeacuterique raquo Ainsi il est deacutesormais possible laquo lorsqursquoune copie fiable a eacuteteacute

reacutealiseacutee raquo282

de deacutetruire un document original avant la fin de sa dureacutee leacutegale de conservation

A noter toutefois que pour les documents qui relegravevent du champ des archives publiques

lrsquoautorisation de destruction sera toujours soumise au visa de lrsquoadministration des archives

281 Ordonnance ndeg 2017-29 du 12 janvier 2017 relative aux conditions de reconnaissance de la force probante des

documents comportant des donneacutees de santeacute agrave caractegravere personnel creacuteeacutes ou reproduits sous forme numeacuterique et

de destruction des documents conserveacutes sous une autre forme que numeacuterique JORF ndeg0011 du 13 janvier 2017

texte ndeg 21 282

Article L 1111-26 du Code de la santeacute publique

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

122

Conclusion de la section

207 Mecircme informatiseacutees les donneacutees de santeacute conservent le statut drsquoarchives hospitaliegraveres

et agrave ce titre leur archivage doit respecter la reacuteglementation en la matiegravere et notamment les

dispositions du Code du patrimoine Ces regravegles ont des conseacutequences agrave la fois sur la gestion

de la vie courante des archives numeacuteriques mais eacutegalement en ce qui concerne leur eacuteventuelle

eacutelimination Nous pouvons par ailleurs regretter les difficulteacutes drsquointerpreacutetation de certaines

de ces regravegles qui sont parfois contradictoires avec les regravegles classiques relatives agrave la gestion

des donneacutees de santeacute telles que celles qui ont trait au secret meacutedical fragilisant ainsi la

seacutecuriteacute et la confidentialiteacute des donneacutees de santeacute

208 La conservation des donneacutees de santeacute informatiseacutees a fait quant agrave elle lrsquoobjet drsquoune

reacuteelle reacuteflexion de la part du leacutegislateur conscient des enjeux qui entourent la seacutecuriteacute et la

confidentialiteacute de ces donneacutees Cela a abouti aux diffeacuterents textes et reacutefeacuterentiels qui encadrent

et organisent aujourdrsquohui lrsquoheacutebergement des donneacutees de santeacute Ce cadre nrsquoest toutefois pas

parfait et certains ajustements permettraient drsquoen ameacuteliorer lrsquoefficaciteacute A lrsquoheure actuelle un

des enjeux essentiels de la conservation informatiseacutee des donneacutees de santeacute reste lrsquoadeacutequation

entre le deacuteveloppement de la technique et lrsquoencadrement juridique mis en place

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

123

Section 2 Heacutebergement et communication des donneacutees un cadre

limiteacute

209 Lrsquoanalyse des textes actuels encadrant lrsquoheacutebergement et la communication

eacutelectronique des donneacutees de santeacute nous amegravene agrave conclure que malheureusement ceux-ci se

montrent trop limiteacutes Drsquoune part le choix drsquoun heacutebergement externaliseacute des donneacutees de

santeacute amegravene les eacutetablissements agrave se poser plusieurs questions juridiques pas toutes reacutesolues

par le corpus de textes relatif agrave lrsquoheacutebergement agreacuteeacute (Paragraphe 1) Drsquoautre part

lrsquoencadrement actuel de la communication par voie eacutelectronique des donneacutees de santeacute nrsquoest

que partiellement en place et donc difficilement applicable (Paragraphe 2)

sect1 Lrsquoheacutebergement des donneacutees de santeacute un cadre incomplet

210 Lrsquoarticle L 1111-8 du Code de la santeacute publique compleacuteteacute par le deacutecret dit

heacutebergeur instaure un cadre strict relatif agrave lrsquoheacutebergement des donneacutees de santeacute Toutefois

la creacuteation et le deacuteveloppement de cette nouvelle activiteacute posent en pratique de nombreuses

questions qui ne sont pas directement reacutesolues par ces textes Ainsi le choix de lrsquoheacutebergeur

soulegraveve des probleacutematiques concregravetes qui ne peuvent ecirctre reacutesolues qursquoen faisant appel agrave

drsquoautres regravegles de droit (A) De mecircme agrave la lecture des textes encadrant lrsquoheacutebergement des

donneacutees de santeacute il est leacutegitime de se poser la question de la reacuteelle place accordeacutee au patient

et agrave ses droits (B)

A Choix de lrsquoheacutebergeur et questions en suspens

211 Aujourdrsquohui les eacutetablissements de santeacute peuvent faire le choix drsquoecirctre leur propre

heacutebergeur de donneacutees de santeacute ou de confier cette charge agrave un tiers Cependant les choses se

compliquent quand ce tiers est un autre eacutetablissement de santeacute (1) Par ailleurs si

lrsquoeacutetablissement fait le choix de confier ses donneacutees agrave un tiers il devra alors se soumettre agrave

drsquoautres regravegles en plus de celles strictement applicables agrave lrsquoheacutebergement externaliseacute des

donneacutees de santeacute (2)

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

124

1) Lrsquohypothegravese drsquoun eacutetablissement de santeacute heacutebergeur de donneacutees

212 Un eacutetablissement de santeacute qui choisirait drsquoecirctre son propre heacutebergeur de donneacutees nrsquoa

pas agrave obtenir drsquoagreacutement En effet lrsquoarticle L 1111-8 du Code de la santeacute publique est tregraves

clair agrave ce sujet et le peacuterimegravetre de lrsquoagreacutement (et agrave compter du 1er

janvier 2019 de la

certification) ne concerne que les cas dans lesquels les donneacutees ont eacuteteacute deacuteposeacutees aupregraves de

personnes tiers Mais quid dans le cas ougrave un eacutetablissement de santeacute heacutebergerait les donneacutees

drsquoun autre eacutetablissement ou un autre professionnel Cette hypothegravese existe par exemple dans

le cas de mise en place de reacuteseaux de teacuteleacutemeacutedecine En toute logique lrsquoeacutetablissement

devenant un tiers heacutebergeur devra donc reacutepondre aux obligations poseacutees par lrsquoarticle L 1111-

8 du Code de la santeacute publique ainsi que celles du deacutecret heacutebergeur Cependant une autre

question se pose alors celle de la possibiliteacute juridique pour un eacutetablissement de santeacute

drsquoassurer des missions de tiers heacutebergeur de donneacutees de santeacute En effet les eacutetablissements

publics de santeacute sont soumis au principe de speacutecialiteacute et sont donc tenus de limiter leurs

activiteacutes aux missions qui leur ont eacuteteacute fixeacutees par la loi Il ne leur est donc pas possible en

theacuteorie de sortir du champ de compeacutetence qui leur a eacuteteacute attribueacute Lrsquoheacutebergement de donneacutees

de santeacute drsquoautres eacutetablissements pourrait-il entrer dans les compeacutetences drsquoun eacutetablissement

public de santeacute

213 Les missions des eacutetablissements de santeacute sont preacutevues agrave lrsquoarticle L 6111-1 du Code de

la santeacute publique283

et lrsquoheacutebergement de donneacutees de santeacute pour le compte drsquoun autre

eacutetablissement public ou priveacute de santeacute ne fait pas partie de la liste exhaustive dresseacutee par

lrsquoarticle Toutefois lrsquoarticle L 6145-7 du Code de la santeacute publique preacutevoit quant agrave lui la

possibiliteacute pour un eacutetablissement public de santeacute sans porter atteinte au principe de speacutecialiteacute

drsquoeffectuer des prestations de service agrave titre subsidiaire Reste agrave savoir ce que recouvre cette

notion de prestation reacutealiseacute agrave titre subsidiaire

283 laquo Les eacutetablissements de santeacute publics priveacutes et priveacutes dinteacuterecirct collectif assurent dans les conditions preacutevues

par le preacutesent Code le diagnostic la surveillance et le traitement des malades des blesseacutes et des femmes

enceintes Ils deacutelivrent les soins avec heacutebergement sous forme ambulatoire ou agrave domicile le domicile pouvant

sentendre du lieu de reacutesidence ou dun eacutetablissement avec heacutebergement relevant du Code de laction sociale et

des familles Ils participent agrave la coordination des soins en relation avec les membres des professions de santeacute

exerccedilant en pratique de ville et les eacutetablissements et services meacutedico-sociaux dans le cadre deacutefini par lAgence

Reacutegionale de Santeacute en concertation avec les conseils geacuteneacuteraux pour les compeacutetences qui les concernent Ils

participent agrave la mise en œuvre de la politique de santeacute publique et des dispositifs de vigilance destineacutes agrave garantir

la seacutecuriteacute sanitaire Ils megravenent en leur sein une reacuteflexion sur leacutethique lieacutee agrave laccueil et la prise en charge

meacutedicale raquo

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

125

214 Le juge administratif est venu apporter quelques preacutecisions agrave ce sujet Dans une

deacutecision du 29 mars 2000 la Cour administrative drsquoappel de Nantes284

a consideacutereacute qursquoune

prestation de blanchisserie assureacutee par un eacutetablissement public de santeacute au profit drsquoune

clinique priveacutee nrsquoentrait pas dans les critegraveres de lrsquoarticle L 6145-7 du Code de la santeacute

publique degraves lors que lrsquoactiviteacute concerneacutee est sans rapport avec les missions deacutevolues aux

eacutetablissements de santeacute Pour le juge administratif une activiteacute exerceacutee agrave titre subsidiaire doit

donc obligatoirement constituer le prolongement drsquoune activiteacute principale drsquoun eacutetablissement

public de santeacute Certains auteurs voient dans cette jurisprudence lrsquoaffirmation selon laquelle

un eacutetablissement public de santeacute ne pourrait pas ecirctre heacutebergeur de donneacutees de santeacute

consideacuterant que lrsquoarticle L 1111-8 du Code de la santeacute publique laquo nrsquoavait pas pour but

drsquoouvrir un potentiel drsquoactiviteacute commercial aux eacutetablissements publics eux-mecircmes raquo285

215 Pourtant aujourdrsquohui plusieurs eacutetablissements de santeacute sont devenus heacutebergeurs

agreacuteeacutes de donneacutees de santeacute Crsquoest le cas par exemple du Centre Hospitalier Universitaire de

Nice qui a reccedilu trois agreacutements diffeacuterents pour lrsquoheacutebergement de donneacutees de santeacute Deux

drsquoentre eux concernent lrsquoutilisation drsquoune application informatique speacutecifique (les applications

e-nadis et Calliope) et le troisiegraveme concerne lrsquoexploitation et la gestion par le CHU drsquoune

plateforme technique sur laquelle sont heacutebergeacutees des applications de ses partenaires Les

Hospices Civils de Lyon sont eacutegalement agreacuteeacutes pour lrsquoheacutebergement drsquoapplications geacuterant des

donneacutees de santeacute agrave caractegravere personnel tout comme lrsquoAssistance Publique des Hocircpitaux de

Paris et lrsquoAssistance Publique des Hocircpitaux de Marseille Enfin le CHU de Nantes a quant agrave

lui reccedilu un agreacutement pour une activiteacute drsquoheacutebergement assez large puisqursquoil est agreacuteeacute pour

laquo une prestation drsquoheacutebergement drsquoapplications fournies par les clients et geacuterant des donneacutees

de santeacute agrave caractegravere personnel ainsi que pour une prestation drsquoheacutebergement de serveurs

contenant des donneacutees de santeacute agrave caractegravere personnel raquo286

Les eacutetablissements publics de

santeacute sont donc en train de deacutevelopper une reacuteelle activiteacute drsquoheacutebergement de donneacutees de santeacute

216 De notre point de vue il semble raisonnable drsquoenvisager la possibiliteacute pour les

eacutetablissements publics de santeacute de deacutevelopper ce type drsquoactiviteacute En effet ce sont bien les

eacutetablissements de santeacute qui sont les plus agrave mecircme de prendre en compte agrave la fois les

284 CAA Nantes 29 mars 2000 Centre Hospitalier de Morlaix ndeg 97NT00451

285 MARZOUG Sanaa laquo Lrsquoheacutebergement des donneacutees de santeacute agrave caractegravere personnel des eacutetablissements de

santeacute quelques repegraveres juridiques raquo Actualiteacutes JuriSanteacute ndeg 74 2011 p 5 286

Description disponible sur le site de lrsquoASIP santeacute [httpesantegouvfr] consulteacute le 2 mars 2017

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

126

contraintes techniques et juridiques qui les entourent mais eacutegalement de concilier les besoins

des professionnels de santeacute avec la confidentialiteacute et la seacutecuriteacute dus aux donneacutees de santeacute des

patients De plus une interpreacutetation plus souple de lrsquoarticle L 6111-1 du Code de la santeacute

publique permet drsquoenvisager lrsquoheacutebergement des donneacutees de santeacute comme eacutetant le

prolongement direct de la mission principale des eacutetablissements publics de santeacute qursquoest le

diagnostic la surveillance et le traitement des malades des blesseacutes et des femmes enceintes

Les eacutetablissements de santeacute ne peuvent pas ou ne souhaitent pas heacuteberger de donneacutees

de santeacute disposent drsquoautres solutions soumises au respect preacutealable de certaines conditions

2) Quelles conditions pour le choix du tiers heacutebergeur

217 Si un eacutetablissement de santeacute fait le choix de confier ses donneacutees de santeacute agrave un tiers

heacutebergeur il devra alors respecter les regravegles du droit des marcheacutes publics (a) Lrsquoeacutetablissement

de santeacute doit eacutegalement savoir qursquoil lui sera possible de coopeacuterer avec drsquoautres eacutetablissements

dans ce cadre (b)

a) Lrsquoobligation drsquoun marcheacute public

218 Lrsquoheacutebergement des donneacutees de santeacute constitue une prestation de service reacutealiseacutee agrave titre

oneacutereux soumise agrave la conclusion drsquoun contrat entre lrsquoeacutetablissement ou le professionnel de

santeacute et lrsquoheacutebergeur de donneacutees Degraves lors dans le cas drsquoun contrat conclu entre un prestataire

heacutebergeur de donneacutees de santeacute et un eacutetablissement public de santeacute la prestation tombe sous le

coup des marcheacutes publics287

Ainsi en la matiegravere ce sont les dispositions de lrsquoordonnance ndeg

2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marcheacutes publics288

et du deacutecret ndeg 2016-360 du 25

mars 2016 relatif aux marcheacutes publics qui vont trouver agrave srsquoappliquer289

Contrairement agrave

certains auteurs290

nous consideacuterons que la prestation drsquoheacutebergement de donneacutees de santeacute doit

ecirctre vue comme une prestation de service informatique A ce titre plusieurs solutions vont

alors srsquooffrir aux eacutetablissements de santeacute Soit le marcheacute porte sur une somme en-deccedilagrave des

seuils europeacuteens fixeacutes par le regraveglement ndeg 20152170 et 20152171 du 24 novembre 2015 de

287 Articles 4 et 5 de lrsquoordonnance ndeg 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marcheacutes publics JORF ndeg0169 du

24 juillet 2015 p 12602 (Anciens articles 1 et 2 du Code des marcheacutes publics abrogeacute au 1er

avril 2016) 288

Ordonnance ndeg 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marcheacutes publics JORF ndeg0169 du 24 juillet 2015 p

12602 289

Deacutecret ndeg 2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marcheacutes publics JORF ndeg0074 du 27 mars 2016 texte ndeg 28 290

MARZOUG Sanaa laquo Lrsquoheacutebergement des donneacutees de santeacute agrave caractegravere personnel des eacutetablissements de

santeacute quelques repegraveres juridiques raquo op cit p 5

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

127

la commission modifiant respectivement les directives 201424UE et 201425UE du 26

feacutevrier 2014291

dans ce cas il est possible pour lrsquoeacutetablissement de recourir agrave une proceacutedure

adapteacutee deacutecrite lrsquoarticle 42 3deg de lrsquoordonnance de 2015 relative aux marcheacutes publics et agrave

lrsquoarticle 27 du deacutecret de 2016 relatif aux marcheacutes publics Au-delagrave de ce seuil il sera

neacutecessaire pour lrsquoeacutetablissement de recourir agrave une proceacutedure formaliseacutee parmi les proceacutedures

suivantes la proceacutedure dappel doffres292

la proceacutedure concurrentielle avec neacutegociation293

la

proceacutedure neacutegocieacutee avec mise en concurrence preacutealable294

et la proceacutedure de dialogue

compeacutetitif295

219 A titre drsquoexemple lrsquoavis public drsquoappel agrave la concurrence lanceacute par lrsquoASIP santeacute au

sujet de lrsquoheacutebergement du DMP en 2009 avait respecteacute la proceacutedure de lrsquoappel drsquooffre

europeacuteen et avait fait lrsquoobjet drsquoune publication au Bulletin Officiel des Annonces des

Marcheacutes Publics (BOAMP)296

et au Journal officiel de lrsquoUnion Europeacuteenne (JOUE)297

Une

hypothegravese existe toutefois dans laquelle un eacutetablissement public nrsquoaura pas agrave se soumettre aux

regravegles des marcheacutes publics celle drsquoune coopeacuteration avec drsquoautres eacutetablissements sur le sujet

b) Les possibiliteacutes de coopeacuteration

220 Lrsquoheacutebergement de ses donneacutees de santeacute repreacutesente pour un eacutetablissement de santeacute un

coucirct non neacutegligeable Une solution qui leur est ouverte est alors de coopeacuterer sur ce sujet avec

drsquoautres eacutetablissements afin de mutualiser les coucircts et les risques Drsquoailleurs lrsquoinformatique

est depuis longtemps une source de coopeacuterations fructueuses entre les eacutetablissements de

santeacute Il nous faut envisager drsquoabord les formes que pourrait prendre une telle coopeacuteration

avant drsquoeacutetudier ensuite les conseacutequences en termes drsquoobligations juridiques notamment pour

ces coopeacuterations Les eacutetablissements publics de santeacute qui souhaiteraient coopeacuterer dans le

cadre de lrsquoheacutebergement de leurs donneacutees de santeacute auront le choix drsquoune coopeacuteration

291 Ces seuils applicables depuis le 1er janvier 2016 sont fixeacutes agrave 209 000 euros hors taxes pour les marcheacutes de

fournitures courantes et services des eacutetablissements publics de santeacute 292

Proceacutedure par laquelle leacutetablissement va choisir loffre eacuteconomiquement la plus avantageuse sans

neacutegociation sur la base de critegraveres objectifs preacutealablement porteacutes agrave la connaissance des candidats 293

Proceacutedure par laquelle lrsquoeacutetablissement va neacutegocier les conditions du marcheacute public avec un ou plusieurs

opeacuterateurs eacuteconomiques 294

Proceacutedure par laquelle lrsquoeacutetablissement va neacutegocier les conditions du marcheacute public avec un ou plusieurs

opeacuterateurs eacuteconomiques 295

Proceacutedure dans laquelle lrsquoeacutetablissement va ecirctre ameneacute agrave dialoguer avec les candidats admis agrave participer agrave la

proceacutedure en vue de deacutefinir ou deacutevelopper les solutions de nature agrave reacutepondre agrave ses besoins et sur la base

desquelles ces candidats sont inviteacutes agrave remettre une offre 296

Reacutefeacuterence 09-219810 BOAMP ndeg198B Annonce ndeg 573 297

JOUE 2009S 198-28 5000

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

128

conventionnelle ou drsquoune coopeacuteration organique La solution de la coopeacuteration

conventionnelle doit ecirctre rapidement mise de cocircteacute pour des raisons qui ont trait agrave la fois au

principe de speacutecialiteacute298

et aux regravegles applicables en matiegravere de marcheacutes publics299

En effet

un contrat de coopeacuteration agrave titre oneacutereux passeacute entre deux ou plusieurs eacutetablissements publics

de santeacute risquerait drsquoecirctre requalifieacute en contrat de prestation300

ce qui serait alors en

opposition avec le principe de speacutecialiteacute auquel doivent obeacuteir les eacutetablissements publics de

santeacute De mecircme une coopeacuteration conventionnelle agrave titre oneacutereux entre un eacutetablissement

public de santeacute et un eacutetablissement priveacute de santeacute au sein de laquelle lrsquoeacutetablissement priveacute

heacutebergerait les donneacutees de santeacute de lrsquoeacutetablissement public pourrait ecirctre requalifieacutee en contrat

de prestation Il serait alors reprocheacute agrave lrsquoeacutetablissement public de santeacute de ne pas srsquoecirctre soumis

aux regravegles du Code des marcheacutes publics pour choisir son prestataire

221 La coopeacuteration organique semble donc ecirctre la solution la plus adapteacutee Srsquoouvre alors

pour les eacutetablissements publics de santeacute une large palette de structures agrave sa disposition Pour

notre eacutetude nous choisirons de nous concentrer sur trois structures qui nous semblent les plus

pertinentes au vue de leur objet potentiel

222 Les eacutetablissements vont pouvoir srsquoorienter drsquoabord vers le Groupement de

Coopeacuteration Sanitaire (GCS) de moyens Cet outil de coopeacuteration particuliegraverement appreacutecieacute

des eacutetablissements preacutesente lrsquoavantage de pouvoir faire coopeacuterer des eacutetablissements publics

priveacutes et mecircme des professionnels de santeacute Selon le Code de la santeacute publique301

le GCS de

moyens a pour objet de faciliter de deacutevelopper ou dameacuteliorer lactiviteacute de ses membres et

peut ecirctre constitueacute pour laquo organiser ou geacuterer des activiteacutes administratives logistiques

techniques meacutedico-techniques denseignement ou de recherche reacutealiser ou geacuterer des

eacutequipements dinteacuterecirct commun il peut le cas eacutecheacuteant ecirctre titulaire agrave ce titre de

lautorisation dinstallation deacutequipements mateacuteriels lourds mentionneacutee agrave larticle L 6122-1

permettre les interventions communes de professionnels meacutedicaux et non meacutedicaux exerccedilant

dans les eacutetablissements ou centres de santeacute membres du groupement ainsi que des

298 V Supra ndeg 212 agrave 216

299 V Supra ndeg 218 agrave 219

300 DE LARD Brigitte laquo Heacutebergement de donneacutees et coopeacuteration raquo Actualiteacutes JuriSanteacute ndeg 74 2011 p 7

301 Article L6133-1 du Code de la santeacute publique

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

129

professionnels libeacuteraux membres du groupement raquo La mutualisation de lrsquoheacutebergement de

donneacutees de santeacute semble donc ecirctre une activiteacute pouvant ecirctre porteacutee par un GCS de moyens

223 Le Groupement drsquoInteacuterecirct Public (GIP) est eacutegalement une solution de coopeacuteration

organique pour les eacutetablissements Il srsquoagit drsquoune personne morale de droit public reacutegie par le

chapitre II de la loi ndeg011-525 du 17 mai 2011 de simplification et drsquoameacutelioration de la

qualiteacute du droit302

Un GIP peut ecirctre constitueacute entre plusieurs personnes morales publiques ou

entre des personnes morales publiques et des personnes morales priveacutees Il a pour objet

drsquoexercer des activiteacutes dinteacuterecirct geacuteneacuteral agrave but non lucratif les membres du GIP mettant en

commun les moyens neacutecessaires agrave leur exercice Initialement conccedilu pour une dureacutee limiteacutee la

loi de 2011 est venue modifier cette particulariteacute Deacutesormais le GIP peut ecirctre agrave dureacutee

deacutetermineacutee ou indeacutetermineacute La dureacutee doit ecirctre preacuteciseacutee au sein de la convention constitutive

Le GIP semble ecirctre un outil adapteacute agrave la coopeacuteration entre eacutetablissements de santeacute dans le but

drsquoheacuteberger des donneacutees de santeacute

224 Enfin le Groupement drsquoInteacuterecirct Economique (GIE) est eacutegalement une solution de

coopeacuteration envisageable celui-ci pouvant ecirctre creacuteeacute entre des personnes morales de droit

priveacute et public Lrsquoobjet principal drsquoun GIE est de faciliter ou de deacutevelopper lrsquoactiviteacute

eacuteconomique de ses membres Son but nrsquoest toutefois pas de reacutealiser des beacuteneacutefices pour lui-

mecircme Dans le domaine sanitaire le GIE a principalement pour objet drsquoacqueacuterir ou de geacuterer

des eacutequipements drsquointeacuterecirct commun (bloc opeacuteratoire scanner) de mutualiser des moyens

humains locaux mateacuteriels ou de fournir aux eacutetablissements des prestations ou services

auxiliaires agrave leurs activiteacutes respectives Comme le GIP le GIE a en theacuteorie une dureacutee de vie

limiteacutee il faudra donc que les eacutetablissements qui choisissent cette forme de coopeacuteration y

soient vigilants

Une fois la structure de coopeacuteration creacuteeacutee celle-ci devra bien eacutevidemment se plier aux

exigences du deacutecret heacutebergeur et donc obtenir un agreacutement A lrsquoheure actuelle huit agreacutements

302 Loi ndeg 2011-525 du 17 mai 2011 de simplification et dameacutelioration de la qualiteacute du droit JORF ndeg 0115 du

18 mai 2011 p 8537

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

130

ont eacuteteacute deacutelivreacutes agrave six structures diffeacuterentes de coopeacuterations (un GIE deux GCS un GIP et

deux SIH303

)

B Quelle place laisseacutee au respect du droit des patients

225 Lrsquointeacuterecirct principal des textes encadrant lrsquoheacutebergement des donneacutees de santeacute par des

tiers est bien entendu de proteacuteger la seacutecuriteacute et la confidentialiteacute de ces donneacutees et donc par

la mecircme occasion les inteacuterecircts des patients concerneacutes par ces donneacutees Toutefois une lecture

preacutecise des textes nous permet de constater que le droit des patients et notamment son droit

au consentement (1) nrsquoest pas particuliegraverement proteacutegeacute Le rocircle de meacutedecin de lrsquoheacutebergeur

reste cependant un rempart contre les atteintes agrave la confidentialiteacute des donneacutees (2)

1) La disparition progressive du consentement

226 Le consentement du patient eacutetait initialement un eacuteleacutement obligatoire en amont de tout

heacutebergement aupregraves drsquoun tiers (a) Mais les diffeacuterentes modifications de lrsquoarticle L 1111-8 du

Code de la santeacute publique ont transformeacute ce principe en exception (b) avant de le faire

totalement disparaitre (c)

a) Le consentement eacuteleacutement initialement essentiel agrave lrsquoheacutebergement

227 En matiegravere de soins le consentement du patient est un eacuteleacutement fondamental Le Code

de deacuteontologie meacutedicale rappelle drsquoailleurs ce principe304

et la loi du 4 mars 2002 lrsquoa eacuterigeacute en

droit essentiel du patient305

En matiegravere de protection des donneacutees personnelles faisant lrsquoobjet

drsquoun traitement automatiseacute et plus particuliegraverement dans le cas des donneacutees de santeacute la loi

Informatique et Liberteacutes a fait du consentement de la personne concerneacutee par les donneacutees une

condition sine qua non du traitement Nous avons toutefois pu constater que ce principe

comporte de nombreuses exceptions sur lesquelles nous ne reviendrons pas306

303 Les Syndicats Inter-Hospitalier sont des structures de coopeacuterations qui ont eacuteteacute supprimeacutees par la loi HPST

Les coopeacuterations qui prenaient cette forme doivent deacutesormais eacutevoluer vers une autre forme juridique 304

Article R4127-36 du Code de la santeacute publique

305 Article L 1111-4 du Code de la santeacute publique

306 V Supra ndeg 230

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

131

228 Quand il a introduit en 2002 la possibiliteacute pour un eacutetablissement ou un professionnel

de santeacute drsquoheacuteberger les donneacutees de santeacute qursquoil collecte aupregraves drsquoun tiers agreacuteeacute le leacutegislateur

nrsquoa pas oublieacute la notion de consentement du patient En effet lrsquoarticle L 1111-8 du Code de

la santeacute publique preacutevoyait la neacutecessiteacute drsquoobtenir preacutealablement agrave lrsquoexternalisation de

lrsquoheacutebergement le consentement expregraves du patient Drsquoailleurs dans les premiegraveres versions de

lrsquoarticle ce critegravere strict ne souffrait drsquoaucune exception307

On devine ici une reacuteelle volonteacute

de la part du leacutegislateur de srsquoassurer que le patient reste bien informeacute des conditions de

conservation des donneacutees de santeacute le concernant A ce titre le leacutegislateur nrsquoexigeait pas un

consentement tacite de la part du patient mais bien un consentement expregraves Cela impliquait

donc un veacuteritable travail drsquoinformation et de recueil du consentement de la part de

lrsquoeacutetablissement ou du professionnel de santeacute En pratique le respect de cette obligation

pouvait ecirctre assureacute soit par lrsquoheacutebergeur lui-mecircme soit par lrsquoeacutetablissement ou le professionnel

de santeacute qui choisissait de deacuteposer ses donneacutees par le biais drsquoun report contractuel de

lrsquoobligation Cependant ce principe a vite souffert drsquoexceptions avant de totalement

disparaicirctre

b) Le consentement du principe agrave lrsquoexception

229 La loi ndeg2007-127 du 30 janvier 2007308

en son article 25 III eacutetait venue introduire

une exception agrave cette obligation stricte du consentement expregraves en ajoutant agrave lrsquoarticle L

1111-8 du Code de la santeacute publique la mention suivante laquo les professionnels et

eacutetablissements de santeacute peuvent par deacuterogation aux dispositions de la derniegravere phrase des

deux premiers alineacuteas du preacutesent article utiliser leurs propres systegravemes ou des systegravemes

appartenant agrave des heacutebergeurs agreacuteeacutes sans le consentement expregraves de la personnes concerneacutee

degraves lors que lrsquoaccegraves deacutetenu est limiteacute au professionnel de santeacute ou agrave lrsquoeacutetablissement de santeacute

qui les a deacuteposeacutes ainsi qursquoagrave la personne concerneacutee dans les conditions preacutevues par lrsquoarticle

L 1111-7 raquo

230 Le leacutegislateur avait ainsi dans un premier temps restreint lrsquoobligation de

consentement aux seuls cas dans lesquels les donneacutees collecteacutees seraient ameneacutees agrave ecirctre

partageacutees entre plusieurs eacutetablissements ou professionnels de santeacute Cette disposition

307 Ceci nrsquoest plus le cas aujourdrsquohui V Infra ndeg 232

308 Loi ndeg 2007-127 du 30 janvier 2007 ratifiant lordonnance ndeg 2005-1040 du 26 aoucirct 2005 relative agrave

lorganisation de certaines professions de santeacute et agrave la reacutepression de lusurpation de titres et de lexercice illeacutegal

de ces professions et modifiant le Code de la santeacute publique JORF ndeg27 du 1 feacutevrier 2007 p 1937

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

132

deacuterogatoire a constitueacute une veacuteritable remise en question de lrsquoimportance accordeacutee au

consentement du patient puisque dans les faits elle est devenue la regravegle applicable En effet

lrsquoexception preacutevue par le leacutegislateur recouvrait la majoriteacute des cas drsquoheacutebergements des

donneacutees de santeacute A titre drsquoexemple le dossier meacutedical drsquoun eacutetablissement public de santeacute

nrsquoa pas pour vocation agrave ecirctre partageacute agrave lrsquoexteacuterieur Degraves lors on pouvait consideacuterer que lrsquoaccegraves

aux donneacutees de santeacute eacutetait bien limiteacute agrave lrsquoeacutetablissement de santeacute qui les avait deacuteposeacutees et le

consentement des patients preacutealable agrave lrsquoheacutebergement aupregraves drsquoun tiers nrsquoeacutetait donc pas

neacutecessaire

Comme si cette disposition nrsquoeacutetait pas suffisante le leacutegislateur est venu en 2011

amoindrir de nouveau la porteacutee du consentement du patient dans ce contexte En effet une

disposition de la loi Fourcade modifiant la loi HPST309

eacutetait venue preacuteciser que les

eacutetablissements de santeacute qui souhaitaient confier lrsquoheacutebergement de leurs donneacutees de santeacute sur

support papier agrave des tiers agreacuteeacutes pouvaient se dispenser du consentement expregraves preacutealable si

ces donneacutees avaient eacuteteacute collecteacutees avant le 10 aoucirct 2011 date de la promulgation de la loi Le

leacutegislateur avait introduit ici une sorte de dispense geacuteneacuterale de consentement qui touchait en

pratique des quantiteacutes extrecircmement importantes de donneacutees personnelles de santeacute Au final

laquo la valeur du consentement de la personne agrave lrsquoheacutebergement de ses donneacutees fait deacutefaut

comme eacutemousseacutee au fur et agrave mesure des textes raquo310

231 Il nous semble que le leacutegislateur avait souhaiteacute simplifier pour les eacutetablissements de

santeacute et les professionnels une proceacutedure qui srsquoinscrivait deacutejagrave dans un environnement

technique et juridique complexe Drsquoailleurs le fait que cette disposition soit apparue cinq ans

apregraves la disposition relative agrave lrsquoheacutebergement agreacuteeacute des donneacutee de santeacute montrait bien que le

leacutegislateur nrsquoavait pas dans un premier temps mesureacute totalement lrsquoimpact drsquoune telle

exigence Certains auteurs ont critiqueacute cette quasi-neacutegation du consentement du patient en

contradiction avec les principes fondateurs de la loi Informatique et Liberteacutes Pourtant

lrsquoeacutevolution reacutecente de lrsquoarticle L 1111-8 du Code de la santeacute publique a fait disparaitre le

consentement du patient

c) La disparition du consentement au profit de la non opposition

309 Loi ndeg 2009-879 du 21 juillet 2009 portant reacuteforme de lhocircpital et relative aux patients agrave la santeacute et aux

territoires JORF ndeg 0167 du 22 juillet 2009 p 12184 310

ZORN-MACREZ Caroline laquo Donneacutees de santeacute et secret partageacute raquo PUN 2010 p 299

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

133

232 Le comiteacute drsquoagreacutement des heacutebergeurs dans son second rapport drsquoactiviteacute311

publieacute en

septembre 2014 srsquoeacutetait interrogeacute sur lrsquointeacuterecirct du recueil preacutealable du consentement du patient

avant la mise en place drsquoun heacutebergement externaliseacute Pour le comiteacute il eacutetait leacutegitime de poser

la question de la neacutecessite de laquo solenniser lrsquoaccord du patient pour lrsquoheacutebergement de ses

donneacutees alors que le leacutegislateur a mis en place au moyen de la proceacutedure drsquoagreacutement des

garanties fortes de seacutecuriteacute et de confidentialiteacute raquo312

Il preacuteconisait ainsi dans son rapport une

eacutevolution des textes sur ce point le recueil du consentement du patient eacutetant en pratique

difficile agrave respecter La loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute a dans son article 96

fait disparaitre de maniegravere deacutefinitive cette exigence au profit drsquoune non opposition

Deacutesormais lrsquoheacutebergement est reacutealiseacute laquo apregraves que la personne prise en charge en a eacuteteacute ducircment

informeacutee et sauf opposition de sa part pour un motif leacutegitime raquo Le leacutegislateur va donc ici

assez loin car le patient dont le consentement nrsquoest plus rechercheacute ne pourra de fait srsquoopposer

agrave lrsquoheacutebergement externaliseacute de ses donneacutees qursquoen avanccedilant un motif leacutegitime non deacutefini par

le texte

2) Le meacutedecin de lrsquoheacutebergeur garant du respect de la confidentialiteacute des donneacutees

233 Le deacutecret heacutebergeur vient introduire une nouvelle fonction celle du meacutedecin de

lrsquoheacutebergeur Selon lrsquoarticle R 1111-9 du Code de la santeacute publique ce meacutedecin est une des

personnes laquo en charge de lrsquoactiviteacute drsquoheacutebergement raquo Cette notion reste toutefois assez floue

et le leacutegislateur nrsquoapporte aucun renseignement sur les missions qui lui seraient deacutevolues

Drsquoailleurs dans son second rapport drsquoactiviteacute le Comiteacute drsquoagreacutement des heacutebergeurs preacuteconise

une intervention du leacutegislateur afin de deacutefinir clairement le rocircle du meacutedecin de lrsquoheacutebergeur

mais eacutegalement fournir un cadre reacuteglementaire preacutecis agrave lrsquoaccegraves aux donneacutees de santeacute

heacutebergeacutees par ce meacutedecin313

234 laquo Rouage important de la politique de confidentialiteacute de lrsquoheacutebergeur raquo314

il apparait

clairement que le rocircle principal du meacutedecin de lrsquoheacutebergeur consiste agrave srsquoassurer drsquoune part du

respect de la confidentialiteacute des donneacutees et drsquoautre part du droit des personnes concerneacutees

311 Rapport drsquoactiviteacute 2012-2013 du comiteacute drsquoagreacutement des heacutebergeurs disponible sur [httpesantegouvfr]

Consulteacute le 15 mai 2017 312

Rapport drsquoactiviteacute 2012-2013 du comiteacute drsquoagreacutement des heacutebergeurs disponible sur [httpesantegouvfr]

Consulteacute le 15 mai 2017 p 20 313

Id p 23 314

Livre blanc de lrsquoassociation franccedilaise des heacutebergeurs agreacuteeacutes de donneacutees de santeacute 2014 p 27

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

134

par les donneacutees qursquoelle deacutetiennent aux termes de la loi Informatique et Liberteacutes Selon

Philippe BICLET le Preacutesident du Comiteacute drsquoagreacutement des heacutebergeurs cette fonction a

eacutegalement eacuteteacute mise en place afin que laquo le secret professionnel soit proteacutegeacute lorsqursquoune

intervention humaine est neacutecessaire agrave lrsquooccasion du traitement des donneacutees ce qui est par

exemple le cas en cas drsquoincident informatique ou agrave lrsquooccasion de la restitution des donneacutees agrave

un patient ou agrave ses ayants-droits raquo315

Le Comiteacute drsquoagreacutement des heacutebergeurs a eacutegalement

preacuteciseacute les missions de ce meacutedecin de lrsquoheacutebergeur Ainsi dans son rapport drsquoactiviteacute 2006-

2011316

on apprend qursquoil peut eacutegalement ecirctre saisi afin de proceacuteder agrave certaines veacuterifications

de coheacuterence dans lrsquohypothegravese drsquoune suspicion de collision ou de doublon dans les dossiers

meacutedicaux Selon lrsquoassociation franccedilaise des heacutebergeurs agreacuteeacutes des donneacutees de santeacute ce

meacutedecin est eacutegalement tenu drsquoinsuffler une culture de la seacutecuriteacute et de la protection des

donneacutees au sein de lrsquoentreprise

235 Le meacutedecin devra bien eacutevidemment signer un contrat avec lrsquoheacutebergeur afin drsquoencadrer

son intervention Lrsquoembauche agrave temps complet drsquoun meacutedecin semble difficilement

envisageable317

et lrsquoheacutebergeur optera plutocirct pour un contrat du type prestation de service de

vacation ou encore de mise agrave disposition Dans tous les cas il est neacutecessaire de veiller agrave ce

que le meacutedecin conserve son indeacutependance deacuteontologique vis-agrave-vis de lrsquoheacutebergeur Le

Conseil National de lrsquoOrdre des Meacutedecins (CNOM) a eacutelaboreacute un modegravele de contrat type qursquoil

met agrave disposition sur son site Internet318

Lrsquointeacuterecirct principal de ce modegravele reacuteside dans la

preacutecision qui est faite des missions deacutevolues au meacutedecin de lrsquoheacutebergeur De mecircme son

indeacutependance professionnelle est rappeleacutee Il est eacutegalement preacutevu une clause afin drsquoeacuteviter

drsquoeacuteventuels conflits drsquointeacuterecircts Ainsi le meacutedecin de lrsquoheacutebergeur ne pourra ecirctre salarieacute ou

exeacutecuter des prestations de service pour le compte de personnes agrave lrsquoorigine des donneacutees de

santeacute heacutebergeacutees ou pour le compte des personnes concerneacutees par ces donneacutees Cette clause

permet drsquoeacuteviter par exemple qursquoun praticien hospitalier ait accegraves agrave lrsquoensemble des donneacutees

que son eacutetablissement fait heacuteberger de par son rocircle de meacutedecin heacutebergeur accegraves qursquoil nrsquoaurait

pas eu dans le cadre de son activiteacute normale et en application des regravegles en matiegravere de secret

partageacute Enfin il est preacutevu la communication du contrat au Conseil de lrsquoordre des meacutedecins

315 BICLET Philippe laquo Heacutebergement et eacutechange des donneacutees de santeacute raquo meacutedecine et droit 2010 pp 159-160

316 Rapport drsquoactiviteacute 2006-2011 du comiteacute drsquoagreacutement des heacutebergeurs p 19

317 ZORN-MACREZ Caroline laquo Donneacutees de santeacute et secret partageacute raquo op cit p 297

318 Modegravele disponible sur [httpswwwconseil-nationalmedecinfr] Consulteacute le 4 mai 2017

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

135

Le Comiteacute drsquoAgreacutement des Heacutebergeurs dans son premier rapport drsquoactiviteacute a regretteacute

lrsquoabsence dans ce contrat type drsquoobligation drsquoalerte aupregraves drsquoorganismes externes en cas de

deacutecouverte drsquoun manquement agrave la confidentialiteacute ceci ayant pu constituer une garantie

suppleacutementaire

sect2 La construction laborieuse du cadre relatif agrave la communication des

donneacutees de santeacute

236 La communication des donneacutees de santeacute par voie eacutelectronique reacutepond agrave des regravegles

strictes eacutedicteacutees par diffeacuterents textes successifs Cependant ce cadre preacutesente plusieurs

lacunes qui rendent son application difficile (A) Par ailleurs certaines exigences poseacutees par

la reacuteglementation applicable semblent contestables (B)

A La communication des donneacutees de santeacute des prescriptions difficilement

applicables en lrsquoeacutetat

237 Les dispositions reacutegissant les modaliteacutes de communication par voie eacutelectronique des

donneacutees de santeacute restent muettes sur certains points pourtant essentiels (1) En outre agrave lrsquoheure

actuelle des reacutefeacuterentiels neacutecessaires agrave la bonne application de ce cadre ne sont toujours pas

parus (2)

1) Des questions en suspens

238 Lrsquoarticle L 1110-4-1 du Code de la santeacute publique introduit par la loi de

modernisation de notre systegraveme de santeacute preacutevoit qursquo laquo afin de garantir la qualiteacute et la

confidentialiteacute des donneacutees de santeacute agrave caractegravere personnel et leur protection les

professionnels de santeacute les eacutetablissements et services de santeacute les heacutebergeurs de donneacutees de

santeacute agrave caractegravere personnel et tout autre organisme participant agrave la preacutevention aux soins ou

au suivi meacutedico-social et social utilisent pour leur traitement leur conservation sur support

informatique et leur transmission par voie eacutelectronique des systegravemes dinformation

conformes aux reacutefeacuterentiels dinteropeacuterabiliteacute et de seacutecuriteacute eacutelaboreacutes par le groupement

dinteacuterecirct public mentionneacute agrave larticle L 1111-24 Ces reacutefeacuterentiels sont approuveacutes par arrecircteacute

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

136

du ministre chargeacute de la santeacute pris apregraves avis de la Commission nationale de linformatique

et des liberteacutes raquo

239 Toutefois le texte ne preacutecise pas si ces dispositions srsquoappliquent seulement aux

eacutechanges entre professionnels de santeacute ou eacutegalement aux eacuteventuels envois de documents

meacutedicaux entre professionnels de santeacute et patients Or il est neacutecessaire de se poser la

question En effet les patients disposent drsquoun droit agrave la communication de leur dossier

meacutedical Actuellement cette communication se fait par le biais de copies du dossier papier ou

drsquoune copie sur CD du dossier informatiseacute Toutefois la question srsquoest poseacutee reacutecemment de

savoir srsquoil eacutetait possible de communiquer un dossier meacutedical informatiseacute au patient par

courrier eacutelectronique Cette question a fait lrsquoobjet drsquoun avis de la Commission drsquoAccegraves aux

Documents Administratifs (CADA) qui selon nous preacutesente quelques limites

240 En lrsquoespegravece un patient avait demandeacute au Centre Hospitalier Universitaire (CHU) que

certains eacuteleacutements de son dossier meacutedical lui soient communiqueacutes et ce par courrier

eacutelectronique Le Directeur Geacuteneacuteral du CHU lui avait reacutepondu qursquoil eacutetait disposeacute agrave lui

communiquer ces eacuteleacutements sous toute autre forme Pour justifier sa reacuteponse le Directeur

Geacuteneacuteral soulignait que la deacutelibeacuteration CNIL ndeg 97-008 du 4 feacutevrier 1997319

preacuteconisait que

seules les messageries seacutecuriseacutees et recourant au chiffrement des donneacutees puissent ecirctre

utiliseacutees pour transfeacuterer des donneacutees meacutedicales nominatives En conseacutequence le Directeur

Geacuteneacuteral de lrsquoeacutetablissement qui nrsquoeacutetait pas assureacute que la messagerie du patient eacutetait

suffisamment seacutecuriseacutee avait estimeacute dans une optique de protection de la seacutecuriteacute et de la

confidentialiteacute des donneacutees que la communication du dossier ne pouvait avoir lieu par ce

biais Le patient a donc saisi la CADA drsquoune demande drsquoavis La Commission dans un avis

rendu le 25 juillet 2013320

a pour sa part consideacutereacute que cette deacutelibeacuteration de la CNIL eacutetait

reacutedigeacutee dans des termes non impeacuteratifs et concernait les transferts de donneacutees meacutedicales entre

professionnels de santeacute Elle ne pouvait donc pas ecirctre invoqueacutee pour faire obstacle agrave la

communication drsquoun dossier meacutedical agrave un patient par courrier eacutelectronique Elle a cependant

estimeacute qursquoil eacutetait neacutecessaire pour lrsquoeacutetablissement de santeacute drsquoavertir le patient des risques que

preacutesente cette modaliteacute de communication De mecircme elle a consideacutereacute que lrsquoeacutetablissement

319 Deacutelibeacuteration portant adoption dune recommandation sur le traitement des donneacutees de santeacute agrave caractegravere

personnel ndeg 97-008 du 04 feacutevrier 1997 320

Avis de la CADA ndeg 20131540 du 25 juillet 2013

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

137

pouvait tout agrave fait chiffrer les donneacutees qursquoil serait ameneacute agrave communiquer par ce biais si ses

possibiliteacutes techniques le lui permettent

241 Cet avis est agrave notre sens critiquable En effet nous ne comprenons pas ce qui

justifierait de faire une diffeacuterence entre donneacutees transmises aux professionnels de santeacute ou

donneacutees transmises aux patients Dans lrsquoabsolu les donneacutees de santeacute doivent ecirctre proteacutegeacutees le

plus strictement possible et en toutes circonstances Degraves lors il nous parait difficile

drsquoenvisager un encadrement de la communication par voie informatique des donneacutees de santeacute

qui serait diffeacuterent selon la personne agrave qui les donneacutees sont transmises Face aux risques

existants en cas drsquoutilisation drsquoune messagerie non crypteacutee nous estimons qursquoun simple

rappel aux patients des risques encourus nrsquoest pas suffisant Avant drsquoaccorder une telle

possibiliteacute il est donc neacutecessaire qursquoune technologie suffisamment seacutecuriseacutee et notamment les

messageries crypteacutees se deacuteveloppent

2) Des reacutefeacuterentiels non parus

242 Jusqursquoagrave lrsquoadoption de la loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute crsquoest le deacutecret

du 15 mai 2007 dit deacutecret confidentialiteacute321

qui imposait pour tout professionnel

eacutetablissement ou reacuteseau de santeacute le respect de reacutefeacuterentiels deacutefinis par arrecircteacute et pris apregraves avis

de la CNIL dans lrsquohypothegravese drsquoune conservation ou de la transmission par voie eacutelectronique

de donneacutees de santeacute De mecircme depuis les modifications apporteacutees par la loi de modernisation

de notre systegraveme de santeacute lrsquoarticle L 1110-4-1 du Code de la santeacute publique nouvellement

creacuteeacute preacutevoit lui aussi la neacutecessiteacute pour les professionnels de santeacute et eacutetablissements qui

souhaiteraient eacutechanger des donneacutees de santeacute par voie eacutelectronique de respecter certains

reacutefeacuterentiels de seacutecuriteacute publieacutes par arrecircteacute322

Cependant agrave lrsquoheure actuelle aucun reacutefeacuterentiel

nrsquoa eacuteteacute publieacute Certains reacutefeacuterentiels agrave la porteacutee plus geacuteneacuterale ont bien eacuteteacute adopteacutes par le

leacutegislateur Ainsi le Reacutefeacuterentiel Geacuteneacuteral de Seacutecuriteacute (RGS) a eacuteteacute creacuteeacute par lrsquoarticle 9 de

321 Deacutecret ndeg 2007-960 du 15 mai 2007 relatif agrave la confidentialiteacute des informations meacutedicales conserveacutees sur

support informatique ou transmises par voie eacutelectronique et modifiant le Code de la santeacute publique (dispositions

reacuteglementaires) JORF ndeg113 du 16 mai 2007 p 9362 322

Lrsquoarticle L 1110-4-1 du Code de la santeacute publique preacutevoit laquo afin de garantir la qualiteacute et la confidentialiteacute

des donneacutees de santeacute agrave caractegravere personnel et leur protection les professionnels de santeacute les eacutetablissements et

services de santeacute les heacutebergeurs de donneacutees de santeacute agrave caractegravere personnel et tout autre organisme participant

agrave la preacutevention aux soins ou au suivi meacutedico-social et social utilisent pour leur traitement leur conservation

sur support informatique et leur transmission par voie eacutelectronique des systegravemes dinformation conformes aux

reacutefeacuterentiels dinteropeacuterabiliteacute et de seacutecuriteacute eacutelaboreacutes par le groupement dinteacuterecirct public mentionneacute agrave larticle L

1111-24 Ces reacutefeacuterentiels sont approuveacutes par arrecircteacute du ministre chargeacute de la santeacute pris apregraves avis de la

Commission nationale de linformatique et des liberteacutes raquo

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

138

lrsquoordonnance ndeg 2005-1516 du 8 deacutecembre 2005 relative aux eacutechanges eacutelectroniques entre les

usagers et les autoriteacutes administratives323

La version initiale du RGS (v10) a eacuteteacute rendue

officielle par arrecircteacute du Premier Ministre en date du 6 mai 2010 Une version 20 a eacuteteacute publieacutee

par arrecircteacute du Premier Ministre du 13 juin 2014 applicable depuis le 1er

juillet 2014 Selon

lrsquoAgence Nationale de Seacutecuriteacute de Systegravemes drsquoInformation (ANSSI) ce reacutefeacuterentiel permet

pour une autoriteacute administrative laquo de garantir aux citoyens et aux autres administrations que

le niveau de seacutecuriteacute de ses systegravemes drsquoinformation est bien adapteacute aux enjeux et aux risques

et qursquoil est harmoniseacute avec ceux de ses partenaires raquo Toutefois il nous semble que le

leacutegislateur dans sa reacutedaction du deacutecret confidentialiteacute entendait faire adopter des reacutefeacuterentiels

speacutecifiques aux eacutechanges de donneacutees de santeacute En effet le texte preacutecise bien qursquoil doit srsquoagir

de reacutefeacuterentiels laquo eacutelaboreacutes par le groupement dinteacuterecirct public mentionneacute agrave larticle L 1111-

24 raquo agrave savoir lrsquoASIP santeacute Le RGS bien qursquoeacutetant une possibiliteacute drsquoorientation pour les

eacutetablissements publics ne constitue donc pas le reacutefeacuterentiel de seacutecuriteacute tel que deacutefini par le

deacutecret confidentialiteacute

243 LrsquoASIP santeacute pour sa part srsquoest attacheacutee agrave reacutediger un reacutefeacuterentiel drsquointeropeacuterabiliteacute324

des systegravemes drsquoinformation en santeacute Celui-ci est disponible sur son site Internet au sein drsquoun

espace de publication appeleacute Reacutepertoire National des Reacutefeacuterentiels (RNR) Au sein de ce

reacutepertoire les eacutetablissements de santeacute peuvent consulter le Cadre drsquoInteropeacuterabiliteacute des

Systegravemes drsquoInformation de Santeacute (CI-SIS) Ce reacutefeacuterentiel a pour ambition afficheacutee de creacuteer

laquo les conditions drsquoune interopeacuterabiliteacute reproductible et efficiente entre SI de santeacute dans le

respect des exigences de seacutecuriteacute et de confidentialiteacute des donneacutees personnelles de santeacute raquo325

Le CI-SIS speacutecifie les standards qursquoil est preacutefeacuterable drsquoutiliser dans le cadre drsquoeacutechanges et de

partages de donneacutees de santeacute entre systegravemes drsquoinformations de santeacute LrsquoASIP Santeacute propose

ainsi tout un eacuteventail de documentation agrave ce sujet adapteacute aux speacutecificiteacutes de certaines

activiteacutes Toutefois ces reacutefeacuterentiels nrsquoont pas eacuteteacute publieacutes de maniegravere officielle et srsquoils restent

des documents de reacutefeacuterences pour les eacutetablissements et professionnels de santeacute ils ne leur

323 Ordonnance ndeg 2005-1516 du 8 deacutecembre 2005 relative aux eacutechanges eacutelectroniques entre les usagers et les

autoriteacutes administratives et entre les autoriteacutes administratives JORF ndeg 286 du 9 deacutecembre 2005 p 18986 324

Lrsquointeropeacuterabiliteacute des systegravemes de dossiers informatiseacutes est deacutefinie par la commission europeacuteenne comme

laquo la capaciteacute de plusieurs systegravemes de dossiers informatiseacutes de santeacute drsquoeacutechanger aussi bien des donneacutees

exploitables par un ordinateur que des informations et des connaissances demandant une intervention

humaine raquo Recommandation ndeg 2008594CE de la commission europeacuteenne du 2 juillet 2008 sur

lrsquointeropeacuterabiliteacute transfrontaliegravere des systegravemes de dossiers informatiseacutes de santeacute JOUE L 190 du 18 juillet 2008 325

Disponible sur [httpesantegouvfr] Consulteacute le 2 mai 2017

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

139

sont pas opposables juridiquement326

Mecircme srsquoil est vrai que ces reacutefeacuterentiels doivent ecirctre

constitueacutes par les acteurs compeacutetents agrave savoir lrsquoASIP Santeacute en lien avec les partenaires

industriels il est neacutecessaire de donner une force juridique agrave ces documents afin drsquoencadrer et

de seacutecuriser les pratiques des eacutetablissements et des professionnels de santeacute

B Lrsquoutilisation systeacutematique de la carte de professionnel de santeacute une

utopie abandonneacutee

244 Lapplication des regravegles relatives au partage des donneacutees ne pose pas reacuteellement de

problegraveme quand il sagit pour deux professionnels deacutechanger oralement Lexercice se

complique degraves lors que lutilisation des TIC entre en jeu En effet il va ecirctre neacutecessaire de

srsquoassurer que la personne qui cherche agrave acceacuteder agrave des donneacutees en a le droit Le professionnel

de santeacute va donc devoir srsquoidentifier puis srsquoauthentifier Il sagit ici de deux actions diffeacuterentes

une premiegravere au cours de laquelle le professionnel va deacutecliner son identiteacute et une autre qui va

permettre au professionnel de laquo prouver raquo quil est bien celui quil preacutetend ecirctre Afin de

reacutealiser ces deux actions le leacutegislateur a preacutevu dans un premier lrsquoutilisation obligatoire et

systeacutematique de la Carte de Professionnel de santeacute (CPS)327

ou drsquoun dispositif dit

eacutequivalent328

Drsquoabord mise en place pour lauthentification des professionnels de santeacute dans

le cadre de la transmission deacutemateacuterialiseacutee des feuilles de soin son utilisation a donc eacuteteacute

eacutelargie329

agrave toutes les transmissions de donneacutees de santeacute par voie eacutelectronique Il srsquoagit en

326 Ces reacutefeacuterentiels sont disponibles en ligne sur le site Internet de lrsquoASIP santeacute [httpesantegouvfr]

327 Article R 1110-3 du Code de la santeacute publique laquo en cas daccegraves par des professionnels de santeacute aux

informations meacutedicales agrave caractegravere personnel conserveacutees sur support informatique ou de leur transmission par

voie eacutelectronique lutilisation de la carte de professionnel de santeacute mentionneacutee au dernier alineacutea de larticle L

161-33 du Code de la seacutecuriteacute sociale est obligatoire raquo 328

Lrsquoarticle L 1110-4 du Code de la santeacute publique dans sa reacutedaction applicable jusqursquoau 28 janvier 2016

preacutevoyait qursquo laquo afin de garantir la confidentialiteacute des informations meacutedicales mentionneacutees aux alineacuteas

preacuteceacutedents leur conservation sur support informatique comme leur transmission par voie eacutelectronique entre

professionnels sont soumises agrave des regravegles deacutefinies par deacutecret en Conseil dEtat pris apregraves avis public et motiveacute

de la Commission nationale de linformatique et des liberteacutes Ce deacutecret deacutetermine les cas ougrave lutilisation de la

carte de professionnel de santeacute mentionneacutee au dernier alineacutea de larticle L 161-33 du Code de la seacutecuriteacute

sociale ou un dispositif eacutequivalent agreacuteeacute par lorganisme chargeacute deacutemettre la carte de professionnel de santeacute est

obligatoire La carte de professionnel de santeacute et les dispositifs eacutequivalents agreacuteeacutes sont utiliseacutes par les

professionnels de santeacute les eacutetablissements de santeacute les reacuteseaux de santeacute ou tout autre organisme participant agrave

la preacutevention et aux soins raquo 329

Article L 161-33 al3 du Code de la seacutecuriteacute sociale laquo dans le cas de transmission eacutelectronique par les

professionnels organismes ou eacutetablissements dispensant des actes ou prestations remboursables par lassurance

maladie lidentification de leacutemetteur son authentification et la seacutecurisation des eacutechanges sont assureacutees par une

carte eacutelectronique individuelle appeleacutee carte de professionnel de santeacute Le contenu les modaliteacutes de deacutelivrance

et dutilisation de cette carte sont fixeacutes par deacutecret en Conseil dEtat apregraves avis de la Commission nationale

informatique et liberteacutes raquo

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

140

pratique drsquoune carte contenant les donneacutees didentification de son porteur ainsi que ses

conditions dexercice et lui permettant ainsi de sauthentifier et de signer eacutelectroniquement les

diffeacuterentes opeacuterations quil effectue (par exemple la reacutedaction dun compte rendu

dhospitalisation) Drsquoabord geacutereacutee par le GIP-CPS cette carte est actuellement distribueacutee par

lAgence des Systegravemes dInformation Partageacutees en santeacute (ASIP santeacute)330

Ce dispositif permet

indeacuteniablement drsquoassurer la seacutecuriteacute neacutecessaire aux donneacutees de santeacute Cependant plusieurs

beacutemols peuvent ecirctre apporteacutes agrave son utilisation obligatoire

245 Drsquoabord drsquoun point de vue pratique selon les chiffres de lASIP Santeacute sur les 1 178

271 cartes actives de la famille des cartes de professionnels (CPS et autres cartes eacutequivalents

diffuseacutees par lrsquoASIP santeacute) seulement 325 789 ont eacuteteacute distribueacutees au sein des eacutetablissements

de santeacute331

Cette diffeacuterence srsquoexplique notamment gracircce agrave lrsquohistorique de cette carte En effet

au vu de son objet initial cette carte est peu connue du monde hospitalier et son

deacuteveloppement au sein des eacutetablissements de santeacute est aujourdrsquohui difficile pour des raisons agrave

la fois techniques mais eacutegalement drsquohabitude En eacutetablissement de santeacute cette obligation

drsquoutiliser de maniegravere systeacutematique une carte de professionnel de santeacute ou dispositif

eacutequivalent est donc compliqueacute Par ailleurs en instaurant lrsquoutilisation obligatoire de la CPS

pour la transmission de donneacutees de santeacute par voie eacutelectronique par des professionnels de

santeacute le deacutecret confidentialiteacute a en reacutealiteacute eacutelargi le champ drsquoapplication initial de lrsquoarticle L

161-33 du Code de la seacutecuriteacute sociale qui ne preacutevoyait lrsquoutilisation de cette carte que dans les

cas de la transmission eacutelectronique des feuilles de soins deacutemateacuterialiseacutees agrave lrsquoassurance maladie

246 Le deacutecret confidentialiteacute acte reacuteglementaire a donc eacutelargi le champ drsquoutilisation de la

CPS initialement preacutevu par la loi332

Or un deacutecret ne doit pas venir modifier le champ

drsquoapplication de la loi mais simplement en deacutefinir les modaliteacutes drsquoapplication Nous sommes

donc ici face agrave un deacutecret qui eacutetait en reacutealiteacute contraire agrave la loi Ceci relegraveve comme le souligne agrave

juste titre Caroline ZORN-MACREZ drsquoune pratique contra legem333

En cela les obligations

du deacutecret eacutetaient donc inapplicables

330Arrecircteacute du 12 octobre 2009 portant approbation de la modification de la convention constitutive du

Groupement drsquoInteacuterecirct Public laquo Carte de Professionnel de Santeacute raquo JORF du 17 octobre 2009 A compter de

novembre 2009 le GIP-CPS a inteacutegreacute lrsquoASIP santeacute 331

Chiffres disponibles sur [httpesantegouvfr] consulteacutes le 1er mars 2017 332

ZORN-MACREZ Caroline laquo Donneacutees de santeacute et secret partageacute raquo op cit p 269 333

Id p 269 laquo cette situation illustre parfaitement les deacutebordements drsquoune pratique reacuteglementaire ultra legem

laquelle dissimule une pratique veacuteritablement contra legem raquo

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

141

247 Ces difficulteacutes ont eacuteteacute reacutegleacutees par lrsquoarticle 96 de la loi de modernisation de notre

systegraveme de santeacute qui supprime purement et simplement lrsquoexigence de lrsquoutilisation de la CPS

ou drsquoun dispositif eacutequivalent pour la transmission de donneacutees de santeacute par voie eacutelectronique

Cette mention a donc disparu de lrsquoarticle L 1110-4 du Code de la santeacute publique qui preacutevoit

deacutesormais qursquolaquo afin de garantir la qualiteacute et la confidentialiteacute des donneacutees de santeacute agrave

caractegravere personnel et leur protection les professionnels de santeacute les eacutetablissements et

services de santeacute les heacutebergeurs de donneacutees de santeacute agrave caractegravere personnel et tout autre

organisme participant agrave la preacutevention aux soins ou au suivi meacutedico-social et social utilisent

pour leur traitement leur conservation sur support informatique et leur transmission par voie

eacutelectronique des systegravemes dinformation conformes aux reacutefeacuterentiels dinteropeacuterabiliteacute et de

seacutecuriteacute eacutelaboreacutes par le groupement dinteacuterecirct public mentionneacute agrave larticle L 1111-24 Ces

reacutefeacuterentiels sont approuveacutes par arrecircteacute du ministre chargeacute de la santeacute pris apregraves avis de la

Commission nationale de linformatique et des liberteacutes raquo

248 Or agrave ce jour et comme nous avons pu le constater preacuteceacutedemment ces reacutefeacuterentiels

nrsquoont toujours pas eacuteteacute publieacutes et les dispositions du deacutecret confidentialiteacute applicables

preacuteceacutedemment et codifieacutes aux article R 1110-1 agrave R 1110-4 du Code de la santeacute publique ont

eacuteteacute remplaceacutes par des dispositions inteacutegreacutees par le deacutecret du 20 juillet 2016 relatif aux

conditions drsquoeacutechange et de partage drsquoinformations entre professionnels de santeacute et autres

professionnels des champs social et meacutedico-social et agrave laccegraves aux informations de santeacute agrave

caractegravere personnel334

Lrsquoencadrement de la transmission par voie informatique des donneacutees

de santeacute demeure donc aujourdrsquohui inabouti

334 Deacutecret ndeg 2016-994 du 20 juillet 2016 relatif aux conditions deacutechange et de partage dinformations entre

professionnels de santeacute et autres professionnels des champs social et meacutedico-social et agrave laccegraves aux informations

de santeacute agrave caractegravere personnel JORF ndeg0169 du 22 juillet 2016 texte ndeg 21

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

142

Conclusion de la section

249 Bien que preacutesentant certaines lacunes le deacutecret heacutebergeur et lrsquoensemble de

lrsquoencadrement et des proceacutedures relatives agrave lrsquoheacutebergement des donneacutees de santeacute aupregraves drsquoun

tiers permettent drsquoassurer la seacutecuriteacute neacutecessaire agrave ces donneacutees Par ailleurs la reacutecente

reacutenovation du cadre de lrsquoheacutebergement des donneacutees de santeacute permet de simplifier les

deacutemarches preacutealables qui srsquoimposent aux heacutebergeurs leur apportant plus de souplesse et de

reacuteactiviteacute

250 En ce qui concerne la communication des donneacutees de santeacute en revanche bien que le

leacutegislateur ait tenteacute drsquoencadrer strictement la communication par voie eacutelectronique des

donneacutees de santeacute force est de constater qursquoil a malheureusement eacutechoueacute Car mecircme si lrsquoideacutee

initiale eacutetait tregraves inteacuteressante lrsquoapplication nrsquoa pas suivi De plus lrsquoobligation drsquoutiliser de

maniegravere systeacutematique la carte de professionnel de santeacute a eacuteteacute abandonneacutee reacutecemment par le

leacutegislateur mais aucune alternative nrsquoa eacuteteacute proposeacutee

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

143

Conclusion du chapitre

251 Les donneacutees de santeacute dont la collecte la conservation et la communication sont

essentielles agrave la bonne prise en charge des patients se doivent drsquoecirctre suffisamment proteacutegeacutees

Leur vie de lrsquoarchivage agrave la destruction en passant par la communication est en theacuteorie

strictement encadreacutee par un ensemble de regravegles juridiques eacutepars Les donneacutees de santeacute

produites par les eacutetablissements publics de santeacute ont le statut drsquoarchives publiques De ce fait

le Code du patrimoine reacutegit leur conservation ainsi que leur destruction Mais la particulariteacute

de ces donneacutees font qursquoelles sont eacutegalement soumises agrave drsquoautres regravegles plus preacutecises

notamment en matiegravere de secret meacutedical Et crsquoest lagrave qursquoapparaissent les premiegraveres lacunes des

textes qui vont parfois entrer en contradiction Lrsquointroduction des TIC dans la pratique

meacutedicale implique une difficulteacute suppleacutementaire puisqursquoil faut deacutesormais conserver et

archiver des donneacutees de santeacute informatiseacutees

252 Malheureusement le leacutegislateur en deacutepit de ses efforts nrsquoa pas reacuteellement su faire

face agrave lrsquoarriveacutee massive des TIC et agrave lrsquoinformatisation croissante des donneacutees de santeacute Bien

que leur heacutebergement aupregraves drsquoun tiers soit correctement encadreacute le deacutecret confidentialiteacute

censeacute reacuteglementer la communication eacutelectronique des donneacutees a failli agrave sa mission et est

resteacute inapplicable Aujourdrsquohui le leacutegislateur au travers de la loi de modernisation de notre

systegraveme de santeacute et de ses textes drsquoapplication a supprimeacute les dispositions du deacutecret

confidentialiteacute Cependant agrave lrsquoheure actuelle aucune disposition ne les remplace et la

communication des donneacutees de santeacute est soumise au respect de reacutefeacuterentiels qui nrsquoont toujours

pas eacuteteacute agrave ce jour publieacutes

145

Conclusion du titre

253 Lrsquoeacutetude des modaliteacutes juridiques de lrsquoinformatisation des donneacutees de santeacute agrave lrsquohocircpital

nous a conduit agrave constater que le cadre juridique applicable se reacutevegravele complexe agrave appreacutehender

Regravegles de droit commun regravegles speacutecifiques et exceptions aux regravegles se superposent et ce

cadre peut parfois devenir illisible Il faut dire que le leacutegislateur a la lourde tacircche de proteacuteger

ces donneacutees particuliegraverement sensibles tout en permettant aux eacutetablissements et aux

professionnels de santeacute de mener agrave bien leurs missions Un juste eacutequilibre doit donc ecirctre

trouveacute A lrsquoheure actuelle lrsquoencadrement juridique de la naissance la communication la

conservation et la destruction des donneacutees de santeacute informatiseacutees fait lrsquoobjet de textes eacutepars

Certains drsquoentre eux ont montreacute leurs limites et le leacutegislateur srsquoemploie agrave moderniser un cadre

parfois trop rigide

Lrsquoinformatisation des donneacutees de santeacute nrsquoest qursquoune partie du rocircle joueacute par les TIC

dans la pratique meacutedicale et leur utilisation dans la prise en charge du patient a pris une place

importante Il nous apparait alors neacutecessaire de srsquoarrecircter sur le cadre juridique qui permet

aujourdrsquohui une telle utilisation

TITRE 2

TIC ET PRISE EN CHARGE MEDICALE UN

CADRE EN EVOLUTION

148

laquo Favoriser la coordination des professionnels de santeacute et leur coopeacuteration eacutetroite pour

ameacuteliorer la prise en charge des malades tel est le but de lrsquoutilisation des TIC [hellip] raquo335

254 Lrsquoutilisation des TIC dans la pratique meacutedicale ne se limite pas agrave lrsquoinformatisation des

donneacutees de santeacute Au contraire celle-ci nrsquoest qursquoune eacutetape permettant le deacuteveloppement de la

deacutemateacuterialisation de la prise en charge du patient et en la matiegravere les possibiliteacutes techniques

sont nombreuses Ces derniegraveres anneacutees ont vu se deacutevelopper de nombreuses initiatives en ce

sens Cependant une fois encore les possibiliteacutes techniques doivent ecirctre mises au regard de

lrsquointeacuterecirct du patient et la protection de ses droits et un juste eacutequilibre doit ecirctre trouveacute

255 Dans le but drsquoameacuteliorer la coordination et la qualiteacute des soins et dans la suite logique

de lrsquoinformatisation des donneacutees de santeacute les dossiers meacutedicaux deacutemateacuterialiseacutes et partageacutes se

sont deacuteveloppeacutes Si la plupart drsquoentre eux relegravevent du reacutegime de droit commun le leacutegislateur

a creacuteeacute un laquo reacutegime speacutecifique exorbitant de droit commun raquo336

au Dossier Meacutedical Partageacute

(DMP) Le deacuteveloppement de ce type de dossier repreacutesente une premiegravere eacutetape dans la

deacutemateacuterialisation de la prise en charge du patient (Chapitre premier) sur laquelle il nous faut

nous attarder Mais les TIC permettent eacutegalement drsquoenvisager une prise en charge agrave distance

des patients bousculant ainsi les codes et les regravegles en place depuis de nombreuses anneacutees en

la matiegravere Une eacutetude du cadre juridique naissant de cette pratique nous apparait alors

neacutecessaire (chapitre second)

335 FIESCHI Marius laquo Les donneacutees du patient partageacutees la culture du partage et de la qualiteacute des informations

pour ameacuteliorer la qualiteacute des soins raquo rapport au ministre de la santeacute de la famille et des personnes handicapeacutees

janvier 2003 p 8 336

ZORN-MACREZ Caroline laquo Donneacutees de santeacute et secret partageacute raquo PUN p 305

149

Chapitre 1

La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux

lrsquoexemple du DMP

256 Depuis plusieurs anneacutees maintenant les rapports officiels se multiplient au sujet de

lrsquoutilisation des TIC dans le domaine de la santeacute et plus speacutecifiquement dans le cadre de la

mise en place de dossiers informatiseacutes Le but ultime est bien entendu la creacuteation drsquoun

dossier informatiseacute partageacute un outil permettant de favoriser une meilleure coordination des

professionnels une ameacutelioration de la qualiteacute de la prise en charge et donc un meilleur eacutetat de

santeacute global

257 Les eacutetablissements de santeacute ont deacutejagrave depuis plusieurs dizaines drsquoanneacutees commenceacute

lrsquoinformatisation de leur dossier meacutedical Celle-ci se fait de maniegravere progressive et les

eacutetablissements de santeacute ne sont pas tous agrave lrsquoheure actuelle au mecircme stade de deacuteveloppement

Lrsquoinformatisation complegravete drsquoun dossier meacutedical demande en effet du temps mais eacutegalement

des moyens agrave la fois financiers et humains Lrsquoeacutevolution technologique doit par ailleurs ecirctre

accompagneacutee par une bonne gestion manageacuteriale de la conduite du changement

258 Il apparait eacutevident que les enjeux de lrsquoinformatisation du dossier meacutedical sont

importants (ameacutelioration de la prise en charge du patient meilleure coordination outil plus

facile drsquoaccegraves hellip) et ceux-ci deacutepassent les portes de lrsquohocircpital Le recueil la conservation et le

partage de donneacutees issues du soin agrave un niveau reacutegional voire national font partie des

preacuteoccupations des pouvoirs publics depuis plus de dix ans Ainsi face aux succegraves de certains

de nos voisins europeacuteens et deacutecideacute agrave mettre en place un dossier partageacute unique le leacutegislateur

est venu creacuteer en 2004 le Dossier Meacutedical Partageacute (DMP) (Section I) Depuis ce dossier et

surtout son encadrement juridique nrsquoont cesseacute drsquoeacutevoluer pour tenter de faire face aux eacutechecs

et aux critiques que le projet subi (Section II)

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

150

Section 1 Le DMP un Dossier meacutedical eacutelectronique institutionnel

259 Alors que les projets drsquoinformatisation des dossiers meacutedicaux se deacuteveloppent au sein

des eacutetablissements de santeacute et ce de faccedilon plutocirct disparate chaque eacutetablissement eacutetant libre de

choisir comment il va organiser du point de vue pratique et technique lrsquoinformatisation de son

dossier meacutedical le leacutegislateur a fait le pari en 2004 de lancer un dossier informatiseacute partageacute

entre tous les professionnels de santeacute ameneacutes agrave prendre en charge un mecircme patient

Lrsquooriginaliteacute du projet reacuteside dans le fait que ce dossier peut eacutegalement ecirctre consulteacute

directement par le patient

260 Toutefois perdu dans la masse de lrsquoensemble des dossiers meacutedicaux eacutelectroniques

qui se deacuteveloppent il est parfois difficile drsquoenvisager quelle est la place du DMP (Paragraphe

1) Drsquoailleurs cela nrsquoest pas eacutetranger au fait que depuis sa creacuteation son cadre juridique eacutevolue

de maniegravere heacutesitante (Paragraphe 2)

sect1 La place incertaine du DMP dans le champ des dossiers meacutedicaux

261 DME DMI DMP DP Les acronymes sont aujourdrsquohui nombreux et il devient

difficile de se retrouver dans le champ des diffeacuterentes acceptions du dossier meacutedical Et il est

tout autant difficile de reacuteussir agrave deacutelimiter la place et le rocircle deacutedieacutes au DMP dans cet ensemble

disparate

Pour reacuteussir cet exercice il est neacutecessaire de srsquoessayer dans un premier temps agrave

deacutelimiter les contours et le cadre juridique qui serait applicable aux dossiers meacutedicaux

eacutelectroniques terme finalement le plus geacuteneacuteral et le plus englobant qui reacuteunit lrsquoensemble des

diffeacuterents dossiers informatiseacutes (A) Cet exercice termineacute il nous sera neacutecessaire de tenter

drsquoarticuler les diffeacuterents dossiers entre eux afin de chercher agrave savoir dans quelle mesure ils se

complegravetent etou sont redondants (B) Cela aura pour but principal bien sucircr de chercher agrave

savoir ougrave se situe le DMP dans le paysage des dossiers meacutedicaux

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

151

A Tentative de deacutelimitation du cadre juridique des DME

262 Terme couramment utiliseacute notamment par les professionnels des systegravemes

drsquoinformation hospitaliers le Dossier Meacutedical Electronique (DME) nrsquoest pourtant pas

juridiquement deacutefini de maniegravere claire Or il est facile de se perdre dans les meacuteandres des

deacutenominations diverses qui existent actuellement pour deacutesigner le dossier meacutedical Ainsi

pour nous eacuteclairer agrave ce sujet il est neacutecessaire de tenter de deacutelimiter les contours du DME (2) agrave

la lumiegravere des diffeacuterentes formes que peut prendre le dossier meacutedical (1)

1) Le dossier meacutedical un dossier aux formes multiples

263 Bien que le dossier meacutedical soit un outil deacutesormais solidement ancreacute dans les pratiques

des professionnels de santeacute celui-ci ne dispose pas de reacuteelle deacutefinition juridique En effet il

nrsquoest finalement deacutefini que par le biais de son contenu ou de ses modes drsquoaccegraves et de

communication337

Or il existe agrave lrsquoheure actuelle un nombre important de dossiers diffeacuterents

qui contiennent des donneacutees meacutedicales de patients et qui sont utiliseacutes pour leur suivi Pour

reprendre les propos de Philippe BICLET laquo derriegravere le terme geacuteneacuterique de dossier meacutedical

se cachent des reacutealiteacutes bien diffeacuterentes raquo338

264 Dossier de suivi meacutedical dossier hospitalier dossier patient dossier meacutedical

informatiseacute dossier meacutedical personnel dossier pharmaceutique dossier de reacuteseau les

deacutenominations sont aujourdrsquohui nombreuses et il est parfois difficile de clairement identifier

de quel outil il srsquoagit Or pour mieux appreacutehender le DME et le DMP il nous semble

important de deacutelimiter drsquoabord les contours de ces diffeacuterents dossiers Pour ce faire nous

faisons le choix de concentrer nos travaux sur les seuls dossiers ayant un encadrement

juridique preacutecis En effet comme nous le verrons plusieurs deacutenominations regroupent en

reacutealiteacute la mecircme chose

265 Drsquoun point de vue strictement juridique quatre types de dossiers existent reacuteellement

Le plus connu ou tout du moins le mieux identifieacute en pratique est le dossier meacutedical dont le

337 GIOCANTI Dominique laquo Les diffeacuterentes acceptions des termes dossier meacutedical et dans ce contexte

situation du dossier hospitalier raquo RGDM ndeg 37 2010 p 164 338

BICLET Philippe laquo Le dossier meacutedical dans tous ses eacutetats raquo Meacutedecine et droit 2006 p 174

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

152

contenu est deacutefini agrave lrsquoarticle R 1112-2 du Code de la santeacute publique339

et obligatoirement

preacutesent dans les eacutetablissements de santeacute publics ou priveacutes Ce dossier est couramment appeleacute

dossier hospitalier340

En reacutealiteacute il nrsquoexiste pas de texte qui le deacutefinisse juridiquement

Toutefois par le jeu des diffeacuterents articles deacutefinissant agrave la fois son contenu a minima (article

R 1112-2 du Code de la santeacute publique) ou les moyens de sa communication au patient

(article L 1111-7 du Code de la santeacute publique) il nous est possible drsquoen dresser les contours

Il apparait ainsi que ce dossier a eacuteteacute conccedilu par le leacutegislateur pour ecirctre le plus large possible et

contenir lrsquoensemble des informations meacutedicales drsquoun patient qui ont pu ecirctre collecteacutees agrave

lrsquooccasion de son seacutejour en eacutetablissement de santeacute Drsquoailleurs les autres dossiers de

professionnels se doivent drsquoecirctre regroupeacutes en son sein (crsquoest le cas par exemple du dossier

drsquoanestheacutesie ou encore du dossier de soins infirmiers) A noter que lrsquoarticle R 1112-2 preacutevoit

que le contenu eacutenonceacute est un contenu a minima Ainsi les eacutetablissements restent libres

drsquoajouter drsquoautres eacuteleacutements typiques de leur organisation interne par exemple pour compleacuteter

ce dossier Cela explique la diversiteacute actuelle qui existe en matiegravere drsquoorganisation des dossiers

meacutedicaux

266 Lrsquoarticle 45 du Code de deacuteontologie meacutedicale codifieacute agrave lrsquoarticle R 4127-45 du Code

de la santeacute publique vient pour sa part imposer agrave chaque meacutedecin la tenue drsquoune fiche

drsquoobservation pour chaque patient Celle-ci est strictement personnelle au meacutedecin et doit

ecirctre reacutedigeacutee indeacutependamment du laquo dossier de suivi meacutedical preacutevu par la loi raquo Il srsquoagit en

reacutealiteacute drsquoun dossier de suivi qui avait eacuteteacute instaureacute par la Convention Nationale des meacutedecins

suite agrave la loi du 18 janvier 1994341

Toutefois agrave lrsquoheure actuelle ceci nrsquoest plus une

obligation342

Aucun formalisme nrsquoest preacutevu par la loi concernant ces notes et il nrsquoest pas

rare encore aujourdrsquohui que celles-ci soient tenues par les meacutedecins sur de simples fiches

cartonneacutees sans reacuteelle organisation Comme le souligne agrave juste titre le Professeur Marius

FIESCHI dans son rapport343

ce type de dossier meacutedical prend plutocirct la forme drsquoun dossier

339 Article R 1112-2 du Code de la santeacute publique laquo un dossier meacutedical est constitueacute pour chaque patient

hospitaliseacute dans un eacutetablissement de santeacute public ou priveacute raquo 340

V en ce sens GIOCANTI Dominique laquo Les diffeacuterentes acceptions des termes laquo dossier meacutedical raquo et dans ce

contexte situation du dossier hospitalier raquo op cit VEILLEROT Guy laquo Le dossier hospitalier raquo RGDM ndeg37

2010 pp 177-183 341

Loi ndeg 94-43 du 18 janvier 1994 relative agrave la santeacute publique et agrave la protection sociale JORF ndeg15 du 19

janvier 1994 p 960 342

BICLET Philippe laquo Le dossier meacutedical dans tous ses eacutetats raquo op cit p 174 343

FIESCHI Marius laquo Les donneacutees du patient partageacutees la culture du partage et de la qualiteacute des informations

pour ameacuteliorer la qualiteacute des soins raquo Rapport au ministre de la santeacute de la famille et des personnes handicapeacutees

op cit

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

153

drsquoarchives et ne correspond pas agrave un dossier partageacute qui serait un outil de coordination pour

les professionnels de santeacute

Toutefois ces derniegraveres anneacutees le leacutegislateur dans la suite des preacuteconisations du

rapport FIESCHI notamment qui procircnait la mise en place drsquoun dossier patient partageacute est

venu creacuteer deux dossiers informatiseacutes et partageacutes

267 Le premier et celui qui agrave lrsquoheure actuelle a rencontreacute le plus franc succegraves est le

dossier pharmaceutique (ou DP) introduit au Code de la seacutecuriteacute sociale par la loi du 30

janvier 2007344

Il srsquoagit drsquoun dossier destineacute exclusivement aux pharmaciens et qui permet

par le biais de la carte vitale du patient de consulter lrsquoensemble des meacutedicaments deacutelivreacutes au

cours des quatre derniers mois Initialement conccedilu comme un outil au service du DMP afin

drsquoalimenter le volet meacutedicaments de celui-ci le DP a veacutecu une premiegravere phase

drsquoexpeacuterimentation entre 2007 et deacutecembre 2008 phase deacuteveloppeacutee agrave lrsquoinitiative du Conseil

National de lrsquoOrdre des Pharmaciens Le deacutecret ndeg 2008-1326 du 15 deacutecembre 2008 relatif au

dossier pharmaceutique345

a geacuteneacuteraliseacute ce processus lrsquoensemble des pharmacies drsquoofficines

eacutetant appeleacutees agrave se doter de lrsquooutil Puis la loi HPST346

a introduit lrsquoarticle L 1111-23 au

Code de la santeacute publique qui preacutevoit lrsquoouverture pour chaque beacuteneacuteficiaire de lrsquoassurance

maladie et avec son consentement drsquoun dossier pharmaceutique dont le but afficheacute est de

favoriser la coordination la qualiteacute la continuiteacute des soins et la seacutecuriteacute de la dispensation des

meacutedicaments347

Cet article preacutevoit eacutegalement que la mise en œuvre du DP est assureacutee par le

Conseil National de lrsquoOrdre des pharmaciens En pratique seul un pharmacien drsquooffice ou

344 Loi ndeg 2007-127 du 30 janvier 2007 ratifiant lordonnance ndeg 2005-1040 du 26 aoucirct 2005 relative agrave

lorganisation de certaines professions de santeacute et agrave la reacutepression de lusurpation de titres et de lexercice illeacutegal

de ces professions et modifiant le Code de la santeacute publique JORF ndeg27 du 1 feacutevrier 2007 p 1937 345

Deacutecret ndeg 2008-1326 du 15 deacutecembre 2008 relatif au dossier pharmaceutique JORF ndeg0293 du 17 deacutecembre

2008 p 19237 346

Loi ndeg 2009-879 du 21 juillet 2009 portant reacuteforme de lhocircpital et relative aux patients agrave la santeacute et aux

territoires JORF ndeg0167 du 22 juillet 2009 p 12184 347

Article L 1111-23 du Code de la santeacute publique laquo afin de favoriser la coordination la qualiteacute la continuiteacute

des soins et la seacutecuriteacute de la dispensation des meacutedicaments produits et objets deacutefinis agrave larticle L 4211-1 il est

creacuteeacute pour chaque beacuteneacuteficiaire de lassurance maladie avec son consentement un dossier pharmaceutique Sauf

opposition du patient quant agrave laccegraves du pharmacien agrave son dossier pharmaceutique et agrave lalimentation de celui-

ci tout pharmacien dofficine est tenu dalimenter le dossier pharmaceutique agrave loccasion de la dispensation

Dans les mecircmes conditions les pharmaciens exerccedilant dans une pharmacie agrave usage inteacuterieur peuvent consulter et

alimenter ce dossier Les informations de ce dossier utiles agrave la coordination des soins sont reporteacutees dans le

dossier meacutedical personnel dans les conditions preacutevues agrave larticle L 1111-15 La mise en œuvre du dossier

pharmaceutique est assureacutee par le Conseil national de lordre des pharmaciens mentionneacute agrave larticle L 4231-2

Un deacutecret en Conseil dEtat pris apregraves avis de la Commission nationale de linformatique et des liberteacutes et du

Conseil national de lordre des pharmaciens fixe les conditions dapplication du preacutesent article raquo

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

154

exerccedilant au sein des pharmacies agrave usage interne (PUI) peut consulter et alimenter ce dossier

Toutefois il est preacutevu agrave terme que le DP soit inteacutegreacute au DMP tout du moins en partie et soit

donc de ce fait consultable par les autres professionnels de santeacute

268 Enfin le dossier meacutedical partageacute (DMP) qui fait lrsquoobjet drsquoune eacutetude pousseacutee tout au

long de notre chapitre est le projet de dossier meacutedical partageacute le plus complet tout du moins

en theacuteorie reflet de la volonteacute du leacutegislateur drsquoinstaurer un dossier partageacute par tous les

professionnels de santeacute intervenant dans la prise en charge drsquoun patient

Il est utile de signaler que des dispositifs alternatifs au dossier meacutedical existent

eacutegalement Citons plus particuliegraverement en ce sens le carnet de santeacute creacuteeacute par les articles R

162-1 agrave R 162-1-6 du Code de seacutecuriteacute sociale qui quant agrave lui visait plutocirct agrave permettre une

continuiteacute et une coordination des soins plus qursquoun archivage des informations meacutedicales

2) Deacutelimitation des contours du DME

Couramment les termes Dossier Meacutedical Electronique (DME) et de Dossier Meacutedical

Informatiseacute (DMI) sont utiliseacutes de maniegravere indiffeacuterente Nous choisirons ici de suivre ce

courant et de ne pas distinguer lrsquoun et lrsquoautre

269 Le dossier meacutedical eacutelectronique (DME) nrsquoest pas reacuteellement un dossier agrave part entiegravere

clairement deacutefini par les textes Il srsquoagit plutocirct drsquoun concept drsquoune terminologie geacuteneacuterale

employeacutee pour deacutesigner finalement lrsquoensemble des dossiers patients conserveacutes sur support

informatique Selon Bruno ROUSSEL le DME laquo est le mot utiliseacute par les professionnels de

lrsquoinformatique meacutedicale pour deacutesigner les dossiers patients informatiseacutes dans le milieu

hospitalier Par extension le DME deacutesigne les systegravemes informatiques permettant de deacuteployer

ces dossiers patients eacutelectroniques raquo348

Face agrave cette observation il est neacutecessaire de se

demander si les DME seraient des outils reacuteserveacutes au milieu hospitalier comme lrsquoaffirme

lrsquoauteur Nous pensons au contraire qursquoil faut plutocirct le consideacuterer de maniegravere globale et

inteacutegrer dans cette notion lrsquoensemble des dossiers informatiseacutes peu importe que leur

utilisateur soit un centre hospitalier un professionnel de santeacute libeacuteral ou le patient lui-mecircme

348 ROUSSEL Bruno laquo Informatisation des dossiers meacutedicaux en milieu hospitalier inteacutegriteacute et opposabiliteacute

des donneacutees numeacuteriques raquo Communication Commerce Electronique 2009 eacutetude 15 p 15

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

155

dans le cadre du DMP Le DME serait alors le terme geacuteneacuteral pour deacutesigner tous les dossiers

meacutedicaux se preacutesentant sous une forme eacutelectronique et se deacuteploierait alors en diffeacuterentes sous

cateacutegories

270 Toutefois comme le souligne agrave juste titre Bruno ROUSSEL laquo il semble leacutegitime de

replacer lrsquooutil technique DME dans le contexte juridique du DMP raquo349

Autrement dit le

DME nrsquoest qursquoun outil un support technique et le DMP en serait sa deacuteclinaison concregravete

ayant une reacuteelle existence juridique En lrsquoabsence drsquoune deacutefinition strictement juridique du

DME il est inteacuteressant de se tourner vers les diffeacuterents rapports qui ont eacuteteacute produits ces

derniegraveres anneacutees au sujet de lrsquoinformatisation des donneacutees de santeacute et des dossiers meacutedicaux

et ce afin de tenter drsquoen deacutefinir les contours

271 Dans le rapport du Professeur Marius FIESCHI350

le terme de DME nrsquoapparait agrave

aucun moment Lrsquoauteur preacutefegravere utiliser le terme de dossier patient partageacute eacutetant entendu que

ce dossier simple projet agrave lrsquoeacutepoque de la reacutedaction du rapport est forceacutement un dossier

informatiseacute

Dans son rapport drsquoinformation de 2008351

consacreacute au dossier meacutedical personnel le

deacuteputeacute Jean-Pierre DOOR considegravere le DME comme eacutetant un dossier meacutedical personnel et

partageacute Il nrsquoutilise toutefois que tregraves peu de fois ce terme et ne prend donc pas la peine de le

deacutefinir Drsquoailleurs il utilise indiffeacuteremment les termes DME DMP dossier patient

eacutelectronique ou encore de dossier meacutedical informatiseacute Pour le deacuteputeacute le DMP est un DME

parmi drsquoautres

Michel GAGNEUX dans son rapport portant sur le dossier patient virtuel et partageacute

reacutedigeacute dans le cadre de la mission de relance du projet de DMP352

consacre une section agrave la

deacutefinition des diffeacuterents concepts existant en la matiegravere Ceux-ci restent cependant assez

flous mecircme pour lrsquoauteur Le terme de DME nrsquoest que peu utiliseacute dans ce rapport puisque

lrsquoauteur lui preacutefegravere lrsquoexpression de Dossier meacutedical eacutelectronique partageacute (parfois remplaceacute

349 Ibid

350 FIESCHI Marius laquo Les donneacutees du patient partageacutees la culture du partage et de la qualiteacute des informations

pour ameacuteliorer la qualiteacute des soins raquo op cit 351

Rapport drsquoinformation deacuteposeacute par la commission des affaires culturelles familiales et sociales sur le dossier

meacutedical personnel 29 janvier 2008 352

GAGNEUX Michel COMBLE Pierre-Henri De KERGOMMEAUX Loiumlc laquo Pour un dossier patient virtuel

et partageacute et une strateacutegie nationale des systegravemes drsquoinformation de santeacute raquo Recommandations agrave la ministre de la

santeacute de la jeunesse des sports et de la vie associative Avril 2008

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

156

par dossier eacutelectronique partageacute) Ainsi nous comprenons que le dossier eacutelectronique tel

que lrsquoauteur lrsquoenvisage est forceacutement partageacute Drsquoailleurs au sein drsquoun mecircme paragraphe il

utilise indiffeacuteremment les termes de dossier meacutedical eacutelectronique de dossier partageacute et de

DMP et ce pour deacutesigner un seul et mecircme outil Cela reacutevegravele selon nous le flou qui entoure

toutes ces nouvelles notions qui se deacuteveloppement autour du dossier meacutedical Lrsquoauteur tout

de mecircme de donner une deacutefinition du DME preacutecisant que celui-ci se preacutesente laquo non comme

un produit fini mais comme une dynamique de construction que lrsquoeacutevolution des usages et des

technologies faccedilonnera raquo353

Il est inteacuteressant de relever que Michel GAGNEUX diffeacuterencie

de maniegravere tregraves claire le DMP de lrsquoensemble des dossiers partageacutes Le DMP serait ainsi pour

reprendre son expression une vue particuliegravere du dossier partageacute354

tout dossier partageacute nrsquoest

pas forceacutement personnel355

et donc accessible aux patients Finalement le rapport introduit un

concept parallegravele agrave celui de DME le dossier virtuel qui se deacutefinirait comme laquo le dossier

patient unique que les technologies de lrsquoinformation permettent de preacutesenter aux utilisateurs

professionnels de santeacute ou patients sous une forme adapteacutee agrave leur contexte drsquousage agrave partir

de multiples dossiers physiquement distincts et reacutepartis raquo356

Une sorte de dossier cameacuteleacuteon

qui srsquoadapterait aux besoins drsquoinformation de chacun de ses utilisateurs

Face agrave ce flou de deacutefinitions de notions et drsquoexpressions nous prenons le parti de

tenter une deacutefinition du DME Celle-ci se doit selon nous de rester simple et la plus large

possible

272 Finalement les dossiers meacutedicaux eacutelectroniques regroupent toutes sortes de dossier

meacutedical agrave partir du moment ougrave il sera informatiseacute Il pourra eacuteventuellement ecirctre partageacute

entre professionnels de santeacute il pourra ecirctre accessible au patient comme dans le cas du DMP

ou ecirctre simplement le dossier hospitalier tel que deacutefini agrave lrsquoarticle R 1112-2 du Code de la

santeacute publique mais se preacutesentant sous une forme informatiseacutee Finalement la deacutefinition de

Bruno ROUSSEL reste selon nous la plus proche et la plus adapteacutee de la reacutealiteacute actuelle

353 Id p 28

354 Id p 30

355 Rappelons qursquoagrave la date agrave laquelle ce rapport a eacuteteacute publieacute le DMP eacutetait lrsquoacronyme de Dossier Meacutedical

Personnel Ce nrsquoest que depuis la publication de la loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute que le DMP

est devenue Dossier Meacutedical Partageacute 356

GAGNEUX Michel COMBLE Pierre-Henri De KERGOMMEAUX Loiumlc laquo Pour un dossier patient virtuel

et partageacute et une strateacutegie nationale des systegravemes drsquoinformation de santeacute raquo op cit p 31

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

157

Cet exercice de deacutefinition termineacute il nous est neacutecessaire de reacutefleacutechir sur la mise en œuvre

lrsquointeacuterecirct et lrsquoarticulation de lrsquoensemble de ces dossiers entre eux

B DMP DME et autres dossiers meacutedicaux une articulation indispensable

273 Le DMP eacutetait agrave lrsquoeacutepoque de sa creacuteation un projet fondamentalement novateur dans le

cadre des politiques de santeacute (1) Ce dossier atypique agrave plusieurs points de vue doit

aujourdrsquohui srsquoarticuler avec les autres dossiers meacutedicaux qui peuvent exister (2)

1) Le DMP un projet novateur

Bien que lrsquoideacutee drsquoun DMP ne soit pas nouvelle le projet dans son ensemble est dans

les faits original et innovant il constitue un veacuteritable laquo projet de socieacuteteacute qui bouleverse les

habitudes et les mentaliteacutes raquo357

274 Le projet est original car il srsquoagit du premier dossier meacutedical dont le patient est

titulaire358

En effet jusque-lagrave bien qursquoils deacutetiennent un droit drsquoaccegraves agrave leur dossier

meacutedical359

les patients nrsquoavaient pas un dossier qui leur eacutetait directement accessible drsquoune

part et clairement identifieacute comme leur appartenant drsquoautre part Car crsquoest bien lagrave lrsquooriginaliteacute

du DMP le leacutegislateur affiche degraves le deacutepart son ambition de faire du DMP le dossier du

patient Degraves les travaux parlementaires de la loi du 13 aoucirct 2004360

il est rappeleacute que laquo le

choix du gouvernement drsquoutiliser lrsquoexpression dossier meacutedical personnel plutocirct que

dossier meacutedical partageacute vise agrave souligner qursquoil srsquoagit avant tout du dossier patient raquo361

Le

nom a peut-ecirctre aujourdrsquohui changeacute le DMP eacutetant redevenu partageacute avec la loi de

modernisation de notre systegraveme de santeacute362

le principe afficheacute reste pour autant le mecircme Le

patient beacuteneacuteficie drsquoun veacuteritable controcircle sur lrsquoensemble de son dossier il controcircle son

ouverture qui est conditionneacutee agrave son consentement expregraves et eacuteclaireacute il controcircle eacutegalement sa

357 MONNIER Anne laquo Le dossier meacutedical personnel histoire encadrement juridique et perspectives raquo RDSS

2009 p 625 358

Lrsquoarticle R 1111-26 du Code de la santeacute publique dispose laquo Une fois son dossier creacuteeacute le beacuteneacuteficiaire de

lrsquoassurance maladie en devient le titulaire raquo 359

Article L 1111-7 du Code de la santeacute publique 360

Loi ndeg 2004-810 du 13 aoucirct 2004 relative agrave lassurance maladie JORF ndeg0190 du 17 aoucirct 2004 p 14598 361

VASSELLE Alain laquo Projet de loi relatif agrave lassurance maladie rapport fait au nom de la commission des

affaires sociales raquo Seacutenat ndeg 424 tome I 2004 362

Loi ndeg 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre systegraveme de santeacute JORF ndeg0022 du 27 janvier

2016 texte ndeg 1

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

158

clocircture et il deacutecide dans une certaine mesure des professionnels qui pourront y avoir accegraves

ainsi que les informations que ces professionnels pourront consulter Enfin et crsquoest lagrave un des

dispositifs les plus originaux et parfois controverseacute du DMP le patient beacuteneacuteficie drsquoun droit

de masquage sur son dossier

275 En effet cette possibiliteacute a eacuteteacute introduite par la loi de financement de la seacutecuriteacute

sociale du 19 deacutecembre 2007 pour 2008363

qui preacutevoyait que selon certaines modaliteacutes qui

devaient ecirctre fixeacutees par un deacutecret pris en Conseil drsquoEtat les informations contenues dans le

DMP pouvaient ecirctre rendues inaccessibles par le titulaire du DMP ou son repreacutesentant leacutegal

Quand lrsquoensemble des dispositions relatives au DMP ont eacuteteacute introduites dans le Code de la

santeacute publique par la loi HPST cette mesure est resteacutee Ce deacutecret nrsquoa jamais eacuteteacute adopteacute et

cette possibiliteacute est resteacutee longtemps inactive les preacutecisions regraveglementaires et pratiques

neacutecessaires agrave sa mise en œuvre nrsquoayant pas eacuteteacute adopteacutees Puis avec lrsquoultime relance du DMP

amorceacutee par la loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute cette possibiliteacute a finalement

eacuteteacute confirmeacutee Le deacutecret ndeg 2016-914 du 4 juillet 2016 relatif au dossier meacutedical partageacute364

est

venu inseacuterer au sein du Code de la santeacute publique lrsquoarticle R 1111-38 qui preacutevoit que laquo le

titulaire peut deacutecider que des informations le concernant contenues dans son dossier meacutedical

partageacute ne soient pas accessibles aux professionnels de santeacute autoriseacutes agrave acceacuteder agrave son

dossier raquo

276 Le droit de masquage est donc deacutefinitivement consacreacute Le support du DMP peut lui

eacutegalement ecirctre consideacutereacute comme innovant En effet mecircme si au moment de la creacuteation du

DMP lrsquoinformation des systegravemes drsquoinformation hospitaliers avait commenceacute depuis plusieurs

anneacutees et si des dossiers meacutedicaux eacutelectroniques se deacuteveloppent lrsquoideacutee drsquoun dossier

totalement deacutemateacuterialiseacute et deacuteposeacute chez un heacutebergeur agreacuteeacute est pour sa part nouvelle Dans

un premier temps le leacutegislateur avait envisageacute la possibiliteacute de faire appel agrave plusieurs

heacutebergeurs de donneacutees diffeacuterents chaque deacutetenteur drsquoun DMP eacutetant libre de choisir

lrsquoheacutebergeur de son choix et drsquoen changer srsquoil le souhaite Toutefois cette solution lors des

premiegraveres expeacuterimentations de 2006 preacutesente vite ses limites tous les heacutebergeurs ne

proposant pas le mecircme niveau de seacutecuriteacute malgreacute les obligations auxquelles ils sont

363 Loi ndeg 2007-1786 du 19 deacutecembre 2007 de financement de la seacutecuriteacute sociale pour 2008 JORF ndeg0296 du 21

deacutecembre 2007 p 20603 364

Deacutecret ndeg 2016-914 du 4 juillet 2016 relatif au dossier meacutedical partageacute JORF ndeg0155 du 5 juillet 2016 texte

ndeg 20

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

159

soumis365

Enfin apregraves avoir songeacute pendant un temps agrave la mise en place drsquoun heacutebergeur de

reacutefeacuterence et avoir classeacute sans suite lrsquoappel drsquooffres qui avait eacuteteacute lanceacute pour le seacutelectionner le

leacutegislateur a adopteacute366

ce qui fait aujourdrsquohui du DMP un dossier unique en son genre le

portail drsquoaccegraves unique

277 En parallegravele la politique en matiegravere drsquoheacutebergement du DMP a eacuteteacute repenseacutee et le

leacutegislateur a fait le choix drsquoun heacutebergeur unique un seul accegraves un seul heacutebergeur pour

arriver agrave un mecircme dossier pour tous les assureacutes sociaux Suite agrave un appel drsquooffre la

commission des marcheacutes de lrsquoASIP Santeacute a retenu agrave lrsquounanimiteacute de ses membres le

consortium industriel meneacute par les groupes ATOS Origin et LA POSTE et constitueacute des

socieacuteteacutes ATOS wordline SAS SANTEOS SA EXTELIA SAS HSC SOFTWAY

Medical Services EVALAB

2) Le DMP compleacutement ou concurrent des autres dossiers

laquo La multipliciteacute des informations conduit naturellement agrave celle des dossiers et cette

multipliciteacute est bien naturelle chaque professionnel de santeacute a vocation agrave avoir son dossier

sur ses patients raquo367

278 En creacuteant le DMP le leacutegislateur a souhaiteacute proposer un outil accessible agrave tous les

professionnels intervenant lors de la prise en charge drsquoun patient donneacute Toutefois comme le

souligne Franccedilois VIALLA chaque professionnel selon sa speacutecialiteacute va produire des

informations de types et formes diffeacuterentes (imagerie compte rendu reacutesultats de laboratoire

hellip) De mecircme chaque professionnel dans son exercice va tenir son propre dossier Or face agrave

la deacutemultiplication des dossiers se pose la question de savoir comment ceux-ci srsquoarticulent

entre eux Est-ce qursquoils se complegravetent Srsquoalimentent entre eux Ou alors sont-ils redondants

auquel cas certains drsquoentre eux seraient ameneacutes agrave disparaitre Finalement la question

principale qui se pose ici est de savoir si le DMP de par ses particulariteacutes est un concurrent

ou un reacuteel compleacutement aux autres dossiers

365 V Supra ndeg 179 et s

366 Loi ndeg 2007-1786 du 19 deacutecembre 2007 de financement de la seacutecuriteacute sociale pour 2008 JORF ndeg0296 du 21

deacutecembre 2007 p 20603 367

VIALLA Franccedilois laquo Dossier patient DMP quelles frontiegraveres raquo RGDM ndeg 20 2006 p 135

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

160

279 Selon lrsquoavis du Comiteacute Consultatif National drsquoEthique (CCNE) relatif au Dossier

meacutedical Personnel et agrave lrsquoinformatisation des donneacutees368

laquo aux yeux drsquoun certain nombre

drsquoacteurs de soin la notion de dossier meacutedical personnel recouvre celle de dossier meacutedical

partageacute entre les professionnels de santeacute Les membres du corps meacutedical sont enclins agrave y voir

un outil de travail agrave usage professionnel Ils y trouvent un inteacuterecirct dans la mesure ougrave toutes les

informations utiles sont accessibles aux soignants qui en ont besoin [hellip] Ils proposent qursquoune

partie du contenu de ce dossier meacutedical partageacute puisse eacuteventuellement constituer le dossier

meacutedical personnel raquo Toutefois la fusion des deux types de dossiers est preacutesenteacutee comme

peacuterilleuse et ingeacuterable et il est fait une distinction nette entre le dossier meacutedical outil

professionnel et le DMP outil certes utile aux professionnels mais principalement agrave

destination du patient Toujours en ce sens le bilan de la mission meneacutee par Jean-Pierre

DOOR tend agrave montrer qursquoune pluraliteacute de DME nrsquoest pas agrave exclure et que les DME deacutejagrave

existants et opeacuterationnels poursuivent de toute maniegravere des objectifs plus compleacutementaires

que concurrents au DMP Ainsi le DMP serait bien un compleacutement des autres dossiers

meacutedicaux existants qursquoils soient partageacutes ou non

280 Dans le rapport consacreacute agrave la relance du DMP369

Michel GAGNEUX rappelle que le

DMP est avant tout un dossier patient plus qursquoun veacuteritable dossier meacutedical Degraves lors il nrsquoest

donc pas envisageable qursquoil vienne se substituer aux dossiers meacutedicaux tenus par les

professionnels laquo mecircme srsquoil contribue agrave les faire eacutevoluer raquo370

Lagrave encore le rocircle

compleacutementaire du DMP par rapport aux autres dossiers meacutedicaux est mis en valeur

Toutefois cette vision nrsquoest pas partageacutee par tous les auteurs Ainsi Olivier SAUTEL

considegravere que laquo le DMP viendra drsquoabord en concurrence avec le dossier papier Puis il aura

vocation agrave srsquoy substituer totalement Le dossier papier est donc voueacute agrave la disparition Crsquoest la

logique implacable de la reacuteforme DMP raquo371

281 Plusieurs critiques peuvent toutefois ecirctre eacutemises Drsquoune part lrsquoauteur confond dossier

meacutedical eacutelectronique et DMP certes lrsquoinformatisation grandissante conduira certainement agrave

368 Avis du Comiteacute National Consultatif ndeg 104 laquo le Dossier meacutedical personnel et lrsquoinformatisation des donneacutees

de santeacute raquo juin 2008 p 5 369

GAGNEUX Michel COMBLE Pierre-Henri De KERGOMMEAUX Loiumlc laquo Pour un dossier patient virtuel

et partageacute et une strateacutegie nationale des systegravemes drsquoinformation de santeacute raquo recommandations agrave la ministre de la

santeacute de la jeunesse des sports et de la vie associative avril 2008 370

Id p 27 371

SAUTEL Olivier laquo Le dossier meacutedical personnel raquo Journal de meacutedecine leacutegale 2007 p 6

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

161

lrsquoavenir la disparition des dossiers meacutedicaux papiers Mais ce sont bien diffeacuterents DME

propres agrave chaque eacutetablissement de santeacute ou professionnel de santeacute qui le remplaceront Nous

partageons ici le point de vue de Ceacutecile MANAOUIL372

et estimons que cette affirmation

relegraveve drsquoune confusion entre informatisation des dossiers meacutedicaux et instauration du DMP Il

nrsquoest pas envisageable de notre point de vue qursquoun dossier dont le patient est titulaire

vienne remplacer les dossiers professionnels que ceux-ci soient partageacutes ou non Cette

affirmation deacutenote une mauvaise compreacutehension des ambitions du DMP mais eacutegalement du

fonctionnement du systegraveme de santeacute et de lrsquoorganisation des professionnels de santeacute dans leur

pratique

282 Finalement le DMP est une vision globale de lrsquoeacutetat de santeacute du patient en cela il

permet de compleacuteter les informations que chaque professionnel de santeacute possegravede deacutejagrave

Toutefois il nous semble qursquoun professionnel de santeacute ne pourra pas deacutecemment supprimer le

propre dossier meacutedical qursquoil tient certainement plus preacutecis dans sa speacutecialiteacute que ne le sera le

DMP Le DMP ne doit pas ecirctre consideacutereacute comme concurrent ou redondant avec drsquoautres

dossiers Ce point a drsquoailleurs eacuteteacute eacuteclairci par le leacutegislateur en juillet dernier373

puisque

lrsquoarticle R 1111-28 du Code de la santeacute publique preacutevoit deacutesormais que laquo le dossier meacutedical

partageacute ne se substitue pas au dossier que tient chaque eacutetablissement de santeacute [hellip] raquo

372 MANAOUIL Ceacutecile laquo Le dossier meacutedical personnel (DMP) autopsie drsquoun projet ambitieux raquo Meacutedecine

et droit 2009 p 26 373

Deacutecret ndeg 2016-914 du 4 juillet 2016 relatif au dossier meacutedical partageacute JORF ndeg0155 du 5 juillet 2016 texte

ndeg 20

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

162

sect2 Le DMP un encadrement juridique eacutevoluant avec difficulteacutes

283 Projet en route depuis plus de dix ans le DMP rencontre de nombreuses difficulteacutes agrave

se deacutevelopper et agrave trouver sa place Drsquoailleurs la preacutecipitation et les premiegraveres orientations

balbutiantes du DMP (A) ont conduit le leacutegislateur a rapidement repenser son projet et

engager plusieurs relances devenues neacutecessaires (B)

A Les premiers pas du DMP des orientations incertaines

Le DMP est en reacutealiteacute le fruit drsquoune longue reacuteflexion relative agrave lrsquoinformatisation des

donneacutees et les principes fondamentaux qui le reacutegissent sont finalement assez classiques (1)

Toutefois au fur et agrave mesure des nombreuses critiques du projet celui-ci a ducirc srsquoadapter au

greacute notamment des diffeacuterentes lois de financement de seacutecuriteacute sociale (2)

1) Origines et principes fondamentaux du DMP

284 Lrsquoideacutee drsquoun dossier reprenant lrsquoensemble des eacuteleacutements relatifs agrave un patient et partageacute

dans un objectif de meilleure coordination entre plusieurs professionnels de santeacute diffeacuterents

nrsquoest pas nouvelle Avec lrsquointroduction et le deacuteveloppement des TIC dans la pratique

meacutedicale facilitant le partage et la diffusion de lrsquoinformation meacutedicale cette ideacutee srsquoest faite

de plus en plus preacutesente

285 Le rapport de Marius FIESCHI374

rendu en 2003 faisait drsquoailleurs eacutetat de cette

tentative depuis de nombreuses anneacutees de mettre en place un dossier partageacute Il soulignait

lrsquoeacutechec du projet de Dossier Minimum Commun (DMC) Il rappelait eacutegalement lrsquointeacuterecirct de

mettre en place un dossier visant agrave rassembler toutes les informations meacutedicales concernant

un patient modegravele correspondant alors mieux agrave la reacutealiteacute de lrsquoeacutetat de santeacute du patient car non

centreacute sur une seule pathologie Il avanccedilait alors le nom de Dossier Patient Partageacute (DPP)

374 FIESCHI Marius laquo Les donneacutees du patient partageacutees la culture du partage et de la qualiteacute des informations

pour ameacuteliorer la qualiteacute des soins raquo op cit

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

163

Se basant sur ce rapport le ministre de la santeacute de lrsquoeacutepoque M Philippe DOUSTE-

BLAZY a alors deacutecideacute drsquoen faire un projet national phare Crsquoest la loi du 13 aoucirct 2004

relative agrave lrsquoassurance maladie375

qui a creacuteeacute en son article 3 le dossier meacutedical personnel376

Les dispositions relatives au DMP ne sont alors pas nombreuses mais elles sont tregraves denses377

et inseacutereacutees aux articles L 162-36-1 agrave L 162-36-4 du Code de la seacutecuriteacute sociale Comme le

soulignait agrave juste titre Didier TRUCHET378

cette consideacuteration nrsquoest pas anecdotique

puisqursquoelle deacutetermine le champ drsquoapplication de la loi tous les beacuteneacuteficiaires de lrsquoassurance

maladie pourront ouvrir un DMP et non pas tous les patients De plus le fait que le DMP soit

creacuteeacute par une loi relative agrave lrsquoassurance maladie et ses dispositions preacutesentes dans le Code de la

seacutecuriteacute sociale marque bien lrsquoobjectif premier confieacute au DMP la reacutealisation drsquoeacuteconomies en

termes de deacutepenses de santeacute Cet objectif nrsquoa jamais eacuteteacute clairement afficheacute par le leacutegislateur

Lrsquoarticle L 161-36-1 du Code de la seacutecuriteacute sociale preacutevoyait la creacuteation du DMP

laquo afin de favoriser la coordination la qualiteacute et la continuiteacute des soins gages drsquoun bon

niveau de santeacute raquo Toutefois en preacutevoyant ce dispositif au sein drsquoune loi consacreacutee agrave

lrsquoassurance maladie et en inseacuterant son encadrement au sein du Code de la seacutecuriteacute sociale le

leacutegislateur faisait de fait du DMP un outil au service de lrsquoassurance maladie Drsquoailleurs dans

le rapport relatif au DMP de 2007 la plus grande maicirctrise des deacutepenses drsquoassurance maladie

via la diminution des actes redondants inutiles ou iatrogegravenes fait partie des quatre objectifs

initiaux constateacutes du DMP379

Lrsquoarticle 3 de la loi du 4 aoucirct 2004 a ainsi poseacute les bases

juridiques du DMP laissant agrave un deacutecret pris en Conseil drsquoEtat le soin drsquoapporter lrsquoensemble

des preacutecisions pratiques qui seront neacutecessaires agrave la bonne mise en œuvre de lrsquooutil

Cependant ce deacutecret nrsquoa jamais vu le jour

286 A lrsquoorigine les principes qui reacutegissaient le DMP sont les suivants en tant que dossier

personnel380

le DMP eacutetait placeacute sous le controcircle381

du patient celui-ci accordant ou non son

375 Loi ndeg 2004-810 du 13 aoucirct 2004 relative agrave lassurance maladie JORF ndeg0190 du 17 aoucirct 2004 p 14598

376 Alors que lrsquoarticle 3 de la loi du 4 aoucirct 2004 est venue creacuteer le Dossier Meacutedical Personnel la reacutedaction

actuelle de lrsquoarticle L 1111-5 du Code de la santeacute publique issue de la loi de modernisation de notre systegraveme de

santeacute dispose que laquo dans le respect des regravegles deacuteontologiques qui lui sont applicables ainsi que des articles L

1110-4 L 1110-4-1 et L 1111-2 chaque professionnel de santeacute quels que soient son mode et son lieu

dexercice reporte dans le dossier meacutedical partageacute [hellip] raquo 377

TRUCHET Didier laquo Que dit la loi raquo RGDM Ndeg20 2006 p 67 378

Ibid 379

Rapport sur le Dossier meacutedical personnaliseacute Inspection geacuteneacuterale des finances Inspection geacuteneacuterale des

Affaires sociales Conseil geacuteneacuterale des Technologies de lrsquoInformation novembre 2007 p 1 380

Rappelons qursquoinitialement le DMP eacutetait lrsquoacronyme de laquo dossier meacutedical personnel raquo

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

164

consentement agrave lrsquoouverture du dossier et deacutesignant les professionnels pouvant y acceacuteder Les

professionnels et les eacutetablissements de santeacute avaient quant agrave eux pour obligation drsquoalimenter

ce dossier En effet lrsquoadheacutesion et le maintien aux conventions nationales signeacutees entre

professionnels de santeacute et lrsquoassurance maladie eacutetait soumis agrave la consultation et agrave la mise agrave jour

du DMP par les professionnels En contrepartie il eacutetait eacutegalement preacutevu que le niveau de

prise en charge des actes et prestations soit subordonneacutee agrave lrsquoautorisation donneacutee par le patient

au professionnel de consulter son DMP

287 Lors de la publication de la loi cette derniegravere mesure avait eacuteteacute vivement critiqueacutee et le

Conseil Constitutionnel avait eacuteteacute saisi au motif notamment que cette disposition portait

atteinte au droit agrave la protection sociale garanti au titre du preacuteambule de la Constitution de

1946 Le Conseil Constitutionnel a toutefois consideacutereacute que laquo eu eacutegard aux finaliteacutes des

dispositions contesteacutees qui sont dune part dameacuteliorer la qualiteacute des soins dautre part de

reacuteduire le deacuteseacutequilibre financier de lassurance maladie et compte tenu de lensemble des

garanties qui viennent decirctre rappeleacutees le leacutegislateur a opeacutereacute entre les exigences

constitutionnelles en cause une conciliation qui napparaicirct pas manifestement deacuteseacutequilibreacutee

que degraves lors les griefs invoqueacutes doivent ecirctre rejeteacutes raquo382

Ainsi pour les sages du Conseil le

droit agrave la santeacute neacutecessite un systegraveme de protection sociale qui se doit drsquoecirctre en eacutequilibre

financier et par conseacutequent des concessions doivent eacutegalement ecirctre opeacutereacutees de la part des

beacuteneacuteficiaires de ce systegraveme383

Pour reprendre les mots de Franccedilois VIALLA le patient

laquo srsquoest vu reconnaitre des droits il commence agrave en deacutecouvrir les contreparties raquo384

288 La loi de 2004 soucieuse de preacuteserver le secret professionnel malgreacute la mise en place

drsquoun outil destineacute agrave ecirctre partageacute avec un grand nombre de professionnels preacutevoyait des

garanties en ce sens puisque le DMP devait ecirctre mis en place dans le respect du secret

meacutedical (article L 161-36-1) et heacutebergeacute aupregraves drsquoun heacutebergeur agreacutee la consultation se

faisant dans le respect des regravegles deacuteontologiques applicables au professionnel ainsi que dans

le respect des articles L 1110-4 et L 1111-2 du Code de la santeacute publique Enfin il eacutetait

eacutegalement preacutevu lrsquointerdiction de consulter le DMP dans certaines situations telle que lors de

381 V Supra ndeg112 agrave 119

382 Deacutecision du Conseil Constitutionnel ndeg 2004-504 du 12 aoucirct 2004 JORF ndeg190 du 17 aoucirct 2004 p 14657

383 VIALLA Franccedilois laquo Secret et DMP raquo RDS 2005 pp 42-44

384 Id p 42

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

165

la conclusion drsquoun contrat drsquoassurance par exemple ou de tout autre contrat qui neacutecessiterait

lrsquoeacutevaluation de la santeacute drsquoune personne

Cette premiegravere version du DMP a toutefois rapidement fait lrsquoobjet de critiques et

certaines eacutevolutions ont eacuteteacute instaureacutees au fil des anneacutees

2) Des eacutevolutions au greacute des critiques

289 La loi du 13 aoucirct 2004 preacutevoyait que lrsquoensemble des preacutecisions utiles agrave la mise en

place du DMP seraient apporteacutees dans un deacutecret pris en Conseil drsquoEtat Cependant bien qursquoun

projet ait eacuteteacute soumis agrave concertation publique ce deacutecret nrsquoa jamais vu le jour Certaines

preacutecisions ou modifications ont toutefois eacuteteacute apporteacutees au projet initial certaines reacutesultants

parfois des critiques eacutemises agrave lrsquoencontre du projet Ces compleacutements sont de deux ordres

Drsquoune part des eacuteleacutements pratiques ont eacuteteacute mis en place (a) et drsquoautre part des preacutecisions sur

le fonctionnement du DMP ont eacuteteacute apporteacutees (b)

a) Les apports pratiques

290 Afin de lancer la mise en œuvre pratique du DMP un GIP de preacutefiguration le GIP

DMP a eacuteteacute creacuteeacute et sa convention constitutive approuveacutee par un arrecircteacute en date du 11 avril

2005385

Il eacutetait composeacute de lEtat de la Caisse nationale dassurance maladie des travailleurs

salarieacutes et de la Caisse des deacutepocircts et consignations Son objet consistait agrave preacuteparer les

dispositions juridiques organisationnelles financiegraveres et logistiques du futur organisme

gestionnaire du dossier meacutedical personnel et den assurer les premiegraveres reacutealisations Ce

groupement devait permettre au futur organisme gestionnaire du dossier meacutedical personnel

decirctre immeacutediatement opeacuterationnel dans la perspective de la publication du deacutecret

dapplication de la loi relative agrave lassurance maladie Le GIP-DMP eacutetait donc une structure

temporaire censeacutee faciliter lrsquoexpeacuterimentation puis la mise en place du DMP ameneacutee agrave

disparaitre degraves que lrsquoorganisme gestionnaire du DMP aurait eacuteteacute mis en place et apte agrave

effectuer ses missions Cependant le leacutegislateur srsquoest reacuteveacuteleacute quelque peu preacutesomptueux sur le

calendrier de reacutealisation de ce projet bien que le groupement dinteacuterecirct public groupement de

preacutefiguration du dossier meacutedical personnel eacutetait initialement creacuteeacute pour une dureacutee de vie

385 Arrecircteacute ministeacuteriel du 11 avril 2005 portant approbation de la convention constitutive dun groupement

dinteacuterecirct public

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

166

limiteacutee puisqursquoil devait prendre fin le 31 deacutecembre 2005 celui-ci sera maintenu jusqursquoen

2009 anneacutee de mise en œuvre du programme relance du DMP

291 De maniegravere pratique une phase drsquoexpeacuterimentation autoriseacute par une deacutelibeacuteration CNIL

en date du 30 mai 2006386

a deacutebuteacute le 1er

juin de la mecircme anneacutee Le Cadre de cette

expeacuterimentation ainsi que les perspectives de geacuteneacuteralisation du DMP ont par ailleurs eacuteteacute

preacuteciseacutes par la circulaire du 28 juin 2006 relative agrave la mise en œuvre du DMP par les

eacutetablissements de santeacute387

Cette circulaire dressait eacutegalement un calendrier de deacuteploiement

particuliegraverement ambitieux puisque la phase de geacuteneacuteralisation eacutetait censeacutee deacutebuter au premier

semestre 2007

b) Les apports sur le fond

292 La loi de 2004 instaurant le DMP eacutetait loin drsquoecirctre complegravete et certaines preacutecisions ont

eacuteteacute apporteacutees par la suite Nous traiterons ici de lrsquoensemble des modifications qui ont eu lieu

sur le projet initial et non pas des modifications apparues apregraves 2009 lors des phases de

relance du DMP

293 La plupart des ajouts ont eacuteteacute apporteacutes par la loi de financement de seacutecuriteacute sociale pour

2008388

Ainsi ce texte est drsquoabord venu combler une lacune en matiegravere drsquoaccegraves au DMP par

les ayants droit En effet en cas de deacutecegraves du patient deacutetenteur drsquoun DMP rien nrsquoeacutetait preacutevu

dans la loi initiale La LFSS pour 2008 a donc appliqueacute au DMP les dispositions existantes en

matiegravere de communication du dossier meacutedical aux ayants droit drsquoun patient deacuteceacutedeacute389

Toutefois aucune preacutecision nrsquoa eacuteteacute apporteacutee au sujet des modaliteacutes pratiques drsquoaccegraves cet

accegraves doit-il se faire par le biais drsquoun professionnel de santeacute Du meacutedecin traitant Ou

encore par le concours du meacutedecin de lrsquoheacutebergeur Rien nrsquoeacutetait preacuteciseacute par cette loi et

aujourdrsquohui encore malgreacute diffeacuterentes reacuteformes390

le doute subsiste Pour notre part il nous

386 Deacutelibeacuteration CNIL ndeg2006-151 du 30 mai 2006 portant autorisation de mise en œuvre des applications

informatiques neacutecessaires agrave lexpeacuterimentation du dossier meacutedical personnel 387

Circulaire DHOSE3 ndeg 2006-281 du 28 juin 2006 relative agrave la mise en œuvre du dossier meacutedical personnel

(DMP) par les eacutetablissements de santeacute BO ndeg 20067 388

Loi ndeg 2007-1786 du 19 deacutecembre 2007 de financement de la seacutecuriteacute sociale pour 2008 JORF ndeg0296 du 21

deacutecembre 2007 p 20603 389

Lrsquoarticle L 1110-4 du Code de la santeacute publique preacutevoit que laquo Le secret meacutedical ne fait pas obstacle agrave ce que

les informations concernant une personne deacuteceacutedeacutee soient deacutelivreacutees agrave ses ayants droit dans la mesure ougrave elles

leur sont neacutecessaires pour leur permettre de connaicirctre les causes de la mort de deacutefendre la meacutemoire du deacutefunt

ou de faire valoir leurs droits sauf volonteacute contraire exprimeacutee par la personne avant son deacutecegraves raquo 390

V Infra ndeg 306 agrave 309

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

167

semble que le meacutedecin traitant serait lrsquointerlocuteur le plus agrave mecircme de seacutelectionner les

documents agrave transmettre aux ayants-droits

294 La LFSS pour 2008 a eacutegalement apporteacute une modification tregraves importante dans le

fonctionnement du DMP puisqursquoelle a introduit le tregraves largement deacutebattu droit au masquage

Pas de maniegravere tregraves preacutecise il est vrai puisque le texte se bornait agrave preacutevoir qursquo laquo un deacutecret en

Conseil drsquoEtat fixe les conditions dans lesquelles certaines peuvent ecirctre rendues inaccessibles

par le titulaire du DMP ou son repreacutesentant leacutegal ainsi que les modaliteacutes selon lesquelles le

professionnel de santeacute acceacutedant au DMP a connaissance de lrsquoinscription au dossier

drsquoinformations rendues inaccessibles par son titulaire ou son repreacutesentant leacutegalraquo

Par ailleurs la LFSS pour 2008 a creacuteeacute le portail drsquoaccegraves unique au DMP qui permet

au patient de geacuterer son DMP et notamment les droits drsquoaccegraves y affeacuterant Cette disposition a

ainsi permis drsquoassurer une harmonisation en matiegravere drsquoaccegraves et drsquoutilisation de son DMP par

le patient La LFSS pour 2008 a eacutegalement eacuteteacute lrsquooccasion de supprimer une disposition

contraire au respect de certains droits fondamentaux et introduite par la loi du 5 mars 2007

instituant le droit au logement opposable391

Celle-ci permettait lrsquoaccegraves par un bailleur au

DMP drsquoun candidat agrave un logement adapteacute ou speacutecifique392

295 Enfin la loi du 30 janvier 2007393

a instaureacute non sans mal le dispositif du bris de

glace qui permet un accegraves au DMP dans les cas drsquourgences Deacutesormais dans ces situations

le consentement preacutealable du patient pour acceacuteder agrave son dossier nrsquoest plus neacutecessaire Il est

inteacuteressant de noter que cette disposition eacutetait initialement preacutevue dans la LFSS pour 2007

mais avait eacuteteacute deacuteclareacutee non conforme agrave la Constitution par une deacutecision du Conseil

constitutionnel394

391 Loi ndeg 2007-290 du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en

faveur de la coheacutesion sociale JORF ndeg55 du 6 mars 2007 p 4190 392

MANAOUIL Ceacutecile laquo Le dossier meacutedical personnel (DMP) autopsie drsquoun projet ambitieux raquo op cit p

29 393

Loi ndeg 2007-127 du 30 janvier 2007 ratifiant lordonnance ndeg 2005-1040 du 26 aoucirct 2005 relative agrave

lorganisation de certaines professions de santeacute et agrave la reacutepression de lusurpation de titres et de lexercice illeacutegal

de ces professions et modifiant le Code de la santeacute publique JORF ndeg27 du 1 feacutevrier 2007 p 1937 394

Deacutecision du Conseil Constitutionnel ndeg 2004-504 du 12 aoucirct 2004 JORF ndeg190 du 17 aoucirct 2004 p14657

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

168

B Une rapide remise en question du projet initial

296 Degraves 2007 soit agrave peine trois ans apregraves la promulgation de la loi relative agrave lrsquoassurance

maladie creacuteant le DMP les premiers bilans relatifs agrave la mise en œuvre de ce dossier ont eacuteteacute

effectueacutes et leur reacutesultat a eacuteteacute neacutegatif (1) Le ministegravere a alors souhaiteacute reprendre les choses en

main et mettre en place une relance du projet (2) Celle-ci dont les reacutesultats ont eacuteteacute mitigeacutes a

donc eacuteteacute suivie drsquoune deuxiegraveme relance (3) engageacutee par le biais de la loi de modernisation de

notre systegraveme de santeacute

1) Un premier bilan neacutegatif

297 Face aux ambitions deacutemesureacutees de la loi du 13 aoucirct 2004 aux difficulteacutes agrave faire

avancer correctement le projet et agrave toutes les critiques relatives au DMP lrsquoexeacutecutif a ordonneacute

une mission interministeacuterielle de revue de projet sur le DMP afin de laquo reacutealiser un point

deacutetailleacute sur lrsquoeacutetat drsquoavancement et le pilotage de ce projet ainsi que sur sa capaciteacute de

reacutepondre aux objectifs initiaux raquo395

Cette mission a eacuteteacute confieacutee agrave lrsquoInspection geacuteneacuterale des

finances agrave lrsquoInspection geacuteneacuterale des Affaires Sociales et au Conseil geacuteneacuteral des Technologies

de lrsquoInformation Lrsquoensemble de la mission a eacuteteacute conduite par Michel GAGNEUX et un

rapport a eacuteteacute rendu en novembre 2007 (a) En parallegravele la CNIL a elle aussi rendu un

rapport portant pour sa part sur le bilan des premiegraveres expeacuterimentations du DMP (b)

a) Le rapport GAGNEUX

Ce rapport visant agrave effectuer lrsquoaudit du projet DMP sur la peacuteriode 20052007 dresse un

bilan plus que neacutegatif des premiegraveres tentatives de mise en œuvre du DMP

298 La principale critique porte sur les objectifs initiaux du leacutegislateur en matiegravere de mise

en œuvre du DMP hors drsquoatteintes A la fois les deacutelais (tout assureacute pourrait avoir un DMP

ouvert au 1er juillet 2007) le coucirct et le modegravele eacuteconomique du projet ne permettaient pas le

succegraves pourtant annonceacute de celui-ci En effet nous pensons que le leacutegislateur au lieu de

choisir la preacutecipitation aurait ducirc prendre le temps drsquoeacutetudier lrsquoorganisation deacuteployeacutee dans les

pays voisins dans le cadre de projets similaires et srsquoen inspirer directement Lrsquoeacutetude de ces

395 Lettre de mission relative agrave la mission interministeacuterielle de revue de projet sur le dossier meacutedical personnel

(DMP) rapport sur le dossier meacutedical personnel op cit

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

169

projets aurait permis selon nous de mettre en eacutevidence le caractegravere utopiste de la

meacutethodologie initiale choisie par notre leacutegislateur notamment en termes de calendrier Degraves

lors il ne peut que ressortir de ce rapport le manque de creacutedibiliteacute et de lisibiliteacute du projet du

fait des trop nombreuses zones de risques et drsquoincertitudes dans la strateacutegie mise en œuvre

Nous ne pouvons qursquoecirctre drsquoaccord avec les conclusions de ce rapport qui montrent que la

preacutecipitation a guideacute lrsquoensemble des actions mises en œuvre ce qui a joueacute en deacutefaveur du

DMP Alors mecircme que le concept et la finaliteacute du DMP nrsquoeacutetaient pas clairement preacuteciseacutes

seule la mise en œuvre technique faisait lrsquoobjet de toutes les attentions

299 La mission interministeacuterielle de revue du projet a abouti agrave sept recommandations

deacuteclarer sans suite la consultation agrave lrsquoeacutepoque en cours pour la deacutesignation de lrsquoheacutebergeur de

reacutefeacuterence sauvegarder les acquis restaurer la confiance dans le projet relancer la dynamique

du projet reacutesoudre parallegravelement les questions majeures notamment juridiques en suspens

attribuer au DMP un budget de programme et refonder la gouvernance des systegravemes

drsquoinformation dans le domaine de la santeacute Dans la fouleacutee de cet audit Michel GAGNEUX a

ensuite reacutedigeacute et preacutesenteacute un rapport en 2008 consacreacute agrave la relance du DMP396

Reprenant

pour partie les recommandations eacutenonceacutees dans son preacuteceacutedent rapport lrsquoauteur dresse les

contours de ce qui sera en 2009 avec la loi HPST les bases de la relance du DMP

b) Le bilan de la CNIL

300 Suite aux premiegraveres expeacuterimentations qui se sont deacuterouleacutees drsquoavril agrave deacutecembre 2006

la CNIL qui srsquoeacutetait prononceacutee sur les dossiers drsquoagreacutement des heacutebergeurs de donneacutees de santeacute

seacutelectionneacutes pour la phase drsquoexpeacuterimentation a controcircleacute sur site les principaux acteurs Le but

de la CNIL nrsquoeacutetait pas tant de reacutealiser un controcircle exhaustif des diffeacuterentes pratiques mais

plutocirct drsquoappreacutecier la reacutealiteacute des engagements pris par les heacutebergeurs dans le dossier

drsquoagreacutement Le bilan qui a reacutesulteacute de ces controcircles srsquoest montreacute seacutevegravere

301 Bien entendu la courte dureacutee de cette expeacuterimentation qui a reacutesulteacute drsquoun changement

de strateacutegie en cours de route nrsquoa pas permis agrave la CNIL de mesurer de maniegravere efficace le

fonctionnement des diffeacuterents acteurs Il est cependant ressorti un manque de seacutecuriteacute et une

deacutefaillance de certains heacutebergeurs de santeacute Certaines pratiques relatives agrave la communication

396 GAGNEUX Michel COMBLE Pierre-Henri FOLLIET Alain DE KERGOMMEAUX Loiumlc

LIVARTOWSKI Alain LOTH Andreacute RICHARD Denis SAURET Jacques laquo Pour un dossier patient virtuel

et partageacute et une strateacutegie nationale des systegravemes drsquoinformation de santeacute raquo rapport de la mission de relance du

DMP 23 avril 2008

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

170

au patient de son numeacutero identifiant santeacute (INS) et de son Adresse Qualiteacute Santeacute (AQS) ont

eacuteteacute pointeacutees comme de nature agrave compromettre la confidentialiteacute des informations Du cocircteacute de

lrsquoalimentation des dossiers le constat effectueacute eacutetait le mecircme les proceacutedures drsquoidentification

et drsquoauthentification des personnels ne permettaient pas de maintenir un niveau de seacutecuriteacute

suffisant

302 Lrsquoaccegraves en mode bris de glace est une autre des difficulteacutes que le controcircle de la

CNIL a mis en valeur La CNIL a pointeacute ici et agrave juste titre le caractegravere contradictoire de

certaines situations par rapport agrave la finaliteacute mecircme du mode drsquoaccegraves A titre drsquoexemple

lrsquoidentifiant du patient (AQS) devait ecirctre entreacute pour acceacuteder au DMP en mode bris de glace

Or la finaliteacute premiegravere de ce type drsquoaccegraves eacutetait pourtant drsquoaccegraveder aux donneacutees drsquoun patient

dans des cas drsquourgences notamment si celui-ci est inconscient et donc inapte agrave renseigner ce

type drsquoinformations

303 La CNIL avait aussi souleveacute lrsquoabsence de la traccedilabiliteacute des accegraves en mode bris de glace

au beacuteneacutefice du meacutedecin de lrsquoheacutebergeur dont la mission principale consistait pourtant agrave veiller

agrave la confidentialiteacute des donneacutees Le Meacutedecin de lrsquoheacutebergeur est donc bien le seul leacutegitime et

potentiellement capable drsquoalerter en cas drsquoutilisation frauduleuse ou trop importante de ce

genre drsquoaccegraves

304 Enfin et crsquoest peut-ecirctre lagrave une des probleacutematique ayant conduit agrave lrsquoeacutechec de cette

expeacuterimentation la CNIL lors de ces controcircles a constateacute que certains heacutebergeurs nrsquoavaient

pas mis en place lrsquointeacutegraliteacute de leur architecture technique preacutefeacuterant attendre la phase de

geacuteneacuteralisation avant drsquoengager les investissements neacutecessaires Or il nous semble que ce type

de comportement en plus drsquoecirctre reacuteveacutelateur drsquoune certaine meacutefiance vis-agrave-vis du projet a

conduit la phase drsquoexpeacuterimentation agrave ne pas ecirctre exeacutecuteacutee correctement ce qui a ameneacute agrave des

conclusions fausseacutees Bien entendu drsquoautres problegravemes techniques et juridiques ont eacuteteacute

releveacutes mais lrsquoimplication partielle de certains acteurs nrsquoa pas permis selon nous de soutenir

correctement le projet

305 En conclusion de ses controcircles la CNIL a rappeleacute aux heacutebergeurs de santeacute mais

eacutegalement au GIP-DMP ainsi qursquoau Ministegravere de la santeacute qursquoune authentification forte un

chiffrement complet et une information claire et complegravete des patients eacutetaient les conditions

neacutecessaires agrave remplir

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

171

En 2009 suite aux diffeacuterents rapports ayant eacutemis de nombreuses preacuteconisations sur la

reacuteforme de lrsquooutil la Ministre de la santeacute de lrsquoeacutepoque a annonceacute la mise en œuvre drsquoun plan

de relance du DMP

2) Une premiegravere relance mitigeacutee

306 Lors de son discours397

agrave lrsquooccasion drsquoun colloque consacreacute agrave la relance du DMP la

Ministre de la santeacute Madame Roselyne Bachelot avait preacutesenteacute la nouvelle feuille de route

du projet Reprenant largement les preacuteconisations deacuteveloppeacutees dans les diffeacuterents rapports

consacreacutes au sujet la Ministre avait alors annonceacute que la nature du DMP serait clarifieacutee le

dossier repositionneacute comme eacutetant un outil au service du patient et des professionnels et non

pas un outil purement technique eacuteloigneacute des reacutealiteacutes pratiques et enfin que la prioriteacute serait

donneacute aux expeacuterimentations au plus pregraves des pratiques afin drsquoadapter lrsquooutil aux mieux aux

besoins De mecircme la volonteacute de rupture vis-agrave-vis de lrsquoancien projet a eacuteteacute marqueacutee par le

changement de la gouvernance du projet lrsquoASIP santeacute a ainsi reacutecupeacutereacute la gestion du projet

Le ministegravere a essayeacute de se montrer plus prudent et raisonnable dans la mise en œuvre du

DMP Ainsi une phase drsquoexpeacuterimentation agrave lrsquoeacutechelle reacutegionale et non plus nationale a eacuteteacute

mise en œuvre en 2009 afin de pouvoir ensuite deacuteployer progressivement une premiegravere

version nationale Ces expeacuterimentations ont permis de choisir parmi les solutions les plus

efficaces deacuteveloppeacutees en reacutegion pour les deacutevelopper au niveau supeacuterieur

307 En parallegravele de cette annonce la loi HPST398

a transposeacute les dispositions relatives au

DMP qui se trouvaient au sein du Code de seacutecuriteacute sociale au sein du Code de la santeacute

publique Ce passage drsquoun code agrave lrsquoautre preacutesente une porteacutee hautement symbolique le but

premier du DMP nrsquoest plus la maicirctrise des deacutepenses de santeacute mais lrsquoameacutelioration et la

coordination des soins Avec la reacuteforme introduite par Mme BACHELOT le DMP nrsquoest plus

un outil de seacutecuriteacute sociale mais bien un outil de santeacute publique

308 Le DMP nrsquoest plus obligatoire et le patient devient degraves lors veacuteritable maicirctre de son

dossier pouvant choisir de lrsquoouvrir ou non De mecircme la sanction financiegravere en cas de refus

397 Discours prononceacute agrave lrsquooccasion du colloque consacreacute agrave la relance du DMP 9 avril 2009 disponible sur

[httpsantegouvfr] Consulteacute le 15 mai 2017 398

Loi ndeg 2009-879 du 21 juillet 2009 portant reacuteforme de lhocircpital et relative aux patients agrave la santeacute et aux

territoires JORF ndeg0167 du 22 juillet 2009 p 12184

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

172

drsquoaccegraves par certains meacutedecins disparait Lagrave encore cette disposition nous apparait comme

reacuteveacutelatrice de la volonteacute du leacutegislateur de marquer le changement drsquoorientation et la prioriteacute

donneacutee agrave lrsquoameacutelioration de la coordination de soins theacutematique plus attractive que celle de la

maicirctrise des deacutepenses de santeacute

Reacuteveacutelateur de la prudence nouvelle du leacutegislateur aucune date preacutecise de deacuteploiement

nrsquoest acteacutee dans les textes ceux-ci se contentant deacutesormais de preacutevoir une mise en œuvre laquodegraves

que lutilisation du dossier meacutedical personnel est possible sur lensemble des territoires

auxquels sapplique la preacutesente section raquo399

Toutefois lors de son discours drsquoavril 2009 la

ministre de la santeacute avait eacutevoqueacute le possible deacuteploiement national degraves 2010 Or en pratique

bien que la geacuteneacuteralisation sur le territoire soit instaureacutee en avril 2011 le DMP va pacirctir de la

suppression en novembre 2011 de son budget de deacuteploiement par la CNAMTS Ainsi en

deacutecembre 2011 seuls 56 000 patients disposaient de leur DMP sans pour autant savoir

combien drsquoentre eux eacutetaient reacuteellement actifs crsquoest-agrave-dire alimenteacutes et consulteacutes Malgreacute un

projet laquo techniquement precirct raquo selon les termes du directeur de lrsquoASIP de lrsquoeacutepoque Jean-Yves

ROBIN seuls 90 000 dossiers eacutetaient creacuteeacutes en mars 2012 le projet eacutetant figeacute dans sa phase

de test

309 En deacutepit drsquoune relance coheacuterente et mieux preacutepareacutee force est de constater que le

DMP lors de sa premiegravere relance a pacircti en plus de probleacutematiques financiegraveres de

consideacuterations politiques qui ont malheureusement pris le dessus sur les consideacuterations de

santeacute publique Il est en effet utile de rappeler que lrsquoanneacutee 2012 a eacuteteacute une anneacutee drsquoeacutelections

Le projet a ainsi subi un retard lieacute agrave la mise en œuvre drsquoun nouveau gouvernement

3) La loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute un nouveau souffle pour le DMP

310 Dans lrsquooptique drsquoamorcer une ultime relance du DMP Marisol TOURAINE Ministre

de la santeacute avait annonceacute degraves novembre 2012 la mise ne place drsquoun DMP 2 Toutefois

aucune reacuteelle preacutecision au sujet de ce dossier nrsquoavait eacuteteacute apporteacutee jusqursquoagrave la preacutesentation du

projet de loi de santeacute en juin 2014400

Crsquoest ainsi que lrsquoarticle 96 de la loi de modernisation de

399 Article L 1111-14 du Code de la santeacute publique

400 Projet de loi relatif agrave la santeacute disponible sur [httpswwwlegifrancegouvfr] Consulteacute le 11 mai 2017

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

173

notre systegraveme de santeacute compleacuteteacute par le deacutecret ndeg 2016-1545 du 16 novembre 2016401

sont

venus refondre une nouvelle fois le dispositif de DMP

311 Lrsquoexposeacute des motifs de la loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute srsquoappuie sur

le caractegravere essentiel du DMP dans la coordination des prises en charge et tente de deacutemontrer

que le leacutegislateur a appris de ses erreurs passeacutees laquo le nouveau dispositif tire les leccedilons des

eacutechecs successifs des diffeacuterents modegraveles de deacuteveloppement du DMP souffrant depuis le deacutebut

dune confusion dobjectifs Assumer les difficulteacutes rencontreacutees conduit agrave proposer un DMP

pluriel adapteacute aux besoins de chacune des parties prenantes et notamment des

professionnels de santeacute Lenjeu du DMP 2 est de deacutefinir le socle dinformations qui doit y

figurer La creacutedibiliteacute de loutil et sa pleine appropriation par les usagers et les

professionnels deacutepend de la rapiditeacute de son implantation de sa capaciteacute agrave devenir un outil

efficace de coordination du rocircle que le meacutedecin traitant sy voit confeacuterer et enfin des

garanties sans faille quil apporte dans la deacutefense des inteacuterecircts et des droits des usagers raquo402

Lrsquoambition du leacutegislateur avec cette ultime relance est de faire du DMP lrsquooutil de reacutefeacuterence

comme support de la prise en charge coordonneacutee des patients notamment dans le cas des

malades atteints de pathologies chroniques

312 La gestion de ce nouveau DMP et de son deacuteploiement est confieacutee agrave la Caisse Nationale

drsquoAssurance Maladie des Travailleurs Salarieacutes (CNAMTS) consideacutereacutee comme plus agrave mecircme

que lrsquoASIP santeacute drsquoassurer le deacuteploiement effectif de lrsquooutil Afin de ne pas reproduire

certaines erreurs effectueacutees dans la gestion passeacutee le leacutegislateur a adopteacute dans la fouleacutee le

deacutecret drsquoapplication des dispositions issues de la loi de modernisation de notre systegraveme de

santeacute

313 Le DMP est deacutesormais deacutefini comme un laquo dossier numeacuterique destineacute agrave favoriser la

preacutevention la qualiteacute la continuiteacute et la prise en charge coordonneacutee des soins du patient raquo403

Le patient reste le titulaire du dossier mecircme si celui-ci nrsquoest plus personnel mais deacutesormais

partageacute Cette nouvelle deacutenomination a le meacuterite de marquer le but premier de ce dossier

401 Deacutecret ndeg 2016-1545 du 16 novembre 2016 autorisant la creacuteation dun traitement de donneacutees agrave caractegravere

personnel deacutenommeacute laquo dossier meacutedical partageacute raquo JORF ndeg0268 du 18 novembre 2016 texte ndeg 14 402

Loi ndeg 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre systegraveme de santeacute exposeacute des motifs disponible

sur [httpswwwlegifrancegouvfr] Consulteacute le 11 mars 2017 403

Article R 1111-26 du Code de la santeacute publique

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

174

partager lrsquoinformation meacutedicale le plus largement possible afin drsquoameacuteliorer le fonctionnement

du systegraveme de santeacute404

314 Cette ultime relance srsquoaccompagne drsquoun plan drsquoaction de la CNAMTS ambitieux afin

de faire du DMP un outil incontournable ouvert pour chaque assureacute social Sa creacuteation sera

simplifieacutee puisqursquoil la possibiliteacute drsquoune creacuteation directe par le patient depuis le site de

lrsquoassurance maladie est envisageacutee405

La CNAMTS a fait le choix drsquoune strateacutegie progressive puisque dans un premier

temps le deacuteploiement nrsquoest envisageacute que dans neufs deacutepartements pilotesEnfin afin drsquoinciter

les patients agrave srsquointeacuteresser au DMP et donc agrave creacuteer le leur la CNAMTS envisage la creacuteation

drsquoune application mobile sur laquelle pourra ecirctre consulteacute le DMP406

404 Etude drsquoimpact du projet de loi relatif agrave la santeacute octobre 2014 p 99

405 laquo Relance du DMP une creacuteation automatique dici fin 2016 et un inteacuteressement agrave lalimentation pour les

meacutedecins (Cnamts) raquo Deacutepecircche TIC santeacute 21 septembre 2015 disponible sur [httpwwwticsantecom]

Consulteacutee le 8 mars 2017 406

laquo DMP une application mobile attendue au printemps 2017 (Nicolas Revel) raquo Deacutepecircche TIC santeacute 10

novembre 2016 disponible sur [httpwwwticsantecom] Consulteacutee le 8 mars 2017

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

175

Conclusion de la section

315 Le DMP dossier meacutedical informatiseacute partageacute entre les diffeacuterents professionnels de

santeacute et accessible directement par le patient est un projet qui peut ecirctre qualifieacute drsquooriginal et

ambitieux Original de par son format et ambitieux de par les objectifs qursquoil devait atteindre

Toutefois degraves le deacutepart le leacutegislateur avait afficheacute un calendrier de mise en œuvre du DMP

beaucoup trop ambitieux En effet lagrave ougrave les pays voisins ont mis une dizaine drsquoanneacutee agrave

deacutevelopper et faire entrer dans les pratiques des dossiers partageacutes informatiseacutes le leacutegislateur

dans la loi de 2004 annonccedilait une entreacutee en vigueur deacutefinitive des dispositions au 1er

juillet

2007 Or tregraves rapidement le projet a fait lrsquoobjet de vives critiques ce qui a ameneacute le

leacutegislateur agrave mettre en œuvre diffeacuterentes relances du projet

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

176

Section 2 Le DMP les limites drsquoun projet ambitieux

laquo Le DMP est un projet de socieacuteteacute qui bouleverse les habitudes et les mentaliteacutes Il constitue

un facteur drsquoeacutevolution des pratiques meacutedicales et des relations entre patients et

professionnels de santeacute [hellip] raquo407

316 Projet titanesque agrave envergure nationale annonceacute comme un outil unique en son genre

le DMP devait remplir des objectifs aux enjeux strateacutegiques Toutefois les diffeacuterents

responsables du projet se sont montreacutes trop ambitieux et parfois mecircme trop confiants dans la

reacutealisation et la mise en place de ce projet Les ambitions du DMP eacutetaient certes louables

mais peut-ecirctre deacutemesureacutees face aux moyens et surtout au temps accordeacute pour sa mise en place

(Paragraphe 1) Aujourdrsquohui apregraves plus de dix ans de tentatives de mise en place et drsquoeacutechecs

successifs lrsquoavenir de cet outil prometteur se reacutevegravele finalement incertain (Paragraphe 2)

sect1 Des ambitions louables mais deacutemesureacutees

317 Nous ne pouvons que rappeler et souligner une fois de plus les ambitions louables du

leacutegislateur quand il a souhaiteacute mettre en place le DMP Degraves son lancement lrsquooutil se reacuteveacutelait

plein de promesses tant sur le fond que sur la forme (A) Toutefois de nombreuses lacunes

notamment en termes drsquoencadrement juridique sont apparues degraves le lancement du projet Cela

srsquoest alors reacuteveacuteleacute facirccheux dans la conduite et le deacuteveloppement du projet (B)

A Un outil plein de promesses

318 Lrsquoobjectif initial du DMP eacutetait drsquoinstaurer une meilleure coordination des soins afin

drsquoen ameacuteliorer la qualiteacute et la continuiteacute De cela aurait alors reacutesulteacute une meilleure maicirctrise

des deacutepenses de lrsquoAssurance maladie

En permettant de reacuteduire les interactions meacutedicamenteuses et les actes redondants mais

en facilitant eacutegalement les eacutechanges entre professionnels de santeacute le DMP devait relever le

407 MONNIER Anne laquo Le Dossier meacutedical personnel histoire encadrement juridique et perspectives raquo RDSS

2009 p 625

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

177

deacutefi drsquoameacuteliorer la coordination et la qualiteacute des soins (1) Toutefois en pratique lrsquoaccent et

la prioriteacute ont eacuteteacute axeacutes sur les aspects techniques de lrsquooutil et notamment la seacutecurisation des

donneacutees (2)

1) Lrsquoameacutelioration et la coordination des soins un enjeu majeur

laquo Dans quelques mois donc les premiers DMP seront ouverts Si le DMP a pu ecirctre preacutesenteacute

comme un outil de maicirctrise des deacutepenses il ne doit y avoir aucune ambiguiumlteacute sur la nature

reacuteelle du DMP le DMP est drsquoabord et avant tout un grand projet de santeacute publique au

service de la santeacute de nos concitoyens raquo408

319 Comme lrsquoavait rappeleacute la Ministre de la santeacute de lrsquoeacutepoque Roselyne BACHELOT

lors de son discours consacreacute agrave la relance du projet DMP lrsquoameacutelioration et la coordination des

soins eacutetaient les enjeux prioritaires de la mise en place du DMP

Ces objectifs clairement afficheacutes dans les textes fondateurs du DMP sont finalement

classiques pour ce type de dossier partageacute Si nous prenons lrsquoexemple du dossier

communiquant en canceacuterologie lrsquoobjectif est bien drsquoameacuteliorer la prise en charge globale des

patients atteints de cancer De mecircme le Dossier Pharmaceutique a bien pour enjeu de mieux

coordonner les prescriptions afin drsquoeacuteviter les interactions meacutedicamenteuses Toutefois la

particulariteacute du DMP tient agrave sa volonteacute de couvrir lrsquoensemble de la prise en charge du patient

peu importe les speacutecialiteacutes concerneacutees Crsquoest bien lagrave que reacuteside le caractegravere agrave la fois innovant

et ambitieux de cet outil Comme le soulignait agrave juste titre Caroline ZORN-MACREZ laquo il y

a lagrave un nouveau scheacutema de rationalisation du systegraveme de soins par le partage de donneacutees de

santeacute gracircce agrave des dossiers utiles aux soins raquo409

320 Au-delagrave de cet objectif se dessine la volonteacute de faire coopeacuterer lrsquoensemble des acteurs

de la prise en charge drsquoun patient Car crsquoest bien par cette coopeacuteration que passe la

coordination et donc lrsquoameacutelioration des soins Le DMP en eacutetant preacutesenteacute comme source drsquoune

information diversifieacutee complegravete et partageacutee est positionneacute comme lrsquooutil neacutecessaire agrave la

408 Discours prononceacute agrave lrsquooccasion du colloque consacreacute agrave la relance du DMP 9 avril 2009 disponible sur

[httpsantegouvfr] Consulteacute le 15 janvier 2015 409

ZORN-MACREZ Caroline laquo Donneacutees de santeacute et secret partageacute raquo op cit p 306

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

178

bonne coopeacuteration des professionnels de santeacute peu importe leur speacutecialiteacute ou leur lieu de

travail

321 Neacuteanmoins il est rapidement apparu que ce sont moins les difficulteacutes techniques ou

budgeacutetaires qui ont poseacute le plus de problegravemes au deacuteveloppement du projet que la barriegravere de

la culture meacutedicale qui nrsquoest pas forceacutement celle du partage de lrsquoinformation En effet le

positionnement des professionnels de santeacute face au DMP est original contrairement aux

dossiers meacutedicaux traditionnels que le professionnel va creacuteer alimenter et conserver le DMP

est conccedilu pour le patient et non pour le professionnel qui sera principalement ameneacute agrave

lrsquoalimenter Il srsquoagit ici drsquoun bouleversement des pratiques habituelles des professionnels

Dans le milieu hospitalier ce choc des cultures est drsquoautant plus flagrant De fait les

eacutetablissements de santeacute ont la particulariteacute du fait des activiteacutes varieacutees de produire un

nombre consideacuterable de donneacutees de santeacute diverses et varieacutees Ainsi afin de donner vie le plus

rapidement possible au DMP lors du programme de relance de 2009 il avait eacuteteacute deacutecideacute de

mettre lrsquoaccent sur lrsquoalimentation des dossiers par les professionnels du secteur hospitalier

ceux-ci ont alors pu ecirctre frustreacutes par cette vision restrictive du rocircle qui leur eacutetait accordeacute

322 Nous pensons que cet eacutetat drsquoesprit illustre bien les attentes peut-ecirctre trop eacuteleveacutees du

leacutegislateur vis-agrave-vis du DMP En effet il nous semble qursquoil aurait peut-ecirctre eacuteteacute plus opportun

de laisser au DMP la vocation premiegravere de tout dossier meacutedical agrave savoir ecirctre un outil

professionnel Bien que les professionnels de santeacute ne soient pas contre lrsquoideacutee drsquoecirctre

transparent vis-agrave-vis de leurs patients il nous semble qursquoil ne faut pas confondre outil de

travail et outil drsquoinformation En laissant une part tregraves importante au patient dans le DMP les

professionnels ont pu se sentir deacuteposseacutedeacutes de ce qui aurait pu ecirctre un outil de travail consacreacute

au partage de lrsquoinformation et agrave la coordination des soins

2) La seacutecuriteacute de lrsquooutil une prioriteacute

Degraves le lancement du projet la seacutecuriteacute de lrsquooutil a eacuteteacute une des prioriteacutes afficheacutee afin

drsquoune part de srsquoassurer que lrsquointeacutegriteacute et la confidentialiteacute des donneacutees soient conserveacutees et

drsquoautre part que les utilisateurs aient une pleine confiance dans lrsquooutil

323 En ce qui concerne lrsquoheacutebergement du DMP apregraves quelques tacirctonnements crsquoest la piste

de lrsquoheacutebergeur unique qui a eacuteteacute finalement retenue Cet heacutebergeur en reacutealiteacute consortium de

plusieurs entreprises a eacuteteacute agreacuteeacute selon les modaliteacutes exigeacutees par lrsquoarticle L 1111-8 du Code

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

179

de la santeacute publique et du deacutecret heacutebergeur De mecircme lrsquoaccent a eacuteteacute mis sur la traccedilabiliteacute au

sein du DMP Ainsi tous les accegraves sont traceacutes qursquoil srsquoagisse de la consultation drsquoun

document ou de son ajout Le patient va ainsi pouvoir identifier quel professionnel a eu accegraves

agrave quel document La date et lrsquoheure sont eacutegalement traceacutees Par ailleurs selon les dispositions

de lrsquoarticle R 1111-31 du Code de la santeacute publique le patient titulaire du dossier mais

eacutegalement son meacutedecin traitant les professionnels de santeacute auxquels le patient aurait confieacute

les mecircmes droits que le meacutedecin traitant et les professionnels auteur des informations faisant

lrsquoobjet des traces peuvent y acceacuteder

324 Le DMP a surtout permis de donner une impulsion agrave la mise en place de lrsquoIdentifiant

National de Santeacute (INS) En effet lrsquoarticle L 1111-8 du Code de la santeacute publique preacutevoyait

les dispositions suivantes laquo un identifiant de santeacute des beacuteneacuteficiaires de lassurance maladie

pris en charge par un professionnel de santeacute ou un eacutetablissement de santeacute ou dans le cadre

dun reacuteseau de santeacute deacutefini agrave larticle L 6321-1 est utiliseacute dans linteacuterecirct des personnes

concerneacutees et agrave des fins de coordination et de qualiteacute des soins pour la conservation

lheacutebergement et la transmission des informations de santeacute Il est eacutegalement utiliseacute pour

louverture et la tenue du dossier meacutedical personnel institueacute par larticle L 161-36-1 du Code

de la seacutecuriteacute sociale et du dossier pharmaceutique institueacute par larticle L 161-36-4-2 du

mecircme Code Un deacutecret pris apregraves avis de la Commission nationale de linformatique et des

liberteacutes fixe le choix de cet identifiant ainsi que ses modaliteacutes dutilisation raquo

Cet identifiant censeacute regrouper lrsquoensemble des identifiants qui existent au sein des

diffeacuterents systegravemes drsquoinformation de santeacute a eacuteteacute instaureacute par la loi du 30 janvier 2007

Consideacutereacute par certains auteurs410

comme eacutetant une donneacutee de santeacute agrave part entiegravere et donc agrave ce

titre devant beacuteneacuteficier des protections mises en place par la loi Informatique et Liberteacute lrsquoINS

a donneacute lieu agrave de nombreux deacutebats concernant sa composition La question srsquoest drsquoabord

poseacutee de savoir si lrsquoINS pouvait ecirctre le Numeacutero drsquoInscription au Reacutepertoire de lrsquoINSEE (NIR

ndash couramment appeleacute numeacutero de seacutecuriteacute sociale) En effet plutocirct que de creacuteer de toute piegravece

un nouveau numeacutero ce qui en plus de repreacutesenter un coucirct financier et humain non

neacutegligeable pouvait preacutesenter des failles en termes de seacutecuriteacute les maicirctres drsquoœuvre du projet

410 V notamment en ce sens HEBERT Sophie laquo Lrsquoidentiteacute sanitaire raquo RGDM 2007 ndeg 24 pp 121-138

ZORN-MACREZ Caroline laquo Donneacutees de santeacute et secret partageacute raquo PUN 2010 p 271 En lrsquoespegravece lrsquoauteur se

base sur les reacuteflexions meneacutees par le groupe de lrsquoarticle 29 sur la nature des donneacutees contenues au sein des DME

pour arriver agrave la conclusion que lrsquoINS est une donneacutee sensible au sens de la loi Informatique et Liberteacutes

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

180

(agrave lrsquoeacutepoque le GIP-DMP) ont alors avanceacute lrsquoideacutee drsquoutiliser le numeacutero de seacutecuriteacute sociale

Toutefois cette ideacutee a subi de vives critiques de la part notamment des associations de

deacutefenses des consommateurs

La CNIL quant agrave elle avait eacutecarteacute une telle possibiliteacute dans sa deacutelibeacuteration du 20

feacutevrier 2007411

estimant que cette utilisation serait de nature agrave laquo alteacuterer les liens de confiance

entre les professionnels de santeacute et les patients ceux-ci pouvant leacutegitimement srsquointerroger sur

les risques drsquoaccegraves non controcircleacutes agrave leur dossier meacutedical par cet identifiant largement

connu raquo

325 Toutefois la CNIL consciente des deacutesagreacutements et de la lourdeur induite par la

creacuteation drsquoun nouvel identifiant avait suggeacutereacute dans cette mecircme deacutelibeacuteration la possibiliteacute pour

creacuteer lrsquoINS de partir du numeacutero NIR mais transcodeacute selon des techniques connues

drsquoanonymisation Cela aboutissant agrave un numeacutero non signifiant LrsquoASIP santeacute chargeacute de

reprendre les activiteacutes du GIP-DMP et notamment la mise en place de lrsquoINS a suivi cette voie

dans la conception de lrsquoINS Le leacutegislateur constatant que laquo lrsquoadoption drsquoun dispositif unique

et commun drsquoidentification des patients est une condition neacutecessaire de lrsquointeropeacuterabiliteacute des

systegravemes drsquoinformation des professionnels et eacutetablissements de santeacute et donc de leur capaciteacute

agrave eacutechanger et partager facilement et de faccedilon seacutecuriseacutee (absence drsquoerreur sur le patient) les

donneacutees meacutedicales neacutecessaires agrave la prise en charge des patient raquo412

a deacutefinitivement reacutegleacute le

problegraveme en faisant du NIR le seul identifiant de santeacute utilisable413

En effet pour le

leacutegislateur le NIR preacutesente le double lrsquointeacuterecirct drsquoecirctre robuste et de permettre une

geacuteneacuteralisation rapide

326 Deacutesormais laquo lidentifiant du dossier meacutedical partageacute est lidentifiant national de

santeacute mentionneacute agrave larticle L 1111-8-1 raquo414

Par ailleurs les conditions drsquoutilisation du NIR

en tant qursquoidentifiant national de santeacute ont eacuteteacute preacuteciseacutees par le deacutecret ndeg 2017-412 du 27 mars

411 Deacutelibeacuteration CNIL ndeg 2007-036 du 20 feacutevrier 2007 portant avis sur deux projets drsquoarrecircteacutes relatifs drsquoune part

aux speacutecifications physiques et logiques de la carte drsquoassurance maladie et aux donneacutees y eacutetant contenues et

drsquoautre part aux conditions drsquoeacutemission et de gestion des cartes drsquoassurance maladie 412

Etude drsquoimpact du projet de loi relatif agrave la santeacute p 187 413

Lrsquoarticle 193 de la loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute vient creacuteer un article L 1111-8-1 au Code

de la santeacute publique qui preacutevoit laquo le numeacutero dinscription au reacutepertoire national didentification des personnes

physiques est utiliseacute comme identifiant de santeacute des personnes pour leur prise en charge agrave des fins sanitaires et

meacutedico-sociales dans les conditions preacutevues agrave larticle L 1110-4 raquo 414

Article R 1111-33 du Code de la santeacute publique

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

181

2017 relatif agrave lrsquoutilisation du numeacutero drsquoinscription au reacutepertoire national drsquoidentification des

personnes physiques comme identifiant national de santeacute415

B Des lacunes certaines

327 Malgreacute les reacuteformes et relances entourant le projet de nombreuses inconnues

subsistent aujourdrsquohui encore faisant du DMP un outil mouvant et parfois flou (1) Quant aux

droits des patients ceux-ci sont incertains malgreacute lrsquoaffichage positif que le leacutegislateur a

souhaiteacute donner (2)

1) Le DMP un outil agrave geacuteomeacutetrie variable

328 La question du contenu du DMP a longtemps poseacute problegraveme Lors de la creacuteation de

lrsquooutil en 2004 le Code de la seacutecuriteacute sociale preacutevoyait les dispositions suivantes laquo chaque

beacuteneacuteficiaire de lrsquoassurance maladie [hellip] dispose drsquoun dossier meacutedical personnel constitueacute de

lrsquoensemble des donneacutees mentionneacutees agrave lrsquoarticle L 1111-8 du mecircme Code raquo Ainsi le

leacutegislateur renvoyait aux donneacutees viseacutees agrave lrsquoarticle L 1111-8 du Code de la santeacute publique agrave

savoir les laquo donneacutees de santeacute recueillies agrave lrsquooccasion drsquoactes de soins de preacutevention ou de

diagnostic raquo Or cette reacutefeacuterence eacutetait maladroite En effet comme nous avons pu le voir

longuement lors drsquoun preacuteceacutedent paragraphe la notion de donneacutees de santeacute nrsquoa fait pendant

longtemps lrsquoobjet drsquoaucune deacutefinition juridique Celle finalement adopteacute par le Regraveglement

Europeacuteen se montre quant agrave elle tregraves large Pourtant il semble difficilement envisageable que

le DMP puisse ecirctre un dossier fourre-tout veacuteritable recueil exhaustif des donneacutees et

informations relatives directement ou indirectement agrave la santeacute du patient En effet rappelons

que le but initial du DMP eacutetait bien drsquoameacuteliorer la coordination des soins Degraves lors seuls les

eacuteleacutements permettant drsquoatteindre ce but devraient figurer en son sein ni plus ni moins Face agrave

un dossier surchargeacute les professionnels ne seraient plus en capaciteacute de retrouver les eacuteleacutements

utiles au suivi de leur patient

415 Deacutecret ndeg 2017-412 du 27 mars 2017 relatif agrave lrsquoutilisation du numeacutero drsquoinscription au reacutepertoire national

drsquoidentification des personnes physiques comme identifiant national de santeacute JORF ndeg0075 du 29 mars 2017

texte ndeg 23

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

182

329 Le rapport sur le Dossier meacutedical personnel de 2007416

relatif au bilan du DMP

soulignait que lrsquoabsence drsquoeacutetude approfondie du contenu du DMP en amont de la creacuteation de

lrsquooutil a eacuteteacute une des erreurs majeures lors de la creacuteation du DMP Mecircme la note relative aux

propositions de contenu remise au ministre de la santeacute par le Docteur Jean-Marie PICARD417

nrsquoenvisageait finalement que succinctement ce contenu Lrsquoerreur serait drsquoenvisager le DMP

comme un dossier se voulant exhaustif veacuteritable laquo reacuteplique eacutelectronique drsquoune armoire de

rangement raquo418

Or il est pourtant eacutevident que ce dossier ne doit pas et ne pourra pas ecirctre

exhaustif ne doit pas pour les raisons exposeacutees preacuteceacutedemment et ne pourra pas pour une

raison tregraves pratique le contenu du DMP deacutepend de la capaciteacute mais aussi de la volonteacute des

professionnels agrave lrsquoalimenter

330 Alors que la loi HPST initiatrice de la premiegravere relance du DMP nrsquoa apporteacute que peu

drsquoeacuteleacutements nouveaux quant au contenu du DMP le deacutecret du 4 juillet 2016419

tente de reacutegler

cette difficulteacute en creacuteant au sein du Code de la santeacute publique une sous-section consacreacutee au

contenu du DMP Un contenu a minima du dossier est deacutesormais preacutevu par lrsquoarticle R 1111-

30 du Code de la santeacute publique permettant drsquoassurer un socle de documents commun agrave tous

les DMP ceux-ci ne risquant plus deacutesormais drsquoecirctre alimenteacutes de maniegravere disparate selon le

bon vouloir des professionnels de santeacute

2) Les droits et devoirs des patients un manque de clarteacute

331 Une des questions qui a eacuteteacute et qui reste encore aujourdrsquohui reacuteguliegraverement souleveacutee est

celle de la protection du secret meacutedical dans le cadre de la mise en place drsquoun outil partageacute

avec un grand nombre de personnes et accessible via Internet Degraves lrsquoorigine du projet le

leacutegislateur avait bien preacutevu que le DMP soit instaureacute dans le respect du secret meacutedical420

Dans lrsquoabsolu le fonctionnement du DMP ne change rien aux regravegles relatives au secret

meacutedical Drsquoailleurs nous nrsquoadheacuterons pas agrave lrsquoaffirmation de Marie-Catherine CHEMTOB-

CONCE qui considegravere que laquo la mise en œuvre du DMP [hellip] permet de mieux proteacuteger le

416 Rapport sur le dossier meacutedical personnaliseacute Inspection geacuteneacuterale des finances Inspection geacuteneacuterale des

Affaires sociales Conseil geacuteneacuterale des Technologies de lrsquoInformation novembre 2007 417

PICARD Jean-Marie laquo Dossier Meacutedical Personnel proposition de contenu raquo enquecircte qualitative meneacutee

aupregraves de professionnels sous lrsquoeacutegide de la CNAMTS 418

Rapport sur le Dossier meacutedical personnaliseacute Inspection geacuteneacuterale des finances Inspection geacuteneacuterale des

Affaires sociales Conseil geacuteneacuterale des Technologies de lrsquoInformation novembre 2007 p 25 419

Deacutecret ndeg 2016-914 du 4 juillet 2016 relatif au dossier meacutedical partageacute op cit 420

Article L 161-36-1 alineacutea 1 du Code de la seacutecuriteacute sociale

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

183

secret meacutedical le secret professionnel raquo421

Au mieux le DMP ne met pas plus en danger le

secret professionnel qursquoun autre dossier informatiseacute mais en aucun cas il nrsquoest possible

drsquoenvisager qursquoun dossier meacutedical informatiseacute pouvant ecirctre accessible par un nombre

important de professionnels de santeacute diffeacuterents sera plus protecteur du secret meacutedical De

plus lrsquooutil en lui-mecircme comme tout dossier informatiseacute est forceacutement vecteur de risques

accrus en termes de seacutecuriteacute et de violation de la confidentialiteacute des donneacutees

332 Neacuteanmoins en ce qui concerne la seacutecurisation technique du DMP lrsquoheacutebergeur du

DMP offre drsquoimportantes garanties exigeacutees degraves le lancement de lrsquoappel drsquooffre et confirmeacutee

suite agrave lrsquoobtention de lrsquoagreacutement heacutebergeur A lrsquoheure actuelle aucune autre garantie

technique suppleacutementaire ne pourrait ecirctre apporteacutee et en cela nous pouvons affirmer que le

DMP apporte une forte protection du secret professionnel Cependant il ne faut pas oublier

que le DMP creacuteeacute une nouvelle forme de partage des donneacutees de santeacute Dans les faits force est

de constater que de nombreux professionnels auront avec cet outil potentiellement accegraves agrave de

nombreux documents issus de la prise en charge du patient Il est donc neacutecessaire de se

preacuteoccuper de la protection reacuteserveacutee agrave la confidentialiteacute des donneacutees

333 Un autre problegraveme intimement lieacute agrave la probleacutematique relative au secret professionnel

avait eacuteteacute souleveacute lors de la saisine du Conseil constitutionnel drsquoun recours contre la loi

relative agrave lassurance maladie pour les auteurs de la saisine les dispositions relatives au

DMP meacuteconnaissaient le droit au respect de la vie priveacutee Le Conseil Constitutionnel dans sa

deacutecision ndeg 2004-504 du 12 aoucirct 2004422

avait toutefois deacuteclareacute les dispositions conformes agrave

la constitution estimant que les garanties preacutesenteacutees par le leacutegislateur afin drsquoassurer le respect

du secret professionnel et de la confidentialiteacute des donneacutees eacutetaient des garanties suffisantes

pour preacuteserver le droit au respect agrave la vie priveacutee

421 CHEMTOB-CONCE Marie-Catherine laquo Dossier Meacutedical Personnel et Dossier Pharmaceutique raquo Gazette

du palais 2007 pp 2-5 422

laquo Consideacuterant en second lieu que le dossier meacutedical personnel sera eacutelaboreacute laquo dans le respect du secret

meacutedical raquo quil reacutesulte du renvoi agrave larticle L 1111-8 du Code de la santeacute publique que lheacutebergement des

donneacutees et la possibiliteacute dy acceacuteder seront subordonneacutes au consentement de la personne concerneacutee que le

traitement des donneacutees sera soumis au respect des dispositions de la loi du 6 janvier 1978 susviseacutee que

lheacutebergeur devra faire lobjet dun agreacutement que laccegraves au dossier par un professionnel de santeacute sera soumis

agrave lobservation des regravegles deacuteontologiques ainsi que des dispositions des articles L 1110-4 et L 1111-2 du Code

de la santeacute publique qui imposent notamment le respect de la vie priveacutee et du secret des informations

concernant le patient que laccegraves au dossier meacutedical en dehors des cas preacutevus par la loi sera puni des peines

preacutevues agrave larticle 226-13 du Code peacutenal que ces sanctions sappliqueront sans preacutejudice des dispositions du

Code peacutenal relatives aux laquo atteintes aux droits de la personne reacutesultant des fichiers ou des traitements

informatiques raquo

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

184

334 Drsquoune maniegravere geacuteneacuterale un tel dossier ouvre le deacutebat sur la place accordeacutee aux droits

fondamentaux face aux enjeux politiques sanitaires et eacuteconomiques que sont la coordination

des soins et la maicirctrise des deacutepenses de santeacute Bien qursquoabandonneacutee lrsquoideacutee drsquoune sanction

financiegravere sous la forme drsquoun non remboursement en cas de refus drsquoaccegraves agrave sa DMP avait eacuteteacute

pourtant valideacutee par le Conseil constitutionnel celui-ci reconnaissant la supeacuterioriteacute de la

maicirctrise des deacutepenses de santeacute sur finalement le respect agrave la vie priveacutee

335 Lrsquoautre question relative aux droits des patients dans le cadre du DMP concerne la

place accordeacutee agrave son consentement En effet dans le cadre du DMP le consentement du

patient peut ecirctre multiple le patient va devoir consentir agrave lrsquoouverture de son DMP puis il va

devoir habiliter les professionnels qui auront accegraves agrave ce dossier il doit donc consentir agrave

partager ses donneacutees de santeacute avec ces professionnels En ce qui concerne le consentement agrave

la mise en place de son DMP cela ne pose pas de problegraveme particulier Lrsquoarticle L 1111-14

du Code de la santeacute publique preacutevoit en effet les dispositions suivantes laquo le dossier meacutedical

partageacute est creacuteeacute sous reacuteserve du consentement expregraves de la personne ou de son repreacutesentant

leacutegal raquo Cette formulation issue de la refonte du DMP introduite par la loi de modernisation

de notre systegraveme de santeacute a le meacuterite drsquoecirctre beaucoup plus claire qursquoauparavant En effet

dans sa reacutedaction anteacuterieure lrsquoarticle L 1111-14 du Code de la santeacute publique ne preacutevoyait

pas le consentement preacutealable du patient agrave la creacuteation de son DMP Toutefois les dispositifs

techniques mis en place pour permettre la creacuteation du DMP permettent de srsquoassurer du

consentement preacutealable du patient celui-ci devant remettre sa carte vitale au professionnel qui

se chargera de creacuteer son DMP

336 Concernant lrsquohabilitation des patients et donc lrsquoautorisation drsquoaccegraves au DMP plusieurs

exceptions vont venir affaiblir le principe du consentement preacutealable du patient Par principe

laquo laccegraves au dossier meacutedical personnel des professionnels mentionneacutes au premier alineacutea est

subordonneacute agrave lautorisation que donne le patient dacceacuteder agrave son dossier raquo423

Il existe

cependant des hypothegraveses dans lesquelles le consentement du patient ne sera pas neacutecessaire

pour acceacuteder agrave son DMP en cas de risque immeacutediat pour une personne hors drsquoeacutetat

drsquoexprimer sa volonteacute et en cas drsquoappel drsquourgence (appels au centre 15) Toutefois ces deux

423 Article L 1111-15 du Code de la santeacute publique

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

185

hypothegraveses qui reprennent finalement la classique exception de lrsquourgence vitale sont dans le

cas du DMP assez bien verrouilleacutees Introduites par la loi de 2007424

ces dispositions

preacutevoient une exception agrave lrsquoexception En effet un meacutedecin peut acceacuteder au DMP sans que le

patient ne lrsquoai autoriseacute et ce en cas de risque immeacutediat ou en cas drsquoappel aux services

drsquourgences sauf si cette personne avait auparavant manifesteacute son opposition expresse agrave ce

que son dossier soit consulteacute ou alimenteacute dans une telle situation Ainsi une opposition

expresse rendra le DMP inaccessible peu importe les circonstances

337 Nous estimons que ces dispositions certes soucieuses de garantir la seacutecuriteacute des

donneacutees et le respect du droit des patients ne sont toutefois pas forceacutement dans lrsquointeacuterecirct de ce

dernier Il nous semble en effet que le principe de sauvegarde de la vie humaine doit rester

une prioriteacute par rapport agrave drsquoautres droits fondamentaux et nous deacuteplorons qursquoune opposition

expresse puisse verrouiller totalement lrsquoaccegraves au DMP accegraves qui dans certaines situations

pourrait ecirctre la seule source drsquoinformations

338 Enfin le DMP introduit la possibiliteacute pour un professionnel qui aurait eacuteteacute habiliteacute par

un patient de recueillir son consentement afin qursquoun autre professionnel agrave qui il pourrait ecirctre

opportun de confier une partie de la prise en charge puisse acceacuteder eacutegalement au DMP

Finalement rien de tregraves original dans cette mesure qui est directement inspireacutee des modaliteacutes

de partage drsquoinformations entre professionnels de santeacute preacutevues au sein de lrsquoarticle L 1110-4

du Code de la santeacute publique425

sect2 Un outil agrave lrsquoavenir incertain

339 A lrsquoheure actuelle le bilan des dix premiegraveres anneacutees du DMP est plus que mitigeacute Degraves

lors lrsquoavenir de cet outil ambitieux se preacutesente assez mal En effet le DMP est victime de ses

premiers eacutechecs et de ce fait est mal perccedilu par ses utilisateurs quels qursquoils soient (A)

424 Loi ndeg 2007-127 du 30 janvier 2007 ratifiant lordonnance ndeg 2005-1040 du 26 aoucirct 2005 relative agrave

lorganisation de certaines professions de santeacute et agrave la reacutepression de lusurpation de titres et de lexercice illeacutegal

de ces professions et modifiant le Code de la santeacute publique JORF ndeg27 du 1 feacutevrier 2007 p 1937 425

Lrsquoarticle L 1110-4 preacutevoit les dispositions suivantes laquo le partage entre des professionnels ne faisant pas

partie de la mecircme eacutequipe de soins dinformations neacutecessaires agrave la prise en charge dune personne requiert son

consentement preacutealable recueilli par tout moyen y compris de faccedilon deacutemateacuterialiseacutee dans des conditions

deacutefinies par deacutecret pris apregraves avis de la Commission nationale de linformatique et des liberteacutes raquo

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

186

Finalement malgreacute les relances diverses depuis sa creacuteation le DMP peine agrave trouver sa place

et il est leacutegitime de se demander si cet outil nrsquoest finalement pas voueacute agrave lrsquoeacutechec (B)

A Un outil mal perccedilu

340 Lrsquoensemble des rapports qui ont pu ecirctre reacutedigeacutes au sujet du DMP pointent la mecircme

faille le manque de confiance et drsquoadheacutesion agrave lrsquooutil que cela soit de la part des

professionnels ou des patients Les professionnels de santeacute et plus particuliegraverement les

professionnels du milieu hospitalier ne cachent pas leurs doutes et leur hostiliteacute face agrave ce

projet leurs craintes sont nombreuses et portent tant sur la charge de travail induite par ce

nouvel outil que sur les conseacutequences qursquoil aura sur leur pratique quotidienne et leur

responsabiliteacute Nous pouvons en effet constater que lrsquointroduction du DMP dans la pratique

meacutedicale ne se fera pas sans conseacutequence sur la responsabiliteacute des professionnels de santeacute (1)

Mais la fonctionnaliteacute qui reste la plus appreacutehendeacutee et donc source de doute est le droit de

masquage des donneacutees (2) accordeacute au patient

1) DMP et responsabiliteacute

Plusieurs questions se sont poseacutees avec lrsquointroduction du DMP quant agrave la responsabiliteacute

des praticiens

341 La premiegravere concerne les nouvelles responsabiliteacutes pesant deacutesormais sur les

professionnels du fait de leurs obligations en lien avec lrsquoouverture drsquoun DMP En effet les

dispositions du Code de la santeacute publique preacutevoient que lrsquousager doit donner un consentement

expregraves agrave lrsquoouverture de son DMP Ainsi cela induit en toute logique pour le professionnel de

santeacute qui sera ameneacute agrave accompagner le patient dans lrsquoouverture de son dossier de lui diffuser

une information claire agrave ce sujet dans un premier temps puis recueillir son consentement dans

un second temps Face agrave ces nouvelles obligations lrsquoASIP santeacute a toutefois creacuteeacute des brochures

drsquoinformation deacutelivrables aux patients afin de faciliter la tacircche des professionnels De mecircme

lrsquooutil informatique support du DMP preacutevoit une case qui doit ecirctre cocheacutee par le

professionnel afin de valider virtuellement le consentement du patient Enfin lrsquooutil

informatique stocke et conserve la trace et la date drsquoobtention du consentement Ainsi dans

lrsquohypothegravese drsquoun contentieux au cours duquel un patient preacutetendrait ne pas avoir consenti agrave

lrsquoouverture de son DMP le professionnel pourrait se deacutefendre en utilisant un faisceau

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

187

drsquoindices composeacute de lrsquoensemble de ces outils Bien qursquoen theacuteorie possible ce genre de

contentieux nrsquoest donc pas drsquoapregraves nous agrave craindre de la part du professionnel

342 La deuxiegraveme reacuteflexion agrave avoir en termes de responsabiliteacute concerne lrsquoobligation

drsquoinformation classique dont tout professionnel est redevable vis-agrave-vis de son patient

En effet le DMP permettrait-il drsquoalleacuteger lrsquoobligation drsquoinformation qui pegravese sur les

professionnels de santeacute Cette theacuteorie est celle soutenue par certains auteurs pour qui le

DMP en diffusant une meilleure information au patient permettra drsquoeacuteviter les

incompreacutehensions autour desquelles se cristallisent parfois les contentieux Crsquoest la theacuteorie

avanceacutee notamment par Jeacuterocircme CAYOL426

Mais peut-on reacuteellement consideacuterer que

lrsquoobligation drsquoinformation du patient sera correctement remplie une fois le DMP compleacuteteacute

Nous pensons que ce nrsquoest pas le cas et qursquoil serait mecircme dangereux drsquoaccepter une telle

possibiliteacute En effet comme lrsquoexige le Code de la santeacute publique et comme le rappelle

reacuteguliegraverement la jurisprudence lrsquoinformation dispenseacutee se doit drsquoecirctre claire loyale et surtout

compreacutehensible Or mecircme si lrsquoinformation contenue au DMP peut remplir les deux premiers

critegraveres seule une discussion entre le professionnel et son patient permettra de srsquoassurer que

lrsquoinformation dispenseacutee a eacuteteacute adapteacutee au degreacute de compreacutehension du patient et a bien eacuteteacute

acquise

343 Par ailleurs comme cela est reacuteguliegraverement souligneacute par les professionnels le patient

ne sera pas toujours capable de geacuterer lrsquoabondance de ces informations et surtout la reacutealiteacute

parfois tregraves dure de certaines drsquoentre elles Il nous semble donc que lrsquoobligation restera la

mecircme Peut-ecirctre sera t-elle-mecircme renforceacutee car le professionnel devra eacutegalement srsquoassurer

que le patient a compris et inteacutegreacute drsquoune part les informations reccedilues mais eacutegalement les

informations preacutesentes sur son dossier

344 Enfin des questions quant aux responsabiliteacutes pesant sur les professionnels au sujet de

la tenue et de la consultation du DMP se posent Concernant la tenue du DMP drsquoabord nous

le savons les professionnels de santeacute ont pour rocircle de lrsquoalimenter Mais quelles seraient les

conseacutequences srsquoils ne le font pas ou le font mal Se pose eacutegalement la question de la qualiteacute

de lrsquoinformation deacuteposeacutee au sein du DMP et des reacutepercussions en termes de responsabiliteacute

Nous retrouvons finalement ici le raisonnement relatif au contenu du dossier enregistrer

426 CAYOL Jeacuterocircme laquo Reacuteflexions sur la responsabiliteacute meacutedicale agrave la suite de lrsquointroduction du dossier meacutedical

personnel raquo Meacutedecine et droit 2006 pp 85-87

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

188

lrsquointeacutegraliteacute des informations de santeacute drsquoun patient au sein du DMP risquerait de faire se

perdre lrsquoinformation utile et neacutecessaire dans une masse de donneacutees insignifiantes Cela

pourrait alors entrainer un deacutefaut ou un retard dans la prise en charge du patient qui lui serait

preacutejudiciable Qui serait alors responsable La mecircme question peut ecirctre poseacutee au sujet de la

qualiteacute de lrsquoinformation Comme le soulignait agrave juste titre Gilles LUCAZEAUX procureur

geacuteneacuteral pregraves la Cour drsquoAppel de Nancy laquoqursquoen est-il du jour ougrave lrsquoon srsquointerrogera sur la

qualiteacute du dossier tenu Srsquoil nrsquoest pas de bonne qualiteacute ne va-t-on pas ouvrir la boite de

Pandore crsquoest-agrave-dire drsquoeacuteventuelles responsabiliteacutes raquo427

Dans lrsquohypothegravese drsquoun dossier mal geacutereacute finalement le droit commun trouverait agrave

srsquoappliquer pour que la responsabiliteacute peacutenale du praticien soit retenue il serait neacutecessaire

drsquoapporter la preuve drsquoune faute caracteacuteriseacutee crsquoest-agrave-dire une faute dont le meacutedecin ne

pouvait pas ignorer les conseacutequences et leurs risques et drsquoun preacutejudice du fait de la mauvaise

tenue

345 Une meilleure connaissance du patient par le meacutedecin de fait de lrsquoaccessibiliteacute agrave

certaines donneacutees qui lui auraient eacuteteacute cacheacutees auparavant entrainerait-il une responsabiliteacute

accrue des praticiens Certes cela est parfaitement envisageable Toutefois cela induit-il une

obligation de consultation du DMP Un professionnel pourrait-il ecirctre fautif du fait de la non

consultation du DMP alors qursquoil y avait accegraves Nous pensons en effet que comme dans

lrsquohypothegravese de la non consultation drsquoun dossier meacutedical par un praticien ou en cas

drsquointerrogatoire incomplet le praticien qui ne consulterait pas le DMP auquel il aurait accegraves

faillirait agrave son obligation de moyens Ainsi la responsabiliteacute civile de lrsquoeacutetablissement de santeacute

ou celle du meacutedecin pourrait ecirctre engageacutee Toutefois il est certain qursquoen ce qui concerne la

mise en œuvre de la responsabiliteacute meacutedicale responsabiliteacute pour faute les regravegles restent

inchangeacutees Tout au plus le DMP permettra au patient drsquoeacutetablir plus facilement le lien de

causaliteacute entre le preacutejudice subi et la faute du professionnel

346 Plusieurs obligations nouvelles vont peser sur le professionnel obligation leacutegale

drsquoinformer le patient au sujet du DMP et drsquoobtenir son consentement pour la creacuteation du

dossier Comme le rappelle lrsquoASIP santeacute agrave juste titre crsquoest au patient qui invoquerait un

427 LUCAZEAUX Gilles laquo La justice peacutenale et les informations meacutedicalesraquo RGDM ndeg 20 2006 pp 189-194

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

189

manquement drsquoapporter la preuve Le leacutegislateur a par ailleurs preacutevu une traccedilabiliteacute de

lrsquoensemble des actions effectueacutees sur le DMP accessibles par le patient Lrsquoarticulation des

regravegles concernant le consentement drsquoacceacuteder agrave son dossier donneacute par un patient agrave un

professionnel avec les regravegles relatives au secret partageacute doivent ecirctre mises agrave plat Cette

articulation nrsquoest pas si simple qursquoil y parait et contrairement agrave une partie de la doctrine

comme Marie-Catherine CHEMTOB-CONCE par exemple qui considegravere que laquo le DMP ne

creacutee aucun changement quant au secret meacutedical raquo et que laquo la mise en œuvre du DMP ne

change pas en soi la responsabiliteacute meacutedicale des professionnels de santeacute et des eacutetablissements

de soin mais permet de mieux proteacuteger le secret meacutedical le secret professionnel et la vie

priveacutee du patient raquo nous consideacuterons au contraire que le DMP ouvre de nouvelles

possibiliteacutes drsquoaccegraves aux donneacutees de santeacute et fragilise ainsi la protection de celles-ci

347 Finalement la doctrine srsquoaccorde en grande majoriteacute pour souligner que le DMP ne

changera strictement rien aux regravegles de responsabiliteacutes applicables428

Les regravegles ordinaires

srsquoappliquent et le DMP ne sera finalement qursquoun outil de plus dans la preuve de la

responsabiliteacute Mais il faut toutefois souligner qursquoil est aussi un outil en plus donc une source

suppleacutementaire de mise en œuvre de la responsabiliteacute des professionnels et ce pour toutes les

raisons eacutevoqueacutees preacuteceacutedemment

2) La theacuteorie du masquage

348 Depuis lrsquointroduction de la possibiliteacute pour le patient de masquer certaines

informations vis-agrave-vis de certains professionnels ceux-ci ont pu faire part de leurs craintes

vis-agrave-vis du dispositif Cette possibiliteacute est preacutevue agrave lrsquoarticle R 1111-38 du Code de la santeacute

publique qui preacutevoit que laquo le titulaire peut deacutecider que des informations le concernant

contenues dans son dossier meacutedical partageacute ne soient pas accessibles aux professionnels de

santeacute autoriseacutes agrave acceacuteder agrave son dossier Ces informations restent cependant accessibles au

professionnel de santeacute qui les a deacuteposeacutees dans le dossier meacutedical partageacute et aux

professionnels de santeacute viseacutes agrave larticle R 1111-43 Cette deacutecision est modifiable agrave tout

moment par le titulaire raquo

428 V en ce sens PY Bruno laquo Conclusions sur les aspects juridiques raquo RGDM ndeg 20 2006 p 239

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

190

349 Le deacutecret du 4 juillet 2016429

a acteacute de maniegravere deacutefinitive cette possibiliteacute sans

apporter pour autant beaucoup de preacutecisions agrave ce sujet Drsquoune maniegravere geacuteneacuterale cette notion

de masquage de certaines donneacutees a eacuteteacute longuement deacutebattue avec lrsquoensemble des acteurs du

DMP En pratique le masquage terme fortement connoteacute il nous semble nrsquoest que la

traduction informatique du colloque singulier qui existe entre le patient et un professionnel de

santeacute En effet lors drsquoune consultation le patient est libre de choisir de cacher des

informations agrave son praticien Or ce dernier en a parfaitement conscience et ne se contente pas

des informations que le patient sera enclin agrave lui donner Il eacutetait donc normal drsquoaccorder cette

mecircme faculteacute au patient au sein de son DMP A ce sujet le rapport FAGNIEZ430

soulignait le

risque drsquoaffaiblissement du colloque singulier du fait de la consultation du DMP le

professionnel se basant uniquement sur les informations contenues et ne cherchant plus agrave

interroger le patient en cela le masquage de certaines donneacutees va preacuteserver ce dialogue

preacutecieux De plus au titre de lrsquoarticle L 1110-4 du Code de la santeacute publique le patient a le

droit de srsquoopposer agrave ce que deux professionnels eacutechangent des donneacutees le concernant cette

possibiliteacute lui est donneacutee au sein du DMP agrave travers le masquage

350 Pour notre part nous pensons que le masquage est simplement la traduction

informatique de la liberteacute accordeacutee au patient de cacher des choses au professionnel qui le

prend en charge Toutefois bien que cette fonctionnaliteacute soit tregraves respectueuse des droits des

patients il nous semble qursquoelle aille finalement agrave lrsquoencontre de lrsquoenjeu premier du DMP qui

est le partage drsquoinformations pour une meilleure coordination des soins En effet dans

lrsquoabsolu un patient pourrait choisir de ne donner accegraves qursquoaux documents que le

professionnel a deacuteposeacute au sein du DMP lui masquant lrsquointeacutegraliteacute des autres donneacutees Or ceci

diminuerait clairement lrsquointeacuterecirct du DMP

351 Nous pensons qursquoil aurait peut-ecirctre eacuteteacute plus efficace drsquoabandonner cette fonctionnaliteacute

de masquage au profit drsquoune validation de la part du patient des documents que le

professionnel peut partager au sein du DMP Une autre solution et crsquoest une des propositions

formuleacutees au sein du rapport FAGNIEZ aurait eacuteteacute de tenter drsquoeacuteviter le masquage laquo solitaire raquo

et drsquoinciter les patients agrave se faire accompagner par un professionnel de confiance par exemple

429 Deacutecret ndeg 2016-914 du 4 juillet 2016 relatif au dossier meacutedical partageacute JORF ndeg0155 du 5 juillet 2016 texte

ndeg 20 430

FAGNIEZ Pierre-Louis laquo Le masquage drsquoinformations par le patient dans son DMP raquo rapport au ministre

de la santeacute et des solidariteacutes 30 janvier 2007

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

191

leur meacutedecin traitant dans le choix des documents qursquoils souhaitent masquer une sorte

laquo drsquoomission partageacutee raquo431

B Un projet voueacute agrave lrsquoeacutechec

352 A lrsquoheure actuelle le projet DMP nrsquoaffiche pas un bilan positif Le dernier rapport sur

le sujet a eacuteteacute reacutedigeacute par la Cour des comptes en juillet 2012 et le bilan financier qursquoelle y

dresse reacutevegravele la situation critique du projet (1) Toutefois le leacutegislateur a tenu agrave lrsquooccasion

drsquoune ultime refonte agrave relancer le projet sous lrsquoeacutegide cette fois-ci de la CNAMTS (2)

1) Le coucirct important du DMP

353 Preacutesenteacute lors de son lancement comme un outil censeacute diminuer les coucircts de santeacute et

donc favoriser des eacuteconomies pour lrsquoassurance maladie le DMP est bien loin drsquoavoir les

effets escompteacutes agrave ce niveau Pire encore il est accuseacute de coucircter beaucoup plus drsquoargent que

ce qursquoil nrsquoa pour lrsquoinstant ou mecircme ne pourra agrave terme amener comme eacuteconomies preacutesentant

pour certains laquo un coucirct excessif pour un succegraves mitigeacute raquo432

354 En juillet 2012 la Cour des comptes saisie par le preacutesident de la commission des

finances de lrsquoAssembleacutee Nationale drsquoune demande drsquoenquecircte sur laquo le coucirct du dossier meacutedical

personnel depuis sa mise en place raquo a rendu un rapport dressant un bilan neacutegatif agrave ce sujet433

Le chiffre avanceacute par la Cour des comptes dans son rapport srsquoeacutelegraveve agrave 210 millions drsquoeuros

deacutepenseacutes entre 2004 et fin 2011 dont un quart en expeacuterimentation Toutefois la Cour des

comptes apporte rapidement un beacutemol important agrave ce chiffre qui ne tient pas compte de

lrsquoensemble des coucircts induits par le projet Plusieurs deacutefaillances lieacutees de maniegravere plus ou

moins directe aux aspects financiers du projet sont pointeacutees par le rapport Lrsquoabsence

drsquoeacutevaluation meacutedico-eacuteconomique ainsi que lrsquoabsence de deacutefinition drsquoune strateacutegie nationale

en termes de systegravemes drsquoinformation de santeacute sont preacutesenteacutees comme des lacunes et donc de

grosses erreurs strateacutegiques de la part des pouvoirs publics De mecircme lrsquoabsence flagrante de

suivi des coucircts du projet ainsi que lrsquoignorance des coucircts induits sont autant de risques lourds

431 FAGNIEZ Pierre-Louis laquo Le masquage drsquoinformations par le patient dans son DMP raquo op cit p 12

432 Article paru sur laquo Le Monde santeacute raquo disponible sur [httpwwwlemondefr] Consulteacute le 10 feacutevrier 2015

433 Cour des comptes laquo Le coucirct du dossier meacutedical personnel depuis sa mise en place raquo communication agrave la

commission des finances de lrsquoAssembleacutee Nationale Juillet 2012

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

192

selon la Cour pour le bon aboutissement du projet Finalement nous partageons pleinement

lrsquoavis de la Cour des comptes qui considegravere que laquo ces deacutefaillances attestent [hellip] drsquoune

absence particuliegraverement anormale et preacutejudiciable de strateacutegie et drsquoun grave deacutefaut de

continuiteacute de meacutethode dans la mise en œuvre drsquoun outil annonceacute comme essentiel agrave la reacuteussite

de profondes reacuteformes structurelles raquo434

355 Depuis ce rapport les deacutetracteurs du projet nrsquoen finissent pas drsquoinvoquer des chiffres

beaucoup plus importants Ainsi en janvier 2014 la somme de 500 millions drsquoeuros a eacuteteacute

avanceacutee dans un article publieacute au sein du journal le Parisien435

Cette somme serait issue drsquoun

document interne du Conseil national de la qualiteacute et de la coordination des soins LrsquoASIP

santeacute alors encore en charge de la gestion du DMP agrave lrsquoeacutepoque avait souhaiteacute rectifier ces

diffeacuterentes informations qursquoelle qualifie drsquoerroneacutees Ainsi dans un document disponible sur

leur site Internet436

le groupement se basant sur des donneacutees qursquoelle qualifie drsquoexactes

documenteacutees et veacuterifieacutees avance des sommes tregraves diffeacuterentes Tout drsquoabord en ce qui

concerne la phase initiale de recherche et de deacuteveloppement (phase drsquoexpeacuterimentation allant

de 2005 agrave 2008) lrsquoassurance maladie aurait verseacute au groupement en charge du projet (agrave

lrsquoeacutepoque le GIP DMP) la somme totale de 92 millions drsquoeuros via le fonds drsquoaide agrave la qualiteacute

des soins de ville (FAQSV) jusqursquoen 2007 le fonds drsquointervention de la qualiteacute et de la

coordination des soins (FIQCS) agrave partir de 2008 et le fonds national de gestion administrative

(FNG) de la Caisse nationale drsquoassurance maladie des travailleurs salarieacutes (CNAMTS) eacutetant

entendu que 90 millions drsquoeuros ont eacuteteacute affecteacute agrave la preacuteparation de la conception Toutefois

ces chiffres ne concordent pas avec ceux avanceacutes par la Cour des comptes dans son rapport de

2012 qui pour sa part avanccedilait la somme drsquoenviron 70 millions drsquoeuros

En ce qui concerne la phase qualifieacutee de phase de construction et drsquoamorccedilage par

lrsquoASIP celle-ci se rapporte aux chiffres de la Cour des comptes entre 2010 et 2013 97

millions drsquoeuros auraient servis agrave financer le DMP (sur les 152 millions drsquoeuros verseacutes agrave

lrsquoASIP) Cette information nous amegravene agrave formuler deux remarques La premiegravere concerne

lrsquoanneacutee 2009 passeacutee sous silence par lrsquoASIP santeacute Bien qursquoentre 2008 et 2009 le projet a

434 Id p 11

435 laquo Dossier meacutedical personnel un demi-milliard pour rien raquo le Parisien 4 janvier 2014 disponible sur

[httpwwwleparisienfr] Consulteacute le 6 feacutevrier 2017 436

Chiffres disponibles sur [httpesantegouvfr] Consulteacutes le 10 feacutevrier 2015

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

193

pris un nouveau tournant437

les financements nrsquoont pas eacuteteacute stoppeacutes pour autant La Cour des

comptes annonce pour cette anneacutee-lagrave la somme de 24 millions drsquoeuros verseacutes dont 20 millions

alloueacutes au DMP

356 Notre seconde reacuteflexion concerne la justification de ces chiffres LrsquoASIP les preacutesente

comme eacutetant ceux de la Cour des comptes Or dans son rapport la Cour preacutecise que les

sommes annonceacutees comme eacutetant affecteacutees au DMP sur le total verseacute par lrsquoassurance maladie

sont les sommes preacutesenteacutees comme tel par lrsquoASIP LrsquoASIP tente habilement de justifier les

chiffres qursquoelle avance et de leur fournir un caractegravere officiel qui nrsquoexiste pas reacuteellement

Alors que la Cour des comptes annonccedilait la somme de 210 millions drsquoeuros agrave fin 2011

lrsquoASIP estime que seuls 187 millions ont eacuteteacute reacuteellement alloueacutes au projet au 31 deacutecembre

2013 Cette diffeacuterence srsquoexplique par la meacutethode retenue par lrsquoASIP santeacute En effet celle-ci a

fait le choix ne pas associer au coucirct du DMP des coucircts drsquoactions conduites au niveau reacutegional

alors que la Cour les considegravere justement comme eacutetant agrave comptabiliser

357 Finalement comme la Cour des comptes le soulignait agrave juste titre un veacuteritable

chiffrage du coucirct du DMP se reacutevegravele quasiment impossible Il semble en effet difficile de

savoir ce que lrsquoon considegravere comme entrant dans le champ du coucirct imputable au DMP agrave ce

sujet les diffeacuterents acteurs ne sont clairement pas drsquoaccord Par ailleurs le manque total de

suivi et de management du projet en termes de finances ne permet pas une transparence

suffisante et pourtant neacutecessaire pour dresser ce type de bilan Ainsi lagrave ougrave les deacutetracteurs du

projet annoncent des coucircts colossaux qursquoil est neacutecessaire de stopper les fervents deacutefenseurs

du projet tentent de minimiser le coucirct reacuteel Dans tous les cas nous estimons deacuteplorable que le

montant total des fonds publics consacreacutes agrave un projet national aussi conseacutequent ne puisse ecirctre

eacutetabli Cela reacutevegravele une deacutefaillance importante et preacutejudiciable dans la gestion des fonds

publics

2) Les beacutemols face agrave la relance de la loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute

358 Face agrave lrsquoimpossibiliteacute de geacuteneacuteraliser le deacuteveloppement du DMP le leacutegislateur srsquoest

pencheacute degraves 2011 sur les possibiliteacutes drsquoeacutevolution envisageables pour ce dossier Ainsi un

437 V Supra ndeg 306 agrave 309

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

194

projet alternatif a drsquoabord eacuteteacute envisageacute par la loi Fourcade438

le dossier meacutedical implanteacute sur

support portable numeacuterique seacutecuriseacute Une expeacuterimentation qui visait speacutecifiquement un

eacutechantillon drsquoassureacutes souffrant drsquoune affection de longue dureacutee devait ecirctre meneacutee selon les

termes de la loi avant le 31 deacutecembre 2013 Toutefois ce projet srsquoest conclu par un eacutechec En

effet degraves 2012 la CNIL avait eacutemis des doutes importants quant agrave la seacutecuriteacute qui pouvait

assurer un tel dispositif Les limites techniques que pouvait preacutesenter un tel support

notamment en termes drsquointeacutegriteacute et de disponibiliteacute des donneacutees mais aussi en termes de

seacutecuriteacute (possibiliteacute de virus notamment) avaient eacuteteacute pointeacutees

359 LAssociation pour la promotion de linformatique et de la communication en

meacutedecine (Apicem) avait toutefois tenteacute fin 2012 de lancer une expeacuterimentation du dossier sur

clef USB sans reacuteussir pour autant agrave tenir lrsquoeacutecheacuteance leacutegale fixeacutee au 31 deacutecembre 2013 et la

Ministre de la santeacute Marisol TOURAINE a refuseacute de prolonger ce deacutelai Elle avait drsquoailleurs

rappeleacute ecirctre deacutefavorable agrave la prolongation de ce type drsquoexpeacuterimentation439

preacutecisant

neacuteanmoins srsquoengager agrave ce qursquoun programme permettant drsquoaboutir au DMP 2 soit rapidement

mis en place

360 La refonte du DMP nrsquoa finalement eu lieu qursquoen 2016 avec la loi de modernisation de

notre systegraveme de santeacute Le leacutegislateur a opeacutereacute un virage majeur qui sur certains points peut

ecirctre consideacutereacute comme un retour en arriegravere le Dossier Meacutedical Personnel devient dans sa

version 20 Partageacute Changement de formulation lourde de sens puisque lrsquooutil au service du

patient devient deacutesormais un service pour les professionnels de santeacute le patient qui en reste

titulaire conservant le consentement agrave son ouverture et lrsquoaccegraves direct

361 Autre retour en arriegravere lrsquoenjeu de ce dossier serait une nouvelle fois recentreacute sur la

maicirctrise des deacutepenses de santeacute En effet bien que la loi de modernisation de notre systegraveme de

santeacute ne le preacutesente pas de maniegravere claire en preacutevoyant un controcircle du projet par la CNAMTS

et non plus par lrsquoASIP santeacute le leacutegislateur affiche clairement la prioriteacute donneacutee agrave lrsquooutil

Drsquoailleurs le contenu du DMP preacutevu par lrsquoarticle R 1111-30 du Code de la santeacute publique

438Loi ndeg 2011-940 du 10 aoucirct 2011 modifiant certaines dispositions de la loi ndeg 2009-879 du 21 juillet 2009

portant reacuteforme de lhocircpital et relative aux patients agrave la santeacute et aux territoires JORF ndeg0185 du 11 aoucirct 2011 p

13754 439

Question eacutecrite ndeg 48488 publieacutee au JO le 4 feacutevrier 2014 p 934 reacuteponse apporteacutee et publieacutee au JO le 17 juin

2014 p 49223

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

195

integravegre les donneacutees de remboursement de lrsquoassurance maladie consideacutereacutees comme

eacutetant neacutecessaires agrave la coordination des soins Ce controcircle est critiquable agrave plusieurs niveaux

Drsquoune part nous pouvons leacutegitimement nous poser la question de la possibiliteacute pour

lrsquoassurance maladie de concilier ses missions propres avec la gestion et la mise en place drsquoun

dossier partageacute dont le contenu sera plus que sensible Drsquoautre part et comme nous lrsquoavons

deacutejagrave souligneacute il srsquoagit ici drsquoun revirement agrave la symbolique forte le DMP nrsquoest plus un outil

de santeacute publique et les prioriteacutes ne sont plus les mecircmes Toutefois face aux nombreuses

critiques qursquoa pu essuyer le projet que ce soit en termes de gestion ou de financement nous

estimons que la deacutecision de confier la conduite du projet agrave lrsquoorganisme qui en sera le principal

financeur relegraveve du bon sens et permettra certainement de mener agrave bien le projet plus

facilement mecircme si celui-ci srsquoeacuteloignera de son essence initiale

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

196

Conclusion de la section

362 Outil plein de promesses le DMP nrsquoa toutefois pas reacuteussi agrave ce jour agrave atteindre les

objectifs qui lui avaient eacuteteacute fixeacutes A sa deacutecharge nous ne pouvons que constater lrsquoambition

deacutemesureacutee du leacutegislateur degraves le deacutebut du projet Bien que les enjeux soient louables les

moyens qui lui ont eacuteteacute accordeacutes (juridiques financiers ou humains) nrsquoeacutetaient pas adapteacutes agrave

lrsquoampleur de la tacircche A sa deacutecharge le DMP nrsquoa pas rencontreacute le succegraves escompteacute aupregraves des

professionnels de santeacute et agrave deacutefaut drsquoalimentation il a peu agrave peu perdu de son inteacuterecirct Face

aux critiques qui ne cessent de se deacutevelopper notamment sur le coucirct aujourdrsquohui encore

obscur du DMP depuis 2004 le leacutegislateur a souhaiteacute lui donner une derniegravere chance Avec la

loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute il tente donc le tout pour le tout en confiant agrave

la CNAMTS le soin de relancer de maniegravere efficace ce dossier qui se fait attendre

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

197

Conclusion du chapitre

363 Depuis plusieurs anneacutees le deacuteveloppement des TIC en santeacute a ameneacute les

professionnels de santeacute et les eacutetablissements de santeacute agrave se doter de dossiers meacutedicaux

eacutelectroniques

364 Face au deacuteveloppement de lrsquoinformatisation mais eacutegalement aux neacutecessiteacutes accrues de

partage de lrsquoinformation entre les professionnels de santeacute et inspireacute des expeacuteriences reacuteussies

de nos pays voisins le leacutegislateur a souhaiteacute en 2004 mettre en place un dossier informatiseacute

partageacute national le Dossier Meacutedical Personnel eacutetait neacute Preacutesenteacute comme un compleacutement des

autres dossiers et se deacutemarquant par plusieurs originaliteacutes et innovations (portail drsquoaccegraves

unique accessibiliteacute et controcircle de son dossier par le patienthellip) le DMP avait des ambitions

louables Toutefois tregraves rapidement cette ambition du leacutegislateur srsquoest retourneacutee contre le

projet qui pacircti depuis dix ans drsquoun manque drsquoencadrement juridique et manageacuterial Au fil

des anneacutees les acteurs ont alors perdu confiance dans lrsquooutil jusqursquoagrave reacutecemment deacutenoncer son

coucirct exorbitant Le DMP est aujourdrsquohui consideacutereacute par certains comme un eacutechec

365 La loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute preacutevoyant une ultime relance du

projet sera peut-ecirctre la boueacutee de sauvetage du Dossier Meacutedical devenu Partageacute En modeacuterant

ses ambitions et en confiant la gouvernance du projet agrave un acteur qui a deacutejagrave participeacute agrave un

projet drsquoinformatisation des donneacutees de santeacute meneacute agrave bien440

le leacutegislateur accorde au DMP

toutes les chances dont il a besoin pour fonctionner

440La CNAMTS fait partie du GIE SESAM-VITALE en charge notamment de la mise en place et du

deacuteploiement de la carte vitale

199

Chapitre 2

Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du

patient

366 Les Technologies drsquoInformation et de la Communication ont apporteacute de nouvelles

possibiliteacutes de prise en charge du patient Avec elles se sont donc deacuteveloppeacutees de nouvelles

pratiques meacutedicales agrave distance permettant notamment de reacuteduire les ineacutegaliteacutes drsquoaccegraves aux

soins pour certaines populations en difficulteacute soit de par leur situation personnelle (par

exemple les deacutetenus ou les personnes acircgeacutees) soit de par leur situation geacuteographique

Ces pratiques maintenant ancreacutees pour certaines drsquoentre elles depuis une vingtaine

drsquoanneacutees se sont reacutecemment vues encadreacutees par le leacutegislateur (Section I) soucieux agrave la fois

de preacuteserver les droits des patients mais eacutegalement drsquoeacuteviter certaines deacuteviances Le

deacuteveloppement de lrsquoutilisation des TIC dans le cadre de la prise en charge du patient a

cependant rendu plus complexes les regravegles applicables en matiegravere de responsabiliteacute meacutedicale

En effet ces pratiques induisent de nouveaux risques et font intervenir de nouveaux acteurs

rendant ainsi neacutecessaire la clarification des regravegles applicables en matiegravere de responsabiliteacute

(Section II)

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

200

Section 1 La prise en charge agrave distance un cadre naissant

367 La pratique de la meacutedecine agrave distance nrsquoest pas nouvelle En effet certains reacuteseaux de

teacuteleacutemeacutedecine existent et fonctionnent depuis pregraves de vingt ans Ces pratiques ont drsquoabord

consisteacute en du conseil teacuteleacutephonique ou des visioconfeacuterences avant de se structurer

conduisant agrave la naissance de veacuteritables reacuteseaux de reacutefeacuterence441

Pourtant la notion de

teacuteleacutemeacutedecine a longtemps eacuteteacute deacutepourvue de deacutefinition juridique la pratique nrsquoeacutetant

absolument pas appreacutehendeacutee par le droit Ce nrsquoest que reacutecemment que le leacutegislateur srsquoest

pencheacute sur cette pratique pour lrsquoencadrer (Paragraphe 1)

En revanche il srsquoest inteacuteresseacute bien plus tocirct agrave la question de prescriptions meacutedicales

informatiseacutees (Paragraphe2) souhaitant seacutecuriser la prise en charge meacutedicamenteuse des

patients

sect1 La teacuteleacutemeacutedecine une pratique ancienne reacutecemment consacreacutee par

le leacutegislateur

368 Le leacutegislateur est reacutecemment venu srsquointeacuteresser agrave une pratique qui pourtant se

deacuteveloppait depuis plus de vingt ans442

Ainsi lrsquoarticle 78 de la loi HPST compleacuteteacute par le

deacutecret du 9 octobre 2010443

ont poseacute les regravegles applicables aux activiteacutes de teacuteleacutemeacutedecine

Toutefois ce cadre deacutefini de maniegravere stricte et circonscrite (A) srsquoajoute au cadre geacuteneacuteral

relatif aux droits des patients et agrave la protection de leurs donneacutees de santeacute rendant la pratique

de la teacuteleacutemeacutedecine lourde agrave mettre en place (B)

441 V notamment en ce sens TIERS Gonzague CAPON Catherine CLEMENTE Heacutelegravene laquo Teacuteleacutemeacutedecine en

reacutegion Nord-Pas de Calais raquo ITBM-RBM 2000 271-4 au sujet du reacuteseau de teacuteleacutemeacutedecine TELURGE

opeacuterationnel depuis mai 1996 442

Ibid 443

Deacutecret ndeg 2010-1229 du 19 octobre 2010 relatif agrave la teacuteleacutemeacutedecine JORF ndeg 0245 du 21 octobre 2010 texte ndeg

13

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

201

A Un cadre speacutecifique strictement deacutefini par la loi HPST

369 Lrsquoarticle 78 de la loi HPST fixe le cadre actuel de la teacuteleacutemeacutedecine Cet article et son

deacutecret drsquoapplication viennent seacutecuriser la pratique de la teacuteleacutemeacutedecine Ce cadre instituant une

proceacutedure preacutealable au deacuteveloppement de toute activiteacute de teacuteleacutemeacutedecine (2) preacutesente

eacutegalement lrsquointeacuterecirct de venir deacutefinir leacutegalement la teacuteleacutemeacutedecine (1)

1) La teacuteleacutemeacutedecine seule pratique agrave distance leacutegalement deacutefinie

a) Deacutefinition des diffeacuterentes pratiques

370 Avec le deacuteveloppement de lrsquoutilisation de TIC dans la pratique meacutedicale srsquoest

eacutegalement deacuteveloppeacute un champ lexical relatif agrave lrsquoexercice agrave distance de la meacutedecine Ainsi il

nous parait indispensable de deacutefinir certains termes afin de les exclure de notre reacuteflexion En

effet il est reacuteguliegraverement fait usage et parfois de maniegravere indiffeacuterencieacutee des termes teacuteleacutesanteacute

e-santeacute m-health ou encore e-health

371 Degraves 1998 lrsquoOrganisation Mondiale de la Santeacute affirmait la neacutecessiteacute de distinguer la

teacuteleacutesanteacute de la teacuteleacutemeacutedecine ce dernier terme devant ecirctre reacuteserveacute aux seules actions cliniques

et curatives de la meacutedecine utilisant les TIC444

Comme le soulignait agrave juste titre Pierre

LABORDES dans son rapport relatif agrave la teacuteleacutesanteacute445

ce terme reste une notion impreacutecise

Pour lui laquo son champ drsquoapplication est plus vaste que celui de la teacuteleacutemeacutedecine par sa

vocation agrave couvrir outre le domaine meacutedical au sens strict le domaine tregraves large et divers du

meacutedico-social raquo446

Drsquoune maniegravere plus preacutecise Pierre LABORDES tente de deacutefinir

diffeacuterentes pratiques qursquoil considegravere comme appartenant au domaine de la teacuteleacutesanteacute Pour le

deacuteputeacute peuvent donc relever de la teacuteleacutesanteacute des activiteacutes telles que la teacuteleacuteinformation la

teacuteleacutevigilance le teacuteleacutemonitoring la teacuteleacutecollaboration la teacuteleacuteprescription447

Ainsi la

teacuteleacutesanteacute se distinguerait assez clairement de la teacuteleacutemeacutedecine

444 HAS laquo Efficience de la teacuteleacutemeacutedecine eacutetat des lieux de la litteacuterature internationale et cadre drsquoeacutevolution raquo

juillet 2013 p 11 disponible sur [httpwwwhas-santefr] Consulteacute le 15 mai 2017 445

LABORDES Pierre laquo La teacuteleacutesanteacute un nouvel atout au service de notre bien-ecirctre raquo La Documentation

franccedilaise octobre 2009 446

Id p 36 447

LABORDES Pierre laquo La teacuteleacutesanteacute un nouvel atout au service de notre bien-ecirctre raquo op cit p 37

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

202

Lrsquoexercice de deacutefinition se complique toutefois quand on en vient agrave deacutefinir les notions

drsquoe-santeacute et de m-health Cette difficulteacute provient essentiellement de confusions dans la

traduction faite de ces notions Ainsi il nrsquoest pas rare que le terme e-santeacute soit utiliseacute pour

faire reacutefeacuterence agrave lrsquoactiviteacute de teacuteleacutesanteacute Crsquoest le cas par exemple de Pierre SIMON et

Dominique ACKER qui dans leur rapport relatif agrave la teacuteleacutemeacutedecine emploient ces deux

termes de maniegravere indistincte laquo les technologies du numeacuterique appliqueacutees agrave la santeacute

couvrent le champ de la e-santeacute ou teacuteleacutesanteacute [hellip] raquo448

Or initialement le terme de e-health

qui pourrait ecirctre traduit litteacuteralement par e-santeacute a eacuteteacute utiliseacute par lrsquoOMS pour faire reacutefeacuterence

aux laquo activiteacutes services et systegravemes lieacutes agrave la santeacute pratiqueacutes agrave distance au moyen des TIC

pour les besoins planeacutetaires de promotion de la santeacute des soins et du controcircle des eacutepideacutemies

de lrsquoeacutepideacutemiologie de la gestion et de la recherche appliqueacutees agrave la santeacute raquo Cette deacutefinition

est donc bien plus large que celle donneacutee pour la teacuteleacutesanteacute

Dans ses travaux consacreacutes agrave lrsquoencadrement juridique de la gestion eacutelectronique des

donneacutees meacutedicales NrsquoDa Brigitte ETIEN-GNOAN449

srsquoappuie sur la deacutefinition proposeacutee par

Gunther EYSENBACH pour deacutelimiter les contours de lrsquoe-santeacute Ainsi elle en deacuteduit que laquo la

e-santeacute ne srsquoinscrit pas dans une logique personnaliseacutee de diagnostic ou de theacuterapie alors que

la teacuteleacutesanteacute mecircme si elle consiste quelque fois en des transmissions drsquoinformations ou de

formation elle est plus marqueacutee par des actes ou services adresseacutes agrave des personnes de

maniegravere personnelle raquo450

La notion de e-santeacute serait donc un terme permettant de deacutesigner

des pratiques plus geacuteneacuteriques et moins personnaliseacutees que sont la teacuteleacutesanteacute ou la

teacuteleacutemeacutedecine

Enfin le terme m-health deacutesigne la mobile-health ou santeacute-mobile Il srsquoagit des

services drsquoinformations mais eacutegalement de recueil drsquoinformations de santeacute via des objets

connecteacutes afin de dispenser des conseils santeacute personnaliseacutes Cette pratique en plein essor ne

fera pourtant pas lrsquoobjet de notre eacutetude ici et nous ne pousserons donc pas plus loin lrsquoexercice

de deacutefinition En effet il srsquoagit drsquoune pratique qui ne touche aujourdrsquohui que de tregraves loin les

448 SIMON Pierre ACKER Dominique laquoLa place de la teacuteleacutemeacutedecine dans lrsquoorganisation des soins raquo novembre

2008 p 8 449

ETIEN-GNOAN NDa Brigitte laquo Lrsquoencadrement juridique de la gestion eacutelectronique des donneacutees

meacutedicales raquo deacutecembre 2014 thegravese pour obtenir le grade de docteur en droit disponible sur [httppepite-

depotuniv-lille2fr] Consulteacute le 15 mai 2017 450

Id p 224

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

203

eacutetablissements publics de santeacute et crsquoest pourquoi nous preacutefeacuterons lrsquoexclure de notre champ

drsquoeacutetude

372 Cet exercice termineacute nous pouvons nous concentrer sur la notion de teacuteleacutemeacutedecine

seule notion dans le domaine ayant une reacuteelle existence et deacutefinition leacutegale

Lrsquoarticle 78 de la loi HPST vient creacuteer au sein du titre premier du livre troisiegraveme de la

sixiegraveme partie du Code de la santeacute publique451

un chapitre six intituleacute laquo Teacuteleacutemeacutedecine raquo

Celle-ci est deacutefinie comme laquo une forme de pratique meacutedicale agrave distance utilisant les

Technologies de lrsquoInformation et de la Communication Elle met en rapport entre eux ou

avec un patient un ou plusieurs professionnels de santeacute parmi lesquels figure neacutecessairement

un professionnel meacutedical et le cas eacutecheacuteant drsquoautres professionnels apportant leurs soins au

patient raquo Toujours selon lrsquoarticle L 6316-1 du Code de la santeacute publique la teacuteleacutemeacutedecine

laquo permet drsquoeacutetablir un diagnostic drsquoassurer pour un patient agrave risque un suivi agrave viseacutee

preacuteventive ou un suivi post-theacuterapeutique de requeacuterir un avis speacutecialiseacute de preacuteparer une

deacutecision theacuterapeutique de prescrire des produits de prescrire ou de reacutealiser des prestations

ou des actes ou drsquoeffectuer une surveillance de lrsquoeacutetat des patients raquo Avec cette deacutefinition le

leacutegislateur fait donc de la teacuteleacutemeacutedecine un acte meacutedical agrave part entiegravere clairement deacutefini drsquoune

part et juridiquement consacreacute drsquoautre part

b) Les cinq actes de teacuteleacutemeacutedecine

373 Le deacutecret du 9 octobre 2010 deacutefinit cinq actes relevant de la teacuteleacutemeacutedecine Degraves lors

seules les pratiques correspondant agrave une de ces cinq deacutefinitions seront consideacutereacutees comme des

actes de teacuteleacutemeacutedecine entrant dans le cadre leacutegal (sous reacuteserve bien entendu de reacutepondre

eacutegalement aux autres contraintes du deacutecret452

) La liste de ces actes a eacuteteacute codifieacutee au sein de

lrsquoarticle R 6316-1 du Code de la santeacute publique

374 Le premier acte de teacuteleacutemeacutedecine est la teacuteleacuteconsultation acte ayant pour objet de

permettre agrave un professionnel meacutedical de donner une consultation agrave distance agrave un patient Un

professionnel de santeacute peut ecirctre preacutesent pregraves du patient et le cas eacutecheacuteant assister le

professionnel meacutedical au cours de la consultation Le texte preacutecise eacutegalement que les

psychologues peuvent eacutegalement ecirctre preacutesents aupregraves du patient

451 laquo Etablissements et services de santeacute raquo

452 V Infra ndeg 377 agrave 381

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

204

375 Le deuxiegraveme acte de teacuteleacutemeacutedecine est la teacuteleacuteexpertise Celle-ci a pour but de permettre

agrave un professionnel meacutedical de solliciter agrave distance lrsquoavis drsquoun ou plusieurs professionnels

meacutedicaux en raison de leurs formations ou de leurs compeacutetences particuliegraveres sur la base des

informations meacutedicales lieacutees agrave la prise en charge drsquoun patient Cette pratique est finalement

lrsquoapplication aux TIC de la possibiliteacute dont dispose le professionnel de pouvoir solliciter un

confregravere dans certains cas

376 Le troisiegraveme acte viseacute par le deacutecret du 9 octobre 2010 est la teacuteleacutesurveillance meacutedicale

Cette pratique a pour objet de permettre agrave un professionnel meacutedical drsquointerpreacuteter agrave distance les

donneacutees neacutecessaires au suivi meacutedical drsquoun patient et le cas eacutecheacuteant de prendre des deacutecisions

relatives agrave la prise en charge de ce patient Lrsquoenregistrement et la transmission des donneacutees

peuvent ecirctre automatiseacutes ou reacutealiseacutes par le patient lui-mecircme ou par un professionnel de santeacute

La quatriegraveme pratique est la teacuteleacuteassistance meacutedicale permettant agrave un professionnel meacutedical

drsquoassister agrave distance un autre professionnel de santeacute au cours de la reacutealisation drsquoun acte

Enfin le leacutegislateur a eacutegalement inscrit parmi les actes de teacuteleacutemeacutedecine la reacuteponse

meacutedicale apporteacutee dans le cadre de la reacutegulation meacutedicale

Seules ces cinq pratiques sont constitutives drsquoun acte de teacuteleacutemeacutedecine

2) Une proceacutedure preacutealable stricte

377 Le deacutecret du 9 octobre 2010 ne srsquoest pas contenteacute drsquoapporter des deacutefinitions il a

eacutegalement instaureacute le cadre leacutegal conventionnel et financier dans lequel doit srsquoinscrire lrsquoacte

de teacuteleacutemeacutedecine Plusieurs exigences preacutealables au deacuteveloppement drsquoun projet de

teacuteleacutemeacutedecine doivent donc drsquoecirctre respecteacutees Nous ne nous attarderons pas ici sur les regravegles de

droit commun applicables agrave lrsquoexercice de la meacutedecine drsquoune maniegravere geacuteneacuterale qui vont

srsquoopposer eacutegalement agrave lrsquoactiviteacute de teacuteleacutemeacutedecine ces eacuteleacutements eacutetant deacuteveloppeacutes

ulteacuterieurement453

Nous preacutefeacuterons nous concentrer sur les regravegles propres agrave lrsquoactiviteacute de

teacuteleacutemeacutedecine eacutedicteacutees par le deacutecret de 2010

453 V Infra ndeg 425 et s

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

205

378 Celles-ci sont de trois ordres Drsquoabord lrsquoactiviteacute de teacuteleacutemeacutedecine ne peut pas ecirctre mise

en place si elle ne srsquoinscrit pas au choix dans un programme national dans un contrat

pluriannuel drsquoobjectifs et de moyens454

(CPOM) ou dans un contrat particulier signeacute avec le

Directeur Geacuteneacuteral (DG) de lrsquoARS Le deacutecret preacutecise eacutegalement que le CPOM ou le contrat

particulier signeacute avec le DG ARS devra respecter par ailleurs les prescriptions du programme

relatif au deacuteveloppement de la teacuteleacutemeacutedecine lui-mecircme inclus dans le projet reacutegional de

santeacute455

On peut noter ici une volonteacute de la part du leacutegislateur de srsquoassurer que les projets de

teacuteleacutemeacutedecine se deacuteveloppent en lien avec les ARS et dans le respect des besoins de santeacute des

populations De ce fait elles jouent un rocircle important puisqursquoelles garantissent la coheacuterence

des activiteacutes deacuteveloppeacutees avec les besoins du territoire Il srsquoagit eacutegalement drsquoun moyen utile

pour orienter le deacuteveloppement de projets sur des theacutematiques ou des speacutecialiteacutes consideacutereacutees

comme prioritaires Il est important de preacuteciser que suite au deacutecret dit Teacuteleacutemeacutedecine la

Direction Geacuteneacuterale de lrsquoOffre de Soins (DGOS) a souhaiteacute mettre en place une strateacutegie

nationale de deacuteploiement de la teacuteleacutemeacutedecine Celle-ci a consisteacute en la mise en place drsquoun

comiteacute de pilotage national456

en charge de coordonner les initiatives des diffeacuterents acteurs de

la teacuteleacutemeacutedecine En 2011 ce comiteacute de pilotage national a identifieacute cinq theacutematiques

consideacutereacutees comme eacutetant des prioriteacutes nationales de deacuteploiement de la teacuteleacutemeacutedecine Il srsquoagit

de la permanence des soins en imagerie de la prise en charge de lrsquoAVC de la santeacute des

personnes deacutetenues de la prise en charge des maladies chroniques et des soins en structures

meacutedico-sociale ou HAD Ces theacutematiques sont agrave lrsquoheure actuelle prioriseacutees dans les

programmes reacutegionaux de deacuteveloppement de la teacuteleacutemeacutedecine

454 Article L 6114-1 du Code de la santeacute publique laquo lagence reacutegionale de santeacute conclut avec chaque

eacutetablissement de santeacute ou titulaire de lautorisation preacutevue agrave larticle L 6122-1 un contrat pluriannuel

dobjectifs et de moyens dune dureacutee maximale de cinq ans Lorsquil comporte des clauses relatives agrave lexeacutecution

dune mission de service public le contrat est signeacute pour une dureacutee de cinq ans raquo 455

Article L 1434-2 du Code de la santeacute publique laquo le projet reacutegional de santeacute est constitueacute

1deg Dun plan strateacutegique reacutegional de santeacute qui fixe les orientations et objectifs de santeacute pour la reacutegion

2deg De scheacutemas reacutegionaux de mise en œuvre en matiegravere de preacutevention dorganisation de soins et dorganisation

meacutedico-sociale

3deg De programmes deacuteclinant les modaliteacutes speacutecifiques dapplication de ces scheacutemas dont un programme relatif

agrave laccegraves agrave la preacutevention et aux soins des personnes les plus deacutemunies et un programme relatif au deacuteveloppement

de la teacuteleacutemeacutedecine La programmation peut prendre la forme de programmes territoriaux de santeacute pouvant

donner lieu agrave des contrats locaux de santeacute tels que deacutefinis agrave larticle L 1434-17

Le plan strateacutegique reacutegional de santeacute preacutevoit des articulations avec la santeacute au travail la santeacute en milieu

scolaire et la santeacute des personnes en situation de preacutecariteacute et dexclusion raquo 456

Ce comiteacute de pilotage est animeacute et coordonneacute par la DGOS en lien avec drsquoautres partenaires institutionnels

tels que la DSSIS lrsquoASIP Santeacute la DSS la CNAM-TS lrsquoANAP la HAS la DATAR la DGCIS et les

repreacutesentants des usagers

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

206

379 Les eacutetablissements organismes etou professionnels de santeacute qui participent agrave une

activiteacute de teacuteleacutemeacutedecine vont eacutegalement devoir conclure entre eux une convention afin de

reacutegir leurs relations et les conditions drsquoorganisation de cette activiteacute A ce sujet la CNIL

recommande que les engagements et les responsabiliteacutes des acteurs soient rappeleacutes dans ces

conventions Celles-ci devront eacutegalement en pratique comprendre les mentions relatives agrave

lrsquoorganisation de lrsquoactiviteacute agrave lrsquoheacutebergement agrave la seacutecuriteacute et la confidentialiteacute des donneacutees

mais eacutegalement celles relatives agrave la proceacutedure deacutegradeacutee agrave organiser dans lrsquohypothegravese drsquoune

deacutefaillance de la solution technique initiale

380 Enfin les organismes eacutetablissements ou professionnels de santeacute qui mettent en place

une activiteacute de teacuteleacutemeacutedecine doivent srsquoassurer agrave la fois de la formation mais aussi des

compeacutetences techniques des professionnels qui prennent part agrave lrsquoactiviteacute Toutefois notons

que le deacutecret reste muet en ce qui concerne les moyens de controcircle de la bonne formation des

professionnels En cas de contentieux il reviendrait alors agrave lrsquoeacutetablissement de santeacute drsquoapporter

la preuve qursquoil a bien formeacute ses professionnels agrave lrsquoutilisation de la solution technique qursquoil

aurait mis agrave disposition de ceux-ci

381 Le cadre de la mise en place drsquoune activiteacute de teacuteleacutemeacutedecine ne srsquoarrecircte pas agrave ces

proceacutedures preacutealables Drsquoautres proceacutedures administratives vont devoir ecirctre respecteacutees

impliquant plusieurs acteurs Cet ensemble forme alors un cadre assez pesant pour les

responsables de projets de teacuteleacutemeacutedecine susceptibles de les freiner

B Un cadre lourd frein au deacuteveloppement de lrsquoactiviteacute

382 Certains acteurs de la teacuteleacutemeacutedecine considegraverent aujourdrsquohui que le cadre leacutegal bien

que seacutecurisant peut constituer un frein au deacuteveloppement rapide de la teacuteleacutemeacutedecine

Effectivement force est de constater que les projets aboutis ne sont pas aujourdrsquohui aussi

nombreux que les professionnels du secteur auraient pu lrsquoespeacuterer (1) Ce constat reacutesulte

principalement des lourdeurs administratives qui entourent la mise en place drsquoune activiteacute de

teacuteleacutemeacutedecine qursquoelles soient preacutevues par les textes ou induites par la nature mecircme de

lrsquoexercice (2) Des pistes drsquoameacutelioration sont actuellement eacutetudieacutees afin drsquoencourager le

deacuteveloppement de la teacuteleacutemeacutedecine (3)

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

207

1) Etat des lieux de lrsquoactiviteacute en France

383 La DGOS suite agrave un premier eacutetat des lieux des projets de teacuteleacutemeacutedecine existant en

France reacutealiseacute agrave la fin de lrsquoanneacutee 2011 a proceacutedeacute agrave un nouveau recensement au 31 deacutecembre

2012457

Cette seconde eacutetude a permis drsquoeacutetablir un bilan plus complet et mettre en valeur

lrsquoeacutevolution des projets Alors que 256 dispositifs de teacuteleacutemeacutedecine eacutetaient recenseacutes pour 2011

lrsquoenquecircte meneacutee en 2012 a reacuteveacuteleacute lrsquoexistence de 331 dispositifs soit une augmentation de pregraves

de 50 en un an Les actes de teacuteleacuteconsultation et de teacuteleacuteexpertise sont largement majoritaires

puisqursquoils repreacutesentent 78 des projets Sur lrsquoensemble de ces projets 169 sont opeacuterationnels

et prennent en charge des patients (contre 161 encore agrave lrsquoeacutetat de conception au moment du

recensement) 53 de ces projets concernent de maniegravere exclusive le secteur hospitalier et 30

impliquent le secteur ambulatoire A ce sujet il est utile de preacuteciser qursquoil srsquoagit ici drsquoune

augmentation de 179 par rapport agrave 2011 Cependant ces chiffres soulignent une

preacutedominance du secteur hospitalier dans le cadre de lrsquoactiviteacute de teacuteleacutemeacutedecine

384 En adeacutequation avec les prioriteacutes deacutefinies au niveau national 25 reacutegions comptent au

moins un dispositif de teacuteleacutemeacutedecine ayant pour objectif la prise en charge drsquoune maladie

chronique De mecircme drsquoune maniegravere globale 30 dispositifs de teacuteleacutemeacutedecine concernent la

prise en charge de lrsquoaccident vasculaire ceacutereacutebral (AVC) 30 projets lrsquoinsuffisance reacutenale et 24

projets lrsquoinsuffisance cardiaque

385 Ces chiffres drsquoordre geacuteneacuteral sur lrsquoeacutevolution de la teacuteleacutemeacutedecine eacutetant exposeacutes il est

inteacuteressant de srsquoattarder sur un point mis en valeur dans ce rapport de la DGOS lrsquoeacutetat des

lieux de la contractualisation et du conventionnement

En ce qui concerne le conventionnement avec lrsquoARS la DGOS affirme que sur les 169

projets opeacuterationnels seuls 24 ont fait lrsquoobjet drsquoune contractualisation avec lrsquoARS (soit

environ 41 projets) Aucun chiffre nrsquoest mentionneacute quant aux projets en cours drsquoeacutelaboration

Pour autant 81 des 331 dispositifs de teacuteleacutemeacutedecine srsquoinscrivent dans les prioriteacutes du

programme reacutegional de teacuteleacutemeacutedecine de leur reacutegion

457 laquo La preuve par 10 Principaux enseignements du bilan PRT et du recensement des projets teacuteleacutemeacutedecine

2013 raquo Direction Geacuteneacuterale de lrsquoOffre de Soins A noter qursquoagrave lrsquoheure actuelle ce bilan est le seul bilan officiel

qui existe concernant lrsquoeacutetat des lieux de lrsquooffre de teacuteleacutemeacutedecine en France

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

208

Le conventionnement entre les acteurs drsquoun dispositif de teacuteleacutemeacutedecine nrsquoa pas plus de

succegraves puisque seulement 51 des projets opeacuterationnels (donc 86 projets) ont donneacute lieu agrave un

conventionnement entre les acteurs La DGOS preacutecise que ce conventionnement recenseacute peut

ecirctre total ou partiel sans pour autant preacuteciser ce qursquoelle entend par conventionnement partiel

Or cette situation va non seulement agrave lrsquoencontre des dispositions du deacutecret de 2010 qui

impose la signature drsquoune convention mais eacutegalement agrave lrsquoencontre de la plupart des

recommandations eacutemises agrave ce sujet

386 Alors que la DGOS semble se feacuteliciter de ce deacuteveloppement qursquoelle considegravere comme

remarquable nous ne pouvons que constater que le nombre limiteacute de projets officiels de

teacuteleacutemeacutedecine pour une activiteacute qui dispose drsquoune existence leacutegale depuis peu de temps mais

se deacuteveloppe toutefois depuis presque 20 ans Pour nous cet eacutetat de fait tend agrave montrer qursquoil

existe encore aujourdrsquohui des freins au deacuteveloppement des activiteacutes de teacuteleacutemeacutedecine freins

qui ne sont pas drsquoordre technique

2) Le poids des proceacutedures preacutealables

387 La mise en œuvre drsquoun projet de teacuteleacutemeacutedecine sous-entend pour son initiateur de

traiter avec une diversiteacute drsquointerlocuteurs administratifs ou meacutedicaux afin soit drsquoobtenir les

autorisations neacutecessaires agrave lrsquoactiviteacute soit de contractualiser Cette proceacutedure preacutealable est en

partie preacutevue par le deacutecret de 2010 crsquoest le cas de la contractualisation preacutealable obligatoire

avec lrsquoARS ou entre les acteurs drsquoun mecircme projet (a) mais elle peut eacutegalement ecirctre en partie

induite par la nature mecircme de la teacuteleacutemeacutedecine activiteacute neacutecessitant une collecte un traitement

et un archivage de donneacutees informatiseacutees (b)

a) La contractualisation avec les acteurs

388 Comme nous avons pu le voir preacuteceacutedemment si lrsquoactiviteacute de teacuteleacutemeacutedecine ne srsquoinscrit

pas dans le cadre drsquoun programme national deacutefini par arrecircteacute pris par le ministre en charge de

la santeacute ou si elle nrsquoest pas inscrite au sein drsquoun CPOM quand il srsquoagit drsquoune activiteacute meneacutee

par un eacutetablissement de santeacute elle doit faire lrsquoobjet drsquoun contrat signeacute avec lrsquoARS Or agrave

lrsquoheure actuelle lrsquoorientation prise par le Ministegravere de la santeacute est bien de confier

lrsquoorganisation des activiteacutes de teacuteleacutemeacutedecine aux ARS Il nrsquoexiste donc pas agrave ce jour de

programme national de teacuteleacutemeacutedecine

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

209

389 Pour permettre drsquoaccompagner les diffeacuterents acteurs dans cette deacutemarche de

contractualisation la DGOS a publieacute en 2012 un guide meacutethodologique458

Ce guide

considegravere la contractualisation avec lrsquoARS comme un levier permettant drsquoassurer une

meilleure visibiliteacute aux porteurs des projets de teacuteleacutemeacutedecine tout en assurant la qualiteacute des

activiteacutes mises en place En lrsquoabsence de preacutecisions dans le deacutecret le guide meacutethodologique

preacutesente lrsquointeacuterecirct de preacuteconiser une dureacutee et un peacuterimegravetre pour les contrats ceux-ci doivent

donc selon le Ministegravere avoir une dureacutee caleacutee sur celle du programme reacutegional de

teacuteleacutemeacutedecine et ecirctre signeacutes une fois la phase de conception termineacutee mais avant la prise en

charge effective des patients Enfin le guide propose un contrat-type

390 Les porteurs drsquoun projet de teacuteleacutemeacutedecine doivent eacutegalement preacutevoir une convention

entre eux Celle-ci a notamment pour but de preacutevoir les modaliteacutes pratiques de lrsquoorganisation

de lrsquoactiviteacute (en termes de solution technique choisie par exemple) mais rappelle eacutegalement

les obligations de chacun en matiegravere de droit des patients ainsi qursquoen termes de reacutepartition des

responsabiliteacutes Ainsi dans le cadre de la mise en place drsquoun projet de teacuteleacutemeacutedecine le deacutecret

de 2010 exige a minima la mise en place de deux conventions diffeacuterentes Cette proceacutedure

bien qursquoutile en plusieurs points reste lourde pour les diffeacuterents acteurs Elle implique une

charge administrative suppleacutementaire qui pourra srsquoaveacuterer chronophage surtout lorsque le

nombre drsquoacteurs concerneacutes par lrsquoactiviteacute sera important Or il ne faut pas oublier que le but

premier drsquoun projet de teacuteleacutemeacutedecine est lrsquoameacutelioration de la prise en charge des patients

Pourtant cette charge administrative est souvent une cause de retard dans le lancement des

activiteacutes de teacuteleacutemeacutedecine

b) Les proceacutedures induites par lrsquoactiviteacute

La proceacutedure preacutealable aupregraves de la CNIL

391 Initialement la CNIL exigeait que lrsquoactiviteacute de teacuteleacutemeacutedecine soit preacutealablement

soumise agrave une demande drsquoautorisation459

Cependant la CNIL dans une deacutemarche de

simplification des formaliteacutes preacutealables a deacutecideacute de soumettre au reacutegime de la deacuteclaration les

traitements de donneacutees de santeacute qui relegravevent des exceptions preacutevues agrave lrsquoarticle 8 II de la loi

Informatique et Liberteacutes Cette deacutemarche de la CNIL srsquoinscrit dans la continuiteacute de la

458 Circulaire DGOSPF3 ndeg2012-114 du 13 mars 2012 relative au guide meacutethodologique pour lrsquoeacutelaboration des

contrats et des conventions en teacuteleacutemeacutedecine non publieacutee au JORF 459

Disponible sur [httpwwwsantegouvfr] Consulteacute le 15 mai 2017

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

210

philosophie impulseacutee par le regraveglement europeacuteen sur la protection des donneacutees fondeacute en

grande partie sur la responsabilisation des responsables de traitement460

392 Cette deacutemarche aurait pu en reacutealiteacute ecirctre mise en place bien avant lrsquoadoption du

regraveglement europeacuteen Une lecture croiseacutee de lrsquoarticle 8 et de lrsquoarticle 25-I-1 de la loi

Informatique et Liberteacutes permet de consideacuterer que les traitements de donneacutees de santeacute mis en

place dans le cadre drsquoune activiteacute de teacuteleacutemeacutedecine permet drsquoaffirmer que ceux-ci nrsquoeacutetaient

pas soumis agrave la proceacutedure drsquoautorisation mais simplement agrave la proceacutedure de deacuteclaration En

effet lrsquoarticle 25-I-1 de la loi Informatique et Liberteacutes preacutevoit que laquo sont mis en œuvre apregraves

autorisation de la Commission nationale de linformatique et des liberteacutes [hellip] les traitements

automatiseacutes ou non mentionneacutes au 7deg du II au III et au IV de larticle 8 raquo Or les traitements

mis en œuvre dans le cadre drsquoune activiteacute de teacuteleacutemeacutedecine relegravevent selon nous des 1deg et 2deg

du II de lrsquoarticle 8461

Lrsquoheacutebergement agreacuteeacute des donneacutees

393 Comme le preacutevoit lrsquoarticle R 6316-10 du Code de la santeacute publique laquo les organismes

et les professionnels de santeacute utilisateurs des Technologies de lInformation et de la

Communication pour la pratique dactes de teacuteleacutemeacutedecine sassurent que lusage de ces

technologies est conforme aux dispositions preacutevues au quatriegraveme alineacutea de larticle L 1111-8

du Code de la santeacute publique relatif aux modaliteacutes dheacutebergement des donneacutees de santeacute agrave

caractegravere personnel raquo

Les acteurs impliqueacutes dans une activiteacute de teacuteleacutemeacutedecine vont devoir reacutefleacutechir aux

modaliteacutes drsquoheacutebergement des donneacutees de santeacute recueillies dans ce cadre Un des risques dans

lrsquohypothegravese drsquoune activiteacute qui regroupe plusieurs eacutetablissements ou professionnels de santeacute

est que lrsquoun drsquoentre eux conserve lrsquoensemble des donneacutees de santeacute sur son systegraveme

drsquoinformation La question peut se poser de savoir srsquoil devra agrave son tour ecirctre heacutebergeur agreacuteeacute

460 V en ce sens la position de la CNIL sur sa deacutemarche de simplification des formaliteacutes disponible sur

[httpswwwcnilfr] 461

Les 1deg et 2deg du II de lrsquoarticle 8 visent laquo les traitements pour lesquels la personne concerneacutee a donneacute son

consentement expregraves sauf dans le cas ougrave la loi preacutevoit que linterdiction viseacutee au I ne peut ecirctre leveacutee par le

consentement de la personne concerneacutee raquo et les laquo traitements neacutecessaires agrave la sauvegarde de la vie humaine

mais auxquels la personne concerneacutee ne peut donner son consentement par suite dune incapaciteacute juridique ou

dune impossibiliteacute mateacuterielle raquo

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

211

Tant qursquoil ne conserve que les donneacutees de patient qursquoil a pris en charge la reacuteponse est non

Toutefois dans le cadre drsquoun reacuteseau de teacuteleacutemeacutedecine la reacuteponse peut ecirctre plus nuanceacutee Par

exemple dans lrsquohypothegravese ougrave un eacutetablissement centralise et conserve lrsquoensemble des donneacutees

mais ne participe pas agrave toutes les prises en charge par le reacuteseau il en viendra agrave ecirctre heacutebergeur

de donneacutees de santeacute et devra donc disposer drsquoun agreacutement agrave ce titre Cette situation doit donc

ecirctre penseacutee en amont de la mise en place de lrsquoactiviteacute par lrsquoensemble des acteurs En effet

comme nous lrsquoavons vu preacuteceacutedemment la proceacutedure drsquoheacutebergement est longue Le plus

simple pour lrsquoensemble des acteurs est donc de solliciter un heacutebergeur agreacuteeacute

La convention de coopeacuteration entre professionnels

394 Dans certains cas lrsquoactiviteacute de teacuteleacutemeacutedecine va faire appel agrave une eacutequipe

pluridisciplinaire Drsquoailleurs certains actes habituellement reacuteserveacutes aux meacutedecins par

exemple vont dans le contexte de la teacuteleacutemeacutedecine ecirctre reporteacutes sur le personnel parameacutedical

tels que les infirmiers Dans ce cas le projet de teacuteleacutemeacutedecine devra en plus des diffeacuterentes

conventions citeacutees preacuteceacutedemment mettre en place le protocole de coopeacuteration preacutevu par

lrsquoarticle L 4011-1462

du Code de la santeacute publique Cette possibiliteacute drsquoencadrer leacutegalement ce

qui est ni plus ni moins qursquoun transfert de tacircches a eacuteteacute introduite par lrsquoarticle 51 de la loi

HPST Cet article permet agrave un professionnel dans le cadre drsquoun protocole preacutecis de reacutealiser

des actes qui ne relegravevent pas drsquoun point de vue strictement reacuteglementaire de sa compeacutetence

En pratique il appartient aux professionnels drsquoecirctre les initiateurs de cette deacutemarche Le

protocole mis en place entre les professionnels souhaitant srsquoinscrire dans une deacutemarche de

coopeacuteration est soumis agrave validation de lrsquoARS Celle-ci veacuterifie dans un premier temps si le

protocole correspond bien agrave un besoin reacuteel de santeacute constateacute au sein de la reacutegion Puis le

protocole est soumis agrave lrsquoavis de la Haute autoriteacute de Santeacute (HAS) Le Directeur de lrsquoARS

autorise ensuite la mise en œuvre de ce protocole par voie drsquoarrecircteacute

462 Cet article preacutevoit laquo Par deacuterogation aux articles L 1132-1 L 4111-1 L 4161-1 L 4161-3 L 4161-5 L

4221-1 L 4311-1 L 4321-1 L 4322-1 L 4331-1 L 4332-1 L 4341-1 L 4342-1 L 4351-1 L 4361-1 L

4362-1 L 4364-1 et L 4371-1 les professionnels de santeacute peuvent sengager agrave leur initiative dans une

deacutemarche de coopeacuteration ayant pour objet dopeacuterer entre eux des transferts dactiviteacutes ou dactes de soins ou de

reacuteorganiser leurs modes dintervention aupregraves du patient Ils interviennent dans les limites de leurs

connaissances et de leur expeacuterience ainsi que dans le cadre des protocoles deacutefinis aux articles L 4011-2 et L

4011-3[hellip] raquo

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

212

395 Cependant ce dispositif nrsquoa pas reccedilu le succegraves escompteacute Dans son rapport drsquoactiviteacute

de 2013463

consacreacute au sujet la HAS donnait les chiffres suivants laquo au 31 deacutecembre 2013

les ARS ont transmis 71 protocoles agrave la HAS correspondant aux protocoles reccedilus depuis 2

ans [hellip] Mais du fait de double saisine pour le mecircme dossier ou de retrait de dossiers par les

promoteurs la HAS a donneacute un avis sur 38 dossiers et 19 dossiers sont en instruction fin

2013 30 ont reccedilu un avis favorable avec reacuteserves Ces reacuteserves portent freacutequemment sur les

indicateurs proposeacutes (fiches incomplegravetes ou manquantes) sur les formations neacutecessaires agrave

lrsquoacquisition de compeacutetences ou sur lrsquoinformation donneacutee aux patients raquo

396 En ce qui concerne plus particuliegraverement la teacuteleacutemeacutedecine seuls trois protocoles de

coopeacuteration avaient eacuteteacute mis en place en deacutecembre 2013 le premier concernant une

consultation de mesure de lrsquoacuiteacute visuelle et de la reacutefraction (dans ce cas un ophtalmologiste

deacutelegravegue ses compeacutetences agrave un orthoptiste ou un infirmier diplocircmeacute drsquoeacutetat) le deuxiegraveme

concernant le suivi de patients diabeacutetiques traiteacutes par insuline (dans ce cas la prescription des

soins est effectueacute par lrsquoinfirmier agrave la place du meacutedecin) et le dernier concernant le suivi des

plaies complexes etou agrave retard de cicatrisation (dans ce cas le meacutedecin ou le chirurgien

deacutelegravegue ses compeacutetences agrave un infirmier)

397 Nous ne pouvons que nous eacutetonner du faible nombre de protocoles de coopeacuteration mis

en place Cependant nous ne sommes pas en mesure de dire faute de recensement preacutecis de

lrsquoensemble des projets de teacuteleacutemeacutedecine existant464

si ce faible chiffre est ducirc agrave lrsquoabsence reacuteelle

de transfert de compeacutetences dans les activiteacutes de teacuteleacutemeacutedecine ou srsquoil srsquoagit drsquoune lacune dans

la reacutealisation des deacutemarches par les responsables de projet La lourdeur drsquoune part et le

manque drsquoadheacutesion au dispositif drsquoautre part sont certainement les causes de ce faible

nombre

463 HAS laquo les protocoles de coopeacuteration article 51 de la loi HPST raquo rapport drsquoactiviteacute 2013 disponible sur

[httpwwwhas-santefr] Consulteacute le 3 mars 2017 464

Le recensement des projets effectueacutes par la DGOS reste global et ne preacutesente pas de maniegravere individuelle

lrsquoensemble des projets existants

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

213

3) Pistes drsquoeacutevolution

En mai 2015 le groupe de travail GT33 CSIS-CSF465

a publieacute un rapport466

dans lequel

il identifie les freins au deacuteveloppement pour ensuite cibler des actions susceptibles

drsquoameacuteliorer le deacuteveloppement de la teacuteleacutemeacutedecine

398 La premiegravere action tregraves concregravete consiste en une aide agrave la qualification drsquoun projet de

teacuteleacutemeacutedecine Pour cela le groupe a reacutealiseacute un kit de deacutemarrage composeacute de cinq fiches

pratiques permettant drsquoidentifier de maniegravere claire le projet et de prendre en consideacuteration

toutes les implications juridiques de celui-ci

399 La deuxiegraveme action proposeacutee est une aide agrave lrsquoeacutevaluation a priori drsquoun projet Cette

aide inteacutegrerait un dialogue en amont entre les porteurs de projets et lrsquoHAS et la CNAMTS

notamment afin de srsquoassurer de lrsquoefficience du projet et drsquoaborder eacuteventuellement la prise en

charge par lrsquoAssurance Maladie des futurs actes de teacuteleacutemeacutedecine

400 La troisiegraveme proposition revient sur le processus de contractualisation actuellement

preacutevu par le deacutecret drsquooctobre 2010 Pour le GT 33 une des pistes serait eacuteventuellement de ne

rendre la contractualisation obligatoire que pour les projets expeacuterimentaux financeacutes A ce

sujet la DGOS a mis en place un groupe de travail auquel les industriels ont eacuteteacute associeacutes degraves

la fin de lrsquoanneacutee 2014 et un deacutecret refondu et simplifieacute eacutetait annonceacute pour la fin du 1er

semestre 2015 Toutefois ce deacutecret a pris du retard et nrsquoest agrave lrsquoheure actuelle toujours pas

publieacute

401 La quatriegraveme proposition srsquoinscrit dans la mecircme dynamique que la preacuteceacutedente

puisqursquoelle consiste en une simplification de lrsquoinstruction des protocoles de coopeacuteration Cette

deacutemarche serait accompagneacutee drsquoune communication aupregraves des porteurs de projets sur

lrsquoexistence drsquoun site deacutedieacute agrave la deacutemateacuterialisation des demandes de validation de protocole

465 Ce groupe de travail associe les repreacutesentants des pouvoirs publics (DGOS DSSIS DGE DGRI ASIP Santeacute

ANAP HAS CNAMTS ANSM) et des syndicats industriels (SNITEM Syntec Numeacuterique) et a pour objectif

de permettre lrsquoeacutemergence drsquoune strateacutegie industrielle en matiegravere de e-santeacute (projet nommeacute laquo mesure 33 raquo) 466

laquo GT33CSIS‐CSF Permettre lrsquoeacutemergence drsquoune strateacutegie industrielle en matiegravere de e-santeacute en soutien de la

politique de santeacute publique en associant les industriels Lever les freins au deacuteploiement de la teacuteleacutemeacutedecine raquo

Rapport eacutelaboreacute par le groupe de travail sur la teacuteleacutemeacutedecine reacuteuni dans le cadre du Comiteacute Strateacutegique de Filiegravere

Santeacute Mai 2015 Disponible sur [httpwwwsocial-santegouvfr]

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

214

402 Le groupe de travail propose en cinquiegraveme intention de simplifier lrsquoensemble des

deacutemarches administratives obligatoires au niveau reacutegional Partant du constat que les

interlocuteurs des responsables de projets teacuteleacutemeacutedecine sont agrave la fois nombreux et mal

identifieacutes il est preacuteconiseacute la clarification du parcours administratif qui pourrait passer par

lrsquoinstauration drsquoun guichet unique aupregraves de lrsquoARS Enfin les aspects techniques et

notamment les systegravemes drsquoauthentification doivent ecirctre clarifieacutes et la teacuteleacutemeacutedecine promue

notamment en lrsquointeacutegrant dans les parcours de soins

403 Ces propositions si elles eacutetaient mises en œuvre permettraient effectivement selon

nous drsquoaugmenter le deacuteveloppement de projets de teacuteleacutemeacutedecine Le chantier principal serait

alors lrsquoensemble des simplifications neacutecessaires en termes de deacutemarches administratives

celles-ci repreacutesentant un poids consideacuterable et chronophage pour les porteurs de projets

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

215

sect2 Lrsquoinformatisation des prescriptions meacutedicales un cadre en

construction

404 Le deacuteveloppement des TIC dans la pratique meacutedicale couvre tous les actes meacutedicaux

y compris la prescription meacutedicale Cela implique deux principes diffeacuterents sur lesquelles il

est inteacuteressant que nous nous attardions Drsquoune part la possibiliteacute drsquoutiliser lrsquoe-mail pour

transmettre une prescription meacutedicale (A) et drsquoautre part lrsquoinformatisation de lrsquoacte en tant

que tel et donc de toutes les eacutetapes preacutevues dans le circuit du meacutedicament (B)

A La prescription par voie eacutelectronique une possibiliteacute encore limiteacutee

405 Bien avant lrsquoencadrement de la teacuteleacutemeacutedecine le leacutegislateur srsquoest pencheacute sur la

possibiliteacute de transmettre une prescription meacutedicale par courrier eacutelectronique Elle existe donc

depuis 2004 (1) mais elle meacuteriterait aujourdrsquohui drsquoecirctre exploiteacutee et deacuteveloppeacutee (2)

1) La prescription par e-mail une possibiliteacute leacutegalement encadreacutee

406 Crsquoest la loi du 3 aoucirct 2004 relative agrave lrsquoassurance maladie467

qui dans son article 34 a

introduit la possibiliteacute de reacutediger puis transmettre une ordonnance par courriel Cependant

cette possibiliteacute est tregraves encadreacutee afin drsquoen limiter lrsquoutilisation agrave certaines situations Lrsquoarticle

34 de la loi preacuteciteacutee dispose en effet qursquo laquo une ordonnance comportant les prescriptions de

soins ou de meacutedicaments peut ecirctre formuleacutee par courriel degraves lors que son auteur peut ecirctre

ducircment identifieacute qursquoelle a eacuteteacute eacutetablie transmise et conserveacutee dans des conditions propres agrave

garantir son inteacutegriteacute et sa confidentialiteacute et agrave condition qursquoun examen clinique du patient ait

eacuteteacute reacutealiseacute preacutealablement sauf agrave titre exceptionnel en cas drsquourgence raquo

407 Plusieurs conditions sont donc poseacutees afin de permettre agrave un meacutedecin drsquoenvoyer une

prescription meacutedicale agrave un patient sous forme de courrier eacutelectronique Les premiegraveres

conditions ont trait au document envoyeacute par voie eacutelectronique En effet celui-ci pour ecirctre

467 Loi ndeg 2004-810 du 13 aoucirct 2004 relative agrave lassurance maladie JORF ndeg190 17 aoucirct 2004 p 14598

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

216

valable va devoir respecter plusieurs regravegles permettant drsquoassurer notamment la seacutecuriteacute du

document Ainsi lrsquoauteur de la prescription doit ecirctre laquo ducircment identifieacute raquo Cette identification

pourra passer par lrsquoapposition drsquoune signature eacutelectronique ou par lrsquoutilisation de la carte de

professionnel de Santeacute (CPS) La prescription doit ensuite ecirctre eacutetablie transmise et archiveacutee

dans des conditions permettant drsquoassurer son inteacutegriteacute (le document ne doit pas ecirctre

modifiable) et sa confidentialiteacute Finalement ces conditions ne sont pas nouvelles puisque ce

sont celles que nous retrouvons en matiegravere de conservation et de transmission de donneacutees

meacutedicales sur support eacutelectronique

La derniegravere condition essentielle agrave lrsquoenvoi drsquoune prescription eacutelectronique est la

reacutealisation preacutealable drsquoun examen clinique du patient Cette preacutecision est importante et non

sans conseacutequences En effet cela implique qursquoaucune prescription par courriel ne pourra ecirctre

transmise agrave lrsquoissue drsquoun acte de teacuteleacutemeacutedecine au cours duquel aucun examen clinique ne

pourrait ecirctre reacutealiseacute Lrsquoenvoi par e-mail drsquoune prescription meacutedicale pourrait cependant ecirctre

envisageable dans le cas drsquoune teacuteleacuteconsultation au cours de laquelle le meacutedecin serait assisteacute

par un professionnel de santeacute preacutesent aux cocircteacutes du patient et dont le rocircle serait de reacutealiser

lrsquoexamen clinique preacutealable Dans cette hypothegravese le meacutedecin pourrait alors ensuite reacutediger et

envoyer par courriel la prescription meacutedicale Cette organisation serait bien entendu

encadreacutee par un protocole de coopeacuteration

De mecircme bien que le deacutecret encadrant la teacuteleacutemeacutedecine nrsquoait pas consacreacute la

teacuteleacuteprescription parmi les actes de teacuteleacutemeacutedecine alors mecircme que lrsquoarticle L 6316-1 du Code

de la santeacute publique preacutevoit que la teacuteleacutemeacutedecine permet notamment de laquo prescrire des

produits raquo nous pouvons parfaitement envisager la possibiliteacute de recourir agrave la

teacuteleacuteprescription agrave lrsquoissue drsquoun acte de teacuteleacuteconsultation au cours duquel lrsquoexamen clinique du

patient aura eacuteteacute reacutealiseacute468

Sous reacuteserve du respect de lrsquoensemble de ces dispositions lrsquoenvoi drsquoune ordonnance

par courrier eacutelectronique est donc envisageable et juridiquement encadreacute Il nous faut

cependant revenir sur une autre voie possible de transmission drsquoune ordonnance qui pose

reacuteguliegraverement difficulteacutes lrsquoordonnance faxeacutee

468 DESMARAIS Pierre laquo La teacuteleacutemeacutedecine source de nouveaux cas de responsabiliteacute raquo Communication

Commerce eacutelectronique septembre 2011 eacutetude ndeg 16

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

217

408 Lordonnance faxeacutee neacutetant mentionneacutee dans aucun texte reacuteglementaire elle nest ni

interdite ni expresseacutement autoriseacutee Il est eacutevident qursquoune ordonnance envoyeacutee par courriel ne

peut pas ecirctre assimileacutee agrave une ordonnance faxeacutee les deux outils utiliseacutes ne preacutesentant pas les

mecircmes conditions de seacutecuriteacute ou de confidentialiteacute Les modaliteacutes preacutevues agrave lrsquoarticle 34 de la

loi de 2004 ne peuvent donc pas srsquoappliquer agrave la teacuteleacutecopie Toutefois cette pratique peut

srsquoenvisager agrave condition qursquoelle srsquoinscrive dans le cadre leacutegal de toute prescription meacutedicale

drsquoune part et que le recours agrave cette pratique soit pleinement justifieacute drsquoautre part

Comme le preacutevoit lrsquoarticle R 5132-3469

du Code de la santeacute publique lrsquoexamen

clinique du patient est le preacutealable obligatoire agrave toute ordonnance meacutedicale Le recours agrave la

teacuteleacutecopie devra donc srsquoinscrire dans ce cadre strict Toutefois le respect de cette seule

condition nrsquoapparait pas suffisant Comme lrsquoa souligneacute la HAS dans ses recommandations

relatives aux prescriptions meacutedicamenteuses par teacuteleacutephone470

laquo un envoi par fax ne peut

garantir une complegravete confidentialiteacute il est donc recommandeacute de preacutefeacuterer un envoi par

courriel chaque fois que cela est possibleraquo Ainsi lrsquoenvoi par fax devrait donc rester une

exception utiliseacutee dans des cas drsquourgence La reacutegulation meacutedicale acte de meacutedecine agrave part

entiegravere est donc un cadre speacutecifique dans lequel une ordonnance envoyeacutee par teacuteleacutecopie au

pharmacien va pouvoir ecirctre accepteacutee Drsquoailleurs le Conseil National de lrsquoOrdre des Meacutedecins

a tregraves tocirct preacuteciseacute les regravegles dans lesquelles devaient srsquoinscrire ces pratiques Ainsi les

diffeacuterents intervenants doivent ecirctre ducircment enregistreacutes et les eacutechanges meacutemoriseacutes afin de

pouvoir ecirctre consulteacutes dans lrsquohypothegravese drsquoun preacutejudice ou drsquoun litige ulteacuterieur

En tout eacutetat de cause il apparait donc que lrsquoordonnance faxeacutee si elle peut ecirctre

envisageacutee doit rester une situation exceptionnelle ou transitoire Le meacutedecin pourra lrsquoutiliser

pour reacutegler des situations drsquourgence et non par faciliteacute voire mecircme par complaisance

Cependant il reste preacutefeacuterable de privileacutegier lrsquoenvoi par courriel parfaitement encadreacute

Aujourdrsquohui il serait souhaitable pour certains que cette possibiliteacute de transmission par

courriel drsquoordonnances soit utiliseacutee pour servir de base agrave une autre pratique la e-prescription

469 laquo La prescription de meacutedicaments ou produits destineacutes agrave la meacutedecine humaine mentionneacutes agrave la preacutesente

section est reacutedigeacutee apregraves examen du malade [hellip] raquo 470

Prescription meacutedicamenteuse par teacuteleacutephone (ou teacuteleacuteprescription) dans le cadre de la reacutegulation meacutedicale p 4

disponible sur [httpwwwhas-santefr] Consulteacute le 3 mars 2017

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

218

2) Les voies de deacuteploiement de la e-prescription

409 La notion de e-prescription deacutesigne une pratique qui recouvre une reacutealiteacute bien plus

large que le simple envoi par courriel des ordonnances Elle consiste notamment agrave regrouper

lrsquoensemble des ordonnance eacutelectroniques drsquoun patient afin de constituer une base geacuteneacuterale de

donneacutees le concernant et regroupant lrsquoensemble des prescriptions meacutedicales qui lui ont eacuteteacute

deacutelivreacutees qursquoil srsquoagisse de prescriptions de meacutedicaments de dispositifs meacutedicaux ou encore

drsquoexamens de biologie En France crsquoest le Comiteacute de Liaison des Institutions Ordinales

(CLIO santeacute)471

qui srsquoest engageacute depuis quelques anneacutees dans cette deacutemarche (a) Mais cette

ideacutee est eacutegalement preacutegnante et bien avanceacutee au niveau europeacuteen (b)

a) La note drsquoorientation du CLIO santeacute

410 Depuis la loi de 2004 aucun texte nrsquoest venu preacuteciser le cadre du deacuteveloppement de

lrsquoe-prescription Ainsi contrairement agrave la teacuteleacutemeacutedecine ou au DMP la e-prescription nrsquoexiste

pas encore leacutegalement bien qursquoelle faisait partie du plan de deacuteveloppement du DMP

Voulant srsquoinscrire dans une deacutemarche drsquoincitation au deacuteploiement de lrsquoe-prescription

le CLIO santeacute a reacutedigeacute et publieacute en janvier 2012 une note drsquoorientation preacutesentant les enjeux

de la prescription eacutelectronique et formulant des propositions pour la deacuteployer

Dans cette proposition valideacutee par ailleurs par sept ordres professionnels le groupe de

travail part de la possibiliteacute depuis 2004 drsquoeacutetablir une ordonnance par voie eacutelectronique pour

proposer ensuite de deacutevelopper un systegraveme de e-prescription qui reposerait sur des

prescriptions reacutedigeacutees de maniegravere informatique puis deacuteposeacutees dans une base de donneacutees des

prescriptions Bien que preacutesentant un projet inteacuteressant et certainement utile pour

lrsquoameacutelioration de la prise en charge du patient et la diminution des risques de contre-

indication entre diffeacuterentes prescriptions il nrsquoapporte aucune reacuteelle proposition en termes de

gouvernance et de structuration juridique de ce projet La note drsquoorientation rappelle juste que

la CNIL devra ecirctre consulteacutee sur ce sujet et preacuteconise de choisir le NIR comme identifiant

patient plus sucircr et plus large que lrsquoINS-C Cependant le CLIO santeacute srsquoen remet agrave lrsquoASIP

santeacute pour mettre en place des phases pilotes en lien avec les ordres professionnels Rien

471 Le Comiteacute de liaison des Institutions Ordinales est un comiteacute qui reacuteunit les institutions franccedilaises auxquelles

sont obligatoirement inscrits les membres de professions reacuteglementeacutees

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

219

drsquoinnovant donc en ce qui concerne la gouvernance de ce genre de projets Ceci explique

peut-ecirctre pourquoi cette note semble ecirctre resteacutee lettre morte En effet depuis sa publication en

janvier 2012 aucune action nrsquoa eacuteteacute mise en œuvre sur cette base

b) Le projet europeacuteen EPSOS

411 Une autre voie de deacuteveloppement a eacutegalement eacuteteacute envisageacutee au niveau europeacuteen au

travers du projet EPSOS Acronyme de Smart Open Services for European patients le

projet EPSOS a deacutemarreacute en 2008 Regroupant initialement 12 pays de lrsquoUnion Europeacuteenne

11 autres se sont ajouteacutes en 2011 lors du lancement de la phase pilote

Il srsquoagissait drsquoun projet cofinanceacute par lrsquoUnion Europeacuteenne comportant deux objectifs

principaux Drsquoune part la mise en place drsquoun service de e-prescription (service qui comprend

la creacuteation drsquoune prescription de meacutedicaments et sa transmission eacutelectronique agrave un

pharmacien) et drsquoun servie de patient summary (service qui reprend lrsquoensemble des donneacutees

essentielles et pertinentes pour assurer la continuiteacute de la prise en charge drsquoun patient drsquoun

pays agrave un autre) Drsquoautre part une analyse agrave la fois de lrsquointeacuterecirct et de lrsquoimpact sur les pratiques

de ces services

Le but de la phase pilote meneacutee entre 2011 et 2014 a eacuteteacute de tester lrsquoeacutechange de

donneacutees entre pays de lrsquoUnion Europeacuteenne dans ce contexte en se basant uniquement sur les

cadres reacuteglementaires existant dans chaque pays membre sans en creacuteer de nouveau En

France une opeacuteration pilote avait eacuteteacute mise en place entre 2012 et 2013 srsquoappuyant sur le

programme europeacuteen drsquoeacutechange eacutetudiant ERASMUS et visant agrave mettre en place le service

laquo Patient SUMMARY raquo

Le projet qui a pris fin en juin 2014 preacutesente un bilan positif Il a notamment permis

de deacutefinir les bases en termes de gouvernance de ce type de service mais eacutegalement en termes

de contenu neacutecessaire des dossiers partageacutes De plus bien que la mise en œuvre de services de

santeacute transfrontaliers srsquoappuyant sur les TIC relegraveve des preacuterogatives nationales le projet

EPSOS a permis drsquoinstaurer une dynamique efficace en la matiegravere et plusieurs projets

europeacuteens portant sur lrsquointeropeacuterabiliteacute en e-santeacute ont eacuteteacute lanceacutes depuis472 Le projet EPSOS

472 eHealth Network

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

220

est donc un exemple reacuteussi de projet de partage de donneacutees et de prise en charge informatiseacutee

agrave grande eacutechelle

Cette dynamique drsquoinformatisation de la prescription ne se cantonne pas agrave lrsquoenvoi de

celle-ci Depuis plusieurs anneacutees on observe au sein des eacutetablissements de santeacute une

eacutevolution tendant agrave lrsquoinformatisation de lrsquoensemble du circuit du meacutedicament Cette impulsion

reacutesulte principalement des orientations voulues par les pouvoirs publics

B La prescription informatiseacutee une pratique encourageacutee par les pouvoirs

publics

412 Par le biais de plusieurs dispositifs reacuteglementaires pour la majoriteacute relatifs agrave la qualiteacute

et agrave la seacutecuriteacute des soins le Ministegravere de la santeacute incite les eacutetablissements agrave informatiser leur

circuit du meacutedicament (1) En parallegravele le leacutegislateur montre sa volonteacute de ne pas laisser cette

informatisation sans cadre et a obligeacute les eacutediteurs de solutions logicielles agrave srsquoengager dans une

deacutemarche de certification obligatoire garante de la seacutecuriteacute du circuit du meacutedicament (2)

1) Lrsquoincitation agrave lrsquoinformatisation du circuit du meacutedicament

413 Le circuit du meacutedicament qui peut ecirctre deacutefini de maniegravere simplifieacute comme eacutetant le

chemin parcouru par le meacutedicament (prescription meacutedicale dispensation puis administration)

est pour les eacutetablissements de santeacute encadreacutes par plusieurs textes diffeacuterents

414 Lrsquoinformatisation du circuit du meacutedicament nrsquoest pas une ideacutee reacutecente Dans lrsquooptique

drsquoassurer aux patients la seacutecuriteacute et la qualiteacute de leur prise en charge meacutedicamenteuse le

Ministegravere de la santeacute a tregraves vite mis en avant le beacuteneacutefice apporteacute par une informatisation

complegravete de lrsquoensemble du circuit du meacutedicament permettant non seulement une meilleure

traccedilabiliteacute mais eacutegalement un renforcement indeacuteniable de la seacutecuriteacute du patient en eacutevitant la

survenance drsquoeacuteveacutenements indeacutesirables Le premier texte agrave aborder ce sujet est une circulaire

du 2 janvier 1985473

relative agrave lrsquoinformatisation des systegravemes de dispensation des

meacutedicaments Plusieurs autres textes vont suivre mais le texte majeur en la matiegravere est lrsquoarrecircteacute

du 31 mars 1999 relatif agrave la prescription la dispensation et agrave lrsquoadministration des

473 Circulaire ndeg 658DPhM du 2 janvier 1985 relative agrave lrsquoinformatisation des systegravemes de dispensation non

publieacutee au JORF

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

221

meacutedicaments soumis agrave la reacuteglementation des substances veacuteneacuteneuses dans les eacutetablissements

de santeacute474

Ce texte preacutevoit notamment la possibiliteacute pour une prescription drsquoecirctre reacutedigeacutee

conserveacutee et transmise de maniegravere informatiseacutee sous reacuteserve drsquoune part de pouvoir identifier

son auteur et drsquoautre part de pouvoir lrsquoeacutediter sur support papier si neacutecessaire

Lrsquoinformatisation du circuit du meacutedicament continue alors sa progression

Cependant lrsquoensemble des textes publieacutes agrave ce sujet entre 1985 et 1999 sont des

circulaires nrsquoayant aucune incidence juridique en tant que telle ou des arrecircteacutes pris par le

ministre ou le secreacutetaire drsquoEtat deacutedieacute agrave la santeacute Le cadre mis en place nrsquoavait donc pas ou peu

de force contraignante vis-agrave-vis des responsables du circuit du meacutedicament

415 Le deacutecret ndeg 2005-1023 du 24 aoucirct 2005 relatif au contrat de bon usage des

meacutedicaments et des produits et prestations mentionneacute agrave larticle L 162-22-7 du Code de la

seacutecuriteacute sociale475

va venir changer ce paysage normatif En effet lrsquoarticle 4 de ce texte

preacutevoit que les eacutetablissements de santeacute doivent souscrire agrave des engagements relatifs aux

meacutedicaments ou aux produits et prestations sous la forme dun programme pluriannuel

dactions celui-ci devant porter a minima sur un certain nombre de points dont

lrsquoinformatisation du circuit du meacutedicament fait partie Ainsi crsquoest deacutesormais dans le cadre du

contrat de bon usage476

signeacute avec lrsquoARS que les eacutetablissements de santeacute vont organiser

lrsquoinformatisation de la prescription meacutedicale

416 La loi HPST va eacutegalement ecirctre agrave lrsquoorigine drsquoune impulsion en ce sens En effet en

faisant de la qualiteacute et de la seacutecuriteacute des soins une prioriteacute de la loi le leacutegislateur de maniegravere

indirecte incite les eacutetablissements de santeacute agrave continuer lrsquoinformatisation de leur circuit du

meacutedicament Drsquoautres textes vont suivre et integravegrent la qualiteacute de la prise en charge

meacutedicamenteuse du patient dans la gestion globale des risques agrave lrsquohocircpital Crsquoest le cas

474 Arrecircteacute du 31 mars 1999 relatif agrave la prescription agrave la dispensation et agrave ladministration des meacutedicaments

soumis agrave la reacuteglementation des substances veacuteneacuteneuses dans les eacutetablissements de santeacute les syndicats

interhospitaliers et les eacutetablissements meacutedico-sociaux disposant dune pharmacie agrave usage inteacuterieur mentionneacutes agrave

larticle L 595-1 du Code de la santeacute publique JORF ndeg77 1er

avril 1999 p 4854 475

Deacutecret ndeg 2005-1023 du 24 aoucirct 2005 relatif au contrat de bon usage des meacutedicaments et des produits et

prestations mentionneacute agrave larticle L 162-22-7 du Code de la seacutecuriteacute sociale JORF ndeg198 26 aoucirct 2005 p

13526 476

Le CBU est un contrat conclu entre lrsquoARS et un eacutetablissement de santeacute pour une dureacutee de trois agrave cinq ans Il a

pour but principal de seacutecuriser le circuit du meacutedicament En cas de respect de ses engagements lrsquoeacutetablissement

de santeacute se voit assureacute un taux de remboursement de 100 par lrsquoassurance maladie pour les speacutecialiteacutes

pharmaceutiques et les produits et prestations mentionneacutes agrave larticle L 162-22-72 du Code de la seacutecuriteacute sociale

Dans le cas contraire le taux de remboursement peut ecirctre reacuteduit agrave 70

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

222

notamment le deacutecret du 12 novembre 2010477

relatif agrave la lutte contre les eacuteveacutenements

indeacutesirables associeacutes aux soins ou encore de lrsquoarrecircteacute du 6 avril 2011478

relatif au management

de la qualiteacute de la prise en charge meacutedicamenteuse qui preacutesente lrsquoinformatisation comme un

gage drsquoameacutelioration de la seacutecuriteacute de la prise en charge meacutedicamenteuse Cet arrecircteacute est

drsquoailleurs inteacuteressant et meacuterite que nous nous y attardions Il preacutecise dans son article 3 que

laquo linformatisation des processus de prise en charge meacutedicamenteuse est une des condition

essentielle de sa seacutecurisation raquo Pour le leacutegislateur il est donc clair que la qualiteacute et la seacutecuriteacute

de la prise en charge meacutedicamenteuse du patient passent par lrsquoinformatisation du circuit du

meacutedicament Sans ecirctre pour autant une obligation leacutegale opposable aux eacutetablissements la

formule permet au leacutegislateur drsquoorienter fortement les eacutetablissements de santeacute vers une

informatisation Pour compleacuteter ces textes et accompagner au mieux les eacutetablissements dans

cette deacutemarche de seacutecurisation la DGOS a publieacute un guide intituleacute Qualiteacute de la prise en

charge meacutedicamenteuse - outils pour les eacutetablissements de santeacute479

Celui-ci rappelle

eacutegalement agrave plusieurs occasions la neacutecessiteacute de lrsquoinformatisation du circuit du meacutedicament Il

preacutecise notamment que le programme hocircpital numeacuterique dans sa feuille de route 2012-2016

pour les systegravemes drsquoinformation hospitaliers laquo incite lrsquoensemble des eacutetablissements de santeacute agrave

atteindre un socle minimal de maturiteacute sur 5 domaines prioritaires dont la prescription

eacutelectronique raquo480

417 Ainsi pour les pouvoirs publics lrsquoinformatisation nrsquoest pas une fin en soi mais un

outil que les eacutetablissements de santeacute se devront drsquoutiliser srsquoils souhaitent respecter leurs

obligations leacutegales en matiegravere de qualiteacute et de seacutecuriteacute de la prise en charge meacutedicamenteuse

Cependant cette informatisation ne doit pas reposer sur nrsquoimporte quelle solution technique si

lrsquoon souhaite qursquoelle atteigne son but Crsquoest pourquoi deacutesormais les eacutediteurs de logiciels de

prescription meacutedicale doivent ecirctre certifieacutes

477 Deacutecret ndeg 2010-1408 du 12 novembre 2010 relatif agrave la lutte contre les eacuteveacutenements indeacutesirables associeacutes aux

soins dans les eacutetablissements de santeacute JORF ndeg0265 16 novembre 2010 p 20428 478

Arrecircteacute du 6 avril 2011 relatif au management de la qualiteacute de la prise en charge meacutedicamenteuse et aux

meacutedicaments dans les eacutetablissements de santeacute JORF ndeg0090 16 avril 2011 p 6687 479

DGOS laquo Qualiteacute de la prise en charge meacutedicamenteuse - outils pour les eacutetablissements de santeacute raquo feacutevrier

2012 disponible sur [httpwwwsantegouvfr] Consulteacute le 3 mars 2017 480

Id p 12

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

223

2) La certification obligatoire des logiciels de prescription meacutedicale

418 La loi ndeg 2011-2012 du 29 deacutecembre 2011 relative au renforcement de la seacutecuriteacute

sanitaire du meacutedicament et des produits de santeacute481

a rendu obligatoire la certification des

logiciels drsquoaide agrave la prescription Ainsi deacutesormais laquo ces certifications sont rendues

obligatoires pour tout logiciel dont au moins une des fonctionnaliteacutes est de proposer une aide

agrave lrsquoeacutedition des prescriptions meacutedicales ou une aide agrave la dispensation des meacutedicaments dans

des conditions preacutevues par deacutecret en Conseil drsquoEtat et au plus tard le 1er janvier 2015 raquo482

Ce texte a eacuteteacute compleacuteteacute par le deacutecret ndeg 2014-1359 du 14 novembre 2014483

qui preacutecise

lrsquoeacutetendue de cette obligation Il est inteacuteressant de noter que la certification ne concerne que la

fonctionnaliteacute drsquoaide agrave la prescription Un logiciel comportant drsquoautres fonctionnaliteacutes ne

devra donc ecirctre certifieacute que pour la partie aide agrave la prescription La proceacutedure de certification

est eacutetablie par la HAS qui a la charge drsquoeacutelaborer les reacutefeacuterentiels

419 A ce sujet484

la certification de ces logiciels reacutepond agrave un objectif triple garantir la

conformiteacute des logiciels agrave certaines exigences en termes de seacutecuriteacute de conformiteacute et

drsquoefficience Dans le respect du souci de transparence qui guide lrsquoensemble de la loi de 2011

les certifications ne sont pas reacutealiseacutees par la HAS mais par des organismes certificateurs

devant eux-mecircmes faire lrsquoobjet drsquoune accreacuteditation preacutealable485

La responsabiliteacute de la

reacutealisation de cette certification incombe bien entendu aux eacutediteurs des logiciels De leur

cocircteacute les eacutetablissements nrsquoont pas drsquoobligation leacutegale de faire appel agrave un eacutediteur certifieacute

Toutefois il nous semble que cette solution est bien eacutevidemment celle agrave privileacutegier par les

eacutetablissements De plus de par la forte obligation de seacutecuriteacute et de qualiteacute de la prise en

charge meacutedicamenteuse qui pegravese sur les eacutetablissements le fait de choisir une solution non

certifieacutee pourrait engager leur responsabiliteacute en cas de preacutejudice

481 Loi ndeg 2011-2012 du 29 deacutecembre 2011 relative au renforcement de la seacutecuriteacute sanitaire du meacutedicament et des

produits de santeacute JORF ndeg0302 30 deacutecembre 2011 p 22667 482

Article L 161-38 du Code de seacutecuriteacute sociale 483

Deacutecret ndeg 2014-1359 du 14 novembre 2014 relatif agrave lobligation de certification des logiciels daide agrave la

prescription meacutedicale et des logiciels daide agrave la dispensation preacutevue agrave larticle L 161-38 du Code de la seacutecuriteacute

sociale JORF ndeg0264 15 novembre 2014 p 19255 484

V en ce sens la foire aux questions de la HAS portant sur les LAP Disponible sur [httpwwwhas-santefr]

Consulteacute le 3 mars 2017 485

Cette accreacuteditation est quant agrave elle reacutealiseacutee par le comiteacute franccedilais drsquoaccreacuteditation (COFRAC)

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

224

420 Cependant comme le reconnait la HAS cette certification preacutesente certaines limites

Ainsi elle nrsquoaborde pas la probleacutematique de lrsquointeacutegration des Logiciels drsquoAide agrave la

Prescription (LAP) dans les Systegravemes drsquoInformation Hospitaliers Les LAP sont donc certifieacutes

individuellement mais leur qualiteacute seacutecuriteacute ne sont plus assureacutees une fois inteacutegreacute au sein du

SIH drsquoun eacutetablissement Cela srsquoexplique notamment par le fait que les normes

drsquointeropeacuterabiliteacute entre logiciels ne sont pas agrave lrsquoheure actuelle arrecircteacutees Par ailleurs la

certification mecircme si elle peut constituer pour les pharmaciens un levier en termes de respect

de la reacuteglementation applicable en matiegravere de meacutedicament ne doit pas ecirctre le seul outil utiliseacute

En effet lrsquointeacutegration de lrsquoensemble des contraintes juridiques existantes en la matiegravere au

sein du logiciel ne laisserait plus aucune place aux initiatives parfois neacutecessaires notamment

en cas drsquourgence Un tel logiciel geacuteneacutererait donc plus de risques ce qui nrsquoest pas souhaitable

La certification ne peut donc pas conduire agrave elle seule au respect de lrsquoensemble des

contraintes juridiques actuelles pesant sur le circuit du meacutedicament sous peine drsquoavoir lrsquoeffet

inverse

421 Toutefois les logiciels drsquoaide agrave la prescription sont reacuteguliegraverement pointeacutes du doigt

Ainsi le quotidien Le Parisien486

a fait part en 2013 des deacutefaillances drsquoun LAP preacutesumeacute

responsable du deacutecegraves drsquoune patiente au centre hospitalier de Versailles en 2011 Les

conclusions de cet article reposaient sur un rapport rendu le 4 mars 2013 par la Commission

Reacutegionale de Conciliation et drsquoIndemnisation drsquoIle de France dans le cadre drsquoune proceacutedure

engageacutee suite au deacutecegraves drsquoune patiente en novembre 2011 au centre hospitalier de Versailles

La patiente serait deacuteceacutedeacutee selon la famille suite agrave une prescription drsquoamoxicilline

antibiotique auquel elle eacutetait allergique mention par ailleurs preacuteciseacutee au sein du dossier

meacutedical de la patiente Or pour les experts de la CRCI cette mention nrsquoaurait pas eacuteteacute

reacutepercuteacutee dans le systegraveme informatique de prescription de meacutedicaments Cette erreur aurait

entraineacute selon la Commission une perte de chance de survie de la patiente de 80 Toujours

selon ce rapport les LAP mecircme srsquoils permettent une clarification des prescriptions

nrsquoassurent pas une seacutecuriteacute suffisamment fine en matiegravere drsquoallergies notamment

A lrsquoheure actuelle ces outils ne peuvent donc pas ecirctre consideacutereacutes comme totalement

fiables et le controcircle manuel par les professionnels de santeacute reste neacutecessaire

486 V en ce sens deacutepecircche TIC santeacute du 12 juillet 2013 laquo Poleacutemique sur les logiciels daide agrave la prescription

hospitaliers suite agrave un deacutecegraves raquo disponible sur [httpwwwticsantecom] Consulteacute le 3 mars 2017

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

225

Conclusion de section

422 Les TIC occupent aujourdrsquohui une part majeure dans la prise en charge des patients

Leur utilisation permet lrsquoameacutelioration de la qualiteacute des soins dispenseacutes aux patients et ce agrave

plusieurs titres Drsquoun cocircteacute les soins et techniques de pointe deviennent plus accessibles pour

certains patients isoleacutes geacuteographiquement ou dont la condition (personne acircgeacutee handicapeacutee

voire mecircme personne deacutetenue) ne leur permet pas drsquoacceacuteder aux eacutetablissements de santeacute

beacuteneacuteficiant de ces techniques Drsquoun autre cocircteacute les eacutetablissements de santeacute seacutecurisent gracircce agrave

lrsquoinformatique leur circuit du meacutedicament afin drsquoeacuteviter les eacuteveacutenements indeacutesirables

423 Cependant lrsquointervention du leacutegislateur dans ces pratiques bien que neacutecessaire ne

doit pas ecirctre trop stricte En effet le droit ne peut pas devenir bloquant au risque de

provoquer les effets inverses de ceux souhaiteacutes Il faut donc trouver le juste milieu entre

inteacutegration des progregraves techniques et encadrement juridique de ceux-ci ce qui peut srsquoaveacuterer

parfois deacutelicat pour le leacutegislateur

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

226

Section 2 Prise en charge meacutedicale et TIC des regravegles de responsabiliteacute

bousculeacutees

424 Le deacuteveloppement de nouvelles pratiques meacutedicales induites par lrsquointroduction des

TIC dans la prise en charge des patients va venir bousculer les regravegles de responsabiliteacute

eacutetablies jusqursquoalors En effet mecircme si les principes fondamentaux qui dirigent le droit de la

responsabiliteacute meacutedicale vont demeurer inchangeacutes ces regravegles classiques vont toutefois devoir

ecirctre adapteacutees aux speacutecificiteacutes lieacutees aux TIC (Paragraphe 1) Par ailleurs lrsquointroduction des

TIC va induire lrsquoentreacutee en jeu de regravegles speacutecifiques et celles-ci vont devoir ecirctre prises en

compte et articuleacutees avec les regravegles classiques (Paragraphe 2)

sect1 Droit des usagers et responsabiliteacute meacutedicale lrsquoadaptation du droit

commun

425 Par principe les patients beacuteneacuteficient tous des mecircmes droits fondamentaux eacutetablis par

la loi Kouchner et ce peu importe la faccedilon dont ils vont ecirctre pris en charge Cependant du

fait de lrsquointroduction des TIC dans la prise en charge les obligations agrave la charge des

professionnels de santeacute vont ecirctre renforceacutees (A) Par ailleurs bien que les regravegles de

responsabiliteacute applicables vont rester les mecircmes les risques drsquoapplication vont ecirctre multiplieacutes

(B)

A Information et consentement du patient une obligation maintenue et

renforceacutee

426 Lrsquointroduction des TIC modifie les modaliteacutes drsquoexercice de la meacutedecine Pour autant

les finaliteacutes drsquoun acte meacutedical mecircme exerceacute agrave distance restent les mecircmes

Ainsi la teacuteleacutemeacutedecine eacutetant juridiquement deacutefinie comme eacutetant un acte meacutedical le

droit commun srsquoappliquant agrave lrsquoexercice meacutedical va trouver agrave srsquoappliquer agrave cette activiteacute Le

patient beacuteneacuteficie des droits classiques deacutefinis au sein de la loi Kouchner et notamment le droit

drsquoecirctre informeacute sur les soins qursquoil va recevoir et drsquoy consentir de maniegravere libre et eacuteclaireacute

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

227

Toutefois lrsquoutilisation des TIC va neacutecessiter une information du patient renforceacutee et

speacutecifique agrave ce sujet Ainsi il apparait que le patient pris en charge dans le cadre drsquoune

activiteacute meacutedicale exerceacutee par le biais des TIC va ecirctre en reacutealiteacute destinataire drsquoune double

information une information relative agrave lrsquoacte meacutedical en lui-mecircme et une information

relative agrave lrsquoacte de teacuteleacutemeacutedecine en tant que pratique deacutemateacuterialiseacutee (1) Cependant se pose la

question de la mise en œuvre de ces droits quand la prise en charge implique les TIC (2)

1) Lrsquoobligation classique eacutetendue aux speacutecificiteacutes des TIC

427 Devant les particulariteacutes propres agrave la teacuteleacutemeacutedecine il est logique de srsquointerroger sur le

maintien des obligations classiques des professionnels de santeacute en matiegravere drsquoinformation du

patient et de recueil de son consentement Cette interrogation nrsquoest pas reacutecente et en 2009 la

HAS487

dans ses recommandations relatives aux prescriptions meacutedicamenteuses par

teacuteleacutephone avait apporteacute quelques preacutecisions agrave ce sujet Ainsi elle avait indiqueacute que les

speacutecificiteacutes de la reacutegulation meacutedicale devaient ecirctre prises en compte afin drsquoalleacuteger lrsquoobligation

drsquoinformation du professionnel intervenant agrave distance Toutefois agrave lrsquoeacutepoque crsquoeacutetait bien la

situation dlsquourgence plus que la deacutemateacuterialisation de lrsquoacte qui justifiait cette souplesse488

Depuis le leacutegislateur est intervenu et bien que le deacutecret teacuteleacutemeacutedecine ne comporte que peu de

dispositions relatives agrave lrsquoinformation et au consentement du patient ces dispositions ont le

meacuterite drsquoecirctre assez claires Ainsi comme le rappelle lrsquoarticle R 6316-2 du Code de la santeacute

publique laquo les actes de teacuteleacutemeacutedecine sont reacutealiseacutes avec le consentement libre et eacuteclaireacute de la

personne en application notamment des dispositions des articles L 1111-2 et L 1111-4 raquo

Le texte vise expresseacutement lrsquoarticle L 1111-2489

du Code de la santeacute publique relatif agrave

487 HAS laquo Recommandations professionnelles Prescription meacutedicamenteuse par teacuteleacutephone (ou teacuteleacuteprescription)

dans le cadre de la reacutegulation meacutedicale raquo feacutevrier 2009 disponible sur [httpwwwhas-santefr] Consulteacute le 3

mars 2017 488

BOURDAIRE-MIGNOT Camille laquo Teacuteleacuteconsultation quelles exigences Quelles pratiques raquo RDS 2011

pp 1003-1013 489

Cet article dispose que laquo toute personne a le droit decirctre informeacutee sur son eacutetat de santeacute Cette information

porte sur les diffeacuterentes investigations traitements ou actions de preacutevention qui sont proposeacutes leur utiliteacute leur

urgence eacuteventuelle leurs conseacutequences les risques freacutequents ou graves normalement preacutevisibles quils

comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conseacutequences preacutevisibles en cas de refus

Lorsque posteacuterieurement agrave lexeacutecution des investigations traitements ou actions de preacutevention des risques

nouveaux sont identifieacutes la personne concerneacutee doit en ecirctre informeacutee sauf en cas dimpossibiliteacute de la retrouver

Cette information incombe agrave tout professionnel de santeacute dans le cadre de ses compeacutetences et dans le respect des

regravegles professionnelles qui lui sont applicables Seules lurgence ou limpossibiliteacute dinformer peuvent len

dispenser raquo

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

228

lrsquoobligation drsquoinformation du professionnel de santeacute ainsi que lrsquoarticle L 1111-4490

relatif agrave la

co-deacutecision491

et donc au consentement aux soins Il ne fait degraves lors aucun doute que le

leacutegislateur a voulu srsquoassurer de lrsquoapplication des dispositions relatives agrave lrsquoinformation et au

consentement du patient aux actes de teacuteleacutemeacutedecine Drsquoailleurs comme le souligne agrave juste titre

Pierre DESMARAIS492

crsquoest bien cette obligation de consentement preacutealable agrave lrsquoexercice de

la teacuteleacutemeacutedecine qui distingue cette pratique meacutedicale nouvellement reconnue du simple avis

recueilli par un professionnel aupregraves drsquoun confregravere493

Ainsi les regravegles classiques applicables

agrave lrsquoexercice meacutedical vont trouver agrave srsquoappliquer agrave la teacuteleacutemeacutedecine le deacutecret ne modifiant pas le

droit commun de lrsquoexercice meacutedical Le patient pris en charge dans le cadre drsquoun acte de

teacuteleacutemeacutedecine devra donc recevoir laquo une information loyale claire et approprieacutee portant sur

les diffeacuterentes investigations traitements ou actions de preacutevention proposeacutes leur utiliteacute leur

urgence eacuteventuelle leurs conseacutequences les risques freacutequents ou graves normalement

preacutevisibles qursquoils comportent les autres solutions possibles ainsi que les conseacutequences

possibles en cas de refus raquo De mecircme le patient devra ecirctre informeacute des nouveaux risques

identifieacutes posteacuterieurement aux actes reacutealiseacutes

428 Cependant la particulariteacute de la teacuteleacutemeacutedecine tient principalement agrave la

deacutemateacuterialisation des eacutechanges par le biais de lrsquoutilisation des TIC Dans ce contexte le

patient va devoir ecirctre non seulement informeacute sur sa prise en charge par le biais drsquoun dispositif

de teacuteleacutemeacutedecine mais eacutegalement sur le traitement informatiseacute de ses donneacutees de santeacute et leur

partage entre plusieurs professionnels de santeacute

Le traitement des donneacutees de santeacute agrave caractegravere personnel est encadreacute par les

dispositions de la loi Informatique et Liberteacutes Les donneacutees de santeacute sont consideacutereacutees par ce

texte comme eacutetant des donneacutees sensibles beacuteneacuteficiant agrave ce titre drsquoun encadrement speacutecifique

Toutefois ce sont bien les dispositions geacuteneacuterales de la loi qui vont imposer une information

du professionnel de santeacute au patient

490 Cet article preacutevoit que laquo toute personne prend avec le professionnel de santeacute et compte tenu des informations

et des preacuteconisations quil lui fournit les deacutecisions concernant sa santeacute raquo 491

Sur lrsquoimportance de la co-deacutecision en matiegravere de teacuteleacutemeacutedecine V notamment BOURDAIRE-MIGNOT

Camille laquo Teacuteleacuteconsultation quelles exigences Quelles pratiques raquo RDS 2011 op cit 492

DESMARAIS Pierre laquo laquo La teacuteleacutemeacutedecine source de nouveaux cas de responsabiliteacute raquo Communication

commerce eacutelectronique ndeg 9 septembre 2011 eacutetude ndeg 16 493

Article R 4127-32 du Code de la santeacute publique

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

229

Ainsi lrsquoarticle 32 de la loi Informatique et Liberteacutes preacutevoit que la personne concerneacutee

par les donneacutees traiteacutees (dans notre cas le patient) doit recevoir une information preacutecise agrave ce

sujet et notamment lrsquoidentiteacute du responsable du traitement sa finaliteacute les diffeacuterents

destinataires des donneacutees ainsi que les droits dont il dispose aux termes de la loi Informatique

et Liberteacutes Il srsquoagit donc drsquoun droit essentiel pour le patient puisque crsquoest celui qui

conditionne non seulement son accegraves aux autres droits dont il dispose (notamment droit

drsquoaccegraves aux donneacutees et de rectification) mais eacutegalement celui qui comme pour lrsquoacte

meacutedical va lui permettre de consentir ou non au traitement de ses donneacutees et ce de maniegravere

eacuteclaireacutee Un beacutemol toutefois doit ecirctre apporteacute agrave ce sujet En effet la loi Informatique et

Liberteacutes preacutevoit certains cas dans lesquels le consentement de la personne concerneacutee ne sera

pas neacutecessaire Il srsquoagit notamment du cas du traitement mis en place pour reacutepondre agrave une

obligation leacutegale (crsquoest le cas par exemple de la mise en place drsquoun dossier meacutedical rendu

obligatoire par lrsquoarticle R 1112-2 du Code de la santeacute publique)

429 Certains professionnels de santeacute craignent cette information suppleacutementaire qui devra

ecirctre donneacutee au patient celle-ci pouvant se montrer difficile du fait de la techniciteacute de la

matiegravere mais eacutegalement chronophage494

De plus il leur est neacutecessaire de diffuser une

information claire en deux temps drsquoabord celle relative agrave lrsquoacte de soins puis celle relative agrave

lrsquoutilisation du proceacutedeacute de teacuteleacutemeacutedecine

430 En ce qui concerne le partage des donneacutees du patient le deacutecret preacutevoit que laquo les

professionnels participant agrave un acte de teacuteleacutemeacutedecine peuvent sauf opposition de la personne

ducircment informeacutee eacutechanger des informations relatives agrave cette personne notamment par le

biais des TIC raquo Rien de reacuteellement nouveau dans cette disposition puisqursquoil srsquoagit ici drsquoune

application du secret partageacute tel que deacutefini agrave lrsquoarticle L 1110-4 du Code de la santeacute publique

Le patient devra donc ecirctre informeacute du partage de ces informations par le bais des TIC mais

eacutegalement des personnes avec lesquelles elles seront partageacutees afin de pouvoir srsquoy opposer srsquoil

le souhaite Lrsquoinformation due au patient en matiegravere de teacuteleacutemeacutedecine est donc renforceacutee

puisqursquoagrave lrsquoinformation classique relative agrave lrsquoacte meacutedical en lui-mecircme et agrave ses conseacutequences

srsquoajoute lrsquoinformation relative agrave lrsquoacte de teacuteleacutemeacutedecine en tant que pratique faisant appel aux

TIC

494 MORLET-HAIumlDARA Lydia RAHAL-LOumlFSKOG Deacutelia laquo La teacuteleacutemeacutedecine et la protection des donneacutees de

santeacute par la loi Informatique et Liberteacutes raquo RGDM ndeg 44 2012 p 341

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

230

431 Enfin en ce qui concerne plus particuliegraverement le consentement du patient la question

de la possibiliteacute pour celui-ci de choisir ou non son teacuteleacutemeacutedecin pourrait ecirctre souleveacutee

Toutefois il y a lieu de vite eacuteluder cette question En effet comme le souligne agrave juste titre

Caroline LE GOFFIC495

dans son eacutetude sur le sujet un meacutedecin a la possibiliteacute de recourir agrave

un tiers compeacutetent afin que le patient reccediloive les soins les plus adapteacutes et fondeacutes sur les

notions acquises de la science496

Degraves lors le meacutedecin requeacuterant doit il est vrai recueillir le

consentement du patient au sujet de la pratique de la teacuteleacutemeacutedecine mais il nrsquoaura pas agrave obtenir

son consentement quant au choix du meacutedecin requis

2) La mise en œuvre des droits des patients

a) La question de la forme de lrsquoinformation

432 La question qui se pose agrave nous ici est de savoir comment la teacuteleacutemeacutedecine va pouvoir

srsquoacquitter de son devoir drsquoinformation dans le cadre drsquoune relation totalement deacutemateacuterialiseacutee

Selon les dispositions de lrsquoarticle L 1111-2 du Code de la santeacute publique lrsquoinformation laquo est

dispenseacutee au cours drsquoun entretien individuel raquo A cela srsquoajoutent les dispositions du Code de

deacuteontologie meacutedicale qui preacutecisent que lrsquoinformation dispenseacutee doit ecirctre claire loyale et

approprieacutee497

Enfin la charte du patient hospitaliseacute preacutevoit quant agrave elle que lrsquoinformation se

doit drsquoecirctre laquo simple accessible intelligible et loyale raquo

433 Ces dispositions peuvent au premier abord poser problegraveme En effet la teacuteleacutemeacutedecine

preacutesente la particulariteacute dans certains cas de deacutemateacuterialiser la relation existant entre le

professionnel et son patient ceux-ci nrsquoont plus reacuteellement de lien direct et srsquoadressent lrsquoun agrave

lrsquoautre par le biais des outils informatiques Comment dans ce cas le respect drsquoun entretien

individuel loyal et intelligible va-t-il ecirctre possible De mecircme comment srsquoassurer que le

patient a bien reccedilu une information adapteacutee agrave la fois agrave sa situation mais aussi agrave ses capaciteacutes

de compreacutehension Pour certains auteurs lrsquoobligation de deacutelivrer lrsquoinformation au cours drsquoun

495 LE GOFFIC Caroline laquo Consentement et confidentialiteacute agrave lrsquoeacutepreuve de la teacuteleacutemeacutedecine raquo RDSS 2011 pp

987- 995 496

Lrsquoarticle R 4127-32 du Code de la santeacute publique dispose laquo degraves lors quil a accepteacute de reacutepondre agrave une

demande le meacutedecin sengage agrave assurer personnellement au patient des soins consciencieux deacutevoueacutes et fondeacutes

sur les donneacutees acquises de la science en faisant appel sil y a lieu agrave laide de tiers compeacutetents raquo 497

Lrsquoarticle 35 du code de deacuteontologie meacutedicale preacutevoit que laquo le meacutedecin doit agrave la personne quil examine quil

soigne ou quil conseille une information loyale claire et approprieacutee sur son eacutetat les investigations et les soins

quil lui propose Tout au long de la maladie il tient compte de la personnaliteacute du patient dans ses explications

et veille agrave leur compreacutehension raquo

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

231

entretien individuel ne pose pas de reacuteel problegraveme la notion drsquoentretien devant srsquoentendre

selon eux de maniegravere large pour y inclure les formes eacutelectroniques de communication498

Il

est en reacutealiteacute neacutecessaire de revenir sur chacune des activiteacutes de teacuteleacutemeacutedecine preacutevues par le

deacutecret drsquooctobre 2010 afin de tenter drsquoeacuteclaircir ce point

434 Pour la teacuteleacuteexpertise la question ne pose pas reacuteellement de problegraveme Cette activiteacute

srsquoapparente en reacutealiteacute agrave la possibiliteacute pour le professionnel de santeacute de faire appel agrave un autre

professionnel plus speacutecialiseacute si la prise en charge le neacutecessite Il srsquoagit drsquoune regravegle preacutevue au

Code de deacuteontologie meacutedicale qui srsquoimpose au meacutedecin499

Dans ce cas le patient nrsquoest pas

pris en charge par le biais drsquoun acte totalement deacutemateacuterialiseacute puisque la relation agrave distance nrsquoa

lieu qursquoentre deux professionnels de santeacute Il pourra donc recevoir lrsquoinformation qui lui est

due dans les conditions classiques et exprimer le consentement relatif agrave sa prise en charge

aupregraves du meacutedecin requeacuterant Il en va de mecircme pour la teacuteleacuteassistance dans ce cas le patient

nrsquoest pas pris en charge agrave distance mais crsquoest bien le professionnel qui est assisteacute par un autre

professionnel de faccedilon deacutemateacuterialiseacutee

435 Dans le cadre de la reacuteponse en matiegravere de reacutegulation meacutedicale la particulariteacute de la

situation agrave savoir lrsquourgence fait que cette question ne se pose pas reacuteellement le professionnel

se trouvant alors dans une des situations exceptionnelles lui permettant de ne pas remplir son

obligation drsquoinformation ni de recueillir le consentement preacutealable du patient

Dans le cas de la teacuteleacutesurveillance la question peut ecirctre tregraves rapidement reacutegleacutee En effet ce

genre drsquoactiviteacute supposera a minima une consultation preacutealable avec le patient au cours de

laquelle le professionnel pourra donc lrsquoinformer sur lrsquoacte le dispositif de teacuteleacutemeacutedecine le

traitement de ses informations personnelles mais eacutegalement comme le dispose le deacutecret le

former si neacutecessaire aux outils et au recueil de ses donneacutees En effet il est preacutevu lorsque la

situation lrsquoimpose que le patient soit formeacute ou preacutepareacute agrave lrsquoutilisation du dispositif de

teacuteleacutemeacutedecine

436 Enfin la teacuteleacuteconsultation reste la pratique qui pose en reacutealiteacute le plus de problegravemes agrave ce

sujet En ce qui concerne lrsquoentretien individuel il est vrai qursquoil pourra toujours avoir lieu

498 V notamment en ce sens LE GOFFIC Caroline laquo Consentement et confidentialiteacute agrave lrsquoeacutepreuve de la

teacuteleacutemeacutedecine raquo Revue de droit sanitaire et social 2011 op cit 499

Article R 4127-32 du Code de la santeacute publique

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

232

mecircme si crsquoest par le biais drsquoune webcam Toutefois la deacutemateacuterialisation des relations entre le

patient et son meacutedecin ne doit pas pour autant conduire celui-ci agrave prendre une trop grande

distance avec son patient Il devra donc srsquoassurer qursquoil a bien deacutelivreacute une information

reacutepondant aux obligations leacutegales Certains auteurs parlent en effet de risque de laquo

standardisation de lrsquoinformation raquo du fait de la deacutemateacuterialisation des eacutechanges Crsquoest cet

eacutecueil qursquoil faudra veiller agrave eacuteviter500

En tout eacutetat de cause la preuve de lrsquoinformation sera

drsquoautant plus importante qursquoil nrsquoy a pas eu de rencontre formelle entre patient et meacutedecin

b) La preuve de lrsquoinformation et du recueil du consentement

437 Dans le cadre de la teacuteleacutemeacutedecine la question de la preuve que ce soit de la deacutelivrance

de lrsquoinformation ou de lrsquoobtention du consentement peut poser certaines difficulteacutes Le

problegraveme ne reacuteside pas vraiment dans les modaliteacutes de preuve de lrsquoinformation qui en reacutealiteacute

ne vont pas diffeacuterer que lrsquoon soit dans le cadre drsquoun acte de teacuteleacutemeacutedecine ou un acte meacutedical

plus classique En effet la charge de la preuve en la matiegravere repose sur le professionnel de

santeacute qui devra conserver la trace de la deacutelivrance de son information A ce sujet la loi501

comme la jurisprudence502

ont poseacute le principe de la preuve de lrsquoinformation par tous

moyens Ainsi les eacutecrits peuvent constituer un deacutebut de preuve et les eacutechanges de courriels

pourront lrsquoecirctre eacutegalement Le problegraveme reacuteside ici dans les nouveaux modes de preuves induits

par lrsquoutilisation des TIC

438 La premiegravere question qui se pose est celle de lrsquoenregistrement de la teacuteleacuteconsultation en

elle-mecircme Certains auteurs avancent cette possibiliteacute sous reacuteserve de respecter certaines

obligations preacutealables Il nous semble toutefois que cette possibiliteacute doive ecirctre eacutecarteacutee pour

des raisons agrave la fois leacutegales et eacutethiques En effet drsquoun point de vue strictement leacutegal les

dispositions de la loi Informatique et Liberteacutes et notamment le respect du principe de

proportionnaliteacute entre le traitement et le but rechercheacute ne nous semblent pas autoriser un tel

enregistrement De mecircme drsquoun point de vue eacutethique on comprend tregraves vite qursquoun tel

enregistrement va fragiliser le colloque singulier et la relation de confiance qui doit exister

entre meacutedecin et patient En revanche une trace informatique de la consultation pourra ecirctre

conserveacutee sous reacuteserve de respecter les diffeacuterentes obligations de deacuteclarations aupregraves de la

500 BOURDAIRE-MIGNOT Camille laquo Teacuteleacuteconsultation quelles exigences Quelles pratiques raquo op cit p

1005 501

Article L 1111-2 du Code de santeacute publique 502

Cass 1egravere

civ 25 feacutevrier 1997 ndeg 94-19685 Defreacutenois 1997 p 751 note JL AUBERT

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

233

CNIL Cette trace pourra donc constituer un deacutebut de preuve en permettant par exemple de

deacutemontrer la dureacutee de la consultation Le meacutedecin devra donc continuer de preacuteciser au sein

du dossier meacutedical le contenu de lrsquoinformation qursquoil a deacutelivreacutee et eacuteventuellement la

compleacuteter par un document eacutecrit transmis par e-mail Dans le cadre drsquoune activiteacute de

teacuteleacutemeacutedecine il appartient selon nous au meacutedecin drsquoecirctre vigilant et de constituer tout au

long de la prise en charge agrave distance de son patient un faisceau drsquoindices qui permettra

drsquoapporter la preuve de lrsquoinformation dans lrsquohypothegravese drsquoun contentieux

439 Le professionnel devra ecirctre drsquoautant plus attentif agrave la deacutelivrance de ces informations

que la jurisprudence se montre de plus en plus stricte agrave ce sujet la Cour de Cassation ayant

fait du deacutefaut drsquoinformation un preacutejudice autonome et le Conseil drsquoEtat ayant deacuteveloppeacute la

notion de preacutejudice drsquoimpreacuteparation

En effet dans une deacutecision en date du 3 juin 2010503

la Cour de cassation a consacreacute

lrsquoautonomie du preacutejudice reacutesultant du deacutefaut drsquoinformation Deacutesormais lrsquoabsence

drsquoinformation claire et loyale du patient preacutealablement agrave lrsquoexeacutecution drsquoun acte meacutedical

constitue un preacutejudice agrave part entiegravere qui comme le preacutecisait la Haute juridiction ne peut rester

sans reacuteparation Le Conseil drsquoEtat est quant agrave lui venu consacrer dans une deacutecision du 10

octobre 2012504

la notion de preacutejudice drsquoimpreacuteparation laquo consideacuterant qursquoindeacutependamment

de la perte de chance de refuser lrsquointervention le manquement des meacutedecins agrave leur obligation

drsquoinformer le patient des risques encourus ouvre pour lrsquointeacuteresseacute lorsque ces risque se

reacutealisent le droit drsquoobtenir reacuteparation des troubles qursquoil a pu subir du fait qursquoil nrsquoa pas pu se

preacuteparer agrave cette eacuteventualiteacute notamment en prenant certaines dispositions personnelle [hellip] raquo

Pour la Haute juridiction administrative le deacutefaut drsquoinformation constitue une perte de chance

de se preacuteparer aux risques possibles lieacutes agrave lrsquointervention et doit donc ecirctre reacutepareacute agrave ce titre Les

droits des patients pris en charge par un dispositif agrave distance telle que la teacuteleacutemeacutedecine restent

les mecircmes et sont mecircme renforceacutes sur certains aspects Crsquoest la mecircme logique qui va trouver agrave

srsquoappliquer en ce qui concerne les regravegles existantes en matiegravere de responsabiliteacute

503 Cass 1egravere civ 3 juin 2010 ndeg 09-13591 A LEGOUX Gaz Pal 2010 pp 9-13 P SARGOS laquo Deux

arrecircts historiques en matiegravere de responsabiliteacute meacutedicale geacuteneacuterale et de responsabiliteacute particuliegravere lieacutee au

manquement dun meacutedecin agrave son devoir dinformation raquo D 2010 pp 1522-1526 504

CE 10 octobre 2012 Michel C ndeg350426 F VIALLA JCP G 2012 p 1252 C LANTERO AJDA 2012

p 2231

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

234

B Responsabiliteacute meacutedicale des regravegles classiques aux risques drsquoapplication

multiplieacutes

440 Les actes meacutedicaux pratiqueacutes par le biais des TIC qursquoil srsquoagisse de la teacuteleacutemeacutedecine ou

de la prescription informatiseacutee restent des actes meacutedicaux agrave part entiegravere et juridiquement

reconnus comme tels De ce fait il est logique que les regravegles relatives agrave la mise en cause de la

responsabiliteacute des professionnels et eacutetablissements de santeacute soient les mecircmes que celles

applicables aux actes meacutedicaux non deacutemateacuterialiseacutes (1) Toutefois les speacutecificiteacutes de la

teacuteleacutemeacutedecine notamment le deacuteveloppement de pratiques pluridisciplinaires amegravenent agrave

srsquointerroger sur la reacutepartition des responsabiliteacutes entre les diffeacuterents acteurs (2) qursquoils

srsquoagissent des meacutedecins des personnels parameacutedicaux ou mecircme des patients

1) La responsabiliteacute meacutedicale une responsabiliteacute pour faute

441 laquo Il nrsquoy a pas lieu de creacuteer un reacutegime de responsabiliteacute speacutecifique autour de la

teacuteleacutemeacutedecine raquo505

Pour la DGOS il ne fait aucun doute que le reacutegime de droit commun

applicable en matiegravere de responsabiliteacute meacutedicale va trouver agrave srsquoappliquer agrave la teacuteleacutemeacutedecine

sans qursquoil y ait lieu de clarifier voire mecircme creacuteer de nouvelles regravegles

442 Tregraves tocirct la jurisprudence judiciaire a consideacutereacute qursquoun meacutedecin eacutetait responsable des

dommages causeacutes agrave un patient et ce sur le fondement des articles 1240506

et 1241507

du Code

civil Le dommage causeacute par le meacutedecin agrave son patient eacutetait donc reacuteparable sur le terrain de la

responsabiliteacute deacutelictuelle Cette position a eacuteteacute modifieacutee par le tregraves ceacutelegravebre arrecirct Mercier du 20

mai 1936508

par lequel la Haute juridiction est venue affirmer que la relation qui srsquoeacutetablissait

entre un meacutedecin et un patient eacutetait une relation contractuelle Ainsi le non-respect par le

meacutedecin drsquoune de ses obligations engageait alors sa responsabiliteacute contractuelle Cette

position a ensuite eacuteteacute confirmeacutee par plusieurs arrecircts rappelant que les meacutedecins nrsquoengageaient

leur responsabiliteacute contractuelle qursquoen cas de faute Ce contrat eacutetait un contrat

505 laquo La teacuteleacutemeacutedecine nrsquoa pas besoin drsquoun reacutegime de responsabiliteacute professionnelle speacutecifique selon la DGOS raquo

deacutepecircche Tic-santeacute 15 mai 2012 disponible sur [httpwwwticsantecom] Consulteacute le 3 mars 2017 506

laquo Tout fait quelconque de lhomme qui cause agrave autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est

arriveacute agrave le reacuteparer raquo 507

laquo Chacun est responsable du dommage quil a causeacute non seulement par son fait mais encore par sa

neacutegligence ou par son imprudence raquo 508

Cass 1egravere

civ 20 mai 1936 Mercier JCP 1936 1079

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

235

synallagmatique de droit priveacute Ainsi il pesait des obligations sur chacune des parties

Toutefois ce contrat nrsquoeacutetait valable que pour les soins dispenseacutes par un meacutedecin libeacuteral ou par

un meacutedecin exerccedilant en eacutetablissement priveacute Dans le cas drsquoun meacutedecin hospitalier exerccedilant en

eacutetablissement public de santeacute on consideacuterait le patient comme eacutetant un usager du service

public et degraves lors il relevait drsquoune situation statutaire509

Crsquoest drsquoailleurs toujours le cas

aujourdrsquohui La responsabiliteacute contractuelle du meacutedecin a toutefois continueacute de coexister avec

la possibiliteacute de mettre en œuvre sa responsabiliteacute deacutelictuelle dans certains cas Ainsi en cas

drsquoabsence de contrat meacutedical ab initio510

ou dans lrsquohypothegravese de son annulation511

le patient

pouvait tout de mecircme mettre en cause la responsabiliteacute deacutelictuelle du meacutedecin

443 Le Conseil drsquoEtat pour sa part a longtemps reconnu la responsabiliteacute pour faute du

service public hospitalier distinguant toutefois les fautes simples512

des fautes lourdes513

Cependant avec lrsquoarrecirct BIANCHI514

la Haute juridiction a admis une possibiliteacute de

responsabiliteacute sans faute du service public hospitalier quand lrsquoexeacutecution de lrsquoacte meacutedical

neacutecessaire au diagnostic ou au traitement du patient preacutesentait un risque certes connu mais

dont la reacutealisation eacutetait exceptionnelle

444 La loi du 4 mars 2002515

unifie le reacutegime de responsabiliteacute meacutedicale en instaurant un

principe de responsabiliteacute pour faute et ce peu importe que la prise en charge se fasse dans un

cadre priveacute ou public Crsquoest le principe poseacute agrave lrsquoarticle L 1142-1 du Code de la santeacute publique

selon lequel laquo hors le cas ougrave leur responsabiliteacute est encourue en raison dun deacutefaut dun

produit de santeacute les professionnels de santeacute mentionneacutes agrave la quatriegraveme partie du preacutesent

Code ainsi que tout eacutetablissement service ou organisme dans lesquels sont reacutealiseacutes des actes

individuels de preacutevention de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conseacutequences

dommageables dactes de preacutevention de diagnostic ou de soins quen cas de faute raquo Il

509 CE 11 janvier 1991Mme Biancale ndeg 93348 AJDA 1991 p 479

510 Cass 1

egravere civ 20 feacutevrier 1979 D 1980 p 171 obs PENNEAU

511 TGI Paris 3 juin 1979 D 1980 p 136

512 A titre drsquoexemple un deacutefaut dans lrsquoorganisation du service eacutetait consideacutereacute comme une faute simple que

lrsquoeacutetablissement public de santeacute se devait de reacuteparer (CE 26 juin 1959 Rouzet Rec 1959 p 305) 513

Faute reacuteserveacutee aux actes techniques (CE 8 novembre 1935 veuve Loiseau Rec 1935 p1019) 514

CE Ass 9 avril 1993 Bianchi ndeg69336 RFDA 1993 p 573 concl S DAEumlL RDP 1993 p 1099 note

M PAILLET Rev Adm 1993 p 561 note P FRAISSEX 515

Loi ndeg 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et agrave la qualiteacute du systegraveme de santeacute JORF du

5 mars 2002 p 4118

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

236

appartiendra alors au patient qui srsquoestime victime drsquoun dommage drsquoapporter la preuve drsquoune

faute et ce par tous moyens

En termes de fautes celles-ci peuvent ecirctre tregraves diverses et porter tant sur la reacutealisation

du soin que sur le deacutefaut dans lrsquoinformation preacutealable du patient Les fautes peuvent

eacutegalement ecirctre strictement meacutedicales ou parfois reacutesulter drsquoun dysfonctionnement dans

lrsquoorganisation du service Dans le cas particulier de la prise en charge drsquoun patient en

eacutetablissement public de santeacute par principe lrsquoeacutetablissement devra reacuteparer la faute commise par

ses preacuteposeacutes sauf en cas de faute deacutetachable du service516

2) La reacutepartition de la responsabiliteacute entre les diffeacuterents acteurs de la teacuteleacutemeacutedecine

445 Lors drsquoun acte de teacuteleacutemeacutedecine plusieurs sceacutenarios peuvent se mettre en place

impliquant dans la prise en charge du patient des meacutedecins des professionnels de santeacute et

parfois mecircme le patient lui-mecircme La reacuteparation des responsabiliteacutes sera diffeacuterente selon

lrsquoacte reacutealiseacute (teacuteleacuteexpertise ou teacuteleacuteconsultation par exemple) ou les professionnels impliqueacutes

La doctrine a beaucoup eacutecrit agrave ce sujet517

et plusieurs hypothegraveses de reacutepartition des

responsabiliteacutes se sont deacuteveloppeacutees Celles-ci sont drsquoailleurs parfois assez diffeacuterentes que

lrsquoon se situe du cocircteacute du droit priveacute ou du droit public

446 Dans le cadre de la pratique de la teacuteleacutemeacutedecine et plus speacutecifiquement dans le cas

drsquoactes de teacuteleacuteexpertise ou de teacuteleacuteassistance il est possible de faire un parallegravele avec la

situation dans laquelle un meacutedecin demande lrsquoavis drsquoun confregravere Drsquoune maniegravere geacuteneacuterale

516 La faute deacutetachable a eacuteteacute deacutefinie par une deacutecision Tribunal des conflits (Arrecirct Pelletier 3 juillet 1873) qui

preacutevoit que la faute deacutetachable est une laquo faute meacutedicale plus que lourde drsquoune graviteacute exceptionnelle et

inexcusable ou nrsquoayant aucun rapport avec lrsquoactiviteacute meacutedicale raquo A titre drsquoexemple le Conseil drsquoEtat dans sa

deacutecision ndeg213931 du 28 deacutecembre 2001 a reconnu la qualification de faute personnelle deacutetachable du service

pour un meacutedecin chef de service de radiologie qui avait tardeacute deacutelibeacutereacutement agrave reacuteveacuteler une erreur meacutedicale

commise dans son service Sur la faute deacutetachable du service V notamment LEFEVRE Valeacuterie laquo La faute

deacutetachable du service et la critique dun meacutedecin sur le travail de lun de ses confregraveres dans un eacutetablissement de

santeacute Note sous Cour de cassation premiegravere Chambre civile 20 feacutevrier 2008 Monsieur X contre Mesdames Y

Z et A et Monsieur B pourvoi numeacutero 06-21980 raquo Gaz Pal ndeg 282-283 2008 pp 40-41 KLEITZ-

BACHELET Cleacutementine laquo Meacutedecin hospitalier et faute deacutetachable du service raquo RLDC ndeg 48 2008 p 27 517

V notamment en ce sens CORGAS-BERNARD Cristina laquo Responsabiliteacute civile meacutedicale et nouvelles

pratiques numeacuteriques lexemple de la teacuteleacutemeacutedecine raquo LPA ndeg 162 2014 pp 27-30 FRAYSSINET Marie-

Heacutelegravene laquo La faute dans lorganisation et le fonctionnement du service agrave leacutepreuve de la teacuteleacutesanteacute raquo RGDM ndeg

44 2012 pp 313-331 GRYNBAUM Luc laquo La responsabiliteacute des acteurs de teacuteleacutemeacutedecine raquo RDSS ndeg 6

2011 pp 996-1002 FORGERON Jean-Franccedilois laquo Les applications de teacuteleacutemeacutedecine des responsabiliteacutes

meacutedicales traditionnelles aux responsabiliteacutes techniques nouvelles raquo Gaz Pal ndeg 287 2001 pp 20-22

ROUSSEL Bruno laquo Les applications de teacuteleacutemeacutedecine des responsabiliteacutes meacutedicales traditionnelles aux

responsabiliteacutes techniques nouvelles raquo Communication commerce eacutelectronique ndeg 1 2011 p 2

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

237

une majoriteacute des auteurs considegraverent qursquoil existe une responsabiliteacute du meacutedecin qui se trouve

aupregraves du patient du fait du meacutedecin qui exerce agrave distance518

La teacuteleacuteexpertise est alors

consideacutereacutee comme une aide agrave la deacutecision meacutedicale519

et lrsquoacte reste sous la responsabiliteacute du

meacutedecin qui a pris en charge le patient ce qui implique donc une responsabiliteacute exclusive de

ce dernier Finalement il srsquoagit ici de lrsquoapplication des dispositions de lrsquoarticle R 4127-69 du

Code de la santeacute publique qui preacutevoit que laquo lrsquoexercice de la meacutedecine est personnel chaque

meacutedecin est responsable de ses deacutecisions et ses actes raquo Effectivement dans le cas speacutecifique

de la teacuteleacuteexpertise crsquoest bien au meacutedecin demandeur qui se trouve agrave proximiteacute du patient et

qui prend en charge ce dernier qursquoil reviendra de prendre la deacutecision meacutedicale en se basant

sur les preacuteconisations du meacutedecin teacuteleacuteexpert

447 Toutefois il faut souligner que lrsquoarticle R 4127-64 du Code de la santeacute publique

preacutecise quant agrave lui que laquo lorsque plusieurs meacutedecins collaborent agrave lrsquoexamen ou au traitement

drsquoun malade ils doivent se tenir mutuellement informeacutes chacun des praticiens assume ses

responsabiliteacutes personnelles et veille agrave lrsquoinformation du malade raquo A la lumiegravere de cette autre

disposition du Code de la santeacute publique il apparait que meacutedecin requeacuterant et meacutedecin requis

devraient naturellement voir leurs responsabiliteacutes partageacutees en cas de dommage subi par le

patient A noter que classiquement la jurisprudence retient la responsabiliteacute solidaire des

intervenants quand un meacutedecin deacutecide de prendre un avis aupregraves drsquoun confregravere speacutecialiste

dans son domaine520

448 Crsquoest drsquoailleurs agrave ce jour la solution retenue par les juges administratifs en ce qui

concerne la pratique de la teacuteleacutemeacutedecine et plus speacutecifiquement la pratique de la

teacuteleacuteexpertise521

En lrsquoespegravece il srsquoagissait drsquoun patient hospitaliseacute au sein drsquoun centre

hospitalier suite agrave un traumatisme cracircnien puis autoriseacute agrave sortir le scanner ne reacuteveacutelant aucun

traumatisme Il est hospitaliseacute de nouveau un mois plus tard agrave la suite de ceacutephaleacutees

inhabituelles et de vomissements Un nouveau scanner est reacutealiseacute et un avis demandeacute au

service de neurochirurgie du Centre Hospitalier Universitaire (CHU) de Grenoble par le biais

518 CONTIS Mailen CROEL Jean-Marc laquo Le droit des obligations agrave lrsquoeacutepreuve de la teacuteleacutemeacutedecine raquo PUAM

2006 V eacutegalement en ce sens PIDOUX Estelle laquo La responsabiliteacute meacutedicale au regard de la teacuteleacutetransmission

et de la teacuteleacutemeacutedecine raquo LPA ndeg 149 2000 pp 5-11 519

V notamment en ce sens FLAVIN Patrick laquo De la responsabiliteacute encourue dans le cadre de la

teacuteleacutemeacutedecine raquo Revue hospitaliegravere de France ndeg 537 2010 p 56-57 520

CAA Bordeaux 10 octobre 1998 ndeg 97BX01978 521

TA Grenoble 21 mai 2010 ndeg0600648

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

238

drsquoune videacuteotransmission des images Le CHU de Grenoble informe le centre hospitalier qursquoil

ne dispose pas de place pour accueillir le patient mais que lrsquoeacutetat de celui-ci permettait

drsquoattendre pour reacutealiser lrsquoopeacuteration de drainage de lrsquoheacutematome deacutecouvert Lrsquoeacutetat du patient se

deacutegrade le jour suivant mais le CHU maintient son avis initial Le patient tombe dans le coma

Il est ensuite transfeacutereacute dans un autre eacutetablissement dans lequel il deacutecegravede En se basant sur les

expertises meacutedicales reacutealiseacutees le TA de Grenoble retient une erreur de diagnostic dans

lrsquointerpreacutetation du scanner lors de la reacuteadmission du patient Alors que le CHU invoque un

doute sur la reacuteception de deux planches drsquoimages par son service de neurochirurgie et fait part

de son interrogation sur la qualiteacute de celles-ci le TA pointe le fait qursquoaucun eacuteleacutement du

dossier ne permet drsquoeacutetablir que les meacutedecins qui les ont reccedilues et interpreacuteteacutees ont eacutemis agrave un

moment de la prise en charge des doutes quant agrave leur caractegravere complet et preacutecis Pour les

juges du fond lrsquoerreur de diagnostic est constitutive drsquoune faute commune aux deux

eacutetablissements et engage donc leur responsabiliteacute solidaire Le TA a eacutegalement ducirc statuer sur

lrsquoappel en garantie formeacute par le CH de Sallanches contre le CHU de Grenoble Les juges du

fond rappellent agrave cette occasion que les centres hospitaliers geacuteneacuteraux ne sont pas doteacutes de

moyens speacutecialiseacutes en neurochirurgie et sont donc ameneacutes agrave demander lrsquoavis de services

speacutecialiseacutes Le TA relegraveve ensuite que les teacuteleacutetransmissions drsquoimages nrsquoont pas donneacute lieu agrave

des comptes rendus eacutecrits et qursquoagrave aucun moment les meacutedecins qui ont reccedilu et interpreacuteteacute les

images nrsquoont eacutemis de doute sur leur qualiteacute Degraves lors pour le tribunal le CHU a commis une

faute vis-agrave-vis du CH et doit le garantir de lrsquoensemble de la condamnation prononceacutee agrave son

encontre

449 Il srsquoagit selon la doctrine drsquoune deacutecision522

qui preacutefigure la maniegravere dont la

responsabiliteacute des diffeacuterents intervenants dans le cadre drsquoune activiteacute de teacuteleacutemeacutedecine pourrait

ecirctre appreacutecieacutee par les juges Avec cette deacutecision les juges srsquoorientent vers une responsabiliteacute

solidaire des deux meacutedecins intervenant dans la prise en charge du patient Drsquoailleurs il faut

noter que la responsabiliteacute solidaire des intervenants dans le cas drsquoun meacutedecin prenant un

avis aupregraves drsquoun speacutecialiste avait deacutejagrave eacuteteacute retenue auparavant523

522 FLAVIN Patrick laquo De la responsabiliteacute encourue dans le cadre de la teacuteleacutemeacutedecine raquo op cit

523 CAA Bordeaux op cit

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

239

Toutefois il nous faut souligner ici la seacuteveacuteriteacute de cette deacutecision524

En effet les juges

ne se contentent pas de retenir une responsabiliteacute solidaire mais estiment que le CHU de par

sa position drsquoexpert en la matiegravere se doit de garantir la condamnation du CH Il appartiendrait

donc au teacuteleacuteexpert de srsquoassurer de la qualiteacute des donneacutees qursquoil reccediloit avant de dispenser son

avis Il doit prendre en compte les limites inheacuterentes agrave la pratique et solliciter les informations

compleacutementaires en cas de doute sous peine de voir sa responsabiliteacute pleinement engageacutee en

cas de preacutejudice

450 Une derniegravere question relative agrave la responsabiliteacute du meacutedecin dans le cadre de la

teacuteleacutemeacutedecine doit encore ecirctre souleveacutee celle de lrsquoexistence eacuteventuelle drsquoune obligation

meacutedicale drsquoutiliser la teacuteleacutemeacutedecine En effet lrsquoarticle R 4127-32 du Code de la santeacute

publique fait peser sur le meacutedecin lrsquoobligation de moyens suivante laquo degraves lors quil a accepteacute

de reacutepondre agrave une demande le meacutedecin sengage agrave assurer personnellement au patient des

soins consciencieux deacutevoueacutes et fondeacutes sur les donneacutees acquises de la science en faisant

appel sil y a lieu agrave laide de tiers compeacutetents raquo Il srsquoagit ici de lrsquoobligation leacutegale et

deacuteontologique pesant sur tout meacutedecin de faire appel agrave des tiers compeacutetents Avec le

deacuteveloppement de la teacuteleacutemeacutedecine et plus particuliegraverement de la teacuteleacuteexpertise il serait

possible drsquoenvisager que cette obligation soit eacutetendue agrave lrsquoutilisation des TIC et notamment de

la teacuteleacutemeacutedecine Un meacutedecin pourrait donc voir sa responsabiliteacute engageacutee srsquoil est eacutetabli qursquoil

avait la possibiliteacute drsquoavoir recours agrave la teacuteleacutemeacutedecine et qursquoil ne lrsquoa pas fait Toutefois agrave

lrsquoheure actuelle et au vu du deacuteveloppement de la pratique il nous semble compliqueacute de faire

peser sur un meacutedecin une telle obligation de moyens

sect2 Teacuteleacutemeacutedecine et responsabiliteacute des regravegles speacutecifiques agrave prendre en

consideacuteration

451 Lrsquointroduction des TIC dans la prise en charge des patients nous amegravene agrave reacutefleacutechir sur

la nouvelle reacutepartition des responsabiliteacutes En effet les logiciels vont devenir un outil de la

prise en charge meacutedicale agrave part entiegravere et ses eacuteventuelles deacutefaillances ne vont pas ecirctre sans

524 V eacutegalement en ce sens FLAVIN Patrick laquo De la responsabiliteacute encourue dans le cadre de la teacuteleacutemeacutedecine raquo

op cit p 57

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

240

conseacutequence (A) Par ailleurs il nous faut eacutegalement nous pencher sur la responsabiliteacute drsquoun

nouvel acteur entrant dans la prise en charge du patient le tiers technologique (B)

A Deacutefaillance des logiciels et responsabiliteacutes

452 Dans le cadre de lrsquoinformatisation constante de la prise en charge meacutedicale les

logiciels informatiques sont devenus un des outils principaux des eacutetablissements de santeacute

Toutefois cela nrsquoest pas sans conseacutequence sur les regravegles applicables en matiegravere de

responsabiliteacute meacutedicale En effet en introduisant ce nouvel outil les eacutetablissements

augmentent les risques de dommage en cas de deacutefaillance de celui-ci Il leur est donc

neacutecessaire de se pencher sur la question de la reacuteparation des responsabiliteacutes Pour cela il nous

faut nous tourner vers le reacutegime de responsabiliteacute applicable en matiegravere de produits

deacutefectueux (2) apregraves avoir pris le soin de se pencher plus speacutecifiquement sur la qualification

juridique des logiciels utiliseacutes (1)

1) Qualification juridique des logiciels

453 Avant 2010 et la transposition en droit franccedilais des dispositions issues de la directive

europeacuteenne 200747CE525

seuls les logiciels neacutecessaires au bon fonctionnement drsquoun

dispositif meacutedical eacutetaient consideacutereacutes comme eacutetant des dispositifs meacutedicaux Lrsquoarticle L 5211-

1 du Code de la santeacute publique preacutevoyait alors laquo on entend par dispositif meacutedical tout

instrument appareil eacutequipement matiegravere produit agrave lexception des produits dorigine

humaine ou autre article utiliseacute seul ou en association y compris les accessoires et logiciels

intervenant dans son fonctionnement destineacute par le fabricant agrave ecirctre utiliseacute chez lhomme agrave

des fins meacutedicales et dont laction principale voulue nest pas obtenue par des moyens

pharmacologiques ou immunologiques ni par meacutetabolisme mais dont la fonction peut ecirctre

assisteacutee par de tels moyens raquo A lrsquoeacutepoque un logiciel ne pouvait obtenir cette qualification

que par association agrave un dispositif meacutedical

525 Directive 200747CE du parlement europeacuteen et du conseil du 5 septembre 2007 modifiant la directive

90385CEE du Conseil concernant le rapprochement des leacutegislations des Eacutetats membres relatives aux dispositifs

meacutedicaux implantables actifs la directive 9342CEE du Conseil relative aux dispositifs meacutedicaux et la directive

988CE concernant la mise sur le marcheacute des produits biocides JOUE L24721 21 septembre 2007

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

241

454 Lrsquoordonnance ndeg 2010-250 du 11 mars 2010526

relative aux dispositifs meacutedicaux et

transposant les dispositions de droit europeacuteen en droit franccedilais a eacutelargi le champ des logiciels

pouvant ecirctre consideacutereacutes comme eacutetant des dispositifs meacutedicaux Deacutesormais selon les

dispositions de lrsquoarticle L 5211-1 du Code de la santeacute publique sont des dispositifs

meacutedicaux laquo tout instrument appareil eacutequipement matiegravere produit agrave lexception des

produits dorigine humaine ou autre article utiliseacute seul ou en association y compris les

accessoires et logiciels neacutecessaires au bon fonctionnement de celui-ci destineacute par le fabricant

agrave ecirctre utiliseacute chez lhomme agrave des fins meacutedicales et dont laction principale voulue nest pas

obtenue par des moyens pharmacologiques ou immunologiques ni par meacutetabolisme mais

dont la fonction peut ecirctre assisteacutee par de tels moyens Constitue eacutegalement un dispositif

meacutedical le logiciel destineacute par le fabricant agrave ecirctre utiliseacute speacutecifiquement agrave des fins

diagnostiques ou theacuterapeutiques raquo

Ainsi un logiciel seul ayant une finaliteacute theacuterapeutique ou diagnostique pourra ecirctre

qualifieacute de dispositif meacutedical et se voir ainsi appliquer les dispositions relatives agrave

lrsquoencadrement des dispositifs meacutedicaux que ce soit en matiegravere de seacutecuriteacute de controcircle ou de

responsabiliteacute Par ailleurs comme nous avons pu le voir preacuteceacutedemment cela permettra de

deacuteterminer quel reacutegime de responsabiliteacute sera applicable Cette classification est donc

importante

455 Toutefois lrsquoidentification va devoir se faire au cas par cas Ainsi un simple logiciel de

gestion du dossier patient ne pourra pas ecirctre consideacutereacute comme un dispositif meacutedical tandis

qursquoun logiciel drsquoaide agrave la prescription effectuant un calcul de dose de meacutedicament agrave partir

drsquoune base de donneacutees propre au patient pourra ecirctre qualifieacute de dispositif meacutedical

En ce qui concerne plus speacutecifiquement la teacuteleacutemeacutedecine il nous faut diffeacuterencier les logiciels

neacutecessaires agrave la communication agrave distance qui ne pourront pas ecirctre consideacutereacutes comme eacutetant

des dispositifs meacutedicaux et les applications ayant pour finaliteacute de piloter des dispositifs

meacutedicaux agrave distance (dans le cadre de la teacuteleacutesurveillance notamment)

526 Ordonnance ndeg 2010-250 du 11 mars 2010 relative aux dispositifs meacutedicaux JORF ndeg0060 du 12 mars 2010

p 4870

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

242

456 LrsquoAgence Nationale de Seacutecuriteacute du Meacutedicament (ANSM)527

chargeacutee notamment de

garantir la seacutecuriteacute des produits de santeacute a apporteacute dans une deacutecision rendue le 12 avril

2015528

quelques preacutecisions quant agrave la qualification de dispositif meacutedical pour un logiciel En

effet lrsquoANSM a suspendu la mise sur le marcheacute drsquoun logiciel qui nrsquoeacutetait pas revecirctu du

marquage CE obligation agrave laquelle doivent reacutepondre les dispositifs meacutedicaux Il srsquoagissait

drsquoun logiciel drsquoenregistrement et de stockage de donneacutees issues drsquoexamens meacutedicaux du

patient accompagneacute drsquoun module de compression et drsquoenregistrement drsquoimages meacutedicales au

format waaves Crsquoest ce module speacutecifique qui a poseacute problegraveme agrave lrsquoANSM celle-ci

consideacuterant que ce module aidant le meacutedecin qui devait proceacuteder agrave un examen tombait sous

le coup de la deacutefinition des dispositifs meacutedicaux de classe 2 et devait de ce fait en respecter

les exigences

2) Responsabiliteacute du fait des produits deacutefectueux

457 Dans le cadre de lrsquoutilisation de logiciels dispositifs meacutedicaux par des eacutetablissements

de santeacute ceux-ci peuvent ecirctre ameneacutes agrave endosser le rocircle de prestataire de service vis-agrave-vis du

patient Or en la matiegravere les regravegles de reacutepartition des responsabiliteacutes entre fournisseur et

producteur nrsquoont pas toujours eacuteteacute tregraves claires

458 Lrsquoarticulation des regravegles applicables du fait de la deacutefaillance des produits de santeacute a

longtemps eacuteteacute difficile agrave appreacutehender Drsquoun cocircteacute le reacutegime europeacuteen impose de rechercher de

maniegravere prioritaire la responsabiliteacute du producteur du produit deacutefectueux et drsquoun autre cocircteacute le

reacutegime franccedilais issu drsquoune construction jurisprudentielle preacutevoit la responsabiliteacute sans faute

de lrsquoeacutetablissement de santeacute en tant que prestataire du produit deacutefectueux Il apparait donc

difficile drsquoarticuler les deux reacutegimes applicables

527 LrsquoAgence nationale de seacutecuriteacute du meacutedicament et des produits de santeacute (ANSM) a eacuteteacute creacuteeacutee par la loi du 29

deacutecembre 2011 relative au renforcement de la seacutecuriteacute sanitaire des meacutedicaments et des produits de santeacute Elle

srsquoest substitueacutee agrave lrsquoAgence franccedilaise de seacutecuriteacute sanitaire du meacutedicament et des produits de santeacute (Afssaps) dont

elle a repris les missions droits et obligations Il srsquoagit drsquoun eacutetablissement public placeacute sous la tutelle du

Ministegravere chargeacute de la santeacute 528

Deacutecision du 12 janvier 2015 portant suspension de mise sur le marcheacute de mise en service drsquoexportation et de

distribution du produit Infocament inteacutegrant un module de compression drsquoimages au format Waaves fabriqueacute et

mis sur le marcheacute par la socieacuteteacute CIRA

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

243

459 En effet la directive europeacuteenne 85374529

transposeacutee par la loi ndeg 98-389 du 19 mai

1998 a creacuteeacute un reacutegime speacutecial de responsabiliteacute sans faute du fait des produits deacutefectueux

Ainsi lrsquoarticle 1245 du Code civil preacutevoit que laquo Le producteur est responsable du dommage

causeacute par un deacutefaut de son produit quil soit ou non lieacute par un contrat avec la victime raquo

Degraves lors en vertu de cette directive le producteur est responsable de la deacutefectuositeacute

drsquoun produit mecircme en lrsquoabsence de faute Le fournisseur peut quant agrave lui voir sa

responsabiliteacute rechercheacutee soit sur le fondement de la responsabiliteacute sans faute agrave condition

que le producteur ne soit pas connu soit sur le fondement de la responsabiliteacute contractuelle ou

deacutelictuelle Cette directive nrsquoeacutecarte toutefois pas la possibiliteacute pour ce reacutegime de coexister

avec des reacutegimes de responsabiliteacute speacuteciaux qui pourraient exister en droit interne agrave condition

que ce reacutegime existe au moment de la notification de la directive530

460 Par ailleurs en droit franccedilais le Conseil drsquoEtat a instaureacute une responsabiliteacute du service

public hospitalier du fait de la deacutefaillance des produits et appareils de santeacute531

Classiquement

avant cette deacutecision la jurisprudence distinguait la mauvaise utilisation drsquoun produit de santeacute

de sa deacutefaillance Ainsi si aucune erreur drsquoutilisation nrsquoeacutetait imputable agrave lrsquoeacutequipe meacutedicale le

juge consideacuterait qursquoil nrsquoeacutetait pas possible de retenir une faute dans lrsquoorganisation du

service532

Puis la jurisprudence est devenue plus favorable aux patients et les juges533

ont eu

tendance agrave srsquoorienter vers un reacutegime de preacutesomption de la faute534

Enfin avec son arrecirct en

date du 9 juillet 2003 la Haute juridiction administrative a instaureacute un veacuteritable reacutegime de

responsabiliteacute sans faute du fait de la deacutefaillance des produits de santeacute Deacutesormais le service

public hospitalier est responsable des conseacutequences dommageables pour les usagers drsquoune

deacutefaillance drsquoun produit ou appareil de santeacute qursquoil utilise mecircme en lrsquoabsence de faute de sa

part et ce sans preacutejudice de son recours en garantie agrave lrsquoencontre du producteur Pour

reprendre les termes de Jeacuterocircme PEIGNE laquo lrsquoeacutetablissement de santeacute nrsquointervient plus comme

529 Directive 85374CEE du Conseil du 25 juillet 1985 relative au rapprochement des dispositions leacutegislatives

reacuteglementaires et administratives des Eacutetats membres en matiegravere de responsabiliteacute du fait des produits deacutefectueux

JOUE ndeg L 210 du 7 aoucirct 1985 pp 29 ndash 33 530

Article 1 de la directive 85374CEE 531

CE 9 juillet 2003 APHP c Marzouk ndeg220437 Rec 2003 p 338 Droit Administratif ndeg 11 novembre

2003 comm 226 532

CE 14 deacutecembre 1984 Centre Hospitalier de Melun ndeg 37563 533

V notamment en ce sens CAA Bordeaux 9 mai 1989 Centre Hospitalier de Castelnaudary ndeg 89 BX00002

CAA paris 11 feacutevrier 1992 Administration geacuteneacuterale de lrsquoAssistance publique agrave Paris ndeg 90PA00256 534

PEIGNE Jeacuterocircme laquo Les tribulations de la responsabiliteacute hospitaliegravere du fait des produits de santeacute

deacutefectueux raquo RDSS 2011 pp 95-104

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

244

lrsquoauteur drsquoun diagnostic ou le dispensateur drsquoun traitement mais comme le fournisseur au

patient drsquoun produit dont il doit reacutepondre raquo535

461 Toutefois la Cour administrative drsquoappel de Lyon536

a eacuteteacute ameneacutee agrave se poser la

question de la compatibiliteacute de la directive europeacuteenne avec la jurisprudence du Conseil

drsquoEtat Degraves lors laquo dans lrsquohypothegravese de lrsquoincompatibiliteacute entre les deux reacutegimes de

responsabiliteacute La Cour Administrative drsquoappel de Lyon devait se demander si le reacutegime

jurisprudentiel deacutefini par le Conseil drsquoEtat pouvait ecirctre consideacutereacute comme un reacutegime speacutecial

preacuteexistant au sens de lrsquoarticle 1 preacuteciteacute de la directive de sorte que les deux reacutegimes

pourraient coexister de sorte que la victime pourrait selon ce qui lui est plus favorable

opter pour lrsquoun ou lrsquoautre raquo537

Ainsi dans sa deacutecision du 23 mars 2010 la Cour

Administrative drsquoAppel de Lyon rappelle drsquoabord que lorsqursquoun centre hospitalier fournit un

produit deacutefectueux agrave un patient mais que son producteur est connu seul ce dernier est

responsable des dommages causeacutes par le produit deacutefectueux Elle considegravere alors que le

reacutegime instaureacute par le Conseil drsquoEtat ne peut pas ecirctre consideacutereacute comme eacutetant un reacutegime

speacutecial de responsabiliteacute au sens de lrsquoarticle 13 de la directive et eacutecarte alors lrsquoapplication de

la jurisprudence MARZOUK au cas qui lui eacutetait soumis Puis dans une deacutecision du 4 octobre

2010538

le Conseil drsquoEtat qui eacutetait confronteacute agrave un problegraveme similaire a deacutecideacute de surseoir agrave

statuer jusqursquoagrave ce que la Cour de justice de lrsquoUnion europeacuteenne se prononce sur la question

suivante laquo compte tenu des dispositions de son article 13 la directive 85374CEE du 25

juillet 1985 permet-elle la mise en œuvre drsquoun reacutegime de responsabiliteacute fondeacute sur la situation

particuliegravere des patients des eacutetablissements publics de santeacute en tant qursquoil leur reconnait

notamment le droit drsquoobtenir de ces eacutetablissements en lrsquoabsence mecircme de faute de ceux-ci la

reacuteparation des dommages causeacutes par la deacutefaillance des produits et appareils qursquoils utilisent

sans preacutejudice de la possibiliteacute pour lrsquoeacutetablissement drsquoexercer un recours en garantie contre

le producteur raquo

535 PEIGNE Jeacuterocircme laquo Les tribulations de la responsabiliteacute hospitaliegravere du fait des produits de santeacute

deacutefectueux raquo op cit p 96 536

CAA Lyon 23 mars 2010 MF c CHU de Chambeacutery ndeg 06LY01195 537

VINET Camille laquo Responsabiliteacute de lrsquohocircpital du fait des produits deacutefectueux raquo AJDA 2010 p 1485-1487 538

CE 4 octobre 2010 Centre hospitalier universitaire de Besanccedilon ndeg 327449

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

245

462 Dans une deacutecision en date du 21 deacutecembre 2011539

la CJUE en clarifiant le champ

drsquoapplication de la directive 85374 du 25051985 relative agrave la responsabiliteacute du fait des

produits deacutefectueux apporte des preacutecisions quant agrave la responsabiliteacute des eacutetablissements

publics de santeacute en tant que prestataires de service

Le litige opposait le CHU de Besanccedilon agrave un patient au sujet de lrsquoindemnisation de

brucirclures qui lui avait eacuteteacute causeacute par un matelas chauffant dont le systegraveme de reacutegulation de

tempeacuterature eacutetait deacutefectueux Par jugement du 27 mars 2007 le CHU avait eacuteteacute condamneacute par

le TA de Besanccedilon agrave reacuteparer le dommage causeacute au patient en lui versant la somme de 9000

Euros (ainsi que 597499 Euros agrave la CPAM du Jura) Lrsquoappel que le CHU avait formeacute agrave

lrsquoencontre de cette deacutecision ayant eacuteteacute rejeteacute il srsquoeacutetait donc pourvu en cassation et le CE avait

deacutecideacute de surseoir agrave statuer La CJUE a consideacutereacute que laquo la responsabiliteacute drsquoun prestataire de

service qui utilise dans le cadre drsquoune prestation de services telles que des soins dispenseacutes au

milieu hospitalier des appareils ou des produits deacutefectueux dont il nrsquoest pas le producteur au

sens de la directive 85374 et cause de ce fait des dommages au beacuteneacuteficiaire de la prestation

ne relegraveve pas du champ drsquoapplication de cette directive Cette derniegravere ne srsquooppose degraves lors

pas agrave ce qursquoun Etat membre institue un tel reacutegime tel que celui en cause au principal

preacutevoyant la responsabiliteacute drsquoun tel prestataire agrave lrsquoeacutegard des dommages ainsi occasionneacutes

mecircme en lrsquoabsence de toute faute imputable agrave celui-ci agrave condition toutefois que soit

preacuteserveacutee la faculteacute pour la victime etou ledit prestataire de mettre en cause la responsabiliteacute

du producteur sur le fondement de ladite directive lorsque se trouvent remplies les conditions

preacutevues par celle-ci raquo

463 Ainsi la juridiction europeacuteenne renforce ici les droits des usagers puisque ceux-ci

auront la possibiliteacute de mettre en cause agrave la fois la responsabiliteacute de lrsquoeacutetablissement de santeacute

en sa qualiteacute de prestataire de service sur le fondement de la responsabiliteacute du service public

hospitalier du fait de la deacutefaillance des produits et appareils de santeacute mais eacutegalement la

responsabiliteacute du producteur du produit de lrsquoappareil deacutefaillant sur le fondement de lrsquoarticle

1245 du Code civil Dans lrsquohypothegravese drsquoun logiciel qualifieacute de dispositif meacutedical qui se

reacuteveacutelerait deacutefectueux ce sont donc ces dispositions qui trouveraient agrave srsquoappliquer

539 CJUE arrecirct de la Cour (grande chambre) du 21 deacutecembre 2011 Centre hospitalier universitaire de Besanccedilon

contre Thomas Dutrueux et Caisse primaire dassurance maladie du Jura Demande de deacutecision preacutejudicielle

Conseil dEacutetat - France Affaire C-49510

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

246

Mais lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge meacutedicale nrsquoinduit pas seulement

lrsquoutilisation de nouveaux outils Elle est eacutegalement synonyme de lrsquoarriveacutee de nouveaux

acteurs

B Nouveaux acteurs et nouvelles responsabiliteacutes

laquo Le CNOM attire donc lrsquoattention sur le fait que les prestataires techniques susceptibles

dintervenir dans une application de teacuteleacutemeacutedecine sont nombreux fabricants de mateacuteriels

mais aussi fournisseurs de solutions logicielles opeacuterateurs de teacuteleacutecommunications socieacuteteacutes

de maintenance Chacun drsquoeux porte la responsabiliteacute correspondant agrave sa prestationraquo540

464 Comme lrsquoindique agrave juste titre le CNOM dans son livre blanc sur la teacuteleacutemeacutedecine la

teacuteleacutemeacutedecine et mecircme plus geacuteneacuteralement lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du

patient a pour conseacutequence de faire intervenir plusieurs prestataires techniques dans la mise

en place lrsquoorganisation et la reacutealisation de lrsquoacte meacutedical Ainsi deacutesormais un nouvel acteur

intervient susceptible lui aussi drsquoengager sa responsabiliteacute en cas de dommage le tiers

technologique Cette notion bien que couramment utiliseacutee nrsquoa pas de reacuteelle deacutefinition leacutegale

Drsquoailleurs le deacutecret teacuteleacutemeacutedecine drsquooctobre 2010 reste muet agrave son sujet Il faut donc une fois

de plus nous tourner vers les regravegles de droit commun afin de tenter de deacutelimiter les

responsabiliteacutes de ce tiers technologique dans lrsquohypothegravese ougrave un patient subirait un preacutejudice

imputable agrave une deacutefaillance du mateacuteriel ou agrave lrsquoinstallation informatique utiliseacutee

465 Un logiciel drsquoaide agrave la prescription ou un dispositif de teacuteleacutemeacutedecine perdent leur

inteacuterecirct et peuvent mecircme devenir dangereux srsquoils sont mal utiliseacutes par les professionnels de

santeacute Nous ne nous attarderons pas ici sur les hypothegraveses drsquoutilisation inadeacutequate (ignorance

des dispositifs de seacutecuriteacute par exemple) ou neacutegligente (absence de controcircle de la prescription

du LAP par le professionnel de santeacute) qui entraineraient la mise en cause de sa responsabiliteacute

par les juges Nous preacutefeacuterons eacutetudier ici lrsquohypothegravese drsquoune mauvaise utilisation lieacutee agrave un

deacutefaut drsquoinformation ou de formation de la part du tiers technologique

540 Livre blanc du CNOM sur la teacuteleacutemeacutedecine 2009 p 12 disponible sur [httpwwwconseil-

nationalmedecinfr] Consulteacute le 15 mai 2017

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

247

466 En ce qui concerne la responsabiliteacute meacutedicale du tiers technologique certains auteurs

ont tregraves tocirct imagineacute de soumettre le fournisseur de mateacuteriel agrave lrsquoobligation de conseil

renforceacute541

En effet le caractegravere innovant des solutions et applications proposeacutees par ces

prestataires ainsi que le caractegravere profane des professionnels de santeacute comme des

eacutetablissements de santeacute en la matiegravere renforce selon la doctrine lrsquoobligation de conseil pesant

sur le tiers technologique

Cette theacuteorie nous semble au premier abord tregraves logique Elle est finalement

lrsquoapplication aux TIC en santeacute des regravegles classiques applicables en droit de la

consommation542

et deacuteveloppeacutees depuis longtemps par la jurisprudence Tout comme le

meacutedecin est redevable drsquoune obligation drsquoinformation vis-agrave-vis de son patient le tiers

technologique serait quant agrave lui redevable drsquoune obligation de conseil et drsquoinformation vis-agrave-

vis du meacutedecin Cette obligation drsquoinformation va mecircme plus loin puisque son respect passe

eacutegalement par lrsquoobligation pour le vendeur de se renseigner En effet celui-ci se doit

srsquoinformer au sujet de lrsquousage que lrsquoacheteur entend faire du produit destineacute agrave la vente543

A

charge pour lrsquoacheteur drsquoinformer le vendeur drsquoun eacuteventuel usage inhabituel de la chose

vendue qursquoil envisagerait drsquoeffectuer544

Ce devoir drsquoinformation est mecircme pour les juges de

la Haute juridiction un devoir de conseil le vendeur ne doit pas se contenter de renseigner

lrsquoacheteur sur le produit il doit eacutegalement accompagner cette information de conseils

notamment au sujet du caractegravere adapteacute du bien par rapport aux besoins de lrsquoacheteur

541 FORGERON Jean-Franccedilois BELAY Nathalie laquo Les applications de la teacuteleacutemeacutedecine des responsabiliteacutes

meacutedicales traditionnelles aux responsabiliteacutes techniques nouvelles raquo Gaz Pal 16 octobre 2001 ndeg 289 p 20 542

Lrsquoarticle L 111-1 du Code de la consommation preacutevoit que laquo avant que le consommateur ne soit lieacute par un

contrat de vente de biens ou de fourniture de services le professionnel communique au consommateur de

maniegravere lisible et compreacutehensible les informations suivantes

1deg Les caracteacuteristiques essentielles du bien ou du service compte tenu du support de communication utiliseacute et du

bien ou service concerneacute

2deg Le prix du bien ou du service en application des articles L 113-3 et L 113-3-1

3deg En labsence dexeacutecution immeacutediate du contrat la date ou le deacutelai auquel le professionnel sengage agrave livrer le

bien ou agrave exeacutecuter le service

4deg Les informations relatives agrave son identiteacute agrave ses coordonneacutees postales teacuteleacutephoniques et eacutelectroniques et agrave ses

activiteacutes pour autant quelles ne ressortent pas du contexte ainsi que sil y a lieu celles relatives aux garanties

leacutegales aux fonctionnaliteacutes du contenu numeacuterique et le cas eacutecheacuteant agrave son interopeacuterabiliteacute agrave lexistence et aux

modaliteacutes de mise en œuvre des garanties et aux autres conditions contractuelles La liste et le contenu preacutecis de

ces informations sont fixeacutes par deacutecret en Conseil dEtat raquo 543

Cass com 1er

deacutecembre 1992 ndeg 90-18238 laquo tout vendeur dun mateacuteriel doit afin que la vente soit conclue

en connaissance de cause sinformer des besoins de son acheteur et informer ensuite celui-ci des contraintes

techniques de la chose vendue et de son aptitude agrave atteindre le but rechercheacute raquo 544

Cass 1egravere

civ 20 juin 1995 ndeg 93-15801

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

248

Cependant ce raisonnement repose en partie sur le faible niveau drsquoexpeacuterience des

professionnels en la matiegravere Or avec le deacuteveloppement rapide de ces solutions ainsi que leur

utilisation croissante il nous faut nous poser la question de la relativiteacute du caractegravere profane

des professionnels en la matiegravere En effet aujourdrsquohui certains eacutetablissements en lien direct

avec les meacutedecins sont agrave lrsquoorigine de la conception de solutions innovantes degraves lors est-il

toujours leacutegitime drsquoenvisager une obligation de conseil renforceacutee Quand Jean-Franccedilois

FORGERON et Nathalie BELAY ont deacuteveloppeacute leur raisonnement en 2001 il reposait

notamment sur le postulat suivant laquo le faible deacuteveloppement sur le marcheacute des solutions de

teacuteleacutemeacutedecine induit un faible niveau dexpeacuterience des professionnels de santeacute inteacuteresseacutes et

accroicirct correacutelativement le peacuterimegravetre de lobligation de conseil des prestataires raquo Or ce nrsquoest

clairement plus le cas aujourdrsquohui Degraves lors peut-on toujours consideacuterer aujourdrsquohui les

professionnels de santeacute et surtout les eacutetablissements de santeacute comme des profanes crsquoest-agrave-

dire comme de simples consommateurs en matiegravere de TIC en santeacute

467 Jusqursquoagrave la loi du 17 mars 2014 dite loi HAMON545

il nrsquoexistait pas de deacutefinition

leacutegale de la notion de consommateur Cette loi a introduit au Code de la consommation un

article preacuteliminaire qui preacutevoit que laquo au sens du preacutesent code est consideacutereacutee comme un

consommateur toute personne physique qui agit agrave des fins qui nentrent pas dans le cadre de

son activiteacute commerciale industrielle artisanale ou libeacuterale raquo Cependant cette deacutefinition ne

concerne que les personnes physiques et non les personnes morales Quid de celles-ci Pour

reacutepondre agrave cette question il nous faut nous tourner vers la jurisprudence Ainsi la Haute

juridiction civile en srsquoappuyant sur la notion de laquo non-professionnel raquo que lrsquoon peut retrouver

au sein du Code de la consommation546

a reconnu dans un arrecirct du 15 mars 2005547

que les

personnes morales nrsquoeacutetaient pas exclues du dispositif leacutegal de protection contre les clauses

abusives Pour la jurisprudence une personne morale peut donc ecirctre consideacutereacutee comme eacutetant

un non-professionnel notion toutefois distincte de celle de consommateur mais pouvant

beacuteneacuteficier agrave ce titre de certaines protections preacutevues par le Code de la consommation Le

critegravere retenu pour qualifier une personne morale drsquoacheteur professionnel ou non

professionnel est celui du lien de lrsquoachat avec lrsquoactiviteacute exerceacutee La personne morale qui pour

545 Loi ndeg 2014-344 du 17 mars 2014 relative agrave la consommation JORF ndeg0065 du 18 mars 2014 p 5400

546 Article L 132-1 du Code de la consommation

547 Cass 1

egravere civ 15 mars 2005 ndeg 02-13285 D 2005 AJ p 887 obs RONDEY Ceacuteline

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

249

les besoins de son activiteacute conclurait un contrat dont lrsquoobjet ne relegraveve pas de lrsquoactiviteacute qursquoelle

exerce est donc consideacutereacutee comme non professionnelle

Dans notre cas un eacutetablissement de santeacute qui pour la prise en charge de ses patients

conclut un contrat avec un prestataire informatique pourrait donc ecirctre consideacutereacute comme non

professionnel et agrave ce titre beacuteneacuteficier de la protection contre les clauses abusives

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

250

Conclusion de section

468 La prise en charge agrave distance des patients par le biais des TIC nrsquoinduit pas lrsquoexistence

de nouveaux droits et crsquoest bien le droit commun applicable agrave tout acte meacutedical qui va trouver

agrave srsquoappliquer aux activiteacutes telles que la teacuteleacutemeacutedecine ou la prescription informatiseacutee Les

regravegles de responsabiliteacute meacutedicale restent eacutegalement inchangeacutees Neacuteanmoins lrsquointroduction

des TIC induit lrsquointervention au sein de la pratique meacutedicale de nouveaux outils mais

eacutegalement de nouveaux acteurs qui doivent ecirctre pris en compte De ce fait les regravegles de

responsabiliteacute applicables peuvent srsquoen trouver bousculeacutees notamment dans leur reacutepartition

entre les diffeacuterents acteurs

La difficulteacute pour les eacutetablissements de santeacute va reacutesider dans lrsquoidentification des

diffeacuterentes regravegles applicables qui comme nous lrsquoavons vu sont nombreuses et dont

lrsquoarticulation nrsquoest pas toujours aiseacutee agrave appreacutehender

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

251

Conclusion du chapitre

469 Les TIC servent aujourdrsquohui agrave la prise en charge agrave distance des patients et les actes

reacutealiseacutes dans ce cadre beacuteneacuteficient drsquoune veacuteritable et solide reconnaissance juridique

Cependant le droit peine parfois agrave trouver sa place dans cette organisation En effet il ne peut

pas devancer la technique au risque de la freiner Mais il ne peut pas trop tarder non plus agrave

venir poser un cadre neacutecessaire au bon deacuteveloppement de ces pratiques Dans le cas de la

teacuteleacutemeacutedecine le leacutegislateur a tenteacute drsquoecirctre le plus concis et preacutecis agrave la fois certainement pour

ne pas alourdir une pratique deacutejagrave bien en place depuis une vingtaine drsquoanneacutees Cependant la

proceacutedure institutionnelle mise en place nrsquoa pas lrsquoeffet escompteacute eacutetant semeacutee de lourdeurs

administratives La simplification des deacutemarches mais eacutegalement la clarification du cadre

financier de lrsquoactiviteacute sont deux pistes agrave explorer afin que la teacuteleacutemeacutedecine puisse srsquoeacutepanouir

comme il se doit

470 Les eacutetablissements de santeacute sont eacutegalement fortement inciteacutes agrave srsquoattaquer agrave un autre

chantier important celui de lrsquoinformatisation du circuit du meacutedicament Mais les

eacutetablissements de santeacute et les professionnels de santeacute ne doivent pas oublier qursquoils disposent

depuis plus de dix ans maintenant de la possibiliteacute de deacutemateacuterialiser leurs prescriptions

meacutedicales Cette possibiliteacute est malheureusement trop peu exploiteacutee agrave ce jour Du point de vue

de la responsabiliteacute meacutedicale ces pratiques ne changent rien aux fondamentaux applicables en

droit de la santeacute Cependant il faut aujourdrsquohui prendre en compte les nouveaux outils agrave

disposition des professionnels de santeacute que sont les logiciels meacutedicaux ainsi que les

nouveaux acteurs que sont les tiers technologiques dans lrsquoapplication des regravegles de

responsabiliteacute

253

Conclusion du titre

471 Lrsquoutilisation des TIC dans la pratique meacutedicale permet la deacutemateacuterialisation des

eacutechanges avec le patient Les eacutetablissements de santeacute deacuteveloppent ainsi leurs DME

permettant le partage des donneacutees informatiseacutees du patient Dans ce contexte un seul DME

beacuteneacuteficie drsquoun cadre juridique qui lui est propre le DMP Fruit de la volonteacute du leacutegislateur de

mettre en place un dossier meacutedical partageacute au niveau national dont le patient serait titulaire

ce projet ambitieux nrsquoa cependant pas reacuteussi agrave trouver sa place apregraves plus de dix ans

drsquoexistences et plusieurs relances

472 La deacutemateacuterialisation de la prise en charge du patient conduit eacutegalement au

deacuteveloppement de pratiques meacutedicales agrave distance comme la teacuteleacutemeacutedecine Ces pratiques

eacutevoluent drsquoailleurs dans un cadre juridique assez clair Cependant mecircme si les regravegles en

matiegravere de droit du patient et de responsabiliteacute meacutedicale restent inchangeacutees leur application

peut se trouver quant agrave elle modifier de nouveaux outils et de nouveaux acteurs entrant en

jeu Les eacutetablissements de santeacute doivent donc appreacutehender ces nouvelles activiteacutes dans leur

globaliteacute afin de comprendre lrsquoensemble des conseacutequences juridiques qursquoelles peuvent

impliquer

255

Conclusion de la premiegravere partie

laquo Le droit nrsquoest pas perplexe ni deacutesarccedilonneacute devant lrsquoinnovation il la reacuteduit au deacutejagrave

connu raquo548

473 Les TIC outils en constantes eacutevolutions induisent de nombreux avantages qualitatifs

et financiers en terme de prise en charge meacutedicale ceci nrsquoest plus agrave deacutemontrer Mais ils

induisent eacutegalement des risques (notamment en ce qui concerne la confidentialiteacute des donneacutees

et la protection de la vie priveacutee du patient) et sont agrave lrsquoeacutevidence sources de grands

bouleversements pour la pratique meacutedicale Dans ce contexte le deacuteveloppement croissant de

la deacutemateacuterialisation de la prise en charge du patient a conduit le leacutegislateur agrave se pencher sur

ces pratiques Exercice difficile pour ce dernier qui doit se soucier de creacuteer un cadre propice

au deacuteveloppement de ces pratiques tout en veillant agrave proteacuteger les droits fondamentaux des

patients et agrave assurer aux eacutetablissements et aux professionnels de santeacute la seacutecurisation de leurs

activiteacutes Or agrave lrsquoheure actuelle le cadre juridique applicable agrave lrsquoutilisation des TIC dans la

pratique meacutedicale ne permet pas drsquoassurer cet eacutequilibre deacutelicat Les eacutetablissements de santeacute

peuvent rapidement se perdre dans les meacuteandres des diffeacuterentes regravegles de droit geacuteneacuteral et de

droit speacutecial qui trouvent agrave srsquoappliquer et certains projets se trouvent freineacutes ou restreints

474 Bien que nous ne consideacuterions pas qursquoil soit neacutecessaire de creacuteer un cadre juridique

speacutecifique agrave lrsquoutilisation des TIC en santeacute une reacutenovation du cadre juridique pourrait ecirctre

entreprise Cependant les voies de seacutecurisation des pratiques en la matiegravere sont multiples et

lrsquoensemble doit ecirctre repenseacute dans sa globaliteacute

548 LYON-CAEN Geacuterard laquo Deacutebat autour de lrsquoarrecirct Nikon France raquo Semaine Sociale Lamy nordm 1046 15 octobre

2001 Disponible sur [httplamylinelamyfr] Consulteacute le 16 janvier 2017

SECONDE PARTIE

LES VOIES DE SECURISATION DE

LrsquoUTILISATION DES TIC A LrsquoHOPITAL

258

laquo Les transformations induites par lrsquoavegravenement du numeacuterique dans la santeacute doivent

cependant srsquoaccomplir dans un cadre de confiance renouveleacute et adapteacute raquo549

475 Le succegraves du deacuteveloppement de lrsquoutilisation des TIC dans la pratique meacutedicale deacutepend

de plusieurs facteurs Une technique suffisamment mucircre pour ecirctre mise en place un modegravele

eacuteconomique viable et satisfaisant pour lrsquoensemble des acteurs un cadre juridique adapteacute en

font partie La confiance des utilisateurs - patients et professionnels - vis-agrave-vis des outils est

eacutegalement lrsquoun des facteurs essentiels au bon deacuteveloppement des TIC en santeacute Aujourdrsquohui

pourtant un franccedilais sur deux exprime leur meacutefiance vis-vis des pratiques de santeacute

deacutemateacuterialiseacutee craignant une menace pour le secret meacutedical550

De mecircme certains

professionnels de santeacute se montrent encore reacuteticents agrave lrsquoutilisation des TIC qui bouleversent

des pratiques ancreacutees depuis bien longtemps551

Pourtant la confiance et lrsquoadheacutesion des

professionnels et des eacutetablissements de santeacute agrave ces nouvelles pratiques est essentielle pour

pouvoir les diffuser et les faire eacutevoluer Pour assurer un deacuteveloppement serein et peacuterenne de

lrsquoutilisation des TIC en santeacute les eacutetablissements de santeacute doivent pouvoir œuvrer dans un

contexte seacutecuriseacute et donc rassurant Or aujourdrsquohui lrsquoinformatisation croissante de la pratique

meacutedicale creacutee de nombreuses interrogations juridiques eacutethiques et deacuteontologiques auxquelles

les eacutetablissements et les professionnels de santeacute nrsquoont pas toujours de reacuteponse fiable De

mecircme le manque de vision globale du deacuteveloppement de lrsquoutilisation des TIC dans la

pratique meacutedicale ne permet pas de donner aux diffeacuterentes initiatives le poids et les ressources

neacutecessaires agrave leur deacuteveloppement peacuterenne

476 Ce contexte drsquoinseacutecuriteacute pour les eacutetablissements de santeacute nrsquoest pas sans issue et

plusieurs voies existent pour permettre de seacutecuriser lrsquoutilisation des TIC en santeacute La premiegravere

voie repose sur les pouvoirs publics et leur capaciteacute agrave impulser cette deacutemarche de seacutecurisation

en prenant le soin drsquooffrir aux TIC en santeacute une gouvernance forte drsquoune part (chapitre

premier) et en reacutenovant le cadre juridique applicable (chapitre second) La seconde voie de

seacutecurisation repose sur les eacutetablissements de santeacute eux-mecircmes qui au cœur des pratiques

sont les plus agrave-mecircme de les seacutecuriser (chapitre premier) En la matiegravere lrsquoexemple du CHRU

de Lille peut ecirctre exposeacute (chapitre second)

549 CNOM laquo Deacutemateacuterialisation des documents meacutedicaux raquo 2010 p 4

550laquo E-santeacute la meacutedecine agrave lrsquoegravere du numeacuterique raquo Science et santeacute ndeg 29 2016 p 33

551 Ibid

TITRE 1

LrsquoIMPULSION DE LA SECURISATION AU

NIVEAU NATIONAL

260

laquo Faute drsquoune volonteacute politique forte et constante sur une dureacutee suffisante et drsquoune

gouvernance unifieacutee lrsquoe-santeacute et ses usages semblent donc condamneacutes agrave progresser de faccedilon

chaotique au greacute des annonces raquo552

477 Les pouvoirs publics ont un rocircle essentiel agrave jouer en ce qui concerne le deacuteveloppement

des TIC en santeacute En effet dans le contexte particulier de la santeacute fortement reacuteguleacute lrsquoaction

des pouvoirs publics en la matiegravere est essentielle553

Ainsi une des voies de seacutecurisation de

lrsquoutilisation des TIC dans la pratique meacutedicale repose sur lrsquoimpulsion que les pouvoirs publics

pourront donner en la matiegravere

Reacuteguliegraverement lrsquoabsence drsquoune autoriteacute forte de pilotage en matiegravere de deacuteveloppement

des TIC dans la pratique meacutedicale est pointeacutee du doigt Or il srsquoagit drsquoun eacuteleacutement essentiel

pour srsquoassurer de la mise en œuvre drsquoune action coordonneacutee Crsquoest pourquoi la prioriteacute doit

ecirctre aujourdrsquohui donneacutee agrave la peacuterennisation drsquoune gouvernance solide en matiegravere de TIC en

santeacute (chapitre premier)

En parallegravele le cadre juridique de lrsquoutilisation des TIC en santeacute doit ecirctre repenseacute

Comme nous lrsquoavons constateacute il nous faut aujourdrsquohui laquo recourir agrave une multitude de codes

diffeacuterents pour aborder dans sa globaliteacute la seule question des systegravemes drsquoinformation de

santeacute raquo554

Ceci est alors source drsquoinseacutecuriteacute juridique pour les acteurs et notamment les

eacutetablissements de santeacute Une reacutenovation de ce cadre juridique srsquoimpose donc (chapitre

second)

552 ROBIN Jean-Yves laquo Lrsquourgence numeacuterique Faire de la France un leader de lrsquoe-santeacute raquo LrsquoHarmattan 2015

p 168 553

Ibid 554

ROBIN Jean-Yves laquo Lrsquourgence numeacuterique Faire de la France un leader de lrsquoe-santeacute raquo op cit p 193

261

Chapitre 1

Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation

en santeacute une prioriteacute

laquo Administrer nrsquoest pas gouverner et lrsquoe-santeacute a plus besoin drsquoecirctre gouverneacutee

qursquoadministreacutee raquo555

478 Cette citation de Jean-Yves ROBIN ancien directeur de lrsquoASIP santeacute nrsquoest pas

anodine Elle est reacuteveacutelatrice du problegraveme majeur dans le deacuteveloppement de lrsquoe-santeacute en

France En invoquant ce qursquoil appelle la laquo tentation gestionnaire raquo de lrsquoEtat en matiegravere drsquoe-

santeacute lrsquoauteur souligne lrsquoabsence drsquoune reacuteelle conduite par lrsquoEtat des projets drsquoe-santeacute

pourtant neacutecessaire agrave un deacuteveloppement efficace et coheacuterent

Afin que lrsquoe-santeacute en France se deacuteveloppe de maniegravere unifieacutee et peacuterenne une

impulsion mais eacutegalement un cadre national doivent ecirctre instaureacutes Or la cartographie

actuelle de la gouvernance apparait comme complexe voire parfois illisible (Section I) et il

est essentiel que des choix clairs soient rapidement effectueacutes et un eacutequilibre trouveacute afin

drsquoinstaurer une gouvernance efficace (Section II)

555 ROBIN Jean-Yves laquo Lrsquourgence numeacuterique Faire de la France un leader de lrsquoe-santeacute raquo op cit p 88

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

262

Section 1 Lrsquoeacuteparpillement notable de la gouvernance actuelle

479 En matiegravere drsquoorganisation de la gouvernance de lrsquoe-santeacute lrsquoEtat a passeacute son temps agrave

eacuteparpiller les rocircles et les pouvoirs (Paragraphe I) en fonction des diffeacuterents projets

Aujourdrsquohui bien qursquoune gouvernance refondue soit en place la visibiliteacute sur les projets en

cours et leur gestion reste deacutelicate (Paragraphe 2)

sect1 Des difficulteacutes pour instaurer une gouvernance stable et efficace

480 La question de la gouvernance des projets drsquoe-santeacute en France fait deacutebat depuis de

nombreuses anneacutees Le chantier nrsquoest pas des moindres puisqursquoil srsquoagit drsquoencadrer de

conduire et de mener agrave termes des projets relatifs agrave des systegravemes drsquoinformations (SI)

diffeacuterents (SI des meacutedecins de ville SI hospitaliers SI de lrsquoassurance maladie) Notons

cependant que tout au long de notre deacuteveloppement nous nous attacherons plus

particuliegraverement agrave la gouvernance des systegravemes drsquoinformation de santeacute hospitaliers bien que

les systegravemes drsquoinformation de santeacute recouvrent un domaine bien plus large

Avant drsquoeacutetudier les critiques qui ont pu ecirctre formuleacutees au sujet des choix de

gouvernance des systegravemes drsquoinformation de santeacute hospitaliers (B) il nous est neacutecessaire de

faire un point sur lrsquohistorique en la matiegravere (A) Il srsquoagira ensuite drsquoexposer pour conclure les

propositions drsquoeacutevolution qui ont pu ecirctre faites (C)

A Lrsquoeacutevolution de la gouvernance des systegravemes drsquoinformation en santeacute en

France

481 De maniegravere scheacutematique la mise en place de la gouvernance des systegravemes

drsquoinformation en santeacute (SIS) a conduit agrave lrsquoeacutemergence de deux types drsquoacteurs drsquoune part les

structures de coordination (1) et drsquoautre part les structures opeacuterationnelles (2)

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

263

1) Les structures de coordination

482 Tregraves tocirct le Ministegravere de la santeacute avait souhaiteacute encadrer le deacuteveloppement de

lrsquoinformatique en santeacute A titre drsquoexemple lrsquoinformatisation des hocircpitaux publics avait fait

lrsquoobjet de deux circulaires556

procircnant lrsquointeacuterecirct drsquoassurer une coheacuterence nationale en termes de

gouvernance mais eacutegalement de donneacutees partageacutees et donc drsquointeropeacuterabiliteacute Pourtant le

pilotage global des politiques drsquoinformatisation du secteur de la santeacute avait eacuteteacute degraves 2007

consideacutereacute comme deacutefaillant par la commission des finances du Seacutenat557

Ce constat faisait

suite agrave un controcircle de la Cour des comptes sur linteropeacuterabiliteacute des systegravemes dinformation en

santeacute558

ainsi qursquoau chapitre X du rapport annuel de la Cour des comptes sur lrsquoapplication des

lois de financement de la seacutecuriteacute sociale paru en septembre 2007 et portant sur laquo le partage

des donneacutees entre les systegravemes drsquoinformation raquo559

483 En 2009 deux rapports560

commandeacutes par le Ministre de la santeacute de lrsquoeacutepoque

Madame Roselyne BACHELOT-NARQUIN preacutesentaient eacutegalement un regard assez dur sur

lrsquoeacutetat des lieux de la gouvernance des systegravemes drsquoinformation de santeacute en France Pour

comprendre la raison de ces critiques il est important de revenir sur les acteurs prenant part agrave

cette eacutepoque agrave la gouvernance des systegravemes drsquoinformation de santeacute hospitaliers

a) La Mission pour lrsquoinformatisation du systegraveme de santeacute

484 La Mission pour lrsquoinformatisation du systegraveme de santeacute (MISS) creacuteeacutee en 1997

quelques temps apregraves le Conseil Supeacuterieur des Systegravemes drsquoInformation de Santeacute561

(CSSIS)562

avait pour mission de coordonner lrsquoensemble des projets relatifs agrave

556 Circulaire ndeg16 du 18 novembre 1982 circulaire ndeg 275 du 6 janvier 1989 relative agrave linformatisation des

hocircpitaux publics non parue au JORF 557

JEacuteGOU Jean-Jacques laquo Systegravemes dinformation de santeacute le diagnostic est poseacute le traitement simpose raquo

rapport dinformation fait au nom de la commission des finances ndeg 35 Seacutenat 2007 558

Cour des comptes laquo Lrsquointeropeacuterabiliteacute des systegravemes drsquoinformation en santeacute raquo reacutefeacutereacute ndeg 46485 observations

deacutefinitives adresseacutees au Ministre de la santeacute et des solidariteacutes 2006 559

Cour des Comptes laquo La seacutecuriteacute sociale raquo rapport annuel chapitre X 2007 560

GAGNEUX Michel laquo Refonder la gouvernance de la politique dinformatisation du systegraveme de santeacute -

Douze propositions pour renforcer la coheacuterence et lefficaciteacute de laction publique dans le domaine des systegravemes

dinformation de santeacute raquo La documentation Franccedilaise 2009 et FIESHI Marius laquo La gouvernance de

linteropeacuterabiliteacute seacutemantique est au cœur du deacuteveloppement des systegravemes dinformation en santeacute raquo La

Documentation Franccedilaise juin 2009 561

Deacutecret ndeg 97-20 du 14 janvier 1997 portant creacuteation dun Conseil supeacuterieur des systegravemes dinformation de

santeacute JORF ndeg12 du 15 janvier 1997 p 712 562

Ce conseil qui avait pour mission deacutemettre des recommandations et des avis sur les problegravemes lieacutes agrave la

production agrave la transmission et aux modaliteacutes dexploitation des informations relatives aux soins et agrave la santeacute des

personnes a eacuteteacute mis en sommeil en 2000 Lrsquoarticle 5 du deacutecret ndeg2003-462 du 21 mai 2003 relatif aux

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

264

lrsquoinformatisation du systegraveme de santeacute en lien notamment avec les diffeacuterentes directions du

ministegravere concerneacute Pour ce faire un chargeacute de mission pour lrsquoinformatisation du systegraveme de

santeacute avait eacuteteacute nommeacute Trois champs prioritaires avaient eacuteteacute identifieacutes dans ses missions les

projets relatifs agrave la CPS le projet SESAM-Vitale et lrsquoinformatisation du poste de travail des

professionnels de santeacute563

485 Dans le cadre de son controcircle564

portant sur lrsquointeropeacuterabiliteacute des systegravemes

drsquoinformation en santeacute la Cour des comptes srsquoeacutetait inteacuteresseacutee agrave la MISS qui sur le papier tout

du moins faisait figure drsquoorgane central dans la gouvernance de lrsquoinformatisation du systegraveme

de santeacute Cependant il est tregraves vite apparu que la MISS nrsquoeacutetait pas en capaciteacute de remplir les

missions qui lui avaient eacuteteacute confieacutees Cela reacutesultait drsquoune part drsquoun manque de leacutegitimiteacute et

drsquoautre part drsquoun manque de moyens Le manque de leacutegitimiteacute a drsquoailleurs eacuteteacute souligneacute au

long des diffeacuterents rapports relatifs agrave lrsquoinformatisation du systegraveme de santeacute Alors que lrsquoIGAS

dans son rapport de 2002 soulignait que laquo le positionnement de la mission [avait] souffert de

la non invitation sauf exception du chargeacute de mission aux reacuteunions du comiteacute des directeurs

du ministegravere de la santeacute raquo565

la Cour des comptes quant agrave elle estimait que laquo la mission

[apparaissait] plus comme un organe facilitateur [hellip] que comme une uniteacute normative raquo566

Par ailleurs entre 2004 et 2006 la MISS a pacircti drsquoune absence de direction le chargeacute de

mission ayant quitteacute son poste et nrsquoayant eacuteteacute remplaceacute que tardivement Finalement le deacutecret

ndeg 2011-496 du 5 mai 2011 portant creacuteation dune deacuteleacutegation agrave la strateacutegie des systegravemes

dinformation de santeacute aupregraves des ministres chargeacutes de la santeacute de la seacutecuriteacute sociale des

solidariteacutes et de la coheacutesion sociale567

est venu supprimer la MISS qui avait fini par devenir

une coquille vide

b) Le Conseil supeacuterieur des systegravemes dinformation de santeacute

dispositions reacuteglementaires des parties I II et III du Code de la santeacute publique a finalement abrogeacute le deacutecret

creacuteant le CSSIS le faisant disparaitre par la mecircme occasion 563

Cour des Comptes laquo La seacutecuriteacute sociale raquo rapport annuel op cit p 35 564

Cour des comptes laquo Lrsquointeropeacuterabiliteacute des systegravemes drsquoinformation en santeacute raquo op cit 565

IGAS laquo Evaluation du systegraveme drsquoinformation des professionnels de santeacute raquo rapport ndeg 2002-142 novembre

2002 p 40 566

Cour des comptes laquo Lrsquointeropeacuterabiliteacute des systegravemes drsquoinformation en santeacute raquo op citp 36 567

Deacutecret ndeg 2011-496 du 5 mai 2011 portant creacuteation dune deacuteleacutegation agrave la strateacutegie des systegravemes dinformation

de santeacute aupregraves des ministres chargeacutes de la santeacute de la seacutecuriteacute sociale des solidariteacutes et de la coheacutesion sociale

JORF ndeg 0105 texte ndeg31

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

265

486 Creacuteeacute en 1997568

le Conseil supeacuterieur des systegravemes dinformation de santeacute (CSSIS)

placeacute aupregraves du Ministre de la santeacute avait pour missions principales laquo deacutemettre des

recommandations et des avis sur les problegravemes lieacutes agrave la production agrave la transmission et aux

modaliteacutes dexploitation des informations relatives aux soins et agrave la santeacute des personnes raquo569

mais eacutegalement et il srsquoagissait selon nous de sa mission essentielle de veiller laquo agrave la

coheacuterence agrave la seacutecuriteacute et au caractegravere eacutevolutif des programmes dinteacuterecirct geacuteneacuteral dont il est

ameneacute agrave connaicirctre notamment en ce qui concerne les outils daide agrave la pratique meacutedicale et

les reacuteseaux destineacutes aux eacutechanges dinformation de santeacute raquo570

En parallegravele de ces fonctions

le CSSIS avait la possibiliteacute de proposer au Ministre de la santeacute de faire proceacuteder agrave des eacutetudes

ou investigations par lrsquoIGAS Cependant il nrsquoa pas utiliseacute lrsquoensemble des moyens qui eacutetaient

agrave sa disposition

Apregraves trois anneacutees drsquoexercice pourtant assez riches et trois rapports drsquoactiviteacute le

mandat des membres arrivait agrave terme et sa composition nrsquoa pas eacuteteacute renouveleacutee Ainsi

lrsquoactiviteacute du CSSIS a eacuteteacute mise en sommeil et cet organe disparaitra deacutefinitivement lors de la

creacuteation de la DSSIS

2) Les structures opeacuterationnelles

A cocircteacute des structures deacutedieacutees agrave la coordination existaient des structures plus

opeacuterationnelles

a) Le groupement pour la modernisation du systegraveme dinformation hospitalier

487 Le groupement pour la modernisation du systegraveme dinformation hospitalier (GMSIH)

dont la convention constitutive avait eacuteteacute approuveacutee par arrecircteacute ministeacuteriel en date du 23 feacutevrier

2000571

avait pour mission de laquo concourir dans le cadre geacuteneacuteral de la construction du

systegraveme dinformation de santeacute agrave la mise en coheacuterence agrave linteropeacuterabiliteacute agrave louverture et agrave

la seacutecuriteacute des systegravemes dinformation utiliseacutes par les eacutetablissements de santeacute membres raquo

Initialement constitueacute pour une dureacutee de cinq ans il a ensuite eacuteteacute prorogeacute de deux anneacutees

568 Deacutecret ndeg 97-20 du 14 janvier 1997 portant creacuteation dun Conseil supeacuterieur des systegravemes dinformation de

santeacute JORF ndeg12 du 15 janvier 1997 p 712 569

Id Article 1er

570

Ibid 571

Arrecircteacute du 23 feacutevrier 2000 relatif agrave la nomination dun commissaire du Gouvernement aupregraves du groupement

dinteacuterecirct public deacutenommeacute laquo Groupement pour la modernisation du systegraveme dinformation hospitalier raquo JORF

ndeg49 du 27 feacutevrier 2000 p 3082

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

266

suppleacutementaires par un arrecircteacute du 5 octobre 2004572

Comme le preacutevoyait lrsquoarticle L 6113-10

du Code de la santeacute publique applicable agrave lrsquoeacutepoque573

le GIP eacutetait composeacute des

eacutetablissements publics de santeacute volontaires574

Par ailleurs les repreacutesentants des membres du

GIP agrave lrsquoassembleacutee geacuteneacuterale et au conseil drsquoadministration eacutetaient deacutesigneacutes par les

organisations repreacutesentatives des eacutetablissements membres575

En termes drsquoactiviteacute la

convention constitutive du groupement exposait clairement qursquoil nrsquoeacutetait laquo nest ni deacuteveloppeur

ni maicirctre douvrage dapplicatifs raquo Comme le souligne la Cour des comptes dans son rapport

le GMSIH apparaissait donc plutocirct comme un laquo centre de ressources et drsquoexpertise constitueacute

en vue drsquoeacutelaborer des orientations strateacutegiques raquo576

Le GMSIH srsquoest eacutegalement reacuteveacuteleacute avoir

un rocircle drsquointermeacutediaire entre la Direction de lrsquoHospitalisation de lrsquoOffre de Soins (DHOS)577

agrave lrsquoinitiative des projets et les eacutetablissements de santeacute en charge de lrsquoexeacutecution de ces

projets

572 Arrecircteacute du 5 octobre 2004 JORF ndeg 256 du 3 novembre 2004 p 18563

573 laquo Un groupement pour la modernisation du systegraveme dinformation hospitalier est chargeacute de concourir dans

le cadre geacuteneacuteral de la construction du systegraveme dinformation de santeacute agrave la mise en coheacuterence agrave

linteropeacuterabiliteacute agrave louverture et agrave la seacutecuriteacute des systegravemes dinformation utiliseacutes par les eacutetablissements de santeacute

qui en sont membres Sous reacuteserve des dispositions du preacutesent article il est soumis aux dispositions de larticle

21 de la loi ndeg 82-610 du 15 juillet 1982 dorientation et de programmation pour la recherche et le

deacuteveloppement technologique de la France La convention constitutive du groupement est approuveacutee par un

arrecircteacute des ministres chargeacutes de la santeacute et des affaires sociales Ce groupement est constitueacute pour une dureacutee qui

ne peut exceacuteder sept ans sous la forme dun groupement dinteacuterecirct public entre des eacutetablissements publics de

santeacute volontaires Les eacutetablissements de santeacute priveacutes peuvent y adheacuterer Les organisations repreacutesentatives des

eacutetablissements membres du groupement figurant sur une liste arrecircteacutee par le ministre chargeacute de la santeacute

deacutesignent les repreacutesentants des membres agrave lassembleacutee geacuteneacuterale et au conseil dadministration Les

repreacutesentants deacutesigneacutes par lorganisation repreacutesentative des eacutetablissements publics de santeacute disposent de la

majoriteacute des voix au sein de chacune de ces instances [hellip] raquo 574

Arrecircteacute du 23 feacutevrier 2000 portant approbation de la convention constitutive dun groupement dinteacuterecirct public

JORF ndeg49 du 27 feacutevrier 2000 p 3081 575

Arrecircteacute du 17 deacutecembre 1999 pris en application de larticle L 710-8 du Code de la santeacute publique et relatif

aux organisations chargeacutees de deacutesigner les repreacutesentants des eacutetablissements de santeacute membres du groupement

pour la modernisation du systegraveme dinformation hospitalier au sein des organes deacutelibeacuterants dudit groupement

JORF ndeg297 du 23 deacutecembre 1999 p 19108 576

Cour des Comptes laquo La seacutecuriteacute sociale raquo op cit p 45 577

Direction de lrsquoHospitalisation et de lrsquoOffre de Soins devenue la Direction Geacuteneacuterale de lrsquoOffre de Soins

depuis le deacutecret ndeg 2010-271 portant organisation de la direction geacuteneacuterale de loffre de soins JORF ndeg0063 du 16

mars 2010 texte ndeg 36

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

267

b) La Mission Nationale drsquoAppui agrave lrsquoInvestissement Hospitalier

488 La Mission nationale drsquoappui agrave lrsquoinvestissement hospitalier (MAINH) a eacuteteacute creacuteeacutee dans

le cadre de la mise en œuvre du plan hocircpital 2007 par arrecircteacute du ministegravere de la santeacute578

Cette

mission eacutetait chargeacutee laquo daccompagner techniquement le programme de reacutenovation du

patrimoine hospitalier preacutevu dans le plan laquo Hocircpital 2007 raquo579

Elle eacutetait placeacutee sous la direction drsquoun directeur deacutetacheacute aupregraves de lrsquoARH Ile-de-

France qui en assurait la gestion administrative et financiegravere Lrsquoarrecircteacute nrsquoapporte aucun deacutetail

suppleacutementaire quant agrave son fonctionnement et ses missions Dans les faits cette mission a

piloteacute le plan hocircpital ainsi que les budgets qui lui eacutetaient deacutedieacutes En 2005 un arrecircteacute a eacutetendu

ses compeacutetences aux systegravemes drsquoinformation hospitaliers580

La MAINH a eacuteteacute tregraves vite critiqueacutee sur son organisation Ainsi la Cour des comptes

degraves 2006 pointait du doigt son rattachement administratif agrave lrsquoARH drsquoIle-de-France ainsi que

son positionnement direct aupregraves du Ministre de la santeacute Ce rapport soulignait eacutegalement la

probleacutematique de lrsquoeacuteclatement des compeacutetences et des responsabiliteacutes entre drsquoune part la

DHOS et drsquoautre part la MAINH en matiegravere drsquoorganisation et de gestion des systegravemes

drsquoinformation hospitaliers Cette absence de partage clair et preacutecis des responsabiliteacutes ajouteacutee

agrave une absence de preacutecisions quant aux liens existants entre DHOS et MAINH a compliqueacute le

processus deacutecisionnel et a fragiliseacute la coheacuterence globale de lrsquoaction de lrsquoEtat sur ce sujet

Dans son rapport de novembre 2007 sur lrsquointeropeacuterabiliteacute la Cour des Comptes

soulignait la possible redondance de la MAINH avec le GMSIH

Malgreacute la mise en place drsquoun protocole de coopeacuteration entre les deux structures ainsi

que la reacuteunion trimestrielle drsquoun comiteacute de pilotage le pilotage des SIH par le biais de ces

structures srsquoest reacuteveacuteleacute chronophage et consommateur de ressources tant humaines que

financiegraveres

578 Arrecircteacute du 27 mars 2003 portant deacutesignation du directeur et organisation de la mission nationale dappui agrave

linvestissement hospitalier JORF du 2 avril 2003 p 5817 579

Ibid 580

Arrecircteacute du 1er juillet 2005 modifiant larrecircteacute du 27 mars 2003 portant deacutesignation du directeur et organisation

de la mission nationale dappui agrave linvestissement hospitalier JORF du 5 aoucirct 2005 texte ndeg 62

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

268

La MAINH et le GMSIH ont finalement disparu pour laisser place en 2011 agrave la

Deacuteleacutegation agrave la Strateacutegie des Systegravemes drsquoInformation de Santeacute (DSSIS) qui constitue

deacutesormais la seule structure de coordination des politiques relatives aux systegravemes

drsquoinformation de santeacute

c) Les GIP DMP et CPS

489 Suite agrave la creacuteation du DMP par la loi du 13 aoucirct 2004581

le Groupement de

preacutefiguration du DMP (communeacutement appeleacute GIP-DMP) a vu le jour Ce groupement

composeacute de lEtat de la Caisse nationale dassurance maladie des travailleurs salarieacutes et de la

Caisse des deacutepocircts et consignations et dont la convention constitutive a eacuteteacute approuveacutee par un

arrecircteacute du 11 avril 2005582

avait pour mission principale de preacuteparer les dispositions qui

permettraient agrave lrsquoorganisme gestionnaire du DMP drsquoecirctre opeacuterationnel Ses fonctions eacutetaient

donc temporaires dans lrsquoattente de la mise en place drsquoune structure peacuterenne Il fut drsquoailleurs

initialement creacuteeacute pour une dureacutee tregraves courte puisque sa convention constitutive preacutevoyait sa

disparition au 31 deacutecembre 2005

Cependant un arrecircteacute du 28 deacutecembre 2005583

a prorogeacute la vie de ce GIP jusquau 30

juin 2007 eacutetant par ailleurs preacuteciseacute qursquoil avait laquo vocation agrave cesser dexister degraves que

lorganisme gestionnaire du dossier meacutedical personnel aura eacuteteacute mis en place et sera en

mesure daccomplir ses missions raquo En effet face au retard consideacuterable pris dans la mise en

place du DMP les pouvoirs publics nrsquoont pas eu drsquoautre choix que de maintenir ce GIP La

Cour des comptes lors de son controcircle des comptes et de la gestion du GIP avait eu

lrsquooccasion de mettre en exergue le deacutecalage qui existait entre drsquoune part lrsquoampleur du projet

et drsquoautre part le peu de moyens accordeacutees agrave ce que la Cour qualifiait de laquo petite structure raquo

(65 emplois et 23 millions drsquoeuros de deacutepenses en 2007)584

A lrsquooccasion de ce controcircle

plusieurs points neacutegatifs avaient eacuteteacute releveacutes Il eacutetait notamment reprocheacute au GIP son

autonomie trop limiteacutee lrsquoEtat intervenant plus que de raison dans son fonctionnement ainsi

que sa gouvernance deacuteficiente reacutesultant directement de cette intervention constante de lrsquoEtat

581 Loi ndeg 2004-810 du 13 aoucirct 2004 relative agrave lassurance maladie JORF ndeg0190 du 17 aoucirct 2004 p 14598

582 Arrecircteacute du 11 avril 2005 portant approbation de la convention constitutive dun groupement dinteacuterecirct public

JORF ndeg85 du 12 avril 2005 p 6547 583

Arrecircteacute du 28 deacutecembre 2005 portant approbation des modifications apporteacutees agrave la convention constitutive du

groupement de preacutefiguration du dossier meacutedical personnel JORF ndeg304 du 31 deacutecembre 2005 p 20903 584

laquo La gestion du GIP Dossier meacutedical personnel raquo rapport public annuel de la Cour des comptes feacutevrier 2009

pp 135-151

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

269

Par ailleurs les faiblesses de la maicirctrise drsquoouvrage pourtant au cœur de ses missions et le

manque drsquointeacuterecirct du GIP pour la qualiteacute et la seacutecuriteacute du systegraveme avaient eacutegalement eacuteteacute

souligneacutees

Ce rapport est toutefois intervenu comme la Cour le souligne elle-mecircme agrave un moment ougrave

laquo les pouvoirs publics prenaient enfin conscience de lrsquoirreacutealisme du projet et deacutecidaient

drsquoattendre le reacutesultat des missions drsquoenquecirctes avant de le relancer raquo585

Parmi ces missions

drsquoenquecircte on retrouve notamment le Rapport de la mission de relance du DMP rendu en avril

2008 par Michel GAGNEUX586

ou encore le Rapport sur le dossier meacutedical personnel

preacutesenteacute par Pierre LABORDES au Seacutenat en avril 2009587

Ces deux rapports dressaient un

bilan mitigeacute du DMP et preacuteconisaient une relance du projet comprenant une refonte de sa

gouvernance et de son organisation geacuteneacuterale

Ces rapports ne sont pas les seuls agrave srsquoecirctre attardeacutes sur le sujet et entre 2007 et 2009

plusieurs institutions se sont pencheacutees sur la probleacutematique de la gouvernance des systegravemes

drsquoinformation de santeacute En est ressorti un bilan assez critique de lrsquoorganisation en place

B Un bilan mitigeacute

490 La Cour des comptes en eacutetudiant la question de lrsquointeropeacuterabiliteacute des systegravemes

drsquoinformation (1) et lrsquoIGAS (2) ont eu lrsquooccasion drsquoobserver la gouvernance des systegravemes

drsquoinformation de santeacute de maniegravere assez preacutecise

1) Les rapports de la Cour des comptes

La Cour des comptes srsquoest pencheacutee agrave plusieurs reprises sur la question de lrsquointeropeacuterabiliteacute

des systegravemes drsquoinformation de santeacute eacutetudes menant irreacutemeacutediablement agrave srsquointerroger sur lrsquoeacutetat

de la gouvernance des projets drsquoe-santeacute en France

585 Id p 135

586 GAGNEUX Michel laquo Pour un dossier patient virtuel et partageacute et une strateacutegie nationale des systegravemes

drsquoinformation de santeacute raquo La Documentation Franccedilaise 2008 587

ETIENNE Jean-Claude LABORDES Pierre laquo Le dossier meacutedical personnel (DMP) quel bilan deacutetape

pour quelles perspectives raquo rapport fait au nom de lOffice parlementaire deacutevaluation des choix scientifiques

et technologiques Seacutenat ndeg 567 2009

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

270

491 A lrsquooccasion drsquoun controcircle portant sur lrsquointeropeacuterabiliteacute des systegravemes drsquoinformation en

santeacute drsquoabord la Cour avait conclu que les conditions neacutecessaires agrave lrsquoameacutelioration de

lrsquointeropeacuterabiliteacute nrsquoeacutetaient pas reacuteunies et ce en grande partie agrave cause drsquoun deacutefaut de pilotage

central Dans son reacutefeacutereacute agrave lrsquoattention du Ministre de la santeacute et des solidariteacutes le Premier

Preacutesident de la Cour des comptes relevait que laquo face agrave des acteurs multiples aux inteacuterecircts non

convergents lrsquoEtat nrsquoa pas su organiser un pilotage efficace raquo La Cour reconnaissait ici le

contexte compliqueacute auquel lrsquoEtat eacutetait confronteacute mais nrsquooubliait pas pour autant de rappeler

que lrsquoabsence de lisibiliteacute de la politique meneacutee par le Ministegravere de la santeacute en la matiegravere

nrsquoavait cesseacute drsquoecirctre pointeacutee du doigt depuis le deacutebut des anneacutees 2000 Au moment de son

controcircle la Cour deacuteplorait ainsi lrsquoinexistence drsquoun document de cadrage opposable aux

diffeacuterentes directions du ministegravere mais eacutegalement agrave lrsquoensemble des acteurs concerneacutes par le

systegraveme drsquoinformation en santeacute et reprenant les grandes orientations de ce que devrait ecirctre ce

systegraveme drsquoinformation588

492 A lrsquooccasion de son rapport annuel sur lrsquoapplication des lois de financement ensuite

rendu en septembre 2007 la Cour des comptes avait consacreacute un chapitre au partage des

donneacutees entre les systegravemes drsquoinformation de santeacute Cela avait eacuteteacute lrsquooccasion pour la

juridiction drsquoeacutemettre une recommandation touchant plus particuliegraverement agrave la probleacutematique

de la gouvernance des systegravemes drsquoinformation en santeacute Elle avait alors preacuteconiseacute de reacuteduire

le nombre drsquoopeacuterateurs des systegravemes drsquoinformation en santeacute et renforcer le pilotage

strateacutegique par le Ministegravere Pour la Cour il apparaissait de maniegravere eacutevidente et agrave juste titre

selon nous que lrsquoameacutelioration de la gouvernance passerait obligatoirement par une

simplification de lrsquoorganigramme des acteurs concerneacutes mais surtout par une reprise en main

par lrsquoEtat du pilotage global du systegraveme drsquoinformation de santeacute afin drsquoen assurer la coheacuterence

geacuteneacuterale Un pilotage strateacutegique fort par le Ministegravere appuyeacute par des structures

opeacuterationnelles efficaces et reacuteduites en nombre apparaissait comme la solution de

lrsquoameacutelioration de la gouvernance des systegravemes drsquoinformation en santeacute Crsquoest par ailleurs

comme nous le verrons la solution adopteacutee lors de la refonte de la gouvernance agrave partir de

2009

588 Cour des comptes laquo Lrsquointeropeacuterabiliteacute des systegravemes drsquoinformation en santeacute raquo op cit p 23

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

271

2) Le rapport de lrsquoIGAS

493 LrsquoIGAS dans le cadre de son activiteacute 2006 a eacuteteacute ameneacute agrave se pencher sur

lrsquoorganisation et sur le pilotage des organismes en charge du deacuteveloppement des systegravemes

drsquoinformation de santeacute589

Sa feuille de route eacutetait alors tregraves claire elle devait laquo proceacuteder

[hellip] agrave lrsquoaudit de lrsquoorganisation du pilotage de ces dispositifs en vue de veacuterifier leur coheacuterence

drsquoensemble et drsquoeacutevaluer la qualiteacute du pilotage de chaque structure ainsi que lrsquoefficaciteacute et la

coheacuterence du pilotage global du systegraveme par lrsquoEtat raquo590

Cet audit srsquoest donc inteacuteresseacute

pleinement agrave la gouvernance des systegravemes drsquoinformation de santeacute et il en a reacutesulteacute des

recommandations concregravetes et efficaces certaines ayant drsquoailleurs eacuteteacute mises en œuvre depuis

lors

494 Lrsquointeacuterecirct principal de cette eacutetude de lrsquoIGAS reacuteside selon nous dans lrsquoanalyse fine qui

y est faite du pilotage des diffeacuterents organismes intervenant dans la gouvernance et la mise en

place des systegravemes drsquoinformation en santeacute En effet comme nous lrsquoavons vu plusieurs types

de structures ont coexisteacute allant des missions eacutemanations directes du Ministegravere aux GIP

formule principalement privileacutegieacutee par lrsquoEtat Le choix du groupement reacuteveacutelateur de la

volonteacute de faire travailler ensemble deux acteurs essentiels du systegraveme de santeacute (le Ministegravere

de la santeacute et lrsquoassurance maladie) a permis agrave lrsquoEtat de srsquoengager dans des projets et drsquoen

garder le controcircle pendant que la CNAMTS les financcedilait Par exemple comme le relegraveve

lrsquoIGAS laquo la creacuteation du GIP-DMP permet-elle agrave lrsquoEtat de financer sur des ressources de

lrsquoassurance maladie un projet reacutepondant drsquoabord agrave des objectifs de santeacute publique raquo Nous

ajouterons eacutegalement que ce choix est plus que strateacutegique en termes drsquoaffichage politique En

effet un projet comme celui du DMP par exemple qui serait entiegraverement financeacute et geacutereacute par

lrsquoAssurance maladie serait alors consideacutereacute principalement comme un projet de reacutegulation des

deacutepenses et de controcircle des professionnels alors que ce mecircme projet geacutereacute par un GIP dont

lrsquoEtat est membre redevient un projet de santeacute publique au service des usagers du systegraveme de

santeacute avant tout

589 IGAS laquo Audit de lrsquoorganisation et du pilotage des organismes œuvrant agrave lrsquoinformatisation du systegraveme de

santeacute raquo op cit 590

Id p 1

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

272

495 Neacuteanmoins cette multiplication des projets et des GIP les geacuterant a multiplieacute les

repreacutesentations de lrsquoEtat qui srsquoest de fait eacuteparpilleacute Il a par ailleurs eacuteteacute constateacute un

cloisonnement entre les diffeacuterentes directions du Ministegravere en charge de la tutelle des

diffeacuterents GIP Ainsi aucune coordination nrsquoeacutetait assureacutee entre la DHOS la Direction de la

Seacutecuriteacute Sociale (DSS) ou encore la Direction Geacuteneacuterale de la Santeacute (DGS) alors qursquoune mise

en commun de leurs personnel speacutecialiseacute de leurs expertises mais eacutegalement une deacutefinition

drsquoobjectifs communs aurait eacuteteacute souhaitable Enfin lrsquoensemble de ces structures concentreacutees

sur un projet technique preacutecis a deacuteveloppeacute des compeacutetences et expertises techniques pointues

au prix drsquoune certaine redondance entre les structures elles-mecircmes alors qursquoune mutualisation

aurait eacuteteacute plus efficiente et eacuteconomique

Cette conception verticale de la reacutealisation des projets591

a finalement affaibli

lrsquoefficaciteacute de la gouvernance en place

C Les propositions GAGNEUX et FIESHI

496 Missionneacute par le Ministre de la santeacute de lrsquoeacutepoque Madame Roselyne BACHELOT-

NARQUIN Michel GAGNEUX alors Preacutesident du Groupement drsquoInteacuterecirct public DMP a

rendu un rapport en mai 2009 comportant laquo 12 propositions pour renforcer la coheacuterence et

lrsquoefficaciteacute de lrsquoaction publique dans le domaine des systegravemes drsquoinformation de santeacute raquo592

Pour lrsquoinspecteur geacuteneacuteral des affaires sociales ce sont bien les diverses probleacutematiques

rencontreacutees lors des tentatives de deacuteveloppement du DMP qui ont mis en exergue la faiblesse

de la gouvernance du systegraveme drsquoinformation en santeacute Il ressortait de ce rapport qursquoune

gouvernance efficace et coheacuterente devait reposer sur une strateacutegie nationale globale en

matiegravere de systegravemes drsquoinformation de santeacute Lrsquoensemble des objectifs mais eacutegalement des

scheacutemas directeurs des projets de leur coheacuterence et de leurs budgets devait eacutemaner de

lrsquoeacutechelon national Michel GAGEUX proposait pour cela de mettre en place un conseil

national des systegravemes drsquoinformation de santeacute dont la compeacutetence serait eacutetendue agrave lrsquoensemble

du champ de la santeacute et posseacutedant une leacutegitimiteacute forte (en eacutetant notamment institueacute par la loi

591 GRATIEUX Laurent OLLIVIER Roland laquo Audit de lrsquoorganisation et du pilotage des organismes œuvrant agrave

lrsquoinformatisation du systegraveme de santeacute raquo IGAS p 10 592

GAGNEUX Michel laquo Refonder la gouvernance de la politique dinformatisation du systegraveme de santeacute -

Douze propositions pour renforcer la coheacuterence et lefficaciteacute de laction publique dans le domaine des systegravemes

dinformation de santeacute raquo op cit

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

273

et preacutesideacute par le Ministre de la santeacute) Par ailleurs le rapport soulignant lrsquoinadeacutequation des

moyens et preacuterogatives de la MISS avec ses objectifs proposait la disparition de la mission et

la creacuteation au sein du ministegravere drsquoune Direction de la strateacutegie et de la prospective des

systegravemes drsquoinformation de santeacute Pour Michel GAGNEUX seule une direction placeacutee au

niveau exeacutecutif et disposant de lrsquoexpertise et de la leacutegitimiteacute neacutecessaire serait capable de

feacutedeacuterer lrsquoensemble des acteurs impliqueacutes afin de mettre en place une politique coheacuterente593

Le rapport insistait enfin sur la neacutecessiteacute de deacutevelopper et professionnaliser la maicirctrise

drsquoouvrage qui devait srsquoorganiser agrave la fois agrave lrsquoeacutechelon national et plus speacutecifiquement au

niveau des directions techniques du Ministegravere de la santeacute mais eacutegalement au niveau reacutegional

et plus particuliegraverement des ARS

497 Le Professeur Marius FIESHI quant agrave lui a rendu en juin 2009 un rapport intituleacute

laquo La gouvernance de lrsquointeropeacuterabiliteacute seacutemantique est au cœur du deacuteveloppement des

systegravemes drsquoinformation en santeacute raquo594

Ce rapport axait son eacutetude sur lrsquoopportuniteacute de

lrsquoutilisation de systegravemes terminologiques communs dans le cadre du deacuteveloppement de

lrsquoinformatisation du systegraveme de santeacute et ce afin drsquoameacuteliorer notamment la prise en charge des

patients A lrsquooccasion de son eacutetude du sujet sur laquelle nous aurons lrsquooccasion de revenir au

cours de nos travaux le Professeur FIESHI a abordeacute la question de la gouvernance des

systegravemes drsquoinformation Son constat eacutetait tregraves simple pour lui le Ministegravere ne srsquoeacutetait pas

suffisamment preacuteoccupeacute de la question de la cette gouvernance A lrsquoappui de ce constat il

citait divers rapports pour conclure sur une critique sans appel laquo en lrsquoabsence de scheacutema

directeur un ensemble de projets ne conduit pas agrave un systegraveme raquo595

En effet lrsquoorganisation

existante lors de la reacutedaction de ce rapport eacutetait baseacutee sur des projets successifs meneacutes de

maniegravere indeacutependante et sans maicirctrise drsquoouvrage commune donc sans gouvernance reacuteelle

498 Ces deux rapports publieacutes agrave quelques mois drsquointervalles ont permis drsquoamorcer une

refonte de la gouvernance agrave lrsquoinitiative du Ministegravere de la santeacute En effet les propositions du

rapport de Michel GAGNEUX ont conduit la ministre de la santeacute agrave le missionner afin de

conduire une mission de preacutefiguration en lien avec le secreacutetaire geacuteneacuteral des ministegraveres

593 Id p 6

594 FIESHI Marius laquo La gouvernance de linteropeacuterabiliteacute seacutemantique est au cœur du deacuteveloppement des

systegravemes dinformation en santeacute raquo La Documentation Franccedilaise juin 2009 595

Id p 30

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

274

chargeacutes des affaires sociales afin de creacuteer et installer notamment la deacuteleacutegation agrave la strateacutegie

des systegravemes drsquoinformation de santeacute

Cette nouvelle gouvernance montre cependant elle aussi quelques limites

sect2 Un manque de visibiliteacute sur la gouvernance des projets en cours

499 Face aux critiques eacutemises et dans un souci drsquoassurer une gestion coheacuterente des SIS la

refonte agrave partir de 2009 de lrsquoorganisation lieacutee agrave leur gouvernance a permis drsquoaboutir agrave un

nouvel organigramme (A) Neacuteanmoins celui-ci montre encore aujourdrsquohui quelques limites

rendant difficile la visibiliteacute sur les projets en cours (B)

A Le nouvel organigramme de la gouvernance des SIS

500 Comme auparavant la structure est resteacutee scheacutematiquement la mecircme agrave savoir des

structures drsquoappui opeacuterationnelles (2) en charge de la maicirctrise drsquoouvrage de certains projets et

une structure de coordination (1) doteacutee cette fois-ci drsquoune leacutegitimiteacute et de moyens drsquoaction

plus forts que ses preacutedeacutecesseurs

1) Une structure de coordination la deacuteleacutegation agrave la strateacutegie des systegravemes drsquoinformation

de santeacute

501 Pour plus de lisibiliteacute mais eacutegalement drsquoefficaciteacute la MISS et le CSSIS ont disparu

pour laisser place agrave la Deacuteleacutegation agrave la Strateacutegie des Systegravemes drsquoInformation de Santeacute (DSSIS)

placeacutee sous lrsquoautoriteacute du secreacutetariat geacuteneacuteral des ministegraveres chargeacutes des affaires sociales

Preacutefigureacutee par Michel GAGNEUX cette deacuteleacutegation a toutefois mis du temps agrave voir le jour

Presque un an et demi se sont en effet eacutecouleacutes entre la lettre de mission et le deacutecret du 5 mai

2011 instaurant la deacuteleacutegation596

Lrsquoarticle 2 de ce deacutecret lui accorde sept missions importantes

et conseacutequentes que sont lrsquoanimation et lrsquoeacutelaboration des prioriteacutes nationales en matiegravere de SI

santeacute et meacutedico-social la participation aux organes de pilotage national la preacuteparation des

596 Deacutecret ndeg 2011-493 du 5 mai 2011 relatif agrave la prise en compte des incidences eacutenergeacutetiques et

environnementales des veacutehicules agrave moteur dans les proceacutedures de commande publique JORF ndeg0105 du 6 mai

2011 p 7751

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

275

deacutecisions du Conseil national de pilotage des ARS la coordination des actions des diffeacuterents

acteurs en la matiegravere (Etat assurance maladie agences eacutetablissements de santeacute CNSA) la

tutelle de lrsquoASIP santeacute lrsquoorientation et la coordination de lrsquoaction agrave lrsquoeacutechelle europeacuteenne et

internationale et enfin assurer la maicirctrise drsquoouvrage des systegravemes drsquoinformation centraux et

deacuteconcerteacutes des ministegraveres

502 Cependant le deacutecret ndeg 2013-727 du 12 aoucirct 2013 portant creacuteation organisation et

attributions dun secreacutetariat geacuteneacuteral des Ministegraveres chargeacutes des affaires sociales597

vient

repreacuteciser dans son article 10 les missions de la DSSIS Ainsi la mission de maicirctrise

drsquoouvrage des systegravemes drsquoinformation des services centraux disparait Celle-ci est reprise par

une nouvelle direction la direction des systegravemes drsquoinformation du secreacutetariat geacuteneacuteral Cette

modification souligne une volonteacute de seacuteparer la gestion des systegravemes drsquoinformation de santeacute

de la gestion du systegraveme drsquoinformation du Ministegravere les enjeux les expertises et les acteurs

nrsquoeacutetant pas les mecircmes

503 Preacutesenteacutee par le Ministegravere des Affaires sociales et de la santeacute598

comme une structure

leacutegegravere srsquoappuyant sur lrsquoASIP santeacute la DSSIS a un rocircle majeur de coordination geacuteneacuterale des

acteurs intervenant dans lrsquoorganisation et la mise en place des systegravemes drsquoinformation de

santeacute Crsquoest eacutegalement agrave elle qursquoil revient de donner lrsquoimpulsion geacuteneacuterale en termes de

deacuteveloppement des projets notamment en leur donnant le cadre neacutecessaire agrave leur bon

deacuteveloppement Ainsi lors de sa mise en place la DSSIS avait agrave cœur599

avant toute chose

drsquoinstaurer des bases solides en matiegravere de preacuterequis neacutecessaires au deacuteveloppement drsquoune

politique forte et efficace en des systegravemes drsquoinformation en santeacute agrave savoir un cadre juridique

fiable une gestion coordonneacutee des reacutefeacuterentiels et assurer la seacutecuriteacute des systegravemes

drsquoinformation en santeacute

Malheureusement comme nous le constaterons dans la suite de nos travaux agrave lrsquoheure

actuelle ces trois points majeurs ne sont pas reacutesolus

597 Deacutecret ndeg 2013-727 du 12 aoucirct 2013 portant creacuteation organisation et attributions dun secreacutetariat geacuteneacuteral des

ministegraveres chargeacutes des affaires sociales JORF ndeg0188 du 14 aoucirct 2013 texte ndeg 4 598

Preacutesentation geacuteneacuterale de la DSSIS disponible sur [httpsocial-santegouvfr] Consulteacute le 15 avril 2016 599

laquo Systegraveme drsquoinformation de Santeacute la DSSIS trace les axes prioritaires raquo Interview de Philippe BURNEL

DSIH e-santeacute 2012 disponible sur [httpwwwdsihfr] Consulteacute le 15 avril 2016

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

276

2) Des structures opeacuterationnelles en appui

a) LrsquoASIP Santeacute

504 LrsquoAgence des Systegravemes drsquoInformation Partageacutes en santeacute est un groupement drsquointeacuterecirct

public dont la convention constitutive a eacuteteacute approuveacutee par un arrecircteacute en date du 8 septembre

2009600

et placeacutee sous la tutelle de lrsquoEtat Ce groupement composeacute dans un premier temps de

lrsquoEtat (repreacutesenteacute par le Ministegravere de la santeacute) la CNAMTS et la caisse des deacutepocircts et

consignation est aujourdrsquohui composeacute de lrsquoEtat la CNAMTS et la Caisse nationale de

solidariteacute pour lrsquoautonomie

Le GIP neacute de la reacuteunion du GIP-DMP du GIP-CPS assure selon sa convention

constitutive sept missions qui sont les suivantes la maicirctrise douvrage des projets de systegravemes

drsquoinformation en santeacute qui lui sont deacuteleacutegueacutes par ses membres la reacutealisation et le deacuteploiement

du Dossier Meacutedical Personnel (DMP) et la maicirctrise douvrage de son heacutebergement la

deacutefinition la promotion et lhomologation de reacutefeacuterentiels standards produits ou services

contribuant agrave linteropeacuterabiliteacute la seacutecuriteacute et lusage des systegravemes dinformation de santeacute et de

la teacuteleacutesanteacute ainsi que la surveillance de leur bonne application la maicirctrise douvrage et la

gestion dans le cadre des missions qui lui sont deacuteleacutegueacutees des annuaires et reacutefeacuterentiels

nationaux regroupant les identiteacutes et informations associeacutees relatives aux professionnels de

santeacute ainsi quaux services et eacutetablissements de santeacute et du secteur meacutedico-social la

certification la production la gestion et le deacuteploiement de la Carte de Professionnel de Santeacute

(CPS) et plus geacuteneacuteralement de dispositifs assurant les fonctions didentification

dauthentification de signature permettant aux professionnels de santeacute de faire reconnaicirctre

dans les conditions de seacutecuriteacute et de confidentialiteacute requises leur identiteacute et leurs

qualifications professionnelles par les systegravemes dinformation et deacutechanges eacutelectroniques

quils utilisent laccompagnement et lencadrement des initiatives publiques et priveacutees

concourant agrave son objet (notamment sous forme de conventions dassistance agrave maicirctrise

douvrage ou de conventions de partenariat) la participation agrave la preacuteparation et agrave lapplication

des accords ou projets internationaux dans le domaine des systegravemes de partage et deacutechange

de linformation de santeacute agrave la demande du ministre ou des ministres compeacutetents

600 Arrecircteacute du 8 septembre 2009 portant approbation de la convention constitutive dun groupement dinteacuterecirct

public JORF ndeg0213 du 15 septembre 2009 p 15096

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

277

Ce groupement a vu le jour suite aux diffeacuterents rapports qui pointaient les deacutefaillances

de la gouvernance en place en matiegravere des systegravemes drsquoinformation de santeacute LrsquoASIP Santeacute

reacutesulte de la volonteacute de lrsquoEtat de renforcer la maicirctrise drsquoouvrage publique des systegravemes

drsquoinformation mais eacutegalement drsquoinstaurer un mode drsquoaction efficace dans le domaine

Comme lrsquoindiquait le communiqueacute de presse du 16 septembre 2009 agrave ce sujet laquo lrsquoASIP est neacute

de la volonteacute [hellip] drsquoinstaller une agence drsquoEtat reacutefeacuterente et feacutedeacuteratrice de lrsquoe-santeacute en

France raquo601

505 Pour lrsquoensemble des industriels regroupeacutes au sein du LESISS (Les Entreprises des

Systegravemes drsquoInformation Sanitaires et Sociaux ndash LESISS) lrsquoASIP est laquo un pilote clairement

identifieacute qui œuvre dans un esprit de concertation raquo602

LrsquoASIP peut en effet srsquoenorgueillir de

plusieurs reacuteussites en matiegravere de systegravemes drsquoinformation de santeacute (publication de reacutefeacuterentiels

drsquointeropeacuterabiliteacute deacutefinition drsquoun identifiant national de santeacute (INS) creacuteation du reacutepertoire

des professionnels de santeacute (RPPS) creacuteation de lrsquooffre de service DMP) lagrave ougrave ses

preacutedeacutecesseurs nrsquoavaient malheureusement pas reacuteussi agrave mener agrave bien leur mission

506 Cependant bien que tregraves active dans ses premiegraveres anneacutees de vie lrsquoASIP srsquoest vite

retrouveacutee bloqueacutee dans plusieurs projets et notamment en ce qui concerne le DMP Comme le

soulignait Michel GAGNEUX dans le rapport drsquoactiviteacute de lrsquoASIP de 2012 laquo force est de

reconnaicirctre que lrsquoaction de lrsquoagence ne peut plus ecirctre depuis la fin de lrsquoanneacutee 2011 agrave la

hauteur de ces finaliteacutes Projet embleacutematique le Dossier Meacutedical Personnel (DMP) a eacuteteacute mis

en service avec succegraves en phase de test dans quatre reacutegions degraves le deacutebut de 2011 mais son

deacuteploiement nrsquoa pu ecirctre engageacute Notre pays a plus que jamais besoin drsquoune politique

nationale coheacuterente et constante fondeacutee sur une vision de long terme de notre systegraveme de

santeacute agrave la fois mobilisatrice et feacutedeacuteratrice et sur une strateacutegie drsquoaction claire et

pertinente raquo603

601 Communiqueacute disponible sur [httpwwwportailtelesanteorg] consulteacute le 15 avril 2016

602 Rapport drsquoactiviteacute de lrsquoASIP santeacute 2009 p 29 disponible sur [httpesantegouvfr] consulteacute le 19 mars

2017 603

Rapport drsquoactiviteacute 2012 de lrsquoASIP santeacute p 1 disponible sur [httpesantegouvfr] consulteacute le 15 avril 2016

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

278

507 Avec le transfert de la gestion et de la mise en place du DMP agrave la CNAMTS par la loi

de modernisation de notre systegraveme de santeacute604

lrsquoASIP a perdu lrsquoune de ses missions

principales agrave laquelle elle travaillait depuis sa creacuteation Sa convention constitutive sera

certainement modifieacutee en ce sens Elle se recentre donc sur de nouveaux projets dont la mise

en œuvre de la messagerie seacutecuriseacutee de santeacute la modernisation des systegravemes drsquoinformation

des SAMU ou encore le deacuteploiement des reacutepertoires opeacuterationnels des ressources605

b) Lrsquoagence Nationale drsquoAppui agrave la Performance

508 Lrsquoagence Nationale drsquoAppui agrave la Performance (ANAP) neacutee en 2009 de la reacuteunion du

GMSIH de la MAINH et de la Mission nationale drsquoexpertise et drsquoaudit hospitaliers a repris

lrsquoensemble des missions qui leur eacuteteacute confieacutees Elle srsquoest par ailleurs vu confier drsquoautres

missions par la loi HPST et notamment celle drsquoappuyer les eacutetablissements de santeacute les

eacutetablissements meacutedico-sociaux et les ARS en vue drsquoameacuteliorer leur performance Institueacute par

la loi HPST ce GIP606

a eacuteteacute creacuteeacute le 23 octobre 2009 date de publication de lrsquoarrecircteacute

drsquoapprobation de sa convention constitutive

509 Cette agence a un rocircle global drsquoaccompagnement des eacutetablissements sanitaires et

meacutedico-sociaux dans leurs deacutemarches drsquoameacutelioration de leur performance Parmi son large

portefeuille drsquoactiviteacutes se trouve ainsi les systegravemes drsquoinformation Contrairement agrave drsquoautres

agences lrsquoANAP ne participe aucunement agrave lrsquoeacutediction de normes techniques ou

regraveglementaires dans le domaine De mecircme elle nrsquoest pas habiliteacutee agrave deacutelivrer des autorisations

ou des avis Son rocircle est strictement limiteacute agrave lrsquoaccompagnement et au conseil des

eacutetablissements en leur fournissant un appui ponctuel mais eacutegalement en eacutetablissant des

meacutethodologies et des reacutefeacuterentiels partageables agrave tous les eacutetablissements LrsquoANAP remplit

eacutegalement des missions drsquoaudit et drsquoeacutevaluation des projets hospitaliers notamment dans le

domaine informatique A titre drsquoexemple en 2015 lrsquoANAP en lien avec la DGOS a travailleacute

604 Loi ndeg 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre systegraveme de santeacute JORF ndeg0022 du 27 janvier

2016 texte 1 article 96 605

La mise en place du reacutepertoire Opeacuterationnel des Ressources ndash ou ROR- est preacutevue par lrsquoarticle D 6124-25 du

Code de la santeacute publique Le ROR est un outil de description des ressources de lrsquooffre de soins pour une reacutegion

dont lrsquoobjectif est de proposer une information exhaustive de lrsquooffre de soins reacutegionale et extra-reacutegionale En mai

2012 lrsquoASIP santeacute a eacuteteacute missionneacutee par la DGOS pour deacutefinir et mettre en œuvre un programme permettant de

doter lrsquoensemble des reacutegions drsquoun service ROR coheacuterent agrave lrsquoeacutechelle nationale en srsquoinspirant notamment des

ROR fonctionnel Puis en 2015 la mission de lrsquoASIP a eacutevolueacute Deacutesormais elle a en charge de rendre

interopeacuterable les ROR en place afin de permettre lrsquoaccegraves agrave lrsquooffre de soin drsquoune reacutegion agrave une autre et deacuteployer

un ROR interopeacuterable dans les reacutegions qui nrsquoen seraient pas encore pourvues 606

Ce GIP est composeacute de lrsquoEtat lrsquoUnion des caisses drsquoassurance maladie la caisse nationale de solidariteacute pour

lrsquoautonomie et les feacutedeacuterations repreacutesentatives des eacutetablissements de santeacute et meacutedicaux sociaux

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

279

au deacuteploiement du programme hocircpital numeacuterique et notamment agrave la reacuteduction des freins

structurels au bon deacuteploiement des systegravemes drsquoinformation de santeacute607

B Les limites de cette nouvelle organisation

510 Bien que grandement reacutenoveacutee la nouvelle gouvernance des systegravemes drsquoinformation de

santeacute preacutesente encore quelques lacunes et meacuterite que lrsquoon srsquointerroge agrave son sujet Ainsi il

nous parait important de nous inteacuteresser au choix effectueacute par lrsquoEtat de creacuteer une agence afin

de lui deacuteleacuteguer ses missions (1) avant drsquoexposer le manque de visibiliteacute sur certains projets

qui perdure aujourdrsquohui (2)

1) Le scheacutema de gouvernance choisi par lrsquoEtat

511 LrsquoEtat a fait le choix de confier la maicirctrise drsquoouvrage des projets agrave une agence

speacutecialiseacutee formeacutee sous forme de GIP tandis qursquoune deacuteleacutegation deacutedieacutee aux SIS placeacutee sous

lrsquoautoriteacute du secreacutetariat aux affaires sociales se charge de veiller agrave la bonne coordination de

lrsquoensemble A premiegravere vue cet organigramme simplifieacute semble plus efficient Cependant ce

choix meacuterite que lrsquoon srsquoy attarde pour tenter de mieux le comprendre

a) LrsquoASIP une nouvelle venue dans le paysage des agences de lrsquoEtat

512 LrsquoEtat a fait le choix de creacuteer une agence afin de lui confier le soin drsquoassurer la

maicirctrise drsquoouvrage des SIS Comme lrsquoa souligneacute le Conseil drsquoEtat dans son eacutetude annuelle

consacreacutee agrave la notion drsquoAgence608

ce pheacutenomegravene de recours reacutegulier aux agences par lrsquoEtat a

poseacute quelques difficulteacutes juridiques En effet cette notion drsquoagence peut parfois ecirctre difficile agrave

cerner Il nrsquoen existe pas de deacutefinition juridique preacutecise

513 Lrsquoeacutetude du Conseil drsquoEtat pour sa part srsquooriente vers une deacutefinition a contrario en

preacutefeacuterant drsquoabord preacuteciser ce que ne sont pas les agences (ni des autoriteacutes administratives

indeacutependantes ni de simples opeacuterateurs) avant de tenter de deacutefinir ce qursquoelles sont des

acteurs opeacuterationnels qui assurent des missions que lrsquoEtat ne peut assurer lui-mecircme une

607 Rapport drsquoactiviteacute 2015 de lrsquoANAP p 7 disponible sur [httpwwwanapfr] consulteacute le 17 avril 2016

608 Conseil drsquoEtat laquo Les agences une nouvelle gestion publique raquo eacutetude annuelle Septembre 2012 18

questions 18 reacuteponses

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

280

laquo reacuteponse manageacuteriale agrave lrsquoincapaciteacute supposeacutee de lrsquoEtat de faire face agrave ses missions raquo609

Les

agences ont par ailleurs la particulariteacute de ne pas preacutesenter un statut unique et lrsquoon peut

trouver des GIP des GIE des eacutetablissements publics ou encore bien que cela soit plus rare

des associations Lrsquoeacutetude du Conseil drsquoEtat partant de ce constat a tenteacute de proposer les

statuts les plus adeacutequats en fonction des types de missions exerceacutees par les agences le statut

drsquoeacutetablissement public eacutetant preacuteconiseacute en prioriteacute et celui de GIP dans les cas ougrave lrsquoagence

serait ameneacutee agrave laquo expeacuterimenter des formes nouvelles de gestion raquo

514 Dans le cas de lrsquoASIP crsquoest ce qui a motiveacute lrsquoEtat agrave choisir la formule du GIP En

effet lrsquoEtat souhaitant associer la CNAMTS agrave la gestion et surtout au financement des projets

meneacutees par lrsquoASIP nrsquoa pas pu srsquoorienter vers lrsquoeacutetablissement public qui aurait sous-entendu

un financement inteacutegral par lrsquoEtat ce qursquoil nrsquoeacutetait pas en mesure de faire La forme drsquoAgence

quant agrave elle preacutesente lrsquoavantage de seacuteparer la deacutefinition des politiques publiques et dans notre

cas des grandes orientations nationales en matiegravere de systegravemes drsquoinformation en santeacute de leur

mise en œuvre par un organisme qui pourra ecirctre jugeacute sur ses reacutesultats et en ecirctre tenu

responsable Quand lrsquoon srsquoattarde sur les quatre critegraveres deacutegageacutes par le Conseil drsquoEtat pour

justifier la creacuteation drsquoune agence610

(lrsquoefficience lrsquoexpertise le partenariat et la neutraliteacute) il

nous apparait clairement que lrsquoASIP y reacutepond pleinement Le choix de creacuteer une laquo agence raquo

deacutedieacutee agrave cette mission apparait donc opportun tout comme celui drsquoun GIP

b) LrsquoASIP un GIP sous tutelle

515 Il nous faut eacutegalement nous interroger sur le controcircle exerceacute par lrsquoEtat sur cette

Agence En effet en tant que GIP dont lrsquoEtat est membre lrsquoASIP pourrait se voir placeacutee sous

le controcircle drsquoun commissaire du gouvernement Cependant agrave lrsquoheure actuelle lrsquoEtat nrsquoa pas

fait ce choix Crsquoeacutetait drsquoailleurs deacutejagrave le cas agrave lrsquoeacutepoque des GIP-DMP et GIP-CPS et lrsquoIGAS

avait souligneacute ce choix de lrsquoEtat de ne pas user de son pouvoir De maniegravere pratique un

commissaire du gouvernement est chargeacute de controcircler les activiteacutes ainsi que la gestion du

GIP Il a eacutegalement un rocircle dintermeacutediaire entre les instances du GIP et les autoriteacutes chargeacutees

de lapprobation de la convention constitutive du GIP De mecircme il a pour mission de veiller

au respect des dispositions applicables au groupement et participe agrave toutes ses instances au

609 Jacky RICHARD laquo Reacutefleacutechir aux agences crsquoest reacutefleacutechir agrave lrsquoEtat raquo AJDA 2012 p 1660

610 Conseil drsquoEtat laquo Les agences une nouvelle gestion publique raquo op cit p 12

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

281

sein desquelles il dispose drsquoune voix consultative LrsquoEtat a cependant preacutevu de placer lrsquoASIP

sous la tutelle de la DSSIS

516 Notion issue du droit civil la tutelle a pu ecirctre deacutefinie en droit administratif comme

laquo lrsquoensemble des pouvoirs limiteacutes accordeacutes par la loi agrave une autoriteacute supeacuterieure sur les agents

deacutecentraliseacutes et sur leurs actes dans un but de protection de lrsquointeacuterecirct geacuteneacuteral raquo611

Il

srsquoagissait en pratique drsquoune veacuterification de la leacutegaliteacute du fonctionnement des eacutetablissements

publics qursquoils soient locaux ou nationaux une fois les deacutecisions prises en totale liberteacute et non

pas drsquoune participation agrave la gestion de lrsquoeacutetablissement Lrsquoautoriteacute de tutelle disposait bien de

pouvoirs drsquoannulation ou drsquoapprobation sur les actes eacutemanant des eacutetablissements bien qursquoelle

ne puisse pas pour autant modifier les actes soumis agrave approbation612

Depuis la loi du 2 mars 1982613

le leacutegislateur a mis fin aux tutelles exerceacutees par lrsquoEtat

sur les deacutecisions prises par les collectiviteacutes territoriales et a transformeacute le controcircle a priori

(controcircle hieacuterarchique) qui existait en un controcircle a posteriori des deacutecisions prises Cette

tutelle est donc devenue principalement un controcircle a posteriori de la leacutegaliteacute des actes des

eacutetablissements publics Ainsi lautoriteacute de lEacutetat apregraves reacuteception des actes les rendant

exeacutecutoires de plein droit agrave deacutefeacuterer au tribunal administratif les actes de lautoriteacute territoriale

quelle estime devoir ecirctre annuleacutes La tutelle est finalement une contrepartie agrave lrsquoautonomie qui

est accordeacutee aux eacutetablissements publics En pratique lrsquoautoriteacute de tutelle va selon les cas

disposer de moyens plus ou moins eacutetendus de controcircle sur lrsquoeacutetablissement Sachant que selon

le ceacutelegravebre adage il nrsquoy a pas de tutelle sans texte et pas de tutelle au-delagrave des textes les

pouvoirs de lrsquoautoriteacute de tutelle et leur eacutetendue vont donc deacutependre de ce qursquoaura preacutevu le

leacutegislateur en la matiegravere Aussi la tutelle drsquoun eacutetablissement public ne se preacutesume pas et

lrsquoautoriteacute investie de ce pouvoir ne pourra pas deacutepasser les limites strictement preacutevues par les

textes Nous pouvons donc en deacuteduire que le texte instaurant une tutelle devra preacuteciser les

mesures que lautoriteacute de tutelle pourra prendre ainsi que ses domaines dintervention

611 MASPETIOL et LAROQUE La tutelle administrative 1930 Sirey p 10

612 CE 24 juin 1970 min Anciens combattants et victimes de guerre c Lepeltier Rec 1970 p 430

613 Loi ndeg 82-213 du 2 mars 1982 relative aux droits et liberteacutes des communes des deacutepartements et des reacutegions

JORF du 3 mars 1982 p 730

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

282

517 Ceci eacutetant rappeleacute il nous est neacutecessaire de nous interroger sur cette tutelle de lrsquoASIP

par la DSSIS Dans un premier temps il nous faut reacutefleacutechir agrave la possibiliteacute pour un GIP drsquoecirctre

placeacute sous la tutelle de lrsquoEtat

En effet comme lrsquoa rappeleacute le Tribunal des Conflits les GIP sont des personnes

publiques soumises agrave un reacutegime particulier preacutevu par la loi et ne sont donc pas soumis de

plein droit aux lois et regraveglements reacutegissant les eacutetablissements publics614

Nous pouvons en

deacuteduire que la tutelle drsquoun GIP nrsquoest pas comme pour un eacutetablissement public chose

automatique Cependant nous pouvons aiseacutement comprendre ici au vu de la particulariteacute du

GIP en question auquel lrsquoEtat a confieacute une mission qui lui incombait lrsquointeacuterecirct drsquoecirctre soumis agrave

sa tutelle

Dans un second temps il nous apparait leacutegitime de nous interroger sur le caractegravere

suffisant des dispositions preacutevoyant la tutelle de lrsquoASIP En effet celles-ci sont assez

simples puisque le deacutecret ndeg 2013-727 du 12 aoucirct 2013 portant creacuteation organisation et

attributions dun secreacutetariat geacuteneacuteral des ministegraveres chargeacutes des affaires sociales615

preacutevoit

simplement que laquo la deacuteleacutegation agrave la strateacutegie des systegravemes dinformation de santeacute a pour

missions [hellip] drsquoassurer la tutelle sur le groupement dinteacuterecirct public deacutenommeacute Agence des

systegravemes dinformation partageacutes de santeacute raquo ni plus ni moins Aucune preacutecision nrsquoest

apporteacutee quant aux limites de cette tutelle et rien ne vient nous eacuteclairer sur le pouvoir de

controcircle que possegravede la DSSIS sur lrsquoASIP A titre drsquoexemple il nous est impossible de savoir

si tous les actes pris par lrsquoASIP devront ecirctre communiqueacutes agrave la DSSIS ou simplement les

deacutecisions les plus importantes eacutemanant de son assembleacutee deacutelibeacuterante

La porteacutee de cette tutelle et donc du controcircle exerceacute par lrsquoEtat sur lrsquoASIP agrave lrsquoheure

actuelle nous semble donc trop peu preacutecis Par ailleurs face agrave cette tutelle certes preacutevue par

un texte mais trop peu deacutetailleacutee nous pouvons nous questionner sur son efficaciteacute Ainsi il

nous apparait qursquoun commissaire du gouvernement aurait eu un rocircle si ce nrsquoest plus efficace

en tous cas plus preacutecis

614 TC 14 feacutevrier 2000 GIP Habitat et interventions sociales pour les mal-logeacutes et les sans-abris Rec p 748

615 Deacutecret ndeg 2013-727 du 12 aoucirct 2013 portant creacuteation organisation et attributions dun secreacutetariat geacuteneacuteral des

ministegraveres chargeacutes des affaires sociales JORF ndeg0188 du 14 aoucirct 2013 texte ndeg 4

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

283

2) Un manque de visibiliteacute des projets en cours

518 Malgreacute une gouvernance reacutenoveacutee et une certaine apparence drsquouniciteacute gracircce

notamment agrave lrsquoASIP santeacute force est de constater qursquoil reste difficile de faire la cartographie

preacutecise des projets relatifs aux SIS en cours et surtout de leur gestion Jean-Yves ROBIN

ancien directeur de lrsquoASIP Santeacute souligne dans son ouvrage consacreacute agrave lrsquoeacutetat des lieux du

numeacuterique en santeacute en France616

lrsquoabsence de vision globale de la gestion des projets qui

amegravene naturellement agrave un manque de visibiliteacute des projets en cours Ainsi il tente de dresser

un eacutetat des lieux des projets afin de deacutemontrer lrsquoeacuteparpillement des moyens et des initiatives en

la matiegravere Dans les faits il est effectivement difficile de dresser un eacutetat des lieux exhaustif

des projets drsquoe-santeacute tous domaines confondus actuellement en cours Lrsquoexercice se

complique quand il est question de rechercher les pilotes des projets

519 Si lrsquoon reprend lrsquoanalyse de Jean-Yves ROBIN on constate que de nombreux projets

sont en cours piloteacutes par autant drsquoorganismes diffeacuterents qursquoil y a de projets617

Ainsi agrave titre

drsquoexemple lrsquoinformatique des professionnels de santeacute ambulatoire est piloteacutee par la

CNAMTS tandis que les systegravemes drsquoinformation hospitaliers sont geacutereacutes au niveau de la

DGOS Lrsquoappel agrave projets Territoires de Soins Numeacuteriques est quant agrave lui eacutegalement piloteacute par

la DGOS mais neacutecessite le concours des ARS et un suivi de la Caisse des Deacutepocircts et des

Consignations Le DMP eacutetait jusqursquoagrave tregraves reacutecemment piloteacute par lrsquoASIP santeacute mais a eacuteteacute

reacuteattribueacute agrave la CNAMTS618

Par ailleurs le Comiteacute strateacutegique de filiegravere piloteacute par le

Ministegravere de lrsquoeacuteconomie consacre certains de ses travaux agrave lrsquoe-santeacute tout comme le Conseil

National du Numeacuterique Enfin sans entrer dans le deacutetail preacutecisons toutefois que la Direction

Geacuteneacuterale de la Santeacute placeacutee aupregraves du Ministegravere de la santeacute pilote de maniegravere directe une

trentaine de projets dont lrsquoaboutissement peut ecirctre parfois tregraves long faute de ressources

suffisantes

Ce rapide eacutetat des lieux dresseacute par Jean-Yves ROBIN permet de constater facilement agrave

quel point les ressources et les efforts en matiegravere drsquoe-santeacute sont eacuteparpilleacutes Car bien sucircr

616 ROBIN Jean-Yves laquo Lrsquourgence numeacuterique Faire de la France un leader de lrsquoe-santeacute raquo LrsquoHarmattan 2015

p 57 617

Ibid 618

Article 96 de la loi ndeg 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre systegraveme de santeacute JORF ndeg0022

du 27 janvier 2016 texte 1

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

284

aucune coordination nrsquoest assureacutee entre les diffeacuterents projets ce qui drsquoune part ne permet pas

de mutualiser les moyens et les expertises entre les projets et drsquoautre part creacutee un

cloisonnement entre les diffeacuterentes initiatives ce qui sur le long terme amegravene agrave des projets

eacutevoluant en parallegravele lagrave ougrave il aurait eacuteteacute neacutecessaire de les construire et les deacutevelopper en

concordance Degraves lors les outils proposeacutes aux professionnels de santeacute en ambulatoire ou en

secteur hospitalier ne preacutesentent ni logique ni lrsquoefficaciteacute escompteacutee

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

285

Conclusion de la section

520 Il apparait compliqueacute pour lrsquoEtat drsquoorganiser une gouvernance stable et coheacuterente des

SIS Ce constat srsquoexplique en partie par lrsquohistorique du sujet En effet tant que le Ministegravere de

la santeacute nrsquoavait pas reacutealiseacute lrsquoampleur de la probleacutematique et la neacutecessiteacute drsquoassurer une

politique unifieacutee en la matiegravere les projets se sont deacuteveloppeacutes de maniegravere indeacutependante et agrave

diffeacuterents eacutechelons avec plus ou moins de succegraves Ainsi la gouvernance initiale des SIS qui

regroupait drsquoune part des structures drsquoappui et de coordination en charge drsquoimpulser des

projets majeurs et drsquoautre part des structures plus opeacuterationnelles srsquoest tregraves vite reacuteveacuteleacutee

complexe et incoheacuterente En a reacutesulteacute de nombreuses critiques notamment de la part de la

Cour des comptes et de lrsquoIGAS ces deux instances srsquoaccordant sur lrsquoabsence de lisibiliteacute de la

gouvernance et sur lrsquoeacuteparpillement notable de lrsquoEtat en la matiegravere Degraves 2009 le Ministre de la

santeacute srsquoest donc inscrit dans une deacutemarche drsquoeacutevolution de cette gouvernance inspireacutee par les

recommandations concregravetes eacutemise pas des speacutecialistes de la question

521 Dans le cadre de la refonte de cette gouvernance le choix de confier agrave une agence

lrsquoASIP santeacute la maicirctrise drsquoouvrage des projets relatifs aux SIS sous la tutelle drsquoune

deacuteleacutegation placeacutee aupregraves du Ministegravere de la santeacute nrsquoest pas sans poser quelques petites

interrogations Cependant cette nouvelle gouvernance se reacutevegravele dans lrsquoensemble plus

efficace et pertinente que la preacuteceacutedente mecircme si aujourdrsquohui encore il est compliqueacute drsquoavoir

une vue drsquoensemble des projets en cours et dresser une cartographie de lrsquoensemble des acteurs

intervenants dans les projets SIS reste un deacutefi difficile agrave relever

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

286

Section 2 Les deacutefis agrave relever pour une gouvernance efficace

522 LrsquoEtat doit aujourdrsquohui relever deux deacutefis majeurs srsquoil souhaite ameacuteliorer la

gouvernance actuelle des SIS Ces deacutefis sont de nature diffeacuterente mais drsquoune importance

eacutegale Le premier technique concerne lrsquointeropeacuterabiliteacute des systegravemes drsquoinformation

(paragraphe 1) Le deuxiegraveme agrave la fois politique et organisationnel concerne la deacutefinition de la

place des acteurs reacutegionaux dans la gouvernance des SIS (paragraphe 2)

sect1 Lrsquointeropeacuterabiliteacute des SI un chantier prioritaire

523 Lrsquointeropeacuterabiliteacute des systegravemes drsquoinformation concept que nous tacirccherons de deacutefinir

preacuteciseacutement au cours de notre reacuteflexion apparait comme le chantier principal agrave mener agrave bien

aujourdrsquohui afin drsquoassurer une gouvernance stable des SIS Sans interopeacuterabiliteacute point de

salut pour les SIS car celle-ci apparait comme eacutetant la clef de voucircte drsquoun systegraveme coheacuterent

communiquant unifieacute et donc efficace Cette probleacutematique tregraves ancienne en matiegravere de SIS

(A) semble parfois difficile agrave reacutesoudre malgreacute certains projets majeurs deacuteveloppeacutes agrave ce sujet

(B)

A Enjeux drsquoune probleacutematique ancienne

524 Cette notion drsquointeropeacuterabiliteacute notion tregraves technique ne dispose pas de deacutefinition

leacutegale correctement eacutetablie (1) Pour tenter drsquoatteindre cette interopeacuterabiliteacute neacutecessaire agrave la

bonne communication des SIS entre eux plusieurs conditions techniques doivent ecirctre

preacutealablement mises en place (2) et suppose bien eacutevidemment que les SIS soient deacuteveloppeacutes

agrave partir de normes standardiseacutees (3)

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

287

1) Peacuterimegravetre de lrsquointeropeacuterabiliteacute

525 Il peut apparaicirctre difficile drsquoappreacutehender cette notion drsquointeropeacuterabiliteacute De maniegravere

technique elle peut ecirctre deacutefinie comme la capaciteacute de mateacuteriels de logiciels ou de protocoles

de fonctionner ensemble et agrave partager des informations619

526 La Cour des Comptes dans son rapport relatif agrave lrsquointeropeacuterabiliteacute des systegravemes

drsquoinformations srsquoeacutetait bien entendu essayeacute agrave cet exercice de deacutefinition preacutealable neacutecessaire agrave

son eacutetude Il en eacutetait ressorti la deacutefinition suivante laquo dans le domaine des systegravemes

drsquoinformation lrsquointeropeacuterabiliteacute peut ecirctre entendue comme une proprieacuteteacute des systegravemes

permettant agrave deux ou plusieurs agents (automates ou utilisateurs final) drsquoeacutechanger de

lrsquoinformation et drsquoen comprendre le sens indeacutependamment des bases technologiques utiliseacutees

et sans faire appel agrave une intervention humaine au cours de la chaine de communication que

cette communication soit synchroniseacutee (comme le teacuteleacutephone) ou deacutesynchroniseacutee (comme la

messagerie ) raquo620

Juridiquement ce concept nrsquoest pas reacuteellement circonscrit Il apparait pourtant bien

dans plusieurs textes leacutegislatifs621

Au long de notre deacuteveloppement nous nous appuierons

donc sur cette deacutefinition donneacutee par la Cour des comptes qui permet selon nous

drsquoappreacutehender les enjeux techniques de cette notion assez facilement

2) Preacutealables neacutecessaire agrave lrsquointeropeacuterabiliteacute

Lrsquointeropeacuterabiliteacute des systegravemes drsquoinformation neacutecessite que certaines conditions

essentielles soient reacuteunies afin drsquoecirctre correctement mise en place

a) Une identification unifieacutee des patients

527 En toute logique pour que des informations puissent ecirctre eacutechangeacutees au sujet drsquoun

patient il faut que celui-ci puisse ecirctre identifieacute correctement Cela suppose donc une

identification fiable et unifieacutee au sein des diffeacuterents systegravemes drsquoinformation fiabiliteacute qui ne

619 Deacutefinition du Larousse

620 Cour des comptes laquo Lrsquointeropeacuterabiliteacute des systegravemes drsquoinformation en santeacute raquo op cit p 5

621 V notamment en ce sens lrsquoarticle 43 de la loi ndeg 99-641 du 27 juillet 1999 portant creacuteation drsquoune couverture

maladie universelle JORF ndeg0172 du 28 juillet 1999 p 11229

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

288

peut ecirctre assureacutee par les simples noms preacutenoms et date de naissance pour des raisons

eacutevidentes drsquoidentitovigilances Crsquoest dans cette optique que le leacutegislateur en 2007 avait preacutevu

qursquoun laquo identifiant de santeacute des personnes prises en charge par un professionnel de santeacute ou

un eacutetablissement de santeacute [hellip] est utiliseacute dans lrsquointeacuterecirct des personnes concerneacutees et agrave des fins

de coordination et de qualiteacute des soins pour la conservation lrsquoheacutebergement et la transmission

des informations de santeacute raquo622

Alors que le Ministegravere de la santeacute srsquoorientait vers une

utilisation du NIR agrave cette fin la CNIL dans un rapport 20 feacutevrier 2007623

preacuteconisait pour sa

part la creacuteation agrave partir du NIR drsquoun identifiant speacutecifique non signifiant Dans le cadre de ses

missions lrsquoASIP Santeacute srsquoest ainsi vue confier la deacutelicate mission de mettre en œuvre cet

identifiant Dans un premier temps lrsquoagence a deacuteveloppeacute une solution permettant la mise en

œuvre drsquoun identifiant national de santeacute dit calculeacute (INS-C) Celui-ci pouvait ainsi ecirctre

inteacutegreacute par les eacutediteurs de logiciels de professionnels de santeacute dans leurs solutions techniques

Cependant cet INS-C nrsquoa pas eu le succegraves escompteacute et bien que cet identifiant devait ecirctre

temporaire afin de faciliter la mise en place drsquoun INS deacutefinitif (appeleacute INS-aleacuteatoire) lrsquoeacutetape

ultime nrsquoa jamais eacuteteacute franchie

528 La loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute reacutesoud cette difficulteacute puisqursquoelle

modifie lrsquoarticle L 1111-8-1 au Code de la santeacute publique qui preacutevoit deacutesormais que laquo le

numeacutero dinscription au reacutepertoire national didentification des personnes physiques est

utiliseacute comme identifiant de santeacute des personnes pour leur prise en charge agrave des fins

sanitaires et meacutedico-sociales dans les conditions preacutevues agrave larticle L 1110-4 raquo Cette

disposition est deacutefinitivement entreacutee en vigueur comme nous lrsquoavons vu preacuteceacutedemment

depuis la publication du deacutecret ndeg 2017-412 du 27 mars 2017 relatif agrave lutilisation du numeacutero

dinscription au reacutepertoire national didentification des personnes physiques comme identifiant

national de santeacute 624

Par ailleurs pour eacuteviter toute discordance avec les dispositions de la loi Informatique

et Liberteacutes la Loi Touraine a pris le soin de preacuteciser que laquo les dispositions de la loi ndeg 78-17

622 Deacutecret ndeg 2007-960 du 15 mai 2007 relatif agrave la confidentialiteacute des informations meacutedicales conserveacutees sur

support informatique ou transmises par voie eacutelectronique et modifiant le Code de la santeacute publique (dispositions

reacuteglementaires) JORF ndeg113 du 16 mai 2007 p 9362 623

Rapport du groupe de travail relatif agrave lrsquoeacutevaluation de la doctrine de la CNIL en matiegravere drsquoutilisation du NIR

20 feacutevrier 2007 Disponible sur [httpswwwcnilfr] Consulteacute le 17 avril 2016 624

Deacutecret ndeg 2017-412 du 27 mars 2017 relatif agrave lutilisation du numeacutero dinscription au reacutepertoire national

didentification des personnes physiques comme identifiant national de santeacute JORF ndeg0075 du 29 mars 2017

texte ndeg 23

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

289

du 6 janvier 1978 relative agrave linformatique aux fichiers et aux liberteacutes prescrivant une

proceacutedure particuliegravere dautorisation agrave raison de lutilisation du numeacutero dinscription au

reacutepertoire national didentification des personnes physiques dans un traitement de donneacutees agrave

caractegravere personnel ne sont pas applicables aux traitements qui utilisent ce numeacutero

exclusivement dans les conditions preacutevues au preacutesent I raquo

529 Finalement faute drsquoidentifiant de santeacute satisfaisant le leacutegislateur a retenu la solution

du NIR plus seacutecuriseacute et deacutejagrave en place Comme le souligne lrsquoASIP santeacute625

laquo le deacuteploiement

actuel des SI de santeacute autour du patient et de la notion de parcours impose en effet de faire le

choix drsquoun identifiant simple peacuterenne fiable et dans un contexte budgeacutetaire tregraves contraint

de privileacutegier lrsquoefficaciteacute agrave des solutions coucircteuses Le numeacutero de seacutecuriteacute sociale ou laquo NIR

raquo preacutesente ces caracteacuteristiques raquo

b) Lrsquoidentification des professionnels

530 A lrsquoinstar des patients lrsquoidentification des professionnels de santeacute au sein du SIS

permet la justification de leur identiteacute assure la traccedilabiliteacute de leurs accegraves et permet a fortiori

le controcircle du respect du secret professionnel

531 Crsquoest le systegraveme de carte de professionnel de santeacute (CPS) qui aujourdrsquohui a pour

mission drsquoassurer cette identification Cependant comme nous avons pu le voir

preacuteceacutedemment dans nos deacuteveloppements cette carte rencontre un succegraves mitigeacute626

notamment au sein des eacutetablissements de santeacute et sa mise en place demeure assez longue Sur

le terrain nombreux sont les eacutetablissements de santeacute qui ont mis en place des cartes

alternatives certaines comportant un systegraveme de signature eacutelectronique reconnue de type RGS

2 eacutetoiles627

625 laquo Projet de loi de santeacute les apports en matiegravere de deacutemateacuterialisation des donneacutees de santeacute raquo article

consultable sur [httpesantegouvfr] consulteacute le 22 mars 2016 626

Au sein des eacutetablissements hospitaliers agrave ce jour 237 075 cartes de la famille des CPx sont actives dont 100

064 cartes CPS 627

Au CHRU de Lille par exemple une carte drsquoeacutetablissement distribueacute agrave tous les professionnels est deacuteployeacutee

depuis 2011 Depuis 2015 certaines drsquoentre elles comportent un systegraveme de signature eacutelectronique de type RGS

2 eacutetoiles

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

290

3) La normalisation des systegravemes la condition technique essentielle

532 Il est impossible drsquoaborder la notion drsquointeropeacuterabiliteacute sans parler de la normalisation

des eacutechanges informatiseacutes En effet pour ecirctre interopeacuterables deux systegravemes devront ecirctre

baseacutes sur les mecircmes normes afin de srsquoassurer que les donneacutees eacutechangeacutees soient

compreacutehensibles et exploitables En matiegravere de SIS cette normalisation est double car elle

concerne agrave la fois lrsquoaspect informatique mais eacutegalement lrsquoaspect meacutedical dans le sens ougrave les

donneacutees reporteacutees au sein des dossiers informatiques ne devront permettre aucune

interpreacutetation contraire Les termes et eacuteventuels codes utiliseacutes devront ecirctre donc normaliseacutes628

533 Cette notion de normalisation est encadreacutee par le deacutecret ndeg 2009-697 du 16 juin 2009

relatif agrave la normalisation629

Sa deacutefinition est preacutevue agrave lrsquoarticle 1 du deacutecret laquo la normalisation

est une activiteacute dinteacuterecirct geacuteneacuteral qui a pour objet de fournir des documents de reacutefeacuterence

eacutelaboreacutes de maniegravere consensuelle par toutes les parties inteacuteresseacutees portant sur des regravegles

des caracteacuteristiques des recommandations ou des exemples de bonnes pratiques relatives agrave

des produits agrave des services agrave des meacutethodes agrave des processus ou agrave des organisations Elle vise

agrave encourager le deacuteveloppement eacuteconomique et linnovation tout en prenant en compte des

objectifs de deacuteveloppement durable raquo

534 En France crsquoest lrsquoAssociation Franccedilaise de Normalisation (AFNOR)630

qui a pour

mission de mettre en œuvre la normalisation et de la promouvoir Dans ce but elle dispose

drsquoun pouvoir drsquoeacutelaboration et drsquohomologation des normes quels qursquoen soit les domaines Une

norme est par principe drsquoapplication volontaire mecircme si certains textes reacuteglementaires

peuvent les rendre obligatoires631

Cependant comme le relevait la Cour des Comptes dans

son rapport laquo nombre de conventions techniques permettant drsquoassurer lrsquointeropeacuterabiliteacute se

628 Nous pensons ici particuliegraverement au PMSI et agrave la codification des actes meacutedicaux

629 Deacutecret ndeg 2009-697 du 16 juin 2009 relatif agrave la normalisation JORF ndeg0138 du 17 juin 2009 p9860 Ce texte

est pris en application des directives 9834CE du Parlement europeacuteen et du Conseil du 22 juin 1998 preacutevoyant

une proceacutedure dinformation dans le domaine des normes et reacuteglementations techniques et des regravegles relatives

aux services de la socieacuteteacute de linformation et 2006123CE du Parlement europeacuteen et du Conseil du 12 deacutecembre

2006 relative aux services dans le marcheacute inteacuterieur ensemble la notification ndeg 20080042F du 1er feacutevrier 2008

adresseacutee agrave la Commission des Communauteacutes europeacuteennes 630

LrsquoAFNOR est lrsquoorganisme franccedilais en charge de la normalisation mais il existe eacutegalement des organismes

internationaux tel que lrsquoISO (International Standards Organisation ndash Organisation internationale de

normalisation) LrsquoANSI (American National Standards Institute) le CEN (Comiteacute Europeacuteen de Normalisation) 631

Article 17 du deacutecret ndeg 2009-697 du 16 juin 2009 relatif agrave la normalisation JORF ndeg0138 du 17 juin 2009

p 9860

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

291

sont imposeacutees de fait eacutetant donneacute lrsquoimportance industrielle de leurs promoteurs raquo632

Ainsi le

poids et lrsquoinfluence des industriels en matiegravere de normalisation nrsquoest pas neacutegligeable

B Lrsquointeropeacuterabiliteacute une probleacutematique insoluble

535 Nombreux ont eacuteteacute et perdurent encore aujourdrsquohui les freins agrave la mise en place de

lrsquointeropeacuterabiliteacute des systegravemes drsquoinformation en santeacute La Cour des comptes les avait deacutejagrave

releveacutes en son temps tout comme lrsquoIGAS et aujourdrsquohui le constat reste malheureusement le

mecircme Pourtant des solutions ont eacuteteacute envisageacutees et des chantiers sont en cours (1) Mais

certaines limites restent aujourdrsquohui tregraves preacutesentes (2)

1) Le cadre drsquointeropeacuterabiliteacute des SIS

536 Afin de srsquoassurer que les conditions drsquointeropeacuterabiliteacute des systegravemes sont reacuteunies il est

essentiel de mettre en place des reacutefeacuterentiels drsquointeropeacuterabiliteacute Crsquoest ce qursquoa preacutevu

lrsquoordonnance du 8 deacutecembre 2005633

en soulignant qursquoun laquo reacutefeacuterentiel geacuteneacuteral

dinteropeacuterabiliteacute fixe les regravegles techniques permettant dassurer linteropeacuterabiliteacute des

systegravemes dinformation raquo634

des administrations de lrsquoEtat des collectiviteacutes territoriales des

eacutetablissements publics agrave caractegravere administratif et des organismes de seacutecuriteacute sociale635

Le

reacutefeacuterentiel geacuteneacuteral drsquointeropeacuterabiliteacute a eacuteteacute approuveacute par lrsquoarrecircteacute du 9 novembre 2009 portant

approbation du reacutefeacuterentiel geacuteneacuteral dinteropeacuterabiliteacute

537 Dans le domaine plus speacutecifique des systegravemes drsquoinformation en santeacute crsquoest agrave lrsquoASIP

Santeacute que revient drsquoassurer la mise en place de lrsquointeropeacuterabiliteacute En effet rappelons que cette

agence a notamment pour mission de deacutefinir promouvoir et homologuer des reacutefeacuterentiels

contribuant agrave lrsquointeropeacuterabiliteacute agrave la seacutecuriteacute et agrave lrsquousage des systegravemes drsquoinformation de santeacute

et de la teacuteleacutesanteacute ainsi que de favoriser le deacuteveloppement des systegravemes drsquoinformation partageacutes

dans le domaine de la santeacute et du secteur meacutedico-social afin de deacutevelopper la coordination et

la qualiteacute des soins (dont la teacuteleacutemeacutedecine) la preacutevention la veille et lrsquoalerte sanitaire

632 Cour des comptes laquo Lrsquointeropeacuterabiliteacute des systegravemes drsquoinformation en santeacute raquo op cit p 7

633 Ordonnance ndeg 2005-1516 du 8 deacutecembre 2005 relative aux eacutechanges eacutelectroniques entre les usagers et les

autoriteacutes administratives et entre les autoriteacutes administratives JORF du 9 deacutecembre 2005 p 18986 634

Id article 11 635

Id article 1er

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

292

538 Crsquoest dans ce contexte que lrsquoASIP Santeacute a eacutelaboreacute le cadre drsquointeropeacuterabiliteacute des

systegravemes drsquoinformation de santeacute (CI-SIS) Lrsquoobjectif principal du CI-SIS est de deacutefinir les

regravegles permettant lrsquointeropeacuterabiliteacute des SIS en santeacute Cette interopeacuterabiliteacute se situe agrave deux

niveaux diffeacuterents drsquoune part lrsquointeropeacuterabiliteacute technique qui va permettre le partage des

donneacutees de santeacute en favorisant les flux et les eacutechanges et drsquoautre part lrsquointeropeacuterabiliteacute des

contenus meacutetiers afin de permettre le traitement des donneacutees et leur compreacutehension Drsquoune

maniegravere geacuteneacuterale le CI-SIS est baseacute sur des normes internationales en matiegravere de SIS

ponctuellement adapteacutees aux speacutecificiteacutes franccedilaises quand cela est neacutecessaire

539 Reacutecemment lrsquoASIP santeacute a revu et corrigeacute entiegraverement la gouvernance de ce cadre

drsquointeropeacuterabiliteacute La nouvelle gouvernance du CI-SIS a eacuteteacute preacutesenteacutee en novembre 2015 aux

utilisateurs aux industriels et aux partenaires institutionnels Cette reacutenovation reacutesulte drsquoune

volonteacute de lrsquoASIP drsquoadapter le CI-SIS aux eacutevolutions des usages en matiegravere de SIS mais

eacutegalement de srsquoadapter aux eacutevolutions des normes internationales sur lesquelles le CI-SIS

srsquoappuie en majeure partie Pour cela les acteurs de SIS santeacute ont eacuteteacute fortement solliciteacutes et

leurs besoins en matiegravere drsquointeropeacuterabiliteacute ont eacuteteacute recueillis Enfin la loi de modernisation de

notre systegraveme de santeacute est venue ajouter636

un article L 1110-4-1 au Code de la santeacute

publique qui renforce le poids des reacutefeacuterentiels drsquointeropeacuterabiliteacute puisqursquoil preacutecise la chose

suivante laquo afin de garantir la qualiteacute et la confidentialiteacute des donneacutees de santeacute agrave caractegravere

personnel et leur protection les professionnels de santeacute les eacutetablissements et services de

santeacute les heacutebergeurs de donneacutees de santeacute agrave caractegravere personnel et tout autre organisme

participant agrave la preacutevention aux soins ou au suivi meacutedico-social et social utilisent pour leur

traitement leur conservation sur support informatique et leur transmission par voie

eacutelectronique des systegravemes dinformation conformes aux reacutefeacuterentiels dinteropeacuterabiliteacute et de

seacutecuriteacute eacutelaboreacutes par le groupement dinteacuterecirct public mentionneacute agrave larticle L 1111-24 Ces

reacutefeacuterentiels sont approuveacutes par arrecircteacute du ministre chargeacute de la santeacute pris apregraves avis de la

Commission nationale de linformatique et des liberteacutes raquo

540 Cependant agrave lrsquoheure actuelle bien que ces reacutefeacuterentiels soient precircts et disponibles sur le

site de lrsquoASIP Santeacute ils nrsquoont toujours pas eacuteteacute comme la loi lrsquoexige approuveacute par arrecircteacute du

636 Article 96 de la loi ndeg 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre systegraveme de santeacute JORF ndeg0022

du 27 janvier 2016 texte 1

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

293

ministre de la santeacute Ainsi nous comprenons tregraves vite lrsquoambiguiumlteacute de la situation les

eacutetablissements de santeacute sont supposeacutement contraints drsquoadopter des solutions respectant des

regravegles drsquointeropeacuterabiliteacute valideacutees par le ministegravere de la santeacute srsquoils souhaitent conserver ou

eacutechanger par voie informatique des donneacutees de santeacute mais le ministegravere tarde agrave fournir cet

arrecircteacute La situation est donc actuellement en suspens

Il ne srsquoagit pas du seul frein au bon deacuteveloppement de lrsquointeropeacuterabiliteacute des SIS et des

obstacles majoritairement techniques subsistent encore aujourdrsquohui

2) Les obstacles au deacuteveloppement de lrsquointeropeacuterabiliteacute

541 Comme le rapport drsquoinformation du deacuteputeacute Jean-Yves JEGOU le signalait deacutejagrave en

2007637

plusieurs types drsquoobstacles existent agrave un reacuteel aboutissement de lrsquointeropeacuterabiliteacute des

SIS Les constats effectueacutes il y a presque dix ans sont aujourdrsquohui encore valables mecircme srsquoil

est vrai que les obstacles techniques ont eacuteteacute consideacuterablement reacuteduits

542 Le premier obstacle technique majeur est bien entendu lrsquoexistence ou plutocirct agrave lrsquoheure

actuelle lrsquoinexistence drsquoun identifiant patient unique et unifieacute Jusque tregraves reacutecemment les

tentatives de mise en place de cet identifiant ont eacutechoueacute La loi de modernisation de notre

systegraveme de santeacute tente de reacutesoudre ce problegraveme en preacutevoyant lrsquoutilisation geacuteneacuteraliseacutee du NIR

comme identifiant patient unique Il faut maintenant que les acteurs concerneacutes srsquoadaptent pour

mettre en place cet identifiant Pour les eacutetablissements de santeacute cette utilisation devrait ecirctre

de toute maniegravere acceacuteleacutereacutee par la mise en place des Groupements Hospitaliers de Territoire

qui devront organiser une mutualisation de la gestion des systegravemes drsquoinformation et un

systegraveme drsquoinformation convergent drsquoici 2020 Le mecircme problegraveme se pose en termes

drsquoauthentification des professionnels de santeacute par le biais du systegraveme de carte CPS

notamment dont nous avons deacutejagrave exposeacute les limites actuelles agrave plusieurs reprises

543 Lrsquoautre obstacle technique majeur reacuteside dans la multipliciteacute des opeacuterateurs logiciels

sur le marcheacute En effet les industriels deacuteveloppent des solutions et des applications

diffeacuterentes afin de faire marcher le jeu de la concurrence De ce fait ces applications ne sont

pas communicantes entre elles Ainsi en 2007 la Cour des comptes parlait mecircme

637 JEacuteGOU Jean-Jacques laquo Systegravemes dinformation de santeacute le diagnostic est poseacute le traitement simpose raquo op

cit

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

294

laquo drsquoatomisation du parc de logiciels raquo la seule exception eacutetant les domaines de lrsquoimagerie

meacutedicale et des laboratoires dont les systegravemes drsquoinformations doivent ecirctre coupleacutes avec des

eacutequipements techniques dont le nombre de constructeurs est assez faible

544 Enfin un problegraveme organisationnel vient eacutegalement ralentir le deacuteveloppement peacuterenne

de lrsquointeropeacuterabiliteacute celui de lrsquourbanisation des systegravemes drsquoinformation Ce terme emprunteacute

au domaine des travaux drsquoarchitecture des villes a eacuteteacute repris par les professionnels de

lrsquoinformatique pour deacutesigner une deacutemarche visant agrave structurer le systegraveme drsquoinformation drsquoune

socieacuteteacute afin de le rationaliser et drsquoameacuteliorer ses performances et faciliter ses eacutevolutions

545 En matiegravere de systegravemes drsquoinformation de santeacute pour reprendre les propos drsquoYves

ROBIN laquo dans une organisation du niveau de complexiteacute de notre systegraveme de santeacute crsquoest

lrsquourbanisation ou le chaos raquo638

Or pour lrsquoauteur crsquoest bien agrave lrsquoEtat qursquoil appartient de poser

les bases de cette urbanisation afin drsquoharmoniser lrsquoorganisation des systegravemes drsquoinformation

de santeacute Ainsi pour lrsquoancien directeur de lrsquoASIP santeacute plusieurs leviers permettraient de

faire eacutevoluer la situation actuelle en matiegravere drsquointeropeacuterabiliteacute et drsquourbanisation Il serait

question dans un premier temps de la mise en place par lrsquoEtat drsquoun scheacutema global

drsquourbanisation qui serait en soutien drsquoune politique globale de deacuteveloppement de lrsquoe-santeacute

Ce scheacutema serait lrsquooccasion drsquoorganiser la reacutepartition des missions et compeacutetences respectives

de lrsquoensemble des acteurs intervenants en la matiegravere que ce soit au niveau national ou

reacutegional Il serait eacutegalement neacutecessaire drsquoeacutelaborer un reacutefeacuterentiel laquo univoque drsquoidentiteacutes des

personnes physiques et morales composants lrsquooffre de soins raquo afin de pouvoir eacutetablir ensuite

une politique drsquoauthentification des professionnels efficace et compatible avec les pratiques

actuelles Enfin une de ses derniegraveres preacuteconisations majeures a eacuteteacute suivie puisqursquoil conseillait

drsquoadopter le NIR comme identifiant patient unique

Lrsquointeropeacuterabiliteacute des SIS nrsquoest pas le seul deacutefi majeur agrave relever En effet afin drsquoecirctre

efficace la gouvernance des SIS doit accorder une place importante aux acteurs reacutegionaux

638 ROBIN Jean-Yves laquo Lrsquourgence numeacuterique Faire de la France un leader de lrsquoe-santeacute raquo LrsquoHarmattan 2015

p 57

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

295

sect2 La place strateacutegique des acteurs reacutegionaux dans la gouvernance des

SIS

546 Au niveau national lrsquoEtat seul ne peut pas drsquoune part eacutedicter la politique geacuteneacuterale

applicable en matiegravere de SIS et drsquoautre part la mettre en place de maniegravere uniforme sur

lrsquoensemble du territoire Il doit donc srsquoappuyer sur drsquoautres acteurs pour mettre en place et

eacuteventuellement adapter ces politiques Au niveau reacutegional ce sont les Agences Reacutegionales de

Santeacute (ARS) qui ont ce rocircle majeur (A) et qui servent notamment de lien avec les

eacutetablissements de santeacute et professionnels concerneacutes Reacutecemment cette organisation reacutegionale

srsquoest eacutetoffeacutee avec lrsquoapparition drsquoun nouvel acteur au rocircle strateacutegique le Groupement

Hospitalier de Territoire (B)

A LrsquoARS acteur charniegravere dans la mise en œuvre des politiques relatives

aux SIS

547 Depuis plusieurs anneacutees la France srsquoest engageacutee dans de nombreux chantiers de

dessaisissement des services de lrsquoEtat au profit drsquoautres organismes En matiegravere sociale le

Conseil National de modernisation des politiques publiques a entrepris depuis 2007 une

reacuteorganisation des services centraux et deacuteconcentreacutes de lrsquoEtat en la matiegravere639

Dans le

domaine sanitaire crsquoest la loi HPST qui a amorceacute un changement important par la creacuteation

des Agences Reacutegionales de Santeacute services deacutecentraliseacutes de lrsquoEtat en matiegravere de santeacute

publique640

639 CRISTOL Daniegravele laquo La reacuteorganisation des services de lrsquoEtat en matiegravere sociale raquo RDSS 2011 p 27

640 Article L1431-1 du Code de la santeacute publique laquo Dans chaque reacutegion et dans la collectiviteacute territoriale de

Corse une agence reacutegionale de santeacute a pour mission de deacutefinir et de mettre en œuvre un ensemble coordonneacute de

programmes et dactions concourant agrave la reacutealisation agrave leacutechelon reacutegional et infrareacutegional

- des objectifs de la politique nationale de santeacute deacutefinie agrave larticle L 1411-1 du preacutesent Code

- des principes de laction sociale et meacutedico-sociale eacutenonceacutes aux articles L 116-1 et L 116-2 du Code de

laction sociale et des familles

- des principes fondamentaux affirmeacutes au I de larticle L 111-2-1 du Code de la seacutecuriteacute sociale

Les agences reacutegionales de santeacute contribuent au respect de lobjectif national de deacutepenses dassurance maladie

Leurs compeacutetences sexercent sans preacutejudice et dans le respect de celles des collectiviteacutes territoriales et des

eacutetablissements et agences mentionneacutes aux articles L 1222-1 L 1313-1 L 1413-2 L 1418-1 et L 5311-1 du

preacutesent Code ainsi quaux articles L 312-8 du Code de laction sociale et des familles et L 161-37 du Code de la

seacutecuriteacute sociale raquo

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

296

548 Les ARS jouent ainsi un rocircle majeur dans de nombreux projets relatifs aux systegravemes

drsquoinformation en santeacute la DGOS srsquoappuyant sur elles pour la mise en œuvre de projets ou

amorcer des phases de test au niveau reacutegional Cet acteur preacutesente lrsquointeacuterecirct drsquoavoir les

pouvoirs et lrsquoorganisation suffisante (1) pour aider lrsquoEtat dans la mise en œuvre concregravete de

ses politiques Crsquoest pour cela qursquoelles ont pour les projets principaux la deacutelicate mission de

les deacutecliner ou parfois de les tester au niveau reacutegional Crsquoest notamment le cas du programme

hocircpital numeacuterique projet phare de la DGOS en matiegravere de SIS (2)

1) LrsquoARS laquo bras armeacute raquo de lrsquoEtat en matiegravere de politiques de santeacute

549 Les Agences Reacutegionales de Santeacute creacuteeacutees par la loi HPST sont des eacutetablissements

publics de lrsquoEtat soumis agrave son controcircle Contrairement aux Agences Reacutegionales de

lrsquoHospitalisation (ARH) qui eacutetaient des GIP dont lrsquoEtat eacutetait membre les ARS sont donc une

eacutemanation directe de lrsquoEtat Leur creacuteation srsquoinscrit dans le cadre plus large de la reacutevision

geacuteneacuterale des politiques publiques ainsi que de sa deacuteclinaison territoriale641

Ainsi comme lrsquoa

releveacute la Cour des comptes lors de son examen de la mise en place des ARS laquo la creacuteation

des ARS confirme le niveau reacutegional comme eacutechelon pertinent de deacuteclinaison et de gestion

des politique de santeacute publique raquo642

En effet rappelons que jusqursquoalors crsquoest lrsquoeacutechelon

deacutepartemental qui eacutetait largement privileacutegieacute

Srsquoinscrivant dans une logique drsquoassociations des compeacutetences les ARS regroupent agrave la

fois des administrations deacuteconcentreacutees de lrsquoEtat (les anciennes Directions Deacutepartementales de

lrsquoAction Sanitaire et Sociale ndash DDASS - et Direction Reacutegionales de lrsquoAction Sanitaire et

Sociale ndash DRASS -) des organismes drsquoassurance maladie (URCAM CRAM et DRSM) ainsi

que des structures mixtes qui associaient deacutejagrave Etat et assurance maladie (ARH) Ces agences

se voient confieacutees de nombreuses deacuteleacutegations de pouvoir et beacuteneacuteficient drsquoune autonomie et de

pouvoirs renforceacutes par rapport notamment aux ARH Enfin au niveau national les ARS sont

piloteacutees par un Conseil National de Pilotage (CNP) des ARS composeacute de repreacutesentants de

lrsquoEtat de repreacutesentant de la Caisse Nationale de Solidariteacute pour lrsquoAutonomie et de

641 Cour des comptes laquo La mise en place des Agences Reacutegionales de Santeacute raquo rapport annuel relatif agrave la seacutecuriteacute

sociale chapitre VIII septembre 2012 p 233 642

Id p 234

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

297

repreacutesentants des organismes drsquoassurance maladie643

Le CNP a pour rocircle de deacutelivrer en

amont lrsquoensemble des directives neacutecessaires pour que les ARS puissent mettre en œuvre au

niveau reacutegional la politique de santeacute deacuteveloppeacutee au niveau national Par ailleurs le CNP a

pour rocircle drsquoeacutevaluer les actions des ARS ainsi que de leurs directeurs Geacuteneacuteraux

550 Le choix de faire des ARS des eacutetablissements publics de lrsquoEtat nrsquoest pas anodin et va

dans le sens drsquoune reacuteorganisation geacuteneacuterale de la gouvernance du systegraveme de santeacute qui induit

un renforcement de lrsquoemprise de lrsquoEtat644

Les ARS sont les repreacutesentantes de lrsquoEtat dans les

reacutegions veacuteritables bras armeacutes de lrsquoEtat en charge de la mise en œuvre de la politique de

santeacute sur les diffeacuterents territoires Ainsi les ARS de par leur organisation et leurs pouvoirs

apparaissent comme lrsquoacteur majeur de la mise en œuvre de la politique deacuteveloppeacutee par lrsquoEtat

en matiegravere de SIS Pour reprendre les termes employeacutes par lrsquoASIP santeacute laquo acteur unique

chargeacute de lefficience des soins dans les territoires les ARS sont en premiegravere ligne pour le

deacuteploiement des systegravemes dinformation partageacutes de santeacute raquo645

Elles sont le relais

indispensable agrave lrsquoEtat au niveau des territoires de santeacute Elles preacutesentent eacutegalement lrsquointeacuterecirct

drsquoavoir une capaciteacute agrave adapter la politique nationale aux particulariteacutes de leurs territoires En

effet selon les reacutegions et au sein mecircme des reacutegions selon les territoires de santeacute les enjeux

en matiegravere de SIS ne seront pas les mecircmes Elles peuvent donc selon les besoins des

territoires et les acteurs en place instaurer les coopeacuterations neacutecessaires ou encore

accompagner le deacuteveloppement et la modernisation des SIH de certains eacutetablissements Pour

autant leur lien tuteacutelaire avec lrsquoEtat empecircche des deacuteveloppements anarchiques de systegravemes

drsquoinformation de santeacute totalement reacutegionaliseacutes et donc cloisonneacutes

551 Tout comme elle lrsquoest pour les politiques de santeacute publique plus traditionnelles lrsquoARS

apparait parfaitement leacutegitime non seulement pour appuyer et soutenir en reacutegion la politique

nationale de deacuteveloppement de SIS mais eacutegalement pour la deacuteployer de maniegravere concregravete sur

les territoires de soins Elle apparait comme le lien entre lrsquoEtat concepteur de ces politiques

et eacutetablissements de santeacute acteurs directs en charge de leur application LrsquoARS repreacutesentant

de lrsquoEtat et surtout de sa politique de santeacute dans les reacutegions va ecirctre le pivot sur lequel lrsquoEtat

643 Article L 1433-1 du Code de la santeacute publique

644 VIOUJAS Vincent laquo De la loi HPST agrave la loi ndeg 2016-41 du 26 janvier 2016 convergences et inflexions

dans lrsquoeffort de modernisation de notre systegraveme de santeacute raquo JCP-A ndeg 13 avril 2016 p 2092 645

laquo LrsquoARS acteur unique du systegraveme de santeacute en reacutegion raquo ASIP santeacute disponible sur [httpesantegouvfr]

consulteacute le 19 avril 2016

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

298

va pouvoir se reposer afin de tester et de mettre en place sa politique en matiegravere de systegravemes

drsquoinformation de santeacute Cependant les ARS beacuteneacuteficiant drsquoune certaine autonomie chacune

drsquoentre elles peut deacutevelopper une strateacutegie adapteacutee agrave sa reacutegion

2) LrsquoARS acteur essentiel de la strateacutegie hocircpital numeacuterique

552 Piloteacute et mis en place par la DGOS le programme hocircpital numeacuterique destineacute au

deacuteveloppement et agrave la modernisation des systegravemes drsquoinformation hospitaliers sur la peacuteriode

2012-2017 a eacuteteacute lanceacute le 25 novembre 2011 Ce programme a pour buts principaux de

coordonner lrsquoensemble des acteurs (eacutetablissements de santeacute ARS administration centrale

industriels) autour drsquoune feuille de route commune pour les SIH soutenir les projets

innovants et amener le systegraveme drsquoinformation de lrsquoensemble des eacutetablissements de santeacute au

palier de maturiteacute Hocircpital numeacuterique

553 Les Agences Reacutegionales de Santeacute ont pour mission la mise en œuvre agrave lrsquoeacutechelon

reacutegional et infrareacutegional des politiques nationales en matiegravere de santeacute A ce titre elles

deacuteclinent au sein de leur territoire le programme Hocircpital numeacuterique Les objectifs du

programme doivent ecirctre pris en compte dans les politiques reacutegionales de santeacute deacutefinies par les

ARS dans le cadre de documents strateacutegiques (programme reacutegional SI scheacutema directeur SI

programme de teacuteleacutesanteacute hellip) mais eacutegalement dans les contrats pluriannuels drsquoobjectifs et de

moyens (CPOM) qursquoelles signent avec les eacutetablissements de santeacute de leur territoire A titre

drsquoexemple les engagements reacuteciproques de lrsquoARS et drsquoun eacutetablissement de santeacute sur les

sujets relatifs aux systegravemes drsquoinformation hospitaliers sont formaliseacutes au sein du volet

systegraveme drsquoinformation du CPOM volet par ailleurs obligatoire

554 Comme le preacutecise le guide pratique agrave destination des agences reacutegionales de santeacute pour

la deacuteclinaison du programme hocircpital numeacuterique646

la DGOS attend de lrsquoARS qursquoelle prenne

laquo une part active dans la mise en œuvre du programme Hocircpital numeacuterique et ecirctre un reacuteel

promoteur du projet sur toute sa dureacutee raquo Ainsi la mise en œuvre opeacuterationnelle du

programme repose sur trois axes au sein desquels lrsquoARS aura un rocircle agrave jouer

646 Publieacute par lrsquoinstruction DGOSMSIOS ndeg 201-375 du 31 octobre 2012 BO santeacute protection sociale

solidariteacute ndeg 2012-12 du 15 janvier 2013 p 149

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

299

555 Le premier axe est consacreacute agrave la gouvernance du projet Les ARS participent agrave cette

gouvernance par le biais de plusieurs outils Drsquoabord elles integravegrent le programme au sein de

la politique reacutegionale de santeacute soit sous la forme drsquoune deacuteclinaison du plan drsquoaction national

agrave lrsquoeacutechelle des territoires de santeacute soit gracircce agrave la contractualisation avec les eacutetablissements par

le biais des CPOM En ce qui concerne plus speacutecifiquement les CPOM il est important de

noter que le Code de la santeacute publique preacutevoit expresseacutement que laquo le contrat fixe [hellip] les

engagements du titulaire en termes de deacuteveloppement des systegravemes drsquoinformation de

transmission des donneacutees informatiques et le cas eacutecheacuteant des activiteacutes de teacuteleacutemeacutedecine raquo

LrsquoARS a eacutegalement la possibiliteacute de mettre en place des structures de coopeacuteration visant agrave

faciliter la mutualisation des moyens A ce sujet nous verrons que lrsquoARS dispose depuis peu

drsquoun outil qui va si sa mise en œuvre fonctionne faciliter ces mutualisations les

Groupements Hospitaliers de Territoire (GHT)

556 Sur lrsquoaxe 2 consacreacute aux compeacutetences SI les ARS ont un rocircle essentiellement

peacutedagogique puisqursquoelles devront assurer la coordination des formations initiales et continue

Drsquoune maniegravere concregravete lrsquoARS pourra srsquoassurer que la dimension SI est bien inteacutegreacutee dans les

programmes de formations en srsquoappuyant notamment sur les deacuteleacutegations reacutegionales de

lrsquoANFH

557 En ce qui concerne lrsquoaxe 3 consacreacute agrave lrsquooffre de solution les ARS nrsquointerviennent pas

En revanche leur rocircle est strateacutegique sur lrsquoaxe 4 consacreacute au financement En effet crsquoest aux

ARS qursquoil appartient de seacutelectionner les dossiers qui seront retenus pour se voir octroyer un

soutien financier au titre du programme A noter que ce soutien nrsquoest pas neacutegligeable puisque

agrave titre drsquoexemple en 2015 154 millions drsquoeuros ont eacuteteacute alloueacutes agrave 600 eacutetablissements

diffeacuterents reacutepartis au sein de 23 reacutegions647

Les ARS sont donc au cœur de lrsquoorganisation du

financement du projet Cette mission tregraves speacutecifique a drsquoailleurs fait lrsquoobjet drsquoune instruction

du ministegravere de la santeacute648

647 Projet hocircpital numeacuterique rapport drsquoactiviteacute 2015 p 18

648 Instruction ndegDGOSPFMSIOS2013225 du 04 juin 2013 relative au lancement opeacuterationnel du volet

financement du programme hocircpital numeacuterique non publieacutee au JORF

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

300

3) Les maicirctrises drsquoouvrage reacutegionales appuis strateacutegiques aux ARS

558 Autres acteurs reacutegionaux incontournables et essentiels en matiegravere de mise en œuvre de

la politique des systegravemes drsquoinformation de santeacute les maicirctrises drsquoouvrages reacutegionales ou

MOAR

La speacutecificiteacute et la haute techniciteacute des projets relatifs aux Systegravemes drsquoinformation en

santeacute ont neacutecessiteacute de renforcer la maicirctrise drsquoouvrage reacutegionale en charge de ces projets Alors

que de nombreux rapports et notamment le rapport GAGNEUX preacuteconisaient de creacuteer dans

chaque reacutegion des structures de maicirctrise drsquoouvrage partenariales chaque reacutegion devant se

doter laquo sous la responsabiliteacute de lrsquoagence reacutegionale de santeacute drsquoune structure de maicirctrise

drsquoouvrage monteacutee en partenariat avec lrsquoensemble des acteurs raquo lrsquoASIP Santeacute a deacutecideacute de

faciliter la creacuteation et le deacuteveloppement de ces MOAR degraves 2010 en lanccedilant le programme

EMERGENCE Lrsquoobjectif de ce programme eacutetait drsquoaccompagner les acteurs reacutegionaux dans

la mise en place drsquoune maicirctrise drsquoouvrage reacutegionale qui viendrait en appui de lrsquoARS pour les

accompagner dans ses missions en matiegravere de SIS Ce programme srsquoinscrivait dans la

continuiteacute du programme de relance du DMP

559 Alors que certaines reacutegions comme la reacutegion Midi-pyreacuteneacutees nrsquoavaient pas attendu

pour creacuteer leur MOAR drsquoautres ont de leur cocircteacute fortement beacuteneacuteficieacute du programme

EMERGENCE et de lrsquoimpulsion de lrsquoASIP Santeacute pour la mettre en place Ainsi un rapport

relatif agrave lrsquoeacutetat des lieux des maicirctrises drsquoouvrages reacutegionales reacutealiseacute par le cabinet KPMG sur

commande de lrsquoASIP en novembre 2012649

preacutecisant qursquoagrave cette date 21 reacutegions (sur 26 agrave

lrsquoeacutepoque) beacuteneacuteficiaient drsquoune MOAR opeacuterationnelle Toutes ces structures de MOAR sans

exception ont fait le choix du GCS de moyens pour la grande majoriteacute drsquoentre elles GCS

priveacute mecircme si trois MOAR conservaient en 2012 le statut de GCS de moyens de droit

public Ce choix srsquoexplique agrave la fois pour les avantages juridiques du GCS (structure doteacutee de

la personnaliteacute juridique ayant une autonomie et un budget propre) mais eacutegalement par le fait

que cette formule se reacutevegravele parfaitement adapteacutee pour des coopeacuterations entre plusieurs acteurs

649 Cabinet KPMG laquo Etat des lieux des maicirctrises drsquoouvrage reacutegionales raquo rapport final novembre 2012

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

301

tregraves diffeacuterents (eacutetablissements publics eacutetablissements priveacutes structures associatives

professionnels de santeacute)

560 Cependant le choix du GCS preacutesente un point neacutegatif non neacutegligeable le fait que ce

type de groupement soit par deacutefinition au service exclusif de ses adheacuterents Or il apparait

difficile de faire des MOAR une structure drsquoappui aux ARS pour ses missions de santeacute

publique si cette mecircme MOAR ne peut pas srsquoadresser agrave lrsquoensemble des acteurs concerneacutes par

lrsquoARS Par ailleurs comme le soulignait agrave juste titre le rapport de KPMG sur les MOAR le

statut de GCS peut perdre en agiliteacute et en reacuteactiviteacute au fur et agrave mesure de lrsquoaugmentation de

ses membres Degraves lors le risque est que la MOAR devienne plutocirct une structure de

repreacutesentation qursquoune structure opeacuterationnelle Cependant les MOAR restent des acteurs

reacutegionaux indispensables au deacuteveloppement des SIS et de la mise en œuvre des politiques

nationales en la matiegravere

B Les GHT nouveaux acteurs strateacutegiques pour le SIS

561 Preacutesenteacutes comme une laquo [] strateacutegie de prise en charge partageacutee autour dun projet

meacutedical commun par les eacutetablissements publics de santeacute dun mecircme territoire

[] raquo permettant la gestion mutualiseacutee de laquo certaines fonctions transversales () raquo650

les

Groupements Hospitaliers de territoires nouveaux venus dans le monde des coopeacuterations

hospitaliegraveres sont des groupements preacutesentant de nombreuses atypies (1) Parmi leurs

nombreuses missions les GHT doivent notamment veiller agrave la convergence des SI de leurs

membres Cette nouvelle structure devient donc un acteur incontournable de la gouvernance

des SIS (2)

1) Les GHT une forme atypique de coopeacuteration

562 La loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute compleacuteteacutee par le deacutecret ndeg 2016-

524 du 27 avril 2016 relatif aux groupements hospitaliers de territoire651

modifie

profondeacutement lrsquoorganisation des coopeacuterations hospitaliegraveres opeacuterant un laquo reacuteel changement de

650 Ministre des Affaires sociales de la Santeacute et des Droits des femmes lettre de la mission daccompagnement

sur les groupements hospitaliers de territoire 17 novembre 2014 651

Deacutecret ndeg 2016-524 du 27 avril 2016 relatif aux groupements hospitaliers de territoire JORF ndeg0101 du 29

avril 2016 texte ndeg 24

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

302

paradigme raquo652

en instaurant les Groupements Hospitaliers de Territoires (GHT) En effet

lrsquoarticle 107 de la loi codifieacute aux articles L 6132-1 et suivants du Code de la santeacute publique

preacutevoit que laquo chaque eacutetablissement public de santeacute sauf deacuterogation tenant agrave sa speacutecificiteacute

dans loffre de soins territoriale est partie agrave une convention de groupement hospitalier de

territoire Le groupement hospitalier de territoire nest pas doteacute de la personnaliteacute morale Le

groupement hospitalier de territoire a pour objet de permettre aux eacutetablissements de mettre

en œuvre une strateacutegie de prise en charge commune et gradueacutee du patient dans le but

dassurer une eacutegaliteacute daccegraves agrave des soins seacutecuriseacutes et de qualiteacute Il assure la rationalisation

des modes de gestion par une mise en commun de fonctions ou par des transferts dactiviteacutes

entre eacutetablissements Dans chaque groupement les eacutetablissements parties eacutelaborent un projet

meacutedical partageacute garantissant une offre de proximiteacute ainsi que laccegraves agrave une offre de reacutefeacuterence

et de recours raquo Le GHT est preacutesenteacute comme un outil de coopeacuteration qui vise laquo agrave rationaliser

les modes de gestion soit par une mise en commun de fonctions soit par des transferts

drsquoactiviteacute entre eacutetablissements Les modes de gestion srsquoentendent ainsi de plusieurs maniegraveres

la gestion de lrsquooffre de soins drsquoune part (hellip) et la gestion des outils supports drsquoautre part

permettant une ameacutelioration des modaliteacutes de travail raquo653

Il est inteacuteressant de se pencher sur cette nouvelle forme de coopeacuteration creacutee par la loi

Touraine originale en plusieurs points

a) Speacutecificiteacute des GHT

563 Le GHT preacutesente la particulariteacute de nrsquoavoir de groupement que le nom En effet

contrairement aux GCS ou aux GIE les GHT ne donnent pas lieu agrave la naissance drsquoune

nouvelle personne morale et reposent sur un dispositif conventionnel En cela les GHT sont

les descendants directs des Communauteacutes hospitaliegraveres de territoires formule de coopeacuteration

introduite par la loi HPST et qui disparait drsquoailleurs avec la creacuteation des GHT654

En pratique

les GHT sont composeacutes drsquoeacutetablissements publics dont lrsquoadheacutesion est encadreacutee par une

convention constitutive signeacutee entre les diffeacuterents eacutetablissements membres et valideacutee par

lrsquoARS Notons qursquoun eacutetablissement public de santeacute ne peut ecirctre partie qursquoagrave un seul GHT et les

652 VARNIER Freacutedeacuteric laquo La coopeacuteration hospitaliegravere au service de la modernisation de notre systegraveme de

santeacute raquo RDSS 2016 ndeg 4 p 620 653

VEacuteRAN Olivier LACLAIS Bernadette TOURAINE Jean-Louis et ali Rapport fait au nom de la

commission des affaires sociales sur le projet de loi relatif agrave la santeacute ndeg 2673 mars 2015 p 46 654

V notamment en ce sens lrsquoarticle L 6211-21 du Code de la santeacute publique

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

303

coopeacuterations de ce type ne peuvent donc pas ecirctre deacutemultiplieacutees Lrsquoautre particulariteacute de ces

groupements est leur caractegravere obligatoire En effet les eacutetablissements de santeacute nrsquoont pas eu

drsquoautre choix que drsquoadheacuterer agrave un GHT et ce avant la date butoir du 1er

juillet 2016 fixeacutee par la

loi Ce caractegravere obligatoire constitue une rupture655

avec ce qui existait preacuteceacutedemment en

matiegravere de coopeacuteration hospitaliegravere Par ailleurs il est utile de preacuteciser que le leacutegislateur srsquoil a

encadreacute et preacutevu lrsquoensemble des dispositions relatives agrave la constitution des GHT il nrsquoen a

preacutevu aucune quant agrave leur dissolution ou encore au retrait des eacutetablissements Drsquoautres

eacutetablissements peuvent cependant participer agrave un GHT par le biais drsquoune association ou drsquoun

partenariat En effet la loi Touraine a ouvert la possibiliteacute aux eacutetablissements deacutejagrave membres

drsquoun GHT ou qui au contraire ne pourraient pas faire partie drsquoun GHT de par leur statut

(hocircpitaux des armeacutees eacutetablissements drsquohospitalisation agrave domicile eacutetablissements publics de

santeacute autoriseacutes en psychiatrie) drsquoecirctre tout de mecircme associeacute au projet meacutedical De mecircme tous

les GHT doivent ecirctre associeacutes agrave un CHU au titre des activiteacutes hospitalo-universitaires cette

association eacutetant traduite agrave la fois dans le projet meacutedical du groupement et dans une

convention drsquoassociation passeacutee entre lrsquoeacutetablissement support du GHT et le CHU concerneacute

Enfin les eacutetablissements priveacutes peuvent quant agrave eux ecirctre partenaires drsquoun GHT et ce en

signant une convention de coopeacuteration encadreacutee par les dispositions de lrsquoarticle L 6134-1 du

Code de la santeacute publique656

Ainsi le GHT est fondeacute sur un dispositif strictement conventionnel En effet le GHT

repose sur a minima deux conventions la convention constitutive drsquoune part et la convention

drsquoassociation avec un CHU drsquoautre part mecircme si celle-ci ne sera signeacutee que par

lrsquoeacutetablissement support

564 La convention constitutive preacutesente un reacuteel caractegravere strateacutegique en ce qursquoelle doit

preacuteciser des points majeurs du fonctionnement du GHT Elle doit ainsi fixer le projet meacutedical

partageacute les deacuteleacutegations eacuteventuelles drsquoactiviteacutes les transferts eacuteventuels de soins ou

655 VARNIER Freacutedeacuteric laquo La coopeacuteration hospitaliegravere au service de la modernisation de notre systegraveme de

santeacute raquo op cit p 620 656

laquo Dans le cadre des missions qui leur sont imparties et dans les conditions deacutefinies par voie reacuteglementaire

les eacutetablissements de santeacute publics ou priveacutes agrave but non lucratif peuvent participer agrave des actions de coopeacuteration y

compris internationales avec des personnes de droit public et priveacute Pour la poursuite de ces actions ils

peuvent signer des conventions participer agrave des groupements dinteacuterecirct public des groupements dinteacuterecirct

eacuteconomique ou des groupements de coopeacuteration sanitaire ou constituer entre eux des feacutedeacuterations meacutedicales

interhospitaliegraveres Pour les actions de coopeacuteration internationale les eacutetablissements de santeacute publics ou priveacutes agrave

but non lucratif peuvent eacutegalement signer des conventions avec des personnes de droit public et priveacute dans le

respect des engagements internationaux souscrits par lEtat franccedilais raquo

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

304

drsquoeacutequipement mateacuteriels lourds entre les eacutetablissements lrsquoorganisation des activiteacutes et la

reacutepartition des emplois meacutedicaux et pharmaceutiques les modaliteacutes de constitution des

eacutequipes meacutedicales communes et des eacuteventuels pocircles inter-eacutetablissements et enfin les

modaliteacutes pratiques drsquoorganisation et de fonctionnement du GHT Elle est eacutegalement la base

leacutegale de la deacuteleacutegation de compeacutetences entre les eacutetablissements et lrsquoeacutetablissement support Car

en effet lrsquoautre particulariteacute majeure des GHT est cet adossement agrave un eacutetablissement support

deacutesigneacute au sein de la convention et qui aura en charge drsquoexercer certaines fonctions pour le

compte des autres eacutetablissements et notamment la gestion commune drsquoun SIH convergent la

gestion du DIM la fonction achat la coordination des instituts et des eacutecoles de formation

Cette convention est drsquoautant plus importante que le GHT ne dispose ni de la personnaliteacute

morale ni drsquoun dispositif extrecircmement encadreacute comme crsquoest par exemple le cas pour les

GCS La convention se doit donc drsquoecirctre la plus preacutecise possible puisqursquoelle a la lourde tacircche

pour reprendre les propos de Catherine KELLER de compenser laquo lrsquoabsence drsquoincarnation

juridique de la coopeacuteration qursquoelle met en œuvre raquo657

565 Plus qursquoune simple mise en commun des moyens telle que lrsquoon peut la rencontrer

dans les coopeacuterations du type GIP ou GCS les GHT induisent une deacuteleacutegation drsquoactiviteacute658

Ce

que le texte preacutevoit relegraveve en effet de la deacuteleacutegation de compeacutetence puisque les eacutetablissements

doivent deacuteleacuteguer a minima quatre compeacutetences strateacutegiques - SIH DIM achats et formation -

agrave lrsquoeacutetablissement support qui agira alors pour leur compte Crsquoest avec une grande attention et

une grande preacutecaution que ces deacuteleacutegations drsquoactiviteacute devront ecirctre appreacutehendeacutees par les

diffeacuterents eacutetablissements En effet lrsquoeacutetablissement support devra mesurer lrsquoimpact de cette

deacuteleacutegation sur sa responsabiliteacute Par ailleurs la convention constitutive est la base juridique de

cette deacuteleacutegation de compeacutetence ce qui ne fait que renforcer son importance

b) Des questions en suspens

566 La mise en place des GHT soulegraveve plusieurs questions drsquoordre juridique Drsquoabord la

pertinence du qualificatif de coopeacuteration attribueacute aux GHT En effet il est neacutecessaire de se

demander si le terme de coopeacuteration est adapteacute pour deacutesigner les GHT agrave partir du moment ougrave

657 KELLER Catherine laquo De la communauteacute hospitaliegravere de territoire au groupement hospitalier de territoire

continuiteacute et rupture raquo JCP ndashA 2015 p 39 658

La deacuteleacutegation de compeacutetence peut ecirctre deacutefinie comme le fait pour une autoriteacute administrative de se dessaisir

dans les limites preacutevues par la loi drsquoun ou plusieurs de ses pouvoirs en faveur drsquoun autre agent qui les exercera agrave

sa place

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

305

la mutualisation de moyens arrive en second plan Pour certains auteurs le GHT ne serait

qursquoune eacutetape intermeacutediaire qui megravenera irreacutemeacutediablement vers une fusion des

eacutetablissements659

Il ne faut pourtant pas oublier le sens premier du terme coopeacuteration Le

dictionnaire donne la deacutefinition suivante de la notion de coopeacuteration laquo action de coopeacuterer

de participer agrave une œuvre commune raquo En droit public la coopeacuteration peut ecirctre deacutefinie comme

la mise en commun de moyens par plusieurs partenaires afin de reacutealiser des missions

communes Elle suppose donc un partage des tacircches des moyens mais eacutegalement des

responsabiliteacutes Or le meacutecanisme de deacuteleacutegation drsquoactiviteacute est pour sa part totalement

diffeacuterent En effet un seul eacutetablissement dans ce cas sera responsable de lrsquoexeacutecution des

missions et lui seul sera eacutegalement responsable en cas drsquoeacutechec Cependant le deacuteleacutegataire

deacutetiendra seul lrsquoautoriteacute deacutecisionnaire contrairement aux coopeacuterations ougrave les eacutetablissements

deacutecident ensemble dans le cadre drsquoinstances

567 Bien entendu cette analyse doit ecirctre nuanceacutee dans le cas des GHT En effet toutes les

activiteacutes ne font pas lrsquoobjet drsquoune deacuteleacutegation de compeacutetence Pour certaines il y aura reacuteelle

mutualisation des moyens Lrsquoexistence drsquoun projet meacutedical commun est drsquoailleurs la preuve

irreacutefutable de lrsquoexistence drsquoune forme de coopeacuteration Par ailleurs les textes preacutevoient

lrsquoexistence drsquoune gouvernance commune Ainsi lrsquoarticle L 6132-2 du Code de la santeacute

publique preacutevoit la mise en place drsquoun comiteacute strateacutegique chargeacute de laquo se prononcer sur la

mise en œuvre de la convention et du projet meacutedical partageacute raquo composeacute des directeurs des

eacutetablissements membres des Preacutesidents de CME et des Preacutesidents de CSIRMT des

eacutetablissements membres

Le GHT apparait donc agrave ce stade comme une formule hybride agrave la lisiegravere entre

coopeacuteration fonctionnelle et coopeacuteration organique et faisant appel agrave plusieurs meacutecanismes

juridiques tregraves distincts pour fonctionner

568 Nous pouvons ensuite nous interroger sur la reacuteelle simpliciteacute attacheacutee agrave lrsquoabsence de

personnaliteacute morale du GHT En effet le rapport intermeacutediaire de la mission Groupements

Hospitaliers de Territoire meneacutee par Jacqueline HUBERT et Freacutederic MARTINEAU et rendu

en mai 2015 procircnait une absence de personnaliteacute morale invoquant la lourdeur des

659 HOUDART Laurent HOUDART Steacutephanie CHAMPENOIS Guillaume laquoTout ce que vous avez toujours

voulu savoir sur les GHT raquo article disponible sur [httpwwwhoudartorg] Consulteacute le 20 avril 2016

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

306

coopeacuterations donnant lieu agrave creacuteation drsquoune nouvelle personne morale et estimant que cette

absence de personnaliteacute morale pouvait au contraire se reacuteveacuteler ecirctre une condition de reacuteussite

de la coopeacuteration660

Or cette simpliciteacute preacutesupposeacutee nrsquoexiste pas en reacutealiteacute661

En effet le

GHT existera par le biais de diffeacuterents montages conventionnels conventions qui pourraient

se deacutecliner sur trois niveaux diffeacuterents (convention constitutive convention(s) de partenariat

et convention(s) drsquoassociation) A ce sujet Jacques HARDY parle drsquoun laquo usage de la forme

contractuelle [hellip] pousseacutee aux limites de la neacutecessiteacute de creacuteer une personne morale deacutedieacutee agrave

la coopeacuteration raquo662

Par ailleurs lrsquoabsence de personnaliteacute juridique peut laisser craindre une

certaine fragiliteacute du dispositif mecircme si agrave ce sujet les avis de la doctrine divergent663

569 Cette absence de personnaliteacute juridique du GHT apporte selon nous une autre

difficulteacute importante celle de la reacutepartition des responsabiliteacutes au sein drsquoune structure sans

personnaliteacute juridique La reacuteponse est simple pour les activiteacutes deacuteleacutegueacutees agrave lrsquoeacutetablissement

support En effet celui-ci en tant que deacuteleacutegataires devra en assumer lrsquoensemble des

responsabiliteacutes et ce poids ne sera pas anodin pour lrsquoeacutetablissement qui aura la lourde charge

drsquoecirctre le support drsquoun GHT

570 Cependant pour ce qui est des activiteacutes mises en commun et notamment la mise en

place eacuteventuelle de pocircle inter-eacutetablissements il sera neacutecessaire pour chacun des membres du

GHT drsquoapporter une vigilance particuliegravere agrave la traccedilabiliteacute de lrsquoensemble de leurs actes La

reacutepartition des responsabiliteacutes sera donc toujours possible en appliquant les regravegles de droit

commun Force est de constater que lrsquoexistence drsquoune personne morale ducircment identifieacutee

660 HUBERT Jacqueline MARTINEAU Freacutederic laquo Mission Groupements Hospitaliers de Territoire raquo rapport

intermeacutediaire mai 2015 p 25 661

KELLER Catherine laquo De la communauteacute hospitaliegravere de territoire au groupement hospitalier de territoire

continuiteacute et rupture raquo op cit 662

HARDY Jacques laquo Les cateacutegories juridiques agrave lrsquoeacutepreuve de la reacuteforme administrative Le Cas des

groupements hospitaliers de territoire raquo AJDA 2017 p 919 663

V notamment en ce sens VARNIER Freacutedeacuteric laquo La coopeacuteration hospitaliegravere au service de la modernisation

de notre systegraveme de santeacute raquo op cit p620 qui estime que lrsquoabsence de personnaliteacute juridique nrsquoest pas

synonyme de fragiliteacute juridique les activiteacutes eacutetant simplement deacuteplaceacutees drsquoun eacutetablissement agrave un autre

conservant sa personnaliteacute morale V eacutegalement HARDY Jacques laquo Les cateacutegories juridiques agrave lrsquoeacutepreuve de la

reacuteforme administrative Le Cas des groupements hospitaliers de territoire raquo op cit Lrsquoauteur estime pour sa part

que laquo lrsquoabsence de personnaliteacute morale nrsquoest pas surprenante degraves lors qursquoun GHT personnaliseacute aurait

ineacutevitablement eacuteteacute le moyen et en mecircme temps le reacutesultat drsquoune fusion des eacutetablissements concerneacutes raquo

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

307

aurait permis drsquoeacuteviter ce genre de difficulteacutes Quoi qursquoil en soit cette nouvelle organisation

laquo interroge les eacutequilibres internes lieacutes agrave la place respective de chaque eacutetablissement raquo664

571 Enfin derniegravere difficulteacute majeure celle de lrsquoarticulation du GHT avec les coopeacuterations

deacutejagrave existantes En effet comme le souligne Catherine KELLER lrsquoabsence de personnaliteacute

juridique rend plus compliqueacutee lrsquoarticulation des coopeacuterations deacutejagrave en place - peu importe leur

forme - avec le GHT Alors qursquoune nouvelle personne morale aurait pu reprendre agrave son

compte les coopeacuterations existantes le GHT simple coopeacuteration fonctionnelle entre plusieurs

eacutetablissements devra cohabiter avec drsquoautres coopeacuterations la plupart existant sous la forme

de GCS de moyens Finalement cela amegravene agrave une autre question essentielle celle de la

peacuterenniteacute des coopeacuterations actuellement en place Question drsquoautant plus importante pour les

coopeacuterations existantes en matiegravere de compeacutetences qui devront ecirctre deacuteleacutegueacutees agrave

lrsquoeacutetablissement support Nous pensons ici par exemple aux ex-SIH devenus GIP dans le

domaine de lrsquoinformatique ou encore aux groupements dont la mission est la mutualisation

des achats hospitaliers Par ailleurs la question se pose eacutegalement pour les domaines pour

lesquels la deacuteleacutegation nrsquoest pas aujourdrsquohui obligatoire au sein des GHT mais ougrave une

mutualisation est fortement preacuteconiseacutee telle que lrsquoimagerie ou la biologie Aujourdrsquohui des

GHT qui mutualiseraient leurs activiteacutes de biologie seraient ameneacutes agrave coexister avec des GCS

parfois vieux de plusieurs anneacutees au sein desquels des eacutetablissements coopegraverent de maniegravere

efficace sur ces sujets Catherine KELLER srsquointerroge agrave juste titre sur ce sujet laquo les

eacutetablissements publics adheacuterents avec des eacutetablissements priveacutes de santeacute agrave des GCS de

moyens [hellip] vont-ils devoir renoncer agrave des anneacutees de dynamique coopeacuterative [hellip] ou

srsquoimpliquer dans une seacutedimentation coopeacuterative complexe raquo665

2) La mutualisation des SIS entre eacutetablissements de santeacute

572 laquo Vague de fond qui va modifier sur le long terme le marcheacute de linformatique et de

le-santeacute en France raquo666

Telle est la qualification donneacutee agrave lrsquoobligation de mise en place drsquoun

systegraveme drsquoinformation de santeacute convergent au sein des GHT qui devra ecirctre opeacuterationnel au

664 SAISON-DEMARS Johanne laquo Modernisation du systegraveme de santeacute une gouvernance hospitaliegravere agrave

geacuteomeacutetrie variable raquo RDSS 2016 p 633 665

KELLER Catherine laquo De la communauteacute hospitaliegravere de territoire au groupement hospitalier de territoire

continuiteacute et rupture raquo JCP ndashA 2015 p 41 666

Propos de Christophe Boutin preacutesident de Maincare Solutions lors dun entretien agrave TICsanteacute le 16 feacutevrier

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

308

31 deacutecembre 2020 eacutetant entendu que la lourde tacircche de geacuterer cela revient agrave lrsquoeacutetablissement

support de chaque GHT Ce dispositif agrave la fois innovant et parfaitement restructurant nous

amegravene agrave formuler plusieurs reacuteflexions Une premiegravere concernant le choix des mots qui nrsquoest

pas anodin En effet la loi parle bien de convergence des SIS Cependant cette convergence

srsquoopeacuterera au fil de lrsquoeau et non comme lrsquoa signaleacute le rapport de fin de mission de jacqueline

HUBERT et Freacutedeacuteric MARTINEAU agrave lrsquooccasion drsquoune opeacuteration laquo Big Bang raquo667

En effet

la loi Touraine instaure bien une convergence des SIS et non une fusion Le choix des termes

est important et le rapport se veut rassurant preacutecisant qursquoil ne srsquoagit pas drsquoun plan Marshall

de refonte des systegravemes drsquoinformation mais plutocirct la mise en place drsquoune gestion

preacutevisionnelle coheacuterente des investissements futurs en la matiegravere et des eacutevolutions des SIS en

place La solution de lrsquoimpleacutementation drsquoune brique logicielle drsquointeropeacuterabiliteacute a donc eacuteteacute

eacutecarteacutee au profit drsquoune convergence certes plus lente mais agrave terme plus efficace selon nous

puisqursquoelle permettra de trouver au sein de chaque GHT un systegraveme drsquoinformation unifieacute

avec des logiciels identiques La mutualisation de la fonction achats au sein du GHT devient

ici un atout majeur et facilitateur en la matiegravere

573 Drsquoun point de vue pratique cette convergence a pour but principal drsquouniformiser les

outils de travail des professionnels qui pourront ecirctre ameneacutes agrave lrsquooccasion de la mise en place

des projets meacutedicaux des GHT agrave travailler au sein de plusieurs eacutetablissements diffeacuterents Ce

sera aussi lrsquooccasion drsquouniformiser la gouvernance des systegravemes drsquoinformation santeacute au

niveau drsquoun territoire donneacute Degraves lors le nombre drsquoacteurs en charge de la mise en œuvre des

SIS et de la politique publique en la matiegravere sera consideacuterablement diminueacute ce qui facilitera

le dialogue et les eacutechanges entre drsquoune part lrsquoEtat agrave lrsquoorigine des grandes orientations

politiques en la matiegravere et drsquoautre part lrsquoARS et les eacutetablissements de santeacute principaux

utilisateurs mais eacutegalement exeacutecuteurs de ces politiques La convergence des SI au sein des

GHT nous apparait constituer une opportuniteacute inteacuteressante pour permettre drsquoameacuteliorer le

deacuteveloppement et lrsquoefficaciteacute des SIH Mecircme si cette solution ne permettra pas de prendre en

compte lrsquoensemble des speacutecificiteacutes de chaque membre drsquoun GHT elle preacutesente le grand

avantage de diffuser de maniegravere plus uniforme les politiques publiques En termes

drsquoorganisation pratique elle induit la mise en place drsquoune direction des systegravemes

drsquoinformation unique et centraliseacutee Elle neacutecessite eacutegalement la mise en place drsquoun scheacutema

667 HUBERT Jacqueline MARTINEAU Freacutederic laquo Mission Groupements Hospitaliers de Territoire raquo op cit

p 22

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

309

directeur des SIS unique Crsquoest drsquoailleurs ce scheacutema directeur qui est dans les deux anneacutees

qui suivront la promulgation de la loi Touraine et des deacutecrets drsquoapplication la prioriteacute

La convergence des SI au sein du GHT preacutesente toutefois selon nous quelques

difficulteacutes

574 La premiegravere que nous avons souleveacutee rapidement dans notre paragraphe preacuteceacutedent

concerne lrsquoavenir des coopeacuterations deacutejagrave en place en matiegravere de systegraveme drsquoinformation et leur

survie face aux GHT En effet nombreux sont les eacutetablissements qui se sont regroupeacutes sous

forme de GCS de GIP ou avant cela sous forme de SIH dans le but de mutualiser leurs

moyens en matiegravere de systegravemes drsquoinformation hospitaliers A ce sujet le rapport intermeacutediaire

de la mission GHT preacutecise bien que laquo les outils de coopeacuteration sont tregraves largement utiliseacutes raquo

eacutetant preacuteciseacute que 326 GCS (sur 621 existant agrave ce jour) sont constitueacutes dans le seul but de

mutualiser des fonctions informatiques Certains de ces groupements sont par ailleurs devenus

aujourdrsquohui des reacutefeacuterences en la matiegravere Citons par exemple le GIP SIB668

ou encore le GIP

e-sis Mais finalement ces groupements qui se sont avec le temps professionnaliseacutes au point

de devenir eacutediteurs de logiciels heacutebergeur agrave part entiegravere ne sont pas reacuteellement menaceacutes Au

contraire lrsquoavegravenement des GHT peut ecirctre synonyme de nouveaux clients En revanche

certaines coopeacuterations fonctionnelles entre plusieurs eacutetablissements de petites tailles seront

certainement ameneacutees agrave disparaitre ou tout du moins agrave se fondre dans les GHT ce au nom de

la convergence obligatoire des SIS

575 La deuxiegraveme interrogation porte sur lrsquoheacutebergement des donneacutees de santeacute de lrsquoensemble

des eacutetablissements membres du GHT Le rapport de la mission est assez clair sur ce sujet il

est preacutefeacuterable que lrsquoeacutetablissement support ne soit pas heacutebergeur En effet cela comme nous

lrsquoavons eacutetudieacute auparavant induirait de trop lourdes responsabiliteacutes mais eacutegalement une trop

lourde proceacutedure pour se faire agreacuteer En effet la convergence des SIS nrsquoimplique pas selon

nous que lrsquoeacutetablissement support endosse la responsabiliteacute de lrsquoarchivage des donneacutees de

santeacute responsabiliteacute par ailleurs lourde et complexe Cependant il devra peut-ecirctre pour plus

668 Le groupement dinteacuterecirct public Santeacute Informatique de Bretagne (SIB) est un eacutetablissement public de

coopeacuteration hospitaliegravere speacutecialiseacute dans les prestations informatiques agrave destination des eacutetablissements de santeacute Il

est par ailleurs agreacuteeacute heacutebergeur de donneacutees de santeacute

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

310

de coheacuterence orienter et coordonner le choix des eacutetablissements membres du GHT pour un

heacutebergeur agreacuteeacute unique

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

311

Conclusion de la section

576 Lrsquointeropeacuterabiliteacute des SIS reste un deacutefi technique majeur agrave relever dans le cadre de

lrsquoinstauration drsquoune gouvernance unifieacutee et coheacuterente des SIS Ce deacutefi est de taille et

aujourdrsquohui encore de nombreux obstacles empecircchent son parfait deacuteveloppement Pour autant

lrsquoASIP Santeacute y travaille depuis sa creacuteation et le leacutegislateur encore tregraves reacutecemment est venu

deacutebloquer en faisant du NIR lrsquoidentifiant de santeacute tant attendu

LrsquoEtat chargeacute de donner une impulsion globale en matiegravere de SIS doit eacutegalement

veiller au bon deacuteveloppement des politiques qursquoil eacutelabore en la matiegravere Pour lrsquoaider dans

cette mission il doit srsquoappuyer sur les acteurs preacutesents agrave lrsquoeacutechelon reacutegional A ce titre les

ARS et les GHT se reacutevegravelent alors essentiels agrave la diffusion et la mise en œuvre concregravete des

politiques nationales deacuteveloppeacutees en la matiegravere LrsquoARS en tant que repreacutesentant de lrsquoEtat

dans la reacutegion en matiegravere de politique de santeacute va ecirctre en charge de lrsquoapplication reacutegionale

des politiques deacuteveloppeacutees en matiegravere de SIS Les ARS ont drsquoailleurs joueacute un rocircle majeur

dans le programme Hocircpital Numeacuterique Les GHT nouveaux venus dans le paysage des

coopeacuterations hospitaliegraveres vont quant agrave eux permettre drsquoacceacuteleacuterer la convergence des SIS des

diffeacuterents eacutetablissements publics de santeacute

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

313

Conclusion du chapitre

577 Instaurer une gouvernance efficace des SIS nrsquoest pas chose aiseacutee Les interlocuteurs

sont nombreux et eacuteclectiques (Etat Assurance maladie eacutetablissements de santeacute industriels du

secteur professionnels de santeacute) les enjeux ne sont pas forceacutement les mecircmes pour tous et les

besoins diffeacuterent souvent A cela srsquoajoute la techniciteacute du sujet et en conseacutequence la

neacutecessiteacute drsquoun soutien drsquoexperts Dans ce contexte lrsquoEtat a tenteacute drsquoinstaurer degraves 2009 une

gouvernance intelligente et efficace deacuteleacuteguant notamment la maicirctrise drsquoouvrage agrave une agence

speacutecialiseacutee en la matiegravere et supprimant les organismes redondants et inefficaces Cette

gouvernance nrsquoest bien entendu pas parfaite et se doit drsquoecirctre ameacutelioreacutee Pour ce faire

lrsquointeropeacuterabiliteacute des SIS fait partie des pistes principales agrave explorer Cette probleacutematique

assez technique une fois reacutesolue permettrait drsquoassurer une uniciteacute et une coheacuterence

neacutecessaires au sein des SIS ce qui facilitera ainsi leur deacuteveloppement

Par ailleurs lrsquoEtat ne peut pas ignorer lrsquoimportance des acteurs reacutegionaux qui jouent

un rocircle tregraves important dans la gouvernance des SIS En effet lrsquoEtat nrsquoa pas drsquoautre choix que

de srsquoappuyer sur les ARS pour diffuser et mettre en place ses politiques publiques relatives

aux SIS Mais lrsquoeacutechelon reacutegional permet eacutegalement drsquoadapter ces politiques parfois trop

geacuteneacuteralistes et non adapteacutees aux speacutecificiteacutes des territoires de santeacute Enfin les GHT

nouveaux acteurs dans le paysage ont eacutegalement un rocircle majeur dans la gouvernance des SIS

Ils vont en effet permettre la convergence de plusieurs systegravemes drsquoinformation hospitaliers

ameacuteliorant ainsi lrsquointeropeacuterabiliteacute des systegravemes et donc lrsquoensemble des projets qui pourront

par la suite ecirctre mis en œuvre en matiegravere de SIS par lrsquoEtat

315

Chapitre 2

La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

578 A ce stade de nos travaux nous constatons que le cadre relatif aux TIC en santeacute est

loin drsquoecirctre abouti ni mecircme adapteacute aux exigences ou aux besoins des professionnels En effet

la speacutecificiteacute mecircme du sujet agrave savoir lrsquoutilisation drsquooutils drsquoinformation et de communication

agrave distance dans le contexte sensible voir mecircme intime de la santeacute rend son appreacutehension par

le droit assez complexe

Drsquoun cocircteacute le cadre en place doit ecirctre suffisamment souple pour accorder agrave la

technologie la liberteacute dont elle a besoin afin drsquoeacutevoluer constamment Drsquoun autre cocircteacute le

patient son intimiteacute et sa vie priveacutee doivent ecirctre proteacutegeacutes Le leacutegislateur se retrouve donc

face agrave un paradoxe ne pas trop interdire en veillant de ne pas trop en permettre non plus En

parallegravele il doit eacutegalement jongler avec les diffeacuterents inteacuterecircts en preacutesence les professionnels

de santeacute qui souhaitent voir leurs outils et leurs techniques eacutevoluer en eacutetant adapteacutes agrave leur

pratique quotidienne les patients dont la seacutecuriteacute et celle de leurs donneacutees personnelles

doivent ecirctre assureacutees les industriels qui souhaitant profiter eacuteconomiquement de la

commercialisation et de lrsquoutilisation des nouvelles technologies Ces contraintes lieacutees aux

exigences des matiegraveres et du secteur concerneacutes se confrontent alors aux contraintes plus

classiques du leacutegislateur Il doit en conseacutequence construire un cadre juridique adapteacute agrave un

domaine innovant respectueux de la hieacuterarchie des normes et des cadres juridiques deacutejagrave en

vigueur

Cependant le cadre juridique actuel principalement construit au fil des eacutevolutions

technologiques srsquoavegravere aujourdrsquohui incertain fragilisant ainsi la seacutecuriteacute juridique (section I)

Il doit ecirctre repenseacute pour ecirctre adapteacute aux besoins actuels des professionnels de santeacute et ce afin

drsquoobtenir un juste eacutequilibre entre respect des droits des patients et de ses donneacutees et efficaciteacute

des technologies disponibles (section II)

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

316

Section 1 Le cadre juridique actuel source drsquoinseacutecuriteacute juridique

579 Lrsquoeacutetude du cadre juridique des TIC en santeacute nous amegravene agrave identifier deux difficulteacutes

majeures drsquoune part le cadre semble aujourdrsquohui trop complexe du fait notamment de sa

forme baseacute sur un empilement de reacutefeacuterences eacuteparses distinctes et parfois contradictoires

drsquoautre part il ne permet pas drsquoassurer la seacutecuriteacute juridique neacutecessaire au bon deacuteveloppement

et agrave une utilisation croissante des TIC en santeacute Degraves lors ce cadre se reacutevegravele aujourdrsquohui ecirctre

une source drsquoincertitudes et surtout drsquoinseacutecuriteacute juridique pour lrsquoensemble des acteurs du

domaine Pour eacutetayer nos propos il nous est neacutecessaire dans un premier temps de revenir sur

le concept mecircme de seacutecuriteacute juridique (Paragraphe I) avant de reacutefleacutechir aux origines de la

complexiteacute du cadre juridique actuel des TIC en santeacute et donc de son inseacutecuriteacute (Paragraphe

II)

sect1 Retour sur la notion de seacutecuriteacute juridique

laquo Les lois inutiles affaiblissent les lois neacutecessaires raquo669

580 Parfois qualifieacute de concept clandestin le principe de seacutecuriteacute juridique est pourtant

reacuteguliegraverement associeacute au concept drsquoEtat de droit et consideacutereacute comme une des finaliteacutes du

droit Ce principe est pourtant assez reacutecent et demeure une creacuteation purement jurisprudentielle

et doctrinale Par ailleurs le principe de seacutecuriteacute juridique induit plusieurs applications

concregravetes et fondamentales dans notre droit et notamment la preacutevisibiliteacute de la loi ainsi que la

clarteacute et lrsquoaccessibiliteacute de la norme Afin drsquoappreacutehender ce concept il nous est donc

neacutecessaire de nous attarder sur les principes de clarteacute et drsquointelligibiliteacute de la norme (A) avant

drsquoenvisager les solutions avanceacutees afin de garantir la seacutecuriteacute juridique du droit (B)

669 Montesquieu laquo De lrsquoesprit des lois raquo Partie 6 Livre XXIX laquo De la maniegravere de composer les lois raquo 1758

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

317

A Porteacutees des principes de clarteacute et drsquointelligibiliteacute de la norme

laquo Quand le droit bavarde le citoyen ne lui precircte plus qursquoune oreille distraite raquo670

581 Mecircme si selon le ceacutelegravebre adage laquo nul nrsquoest censeacute ignoreacute la loi raquo il est eacutevident qursquoune

loi qui ne serait pas appreacutehendable par le citoyen risquerait drsquoecirctre de ce fait ignoreacutee La

seacutecuriteacute juridique induit donc une clarteacute et un caractegravere intelligible afin drsquoassurer son

accessibiliteacute par le citoyen Ces concepts composantes de la notion de seacutecuriteacute juridique (2)

se doivent drsquoecirctre deacutefinis preacuteciseacutement (1)

1) Deacutefinition des principes

Quand on aborde la notion de seacutecuriteacute juridique drsquoautres principes sont reacuteguliegraverement

associeacutes Il srsquoagit des notions de clarteacute drsquointelligibiliteacute et drsquoaccessibiliteacute de la loi

582 Crsquoest le Conseil constitutionnel qui par plusieurs deacutecisions consacre le principe de

clarteacute de la loi avant de finalement lrsquoabandonner Bien que ces exigences de clarteacute et de

preacutecision dans la reacutedaction des dispositions leacutegislatives soient traditionnellement exigeacutees par

le Conseil constitutionnel en matiegravere peacutenale671

le principe de clarteacute de la norme est cependant

apparu de maniegravere explicite dans une deacutecision portant sur une loi relative au travail En effet

crsquoest dans sa deacutecision ndeg 98-401 DC du 10 juin 1998 portant sur la loi drsquoorientation et

drsquoincitation relative agrave la reacuteduction du temps de travail que la Haute juridiction preacutecise qursquoune

mesure deacutefinie de maniegravere suffisamment claire et preacutecise satisfaisait aux exigences poseacutees par

lrsquoarticle 34 de la Constitution Le Conseil constitutionnel exigeait deacutesormais des lois qursquoelles

comportent des laquo dispositions suffisamment preacutecises et des formules non eacutequivoques raquo672

Puis en 1999 les juges de la rue Montpensier ont deacutegageacute un objectif agrave valeur

constitutionnelle celui drsquoaccessibiliteacute et drsquointelligibiliteacute de la loi673

583 Cependant tregraves vite la doctrine a souligneacute la confusion possible entre ces deux

notions relativement proches Pour la doctrine le Conseil constitutionnel lui-mecircme eacutetait

670 Rapport du Conseil drsquoEtat laquo De la seacutecuriteacute juridique raquo 1991 La documentation franccedilaise

671 Les documents de travail du Seacutenat laquo La qualiteacute de la loi raquo seacuterie eacutetudes juridiques septembre 2007 p 15

672 Id p 16 agrave propos de la Deacutecision ndeg 2001-455 DC du 12 janvier 2002

673 Deacutecision ndeg 99-421 DC du 16 deacutecembre 1999

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

318

prompt agrave confondre le principe de clarteacute de la loi et lrsquoobjectif agrave valeur constitutionnelle

drsquoaccessibiliteacute et drsquointelligibiliteacute de la loi Une eacutetude de sa jurisprudence tend agrave deacutemontrer la

confusion reacutealiseacutee par les Sages eux-mecircmes674

Or pour certains auteurs laquo la volonteacute du

Conseil de distinguer principe de clarteacute de la loi et objectif drsquointelligibiliteacute et drsquoaccessibiliteacute

de la loi nrsquoaurait eacuteteacute leacutegitime qursquoau prix drsquoune politique jurisprudentielle rigoureuse justifiant

lrsquoutiliteacute respective de chacun des concepts raquo675

De mecircme certains auteurs confondaient

reacuteguliegraverement les deux allant parfois jusqursquoagrave invoquer un objectif agrave valeur constitutionnelle

de clarteacute et drsquointelligibiliteacute de la loi676

Il apparait effectivement assez complexe de mesurer la

diffeacuterence qui peut exister entre drsquoune part la clarteacute de la loi et drsquoautre part lrsquoaccessibiliteacute et

lrsquointelligibiliteacute de la loi La doctrine a donc tregraves vite manifesteacute son inteacuterecirct pour lrsquoobjectif agrave

valeur constitutionnelle drsquointelligibiliteacute et drsquoaccessibiliteacute de la loi preacuteconisant un abandon pur

et simple du principe de clarteacute de la loi laquo la malleacuteabiliteacute de lrsquoobjectif de valeur

constitutionnelle parait donc particuliegraverement adapteacutee agrave la recherche drsquoune plus grande

qualiteacute du droit [hellip] Au contraire le principe de clarteacute parce qursquoil semble vouloir recouvrir

une dimension objective induit une rigiditeacute qui cadre mal avec la relativiteacute de la notion de

laquo qualiteacute de droit raquo [hellip] qui [hellip] ne peut srsquoappreacutecier qursquoau regard des circonstances de

lrsquoespegravece raquo677

584 Crsquoest ainsi que le Conseil constitutionnel dans une deacutecision du 27 juillet 2006

abandonna la reacutefeacuterence au principe de clarteacute de la loi pour lui preacutefeacuterer lrsquoobjectif

drsquointelligibiliteacute et drsquoaccessibiliteacute de la loi comme reacutefeacuterence unique laquo consideacuterant qursquoil

incombe au leacutegislateur drsquoexercer pleinement la compeacutetence que lui confie la Constitution et

en particulier son article 34 que le plein exercice de cet exercice ainsi que lrsquoobjectif de

valeur constitutionnelle drsquointelligibiliteacute et drsquoaccessibiliteacute de la loi qui deacutecoule des articles 4

5 6 et 16 de la Deacuteclaration des droits de lrsquohomme et du citoyen de 1789 lui imposent

drsquoadopter des dispositions suffisamment preacutecises et des formules non eacutequivoques [hellip] raquo678

674 V notamment en ce sens MILANO Laure laquo Controcircle de constitutionnaliteacute et qualiteacute de la loi raquo Revue de

droit public ndeg 3 2006 p 637 675

Ibid 676

V notamment en ce sens LANDAIS Claire LE NICA Freacutedeacuteric laquo Seacutecuriteacute juridique la conseacutecration raquo

AJDA 2006 p 1028 677

GAY Laurence laquo Jurisprudence du Conseil constitutionnel raquo Revue franccedilaise de droit constitutionnel ndeg 50

avril-juin 2002 pp 385-445 678

Deacutecision ndeg 2006 - 540 DC du 27 juillet 2006

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

319

Deacutesormais seul lrsquoobjectif de valeur constitutionnelle drsquoaccessibiliteacute et drsquointelligibiliteacute

de la loi doit ecirctre respecteacute par le leacutegislateur et peut fonder une deacuteclaration de non-conformiteacute agrave

la Constitution679

2) Des composantes drsquoun concept plus large celui de seacutecuriteacute juridique

585 La notion de seacutecuriteacute juridique nrsquoapparait pas au sein de notre corpus constitutionnel

ou leacutegislatif et bien qursquoil la protegravege le Conseil constitutionnel nrsquoa pour autant jamais

consacreacute la notion de seacutecuriteacute juridique au sein de sa jurisprudence680

En revanche le Conseil

drsquoEtat a fait le choix de consacrer de maniegravere solennelle ce principe jusqursquoalors inexistant

dans le droit administratif Ainsi par une deacutecision en date du 24 mars 2006 le Conseil drsquoEtat

reacuteuni en Assembleacutee681

a pour la premiegravere fois affirmer le principe de seacutecuriteacute juridique En

lrsquoespegravece les juges avaient ducirc se prononcer sur la leacutegaliteacute du deacutecret du 16 novembre 2005

portant approbation du Code de deacuteontologie des commissaires aux comptes A cette occasion

la Haute juridiction preacutecise que laquo consideacuterant qursquoindeacutependamment du respect de cette

exigence il incombe agrave lrsquoautoriteacute investie du pouvoir reacuteglementaire drsquoeacutedicter pour des motifs

de seacutecuriteacute juridique les mesures transitoires qursquoimplique srsquoil y a lieu une reacuteglementation

nouvelle [hellip] raquo682

avant drsquoaffirmer pour le cas drsquoespegravece qui lui eacutetait soumis que laquo toutefois agrave

deacutefaut de toute disposition transitoire dans le deacutecret attaqueacute les exigences et interdictions qui

reacutesultent du code apporteraient dans les relations contractuelles leacutegalement institueacutees avant

son intervention des perturbations qui du fait de leur caractegravere excessif au regard de

lobjectif poursuivi sont contraires au principe de seacutecuriteacute juridique raquo Il est inteacuteressant de

noter que cette deacutecision symbolique fut par ailleurs rendue quelques semaines apregraves la

publication du rapport du Conseil drsquoEtat consacreacute agrave la seacutecuriteacute juridique683

586 Tous les auteurs nrsquoont cependant pas accueilli de la mecircme faccedilon cette deacutecision

certains consideacuterant que cet arrecirct laquo constitue un signal fort quant agrave lorientation de la

679 Les documents de travail du Seacutenat seacuterie eacutetudes juridiques laquo La qualiteacute de la loi raquo septembre 2007 p 22

680 DUTHEILLET de LAMOTHE Olivier laquo La seacutecuriteacute juridique le point de vue du juge constitutionnel raquo

rapport du Conseil drsquoEtat laquo Seacutecuriteacute juridique et complexiteacute du droit raquo mars 2006 p 369 681

CE Ass 24 mars 2006 KPMG et autres ndeg 288460 et s Rec p 154 AJDA 2006 p 1028 chron C

LANDAIS Claire et LE NICA Freacutedeacuteric RFDA 2006 p 463 concl AGUILA Yann BJCP 2006 p 173

concl AGUILA Yann 682

A noter que les dispositions de cette jurisprudence sont deacutesormais codifieacutees au sein du Code des relations

entre le public et lrsquoadministration agrave lrsquoarticle L 221-5 683

Rapport public du Conseil drsquoEtat laquo Seacutecuriteacute juridique et complexiteacute du droit raquo mars 2006

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

320

jurisprudence administrativeraquo684

tandis que drsquoautres plus frileux se demandaient si

lrsquoeacutevocation par le Conseil drsquoEtat dans ses consideacuterants drsquoun motif de seacutecuriteacute juridique

suffisait agrave lui seul pour en deacuteduire que la Haute juridiction venait consacrer le principe685

Bien qursquoenfin consacreacute ce principe proteacuteiforme pacirctit toujours aujourdrsquohui drsquoun manque de

deacutefinition preacutecise de ses contours

Finalement le principe de seacutecuriteacute juridique ne serait qursquoun laquo un pavillon qui

recouvre une multitude de principes plus speacutecifiques dont les caracteacuteristiques - et notamment

la valeur - peuvent ecirctre diffeacuterentes raquo686

Certains auteurs comme le rapporte Fabrice

MELLERAY sont mecircme alleacutes jusqursquoagrave parler laquo drsquoinstillation raquo dans notre droit drsquoune

perspective de seacutecuriteacute plutocirct que de la naissance drsquoun reacuteel principe687

587 Pour le Conseil drsquoEtat laquo le principe de seacutecuriteacute juridique implique que les citoyens

soient sans que cela appelle de leur part des efforts insurmontables en mesure de deacuteterminer

ce qui est permis et ce qui est deacutefendu par le droit applicable raquo688

Pour y parvenir il est

neacutecessaire que la norme reacuteponde agrave certaines exigences mateacuterielles et temporelles689

588 Lrsquoexigence mateacuterielle reacuteside principalement dans la qualiteacute de la norme eacutedicteacutee laquo la

loi permet ordonne eacutedicte raquo690

Cette exigence de qualiteacute renvoie agrave lrsquoobjectif de valeur

constitutionnelle drsquointelligibiliteacute et drsquoaccessibiliteacute de la loi En ce sens lrsquoaccessibiliteacute et

lrsquointelligibiliteacute de la loi sont deux des diffeacuterentes caracteacuteristiques qui composent le principe de

seacutecuriteacute juridique691

Pour autant comme lrsquoavait souligneacute le Seacutenat dans son eacutetude consacreacutee

au sujet la loi peut ecirctre complexe sans pour autant ecirctre contraire agrave la seacutecuriteacute juridique Le

Conseil constitutionnel a eu lrsquooccasion drsquoaffirmer cette position agrave plusieurs reprises Ce fut

684 LANDAIS Claire LE NICA Freacutedeacuteric laquo Seacutecuriteacute juridique la conseacutecration raquo AJDA 2006 p 1028

685 MELLERAY Fabrice laquo Lrsquoarrecirct KPMG consacre-t-il vraiment le principe de seacutecuriteacute juridique raquo AJDA

2006 p 897 686

CASSIA Paul laquo La seacutecuriteacute juridique un laquo nouveau raquo principe geacuteneacuteral du droit aux multiples facettes raquo

Dalloz 2006 p 1190 687

MELLERAY Fabrice laquo Lrsquoarrecirct KPMG consacre-t-il vraiment le principe de seacutecuriteacute juridique raquo op cit

en citant PACTEAU Bernard laquo La seacutecuriteacute juridique un principe qui nous manque raquo AJDA numeacutero speacutecial

1995 p 151 688

Rapport public du Conseil drsquoEtat laquo Seacutecuriteacute juridique et complexiteacute du droit raquo op cit p 281 689

Drsquoune maniegravere diffeacuterente Paul CASSIA fait le choix de deacutecomposer le principe de seacutecuriteacute juridique en

diffeacuterenciant son volet objectif de son volet subjectif 690

PORTALIS laquo Discours preacuteliminaire du Code civil raquo 1804 691

MATHIEU Bertrand laquo Les lois de finances au crible de la seacutecuriteacute juridiqueraquo LPA ndeg 10 2006 p 4

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

321

notamment le cas dans sa deacutecision ndeg 2000-437 DC du 19 deacutecembre 2000 En lrsquoespegravece la loi

de financement de la seacutecuriteacute sociale pour 2001 avait eacuteteacute soumise agrave son appreacuteciation Les

juges de la Haute juridiction avaient alors preacuteciseacute que laquo si la loi deacutefeacutereacutee accroit encore la

complexiteacute des circuits financiers [hellip] elle eacutenonce de faccedilon preacutecise les nouvelles regravegles de

financement qursquoelle instaure raquo Ainsi une loi pourra ecirctre intelligible mais complexifier les

regravegles en place sans que cela ne porte atteinte aux yeux du Conseil constitutionnel agrave la

seacutecuriteacute juridique692

589 Lrsquoexigence temporelle quant agrave elle reacuteside dans lrsquoimpeacuteratif de preacutevisibiliteacute du droit

dont deacutecoule le principe de non-reacutetroactiviteacute de la norme mais eacutegalement lrsquoobligation

drsquoinstaurer des mesures transitoires Le principe fondamental de non reacutetroactiviteacute de la norme

est poseacute par lrsquoarticle 2 du Code civil selon lequel laquo la loi ne dispose que pour lavenir elle

na point deffet reacutetroactif raquo Srsquoil eacutetait encore neacutecessaire drsquoinsister sur le caractegravere quasi sacreacute

de ce principe dans notre droit rappelons que cette disposition du Code civil existe et est

resteacutee inchangeacutee depuis 1803 En ce qui concerne les actes administratifs le principe

deacuteveloppeacute par la jurisprudence du Conseil drsquoEtat est le mecircme693

Enfin la neacutecessiteacute pour le

leacutegislateur drsquoinstaurer des mesures transitoires lors de la mise en place drsquoune nouvelle

reacuteglementation a eacuteteacute poseacute par le mecircme arrecirct venant reconnaitre lrsquoexistence du principe de

seacutecuriteacute juridique lrsquoarrecirct dit KPMG

La seacutecuriteacute juridique constitue donc un principe vaste aux contours non reacuteellement

deacutefinis de maniegravere stricte agrave lrsquoheure actuelle Il est toutefois possible drsquoameacuteliorer cette seacutecuriteacute

juridique gracircce agrave plusieurs outils

B Les outils de lutte contre lrsquoinseacutecuriteacute juridique

590 Aujourdrsquohui nombreux sont les articles de doctrine portant sur la notion de seacutecuriteacute

juridique Le Conseil drsquoEtat ainsi que les sages du Conseil constitutionnel se sont eacutegalement

saisis du sujet Crsquoest drsquoailleurs en grande partie agrave cette occasion que des pistes de lutte contre

692 Conseil constitutionnel deacutecision ndeg 2000-437 DC du 19 deacutecembre 2000 JORF ndeg298 du 24 deacutecembre 2000

p 20576 693

CE Ass 25 juin 1948 Socieacuteteacute du journal lrsquoAurore Rec p 289 Gaz Pal 1948 2 p 7 concl

LETOURNEUR JCP G 1948 II 4427 note MESTRE GAJA 1999 p 408

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

322

lrsquoinseacutecuriteacute juridique ont eacuteteacute avanceacutees (2) Mais avant drsquoenvisager celles-ci il est inteacuteressant

de srsquoattarder sur les causes de la fragilisation actuelle de la seacutecuriteacute juridique (1)

1) Les origines varieacutees de lrsquoinseacutecuriteacute juridique

591 laquo Ce mal on le sait est proteacuteiforme Lrsquoinseacutecuriteacute juridique se nourrit de lrsquoinflation

normative comme de lrsquoinstabiliteacute des regravegles ou encore du deacuteclin de lrsquoart de leacutegifeacuterer raquo694

Nicolas MOLFESSIS nous apporte par ce constat les principales causes de lrsquoinseacutecuriteacute

juridique En effet lrsquoinseacutecuriteacute juridique ou plutocirct la mise en danger de la seacutecuriteacute juridique

reacutesulte principalement drsquoune multiplication croissante des normes et de leur reacutevision

reacuteguliegravere Cet accroissement des normes trouve plusieurs sources diverses

592 La premiegravere est lrsquoapparition ces derniegraveres anneacutees de nouveaux domaines de

leacutegislation portant sur des speacutecialiteacutes parfois complexes Crsquoest par exemple le cas des

biotechnologies ou du secteur du numeacuterique qui comme nous lrsquoeacutevoquons tout au long de nos

recherches a des reacutepercussions dans de nombreux domaines et notamment celui de la santeacute

Ces secteurs lieacutes agrave la technologie de pointe eacutevoluent rapidement et le leacutegislateur a parfois des

difficulteacutes agrave suivre cette eacutevolution le temps du deacutebat parlementaire nrsquoeacutetant clairement pas le

mecircme que celui du progregraves scientifique Au final nous nous retrouvons avec un corpus de

textes eacutepars parfois contradictoires et souvent inadapteacutes

De mecircme le foisonnement des normes est accentueacute par lrsquoaugmentation des sources de

droit externes Si nous restons sur lrsquoexemple des Technologies de lrsquoInformation et de la

Communication le Conseil drsquoEtat dans son rapport annuel de 2006 a constateacute que pas moins

de 6 directives avaient eacuteteacute adopteacutees agrave ce sujet par lrsquoUnion europeacuteenne depuis le milieu des

anneacutees 1990695

Par ailleurs comme nous lrsquoeacutetudierons plus en deacutetails ulteacuterieurement le

regraveglement europeacuteen relatif agrave la protection des donneacutees personnelles publieacute le 4 mai 2016696

et transposable directement drsquoici 2018 bouleverse notre droit interne modifiant certaines

694 MOLFESSIS Nicolas laquo Combattre lrsquoinseacutecuriteacute juridique ou la lutte contre du systegraveme juridique contre lui-

mecircme raquo rapport du Conseil drsquoEtat laquo Seacutecuriteacute juridique et complexiteacute du droit raquo mars 2006 p 391 695

Rapport du Conseil drsquoEtat laquo Seacutecuriteacute juridique et complexiteacute du droit raquo mars 2006 p 240 696

Regraveglement (UE) 2016679 du Parlement europeacuteen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif agrave la protection des

personnes physiques agrave leacutegard du traitement des donneacutees agrave caractegravere personnel et agrave la libre circulation de ces

donneacutees et abrogeant la directive 9546CE JOUE 4 mai 2016 L 1191

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

323

dispositions de la loi Informatique et Liberteacutes de 1978 deacutejagrave pourtant modifieacutee agrave plusieurs

reprises

593 Le rapport du Conseil drsquoEtat insiste eacutegalement sur une nouvelle source possible du

droit qui est apparue avec la naissance des autoriteacutes administratives indeacutependantes En effet

certaines drsquoentre elles disposent drsquoun pouvoir normatif et toutes contribuent agrave lrsquoeacutelaboration de

regravegles applicables au travers de leurs deacutecisions Crsquoest ainsi le cas de la CNIL dont les

deacutecisions font loi dans le domaine speacutecifique de la protection des donneacutees agrave caractegravere

personnel

594 Autre source drsquoinseacutecuriteacute juridique reacuteguliegraverement releveacutee le contournement de la

proceacutedure parlementaire voire sa deacutenaturation visant notamment lrsquoutilisation abusive des

ordonnances de lrsquoarticle 38 de la Constitution ou encore agrave la proceacutedure drsquourgence Par ce biais

sont reacuteguliegraverement adopteacutees des ordonnances dite de simplification dont les conseacutequences

sur notre droit ne sont finalement pas celles attendues certains auteurs allant mecircme jusqursquoagrave

parler de cynisme du pouvoir exeacutecutif

Lrsquoatteinte agrave la seacutecuriteacute juridique passe eacutegalement par une atteinte directe agrave la qualiteacute de

la norme Une norme fragile ou une norme incomplegravete ne permettra pas drsquoassurer la seacutecuriteacute

juridique que tout citoyen est en droit drsquoattendre Or la loi est parfois paralyseacutee par lrsquoabsence

de publication des textes drsquoapplication697

595 Enfin face agrave ces sources du foisonnement de la norme que nous pouvons qualifier

drsquoobjectives nous trouvons des causes plus subjectives preacutesentant plutocirct un caractegravere

politique et sociologique Comme le reacutesume tregraves bien Guy Carcassonne laquo tout sujet drsquoun

vingt heures est virtuellement une loi raquo698

La force tregraves symbolique de la loi en France pousse

parfois les gouvernants agrave abuser de cet outil699

Or communication politique et droit ne font

pas forcement bon meacutenage et il en reacutesulte parfois des lois inutiles et un corpus juridique

complexifieacute Le meacutediateur de la Reacutepublique a eacutegalement reacutealiseacute ce constat rappelant agrave

697 MORVAN Patrick laquo Le principe de seacutecuriteacute juridique lrsquoantidote au poison de lrsquoinseacutecuriteacute juridique raquo

Droit social 2006 p 707 698

CARCASSONNE Guy laquo Penser la loi raquo Pouvoirs septembre 2005 p 39 699

De CLAUSSADE Jocelyne laquo Seacutecuriteacute juridique et complexiteacute du droit consideacuterations geacuteneacuterales du Conseil

drsquoEtat raquo Recueil Dalloz 2006 p 737

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

324

lrsquooccasion de son rapport annuel de 2005 laquo lrsquoempilement des textes souvent voteacutes trop

rapidement et dans le souci illusoire de reacutepondre par la preacutecipitation leacutegislative agrave des

emballements meacutediatiques et drsquoopinion raquo700

Cette inseacutecuriteacute juridique issue de sources varieacutees peut toutefois ecirctre contreacutee

2) Les pistes de seacutecurisation du droit

596 laquo La lutte contre lrsquoinseacutecuriteacute juridique est devenue en soi un objet de

reacuteglementation raquo701

Depuis plusieurs anneacutees les textes relatifs agrave la simplification du droit ont

tendance agrave se deacutevelopper Nous pouvons citer agrave titre drsquoexemple la loi ndeg 2014-1545 du 20

deacutecembre 2014 relative agrave la simplification de la vie des entreprises et portant diverses

dispositions de simplification et de clarification du droit et des proceacutedures administratives702

ou lrsquoordonnance ndeg 2015-1288 du 15 octobre 2015 portant simplification et modernisation du

droit de la famille703

Mais ces textes sont loin drsquoecirctre isoleacutes et le leacutegislateur a entendu

srsquoemparer des difficulteacutes poseacutees par la multiplication croissante des normes et les difficulteacutes

de lisibiliteacute pour le citoyen que cela engendre Malheureusement parfois les solutions

deviennent elles-mecircmes sources de dysfonctionnements Ainsi comme le soulignait Nicolas

MOLFESSIS dans son analyse le choix des ordonnances de simplification senseacutees

deacutesencombrer le parlement et simplifier rapidement et efficacement les normes en place a

abouti agrave lrsquoeffet inverse le nombre croissant de ces ordonnances participant agrave lrsquoinflation

normative est reacuteguliegraverement deacutenonceacute et critiqueacute704

597 Finalement il est avant tout neacutecessaire de reacutefleacutechir au but rechercheacute avant de mettre en

place certaines actions La seacutecuriteacute juridique principe deacutesormais consacreacute par le Conseil

drsquoEtat srsquoobtient par la mise en place de solutions concregravetes et non pas par la seule eacutediction

drsquoun principe Ainsi plusieurs solutions ont pu ecirctre avanceacutees En eacutetudiant les solutions

700 Meacutediateur de la Reacutepublique rapport annuel pour 2005 p 16

701 MOLFESSIS Nicolas laquo Combattre lrsquoinseacutecuriteacute juridique ou la lutte contre du systegraveme juridique contre lui-

mecircme raquo op cit p 391 702

Loi ndeg 2014-1545 du 20 deacutecembre 2014 relative agrave la simplification de la vie des entreprises et portant diverses

dispositions de simplification et de clarification du droit et des proceacutedures administratives JORF ndeg0295 du 21

deacutecembre 2014 p 21647 703

Ordonnance ndeg 2015-1288 du 15 octobre 2015 portant simplification et modernisation du droit de la famille

JORF ndeg0240 du 16 octobre 2015 p 19304 704

MOLFESSIS Nicolas laquo Combattre lrsquoinseacutecuriteacute juridique ou la lutte contre du systegraveme juridique contre lui-

mecircme raquo op cit p 394

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

325

adopteacutees par nos voisins le Conseil drsquoEtat avait notamment proposeacute dans son rapport de

2006 de mettre en place des proceacutedures drsquoeacutelaboration des textes plus rigoureuses705

Cette

neacutecessiteacute de rigueur avanceacutee par la Haute juridiction dans son rapport de 2006706

a conduit agrave

une reacuteforme introduite en 2009 par une loi organique707

Celle-ci resteacutee discregravete708

a pourtant

introduit agrave lrsquoobligation pour les auteurs drsquoun projet de loi drsquoen exposer les motifs au regard

notamment du droit applicable et drsquoen eacutevaluer les impacts qursquoils soient sociaux financiers

eacuteconomiques ou environnementaux Cette reacuteforme nrsquoa pourtant pas forceacutement eacuteteacute appliqueacutee

correctement le Conseil drsquoEtat lui-mecircme estimant que laquo mecircme si des progregraves notables sont agrave

mettre au creacutedit des administrations la qualiteacute des eacutetudes drsquoimpact ou srsquoagissant des lois de

finances des eacutevaluations preacutealables doit encore ecirctre sensiblement ameacutelioreacutes raquo709

Par ailleurs signalons que ce dispositif ne vaut que pour les projets de lois Ainsi

lrsquoensemble des textes eacutemanant des parlementaires eux-mecircmes ne sont pas soumis agrave ces eacutetudes

preacutealables Or comme le relegraveve Yves JEGOUZO lrsquoeacutevaluation a priori des lois joue un rocircle

mineur dans le processus de creacuteation de la norme eacutetant donneacute que ces derniegraveres anneacutees le

gouvernement a plutocirct privileacutegieacute la voie parlementaire et donc les propositions de lois pour

faire passer ses textes710

598 Au niveau reacuteglementaire des dispositions similaires ont eacutegalement eacuteteacute mises en place

Ainsi comme le rappelle par exemple la circulaire ndeg 5817SG du 1er

ministre en date du 12

octobre 2015 laquo lrsquoeacutevaluation preacutealable des projets de textes reacuteglementaires et le gel de la

reacuteglementation deacutefini par la circulaire du 17 juillet 2013 contribuent agrave lrsquoameacutelioration de la

qualiteacute du droit raquo En effet la circulaire du 17 juillet 2013711

preacutevoit que tout nouveau projet

de texte reacuteglementaire creacuteant des charges nouvelles pour les collectiviteacutes les entreprises ou le

public ne peut ecirctre adopteacute sans qursquoil soit en contrepartie accompagneacute drsquoune simplification

eacutequivalente Il est par ailleurs preacutevu une eacutevaluation preacutealable de lrsquoensemble des projets de

705 Rapport du Conseil drsquoEtat laquo seacutecuriteacute juridique et complexiteacute du droit raquo op cit p 300

706 Rapport du Conseil drsquoEtat laquo seacutecuriteacute juridique et complexiteacute du droit raquo op cit p 313 Le Conseil drsquoEtat

preacuteconisait de recourir agrave une loi organique afin de fixer les obligations en termes de proceacutedure et notamment de

subordonner tout deacutepocirct de loi drsquoune eacutevaluation preacutealable des impacts de la reacuteforme 707

Loi organique ndeg 2009-403 du 15 avril 2009 relative agrave lapplication des articles 34-1 39 et 44 de la

Constitution JORF ndeg0089 du 16 avril 2009 p 6528 708

JEGOUZO Yves laquo Lrsquoeacutetude drsquoimpact formaliteacute ou garantie de la qualiteacute de la loi raquo AJDA 2012 p 1425 709

Rapport annuel du Conseil drsquoEtat 2012 p 135 710

JEGOUZO Yves laquo Lrsquoeacutetude drsquoimpact formaliteacute ou garantie de la qualiteacute de la loi raquo op cit p 135 711

Circulaire du 17 juillet 2013 relative agrave la mise en œuvre du gel de la reacuteglementation JORF ndeg0165 du 18

juillet 2013 p 11993

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

326

textes reacuteglementaires applicables aux collectiviteacutes locales aux entreprises ou au public par le

biais de fiches drsquoimpact Enfin une information systeacutematique du public sur ces eacutevaluations

par le biais des publications des fiches drsquoimpact doit ecirctre mise en place Ce dispositif des

fiches drsquoimpact a par ailleurs eacuteteacute eacutetendu agrave lrsquoeacutevaluation preacutealable des projets de normes ayant

des conseacutequences sur les missions ou lrsquoorganisation des services deacuteconcentreacutes de lrsquoEtat textes

initialement exclus du dispositif

599 Il nous faut eacutegalement signaler le travail de deacutebroussaillage des circulaires qui avait

eacuteteacute effectueacute ces derniegraveres anneacutees notamment gracircce au deacutecret ndeg 2008-1281 du 8 deacutecembre

2008 relatif aux conditions de publication des instructions et circulaires712

En effet comme le

soulignait le leacutegislateur dans son rapport relatif au deacutecret ndeg 2008-1281 du 8 deacutecembre 2008

laquo la prolifeacuteration des circulaires fait lobjet de critiques reacutepeacuteteacutees de la part de membres du

Parlement mais aussi des collectiviteacutes territoriales des entreprises et plus largement de

lopinion raquo Ainsi afin drsquoeacuteviter une stratification des circulaires et pour permettre au citoyen

drsquoen prendre connaissance le deacutecret du 8 deacutecembre 2008 oblige les administrations agrave publier

leurs circulaires sur un site unique celui du Premier ministre713

Les circulaires qui ne

figurent pas sur ce site ne sont pas opposables aux administreacutes A noter que lrsquoensemble des

dispositions issues du deacutecret de 2008 a eacuteteacute codifieacute depuis le 1er

janvier 2016 au sein du Code

des relations entre le public et ladministration aux articles R 312-8 et R 312-9

Le leacutegislateur travaille donc agrave instaurer les conditions neacutecessaires agrave une ameacutelioration

de la seacutecuriteacute juridique

712 Deacutecret ndeg 2008-1281 du 8 deacutecembre 2008 relatif aux conditions de publication des instructions et circulaires

JORF ndeg0287 du 10 deacutecembre 2008 p 18777 713

Lrsquoarticle 1 du deacutecret preacutevoit que laquo les circulaires et instructions adresseacutees par les ministres aux services et

eacutetablissements de lrsquoEacutetat sont tenues agrave la disposition du public sur un site internet relevant du Premier ministre

Elles sont classeacutees et reacutepertorieacutees de maniegravere agrave faciliter leur consultation raquo

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

327

sect2 La complexiteacute du cadre juridique srsquoappliquant aux TIC en santeacute

laquo La loi protegravege-t-elle encore le faible lorsqursquoelle est aussi complexe foisonnante et

instable raquo

600 Cet extrait drsquoun entretien accordeacute par Mme Josseline de CLAUSADE Conseiller

drsquoEtat714

illustre bien les difficulteacutes que posent une loi et plus geacuteneacuteralement un cadre

juridique trop complexe pour ses utilisateurs En effet un cadre juridique qui serait trop flou

trop complexe et trop diversifieacute nrsquooffre pas la seacutecuriteacute juridique agrave laquelle le citoyen est en

droit de srsquoattendre Finalement quand le droit devient compleacutetement hermeacutetique au profane et

nrsquoest plus accessible qursquoaux plus aguerris des experts juridiques il est leacutegitime de se

demander srsquoil remplit encore son rocircle fondamental

Crsquoest agrave lrsquoeacutechelle des TIC en santeacute la question que nous pouvons leacutegitimement nous

poser Car force est de constater que le cadre juridique geacuteneacuteral dans lequel eacutevoluent les TIC

en santeacute nrsquoest pas des plus simples agrave appreacutehender (A) causant alors un sentiment global

drsquoinseacutecuriteacute juridique pour les professionnels qui y sont confronteacutees (B)

A Lrsquoutilisation des TIC agrave lrsquohocircpital une pratique eacutevoluant dans des

environnements normatifs distincts

601 Regraveglementer lrsquoutilisation des TIC en santeacute induit de prendre en compte un certain

nombre de paramegravetres nrsquoayant a priori rien agrave voir ni avec les technologies de

communication ni la santeacute agrave proprement parler Cependant lrsquoobtention drsquoun cadre juridique

adapteacute et donc facilement applicable passe par cet exercice complexe (1) Toutefois agrave lrsquoheure

actuelle le cadre existant ne fait qursquoempiler diffeacuterents textes parfois geacuteneacuteraux parfois hyper

speacutecialiseacutes sans reacuteelle coheacuterence entre eux (2)

714 Les documents de travail du Seacutenat seacuterie eacutetudes juridiques laquo La qualiteacute de la loi raquo op cit p 7

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

328

1) Multipliciteacute des matiegraveres agrave prendre en compte

602 Au-delagrave du droit lrsquointroduction des TIC dans la pratique meacutedicale laquo se situe au

carrefour de plusieurs approches scientifiques et de plusieurs champs sectoriels (meacutedecine

eacutethique droit eacuteconomie psychologie) raquo715

Cette multipliciteacute des matiegraveres agrave prendre en

consideacuteration est une des sources de difficulteacute agrave lrsquoeacutelaboration drsquoun cadre unifieacute

603 Drsquoune maniegravere geacuteneacuterale le deacuteveloppement des TIC touche toute la socieacuteteacute il modifie

lrsquoensemble des secteurs industriels et de service mais eacutegalement la vie au travail la vie

quotidienne et plus reacutecemment la faccedilon dont les personnes gegraverent leur santeacute Ainsi les

enjeux du deacuteveloppement des TIC en santeacute sont multiples et les consideacuterations qui entourent

son encadrement juridique sont nombreuses

604 Un des enjeux majeurs est bien entendu lrsquoenjeu eacuteconomique Il est clair que les

industriels du secteur ne vont pas srsquoaventurer agrave deacutevelopper une solution coucircteuse sans retour

sur investissement preacutevisible Degraves lors le cadre juridique peut devenir un frein srsquoil srsquoavegravere

trop contraignant pour les industriels ou au contraire un eacuteleacutement moteur srsquoil srsquoavegravere ecirctre

favorable en imposant par exemple certaines solutions techniques ou en allouant des creacutedits

pour le deacuteveloppement des TIC en santeacute

605 Au-delagrave de lrsquoaspect juridique se pose eacutevidemment la question du deacutebat eacutethique

fortement preacutesent dans des domaines ougrave lrsquoinnovation scientifique touche de tregraves pregraves agrave

lrsquohumain A titre drsquoexemple les deacutebats eacutethiques sont nombreux en bioeacutethique autour

notamment de lrsquoencadrement de lrsquoeacutetude du geacutenome et du deacuteveloppement de la meacutedecine

preacutedictive En ce sens lrsquoeacutethique nrsquoest pas absente des deacutebats relatifs aux TIC en santeacute Il porte

particuliegraverement sur la confidentialiteacute de lrsquoinformation meacutedicale son partage et donc sur la

protection de la vie priveacutee En effet les TIC permettent nous lrsquoavons vu716

de collecter

stocker partager et exploiter des quantiteacutes importantes de donneacutees Ces donneacutees qui sont

extrecircmement sensibles car touchant agrave lrsquointimiteacute des personnes qursquoelles concernent peuvent

ecirctre un bien preacutecieux pour de nombreuses personnes que ce soient les professionnels de

715 BERANGER Jeacuterocircme Le COZ Pierre laquo Reacuteflexion eacutethique sur la pluridisciplinariteacute et la confidentialiteacute de

lrsquoinformation en imagerie meacutedicale via les nouvelles technologies de lrsquoinformation et de la communication raquo

Cancerradiotheacuterapie 2012 ndeg 16 pp 215-218 716

V Supra ndeg 37

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

329

santeacute les chercheurs mais aussi les assureurs ou les organismes bancaires par exemple La

question est donc de savoir jusqursquoougrave proteacuteger les donneacutees de santeacute et avec qui les partager

Quel eacutequilibre peut ecirctre trouveacute entre bonne utilisation des donneacutees de santeacute et protection de la

vie priveacutee Cette question rejoint celle relative agrave la possible reconnaissance drsquoun droit de

proprieacuteteacute des personnes sur leurs donneacutees personnelles717

Finalement doit-on envisager un

reacutegime de dispositions des donneacutees de santeacute similaire agrave celui qui srsquoapplique aux eacuteleacutements du

corps humain interdisant de maniegravere stricte toute possibiliteacute de commercialisation de celles-

ci Ou au contraire doit-on adheacuterer agrave la theacuteorie de lrsquolaquo Empowerment raquo qui pourrait permettre

aux personnes selon certains partisans du concept de devenir de veacuteritables acteurs de la

protection de leurs donneacutees renforccedilant ainsi celle-ci Toutes ces questions sont aujourdrsquohui

encore discuteacutees dans le cadre notamment du deacutebat relatif agrave lrsquoouverture eacutelargie de lrsquoaccegraves agrave

certaines donneacutees de santeacute lrsquoensemble srsquoinscrivant dans le cadre plus large de lrsquoopen-data en

santeacute

606 De fait suite au rapport rendu en 2014 agrave la Ministre de la santeacute Madame Marisol

TOURAINE par la Commission open-data constitueacutee en novembre 2013 la Ministre a tregraves

vite affirmeacute sa volonteacute de deacutevelopper lrsquoopen-data en santeacute Le rapport de la Commission

deacutefinit lrsquoopen-data comme laquo lrsquoouverture et le partage de donneacutees par leur mise en ligne dans

des formats ouverts en autorisant la reacuteutilisation libre et gratuite par toute personneraquo718

Derriegravere ce terme anglophone se cache donc lrsquoouverture au public des donneacutees de santeacute et ce

dans le but de promouvoir la deacutemocratie sanitaire favoriser lrsquoautonomisation du patient mais

aussi et surtout deacutevelopper la recherche et lrsquoinnovation en santeacute Crsquoest ainsi que sur la base

de cette eacutetude la loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute719

vient dans son chapitre V

intituleacute laquo creacuteer les conditions dun accegraves ouvert aux donneacutees de santeacute raquo preacutevoir les conditions

du deacuteveloppement de lrsquoopen data en santeacute La volonteacute du leacutegislateur est de laquo reacuteformer lrsquoaccegraves

aux donneacutees de santeacute afin que leurs potentialiteacutes soient utiliseacutees au mieux dans linteacuterecirct de la

collectiviteacute et du principe de valeur constitutionnelle de protection de la santeacute tout en

assurant la confidentialiteacute des donneacutees personnelles qui procegravede du droit au respect de la vie

priveacutee autre exigence de rang constitutionnel dautant plus forte quil sagit de donneacutees

717 V Supra ndeg 111 et s

718 Rapport de la Commission Open Data en santeacute p 9

719 Loi ndeg 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre systegraveme de santeacute JORF ndeg0022 du 27 janvier

2016 texte ndeg 1

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

330

sensibles raquo720

Ces nouvelles dispositions sont la preuve de lrsquoextrecircme importance des

questions eacutethiques relatives aux limites de lrsquoutilisation des donneacutees de santeacute face agrave la neacutecessiteacute

de proteacuteger la vie priveacutee

607 Enfin le deacuteveloppement des TIC en santeacute pousse de maniegravere indirecte agrave se pencher

sur la question de la place et de lrsquoutilisation des reacuteseaux sociaux En effet ces derniers

directement lieacutes au deacuteveloppement de lrsquoutilisation des TIC dans la socieacuteteacute sont aujourdrsquohui

tregraves preacutesents Qursquoils soient professionnels (VIADEO LinKedin) ou personnels (Facebook

Twitter) leur existence leur importance et leur force ne peuvent ecirctre ignoreacutees Le secteur

hospitalier nrsquoy eacutechappe pas et nombreux sont les eacutetablissements qui ont fait le choix drsquoouvrir

et deacutevelopper un compte Facebook ou un compte Twitter De mecircme les personnels de ces

eacutetablissements deacutetenant un ou plusieurs comptes sur les reacuteseaux sociaux sont eacutegalement

nombreux Aussi lrsquoutilisation de ces reacuteseaux nous amegravene agrave nous poser des questions majeures

agrave la fois en termes de respect de la vie priveacutee (vie priveacutee des personnels mais eacutegalement des

patients) et de respect de la liberteacute drsquoexpression Lrsquoerreur majeure est de consideacuterer les

reacuteseaux sociaux comme eacutetant des lieux clos ougrave les informations eacutechangeacutees restent priveacutees En

effet selon les paramegravetres de confidentialiteacute seacutelectionneacutes les informations pourront ecirctre

consideacutereacutees comme publiques ou priveacutees Il est donc neacutecessaire de se reporter aux conditions

geacuteneacuterales drsquoutilisation du reacuteseau social trop souvent ignoreacutees par les utilisateurs A titre

drsquoexemple les conditions geacuteneacuterales drsquoutilisation de Facebook et plus speacutecifiquement leur

politique drsquoutilisation des donneacutees preacutevoient la chose suivante laquo le terme informations

publiques fait reacutefeacuterence aux informations que vous partagez avec tout le monde dans votre

profil public ou encore aux contenus que vous partagez sur une Page Facebook ou sur un

autre forum public Les informations publiques sont accessibles agrave tout le monde au sein

comme en dehors de nos Services et peuvent ecirctre vues ou retrouveacutees agrave lrsquoaide de moteurs de

recherche en ligne drsquoAPI et de meacutedias hors ligne tels que la teacuteleacutevisionraquo721

Ainsi un utilisateur qui fait le choix dans ses paramegravetres de seacutecuriteacute drsquoun profil

public doit savoir que toutes ses informations seront publiques et donc accessibles agrave tous y

compris par le biais de moteurs de recherche Par ailleurs une personne commentant un profil

public ou partageant des informations (photos commentaires ou autres) sur un profil une

720 Exposeacute des motifs loi ndeg 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre systegraveme de santeacute disponible

sur [httpswwwlegifrancegouvfr] consulteacute le 1er

septembre 2016 721

Politique drsquoutilisation des donneacutees Facebook disponible sur [httpswwwfacebookcom] Consulteacutee le 29

aoucirct 2016

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

331

page ou un groupe public doit avoir agrave lrsquoesprit que ces informations seront publiques peu

importe si son profil personnel est par ailleurs priveacute Il est donc important de srsquointeacuteresser aux

conditions geacuteneacuterales drsquoutilisation ainsi qursquoagrave la politique drsquoutilisation des donneacutees du reacuteseau

social et ce agrave chaque fois qursquoelles sont mises agrave jour afin de parameacutetrer au mieux son profil et

proteacuteger ses donneacutees

608 Toute la difficulteacute de lrsquoencadrement de lrsquoutilisation des reacuteseaux sociaux par les

professionnels des eacutetablissements de santeacute reacuteside dans la juste adeacutequation entre le respect de

la liberteacute drsquoexpression des professionnels drsquoune part et le respect par ces derniers de leurs

obligations professionnelles drsquoautre part En effet rappelons que les professionnels travaillant

agrave lrsquohocircpital et plus speacutecifiquement les professionnels de santeacute sont deacutebiteurs drsquoune obligation

de respect du secret professionnel722

De mecircme ces professionnels en tant qursquoagents publics

doivent respecter une obligation de confidentialiteacute de neutraliteacute et de reacuteserve723

Ces

obligations sont bien entendu valables sur les reacuteseaux sociaux eacutegalement La liberteacute

drsquoexpression sur les reacuteseaux sociaux est donc permise mais celle-ci doit srsquoexercer dans le

respect du patient de lrsquoinstitution de ses collegravegues et de sa profession Ainsi la diffamation

lrsquoinjure ou encore le deacutenigrement vont venir limiter cette liberteacute drsquoexpression Dans ce

contexte le caractegravere public drsquoune information diffuseacutee sur les reacuteseaux sociaux va avoir son

importance En effet alors que la diffamation publique est consideacutereacutee comme un deacutelit

punissable drsquoune amende de 12 000 euros la diffamation priveacutee est quant agrave elle une

contravention punie drsquoune amende de 38 euros Mecircme chose pour lrsquoinjure qui sera plus

durement reacuteprimeacutee si elle est publique (amende de 12 000 euros ndash article 33 de la loi du 29

juillet 1881724

) que si elle est priveacutee (contravention de premiegravere classe ndash article R 621-2 du

Code peacutenal) Degraves lors il est leacutegitime de se demander ce qui peut bien ecirctre consideacutereacute comme

public sur un reacuteseau social La jurisprudence nous apporte quelques reacuteponses agrave ce sujet

Ainsi la Cour drsquoAppel de Lyon725

a par exemple consideacutereacute qursquoun licenciement eacutetait

fondeacute sur une cause reacuteelle et seacuterieuse pour un salarieacute qui laquo en nactivant pas les critegraveres de

confidentialiteacute de son compte Facebook a pris le risque que ses propos quil pensait priveacutes

soient accessibles agrave dautres salarieacutes de la socieacuteteacute eux mecircme titulaires dun compte

722 Article L 1110-4 du Code de la santeacute publique

723 V notamment en ce sens les dispositions de lrsquoarticle L 1110-4 du Code de la santeacute publique mais eacutegalement

les dispositions de lrsquoarticle 25 de la loi ndeg 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des

fonctionnaires Loi dite loi Le Pors JORF du 14 juillet 1983 p 2174 724

Loi du 29 juillet 1881 sur la liberteacute de la presse JORF du 30 juillet 1881 p 4201 725

CA Lyon ch soc sect A 24 mars 2014 ndeg 1303463

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

332

Facebookraquo Selon les juges les propos peu flatteurs auraient exceacutedeacute le droit agrave la liberteacute

drsquoexpression de leur auteur En revanche comme le preacutecise la Cour administrative drsquoappel de

Rouen laquo la seule existence de propos injurieux et calomnieux sur le reacuteseau social ne suffit

pas en elle-mecircme agrave justifier du licenciement drsquoun salarieacute il incombe agrave lrsquoemployeur de

deacutemontrer le caractegravere public des correspondances litigieuses raquo 726

Ainsi lrsquoemployeur qui

souhaiterait sanctionner un agent pour des propos tenus sur un reacuteseau social devra drsquoabord

eacutetablir le caractegravere public des propos

La notion de liberteacute drsquoexpression confronteacutee aux obligations des professionnels de

santeacute et plus geacuteneacuteralement des fonctionnaires doit donc eacutegalement ecirctre prise en compte dans

le cadre de la reacuteflexion relative agrave lrsquoencadrement des TIC en santeacute

2) Lrsquoempilement leacutegislatif et regraveglementaire relatif aux TIC en santeacute

609 Lrsquoencadrement de lrsquoinnovation et drsquoune maniegravere geacuteneacuterale des sciences et techniques

par le droit reacutesulte de lrsquoagreacutegation de plusieurs disciplines preacuteexistantes (droit de la santeacute de

la proprieacuteteacute intellectuelle de lrsquoenvironnement) 727

et crsquoest lagrave que reacuteside toute la difficulteacute de ce

type de matiegravere Les TIC en santeacute nrsquoeacutechappent pas agrave la regravegle

610 Lors du congregraves annuel de lrsquoAssociation pour la promotion de la seacutecuriteacute des SI en

santeacute (Apssis) plusieurs participants ont pointeacute du doigt ce qursquoils ont qualifieacute de laquo maquis

reacuteglementaire raquo728

des SI en santeacute Si nous reprenons cette expression anecdotique crsquoest parce

qursquoelle reflegravete bien selon nous lrsquoeacutetat du cadre juridique actuel des SIS En effet la difficulteacute

majeure reacutesulte aujourdrsquohui du fait que lrsquoutilisation des TIC en santeacute eacutevolue dans deux cadres

normatifs bien distincts celui de lrsquoinformatique et des outils de communication drsquoune part

et celui de la santeacute drsquoautre part729

ces deux domaines reacutepondant agrave des contraintes speacutecifiques

et tregraves strictes Drsquoailleurs Caroline ZORN-MACREZ deacuteplorait au sujet de ces diffeacuterents textes

laquo leur meacutethode drsquoeacutelaboration au coup par coup conduisant agrave multiplier les antinomies

726 CA Rouen 15 novembre 2011 ndeg1101827

727 VERGES Etienne laquo Lrsquoeacutevolution scientifique et technologique au prisme du droit aperccedilu drsquoune relation agrave

plusieurs facettes raquo In laquo Variations eacutevolutions meacutetamorphose raquo PU St Etienne Institut universitaire de France

2012 p 371 728

Deacutepecircche TIC Santeacute laquo Le maquis reacuteglementaire de la seacutecuriteacute des SI en santeacute pointeacute du doigt raquo 7 avril

2016 disponible sur [httpwwwticsantecom] Consulteacutee le 1er

septembre 2016 729

DEBOST Claire laquo Lrsquoappreacutehension juridique de la relation de soin au prisme des nouvelles technologies raquo

Jurisdoctoria ndeg 8 2012 p 104

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

333

textuelles raquo730

Cependant si lrsquoon pousse la reacuteflexion un peu plus loin et au vu de notre eacutetude

nous comprenons tregraves vite que ces deux environnements normatifs sont eux-mecircmes assez

compliqueacutes agrave appreacutehender faisant parfois appel agrave drsquoautres branches du droit ou devant tout

du moins tenir compte drsquoautres cadres juridiques

611 Cet laquo empilement leacutegislatif et reacuteglementaire raquo pour reprendre lrsquoexpression de Philippe

BICLET731

est aggraveacute par lrsquoabsence de permeacuteabiliteacute entre les diffeacuterentes couches Certains

textes sont en effet adopteacutes sans prendre en consideacuteration ce qui aurait pu ecirctre preacutevu par

ailleurs De cela reacutesulte agrave la fois des difficulteacutes majeures drsquointerpreacutetation mais eacutegalement des

difficulteacutes dans la mise en place concregravete des TIC en santeacute La cartographie du cadre juridique

actuel donne lrsquoimpression que le sujet nrsquoa pas eacuteteacute traiteacute reacuteellement dans sa globaliteacute mais bout

par bout selon les besoins des acteurs Cette faccedilon de proceacuteder ne peut malheureusement que

donner lieu agrave de nombreuses incoheacuterences Le constat sans appel qui avait eacuteteacute fait par Nicolas

MOLFESSIS peut ecirctre repris ici et appliqueacute aux TIC en santeacute laquo une mecircme situation

juridique se trouve [hellip] placeacutee sous lrsquoempire de diverses regravegles speacuteciales qui srsquoadditionnent

pour deacuteterminer par agglutination [hellip] le droit applicable raquo732

612 Aujourdrsquohui mecircme si un corpus juridique relatif agrave lrsquoutilisation des TIC en santeacute

commence agrave se deacutevelopper laquo cette reacuteglementation eacuteparse manque de coheacuterence et nuit agrave sa

juste application par les professionnels de santeacute raquo733

Par ailleurs ce corpus nrsquoest pas toujours

en coheacuterence avec les diffeacuterents textes geacuteneacuteralistes applicables Enfin lrsquoensemble de cet

encadrement juridique se construit sans concertation avec les principaux inteacuteresseacutes agrave savoir

les professionnels de santeacute Ceux-ci se voient opposer de nouvelles contraintes agrave la fois

techniques et juridiques qui parfois mecircme ne reacutepondent pas agrave leur besoin734

La difficulteacute

actuelle est lrsquoentre-deux dans lequel se situe le corpus juridique relatif aux TIC en santeacute Il

nrsquoest pas encore abouti puisque certaines situations sont encore peu ou pas encadreacutees mais

certaines mesures qui le composent sont suffisamment contraignantes pour freiner les

eacutevolutions technologiques ou les projets qui pourraient y ecirctre lieacutes

730 ZORN-MACREZ Caroline laquo Chroniques martiennes des donneacutees de santeacute numeacuteriseacutees Bregraveves observations

sur une reacuteglementation surreacutealiste raquo RDS ndeg 36 juillet 2010 pp 331-342 731

BICLET Philippe laquo Heacutebergement et eacutechange des donneacutees de santeacute raquo Meacutedecine et droit 2010 p 159 732

MOLFESSIS Nicolas laquo Combattre lrsquoinseacutecuriteacute juridique ou la lutte contre du systegraveme juridique contre lui-

mecircme raquo op cit p 392 733

DEBOST Claire laquo Lrsquoappreacutehension juridique de la relation de soin au prisme des nouvelles technologies raquo

op cit p 113 734

Ibid

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

334

613 Finalement nous pouvons leacutegitimement nous poser la question de lrsquoopportuniteacute drsquoune

intervention renforceacutee du leacutegislateur sur ce sujet Lrsquoinnovation et lrsquoeacutevolution constante

qursquoinduit ce type de technologie neacutecessitent une certaine souplesse qursquoun cadre juridique trop

contraignant risquerait de freiner De mecircme une superposition de textes eacutepars conduit agrave une

absence de lisibiliteacute et drsquoefficaciteacute de lrsquoencadrement juridique

Au-delagrave de cette probleacutematique de lisibiliteacute des textes se pose eacutegalement parfois la

question des limites de leur applicabiliteacute certains drsquoentre eux preacutevoyant parfois des conditions

strictes drsquoapplication sans pour autant apporter les outils neacutecessaires agrave leur mise en œuvre

B Un cadre juridique source drsquoincertitudes

614 Lrsquoempilement des textes applicables srsquoavegravere souvent source de difficulteacutes pour les

acteurs et utilisateurs des TIC en santeacute En effet la question du texte applicable agrave lrsquoespegravece va

se poser agrave plusieurs reprises donnant parfois lieu agrave interpreacutetations diverses et eacuteventuelles

prises de risques notamment de la part des eacutetablissements dans la mise en œuvre de leurs

projets Mais lrsquoinseacutecuriteacute juridique reacutesulte eacutegalement du fait que certains textes soient

inaboutis causant lagrave encore des problegravemes drsquointerpreacutetation et de mise en œuvre Tout cela

concourt agrave creacuteer une inseacutecuriteacute juridique dans le deacuteveloppement des TIC agrave lrsquohocircpital

615 En la matiegravere dispositions de droit commun et dispositions particuliegraveres cohabitent

Ainsi le leacutegislateur a nous lrsquoavons vu fait le choix drsquoencadrer de maniegravere speacutecifique les

modaliteacutes de conservation et drsquoeacutechange de donneacutees de santeacute par voie informatique

Cependant pendant longtemps le leacutegislateur nrsquoest pas alleacute au bout des choses creacuteant ainsi

des situations intermeacutediaires au sein desquelles les regravegles eacutetaient inabouties et donc

difficilement applicables et opposables

616 Cette affirmation est particuliegraverement vraie dans le cas des modaliteacutes drsquoapplication du

deacutecret dit confidentialiteacute Comme nous avons pu le voir preacuteceacutedemment dans nos

recherches735

ce deacutecret renvoyait pour son application concregravete agrave des reacutefeacuterentiels qui auraient

735 V Supra ndeg 242 agrave 243

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

335

ducirc ecirctre publieacutes par voie drsquoarrecircteacutes les eacutetablissements devant alors se mettre en conformiteacute avec

les dits arrecircteacutes dans le deacutelai drsquoun an suivant leurs publications Or ces arrecircteacutes nrsquoont jamais eacuteteacute

publieacutes Face agrave la lenteur du pouvoir reacuteglementaire la question de la valeur de ce texte srsquoest

rapidement poseacutee En effet dans quelle mesure le deacutecret confidentialiteacute pouvait-il ecirctre

consideacutereacute comme eacutetant reacuteellement applicable et donc opposable aux eacutetablissements de santeacute agrave

partir du moment ougrave lrsquoun des eacuteleacutements essentiels agrave sa mise en œuvre nrsquoa jamais eacuteteacute publieacute

Pour reacutepondre agrave cette question il nous semble inteacuteressant de nous arrecircter sur la notion de deacutelai

raisonnable deacuteveloppeacute en droit administratif et sur les actions qui auraient pu ecirctre meneacutees agrave

lrsquoencontre de ce deacutecret

617 Tregraves tocirct le Conseil drsquoEtat a reconnu que la responsabiliteacute de lEacutetat pouvait ecirctre

engageacutee du fait de la non-intervention des deacutecrets dapplication dans un deacutelai raisonnable736

Cependant le juge eacutetudie chaque cas ougrave le non-respect drsquoun deacutelai raisonnable serait invoqueacute

aupregraves de lui et il est neacutecessaire qursquoun preacutejudice reacutesultant du retard soit eacutetabli laquo le retard

[nrsquoeacutetant] pas en soi un preacutejudice raquo737

Ce principe ne srsquoapplique pas seulement aux deacutecrets

qui devraient ecirctre pris en application drsquoune loi mais eacutegalement aux arrecircteacutes preacutevus par des

deacutecrets Le Conseil drsquoEtat dans une deacutecision rendue le 29 juin 2011738

a ainsi consideacutereacute que

laquo lrsquoexercice du pouvoir reacuteglementaire comporte non seulement le droit mais aussi lrsquoobligation

de prendre dans un deacutelai raisonnable les mesures qursquoimplique neacutecessairement lrsquoapplication

de la loi hors le cas ougrave le respect drsquoengagements internationaux de la France y ferait

obstacle que lorsqursquoun deacutecret pris pour lrsquoapplication drsquoune loi renvoie lui-mecircme agrave un arrecircteacute

la deacutetermination de certaines mesures neacutecessaires agrave cette application cet arrecircteacute doit

eacutegalement intervenir dans un deacutelai raisonnable raquo La Haute juridiction peut drsquoailleurs se

montrer parfois tregraves stricte nrsquoheacutesitant pas agrave enjoindre lrsquoEtat deacutefaillant de prendre les textes

drsquoapplication attendus en assortissant sa deacutecision drsquoune astreinte739

618 Il est vrai que cette notion de deacutelai raisonnable ne repose sur aucun texte Cependant

au fil des anneacutees la notion a eacuteteacute deacuteveloppeacutee et affineacutee agrave la fois par le juge europeacuteen et par le

Conseil drsquoEtat Dans le cas du deacutecret confidentialiteacute les arrecircteacutes neacutecessaires agrave la bonne

736 CE Ass 27 novembre 1964 Veuve Renard Rec p 590

737 ABIKHZER Franck laquo Le deacutelai raisonnable dans le contentieux administratif un fruit parvenu agrave

maturiteacute raquo AJDA 2005 p 985 738

CE 29 juin 2011 Steacute Cryo-Save France ndeg 343188 739

V notamment en ce sens CE 28 juillet 2000 Assoc France Nature Environnement ndeg 204024 Rec 2000

p 322 CE 28 mars 1997 UNAF ndeg 180943 Rec 1997 p 124

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

336

application du texte nrsquoavaient toujours pas eacuteteacute adopteacutes agrave la veille de la promulgation de la loi

de modernisation de notre systegraveme de santeacute soit presque 9 anneacutees apregraves lrsquoentreacutee en vigueur

du texte Bien que la jurisprudence eacutetudie chaque cas de maniegravere indeacutependante il nous

apparaicirct cependant qursquoune dureacutee de 9 ans aurait difficilement pu ecirctre consideacutereacutee comme eacutetant

un deacutelai raisonnable Les eacutetablissements auraient drsquoailleurs pu saisir le Ministre en charge de

la santeacute drsquoune demande tendant agrave lrsquoadoption de ces reacutefeacuterentiels Dans lrsquohypothegravese drsquoune

reacuteponse neacutegative ou sans reacuteponse de sa part dans un deacutelai de deux mois il leur aurait alors eacuteteacute

possible de lui adresser ensuite un recours gracieux et le cas eacutecheacuteant deacuteposer un recours pour

excegraves de pouvoir aupregraves du Conseil drsquoEtat afin drsquoobtenir lrsquoannulation du deacutecret

confidentialiteacute Pour autant cela nrsquoaurait pas eacuteteacute selon nous dans lrsquointeacuterecirct des eacutetablissements

de santeacute En effet ceux-ci souhaitaient avant tout seacutecuriser leurs pratiques par lrsquoadoption des

reacutefeacuterentiels

619 Pendant longtemps lrsquoabrogation du texte a eacuteteacute envisageacutee un nouveau texte eacutetant

supposeacutement en cours drsquoeacutelaboration740

Dans lrsquoentre-temps les professionnels nrsquoavaient pas

drsquoautre choix que de srsquoen reacutefeacuterer aux reacutefeacuterentiels de lrsquoASIP santeacute Aujourdrsquohui toutefois la

loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute741

a tenteacute de reacutesoudre cette difficulteacute Comme

le preacutecisaient les motifs de la loi le but du leacutegislateur eacutetait drsquoharmoniser laquo des regravegles de droit

dans un domaine ougrave leacutevolution rapide de la leacutegislation a pu conduire agrave des eacutecarts raquo Pour

autant il nous semble que les mecircmes erreurs ont eacuteteacute commises

En effet lrsquoarticle 96 de cette loi vient creacuteer un article L 1110-4-1 au Code de la santeacute

publique qui dispose laquo afin de garantir la qualiteacute et la confidentialiteacute des donneacutees de santeacute agrave

caractegravere personnel et leur protection les professionnels de santeacute les eacutetablissements et

services de santeacute les heacutebergeurs de donneacutees de santeacute agrave caractegravere personnel et tout autre

organisme participant agrave la preacutevention aux soins ou au suivi meacutedico-social et social utilisent

pour leur traitement leur conservation sur support informatique et leur transmission par voie

eacutelectronique des systegravemes dinformation conformes aux reacutefeacuterentiels dinteropeacuterabiliteacute et de

seacutecuriteacute eacutelaboreacutes par le groupement dinteacuterecirct public mentionneacute agrave larticle L 1111-24 Ces

740 SAMARCQ Nicolas BRIOIS Seacutebastien laquo Donneacutees de santeacute agrave caractegravere personnel les enjeux de la

diffusion des TIC raquo Expertises 2010 p 386 741

Loi ndeg 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre systegraveme de santeacute JORF ndeg0022 du 27 janvier

2016 texte ndeg 1

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

337

reacutefeacuterentiels sont approuveacutes par arrecircteacute du ministre chargeacute de la santeacute pris apregraves avis de la

Commission nationale de linformatique et des liberteacutes raquo

620 Lrsquoobligation de se reacutefeacuterer agrave des reacutefeacuterentiels approuveacutes par arrecircteacute ministeacuteriel nrsquoest plus

simplement regraveglementaire mais bien leacutegale Cette obligation acquiert donc un poids

suppleacutementaire Mecircme srsquoil est vrai que les travaux de lrsquoASIP relatifs aux reacutefeacuterentiels de

seacutecuriteacute et drsquointeropeacuterabiliteacute sont bien avanceacutes le risque que ces reacutefeacuterentiels ne soient jamais

opposables aux acteurs concerneacutes reste le mecircme En effet nous sommes aujourdrsquohui encore

dans lrsquoattente de publication drsquoun arrecircteacute Le leacutegislateur a gagneacute du temps mais il va bien

devoir agir dans un deacutelai raisonnable

Par ailleurs il nous semble important drsquoattirer lrsquoattention sur un deacutecret pris en

application de lrsquoarticle 96 de la loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute et ses

conseacutequences sur le deacutecret confidentialiteacute En effet le deacutecret ndeg 2016-994 du 20 juillet

2016742

vient modifier les articles R 1110-1 agrave R 1110-3 du Code de la santeacute publique

initialement issus du deacutecret confidentialiteacute Lrsquoancienne section I de la premiegravere partie du livre

1er

du titre premier du chapitre preacuteliminaire de la partie regraveglementaire du Code de santeacute

publique preacuteceacutedemment intituleacutee laquo confidentialiteacute des informations meacutedicales conserveacutees sur

support informatique ou transmises par voie eacutelectronique raquo devient deacutesormais laquo Conditions

deacutechange et de partage dinformations entre professionnels de santeacute et autres professionnels

des champs social et meacutedico-social raquo

Ainsi lrsquoensemble des dispositions introduites par le deacutecret confidentialiteacute disparaissent

purement et simplement Ce deacutecret qui avait causeacute de nombreuses interrogations quant agrave ses

modaliteacutes drsquoapplication disparait donc de maniegravere assez discregravete

742 Deacutecret ndeg 2016-994 du 20 juillet 2016 relatif aux conditions deacutechange et de partage dinformations entre

professionnels de santeacute et autres professionnels des champs social et meacutedico-social et agrave laccegraves aux informations

de santeacute agrave caractegravere personnel JORF ndeg0169 du 22 juillet 2016 texte ndeg 21

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

338

Conclusion de la section

621 Lrsquoappreacutehension du principe de seacutecuriteacute juridique et de lrsquoensemble de ses corollaires

nous permet drsquoeffectuer une analyse critique sur le cadre actuel des TIC en santeacute et de

constater qursquoil se reacutevegravele finalement vecteur drsquoinseacutecuriteacute juridique Il est vrai que la

construction de ce cadre est un deacutefi de taille Non seulement cela neacutecessite de faire appel agrave

plusieurs branches du droit (droit civil droit peacutenal droit de la santeacute droit de lrsquoInternet) mais

cela induit eacutegalement de tenir compte des enjeux eacutethiques et eacuteconomiques du domaine Le

leacutegislateur doit donc appreacutehender lrsquoensemble de ces contraintes dans leur globaliteacute et prendre

le recul neacutecessaire afin de construire un cadre coheacuterent compreacutehensible et donc seacutecuriseacute

Or le cadre actuel nrsquoest qursquoune succession de textes eacutepars parfois contradictoires ce

qui rend complexe sa compreacutehension par les acteurs concerneacutes Par ailleurs le cadre semble

parfois inabouti certains arrecircteacutes pourtant essentiels nrsquoayant jamais eacuteteacute adopteacutes Bien que la loi

de modernisation de notre systegraveme de santeacute tente de corriger certaines de ces lacunes le

chemin vers un cadre plus lisible nous semble encore long

Tout cela conduit agrave un cadre creacuteateur drsquoincertitude et vecteur drsquoinseacutecuriteacutes Il nous

semble donc aujourdrsquohui essentiel de le repenser

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

339

Section 2 Un cadre juridique agrave repenser

622 Actuellement le cadre juridique relatif aux TIC en santeacute peut paraitre difficilement

accessible aux personnes qui y sont confronteacutees Nous pensons ici plus particuliegraverement aux

personnels de santeacute mais eacutegalement aux eacutetablissements de santeacute parfois deacutepourvus face agrave la

complexiteacute des regravegles existantes Il est donc neacutecessaire de repenser si ce nrsquoest entiegraverement

tout du moins en partie le cadre des TIC en santeacute En effet il nous apparait clairement agrave ce

stade de nos recherches que le cadre juridique actuellement en place constitue un reacuteel frein au

bon deacuteveloppement des TIC en santeacute (Paragraphe I) Le leacutegislateur doit donc reacutefleacutechir agrave un

cadre innovant qui serait agrave la fois moteur et protecteur (Paragraphe II)

sect1 Le cadre actuel frein au deacuteveloppement peacuterenne des TIC agrave lrsquohocircpital

laquo La science avance plus vite que le droit et lui soumet de plus en plus souvent des situations

ineacutedites et embarrassantes raquo743

623 Souvent lrsquoinnovation va plus vite que le droit qui se contente de suivre et drsquoencadrer

a posteriori Cest le constat qui est reacuteguliegraverement reacutealiseacute quand on aborde la question des

liens entre droit sciences technique et innovation Toutefois quand on y regarde de plus pregraves

cela nrsquoest finalement pas aussi simple qursquoil y parait Lrsquoinnovation scientifique et technique et

le droit sont en reacutealiteacute engageacutes dans une relation complexe dont lrsquoeacutequilibre est souvent

difficile agrave atteindre (A) Crsquoest pourquoi il nous faut peut-ecirctre aujourdrsquohui nous eacuteloigner de nos

outils juridiques classiques souvent contraignant pour nous orienter vers les solutions plus

originales et surtout plus flexibles proposeacutees par le droit souple (B)

A Lrsquoencadrement juridique de lrsquoinnovation un eacutequilibre deacutelicat

624 Comme le souligne Anne LAUDE laquo le dispositif juridique ne saurait ecirctre un frein agrave

lrsquoimpeacuterieuse neacutecessiteacute drsquoinnovation Bien au contraire il se doit drsquoecirctre un outil

743 MATTEI Jean-Franccedilois laquo Rapport au premier ministre sur lrsquoeacutethique meacutedicale raquo 1993

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

340

drsquoencadrement au progregraves scientifique raquo744

Lrsquoeacutetude du lien entre sciences technologies et

droit nrsquoest pas reacutecente et deacutejagrave en 1966 David F CAVERS745

tentait de deacutemontrer que le droit

nrsquoeacutetait pas qursquoun laquo instrument de prohibition et obstacle au deacuteveloppement de la

connaissance et des innovations raquo746

625 Meacutedecine et Technologies de lrsquoInformation et de la Communication sont deux

domaines ougrave lrsquoinnovation est essentielle Parfois cependant lrsquoinnovation nrsquoest possible que

par la transgression Il est donc neacutecessaire de trouver un eacutequilibre entre progregraves et

encadrement afin de maintenir une seacutecuriteacute neacutecessaire pour les patients Il est neacutecessaire de

rechercher des laquo compromis preacutecaires entre les exigences juridiques et les nouvelles reacutealiteacutes

techniques raquo747

Car le deacuteveloppement des TIC ne fait pas que modifier les conditions dans

lesquelles le droit va srsquoappliquer elle creacutee de nouvelles situations jamais appreacutehendeacutees

jusqursquoalors par le droit et auxquelles les regravegles existantes ne peuvent srsquoappliquer Pour

illustrer cela Bertrand WARUSFEL cite agrave juste titre lrsquoexemple du deacuteveloppement des bases

de donneacutees et des droits qui peuvent y ecirctre affeacuterents Ainsi il est rapidement apparu que

lrsquoapplication ou non de la protection issue du droit drsquoauteur agrave ces bases nrsquoeacutetait pas une

question qui pouvait se trancher aussi facilement De lagrave est neacute au niveau europeacuteen des regravegles

propres agrave la structure et au contenu des bases de donneacutees regravegles que nous avons par ailleurs

exposeacutees preacuteceacutedemment dans nos recherches et pris en exemple afin de tenter de qualifier le

droit drsquoun eacutetablissement de santeacute sur le dossier patient748

626 Dans ses travaux consacreacutes au sujet Etienne VERGES affirmait que laquo drsquoune part le

droit est un outil de contrainte qui limite la liberteacute des chercheurs et qui fait obstacle au

progregraves scientifique Drsquoautre part lrsquoeacutevolution du droit est trop lente et ne parvient pas agrave

suivre le rythme imposeacute par le progregraves scientifique raquo749

Bien que le leacutegislateur ait pu parfois

744 LAUDE Anne laquo Lrsquoencadrement juridique de lrsquoinnovation raquo Les tribunes de la santeacute 12004 (ndeg2) pp 37-

46 745

CAVERS David laquo Law and science some points of confrontation raquo in laquo Law and the social role of

scienceraquo Rockefeller University Press 1966 p 5 746

VERGES Etienne laquoLrsquoeacutevolution scientifique et technologique au prisme du droit aperccedilu drsquoune relation agrave

plusieurs facettes raquo in laquo Variation eacutevolutions meacutetamorphoses raquo PU St Etienne Institut universitaire de France

2012 p 371 747

WARUSFEL Bertrand laquo Le droit des nouvelles technologies entre technique et civilisation raquo La lettre de

la rue Saint Guillaume Revue des Anciens eacutelegraveves de Sciences-Po ndeg 127 juin 2002 pp 52-59 748

V Supra ndeg 111 et s 749

VERGES Etienne laquoLrsquoeacutevolution scientifique et technologique au prisme du droit aperccedilu drsquoune relation agrave

plusieurs facettes raquo op cit p 371

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

341

intervenir tardivement dans certains domaines innovant - ce qui a drsquoailleurs pu lui ecirctre

reprocheacute - pour autant il a fait preuve drsquoune grande reacuteactiviteacute dans drsquoautres domaines Crsquoest

notamment le cas drsquoInternet domaine ougrave le leacutegislateur a pris soin de rapidement adapter le

droit commun agrave ce nouvel outil et plus geacuteneacuteralement au deacuteveloppement des technologies du

numeacuterique

Dans son eacutetude Etienne VERGES tente de deacutemontrer les diffeacuterents rocircles du droit vis-

agrave-vis de lrsquoinnovation scientifique et technologique Ainsi il apparait que le droit peut agrave la fois

avoir un rocircle drsquoencadrement mais eacutegalement drsquoincitation par le biais de politiques publiques

allant en ce sens Nous ajouterons agrave cela le rocircle protecteur du droit vis-agrave-vis de lrsquoinnovation

rocircle majeur qui ne doit pas ecirctre oublieacute

627 Le cadre contraignant comporte plusieurs niveaux En effet il peut tout drsquoabord srsquoagir

de lrsquointerdiction pure et simple des activiteacutes (crsquoest le cas par exemple du clonage humain

interdit par les lois bioeacutethiques) Il existe eacutegalement des reacutegimes drsquoautorisation preacutealable

ainsi les protocoles de recherche impliquant la personne humaine ne peuvent ecirctre mis en

œuvre sans lrsquoavis preacutealable du comiteacute de protection des personnes750

qui va avoir pour rocircle

drsquoeacutetudier les conditions dans lesquelles la seacutecuriteacute des participants agrave lrsquoessai sera assureacutee mais

eacutegalement la pertinence du projet et de sa meacutethodologie Il srsquoagit dans les deux cas drsquoune

contrainte a priori dans le but de seacutecuriser en amont les innovations scientifiques et

technologiques Mais le droit intervient aussi a posteriori dans une optique de reacuteparer les

conseacutequences neacutegatives du fait du deacuteveloppement des innovations Il srsquoagit alors de mettre en

œuvre la responsabiliteacute des commettants afin de reacuteparer les dommages qui seraient survenus

Pour Etienne VERGES cette mise en œuvre de la responsabiliteacute laquo est essentielle dans une

socieacuteteacute technoscientifique dans laquelle le deacuteveloppement des innovations srsquoaccompagne drsquoun

risque incompressible La responsabiliteacute du fait drsquoune activiteacute agrave risque constitue le corollaire

de la liberteacute drsquoexercice de lrsquoactiviteacute scientifique et technologique raquo751

628 Cependant il arrive que le cadre contraignant soit pointeacute du doigt par les industriels

Dans le cas de lrsquoencadrement des TIC en santeacute le Conseil National du Numeacuterique (CNNum)

750 Articles L 1121-1 agrave L 1126-11 du Code de la santeacute publique

751 VERGES Etienne laquoLrsquoeacutevolution scientifique et technologique au prisme du droit aperccedilu drsquoune relation agrave

plusieurs facettes raquo op cit p 371

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

342

dans son eacutetude de 2015 consacreacute au numeacuterique en santeacute752

preacuteconise drsquoailleurs drsquoadopter des

laquo proceacutedures pragmatiques de reacutegulation du marcheacute de la santeacute connecteacutee en phase avec les

cycles courts de lrsquoinnovation raquo753

Pour le CNNum cela passe par un assouplissement du

controcircle a priori au beacuteneacutefice drsquoun renforcement du controcircle a posteriori et de la veille

sanitaire La flexibiliteacute mais eacutegalement un traitement rapide des dossiers (par le biais de laquo fast

tracks raquo - guichets rapides) sont eacutegalement essentiels Effectivement nous ne pouvons

qursquoadheacuterer agrave cette solution impliquant un droit plus pragmatique et plus reacuteactif face aux

cycles de lrsquoinnovation particuliegraverement courts Par ailleurs actuellement certaines

proceacutedures par exemple en matiegravere de protection des donneacutees de santeacute peuvent ecirctre

particuliegraverement longues et coucircteuses ce qui comme le souligne lrsquoeacutetude du CNNum peut

srsquoaveacuterer extrecircmement pesant sur le modegravele eacuteconomique deacuteveloppeacutee par les acteurs des TIC en

santeacute A terme cela preacutesente indubitablement des conseacutequences dommageables pour les petits

industriels moins compeacutetitifs et donc drsquoune maniegravere geacuteneacuterale pour les acteurs concerneacutes

qursquoils srsquoagissent des professionnels ou des patients se retrouvant face agrave un marcheacute au choix

restreint et peut ecirctre moins bien deacuteveloppeacute qursquoil ne pourrait lrsquoecirctre par ailleurs

629 A cocircteacute de ce cadre qualifieacute de contraignant il existe eacutegalement un cadre incitatif En

effet le droit se reacutevegravele ecirctre parfois un outil au service de lrsquoinnovation Certaines politiques

publiques sont mecircme tregraves incitatives puisqursquoelles participent directement au deacuteveloppement

de la recherche et de lrsquoinnovation Dans le domaine de la santeacute nous pouvons citer agrave titre

drsquoexemple les MERRI ndash Missions drsquoEnseignement de Recherche de Reacutefeacuterence et

drsquoInnovation ndash financements accordeacutes dans le cadre de la tarification agrave lrsquoactiviteacute et des

Missions drsquoInteacuterecirct Geacuteneacuteral drsquoAide agrave la contractualisation (MIGAC) aux eacutetablissements de

santeacute en fonction de leurs activiteacutes de recherche754

630 Plus geacuteneacuteralement le droit permet de creacuteer les outils institutionnels neacutecessaires au bon

deacuteveloppement de la recherche Crsquoest ainsi qursquoest neacutee en 2005 lrsquoagence Nationale de la

Recherche (ANR) agence dont la mission est de financer les projets de recherche Crsquoest elle

qui pilote le plan drsquoInvestissements drsquoavenir et qui a par ailleurs geacutereacute lrsquoappel agrave projets RHU

752 CNNum laquo La santeacute bien commun de la socieacuteteacute numeacuterique raquo rapport remis agrave la Ministre des Affaires

sociales de la Santeacute et des Droits des femmes 2015 753

VERGES Etienne laquoLrsquoeacutevolution scientifique et technologique au prisme du droit aperccedilu drsquoune relation agrave

plusieurs facettes raquo op cit p 14 754

Article L 162-22-13 du Code de la seacutecuriteacute sociale

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

343

(recherche hospitalo-universitaire) ayant abouti au soutien financier agrave hauteur de 325

millions drsquoeuros de projets de recherche en santeacute preacutesentant un fort potentiel de transfert

rapide vers lindustrie ou vers la socieacuteteacute755

631 Enfin le droit est eacutegalement un outil de protection de lrsquoinnovation et plus

particuliegraverement de ses reacutesultats En effet une innovation pour vivre et se deacutevelopper doit

ecirctre proteacutegeacutee et valoriseacutee Le droit au travers du droit de la proprieacuteteacute intellectuelle apporte

une palette complegravete drsquooutils destineacutes agrave proteacuteger (brevet droit drsquoauteur) et valoriser (contrats

de cession ou de licence) les creacuteations issues de lrsquoinnovation Finalement le droit permet de

laquo garantir la valeur eacuteconomique des reacutesultats scientifiques raquo756

Innovation sciences et droit sont au cœur drsquoune relation complexe aux enjeux

nombreux et parfois opposeacutes Cependant loin drsquoecirctre un ennemi de lrsquoinnovation le droit

lrsquoaccompagne lrsquoencadre et la facilite mecircme parfois Mais il faut pour cela reacuteussir agrave trouver le

juste eacutequilibre parfois preacutecaire Cet eacutequilibre passe peut-ecirctre par une solution alternative aux

outils normatifs tels qursquoon les connait le droit souple

B Le recours au droit souple une solution agrave envisager

632 Souvent qualifieacute de droit mou (sans sanction) voire parfois de droit flou (sans

preacutecision) ou droit doux (sans obligation)757

le droit souple a longtemps eacuteteacute deacuteconsideacutereacute par

la grande majoriteacute des juristes En 2013 pourtant le Conseil drsquoEtat a choisi drsquoen faire lrsquoobjet

de son eacutetude annuelle vantant alors les meacuterites drsquoun droit qursquoil avait vivement critiqueacute dans

des eacutetudes anteacuterieures Cette notion tregraves actuelle nrsquoest pourtant pas reacutecente et il nous faut nous

y attarder (1) avant de deacutemontrer lrsquointeacuterecirct que le droit souple preacutesente en matiegravere

drsquoencadrement des TIC en santeacute (2)

755 Sur lrsquoappel agrave projets RHU V notamment [httpwwwagence-nationale-recherchefr]

756 VERGES Etienne laquoLrsquoeacutevolution scientifique et technologique au prisme du droit aperccedilu drsquoune relation agrave

plusieurs facettes raquo op cit p 14 757

THIBIERGE Catherine laquo Reacuteflexion sur les textures du droit raquo RDT Civ 2003 p 599

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

344

1) La notion de droit souple

633 Depuis plusieurs anneacutees nous assistons que ce soit au niveau international europeacuteen

ou en droit interne agrave un deacuteveloppement des instruments alternatifs agrave la loi et au regraveglement

qui mecircme srsquoils nrsquoont pas de force contraignante vis-agrave-vis des personnes agrave qui ils srsquoadressent

leur permettent laquo drsquoorienter leur comportement raquo

634 Utiliseacutee de plus en plus couramment la notion de droit souple pouvait faire reacutefeacuterence agrave

toute une panoplie de documents tels que les avis et recommandations drsquoAAI les normes (du

type norme ISO) les certifications les labels ou encore les guides de bonne pratique Cette

notion a tregraves vite attireacute lrsquoattention du Conseil drsquoEtat qui alors qursquoil lrsquoavait critiqueacute dans ses

rapports de 1991 et de 2006 a adopteacute dans son eacutetude de 2013 une position quelque peu

diffeacuterente quant au droit souple invoquant alors la compleacutementariteacute du droit souple avec les

sources traditionnelles du droit permettant ainsi de renforcer la qualiteacute de ce dernier

Finalement pour la Haute juridiction laquo parler de droit souple crsquoest admettre qursquoil srsquoagit de

droit raquo758

A cette occasion la Haute juridiction a tenteacute de deacutefinir ce concept afin drsquoen

deacutelimiter les contours proposant ainsi laquo une eacutechelle de normativiteacute gradueacutee qui va du droit

souple au droit dur raquo759

Pour le Conseil drsquoEtat le droit souple serait donc composeacute de

lrsquoensemble des instruments reacutepondant agrave trois conditions cumulatives ils ont pour objet de

modifier ou orienter le comportement de leurs destinataires ils ne creacuteent pas par eux-mecircmes

des obligations et ils preacutesentent par leur contenu ou leur mode drsquoeacutelaboration un degreacute de

formalisation et de structuration qui les apparentent aux regravegles de droit760

635 Dans leur eacutetude les magistrats du Conseil drsquoEtat relegravevent quatre utiliteacutes au droit

souple la premiegravere concerne sa substitution au droit dur quand le recours agrave ce dernier nrsquoest

pas envisageable La deuxiegraveme concerne lrsquoappreacutehension des pheacutenomegravenes eacutemergents et

notamment des eacutevolutions technologiques dans ce contexte le droit souple constitue une

eacutetape preacutealable agrave lrsquoutilisation du droit dur face agrave des pheacutenomegravenes encore en mutation et qui

neacutecessitent donc un cadre facilement eacutevolutif La troisiegraveme porte sur lrsquoaccompagnement de la

mise en œuvre du droit dur par le droit souple aux travers des chartes ou encore des

758 Etude annuelle du Conseil drsquoEtat laquo Le Droit souple raquo questionsreacuteponses 2013

759 RICHARD Jacky laquo Droit souple pour une doctrine de recours et drsquoemploi raquo Recueil Dalloz 2013 p 2512

760 Etude annuelle du Conseil drsquoEtat laquo Le Droit souple raquo 2013 p 9

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

345

deacutemarches de conformiteacute Enfin le dernier avantage reacuteside dans lrsquoalternative que constitue le

droit souple au droit dur dans certains domaines ougrave cette solution permet de concilier les

besoins de reacutegulation et les neacutecessiteacutes drsquoune certaine liberteacute

636 Droit souple et droit dur sont seacutepareacutes par une frontiegravere finalement assez permeacuteable le

droit souple pouvant ecirctre une eacutetape avant drsquoarriver au droit dur ou pouvant mecircme parfois ecirctre

pris en compte par le juge761

Par ailleurs le Conseil drsquoEtat parle mecircme drsquoeacutechelle de

normativiteacute gradueacutee srsquoaffranchissant des theacuteories de Kelsen pour affirmer qursquoil existerait une

continuiteacute sous forme de gradation entre le droit dur et le droit souple Cependant le droit

souple ne sera efficace que si son effectiviteacute est assureacutee crsquoest-agrave-dire srsquoil emporte lrsquoadheacutesion

des personnes auxquelles il srsquoadresse Crsquoest le cas srsquoil en vient agrave ecirctre consideacutereacute comme un

standard ou si sa violation emporte des conseacutequences neacutegatives pour la personne qui ne le

respecterait pas Enfin la leacutegitimiteacute de ces regravegles de droit souple repose en grande partie

sur lrsquoimplication des acteurs dans son eacutelaboration Lrsquoeacutetude du Conseil drsquoEtat sur le sujet a

donc permis de reacutepondre au besoin qui existait de laquo mieux saisir une notion deacutejagrave fuyante bien

que drsquoapparition reacutecente raquo762

637 Depuis cette eacutetude le deacuteveloppement du droit souple et son utilisation nrsquoont cesseacute de

croitre Par ailleurs le Conseil drsquoEtat admet mecircme deacutesormais763

la possibiliteacute de former un

recours en excegraves de pouvoir contre des actes qui ne reacutepondent pas aux critegraveres classiques de la

deacutecision faisant grief et qui srsquoapparentent plutocirct agrave du droit souple764

Ainsi agrave lrsquooccasion de

ses deacutecisions Socieacuteteacute Fairvesta International GMBH et Socieacuteteacute Numeacutericable lrsquoAssembleacutee

apregraves avoir rappeleacute que laquo les avis recommandations mises en garde et prises de position

adopteacutees par les autoriteacutes de reacutegulation dans lrsquoexercice des missions dont elles sont investies

peuvent ecirctre deacutefeacutereacutes au juge de lrsquoexcegraves de pouvoir lorsqursquoils revecirctent le caractegravere de

dispositions geacuteneacuterales et impeacuteratives ou lorsqursquoelles eacutenoncent des prescriptions individuelles

dont ces autoriteacutes pourraient ulteacuterieurement censurer la meacuteconnaissance raquo est venue preacuteciser

que laquo ces actes peuvent eacutegalement faire lrsquoobjet drsquoun tel recours [hellip] lorsqursquoils sont de nature

761 CE 11 deacutecembre 1970 ndeg 78880 Creacutedit foncier de France Rec p 750 DP 1971 1224 note WALINE

JCP G 1972 II 17132 note FROMONT AJDA 1971 p 196 D 1971 p 674 note LOSCHAK 762

DEUMIER Pascale laquo Saisir le droit souple par sa deacutefinition ou par ses effets raquo eacutetude annuelle du Conseil

dEtat 2013 p 247 763

CE Ass 31 mars 2016 Socieacuteteacute Fairvesta International GMBH ndeg 368082 AJDA 2016 p 717 com

DUTHEILLET de LAMOTHE Louis ODINET Guillaume 764

DUTHEILLET de LAMOTHE Louis ODINET Guillaume laquo Un recours souple pour le droit souple raquo

AJDA 2016 p 717

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

346

agrave produire des effets notables [hellip] ou ont pour objet drsquoinfluer de maniegravere significative sur les

comportements des personnes auxquels ils srsquoadressent raquo Le juge doit alors controcircler ces actes

au mecircme titre qursquoil controcircle les deacutecisions faisant grief La Haute juridiction ne srsquoarrecircte pas lagrave

puisqursquoelle est venue tregraves reacutecemment preacuteciser le point de deacutepart du deacutelai de recours contre les

actes de droit souple des autoriteacutes de reacutegulation en le fixant agrave deux mois agrave compter de la mise

en ligne de lrsquoacte incrimineacute765

Le Conseil drsquoEtat poursuit donc la construction preacutetorienne relative agrave lrsquoutilisation et agrave

la place du droit souple en faisant ainsi de ce droit un outil juridique agrave part entiegravere qui peut

ecirctre une bonne alternative dans certains cas speacutecifiques et notamment selon nous dans le cas

de lrsquoencadrement de lrsquoutilisation des TIC en santeacute

2) Le deacuteveloppement du droit souple pour encadrer les TIC en santeacute

638 La meacutedecine et les nouvelles technologies sont deux domaines en mutation

permanente Ainsi leur encadrement mecircme srsquoil est indeacuteniablement neacutecessaire se doit drsquoecirctre

suffisamment souple et flexible pour srsquoadapter aux eacutevolutions permanentes Cependant ces

matiegraveres sont paradoxalement des matiegraveres ougrave le droit applicable peut se reacuteveacuteler dans certains

cas complexes et dans drsquoautres presque inexistants Il est donc leacutegitime de se demander si le

droit souple tel que deacutefini par le Conseil drsquoEtat dans son eacutetude de 2013 ne constituerait pas

une alternative pertinente permettant drsquoassurer un cadre juridique agrave lrsquoutilisation des TIC en

santeacute suffisamment souple pour un deacuteveloppement efficace et peacuterenne

Plusieurs exemples viennent argumenter en ce sens En effet le leacutegislateur qui srsquoeacutetait

atteleacute agrave lrsquoencadrement strict de lrsquoheacutebergement des donneacutees de santeacute quel qursquoen soit leur

support semble aujourdrsquohui faire machine arriegravere face agrave lrsquoampleur de la tacircche766

De mecircme

lrsquoencadrement tregraves strict de la communication et de lrsquoeacutechange des donneacutees de santeacute

informatiseacutees mise en place par le deacutecret confidentialiteacute est aujourdrsquohui inabouti les

diffeacuterents arrecircteacutes neacutecessaires agrave la mise en œuvre du deacutecret nrsquoayant jamais eacuteteacute publieacutes767

Finalement il apparaicirct que des outils plus souples que les textes juridiques classiques

765 CE 13 juillet 2016 Socieacuteteacute GDF Suez ndeg 388150 JCP A 2016 2252 note Olivier Le BOT

766 Article 204 de la loi ndeg ndeg 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre systegraveme de santeacute agrave propos

de la mise en place drsquoune certification des heacutebergeurs de donneacutees de santeacute agrave la place de leur agreacutement actuel 767

V Supra ndeg 242 agrave 243

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

347

seraient peut-ecirctre plus adapteacutes agrave lrsquoencadrement des TIC en santeacute Le recours au droit souple

doit donc ecirctre envisageacute de maniegravere seacuterieuse dans ce cas

639 Argument fort en faveur drsquoune utilisation plus preacutesente du droit souple dans le cas des

TIC en santeacute celui-ci est deacutejagrave tregraves preacutesent en droit meacutedical comme en droit des nouvelles

technologies Ainsi en matiegravere meacutedicale les recommandations de bonnes pratiques (RBP)

deacuteveloppeacutees dans les anneacutees 1990 sont aujourdrsquohui tregraves ancreacutees A titre drsquoexemple la Haute

Autoriteacute de Santeacute creacuteeacutee en 2004 est en charge de lrsquoeacutelaboration de RBP dans le domaine

sanitaire Il en est de mecircme pour lrsquoAutoriteacute Nationale de Seacutecuriteacute du Meacutedicament (ANSM)

dans son domaine speacutecifique drsquoaction De leur cocircteacute les socieacuteteacutes savantes meacutedicales

produisent reacuteguliegraverement de guidelines qui recueillent une tregraves forte adheacutesion de la part des

professionnels concerneacutes

640 Les RBP preacutesentent lrsquoavantage laquo par leur normativiteacute souple de preacuteserver agrave la fois la

liberteacute de prescriptions des meacutedecins et le droit pour le patient drsquoecirctre soigneacute selon les

donneacutees acquises de la science raquo768

Pourtant la question de la nature juridique de ces RBP

srsquoest poseacutee tregraves rapidement et le juge a apporteacute certaines preacutecisions agrave leur sujet La Haute

juridiction avait deacutejagrave eu lrsquooccasion de preacuteciser que les RBP en matiegravere meacutedicale constituaient

des instruments drsquoaide agrave la deacutecision pour les praticiens mais eacutegalement pour le juge769

Dans

le cadre de son arrecirct Conseil National de lrsquoOrdre des Meacutedecins770

le juge administratif va

plus loin et considegravere que certaines RBP sont susceptibles de recours pour excegraves de pouvoir agrave

partir du moment ougrave elles sont reacutedigeacutees sur le mode impeacuteratif En lrsquoespegravece le Ministre de la

santeacute avait refuseacute de retirer un arrecircteacute portant homologation de RBP eacutemises par lrsquoancienne

agence nationale drsquoaccreacuteditation et drsquoeacutevaluation en santeacute (aujourdrsquohui la Haute Autoriteacute de

Santeacute) Ces RBP avaient eacuteteacute prises sur la base de lrsquoarticle L 1111-9 du Code de la santeacute

publique qui preacutecisait alors que laquo un deacutecret en Conseil dEtat fixe les conditions dapplication

du preacutesent chapitre Les modaliteacutes daccegraves aux informations concernant la santeacute dune

personne et notamment laccompagnement de cet accegraves font lobjet de recommandations de

bonnes pratiques eacutetablies par lAgence nationale daccreacuteditation et deacutevaluation en santeacute et

homologueacutees par arrecircteacute du ministre chargeacute de la santeacute raquo

768 KRZICH Delphine laquo Force normative et efficaciteacute des recommandations de bonne pratique en matiegravere

meacutedicale raquo RDSS 2014 p 1087 769

V en ce sens CE 12 janvier 2005 ndeg 25600 770

CE 26 septembre 2005 ndeg 270234 Conseil National de lrsquoOrdre des Meacutedecins Rec 2005 p 395

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

348

Pour le Conseil drsquoEtat ces RBP laquoqui visent normalement agrave donner aux professionnels

et eacutetablissements de santeacute des indications et orientations pour lapplication des dispositions

leacutegislatives et reacuteglementaires relatives agrave laccegraves des patients aux informations meacutedicales

nont pas en principe mecircme apregraves leur homologation par le ministre chargeacute de la santeacute le

caractegravere de deacutecision faisant grief elles doivent toutefois ecirctre regardeacutees comme ayant un tel

caractegravere tout comme le refus de les retirer lorsquelles sont reacutedigeacutees de faccedilon

impeacuterative raquo771

Ainsi ces RPB qui par leur caractegravere impeacuteratif viennent modifier

lrsquoordonnancement juridique constituent des actes faisant grief susceptibles de recours en

excegraves de pouvoir Il nous est possible de faire un parallegravele ici avec la jurisprudence

Duvignegraveres772

du Conseil drsquoEtat qui venait faire la distinction entre circulaires impeacuteratives et

circulaires interpreacutetatives773

641 Le Conseil drsquoEtat a par la suite confirmeacute sa jurisprudence agrave plusieurs reprises En 2011

drsquoabord agrave lrsquooccasion de lrsquoarrecirct Formindep774

ougrave il vient preacuteciser que les recommandations de

bonnes pratiques eacutelaboreacutees par la Haute Autoriteacute de Santeacute sur la base de dispositions leacutegales

laquo ont pour objet de guider les professionnels de santeacute dans la deacutefinition et la mise en œuvre

des strateacutegies de soins agrave viseacutee preacuteventive diagnostique ou theacuterapeutique les plus approprieacutees

sur la base des connaissances meacutedicales aveacutereacutees agrave la date de leur eacutediction raquo il poursuit en

en preacutecisant laquo queu eacutegard agrave lobligation deacuteontologique incombant aux professionnels de

santeacute [hellip] dassurer au patient des soins fondeacutes sur les donneacutees acquises de la science telles

quelles ressortent notamment de ces recommandations de bonnes pratiques ces derniegraveres

doivent ecirctre regardeacutees comme des deacutecisions faisant grief susceptibles de faire lobjet dun

recours pour excegraves de pouvoir raquo De mecircme en 2013 le Conseil drsquoEtat adopte une position

similaire vis-agrave-vis des RBP adresseacutees par lrsquoAFSSAPS (aujourdrsquohui ANSM)775

Il apparaicirct

donc clairement que progressivement les RPB prennent une place majeure dans le domaine

du droit meacutedical

771 CE 26 septembre 2005 op cit

772 CE 18 deacutecembre 2002 Mme Duvignegraveres ndeg 233618 Rec 2002 p 463 concl P FOMBEUR Dr adm

2003 comm 73 et repegravere 3 Proceacutedures 2003 ndeg 154 note S DEYGAS AJDA 2003 p 487 chron F

DONNAT et D CASAS 773

MARKUS Jean-Paul laquo Nature juridique des recommandations de bonnes pratiques meacutedicales raquo AJDA

2006 p 308 774

CE 27 avril 2011 Association pour une formation meacutedicale indeacutependante ndeg334396 JurisData ndeg 2011-

007009 775

CE 4 octobre 2013 Steacute Laboratoires Servier ndeg 356700

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

349

642 Du cocircteacute des TIC le droit souple est eacutegalement tregraves priseacute En effet il srsquoavegravere ecirctre un

outil particuliegraverement adapteacute agrave un domaine ougrave les eacutevolutions sont constantes Ainsi les

acteurs priveacutes de ce domaine srsquoengagent dans la conception de normes afin de geacuterer leurs

relations Ces normes laquo se distinguent eacutegalement par leur origine extra eacutetatique et la

neacutegociation qui conduit agrave leur eacutelaboration raquo776

Le domaine des TIC voit alors se deacutevelopper

les chartes et les autres guides de bonnes pratiques

Aujourdrsquohui nous pouvons donc facilement imaginer que ces outils puissent

eacutegalement ecirctre utiliseacutes en matiegravere de TIC en santeacute Drsquoailleurs les eacutetablissements de santeacute face

aux lacunes du cadre actuel et afin de seacutecuriser leurs pratiques construisent leurs propres

chartes et regraveglements inteacuterieurs en matiegravere de systegravemes drsquoinformation hospitaliers Le but de

ces textes est drsquoorganiser le bon usage des TIC dans le cadre notamment du traitement des

donneacutees de santeacute mais eacutegalement de la prise en charge des patients

776 SARR Minata laquo Droit souple et commerce eacutelectronique raquo Jurisdoctoria 2012 ndeg8 p 52

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

350

sect2 Le leacutegislateur sur la voie de la modernisation du cadre juridique

643 Que ce soit au niveau national ou au niveau europeacuteen le leacutegislateur cherche agrave adapter

les regravegles en place afin de seacutecuriser les pratiques lieacutees agrave lrsquoutilisation des TIC en santeacute Il a en

effet eu lrsquooccasion de constater agrave de multiples reprises la neacutecessiteacute de reacutenover le cadre en

place aujourdrsquohui devenu trop complexe et inadapteacute aux nouvelles pratiques et technologies

qui se deacuteveloppent rapidement

Alors que le leacutegislateur franccedilais a souhaiteacute corriger certains dysfonctionnements qui pouvaient

devenir pesant (B) le leacutegislateur europeacuteen pour sa part srsquoest concentreacute sur un sujet qui lui est

cher depuis de nombreuses anneacutees celui de la protection des donneacutees agrave caractegravere personnel

(A)

A Une volonteacute europeacuteenne drsquounifier la protection des donneacutees personnelles

644 A lrsquoissue drsquoune proceacutedure leacutegislative particuliegraverement fastidieuse (1) le Regraveglement

europeacuteen relatif agrave la protection des personnes physiques agrave lrsquoeacutegard du traitement des donneacutees agrave

caractegravere personnel et agrave la libre circulation des donneacutees777

a enfin eacuteteacute adopteacute Il apporte de

nombreuses modifications notamment en terme de droits des personnes concerneacutees par un

traitement de donneacutees agrave caractegravere personnel mais aussi au sujet des proceacutedures et obligations

preacutealables agrave la mise en œuvre drsquoun traitement automatiseacute de donneacutees agrave caractegravere personnel

(2)

1) Une proceacutedure leacutegislative longue et deacutelicate

645 Adopteacute le 27 avril 2016 agrave lrsquoissue drsquoun trilogue entre le Conseil de lrsquoUnion

europeacuteenne la Commission europeacuteenne et le Parlement europeacuteen le regraveglement (UE)

2016679 relatif agrave la protection des personnes physiques agrave lrsquoeacutegard du traitement des donneacutees agrave

caractegravere personnel et agrave la libre circulation des donneacutees entrera en vigueur le 25 mai 2018 Ce

regraveglement voit enfin le jour apregraves quatre longues anneacutees de discussions et de neacutegociations

777 Regraveglement (UE) 2016679 du Parlement europeacuteen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif agrave la protection des

personnes physiques agrave leacutegard du traitement des donneacutees agrave caractegravere personnel et agrave la libre circulation de ces

donneacutees et abrogeant la directive 9546CE JOUE ndeg L 119 du 4 mai 2016 p 1

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

351

Initialement en effet le projet de regraveglement avait eacuteteacute adopteacute en Commission europeacuteenne le 25

janvier 2012 dans le but de reacutenover le cadre juridique applicable issu de la directive

9546CE du 24 octobre 1995 texte devenu quelque peu obsolegravete face agrave lrsquoaugmentation de

lrsquoutilisation de lrsquooutil informatique et plus speacutecifiquement de lrsquoInternet En effet selon

plusieurs eacutetudes du Groupe de lrsquoarticle 29778

la directive de 1995 soulevait certaines

difficulteacutes drsquointerpreacutetation

Alors que lrsquooutil utiliseacute en 1995 eacutetait la directive neacutecessitant ainsi une transposition par

chacun des Etats membres dans son droit interne la reacuteforme est quant agrave elle baseacutee sur un

autre outil juridique le regraveglement Celui-ci preacutesente en effet lrsquoavantage de creacuteer les mecircmes

regravegles applicables dans tous les Etats membres et donc en ce sens de diminuer les diffeacuterences

qui peuvent exister entre les Etats Cela a pour conseacutequence de reacuteduire la marge de manœuvre

que pourraient avoir les Etats avec une directive et qui permettrait drsquoadapter certains

eacuteleacutements agrave leur droit interne

646 Le processus leacutegislatif srsquoest aveacutereacute long et laborieux779

Bien eacutevidemment les enjeux

eacuteconomiques ont eacuteteacute une des causes majeures de la longueur de la proceacutedure dont lrsquoissue eacutetait

initialement annonceacutee pour 2014 Comme le preacutecise le regraveglement dans ses consideacuterants laquo le

droit agrave la protection des donneacutees agrave caractegravere personnel nrsquoest pas un droit absolu il doit ecirctre

consideacutereacute par rapport agrave sa fonction dans la socieacuteteacute et ecirctre mis en balance avec drsquoautres

droits fondamentaux conformeacutement au principe de proportionnaliteacute raquo Le texte srsquoest donc

attacheacute agrave trouver le juste eacutequilibre entre protection des donneacutees et de la vie priveacutee liberteacute

drsquoexpression et enjeux eacuteconomiques Pour certains auteurs lrsquoobjectif prioritaire de ce texte est

bien de construire un marcheacute unique numeacuterique780

Par ailleurs comme le souligne agrave juste titre Ceacuteline CASTETS-RENARD dans son

analyse du Regraveglement781

une autre difficulteacute majeure rencontreacutee par le leacutegislateur europeacuteen a

eacuteteacute de trouver lrsquoeacutequilibre entre la volonteacute drsquouniformiser le cadre relatif agrave la protection des

donneacutees personnelles en Europe en choisissant lrsquooutil du regraveglement et drsquoautre part la

possibiliteacute pour chaque Etat drsquoarticuler ces nouvelles normes avec celles deacutejagrave existantes dans

778 V Notamment en ce sens avis ndeg 82010 16 deacutec 2010 WP 179 avis ndeg 52009 12 juin 2009 WP 163

779 Alors que le projet adopteacute en janvier 2012 a eacuteteacute soumis agrave discussions au sein du Conseil de lrsquoUnion

europeacuteenne le 7 deacutecembre 2012 celles-ci se sont termineacutees en mars 2014 et le Parlement nrsquoa eacuteteacute saisi du projet

que le 12 mars 2014 le trilogue entre le Conseil le Parlement et la Commission ne deacutebutant qursquoen avril 2016 780

CASTETS-RENARD Ceacuteline laquo Bregraveve analyse du regraveglement geacuteneacuteral relatif agrave la protection des donneacutees

personnes raquo Dalloz IPIT 2016 p 331 781

Ibid

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

352

sa leacutegislation interne Ainsi il est important de souligner que le Regraveglement initialement outil

contraignant laisse ici une marge de manœuvre importante aux Etats membres puisqursquoil

preacutevoit que certains points du texte pourront donc ecirctre preacuteciseacutes par chaque Etat membre

2) La mise en place drsquoun cadre reacutenoveacute

647 Sans revenir sur lrsquointeacutegraliteacute du texte il est important drsquoen souligner les points

principaux qui repreacutesentent selon nous les avanceacutees majeures dans la protection des donneacutees

agrave caractegravere personnel Le Regraveglement srsquoattache en premier lieu agrave deacutefinir deux notions

essentielles drsquoune part celle de donneacutees personnelles en son article 41 et drsquoautre part celle

de consentement Ainsi les donneacutees personnelles sont laquo toute information se rapportant agrave une

personne physique identifieacutee ou identifiable [hellip] est reacuteputeacutee ecirctre une laquopersonne physique

identifiableraquo une personne physique qui peut ecirctre identifieacutee directement ou indirectement

notamment par reacutefeacuterence agrave un identifiant tel quun nom un numeacutero didentification des

donneacutees de localisation un identifiant en ligne ou agrave un ou plusieurs eacuteleacutements speacutecifiques

propres agrave son identiteacute physique physiologique geacuteneacutetique psychique eacuteconomique culturelle

ou sociale raquo

648 Le consentement quant agrave lui est deacutefini comme eacutetant laquo toute manifestation de volonteacute

libre speacutecifique eacuteclaireacutee et univoque par laquelle la personne concerneacutee accepte par une

deacuteclaration ou par un acte positif clair que des donneacutees agrave caractegravere personnel la concernant

fassent lobjet dun traitement raquo

Passeacute cet exercice de deacutefinition il srsquoattache ensuite agrave instaurer un cadre reacutenoveacute de la

protection des donneacutees agrave caractegravere personnel au sein de lrsquoUnion europeacuteenne

a) Le renforcement du droit des personnes

Avec ce nouveau Regraveglement les droits des personnes dont les donneacutees agrave caractegravere

personnel font lrsquoobjet drsquoun traitement sont renforceacutes

649 Il nous semble inteacuteressant de nous attarder drsquoabord sur le droit au consentement De

maniegravere assez classique le regraveglement reprend lrsquoobligation pour la personne concerneacutee par un

traitement de donneacutees agrave caractegravere personnel drsquoy consentir de maniegravere libre et explicite (article

7 du Regraveglement) agrave deacutefaut le traitement ne sera pas en principe licite (article 6 du

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

353

Regraveglement) Mais la nouveauteacute apporteacutee par le Regraveglement reacuteside dans la possibiliteacute pour la

personne de retirer son consentement En effet agrave tout moment il est possible de revenir sur le

consentement accordeacute en vue drsquoun traitement de donneacutees agrave caractegravere personnel Bien entendu

et en cela le texte est bien fait le regraveglement preacutevoit expresseacutement que le retrait nrsquoest valable

que pour lrsquoavenir et ne remet aucunement en question la liceacuteiteacute du traitement initialement

fondeacute sur le consentement preacutealable Cependant le leacutegislateur europeacuteen ajoute une mention

quelque peu surprenante puisqursquoil conclut cette disposition par la phrase suivante laquo il est

aussi simple de retirer que de donner son consentement raquo Peut-ecirctre qursquoavec cette formulation

le leacutegislateur europeacuteen a entendu appuyer sur la faciliteacute qui doit ecirctre accordeacutee agrave la personne de

revenir sur son accord Notons que la formule bien qursquoelle nous surprenne a le meacuterite drsquoavoir

eacutevolueacute par rapport celle de la proposition de regraveglement dans sa version de 2014 puisqursquoil eacutetait

initialement preacutevu qursquo laquo il devrait ecirctre aussi simple de retirer son consentement que de le

donner raquo Cette formulation qui relevait plus du vœu pieu que drsquoune reacuteelle obligation leacutegale

aurait pu ecirctre source de difficulteacutes782

puisqursquoelle nrsquoaurait fait peser qursquoune simple obligation

de moyens sur le responsable du traitement Pour conclure sur le consentement notons que le

Regraveglement maintient une seacuterie drsquoexceptions agrave son recueil Ces exceptions783

sont les mecircmes

que celles preacutevues par la loi Informatique et Liberteacutes

De plus le Regraveglement laisse une marche de manœuvre aux Etats membres sur ce point

puisqursquoils pourraient laquo maintenir ou introduire des dispositions plus speacutecifiques pour adapter

lrsquoapplication des regravegles du preacutesent regraveglement raquo En drsquoautres termes cette liste drsquoexception

nrsquoest pas limitative et elle pourra ecirctre augmenteacutee par chacun des Etats membres selon ses

besoins

782 BOIZARD Maryline laquo Le consentement agrave lrsquoexploitation des donneacutees agrave caractegravere personnel une douce

illusion raquo Communication commerce eacutelectronique ndeg 3 mars 2016 eacutetude 6 783

Lrsquoarticle 6 du Regraveglement europeacuteen preacutevoit que laquo le traitement nest licite que si et dans la mesure ougrave au

moins une des conditions suivantes est remplie

a) la personne concerneacutee a consenti au traitement de ses donneacutees agrave caractegravere personnel pour une ou plusieurs

finaliteacutes speacutecifiques

b) le traitement est neacutecessaire agrave lexeacutecution dun contrat auquel la personne concerneacutee est partie ou agrave lexeacutecution

de mesures preacutecontractuelles prises agrave la demande de celle-ci

c) le traitement est neacutecessaire au respect dune obligation leacutegale agrave laquelle le responsable du traitement est

soumis

d) le traitement est neacutecessaire agrave la sauvegarde des inteacuterecircts vitaux de la personne concerneacutee ou dune autre

personne physique

e) le traitement est neacutecessaire agrave lexeacutecution dune mission dinteacuterecirct public ou relevant de lexercice de lautoriteacute

publique dont est investi le responsable du traitement

f) le traitement est neacutecessaire aux fins des inteacuterecircts leacutegitimes poursuivis par le responsable du traitement ou par

un tiers agrave moins que ne preacutevalent les inteacuterecircts ou les liberteacutes et droits fondamentaux de la personne concerneacutee

qui exigent une protection des donneacutees agrave caractegravere personnel notamment lorsque la personne concerneacutee est un

enfant raquo

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

354

650 Le Regraveglement consacre son chapitre III aux droits des personnes concerneacutees par un

traitement De maniegravere assez classique par rapport agrave la leacutegislation actuelle le regraveglement

deacutebute par le rappel de lrsquoobligation drsquoinformer la personne preacutealablement agrave la mise en œuvre

du traitement de maniegravere claire intelligible et facilement accessible Finalement le texte fait

du responsable du traitement le deacutebiteur drsquoune obligation de transparence renforceacutee vis-agrave-vis

des personnes concerneacutees A noter que les droits drsquoaccegraves et de rectification sont maintenus

651 Mais le texte innove eacutegalement puisqursquoil vient creacuteer de nouveaux droits Ainsi les

personnes concerneacutees par un traitement de donneacutees agrave caractegravere personnel pourront deacutesormais

obtenir la limitation de leur traitement Ce droit assez original suspend lrsquoutilisation des

donneacutees collecteacutees par le responsable du traitement (le temps drsquoobtenir la rectification de

donneacutees inexactes ou encore si le responsable nrsquoa plus besoin des donneacutees mais qursquoelles sont

neacutecessaires agrave la personne concerneacutees pour faire valoir ses droits par exemple) qui continue

neacuteanmoins agrave en assurer la conservation

De mecircme le droit agrave lrsquooubli (appeleacute droit agrave lrsquoeffacement) qui eacutetait deacutejagrave en partie

consacreacute par la loi Informatique et Liberteacute en son article 40 est rappeleacute par le regraveglement qui

preacutevoit de nouveaux cas drsquoapplicabiliteacute Deacutesormais la personne pourra obtenir lrsquoeffacement

de ses donneacutees si celles-ci ne sont plus neacutecessaires agrave la finaliteacute du traitement ou comme nous

lrsquoavons vu si elle deacutecide de retirer son consentement La personne concerneacutee par un

traitement de donneacutees agrave caractegravere personnel beacuteneacuteficie eacutegalement drsquoun droit agrave la portabiliteacute de

ses donneacutees crsquoest-agrave-dire le droit drsquoobtenir du responsable du traitement lrsquoensemble des

donneacutees qui la concerne dans un format structureacute

Corollaire direct des droits la possibiliteacute drsquoobtenir reacuteparation du fait de la violation de

ceux-ci est eacutegalement preacutevue par le Regraveglement en son chapitre VIII Ainsi laquo toute personne

ayant subi un dommage mateacuteriel ou moral du fait drsquoune violation du preacutesent regraveglement a le

droit drsquoobtenir du responsable de traitement ou du sous-traitant reacuteparation du preacutejudice

subi raquo (article 82 du regraveglement) Par ailleurs une reacuteclamation agrave lrsquoencontre drsquoun responsable de

traitement deacutefaillant peut ecirctre formuleacutee par voie de recours administratif juridictionnel ou

aupregraves de lrsquoautoriteacute de controcircle Une action juridictionnelle peut ecirctre par ailleurs deacuteposeacutee agrave

lrsquoencontre drsquoune autoriteacute de controcircle

b) Un nouveau cadre de controcircle et de sanction

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

355

laquoReacuteorganisation et documentation ce sont les maicirctres mots qursquoil faut retenir du Regraveglement

geacuteneacuteral sur la protection des donneacutees ndeg 2016679 raquo784

652 Point majeur de ce regraveglement celui-ci vient creacuteer le deacuteleacutegueacute agrave la protection des

donneacutees (Data Protection Officer ndash DPO) Ainsi sa deacutesignation est obligatoire pour toutes les

entreprises du secteur public quelle que soit la nature des traitements reacutealiseacutes Les

eacutetablissements de santeacute qui ne srsquoeacutetaient pas encore doteacutes drsquoun correspondant informatique et

liberteacutes (CIL) vont donc devoir drsquoici mai 2018 se mettre agrave la recherche drsquoun DPO Le

Regraveglement fixe une liste de ce que devront ecirctre a minima les missions de ce nouvel acteur Si

certaines sont similaires agrave celle de notre actuel CIL de nouvelles missions apparaissent

cependant Il srsquoagit du controcircle des regravegles internes de lrsquoentreprise en matiegravere de protection des

donneacutees agrave caractegravere personnel une mission de conseil et de veacuterification de lrsquoexeacutecution des

analyses drsquoimpact devant ecirctre reacutealiseacutees par lrsquoentreprise et enfin une mission de coopeacuteration

et de contact avec lrsquoautoriteacute de contact (ce qui mecircme si la loi Informatique et Liberteacutes ne le

preacutevoit pas eacutetait deacutejagrave le cas des CIL en grande majoriteacute)

Le DPO dispose bien entendu drsquoune indeacutependance dans lrsquoexercice de ses missions et

ne rend des comptes qursquoau niveau le plus eacuteleveacute de la hieacuterarchie de lrsquoentreprise En cela rien

de nouveau par rapport au CIL

653 Dans chaque Etat membre une autoriteacute de controcircle indeacutependante doit ecirctre mise en

place afin de controcircler la bonne application du Regraveglement mais eacutegalement proteacuteger les droits

des personnes785

Finalement sur ce point la France est en avance puisque la CNIL est en

place depuis de nombreuses anneacutees Ses missions et peut-ecirctre ses moyens devront cependant

ecirctre adapteacutes au nouveau Regraveglement Nous ne nous attarderons donc pas sur ces dispositions

En termes de sanctions un nouveau reacutegime drsquoamende plus dur est mis en place Lrsquoarticle 83

de Regraveglement vient poser le cadre geacuteneacuteral permettant aux autoriteacutes de controcircle de sanctionner

les responsables de traitement deacutefaillants Les amendes pourront srsquoeacutelever jusqursquoagrave 10 000 000

euros ou 2 du chiffre drsquoaffaires annuel mondial dans certains cas (en cas de violation des

conditions relatives au consentement des enfants par exemple) ou dans drsquoautres cas jusqursquoagrave

784 BOURGEOIS Matthieu BOUNEDJOUM Amira laquo Reacuteforme europeacuteenne des donneacutees personnelles

registres internes et DPO la neacutecessaire reacuteorganisation des entreprises raquo JCP Entreprises et Affaires ndeg 22 juin

2016 p 1326 785

Chapitre VI du Regraveglement

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

356

20 000 000 euros ou 4 du chiffre drsquoaffaires annuel mondial en cas drsquoilliceacuteiteacute du traitement

notamment Par ailleurs pour tous les cas qui ne seraient pas reacutegleacutes par lrsquoarticle 83 du

Regraveglement lrsquoarticle 84 preacutevoit la possibiliteacute pour chaque Etat membre de preacutevoir drsquoautres

mesures drsquoamendes

654 Malgreacute ce durcissement nous nous interrogeons sur la pertinence de ces amendes

Bien sucircr le texte preacutevoit une amende maximale modulable par lrsquoautoriteacute de controcircle

compeacutetente Malheureusement comme nous avions deacutejagrave pu le constater786

les amendes

excessives ne sont jamais prononceacutees et finissent par ne plus ecirctre dissuasives

C) Des nouvelles formaliteacutes

655 Autre point essentiel de ce Regraveglement la modification des formaliteacutes preacutealables agrave la

mise en œuvre drsquoun traitement de donneacutees Le responsable du traitement doit deacutesormais

mettre en place un registre des activiteacutes du traitement Ce registre srsquoimpose agrave toutes les

entreprises avec un ameacutenagement pour les entreprises de moins de 250 employeacutes Le

responsable de traitement et son sous-traitant sont tous deux en charge de la tenue de ce

registre Autre nouveauteacute non neacutegligeable la neacutecessiteacute dans certains cas de reacutealiser une

analyse drsquoimpact relative agrave la protection des donneacutees Crsquoest en effet le cas lorsqursquoun

traitement est susceptible drsquoengendrer un risque trop eacuteleveacute pour les droits et liberteacutes des

personnes physiques Cela concerne notamment les traitements de profilage sur la base duquel

des deacutecisions juridiques peuvent ecirctre prises la surveillance systeacutematique agrave grande eacutechelle

drsquoune zone accessible au public ou les traitements agrave grande eacutechelle de donneacutees qui reacutevegravelent

lrsquoorigine raciale ou ethnique les opinions politiques les convictions religieuses ou

philosophiques ou lrsquoappartenance syndicale ainsi que les donneacutees geacuteneacutetiques et biomeacutetriques

Cependant le Regraveglement nrsquoapporte pas plus de preacutecisions et laisse aux autoriteacutes de controcircle

de chaque Etat membre le soin de publier une liste des types drsquoopeacuteration de traitement pour

lesquelles une analyse drsquoimpact sera neacutecessaire Dans lrsquohypothegravese ougrave lrsquoanalyse drsquoimpact

reacutealiseacutee deacutemontre que le traitement envisageacute preacutesente un risque eacuteleveacute pour le respect du droit

des personnes le responsable du traitement doit se rapprocher de lrsquoautoriteacute de controcircle

786 V Supra ndeg 91

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

357

Ainsi le leacutegislateur europeacuteen a travailleacute agrave la reacutenovation du cadre relatif agrave la protection

des donneacutees agrave caractegravere personnel En France le leacutegislateur srsquoest atteleacute quant agrave lui agrave diffeacuterents

chantiers

B Une volonteacute franccedilaise de moderniser le cadre applicable

656 Le leacutegislateur franccedilais tente de moderniser le cadre juridique de lrsquoutilisation des TIC

en santeacute Cela passe sur le long terme par un important travail drsquoencadrement du numeacuterique

drsquoune maniegravere geacuteneacuterale (2) et agrave plus court terme par un chantier de correction de certains

dysfonctionnements (1)

1) La loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute patch correctif de certains

dysfonctionnements

657 La loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute787

adopteacutee le 26 janvier 2016

contient plusieurs dispositions relatives agrave lrsquoutilisation des TIC en santeacute Certaines font partie

inteacutegrante de la loi et drsquoautres ont eacuteteacute adopteacutees par voie drsquoordonnance788

Pourtant force est

de constater que certaines de ces mesures pourtant reacuteellement impactantes sont passeacutees

presque inaperccedilues Elles nrsquoont fait lrsquoobjet drsquoaucun commentaire de la part de la doctrine

celle-ci preacutefeacuterant se focaliser sur les mesures phares de la loi telles que les GHT ou la refonte

du service public hospitalier

Pourtant le leacutegislateur a entendu agrave travers cette loi simplifier ou uniformiser certaines

dispositions applicables aux TIC en santeacute devenues trop complexes

658 Bien entendu la refonte du DMP est une des mesures principales relatives aux TIC en

santeacute et preacutesente dans ce texte Plus qursquoun simple patch correctif789

les mesures preacutevues par

787 Loi ndeg 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre systegraveme de santeacute JORF ndeg0022 du 27 janvier

2016 texte 1 788

Ordonnance ndeg 2017-27 du 12 janvier 2017 relative agrave lheacutebergement de donneacutees de santeacute agrave caractegravere

personnel JORF ndeg0011 du 13 janvier 2017 texte ndeg 17 Ordonnance ndeg 2017-29 du 12 janvier 2017 relative

aux conditions de reconnaissance de la force probante des documents comportant des donneacutees de santeacute agrave

caractegravere personnel creacuteeacutes ou reproduits sous forme numeacuterique et de destruction des documents conserveacutes sous

une autre forme que numeacuterique JORF ndeg0011 du 13 janvier 2017 texte ndeg 21 789

Nous utilisons volontairement cette expresseacutement tireacutee de lrsquoinformatique Dans ce cadre un patch deacutesigne un

morceau de Code apportant un correctif agrave un programme

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

358

lrsquoarticle 96 de la loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute et son deacutecret drsquoapplication790

repreacutesentent selon nous lrsquoultime tentative du leacutegislateur de sauver ce projet ambitieux dont

on ne compte plus les eacutechecs depuis plus de 10 ans Mais lrsquoarticle 96 vient eacutegalement

transformer le consentement du patient neacutecessaire preacutealablement agrave tout heacutebergement

externaliseacute de donneacutees de santeacute aupregraves drsquoun heacutebergeur agreacuteeacute en simple non opposition Il

reacutesout ainsi certaines difficulteacutes pratiques reacuteguliegraverement rencontreacutees par les professionnels

659 Les mesures les plus discregravetes mais pour autant importantes se situent au sein du titre

V de la loi consacreacute aux mesures de simplification Ainsi lrsquoarticle 204 de la loi preacutevoit la

possibiliteacute pour le Gouvernement de venir laquo dans les conditions preacutevues agrave larticle 38 de la

Constitution et dans un deacutelai de douze mois agrave compter de la promulgation de la preacutesente loi

[hellip] prendre par ordonnances les mesures dameacutelioration et de simplification du systegraveme de

santeacute relevant du domaine de la loi raquo Par ce biais le Gouvernement a pu poser par voie

drsquoordonnance certaines regravegles en matiegravere drsquoheacutebergement de donneacutees de santeacute791

Les

dispositions en matiegravere drsquoagreacutement des heacutebergeurs de donneacutees de santeacute preacutevues au Code de la

santeacute publique ont eacuteteacute harmoniseacutees avec celles relatives agrave lrsquoagreacutement des personnes

deacutepositaires drsquoarchives publiques telles que preacutevues agrave lrsquoarticle L 212-4 du Code du

patrimoine Cette disposition deacutemontre bien la volonteacute du leacutegislateur drsquoappreacutehender ce type de

probleacutematique dans sa globaliteacute Par ailleurs et nous lrsquoavons eacutetudieacute en deacutetail preacuteceacutedemment

la proceacutedure drsquoagreacutement est largement simplifieacutee et la certification remplacera la proceacutedure

du comiteacute drsquoagreacutement des heacutebergeurs

Enfin par voie drsquoordonnance792

le Gouvernement a apporteacute une solution agrave la

probleacutematique concregravete que rencontrent tous les eacutetablissements de santeacute aujourdrsquohui agrave savoir

creacuteer les modaliteacutes de destruction des dossier meacutedicaux papiers qui ont eacuteteacute numeacuteriseacutes

2) La loi pour une Reacutepublique numeacuterique

a) Les travaux preacutealables du Conseil drsquoEtat

790 Deacutecret ndeg 2016-914 du 4 juillet 2016 relatif au dossier meacutedical partageacute JORF ndeg0155 du 5 juillet 2016

791 Ibid

792 Ordonnance ndeg 2017-29 du 12 janvier 2017 relative aux conditions de reconnaissance de la force probante des

documents comportant des donneacutees de santeacute agrave caractegravere personnel creacuteeacutes ou reproduits sous forme numeacuterique et

de destruction des documents conserveacutes sous une autre forme que numeacuterique JORF ndeg0011 du 13 janvier 2017

texte ndeg 21

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

359

660 En 2014 le Conseil drsquoEtat avait consacreacute son eacutetude annuelle793

au numeacuterique et aux

droits fondamentaux Ce choix qui constituait selon le Conseil drsquoEtat une audace de sa part

eacutetait pourtant apparu comme eacutevident notamment car lrsquoessor du numeacuterique dans notre socieacuteteacute

avait forceacutement des conseacutequences sur les droits fondamentaux des personnes Le Conseil

drsquoEtat se devait donc de revecirctir son rocircle de gardien des droits et liberteacutes fondamentaux A

lrsquooccasion de cette eacutetude la Haute juridiction a donc constateacute que non seulement le numeacuterique

a permis drsquoobtenir la reconnaissance de nouveaux droits fondamentaux autonomes tels que le

droit agrave la protection des donneacutees personnelles et le droit drsquoaccegraves agrave Internet mais il a

eacutegalement bouleverseacute le reacutegime juridique de certaines liberteacutes fondamentales En effet agrave

lrsquoheure de lrsquoInternet les moyens classiques de protection de la liberteacute drsquoexpression et de la vie

priveacutee ont pu ecirctre mis agrave mal La loi ndeg 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans

lrsquoeacuteconomie numeacuterique794

a permis de stabiliser le reacutegime relatif agrave la liberteacute drsquoexpression795

mais les questions relatives aux limites de la liberteacute drsquoexpression restent vives En soi ce nrsquoest

pas tant la question des limites agrave apporter agrave la liberteacute drsquoexpression qui se pose mais plutocirct les

moyens pour lutter contre les contenus illicites normalement interdits Pour le Conseil drsquoEtat

il eacutetait donc neacutecessaire de repenser la protection des droits fondamentaux face agrave lrsquoessor du

numeacuterique

661 Cette protection nrsquoest possible que par une responsabilisation accrue des utilisateurs

Cette notion revient comme nous avons pu le constater tregraves reacuteguliegraverement En accordant plus

de moyens drsquoactions en cas de violation de leurs droits mais eacutegalement en leur accordant une

plus grande maicirctrise de leurs donneacutees personnelles les utilisateurs des outils numeacuteriques

pourraient se proteacuteger plus facilement Drsquoailleurs agrave lrsquooccasion de cette eacutetude le Conseil

drsquoEtat a avanceacute la possibiliteacute de consacrer un droit agrave lrsquoautodeacutetermination informelle de

lrsquoindividu plutocirct que celui drsquoun droit agrave la proprieacuteteacute estimant qursquoil convenait drsquoeacutecarter ce qursquoil

a qualifieacute de logique patrimoniale dans la protection des donneacutees

662 Face agrave ces diffeacuterents constats le Conseil drsquoEtat avait formuleacute cinquante propositions

tendant notamment agrave lrsquoameacutelioration de la deacutefinition des droits fondamentaux agrave lrsquoegravere du

793 Conseil drsquoEtat eacutetude annuelle laquo Le numeacuterique et les droits fondamentaux raquo 2014 La documentation

franccedilaise 794

Loi ndeg 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans leacuteconomie numeacuterique JORF ndeg0143 du 22 juin

2004 p 11168 795

Conseil drsquoEtat eacutetude annuelle laquo Le numeacuterique et les droits fondamentaux raquo dossier de presse 2014 p 5

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

360

numeacuterique au renforcement des pouvoirs des individus vis-agrave-vis de leurs donneacutees agrave la

redeacutefinition des moyens de protection des droits fondamentaux et du rocircle des autoriteacutes

publiques et agrave lrsquoorganisation de la coopeacuteration europeacuteenne et internationale

663 En parallegravele de cette eacutetude tregraves instructive sur lrsquoimpact du numeacuterique sur les droits

fondamentaux le Conseil national du numeacuterique a meneacute entre octobre 2014 et feacutevrier 2015

une concertation qui a permis au Gouvernement drsquoeacutelaborer sa strateacutegie numeacuterique Le 9

deacutecembre 2015 le projet de loi pour une Reacutepublique Numeacuterique a eacuteteacute adopteacute en conseil des

Ministres Enfin la loi pour une Reacutepublique Numeacuterique a eacuteteacute adopteacutee le 7 octobre 2016796

b) Les enjeux de la loi

664 La loi issue drsquoune vaste concertation nationale en ligne797

se deacutecompose en trois

axes la circulation des donneacutees et du savoir la protection des droits dans la socieacuteteacute

numeacuterique et lrsquoaccegraves au numeacuterique Les motifs du projet de loi preacutecisent bien que lrsquoobjectif

du Gouvernement avec ce projet est double laquo drsquoune part donner une longueur drsquoavance agrave

la France dans le domaine du numeacuterique en favorisant une politique drsquoouverture des donneacutees

et des connaissances drsquoautre part adopter une approche progressiste du numeacuterique qui

srsquoappuie sur les individus pour renforcer leur pouvoir drsquoagir et leurs droits dans le monde

numeacuterique raquo798

665 A travers ce texte le leacutegislateur entend drsquoune part favoriser lrsquoinnovation lieacutee au

numeacuterique par des leviers incitatifs et drsquoautre part encadrer en amont cette innovation et

assurer la protection des individus Cette loi preacutesente lrsquoambition drsquoencadrer dans sa globaliteacute

le deacuteveloppement du numeacuterique en France Il est vrai que la loi pour une Reacutepublique

Numeacuterique tente de toucher toutes les sphegraveres du droit concerneacutees par le numeacuterique Qualifieacutee

de polymorphe799

la Reacutepublique numeacuterique touche effectivement au droit public au droit

796 Loi ndeg 2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une Reacutepublique numeacuterique JORF ndeg0235 du 8 octobre 2016 texte

ndeg1 797

Selon le communiqueacute de presse du Conseil des Ministres en date du 9 deacutecembre 2015 laquo En seulement trois

semaines pregraves de 21 000 participants ont publieacute 8 500 contributions A lrsquoissue de cet exercice le Gouvernement

a retenu cinq nouveaux articles drsquoinspiration citoyenne dans son projet et a inteacutegreacute pregraves de 90 modifications du

projet raquo disponible sur [httpwwwgouvernementfr] Consulteacute le 31 aoucirct 2016 Cependant cette notion de

laquo co-eacutecriture citoyenne raquo avanceacutee par le Gouvernement est parfois critiqueacutee V notamment en ce sens PASTOR

Jean-Marc laquo Les politiques publiques dans la reacutepublique numeacuterique raquo Dalloz actualiteacutes 19 deacutecembre 2015 798

Exposeacute des motifs de la loi disponible sur [httpswwwlegifrancegouvfr] Consulteacute le 19 mars 2017 799

DALEAU Jeanne laquo Reacutepublique numeacuterique apregraves la consultation publique la discussion parlementaire raquo

Dalloz actualiteacutes 28 janvier 2016

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

361

des affaires mais eacutegalement au droit de la consommation au droit de la proprieacuteteacute intellectuelle

et au droit peacutenal Certaines des dispositions preacutevues par le texte meacuteritent drsquoailleurs que nous

nous y attardions

666 Dans le cadre de lrsquoaxe relatif agrave lrsquoincitation agrave la circulation des donneacutees le

gouvernement propose bien eacutevidemment drsquoeacutelargir lrsquoouverture des donneacutees publiques en

France LrsquoOpen Data est effectivement un enjeu primordial agrave lrsquoheure du deacuteveloppement du

numeacuterique Le premier titre preacutevoit ainsi la mise en ligne obligatoire sur le site Internet des

administrations des documents administratifs librement communicables Mais le point qui

attire le plus notre attention est lrsquointroduction de la notion de donneacutees drsquointeacuterecirct geacuteneacuteral afin de

permettre notamment un accegraves simplifieacute aux statistiques publiques

667 En ce qui concerne le renforcement de la protection dans la socieacuteteacute numeacuterique nous

pouvons constater que certaines propositions issues de lrsquoeacutetude annuelle du Conseil drsquoEtat ont

eacuteteacute reprises En effet de nouveaux droits sont creacuteeacutes et notamment le droit agrave la libre disposition

de ses donneacutees par un individu (lrsquoautodeacutetermination informelle) Lrsquoexposeacute des motifs de la loi

preacutecise drsquoailleurs que la piste de la creacuteation drsquoun droit de proprieacuteteacute sur les donneacutees

personnelles nrsquoest pas retenue notamment car laquo la valeur des donneacutees personnelles drsquoun

individu est tregraves limiteacutee de lrsquoordre de quelques centimes drsquoeuros raquo800

Cet argument tregraves

pragmatique finira certainement de convaincre les personnes qui militaient encore pour ce

droit et qui nrsquoavaient peut-ecirctre pas encore inteacutegreacutes pleinement les risques qui existent agrave

reconnaitre un droit de proprieacuteteacute des personnes sur leurs donneacutees personnelles

668 Par ailleurs la loi introduit eacutegalement le droit agrave la portabiliteacute des donneacutees en totale

redondance avec le Regraveglement europeacuteen relatif agrave la protection des donneacutees adopteacute en avril

2016 tout comme lrsquoest lrsquoensemble de dispositions venant modifier la loi Informatique et

Liberteacutes Il aurait eacuteteacute preacutefeacuterable que le leacutegislateur ne creacutee pas un doublon avec le Regraveglement

europeacuteen Mecircme si celui-ci nrsquoentrera en vigueur au plus tard qursquoen mai 2018 il aurait eacuteteacute

souhaitable drsquoeacuteviter de creacuteer encore une fois une superposition de textes portant sur le mecircme

sujet au risque de creacuteer des dispositions divergentes

800 Exposeacute des motifs du projet de loi pour une Reacutepublique numeacuterique agrave propos de lrsquoarticle 26 disponible sur

[httpswwwlegifrancegouvfr] Consulteacute le 31 aoucirct 2016

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

362

Si cette loi a le meacuterite de srsquoemparer drsquoun sujet complexe agrave encadrer quelques erreurs

sont deacutejagrave preacutesentes et il aurait eacuteteacute preacutefeacuterable drsquoinscrire ce texte dans la ligne directe des

mesures prises au niveau europeacuteen et notamment celles contenues dans le Regraveglement

europeacuteen afin drsquoeacuteviter de rendre illisible le cadre juridique

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

363

Conclusion de la section

669 Le cadre juridique des TIC en santeacute doit ecirctre reacutenoveacute cela est incontestable Il est vrai

qursquoil peut parfois ecirctre compliqueacute de trouver le bon eacutequilibre entre le droit souvent vu comme

un outil contraignant et lrsquoinnovation technologique rapide et neacutecessitant une grande liberteacute

Pourtant quand cet eacutequilibre est atteint droit et innovation sont alors des allieacutes de taille le

droit permettant agrave lrsquoinnovation de se deacutevelopper au sein drsquoun cadre agrave la fois protecteur pour

les usagers mais aussi incitatif et valorisant pour les chercheurs Cependant la flexibiliteacute

neacutecessaire doit ecirctre rechercheacutee dans des outils juridiques un peu moins classiques Le droit

souple apparait alors comme constituant une solution adapteacutee En matiegravere de TIC en santeacute

cela est drsquoautant plus vrai que les deux domaines concerneacutes agrave savoir la meacutedecine et les

technologies de communication utilisent deacutejagrave depuis longtemps les outils issus du droit

souple

670 Bien qursquoils ne semblent pas explorer cette piste pour lrsquoinstant le leacutegislateur europeacuteen

et le leacutegislateur franccedilais se sont toutefois tous deux atteleacutes agrave la modernisation du cadre

juridique des TIC en santeacute chacun dans des domaines diffeacuterents Le leacutegislateur europeacuteen

reacutenove ainsi le travail qursquoil avait reacutealiseacute en 1995 en matiegravere de protection des donneacutees agrave

caractegravere personnel tandis que le leacutegislateur franccedilais tente de reacuteparer certains

dysfonctionnements preacutesents depuis longtemps Il fait aussi preuve drsquoinitiative agrave travers la loi

relative agrave la Reacutepublique Numeacuterique Il marque ainsi sa volonteacute drsquoaccompagner le

deacuteveloppement des TIC dans leur globaliteacute en remplissant agrave la fois un rocircle protecteur (en

eacutedictant de nouveaux droits fondamentaux) mais eacutegalement incitateur (en tentant de rendre

accessible agrave tous les outils du numeacuterique)

Il faut toutefois qursquoil veille agrave garder un rythme soutenu en la matiegravere srsquoil ne veut pas

ecirctre tregraves vite deacutepasseacute De mecircme il doit apprendre de ses erreurs et veiller agrave ne pas ecirctre de

nouveau redondant avec drsquoautres textes au risque de complexifier encore plus le cadre

juridique

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

365

Conclusion du chapitre

671 Le cadre juridique de lrsquoutilisation des TIC agrave lrsquohocircpital construit au fur et agrave mesure

nrsquoest qursquoune succession de textes eacutepars et parfois inaboutis qui mis bout agrave bout ne forment

absolument pas un ensemble coheacuterent A lrsquoheure actuelle ce cadre juridique ne remplit pas

correctement son rocircle en eacutetant source drsquoune certaine inseacutecuriteacute juridique Pour lutter

efficacement contre cela il est neacutecessaire de limiter lrsquoinflation leacutegislative Le leacutegislateur doit

se montrer plus rigoureux dans lrsquoeacutelaboration des normes en tacircchant de privileacutegier la qualiteacute

de celles-ci plutocirct que leur quantiteacute La reacutenovation de ce cadre semble donc ineacuteluctable

Pour cela il nous apparait indispensable que le droit srsquoadapte aux exigences des

innovations technologiques Reacuteactiviteacute inventiviteacute et souplesse doivent donc ecirctre les maicirctres-

mots de ce nouveau cadre juridique Le leacutegislateur devra peut-ecirctre srsquoorienter vers les solutions

proposeacutees par le droit souple qui longtemps critiqueacute apparait aujourdrsquohui pour beaucoup (et

notamment par le Conseil drsquoEtat) comme une alternative efficace pour encadrer certains

domaines neacutecessitant une forte flexibiliteacute En cela cette solution semble ecirctre adapteacutee pour

venir en partie constituer le cadre juridique des TIC en santeacute Enfin soulignons que le

leacutegislateur europeacuteen et le leacutegislateur franccedilais se preacuteoccupent drsquoores et deacutejagrave de moderniser le

cadre juridique des TIC en santeacute Le regraveglement europeacuteen relatif agrave la protection des personnes

physiques agrave lrsquoeacutegard du traitement des donneacutees agrave caractegravere personnel et agrave la libre circulation

des donneacutees propose un encadrement global reacutenoveacute du traitement des donneacutees agrave caractegravere

personnel Les TIC en santeacute neacutecessitant la collecte et le traitement de donneacutees de santeacute seront

donc directement impacteacutees par cette reacuteforme Le leacutegislateur franccedilais quant agrave lui a profiteacute de

la loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute pour glisser quelques nouveauteacutes et surtout

quelques simplifications en ce qui concerne la conservation et lrsquoeacutechange de donneacutees de santeacute

Par ailleurs la loi pour une Reacutepublique numeacuterique ambitionne de venir reconnaitre de

nouveaux droits fondamentaux issus directement du deacuteveloppement des TIC Pour autant

ceci nrsquoest que le deacutebut drsquoun chantier bien plus grand De nombreuses incoheacuterences subsistent

et de nouvelles technologies deacuteveloppeacutees dans le secteur de la santeacute doivent ecirctre appreacutehendeacutees

par le droit Le chemin est donc encore long

Dans lrsquoattente les eacutetablissements de santeacute ne restent pas sans reacuteagir Ils sont en effet

venus compenser les lacunes du leacutegislateur en tentant de se reacuteguler eux-mecircmes afin de

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

366

proposer des solutions technologiques innovantes agrave leurs professionnels et leurs patients tout

en srsquoassurant que les droits de ces derniers seront respecteacutes

367

Conclusion du titre

672 Le bon deacuteveloppement des SIS en France a besoin drsquoune gouvernance efficace Pour

que des projets drsquoampleur neacutecessitant une ligne de conduite nationale unifieacutee (tel que le DMP

par exemple) puissent aboutir il est en effet neacutecessaire que lrsquoEtat prennent les choses en main

et instaure le cadre de conduite propice agrave leur bon deacuteveloppement Les pouvoirs publics srsquoy

attegravelent et la gouvernance reacutenoveacutee en place depuis 2009 a le meacuterite drsquoecirctre plus lisible pour

les diffeacuterents acteurs La gouvernance et la conduite des projets de SIS ne peuvent reposer

seulement sur lrsquoeacutechelon national et ainsi au niveau reacutegional les ARS et les GHT repreacutesentent

les appuis essentiels pour les eacutetablissements de santeacute

Pour reacuteussir agrave seacutecuriser lrsquoutilisation des TIC dans la pratique meacutedicale les pouvoirs

publics doivent eacutegalement reacutefleacutechir agrave la refonte du cadre juridique actuel En effet lrsquoinfluence

de sources de droit exteacuterieure lrsquoapparition de nouveaux domaines complexes et proteacuteiformes

(tel que les TIC en santeacute) ou encore la propension du gouvernement agrave leacutegifeacuterer de maniegravere

meacutediatique deacutegradent de plus en plus la qualiteacute de nos normes Aujourdrsquohui la complexiteacute

entourant les TIC en santeacute posent une difficulteacute majeure pour eacutetablir un cadre lisible et

compreacutehensible par tous les acteurs A la deacutecharge du leacutegislateur il est vrai que les enjeux

entourant les TIC en santeacute sont nombreux et varieacutes Il faut adopter une vision globale de la

matiegravere en prenant en compte les contraintes juridiques bien eacutevidemment mais eacutegalement

les contraintes eacutethiques eacuteconomiques et techniques Une reacuteforme srsquoimpose donc afin de

pouvoir apporter aux eacutetablissements lrsquoenvironnement juridique clair dont ils ont besoin

Neacuteanmoins la seacutecurisation de lrsquoutilisation des TIC dans la pratique meacutedicale peut ecirctre

amorceacutee par les eacutetablissements eux-mecircmes plus agrave mecircme drsquoidentifier leurs besoins en la

matiegravere En accompagnant lrsquoinformatisation de leurs pratiques par une reacuteflexion portant sur la

seacutecurisation de ces derniegraveres les eacutetablissements sont ainsi assureacute drsquoun deacuteveloppement serein

et sucircr de lrsquoutilisation des TIC

TITRE 2

LES ETABLISSEMENTS DE SANTE

ACTEURS CLES DE LA SECURISATION DE

LrsquoUTILISATION DES TIC A LrsquoHOcircPITAL

370

673 Comme le pointait agrave juste titre la Cour des Comptes dans son eacutetude de 2016 consacreacutee

agrave la modernisation des systegravemes drsquoinformation hospitaliers laquo loin de srsquoatteacutenuer la complexiteacute

des processus drsquoinformatisation des hocircpitaux a plutocirct tendance agrave srsquoaccroitre raquo801

Les

eacutetablissements de santeacute pour relever le deacutefi de lrsquoinformatisation doivent faire face agrave une

probleacutematique multiple non seulement ils doivent srsquoassurer drsquoinstaller un systegraveme

drsquoinformation hospitalier qui soit agrave la fois efficient et adapteacute aux besoins des professionnels

pour leur pratique quotidienne mais ils doivent eacutegalement veiller agrave ce que ce systegraveme

drsquoinformation respecte la leacutegislation en vigueur en matiegravere drsquoutilisation des TIC de traitement

des donneacutees agrave caractegravere sensible et de droits des usagers Trouver ce juste eacutequilibre nrsquoest pas

toujours aiseacute pour les eacutetablissements de santeacute qui doivent agir dans un cadre financier et

juridique contraint ce dernier eacutetant parfois comme nous le constatons depuis le deacutebut de nos

recherches fluctuant et difficile agrave appreacutehender Dans ce contexte particulier les

eacutetablissements de santeacute vont pouvoir jouer un rocircle essentiel dans la seacutecurisation de leurs

pratiques compensant ainsi les lacunes du leacutegislateur et des pouvoirs publics en la matiegravere

Ainsi les eacutetablissements disposent de plusieurs outils permettant drsquoencadrer au mieux

leur deacutemarche drsquoinformatisation les placcedilant ainsi au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

(chapitre premier) Le CHRU de Lille est drsquoailleurs un exemple de seacutecurisation reacuteussie qui

meacuterite que nous nous y attardions (chapitre second)

801 Cour des Comptes laquo La modernisation des systegravemes drsquoinformation hospitaliers une contribution agrave

lrsquoefficience du systegraveme de soins agrave renforcer raquo rapport sur lrsquoapplication des lois de financement de la seacutecuriteacute

sociale Chapitre VIII septembre 2016 p 330

371

Chapitre 1

Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la

seacutecurisation de leurs pratiques

674 Le deacuteveloppement des systegravemes drsquoinformation hospitaliers se reacutevegravele ecirctre un chantier

long et joncheacute drsquoembuches A titre drsquoexemple le CHU de ROUEN suite agrave un incident lors du

deacuteploiement de la prescription informatiseacutee au sein de son systegraveme drsquoinformation a ducirc

revenir de maniegravere transitoire au papier802

Aujourdrsquohui force est de constater que les

eacutetablissements de santeacute ne sont pas tous eacutegaux en termes de deacuteveloppement de leur systegraveme

drsquoinformation hospitalier Alors que certains peinent agrave deacuteployer leur dossier patient

informatiseacute (AP-HP CHU de Rouen)803

drsquoautres ont eu lrsquooccasion de deacutevelopper avec

succegraves une solution interne qursquoils peuvent deacutesormais diffuser au sein drsquoautres eacutetablissements

(Hospices civils de Lyon)804

675 Ces diffeacuterences en termes drsquoavanceacutee ont des sources multiples Ainsi il arrive parfois

comme le souligne la Cour des Comptes que laquo des deacuterives de deacutelais de coucircts et de qualiteacute se

cumulent raquo805

Cependant les eacutetablissements de santeacute ne sont pas totalement deacutemunis face agrave

ce deacutefi de taille qursquoest le deacuteveloppement de leur systegraveme drsquoinformation hospitalier Ainsi ils

vont pouvoir ecirctre les acteurs directs de la seacutecurisation de leurs pratiques

En amont drsquoabord puisqursquoils vont pouvoir inscrire le deacuteveloppement et la mise en place de

leur systegraveme drsquoinformation hospitalier dans une deacutemarche strateacutegique leur permettant ainsi

drsquoanticiper le mieux possible les difficulteacutes et les risques lieacutes agrave lrsquoinformatisation des pratiques

meacutedicales (Section I) Puis en aval une fois le systegraveme drsquoinformation hospitalier mis en

place les eacutetablissements vont pouvoir user drsquooutils juridiques et manageacuteriaux afin drsquoanticiper

certains risques et sanctionner des pratiques incorrectes (Section II) Dans la pratique bien

eacutevidemment ces diffeacuterentes solutions se superposent et devront ecirctre mises en œuvre

simultaneacutement

802 Id p 337

803 Id p 353

804 Id p 353

805 Id p 339

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

372

Section 1 Les pistes de seacutecurisation a priori

676 La mise en œuvre et le deacuteveloppement des TIC dans la pratique meacutedicale doit ecirctre

reacutefleacutechie en amont par les eacutetablissements de santeacute Les risques lieacutes agrave lrsquoutilisation des TIC

qursquoils soient drsquoordre juridique ou technique peuvent ecirctre anticipeacutes et les pratiques peuvent

degraves leur origine ecirctre seacutecuriseacutees Ainsi la mise en place drsquoune strateacutegie drsquoeacutetablissement autour

du deacuteveloppement du systegraveme drsquoinformation hospitalier est une condition essentielle agrave une

utilisation sereine des TIC (Paragraphe I) Par ailleurs les eacutetablissements de santeacute peuvent

eacutegalement faire appel agrave des experts dans le domaine qui sauront les guider et les

accompagner dans la mise en place de leur systegraveme drsquoinformation hospitalier (Paragraphe II)

sect1 La gestion strateacutegique de lrsquoinformatisation agrave lrsquohocircpital

677 Lrsquoensemble des applications informatiques utiliseacutees agrave lrsquohocircpital qursquoil srsquoagisse des

logiciels meacutedicaux ou des simples logiciels administratifs (gestion de la paie par exemple ou

de la facturation) srsquoorganise dans le cadre preacutecis du Systegraveme drsquoInformation Hospitalier (SIH)

Il nous est neacutecessaire de deacutefinir ce concept de SIH (A) avant de reacutefleacutechir aux modaliteacutes

permettant de geacuterer de maniegravere strateacutegique son deacuteveloppement (B)

A Le Systegraveme drsquoinformation hospitalier

1) Bref rappel historique

678 Le systegraveme drsquoinformation hospitalier tel qursquoil existe aujourdrsquohui au sein des

eacutetablissements de santeacute a mis du temps agrave se deacutevelopper Ce sont les fonctions purement

administratives qui dans un premier temps ont eacuteteacute informatiseacutees Ainsi certaines fonctions

ayant trait agrave la gestion des ressources humaines (la paie notamment) mais eacutegalement les

fonctions financiegraveres (la facturation ou encore la comptabiliteacute) ont eacuteteacute informatiseacutees par le

biais notamment drsquoapplication deacuteveloppeacutees au niveau national806

806 ANAP laquo Audit des systegravemes drsquoinformation hospitaliers aupregraves drsquoeacutetablissements repreacutesentatifs raquo rapport

final mars 2014 p 13

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

373

679 En 1972 le statut des syndicats inter-hospitaliers est creacuteeacute807

Ce type de coopeacuteration se

deacuteveloppe alors afin de mutualiser les efforts et les moyens en matiegravere drsquoinformatique

hospitaliegravere Les centres Reacutegionaux de lrsquoInformatique Hospitaliegravere (CRIH) apparaissent agrave la

mecircme eacutepoque Il srsquoagit de structures publiques qui laquo sont en charge drsquoassurer le

deacuteveloppement la maintenance et lrsquoexploitation de lrsquoinformatique hospitaliegravere raquo808 Ce sont

les CRIH qui dans un premier temps vont deacutevelopper et proposer des solutions logicielles

aux eacutetablissements de santeacute Cependant agrave partir de 1989 le marcheacute va srsquoouvrir aux industriels

du secteur priveacute

680 Par ailleurs en 1982 la creacuteation du Programme de Meacutedicalisation des Systegravemes

drsquoInformation (PMSI) va renforcer la neacutecessiteacute pour les eacutetablissements de srsquoinformatiser de

maniegravere fiable afin de recueillir les donneacutees relatives agrave lrsquoactiviteacute meacutedicale et les transmettre

aux autoriteacutes compeacutetentes En effet le nouveau mode de financement de lrsquoactiviteacute agrave savoir le

budget global introduit par Jean de KERVASDOUE (alors Directeur des Hocircpitaux)809

impose aux eacutetablissements de santeacute de valoriser au mieux leur activiteacute en tenant un releveacute le

plus preacutecis possible de celle-ci Ce ne sont toutefois que les preacutemisses du PMSI qui sera

geacuteneacuteraliseacute en 1995810

681 Puis apregraves le deacuteveloppement de lrsquooffre informatique relative au secteur meacutedico-

technique (biologie et imagerie) entre 1990 et 2000 crsquoest la production de soins qui va

commencer agrave ecirctre informatiseacutee agrave partir de 2000 Cette informatisation ne trouve cependant pas

sa source dans une volonteacute drsquoameacuteliorer la prise en charge ou drsquoinformatiser de maniegravere

intensive la pratique meacutedicale La justification est purement meacutedico-eacuteconomique En effet

avec la loi de financement pour 2004 apparait la tarification agrave lrsquoactiviteacute811

deacutesormais les

ressources des eacutetablissements de santeacute deacutependent de leur activiteacute Le deacuteveloppement de

lrsquoinformatique et notamment de lrsquoinformatique meacutedicale devient alors aux yeux des

807 Deacutecret ndeg72-353 du 2 mai 1972 relatif agrave la creacuteation des syndicats inter-hospitaliers et agrave leurs conseils

dadministration JORF du 4 mai 1972 p 4605 808

ANAP laquo Audit des systegravemes drsquoinformation hospitaliers aupregraves drsquoeacutetablissements repreacutesentatifs raquo op cit p

13 809

Ancien nom de lrsquoactuelle Direction Geacuteneacuterale de lrsquoOffre de Soins (DGOS) 810

Arrecircteacute du 20 septembre 1994 relatif au recueil et au traitement des donneacutees dactiviteacute meacutedicale et de coucirct

viseacutees agrave larticle L 710-5 du Code de la santeacute publique par les eacutetablissements de santeacute publics et priveacutes viseacutes aux

articles L 714-1 L 715-5 du Code de la santeacute publique et aux articles L 162-23 L 162-23-1 et L 162-25 du

Code de la Seacutecuriteacute Sociale et agrave la transmission aux services de lEacutetat et aux organismes dassurance maladie

dinformations issues de ces traitements JORF ndeg 242 18 octobre 1994 p 14761 811

Loi ndeg 2003-1199 du 18 deacutecembre 2003 de financement de la seacutecuriteacute sociale pour 2004 JORF ndeg293 19

deacutecembre 2003 p 21641

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

374

eacutetablissements de santeacute un veacuteritable enjeu strateacutegique Les eacutetablissements de santeacute aideacutes et

motiveacutes par le plan hocircpital 2007 vont donc se lancer dans lrsquoinformatisation de la production

de soins de maniegravere acceacuteleacutereacutee

Par ailleurs et comme nous lrsquoavons vu preacuteceacutedemment les politiques nationales

incitatives vont se deacutevelopper poussant les eacutetablissements de santeacute agrave deacutevelopper leur systegraveme

drsquoinformation hospitalier

2) Tentative de deacutefinition de la notion de systegraveme drsquoinformation hospitalier

La notion de systegraveme drsquoinformation hospitalier peut agrave premiegravere vue paraicirctre assez

vague Pour comprendre les enjeux mais eacutegalement les difficulteacutes lieacutees agrave sa mise en place

ainsi qursquoagrave sa seacutecurisation il est donc neacutecessaire de tenter drsquoen deacutefinir les contours

682 La circulaire du 6 janvier 1989 relative agrave lrsquoinformatisation des hocircpitaux publics812

preacutecise que le systegraveme drsquoinformation hospitalier peut ecirctre deacutefini comme laquo lensemble des

informations de leurs regravegles de circulation et de traitement neacutecessaires agrave son fonctionnement

quotidien agrave ses modes de gestion et deacutevaluation ainsi quagrave son processus de deacutecision

strateacutegique raquo Dans son audit des systegravemes drsquoinformation hospitaliers publieacute en mars 2014813

lrsquoANAP revient sur la deacutefinition drsquoun systegraveme drsquoinformation hospitalier Ainsi le rapport

preacutecise que le systegraveme drsquoinformation hospitalier qui ne peut se reacuteduire au seul systegraveme

informatique laquo est la combinaison drsquoorganisations avec les Technologies de lrsquoInformation et

de la Communication raquo814

A lrsquoappui de cette deacutefinition le rapport cite lrsquoauteur R De

COURCY pour lequel laquo un systegraveme drsquoinformation (SI) est un ensemble organiseacute de

ressources (mateacuteriels logiciels personnel donneacutees et proceacutedures) qui permet de collecter

regrouper classifier traiter et diffuser de lrsquoinformation dans un environnement donneacute raquo815

683 Drsquoun point de vue strictement technique un SIH va se construire agrave partir de briques

fonctionnelles les pro-logiciels Ces briques sont ensuite assembleacutees les unes aux autres

812 Circulaire ndeg 275 du 6 janvier 1989 relative agrave lrsquoinformatisation des hocircpitaux publics non parue au JORF

813ANAP laquo Audit des systegravemes drsquoinformation hospitaliers aupregraves drsquoeacutetablissements repreacutesentatifs raquo rapport final

mars 2014 814

Id p 11 815

Ibid citant DE COURCY (R) Les systegravemes drsquoinformation en reacuteadaptation Queacutebec Reacuteseau international

CIDIH et facteurs environnementaux 1992 ndeg 5 vol 1-2 p 7-10

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

375

chacune eacutetant classeacutee au sein drsquoun domaine fonctionnel Le rapport de lrsquoANAP tente avec

succegraves selon nous de scheacutematiser lrsquoorganisation en briques fonctionnelles drsquoun SIH type816

Ainsi au sein drsquoun SIH nous pouvons retrouver en termes de domaines fonctionnels le

pilotage meacutedico-eacuteconomique la production de soins cliniques la production de soins medico-

technique et les fonctions support Au sein mecircme de ces domaines seront deacuteveloppeacutees des

briques fonctionnelles Toute la difficulteacute reacuteside dans lrsquoassemblage de ces briques

fonctionnelles entre elles En effet le systegraveme drsquoinformation hospitalier comme on peut le

constater va ecirctre composeacute de plusieurs centaines de logiciels diffeacuterents Or ces briques

associeacutees les unes aux autres ne forment que rarement un ensemble coheacuterent

Lrsquointeropeacuterabiliteacute encore inexistante des diffeacuterentes solutions logicielles est une cause de cette

difficulteacute Toutefois cette difficulteacute reacutesulte eacutegalement de la consideacuteration porteacutee aux SIH par

les directeurs drsquoeacutetablissement En effet leur vision actuelle des SIH est encore trop peu

strateacutegique

B Une gestion strateacutegique indispensable

Progressivement les directions drsquoeacutetablissement ont pris conscience des enjeux qui

entouraient le systegraveme drsquoinformation hospitalier Drsquoabord consideacutereacute comme un simple sujet

technique le SIH devient peu agrave peu un sujet strateacutegique Malgreacute tout tous les eacutetablissements

de santeacute nrsquoont pas agrave ce jour deacuteveloppeacute une reacuteelle strateacutegie autour de leur systegraveme

drsquoinformation

684 Dans son eacutetude de 2014 lrsquoANAP observe que laquo si des progregraves sont notables du

chemin reste encore agrave parcourir pour que le SIH trouve deacutefinitivement sa place au sein de la

strateacutegie de lrsquoeacutetablissement raquo817

Pour illustrer ses propos lrsquoANAP avance le fait

qursquoaujourdrsquohui encore le fonctionnement du SIH et ses possibles eacutevolutions ne sont pas pris

en compte dans lrsquoeacutelaboration du projet meacutedical drsquoeacutetablissement Or agrave une eacutepoque ougrave la

pratique meacutedicale srsquoinformatise il est eacutevident que les projets meacutedicaux doivent srsquoappuyer en

partie sur lrsquoexpertise des directions des systegravemes drsquoinformation (DSI)

816 Ce scheacutema est repris en annexe de nos travaux annexe I

817 ANAP laquo Audit des systegravemes drsquoinformation hospitaliers aupregraves drsquoeacutetablissements repreacutesentatifs raquo op cit p

23

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

376

685 Le constat reacutealiseacute par la Cour des Comptes agrave lrsquooccasion de son eacutetude nationale de 2016

consacreacutee aux systegravemes drsquoinformation hospitaliers818

est un peu plus nuanceacute En effet pour la

Cour des Comptes laquo les 41 eacutetablissements de lrsquoenquecircte se sont doteacutes drsquoune strateacutegie

informatique raquo819

La Cour souligne toutefois que laquo ce pilotage strateacutegique associe encore

insuffisamment lrsquoutilisateur raquo820

Autrement dit les outils deacuteveloppeacutes dans le cadre du SIH ne

sont pas toujours preacutesenteacutes en amont aux principaux utilisateurs ce qui peut se reacuteveacuteler parfois

tregraves bloquant agrave lrsquoissue drsquoun projet

Il apparaicirct alors essentiel pour les eacutetablissements de laquo penser les systegravemes

drsquoinformation comme un outil au service de la strateacutegie de lrsquoeacutetablissement assurer la stabiliteacute

des strateacutegies informatiques dans la dureacutee capitaliser sur une premiegravere expeacuterience

drsquoinformatisation maicirctriser la conduite de projet associer en continu les utilisateurs

anticiper les risques et inteacutegrer degraves la conception du projet les gains drsquoefficience

rechercheacutes raquo821

Dans son rapport lrsquoANAP identifie quatre deacuteterminants au bon deacuteveloppement des

SIH au sein des eacutetablissements de santeacute

686 En premier lieu lrsquoANAP considegravere que laquo la maturiteacute de la strateacutegie doit se traduire

par une inteacutegration systeacutematique du sujet SIH dans lrsquoensemble des projets de

lrsquoeacutetablissement raquo822

En effet le SIH ne doit plus ecirctre un simple outil servant la mise en œuvre

de projets internes mais bien un projet agrave part entiegravere Une culture du SIH doit ecirctre distilleacutee au

sein de lrsquoeacutetablissement et aupregraves de lrsquoensemble des personnels Pour cela lrsquoeacutetablissement de

santeacute doit donc drsquoabord eacutelaborer une strateacutegie autour du deacuteveloppement de son SIH

818 Cour des Comptes laquo La modernisation des systegravemes drsquoinformation hospitaliers une contribution agrave

lrsquoefficience du systegraveme de soins agrave renforcer raquo Rapport sur lrsquoapplication des lois de financement de la seacutecuriteacute

sociale Chapitre VIII op cit 819

Id p 333 820

Ibid 821

Rapport sur lrsquoapplication des lois de financement de la seacutecuriteacute sociale Chapitre VIII laquo La modernisation des

systegravemes drsquoinformation hospitaliers une contribution agrave lrsquoefficience du systegraveme de soins agrave renforcer raquo Cour des

Comptes septembre 2016 p 360 822

ANAP laquo Audit des systegravemes drsquoinformation hospitaliers aupregraves drsquoeacutetablissements repreacutesentatifs raquo op cit p

35

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

377

composeacutee drsquoun scheacutema directeur des systegravemes drsquoinformation (SDSI)823

dont la mise en œuvre

sera superviseacutee par un comiteacute strateacutegique

687 Mais la strateacutegie nrsquoest pas le seul deacuteterminant au succegraves du deacuteveloppement drsquoun SIH

Il faut eacutegalement que les professionnels soient associeacutes agrave ce deacuteveloppement de maniegravere active

Par exemple les groupes de travail doivent ecirctre composeacutes de professionnels de terrain bien

eacutevidemment inteacuteresseacutes par lrsquoinformatique Ce sont ces professionnels qui feront le lien entre

la Direction des Systegravemes drsquoInformation et les utilisateurs

688 La maturiteacute des logiciels et de lrsquointeropeacuterabiliteacute est le troisiegraveme deacuteterminant au bon

deacuteveloppement des SIH selon lrsquoANAP En effet le SIH est composeacute de nombreuses briques

fonctionnelles et de plusieurs centaines de logiciels Il est donc plus que neacutecessaire de

reacutefleacutechir en termes drsquourbanisation du SIH afin que le systegraveme construit soit coheacuterent

fonctionnel et surtout communiquant

689 Enfin le dernier deacuteterminant concerne la meacutethode deacuteveloppeacutee pour mettre en place le

SIH Il est neacutecessaire que la gestion de projet soit rigoureuse et prenne notamment le temps

drsquoidentifier les impacts de lrsquoinformatisation cadrer et prioriser les projets donner un rythme

au deacuteploiement et ne pas oublier de mettre en place une deacutemarche de conduite du

changement En effet trop souvent les eacutetablissements de santeacute ont consideacutereacute que crsquoeacutetait agrave

lrsquoinformatique de srsquoadapter aux pratiques Or aujourdrsquohui il est neacutecessaire que les pratiques

eacutevoluent gracircce agrave lrsquoinformatique Il est donc essentiel pour cela que les organisations actuelles

srsquoadaptent et integravegrent pleinement lrsquoinformatique Lrsquoeacutetablissement de santeacute devra donc veiller

agrave lrsquoaccompagnement manageacuterial de lrsquoinformatisation

823 Le rapport de la Cour des Comptes preacutecise agrave ce propos que la plupart des eacutetablissements de son enquecircte

disposaient drsquoun tel scheacutema

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

378

sect 2 Lrsquoappui sur des ressources qualifieacutees

690 Le deacuteveloppement drsquoun SIH neacutecessite de hautes connaissances techniques Les

directeurs des eacutetablissements de santeacute doivent donc srsquoentourer des compeacutetences neacutecessaires

afin de mener agrave bien lrsquoinformatisation des fonctions administratives et meacutedicales de leurs

eacutetablissements

Les eacutetablissements peuvent alors faire le choix de recruter des experts informatiques

afin de les inteacutegrer directement agrave leurs eacutequipes (A) Ils peuvent eacutegalement faire appel sous

certaines conditions agrave de socieacuteteacutes exteacuterieures qui pourront alors les accompagner dans leur

deacutemarche de deacuteveloppement du SIH (B) Drsquoune maniegravere geacuteneacuterale les eacutetablissements

srsquoappuient sur ces deux possibiliteacutes afin de renforcer lrsquoexpertise relative aux SIH en leur sein

A Le recrutement de compeacutetences speacutecialiseacutees

691 Les eacutetablissements de santeacute dans le cadre de la mise en place de leur strateacutegie

informatique doivent srsquoentourer drsquoexperts Cependant le recrutement de compeacutetences

speacutecialiseacutees et notamment drsquoingeacutenieurs informatiques reste un deacutefi de taille pour les

eacutetablissements de santeacute A ce sujet la Cour des Comptes observe dans son rapport de

septembre 2016824

que certains eacutetablissements tels que lrsquoAP-HP le CHU de Saint Etienne ou

encore le Groupe hospitalier public du sud de lrsquoOise ont rencontreacute de reacuteelles difficulteacutes agrave

assurer de tels recrutements les amenant agrave se deacutetacher des statuts de la fonction publique

hospitaliegravere825

692 Il est vrai que les statuts de la fonction publique hospitaliegravere peuvent parfois ecirctre un

obstacle au recrutement de personnel hautement speacutecialiseacute Pour comprendre les raisons de

ces difficulteacutes il nous faut nous pencher sur les regravegles applicables au sein de la fonction

publique hospitaliegravere en matiegravere de recrutement du personnel

824 Cour des Comptes laquo La modernisation des systegravemes drsquoinformation hospitaliers une contribution agrave

lrsquoefficience du systegraveme de soins agrave renforcer raquo Rapport sur lrsquoapplication des lois de financement de la seacutecuriteacute

sociale Chapitre VIII op cit 825

Id p 334

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

379

Le principe qui est par ailleurs le mecircme au sein de toutes les fonctions publiques est

celui du recrutement de personnel titulaire de la fonction publique En effet lrsquoarticle 3 de la

loi Le Pors826

dispose que laquo sauf deacuterogation preacutevue par une disposition leacutegislative les

emplois civils permanents de lEtat des reacutegions des deacutepartements des communes et de leurs

eacutetablissements publics agrave caractegravere administratif sont agrave lexception de ceux reacuteserveacutes aux

magistrats de lordre judiciaire et aux fonctionnaires des assembleacutees parlementaires occupeacutes

soit par des fonctionnaires reacutegis par le preacutesent titre soit par des fonctionnaires des

assembleacutees parlementaires des magistrats de lordre judiciaire ou des militaires dans les

conditions preacutevues par leur statut raquo

693 Le leacutegislateur a cependant preacutevu quelques exceptions permettant dans certains cas

aux eacutetablissements publics de santeacute de faire appel agrave des agents recruteacutes par voie contractuelle

Ainsi lrsquoarticle 9-1 de la loi ndeg 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires

relatives agrave la fonction publique hospitaliegravere827

preacutevoit que laquo les eacutetablissements peuvent

recruter des agents contractuels pour assurer le remplacement momentaneacute de fonctionnaires

ou dagents contractuels autoriseacutes agrave exercer leurs fonctions agrave temps partiel ou indisponibles

[hellip] Le contrat est conclu pour une dureacutee deacutetermineacutee Il est renouvelable par deacutecision

expresse dans la limite de la dureacutee de labsence de lagent agrave remplacer raquo Lrsquoarticle poursuit

en preacutecisant que laquo pour les besoins de continuiteacute du service des agents contractuels peuvent

ecirctre recruteacutes pour faire face agrave une vacance temporaire demploi dans lattente du recrutement

dun fonctionnaire raquo Enfin laquo les eacutetablissements peuvent recruter des agents contractuels

pour faire face agrave un accroissement temporaire dactiviteacute lorsque celui-ci ne peut ecirctre assureacute

par des fonctionnaires raquo Lrsquoarticle 9 de cette mecircme loi dispose quant agrave lui que laquo par

deacuterogation agrave larticle 3 du titre Ier du statut geacuteneacuteral les emplois permanents mentionneacutes au

premier alineacutea de larticle 2 peuvent ecirctre occupeacutes par des agents contractuels lorsque la

nature des fonctions ou les besoins du service le justifient notamment lorsquil nexiste pas de

corps de fonctionnaires hospitaliers susceptibles dassurer ces fonctions ou lorsquil sagit de

fonctions nouvellement prises en charge par ladministration ou neacutecessitant des

connaissances techniques hautement speacutecialiseacutees raquo Ainsi les eacutetablissements de santeacute peuvent

recruter par voie contractuelle des ingeacutenieurs informatiques qualifieacutes agrave partir du moment ougrave

826 Loi ndeg 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires Loi dite loi Le Pors JORF

du 14 juillet 1983 p 2174 827

Loi ndeg 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives agrave la fonction publique hospitaliegravere

JORF du 11 janvier 1986 p 535

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

380

ils justifient que la nature des fonctions qui seront exerceacutees neacutecessite des connaissances

techniques hautement speacutecialiseacutees

694 Cependant lrsquoautre difficulteacute rencontreacutee par les eacutetablissements de santeacute dans le cadre

du recrutement concerne la reacutemuneacuteration des agents En effet par principe les agents

titulaires de la fonction publique ont droit agrave laquo une reacutemuneacuteration comprenant le traitement

lindemniteacute de reacutesidence le suppleacutement familial de traitement ainsi que les indemniteacutes

institueacutees par un texte leacutegislatif ou reacuteglementaire Les indemniteacutes peuvent tenir compte des

fonctions et des reacutesultats professionnels des agents ainsi que des reacutesultats collectifs des

services Sy ajoutent les prestations familiales obligatoires raquo828

Ainsi en ce qui concerne les

agents qui seraient titulaires de la fonction publique lrsquoeacutetablissement de santeacute nrsquoa pas de marge

de manœuvre et devra en termes de reacutemuneacuteration srsquoen tenir aux dispositions statutaires

695 Pour les contractuels en revanche les eacutetablissements vont pouvoir se permettre

drsquoaccorder des reacutemuneacuterations supeacuterieures agrave celles preacutevues par les grilles statutaires En effet

lrsquoarticle 1-2 du deacutecret ndeg 91-155 du 6 feacutevrier 1991829

preacutevoit la chose suivante laquo Le montant

de la reacutemuneacuteration est fixeacute par lautoriteacute administrative en prenant en compte notamment

les fonctions occupeacutees la qualification requise pour leur exercice la qualification deacutetenue

par lagent ainsi que son expeacuterience raquo La reacutemuneacuteration peut donc pour les agents

contractuels ecirctre fixeacutee contractuellement et elle est laisseacutee en theacuteorie agrave la libre appreacuteciation

de lrsquoautoriteacute administrative Toutefois la jurisprudence est venue apporter un beacutemol agrave ce

principe Ainsi pour reacutemuneacuterer un agent contractuel un employeur public se doit de prendre

en compte la reacutemuneacuteration des agents titulaires exerccedilant des fonctions eacutequivalentes ainsi que

le niveau de diplocircme et lrsquoexpeacuterience professionnelle des autres agents contractuels qui

exercent des fonctions eacutequivalentes830

696 Par ailleurs la liberteacute drsquoaction de lrsquoemployeur public en matiegravere drsquooctroi drsquoune prime agrave

un agent contractuel a eacuteteacute soumise agrave questionnement Le Conseil drsquoEtat dans une deacutecision en

date du 23 mars 2009 preacutecise que les agents contractuels de la fonction publique hospitaliegravere

828 Article 20 de la loi Le Pors

829 Deacutecret ndeg 91-155 du 6 feacutevrier 1991 relatif aux dispositions geacuteneacuterales applicables aux agents contractuels des

eacutetablissements mentionneacutes agrave larticle 2 de la loi ndeg 86-33 du 9 janvier 1986 modifieacutee portant dispositions

statutaires relatives agrave la fonction publique hospitaliegravere JORF ndeg 35 9 feacutevrier 1991 p 2058 830

CAA Marseille 9 avril 2013 ndeg11MA00840

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

381

ne pouvaient se voir octroyer le beacuteneacutefice de la prime de service831

Srsquoest alors poseacutee la

question de lrsquoattribution drsquoautres primes agrave des agents contractuels Une reacuteponse claire a eacuteteacute

apporteacutee agrave cette question par lrsquoinstruction ndeg DGOSRH42015108 du 2 avril 2015 relative au

reacutegime indemnitaire applicable aux agents contractuels des eacutetablissements relevant de la

fonction publique hospitaliegravere832

Ce texte faisait suite aux nombreuses sollicitations du

Ministre de la santeacute agrave ce sujet tant par les organisations syndicales que par les eacutetablissements

de santeacute ayant fait lrsquoobjet drsquoun controcircle de la Cour des Comptes au sujet des modaliteacutes de

reacutemuneacuteration des agents contractuels et plus particuliegraverement le versement des primes et

indemniteacutes Le raisonnement tenu par la DGOS dans cette instruction est le suivant selon les

dispositions du deacutecret ndeg 91-155 du 6 feacutevrier 1991833

les modaliteacutes de reacutemuneacuteration de

lrsquoagent contractuel sont fixeacutees par leur contrat Lrsquoarticle 20 de la loi Le Pors quant agrave lui pose

le principe selon lequel il nrsquoy a pas de prime ou drsquoindemniteacute sans texte leacutegislatif ou

reacuteglementaire Or selon la DGOS laquo aucune disposition de la loi du 9 janvier 1986

susmentionneacutee nrsquoinstaure que les agents contractuels de la FPH sont soumis aux dispositions

de cet article Par ailleurs lrsquoarticle 54 du deacutecret du 6 feacutevrier 1991 rend applicables agrave ces

agents les regravegles fixeacutees par le deacutecret du 24 octobre 1985 susmentionneacute qui se borne agrave deacutefinir

chacun des eacuteleacutements de la reacutemuneacuteration principale mentionneacutee agrave lrsquoarticle 20 du titre Ier du

statut geacuteneacuteral et agrave preacuteciser leurs modaliteacutes de calcul Ainsi lrsquoabsence de renvoi agrave cet article

20 ne signifie pas une interdiction mais une possibiliteacute de verser des primes et indemniteacutes aux

agents contractuels de la FPH sans que celles-ci soient neacutecessairement institueacutees par un texte

leacutegislatif ou reacuteglementaire raquo834

Ainsi et comme lrsquoa fixeacute la jurisprudence sans texte

reacuteglementaire certains eacuteleacutements de la situation des agents contractuels peuvent ecirctre fixeacutes par

le biais du contrat835

En revanche seule lrsquoautoriteacute deacutetentrice du pouvoir de nomination sous

laquelle sont placeacutes les agents contractuels pourra instaurer une prime en leur faveur836

697 Sous reacuteserve de respecter lrsquoensemble de ces dispositions un eacutetablissement de santeacute

pourra donc embaucher des agents contractuels et leur accorder une prime Cette souplesse

831 CE 23 mars 2009 ndeg312446

832 Instruction ndeg DGOSRH42015108 du 2 avril 2015 relative au reacutegime indemnitaire applicable aux agents

contractuels des eacutetablissements relevant de la fonction publique hospitaliegravere non parue au JORF 833

Deacutecret ndeg 91-155 du 6 feacutevrier 1991 relatif aux dispositions geacuteneacuterales applicables aux agents contractuels des

eacutetablissements mentionneacutes agrave larticle 2 de la loi ndeg 86-33 du 9 janvier 1986 modifieacutee portant dispositions

statutaires relatives agrave la fonction publique hospitaliegravere JORF ndeg35 du 9 feacutevrier 1991 p 2058 834

Id p 2 835

CE Ass 30 janvier 1997 avis ndeg 359964 836

CE 23 mars 2009 ndeg 312446

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

382

accordeacutee aux eacutetablissements de santeacute va leur permettre dans une certaine mesure drsquoaccroitre

leur attractiviteacute vis-agrave-vis drsquoemployeurs priveacutes Ils pourront donc envisager de recruter des

compeacutetences hautement speacutecialiseacutees dans le cadre de la mise en place de leur SIH

B Lrsquoappel aux ressources exteacuterieures

698 Pour deacutevelopper leur SIH de maniegravere seacutecuriseacutee et peacuterenne les eacutetablissements de santeacute

peuvent eacutegalement faire le choix de faire appel agrave des ressources exteacuterieures Ce choix peut se

traduire par lrsquoachat de prestations ou drsquooutils informatiques aupregraves de socieacuteteacutes exteacuterieures ou

par la mutualisation des ressources informatiques entre eacutetablissements de santeacute Cette

possibiliteacute ayant deacutejagrave fait lrsquoobjet drsquoune eacutetude preacuteceacutedemment837

nous nous focaliserons ici sur

les modaliteacutes drsquoappui sur des socieacuteteacutes exteacuterieures

699 Les eacutetablissements de santeacute nrsquoont pas pour mission principale de deacutevelopper des

solutions informatiques ni de les mettre en œuvre dans le cadre drsquoun SIH coheacuterent

Cependant ils sont porteurs drsquoun besoin bien deacutefini et parfois mecircme drsquoun projet preacutecis A ce

titre ils sont les maicirctres drsquoouvrage (ou maicirctrise drsquoouvrage) du projet Crsquoest agrave eux qursquoil revient

de deacutefinir lrsquoobjectif du projet son calendrier et le budget qui lui sera consacreacute Cependant le

maicirctre drsquoouvrage nrsquoa pas toujours les compeacutetences techniques neacutecessaires pour mener agrave bien

son projet Crsquoest pourquoi il doit faire appel aux compeacutetences drsquoun maicirctre drsquoœuvre Celui-ci

aura pour responsabiliteacute de reacutealiser le projet dans les deacutelais et les coucircts fixeacutes Par ailleurs

lrsquoeacutetablissement de santeacute en tant que maitre drsquoouvrage pourra srsquoentourer drsquoune assistance agrave la

maicirctrise drsquoouvrage ayant pour mission de lrsquoaccompagner dans la gestion et le pilotage du

projet

Ainsi la conception du SIH et notamment la conception de nouveaux logiciels qui

vont venir lrsquoalimenter peut ecirctre confieacutee agrave des socieacuteteacutes prestataires (1) Lrsquoeacutetablissement peut

eacutegalement ecirctre accompagneacute dans sa gestion strateacutegique du SIH par une socieacuteteacute de conseil (2)

837 V supra ndeg 222 agrave 224

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

383

1) Lrsquoaide agrave la conception du SIH

700 La conception de logiciels informatiques est un secteur industriel en plein essor qui

neacutecessite par ailleurs une expertise technique et scientifique de haut niveau A lrsquoheure

actuelle rares sont les eacutetablissements qui ont fait le choix de deacutevelopper en interne une

solution logicielle permettant de reacutepondre agrave leurs besoins Le rapport de la Cour des Comptes

publieacute en septembre 2016 cite cependant lrsquoexemple reacuteussi des Hospices Civils de Lyon (HCL)

qui ont fait le choix drsquoecirctre leur propre eacutediteur en ce qui concerne le dossier meacutedical

informatiseacute Ainsi agrave partir de 2012 les HCL ont deacuteveloppeacute leur propre dossier patient

informatiseacute nommeacute Easily Le deacuteploiement de cette solution srsquoest fait par ailleurs sans

retard et la solution convient aux utilisateurs838

Mais ce cas reste une exception et en grande

majoriteacute les eacutetablissements de santeacute font le choix de faire appel agrave des eacutediteurs pour leur

fournir les solutions logicielles dont ils ont besoin

701 A lrsquoheure actuelle le choix en la matiegravere est assez vaste En effet plusieurs centaines

drsquoeacutediteurs839

de solutions logicielles sont actuellement preacutesents sur le marcheacute franccedilais

Cependant ces acteurs preacutesentent la particulariteacute drsquoecirctre principalement de petites entreprises

certains se speacutecialisant par ailleurs dans des marcheacutes dits de niche Cette surspeacutecialisation

pose une difficulteacute importante aux eacutetablissements de santeacute qui nrsquoauront aucune visibiliteacute sur

la peacuterenniteacute de ce type de structure et donc sur la solution mise en place A titre drsquoexemple le

CHU de Nicircmes avait choisi son eacutediteur pour le dossier patient informatiseacute en 2009 Cet

eacutediteur a eacuteteacute racheteacute en 2011 et a proposeacute de nouvelles solutions logicielles alors que le

marcheacute passeacute par le CHU de Nicircmes eacutetait encore en cours et la solution initiale en cours de

deacuteploiement Cette opposition entre le titulaire du marcheacute et le CHU de Nicircmes a meneacute agrave un

contentieux entre les parties reacutegleacute en 2014 mais entraicircnant de fortes pertes financiegraveres pour

le CHU de Nicircmes840

838 Cour des Comptes laquo La modernisation des systegravemes drsquoinformation hospitaliers une contribution agrave

lrsquoefficience du systegraveme de soins agrave renforcer raquo rapport sur lrsquoapplication des lois de financement de la seacutecuriteacute

sociale Chapitre VIII op cit p 353 839

Plus de 300 selon le rapport de lrsquoANAP contre 277 selon le rapport de la Cour des Comptes 840

Cour des Comptes laquo La modernisation des systegravemes drsquoinformation hospitaliers une contribution agrave

lrsquoefficience du systegraveme de soins agrave renforcer raquo Rapport sur lrsquoapplication des lois de financement de la seacutecuriteacute

sociale Chapitre VIII op cit p 352

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

384

Face agrave la techniciteacute du sujet et agrave lrsquoampleur de lrsquooffre sur le marcheacute parfois peu visible

il peut srsquoaveacuterer neacutecessaire pour les eacutetablissements de santeacute drsquoecirctre accompagneacute en amont du

choix de la solution au moment mecircme de la deacutefinition de leurs besoins

2) Lrsquoappui agrave la maicirctrise drsquoouvrage

702 Dans le cadre de son rapport rendu en septembre 2016 la Cour des Comptes a

souligneacute les faiblesses actuelles des maicirctrises drsquoouvrage des projets informatiques deacuteveloppeacutes

par les eacutetablissements de santeacute841

La maicirctrise drsquoouvrage est pourtant fondamentale

puisqursquoelle est le point de deacutepart de lrsquoensemble du projet Elle se doit drsquoecirctre solide si

lrsquoeacutetablissement souhaite voir son projet meneacute agrave bien Ainsi la Cour des Comptes au cours de

ses controcircles a pu constater les lacunes suivantes laquo absence de reacuteunion des compeacutetences

techniques requises dimensionnement insuffisant des eacutequipes analyse imparfaite des besoins

compreacutehension insuffisante des attentes des utilisateurs tout au long du deacuteploiement du

projet raquo842

703 Ces difficulteacutes ne sont pas sans conseacutequences puisqursquoune maicirctrise drsquoouvrage faible va

entrainer des retards dans le calendrier de deacuteploiement des solutions informatiques et surtout

des deacutepassements du budget fixeacute A ce sujet le constat est sans appel agrave lrsquoheure actuelle et en

ce qui concerne les eacutetablissements controcircleacutes par la Cour des Comptes agrave lrsquooccasion de son

enquecircte relative aux SIH843

la moitieacute des opeacuterations financeacutees par le plan hocircpital 2012 ont

deacutepasseacute agrave la fois les enveloppes financiegraveres et les calendriers fixeacutes844

704 A la suite de son audit des SIH lrsquoANAP avait quant agrave elle constateacute que les directions

des systegravemes drsquoinformation eacutetaient encore laquo trop souvent deacutemunies pour geacuterer et piloter les

projets en lien avec les professionnels meacutetiers et industriels raquo845

Alors que les ressources

841 Cour des Comptes laquo La modernisation des systegravemes drsquoinformation hospitaliers une contribution agrave

lrsquoefficience du systegraveme de soins agrave renforcer raquo Rapport sur lrsquoapplication des lois de financement de la seacutecuriteacute

sociale Chapitre VIII op cit p338 842

Id p 338 843

A lrsquooccasion de cette enquecircte la Cour des comptes a controcircleacute lrsquoAP-HP les HCL 4 CHU un CHR un EPSM

32 CH un centre de lutte contre le cancer un GIP et un GIE 844

Cour des comptes laquo La modernisation des systegravemes drsquoinformation hospitaliers une contribution agrave

lrsquoefficience du systegraveme de soins agrave renforcer raquo Rapport sur lrsquoapplication des lois de financement de la seacutecuriteacute

sociale Chapitre VIII op cit p 338 845

ANAP laquo Audit des systegravemes drsquoinformation hospitaliers aupregraves drsquoeacutetablissements repreacutesentatifs raquo op cit p

30

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

385

techniques en interne des eacutetablissements sont aujourdrsquohui preacutesentes la gestion de projet reste

une faiblesse des eacutequipes informatiques des eacutetablissements de santeacute

Lrsquoappel agrave une prestation drsquoappui agrave maicirctrise drsquoouvrage aupregraves drsquoune socieacuteteacute exteacuterieure

permettrait aux eacutetablissements drsquoeacuteviter ces eacutecueils Or aujourdrsquohui cela est encore rare846

les

eacutetablissements de santeacute nrsquoayant pas acquis le reacuteflexe de faire appel agrave un appui externe en ce

qui concerne la maicirctrise drsquoouvrage847

846 Cour des comptes laquo La modernisation des systegravemes drsquoinformation hospitaliers une contribution agrave

lrsquoefficience du systegraveme de soins agrave renforcer raquo Rapport sur lrsquoapplication des lois de financement de la seacutecuriteacute

sociale Chapitre VIII op cit p 333 847

ANAP laquo Audit des systegravemes drsquoinformation hospitaliers aupregraves drsquoeacutetablissements repreacutesentatifs raquo rapport

final mars 2014 p 30

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

386

Conclusion de la section

705 Avant mecircme de deacutevelopper le recours aux TIC et de les inteacutegrer agrave la pratique

quotidienne les eacutetablissements doivent reacutefleacutechir agrave la construction de leur Systegraveme

drsquoInformation Hospitalier Celle-ci doit se faire de maniegravere strateacutegique et la mise en place du

SIH doit devenir un projet agrave part entiegravere de lrsquoeacutetablissement de santeacute Cette vision strateacutegique

permettra aux eacutetablissements de santeacute drsquoanticiper des eacuteventuels aleacuteas et donc seacutecuriser en

amont lrsquoutilisation qui sera faite des TIC ainsi mises en place

Le deacuteveloppement peacuterenne du SIH passe eacutegalement par lrsquoappel agrave des ressources

expertes sur le sujet Ainsi le recrutement drsquoingeacutenieurs informatiques speacutecialiseacutes et le recours

agrave des socieacuteteacutes prestataires sont deux solutions envisageables pour les eacutetablissements de santeacute

afin de srsquoentourer des expertises neacutecessaires

Les solutions sont compleacutementaires et peuvent bien eacutevidemment ecirctre mises en œuvre

de maniegravere concomitante En effet mecircme en embauchant directement des ingeacutenieurs

informatiques experts dans leur domaine les eacutetablissements de santeacute ne souhaitent pas se

lancer dans la creacuteation et lrsquoeacutedition directe de solutions logicielles

Les eacutetablissements de santeacute doivent en tout eacutetat de cause penser agrave srsquoentourer des

ressources neacutecessaires et suffisantes afin de srsquoassurer de mener agrave bien et dans les meilleures

conditions le deacuteveloppement de leur SIH

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

387

Section 2 Les pistes de seacutecurisation a posteriori

706 Le deacuteveloppement drsquoun SIH structureacute va permettre aux eacutetablissements de santeacute

drsquointeacutegrer de maniegravere peacuterenne et seacutecuriseacutee les TIC agrave la pratique de ses professionnels

Cependant mettre agrave disposition un outil fiable et adapteacute ne fait pas tout A posteriori

lrsquoeacutetablissement de santeacute va pouvoir venir seacutecuriser leur utilisation quotidienne Pour cela il

dispose de deux types de leviers le levier juridique et le levier manageacuterial

Par le biais du levier juridique (paragraphe 1) lrsquoeacutetablissement de santeacute va pouvoir

rappeler voire parfois mecircme eacutedicter la regravegle en matiegravere de bon usage de lrsquooutil ainsi mis agrave

disposition Il pourra eacutegalement veiller agrave ce que les agents srsquoengagent agrave une utilisation

correcte des TIC Le levier manageacuterial (paragraphe 2) quant agrave lui va permettre agrave

lrsquoeacutetablissement de santeacute de former les agents agrave une utilisation adeacutequate des TIC et dans

lrsquohypothegravese drsquoune violation des regravegles eacutedicteacutees mettre en place des sanctions agrave lrsquoencontre de

lrsquoagent

sect1 Lrsquoutilisation drsquooutils juridiques

707 Pour les eacutetablissements publics de santeacute les enjeux drsquoune bonne utilisation des TIC

par ses agents sont multiples En premier lieu lrsquoeacutetablissement doit srsquoassurer que les outils sont

utiliseacutes de maniegravere agrave reacutealiser les missions qui lui sont propres (le soin la recherche et

lrsquoenseignement) Il doit srsquoassurer ensuite que cette utilisation permet drsquoassurer la continuiteacute

des soins la seacutecuriteacute des patients mais eacutegalement la confidentialiteacute des donneacutees de santeacute ainsi

que celle des donneacutees personnelles recueillies Enfin il est essentiel pour lrsquoeacutetablissement de

srsquoassurer qursquoil nrsquoest pas fait une utilisation indue abusive voire illeacutegale des outils

informatiques qursquoil met agrave disposition de ses agents En effet lrsquoeacutetablissement de santeacute pourrait

voir sa responsabiliteacute engageacutee du fait des fautes commises par ses agents dans le cadre de

lrsquoutilisation des TIC ou par le biais de lrsquoutilisation de ces outils Les eacutetablissements de santeacute

doivent donc trouver un eacutequilibre entre les risques qursquoils encourent du fait drsquoune potentielle

mauvaise utilisation des TIC par leurs agents et les conditions dans lesquelles ils souhaitent

que ces outils soient utiliseacutes afin de reacutepondre agrave leur mission premiegravere

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

388

Pour reacuteguler cela lrsquoeacutetablissement de santeacute a donc inteacuterecirct de faire le choix drsquoinstaurer

une limitation et un controcircle de lrsquoutilisation qui est faite des TIC par ses agents (A) Pour

accompagner cette deacutemarche il peut faire appel agrave un outil de droit souple de plus en plus

utiliseacute la charte informatique (B)

A Le controcircle et la limitation de lrsquoutilisation des TIC

laquo Ce sont moins les NTIC ndash nouvelles technologies de lrsquoinformation et de la communication ndash

qui mettent agrave lrsquoeacutepreuve le droit du travail que le droit du travail qui se manifeste ici

comme norme reacutegulatrice de lrsquoemploi des NTIC raquo848

708 Aujourdrsquohui il nrsquoest pas rare que le mateacuteriel informatique mis agrave disposition des agents

soit parfois utiliseacute agrave drsquoautres fins que le strict exercice de leurs missions professionnelles

Comme le soulignait Jean-Pierre GRIDEL849

dans son eacutetude consacreacutee agrave lrsquoutilisation de

lrsquooutil informatique mis agrave la disposition du salarieacute pour les besoins de son activiteacute

professionnelle lrsquooutil informatique est laquo susceptible de deacutetournement dans son utilisation raquo

Or contrairement aux cas ougrave il apparait clairement que le deacutetournement du mateacuteriel mis agrave

disposition doit ecirctre automatiquement sanctionneacute850

le deacutetournement de lrsquooutil informatique agrave

des fins priveacutees ne peut srsquoenvisager de la mecircme maniegravere

En effet dans ce contexte particulier les liberteacutes fondamentales des agents (1) vont se

confronter aux obligations professionnelles dont ils sont deacutebiteurs vis-agrave-vis de leur employeur

mais eacutegalement au pouvoir dont dispose lrsquoemployeur de controcircler voire restreindre

lrsquoutilisation qui peut ecirctre faite par ses agents des outils qursquoil leur met agrave disposition dans un but

purement professionnel (2)

848 LYON-CAEN Geacuterard laquo Deacutebat autour de lrsquoarrecirct Nikon France raquo Semaine Sociale Lamy nordm 1046 15 octobre

2001 Disponible sur [httplamylinelamyfr] consulteacute le 16 janvier 2017 849

GRIDEL Jean-Pierre laquo Lrsquoentreprise et lrsquoutilisation en justice de lrsquoinformation issue de lrsquooutil informatique

mis agrave la disposition du salarieacute pour les besoins de son activiteacute professionnelle En hommage agrave la haute meacutemoire

du professeur Pierre Catala raquo Communication commerce eacutelectronique ndeg 7-8 juillet 2016 eacutetude ndeg 13 850

V notamment en ce sens CE 6 Mai 2011 ndeg 330020 Dans cette deacutecision la Haute juridiction a rappeleacute

qursquolaquo un agent public qui deacutetourne de lobjet de sa mission un veacutehicule de service pour lutiliser agrave des fins

personnelles sans y ecirctre autoriseacute par ladministration commet une faute personnelle deacutetachable de lexercice de

ses fonctions raquo

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

389

1) Le droit agrave la vie priveacutee dans le cadre professionnel enjeux et limites

709 Lrsquoarticle 25 Septies de la loi Le Pors851

preacutevoit que laquo le fonctionnaire consacre

linteacutegraliteacute de son activiteacute professionnelle aux tacircches qui lui sont confieacutees raquo De mecircme par

principe le mateacuteriel professionnel mis agrave la disposition drsquoun agent par son employeur ne peut

faire lrsquoobjet que drsquoune utilisation strictement professionnelle et la jurisprudence considegravere que

lrsquoutilisation par un agent du mateacuteriel qui lui eacuteteacute fourni pour drsquoautres fins constitue une

faute852

Cependant en ce qui concerne lrsquoutilisation de la messagerie professionnelle (a) ainsi

que drsquoInternet et de lrsquoordinateur (b) ces principes souffrent de plusieurs exceptions et vont

ecirctre mis en regard de certaines liberteacutes fondamentales dont disposent tous les citoyens et donc

les agents dans le cadre de leurs fonctions professionnelles

a) La messagerie professionnelle

710 En droit priveacute crsquoest en 2001 agrave lrsquooccasion du ceacutelegravebre arrecirct laquo Nikon raquo853

que la Cour de

Cassation srsquoest prononceacutee pour la premiegravere fois sur la protection de la vie priveacutee sur le lieu

de travail A cette occasion les juges ont eu agrave se pencher sur la question de lrsquoutilisation de la

messagerie professionnelle agrave des fins personnelles par un salarieacute En lrsquoespegravece un salarieacute de la

socieacuteteacute Nikon France avait signeacute avec les socieacuteteacutes Nikon Corporation et Nikon Europe BV

un accord de confidentialiteacute lui interdisant de divulguer des informations confidentielles

communiqueacutees par ces deux socieacuteteacutes Quelques anneacutees plus tard le salarieacute a eacuteteacute licencieacute pour

faute grave agrave la suite notamment de lrsquoutilisation agrave des fins personnelles du mateacuteriel mis agrave

disposition par son employeur Saisi drsquoun pourvoi en cassation la Haute juridiction est venue

preacuteciser que laquo le salarieacute a droit mecircme au temps et au lieu de travail au respect de lrsquointimiteacute

de sa vie priveacutee que celle-ci implique en particulier le secret des correspondances que

lrsquoemployeur ne peut degraves lors sans violation de cette liberteacute fondamentale prendre

connaissance des messages personnels eacutemis par le salarieacute et reccedilus par lui gracircce agrave un outil

informatique mis agrave sa disposition pour son travail et ceci mecircme au cas ougrave lrsquoemployeur aurait

interdit une utilisation non professionnelle de lrsquoordinateur raquo Ainsi nous pouvons constater

851 Loi ndeg 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires Loi dite loi Le Pors JORF

14 juillet 1983 p 2174 852

CAA Douai 2 deacutecembre 2010 ndeg 09DA01118 853

Cass Soc ndeg99-42942 2 octobre 2001

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

390

que pour les magistrats de la Cour de Cassation laquo le droit principalement celui des liberteacutes

individuelles nrsquoa pas agrave srsquoincliner devant lrsquoeacutetat de la technologie crsquoest agrave la technologie de

srsquoadapter [hellip] aux exigences fondamentales du droit raquo854

711 Cet arrecirct vient poser le principe du respect de lrsquointimiteacute de la vie priveacutee au sein de la

sphegravere professionnelle en y appliquant de maniegravere stricte le droit au secret des

correspondances Pour reprendre les termes de Geacuterard LYON-CAEN855

le cloisonnement

entre vie priveacutee et vie professionnelle disparaicirct Cette deacutecision est parfaitement transposable

aux administrations publiques ougrave lrsquoagent pourra voir ses correspondances priveacutees proteacutegeacutees

par le secret des correspondances856

712 Ainsi lrsquoemployeur ne peut pas acceacuteder aux courriels de ses agents qui relegraveveraient de

la sphegravere priveacutee sous peine de risquer une condamnation peacutenale lrsquoatteinte au secret des

correspondances eacutetant reacuteprimeacutee notamment par les articles 226-15857

et 432-9858

du Code

peacutenal Cependant pour ecirctre proteacutegeacute par le secret de la correspondance il est neacutecessaire que

ces messages soient identifieacutes comme ayant un caractegravere priveacute En lrsquoabsence de reacuteelle

deacutefinition leacutegale malgreacute une tentative resteacutee lettre morte859

crsquoest agrave la deacutefinition construite par

les juges qursquoil faut srsquoen remette Ainsi ces derniers acceptent communeacutement de consideacuterer

comme eacutetant un message priveacute le courrier eacutelectronique dont lrsquoobjet preacutecise la mention

854 LYON-CAEN Geacuterard laquo Deacutebat autour de lrsquoarrecirct Nikon France raquo Semaine Sociale Lamy Nordm 1046 15

octobre 2001 disponible sur [httplamylinelamyfr] Consulteacute le 16 janvier 2017 855

Ibid 856

Article 1er

de la loi ndeg 91-646 du 10 juillet 1991 relative au secret des correspondances eacutemises par la voie des

communications eacutelectroniques JORF ndeg 162 13 juillet 1991 p 9167 857

Lrsquoarticle 226-15 du Code peacutenal dispose laquo le fait commis de mauvaise foi douvrir de supprimer de

retarder ou de deacutetourner des correspondances arriveacutees ou non agrave destination et adresseacutees agrave des tiers ou den

prendre frauduleusement connaissance est puni dun an demprisonnement et de 45000 euros damende Est

puni des mecircmes peines le fait commis de mauvaise foi dintercepter de deacutetourner dutiliser ou de divulguer des

correspondances eacutemises transmises ou reccedilues par la voie des teacuteleacutecommunications ou de proceacuteder agrave

linstallation dappareils conccedilus pour reacutealiser de telles interceptions raquo 858

Lrsquoarticle 432-9 du Code peacutenal dispose laquo le fait par une personne deacutepositaire de lautoriteacute publique ou

chargeacutee dune mission de service public agissant dans lexercice ou agrave loccasion de lexercice de ses fonctions

ou de sa mission dordonner de commettre ou de faciliter hors les cas preacutevus par la loi le deacutetournement la

suppression ou louverture de correspondances ou la reacuteveacutelation du contenu de ces correspondances est puni de

trois ans demprisonnement et de 45 000 euros damende Est puni des mecircmes peines le fait par une personne

viseacutee agrave lalineacutea preacuteceacutedent ou un agent dun exploitant de reacuteseaux ouverts au public de communications

eacutelectroniques ou dun fournisseur de services de teacuteleacutecommunications agissant dans lexercice de ses fonctions

dordonner de commettre ou de faciliter hors les cas preacutevus par la loi linterception ou le deacutetournement des

correspondances eacutemises transmises ou reccedilues par la voie des teacuteleacutecommunications lutilisation ou la divulgation

de leur contenu raquo 859

V notamment en ce sens la proposition de loi seacutenatoriale ndeg 385 de juin 2006 dont le but eacutetait de deacutefinir le

courrier eacutelectronique professionnel

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

391

personnel ou priveacute860

Au contraire un message agrave caractegravere mixte eacutemis par un agent

public sur sa messagerie professionnelle et contenant drsquoune part des eacuteleacutements drsquoordre

professionnel et drsquoautre part des opinions personnelles au sujet de lrsquoorganisation de son

service est consideacutereacute comme relevant de la sphegravere professionnelle861

En revanche un

employeur peut sanctionner un agent qui en acceacutedant aux courriers eacutelectroniques priveacutes drsquoun

de ses collegravegues se serait lui-mecircme rendu coupable drsquoune atteinte au secret des

correspondances priveacutees862

Ainsi une toleacuterance vis-agrave-vis drsquoune utilisation priveacutee de la messagerie professionnelle

est aujourdrsquohui communeacutement admise eacutetant entendue que cet usage doit se faire dans des

proportions raisonnables

b) Lrsquoutilisation drsquoInternet et du mateacuteriel informatique agrave des fins priveacutees

713 Lagrave encore le principe est le mecircme lrsquousage du mateacuteriel informatique ainsi que des

connexions Internet mis agrave disposition de lrsquoagent par son employeur doit ecirctre strictement

professionnel Cependant une toleacuterance est admise dans la mesure ougrave lrsquousage priveacute reste

raisonnable Le curseur quant au caractegravere raisonnable ou non de lrsquoutilisation de lrsquooutil

informatique et drsquoInternet a eacuteteacute placeacute par la jurisprudence et par la CNIL La CNIL dans son

rapport drsquoactiviteacute de 2003863

considegravere qursquo laquo une interdiction geacuteneacuterale et absolue de toute

utilisation drsquoInternet agrave des fins autres que professionnelles ne parait pas reacutealiste dans une

socieacuteteacute de lrsquoinformation et de la communication raquo Ainsi lrsquoautoriteacute administrative

indeacutependante considegravere qursquoil est socialement admis qursquoune utilisation agrave des fins personnelles

du mateacuteriel professionnel puisse ecirctre effectueacutee tant que cet usage nrsquoamoindrit pas les

conditions drsquoaccegraves au reacuteseau et ne diminue pas la productiviteacute du salarieacute

714 Cependant lagrave encore les fichiers personnels doivent ecirctre identifieacutes comme tels sous

peine drsquoecirctre accessible par lrsquoemployeur sans lrsquoaccord du salarieacute En effet pour la Cour de

Cassation il apparait que laquo les dossiers et fichiers creacuteeacutes par un salarieacute gracircce agrave lrsquooutil

860 V notamment en ce sens CAA Nancy 2 aoucirct 2007 Commune de Lons-le-Saunier c Mme E Mazzier ndeg

07NC00217 861

CA Rennes 14 janvier 2010 ndeg 972010 Dans cette affaire les juges ont estimeacute notamment que la reacuteponse

apporteacutee agrave une question professionnelle par lrsquoagent mis en cause eacutetait le preacutetexte qui avait conduit cet agent a

exprimeacute son opinion personnelle Degraves lors les juges ont consideacutereacute que laquo indeacutependamment du ton employeacute et de

la restriction dune reacuteponse faite au seul expeacutediteur dun message geacuteneacuteral la correspondance litigieuse est bien

dessence professionnelle raquo 862

CE 25 janvier 2006 ndeg 280165 863

CNIL 24egraveme

rapport drsquoactiviteacute 2003 p 497

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

392

informatique mis agrave sa disposition par son employeur pour lrsquoexeacutecution de son travail sont

preacutesumeacutes sauf si le salarieacute les identifie comme eacutetant personnels avoir un caractegravere

professionnel raquo864

En revanche cette protection de la vie priveacutee ne va pas jusqursquoagrave proteacuteger les favoris

de navigation sur Internet qui ne preacutesentent pas un caractegravere personnel865

Ainsi lrsquohistorique

de navigation Internet ne pourra jamais contrairement aux fichiers informatiques ecirctre proteacutegeacute

par le droit au respect de la vie priveacutee celui-ci ne pouvant jamais ecirctre identifieacute de maniegravere

directe comme eacutetant personnel Par ailleurs la jurisprudence se montre tregraves claire agrave ce sujet

et le controcircle des connexions Internet drsquoun salarieacute par son employeur est possible puisque ces

connexions sont preacutesumeacutees avoir un caractegravere professionnel866

2) Les possibiliteacutes de reacutegulation et de controcircle offertes agrave lrsquoemployeur

715 Dans un souci agrave la fois de seacutecuriteacute du reacuteseau informatique mais eacutegalement drsquoefficaciteacute

dans le fonctionnement de ses services lrsquoemployeur va pouvoir tout en respectant les liberteacutes

fondamentales des agents controcircler voire limiter lrsquoutilisation des outils informatiques des

agents En effet un controcircle de lrsquoutilisation qui peut ecirctre faite des TIC par les agents permet agrave

lrsquoeacutetablissement de preacutevenir une atteinte interne ou externe agrave son systegraveme drsquoinformation Par

ailleurs lrsquoeacutetablissement pourrait comme nous lrsquoavons souligneacute auparavant voire sa

responsabiliteacute engageacutee du fait drsquoune utilisation prohibeacutee des TIC par ses agents Comme le

soulignait lrsquoavocat geacuteneacuteral de la Cour de Cassation S KEHRIG dans le cadre de lrsquoarrecirct

NIKON France laquo Srsquoil est certain qursquoen vertu de son pouvoir de direction lrsquoemployeur a le

droit de controcircler et surveiller lrsquoactiviteacute de ses salarieacutes pendant le temps de travail [hellip] ce

droit peut mecircme drsquoailleurs se transformer en devoir eu eacutegard aux regravegles de responsabiliteacute

civile du commettant [hellip] raquo867

Ce risque est le mecircme pour les eacutetablissements de santeacute qui

sont par principe responsable du fait de leur agent sauf agrave venir deacutemontrer lrsquoexistence drsquoune

faute deacutetachable du service

864 Cass Soc 18 octobre 2006 Jeacutereacutemy L-F c Techni-soft ndeg 04-48025

865 Cass Soc 9 feacutevrier 2010 ndeg 08-45253

866 Cass Soc 9 juillet 2008 ndeg 06-45800

867 Conclusion de M KEHRIG avocat geacuteneacuteral Disponibles sur [httpswwwcourdecassationfr] Consulteacute le 16

janvier 2017

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

393

716 Le controcircle mis en place par lrsquoemployeur doit reacutepondre au mecircme principe que celui

qui dirige lrsquoutilisation priveacutee des outils professionnels par lrsquoagent le principe de

proportionnaliteacute Par ailleurs il paraicirct eacutevident que la mise en place drsquoun tel controcircle ne devra

ecirctre motiveacute par lrsquounique volonteacute de lrsquoemployeur drsquoinstaurer une surveillance de ses agents En

effet la cybersurveillance des salarieacutes est tregraves encadreacutee et lrsquoemployeur ne sera pas libre de ses

mouvements Ce controcircle peut ecirctre deux ordres soit global soit cibleacute

717 En premier lieu en effet lrsquoemployeur peut deacutecider de mettre en place un controcircle

global de lrsquoensemble des utilisations des TIC reacutealiseacutees par ses agents Par exemple il lui est

possible de controcircler lrsquoensemble des connexions Internet reacutealiseacutees par ses agents ou mecircme

utiliser des fichiers de journalisation pour connaitre lrsquoensemble des flux informatiques reacutealiseacutes

au sein du systegraveme drsquoinformation Dans la mecircme logique il peut controcircler le trafic de la

messagerie professionnelle sans prendre connaissance du contenu de lrsquoensemble des e-mails

eacutechangeacutes Dans les deux cas nous nous situons dans un controcircle que nous pouvons qualifier

de masse et geacuteneacuteraliseacute de lrsquoutilisation des TIC A ce niveau il srsquoagit principalement pour

lrsquoemployeur de srsquoassurer que son systegraveme drsquoinformation est correctement conccedilu pour

supporter la charge qui lui est imposeacutee mais eacutegalement srsquoassurer qursquoil nrsquoexiste pas de failles

de seacutecuriteacute Cependant agrave partir du moment ougrave ces pratiques induisent une collecte

drsquoinformations agrave caractegravere personnel telles que deacutefinies par la loi Informatique et Liberteacutes

lrsquoemployeur devra effectuer les deacuteclarations neacutecessaires aupregraves de la CNIL Par ailleurs dans

tous les cas la mise en place drsquoun controcircle des accegraves et connexions induit en vertu du

principe de loyauteacute une information a priori des agents Si ces conditions sont remplies alors

lrsquoemployeur pourra par la suite si la situation lrsquoexige utiliser ces eacuteleacutements ainsi recueillis

dans le cadre drsquoune proceacutedure disciplinaire agrave lrsquoencontre de son agent868

718 Dans un second temps sous certaines conditions strictes lrsquoemployeur va pouvoir

eacutegalement consulter les dossiers de son agent pourtant identifieacutes comme eacutetant personnels En

effet par principe lrsquoemployeur peut demander agrave lrsquoagent drsquoacceacuteder aux fichiers identifieacutes

comme eacutetant personnels en preacutesence de celui-ci ou si celui-ci a eacuteteacute informeacute preacutealablement

Dans ce cas la violation de la vie priveacutee ou dans le cas des courriels du secret des

correspondances ne sera pas constitueacutee Par ailleurs selon la jurisprudence lrsquoemployeur peut

868 CA Rouen 11 septembre 2007 ndeg 07180

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

394

eacutegalement acceacuteder agrave ces fichiers sans lrsquoaccord du salarieacute en cas de risque ou eacuteveacutenement

particulier869

Cependant encore faut-il que lrsquoemployeur puisse justifier drsquoun tel risque ou

eacuteveacutenement particulier

Par ailleurs comme la jurisprudence judiciaire a deacutejagrave eu lrsquooccasion de le preacuteciser870

la

preacutesence de fichiers informatiques ou de courriels identifieacutes comme personnels ne fait pas

obstacle agrave la mise en œuvre de lrsquoarticle 145 du Code de proceacutedure civile Ainsi un huissier

pourra reacutecupeacuterer des copies des fichiers en preacutesence du salarieacute En lrsquoespegravece il srsquoagissait drsquoun

employeur qui pensait que le mateacuteriel informatique qursquoil mettait agrave disposition de son employeacute

servait agrave favoriser des actes de concurrence deacuteloyale Le juge a estimeacute que cette raison eacutetait

leacutegitime et a ordonneacute agrave un huissier de saisir une copie des eacuteleacutements susceptibles de

caracteacuteriser un acte de concurrence deacuteloyale

719 En revanche il nous semble important de preacuteciser que mecircme si lrsquoadministrateur

reacuteseau peut acceacuteder agrave certains courriels drsquoordre priveacute dans le cadre de sa fonction visant agrave

assurer la seacutecuriteacute du reacuteseau informatique de lrsquoentreprise cela ne peut se faire qursquoagrave certaines

conditions Ainsi un employeur peut parfaitement confier agrave son administrateur reacuteseau soumis

agrave une obligation de confidentialiteacute une enquecircte speacutecifique suite agrave un incident de seacutecuriteacute

mecircme si cette enquecircte conduit agrave la prise de connaissance par lrsquoadministrateur de courriels

proteacutegeacutes par le secret des correspondances871

Toutefois lrsquoadministrateur reacuteseau ne pourra en

aucun cas se deacutelier de son obligation de confidentialiteacute pour communiquer ces messages agrave son

employeur A ce sujet la Cour de cassation est venue preacuteciser notamment que mecircme si la

seacutecuriteacute du reacuteseau informatique drsquoune entreprise justifie que son administrateur reacuteseau fasse

usage de lrsquoensemble des possibiliteacutes techniques qursquoil a agrave sa disposition afin de prendre les

mesures qui srsquoimposent laquo la divulgation du contenu des messages [hellip] ne [relegraveve] pas de ces

objectifs raquo872

720 Enfin bien eacutevidemment en amont de ce controcircle lrsquoemployeur peut leacutegitimement

limiter voire mecircme parfois bloquer les utilisations de lrsquooutil informatique A titre drsquoexemple

869 Cass Soc 17 mai 2005 ndeg 03-40701

870 Cass Soc 10 juin 2008 ndeg 06-19229

871 Cass Soc 17 juin 2009 SA Sanofi Chimie c M GUZZI et a ndeg 08-40274

872 CA Paris 11

egraveme chambre F et a 17 deacutecembre 2001

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

395

il pourra mettre en place des dispositifs permettant le filtrage des sites Internet non autoriseacutes

(sites agrave caractegravere pornographique par exemple mais eacutegalement les sites des reacuteseaux sociaux

srsquoil le juge utile) Il pourra eacutegalement interdire la possibiliteacute pour les agents de teacuteleacutecharger de

nouveaux logiciels sur leur poste de travail Pour des raisons de seacutecuriteacute toujours et afin

drsquoeacuteviter la propagation de virus informatique lrsquoutilisation des cleacutes USB personnelles non

seacutecuriseacutees pourra ecirctre prohibeacutee (mecircme si en pratique lrsquoemployeur devra dans la plupart du

temps proposer une solution alternative qui consistera par exemple agrave fournir lui-mecircme des

cleacutes seacutecuriseacutees) De mecircme dans le cadre de lrsquoutilisation de logiciels (comme cela est le cas

pour les logiciels de dossiers meacutedicaux par exemple) certains agents verront en vue de leur

fonction ou de leurs missions leur droit drsquoaccegraves agrave certaines donneacutees limiteacute

B La mise en place drsquoune charte informatique

721 Le recours aux chartes informatiques que cela soit au sein des entreprises priveacutees ou

des administrations publiques srsquoest deacuteveloppeacute depuis plusieurs anneacutees Deacutefinies par une

circulaire de 2008873

comme eacutetant des laquo outils permettant agrave lrsquoinverse du regraveglement inteacuterieur

dont le champ est leacutegalement limiteacute de reacuteunir en un document selon un contenu et un degreacute

de preacutecision variables les engagements et obligations respectifs de lrsquoemployeur et des

salarieacutes dans le cadre de lrsquoexeacutecution du contrat de travail raquo les chartes se reacutevegravelent ecirctre des

tregraves utiles pour lrsquoemployeur agrave condition drsquoecirctre utiliseacutees convenablement Elles permettent en

effet agrave ce dernier de mettre agrave plat les laquo regravegles du jeu raquo en matiegravere drsquoutilisation des TIC par ses

agents

laquo A deacutefaut de textes officiels et normatifs sur le sujet raquo874

la charte preacutesente lrsquoavantage

de formaliser de maniegravere claire et opposable les regravegles applicables au sein de lrsquoeacutetablissement

en matiegravere drsquoutilisation des outils informatiques et des TIC Lrsquoavantage majeur de cet outil

est bien entendu sa grande souplesse Encadreacute par aucun texte contrairement au regraveglement

inteacuterieur de lrsquoeacutetablissement de santeacute par exemple aucun contenu a minima nrsquoest imposeacute

Libre agrave lrsquoeacutetablissement de lrsquoeacutelaborer avec lrsquoensemble des informations qursquoil souhaite y faire

figurer En revanche pour des questions pratiques il est eacutevident que cet outil ne doit pas

873 Circulaire DGT 200822 du 19 novembre 2008 relative aux chartes eacutethiques dispositifs drsquoalerte

professionnelle et au regraveglement inteacuterieur Ministegravere du travail des relations sociales de la famille et de la

solidariteacute non parue au JORF 874

CAA Nancy 2 aoucirct 2007 Cne Lons-le-Saunier JCP A 2007 ndeg 2039 note ndeg 07NC00217 de D JEAN-

PIERRE

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

396

devenir un catalogue technique des modaliteacutes drsquoutilisation des TIC La charte peut eacutegalement

interdire certaines utilisations des TIC sans que cela puisse ecirctre contesteacute Ainsi une charte

informatique qui interdit lrsquoutilisation de la messagerie professionnelle agrave des fins politiques est

leacutegale875

722 Pour autant bien eacutevidemment lrsquoabsence de charte ne veut pas dire absence de regravegles

ou absences de sanctions Dans certains cas ce nrsquoest pas la violation de la charte qui sera

sanctionneacutee mais bien la violation drsquoune obligation deacuteontologique du professionnel agent de

la fonction publique876

La charte reste cependant le moyen le plus efficace drsquoinformer les

agents sur les usages qui ne seront pas toleacutereacutes Elle preacutesente eacutegalement un inteacuterecirct peacutedagogique

vis-agrave-vis des agents en matiegravere de seacutecuriteacute informatique car il ne faut pas oublier que laquo la

seacutecuriteacute ne simpose pas elle sinculque raquo877

Cependant afin drsquoecirctre totalement efficace la

charte informatique devra ecirctre opposable aux agents Car tout comme la jurisprudence

reconnaicirct la possibiliteacute de srsquoappuyer sur ces chartes pour sanctionner un salarieacute elle rappelle

eacutegalement la neacutecessiteacute que ces chartes soient avant toute chose opposable878

723 Au sein drsquoun eacutetablissement de santeacute le Directeur drsquoeacutetablissement dispose de plusieurs

solutions pour rendre opposable sa charte informatique Il peut drsquoabord faire le choix

drsquoannexer cette charte au contrat de travail des agents permettant ainsi drsquoen faire un

document contractuel opposable aux agents en cas de violation celle-ci En revanche cette

possibiliteacute nrsquoest envisageable que pour les personnels contractuels Pour les titulaires de la

fonction publique hospitaliegravere cette solution sera impossible En effet par principe les agents

titulaires de la fonction publique sont reacutegis par leurs statuts issus de la loi (pour les

fonctionnaires de la fonction publique hospitaliegravere il srsquoagit de la loi ndeg 86-33 du 9 janvier

1986 portant dispositions statutaires relatives agrave la fonction publique hospitaliegravere879

) et du

875 CAA Nancy 2 aoucirct 2007 Cne Lons-le-Saunier op cit

876 CAA Paris 12 feacutevrier 2008 ndeg 06PA04287

877 CAPRIOLI amp Associeacutes laquo Deacutemarche pour la mise en place dune charte informatique et communications

eacutelectroniques dans les collectiviteacutes territoriales raquo disponible sur [httpwwwcaprioli-avocatscom] Consulteacute le

16 janvier 2017 878

Conseil des prudrsquohommes de Paris 10 juin 2014 ndeg 1302093 879

Loi ndeg 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives agrave la fonction publique hospitaliegravere

JORF du 11 janvier 1986 p 535

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

397

regraveglement880

Seuls des textes de cet ordre peuvent donc modifier les regravegles qui viendront

reacutegir leur statut

724 Cependant une autre solution existe au sein des eacutetablissements de santeacute afin de

permettre de donner agrave la charte une valeur juridique suffisante agrave la rendre opposable Il suffit

pour cela drsquoen faire un eacuteleacutement du regraveglement inteacuterieur Cette solution est par ailleurs deacutejagrave

valideacutee par la jurisprudence pour les entreprises priveacutees881

Il srsquoagit drsquoun avantage dont

disposent les eacutetablissements de santeacute par rapport aux collectiviteacutes territoriales par exemple

Ainsi en annexant au regraveglement inteacuterieur de lrsquoeacutetablissement la charte informatique celle-ci

deviendra de fait opposable agrave tous les agents de lrsquoeacutetablissement contractuels ou titulaires

Cela induit en revanche de respecter un circuit de validation interne preacutealable qui inclut

notamment une preacutesentation en comiteacute technique drsquoeacutetablissement Toutefois la jurisprudence

nrsquoexige pas toujours un passage devant les instances et notamment une consultation du

Comiteacute technique Par exemple une Cour Administrative drsquoAppel a deacutejagrave eu lrsquooccasion de

juger que lrsquoagent qui meacuteconnait les regravegles drsquoutilisation de la messagerie professionnelle

fixeacutees au sein de la charte informatique commet une faute disciplinaire mecircme si cette mecircme

charte nrsquoa pas fait lrsquoobjet drsquoun examen en comiteacute technique le chef drsquoeacutetablissement disposant

du pouvoir reacuteglementaire en matiegravere drsquoutilisation de la messagerie882

Neacuteanmoins lrsquoemployeur se doit drsquoinformer ses agents des regravegles encadrant

lrsquoutilisation du mateacuteriel informatique qui leur est mis agrave disposition883

A lrsquooccasion de

plusieurs litiges aux Prudrsquohommes la charte informatique a eacuteteacute progressivement reconnue

comme opposable au salarieacute et sa violation a justifieacute dans plusieurs cas des licenciements pour

faute grave En 2006 par un arrecirct en date du 21 deacutecembre884

la Cour de Cassation avait

mecircme fait reacutefeacuterence de maniegravere explicite agrave la charte informatique drsquoune entreprise dont la

violation avait entraineacute le licenciement pour faute grave drsquoun salarieacute885

880 Par exemple le deacutecret ndeg 91-155 du 6 feacutevrier 1991 relatif aux dispositions geacuteneacuterales applicables aux agents

contractuels des eacutetablissements mentionneacutes agrave larticle 2 de la loi ndeg 86-33 du 9 janvier 1986 modifieacutee portant

dispositions statutaires relatives agrave la fonction publique hospitaliegravere JORF ndeg 35 du 9 feacutevier 1991 p 2058 881

Cass Soc 15 deacutecembre 2010 ndeg 09-42691 882

CAA Nantes 2 juillet 2010 ndeg 10NT00319 883

WALLE Emmanuelle laquo A nouvelles technologies nouvelles causes de licenciement raquo Gaz Pal 23 avril

2011 ndeg 113 p 20 884

Cass Soc 21 deacutecembre 2006 ndeg 05-41165 J-H Pettre csteacute Ad 2 One SA 885

CAPRIOLI Eric laquo Charte informatique et droit du travail raquo Communication commerce eacutelectronique ndeg 7-8

juillet 2001 commentaire 101

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

398

La charte informatique est eacutegalement un moyen pour lrsquoemployeur drsquoinformer de

maniegravere loyale ses salarieacutes de lrsquoensemble des mesures eacuteventuelles de surveillance et de

controcircle des accegraves et de lrsquoutilisation des outils informatiques Degraves lors elle permet ensuite

lrsquoutilisation de ces traces lors drsquoeacuteventuelles proceacutedures disciplinaires

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

399

sect2 Lrsquoutilisation drsquooutils manageacuteriaux

725 Lrsquoimpact de lrsquointroduction des TIC au travail fait lrsquoobjet de nombreuses eacutetudes depuis

plusieurs anneacutees La doctrine srsquoest pencheacutee agrave la fois sur les risques induits par lrsquointroduction

des TIC sur la santeacute du salarieacute886

et ses conditions de travail mais eacutegalement sur les risques

lieacutes agrave un controcircle abusif des salarieacutes par leur employeur887

ou encore sur lrsquoimpact des TIC sur

lrsquoaction syndicale888

Derniegraverement avec le deacuteveloppement du teacuteleacutetravail notamment crsquoest le

droit agrave la deacuteconnexion qui a fait lrsquoobjet de multiples eacutetudes889

726 Lrsquointroduction des TIC comme outil de travail induit pour lrsquoemployeur la neacutecessiteacute

drsquoaccompagner la mise en place de ces outils mais eacutegalement de veiller agrave leur bonne

utilisation voire de reacuteguler drsquoeacuteventuelles utilisations qui ne seraient pas en accord avec la loi

ou les pratiques internes fixeacutees par le biais de la charte informatique Pour ce faire

lrsquoemployeur va disposer drsquooutils manageacuteriaux efficaces En amont lrsquoadministration

hospitaliegravere pourra et mecircme devra assurer la formation des utilisateurs des TIC afin qursquoils

puissent adapter leurs pratiques agrave ces nouveaux outils (A) Puis dans lrsquohypothegravese ougrave lrsquoagent

nrsquoaurait pas effectueacute une utilisation correcte de ses outils lrsquoemployeur aura la possibiliteacute de le

sanctionner (B) Ces deux outils manageacuteriaux vont permettre aux eacutetablissements de santeacute de

seacutecuriser lrsquoutilisation des TIC agrave lrsquohocircpital

886 V notamment en ce sens FANTONI-QUINTON Sophie LEBORGNE-INGELAERE Ceacuteline laquo Limpact

des TIC sur la santeacute au travail raquo JCP-S novembre 2013 ndeg 48 pp 16-21 887

V notamment en ce sens De GIVRY Emmanuel laquo Tic et surveillance du salarieacute regards de la CNIL raquo

JCP-S octobre 2013 ndeg 41 pp 24-26 BAREGE Alexandre BOSSU Bernard laquo Les TIC et le controcircle de

lrsquoactiviteacute du salarieacute raquo JCP-S octobre 2013 ndeg 41 pp 13-23 888

V notamment en ce sens GAURIAU Bernard laquo Les TIC et lrsquoaction syndicale raquo JCP-S octobre 2013 ndeg

41 pp 18-24 889

V notamment en ce sens De MONTVALON Luc laquo Droit agrave la deacuteconnexion lrsquoarbre qui cache la forecirct raquo

Semaine sociale Lamy novembre 2016 ndeg 1743 pp 19-20 MATHIEU Chantal PERETIE Marie-Madeleine

PICAULT Alex laquo Le droit agrave la deacuteconnexion une chimegravere raquo Revue droit du travail Dalloz octobre 2016 ndeg

10 pp 592-598

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

400

A La formation des utilisateurs

727 La formation professionnelle des agents publics obligation leacutegale agrave la charge tant de

lrsquoemployeur et de lrsquoagent (1) va srsquoaveacuterer ecirctre un outil manageacuterial preacutecieux (2) pour

accompagner la mise en place des TIC

1) La formation professionnelle une obligation leacutegale reacuteciproque

728 Comme le preacutevoit la loi Le Pors laquo le droit agrave la formation professionnelle tout au long

de la vie est reconnu aux fonctionnaires raquo890

La formation professionnelle au cours de sa

carriegravere est un droit essentiel de lrsquoagent public qui srsquoinscrit dans un cadre regraveglementaire et

financier assez preacutecis preacutevu notamment en ce qui concerne la fonction publique hospitaliegravere

par le deacutecret ndeg 2008-824 du 21 aoucirct 2008 relatif agrave la formation professionnelle tout au long

de la vie des agents de la fonction publique hospitaliegravere891

et par la circulaire ndeg

DHOSRH4201057 du 11 feacutevrier 2010 relative agrave la mise en œuvre du congeacute de formation

professionnelle des agents de la fonction publique hospitaliegravere Cependant ce nrsquoest que

reacutecemment que la formation professionnelle des agents publics a pris une place importante

En effet jusqursquoen 2007 les agents beacuteneacuteficiaient drsquoun droit agrave une laquo formation permanente raquo892

Srsquoinspirant des regravegles applicables en droit du travail le droit de la fonction publique a eacutevolueacute

et consacreacute au travers de la loi de 2007 de modernisation de la fonction publique893

un droit

fondamental pour lrsquoagent public agrave la formation continue tout au long de sa vie professionnelle

Cette loi consacre notamment la reconnaissance de lrsquoexpeacuterience professionnelle pour les

promotions internes ainsi que dans les concours administratifs et deacuteveloppe la validation des

acquis de lrsquoexpeacuterience (VAE) Elle introduit eacutegalement le droit individuel agrave la formation qui

nrsquoexistait pas jusqursquoalors dans la fonction publique

890 Article 22 loi ndeg 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires Loi dite loi Le

Pors JORF du 14 juillet 1983 p 2174 891

Deacutecret ndeg 2008-824 du 21 aoucirct 2008 relatif agrave la formation professionnelle tout au long de la vie des agents de

la fonction publique hospitaliegravere JORF ndeg 0196 23 aoucirct 2008 p 13285 892

Lrsquoarticle 22 de la loi Le Pors dans sa reacutedaction applicable jusqursquoen 2007 disposait que laquo Le droit agrave la

formation permanente est reconnu aux fonctionnaires Ceux-ci peuvent ecirctre tenus de suivre des actions de

formation professionnelle dans les conditions fixeacutees par les statuts particuliers raquo 893

Loi ndeg 2007-148 du 2 feacutevrier 2007 de modernisation de la fonction publique JORF ndeg31 6 feacutevrier 2007 p

2160

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

401

Ainsi et comme lrsquoa souligneacute agrave juste titre Emmanuel AUBIN en parlant de

travaillisation894

du droit de la fonction publique le droit du travail a eu une veacuteritable

influence positive en la matiegravere sur le droit de la fonction publique

729 Ce droit fondamental de lrsquoagent agrave la formation opposable agrave lrsquoadministration se

traduit pour lrsquoemployeur en une obligation assez forte Celui-ci devra notamment prendre agrave

sa charge les frais de formation De mecircme dans lrsquohypothegravese ougrave la formation de lrsquoagent se

deacuteroulerait en dehors du temps de travail il devra attribuer agrave lrsquoagent une allocation de

formation895

Mais lrsquoobligation de lrsquoemployeur public va plus loin puisqursquoil doit eacutegalement se

montrer actif en la matiegravere Ainsi les dispositions de lrsquoarticle 37 du deacutecret de 2008 lui

imposent de mettre en place laquo un document pluriannuel dorientation de la formation des

agents raquo document qui devra ecirctre par ailleurs laquo soumis pour avis au comiteacute technique

deacutetablissement raquo En outre laquo ce document dorientation est fondeacute sur lanalyse de leacutevolution

des effectifs des emplois des compeacutetences et des missions de leacutetablissement Il porte sur les

prioriteacutes les objectifs et les moyens de la formation professionnelle des agents au regard de

ces eacutevolutions Il prend eacutegalement en compte lanalyse de la situation compareacutee des hommes

et des femmes et laccegraves de tous les agents agrave la formation Dans le cadre ainsi deacutefini le chef

deacutetablissement arrecircte tous les ans le plan de formation apregraves avis du comiteacute technique

deacutetablissement qui se reacuteunit agrave cet effet au cours du dernier trimestre preacuteceacutedant la peacuteriode

couverte par ce plan Les plans de formation des eacutetablissements prennent en compte les

prioriteacutes nationales de formation et les plans de santeacute publique deacutefinis par le ministre chargeacute

de la santeacute Le suivi de la reacutealisation du plan ainsi que leacutevaluation de ses reacutesultats doivent

associer le comiteacute technique deacutetablissement raquo896

Lrsquoobligation qui pegravese sur les eacutetablissements de santeacute en matiegravere de formation est donc

importante et la formation professionnelle doit faire lrsquoobjet au sein des eacutetablissements de

santeacute drsquoun projet construit par lrsquoemployeur

894 AUBIN Emmanuel laquo Les dispositions relatives agrave la formation professionnelle des fonctionnaires tout au

long de la vie raquo AJDA 2007 p 511 895

Lrsquoarticle 16 du deacutecret ndeg 2008-824 du 21 aoucirct 2008 relatif agrave la formation professionnelle tout au long de la vie

des agents de la fonction publique hospitaliegravere preacutevoit que laquo Les heures de formation reacutealiseacutees par un agent

dans le cadre du droit individuel agrave la formation en dehors du temps de travail donnent lieu au versement dune

allocation de formation dun montant eacutegal agrave 50 du traitement horaire de lagent concerneacute raquo 896

Article 37 deacutecret ndeg 2008-824 du 21 aoucirct 2008 relatif agrave la formation professionnelle tout au long de la vie des

agents de la fonction publique hospitaliegravere JORF ndeg 0196 23 aoucirct 2008 p 13285

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

402

730 Cependant cette obligation nrsquoest pas agrave sens unique et il arrive parfois que le droit agrave la

formation de lrsquoagent soit eacutegalement assorti de contraintes pour celui-ci Par ailleurs dans

certains cas lrsquoagent va ecirctre deacutebiteur vis-agrave-vis de son employeur drsquoune obligation de se

former et lrsquoirrespect de cette obligation pourra ecirctre sanctionneacute En effet la formation est

eacutegalement parfois une obligation pour lrsquoagent Une obligation leacutegale tout drsquoabord puisque

lrsquoarticle 22 de la loi Le Pors dispose que laquo ceux-ci peuvent ecirctre tenus de suivre des actions

de formation professionnelle dans les conditions fixeacutees par les statuts particuliers raquo Mais

avant cette modification de la loi Le Pors intervenue en 2007 la jurisprudence avait deacutejagrave

preacuteciseacute qursquoune administration pouvait imposer agrave un agent une formation en rapport avec ses

fonctions exerceacutees897

731 Par ailleurs les fonctionnaires sont tenus par principe agrave une obligation drsquoobeacuteissance

hieacuterarchique Ainsi le refus par un agent drsquoassister agrave une formation qui lui est imposeacutee par

son supeacuterieur hieacuterarchique pourrait conduire agrave des sanctions disciplinaires A titre drsquoexemple

dans une deacutecision en date du 9 avril 2009 la Cour Administrative de Nancy898

a eu agrave se

prononcer sur une deacutecision de blacircme prononceacute agrave lrsquoencontre drsquoun fonctionnaire qui avait refuseacute

une formation En lrsquoespegravece il srsquoagissait drsquoun caporal-chef des sapeurs-pompiers

professionnel qui avait refuseacute de participer agrave la premiegravere seacuteance de formation institueacutee par

une deacutecision du conseil dadministration du service deacutepartemental dincendie et de secours de

la Moselle Il ressortait eacutegalement des eacuteleacutements du dossier que cet agent avait par ailleurs

inciteacute ses collegravegues agrave refuser cette formation Un blacircme lui a eacuteteacute infligeacute par son employeur La

Cour Administrative drsquoAppel a consideacutereacute que cette sanction disciplinaire nrsquoeacutetait pas entacheacutee

drsquoerreur manifeste drsquoappreacuteciation

A noter qursquoen droit priveacute lrsquoobligation de formation pegravese eacutegalement lourdement sur le

salarieacute qui est tenu de se former dans le cadre de lrsquoexeacutecution de son contrat de travail Par

exemple la jurisprudence a deacutejagrave reconnu qursquoun salarieacute qui refusait une formation proposeacutee

par son employeur afin drsquoassurer le maintien de ce salarieacute dans son emploi pouvait ecirctre

licencieacute pour motif disciplinaire899

897 ANTOINE Dominique laquo La formation professionnelle dans la fonction publique en France ndash Compte rendu

dun rapport de la promotion Reneacute Cassin de lENA raquo RF adm publ 2002 ndeg 104 p 611 898

CAA de Nancy 9 avril 2009 ndeg 08NC00449 899

V notamment en ce sens Cass Soc 12 mai 2004 ndeg 02-40772 Cass Soc 18 mars 2009 ndeg 08-40378

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

403

2) La formation professionnelle un outil manageacuterial strateacutegique

732 Les dispositions de lrsquoarticle 1er

du deacutecret de 2008900

preacutecise que laquo la formation

professionnelle tout au long de la vie des agents titulaires et non titulaires de la fonction

publique hospitaliegravere a pour but de leur permettre dexercer efficacement leurs fonctions

durant lensemble de leur carriegravere dameacuteliorer la qualiteacute du service public hospitalier de

favoriser leur deacuteveloppement professionnel et personnel et leur mobiliteacute Elle contribue agrave

creacuteer les conditions dun eacutegal accegraves aux diffeacuterents grades et emplois entre les hommes et les

femmes raquo

733 La formation professionnelle continue preacutesente de nombreux avantages manageacuteriaux

Elle permet notamment aux agents drsquoadapter leurs compeacutetences aux nouvelles exigences des

emplois et notamment aux exigences des nouveaux outils901

En cela la formation

professionnelle laquo participe agrave la qualiteacute et agrave la mutabiliteacute du service public raquo902

puisqursquoelle

permet lrsquoeacutevolution des agents de leurs compeacutetences et eacuteventuellement de leurs postes La

formation professionnelle permet eacutegalement agrave lrsquoemployeur drsquoameacuteliorer la gestion des

ressources humaines903

Dans le cadre de lrsquointroduction des TIC dans la pratique meacutedicale la

formation est eacutevidement essentielle Elle touche par ailleurs un domaine assez vaste ce qui

peut la rendre complexe En effet il srsquoagit aussi bien de former les agents agrave lrsquoutilisation des

logiciels meacutedicaux (logiciel dossier informatique logiciel de gestion de la pharmacie logiciel

drsquoimagerie) que de les former aux nouvelles pratiques comme la teacuteleacutemeacutedecine Drsquoailleurs en

la matiegravere lrsquoobligation de formation des utilisateurs est clairement acteacutee dans le deacutecret de

2010 faisant de celle-ci lrsquoune des conditions preacutealables agrave la mise en œuvre drsquoune action de

teacuteleacutemeacutedecine Ainsi lrsquoarticle R 6316-9 du Code de la santeacute publique introduit par le deacutecret

ndeg 2010-1229 du 19 octobre 2010 relatif agrave la teacuteleacutemeacutedecine preacutevoit que laquo Les organismes et

les professionnels libeacuteraux de santeacute qui organisent une activiteacute de teacuteleacutemeacutedecine sassurent

que les professionnels de santeacute et les psychologues participant aux activiteacutes de teacuteleacutemeacutedecine

ont la formation et les compeacutetences techniques requises pour lutilisation des dispositifs

900 Deacutecret ndeg 2008-824 du 21 aoucirct 2008 relatif agrave la formation professionnelle tout au long de la vie des agents de

la fonction publique hospitaliegravere JORF ndeg0196 du 23 aoucirct 2008 p 13285 901

AUBIN Emmanuel laquo Les dispositions relatives agrave la formation professionnelle des fonctionnaires tout au

long de la vie raquo AJDA 2007 p 511 902

FORTIER Charles laquo Le deacutefi de la continuiteacute du service public de lrsquoeacuteducation nationale assurer les

remplacements raquo AJDA 2006 ndeg 33 pp 1822-1829 903

ESPAGNO Delphine laquo La formation professionnelle enjeu de la modernisation de la fonction publique raquo

AJFP 2007 p 116

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

404

correspondants raquo Le texte va mecircme plus loin puisqursquoil fait eacutegalement peser sur les

eacutetablissements de santeacute comme sur les professionnels libeacuteraux organisant une activiteacute de

teacuteleacutemeacutedecine une obligation de formation vis-agrave-vis des patients904

734 En termes de management la formation est un levier important qui preacutesente plusieurs

avantages pour lrsquoemployeur Drsquoabord elle assure agrave lrsquoemployeur un gain de performance En

effet en permettant agrave ses agents de mettre agrave jour drsquoacqueacuterir ou de perfectionner les

compeacutetences techniques neacutecessaires agrave son poste il srsquoassure que ses agents soient toujours

adapteacutes agrave leur poste et donc productifs Toujours dans cette logique la formation va permettre

agrave lrsquoemployeur de srsquoassurer que son agent srsquoadapte aux eacutevolutions qui interviennent sur son

poste ou dans le cas qui nous inteacuteresse sur les outils utiliseacutes Enfin la formation

professionnelle des agents agrave lrsquoutilisation des TIC va permettre agrave lrsquoemployeur de seacutecuriser les

pratiques en limitant les risques de meacutesusages ou de mauvaise utilisation Il srsquoagit ici pour

lrsquoemployeur drsquoun moyen drsquoanticiper au mieux les risques lieacutes agrave une mauvaise utilisation des

TIC par ses agents

B La sanction drsquoune mauvaise utilisation des TIC

735 Au sein de la fonction publique hospitaliegravere la proceacutedure disciplinaire est encadreacutee de

maniegravere tregraves stricte par les textes reacuteglementaires (1) Mais sous reacuteserve du respect de cette

proceacutedure le Directeur drsquoeacutetablissement en tant qursquoautoriteacute deacutetentrice du pouvoir de

nomination sera libre de prononcer une sanction disciplinaire agrave lrsquoencontre de lrsquoun de ses

agents si cela srsquoavegravere neacutecessaire (2) Dans le cadre de lrsquoutilisation des TIC dans la pratique

meacutedicale ce pouvoir permettra de sanctionner le non-respect de leurs obligations

deacuteontologiques par les agents mais eacutegalement une eacuteventuelle utilisation des TIC qui ne serait

pas en accord avec les regravegles applicables que celles-ci soient issues des textes leacutegislatifs et

reacuteglementaires ou simplement des regravegles internes tel que nous lrsquoavons vu preacuteceacutedemment

904 Article R 6316-3 du Code de la santeacute publique laquo Lorsque la situation limpose la formation ou la

preacuteparation du patient agrave lutilisation du dispositif de teacuteleacutemeacutedecine raquo

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

405

1) Le cadre drsquoexercice du pouvoir disciplinaire

736 Au terme des dispositions de la loi Le Pors les agents publics disposent de droits

mais ils sont eacutegalement soumis agrave plusieurs obligations professionnelles et deacuteontologiques

Celles-ci ont drsquoailleurs eacuteteacute renforceacutees par la loi ndeg 2016-483 du 20 avril 2016 relative agrave la

deacuteontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires905

La violation de ces obligations

constitue alors une faute qui peut ecirctre sanctionneacutee disciplinairement Par principe crsquoest agrave

lrsquoautoriteacute investie du pouvoir de nomination agrave savoir le directeur drsquoeacutetablissement qursquoil

appartient de mettre en place srsquoil lrsquoestime opportun une proceacutedure disciplinaire Cette

proceacutedure srsquoorganise dans un cadre preacutecis et strict et la deacutecision de sanction disciplinaire

pourra ecirctre soumise agrave lrsquoappreacuteciation du juge administratif

737 Lrsquoensemble de la proceacutedure disciplinaire va ecirctre dirigeacutee par le respect du principe du

contradictoire A chaque eacutetape de la proceacutedure lrsquoagent devra avoir connaissance des faits qui

lui sont reprocheacutes et pourra eacutegalement acceacuteder agrave lrsquoensemble des documents eacutecrits venant

eacutetayer ces faits (rapports eacutecrits teacutemoignages ou tout autre eacuteleacutement de preuve) Drsquoailleurs le

droit drsquoobtenir communication de son dossier administratif est un droit fondamental de lrsquoagent

mis en cause tout comme celui de se faire assister par la personne de son choix Lrsquoabsence du

respect du contradictoire empecircchant lrsquoagent de pouvoir preacuteparer correctement sa deacutefense est

reacuteguliegraverement sanctionneacute par le juge administratif906

Pour certaines sanctions envisageacutees (les

sanctions du deuxiegraveme troisiegraveme et quatriegraveme groupe907

) la saisine de la Commission

905 Loi ndeg 2016-483 du 20 avril 2016 relative agrave la deacuteontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires

JORF ndeg0094 21 avril 2016 906

V notamment en ce sens CE 5 mai 1944 Dame veuve Trompier-Gravier ndeg 69751 Rec p 133 Dans cet

arrecirct la Haute juridiction preacutecise qursquoen cas de sanction administrative ou disciplinaire un agent qui nrsquoa pas eacuteteacute

inviteacute agrave preacutesenter ses moyens de deacutefense est fondeacutee agrave soutenir que la deacutecision attaqueacutee a eacuteteacute prise dans des

conditions irreacuteguliegraveres et est entacheacutee drsquoexcegraves de pouvoir CAA Versailles 19 feacutevrier 2009 n 07VE02328 A

lrsquooccasion de cette deacutecision les juges ont preacuteciseacute que dans le cadre drsquoune proceacutedure disciplinaire le rapport

disciplinaire doit ecirctre communiqueacute agrave lrsquoagent et ne doit pas se reacutefeacuterer agrave drsquoautres eacuteleacutements non verseacutes au dossier de

lrsquoagent CE 21 novembre 2012 M A C la communauteacute de communes du Grand Cahors ndeg 345140 Cet arrecirct

preacutecise que dans le cadre drsquoune proceacutedure de discipline un agent doit ecirctre inviteacute dans un deacutelai de nature agrave lui

permettre drsquoassurer sa deacutefense agrave prendre connaissance du rapport qui saisit de son cas le conseil de discipline A

deacutefaut la proceacutedure de discipline engageacutee est irreacuteguliegravere 907

Lrsquoarticle 81 de la loi ndeg 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives agrave la fonction

publique hospitaliegravere preacutevoit que laquo les sanctions disciplinaires sont reacuteparties en quatre groupes Premier

groupe Lavertissement le blacircme Deuxiegraveme groupe La radiation du tableau davancement labaissement

deacutechelon lexclusion temporaire de fonctions pour une dureacutee maximale de quinze jours Troisiegraveme groupe La

reacutetrogradation lexclusion temporaire de fonctions pour une dureacutee de trois mois agrave deux ans Quatriegraveme groupe

La mise agrave la retraite doffice la reacutevocation Parmi les sanctions du premier groupe seul le blacircme est inscrit au

dossier du fonctionnaire Il est effaceacute automatiquement du dossier au bout de trois ans si aucune sanction nest

intervenue pendant cette peacuteriode Lexclusion temporaire de fonctions qui est privative de toute reacutemuneacuteration

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

406

Administrative Paritaire Locale reacuteunie en Conseil de discipline est obligatoire Celui-ci

rendra un avis qui nrsquoaura qursquoune valeur consultative La deacutecision finale sera rendue par le

directeur drsquoeacutetablissement

2) La sanction drsquoun meacutesusage des TIC

738 La jurisprudence relative aux sanctions du fait drsquoune mauvaise utilisation des TIC est

assez fournie Elle se base principalement sur des violations par les agents publics de leurs

obligations fondamentales telles que deacutefinies au sein de la loi Le Pors En effet mecircme dans le

cadre de lrsquoutilisation des TIC les agents demeurent soumis au respect du secret professionnel

de la confidentialiteacute mais eacutegalement deacutebiteur drsquoune obligation de neutraliteacute et de laiumlciteacute

Crsquoest souvent la violation de ces obligations qui amegravene agrave des sanctions les TIC nrsquoeacutetant qursquoun

moyen comme un autre ayant ameneacute la reacutealisation de la faute Ainsi il a eacuteteacute jugeacute qursquoun

enseignant qui portait agrave la connaissance de collegravegues des eacuteleacutements consideacutereacutes comme

confidentiels par le biais drsquoun message eacutelectronique manque agrave son obligation de discreacutetion

professionnelle et lrsquoavertissement prononceacute agrave son encontre agrave cette occasion nrsquoest pas aux

yeux du juge administratif une sanction disproportionneacutee au regard des faits908

739 Toujours en ce qui concerne lrsquousage de la messagerie lrsquoemployeur pourra sanctionner

les agents qui auront envoyeacute depuis leur messagerie professionnelle des courriels ne

respectant pas leurs obligations deacuteontologiques Ainsi le manquement agrave lrsquoobligation de

discreacutetion professionnelle909

agrave lrsquoobligation de reacuteserve910

ou mecircme le manquement agrave

lrsquoobligation drsquoobeacuteissance hieacuterarchique911

pourront ecirctre sanctionneacutes Enfin tout comme un

employeur sera sanctionneacute dans lrsquohypothegravese drsquoune violation du secret des correspondances de

peut ecirctre assortie dun sursis total ou partiel Celui-ci ne peut avoir pour effet dans le cas de lexclusion

temporaire de fonctions du troisiegraveme groupe de ramener la dureacutee de cette exclusion agrave moins de un mois

Lintervention dune sanction disciplinaire des deuxiegraveme ou troisiegraveme groupes pendant une peacuteriode de cinq ans

apregraves le prononceacute de lexclusion temporaire entraicircne la reacutevocation du sursis En revanche si aucune sanction

disciplinaire autre que lavertissement ou le blacircme na eacuteteacute prononceacutee durant cette mecircme peacuteriode agrave lencontre de

linteacuteresseacute ce dernier est dispenseacute deacutefinitivement de laccomplissement de la partie de la sanction pour laquelle

il a beacuteneacuteficieacute du sursis raquo 908

CAA Nantes 8 mars 2007 ndeg 06NT01199 909

Ibid Sanction de 1er

groupe (avertissement) prononceacutee agrave lrsquoencontre drsquoun enseignant qui avait reacuteveacuteleacute des

eacuteleacutements relatifs agrave la notation des eacutepreuves de matheacutematiques au baccalaureacuteat 910

CAA Paris 21 novembre 2006 ndeg 04PA00634 911

CAA Nancy 2 aoucirct 2007 Cne Lons-Le-Saunier ndeg 07NC00217 A cette occasion les magistrats ont rappeleacute

que le fait pour un agent de ne pas respecter les prescriptions en matiegravere drsquoutilisation de la messagerie

professionnelles fixeacutees par une note de service peut donner lieu agrave sanction disciplinaire pour deacutesobeacuteissance

hieacuterarchique

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

407

sa part un agent qui ne respecterait pas le secret des correspondances priveacutees pourra ecirctre

sanctionneacute disciplinairement

740 Ainsi la jurisprudence a eu plusieurs fois lrsquooccasion de se prononcer sur le caractegravere

fautif de lrsquoaccegraves par un agent agrave la messagerie drsquoun de ses collegravegues Le Conseil drsquoEtat dans

une deacutecision du 13 mai 2005912

est venu confirmer la sanction drsquoexclusion temporaire des

fonctions pour une dureacutee de deux ans prononceacutee agrave lrsquoencontre drsquoun inspecteur geacuteneacuteral de

lrsquoeacuteducation nationale En lrsquoespegravece lrsquoagent sanctionneacute chargeacute de preacutesider le concours du

CAPES drsquoallemand srsquoeacutetait connecteacute agrave plusieurs reprises agrave la messagerie eacutelectronique de

lrsquoinspecteur chargeacute de preacutesider le concours du CAPES drsquoanglais Ayant pris connaissance des

sujets agrave cette occasion il avait ensuite creacuteeacute une adresse eacutelectronique agrave partir de laquelle il

avait faussement informeacute la direction en charge de lrsquoorganisation du concours que des

candidats avaient pu se procurer les sujets

Le meacutesusage des TIC agrave lrsquohocircpital pourra donc donner lieu agrave sanctions disciplinaires de

la part de lrsquoemployeur

912 CE juge des reacutefeacutereacutes 16 mai 2005 ndeg 280166 JurisData ndeg 2005-068570

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

408

Conclusion de la section

741 Les eacutetablissements de santeacute disposent drsquoun panel drsquooutils leur permettant de seacutecuriser

la mise ne place et surtout lrsquoutilisation des TIC en leur sein

Drsquoabord ils peuvent avoir recours agrave des outils juridiques Crsquoest le cas notamment de la charte

informatique qui leur permettra drsquoacter un certain nombre de regravegles qursquoils souhaitent voir

srsquoappliquer en la matiegravere Ces chartes sont souvent accompagneacutees drsquoun controcircle et drsquoune

limitation de lrsquoutilisation des outils informatiques par les agents

Par ailleurs les eacutetablissements de santeacute peuvent eacutegalement utiliser des outils

manageacuteriaux qui vont leur permettre drsquoaccompagner lrsquoutilisation progressive des TIC mais

eacutegalement de sanctionner en cas de comportement deacuteviant

Lrsquoaccompagnement de lrsquointeacutegration des TIC agrave la pratique professionnelle se fera par le

biais de la formation aux outils et notamment gracircce agrave la formation professionnelle continue

des agents La possibiliteacute de sanctionner un comportement deacuteviant est quant agrave elle accordeacutee au

directeur de lrsquoeacutetablissement en tant qursquoautoriteacute deacutetentrice du pouvoir de nomination A ce

titre il pourra prononcer des sanctions disciplinaires agrave lrsquoencontre drsquoun agent

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

409

Conclusion du chapitre

742 Les eacutetablissements de santeacute peuvent ecirctre les acteurs de la seacutecurisation de lrsquoutilisation

des TIC en leur sein en intervenant agrave chaque eacutetape de la vie des TIC dans lrsquoeacutetablissement

que cela soit au moment du deacuteveloppement au moment de la mise en place ou encore lors de

leur utilisation courante afin de seacutecuriser les pratiques

743 En amont lors du deacuteveloppement et de la mise en place des TIC les eacutetablissements

vont pouvoir geacuterer de maniegravere strateacutegique le deacuteveloppement de leur SIH Il est en effet

essentiel pour les eacutetablissements de santeacute que la mise en place de leur SIH devienne un projet

agrave part entiegravere inteacutegreacute au projet global de lrsquoeacutetablissement Car le SIH nrsquoest pas une quantiteacute

neacutegligeable qui pourra srsquoadapter aux pratiques le moment venu Il srsquoagit au contraire

aujourdrsquohui drsquoun outil strateacutegique essentiel auquel les pratiques actuelles vont devoir

srsquoadapter Afin de geacuterer au mieux ce projet les eacutetablissements peuvent drsquoentourer drsquoexperts

du domaine Deux choix srsquooffrent alors agrave eux embaucher directement ces ressources ou faire

appel agrave des prestations de service aupregraves de socieacuteteacutes speacutecialiseacutees Dans les faits les

eacutetablissements de santeacute auront inteacuterecirct agrave cumuler les deux solutions

Puis une fois les TIC mises en place les eacutetablissements de santeacute vont pouvoir

seacutecuriser leur utilisation par le biais drsquooutils juridiques et drsquooutils manageacuteriaux Ainsi la mise

en place drsquoune charte informatique permettra drsquoencadrer au mieux lrsquoutilisation des TIC Par

ailleurs par le biais de la formation les eacutetablissements de santeacute pourront accompagner leurs

agents dans lrsquoutilisation de ces nouveaux outils et donc lrsquoeacutevolution de leurs pratiques

professionnelles Enfin dans lrsquohypothegravese drsquoune utilisation des TIC qui ne serait pas en

adeacutequation avec les obligations professionnelles des agents ou avec la charte informatique de

lrsquoeacutetablissement le directeur pourra sanctionner disciplinairement lrsquoagent fautif

A lrsquoinstar du CHRU de Lille qui srsquoest engageacute pleinement dans lrsquoaccompagnement et

le suivi du deacuteveloppement de lrsquoinformatisation des pratiques meacutedicales en son sein les

eacutetablissements de santeacute en srsquoinscrivant dans une telle deacutemarche en tireront de seacuterieux

beacuteneacutefices

411

Chapitre 2

Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

744 Le Centre Hospitalier Reacutegional Universitaire de Lille (CHRU) est un des plus grands

CHRU de France reacuteguliegraverement classeacute parmi les trois meilleurs hocircpitaux de France par les

diffeacuterents palmaregraves des hocircpitaux913

et positionneacute au 3egraveme rang franccedilais pour les eacutetudes et les

essais cliniques (SIGREC) En 2013 le CHRU de Lille disposait drsquoune capaciteacute drsquoun peu plus

de 3000 lits Son activiteacute repreacutesentait 199 956 prises en charge en hospitalisation 1 401 291

venues en consultation En termes de moyens humains le CHRU emploie 15 303

professionnels dont 7592 soignants et 3576 meacutedecins actifs ou en formation

745 Le CHRU de Lille intervient au sein drsquoune reacutegion qui avec environ 4 millions

dhabitants se caracteacuterise par une des plus importantes densiteacutes de population en France Il

repreacutesente un centre de recours essentiel au sein drsquoune reacutegion ougrave les indicateurs de santeacute de la

population sont en-deccedilagrave de la moyenne nationale Le CHRU de Lille assure eacutegalement un rocircle

majeur dans la permanence des soins notamment gracircce agrave son service drsquourgence qui a

comptabiliseacute en 2013 plus de 88 000 passages Enfin pour certaines activiteacutes de haute

speacutecialisation le CHRU de Lille est le seul eacutetablissement de prise en charge pour le Nord-

Pas-de-Calais voire de lrsquointerreacutegion Nord-Ouest

746 Le CHRU de Lille srsquoattache agrave ecirctre au cœur des innovations technologiques en

acqueacuterant un eacutequipement de pointe et en renouvelant reacuteguliegraverement son parc deacutequipement

biomeacutedical Il srsquoengage eacutegalement dans le deacuteveloppement de lrsquoutilisation des TIC et plus

particuliegraverement dans le cadre de la teacuteleacutemeacutedecine en deacuteveloppant une politique active en la

matiegravere En effet degraves 1991 il a mis en place une eacutequipe deacutedieacutee au deacuteveloppement des projets

de teacuteleacutemeacutedecine dans la reacutegion Aujourdrsquohui de nombreux reacuteseaux de teacuteleacutemeacutedecine ont eacuteteacute

mis en œuvre (TELURGE TELEEG TELEIMAGERIE LOGINAT Flandre Ophtalmo) et

de nouveaux projets sont actuellement agrave lrsquoeacutetude Crsquoest dans ce contexte particulier que

lrsquoeacutetablissement doit aujourdrsquohui deacutevelopper un SIH efficient seacutecuriseacute et peacuterenne

913 V notamment le classement effectueacute par Le Point chaque anneacutee Disponible sur [httpwwwlepointfr]

consulteacute le 20 mars 2017

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

412

747 En 2016 le CHRU de Lille ainsi que 40 autres eacutetablissements publics de santeacute ont eacuteteacute

cibleacutes par la Cour des comptes pour une eacutetude de leur systegraveme drsquoinformation914

Ce controcircle

du CHRU de Lille a fait lrsquoobjet drsquoun rapport rendu en juillet 2016 qui a servi agrave alimenter

lrsquoeacutetude nationale de la Cour des comptes sur lrsquoeacutetat du deacuteveloppement des SIH Ce fut

lrsquooccasion pour lrsquoeacutetablissement drsquoeffectuer son propre bilan Ainsi drsquoune maniegravere geacuteneacuterale

lrsquoorganisation interne du CHRU qursquoil srsquoagisse de la gouvernance de son SIH ou des projets

qursquoil deacuteveloppe deacutemontre la volonteacute de lrsquoeacutetablissement de seacutecuriser lrsquoutilisation des TIC en

santeacute en son sein (Section I) Par ailleurs le CHRU de Lille porte une attention toute

particuliegravere agrave la protection des donneacutees informatiseacutees (Section II)

914 Cour des comptes laquo La modernisation des systegravemes drsquoinformation hospitaliers une contribution agrave

lrsquoefficience du systegraveme de soins agrave renforcer raquo rapport annuel de la Cour des comptes sur lapplication des lois de

financement de la seacutecuriteacute sociale 2016

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

413

Section 1 Une volonteacute marqueacutee de seacutecuriser lrsquoutilisation des TIC en

santeacute

748 Afin de deacutevelopper une offre de soins performante le CHRU de Lille srsquoappuie de plus

en plus fortement sur son SIH qui est devenu un outil indispensable agrave tous les professionnels

dans leurs relations avec les patients mais eacutegalement entre eux Le SIH est eacutegalement un outil

preacutecieux dans la mise en place et le maintien de liens avec les professionnels et partenaires

exteacuterieurs Dans ce contexte le deacuteveloppement drsquoun SIH seacutecuriseacute est un enjeu fondamental

pour le CHRU de Lille qui doit assurer aux patients la seacutecuriteacute des soins dispenseacutes et la

confidentialiteacute des donneacutees qui les concernent mais eacutegalement garantir aux professionnels de

santeacute la disponibiliteacute de leurs outils informatiques

Crsquoest pourquoi le CHRU de Lille a choisi de structurer une partie de son organisation

autour de la seacutecuriteacute du SIH (Paragraphe I) tout en veillant agrave diffuser en son sein une culture

de la seacutecuriteacute informatique (Paragraphe II)

sect1 Une organisation interne tourneacutee vers la seacutecuriteacute du SIH

749 Le CHRU de Lille a tregraves vite fait le choix de mettre en place une strateacutegie lieacutee au

deacuteveloppement de son SIH A lrsquooccasion de la reacuteflexion portant sur le nouveau projet

drsquoeacutetablissement (projet 2012-2016) des dysfonctionnements lieacutes agrave la gestion des projets

informatiques avaient eacuteteacute constateacutes915

Lrsquoorganisation a alors eacuteteacute repenseacutee (A) afin de

permettre au CHRU de Lille de mettre en place une gestion optimale des projets lieacutes au

deacuteveloppement de son SIH Drsquoailleurs en matiegravere de seacutecuriteacute du SIH le CHRU a eu

lrsquooccasion de deacutevelopper plusieurs projets ambitieux (B) sur lesquels il est inteacuteressant de

srsquoarrecircter

915 Chambre reacutegionale des comptes laquo CHRU de Lille enquecircte systegraveme drsquoinformation hospitalier raquo rapport

drsquoobservations deacutefinitives mars 2016 p 9

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

414

A Preacutesentation de lrsquoorganisation du CHRU en matiegravere de SIH

750 Le CHRU de Lille a agrave cœur de srsquoassurer de la seacutecuriteacute de son systegraveme drsquoinformation

afin de garantir notamment la confidentialiteacute des donneacutees de santeacute de ses patients Par ailleurs

son statut de centre de recours et drsquoopeacuterateur drsquoimportance vitale au sens de la protection

civile lui impose de fortes exigences en matiegravere de seacutecuriteacute et de disponibiliteacute de ses

eacutequipements

Depuis plusieurs anneacutees son organisation interne reflegravete cette volonteacute de seacutecuriser les

pratiques en matiegravere de TIC en santeacute En matiegravere de gestion de son SIH il a ainsi mis en place

une gouvernance axeacutee autour de trois instances (1) et srsquoest doteacute de ressources speacutecifiques en

matiegravere de seacutecuriteacute Par ailleurs le CHRU de Lille a construit une veacuteritable strateacutegie autour du

deacuteveloppement de son SIH (2)

1) La gouvernance du SIH

751 Le CHRU de Lille a mis en place un scheacutema de gouvernance de la politique du

systegraveme drsquoinformation composeacute de trois instances le Deacutepartement des Ressources

Numeacuteriques (DRN) en charge du fonctionnement et de la coheacuterence du SIH le Comiteacute

Strateacutegique du Systegraveme drsquoInformation (CSSI) composeacute de membres de la Direction et en

charge de veacuterifier la coheacuterence strateacutegique du SIH avec lrsquoensemble des objectifs de

lrsquoeacutetablissement et enfin le Comiteacute Opeacuterationnel du Systegraveme drsquoInformation (COSI) qui veacuterifie

que les applications deacuteveloppeacutees reacutepondent correctement aux besoins des utilisateurs afin

drsquoecirctre reacuteellement utiliseacutees

Le COSI et le CSSI ont eacuteteacute particuliegraverement actifs lors de lrsquoeacutelaboration du Scheacutema

Directeur des Systegravemes drsquoInformation (SDSI) du CHRU de Lille Cependant une fois ce

scheacutema mis en place ces instances se sont moins reacuteunies916

La Chambre reacutegionale des

comptes relegraveve dans son rapport que le CSSI contrairement agrave son objectif afficheacute ne remplit

pas son rocircle de priorisation des projets et nrsquoest qursquoune instance de validation des propositions

formuleacutees par le COSI A titre drsquoexemple le CSSI nrsquoa jamais fait appel agrave des expertises ou

analyses gracircce auxquelles il aurait pu se prononcer sur la priorisation des projets agrave lrsquoappui de

916 Id p 10

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

415

critegraveres techniques ou eacuteconomiques objectiveacutes La Chambre a drsquoailleurs preacuteconiseacute de revoir

cette organisation agrave lrsquooccasion de la mise en place du prochain projet drsquoeacutetablissement du

CHRU de Lille917

752 Le DRN pour sa part est le fruit drsquoune reacutecente reacuteorganisation Ainsi lrsquoancienne

Direction des Systegravemes drsquoInformation (DSI) du CHRU de Lille a eacuteteacute reacuteorganiseacutee et a disparu

au profit drsquoune deacuteleacutegation directement rattacheacutee au Directeur geacuteneacuteral Cette reacuteorganisation a

eu pour objectif de donner plus de visibiliteacute aux chefs de projet informatique en creacuteant

notamment une sous-direction deacutedieacutee

753 Par ailleurs le CHRU de Lille dispose drsquoun Responsable de la Seacutecuriteacute du Systegraveme

drsquoInformation (RSSI) qui a la particulariteacute drsquoavoir eacutegalement la casquette de Correspondant

Informatique et Liberteacute (CIL) Ce dernier travaille en eacutetroite collaboration avec la Direction

des Affaires Juridiques (DAJ) Il a en charge la conception et lrsquoanimation de la deacutemarche

seacutecuriteacute du SIH en veillant notamment agrave ce que les niveaux de seacutecuriteacute soient conformes agrave la

reacuteglementation et aux normes applicables en la matiegravere Crsquoest agrave lui qursquoil revient de garantir la

seacutecuriteacute la disponibiliteacute et lrsquointeacutegriteacute du SIH de lrsquoeacutetablissement

Au CHRU de Lille le RSSI est accompagneacute dans ses missions par un prestataire

exteacuterieur dans le cadre notamment de la deacutemarche SMSSI engageacutee par le CHRU de Lille degraves

2011918

Son rocircle est essentiel puisque crsquoest lui qui sera garant de la coheacuterence des projets

envisageacutes avec la reacuteglementation applicable dans le domaine de la seacutecuriteacute informatique A ce

titre il valide par exemple lrsquoensemble des conventions passeacutees avec des prestataires de

service informatique sur le volet seacutecuriteacute

754 Enfin de maniegravere ponctuelle la DRN fait appel agrave la DAJ afin de seacutecuriser certains

projets A titre drsquoexemple la DAJ a eu lrsquooccasion drsquoaider agrave la reacutedaction des conventions de

teacuteleacutemeacutedecine lors de la mise en place ou du renouvellement de certains reacuteseaux de

teacuteleacutemeacutedecine Drsquoailleurs la DAJ est repreacutesenteacutee dans la plupart des comiteacutes de pilotages des

projets informatique (COPIL teacuteleacutemeacutedecine ou COPIL dossier patient par exemple) ou a

minima associeacutee au titre drsquoexpert

917 Chambre reacutegionale des comptes laquo CHRU de Lille enquecircte systegraveme drsquoinformation hospitalier raquo op cit p 9

918 V Infra ndeg 760 agrave 763

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

416

2) La gestion strateacutegique du SIH

755 Le CHRU de Lille a souhaiteacute geacuterer de maniegravere strateacutegique le deacuteveloppement de son

SIH Pour cela il a fait le choix de deacutevelopper un projet consacreacute au SIH faisant partie

inteacutegrante du projet drsquoeacutetablissement 2012-2016 Ainsi dans ce cadre le volet systegraveme

drsquoinformation du projet drsquoeacutetablissement est venu deacutefinir les orientations strateacutegiques du

CHRU de Lille en matiegravere de systegraveme drsquoinformation orientations elles-mecircmes deacuteclineacutees dans

le cadre du Scheacutema Directeur du Systegraveme drsquoInformation (SDSI)

Ce scheacutema directeur a pour ambition de deacutefinir les cibles agrave atteindre afin de soutenir

les objectifs strateacutegiques de lrsquoeacutetablissement en matiegravere de SI tout en tenant compte des

besoins exprimeacutes par les utilisateurs Ceux-ci avaient drsquoailleurs eacuteteacute recenseacutes en amont de

lrsquoeacutelaboration du projet SIH par le COSI Le SDSI permet eacutegalement drsquoeacutetablir un plan

drsquoaction permettant drsquoatteindre la cible fixeacutee par le bais drsquoune mise en œuvre progressive

mais peacuterenne du SIH Par ailleurs cela garantit une coheacuterence de lrsquoensemble du SIH

756 Afin drsquoeacutelaborer le SDSI le CHRU de Lille a deacutefini huit orientations strateacutegiques

elles-mecircmes deacuteclineacutees en objectifs opeacuterationnels Bien eacutevidemment la premiegravere orientation

fixeacutee concerne lrsquoameacutelioration de la qualiteacute et de la seacutecuriteacute de prise en charge du patient et

lrsquoaide agrave la prise de deacutecision meacutedicale et soignante par le biais du systegraveme drsquoinformation

hospitalier Le but ici est de deacutevelopper la prise en charge des patients par le biais des TIC en

deacuteveloppant notamment les logiciels drsquoaide agrave la deacutecision meacutedicale mais eacutegalement la

prescription informatiseacutee dans le cadre du circuit du meacutedicament La deuxiegraveme orientation

concerne le deacuteveloppement drsquoun SIH contribuant agrave la performance meacutedico-eacuteconomique de

lrsquoeacutetablissement En effet faciliter la diffusion de donneacutees fiables dans le cadre du PMSI est un

enjeu strateacutegique important pour lrsquoeacutetablissement de santeacute Le deacuteveloppement drsquoun SIH

efficace en la matiegravere est donc neacutecessaire La troisiegraveme orientation concerne le patient de

maniegravere plus directe puisqursquoil srsquoagit pour le SIH de permettre au patient drsquoecirctre un acteur de

sa prise en charge et de proposer une prise en charge personnaliseacutee et globale A ce titre le

CHRU de Lille srsquoest engageacute dans la creacuteation et la mise en place drsquoune plate-forme patient

accessible depuis Internet et par laquelle les patients pourront prendre des RDV en ligne

Le systegraveme drsquoinformation doit eacutegalement permettre de faciliter la continuiteacute drsquoaccegraves

notamment agrave lrsquoexteacuterieur de lrsquoeacutetablissement (orientation ndeg 4) venir en appui des activiteacutes de

recherche des professionnels de lrsquoeacutetablissement (orientation ndeg 5) et permettre agrave

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

417

lrsquoeacutetablissement de remplir sa mission hospitalo-universitaire en matiegravere drsquoenseignement

(orientation ndeg 6) Drsquoune maniegravere plus pratique le SIH doit garantir la seacutecuriteacute des donneacutees et

pouvoir fonctionner en continue afin que les applications soient toujours accessibles

(orientation ndeg 7) Enfin le CHRU doit mettre en place un SIH ergonomique pour ses agents

afin drsquoameacuteliorer leurs conditions de travail (orientation ndeg 8)

Lrsquoensemble de ces orientations ont eacuteteacute mises en œuvre aux travers notamment du

deacuteveloppement de cinq projets informatiques identifieacutes comme eacutetant prioritaires le projet

Circuit informatiseacute du meacutedicament et des produits de santeacute le projet Informatisation de la

production de soins le projet Systegraveme drsquoArchive et de Partage des Images (PACS) le projet

Informatisation des blocs opeacuteratoires et des sites interventionnels et le projet Multimeacutedia

au lit du patient

B Le deacuteveloppement de projets ambitieux relatifs agrave la seacutecuriteacute

757 Conscient des enjeux mais eacutegalement des fortes responsabiliteacutes qui pegravesent sur lui en

matiegravere de seacutecuriteacute informatique le CHRU de Lille a fait le choix de deacutevelopper des projets

ambitieux en matiegravere de seacutecuriteacute du SIH

Il nous semble utile de nous attarder plus particuliegraverement sur deux drsquoentre eux qui

ont particuliegraverement modifieacute lrsquoorganisation du CHRU en termes de seacutecuriteacute informatique le

projet carte drsquoeacutetablissement drsquoune part (1) et le projet Systegraveme de Management de la

Seacutecuriteacute des Systegravemes drsquoInformation (SMSSI) drsquoautre part (2)

1) Le projet carte drsquoeacutetablissement

758 Comme nous avons pu le constater pendant longtemps le leacutegislateur exigeait

lrsquoutilisation de la Carte de Professionnel de Santeacute (CPS) pour la transmission de donneacutees de

santeacute par voie eacutelectronique Afin de se mettre en conformiteacute avec les dispositions du deacutecret

confidentialiteacute le CHRU de Lille srsquoest engageacute degraves 2007 dans le deacuteploiement drsquoune carte

drsquoeacutetablissement Cette carte a pour objectif initial de concilier les exigences des textes de loi

et les contraintes du fonctionnement hospitalier Ainsi la carte drsquoeacutetablissement devait se

substituer agrave la CPS gracircce agrave des certificats constituant en quelque sorte une version

deacutemateacuterialiseacutee de la CPS et embarqueacutes sur la carte drsquoeacutetablissement Dans ce cadre le CHRU

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

418

de Lille eacutetait le site pilote national drsquoune deacutemarche drsquoexpeacuterimentation meneacutee par le

Groupement pour la Modernisation des Systegraveme drsquoInformation Hospitalier (GMSIH) le

Groupement drsquoInteacuterecirct Public des Cartes de Professionnels de Santeacute (GIP CPS) et la Direction

de lrsquoHospitalisation et de lrsquoOrganisation du Soin (DHOS)

759 Cette carte magneacutetique est une carte multi-usage qui controcircle lrsquoaccegraves au systegraveme

drsquoinformation permet lrsquoidentification lrsquoauthentification et la traccedilabiliteacute des accegraves au sein des

diffeacuterentes applications informatiques Mais elle permet eacutegalement un accegraves aux parkings aux

bacirctiments dont lrsquoaccegraves est limiteacute et au self Deacuteployeacutee de maniegravere tregraves large sur

lrsquoeacutetablissement cette carte est aujourdrsquohui remise de maniegravere systeacutematique aux nouveaux

employeacutes accompagneacutee de la charte drsquoutilisation de cette carte qui doit ecirctre signeacutee En

pratique la carte drsquoeacutetablissement permet non seulement de seacutecuriser lrsquoaccegraves au SIH et aux

donneacutees qursquoil contient mais eacutegalement drsquoassurer la traccedilabiliteacute des actions reacutealiseacutees au sein des

diffeacuterents logiciels qui composent le SIH Enfin elle permet aussi de signer eacutelectroniquement

les documents et de geacuterer plus facilement lrsquoensemble des droits drsquoaccegraves accordeacutes aux agents

Un second projet mis en place par le CHRU de Lille a eacutegalement retenu notre

attention

2) Le projet Systegraveme de Management de la Seacutecuriteacute du Systegraveme drsquoinformation (SMSSI)

760 Le Systegraveme de Management de la Seacutecuriteacute du Systegraveme drsquoInformation est un systegraveme

de gestion de lrsquoensemble des politiques mises en place dans le cadre de la seacutecuriteacute du SIH

Ce systegraveme permet de mettre en œuvre une deacutemarche ayant pour but de maicirctriser la seacutecuriteacute

du SIH Le SMSSI permet de garantir la disponibiliteacute et lrsquointeacutegriteacute du SIH mais eacutegalement de

garantir la confidentialiteacute des donneacutees sensibles et des traces informatiques Il permet

eacutegalement de faciliter les deacutemarches de certification de lrsquoeacutetablissement (la seacutecuriteacute du SI est

en effet eacutevalueacutee au travers du critegravere 5b) En termes drsquoaffichage enfin le SMSSI permet de

deacutemontrer lrsquoeffort de lrsquoeacutetablissement dans la garantie de la seacutecuriteacute de son SIH

761 Par principe un SMSSI est eacutelaboreacute selon une norme La plus connue en la matiegravere et

celle actuellement mise en œuvre au CHRU de Lille est la norme ISO 27001 Au CHRU de

Lille le projet SMSSI a eacuteteacute amorceacute en 2011 Il a deacutemarreacute par une phase drsquoeacutetude de 2011 agrave

2013 pendant laquelle un diagnostic et une analyse des risques ont eacuteteacute reacutealiseacutes Cette analyse

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

419

a eacuteteacute reacutealiseacutee agrave partir drsquoun diagnostic technique ainsi que des besoins de seacutecuriteacute identifieacutes lors

des diffeacuterentes reacuteunions de travail organiseacutees par lrsquoeacutequipe de prestataire en charge du projet

avec les diffeacuterents services du CHRU de Lille A lrsquoissue de cette analyse a eacuteteacute dresseacutee une

cartographie des risques de seacutecuriteacute lieacutes aux diffeacuterentes activiteacutes (production de soin

facturation hellip) et aux donneacutees du CHRU de Lille

762 Lrsquoensemble des travaux meneacutes dans le cadre du projet SMSSI a permis drsquoeacutelaborer un

reacutefeacuterentiel de seacutecuriteacute qui preacutesente les enjeux de la deacutemarche seacutecuriteacute les rocircles et

responsabiliteacute de lrsquoensemble des acteurs ainsi que les regravegles de seacutecuriteacute du SIH Ce reacutefeacuterentiel

seacutecuriteacute se compose de trois documents la Politique Geacuteneacuterale du Systegraveme drsquoInformation

(PGSSI) qui fixe les principes applicables en matiegravere de gouvernance de la seacutecuriteacute du SIH

les politiques opeacuterationnelles qui fixent les regravegles de seacutecuriteacute et la charte drsquoutilisation du SIH

qui rappelle les droits et obligations des utilisateurs du SIH Par ailleurs ce projet a eacuteteacute

lrsquooccasion de proposer une meacutethodologie dinteacutegration de la seacutecuriteacute dans les projets

permettant de garantir un niveau de seacutecuriteacute eacutequivalent pour lrsquoensemble des projets

deacuteveloppeacutes Deacutesormais lrsquoensemble des projets informatiques doivent donc ecirctre soumis agrave

lrsquoeacutequipe en charge de la seacutecuriteacute afin de reacutealiser une analyse de risques preacutealable Cela permet

donc drsquoassurer une ameacutelioration continue de la seacutecuriteacute du SIH au CHRU de Lille

763 Cette deacutemarche SMSSI est aujourdrsquohui renforceacutee par les nouvelles obligations

regraveglementaires qui pegravesent sur les eacutetablissements de santeacute en matiegravere de seacutecuriteacute de leur SIH

En effet face aux menaces pesant sur les SIH des eacutetablissements de santeacute et suite agrave quelques

incidents graves de seacutecuriteacute919

le leacutegislateur est venu renforcer le cadre juridique applicable

en la matiegravere Ainsi la loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute920

a introduit au sein du

Code de la santeacute publique un article L 1111-8-2 qui preacutevoit que laquo les eacutetablissements de santeacute

et les organismes et services exerccedilant des activiteacutes de preacutevention de diagnostic ou de soins

signalent sans deacutelai agrave lrsquoagence reacutegionale de santeacute les incidents graves de seacutecuriteacute des

systegravemes drsquoinformation raquo Le deacutecret ndeg2016-1214 du 12 septembre 2016 relatif aux conditions

919 Selon le Ministegravere des Affaires Sociales plus de 1300 attaques informatiques contre des eacutetablissements de

santeacute ont eacuteteacute recenseacutees en 2015 dont 18 attaques cibleacutees Chiffres disponibles sur [httpwwwticsantecom]

consulteacutes le 20 mars 2017 Les eacutetablissements de santeacute sont particuliegraverement cibleacutes par les attaques de type

ranconware qui visent agrave paralyser lrsquoensemble du SIH et bloquer lrsquoaccegraves aux donneacutees tant que nrsquoest pas verseacutee

une ranccedilon 920

Loi ndeg 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre systegraveme de santeacute JORF ndeg 0022 du 27 janvier

2016 texte ndeg 1

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

420

selon lesquelles sont signaleacutes les incidents graves de seacutecuriteacute des systegravemes drsquoinformation921

preacutecise quant agrave lui les conditions et modaliteacutes de mise en œuvre du signalement des incidents

graves de seacutecuriteacute des systegravemes drsquoinformation Selon ce texte laquo sont consideacutereacutes comme

incidents graves de seacutecuriteacute des systegravemes dinformation les eacuteveacutenements geacuteneacuterateurs dune

situation exceptionnelle au sein dun eacutetablissement organisme ou service et notamment les

incidents ayant des conseacutequences potentielles ou aveacutereacutees sur la seacutecuriteacute des soins les

incidents ayant des conseacutequences sur la confidentialiteacute ou linteacutegriteacute des donneacutees de santeacute

les incidents portant atteinte au fonctionnement normal de leacutetablissement de lorganisme ou

du service raquo Nous ne pouvons toutefois que constater le caractegravere impreacutecis de la deacutefinition de

la notion drsquoincident grave Le RSSI aura donc un rocircle majeur agrave jouer dans ce cadre puisqursquoil

lui appartiendra de conseiller le directeur geacuteneacuteral de lrsquoeacutetablissement en charge de la

deacuteclaration des incidents aupregraves de lrsquoARS Celle-ci pour sa part sera chargeacutee de faire

remonter aupregraves de lrsquoASIP santeacute parmi ces incidents ceux qursquoelle aura qualifieacute de

significatifs crsquoest-agrave-dire ceux laquo ayant un retentissement potentiel ou aveacutereacute sur lorganisation

deacutepartementale reacutegionale ou nationale du systegraveme de santeacute et les incidents susceptibles de

toucher dautres eacutetablissements organismes ou services raquo A noter que ces dispositions

nrsquoentreront en vigueur qursquoagrave compter du 1er

octobre 2017

Le projet SMSSI est donc un projet majeur du CHRU de Lille dans la seacutecurisation de

son SIH

921 Deacutecret ndeg 2016-1214 du 12 septembre 2016 relatif aux conditions selon lesquelles sont signaleacutes les incidents

graves de seacutecuriteacute des systegravemes dinformation JORF ndeg0214 du 14 septembre 2016 texte ndeg 15

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

421

sect2 La diffusion drsquoune culture de la seacutecuriteacute informatique

764 La seacutecuriteacute du SIH nrsquoest pas seulement lrsquoaffaire du directeur de lrsquoeacutetablissement de

santeacute Tous les utilisateurs du SIH doivent y participer et crsquoest pourquoi le CHRU de Lille

srsquoattache agrave diffuser une veacuteritable culture de la seacutecuriteacute informatique aupregraves de ses agents Pour

cela le CHRU de Lille sensibilise au quotidien ses agents par le biais de diffeacuterentes actions

de formation et de communication (A) Par ailleurs le CHRU de Lille a mis en place une

regraveglementation interne par le biais de chartes informatiques afin de rappeler aux agents leurs

obligations en matiegravere drsquoutilisation du SIH (B)

A La sensibilisation des utilisateurs du SIH

Les utilisateurs du SIH du CHRU de Lille sont reacuteguliegraverement sensibiliseacutes aux enjeux

lieacutes agrave la seacutecuriteacute Cette sensibilisation passe par des actions de formation (1) mais eacutegalement

par des actions de communications cibleacutees (2)

1) Les formations

765 Le CHRU de Lille a souhaiteacute sensibiliser ses agents agrave la question de la seacutecuriteacute du SIH

et aux risques encourus en cas de mauvaises pratiques Ces formations ont pris plusieurs

formes afin de toucher le plus grand nombre drsquoagents

Drsquoabord agrave chaque journeacutee drsquoaccueil des nouveaux recruteacutes ainsi qursquoagrave la session

drsquoaccueil des nouveaux internes une preacutesentation relative aux bons usages des outils

informatiques et notamment de la carte drsquoeacutetablissement est reacutealiseacutee Les principes de base

lieacutes agrave la seacutecuriteacute du SIH (mot de passe fort ne pas precircter ses identifiants hellip) sont alors

rappeleacutes

Puis de maniegravere ponctuelle la Direction des Affaires Juridiques est ameneacutee agrave

dispenser des formations sur ce sujet Celles-ci ont plutocirct pour but de rappeler aux agents les

regravegles applicables en matiegravere de confidentialiteacute et de secret professionnel dans le cadre de

lrsquousage des TIC en santeacute Ces formations sont programmeacutees en fonction des demandes des

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

422

services et peuvent ecirctre adapteacutees soit au public concerneacute soit aux probleacutematiques

rencontreacutees par le service Cette formule permet plus de souplesse mais aussi une meilleure

reacuteactiviteacute face aux besoins des eacutequipes Elle permet eacutegalement drsquoadapter le message deacutelivreacute

A titre drsquoexemple les formations suivantes ont pu ecirctre dispenseacutees confidentialiteacute et systegraveme

drsquoinformation la confidentialiteacute ou encore le secret professionnel

En 2016 une demande plus particuliegravere srsquoest deacuteveloppeacutee au sein des services la

formation relative aux bons usages des reacuteseaux sociaux En effet les services ont pu constater

une augmentation des meacutesusages lieacutes agrave lrsquoutilisation des reacuteseaux sociaux Une offre speacutecifique

agrave cette probleacutematique srsquoest donc deacuteveloppeacutee

Par ailleurs en 2015 le CIL en lien avec la Direction des Affaires Juridiques avait

proposeacute plusieurs sessions de formation sur la theacutematique rappel des obligations en matiegravere

drsquoaccegraves au dossier meacutedical Ces sessions avaient pour but drsquoune part de rappeler la

leacutegislation applicable en matiegravere de secret professionnel et drsquoautre part celle relative agrave la Loi

Informatique et Liberteacutes Plusieurs creacuteneaux drsquoune heure trente avec inscription libre ont eacuteteacute

programmeacutes Malheureusement cette formation nrsquoa susciteacute que peu drsquoinscriptions et lrsquoaction

nrsquoa pas eacuteteacute reconduite sur 2016

Enfin dans le cadre de la deacutemarche SMSSI une plateforme e-learning deacutedieacutee agrave la

seacutecuriteacute SI a eacuteteacute mise agrave disposition des agents du CHRU de Lille afin de les accompagner

dans le deacuteveloppement de bonnes pratiques et les sensibiliser agrave la seacutecuriteacute

A ces actions de formation des agents srsquoajoutent des actions de communication

interne

2) Les actions de communication

766 Le RSSI du CHRU de Lille en lien avec son eacutequipe seacutecuriteacute et dans le cadre du projet

SMSSI organise de faccedilon reacuteguliegravere des actions de communication en lien avec la seacutecuriteacute du

SIH Ainsi reacuteguliegraverement des e-mails sont transmis agrave lrsquoensemble des agents posseacutedant une

boite professionnelle afin de leur rappeler commun reacuteagir face agrave un e-mail suspect Cette

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

423

action permet drsquoeacuteviter les tentatives de phishing922

ou de ranconware en invitant les

utilisateurs du SIH agrave signaler ce genre de courriel au RSSI

Le RSSI a eacutegalement eu lrsquooccasion de mettre en place une campagne de

communication intituleacutee lrsquoordinateur agrave lrsquohocircpital ce nrsquoest pas comme agrave la maison qui avait

pour but de rappeler les regravegles de bonne utilisation des outils informatiques De mecircme un

espace deacutedieacute agrave la seacutecuriteacute du systegraveme dinformation a eacuteteacute mis en place sur le site Intranet du

CHRU de Lille regroupant notamment des fiches de bonnes pratiques de seacutecuriteacute SI agrave

destination des professionnels

Il a eacutegalement mis agrave disposition de ses personnels six bornes de deacutecontamination de

cleacutes USB avec six antivirus mis agrave jour tous les quarts drsquoheure

Lrsquoensemble de ces deacutemarches permet de diffuser au sein du CHRU de Lille une

veacuteritable culture de la seacutecuriteacute informatique Ainsi chaque agent participe agrave son niveau agrave

maintenir lrsquointeacutegriteacute la seacutecuriteacute et la confidentialiteacute des donneacutees

En parallegravele de la sensibilisation des agents le CHRU de Lille a souhaiteacute reacutediger des

chartes informatiques

B La mise en place de chartes informatiques

767 En 2012 le RSSI en lien eacutetroit avec la Direction des Affaires Juridiques et appuyeacute

par une socieacuteteacute de conseil exteacuterieure a reacutedigeacute quatre chartes informatiques afin drsquoencadrer

lrsquoutilisation du SIH Ces chartes ont pour objet de fixer les regravegles drsquoutilisation du systegraveme

drsquoinformation hospitalier Elles ont eacuteteacute mises en place dans le cadre du projet SMSSI et en

lien avec la Politique de Seacutecuriteacute des Systegravemes drsquoInformation Ces quatre chartes srsquoadressent

agrave quatre types drsquoacteurs diffeacuterents

922 Le phishing (hameccedilonnage ou filoutage) est une technique par laquelle des personnes malveillantes se font

passer pour de grandes socieacuteteacutes ou des organismes financiers qui vous sont familiers en envoyant des megravels

frauduleux et reacutecupegraverent des mots de passe de comptes bancaires ou numeacuteros de cartes de creacutedit pour deacutetourner

des fonds Deacutefinition du ministegravere de lrsquoeacuteconomie et des finances

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

424

La premiegravere srsquoadresse agrave lrsquoensemble des agents du CHRU de Lille appeleacutes agrave utiliser le

SIH Elle est annexeacutee au regraveglement inteacuterieur du CHRU et agrave ce titre dispose de la mecircme force

Elle est par ailleurs accessible aux agents via lrsquoIntranet de lrsquoeacutetablissement La deuxiegraveme

srsquooppose aux tiers exteacuterieurs au CHRU de Lille et qui dans le cadre de prestations de service

seraient ameneacutees agrave acceacuteder au SIH du CHRU Cette charte est systeacutematiquement annexeacutee aux

contrats de prestations de service

La troisiegraveme charte concerne une population plus speacutecifique puisqursquoelle srsquoapplique aux

administrateurs (administrateurs des reacuteseaux drsquoapplications informatiques de bases de

donneacuteeshellip) qursquoils soient internes au CHRU de Lille ou prestataire de service

Enfin la derniegravere charte concerne lrsquoinfogeacuterant du CHRU de Lille crsquoest-agrave-dire le prestataire en

charge de la gestion lrsquoexploitation lrsquooptimisation et la seacutecurisation du systegraveme drsquoinformation

du CHRU de Lille

768 Lors de leur mise en place ces chartes ont toutes suivi le mecircme processus drsquoeacutelaboration

et ce afin de leur confeacuterer une force contraignante Ainsi elles ont fait drsquoabord lrsquoobjet drsquoune

preacutesentation pour information au sein de lrsquoinstance repreacutesentative du personnel de

lrsquoeacutetablissement (Comiteacute Technique drsquoEtablissement) Puis apregraves avoir eacuteteacute eacutegalement

soumises agrave lrsquoapprobation du directoire elles ont eacuteteacute annexeacutees au regraveglement inteacuterieur de

lrsquoeacutetablissement et publieacutees sur le site Intranet de lrsquoeacutetablissement Ces chartes qui constituent

une source de droit dit mou permettent ainsi au CHRU de Lille de donner une force

contraignante aux regravegles qursquoil a souhaiteacute mettre en place en son sein Une violation de celles-

ci pourrait entrainer une sanction disciplinaire dans le cadre des agents ou une rupture du

contrat pour les prestataires de services

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

425

Conclusion de section

769 Le CHRU de Lille conscient des enjeux lieacutes agrave la seacutecuriteacute et au bon fonctionnement de

son SIH a mis en place une organisation tourneacutee vers la seacutecuriteacute A lrsquooccasion de

lrsquoeacutelaboration de son projet drsquoeacutetablissement il srsquoest ainsi inscrit dans une gestion strateacutegique

du deacuteveloppement de son SIH srsquoattachant agrave mettre en place un SIH agrave la fois efficace et

seacutecuriseacute Ainsi sa gouvernance interne repose sur des instances en charge de la coheacuterence de

lrsquoensemble des projets informatiques et lrsquoeacutetablissement de santeacute a fait le choix de creacuteer un

poste de RSSI directement en charge de la seacutecuriteacute du SIH Par ailleurs lrsquoensemble du

deacuteveloppement du SIH est penseacute de maniegravere strateacutegique et directement inteacutegreacute au projet

drsquoeacutetablissement Dans ce contexte le CHRU de Lille a notamment deacuteveloppeacute deux projets

ambitieux le projet carte drsquoeacutetablissement drsquoune part et le projet SMSSI drsquoautre part

Le CHRU de Lille srsquoattache eacutegalement agrave sensibiliser lrsquoensemble des utilisateurs de son SIH

aux enjeux lieacutes agrave la seacutecuriteacute de celui-ci Plusieurs actions ont donc eacuteteacute deacuteveloppeacutees dans ce

sens

Drsquoabord le CHRU forme ses agents reacuteguliegraverement aux questions lieacutees agrave la seacutecuriteacute du

SIH mais eacutegalement au bon respect de la confidentialiteacute Des campagnes de sensibilisation

sont reacuteguliegraverement mises en œuvre afin de rappeler reacuteguliegraverement aux agents les bonnes

pratiques agrave appliquer Par ailleurs il a mis en place des chartes informatiques agrave valeur

contraignante afin de rappeler aux utilisateurs du SIH leurs obligations en matiegravere

drsquoutilisation des TIC

Ainsi le CHRU de Lille de par son organisation interne mais eacutegalement au travers

des diffeacuterentes actions de communication et de sensibilisation qursquoil megravene deacutemontre sa

volonteacute de seacutecuriser lrsquoutilisation des TIC en santeacute par ses agents

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

426

Section 2 Une volonteacute affirmeacutee de proteacuteger les donneacutees de santeacute

770 En tant que centre hospitalier universitaire le CHRU de Lille est ameneacute agrave produire une

quantiteacute importante de donneacutees de santeacute sous forme deacutemateacuterialiseacutee Ces donneacutees neacutecessaires

agrave la bonne prise en charge des patients preacutesentent eacutegalement un inteacuterecirct non neacutegligeable pour

la recherche en santeacute Il est donc neacutecessaire pour le CHRU de Lille de srsquoassurer que la

fiabiliteacute lrsquointeacutegriteacute et surtout la confidentialiteacute de ces donneacutees soient maintenues

En ce qui concerne plus particuliegraverement la confidentialiteacute le CHRU de Lille a fait le

choix drsquoecirctre innovant et de confier cette mission agrave une commission creacuteeacutee speacutecifiquement

pour cela La mecircme logique a eacuteteacute adopteacutee en ce qui concerne la gestion des deacutemarches CNIL

(paragraphe 1) Ces commissions et plus particuliegraverement la Commission Confidentialiteacute de

lrsquoInformation Meacutedicale (CCIM) preacutesentent un bilan drsquoaction assez positif (paragraphe 2)

sect1 La creacuteation de structures adrsquohoc pour geacuterer la confidentialiteacute des

donneacutees de santeacute

771 Afin de reacutepondre correctement aux nombreuses questions agrave la fois juridiques et

techniques que pose le deacuteveloppement du systegraveme drsquoinformation hospitalier et plus

particuliegraverement la mise en place du dossier meacutedical informatiseacute le CHRU de Lille a fait le

choix de creacuteer deux commissions internes agrave composition pluridisciplinaire afin de trancher

les questions en suspens

Crsquoest ainsi que dans un premier temps la commission confidentialiteacute de lrsquoinformation

meacutedicale (CCIM) a eacuteteacute installeacutee en 2011 (1) Puis dans un cadre plus speacutecifique afin drsquoaider

le CIL dans ses missions une commission informatique et liberteacute a eacuteteacute creacuteeacutee en 2016 (2)

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

427

A La Commission Confidentialiteacute de lrsquoInformation Meacutedicale (CCIM)

La CCIM a eacuteteacute creacuteeacutee pour reacutepondre agrave un besoin accru de srsquoassurer de la confidentialiteacute

des donneacutees au moment ougrave le CHRU de Lille deacuteveloppait son dossier patient informatiseacute (1)

Au fil des ans son organisation et ses missions ont eacuteteacute ameneacutees agrave eacutevoluer (2)

1) Contexte de la creacuteation de la CCIM

772 En 2010 dans une logique drsquoinformatisation croissante de la pratique meacutedicale le

CHRU de Lille a entameacute le deacuteploiement drsquoun nouveau logiciel de gestion du dossier patient

informatiseacute Le choix opeacutereacute a eacuteteacute celui drsquoen faire le logiciel pivot du SIH autour duquel les

autres applications informatiques devront srsquoorganiser La mise en place de ce logiciel a alors

neacutecessiteacute une reacuteflexion relative agrave lrsquoattribution des droits drsquoaccegraves en son sein Non seulement

ces droits devaient ecirctre en adeacutequation avec les besoins des diffeacuterents agents selon leur

fonction mais eacutegalement avec les regravegles juridiques applicables en matiegravere de secret

professionnel En theacuteorie il suffisait drsquoappliquer les regravegles relatives au secret partageacute agrave

lrsquoeacutequipe de soins tel que deacutefini agrave lrsquoarticle L 1110-4 du Code de la santeacute publique Cependant

la traduction de ce principe juridique dans le cadre drsquoune matrice technique des droits drsquoaccegraves

srsquoest reacuteveacuteleacutee ecirctre plus complexe que preacutevue

773 Initialement cette mission a eacuteteacute confieacutee agrave un groupe de travail composeacute en majoriteacute

de meacutedecins de meacutedecins du Deacutepartement de lrsquoInformation Meacutedicale de techniciens de la

direction des systegravemes drsquoinformation des repreacutesentants du prestataire fournisseur de la

solution logicielle et du Directeur des affaires juridiques Ce groupe de travail a eu agrave preacuteciser

pour chaque profil utilisateur le contenu accessible crsquoest-agrave-dire agrave quelles parties du dossier le

profil est susceptible de donner accegraves et le peacuterimegravetre accessible crsquoest-agrave-dire agrave quel niveau de

structure ce profil permet drsquoacceacuteder (ensemble de lrsquoeacutetablissement pocircle ou service) Cette

matrice des droits drsquoaccegraves a eacuteteacute ensuite valideacutee par lrsquoensemble des instances du CHRU de

Lille et ce afin de pouvoir ecirctre parfaitement opposable agrave lrsquoensemble des utilisateurs

A lrsquooccasion du deacuteploiement de ce logiciel et de lrsquoapplication effective des regravegles drsquoaccegraves

des difficulteacutes sont apparues quant au bon respect de la confidentialiteacute des donneacutees de santeacute

Par ailleurs alors qursquoil appartenait agrave la commission meacutedicale drsquoeacutetablissement de trancher

lrsquoensemble des questions lieacutees agrave la confidentialiteacute des donneacutees meacutedicales informatiseacutees ce

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

428

dispositif a vite montreacute des limites les reacuteponses apporteacutees nrsquoeacutetant pas suffisamment concregravetes

et rapides Se posaient notamment les questions concregravetes relatives agrave la gestion des rendez-

vous meacutedicaux des deacutetenus visibles dans le logiciel agrave lrsquoaccegraves aux dossiers meacutedicaux des

personnels du CHRU par leurs collegravegues accegraves constateacute de maniegravere reacutecurrente ou encore agrave la

neacutecessiteacute de rendre strictement confidentiel lrsquoaccegraves agrave certains services (comme la psychiatrie

ou encore les consultations meacutedico-judiciaires)

774 En parallegravele il est tregraves vite apparu clairement que le praticien responsable de

linformation meacutedicale923

pour assurer au mieux son rocircle de conseil aupregraves du Directeur

Geacuteneacuteral en matiegravere de confidentialiteacute devait ecirctre assisteacute dans ses missions En effet le

meacutedecin responsable de lrsquoinformation meacutedicale ne pouvait seul assumer ces missions de

conseil pour lesquelles une reacuteponse juridique eacutethique mais aussi technique eacutetait neacutecessaire

Ainsi il a eacuteteacute deacutecideacute de creacuteer une structure adrsquohoc chargeacutee drsquoanalyser les interrogations

portant sur la confidentialiteacute des donneacutees meacutedicales et de mettre en place les proceacutedures

neacutecessaires pour en garantir le respect

La commission confidentialiteacute de lrsquoinformation meacutedicale ndash CCIM ndash srsquoest ainsi reacuteunie

pour la premiegravere fois le 29 mars 2011

775 Le choix a eacuteteacute fait de placer cette commission sous lrsquoautoriteacute directe du Directeur

Geacuteneacuteral eacutetant entendu qursquoelle devrait preacutesenter un bilan de son activiteacute devant la CME Par

ailleurs agrave deacutefaut de consensus au sein du groupe sur la solution agrave mettre en place les

difficulteacutes persistantes eacutetant soumises pour avis agrave la CME avec les solutions envisageables

de maniegravere agrave ce que le Directeur Geacuteneacuteral puisse ensuite arrecircter les mesures agrave prendre

conformeacutement aux dispositions de lrsquoarticle R 6113-6 du Code de la santeacute publique La

commission srsquoest donc vue confier agrave lrsquoorigine un rocircle de conseil et drsquoeacuteclairage vis-agrave-vis du

Directeur Geacuteneacuteral

923 Selon les dispositions de lrsquoarticle R 6113-6 du Code de la santeacute publique le meacutedecin responsable de

lrsquoinformation meacutedicale conseille le directeur geacuteneacuteral de lrsquoeacutetablissement sur la dureacutee de conservation des archives

meacutedicales la reacuteception des demandes des usagers concernant leur droit drsquoaccegraves et de rectification preacutevu par la

loi informatique et liberteacutes du 6 janvier 1978 et les droits drsquoaccegraves aux donneacutees meacutedicales nominatives ou

lrsquoeacutelimination des dossiers archiveacutes Par ailleurs mecircme si crsquoest au directeur geacuteneacuteral qursquoil appartient de prendre

toutes dispositions utiles pour preacuteserver la confidentialiteacute des donneacutees meacutedicales nominatives notamment en ce

qui concerne les drsquoattribution et de controcircle des autorisations drsquoaccegraves ceci doit se faire en lien avec le Preacutesident

de la CME et le meacutedecin responsable de lrsquoinformation meacutedicale

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

429

776 Cette structure agrave majoriteacute meacutedicale est piloteacutee par le meacutedecin responsable de

lrsquoinformation meacutedicale et composeacutee drsquoun meacutedecin en charge du dossier patient un meacutedecin

repreacutesentant du comiteacute opeacuterationnel du systegraveme drsquoinformation COSI un meacutedecin deacutesigneacute par

la CME un repreacutesentant de la sous-commission qualiteacute et seacutecuriteacute des soins un repreacutesentant

de la coordination geacuteneacuterale de soins un repreacutesentant de la direction du systegraveme drsquoinformation

hospitalier le correspondant CNIL et un repreacutesentant de la direction des affaires juridiques

A lrsquoensemble de ces membres peuvent ecirctre associeacutees de maniegravere ponctuelle des personnes

ressources sur certains sujets tel que le responsable des archives ou le repreacutesentant des

secreacutetaires meacutedicales par exemple

2) Missions et eacutevolution de la CCIM

777 Les premiers travaux de la CCIM ont avanceacute difficilement Assez rapidement la

commission srsquoest trouveacutee en charge de nombreuses questions strateacutegiques agrave reacutesoudre sans en

avoir ni le pouvoir ni la leacutegitimiteacute pour trancher correctement et efficacement ces questions

En effet cette commission qui nrsquoavait initialement qursquoun rocircle drsquoeacuteclairage a commenceacute agrave

rendre des avis sans aucune force contraignante ni reacuteelle leacutegitimiteacute Par ailleurs agrave lrsquooccasion

de ses rapports drsquoactiviteacute la CCIM a constateacute que des risques majeurs existaient en termes de

respect de la confidentialiteacute des donneacutees de santeacute lieacutes agrave la fois agrave lrsquoorganisation des droits

drsquoaccegraves aux diffeacuterentes applications du SIH ainsi qursquoagrave lrsquoabsence totale de suivi et drsquoanalyse

des accegraves aux donneacutees par les utilisateurs

778 Elle a donc souhaiteacute proposer une reacuteorientation de ses prioriteacutes ainsi une augmentation

de ses moyens En 2014 soit trois ans apregraves sa mise en place la CCIM a formuleacute agrave lrsquointention

de la Direction geacuteneacuterale du CHRU de Lille une proposition de fonctionnement en termes de

gestion de la confidentialiteacute meacutedicale Lrsquoorganisation proposeacutee reposait sur drsquoune part une

gestion de la confidentialiteacute au sein du SIH par le deacutepartement de lrsquoinformation meacutedicale

avec lrsquoappui et la validation systeacutematique de la CCIM et drsquoautre part sur la gestion

opeacuterationnelle assureacutee par le Deacutepartement de lrsquoinformation meacutedicale en lien avec lrsquoensemble

des directions techniques compeacutetentes (et notamment la direction des ressources numeacuteriques)

Lrsquoensemble des actions agrave mener pour aboutir agrave une organisation optimiseacutee et peacuterenne en

matiegravere de gestion de la confidentialiteacute ainsi que les moyens humains et financiers agrave

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

430

mobiliser eacutetait eacutegalement preacuteciseacute dans cette proposition Cependant bien que la direction

geacuteneacuterale de lrsquoeacutetablissement ait agrave maintes reprises reacuteaffirmeacute le besoin drsquoorganiser la gestion

de la confidentialiteacute et a confirmeacute le rocircle preacutepondeacuterant de la CCIM en la matiegravere aucune

preacutesentation en Directoire du projet nrsquoa eu lieu

779 Toutefois la CCIM a continueacute sa reacuteorganisation afin de poursuivre au mieux ses

travaux Crsquoest ainsi que 4 nouveaux grands axes de travail ont eacuteteacute redeacutefinis la deacutefinition des

droits drsquoaccegraves la gestion de ces droits lrsquoanalyse des pratiques et des traces drsquoaccegraves et enfin

lrsquoinformation et la communication autour de la confidentialiteacute En parallegravele la Deacutepartement

de lrsquoInformation Meacutedicale a obtenu la creacuteation drsquoun poste de meacutedecin agrave 60 consacreacute agrave la

confidentialiteacute Le redimensionnent des attributions et des moyens de la CCIM a permis de

donner une toute nouvelle envergure agrave cette commission dont les travaux ont eacuteteacute plus riches

sur les anneacutees 2015 et 2016

Cette commission est ameneacutee agrave eacutevoluer dans les anneacutees agrave venir sa charge de travail et

son champ drsquoaction ne cessant drsquoaugmenter Une organisation plus structureacutee doit ecirctre mise

en place et sa leacutegitimiteacute doit ecirctre deacutefinitivement ancreacutee

B Le Comiteacute CNIL

780 Le CHRU de Lille bien que doteacute drsquoun agent occupant la fonction de Correspondant

Informatique et Liberteacutes agrave 50 de son temps nrsquoarrivait pas agrave faire face agrave lrsquoensemble des

formaliteacutes exigeacutees en la matiegravere Tregraves rapidement la Direction des Affaires Juridiques et le

CIL ont travailleacute en eacutetroite collaboration afin drsquoameacuteliorer le respect des regravegles en la matiegravere

En ce sens et comme nous lrsquoavons vu preacuteceacutedemment une campagne de sensibilisation par le

biais de formations avait eacuteteacute mise en place sans reacuteel succegraves Par ailleurs afin de satisfaire agrave

lrsquoobligation leacutegale drsquoinformation des patients relative aux traitements de donneacutees les

concernant une information par voie drsquoaffichage drsquoune part et par le biais du livret

drsquoaccueil drsquoautre part a eacuteteacute reacutealiseacutee Cependant face agrave la techniciteacute et agrave la reacutecurrence de

certaines probleacutematiques (notamment lieacutees agrave lrsquoencadrement de la recherche en santeacute) il a eacuteteacute

deacutecideacute de creacuteer un comiteacute deacutedieacute veacuteritable dispositif transverse au cocircteacute du Correspondant

Informatique et Liberteacutes permettant de garantir la protection des donneacutees agrave caractegravere

personnel notamment par des actions en amont telle que lrsquoeacutelaboration des mesures adapteacutees agrave

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

431

la protection des donneacutees mais eacutegalement des action concregravetes comme lrsquoinstruction des

demandes speacutecifiques ou complexes et bien entendu le suivi des eacutevolutions leacutegislatives et

regraveglementaires sur la question particuliegraverement fournies ces derniegraveres anneacutees

781 Ce comiteacute a eacuteteacute penseacute par le CIL comme une eacutemanation de la CCIM Ainsi on

retrouve dans la composition de ce comiteacute des membres eacutegalement preacutesents agrave la CCIM

(notamment le DIM et la Direction des Affaires Juridiques) Sa composition est

multidisciplinaire avec toutefois une forte repreacutesentation des acteurs de la recherche

meacutedicale et notamment les coordonnateurs des attacheacutes de recherches cliniques en prise

directe avec les deacutemarches CNIL et les probleacutematiques qursquoelles peuvent poser

Tregraves pragmatique ce comiteacute entend apporter des reacuteponses pratiques aux questions qui

lui sont soumises Il participe agrave la diffusion de lrsquoinformation en matiegravere de leacutegislation

Informatique et Liberteacutes Ainsi agrave lrsquooccasion de la publication des meacutethodologies de reacutefeacuterence

le comiteacute a travailleacute agrave lrsquoeacutelaboration drsquoun support drsquoinformation

782 Son premier chantier a consisteacute en un travail de simplification des deacutemarches CNIL au

sein de lrsquoeacutetablissement Au CHRU de Lille un accegraves Intranet agrave une rubrique deacutedieacutee est mise

en place depuis plusieurs anneacutees Cependant les deacuteclarations de traitement nrsquoeacutetaient pas

nombreuses par manque de visibiliteacute et de clarteacute de cette rubrique Par ailleurs les deacutemarches

pouvaient parfois paraitre trop longues ou fastidieuses pour les responsables de traitement

(notamment dans le cas des thegraveses) qui preacutefeacuteraient les contourner Ainsi le premier travail du

Comiteacute CNIL a eacuteteacute drsquoameacuteliorer cette proceacutedure Le formulaire de deacuteclaration a eacuteteacute modifieacute et

des questions plus preacutecises ont eacuteteacute ajouteacutees permettant de qualifier plus facilement le

traitement (notamment pour la recherche) et de limiter les demandes de preacutecisions aupregraves du

deacuteclarant

Une nette eacutevolution des deacuteclarations a alors eacuteteacute observeacutee Ainsi en mars 2017 une

augmentation de 44 des deacuteclarations par rapport agrave 2016 a pu ecirctre constateacutee Pour compleacuteter

ce dispositif une permanence CNIL a eacuteteacute mise en place de maniegravere hebdomadaire et assureacutee

par des membres de lrsquoeacutequipe seacutecuriteacute du SIH

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

432

Actuellement le comiteacute continue son travail drsquoeacutetude des situations plus complexes tout en

suivant lrsquoeacutevolution de la leacutegislation applicable afin drsquoadapter ses pratiques

sect2 Bilan des reacutealisations de ces structures novatrices

783 Il nous apparait inteacuteressant agrave ce stade de nos recherches de nous attarder sur les

reacutesultats obtenus par la creacuteation de ce type de structures et plus particuliegraverement sur les

reacutealisations de la CCIM commission ayant veacutecu suffisamment longtemps pour qursquoun premier

bilan soit dresseacute

Les pistes de travail de cette commission ont eacuteteacute nombreuses Il nous semble

cependant inteacuteressant de nous arrecircter plus particuliegraverement sur le travail de reacuteflexion autour de

la mise ne place drsquoune regraveglementation interne en matiegravere de confidentialiteacute de lrsquoinformation

(A) ainsi que sur le travail portant sur lrsquoanalyse des traces drsquoaccegraves et la reacuteponse apporteacutee aux

accegraves indus (B) Enfin il faut preacuteciser que lrsquoaction de cette commission a eacuteteacute reconnue par

lrsquoARS au niveau reacutegional qui lui a deacutecerneacute en 2015 le label laquo droit des usagers raquo (C)

reconnaissant ainsi le travail particuliegraverement novateur mais aussi protecteur des droits des

patients de cette commission

A Lrsquoeacutelaboration drsquoune reacuteglementation interne

784 Partant du principe que pour ecirctre opposables les regravegles relatives agrave la confidentialiteacute

devaient ecirctre parfaitement connues des utilisateurs la CCIM a meneacute et megravene encore agrave ce

jour un chantier de mise en place drsquoune regraveglementation interne

Cette regraveglementation se compose de deux parties drsquoun cocircteacute un regraveglement inteacuterieur de

lrsquoinformation meacutedicale plutocirct geacuteneacuteral et de lrsquoautre des regraveglements inteacuterieurs drsquoapplication

speacutecifiques agrave chacun des logiciels Ces deux chantiers qui sont encore en cours drsquoeacutelaboration

agrave lrsquoheure actuelle meacuteritent tout de mecircme que lrsquoon srsquoy attarde

Lrsquoideacutee de reacutediger un regraveglement inteacuterieur de lrsquoinformation meacutedicale au CHRU de Lille

nrsquoest pas nouvelle En reacutealiteacute quand la CCIM srsquoest empareacutee de la question il srsquoagissait plutocirct

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

433

drsquoune mise agrave jour drsquoun preacuteceacutedent regraveglement initialement reacutedigeacute en 2001 mais jamais appliqueacute

faute de validation institutionnelle Le but premier de ce regraveglement est de remettre agrave plat

lrsquoensemble des regravegles applicables en matiegravere de partage et drsquoutilisation des donneacutees issues de

lrsquoactiviteacute meacutedicale Il repreacutesente un atout particuliegraverement preacutecieux dans le cadre de la

recherche et des modaliteacutes drsquoaccegraves et de reacuteutilisation des donneacutees de santeacute dans le cadre drsquoune

recherche reacutetrospective notamment

785 Deacutebuteacutee en 2014 cette mise agrave jour nrsquoa cependant pas abouti agrave lrsquoheure actuelle Deux

eacuteleacutements peuvent expliquer les difficulteacutes rencontreacutees par la CCIM dans la gestion de ce

travail Drsquoune part la commission est reacuteguliegraverement saisie par drsquoautres probleacutematiques

consideacutereacutees comme plus urgentes notamment en termes de droits drsquoaccegraves au SIH Victime en

quelques sortes de son succegraves mais nrsquoayant pas drsquoeacutequipe deacutedieacutee pour geacuterer lrsquoensemble des

missions et demandes confieacutees la CCIM ne peut srsquoatteler agrave tous les chantiers confieacutes et doit

donc en prioriser certains Dans ce contexte la reacutedaction du regraveglement inteacuterieur de

lrsquoinformation meacutedicale nrsquoa malheureusement jamais eacuteteacute prioriseacute

Drsquoautre part la theacutematique de la recherche meacutedicale et plus particuliegraverement des

modaliteacutes de partage de lrsquoinformation meacutedicale au sein de lrsquoeacutetablissement dans un but de

reacuteutilisation agrave des fins de recherche est un sujet particuliegraverement sensible et strateacutegique Ce

sujet neacutecessite un arbitrage institutionnel avant de pouvoir ecirctre inteacutegreacute au sein du regraveglement

inteacuterieur de lrsquoinformation meacutedicale Crsquoest pourquoi aujourdrsquohui le CCIM nrsquoa pas encore

adopteacute son regraveglement inteacuterieur

786 Sur ce sujet un parallegravele peut ecirctre effectueacute avec les regraveglements inteacuterieurs du

Deacutepartement de lrsquoInformation Meacutedicale (DIM) qui existent dans certains eacutetablissements

hospitaliers En effet dans les eacutetablissements qui ne se sont pas doteacutes drsquoune commission

deacutedieacutee agrave la protection de la confidentialiteacute le Meacutedecin responsable de lrsquoinformation meacutedicale

et donc par extension le DIM doivent geacuterer cette mission De maniegravere classique ces

regraveglements inteacuterieurs reprennent les missions du DIM sa place dans lrsquoeacutetablissement et les

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

434

moyens qui lui sont attribueacutes Les rocircles des diffeacuterents acteurs ainsi que les regravegles de traitement

et de transmission de linformation y sont eacutegalement preacutesents924

Le travail de regraveglementation interne de la CCIM concerne eacutegalement les diffeacuterents logiciels

meacutedicaux composant le SIH du CHRU de Lille Partant de lrsquoexemple de la charte

informatique reacutedigeacutee en 2012 et annexeacutee au Regraveglement Inteacuterieur de lrsquoeacutetablissement la CCIM

a souhaiteacute dupliquer ce modegravele Lrsquoideacutee eacutetait donc de reacutediger le regraveglement inteacuterieur

drsquoutilisation de chaque application logicielle sur un modegravele identique Ces regraveglements ont

deux objectifs principaux drsquoune part deacutefinir clairement les droits drsquoutilisation des diffeacuterents

profils dans lrsquoapplication et drsquoautre part rappeler aux utilisateurs leurs obligations

notamment en termes de seacutecuriteacute et de confidentialiteacute

La reacutedaction de ces regraveglements inteacuterieurs des applications meacutedicales a deacutebuteacute en 2015

et demeure en cours aujourdrsquohui

La CCIM a eacutegalement travailleacute sur un autre sujet important celui des accegraves indus aux

donneacutees de santeacute

B Analyse et sanction des accegraves indus

787 Sur une peacuteriode de 18 mois entre 2013 et 2015 le CHRU a vu le nombre de plaintes

de professionnels de santeacute pris en charge au sein du CHRU de Lille pour accegraves indu agrave leur

dossier meacutedical informatiseacute augmenter de maniegravere significative

Ces plaintes sont en reacutealiteacute de deux sortes drsquoun cocircteacute les plaintes qui eacutemanent

drsquoagents qui craignent une rupture dans la confidentialiteacute de leur donneacutees souvent par

manque de confiance dans le SIH et drsquoun autre cocircteacute les plaintes reacutesultant de constats

objectifs de lrsquoexistence drsquoune violation du secret professionnel Srsquoest alors poseacutee pour la

CCIM la question de la position agrave adopter

924 V notamment en ce sens Le deacutepartement dinformation meacutedicale Information informatique et programme

de meacutedicalisation des systegravemes dinformation Fascicule Informations Hospitaliegraveres ndeg27 1990 pp 60-63

plusieurs regraveglement inteacuterieurs de DIM sont disponible sur Internet Crsquoest le cas notamment du Centre Hospitalier

Edouard Toulouse agrave Marseille ou celui du Centre Hospitalier de Montperrin

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

435

En effet lrsquooutil informatique permet une traccedilabiliteacute des accegraves au dossier meacutedical

informatiseacute Cependant la CCIM a ducirc reacutefleacutechir aux modaliteacutes drsquoexploitation de ces traces

drsquoun point de vue technique bien eacutevidemment mais surtout drsquoun point de vue juridique Une

reacuteflexion a eacuteteacute meneacutee pour savoir sur quels fondements ces traces drsquoaccegraves pourraient ecirctre

transmises aux personnes qui en feraient la demande La CCIM souhaitait en effet rendre

accessible aux patients qursquoils soient agents du CHRU de Lille ou non lrsquoensemble des traces

drsquoaccegraves agrave leur dossier meacutedical

788 Ainsi partant du principe que les traces drsquoaccegraves agrave un dossier meacutedical informatiseacute

faisaient partie inteacutegrante de ce dossier lui-mecircme communicable au patient au titre des

dispositions preacutevues par lrsquoarticle L 1111-7 du Code de la santeacute publique la CCIM a

consideacutereacute que celles-ci pourraient donc ecirctre communiqueacutees agrave toute personne en faisant la

demande Cependant dans un souci de loyauteacute vis-agrave-vis de ses agents une communication

large a eacuteteacute effectueacutee agrave ce sujet avant que la proceacutedure de communication des traces soit

effective Au deuxiegraveme semestre 2015 cette proceacutedure a eacuteteacute deacutefinitivement mise en place

Les demandes nrsquoont cesseacute depuis drsquoaugmenter Cependant nous pouvons constater que le

nombre de demandes reste tregraves faible en proportion de lrsquoactiviteacute du CHRU de Lille Ainsi

depuis la mise en place de cette proceacutedure 32 demandes de communication de traces drsquoaccegraves

ont eacuteteacute enregistreacutees et traiteacutees Huit de ces demandes eacutemanaient de patients 19 drsquoagents pris

en charge au CHRU de Lille et cinq de cadres drsquoagents suspectant un comportement

inadeacutequat Dans ce contexte la DAJ a par ailleurs rencontreacute six personnes ayant demandeacute

ces traces drsquoaccegraves afin notamment de les renseigner sur les suites possibles agrave donner

Par ailleurs il a eacuteteacute deacutecideacute que les accegraves indus aux dossiers meacutedicaux constateacutes agrave cette

occasion feraient lrsquoobjet drsquoune transmission aupregraves du Deacutepartement des Ressources

Humaines afin drsquoenvisager au cas par cas des sanctions disciplinaires ou a minima un

rappel des regravegles applicables Cette proceacutedure permet au CHRU drsquoecirctre transparent vis-agrave-vis de

ses patients mais eacutegalement de les rassurer En effet il nrsquoest pas rare qursquoune suspicion de

violation du secret professionnel soit infondeacutee et la transmission des traces permet de calmer

les craintes du patient agrave ce sujet Elle permet eacutegalement de sensibiliser les agents aux regravegles

applicables en matiegravere de partage de lrsquoinformation meacutedicale et leur rappeler leurs obligations

en matiegravere de secret professionnel et de confidentialiteacute

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

436

La CCIM fortes de ces actions a souhaiteacute concourir au label droits des usagers du

Ministegravere de la santeacute

C La labellisation de lrsquoaction de la CCIM

789 En 2015 la CCIM a souhaiteacute concourir au label droits des usagers mis en place par

le Ministegravere de la santeacute via les ARS depuis 2011 Elle a ainsi soumis son projet intituleacute

laquo deacutemarche qualiteacute et gestion des risques de la CCIM raquo Ce projet drsquooptimisation de la

confidentialiteacute des donneacutees de santeacute eacutetait en reacutealiteacute composeacute de trois projets unitaires et

indissociables deacuteveloppeacutes en 2015 la participation agrave la semaine seacutecuriteacute patient la

reacutealisation drsquoune deacutemarche drsquoeacutevaluation des pratiques professionnelles et la reacutedaction des

regraveglements inteacuterieurs des applications meacutedicales Ces trois projets meneacutes de front avaient

pour but drsquoameacuteliorer la culture des professionnels de reacuteglementer de maniegravere claire et

applicable et drsquoameacuteliorer en conseacutequence le respect des droits des usagers

Il est inteacuteressant de nous attarder sur le contenu de ces trois projets qui ont permis agrave la

CCIM drsquoobtenir son label droit des usagers925

790 En 2015 la CCIM a participeacute aux actions internes du CHRU meneacutees agrave lrsquooccasion de la

Semaine Seacutecuriteacute Patient Lrsquoaction de la CCIM agrave cette occasion srsquoest mateacuterialiseacutee par une

preacutesentation de la Commission et de ses travaux aupregraves des professionnels du CHRU de Lille

sur un stand deacutedieacute au sein des diffeacuterents hocircpitaux de lrsquoeacutetablissement Ainsi lors de cette

action les membres de la CCIM ont pu rappeler agrave de nombreux professionnels les principes

du secret meacutedical et du secret professionnel et ont eu lrsquooccasion de distribuer des documents

de communication926

portant sur le respect de la confidentialiteacute des donneacutees meacutedicales dans

la pratique de soin et dans la recherche en santeacute Certains des stands ayant eacuteteacute installeacutes dans le

hall drsquoentreacutee des hocircpitaux les patients inteacuteresseacutes ont eacutegalement eu lrsquooccasion de poser leurs

questions relatives agrave la seacutecuriteacute et agrave la confidentialiteacute de leurs donneacutees de santeacute Drsquoune

maniegravere plus geacuteneacuterale cette action a eacuteteacute lrsquooccasion drsquoune campagne de communication

925 Les modaliteacutes drsquoobtention de ce label sont reprises en annexe de nos travaux annexe II

926 Ces documents sont repris en annexe de nos travaux annexe III

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

437

massive au sujet de la CCIM et de ses actions encore trop meacuteconnus des professionnels de

lrsquoeacutetablissement en 2015

791 Par ailleurs la CCIM a reacutealiseacute en 2015 un audit interne sous forme drsquoeacutevaluation des

pratiques professionnelles (EPP) et portant sur lrsquoaccegraves aux donneacutees meacutedicales informatiseacutees

et leur partage Ce travail a eacuteteacute reacutealiseacute suite agrave une augmentation des plaintes pour accegraves indu

au dossier meacutedical informatiseacute mais eacutegalement en raison de lrsquoobservation de meacutesusages

importants dans lrsquoutilisation du systegraveme drsquoinformation Les objectifs poursuivis par cet audit

eacutetaient multiples Du point de vue des professionnels du CHRU il visait principalement agrave les

sensibiliser sur la probleacutematique de la confidentialiteacute des donneacutees en les faisant reacutefleacutechir sur

leurs propres pratiques Du point de lrsquoeacutetablissement ce questionnaire permettait de faire

connaitre aupregraves des professionnels lrsquoexistence de la CCIM et le travail reacutealiseacute au niveau

institutionnel au sujet de la confidentialiteacute

Un questionnaire de 30 questions927

a donc eacuteteacute mis en ligne sur lrsquoIntranet de

lrsquoeacutetablissement pendant deux mois et lrsquoensemble des agents du CHU eacutetaient inviteacutes agrave y

reacutepondre Deux mille trois cent deux personnes ont participeacute (sur les 15 000 personnes

environ travaillant au CHU)928

A lrsquoissue de cet EPP des risques de rupture de la confidentialiteacute ont eacuteteacute repeacutereacutes agrave

plusieurs niveaux A partir de ces reacutesultats la CCIM va pouvoir engager des actions

correctrices Par ailleurs les reacutesultats de cet audit ont fait lrsquoobjet drsquoune large communication

agrave lrsquoeacutechelle de lrsquoeacutetablissement mais au-delagrave eacutegalement puisque les travaux de la CCIM et plus

speacutecifiquement ce travail drsquoaudit ont fait lrsquoobjet drsquoune communication agrave lrsquooccasion drsquoune

journeacutee drsquoeacutetudes consacreacutee au secret professionnel et organiseacutee par le CHRU de Lille en

partenariat avec la faculteacute de droit de lrsquoUniversiteacute de Lille Droit et Santeacute Cette

communication a eacutegalement eacuteteacute publieacutee au sein de la Revue Geacuteneacuterale de Droit meacutedical lui

assurant une certaine visibiliteacute parmi les professionnels du droit de la santeacute929

927 Ce questionnaire est repris en annexe de nos travaux annexe IV

928 DUMESNIL Chloeacute laquo Informatisation des donneacutees et protection du secret lrsquoexemple des travaux de la

commission de confidentialiteacute des informations meacutedicales du CHRU de Lille raquo RGDM ndeg 61 deacutecembre 2016

p 79 929

Id pp 77-79

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

438

792 Enfin comme nous lrsquoavons vu preacuteceacutedemment la CCIM a travailleacute agrave la reacutedaction des

regraveglements inteacuterieurs des principales applications informatiques preacutesentesay au sein du SIH

du CHRU de Lille

Ces trois actions ont composeacute le projet global laquo deacutemarche qualiteacute et gestion des

risques de la CCIM raquo qui a reccedilu le label reacutegional Droits des usagers 2015

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

439

Conclusion de la section

793 Le CHRU de Lille a creacuteeacute deux commissions adrsquohoc afin de geacuterer drsquoune part la

protection de la confidentialiteacute des donneacutees de santeacute et drsquoautre part lrsquoensemble des

formaliteacutes CNIL

En effet face agrave lrsquoaugmentation constante du nombre de donneacutees sensibles produites et

enregistreacutees au sein du SIH le CHRU de Lille a confieacute agrave la CCIM la mission de veiller au

strict respect des regravegles de partage de celles-ci Par ailleurs afin drsquoaider la CIL dans ses

missions un Comiteacute CNIL srsquoest mis en place permettant notamment de simplifier et rendre

plus visibles les deacutemarches preacutealables neacutecessaires agrave la mise en place drsquoun nouveau traitement

de donneacutees au sein du CHRU de Lille

Ces deux commissions preacutesentent une composition pluridisciplinaire sensiblement

identique Ainsi lrsquoensemble des acteurs concerneacutes par la confidentialiteacute des donneacutees y sont

repreacutesenteacute notamment le DIM le CIL la communauteacute meacutedicale la communauteacute soignante la

DRN et la DAJ

En instaurant ces commissions le CHRU de Lille a deacutemontreacute sa volonteacute de proteacuteger

activement les donneacutees de santeacute de ses patients Aujourdrsquohui le bilan des actions de ces

commissions et plus particuliegraverement de la CCIM est globalement positif mecircme si cette

commission manque encore aujourdrsquohui drsquoune leacutegitimiteacute forte et de moyens humains suffisant

pour mener agrave bien toutes ses missions

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

441

Conclusion du chapitre

794 Le CHRU de Lille a souhaiteacute inscrire le deacuteveloppement et la peacuterennisation de son SIH

dans la strateacutegie globale de lrsquoeacutetablissement Le Scheacutema Directeur des Systegravemes drsquoInformation

(SDSI) a donc eacuteteacute adopteacute agrave lrsquooccasion du projet drsquoeacutetablissement 2012-2016 A cette occasion

huit grandes orientations ont eacuteteacute deacutefinies elles-mecircmes mises en œuvre par le biais de cinq

projets prioritaires

Par ailleurs deux projets importants en termes de seacutecuriteacute du SIH ont eacuteteacute mis en œuvre

et meneacutes agrave bien au CHRU de Lille Drsquoune part le projet carte drsquoeacutetablissement qui a permis

de fournir agrave lrsquoensemble des agents de lrsquoeacutetablissement une carte permettant drsquoassurer le

controcircle des accegraves mais eacutegalement lrsquoauthentification et la traccedilabiliteacute des actions au sein des

diffeacuterentes applications informatiques Drsquoautre part le projet SMSSI deacutemarche qui a

permis au CHRU de Lille de garantir lrsquointeacutegriteacute et la disponibiliteacute de son SIH mais eacutegalement

drsquoeacutelaborer une meacutethodologie permettant drsquointeacutegrer de maniegravere systeacutematique la seacutecuriteacute au sein

des projets informatiques deacuteveloppeacutes

Le CHRU srsquoattache eacutegalement agrave diffuser aupregraves de ses agents une veacuteritable culture de

la seacutecuriteacute du SIH par le biais de formations mais eacutegalement drsquoactions de communication et

de sensibilisation Enfin le CHRU de Lille deacutemontre une reacuteelle volonteacute de proteacuteger les

donneacutees de santeacute qursquoil produit Ainsi il a creacuteeacute deux structures adrsquohoc pour mener agrave bien cette

mission la CCIM et le comiteacute CNIL La CCIM commission particuliegraverement novatrice

preacutesente un bilan drsquoactions positif mecircme si son manque de moyens et des interrogations

quant agrave sa place au sein de lrsquoeacutetablissement freinent lrsquoavanceacutee de ses travaux

443

Conclusion du titre

795 Afin de seacutecuriser au mieux lrsquoutilisation des TIC au sein des eacutetablissements de santeacute

ces derniers doivent intervenir agrave chaque eacutetape depuis la mise en place des TIC jusqursquoagrave leur

utilisation quotidienne Face aux lacunes des pouvoirs publics et aux difficulteacutes causeacutees par

les impreacutecisions du droit les eacutetablissements peuvent agir et impulser la seacutecurisation des

pratiques qui leur manque Finalement ils beacuteneacuteficient drsquoune marge de manœuvre qui leur

permet drsquoecirctre inventifs et drsquoeacutelaborer des solutions qui leurs sont parfaitement adapteacutees creacuteant

ainsi le contexte propice au deacuteveloppement de techniques de plus en plus innovantes

Cependant il leur faut pour cela penser de maniegravere globale leur politique de deacuteveloppement

des SIH Cette reacuteflexion doit ecirctre amorceacutee en amont en deacuteveloppant une veacuteritable strateacutegie

au sein mecircme du projet drsquoeacutetablissement Les eacutetablissements ne doivent pas oublier qursquoils

disposent par ailleurs drsquooutils juridiques et manageacuteriaux qui pourront leur permettre drsquoassurer

une utilisation des TIC qui sera fiable et respectueuse des contraintes juridiques

deacuteontologiques et eacutethiques

En la matiegravere le CHRU de Lille constitue un exemple de seacutecurisation reacuteussie

Soucieux drsquoinstaurer les meilleures conditions possibles pour le deacuteveloppement de son SIH il

a su geacuterer de maniegravere strateacutegique diffeacuterents projets relatifs agrave la seacutecuriteacute tout en assurant une

seacutecurisation accrue des donneacutees de santeacute

445

Conclusion de la seconde partie

796 A ce stade de notre eacutetude nous avons pu constater que les pouvoirs publics avaient un

rocircle strateacutegique agrave jouer dans la seacutecurisation de lrsquoutilisation des TIC en santeacute Une impulsion

nationale doit ecirctre donneacutee en la matiegravere afin drsquoassurer la coheacuterence des projets deacuteveloppeacutes et

seule une gouvernance forte de lrsquoe-santeacute pourra y parvenir Le deacuteploiement des projets pourra

quant agrave lui se faire au niveau reacutegional en srsquoappuyant sur les ARS mais eacutegalement sur la

dynamique qui apparaitra avec la naissance des GHT

Bien qursquoune inflation leacutegislative dans le domaine soit eacutevidemment agrave proscrire

laquo certains points de droits constituent clairement des verrous au regard du deacuteveloppement de

lrsquoe-santeacute raquo930

Ainsi le cadre doit ecirctre reacutenoveacute afin drsquoaccompagner lrsquoinnovation dans le

numeacuterique en santeacute et assurer la seacutecuriteacute juridique neacutecessaire agrave la bonne utilisation des TIC

dans la pratique meacutedicale

Dans cette dynamique geacuteneacuterale de seacutecurisation les eacutetablissements de santeacute ont un rocircle

essentiel agrave jouer Ils peuvent en effet identifier leurs besoins et seacutecuriser au mieux leurs

pratiques quotidiennes A titre drsquoexemple le CHRU de Lille srsquoattache agrave seacutecuriser au mieux

lrsquoutilisation des TIC dans la pratique quotidienne de ses agents

930 ROBIN Jean-Yves laquo Lrsquourgence numeacuterique Faire de la France un leader de lrsquoe-santeacute raquo LrsquoHarmattan 2015

p 193

447

Conclusion geacuteneacuterale

laquo Nous sommes agrave la croiseacutee des chemins [hellip] les prochaines anneacutees seront

deacuteterminantes pour le devenir de notre modegravele et le numeacuterique peut ecirctre notre

meilleur allieacute comme notre pire ennemi pour preacuteserver ce qui doit lrsquoecirctre et

transformer ce que nous choisirons collectivement de reacuteformer raquo931

797 A lrsquoissue de nos travaux nous pouvons constater que lrsquoutilisation des TIC dans la

pratique meacutedicale ne fait pas lrsquoobjet drsquoun cadre juridique speacutecifique et unifieacute Reacutefleacutechir agrave

lrsquoappreacutehension des TIC en santeacute par le Droit crsquoest faire appel agrave diffeacuterentes sources du droit

Tout comme il nrsquoexiste pas une seule utilisation possible des TIC dans la pratique meacutedicale il

nrsquoexiste pas un seul cadre juridique applicable Les eacutetablissements de santeacute vont donc devoir

reacutefleacutechir au cas par cas et repeacuterer les diffeacuterentes contraintes juridiques qui srsquoimposent agrave eux

798 Drsquoune maniegravere geacuteneacuterale lrsquoinformatisation des donneacutees de santeacute conseacutequence premiegravere

de lrsquointroduction des TIC dans la pratique meacutedicale relegraveve du droit commun de la protection

des donneacutees personnelles Cependant le caractegravere particulier et multiple de ces donneacutees exige

le respect de diffeacuterentes regraveglementations applicables Elles neacutecessitent eacutegalement une

protection particuliegravere et le leacutegislateur ne srsquoest pas contenteacute de proteacuteger le secret

professionnel A cela il a souhaiteacute ajouteacute un cadre relatif agrave lrsquoheacutebergement et agrave la

communication des donneacutees de santeacute informatiseacutees Ce cadre montre cependant certaines

limites

799 Les TIC en santeacute ont eacutegalement permis de chambouler les pratiques habituelles en

matiegravere de prise en charge du patient Deacutesormais celle-ci peut ecirctre entiegraverement

deacutemateacuterialiseacutee les professionnels de santeacute pouvant envisager une prise en charge agrave distance

en srsquoappuyant notamment sur des dossiers meacutedicaux partageacutes Ces dossiers meacutedicaux

communeacutement appeleacutes dossiers meacutediaux eacutelectroniques ne beacuteneacuteficient aucunement drsquoun statut

931 ROBIN Jean-Yves laquo Lrsquoe-santeacute en question raquo I2D ndash Information donneacutees amp documents 20163 (Volume

53) p 58

Conclusion geacuteneacuterale

448

eacutedicteacute par la loi agrave lrsquoexception de lrsquoun drsquoentre eux le Dossier Meacutedical Partageacute Pour ce

dossier ambitieux placeacute sous le controcircle direct du patient et accessible via une plateforme

unique entiegraverement deacutemateacuterialiseacutee le leacutegislateur a souhaiteacute mettre en place un reacutegime

exorbitant de droit commun932

La prise en charge deacutemateacuterialiseacutee du patient par le biais drsquoun

outil de teacuteleacutemeacutedecine a eacutegalement fait lrsquoobjet drsquoun cadre speacutecifique mais celui-ci sous des

aspects de simpliciteacute impose de trop nombreuses contraintes administratives aux

eacutetablissements de santeacute A cela srsquoajoute un bouleversement des pratiques et des regravegles

habituelles en matiegravere de droit des patients et de responsabiliteacute professionnelle

800 Lrsquoutilisation des TIC dans la pratique meacutedicale reacutepond ainsi tantocirct agrave des regravegles de droit

commun et tantocirct agrave des regravegles speacutecifiques Les eacutetablissements de santeacute peuvent rapidement se

retrouver perdus face agrave lrsquoensemble de ces diffeacuterentes regravegles de droits qui sont autant

drsquoobstacles sur leur voie du deacuteveloppement de pratiques innovantes en matiegravere de TIC en

santeacute Le droit perd alors son rocircle de seacutecurisation et plus qursquoun simple frein aux initiatives il

peut parfois ecirctre source drsquoincertitudes

Pour y remeacutedier plusieurs voies doivent ecirctre emprunteacutees

801 Une impulsion doit ecirctre donneacutee au niveau national Une vision globale du numeacuterique

en santeacute est en effet neacutecessaire afin de favoriser lrsquoinnovation et drsquoassurer aux diffeacuterents

acteurs impliqueacutes un environnement propice Crsquoest pourquoi la gouvernance des Systegravemes

drsquoInformation en Santeacute se doit drsquoecirctre solide lisible et force de proposition Par ailleurs le

cadre juridique actuel applicable aux TIC en santeacute doit ecirctre repenseacute Ceci repreacutesente

certainement aujourdrsquohui lrsquoexercice le plus complexe Le droit en place doit ecirctre lrsquoallieacute des

acteurs concerneacutes et non lrsquoennemi redouteacute Il faut donc un cadre adapteacute aux exigences de ces

technologies innovantes crsquoest-agrave-dire un cadre souple et reacuteactif Cependant la reacutenovation du

cadre juridique ne doit pas passer agrave notre sens par lrsquoeacutediction de nouvelles regravegles mais par une

simplification de celles deacutejagrave en place

802 Les eacutetablissements de santeacute ont eacutegalement un rocircle essentiel agrave jouer dans la seacutecurisation

de leurs pratiques Ils doivent pour cela envisager de maniegravere strateacutegique le deacuteveloppement et

932 V notamment en ce sens ZORN-MACREZ Caroline laquo Donneacutees de santeacute et secret partageacute raquo op cit p 305

Conclusion geacuteneacuterale

449

la gestion de leur systegraveme drsquoinformation hospitalier Cette vision leur permettra drsquoanticiper les

eacuteventuelles contraintes et mener agrave bien leurs diffeacuterents projets Par ailleurs ils disposent

drsquooutils juridiques et manageacuteriaux efficaces pour leur permettre drsquoencadrer lrsquoutilisation des

TIC dans la pratique meacutedicale par leurs agents Ils accompagneront ainsi ces nouvelles

pratiques en rappelant les regravegles applicables et en formant leurs agents agrave lrsquoutilisation

approprieacutee des TIC Ils peuvent aussi sanctionner des comportements deacuteviants et ainsi assureacute

une utilisation sereine et respectueuse des contraintes juridiques eacutethique et deacuteontologique des

TIC dans la pratique meacutedicale Lrsquoexemple du CHRU de Lille et de lrsquoensemble des actions

qursquoil a pu mettre en place deacutemontre bien que les eacutetablissements de santeacute peuvent ecirctre agrave

lrsquoorigine drsquoune seacutecurisation reacuteussie de leurs pratiques

803 Nos travaux nous ont donc permis drsquoappreacutehender le cadre juridique dans lequel

srsquoinscrit lrsquoutilisation des TIC dans la pratique meacutedicale et constater ses lacunes Aujourdrsquohui

une seacutecurisation de lrsquoutilisation des TIC en santeacute est neacutecessaire Notre eacutetude ne se veut pas

exhaustive et si les possibiliteacutes du numeacuterique en santeacute sont nombreuses les questionnements

juridiques qui srsquoy rapportent le sont tout autant Ce dont nous sommes certains crsquoest que le

numeacuterique en santeacute repreacutesente lrsquoavenir du systegraveme de santeacute actuel et il est essentiel de

srsquoinscrire dans cette deacutemarche drsquoutilisation croissante des TIC dans la pratique meacutedicale

451

Table des Annexes

Annexe I Scheacutema de lrsquoorganisation en briques fonctionnelles drsquoun SIH type

Annexe II Preacutesentation et modaliteacutes drsquoobtention du label droits des usagers

Annexe III Documents de communication de la CCIM

Annexe IV Questionnaire drsquoeacutevaluation des pratiques professionnelles de la CCIM

452

Annexe I Scheacutema de lrsquoorganisation en briques fonctionnelles drsquoun SIH type

Ce scheacutema est issu des travaux en cours meneacutees par lrsquoASIP Santeacute et lrsquoANAP sur les SI de

santeacute

Preacutesentation et modaliteacutes drsquoobtention du label droits des usagers

453

Annexe II Preacutesentation et modaliteacutes drsquoobtention du label droits des

usagers

Preacutesentation et modaliteacutes drsquoobtention du label droits des usagers

454

Preacutesentation et modaliteacutes drsquoobtention du label droits des usagers

455

Preacutesentation et modaliteacutes drsquoobtention du label droits des usagers

456

Preacutesentation et modaliteacutes drsquoobtention du label droits des usagers

457

Preacutesentation et modaliteacutes drsquoobtention du label droits des usagers

458

Preacutesentation et modaliteacutes drsquoobtention du label droits des usagers

459

Preacutesentation et modaliteacutes drsquoobtention du label droits des usagers

460

Preacutesentation et modaliteacutes drsquoobtention du label droits des usagers

461

Preacutesentation et modaliteacutes drsquoobtention du label droits des usagers

462

Preacutesentation et modaliteacutes drsquoobtention du label droits des usagers

463

Documents de communication de la CCIM

464

Annexe III Documents de communication de la CCIM

Documents de communication de la CCIM

465

Documents de communication de la CCIM

466

Documents de communication de la CCIM

467

Documents de communication de la CCIM

468

Documents de communication de la CCIM

469

Questionnaire drsquoeacutevaluation des pratiques professionnelles de la CCIM

470

Annexe IV Questionnaire drsquoeacutevaluation des pratiques professionnelles de la

CCIM

Questionnaire drsquoeacutevaluation des pratiques professionnelles de la CCIM

471

Questionnaire drsquoeacutevaluation des pratiques professionnelles de la CCIM

472

Questionnaire drsquoeacutevaluation des pratiques professionnelles de la CCIM

473

Questionnaire drsquoeacutevaluation des pratiques professionnelles de la CCIM

474

475

Bibliographie

I Ouvrages manuels et thegraveses

A Ouvrages et manuels geacuteneacuteraux

B Ouvrages speacuteciaux

C Contributions agrave un ouvrage

D Thegraveses

II Articles et doctrines

III Rapports et eacutetudes

IV Avis et deacutelibeacuterations

V Deacutecisions commenteacutees

Bibliographie

476

I Ouvrages manuels et thegraveses

A Ouvrages et manuels geacuteneacuteraux

- CAPITANT Henri Introduction agrave lrsquoeacutetude du droit civil A Peacutedone 5egraveme

eacutedition

1929

- CHAPUS Reneacute Droit administratif geacuteneacuteral Tome 1 15egraveme

eacutedition Montchrestien

2001

- CORNU Geacuterard Vocabulaire juridique PUF 2011

- Montesquieu De lrsquoesprit des lois Partie 6 Livre XXIX laquo De la maniegravere de composer

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B Ouvrages speacuteciaux

- BENSOUSSAN Alain Informatique et liberteacutes Francis Lefebvre Paris 2010

- CATALA Pierre Le droit agrave leacutepreuve du numeacuterique PUF 1998

- COELS Jean-Marie Le droit des obligations agrave lrsquoeacutepreuve de la teacuteleacutemeacutedecine PUAM

2006

- DESGENS-PASANAU Guillaume La protection des donneacutees agrave caractegravere personnel

Lexis-Nexis 2egraveme

eacutedition Paris 2016

- DUPONT Marc BERGOIGNAN-ESPER Claudine PAIRE Christian Droit

hospitalier Dalloz 7eacuteme eacutedition 2009

- DUPUY Olivier La gestion des informations relatives au patient Les eacutetudes

hospitaliegraveres 2005

- DUSSERRE Liliane DUCROT Henry ALLAERT Franccedilois-Andreacute Lrsquoinformation

meacutedicale lrsquoordinateur et la loi Editions meacutedicales internationales 2eacuteme eacutedition

1999

- HOERNI Bernard Ethique et deacuteontologie meacutedicale 2egraveme eacutedition Masson 2000

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eacutedition PUF 2012

Bibliographie

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1991

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eacutedition

Eyrolles 2016

- MOQUET-ANGER Marie-Laure Droit hospitalier 3egraveme

eacutedition LGDJ 2013

- PY Bruno Le secret professionnel LrsquoHarmattan 2005

- SAISON-DEMARS Johanne Droit hospitalier 3egraveme

eacutedition Gualino 2011

- RIGAUX Franccedilois POULLET Franccedilois LEONARD Thierry La vie priveacutee une

liberteacute comme les autres Larcier 1992

C Contribution agrave un ouvrage

- CADIET Loiumlc La notion drsquoinformation geacuteneacutetique en droit franccedilais In La geacuteneacutetique

humaine de lrsquoinformation agrave lrsquoinformatisation TheacutemisLitec diffusion 1992 p 52

- CAVERS David laquo Law and science some points of confrontation raquo in laquo Law and the

social role of scienceraquo Rockefeller University Press 1966 p 5

- POULLET Yves LEONARD Thierry Les liberteacutes comme fondement de la

protection des donneacutees nominatives in La vie priveacutee une liberteacute parmi les autres

Larcier 1992

- VERGES Etienne laquo Lrsquoeacutevolution scientifique et technologique au prisme du droit

aperccedilu drsquoune relation agrave plusieurs facettes raquo In laquo Variations eacutevolutions

meacutetamorphose raquo PU St Etienne Institut universitaire de France 2012 p 371

D Thegraveses

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des donneacutees meacutedicales thegravese Lille 2014

Bibliographie

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- ZORN-MACREZ Caroline Secret partageacute et donneacutees de santeacute pour un droit de la

personne agrave la protection de ses donneacutees de santeacute partageacutees PUN 2010

- CAVALIER Mathilde La proprieacuteteacute des donneacutees de santeacute thegravese Lyon 2016

Bibliographie

479

II Rapports et eacutetudes

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o Programme de relance du DMP et des systegravemes drsquoinformation partageacutes de

santeacute synthegravese de la concertation Juillet 2009

o Rapport drsquoactiviteacute 2012

- Association Franccedilaise des Heacutebergeurs Agreacuteeacutes de donneacutees de santeacute Les heacutebergeurs

agreacuteeacutes de donneacutees de santeacute acteurs cleacutes de la confiance numeacuterique en santeacute livre

blanc de lrsquoassociation franccedilaise des heacutebergeurs agreacuteeacutes de donneacutees de santeacute 2014

- BRAIBANT Guy Donneacutees personnelles et socieacuteteacutes de lrsquoinformation rapport au 1er

ministre La Documentation franccedilaise 1998

- CATALA Pierre TRICOT Bernard Rapport de la commission Informatique et

liberteacutes La Documentation franccedilaise 1975

- CHAMBRE REGIONALE DES COMPTES CHRU de Lille enquecircte systegraveme

drsquoinformation hospitalier rapport drsquoobservations deacutefinitives 2016

- COMITE DrsquoAGREMENT DES HEBERGEURS

o Premier rapport drsquoactiviteacute 2011

o Deuxiegraveme rapport drsquoactiviteacute 2012-2013

- CONSEIL DrsquoETAT

o Les autoriteacutes administratives indeacutependantes rapport public La

Documentation franccedilaise 2001

o Le Droit souple eacutetude annuelle du Conseil drsquoEtat questionsreacuteponses 2013

o Le numeacuterique et les droits fondamentaux rapport public La Documentation

franccedilaise 2014

o Le numeacuterique et les droits fondamentaux eacutetude annuelle La documentation

franccedilaise 2014

- CONSEIL NATIONAL DE LrsquoORDRE DES MEDECINS

o Teacuteleacutematique de santeacute 2006

Bibliographie

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o Linformatisation de la santeacute livre blanc 2008

o La teacuteleacutemeacutedecine livre blanc 2009

o Deacuteontologie sur le web livre blanc 2009

o Teacuteleacutemeacutedecine et autres prestations meacutedicales eacutelectroniques rapport de

mission 2016

- COUR DES COMPTES

o Le partage des donneacutees entre les systegravemes drsquoinformation rapport public annuel

sur la seacutecuriteacute sociale chapitre X 2007

o Lrsquoaccegraves en ligne aux dossiers meacutedicaux rapport public annuel sur la seacutecuriteacute

sociale Chapitre VII 2008

o Les systegravemes drsquoinformation dans les EPS rapport public annuel sur la seacutecuriteacute

sociale Chapitre VIII 2008

o La gestion du GIP Dossier meacutedical personnel rapport public annuel chapitre

VI 2009

o Le coucirct du dossier meacutedical personnel depuis sa mise en place communication

agrave la commission des finances de lrsquoassembleacutee nationale 2012

o La modernisation des systegravemes drsquoinformation hospitaliers une contribution agrave

lrsquoefficience du systegraveme de soins agrave renforcer rapport sur lrsquoapplication des lois

de financement de la seacutecuriteacute sociale Chapitre VIII septembre 2016

- DIONIS du SEJOUR Jean ETIENNE Jean-Claude Les teacuteleacutecommunications agrave haut

deacutebit au service du systegraveme de santeacute rapport de lrsquooffice parlementaire deacutevaluation des

choix scientifiques et technologiques La documentation franccedilaise 2004

- DOOR Jean-Pierre Rapport dinformation sur le dossier meacutedical personnel rapport

deacuteposeacute par la commission des affaires culturelles familiales et sociale de lAssembleacutee

Nationale La documentation franccedilaise janvier 2008

- DOSIERE Reneacute VANNESTE Christian Rapport drsquoinformation sur les autoriteacutes

administratives indeacutependantes rapport fait au nom du comiteacute drsquoeacutevaluation et de

controcircle des politiques publiques AN 28 octobre 2010

- ETIENNE Jean-Claude LASBORDES Pierre Le dossier meacutedical personnel (DMP)

quel bilan deacutetape pour quelles perspectives rapport fait au nom de lOffice

parlementaire deacutevaluation des choix scientifiques et technologique Seacutenat 2009

Bibliographie

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- FAROUDJA Jean-Marie Questions sur lrsquoinformatisation des dossiers meacutedicaux le

partage et lrsquoheacutebergement des donneacutees rapport de la commission nationale

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juin 2005

- FIESCHI Marius Les donneacutees du patient partageacutees la culture du partage et de la

qualiteacute des informations pour ameacuteliorer la qualiteacute des soins rapport au ministre de la

santeacute de la famille et des personnes handicapeacutees La Documentation franccedilaise janvier

2003

- FOYER Jean Rapport au nom de la commission des lois constitutionnelles de la

leacutegislation et de ladministration geacuteneacuterale de la reacutepublique sur le projet de loi (ndeg

2516) relatif agrave linformatique et aux liberteacutes la proposition de loi (ndeg 1004) de Pierre-

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des citoyens la proposition de loi (ndeg 3092) de Franccedilois Villa et plusieurs de ses

collegravegues sur les liberteacutes les fichiers et linformatique Assembleacutee Nationale t1 ndeg

3125 Paris 1977

- GAGNEUX Michel Refonder la gouvernance de la politique dinformatisation du

systegraveme de santeacute Douze propositions pour renforcer la coheacuterence et lefficaciteacute de

laction publique dans le domaine des systegravemes dinformation de santeacute La

Documentation franccedilaise mai 2009

- GAGNEUX Michel BOARETTO Yann CHOLLEY Franccedilois Rapport sur le

dossier meacutedical personnaliseacute (DMP) Inspection geacuteneacuterale des finances La

Documentation franccedilaise novembre 2007

- GAGNEUX Michel COMBLE Pierre-Henri De KERGOMMEAUX Loiumlc Pour un

dossier patient virtuel et partageacute et une strateacutegie nationale des systegravemes drsquoinformation

de santeacute Inspection geacuteneacuterale des affaires sociales Avril 2008

- GARREC Reneacute Rapport ndeg 146 fait au nom de la commission des lois Projet de loi

relatif aux archives Seacutenat deacutecembre 2007

- GRATIEUX Laurent OLLIVIER Laurent Audit de lrsquoorganisation et du pilotage

des organismes œuvrant agrave lrsquoinformatisation du systegraveme de santeacute IGAS Rapport ndeg

2006-113 novembre 2006

- GT33CSIS‐CSF Permettre lrsquoeacutemergence drsquoune strateacutegie industrielle en matiegravere de e-

santeacute en soutien de la politique de santeacute publique en associant les industriels Lever

les freins au deacuteploiement de la teacuteleacutemeacutedecine rapport eacutelaboreacute par le groupe de travail

Bibliographie

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- Haute Autoriteacute de Santeacute

o Efficience de la teacuteleacutemeacutedecine eacutetat des lieux de la litteacuterature internationale et

cadre drsquoeacutevolution juillet 2013 disponible sur [httpwwwhas-santefr]

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o laquo Deacuteontologie et Internet raquo Gaz Pal 2002 ndeg 85 p 22

- REMY Claire laquo Les aspects juridiques de la deacutemateacuterialisation des documents raquo

Solutions et logiciels 2010 ndeg12 p 30

- RENARD Isabelle laquo Preuve informatique ndash valeur juridique du document

numeacuterique raquo Expertises 2010 p 215

- RICHARD Jacky laquo Droit souple pour une doctrine de recours et drsquoemploi raquo Recueil

Dalloz 2013 p 2512

- ROBIN Jean-Yves laquo Lrsquourgence numeacuterique Faire de la France un leader de lrsquoe-

santeacute raquo LrsquoHarmattan 2015 p 88

- ROUSSEL Bruno laquo Informatisation des dossiers meacutedicaux en milieu hospitalier

inteacutegriteacute et opposabiliteacute des donneacutees numeacuteriques raquo Communication commerce

eacutelectronique 2009 ndeg 6 eacutetude 15

- SABOURIN Pierre laquo Les autoriteacutes administratives indeacutependantes une cateacutegorie

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- SAISON-DEMARS Johanne laquo Modernisation du systegraveme de santeacute une gouvernance

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Bibliographie

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les enjeux de la diffusion des TIC raquo Expertises 2010 p 382

- SARR Minata laquo Droit souple et commerce eacutelectronique raquo Jurisdoctoria 2012 ndeg8

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2007 p 6

- SAVIN Patricia TESSALONIKOS Arnaud laquo Big data santeacute et droit quelle

combinaison ideacuteale raquo Techniques hospitaliegraveres 2015 ndeg 753 p 26

- SERAICHE Rhislegravene laquo Petit rappel sur le commencement de preuve par eacutecrit raquo Gaz

Pal 2012 ndeg 89 p12

- SICARD Didier laquo Quelles limites au secret meacutedical partageacute raquo recueil Dalloz [en

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- STEFANI Franccedilois laquo Le secret meacutedical agrave lrsquoeacutepreuve des nouvelles technologies raquo

Recueil Dalloz 2009 ndeg 39 p 2636

- SOULAS DE RUSSEL Dominique RAIMBAULT Philippe laquo Nature et racines du

principe de seacutecuriteacute juridique une mise au point raquo revue internationale de droit

compareacute 2003 ndeg 1 p 85

- THIBIERGE Catherine laquo Reacuteflexion sur les textures du droit raquo RTD civ 2003 p

599

- TIERS Gonzague CAPON Catherine CLEMENTE Heacutelegravene laquo Teacuteleacutemeacutedecine en

reacutegion Nord-Pas de Calais raquo ITBM-RBM 2000 271-4

- TRUCHET Didier laquo Que dit la loi raquo RGDM Ndeg20 2006 p 67

- VACARIE Isabelle laquo La finaliteacute des traitements de donneacutees de santeacute raquo RGDM

2004 numeacutero speacutecial pp 27-34

- VARNIER Freacutedeacuteric laquo La coopeacuteration hospitaliegravere au service de la modernisation de

notre systegraveme de santeacute raquo RDSS 2016 ndeg 4 p 620

- VAYR Jonathan laquo Les donneacutees de santeacute un enjeu pour le futur raquo LPA septembre

2016 ndeg 185-186 p 4

- VIALLA Franccedilois

o laquo Dossier patient DMP quelles frontiegraveres raquo RGDM ndeg 20 2006 p 135

Bibliographie

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- VINET Camille laquo Responsabiliteacute de lrsquohocircpital du fait des produits deacutefectueux raquo

AJDA 2010 p 1485

- VIOUJAS Vincent laquo La teacuteleacutemeacutedecine entre expeacuterimentations reacuteussies et

geacuteneacuteralisation au ralenti raquo RDSS 2015 p 681

- VEILLEROT Guy laquo Le dossier hospitalier raquo RGDM 2010 ndeg 37 p 177

- WALLE Emmanuelle laquo A nouvelles technologies nouvelles causes de

licenciement raquo Gaz Pal 23 avril 2011 ndeg 113 p 20

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civilisation raquo La lettre de la rue Saint Guillaume Revue des Anciens eacutelegraveves de

Sciences-Po ndeg 127 juin 2002 p 52

- ZORN Caroline BELLIVIER Florence NOIVILLE Christine laquo Gestion et partage

des donneacutees de santeacute un deacutemarrage poussif du contrat raquo Revue des contrats [en

ligne] 2009 ndeg 2 p 711 disponible sur [httpwwwlextensofr] Consulteacute le 15 mai

2017

- ZORN Caroline

o laquo Chronique martienne des donneacutees de santeacute numeacuteriseacutees raquo RDS 2010 ndeg 36

p 331

o laquo Les dossiers meacutedicaux des deacutefunts des archives publiques non

communicables raquo Revue Lamy Droit de lrsquoImmateacuteriel 2010 ndeg 56 p 63

Bibliographie

497

IV Avis et deacutelibeacuterations

- CNIL

o Deacutelibeacuteration ndeg 2005-003 du 13 janvier 2005 deacutecidant la dispense de

deacuteclaration des traitements mis en œuvre par les organismes publics dans le

cadre de la deacutemateacuterialisation des marcheacutes publics JORF ndeg 55 du 6 mars 2006

p 3875

o Deacutelibeacuteration CNIL ndeg81-094 du 21 juillet 1981 portant adoption drsquoune

recommandation relative aux mesures geacuteneacuterales de seacutecuriteacute des systegravemes

informatiques

o Deacutelibeacuteration CNIL ndeg2006-151 du 30 mai 2006 portant autorisation de mise en

œuvre des applications informatiques neacutecessaires agrave lexpeacuterimentation du

dossier meacutedical personnel

o Deacutelibeacuteration CNIL ndeg 2007-036 du 20 feacutevrier 2007 portant avis sur deux

projets drsquoarrecircteacutes relatifs drsquoune part aux speacutecifications physiques et logiques

de la carte drsquoassurance maladie et aux donneacutees y eacutetant contenues et drsquoautre

part aux conditions drsquoeacutemission et de gestion des cartes drsquoassurance maladie

JORF ndeg65 du 17 mars 2007 p 4983

- Comiteacute Consultatif National drsquoEthique laquo le Dossier meacutedical personnel et

lrsquoinformatisation des donneacutees de santeacute raquo avis ndeg 104 juin 2008

Bibliographie

498

V Deacutecisions commenteacutees

- BON P Concl et note sous CE 5 janvier 2000 Consorts Telle cAP-HP

ndeg181899 RFDA 2000 p 646

- BRETON A note sous Cass civ 20 mai 1936 Dr Nicolas c eacutepoux Mercier S

1937 I p 321

- CHAUVAUX D Concl sous CE Sect 5 janvier 2000 Consorts Telle c AP-

HP ndeg181899 RFDA 2000 p 641

- CHAVRIER G laquo Creacuteation preacutetorienne dun reacutegime de responsabiliteacute sans faute du

service public hospitalier en cas de deacutefaillance dommageable des produits et

appareils de santeacute raquo note sous CE 9 juillet 2003 ndeg 220437 Assistance publique-

Hocircpitaux de Paris c Mme MSera JCP-A ndeg 41 2003 p 1302

- DUBOUIS L Note sous CE 5 janvier 2000 Consorts Telle cAP-HP

ndeg181899 RDSS 2000 p 357

- DE FORGES J-M Note sous CE Ass 9 avril 1993 Bianchi ndeg69336 RDSS

1994 p 108

- DEYGAS S Note sous CE 18 deacutecembre 2002 ndeg 233618 Mme Duvignegraveres

Proceacutedures 2003 ndeg 154 AJDA 2003 p 487 chron F DONNAT et D CASAS

- DONNAT F CASAS D Chron CE 18 deacutecembre 2002 ndeg 233618 Mme

Duvignegraveres AJDA 2003 p 487

- GUETTIER C

o Note sous CE 5 janvier 2000 Consorts Telle cAP-HP ndeg181899 Revue

de droit public 2001 p 4012

o Note sous CE 9 juillet 2003 Assistance publique-Hocircpitaux de Paris c

Mme Marzouk ndeg 220437 JCP-A ndeg 41 2003 p 1302

- LANDAIS C LE NICA F Note sous CE 24 mars 2006 KPMG et autres ndeg

288460 et s AJDA 2006 p 1028

- LOSCHAK D Note sous CE 11 deacutecembre 1970 ndeg 78880 Creacutedit foncier de

France D 1971 p 674

- MATTER P Concl sous Cass civ 20 mai 1936 Dr Nicolas c eacutepoux Mercier

D 1936 p 88

Bibliographie

499

- MOQUET-ANGER ML Note sous CE 24 septembre 2012 ndeg 339285 JCP-A

ndeg 1 2013 2001

- SARGOS P Note sous Cass civ 3 juin 2010 ndeg 0913591 D 2010 p 1522

- VIOUJAS V note sous arrecirct CAA Marseille 25 juin 2009 centre hospitalier

intercommunal de Toulon-La-Seyne ndeg 07MA02024 RDSS 2009 p 1155

501

Index alphabeacutetique

Les numeacuteros renvoient aux paragraphes

A

Agence Reacutegionale de Santeacute 33 378 385-389 546-560 563 573 576 et s 672 763 783

789 796

Agreacutement 152 179 et s 182-189 212 215 224 232 300 332 393 659

Archives

hospitaliegraveres 124 157 162-168 174 193 207

publiques 124 156 158-169 174-177 202 206 251 659

Article 29 (Groupe de lrsquo) 65 67 104 645

ASIP santeacute 183 185-187 195 219 243-245 277 306 312 325 341 346 355-356 361

410 478 501 503 et s 518-521 527-529 537-540 545 558 et s 576 619 763

Autodeacutetermination informelle 116-118 661 667

Autoriteacute Administrative Indeacutependante (AAI) 81 83 93 634 713

C

Carte de Professionnel de Santeacute (CPS) 130 et s 195 244-247 250 407 484 504 515 531

544 758

Clarteacute de la loi 582-584

Comiteacute drsquoagreacutement 187 232-235 659

Commission drsquoAccegraves aux Documents Administratifs (CADA) 169 239 et s 174-177

Commission Nationale de lrsquoInformatique et des Liberteacutes (CNIL) 47 85 89 93 97 101 et

s106 140 146-152 171-173 181-185 240 242 291 300-305 325 358 379 391 458

693 713 782

Consentement

aux soins 21 427 431 434 et s 437

au traitement automatiseacute des donneacutees 55 59 96 97-98 103-107 116 647-649

agrave lrsquoheacutebergement des donneacutees 225-232 658

agrave lrsquoouverture drsquoun DMP 274 286 295 335-338 341 346 360

502

Coopeacuteration 48 219-224 320 394-397 401 407 550 555 559 561-568 571 574 576

662 679

D

Data Protection Officer (DPO) 652

Deacutecret confidentialiteacute 130 et s 242 245 et s 248 616 618 620

Donneacutees de santeacute (deacutefinition) 62-65

Donneacutees personnelles (protection des ~) 48-51 66 78 227 592 646 et s 592 646 et s

660 et s667 707 798

Dossier (deacutefinition)

Hospitalier 265

Meacutedical Electronique 269 271 281

Meacutedical Partageacute 268 274-282

Pharmaceutique 267

Droit souple 623 631-639 642 669 671 707

Droit agrave lrsquooubli 54 170 et s 651

E

Equipe de soins 126-129 150 772

Etablissement public de santeacute (deacutefinition) 4

Responsabiliteacute des ~ 458 460 463

Evaluation des pratiques professionnelles (EPP) 789 791

F

Formation professionnelle 727-734 741

G

Groupement

drsquoInteacuterecirct Economique (GIE) 224

drsquoInteacuterecirct Public (GIP) 223 511-517

Hospitalier de Territoire (GHT) 561-577 657 672 796

503

Gouvernance des systegravemes drsquoinformation hospitaliers 476-485 489-500 504-510 518 520-

523

H

Heacutebergement de donneacutees 179 212 et s 215 218 222 659

Heacutebergeur de donneacutees 184 211 et s 214 218 393

Hocircpital (voir eacutetablissement de santeacute)

I

Identifiant National de Santeacute (INS) 324 326 505 527 et s

Intelligibiliteacute de la loi 582-584 588

Interopeacuterabiliteacute 243 247 325 420 482 485 488 490 et s 497 504 et s 522-527 532

534-541 544-546 572 576 et s 619 et s 683

N

Numeacutero drsquoinscription au Reacutepertoire (NIR) 324-326 410 527 529 542 545 576

P

Proprieacuteteacute (des donneacutees de santeacute) 110 et s 115 118-124 605 667

R

Recommandations de Bonnes Pratiques (RBP) 639-641

Reacutefeacuterentiels de seacutecuriteacute 181 242 620

Reacuteseaux sociaux 607 et s 720 765

S

SAFARI (projet) 44

Secret

meacutedical 150 175 207 251 288 331 346 475 790

partageacute 126 129 132 150 153 235 346 430 772

professionnel 22 65 71-73 78 99 108 125 128 145 150 et s 173 234 288 331-

333 346 530 608 738 772 787 790 et s 798

504

Seacutecuriteacute juridique (deacutefinition) 585-589

Systegraveme drsquoinformation hospitalier (deacutefinition) 682-683

T

Tarification agrave lrsquoactiviteacute (T2A) 629 681

Technologies de lrsquoInformation et de la Communication (deacutefinition) 2

Teacuteleacutemeacutedecine 10 et s 13 25-29 212 367-399 402-405 407 410 426-433 435 437-442

445-450 455 464-469 733 746 745

Teacuteleacuteconsultation 11 25 et s 374 383 407 436 438 445

Teacuteleacuteexpertise 8 12 375 383 434 445 et s 448 450

Teacuteleacuteprescription 371 407

V

Vie priveacutee 21 22 37 44 46 48 56 86 333-334 473 578 605-607 646 660 710 et s

714 718

505

Table des matiegraveres

Remerciements 1

Sommaire 1

Principales abreacuteviations 3

Introduction Geacuteneacuterale 7

sect1 Les multiples possibiliteacutes offertes par lrsquointroduction des TIC dans la pratique meacutedicale 9

A Les TIC nouvel espoir pour les prises en charges difficiles 10

B Les TIC outil majeur dans la mise en place drsquoactions de preacutevention en santeacute 13

sect2 Les TIC des outils sources de risques eacutethiques et juridiques majeurs 15

A Les risques pesant sur la vie priveacutee du patient 15

B Les risques laquo drsquoubeacuterisation raquo de la meacutedecine la nouvelle crainte 17

sect3 Probleacutematique de la thegravese 20

PREMIERE PARTIE LE CADRE JURIDIQUE DE LrsquoUTILISATION DES TIC A

LrsquoHOcircPITAL UN CADRE INCOMPLET 23

TITRE 1 TIC ET INFORMATISATION DES DONNEES DE SANTE UN CADRE

PARFOIS INADAPTE 27

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient 29

Section 1 La protection des donneacutees du patient 30

sect1 La leacutegislation de droit commun agrave disposition du droit de la santeacute 30

A La loi Informatique et Liberteacutes pilier de lrsquoencadrement 30

1) La France parmi les preacutecurseurs 30

2) Une protection forte 34

B La protection speacutecifique des donneacutees de santeacute 39

1) Les donneacutees de santeacute des donneacutees sensibles 39

2) Des meacutecanismes de protection propres aux donneacutees de santeacute 43

sect2 Une protection agrave lrsquoefficaciteacute relative 48

A Le controcircle et la sanction du non-respect de la loi Informatique et Liberteacutes des

mesures disproportionneacutees 48

1) La CNIL une autoriteacute administrative indeacutependante doteacutee drsquoun pouvoir de controcircle

neacutecessaire 48

2) La limite des sanctions preacutevues par les textes 51

B La protection limiteacutee des donneacutees de santeacute 56

1) Les limites de lrsquointerdiction de traitement des donneacutees sensibles 56

2) Le consentement mis agrave mal 60

Conclusion de la Section 63

Section 2 Les modaliteacutes de partage des donneacutees relatives au patient 64

506

sect1 Les regravegles geacuteneacuterales 64

A La deacutelicate question de la proprieacuteteacute des donneacutees de santeacute 65

1) La recherche drsquoune qualification du droit des individus sur leurs donneacutees 65

2) Tentative de qualification du droit des professionnels de santeacute sur le dossier meacutedical 68

B La difficile application des regravegles relatives au secret partageacute 72

1) Le secret partageacute une deacuterogation au secret professionnel strictement encadreacutee 72

2) Les limites de lrsquoapplication du secret partageacute aux TIC 75

sect2 Le cas particulier de la recherche meacutedicale des regravegles de protection speacutecifiques 77

A Le cadre juridique des recherches impliquant la personne humaine 77

B Lrsquoencadrement particulier des traitements des donneacutees de santeacute dans le cadre de la

recherche 80

1) Les principes applicables aux traitements de donneacutees agrave caractegravere personnel dans le

cadre de la recherche meacutedicale 81

2) Les Meacutethodologies de Reacutefeacuterences MR001 et MR003 83

C Les donneacutees de santeacute utiliseacutees dans le cadre de la recherche des donneacutees moins bien

proteacutegeacutees 85

Conclusion de la section 89

Conclusion du chapitre 91

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives

aux patients 93

Section 1 La conservation des donneacutees de santeacute en tant qursquoarchives hospitaliegraveres 95

sect1 Les regravegles speacutecifiques aux archives publiques 95

A Les conseacutequences de la qualification drsquoarchives publiques 96

1) Deacutefinitions leacutegales 96

2) Conseacutequences juridiques 98

a) Les conseacutequences relatives agrave la dureacutee de conservation des donneacutees 98

b) Les conseacutequences relatives agrave la suppression des donneacutees 100

B Archives publiques archives hospitaliegraveres et secret meacutedical des regravegles parfois en

opposition 103

sect2 La conservation agrave lrsquoegravere des TIC le cadre de lrsquoheacutebergement des donneacutees de santeacute 106

A Lrsquoheacutebergement des donneacutees de santeacute de lrsquoagreacutement agrave la certification 106

1) Des regravegles agrave la mise en place laborieuse 107

2) Lrsquoagreacutement des heacutebergeurs une proceacutedure critiqueacutee 109

a) Points essentiels de la proceacutedure 109

b) Une proceacutedure remise en cause 110

c) Lrsquoadoption deacutefinitive drsquoune proceacutedure de certification 112

B La reprise de lrsquoexistant lrsquoeacuteventualiteacute de la numeacuterisation des dossiers papier 113

507

1) Les conditions de la numeacuterisation des dossiers existants 114

a) Les regravegles applicables en droit commun 115

2) Le devenir des dossiers papier numeacuteriseacutes 119

a) La reacuteponse des Archives de France 119

b) Les apports de la loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute 121

Conclusion de la section 122

Section 2 Heacutebergement et communication des donneacutees un cadre limiteacute 123

sect1 Lrsquoheacutebergement des donneacutees de santeacute un cadre incomplet 123

A Choix de lrsquoheacutebergeur et questions en suspens 123

1) Lrsquohypothegravese drsquoun eacutetablissement de santeacute heacutebergeur de donneacutees 124

2) Quelles conditions pour le choix du tiers heacutebergeur 126

a) Lrsquoobligation drsquoun marcheacute public 126

b) Les possibiliteacutes de coopeacuteration 127

B Quelle place laisseacutee au respect du droit des patients 130

1) La disparition progressive du consentement 130

a) Le consentement eacuteleacutement initialement essentiel agrave lrsquoheacutebergement 130

b) Le consentement du principe agrave lrsquoexception 131

c) La disparition du consentement au profit de la non opposition 132

2) Le meacutedecin de lrsquoheacutebergeur garant du respect de la confidentialiteacute des donneacutees 133

sect2 La construction laborieuse du cadre relatif agrave la communication des donneacutees de santeacute 135

A La communication des donneacutees de santeacute des prescriptions difficilement applicables

en lrsquoeacutetat 135

1) Des questions en suspens 135

2) Des reacutefeacuterentiels non parus 137

B Lrsquoutilisation systeacutematique de la carte de professionnel de santeacute une utopie

abandonneacutee 139

Conclusion de la section 142

Conclusion du chapitre 143

Conclusion du titre 145

TITRE 2 TIC ET PRISE EN CHARGE MEDICALE UN CADRE EN EVOLUTION 147

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP 149

Section 1 Le DMP un Dossier meacutedical eacutelectronique institutionnel 150

sect1 La place incertaine du DMP dans le champ des dossiers meacutedicaux 150

A Tentative de deacutelimitation du cadre juridique des DME 151

1) Le dossier meacutedical un dossier aux formes multiples 151

2) Deacutelimitation des contours du DME 154

508

B DMP DME et autres dossiers meacutedicaux une articulation indispensable 157

1) Le DMP un projet novateur 157

2) Le DMP compleacutement ou concurrent des autres dossiers 159

sect2 Le DMP un encadrement juridique eacutevoluant avec difficulteacutes 162

A Les premiers pas du DMP des orientations incertaines 162

1) Origines et principes fondamentaux du DMP 162

2) Des eacutevolutions au greacute des critiques 165

a) Les apports pratiques 165

b) Les apports sur le fond 166

B Une rapide remise en question du projet initial 168

1) Un premier bilan neacutegatif 168

a) Le rapport GAGNEUX 168

b) Le bilan de la CNIL 169

2) Une premiegravere relance mitigeacutee 171

3) La loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute un nouveau souffle pour le DMP 172

Conclusion de la section 175

Section 2 Le DMP les limites drsquoun projet ambitieux 176

sect1 Des ambitions louables mais deacutemesureacutees 176

A Un outil plein de promesses 176

1) Lrsquoameacutelioration et la coordination des soins un enjeu majeur 177

2) La seacutecuriteacute de lrsquooutil une prioriteacute 178

B Des lacunes certaines 181

1) Le DMP un outil agrave geacuteomeacutetrie variable 181

2) Les droits et devoirs des patients un manque de clarteacute 182

sect2 Un outil agrave lrsquoavenir incertain 185

A Un outil mal perccedilu 186

1) DMP et responsabiliteacute 186

2) La theacuteorie du masquage 189

B Un projet voueacute agrave lrsquoeacutechec 191

1) Le coucirct important du DMP 191

2) Les beacutemols face agrave la relance de la loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute 193

Conclusion de la section 196

Conclusion du chapitre 197

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient 199

Section 1 La prise en charge agrave distance un cadre naissant 200

509

sect1 La teacuteleacutemeacutedecine une pratique ancienne reacutecemment consacreacutee par le leacutegislateur 200

A Un cadre speacutecifique strictement deacutefini par la loi HPST 201

1) La teacuteleacutemeacutedecine seule pratique agrave distance leacutegalement deacutefinie 201

a) Deacutefinition des diffeacuterentes pratiques 201

b) Les cinq actes de teacuteleacutemeacutedecine 203

2) Une proceacutedure preacutealable stricte 204

B Un cadre lourd frein au deacuteveloppement de lrsquoactiviteacute 206

1) Etat des lieux de lrsquoactiviteacute en France 207

2) Le poids des proceacutedures preacutealables 208

a) La contractualisation avec les acteurs 208

b) Les proceacutedures induites par lrsquoactiviteacute 209

3) Pistes drsquoeacutevolution 213

sect2 Lrsquoinformatisation des prescriptions meacutedicales un cadre en construction 215

A La prescription par voie eacutelectronique une possibiliteacute encore limiteacutee 215

1) La prescription par e-mail une possibiliteacute leacutegalement encadreacutee 215

2) Les voies de deacuteploiement de la e-prescription 218

a) La note drsquoorientation du CLIO santeacute 218

b) Le projet europeacuteen EPSOS 219

B La prescription informatiseacutee une pratique encourageacutee par les pouvoirs publics 220

1) Lrsquoincitation agrave lrsquoinformatisation du circuit du meacutedicament 220

2) La certification obligatoire des logiciels de prescription meacutedicale 223

Conclusion de section 225

Section 2 Prise en charge meacutedicale et TIC des regravegles de responsabiliteacute bousculeacutees 226

sect1 Droit des usagers et responsabiliteacute meacutedicale lrsquoadaptation du droit commun 226

A Information et consentement du patient une obligation maintenue et renforceacutee 226

1) Lrsquoobligation classique eacutetendue aux speacutecificiteacutes des TIC 227

2) La mise en œuvre des droits des patients 230

a) La question de la forme de lrsquoinformation 230

b) La preuve de lrsquoinformation et du recueil du consentement 232

B Responsabiliteacute meacutedicale des regravegles classiques aux risques drsquoapplication multiplieacutes

234

1) La responsabiliteacute meacutedicale une responsabiliteacute pour faute 234

2) La reacutepartition de la responsabiliteacute entre les diffeacuterents acteurs de la teacuteleacutemeacutedecine 236

sect2 Teacuteleacutemeacutedecine et responsabiliteacute des regravegles speacutecifiques agrave prendre en consideacuteration 239

A Deacutefaillance des logiciels et responsabiliteacutes 240

510

1) Qualification juridique des logiciels 240

2) Responsabiliteacute du fait des produits deacutefectueux 242

B Nouveaux acteurs et nouvelles responsabiliteacutes 246

Conclusion de section 250

Conclusion du chapitre 251

Conclusion du titre 253

Conclusion de la premiegravere partie 255

SECONDE PARTIE LES VOIES DE SECURISATION DE LrsquoUTILISATION DES TIC

A LrsquoHOPITAL 257

TITRE 1 LrsquoIMPULSION DE LA SECURISATION AU NIVEAU NATIONAL 259

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute 261

Section 1 Lrsquoeacuteparpillement notable de la gouvernance actuelle 262

sect1 Des difficulteacutes pour instaurer une gouvernance stable et efficace 262

A Lrsquoeacutevolution de la gouvernance des systegravemes drsquoinformation en santeacute en France 262

1) Les structures de coordination 263

a) La Mission pour lrsquoinformatisation du systegraveme de santeacute 263

b) Le Conseil supeacuterieur des systegravemes dinformation de santeacute 264

2) Les structures opeacuterationnelles 265

a) Le groupement pour la modernisation du systegraveme dinformation hospitalier 265

b) La Mission Nationale drsquoAppui agrave lrsquoInvestissement Hospitalier 267

c) Les GIP DMP et CPS 268

B Un bilan mitigeacute 269

1) Les rapports de la Cour des comptes 269

2) Le rapport de lrsquoIGAS 271

C Les propositions GAGNEUX et FIESHI 272

sect2 Un manque de visibiliteacute sur la gouvernance des projets en cours 274

A Le nouvel organigramme de la gouvernance des SIS 274

1) Une structure de coordination la deacuteleacutegation agrave la strateacutegie des systegravemes drsquoinformation

de santeacute 274

2) Des structures opeacuterationnelles en appui 276

a) LrsquoASIP Santeacute 276

b) Lrsquoagence Nationale drsquoAppui agrave la Performance 278

B Les limites de cette nouvelle organisation 279

1) Le scheacutema de gouvernance choisi par lrsquoEtat 279

a) LrsquoASIP une nouvelle venue dans le paysage des agences de lrsquoEtat 279

b) LrsquoASIP un GIP sous tutelle 280

511

2) Un manque de visibiliteacute des projets en cours 283

Conclusion de la section 285

Section 2 Les deacutefis agrave relever pour une gouvernance efficace 286

sect1 Lrsquointeropeacuterabiliteacute des SI un chantier prioritaire 286

A Enjeux drsquoune probleacutematique ancienne 286

1) Peacuterimegravetre de lrsquointeropeacuterabiliteacute 287

2) Preacutealables neacutecessaire agrave lrsquointeropeacuterabiliteacute 287

a) Une identification unifieacutee des patients 287

b) Lrsquoidentification des professionnels 289

3) La normalisation des systegravemes la condition technique essentielle 290

B Lrsquointeropeacuterabiliteacute une probleacutematique insoluble 291

1) Le cadre drsquointeropeacuterabiliteacute des SIS 291

2) Les obstacles au deacuteveloppement de lrsquointeropeacuterabiliteacute 293

sect2 La place strateacutegique des acteurs reacutegionaux dans la gouvernance des SIS 295

A LrsquoARS acteur charniegravere dans la mise en œuvre des politiques relatives aux SIS 295

1) LrsquoARS laquo bras armeacute raquo de lrsquoEtat en matiegravere de politiques de santeacute 296

2) LrsquoARS acteur essentiel de la strateacutegie hocircpital numeacuterique 298

3) Les maicirctrises drsquoouvrage reacutegionales appuis strateacutegiques aux ARS 300

B Les GHT nouveaux acteurs strateacutegiques pour le SIS 301

1) Les GHT une forme atypique de coopeacuteration 301

a) Speacutecificiteacute des GHT 302

b) Des questions en suspens 304

2) La mutualisation des SIS entre eacutetablissements de santeacute 307

Conclusion de la section 311

Conclusion du chapitre 313

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire 315

Section 1 Le cadre juridique actuel source drsquoinseacutecuriteacute juridique 316

sect1 Retour sur la notion de seacutecuriteacute juridique 316

A Porteacutees des principes de clarteacute et drsquointelligibiliteacute de la norme 317

1) Deacutefinition des principes 317

2) Des composantes drsquoun concept plus large celui de seacutecuriteacute juridique 319

B Les outils de lutte contre lrsquoinseacutecuriteacute juridique 321

1) Les origines varieacutees de lrsquoinseacutecuriteacute juridique 322

2) Les pistes de seacutecurisation du droit 324

sect2 La complexiteacute du cadre juridique srsquoappliquant aux TIC en santeacute 327

512

A Lrsquoutilisation des TIC agrave lrsquohocircpital une pratique eacutevoluant dans des environnements

normatifs distincts 327

1) Multipliciteacute des matiegraveres agrave prendre en compte 328

2) Lrsquoempilement leacutegislatif et regraveglementaire relatif aux TIC en santeacute 332

B Un cadre juridique source drsquoincertitudes 334

Conclusion de la section 338

Section 2 Un cadre juridique agrave repenser 339

sect1 Le cadre actuel frein au deacuteveloppement peacuterenne des TIC agrave lrsquohocircpital 339

A Lrsquoencadrement juridique de lrsquoinnovation un eacutequilibre deacutelicat 339

B Le recours au droit souple une solution agrave envisager 343

1) La notion de droit souple 344

2) Le deacuteveloppement du droit souple pour encadrer les TIC en santeacute 346

sect2 Le leacutegislateur sur la voie de la modernisation du cadre juridique 350

A Une volonteacute europeacuteenne drsquounifier la protection des donneacutees personnelles 350

1) Une proceacutedure leacutegislative longue et deacutelicate 350

2) La mise en place drsquoun cadre reacutenoveacute 352

a) Le renforcement du droit des personnes 352

b) Un nouveau cadre de controcircle et de sanction 354

C) Des nouvelles formaliteacutes 356

B Une volonteacute franccedilaise de moderniser le cadre applicable 357

1) La loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute patch correctif de certains

dysfonctionnements 357

2) La loi pour une Reacutepublique numeacuterique 358

a) Les travaux preacutealables du Conseil drsquoEtat 358

b) Les enjeux de la loi 360

Conclusion de la section 363

Conclusion du chapitre 365

Conclusion du titre 367

TITRE 2 LES ETABLISSEMENTS DE SANTE ACTEURS CLES DE LA

SECURISATION DE LrsquoUTILISATION DES TIC A LrsquoHOcircPITAL 369

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques 371

Section 1 Les pistes de seacutecurisation a priori 372

sect1 La gestion strateacutegique de lrsquoinformatisation agrave lrsquohocircpital 372

A Le Systegraveme drsquoinformation hospitalier 372

1) Bref rappel historique 372

2) Tentative de deacutefinition de la notion de systegraveme drsquoinformation hospitalier 374

513

B Une gestion strateacutegique indispensable 375

sect 2 Lrsquoappui sur des ressources qualifieacutees 378

A Le recrutement de compeacutetences speacutecialiseacutees 378

B Lrsquoappel aux ressources exteacuterieures 382

1) Lrsquoaide agrave la conception du SIH 383

2) Lrsquoappui agrave la maicirctrise drsquoouvrage 384

Conclusion de la section 386

Section 2 Les pistes de seacutecurisation a posteriori 387

sect1 Lrsquoutilisation drsquooutils juridiques 387

A Le controcircle et la limitation de lrsquoutilisation des TIC 388

1) Le droit agrave la vie priveacutee dans le cadre professionnel enjeux et limites 389

a) La messagerie professionnelle 389

b) Lrsquoutilisation drsquoInternet et du mateacuteriel informatique agrave des fins priveacutees 391

2) Les possibiliteacutes de reacutegulation et de controcircle offertes agrave lrsquoemployeur 392

B La mise en place drsquoune charte informatique 395

sect2 Lrsquoutilisation drsquooutils manageacuteriaux 399

A La formation des utilisateurs 400

1) La formation professionnelle une obligation leacutegale reacuteciproque 400

2) La formation professionnelle un outil manageacuterial strateacutegique 403

B La sanction drsquoune mauvaise utilisation des TIC 404

1) Le cadre drsquoexercice du pouvoir disciplinaire 405

2) La sanction drsquoun meacutesusage des TIC 406

Conclusion de la section 408

Conclusion du chapitre 409

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille 411

Section 1 Une volonteacute marqueacutee de seacutecuriser lrsquoutilisation des TIC en santeacute 413

sect1 Une organisation interne tourneacutee vers la seacutecuriteacute du SIH 413

A Preacutesentation de lrsquoorganisation du CHRU en matiegravere de SIH 414

1) La gouvernance du SIH 414

2) La gestion strateacutegique du SIH 416

B Le deacuteveloppement de projets ambitieux relatifs agrave la seacutecuriteacute 417

1) Le projet carte drsquoeacutetablissement 417

2) Le projet Systegraveme de Management de la Seacutecuriteacute du Systegraveme drsquoinformation (SMSSI) 418

sect2 La diffusion drsquoune culture de la seacutecuriteacute informatique 421

A La sensibilisation des utilisateurs du SIH 421

1) Les formations 421

514

2) Les actions de communication 422

B La mise en place de chartes informatiques 423

Conclusion de section 425

Section 2 Une volonteacute affirmeacutee de proteacuteger les donneacutees de santeacute 426

sect1 La creacuteation de structures adrsquohoc pour geacuterer la confidentialiteacute des donneacutees de santeacute 426

A La Commission Confidentialiteacute de lrsquoInformation Meacutedicale (CCIM) 427

1) Contexte de la creacuteation de la CCIM 427

2) Missions et eacutevolution de la CCIM 429

B Le Comiteacute CNIL 430

sect2 Bilan des reacutealisations de ces structures novatrices 432

A Lrsquoeacutelaboration drsquoune reacuteglementation interne 432

B Analyse et sanction des accegraves indus 434

C La labellisation de lrsquoaction de la CCIM 436

Conclusion de la section 439

Conclusion du chapitre 441

Conclusion du titre 443

Conclusion de la seconde partie 445

Conclusion geacuteneacuterale 447

Table des Annexes 451

Annexe I Scheacutema de lrsquoorganisation en briques fonctionnelles drsquoun SIH type 452

Annexe II Preacutesentation et modaliteacutes drsquoobtention du label droits des usagers 453

515

453

516

454

517

455

518

456

519

457

520

458

521

459

522

460

523

461

524

462

525

463

Annexe III Documents de communication de la CCIM 464

526

464

Annexe IV Questionnaire drsquoeacutevaluation des pratiques professionnelles de la CCIM 470

470

527

471

528

472

529

473

Bibliographie 475

I Ouvrages manuels et thegraveses 476

530

A Ouvrages et manuels geacuteneacuteraux 476

B Ouvrages speacuteciaux 476

C Contribution agrave un ouvrage 477

D Thegraveses 477

II Rapports et eacutetudes 479

III Articles 484

IV Avis et deacutelibeacuterations 497

V Deacutecisions commenteacutees 498

Index alphabeacutetique 501

Table des matiegraveres 505

Lrsquoutilisation des technologies de lrsquoinformation et de la communication agrave lrsquohocircpital

Lrsquoutilisation des TIC agrave lrsquohocircpital prend une place de plus en plus importante et son deacuteveloppement ne cesse de

croicirctre Le cadre juridique applicable se reacutevegravele cependant complexe agrave appreacutehender composeacute agrave la fois de textes de

droit commun et de textes plus speacutecifiques le tout formant un ensemble pas toujours coheacuterent Pour

accompagner au mieux lrsquoutilisation des TIC agrave lrsquohocircpital le leacutegislateur doit trouver le juste eacutequilibre entre cadre

propice pour le deacuteveloppement de ces pratiques protection des droits fondamentaux et seacutecurisation des

pratiques Or agrave lrsquoheure actuelle le cadre juridique applicable agrave lrsquoutilisation des TIC agrave lrsquohocircpital ne permet pas

drsquoassurer cet eacutequilibre deacutelicat Les pouvoirs publics ont donc un rocircle strateacutegique agrave jouer dans la seacutecurisation de

lrsquoutilisation des TIC agrave lrsquohocircpital Une impulsion nationale doit ecirctre donneacutee en la matiegravere afin drsquoassurer la

coheacuterence des projets deacuteveloppeacutes au travers drsquoune gouvernance forte Le cadre juridique doit quant agrave lui ecirctre

reacutenoveacute afin drsquoaccompagner lrsquoinnovation dans le numeacuterique en santeacute et assurer la seacutecuriteacute juridique neacutecessaire agrave

la bonne utilisation des TIC Dans ce contexte les hocircpitaux ont un rocircle essentiel agrave jouer afin de seacutecuriser leurs

pratiques

Mots clefs franccedilais TIC ndash hocircpital - teacuteleacutemeacutedecine ndash dossier meacutedical eacutelectronique -

donneacutees de santeacute ndash donneacutees personnelles - e-santeacute

The use of information and communication technologies in hospitals

The use of ICT has become increasingly important in hospitals However the legal framework structuring its use

is very complex to grasp Indeed it is made up of general laws as well as specific ones and makes this

framework sometimes unconsistent To provide an optimal legal framework for the ICT to expand safely the

legislator needs to strike the right balance between protecting fundamental rights and securing practices As the

current legal framework does not provide this delicate balance public authorities have a strategic role to play to

ensure a secure use of ICT within hospitals To guarantee the development of consistent projects a strong

governance has to set up a national leadership The legal framework needs to be rehabilitated to support digital

innovation in Healthcare and to ensure a legal protection required for an appropriate use of ICT Hospitals have

then a key role to play in securing their practices

Keywords ICT ndash hospitals ndash telemedecine ndash electronic medical record ndash health data ndash

personal data - eHealth

Uniteacute de rechercheResearch unit Centre Droits et perspectives du droit ndash CRDP - EA

ndeg4487 httpcrdpuniv-lille2fr

Ecole doctoraleDoctoral school Ecole doctorale des sciences juridiques politiques et de

gestion ndeg 74 1 place Deacuteliot 59000 Lille ecodocuniv-lille2fr httpedoctorale74univ-

lille2fr

UniversiteacuteUniversity Universiteacute Lille 2 Droit et Santeacute 42 rue Paul Duez 59000 Lille

httpwwwuniv-lille2fr

Page 2: L'utilisation des technologies de l'information et de la

ComUE Lille Nord de France

Thegravese deacutelivreacutee par

LrsquoUniversiteacute de Lille Droit et Santeacute

Ndeg attribueacute par la bibliothegraveque

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THEgraveSE

Pour obtenir le grade de Docteur en Droit public

Preacutesenteacutee et soutenue publiquement par

Laora TILMAN

Le 28 septembre 2017 agrave 14h30

Lrsquoutilisation des technologies de lrsquoinformation et de la communication agrave

lrsquohocircpital face au droit

JURY

Directeur de thegravese Madame Johanne SAISON-DEMARS Professeur des universiteacutes

Universiteacute Lille 2 Droit et Santeacute

Membres du jury Madame Ceacutecile MANAOUIL Professeur des universiteacutes Universiteacute

de Picardie Jules Verne Rapporteur

Monsieur Marcel MORITZ Maicirctre de confeacuterences des universiteacutes

Universiteacute Lille 2 Droit et Santeacute Suffragant

Monsieur Franccedilois VIALLA Professeur des universiteacutes Universiteacute

Montpellier 1 Rapporteur

Madame Caroline ZORN Docteur en droit priveacute

Suffragante

LrsquoUniversiteacute de Lille 2 nrsquoentend donner aucune approbation ni improbation

aux opinions eacutemises dans cette thegravese Elles doivent ecirctre consideacutereacutees comme propres agrave

leur auteur

Remerciements

Jrsquoadresse drsquoabord mes remerciements agrave Madame Johanne Saison- Demars qui mrsquoa

accordeacute sa confiance et a accepteacute de diriger mes travaux de recherche Son soutien sa

disponibiliteacute et ses conseils mrsquoont permis drsquoarriver au terme de cette thegravese

Je remercie les membres du jury qui mrsquoont accordeacute le privilegravege de leur preacutesence

Madame le Professeur Ceacutecile Manaouil Monsieur Marcel Moritz Monsieur le Professeur

Franccedilois Vialla et Madame Caroline Zorn

Je tiens agrave remercier lrsquoAssociation Nationale de la Recherche et de la Technologie

(ANRT) pour le soutien financier qursquoelle mrsquoa accordeacute Je remercie eacutegalement le CHRU de

Lille pour son accompagnement

Jrsquoexprime ma profonde gratitude agrave Monsieur Paul Barincou ancien Directeur des

Affaires Juridiques du CHRU de Lille qui mrsquoa permis de preacuteparer cette thegravese dans le cadre

drsquoune CIFRE Ces travaux nrsquoauraient pas vu le jour sans lrsquoopportuniteacute qursquoil mrsquoa accordeacutee Je

remercie eacutegalement Madame Marie-Charlotte Dalle Directrice des Affaires Juridiques du

CHRU de Lille pour son soutien et sa bienveillance au quotidien

Je tiens agrave exprimer ma reconnaissance agrave lrsquoeacutegard de mes proches mes parents qui

mrsquoont soutenue au long de mes eacutetudes de droit et ma sœur pour son eacutecoute sans faille Je

remercie sincegraverement mon conjoint pour sa preacutesence sa patience ses encouragements

La thegravese est un travail long et prenant Dans ce contexte lrsquoappui et le soutien de mes

amis a eacuteteacute une aide preacutecieuse Je leur en suis extrecircmement reconnaissante

Je tiens enfin agrave remercier mes relecteurs Alice dont les bons mots ont eacutegayeacute mes

corrections Elise qui mrsquoa accompagneacutee tout au long de ma thegravese Emmanuelle Franccedilois et

Marie qui ont pris le temps de mrsquoeacutepauler et de srsquointeacuteresser agrave mes travaux Heidi pour sa

rigueur et ses conseils aviseacutes Rodolphe qui a pris le temps de ponctuer sa relecture de

remarques preacutecieuses

1

Sommaire

PREMIERE PARTIE Le cadre juridique de lrsquoutilisation des TIC agrave lrsquohocircpital un cadre

incomplet

Titre 1TIC et informatisation des donneacutees de sante un cadre parfois inadapteacute

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des

informations relatives aux patients

Titre 2 TIC et prise en charge meacutedicale un cadre en eacutevolution

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

SECONDE PARTIE Les voies de seacutecurisation de lrsquoutilisation des TIC agrave lrsquohocircpital

Titre 1 Lrsquoimpulsion de la seacutecurisation au niveau national

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une

prioriteacute

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

Titre 2 Les eacutetablissements de santeacute acteurs cleacutes de la seacutecurisation de lrsquoutilisation des

TIC agrave lrsquohocircpital

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs

pratiques

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

3

Principales abreacuteviations

AJDA Actualiteacute Juridique Droit Administratif

AN Assembleacutee nationale

Ass Pleacuten Assembleacutee pleacuteniegravere

Bull crim Bulletin des arrecircts de la Cour de cassation chambre criminelle

CAA Cour administrative drsquoappel

CC Conseil constitutionnel

CE Conseil drsquoEtat

Cass civ Cour de cassation chambre civile

Cass crim Cour de cassation chambre criminelle

Cass soc Cour de cassation chambre sociale

Chron Chronique

CHU Centre hospitalier universitaire

CJUE Cour de justice de lrsquoUnion europeacuteenne

Comm Commentaires

Concl Conclusions

CPOM Contrats pluriannuels drsquoobjectifs et de moyens

D Recueil Dalloz

DDS Droit deacuteontologie et soin

DGOS Direction geacuteneacuterale de lrsquooffre de soins

DMP Dossier meacutedical partageacute

eacuted Edition

Fasc Fascicule

Gaz Pal Gazette du palais

GHT Groupement hospitalier de territoire

Ibid Mecircme ouvrage agrave la mecircme page

Id Mecircme ouvrage

In Dans

INS Identifiant national de santeacute

Infra Ci-dessous

JCP Jurisclasseur peacuteriodique (La semaine juridique)

4

JORF Journal officiel de la Reacutepublique franccedilaise

LGDJ Librairie Geacuteneacuterale de Droit et de Jurisprudence

LPA Les petites affiches

ndeg Numeacutero

NIR Numeacutero drsquoinscription au reacutepertoire

Obs Observations

Op cit Opere citato (dans lrsquoouvrage preacuteciteacute)

PUF Presses universitaires de France

PUN Presses universitaires de Nancy

RDP Revue de droit public

RDC Revue de droit des contrats

RDS Revue Droit et santeacute

RDSS Revue de droit sanitaire et social

Rec Recueil Lebon

RF adm publ Revue franccedilaise drsquoadministration publique

RFDC Revue franccedilaise de droit constitutionnel

RGDM Revue geacuteneacuterale de droit meacutedical

RTD civ Revue trimestrielle de droit civil

s Suivant

S Recueil Sirey

Supra Ci-dessus

TA Tribunal administratif

TC Tribunal des conflits

TGI Tribunal de grande instance

TIC Technologies de lrsquoinformation et de la communication

V Voir

vol Volume

7

Introduction Geacuteneacuterale

laquo Dans le domaine de la santeacute le XIXegraveme siegravecle avait connu la reacutevolution pasteurienne le

XXegraveme celle entraicircneacutee par la deacutecouverte de la peacutenicilline il est probable que le XXIegraveme en

connaicirctra deux la geacuteneacutetique et linteacutegration agrave la meacutedecine des nouvelles technologies de

linformation qui vont bouleverser en profondeur lorganisation et la conception que nous

nous faisons de la meacutedecine raquo1

1 Lrsquointroduction reacuteussie des Technologies de lrsquoInformation et de la Communication

(TIC) dans la pratique meacutedicale repreacutesente un enjeu important dans la reacutenovation du systegraveme

de santeacute franccedilais Les TIC apparaissent en effet comme lrsquooutil ideacuteal permettant de reacutepondre

aux deacutefis majeurs que rencontre notre systegraveme de santeacute aujourdrsquohui Drsquoabord elles participent

agrave une meilleure coordination des soins en ameacuteliorant le recueil des informations relatives aux

patients et la communication de celles-ci entre les professionnels de santeacute Elles permettent

eacutegalement drsquoassurer un accegraves aux soins agrave certains patients situeacutes dans certaines zones du

territoire mal doteacutees en termes drsquooffre de soins Il srsquoagit en effet drsquooutils capables de

laquo reacutepondre aux situations drsquoisolement et drsquoeacuteloignement geacuteographique dues agrave la rareacutefaction

des meacutedecins geacuteneacuteralistes et speacutecialistes dans certaines reacutegions raquo mais permettant eacutegalement

drsquoatteacutenuer laquo les effets du cloisonnement et de la complexiteacute de lrsquoorganisation des soins et des

aides sociales notamment agrave la sortie de lrsquohocircpital lorsque lrsquoeacutetat du patient neacutecessite une

teacuteleacutesurveillance meacutedicale agrave domicile et des aides non meacutedicales raquo2 Ensuite leur utilisation est

source drsquoeacuteconomies non neacutegligeables en matiegravere de deacutepenses de santeacute Enfin les TIC en santeacute

garantissent un accegraves eacutelargi agrave lrsquoensemble du territoire aux expertises meacutedicales de pointe

2 Le dictionnaire Larousse deacutefinit les Technologies de lrsquoInformation et de la

Communication comme lrsquolaquo ensemble des techniques et des eacutequipements informatiques

permettant de communiquer agrave distance par voie eacutelectronique raquo Les TIC peuvent eacutegalement

1 DIONIS du SEJOUR Jean ETIENNE Jean-Claude laquo Les teacuteleacutecommunications agrave haut deacutebit au service du

systegraveme de santeacute raquo rapport de lrsquooffice parlementaire deacutevaluation des choix scientifiques et technologiques

2004 p 8 2 LABORDES Pierre laquo La teacuteleacutesanteacute un nouvel atout au service de notre bien-ecirctre raquo La Documentation

franccedilaise p 39

Introduction geacuteneacuterale

8

ecirctre deacutefinies comme les technologies qui laquo englobent toutes les technologies numeacuteriques

facilitant la saisie le traitement le stockage et lrsquoeacutechange eacutelectroniques drsquoinformations raquo3

Dans le domaine plus speacutecifique de la santeacute lrsquoutilisation des TIC est multiple Ces outils sont

utiliseacutes dans de nombreuses situations assez diverses et derriegravere lrsquoexpression de TIC en

santeacute nous retrouvons de nombreuses pratiques telle que la e-santeacute les activiteacutes de

teacuteleacutemeacutedecine (ou parfois appeleacutees plus largement teacuteleacutesanteacute) lrsquoinformatisation des donneacutees de

santeacute par le biais de la creacuteation de dossier meacutedicaux informatiseacutes mais eacutegalement le dispositif

SESAM-Vitale (dans le cadre de la mise en place de la teacuteleacutetransmission des feuilles de soins)

le deacuteveloppement des cartes puce (carte Vitale carte CPS) les sites drsquoinformation en santeacute

sur Internet ou encore plus reacutecemment le deacuteveloppement des objets connecteacutes en santeacute

3 Face agrave la multipliciteacute et agrave la complexiteacute du sujet nous avons fait le choix de concentrer

notre recherche plus speacutecifiquement sur lrsquoutilisation des TIC dans la pratique meacutedicale crsquoest-

agrave-dire lrsquoutilisation des TIC comme outils intervenant directement dans la prise en charge

meacutedicale drsquoun patient par les professionnels de santeacute et plus particuliegraverement dans le cadre

drsquoactes de soins de diagnostic ou de preacutevention

4 Lrsquohocircpital4 de par ses missions

5 et son organisation apparait alors comme eacutetant le

terrain ideacuteal de notre eacutetude Le systegraveme de santeacute franccedilais se caracteacuterise par la coexistence de

plusieurs types drsquoeacutetablissements de santeacute les eacutetablissements publics de santeacute drsquoune part et

les eacutetablissements priveacutes drsquoautre part Parmi ces derniers nous retrouvons les eacutetablissements

de santeacute drsquointeacuterecirct collectif (ESPIC) et les eacutetablissements poursuivant un but lucratif Les

3 GAGNON Marie-Pierre BRETON Erik laquo Lrsquoinfluence des technologies de lrsquoinformation et des

communications sur le maintien en poste des infirmiegraveres raquo Santeacute Publique 20133 (Vol 25) p 126 4 Le dictionnaire Larousse deacutefinit lrsquohocircpital comme eacutetant un laquo eacutetablissement public ou eacutetablissement priveacute ayant

passeacute certaines conventions avec lEacutetat et ougrave peuvent ecirctre admis tous les malades pour y ecirctre traiteacutes raquo 5 Lrsquoarticle L 6111-1 du Code de la santeacute publique preacutevoit que laquo les eacutetablissements de santeacute publics priveacutes

dinteacuterecirct collectif et priveacutes assurent dans les conditions preacutevues au preacutesent code en tenant compte de la

singulariteacute et des aspects psychologiques des personnes le diagnostic la surveillance et le traitement des

malades des blesseacutes et des femmes enceintes et megravenent des actions de preacutevention et deacuteducation agrave la santeacute Ils

deacutelivrent les soins le cas eacutecheacuteant palliatifs avec ou sans heacutebergement sous forme ambulatoire ou agrave domicile le

domicile pouvant sentendre du lieu de reacutesidence ou dun eacutetablissement avec heacutebergement relevant du code de

laction sociale et des familles Ils participent agrave la coordination des soins en relation avec les membres des

professions de santeacute exerccedilant en pratique de ville et les eacutetablissements et services meacutedico-sociaux dans le cadre

deacutefini par lagence reacutegionale de santeacute en concertation avec les conseils deacutepartementaux pour les compeacutetences

qui les concernent Ils participent agrave la mise en œuvre de la politique de santeacute et des dispositifs de vigilance

destineacutes agrave garantir la seacutecuriteacute sanitaire Ils megravenent en leur sein une reacuteflexion sur leacutethique lieacutee agrave laccueil et la

prise en charge meacutedicale Ils peuvent participer agrave la formation agrave lenseignement universitaire et post-

universitaire agrave la recherche et agrave linnovation en santeacute Ils peuvent eacutegalement participer au deacuteveloppement

professionnel continu des professionnels de santeacute et du personnel parameacutedical raquo

Introduction geacuteneacuterale

9

eacutetablissements publics de santeacute quant agrave eux sont des personnes morales de droit public

doteacutees drsquoune autonomie administrative et financiegravere6 Le secteur public se caracteacuterise par une

regraveglementation abondante et diversifieacutee portant sur lrsquoorganisation des eacutetablissements leur

fonctionnement ou encore la gestion de leur personnel Crsquoest notamment pour cette speacutecificiteacute

que nous avons fait le choix de concentrer nos recherches sur les eacutetablissements publics de

santeacute

5 Dans ce contexte lrsquointroduction des TIC a ouvert de nombreuses possibiliteacutes de prises

en charge innovantes (Paragraphe I) en permettant notamment le deacuteploiement de la

teacuteleacutemeacutedecine Neacuteanmoins lrsquoutilisation de ces nouveaux outils peut eacutegalement ecirctre source de

deacuterives et de nombreuses questions se posent quant agrave lrsquoencadrement de leur mise en place

(Paragraphe II) Le droit apparait alors comme un outil incontournable pour accompagner

lrsquoexpansion de lrsquoutilisation des TIC en santeacute Cependant il va eacutegalement se reacuteveacuteler ecirctre dans

certaines situations un frein au deacuteveloppement peacuterenne des TIC dans la pratique meacutedicale

soit par ses lacunes soit par son excegraves de rigueur et geacuteneacuteralement par son caractegravere inadapteacute

Notre eacutetude va ainsi srsquoattacher agrave preacutesenter le caractegravere lacunaire du cadre juridique de

lrsquoutilisation des TIC en santeacute avant de reacutefleacutechir aux pistes de seacutecurisation possibles

(Paragraphe III)

sect1 Les multiples possibiliteacutes offertes par lrsquointroduction des TIC dans la

pratique meacutedicale

laquo Lessentiel cest dabord cette conviction que nous partageons tous que la teacuteleacutesanteacute nest pas

un sujet comme un autre mais le systegraveme qui dans les anneacutees agrave venir va transformer les

pratiques meacutedicales voire la maniegravere mecircme dont nous concevons la santeacute raquo7

6 Qualifieacutee de laquo nouvelle reacutevolution meacutedicale raquo8 lrsquointroduction des TIC dans la pratique

meacutedicale repreacutesente le renouveau de lrsquoactiviteacute meacutedicale et le deacuteveloppement croissant de leur

utilisation ouvre de nouvelles possibiliteacutes dans la prise en charge et le suivi agrave distance des

6 Article L 6141-1 du Code de la santeacute publique

7 Deacuteclaration de Mme Roselyne Bachelot Ministre de la santeacute de la jeunesse des sports et de la vie associative

sur lutilisation des technologies de linformation et de la communication au service de la santeacute Paris le 4

novembre 2008 Disponible sur [httpdiscoursvie-publiquefr] 8 LABORDES Pierre laquo La teacuteleacutesanteacute un nouvel atout au service de notre bien-ecirctre raquo op cit p 39

Introduction geacuteneacuterale

10

patients Celles-ci sont nombreuses et certaines drsquoentre elles ont retenues plus

particuliegraverement notre attention Veacuteritable espoir pour les zones geacuteographiques mal

desservies mais eacutegalement pour les populations isoleacutees les TIC permettent lrsquoaccegraves agrave des

expertises de pointe (A) Par ailleurs lrsquoutilisation des TIC preacutesente eacutegalement un inteacuterecirct dans

la mise en œuvre de politiques de preacutevention au travers du deacuteveloppement des objets

connecteacutes (B) Deux possibiliteacutes qui meacuteritent que nous nous y attardions

A Les TIC nouvel espoir pour les prises en charges difficiles

7 La reacutepartition de lrsquooffre de santeacute sur le territoire franccedilais est ineacutegale A titre

drsquoexemple en 2015 alors que la reacutegion Ile-de-France comptait plus de 3000 cabinets

meacutedicaux la Picardie nrsquoen comptait qursquoentre 500 et 1000 et la Corse moins de 5009 Bien que

les effectifs de meacutedecin aient augmenteacute jusqursquoen 2008 lrsquoabaissement du numerus clausus

dans les anneacutees 90 a pour conseacutequence depuis 2009 une baisse du nombre de meacutedecins qui

devrait continuer jusqursquoen 2019 et qui sera accompagneacute agrave compter de 2025 drsquoun deacutepart

massif agrave la retraite de meacutedecins provoquant ainsi une baisse de 10 de leur nombre10

Ces

deacuteparts risquent de fragiliser grandement certains territoires deacutejagrave mal desservis Dans ce

contexte difficile la teacuteleacutemeacutedecine qui srsquoest deacuteveloppeacutee gracircce agrave lrsquointroduction des TIC dans la

pratique meacutedicale apparait comme un des outils agrave privileacutegier afin de maintenir un eacutegal accegraves

aux soins sur le territoire Drsquoailleurs le Ministegravere de la santeacute lors du lancement du pacte santeacute

territoire11

ndeg2 en 2015 a preacutevu au titre de ses dix nouvelles actions un investissement de

plus de 40 millions drsquoeuros pour deacutevelopper la teacuteleacutemeacutedecine en ville en particulier pour les

patients chroniques et les soins urgents

8 La teacuteleacutemeacutedecine preacutesente des avantages multiples elle facilite lrsquoaccegraves agrave des soins de

qualiteacute pour des personnes situeacutees dans des zones isoleacutees et contribue au maintien de lrsquooffre

de soins de proximiteacute tout en apportant une expertise de pointe accessible via les TIC Elle

permet eacutegalement le suivi agrave distance des populations fragiles ou chroniques limitant ainsi

9 DGOS laquo Les chiffres cleacutes de lrsquooffre de soin raquo eacutedition 2015 p 4 Disponible sur [httpwwwfnehadfr]

consulteacute le 2 mai 2017 10

LABORDES Pierre laquo La teacuteleacutesanteacute un atout au service de notre bien-ecirctre raquo op cit p 46 11

Lanceacute en 2012 et compleacuteteacute en 2015 le Pacte Santeacute Territoire a pour objectifs de lutter contre la deacutesertification

meacutedicale et drsquoassurer une meilleure reacutepartition des meacutedecins sur le territoire

Introduction geacuteneacuterale

11

leurs deacuteplacements et ameacuteliorant leur qualiteacute de vie Lrsquointroduction de la teacuteleacutemeacutedecine dans la

pratique des professionnels de santeacute va eacutegalement rendre le temps meacutedical plus efficient12

Enfin la prise en charge de certaines urgences vitales va ecirctre ameacutelioreacutee la teacuteleacutemeacutedecine

permettant aux services drsquourgence de recueillir plus facilement et plus rapidement des avis

speacutecialiseacutes neacutecessaires Crsquoest le cas par exemple de lrsquoaccident vasculaire ceacutereacutebral ischeacutemique

(AVC) pour lequel lrsquoavis drsquoun neuroradiologue est neacutecessaire Le recours agrave la teacuteleacuteexpertise

dans ce cas permet alors drsquoeacutetablir rapidement un diagnostic et drsquoenvisager la suite de la prise

en charge du patient en limitant ainsi toutes pertes de chance

9 Crsquoest pourquoi degraves 2011 la Direction Geacuteneacuterale de lrsquoOffre de Soins (DGOS) en

charge du pilotage de la strateacutegie nationale de deacuteploiement de la teacuteleacutemeacutedecine sur le territoire

avait identifieacute cinq theacutematiques consideacutereacutees comme prioritaires Il srsquoagissait de la permanence

des soins en imagerie meacutedicale de la prise en charge des accidents vasculaires ceacutereacutebraux

(AVC) de la santeacute des personnes deacutetenues de la prise en charge dune maladie chronique (et

notamment lrsquoinsuffisance reacutenale chronique lrsquoinsuffisance cardiaque diabegravete ) et des soins

en structure meacutedico-sociale ou en hospitalisation agrave domicile (HAD)

Ainsi plusieurs projets de teacuteleacutemeacutedecine ont eacuteteacute deacuteveloppeacutes en France autour de ces

probleacutematiques LrsquoANAP dans un guide publieacute en mai 2012 avait drsquoailleurs dresseacute un

premier bilan de 25 projets srsquoinscrivant dans les cinq theacutematiques prioritaires et identifieacutes

comme suffisamment matures pour servir drsquoexemple aux acteurs souhaitant deacutevelopper un

projet de teacuteleacutemeacutedecine

10 Dans ce contexte les eacutetablissements publics de santeacute apparaissent ecirctre les acteurs

centraux de la majoriteacute des projets de teacuteleacutemeacutedecine actuellement recenseacutes13

De nombreux

exemples pourraient ecirctre citeacutes14

nous faisons le choix de nous attarder sur deux projets

speacutecifiques qui deacutemontrent bien agrave notre sens les enjeux de la teacuteleacutemeacutedecine

12 SIMON Pierre laquo Comment deacutevelopper la teacuteleacutemeacutedecine Ougrave raquo disponible sur

|httpesantegouvfractustelemedecine] Consulteacute le 15 mai 2017 13

laquo Le recensement des activiteacutes de teacuteleacutemeacutedecine raquo rapport de la DGOS deacutecembre 2012 14

V notamment en ce sens HERVIEU-BEGUE Marie GIROUD Maurice BEJOT Yannick laquoUn reacuteseau

de teacuteleacutemeacutedecine pour AVC raquo Soins Aides-Soignantes Volume 14 2017 p 13-14 Le BŒUF Dominique

laquo La teacuteleacutemeacutedecine en France du concept agrave la pratique raquo Soins Volume 61 2016 pp 28-30 PERRIER-

BONNET Sabine laquo Une consultation de teacuteleacutemeacutedecine dans le cadre drsquoun reacuteseau plaies et cicatrisation raquo La

Revue de lInfirmiegravere Volume 65 2016 pp 35-37

Introduction geacuteneacuterale

12

11 Le premier est un projet de teacuteleacutepsychiatrie deacuteveloppeacute par le centre hospitalier de

Rouvray degraves 200715

Cet eacutetablissement psychiatrique dispose drsquoun service de psychogeacuteriatrie

comprenant notamment une eacutequipe mobile intervenant au sein de diffeacuterents EHPAD Un

projet de teacuteleacutepsychiatrie pour les sujets acircgeacutes srsquoest deacuteveloppeacute initialement sur cinq sites (le

CHR de Rouvray 3 CMP un EHPAD et une uniteacute drsquoaccueil familial theacuterapeutique) Les

premiers retours de cette expeacuterimentation eacutetant positifs lrsquoactiviteacute de teacuteleacutepsychiatrie a eacuteteacute

maintenue et srsquoest accentueacutee Ainsi le nombre des teacuteleacuteconsultations assureacutees par les cinq

psychiatres deacutedieacutes agrave lrsquoactiviteacute ont augmenteacute passant de pregraves de 100 teacuteleacuteconsultations en 2012

agrave 462 en 2014 Pour les eacutequipes mobiles cet outil a permis drsquoeacutetendre leur couverture

territoriale et drsquoameacuteliorer leur reacuteactiviteacute diminuant ainsi le recours aux services drsquourgences

Cette expeacuterience qui srsquoinscrit dans le contexte particulier de la baisse de lrsquooffre de soins

psychiatriques dans certaines zones rurales et de la prise en charge de populations fragiles agrave

mobiliteacute reacuteduite (les personnes acircgeacutees) deacutemontre lrsquointeacuterecirct et la plus-value de la teacuteleacutemeacutedecine

dans ce type de prise en charge

12 Le second est un projet de teacuteleacuteexpertise pour les urgences neurochirurgicales

deacuteveloppeacute par le CHRU de Lille le reacuteseau TELURGE Ce dispositif est un pionnier en la

matiegravere puisque le reacuteseau composeacute de 22 centres hospitaliers a eacuteteacute creacuteeacute en 1996 Le principe

consiste en lrsquoobtention agrave distance pour les services drsquourgences des diffeacuterents centres

hospitaliers de lrsquoavis drsquoun neurochirurgien du CHRU de Lille ou depuis 2012 du Centre

hospitalier de Valenciennes Le neurochirurgien sur la base drsquoun dossier meacutedical et drsquoexamen

drsquoimagerie transmis agrave distance va formuler un avis veacuteritable aide agrave la deacutecision diagnostique

et theacuterapeutique pour lrsquoeacutequipe prenant en charge le patient Ce dispositif permet donc agrave vingt

et un centres hospitaliers de beacuteneacuteficier drsquoune expertise de pointe et drsquoassurer ainsi une prise

en charge optimale pour leurs patients arrivant parfois dans des situations critiques telles que

les heacutemorragies ceacutereacutebrales ou les traumatismes cracircniens Par ailleurs cette expertise permet

drsquoeacuteviter au patient un transfert inutile et de limiter toute perte de chance

13 Ces deux exemples16

permettent agrave notre sens de deacutemontrer que lrsquointroduction des

TIC dans la pratique meacutedicale au travers de la teacuteleacutemeacutedecine ameacuteliore de maniegravere

15 DESBORDES Marie laquo La teacuteleacutemeacutedecine en psychiatrie du sujet acircgeacute enjeux et perspectives

La teacuteleacutemeacutedecine en psychiatrie du sujet acircgeacute enjeux et perspectives raquo NPG Neurologie - Psychiatrie -

Geacuteriatrie Volume 15 2015 pp 270-273 16

Deacutefinition de la HAS Disponible sur [httpwwwhas-santefr] consulteacute le 15 mai 2017

Introduction geacuteneacuterale

13

consideacuterable lrsquooffre de soin existante Elle permet de reacutesoudre certaines difficulteacutes rencontreacutees

dans un contexte de diminution de lrsquooffre de santeacute en zone rurale et de vieillissement de la

population mais eacutegalement de faire beacuteneacuteficier aux patients des meilleurs soins et des

expertises les plus pointues et ce sans avoir agrave les deacuteplacer inutilement La teacuteleacutemeacutedecine

permet ainsi de gommer certaines ineacutegaliteacutes dans lrsquoaccegraves aux soins et agrave ce titre permet

drsquoassurer le droit agrave la protection de la santeacute tel que preacutevu par lrsquoalineacutea 11 du preacuteambule de la

Constitution de 1946

B Les TIC outil majeur dans la mise en place drsquoactions de preacutevention en

santeacute

14 Inscrite parmi les missions des eacutetablissements publics de santeacute17

la preacutevention en

santeacute repreacutesente un enjeu essentiel des politiques de santeacute en France Or comme le soulignait

lrsquoavis du conseil eacuteconomique social et environnemental la politique sanitaire actuelle est

encore trop centreacutee sur le curatif18

Selon la Haute Autoriteacute de Santeacute (HAS) la preacutevention

consiste agrave laquo eacuteviter lapparition le deacuteveloppement ou laggravation de maladies ou

dincapaciteacutes sont classiquement distingueacutees la preacutevention primaire qui agit en amont de la

maladie (ex vaccination et action sur les facteurs de risque) la preacutevention secondaire qui

agit agrave un stade preacutecoce de son eacutevolution (deacutepistages) et la preacutevention tertiaire qui agit sur les

complications et les risques de reacutecidive raquo19

15 Les actions de preacutevention pour ecirctre efficaces neacutecessitent une adheacutesion voire comme

le soulignait le conseil une appropriation de celles-ci par les patients en tant qursquoacteur de leur

santeacute Lrsquoutilisation des TIC au sein de projets de preacutevention en santeacute et plus particuliegraverement

des objets connecteacutes en santeacute devient alors un moyen efficace pour diffuser des politiques de

preacutevention en obtenant lrsquoadheacutesion des usagers Ces objets connecteacutes sont des objets mobiles et

communicants qui permettent par le biais drsquoune connexion Internet laquo drsquoidentifier capter et

17 Lrsquoarticle L 6111-1 dispose que laquo les eacutetablissements de santeacute publics priveacutes dinteacuterecirct collectif et priveacutes

assurent dans les conditions preacutevues au preacutesent code en tenant compte de la singulariteacute et des aspects

psychologiques des personnes le diagnostic la surveillance et le traitement des malades des blesseacutes et des

femmes enceintes et megravenent des actions de preacutevention et deacuteducation agrave la santeacute [] raquo 18

GROS Jeannette laquo Santeacute et nouvelles technologies de linformation raquo JORF avis et rapports du Conseil

eacuteconomique et social 2002 p 4 19

Deacutefinition de la HAS disponible sur [httpswwwhas-santefr] consulteacute le 25 mai 2017

Introduction geacuteneacuterale

14

transmettre des informations provoquer une interaction avec lrsquoenvironnement et alimenter

une application preacutesente sur une interface (par exemple un smartphone)raquo20

16 En la matiegravere les assureurs et les mutuelles font figure de pionniers A titre

drsquoexemple en 2013 la socieacuteteacute AXA en partenariat avec la socieacuteteacute WITHINGS proposait

drsquooffrir aux 1000 premiers souscripteurs drsquoune nouvelle compleacutementaire santeacute un objet

connecteacute permettant de tracer lrsquoactiviteacute physique mais eacutegalement le rythme cardiaque et la

qualiteacute de sommeil de son porteur Lrsquoassureur compleacutetait eacutegalement son offre en proposant un

chegraveque laquo meacutedecine douce raquo drsquoune valeur de 50 euros pour les clients reacutealisant plus de 7000

pas par jour Selon Dimitri CARBONNELLE21

laquo [les objets connecteacutes] sont une formidable

opportuniteacute pour les assureurs car cela leur permet de vendre de nouveaux services raquo

17 Les eacutetablissements de santeacute commencent eacutegalement agrave deacutevelopper des actions de

preacutevention en santeacute par le biais de lrsquoutilisation drsquoobjets connecteacutes en santeacute Ainsi un

Professeur des Universiteacutes Praticien Hospitalier (PU-PH) du CHRU de Lille a deacuteveloppeacute

avec lrsquoappui du Ministegravere de la santeacute le projet intituleacute laquo 10 000 pas le deacutefi pour la vie raquo Il

srsquoagit drsquoun programme de preacutevention de lrsquoactiviteacute physique piloteacute par le Professeur Philippe

AMOUYEL et ayant pour but de lutter contre la seacutedentariteacute afin de preacutevenir le

deacuteveloppement de maladies telles que le diabegravete les cancers ou encore les maladies

cardiovasculaires Ainsi afin drsquoaugmenter leur nombre de pas quotidiens un kit composeacute

drsquoun podomegravetre et drsquoune application smartphone a eacuteteacute distribueacute agrave certains agents du CHRU

de Lille volontaires pour srsquoinscrire dans la deacutemarche Le podomegravetre enregistre de maniegravere

quotidienne les performances de son porteur et celui-ci peut gracircce agrave lrsquoapplication smartphone

relieacutee et speacutecialement conccedilue pour ce programme se fixer des objectifs suivre son eacutevolution

et lancer des deacutefis aux autres participants du programme Des conseils dieacuteteacutetiques sont

eacutegalement dispenseacutes de maniegravere reacuteguliegravere Ce programme drsquoabord diffuseacute au niveau reacutegional

a pour but drsquoecirctre eacutetendu ensuite au niveau national

20 CAMBON Linda laquo Objets connecteacutes mobiles communicants en preacutevention deacutepasser lrsquooutil penser

lrsquointerventionhellip raquo Santeacute Publique vol 28 ndeg 1 2016 pp 5-6 21

CARBONELLE Dimitri laquo Les objets connecteacutes transforment le secteur de lrsquoassurance raquo Le monde eacuteconomie

15 juin 2015

Introduction geacuteneacuterale

15

18 Les TIC en santeacute ont donc un rocircle important agrave jouer dans la preacutevention en santeacute La

santeacute mobile (ou m-Health) qui repose sur des dispositifs mobiles se deacuteveloppe en effet de

maniegravere consideacuterable22

Le leacutegislateur srsquoest mecircme reacutecemment attacheacute agrave deacutefinir certaines

notions qui entourent la santeacute mobile Ainsi la notion drsquoautomesure connecteacutee est-elle

apparue au sein drsquoun avis de la commission drsquoenrichissement de la langue franccedilaise publieacute au

Journal Officiel du 4 mars 201723

Celle-ci est deacutefinie comme une laquo pratique consistant pour

une personne agrave mesurer elle-mecircme agrave laide dobjets connecteacutes des variables physiologiques

la concernant relatives notamment agrave sa nutrition agrave ses activiteacutes physiques ou agrave son

sommeil raquo

Les TIC en santeacute et notamment les objets connecteacutes vont donc ecirctre ameneacutes agrave jouer un

rocircle majeur dans la preacutevention en santeacute

sect2 Les TIC des outils sources de risques eacutethiques et juridiques majeurs

19 Bien que lrsquoutilisation accrue des TIC dans la pratique meacutedicale preacutesente de nombreux

inteacuterecircts indeacuteniables elle srsquoaccompagne eacutegalement de risques Leur deacuteveloppement doit se

faire dans le strict respect des regravegles juridiques et deacuteontologiques qui srsquoappliquent agrave lrsquoexercice

de la meacutedecine Or ces nouvelles pratiques vont srsquoaccompagner de lrsquoapparition de nouveaux

risques qui vont peser aussi bien sur les patients et plus particuliegraverement sur leurs donneacutees de

santeacute (A) que sur la pratique meacutedicale drsquoune maniegravere geacuteneacuterale (B)

A Les risques pesant sur la vie priveacutee du patient

20 Lrsquoutilisation des TIC dans la pratique meacutedicale va modifier les modaliteacutes de prise en

charge des patients Neacuteanmoins la distance et la deacutemateacuterialisation des eacutechanges fondements

mecircme de ces nouvelles pratiques meacutedicales ne doivent pas aller agrave lrsquoencontre des droits

fondamentaux des patients

22 DESMARAIS Pierre laquo Santeacute mobile - Quel reacutegime pour la m-Health raquo Communication Commerce

eacutelectronique ndeg 3 Mars 2013 eacutetude 5 23

Avis de la commission denrichissement de la langue franccedilaise vocabulaire de la santeacute JORF ndeg0054 du 4

mars 2017 texte ndeg 92

Introduction geacuteneacuterale

16

21 La loi du 4 mars 200224

dite loi Kouchner a consacreacute des droits individuels aux

patients tels que le droit au respect de la digniteacute le respect de la vie priveacutee et du secret des

informations le droit agrave la seacutecuriteacute des soins le droit agrave linformation le respect du

consentement ou le droit drsquoobtenir communication de son dossier meacutedical Ces droits sont

aujourdrsquohui bien ancreacutes dans les pratiques courantes et ne doivent pas ecirctre neacutegligeacutes au profit

du deacuteveloppement des TIC dans la prise en charge meacutedicale Or comme le souligne Merav

GRIGUER laquo si le secteur de la santeacute vit actuellement sa transformation digitale les

utilisateurs manifestent encore un certain scepticisme Parmi leurs principales

preacuteoccupations figurent le respect du secret meacutedical la protection de leurs donneacutees

personnelles et de leur vie priveacutee la seacutecurisation des donneacutees la transparence et le controcircle

de lutilisation de leurs donneacutees raquo25

22 Lrsquoutilisation des TIC en santeacute conduit de fait agrave un accroissement consideacuterable du

nombre de donneacutees personnelles deacutemateacuterialiseacutees Ces donneacutees sont ensuite partageacutees entre

professionnels par le biais des TIC et ce plus facilement et surtout plus rapidement

qursquoauparavant Cependant le secret professionnel et la protection des donneacutees personnelles du

patient essentiels au maintien de la relation de confiance entre un professionnel de santeacute et

son patient ne doivent pas ecirctre neacutegligeacutes au profit drsquoune technique certes efficace mais

neacuteanmoins risqueacutee En effet si la laquo multiplication exponentielle raquo des donneacutees de santeacute peut

offrir de reacuteelles opportuniteacutes elle repreacutesente aussi certains risques pour le respect de la vie

priveacutee et la confidentialiteacute de ces donneacutees raquo26

Leur protection est donc essentielle afin de

preacuteserver le respect de la vie priveacutee du patient et assurer le maintien du secret professionnel

Mais au-delagrave de la crainte drsquoune mauvaise protection des donneacutees subsiste la crainte drsquoun

meacutesusage des donneacutees collecteacutees Les TIC apparaissent ici comme un danger pour le respect

de la finaliteacute de ces donneacutees pouvant mener agrave une utilisation agrave mauvais escient voir pire une

marchandisation de celles-ci Il apparait alors eacutevident que lrsquoensemble des utilisations qui

pourraient aller agrave lrsquoencontre de lrsquointeacuterecirct du patient doivent alors ecirctre interdites27

Toutefois

ces interdictions doivent ecirctre mises en perspective avec lrsquointeacuterecirct que preacutesentent certaines

24 Loi ndeg 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et agrave la qualiteacute du systegraveme de santeacute JORF du 5

mars 2002 p 4118 25

GRIGUER Merav laquo Quel cadre leacutegal pour lrsquoe-santeacute raquo Cahiers de droit de lentreprise ndeg 5 2016 prat 25 26

VAYR Jonathan laquo Les donneacutees de santeacute un enjeu pour le futur raquo LPA septembre 2016 ndeg 185-186 p 4 27

Ibidem

Introduction geacuteneacuterale

17

donneacutees Finalement toute la difficulteacute repose dans les finaliteacutes pour lesquelles ces donneacutees

deacutemateacuterialiseacutees vont ecirctre utiliseacutees

B Les risques laquo drsquoubeacuterisation raquo de la meacutedecine la nouvelle crainte

Lrsquointroduction des TIC en santeacute a eacuteteacute immeacutediatement accompagneacutee de multiples

craintes de la part des professionnels de santeacute et plus speacutecifiquement de la communauteacute

meacutedicale

23 Le Conseil National de lrsquoOrdre des Meacutedecins (CNOM) srsquoattache ainsi depuis

plusieurs anneacutees agrave suivre de pregraves lrsquoeacutevolution des TIC dans la pratique meacutedicale nrsquoheacutesitant

pas agrave reacutealiser de nombreuses eacutetudes et rapports sur le sujet Consideacuterant que laquo par son rocircle de

feacutedeacuterateur des meacutedecins de toutes disciplines et de tous secteurs reacuteunis autour des mecircmes

principes deacuteontologiques [il] a la responsabiliteacute de sengager dans les projets de systegraveme

dinformation de santeacute au nom de lavenir scientifique mais dans le respect absolu des

liberteacutes individuelles raquo28

mais eacutegalement que laquo le respect absolu de la vie priveacutee et des

liberteacutes individuelles est un impeacuteratif premier dans lexamen du deacuteveloppement utile des

moyens informatiques raquo29

lrsquoordre accompagne les eacutevolutions techniques qui viennent

bouleverser lrsquoexercice meacutedical

24 Lrsquointroduction des TIC dans la relation de soin a drsquoabord fait naitre chez les

meacutedecins la crainte drsquoune deacuteshumanisation de lrsquoacte meacutedical Les TIC apparaissaient aux

yeux des meacutedecins comme une barriegravere entre leurs patients et eux creacuteant de la distance et

pouvant ainsi deacuteteacuteriorer le colloque singulier neacutecessaire agrave la prise en charge du patient

Mais au-delagrave de ce risque lieacute au changement des pratiques professionnelles la communauteacute

meacutedicale au travers du CNOM a reacutecemment exprimeacute une crainte quant agrave laquo lrsquoubeacuterisation de la

santeacute raquo constatant laquo un risque de deacuterive vers du commerce eacutelectronique non reacuteguleacute qui

28 laquo Lrsquoinformatisation de la santeacute raquo Livre blanc du CNOM 2008 p 1

29 laquo Teacuteleacutematique de santeacute raquo CNOM 2006 Disponible sur [httpswwwconseil-nationalmedecinfr] p 1

consulteacute le 15 mai 2017

Introduction geacuteneacuterale

18

reacuteduirait la pratique meacutedicale agrave une simple prestation eacutelectronique moyennant reacutetribution

via des plateformes du secteur marchand raquo30

25 La notion drsquo ubeacuterisation est tregraves reacutecente et ne possegravede pas de reacuteelle deacutefinition Elle

peut ecirctre vue comme laquo une strateacutegie de contournement des regravegles par lutilisation optimale

des Technologies de lInformation et de la Communication et ce afin de fournir un accegraves

faciliteacute plus rapide et en principe moins coucircteux agrave un service raquo31

Dans le domaine de la

santeacute lrsquoubeacuterisation se reacutevegravele par lrsquoapparition au sein de lrsquooffre numeacuterique de services

meacutedicaux qui srsquoaffranchissent du cadre leacutegal actuellement en place (notamment en ce qui

concerne la teacuteleacutemeacutedecine) Parmi ces offres dires ubeacuteriseacutees nous trouvons principalement

des offres de teacuteleacuteconseil et de teacuteleacuteconsultation A titre drsquoexemple lrsquoassureur AXA propose

dans le cadre de ses contrats drsquoassurance santeacute compleacutementaire un service de

teacuteleacuteconsultation disponible 7 j7 et 24h24 permettant au patient de pallier lrsquoindisponibiliteacute

(aveacutereacutee ou supposeacutee) de son meacutedecin traitant Ces offres souvent agrave la limite de la leacutegaliteacute

viennent concurrencer lrsquooffre existante Par ailleurs ces offres contreviennent totalement agrave

certains principes deacuteontologiques fondamentaux qui srsquoimposent aux meacutedecins et notamment

lrsquointerdiction de pratiquer la meacutedecine comme un commerce32

26 A ce sujet le CNOM srsquoinquiegravete drsquoune tendance agrave lrsquoaugmentation des laquo offres en ligne

qui correspondent agrave du commerce eacutelectronique non reacuteguleacute et qui tendent agrave reacuteduire la pratique

meacutedicale agrave une simple prestation eacutelectronique moyennant reacutetribution via des plateformes du

secteur marchand raquo33

En effet certaines offres dites de teacuteleacuteconseils tendent agrave se deacutevelopper

Cette activiteacute laquo consiste agrave mettre en relation des internautes qui se connectent agrave un site avec

un meacutedecin qui leur fournit secondairement agrave lrsquooccasion drsquoun entretien teacuteleacutephonique des

informations personnaliseacuteesraquo34

Or le teacuteleacuteconseil ne fait pas partie des cinq actes de

teacuteleacutemeacutedecine aujourdrsquohui reconnus et encadreacutes par le deacutecret drsquooctobre 201035

Se pose alors la

question du cadre juridique deacuteontologique mais eacutegalement eacutethique dans lequel cette

30 CNOM laquo Teacuteleacutemeacutedecine et autres prestations meacutedicales eacutelectroniques raquo rapport de mission adopteacute lors de la

session du Conseil national de lrsquoOrdre des meacutedecins de feacutevrier 2016 p 2 31

LEQUILLERIER Cleacutementine laquo Lrsquoubeacuterisation de la santeacute raquo Dalloz IPIT 2017 p 155 32

Article R 4127-19 du Code de la santeacute publique 33

CNOM laquo Teacuteleacutemeacutedecine et autres prestations meacutedicales eacutelectroniques raquo op cit p 4 34

Disponible sur [httpswwwconseil-nationalmedecinfrarticleteleconseil-personnalise-1155] Consulteacute le 15

mai 2017 35

Deacutecret ndeg 2010-1229 du 19 octobre 2010 relatif agrave la teacuteleacutemeacutedecine JORF ndeg0245 du 21 octobre 2010 texte ndeg

13

Introduction geacuteneacuterale

19

prestation pourrait srsquoinscrire Pour le CNOM le teacuteleacuteconseil reste quoi qursquoil en soit soumise

aux dispositions du Code de deacuteontologie meacutedicale en tant que prestation meacutedicale Il

considegravere cependant que laquo lrsquooffre marchande repose pour une large part sur la confusion

qursquoil est possible drsquoentretenir aupregraves du grand public entre la teacuteleacutemeacutedecine ndash notamment la

teacuteleacuteconsultation ndash deacutesormais deacutefinie par la loi et des activiteacutes qui srsquoen reacuteclament mais qui il

faut le souligner clairement nrsquoentrent pas dans le champ des nouveaux textes

reacuteglementaires raquo36

27 Face agrave ce pheacutenomegravene le CNOM tente drsquointerpeller les pouvoirs publics se

demandant agrave juste titre si lrsquoEtat pouvait laquo continuer de produire des textes reacuteglementaires

normatifs appliqueacutes agrave lrsquoexercice de la meacutedecine utilisant des moyens numeacuteriques et laisser

prospeacuterer des offres numeacuteriques non reacuteguleacutees sur le marcheacute de la e-santeacute raquo En effet

lrsquoordre demande depuis plusieurs anneacutees maintenant agrave ce que ce secteur soit reacuteguleacute afin

drsquoeacuteviter toutes deacuterives commerciales Le CNOM souhaite que laquo le flou juridique soit leveacute Il

considegravere que lrsquoexercice du teacuteleacuteconseil devrait donner lieu agrave une reacuteglementation sanitaire

speacutecifique et agrave des obligations contraignantes assurant la seacutecuriteacute des informations donneacutees agrave

lrsquointernaute la protection des donneacutees personnelles de santeacute et leur caractegravere non

marchandisable raquo37

Nous pouvons alors observer les premiegraveres limites du cadre juridique des TIC en santeacute la

laquo reacuteglementation trop stricte de cette pratique [ayant] nui agrave son deacuteveloppement et [ayant]

preacuteciseacutement favoriseacute leacutemergence doffres ubeacuteriseacuteesraquo38

28 Enfin le deacuteveloppement de cette offre ubeacuteriseacutee en plus drsquoaccentuer les risques deacutejagrave

existants pour la protection des donneacutees du patient (les prestataires srsquoaffranchissant des

contraintes mises en place dans le cadre de la teacuteleacutemeacutedecine) aura tendance agrave creacuteer une offre

de santeacute agrave deux vitesses renforccedilant les ineacutegaliteacutes existantes deacutejagrave en la matiegravere Or utiliseacutees agrave

bon escient les TIC peuvent au contraire reacuteduire ces ineacutegaliteacutes

36 laquo Deacuteontologie meacutedicale sur le web raquo Le Livre blanc du Conseil national de lrsquoOrdre des meacutedecins deacutecembre

2011 p 29 37

Idem p 30 38

LEQUILLERIER Cleacutementine laquo Lubeacuterisation de la santeacute raquo op cit

Introduction geacuteneacuterale

20

sect3 Probleacutematique de la thegravese

29 Notre probleacutematique est partie drsquoun constat celui des difficulteacutes pour les TIC en

santeacute de se deacutevelopper de maniegravere peacuterenne A titre drsquoexemple alors que laquo malgreacute les

ambitions et les incitations la geacuteneacuteralisation de la teacuteleacutemeacutedecine progresse lentement raquo39

le

Dossier Meacutedical Partageacute (DMP) projet phare des pouvoirs publics institueacute par la loi ndeg2004-

810 du 13 aoucirct 200440

peine agrave se deacutefaire de son eacutetiquette drsquoArleacutesienne

30 Se pose alors la question de savoir quels peuvent ecirctre les freins agrave ce deacuteveloppement

Au-delagrave des aspects purement eacuteconomiques de certains projets (les TIC coucirctent chers) et des

difficulteacutes agrave obtenir lrsquoadheacutesion des acteurs face agrave des changements de pratiques parfois tregraves

ancreacutees de nombreuses difficulteacutes juridiques jalonnent la voie du deacuteveloppement des TIC

dans la prise en charge meacutedicale En effet quand on en vient agrave reacutefleacutechir aux aspects juridiques

lieacutes agrave la mise en place des TIC dans la pratique meacutedicale nous ne pouvons que constater tregraves

rapidement que le droit occupe une place importante De nombreuses questions vont se poser

Celles-ci ont trait agrave la pratique elle-mecircme qui sous sa nouvelle forme deacutemateacuterialiseacutee va

poser des difficulteacutes en termes de responsabiliteacutes mais eacutegalement de droit des patients Mais

les questions concernent eacutegalement lrsquoencadrement de la mise en œuvre de ces pratiques quel

cadre applique-t-on agrave lrsquoutilisation de ces nouveaux outils Comment seacutecurise-on et encadre-t-

on ces pratiques Drsquoailleurs doit-on les encadrer Enfin lrsquointroduction des TIC dans la

pratique meacutedicale a des impacts juridiques Crsquoest notamment le cas de lrsquoinformatisation

massive des donneacutees de santeacute conseacutequence directe de lrsquoutilisation des TIC et dont la gestion

juridique sera neacutecessaire mais complexe

31 Finalement le Droit se dresse parfois devant ces nouvelles pratiques comme un

obstacle Les initiatives innovantes peuvent se trouver alors freineacutees par ce Droit complexe

rigide et parfois inadapteacute Pourtant celui-ci est loin drsquoecirctre insurmontable Des solutions

peuvent ecirctre apporteacutees afin de faire du Droit non plus le frein mais bien lrsquoaccompagnateur si

ce nrsquoest mecircme le moteur du deacuteveloppement de lrsquoutilisation des TIC dans la pratique meacutedicale

39 VIOUJAS Vincent laquo La teacuteleacutemeacutedecine entre expeacuterimentations reacuteussies et geacuteneacuteralisation au ralenti raquo RDSS

2015 p 681 40

Loi ndeg 2004-810 du 13 aoucirct 2004 relative agrave lassurance maladie JORF ndeg0190 du 17 aoucirct 2004 p 14598

Introduction geacuteneacuterale

21

32 Avec ces travaux nous tenterons drsquoeacutetablir que si le cadre juridique actuel nrsquoest pas

propice au deacuteveloppement serein et peacuterenne de lrsquoutilisation des TIC dans la pratique meacutedicale

des solutions existent afin de permettre aux eacutetablissements de santeacute de seacutecuriser leurs

pratiques Ainsi dans un premier temps nous eacutetudierons de maniegravere critique le cadre

juridique qui srsquoapplique aujourdrsquohui agrave lrsquoutilisation des TIC dans la pratique meacutedicale

(Premiegravere partie) avant drsquoenvisager les diffeacuterentes pistes de seacutecurisation de ces pratiques

permettant drsquoassurer leur deacuteveloppement dans un contexte propice (Seconde partie)

PREMIERE PARTIE

LE CADRE JURIDIQUE DE LrsquoUTILISATION

DES TIC A LrsquoHOcircPITAL UN CADRE

INCOMPLET

24

laquo [La] technique ne doit pas progresser plus vite que son controcircle raquo41

33 En posant ce principe de base simple et logique le deacuteputeacute M Jean FOYER mettait en

exergue ce qui est un des plus grands problegravemes lieacutes agrave lrsquoutilisation des technologies

drsquoinformation et de communication dans la pratique meacutedicale En effet aujourdrsquohui alors que

la technique se deacuteveloppe reacuteguliegraverement et que les socieacuteteacutes proposent des solutions toujours

plus innovantes le leacutegislateur se montre quant agrave lui peu reacuteactif et tarde agrave donner aux

Technologies de lrsquoInformation et de la Communication le cadre regraveglementaire neacutecessaire agrave

leur bon deacuteveloppement Car il est certain que lrsquoinformatisation croissante de la pratique

meacutedicale ne peut ecirctre que beacuteneacutefique pour la prise en charge du patient et les avanceacutees en la

matiegravere offrent de nouvelles possibiliteacutes chaque jour A titre drsquoexemple deacutesormais les

radiographies sont plus souvent numeacuteriseacutees et conserveacutees sur des logiciels speacutecialiseacutes De

mecircme les hocircpitaux investissent deacutesormais dans des logiciels de gestion informatiseacutee des

dossiers meacutedicaux et la prescription informatiseacutee se deacuteveloppe de plus en plus les Agences

Reacutegionales de Santeacute (ARS) incitant agrave leur utilisation par le biais des contrats de bon usage

notamment42

34 Toutefois force est de constater que le leacutegislateur nrsquoa pas su accompagner en temps et

en heure ce deacuteveloppement fulgurant Alors que la France se posait comme lrsquoun des

preacutecurseurs en la matiegravere en adoptant en 1978 une leacutegislation encadrant le traitement des

donneacutees agrave caractegravere personnel elle a ensuite perdu sa longueur drsquoavance tardant agrave transposer

la directive europeacuteenne de 199543

et proposant ensuite des cadres incomplets difficiles agrave

respecter voire mecircme pour certains totalement inapplicables

35 A lrsquoheure actuelle lrsquoencadrement leacutegislatif et regraveglementaire propre agrave lrsquoutilisation des

TIC dans la pratique meacutedicale preacutesente un visage flou et complexe En ce qui concerne la

41 FOYER Jean laquo Rapport au nom de la commission des lois constitutionnelles de la leacutegislation et de

ladministration geacuteneacuterale de la reacutepublique sur le projet de loi (ndeg 2516) relatif agrave linformatique et aux liberteacutes la

proposition de loi (ndeg 1004) de Pierre-Bernard Cousteacute tendant agrave creacuteer une commission de controcircle des moyens

dinformatique afin dassurer la protection de la vie priveacutee et des liberteacutes individuelles des citoyens la

proposition de loi (ndeg 3092) de Franccedilois Villa et plusieurs de ses collegravegues sur les liberteacutes les fichiers et

linformatique raquo Assembleacutee Nationale t1 ndeg 3125 Paris 1977 p 13 42

Deacutecret ndeg 2015-355 du 27 mars 2015 relatif au contrat de bon usage des meacutedicaments et des produits et

prestations mentionneacute agrave larticle L 162-22-7 du code de la seacutecuriteacute sociale JORF du 29 mars 2015 p 5763 43

Directive 9546CE du Parlement europeacuteen et du Conseil du 24 octobre 1995 relative agrave la protection des

personnes physiques agrave leacutegard du traitement des donneacutees agrave caractegravere personnel et agrave la libre circulation de ces

donneacutees JO ndeg L 281 du 23 novembre 1995 p 31

25

gestion globale et lrsquoutilisation des donneacutees du patient le cadre de leur traitement informatique

peut paraitre trop geacuteneacuteral et par conseacutequent inadapteacute (titre premier chapitre premier) tandis

que les regravegles relatives agrave leur heacutebergement et leur communication peuvent sembler illisibles et

parfois insuffisantes (titre premier chapitre second) Lrsquoutilisation des TIC dans le cadre de la

prise en charge des patients ne beacuteneacuteficie pas non plus drsquoun encadrement adeacutequat drsquoune part

le deacuteveloppement de la deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux montre les limites des regravegles

en place (titre second chapitre premier) drsquoautre part la reacutealisation drsquoactes de soins via les

TIC souffre drsquoun cadre incomplet quand il nrsquoest pas inexistant (titre second chapitre second)

TITRE 1

TIC ET INFORMATISATION DES DONNEES

DE SANTE UN CADRE PARFOIS

INADAPTE

28

36 Les donneacutees relatives au patient qursquoil srsquoagisse des donneacutees strictement administratives

telles que leur nom leur adresse ou encore leur numeacutero de seacutecuriteacute sociale ou des donneacutees

meacutedicales les concernant sont fondamentalement neacutecessaires agrave la bonne prise en charge de

celui-ci Elles doivent donc ecirctre recueillies ordonneacutees et conserveacutees Ces donneacutees sont un

bien preacutecieux pour les professionnels de santeacute agrave de nombreux eacutegards Elles leur permettent

drsquoapporter aux patients les meilleurs soins possibles seacutecuriser leur diagnostic et assurer la

bonne coordination des soins Les donneacutees constituent eacutegalement une source de matiegravere

premiegravere pour les recherches meacutedicales

37 Aujourdrsquohui lrsquointroduction des TIC dans la pratique meacutedicale va avoir pour

conseacutequence une informatisation massive de ces donneacutees qui vont ecirctre deacutemateacuterialiseacutees

enregistreacutees stockeacutees et partageacutees par le biais de systegravemes informatiques Cette

informatisation de donneacutees particuliegraverement sensibles doit ecirctre accompagneacutee drsquoun cadre

juridique adeacutequat afin drsquoassurer aux patients une protection efficace de leur vie priveacutee

38 Notre reacuteflexion va nous amener agrave nous pencher dans un premier temps sur

lrsquoencadrement juridique du traitement informatiseacute des donneacutees cadre de droit commun

parfois inadapteacute aux TIC en santeacute (chapitre 1) Puis dans un second temps nous nous

pencherons sur les modaliteacutes actuellement en place en matiegravere de conservation et de

communication des informations du patient (chapitre 2)

29

Chapitre 1

Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

39 Le traitement systeacutematique des donneacutees relatives au patient nrsquoest pas nouveau Les

toutes premiegraveres traces de dossier meacutedical datent du IXegraveme

siegravecle RHAZES meacutedecin arabe

avait lrsquohabitude de conserver les cas qursquoil estimait inteacuteressants dans un registre intituleacute

laquo observation de lrsquohocircpital raquo Lrsquoensemble a ensuite eacuteteacute publieacute dans lrsquoouvrage laquo continens raquo La

notion de dossier meacutedical pour chaque patient nrsquoapparaicirct qursquoagrave la fin du XVIIIegraveme

siegravecle mais

son contenu reste succinct Ce nrsquoest qursquoau XIXegraveme

siegravecle que le dossier meacutedical en tant que tel

apparaicirct il contient alors les donneacutees meacutedicales ainsi que les donneacutees administratives du

patient Les meacutedecins de ville vont eux aussi formaliser petit agrave petit des fiches drsquoinformation

relatives agrave leurs patients Aujourdrsquohui la tenue drsquoun dossier meacutedical est pour les

eacutetablissements de santeacute une obligation regraveglementaire codifieacutee agrave lrsquoarticle R 1112-2 du Code

de la santeacute publique44

Un dossier meacutedical doit ecirctre constitueacute pour chaque patient contenant a

minima certaines informations obligatoires (et notamment les motifs de lrsquohospitalisation les

conclusions de lrsquoeacutevaluation clinique initiale les reacutesultats des diffeacuterentes examens et analyses

le dossier de soins infirmiers) Ce dossier meacutedical doit drsquoailleurs ecirctre conserveacute pour une dureacutee

de 20 ans apregraves le dernier passage du patient agrave lrsquohocircpital

40 Depuis plusieurs anneacutees lrsquointroduction puis le deacuteveloppement massif des TIC agrave

lrsquohocircpital a transformeacute le traditionnel dossier papier en dossier informatiseacute Parfois craint

souvent appreacutehendeacute ce passage au tout informatique ne creacutee pas forceacutement de risques

nouveaux Toutefois une attention particuliegravere doit ecirctre porteacutee aux traitements des donneacutees du

patient Pour cela leur protection est un preacutealable neacutecessaire (section I) Celle-ci est assureacutee

par un corpus de textes eacutepars dont lrsquoefficaciteacute peut se reacuteveacuteler relative De mecircme leur partage

est soumis au respect de certaines conditions qui vont ecirctre diffeacuterentes selon le but rechercheacute

par leur utilisation (section II)

44 Lrsquoarticle R 1112-2 du Code de la santeacute publique preacutevoit qursquolaquo un dossier meacutedical est constitueacute pour chaque

patient hospitaliseacute dans un eacutetablissement de santeacute public ou priveacute raquo

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

30

Section 1 La protection des donneacutees du patient

41 En matiegravere de protection des donneacutees du patient il faut se reacutefeacuterer agrave la leacutegislation de

droit commun qui existe en la matiegravere agrave savoir la loi Informatique et Liberteacutes En effet les

principes geacuteneacuteraux eacutedicteacutes par cette loi trouveront agrave srsquoappliquer en matiegravere de donneacutees de

santeacute (paragraphe I) mecircme si celle-ci est compleacuteteacutee par quelques dispositions particuliegraveres

aux donneacutees de santeacute Toutefois cet eacutetat des lieux pointe les lacunes des protections mises en

place (paragraphe II)

sect1 La leacutegislation de droit commun agrave disposition du droit de la santeacute

42 La loi ndeg 78-16 du 6 janvier 1978 dite laquo loi Informatique et Liberteacutes raquo45

a eacuteteacute lrsquoune des

premiegraveres lois proteacutegeant les donneacutees agrave caractegravere personnel en encadrant leur traitement en

Europe Cette loi reacuteformeacutee en 200446

affiche une volonteacute drsquoapporter une protection forte (A)

En ce qui concerne les donneacutees de santeacute cette protection est toutefois compleacuteteacutee par des

dispositions speacutecifiques agrave ces donneacutees (B)

A La loi Informatique et Liberteacutes pilier de lrsquoencadrement

43 La France est une pionniegravere en matiegravere drsquoencadrement des traitements de donneacutees agrave

caractegravere personnel (1) et la loi Informatique et Liberteacutes marque la volonteacute du leacutegislateur

drsquoinstaurer une protection forte (2)

1) La France parmi les preacutecurseurs

44 Au cours des anneacutees 1970 lrsquoutilisation de lrsquoinformatique se deacuteveloppe notamment

dans les administrations publiques Toutefois lrsquoopinion publique craint une augmentation des

45 Loi ndeg 78-17 du 6 janvier 1978 relative agrave lrsquoinformatique aux fichiers et aux liberteacutes JORF du 7 janvier 1978

p 227 46

Loi ndeg 2004-801 du 6 aoucirct 2004 relative agrave la protection des personnes physiques agrave leacutegard des traitements de

donneacutees agrave caractegravere personnel et modifiant la loi ndeg 78-17 du 6 janvier 1978 relative agrave linformatique aux

fichiers et aux liberteacutes JORF du 7 aoucirct 2004 p 14063

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

31

atteintes aux liberteacutes publiques ainsi qursquoune violation de la sphegravere priveacutee Cette crainte est

particuliegraverement bien exprimeacutee dans lrsquoarticle de Philippe BOUCHER intituleacute laquo SAFARI ou

la chasse aux franccedilais raquo47

Celui-ci expose au grand jour un projet deacutenommeacute Systegraveme

automatiseacute pour les fichiers administratifs et le reacutepertoire des individus (SAFARI) laquo qui

devait permettre agrave partir du reacutepertoire national drsquoidentification des personnes physiques de

faciliter les intercommunications entre les fichiers qui auraient recours au numeacutero national

drsquoidentiteacute soit comme base de classement soit comme eacuteleacutement de reacutefeacuterence raquo48

Or comme le

reacuteveacutelait lrsquoarticle de Pierre BOUCHER et contrairement aux recommandations eacutemises par le

Conseil drsquoEtat le Premier Ministre de lrsquoeacutepoque Pierre MESSMER avait eacutecarteacute tout projet de

deacutebat public sur les projets drsquoinformatisation du gouvernement Lrsquoopinion publique vivement

eacutemue amena le Premier Ministre agrave constituer une commission preacutesideacutee par le vice-preacutesident

du Conseil drsquoEtat Bernard CHENOT et chargeacutee de proposer des mesures permettant de

garantir que le deacuteveloppement de lrsquoinformatique dans les secteurs public semi-public et priveacute

se reacutealise dans le respect de la vie priveacutee des liberteacutes individuelles et des liberteacutes publiques

Le rapport49

de cette commission reacutedigeacute par Bernard TRICOT et le Professeur Pierre

CATALA fut remis le 27 juin 1975 Crsquoest sur la base de ce rapport que le projet de loi relatif

agrave lrsquoinformatique et aux liberteacutes fut reacutedigeacute

45 Pour autant la France bien qursquoen avance sur de nombreux pays nrsquoeacutetait pas le premier

agrave leacutegifeacuterer sur le sujet En effet avant cela lrsquoAllemagne avait adopteacute une loi relative au

traitement automatiseacute des informations nominatives en octobre 1970 Elle fut rapidement

suivie par la Suegravede qui adopta une loi sur le mecircme sujet en 1973 Hors Europe les Etats-Unis

adoptegraverent quant agrave eux un Privacy Act en 1974 dont lrsquoapplication est toutefois limiteacutee aux

fichiers deacutetenus par les administrations feacutedeacuterales

46 En France plusieurs propositions de loi relatives au sujet vont ecirctre deacuteposeacutees

successivement aupregraves de lrsquoAssembleacutee Nationale la premiegravere eacutemanant de Pierre-Bernard

47 BOUCHER Pierre laquo SAFARI ou la chasse aux franccedilais raquo Le Monde 21 mars 1974

48 FOYER Jean laquo Rapport au nom de la commission des lois constitutionnelles de la leacutegislation et de

ladministration geacuteneacuterale de la reacutepublique sur le projet de loi (ndeg 2516) relatif agrave linformatique et aux liberteacutes la

proposition de loi (ndeg 1004) de Pierre-Bernard Cousteacute tendant agrave creacuteer une commission de controcircle des moyens

dinformatique afin dassurer la protection de la vie priveacutee et des liberteacutes individuelles des citoyens la

proposition de loi (ndeg 3092) de Franccedilois Villa et plusieurs de ses collegravegues sur les liberteacutes les fichiers et

linformatique raquo op cit 49

CATALA Pierre TRICOT Bernard laquo Rapport de la commission Informatique et Liberteacutes raquo La

Documentation franccedilaise Paris 1975

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

32

COUSTE et tendant agrave creacuteer une commission de controcircle des moyens informatiques afin

drsquoassurer la protection de la vie priveacutee et des liberteacutes individuelles des citoyens et une autre

eacutemanant de Franccedilois VILLA et plusieurs de ses collegravegues sur les liberteacutes les fichiers et

lrsquoinformatique De mecircme un projet de loi relatif agrave lrsquoInformatique et aux Liberteacutes va

eacutegalement ecirctre preacutesenteacute Ces trois textes feront lrsquoobjet drsquoun rapport commun de la commission

des lois constitutionnelles de la leacutegislation et de lrsquoadministration geacuteneacuterale de la Reacutepublique50

47 La loi relative agrave lrsquoinformatique aux fichiers et aux liberteacutes va ecirctre adopteacutee le 6 janvier

1978 Elle comporte alors des dispositions organiques (creacuteation de la commission nationale de

lrsquoinformatique et des liberteacutes ndash CNIL) ainsi que des dispositions mateacuterielles51

Tregraves

symbolique lrsquoarticle premier de la loi dispose laquo lrsquoinformatique doit ecirctre au service de

chaque citoyen Son deacuteveloppement doit srsquoopeacuterer dans le cadre de la coopeacuteration

internationale Elle ne doit porter atteinte ni agrave lrsquoidentiteacute humaine ni aux droits de lrsquohomme

ni agrave la vie priveacutee ni aux liberteacutes publiques ou individuelles raquo

48 Au niveau international une crainte du deacuteveloppement de leacutegislations trop protectrices

est alors apparue Ainsi lrsquoOrganisation de Coopeacuteration et de Deacuteveloppement Economique

(OCDE) le 23 septembre 1980 arrecircta des lignes directrices reacutegissant la protection de la vie

priveacutee et les flux transfrontaliers de donneacutees agrave caractegravere personnel deacutenueacutees de force

obligatoire mais ayant pour ambition drsquoeacuteviter que la protection des donneacutees personnelles

nrsquoentrave la libre circulation de lrsquoinformation ainsi que le deacuteveloppement des relations

eacuteconomiques et sociales des pays membres Le Conseil de lrsquoEurope adopta quant agrave lui la

convention pour la protection des personnes agrave leacutegard du traitement automatiseacute des donneacutees agrave

caractegravere personnel dite laquo convention 108 raquo signeacutee le 28 janvier 1981 et ayant pour but de

concilier la protection de la vie priveacutee avec la libre circulation de lrsquoinformation entre les

peuples52

50 FOYER Jean laquo Rapport au nom de la commission des lois constitutionnelles de la leacutegislation et de

ladministration geacuteneacuterale de la reacutepublique sur le projet de loi (ndeg 2516) relatif agrave linformatique et aux liberteacutes la

proposition de loi (ndeg 1004) de Pierre-Bernard COUSTE tendant agrave creacuteer une commission de controcircle des moyens

dinformatique afin dassurer la protection de la vie priveacutee et des liberteacutes individuelles des citoyens la

proposition de loi (ndeg 3092) de Franccedilois Villa et plusieurs de ses collegravegues sur les liberteacutes les fichiers et

linformatique raquo op cit 51

V Infra ndeg 52 et s 52

Convention ndeg 108 du Conseil de lrsquoEurope pour la protection des personnes agrave leacutegard du traitement automatiseacute

des donneacutees agrave caractegravere personnel 28 janvier 1981 disponible sur [httpwwwcoeintfr] consulteacute le 15 mai

2017

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

33

49 En 1995 afin de reacuteduire les divergences qui peuvent exister entre les leacutegislations des

diffeacuterents Etats lrsquoUnion Europeacuteenne adopta la directive 9546CE relative agrave la protection des

donneacutees personnelles et agrave la libre circulation de ces donneacutees53

Lrsquoambition de cette directive

eacutetait de prendre en compte trois eacutevolutions majeures en matiegravere drsquoinformatisation des

donneacutees agrave savoir la marchandisation des donneacutees lrsquointernationalisation des flux et le

pheacutenomegravene de traccedilabiliteacute54

Les Etats membres avaient alors jusqursquoau 25 octobre 1998 date

drsquoentreacutee en vigueur de la directive pour la transposer

50 Toutefois en France la proceacutedure va srsquoaveacuterer tregraves longue Le 12 septembre 1997 le

Premier Ministre de lrsquoeacutepoque confie agrave Guy BRAIBANT un travail preacuteparatoire agrave lrsquoeacutelaboration

drsquoun avant-projet de loi en vue de la transposition de la directive de 1995 Le 3 mars 1998

Guy BRAIBANT remet son rapport55

dans lequel il expose notamment les enjeux de la

transposition mais formule eacutegalement plusieurs propositions afin de maintenir un haut niveau

de protection des liberteacutes Puis entre le 5 octobre et le 5 deacutecembre 1999 une consultation

publique est lanceacutee sur le futur projet de loi intituleacute laquo socieacuteteacute de lrsquoinformation raquo Le projet de

loi relatif agrave la protection des donneacutees agrave caractegravere personnel est preacutesenteacute agrave lrsquooccasion drsquoun

conseil des ministres le 18 juillet 2001 Toutefois suite aux diffeacuterents examens la loi

nrsquoentrera en vigueur que le 7 aoucirct 2004 et la France sera parmi lrsquoun des derniers pays agrave

transposer la directive Ainsi la loi ndeg 2004-801 du 6 aoucirct 2004 relative agrave la protection des

personnes physiques agrave lrsquoeacutegard des traitements de donneacutees agrave caractegravere personnel remanie

profondeacutement la loi du 6 janvier 1978 De faccedilon tregraves symbolique lrsquoarticle premier de la loi a

eacuteteacute conserveacute

51 A lrsquoheure actuelle la protection des donneacutees personnelles reste un sujet tregraves important

en France et en Europe La CNIL a depuis plusieurs anneacutees fait connaicirctre sa volonteacute de

renforcer ce principe de protection des donneacutees personnelles en preacuteconisant notamment une

constitutionnalisation du principe Au niveau europeacuteen une reacutevision du cadre existant a par

ailleurs eacuteteacute initieacutee en 2012 avec une proposition de regraveglement europeacuteen reacuteformant le cadre de

53 Directive 9546CE du Parlement europeacuteen et du Conseil du 24 octobre 1995 relative agrave la protection des

personnes physiques agrave leacutegard du traitement des donneacutees agrave caractegravere personnel et agrave la libre circulation de ces

donneacutees JOUE ndeg L 281 du 23 novembre 1995 p 31 54

DESGENS-PASANAU Guillaume laquo La protection des donneacutees agrave caractegravere personnel raquo Lexis-Nexis 2egraveme

eacutedition Paris 2016 p 5 55

BRAIBANT Guy laquo Donneacutees personnelles et socieacuteteacutes de lrsquoinformation Rapport au premier ministre raquo La

Documentation franccedilaise 1998

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

34

la protection des donneacutees agrave caractegravere personnel56

adopteacutee le 25 janvier 2012 par la

Commission Europeacuteenne Afin drsquoinstaurer une politique plus geacuteneacuterale et coheacuterente en matiegravere

de protection des donneacutees agrave caractegravere personnel le leacutegislateur europeacuteen a fait le choix

drsquoutiliser le regraveglement comme instrument juridique En effet lrsquoarticle 288 du traiteacute sur le

fonctionnement de lrsquoUnion Europeacuteenne preacutevoyant lrsquoapplicabiliteacute directe des regraveglements

lrsquoutilisation de cet outil permet drsquoeacuteviter les transpositions limiteacutees et surtout tregraves longues

comme ce fut le cas avec la directive de 1995 Les deacutebats ont tout de mecircme dureacute quatre ans

puisque ce nrsquoest qursquoen avril 2016 que ce texte a eacuteteacute deacutefinitivement adopteacute57

Nous ne nous attarderons pas ici sur les apports particuliers de cette proposition de

regraveglement en matiegravere de protection des donneacutees agrave caractegravere personnel ces eacuteleacutements eacutetant

abordeacutes tout au long de ces travaux Il est simplement neacutecessaire agrave ce stade de constater la

volonteacute au niveau europeacuteen drsquoinstaurer un cadre unifieacute et solide et ce dans un but double

proteacuteger les donneacutees agrave caractegravere personnel et favoriser lrsquoutilisation des Technologies de

lrsquoInformation et de la Communication

2) Une protection forte

52 La loi Informatique et Liberteacutes avait pour ambition drsquoapporter un cadre tregraves protecteur

au traitement des donneacutees agrave caractegravere personnel Les modifications subies par la loi initiale

suite agrave la transposition de la directive europeacuteenne 9546CE du 24 octobre 1995 vont

eacutegalement en ce sens Avec la loi ndeg 2004-801 du 6 aoucirct 2004 relative agrave la protection des

personnes physiques agrave leacutegard des traitements de donneacutees agrave caractegravere personnel et modifiant la

loi ndeg 78-17 du 6 janvier 1978 relative agrave linformatique aux fichiers et aux liberteacutes le

leacutegislateur montre une reacuteelle volonteacute drsquoinstaurer une protection forte vis-agrave-vis de ce type de

donneacutees Pour ce faire il est preacutevu agrave la fois une protection a priori et une protection a

posteriori

56 Proposition de regraveglement du parlement europeacuteen et du conseil relatif agrave la protection des personnes physiques agrave

lrsquoeacutegard du traitement des donneacutees agrave caractegravere personnel et agrave la libre circulation de ces donneacutees ndeg20120011 25

janvier 2012 57

Regraveglement (UE) 2016679 du Parlement europeacuteen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif agrave la protection des

personnes physiques agrave leacutegard du traitement des donneacutees agrave caractegravere personnel et agrave la libre circulation de ces

donneacutees et abrogeant la directive 9546CE (regraveglement geacuteneacuteral sur la protection des donneacutees) JOUE L 119 du 4

mai 2016 p 1

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

35

53 La protection a priori relegraveve agrave la fois de lrsquoencadrement mis en place par les textes

mais eacutegalement des formaliteacutes agrave accomplir preacutealablement agrave tout traitement de donneacutees agrave

caractegravere personnel Certaines conditions de liceacuteiteacute des traitements sont poseacutees degraves les

premiers articles de la loi Ainsi lrsquoarticle 6 dispose que laquo les donneacutees sont collecteacutees de

maniegravere loyale et licite [hellip] pour des finaliteacutes deacutetermineacutes explicites et leacutegitimes et ne sont pas

traiteacutees ulteacuterieurement de maniegravere incompatible avec ces finaliteacutes [hellip] elles sont adeacutequates

pertinentes et non excessives [hellip] elles sont exactes complegravetes et si neacutecessaire mises agrave

jour[hellip] elles sont conserveacutees sous une forme permettant lrsquoidentification des personnes

concerneacutees pendant une dureacutee qui nrsquoexcegravede pas la dureacutee neacutecessaire aux finaliteacutes pour

lesquelles elles sont collecteacutees et traiteacutees raquo

54 Nous pouvons constater que lrsquoaccent est mis ici sur le respect du principe de

proportionnaliteacute Ce principe bien qursquoil ne figure pas dans la Constitution est reacuteguliegraverement

invoqueacute par le Conseil constitutionnel dans ses deacutecisions Les donneacutees collecteacutees doivent

avant tout reacutepondre agrave une finaliteacute bien preacutecise et ne pas ecirctre disproportionneacutees par rapport au

but rechercheacute Le principe de proportionnaliteacute apparaicirct eacutegalement au travers de lrsquoobligation de

conserver ces donneacutees pour une dureacutee limiteacutee et adapteacutee aux besoins du traitement Les

donneacutees ne peuvent ecirctre conserveacutees que pour une dureacutee strictement deacutefinie La leacutegislation

consacre ici le principe de droit agrave lrsquooubli58

Ce principe de proportionnaliteacute permet drsquoassurer

un certain eacutequilibre entre droits des personnes concerneacutees par les donneacutees traiteacutees et inteacuterecircts

du responsable du traitement

55 La seconde exigence preacutealable agrave tout traitement est poseacutee agrave lrsquoarticle 7 de la loi

Informatique et Liberteacutes laquo un traitement de donneacutees agrave caractegravere personnel doit avoir reccedilu le

consentement de la personne concerneacutee raquo Cette exigence permet de srsquoassurer drsquoune part que

les personnes concerneacutees par les donneacutees sont au courant de lrsquoutilisation qui va en ecirctre faite et

drsquoautre part qursquoils en sont drsquoaccord Toutefois il est utile de preacuteciser que ce mecircme article qui

preacutevoit lrsquoobligation de consentement introduit immeacutediatement une liste drsquoexceptions Ainsi

le consentement de la personne concerneacutee par les donneacutees traiteacutees ne sera pas neacutecessaire si le

traitement satisfait agrave lrsquoune des conditions suivantes laquo le respect drsquoune obligation leacutegale

incombant au responsable du traitement la sauvegarde de la vie de la personne concerneacutee

58 DESGENS-PASANAU Guillaume laquo La protection des donneacutees agrave caractegravere personnel raquo op cit p 41

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

36

lrsquoexeacutecution drsquoune mission de service public dont est investi le responsable ou le destinataire

du traitement lrsquoexeacutecution soit drsquoun contrat auquel la personne concerneacutee est partie soit de

mesures contractuelles prises agrave la demande de celle-ci la reacutealisation de lrsquointeacuterecirct leacutegitime

poursuivi par le responsable du traitement ou par le destinataire sous reacuteserve de ne pas

meacuteconnaitre lrsquointeacuterecirct ou les droits et liberteacutes fondamentaux de la personne concerneacutee raquo En

outre le responsable du traitement devra le deacuteclarer aupregraves de la CNIL Diffeacuterentes formes de

deacuteclarations existent et celle qui devra srsquoappliquer deacutependra de la finaliteacute poursuivie par le

traitement et non pas de lrsquoapplication utiliseacutee pour mettre en œuvre le traitement Ces

diffeacuterents reacutegimes sont traiteacutes au sein du chapitre IV de la loi Informatique et Liberteacutes intituleacute

laquo Formaliteacutes preacutealables agrave la mise en œuvre des traitements raquo Le reacutegime de droit commun est

celui de la deacuteclaration normale deacutecrite agrave lrsquoarticle 23 de la loi Informatique et Liberteacutes et

applicable agrave tous les traitements qui ne relegraveveraient pas drsquoune proceacutedure speacutecifique Il srsquoagit

en reacutealiteacute drsquoun engagement de la part du responsable du traitement qui certifie que son

traitement est conforme aux exigences de la CNIL

56 Afin de geacuterer au mieux les diffeacuterentes deacuteclarations mais eacutegalement de faciliter les

traitements de donneacutees dont la mise en œuvre nrsquoest pas susceptible de porter atteinte agrave la vie

priveacutee et aux liberteacutes il est eacutegalement preacutevu que la CNIL puisse eacutetablir des normes afin de

simplifier les obligations de deacuteclaration A titre drsquoexemple la norme simplifieacutee ndeg 50 relatif agrave

la gestion des cabinets meacutedicaux et parameacutedicaux59

permet aux professionnels de santeacute

libeacuteraux de deacuteposer une simple deacuteclaration de conformiteacute agrave cette norme afin drsquoecirctre en regravegle

avec la leacutegislation Cette norme srsquoapplique agrave la gestion courante des cabinets meacutedicaux qursquoil

srsquoagisse des dossiers meacutedicaux de la teacuteleacutetransmission des feuilles de soins ou encore de la

comptabiliteacute La CNIL peut eacutegalement en vertu des dispositions preacutevues agrave lrsquoarticle 24 de la

loi Informatique et Liberteacutes deacutecider que certaines cateacutegories courantes de traitements dont la

mise en œuvre nrsquoest pas susceptible de porter atteinte agrave la vie priveacutee ou aux liberteacutes compte

tenu de leur finaliteacute de leur destinataire des donneacutees agrave caractegravere personnel traiteacutees de leur

dureacutee de conservation et des cateacutegories de personnes concerneacutees peuvent ecirctre dispenseacutees de

deacuteclaration La liste de ces traitements est publieacutee au Journal Officiel Crsquoest le cas par

exemple de la dispense accordeacutee aux organismes publics pour la deacutemateacuterialisation des

59 Deacutelibeacuteration ndeg 2005-296 du 22 novembre 2005 portant adoption drsquoune norme simplifieacutee relative aux

traitements automatiseacutes de donneacutees agrave caractegravere personnel mis en œuvre par les membres des professions

meacutedicales et parameacutedicales exerccedilant agrave titre libeacuteral agrave des fins de gestion de leur cabinet JORF ndeg7 du 8 janvier

2006 texte ndeg 19

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

37

marcheacutes publics60

La CNIL peut eacutegalement dans le cas de traitement relevant drsquoun mecircme

organisme ou ayant des finaliteacutes identiques ou lieacutees entre elles autoriser les responsables du

traitement agrave proceacuteder agrave une deacuteclaration unique61

57 Pour les donneacutees consideacutereacutees comme eacutetant plus sensibles une autorisation preacutealable

de la CNIL sera neacutecessaire Ce reacutegime particulier srsquoapplique aux donneacutees sensibles citeacutees aux

III et IV lrsquoarticle 8 de la loi62

mais eacutegalement laquo aux traitements automatiseacutes portant sur des

donneacutees geacuteneacutetiques agrave lrsquoexception de ceux drsquoentre eux qui sont mis en œuvre par des meacutedecins

ou des biologistes et qui sont neacutecessaires aux fins de la meacutedecine preacuteventive des diagnostics

meacutedicaux ou de lrsquoadministration de soins ou de traitements aux traitements portant sur des

donneacutees relatives aux infractions condamnations ou mesures de sucircreteacute aux traitements

automatiseacutes susceptibles drsquoexclure des personnes du beacuteneacutefice drsquoun droit drsquoune prestation ou

drsquoun contrat en lrsquoabsence de toute disposition leacutegislative ou reacuteglementaire aux traitements

automatiseacutes ayant pour objet lrsquointerconnexion de fichiers relevant drsquoune ou de plusieurs

personnes morales geacuterant un service public et dont les finaliteacutes correspondent agrave des inteacuterecircts

publics diffeacuterents lrsquointerconnexion de fichiers relevant drsquoautres personnes et dont les finaliteacutes

principales sont diffeacuterentes les traitements portant sur des donneacutees parmi lesquelles figure le

numeacutero drsquoinscription des personnes au reacutepertoire national drsquoidentification des personnes

physiques et ceux qui requiegraverent une consultation de ce reacutepertoire sans inclure le numeacutero

drsquoinscription agrave celui-ci des personnes les traitements automatiseacutes de donneacutees comportant des

appreacuteciations sur les difficulteacutes sociales des personnes les traitements automatiseacutes

comportant des donneacutees biomeacutetriques neacutecessaires au controcircle de lrsquoidentiteacute des personnes raquo

58 Contrairement agrave la proceacutedure de deacuteclaration normale le traitement envisageacute va faire

lrsquoobjet drsquoun examen de la part de la CNIL qui dispose drsquoun deacutelai de deux mois renouvelable

une fois sur deacutecision motiveacutee de son preacutesident pour se prononcer et autoriser ou non la mise

en œuvre du traitement En lrsquoabsence de reacuteponse de la part de la CNIL dans le deacutelai imparti la

demande drsquoautorisation est reacuteputeacutee rejeteacutee et le responsable du traitement pourra engager un

recours en annulation aupregraves du Conseil drsquoEtat

60 Deacutelibeacuteration ndeg 2005-003 du 13 janvier 2005 deacutecidant la dispense de deacuteclaration des traitements mis en œuvre

par les organismes publics dans le cadre de la deacutemateacuterialisation des marcheacutes publics JORF ndeg 55 du 6 mars

2005 texte ndeg 32 61

Article 24 II de la loi Informatique et Liberteacutes 62

V Infra ndeg 63

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

38

59 La protection mise en place par la loi Informatique et Liberteacutes passe eacutegalement par la

conseacutecration de droits fondamentaux pour les personnes concerneacutees par les donneacutees traiteacutees

Ces droits exposeacutes au sein du chapitre V de la loi sont au nombre de quatre droit

drsquoinformation droit drsquoaccegraves droit de rectification et de radiation et le droit drsquoopposition Le

droit drsquoinformation preacutevu agrave lrsquoarticle 32 de la loi consiste pour la personne concerneacutee par les

donneacutees agrave ecirctre informeacutee drsquoune maniegravere geacuteneacuterale sur le traitement dont ses donneacutees vont faire

lrsquoobjet Elle doit notamment ecirctre informeacutee sur lrsquoidentiteacute du responsable du traitement de la

finaliteacute du traitement du ou des destinataires des donneacutees des droits qursquoil deacutetient en vertu de

la loi Informatique et Liberteacutes et le cas eacutecheacuteant du transfert des donneacutees au sein drsquoun eacutetat non

membre de lrsquoUnion Europeacuteenne Ce droit nous apparaicirct comme essentiel puisqursquoil va

permettre agrave la personne concerneacutee par le traitement drsquoune part de donner un consentement

eacuteclaireacute au traitement et drsquoautre part drsquoecirctre clairement informeacutee des autres droits qursquoelle

deacutetient agrave lrsquoeacutegard de ses donneacutees

La loi Informatique et Liberteacutes preacutevoit eacutegalement le droit pour toute personne

physique de srsquoopposer agrave ce que ses donneacutees fassent lrsquoobjet drsquoun traitement et ce agrave condition

drsquoavoir des raisons leacutegitimes Lrsquoopposition devra donc ecirctre motiveacutee et lrsquoappreacuteciation du

caractegravere leacutegitime ou non de lrsquoopposition reviendra donc au responsable du traitement Cette

notion de laquo motifs leacutegitimes raquo nrsquoest malheureusement pas deacutefinie dans les textes et ni la

CNIL ni le juge nrsquoont eu agrave se prononcer agrave ce sujet pour lrsquoinstant

Le droit drsquoaccegraves poseacute agrave lrsquoarticle 39 de la loi Informatique et Liberteacutes permet agrave toute

personne physique justifiant de son identiteacute drsquointerroger le responsable drsquoun traitement afin

drsquoobtenir confirmation que ses donneacutees font ou ne font pas lrsquoobjet drsquoun traitement

Enfin il est preacutevu que toute personne physique ait droit drsquoexiger que ses donneacutees

soient laquo rectifieacutees compleacuteteacutees mises agrave jour verrouilleacutees ou effaceacutees raquo Toutefois les

donneacutees concerneacutees doivent ecirctre inexactes incomplegravetes peacuterimeacutees ou encore eacutequivoques ou

tout simplement frappeacutees drsquoune interdiction de traitement

60 Avec la loi Informatique et Liberteacutes le leacutegislateur a donc essayeacute de mettre en place la

protection des donneacutees agrave caractegravere personnel la plus complegravete possible garantissant aux

personnes concerneacutees par un traitement de donneacutees des droits fondamentaux assurant un

controcircle a priori et a posteriori des traitements effectueacutes Ces garanties ont drsquoailleurs eacuteteacute

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

39

jugeacutees comme preacutesentant un caractegravere approprieacute par le Conseil drsquoEtat dans une deacutecision

rendue le 19 novembre 199263

B La protection speacutecifique des donneacutees de santeacute

61 Les donneacutees de santeacute sont des donneacutees agrave caractegravere personnel assez particuliegraveres En

effet elles touchent de tregraves pregraves agrave lrsquointimiteacute de la personne et leur communication rend la

personne qursquoelles concernent vulneacuterable Cette particulariteacute leur vaut drsquoappartenir agrave une

cateacutegorie speacutecifique de donneacutees puisqursquoelles sont consideacutereacutees par la loi Informatique et

Liberteacutes comme eacutetant des donneacutees sensibles (1) En compleacutement des protections instaureacutees

par la loi Informatique et Liberteacutes les donneacutees de santeacute beacuteneacuteficient ainsi de protections qui

leurs sont propres (2)

1) Les donneacutees de santeacute des donneacutees sensibles

62 Bien qursquoil soit depuis longtemps acquis que les donneacutees de santeacute sont des donneacutees

particuliegraverement sensibles la deacutefinition leacutegale de la notion de donneacutees de santeacute nrsquoest apparue

que tregraves reacutecemment

63 La loi Informatique et Liberteacutes deacutefinit clairement la notion de donneacutees agrave caractegravere

personnel comme eacutetant laquo toute information relative agrave une personne physique identifieacutee ou qui

peut ecirctre identifieacutee directement ou indirectement par reacutefeacuterence agrave un numeacutero drsquoidentification

ou agrave un ou plusieurs eacuteleacutements qui lui sont propres raquo Toutefois elle ne revient pas

preacuteciseacutement sur la notion de donneacutees de santeacute Elle se contente juste de preacuteciser dans son

article 8 qursquo laquo il est interdit de collecter ou de traiter des donneacutees agrave caractegravere personnel [hellip]

qui sont relatives agrave la santeacute raquo La directive europeacuteenne de 1995 nrsquoest pas beaucoup plus

preacutecise sur la notion de donneacutees de santeacute Crsquoest un arrecirct de la CJCE en date du 6 novembre

2003 qui a apporteacute les premiegraveres preacutecisions sur cette notion64

En lrsquoespegravece le Goumlta hovraumltt

(Suegravede) avait poseacute par ordonnance du 23 feacutevrier 2001 sept questions preacutejudicielles sur

lrsquointerpreacutetation de la directive 9546CE La quatriegraveme de ces questions demandait agrave la Cour

de preacuteciser si laquo lrsquoindication sur une page drsquoaccueil qursquoun collegravegue de travail mentionneacute par

63 CE 18 novembre 1992 LICRA ndeg 115367 Rec 1992 p 411 AJDA 1993 p 213

64 CJCE 6 novembre 2003 affndegC-10101 Suegravede c Lindqvist

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

40

son nom srsquoest blesseacute au pied et est en congeacute de maladie partiel est-elle une donneacutee agrave

caractegravere personnel relative agrave la santeacute qui aux termes de lrsquoarticle 8 paragraphe 1 ne peut

faire lrsquoobjet drsquoun traitement raquo Face agrave cette question la CJCE va apporter une reacuteponse

simple laquo Eu eacutegard agrave lrsquoobjet de cette directive il convient de donner agrave lrsquoexpression donneacutees

de santeacute employeacutee agrave son article 8 paragraphe 1 une interpreacutetation large de sorte qursquoelle

comprenne des informations concernant tous les aspects tant physiques que psychiques de la

santeacute drsquoune personne raquo La CJCE se montre par conseacutequent assez large sur la deacutefinition de la

notion de donneacutees de santeacute Et elle nrsquoest drsquoailleurs pas la seule dans ce cas

64 Dans sa transposition de la directive 9546CE le Grand-Ducheacute du Luxembourg

contrairement agrave la France a deacutefini les donneacutees relatives agrave la santeacute comme eacutetant laquo toute

information concernant lrsquoeacutetat physique et mental drsquoune personne concerneacutee y compris les

donneacutees geacuteneacutetiques raquo65

La deacutefinition est leacutegegraverement plus large en ce qursquoelle regroupe

expresseacutement les donneacutees geacuteneacutetiques Cette inteacutegration est compreacutehensible bien que les

donneacutees geacuteneacutetiques qui regroupent les caractegraveres heacutereacuteditaires drsquoun individu ne concernent

pas agrave proprement parleacute un aspect de la santeacute drsquoun individu mais touchent en revanche

indeacuteniablement agrave son intimiteacute

65 Le Groupe de lrsquoarticle 2966

se montre eacutegalement tregraves large dans la deacutefinition qursquoil

donne de la notion Ce groupe srsquoest pencheacute agrave plusieurs reprises sur la probleacutematique lieacutee agrave la

protection des donneacutees de santeacute Ainsi dans un document de travail sur le traitement des

donneacutees agrave caractegravere personnel relatives agrave la santeacute contenues dans les dossiers meacutedicaux

eacutelectroniques adopteacute le 15 feacutevrier 2007 le groupe de travail reprend la deacutefinition poseacutee par

lrsquoarrecirct Lindqvist et la complegravete en preacutecisant que laquo cette deacutefinition srsquoapplique eacutegalement aux

donneacutees agrave caractegravere personnel lorsqursquoelles preacutesentent un lien clair et eacutetroit avec la

description de lrsquoeacutetat de santeacute drsquoune personne les donneacutees sur la consommation de

65 Loi du 2 aoucirct 2002 relative agrave la protection des personnes agrave lrsquoeacutegard du traitement des donneacutees agrave caractegravere

personnel Art 2 g) du journal officiel du Grand-Ducheacute du Luxembourg laquo Recueil des leacutegislations raquo A ndeg 91

du 13 aoucirct 2002 66

Le groupe de lrsquoarticle 29 ou Article 29 data protection working party est un organe consultatif europeacuteen

indeacutependant sur la protection des donneacutees et de la vie priveacutee eacutetabli en vertu de lrsquoarticle 29 de la directive ndeg

9546CE Ce groupe consultatif et indeacutependant est composeacute de repreacutesentants des autoriteacutes nationales chargeacutees

de la protection des donneacutees agrave caractegravere personnel drsquoun repreacutesentant de lrsquoautoriteacute creacutee pourhellipet drsquoun

repreacutesentant de la commission europeacuteenne Ses missions sont deacutefinies agrave lrsquoarticle 30 de la directive Il srsquoagit

principalement de donneacutee des avis sur les questions relatives agrave la protection des donneacutees agrave caractegravere personnel

mais eacutegalement promouvoir et contribuer agrave une application uniforme de la directive

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

41

meacutedicaments drsquoalcool ou de drogue et les donneacutees geacuteneacutetiques sont incontestablement des

donneacutees agrave caractegravere personnel relatives agrave la santeacute [hellip] en outre toutes autres donneacutees ndash par

exemple des donneacutees administratives (numeacutero de seacutecuriteacute sociale date drsquoadmission agrave

lrsquohocircpital) ndash contenues dans les documents meacutedicaux relatifs au traitement drsquoun patient

doivent ecirctre consideacutereacutees comme sensibles raquo Le Groupe de lrsquoarticle 29 franchit un cap

suppleacutementaire en inteacutegrant les donneacutees administratives agrave la cateacutegorie des donneacutees de santeacute agrave

partir du moment ougrave celles-ci sont contenues dans les dossiers meacutedicaux Il justifie sa position

au regard de la pertinence preacutesumeacutee de ces donneacutees dans le cadre de la prise en charge du

patient Nous pouvons noter ici le lien entre la deacutefinition de la notion de donneacutees de santeacute que

tente drsquoesquisser le Groupe de lrsquoarticle 29 et le champ couvert par le secret professionnel En

effet lrsquoarticle L 1110-4 du Code de la santeacute publique preacutevoit que le secret laquo couvre

lensemble des informations concernant la personne venues agrave la connaissance du

professionnel de santeacute raquo Il nous semble degraves lors raisonnable drsquoaffirmer si ces donneacutees sont

couvertes par le secret professionnel crsquoest bien du fait de leur caractegravere sensible Degraves lors la

deacutefinition des donneacutees de santeacute ne peut pas ecirctre moins vaste que cela A ce sujet drsquoailleurs le

Groupe Europeacuteen drsquoEthique dans une deacutecision rendue le 30 juillet 1999 avait deacutefini le

peacuterimegravetre des donneacutees de santeacute comme englobant laquo un large eacuteventail drsquoinformations qui

touchent agrave la vie priveacutee de la personne concerneacutee Elles incluent non seulement les donneacutees

meacutedicales de base [] mais aussi des donneacutees individuelles sensibles telles que celles

relatives agrave lrsquoeacutetat psychique de la personne agrave ses anteacuteceacutedents familiaux agrave ses habitudes de

vie y compris sa vie sexuelle agrave sa situation sociale et eacuteconomique ainsi que des donneacutees de

nature administrative raquo

66 Le regraveglement europeacuteen relatif agrave la protection des donneacutees personnelles67

adopteacute en

avril 2016 donne enfin une deacutefinition leacutegale agrave la notion de donneacutee de santeacute Ainsi selon les

dispositions de lrsquoarticle 4 de ce regraveglement les donneacutees concernant la santeacute sont deacutefinies

comme laquo les donneacutees agrave caractegravere personnel relatives agrave la santeacute physique ou mentale dune

personne physique y compris la prestation de services de soins de santeacute qui reacutevegravelent des

informations sur leacutetat de santeacute de cette personne raquo

67 Regraveglement 2016679 du Parlement europeacuteen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif agrave la protection des

personnes physiques agrave leacutegard du traitement des donneacutees agrave caractegravere personnel et agrave la libre circulation de ces

donneacutees et abrogeant la directive 9546CE JOUE du 4 mai 2016

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

42

67 Cette deacutefinition tregraves succincte srsquoinscrit dans la ligneacutee de celles proposeacutees jusqursquoalors

dans le sens ougrave elle se veut le plus large possible Toutefois nous pensons qursquoil aurait eacuteteacute

preacutefeacuterable drsquoinclure de maniegravere explicite les donneacutees administratives comme crsquoeacutetait le cas

dans la deacutefinition avanceacutee par le Groupe de lrsquoarticle 29 ou encore par le Groupe Europeacuteen

drsquoEthique Toutes les donneacutees relatives au patient et servant de maniegravere directe ou non agrave sa

prise en charge devraient pouvoir beacuteneacuteficier de la mecircme protection renforceacutee du fait de leur

sensibiliteacute mais eacutegalement afin drsquoassurer une certaine coheacuterence

68 Le caractegravere particuliegraverement sensible de ces donneacutees a ameneacute le leacutegislateur agrave adopter

des dispositions speacutecifiques agrave celles-ci Ainsi le traitement de ces donneacutees est en principe

interdit laquo il est interdit de collecter ou de traiter des donneacutees agrave caractegravere personnel qui font

apparaicirctre directement ou indirectement les origines raciales ou ethniques les opinions

politiques philosophiques ou religieuses ou lrsquoappartenance syndicale des personnes ou qui

sont relatives agrave la santeacute ou agrave la vie sexuelle de celles-ciraquo68

69 Toutefois agrave chaque principe son exception et les dispositions de la loi Informatique et

Liberteacutes ne deacuterogent pas agrave la regravegle Cette exception est drsquoailleurs poseacutee tout de suite apregraves le

principe69

En effet le II de lrsquoarticle 8 de la loi Informatique et Liberteacutes dresse une liste de

68 Article 8 de la loi Informatique et Liberteacutes

69 Lrsquoarticle 8 II de la loi Informatique et Liberteacutes dispose laquo Dans la mesure ougrave la finaliteacute du traitement lrsquoexige

pour certaines cateacutegories de donneacutees ne sont pas soumis agrave lrsquointerdiction preacutevue au I

1deg Les traitements pour lesquels la personne concerneacutee a donneacute son consentement expregraves sauf dans le cas ougrave la

loi preacutevoit que lrsquointerdiction viseacutee au I ne peut ecirctre leveacutee par le consentement de la personne concerneacutee

2deg Les traitements neacutecessaires agrave la sauvegarde de la vie humaine mais auxquels la personne concerneacutee ne peut

donner son consentement par suite drsquoune incapaciteacute juridique ou drsquoune impossibiliteacute mateacuterielle

3deg Les traitements mis en œuvre par une association ou tout autre organisme agrave but non lucratif et agrave caractegravere

religieux philosophique politique ou syndical

- pour les seules donneacutees mentionneacutees au I correspondant agrave lrsquoobjet de ladite association ou dudit organisme

- sous reacuteserve qursquoils ne concernent que les membres de cette association ou de cet organisme et le cas eacutecheacuteant

les personnes qui entretiennent avec celui-ci des contacts reacuteguliers dans le cadre de son activiteacute

- et qursquoils ne portent que sur des donneacutees non communiqueacutees agrave des tiers agrave moins que les personnes concerneacutees

nrsquoy consentent expresseacutement

4deg Les traitements portant sur des donneacutees agrave caractegravere personnel rendues publiques par la personne concerneacutee

5deg Les traitements neacutecessaires agrave la constatation agrave lrsquoexercice ou agrave la deacutefense drsquoun droit en justice

6deg Les traitements neacutecessaires aux fins de la meacutedecine preacuteventive des diagnostics meacutedicaux de

lrsquoadministration de soins ou de traitements ou de la gestion de services de santeacute et mis en oeuvre par un

membre drsquoune profession de santeacute ou par une autre personne agrave laquelle srsquoimpose en raison de ses fonctions

lrsquoobligation de secret professionnel preacutevue par lrsquoarticle 226-13 du Code peacutenal

7deg Les traitements statistiques reacutealiseacutes par lrsquoInstitut national de la statistique et des eacutetudes eacuteconomiques ou lrsquoun

des services statistiques ministeacuteriels dans le respect de la loi ndeg 51-711 du 7 juin 1951 sur lrsquoobligation la

coordination et le secret en matiegravere de statistiques apregraves avis du Conseil national de lrsquoinformation statistique et

dans les conditions preacutevues agrave lrsquoarticle 25 de la preacutesente loi

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

43

huit exceptions pour lesquelles le traitement drsquoune donneacutee a priori sensible peut toutefois ecirctre

autoriseacute Ainsi mecircme si les donneacutees sensibles sont frappeacutees drsquoune interdiction de traitement

comme nous pourrons le constater dans la suite de notre reacuteflexion ce sont bien les exceptions

qui trouveront agrave srsquoappliquer la majeure partie du temps

2) Des meacutecanismes de protection propres aux donneacutees de santeacute

70 La loi Informatique et Liberteacutes nrsquoest pas le seul texte organisant la protection des

donneacutees de santeacute et drsquoautres protections les concernant existent au sein du Code de la santeacute

publique Toutefois bien que preacutesentes au sein drsquoun mecircme code celles-ci sont eacuteparses et il

nrsquoexiste pas reacuteellement de coordination entre les diffeacuterents textes Nous ne nous attarderons

pas ici sur lrsquoencadrement speacutecifique qui existe en matiegravere drsquoheacutebergement des donneacutees de santeacute

et de confidentialiteacute ces cas speacutecifiques faisant lrsquoobjet drsquoun deacuteveloppement ulteacuterieur70

et

preacutefeacuterons concentrer notre reacuteflexion sur les protections de droit commun relatives aux

donneacutees de santeacute

Deux dispositions doivent donc ecirctre eacutetudieacutees la protection des donneacutees assureacutee par le

secret professionnel et le rocircle joueacute par le meacutedecin responsable de lrsquoinformation meacutedicale

71 laquo Il nrsquoy a pas de soins sans confidences de confidences sans confiance de confiance

sans secret raquo71

Comme le rappelle Bernard HOERNI le secret meacutedical est le pilier de la

relation entre le meacutedecin et son patient car il permet de preacuteserver le colloque singulier

neacutecessaire agrave lrsquoinstauration drsquoune relation de confiance La jurisprudence a tregraves tocirct affirmeacute le

caractegravere absolu du secret meacutedical Dans une deacutecision rendue le 9 deacutecembre 1885 connue

sous le nom de lrsquoarrecirct WATELET la Cour de cassation avait deacutecideacute que lrsquoobligation de

secret professionnel srsquoimposait aux meacutedecins comme un devoir de leur eacutetat qualifiant cette

obligation de geacuteneacuterale et absolue personne ne pouvant les en affranchir72

Aujourdrsquohui

lrsquoobligation de secret meacutedical a eacuteteacute introduite au Code de la santeacute publique et elle srsquoimpose

8deg Les traitements neacutecessaires agrave la recherche dans le domaine de la santeacute selon les modaliteacutes preacutevues au

chapitre IX raquo 70

V Infra ndeg 155 et s 71

HOERNI Bernard laquo Ethique et deacuteontologie meacutedicale raquo 2egraveme

eacutedition Masson Juin 2000 72

Cass crim 19 deacutecembre 1885 Watelet Bull crindeg 363 et S V eacutegalement en ce sens Cass Crim 8 mai

1947 Decraene Bull Crim ndeg 124

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

44

aussi bien aux meacutedecins qursquoagrave toutes les personnes intervenant dans la prise en charge du

patient

72 Ainsi lrsquoarticle 4 du Code de deacuteontologie meacutedicale transposeacute agrave lrsquoarticle R 4127-4 du

Code de la santeacute publique preacutevoit laquo le secret professionnel institueacute dans linteacuterecirct des

patients simpose agrave tout meacutedecin dans les conditions eacutetablies par la loi Le secret couvre tout

ce qui est venu agrave la connaissance du meacutedecin dans lexercice de sa profession cest-agrave-dire

non seulement ce qui lui a eacuteteacute confieacute mais aussi ce quil a vu entendu ou comprisraquo La loi du

4 mars 2002 relative aux droits des malades et agrave la qualiteacute du systegraveme de santeacute73

a renforceacute le

secret meacutedical et lrsquoa eacutetendu agrave toutes les personnes participant de maniegravere directe ou indirecte agrave

la prise en charge du patient Ainsi lrsquoarticle L 1110-4 du Code de la santeacute publique preacutevoit

laquo toute personne prise en charge par un professionnel de santeacute un eacutetablissement ou service

un professionnel ou organisme concourant agrave la preacutevention ou aux soins dont les conditions

dexercice ou les activiteacutes sont reacutegies par le preacutesent code le service de santeacute des armeacutees un

professionnel du secteur meacutedico-social ou social ou un eacutetablissement ou service social et

meacutedico-social mentionneacute au I de larticle L 312-1 du Code de laction sociale et des familles

a droit au respect de sa vie priveacutee et du secret des informations le concernant Excepteacute dans

les cas de deacuterogation expresseacutement preacutevus par la loi ce secret couvre lensemble des

informations concernant la personne venues agrave la connaissance du professionnel de tout

membre du personnel de ces eacutetablissements services ou organismes et de toute autre

personne en relation de par ses activiteacutes avec ces eacutetablissements ou organismes Il simpose

agrave tous les professionnels intervenant dans le systegraveme de santeacute [hellip] raquo Ainsi du secret

meacutedical nous sommes passeacutes au secret professionnel dont la violation peut entrainer des

sanctions civiles disciplinaires et peacutenales A ce titre le Code peacutenal sanctionne la violation du

secret professionnel drsquoun an emprisonnement et de 15 000 Euros drsquoamende74

73 La protection apporteacutee par le secret meacutedical vient renforcer celle offerte par la loi

Informatique et Liberteacutes Il faut toutefois srsquoattarder sur la diffeacuterence qui existe entre la notion

drsquoinformation concernant la personne couverte par le secret professionnel selon les

dispositions de lrsquoarticle L 1110-4 du Code de la santeacute publique et la notion de donneacutees agrave

73 Loi ndeg 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et agrave la qualiteacute du systegraveme de santeacute JORF du 5

mars 2002 p 4118 74

Article 226-13 du Code peacutenal

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

45

caractegravere personnel relatives agrave la santeacute (ou donneacutees de santeacute) dont la protection est assureacutee par

la loi Informatique et Liberteacutes75

Il faut faire attention agrave ne pas aller trop vite et consideacuterer

comme reacutefeacuterant agrave la mecircme chose deux notions qui en reacutealiteacute ne se recoupent pas

totalement76

Une information peut ecirctre deacutefinie comme eacutetant toute laquo indication

renseignement preacutecision que lrsquoon donne ou que lrsquoon obtient sur quelqursquoun ou sur quelque

chose raquo77

tandis que la donneacutee est deacutefinie comme eacutetant une laquo repreacutesentation drsquoune

information sous forme conventionnelle destineacutee agrave faciliter son traitement raquo78

La donneacutee est

donc une information valoriseacutee qui possegravede une valeur ajouteacutee drsquoordre technologique79

Ainsi

alors que la simple information meacutedicale ne sera proteacutegeacutee que par le secret professionnel

(crsquoest le cas par exemple de lrsquoinformation orale donneacutee par le patient agrave son meacutedecin qui ne

serait pas retranscrite au dossier meacutedical) la donneacutee de santeacute se verra offrir une double

protection celle preacutevue par la loi Informatique et Liberteacutes drsquoune part et celle assureacutee par

lrsquoobligation de secret professionnel drsquoautre part Cette double protection veacuteritable garantie

pour le patient peut toutefois srsquoaveacuterer pesante pour le professionnel de santeacute qui devra

srsquoassurer que toutes les obligations vis-agrave-vis drsquoune seule et mecircme donneacutee soient remplies

sous peine de voir sa responsabiliteacute engageacutee

74 Lrsquoautre protection majeure garantie aux donneacutees de santeacute est celle assureacutee par le

meacutedecin responsable de lrsquoinformation meacutedicale Ce dispositif preacutevu au Code de la santeacute

publique srsquoinscrit dans un cadre particulier qui est celui de lrsquoutilisation des informations

meacutedicales dans un but drsquoanalyse de lrsquoactiviteacute le Programme de Meacutedicalisation des Systegravemes

drsquoInformation ou PMSI instaureacute par lrsquoordonnance du 24 avril 199680

75 Un laquo praticien responsable de lrsquoinformation meacutedicale raquo doit ecirctre deacutesigneacute dans tout

eacutetablissement de santeacute par le directeur geacuteneacuteral apregraves avis de la commission meacutedicale

drsquoeacutetablissement81

Les conditions exactes de sa deacutesignation et les modes drsquoorganisation de la

fonction auraient ducirc ecirctre fixeacutees par un deacutecret qui nrsquoa pas eacuteteacute publieacute Bien que ces modaliteacutes ne

75 LAUDE Anne TABUTEAU Didier laquo Droit de la santeacute raquo PUF 2007 p 321

76 DE LAMBERTERIE Isabelle LUCAS Henri-Jacques laquo Informatique liberteacutes et recherche meacutedicale raquo

CNRS eacuted 2001 p 68 77

Deacutefinition du dictionnaire Larousse 78

DE LAMBERTERIE Isabelle laquo Qursquoest-ce qursquoune donneacutee de santeacute raquo RGDM ndeg speacutecial 2004 p 12 79

Id p 13 80

Ordonnance ndeg 96-346 du 24 avril 1996 portant reacuteforme de lhospitalisation publique et priveacutee JORF ndeg98 du

25 avril 1996 p 6324 81

Article L 6113-7 du Code de la santeacute publique

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

46

nous semblent pas indispensables les dispositions du Code de la santeacute publique eacutetant

suffisamment claires pour que les eacutetablissements de santeacute puissent prendre leurs dispositions

quant agrave la nomination du praticien responsable de lrsquoinformation meacutedicale nous ne pouvons

que deacuteplorer encore une fois le manque de rigueur du leacutegislateur qui ne nous offre que des

dispositions partielles sur un sujet pourtant important qursquoest lrsquoencadrement de lrsquoinformation

meacutedicale

76 La mission principale du meacutedecin responsable de lrsquoinformation meacutedicale est de

collecter les informations puis de traiter les donneacutees neacutecessaires agrave lrsquoanalyse de lrsquoactiviteacute

meacutedicale et agrave sa facturation que doivent lui transmettre les praticiens hospitaliers Divers

textes preacutecisent les autres missions de ce praticien responsable de lrsquoinformation meacutedicale

conseiller les praticiens pour la production des donneacutees et veiller agrave la qualiteacute de ces donneacutees

en les confrontant si neacutecessaire avec les dossiers meacutedicaux et les fichiers administratifs82

assurer la sauvegarde et la copie des donneacutees puis leur conservation durant cinq ans83

diffuser

ces donneacutees aupregraves de la direction de lrsquoeacutetablissement du preacutesident de la Commission

meacutedicale drsquoeacutetablissement (CME) ou de la commission elle-mecircme selon des modaliteacutes

arrecircteacutees apregraves avis de la CME84

Le meacutedecin responsable de lrsquoinformation meacutedicale transmet agrave

la direction de lrsquoeacutetablissement ainsi qursquoau preacutesident de la CME les informations neacutecessaires agrave

lanalyse de lactiviteacute de leacutetablissement soit dans son ensemble soit pour chacune des

structures meacutedicales de maniegravere systeacutematique ou agrave leur demande mais toujours dans des

conditions garantissant la confidentialiteacute des donneacutees et lrsquoanonymat des patients Il peut aussi

transmettre ces informations aux praticiens ayant dispenseacutes des soins Le meacutedecin responsable

de lrsquoinformation meacutedicale doit ecirctre informeacute de lrsquoobjectif des traitements de lrsquoinformation qui

lui sont demandeacutes Il doit ensuite participer agrave lrsquointerpreacutetation de leurs reacutesultats

77 Dans le cadre des controcircles relatifs agrave la facturation les meacutedecins inspecteurs de santeacute

publique et les meacutedecins conseils des organismes drsquoassurance maladie ont accegraves aux fichiers

concernant les informations drsquoactiviteacute et de facturation par lrsquointermeacutediaire du praticien

82 Article R 6113-4 du Code de la santeacute publique

83 Arrecircteacute du 22 feacutevrier 2008 relatif au recueil et au traitement des donneacutees dactiviteacute meacutedicale et des donneacutees de

facturation correspondantes produites par les eacutetablissements de santeacute publics ou priveacutes ayant une activiteacute en

meacutedecine chirurgie obsteacutetrique et odontologie et agrave la transmission dinformations issues de ce traitement dans

les conditions deacutefinies agrave larticle L 6113-8 du Code de la santeacute publique JORF ndeg0051 du 29 feacutevrier 2008 p

3577 84

Article R 6113-8 du Code de la santeacute publique

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

47

responsable de lrsquoinformation meacutedicale Ce dernier doit dans le cadre drsquoun controcircle informer

les praticiens responsables des structures meacutedicales concerneacutees preacutealablement agrave toute

confrontation drsquoun enregistrement de fichier avec un dossier meacutedical Il appartient eacutegalement

au praticien responsable de lrsquoinformation meacutedicale de conseiller le directeur geacuteneacuteral en ce qui

concerne la dureacutee de conservation des dossiers85

Ainsi il doit ecirctre consulteacute par le directeur

geacuteneacuteral avant que ce dernier deacutecide drsquoeacuteliminer un dossier meacutedical dont le deacutelai de

conservation est deacutepasseacute Il lui appartient eacutegalement de donner son avis sur lrsquoopportuniteacute de

fixer des dureacutees de conservation exceacutedant vingt ans pour certaines cateacutegories de dossiers En

tant que garant de la protection des donneacutees nominatives il reccediloit les demandes des usagers

concernant leur droit drsquoaccegraves et de rectification preacutevu par la loi Informatique et Liberteacutes du 6

janvier 1978 et conseille le directeur geacuteneacuteral en ce qui concerne les droits drsquoaccegraves aux

donneacutees meacutedicales nominatives Il est eacutegalement consulteacute concernant les modaliteacutes

drsquoattribution et de controcircle des autorisations drsquoaccegraves

78 Force est de constater que ce meacutedecin responsable de lrsquoinformation meacutedicale beacuteneacuteficie

de nombreuses preacuterogatives afin de lui permettre de remplir au mieux son rocircle de garant de la

protection des donneacutees personnelles Toutefois cette fonction est souvent restreinte au sein

des eacutetablissements de santeacute aux simples missions relatives au PMSI Or lrsquoanalyse des textes

nous montre bien une volonteacute drsquoinstaurer un gardien de lrsquoinformation meacutedicale agrave la fois

garant de la bonne application des dispositions de la loi Informatique et Liberteacutes mais

eacutegalement du respect du secret professionnel

85 Article R 1112-7 du Code de la santeacute publique

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

48

sect2 Une protection agrave lrsquoefficaciteacute relative

79 La loi Informatique et Liberteacutes a doteacute la CNIL de nombreux pouvoirs afin que celle-ci

puisse mener agrave bien les missions de controcircle qui lui sont confieacutees Toutefois il convient de

srsquointerroger sur lrsquoefficaciteacute de ces pouvoirs (A) tout comme sur les limites de la protection

accordeacutee aux donneacutees de santeacute (B)

A Le controcircle et la sanction du non-respect de la loi Informatique et

Liberteacutes des mesures disproportionneacutees

80 La CNIL srsquoest vue doteacutee par le leacutegislateur drsquoun statut particulier accompagneacute des

pouvoirs qursquoil estimait neacutecessaire agrave la reacutealisation de ses missions (1) Il est eacutegalement preacutevu

que le non-respect des dispositions de la loi Informatique et Liberteacutes entraine la mise en

œuvre de sanctions qui nous semblent toutefois disproportionneacutees et donc difficiles

drsquoapplication (2)

1) La CNIL une autoriteacute administrative indeacutependante doteacutee drsquoun pouvoir de controcircle

neacutecessaire

81 Le chapitre III de la loi Informatique et Liberteacutes encadre le fonctionnement et

lrsquoorganisation de la Commission Nationale de lrsquoInformatique et des Liberteacutes Celle-ci fut la

premiegravere a beacuteneacuteficieacute du statut particulier drsquoAutoriteacute Administrative Indeacutependante (AAI) Lors

des deacutebats relatifs agrave la loi de 1978 srsquoeacutetait en effet poseacutee la question du statut agrave donner agrave ce qui

aller devenir la CNIL Initialement il avait eacuteteacute envisageacute de faire de la CNIL soit un

eacutetablissement public sur lequel nrsquoaurait peseacute qursquoune tutelle alleacutegeacutee soit un simple service du

Ministegravere de la justice Mais le contexte particulier86

dans lequel est neacutee la loi Informatique et

Liberteacutes et donc la CNIL a justifieacute la creacuteation drsquoune nouvelle structure les AAI Toutefois

ce nrsquoest que plus tard que cette deacutenomination speacutecifique est apparue Crsquoest le Conseil

constitutionnel dans une deacutecision en date du 26 juillet 198487

et relative agrave la haute autoriteacute

86 V Supra ndeg 44

87 Conseil constitutionnel deacutecision ndeg 84-173 DC du 26 juillet 1984 JORF du 28 juillet 1984 p 2496

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

49

audiovisuelle qui va pour la premiegravere fois mettre un nom sur le concept laquo la deacutesignation

drsquoune autoriteacute administrative indeacutependante du gouvernement pour exercer une attribution

aussi importante [hellip] constitue une garantie fondamentale pour lrsquoexercice drsquoune liberteacute

publique raquo La doctrine srsquoeacutetait cependant essayeacutee agrave la theacuteorisation du concept auparavant88

Les AAI ont eacuteteacute creacuteeacutees pour reacutepondre principalement agrave trois objectifs89

le premier est drsquooffrir

aux citoyens lrsquoassurance drsquoune certaine impartialiteacute en ce qui concerne les interventions de

lrsquoEtat En effet les AAI ont cette particulariteacute de sembler laquo pareacutees degraves leur naissance drsquoune

onction qui les ferait beacuteneacuteficier drsquoune irreacutefragable preacutesomption drsquoimpartialiteacute raquo90

Dans les

domaines touchant de pregraves aux droits et liberteacutes fondamentaux comme crsquoest le cas pour la

protection des donneacutees agrave caractegravere personnel lrsquoEtat peut ecirctre reacuteputeacute partial il lui appartient

alors de confier ses responsabiliteacutes en la matiegravere agrave des autoriteacutes exteacuterieures et indeacutependantes

dont les avis et deacutecisions ne seront pas remis en cause La deuxiegraveme justification tient agrave la

volonteacute drsquoassocier des professionnels agrave la mise en place des regravegles applicables dans des

domaines techniques Enfin la troisiegraveme justification avanceacutee est la meilleure efficaciteacute drsquoune

AAI notamment en matiegravere de sanction le juge pouvant sembler parfois plus lent agrave ce niveau

mais eacutegalement en matiegravere de prise de deacutecision le circuit eacutetant plus simple qursquoau sein drsquoune

administration classique

82 La volonteacute initiale du leacutegislateur en creacuteant la CNIL nrsquoeacutetait pas drsquoinstaurer une

nouvelle cateacutegorie juridique mais simplement de srsquoassurer que la commission qursquoil allait

creacuteer ne serait pas une eacuteniegraveme structure deacutenueacutee de tout pouvoir Selon les dispositions de la

loi Informatique et Liberteacutes la CNIL dispose de missions speacutecifiques qui pourront ecirctre

meneacutees agrave bien gracircce aux pouvoirs que lui accorde la loi lrsquoensemble eacutetant deacutefini au sein de

lrsquoarticle 11 de la loi

83 La CNIL est avant toute chose investie drsquoune mission drsquoinformation et de conseil

puisque qursquoelle doit informer les citoyens et les responsables de traitements de leurs droits et

obligations Au titre de sa mission de conseil elle doit eacutegalement eacutepauler les pouvoirs publics

et les juridictions en reacutepondant agrave leurs demandes drsquoavis Cette mission lrsquoamegravene par ailleurs agrave

88 V notamment en ce sens SABOURIN Pierre laquo Les autoriteacutes administratives indeacutependantes une cateacutegorie

nouvelle raquo AJDA 1983 pp 275-295 89

laquo Consideacuterations geacuteneacuterales les Autoriteacutes Administratives Indeacutependantesraquo Rapport public du Conseil drsquoEtat

2001 p 275 90

Ibid

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

50

donner un avis sur tout projet de loi ou de deacutecret portant sur la protection des personnes agrave

lrsquoeacutegard des traitements automatiseacutes Elle peut aussi collaborer avec drsquoautres AAI en matiegravere

de protection de donneacutees mais eacutegalement ecirctre associeacutee agrave la preacuteparation et agrave la deacutefinition de la

position franccedilaise en la matiegravere La CNIL constitue ainsi une reacuteelle cellule drsquoappui et de

conseil en matiegravere de protection des donneacutees

84 Sa deuxiegraveme mission consiste agrave assurer la protection des donneacutees agrave caractegravere

personnel Elle se doit donc de veiller agrave ce que les traitements de donneacutees soient mis en œuvre

de maniegravere conforme agrave la loi Pour mener agrave bien cette mission le leacutegislateur nrsquoa pas heacutesiteacute agrave

doter la commission drsquoun double pouvoir de controcircle controcircle a priori et controcircle a

posteriori Au titre de son pouvoir a priori elle doit instruire les deacuteclarations de traitement

ainsi que les demandes drsquoautorisation ou drsquoavis qui lui sont soumises Au titre de son pouvoir

de controcircle a posteriori elle est destinataire des reacuteclamations peacutetitions et plaintes relatives agrave

la mise en œuvre des traitements auxquelles elle deacutecide des suites agrave donner Elle dispose

eacutegalement drsquoun pouvoir drsquoenquecircte au sein des entreprises Elle peut agrave ce titre diligenter des

perquisitions Cela lui permet de recueillir tout renseignement utile ou drsquoobtenir la

communication de tout document qursquoelle estimera neacutecessaire agrave la reacutealisation de sa mission91

Elle possegravede un important pouvoir reacuteglementaire en vertu duquel elle est habiliteacutee agrave eacutelaborer

des normes simplifieacutees mais eacutegalement des regraveglements types et ce afin drsquoassurer la seacutecuriteacute

des systegravemes Toutefois la CNIL nrsquoa que tregraves peu utiliseacute ce pouvoir puisqursquoun seul regraveglement

de ce type a eacuteteacute eacutetabli jusqursquoagrave aujourdrsquohui92

Enfin elle beacuteneacuteficie drsquoun pouvoir de sanction agrave

lrsquoencontre des responsables de traitements93

85 La CNIL dispose bien entendu de moyens propres afin de mener agrave bien lrsquoensemble des

missions qui lui sont confieacutees son budget relevant du budget de lrsquoEtat Toutefois en 2008

face agrave la faiblesse de ses moyens la commission a reacutefleacutechi agrave la possibiliteacute drsquoinstaurer un autre

mode de financement La CNIL avait donc preacutesenteacute au Seacutenat en 2007 un projet de

diversification des sources de financement de la commission94

dans lequel il envisageait une

91 DESGENSPASANAU Guillaume laquo La protection des donneacutees agrave caractegravere personnel raquo op cit p 63

92 Deacutelibeacuteration CNIL ndeg81-094 du 21 juillet 1981 portant adoption drsquoune recommandation relative aux mesures

geacuteneacuterales de seacutecuriteacute des systegravemes informatiques 93

V Infra ndeg 86 et s 94

DEacuteTRAIGNE Yves ESCOFFIER Anne-Marie laquoLa vie priveacutee agrave lheure des meacutemoires numeacuteriques Pour une

confiance renforceacutee entre citoyens et socieacuteteacute de linformation raquo Rapport dinformation fait au nom de la

commission des lois ndeg 441 27 mai 2009

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

51

contribution de la part de chaque acteur geacuteneacuterant des traitements de donneacutees agrave caractegravere

personnel tout en excluant des contributeurs les particuliers et le petits organismes Toutefois

celui-ci nrsquoa agrave lrsquoheure actuelle pas abouti Nous estimons que cette mesure bien que

permettant de renforcer les moyens de la CNIL pourrait ecirctre agrave double tranchant drsquoun cocircteacute

certains organismes pourraient ecirctre tenteacutes de ne pas deacuteclarer leurs fichiers afin de ne pas avoir

agrave srsquoacquitter de la redevance mais drsquoun autre cocircteacute nous pourrions assister agrave une plus grande

implication des organismes contributeurs dans la protection des donneacutees Dans tous les cas il

est vrai que le manque de moyens de la CNIL face agrave lrsquoaugmentation constante du traitement

des donneacutees agrave caractegravere personnel et du deacuteveloppement de nouvelles situations agrave risque

(deacuteveloppement des proceacutedeacutes de biomeacutetrie notamment) pousse agrave reacutefleacutechir aux nouveaux

modes de financement de cette commission

Le pouvoir de controcircles accordeacute agrave la CNIL par la loi Informatique et Liberteacutes est

compleacuteteacute par un pouvoir de sanction qui preacutesente cependant quelques limites

2) La limite des sanctions preacutevues par les textes

86 Depuis la reacuteforme de la loi Informatique et Liberteacutes intervenue en 2004 la CNIL srsquoest

vue accorder un pouvoir de sanction administrative dispositif qui est venu compleacuteter les

sanctions peacutenales deacutejagrave en place

Lrsquoensemble des sanctions encourues en cas de non-respect de la loi Informatique et

Liberteacutes est deacutecrit au sein de chapitre VII et VIII de la loi traitant respectivement des

sanctions prononceacutees par la CNIL et des sanctions peacutenales Il existe une gradation dans les

sanctions pouvant ecirctre mises en œuvre par la CNIL Un premier niveau est preacutevu avec la

possibiliteacute de prononcer un avertissement ou une mise en demeure de faire cesser les

manquements agrave lrsquoencontre du responsable drsquoun traitement qui nrsquoaurait pas respecteacute les

obligations deacutecoulant de la loi Informatique et Liberteacutes Si le responsable ne se conforme pas

agrave la mise en demeure et apregraves la mise en œuvre drsquoune proceacutedure contradictoire la CNIL

pourra alors prononcer agrave lrsquoencontre du responsable du traitement deacutefaillant soit une sanction

peacutecuniaire (sauf srsquoil srsquoagit drsquoun traitement mis en œuvre par lrsquoEtat) soit une injonction de

cesser le traitement ou un retrait de lrsquoautorisation qui avait eacuteteacute deacutelivreacutee La loi preacutevoit

eacutegalement une proceacutedure drsquourgence qui permet agrave la CNIL apregraves une proceacutedure contradictoire

et dans lrsquohypothegravese ougrave le traitement porterait atteinte agrave lrsquoidentiteacute humaine aux droits de

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

52

lrsquohomme agrave la vie priveacutee ou encore aux liberteacutes individuelles ou publiques de deacutecider de

lrsquointerruption de la mise en œuvre du traitement pour une dureacutee maximum de trois mois (sauf

pour certains traitements speacutecifiques mis en œuvre par lrsquoEtat) deacutecider le verrouillage de

certaines donneacutees agrave caractegravere personnel pour une dureacutee maximale de trois mois (sauf pour les

traitements qui inteacuteressent la sucircreteacute de lrsquoEtat la deacutefense ou la seacutecuriteacute publique ou qui

concernent la preacutevention la recherche la constatation ou la poursuite drsquoinfractions peacutenales

dans ce cas la CNIL en informera le Premier Ministre qui prendra le cas eacutecheacuteant les mesures

neacutecessaires pour faire cesser la violation constateacutee) ou enfin en cas drsquoatteinte grave et

immeacutediate aux droits et liberteacutes le Preacutesident de la CNIL peut demander par le biais drsquoun

reacutefeacutereacute aupregraves de la juridiction compeacutetente drsquoordonner sous astreinte toutes les mesures de

seacutecuriteacute neacutecessaires agrave la sauvegarde de ces droits95

Ces deacutecisions doivent ecirctre motiveacutees et

notifieacutees au responsable du traitement Elles sont susceptibles de recours devant le Conseil

drsquoEtat Enfin la CNIL peut deacutecider de rendre publics ou non les avertissements qursquoelle

prononce ou en ce qui concerne les autres sanctions en cas de mauvaise foi du responsable

du traitement deacutecider de les faire publier au sein de journaux ou tout autre support de son

choix

87 Les sanctions peacutenales reacuteprimant les infractions aux dispositions de la loi Informatique

et Liberteacutes sont reacuteprimeacutees aux articles 226-16 agrave 226-24 du Code peacutenal96

Drsquoune maniegravere

geacuteneacuterale nous pouvons constater que toutes les infractions agrave la loi Informatique et Liberteacutes

sont punissables drsquoune peine de cinq ans drsquoemprisonnement et de 300 000 Euros drsquoamende et

dans tous les cas lrsquoeffacement des donneacutees agrave caractegravere personnel traiteacutees de maniegravere illeacutegales

peut ecirctre ordonneacute97

A noter que le fait drsquoentraver lrsquoaction de la CNIL est puni drsquoun an

drsquoemprisonnement et 15 000 euros drsquoamende98

88 Les sanctions administratives peacutecuniaires quant agrave elles doivent ecirctre proportionnelles

aux manquements constateacutes et prises en fonction de la graviteacute du manquement constateacute Elles

ne peuvent exceacuteder la somme de trois millions drsquoeuros99

95 Article 46 de la loi Informatique et Liberteacutes

96 Article 50 de la loi Informatique et Liberteacutes

97 Article 226-22-2 du Code Peacutenal

98 Article 51 de la loi Informatique et Liberteacutes

99 Il est inteacuteressant de preacuteciser que ce plafond a eacuteteacute introduit par lrsquoarticle 65 de la loi ndeg2016-1321 du 7 octobre

2016 pour une Reacutepublique numeacuterique Avant cela les sanctions administratives peacutecuniaires eacutetaient gradueacutees et

ne pouvaient deacutepasser la somme de 150 000 euros lors du premier manquement et 300 000 euros en cas de

manquement reacuteiteacutereacute

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

53

89 Ces sanctions preacutevues par la loi soulegravevent de nombreuses interrogations La premiegravere

est celle de savoir quelle peut ecirctre lrsquoarticulation entre sanctions peacutenales et sanctions

administratives prononceacutees par la CNIL En pratique rien dans le texte nrsquoempecircche une saisine

des deux juridictions de maniegravere simultaneacutee Le parallegravele ici peut ecirctre fait avec ce qui

srsquoapplique en matiegravere de responsabiliteacute meacutedicale la responsabiliteacute peacutenale du praticien peut

ecirctre mise en cause sans que cela nrsquoempecircche le Conseil de lrsquoOrdre de mettre en œuvre une

proceacutedure disciplinaire Un seul beacutemol est apporteacute par le Conseil constitutionnel100

agrave ce sujet

le cumul des sanctions prononceacutees ne peut pas deacutepasser le montant le plus eacuteleveacute drsquoune des

sanctions encourues De mecircme la loi Informatique et Liberteacutes elle-mecircme preacutevoit que

laquo lorsque la Commission Nationale de lrsquoInformatique et des Liberteacutes a prononceacute une

sanction peacutecuniaire devenue deacutefinitive avant que le juge peacutenal ait statueacute deacutefinitivement sur les

mecircmes faits ou sur des faits connexes celui-ci peut ordonner que la sanction peacutecuniaire

srsquoimpute sur lrsquoamende qursquoil prononce raquo

90 La deuxiegraveme reacuteflexion qursquoil est utile drsquoaborder agrave ce stade concerne lrsquoefficaciteacute reacuteelle

des sanctions preacutevues Pour cela nous devons deacutevelopper notre reacuteflexion en deux temps

drsquoabord se pencher sur les sanctions peacutenales et ensuite se focaliser sur le pouvoir de sanction

propre agrave la CNIL

91 Les sanctions peacutenales sont-elles efficaces Cela est fortement remis en question par la

doctrine101

En effet avant la reacuteforme intervenue en 2004 le contraste entre la seacuteveacuteriteacute des

textes et les condamnations prononceacutees eacutetaient frappant Ce constat avait drsquoailleurs eacuteteacute

effectueacute par Guy BRAIBANT dans son rapport remis au Premier Ministre en 1998 puisqursquoil y

preacutecisait que laquo le reacutegime reacutepressif franccedilais en matiegravere de fichiers informatiques ndash dont la

coheacuterence avec drsquoautres dispositions du Code Peacutenal comparables est sujette agrave caution ndash se

caracteacuterise par une grande seacuteveacuteriteacute dont le contraste avec une jurisprudence pusillanime est

frappant raquo102

La directive europeacuteenne de 1995 laissant carte blanche aux diffeacuterents Etats en

100 Deacutecision du Conseil constitutionnel ndeg 89-260DC du 25 juillet 1989 Rec p 59 V eacutegalement en ce

sens Deacutecision du Conseil constitutionnel ndeg 97-395DC du 30 deacutecembre 1997 Rec p 33 101

V en ce sens LEPAGE Agathe laquo Loi du 6 aoucirct 2004 Reacuteflexions de droit peacutenal sur la loi du 6 aoucirct 2004

relative agrave la protection des personnes agrave lrsquoeacutegard des traitements de donneacutees agrave caractegravere personnel raquo

Communication commerce eacutelectronique 2005 ndeg 2 eacutetude ndeg 9 102

BRAIBANT Guy laquo Donneacutees personnelles et socieacuteteacute de lrsquoinformation rapport au Premier ministre sur la

transposition en droit franccedilais de la directive numeacutero 95-46raquo La Documentation franccedilaise 1998 p 119

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

54

ce qui concerne les sanctions agrave mettre en œuvre103

le leacutegislateur aurait pu profiter de la

reacuteforme de 2004 pour refondre le reacutegime de sanction peacutenale Il aurait pu envisager par

exemple comme une partie de la doctrine pouvait lrsquoeacutevoquer une deacutepeacutenalisation104

les

sanctions peacutecuniaires prononceacutees par la CNIL se substituant aux sanctions peacutenales105

Le

leacutegislateur aurait eacutegalement pu suivre les preacuteconisations de Guy BRAIBANT Celui-ci

constatant lrsquoabsence drsquoune reacuteelle politique peacutenale dans un domaine laquo ougrave les moyens

drsquoinvestigation humain et mateacuteriels de la police judiciaire sont insuffisants et sous

dimensionneacutes eu eacutegard agrave lrsquoampleur de lrsquoactiviteacute eacuteconomique lieacutee agrave lrsquoinformatique raquo

proposait drsquoassouplir la reacutepression en distinguant les cas ougrave la violation des dispositions de la

loi Informatique et Liberteacutes eacutetait destineacutee agrave porter atteinte agrave la liberteacute des cas ougrave il nrsquoy avait

qursquoune violation des regravegles de forme Dans la premiegravere hypothegravese la sanction aurait eacuteteacute une

peine correctionnelle et dans la seconde une peine contraventionnelle Cette solution aurait

permis de rendre la loi et la reacutepression plus efficaces

92 Toutefois le leacutegislateur a choisi une autre direction lors de la reacuteforme de 2004 en

accordant il est vrai plus de pouvoirs agrave la CNIL mais en nrsquoapportant que peu de nouveauteacutes

en ce qui concerne les sanctions peacutenales La preuve en est le leacutegislateur se contente drsquoutiliser

la technique du renvoi agrave la loi de 1978 Or comme le souligne tregraves bien Caroline ZORN-

MACREZ laquo ce proceacutedeacute facteur drsquoinflation leacutegislative du fait de sa faciliteacute est eacutegalement

facteur drsquoinstabiliteacute juridique car il contribue agrave perdre dans ses meacuteandres le leacutegislateur

comme le citoyen raquo106

Loin de la simplification procircneacutee notamment par Guy BRAIBANT

certains auteurs y ont mecircme vu un renforcement de la peacutenalisation107

responsable drsquoune

inefficaciteacute des sanctions preacutevues du fait de leur disproportion Car force est de constater que

les peines actuellement preacutevues trop seacutevegraveres si ce nrsquoest mecircme disproportionneacutees perdent de

leur pouvoir dissuasif et donc de leur efficaciteacute A titre de comparaison il est inteacuteressant de

signaler qursquoalors que laquo le fait y compris par neacutegligence de proceacuteder ou de faire proceacuteder agrave

103 Directive ndeg9546CE du 24 octobre 1995 article 24 laquo Les Etats membres prennent les mesures approprieacutees

pour assurer la pleine application des dispositions de la preacutesente directive et deacuteterminent notamment les

sanctions agrave appliquer en cas de violation des dispositions prises en application de la preacutesente directive raquo 104

V notamment en ce sens FRANCILLON Jacques laquo Infractions relevant du droit de lrsquoinformation et de la

communication raquo revue de science criminelle et de droit peacutenal compareacute 1995 ndeg 1 105

BRAIBANT Guy laquo Donneacutees personnelles et socieacuteteacute de lrsquoinformation rapport au Premier ministre sur la

transposition en droit franccedilais de la directive numeacutero 95-46raquo op cit p 119 106

ZORN-MACREZ Caroline laquo Donneacutees de santeacute et secret partageacute raquo PUN 2010 p 214 107

BRAIBANT Guy laquo Donneacutees personnelles et socieacuteteacute de lrsquoinformation rapport au Premier ministre sur la

transposition en droit franccedilais de la directive numeacutero 95-46raquo op cit p 119

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

55

des traitements de donneacutees agrave caractegravere personnel sans quaient eacuteteacute respecteacutees les formaliteacutes

preacutealables agrave leur mise en œuvre preacutevues par la loi est puni de cinq ans demprisonnement et

de 300 000 euros damende raquo lrsquohomicide involontaire est quant agrave lui puni de trois ans

demprisonnement et de 45 000 euros damende108

Il est alors facilement compreacutehensible que

le juge peacutenal face agrave une infraction agrave la loi Informatique et Liberteacutes heacutesite agrave prononcer une

peine trop lourde alors que lrsquoatteinte causeacutee ne constitue ni une atteinte physique ni une

atteinte aux biens109

et que le veacuteritable preacutejudice subi par la victime sera difficile agrave chiffrer

93 Nous sommes ici face agrave ce que Caroline ZORN-MACREZ considegravere comme laquo un

droit non-reacutealiste raquo110

difficilement susceptible drsquoecirctre sanctionneacute Tout repose alors sur

lrsquoefficaciteacute de la CNIL et des sanctions qursquoelle prononce Le fait de disposer de pouvoirs de

sanction nrsquoest pas rare pour les autoriteacutes administratives de ce type Le Conseil constitutionnel

srsquoeacutetait drsquoailleurs deacutejagrave prononceacute sur la possibiliteacute qursquoune AAI puisse exercer un pouvoir de

sanction dans la mesure ougrave la sanction susceptible drsquoecirctre prononceacutee reste exclusive de toute

privation de liberteacute et que lrsquoexercice de ce pouvoir demeure assorti par la loi de mesures

destineacutees agrave sauvegarder les droits et liberteacutes constitutionnellement garantis111

Mais la CNIL a

ducirc attendre la reacuteforme de 2004 et le deacutecret drsquoapplication du 20 octobre 2005112

avant de

pouvoir disposer de telles preacuterogatives Et il a fallu attendre encore deux ans apregraves lrsquoadoption

de cette reacuteforme avant que la CNIL ne se deacutecide agrave faire usage de son nouveau pouvoir113

et

prononcer sa premiegravere sanction peacutecuniaire114

Depuis entre 2006 et 2015 la CNIL aura

prononceacute en tout 122 sanctions dont 58 sanctions peacutecuniaires115

Ce nombre qui peut nous

paraitre assez bas srsquoexplique par la proceacutedure drsquoeacutelaboration des sanctions elle-mecircme En effet

comme nous avons pu le constater preacuteceacutedemment ce nrsquoest que srsquoil ne se conforme pas agrave la

mise en demeure prononceacutee agrave son encontre et qursquoil maintient son deacutelit que le responsable

drsquoun traitement se verra sanctionneacute A titre drsquoexemple en 2011 65 mises en demeures ont eacuteteacute

108 Article 221-6 du Code Peacutenal

109 MATTATIA Franccedilois laquo CNIL et tribunaux concurrence ou compleacutementariteacute dans la reacutepression des

infractions agrave la loi Informatique et Liberteacutes raquo Revue de science criminelle 2009 p 317 110

ZORN-MACREZ Caroline laquo Donneacutees de santeacute et secret partageacute raquo op cit p 216 111

Deacutecision du Conseil constitutionnel ndeg 89-260 DC du 28 juillet 1989 112

Deacutecret ndeg 2005-1309 du 20 octobre 2005 pris pour lapplication de la loi ndeg 78-17 du 6 janvier 1978 relative agrave

linformatique aux fichiers et aux liberteacutes modifieacutee par la loi ndeg 2004-801 du 6 aoucirct 2004 JORF ndeg 247 du 22

octobre 2005 p 16769 113

FOREST David laquo Pouvoirs de la CNIL le reacuteveil soudain de la belle endormie raquo Recueil Dalloz 2007 p

94 114

Deacutelibeacuteration CNIL ndeg2006-173 du 28 juin 2006 115

Chiffres consulteacutes le 3 mai 2016 sur [httpwwwcnilfr]

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

56

adopteacutees par la CNIL contre seulement 19 sanctions prononceacutees116

Ainsi contrairement aux

cas dans lesquels le traitement litigieux serait ameneacute devant un tribunal le responsable du

traitement beacuteneacuteficie drsquoune possibiliteacute de reacutegulariser sa situation117

Le pouvoir de sanction

accordeacute agrave la CNIL nous apparaicirct donc ecirctre plus efficace et plus facilement applicable que

devant une juridiction de droit commun

En parallegravele de ce pouvoir de sanction la loi Informatique et Liberteacutes instaure comme

nous lrsquoavons vu une protection speacutecifique aux donneacutees de santeacute Cependant dans les faits

celle-ci preacutesente certaines limites

B La protection limiteacutee des donneacutees de santeacute

94 La loi Informatique et Liberteacutes se veut aux premiers abords protectrice des donneacutees

de santeacute reacuteputeacutees sensibles Toutefois celles-ci peuvent quand mecircme faire lrsquoobjet drsquoun

traitement automatiseacute (1) De mecircme le consentement de la personne concerneacutee par les

donneacutees nrsquoa pas lrsquoimportance ni le poids que lrsquoon pourrait attendre de lui (2)

1) Les limites de lrsquointerdiction de traitement des donneacutees sensibles

95 En transposant la directive europeacuteenne 9546CE le leacutegislateur a fait entrer les

donneacutees de santeacute dans la cateacutegorie des donneacutees sensibles cateacutegorie qui est par principe

frappeacutee drsquoune interdiction de traitement Toutefois agrave chaque principe son exception lrsquoarticle

8 II vient dresser une liste de plusieurs cas dans lesquels le traitement des donneacutees sensibles

va ecirctre autoriseacute Nos travaux portant plus particuliegraverement sur les donneacutees de santeacute nous ne

nous attarderons pas sur les dispositions qui ne srsquoappliquent pas agrave celles-ci

96 Pas moins de six exceptions trouvent agrave srsquoappliquer aux donneacutees de santeacute La premiegravere

est eacutenonceacutee au 1deg du II de lrsquoarticle 8 de la loi Informatique et Liberteacutes laquo les traitements pour

lesquels la personne concerneacutee a donneacute son consentement expregraves sauf dans le cas ougrave la loi

preacutevoit que lrsquointerdiction viseacutee au I ne peut ecirctre leveacutee par le consentement de la personne raquo

116 Rapport drsquoactiviteacute 2011 de la CNIL p 68

117 MATTATIA Fabrice laquo CNIL et tribunaux concurrence ou compleacutementariteacute dans la reacutepression des

infractions agrave la loi Informatique et Liberteacutes raquo Revue de science criminelle 2009 p 317

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

57

Cette premiegravere exception amegravene plusieurs reacuteflexions Drsquoabord la loi exige un consentement

expregraves de la part de la personne concerneacutee par les donneacutees Ainsi les consentements

preacutesumeacutes ne seront pas suffisants contrairement agrave certaines hypothegraveses ougrave seule la non

opposition suffit Concernant la forme la loi nrsquoimpose pas drsquoobligation de consentement eacutecrit

mais dans la pratique il sera plus prudent pour le responsable du traitement drsquoobtenir une

preuve du consentement de la personne concerneacutee par les donneacutees sous peine de se voir

sanctionneacute peacutenalement118

97 Le consentement ne sera pour autant pas toujours suffisant agrave lever lrsquointerdiction de

traitement des donneacutees sensibles puisque la loi laisse la possibiliteacute au leacutegislateur de preacutevoir

que le consentement de la personne concerneacutee par les donneacutees ne soit pas suffisant pour lever

lrsquointerdiction de traitement des donneacutees Cette possibiliteacute a eacuteteacute introduite par la directive

europeacuteenne 9546CE en son article 8 II point a laquo le paragraphe 1 ne sapplique pas

lorsque la personne concerneacutee a donneacute son consentement explicite agrave un tel traitement sauf

dans le cas ougrave la leacutegislation de lEacutetat membre preacutevoit que linterdiction viseacutee au paragraphe 1

ne peut ecirctre leveacutee par le consentement de la personne concerneacutee raquo Le leacutegislateur franccedilais a

repris cette disposition telle quelle Toutefois il nrsquoen nrsquoa pas fait application concernant les

donneacutees de santeacute Or cette interdiction de traiter des donneacutees sensibles malgreacute le

consentement de la personne concerneacutee aurait pu permettre drsquoinstaurer une protection

suppleacutementaire vis-agrave-vis de certaines situations susceptibles de repreacutesenter un risque pour la

personne sans que celle-ci ne puisse totalement srsquoen rendre compte Cela aurait constitueacute une

forme de garde-fou contre la personne elle-mecircme La CNIL quant agrave elle se montre reacuteticente

agrave lrsquoutilisation du consentement de la personne comme unique justification du traitement des

donneacutees consideacuterant que le consentement risque drsquoecirctre parfois forceacute et devenir en quelques

sortes une laquo solution de faciliteacute raquo pour le responsable du traitement119

Ainsi nous estimons

que cette possibiliteacute aurait pu ecirctre utiliseacutee notamment dans le cas des dossiers meacutedicaux

proposeacutes par certaines socieacuteteacutes120

En effet nous pensons que les personnes ne mesurent pas

toujours les conseacutequences du traitement de certaines de leurs donneacutees et qursquoelles doivent donc

beacuteneacuteficier drsquoune protection suppleacutementaire

118 JOB Jean-Marie laquo La loi Informatiques et liberteacutes et les donneacutees de santeacute raquo RLDI ndeg 34 2008 p 87

119 Ibid

120 ZORN-MACREZ Caroline laquo Donneacutees de santeacute et secret partageacute raquo PUN 2010 p 230

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

58

98 La deuxiegraveme exception agrave lrsquointerdiction de traitement des donneacutees de santeacute est poseacutee au

2deg du II de lrsquoarticle 8 laquo les traitements neacutecessaires agrave la sauvegarde de la vie humaine mais

auxquels la personne concerneacutee ne peut donner son consentement par suite drsquoune incapaciteacute

juridique ou drsquoune impossibiliteacute mateacuterielleraquo Cette exception rejoint celle existant dans le

cadre des soins et instaureacutee par la loi Kouchner de 2002 (lrsquoarticle L 1111-4 du Code de la

santeacute publique preacutevoit que laquo aucun acte meacutedical ni aucun traitement ne peut ecirctre pratiqueacute

sans le consentement libre et eacuteclaireacute de la personne et ce consentement peut ecirctre retireacute agrave tout

moment Lorsque la personne est hors deacutetat dexprimer sa volonteacute aucune intervention ou

investigation ne peut ecirctre reacutealiseacutee sauf urgence ou impossibiliteacute raquo) La notion de sauvegarde

de la vie de la personne concerneacutee a eacuteteacute preacutefeacutereacutee agrave celle drsquointeacuterecirct vital qui eacutetait utiliseacutee dans

la directive europeacuteenne Comme le souligne agrave juste titre Alex TUumlRK dans son rapport121

la

notion drsquointeacuterecirct vital est la traduction litteacuterale de lrsquoexpression anglaise vital interest terme

ambigu en ce qursquoil peut deacutesigner eacutegalement un inteacuterecirct essentiel qui ne se rattache pas pour

autant agrave la survie de la personne Lrsquourgence dispense donc drsquoobtenir le consentement de la

personne dans lrsquohypothegravese ougrave le traitement serait neacutecessaire agrave la sauvegarde de la vie de la

personne concerneacutee par les donneacutees Cette exception est en reacutealiteacute double ce qui rend son

application tregraves limiteacutee122

De plus comme le souligne Jean-Marie JOB il srsquoagit de situations

qui sont deacutejagrave couvertes par la troisiegraveme deacuterogation beaucoup plus geacuteneacuterale123

99 La troisiegraveme exception concerne les laquo traitements neacutecessaires aux fins de la meacutedecine

preacuteventive des diagnostics meacutedicaux de lrsquoadministration de soins ou de traitements ou de la

gestion de services de santeacute et mis en œuvre par un membre drsquoune profession de santeacute ou par

une autre personne agrave laquelle srsquoimpose en raison de ses fonctions lrsquoobligation de secret

professionnel preacutevue par lrsquoarticle 226-13 du Code peacutenal raquo (article 8 II 6deg) Pour que cette

exception puisse srsquoappliquer deux conditions cumulatives doivent ecirctre respecteacutees le

traitement doit reacutepondre agrave une finaliteacute speacutecifique et ecirctre mis en œuvre par un professionnel de

santeacute ou tout autre professionnel tenu au secret professionnel Cette condition permet ainsi de

srsquoassurer que les donneacutees qui seront traiteacutees dans ce cadre seront soumises agrave une autre

121 TUumlRK Alex laquo Rapport fait au nom de la commission des Lois constitutionnelles de leacutegislation du suffrage

universel du Regraveglement et drsquoadministration geacuteneacuterale sur le projet de loi adopteacute par lrsquoAssembleacutee Nationale

relatif agrave la protection des personnes physiques agrave lrsquoeacutegard des traitements de donneacutees agrave caractegravere personnel et

modifiant la loi ndeg 78-17 du 6 janvier 1978 relative agrave lrsquoinformatique aux fichiers et aux liberteacutes raquo Seacutenat 2003

p 57 122

ZORN-MACREZ Caroline laquo Donneacutees de santeacute et secret partageacute raquo op cit p 236 123

JOB Jean-Marie laquo La loi Informatique et Liberteacutes et les donneacutees de santeacute raquo op cit p 87

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

59

protection celle du secret professionnel Cette exception renvoie agrave la relation patient

meacutedecin classique au cours de laquelle le patient communique un certain nombre

drsquoinformations agrave son meacutedecin neacutecessaires agrave sa prise en charge124

Comme le soulignait le

seacutenateur Alex TUumlRK cette exception permet de compenser le fait que les donneacutees de santeacute

soient de par leur qualification de donneacutees sensibles interdites de traitement tout en offrant

un cadre strict et seacutecuriseacute pour la personne concerneacutee par les donneacutees traiteacutees125

100 La quatriegraveme exception est beaucoup plus speacutecifique puisque le 8deg du II de lrsquoarticle 8

vise laquo les traitements neacutecessaires agrave la recherche dans le domaine de la santeacute selon les

modaliteacutes preacutevues au chapitre IX raquo Cette disposition concerne les traitements mis en œuvre

dans le cadre des recherches meacutedicales qui sont soumis agrave une proceacutedure particuliegravere deacutecrite

au sein du chapitre IX de la loi Informatique et Liberteacutes

101 La cinquiegraveme exception vise eacutegalement un cas tregraves speacutecifique puisque le III de

lrsquoarticle 8 de la loi dispose laquo si les donneacutees agrave caractegravere personnel viseacutees au I sont appeleacutees agrave

faire lrsquoobjet agrave bref deacutelai drsquoun proceacutedeacute drsquoanonymisation preacutealablement reconnu conforme aux

dispositions de la preacutesente loi par la Commission nationale de lrsquoinformatique et des liberteacutes

celle-ci peut autoriser compte tenu de leur finaliteacute certaines cateacutegories de traitement selon

les modaliteacutes preacutevues agrave lrsquoarticle 25 Les dispositions des chapitres IX et X ne sont pas

applicables raquo Les donneacutees doivent donc ecirctre anomymiseacutees crsquoest-agrave-dire transformeacutees afin

qursquoil ne soit plus possible de les relier mecircme indirectement agrave la personne concerneacutee126

on

parlera alors drsquoanonymisation irreacuteversible Celle-ci doit intervenir agrave bref deacutelai cette notion

nrsquoest pas deacutefinie par la loi Informatique et Liberteacutes et il appartiendra donc agrave la CNIL lors de

lrsquoeacutetude de la demande drsquoautorisation drsquoappreacutecier le deacutelai proposeacute par le responsable du

traitement Comme il est preacuteciseacute cette exception ne srsquoapplique pas dans le cadre de la

recherche meacutedicale mais trouvera agrave srsquoappliquer notamment dans le cadre de traitements mis

en œuvre par des entreprises priveacutees du secteur de la santeacute comme par exemple les

mutuelles

124 DE LAMBERTERIE Isabelle laquoLa place du consentement dans la collecte et le traitement des informations

sensibles La situation en France raquo RGDM ndeg 13 2004 p 62 125

TUumlRK Alex laquo Rapport fait au nom de la commission des Lois constitutionnelles de leacutegislation du suffrage

universel du Regraveglement et drsquoadministration geacuteneacuterale sur le projet de loi adopteacute par lrsquoAssembleacutee Nationale

relatif agrave la protection des personnes physiques agrave lrsquoeacutegard des traitements de donneacutees agrave caractegravere personnel et

modifiant la loi ndeg 78-17 du 6 janvier 1978 relative agrave lrsquoinformatique aux fichiers et aux liberteacutes raquo op cit p 63 126

JOB Jean-Marie laquo La loi Informatique et Liberteacutes et les donneacutees de santeacute raquo op cit p 88

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

60

102 Enfin la loi Informatique et Liberteacutes dans son article 8 IV preacutevoit que les donneacutees

sensibles pourront faire lrsquoobjet drsquoun traitement si celui-ci est justifeacute par lrsquointeacuterecirct public et

apregraves autorisation de la CNIL127

Cette exception ouvre de nombreuses possibiliteacutes et trouve agrave

srsquoappliquer dans des situations diverses La loi ne deacutefinit pas preacuteciseacutement cette notion

drsquointeacuterecirct public Nous adheacuterons neacuteanmoins agrave la deacutefinition proposeacutee par Caroline ZORN-

MACREZ128

et agrave la deacutefinition du vocabulaire juridique de Geacuterard CORNU laquo ce qui est agrave

lrsquoavantage de tous raquo129

La directive europeacuteenne vient nous apporter quelques preacutecisions quant

aux situations pouvant beacuteneacuteficier de cette exception Ainsi elle cite les domaines de la santeacute

publique et de la protection sociale130

On peut penser par exemple agrave la teacuteleacutetransmission des

feuilles de soins preacutevue agrave lrsquoarticle L 161-29 du Code de la Seacutecuriteacute Sociale131

Ainsi les responsables de traitement disposent de plusieurs exceptions leur permettant

de mettre en œuvre un traitement portant sur des donneacutees de santeacute Au final ces exceptions

de par leur nombre et leur champ drsquoapplication font du principe drsquointerdiction la veacuteritable

exception

2) Le consentement mis agrave mal

103 La condition du consentement preacutealable au traitement des donneacutees est poseacutee agrave lrsquoarticle

7 de la loi Informatique et Liberteacutes Cette neacutecessiteacute nrsquoexistait pas dans la version anteacuterieure de

la loi En effet initialement elle ne preacutevoyait qursquoune possibiliteacute drsquoopposition de la personne

concerneacutee par les donneacutees132

La loi de 2004 modifiant la loi initiale fait deacutesormais du

consentement une des conditions permettant la mise en œuvre drsquoun traitement automatiseacute de

donneacutees personnelles Cependant le consentement nrsquoest envisageacute que comme une alternative

parmi drsquoautres agrave disposition du responsable du traitement pour leacutegitimer son traitement et non

127 Article 8 IV laquo ne sont pas soumis agrave lrsquointerdiction de traitement preacutevue au I les traitements automatiseacutes ou

non justifieacutes par lrsquointeacuterecirct public et autoriseacutes dans les conditions preacutevues au I de lrsquoarticle 25 ou au II de lrsquoarticle

26 raquo 128

ZORN-MACREZ Caroline laquo Donneacutees de santeacute et secret partageacute raquo op cit p 238 129

CORNU Geacuterard laquo Vocabulaire juridique raquo PUF coll laquo Quadrige Dicos Poche raquo 8eacuteme eacuted 2007 130

La directive 9546CE preacutevoit en son consideacuterant 34 laquo Les Etats membres doivent eacutegalement ecirctre autoriseacutes

agrave deacuteroger agrave lrsquointerdiction de traiter les cateacutegories de donneacutees sensibles lorsqursquoun motif drsquointeacuterecirct public important

le justifie dans des domaines tels que la santeacute publique et la protection sociale raquo 131

ZORN-MACREZ Caroline laquo Donneacutees de santeacute et secret partageacute raquo op cit p 239 132

Article 26 de la loi Informatique et Liberteacutes

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

61

pas une condition neacutecessaire133

(lrsquoarticle 7 preacutevoit laquo un traitement de donneacutees agrave caractegravere

personnel doit avoir reccedilu le consentement de la personne concerneacutee ou satisfaire agrave lrsquoune des

conditions suivantes [hellip] raquo) Ainsi nonobstant le consentement de la personne concerneacutee le

traitement pourra quand mecircme ecirctre licite srsquoil remplit une des autres conditions eacutenonceacutees agrave

lrsquoarticle 7

104 La qualiteacute et la forme du consentement ne sont quant agrave elles pas preacuteciseacutees

Contrairement agrave ce qui est preacutevu en matiegravere de donneacutees sensibles le leacutegislateur nrsquoexige pas de

consentement expregraves Ainsi il pourrait ecirctre possible de preacutesumer qursquoune simple non

opposition pourrait ecirctre suffisante Toutefois il ne nous semble pas que cela soit la volonteacute du

leacutegislateur Le Groupe de travail de lrsquoarticle 29 srsquoest pencheacute sur la question et a apporteacute

quelques pistes de reacuteflexions134

Ainsi le consentement de la personne concerneacutee par les

donneacutees doit ecirctre un consentement eacuteclaireacute et comme le preacutecise la directive europeacuteenne en son

article 2 il doit ecirctre une laquo manifestation de volonteacute libre speacutecifique et informeacutee raquo

105 Le consentement ne beacuteneacuteficie pas drsquoun poids important dans le traitement des donneacutees

agrave caractegravere personnel dans la mesure ougrave drsquoautres hypothegraveses vont venir leacutegitimer le traitement

des donneacutees sans que le consentement de la personne ne soit neacutecessaire Il srsquoagit du respect

drsquoune obligation leacutegale incombant au responsable du traitement (crsquoest le cas par exemple de

la mise en place drsquoun dossier meacutedical rendu obligatoire par lrsquoarticle R 1112-2 du Code de la

Santeacute Publique) de la sauvegarde de la vie de la personne concerneacutee de lrsquoexeacutecution drsquoune

mission de service public dont est investi le responsable ou le destinataire du traitement de

lrsquoexeacutecution soit drsquoun contrat auquel la personne concerneacutee est partie soit de mesures

preacutecontractuelles prises agrave la demande de celle-ci ou enfin de la reacutealisation de lrsquointeacuterecirct leacutegitime

poursuivi par le responsable du traitement ou son destinataire sous reacuteserve de ne pas

meacuteconnaicirctre lrsquointeacuterecirct ou les droits et liberteacutes fondamentaux de la personne concerneacutee

106 Il est inteacuteressant ici de srsquoarrecircter sur la derniegravere exception lrsquointeacuterecirct leacutegitime du

responsable du traitement Nous ne pouvons que deacuteplorer cette disposition qui nous apparaicirct

133 DE LAMBERTERIE Isabelle laquo La place du consentement dans la collecte et le traitement des informations

sensibles La situation en France raquo op cit p 61 134

Groupe de travail laquo article 29 raquo sur la protection des donneacutees laquo Document de travail sur le traitement des

donneacutees agrave caractegravere personnel relatives agrave la santeacute contenues dans les dossiers meacutedicaux eacutelectroniques (DME) raquo

Commission europeacuteenne 2007

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

62

trop large En effet la loi ne propose aucune deacutefinition de ce que pourrait ecirctre lrsquointeacuterecirct

leacutegitime Pour sa part la directive europeacuteenne se contente dans son consideacuterant 30 de donner

quelques exemples tels que la gestion courante des entreprises la prospection commerciale ou

encore la prospection par une association caritative Force est de constater que cette exception

donne au responsable du traitement une marge de manœuvre assez large avec pour seules

limites le respect de lrsquointeacuterecirct ou des droits de la personne concerneacutee Alex TUumlRK avait

deacuteploreacute dans son rapport le caractegravere tregraves geacuteneacuteral de cette deacuterogation laquo drsquoune porteacutee

exceptionnellement large raquo qui selon lui laquo fragilise substantiellement la porteacutee du principe du

consentement de la personne qui ne saurait donc ecirctre consideacutereacute comme constituant la regravegle

en matiegravere de traitement des donneacutees raquo Il appartient donc agrave la CNIL gracircce agrave ses pouvoirs de

controcircle de srsquoassurer que lrsquoeacutequilibre entre lrsquointeacuterecirct leacutegitime du responsable du traitement et le

respect des droits de la personne concerneacutee est eacutetabli

107 Ces exceptions et notamment la derniegravere fragilisent fortement le consentement de la

personne concerneacutee par les donneacutees et sa valeur srsquoen trouve amoindrie Dans les domaines

relatifs au traitement des donneacutees de santeacute rares seront les hypothegraveses ougrave le consentement du

patient sera neacutecessaire En effet agrave titre drsquoexemple la constitution drsquoun dossier meacutedical agrave

lrsquohocircpital reacutepond agrave une obligation leacutegale (exception ndeg 1) Drsquoune maniegravere geacuteneacuterale les

traitements des donneacutees de santeacute par un eacutetablissement de santeacute deacutecoulent directement de sa

mission de service public qui est le soin (exception ndeg 3) mais permettent eacutegalement la

sauvegarde de la vie de la personne concerneacutee (exception ndeg 2)

De mecircme si nous poussons notre raisonnement les compagnies drsquoassurance

pourraient invoquer un inteacuterecirct leacutegitime agrave la collecte et au traitement de donneacutees de santeacute ce

qui pourrait srsquoaveacuterer reacuteellement preacutejudiciable pour le patient

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

63

Conclusion de la Section

108 La France srsquoest tregraves tocirct sentie concerneacutee par la probleacutematique du deacuteveloppement de

lrsquoinformatique et des traitements automatiseacutes des donneacutees agrave caractegravere personnel Sa leacutegislation

Informatique et Liberteacutes essaie drsquoinstaurer un cadre se voulant le plus protecteur possible pour

les donneacutees personnelles Les donneacutees de santeacute consideacutereacutees comme des donneacutees sensibles

beacuteneacuteficient en theacuteorie drsquoune protection renforceacutee au titre de la loi Informatique et Liberteacutes

mais eacutegalement au titre de dispositions du Code de la Santeacute Publique la plus importante

drsquoentre elles eacutetant bien entendu le secret professionnel

Toutefois une eacutetude approfondie des dispositions de la loi Informatique et Liberteacutes nous a

permis drsquoeacutetablir que le principe drsquointerdiction de traitement des donneacutees sensibles eacutetait

fortement fragiliseacute par les nombreuses exceptions qui y sont preacutevues De mecircme le

consentement de la personne concerneacutee par les donneacutees nrsquoa pas autant drsquoimportance qursquoon

aurait pu lrsquoespeacuterer

Ces donneacutees de santeacute faisant lrsquoobjet drsquoun traitement vont ensuite ecirctre partageacutees par les

diffeacuterents professionnels intervenant dans la prise en charge du patient Il est donc important

de srsquoarrecircter sur lrsquoencadrement reacuteserveacute au partage de ces donneacutees sensibles

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

64

Section 2 Les modaliteacutes de partage des donneacutees relatives au patient

109 Les donneacutees relatives agrave un patient qursquoil srsquoagisse de donneacutees de santeacute ou tout

simplement de donneacutees administratives sont neacutecessaires agrave sa bonne prise en charge que ce

soit pour la preacutevention le diagnostic le soin ou encore pour la recherche meacutedicale Ces

donneacutees sont donc comme nous lrsquoavons vu preacuteceacutedemment collecteacutees conserveacutees et ensuite

partageacutees entre les diffeacuterents professionnels qui en auraient besoin Lrsquoutilisation deacutesormais

quasi systeacutematique des technologies drsquoinformation et de communication ameacuteliore et facilite ce

partage En effet gracircce agrave lrsquoinformatisation des donneacutees le partage se fait plus rapidement et il

est plus complet La consultation des dossiers meacutedicaux dans leur version informatiseacutee est

eacutegalement plus simple Toutefois ces donneacutees sont des donneacutees sensibles et surtout

confidentielles Leur partage ne peut donc pas avoir lieu sans que certaines dispositions soient

prises notamment en ce qui concerne la seacutecuriteacute des donneacutees Force est de constater que les

regravegles existantes en la matiegravere sont des regravegles drsquoordre geacuteneacuteral qui ne srsquoadaptent pas toujours

correctement aux speacutecificiteacutes des technologies drsquoinformation et de communication

Lrsquoencadrement du partage des donneacutees du patient doit prendre en compte deux dimensions

la seacutecurisation physique des donneacutees et lrsquoencadrement du partage en tant que tel de maniegravere

agrave deacutelimiter quand avec qui et sous quelles conditions les donneacutees peuvent ecirctre partageacutees

Crsquoest bien cette derniegravere notion qui va particuliegraverement nous inteacuteresser ici En la matiegravere il

nrsquoexiste pas de regravegle speacutecifique reacutegissant lrsquoencadrement du partage des donneacutees de santeacute par

le biais des TIC Il faut donc se tourner une fois de plus vers les regravegles geacuteneacuterales applicables

en la matiegravere (paragraphe I) regravegles geacuteneacuterales qui peuvent se montrer parfois limiteacutees En

matiegravere de recherche meacutedicale toutefois un corpus de regravegles speacutecifiques agrave la matiegravere existe

(paragraphe II) qui demeure neacuteanmoins incomplet

sect1 Les regravegles geacuteneacuterales

110 Lrsquoencadrement du partage des donneacutees de santeacute nous pousse agrave nous demander quelles

donneacutees peuvent ecirctre partageacutees et avec qui Cette question nous oblige donc agrave reacutefleacutechir dans

un premier temps agrave la notion de proprieacuteteacute des donneacutees (A) On peut constater que mecircme srsquoil

nrsquoexiste pas aujourdrsquohui de reacuteponse claire et deacutefinitive sur la question plusieurs pistes de

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

65

reacuteflexion srsquooffrent agrave nous Or des droits attacheacutes aux donneacutees de santeacute et au dossier meacutedical

vont deacutecouler certaines regravegles relatives agrave leur partage (B)

A La deacutelicate question de la proprieacuteteacute des donneacutees de santeacute

111 Avant de savoir comment peuvent ecirctre utiliseacutees les donneacutees de santeacute et notamment les

conditions de leur partage il est inteacuteressant de chercher drsquoabord agrave savoir qui possegravede des

droits sur ces donneacutees En effet la question de la proprieacuteteacute des donneacutees meacutedicales se pose tregraves

souvent Les patients drsquoun cocircteacute estiment que les donneacutees les concernent et sont donc leur

proprieacuteteacute (1) Les professionnels de santeacute agrave lrsquoinverse pensent parfois qursquoils possegravedent un

droit sur ces donneacutees qursquoils ont recueillies formaliseacutees et conserveacutees (2)

1) La recherche drsquoune qualification du droit des individus sur leurs donneacutees

112 Afin de comprendre comment peuvent se partager les donneacutees de santeacute et notamment

qui peut deacutecider quelles donneacutees sont partageacutees avec quelles personnes il faut commencer par

rechercher quels droits possegravedent les individus sur leurs donneacutees Car il nrsquoest pas rare

drsquoentendre un patient reacuteclamer lrsquointeacutegraliteacute de son dossier meacutedical non pas parce que la loi lui

octroie un droit drsquoaccegraves135

mais surtout parce qursquoil considegravere son dossier meacutedical comme

eacutetant un bien dont il serait le proprieacutetaire

113 Drsquoune maniegravere geacuteneacuterale la recherche de la qualification du droit que deacutetient lrsquoindividu

vis-agrave-vis de ses donneacutees fait lrsquoobjet drsquoun vieux deacutebat au sein de la doctrine En effet la

question qui nous inteacuteresse agrave savoir quels droits existent sur lrsquoinformation de santeacute srsquoinscrit

dans un deacutebat beaucoup plus large qui est celui du statut de lrsquoinformation136

Nous ne nous

attarderons toutefois pas ici sur le concept large drsquoinformation qui peut deacutesigner tout autant

les ideacutees drsquoune personne que les informations plus geacuteneacuterales sur un eacuteveacutenement Nous

135 Lrsquoarticle L 1111-7 Code de la santeacute Publique dispose laquo Toute personne a accegraves agrave lensemble des

informations concernant sa santeacute deacutetenues agrave quelque titre que ce soit par des professionnels et eacutetablissements

de santeacute qui sont formaliseacutees ou ont fait lobjet deacutechanges eacutecrits entre professionnels de santeacute notamment des

reacutesultats dexamen comptes rendus de consultation dintervention dexploration ou dhospitalisation des

protocoles et prescriptions theacuterapeutiques mis en oeuvre feuilles de surveillance correspondances entre

professionnels de santeacute agrave lexception des informations mentionnant quelles ont eacuteteacute recueillies aupregraves de tiers

nintervenant pas dans la prise en charge theacuterapeutique ou concernant un tel tiers raquo 136

MALLET-POUJOL Nathalie laquo Appropriation de lrsquoinformation lrsquoeacuteternelle chimegravere raquo Dalloz 1997

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

66

preacutefeacuterons nous concentrer sur lrsquoinformation personnelle en tant que donneacutee relative agrave la

personne

114 Face agrave un risque de marchandisation de lrsquoinformation personnelle notamment dans un

but de prospection certains auteurs ont souhaiteacute srsquoorienter vers le droit de proprieacuteteacute en

preacuteconisant une appropriation de lrsquoinformation personnelle137

Cette theacuteorie soutenue

notamment par LHUNTER et JRULE a eacuteteacute deacuteveloppeacutee afin que chaque individu puisse ecirctre

proprieacutetaire des droits drsquoexploitation commerciale des renseignements le concernant138

Elle

preacutesente lrsquoavantage drsquooffrir agrave la personne un droit de controcircle absolu sur ces donneacutees et sur

lrsquoutilisation qui peut en ecirctre faite Toutefois ce raisonnement semble pour certains auteurs

impossible agrave maintenir Ainsi Nathalie MALLET-POUJOL qualifie cette theacuteorie

drsquo laquo excessivement dangereuse raquo en ce qursquoelle instaure pour lrsquoindividu une possibiliteacute de

disposer de lrsquoinformation qui le concerne laquo quand seule la jouissance de cette information est

veacuteritablement en jeu raquo ce qui pour reprendre ses termes laquo hypothegraveque le principe de digniteacute

de la personne raquo139

Pour illustrer ses propos lrsquoauteur reprend agrave juste titre lrsquoexemple de

lrsquoinformation geacuteneacutetique et cite le raisonnement deacuteveloppeacute par Loiumlc CADIET140

agrave ce sujet

Pour lrsquoauteur lrsquoinformation geacuteneacutetique de par son caractegravere intrinsegravequement lieacute agrave la personne

doit ecirctre consideacutereacutee comme eacutetant un eacuteleacutement du corps humain agrave part entiegravere Lrsquoinformation

geacuteneacutetique relegraveverait donc de la cateacutegorie des personnes et beacuteneacuteficierait agrave ce titre des mecircmes

droits Lrsquoinformation geacuteneacutetique au mecircme titre que le corps humain se verrait donc appliquer

le principe de non-patrimonialiteacute141

115 Cette proximiteacute des liens entre la personne et ses informations nrsquoest pas toujours aussi

trancheacutee que dans le cas des donneacutees geacuteneacutetiques Toutefois certaines informations peuvent

ecirctre facilement assimileacutees agrave la personne Crsquoest le cas du nom qui comme le dit si bien

CAPITANT est une eacutemanation de la personne142

Ainsi nous estimons qursquoil en va de mecircme

137 MALLET-POUJOL Nathalie laquo Droit agrave et droit sur lrsquoinformation de santeacute raquo RGDM 2007 pp 77-95

138 L HUNTER J RULE laquo Vers un droit de proprieacuteteacute des renseignements personnels raquo Communication au

congregraves de lrsquoassociation canadienne franccedilaise pour lrsquoavancement de la science Montreacuteal 1994 139

MALLET-POUJOL Nathalie laquo Appropriation de lrsquoinformation lrsquoeacuteternelle chimegravere raquo op cit 140

CADIET Loiumlc laquo La notion drsquoinformation geacuteneacutetique en droit franccedilais raquo in La geacuteneacutetique humaine de

lrsquoinformation agrave lrsquoinformatisation Ed TheacutemisLitec diffusion 1992 p52 Citeacute par MALLET-POUJOL Nathalie

laquo Appropriation de lrsquoinformation lrsquoeacuteternelle chimegravere raquo op cit 141

Article 16-1 du Code Civil 142

CAPITANT laquo Introduction agrave lrsquoeacutetude du droit raquo 3eacuteme Ed Paris 1902 p 97 citeacute par MALLET-POUJOL

Nathalie laquo Appropriation de lrsquoinformation lrsquoeacuteternelle chimegravere raquo op cit

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

67

pour les donneacutees de santeacute drsquoune personne qui comme nous avons pu le voir preacuteceacutedemment

touchent de tregraves pregraves agrave son intimiteacute Degraves lors les informations personnelles doivent donc ecirctre

consideacutereacutees comme eacutetant des choses hors commerce En effet nous adheacuterons agrave la conception

de Nathalie MALLET-POUJOL qui considegravere qursquoun rapport proprieacutetaire objet de proprieacuteteacute

de la part drsquoun individu sur ses donneacutees personnelles est inenvisageable car cela reviendrait agrave

remettre en cause la digniteacute mecircme de la personne Le droit de lrsquoindividu sur ses donneacutees

personnelles entrerait donc dans la classification des droits de la personnaliteacute143

De fait la

question ici nrsquoest pas tant de proteacuteger les donneacutees personnelles que lrsquoindividu lui-mecircme

116 Quand on se penche sur la question du droit des personnes sur leurs donneacutees il est

eacutegalement inteacuteressant de srsquoarrecircter sur le principe drsquoautodeacutetermination informelle Ce concept

est neacute drsquoune deacutecision du tribunal feacutedeacuteral drsquoAllemagne qui en 1983144

est venu preacuteciser que

le traitement de donneacutees personnelles neacutecessitait une justification Le droit agrave

lrsquoautodeacutetermination informelle ou laquo Recht auf informationelle Selbstbestimmung raquo est apparu

avec cette deacutecision le tribunal feacutedeacuteral allemand en faisant un droit fondamental de la

personne humaine Le droit agrave lrsquoautodeacutetermination informelle peut ecirctre deacutefini comme eacutetant le

droit pour une personne de maicirctriser pleinement les informations la concernant en deacutecidant

notamment agrave qui ces informations pourront ecirctre transmises Il est eacutegalement deacutefini par

certains auteurs comme laquo le droit de tout individu agrave maicirctriser lrsquoimage qursquoil donne de lui-

mecircme dans la socieacuteteacute raquo145

Ce droit agrave lrsquoautodeacutetermination informelle se retrouve dans la loi

Informatique et Liberteacutes avec le principe poseacute agrave lrsquoarticle 7 selon lequel tout traitement de

donneacutees agrave caractegravere personnel doit avoir reccedilu le consentement preacutealable de la personne

concerneacutee Toutefois comme nous avons pu le voir preacuteceacutedemment cette regravegle connaicirct

quelques exceptions qui viennent fragiliser le poids du consentement et donc ce droit agrave

lrsquoautodeacutetermination informelle Il existe des cas dans lesquels lrsquoindividu verra ses donneacutees

faire lrsquoobjet drsquoun traitement sans qursquoil ne puisse en deacutecider autrement146

117 La theacuteorie de lrsquoautodeacutetermination informelle preacutesente lrsquoavantage comme le souligne

Caroline ZORN-MACREZ147

de rendre lrsquoindividu responsable des deacutecisions qursquoil prendra

143 MALLET-POUJOL Nathalie laquo Appropriation de lrsquoinformation lrsquoeacuteternelle chimegravere raquo op cit

144 Tribunal constitutionnel allemand 15 octobre 1983 citeacute par ZORN-MACREZ Caroline laquo Donneacutees de santeacute

et secret partageacute raquo op cit p 231 note 2 145

POULLET Yves LEONARD Thierry laquo Les liberteacutes comme fondement de la protection des donneacutees

nominatives raquo in La vie priveacutee une liberteacute parmi les autres Larcier Bruxelles 1992 p 233 146

V Infra ndeg 230 147

ZORN-MACREZ Caroline laquo Donneacutees de santeacute et secret partageacute raquo op cit p 233

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

68

concernant ses donneacutees celles-ci eacutetant totalement en sa maicirctrise Toutefois nous estimons

qursquoune application absolue de ce principe pourrait srsquoaveacuterer trop dangereuse notamment en ce

qui concerne des donneacutees sensibles telles que les donneacutees de santeacute les individus nrsquoayant pas

toujours conscience des conseacutequences du partage ou de la communication de leurs donneacutees

118 Nous estimons qursquoil est inconcevable drsquoenvisager les patients comme eacutetant

proprieacutetaires de leurs donneacutees meacutedicales Le droit de proprieacuteteacute ne peut srsquoappliquer agrave des

donneacutees aussi sensibles que les donneacutees de santeacute sans que cela ne porte atteinte agrave la digniteacute de

la personne concerneacutee Tout au plus disposent-ils drsquoune certaine maicirctrise sur leur utilisation

Cependant cette maicirctrise de lrsquoindividu sur lrsquoutilisation qui peut ecirctre faite de ses donneacutees de

santeacute est relative et le jeu des principes et des exceptions agrave lrsquointerdiction de traitement des

donneacutees de santeacute148

fait que les seuls cas dans lesquels lrsquoindividu pourra deacutecider srsquoil souhaite

ou non partager ses donneacutees seront des cas dans lesquels il aurait eacuteteacute preacutefeacuterable selon nous

que le leacutegislateur intervienne afin de rendre lrsquoautodeacutetermination informelle de lrsquoindividu

inapplicable149

2) Tentative de qualification du droit des professionnels de santeacute sur le dossier meacutedical

119 Si les patients ne disposent pas drsquoun droit de proprieacuteteacute sur leurs donneacutees meacutedicales

qursquoen est-il des professionnels de santeacute et des eacutetablissements de santeacute qui alimentent les

dossiers meacutedicaux A lrsquoorigine le dossier meacutedical nrsquoeacutetait constitueacute que de quelques notes sur

des fiches cartonneacutees que le meacutedecin de famille conservait preacutecieusement en son cabinet La

pratique a eacutevolueacute et la technique aussi Les eacutetablissements de santeacute ont eacuteteacute leacutegalement tenus

de constituer un dossier meacutedical150

Ainsi depuis quelques anneacutees les systegravemes drsquoinformation

hospitaliers se deacuteveloppent et avec eux les dossiers meacutedicaux informatiseacutes Des simples

fiches nous sommes passeacutes agrave des dossiers informatiseacutes et structureacutes contenant de nombreuses

informations sur le patient La question se pose alors de savoir si les professionnels de santeacute

qui alimentent les dossiers meacutedicaux ou les eacutetablissements de santeacute qui mettent en place et

conservent ces dossiers vont beacuteneacuteficier de droits particuliers sur ces derniers

148 V infra ndeg 95 agrave 102

149 Comme nous lrsquoavons vu preacuteceacutedemment la loi Informatique et Liberteacutes laisse au leacutegislateur la possibiliteacute de

preacutevoir des cas ougrave mecircme le consentement de la personne concerneacutee par les donneacutees ne pourra pas venir lever

lrsquointerdiction de traitement dont fait lrsquoobjet les donneacutees sensibles 150

Lrsquoarticle R 1112-2 du Code de la santeacute Publique dispose laquo un dossier meacutedical est constitueacute pour chaque

patient hospitaliseacute dans un eacutetablissement de santeacute public ou priveacute raquo

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

69

120 Le Code de la santeacute publique nrsquoapporte pas reacuteellement de preacutecisions agrave ce sujet (mis agrave

part lrsquoarticle R 4127-45 relatif au dossier professionnel ou fiche drsquoobservation tenu par le

meacutedecin)151

Il nous faut donc faire appel agrave une autre branche du droit en lrsquooccurrence le droit

de la proprieacuteteacute intellectuelle pour tenter de qualifier les droits des professionnels et des

eacutetablissements de santeacute sur les dossiers meacutedicaux

121 Le dossier meacutedical en tant que recueil formaliseacute drsquoun ensemble de donneacutees peut-il

ecirctre consideacutereacute comme une base de donneacutees et beacuteneacuteficier agrave ce titre de la protection speacutecifique

mise en place par le Code de la proprieacuteteacute intellectuelle Et si tel est le cas qui des praticiens

alimentant le dossier ou de lrsquoeacutetablissement serait gardien de la structure mecircme du dossier

La base de donneacutees est deacutefinie par le Code de la proprieacuteteacute intellectuelle comme laquo un recueil

drsquoœuvres de donneacutees ou drsquoautres eacuteleacutements indeacutependants disposeacutes de maniegravere systeacutematique

ou meacutethodique et individuellement accessibles par des moyens eacutelectroniques ou par drsquoautres

moyens raquo152

A ce titre il est donc possible drsquoenvisager le dossier meacutedical comme eacutetant une

base de donneacutees celui-ci eacutetant bien un recueil de donneacutees qui sont accessibles de maniegravere

individuelle Une nuance pourrait ecirctre apporteacutee sur la question de savoir si ces donneacutees sont

bien disposeacutees de maniegravere systeacutematique agrave savoir selon un ordre deacutetermineacute agrave lrsquoavance ou

encore de faccedilon meacutethodique crsquoest-agrave-dire selon un ensemble ordonneacute de maniegravere logique153

Le Code de la Santeacute Publique nrsquoimpose pas il est vrai de classification speacutecifique du dossier

meacutedical Toutefois lrsquoarticle R 1112-2 du mecircme code deacutetaille le contenu a minima du

dossier meacutedical et des recommandations de lrsquoAgence Nationale drsquoAccreacuteditation et

drsquoEvaluation en Santeacute (ANAES) relatives au contenu du dossier meacutedical ont eacuteteacute publieacutees154

Le dossier meacutedical nous semble donc correspondre suffisamment agrave la deacutefinition du Code de la

proprieacuteteacute intellectuelle pour ecirctre qualifieacute de base de donneacutees

151 Cet article preacutevoit laquo Indeacutependamment du dossier meacutedical preacutevu par la loi le meacutedecin tient pour chaque

patient une fiche drsquoobservations qui lui est personnelle [hellip] les notes personnelles du meacutedecin ne sont ni

transmissibles ni accessibles au patient et aux tiers raquo Toutefois cette disposition ne concerne que le cas

particulier des notes personnelles du meacutedecin et non lrsquoensemble du dossier meacutedical 152

Article L 112-3 Code de la proprieacuteteacute intellectuelle 153

Selon la deacutefinition du dictionnaire Larousse 154

Agence Nationale drsquoAccreacuteditation et drsquoEvaluation en Santeacute laquo Dossier du patient ameacutelioration de la qualiteacute

de la tenue et du contenu reacuteglementation et recommandations raquo juin 2003 disponible sur [httpwwwhas-

santefr] Consulteacute le 5 mai 2017

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

70

122 Les bases de donneacutees beacuteneacuteficient de la protection relative aux droits drsquoauteurs ainsi

que drsquoune protection sui generis poseacutee au titre IV du Code de la proprieacuteteacute intellectuelle et

relative aux droits des producteurs des bases de donneacutees Ce droit srsquoexerce drsquoailleurs

indeacutependamment des droits drsquoauteurs ou drsquoautres droits qui pourraient srsquoexercer sur la base de

donneacutees

123 Le droit drsquoauteur va proteacuteger plus particuliegraverement la structure de la base de donneacutees

et pour en beacuteneacuteficier celle-ci devra preacutesenter un critegravere drsquooriginaliteacute Il faut ainsi apporter la

preuve que la seule forme de la base de donneacutees est originale Par exemple il est neacutecessaire

de deacutemontrer que laquo le choix et la disposition sont originaux raquo155

Dans le cas des dossiers

meacutedicaux informatiseacutes la structure mecircme du dossier va deacutependre du logiciel de gestion utiliseacute

par lrsquoeacutetablissement de santeacute Or dans la majoriteacute des cas ce logiciel va ecirctre la proprieacuteteacute drsquoune

socieacuteteacute prestataire sauf agrave envisager que lrsquoeacutetablissement de santeacute ait creacuteeacute son propre logiciel

Cela nous paraicirct difficilement envisageable et il faut donc recentrer notre reacuteflexion sur

la protection sui generis des bases de donneacutees Celle-ci va beacuteneacuteficier au producteur de la base

de donneacutees qui est deacutefini agrave lrsquoarticle L 341-1 du Code de la Proprieacuteteacute Intellectuelle comme

eacutetant laquo la personne qui prend linitiative et le risque des investissements correspondants raquo Il

peut alors beacuteneacuteficier laquo dune protection du contenu de la base lorsque la constitution la

veacuterification ou la preacutesentation de celui-ci atteste dun investissement financier mateacuteriel ou

humain substantiel raquo Le producteur reconnu drsquoune base de donneacutees se verra ainsi donner la

possibiliteacute drsquointerdire laquo lextraction par transfert permanent ou temporaire de la totaliteacute ou

dune partie qualitativement ou quantitativement substantielle du contenu dune base de

donneacutees sur un autre support par tout moyen et sous toute forme que ce soit la reacuteutilisation

par la mise agrave la disposition du public de la totaliteacute ou dune partie qualitativement ou

quantitativement substantielle du contenu de la base quelle quen soit la forme raquo156

Ainsi la question qui se pose agrave nous est celle de savoir qui agrave lrsquohocircpital prend

lrsquoinitiative et le risque des investissements correspondants agrave la creacuteation de la base de donneacutees

Une chose est certaine les professionnels de santeacute ne peuvent en aucun cas ecirctre consideacutereacutes

comme les producteurs de la base de donneacutees dans la mesure ougrave ce ne sont pas eux qui

155 TGI Paris 3

e ch 1eacutere sect 13 avril 2010 ndeg0903970 Steacute Optima on line JurisData ndeg 2010-010806

156 Article L 342-1 du Code de la proprieacuteteacute intellectuelle

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

71

pourront attester drsquoun investissement financier humain ou mateacuteriel157

Lrsquoeacutetablissement de

santeacute peut-il alors ecirctre consideacutereacute comme le producteur du dossier meacutedical base de donneacutees

Le Code de la proprieacuteteacute intellectuelle preacutecise que le producteur de la base prend lrsquoinitiative et

le risque des investissements Or la mise en place drsquoun dossier meacutedical pour chaque patient

eacutetant une obligation leacutegale peut-on reacuteellement parler drsquoinitiative agrave proprement parler De

mecircme que les investissements financiers mis en œuvre pour le deacuteveloppement des dossiers

meacutedicaux informatiseacutes ne se feront pas entiegraverement sur les deniers de lrsquoeacutetablissement celui-ci

beacuteneacuteficiant de fonds publics dispenseacutes dans le cadre de plans tels que le plan Hocircpital 2012 ou

encore le programme Hocircpital numeacuterique Degraves lors on ne peut pas consideacuterer que

lrsquoeacutetablissement de santeacute reacuteponde aux critegraveres du producteur de bases de donneacutees

124 Ni les eacutetablissements de santeacute ni les professionnels de santeacute ne disposent donc drsquoun

droit de proprieacuteteacute intellectuelle sur les dossiers meacutedicaux Toutefois les regravegles relatives aux

archives hospitaliegraveres nous apportent des preacutecisions quant aux droits que possegravedent les

eacutetablissements de santeacute sur les dossiers meacutedicaux

Lrsquoarrecircteacute du 11 mars 1968 portant regraveglement des archives hospitaliegraveres deacutefinit le

contenu des archives hospitaliegraveres comme eacutetant laquo lrsquoensemble des titres concernant les biens

droits et obligations des eacutetablissements publics hospitaliers [hellip] y compris les registres et

papiers eacutemanant de lrsquoadministration et des services meacutedicaux et chirurgicaux de ces divers

eacutetablissements raquo158

Ainsi selon les termes de cet arrecircteacute les dossiers meacutedicaux font partie

inteacutegrante des archives hospitaliegraveres Aucune disposition relative aux archives publiques ou

aux archives hospitaliegraveres ne vient preacuteciser que les eacutetablissements publics soient proprieacutetaires

de leurs archives Toutefois lrsquoarrecircteacute du 11 mars 1968 preacutecise en son article 3 que le directeur

de lrsquoeacutetablissement deacutetient la garde et la responsabiliteacute des archives hospitaliegraveres Degraves lors

lrsquoeacutetablissement de santeacute peut ecirctre consideacutereacute comme eacutetant responsable du dossier meacutedical

qursquoil se doit de conserver sous sa protection mais en aucun cas proprieacutetaire159

157 Nous tenons agrave rappeler ici que notre travail est accegraves sur lrsquoutilisation des TIC et non sur la creacuteation du dossier

meacutedical informatiseacute en eacutetablissements de santeacute Notre reacuteflexion diffeacutererait certainement dans le cas des dossiers

meacutedicaux en cabinet de ville 158

Arrecircteacute du 11 mars 1968 portant regraveglement des archives hospitaliegraveres JORF du 25 octobre 1968 p 10039

159 GENOT-POK Isabelle laquo Des archives publiques aux archives hospitaliegraveres points de droit raquo Actualiteacutes

JuriSanteacute ndeg 69 2010 p 6

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

72

B La difficile application des regravegles relatives au secret partageacute

125 Le partage des donneacutees du patient va ecirctre neacutecessaire dans lrsquointeacuterecirct du patient afin

drsquoassurer la continuiteacute des soins et la coordination de sa prisE en charge Pour cela le

leacutegislateur a ameacutenageacute des deacuterogations au secret professionnel (1) afin de permettre et

simplifier le partage des donneacutees entre professionnels Toutefois lrsquointeacutegration des TIC dans la

pratique courante vient compliquer lrsquoapplication concregravete des regravegles theacuteoriques (2)

1) Le secret partageacute une deacuterogation au secret professionnel strictement encadreacutee

126 La notion de secret partageacute nrsquoest pas une notion reacutecente Tregraves tocirct la jurisprudence a

deacuteveloppeacute ce concept neacutecessaire agrave la bonne prise en charge du patient Degraves 1953160

le Conseil

drsquoEtat reconnaissait la possibiliteacute du partage des donneacutees meacutedicales agrave condition que celui-ci

soit neacutecessaire agrave la continuiteacute de la prise en charge du patient161

Toutefois la jurisprudence

restait impreacutecise voire parfois eacutequivoque162

et le secret partageacute ne beacuteneacuteficiait pas de base

leacutegale suffisante agrave son bon deacuteveloppement La loi du 4 mars 2002 en introduisant lrsquoarticle L

1110-4 au Code de la santeacute publique preacutesente lrsquointeacuterecirct de remeacutedier agrave cette situation en

inscrivant dans un cadre preacutecis le partage de donneacutees au sein drsquoune eacutequipe de soins Cet

article modifieacute depuis disposait alors laquo Lorsque la personne est prise en charge par une

eacutequipe de soins dans un eacutetablissement de santeacute les informations la concernant sont reacuteputeacutees

confieacutees par le malade agrave lensemble de leacutequipe raquo Ce texte preacutesentait neacuteanmoins jusque tregraves

reacutecemment une lacune importante aucune deacutefinition preacutecise nrsquoeacutetait apporteacutee concernant la

notion drsquoeacutequipe de soins Certains auteurs consideacuteraient mecircme la notion comme eacutetant une

laquo coquille vide raquo163

qui ne renvoyait agrave rien de preacutecis la composition de chaque eacutequipe devant

ecirctre eacutetudieacutee au cas par cas afin de conserver une souplesse drsquoaction Drsquoautres consideacuteraient

que lrsquoeacutequipe de soins devait obligatoirement ecirctre composeacutee de professionnels effectuant des

actes de soins et donc de professionnels de santeacute ayant compeacutetence leacutegalement reconnue pour

effectuer ce type de soins164

Cette deacutefinition eacutetait selon nous trop reacuteductrice De fait il est

160 CE sect Soc 2 juin 1953 Bull ord Meacuted 1952-1954 p 194

161 ZORN-MACREZ Caroline laquo Donneacutees de santeacute et secret partageacute raquo op cit p 119

162 JONAS Carol laquo La loi du 4 mars 2002 et la pratique meacutedicale quotidienne apports et incertitudes raquo

Meacutedecine et droit ndeg 56 2002 163

ZORN-MACREZ Caroline laquo Donneacutees de santeacute et secret partageacute raquo op cit p 119 164

BOILEAU Chrystelle laquo Lrsquoeacutequipe meacutedicale une existence eacutevidente pour le professionnel de santeacute mais

discutable pour le juriste raquo RGDM 2004 ndeg 14 p 34

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

73

important de ne pas restreindre la composition de lrsquoeacutequipe de soins aux seuls professionnels

de santeacute stricto sensu En effet certains professionnels de santeacute nrsquoeffectuent pas de soins

(comme les ambulanciers) et certains soins ne sont pas dispenseacutes par des professionnels de

santeacute165

Comme le souligne agrave juste titre Caroline ZORN-MACREZ166

il est plus important

de se concentrer sur le contenu des eacutechanges qui interviennent entre les diffeacuterents

professionnels plutocirct que sur la qualiteacute de ces derniers La notion drsquoeacutequipe de soins doit donc

srsquoentendre de maniegravere large et certains professionnels agrave lrsquoinstar des assistantes sociales

doivent pouvoir faire partie pleinement drsquoune eacutequipe de soins et donc partager les donneacutees de

santeacute drsquoun patient si la prise en charge de celui-ci le neacutecessite

127 Crsquoest ce que le leacutegislateur a entendu faire en deacutefinissant dans le cadre de la loi de

modernisation de notre systegraveme de santeacute167

la notion de lrsquoeacutequipe de soins

Deacutesormais lrsquoarticle L 1110-4 est modifieacute et preacutevoit en son point III laquo lorsque ces

professionnels appartiennent agrave la mecircme eacutequipe de soins au sens de larticle L 1110-12 ils

peuvent partager les informations concernant une mecircme personne qui sont strictement

neacutecessaires agrave la coordination ou agrave la continuiteacute des soins ou agrave son suivi meacutedico-social et

social Ces informations sont reacuteputeacutees confieacutees par la personne agrave lensemble de leacutequipe raquo

Lrsquoarticle L 1110-12 quant agrave lui dispose laquo pour lapplication du preacutesent titre leacutequipe de

soins est un ensemble de professionnels qui participent directement au profit dun mecircme

patient agrave la reacutealisation dun acte diagnostique theacuterapeutique de compensation du handicap

de soulagement de la douleur ou de preacutevention de perte dautonomie ou aux actions

neacutecessaires agrave la coordination de plusieurs de ces actes et qui

1deg Soit exercent dans le mecircme eacutetablissement de santeacute au sein du service de santeacute des armeacutees

dans le mecircme eacutetablissement ou service social ou meacutedico-social mentionneacute au I de larticle L

312-1 du Code de laction sociale et des familles ou dans le cadre dune structure de

coopeacuteration dexercice partageacute ou de coordination sanitaire ou meacutedico-sociale figurant sur

une liste fixeacutee par deacutecret

165 ZORN-MACREZ Caroline laquo Donneacutees de santeacute et secret partageacute raquo op cit p 126

166 ZORN-MACREZ Caroline laquo Chronique martienne des donneacutees de santeacute numeacuteriseacutees Bregraveves observations

sur une reacuteglementation surreacutealiste raquo RDS ndeg 36 2010 p 336 167

Loi ndeg 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre systegraveme de santeacute JORF ndeg0022 du 27 janvier

2016

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

74

2deg Soit se sont vu reconnaicirctre la qualiteacute de membre de leacutequipe de soins par le patient qui

sadresse agrave eux pour la reacutealisation des consultations et des actes prescrits par un meacutedecin

auquel il a confieacute sa prise en charge

3deg Soit exercent dans un ensemble comprenant au moins un professionnel de santeacute

preacutesentant une organisation formaliseacutee et des pratiques conformes agrave un cahier des charges

fixeacute par un arrecircteacute du ministre chargeacute de la santeacute raquo

128 Preuve que cette notion est difficile agrave cerner le texte nous apparaicirct comme eacutetant reacutedigeacute

de maniegravere complexe proposant finalement plusieurs deacutefinitions dans la deacutefinition geacuteneacuterale

de lrsquoeacutequipe de soins Cependant cet article srsquoinscrit bien dans le sens preacutevu initialement par

les motifs de la loi agrave savoir la promotion drsquoune prise en charge deacutecloisonneacutee entre les

diffeacuterents acteurs intervenant dans la prise en charge drsquoun patient les professionnels des

secteurs sanitaire et meacutedico-social y eacutetant directement inteacutegreacutes Par ailleurs le partage des

donneacutees de santeacute en ville ou dans le cadre drsquoune collaboration ville hocircpital doit satisfaire agrave

drsquoautres conditions elles aussi exposeacutees au sein de lrsquoarticle L 1110-4 du Code de la santeacute

publique laquo un professionnel peut eacutechanger avec un ou plusieurs professionnels identifieacutes des

informations relatives agrave une mecircme personne prise en charge agrave condition quils participent

tous agrave sa prise en charge et que ces informations soient strictement neacutecessaires agrave la

coordination ou agrave la continuiteacute des soins agrave la preacutevention ou agrave son suivi meacutedico-social et

social [hellip]Le partage entre des professionnels ne faisant pas partie de la mecircme eacutequipe de

soins dinformations neacutecessaires agrave la prise en charge dune personne requiert son

consentement preacutealable recueilli par tout moyen y compris de faccedilon deacutemateacuterialiseacutee dans

des conditions deacutefinies par deacutecret pris apregraves avis de la Commission nationale de

linformatique et des liberteacutes raquo Dans ce cas le consentement preacutealable du patient est

neacutecessaire avant tout partage drsquoinformations Nous sommes ici dans une hypothegravese ougrave

lrsquoinformation relative au patient va sortir du cadre strict et deacutelimiteacute de lrsquoeacutequipe de soins Les

donneacutees vont ecirctre communiqueacutees dans ce cas agrave un professionnel exteacuterieur agrave lrsquoeacutequipe voire agrave

lrsquoeacutetablissement Contrairement agrave lrsquoancienne reacutedaction de lrsquoarticle L 1110-4 qui jusqursquoen

janvier 2016 preacutevoyait une non opposition de la part des patients avant tout eacutechange de

donneacutees le concernant168

le Code de la santeacute publique preacutevoit deacutesormais la neacutecessiteacute drsquoun

consentement ducircment recueilli et donc formaliseacute Les professionnels prenant en charge le

168 BOSSI Jeanne laquo Le cadre juridique du partage drsquoinformation dans les domaines sanitaires et meacutedicosocial

Etat des lieux et perspectives raquo Meacutedecine et droit 2013 p 6

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

75

patient et souhaitant partager ses donneacutees avec un autre professionnel devront donc srsquoassurer

de dispenser une information claire au patient afin de lui laisser lrsquoopportuniteacute de consentir ou

non agrave cet eacutechange Bien que cette disposition aille dans le sens drsquoun renforcement du secret

professionnel il nous faut cependant deacuteplorer en pratique lrsquoaspect contraignant pour les

professionnels de la neacutecessiteacute de recueillir le consentement systeacutematique avant tout eacutechange

de donneacutees

2) Les limites de lrsquoapplication du secret partageacute aux TIC

129 Lrsquoapplication des regravegles relatives au secret partageacute ne pose pas reacuteellement problegraveme

quand il srsquoagit pour deux professionnels drsquoeacutechanger agrave lrsquooral Toutefois lrsquoexercice se

complique degraves lors que lrsquoutilisation des TIC entre en jeu En effet dans le cas du dossier

meacutedical informatiseacute par exemple il va falloir srsquoassurer que seule lrsquoeacutequipe de soins au sens de

lrsquoarticle L 1110-4 du Code de la santeacute publique puisse acceacuteder aux donneacutees du patient Il va

donc ecirctre neacutecessaire que le professionnel srsquoidentifie dans un premier temps puis srsquoauthentifie

ensuite Il srsquoagit bien ici de deux actions diffeacuterentes une au cours de laquelle le professionnel

va deacutecliner son identiteacute et une autre qui va permettre au professionnel de prouver qursquoil est

bien celui qursquoil preacutetend ecirctre

130 Pour ce faire a eacuteteacute creacuteeacutee la Carte de Professionnel de Santeacute (CPS) Beaucoup plus

reacutepandue chez les professionnels libeacuteraux cette carte peine toutefois agrave se deacutevelopper dans le

secteur hospitalier La CPS qui contient les donneacutees drsquoidentification de son porteur ainsi que

ses conditions drsquoexercice permet agrave son deacutetenteur de srsquoauthentifier et de signer

eacutelectroniquement les diffeacuterentes opeacuterations qursquoil effectue (par exemple la reacutedaction drsquoun

compte rendu drsquohospitalisation) Initialement mise en place pour lrsquoauthentification des

professionnels de santeacute dans le cadre de la transmission deacutemateacuterialiseacutee des feuilles de soins169

son utilisation a ensuite eacuteteacute eacutelargie agrave toutes les transmissions de donneacutees de santeacute par voie

eacutelectronique Le deacutecret confidentialiteacute du 15 mai 2007170

ajoute donc au Code de la santeacute

169 Lrsquoarticle L 161-33 du Code de la Seacutecuriteacute Sociale dispose laquo Dans le cas de transmission eacutelectronique par les

professionnels organismes ou eacutetablissements dispensant des actes ou prestations remboursables par lassurance

maladie lidentification de leacutemetteur son authentification et la seacutecurisation des eacutechanges sont assureacutees par une

carte eacutelectronique individuelle appeleacutee carte de professionnel de santeacute raquo 170

Deacutecret ndeg 2007-960 du 15 mai 2007 relatif agrave la confidentialiteacute des informations meacutedicales conserveacutees sur

support informatique ou transmises par voie eacutelectronique et modifiant le Code de la santeacute publique JORF 113

du 17 mai 2007 p 9362

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

76

publique un article R 1110-3 qui preacutevoit qursquo laquo en cas daccegraves par des professionnels de santeacute

aux informations meacutedicales agrave caractegravere personnel conserveacutees sur support informatique ou de

leur transmission par voie eacutelectronique lutilisation de la carte de professionnel de santeacute

mentionneacutee au dernier alineacutea de larticle L 161-33 du Code de la seacutecuriteacute sociale est

obligatoire raquo Cette carte est actuellement distribueacutee par lrsquoAgence des Systegravemes

drsquoInformation Partageacutees en santeacute (ASIP santeacute)

131 Plusieurs beacutemols doivent ecirctre apporteacutes agrave ce systegraveme a priori seacutecuriseacute Le premier tient

agrave son manque de diffusion au sein des eacutetablissements de santeacute En effet agrave lrsquoheure actuelle

selon les chiffres de lrsquoASIP santeacute171

sur les 592 828 cartes CPS en circulation seulement

120 408 ont eacuteteacute distribueacutees au sein des eacutetablissements de santeacute Il devient alors compliqueacute

pour les professionnels de ces eacutetablissements de respecter les obligations instaureacutees par le

deacutecret confidentialiteacute dans le cas du partage de donneacutees de santeacute par voie eacutelectronique De

plus ces cartes sont uniquement agrave destination des professions regraveglementeacutees au titre du

chapitre IV du Code de la Santeacute Publique Or en eacutetablissement de santeacute le partage de

donneacutees nrsquoest pas restreint agrave ces professions172

Pour pallier ce problegraveme lrsquoASIP santeacute a mis

en place des cartes de la famille de la CPS On trouve ainsi la CDE (carte de directeur

drsquoeacutetablissement) destineacutee aux directeurs deacutetablissement de santeacute Le directeur peut

eacutegalement deacuteleacuteguer ces tacircches en deacutesignant des mandataires deacuteleacutegueacutes De mecircme a eacuteteacute creacuteeacutee

la CPE (carte de personnel drsquoeacutetablissement) destineacutee aux salarieacutes non professionnels de santeacute

des structures libeacuterales et des eacutetablissements de santeacute Lagrave encore ces cartes ne sont pas

encore suffisamment reacutepandues au sein des eacutetablissements de santeacute pour permettre drsquoassurer

la seacutecuriteacute preacutevue par les textes (sur les 497 590 cartes CPE 203 987 eacutetaient distribueacutees en

secteur hospitalier au 20 feacutevrier 2017)173

132 Les freins agrave lrsquoapplication des regravegles en matiegravere de partage des donneacutees de santeacute dans

le cadre de lrsquoutilisation des TIC sont ducircs principalement aux limites de la technologie actuelle

en matiegravere de traccedilabiliteacute des accegraves ou pour ecirctre plus preacutecis aux difficulteacutes pour les

eacutetablissements de disposer drsquoun systegraveme agrave la fois performant et en conformiteacute avec des textes

parfois utopistes A ce sujet nous pouvons reprendre une expression de Caroline ZORN-

171 Chiffres disponibles sur [httpesantegouvfr] Consulteacutes le 15 mai 2017

172 V Supra ndeg 127

173 Chiffres disponibles sur [httpesantegouvfr] Consulteacutes le 15 mai 2017

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

77

MACREZ qui illustre parfaitement le problegraveme actuel en parlant de laquo secret partageacute coinceacute

dans la bulle informatique raquo174

sect2 Le cas particulier de la recherche meacutedicale des regravegles de protection

speacutecifiques

133 La speacutecificiteacute de la recherche meacutedicale a ameneacute le leacutegislateur agrave inteacutegrer au sein de la

loi Informatique et Liberteacutes des dispositions propres au traitement de donneacutees agrave caractegravere

personnel dans le cadre de la recherche meacutedicale

Avant drsquoeacutetudier de maniegravere preacutecise ces dispositions (B) il est important de nous

arrecircter sur la particulariteacute de la recherche meacutedicale et du cadre qui lrsquoentoure cadre pouvant

parfois se montrer complexe agrave appreacutehender et ce malgreacute une reacuteforme reacutecente (A) Lrsquoeacutetude de

lrsquoensemble de ces dispositions nous permettra de nous interroger sur la force de la protection

accordeacutee aux donneacutees de santeacute issues de la recherche (C)

A Le cadre juridique des recherches impliquant la personne humaine

134 La difficulteacute principale rencontreacutee lors de lrsquoeacutetude et lrsquoapplication des regravegles en matiegravere

de partage des donneacutees dans le cadre de la recherche meacutedicale provient du manque de

lisibiliteacute des textes encadrant la recherche meacutedicale En effet la recherche meacutedicale est

strictement reacuteglementeacutee par diffeacuterentes lois codifieacutees au sein du Code de la santeacute publique

tandis que lrsquoencadrement des traitements de donneacutees dans ce cadre fait lrsquoobjet comme nous

venons de le voir de dispositions speacutecifiques au sein de la loi Informatique et Liberteacutes Pour

certains auteurs nous sommes ici confronteacutes agrave une dualiteacute de qualification175

et le responsable

drsquoun traitement va devoir commencer par qualifier juridiquement sa recherche avant de

pouvoir chercher agrave trouver quelles seront les deacutemarches agrave effectuer en vue drsquoencadrer son

traitement de donneacutees agrave caractegravere personnel

174 ZORN-MACREZ Caroline laquo Chronique martienne des donneacutees de santeacute numeacuteriseacutees Bregraveves observations

sur une reacuteglementation surreacutealiste raquo Revue droit et santeacute ndeg 36 2010 p 335 175

BAHR Anne BULACH Claudette FABER Steacutephanie laquo Comment appliquer la loi Informatique et Liberteacutes

agrave la recherche meacutedicale raquo op cit p 49

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

78

135 Cette deacutemarche constitue une premiegravere difficulteacute En effet les recherches meacutedicales

sont encadreacutees par diffeacuterents textes Jusque 2012 la recherche meacutedicale eacutetait encadreacutee pour

lrsquoessentiel par la loi ndeg 88-1138 du 20 deacutecembre 1988 relative agrave la protection des personnes

se precirctant agrave des recherches biomeacutedicales connue sous le nom de loi Huriet-Seacuterusclat176

Cette loi a deacutefini pour la premiegravere fois les recherches biomeacutedicales comme eacutetant des laquo essais

ou expeacuterimentations organiseacutes et pratiqueacutes sur lrsquoecirctre humain en vue du deacuteveloppement des

connaissances biologiques ou meacutedicales raquo Plusieurs modifications ont ensuite eacuteteacute apporteacutees

notamment par la loi ndeg 2004-806 du 9 aoucirct 2004 relative agrave la politique de santeacute publique177

qui a transposeacute les dispositions de la directive 200120CE du 4 avril 2001 relative agrave

lrsquoapplication de bonnes pratiques cliniques dans la conduite drsquoessais cliniques de

meacutedicaments agrave usage humain A ces dispositions srsquoajoutaient celles contenues au sein des lois

bioeacutethiques et notamment la loi ndeg 2004-800 du 6 aoucirct 2004 relative agrave la bioeacutethique178

reacuteviseacutee

par la loi ndeg 2001-814 du 7 juillet 2011179

En effet ces lois dont le contenu a eacuteteacute codifieacute au

sein du Code de la santeacute publique encadrent les dons des eacuteleacutements et produits du corps

humain Ainsi dans le cadre drsquoune recherche non interventionnelle portant sur une collection

biologique drsquoeacutechantillons humains le promoteur de la recherche devait effectuer drsquoune part

les deacutemarches relatives agrave la mise en œuvre de la recherche en elle-mecircme et drsquoautre part

celles relatives agrave la mise en place de la collection drsquoeacutechantillons Or les diffeacuterents dispositifs

sont difficiles agrave mettre en œuvre car il nrsquoexiste pas de reacuteelle coordination et le chercheur se

retrouve alors face agrave laquo une multipliciteacute des guichets drsquoautorisation et drsquoenregistrement raquo180

136 Le manque de coheacuterence des diffeacuterents textes ainsi que leur caractegravere incomplet ont

eacuteteacute de nombreuses fois critiqueacutes par la doctrine181

et crsquoest pourquoi un travail de refonte de la

leacutegislation applicable avait eacuteteacute mis en œuvre celui-ci ayant abouti agrave lrsquoadoption de la loi ndeg

176 Loi ndeg88-1138 du 20 deacutecembre 1988 dite Huriet relative agrave la protection des personnes qui se precirctent agrave des

recherches biomeacutedicales JORF du 22 deacutecembre 1988 p 16032 177

Loi ndeg 2004-806 du 9 aoucirct 2004 relative agrave la politique de santeacute publique JORF ndeg185 du 11 aoucirct 2004 p

14277 178

Loi ndeg 2004-800 du 6 aoucirct 2004 relative agrave la bioeacutethique JORF ndeg182 du 7 aoucirct 2004 p 14040 179

Loi ndeg 2011-814 du 7 juillet 2011 relative agrave la bioeacutethique JORF ndeg0157 du 8 juillet 2011 p 11826 180

CHEMTOB-CONCE Marie-Christine CAILLEUX Anne laquo Lrsquoimpact des nouvelles dispositions de la loi

relative aux recherches impliquant la personne humaine raquo meacutedecine et droit 2013 pp 30-35 181

V notamment en ce sens BOYER-BEVIERE Beacuteneacutedicte laquo Les principales reacuteformes de la loi ndeg 2011-300 du

5 mars 2012 sur les recherches impliquant la personne humaine RGDM ndeg 44 2012 pp 225-238 LEMAIRE

Franccedilois laquo Pourquoi faut-il encore reacuteformer la leacutegislation de la recherche biomeacutedicale raquo Meacutedecine et droit

2011 LAIGNEAU Jean-Franccedilois laquo Seacutecuriteacute et deacuteveloppement des recherches de la loi Bertrand agrave la loi

Jardeacute raquo meacutedecine et droit 2012

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

79

2012-300 du 5 mars 2012 sur les recherches impliquant la personne humaine182

plus

communeacutement appeleacutee loi JARDE Cependant le deacutecret drsquoapplication de cette loi

longtemps attendu nrsquoa eacuteteacute publieacute qursquoen novembre 2016183

137 Cette loi a permis drsquounifier le cadre juridique applicable agrave la recherche meacutedicale et ce

notamment afin de simplifier les deacutemarches des chercheurs En effet face au laquo mille-feuille

leacutegislatif raquo184

que constituent les diffeacuterentes lois encadrant la recherche le leacutegislateur a

souhaiteacute offrir agrave la recherche meacutedicale un cadre juridique plus lisible et surtout plus eacutequilibreacute

Olivier JARDE avait notamment reprocheacute lrsquoexcegraves de reacuteglementation qui existait pour

certaines recherches tandis que drsquoautres eacutetaient meneacutees dans laquo quasi-vide juridique raquo185

La

refonte de la reacuteglementation a donc consisteacute en la mise en place de diffeacuterentes cateacutegories de

recherches disposant drsquoun cadre juridique commun Deacutesormais trois cateacutegories de recherches

cohabitent les recherches interventionnelles qui comportent une intervention sur la personne

non justifieacutee par sa prise en charge habituelle les recherches interventionnelles qui ne portent

pas sur des meacutedicaments et qui ne comportent que des risques et des contraintes minimes et

les recherches non interventionnelles dont tous les actes sont pratiqueacutes et les produits utiliseacutes

de maniegravere habituelle Pour ces trois types de recherches la loi propose un cadre juridique

minimum applicable dans tous les cas Ainsi toutes les recherches devront faire lrsquoobjet drsquoun

avis du comiteacute de protection des personnes Cela permettra notamment agrave certains chercheurs

de publier leurs reacutesultats plus facilement186

138 Toutefois ces nouvelles dispositions ne font pas lrsquounanimiteacute au sein de la doctrine Si

certains feacutelicitent le leacutegislateur pour les efforts de simplification accomplis par la loi JARDE

et soulignent lrsquoimpact positif que ces dispositifs pourraient avoir sur le deacuteveloppement de la

182 Loi ndeg 2012-300 du 5 mars 2012 sur les recherches impliquant la personne humaine JORF ndeg 0056 du 6 mars

2012 p 4138 texte ndeg 1 183

Deacutecret ndeg 2016-1537 relatif aux recherches impliquant la personne humaine JORF ndeg 0267 du 17 novembre

2016 184

JARDE Olivier laquo Rapport fait au nom de la commission des affaires sociales sur la proposition de loi

modifieacutee par le Seacutenat relative aux recherches cliniques ou non interventionnelles impliquant la personne

humaine raquo Assembleacutee Nationale 7 avril 2000 185

LAIGNEAU Jean-Franccedilois laquo Seacutecuriteacute et deacuteveloppement des recherches de la loi Bertrand agrave la loi Jardeacute raquo

op cit p 166 186

BOYER-BEVIERE Beacuteneacutedicte laquo Les principales reacuteformes de la loi ndeg 2012-300 du 5 mars 2012 sur les

recherches impliquant la personne humaine raquo RGDM 2012 ndeg 44

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

80

recherche187

drsquoautres au contraire nrsquoheacutesitent pas agrave critiquer avec veacuteheacutemence cette loi qui nrsquoest

laquo pas plus digeste et compreacutehensible raquo188

que les preacuteceacutedents textes deacutenonccedilant une

laquo patheacutetique obscuriteacute des textes raquo189

Au-delagrave du cadre organisant les modaliteacutes de mise en œuvre drsquoune recherche

impliquant la personne humaine la particuliegravere sensibiliteacute du sujet a ameneacute le leacutegislateur agrave

preacutevoir un cadre speacutecifique applicable aux donneacutees de santeacute faisant lrsquoobjet drsquoun traitement

automatiseacute dans ce contexte

B Lrsquoencadrement particulier des traitements des donneacutees de santeacute dans le

cadre de la recherche

139 Conscient du domaine deacutelicat de la recherche et de lrsquoimportance drsquoeacuteviter les deacuteviances

et les abus le leacutegislateur a tregraves tocirct encadreacute lrsquoutilisation et le partage des donneacutees de santeacute dans

le cadre de la recherche Ainsi la loi ndeg 94-548 du 1er

juillet 1994 relative au traitement de

donneacutees nominatives ayant pour fin la recherche dans le domaine de la santeacute et modifiant la

loi ndeg 78-17 du 6 janvier 1978 relative agrave linformatique aux fichiers et aux liberteacutes190

est

venue compleacuteter la loi Informatique et Liberteacutes afin drsquoy inteacutegrer un chapitre consacreacute aux

traitements de donneacutees agrave caractegravere personnel dans le domaine de la recherche meacutedicale

Troisiegraveme volet du triptyque relatif agrave la bioeacutethique191

cette loi a fait lrsquoobjet drsquoune longue

maturation et eacutetait tregraves attendue des acteurs de la recherche meacutedicale192

140 Plus reacutecemment la loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute a modifieacute le cadre

applicable aux traitements des donneacutees agrave caractegravere personnel ayant pour fin la recherche dans

le domaine de la santeacute refondant ainsi le chapitre IX de la loi Informatique et Liberteacutes qui

pose les principes applicables aux traitement de donneacutees agrave caractegravere personnel dans le cadre

187 V en ce sens Marie CHEMTOB-CONCE Marie-Christine CAILLEUX Anne laquo Lrsquoimpact des nouvelles

dispositions de la loi relative aux recherches impliquant la personne humaine raquo op cit p 30 188

LEROYER Anne-Marie laquo Loi ndeg 2012-300 du 5 mars 2012 relative aux recherches impliquant la personne

humaine raquo RTD Civ 2012 p 384 189

Ibid 190

Loi ndeg 94-548 du 1er

juillet 1994 relative au traitement de donneacutees nominatives ayant pour fin la recherche

dans le domaine de la santeacute et modifiant la loi ndeg 78-17 du 6 janvier 1978 relative agrave linformatique aux fichiers et

aux liberteacutes JORF ndeg152 du 2 juillet 1994 p 9559 191

TUumlRK Alex laquo Rapport au nom de la Commission des lois raquo Seacutenat 19931994 p 87 192

MARLIAC-NEGRIER Claire laquo La protection des donneacutees nominatives informatiques en matiegravere de

recherche meacutedicale raquo Tome 1 Presses universitaires drsquoAix-Marseille 2001 p 106

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

81

de la recherche (1) Par ailleurs la CNIL a modifieacute sa meacutethodologie de reacutefeacuterence applicable

aux recherches biomeacutedicales (MR001) et en a adopteacute une nouvelle (MR003) (2) simplifiant

ainsi les deacutemarches pour les chercheurs souhaitant mettre en place un traitement de donneacutees

1) Les principes applicables aux traitements de donneacutees agrave caractegravere personnel dans le

cadre de la recherche meacutedicale

141 Par principe les traitements ayant une finaliteacute drsquointeacuterecirct public de recherche drsquoeacutetude ou

drsquoeacutevaluation dans le domaine de la santeacute doivent ecirctre autoriseacutes par la CNIL Lrsquoautoriteacute prend

sa deacutecision apregraves avoir recueilli drsquoune part lrsquoavis du Comiteacute de Protection des Personnes

(CPP) en ce qui concerne les recherches impliquant la personne humaine telles que deacutefinies agrave

lrsquoarticle L 1121-1 du Code de la santeacute publique ou du Comiteacute drsquoExpertise pour les

Recherches les Etudes et les Evaluations dans le domaine de la Santeacute (CEREES) pour les

demandes relatives agrave des recherches nrsquoimpliquant pas la personne humaine ou relatives agrave des

eacutetudes ou des eacutevaluations Ce comiteacute dont la composition exacte a eacuteteacute preacuteciseacutee par deacutecret193

doit rendre son avis dans un deacutelai drsquoun mois agrave compter de sa saisine deacutelai qui peut ecirctre

rameneacute agrave quinze jours en cas drsquourgence Cet avis portera sur laquo la meacutethodologie retenue sur la

neacutecessiteacute du recours agrave des donneacutees agrave caractegravere personnel sur la pertinence de celles-ci par

rapport agrave la finaliteacute du traitement et sil y a lieu sur la qualiteacute scientifique du projet raquo Le

comiteacute va apporter une caution eacutethique au projet de recherche

142 A noter que ce comiteacute vient remplacer lrsquoancien Comiteacute Consultatif sur le Traitement

de lrsquoInformation en matiegravere de Recherche dans le domaine de la Santeacute (CCTIRS) qui avec la

loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute disparaicirct Cette suppression du CCTIRS au

profit drsquoun comiteacute rebaptiseacute mais ayant les mecircmes missions peut intriguer Cependant le

deacutecret ndeg 2016-1872 du 26 deacutecembre 2016194

qui vient preacuteciser le fonctionnement du

CEREES tend agrave deacutemontrer que le leacutegislateur a souhaiteacute organiser celui-ci de maniegravere plus

preacutecise

193 Deacutecret ndeg 2016-1872 du 26 deacutecembre 2016 modifiant le deacutecret ndeg 2005-1309 du 20 octobre 2005 pris pour

lapplication de la loi ndeg 78-17 du 6 janvier 1978 relative agrave linformatique aux fichiers et aux liberteacutes JORF

ndeg0301 du 28 deacutecembre 2016 texte ndeg 34 194

Ibid

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

82

143 A ces formaliteacutes administratives le chapitre IX de la loi Informatique et Liberteacutes

ajoute drsquoautres obligations agrave la charge du responsable du traitement Ainsi une liste

drsquoinformations agrave fournir preacutealablement agrave la collecte des donneacutees et de maniegravere individuelle

aux personnes concerneacutees est dresseacutee agrave lrsquoarticle 57 de la loi Informatique et Liberteacutes195

Cette

obligation drsquoinformation nrsquoest pas absolue et deux exceptions sont preacutevues la premiegravere

concerne lrsquoimpossibiliteacute de retrouver le patient encas de recherche reacutetrospective la seconde

concerne lrsquohypothegravese dans laquelle le meacutedecin traitant estime pour des raisons leacutegitimes que

le patient doit ecirctre laisseacute dans lrsquoignorance du diagnostic

144 A ce sujet il est inteacuteressant de signaler que ces dispositions sont aujourdrsquohui en

contradiction avec la reacuteforme du Code de deacuteontologie intervenue le 7 mai 2012196

En effet le

Code de deacuteontologie preacutevoyait en son article 35 la possibiliteacute pour le meacutedecin de tenir un

patient dans lrsquoignorance drsquoun diagnostic ou drsquoun pronostic graves et ce pour des raisons

leacutegitimes qursquoil appreacuteciait en conscience En preacutevoyant une possibiliteacute de non divulgation de

lrsquoinformation par le praticien le Code de deacuteontologie eacutetait en opposition avec lrsquoarticle L

1111-2 du Code de la Santeacute Publique qui ne preacutevoit que trois exceptions agrave lrsquoobligation

drsquoinformation lrsquourgence lrsquoimpossibiliteacute drsquoinformer la volonteacute du patient drsquoecirctre tenu dans

lrsquoignorance Cette possibiliteacute est deacutesormais supprimeacutee et remplaceacutee par la disposition suivante

laquo toutefois lorsqursquoune personne demande agrave ecirctre tenue dans lrsquoignorance drsquoun diagnostic ou

pronostic sa volonteacute doit ecirctre respecteacutee sauf si des tiers sont exposeacutes agrave un risque de

contamination raquo Degraves lors il est leacutegitime de se demander quelles vont ecirctre les dispositions qui

preacutevalent

De notre point de vue le Code de deacuteontologie a eacuteteacute modifieacute afin drsquoecirctre mis en

conformiteacute avec les dispositions du Code de la santeacute publique et renforcer ainsi le droit agrave

lrsquoinformation des patients Dans cette optique cette possibiliteacute de tenir le patient dans

195 Cet article dispose laquo Les personnes aupregraves desquelles sont recueillies des donneacutees agrave caractegravere personnel ou

agrave propos desquelles de telles donneacutees sont transmises sont avant le deacutebut du traitement de ces donneacutees

individuellement informeacutees

1deg De la nature des informations transmises

2deg De la finaliteacute du traitement de donneacutees

3deg Des personnes physiques ou morales destinataires des donneacutees

4deg Du droit daccegraves et de rectification institueacute aux articles 39 et 40

5deg Du droit dopposition institueacute aux premier et troisiegraveme alineacuteas de larticle 56 ou dans le cas preacutevu au

deuxiegraveme alineacutea de cet article de lobligation de recueillir leur consentement raquo 196

Deacutecret ndeg 2012-694 du 7 mai 2012 portant modification du Code de deacuteontologie meacutedicale JORF ndeg0108 du 8

mai 2012 p 8479

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

83

lrsquoignorance drsquoun diagnostic ne devrait plus exister non plus dans le cadre de la recherche

meacutedicale sauf agrave admettre que la recherche puisse beacuteneacuteficier drsquoun cadre plus souple du fait des

buts poursuivis Or nous estimons que les donneacutees du patient et drsquoune maniegravere plus geacuteneacuterale

les droits du patients doivent ecirctre proteacutegeacutes de la mecircme maniegravere que le patient soit pris en

charge dans le cadre dlsquoune activiteacute de soins et de diagnostic ou dans le cadre drsquoune recherche

meacutedicale

145 Parmi les obligations incombant au responsable du traitement se trouve lrsquoobligation

drsquoanonymiser les donneacutees agrave caractegravere personnel obligation agrave laquelle il ne peut plus ecirctre

deacuterogeacute197

Enfin il faut souligner que la loi Informatique et Liberteacutes soumet toutes les

personnes ameneacutees agrave mettre en œuvre les traitements ou ayant accegraves aux donneacutees sur

lesquelles celui-ci porte au secret professionnel tel que deacutefini agrave lrsquoarticle 226-13 du Code

peacutenal Lrsquoensemble de ces deacutemarches constituent les formaliteacutes preacutealables agrave la mise en place

Cependant des formaliteacutes simplifieacutees existent par le biais des meacutethodologies de reacutefeacuterence

2) Les Meacutethodologies de Reacutefeacuterences MR001 et MR003

146 La version initiale de la loi du 1er

juillet 1994 preacutevoyait la possibiliteacute pour le Preacutesident

du CCTIRS de mettre en œuvre une proceacutedure simplifieacutee198

applicable aux traitements de

donneacutees agrave caractegravere personnel ayant pour finaliteacute la recherche en santeacute Toutefois ces

dispositions ne contenaient pas plus de preacutecisions quant aux recherches concerneacutees ou aux

modaliteacutes de mise en œuvre de cette proceacutedure simplifieacutee199

Neacuteanmoins la CNIL et le

CCTIRS avaient adopteacute un reacutegime simplifieacute de deacuteclaration des essais cliniques en 1998200

Cette proceacutedure simplifieacutee eacutetait applicable aux recherches entrant dans le champ drsquoapplication

197 Lrsquoarticle 55 de la loi Informatique et Liberteacutes dans sa version anteacuterieure au 26 janvier 2016 preacutevoyait

laquo lorsque ces donneacutees permettent lidentification des personnes elles doivent ecirctre codeacutees avant leur

transmission Toutefois il peut ecirctre deacuterogeacute agrave cette obligation lorsque le traitement de donneacutees est associeacute agrave des

eacutetudes de pharmacovigilance ou agrave des protocoles de recherche reacutealiseacutes dans le cadre deacutetudes coopeacuteratives

nationales ou internationales il peut eacutegalement y ecirctre deacuterogeacute si une particulariteacute de la recherche lexige La

demande dautorisation comporte la justification scientifique et technique de la deacuterogation et lindication de la

peacuteriode neacutecessaire agrave la recherche raquo Ces dispositions ont eacuteteacute supprimeacutees par la loi de modernisation de notre

systegraveme de santeacute 198

Lrsquoancienne version de lrsquoarticle 40-1 loi Informatique et Liberteacutes alineacutea 3 preacutevoyait la chose suivante laquo le

preacutesident du comiteacute consultatif peut mettre en œuvre une proceacutedure simplifieacutee raquo 199

PERRAY Romain laquo Traitement de donneacutees personnelles dans le cadre de recherches meacutedicales vers un

alleacutegement des formaliteacutes raquo Revue Lamy droit de lrsquoimmateacuteriel 2007 ndeg 24 pp 64-66 200

Proceacutedure simplifieacutee adopteacutee par le Comiteacute consultatif le 3 feacutevrier 1998 relative aux traitements

informatiques de donneacutees nominatives collecteacutees dans le cadre de recherches biomeacutedicales

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

84

de la loi du 20 deacutecembre 1988 modifieacutee sur la protection des personnes qui se precirctent agrave des

recherches biomeacutedicales

147 La loi du 6 aoucirct 2004 modifiant la loi Informatique et Liberteacutes initiale dans un premier

temps puis la loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute plus reacutecemment ont preacuteciseacute

cette possibiliteacute drsquoinstaurer des proceacutedures simplifieacutees Lrsquoarticle 54 IV preacutecise deacutesormais

laquo pour les cateacutegories les plus usuelles de traitements automatiseacutes de donneacutees de santeacute agrave

caractegravere personnel agrave des fins de recherche deacutetude ou deacutevaluation dans le domaine de la

santeacute la Commission nationale de linformatique et des liberteacutes peut homologuer et publier

des meacutethodologies de reacutefeacuterence destineacutees agrave simplifier la proceacutedure dexamen Celles-ci sont

eacutetablies en concertation avec le comiteacute dexpertise et des organismes publics et priveacutes

repreacutesentatifs des acteurs concerneacutes raquo Ces proceacutedures vont permettre aux responsables de

traitement en souscrivant agrave un engagement de conformiteacute vis-agrave-vis drsquoune meacutethodologie de

reacutefeacuterence drsquoeacuteviter de formuler une demande drsquoautorisation aupregraves de la CNIL Dans ce cas

les traitements peuvent ecirctre mis en œuvre degraves lors qursquoils respectent les conditions fixeacutees par la

Meacutethodologie de Reacutefeacuterence (conditions en termes de seacutecuriteacute du traitement notamment mais

eacutegalement en termes de dureacutee de conservation des donneacutees)

148 Conformeacutement agrave ces dispositions la CNIL avait donc adopteacute en 2006 une

meacutethodologie de reacutefeacuterence applicable aux traitements de donneacutees personnelles mis en œuvre

dans le cadre des recherches biomeacutedicales201

Lrsquoadoption de cette meacutethodologie de reacutefeacuterence a

eacuteteacute justifieacutee par le fait que les recherches biomeacutedicales sont deacutejagrave encadreacutees de maniegravere stricte

et selon des meacutethodologies standardiseacutees La MR-001 qui a eacuteteacute reacutecemment modifieacutee par la

deacutelibeacuteration CNIL ndeg 2016-262 du 21 juillet 2016202

srsquoapplique aux essais cliniques de

meacutedicaments agrave lrsquoexception des essais cliniques dits par grappe203

aux recherches

biomeacutedicales aux recherches interventionnelles qui comportent une intervention sur la

201 Meacutethodologie de reacutefeacuterence MR-001 pour les traitements de donneacutees personnelles opeacutereacutees dans le cadre des

recherches biomeacutedicales 202

Deacutelibeacuteration ndeg 2016-262 du 21 juillet 2016 portant modification de la meacutethodologie de reacutefeacuterence pour les

traitements de donneacutees personnelles opeacutereacutes dans le cadre des recherches biomeacutedicales (MR-001) JORF ndeg0189

du 14 aoucirct 2016 texte ndeg 76 203

GIRAUDEAU Bruno laquoLrsquoessai clinique randomiseacute par grappes raquo disponible sur [httpipubli-

inserministfr] Consulteacute le 22 feacutevrier 2017 Pour lrsquoauteur laquo un essai clinique randomiseacute par grappes (cluster

randomization trial) est un essai dans lequel on ne randomise pas individuellement des sujets mais des groupes

de sujets qursquoon appelle des laquo grappes raquo (clusters) Ces uniteacutes de randomisation peuvent ecirctre des hocircpitaux des

meacutedecins des familles des villages des entreprises autant drsquouniteacutes sociales pour lesquelles les sujets qui

composent une uniteacute ne peuvent ecirctre consideacutereacutes comme indeacutependants les uns des autres raquo

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

85

personne non justifieacutee par sa prise en charge habituelle aux recherches interventionnelles qui

ne portent pas sur des meacutedicaments et qui ne comportent que des risques et des contraintes

minimes (la liste de ces recherche a eacuteteacute fixeacutee par un arrecircteacute en date du 3 mai 2017204

) et les

recherches neacutecessitant la reacutealisation drsquoun examen des caracteacuteristiques geacuteneacutetiques

La Meacutethodologie de Reacutefeacuterence ndeg3 (MR003) quant agrave elle a eacuteteacute adopteacutee avec la deacutelibeacuteration

CNIL du 21 juillet 2016 et publieacutee le 14 aoucirct 2016205

Elle srsquoapplique aux essais cliniques de

meacutedicaments dits par grappe les recherches visant agrave eacutevaluer les soins courants et les

recherches non interventionnelles

Le leacutegislateur a donc preacutevu plusieurs dispositions venant encadrer lrsquoutilisation des

donneacutees de santeacute dans le cadre de la recherche meacutedicale Cependant il apparait opportun de

srsquointerroger sur la force de cette protection

C Les donneacutees de santeacute utiliseacutees dans le cadre de la recherche des donneacutees

moins bien proteacutegeacutees

149 Les donneacutees de santeacute du fait de leur statut de donneacutees sensibles beacuteneacuteficient drsquoune

protection speacutecifique Ainsi les donneacutees utiliseacutees dans le cadre des recherches meacutedicales eacutetant

eacutegalement des donneacutees de santeacute au sens de la deacutefinition que nous avons pu eacutetudier

preacuteceacutedemment206

devraient beacuteneacuteficier du mecircme degreacute de protection Force est de constater

que cela nrsquoest toujours pas le cas En effet afin de faciliter le travail des chercheurs certaines

mesures deacuterogatoires ont eacuteteacute eacutetablies qui fragilisent la protection instaureacutee autour des

donneacutees de santeacute utiliseacutees dans le cadre de la recherche

150 La premiegravere protection eacutecorneacutee est celle relative au secret meacutedical Les regravegles de droit

commun applicables en matiegravere de secret partageacute ne permettent normalement pas aux

meacutedecins cliniciens de partager leurs donneacutees avec des meacutedecins chercheurs ceux-ci ne

204 Arrecircteacute du 3 mai 2017 fixant la liste des recherches mentionneacutees au 2deg de larticle L 1121-1 du Code de la

santeacute publique JORF ndeg0107 du 6 mai 2017 texte ndeg 30 205

Deacutelibeacuteration ndeg 2016-263 du 21 juillet 2016 portant homologation dune meacutethodologie de reacutefeacuterence relative

aux traitements de donneacutees agrave caractegravere personnel mis en œuvre dans le cadre des recherches dans le domaine de

la santeacute ne neacutecessitant pas le recueil du consentement expregraves ou eacutecrit de la personne concerneacutee (MR-003) JORF

ndeg 0189 du 14 aoucirct 2016 texte ndeg 77 206

V Supra ndeg 63 agrave 69

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

86

faisant pas partie de lrsquoeacutequipe de soins207

Lrsquoarticle 55 de la loi Informatique et Liberteacutes vient

donc instaurer une exception au secret professionnel preacutecisant que laquo nonobstant les regravegles

relatives au secret professionnel les membres des professions de santeacute peuvent transmettre

les donneacutees agrave caractegravere personnel quils deacutetiennent dans le cadre dun traitement de donneacutees

autoriseacute en application de larticle 53 raquo Il peut donc ecirctre deacuterogeacute au secret professionnel srsquoil

srsquoagit pour des professionnels de partager des donneacutees de santeacute initialement collecteacutees afin

drsquoassurer la prise en charge du patient mais dont les chercheurs pourraient avoir besoin dans

le cadre de recherches reacutetrospectives Il est utile de preacuteciser que cette utilisation secondaire

des donneacutees nrsquoest pas contraire dans ce cas au principe de finaliteacute poseacutee par lrsquoarticle 6 de la

loi puisque ce mecircme article preacutevoit qursquoun traitement ulteacuterieur agrave des fins de recherche

scientifique est possible si celui est reacutealiseacute dans le respect de certaines dispositions preacutevues

par la loi et notamment celles du chapitre IX relatif au traitement des donneacutees agrave caractegravere

personnel ayant pour fin la recherche dans le domaine de la santeacute

151 Lrsquoarticle 55 essaie toutefois de compenser cette deacuterogation au secret professionnel en

instaurant une anonymisation obligatoire de ces donneacutees laquo Lorsque ces donneacutees permettent

lidentification des personnes leur transmission doit ecirctre effectueacutee dans des conditions de

nature agrave garantir leur confidentialiteacuteraquo Cela permet de justifier lrsquoexception au secret

professionnel dans la mesure ougrave les donneacutees transmises ne seront plus des donneacutees

personnelles A noter que jusqursquoau 27 janvier 2016 date drsquoentreacutee en vigueur de la loi de

modernisation de notre systegraveme de santeacute lrsquoarticle 55 preacutevoyait deux exceptions agrave cette

obligation drsquoanonymisation lorsque le traitement de donneacutees eacutetait associeacute agrave des eacutetudes de

pharmacovigilance ou si une particulariteacute de la recherche lexigeait Avec la loi de

modernisation de notre systegraveme de santeacute ces deacuterogations ont disparu

152 Lrsquoautre protection importante dont les donneacutees de santeacute issues de la recherche ne

beacuteneacuteficient pas est celle relative agrave lrsquoheacutebergement agreacuteeacute En effet face agrave lrsquoaugmentation de la

deacutemateacuterialisation des donneacutees de santeacute les eacutetablissements de santeacute ainsi que les

professionnels de santeacute nrsquoont pas eu drsquoautre choix que drsquoexternaliser le stockage de ces

donneacutees Afin de seacutecuriser cette pratique la loi du 4 mars 2002 a donc instaureacute un cadre

speacutecifique relatif agrave lrsquoheacutebergement des donneacutees de santeacute Ainsi lrsquoarticle L 1111-8 du Code de

207 V Supra ndeg 127

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

87

la santeacute publique dispose que laquo toute personne qui heacuteberge des donneacutees de santeacute agrave caractegravere

personnel recueillies agrave loccasion dactiviteacutes de preacutevention de diagnostic de soins ou de suivi

social et meacutedico-social pour le compte de personnes physiques ou morales agrave lorigine de la

production ou du recueil desdites donneacutees ou pour le compte du patient lui-mecircme doit ecirctre

agreacuteeacutee agrave cet effet Cet heacutebergement quel quen soit le support papier ou eacutelectronique est

reacutealiseacute apregraves que la personne prise en charge en a eacuteteacute ducircment informeacutee et sauf opposition

pour un motif leacutegitime raquo Nous nrsquoentrerons pas dans les deacutetails des questions que peut poser

lrsquoheacutebergement des donneacutees de santeacute celles-ci faisant lrsquoobjet drsquoun deacuteveloppement ulteacuterieur

Nous preacutefeacuterons nous pencher ici sur la question des donneacutees viseacutees par ces dispositions

En effet lrsquoarticle L 1111-8 du Code de la santeacute publique vise les donneacutees de santeacute

recueillies ou produites agrave lrsquooccasion des activiteacutes de preacutevention de diagnostic ou de soins

Ainsi les donneacutees collecteacutees dans le cadre de recherches biomeacutedicales ne sont pas

directement viseacutees par le texte Faut-il consideacuterer que celles-ci ne doivent pas ecirctre heacutebergeacutees

obligatoirement aupregraves drsquoun heacutebergeur agreacuteeacute Ougrave srsquoagit-il drsquoun oubli malheureux de la part

du leacutegislateur Les travaux parlementaires ne nous eacuteclairent pas agrave ce sujet Lrsquoapplication

stricto sensu de lrsquoarticle L 1111-8 du Code de la Santeacute Publique nous amegravenerait donc agrave

consideacuterer que les donneacutees collecteacutees dans le but drsquoeffectuer une recherche meacutedicale qui

nrsquoest ni un acte de preacutevention ni de diagnostic ni de soin nrsquoauraient pas agrave ecirctre heacutebergeacutees

chez un heacutebergeur agreacuteeacute Pour la CNIL cette position se justifie par le fait que ces donneacutees

auraient un caractegravere indirectement identifiant208

Toutefois comme nous venons de lrsquoeacutetablir

preacuteceacutedemment cela nrsquoest toujours pas le cas La secreacutetaire geacuteneacuterale de lrsquoASIP santeacute de

lrsquoeacutepoque Jeanne BOSSI a apporteacute une preacutecision lors drsquoune preacutesentation relative au deacutecret

heacutebergeur en expliquant que laquo le champ drsquoapplication de la proceacutedure drsquoagreacutement srsquoapplique

agrave toute base de donneacutees recueillies ou produites agrave lrsquooccasion des activiteacutes de preacutevention de

diagnostic ou de soins recherche secteur assurantiel raquo209

Mais contrairement agrave ce

qursquoavancent certains auteurs nous ne pensons pas que cette indication signifie que toutes les

donneacutees de santeacute quelles qursquoelles soient doivent ecirctre conserveacutees chez un heacutebergeur agreacuteeacute La

situation avanceacutee par Jeanne BOSSI fait uniquement reacutefeacuterence aux donneacutees qui auraient dans

un premier temps eacuteteacute recueillies pour des activiteacutes de soin de preacutevention ou de diagnostic

208 BRAC DE LA PERRIERE Marguerite FERRE Elise laquo Lrsquoheacutebergement des donneacutees de santeacute des textes agrave la

pratique raquo Gaz Pal 2011 ndeg 204 p 21 209

Preacutesentation disponible sur [httpwwwsantegouvfr] Consulteacutee le 15 mai 2017

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

88

puis reacutecupeacutereacutees ensuite agrave des fins drsquoutilisation secondaires Cela reacutevegravele au contraire que selon

le type de recherche les donneacutees de santeacute seront soumises agrave une protection diffeacuterente les

donneacutees de santeacute utiliseacutees dans le cadre de recherches reacutetrospectives seront mieux proteacutegeacutees

car initialement collecteacutees dans le cadre viseacute agrave lrsquoarticle L 1111-8 que celles collecteacutees dans le

seul but drsquoeffectuer une recherche meacutedicale

Nous estimons qursquoil est dommage que les donneacutees issues de la recherche ne soient pas

concerneacutees par ces dispositions car elles ne sont en aucun cas moins sensibles que drsquoautres

Nous pensons donc qursquoune eacutevolution de la reacuteglementation en ce sens devrait avoir lieu

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

89

Conclusion de la section

153 Pour assurer la qualiteacute et la continuiteacute des soins de leurs patients les professionnels de

santeacute doivent reacuteguliegraverement partager les donneacutees de santeacute qui les concernent Ce partage ne

peut se faire dans nrsquoimporte quelles conditions et le leacutegislateur a entendu lrsquoencadrer

Dans le cadre du soin tout drsquoabord en introduisant notamment la notion de secret partageacute

mais en permettant eacutegalement aux professionnels de santeacute qui nrsquoappartiendraient pas agrave une

mecircme eacutequipe de soins de partager des donneacutees concernant leur patient sous certaines

conditions

Dans le cadre de la recherche meacutedicale ensuite pour lequel un corpus leacutegislatif et

regraveglementaire strict existe afin de permettre le partage et lrsquoutilisation de donneacutees de santeacute agrave

caractegravere personnel dans ce contexte particulier

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient

91

Conclusion du chapitre

154 Dans le cadre de lrsquointroduction des TIC dans la pratique meacutedicale les traitements

informatiseacutes des donneacutees de santeacute se sont consideacuterablement deacuteveloppeacutes Dans ce contexte

une protection toute particuliegravere doit ecirctre garantie agrave ces donneacutees consideacutereacutees comme sensibles

par la loi Informatique et Liberteacutes Crsquoest justement cette loi qui constitue le premier pilier de

cette protection De fait ce texte de droit commun consacre des dispositions speacutecifiques aux

traitements de donneacutees de santeacute qui devront ecirctre mis en place avant tout traitement

automatiseacute Toutefois cette protection peut apparaitre comme eacutetant limiteacutee les nombreuses

exceptions agrave lrsquointerdiction de traitement des donneacutees de santeacute fragilisant le dispositif en place

Par ailleurs le leacutegislateur a entendu encadrer strictement les modaliteacutes de partage de ces

donneacutees particuliegraveres Ainsi le secret professionnel obligation preacutevue par de nombreux

textes devient le second pilier de la protection offerte aux donneacutees de santeacute Cependant

lrsquoapplication de ces regravegles dans le cadre de lrsquoutilisation des TIC peut parfois srsquoaveacuterer

deacutelicate Enfin le cas particulier des donneacutees de santeacute utiliseacutees dans le cadre de la recherche

nrsquoa pas eacuteteacute oublieacute et fait lrsquoobjet de dispositions leacutegislatives speacutecifiques Cependant ces

donneacutees peuvent apparaitre parfois moins bien proteacutegeacutees que les donneacutees de santeacute recueillies

dans le cadre du soin

Une fois les donneacutees de santeacute ayant fait lrsquoobjet drsquoun traitement automatiseacute sur support

informatique celles-ci vont devoir ecirctre conserveacutees et eacuteventuellement partageacutees par le biais des

TIC Le leacutegislateur a souhaiteacute dans ce cadre mettre en place une reacuteglementation propre aux

TIC en santeacute

93

Chapitre 2

Les modaliteacutes de conservation et de communication

des informations relatives aux patients

laquo La notion mecircme drsquoeacutequipe suppose le partage de lrsquoinformation dans le respect des droits

des patients Crsquoest pourquoi le plus grand risque serait aujourdrsquohui de continuer agrave deacuteployer

des systegravemes drsquoinformation non communiquants raquo210

155 Comme le souligne judicieusement le Dr Jacques LUCAS211

en matiegravere de soins la

prise en charge en eacutequipe preacutevaut deacutesormais Celle-ci se deacuteveloppe notamment par le biais de

lrsquoutilisation des TIC dans la pratique quotidienne Le partage seacutecuriseacute des donneacutees de santeacute

informatiseacutees ainsi que leur conservation sont donc devenus un enjeu majeur

156 Bien que certains puissent voir dans le deacuteveloppement de lrsquoinformatisation en

meacutedecine un risque drsquoaller agrave lrsquoencontre de lrsquohumanisme qui caracteacuterise le meacutetier de

meacutedecin212

il nrsquoen reste pas moins une formidable avanceacutee pour les professionnels de santeacute

comme pour les patients Car force est de constater que lrsquointroduction des TIC dans la

pratique meacutedicale permet drsquoameacuteliorer la coordination des soins par le biais de la mise en place

drsquoune communication faciliteacutee des informations en santeacute

Tout comme il existe un cadre relatif agrave la collecte et au traitement informatiseacute des

donneacutees de santeacute leur archivage et leur communication par voie informatique sont eacutegalement

encadreacutes Or ce cadre est multiple En effet les donneacutees de santeacute produites par les

eacutetablissements publics de santeacute qursquoelles soient informatiseacutees ou non vont ecirctre consideacutereacutees

comme des archives publiques et agrave ce titre leur archivage sera soumis aux dispositions du

Code du patrimoine (Section I Cependant de par leur informatisation lrsquoheacutebergement et la

communication de ces donneacutees de santeacute archives publiques vont devoir ecirctre soumis au

210 Livre blanc de lrsquoAssociation franccedilaise des heacutebergeurs agreacuteeacutes de donneacutees de santeacute 2014 consultable sur

[httpwwwdsihfr] p 13 211

Le Docteur Jacques LUCAS est Vice-Preacutesident du Conseil National de lrsquoOrdre des Meacutedecins 212

FAROUDJA Jean-Marie laquo Questions sur lrsquoinformatisation des dossiers meacutedicaux le partage et

lrsquoheacutebergement des donneacutees raquo rapport de la commission nationale permanente adopteacute lors des assises du Conseil

National de lrsquoordre des meacutedecins du 18 juin 2005 p 3

94

respect de dispositions particuliegraveres Pourtant comme nous le verrons ces dispositions nous

apparaissent agrave lrsquoheure actuelle quelque peu limiteacutees (Section II)

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

95

Section 1 La conservation des donneacutees de santeacute en tant qursquoarchives

hospitaliegraveres

157 Les donneacutees de santeacute recueillies agrave lrsquooccasion drsquoun acte meacutedical vont ecirctre

preacutecieusement conserveacutees au sein de son dossier meacutedical afin notamment drsquoassurer la

continuiteacute des soins du patient A lrsquohocircpital la conservation des donneacutees de santeacute est soumise agrave

une reacuteglementation stricte et preacutecise qui peut parfois paraicirctre complexe agrave articuler En effet

les textes applicables en la matiegravere sont multiples et les obligations pesant sur les

eacutetablissements de santeacute tout aussi nombreuses

Les donneacutees de santeacute produites par les eacutetablissements publics de santeacute vont ecirctre

qualifieacutees drsquoarchives hospitaliegraveres et agrave ce titre ecirctre reacutegies par des dispositions du Code du

patrimoine (Paragraphe 1) Toutefois du fait de leur sensibiliteacute toute particuliegravere les donneacutees

de santeacute ne peuvent pas ecirctre conserveacutees et stockeacutees sans srsquoassurer au preacutealable de la mise en

place de dispositifs permettant de preacuteserver leur seacutecuriteacute et leur confidentialiteacute (Paragraphe 2)

sect1 Les regravegles speacutecifiques aux archives publiques

158 La loi ndeg 2008-696 du 15 juillet 2008213

modifie lrsquoencadrement relatif aux archives

publiques Cette loi qui srsquoinscrivait dans un mouvement de transparence engageacute par le

leacutegislateur franccedilais depuis plusieurs anneacutees214

avait pour but drsquoameacuteliorer la protection des

archives et drsquoen faciliter lrsquoaccegraves

Les dossiers meacutedicaux produits par les eacutetablissements publics de santeacute personnes

morales de droit public entrent dans la cateacutegorie des archives publiques Lrsquoensemble des

dispositions qui les concerne et notamment la loi de 2008 va donc trouver agrave srsquoappliquer agrave ces

dossiers (A)

213 Loi ndeg 2008-696 du 15 juillet 2008 relative aux archives JORF ndeg0164 du 16 juillet 2008 p 11322

214 GARREC Reneacute laquo Rapport sur le projet de loi relatif aux archives raquo rapport fait au nom de la commission

des lois Seacutenat ndeg 146 19 deacutecembre 2007

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

96

Les dossiers meacutedicaux restent cependant soumis agrave une reacuteglementation speacutecifique

preacutevue par le Code de la santeacute publique Cela a pour conseacutequence de provoquer des

oppositions entre les diffeacuterentes regravegles drsquoapplication mais eacutegalement des difficulteacutes

drsquointerpreacutetation (B)

A Les conseacutequences de la qualification drsquoarchives publiques

159 Le Code du patrimoine deacutefinit de maniegravere exhaustive quels sont les documents qui

relegravevent des archives publiques (1) Ces deacutefinitions emportent plusieurs conseacutequences

juridiques notamment en matiegravere de dureacutee de conservation et de modaliteacutes drsquoeacutelimination des

documents (2) mais eacutegalement en matiegravere drsquoarchivage eacutelectronique des donneacutees de santeacute (3)

1) Deacutefinitions leacutegales

160 Lrsquoarchivage peut ecirctre deacutefini comme laquo lrsquoaction de conserver et de classer des

documents ne preacutesentant plus un inteacuterecirct immeacutediat raquo215

Lrsquoheacutebergement quant agrave lui consiste

en informatique en lrsquoaction laquo drsquoaccueillir sur un serveur un service ou des pages Web pour

les rendre accessibles aux utilisateurs raquo216

En ce qui concerne plus speacutecifiquement

lrsquoheacutebergement des donneacutees de santeacute cela consiste donc agrave leur fournir un site de sauvegarde

Notre exercice de deacutefinition doit ecirctre pousseacute un peu plus loin et il est neacutecessaire de se pencher

plus attentivement sur la notion drsquoarchive Crsquoest la loi du 3 janvier 1979 sur les archives217

qui

a donneacute pour la premiegravere fois dans son article initial une deacutefinition geacuteneacuterale de ce que sont

les archives Ainsi aux termes du Code du patrimoine laquo les archives sont lrsquoensemble des

documents quels que soient leur date leur forme et leur support mateacuteriel produits ou reccedilus

par toute personne physique ou morale et par tout service ou organisme public ou priveacute

dans lrsquoexercice de leur activiteacuteraquo218

Comme le souligne Catherine MORIN-DESSAILLY ce

nrsquoest donc pas lrsquoancienneteacute du document qui fait de lui une archive219

215 Deacutefinition du dictionnaire Larousse

216 Ibid

217 Loi ndeg79-18 du 3 janvier 1979 sur les archives JORF du 5 janvier 1979 p 43

218 Article L 211-1 du Code du patrimoine

219 MORIN-DESAILLY Catherine laquo Avis sur le projet de loi relatif aux archives raquo avis rendu au nom de la

commission des affaires culturelles Seacutenat ndeg 147 19 deacutecembre 2007 p 10

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

97

161 Le leacutegislateur distingue les archives publiques des archives priveacutees et les deacutefinit

comme laquo les documents qui procegravedent de lrsquoactiviteacute dans le cadre de leur mission de service

public de lrsquoEtat des collectiviteacutes territoriales des eacutetablissements publics et des autres

personnes morales de droit public ou des personnes de droit priveacute chargeacutees drsquoune telle

mission raquo220

Le leacutegislateur fait la distinction entre trois acircges des archives publiques221

lrsquoacircge

courant qui correspond agrave la peacuteriode pendant laquelle les donneacutees sont agrave la disposition des

personnes qui les ont collecteacutees lrsquoacircge intermeacutediaire qui correspond agrave la peacuteriode pendant

laquelle les donneacutees ne sont plus utiliseacutees mais sont toutefois conserveacutees par lrsquoadministration

notamment pour des raisons de preuve ou de suivi lrsquoacircge deacutefinitif qui concerne une petite

partie des archives publiques qui mecircme si elles ne preacutesentent plus drsquointeacuterecirct pour

lrsquoadministration qui les a produites conservent neacuteanmoins un inteacuterecirct historique scientifique

ou patrimonial222

Cette distinction est cruciale puisque de lrsquoacircge des archives vont deacutependre ensuite leur

modaliteacutes pratiques de conservation (notamment en termes de dureacutee) et de leur destruction

162 Il est important de souligner que le leacutegislateur a creacuteeacute des sous-cateacutegories drsquoarchives

publiques parmi lesquelles se trouvent les archives hospitaliegraveres Ces derniegraveres sont

reacuteglementeacutees par lrsquoarrecircteacute du 11 mars 1968223

qui preacutecise en son article 1 que laquo les archives

hospitaliegraveres consistent dans lrsquoensemble des titres concernant les biens droits et obligations

des eacutetablissements publics hospitaliers eacutenumeacutereacutes agrave lrsquoarticle 1er

du deacutecret ndeg 957 du 3 aoucirct

1959 des eacutetablissements de soins et des eacutetablissements de cure y compris les registres et

papiers eacutemanant de lrsquoadministration et des services meacutedicaux et chirurgicaux de ces divers

eacutetablissements raquo Degraves lors tout document reacutepondant agrave cette deacutefinition se verra appliquer les

regravegles prescrites par lrsquoarrecircteacute du 11 mars 1968 Traditionnellement une distinction est faite

220 Article L 211-4 du Code du patrimoine

221 Deacutecret ndeg 79-1037 du 3 deacutecembre 1979 relatif agrave la compeacutetence des services darchives publics et agrave la

coopeacuteration entre les administrations pour la collecte la conservation et la communication des archives

publiques JORF du 5 deacutecembre 1979 p 3056 et Deacutecret ndeg 2009-1124 du 17 septembre 2009 modifiant le deacutecret

ndeg 79-1037 du 3 deacutecembre 1979 relatif agrave la compeacutetence des services darchives publics et agrave la coopeacuteration entre

les administrations pour la collecte la conservation et la communication des archives publiques JORF ndeg0216

du 18 septembre 2009 p 15251 222

BANAT-BERGER Franccediloise laquo Archives et protection des donneacutees personnelles raquo RLDI 2013 ndeg95 p 93 223

Arrecircteacute du 11 mars 1968 JORF du 25 octobre 1968 p 10039

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

98

entre drsquoune part les archives hospitaliegraveres qualifieacutees drsquoadministratives et drsquoautre part celles

qualifieacutees drsquoarchives meacutedicales Enfin notre exercice de deacutefinition peut ecirctre conclu avec la

preacutecision suivante le leacutegislateur ne fait pas de diffeacuterence selon les supports retenus pour

lrsquoarchivage Ainsi les documents numeacuteriques audiovisuels les bases de donneacutees constituent

des archives au mecircme titre que les documents papiers

2) Conseacutequences juridiques

163 La qualification drsquoarchives publiques et plus particuliegraverement celle drsquoarchives

hospitaliegraveres va avoir des conseacutequences juridiques en matiegravere de dureacutee de conservation des

donneacutees (a) et en matiegravere drsquoeacutelimination des donneacutees (b)

a) Les conseacutequences relatives agrave la dureacutee de conservation des donneacutees

164 Les archives publiques sont comme nous lrsquoavons vu preacuteceacutedemment encadreacutees par des

textes preacutecis En ce qui concerne leur dureacutee de conservation le jeu de lrsquoapplication des

diffeacuterents textes de la loi agrave la simple circulaire peut paraicirctre un peu perturbant drsquoautant plus

que certains desdits textes sont anciens

165 La qualification drsquoarchives publiques entraicircne avant toute chose lrsquoobligation de

conserver ces donneacutees En effet lrsquoarticle L 211-2 du Code du patrimoine dispose que laquo la

conservation de ces documents est organiseacutee dans lrsquointeacuterecirct du public tant pour les besoins de

la gestion et de la justification des droits des personnes physiques ou morales publiques ou

priveacutees que pour la documentation historique de la recherche raquo En ce qui concerne plus

preacuteciseacutement les archives hospitaliegraveres les deacutelais de conservation vont reacutesulter agrave la fois des

textes relatifs aux archives publiques des textes relatifs agrave la conservation du dossier meacutedical

et de textes reacuteglementaires compleacutementaires intervenus pour fixer la dureacutee de conservation de

certaines cateacutegories de donneacutees de santeacute Lrsquoarrecircteacute du 11 mars 1968 classe dans son annexe

les archives hospitaliegraveres en diffeacuterentes cateacutegories auxquelles sont associeacutees des dureacutees de

conservation Ainsi agrave titre drsquoexemple dans la seacuterie Q qui concerne la population malades

hospitaliseacutes on trouve notamment les registres drsquoentreacutees et de sorties qui doivent ecirctre

conserveacutes indeacutefiniment tandis que dans la seacuterie K qui concerne le personnel on trouve les

mouvements du personnel administratif qui doivent ecirctre conserveacutes cinq ans Les archives

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

99

hospitaliegraveres dites administratives ont vu quant agrave elles leur dureacutee de conservation preacuteciseacutee

par plusieurs circulaires publieacutees entre 1993 et 1994224

166 Plus reacutecemment la loi du 4 mars 2002225

a introduit une dureacutee leacutegale de conservation

du dossier meacutedical226

Ces regravegles sont eacutedicteacutees agrave lrsquoarticle R 1112-7 du Code de la santeacute

publique Par principe le dossier meacutedical est conserveacute pendant une dureacutee de vingt ans agrave

compter de la date du dernier seacutejour de son titulaire dans leacutetablissement ou de la derniegravere

consultation externe en son sein Pour un patient mineur si la dureacutee de conservation dun

dossier sachegraveve avant le vingt-huitiegraveme anniversaire de son titulaire celle-ci est prorogeacutee

jusquagrave cette date Enfin pour les patients deacuteceacutedeacutes le dossier est conserveacute pendant une dureacutee

de dix ans agrave compter de la date du deacutecegraves

A noter que ces deacutelais sont suspendus par lintroduction de tout recours gracieux ou

contentieux tendant agrave mettre en cause la responsabiliteacute de leacutetablissement public de santeacute ou

de professionnels de santeacute en raison de leurs interventions au sein de leacutetablissement Enfin

certaines donneacutees de santeacute comme les donneacutees relatives aux transfusions sanguines ou les

donneacutees relatives agrave lrsquoaide meacutedicale agrave la procreacuteation auront une dureacutee de conservation

diffeacuterente de celles du dossier meacutedical traditionnel

167 Le but ici nrsquoest pas de dresser une liste exhaustive des deacutelais de conservation de

chaque type de donneacutees Nous souhaitions simplement souligner qursquoen tant qursquoarchives

publiques les archives hospitaliegraveres doivent reacutepondre agrave une obligation de conservation dont le

deacutelai deacutepend de la nature des informations archiveacutees Or en la matiegravere force est de constater

qursquoil existe presque autant de deacutelais diffeacuterents qursquoil y a de types de documents Une

harmonisation et surtout une mise agrave jour de lrsquoensemble de ces deacutelais serait souhaitable En

effet agrave lrsquoheure actuelle du fait de cette obligation de conservation mais eacutegalement du

224 Circulaire AD 93-4 du 14 mai1993 Archives des eacutetablissements publics drsquohospitalisation Circulaire AD 94-

2 du 18 janvier 1994 Tri et conservation des archives des eacutetablissements publics de santeacute documents produits

apregraves 1968 par les services administratifs chargeacutes de la gestion des hospitalisations et consultations Circulaire

AD 94-6 du 18 juillet 1994 Tri et conservation des archives des eacutetablissements publics de santeacute documents

produits apregraves 1968 par les services chargeacutes de la gestion du personnel et de la formation Circulaire AD 94-11

du 20 octobre 1994 Tri et conservation des documents produits apregraves 1968 par les eacutetablissements publics de

santeacute archives de lrsquoadministration geacuteneacuterale de lrsquoeacutetablissement (Seacuterie L de lrsquoinstruction annexeacutee agrave lrsquoarrecircteacute du 11

mars 1968) 225

Loi ndeg 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et agrave la qualiteacute du systegraveme de santeacute JORF du

5 mars 2002 p 4118 226

Le dossier meacutedical est deacutefini agrave lrsquoarticle R 1112-2 du Code de la santeacute publique

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

100

passage parfois difficile227

du papier au numeacuterique les eacutetablissements publics de santeacute

doivent faire face agrave des difficulteacutes de stockage qursquoelles soient physiques ou techniques De

mecircme comme nous le verrons ulteacuterieurement les supports de conservation informatique

proposeacutes actuellement ne garantissent pas la peacuterenniteacute neacutecessaire pour reacutepondre aux deacutelais

leacutegaux de conservation Les eacutetablissements se trouvent donc reacuteguliegraverement dans lrsquoobligation

pour plus de seacutecuriteacute de conserver les versions papiers en plus des versions informatiques de

certains documents afin de satisfaire aux obligations leacutegales

En matiegravere drsquoarchivage des documents hospitaliers un travail relatif au cadre leacutegal

qui prendrait en compte les nouvelles contraintes techniques auxquelles doivent faire face les

eacutetablissements publics de santeacute devrait donc ecirctre initieacute par le leacutegislateur

b) Les conseacutequences relatives agrave la suppression des donneacutees

168 En matiegravere drsquoeacutelimination des archives hospitaliegraveres il nous plaicirct agrave emprunter

lrsquoexpression de Caroline ZORN-MACREZ qui nous parle de laquo paradoxe de la

suppression raquo228

En effet dans ce domaine plusieurs dispositions vont venir se superposer

voire srsquoopposer creacuteant alors de grandes difficulteacutes drsquointerpreacutetation des textes

169 Classiquement les archives publiques qui ont atteint le troisiegraveme acircge peuvent faire

lrsquoobjet drsquoune destruction sous reacuteserve du respect de certaines conditions strictes preacutevues au

Code du patrimoine Une destruction des archives en dehors de ces regravegles entraicircne la

responsabiliteacute de lrsquoeacutetablissement Crsquoest drsquoailleurs ce qursquoa rappeleacute la Cour administrative

drsquoappel de Marseille dans une deacutecision du 25 juin 2009229

En lrsquoespegravece un centre hospitalier

nrsquoeacutetait pas en mesure de communiquer agrave un usager et ce malgreacute un avis de la CADA en ce

sens les bandes drsquoenregistrement du SAMU celles-ci ayant eacuteteacute deacutetruites Le centre

hospitalier estimait qursquoaucune faute ne pouvait lui ecirctre reprocheacutee aucun texte leacutegislatif ou

reacuteglementaire nrsquoimposant la conservation de ces bandes

La Cour drsquoappel de Marseille a consideacutereacute que lrsquoenregistrement des eacutechanges

teacuteleacutephoniques entre le meacutedecin reacutegulateur du SAMU et ses interlocuteurs constituait un

227 V infra ndeg 191 et s

228 ZORN-MACREZ Caroline laquo Chroniques martiennes des donneacutees de santeacute numeacuteriseacutees raquo RDS ndeg 36 juillet

2010 p 340 229

CAA Marseille 25 juin 2009 ndeg 07MA02024

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

101

document produit par lrsquohocircpital dans lrsquoexercice de ses activiteacutes et reacutepondait donc agrave la deacutefinition

des archives publiques Degraves lors la destruction des enregistrements eacutetant intervenue en dehors

de prescriptions preacutevues au sein de lrsquoarticle 16 du deacutecret ndeg 79-1037 du 3 deacutecembre 1979 la

destruction devait ecirctre consideacutereacutee comme fautive peu importe si celle-ci preacutesentait un

caractegravere intentionnel ou non Drsquoune maniegravere geacuteneacuterale comme le rappelle une instruction

ministeacuterielle du 14 aoucirct 2007230

lrsquoeacutelimination des archives publiques est subordonneacutee au visa

du directeur des archives deacutepartementales territorialement compeacutetent qui peut choisir drsquoen

conserver certaines de maniegravere deacutefinitive afin de documenter la rechercheToutefois

lrsquoeacutetablissement public de santeacute a toujours la possibiliteacute de choisir de conserver les archives

mecircme si la direction deacutepartementale des archives preacuteconise leur eacutelimination231

170 En ce qui concerne le cas plus speacutecifique des archives meacutedicales lrsquoarticle R 1112-7

du Code de la santeacute publique preacutevoit que laquo la deacutecision deacutelimination est prise par le

directeur de leacutetablissement apregraves avis du meacutedecin responsable de linformation meacutedicale

Dans les eacutetablissements publics de santeacute et les eacutetablissements de santeacute priveacutes participant agrave

lexeacutecution du service public hospitalier cette eacutelimination est en outre subordonneacutee au visa

de ladministration des archives qui deacutetermine ceux de ces dossiers dont elle entend assurer

la conservation indeacutefinie pour des raisons dinteacuterecirct scientifique statistique ou historique raquo

La question qui pourrait se poser ici et qui nrsquoest pas directement encadreacutee par les textes est

lrsquohypothegravese dans laquelle un patient en raison du droit agrave lrsquooubli dont il dispose demanderait

lrsquoeacutelimination de son dossier meacutedical et ce dans sa totaliteacute

171 A ce sujet il est avant tout neacutecessaire de tenter de deacutefinir ce qursquoest le droit agrave lrsquooubli

Actuellement il nrsquoen nrsquoexiste aucune deacutefinition Des infractions sont bien preacutevues par le Code

peacutenal en cas de conservation laquo des donneacutees agrave caractegravere personnel au-delagrave de la dureacutee preacutevue

par la loi ou le regraveglement par la demande drsquoautorisation ou drsquoavis ou par la deacuteclaration

preacutealable adresseacute agrave la CNIL raquo232

De mecircme lrsquoarticle 40 de la loi Informatique et Liberteacutes

preacutevoit bien pour toute personne concerneacutee par un traitement automatiseacute de donneacutees agrave

caractegravere personnel le droit drsquoobtenir que soient effaceacutees les donneacutees personnelles la

230 Instruction interministerielle NdegDHOSE1DAFDPACI 2007322 et NdegDAFDPACIRES2007014 du 14

aoucirct 2007 relative agrave la conservation du dossier meacutedical non parue au JORF 231

GARREC Reneacute laquo Rapport sur le projet de loi relatif aux archives raquo Rapport fait au nom de la commission

des lois Seacutenat op cit 232

Article 226-20 du Code peacutenal

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

102

concernant et qui seraient inexactes incomplegravetes eacutequivoques peacuterimeacutees ou dont la collecte

lrsquoutilisation la communication ou la conservation est interdite Enfin plus reacutecemment le

regraveglement europeacuteen a preacutevu dans son article 17 la possibiliteacute pour une personne dont les

donneacutees agrave caractegravere personnel feraient lrsquoobjet drsquoun traitement drsquoobtenir lrsquoeffacement de ces

donneacutees dans les meilleurs deacutelais mais dans la limite de certaines hypothegraveses strictement

preacutevues233

172 Toutefois il ne srsquoagit jamais drsquoune possibiliteacute pure et simple drsquoobtenir lrsquoeacutelimination

complegravete drsquoun traitement automatiseacute Au mieux le patient dispose-t-il drsquoun droit agrave

rectification au sujet de donneacutees erroneacutees Mais agrave qui appartient alors la possibiliteacute

drsquoappreacutecier si une donneacutee de santeacute est erroneacutee La loi Informatique et Liberteacutes reacutepond agrave cette

question puisque toujours dans son article 40 elle preacutecise qursquoil appartient au responsable de

traitement en cas de contestation de la demande de rectification ou de suppression de

donneacutees drsquoapporter la preuve que ces donneacutees ne sont pas fausses sauf srsquoil est eacutetabli que les

donneacutees ont eacuteteacute communiqueacutees par lrsquointeacuteresseacute ou avec son accord De plus la creacuteation drsquoun

dossier meacutedical eacutetant une obligation leacutegale pour lrsquoeacutetablissement et la loi speacuteciale deacuterogeant

au droit geacuteneacuteral une telle demande nous semble impossible agrave autoriser Pourtant la CNIL qui

a deacutejagrave eu agrave se prononcer sur une telle demande srsquoest montreacutee favorable agrave lrsquoapplication stricte

de lrsquoarticle 40 Ainsi elle a consideacutereacute comme eacutetant leacutegitime la demande drsquoun patient qui

exigeait que soit effaceacute lrsquoensemble des documents conserveacutes sur support informatique et

concernant ses diffeacuterentes hospitalisations Le patient invoquait le fait qursquoil eacutetait atteint drsquoune

affection qursquoil ne souhaitait pas reacuteveacuteler agrave sa famille et il craignait qursquoun membre de sa famille

233 Lrsquoarticle 17 du regraveglement europeacuteen preacutevoit laquo La personne concerneacutee a le droit dobtenir du responsable du

traitement leffacement dans les meilleurs deacutelais de donneacutees agrave caractegravere personnel la concernant et le

responsable du traitement a lobligation deffacer ces donneacutees agrave caractegravere personnel dans les meilleurs deacutelais

lorsque lun des motifs suivants sapplique

a) les donneacutees agrave caractegravere personnel ne sont plus neacutecessaires au regard des finaliteacutes pour lesquelles elles ont eacuteteacute

collecteacutees ou traiteacutees dune autre maniegravere

b) la personne concerneacutee retire le consentement sur lequel est fondeacute le traitement conformeacutement agrave larticle 6

paragraphe 1 point a) ou agrave larticle 9 paragraphe 2 point a) et il nexiste pas dautre fondement juridique au

traitement

c) la personne concerneacutee soppose au traitement en vertu de larticle 21 paragraphe 1 et il nexiste pas de motif

leacutegitime impeacuterieux pour le traitement ou la personne concerneacutee soppose au traitement en vertu de larticle 21

paragraphe 2

d) les donneacutees agrave caractegravere personnel ont fait lobjet dun traitement illicite

e) les donneacutees agrave caractegravere personnel doivent ecirctre effaceacutees pour respecter une obligation leacutegale qui est preacutevue

par le droit de lUnion ou par le droit de lEacutetat membre auquel le responsable du traitement est soumis

f) les donneacutees agrave caractegravere personnel ont eacuteteacute collecteacutees dans le cadre de loffre de services de la socieacuteteacute de

linformation viseacutee agrave larticle 8 paragraphe 1 raquo

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

103

meacutedecin dans lrsquohocircpital ougrave il eacutetait pris en charge consulte le systegraveme informatique et deacutecouvre

ainsi sa pathologie234

173 Bien qursquoil faille remarquer ici qursquoil ne srsquoagissait pas drsquoune demande drsquoeacutelimination

portant sur lrsquointeacutegraliteacute du dossier meacutedical lrsquoavis de la CNIL sur ce sujet nous paraicirct

neacuteanmoins dangereux agrave plusieurs titres Drsquoune part nous estimons que la CNIL remet en

question lrsquoefficaciteacute des regravegles relatives au secret professionnel En effet la deacutecision de

supprimer des donneacutees de santeacute par anticipation sur un eacuteventuel accegraves frauduleux agrave celles-ci

laisse agrave penser que la CNIL nrsquoa pas confiance dans les regravegles existantes en matiegravere de partage

de lrsquoinformation meacutedicale regravegles qui srsquoappliquent aux professionnels de santeacute La CNIL

semble oublier qursquoen matiegravere de secret professionnel les mecircme regravegles sont opposables qursquoil

soit question de donneacutees de santeacute papier ou informatiseacutees Drsquoautre part accepter la

suppression de donneacutees informatiseacutees au motif que lrsquoeacutetablissement public de santeacute possegravede

toujours la possibiliteacute de les conserver sur support papier va agrave lrsquoencontre du mouvement

actuel qui tend agrave une informatisation complegravete des dossiers meacutedicaux Ce genre de situation se

reacutevegravele donc tregraves bloquant pour les eacutetablissements publics de santeacute freinant consideacuterablement

le deacuteveloppement des TIC dans la pratique meacutedicale

Or de telles demandes ne peuvent que se multiplier dans les anneacutees agrave venir sous la

double pression de la peur de lrsquooutil informatique et de la crainte de lrsquoouverture agrave tous des

archives dont le deacutelai de conservation serait eacutecouleacute Nous pensons que la CNIL bien que

garante des droits des personnes dont les donneacutees font lrsquoobjet drsquoun traitement informatiseacute

devrait toutefois faciliter lrsquoinstauration drsquoun climat de confiance de lrsquooutil informatique

B Archives publiques archives hospitaliegraveres et secret meacutedical des regravegles

parfois en opposition

174 Suite agrave la loi du 15 juillet 2008235

reacuteformant les regravegles relatives aux archives des

interrogations quant agrave la communicabiliteacute des archives hospitaliegraveres et donc des dossiers

meacutedicaux ont vu le jour Ce questionnement fait suite agrave une disposition issue de cette loi et

234 Quinziegraveme rapport drsquoactiviteacute de la CNIL 1995 citeacute par SAMARCQ Nicolas BRIOIS Seacutebastien laquo Donneacutees

de santeacute agrave caractegravere personnel les enjeux de la diffusion des TIC raquo Expertises 2010 p 385 235

Loi ndeg 2008-696 du 15 juillet 2008 relative aux archives JORF ndeg0164 du 16 juillet 2008 p 11322

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

104

codifieacutee au Code du patrimoine agrave lrsquoarticle L 213-2 Ce texte dispose que laquo les archives

publiques sont communicables de plein droit agrave lrsquoexpiration drsquoun deacutelai de (hellip) vingt-cinq ans agrave

compter du deacutecegraves de lrsquointeacuteresseacute pour les documents dont la communication porte atteinte au

secret meacutedical raquo Le texte ajoute que laquo si la date du deacutecegraves nrsquoest pas connue le deacutelai est de

cent vingt ans agrave compter de la date de naissance de la personne en cause raquo Face agrave cette

disposition le directeur du centre hospitalier de Lorquin a saisi la CADA afin drsquoobtenir un

conseil concernant lrsquoapplication de ces dispositions aux dossiers meacutedicaux

175 Dans un conseil rendu le 16 avril 2009236

la CADA tient le raisonnement suivant en

application de lrsquoarticle L 211-4 du Code du patrimoine les documents des eacutetablissements

publics de santeacute sont des archives publiques archives qui au titre de lrsquoarticle L 213-2 du

mecircme code sont communicables de plein droit vingt-cinq ans agrave compter du deacutecegraves de

lrsquointeacuteresseacute pour les documents dont la communication porte atteinte au secret meacutedical ou cent

vingt ans agrave compter de la date de naissance de la personne en cause Elle poursuit son

raisonnement en preacutecisant que les dossiers meacutedicaux ayant le caractegravere drsquoarchives publiques

sont donc librement communicables dans les conditions preacutevues agrave lrsquoarticle L 212-2 du Code

du patrimoine La CADA ajoute enfin que le dernier alineacutea de lrsquoarticle L 1110-4 du Code de

la santeacute publique237

qui encadre les modaliteacutes de communications des informations drsquoune

personne deacuteceacutedeacutee agrave ses ayants droit nrsquoest alors plus applicable Selon la CADA les dossiers

meacutedicaux passeacute un certain deacutelai pourraient donc ecirctre librement communicables agrave nrsquoimporte

quelle personne qui en formulerait la demande Face agrave cet avis la DHOS a via une circulaire

du 21 aoucirct 2009238

rappeleacute lrsquoeacutetat du droit en matiegravere de communication des informations de

santeacute relatives agrave une personne deacuteceacutedeacutee ayant eacuteteacute hospitaliseacutee dans un eacutetablissement public de

santeacute ou un eacutetablissement priveacute chargeacute drsquoune mission de service public La DHOS preacuteconise

aux eacutetablissements de santeacute lrsquoorganisation de lrsquoeacutelimination des dossiers meacutedicaux et ce

laquo avec une particuliegravere attention raquo En effet par le truchement des articles du Code du

patrimoine preacuteciteacutes et des dispositions du Code de la santeacute publique relatives agrave la dureacutee de

236 CADA conseil ndeg 20091205 seacuteance du 16 avril 2009

237 Cet alineacutea dispose laquo le secret meacutedical ne fait pas obstacle agrave ce que les informations concernant une

personne deacuteceacutedeacutee soient deacutelivreacutees agrave ses ayants droit dans la mesure ougrave elles leur sont neacutecessaires pour leur

permettre de connaicirctre les causes de la mort de deacutefendre la meacutemoire du deacutefunt ou de faire valoir leurs droits

sauf volonteacute contraire exprimeacutee par la personne avant son deacutecegraves raquo 238

Circulaire ndeg DHOSE12009271 du 21 aoucirct 2009 relative agrave la communicabiliteacute des informations de santeacute

concernant une personne deacuteceacutedeacutee ayant eacuteteacute hospitaliseacutee dans un eacutetablissement public de santeacute ou un

eacutetablissement de santeacute priveacute chargeacute drsquoune mission de service public non publieacutee au JORF

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

105

conservation des dossiers meacutedicaux la DHOS estime que lrsquoeacutelimination systeacutematique des

dossiers meacutedicaux eacutevitera leur communication au public

176 Comme une partie de la doctrine nous pensons que cette nouvelle disposition

introduite par la loi de 2008 relative aux archives ne srsquoapplique pas aux dossiers meacutedicaux

De fait bien qursquoil soit exact que les dossiers meacutedicaux soient des archives publiques au sens

de lrsquoarticle L 213-4 du Code du patrimoine ce sont eacutegalement et avant tout des documents

administratifs au sens de la loi du 17 juillet 1978 portant diverses mesures dameacutelioration des

relations entre ladministration et le public et diverses dispositions dordre administratif social

et fiscal239

aujourdrsquohui codifieacute au Code des relations entre le public et les administrations

Ainsi la lecture attentive des articles L 311-5 agrave L 311-8 de ce code nous permet de tenir une

position diffeacuterente de celle de la CADA et la DHOS Ces articles distinguent trois cateacutegories

de documents administratifs les documents non communicables les documents

communicables uniquement agrave lrsquointeacuteresseacute et enfin les documents non communicables qui

peuvent neacuteanmoins lrsquoecirctre agrave titre drsquoexception et notamment dans les conditions et deacutelais

preacutevus aux articles L 213-1 et L 213-2 du Code du patrimoine Ainsi une interpreacutetation

stricte de ces dispositions240

nous permet drsquoaffirmer que seuls les documents dont la liste est

dresseacutee agrave lrsquoarticle L 311-5 du Code des relations entre le public et les administrations seraient

exceptionnellement communicables dans les deacutelais et conditions preacutevus agrave lrsquoarticle L 213-2 du

Code du patrimoine Or les dossiers meacutedicaux sont consideacutereacutes aux termes de lrsquoarticle L 311-

6 du Code des relations entre le public et les administrations comme uniquement

communicables aux personnes inteacuteresseacutees Ceci est drsquoailleurs en adeacutequation avec les

dispositions de lrsquoarticle L 1111-7 du Code de la santeacute publique relatives agrave lrsquoaccegraves agrave son

dossier meacutedical par lrsquousager article drsquoailleurs expresseacutement citeacute par les dispositions de la loi

Dans cette hypothegravese les documents laquo dont la communication porte atteinte au secret

meacutedical raquo seraient tous ceux deacutetenus par lrsquoeacutetablissement de santeacute mais non preacutesents au dossier

meacutedical A titre drsquoexemple il est possible de citer les documents de facturation ou encore les

carnets de rendez-vous

239 Loi ndeg 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures dameacutelioration des relations entre ladministration et

le public et diverses dispositions dordre administratif social et fiscal JORF du 18 juillet 1978 p 2851 240

BEAUJEAN Isabelle laquo Lrsquoinquieacutetant devenir des dossiers patients conserveacutes par les eacutetablissements publics de

santeacute au-delagrave de 25 ansraquo RDS ndeg 45 2012 p 236

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

106

177 Cette circulaire eacutetonnante en plusieurs points nrsquoa toutefois susciteacute que peu de

commentaires au sein de la doctrine Ceux qui existent sont assez trancheacutes Certains estiment

que cette circulaire relegraveve laquo drsquoun emballement rocambolesque raquo critiquent le raisonnement de

la DHOS et estiment qursquoil y a laquo urgence agrave ne pas appliquer cette recommandation raquo241

Drsquoautres affirment tout simplement que laquo la position de la CADA et de la DHOS semble

critiquable raquo preacutecisant qursquoen tout eacutetat de cause lrsquoavis de la CADA et la circulaire

interpreacutetative de la DHOS ne revecirctent aucunement un caractegravere obligatoire242

Au-delagrave des regravegles applicables aux archives publiques lrsquoutilisation des TIC en matiegravere de

conservation des donneacutees de santeacute a ameneacute le leacutegislateur agrave creacuteer un cadre speacutecifique relatif agrave

lrsquoheacutebergement de ces donneacutees sensibles

sect2 La conservation agrave lrsquoegravere des TIC le cadre de lrsquoheacutebergement des

donneacutees de santeacute

178 La conservation des donneacutees de santeacute sur support informatique doit respecter un cadre

reacuteglementaire preacutecis instaureacute par le leacutegislateur dans un souci de proteacuteger agrave la fois la

confidentialiteacute et la seacutecuriteacute de ces donneacutees Ainsi lrsquoheacutebergement des donneacutees de santeacute et

notamment lrsquoheacutebergement externaliseacute aupregraves de tiers reacutepond agrave un cadre strict (A) instaureacute

depuis plusieurs anneacutees et reacutecemment reacutenoveacute

Toutefois la probleacutematique majeure aujourdrsquohui reste lrsquoopposition de la technique et

de son eacutevolution aux regravegles juridiques (B)

A Lrsquoheacutebergement des donneacutees de santeacute de lrsquoagreacutement agrave la certification

179 Lrsquoactiviteacute drsquoheacutebergement de donneacutees de santeacute est strictement encadreacutee depuis

plusieurs anneacutees Les regravegles instaureacutees ont toutefois mis du temps avant drsquoecirctre pleinement

applicables (1) et lrsquoagreacutement dont la proceacutedure est vite apparue comme lourde (2) a eacuteteacute

241 ZORN-MACREZ Caroline laquo Les dossiers meacutedicaux des deacutefunts des archives publiques non

communicables raquo RLDI ndeg 56 2010 p 63 242

BEAUJEAN Isabelle laquo Lrsquoinquieacutetant devenir des dossiers des patients conserveacutes par les eacutetablissements

publics de santeacute au-delagrave du deacutelai de 25 ans raquo op cit p 36

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

107

remplaceacute par une certification instaureacutee par la loi de modernisation de notre systegraveme de

santeacute243

et compleacuteteacutee par une ordonnance de janvier 2017244

(3)

1) Des regravegles agrave la mise en place laborieuse

180 La possibiliteacute pour un eacutetablissement ou un professionnel de santeacute drsquoexternaliser

lrsquoheacutebergement des donneacutees de santeacute informatiseacutees aupregraves drsquoun tiers agreacuteeacute a eacuteteacute instaureacutee par

la loi du 4 mars 2002245

Celle-ci a inseacutereacute au Code de la santeacute publique un article L 1111-8

qui preacutevoit246

les dispositions suivantes laquo toute personne qui heacuteberge des donneacutees de santeacute agrave

caractegravere personnel recueillies agrave loccasion dactiviteacutes de preacutevention de diagnostic de soins

ou de suivi social et meacutedico-social pour le compte de personnes physiques ou morales agrave

lorigine de la production ou du recueil desdites donneacutees ou pour le compte du patient lui-

mecircme doit ecirctre agreacuteeacutee agrave cet effet Cet heacutebergement quel quen soit le support papier ou

eacutelectronique est reacutealiseacute apregraves que la personne prise en charge en a eacuteteacute ducircment informeacutee et

sauf opposition pour un motif leacutegitime raquo Il est inteacuteressant de preacuteciser que jusque tregraves

reacutecemment le texte visait expresseacutement les eacutetablissements de santeacute et les professionnels de

santeacute ou la personne concerneacutee par les donneacutees comme deacutebiteurs de cette obligation

drsquoheacuteberger les donneacutees aupregraves drsquoun tiers agreacuteeacute Depuis la loi de modernisation de notre santeacute

cette obligation incombe aux laquo personnes physiques ou morales agrave lrsquoorigine de la production

ou du recueil desdites donneacutees raquo et porte sur les donneacutees de santeacute ainsi que sur les donneacutees

relatives au suivi social ou meacutedico-social drsquoune personne La formulation finalement retenue

est donc plus vaste

181 Cette disposition du Code de la santeacute publique qui a fait lrsquoobjet de sept modifications

successives entre 2002 et 2016 est compleacuteteacutee par le deacutecret du 4 janvier 2006247

Celui-ci

preacutecise les modaliteacutes propres au dossier de demande drsquoagreacutement au comiteacute drsquoagreacutement ainsi

qursquoau modegravele du contrat qui doit ecirctre signeacute entre lrsquoheacutebergeur et lrsquoeacutetablissement de santeacute ou le

243 Loi ndeg 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre systegraveme de santeacute JORF ndeg0022 du 27 janvier

2016 texte 1 244

Ordonnance ndeg 2017-27 du 12 janvier 2017 relative agrave lheacutebergement de donneacutees de santeacute agrave caractegravere

personnel JORF ndeg0011 du 13 janvier 2017 texte ndeg 17 245

Loi ndeg 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et agrave la qualiteacute du systegraveme de santeacute JORF du

5 mars 2002 p 4118 246

Lrsquoarticle L 1111-8 du Code de la santeacute publique a eacuteteacute modifieacute par lrsquoarticle 96 de la loi ndeg 2016-41 du 26

janvier 2016 de modernisation de notre systegraveme de santeacute 247

Deacutecret ndeg2006-6 du 4 janvier 2006 relatif agrave lheacutebergement de donneacutees de santeacute agrave caractegravere personnel et

modifiant le Code de la santeacute publique JORF ndeg4 du 5 janvier 2006 p 174

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

108

professionnel de santeacute qui externalise les donneacutees de santeacute recueillies Or la mise en place de

ces dispositions nrsquoa pas eacuteteacute simple En effet le deacutecret preacutevoyait initialement une mise en

œuvre des modaliteacutes pratiques drsquoagreacutement des heacutebergeurs au 1er

janvier 2007 Toutefois la loi

du 30 janvier 2007248

suspend la proceacutedure drsquoagreacutement des heacutebergeurs et ce pour une peacuteriode

de 2 ans agrave compter du 2 feacutevrier 2007 En effet lrsquoarticle 25 IV de la loi preacutevoyait laquo sauf

lorsquelle sapplique agrave des demandes dagreacutement portant sur lheacutebergement des dossiers

meacutedicaux personnels preacutevus agrave larticle L 161-36-1 du Code de la seacutecuriteacute sociale la

proceacutedure dagreacutement preacutevue agrave larticle L 1111-8 du Code de la santeacute publique est suspendue

pendant une peacuteriode de deux ans agrave compter de la publication de la preacutesente loi raquo La raison

principale de cette suspension eacutetait la neacutecessiteacute pour assurer une bonne mise en œuvre de ces

dispositions drsquoadopter au preacutealable des reacutefeacuterentiels de seacutecuriteacute et drsquointeropeacuterabiliteacute la

proceacutedure drsquoagreacutement eacutetant difficile agrave mettre en œuvre tant que ces reacutefeacuterentiels permettant

aux candidats drsquoobtenir une certification aupregraves drsquoorganismes accreacutediteacutes nrsquoeacutetaient pas

adopteacutes249

Lagrave encore le leacutegislateur a montreacute son incapaciteacute agrave reacuteagir suffisamment rapidement

face au deacuteveloppement des technologies et le deacutecalage entre technologie et encadrement

juridique a conduit pendant deux anneacutees agrave un flou regraveglementaire dangereux pour les donneacutees

sensibles que sont les donneacutees santeacute A noter que durant cette peacuteriode de suspension les

heacutebergeurs eacutetaient tenus de satisfaire aux dispositions de la loi Informatique et Liberteacute et agrave ce

titre obtenir un avis favorable de la CNIL250

182 Crsquoest le GIP-DMP251

qui a eacuteteacute chargeacute pendant cette peacuteriode de deacutefinir le reacutefeacuterentiel

de constitution des dossiers de demande drsquoagreacutement Cette eacutelaboration a eacuteteacute effectueacutee en

concertation avec les opeacuterateurs les industriels et les maicirctrises drsquoouvrages reacutegionales du

secteur de la santeacute Lrsquoobjectif afficheacute de ce reacutefeacuterentiel eacutetait drsquoassurer aux candidats agrave

lrsquoheacutebergement laquo un traitement eacutequitable et efficace lors de leurs candidatures raquo252

mais

eacutegalement laquo de traduire de faccedilon concregravete les exigences drsquoun texte reacuteglementaire long et

248 Loi ndeg 2007-127 du 30 janvier 2007 ratifiant lordonnance ndeg 2005-1040 du 26 aoucirct 2005 relative agrave

lorganisation de certaines professions de santeacute et agrave la reacutepression de lusurpation de titres et de lexercice illeacutegal

de ces professions et modifiant le Code de la santeacute publique JORF ndeg27 du 1 feacutevrier 2007 p 1937 249

BALLET Philippe laquo Ougrave en est la proceacutedure drsquoagreacutement des heacutebergeurs de donneacutees de santeacute agrave caractegravere

personnel raquo Gaz Pal ndeg 109 2007 p 20 250

Loi ndeg 2007-127 du 30 janvier 2007 ratifiant lordonnance ndeg 2005-1040 du 26 aoucirct 2005 relative agrave

lorganisation de certaines professions de santeacute et agrave la reacutepression de lusurpation de titres et de lexercice illeacutegal

de ces professions et modifiant le Code de la santeacute publique JORF ndeg27 du 1 feacutevrier 2007 p 1937 texte ndeg 1 251

Aujourdrsquohui devenu lrsquoAgence des Systegravemes drsquoInformation Partageacutee en santeacute (ASIP Santeacute) 252

BOSSI Jeanne laquo Le rocircle de lrsquoAgence des systegravemes drsquoinformation partageacutes de santeacute dans la proceacutedure

drsquoagreacutement raquo Actualiteacutes Jurisanteacute ndeg 74 juillet 2011 p 9

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

109

compliqueacute raquo253

A la reprise de la proceacutedure drsquoagreacutement les heacutebergeurs ont eacuteteacute tenus de

deacuteposer un dossier de demande drsquoagreacutement et drsquoobtenir celui-ci afin de pouvoir maintenir

leur activiteacute A lrsquoheure actuelle254

une centaine drsquoagreacutements ont eacuteteacute deacutelivreacutes par le comiteacute

Ceux-ci concernent parfois une mecircme socieacuteteacute qui propose plusieurs types drsquoactiviteacute

drsquoheacutebergement diffeacuterents Lrsquoactiviteacute du comiteacute est neacuteanmoins ameneacutee agrave disparaitre puisque

lrsquoordonnance du 12 janvier 2017255

substitue agrave la proceacutedure drsquoagreacutement une proceacutedure de

certification

2) Lrsquoagreacutement des heacutebergeurs une proceacutedure critiqueacutee

La proceacutedure drsquoagreacutement des heacutebergeurs est deacutecrite tregraves preacuteciseacutement au sein du deacutecret

dit heacutebergeur (a) Celle-ci preacutesente un certain nombre de lacunes (b) sources de critiques

reacuteguliegraveres

a) Points essentiels de la proceacutedure

183 Le but principal de la proceacutedure instaureacutee par le deacutecret du 4 janvier 2006 est

drsquoorganiser et drsquoencadrer le deacutepocirct la conservation et la restitution des donneacutees de santeacute agrave

caractegravere personnel et ce dans des conditions qui vont permettre de garantir la confidentialiteacute

et la seacutecuriteacute des donneacutees De ce fait le deacutecret heacutebergeur a mis en place une proceacutedure stricte

et formaliseacutee applicable agrave toute personne ou entreprise degraves lors qursquoelle conserve des donneacutees

de santeacute de personnes pour lesquelles elles nrsquointerviennent pas dans la prise en charge

meacutedicale La proceacutedure se deacuteroule en plusieurs temps Le dossier de demande drsquoagreacutement

formaliseacute selon le reacutefeacuterentiel de constitution des dossiers mis en place par lrsquoASIP santeacute sera

drsquoabord soumis agrave la CNIL qui dispose drsquoun deacutelai de deux mois renouvelable une fois afin

drsquoappreacutecier laquo les garanties preacutesenteacutees par le candidat en matiegravere de protection des personnes

agrave lrsquoeacutegard des traitements de donneacutees de santeacute agrave caractegravere personnel et de seacutecuriteacute de ces

donneacutees raquo256

La demande est ensuite transmise avec lrsquoavis de la CNIL le cas eacutecheacuteant au

comiteacute drsquoagreacutement des heacutebergeurs257

qui dispose drsquoun deacutelai drsquoun mois renouvelable une fois

253 Ibid

254 Chiffres en date du 25 novembre 2016 veacuterifieacutes sur le site de lrsquoASIP santeacute

[httpesantegouvfrservicesreferentielssecuritehebergeurs-agrees] 255

Article 1er

de lrsquoordonnance ndeg 2017-27 du 12 janvier 2017 relative agrave lheacutebergement de donneacutees de santeacute agrave

caractegravere personnel JORF ndeg0011 du 13 janvier 2017 texte ndeg 17 256

Article R 1111-10 du Code de la santeacute publique 257

Ce comiteacute placeacute aupregraves du ministre chargeacute de la santeacute a eacuteteacute creacuteeacute par le deacutecret de janvier 2006 Ces membres

qui sont nommeacutes pour 5 ans par arrecircteacute du ministre en charge de la santeacute sont les suivants un membre de

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

110

pour rendre un avis sur le dossier de candidature agrave lrsquoagreacutement Sur demande du secreacutetaire

geacuteneacuteral du Ministegravere chargeacute des Affaires Sociale lrsquoASIP Santeacute a eacuteteacute chargeacutee drsquoinstruire

preacutealablement les dossiers de demandes drsquoagreacutement afin de faciliter le travail du Comiteacute

Ainsi un comiteacute drsquoinstruction interne agrave lrsquoASIP Santeacute a eacuteteacute mis en place en 2009 ayant pour

mission de reacutediger un rapport ainsi que des recommandations globales qui sont transmis

ensuite au comiteacute drsquoagreacutement Enfin une fois lrsquoavis du comiteacute rendu le ministre chargeacute de la

santeacute dispose drsquoun deacutelai de deux mois pour prendre sa deacutecision Passeacute ce deacutelai la demande est

reacuteputeacutee rejeteacutee

184 Une fois agreacuteeacutes les heacutebergeurs srsquoengagent agrave rendre chaque anneacutee un rapport drsquoauto-

eacutevaluation Cette proceacutedure qui repose principalement sur une relation de confiance est

toutefois compleacuteteacutee par de possibles controcircles de la CNIL A titre drsquoexemple en 2011 la

CNIL a prononceacute un avertissement agrave lencontre dun heacutebergeur de donneacutees de santeacute suite agrave

une deacuteclaration mensongegravere contenue dans son dossier de demande dagreacutement En lrsquoespegravece

la socieacuteteacute preacutetendait chiffrer les donneacutees meacutedicales heacutebergeacutees par le biais drsquoun proceacutedeacute de

chiffrage fort258

ce qui nrsquoeacutetait pas le cas Lors drsquoun controcircle sur place reacutealiseacute en 2011 la

CNIL a constateacute que les donneacutees nrsquoeacutetaient pas chiffreacutees et qursquoelles eacutetaient de plus accessibles

aux administrateurs informatiques de la socieacuteteacute Dans lrsquoavis rendu par la CNIL celle-ci srsquoest

prononceacutee sur les garanties preacutesenteacutees par le candidat en matiegravere de seacutecuriteacute des donneacutees de

santeacute faisant lrsquoobjet drsquoun traitement informatiseacute et avait estimeacute que lrsquoheacutebergeur ne respectait

pas lrsquoobligation poseacutee agrave lrsquoarticle 6-1 de la loi Informatique et Liberteacute agrave savoir traiter les

donneacutees de maniegravere licite

b) Une proceacutedure remise en cause

La proceacutedure drsquoagreacutement des heacutebergeurs de donneacutees de santeacute a fait lrsquoobjet de plusieurs

critiques

lrsquoinspection des affaires sociales de repreacutesentant des associations compeacutetentes en matiegravere de santeacute 2

repreacutesentants des professionnels de santeacute et de 3 personnaliteacutes qualifieacutees dans les domaines de lrsquoeacutethique et du

droit de la seacutecuriteacute des systegravemes drsquoinformation et dans le domaine eacuteconomique et financier 258

Le chiffrement est une des quatre fonctions assureacutees par la cryptologie Le chiffrement de donneacutees consiste agrave

rendre illisibles et inaccessibles ces donneacutees Seules les personnes deacutetenant une cleacute speacutecifique pourront alors

acceacuteder aux donneacutees Il existe plusieurs techniques de chiffrement le chiffrement symeacutetrique et le chiffrement

asymeacutetrique

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

111

185 La premiegravere concerne bien eacutevidemment les deacutelais de proceacutedure Ceux-ci peuvent en

effet sembler assez longs la proceacutedure officielle pouvant durer entre cinq et huit mois sans

compter la proceacutedure drsquoinstruction preacutealable des dossiers par le comiteacute drsquoinstruction de

lrsquoASIP Santeacute En aoucirct 2011 le comiteacute drsquoagreacutement des heacutebergeurs a rendu son premier rapport

drsquoactiviteacute couvrant les anneacutees 2006 agrave 2011 Apregraves avoir rappeleacute le cadre et le deacuteroulement de

la proceacutedure le comiteacute dresse un bilan de son activiteacute Il en ressort que cet encadrement et la

deacutemarche drsquoagreacutement sont globalement perccedilus de maniegravere positive par les professionnels du

secteur Toutefois le comiteacute drsquoagreacutement pointe du doigt le fait que les expertises meneacutees par

lrsquoASIP Santeacute drsquoune part et par la CNIL drsquoautre part portent en partie sur des points

identiques Cela geacutenegravere des coucircts importants en termes de ressources humaines et financiegraveres

Le comiteacute drsquoagreacutement souligne eacutegalement que les heacutebergeurs doivent faire face agrave une

contrainte pratique suppleacutementaire qui est celle des dates de reacuteunion du comiteacute drsquoagreacutement et

des seacuteances de la CNIL Cette volonteacute drsquoalleacuteger la proceacutedure afin de la rendre plus fluide

nous paraicirct ecirctre effectivement une solution pragmatique agrave adopter rapidement Enfin le

comiteacute drsquoagreacutement srsquointerroge agrave juste titre sur laquo le type drsquoeacutecosystegraveme qui va se mettre en

place si les proceacutedures drsquoagreacutement se complexifient raquo259

preacutecisant que lrsquoactiviteacute

drsquoheacutebergement des donneacutees de santeacute pourrait alors ecirctre de fait reacuteserveacutee aux socieacuteteacutes

industrielles de grande taille eacuteloigneacutees du patient et de ses probleacutematiques

186 Lrsquoautre critique qui peut ecirctre formuleacutee agrave lrsquoencontre du deacutecret heacutebergeur concerne

lrsquoabsence drsquoadeacutequation entre les textes juridiques et les aspects techniques drsquoaujourdrsquohui En

effet comme le souligne la secreacutetaire geacuteneacuterale de lrsquoASIP Santeacute260

les modegraveles pris par le

leacutegislateur dans le deacutecret de 2006 ne reflegravetent pas la reacutealiteacute concregravete et opeacuterationnelle des

offres actuelles sur le marcheacute et certaines exigences juridiques sont de fait inadapteacutees aux

caracteacuteristiques des technologies actuelles Le risque principal de cette inadeacutequation serait

selon lrsquoauteur drsquoamener lrsquoASIP Santeacute agrave eacutetudier des demandes drsquoagreacutement portant sur une

application meacutetier speacutecifique qui manipule des donneacutees de santeacute alors que seul lrsquoheacutebergement

de ces donneacutees est soumis agrave agreacutement De mecircme les documents qui selon le deacutecret doivent

accompagner le dossier drsquoagreacutement ne sont pas toujours pertinents A titre drsquoexemple la

nature des documents reacuteclameacutes afin de veacuterifier la capaciteacute financiegravere de lrsquoheacutebergeur ne permet

259 Premier rapport drsquoactiviteacute du comiteacute drsquoagreacutement des heacutebergeurs 2006-2011 p 27

260 BOSSI Jeanne laquo Le rocircle de lrsquoAgence des systegravemes drsquoinformation partageacutes en santeacute dans la proceacutedure

drsquoagreacutement raquo op cit p 13

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

112

pas toujours selon Jeanne BOSSI drsquoavoir une vision preacutecise et nette de la veacuteritable situation

financiegravere du candidat Le deacutecret dispose en effet que le candidat agrave un agreacutement fournisse

laquo un document preacutesentant les comptes preacutevisionnels de lactiviteacute dheacutebergement et

eacuteventuellement les trois derniers bilans et la composition de lactionnariat du demandeur

ainsi que dans le cas dune demande de renouvellement les comptes de reacutesultat et bilans lieacutes

agrave cette activiteacute dheacutebergement depuis le dernier agreacutement raquo261

187 Drsquoune maniegravere geacuteneacuterale nous adheacuterons agrave la vision pragmatique de la secreacutetaire

geacuteneacuterale de lrsquoASIP Santeacute alors que le deacutecret heacutebergeur expose les objectifs agrave atteindre par

les heacutebergeurs il appartient aux reacutefeacuterentiels drsquoexposer les moyens agrave mettre en œuvre pour les

atteindre Crsquoest pourquoi Jeanne BOSSI avait proposeacute de revoir le deacutecret heacutebergeur en

preacutevoyant notamment un renvoi systeacutematique aux reacutefeacuterentiels afin que le texte ne devienne

pas rapidement obsolegravete Une des solutions avanceacutee agrave la fois par le comiteacute drsquoagreacutement des

heacutebergeurs dans son premier rapport drsquoactiviteacute et rappeleacutee dans le second262

mais eacutegalement

par la secreacutetaire geacuteneacuterale de lrsquoASIP Santeacute eacutetait de srsquoorienter vers une proceacutedure de

certification meneacutee par des organismes accreacutediteacutes en srsquoinspirant notamment de ce qui peut

exister dans le domaine bancaire Crsquoest drsquoailleurs dans cette direction que srsquoest orienteacute le

leacutegislateur avec la loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute et lrsquoordonnance ndeg2017-27

du 12 janvier 2017 relative agrave lrsquoheacutebergement des donneacutees de santeacute agrave caractegravere personnel263

c) Lrsquoadoption deacutefinitive drsquoune proceacutedure de certification

188 Lrsquoarticle 204 de la loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute preacutevoit que dans les

12 mois suivant la promulgation de la loi le gouvernement est autoriseacute agrave prendre par voie

drsquoordonnance plusieurs mesures visant entre autres agrave laquo remplacer lagreacutement preacutevu au

mecircme article L 1111-8 par une eacutevaluation de conformiteacute technique reacutealiseacutee par un

organisme certificateur accreacutediteacute par linstance nationale daccreacuteditation mentionneacutee agrave

larticle 137 de la loi ndeg 2008-776 du 4 aoucirct 2008 de modernisation de leacuteconomie ou par

lorganisme compeacutetent dun autre Etat membre de lUnion europeacuteenne Cette certification de

conformiteacute porte notamment sur le controcircle des proceacutedures de lorganisation et des moyens

261 Ibid

262 Rapport drsquoactiviteacute 2013-2013 du Comiteacute drsquoAgreacutement des Heacutebergeurs consultable en ligne sur

[httpesantegouvfr] Consulteacute le 15 mai 2017 263

Ordonnance ndeg 2017-27 du 12 janvier 2017 relative agrave lheacutebergement de donneacutees de santeacute agrave caractegravere

personnel JORF ndeg0011 du 13 janvier 2017 texte ndeg 17

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

113

mateacuteriels et humains ainsi que sur les modaliteacutes de qualification des applications

heacutebergeacutees raquo

189 Lrsquoordonnance du 12 janvier 2017 a instaureacute cette proceacutedure de certification en

remplacement de la proceacutedure drsquoagreacutement telle qursquoelle existait Deacutesormais les prestataires de

service drsquoheacutebergement externaliseacute de donneacutees de santeacute devront ecirctre certifieacutes par des

organismes de certification accreacutediteacutes par lrsquoinstance franccedilaise drsquoaccreacuteditation ou lrsquoinstance

nationale drsquoaccreacuteditation drsquoun autre Etat de lrsquoUnion europeacuteenne Un deacutecret pris en Conseil

drsquoEtat doit encore venir preacuteciser les conditions dans lesquelles seront deacutelivreacutes ces certificats

Cependant lrsquoordonnance nrsquoest pas applicable immeacutediatement En effet le leacutegislateur a preacutevu

un temps de transition pendant lequel la proceacutedure drsquoagreacutement reste applicable Ainsi par

principe lrsquoordonnance entrera en vigueur agrave une date fixeacutee par deacutecret et au plus tard au 1er

janvier 2019 Dans lrsquointervalle les demandes drsquoagreacutement ou de renouvellement drsquoagreacutement

deacuteposeacutees avant lrsquoentreacutee en vigueur de lrsquoordonnance continuent drsquoecirctre eacutetudieacutees au titre de

lrsquoagreacutement Par ailleurs les organismes agreacuteeacutes conservent le beacuteneacutefice de leur agreacutement

jusqursquoagrave leur terme Si celui-ci arrive agrave eacutecheacuteance dans les douze mois suivant lrsquoentreacutee en

vigueur de lrsquoordonnance ils disposeront drsquoun certain deacutelai fixeacute par deacutecret pour se mettre en

conformiteacute et obtenir une certification

190 Cette nouvelle proceacutedure devra permettre laquo daccroicirctre la seacutecuriteacute des donneacutees de santeacute

heacutebergeacutees en compleacutetant les audits documentaires par des audits sur site de reacuteduire les deacutelais

dinstruction des demandes des heacutebergeurs aujourdhui trop importants et de faire beacuteneacuteficier

les acteurs concerneacutes de la visibiliteacute du dispositif agrave linternational par une reacutefeacuterence agrave des

certifications ISO largement reacutepandues agrave leacutechelle europeacuteenne et mondiale raquo264

B La reprise de lrsquoexistant lrsquoeacuteventualiteacute de la numeacuterisation des dossiers

papier

191 La numeacuterisation eacuteventuelle des anciens dossiers papier est une hypothegravese qui illustre

bien lrsquoopposition qui peut exister entre les contraintes techniques et les contraintes juridiques

Ainsi cette hypothegravese ne pourra ecirctre envisageacutee qursquoagrave certaines conditions strictes (1) et

264 Rapport au Preacutesident de la Reacutepublique relatif agrave lordonnance ndeg 2017-27 du 12 janvier 2017 relative agrave

lheacutebergement de donneacutees de santeacute agrave caractegravere personnel JORF ndeg 0011 du 13 janvier 2017 texte ndeg 16

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

114

soulegravevera en tout eacutetat de cause la question du devenir des dossiers papiers (2) dont la porteacutee

nrsquoest pas neacutegligeable

1) Les conditions de la numeacuterisation des dossiers existants

192 Face au deacuteveloppement massif des dossiers meacutedicaux informatiseacutes une question

majeure se pose que va-t-il advenir du dossier papier Comme nous lrsquoavons vu la

conservation des dossiers meacutedicaux qursquoils soient papiers ou eacutelectroniques est soumise agrave des

conditions de deacutelais strictes Ainsi pour que les dossiers soient parfaitement complets et les

regravegles respecteacutees deux choix srsquooffrent agrave lrsquoeacutetablissement public de santeacute soit conserver en

parallegravele un dossier papier et un dossier informatiseacute soit numeacuteriser lrsquoensemble des dossiers

papier afin de les inteacutegrer au dossier informatique

193 La premiegravere solution est dans les faits la plus simple mais neacuteanmoins la plus

encombrante pour les eacutetablissements de santeacute De plus elle ne se reacutevegravele pas la plus pratique

pour les professionnels de santeacute obligeacutes de consulter les deux dossiers meacutedicaux afin

drsquoobtenir tous les eacuteleacutements relatifs au patient Enfin cette solution est contraire agrave la logique

actuelle qui tend agrave une informatisation complegravete des archives hospitaliegraveres de tout type pour

des raisons pratiques mais eacutegalement de deacuteveloppement durable La seconde solution

permettrait un passage deacutefinitif au dossier informatiseacute Toutefois cette reprise de lrsquoexistant

via une numeacuterisation de lrsquoensemble des dossiers papier preacutesente des difficulteacutes agrave la fois

techniques et juridiques

194 Du point de vue technique il faut reconnaicirctre que cette opeacuteration va se reacuteveacuteler

fastidieuse voire irreacutealisable dans certains eacutetablissements publics de santeacute au vu de la

quantiteacute de documents que repreacutesentent les dossiers meacutedicaux De plus il va ecirctre neacutecessaire

de stocker tous ces documents numeacuteriseacutes sur des serveurs ce qui induit une capaciteacute de

stockage en interne ou externaliseacutee conseacutequente et donc un coucirct suppleacutementaire Drsquoun point

de vue juridique une question inteacuteressante doit ecirctre souleveacutee quelle sera la valeur de ce

document numeacuteriseacute Pendant longtemps la reacuteponse agrave cette question eacutetait quelque peu

incertaine et il eacutetait neacutecessaire de se tourner vers les regravegles de droit commun pour tenter drsquoy

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

115

reacutepondre (a) Mais reacutecemment lrsquoordonnance ndeg2017-29 du 12 janvier 2017265

prise en

application de lrsquoarticle 204 de la loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute266

est venue

y apporter une reacuteponse preacutecise (b)

a) Les regravegles applicables en droit commun

195 Pour reacutepondre agrave cette interrogation il nous faut drsquoabord nous tourner vers les textes

applicables en matiegravere de droit de la preuve dans la mesure ougrave lrsquoeacutecrit eacutelectronique nrsquoest

envisageacute par le leacutegislateur que sous lrsquoangle probatoire La validiteacute comme preuve juridique

drsquoun document numeacuterique est reconnue depuis 2000 Crsquoest la loi ndeg 2000-230267

qui est venue

modifier le Code civil Celui-ci preacutevoit deacutesormais que laquo leacutecrit eacutelectronique a la mecircme force

probante que leacutecrit sur support papier sous reacuteserve que puisse ecirctre ducircment identifieacutee la

personne dont il eacutemane et quil soit eacutetabli et conserveacute dans des conditions de nature agrave en

garantir linteacutegriteacute raquo268

Deux conditions cumulatives sont poseacutees par le leacutegislateur Dans un

premier temps la personne de qui eacutemane le document doit pouvoir ecirctre identifieacutee Pour cela

la personne a la possibiliteacute de signer eacutelectroniquement le document La signature eacutelectronique

est preacutevue agrave lrsquoarticle 1367 du Code civil laquo la signature neacutecessaire agrave la perfection dun acte

juridique identifie son auteur Elle manifeste son consentement aux obligations qui deacutecoulent

de cet acte Quand elle est apposeacutee par un officier public elle confegravere lauthenticiteacute agrave lacte

Lorsquelle est eacutelectronique elle consiste en lusage dun proceacutedeacute fiable didentification

garantissant son lien avec lacte auquel elle sattache La fiabiliteacute de ce proceacutedeacute est preacutesumeacutee

jusquagrave preuve contraire lorsque la signature eacutelectronique est creacuteeacutee lidentiteacute du signataire

assureacutee et linteacutegriteacute de lacte garantie dans des conditions fixeacutees par deacutecret en Conseil

dEtat raquo Il srsquoagit en pratique drsquoun proceacutedeacute retenu pour garantir lrsquoauthenticiteacute des documents

numeacuteriques et reposant sur un proceacutedeacute cryptographique269

En matiegravere de donneacutees de santeacute

cette signature est apposeacutee par le biais de la Carte de Professionnel de Santeacute (CPS) deacutelivreacutee

265 Ordonnance ndeg 2017-29 du 12 janvier 2017 relative aux conditions de reconnaissance de la force probante des

documents comportant des donneacutees de santeacute agrave caractegravere personnel creacuteeacutes ou reproduits sous forme numeacuterique et

de destruction des documents conserveacutes sous une autre forme que numeacuterique JORF ndeg 0011 13 janvier 2017

texte ndeg 21 266

Loi ndeg 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre systegraveme de santeacute JORF ndeg 0022 27 janvier

2016 texte ndeg 1 267

Loi ndeg 2000-230 du 13 mars 2000 portant adaptation du droit de la preuve aux technologies de linformation

et relative agrave la signature eacutelectronique JORF ndeg 62 du 14 mars 2000 p 3968 268

Article 1366 du Code civil 269

Pour plus de deacutetails sur la signature eacutelectronique voir le Meacutemento eacutediteacute par le bureau conseil de la Direction

Centrale de la Seacutecuriteacute des Systegravemes drsquoInformation et consultable en ligne sur [httpwwwssigouvfr]

Consulteacute le 15 mai 2017

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

116

par lrsquoASIP Santeacute270

La carte CPS est une carte qui contient les donneacutees drsquoidentification du

professionnel qui en est le porteur (identiteacute numeacutero RPPS modaliteacutes drsquoexercice) Cette carte

permet aux professionnels de santeacute entres autres drsquoapposer leur signature eacutelectronique sur les

documents qursquoils produisent

196 La seconde condition poseacutee agrave lrsquoarticle 1366 du Code civil est celle de lrsquointeacutegriteacute du

document Cette notion qui nrsquoest pas deacutefinie par la loi meacuterite que nous la preacutecisions Garantir

lrsquointeacutegriteacute drsquoun document consiste agrave srsquoassurer qursquoil ne soit pas alteacutereacute271

que ce soit par le biais

drsquoune manipulation ulteacuterieure ou par une deacutegradation de son support de conservation et donc

de sa lisibiliteacute Lrsquoinformation doit ecirctre maintenue dans son inteacutegraliteacute De mecircme le support

de conservation doit apporter les garanties neacutecessaires en termes de peacuterenniteacute lrsquoinformation

ne doit pas ecirctre modifieacutee ou pire disparaicirctre Finalement lrsquointeacutegriteacute drsquoun document deacutepend

beaucoup de la qualiteacute de son archivage Il est donc neacutecessaire de mettre en place un

processus fiable de gestion du cycle de vie du document272

197 Toutefois ces conditions de validiteacute ne srsquoappliquent qursquoaux documents creacuteeacutes

eacutelectroniquement et non pas aux documents papier originaux dont une copie serait ensuite

conserveacutee sur informatique par le biais de la numeacuterisation Qursquoen est-il de ces documents

En matiegravere de force probante drsquoune copie lrsquoarticle 1379 dispose que laquo la copie fiable a la

mecircme force probante que loriginal La fiabiliteacute est laisseacutee agrave lappreacuteciation du juge

Neacuteanmoins est reacuteputeacutee fiable la copie exeacutecutoire ou authentique dun eacutecrit authentique Est

preacutesumeacutee fiable jusquagrave preuve du contraire toute copie reacutesultant dune reproduction agrave

lidentique de la forme et du contenu de lacte et dont linteacutegriteacute est garantie dans le temps

par un proceacutedeacute conforme agrave des conditions fixeacutees par deacutecret en Conseil dEacutetat Si loriginal

subsiste sa preacutesentation peut toujours ecirctre exigeacutee raquo

198 En ce qui concerne plus particuliegraverement les copies numeacuteriseacutees la Cour de cassation

avait deacutejagrave en 2008 apporteacute un eacuteclairage sur le sujet Dans un arrecirct en date du 4 deacutecembre

2008273

la Haute juridiction preacutecisait la chose suivante laquo lorsqursquoune partie nrsquoa pas conserveacute

270 V Infra ndeg 244

271 RAYNOUARD Arnaud laquo Le droit de lrsquoeacutecrit eacutelectronique raquo LPA 2001 ndeg 65 p 15

272 RENARD Isabelle laquo Preuve informatique ndash valeur juridique du document numeacuterique raquo Expertises 2010 p

215 273

Cass 2egraveme

civ 4 deacutecembre 2008 ndeg 07-17622

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

117

lrsquooriginal drsquoun document la preuve de son existence peut-ecirctre rapporteacutee par la preacutesentation

drsquoune copie qui doit en ecirctre la reproduction non seulement fidegravele mais durable [hellip] Lrsquoeacutecrit

sous forme eacutelectronique ne vaut preuve qursquoagrave condition que son auteur puisse ecirctre ducircment

identifieacute et qursquoil soit eacutetabli et conserveacute dans des conditions de nature agrave en garantir lrsquointeacutegriteacute

raquo En lrsquoespegravece la CPAM de la Marne avait pour apporter la preuve de la deacutelivrance drsquoune

information produit ce qursquoelle preacutesentait comme eacutetant la copie informatique drsquoun courrier La

Cour de Cassation a casseacute la deacutecision drsquoappel rappelant alors les critegraveres permettant

drsquoaccepter une copie eacutelectronique comme eacuteleacutement de preuve Les premiers critegraveres poseacutes par

la Cour avait trait agrave la copie en elle-mecircme qui se devait drsquoecirctre la reproduction fidegravele et

durable de lrsquooriginal Rien drsquoexceptionnel dans ces critegraveres qui sont ceux opposables agrave

nrsquoimporte quelle copie qursquoelle soit papier ou eacutelectronique Nous rappellerons simplement

qursquoune copie fidegravele signifie que celle-ci doit ecirctre lrsquoexacte reproduction de lrsquooriginal (par

exemple si le document original eacutetait signeacute manuellement cette signature doit apparaitre sur

la copie) En ce sens la numeacuterisation drsquoun document papier permettait de remplir ce critegravere

de copie fidegravele Les seconds critegraveres concernaient plus particuliegraverement quant agrave eux la copie

sous forme eacutelectronique Celle-ci doit permettre drsquoidentifier son auteur et doit ecirctre conserveacutee

dans des conditions permettant de garantir son inteacutegriteacute Concernant lrsquoindentification de

lrsquoauteur du document ce qui importait eacutetait finalement de savoir agrave qui il pouvait ecirctre

imputable Se posait alors la question de savoir si cela impliquait que le document soit

forceacutement signeacute Pour certains auteurs ce nrsquoeacutetait pas le cas un simple papier agrave en-tecircte ou

logo distinctif permettant de savoir de qui eacutemane le document274

199 Cependant ce raisonnement montrait vite ses limites selon nous En effet il est

aujourdrsquohui tregraves simple de falsifier un logo ou un papier agrave en-tecircte surtout quand il srsquoagit drsquoun

document eacutelectronique Le deacutecret ndeg 2016-1673 du 5 deacutecembre 2016275

relatif agrave la fiabiliteacute des

copies et pris pour lapplication de larticle 1379 du Code civil pose de maniegravere preacutecise et

deacutefinitive les critegraveres que doivent remplir les copies numeacuteriques pour ecirctre consideacutereacutees comme

fiables Ainsi selon les dispositions de lrsquoarticle 1er

du deacutecret laquo est preacutesumeacutee fiable au sens

du deuxiegraveme alineacutea de larticle 1379 du Code civil la copie reacutesultant

274 RENARD Isabelle laquo Preuve informatique ndash valeur juridique du document numeacuterique raquo op cit p 215

275 Deacutecret ndeg 2016-1673 du 5 deacutecembre 2016 relatif agrave la fiabiliteacute des copies et pris pour lapplication de larticle

1379 du Code civil JORF ndeg0283 du 6 deacutecembre 2016 texte ndeg 61

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

118

- soit dun proceacutedeacute de reproduction qui entraicircne une modification irreacuteversible du support de

la copie

- soit en cas de reproduction par voie eacutelectronique dun proceacutedeacute qui reacutepond aux conditions

preacutevues aux articles 2 agrave 6 du preacutesent deacutecret raquo

200 Les articles 2 agrave 6 du deacutecret fixent des conditions tregraves strictes Le texte exige que le

proceacutedeacute de reproduction par voie eacutelectronique permette drsquoapporter des informations lieacutees agrave la

copie afin de lrsquoidentifier Le contexte de numeacuterisation et la date de creacuteation de la copie

doivent ecirctre preacuteciseacutes Par ailleurs lrsquointeacutegriteacute de la copie doit ecirctre attesteacutee laquo par une empreinte

digitale qui garantit que toute modification ulteacuterieure de la copie agrave laquelle elle est attacheacutee

est deacutetectable raquo Pour ce faire le texte exige que les eacutetablissements de santeacute fassent le choix

entre un systegraveme drsquohorodatage qualifieacute drsquoun cachet eacutelectronique qualifieacute ou drsquoune signature

eacutelectronique tel que preacutevu par le regraveglement (UE) ndeg 9102014 du Parlement Europeacuteen et du

Conseil du 23 juillet 2014 sur lidentification eacutelectronique et les services de confiance pour

les transactions eacutelectroniques au sein du marcheacute inteacuterieur Enfin laquo la copie eacutelectronique est

conserveacutee dans des conditions propres agrave eacuteviter toute alteacuteration de sa forme ou de son

contenu Les opeacuterations requises pour assurer la lisibiliteacute de la copie eacutelectronique dans le

temps ne constituent pas une alteacuteration de son contenu ou de sa forme degraves lors quelles sont

traceacutees et donnent lieu agrave la geacuteneacuteration dune nouvelle empreinte eacutelectronique de la copie raquo

Cette derniegravere disposition preacutesente lrsquointeacuterecirct drsquoecirctre selon nous parfaitement adapteacutee aux

contraintes des techniques informatiques actuelles En effet aujourdrsquohui peu de techniques

sont suffisamment fiables pour permettre de garantir une conservation integravegre et durable des

documents eacutelectroniques276

Ainsi en preacutecisant que les opeacuterations laquo requises pour assurer la

lisibiliteacute de la copie eacutelectronique dans le temps raquo nrsquoaltegraverent pas la fiabiliteacute de la copie le

leacutegislateur permet drsquoenvisager la mise en place des opeacuterations de conversion des formats

informatiques au greacute des eacutevolutions techniques sans que cela nrsquoentache la valeur probante de

la copie

201 La numeacuterisation de lrsquoensemble des dossiers meacutedicaux papier afin de les inteacutegrer aux

dossiers informatiseacutes serait donc juridiquement possible sous reacuteserve de se plier agrave un certain

276 En pratique il est conseilleacute drsquoutiliser des disques WORM (Write Once Read Many) qui sont reacuteinscriptibles

Crsquoest le cas par exemple des disques optiques numeacuteriseacutes Il faut eacutegalement privileacutegier des formats eacutelectroniques

standardiseacutes du type XLM PDF ou TIFF

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

119

nombre de contraintes strictes Toutefois en pratique il srsquoagit drsquoun chantier tregraves important

pour les eacutetablissements publics de santeacute qui induit un coucirct financier et humain non

neacutegligeable A noter qursquoune ordonnance de janvier 2017277

prise en application de lrsquoarticle

204 de la loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute a deacutefinitivement acteacute au sein du

Code de la santeacute publique la possibiliteacute pour des documents contenant des donneacutees de santeacute

drsquoecirctre numeacuteriseacutes tout en conservant une force probante278

Cependant le leacutegislateur ne fait

que rappeler au sein du Code de la santeacute publique les dispositions du Code civil Aucune

nouveauteacute ni simplification donc mais la preacutecision que ces dispositions du droit commun

srsquoappliquent bel et bien aux documents comportant des donneacutees de santeacute

2) Le devenir des dossiers papier numeacuteriseacutes

202 Une fois les dossiers meacutedicaux papier numeacuteriseacutes ceux-ci deviennent redondants avec

le dossier informatiseacute Une suppression de ceux-ci est-elle pour autant envisageable Cette

question qui est commune agrave de nombreuses administrations a eacuteteacute freacutequemment poseacutee aux

Archives deacutepartementales Les Archives de France avaient ainsi dans un premier temps poseacute

un cadre de commun agrave lrsquoeacutelimination anticipeacutee drsquoarchives publiques papier qui auraient eacuteteacute

numeacuteriseacutees (a) Cependant face aux nombreuses demandes des eacutetablissements de santeacute en

faveur notamment drsquoun cadre plus adapteacute le leacutegislateur srsquoest empareacute du sujet (b)

a) La reacuteponse des Archives de France

203 Crsquoest par le biais drsquoune instruction de 2005279

relative aux modaliteacutes de deacutelivrance du

visa drsquoeacutelimination des documents papiers transfeacutereacutes sur support numeacuterique ou micrographique

que les Archives de France ont apporteacute une premiegravere reacuteponse agrave la question du devenir du

papier numeacuteriseacute Cette instruction rappelait la neacutecessiteacute pour lrsquoadministration qui souhaitait

deacutetruire ses archives papiers avant la fin de leur dureacutee de conservation drsquoobtenir une

autorisation drsquoeacutelimination de la part de la direction deacutepartementale des archives et ce mecircme

277 Ordonnance ndeg 2017-29 du 12 janvier 2017 relative aux conditions de reconnaissance de la force probante des

documents comportant des donneacutees de santeacute agrave caractegravere personnel creacuteeacutes ou reproduits sous forme numeacuterique et

de destruction des documents conserveacutes sous une autre forme que numeacuterique JORF ndeg0011 du 13 janvier 2017

texte ndeg 21 278

Le nouvel article L 1111-26 du Code de la santeacute publique preacutevoit que laquo la copie numeacuterique drsquoun document

mentionneacute agrave lrsquoarticle L 1111-25 remplissant les conditions de fiabiliteacute preacutevues par le deuxiegraveme alineacutea de

lrsquoarticle 1379 du Code civil a la mecircme force probante que le document original sur support papier raquo 279

Instruction DITNDPACIRES2005001 du 14 janvier 2005 sur les modaliteacutes de deacutelivrance du visa

deacutelimination des documents papiers transfeacutereacutes sur support numeacuterique ou micrographique Archives de France

non publieacutee au JORF

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

120

si une copie a eacuteteacute reacutealiseacutee sur un autre support Cette instruction preacutecisait les cas (au nombre

de trois) dans lesquels cette autorisation pouvait ecirctre deacutelivreacutee Le premier cas concernait les

documents qui sont normalement eacuteliminables au terme de leur dureacutee drsquoutiliteacute administrative

Dans ce cas un visa drsquoeacutelimination anticipeacute pouvait ecirctre accordeacute Le deuxiegraveme cas concernait

les documents qui devaient ecirctre conserveacutes en totaliteacute et de maniegravere deacutefinitive au terme de

leur dureacutee drsquoutiliteacute administrative pour ces documents les documents papier une fois

numeacuteriseacutes pouvaient ecirctre verseacutes aux archives deacutepartementales de maniegravere anticipeacutee si leur

conservation posait laquo des problegravemes particuliegraverement aigus raquo agrave lrsquoadministration concerneacutee

Enfin si les documents concerneacutes eacutetaient normalement soumis au tri par eacutechantillonnage une

combinaison des deux preacuteceacutedentes regravegles devait alors srsquoappliquer une autorisation

drsquoeacutelimination anticipeacutee pouvait ecirctre deacutelivreacutee pour les documents normalement eacuteliminables agrave

terme tandis que lrsquoeacutechantillon retenu eacutetait conserveacute en version papier et pouvait ecirctre deacuteposeacute

aux archives deacutepartementales au besoin

204 Dans tous les cas lrsquoautorisation drsquoeacutelimination anticipeacutee devait ecirctre assortie de

recommandations Il eacutetait notamment recommandeacute agrave lrsquoadministration de reacutealiser avant

drsquoenvisager la destruction des archives papier une analyse juridique Celle-ci avait pour but

de deacuteterminer les potentiels besoins en matiegravere de preuve les risques de contentieux et donc

chercher agrave savoir si les copies numeacuteriseacutees qursquoelle souhaitait reacutealiser respectaient les critegraveres

neacutecessaires afin de conserver une valeur probante suffisante Les Archives de France

preacutecisaient que pour assurer une meilleure seacutecuriteacute juridique il pouvait eacuteventuellement ecirctre

neacutecessaire de conserver certaines archives papiers et ce jusqursquoagrave la fin de leur dureacutee drsquoutiliteacute

administrative Les Archives de France conseillaient enfin aux administrations qui

srsquoorientaient vers une numeacuterisation de lrsquoensemble de leurs archives papier de suivre une

proceacutedure rigoureuse garantissant la qualiteacute de leur deacutemarche

205 Plusieurs possibiliteacutes srsquooffraient alors aux administrations Celles-ci pouvaient

appliquer les principes poseacutes par Dominique PONSOT dans son rapport intituleacute laquo Valeur

juridique des documents conserveacutes sur support photographique ou numeacuterique raquo280

opeacuterer

dans un cadre systeacutematique crsquoest-agrave-dire traiter de la mecircme faccedilon tous les documents

appartenant agrave la mecircme cateacutegorie etou remplissant la mecircme fonction probatoire dater la copie

280 PONSOT Dominique laquo Valeur juridique des documents conserveacutes sur support photographique ou

numeacuterique raquo Rapport de septembre 1995 La Documentation franccedilaise p 37

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

121

srsquoassurer drsquoeffectuer une copie reproduisant le plus grand nombre de caracteacuteristiques

physiques du document (par exemple les annotations manuscrites) et enfin dans le but de se

preacute-constituer une preuve de lrsquoopeacuteration reacutealiseacutee preacutesenter de maniegravere preacutecise le processus de

numeacuterisation mis en place Les administrations pouvaient aussi srsquoinspirer de normes

existantes En la matiegravere on trouvait par exemple la norme AFNOR NF Z 42-013 intituleacutee laquo

recommandations relatives agrave la conception et agrave lrsquoexploitation de systegravemes informatiques en

vue drsquoassurer la conservation et lrsquointeacutegriteacute des documents stockeacutes dans ces systegravemes raquo

La suppression des archives papier qui auraient eacuteteacute numeacuteriseacutees eacutetait donc possible

Cependant les eacutetablissements publics de santeacute devaient rester prudents et reacutealistes face aux

exigences poseacutees par les Archives de France La loi de modernisation de notre systegraveme de

santeacute srsquoest depuis pencheacutee sur le sujet

b) Les apports de la loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute

206 Lrsquoarticle 204 de la loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute preacutevoyait la

possibiliteacute pour le gouvernement de leacutegifeacuterer par voie drsquoordonnance afin drsquo laquo encadrer les

conditions de destruction des dossiers meacutedicaux conserveacutes sous une autre forme que

numeacuterique quand ils ont fait lrsquoobjet drsquoune numeacuterisation et preacuteciser les conditions permettant

de garantir une valeur probante aux donneacutees et documents de santeacute constitueacutes sous forme

numeacuterique raquo Lrsquoordonnance en question a eacuteteacute adopteacutee en janvier 2017281

et vient ainsi

encadrer la destruction des documents papiers numeacuteriseacutes Ce texte insegravere au sein du Code de

la santeacute publique une nouvelle section intituleacutee laquo conditions de reconnaissance de force

probante des documents comportant des donneacutees de santeacute agrave caractegravere personnes creacuteeacutes ou

reproduits sous forme numeacuterique et de destruction des documents conserveacutes sous une autre

forme que numeacuterique raquo Ainsi il est deacutesormais possible laquo lorsqursquoune copie fiable a eacuteteacute

reacutealiseacutee raquo282

de deacutetruire un document original avant la fin de sa dureacutee leacutegale de conservation

A noter toutefois que pour les documents qui relegravevent du champ des archives publiques

lrsquoautorisation de destruction sera toujours soumise au visa de lrsquoadministration des archives

281 Ordonnance ndeg 2017-29 du 12 janvier 2017 relative aux conditions de reconnaissance de la force probante des

documents comportant des donneacutees de santeacute agrave caractegravere personnel creacuteeacutes ou reproduits sous forme numeacuterique et

de destruction des documents conserveacutes sous une autre forme que numeacuterique JORF ndeg0011 du 13 janvier 2017

texte ndeg 21 282

Article L 1111-26 du Code de la santeacute publique

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

122

Conclusion de la section

207 Mecircme informatiseacutees les donneacutees de santeacute conservent le statut drsquoarchives hospitaliegraveres

et agrave ce titre leur archivage doit respecter la reacuteglementation en la matiegravere et notamment les

dispositions du Code du patrimoine Ces regravegles ont des conseacutequences agrave la fois sur la gestion

de la vie courante des archives numeacuteriques mais eacutegalement en ce qui concerne leur eacuteventuelle

eacutelimination Nous pouvons par ailleurs regretter les difficulteacutes drsquointerpreacutetation de certaines

de ces regravegles qui sont parfois contradictoires avec les regravegles classiques relatives agrave la gestion

des donneacutees de santeacute telles que celles qui ont trait au secret meacutedical fragilisant ainsi la

seacutecuriteacute et la confidentialiteacute des donneacutees de santeacute

208 La conservation des donneacutees de santeacute informatiseacutees a fait quant agrave elle lrsquoobjet drsquoune

reacuteelle reacuteflexion de la part du leacutegislateur conscient des enjeux qui entourent la seacutecuriteacute et la

confidentialiteacute de ces donneacutees Cela a abouti aux diffeacuterents textes et reacutefeacuterentiels qui encadrent

et organisent aujourdrsquohui lrsquoheacutebergement des donneacutees de santeacute Ce cadre nrsquoest toutefois pas

parfait et certains ajustements permettraient drsquoen ameacuteliorer lrsquoefficaciteacute A lrsquoheure actuelle un

des enjeux essentiels de la conservation informatiseacutee des donneacutees de santeacute reste lrsquoadeacutequation

entre le deacuteveloppement de la technique et lrsquoencadrement juridique mis en place

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

123

Section 2 Heacutebergement et communication des donneacutees un cadre

limiteacute

209 Lrsquoanalyse des textes actuels encadrant lrsquoheacutebergement et la communication

eacutelectronique des donneacutees de santeacute nous amegravene agrave conclure que malheureusement ceux-ci se

montrent trop limiteacutes Drsquoune part le choix drsquoun heacutebergement externaliseacute des donneacutees de

santeacute amegravene les eacutetablissements agrave se poser plusieurs questions juridiques pas toutes reacutesolues

par le corpus de textes relatif agrave lrsquoheacutebergement agreacuteeacute (Paragraphe 1) Drsquoautre part

lrsquoencadrement actuel de la communication par voie eacutelectronique des donneacutees de santeacute nrsquoest

que partiellement en place et donc difficilement applicable (Paragraphe 2)

sect1 Lrsquoheacutebergement des donneacutees de santeacute un cadre incomplet

210 Lrsquoarticle L 1111-8 du Code de la santeacute publique compleacuteteacute par le deacutecret dit

heacutebergeur instaure un cadre strict relatif agrave lrsquoheacutebergement des donneacutees de santeacute Toutefois

la creacuteation et le deacuteveloppement de cette nouvelle activiteacute posent en pratique de nombreuses

questions qui ne sont pas directement reacutesolues par ces textes Ainsi le choix de lrsquoheacutebergeur

soulegraveve des probleacutematiques concregravetes qui ne peuvent ecirctre reacutesolues qursquoen faisant appel agrave

drsquoautres regravegles de droit (A) De mecircme agrave la lecture des textes encadrant lrsquoheacutebergement des

donneacutees de santeacute il est leacutegitime de se poser la question de la reacuteelle place accordeacutee au patient

et agrave ses droits (B)

A Choix de lrsquoheacutebergeur et questions en suspens

211 Aujourdrsquohui les eacutetablissements de santeacute peuvent faire le choix drsquoecirctre leur propre

heacutebergeur de donneacutees de santeacute ou de confier cette charge agrave un tiers Cependant les choses se

compliquent quand ce tiers est un autre eacutetablissement de santeacute (1) Par ailleurs si

lrsquoeacutetablissement fait le choix de confier ses donneacutees agrave un tiers il devra alors se soumettre agrave

drsquoautres regravegles en plus de celles strictement applicables agrave lrsquoheacutebergement externaliseacute des

donneacutees de santeacute (2)

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

124

1) Lrsquohypothegravese drsquoun eacutetablissement de santeacute heacutebergeur de donneacutees

212 Un eacutetablissement de santeacute qui choisirait drsquoecirctre son propre heacutebergeur de donneacutees nrsquoa

pas agrave obtenir drsquoagreacutement En effet lrsquoarticle L 1111-8 du Code de la santeacute publique est tregraves

clair agrave ce sujet et le peacuterimegravetre de lrsquoagreacutement (et agrave compter du 1er

janvier 2019 de la

certification) ne concerne que les cas dans lesquels les donneacutees ont eacuteteacute deacuteposeacutees aupregraves de

personnes tiers Mais quid dans le cas ougrave un eacutetablissement de santeacute heacutebergerait les donneacutees

drsquoun autre eacutetablissement ou un autre professionnel Cette hypothegravese existe par exemple dans

le cas de mise en place de reacuteseaux de teacuteleacutemeacutedecine En toute logique lrsquoeacutetablissement

devenant un tiers heacutebergeur devra donc reacutepondre aux obligations poseacutees par lrsquoarticle L 1111-

8 du Code de la santeacute publique ainsi que celles du deacutecret heacutebergeur Cependant une autre

question se pose alors celle de la possibiliteacute juridique pour un eacutetablissement de santeacute

drsquoassurer des missions de tiers heacutebergeur de donneacutees de santeacute En effet les eacutetablissements

publics de santeacute sont soumis au principe de speacutecialiteacute et sont donc tenus de limiter leurs

activiteacutes aux missions qui leur ont eacuteteacute fixeacutees par la loi Il ne leur est donc pas possible en

theacuteorie de sortir du champ de compeacutetence qui leur a eacuteteacute attribueacute Lrsquoheacutebergement de donneacutees

de santeacute drsquoautres eacutetablissements pourrait-il entrer dans les compeacutetences drsquoun eacutetablissement

public de santeacute

213 Les missions des eacutetablissements de santeacute sont preacutevues agrave lrsquoarticle L 6111-1 du Code de

la santeacute publique283

et lrsquoheacutebergement de donneacutees de santeacute pour le compte drsquoun autre

eacutetablissement public ou priveacute de santeacute ne fait pas partie de la liste exhaustive dresseacutee par

lrsquoarticle Toutefois lrsquoarticle L 6145-7 du Code de la santeacute publique preacutevoit quant agrave lui la

possibiliteacute pour un eacutetablissement public de santeacute sans porter atteinte au principe de speacutecialiteacute

drsquoeffectuer des prestations de service agrave titre subsidiaire Reste agrave savoir ce que recouvre cette

notion de prestation reacutealiseacute agrave titre subsidiaire

283 laquo Les eacutetablissements de santeacute publics priveacutes et priveacutes dinteacuterecirct collectif assurent dans les conditions preacutevues

par le preacutesent Code le diagnostic la surveillance et le traitement des malades des blesseacutes et des femmes

enceintes Ils deacutelivrent les soins avec heacutebergement sous forme ambulatoire ou agrave domicile le domicile pouvant

sentendre du lieu de reacutesidence ou dun eacutetablissement avec heacutebergement relevant du Code de laction sociale et

des familles Ils participent agrave la coordination des soins en relation avec les membres des professions de santeacute

exerccedilant en pratique de ville et les eacutetablissements et services meacutedico-sociaux dans le cadre deacutefini par lAgence

Reacutegionale de Santeacute en concertation avec les conseils geacuteneacuteraux pour les compeacutetences qui les concernent Ils

participent agrave la mise en œuvre de la politique de santeacute publique et des dispositifs de vigilance destineacutes agrave garantir

la seacutecuriteacute sanitaire Ils megravenent en leur sein une reacuteflexion sur leacutethique lieacutee agrave laccueil et la prise en charge

meacutedicale raquo

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

125

214 Le juge administratif est venu apporter quelques preacutecisions agrave ce sujet Dans une

deacutecision du 29 mars 2000 la Cour administrative drsquoappel de Nantes284

a consideacutereacute qursquoune

prestation de blanchisserie assureacutee par un eacutetablissement public de santeacute au profit drsquoune

clinique priveacutee nrsquoentrait pas dans les critegraveres de lrsquoarticle L 6145-7 du Code de la santeacute

publique degraves lors que lrsquoactiviteacute concerneacutee est sans rapport avec les missions deacutevolues aux

eacutetablissements de santeacute Pour le juge administratif une activiteacute exerceacutee agrave titre subsidiaire doit

donc obligatoirement constituer le prolongement drsquoune activiteacute principale drsquoun eacutetablissement

public de santeacute Certains auteurs voient dans cette jurisprudence lrsquoaffirmation selon laquelle

un eacutetablissement public de santeacute ne pourrait pas ecirctre heacutebergeur de donneacutees de santeacute

consideacuterant que lrsquoarticle L 1111-8 du Code de la santeacute publique laquo nrsquoavait pas pour but

drsquoouvrir un potentiel drsquoactiviteacute commercial aux eacutetablissements publics eux-mecircmes raquo285

215 Pourtant aujourdrsquohui plusieurs eacutetablissements de santeacute sont devenus heacutebergeurs

agreacuteeacutes de donneacutees de santeacute Crsquoest le cas par exemple du Centre Hospitalier Universitaire de

Nice qui a reccedilu trois agreacutements diffeacuterents pour lrsquoheacutebergement de donneacutees de santeacute Deux

drsquoentre eux concernent lrsquoutilisation drsquoune application informatique speacutecifique (les applications

e-nadis et Calliope) et le troisiegraveme concerne lrsquoexploitation et la gestion par le CHU drsquoune

plateforme technique sur laquelle sont heacutebergeacutees des applications de ses partenaires Les

Hospices Civils de Lyon sont eacutegalement agreacuteeacutes pour lrsquoheacutebergement drsquoapplications geacuterant des

donneacutees de santeacute agrave caractegravere personnel tout comme lrsquoAssistance Publique des Hocircpitaux de

Paris et lrsquoAssistance Publique des Hocircpitaux de Marseille Enfin le CHU de Nantes a quant agrave

lui reccedilu un agreacutement pour une activiteacute drsquoheacutebergement assez large puisqursquoil est agreacuteeacute pour

laquo une prestation drsquoheacutebergement drsquoapplications fournies par les clients et geacuterant des donneacutees

de santeacute agrave caractegravere personnel ainsi que pour une prestation drsquoheacutebergement de serveurs

contenant des donneacutees de santeacute agrave caractegravere personnel raquo286

Les eacutetablissements publics de

santeacute sont donc en train de deacutevelopper une reacuteelle activiteacute drsquoheacutebergement de donneacutees de santeacute

216 De notre point de vue il semble raisonnable drsquoenvisager la possibiliteacute pour les

eacutetablissements publics de santeacute de deacutevelopper ce type drsquoactiviteacute En effet ce sont bien les

eacutetablissements de santeacute qui sont les plus agrave mecircme de prendre en compte agrave la fois les

284 CAA Nantes 29 mars 2000 Centre Hospitalier de Morlaix ndeg 97NT00451

285 MARZOUG Sanaa laquo Lrsquoheacutebergement des donneacutees de santeacute agrave caractegravere personnel des eacutetablissements de

santeacute quelques repegraveres juridiques raquo Actualiteacutes JuriSanteacute ndeg 74 2011 p 5 286

Description disponible sur le site de lrsquoASIP santeacute [httpesantegouvfr] consulteacute le 2 mars 2017

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

126

contraintes techniques et juridiques qui les entourent mais eacutegalement de concilier les besoins

des professionnels de santeacute avec la confidentialiteacute et la seacutecuriteacute dus aux donneacutees de santeacute des

patients De plus une interpreacutetation plus souple de lrsquoarticle L 6111-1 du Code de la santeacute

publique permet drsquoenvisager lrsquoheacutebergement des donneacutees de santeacute comme eacutetant le

prolongement direct de la mission principale des eacutetablissements publics de santeacute qursquoest le

diagnostic la surveillance et le traitement des malades des blesseacutes et des femmes enceintes

Les eacutetablissements de santeacute ne peuvent pas ou ne souhaitent pas heacuteberger de donneacutees

de santeacute disposent drsquoautres solutions soumises au respect preacutealable de certaines conditions

2) Quelles conditions pour le choix du tiers heacutebergeur

217 Si un eacutetablissement de santeacute fait le choix de confier ses donneacutees de santeacute agrave un tiers

heacutebergeur il devra alors respecter les regravegles du droit des marcheacutes publics (a) Lrsquoeacutetablissement

de santeacute doit eacutegalement savoir qursquoil lui sera possible de coopeacuterer avec drsquoautres eacutetablissements

dans ce cadre (b)

a) Lrsquoobligation drsquoun marcheacute public

218 Lrsquoheacutebergement des donneacutees de santeacute constitue une prestation de service reacutealiseacutee agrave titre

oneacutereux soumise agrave la conclusion drsquoun contrat entre lrsquoeacutetablissement ou le professionnel de

santeacute et lrsquoheacutebergeur de donneacutees Degraves lors dans le cas drsquoun contrat conclu entre un prestataire

heacutebergeur de donneacutees de santeacute et un eacutetablissement public de santeacute la prestation tombe sous le

coup des marcheacutes publics287

Ainsi en la matiegravere ce sont les dispositions de lrsquoordonnance ndeg

2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marcheacutes publics288

et du deacutecret ndeg 2016-360 du 25

mars 2016 relatif aux marcheacutes publics qui vont trouver agrave srsquoappliquer289

Contrairement agrave

certains auteurs290

nous consideacuterons que la prestation drsquoheacutebergement de donneacutees de santeacute doit

ecirctre vue comme une prestation de service informatique A ce titre plusieurs solutions vont

alors srsquooffrir aux eacutetablissements de santeacute Soit le marcheacute porte sur une somme en-deccedilagrave des

seuils europeacuteens fixeacutes par le regraveglement ndeg 20152170 et 20152171 du 24 novembre 2015 de

287 Articles 4 et 5 de lrsquoordonnance ndeg 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marcheacutes publics JORF ndeg0169 du

24 juillet 2015 p 12602 (Anciens articles 1 et 2 du Code des marcheacutes publics abrogeacute au 1er

avril 2016) 288

Ordonnance ndeg 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marcheacutes publics JORF ndeg0169 du 24 juillet 2015 p

12602 289

Deacutecret ndeg 2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marcheacutes publics JORF ndeg0074 du 27 mars 2016 texte ndeg 28 290

MARZOUG Sanaa laquo Lrsquoheacutebergement des donneacutees de santeacute agrave caractegravere personnel des eacutetablissements de

santeacute quelques repegraveres juridiques raquo op cit p 5

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

127

la commission modifiant respectivement les directives 201424UE et 201425UE du 26

feacutevrier 2014291

dans ce cas il est possible pour lrsquoeacutetablissement de recourir agrave une proceacutedure

adapteacutee deacutecrite lrsquoarticle 42 3deg de lrsquoordonnance de 2015 relative aux marcheacutes publics et agrave

lrsquoarticle 27 du deacutecret de 2016 relatif aux marcheacutes publics Au-delagrave de ce seuil il sera

neacutecessaire pour lrsquoeacutetablissement de recourir agrave une proceacutedure formaliseacutee parmi les proceacutedures

suivantes la proceacutedure dappel doffres292

la proceacutedure concurrentielle avec neacutegociation293

la

proceacutedure neacutegocieacutee avec mise en concurrence preacutealable294

et la proceacutedure de dialogue

compeacutetitif295

219 A titre drsquoexemple lrsquoavis public drsquoappel agrave la concurrence lanceacute par lrsquoASIP santeacute au

sujet de lrsquoheacutebergement du DMP en 2009 avait respecteacute la proceacutedure de lrsquoappel drsquooffre

europeacuteen et avait fait lrsquoobjet drsquoune publication au Bulletin Officiel des Annonces des

Marcheacutes Publics (BOAMP)296

et au Journal officiel de lrsquoUnion Europeacuteenne (JOUE)297

Une

hypothegravese existe toutefois dans laquelle un eacutetablissement public nrsquoaura pas agrave se soumettre aux

regravegles des marcheacutes publics celle drsquoune coopeacuteration avec drsquoautres eacutetablissements sur le sujet

b) Les possibiliteacutes de coopeacuteration

220 Lrsquoheacutebergement de ses donneacutees de santeacute repreacutesente pour un eacutetablissement de santeacute un

coucirct non neacutegligeable Une solution qui leur est ouverte est alors de coopeacuterer sur ce sujet avec

drsquoautres eacutetablissements afin de mutualiser les coucircts et les risques Drsquoailleurs lrsquoinformatique

est depuis longtemps une source de coopeacuterations fructueuses entre les eacutetablissements de

santeacute Il nous faut envisager drsquoabord les formes que pourrait prendre une telle coopeacuteration

avant drsquoeacutetudier ensuite les conseacutequences en termes drsquoobligations juridiques notamment pour

ces coopeacuterations Les eacutetablissements publics de santeacute qui souhaiteraient coopeacuterer dans le

cadre de lrsquoheacutebergement de leurs donneacutees de santeacute auront le choix drsquoune coopeacuteration

291 Ces seuils applicables depuis le 1er janvier 2016 sont fixeacutes agrave 209 000 euros hors taxes pour les marcheacutes de

fournitures courantes et services des eacutetablissements publics de santeacute 292

Proceacutedure par laquelle leacutetablissement va choisir loffre eacuteconomiquement la plus avantageuse sans

neacutegociation sur la base de critegraveres objectifs preacutealablement porteacutes agrave la connaissance des candidats 293

Proceacutedure par laquelle lrsquoeacutetablissement va neacutegocier les conditions du marcheacute public avec un ou plusieurs

opeacuterateurs eacuteconomiques 294

Proceacutedure par laquelle lrsquoeacutetablissement va neacutegocier les conditions du marcheacute public avec un ou plusieurs

opeacuterateurs eacuteconomiques 295

Proceacutedure dans laquelle lrsquoeacutetablissement va ecirctre ameneacute agrave dialoguer avec les candidats admis agrave participer agrave la

proceacutedure en vue de deacutefinir ou deacutevelopper les solutions de nature agrave reacutepondre agrave ses besoins et sur la base

desquelles ces candidats sont inviteacutes agrave remettre une offre 296

Reacutefeacuterence 09-219810 BOAMP ndeg198B Annonce ndeg 573 297

JOUE 2009S 198-28 5000

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

128

conventionnelle ou drsquoune coopeacuteration organique La solution de la coopeacuteration

conventionnelle doit ecirctre rapidement mise de cocircteacute pour des raisons qui ont trait agrave la fois au

principe de speacutecialiteacute298

et aux regravegles applicables en matiegravere de marcheacutes publics299

En effet

un contrat de coopeacuteration agrave titre oneacutereux passeacute entre deux ou plusieurs eacutetablissements publics

de santeacute risquerait drsquoecirctre requalifieacute en contrat de prestation300

ce qui serait alors en

opposition avec le principe de speacutecialiteacute auquel doivent obeacuteir les eacutetablissements publics de

santeacute De mecircme une coopeacuteration conventionnelle agrave titre oneacutereux entre un eacutetablissement

public de santeacute et un eacutetablissement priveacute de santeacute au sein de laquelle lrsquoeacutetablissement priveacute

heacutebergerait les donneacutees de santeacute de lrsquoeacutetablissement public pourrait ecirctre requalifieacutee en contrat

de prestation Il serait alors reprocheacute agrave lrsquoeacutetablissement public de santeacute de ne pas srsquoecirctre soumis

aux regravegles du Code des marcheacutes publics pour choisir son prestataire

221 La coopeacuteration organique semble donc ecirctre la solution la plus adapteacutee Srsquoouvre alors

pour les eacutetablissements publics de santeacute une large palette de structures agrave sa disposition Pour

notre eacutetude nous choisirons de nous concentrer sur trois structures qui nous semblent les plus

pertinentes au vue de leur objet potentiel

222 Les eacutetablissements vont pouvoir srsquoorienter drsquoabord vers le Groupement de

Coopeacuteration Sanitaire (GCS) de moyens Cet outil de coopeacuteration particuliegraverement appreacutecieacute

des eacutetablissements preacutesente lrsquoavantage de pouvoir faire coopeacuterer des eacutetablissements publics

priveacutes et mecircme des professionnels de santeacute Selon le Code de la santeacute publique301

le GCS de

moyens a pour objet de faciliter de deacutevelopper ou dameacuteliorer lactiviteacute de ses membres et

peut ecirctre constitueacute pour laquo organiser ou geacuterer des activiteacutes administratives logistiques

techniques meacutedico-techniques denseignement ou de recherche reacutealiser ou geacuterer des

eacutequipements dinteacuterecirct commun il peut le cas eacutecheacuteant ecirctre titulaire agrave ce titre de

lautorisation dinstallation deacutequipements mateacuteriels lourds mentionneacutee agrave larticle L 6122-1

permettre les interventions communes de professionnels meacutedicaux et non meacutedicaux exerccedilant

dans les eacutetablissements ou centres de santeacute membres du groupement ainsi que des

298 V Supra ndeg 212 agrave 216

299 V Supra ndeg 218 agrave 219

300 DE LARD Brigitte laquo Heacutebergement de donneacutees et coopeacuteration raquo Actualiteacutes JuriSanteacute ndeg 74 2011 p 7

301 Article L6133-1 du Code de la santeacute publique

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

129

professionnels libeacuteraux membres du groupement raquo La mutualisation de lrsquoheacutebergement de

donneacutees de santeacute semble donc ecirctre une activiteacute pouvant ecirctre porteacutee par un GCS de moyens

223 Le Groupement drsquoInteacuterecirct Public (GIP) est eacutegalement une solution de coopeacuteration

organique pour les eacutetablissements Il srsquoagit drsquoune personne morale de droit public reacutegie par le

chapitre II de la loi ndeg011-525 du 17 mai 2011 de simplification et drsquoameacutelioration de la

qualiteacute du droit302

Un GIP peut ecirctre constitueacute entre plusieurs personnes morales publiques ou

entre des personnes morales publiques et des personnes morales priveacutees Il a pour objet

drsquoexercer des activiteacutes dinteacuterecirct geacuteneacuteral agrave but non lucratif les membres du GIP mettant en

commun les moyens neacutecessaires agrave leur exercice Initialement conccedilu pour une dureacutee limiteacutee la

loi de 2011 est venue modifier cette particulariteacute Deacutesormais le GIP peut ecirctre agrave dureacutee

deacutetermineacutee ou indeacutetermineacute La dureacutee doit ecirctre preacuteciseacutee au sein de la convention constitutive

Le GIP semble ecirctre un outil adapteacute agrave la coopeacuteration entre eacutetablissements de santeacute dans le but

drsquoheacuteberger des donneacutees de santeacute

224 Enfin le Groupement drsquoInteacuterecirct Economique (GIE) est eacutegalement une solution de

coopeacuteration envisageable celui-ci pouvant ecirctre creacuteeacute entre des personnes morales de droit

priveacute et public Lrsquoobjet principal drsquoun GIE est de faciliter ou de deacutevelopper lrsquoactiviteacute

eacuteconomique de ses membres Son but nrsquoest toutefois pas de reacutealiser des beacuteneacutefices pour lui-

mecircme Dans le domaine sanitaire le GIE a principalement pour objet drsquoacqueacuterir ou de geacuterer

des eacutequipements drsquointeacuterecirct commun (bloc opeacuteratoire scanner) de mutualiser des moyens

humains locaux mateacuteriels ou de fournir aux eacutetablissements des prestations ou services

auxiliaires agrave leurs activiteacutes respectives Comme le GIP le GIE a en theacuteorie une dureacutee de vie

limiteacutee il faudra donc que les eacutetablissements qui choisissent cette forme de coopeacuteration y

soient vigilants

Une fois la structure de coopeacuteration creacuteeacutee celle-ci devra bien eacutevidemment se plier aux

exigences du deacutecret heacutebergeur et donc obtenir un agreacutement A lrsquoheure actuelle huit agreacutements

302 Loi ndeg 2011-525 du 17 mai 2011 de simplification et dameacutelioration de la qualiteacute du droit JORF ndeg 0115 du

18 mai 2011 p 8537

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

130

ont eacuteteacute deacutelivreacutes agrave six structures diffeacuterentes de coopeacuterations (un GIE deux GCS un GIP et

deux SIH303

)

B Quelle place laisseacutee au respect du droit des patients

225 Lrsquointeacuterecirct principal des textes encadrant lrsquoheacutebergement des donneacutees de santeacute par des

tiers est bien entendu de proteacuteger la seacutecuriteacute et la confidentialiteacute de ces donneacutees et donc par

la mecircme occasion les inteacuterecircts des patients concerneacutes par ces donneacutees Toutefois une lecture

preacutecise des textes nous permet de constater que le droit des patients et notamment son droit

au consentement (1) nrsquoest pas particuliegraverement proteacutegeacute Le rocircle de meacutedecin de lrsquoheacutebergeur

reste cependant un rempart contre les atteintes agrave la confidentialiteacute des donneacutees (2)

1) La disparition progressive du consentement

226 Le consentement du patient eacutetait initialement un eacuteleacutement obligatoire en amont de tout

heacutebergement aupregraves drsquoun tiers (a) Mais les diffeacuterentes modifications de lrsquoarticle L 1111-8 du

Code de la santeacute publique ont transformeacute ce principe en exception (b) avant de le faire

totalement disparaitre (c)

a) Le consentement eacuteleacutement initialement essentiel agrave lrsquoheacutebergement

227 En matiegravere de soins le consentement du patient est un eacuteleacutement fondamental Le Code

de deacuteontologie meacutedicale rappelle drsquoailleurs ce principe304

et la loi du 4 mars 2002 lrsquoa eacuterigeacute en

droit essentiel du patient305

En matiegravere de protection des donneacutees personnelles faisant lrsquoobjet

drsquoun traitement automatiseacute et plus particuliegraverement dans le cas des donneacutees de santeacute la loi

Informatique et Liberteacutes a fait du consentement de la personne concerneacutee par les donneacutees une

condition sine qua non du traitement Nous avons toutefois pu constater que ce principe

comporte de nombreuses exceptions sur lesquelles nous ne reviendrons pas306

303 Les Syndicats Inter-Hospitalier sont des structures de coopeacuterations qui ont eacuteteacute supprimeacutees par la loi HPST

Les coopeacuterations qui prenaient cette forme doivent deacutesormais eacutevoluer vers une autre forme juridique 304

Article R4127-36 du Code de la santeacute publique

305 Article L 1111-4 du Code de la santeacute publique

306 V Supra ndeg 230

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

131

228 Quand il a introduit en 2002 la possibiliteacute pour un eacutetablissement ou un professionnel

de santeacute drsquoheacuteberger les donneacutees de santeacute qursquoil collecte aupregraves drsquoun tiers agreacuteeacute le leacutegislateur

nrsquoa pas oublieacute la notion de consentement du patient En effet lrsquoarticle L 1111-8 du Code de

la santeacute publique preacutevoyait la neacutecessiteacute drsquoobtenir preacutealablement agrave lrsquoexternalisation de

lrsquoheacutebergement le consentement expregraves du patient Drsquoailleurs dans les premiegraveres versions de

lrsquoarticle ce critegravere strict ne souffrait drsquoaucune exception307

On devine ici une reacuteelle volonteacute

de la part du leacutegislateur de srsquoassurer que le patient reste bien informeacute des conditions de

conservation des donneacutees de santeacute le concernant A ce titre le leacutegislateur nrsquoexigeait pas un

consentement tacite de la part du patient mais bien un consentement expregraves Cela impliquait

donc un veacuteritable travail drsquoinformation et de recueil du consentement de la part de

lrsquoeacutetablissement ou du professionnel de santeacute En pratique le respect de cette obligation

pouvait ecirctre assureacute soit par lrsquoheacutebergeur lui-mecircme soit par lrsquoeacutetablissement ou le professionnel

de santeacute qui choisissait de deacuteposer ses donneacutees par le biais drsquoun report contractuel de

lrsquoobligation Cependant ce principe a vite souffert drsquoexceptions avant de totalement

disparaicirctre

b) Le consentement du principe agrave lrsquoexception

229 La loi ndeg2007-127 du 30 janvier 2007308

en son article 25 III eacutetait venue introduire

une exception agrave cette obligation stricte du consentement expregraves en ajoutant agrave lrsquoarticle L

1111-8 du Code de la santeacute publique la mention suivante laquo les professionnels et

eacutetablissements de santeacute peuvent par deacuterogation aux dispositions de la derniegravere phrase des

deux premiers alineacuteas du preacutesent article utiliser leurs propres systegravemes ou des systegravemes

appartenant agrave des heacutebergeurs agreacuteeacutes sans le consentement expregraves de la personnes concerneacutee

degraves lors que lrsquoaccegraves deacutetenu est limiteacute au professionnel de santeacute ou agrave lrsquoeacutetablissement de santeacute

qui les a deacuteposeacutes ainsi qursquoagrave la personne concerneacutee dans les conditions preacutevues par lrsquoarticle

L 1111-7 raquo

230 Le leacutegislateur avait ainsi dans un premier temps restreint lrsquoobligation de

consentement aux seuls cas dans lesquels les donneacutees collecteacutees seraient ameneacutees agrave ecirctre

partageacutees entre plusieurs eacutetablissements ou professionnels de santeacute Cette disposition

307 Ceci nrsquoest plus le cas aujourdrsquohui V Infra ndeg 232

308 Loi ndeg 2007-127 du 30 janvier 2007 ratifiant lordonnance ndeg 2005-1040 du 26 aoucirct 2005 relative agrave

lorganisation de certaines professions de santeacute et agrave la reacutepression de lusurpation de titres et de lexercice illeacutegal

de ces professions et modifiant le Code de la santeacute publique JORF ndeg27 du 1 feacutevrier 2007 p 1937

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

132

deacuterogatoire a constitueacute une veacuteritable remise en question de lrsquoimportance accordeacutee au

consentement du patient puisque dans les faits elle est devenue la regravegle applicable En effet

lrsquoexception preacutevue par le leacutegislateur recouvrait la majoriteacute des cas drsquoheacutebergements des

donneacutees de santeacute A titre drsquoexemple le dossier meacutedical drsquoun eacutetablissement public de santeacute

nrsquoa pas pour vocation agrave ecirctre partageacute agrave lrsquoexteacuterieur Degraves lors on pouvait consideacuterer que lrsquoaccegraves

aux donneacutees de santeacute eacutetait bien limiteacute agrave lrsquoeacutetablissement de santeacute qui les avait deacuteposeacutees et le

consentement des patients preacutealable agrave lrsquoheacutebergement aupregraves drsquoun tiers nrsquoeacutetait donc pas

neacutecessaire

Comme si cette disposition nrsquoeacutetait pas suffisante le leacutegislateur est venu en 2011

amoindrir de nouveau la porteacutee du consentement du patient dans ce contexte En effet une

disposition de la loi Fourcade modifiant la loi HPST309

eacutetait venue preacuteciser que les

eacutetablissements de santeacute qui souhaitaient confier lrsquoheacutebergement de leurs donneacutees de santeacute sur

support papier agrave des tiers agreacuteeacutes pouvaient se dispenser du consentement expregraves preacutealable si

ces donneacutees avaient eacuteteacute collecteacutees avant le 10 aoucirct 2011 date de la promulgation de la loi Le

leacutegislateur avait introduit ici une sorte de dispense geacuteneacuterale de consentement qui touchait en

pratique des quantiteacutes extrecircmement importantes de donneacutees personnelles de santeacute Au final

laquo la valeur du consentement de la personne agrave lrsquoheacutebergement de ses donneacutees fait deacutefaut

comme eacutemousseacutee au fur et agrave mesure des textes raquo310

231 Il nous semble que le leacutegislateur avait souhaiteacute simplifier pour les eacutetablissements de

santeacute et les professionnels une proceacutedure qui srsquoinscrivait deacutejagrave dans un environnement

technique et juridique complexe Drsquoailleurs le fait que cette disposition soit apparue cinq ans

apregraves la disposition relative agrave lrsquoheacutebergement agreacuteeacute des donneacutee de santeacute montrait bien que le

leacutegislateur nrsquoavait pas dans un premier temps mesureacute totalement lrsquoimpact drsquoune telle

exigence Certains auteurs ont critiqueacute cette quasi-neacutegation du consentement du patient en

contradiction avec les principes fondateurs de la loi Informatique et Liberteacutes Pourtant

lrsquoeacutevolution reacutecente de lrsquoarticle L 1111-8 du Code de la santeacute publique a fait disparaitre le

consentement du patient

c) La disparition du consentement au profit de la non opposition

309 Loi ndeg 2009-879 du 21 juillet 2009 portant reacuteforme de lhocircpital et relative aux patients agrave la santeacute et aux

territoires JORF ndeg 0167 du 22 juillet 2009 p 12184 310

ZORN-MACREZ Caroline laquo Donneacutees de santeacute et secret partageacute raquo PUN 2010 p 299

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

133

232 Le comiteacute drsquoagreacutement des heacutebergeurs dans son second rapport drsquoactiviteacute311

publieacute en

septembre 2014 srsquoeacutetait interrogeacute sur lrsquointeacuterecirct du recueil preacutealable du consentement du patient

avant la mise en place drsquoun heacutebergement externaliseacute Pour le comiteacute il eacutetait leacutegitime de poser

la question de la neacutecessite de laquo solenniser lrsquoaccord du patient pour lrsquoheacutebergement de ses

donneacutees alors que le leacutegislateur a mis en place au moyen de la proceacutedure drsquoagreacutement des

garanties fortes de seacutecuriteacute et de confidentialiteacute raquo312

Il preacuteconisait ainsi dans son rapport une

eacutevolution des textes sur ce point le recueil du consentement du patient eacutetant en pratique

difficile agrave respecter La loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute a dans son article 96

fait disparaitre de maniegravere deacutefinitive cette exigence au profit drsquoune non opposition

Deacutesormais lrsquoheacutebergement est reacutealiseacute laquo apregraves que la personne prise en charge en a eacuteteacute ducircment

informeacutee et sauf opposition de sa part pour un motif leacutegitime raquo Le leacutegislateur va donc ici

assez loin car le patient dont le consentement nrsquoest plus rechercheacute ne pourra de fait srsquoopposer

agrave lrsquoheacutebergement externaliseacute de ses donneacutees qursquoen avanccedilant un motif leacutegitime non deacutefini par

le texte

2) Le meacutedecin de lrsquoheacutebergeur garant du respect de la confidentialiteacute des donneacutees

233 Le deacutecret heacutebergeur vient introduire une nouvelle fonction celle du meacutedecin de

lrsquoheacutebergeur Selon lrsquoarticle R 1111-9 du Code de la santeacute publique ce meacutedecin est une des

personnes laquo en charge de lrsquoactiviteacute drsquoheacutebergement raquo Cette notion reste toutefois assez floue

et le leacutegislateur nrsquoapporte aucun renseignement sur les missions qui lui seraient deacutevolues

Drsquoailleurs dans son second rapport drsquoactiviteacute le Comiteacute drsquoagreacutement des heacutebergeurs preacuteconise

une intervention du leacutegislateur afin de deacutefinir clairement le rocircle du meacutedecin de lrsquoheacutebergeur

mais eacutegalement fournir un cadre reacuteglementaire preacutecis agrave lrsquoaccegraves aux donneacutees de santeacute

heacutebergeacutees par ce meacutedecin313

234 laquo Rouage important de la politique de confidentialiteacute de lrsquoheacutebergeur raquo314

il apparait

clairement que le rocircle principal du meacutedecin de lrsquoheacutebergeur consiste agrave srsquoassurer drsquoune part du

respect de la confidentialiteacute des donneacutees et drsquoautre part du droit des personnes concerneacutees

311 Rapport drsquoactiviteacute 2012-2013 du comiteacute drsquoagreacutement des heacutebergeurs disponible sur [httpesantegouvfr]

Consulteacute le 15 mai 2017 312

Rapport drsquoactiviteacute 2012-2013 du comiteacute drsquoagreacutement des heacutebergeurs disponible sur [httpesantegouvfr]

Consulteacute le 15 mai 2017 p 20 313

Id p 23 314

Livre blanc de lrsquoassociation franccedilaise des heacutebergeurs agreacuteeacutes de donneacutees de santeacute 2014 p 27

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

134

par les donneacutees qursquoelle deacutetiennent aux termes de la loi Informatique et Liberteacutes Selon

Philippe BICLET le Preacutesident du Comiteacute drsquoagreacutement des heacutebergeurs cette fonction a

eacutegalement eacuteteacute mise en place afin que laquo le secret professionnel soit proteacutegeacute lorsqursquoune

intervention humaine est neacutecessaire agrave lrsquooccasion du traitement des donneacutees ce qui est par

exemple le cas en cas drsquoincident informatique ou agrave lrsquooccasion de la restitution des donneacutees agrave

un patient ou agrave ses ayants-droits raquo315

Le Comiteacute drsquoagreacutement des heacutebergeurs a eacutegalement

preacuteciseacute les missions de ce meacutedecin de lrsquoheacutebergeur Ainsi dans son rapport drsquoactiviteacute 2006-

2011316

on apprend qursquoil peut eacutegalement ecirctre saisi afin de proceacuteder agrave certaines veacuterifications

de coheacuterence dans lrsquohypothegravese drsquoune suspicion de collision ou de doublon dans les dossiers

meacutedicaux Selon lrsquoassociation franccedilaise des heacutebergeurs agreacuteeacutes des donneacutees de santeacute ce

meacutedecin est eacutegalement tenu drsquoinsuffler une culture de la seacutecuriteacute et de la protection des

donneacutees au sein de lrsquoentreprise

235 Le meacutedecin devra bien eacutevidemment signer un contrat avec lrsquoheacutebergeur afin drsquoencadrer

son intervention Lrsquoembauche agrave temps complet drsquoun meacutedecin semble difficilement

envisageable317

et lrsquoheacutebergeur optera plutocirct pour un contrat du type prestation de service de

vacation ou encore de mise agrave disposition Dans tous les cas il est neacutecessaire de veiller agrave ce

que le meacutedecin conserve son indeacutependance deacuteontologique vis-agrave-vis de lrsquoheacutebergeur Le

Conseil National de lrsquoOrdre des Meacutedecins (CNOM) a eacutelaboreacute un modegravele de contrat type qursquoil

met agrave disposition sur son site Internet318

Lrsquointeacuterecirct principal de ce modegravele reacuteside dans la

preacutecision qui est faite des missions deacutevolues au meacutedecin de lrsquoheacutebergeur De mecircme son

indeacutependance professionnelle est rappeleacutee Il est eacutegalement preacutevu une clause afin drsquoeacuteviter

drsquoeacuteventuels conflits drsquointeacuterecircts Ainsi le meacutedecin de lrsquoheacutebergeur ne pourra ecirctre salarieacute ou

exeacutecuter des prestations de service pour le compte de personnes agrave lrsquoorigine des donneacutees de

santeacute heacutebergeacutees ou pour le compte des personnes concerneacutees par ces donneacutees Cette clause

permet drsquoeacuteviter par exemple qursquoun praticien hospitalier ait accegraves agrave lrsquoensemble des donneacutees

que son eacutetablissement fait heacuteberger de par son rocircle de meacutedecin heacutebergeur accegraves qursquoil nrsquoaurait

pas eu dans le cadre de son activiteacute normale et en application des regravegles en matiegravere de secret

partageacute Enfin il est preacutevu la communication du contrat au Conseil de lrsquoordre des meacutedecins

315 BICLET Philippe laquo Heacutebergement et eacutechange des donneacutees de santeacute raquo meacutedecine et droit 2010 pp 159-160

316 Rapport drsquoactiviteacute 2006-2011 du comiteacute drsquoagreacutement des heacutebergeurs p 19

317 ZORN-MACREZ Caroline laquo Donneacutees de santeacute et secret partageacute raquo op cit p 297

318 Modegravele disponible sur [httpswwwconseil-nationalmedecinfr] Consulteacute le 4 mai 2017

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

135

Le Comiteacute drsquoAgreacutement des Heacutebergeurs dans son premier rapport drsquoactiviteacute a regretteacute

lrsquoabsence dans ce contrat type drsquoobligation drsquoalerte aupregraves drsquoorganismes externes en cas de

deacutecouverte drsquoun manquement agrave la confidentialiteacute ceci ayant pu constituer une garantie

suppleacutementaire

sect2 La construction laborieuse du cadre relatif agrave la communication des

donneacutees de santeacute

236 La communication des donneacutees de santeacute par voie eacutelectronique reacutepond agrave des regravegles

strictes eacutedicteacutees par diffeacuterents textes successifs Cependant ce cadre preacutesente plusieurs

lacunes qui rendent son application difficile (A) Par ailleurs certaines exigences poseacutees par

la reacuteglementation applicable semblent contestables (B)

A La communication des donneacutees de santeacute des prescriptions difficilement

applicables en lrsquoeacutetat

237 Les dispositions reacutegissant les modaliteacutes de communication par voie eacutelectronique des

donneacutees de santeacute restent muettes sur certains points pourtant essentiels (1) En outre agrave lrsquoheure

actuelle des reacutefeacuterentiels neacutecessaires agrave la bonne application de ce cadre ne sont toujours pas

parus (2)

1) Des questions en suspens

238 Lrsquoarticle L 1110-4-1 du Code de la santeacute publique introduit par la loi de

modernisation de notre systegraveme de santeacute preacutevoit qursquo laquo afin de garantir la qualiteacute et la

confidentialiteacute des donneacutees de santeacute agrave caractegravere personnel et leur protection les

professionnels de santeacute les eacutetablissements et services de santeacute les heacutebergeurs de donneacutees de

santeacute agrave caractegravere personnel et tout autre organisme participant agrave la preacutevention aux soins ou

au suivi meacutedico-social et social utilisent pour leur traitement leur conservation sur support

informatique et leur transmission par voie eacutelectronique des systegravemes dinformation

conformes aux reacutefeacuterentiels dinteropeacuterabiliteacute et de seacutecuriteacute eacutelaboreacutes par le groupement

dinteacuterecirct public mentionneacute agrave larticle L 1111-24 Ces reacutefeacuterentiels sont approuveacutes par arrecircteacute

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

136

du ministre chargeacute de la santeacute pris apregraves avis de la Commission nationale de linformatique

et des liberteacutes raquo

239 Toutefois le texte ne preacutecise pas si ces dispositions srsquoappliquent seulement aux

eacutechanges entre professionnels de santeacute ou eacutegalement aux eacuteventuels envois de documents

meacutedicaux entre professionnels de santeacute et patients Or il est neacutecessaire de se poser la

question En effet les patients disposent drsquoun droit agrave la communication de leur dossier

meacutedical Actuellement cette communication se fait par le biais de copies du dossier papier ou

drsquoune copie sur CD du dossier informatiseacute Toutefois la question srsquoest poseacutee reacutecemment de

savoir srsquoil eacutetait possible de communiquer un dossier meacutedical informatiseacute au patient par

courrier eacutelectronique Cette question a fait lrsquoobjet drsquoun avis de la Commission drsquoAccegraves aux

Documents Administratifs (CADA) qui selon nous preacutesente quelques limites

240 En lrsquoespegravece un patient avait demandeacute au Centre Hospitalier Universitaire (CHU) que

certains eacuteleacutements de son dossier meacutedical lui soient communiqueacutes et ce par courrier

eacutelectronique Le Directeur Geacuteneacuteral du CHU lui avait reacutepondu qursquoil eacutetait disposeacute agrave lui

communiquer ces eacuteleacutements sous toute autre forme Pour justifier sa reacuteponse le Directeur

Geacuteneacuteral soulignait que la deacutelibeacuteration CNIL ndeg 97-008 du 4 feacutevrier 1997319

preacuteconisait que

seules les messageries seacutecuriseacutees et recourant au chiffrement des donneacutees puissent ecirctre

utiliseacutees pour transfeacuterer des donneacutees meacutedicales nominatives En conseacutequence le Directeur

Geacuteneacuteral de lrsquoeacutetablissement qui nrsquoeacutetait pas assureacute que la messagerie du patient eacutetait

suffisamment seacutecuriseacutee avait estimeacute dans une optique de protection de la seacutecuriteacute et de la

confidentialiteacute des donneacutees que la communication du dossier ne pouvait avoir lieu par ce

biais Le patient a donc saisi la CADA drsquoune demande drsquoavis La Commission dans un avis

rendu le 25 juillet 2013320

a pour sa part consideacutereacute que cette deacutelibeacuteration de la CNIL eacutetait

reacutedigeacutee dans des termes non impeacuteratifs et concernait les transferts de donneacutees meacutedicales entre

professionnels de santeacute Elle ne pouvait donc pas ecirctre invoqueacutee pour faire obstacle agrave la

communication drsquoun dossier meacutedical agrave un patient par courrier eacutelectronique Elle a cependant

estimeacute qursquoil eacutetait neacutecessaire pour lrsquoeacutetablissement de santeacute drsquoavertir le patient des risques que

preacutesente cette modaliteacute de communication De mecircme elle a consideacutereacute que lrsquoeacutetablissement

319 Deacutelibeacuteration portant adoption dune recommandation sur le traitement des donneacutees de santeacute agrave caractegravere

personnel ndeg 97-008 du 04 feacutevrier 1997 320

Avis de la CADA ndeg 20131540 du 25 juillet 2013

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

137

pouvait tout agrave fait chiffrer les donneacutees qursquoil serait ameneacute agrave communiquer par ce biais si ses

possibiliteacutes techniques le lui permettent

241 Cet avis est agrave notre sens critiquable En effet nous ne comprenons pas ce qui

justifierait de faire une diffeacuterence entre donneacutees transmises aux professionnels de santeacute ou

donneacutees transmises aux patients Dans lrsquoabsolu les donneacutees de santeacute doivent ecirctre proteacutegeacutees le

plus strictement possible et en toutes circonstances Degraves lors il nous parait difficile

drsquoenvisager un encadrement de la communication par voie informatique des donneacutees de santeacute

qui serait diffeacuterent selon la personne agrave qui les donneacutees sont transmises Face aux risques

existants en cas drsquoutilisation drsquoune messagerie non crypteacutee nous estimons qursquoun simple

rappel aux patients des risques encourus nrsquoest pas suffisant Avant drsquoaccorder une telle

possibiliteacute il est donc neacutecessaire qursquoune technologie suffisamment seacutecuriseacutee et notamment les

messageries crypteacutees se deacuteveloppent

2) Des reacutefeacuterentiels non parus

242 Jusqursquoagrave lrsquoadoption de la loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute crsquoest le deacutecret

du 15 mai 2007 dit deacutecret confidentialiteacute321

qui imposait pour tout professionnel

eacutetablissement ou reacuteseau de santeacute le respect de reacutefeacuterentiels deacutefinis par arrecircteacute et pris apregraves avis

de la CNIL dans lrsquohypothegravese drsquoune conservation ou de la transmission par voie eacutelectronique

de donneacutees de santeacute De mecircme depuis les modifications apporteacutees par la loi de modernisation

de notre systegraveme de santeacute lrsquoarticle L 1110-4-1 du Code de la santeacute publique nouvellement

creacuteeacute preacutevoit lui aussi la neacutecessiteacute pour les professionnels de santeacute et eacutetablissements qui

souhaiteraient eacutechanger des donneacutees de santeacute par voie eacutelectronique de respecter certains

reacutefeacuterentiels de seacutecuriteacute publieacutes par arrecircteacute322

Cependant agrave lrsquoheure actuelle aucun reacutefeacuterentiel

nrsquoa eacuteteacute publieacute Certains reacutefeacuterentiels agrave la porteacutee plus geacuteneacuterale ont bien eacuteteacute adopteacutes par le

leacutegislateur Ainsi le Reacutefeacuterentiel Geacuteneacuteral de Seacutecuriteacute (RGS) a eacuteteacute creacuteeacute par lrsquoarticle 9 de

321 Deacutecret ndeg 2007-960 du 15 mai 2007 relatif agrave la confidentialiteacute des informations meacutedicales conserveacutees sur

support informatique ou transmises par voie eacutelectronique et modifiant le Code de la santeacute publique (dispositions

reacuteglementaires) JORF ndeg113 du 16 mai 2007 p 9362 322

Lrsquoarticle L 1110-4-1 du Code de la santeacute publique preacutevoit laquo afin de garantir la qualiteacute et la confidentialiteacute

des donneacutees de santeacute agrave caractegravere personnel et leur protection les professionnels de santeacute les eacutetablissements et

services de santeacute les heacutebergeurs de donneacutees de santeacute agrave caractegravere personnel et tout autre organisme participant

agrave la preacutevention aux soins ou au suivi meacutedico-social et social utilisent pour leur traitement leur conservation

sur support informatique et leur transmission par voie eacutelectronique des systegravemes dinformation conformes aux

reacutefeacuterentiels dinteropeacuterabiliteacute et de seacutecuriteacute eacutelaboreacutes par le groupement dinteacuterecirct public mentionneacute agrave larticle L

1111-24 Ces reacutefeacuterentiels sont approuveacutes par arrecircteacute du ministre chargeacute de la santeacute pris apregraves avis de la

Commission nationale de linformatique et des liberteacutes raquo

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

138

lrsquoordonnance ndeg 2005-1516 du 8 deacutecembre 2005 relative aux eacutechanges eacutelectroniques entre les

usagers et les autoriteacutes administratives323

La version initiale du RGS (v10) a eacuteteacute rendue

officielle par arrecircteacute du Premier Ministre en date du 6 mai 2010 Une version 20 a eacuteteacute publieacutee

par arrecircteacute du Premier Ministre du 13 juin 2014 applicable depuis le 1er

juillet 2014 Selon

lrsquoAgence Nationale de Seacutecuriteacute de Systegravemes drsquoInformation (ANSSI) ce reacutefeacuterentiel permet

pour une autoriteacute administrative laquo de garantir aux citoyens et aux autres administrations que

le niveau de seacutecuriteacute de ses systegravemes drsquoinformation est bien adapteacute aux enjeux et aux risques

et qursquoil est harmoniseacute avec ceux de ses partenaires raquo Toutefois il nous semble que le

leacutegislateur dans sa reacutedaction du deacutecret confidentialiteacute entendait faire adopter des reacutefeacuterentiels

speacutecifiques aux eacutechanges de donneacutees de santeacute En effet le texte preacutecise bien qursquoil doit srsquoagir

de reacutefeacuterentiels laquo eacutelaboreacutes par le groupement dinteacuterecirct public mentionneacute agrave larticle L 1111-

24 raquo agrave savoir lrsquoASIP santeacute Le RGS bien qursquoeacutetant une possibiliteacute drsquoorientation pour les

eacutetablissements publics ne constitue donc pas le reacutefeacuterentiel de seacutecuriteacute tel que deacutefini par le

deacutecret confidentialiteacute

243 LrsquoASIP santeacute pour sa part srsquoest attacheacutee agrave reacutediger un reacutefeacuterentiel drsquointeropeacuterabiliteacute324

des systegravemes drsquoinformation en santeacute Celui-ci est disponible sur son site Internet au sein drsquoun

espace de publication appeleacute Reacutepertoire National des Reacutefeacuterentiels (RNR) Au sein de ce

reacutepertoire les eacutetablissements de santeacute peuvent consulter le Cadre drsquoInteropeacuterabiliteacute des

Systegravemes drsquoInformation de Santeacute (CI-SIS) Ce reacutefeacuterentiel a pour ambition afficheacutee de creacuteer

laquo les conditions drsquoune interopeacuterabiliteacute reproductible et efficiente entre SI de santeacute dans le

respect des exigences de seacutecuriteacute et de confidentialiteacute des donneacutees personnelles de santeacute raquo325

Le CI-SIS speacutecifie les standards qursquoil est preacutefeacuterable drsquoutiliser dans le cadre drsquoeacutechanges et de

partages de donneacutees de santeacute entre systegravemes drsquoinformations de santeacute LrsquoASIP Santeacute propose

ainsi tout un eacuteventail de documentation agrave ce sujet adapteacute aux speacutecificiteacutes de certaines

activiteacutes Toutefois ces reacutefeacuterentiels nrsquoont pas eacuteteacute publieacutes de maniegravere officielle et srsquoils restent

des documents de reacutefeacuterences pour les eacutetablissements et professionnels de santeacute ils ne leur

323 Ordonnance ndeg 2005-1516 du 8 deacutecembre 2005 relative aux eacutechanges eacutelectroniques entre les usagers et les

autoriteacutes administratives et entre les autoriteacutes administratives JORF ndeg 286 du 9 deacutecembre 2005 p 18986 324

Lrsquointeropeacuterabiliteacute des systegravemes de dossiers informatiseacutes est deacutefinie par la commission europeacuteenne comme

laquo la capaciteacute de plusieurs systegravemes de dossiers informatiseacutes de santeacute drsquoeacutechanger aussi bien des donneacutees

exploitables par un ordinateur que des informations et des connaissances demandant une intervention

humaine raquo Recommandation ndeg 2008594CE de la commission europeacuteenne du 2 juillet 2008 sur

lrsquointeropeacuterabiliteacute transfrontaliegravere des systegravemes de dossiers informatiseacutes de santeacute JOUE L 190 du 18 juillet 2008 325

Disponible sur [httpesantegouvfr] Consulteacute le 2 mai 2017

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

139

sont pas opposables juridiquement326

Mecircme srsquoil est vrai que ces reacutefeacuterentiels doivent ecirctre

constitueacutes par les acteurs compeacutetents agrave savoir lrsquoASIP Santeacute en lien avec les partenaires

industriels il est neacutecessaire de donner une force juridique agrave ces documents afin drsquoencadrer et

de seacutecuriser les pratiques des eacutetablissements et des professionnels de santeacute

B Lrsquoutilisation systeacutematique de la carte de professionnel de santeacute une

utopie abandonneacutee

244 Lapplication des regravegles relatives au partage des donneacutees ne pose pas reacuteellement de

problegraveme quand il sagit pour deux professionnels deacutechanger oralement Lexercice se

complique degraves lors que lutilisation des TIC entre en jeu En effet il va ecirctre neacutecessaire de

srsquoassurer que la personne qui cherche agrave acceacuteder agrave des donneacutees en a le droit Le professionnel

de santeacute va donc devoir srsquoidentifier puis srsquoauthentifier Il sagit ici de deux actions diffeacuterentes

une premiegravere au cours de laquelle le professionnel va deacutecliner son identiteacute et une autre qui va

permettre au professionnel de laquo prouver raquo quil est bien celui quil preacutetend ecirctre Afin de

reacutealiser ces deux actions le leacutegislateur a preacutevu dans un premier lrsquoutilisation obligatoire et

systeacutematique de la Carte de Professionnel de santeacute (CPS)327

ou drsquoun dispositif dit

eacutequivalent328

Drsquoabord mise en place pour lauthentification des professionnels de santeacute dans

le cadre de la transmission deacutemateacuterialiseacutee des feuilles de soin son utilisation a donc eacuteteacute

eacutelargie329

agrave toutes les transmissions de donneacutees de santeacute par voie eacutelectronique Il srsquoagit en

326 Ces reacutefeacuterentiels sont disponibles en ligne sur le site Internet de lrsquoASIP santeacute [httpesantegouvfr]

327 Article R 1110-3 du Code de la santeacute publique laquo en cas daccegraves par des professionnels de santeacute aux

informations meacutedicales agrave caractegravere personnel conserveacutees sur support informatique ou de leur transmission par

voie eacutelectronique lutilisation de la carte de professionnel de santeacute mentionneacutee au dernier alineacutea de larticle L

161-33 du Code de la seacutecuriteacute sociale est obligatoire raquo 328

Lrsquoarticle L 1110-4 du Code de la santeacute publique dans sa reacutedaction applicable jusqursquoau 28 janvier 2016

preacutevoyait qursquo laquo afin de garantir la confidentialiteacute des informations meacutedicales mentionneacutees aux alineacuteas

preacuteceacutedents leur conservation sur support informatique comme leur transmission par voie eacutelectronique entre

professionnels sont soumises agrave des regravegles deacutefinies par deacutecret en Conseil dEtat pris apregraves avis public et motiveacute

de la Commission nationale de linformatique et des liberteacutes Ce deacutecret deacutetermine les cas ougrave lutilisation de la

carte de professionnel de santeacute mentionneacutee au dernier alineacutea de larticle L 161-33 du Code de la seacutecuriteacute

sociale ou un dispositif eacutequivalent agreacuteeacute par lorganisme chargeacute deacutemettre la carte de professionnel de santeacute est

obligatoire La carte de professionnel de santeacute et les dispositifs eacutequivalents agreacuteeacutes sont utiliseacutes par les

professionnels de santeacute les eacutetablissements de santeacute les reacuteseaux de santeacute ou tout autre organisme participant agrave

la preacutevention et aux soins raquo 329

Article L 161-33 al3 du Code de la seacutecuriteacute sociale laquo dans le cas de transmission eacutelectronique par les

professionnels organismes ou eacutetablissements dispensant des actes ou prestations remboursables par lassurance

maladie lidentification de leacutemetteur son authentification et la seacutecurisation des eacutechanges sont assureacutees par une

carte eacutelectronique individuelle appeleacutee carte de professionnel de santeacute Le contenu les modaliteacutes de deacutelivrance

et dutilisation de cette carte sont fixeacutes par deacutecret en Conseil dEtat apregraves avis de la Commission nationale

informatique et liberteacutes raquo

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

140

pratique drsquoune carte contenant les donneacutees didentification de son porteur ainsi que ses

conditions dexercice et lui permettant ainsi de sauthentifier et de signer eacutelectroniquement les

diffeacuterentes opeacuterations quil effectue (par exemple la reacutedaction dun compte rendu

dhospitalisation) Drsquoabord geacutereacutee par le GIP-CPS cette carte est actuellement distribueacutee par

lAgence des Systegravemes dInformation Partageacutees en santeacute (ASIP santeacute)330

Ce dispositif permet

indeacuteniablement drsquoassurer la seacutecuriteacute neacutecessaire aux donneacutees de santeacute Cependant plusieurs

beacutemols peuvent ecirctre apporteacutes agrave son utilisation obligatoire

245 Drsquoabord drsquoun point de vue pratique selon les chiffres de lASIP Santeacute sur les 1 178

271 cartes actives de la famille des cartes de professionnels (CPS et autres cartes eacutequivalents

diffuseacutees par lrsquoASIP santeacute) seulement 325 789 ont eacuteteacute distribueacutees au sein des eacutetablissements

de santeacute331

Cette diffeacuterence srsquoexplique notamment gracircce agrave lrsquohistorique de cette carte En effet

au vu de son objet initial cette carte est peu connue du monde hospitalier et son

deacuteveloppement au sein des eacutetablissements de santeacute est aujourdrsquohui difficile pour des raisons agrave

la fois techniques mais eacutegalement drsquohabitude En eacutetablissement de santeacute cette obligation

drsquoutiliser de maniegravere systeacutematique une carte de professionnel de santeacute ou dispositif

eacutequivalent est donc compliqueacute Par ailleurs en instaurant lrsquoutilisation obligatoire de la CPS

pour la transmission de donneacutees de santeacute par voie eacutelectronique par des professionnels de

santeacute le deacutecret confidentialiteacute a en reacutealiteacute eacutelargi le champ drsquoapplication initial de lrsquoarticle L

161-33 du Code de la seacutecuriteacute sociale qui ne preacutevoyait lrsquoutilisation de cette carte que dans les

cas de la transmission eacutelectronique des feuilles de soins deacutemateacuterialiseacutees agrave lrsquoassurance maladie

246 Le deacutecret confidentialiteacute acte reacuteglementaire a donc eacutelargi le champ drsquoutilisation de la

CPS initialement preacutevu par la loi332

Or un deacutecret ne doit pas venir modifier le champ

drsquoapplication de la loi mais simplement en deacutefinir les modaliteacutes drsquoapplication Nous sommes

donc ici face agrave un deacutecret qui eacutetait en reacutealiteacute contraire agrave la loi Ceci relegraveve comme le souligne agrave

juste titre Caroline ZORN-MACREZ drsquoune pratique contra legem333

En cela les obligations

du deacutecret eacutetaient donc inapplicables

330Arrecircteacute du 12 octobre 2009 portant approbation de la modification de la convention constitutive du

Groupement drsquoInteacuterecirct Public laquo Carte de Professionnel de Santeacute raquo JORF du 17 octobre 2009 A compter de

novembre 2009 le GIP-CPS a inteacutegreacute lrsquoASIP santeacute 331

Chiffres disponibles sur [httpesantegouvfr] consulteacutes le 1er mars 2017 332

ZORN-MACREZ Caroline laquo Donneacutees de santeacute et secret partageacute raquo op cit p 269 333

Id p 269 laquo cette situation illustre parfaitement les deacutebordements drsquoune pratique reacuteglementaire ultra legem

laquelle dissimule une pratique veacuteritablement contra legem raquo

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

141

247 Ces difficulteacutes ont eacuteteacute reacutegleacutees par lrsquoarticle 96 de la loi de modernisation de notre

systegraveme de santeacute qui supprime purement et simplement lrsquoexigence de lrsquoutilisation de la CPS

ou drsquoun dispositif eacutequivalent pour la transmission de donneacutees de santeacute par voie eacutelectronique

Cette mention a donc disparu de lrsquoarticle L 1110-4 du Code de la santeacute publique qui preacutevoit

deacutesormais qursquolaquo afin de garantir la qualiteacute et la confidentialiteacute des donneacutees de santeacute agrave

caractegravere personnel et leur protection les professionnels de santeacute les eacutetablissements et

services de santeacute les heacutebergeurs de donneacutees de santeacute agrave caractegravere personnel et tout autre

organisme participant agrave la preacutevention aux soins ou au suivi meacutedico-social et social utilisent

pour leur traitement leur conservation sur support informatique et leur transmission par voie

eacutelectronique des systegravemes dinformation conformes aux reacutefeacuterentiels dinteropeacuterabiliteacute et de

seacutecuriteacute eacutelaboreacutes par le groupement dinteacuterecirct public mentionneacute agrave larticle L 1111-24 Ces

reacutefeacuterentiels sont approuveacutes par arrecircteacute du ministre chargeacute de la santeacute pris apregraves avis de la

Commission nationale de linformatique et des liberteacutes raquo

248 Or agrave ce jour et comme nous avons pu le constater preacuteceacutedemment ces reacutefeacuterentiels

nrsquoont toujours pas eacuteteacute publieacutes et les dispositions du deacutecret confidentialiteacute applicables

preacuteceacutedemment et codifieacutes aux article R 1110-1 agrave R 1110-4 du Code de la santeacute publique ont

eacuteteacute remplaceacutes par des dispositions inteacutegreacutees par le deacutecret du 20 juillet 2016 relatif aux

conditions drsquoeacutechange et de partage drsquoinformations entre professionnels de santeacute et autres

professionnels des champs social et meacutedico-social et agrave laccegraves aux informations de santeacute agrave

caractegravere personnel334

Lrsquoencadrement de la transmission par voie informatique des donneacutees

de santeacute demeure donc aujourdrsquohui inabouti

334 Deacutecret ndeg 2016-994 du 20 juillet 2016 relatif aux conditions deacutechange et de partage dinformations entre

professionnels de santeacute et autres professionnels des champs social et meacutedico-social et agrave laccegraves aux informations

de santeacute agrave caractegravere personnel JORF ndeg0169 du 22 juillet 2016 texte ndeg 21

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

142

Conclusion de la section

249 Bien que preacutesentant certaines lacunes le deacutecret heacutebergeur et lrsquoensemble de

lrsquoencadrement et des proceacutedures relatives agrave lrsquoheacutebergement des donneacutees de santeacute aupregraves drsquoun

tiers permettent drsquoassurer la seacutecuriteacute neacutecessaire agrave ces donneacutees Par ailleurs la reacutecente

reacutenovation du cadre de lrsquoheacutebergement des donneacutees de santeacute permet de simplifier les

deacutemarches preacutealables qui srsquoimposent aux heacutebergeurs leur apportant plus de souplesse et de

reacuteactiviteacute

250 En ce qui concerne la communication des donneacutees de santeacute en revanche bien que le

leacutegislateur ait tenteacute drsquoencadrer strictement la communication par voie eacutelectronique des

donneacutees de santeacute force est de constater qursquoil a malheureusement eacutechoueacute Car mecircme si lrsquoideacutee

initiale eacutetait tregraves inteacuteressante lrsquoapplication nrsquoa pas suivi De plus lrsquoobligation drsquoutiliser de

maniegravere systeacutematique la carte de professionnel de santeacute a eacuteteacute abandonneacutee reacutecemment par le

leacutegislateur mais aucune alternative nrsquoa eacuteteacute proposeacutee

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives aux patients

143

Conclusion du chapitre

251 Les donneacutees de santeacute dont la collecte la conservation et la communication sont

essentielles agrave la bonne prise en charge des patients se doivent drsquoecirctre suffisamment proteacutegeacutees

Leur vie de lrsquoarchivage agrave la destruction en passant par la communication est en theacuteorie

strictement encadreacutee par un ensemble de regravegles juridiques eacutepars Les donneacutees de santeacute

produites par les eacutetablissements publics de santeacute ont le statut drsquoarchives publiques De ce fait

le Code du patrimoine reacutegit leur conservation ainsi que leur destruction Mais la particulariteacute

de ces donneacutees font qursquoelles sont eacutegalement soumises agrave drsquoautres regravegles plus preacutecises

notamment en matiegravere de secret meacutedical Et crsquoest lagrave qursquoapparaissent les premiegraveres lacunes des

textes qui vont parfois entrer en contradiction Lrsquointroduction des TIC dans la pratique

meacutedicale implique une difficulteacute suppleacutementaire puisqursquoil faut deacutesormais conserver et

archiver des donneacutees de santeacute informatiseacutees

252 Malheureusement le leacutegislateur en deacutepit de ses efforts nrsquoa pas reacuteellement su faire

face agrave lrsquoarriveacutee massive des TIC et agrave lrsquoinformatisation croissante des donneacutees de santeacute Bien

que leur heacutebergement aupregraves drsquoun tiers soit correctement encadreacute le deacutecret confidentialiteacute

censeacute reacuteglementer la communication eacutelectronique des donneacutees a failli agrave sa mission et est

resteacute inapplicable Aujourdrsquohui le leacutegislateur au travers de la loi de modernisation de notre

systegraveme de santeacute et de ses textes drsquoapplication a supprimeacute les dispositions du deacutecret

confidentialiteacute Cependant agrave lrsquoheure actuelle aucune disposition ne les remplace et la

communication des donneacutees de santeacute est soumise au respect de reacutefeacuterentiels qui nrsquoont toujours

pas eacuteteacute agrave ce jour publieacutes

145

Conclusion du titre

253 Lrsquoeacutetude des modaliteacutes juridiques de lrsquoinformatisation des donneacutees de santeacute agrave lrsquohocircpital

nous a conduit agrave constater que le cadre juridique applicable se reacutevegravele complexe agrave appreacutehender

Regravegles de droit commun regravegles speacutecifiques et exceptions aux regravegles se superposent et ce

cadre peut parfois devenir illisible Il faut dire que le leacutegislateur a la lourde tacircche de proteacuteger

ces donneacutees particuliegraverement sensibles tout en permettant aux eacutetablissements et aux

professionnels de santeacute de mener agrave bien leurs missions Un juste eacutequilibre doit donc ecirctre

trouveacute A lrsquoheure actuelle lrsquoencadrement juridique de la naissance la communication la

conservation et la destruction des donneacutees de santeacute informatiseacutees fait lrsquoobjet de textes eacutepars

Certains drsquoentre eux ont montreacute leurs limites et le leacutegislateur srsquoemploie agrave moderniser un cadre

parfois trop rigide

Lrsquoinformatisation des donneacutees de santeacute nrsquoest qursquoune partie du rocircle joueacute par les TIC

dans la pratique meacutedicale et leur utilisation dans la prise en charge du patient a pris une place

importante Il nous apparait alors neacutecessaire de srsquoarrecircter sur le cadre juridique qui permet

aujourdrsquohui une telle utilisation

TITRE 2

TIC ET PRISE EN CHARGE MEDICALE UN

CADRE EN EVOLUTION

148

laquo Favoriser la coordination des professionnels de santeacute et leur coopeacuteration eacutetroite pour

ameacuteliorer la prise en charge des malades tel est le but de lrsquoutilisation des TIC [hellip] raquo335

254 Lrsquoutilisation des TIC dans la pratique meacutedicale ne se limite pas agrave lrsquoinformatisation des

donneacutees de santeacute Au contraire celle-ci nrsquoest qursquoune eacutetape permettant le deacuteveloppement de la

deacutemateacuterialisation de la prise en charge du patient et en la matiegravere les possibiliteacutes techniques

sont nombreuses Ces derniegraveres anneacutees ont vu se deacutevelopper de nombreuses initiatives en ce

sens Cependant une fois encore les possibiliteacutes techniques doivent ecirctre mises au regard de

lrsquointeacuterecirct du patient et la protection de ses droits et un juste eacutequilibre doit ecirctre trouveacute

255 Dans le but drsquoameacuteliorer la coordination et la qualiteacute des soins et dans la suite logique

de lrsquoinformatisation des donneacutees de santeacute les dossiers meacutedicaux deacutemateacuterialiseacutes et partageacutes se

sont deacuteveloppeacutes Si la plupart drsquoentre eux relegravevent du reacutegime de droit commun le leacutegislateur

a creacuteeacute un laquo reacutegime speacutecifique exorbitant de droit commun raquo336

au Dossier Meacutedical Partageacute

(DMP) Le deacuteveloppement de ce type de dossier repreacutesente une premiegravere eacutetape dans la

deacutemateacuterialisation de la prise en charge du patient (Chapitre premier) sur laquelle il nous faut

nous attarder Mais les TIC permettent eacutegalement drsquoenvisager une prise en charge agrave distance

des patients bousculant ainsi les codes et les regravegles en place depuis de nombreuses anneacutees en

la matiegravere Une eacutetude du cadre juridique naissant de cette pratique nous apparait alors

neacutecessaire (chapitre second)

335 FIESCHI Marius laquo Les donneacutees du patient partageacutees la culture du partage et de la qualiteacute des informations

pour ameacuteliorer la qualiteacute des soins raquo rapport au ministre de la santeacute de la famille et des personnes handicapeacutees

janvier 2003 p 8 336

ZORN-MACREZ Caroline laquo Donneacutees de santeacute et secret partageacute raquo PUN p 305

149

Chapitre 1

La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux

lrsquoexemple du DMP

256 Depuis plusieurs anneacutees maintenant les rapports officiels se multiplient au sujet de

lrsquoutilisation des TIC dans le domaine de la santeacute et plus speacutecifiquement dans le cadre de la

mise en place de dossiers informatiseacutes Le but ultime est bien entendu la creacuteation drsquoun

dossier informatiseacute partageacute un outil permettant de favoriser une meilleure coordination des

professionnels une ameacutelioration de la qualiteacute de la prise en charge et donc un meilleur eacutetat de

santeacute global

257 Les eacutetablissements de santeacute ont deacutejagrave depuis plusieurs dizaines drsquoanneacutees commenceacute

lrsquoinformatisation de leur dossier meacutedical Celle-ci se fait de maniegravere progressive et les

eacutetablissements de santeacute ne sont pas tous agrave lrsquoheure actuelle au mecircme stade de deacuteveloppement

Lrsquoinformatisation complegravete drsquoun dossier meacutedical demande en effet du temps mais eacutegalement

des moyens agrave la fois financiers et humains Lrsquoeacutevolution technologique doit par ailleurs ecirctre

accompagneacutee par une bonne gestion manageacuteriale de la conduite du changement

258 Il apparait eacutevident que les enjeux de lrsquoinformatisation du dossier meacutedical sont

importants (ameacutelioration de la prise en charge du patient meilleure coordination outil plus

facile drsquoaccegraves hellip) et ceux-ci deacutepassent les portes de lrsquohocircpital Le recueil la conservation et le

partage de donneacutees issues du soin agrave un niveau reacutegional voire national font partie des

preacuteoccupations des pouvoirs publics depuis plus de dix ans Ainsi face aux succegraves de certains

de nos voisins europeacuteens et deacutecideacute agrave mettre en place un dossier partageacute unique le leacutegislateur

est venu creacuteer en 2004 le Dossier Meacutedical Partageacute (DMP) (Section I) Depuis ce dossier et

surtout son encadrement juridique nrsquoont cesseacute drsquoeacutevoluer pour tenter de faire face aux eacutechecs

et aux critiques que le projet subi (Section II)

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

150

Section 1 Le DMP un Dossier meacutedical eacutelectronique institutionnel

259 Alors que les projets drsquoinformatisation des dossiers meacutedicaux se deacuteveloppent au sein

des eacutetablissements de santeacute et ce de faccedilon plutocirct disparate chaque eacutetablissement eacutetant libre de

choisir comment il va organiser du point de vue pratique et technique lrsquoinformatisation de son

dossier meacutedical le leacutegislateur a fait le pari en 2004 de lancer un dossier informatiseacute partageacute

entre tous les professionnels de santeacute ameneacutes agrave prendre en charge un mecircme patient

Lrsquooriginaliteacute du projet reacuteside dans le fait que ce dossier peut eacutegalement ecirctre consulteacute

directement par le patient

260 Toutefois perdu dans la masse de lrsquoensemble des dossiers meacutedicaux eacutelectroniques

qui se deacuteveloppent il est parfois difficile drsquoenvisager quelle est la place du DMP (Paragraphe

1) Drsquoailleurs cela nrsquoest pas eacutetranger au fait que depuis sa creacuteation son cadre juridique eacutevolue

de maniegravere heacutesitante (Paragraphe 2)

sect1 La place incertaine du DMP dans le champ des dossiers meacutedicaux

261 DME DMI DMP DP Les acronymes sont aujourdrsquohui nombreux et il devient

difficile de se retrouver dans le champ des diffeacuterentes acceptions du dossier meacutedical Et il est

tout autant difficile de reacuteussir agrave deacutelimiter la place et le rocircle deacutedieacutes au DMP dans cet ensemble

disparate

Pour reacuteussir cet exercice il est neacutecessaire de srsquoessayer dans un premier temps agrave

deacutelimiter les contours et le cadre juridique qui serait applicable aux dossiers meacutedicaux

eacutelectroniques terme finalement le plus geacuteneacuteral et le plus englobant qui reacuteunit lrsquoensemble des

diffeacuterents dossiers informatiseacutes (A) Cet exercice termineacute il nous sera neacutecessaire de tenter

drsquoarticuler les diffeacuterents dossiers entre eux afin de chercher agrave savoir dans quelle mesure ils se

complegravetent etou sont redondants (B) Cela aura pour but principal bien sucircr de chercher agrave

savoir ougrave se situe le DMP dans le paysage des dossiers meacutedicaux

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

151

A Tentative de deacutelimitation du cadre juridique des DME

262 Terme couramment utiliseacute notamment par les professionnels des systegravemes

drsquoinformation hospitaliers le Dossier Meacutedical Electronique (DME) nrsquoest pourtant pas

juridiquement deacutefini de maniegravere claire Or il est facile de se perdre dans les meacuteandres des

deacutenominations diverses qui existent actuellement pour deacutesigner le dossier meacutedical Ainsi

pour nous eacuteclairer agrave ce sujet il est neacutecessaire de tenter de deacutelimiter les contours du DME (2) agrave

la lumiegravere des diffeacuterentes formes que peut prendre le dossier meacutedical (1)

1) Le dossier meacutedical un dossier aux formes multiples

263 Bien que le dossier meacutedical soit un outil deacutesormais solidement ancreacute dans les pratiques

des professionnels de santeacute celui-ci ne dispose pas de reacuteelle deacutefinition juridique En effet il

nrsquoest finalement deacutefini que par le biais de son contenu ou de ses modes drsquoaccegraves et de

communication337

Or il existe agrave lrsquoheure actuelle un nombre important de dossiers diffeacuterents

qui contiennent des donneacutees meacutedicales de patients et qui sont utiliseacutes pour leur suivi Pour

reprendre les propos de Philippe BICLET laquo derriegravere le terme geacuteneacuterique de dossier meacutedical

se cachent des reacutealiteacutes bien diffeacuterentes raquo338

264 Dossier de suivi meacutedical dossier hospitalier dossier patient dossier meacutedical

informatiseacute dossier meacutedical personnel dossier pharmaceutique dossier de reacuteseau les

deacutenominations sont aujourdrsquohui nombreuses et il est parfois difficile de clairement identifier

de quel outil il srsquoagit Or pour mieux appreacutehender le DME et le DMP il nous semble

important de deacutelimiter drsquoabord les contours de ces diffeacuterents dossiers Pour ce faire nous

faisons le choix de concentrer nos travaux sur les seuls dossiers ayant un encadrement

juridique preacutecis En effet comme nous le verrons plusieurs deacutenominations regroupent en

reacutealiteacute la mecircme chose

265 Drsquoun point de vue strictement juridique quatre types de dossiers existent reacuteellement

Le plus connu ou tout du moins le mieux identifieacute en pratique est le dossier meacutedical dont le

337 GIOCANTI Dominique laquo Les diffeacuterentes acceptions des termes dossier meacutedical et dans ce contexte

situation du dossier hospitalier raquo RGDM ndeg 37 2010 p 164 338

BICLET Philippe laquo Le dossier meacutedical dans tous ses eacutetats raquo Meacutedecine et droit 2006 p 174

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

152

contenu est deacutefini agrave lrsquoarticle R 1112-2 du Code de la santeacute publique339

et obligatoirement

preacutesent dans les eacutetablissements de santeacute publics ou priveacutes Ce dossier est couramment appeleacute

dossier hospitalier340

En reacutealiteacute il nrsquoexiste pas de texte qui le deacutefinisse juridiquement

Toutefois par le jeu des diffeacuterents articles deacutefinissant agrave la fois son contenu a minima (article

R 1112-2 du Code de la santeacute publique) ou les moyens de sa communication au patient

(article L 1111-7 du Code de la santeacute publique) il nous est possible drsquoen dresser les contours

Il apparait ainsi que ce dossier a eacuteteacute conccedilu par le leacutegislateur pour ecirctre le plus large possible et

contenir lrsquoensemble des informations meacutedicales drsquoun patient qui ont pu ecirctre collecteacutees agrave

lrsquooccasion de son seacutejour en eacutetablissement de santeacute Drsquoailleurs les autres dossiers de

professionnels se doivent drsquoecirctre regroupeacutes en son sein (crsquoest le cas par exemple du dossier

drsquoanestheacutesie ou encore du dossier de soins infirmiers) A noter que lrsquoarticle R 1112-2 preacutevoit

que le contenu eacutenonceacute est un contenu a minima Ainsi les eacutetablissements restent libres

drsquoajouter drsquoautres eacuteleacutements typiques de leur organisation interne par exemple pour compleacuteter

ce dossier Cela explique la diversiteacute actuelle qui existe en matiegravere drsquoorganisation des dossiers

meacutedicaux

266 Lrsquoarticle 45 du Code de deacuteontologie meacutedicale codifieacute agrave lrsquoarticle R 4127-45 du Code

de la santeacute publique vient pour sa part imposer agrave chaque meacutedecin la tenue drsquoune fiche

drsquoobservation pour chaque patient Celle-ci est strictement personnelle au meacutedecin et doit

ecirctre reacutedigeacutee indeacutependamment du laquo dossier de suivi meacutedical preacutevu par la loi raquo Il srsquoagit en

reacutealiteacute drsquoun dossier de suivi qui avait eacuteteacute instaureacute par la Convention Nationale des meacutedecins

suite agrave la loi du 18 janvier 1994341

Toutefois agrave lrsquoheure actuelle ceci nrsquoest plus une

obligation342

Aucun formalisme nrsquoest preacutevu par la loi concernant ces notes et il nrsquoest pas

rare encore aujourdrsquohui que celles-ci soient tenues par les meacutedecins sur de simples fiches

cartonneacutees sans reacuteelle organisation Comme le souligne agrave juste titre le Professeur Marius

FIESCHI dans son rapport343

ce type de dossier meacutedical prend plutocirct la forme drsquoun dossier

339 Article R 1112-2 du Code de la santeacute publique laquo un dossier meacutedical est constitueacute pour chaque patient

hospitaliseacute dans un eacutetablissement de santeacute public ou priveacute raquo 340

V en ce sens GIOCANTI Dominique laquo Les diffeacuterentes acceptions des termes laquo dossier meacutedical raquo et dans ce

contexte situation du dossier hospitalier raquo op cit VEILLEROT Guy laquo Le dossier hospitalier raquo RGDM ndeg37

2010 pp 177-183 341

Loi ndeg 94-43 du 18 janvier 1994 relative agrave la santeacute publique et agrave la protection sociale JORF ndeg15 du 19

janvier 1994 p 960 342

BICLET Philippe laquo Le dossier meacutedical dans tous ses eacutetats raquo op cit p 174 343

FIESCHI Marius laquo Les donneacutees du patient partageacutees la culture du partage et de la qualiteacute des informations

pour ameacuteliorer la qualiteacute des soins raquo Rapport au ministre de la santeacute de la famille et des personnes handicapeacutees

op cit

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

153

drsquoarchives et ne correspond pas agrave un dossier partageacute qui serait un outil de coordination pour

les professionnels de santeacute

Toutefois ces derniegraveres anneacutees le leacutegislateur dans la suite des preacuteconisations du

rapport FIESCHI notamment qui procircnait la mise en place drsquoun dossier patient partageacute est

venu creacuteer deux dossiers informatiseacutes et partageacutes

267 Le premier et celui qui agrave lrsquoheure actuelle a rencontreacute le plus franc succegraves est le

dossier pharmaceutique (ou DP) introduit au Code de la seacutecuriteacute sociale par la loi du 30

janvier 2007344

Il srsquoagit drsquoun dossier destineacute exclusivement aux pharmaciens et qui permet

par le biais de la carte vitale du patient de consulter lrsquoensemble des meacutedicaments deacutelivreacutes au

cours des quatre derniers mois Initialement conccedilu comme un outil au service du DMP afin

drsquoalimenter le volet meacutedicaments de celui-ci le DP a veacutecu une premiegravere phase

drsquoexpeacuterimentation entre 2007 et deacutecembre 2008 phase deacuteveloppeacutee agrave lrsquoinitiative du Conseil

National de lrsquoOrdre des Pharmaciens Le deacutecret ndeg 2008-1326 du 15 deacutecembre 2008 relatif au

dossier pharmaceutique345

a geacuteneacuteraliseacute ce processus lrsquoensemble des pharmacies drsquoofficines

eacutetant appeleacutees agrave se doter de lrsquooutil Puis la loi HPST346

a introduit lrsquoarticle L 1111-23 au

Code de la santeacute publique qui preacutevoit lrsquoouverture pour chaque beacuteneacuteficiaire de lrsquoassurance

maladie et avec son consentement drsquoun dossier pharmaceutique dont le but afficheacute est de

favoriser la coordination la qualiteacute la continuiteacute des soins et la seacutecuriteacute de la dispensation des

meacutedicaments347

Cet article preacutevoit eacutegalement que la mise en œuvre du DP est assureacutee par le

Conseil National de lrsquoOrdre des pharmaciens En pratique seul un pharmacien drsquooffice ou

344 Loi ndeg 2007-127 du 30 janvier 2007 ratifiant lordonnance ndeg 2005-1040 du 26 aoucirct 2005 relative agrave

lorganisation de certaines professions de santeacute et agrave la reacutepression de lusurpation de titres et de lexercice illeacutegal

de ces professions et modifiant le Code de la santeacute publique JORF ndeg27 du 1 feacutevrier 2007 p 1937 345

Deacutecret ndeg 2008-1326 du 15 deacutecembre 2008 relatif au dossier pharmaceutique JORF ndeg0293 du 17 deacutecembre

2008 p 19237 346

Loi ndeg 2009-879 du 21 juillet 2009 portant reacuteforme de lhocircpital et relative aux patients agrave la santeacute et aux

territoires JORF ndeg0167 du 22 juillet 2009 p 12184 347

Article L 1111-23 du Code de la santeacute publique laquo afin de favoriser la coordination la qualiteacute la continuiteacute

des soins et la seacutecuriteacute de la dispensation des meacutedicaments produits et objets deacutefinis agrave larticle L 4211-1 il est

creacuteeacute pour chaque beacuteneacuteficiaire de lassurance maladie avec son consentement un dossier pharmaceutique Sauf

opposition du patient quant agrave laccegraves du pharmacien agrave son dossier pharmaceutique et agrave lalimentation de celui-

ci tout pharmacien dofficine est tenu dalimenter le dossier pharmaceutique agrave loccasion de la dispensation

Dans les mecircmes conditions les pharmaciens exerccedilant dans une pharmacie agrave usage inteacuterieur peuvent consulter et

alimenter ce dossier Les informations de ce dossier utiles agrave la coordination des soins sont reporteacutees dans le

dossier meacutedical personnel dans les conditions preacutevues agrave larticle L 1111-15 La mise en œuvre du dossier

pharmaceutique est assureacutee par le Conseil national de lordre des pharmaciens mentionneacute agrave larticle L 4231-2

Un deacutecret en Conseil dEtat pris apregraves avis de la Commission nationale de linformatique et des liberteacutes et du

Conseil national de lordre des pharmaciens fixe les conditions dapplication du preacutesent article raquo

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

154

exerccedilant au sein des pharmacies agrave usage interne (PUI) peut consulter et alimenter ce dossier

Toutefois il est preacutevu agrave terme que le DP soit inteacutegreacute au DMP tout du moins en partie et soit

donc de ce fait consultable par les autres professionnels de santeacute

268 Enfin le dossier meacutedical partageacute (DMP) qui fait lrsquoobjet drsquoune eacutetude pousseacutee tout au

long de notre chapitre est le projet de dossier meacutedical partageacute le plus complet tout du moins

en theacuteorie reflet de la volonteacute du leacutegislateur drsquoinstaurer un dossier partageacute par tous les

professionnels de santeacute intervenant dans la prise en charge drsquoun patient

Il est utile de signaler que des dispositifs alternatifs au dossier meacutedical existent

eacutegalement Citons plus particuliegraverement en ce sens le carnet de santeacute creacuteeacute par les articles R

162-1 agrave R 162-1-6 du Code de seacutecuriteacute sociale qui quant agrave lui visait plutocirct agrave permettre une

continuiteacute et une coordination des soins plus qursquoun archivage des informations meacutedicales

2) Deacutelimitation des contours du DME

Couramment les termes Dossier Meacutedical Electronique (DME) et de Dossier Meacutedical

Informatiseacute (DMI) sont utiliseacutes de maniegravere indiffeacuterente Nous choisirons ici de suivre ce

courant et de ne pas distinguer lrsquoun et lrsquoautre

269 Le dossier meacutedical eacutelectronique (DME) nrsquoest pas reacuteellement un dossier agrave part entiegravere

clairement deacutefini par les textes Il srsquoagit plutocirct drsquoun concept drsquoune terminologie geacuteneacuterale

employeacutee pour deacutesigner finalement lrsquoensemble des dossiers patients conserveacutes sur support

informatique Selon Bruno ROUSSEL le DME laquo est le mot utiliseacute par les professionnels de

lrsquoinformatique meacutedicale pour deacutesigner les dossiers patients informatiseacutes dans le milieu

hospitalier Par extension le DME deacutesigne les systegravemes informatiques permettant de deacuteployer

ces dossiers patients eacutelectroniques raquo348

Face agrave cette observation il est neacutecessaire de se

demander si les DME seraient des outils reacuteserveacutes au milieu hospitalier comme lrsquoaffirme

lrsquoauteur Nous pensons au contraire qursquoil faut plutocirct le consideacuterer de maniegravere globale et

inteacutegrer dans cette notion lrsquoensemble des dossiers informatiseacutes peu importe que leur

utilisateur soit un centre hospitalier un professionnel de santeacute libeacuteral ou le patient lui-mecircme

348 ROUSSEL Bruno laquo Informatisation des dossiers meacutedicaux en milieu hospitalier inteacutegriteacute et opposabiliteacute

des donneacutees numeacuteriques raquo Communication Commerce Electronique 2009 eacutetude 15 p 15

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

155

dans le cadre du DMP Le DME serait alors le terme geacuteneacuteral pour deacutesigner tous les dossiers

meacutedicaux se preacutesentant sous une forme eacutelectronique et se deacuteploierait alors en diffeacuterentes sous

cateacutegories

270 Toutefois comme le souligne agrave juste titre Bruno ROUSSEL laquo il semble leacutegitime de

replacer lrsquooutil technique DME dans le contexte juridique du DMP raquo349

Autrement dit le

DME nrsquoest qursquoun outil un support technique et le DMP en serait sa deacuteclinaison concregravete

ayant une reacuteelle existence juridique En lrsquoabsence drsquoune deacutefinition strictement juridique du

DME il est inteacuteressant de se tourner vers les diffeacuterents rapports qui ont eacuteteacute produits ces

derniegraveres anneacutees au sujet de lrsquoinformatisation des donneacutees de santeacute et des dossiers meacutedicaux

et ce afin de tenter drsquoen deacutefinir les contours

271 Dans le rapport du Professeur Marius FIESCHI350

le terme de DME nrsquoapparait agrave

aucun moment Lrsquoauteur preacutefegravere utiliser le terme de dossier patient partageacute eacutetant entendu que

ce dossier simple projet agrave lrsquoeacutepoque de la reacutedaction du rapport est forceacutement un dossier

informatiseacute

Dans son rapport drsquoinformation de 2008351

consacreacute au dossier meacutedical personnel le

deacuteputeacute Jean-Pierre DOOR considegravere le DME comme eacutetant un dossier meacutedical personnel et

partageacute Il nrsquoutilise toutefois que tregraves peu de fois ce terme et ne prend donc pas la peine de le

deacutefinir Drsquoailleurs il utilise indiffeacuteremment les termes DME DMP dossier patient

eacutelectronique ou encore de dossier meacutedical informatiseacute Pour le deacuteputeacute le DMP est un DME

parmi drsquoautres

Michel GAGNEUX dans son rapport portant sur le dossier patient virtuel et partageacute

reacutedigeacute dans le cadre de la mission de relance du projet de DMP352

consacre une section agrave la

deacutefinition des diffeacuterents concepts existant en la matiegravere Ceux-ci restent cependant assez

flous mecircme pour lrsquoauteur Le terme de DME nrsquoest que peu utiliseacute dans ce rapport puisque

lrsquoauteur lui preacutefegravere lrsquoexpression de Dossier meacutedical eacutelectronique partageacute (parfois remplaceacute

349 Ibid

350 FIESCHI Marius laquo Les donneacutees du patient partageacutees la culture du partage et de la qualiteacute des informations

pour ameacuteliorer la qualiteacute des soins raquo op cit 351

Rapport drsquoinformation deacuteposeacute par la commission des affaires culturelles familiales et sociales sur le dossier

meacutedical personnel 29 janvier 2008 352

GAGNEUX Michel COMBLE Pierre-Henri De KERGOMMEAUX Loiumlc laquo Pour un dossier patient virtuel

et partageacute et une strateacutegie nationale des systegravemes drsquoinformation de santeacute raquo Recommandations agrave la ministre de la

santeacute de la jeunesse des sports et de la vie associative Avril 2008

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

156

par dossier eacutelectronique partageacute) Ainsi nous comprenons que le dossier eacutelectronique tel

que lrsquoauteur lrsquoenvisage est forceacutement partageacute Drsquoailleurs au sein drsquoun mecircme paragraphe il

utilise indiffeacuteremment les termes de dossier meacutedical eacutelectronique de dossier partageacute et de

DMP et ce pour deacutesigner un seul et mecircme outil Cela reacutevegravele selon nous le flou qui entoure

toutes ces nouvelles notions qui se deacuteveloppement autour du dossier meacutedical Lrsquoauteur tout

de mecircme de donner une deacutefinition du DME preacutecisant que celui-ci se preacutesente laquo non comme

un produit fini mais comme une dynamique de construction que lrsquoeacutevolution des usages et des

technologies faccedilonnera raquo353

Il est inteacuteressant de relever que Michel GAGNEUX diffeacuterencie

de maniegravere tregraves claire le DMP de lrsquoensemble des dossiers partageacutes Le DMP serait ainsi pour

reprendre son expression une vue particuliegravere du dossier partageacute354

tout dossier partageacute nrsquoest

pas forceacutement personnel355

et donc accessible aux patients Finalement le rapport introduit un

concept parallegravele agrave celui de DME le dossier virtuel qui se deacutefinirait comme laquo le dossier

patient unique que les technologies de lrsquoinformation permettent de preacutesenter aux utilisateurs

professionnels de santeacute ou patients sous une forme adapteacutee agrave leur contexte drsquousage agrave partir

de multiples dossiers physiquement distincts et reacutepartis raquo356

Une sorte de dossier cameacuteleacuteon

qui srsquoadapterait aux besoins drsquoinformation de chacun de ses utilisateurs

Face agrave ce flou de deacutefinitions de notions et drsquoexpressions nous prenons le parti de

tenter une deacutefinition du DME Celle-ci se doit selon nous de rester simple et la plus large

possible

272 Finalement les dossiers meacutedicaux eacutelectroniques regroupent toutes sortes de dossier

meacutedical agrave partir du moment ougrave il sera informatiseacute Il pourra eacuteventuellement ecirctre partageacute

entre professionnels de santeacute il pourra ecirctre accessible au patient comme dans le cas du DMP

ou ecirctre simplement le dossier hospitalier tel que deacutefini agrave lrsquoarticle R 1112-2 du Code de la

santeacute publique mais se preacutesentant sous une forme informatiseacutee Finalement la deacutefinition de

Bruno ROUSSEL reste selon nous la plus proche et la plus adapteacutee de la reacutealiteacute actuelle

353 Id p 28

354 Id p 30

355 Rappelons qursquoagrave la date agrave laquelle ce rapport a eacuteteacute publieacute le DMP eacutetait lrsquoacronyme de Dossier Meacutedical

Personnel Ce nrsquoest que depuis la publication de la loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute que le DMP

est devenue Dossier Meacutedical Partageacute 356

GAGNEUX Michel COMBLE Pierre-Henri De KERGOMMEAUX Loiumlc laquo Pour un dossier patient virtuel

et partageacute et une strateacutegie nationale des systegravemes drsquoinformation de santeacute raquo op cit p 31

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

157

Cet exercice de deacutefinition termineacute il nous est neacutecessaire de reacutefleacutechir sur la mise en œuvre

lrsquointeacuterecirct et lrsquoarticulation de lrsquoensemble de ces dossiers entre eux

B DMP DME et autres dossiers meacutedicaux une articulation indispensable

273 Le DMP eacutetait agrave lrsquoeacutepoque de sa creacuteation un projet fondamentalement novateur dans le

cadre des politiques de santeacute (1) Ce dossier atypique agrave plusieurs points de vue doit

aujourdrsquohui srsquoarticuler avec les autres dossiers meacutedicaux qui peuvent exister (2)

1) Le DMP un projet novateur

Bien que lrsquoideacutee drsquoun DMP ne soit pas nouvelle le projet dans son ensemble est dans

les faits original et innovant il constitue un veacuteritable laquo projet de socieacuteteacute qui bouleverse les

habitudes et les mentaliteacutes raquo357

274 Le projet est original car il srsquoagit du premier dossier meacutedical dont le patient est

titulaire358

En effet jusque-lagrave bien qursquoils deacutetiennent un droit drsquoaccegraves agrave leur dossier

meacutedical359

les patients nrsquoavaient pas un dossier qui leur eacutetait directement accessible drsquoune

part et clairement identifieacute comme leur appartenant drsquoautre part Car crsquoest bien lagrave lrsquooriginaliteacute

du DMP le leacutegislateur affiche degraves le deacutepart son ambition de faire du DMP le dossier du

patient Degraves les travaux parlementaires de la loi du 13 aoucirct 2004360

il est rappeleacute que laquo le

choix du gouvernement drsquoutiliser lrsquoexpression dossier meacutedical personnel plutocirct que

dossier meacutedical partageacute vise agrave souligner qursquoil srsquoagit avant tout du dossier patient raquo361

Le

nom a peut-ecirctre aujourdrsquohui changeacute le DMP eacutetant redevenu partageacute avec la loi de

modernisation de notre systegraveme de santeacute362

le principe afficheacute reste pour autant le mecircme Le

patient beacuteneacuteficie drsquoun veacuteritable controcircle sur lrsquoensemble de son dossier il controcircle son

ouverture qui est conditionneacutee agrave son consentement expregraves et eacuteclaireacute il controcircle eacutegalement sa

357 MONNIER Anne laquo Le dossier meacutedical personnel histoire encadrement juridique et perspectives raquo RDSS

2009 p 625 358

Lrsquoarticle R 1111-26 du Code de la santeacute publique dispose laquo Une fois son dossier creacuteeacute le beacuteneacuteficiaire de

lrsquoassurance maladie en devient le titulaire raquo 359

Article L 1111-7 du Code de la santeacute publique 360

Loi ndeg 2004-810 du 13 aoucirct 2004 relative agrave lassurance maladie JORF ndeg0190 du 17 aoucirct 2004 p 14598 361

VASSELLE Alain laquo Projet de loi relatif agrave lassurance maladie rapport fait au nom de la commission des

affaires sociales raquo Seacutenat ndeg 424 tome I 2004 362

Loi ndeg 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre systegraveme de santeacute JORF ndeg0022 du 27 janvier

2016 texte ndeg 1

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

158

clocircture et il deacutecide dans une certaine mesure des professionnels qui pourront y avoir accegraves

ainsi que les informations que ces professionnels pourront consulter Enfin et crsquoest lagrave un des

dispositifs les plus originaux et parfois controverseacute du DMP le patient beacuteneacuteficie drsquoun droit

de masquage sur son dossier

275 En effet cette possibiliteacute a eacuteteacute introduite par la loi de financement de la seacutecuriteacute

sociale du 19 deacutecembre 2007 pour 2008363

qui preacutevoyait que selon certaines modaliteacutes qui

devaient ecirctre fixeacutees par un deacutecret pris en Conseil drsquoEtat les informations contenues dans le

DMP pouvaient ecirctre rendues inaccessibles par le titulaire du DMP ou son repreacutesentant leacutegal

Quand lrsquoensemble des dispositions relatives au DMP ont eacuteteacute introduites dans le Code de la

santeacute publique par la loi HPST cette mesure est resteacutee Ce deacutecret nrsquoa jamais eacuteteacute adopteacute et

cette possibiliteacute est resteacutee longtemps inactive les preacutecisions regraveglementaires et pratiques

neacutecessaires agrave sa mise en œuvre nrsquoayant pas eacuteteacute adopteacutees Puis avec lrsquoultime relance du DMP

amorceacutee par la loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute cette possibiliteacute a finalement

eacuteteacute confirmeacutee Le deacutecret ndeg 2016-914 du 4 juillet 2016 relatif au dossier meacutedical partageacute364

est

venu inseacuterer au sein du Code de la santeacute publique lrsquoarticle R 1111-38 qui preacutevoit que laquo le

titulaire peut deacutecider que des informations le concernant contenues dans son dossier meacutedical

partageacute ne soient pas accessibles aux professionnels de santeacute autoriseacutes agrave acceacuteder agrave son

dossier raquo

276 Le droit de masquage est donc deacutefinitivement consacreacute Le support du DMP peut lui

eacutegalement ecirctre consideacutereacute comme innovant En effet mecircme si au moment de la creacuteation du

DMP lrsquoinformation des systegravemes drsquoinformation hospitaliers avait commenceacute depuis plusieurs

anneacutees et si des dossiers meacutedicaux eacutelectroniques se deacuteveloppent lrsquoideacutee drsquoun dossier

totalement deacutemateacuterialiseacute et deacuteposeacute chez un heacutebergeur agreacuteeacute est pour sa part nouvelle Dans

un premier temps le leacutegislateur avait envisageacute la possibiliteacute de faire appel agrave plusieurs

heacutebergeurs de donneacutees diffeacuterents chaque deacutetenteur drsquoun DMP eacutetant libre de choisir

lrsquoheacutebergeur de son choix et drsquoen changer srsquoil le souhaite Toutefois cette solution lors des

premiegraveres expeacuterimentations de 2006 preacutesente vite ses limites tous les heacutebergeurs ne

proposant pas le mecircme niveau de seacutecuriteacute malgreacute les obligations auxquelles ils sont

363 Loi ndeg 2007-1786 du 19 deacutecembre 2007 de financement de la seacutecuriteacute sociale pour 2008 JORF ndeg0296 du 21

deacutecembre 2007 p 20603 364

Deacutecret ndeg 2016-914 du 4 juillet 2016 relatif au dossier meacutedical partageacute JORF ndeg0155 du 5 juillet 2016 texte

ndeg 20

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

159

soumis365

Enfin apregraves avoir songeacute pendant un temps agrave la mise en place drsquoun heacutebergeur de

reacutefeacuterence et avoir classeacute sans suite lrsquoappel drsquooffres qui avait eacuteteacute lanceacute pour le seacutelectionner le

leacutegislateur a adopteacute366

ce qui fait aujourdrsquohui du DMP un dossier unique en son genre le

portail drsquoaccegraves unique

277 En parallegravele la politique en matiegravere drsquoheacutebergement du DMP a eacuteteacute repenseacutee et le

leacutegislateur a fait le choix drsquoun heacutebergeur unique un seul accegraves un seul heacutebergeur pour

arriver agrave un mecircme dossier pour tous les assureacutes sociaux Suite agrave un appel drsquooffre la

commission des marcheacutes de lrsquoASIP Santeacute a retenu agrave lrsquounanimiteacute de ses membres le

consortium industriel meneacute par les groupes ATOS Origin et LA POSTE et constitueacute des

socieacuteteacutes ATOS wordline SAS SANTEOS SA EXTELIA SAS HSC SOFTWAY

Medical Services EVALAB

2) Le DMP compleacutement ou concurrent des autres dossiers

laquo La multipliciteacute des informations conduit naturellement agrave celle des dossiers et cette

multipliciteacute est bien naturelle chaque professionnel de santeacute a vocation agrave avoir son dossier

sur ses patients raquo367

278 En creacuteant le DMP le leacutegislateur a souhaiteacute proposer un outil accessible agrave tous les

professionnels intervenant lors de la prise en charge drsquoun patient donneacute Toutefois comme le

souligne Franccedilois VIALLA chaque professionnel selon sa speacutecialiteacute va produire des

informations de types et formes diffeacuterentes (imagerie compte rendu reacutesultats de laboratoire

hellip) De mecircme chaque professionnel dans son exercice va tenir son propre dossier Or face agrave

la deacutemultiplication des dossiers se pose la question de savoir comment ceux-ci srsquoarticulent

entre eux Est-ce qursquoils se complegravetent Srsquoalimentent entre eux Ou alors sont-ils redondants

auquel cas certains drsquoentre eux seraient ameneacutes agrave disparaitre Finalement la question

principale qui se pose ici est de savoir si le DMP de par ses particulariteacutes est un concurrent

ou un reacuteel compleacutement aux autres dossiers

365 V Supra ndeg 179 et s

366 Loi ndeg 2007-1786 du 19 deacutecembre 2007 de financement de la seacutecuriteacute sociale pour 2008 JORF ndeg0296 du 21

deacutecembre 2007 p 20603 367

VIALLA Franccedilois laquo Dossier patient DMP quelles frontiegraveres raquo RGDM ndeg 20 2006 p 135

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

160

279 Selon lrsquoavis du Comiteacute Consultatif National drsquoEthique (CCNE) relatif au Dossier

meacutedical Personnel et agrave lrsquoinformatisation des donneacutees368

laquo aux yeux drsquoun certain nombre

drsquoacteurs de soin la notion de dossier meacutedical personnel recouvre celle de dossier meacutedical

partageacute entre les professionnels de santeacute Les membres du corps meacutedical sont enclins agrave y voir

un outil de travail agrave usage professionnel Ils y trouvent un inteacuterecirct dans la mesure ougrave toutes les

informations utiles sont accessibles aux soignants qui en ont besoin [hellip] Ils proposent qursquoune

partie du contenu de ce dossier meacutedical partageacute puisse eacuteventuellement constituer le dossier

meacutedical personnel raquo Toutefois la fusion des deux types de dossiers est preacutesenteacutee comme

peacuterilleuse et ingeacuterable et il est fait une distinction nette entre le dossier meacutedical outil

professionnel et le DMP outil certes utile aux professionnels mais principalement agrave

destination du patient Toujours en ce sens le bilan de la mission meneacutee par Jean-Pierre

DOOR tend agrave montrer qursquoune pluraliteacute de DME nrsquoest pas agrave exclure et que les DME deacutejagrave

existants et opeacuterationnels poursuivent de toute maniegravere des objectifs plus compleacutementaires

que concurrents au DMP Ainsi le DMP serait bien un compleacutement des autres dossiers

meacutedicaux existants qursquoils soient partageacutes ou non

280 Dans le rapport consacreacute agrave la relance du DMP369

Michel GAGNEUX rappelle que le

DMP est avant tout un dossier patient plus qursquoun veacuteritable dossier meacutedical Degraves lors il nrsquoest

donc pas envisageable qursquoil vienne se substituer aux dossiers meacutedicaux tenus par les

professionnels laquo mecircme srsquoil contribue agrave les faire eacutevoluer raquo370

Lagrave encore le rocircle

compleacutementaire du DMP par rapport aux autres dossiers meacutedicaux est mis en valeur

Toutefois cette vision nrsquoest pas partageacutee par tous les auteurs Ainsi Olivier SAUTEL

considegravere que laquo le DMP viendra drsquoabord en concurrence avec le dossier papier Puis il aura

vocation agrave srsquoy substituer totalement Le dossier papier est donc voueacute agrave la disparition Crsquoest la

logique implacable de la reacuteforme DMP raquo371

281 Plusieurs critiques peuvent toutefois ecirctre eacutemises Drsquoune part lrsquoauteur confond dossier

meacutedical eacutelectronique et DMP certes lrsquoinformatisation grandissante conduira certainement agrave

368 Avis du Comiteacute National Consultatif ndeg 104 laquo le Dossier meacutedical personnel et lrsquoinformatisation des donneacutees

de santeacute raquo juin 2008 p 5 369

GAGNEUX Michel COMBLE Pierre-Henri De KERGOMMEAUX Loiumlc laquo Pour un dossier patient virtuel

et partageacute et une strateacutegie nationale des systegravemes drsquoinformation de santeacute raquo recommandations agrave la ministre de la

santeacute de la jeunesse des sports et de la vie associative avril 2008 370

Id p 27 371

SAUTEL Olivier laquo Le dossier meacutedical personnel raquo Journal de meacutedecine leacutegale 2007 p 6

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

161

lrsquoavenir la disparition des dossiers meacutedicaux papiers Mais ce sont bien diffeacuterents DME

propres agrave chaque eacutetablissement de santeacute ou professionnel de santeacute qui le remplaceront Nous

partageons ici le point de vue de Ceacutecile MANAOUIL372

et estimons que cette affirmation

relegraveve drsquoune confusion entre informatisation des dossiers meacutedicaux et instauration du DMP Il

nrsquoest pas envisageable de notre point de vue qursquoun dossier dont le patient est titulaire

vienne remplacer les dossiers professionnels que ceux-ci soient partageacutes ou non Cette

affirmation deacutenote une mauvaise compreacutehension des ambitions du DMP mais eacutegalement du

fonctionnement du systegraveme de santeacute et de lrsquoorganisation des professionnels de santeacute dans leur

pratique

282 Finalement le DMP est une vision globale de lrsquoeacutetat de santeacute du patient en cela il

permet de compleacuteter les informations que chaque professionnel de santeacute possegravede deacutejagrave

Toutefois il nous semble qursquoun professionnel de santeacute ne pourra pas deacutecemment supprimer le

propre dossier meacutedical qursquoil tient certainement plus preacutecis dans sa speacutecialiteacute que ne le sera le

DMP Le DMP ne doit pas ecirctre consideacutereacute comme concurrent ou redondant avec drsquoautres

dossiers Ce point a drsquoailleurs eacuteteacute eacuteclairci par le leacutegislateur en juillet dernier373

puisque

lrsquoarticle R 1111-28 du Code de la santeacute publique preacutevoit deacutesormais que laquo le dossier meacutedical

partageacute ne se substitue pas au dossier que tient chaque eacutetablissement de santeacute [hellip] raquo

372 MANAOUIL Ceacutecile laquo Le dossier meacutedical personnel (DMP) autopsie drsquoun projet ambitieux raquo Meacutedecine

et droit 2009 p 26 373

Deacutecret ndeg 2016-914 du 4 juillet 2016 relatif au dossier meacutedical partageacute JORF ndeg0155 du 5 juillet 2016 texte

ndeg 20

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

162

sect2 Le DMP un encadrement juridique eacutevoluant avec difficulteacutes

283 Projet en route depuis plus de dix ans le DMP rencontre de nombreuses difficulteacutes agrave

se deacutevelopper et agrave trouver sa place Drsquoailleurs la preacutecipitation et les premiegraveres orientations

balbutiantes du DMP (A) ont conduit le leacutegislateur a rapidement repenser son projet et

engager plusieurs relances devenues neacutecessaires (B)

A Les premiers pas du DMP des orientations incertaines

Le DMP est en reacutealiteacute le fruit drsquoune longue reacuteflexion relative agrave lrsquoinformatisation des

donneacutees et les principes fondamentaux qui le reacutegissent sont finalement assez classiques (1)

Toutefois au fur et agrave mesure des nombreuses critiques du projet celui-ci a ducirc srsquoadapter au

greacute notamment des diffeacuterentes lois de financement de seacutecuriteacute sociale (2)

1) Origines et principes fondamentaux du DMP

284 Lrsquoideacutee drsquoun dossier reprenant lrsquoensemble des eacuteleacutements relatifs agrave un patient et partageacute

dans un objectif de meilleure coordination entre plusieurs professionnels de santeacute diffeacuterents

nrsquoest pas nouvelle Avec lrsquointroduction et le deacuteveloppement des TIC dans la pratique

meacutedicale facilitant le partage et la diffusion de lrsquoinformation meacutedicale cette ideacutee srsquoest faite

de plus en plus preacutesente

285 Le rapport de Marius FIESCHI374

rendu en 2003 faisait drsquoailleurs eacutetat de cette

tentative depuis de nombreuses anneacutees de mettre en place un dossier partageacute Il soulignait

lrsquoeacutechec du projet de Dossier Minimum Commun (DMC) Il rappelait eacutegalement lrsquointeacuterecirct de

mettre en place un dossier visant agrave rassembler toutes les informations meacutedicales concernant

un patient modegravele correspondant alors mieux agrave la reacutealiteacute de lrsquoeacutetat de santeacute du patient car non

centreacute sur une seule pathologie Il avanccedilait alors le nom de Dossier Patient Partageacute (DPP)

374 FIESCHI Marius laquo Les donneacutees du patient partageacutees la culture du partage et de la qualiteacute des informations

pour ameacuteliorer la qualiteacute des soins raquo op cit

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

163

Se basant sur ce rapport le ministre de la santeacute de lrsquoeacutepoque M Philippe DOUSTE-

BLAZY a alors deacutecideacute drsquoen faire un projet national phare Crsquoest la loi du 13 aoucirct 2004

relative agrave lrsquoassurance maladie375

qui a creacuteeacute en son article 3 le dossier meacutedical personnel376

Les dispositions relatives au DMP ne sont alors pas nombreuses mais elles sont tregraves denses377

et inseacutereacutees aux articles L 162-36-1 agrave L 162-36-4 du Code de la seacutecuriteacute sociale Comme le

soulignait agrave juste titre Didier TRUCHET378

cette consideacuteration nrsquoest pas anecdotique

puisqursquoelle deacutetermine le champ drsquoapplication de la loi tous les beacuteneacuteficiaires de lrsquoassurance

maladie pourront ouvrir un DMP et non pas tous les patients De plus le fait que le DMP soit

creacuteeacute par une loi relative agrave lrsquoassurance maladie et ses dispositions preacutesentes dans le Code de la

seacutecuriteacute sociale marque bien lrsquoobjectif premier confieacute au DMP la reacutealisation drsquoeacuteconomies en

termes de deacutepenses de santeacute Cet objectif nrsquoa jamais eacuteteacute clairement afficheacute par le leacutegislateur

Lrsquoarticle L 161-36-1 du Code de la seacutecuriteacute sociale preacutevoyait la creacuteation du DMP

laquo afin de favoriser la coordination la qualiteacute et la continuiteacute des soins gages drsquoun bon

niveau de santeacute raquo Toutefois en preacutevoyant ce dispositif au sein drsquoune loi consacreacutee agrave

lrsquoassurance maladie et en inseacuterant son encadrement au sein du Code de la seacutecuriteacute sociale le

leacutegislateur faisait de fait du DMP un outil au service de lrsquoassurance maladie Drsquoailleurs dans

le rapport relatif au DMP de 2007 la plus grande maicirctrise des deacutepenses drsquoassurance maladie

via la diminution des actes redondants inutiles ou iatrogegravenes fait partie des quatre objectifs

initiaux constateacutes du DMP379

Lrsquoarticle 3 de la loi du 4 aoucirct 2004 a ainsi poseacute les bases

juridiques du DMP laissant agrave un deacutecret pris en Conseil drsquoEtat le soin drsquoapporter lrsquoensemble

des preacutecisions pratiques qui seront neacutecessaires agrave la bonne mise en œuvre de lrsquooutil

Cependant ce deacutecret nrsquoa jamais vu le jour

286 A lrsquoorigine les principes qui reacutegissaient le DMP sont les suivants en tant que dossier

personnel380

le DMP eacutetait placeacute sous le controcircle381

du patient celui-ci accordant ou non son

375 Loi ndeg 2004-810 du 13 aoucirct 2004 relative agrave lassurance maladie JORF ndeg0190 du 17 aoucirct 2004 p 14598

376 Alors que lrsquoarticle 3 de la loi du 4 aoucirct 2004 est venue creacuteer le Dossier Meacutedical Personnel la reacutedaction

actuelle de lrsquoarticle L 1111-5 du Code de la santeacute publique issue de la loi de modernisation de notre systegraveme de

santeacute dispose que laquo dans le respect des regravegles deacuteontologiques qui lui sont applicables ainsi que des articles L

1110-4 L 1110-4-1 et L 1111-2 chaque professionnel de santeacute quels que soient son mode et son lieu

dexercice reporte dans le dossier meacutedical partageacute [hellip] raquo 377

TRUCHET Didier laquo Que dit la loi raquo RGDM Ndeg20 2006 p 67 378

Ibid 379

Rapport sur le Dossier meacutedical personnaliseacute Inspection geacuteneacuterale des finances Inspection geacuteneacuterale des

Affaires sociales Conseil geacuteneacuterale des Technologies de lrsquoInformation novembre 2007 p 1 380

Rappelons qursquoinitialement le DMP eacutetait lrsquoacronyme de laquo dossier meacutedical personnel raquo

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

164

consentement agrave lrsquoouverture du dossier et deacutesignant les professionnels pouvant y acceacuteder Les

professionnels et les eacutetablissements de santeacute avaient quant agrave eux pour obligation drsquoalimenter

ce dossier En effet lrsquoadheacutesion et le maintien aux conventions nationales signeacutees entre

professionnels de santeacute et lrsquoassurance maladie eacutetait soumis agrave la consultation et agrave la mise agrave jour

du DMP par les professionnels En contrepartie il eacutetait eacutegalement preacutevu que le niveau de

prise en charge des actes et prestations soit subordonneacutee agrave lrsquoautorisation donneacutee par le patient

au professionnel de consulter son DMP

287 Lors de la publication de la loi cette derniegravere mesure avait eacuteteacute vivement critiqueacutee et le

Conseil Constitutionnel avait eacuteteacute saisi au motif notamment que cette disposition portait

atteinte au droit agrave la protection sociale garanti au titre du preacuteambule de la Constitution de

1946 Le Conseil Constitutionnel a toutefois consideacutereacute que laquo eu eacutegard aux finaliteacutes des

dispositions contesteacutees qui sont dune part dameacuteliorer la qualiteacute des soins dautre part de

reacuteduire le deacuteseacutequilibre financier de lassurance maladie et compte tenu de lensemble des

garanties qui viennent decirctre rappeleacutees le leacutegislateur a opeacutereacute entre les exigences

constitutionnelles en cause une conciliation qui napparaicirct pas manifestement deacuteseacutequilibreacutee

que degraves lors les griefs invoqueacutes doivent ecirctre rejeteacutes raquo382

Ainsi pour les sages du Conseil le

droit agrave la santeacute neacutecessite un systegraveme de protection sociale qui se doit drsquoecirctre en eacutequilibre

financier et par conseacutequent des concessions doivent eacutegalement ecirctre opeacutereacutees de la part des

beacuteneacuteficiaires de ce systegraveme383

Pour reprendre les mots de Franccedilois VIALLA le patient

laquo srsquoest vu reconnaitre des droits il commence agrave en deacutecouvrir les contreparties raquo384

288 La loi de 2004 soucieuse de preacuteserver le secret professionnel malgreacute la mise en place

drsquoun outil destineacute agrave ecirctre partageacute avec un grand nombre de professionnels preacutevoyait des

garanties en ce sens puisque le DMP devait ecirctre mis en place dans le respect du secret

meacutedical (article L 161-36-1) et heacutebergeacute aupregraves drsquoun heacutebergeur agreacutee la consultation se

faisant dans le respect des regravegles deacuteontologiques applicables au professionnel ainsi que dans

le respect des articles L 1110-4 et L 1111-2 du Code de la santeacute publique Enfin il eacutetait

eacutegalement preacutevu lrsquointerdiction de consulter le DMP dans certaines situations telle que lors de

381 V Supra ndeg112 agrave 119

382 Deacutecision du Conseil Constitutionnel ndeg 2004-504 du 12 aoucirct 2004 JORF ndeg190 du 17 aoucirct 2004 p 14657

383 VIALLA Franccedilois laquo Secret et DMP raquo RDS 2005 pp 42-44

384 Id p 42

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

165

la conclusion drsquoun contrat drsquoassurance par exemple ou de tout autre contrat qui neacutecessiterait

lrsquoeacutevaluation de la santeacute drsquoune personne

Cette premiegravere version du DMP a toutefois rapidement fait lrsquoobjet de critiques et

certaines eacutevolutions ont eacuteteacute instaureacutees au fil des anneacutees

2) Des eacutevolutions au greacute des critiques

289 La loi du 13 aoucirct 2004 preacutevoyait que lrsquoensemble des preacutecisions utiles agrave la mise en

place du DMP seraient apporteacutees dans un deacutecret pris en Conseil drsquoEtat Cependant bien qursquoun

projet ait eacuteteacute soumis agrave concertation publique ce deacutecret nrsquoa jamais vu le jour Certaines

preacutecisions ou modifications ont toutefois eacuteteacute apporteacutees au projet initial certaines reacutesultants

parfois des critiques eacutemises agrave lrsquoencontre du projet Ces compleacutements sont de deux ordres

Drsquoune part des eacuteleacutements pratiques ont eacuteteacute mis en place (a) et drsquoautre part des preacutecisions sur

le fonctionnement du DMP ont eacuteteacute apporteacutees (b)

a) Les apports pratiques

290 Afin de lancer la mise en œuvre pratique du DMP un GIP de preacutefiguration le GIP

DMP a eacuteteacute creacuteeacute et sa convention constitutive approuveacutee par un arrecircteacute en date du 11 avril

2005385

Il eacutetait composeacute de lEtat de la Caisse nationale dassurance maladie des travailleurs

salarieacutes et de la Caisse des deacutepocircts et consignations Son objet consistait agrave preacuteparer les

dispositions juridiques organisationnelles financiegraveres et logistiques du futur organisme

gestionnaire du dossier meacutedical personnel et den assurer les premiegraveres reacutealisations Ce

groupement devait permettre au futur organisme gestionnaire du dossier meacutedical personnel

decirctre immeacutediatement opeacuterationnel dans la perspective de la publication du deacutecret

dapplication de la loi relative agrave lassurance maladie Le GIP-DMP eacutetait donc une structure

temporaire censeacutee faciliter lrsquoexpeacuterimentation puis la mise en place du DMP ameneacutee agrave

disparaitre degraves que lrsquoorganisme gestionnaire du DMP aurait eacuteteacute mis en place et apte agrave

effectuer ses missions Cependant le leacutegislateur srsquoest reacuteveacuteleacute quelque peu preacutesomptueux sur le

calendrier de reacutealisation de ce projet bien que le groupement dinteacuterecirct public groupement de

preacutefiguration du dossier meacutedical personnel eacutetait initialement creacuteeacute pour une dureacutee de vie

385 Arrecircteacute ministeacuteriel du 11 avril 2005 portant approbation de la convention constitutive dun groupement

dinteacuterecirct public

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

166

limiteacutee puisqursquoil devait prendre fin le 31 deacutecembre 2005 celui-ci sera maintenu jusqursquoen

2009 anneacutee de mise en œuvre du programme relance du DMP

291 De maniegravere pratique une phase drsquoexpeacuterimentation autoriseacute par une deacutelibeacuteration CNIL

en date du 30 mai 2006386

a deacutebuteacute le 1er

juin de la mecircme anneacutee Le Cadre de cette

expeacuterimentation ainsi que les perspectives de geacuteneacuteralisation du DMP ont par ailleurs eacuteteacute

preacuteciseacutes par la circulaire du 28 juin 2006 relative agrave la mise en œuvre du DMP par les

eacutetablissements de santeacute387

Cette circulaire dressait eacutegalement un calendrier de deacuteploiement

particuliegraverement ambitieux puisque la phase de geacuteneacuteralisation eacutetait censeacutee deacutebuter au premier

semestre 2007

b) Les apports sur le fond

292 La loi de 2004 instaurant le DMP eacutetait loin drsquoecirctre complegravete et certaines preacutecisions ont

eacuteteacute apporteacutees par la suite Nous traiterons ici de lrsquoensemble des modifications qui ont eu lieu

sur le projet initial et non pas des modifications apparues apregraves 2009 lors des phases de

relance du DMP

293 La plupart des ajouts ont eacuteteacute apporteacutes par la loi de financement de seacutecuriteacute sociale pour

2008388

Ainsi ce texte est drsquoabord venu combler une lacune en matiegravere drsquoaccegraves au DMP par

les ayants droit En effet en cas de deacutecegraves du patient deacutetenteur drsquoun DMP rien nrsquoeacutetait preacutevu

dans la loi initiale La LFSS pour 2008 a donc appliqueacute au DMP les dispositions existantes en

matiegravere de communication du dossier meacutedical aux ayants droit drsquoun patient deacuteceacutedeacute389

Toutefois aucune preacutecision nrsquoa eacuteteacute apporteacutee au sujet des modaliteacutes pratiques drsquoaccegraves cet

accegraves doit-il se faire par le biais drsquoun professionnel de santeacute Du meacutedecin traitant Ou

encore par le concours du meacutedecin de lrsquoheacutebergeur Rien nrsquoeacutetait preacuteciseacute par cette loi et

aujourdrsquohui encore malgreacute diffeacuterentes reacuteformes390

le doute subsiste Pour notre part il nous

386 Deacutelibeacuteration CNIL ndeg2006-151 du 30 mai 2006 portant autorisation de mise en œuvre des applications

informatiques neacutecessaires agrave lexpeacuterimentation du dossier meacutedical personnel 387

Circulaire DHOSE3 ndeg 2006-281 du 28 juin 2006 relative agrave la mise en œuvre du dossier meacutedical personnel

(DMP) par les eacutetablissements de santeacute BO ndeg 20067 388

Loi ndeg 2007-1786 du 19 deacutecembre 2007 de financement de la seacutecuriteacute sociale pour 2008 JORF ndeg0296 du 21

deacutecembre 2007 p 20603 389

Lrsquoarticle L 1110-4 du Code de la santeacute publique preacutevoit que laquo Le secret meacutedical ne fait pas obstacle agrave ce que

les informations concernant une personne deacuteceacutedeacutee soient deacutelivreacutees agrave ses ayants droit dans la mesure ougrave elles

leur sont neacutecessaires pour leur permettre de connaicirctre les causes de la mort de deacutefendre la meacutemoire du deacutefunt

ou de faire valoir leurs droits sauf volonteacute contraire exprimeacutee par la personne avant son deacutecegraves raquo 390

V Infra ndeg 306 agrave 309

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

167

semble que le meacutedecin traitant serait lrsquointerlocuteur le plus agrave mecircme de seacutelectionner les

documents agrave transmettre aux ayants-droits

294 La LFSS pour 2008 a eacutegalement apporteacute une modification tregraves importante dans le

fonctionnement du DMP puisqursquoelle a introduit le tregraves largement deacutebattu droit au masquage

Pas de maniegravere tregraves preacutecise il est vrai puisque le texte se bornait agrave preacutevoir qursquo laquo un deacutecret en

Conseil drsquoEtat fixe les conditions dans lesquelles certaines peuvent ecirctre rendues inaccessibles

par le titulaire du DMP ou son repreacutesentant leacutegal ainsi que les modaliteacutes selon lesquelles le

professionnel de santeacute acceacutedant au DMP a connaissance de lrsquoinscription au dossier

drsquoinformations rendues inaccessibles par son titulaire ou son repreacutesentant leacutegalraquo

Par ailleurs la LFSS pour 2008 a creacuteeacute le portail drsquoaccegraves unique au DMP qui permet

au patient de geacuterer son DMP et notamment les droits drsquoaccegraves y affeacuterant Cette disposition a

ainsi permis drsquoassurer une harmonisation en matiegravere drsquoaccegraves et drsquoutilisation de son DMP par

le patient La LFSS pour 2008 a eacutegalement eacuteteacute lrsquooccasion de supprimer une disposition

contraire au respect de certains droits fondamentaux et introduite par la loi du 5 mars 2007

instituant le droit au logement opposable391

Celle-ci permettait lrsquoaccegraves par un bailleur au

DMP drsquoun candidat agrave un logement adapteacute ou speacutecifique392

295 Enfin la loi du 30 janvier 2007393

a instaureacute non sans mal le dispositif du bris de

glace qui permet un accegraves au DMP dans les cas drsquourgences Deacutesormais dans ces situations

le consentement preacutealable du patient pour acceacuteder agrave son dossier nrsquoest plus neacutecessaire Il est

inteacuteressant de noter que cette disposition eacutetait initialement preacutevue dans la LFSS pour 2007

mais avait eacuteteacute deacuteclareacutee non conforme agrave la Constitution par une deacutecision du Conseil

constitutionnel394

391 Loi ndeg 2007-290 du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en

faveur de la coheacutesion sociale JORF ndeg55 du 6 mars 2007 p 4190 392

MANAOUIL Ceacutecile laquo Le dossier meacutedical personnel (DMP) autopsie drsquoun projet ambitieux raquo op cit p

29 393

Loi ndeg 2007-127 du 30 janvier 2007 ratifiant lordonnance ndeg 2005-1040 du 26 aoucirct 2005 relative agrave

lorganisation de certaines professions de santeacute et agrave la reacutepression de lusurpation de titres et de lexercice illeacutegal

de ces professions et modifiant le Code de la santeacute publique JORF ndeg27 du 1 feacutevrier 2007 p 1937 394

Deacutecision du Conseil Constitutionnel ndeg 2004-504 du 12 aoucirct 2004 JORF ndeg190 du 17 aoucirct 2004 p14657

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

168

B Une rapide remise en question du projet initial

296 Degraves 2007 soit agrave peine trois ans apregraves la promulgation de la loi relative agrave lrsquoassurance

maladie creacuteant le DMP les premiers bilans relatifs agrave la mise en œuvre de ce dossier ont eacuteteacute

effectueacutes et leur reacutesultat a eacuteteacute neacutegatif (1) Le ministegravere a alors souhaiteacute reprendre les choses en

main et mettre en place une relance du projet (2) Celle-ci dont les reacutesultats ont eacuteteacute mitigeacutes a

donc eacuteteacute suivie drsquoune deuxiegraveme relance (3) engageacutee par le biais de la loi de modernisation de

notre systegraveme de santeacute

1) Un premier bilan neacutegatif

297 Face aux ambitions deacutemesureacutees de la loi du 13 aoucirct 2004 aux difficulteacutes agrave faire

avancer correctement le projet et agrave toutes les critiques relatives au DMP lrsquoexeacutecutif a ordonneacute

une mission interministeacuterielle de revue de projet sur le DMP afin de laquo reacutealiser un point

deacutetailleacute sur lrsquoeacutetat drsquoavancement et le pilotage de ce projet ainsi que sur sa capaciteacute de

reacutepondre aux objectifs initiaux raquo395

Cette mission a eacuteteacute confieacutee agrave lrsquoInspection geacuteneacuterale des

finances agrave lrsquoInspection geacuteneacuterale des Affaires Sociales et au Conseil geacuteneacuteral des Technologies

de lrsquoInformation Lrsquoensemble de la mission a eacuteteacute conduite par Michel GAGNEUX et un

rapport a eacuteteacute rendu en novembre 2007 (a) En parallegravele la CNIL a elle aussi rendu un

rapport portant pour sa part sur le bilan des premiegraveres expeacuterimentations du DMP (b)

a) Le rapport GAGNEUX

Ce rapport visant agrave effectuer lrsquoaudit du projet DMP sur la peacuteriode 20052007 dresse un

bilan plus que neacutegatif des premiegraveres tentatives de mise en œuvre du DMP

298 La principale critique porte sur les objectifs initiaux du leacutegislateur en matiegravere de mise

en œuvre du DMP hors drsquoatteintes A la fois les deacutelais (tout assureacute pourrait avoir un DMP

ouvert au 1er juillet 2007) le coucirct et le modegravele eacuteconomique du projet ne permettaient pas le

succegraves pourtant annonceacute de celui-ci En effet nous pensons que le leacutegislateur au lieu de

choisir la preacutecipitation aurait ducirc prendre le temps drsquoeacutetudier lrsquoorganisation deacuteployeacutee dans les

pays voisins dans le cadre de projets similaires et srsquoen inspirer directement Lrsquoeacutetude de ces

395 Lettre de mission relative agrave la mission interministeacuterielle de revue de projet sur le dossier meacutedical personnel

(DMP) rapport sur le dossier meacutedical personnel op cit

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

169

projets aurait permis selon nous de mettre en eacutevidence le caractegravere utopiste de la

meacutethodologie initiale choisie par notre leacutegislateur notamment en termes de calendrier Degraves

lors il ne peut que ressortir de ce rapport le manque de creacutedibiliteacute et de lisibiliteacute du projet du

fait des trop nombreuses zones de risques et drsquoincertitudes dans la strateacutegie mise en œuvre

Nous ne pouvons qursquoecirctre drsquoaccord avec les conclusions de ce rapport qui montrent que la

preacutecipitation a guideacute lrsquoensemble des actions mises en œuvre ce qui a joueacute en deacutefaveur du

DMP Alors mecircme que le concept et la finaliteacute du DMP nrsquoeacutetaient pas clairement preacuteciseacutes

seule la mise en œuvre technique faisait lrsquoobjet de toutes les attentions

299 La mission interministeacuterielle de revue du projet a abouti agrave sept recommandations

deacuteclarer sans suite la consultation agrave lrsquoeacutepoque en cours pour la deacutesignation de lrsquoheacutebergeur de

reacutefeacuterence sauvegarder les acquis restaurer la confiance dans le projet relancer la dynamique

du projet reacutesoudre parallegravelement les questions majeures notamment juridiques en suspens

attribuer au DMP un budget de programme et refonder la gouvernance des systegravemes

drsquoinformation dans le domaine de la santeacute Dans la fouleacutee de cet audit Michel GAGNEUX a

ensuite reacutedigeacute et preacutesenteacute un rapport en 2008 consacreacute agrave la relance du DMP396

Reprenant

pour partie les recommandations eacutenonceacutees dans son preacuteceacutedent rapport lrsquoauteur dresse les

contours de ce qui sera en 2009 avec la loi HPST les bases de la relance du DMP

b) Le bilan de la CNIL

300 Suite aux premiegraveres expeacuterimentations qui se sont deacuterouleacutees drsquoavril agrave deacutecembre 2006

la CNIL qui srsquoeacutetait prononceacutee sur les dossiers drsquoagreacutement des heacutebergeurs de donneacutees de santeacute

seacutelectionneacutes pour la phase drsquoexpeacuterimentation a controcircleacute sur site les principaux acteurs Le but

de la CNIL nrsquoeacutetait pas tant de reacutealiser un controcircle exhaustif des diffeacuterentes pratiques mais

plutocirct drsquoappreacutecier la reacutealiteacute des engagements pris par les heacutebergeurs dans le dossier

drsquoagreacutement Le bilan qui a reacutesulteacute de ces controcircles srsquoest montreacute seacutevegravere

301 Bien entendu la courte dureacutee de cette expeacuterimentation qui a reacutesulteacute drsquoun changement

de strateacutegie en cours de route nrsquoa pas permis agrave la CNIL de mesurer de maniegravere efficace le

fonctionnement des diffeacuterents acteurs Il est cependant ressorti un manque de seacutecuriteacute et une

deacutefaillance de certains heacutebergeurs de santeacute Certaines pratiques relatives agrave la communication

396 GAGNEUX Michel COMBLE Pierre-Henri FOLLIET Alain DE KERGOMMEAUX Loiumlc

LIVARTOWSKI Alain LOTH Andreacute RICHARD Denis SAURET Jacques laquo Pour un dossier patient virtuel

et partageacute et une strateacutegie nationale des systegravemes drsquoinformation de santeacute raquo rapport de la mission de relance du

DMP 23 avril 2008

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

170

au patient de son numeacutero identifiant santeacute (INS) et de son Adresse Qualiteacute Santeacute (AQS) ont

eacuteteacute pointeacutees comme de nature agrave compromettre la confidentialiteacute des informations Du cocircteacute de

lrsquoalimentation des dossiers le constat effectueacute eacutetait le mecircme les proceacutedures drsquoidentification

et drsquoauthentification des personnels ne permettaient pas de maintenir un niveau de seacutecuriteacute

suffisant

302 Lrsquoaccegraves en mode bris de glace est une autre des difficulteacutes que le controcircle de la

CNIL a mis en valeur La CNIL a pointeacute ici et agrave juste titre le caractegravere contradictoire de

certaines situations par rapport agrave la finaliteacute mecircme du mode drsquoaccegraves A titre drsquoexemple

lrsquoidentifiant du patient (AQS) devait ecirctre entreacute pour acceacuteder au DMP en mode bris de glace

Or la finaliteacute premiegravere de ce type drsquoaccegraves eacutetait pourtant drsquoaccegraveder aux donneacutees drsquoun patient

dans des cas drsquourgences notamment si celui-ci est inconscient et donc inapte agrave renseigner ce

type drsquoinformations

303 La CNIL avait aussi souleveacute lrsquoabsence de la traccedilabiliteacute des accegraves en mode bris de glace

au beacuteneacutefice du meacutedecin de lrsquoheacutebergeur dont la mission principale consistait pourtant agrave veiller

agrave la confidentialiteacute des donneacutees Le Meacutedecin de lrsquoheacutebergeur est donc bien le seul leacutegitime et

potentiellement capable drsquoalerter en cas drsquoutilisation frauduleuse ou trop importante de ce

genre drsquoaccegraves

304 Enfin et crsquoest peut-ecirctre lagrave une des probleacutematique ayant conduit agrave lrsquoeacutechec de cette

expeacuterimentation la CNIL lors de ces controcircles a constateacute que certains heacutebergeurs nrsquoavaient

pas mis en place lrsquointeacutegraliteacute de leur architecture technique preacutefeacuterant attendre la phase de

geacuteneacuteralisation avant drsquoengager les investissements neacutecessaires Or il nous semble que ce type

de comportement en plus drsquoecirctre reacuteveacutelateur drsquoune certaine meacutefiance vis-agrave-vis du projet a

conduit la phase drsquoexpeacuterimentation agrave ne pas ecirctre exeacutecuteacutee correctement ce qui a ameneacute agrave des

conclusions fausseacutees Bien entendu drsquoautres problegravemes techniques et juridiques ont eacuteteacute

releveacutes mais lrsquoimplication partielle de certains acteurs nrsquoa pas permis selon nous de soutenir

correctement le projet

305 En conclusion de ses controcircles la CNIL a rappeleacute aux heacutebergeurs de santeacute mais

eacutegalement au GIP-DMP ainsi qursquoau Ministegravere de la santeacute qursquoune authentification forte un

chiffrement complet et une information claire et complegravete des patients eacutetaient les conditions

neacutecessaires agrave remplir

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

171

En 2009 suite aux diffeacuterents rapports ayant eacutemis de nombreuses preacuteconisations sur la

reacuteforme de lrsquooutil la Ministre de la santeacute de lrsquoeacutepoque a annonceacute la mise en œuvre drsquoun plan

de relance du DMP

2) Une premiegravere relance mitigeacutee

306 Lors de son discours397

agrave lrsquooccasion drsquoun colloque consacreacute agrave la relance du DMP la

Ministre de la santeacute Madame Roselyne Bachelot avait preacutesenteacute la nouvelle feuille de route

du projet Reprenant largement les preacuteconisations deacuteveloppeacutees dans les diffeacuterents rapports

consacreacutes au sujet la Ministre avait alors annonceacute que la nature du DMP serait clarifieacutee le

dossier repositionneacute comme eacutetant un outil au service du patient et des professionnels et non

pas un outil purement technique eacuteloigneacute des reacutealiteacutes pratiques et enfin que la prioriteacute serait

donneacute aux expeacuterimentations au plus pregraves des pratiques afin drsquoadapter lrsquooutil aux mieux aux

besoins De mecircme la volonteacute de rupture vis-agrave-vis de lrsquoancien projet a eacuteteacute marqueacutee par le

changement de la gouvernance du projet lrsquoASIP santeacute a ainsi reacutecupeacutereacute la gestion du projet

Le ministegravere a essayeacute de se montrer plus prudent et raisonnable dans la mise en œuvre du

DMP Ainsi une phase drsquoexpeacuterimentation agrave lrsquoeacutechelle reacutegionale et non plus nationale a eacuteteacute

mise en œuvre en 2009 afin de pouvoir ensuite deacuteployer progressivement une premiegravere

version nationale Ces expeacuterimentations ont permis de choisir parmi les solutions les plus

efficaces deacuteveloppeacutees en reacutegion pour les deacutevelopper au niveau supeacuterieur

307 En parallegravele de cette annonce la loi HPST398

a transposeacute les dispositions relatives au

DMP qui se trouvaient au sein du Code de seacutecuriteacute sociale au sein du Code de la santeacute

publique Ce passage drsquoun code agrave lrsquoautre preacutesente une porteacutee hautement symbolique le but

premier du DMP nrsquoest plus la maicirctrise des deacutepenses de santeacute mais lrsquoameacutelioration et la

coordination des soins Avec la reacuteforme introduite par Mme BACHELOT le DMP nrsquoest plus

un outil de seacutecuriteacute sociale mais bien un outil de santeacute publique

308 Le DMP nrsquoest plus obligatoire et le patient devient degraves lors veacuteritable maicirctre de son

dossier pouvant choisir de lrsquoouvrir ou non De mecircme la sanction financiegravere en cas de refus

397 Discours prononceacute agrave lrsquooccasion du colloque consacreacute agrave la relance du DMP 9 avril 2009 disponible sur

[httpsantegouvfr] Consulteacute le 15 mai 2017 398

Loi ndeg 2009-879 du 21 juillet 2009 portant reacuteforme de lhocircpital et relative aux patients agrave la santeacute et aux

territoires JORF ndeg0167 du 22 juillet 2009 p 12184

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

172

drsquoaccegraves par certains meacutedecins disparait Lagrave encore cette disposition nous apparait comme

reacuteveacutelatrice de la volonteacute du leacutegislateur de marquer le changement drsquoorientation et la prioriteacute

donneacutee agrave lrsquoameacutelioration de la coordination de soins theacutematique plus attractive que celle de la

maicirctrise des deacutepenses de santeacute

Reacuteveacutelateur de la prudence nouvelle du leacutegislateur aucune date preacutecise de deacuteploiement

nrsquoest acteacutee dans les textes ceux-ci se contentant deacutesormais de preacutevoir une mise en œuvre laquodegraves

que lutilisation du dossier meacutedical personnel est possible sur lensemble des territoires

auxquels sapplique la preacutesente section raquo399

Toutefois lors de son discours drsquoavril 2009 la

ministre de la santeacute avait eacutevoqueacute le possible deacuteploiement national degraves 2010 Or en pratique

bien que la geacuteneacuteralisation sur le territoire soit instaureacutee en avril 2011 le DMP va pacirctir de la

suppression en novembre 2011 de son budget de deacuteploiement par la CNAMTS Ainsi en

deacutecembre 2011 seuls 56 000 patients disposaient de leur DMP sans pour autant savoir

combien drsquoentre eux eacutetaient reacuteellement actifs crsquoest-agrave-dire alimenteacutes et consulteacutes Malgreacute un

projet laquo techniquement precirct raquo selon les termes du directeur de lrsquoASIP de lrsquoeacutepoque Jean-Yves

ROBIN seuls 90 000 dossiers eacutetaient creacuteeacutes en mars 2012 le projet eacutetant figeacute dans sa phase

de test

309 En deacutepit drsquoune relance coheacuterente et mieux preacutepareacutee force est de constater que le

DMP lors de sa premiegravere relance a pacircti en plus de probleacutematiques financiegraveres de

consideacuterations politiques qui ont malheureusement pris le dessus sur les consideacuterations de

santeacute publique Il est en effet utile de rappeler que lrsquoanneacutee 2012 a eacuteteacute une anneacutee drsquoeacutelections

Le projet a ainsi subi un retard lieacute agrave la mise en œuvre drsquoun nouveau gouvernement

3) La loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute un nouveau souffle pour le DMP

310 Dans lrsquooptique drsquoamorcer une ultime relance du DMP Marisol TOURAINE Ministre

de la santeacute avait annonceacute degraves novembre 2012 la mise ne place drsquoun DMP 2 Toutefois

aucune reacuteelle preacutecision au sujet de ce dossier nrsquoavait eacuteteacute apporteacutee jusqursquoagrave la preacutesentation du

projet de loi de santeacute en juin 2014400

Crsquoest ainsi que lrsquoarticle 96 de la loi de modernisation de

399 Article L 1111-14 du Code de la santeacute publique

400 Projet de loi relatif agrave la santeacute disponible sur [httpswwwlegifrancegouvfr] Consulteacute le 11 mai 2017

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

173

notre systegraveme de santeacute compleacuteteacute par le deacutecret ndeg 2016-1545 du 16 novembre 2016401

sont

venus refondre une nouvelle fois le dispositif de DMP

311 Lrsquoexposeacute des motifs de la loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute srsquoappuie sur

le caractegravere essentiel du DMP dans la coordination des prises en charge et tente de deacutemontrer

que le leacutegislateur a appris de ses erreurs passeacutees laquo le nouveau dispositif tire les leccedilons des

eacutechecs successifs des diffeacuterents modegraveles de deacuteveloppement du DMP souffrant depuis le deacutebut

dune confusion dobjectifs Assumer les difficulteacutes rencontreacutees conduit agrave proposer un DMP

pluriel adapteacute aux besoins de chacune des parties prenantes et notamment des

professionnels de santeacute Lenjeu du DMP 2 est de deacutefinir le socle dinformations qui doit y

figurer La creacutedibiliteacute de loutil et sa pleine appropriation par les usagers et les

professionnels deacutepend de la rapiditeacute de son implantation de sa capaciteacute agrave devenir un outil

efficace de coordination du rocircle que le meacutedecin traitant sy voit confeacuterer et enfin des

garanties sans faille quil apporte dans la deacutefense des inteacuterecircts et des droits des usagers raquo402

Lrsquoambition du leacutegislateur avec cette ultime relance est de faire du DMP lrsquooutil de reacutefeacuterence

comme support de la prise en charge coordonneacutee des patients notamment dans le cas des

malades atteints de pathologies chroniques

312 La gestion de ce nouveau DMP et de son deacuteploiement est confieacutee agrave la Caisse Nationale

drsquoAssurance Maladie des Travailleurs Salarieacutes (CNAMTS) consideacutereacutee comme plus agrave mecircme

que lrsquoASIP santeacute drsquoassurer le deacuteploiement effectif de lrsquooutil Afin de ne pas reproduire

certaines erreurs effectueacutees dans la gestion passeacutee le leacutegislateur a adopteacute dans la fouleacutee le

deacutecret drsquoapplication des dispositions issues de la loi de modernisation de notre systegraveme de

santeacute

313 Le DMP est deacutesormais deacutefini comme un laquo dossier numeacuterique destineacute agrave favoriser la

preacutevention la qualiteacute la continuiteacute et la prise en charge coordonneacutee des soins du patient raquo403

Le patient reste le titulaire du dossier mecircme si celui-ci nrsquoest plus personnel mais deacutesormais

partageacute Cette nouvelle deacutenomination a le meacuterite de marquer le but premier de ce dossier

401 Deacutecret ndeg 2016-1545 du 16 novembre 2016 autorisant la creacuteation dun traitement de donneacutees agrave caractegravere

personnel deacutenommeacute laquo dossier meacutedical partageacute raquo JORF ndeg0268 du 18 novembre 2016 texte ndeg 14 402

Loi ndeg 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre systegraveme de santeacute exposeacute des motifs disponible

sur [httpswwwlegifrancegouvfr] Consulteacute le 11 mars 2017 403

Article R 1111-26 du Code de la santeacute publique

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

174

partager lrsquoinformation meacutedicale le plus largement possible afin drsquoameacuteliorer le fonctionnement

du systegraveme de santeacute404

314 Cette ultime relance srsquoaccompagne drsquoun plan drsquoaction de la CNAMTS ambitieux afin

de faire du DMP un outil incontournable ouvert pour chaque assureacute social Sa creacuteation sera

simplifieacutee puisqursquoil la possibiliteacute drsquoune creacuteation directe par le patient depuis le site de

lrsquoassurance maladie est envisageacutee405

La CNAMTS a fait le choix drsquoune strateacutegie progressive puisque dans un premier

temps le deacuteploiement nrsquoest envisageacute que dans neufs deacutepartements pilotesEnfin afin drsquoinciter

les patients agrave srsquointeacuteresser au DMP et donc agrave creacuteer le leur la CNAMTS envisage la creacuteation

drsquoune application mobile sur laquelle pourra ecirctre consulteacute le DMP406

404 Etude drsquoimpact du projet de loi relatif agrave la santeacute octobre 2014 p 99

405 laquo Relance du DMP une creacuteation automatique dici fin 2016 et un inteacuteressement agrave lalimentation pour les

meacutedecins (Cnamts) raquo Deacutepecircche TIC santeacute 21 septembre 2015 disponible sur [httpwwwticsantecom]

Consulteacutee le 8 mars 2017 406

laquo DMP une application mobile attendue au printemps 2017 (Nicolas Revel) raquo Deacutepecircche TIC santeacute 10

novembre 2016 disponible sur [httpwwwticsantecom] Consulteacutee le 8 mars 2017

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

175

Conclusion de la section

315 Le DMP dossier meacutedical informatiseacute partageacute entre les diffeacuterents professionnels de

santeacute et accessible directement par le patient est un projet qui peut ecirctre qualifieacute drsquooriginal et

ambitieux Original de par son format et ambitieux de par les objectifs qursquoil devait atteindre

Toutefois degraves le deacutepart le leacutegislateur avait afficheacute un calendrier de mise en œuvre du DMP

beaucoup trop ambitieux En effet lagrave ougrave les pays voisins ont mis une dizaine drsquoanneacutee agrave

deacutevelopper et faire entrer dans les pratiques des dossiers partageacutes informatiseacutes le leacutegislateur

dans la loi de 2004 annonccedilait une entreacutee en vigueur deacutefinitive des dispositions au 1er

juillet

2007 Or tregraves rapidement le projet a fait lrsquoobjet de vives critiques ce qui a ameneacute le

leacutegislateur agrave mettre en œuvre diffeacuterentes relances du projet

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

176

Section 2 Le DMP les limites drsquoun projet ambitieux

laquo Le DMP est un projet de socieacuteteacute qui bouleverse les habitudes et les mentaliteacutes Il constitue

un facteur drsquoeacutevolution des pratiques meacutedicales et des relations entre patients et

professionnels de santeacute [hellip] raquo407

316 Projet titanesque agrave envergure nationale annonceacute comme un outil unique en son genre

le DMP devait remplir des objectifs aux enjeux strateacutegiques Toutefois les diffeacuterents

responsables du projet se sont montreacutes trop ambitieux et parfois mecircme trop confiants dans la

reacutealisation et la mise en place de ce projet Les ambitions du DMP eacutetaient certes louables

mais peut-ecirctre deacutemesureacutees face aux moyens et surtout au temps accordeacute pour sa mise en place

(Paragraphe 1) Aujourdrsquohui apregraves plus de dix ans de tentatives de mise en place et drsquoeacutechecs

successifs lrsquoavenir de cet outil prometteur se reacutevegravele finalement incertain (Paragraphe 2)

sect1 Des ambitions louables mais deacutemesureacutees

317 Nous ne pouvons que rappeler et souligner une fois de plus les ambitions louables du

leacutegislateur quand il a souhaiteacute mettre en place le DMP Degraves son lancement lrsquooutil se reacuteveacutelait

plein de promesses tant sur le fond que sur la forme (A) Toutefois de nombreuses lacunes

notamment en termes drsquoencadrement juridique sont apparues degraves le lancement du projet Cela

srsquoest alors reacuteveacuteleacute facirccheux dans la conduite et le deacuteveloppement du projet (B)

A Un outil plein de promesses

318 Lrsquoobjectif initial du DMP eacutetait drsquoinstaurer une meilleure coordination des soins afin

drsquoen ameacuteliorer la qualiteacute et la continuiteacute De cela aurait alors reacutesulteacute une meilleure maicirctrise

des deacutepenses de lrsquoAssurance maladie

En permettant de reacuteduire les interactions meacutedicamenteuses et les actes redondants mais

en facilitant eacutegalement les eacutechanges entre professionnels de santeacute le DMP devait relever le

407 MONNIER Anne laquo Le Dossier meacutedical personnel histoire encadrement juridique et perspectives raquo RDSS

2009 p 625

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

177

deacutefi drsquoameacuteliorer la coordination et la qualiteacute des soins (1) Toutefois en pratique lrsquoaccent et

la prioriteacute ont eacuteteacute axeacutes sur les aspects techniques de lrsquooutil et notamment la seacutecurisation des

donneacutees (2)

1) Lrsquoameacutelioration et la coordination des soins un enjeu majeur

laquo Dans quelques mois donc les premiers DMP seront ouverts Si le DMP a pu ecirctre preacutesenteacute

comme un outil de maicirctrise des deacutepenses il ne doit y avoir aucune ambiguiumlteacute sur la nature

reacuteelle du DMP le DMP est drsquoabord et avant tout un grand projet de santeacute publique au

service de la santeacute de nos concitoyens raquo408

319 Comme lrsquoavait rappeleacute la Ministre de la santeacute de lrsquoeacutepoque Roselyne BACHELOT

lors de son discours consacreacute agrave la relance du projet DMP lrsquoameacutelioration et la coordination des

soins eacutetaient les enjeux prioritaires de la mise en place du DMP

Ces objectifs clairement afficheacutes dans les textes fondateurs du DMP sont finalement

classiques pour ce type de dossier partageacute Si nous prenons lrsquoexemple du dossier

communiquant en canceacuterologie lrsquoobjectif est bien drsquoameacuteliorer la prise en charge globale des

patients atteints de cancer De mecircme le Dossier Pharmaceutique a bien pour enjeu de mieux

coordonner les prescriptions afin drsquoeacuteviter les interactions meacutedicamenteuses Toutefois la

particulariteacute du DMP tient agrave sa volonteacute de couvrir lrsquoensemble de la prise en charge du patient

peu importe les speacutecialiteacutes concerneacutees Crsquoest bien lagrave que reacuteside le caractegravere agrave la fois innovant

et ambitieux de cet outil Comme le soulignait agrave juste titre Caroline ZORN-MACREZ laquo il y

a lagrave un nouveau scheacutema de rationalisation du systegraveme de soins par le partage de donneacutees de

santeacute gracircce agrave des dossiers utiles aux soins raquo409

320 Au-delagrave de cet objectif se dessine la volonteacute de faire coopeacuterer lrsquoensemble des acteurs

de la prise en charge drsquoun patient Car crsquoest bien par cette coopeacuteration que passe la

coordination et donc lrsquoameacutelioration des soins Le DMP en eacutetant preacutesenteacute comme source drsquoune

information diversifieacutee complegravete et partageacutee est positionneacute comme lrsquooutil neacutecessaire agrave la

408 Discours prononceacute agrave lrsquooccasion du colloque consacreacute agrave la relance du DMP 9 avril 2009 disponible sur

[httpsantegouvfr] Consulteacute le 15 janvier 2015 409

ZORN-MACREZ Caroline laquo Donneacutees de santeacute et secret partageacute raquo op cit p 306

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

178

bonne coopeacuteration des professionnels de santeacute peu importe leur speacutecialiteacute ou leur lieu de

travail

321 Neacuteanmoins il est rapidement apparu que ce sont moins les difficulteacutes techniques ou

budgeacutetaires qui ont poseacute le plus de problegravemes au deacuteveloppement du projet que la barriegravere de

la culture meacutedicale qui nrsquoest pas forceacutement celle du partage de lrsquoinformation En effet le

positionnement des professionnels de santeacute face au DMP est original contrairement aux

dossiers meacutedicaux traditionnels que le professionnel va creacuteer alimenter et conserver le DMP

est conccedilu pour le patient et non pour le professionnel qui sera principalement ameneacute agrave

lrsquoalimenter Il srsquoagit ici drsquoun bouleversement des pratiques habituelles des professionnels

Dans le milieu hospitalier ce choc des cultures est drsquoautant plus flagrant De fait les

eacutetablissements de santeacute ont la particulariteacute du fait des activiteacutes varieacutees de produire un

nombre consideacuterable de donneacutees de santeacute diverses et varieacutees Ainsi afin de donner vie le plus

rapidement possible au DMP lors du programme de relance de 2009 il avait eacuteteacute deacutecideacute de

mettre lrsquoaccent sur lrsquoalimentation des dossiers par les professionnels du secteur hospitalier

ceux-ci ont alors pu ecirctre frustreacutes par cette vision restrictive du rocircle qui leur eacutetait accordeacute

322 Nous pensons que cet eacutetat drsquoesprit illustre bien les attentes peut-ecirctre trop eacuteleveacutees du

leacutegislateur vis-agrave-vis du DMP En effet il nous semble qursquoil aurait peut-ecirctre eacuteteacute plus opportun

de laisser au DMP la vocation premiegravere de tout dossier meacutedical agrave savoir ecirctre un outil

professionnel Bien que les professionnels de santeacute ne soient pas contre lrsquoideacutee drsquoecirctre

transparent vis-agrave-vis de leurs patients il nous semble qursquoil ne faut pas confondre outil de

travail et outil drsquoinformation En laissant une part tregraves importante au patient dans le DMP les

professionnels ont pu se sentir deacuteposseacutedeacutes de ce qui aurait pu ecirctre un outil de travail consacreacute

au partage de lrsquoinformation et agrave la coordination des soins

2) La seacutecuriteacute de lrsquooutil une prioriteacute

Degraves le lancement du projet la seacutecuriteacute de lrsquooutil a eacuteteacute une des prioriteacutes afficheacutee afin

drsquoune part de srsquoassurer que lrsquointeacutegriteacute et la confidentialiteacute des donneacutees soient conserveacutees et

drsquoautre part que les utilisateurs aient une pleine confiance dans lrsquooutil

323 En ce qui concerne lrsquoheacutebergement du DMP apregraves quelques tacirctonnements crsquoest la piste

de lrsquoheacutebergeur unique qui a eacuteteacute finalement retenue Cet heacutebergeur en reacutealiteacute consortium de

plusieurs entreprises a eacuteteacute agreacuteeacute selon les modaliteacutes exigeacutees par lrsquoarticle L 1111-8 du Code

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

179

de la santeacute publique et du deacutecret heacutebergeur De mecircme lrsquoaccent a eacuteteacute mis sur la traccedilabiliteacute au

sein du DMP Ainsi tous les accegraves sont traceacutes qursquoil srsquoagisse de la consultation drsquoun

document ou de son ajout Le patient va ainsi pouvoir identifier quel professionnel a eu accegraves

agrave quel document La date et lrsquoheure sont eacutegalement traceacutees Par ailleurs selon les dispositions

de lrsquoarticle R 1111-31 du Code de la santeacute publique le patient titulaire du dossier mais

eacutegalement son meacutedecin traitant les professionnels de santeacute auxquels le patient aurait confieacute

les mecircmes droits que le meacutedecin traitant et les professionnels auteur des informations faisant

lrsquoobjet des traces peuvent y acceacuteder

324 Le DMP a surtout permis de donner une impulsion agrave la mise en place de lrsquoIdentifiant

National de Santeacute (INS) En effet lrsquoarticle L 1111-8 du Code de la santeacute publique preacutevoyait

les dispositions suivantes laquo un identifiant de santeacute des beacuteneacuteficiaires de lassurance maladie

pris en charge par un professionnel de santeacute ou un eacutetablissement de santeacute ou dans le cadre

dun reacuteseau de santeacute deacutefini agrave larticle L 6321-1 est utiliseacute dans linteacuterecirct des personnes

concerneacutees et agrave des fins de coordination et de qualiteacute des soins pour la conservation

lheacutebergement et la transmission des informations de santeacute Il est eacutegalement utiliseacute pour

louverture et la tenue du dossier meacutedical personnel institueacute par larticle L 161-36-1 du Code

de la seacutecuriteacute sociale et du dossier pharmaceutique institueacute par larticle L 161-36-4-2 du

mecircme Code Un deacutecret pris apregraves avis de la Commission nationale de linformatique et des

liberteacutes fixe le choix de cet identifiant ainsi que ses modaliteacutes dutilisation raquo

Cet identifiant censeacute regrouper lrsquoensemble des identifiants qui existent au sein des

diffeacuterents systegravemes drsquoinformation de santeacute a eacuteteacute instaureacute par la loi du 30 janvier 2007

Consideacutereacute par certains auteurs410

comme eacutetant une donneacutee de santeacute agrave part entiegravere et donc agrave ce

titre devant beacuteneacuteficier des protections mises en place par la loi Informatique et Liberteacute lrsquoINS

a donneacute lieu agrave de nombreux deacutebats concernant sa composition La question srsquoest drsquoabord

poseacutee de savoir si lrsquoINS pouvait ecirctre le Numeacutero drsquoInscription au Reacutepertoire de lrsquoINSEE (NIR

ndash couramment appeleacute numeacutero de seacutecuriteacute sociale) En effet plutocirct que de creacuteer de toute piegravece

un nouveau numeacutero ce qui en plus de repreacutesenter un coucirct financier et humain non

neacutegligeable pouvait preacutesenter des failles en termes de seacutecuriteacute les maicirctres drsquoœuvre du projet

410 V notamment en ce sens HEBERT Sophie laquo Lrsquoidentiteacute sanitaire raquo RGDM 2007 ndeg 24 pp 121-138

ZORN-MACREZ Caroline laquo Donneacutees de santeacute et secret partageacute raquo PUN 2010 p 271 En lrsquoespegravece lrsquoauteur se

base sur les reacuteflexions meneacutees par le groupe de lrsquoarticle 29 sur la nature des donneacutees contenues au sein des DME

pour arriver agrave la conclusion que lrsquoINS est une donneacutee sensible au sens de la loi Informatique et Liberteacutes

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

180

(agrave lrsquoeacutepoque le GIP-DMP) ont alors avanceacute lrsquoideacutee drsquoutiliser le numeacutero de seacutecuriteacute sociale

Toutefois cette ideacutee a subi de vives critiques de la part notamment des associations de

deacutefenses des consommateurs

La CNIL quant agrave elle avait eacutecarteacute une telle possibiliteacute dans sa deacutelibeacuteration du 20

feacutevrier 2007411

estimant que cette utilisation serait de nature agrave laquo alteacuterer les liens de confiance

entre les professionnels de santeacute et les patients ceux-ci pouvant leacutegitimement srsquointerroger sur

les risques drsquoaccegraves non controcircleacutes agrave leur dossier meacutedical par cet identifiant largement

connu raquo

325 Toutefois la CNIL consciente des deacutesagreacutements et de la lourdeur induite par la

creacuteation drsquoun nouvel identifiant avait suggeacutereacute dans cette mecircme deacutelibeacuteration la possibiliteacute pour

creacuteer lrsquoINS de partir du numeacutero NIR mais transcodeacute selon des techniques connues

drsquoanonymisation Cela aboutissant agrave un numeacutero non signifiant LrsquoASIP santeacute chargeacute de

reprendre les activiteacutes du GIP-DMP et notamment la mise en place de lrsquoINS a suivi cette voie

dans la conception de lrsquoINS Le leacutegislateur constatant que laquo lrsquoadoption drsquoun dispositif unique

et commun drsquoidentification des patients est une condition neacutecessaire de lrsquointeropeacuterabiliteacute des

systegravemes drsquoinformation des professionnels et eacutetablissements de santeacute et donc de leur capaciteacute

agrave eacutechanger et partager facilement et de faccedilon seacutecuriseacutee (absence drsquoerreur sur le patient) les

donneacutees meacutedicales neacutecessaires agrave la prise en charge des patient raquo412

a deacutefinitivement reacutegleacute le

problegraveme en faisant du NIR le seul identifiant de santeacute utilisable413

En effet pour le

leacutegislateur le NIR preacutesente le double lrsquointeacuterecirct drsquoecirctre robuste et de permettre une

geacuteneacuteralisation rapide

326 Deacutesormais laquo lidentifiant du dossier meacutedical partageacute est lidentifiant national de

santeacute mentionneacute agrave larticle L 1111-8-1 raquo414

Par ailleurs les conditions drsquoutilisation du NIR

en tant qursquoidentifiant national de santeacute ont eacuteteacute preacuteciseacutees par le deacutecret ndeg 2017-412 du 27 mars

411 Deacutelibeacuteration CNIL ndeg 2007-036 du 20 feacutevrier 2007 portant avis sur deux projets drsquoarrecircteacutes relatifs drsquoune part

aux speacutecifications physiques et logiques de la carte drsquoassurance maladie et aux donneacutees y eacutetant contenues et

drsquoautre part aux conditions drsquoeacutemission et de gestion des cartes drsquoassurance maladie 412

Etude drsquoimpact du projet de loi relatif agrave la santeacute p 187 413

Lrsquoarticle 193 de la loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute vient creacuteer un article L 1111-8-1 au Code

de la santeacute publique qui preacutevoit laquo le numeacutero dinscription au reacutepertoire national didentification des personnes

physiques est utiliseacute comme identifiant de santeacute des personnes pour leur prise en charge agrave des fins sanitaires et

meacutedico-sociales dans les conditions preacutevues agrave larticle L 1110-4 raquo 414

Article R 1111-33 du Code de la santeacute publique

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

181

2017 relatif agrave lrsquoutilisation du numeacutero drsquoinscription au reacutepertoire national drsquoidentification des

personnes physiques comme identifiant national de santeacute415

B Des lacunes certaines

327 Malgreacute les reacuteformes et relances entourant le projet de nombreuses inconnues

subsistent aujourdrsquohui encore faisant du DMP un outil mouvant et parfois flou (1) Quant aux

droits des patients ceux-ci sont incertains malgreacute lrsquoaffichage positif que le leacutegislateur a

souhaiteacute donner (2)

1) Le DMP un outil agrave geacuteomeacutetrie variable

328 La question du contenu du DMP a longtemps poseacute problegraveme Lors de la creacuteation de

lrsquooutil en 2004 le Code de la seacutecuriteacute sociale preacutevoyait les dispositions suivantes laquo chaque

beacuteneacuteficiaire de lrsquoassurance maladie [hellip] dispose drsquoun dossier meacutedical personnel constitueacute de

lrsquoensemble des donneacutees mentionneacutees agrave lrsquoarticle L 1111-8 du mecircme Code raquo Ainsi le

leacutegislateur renvoyait aux donneacutees viseacutees agrave lrsquoarticle L 1111-8 du Code de la santeacute publique agrave

savoir les laquo donneacutees de santeacute recueillies agrave lrsquooccasion drsquoactes de soins de preacutevention ou de

diagnostic raquo Or cette reacutefeacuterence eacutetait maladroite En effet comme nous avons pu le voir

longuement lors drsquoun preacuteceacutedent paragraphe la notion de donneacutees de santeacute nrsquoa fait pendant

longtemps lrsquoobjet drsquoaucune deacutefinition juridique Celle finalement adopteacute par le Regraveglement

Europeacuteen se montre quant agrave elle tregraves large Pourtant il semble difficilement envisageable que

le DMP puisse ecirctre un dossier fourre-tout veacuteritable recueil exhaustif des donneacutees et

informations relatives directement ou indirectement agrave la santeacute du patient En effet rappelons

que le but initial du DMP eacutetait bien drsquoameacuteliorer la coordination des soins Degraves lors seuls les

eacuteleacutements permettant drsquoatteindre ce but devraient figurer en son sein ni plus ni moins Face agrave

un dossier surchargeacute les professionnels ne seraient plus en capaciteacute de retrouver les eacuteleacutements

utiles au suivi de leur patient

415 Deacutecret ndeg 2017-412 du 27 mars 2017 relatif agrave lrsquoutilisation du numeacutero drsquoinscription au reacutepertoire national

drsquoidentification des personnes physiques comme identifiant national de santeacute JORF ndeg0075 du 29 mars 2017

texte ndeg 23

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

182

329 Le rapport sur le Dossier meacutedical personnel de 2007416

relatif au bilan du DMP

soulignait que lrsquoabsence drsquoeacutetude approfondie du contenu du DMP en amont de la creacuteation de

lrsquooutil a eacuteteacute une des erreurs majeures lors de la creacuteation du DMP Mecircme la note relative aux

propositions de contenu remise au ministre de la santeacute par le Docteur Jean-Marie PICARD417

nrsquoenvisageait finalement que succinctement ce contenu Lrsquoerreur serait drsquoenvisager le DMP

comme un dossier se voulant exhaustif veacuteritable laquo reacuteplique eacutelectronique drsquoune armoire de

rangement raquo418

Or il est pourtant eacutevident que ce dossier ne doit pas et ne pourra pas ecirctre

exhaustif ne doit pas pour les raisons exposeacutees preacuteceacutedemment et ne pourra pas pour une

raison tregraves pratique le contenu du DMP deacutepend de la capaciteacute mais aussi de la volonteacute des

professionnels agrave lrsquoalimenter

330 Alors que la loi HPST initiatrice de la premiegravere relance du DMP nrsquoa apporteacute que peu

drsquoeacuteleacutements nouveaux quant au contenu du DMP le deacutecret du 4 juillet 2016419

tente de reacutegler

cette difficulteacute en creacuteant au sein du Code de la santeacute publique une sous-section consacreacutee au

contenu du DMP Un contenu a minima du dossier est deacutesormais preacutevu par lrsquoarticle R 1111-

30 du Code de la santeacute publique permettant drsquoassurer un socle de documents commun agrave tous

les DMP ceux-ci ne risquant plus deacutesormais drsquoecirctre alimenteacutes de maniegravere disparate selon le

bon vouloir des professionnels de santeacute

2) Les droits et devoirs des patients un manque de clarteacute

331 Une des questions qui a eacuteteacute et qui reste encore aujourdrsquohui reacuteguliegraverement souleveacutee est

celle de la protection du secret meacutedical dans le cadre de la mise en place drsquoun outil partageacute

avec un grand nombre de personnes et accessible via Internet Degraves lrsquoorigine du projet le

leacutegislateur avait bien preacutevu que le DMP soit instaureacute dans le respect du secret meacutedical420

Dans lrsquoabsolu le fonctionnement du DMP ne change rien aux regravegles relatives au secret

meacutedical Drsquoailleurs nous nrsquoadheacuterons pas agrave lrsquoaffirmation de Marie-Catherine CHEMTOB-

CONCE qui considegravere que laquo la mise en œuvre du DMP [hellip] permet de mieux proteacuteger le

416 Rapport sur le dossier meacutedical personnaliseacute Inspection geacuteneacuterale des finances Inspection geacuteneacuterale des

Affaires sociales Conseil geacuteneacuterale des Technologies de lrsquoInformation novembre 2007 417

PICARD Jean-Marie laquo Dossier Meacutedical Personnel proposition de contenu raquo enquecircte qualitative meneacutee

aupregraves de professionnels sous lrsquoeacutegide de la CNAMTS 418

Rapport sur le Dossier meacutedical personnaliseacute Inspection geacuteneacuterale des finances Inspection geacuteneacuterale des

Affaires sociales Conseil geacuteneacuterale des Technologies de lrsquoInformation novembre 2007 p 25 419

Deacutecret ndeg 2016-914 du 4 juillet 2016 relatif au dossier meacutedical partageacute op cit 420

Article L 161-36-1 alineacutea 1 du Code de la seacutecuriteacute sociale

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

183

secret meacutedical le secret professionnel raquo421

Au mieux le DMP ne met pas plus en danger le

secret professionnel qursquoun autre dossier informatiseacute mais en aucun cas il nrsquoest possible

drsquoenvisager qursquoun dossier meacutedical informatiseacute pouvant ecirctre accessible par un nombre

important de professionnels de santeacute diffeacuterents sera plus protecteur du secret meacutedical De

plus lrsquooutil en lui-mecircme comme tout dossier informatiseacute est forceacutement vecteur de risques

accrus en termes de seacutecuriteacute et de violation de la confidentialiteacute des donneacutees

332 Neacuteanmoins en ce qui concerne la seacutecurisation technique du DMP lrsquoheacutebergeur du

DMP offre drsquoimportantes garanties exigeacutees degraves le lancement de lrsquoappel drsquooffre et confirmeacutee

suite agrave lrsquoobtention de lrsquoagreacutement heacutebergeur A lrsquoheure actuelle aucune autre garantie

technique suppleacutementaire ne pourrait ecirctre apporteacutee et en cela nous pouvons affirmer que le

DMP apporte une forte protection du secret professionnel Cependant il ne faut pas oublier

que le DMP creacuteeacute une nouvelle forme de partage des donneacutees de santeacute Dans les faits force est

de constater que de nombreux professionnels auront avec cet outil potentiellement accegraves agrave de

nombreux documents issus de la prise en charge du patient Il est donc neacutecessaire de se

preacuteoccuper de la protection reacuteserveacutee agrave la confidentialiteacute des donneacutees

333 Un autre problegraveme intimement lieacute agrave la probleacutematique relative au secret professionnel

avait eacuteteacute souleveacute lors de la saisine du Conseil constitutionnel drsquoun recours contre la loi

relative agrave lassurance maladie pour les auteurs de la saisine les dispositions relatives au

DMP meacuteconnaissaient le droit au respect de la vie priveacutee Le Conseil Constitutionnel dans sa

deacutecision ndeg 2004-504 du 12 aoucirct 2004422

avait toutefois deacuteclareacute les dispositions conformes agrave

la constitution estimant que les garanties preacutesenteacutees par le leacutegislateur afin drsquoassurer le respect

du secret professionnel et de la confidentialiteacute des donneacutees eacutetaient des garanties suffisantes

pour preacuteserver le droit au respect agrave la vie priveacutee

421 CHEMTOB-CONCE Marie-Catherine laquo Dossier Meacutedical Personnel et Dossier Pharmaceutique raquo Gazette

du palais 2007 pp 2-5 422

laquo Consideacuterant en second lieu que le dossier meacutedical personnel sera eacutelaboreacute laquo dans le respect du secret

meacutedical raquo quil reacutesulte du renvoi agrave larticle L 1111-8 du Code de la santeacute publique que lheacutebergement des

donneacutees et la possibiliteacute dy acceacuteder seront subordonneacutes au consentement de la personne concerneacutee que le

traitement des donneacutees sera soumis au respect des dispositions de la loi du 6 janvier 1978 susviseacutee que

lheacutebergeur devra faire lobjet dun agreacutement que laccegraves au dossier par un professionnel de santeacute sera soumis

agrave lobservation des regravegles deacuteontologiques ainsi que des dispositions des articles L 1110-4 et L 1111-2 du Code

de la santeacute publique qui imposent notamment le respect de la vie priveacutee et du secret des informations

concernant le patient que laccegraves au dossier meacutedical en dehors des cas preacutevus par la loi sera puni des peines

preacutevues agrave larticle 226-13 du Code peacutenal que ces sanctions sappliqueront sans preacutejudice des dispositions du

Code peacutenal relatives aux laquo atteintes aux droits de la personne reacutesultant des fichiers ou des traitements

informatiques raquo

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

184

334 Drsquoune maniegravere geacuteneacuterale un tel dossier ouvre le deacutebat sur la place accordeacutee aux droits

fondamentaux face aux enjeux politiques sanitaires et eacuteconomiques que sont la coordination

des soins et la maicirctrise des deacutepenses de santeacute Bien qursquoabandonneacutee lrsquoideacutee drsquoune sanction

financiegravere sous la forme drsquoun non remboursement en cas de refus drsquoaccegraves agrave sa DMP avait eacuteteacute

pourtant valideacutee par le Conseil constitutionnel celui-ci reconnaissant la supeacuterioriteacute de la

maicirctrise des deacutepenses de santeacute sur finalement le respect agrave la vie priveacutee

335 Lrsquoautre question relative aux droits des patients dans le cadre du DMP concerne la

place accordeacutee agrave son consentement En effet dans le cadre du DMP le consentement du

patient peut ecirctre multiple le patient va devoir consentir agrave lrsquoouverture de son DMP puis il va

devoir habiliter les professionnels qui auront accegraves agrave ce dossier il doit donc consentir agrave

partager ses donneacutees de santeacute avec ces professionnels En ce qui concerne le consentement agrave

la mise en place de son DMP cela ne pose pas de problegraveme particulier Lrsquoarticle L 1111-14

du Code de la santeacute publique preacutevoit en effet les dispositions suivantes laquo le dossier meacutedical

partageacute est creacuteeacute sous reacuteserve du consentement expregraves de la personne ou de son repreacutesentant

leacutegal raquo Cette formulation issue de la refonte du DMP introduite par la loi de modernisation

de notre systegraveme de santeacute a le meacuterite drsquoecirctre beaucoup plus claire qursquoauparavant En effet

dans sa reacutedaction anteacuterieure lrsquoarticle L 1111-14 du Code de la santeacute publique ne preacutevoyait

pas le consentement preacutealable du patient agrave la creacuteation de son DMP Toutefois les dispositifs

techniques mis en place pour permettre la creacuteation du DMP permettent de srsquoassurer du

consentement preacutealable du patient celui-ci devant remettre sa carte vitale au professionnel qui

se chargera de creacuteer son DMP

336 Concernant lrsquohabilitation des patients et donc lrsquoautorisation drsquoaccegraves au DMP plusieurs

exceptions vont venir affaiblir le principe du consentement preacutealable du patient Par principe

laquo laccegraves au dossier meacutedical personnel des professionnels mentionneacutes au premier alineacutea est

subordonneacute agrave lautorisation que donne le patient dacceacuteder agrave son dossier raquo423

Il existe

cependant des hypothegraveses dans lesquelles le consentement du patient ne sera pas neacutecessaire

pour acceacuteder agrave son DMP en cas de risque immeacutediat pour une personne hors drsquoeacutetat

drsquoexprimer sa volonteacute et en cas drsquoappel drsquourgence (appels au centre 15) Toutefois ces deux

423 Article L 1111-15 du Code de la santeacute publique

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

185

hypothegraveses qui reprennent finalement la classique exception de lrsquourgence vitale sont dans le

cas du DMP assez bien verrouilleacutees Introduites par la loi de 2007424

ces dispositions

preacutevoient une exception agrave lrsquoexception En effet un meacutedecin peut acceacuteder au DMP sans que le

patient ne lrsquoai autoriseacute et ce en cas de risque immeacutediat ou en cas drsquoappel aux services

drsquourgences sauf si cette personne avait auparavant manifesteacute son opposition expresse agrave ce

que son dossier soit consulteacute ou alimenteacute dans une telle situation Ainsi une opposition

expresse rendra le DMP inaccessible peu importe les circonstances

337 Nous estimons que ces dispositions certes soucieuses de garantir la seacutecuriteacute des

donneacutees et le respect du droit des patients ne sont toutefois pas forceacutement dans lrsquointeacuterecirct de ce

dernier Il nous semble en effet que le principe de sauvegarde de la vie humaine doit rester

une prioriteacute par rapport agrave drsquoautres droits fondamentaux et nous deacuteplorons qursquoune opposition

expresse puisse verrouiller totalement lrsquoaccegraves au DMP accegraves qui dans certaines situations

pourrait ecirctre la seule source drsquoinformations

338 Enfin le DMP introduit la possibiliteacute pour un professionnel qui aurait eacuteteacute habiliteacute par

un patient de recueillir son consentement afin qursquoun autre professionnel agrave qui il pourrait ecirctre

opportun de confier une partie de la prise en charge puisse acceacuteder eacutegalement au DMP

Finalement rien de tregraves original dans cette mesure qui est directement inspireacutee des modaliteacutes

de partage drsquoinformations entre professionnels de santeacute preacutevues au sein de lrsquoarticle L 1110-4

du Code de la santeacute publique425

sect2 Un outil agrave lrsquoavenir incertain

339 A lrsquoheure actuelle le bilan des dix premiegraveres anneacutees du DMP est plus que mitigeacute Degraves

lors lrsquoavenir de cet outil ambitieux se preacutesente assez mal En effet le DMP est victime de ses

premiers eacutechecs et de ce fait est mal perccedilu par ses utilisateurs quels qursquoils soient (A)

424 Loi ndeg 2007-127 du 30 janvier 2007 ratifiant lordonnance ndeg 2005-1040 du 26 aoucirct 2005 relative agrave

lorganisation de certaines professions de santeacute et agrave la reacutepression de lusurpation de titres et de lexercice illeacutegal

de ces professions et modifiant le Code de la santeacute publique JORF ndeg27 du 1 feacutevrier 2007 p 1937 425

Lrsquoarticle L 1110-4 preacutevoit les dispositions suivantes laquo le partage entre des professionnels ne faisant pas

partie de la mecircme eacutequipe de soins dinformations neacutecessaires agrave la prise en charge dune personne requiert son

consentement preacutealable recueilli par tout moyen y compris de faccedilon deacutemateacuterialiseacutee dans des conditions

deacutefinies par deacutecret pris apregraves avis de la Commission nationale de linformatique et des liberteacutes raquo

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

186

Finalement malgreacute les relances diverses depuis sa creacuteation le DMP peine agrave trouver sa place

et il est leacutegitime de se demander si cet outil nrsquoest finalement pas voueacute agrave lrsquoeacutechec (B)

A Un outil mal perccedilu

340 Lrsquoensemble des rapports qui ont pu ecirctre reacutedigeacutes au sujet du DMP pointent la mecircme

faille le manque de confiance et drsquoadheacutesion agrave lrsquooutil que cela soit de la part des

professionnels ou des patients Les professionnels de santeacute et plus particuliegraverement les

professionnels du milieu hospitalier ne cachent pas leurs doutes et leur hostiliteacute face agrave ce

projet leurs craintes sont nombreuses et portent tant sur la charge de travail induite par ce

nouvel outil que sur les conseacutequences qursquoil aura sur leur pratique quotidienne et leur

responsabiliteacute Nous pouvons en effet constater que lrsquointroduction du DMP dans la pratique

meacutedicale ne se fera pas sans conseacutequence sur la responsabiliteacute des professionnels de santeacute (1)

Mais la fonctionnaliteacute qui reste la plus appreacutehendeacutee et donc source de doute est le droit de

masquage des donneacutees (2) accordeacute au patient

1) DMP et responsabiliteacute

Plusieurs questions se sont poseacutees avec lrsquointroduction du DMP quant agrave la responsabiliteacute

des praticiens

341 La premiegravere concerne les nouvelles responsabiliteacutes pesant deacutesormais sur les

professionnels du fait de leurs obligations en lien avec lrsquoouverture drsquoun DMP En effet les

dispositions du Code de la santeacute publique preacutevoient que lrsquousager doit donner un consentement

expregraves agrave lrsquoouverture de son DMP Ainsi cela induit en toute logique pour le professionnel de

santeacute qui sera ameneacute agrave accompagner le patient dans lrsquoouverture de son dossier de lui diffuser

une information claire agrave ce sujet dans un premier temps puis recueillir son consentement dans

un second temps Face agrave ces nouvelles obligations lrsquoASIP santeacute a toutefois creacuteeacute des brochures

drsquoinformation deacutelivrables aux patients afin de faciliter la tacircche des professionnels De mecircme

lrsquooutil informatique support du DMP preacutevoit une case qui doit ecirctre cocheacutee par le

professionnel afin de valider virtuellement le consentement du patient Enfin lrsquooutil

informatique stocke et conserve la trace et la date drsquoobtention du consentement Ainsi dans

lrsquohypothegravese drsquoun contentieux au cours duquel un patient preacutetendrait ne pas avoir consenti agrave

lrsquoouverture de son DMP le professionnel pourrait se deacutefendre en utilisant un faisceau

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

187

drsquoindices composeacute de lrsquoensemble de ces outils Bien qursquoen theacuteorie possible ce genre de

contentieux nrsquoest donc pas drsquoapregraves nous agrave craindre de la part du professionnel

342 La deuxiegraveme reacuteflexion agrave avoir en termes de responsabiliteacute concerne lrsquoobligation

drsquoinformation classique dont tout professionnel est redevable vis-agrave-vis de son patient

En effet le DMP permettrait-il drsquoalleacuteger lrsquoobligation drsquoinformation qui pegravese sur les

professionnels de santeacute Cette theacuteorie est celle soutenue par certains auteurs pour qui le

DMP en diffusant une meilleure information au patient permettra drsquoeacuteviter les

incompreacutehensions autour desquelles se cristallisent parfois les contentieux Crsquoest la theacuteorie

avanceacutee notamment par Jeacuterocircme CAYOL426

Mais peut-on reacuteellement consideacuterer que

lrsquoobligation drsquoinformation du patient sera correctement remplie une fois le DMP compleacuteteacute

Nous pensons que ce nrsquoest pas le cas et qursquoil serait mecircme dangereux drsquoaccepter une telle

possibiliteacute En effet comme lrsquoexige le Code de la santeacute publique et comme le rappelle

reacuteguliegraverement la jurisprudence lrsquoinformation dispenseacutee se doit drsquoecirctre claire loyale et surtout

compreacutehensible Or mecircme si lrsquoinformation contenue au DMP peut remplir les deux premiers

critegraveres seule une discussion entre le professionnel et son patient permettra de srsquoassurer que

lrsquoinformation dispenseacutee a eacuteteacute adapteacutee au degreacute de compreacutehension du patient et a bien eacuteteacute

acquise

343 Par ailleurs comme cela est reacuteguliegraverement souligneacute par les professionnels le patient

ne sera pas toujours capable de geacuterer lrsquoabondance de ces informations et surtout la reacutealiteacute

parfois tregraves dure de certaines drsquoentre elles Il nous semble donc que lrsquoobligation restera la

mecircme Peut-ecirctre sera t-elle-mecircme renforceacutee car le professionnel devra eacutegalement srsquoassurer

que le patient a compris et inteacutegreacute drsquoune part les informations reccedilues mais eacutegalement les

informations preacutesentes sur son dossier

344 Enfin des questions quant aux responsabiliteacutes pesant sur les professionnels au sujet de

la tenue et de la consultation du DMP se posent Concernant la tenue du DMP drsquoabord nous

le savons les professionnels de santeacute ont pour rocircle de lrsquoalimenter Mais quelles seraient les

conseacutequences srsquoils ne le font pas ou le font mal Se pose eacutegalement la question de la qualiteacute

de lrsquoinformation deacuteposeacutee au sein du DMP et des reacutepercussions en termes de responsabiliteacute

Nous retrouvons finalement ici le raisonnement relatif au contenu du dossier enregistrer

426 CAYOL Jeacuterocircme laquo Reacuteflexions sur la responsabiliteacute meacutedicale agrave la suite de lrsquointroduction du dossier meacutedical

personnel raquo Meacutedecine et droit 2006 pp 85-87

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

188

lrsquointeacutegraliteacute des informations de santeacute drsquoun patient au sein du DMP risquerait de faire se

perdre lrsquoinformation utile et neacutecessaire dans une masse de donneacutees insignifiantes Cela

pourrait alors entrainer un deacutefaut ou un retard dans la prise en charge du patient qui lui serait

preacutejudiciable Qui serait alors responsable La mecircme question peut ecirctre poseacutee au sujet de la

qualiteacute de lrsquoinformation Comme le soulignait agrave juste titre Gilles LUCAZEAUX procureur

geacuteneacuteral pregraves la Cour drsquoAppel de Nancy laquoqursquoen est-il du jour ougrave lrsquoon srsquointerrogera sur la

qualiteacute du dossier tenu Srsquoil nrsquoest pas de bonne qualiteacute ne va-t-on pas ouvrir la boite de

Pandore crsquoest-agrave-dire drsquoeacuteventuelles responsabiliteacutes raquo427

Dans lrsquohypothegravese drsquoun dossier mal geacutereacute finalement le droit commun trouverait agrave

srsquoappliquer pour que la responsabiliteacute peacutenale du praticien soit retenue il serait neacutecessaire

drsquoapporter la preuve drsquoune faute caracteacuteriseacutee crsquoest-agrave-dire une faute dont le meacutedecin ne

pouvait pas ignorer les conseacutequences et leurs risques et drsquoun preacutejudice du fait de la mauvaise

tenue

345 Une meilleure connaissance du patient par le meacutedecin de fait de lrsquoaccessibiliteacute agrave

certaines donneacutees qui lui auraient eacuteteacute cacheacutees auparavant entrainerait-il une responsabiliteacute

accrue des praticiens Certes cela est parfaitement envisageable Toutefois cela induit-il une

obligation de consultation du DMP Un professionnel pourrait-il ecirctre fautif du fait de la non

consultation du DMP alors qursquoil y avait accegraves Nous pensons en effet que comme dans

lrsquohypothegravese de la non consultation drsquoun dossier meacutedical par un praticien ou en cas

drsquointerrogatoire incomplet le praticien qui ne consulterait pas le DMP auquel il aurait accegraves

faillirait agrave son obligation de moyens Ainsi la responsabiliteacute civile de lrsquoeacutetablissement de santeacute

ou celle du meacutedecin pourrait ecirctre engageacutee Toutefois il est certain qursquoen ce qui concerne la

mise en œuvre de la responsabiliteacute meacutedicale responsabiliteacute pour faute les regravegles restent

inchangeacutees Tout au plus le DMP permettra au patient drsquoeacutetablir plus facilement le lien de

causaliteacute entre le preacutejudice subi et la faute du professionnel

346 Plusieurs obligations nouvelles vont peser sur le professionnel obligation leacutegale

drsquoinformer le patient au sujet du DMP et drsquoobtenir son consentement pour la creacuteation du

dossier Comme le rappelle lrsquoASIP santeacute agrave juste titre crsquoest au patient qui invoquerait un

427 LUCAZEAUX Gilles laquo La justice peacutenale et les informations meacutedicalesraquo RGDM ndeg 20 2006 pp 189-194

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

189

manquement drsquoapporter la preuve Le leacutegislateur a par ailleurs preacutevu une traccedilabiliteacute de

lrsquoensemble des actions effectueacutees sur le DMP accessibles par le patient Lrsquoarticulation des

regravegles concernant le consentement drsquoacceacuteder agrave son dossier donneacute par un patient agrave un

professionnel avec les regravegles relatives au secret partageacute doivent ecirctre mises agrave plat Cette

articulation nrsquoest pas si simple qursquoil y parait et contrairement agrave une partie de la doctrine

comme Marie-Catherine CHEMTOB-CONCE par exemple qui considegravere que laquo le DMP ne

creacutee aucun changement quant au secret meacutedical raquo et que laquo la mise en œuvre du DMP ne

change pas en soi la responsabiliteacute meacutedicale des professionnels de santeacute et des eacutetablissements

de soin mais permet de mieux proteacuteger le secret meacutedical le secret professionnel et la vie

priveacutee du patient raquo nous consideacuterons au contraire que le DMP ouvre de nouvelles

possibiliteacutes drsquoaccegraves aux donneacutees de santeacute et fragilise ainsi la protection de celles-ci

347 Finalement la doctrine srsquoaccorde en grande majoriteacute pour souligner que le DMP ne

changera strictement rien aux regravegles de responsabiliteacutes applicables428

Les regravegles ordinaires

srsquoappliquent et le DMP ne sera finalement qursquoun outil de plus dans la preuve de la

responsabiliteacute Mais il faut toutefois souligner qursquoil est aussi un outil en plus donc une source

suppleacutementaire de mise en œuvre de la responsabiliteacute des professionnels et ce pour toutes les

raisons eacutevoqueacutees preacuteceacutedemment

2) La theacuteorie du masquage

348 Depuis lrsquointroduction de la possibiliteacute pour le patient de masquer certaines

informations vis-agrave-vis de certains professionnels ceux-ci ont pu faire part de leurs craintes

vis-agrave-vis du dispositif Cette possibiliteacute est preacutevue agrave lrsquoarticle R 1111-38 du Code de la santeacute

publique qui preacutevoit que laquo le titulaire peut deacutecider que des informations le concernant

contenues dans son dossier meacutedical partageacute ne soient pas accessibles aux professionnels de

santeacute autoriseacutes agrave acceacuteder agrave son dossier Ces informations restent cependant accessibles au

professionnel de santeacute qui les a deacuteposeacutees dans le dossier meacutedical partageacute et aux

professionnels de santeacute viseacutes agrave larticle R 1111-43 Cette deacutecision est modifiable agrave tout

moment par le titulaire raquo

428 V en ce sens PY Bruno laquo Conclusions sur les aspects juridiques raquo RGDM ndeg 20 2006 p 239

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

190

349 Le deacutecret du 4 juillet 2016429

a acteacute de maniegravere deacutefinitive cette possibiliteacute sans

apporter pour autant beaucoup de preacutecisions agrave ce sujet Drsquoune maniegravere geacuteneacuterale cette notion

de masquage de certaines donneacutees a eacuteteacute longuement deacutebattue avec lrsquoensemble des acteurs du

DMP En pratique le masquage terme fortement connoteacute il nous semble nrsquoest que la

traduction informatique du colloque singulier qui existe entre le patient et un professionnel de

santeacute En effet lors drsquoune consultation le patient est libre de choisir de cacher des

informations agrave son praticien Or ce dernier en a parfaitement conscience et ne se contente pas

des informations que le patient sera enclin agrave lui donner Il eacutetait donc normal drsquoaccorder cette

mecircme faculteacute au patient au sein de son DMP A ce sujet le rapport FAGNIEZ430

soulignait le

risque drsquoaffaiblissement du colloque singulier du fait de la consultation du DMP le

professionnel se basant uniquement sur les informations contenues et ne cherchant plus agrave

interroger le patient en cela le masquage de certaines donneacutees va preacuteserver ce dialogue

preacutecieux De plus au titre de lrsquoarticle L 1110-4 du Code de la santeacute publique le patient a le

droit de srsquoopposer agrave ce que deux professionnels eacutechangent des donneacutees le concernant cette

possibiliteacute lui est donneacutee au sein du DMP agrave travers le masquage

350 Pour notre part nous pensons que le masquage est simplement la traduction

informatique de la liberteacute accordeacutee au patient de cacher des choses au professionnel qui le

prend en charge Toutefois bien que cette fonctionnaliteacute soit tregraves respectueuse des droits des

patients il nous semble qursquoelle aille finalement agrave lrsquoencontre de lrsquoenjeu premier du DMP qui

est le partage drsquoinformations pour une meilleure coordination des soins En effet dans

lrsquoabsolu un patient pourrait choisir de ne donner accegraves qursquoaux documents que le

professionnel a deacuteposeacute au sein du DMP lui masquant lrsquointeacutegraliteacute des autres donneacutees Or ceci

diminuerait clairement lrsquointeacuterecirct du DMP

351 Nous pensons qursquoil aurait peut-ecirctre eacuteteacute plus efficace drsquoabandonner cette fonctionnaliteacute

de masquage au profit drsquoune validation de la part du patient des documents que le

professionnel peut partager au sein du DMP Une autre solution et crsquoest une des propositions

formuleacutees au sein du rapport FAGNIEZ aurait eacuteteacute de tenter drsquoeacuteviter le masquage laquo solitaire raquo

et drsquoinciter les patients agrave se faire accompagner par un professionnel de confiance par exemple

429 Deacutecret ndeg 2016-914 du 4 juillet 2016 relatif au dossier meacutedical partageacute JORF ndeg0155 du 5 juillet 2016 texte

ndeg 20 430

FAGNIEZ Pierre-Louis laquo Le masquage drsquoinformations par le patient dans son DMP raquo rapport au ministre

de la santeacute et des solidariteacutes 30 janvier 2007

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

191

leur meacutedecin traitant dans le choix des documents qursquoils souhaitent masquer une sorte

laquo drsquoomission partageacutee raquo431

B Un projet voueacute agrave lrsquoeacutechec

352 A lrsquoheure actuelle le projet DMP nrsquoaffiche pas un bilan positif Le dernier rapport sur

le sujet a eacuteteacute reacutedigeacute par la Cour des comptes en juillet 2012 et le bilan financier qursquoelle y

dresse reacutevegravele la situation critique du projet (1) Toutefois le leacutegislateur a tenu agrave lrsquooccasion

drsquoune ultime refonte agrave relancer le projet sous lrsquoeacutegide cette fois-ci de la CNAMTS (2)

1) Le coucirct important du DMP

353 Preacutesenteacute lors de son lancement comme un outil censeacute diminuer les coucircts de santeacute et

donc favoriser des eacuteconomies pour lrsquoassurance maladie le DMP est bien loin drsquoavoir les

effets escompteacutes agrave ce niveau Pire encore il est accuseacute de coucircter beaucoup plus drsquoargent que

ce qursquoil nrsquoa pour lrsquoinstant ou mecircme ne pourra agrave terme amener comme eacuteconomies preacutesentant

pour certains laquo un coucirct excessif pour un succegraves mitigeacute raquo432

354 En juillet 2012 la Cour des comptes saisie par le preacutesident de la commission des

finances de lrsquoAssembleacutee Nationale drsquoune demande drsquoenquecircte sur laquo le coucirct du dossier meacutedical

personnel depuis sa mise en place raquo a rendu un rapport dressant un bilan neacutegatif agrave ce sujet433

Le chiffre avanceacute par la Cour des comptes dans son rapport srsquoeacutelegraveve agrave 210 millions drsquoeuros

deacutepenseacutes entre 2004 et fin 2011 dont un quart en expeacuterimentation Toutefois la Cour des

comptes apporte rapidement un beacutemol important agrave ce chiffre qui ne tient pas compte de

lrsquoensemble des coucircts induits par le projet Plusieurs deacutefaillances lieacutees de maniegravere plus ou

moins directe aux aspects financiers du projet sont pointeacutees par le rapport Lrsquoabsence

drsquoeacutevaluation meacutedico-eacuteconomique ainsi que lrsquoabsence de deacutefinition drsquoune strateacutegie nationale

en termes de systegravemes drsquoinformation de santeacute sont preacutesenteacutees comme des lacunes et donc de

grosses erreurs strateacutegiques de la part des pouvoirs publics De mecircme lrsquoabsence flagrante de

suivi des coucircts du projet ainsi que lrsquoignorance des coucircts induits sont autant de risques lourds

431 FAGNIEZ Pierre-Louis laquo Le masquage drsquoinformations par le patient dans son DMP raquo op cit p 12

432 Article paru sur laquo Le Monde santeacute raquo disponible sur [httpwwwlemondefr] Consulteacute le 10 feacutevrier 2015

433 Cour des comptes laquo Le coucirct du dossier meacutedical personnel depuis sa mise en place raquo communication agrave la

commission des finances de lrsquoAssembleacutee Nationale Juillet 2012

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

192

selon la Cour pour le bon aboutissement du projet Finalement nous partageons pleinement

lrsquoavis de la Cour des comptes qui considegravere que laquo ces deacutefaillances attestent [hellip] drsquoune

absence particuliegraverement anormale et preacutejudiciable de strateacutegie et drsquoun grave deacutefaut de

continuiteacute de meacutethode dans la mise en œuvre drsquoun outil annonceacute comme essentiel agrave la reacuteussite

de profondes reacuteformes structurelles raquo434

355 Depuis ce rapport les deacutetracteurs du projet nrsquoen finissent pas drsquoinvoquer des chiffres

beaucoup plus importants Ainsi en janvier 2014 la somme de 500 millions drsquoeuros a eacuteteacute

avanceacutee dans un article publieacute au sein du journal le Parisien435

Cette somme serait issue drsquoun

document interne du Conseil national de la qualiteacute et de la coordination des soins LrsquoASIP

santeacute alors encore en charge de la gestion du DMP agrave lrsquoeacutepoque avait souhaiteacute rectifier ces

diffeacuterentes informations qursquoelle qualifie drsquoerroneacutees Ainsi dans un document disponible sur

leur site Internet436

le groupement se basant sur des donneacutees qursquoelle qualifie drsquoexactes

documenteacutees et veacuterifieacutees avance des sommes tregraves diffeacuterentes Tout drsquoabord en ce qui

concerne la phase initiale de recherche et de deacuteveloppement (phase drsquoexpeacuterimentation allant

de 2005 agrave 2008) lrsquoassurance maladie aurait verseacute au groupement en charge du projet (agrave

lrsquoeacutepoque le GIP DMP) la somme totale de 92 millions drsquoeuros via le fonds drsquoaide agrave la qualiteacute

des soins de ville (FAQSV) jusqursquoen 2007 le fonds drsquointervention de la qualiteacute et de la

coordination des soins (FIQCS) agrave partir de 2008 et le fonds national de gestion administrative

(FNG) de la Caisse nationale drsquoassurance maladie des travailleurs salarieacutes (CNAMTS) eacutetant

entendu que 90 millions drsquoeuros ont eacuteteacute affecteacute agrave la preacuteparation de la conception Toutefois

ces chiffres ne concordent pas avec ceux avanceacutes par la Cour des comptes dans son rapport de

2012 qui pour sa part avanccedilait la somme drsquoenviron 70 millions drsquoeuros

En ce qui concerne la phase qualifieacutee de phase de construction et drsquoamorccedilage par

lrsquoASIP celle-ci se rapporte aux chiffres de la Cour des comptes entre 2010 et 2013 97

millions drsquoeuros auraient servis agrave financer le DMP (sur les 152 millions drsquoeuros verseacutes agrave

lrsquoASIP) Cette information nous amegravene agrave formuler deux remarques La premiegravere concerne

lrsquoanneacutee 2009 passeacutee sous silence par lrsquoASIP santeacute Bien qursquoentre 2008 et 2009 le projet a

434 Id p 11

435 laquo Dossier meacutedical personnel un demi-milliard pour rien raquo le Parisien 4 janvier 2014 disponible sur

[httpwwwleparisienfr] Consulteacute le 6 feacutevrier 2017 436

Chiffres disponibles sur [httpesantegouvfr] Consulteacutes le 10 feacutevrier 2015

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

193

pris un nouveau tournant437

les financements nrsquoont pas eacuteteacute stoppeacutes pour autant La Cour des

comptes annonce pour cette anneacutee-lagrave la somme de 24 millions drsquoeuros verseacutes dont 20 millions

alloueacutes au DMP

356 Notre seconde reacuteflexion concerne la justification de ces chiffres LrsquoASIP les preacutesente

comme eacutetant ceux de la Cour des comptes Or dans son rapport la Cour preacutecise que les

sommes annonceacutees comme eacutetant affecteacutees au DMP sur le total verseacute par lrsquoassurance maladie

sont les sommes preacutesenteacutees comme tel par lrsquoASIP LrsquoASIP tente habilement de justifier les

chiffres qursquoelle avance et de leur fournir un caractegravere officiel qui nrsquoexiste pas reacuteellement

Alors que la Cour des comptes annonccedilait la somme de 210 millions drsquoeuros agrave fin 2011

lrsquoASIP estime que seuls 187 millions ont eacuteteacute reacuteellement alloueacutes au projet au 31 deacutecembre

2013 Cette diffeacuterence srsquoexplique par la meacutethode retenue par lrsquoASIP santeacute En effet celle-ci a

fait le choix ne pas associer au coucirct du DMP des coucircts drsquoactions conduites au niveau reacutegional

alors que la Cour les considegravere justement comme eacutetant agrave comptabiliser

357 Finalement comme la Cour des comptes le soulignait agrave juste titre un veacuteritable

chiffrage du coucirct du DMP se reacutevegravele quasiment impossible Il semble en effet difficile de

savoir ce que lrsquoon considegravere comme entrant dans le champ du coucirct imputable au DMP agrave ce

sujet les diffeacuterents acteurs ne sont clairement pas drsquoaccord Par ailleurs le manque total de

suivi et de management du projet en termes de finances ne permet pas une transparence

suffisante et pourtant neacutecessaire pour dresser ce type de bilan Ainsi lagrave ougrave les deacutetracteurs du

projet annoncent des coucircts colossaux qursquoil est neacutecessaire de stopper les fervents deacutefenseurs

du projet tentent de minimiser le coucirct reacuteel Dans tous les cas nous estimons deacuteplorable que le

montant total des fonds publics consacreacutes agrave un projet national aussi conseacutequent ne puisse ecirctre

eacutetabli Cela reacutevegravele une deacutefaillance importante et preacutejudiciable dans la gestion des fonds

publics

2) Les beacutemols face agrave la relance de la loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute

358 Face agrave lrsquoimpossibiliteacute de geacuteneacuteraliser le deacuteveloppement du DMP le leacutegislateur srsquoest

pencheacute degraves 2011 sur les possibiliteacutes drsquoeacutevolution envisageables pour ce dossier Ainsi un

437 V Supra ndeg 306 agrave 309

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

194

projet alternatif a drsquoabord eacuteteacute envisageacute par la loi Fourcade438

le dossier meacutedical implanteacute sur

support portable numeacuterique seacutecuriseacute Une expeacuterimentation qui visait speacutecifiquement un

eacutechantillon drsquoassureacutes souffrant drsquoune affection de longue dureacutee devait ecirctre meneacutee selon les

termes de la loi avant le 31 deacutecembre 2013 Toutefois ce projet srsquoest conclu par un eacutechec En

effet degraves 2012 la CNIL avait eacutemis des doutes importants quant agrave la seacutecuriteacute qui pouvait

assurer un tel dispositif Les limites techniques que pouvait preacutesenter un tel support

notamment en termes drsquointeacutegriteacute et de disponibiliteacute des donneacutees mais aussi en termes de

seacutecuriteacute (possibiliteacute de virus notamment) avaient eacuteteacute pointeacutees

359 LAssociation pour la promotion de linformatique et de la communication en

meacutedecine (Apicem) avait toutefois tenteacute fin 2012 de lancer une expeacuterimentation du dossier sur

clef USB sans reacuteussir pour autant agrave tenir lrsquoeacutecheacuteance leacutegale fixeacutee au 31 deacutecembre 2013 et la

Ministre de la santeacute Marisol TOURAINE a refuseacute de prolonger ce deacutelai Elle avait drsquoailleurs

rappeleacute ecirctre deacutefavorable agrave la prolongation de ce type drsquoexpeacuterimentation439

preacutecisant

neacuteanmoins srsquoengager agrave ce qursquoun programme permettant drsquoaboutir au DMP 2 soit rapidement

mis en place

360 La refonte du DMP nrsquoa finalement eu lieu qursquoen 2016 avec la loi de modernisation de

notre systegraveme de santeacute Le leacutegislateur a opeacutereacute un virage majeur qui sur certains points peut

ecirctre consideacutereacute comme un retour en arriegravere le Dossier Meacutedical Personnel devient dans sa

version 20 Partageacute Changement de formulation lourde de sens puisque lrsquooutil au service du

patient devient deacutesormais un service pour les professionnels de santeacute le patient qui en reste

titulaire conservant le consentement agrave son ouverture et lrsquoaccegraves direct

361 Autre retour en arriegravere lrsquoenjeu de ce dossier serait une nouvelle fois recentreacute sur la

maicirctrise des deacutepenses de santeacute En effet bien que la loi de modernisation de notre systegraveme de

santeacute ne le preacutesente pas de maniegravere claire en preacutevoyant un controcircle du projet par la CNAMTS

et non plus par lrsquoASIP santeacute le leacutegislateur affiche clairement la prioriteacute donneacutee agrave lrsquooutil

Drsquoailleurs le contenu du DMP preacutevu par lrsquoarticle R 1111-30 du Code de la santeacute publique

438Loi ndeg 2011-940 du 10 aoucirct 2011 modifiant certaines dispositions de la loi ndeg 2009-879 du 21 juillet 2009

portant reacuteforme de lhocircpital et relative aux patients agrave la santeacute et aux territoires JORF ndeg0185 du 11 aoucirct 2011 p

13754 439

Question eacutecrite ndeg 48488 publieacutee au JO le 4 feacutevrier 2014 p 934 reacuteponse apporteacutee et publieacutee au JO le 17 juin

2014 p 49223

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

195

integravegre les donneacutees de remboursement de lrsquoassurance maladie consideacutereacutees comme

eacutetant neacutecessaires agrave la coordination des soins Ce controcircle est critiquable agrave plusieurs niveaux

Drsquoune part nous pouvons leacutegitimement nous poser la question de la possibiliteacute pour

lrsquoassurance maladie de concilier ses missions propres avec la gestion et la mise en place drsquoun

dossier partageacute dont le contenu sera plus que sensible Drsquoautre part et comme nous lrsquoavons

deacutejagrave souligneacute il srsquoagit ici drsquoun revirement agrave la symbolique forte le DMP nrsquoest plus un outil

de santeacute publique et les prioriteacutes ne sont plus les mecircmes Toutefois face aux nombreuses

critiques qursquoa pu essuyer le projet que ce soit en termes de gestion ou de financement nous

estimons que la deacutecision de confier la conduite du projet agrave lrsquoorganisme qui en sera le principal

financeur relegraveve du bon sens et permettra certainement de mener agrave bien le projet plus

facilement mecircme si celui-ci srsquoeacuteloignera de son essence initiale

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

196

Conclusion de la section

362 Outil plein de promesses le DMP nrsquoa toutefois pas reacuteussi agrave ce jour agrave atteindre les

objectifs qui lui avaient eacuteteacute fixeacutes A sa deacutecharge nous ne pouvons que constater lrsquoambition

deacutemesureacutee du leacutegislateur degraves le deacutebut du projet Bien que les enjeux soient louables les

moyens qui lui ont eacuteteacute accordeacutes (juridiques financiers ou humains) nrsquoeacutetaient pas adapteacutes agrave

lrsquoampleur de la tacircche A sa deacutecharge le DMP nrsquoa pas rencontreacute le succegraves escompteacute aupregraves des

professionnels de santeacute et agrave deacutefaut drsquoalimentation il a peu agrave peu perdu de son inteacuterecirct Face

aux critiques qui ne cessent de se deacutevelopper notamment sur le coucirct aujourdrsquohui encore

obscur du DMP depuis 2004 le leacutegislateur a souhaiteacute lui donner une derniegravere chance Avec la

loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute il tente donc le tout pour le tout en confiant agrave

la CNAMTS le soin de relancer de maniegravere efficace ce dossier qui se fait attendre

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP

197

Conclusion du chapitre

363 Depuis plusieurs anneacutees le deacuteveloppement des TIC en santeacute a ameneacute les

professionnels de santeacute et les eacutetablissements de santeacute agrave se doter de dossiers meacutedicaux

eacutelectroniques

364 Face au deacuteveloppement de lrsquoinformatisation mais eacutegalement aux neacutecessiteacutes accrues de

partage de lrsquoinformation entre les professionnels de santeacute et inspireacute des expeacuteriences reacuteussies

de nos pays voisins le leacutegislateur a souhaiteacute en 2004 mettre en place un dossier informatiseacute

partageacute national le Dossier Meacutedical Personnel eacutetait neacute Preacutesenteacute comme un compleacutement des

autres dossiers et se deacutemarquant par plusieurs originaliteacutes et innovations (portail drsquoaccegraves

unique accessibiliteacute et controcircle de son dossier par le patienthellip) le DMP avait des ambitions

louables Toutefois tregraves rapidement cette ambition du leacutegislateur srsquoest retourneacutee contre le

projet qui pacircti depuis dix ans drsquoun manque drsquoencadrement juridique et manageacuterial Au fil

des anneacutees les acteurs ont alors perdu confiance dans lrsquooutil jusqursquoagrave reacutecemment deacutenoncer son

coucirct exorbitant Le DMP est aujourdrsquohui consideacutereacute par certains comme un eacutechec

365 La loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute preacutevoyant une ultime relance du

projet sera peut-ecirctre la boueacutee de sauvetage du Dossier Meacutedical devenu Partageacute En modeacuterant

ses ambitions et en confiant la gouvernance du projet agrave un acteur qui a deacutejagrave participeacute agrave un

projet drsquoinformatisation des donneacutees de santeacute meneacute agrave bien440

le leacutegislateur accorde au DMP

toutes les chances dont il a besoin pour fonctionner

440La CNAMTS fait partie du GIE SESAM-VITALE en charge notamment de la mise en place et du

deacuteploiement de la carte vitale

199

Chapitre 2

Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du

patient

366 Les Technologies drsquoInformation et de la Communication ont apporteacute de nouvelles

possibiliteacutes de prise en charge du patient Avec elles se sont donc deacuteveloppeacutees de nouvelles

pratiques meacutedicales agrave distance permettant notamment de reacuteduire les ineacutegaliteacutes drsquoaccegraves aux

soins pour certaines populations en difficulteacute soit de par leur situation personnelle (par

exemple les deacutetenus ou les personnes acircgeacutees) soit de par leur situation geacuteographique

Ces pratiques maintenant ancreacutees pour certaines drsquoentre elles depuis une vingtaine

drsquoanneacutees se sont reacutecemment vues encadreacutees par le leacutegislateur (Section I) soucieux agrave la fois

de preacuteserver les droits des patients mais eacutegalement drsquoeacuteviter certaines deacuteviances Le

deacuteveloppement de lrsquoutilisation des TIC dans le cadre de la prise en charge du patient a

cependant rendu plus complexes les regravegles applicables en matiegravere de responsabiliteacute meacutedicale

En effet ces pratiques induisent de nouveaux risques et font intervenir de nouveaux acteurs

rendant ainsi neacutecessaire la clarification des regravegles applicables en matiegravere de responsabiliteacute

(Section II)

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

200

Section 1 La prise en charge agrave distance un cadre naissant

367 La pratique de la meacutedecine agrave distance nrsquoest pas nouvelle En effet certains reacuteseaux de

teacuteleacutemeacutedecine existent et fonctionnent depuis pregraves de vingt ans Ces pratiques ont drsquoabord

consisteacute en du conseil teacuteleacutephonique ou des visioconfeacuterences avant de se structurer

conduisant agrave la naissance de veacuteritables reacuteseaux de reacutefeacuterence441

Pourtant la notion de

teacuteleacutemeacutedecine a longtemps eacuteteacute deacutepourvue de deacutefinition juridique la pratique nrsquoeacutetant

absolument pas appreacutehendeacutee par le droit Ce nrsquoest que reacutecemment que le leacutegislateur srsquoest

pencheacute sur cette pratique pour lrsquoencadrer (Paragraphe 1)

En revanche il srsquoest inteacuteresseacute bien plus tocirct agrave la question de prescriptions meacutedicales

informatiseacutees (Paragraphe2) souhaitant seacutecuriser la prise en charge meacutedicamenteuse des

patients

sect1 La teacuteleacutemeacutedecine une pratique ancienne reacutecemment consacreacutee par

le leacutegislateur

368 Le leacutegislateur est reacutecemment venu srsquointeacuteresser agrave une pratique qui pourtant se

deacuteveloppait depuis plus de vingt ans442

Ainsi lrsquoarticle 78 de la loi HPST compleacuteteacute par le

deacutecret du 9 octobre 2010443

ont poseacute les regravegles applicables aux activiteacutes de teacuteleacutemeacutedecine

Toutefois ce cadre deacutefini de maniegravere stricte et circonscrite (A) srsquoajoute au cadre geacuteneacuteral

relatif aux droits des patients et agrave la protection de leurs donneacutees de santeacute rendant la pratique

de la teacuteleacutemeacutedecine lourde agrave mettre en place (B)

441 V notamment en ce sens TIERS Gonzague CAPON Catherine CLEMENTE Heacutelegravene laquo Teacuteleacutemeacutedecine en

reacutegion Nord-Pas de Calais raquo ITBM-RBM 2000 271-4 au sujet du reacuteseau de teacuteleacutemeacutedecine TELURGE

opeacuterationnel depuis mai 1996 442

Ibid 443

Deacutecret ndeg 2010-1229 du 19 octobre 2010 relatif agrave la teacuteleacutemeacutedecine JORF ndeg 0245 du 21 octobre 2010 texte ndeg

13

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

201

A Un cadre speacutecifique strictement deacutefini par la loi HPST

369 Lrsquoarticle 78 de la loi HPST fixe le cadre actuel de la teacuteleacutemeacutedecine Cet article et son

deacutecret drsquoapplication viennent seacutecuriser la pratique de la teacuteleacutemeacutedecine Ce cadre instituant une

proceacutedure preacutealable au deacuteveloppement de toute activiteacute de teacuteleacutemeacutedecine (2) preacutesente

eacutegalement lrsquointeacuterecirct de venir deacutefinir leacutegalement la teacuteleacutemeacutedecine (1)

1) La teacuteleacutemeacutedecine seule pratique agrave distance leacutegalement deacutefinie

a) Deacutefinition des diffeacuterentes pratiques

370 Avec le deacuteveloppement de lrsquoutilisation de TIC dans la pratique meacutedicale srsquoest

eacutegalement deacuteveloppeacute un champ lexical relatif agrave lrsquoexercice agrave distance de la meacutedecine Ainsi il

nous parait indispensable de deacutefinir certains termes afin de les exclure de notre reacuteflexion En

effet il est reacuteguliegraverement fait usage et parfois de maniegravere indiffeacuterencieacutee des termes teacuteleacutesanteacute

e-santeacute m-health ou encore e-health

371 Degraves 1998 lrsquoOrganisation Mondiale de la Santeacute affirmait la neacutecessiteacute de distinguer la

teacuteleacutesanteacute de la teacuteleacutemeacutedecine ce dernier terme devant ecirctre reacuteserveacute aux seules actions cliniques

et curatives de la meacutedecine utilisant les TIC444

Comme le soulignait agrave juste titre Pierre

LABORDES dans son rapport relatif agrave la teacuteleacutesanteacute445

ce terme reste une notion impreacutecise

Pour lui laquo son champ drsquoapplication est plus vaste que celui de la teacuteleacutemeacutedecine par sa

vocation agrave couvrir outre le domaine meacutedical au sens strict le domaine tregraves large et divers du

meacutedico-social raquo446

Drsquoune maniegravere plus preacutecise Pierre LABORDES tente de deacutefinir

diffeacuterentes pratiques qursquoil considegravere comme appartenant au domaine de la teacuteleacutesanteacute Pour le

deacuteputeacute peuvent donc relever de la teacuteleacutesanteacute des activiteacutes telles que la teacuteleacuteinformation la

teacuteleacutevigilance le teacuteleacutemonitoring la teacuteleacutecollaboration la teacuteleacuteprescription447

Ainsi la

teacuteleacutesanteacute se distinguerait assez clairement de la teacuteleacutemeacutedecine

444 HAS laquo Efficience de la teacuteleacutemeacutedecine eacutetat des lieux de la litteacuterature internationale et cadre drsquoeacutevolution raquo

juillet 2013 p 11 disponible sur [httpwwwhas-santefr] Consulteacute le 15 mai 2017 445

LABORDES Pierre laquo La teacuteleacutesanteacute un nouvel atout au service de notre bien-ecirctre raquo La Documentation

franccedilaise octobre 2009 446

Id p 36 447

LABORDES Pierre laquo La teacuteleacutesanteacute un nouvel atout au service de notre bien-ecirctre raquo op cit p 37

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

202

Lrsquoexercice de deacutefinition se complique toutefois quand on en vient agrave deacutefinir les notions

drsquoe-santeacute et de m-health Cette difficulteacute provient essentiellement de confusions dans la

traduction faite de ces notions Ainsi il nrsquoest pas rare que le terme e-santeacute soit utiliseacute pour

faire reacutefeacuterence agrave lrsquoactiviteacute de teacuteleacutesanteacute Crsquoest le cas par exemple de Pierre SIMON et

Dominique ACKER qui dans leur rapport relatif agrave la teacuteleacutemeacutedecine emploient ces deux

termes de maniegravere indistincte laquo les technologies du numeacuterique appliqueacutees agrave la santeacute

couvrent le champ de la e-santeacute ou teacuteleacutesanteacute [hellip] raquo448

Or initialement le terme de e-health

qui pourrait ecirctre traduit litteacuteralement par e-santeacute a eacuteteacute utiliseacute par lrsquoOMS pour faire reacutefeacuterence

aux laquo activiteacutes services et systegravemes lieacutes agrave la santeacute pratiqueacutes agrave distance au moyen des TIC

pour les besoins planeacutetaires de promotion de la santeacute des soins et du controcircle des eacutepideacutemies

de lrsquoeacutepideacutemiologie de la gestion et de la recherche appliqueacutees agrave la santeacute raquo Cette deacutefinition

est donc bien plus large que celle donneacutee pour la teacuteleacutesanteacute

Dans ses travaux consacreacutes agrave lrsquoencadrement juridique de la gestion eacutelectronique des

donneacutees meacutedicales NrsquoDa Brigitte ETIEN-GNOAN449

srsquoappuie sur la deacutefinition proposeacutee par

Gunther EYSENBACH pour deacutelimiter les contours de lrsquoe-santeacute Ainsi elle en deacuteduit que laquo la

e-santeacute ne srsquoinscrit pas dans une logique personnaliseacutee de diagnostic ou de theacuterapie alors que

la teacuteleacutesanteacute mecircme si elle consiste quelque fois en des transmissions drsquoinformations ou de

formation elle est plus marqueacutee par des actes ou services adresseacutes agrave des personnes de

maniegravere personnelle raquo450

La notion de e-santeacute serait donc un terme permettant de deacutesigner

des pratiques plus geacuteneacuteriques et moins personnaliseacutees que sont la teacuteleacutesanteacute ou la

teacuteleacutemeacutedecine

Enfin le terme m-health deacutesigne la mobile-health ou santeacute-mobile Il srsquoagit des

services drsquoinformations mais eacutegalement de recueil drsquoinformations de santeacute via des objets

connecteacutes afin de dispenser des conseils santeacute personnaliseacutes Cette pratique en plein essor ne

fera pourtant pas lrsquoobjet de notre eacutetude ici et nous ne pousserons donc pas plus loin lrsquoexercice

de deacutefinition En effet il srsquoagit drsquoune pratique qui ne touche aujourdrsquohui que de tregraves loin les

448 SIMON Pierre ACKER Dominique laquoLa place de la teacuteleacutemeacutedecine dans lrsquoorganisation des soins raquo novembre

2008 p 8 449

ETIEN-GNOAN NDa Brigitte laquo Lrsquoencadrement juridique de la gestion eacutelectronique des donneacutees

meacutedicales raquo deacutecembre 2014 thegravese pour obtenir le grade de docteur en droit disponible sur [httppepite-

depotuniv-lille2fr] Consulteacute le 15 mai 2017 450

Id p 224

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

203

eacutetablissements publics de santeacute et crsquoest pourquoi nous preacutefeacuterons lrsquoexclure de notre champ

drsquoeacutetude

372 Cet exercice termineacute nous pouvons nous concentrer sur la notion de teacuteleacutemeacutedecine

seule notion dans le domaine ayant une reacuteelle existence et deacutefinition leacutegale

Lrsquoarticle 78 de la loi HPST vient creacuteer au sein du titre premier du livre troisiegraveme de la

sixiegraveme partie du Code de la santeacute publique451

un chapitre six intituleacute laquo Teacuteleacutemeacutedecine raquo

Celle-ci est deacutefinie comme laquo une forme de pratique meacutedicale agrave distance utilisant les

Technologies de lrsquoInformation et de la Communication Elle met en rapport entre eux ou

avec un patient un ou plusieurs professionnels de santeacute parmi lesquels figure neacutecessairement

un professionnel meacutedical et le cas eacutecheacuteant drsquoautres professionnels apportant leurs soins au

patient raquo Toujours selon lrsquoarticle L 6316-1 du Code de la santeacute publique la teacuteleacutemeacutedecine

laquo permet drsquoeacutetablir un diagnostic drsquoassurer pour un patient agrave risque un suivi agrave viseacutee

preacuteventive ou un suivi post-theacuterapeutique de requeacuterir un avis speacutecialiseacute de preacuteparer une

deacutecision theacuterapeutique de prescrire des produits de prescrire ou de reacutealiser des prestations

ou des actes ou drsquoeffectuer une surveillance de lrsquoeacutetat des patients raquo Avec cette deacutefinition le

leacutegislateur fait donc de la teacuteleacutemeacutedecine un acte meacutedical agrave part entiegravere clairement deacutefini drsquoune

part et juridiquement consacreacute drsquoautre part

b) Les cinq actes de teacuteleacutemeacutedecine

373 Le deacutecret du 9 octobre 2010 deacutefinit cinq actes relevant de la teacuteleacutemeacutedecine Degraves lors

seules les pratiques correspondant agrave une de ces cinq deacutefinitions seront consideacutereacutees comme des

actes de teacuteleacutemeacutedecine entrant dans le cadre leacutegal (sous reacuteserve bien entendu de reacutepondre

eacutegalement aux autres contraintes du deacutecret452

) La liste de ces actes a eacuteteacute codifieacutee au sein de

lrsquoarticle R 6316-1 du Code de la santeacute publique

374 Le premier acte de teacuteleacutemeacutedecine est la teacuteleacuteconsultation acte ayant pour objet de

permettre agrave un professionnel meacutedical de donner une consultation agrave distance agrave un patient Un

professionnel de santeacute peut ecirctre preacutesent pregraves du patient et le cas eacutecheacuteant assister le

professionnel meacutedical au cours de la consultation Le texte preacutecise eacutegalement que les

psychologues peuvent eacutegalement ecirctre preacutesents aupregraves du patient

451 laquo Etablissements et services de santeacute raquo

452 V Infra ndeg 377 agrave 381

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

204

375 Le deuxiegraveme acte de teacuteleacutemeacutedecine est la teacuteleacuteexpertise Celle-ci a pour but de permettre

agrave un professionnel meacutedical de solliciter agrave distance lrsquoavis drsquoun ou plusieurs professionnels

meacutedicaux en raison de leurs formations ou de leurs compeacutetences particuliegraveres sur la base des

informations meacutedicales lieacutees agrave la prise en charge drsquoun patient Cette pratique est finalement

lrsquoapplication aux TIC de la possibiliteacute dont dispose le professionnel de pouvoir solliciter un

confregravere dans certains cas

376 Le troisiegraveme acte viseacute par le deacutecret du 9 octobre 2010 est la teacuteleacutesurveillance meacutedicale

Cette pratique a pour objet de permettre agrave un professionnel meacutedical drsquointerpreacuteter agrave distance les

donneacutees neacutecessaires au suivi meacutedical drsquoun patient et le cas eacutecheacuteant de prendre des deacutecisions

relatives agrave la prise en charge de ce patient Lrsquoenregistrement et la transmission des donneacutees

peuvent ecirctre automatiseacutes ou reacutealiseacutes par le patient lui-mecircme ou par un professionnel de santeacute

La quatriegraveme pratique est la teacuteleacuteassistance meacutedicale permettant agrave un professionnel meacutedical

drsquoassister agrave distance un autre professionnel de santeacute au cours de la reacutealisation drsquoun acte

Enfin le leacutegislateur a eacutegalement inscrit parmi les actes de teacuteleacutemeacutedecine la reacuteponse

meacutedicale apporteacutee dans le cadre de la reacutegulation meacutedicale

Seules ces cinq pratiques sont constitutives drsquoun acte de teacuteleacutemeacutedecine

2) Une proceacutedure preacutealable stricte

377 Le deacutecret du 9 octobre 2010 ne srsquoest pas contenteacute drsquoapporter des deacutefinitions il a

eacutegalement instaureacute le cadre leacutegal conventionnel et financier dans lequel doit srsquoinscrire lrsquoacte

de teacuteleacutemeacutedecine Plusieurs exigences preacutealables au deacuteveloppement drsquoun projet de

teacuteleacutemeacutedecine doivent donc drsquoecirctre respecteacutees Nous ne nous attarderons pas ici sur les regravegles de

droit commun applicables agrave lrsquoexercice de la meacutedecine drsquoune maniegravere geacuteneacuterale qui vont

srsquoopposer eacutegalement agrave lrsquoactiviteacute de teacuteleacutemeacutedecine ces eacuteleacutements eacutetant deacuteveloppeacutes

ulteacuterieurement453

Nous preacutefeacuterons nous concentrer sur les regravegles propres agrave lrsquoactiviteacute de

teacuteleacutemeacutedecine eacutedicteacutees par le deacutecret de 2010

453 V Infra ndeg 425 et s

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

205

378 Celles-ci sont de trois ordres Drsquoabord lrsquoactiviteacute de teacuteleacutemeacutedecine ne peut pas ecirctre mise

en place si elle ne srsquoinscrit pas au choix dans un programme national dans un contrat

pluriannuel drsquoobjectifs et de moyens454

(CPOM) ou dans un contrat particulier signeacute avec le

Directeur Geacuteneacuteral (DG) de lrsquoARS Le deacutecret preacutecise eacutegalement que le CPOM ou le contrat

particulier signeacute avec le DG ARS devra respecter par ailleurs les prescriptions du programme

relatif au deacuteveloppement de la teacuteleacutemeacutedecine lui-mecircme inclus dans le projet reacutegional de

santeacute455

On peut noter ici une volonteacute de la part du leacutegislateur de srsquoassurer que les projets de

teacuteleacutemeacutedecine se deacuteveloppent en lien avec les ARS et dans le respect des besoins de santeacute des

populations De ce fait elles jouent un rocircle important puisqursquoelles garantissent la coheacuterence

des activiteacutes deacuteveloppeacutees avec les besoins du territoire Il srsquoagit eacutegalement drsquoun moyen utile

pour orienter le deacuteveloppement de projets sur des theacutematiques ou des speacutecialiteacutes consideacutereacutees

comme prioritaires Il est important de preacuteciser que suite au deacutecret dit Teacuteleacutemeacutedecine la

Direction Geacuteneacuterale de lrsquoOffre de Soins (DGOS) a souhaiteacute mettre en place une strateacutegie

nationale de deacuteploiement de la teacuteleacutemeacutedecine Celle-ci a consisteacute en la mise en place drsquoun

comiteacute de pilotage national456

en charge de coordonner les initiatives des diffeacuterents acteurs de

la teacuteleacutemeacutedecine En 2011 ce comiteacute de pilotage national a identifieacute cinq theacutematiques

consideacutereacutees comme eacutetant des prioriteacutes nationales de deacuteploiement de la teacuteleacutemeacutedecine Il srsquoagit

de la permanence des soins en imagerie de la prise en charge de lrsquoAVC de la santeacute des

personnes deacutetenues de la prise en charge des maladies chroniques et des soins en structures

meacutedico-sociale ou HAD Ces theacutematiques sont agrave lrsquoheure actuelle prioriseacutees dans les

programmes reacutegionaux de deacuteveloppement de la teacuteleacutemeacutedecine

454 Article L 6114-1 du Code de la santeacute publique laquo lagence reacutegionale de santeacute conclut avec chaque

eacutetablissement de santeacute ou titulaire de lautorisation preacutevue agrave larticle L 6122-1 un contrat pluriannuel

dobjectifs et de moyens dune dureacutee maximale de cinq ans Lorsquil comporte des clauses relatives agrave lexeacutecution

dune mission de service public le contrat est signeacute pour une dureacutee de cinq ans raquo 455

Article L 1434-2 du Code de la santeacute publique laquo le projet reacutegional de santeacute est constitueacute

1deg Dun plan strateacutegique reacutegional de santeacute qui fixe les orientations et objectifs de santeacute pour la reacutegion

2deg De scheacutemas reacutegionaux de mise en œuvre en matiegravere de preacutevention dorganisation de soins et dorganisation

meacutedico-sociale

3deg De programmes deacuteclinant les modaliteacutes speacutecifiques dapplication de ces scheacutemas dont un programme relatif

agrave laccegraves agrave la preacutevention et aux soins des personnes les plus deacutemunies et un programme relatif au deacuteveloppement

de la teacuteleacutemeacutedecine La programmation peut prendre la forme de programmes territoriaux de santeacute pouvant

donner lieu agrave des contrats locaux de santeacute tels que deacutefinis agrave larticle L 1434-17

Le plan strateacutegique reacutegional de santeacute preacutevoit des articulations avec la santeacute au travail la santeacute en milieu

scolaire et la santeacute des personnes en situation de preacutecariteacute et dexclusion raquo 456

Ce comiteacute de pilotage est animeacute et coordonneacute par la DGOS en lien avec drsquoautres partenaires institutionnels

tels que la DSSIS lrsquoASIP Santeacute la DSS la CNAM-TS lrsquoANAP la HAS la DATAR la DGCIS et les

repreacutesentants des usagers

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

206

379 Les eacutetablissements organismes etou professionnels de santeacute qui participent agrave une

activiteacute de teacuteleacutemeacutedecine vont eacutegalement devoir conclure entre eux une convention afin de

reacutegir leurs relations et les conditions drsquoorganisation de cette activiteacute A ce sujet la CNIL

recommande que les engagements et les responsabiliteacutes des acteurs soient rappeleacutes dans ces

conventions Celles-ci devront eacutegalement en pratique comprendre les mentions relatives agrave

lrsquoorganisation de lrsquoactiviteacute agrave lrsquoheacutebergement agrave la seacutecuriteacute et la confidentialiteacute des donneacutees

mais eacutegalement celles relatives agrave la proceacutedure deacutegradeacutee agrave organiser dans lrsquohypothegravese drsquoune

deacutefaillance de la solution technique initiale

380 Enfin les organismes eacutetablissements ou professionnels de santeacute qui mettent en place

une activiteacute de teacuteleacutemeacutedecine doivent srsquoassurer agrave la fois de la formation mais aussi des

compeacutetences techniques des professionnels qui prennent part agrave lrsquoactiviteacute Toutefois notons

que le deacutecret reste muet en ce qui concerne les moyens de controcircle de la bonne formation des

professionnels En cas de contentieux il reviendrait alors agrave lrsquoeacutetablissement de santeacute drsquoapporter

la preuve qursquoil a bien formeacute ses professionnels agrave lrsquoutilisation de la solution technique qursquoil

aurait mis agrave disposition de ceux-ci

381 Le cadre de la mise en place drsquoune activiteacute de teacuteleacutemeacutedecine ne srsquoarrecircte pas agrave ces

proceacutedures preacutealables Drsquoautres proceacutedures administratives vont devoir ecirctre respecteacutees

impliquant plusieurs acteurs Cet ensemble forme alors un cadre assez pesant pour les

responsables de projets de teacuteleacutemeacutedecine susceptibles de les freiner

B Un cadre lourd frein au deacuteveloppement de lrsquoactiviteacute

382 Certains acteurs de la teacuteleacutemeacutedecine considegraverent aujourdrsquohui que le cadre leacutegal bien

que seacutecurisant peut constituer un frein au deacuteveloppement rapide de la teacuteleacutemeacutedecine

Effectivement force est de constater que les projets aboutis ne sont pas aujourdrsquohui aussi

nombreux que les professionnels du secteur auraient pu lrsquoespeacuterer (1) Ce constat reacutesulte

principalement des lourdeurs administratives qui entourent la mise en place drsquoune activiteacute de

teacuteleacutemeacutedecine qursquoelles soient preacutevues par les textes ou induites par la nature mecircme de

lrsquoexercice (2) Des pistes drsquoameacutelioration sont actuellement eacutetudieacutees afin drsquoencourager le

deacuteveloppement de la teacuteleacutemeacutedecine (3)

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

207

1) Etat des lieux de lrsquoactiviteacute en France

383 La DGOS suite agrave un premier eacutetat des lieux des projets de teacuteleacutemeacutedecine existant en

France reacutealiseacute agrave la fin de lrsquoanneacutee 2011 a proceacutedeacute agrave un nouveau recensement au 31 deacutecembre

2012457

Cette seconde eacutetude a permis drsquoeacutetablir un bilan plus complet et mettre en valeur

lrsquoeacutevolution des projets Alors que 256 dispositifs de teacuteleacutemeacutedecine eacutetaient recenseacutes pour 2011

lrsquoenquecircte meneacutee en 2012 a reacuteveacuteleacute lrsquoexistence de 331 dispositifs soit une augmentation de pregraves

de 50 en un an Les actes de teacuteleacuteconsultation et de teacuteleacuteexpertise sont largement majoritaires

puisqursquoils repreacutesentent 78 des projets Sur lrsquoensemble de ces projets 169 sont opeacuterationnels

et prennent en charge des patients (contre 161 encore agrave lrsquoeacutetat de conception au moment du

recensement) 53 de ces projets concernent de maniegravere exclusive le secteur hospitalier et 30

impliquent le secteur ambulatoire A ce sujet il est utile de preacuteciser qursquoil srsquoagit ici drsquoune

augmentation de 179 par rapport agrave 2011 Cependant ces chiffres soulignent une

preacutedominance du secteur hospitalier dans le cadre de lrsquoactiviteacute de teacuteleacutemeacutedecine

384 En adeacutequation avec les prioriteacutes deacutefinies au niveau national 25 reacutegions comptent au

moins un dispositif de teacuteleacutemeacutedecine ayant pour objectif la prise en charge drsquoune maladie

chronique De mecircme drsquoune maniegravere globale 30 dispositifs de teacuteleacutemeacutedecine concernent la

prise en charge de lrsquoaccident vasculaire ceacutereacutebral (AVC) 30 projets lrsquoinsuffisance reacutenale et 24

projets lrsquoinsuffisance cardiaque

385 Ces chiffres drsquoordre geacuteneacuteral sur lrsquoeacutevolution de la teacuteleacutemeacutedecine eacutetant exposeacutes il est

inteacuteressant de srsquoattarder sur un point mis en valeur dans ce rapport de la DGOS lrsquoeacutetat des

lieux de la contractualisation et du conventionnement

En ce qui concerne le conventionnement avec lrsquoARS la DGOS affirme que sur les 169

projets opeacuterationnels seuls 24 ont fait lrsquoobjet drsquoune contractualisation avec lrsquoARS (soit

environ 41 projets) Aucun chiffre nrsquoest mentionneacute quant aux projets en cours drsquoeacutelaboration

Pour autant 81 des 331 dispositifs de teacuteleacutemeacutedecine srsquoinscrivent dans les prioriteacutes du

programme reacutegional de teacuteleacutemeacutedecine de leur reacutegion

457 laquo La preuve par 10 Principaux enseignements du bilan PRT et du recensement des projets teacuteleacutemeacutedecine

2013 raquo Direction Geacuteneacuterale de lrsquoOffre de Soins A noter qursquoagrave lrsquoheure actuelle ce bilan est le seul bilan officiel

qui existe concernant lrsquoeacutetat des lieux de lrsquooffre de teacuteleacutemeacutedecine en France

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

208

Le conventionnement entre les acteurs drsquoun dispositif de teacuteleacutemeacutedecine nrsquoa pas plus de

succegraves puisque seulement 51 des projets opeacuterationnels (donc 86 projets) ont donneacute lieu agrave un

conventionnement entre les acteurs La DGOS preacutecise que ce conventionnement recenseacute peut

ecirctre total ou partiel sans pour autant preacuteciser ce qursquoelle entend par conventionnement partiel

Or cette situation va non seulement agrave lrsquoencontre des dispositions du deacutecret de 2010 qui

impose la signature drsquoune convention mais eacutegalement agrave lrsquoencontre de la plupart des

recommandations eacutemises agrave ce sujet

386 Alors que la DGOS semble se feacuteliciter de ce deacuteveloppement qursquoelle considegravere comme

remarquable nous ne pouvons que constater que le nombre limiteacute de projets officiels de

teacuteleacutemeacutedecine pour une activiteacute qui dispose drsquoune existence leacutegale depuis peu de temps mais

se deacuteveloppe toutefois depuis presque 20 ans Pour nous cet eacutetat de fait tend agrave montrer qursquoil

existe encore aujourdrsquohui des freins au deacuteveloppement des activiteacutes de teacuteleacutemeacutedecine freins

qui ne sont pas drsquoordre technique

2) Le poids des proceacutedures preacutealables

387 La mise en œuvre drsquoun projet de teacuteleacutemeacutedecine sous-entend pour son initiateur de

traiter avec une diversiteacute drsquointerlocuteurs administratifs ou meacutedicaux afin soit drsquoobtenir les

autorisations neacutecessaires agrave lrsquoactiviteacute soit de contractualiser Cette proceacutedure preacutealable est en

partie preacutevue par le deacutecret de 2010 crsquoest le cas de la contractualisation preacutealable obligatoire

avec lrsquoARS ou entre les acteurs drsquoun mecircme projet (a) mais elle peut eacutegalement ecirctre en partie

induite par la nature mecircme de la teacuteleacutemeacutedecine activiteacute neacutecessitant une collecte un traitement

et un archivage de donneacutees informatiseacutees (b)

a) La contractualisation avec les acteurs

388 Comme nous avons pu le voir preacuteceacutedemment si lrsquoactiviteacute de teacuteleacutemeacutedecine ne srsquoinscrit

pas dans le cadre drsquoun programme national deacutefini par arrecircteacute pris par le ministre en charge de

la santeacute ou si elle nrsquoest pas inscrite au sein drsquoun CPOM quand il srsquoagit drsquoune activiteacute meneacutee

par un eacutetablissement de santeacute elle doit faire lrsquoobjet drsquoun contrat signeacute avec lrsquoARS Or agrave

lrsquoheure actuelle lrsquoorientation prise par le Ministegravere de la santeacute est bien de confier

lrsquoorganisation des activiteacutes de teacuteleacutemeacutedecine aux ARS Il nrsquoexiste donc pas agrave ce jour de

programme national de teacuteleacutemeacutedecine

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

209

389 Pour permettre drsquoaccompagner les diffeacuterents acteurs dans cette deacutemarche de

contractualisation la DGOS a publieacute en 2012 un guide meacutethodologique458

Ce guide

considegravere la contractualisation avec lrsquoARS comme un levier permettant drsquoassurer une

meilleure visibiliteacute aux porteurs des projets de teacuteleacutemeacutedecine tout en assurant la qualiteacute des

activiteacutes mises en place En lrsquoabsence de preacutecisions dans le deacutecret le guide meacutethodologique

preacutesente lrsquointeacuterecirct de preacuteconiser une dureacutee et un peacuterimegravetre pour les contrats ceux-ci doivent

donc selon le Ministegravere avoir une dureacutee caleacutee sur celle du programme reacutegional de

teacuteleacutemeacutedecine et ecirctre signeacutes une fois la phase de conception termineacutee mais avant la prise en

charge effective des patients Enfin le guide propose un contrat-type

390 Les porteurs drsquoun projet de teacuteleacutemeacutedecine doivent eacutegalement preacutevoir une convention

entre eux Celle-ci a notamment pour but de preacutevoir les modaliteacutes pratiques de lrsquoorganisation

de lrsquoactiviteacute (en termes de solution technique choisie par exemple) mais rappelle eacutegalement

les obligations de chacun en matiegravere de droit des patients ainsi qursquoen termes de reacutepartition des

responsabiliteacutes Ainsi dans le cadre de la mise en place drsquoun projet de teacuteleacutemeacutedecine le deacutecret

de 2010 exige a minima la mise en place de deux conventions diffeacuterentes Cette proceacutedure

bien qursquoutile en plusieurs points reste lourde pour les diffeacuterents acteurs Elle implique une

charge administrative suppleacutementaire qui pourra srsquoaveacuterer chronophage surtout lorsque le

nombre drsquoacteurs concerneacutes par lrsquoactiviteacute sera important Or il ne faut pas oublier que le but

premier drsquoun projet de teacuteleacutemeacutedecine est lrsquoameacutelioration de la prise en charge des patients

Pourtant cette charge administrative est souvent une cause de retard dans le lancement des

activiteacutes de teacuteleacutemeacutedecine

b) Les proceacutedures induites par lrsquoactiviteacute

La proceacutedure preacutealable aupregraves de la CNIL

391 Initialement la CNIL exigeait que lrsquoactiviteacute de teacuteleacutemeacutedecine soit preacutealablement

soumise agrave une demande drsquoautorisation459

Cependant la CNIL dans une deacutemarche de

simplification des formaliteacutes preacutealables a deacutecideacute de soumettre au reacutegime de la deacuteclaration les

traitements de donneacutees de santeacute qui relegravevent des exceptions preacutevues agrave lrsquoarticle 8 II de la loi

Informatique et Liberteacutes Cette deacutemarche de la CNIL srsquoinscrit dans la continuiteacute de la

458 Circulaire DGOSPF3 ndeg2012-114 du 13 mars 2012 relative au guide meacutethodologique pour lrsquoeacutelaboration des

contrats et des conventions en teacuteleacutemeacutedecine non publieacutee au JORF 459

Disponible sur [httpwwwsantegouvfr] Consulteacute le 15 mai 2017

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

210

philosophie impulseacutee par le regraveglement europeacuteen sur la protection des donneacutees fondeacute en

grande partie sur la responsabilisation des responsables de traitement460

392 Cette deacutemarche aurait pu en reacutealiteacute ecirctre mise en place bien avant lrsquoadoption du

regraveglement europeacuteen Une lecture croiseacutee de lrsquoarticle 8 et de lrsquoarticle 25-I-1 de la loi

Informatique et Liberteacutes permet de consideacuterer que les traitements de donneacutees de santeacute mis en

place dans le cadre drsquoune activiteacute de teacuteleacutemeacutedecine permet drsquoaffirmer que ceux-ci nrsquoeacutetaient

pas soumis agrave la proceacutedure drsquoautorisation mais simplement agrave la proceacutedure de deacuteclaration En

effet lrsquoarticle 25-I-1 de la loi Informatique et Liberteacutes preacutevoit que laquo sont mis en œuvre apregraves

autorisation de la Commission nationale de linformatique et des liberteacutes [hellip] les traitements

automatiseacutes ou non mentionneacutes au 7deg du II au III et au IV de larticle 8 raquo Or les traitements

mis en œuvre dans le cadre drsquoune activiteacute de teacuteleacutemeacutedecine relegravevent selon nous des 1deg et 2deg

du II de lrsquoarticle 8461

Lrsquoheacutebergement agreacuteeacute des donneacutees

393 Comme le preacutevoit lrsquoarticle R 6316-10 du Code de la santeacute publique laquo les organismes

et les professionnels de santeacute utilisateurs des Technologies de lInformation et de la

Communication pour la pratique dactes de teacuteleacutemeacutedecine sassurent que lusage de ces

technologies est conforme aux dispositions preacutevues au quatriegraveme alineacutea de larticle L 1111-8

du Code de la santeacute publique relatif aux modaliteacutes dheacutebergement des donneacutees de santeacute agrave

caractegravere personnel raquo

Les acteurs impliqueacutes dans une activiteacute de teacuteleacutemeacutedecine vont devoir reacutefleacutechir aux

modaliteacutes drsquoheacutebergement des donneacutees de santeacute recueillies dans ce cadre Un des risques dans

lrsquohypothegravese drsquoune activiteacute qui regroupe plusieurs eacutetablissements ou professionnels de santeacute

est que lrsquoun drsquoentre eux conserve lrsquoensemble des donneacutees de santeacute sur son systegraveme

drsquoinformation La question peut se poser de savoir srsquoil devra agrave son tour ecirctre heacutebergeur agreacuteeacute

460 V en ce sens la position de la CNIL sur sa deacutemarche de simplification des formaliteacutes disponible sur

[httpswwwcnilfr] 461

Les 1deg et 2deg du II de lrsquoarticle 8 visent laquo les traitements pour lesquels la personne concerneacutee a donneacute son

consentement expregraves sauf dans le cas ougrave la loi preacutevoit que linterdiction viseacutee au I ne peut ecirctre leveacutee par le

consentement de la personne concerneacutee raquo et les laquo traitements neacutecessaires agrave la sauvegarde de la vie humaine

mais auxquels la personne concerneacutee ne peut donner son consentement par suite dune incapaciteacute juridique ou

dune impossibiliteacute mateacuterielle raquo

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

211

Tant qursquoil ne conserve que les donneacutees de patient qursquoil a pris en charge la reacuteponse est non

Toutefois dans le cadre drsquoun reacuteseau de teacuteleacutemeacutedecine la reacuteponse peut ecirctre plus nuanceacutee Par

exemple dans lrsquohypothegravese ougrave un eacutetablissement centralise et conserve lrsquoensemble des donneacutees

mais ne participe pas agrave toutes les prises en charge par le reacuteseau il en viendra agrave ecirctre heacutebergeur

de donneacutees de santeacute et devra donc disposer drsquoun agreacutement agrave ce titre Cette situation doit donc

ecirctre penseacutee en amont de la mise en place de lrsquoactiviteacute par lrsquoensemble des acteurs En effet

comme nous lrsquoavons vu preacuteceacutedemment la proceacutedure drsquoheacutebergement est longue Le plus

simple pour lrsquoensemble des acteurs est donc de solliciter un heacutebergeur agreacuteeacute

La convention de coopeacuteration entre professionnels

394 Dans certains cas lrsquoactiviteacute de teacuteleacutemeacutedecine va faire appel agrave une eacutequipe

pluridisciplinaire Drsquoailleurs certains actes habituellement reacuteserveacutes aux meacutedecins par

exemple vont dans le contexte de la teacuteleacutemeacutedecine ecirctre reporteacutes sur le personnel parameacutedical

tels que les infirmiers Dans ce cas le projet de teacuteleacutemeacutedecine devra en plus des diffeacuterentes

conventions citeacutees preacuteceacutedemment mettre en place le protocole de coopeacuteration preacutevu par

lrsquoarticle L 4011-1462

du Code de la santeacute publique Cette possibiliteacute drsquoencadrer leacutegalement ce

qui est ni plus ni moins qursquoun transfert de tacircches a eacuteteacute introduite par lrsquoarticle 51 de la loi

HPST Cet article permet agrave un professionnel dans le cadre drsquoun protocole preacutecis de reacutealiser

des actes qui ne relegravevent pas drsquoun point de vue strictement reacuteglementaire de sa compeacutetence

En pratique il appartient aux professionnels drsquoecirctre les initiateurs de cette deacutemarche Le

protocole mis en place entre les professionnels souhaitant srsquoinscrire dans une deacutemarche de

coopeacuteration est soumis agrave validation de lrsquoARS Celle-ci veacuterifie dans un premier temps si le

protocole correspond bien agrave un besoin reacuteel de santeacute constateacute au sein de la reacutegion Puis le

protocole est soumis agrave lrsquoavis de la Haute autoriteacute de Santeacute (HAS) Le Directeur de lrsquoARS

autorise ensuite la mise en œuvre de ce protocole par voie drsquoarrecircteacute

462 Cet article preacutevoit laquo Par deacuterogation aux articles L 1132-1 L 4111-1 L 4161-1 L 4161-3 L 4161-5 L

4221-1 L 4311-1 L 4321-1 L 4322-1 L 4331-1 L 4332-1 L 4341-1 L 4342-1 L 4351-1 L 4361-1 L

4362-1 L 4364-1 et L 4371-1 les professionnels de santeacute peuvent sengager agrave leur initiative dans une

deacutemarche de coopeacuteration ayant pour objet dopeacuterer entre eux des transferts dactiviteacutes ou dactes de soins ou de

reacuteorganiser leurs modes dintervention aupregraves du patient Ils interviennent dans les limites de leurs

connaissances et de leur expeacuterience ainsi que dans le cadre des protocoles deacutefinis aux articles L 4011-2 et L

4011-3[hellip] raquo

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

212

395 Cependant ce dispositif nrsquoa pas reccedilu le succegraves escompteacute Dans son rapport drsquoactiviteacute

de 2013463

consacreacute au sujet la HAS donnait les chiffres suivants laquo au 31 deacutecembre 2013

les ARS ont transmis 71 protocoles agrave la HAS correspondant aux protocoles reccedilus depuis 2

ans [hellip] Mais du fait de double saisine pour le mecircme dossier ou de retrait de dossiers par les

promoteurs la HAS a donneacute un avis sur 38 dossiers et 19 dossiers sont en instruction fin

2013 30 ont reccedilu un avis favorable avec reacuteserves Ces reacuteserves portent freacutequemment sur les

indicateurs proposeacutes (fiches incomplegravetes ou manquantes) sur les formations neacutecessaires agrave

lrsquoacquisition de compeacutetences ou sur lrsquoinformation donneacutee aux patients raquo

396 En ce qui concerne plus particuliegraverement la teacuteleacutemeacutedecine seuls trois protocoles de

coopeacuteration avaient eacuteteacute mis en place en deacutecembre 2013 le premier concernant une

consultation de mesure de lrsquoacuiteacute visuelle et de la reacutefraction (dans ce cas un ophtalmologiste

deacutelegravegue ses compeacutetences agrave un orthoptiste ou un infirmier diplocircmeacute drsquoeacutetat) le deuxiegraveme

concernant le suivi de patients diabeacutetiques traiteacutes par insuline (dans ce cas la prescription des

soins est effectueacute par lrsquoinfirmier agrave la place du meacutedecin) et le dernier concernant le suivi des

plaies complexes etou agrave retard de cicatrisation (dans ce cas le meacutedecin ou le chirurgien

deacutelegravegue ses compeacutetences agrave un infirmier)

397 Nous ne pouvons que nous eacutetonner du faible nombre de protocoles de coopeacuteration mis

en place Cependant nous ne sommes pas en mesure de dire faute de recensement preacutecis de

lrsquoensemble des projets de teacuteleacutemeacutedecine existant464

si ce faible chiffre est ducirc agrave lrsquoabsence reacuteelle

de transfert de compeacutetences dans les activiteacutes de teacuteleacutemeacutedecine ou srsquoil srsquoagit drsquoune lacune dans

la reacutealisation des deacutemarches par les responsables de projet La lourdeur drsquoune part et le

manque drsquoadheacutesion au dispositif drsquoautre part sont certainement les causes de ce faible

nombre

463 HAS laquo les protocoles de coopeacuteration article 51 de la loi HPST raquo rapport drsquoactiviteacute 2013 disponible sur

[httpwwwhas-santefr] Consulteacute le 3 mars 2017 464

Le recensement des projets effectueacutes par la DGOS reste global et ne preacutesente pas de maniegravere individuelle

lrsquoensemble des projets existants

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

213

3) Pistes drsquoeacutevolution

En mai 2015 le groupe de travail GT33 CSIS-CSF465

a publieacute un rapport466

dans lequel

il identifie les freins au deacuteveloppement pour ensuite cibler des actions susceptibles

drsquoameacuteliorer le deacuteveloppement de la teacuteleacutemeacutedecine

398 La premiegravere action tregraves concregravete consiste en une aide agrave la qualification drsquoun projet de

teacuteleacutemeacutedecine Pour cela le groupe a reacutealiseacute un kit de deacutemarrage composeacute de cinq fiches

pratiques permettant drsquoidentifier de maniegravere claire le projet et de prendre en consideacuteration

toutes les implications juridiques de celui-ci

399 La deuxiegraveme action proposeacutee est une aide agrave lrsquoeacutevaluation a priori drsquoun projet Cette

aide inteacutegrerait un dialogue en amont entre les porteurs de projets et lrsquoHAS et la CNAMTS

notamment afin de srsquoassurer de lrsquoefficience du projet et drsquoaborder eacuteventuellement la prise en

charge par lrsquoAssurance Maladie des futurs actes de teacuteleacutemeacutedecine

400 La troisiegraveme proposition revient sur le processus de contractualisation actuellement

preacutevu par le deacutecret drsquooctobre 2010 Pour le GT 33 une des pistes serait eacuteventuellement de ne

rendre la contractualisation obligatoire que pour les projets expeacuterimentaux financeacutes A ce

sujet la DGOS a mis en place un groupe de travail auquel les industriels ont eacuteteacute associeacutes degraves

la fin de lrsquoanneacutee 2014 et un deacutecret refondu et simplifieacute eacutetait annonceacute pour la fin du 1er

semestre 2015 Toutefois ce deacutecret a pris du retard et nrsquoest agrave lrsquoheure actuelle toujours pas

publieacute

401 La quatriegraveme proposition srsquoinscrit dans la mecircme dynamique que la preacuteceacutedente

puisqursquoelle consiste en une simplification de lrsquoinstruction des protocoles de coopeacuteration Cette

deacutemarche serait accompagneacutee drsquoune communication aupregraves des porteurs de projets sur

lrsquoexistence drsquoun site deacutedieacute agrave la deacutemateacuterialisation des demandes de validation de protocole

465 Ce groupe de travail associe les repreacutesentants des pouvoirs publics (DGOS DSSIS DGE DGRI ASIP Santeacute

ANAP HAS CNAMTS ANSM) et des syndicats industriels (SNITEM Syntec Numeacuterique) et a pour objectif

de permettre lrsquoeacutemergence drsquoune strateacutegie industrielle en matiegravere de e-santeacute (projet nommeacute laquo mesure 33 raquo) 466

laquo GT33CSIS‐CSF Permettre lrsquoeacutemergence drsquoune strateacutegie industrielle en matiegravere de e-santeacute en soutien de la

politique de santeacute publique en associant les industriels Lever les freins au deacuteploiement de la teacuteleacutemeacutedecine raquo

Rapport eacutelaboreacute par le groupe de travail sur la teacuteleacutemeacutedecine reacuteuni dans le cadre du Comiteacute Strateacutegique de Filiegravere

Santeacute Mai 2015 Disponible sur [httpwwwsocial-santegouvfr]

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

214

402 Le groupe de travail propose en cinquiegraveme intention de simplifier lrsquoensemble des

deacutemarches administratives obligatoires au niveau reacutegional Partant du constat que les

interlocuteurs des responsables de projets teacuteleacutemeacutedecine sont agrave la fois nombreux et mal

identifieacutes il est preacuteconiseacute la clarification du parcours administratif qui pourrait passer par

lrsquoinstauration drsquoun guichet unique aupregraves de lrsquoARS Enfin les aspects techniques et

notamment les systegravemes drsquoauthentification doivent ecirctre clarifieacutes et la teacuteleacutemeacutedecine promue

notamment en lrsquointeacutegrant dans les parcours de soins

403 Ces propositions si elles eacutetaient mises en œuvre permettraient effectivement selon

nous drsquoaugmenter le deacuteveloppement de projets de teacuteleacutemeacutedecine Le chantier principal serait

alors lrsquoensemble des simplifications neacutecessaires en termes de deacutemarches administratives

celles-ci repreacutesentant un poids consideacuterable et chronophage pour les porteurs de projets

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

215

sect2 Lrsquoinformatisation des prescriptions meacutedicales un cadre en

construction

404 Le deacuteveloppement des TIC dans la pratique meacutedicale couvre tous les actes meacutedicaux

y compris la prescription meacutedicale Cela implique deux principes diffeacuterents sur lesquelles il

est inteacuteressant que nous nous attardions Drsquoune part la possibiliteacute drsquoutiliser lrsquoe-mail pour

transmettre une prescription meacutedicale (A) et drsquoautre part lrsquoinformatisation de lrsquoacte en tant

que tel et donc de toutes les eacutetapes preacutevues dans le circuit du meacutedicament (B)

A La prescription par voie eacutelectronique une possibiliteacute encore limiteacutee

405 Bien avant lrsquoencadrement de la teacuteleacutemeacutedecine le leacutegislateur srsquoest pencheacute sur la

possibiliteacute de transmettre une prescription meacutedicale par courrier eacutelectronique Elle existe donc

depuis 2004 (1) mais elle meacuteriterait aujourdrsquohui drsquoecirctre exploiteacutee et deacuteveloppeacutee (2)

1) La prescription par e-mail une possibiliteacute leacutegalement encadreacutee

406 Crsquoest la loi du 3 aoucirct 2004 relative agrave lrsquoassurance maladie467

qui dans son article 34 a

introduit la possibiliteacute de reacutediger puis transmettre une ordonnance par courriel Cependant

cette possibiliteacute est tregraves encadreacutee afin drsquoen limiter lrsquoutilisation agrave certaines situations Lrsquoarticle

34 de la loi preacuteciteacutee dispose en effet qursquo laquo une ordonnance comportant les prescriptions de

soins ou de meacutedicaments peut ecirctre formuleacutee par courriel degraves lors que son auteur peut ecirctre

ducircment identifieacute qursquoelle a eacuteteacute eacutetablie transmise et conserveacutee dans des conditions propres agrave

garantir son inteacutegriteacute et sa confidentialiteacute et agrave condition qursquoun examen clinique du patient ait

eacuteteacute reacutealiseacute preacutealablement sauf agrave titre exceptionnel en cas drsquourgence raquo

407 Plusieurs conditions sont donc poseacutees afin de permettre agrave un meacutedecin drsquoenvoyer une

prescription meacutedicale agrave un patient sous forme de courrier eacutelectronique Les premiegraveres

conditions ont trait au document envoyeacute par voie eacutelectronique En effet celui-ci pour ecirctre

467 Loi ndeg 2004-810 du 13 aoucirct 2004 relative agrave lassurance maladie JORF ndeg190 17 aoucirct 2004 p 14598

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

216

valable va devoir respecter plusieurs regravegles permettant drsquoassurer notamment la seacutecuriteacute du

document Ainsi lrsquoauteur de la prescription doit ecirctre laquo ducircment identifieacute raquo Cette identification

pourra passer par lrsquoapposition drsquoune signature eacutelectronique ou par lrsquoutilisation de la carte de

professionnel de Santeacute (CPS) La prescription doit ensuite ecirctre eacutetablie transmise et archiveacutee

dans des conditions permettant drsquoassurer son inteacutegriteacute (le document ne doit pas ecirctre

modifiable) et sa confidentialiteacute Finalement ces conditions ne sont pas nouvelles puisque ce

sont celles que nous retrouvons en matiegravere de conservation et de transmission de donneacutees

meacutedicales sur support eacutelectronique

La derniegravere condition essentielle agrave lrsquoenvoi drsquoune prescription eacutelectronique est la

reacutealisation preacutealable drsquoun examen clinique du patient Cette preacutecision est importante et non

sans conseacutequences En effet cela implique qursquoaucune prescription par courriel ne pourra ecirctre

transmise agrave lrsquoissue drsquoun acte de teacuteleacutemeacutedecine au cours duquel aucun examen clinique ne

pourrait ecirctre reacutealiseacute Lrsquoenvoi par e-mail drsquoune prescription meacutedicale pourrait cependant ecirctre

envisageable dans le cas drsquoune teacuteleacuteconsultation au cours de laquelle le meacutedecin serait assisteacute

par un professionnel de santeacute preacutesent aux cocircteacutes du patient et dont le rocircle serait de reacutealiser

lrsquoexamen clinique preacutealable Dans cette hypothegravese le meacutedecin pourrait alors ensuite reacutediger et

envoyer par courriel la prescription meacutedicale Cette organisation serait bien entendu

encadreacutee par un protocole de coopeacuteration

De mecircme bien que le deacutecret encadrant la teacuteleacutemeacutedecine nrsquoait pas consacreacute la

teacuteleacuteprescription parmi les actes de teacuteleacutemeacutedecine alors mecircme que lrsquoarticle L 6316-1 du Code

de la santeacute publique preacutevoit que la teacuteleacutemeacutedecine permet notamment de laquo prescrire des

produits raquo nous pouvons parfaitement envisager la possibiliteacute de recourir agrave la

teacuteleacuteprescription agrave lrsquoissue drsquoun acte de teacuteleacuteconsultation au cours duquel lrsquoexamen clinique du

patient aura eacuteteacute reacutealiseacute468

Sous reacuteserve du respect de lrsquoensemble de ces dispositions lrsquoenvoi drsquoune ordonnance

par courrier eacutelectronique est donc envisageable et juridiquement encadreacute Il nous faut

cependant revenir sur une autre voie possible de transmission drsquoune ordonnance qui pose

reacuteguliegraverement difficulteacutes lrsquoordonnance faxeacutee

468 DESMARAIS Pierre laquo La teacuteleacutemeacutedecine source de nouveaux cas de responsabiliteacute raquo Communication

Commerce eacutelectronique septembre 2011 eacutetude ndeg 16

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

217

408 Lordonnance faxeacutee neacutetant mentionneacutee dans aucun texte reacuteglementaire elle nest ni

interdite ni expresseacutement autoriseacutee Il est eacutevident qursquoune ordonnance envoyeacutee par courriel ne

peut pas ecirctre assimileacutee agrave une ordonnance faxeacutee les deux outils utiliseacutes ne preacutesentant pas les

mecircmes conditions de seacutecuriteacute ou de confidentialiteacute Les modaliteacutes preacutevues agrave lrsquoarticle 34 de la

loi de 2004 ne peuvent donc pas srsquoappliquer agrave la teacuteleacutecopie Toutefois cette pratique peut

srsquoenvisager agrave condition qursquoelle srsquoinscrive dans le cadre leacutegal de toute prescription meacutedicale

drsquoune part et que le recours agrave cette pratique soit pleinement justifieacute drsquoautre part

Comme le preacutevoit lrsquoarticle R 5132-3469

du Code de la santeacute publique lrsquoexamen

clinique du patient est le preacutealable obligatoire agrave toute ordonnance meacutedicale Le recours agrave la

teacuteleacutecopie devra donc srsquoinscrire dans ce cadre strict Toutefois le respect de cette seule

condition nrsquoapparait pas suffisant Comme lrsquoa souligneacute la HAS dans ses recommandations

relatives aux prescriptions meacutedicamenteuses par teacuteleacutephone470

laquo un envoi par fax ne peut

garantir une complegravete confidentialiteacute il est donc recommandeacute de preacutefeacuterer un envoi par

courriel chaque fois que cela est possibleraquo Ainsi lrsquoenvoi par fax devrait donc rester une

exception utiliseacutee dans des cas drsquourgence La reacutegulation meacutedicale acte de meacutedecine agrave part

entiegravere est donc un cadre speacutecifique dans lequel une ordonnance envoyeacutee par teacuteleacutecopie au

pharmacien va pouvoir ecirctre accepteacutee Drsquoailleurs le Conseil National de lrsquoOrdre des Meacutedecins

a tregraves tocirct preacuteciseacute les regravegles dans lesquelles devaient srsquoinscrire ces pratiques Ainsi les

diffeacuterents intervenants doivent ecirctre ducircment enregistreacutes et les eacutechanges meacutemoriseacutes afin de

pouvoir ecirctre consulteacutes dans lrsquohypothegravese drsquoun preacutejudice ou drsquoun litige ulteacuterieur

En tout eacutetat de cause il apparait donc que lrsquoordonnance faxeacutee si elle peut ecirctre

envisageacutee doit rester une situation exceptionnelle ou transitoire Le meacutedecin pourra lrsquoutiliser

pour reacutegler des situations drsquourgence et non par faciliteacute voire mecircme par complaisance

Cependant il reste preacutefeacuterable de privileacutegier lrsquoenvoi par courriel parfaitement encadreacute

Aujourdrsquohui il serait souhaitable pour certains que cette possibiliteacute de transmission par

courriel drsquoordonnances soit utiliseacutee pour servir de base agrave une autre pratique la e-prescription

469 laquo La prescription de meacutedicaments ou produits destineacutes agrave la meacutedecine humaine mentionneacutes agrave la preacutesente

section est reacutedigeacutee apregraves examen du malade [hellip] raquo 470

Prescription meacutedicamenteuse par teacuteleacutephone (ou teacuteleacuteprescription) dans le cadre de la reacutegulation meacutedicale p 4

disponible sur [httpwwwhas-santefr] Consulteacute le 3 mars 2017

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

218

2) Les voies de deacuteploiement de la e-prescription

409 La notion de e-prescription deacutesigne une pratique qui recouvre une reacutealiteacute bien plus

large que le simple envoi par courriel des ordonnances Elle consiste notamment agrave regrouper

lrsquoensemble des ordonnance eacutelectroniques drsquoun patient afin de constituer une base geacuteneacuterale de

donneacutees le concernant et regroupant lrsquoensemble des prescriptions meacutedicales qui lui ont eacuteteacute

deacutelivreacutees qursquoil srsquoagisse de prescriptions de meacutedicaments de dispositifs meacutedicaux ou encore

drsquoexamens de biologie En France crsquoest le Comiteacute de Liaison des Institutions Ordinales

(CLIO santeacute)471

qui srsquoest engageacute depuis quelques anneacutees dans cette deacutemarche (a) Mais cette

ideacutee est eacutegalement preacutegnante et bien avanceacutee au niveau europeacuteen (b)

a) La note drsquoorientation du CLIO santeacute

410 Depuis la loi de 2004 aucun texte nrsquoest venu preacuteciser le cadre du deacuteveloppement de

lrsquoe-prescription Ainsi contrairement agrave la teacuteleacutemeacutedecine ou au DMP la e-prescription nrsquoexiste

pas encore leacutegalement bien qursquoelle faisait partie du plan de deacuteveloppement du DMP

Voulant srsquoinscrire dans une deacutemarche drsquoincitation au deacuteploiement de lrsquoe-prescription

le CLIO santeacute a reacutedigeacute et publieacute en janvier 2012 une note drsquoorientation preacutesentant les enjeux

de la prescription eacutelectronique et formulant des propositions pour la deacuteployer

Dans cette proposition valideacutee par ailleurs par sept ordres professionnels le groupe de

travail part de la possibiliteacute depuis 2004 drsquoeacutetablir une ordonnance par voie eacutelectronique pour

proposer ensuite de deacutevelopper un systegraveme de e-prescription qui reposerait sur des

prescriptions reacutedigeacutees de maniegravere informatique puis deacuteposeacutees dans une base de donneacutees des

prescriptions Bien que preacutesentant un projet inteacuteressant et certainement utile pour

lrsquoameacutelioration de la prise en charge du patient et la diminution des risques de contre-

indication entre diffeacuterentes prescriptions il nrsquoapporte aucune reacuteelle proposition en termes de

gouvernance et de structuration juridique de ce projet La note drsquoorientation rappelle juste que

la CNIL devra ecirctre consulteacutee sur ce sujet et preacuteconise de choisir le NIR comme identifiant

patient plus sucircr et plus large que lrsquoINS-C Cependant le CLIO santeacute srsquoen remet agrave lrsquoASIP

santeacute pour mettre en place des phases pilotes en lien avec les ordres professionnels Rien

471 Le Comiteacute de liaison des Institutions Ordinales est un comiteacute qui reacuteunit les institutions franccedilaises auxquelles

sont obligatoirement inscrits les membres de professions reacuteglementeacutees

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

219

drsquoinnovant donc en ce qui concerne la gouvernance de ce genre de projets Ceci explique

peut-ecirctre pourquoi cette note semble ecirctre resteacutee lettre morte En effet depuis sa publication en

janvier 2012 aucune action nrsquoa eacuteteacute mise en œuvre sur cette base

b) Le projet europeacuteen EPSOS

411 Une autre voie de deacuteveloppement a eacutegalement eacuteteacute envisageacutee au niveau europeacuteen au

travers du projet EPSOS Acronyme de Smart Open Services for European patients le

projet EPSOS a deacutemarreacute en 2008 Regroupant initialement 12 pays de lrsquoUnion Europeacuteenne

11 autres se sont ajouteacutes en 2011 lors du lancement de la phase pilote

Il srsquoagissait drsquoun projet cofinanceacute par lrsquoUnion Europeacuteenne comportant deux objectifs

principaux Drsquoune part la mise en place drsquoun service de e-prescription (service qui comprend

la creacuteation drsquoune prescription de meacutedicaments et sa transmission eacutelectronique agrave un

pharmacien) et drsquoun servie de patient summary (service qui reprend lrsquoensemble des donneacutees

essentielles et pertinentes pour assurer la continuiteacute de la prise en charge drsquoun patient drsquoun

pays agrave un autre) Drsquoautre part une analyse agrave la fois de lrsquointeacuterecirct et de lrsquoimpact sur les pratiques

de ces services

Le but de la phase pilote meneacutee entre 2011 et 2014 a eacuteteacute de tester lrsquoeacutechange de

donneacutees entre pays de lrsquoUnion Europeacuteenne dans ce contexte en se basant uniquement sur les

cadres reacuteglementaires existant dans chaque pays membre sans en creacuteer de nouveau En

France une opeacuteration pilote avait eacuteteacute mise en place entre 2012 et 2013 srsquoappuyant sur le

programme europeacuteen drsquoeacutechange eacutetudiant ERASMUS et visant agrave mettre en place le service

laquo Patient SUMMARY raquo

Le projet qui a pris fin en juin 2014 preacutesente un bilan positif Il a notamment permis

de deacutefinir les bases en termes de gouvernance de ce type de service mais eacutegalement en termes

de contenu neacutecessaire des dossiers partageacutes De plus bien que la mise en œuvre de services de

santeacute transfrontaliers srsquoappuyant sur les TIC relegraveve des preacuterogatives nationales le projet

EPSOS a permis drsquoinstaurer une dynamique efficace en la matiegravere et plusieurs projets

europeacuteens portant sur lrsquointeropeacuterabiliteacute en e-santeacute ont eacuteteacute lanceacutes depuis472 Le projet EPSOS

472 eHealth Network

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

220

est donc un exemple reacuteussi de projet de partage de donneacutees et de prise en charge informatiseacutee

agrave grande eacutechelle

Cette dynamique drsquoinformatisation de la prescription ne se cantonne pas agrave lrsquoenvoi de

celle-ci Depuis plusieurs anneacutees on observe au sein des eacutetablissements de santeacute une

eacutevolution tendant agrave lrsquoinformatisation de lrsquoensemble du circuit du meacutedicament Cette impulsion

reacutesulte principalement des orientations voulues par les pouvoirs publics

B La prescription informatiseacutee une pratique encourageacutee par les pouvoirs

publics

412 Par le biais de plusieurs dispositifs reacuteglementaires pour la majoriteacute relatifs agrave la qualiteacute

et agrave la seacutecuriteacute des soins le Ministegravere de la santeacute incite les eacutetablissements agrave informatiser leur

circuit du meacutedicament (1) En parallegravele le leacutegislateur montre sa volonteacute de ne pas laisser cette

informatisation sans cadre et a obligeacute les eacutediteurs de solutions logicielles agrave srsquoengager dans une

deacutemarche de certification obligatoire garante de la seacutecuriteacute du circuit du meacutedicament (2)

1) Lrsquoincitation agrave lrsquoinformatisation du circuit du meacutedicament

413 Le circuit du meacutedicament qui peut ecirctre deacutefini de maniegravere simplifieacute comme eacutetant le

chemin parcouru par le meacutedicament (prescription meacutedicale dispensation puis administration)

est pour les eacutetablissements de santeacute encadreacutes par plusieurs textes diffeacuterents

414 Lrsquoinformatisation du circuit du meacutedicament nrsquoest pas une ideacutee reacutecente Dans lrsquooptique

drsquoassurer aux patients la seacutecuriteacute et la qualiteacute de leur prise en charge meacutedicamenteuse le

Ministegravere de la santeacute a tregraves vite mis en avant le beacuteneacutefice apporteacute par une informatisation

complegravete de lrsquoensemble du circuit du meacutedicament permettant non seulement une meilleure

traccedilabiliteacute mais eacutegalement un renforcement indeacuteniable de la seacutecuriteacute du patient en eacutevitant la

survenance drsquoeacuteveacutenements indeacutesirables Le premier texte agrave aborder ce sujet est une circulaire

du 2 janvier 1985473

relative agrave lrsquoinformatisation des systegravemes de dispensation des

meacutedicaments Plusieurs autres textes vont suivre mais le texte majeur en la matiegravere est lrsquoarrecircteacute

du 31 mars 1999 relatif agrave la prescription la dispensation et agrave lrsquoadministration des

473 Circulaire ndeg 658DPhM du 2 janvier 1985 relative agrave lrsquoinformatisation des systegravemes de dispensation non

publieacutee au JORF

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

221

meacutedicaments soumis agrave la reacuteglementation des substances veacuteneacuteneuses dans les eacutetablissements

de santeacute474

Ce texte preacutevoit notamment la possibiliteacute pour une prescription drsquoecirctre reacutedigeacutee

conserveacutee et transmise de maniegravere informatiseacutee sous reacuteserve drsquoune part de pouvoir identifier

son auteur et drsquoautre part de pouvoir lrsquoeacutediter sur support papier si neacutecessaire

Lrsquoinformatisation du circuit du meacutedicament continue alors sa progression

Cependant lrsquoensemble des textes publieacutes agrave ce sujet entre 1985 et 1999 sont des

circulaires nrsquoayant aucune incidence juridique en tant que telle ou des arrecircteacutes pris par le

ministre ou le secreacutetaire drsquoEtat deacutedieacute agrave la santeacute Le cadre mis en place nrsquoavait donc pas ou peu

de force contraignante vis-agrave-vis des responsables du circuit du meacutedicament

415 Le deacutecret ndeg 2005-1023 du 24 aoucirct 2005 relatif au contrat de bon usage des

meacutedicaments et des produits et prestations mentionneacute agrave larticle L 162-22-7 du Code de la

seacutecuriteacute sociale475

va venir changer ce paysage normatif En effet lrsquoarticle 4 de ce texte

preacutevoit que les eacutetablissements de santeacute doivent souscrire agrave des engagements relatifs aux

meacutedicaments ou aux produits et prestations sous la forme dun programme pluriannuel

dactions celui-ci devant porter a minima sur un certain nombre de points dont

lrsquoinformatisation du circuit du meacutedicament fait partie Ainsi crsquoest deacutesormais dans le cadre du

contrat de bon usage476

signeacute avec lrsquoARS que les eacutetablissements de santeacute vont organiser

lrsquoinformatisation de la prescription meacutedicale

416 La loi HPST va eacutegalement ecirctre agrave lrsquoorigine drsquoune impulsion en ce sens En effet en

faisant de la qualiteacute et de la seacutecuriteacute des soins une prioriteacute de la loi le leacutegislateur de maniegravere

indirecte incite les eacutetablissements de santeacute agrave continuer lrsquoinformatisation de leur circuit du

meacutedicament Drsquoautres textes vont suivre et integravegrent la qualiteacute de la prise en charge

meacutedicamenteuse du patient dans la gestion globale des risques agrave lrsquohocircpital Crsquoest le cas

474 Arrecircteacute du 31 mars 1999 relatif agrave la prescription agrave la dispensation et agrave ladministration des meacutedicaments

soumis agrave la reacuteglementation des substances veacuteneacuteneuses dans les eacutetablissements de santeacute les syndicats

interhospitaliers et les eacutetablissements meacutedico-sociaux disposant dune pharmacie agrave usage inteacuterieur mentionneacutes agrave

larticle L 595-1 du Code de la santeacute publique JORF ndeg77 1er

avril 1999 p 4854 475

Deacutecret ndeg 2005-1023 du 24 aoucirct 2005 relatif au contrat de bon usage des meacutedicaments et des produits et

prestations mentionneacute agrave larticle L 162-22-7 du Code de la seacutecuriteacute sociale JORF ndeg198 26 aoucirct 2005 p

13526 476

Le CBU est un contrat conclu entre lrsquoARS et un eacutetablissement de santeacute pour une dureacutee de trois agrave cinq ans Il a

pour but principal de seacutecuriser le circuit du meacutedicament En cas de respect de ses engagements lrsquoeacutetablissement

de santeacute se voit assureacute un taux de remboursement de 100 par lrsquoassurance maladie pour les speacutecialiteacutes

pharmaceutiques et les produits et prestations mentionneacutes agrave larticle L 162-22-72 du Code de la seacutecuriteacute sociale

Dans le cas contraire le taux de remboursement peut ecirctre reacuteduit agrave 70

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

222

notamment le deacutecret du 12 novembre 2010477

relatif agrave la lutte contre les eacuteveacutenements

indeacutesirables associeacutes aux soins ou encore de lrsquoarrecircteacute du 6 avril 2011478

relatif au management

de la qualiteacute de la prise en charge meacutedicamenteuse qui preacutesente lrsquoinformatisation comme un

gage drsquoameacutelioration de la seacutecuriteacute de la prise en charge meacutedicamenteuse Cet arrecircteacute est

drsquoailleurs inteacuteressant et meacuterite que nous nous y attardions Il preacutecise dans son article 3 que

laquo linformatisation des processus de prise en charge meacutedicamenteuse est une des condition

essentielle de sa seacutecurisation raquo Pour le leacutegislateur il est donc clair que la qualiteacute et la seacutecuriteacute

de la prise en charge meacutedicamenteuse du patient passent par lrsquoinformatisation du circuit du

meacutedicament Sans ecirctre pour autant une obligation leacutegale opposable aux eacutetablissements la

formule permet au leacutegislateur drsquoorienter fortement les eacutetablissements de santeacute vers une

informatisation Pour compleacuteter ces textes et accompagner au mieux les eacutetablissements dans

cette deacutemarche de seacutecurisation la DGOS a publieacute un guide intituleacute Qualiteacute de la prise en

charge meacutedicamenteuse - outils pour les eacutetablissements de santeacute479

Celui-ci rappelle

eacutegalement agrave plusieurs occasions la neacutecessiteacute de lrsquoinformatisation du circuit du meacutedicament Il

preacutecise notamment que le programme hocircpital numeacuterique dans sa feuille de route 2012-2016

pour les systegravemes drsquoinformation hospitaliers laquo incite lrsquoensemble des eacutetablissements de santeacute agrave

atteindre un socle minimal de maturiteacute sur 5 domaines prioritaires dont la prescription

eacutelectronique raquo480

417 Ainsi pour les pouvoirs publics lrsquoinformatisation nrsquoest pas une fin en soi mais un

outil que les eacutetablissements de santeacute se devront drsquoutiliser srsquoils souhaitent respecter leurs

obligations leacutegales en matiegravere de qualiteacute et de seacutecuriteacute de la prise en charge meacutedicamenteuse

Cependant cette informatisation ne doit pas reposer sur nrsquoimporte quelle solution technique si

lrsquoon souhaite qursquoelle atteigne son but Crsquoest pourquoi deacutesormais les eacutediteurs de logiciels de

prescription meacutedicale doivent ecirctre certifieacutes

477 Deacutecret ndeg 2010-1408 du 12 novembre 2010 relatif agrave la lutte contre les eacuteveacutenements indeacutesirables associeacutes aux

soins dans les eacutetablissements de santeacute JORF ndeg0265 16 novembre 2010 p 20428 478

Arrecircteacute du 6 avril 2011 relatif au management de la qualiteacute de la prise en charge meacutedicamenteuse et aux

meacutedicaments dans les eacutetablissements de santeacute JORF ndeg0090 16 avril 2011 p 6687 479

DGOS laquo Qualiteacute de la prise en charge meacutedicamenteuse - outils pour les eacutetablissements de santeacute raquo feacutevrier

2012 disponible sur [httpwwwsantegouvfr] Consulteacute le 3 mars 2017 480

Id p 12

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

223

2) La certification obligatoire des logiciels de prescription meacutedicale

418 La loi ndeg 2011-2012 du 29 deacutecembre 2011 relative au renforcement de la seacutecuriteacute

sanitaire du meacutedicament et des produits de santeacute481

a rendu obligatoire la certification des

logiciels drsquoaide agrave la prescription Ainsi deacutesormais laquo ces certifications sont rendues

obligatoires pour tout logiciel dont au moins une des fonctionnaliteacutes est de proposer une aide

agrave lrsquoeacutedition des prescriptions meacutedicales ou une aide agrave la dispensation des meacutedicaments dans

des conditions preacutevues par deacutecret en Conseil drsquoEtat et au plus tard le 1er janvier 2015 raquo482

Ce texte a eacuteteacute compleacuteteacute par le deacutecret ndeg 2014-1359 du 14 novembre 2014483

qui preacutecise

lrsquoeacutetendue de cette obligation Il est inteacuteressant de noter que la certification ne concerne que la

fonctionnaliteacute drsquoaide agrave la prescription Un logiciel comportant drsquoautres fonctionnaliteacutes ne

devra donc ecirctre certifieacute que pour la partie aide agrave la prescription La proceacutedure de certification

est eacutetablie par la HAS qui a la charge drsquoeacutelaborer les reacutefeacuterentiels

419 A ce sujet484

la certification de ces logiciels reacutepond agrave un objectif triple garantir la

conformiteacute des logiciels agrave certaines exigences en termes de seacutecuriteacute de conformiteacute et

drsquoefficience Dans le respect du souci de transparence qui guide lrsquoensemble de la loi de 2011

les certifications ne sont pas reacutealiseacutees par la HAS mais par des organismes certificateurs

devant eux-mecircmes faire lrsquoobjet drsquoune accreacuteditation preacutealable485

La responsabiliteacute de la

reacutealisation de cette certification incombe bien entendu aux eacutediteurs des logiciels De leur

cocircteacute les eacutetablissements nrsquoont pas drsquoobligation leacutegale de faire appel agrave un eacutediteur certifieacute

Toutefois il nous semble que cette solution est bien eacutevidemment celle agrave privileacutegier par les

eacutetablissements De plus de par la forte obligation de seacutecuriteacute et de qualiteacute de la prise en

charge meacutedicamenteuse qui pegravese sur les eacutetablissements le fait de choisir une solution non

certifieacutee pourrait engager leur responsabiliteacute en cas de preacutejudice

481 Loi ndeg 2011-2012 du 29 deacutecembre 2011 relative au renforcement de la seacutecuriteacute sanitaire du meacutedicament et des

produits de santeacute JORF ndeg0302 30 deacutecembre 2011 p 22667 482

Article L 161-38 du Code de seacutecuriteacute sociale 483

Deacutecret ndeg 2014-1359 du 14 novembre 2014 relatif agrave lobligation de certification des logiciels daide agrave la

prescription meacutedicale et des logiciels daide agrave la dispensation preacutevue agrave larticle L 161-38 du Code de la seacutecuriteacute

sociale JORF ndeg0264 15 novembre 2014 p 19255 484

V en ce sens la foire aux questions de la HAS portant sur les LAP Disponible sur [httpwwwhas-santefr]

Consulteacute le 3 mars 2017 485

Cette accreacuteditation est quant agrave elle reacutealiseacutee par le comiteacute franccedilais drsquoaccreacuteditation (COFRAC)

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

224

420 Cependant comme le reconnait la HAS cette certification preacutesente certaines limites

Ainsi elle nrsquoaborde pas la probleacutematique de lrsquointeacutegration des Logiciels drsquoAide agrave la

Prescription (LAP) dans les Systegravemes drsquoInformation Hospitaliers Les LAP sont donc certifieacutes

individuellement mais leur qualiteacute seacutecuriteacute ne sont plus assureacutees une fois inteacutegreacute au sein du

SIH drsquoun eacutetablissement Cela srsquoexplique notamment par le fait que les normes

drsquointeropeacuterabiliteacute entre logiciels ne sont pas agrave lrsquoheure actuelle arrecircteacutees Par ailleurs la

certification mecircme si elle peut constituer pour les pharmaciens un levier en termes de respect

de la reacuteglementation applicable en matiegravere de meacutedicament ne doit pas ecirctre le seul outil utiliseacute

En effet lrsquointeacutegration de lrsquoensemble des contraintes juridiques existantes en la matiegravere au

sein du logiciel ne laisserait plus aucune place aux initiatives parfois neacutecessaires notamment

en cas drsquourgence Un tel logiciel geacuteneacutererait donc plus de risques ce qui nrsquoest pas souhaitable

La certification ne peut donc pas conduire agrave elle seule au respect de lrsquoensemble des

contraintes juridiques actuelles pesant sur le circuit du meacutedicament sous peine drsquoavoir lrsquoeffet

inverse

421 Toutefois les logiciels drsquoaide agrave la prescription sont reacuteguliegraverement pointeacutes du doigt

Ainsi le quotidien Le Parisien486

a fait part en 2013 des deacutefaillances drsquoun LAP preacutesumeacute

responsable du deacutecegraves drsquoune patiente au centre hospitalier de Versailles en 2011 Les

conclusions de cet article reposaient sur un rapport rendu le 4 mars 2013 par la Commission

Reacutegionale de Conciliation et drsquoIndemnisation drsquoIle de France dans le cadre drsquoune proceacutedure

engageacutee suite au deacutecegraves drsquoune patiente en novembre 2011 au centre hospitalier de Versailles

La patiente serait deacuteceacutedeacutee selon la famille suite agrave une prescription drsquoamoxicilline

antibiotique auquel elle eacutetait allergique mention par ailleurs preacuteciseacutee au sein du dossier

meacutedical de la patiente Or pour les experts de la CRCI cette mention nrsquoaurait pas eacuteteacute

reacutepercuteacutee dans le systegraveme informatique de prescription de meacutedicaments Cette erreur aurait

entraineacute selon la Commission une perte de chance de survie de la patiente de 80 Toujours

selon ce rapport les LAP mecircme srsquoils permettent une clarification des prescriptions

nrsquoassurent pas une seacutecuriteacute suffisamment fine en matiegravere drsquoallergies notamment

A lrsquoheure actuelle ces outils ne peuvent donc pas ecirctre consideacutereacutes comme totalement

fiables et le controcircle manuel par les professionnels de santeacute reste neacutecessaire

486 V en ce sens deacutepecircche TIC santeacute du 12 juillet 2013 laquo Poleacutemique sur les logiciels daide agrave la prescription

hospitaliers suite agrave un deacutecegraves raquo disponible sur [httpwwwticsantecom] Consulteacute le 3 mars 2017

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

225

Conclusion de section

422 Les TIC occupent aujourdrsquohui une part majeure dans la prise en charge des patients

Leur utilisation permet lrsquoameacutelioration de la qualiteacute des soins dispenseacutes aux patients et ce agrave

plusieurs titres Drsquoun cocircteacute les soins et techniques de pointe deviennent plus accessibles pour

certains patients isoleacutes geacuteographiquement ou dont la condition (personne acircgeacutee handicapeacutee

voire mecircme personne deacutetenue) ne leur permet pas drsquoacceacuteder aux eacutetablissements de santeacute

beacuteneacuteficiant de ces techniques Drsquoun autre cocircteacute les eacutetablissements de santeacute seacutecurisent gracircce agrave

lrsquoinformatique leur circuit du meacutedicament afin drsquoeacuteviter les eacuteveacutenements indeacutesirables

423 Cependant lrsquointervention du leacutegislateur dans ces pratiques bien que neacutecessaire ne

doit pas ecirctre trop stricte En effet le droit ne peut pas devenir bloquant au risque de

provoquer les effets inverses de ceux souhaiteacutes Il faut donc trouver le juste milieu entre

inteacutegration des progregraves techniques et encadrement juridique de ceux-ci ce qui peut srsquoaveacuterer

parfois deacutelicat pour le leacutegislateur

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

226

Section 2 Prise en charge meacutedicale et TIC des regravegles de responsabiliteacute

bousculeacutees

424 Le deacuteveloppement de nouvelles pratiques meacutedicales induites par lrsquointroduction des

TIC dans la prise en charge des patients va venir bousculer les regravegles de responsabiliteacute

eacutetablies jusqursquoalors En effet mecircme si les principes fondamentaux qui dirigent le droit de la

responsabiliteacute meacutedicale vont demeurer inchangeacutes ces regravegles classiques vont toutefois devoir

ecirctre adapteacutees aux speacutecificiteacutes lieacutees aux TIC (Paragraphe 1) Par ailleurs lrsquointroduction des

TIC va induire lrsquoentreacutee en jeu de regravegles speacutecifiques et celles-ci vont devoir ecirctre prises en

compte et articuleacutees avec les regravegles classiques (Paragraphe 2)

sect1 Droit des usagers et responsabiliteacute meacutedicale lrsquoadaptation du droit

commun

425 Par principe les patients beacuteneacuteficient tous des mecircmes droits fondamentaux eacutetablis par

la loi Kouchner et ce peu importe la faccedilon dont ils vont ecirctre pris en charge Cependant du

fait de lrsquointroduction des TIC dans la prise en charge les obligations agrave la charge des

professionnels de santeacute vont ecirctre renforceacutees (A) Par ailleurs bien que les regravegles de

responsabiliteacute applicables vont rester les mecircmes les risques drsquoapplication vont ecirctre multiplieacutes

(B)

A Information et consentement du patient une obligation maintenue et

renforceacutee

426 Lrsquointroduction des TIC modifie les modaliteacutes drsquoexercice de la meacutedecine Pour autant

les finaliteacutes drsquoun acte meacutedical mecircme exerceacute agrave distance restent les mecircmes

Ainsi la teacuteleacutemeacutedecine eacutetant juridiquement deacutefinie comme eacutetant un acte meacutedical le

droit commun srsquoappliquant agrave lrsquoexercice meacutedical va trouver agrave srsquoappliquer agrave cette activiteacute Le

patient beacuteneacuteficie des droits classiques deacutefinis au sein de la loi Kouchner et notamment le droit

drsquoecirctre informeacute sur les soins qursquoil va recevoir et drsquoy consentir de maniegravere libre et eacuteclaireacute

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

227

Toutefois lrsquoutilisation des TIC va neacutecessiter une information du patient renforceacutee et

speacutecifique agrave ce sujet Ainsi il apparait que le patient pris en charge dans le cadre drsquoune

activiteacute meacutedicale exerceacutee par le biais des TIC va ecirctre en reacutealiteacute destinataire drsquoune double

information une information relative agrave lrsquoacte meacutedical en lui-mecircme et une information

relative agrave lrsquoacte de teacuteleacutemeacutedecine en tant que pratique deacutemateacuterialiseacutee (1) Cependant se pose la

question de la mise en œuvre de ces droits quand la prise en charge implique les TIC (2)

1) Lrsquoobligation classique eacutetendue aux speacutecificiteacutes des TIC

427 Devant les particulariteacutes propres agrave la teacuteleacutemeacutedecine il est logique de srsquointerroger sur le

maintien des obligations classiques des professionnels de santeacute en matiegravere drsquoinformation du

patient et de recueil de son consentement Cette interrogation nrsquoest pas reacutecente et en 2009 la

HAS487

dans ses recommandations relatives aux prescriptions meacutedicamenteuses par

teacuteleacutephone avait apporteacute quelques preacutecisions agrave ce sujet Ainsi elle avait indiqueacute que les

speacutecificiteacutes de la reacutegulation meacutedicale devaient ecirctre prises en compte afin drsquoalleacuteger lrsquoobligation

drsquoinformation du professionnel intervenant agrave distance Toutefois agrave lrsquoeacutepoque crsquoeacutetait bien la

situation dlsquourgence plus que la deacutemateacuterialisation de lrsquoacte qui justifiait cette souplesse488

Depuis le leacutegislateur est intervenu et bien que le deacutecret teacuteleacutemeacutedecine ne comporte que peu de

dispositions relatives agrave lrsquoinformation et au consentement du patient ces dispositions ont le

meacuterite drsquoecirctre assez claires Ainsi comme le rappelle lrsquoarticle R 6316-2 du Code de la santeacute

publique laquo les actes de teacuteleacutemeacutedecine sont reacutealiseacutes avec le consentement libre et eacuteclaireacute de la

personne en application notamment des dispositions des articles L 1111-2 et L 1111-4 raquo

Le texte vise expresseacutement lrsquoarticle L 1111-2489

du Code de la santeacute publique relatif agrave

487 HAS laquo Recommandations professionnelles Prescription meacutedicamenteuse par teacuteleacutephone (ou teacuteleacuteprescription)

dans le cadre de la reacutegulation meacutedicale raquo feacutevrier 2009 disponible sur [httpwwwhas-santefr] Consulteacute le 3

mars 2017 488

BOURDAIRE-MIGNOT Camille laquo Teacuteleacuteconsultation quelles exigences Quelles pratiques raquo RDS 2011

pp 1003-1013 489

Cet article dispose que laquo toute personne a le droit decirctre informeacutee sur son eacutetat de santeacute Cette information

porte sur les diffeacuterentes investigations traitements ou actions de preacutevention qui sont proposeacutes leur utiliteacute leur

urgence eacuteventuelle leurs conseacutequences les risques freacutequents ou graves normalement preacutevisibles quils

comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conseacutequences preacutevisibles en cas de refus

Lorsque posteacuterieurement agrave lexeacutecution des investigations traitements ou actions de preacutevention des risques

nouveaux sont identifieacutes la personne concerneacutee doit en ecirctre informeacutee sauf en cas dimpossibiliteacute de la retrouver

Cette information incombe agrave tout professionnel de santeacute dans le cadre de ses compeacutetences et dans le respect des

regravegles professionnelles qui lui sont applicables Seules lurgence ou limpossibiliteacute dinformer peuvent len

dispenser raquo

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

228

lrsquoobligation drsquoinformation du professionnel de santeacute ainsi que lrsquoarticle L 1111-4490

relatif agrave la

co-deacutecision491

et donc au consentement aux soins Il ne fait degraves lors aucun doute que le

leacutegislateur a voulu srsquoassurer de lrsquoapplication des dispositions relatives agrave lrsquoinformation et au

consentement du patient aux actes de teacuteleacutemeacutedecine Drsquoailleurs comme le souligne agrave juste titre

Pierre DESMARAIS492

crsquoest bien cette obligation de consentement preacutealable agrave lrsquoexercice de

la teacuteleacutemeacutedecine qui distingue cette pratique meacutedicale nouvellement reconnue du simple avis

recueilli par un professionnel aupregraves drsquoun confregravere493

Ainsi les regravegles classiques applicables

agrave lrsquoexercice meacutedical vont trouver agrave srsquoappliquer agrave la teacuteleacutemeacutedecine le deacutecret ne modifiant pas le

droit commun de lrsquoexercice meacutedical Le patient pris en charge dans le cadre drsquoun acte de

teacuteleacutemeacutedecine devra donc recevoir laquo une information loyale claire et approprieacutee portant sur

les diffeacuterentes investigations traitements ou actions de preacutevention proposeacutes leur utiliteacute leur

urgence eacuteventuelle leurs conseacutequences les risques freacutequents ou graves normalement

preacutevisibles qursquoils comportent les autres solutions possibles ainsi que les conseacutequences

possibles en cas de refus raquo De mecircme le patient devra ecirctre informeacute des nouveaux risques

identifieacutes posteacuterieurement aux actes reacutealiseacutes

428 Cependant la particulariteacute de la teacuteleacutemeacutedecine tient principalement agrave la

deacutemateacuterialisation des eacutechanges par le biais de lrsquoutilisation des TIC Dans ce contexte le

patient va devoir ecirctre non seulement informeacute sur sa prise en charge par le biais drsquoun dispositif

de teacuteleacutemeacutedecine mais eacutegalement sur le traitement informatiseacute de ses donneacutees de santeacute et leur

partage entre plusieurs professionnels de santeacute

Le traitement des donneacutees de santeacute agrave caractegravere personnel est encadreacute par les

dispositions de la loi Informatique et Liberteacutes Les donneacutees de santeacute sont consideacutereacutees par ce

texte comme eacutetant des donneacutees sensibles beacuteneacuteficiant agrave ce titre drsquoun encadrement speacutecifique

Toutefois ce sont bien les dispositions geacuteneacuterales de la loi qui vont imposer une information

du professionnel de santeacute au patient

490 Cet article preacutevoit que laquo toute personne prend avec le professionnel de santeacute et compte tenu des informations

et des preacuteconisations quil lui fournit les deacutecisions concernant sa santeacute raquo 491

Sur lrsquoimportance de la co-deacutecision en matiegravere de teacuteleacutemeacutedecine V notamment BOURDAIRE-MIGNOT

Camille laquo Teacuteleacuteconsultation quelles exigences Quelles pratiques raquo RDS 2011 op cit 492

DESMARAIS Pierre laquo laquo La teacuteleacutemeacutedecine source de nouveaux cas de responsabiliteacute raquo Communication

commerce eacutelectronique ndeg 9 septembre 2011 eacutetude ndeg 16 493

Article R 4127-32 du Code de la santeacute publique

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

229

Ainsi lrsquoarticle 32 de la loi Informatique et Liberteacutes preacutevoit que la personne concerneacutee

par les donneacutees traiteacutees (dans notre cas le patient) doit recevoir une information preacutecise agrave ce

sujet et notamment lrsquoidentiteacute du responsable du traitement sa finaliteacute les diffeacuterents

destinataires des donneacutees ainsi que les droits dont il dispose aux termes de la loi Informatique

et Liberteacutes Il srsquoagit donc drsquoun droit essentiel pour le patient puisque crsquoest celui qui

conditionne non seulement son accegraves aux autres droits dont il dispose (notamment droit

drsquoaccegraves aux donneacutees et de rectification) mais eacutegalement celui qui comme pour lrsquoacte

meacutedical va lui permettre de consentir ou non au traitement de ses donneacutees et ce de maniegravere

eacuteclaireacutee Un beacutemol toutefois doit ecirctre apporteacute agrave ce sujet En effet la loi Informatique et

Liberteacutes preacutevoit certains cas dans lesquels le consentement de la personne concerneacutee ne sera

pas neacutecessaire Il srsquoagit notamment du cas du traitement mis en place pour reacutepondre agrave une

obligation leacutegale (crsquoest le cas par exemple de la mise en place drsquoun dossier meacutedical rendu

obligatoire par lrsquoarticle R 1112-2 du Code de la santeacute publique)

429 Certains professionnels de santeacute craignent cette information suppleacutementaire qui devra

ecirctre donneacutee au patient celle-ci pouvant se montrer difficile du fait de la techniciteacute de la

matiegravere mais eacutegalement chronophage494

De plus il leur est neacutecessaire de diffuser une

information claire en deux temps drsquoabord celle relative agrave lrsquoacte de soins puis celle relative agrave

lrsquoutilisation du proceacutedeacute de teacuteleacutemeacutedecine

430 En ce qui concerne le partage des donneacutees du patient le deacutecret preacutevoit que laquo les

professionnels participant agrave un acte de teacuteleacutemeacutedecine peuvent sauf opposition de la personne

ducircment informeacutee eacutechanger des informations relatives agrave cette personne notamment par le

biais des TIC raquo Rien de reacuteellement nouveau dans cette disposition puisqursquoil srsquoagit ici drsquoune

application du secret partageacute tel que deacutefini agrave lrsquoarticle L 1110-4 du Code de la santeacute publique

Le patient devra donc ecirctre informeacute du partage de ces informations par le bais des TIC mais

eacutegalement des personnes avec lesquelles elles seront partageacutees afin de pouvoir srsquoy opposer srsquoil

le souhaite Lrsquoinformation due au patient en matiegravere de teacuteleacutemeacutedecine est donc renforceacutee

puisqursquoagrave lrsquoinformation classique relative agrave lrsquoacte meacutedical en lui-mecircme et agrave ses conseacutequences

srsquoajoute lrsquoinformation relative agrave lrsquoacte de teacuteleacutemeacutedecine en tant que pratique faisant appel aux

TIC

494 MORLET-HAIumlDARA Lydia RAHAL-LOumlFSKOG Deacutelia laquo La teacuteleacutemeacutedecine et la protection des donneacutees de

santeacute par la loi Informatique et Liberteacutes raquo RGDM ndeg 44 2012 p 341

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

230

431 Enfin en ce qui concerne plus particuliegraverement le consentement du patient la question

de la possibiliteacute pour celui-ci de choisir ou non son teacuteleacutemeacutedecin pourrait ecirctre souleveacutee

Toutefois il y a lieu de vite eacuteluder cette question En effet comme le souligne agrave juste titre

Caroline LE GOFFIC495

dans son eacutetude sur le sujet un meacutedecin a la possibiliteacute de recourir agrave

un tiers compeacutetent afin que le patient reccediloive les soins les plus adapteacutes et fondeacutes sur les

notions acquises de la science496

Degraves lors le meacutedecin requeacuterant doit il est vrai recueillir le

consentement du patient au sujet de la pratique de la teacuteleacutemeacutedecine mais il nrsquoaura pas agrave obtenir

son consentement quant au choix du meacutedecin requis

2) La mise en œuvre des droits des patients

a) La question de la forme de lrsquoinformation

432 La question qui se pose agrave nous ici est de savoir comment la teacuteleacutemeacutedecine va pouvoir

srsquoacquitter de son devoir drsquoinformation dans le cadre drsquoune relation totalement deacutemateacuterialiseacutee

Selon les dispositions de lrsquoarticle L 1111-2 du Code de la santeacute publique lrsquoinformation laquo est

dispenseacutee au cours drsquoun entretien individuel raquo A cela srsquoajoutent les dispositions du Code de

deacuteontologie meacutedicale qui preacutecisent que lrsquoinformation dispenseacutee doit ecirctre claire loyale et

approprieacutee497

Enfin la charte du patient hospitaliseacute preacutevoit quant agrave elle que lrsquoinformation se

doit drsquoecirctre laquo simple accessible intelligible et loyale raquo

433 Ces dispositions peuvent au premier abord poser problegraveme En effet la teacuteleacutemeacutedecine

preacutesente la particulariteacute dans certains cas de deacutemateacuterialiser la relation existant entre le

professionnel et son patient ceux-ci nrsquoont plus reacuteellement de lien direct et srsquoadressent lrsquoun agrave

lrsquoautre par le biais des outils informatiques Comment dans ce cas le respect drsquoun entretien

individuel loyal et intelligible va-t-il ecirctre possible De mecircme comment srsquoassurer que le

patient a bien reccedilu une information adapteacutee agrave la fois agrave sa situation mais aussi agrave ses capaciteacutes

de compreacutehension Pour certains auteurs lrsquoobligation de deacutelivrer lrsquoinformation au cours drsquoun

495 LE GOFFIC Caroline laquo Consentement et confidentialiteacute agrave lrsquoeacutepreuve de la teacuteleacutemeacutedecine raquo RDSS 2011 pp

987- 995 496

Lrsquoarticle R 4127-32 du Code de la santeacute publique dispose laquo degraves lors quil a accepteacute de reacutepondre agrave une

demande le meacutedecin sengage agrave assurer personnellement au patient des soins consciencieux deacutevoueacutes et fondeacutes

sur les donneacutees acquises de la science en faisant appel sil y a lieu agrave laide de tiers compeacutetents raquo 497

Lrsquoarticle 35 du code de deacuteontologie meacutedicale preacutevoit que laquo le meacutedecin doit agrave la personne quil examine quil

soigne ou quil conseille une information loyale claire et approprieacutee sur son eacutetat les investigations et les soins

quil lui propose Tout au long de la maladie il tient compte de la personnaliteacute du patient dans ses explications

et veille agrave leur compreacutehension raquo

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

231

entretien individuel ne pose pas de reacuteel problegraveme la notion drsquoentretien devant srsquoentendre

selon eux de maniegravere large pour y inclure les formes eacutelectroniques de communication498

Il

est en reacutealiteacute neacutecessaire de revenir sur chacune des activiteacutes de teacuteleacutemeacutedecine preacutevues par le

deacutecret drsquooctobre 2010 afin de tenter drsquoeacuteclaircir ce point

434 Pour la teacuteleacuteexpertise la question ne pose pas reacuteellement de problegraveme Cette activiteacute

srsquoapparente en reacutealiteacute agrave la possibiliteacute pour le professionnel de santeacute de faire appel agrave un autre

professionnel plus speacutecialiseacute si la prise en charge le neacutecessite Il srsquoagit drsquoune regravegle preacutevue au

Code de deacuteontologie meacutedicale qui srsquoimpose au meacutedecin499

Dans ce cas le patient nrsquoest pas

pris en charge par le biais drsquoun acte totalement deacutemateacuterialiseacute puisque la relation agrave distance nrsquoa

lieu qursquoentre deux professionnels de santeacute Il pourra donc recevoir lrsquoinformation qui lui est

due dans les conditions classiques et exprimer le consentement relatif agrave sa prise en charge

aupregraves du meacutedecin requeacuterant Il en va de mecircme pour la teacuteleacuteassistance dans ce cas le patient

nrsquoest pas pris en charge agrave distance mais crsquoest bien le professionnel qui est assisteacute par un autre

professionnel de faccedilon deacutemateacuterialiseacutee

435 Dans le cadre de la reacuteponse en matiegravere de reacutegulation meacutedicale la particulariteacute de la

situation agrave savoir lrsquourgence fait que cette question ne se pose pas reacuteellement le professionnel

se trouvant alors dans une des situations exceptionnelles lui permettant de ne pas remplir son

obligation drsquoinformation ni de recueillir le consentement preacutealable du patient

Dans le cas de la teacuteleacutesurveillance la question peut ecirctre tregraves rapidement reacutegleacutee En effet ce

genre drsquoactiviteacute supposera a minima une consultation preacutealable avec le patient au cours de

laquelle le professionnel pourra donc lrsquoinformer sur lrsquoacte le dispositif de teacuteleacutemeacutedecine le

traitement de ses informations personnelles mais eacutegalement comme le dispose le deacutecret le

former si neacutecessaire aux outils et au recueil de ses donneacutees En effet il est preacutevu lorsque la

situation lrsquoimpose que le patient soit formeacute ou preacutepareacute agrave lrsquoutilisation du dispositif de

teacuteleacutemeacutedecine

436 Enfin la teacuteleacuteconsultation reste la pratique qui pose en reacutealiteacute le plus de problegravemes agrave ce

sujet En ce qui concerne lrsquoentretien individuel il est vrai qursquoil pourra toujours avoir lieu

498 V notamment en ce sens LE GOFFIC Caroline laquo Consentement et confidentialiteacute agrave lrsquoeacutepreuve de la

teacuteleacutemeacutedecine raquo Revue de droit sanitaire et social 2011 op cit 499

Article R 4127-32 du Code de la santeacute publique

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

232

mecircme si crsquoest par le biais drsquoune webcam Toutefois la deacutemateacuterialisation des relations entre le

patient et son meacutedecin ne doit pas pour autant conduire celui-ci agrave prendre une trop grande

distance avec son patient Il devra donc srsquoassurer qursquoil a bien deacutelivreacute une information

reacutepondant aux obligations leacutegales Certains auteurs parlent en effet de risque de laquo

standardisation de lrsquoinformation raquo du fait de la deacutemateacuterialisation des eacutechanges Crsquoest cet

eacutecueil qursquoil faudra veiller agrave eacuteviter500

En tout eacutetat de cause la preuve de lrsquoinformation sera

drsquoautant plus importante qursquoil nrsquoy a pas eu de rencontre formelle entre patient et meacutedecin

b) La preuve de lrsquoinformation et du recueil du consentement

437 Dans le cadre de la teacuteleacutemeacutedecine la question de la preuve que ce soit de la deacutelivrance

de lrsquoinformation ou de lrsquoobtention du consentement peut poser certaines difficulteacutes Le

problegraveme ne reacuteside pas vraiment dans les modaliteacutes de preuve de lrsquoinformation qui en reacutealiteacute

ne vont pas diffeacuterer que lrsquoon soit dans le cadre drsquoun acte de teacuteleacutemeacutedecine ou un acte meacutedical

plus classique En effet la charge de la preuve en la matiegravere repose sur le professionnel de

santeacute qui devra conserver la trace de la deacutelivrance de son information A ce sujet la loi501

comme la jurisprudence502

ont poseacute le principe de la preuve de lrsquoinformation par tous

moyens Ainsi les eacutecrits peuvent constituer un deacutebut de preuve et les eacutechanges de courriels

pourront lrsquoecirctre eacutegalement Le problegraveme reacuteside ici dans les nouveaux modes de preuves induits

par lrsquoutilisation des TIC

438 La premiegravere question qui se pose est celle de lrsquoenregistrement de la teacuteleacuteconsultation en

elle-mecircme Certains auteurs avancent cette possibiliteacute sous reacuteserve de respecter certaines

obligations preacutealables Il nous semble toutefois que cette possibiliteacute doive ecirctre eacutecarteacutee pour

des raisons agrave la fois leacutegales et eacutethiques En effet drsquoun point de vue strictement leacutegal les

dispositions de la loi Informatique et Liberteacutes et notamment le respect du principe de

proportionnaliteacute entre le traitement et le but rechercheacute ne nous semblent pas autoriser un tel

enregistrement De mecircme drsquoun point de vue eacutethique on comprend tregraves vite qursquoun tel

enregistrement va fragiliser le colloque singulier et la relation de confiance qui doit exister

entre meacutedecin et patient En revanche une trace informatique de la consultation pourra ecirctre

conserveacutee sous reacuteserve de respecter les diffeacuterentes obligations de deacuteclarations aupregraves de la

500 BOURDAIRE-MIGNOT Camille laquo Teacuteleacuteconsultation quelles exigences Quelles pratiques raquo op cit p

1005 501

Article L 1111-2 du Code de santeacute publique 502

Cass 1egravere

civ 25 feacutevrier 1997 ndeg 94-19685 Defreacutenois 1997 p 751 note JL AUBERT

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

233

CNIL Cette trace pourra donc constituer un deacutebut de preuve en permettant par exemple de

deacutemontrer la dureacutee de la consultation Le meacutedecin devra donc continuer de preacuteciser au sein

du dossier meacutedical le contenu de lrsquoinformation qursquoil a deacutelivreacutee et eacuteventuellement la

compleacuteter par un document eacutecrit transmis par e-mail Dans le cadre drsquoune activiteacute de

teacuteleacutemeacutedecine il appartient selon nous au meacutedecin drsquoecirctre vigilant et de constituer tout au

long de la prise en charge agrave distance de son patient un faisceau drsquoindices qui permettra

drsquoapporter la preuve de lrsquoinformation dans lrsquohypothegravese drsquoun contentieux

439 Le professionnel devra ecirctre drsquoautant plus attentif agrave la deacutelivrance de ces informations

que la jurisprudence se montre de plus en plus stricte agrave ce sujet la Cour de Cassation ayant

fait du deacutefaut drsquoinformation un preacutejudice autonome et le Conseil drsquoEtat ayant deacuteveloppeacute la

notion de preacutejudice drsquoimpreacuteparation

En effet dans une deacutecision en date du 3 juin 2010503

la Cour de cassation a consacreacute

lrsquoautonomie du preacutejudice reacutesultant du deacutefaut drsquoinformation Deacutesormais lrsquoabsence

drsquoinformation claire et loyale du patient preacutealablement agrave lrsquoexeacutecution drsquoun acte meacutedical

constitue un preacutejudice agrave part entiegravere qui comme le preacutecisait la Haute juridiction ne peut rester

sans reacuteparation Le Conseil drsquoEtat est quant agrave lui venu consacrer dans une deacutecision du 10

octobre 2012504

la notion de preacutejudice drsquoimpreacuteparation laquo consideacuterant qursquoindeacutependamment

de la perte de chance de refuser lrsquointervention le manquement des meacutedecins agrave leur obligation

drsquoinformer le patient des risques encourus ouvre pour lrsquointeacuteresseacute lorsque ces risque se

reacutealisent le droit drsquoobtenir reacuteparation des troubles qursquoil a pu subir du fait qursquoil nrsquoa pas pu se

preacuteparer agrave cette eacuteventualiteacute notamment en prenant certaines dispositions personnelle [hellip] raquo

Pour la Haute juridiction administrative le deacutefaut drsquoinformation constitue une perte de chance

de se preacuteparer aux risques possibles lieacutes agrave lrsquointervention et doit donc ecirctre reacutepareacute agrave ce titre Les

droits des patients pris en charge par un dispositif agrave distance telle que la teacuteleacutemeacutedecine restent

les mecircmes et sont mecircme renforceacutes sur certains aspects Crsquoest la mecircme logique qui va trouver agrave

srsquoappliquer en ce qui concerne les regravegles existantes en matiegravere de responsabiliteacute

503 Cass 1egravere civ 3 juin 2010 ndeg 09-13591 A LEGOUX Gaz Pal 2010 pp 9-13 P SARGOS laquo Deux

arrecircts historiques en matiegravere de responsabiliteacute meacutedicale geacuteneacuterale et de responsabiliteacute particuliegravere lieacutee au

manquement dun meacutedecin agrave son devoir dinformation raquo D 2010 pp 1522-1526 504

CE 10 octobre 2012 Michel C ndeg350426 F VIALLA JCP G 2012 p 1252 C LANTERO AJDA 2012

p 2231

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

234

B Responsabiliteacute meacutedicale des regravegles classiques aux risques drsquoapplication

multiplieacutes

440 Les actes meacutedicaux pratiqueacutes par le biais des TIC qursquoil srsquoagisse de la teacuteleacutemeacutedecine ou

de la prescription informatiseacutee restent des actes meacutedicaux agrave part entiegravere et juridiquement

reconnus comme tels De ce fait il est logique que les regravegles relatives agrave la mise en cause de la

responsabiliteacute des professionnels et eacutetablissements de santeacute soient les mecircmes que celles

applicables aux actes meacutedicaux non deacutemateacuterialiseacutes (1) Toutefois les speacutecificiteacutes de la

teacuteleacutemeacutedecine notamment le deacuteveloppement de pratiques pluridisciplinaires amegravenent agrave

srsquointerroger sur la reacutepartition des responsabiliteacutes entre les diffeacuterents acteurs (2) qursquoils

srsquoagissent des meacutedecins des personnels parameacutedicaux ou mecircme des patients

1) La responsabiliteacute meacutedicale une responsabiliteacute pour faute

441 laquo Il nrsquoy a pas lieu de creacuteer un reacutegime de responsabiliteacute speacutecifique autour de la

teacuteleacutemeacutedecine raquo505

Pour la DGOS il ne fait aucun doute que le reacutegime de droit commun

applicable en matiegravere de responsabiliteacute meacutedicale va trouver agrave srsquoappliquer agrave la teacuteleacutemeacutedecine

sans qursquoil y ait lieu de clarifier voire mecircme creacuteer de nouvelles regravegles

442 Tregraves tocirct la jurisprudence judiciaire a consideacutereacute qursquoun meacutedecin eacutetait responsable des

dommages causeacutes agrave un patient et ce sur le fondement des articles 1240506

et 1241507

du Code

civil Le dommage causeacute par le meacutedecin agrave son patient eacutetait donc reacuteparable sur le terrain de la

responsabiliteacute deacutelictuelle Cette position a eacuteteacute modifieacutee par le tregraves ceacutelegravebre arrecirct Mercier du 20

mai 1936508

par lequel la Haute juridiction est venue affirmer que la relation qui srsquoeacutetablissait

entre un meacutedecin et un patient eacutetait une relation contractuelle Ainsi le non-respect par le

meacutedecin drsquoune de ses obligations engageait alors sa responsabiliteacute contractuelle Cette

position a ensuite eacuteteacute confirmeacutee par plusieurs arrecircts rappelant que les meacutedecins nrsquoengageaient

leur responsabiliteacute contractuelle qursquoen cas de faute Ce contrat eacutetait un contrat

505 laquo La teacuteleacutemeacutedecine nrsquoa pas besoin drsquoun reacutegime de responsabiliteacute professionnelle speacutecifique selon la DGOS raquo

deacutepecircche Tic-santeacute 15 mai 2012 disponible sur [httpwwwticsantecom] Consulteacute le 3 mars 2017 506

laquo Tout fait quelconque de lhomme qui cause agrave autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est

arriveacute agrave le reacuteparer raquo 507

laquo Chacun est responsable du dommage quil a causeacute non seulement par son fait mais encore par sa

neacutegligence ou par son imprudence raquo 508

Cass 1egravere

civ 20 mai 1936 Mercier JCP 1936 1079

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

235

synallagmatique de droit priveacute Ainsi il pesait des obligations sur chacune des parties

Toutefois ce contrat nrsquoeacutetait valable que pour les soins dispenseacutes par un meacutedecin libeacuteral ou par

un meacutedecin exerccedilant en eacutetablissement priveacute Dans le cas drsquoun meacutedecin hospitalier exerccedilant en

eacutetablissement public de santeacute on consideacuterait le patient comme eacutetant un usager du service

public et degraves lors il relevait drsquoune situation statutaire509

Crsquoest drsquoailleurs toujours le cas

aujourdrsquohui La responsabiliteacute contractuelle du meacutedecin a toutefois continueacute de coexister avec

la possibiliteacute de mettre en œuvre sa responsabiliteacute deacutelictuelle dans certains cas Ainsi en cas

drsquoabsence de contrat meacutedical ab initio510

ou dans lrsquohypothegravese de son annulation511

le patient

pouvait tout de mecircme mettre en cause la responsabiliteacute deacutelictuelle du meacutedecin

443 Le Conseil drsquoEtat pour sa part a longtemps reconnu la responsabiliteacute pour faute du

service public hospitalier distinguant toutefois les fautes simples512

des fautes lourdes513

Cependant avec lrsquoarrecirct BIANCHI514

la Haute juridiction a admis une possibiliteacute de

responsabiliteacute sans faute du service public hospitalier quand lrsquoexeacutecution de lrsquoacte meacutedical

neacutecessaire au diagnostic ou au traitement du patient preacutesentait un risque certes connu mais

dont la reacutealisation eacutetait exceptionnelle

444 La loi du 4 mars 2002515

unifie le reacutegime de responsabiliteacute meacutedicale en instaurant un

principe de responsabiliteacute pour faute et ce peu importe que la prise en charge se fasse dans un

cadre priveacute ou public Crsquoest le principe poseacute agrave lrsquoarticle L 1142-1 du Code de la santeacute publique

selon lequel laquo hors le cas ougrave leur responsabiliteacute est encourue en raison dun deacutefaut dun

produit de santeacute les professionnels de santeacute mentionneacutes agrave la quatriegraveme partie du preacutesent

Code ainsi que tout eacutetablissement service ou organisme dans lesquels sont reacutealiseacutes des actes

individuels de preacutevention de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conseacutequences

dommageables dactes de preacutevention de diagnostic ou de soins quen cas de faute raquo Il

509 CE 11 janvier 1991Mme Biancale ndeg 93348 AJDA 1991 p 479

510 Cass 1

egravere civ 20 feacutevrier 1979 D 1980 p 171 obs PENNEAU

511 TGI Paris 3 juin 1979 D 1980 p 136

512 A titre drsquoexemple un deacutefaut dans lrsquoorganisation du service eacutetait consideacutereacute comme une faute simple que

lrsquoeacutetablissement public de santeacute se devait de reacuteparer (CE 26 juin 1959 Rouzet Rec 1959 p 305) 513

Faute reacuteserveacutee aux actes techniques (CE 8 novembre 1935 veuve Loiseau Rec 1935 p1019) 514

CE Ass 9 avril 1993 Bianchi ndeg69336 RFDA 1993 p 573 concl S DAEumlL RDP 1993 p 1099 note

M PAILLET Rev Adm 1993 p 561 note P FRAISSEX 515

Loi ndeg 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et agrave la qualiteacute du systegraveme de santeacute JORF du

5 mars 2002 p 4118

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

236

appartiendra alors au patient qui srsquoestime victime drsquoun dommage drsquoapporter la preuve drsquoune

faute et ce par tous moyens

En termes de fautes celles-ci peuvent ecirctre tregraves diverses et porter tant sur la reacutealisation

du soin que sur le deacutefaut dans lrsquoinformation preacutealable du patient Les fautes peuvent

eacutegalement ecirctre strictement meacutedicales ou parfois reacutesulter drsquoun dysfonctionnement dans

lrsquoorganisation du service Dans le cas particulier de la prise en charge drsquoun patient en

eacutetablissement public de santeacute par principe lrsquoeacutetablissement devra reacuteparer la faute commise par

ses preacuteposeacutes sauf en cas de faute deacutetachable du service516

2) La reacutepartition de la responsabiliteacute entre les diffeacuterents acteurs de la teacuteleacutemeacutedecine

445 Lors drsquoun acte de teacuteleacutemeacutedecine plusieurs sceacutenarios peuvent se mettre en place

impliquant dans la prise en charge du patient des meacutedecins des professionnels de santeacute et

parfois mecircme le patient lui-mecircme La reacuteparation des responsabiliteacutes sera diffeacuterente selon

lrsquoacte reacutealiseacute (teacuteleacuteexpertise ou teacuteleacuteconsultation par exemple) ou les professionnels impliqueacutes

La doctrine a beaucoup eacutecrit agrave ce sujet517

et plusieurs hypothegraveses de reacutepartition des

responsabiliteacutes se sont deacuteveloppeacutees Celles-ci sont drsquoailleurs parfois assez diffeacuterentes que

lrsquoon se situe du cocircteacute du droit priveacute ou du droit public

446 Dans le cadre de la pratique de la teacuteleacutemeacutedecine et plus speacutecifiquement dans le cas

drsquoactes de teacuteleacuteexpertise ou de teacuteleacuteassistance il est possible de faire un parallegravele avec la

situation dans laquelle un meacutedecin demande lrsquoavis drsquoun confregravere Drsquoune maniegravere geacuteneacuterale

516 La faute deacutetachable a eacuteteacute deacutefinie par une deacutecision Tribunal des conflits (Arrecirct Pelletier 3 juillet 1873) qui

preacutevoit que la faute deacutetachable est une laquo faute meacutedicale plus que lourde drsquoune graviteacute exceptionnelle et

inexcusable ou nrsquoayant aucun rapport avec lrsquoactiviteacute meacutedicale raquo A titre drsquoexemple le Conseil drsquoEtat dans sa

deacutecision ndeg213931 du 28 deacutecembre 2001 a reconnu la qualification de faute personnelle deacutetachable du service

pour un meacutedecin chef de service de radiologie qui avait tardeacute deacutelibeacutereacutement agrave reacuteveacuteler une erreur meacutedicale

commise dans son service Sur la faute deacutetachable du service V notamment LEFEVRE Valeacuterie laquo La faute

deacutetachable du service et la critique dun meacutedecin sur le travail de lun de ses confregraveres dans un eacutetablissement de

santeacute Note sous Cour de cassation premiegravere Chambre civile 20 feacutevrier 2008 Monsieur X contre Mesdames Y

Z et A et Monsieur B pourvoi numeacutero 06-21980 raquo Gaz Pal ndeg 282-283 2008 pp 40-41 KLEITZ-

BACHELET Cleacutementine laquo Meacutedecin hospitalier et faute deacutetachable du service raquo RLDC ndeg 48 2008 p 27 517

V notamment en ce sens CORGAS-BERNARD Cristina laquo Responsabiliteacute civile meacutedicale et nouvelles

pratiques numeacuteriques lexemple de la teacuteleacutemeacutedecine raquo LPA ndeg 162 2014 pp 27-30 FRAYSSINET Marie-

Heacutelegravene laquo La faute dans lorganisation et le fonctionnement du service agrave leacutepreuve de la teacuteleacutesanteacute raquo RGDM ndeg

44 2012 pp 313-331 GRYNBAUM Luc laquo La responsabiliteacute des acteurs de teacuteleacutemeacutedecine raquo RDSS ndeg 6

2011 pp 996-1002 FORGERON Jean-Franccedilois laquo Les applications de teacuteleacutemeacutedecine des responsabiliteacutes

meacutedicales traditionnelles aux responsabiliteacutes techniques nouvelles raquo Gaz Pal ndeg 287 2001 pp 20-22

ROUSSEL Bruno laquo Les applications de teacuteleacutemeacutedecine des responsabiliteacutes meacutedicales traditionnelles aux

responsabiliteacutes techniques nouvelles raquo Communication commerce eacutelectronique ndeg 1 2011 p 2

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

237

une majoriteacute des auteurs considegraverent qursquoil existe une responsabiliteacute du meacutedecin qui se trouve

aupregraves du patient du fait du meacutedecin qui exerce agrave distance518

La teacuteleacuteexpertise est alors

consideacutereacutee comme une aide agrave la deacutecision meacutedicale519

et lrsquoacte reste sous la responsabiliteacute du

meacutedecin qui a pris en charge le patient ce qui implique donc une responsabiliteacute exclusive de

ce dernier Finalement il srsquoagit ici de lrsquoapplication des dispositions de lrsquoarticle R 4127-69 du

Code de la santeacute publique qui preacutevoit que laquo lrsquoexercice de la meacutedecine est personnel chaque

meacutedecin est responsable de ses deacutecisions et ses actes raquo Effectivement dans le cas speacutecifique

de la teacuteleacuteexpertise crsquoest bien au meacutedecin demandeur qui se trouve agrave proximiteacute du patient et

qui prend en charge ce dernier qursquoil reviendra de prendre la deacutecision meacutedicale en se basant

sur les preacuteconisations du meacutedecin teacuteleacuteexpert

447 Toutefois il faut souligner que lrsquoarticle R 4127-64 du Code de la santeacute publique

preacutecise quant agrave lui que laquo lorsque plusieurs meacutedecins collaborent agrave lrsquoexamen ou au traitement

drsquoun malade ils doivent se tenir mutuellement informeacutes chacun des praticiens assume ses

responsabiliteacutes personnelles et veille agrave lrsquoinformation du malade raquo A la lumiegravere de cette autre

disposition du Code de la santeacute publique il apparait que meacutedecin requeacuterant et meacutedecin requis

devraient naturellement voir leurs responsabiliteacutes partageacutees en cas de dommage subi par le

patient A noter que classiquement la jurisprudence retient la responsabiliteacute solidaire des

intervenants quand un meacutedecin deacutecide de prendre un avis aupregraves drsquoun confregravere speacutecialiste

dans son domaine520

448 Crsquoest drsquoailleurs agrave ce jour la solution retenue par les juges administratifs en ce qui

concerne la pratique de la teacuteleacutemeacutedecine et plus speacutecifiquement la pratique de la

teacuteleacuteexpertise521

En lrsquoespegravece il srsquoagissait drsquoun patient hospitaliseacute au sein drsquoun centre

hospitalier suite agrave un traumatisme cracircnien puis autoriseacute agrave sortir le scanner ne reacuteveacutelant aucun

traumatisme Il est hospitaliseacute de nouveau un mois plus tard agrave la suite de ceacutephaleacutees

inhabituelles et de vomissements Un nouveau scanner est reacutealiseacute et un avis demandeacute au

service de neurochirurgie du Centre Hospitalier Universitaire (CHU) de Grenoble par le biais

518 CONTIS Mailen CROEL Jean-Marc laquo Le droit des obligations agrave lrsquoeacutepreuve de la teacuteleacutemeacutedecine raquo PUAM

2006 V eacutegalement en ce sens PIDOUX Estelle laquo La responsabiliteacute meacutedicale au regard de la teacuteleacutetransmission

et de la teacuteleacutemeacutedecine raquo LPA ndeg 149 2000 pp 5-11 519

V notamment en ce sens FLAVIN Patrick laquo De la responsabiliteacute encourue dans le cadre de la

teacuteleacutemeacutedecine raquo Revue hospitaliegravere de France ndeg 537 2010 p 56-57 520

CAA Bordeaux 10 octobre 1998 ndeg 97BX01978 521

TA Grenoble 21 mai 2010 ndeg0600648

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

238

drsquoune videacuteotransmission des images Le CHU de Grenoble informe le centre hospitalier qursquoil

ne dispose pas de place pour accueillir le patient mais que lrsquoeacutetat de celui-ci permettait

drsquoattendre pour reacutealiser lrsquoopeacuteration de drainage de lrsquoheacutematome deacutecouvert Lrsquoeacutetat du patient se

deacutegrade le jour suivant mais le CHU maintient son avis initial Le patient tombe dans le coma

Il est ensuite transfeacutereacute dans un autre eacutetablissement dans lequel il deacutecegravede En se basant sur les

expertises meacutedicales reacutealiseacutees le TA de Grenoble retient une erreur de diagnostic dans

lrsquointerpreacutetation du scanner lors de la reacuteadmission du patient Alors que le CHU invoque un

doute sur la reacuteception de deux planches drsquoimages par son service de neurochirurgie et fait part

de son interrogation sur la qualiteacute de celles-ci le TA pointe le fait qursquoaucun eacuteleacutement du

dossier ne permet drsquoeacutetablir que les meacutedecins qui les ont reccedilues et interpreacuteteacutees ont eacutemis agrave un

moment de la prise en charge des doutes quant agrave leur caractegravere complet et preacutecis Pour les

juges du fond lrsquoerreur de diagnostic est constitutive drsquoune faute commune aux deux

eacutetablissements et engage donc leur responsabiliteacute solidaire Le TA a eacutegalement ducirc statuer sur

lrsquoappel en garantie formeacute par le CH de Sallanches contre le CHU de Grenoble Les juges du

fond rappellent agrave cette occasion que les centres hospitaliers geacuteneacuteraux ne sont pas doteacutes de

moyens speacutecialiseacutes en neurochirurgie et sont donc ameneacutes agrave demander lrsquoavis de services

speacutecialiseacutes Le TA relegraveve ensuite que les teacuteleacutetransmissions drsquoimages nrsquoont pas donneacute lieu agrave

des comptes rendus eacutecrits et qursquoagrave aucun moment les meacutedecins qui ont reccedilu et interpreacuteteacute les

images nrsquoont eacutemis de doute sur leur qualiteacute Degraves lors pour le tribunal le CHU a commis une

faute vis-agrave-vis du CH et doit le garantir de lrsquoensemble de la condamnation prononceacutee agrave son

encontre

449 Il srsquoagit selon la doctrine drsquoune deacutecision522

qui preacutefigure la maniegravere dont la

responsabiliteacute des diffeacuterents intervenants dans le cadre drsquoune activiteacute de teacuteleacutemeacutedecine pourrait

ecirctre appreacutecieacutee par les juges Avec cette deacutecision les juges srsquoorientent vers une responsabiliteacute

solidaire des deux meacutedecins intervenant dans la prise en charge du patient Drsquoailleurs il faut

noter que la responsabiliteacute solidaire des intervenants dans le cas drsquoun meacutedecin prenant un

avis aupregraves drsquoun speacutecialiste avait deacutejagrave eacuteteacute retenue auparavant523

522 FLAVIN Patrick laquo De la responsabiliteacute encourue dans le cadre de la teacuteleacutemeacutedecine raquo op cit

523 CAA Bordeaux op cit

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

239

Toutefois il nous faut souligner ici la seacuteveacuteriteacute de cette deacutecision524

En effet les juges

ne se contentent pas de retenir une responsabiliteacute solidaire mais estiment que le CHU de par

sa position drsquoexpert en la matiegravere se doit de garantir la condamnation du CH Il appartiendrait

donc au teacuteleacuteexpert de srsquoassurer de la qualiteacute des donneacutees qursquoil reccediloit avant de dispenser son

avis Il doit prendre en compte les limites inheacuterentes agrave la pratique et solliciter les informations

compleacutementaires en cas de doute sous peine de voir sa responsabiliteacute pleinement engageacutee en

cas de preacutejudice

450 Une derniegravere question relative agrave la responsabiliteacute du meacutedecin dans le cadre de la

teacuteleacutemeacutedecine doit encore ecirctre souleveacutee celle de lrsquoexistence eacuteventuelle drsquoune obligation

meacutedicale drsquoutiliser la teacuteleacutemeacutedecine En effet lrsquoarticle R 4127-32 du Code de la santeacute

publique fait peser sur le meacutedecin lrsquoobligation de moyens suivante laquo degraves lors quil a accepteacute

de reacutepondre agrave une demande le meacutedecin sengage agrave assurer personnellement au patient des

soins consciencieux deacutevoueacutes et fondeacutes sur les donneacutees acquises de la science en faisant

appel sil y a lieu agrave laide de tiers compeacutetents raquo Il srsquoagit ici de lrsquoobligation leacutegale et

deacuteontologique pesant sur tout meacutedecin de faire appel agrave des tiers compeacutetents Avec le

deacuteveloppement de la teacuteleacutemeacutedecine et plus particuliegraverement de la teacuteleacuteexpertise il serait

possible drsquoenvisager que cette obligation soit eacutetendue agrave lrsquoutilisation des TIC et notamment de

la teacuteleacutemeacutedecine Un meacutedecin pourrait donc voir sa responsabiliteacute engageacutee srsquoil est eacutetabli qursquoil

avait la possibiliteacute drsquoavoir recours agrave la teacuteleacutemeacutedecine et qursquoil ne lrsquoa pas fait Toutefois agrave

lrsquoheure actuelle et au vu du deacuteveloppement de la pratique il nous semble compliqueacute de faire

peser sur un meacutedecin une telle obligation de moyens

sect2 Teacuteleacutemeacutedecine et responsabiliteacute des regravegles speacutecifiques agrave prendre en

consideacuteration

451 Lrsquointroduction des TIC dans la prise en charge des patients nous amegravene agrave reacutefleacutechir sur

la nouvelle reacutepartition des responsabiliteacutes En effet les logiciels vont devenir un outil de la

prise en charge meacutedicale agrave part entiegravere et ses eacuteventuelles deacutefaillances ne vont pas ecirctre sans

524 V eacutegalement en ce sens FLAVIN Patrick laquo De la responsabiliteacute encourue dans le cadre de la teacuteleacutemeacutedecine raquo

op cit p 57

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

240

conseacutequence (A) Par ailleurs il nous faut eacutegalement nous pencher sur la responsabiliteacute drsquoun

nouvel acteur entrant dans la prise en charge du patient le tiers technologique (B)

A Deacutefaillance des logiciels et responsabiliteacutes

452 Dans le cadre de lrsquoinformatisation constante de la prise en charge meacutedicale les

logiciels informatiques sont devenus un des outils principaux des eacutetablissements de santeacute

Toutefois cela nrsquoest pas sans conseacutequence sur les regravegles applicables en matiegravere de

responsabiliteacute meacutedicale En effet en introduisant ce nouvel outil les eacutetablissements

augmentent les risques de dommage en cas de deacutefaillance de celui-ci Il leur est donc

neacutecessaire de se pencher sur la question de la reacuteparation des responsabiliteacutes Pour cela il nous

faut nous tourner vers le reacutegime de responsabiliteacute applicable en matiegravere de produits

deacutefectueux (2) apregraves avoir pris le soin de se pencher plus speacutecifiquement sur la qualification

juridique des logiciels utiliseacutes (1)

1) Qualification juridique des logiciels

453 Avant 2010 et la transposition en droit franccedilais des dispositions issues de la directive

europeacuteenne 200747CE525

seuls les logiciels neacutecessaires au bon fonctionnement drsquoun

dispositif meacutedical eacutetaient consideacutereacutes comme eacutetant des dispositifs meacutedicaux Lrsquoarticle L 5211-

1 du Code de la santeacute publique preacutevoyait alors laquo on entend par dispositif meacutedical tout

instrument appareil eacutequipement matiegravere produit agrave lexception des produits dorigine

humaine ou autre article utiliseacute seul ou en association y compris les accessoires et logiciels

intervenant dans son fonctionnement destineacute par le fabricant agrave ecirctre utiliseacute chez lhomme agrave

des fins meacutedicales et dont laction principale voulue nest pas obtenue par des moyens

pharmacologiques ou immunologiques ni par meacutetabolisme mais dont la fonction peut ecirctre

assisteacutee par de tels moyens raquo A lrsquoeacutepoque un logiciel ne pouvait obtenir cette qualification

que par association agrave un dispositif meacutedical

525 Directive 200747CE du parlement europeacuteen et du conseil du 5 septembre 2007 modifiant la directive

90385CEE du Conseil concernant le rapprochement des leacutegislations des Eacutetats membres relatives aux dispositifs

meacutedicaux implantables actifs la directive 9342CEE du Conseil relative aux dispositifs meacutedicaux et la directive

988CE concernant la mise sur le marcheacute des produits biocides JOUE L24721 21 septembre 2007

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

241

454 Lrsquoordonnance ndeg 2010-250 du 11 mars 2010526

relative aux dispositifs meacutedicaux et

transposant les dispositions de droit europeacuteen en droit franccedilais a eacutelargi le champ des logiciels

pouvant ecirctre consideacutereacutes comme eacutetant des dispositifs meacutedicaux Deacutesormais selon les

dispositions de lrsquoarticle L 5211-1 du Code de la santeacute publique sont des dispositifs

meacutedicaux laquo tout instrument appareil eacutequipement matiegravere produit agrave lexception des

produits dorigine humaine ou autre article utiliseacute seul ou en association y compris les

accessoires et logiciels neacutecessaires au bon fonctionnement de celui-ci destineacute par le fabricant

agrave ecirctre utiliseacute chez lhomme agrave des fins meacutedicales et dont laction principale voulue nest pas

obtenue par des moyens pharmacologiques ou immunologiques ni par meacutetabolisme mais

dont la fonction peut ecirctre assisteacutee par de tels moyens Constitue eacutegalement un dispositif

meacutedical le logiciel destineacute par le fabricant agrave ecirctre utiliseacute speacutecifiquement agrave des fins

diagnostiques ou theacuterapeutiques raquo

Ainsi un logiciel seul ayant une finaliteacute theacuterapeutique ou diagnostique pourra ecirctre

qualifieacute de dispositif meacutedical et se voir ainsi appliquer les dispositions relatives agrave

lrsquoencadrement des dispositifs meacutedicaux que ce soit en matiegravere de seacutecuriteacute de controcircle ou de

responsabiliteacute Par ailleurs comme nous avons pu le voir preacuteceacutedemment cela permettra de

deacuteterminer quel reacutegime de responsabiliteacute sera applicable Cette classification est donc

importante

455 Toutefois lrsquoidentification va devoir se faire au cas par cas Ainsi un simple logiciel de

gestion du dossier patient ne pourra pas ecirctre consideacutereacute comme un dispositif meacutedical tandis

qursquoun logiciel drsquoaide agrave la prescription effectuant un calcul de dose de meacutedicament agrave partir

drsquoune base de donneacutees propre au patient pourra ecirctre qualifieacute de dispositif meacutedical

En ce qui concerne plus speacutecifiquement la teacuteleacutemeacutedecine il nous faut diffeacuterencier les logiciels

neacutecessaires agrave la communication agrave distance qui ne pourront pas ecirctre consideacutereacutes comme eacutetant

des dispositifs meacutedicaux et les applications ayant pour finaliteacute de piloter des dispositifs

meacutedicaux agrave distance (dans le cadre de la teacuteleacutesurveillance notamment)

526 Ordonnance ndeg 2010-250 du 11 mars 2010 relative aux dispositifs meacutedicaux JORF ndeg0060 du 12 mars 2010

p 4870

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

242

456 LrsquoAgence Nationale de Seacutecuriteacute du Meacutedicament (ANSM)527

chargeacutee notamment de

garantir la seacutecuriteacute des produits de santeacute a apporteacute dans une deacutecision rendue le 12 avril

2015528

quelques preacutecisions quant agrave la qualification de dispositif meacutedical pour un logiciel En

effet lrsquoANSM a suspendu la mise sur le marcheacute drsquoun logiciel qui nrsquoeacutetait pas revecirctu du

marquage CE obligation agrave laquelle doivent reacutepondre les dispositifs meacutedicaux Il srsquoagissait

drsquoun logiciel drsquoenregistrement et de stockage de donneacutees issues drsquoexamens meacutedicaux du

patient accompagneacute drsquoun module de compression et drsquoenregistrement drsquoimages meacutedicales au

format waaves Crsquoest ce module speacutecifique qui a poseacute problegraveme agrave lrsquoANSM celle-ci

consideacuterant que ce module aidant le meacutedecin qui devait proceacuteder agrave un examen tombait sous

le coup de la deacutefinition des dispositifs meacutedicaux de classe 2 et devait de ce fait en respecter

les exigences

2) Responsabiliteacute du fait des produits deacutefectueux

457 Dans le cadre de lrsquoutilisation de logiciels dispositifs meacutedicaux par des eacutetablissements

de santeacute ceux-ci peuvent ecirctre ameneacutes agrave endosser le rocircle de prestataire de service vis-agrave-vis du

patient Or en la matiegravere les regravegles de reacutepartition des responsabiliteacutes entre fournisseur et

producteur nrsquoont pas toujours eacuteteacute tregraves claires

458 Lrsquoarticulation des regravegles applicables du fait de la deacutefaillance des produits de santeacute a

longtemps eacuteteacute difficile agrave appreacutehender Drsquoun cocircteacute le reacutegime europeacuteen impose de rechercher de

maniegravere prioritaire la responsabiliteacute du producteur du produit deacutefectueux et drsquoun autre cocircteacute le

reacutegime franccedilais issu drsquoune construction jurisprudentielle preacutevoit la responsabiliteacute sans faute

de lrsquoeacutetablissement de santeacute en tant que prestataire du produit deacutefectueux Il apparait donc

difficile drsquoarticuler les deux reacutegimes applicables

527 LrsquoAgence nationale de seacutecuriteacute du meacutedicament et des produits de santeacute (ANSM) a eacuteteacute creacuteeacutee par la loi du 29

deacutecembre 2011 relative au renforcement de la seacutecuriteacute sanitaire des meacutedicaments et des produits de santeacute Elle

srsquoest substitueacutee agrave lrsquoAgence franccedilaise de seacutecuriteacute sanitaire du meacutedicament et des produits de santeacute (Afssaps) dont

elle a repris les missions droits et obligations Il srsquoagit drsquoun eacutetablissement public placeacute sous la tutelle du

Ministegravere chargeacute de la santeacute 528

Deacutecision du 12 janvier 2015 portant suspension de mise sur le marcheacute de mise en service drsquoexportation et de

distribution du produit Infocament inteacutegrant un module de compression drsquoimages au format Waaves fabriqueacute et

mis sur le marcheacute par la socieacuteteacute CIRA

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

243

459 En effet la directive europeacuteenne 85374529

transposeacutee par la loi ndeg 98-389 du 19 mai

1998 a creacuteeacute un reacutegime speacutecial de responsabiliteacute sans faute du fait des produits deacutefectueux

Ainsi lrsquoarticle 1245 du Code civil preacutevoit que laquo Le producteur est responsable du dommage

causeacute par un deacutefaut de son produit quil soit ou non lieacute par un contrat avec la victime raquo

Degraves lors en vertu de cette directive le producteur est responsable de la deacutefectuositeacute

drsquoun produit mecircme en lrsquoabsence de faute Le fournisseur peut quant agrave lui voir sa

responsabiliteacute rechercheacutee soit sur le fondement de la responsabiliteacute sans faute agrave condition

que le producteur ne soit pas connu soit sur le fondement de la responsabiliteacute contractuelle ou

deacutelictuelle Cette directive nrsquoeacutecarte toutefois pas la possibiliteacute pour ce reacutegime de coexister

avec des reacutegimes de responsabiliteacute speacuteciaux qui pourraient exister en droit interne agrave condition

que ce reacutegime existe au moment de la notification de la directive530

460 Par ailleurs en droit franccedilais le Conseil drsquoEtat a instaureacute une responsabiliteacute du service

public hospitalier du fait de la deacutefaillance des produits et appareils de santeacute531

Classiquement

avant cette deacutecision la jurisprudence distinguait la mauvaise utilisation drsquoun produit de santeacute

de sa deacutefaillance Ainsi si aucune erreur drsquoutilisation nrsquoeacutetait imputable agrave lrsquoeacutequipe meacutedicale le

juge consideacuterait qursquoil nrsquoeacutetait pas possible de retenir une faute dans lrsquoorganisation du

service532

Puis la jurisprudence est devenue plus favorable aux patients et les juges533

ont eu

tendance agrave srsquoorienter vers un reacutegime de preacutesomption de la faute534

Enfin avec son arrecirct en

date du 9 juillet 2003 la Haute juridiction administrative a instaureacute un veacuteritable reacutegime de

responsabiliteacute sans faute du fait de la deacutefaillance des produits de santeacute Deacutesormais le service

public hospitalier est responsable des conseacutequences dommageables pour les usagers drsquoune

deacutefaillance drsquoun produit ou appareil de santeacute qursquoil utilise mecircme en lrsquoabsence de faute de sa

part et ce sans preacutejudice de son recours en garantie agrave lrsquoencontre du producteur Pour

reprendre les termes de Jeacuterocircme PEIGNE laquo lrsquoeacutetablissement de santeacute nrsquointervient plus comme

529 Directive 85374CEE du Conseil du 25 juillet 1985 relative au rapprochement des dispositions leacutegislatives

reacuteglementaires et administratives des Eacutetats membres en matiegravere de responsabiliteacute du fait des produits deacutefectueux

JOUE ndeg L 210 du 7 aoucirct 1985 pp 29 ndash 33 530

Article 1 de la directive 85374CEE 531

CE 9 juillet 2003 APHP c Marzouk ndeg220437 Rec 2003 p 338 Droit Administratif ndeg 11 novembre

2003 comm 226 532

CE 14 deacutecembre 1984 Centre Hospitalier de Melun ndeg 37563 533

V notamment en ce sens CAA Bordeaux 9 mai 1989 Centre Hospitalier de Castelnaudary ndeg 89 BX00002

CAA paris 11 feacutevrier 1992 Administration geacuteneacuterale de lrsquoAssistance publique agrave Paris ndeg 90PA00256 534

PEIGNE Jeacuterocircme laquo Les tribulations de la responsabiliteacute hospitaliegravere du fait des produits de santeacute

deacutefectueux raquo RDSS 2011 pp 95-104

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

244

lrsquoauteur drsquoun diagnostic ou le dispensateur drsquoun traitement mais comme le fournisseur au

patient drsquoun produit dont il doit reacutepondre raquo535

461 Toutefois la Cour administrative drsquoappel de Lyon536

a eacuteteacute ameneacutee agrave se poser la

question de la compatibiliteacute de la directive europeacuteenne avec la jurisprudence du Conseil

drsquoEtat Degraves lors laquo dans lrsquohypothegravese de lrsquoincompatibiliteacute entre les deux reacutegimes de

responsabiliteacute La Cour Administrative drsquoappel de Lyon devait se demander si le reacutegime

jurisprudentiel deacutefini par le Conseil drsquoEtat pouvait ecirctre consideacutereacute comme un reacutegime speacutecial

preacuteexistant au sens de lrsquoarticle 1 preacuteciteacute de la directive de sorte que les deux reacutegimes

pourraient coexister de sorte que la victime pourrait selon ce qui lui est plus favorable

opter pour lrsquoun ou lrsquoautre raquo537

Ainsi dans sa deacutecision du 23 mars 2010 la Cour

Administrative drsquoAppel de Lyon rappelle drsquoabord que lorsqursquoun centre hospitalier fournit un

produit deacutefectueux agrave un patient mais que son producteur est connu seul ce dernier est

responsable des dommages causeacutes par le produit deacutefectueux Elle considegravere alors que le

reacutegime instaureacute par le Conseil drsquoEtat ne peut pas ecirctre consideacutereacute comme eacutetant un reacutegime

speacutecial de responsabiliteacute au sens de lrsquoarticle 13 de la directive et eacutecarte alors lrsquoapplication de

la jurisprudence MARZOUK au cas qui lui eacutetait soumis Puis dans une deacutecision du 4 octobre

2010538

le Conseil drsquoEtat qui eacutetait confronteacute agrave un problegraveme similaire a deacutecideacute de surseoir agrave

statuer jusqursquoagrave ce que la Cour de justice de lrsquoUnion europeacuteenne se prononce sur la question

suivante laquo compte tenu des dispositions de son article 13 la directive 85374CEE du 25

juillet 1985 permet-elle la mise en œuvre drsquoun reacutegime de responsabiliteacute fondeacute sur la situation

particuliegravere des patients des eacutetablissements publics de santeacute en tant qursquoil leur reconnait

notamment le droit drsquoobtenir de ces eacutetablissements en lrsquoabsence mecircme de faute de ceux-ci la

reacuteparation des dommages causeacutes par la deacutefaillance des produits et appareils qursquoils utilisent

sans preacutejudice de la possibiliteacute pour lrsquoeacutetablissement drsquoexercer un recours en garantie contre

le producteur raquo

535 PEIGNE Jeacuterocircme laquo Les tribulations de la responsabiliteacute hospitaliegravere du fait des produits de santeacute

deacutefectueux raquo op cit p 96 536

CAA Lyon 23 mars 2010 MF c CHU de Chambeacutery ndeg 06LY01195 537

VINET Camille laquo Responsabiliteacute de lrsquohocircpital du fait des produits deacutefectueux raquo AJDA 2010 p 1485-1487 538

CE 4 octobre 2010 Centre hospitalier universitaire de Besanccedilon ndeg 327449

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

245

462 Dans une deacutecision en date du 21 deacutecembre 2011539

la CJUE en clarifiant le champ

drsquoapplication de la directive 85374 du 25051985 relative agrave la responsabiliteacute du fait des

produits deacutefectueux apporte des preacutecisions quant agrave la responsabiliteacute des eacutetablissements

publics de santeacute en tant que prestataires de service

Le litige opposait le CHU de Besanccedilon agrave un patient au sujet de lrsquoindemnisation de

brucirclures qui lui avait eacuteteacute causeacute par un matelas chauffant dont le systegraveme de reacutegulation de

tempeacuterature eacutetait deacutefectueux Par jugement du 27 mars 2007 le CHU avait eacuteteacute condamneacute par

le TA de Besanccedilon agrave reacuteparer le dommage causeacute au patient en lui versant la somme de 9000

Euros (ainsi que 597499 Euros agrave la CPAM du Jura) Lrsquoappel que le CHU avait formeacute agrave

lrsquoencontre de cette deacutecision ayant eacuteteacute rejeteacute il srsquoeacutetait donc pourvu en cassation et le CE avait

deacutecideacute de surseoir agrave statuer La CJUE a consideacutereacute que laquo la responsabiliteacute drsquoun prestataire de

service qui utilise dans le cadre drsquoune prestation de services telles que des soins dispenseacutes au

milieu hospitalier des appareils ou des produits deacutefectueux dont il nrsquoest pas le producteur au

sens de la directive 85374 et cause de ce fait des dommages au beacuteneacuteficiaire de la prestation

ne relegraveve pas du champ drsquoapplication de cette directive Cette derniegravere ne srsquooppose degraves lors

pas agrave ce qursquoun Etat membre institue un tel reacutegime tel que celui en cause au principal

preacutevoyant la responsabiliteacute drsquoun tel prestataire agrave lrsquoeacutegard des dommages ainsi occasionneacutes

mecircme en lrsquoabsence de toute faute imputable agrave celui-ci agrave condition toutefois que soit

preacuteserveacutee la faculteacute pour la victime etou ledit prestataire de mettre en cause la responsabiliteacute

du producteur sur le fondement de ladite directive lorsque se trouvent remplies les conditions

preacutevues par celle-ci raquo

463 Ainsi la juridiction europeacuteenne renforce ici les droits des usagers puisque ceux-ci

auront la possibiliteacute de mettre en cause agrave la fois la responsabiliteacute de lrsquoeacutetablissement de santeacute

en sa qualiteacute de prestataire de service sur le fondement de la responsabiliteacute du service public

hospitalier du fait de la deacutefaillance des produits et appareils de santeacute mais eacutegalement la

responsabiliteacute du producteur du produit de lrsquoappareil deacutefaillant sur le fondement de lrsquoarticle

1245 du Code civil Dans lrsquohypothegravese drsquoun logiciel qualifieacute de dispositif meacutedical qui se

reacuteveacutelerait deacutefectueux ce sont donc ces dispositions qui trouveraient agrave srsquoappliquer

539 CJUE arrecirct de la Cour (grande chambre) du 21 deacutecembre 2011 Centre hospitalier universitaire de Besanccedilon

contre Thomas Dutrueux et Caisse primaire dassurance maladie du Jura Demande de deacutecision preacutejudicielle

Conseil dEacutetat - France Affaire C-49510

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

246

Mais lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge meacutedicale nrsquoinduit pas seulement

lrsquoutilisation de nouveaux outils Elle est eacutegalement synonyme de lrsquoarriveacutee de nouveaux

acteurs

B Nouveaux acteurs et nouvelles responsabiliteacutes

laquo Le CNOM attire donc lrsquoattention sur le fait que les prestataires techniques susceptibles

dintervenir dans une application de teacuteleacutemeacutedecine sont nombreux fabricants de mateacuteriels

mais aussi fournisseurs de solutions logicielles opeacuterateurs de teacuteleacutecommunications socieacuteteacutes

de maintenance Chacun drsquoeux porte la responsabiliteacute correspondant agrave sa prestationraquo540

464 Comme lrsquoindique agrave juste titre le CNOM dans son livre blanc sur la teacuteleacutemeacutedecine la

teacuteleacutemeacutedecine et mecircme plus geacuteneacuteralement lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du

patient a pour conseacutequence de faire intervenir plusieurs prestataires techniques dans la mise

en place lrsquoorganisation et la reacutealisation de lrsquoacte meacutedical Ainsi deacutesormais un nouvel acteur

intervient susceptible lui aussi drsquoengager sa responsabiliteacute en cas de dommage le tiers

technologique Cette notion bien que couramment utiliseacutee nrsquoa pas de reacuteelle deacutefinition leacutegale

Drsquoailleurs le deacutecret teacuteleacutemeacutedecine drsquooctobre 2010 reste muet agrave son sujet Il faut donc une fois

de plus nous tourner vers les regravegles de droit commun afin de tenter de deacutelimiter les

responsabiliteacutes de ce tiers technologique dans lrsquohypothegravese ougrave un patient subirait un preacutejudice

imputable agrave une deacutefaillance du mateacuteriel ou agrave lrsquoinstallation informatique utiliseacutee

465 Un logiciel drsquoaide agrave la prescription ou un dispositif de teacuteleacutemeacutedecine perdent leur

inteacuterecirct et peuvent mecircme devenir dangereux srsquoils sont mal utiliseacutes par les professionnels de

santeacute Nous ne nous attarderons pas ici sur les hypothegraveses drsquoutilisation inadeacutequate (ignorance

des dispositifs de seacutecuriteacute par exemple) ou neacutegligente (absence de controcircle de la prescription

du LAP par le professionnel de santeacute) qui entraineraient la mise en cause de sa responsabiliteacute

par les juges Nous preacutefeacuterons eacutetudier ici lrsquohypothegravese drsquoune mauvaise utilisation lieacutee agrave un

deacutefaut drsquoinformation ou de formation de la part du tiers technologique

540 Livre blanc du CNOM sur la teacuteleacutemeacutedecine 2009 p 12 disponible sur [httpwwwconseil-

nationalmedecinfr] Consulteacute le 15 mai 2017

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

247

466 En ce qui concerne la responsabiliteacute meacutedicale du tiers technologique certains auteurs

ont tregraves tocirct imagineacute de soumettre le fournisseur de mateacuteriel agrave lrsquoobligation de conseil

renforceacute541

En effet le caractegravere innovant des solutions et applications proposeacutees par ces

prestataires ainsi que le caractegravere profane des professionnels de santeacute comme des

eacutetablissements de santeacute en la matiegravere renforce selon la doctrine lrsquoobligation de conseil pesant

sur le tiers technologique

Cette theacuteorie nous semble au premier abord tregraves logique Elle est finalement

lrsquoapplication aux TIC en santeacute des regravegles classiques applicables en droit de la

consommation542

et deacuteveloppeacutees depuis longtemps par la jurisprudence Tout comme le

meacutedecin est redevable drsquoune obligation drsquoinformation vis-agrave-vis de son patient le tiers

technologique serait quant agrave lui redevable drsquoune obligation de conseil et drsquoinformation vis-agrave-

vis du meacutedecin Cette obligation drsquoinformation va mecircme plus loin puisque son respect passe

eacutegalement par lrsquoobligation pour le vendeur de se renseigner En effet celui-ci se doit

srsquoinformer au sujet de lrsquousage que lrsquoacheteur entend faire du produit destineacute agrave la vente543

A

charge pour lrsquoacheteur drsquoinformer le vendeur drsquoun eacuteventuel usage inhabituel de la chose

vendue qursquoil envisagerait drsquoeffectuer544

Ce devoir drsquoinformation est mecircme pour les juges de

la Haute juridiction un devoir de conseil le vendeur ne doit pas se contenter de renseigner

lrsquoacheteur sur le produit il doit eacutegalement accompagner cette information de conseils

notamment au sujet du caractegravere adapteacute du bien par rapport aux besoins de lrsquoacheteur

541 FORGERON Jean-Franccedilois BELAY Nathalie laquo Les applications de la teacuteleacutemeacutedecine des responsabiliteacutes

meacutedicales traditionnelles aux responsabiliteacutes techniques nouvelles raquo Gaz Pal 16 octobre 2001 ndeg 289 p 20 542

Lrsquoarticle L 111-1 du Code de la consommation preacutevoit que laquo avant que le consommateur ne soit lieacute par un

contrat de vente de biens ou de fourniture de services le professionnel communique au consommateur de

maniegravere lisible et compreacutehensible les informations suivantes

1deg Les caracteacuteristiques essentielles du bien ou du service compte tenu du support de communication utiliseacute et du

bien ou service concerneacute

2deg Le prix du bien ou du service en application des articles L 113-3 et L 113-3-1

3deg En labsence dexeacutecution immeacutediate du contrat la date ou le deacutelai auquel le professionnel sengage agrave livrer le

bien ou agrave exeacutecuter le service

4deg Les informations relatives agrave son identiteacute agrave ses coordonneacutees postales teacuteleacutephoniques et eacutelectroniques et agrave ses

activiteacutes pour autant quelles ne ressortent pas du contexte ainsi que sil y a lieu celles relatives aux garanties

leacutegales aux fonctionnaliteacutes du contenu numeacuterique et le cas eacutecheacuteant agrave son interopeacuterabiliteacute agrave lexistence et aux

modaliteacutes de mise en œuvre des garanties et aux autres conditions contractuelles La liste et le contenu preacutecis de

ces informations sont fixeacutes par deacutecret en Conseil dEtat raquo 543

Cass com 1er

deacutecembre 1992 ndeg 90-18238 laquo tout vendeur dun mateacuteriel doit afin que la vente soit conclue

en connaissance de cause sinformer des besoins de son acheteur et informer ensuite celui-ci des contraintes

techniques de la chose vendue et de son aptitude agrave atteindre le but rechercheacute raquo 544

Cass 1egravere

civ 20 juin 1995 ndeg 93-15801

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

248

Cependant ce raisonnement repose en partie sur le faible niveau drsquoexpeacuterience des

professionnels en la matiegravere Or avec le deacuteveloppement rapide de ces solutions ainsi que leur

utilisation croissante il nous faut nous poser la question de la relativiteacute du caractegravere profane

des professionnels en la matiegravere En effet aujourdrsquohui certains eacutetablissements en lien direct

avec les meacutedecins sont agrave lrsquoorigine de la conception de solutions innovantes degraves lors est-il

toujours leacutegitime drsquoenvisager une obligation de conseil renforceacutee Quand Jean-Franccedilois

FORGERON et Nathalie BELAY ont deacuteveloppeacute leur raisonnement en 2001 il reposait

notamment sur le postulat suivant laquo le faible deacuteveloppement sur le marcheacute des solutions de

teacuteleacutemeacutedecine induit un faible niveau dexpeacuterience des professionnels de santeacute inteacuteresseacutes et

accroicirct correacutelativement le peacuterimegravetre de lobligation de conseil des prestataires raquo Or ce nrsquoest

clairement plus le cas aujourdrsquohui Degraves lors peut-on toujours consideacuterer aujourdrsquohui les

professionnels de santeacute et surtout les eacutetablissements de santeacute comme des profanes crsquoest-agrave-

dire comme de simples consommateurs en matiegravere de TIC en santeacute

467 Jusqursquoagrave la loi du 17 mars 2014 dite loi HAMON545

il nrsquoexistait pas de deacutefinition

leacutegale de la notion de consommateur Cette loi a introduit au Code de la consommation un

article preacuteliminaire qui preacutevoit que laquo au sens du preacutesent code est consideacutereacutee comme un

consommateur toute personne physique qui agit agrave des fins qui nentrent pas dans le cadre de

son activiteacute commerciale industrielle artisanale ou libeacuterale raquo Cependant cette deacutefinition ne

concerne que les personnes physiques et non les personnes morales Quid de celles-ci Pour

reacutepondre agrave cette question il nous faut nous tourner vers la jurisprudence Ainsi la Haute

juridiction civile en srsquoappuyant sur la notion de laquo non-professionnel raquo que lrsquoon peut retrouver

au sein du Code de la consommation546

a reconnu dans un arrecirct du 15 mars 2005547

que les

personnes morales nrsquoeacutetaient pas exclues du dispositif leacutegal de protection contre les clauses

abusives Pour la jurisprudence une personne morale peut donc ecirctre consideacutereacutee comme eacutetant

un non-professionnel notion toutefois distincte de celle de consommateur mais pouvant

beacuteneacuteficier agrave ce titre de certaines protections preacutevues par le Code de la consommation Le

critegravere retenu pour qualifier une personne morale drsquoacheteur professionnel ou non

professionnel est celui du lien de lrsquoachat avec lrsquoactiviteacute exerceacutee La personne morale qui pour

545 Loi ndeg 2014-344 du 17 mars 2014 relative agrave la consommation JORF ndeg0065 du 18 mars 2014 p 5400

546 Article L 132-1 du Code de la consommation

547 Cass 1

egravere civ 15 mars 2005 ndeg 02-13285 D 2005 AJ p 887 obs RONDEY Ceacuteline

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

249

les besoins de son activiteacute conclurait un contrat dont lrsquoobjet ne relegraveve pas de lrsquoactiviteacute qursquoelle

exerce est donc consideacutereacutee comme non professionnelle

Dans notre cas un eacutetablissement de santeacute qui pour la prise en charge de ses patients

conclut un contrat avec un prestataire informatique pourrait donc ecirctre consideacutereacute comme non

professionnel et agrave ce titre beacuteneacuteficier de la protection contre les clauses abusives

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

250

Conclusion de section

468 La prise en charge agrave distance des patients par le biais des TIC nrsquoinduit pas lrsquoexistence

de nouveaux droits et crsquoest bien le droit commun applicable agrave tout acte meacutedical qui va trouver

agrave srsquoappliquer aux activiteacutes telles que la teacuteleacutemeacutedecine ou la prescription informatiseacutee Les

regravegles de responsabiliteacute meacutedicale restent eacutegalement inchangeacutees Neacuteanmoins lrsquointroduction

des TIC induit lrsquointervention au sein de la pratique meacutedicale de nouveaux outils mais

eacutegalement de nouveaux acteurs qui doivent ecirctre pris en compte De ce fait les regravegles de

responsabiliteacute applicables peuvent srsquoen trouver bousculeacutees notamment dans leur reacutepartition

entre les diffeacuterents acteurs

La difficulteacute pour les eacutetablissements de santeacute va reacutesider dans lrsquoidentification des

diffeacuterentes regravegles applicables qui comme nous lrsquoavons vu sont nombreuses et dont

lrsquoarticulation nrsquoest pas toujours aiseacutee agrave appreacutehender

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient

251

Conclusion du chapitre

469 Les TIC servent aujourdrsquohui agrave la prise en charge agrave distance des patients et les actes

reacutealiseacutes dans ce cadre beacuteneacuteficient drsquoune veacuteritable et solide reconnaissance juridique

Cependant le droit peine parfois agrave trouver sa place dans cette organisation En effet il ne peut

pas devancer la technique au risque de la freiner Mais il ne peut pas trop tarder non plus agrave

venir poser un cadre neacutecessaire au bon deacuteveloppement de ces pratiques Dans le cas de la

teacuteleacutemeacutedecine le leacutegislateur a tenteacute drsquoecirctre le plus concis et preacutecis agrave la fois certainement pour

ne pas alourdir une pratique deacutejagrave bien en place depuis une vingtaine drsquoanneacutees Cependant la

proceacutedure institutionnelle mise en place nrsquoa pas lrsquoeffet escompteacute eacutetant semeacutee de lourdeurs

administratives La simplification des deacutemarches mais eacutegalement la clarification du cadre

financier de lrsquoactiviteacute sont deux pistes agrave explorer afin que la teacuteleacutemeacutedecine puisse srsquoeacutepanouir

comme il se doit

470 Les eacutetablissements de santeacute sont eacutegalement fortement inciteacutes agrave srsquoattaquer agrave un autre

chantier important celui de lrsquoinformatisation du circuit du meacutedicament Mais les

eacutetablissements de santeacute et les professionnels de santeacute ne doivent pas oublier qursquoils disposent

depuis plus de dix ans maintenant de la possibiliteacute de deacutemateacuterialiser leurs prescriptions

meacutedicales Cette possibiliteacute est malheureusement trop peu exploiteacutee agrave ce jour Du point de vue

de la responsabiliteacute meacutedicale ces pratiques ne changent rien aux fondamentaux applicables en

droit de la santeacute Cependant il faut aujourdrsquohui prendre en compte les nouveaux outils agrave

disposition des professionnels de santeacute que sont les logiciels meacutedicaux ainsi que les

nouveaux acteurs que sont les tiers technologiques dans lrsquoapplication des regravegles de

responsabiliteacute

253

Conclusion du titre

471 Lrsquoutilisation des TIC dans la pratique meacutedicale permet la deacutemateacuterialisation des

eacutechanges avec le patient Les eacutetablissements de santeacute deacuteveloppent ainsi leurs DME

permettant le partage des donneacutees informatiseacutees du patient Dans ce contexte un seul DME

beacuteneacuteficie drsquoun cadre juridique qui lui est propre le DMP Fruit de la volonteacute du leacutegislateur de

mettre en place un dossier meacutedical partageacute au niveau national dont le patient serait titulaire

ce projet ambitieux nrsquoa cependant pas reacuteussi agrave trouver sa place apregraves plus de dix ans

drsquoexistences et plusieurs relances

472 La deacutemateacuterialisation de la prise en charge du patient conduit eacutegalement au

deacuteveloppement de pratiques meacutedicales agrave distance comme la teacuteleacutemeacutedecine Ces pratiques

eacutevoluent drsquoailleurs dans un cadre juridique assez clair Cependant mecircme si les regravegles en

matiegravere de droit du patient et de responsabiliteacute meacutedicale restent inchangeacutees leur application

peut se trouver quant agrave elle modifier de nouveaux outils et de nouveaux acteurs entrant en

jeu Les eacutetablissements de santeacute doivent donc appreacutehender ces nouvelles activiteacutes dans leur

globaliteacute afin de comprendre lrsquoensemble des conseacutequences juridiques qursquoelles peuvent

impliquer

255

Conclusion de la premiegravere partie

laquo Le droit nrsquoest pas perplexe ni deacutesarccedilonneacute devant lrsquoinnovation il la reacuteduit au deacutejagrave

connu raquo548

473 Les TIC outils en constantes eacutevolutions induisent de nombreux avantages qualitatifs

et financiers en terme de prise en charge meacutedicale ceci nrsquoest plus agrave deacutemontrer Mais ils

induisent eacutegalement des risques (notamment en ce qui concerne la confidentialiteacute des donneacutees

et la protection de la vie priveacutee du patient) et sont agrave lrsquoeacutevidence sources de grands

bouleversements pour la pratique meacutedicale Dans ce contexte le deacuteveloppement croissant de

la deacutemateacuterialisation de la prise en charge du patient a conduit le leacutegislateur agrave se pencher sur

ces pratiques Exercice difficile pour ce dernier qui doit se soucier de creacuteer un cadre propice

au deacuteveloppement de ces pratiques tout en veillant agrave proteacuteger les droits fondamentaux des

patients et agrave assurer aux eacutetablissements et aux professionnels de santeacute la seacutecurisation de leurs

activiteacutes Or agrave lrsquoheure actuelle le cadre juridique applicable agrave lrsquoutilisation des TIC dans la

pratique meacutedicale ne permet pas drsquoassurer cet eacutequilibre deacutelicat Les eacutetablissements de santeacute

peuvent rapidement se perdre dans les meacuteandres des diffeacuterentes regravegles de droit geacuteneacuteral et de

droit speacutecial qui trouvent agrave srsquoappliquer et certains projets se trouvent freineacutes ou restreints

474 Bien que nous ne consideacuterions pas qursquoil soit neacutecessaire de creacuteer un cadre juridique

speacutecifique agrave lrsquoutilisation des TIC en santeacute une reacutenovation du cadre juridique pourrait ecirctre

entreprise Cependant les voies de seacutecurisation des pratiques en la matiegravere sont multiples et

lrsquoensemble doit ecirctre repenseacute dans sa globaliteacute

548 LYON-CAEN Geacuterard laquo Deacutebat autour de lrsquoarrecirct Nikon France raquo Semaine Sociale Lamy nordm 1046 15 octobre

2001 Disponible sur [httplamylinelamyfr] Consulteacute le 16 janvier 2017

SECONDE PARTIE

LES VOIES DE SECURISATION DE

LrsquoUTILISATION DES TIC A LrsquoHOPITAL

258

laquo Les transformations induites par lrsquoavegravenement du numeacuterique dans la santeacute doivent

cependant srsquoaccomplir dans un cadre de confiance renouveleacute et adapteacute raquo549

475 Le succegraves du deacuteveloppement de lrsquoutilisation des TIC dans la pratique meacutedicale deacutepend

de plusieurs facteurs Une technique suffisamment mucircre pour ecirctre mise en place un modegravele

eacuteconomique viable et satisfaisant pour lrsquoensemble des acteurs un cadre juridique adapteacute en

font partie La confiance des utilisateurs - patients et professionnels - vis-agrave-vis des outils est

eacutegalement lrsquoun des facteurs essentiels au bon deacuteveloppement des TIC en santeacute Aujourdrsquohui

pourtant un franccedilais sur deux exprime leur meacutefiance vis-vis des pratiques de santeacute

deacutemateacuterialiseacutee craignant une menace pour le secret meacutedical550

De mecircme certains

professionnels de santeacute se montrent encore reacuteticents agrave lrsquoutilisation des TIC qui bouleversent

des pratiques ancreacutees depuis bien longtemps551

Pourtant la confiance et lrsquoadheacutesion des

professionnels et des eacutetablissements de santeacute agrave ces nouvelles pratiques est essentielle pour

pouvoir les diffuser et les faire eacutevoluer Pour assurer un deacuteveloppement serein et peacuterenne de

lrsquoutilisation des TIC en santeacute les eacutetablissements de santeacute doivent pouvoir œuvrer dans un

contexte seacutecuriseacute et donc rassurant Or aujourdrsquohui lrsquoinformatisation croissante de la pratique

meacutedicale creacutee de nombreuses interrogations juridiques eacutethiques et deacuteontologiques auxquelles

les eacutetablissements et les professionnels de santeacute nrsquoont pas toujours de reacuteponse fiable De

mecircme le manque de vision globale du deacuteveloppement de lrsquoutilisation des TIC dans la

pratique meacutedicale ne permet pas de donner aux diffeacuterentes initiatives le poids et les ressources

neacutecessaires agrave leur deacuteveloppement peacuterenne

476 Ce contexte drsquoinseacutecuriteacute pour les eacutetablissements de santeacute nrsquoest pas sans issue et

plusieurs voies existent pour permettre de seacutecuriser lrsquoutilisation des TIC en santeacute La premiegravere

voie repose sur les pouvoirs publics et leur capaciteacute agrave impulser cette deacutemarche de seacutecurisation

en prenant le soin drsquooffrir aux TIC en santeacute une gouvernance forte drsquoune part (chapitre

premier) et en reacutenovant le cadre juridique applicable (chapitre second) La seconde voie de

seacutecurisation repose sur les eacutetablissements de santeacute eux-mecircmes qui au cœur des pratiques

sont les plus agrave-mecircme de les seacutecuriser (chapitre premier) En la matiegravere lrsquoexemple du CHRU

de Lille peut ecirctre exposeacute (chapitre second)

549 CNOM laquo Deacutemateacuterialisation des documents meacutedicaux raquo 2010 p 4

550laquo E-santeacute la meacutedecine agrave lrsquoegravere du numeacuterique raquo Science et santeacute ndeg 29 2016 p 33

551 Ibid

TITRE 1

LrsquoIMPULSION DE LA SECURISATION AU

NIVEAU NATIONAL

260

laquo Faute drsquoune volonteacute politique forte et constante sur une dureacutee suffisante et drsquoune

gouvernance unifieacutee lrsquoe-santeacute et ses usages semblent donc condamneacutes agrave progresser de faccedilon

chaotique au greacute des annonces raquo552

477 Les pouvoirs publics ont un rocircle essentiel agrave jouer en ce qui concerne le deacuteveloppement

des TIC en santeacute En effet dans le contexte particulier de la santeacute fortement reacuteguleacute lrsquoaction

des pouvoirs publics en la matiegravere est essentielle553

Ainsi une des voies de seacutecurisation de

lrsquoutilisation des TIC dans la pratique meacutedicale repose sur lrsquoimpulsion que les pouvoirs publics

pourront donner en la matiegravere

Reacuteguliegraverement lrsquoabsence drsquoune autoriteacute forte de pilotage en matiegravere de deacuteveloppement

des TIC dans la pratique meacutedicale est pointeacutee du doigt Or il srsquoagit drsquoun eacuteleacutement essentiel

pour srsquoassurer de la mise en œuvre drsquoune action coordonneacutee Crsquoest pourquoi la prioriteacute doit

ecirctre aujourdrsquohui donneacutee agrave la peacuterennisation drsquoune gouvernance solide en matiegravere de TIC en

santeacute (chapitre premier)

En parallegravele le cadre juridique de lrsquoutilisation des TIC en santeacute doit ecirctre repenseacute

Comme nous lrsquoavons constateacute il nous faut aujourdrsquohui laquo recourir agrave une multitude de codes

diffeacuterents pour aborder dans sa globaliteacute la seule question des systegravemes drsquoinformation de

santeacute raquo554

Ceci est alors source drsquoinseacutecuriteacute juridique pour les acteurs et notamment les

eacutetablissements de santeacute Une reacutenovation de ce cadre juridique srsquoimpose donc (chapitre

second)

552 ROBIN Jean-Yves laquo Lrsquourgence numeacuterique Faire de la France un leader de lrsquoe-santeacute raquo LrsquoHarmattan 2015

p 168 553

Ibid 554

ROBIN Jean-Yves laquo Lrsquourgence numeacuterique Faire de la France un leader de lrsquoe-santeacute raquo op cit p 193

261

Chapitre 1

Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation

en santeacute une prioriteacute

laquo Administrer nrsquoest pas gouverner et lrsquoe-santeacute a plus besoin drsquoecirctre gouverneacutee

qursquoadministreacutee raquo555

478 Cette citation de Jean-Yves ROBIN ancien directeur de lrsquoASIP santeacute nrsquoest pas

anodine Elle est reacuteveacutelatrice du problegraveme majeur dans le deacuteveloppement de lrsquoe-santeacute en

France En invoquant ce qursquoil appelle la laquo tentation gestionnaire raquo de lrsquoEtat en matiegravere drsquoe-

santeacute lrsquoauteur souligne lrsquoabsence drsquoune reacuteelle conduite par lrsquoEtat des projets drsquoe-santeacute

pourtant neacutecessaire agrave un deacuteveloppement efficace et coheacuterent

Afin que lrsquoe-santeacute en France se deacuteveloppe de maniegravere unifieacutee et peacuterenne une

impulsion mais eacutegalement un cadre national doivent ecirctre instaureacutes Or la cartographie

actuelle de la gouvernance apparait comme complexe voire parfois illisible (Section I) et il

est essentiel que des choix clairs soient rapidement effectueacutes et un eacutequilibre trouveacute afin

drsquoinstaurer une gouvernance efficace (Section II)

555 ROBIN Jean-Yves laquo Lrsquourgence numeacuterique Faire de la France un leader de lrsquoe-santeacute raquo op cit p 88

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

262

Section 1 Lrsquoeacuteparpillement notable de la gouvernance actuelle

479 En matiegravere drsquoorganisation de la gouvernance de lrsquoe-santeacute lrsquoEtat a passeacute son temps agrave

eacuteparpiller les rocircles et les pouvoirs (Paragraphe I) en fonction des diffeacuterents projets

Aujourdrsquohui bien qursquoune gouvernance refondue soit en place la visibiliteacute sur les projets en

cours et leur gestion reste deacutelicate (Paragraphe 2)

sect1 Des difficulteacutes pour instaurer une gouvernance stable et efficace

480 La question de la gouvernance des projets drsquoe-santeacute en France fait deacutebat depuis de

nombreuses anneacutees Le chantier nrsquoest pas des moindres puisqursquoil srsquoagit drsquoencadrer de

conduire et de mener agrave termes des projets relatifs agrave des systegravemes drsquoinformations (SI)

diffeacuterents (SI des meacutedecins de ville SI hospitaliers SI de lrsquoassurance maladie) Notons

cependant que tout au long de notre deacuteveloppement nous nous attacherons plus

particuliegraverement agrave la gouvernance des systegravemes drsquoinformation de santeacute hospitaliers bien que

les systegravemes drsquoinformation de santeacute recouvrent un domaine bien plus large

Avant drsquoeacutetudier les critiques qui ont pu ecirctre formuleacutees au sujet des choix de

gouvernance des systegravemes drsquoinformation de santeacute hospitaliers (B) il nous est neacutecessaire de

faire un point sur lrsquohistorique en la matiegravere (A) Il srsquoagira ensuite drsquoexposer pour conclure les

propositions drsquoeacutevolution qui ont pu ecirctre faites (C)

A Lrsquoeacutevolution de la gouvernance des systegravemes drsquoinformation en santeacute en

France

481 De maniegravere scheacutematique la mise en place de la gouvernance des systegravemes

drsquoinformation en santeacute (SIS) a conduit agrave lrsquoeacutemergence de deux types drsquoacteurs drsquoune part les

structures de coordination (1) et drsquoautre part les structures opeacuterationnelles (2)

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

263

1) Les structures de coordination

482 Tregraves tocirct le Ministegravere de la santeacute avait souhaiteacute encadrer le deacuteveloppement de

lrsquoinformatique en santeacute A titre drsquoexemple lrsquoinformatisation des hocircpitaux publics avait fait

lrsquoobjet de deux circulaires556

procircnant lrsquointeacuterecirct drsquoassurer une coheacuterence nationale en termes de

gouvernance mais eacutegalement de donneacutees partageacutees et donc drsquointeropeacuterabiliteacute Pourtant le

pilotage global des politiques drsquoinformatisation du secteur de la santeacute avait eacuteteacute degraves 2007

consideacutereacute comme deacutefaillant par la commission des finances du Seacutenat557

Ce constat faisait

suite agrave un controcircle de la Cour des comptes sur linteropeacuterabiliteacute des systegravemes dinformation en

santeacute558

ainsi qursquoau chapitre X du rapport annuel de la Cour des comptes sur lrsquoapplication des

lois de financement de la seacutecuriteacute sociale paru en septembre 2007 et portant sur laquo le partage

des donneacutees entre les systegravemes drsquoinformation raquo559

483 En 2009 deux rapports560

commandeacutes par le Ministre de la santeacute de lrsquoeacutepoque

Madame Roselyne BACHELOT-NARQUIN preacutesentaient eacutegalement un regard assez dur sur

lrsquoeacutetat des lieux de la gouvernance des systegravemes drsquoinformation de santeacute en France Pour

comprendre la raison de ces critiques il est important de revenir sur les acteurs prenant part agrave

cette eacutepoque agrave la gouvernance des systegravemes drsquoinformation de santeacute hospitaliers

a) La Mission pour lrsquoinformatisation du systegraveme de santeacute

484 La Mission pour lrsquoinformatisation du systegraveme de santeacute (MISS) creacuteeacutee en 1997

quelques temps apregraves le Conseil Supeacuterieur des Systegravemes drsquoInformation de Santeacute561

(CSSIS)562

avait pour mission de coordonner lrsquoensemble des projets relatifs agrave

556 Circulaire ndeg16 du 18 novembre 1982 circulaire ndeg 275 du 6 janvier 1989 relative agrave linformatisation des

hocircpitaux publics non parue au JORF 557

JEacuteGOU Jean-Jacques laquo Systegravemes dinformation de santeacute le diagnostic est poseacute le traitement simpose raquo

rapport dinformation fait au nom de la commission des finances ndeg 35 Seacutenat 2007 558

Cour des comptes laquo Lrsquointeropeacuterabiliteacute des systegravemes drsquoinformation en santeacute raquo reacutefeacutereacute ndeg 46485 observations

deacutefinitives adresseacutees au Ministre de la santeacute et des solidariteacutes 2006 559

Cour des Comptes laquo La seacutecuriteacute sociale raquo rapport annuel chapitre X 2007 560

GAGNEUX Michel laquo Refonder la gouvernance de la politique dinformatisation du systegraveme de santeacute -

Douze propositions pour renforcer la coheacuterence et lefficaciteacute de laction publique dans le domaine des systegravemes

dinformation de santeacute raquo La documentation Franccedilaise 2009 et FIESHI Marius laquo La gouvernance de

linteropeacuterabiliteacute seacutemantique est au cœur du deacuteveloppement des systegravemes dinformation en santeacute raquo La

Documentation Franccedilaise juin 2009 561

Deacutecret ndeg 97-20 du 14 janvier 1997 portant creacuteation dun Conseil supeacuterieur des systegravemes dinformation de

santeacute JORF ndeg12 du 15 janvier 1997 p 712 562

Ce conseil qui avait pour mission deacutemettre des recommandations et des avis sur les problegravemes lieacutes agrave la

production agrave la transmission et aux modaliteacutes dexploitation des informations relatives aux soins et agrave la santeacute des

personnes a eacuteteacute mis en sommeil en 2000 Lrsquoarticle 5 du deacutecret ndeg2003-462 du 21 mai 2003 relatif aux

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

264

lrsquoinformatisation du systegraveme de santeacute en lien notamment avec les diffeacuterentes directions du

ministegravere concerneacute Pour ce faire un chargeacute de mission pour lrsquoinformatisation du systegraveme de

santeacute avait eacuteteacute nommeacute Trois champs prioritaires avaient eacuteteacute identifieacutes dans ses missions les

projets relatifs agrave la CPS le projet SESAM-Vitale et lrsquoinformatisation du poste de travail des

professionnels de santeacute563

485 Dans le cadre de son controcircle564

portant sur lrsquointeropeacuterabiliteacute des systegravemes

drsquoinformation en santeacute la Cour des comptes srsquoeacutetait inteacuteresseacutee agrave la MISS qui sur le papier tout

du moins faisait figure drsquoorgane central dans la gouvernance de lrsquoinformatisation du systegraveme

de santeacute Cependant il est tregraves vite apparu que la MISS nrsquoeacutetait pas en capaciteacute de remplir les

missions qui lui avaient eacuteteacute confieacutees Cela reacutesultait drsquoune part drsquoun manque de leacutegitimiteacute et

drsquoautre part drsquoun manque de moyens Le manque de leacutegitimiteacute a drsquoailleurs eacuteteacute souligneacute au

long des diffeacuterents rapports relatifs agrave lrsquoinformatisation du systegraveme de santeacute Alors que lrsquoIGAS

dans son rapport de 2002 soulignait que laquo le positionnement de la mission [avait] souffert de

la non invitation sauf exception du chargeacute de mission aux reacuteunions du comiteacute des directeurs

du ministegravere de la santeacute raquo565

la Cour des comptes quant agrave elle estimait que laquo la mission

[apparaissait] plus comme un organe facilitateur [hellip] que comme une uniteacute normative raquo566

Par ailleurs entre 2004 et 2006 la MISS a pacircti drsquoune absence de direction le chargeacute de

mission ayant quitteacute son poste et nrsquoayant eacuteteacute remplaceacute que tardivement Finalement le deacutecret

ndeg 2011-496 du 5 mai 2011 portant creacuteation dune deacuteleacutegation agrave la strateacutegie des systegravemes

dinformation de santeacute aupregraves des ministres chargeacutes de la santeacute de la seacutecuriteacute sociale des

solidariteacutes et de la coheacutesion sociale567

est venu supprimer la MISS qui avait fini par devenir

une coquille vide

b) Le Conseil supeacuterieur des systegravemes dinformation de santeacute

dispositions reacuteglementaires des parties I II et III du Code de la santeacute publique a finalement abrogeacute le deacutecret

creacuteant le CSSIS le faisant disparaitre par la mecircme occasion 563

Cour des Comptes laquo La seacutecuriteacute sociale raquo rapport annuel op cit p 35 564

Cour des comptes laquo Lrsquointeropeacuterabiliteacute des systegravemes drsquoinformation en santeacute raquo op cit 565

IGAS laquo Evaluation du systegraveme drsquoinformation des professionnels de santeacute raquo rapport ndeg 2002-142 novembre

2002 p 40 566

Cour des comptes laquo Lrsquointeropeacuterabiliteacute des systegravemes drsquoinformation en santeacute raquo op citp 36 567

Deacutecret ndeg 2011-496 du 5 mai 2011 portant creacuteation dune deacuteleacutegation agrave la strateacutegie des systegravemes dinformation

de santeacute aupregraves des ministres chargeacutes de la santeacute de la seacutecuriteacute sociale des solidariteacutes et de la coheacutesion sociale

JORF ndeg 0105 texte ndeg31

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

265

486 Creacuteeacute en 1997568

le Conseil supeacuterieur des systegravemes dinformation de santeacute (CSSIS)

placeacute aupregraves du Ministre de la santeacute avait pour missions principales laquo deacutemettre des

recommandations et des avis sur les problegravemes lieacutes agrave la production agrave la transmission et aux

modaliteacutes dexploitation des informations relatives aux soins et agrave la santeacute des personnes raquo569

mais eacutegalement et il srsquoagissait selon nous de sa mission essentielle de veiller laquo agrave la

coheacuterence agrave la seacutecuriteacute et au caractegravere eacutevolutif des programmes dinteacuterecirct geacuteneacuteral dont il est

ameneacute agrave connaicirctre notamment en ce qui concerne les outils daide agrave la pratique meacutedicale et

les reacuteseaux destineacutes aux eacutechanges dinformation de santeacute raquo570

En parallegravele de ces fonctions

le CSSIS avait la possibiliteacute de proposer au Ministre de la santeacute de faire proceacuteder agrave des eacutetudes

ou investigations par lrsquoIGAS Cependant il nrsquoa pas utiliseacute lrsquoensemble des moyens qui eacutetaient

agrave sa disposition

Apregraves trois anneacutees drsquoexercice pourtant assez riches et trois rapports drsquoactiviteacute le

mandat des membres arrivait agrave terme et sa composition nrsquoa pas eacuteteacute renouveleacutee Ainsi

lrsquoactiviteacute du CSSIS a eacuteteacute mise en sommeil et cet organe disparaitra deacutefinitivement lors de la

creacuteation de la DSSIS

2) Les structures opeacuterationnelles

A cocircteacute des structures deacutedieacutees agrave la coordination existaient des structures plus

opeacuterationnelles

a) Le groupement pour la modernisation du systegraveme dinformation hospitalier

487 Le groupement pour la modernisation du systegraveme dinformation hospitalier (GMSIH)

dont la convention constitutive avait eacuteteacute approuveacutee par arrecircteacute ministeacuteriel en date du 23 feacutevrier

2000571

avait pour mission de laquo concourir dans le cadre geacuteneacuteral de la construction du

systegraveme dinformation de santeacute agrave la mise en coheacuterence agrave linteropeacuterabiliteacute agrave louverture et agrave

la seacutecuriteacute des systegravemes dinformation utiliseacutes par les eacutetablissements de santeacute membres raquo

Initialement constitueacute pour une dureacutee de cinq ans il a ensuite eacuteteacute prorogeacute de deux anneacutees

568 Deacutecret ndeg 97-20 du 14 janvier 1997 portant creacuteation dun Conseil supeacuterieur des systegravemes dinformation de

santeacute JORF ndeg12 du 15 janvier 1997 p 712 569

Id Article 1er

570

Ibid 571

Arrecircteacute du 23 feacutevrier 2000 relatif agrave la nomination dun commissaire du Gouvernement aupregraves du groupement

dinteacuterecirct public deacutenommeacute laquo Groupement pour la modernisation du systegraveme dinformation hospitalier raquo JORF

ndeg49 du 27 feacutevrier 2000 p 3082

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

266

suppleacutementaires par un arrecircteacute du 5 octobre 2004572

Comme le preacutevoyait lrsquoarticle L 6113-10

du Code de la santeacute publique applicable agrave lrsquoeacutepoque573

le GIP eacutetait composeacute des

eacutetablissements publics de santeacute volontaires574

Par ailleurs les repreacutesentants des membres du

GIP agrave lrsquoassembleacutee geacuteneacuterale et au conseil drsquoadministration eacutetaient deacutesigneacutes par les

organisations repreacutesentatives des eacutetablissements membres575

En termes drsquoactiviteacute la

convention constitutive du groupement exposait clairement qursquoil nrsquoeacutetait laquo nest ni deacuteveloppeur

ni maicirctre douvrage dapplicatifs raquo Comme le souligne la Cour des comptes dans son rapport

le GMSIH apparaissait donc plutocirct comme un laquo centre de ressources et drsquoexpertise constitueacute

en vue drsquoeacutelaborer des orientations strateacutegiques raquo576

Le GMSIH srsquoest eacutegalement reacuteveacuteleacute avoir

un rocircle drsquointermeacutediaire entre la Direction de lrsquoHospitalisation de lrsquoOffre de Soins (DHOS)577

agrave lrsquoinitiative des projets et les eacutetablissements de santeacute en charge de lrsquoexeacutecution de ces

projets

572 Arrecircteacute du 5 octobre 2004 JORF ndeg 256 du 3 novembre 2004 p 18563

573 laquo Un groupement pour la modernisation du systegraveme dinformation hospitalier est chargeacute de concourir dans

le cadre geacuteneacuteral de la construction du systegraveme dinformation de santeacute agrave la mise en coheacuterence agrave

linteropeacuterabiliteacute agrave louverture et agrave la seacutecuriteacute des systegravemes dinformation utiliseacutes par les eacutetablissements de santeacute

qui en sont membres Sous reacuteserve des dispositions du preacutesent article il est soumis aux dispositions de larticle

21 de la loi ndeg 82-610 du 15 juillet 1982 dorientation et de programmation pour la recherche et le

deacuteveloppement technologique de la France La convention constitutive du groupement est approuveacutee par un

arrecircteacute des ministres chargeacutes de la santeacute et des affaires sociales Ce groupement est constitueacute pour une dureacutee qui

ne peut exceacuteder sept ans sous la forme dun groupement dinteacuterecirct public entre des eacutetablissements publics de

santeacute volontaires Les eacutetablissements de santeacute priveacutes peuvent y adheacuterer Les organisations repreacutesentatives des

eacutetablissements membres du groupement figurant sur une liste arrecircteacutee par le ministre chargeacute de la santeacute

deacutesignent les repreacutesentants des membres agrave lassembleacutee geacuteneacuterale et au conseil dadministration Les

repreacutesentants deacutesigneacutes par lorganisation repreacutesentative des eacutetablissements publics de santeacute disposent de la

majoriteacute des voix au sein de chacune de ces instances [hellip] raquo 574

Arrecircteacute du 23 feacutevrier 2000 portant approbation de la convention constitutive dun groupement dinteacuterecirct public

JORF ndeg49 du 27 feacutevrier 2000 p 3081 575

Arrecircteacute du 17 deacutecembre 1999 pris en application de larticle L 710-8 du Code de la santeacute publique et relatif

aux organisations chargeacutees de deacutesigner les repreacutesentants des eacutetablissements de santeacute membres du groupement

pour la modernisation du systegraveme dinformation hospitalier au sein des organes deacutelibeacuterants dudit groupement

JORF ndeg297 du 23 deacutecembre 1999 p 19108 576

Cour des Comptes laquo La seacutecuriteacute sociale raquo op cit p 45 577

Direction de lrsquoHospitalisation et de lrsquoOffre de Soins devenue la Direction Geacuteneacuterale de lrsquoOffre de Soins

depuis le deacutecret ndeg 2010-271 portant organisation de la direction geacuteneacuterale de loffre de soins JORF ndeg0063 du 16

mars 2010 texte ndeg 36

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

267

b) La Mission Nationale drsquoAppui agrave lrsquoInvestissement Hospitalier

488 La Mission nationale drsquoappui agrave lrsquoinvestissement hospitalier (MAINH) a eacuteteacute creacuteeacutee dans

le cadre de la mise en œuvre du plan hocircpital 2007 par arrecircteacute du ministegravere de la santeacute578

Cette

mission eacutetait chargeacutee laquo daccompagner techniquement le programme de reacutenovation du

patrimoine hospitalier preacutevu dans le plan laquo Hocircpital 2007 raquo579

Elle eacutetait placeacutee sous la direction drsquoun directeur deacutetacheacute aupregraves de lrsquoARH Ile-de-

France qui en assurait la gestion administrative et financiegravere Lrsquoarrecircteacute nrsquoapporte aucun deacutetail

suppleacutementaire quant agrave son fonctionnement et ses missions Dans les faits cette mission a

piloteacute le plan hocircpital ainsi que les budgets qui lui eacutetaient deacutedieacutes En 2005 un arrecircteacute a eacutetendu

ses compeacutetences aux systegravemes drsquoinformation hospitaliers580

La MAINH a eacuteteacute tregraves vite critiqueacutee sur son organisation Ainsi la Cour des comptes

degraves 2006 pointait du doigt son rattachement administratif agrave lrsquoARH drsquoIle-de-France ainsi que

son positionnement direct aupregraves du Ministre de la santeacute Ce rapport soulignait eacutegalement la

probleacutematique de lrsquoeacuteclatement des compeacutetences et des responsabiliteacutes entre drsquoune part la

DHOS et drsquoautre part la MAINH en matiegravere drsquoorganisation et de gestion des systegravemes

drsquoinformation hospitaliers Cette absence de partage clair et preacutecis des responsabiliteacutes ajouteacutee

agrave une absence de preacutecisions quant aux liens existants entre DHOS et MAINH a compliqueacute le

processus deacutecisionnel et a fragiliseacute la coheacuterence globale de lrsquoaction de lrsquoEtat sur ce sujet

Dans son rapport de novembre 2007 sur lrsquointeropeacuterabiliteacute la Cour des Comptes

soulignait la possible redondance de la MAINH avec le GMSIH

Malgreacute la mise en place drsquoun protocole de coopeacuteration entre les deux structures ainsi

que la reacuteunion trimestrielle drsquoun comiteacute de pilotage le pilotage des SIH par le biais de ces

structures srsquoest reacuteveacuteleacute chronophage et consommateur de ressources tant humaines que

financiegraveres

578 Arrecircteacute du 27 mars 2003 portant deacutesignation du directeur et organisation de la mission nationale dappui agrave

linvestissement hospitalier JORF du 2 avril 2003 p 5817 579

Ibid 580

Arrecircteacute du 1er juillet 2005 modifiant larrecircteacute du 27 mars 2003 portant deacutesignation du directeur et organisation

de la mission nationale dappui agrave linvestissement hospitalier JORF du 5 aoucirct 2005 texte ndeg 62

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

268

La MAINH et le GMSIH ont finalement disparu pour laisser place en 2011 agrave la

Deacuteleacutegation agrave la Strateacutegie des Systegravemes drsquoInformation de Santeacute (DSSIS) qui constitue

deacutesormais la seule structure de coordination des politiques relatives aux systegravemes

drsquoinformation de santeacute

c) Les GIP DMP et CPS

489 Suite agrave la creacuteation du DMP par la loi du 13 aoucirct 2004581

le Groupement de

preacutefiguration du DMP (communeacutement appeleacute GIP-DMP) a vu le jour Ce groupement

composeacute de lEtat de la Caisse nationale dassurance maladie des travailleurs salarieacutes et de la

Caisse des deacutepocircts et consignations et dont la convention constitutive a eacuteteacute approuveacutee par un

arrecircteacute du 11 avril 2005582

avait pour mission principale de preacuteparer les dispositions qui

permettraient agrave lrsquoorganisme gestionnaire du DMP drsquoecirctre opeacuterationnel Ses fonctions eacutetaient

donc temporaires dans lrsquoattente de la mise en place drsquoune structure peacuterenne Il fut drsquoailleurs

initialement creacuteeacute pour une dureacutee tregraves courte puisque sa convention constitutive preacutevoyait sa

disparition au 31 deacutecembre 2005

Cependant un arrecircteacute du 28 deacutecembre 2005583

a prorogeacute la vie de ce GIP jusquau 30

juin 2007 eacutetant par ailleurs preacuteciseacute qursquoil avait laquo vocation agrave cesser dexister degraves que

lorganisme gestionnaire du dossier meacutedical personnel aura eacuteteacute mis en place et sera en

mesure daccomplir ses missions raquo En effet face au retard consideacuterable pris dans la mise en

place du DMP les pouvoirs publics nrsquoont pas eu drsquoautre choix que de maintenir ce GIP La

Cour des comptes lors de son controcircle des comptes et de la gestion du GIP avait eu

lrsquooccasion de mettre en exergue le deacutecalage qui existait entre drsquoune part lrsquoampleur du projet

et drsquoautre part le peu de moyens accordeacutees agrave ce que la Cour qualifiait de laquo petite structure raquo

(65 emplois et 23 millions drsquoeuros de deacutepenses en 2007)584

A lrsquooccasion de ce controcircle

plusieurs points neacutegatifs avaient eacuteteacute releveacutes Il eacutetait notamment reprocheacute au GIP son

autonomie trop limiteacutee lrsquoEtat intervenant plus que de raison dans son fonctionnement ainsi

que sa gouvernance deacuteficiente reacutesultant directement de cette intervention constante de lrsquoEtat

581 Loi ndeg 2004-810 du 13 aoucirct 2004 relative agrave lassurance maladie JORF ndeg0190 du 17 aoucirct 2004 p 14598

582 Arrecircteacute du 11 avril 2005 portant approbation de la convention constitutive dun groupement dinteacuterecirct public

JORF ndeg85 du 12 avril 2005 p 6547 583

Arrecircteacute du 28 deacutecembre 2005 portant approbation des modifications apporteacutees agrave la convention constitutive du

groupement de preacutefiguration du dossier meacutedical personnel JORF ndeg304 du 31 deacutecembre 2005 p 20903 584

laquo La gestion du GIP Dossier meacutedical personnel raquo rapport public annuel de la Cour des comptes feacutevrier 2009

pp 135-151

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

269

Par ailleurs les faiblesses de la maicirctrise drsquoouvrage pourtant au cœur de ses missions et le

manque drsquointeacuterecirct du GIP pour la qualiteacute et la seacutecuriteacute du systegraveme avaient eacutegalement eacuteteacute

souligneacutees

Ce rapport est toutefois intervenu comme la Cour le souligne elle-mecircme agrave un moment ougrave

laquo les pouvoirs publics prenaient enfin conscience de lrsquoirreacutealisme du projet et deacutecidaient

drsquoattendre le reacutesultat des missions drsquoenquecirctes avant de le relancer raquo585

Parmi ces missions

drsquoenquecircte on retrouve notamment le Rapport de la mission de relance du DMP rendu en avril

2008 par Michel GAGNEUX586

ou encore le Rapport sur le dossier meacutedical personnel

preacutesenteacute par Pierre LABORDES au Seacutenat en avril 2009587

Ces deux rapports dressaient un

bilan mitigeacute du DMP et preacuteconisaient une relance du projet comprenant une refonte de sa

gouvernance et de son organisation geacuteneacuterale

Ces rapports ne sont pas les seuls agrave srsquoecirctre attardeacutes sur le sujet et entre 2007 et 2009

plusieurs institutions se sont pencheacutees sur la probleacutematique de la gouvernance des systegravemes

drsquoinformation de santeacute En est ressorti un bilan assez critique de lrsquoorganisation en place

B Un bilan mitigeacute

490 La Cour des comptes en eacutetudiant la question de lrsquointeropeacuterabiliteacute des systegravemes

drsquoinformation (1) et lrsquoIGAS (2) ont eu lrsquooccasion drsquoobserver la gouvernance des systegravemes

drsquoinformation de santeacute de maniegravere assez preacutecise

1) Les rapports de la Cour des comptes

La Cour des comptes srsquoest pencheacutee agrave plusieurs reprises sur la question de lrsquointeropeacuterabiliteacute

des systegravemes drsquoinformation de santeacute eacutetudes menant irreacutemeacutediablement agrave srsquointerroger sur lrsquoeacutetat

de la gouvernance des projets drsquoe-santeacute en France

585 Id p 135

586 GAGNEUX Michel laquo Pour un dossier patient virtuel et partageacute et une strateacutegie nationale des systegravemes

drsquoinformation de santeacute raquo La Documentation Franccedilaise 2008 587

ETIENNE Jean-Claude LABORDES Pierre laquo Le dossier meacutedical personnel (DMP) quel bilan deacutetape

pour quelles perspectives raquo rapport fait au nom de lOffice parlementaire deacutevaluation des choix scientifiques

et technologiques Seacutenat ndeg 567 2009

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

270

491 A lrsquooccasion drsquoun controcircle portant sur lrsquointeropeacuterabiliteacute des systegravemes drsquoinformation en

santeacute drsquoabord la Cour avait conclu que les conditions neacutecessaires agrave lrsquoameacutelioration de

lrsquointeropeacuterabiliteacute nrsquoeacutetaient pas reacuteunies et ce en grande partie agrave cause drsquoun deacutefaut de pilotage

central Dans son reacutefeacutereacute agrave lrsquoattention du Ministre de la santeacute et des solidariteacutes le Premier

Preacutesident de la Cour des comptes relevait que laquo face agrave des acteurs multiples aux inteacuterecircts non

convergents lrsquoEtat nrsquoa pas su organiser un pilotage efficace raquo La Cour reconnaissait ici le

contexte compliqueacute auquel lrsquoEtat eacutetait confronteacute mais nrsquooubliait pas pour autant de rappeler

que lrsquoabsence de lisibiliteacute de la politique meneacutee par le Ministegravere de la santeacute en la matiegravere

nrsquoavait cesseacute drsquoecirctre pointeacutee du doigt depuis le deacutebut des anneacutees 2000 Au moment de son

controcircle la Cour deacuteplorait ainsi lrsquoinexistence drsquoun document de cadrage opposable aux

diffeacuterentes directions du ministegravere mais eacutegalement agrave lrsquoensemble des acteurs concerneacutes par le

systegraveme drsquoinformation en santeacute et reprenant les grandes orientations de ce que devrait ecirctre ce

systegraveme drsquoinformation588

492 A lrsquooccasion de son rapport annuel sur lrsquoapplication des lois de financement ensuite

rendu en septembre 2007 la Cour des comptes avait consacreacute un chapitre au partage des

donneacutees entre les systegravemes drsquoinformation de santeacute Cela avait eacuteteacute lrsquooccasion pour la

juridiction drsquoeacutemettre une recommandation touchant plus particuliegraverement agrave la probleacutematique

de la gouvernance des systegravemes drsquoinformation en santeacute Elle avait alors preacuteconiseacute de reacuteduire

le nombre drsquoopeacuterateurs des systegravemes drsquoinformation en santeacute et renforcer le pilotage

strateacutegique par le Ministegravere Pour la Cour il apparaissait de maniegravere eacutevidente et agrave juste titre

selon nous que lrsquoameacutelioration de la gouvernance passerait obligatoirement par une

simplification de lrsquoorganigramme des acteurs concerneacutes mais surtout par une reprise en main

par lrsquoEtat du pilotage global du systegraveme drsquoinformation de santeacute afin drsquoen assurer la coheacuterence

geacuteneacuterale Un pilotage strateacutegique fort par le Ministegravere appuyeacute par des structures

opeacuterationnelles efficaces et reacuteduites en nombre apparaissait comme la solution de

lrsquoameacutelioration de la gouvernance des systegravemes drsquoinformation en santeacute Crsquoest par ailleurs

comme nous le verrons la solution adopteacutee lors de la refonte de la gouvernance agrave partir de

2009

588 Cour des comptes laquo Lrsquointeropeacuterabiliteacute des systegravemes drsquoinformation en santeacute raquo op cit p 23

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

271

2) Le rapport de lrsquoIGAS

493 LrsquoIGAS dans le cadre de son activiteacute 2006 a eacuteteacute ameneacute agrave se pencher sur

lrsquoorganisation et sur le pilotage des organismes en charge du deacuteveloppement des systegravemes

drsquoinformation de santeacute589

Sa feuille de route eacutetait alors tregraves claire elle devait laquo proceacuteder

[hellip] agrave lrsquoaudit de lrsquoorganisation du pilotage de ces dispositifs en vue de veacuterifier leur coheacuterence

drsquoensemble et drsquoeacutevaluer la qualiteacute du pilotage de chaque structure ainsi que lrsquoefficaciteacute et la

coheacuterence du pilotage global du systegraveme par lrsquoEtat raquo590

Cet audit srsquoest donc inteacuteresseacute

pleinement agrave la gouvernance des systegravemes drsquoinformation de santeacute et il en a reacutesulteacute des

recommandations concregravetes et efficaces certaines ayant drsquoailleurs eacuteteacute mises en œuvre depuis

lors

494 Lrsquointeacuterecirct principal de cette eacutetude de lrsquoIGAS reacuteside selon nous dans lrsquoanalyse fine qui

y est faite du pilotage des diffeacuterents organismes intervenant dans la gouvernance et la mise en

place des systegravemes drsquoinformation en santeacute En effet comme nous lrsquoavons vu plusieurs types

de structures ont coexisteacute allant des missions eacutemanations directes du Ministegravere aux GIP

formule principalement privileacutegieacutee par lrsquoEtat Le choix du groupement reacuteveacutelateur de la

volonteacute de faire travailler ensemble deux acteurs essentiels du systegraveme de santeacute (le Ministegravere

de la santeacute et lrsquoassurance maladie) a permis agrave lrsquoEtat de srsquoengager dans des projets et drsquoen

garder le controcircle pendant que la CNAMTS les financcedilait Par exemple comme le relegraveve

lrsquoIGAS laquo la creacuteation du GIP-DMP permet-elle agrave lrsquoEtat de financer sur des ressources de

lrsquoassurance maladie un projet reacutepondant drsquoabord agrave des objectifs de santeacute publique raquo Nous

ajouterons eacutegalement que ce choix est plus que strateacutegique en termes drsquoaffichage politique En

effet un projet comme celui du DMP par exemple qui serait entiegraverement financeacute et geacutereacute par

lrsquoAssurance maladie serait alors consideacutereacute principalement comme un projet de reacutegulation des

deacutepenses et de controcircle des professionnels alors que ce mecircme projet geacutereacute par un GIP dont

lrsquoEtat est membre redevient un projet de santeacute publique au service des usagers du systegraveme de

santeacute avant tout

589 IGAS laquo Audit de lrsquoorganisation et du pilotage des organismes œuvrant agrave lrsquoinformatisation du systegraveme de

santeacute raquo op cit 590

Id p 1

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

272

495 Neacuteanmoins cette multiplication des projets et des GIP les geacuterant a multiplieacute les

repreacutesentations de lrsquoEtat qui srsquoest de fait eacuteparpilleacute Il a par ailleurs eacuteteacute constateacute un

cloisonnement entre les diffeacuterentes directions du Ministegravere en charge de la tutelle des

diffeacuterents GIP Ainsi aucune coordination nrsquoeacutetait assureacutee entre la DHOS la Direction de la

Seacutecuriteacute Sociale (DSS) ou encore la Direction Geacuteneacuterale de la Santeacute (DGS) alors qursquoune mise

en commun de leurs personnel speacutecialiseacute de leurs expertises mais eacutegalement une deacutefinition

drsquoobjectifs communs aurait eacuteteacute souhaitable Enfin lrsquoensemble de ces structures concentreacutees

sur un projet technique preacutecis a deacuteveloppeacute des compeacutetences et expertises techniques pointues

au prix drsquoune certaine redondance entre les structures elles-mecircmes alors qursquoune mutualisation

aurait eacuteteacute plus efficiente et eacuteconomique

Cette conception verticale de la reacutealisation des projets591

a finalement affaibli

lrsquoefficaciteacute de la gouvernance en place

C Les propositions GAGNEUX et FIESHI

496 Missionneacute par le Ministre de la santeacute de lrsquoeacutepoque Madame Roselyne BACHELOT-

NARQUIN Michel GAGNEUX alors Preacutesident du Groupement drsquoInteacuterecirct public DMP a

rendu un rapport en mai 2009 comportant laquo 12 propositions pour renforcer la coheacuterence et

lrsquoefficaciteacute de lrsquoaction publique dans le domaine des systegravemes drsquoinformation de santeacute raquo592

Pour lrsquoinspecteur geacuteneacuteral des affaires sociales ce sont bien les diverses probleacutematiques

rencontreacutees lors des tentatives de deacuteveloppement du DMP qui ont mis en exergue la faiblesse

de la gouvernance du systegraveme drsquoinformation en santeacute Il ressortait de ce rapport qursquoune

gouvernance efficace et coheacuterente devait reposer sur une strateacutegie nationale globale en

matiegravere de systegravemes drsquoinformation de santeacute Lrsquoensemble des objectifs mais eacutegalement des

scheacutemas directeurs des projets de leur coheacuterence et de leurs budgets devait eacutemaner de

lrsquoeacutechelon national Michel GAGEUX proposait pour cela de mettre en place un conseil

national des systegravemes drsquoinformation de santeacute dont la compeacutetence serait eacutetendue agrave lrsquoensemble

du champ de la santeacute et posseacutedant une leacutegitimiteacute forte (en eacutetant notamment institueacute par la loi

591 GRATIEUX Laurent OLLIVIER Roland laquo Audit de lrsquoorganisation et du pilotage des organismes œuvrant agrave

lrsquoinformatisation du systegraveme de santeacute raquo IGAS p 10 592

GAGNEUX Michel laquo Refonder la gouvernance de la politique dinformatisation du systegraveme de santeacute -

Douze propositions pour renforcer la coheacuterence et lefficaciteacute de laction publique dans le domaine des systegravemes

dinformation de santeacute raquo op cit

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

273

et preacutesideacute par le Ministre de la santeacute) Par ailleurs le rapport soulignant lrsquoinadeacutequation des

moyens et preacuterogatives de la MISS avec ses objectifs proposait la disparition de la mission et

la creacuteation au sein du ministegravere drsquoune Direction de la strateacutegie et de la prospective des

systegravemes drsquoinformation de santeacute Pour Michel GAGNEUX seule une direction placeacutee au

niveau exeacutecutif et disposant de lrsquoexpertise et de la leacutegitimiteacute neacutecessaire serait capable de

feacutedeacuterer lrsquoensemble des acteurs impliqueacutes afin de mettre en place une politique coheacuterente593

Le rapport insistait enfin sur la neacutecessiteacute de deacutevelopper et professionnaliser la maicirctrise

drsquoouvrage qui devait srsquoorganiser agrave la fois agrave lrsquoeacutechelon national et plus speacutecifiquement au

niveau des directions techniques du Ministegravere de la santeacute mais eacutegalement au niveau reacutegional

et plus particuliegraverement des ARS

497 Le Professeur Marius FIESHI quant agrave lui a rendu en juin 2009 un rapport intituleacute

laquo La gouvernance de lrsquointeropeacuterabiliteacute seacutemantique est au cœur du deacuteveloppement des

systegravemes drsquoinformation en santeacute raquo594

Ce rapport axait son eacutetude sur lrsquoopportuniteacute de

lrsquoutilisation de systegravemes terminologiques communs dans le cadre du deacuteveloppement de

lrsquoinformatisation du systegraveme de santeacute et ce afin drsquoameacuteliorer notamment la prise en charge des

patients A lrsquooccasion de son eacutetude du sujet sur laquelle nous aurons lrsquooccasion de revenir au

cours de nos travaux le Professeur FIESHI a abordeacute la question de la gouvernance des

systegravemes drsquoinformation Son constat eacutetait tregraves simple pour lui le Ministegravere ne srsquoeacutetait pas

suffisamment preacuteoccupeacute de la question de la cette gouvernance A lrsquoappui de ce constat il

citait divers rapports pour conclure sur une critique sans appel laquo en lrsquoabsence de scheacutema

directeur un ensemble de projets ne conduit pas agrave un systegraveme raquo595

En effet lrsquoorganisation

existante lors de la reacutedaction de ce rapport eacutetait baseacutee sur des projets successifs meneacutes de

maniegravere indeacutependante et sans maicirctrise drsquoouvrage commune donc sans gouvernance reacuteelle

498 Ces deux rapports publieacutes agrave quelques mois drsquointervalles ont permis drsquoamorcer une

refonte de la gouvernance agrave lrsquoinitiative du Ministegravere de la santeacute En effet les propositions du

rapport de Michel GAGNEUX ont conduit la ministre de la santeacute agrave le missionner afin de

conduire une mission de preacutefiguration en lien avec le secreacutetaire geacuteneacuteral des ministegraveres

593 Id p 6

594 FIESHI Marius laquo La gouvernance de linteropeacuterabiliteacute seacutemantique est au cœur du deacuteveloppement des

systegravemes dinformation en santeacute raquo La Documentation Franccedilaise juin 2009 595

Id p 30

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

274

chargeacutes des affaires sociales afin de creacuteer et installer notamment la deacuteleacutegation agrave la strateacutegie

des systegravemes drsquoinformation de santeacute

Cette nouvelle gouvernance montre cependant elle aussi quelques limites

sect2 Un manque de visibiliteacute sur la gouvernance des projets en cours

499 Face aux critiques eacutemises et dans un souci drsquoassurer une gestion coheacuterente des SIS la

refonte agrave partir de 2009 de lrsquoorganisation lieacutee agrave leur gouvernance a permis drsquoaboutir agrave un

nouvel organigramme (A) Neacuteanmoins celui-ci montre encore aujourdrsquohui quelques limites

rendant difficile la visibiliteacute sur les projets en cours (B)

A Le nouvel organigramme de la gouvernance des SIS

500 Comme auparavant la structure est resteacutee scheacutematiquement la mecircme agrave savoir des

structures drsquoappui opeacuterationnelles (2) en charge de la maicirctrise drsquoouvrage de certains projets et

une structure de coordination (1) doteacutee cette fois-ci drsquoune leacutegitimiteacute et de moyens drsquoaction

plus forts que ses preacutedeacutecesseurs

1) Une structure de coordination la deacuteleacutegation agrave la strateacutegie des systegravemes drsquoinformation

de santeacute

501 Pour plus de lisibiliteacute mais eacutegalement drsquoefficaciteacute la MISS et le CSSIS ont disparu

pour laisser place agrave la Deacuteleacutegation agrave la Strateacutegie des Systegravemes drsquoInformation de Santeacute (DSSIS)

placeacutee sous lrsquoautoriteacute du secreacutetariat geacuteneacuteral des ministegraveres chargeacutes des affaires sociales

Preacutefigureacutee par Michel GAGNEUX cette deacuteleacutegation a toutefois mis du temps agrave voir le jour

Presque un an et demi se sont en effet eacutecouleacutes entre la lettre de mission et le deacutecret du 5 mai

2011 instaurant la deacuteleacutegation596

Lrsquoarticle 2 de ce deacutecret lui accorde sept missions importantes

et conseacutequentes que sont lrsquoanimation et lrsquoeacutelaboration des prioriteacutes nationales en matiegravere de SI

santeacute et meacutedico-social la participation aux organes de pilotage national la preacuteparation des

596 Deacutecret ndeg 2011-493 du 5 mai 2011 relatif agrave la prise en compte des incidences eacutenergeacutetiques et

environnementales des veacutehicules agrave moteur dans les proceacutedures de commande publique JORF ndeg0105 du 6 mai

2011 p 7751

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

275

deacutecisions du Conseil national de pilotage des ARS la coordination des actions des diffeacuterents

acteurs en la matiegravere (Etat assurance maladie agences eacutetablissements de santeacute CNSA) la

tutelle de lrsquoASIP santeacute lrsquoorientation et la coordination de lrsquoaction agrave lrsquoeacutechelle europeacuteenne et

internationale et enfin assurer la maicirctrise drsquoouvrage des systegravemes drsquoinformation centraux et

deacuteconcerteacutes des ministegraveres

502 Cependant le deacutecret ndeg 2013-727 du 12 aoucirct 2013 portant creacuteation organisation et

attributions dun secreacutetariat geacuteneacuteral des Ministegraveres chargeacutes des affaires sociales597

vient

repreacuteciser dans son article 10 les missions de la DSSIS Ainsi la mission de maicirctrise

drsquoouvrage des systegravemes drsquoinformation des services centraux disparait Celle-ci est reprise par

une nouvelle direction la direction des systegravemes drsquoinformation du secreacutetariat geacuteneacuteral Cette

modification souligne une volonteacute de seacuteparer la gestion des systegravemes drsquoinformation de santeacute

de la gestion du systegraveme drsquoinformation du Ministegravere les enjeux les expertises et les acteurs

nrsquoeacutetant pas les mecircmes

503 Preacutesenteacutee par le Ministegravere des Affaires sociales et de la santeacute598

comme une structure

leacutegegravere srsquoappuyant sur lrsquoASIP santeacute la DSSIS a un rocircle majeur de coordination geacuteneacuterale des

acteurs intervenant dans lrsquoorganisation et la mise en place des systegravemes drsquoinformation de

santeacute Crsquoest eacutegalement agrave elle qursquoil revient de donner lrsquoimpulsion geacuteneacuterale en termes de

deacuteveloppement des projets notamment en leur donnant le cadre neacutecessaire agrave leur bon

deacuteveloppement Ainsi lors de sa mise en place la DSSIS avait agrave cœur599

avant toute chose

drsquoinstaurer des bases solides en matiegravere de preacuterequis neacutecessaires au deacuteveloppement drsquoune

politique forte et efficace en des systegravemes drsquoinformation en santeacute agrave savoir un cadre juridique

fiable une gestion coordonneacutee des reacutefeacuterentiels et assurer la seacutecuriteacute des systegravemes

drsquoinformation en santeacute

Malheureusement comme nous le constaterons dans la suite de nos travaux agrave lrsquoheure

actuelle ces trois points majeurs ne sont pas reacutesolus

597 Deacutecret ndeg 2013-727 du 12 aoucirct 2013 portant creacuteation organisation et attributions dun secreacutetariat geacuteneacuteral des

ministegraveres chargeacutes des affaires sociales JORF ndeg0188 du 14 aoucirct 2013 texte ndeg 4 598

Preacutesentation geacuteneacuterale de la DSSIS disponible sur [httpsocial-santegouvfr] Consulteacute le 15 avril 2016 599

laquo Systegraveme drsquoinformation de Santeacute la DSSIS trace les axes prioritaires raquo Interview de Philippe BURNEL

DSIH e-santeacute 2012 disponible sur [httpwwwdsihfr] Consulteacute le 15 avril 2016

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

276

2) Des structures opeacuterationnelles en appui

a) LrsquoASIP Santeacute

504 LrsquoAgence des Systegravemes drsquoInformation Partageacutes en santeacute est un groupement drsquointeacuterecirct

public dont la convention constitutive a eacuteteacute approuveacutee par un arrecircteacute en date du 8 septembre

2009600

et placeacutee sous la tutelle de lrsquoEtat Ce groupement composeacute dans un premier temps de

lrsquoEtat (repreacutesenteacute par le Ministegravere de la santeacute) la CNAMTS et la caisse des deacutepocircts et

consignation est aujourdrsquohui composeacute de lrsquoEtat la CNAMTS et la Caisse nationale de

solidariteacute pour lrsquoautonomie

Le GIP neacute de la reacuteunion du GIP-DMP du GIP-CPS assure selon sa convention

constitutive sept missions qui sont les suivantes la maicirctrise douvrage des projets de systegravemes

drsquoinformation en santeacute qui lui sont deacuteleacutegueacutes par ses membres la reacutealisation et le deacuteploiement

du Dossier Meacutedical Personnel (DMP) et la maicirctrise douvrage de son heacutebergement la

deacutefinition la promotion et lhomologation de reacutefeacuterentiels standards produits ou services

contribuant agrave linteropeacuterabiliteacute la seacutecuriteacute et lusage des systegravemes dinformation de santeacute et de

la teacuteleacutesanteacute ainsi que la surveillance de leur bonne application la maicirctrise douvrage et la

gestion dans le cadre des missions qui lui sont deacuteleacutegueacutees des annuaires et reacutefeacuterentiels

nationaux regroupant les identiteacutes et informations associeacutees relatives aux professionnels de

santeacute ainsi quaux services et eacutetablissements de santeacute et du secteur meacutedico-social la

certification la production la gestion et le deacuteploiement de la Carte de Professionnel de Santeacute

(CPS) et plus geacuteneacuteralement de dispositifs assurant les fonctions didentification

dauthentification de signature permettant aux professionnels de santeacute de faire reconnaicirctre

dans les conditions de seacutecuriteacute et de confidentialiteacute requises leur identiteacute et leurs

qualifications professionnelles par les systegravemes dinformation et deacutechanges eacutelectroniques

quils utilisent laccompagnement et lencadrement des initiatives publiques et priveacutees

concourant agrave son objet (notamment sous forme de conventions dassistance agrave maicirctrise

douvrage ou de conventions de partenariat) la participation agrave la preacuteparation et agrave lapplication

des accords ou projets internationaux dans le domaine des systegravemes de partage et deacutechange

de linformation de santeacute agrave la demande du ministre ou des ministres compeacutetents

600 Arrecircteacute du 8 septembre 2009 portant approbation de la convention constitutive dun groupement dinteacuterecirct

public JORF ndeg0213 du 15 septembre 2009 p 15096

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

277

Ce groupement a vu le jour suite aux diffeacuterents rapports qui pointaient les deacutefaillances

de la gouvernance en place en matiegravere des systegravemes drsquoinformation de santeacute LrsquoASIP Santeacute

reacutesulte de la volonteacute de lrsquoEtat de renforcer la maicirctrise drsquoouvrage publique des systegravemes

drsquoinformation mais eacutegalement drsquoinstaurer un mode drsquoaction efficace dans le domaine

Comme lrsquoindiquait le communiqueacute de presse du 16 septembre 2009 agrave ce sujet laquo lrsquoASIP est neacute

de la volonteacute [hellip] drsquoinstaller une agence drsquoEtat reacutefeacuterente et feacutedeacuteratrice de lrsquoe-santeacute en

France raquo601

505 Pour lrsquoensemble des industriels regroupeacutes au sein du LESISS (Les Entreprises des

Systegravemes drsquoInformation Sanitaires et Sociaux ndash LESISS) lrsquoASIP est laquo un pilote clairement

identifieacute qui œuvre dans un esprit de concertation raquo602

LrsquoASIP peut en effet srsquoenorgueillir de

plusieurs reacuteussites en matiegravere de systegravemes drsquoinformation de santeacute (publication de reacutefeacuterentiels

drsquointeropeacuterabiliteacute deacutefinition drsquoun identifiant national de santeacute (INS) creacuteation du reacutepertoire

des professionnels de santeacute (RPPS) creacuteation de lrsquooffre de service DMP) lagrave ougrave ses

preacutedeacutecesseurs nrsquoavaient malheureusement pas reacuteussi agrave mener agrave bien leur mission

506 Cependant bien que tregraves active dans ses premiegraveres anneacutees de vie lrsquoASIP srsquoest vite

retrouveacutee bloqueacutee dans plusieurs projets et notamment en ce qui concerne le DMP Comme le

soulignait Michel GAGNEUX dans le rapport drsquoactiviteacute de lrsquoASIP de 2012 laquo force est de

reconnaicirctre que lrsquoaction de lrsquoagence ne peut plus ecirctre depuis la fin de lrsquoanneacutee 2011 agrave la

hauteur de ces finaliteacutes Projet embleacutematique le Dossier Meacutedical Personnel (DMP) a eacuteteacute mis

en service avec succegraves en phase de test dans quatre reacutegions degraves le deacutebut de 2011 mais son

deacuteploiement nrsquoa pu ecirctre engageacute Notre pays a plus que jamais besoin drsquoune politique

nationale coheacuterente et constante fondeacutee sur une vision de long terme de notre systegraveme de

santeacute agrave la fois mobilisatrice et feacutedeacuteratrice et sur une strateacutegie drsquoaction claire et

pertinente raquo603

601 Communiqueacute disponible sur [httpwwwportailtelesanteorg] consulteacute le 15 avril 2016

602 Rapport drsquoactiviteacute de lrsquoASIP santeacute 2009 p 29 disponible sur [httpesantegouvfr] consulteacute le 19 mars

2017 603

Rapport drsquoactiviteacute 2012 de lrsquoASIP santeacute p 1 disponible sur [httpesantegouvfr] consulteacute le 15 avril 2016

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

278

507 Avec le transfert de la gestion et de la mise en place du DMP agrave la CNAMTS par la loi

de modernisation de notre systegraveme de santeacute604

lrsquoASIP a perdu lrsquoune de ses missions

principales agrave laquelle elle travaillait depuis sa creacuteation Sa convention constitutive sera

certainement modifieacutee en ce sens Elle se recentre donc sur de nouveaux projets dont la mise

en œuvre de la messagerie seacutecuriseacutee de santeacute la modernisation des systegravemes drsquoinformation

des SAMU ou encore le deacuteploiement des reacutepertoires opeacuterationnels des ressources605

b) Lrsquoagence Nationale drsquoAppui agrave la Performance

508 Lrsquoagence Nationale drsquoAppui agrave la Performance (ANAP) neacutee en 2009 de la reacuteunion du

GMSIH de la MAINH et de la Mission nationale drsquoexpertise et drsquoaudit hospitaliers a repris

lrsquoensemble des missions qui leur eacuteteacute confieacutees Elle srsquoest par ailleurs vu confier drsquoautres

missions par la loi HPST et notamment celle drsquoappuyer les eacutetablissements de santeacute les

eacutetablissements meacutedico-sociaux et les ARS en vue drsquoameacuteliorer leur performance Institueacute par

la loi HPST ce GIP606

a eacuteteacute creacuteeacute le 23 octobre 2009 date de publication de lrsquoarrecircteacute

drsquoapprobation de sa convention constitutive

509 Cette agence a un rocircle global drsquoaccompagnement des eacutetablissements sanitaires et

meacutedico-sociaux dans leurs deacutemarches drsquoameacutelioration de leur performance Parmi son large

portefeuille drsquoactiviteacutes se trouve ainsi les systegravemes drsquoinformation Contrairement agrave drsquoautres

agences lrsquoANAP ne participe aucunement agrave lrsquoeacutediction de normes techniques ou

regraveglementaires dans le domaine De mecircme elle nrsquoest pas habiliteacutee agrave deacutelivrer des autorisations

ou des avis Son rocircle est strictement limiteacute agrave lrsquoaccompagnement et au conseil des

eacutetablissements en leur fournissant un appui ponctuel mais eacutegalement en eacutetablissant des

meacutethodologies et des reacutefeacuterentiels partageables agrave tous les eacutetablissements LrsquoANAP remplit

eacutegalement des missions drsquoaudit et drsquoeacutevaluation des projets hospitaliers notamment dans le

domaine informatique A titre drsquoexemple en 2015 lrsquoANAP en lien avec la DGOS a travailleacute

604 Loi ndeg 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre systegraveme de santeacute JORF ndeg0022 du 27 janvier

2016 texte 1 article 96 605

La mise en place du reacutepertoire Opeacuterationnel des Ressources ndash ou ROR- est preacutevue par lrsquoarticle D 6124-25 du

Code de la santeacute publique Le ROR est un outil de description des ressources de lrsquooffre de soins pour une reacutegion

dont lrsquoobjectif est de proposer une information exhaustive de lrsquooffre de soins reacutegionale et extra-reacutegionale En mai

2012 lrsquoASIP santeacute a eacuteteacute missionneacutee par la DGOS pour deacutefinir et mettre en œuvre un programme permettant de

doter lrsquoensemble des reacutegions drsquoun service ROR coheacuterent agrave lrsquoeacutechelle nationale en srsquoinspirant notamment des

ROR fonctionnel Puis en 2015 la mission de lrsquoASIP a eacutevolueacute Deacutesormais elle a en charge de rendre

interopeacuterable les ROR en place afin de permettre lrsquoaccegraves agrave lrsquooffre de soin drsquoune reacutegion agrave une autre et deacuteployer

un ROR interopeacuterable dans les reacutegions qui nrsquoen seraient pas encore pourvues 606

Ce GIP est composeacute de lrsquoEtat lrsquoUnion des caisses drsquoassurance maladie la caisse nationale de solidariteacute pour

lrsquoautonomie et les feacutedeacuterations repreacutesentatives des eacutetablissements de santeacute et meacutedicaux sociaux

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

279

au deacuteploiement du programme hocircpital numeacuterique et notamment agrave la reacuteduction des freins

structurels au bon deacuteploiement des systegravemes drsquoinformation de santeacute607

B Les limites de cette nouvelle organisation

510 Bien que grandement reacutenoveacutee la nouvelle gouvernance des systegravemes drsquoinformation de

santeacute preacutesente encore quelques lacunes et meacuterite que lrsquoon srsquointerroge agrave son sujet Ainsi il

nous parait important de nous inteacuteresser au choix effectueacute par lrsquoEtat de creacuteer une agence afin

de lui deacuteleacuteguer ses missions (1) avant drsquoexposer le manque de visibiliteacute sur certains projets

qui perdure aujourdrsquohui (2)

1) Le scheacutema de gouvernance choisi par lrsquoEtat

511 LrsquoEtat a fait le choix de confier la maicirctrise drsquoouvrage des projets agrave une agence

speacutecialiseacutee formeacutee sous forme de GIP tandis qursquoune deacuteleacutegation deacutedieacutee aux SIS placeacutee sous

lrsquoautoriteacute du secreacutetariat aux affaires sociales se charge de veiller agrave la bonne coordination de

lrsquoensemble A premiegravere vue cet organigramme simplifieacute semble plus efficient Cependant ce

choix meacuterite que lrsquoon srsquoy attarde pour tenter de mieux le comprendre

a) LrsquoASIP une nouvelle venue dans le paysage des agences de lrsquoEtat

512 LrsquoEtat a fait le choix de creacuteer une agence afin de lui confier le soin drsquoassurer la

maicirctrise drsquoouvrage des SIS Comme lrsquoa souligneacute le Conseil drsquoEtat dans son eacutetude annuelle

consacreacutee agrave la notion drsquoAgence608

ce pheacutenomegravene de recours reacutegulier aux agences par lrsquoEtat a

poseacute quelques difficulteacutes juridiques En effet cette notion drsquoagence peut parfois ecirctre difficile agrave

cerner Il nrsquoen existe pas de deacutefinition juridique preacutecise

513 Lrsquoeacutetude du Conseil drsquoEtat pour sa part srsquooriente vers une deacutefinition a contrario en

preacutefeacuterant drsquoabord preacuteciser ce que ne sont pas les agences (ni des autoriteacutes administratives

indeacutependantes ni de simples opeacuterateurs) avant de tenter de deacutefinir ce qursquoelles sont des

acteurs opeacuterationnels qui assurent des missions que lrsquoEtat ne peut assurer lui-mecircme une

607 Rapport drsquoactiviteacute 2015 de lrsquoANAP p 7 disponible sur [httpwwwanapfr] consulteacute le 17 avril 2016

608 Conseil drsquoEtat laquo Les agences une nouvelle gestion publique raquo eacutetude annuelle Septembre 2012 18

questions 18 reacuteponses

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

280

laquo reacuteponse manageacuteriale agrave lrsquoincapaciteacute supposeacutee de lrsquoEtat de faire face agrave ses missions raquo609

Les

agences ont par ailleurs la particulariteacute de ne pas preacutesenter un statut unique et lrsquoon peut

trouver des GIP des GIE des eacutetablissements publics ou encore bien que cela soit plus rare

des associations Lrsquoeacutetude du Conseil drsquoEtat partant de ce constat a tenteacute de proposer les

statuts les plus adeacutequats en fonction des types de missions exerceacutees par les agences le statut

drsquoeacutetablissement public eacutetant preacuteconiseacute en prioriteacute et celui de GIP dans les cas ougrave lrsquoagence

serait ameneacutee agrave laquo expeacuterimenter des formes nouvelles de gestion raquo

514 Dans le cas de lrsquoASIP crsquoest ce qui a motiveacute lrsquoEtat agrave choisir la formule du GIP En

effet lrsquoEtat souhaitant associer la CNAMTS agrave la gestion et surtout au financement des projets

meneacutees par lrsquoASIP nrsquoa pas pu srsquoorienter vers lrsquoeacutetablissement public qui aurait sous-entendu

un financement inteacutegral par lrsquoEtat ce qursquoil nrsquoeacutetait pas en mesure de faire La forme drsquoAgence

quant agrave elle preacutesente lrsquoavantage de seacuteparer la deacutefinition des politiques publiques et dans notre

cas des grandes orientations nationales en matiegravere de systegravemes drsquoinformation en santeacute de leur

mise en œuvre par un organisme qui pourra ecirctre jugeacute sur ses reacutesultats et en ecirctre tenu

responsable Quand lrsquoon srsquoattarde sur les quatre critegraveres deacutegageacutes par le Conseil drsquoEtat pour

justifier la creacuteation drsquoune agence610

(lrsquoefficience lrsquoexpertise le partenariat et la neutraliteacute) il

nous apparait clairement que lrsquoASIP y reacutepond pleinement Le choix de creacuteer une laquo agence raquo

deacutedieacutee agrave cette mission apparait donc opportun tout comme celui drsquoun GIP

b) LrsquoASIP un GIP sous tutelle

515 Il nous faut eacutegalement nous interroger sur le controcircle exerceacute par lrsquoEtat sur cette

Agence En effet en tant que GIP dont lrsquoEtat est membre lrsquoASIP pourrait se voir placeacutee sous

le controcircle drsquoun commissaire du gouvernement Cependant agrave lrsquoheure actuelle lrsquoEtat nrsquoa pas

fait ce choix Crsquoeacutetait drsquoailleurs deacutejagrave le cas agrave lrsquoeacutepoque des GIP-DMP et GIP-CPS et lrsquoIGAS

avait souligneacute ce choix de lrsquoEtat de ne pas user de son pouvoir De maniegravere pratique un

commissaire du gouvernement est chargeacute de controcircler les activiteacutes ainsi que la gestion du

GIP Il a eacutegalement un rocircle dintermeacutediaire entre les instances du GIP et les autoriteacutes chargeacutees

de lapprobation de la convention constitutive du GIP De mecircme il a pour mission de veiller

au respect des dispositions applicables au groupement et participe agrave toutes ses instances au

609 Jacky RICHARD laquo Reacutefleacutechir aux agences crsquoest reacutefleacutechir agrave lrsquoEtat raquo AJDA 2012 p 1660

610 Conseil drsquoEtat laquo Les agences une nouvelle gestion publique raquo op cit p 12

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

281

sein desquelles il dispose drsquoune voix consultative LrsquoEtat a cependant preacutevu de placer lrsquoASIP

sous la tutelle de la DSSIS

516 Notion issue du droit civil la tutelle a pu ecirctre deacutefinie en droit administratif comme

laquo lrsquoensemble des pouvoirs limiteacutes accordeacutes par la loi agrave une autoriteacute supeacuterieure sur les agents

deacutecentraliseacutes et sur leurs actes dans un but de protection de lrsquointeacuterecirct geacuteneacuteral raquo611

Il

srsquoagissait en pratique drsquoune veacuterification de la leacutegaliteacute du fonctionnement des eacutetablissements

publics qursquoils soient locaux ou nationaux une fois les deacutecisions prises en totale liberteacute et non

pas drsquoune participation agrave la gestion de lrsquoeacutetablissement Lrsquoautoriteacute de tutelle disposait bien de

pouvoirs drsquoannulation ou drsquoapprobation sur les actes eacutemanant des eacutetablissements bien qursquoelle

ne puisse pas pour autant modifier les actes soumis agrave approbation612

Depuis la loi du 2 mars 1982613

le leacutegislateur a mis fin aux tutelles exerceacutees par lrsquoEtat

sur les deacutecisions prises par les collectiviteacutes territoriales et a transformeacute le controcircle a priori

(controcircle hieacuterarchique) qui existait en un controcircle a posteriori des deacutecisions prises Cette

tutelle est donc devenue principalement un controcircle a posteriori de la leacutegaliteacute des actes des

eacutetablissements publics Ainsi lautoriteacute de lEacutetat apregraves reacuteception des actes les rendant

exeacutecutoires de plein droit agrave deacutefeacuterer au tribunal administratif les actes de lautoriteacute territoriale

quelle estime devoir ecirctre annuleacutes La tutelle est finalement une contrepartie agrave lrsquoautonomie qui

est accordeacutee aux eacutetablissements publics En pratique lrsquoautoriteacute de tutelle va selon les cas

disposer de moyens plus ou moins eacutetendus de controcircle sur lrsquoeacutetablissement Sachant que selon

le ceacutelegravebre adage il nrsquoy a pas de tutelle sans texte et pas de tutelle au-delagrave des textes les

pouvoirs de lrsquoautoriteacute de tutelle et leur eacutetendue vont donc deacutependre de ce qursquoaura preacutevu le

leacutegislateur en la matiegravere Aussi la tutelle drsquoun eacutetablissement public ne se preacutesume pas et

lrsquoautoriteacute investie de ce pouvoir ne pourra pas deacutepasser les limites strictement preacutevues par les

textes Nous pouvons donc en deacuteduire que le texte instaurant une tutelle devra preacuteciser les

mesures que lautoriteacute de tutelle pourra prendre ainsi que ses domaines dintervention

611 MASPETIOL et LAROQUE La tutelle administrative 1930 Sirey p 10

612 CE 24 juin 1970 min Anciens combattants et victimes de guerre c Lepeltier Rec 1970 p 430

613 Loi ndeg 82-213 du 2 mars 1982 relative aux droits et liberteacutes des communes des deacutepartements et des reacutegions

JORF du 3 mars 1982 p 730

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

282

517 Ceci eacutetant rappeleacute il nous est neacutecessaire de nous interroger sur cette tutelle de lrsquoASIP

par la DSSIS Dans un premier temps il nous faut reacutefleacutechir agrave la possibiliteacute pour un GIP drsquoecirctre

placeacute sous la tutelle de lrsquoEtat

En effet comme lrsquoa rappeleacute le Tribunal des Conflits les GIP sont des personnes

publiques soumises agrave un reacutegime particulier preacutevu par la loi et ne sont donc pas soumis de

plein droit aux lois et regraveglements reacutegissant les eacutetablissements publics614

Nous pouvons en

deacuteduire que la tutelle drsquoun GIP nrsquoest pas comme pour un eacutetablissement public chose

automatique Cependant nous pouvons aiseacutement comprendre ici au vu de la particulariteacute du

GIP en question auquel lrsquoEtat a confieacute une mission qui lui incombait lrsquointeacuterecirct drsquoecirctre soumis agrave

sa tutelle

Dans un second temps il nous apparait leacutegitime de nous interroger sur le caractegravere

suffisant des dispositions preacutevoyant la tutelle de lrsquoASIP En effet celles-ci sont assez

simples puisque le deacutecret ndeg 2013-727 du 12 aoucirct 2013 portant creacuteation organisation et

attributions dun secreacutetariat geacuteneacuteral des ministegraveres chargeacutes des affaires sociales615

preacutevoit

simplement que laquo la deacuteleacutegation agrave la strateacutegie des systegravemes dinformation de santeacute a pour

missions [hellip] drsquoassurer la tutelle sur le groupement dinteacuterecirct public deacutenommeacute Agence des

systegravemes dinformation partageacutes de santeacute raquo ni plus ni moins Aucune preacutecision nrsquoest

apporteacutee quant aux limites de cette tutelle et rien ne vient nous eacuteclairer sur le pouvoir de

controcircle que possegravede la DSSIS sur lrsquoASIP A titre drsquoexemple il nous est impossible de savoir

si tous les actes pris par lrsquoASIP devront ecirctre communiqueacutes agrave la DSSIS ou simplement les

deacutecisions les plus importantes eacutemanant de son assembleacutee deacutelibeacuterante

La porteacutee de cette tutelle et donc du controcircle exerceacute par lrsquoEtat sur lrsquoASIP agrave lrsquoheure

actuelle nous semble donc trop peu preacutecis Par ailleurs face agrave cette tutelle certes preacutevue par

un texte mais trop peu deacutetailleacutee nous pouvons nous questionner sur son efficaciteacute Ainsi il

nous apparait qursquoun commissaire du gouvernement aurait eu un rocircle si ce nrsquoest plus efficace

en tous cas plus preacutecis

614 TC 14 feacutevrier 2000 GIP Habitat et interventions sociales pour les mal-logeacutes et les sans-abris Rec p 748

615 Deacutecret ndeg 2013-727 du 12 aoucirct 2013 portant creacuteation organisation et attributions dun secreacutetariat geacuteneacuteral des

ministegraveres chargeacutes des affaires sociales JORF ndeg0188 du 14 aoucirct 2013 texte ndeg 4

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

283

2) Un manque de visibiliteacute des projets en cours

518 Malgreacute une gouvernance reacutenoveacutee et une certaine apparence drsquouniciteacute gracircce

notamment agrave lrsquoASIP santeacute force est de constater qursquoil reste difficile de faire la cartographie

preacutecise des projets relatifs aux SIS en cours et surtout de leur gestion Jean-Yves ROBIN

ancien directeur de lrsquoASIP Santeacute souligne dans son ouvrage consacreacute agrave lrsquoeacutetat des lieux du

numeacuterique en santeacute en France616

lrsquoabsence de vision globale de la gestion des projets qui

amegravene naturellement agrave un manque de visibiliteacute des projets en cours Ainsi il tente de dresser

un eacutetat des lieux des projets afin de deacutemontrer lrsquoeacuteparpillement des moyens et des initiatives en

la matiegravere Dans les faits il est effectivement difficile de dresser un eacutetat des lieux exhaustif

des projets drsquoe-santeacute tous domaines confondus actuellement en cours Lrsquoexercice se

complique quand il est question de rechercher les pilotes des projets

519 Si lrsquoon reprend lrsquoanalyse de Jean-Yves ROBIN on constate que de nombreux projets

sont en cours piloteacutes par autant drsquoorganismes diffeacuterents qursquoil y a de projets617

Ainsi agrave titre

drsquoexemple lrsquoinformatique des professionnels de santeacute ambulatoire est piloteacutee par la

CNAMTS tandis que les systegravemes drsquoinformation hospitaliers sont geacutereacutes au niveau de la

DGOS Lrsquoappel agrave projets Territoires de Soins Numeacuteriques est quant agrave lui eacutegalement piloteacute par

la DGOS mais neacutecessite le concours des ARS et un suivi de la Caisse des Deacutepocircts et des

Consignations Le DMP eacutetait jusqursquoagrave tregraves reacutecemment piloteacute par lrsquoASIP santeacute mais a eacuteteacute

reacuteattribueacute agrave la CNAMTS618

Par ailleurs le Comiteacute strateacutegique de filiegravere piloteacute par le

Ministegravere de lrsquoeacuteconomie consacre certains de ses travaux agrave lrsquoe-santeacute tout comme le Conseil

National du Numeacuterique Enfin sans entrer dans le deacutetail preacutecisons toutefois que la Direction

Geacuteneacuterale de la Santeacute placeacutee aupregraves du Ministegravere de la santeacute pilote de maniegravere directe une

trentaine de projets dont lrsquoaboutissement peut ecirctre parfois tregraves long faute de ressources

suffisantes

Ce rapide eacutetat des lieux dresseacute par Jean-Yves ROBIN permet de constater facilement agrave

quel point les ressources et les efforts en matiegravere drsquoe-santeacute sont eacuteparpilleacutes Car bien sucircr

616 ROBIN Jean-Yves laquo Lrsquourgence numeacuterique Faire de la France un leader de lrsquoe-santeacute raquo LrsquoHarmattan 2015

p 57 617

Ibid 618

Article 96 de la loi ndeg 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre systegraveme de santeacute JORF ndeg0022

du 27 janvier 2016 texte 1

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

284

aucune coordination nrsquoest assureacutee entre les diffeacuterents projets ce qui drsquoune part ne permet pas

de mutualiser les moyens et les expertises entre les projets et drsquoautre part creacutee un

cloisonnement entre les diffeacuterentes initiatives ce qui sur le long terme amegravene agrave des projets

eacutevoluant en parallegravele lagrave ougrave il aurait eacuteteacute neacutecessaire de les construire et les deacutevelopper en

concordance Degraves lors les outils proposeacutes aux professionnels de santeacute en ambulatoire ou en

secteur hospitalier ne preacutesentent ni logique ni lrsquoefficaciteacute escompteacutee

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

285

Conclusion de la section

520 Il apparait compliqueacute pour lrsquoEtat drsquoorganiser une gouvernance stable et coheacuterente des

SIS Ce constat srsquoexplique en partie par lrsquohistorique du sujet En effet tant que le Ministegravere de

la santeacute nrsquoavait pas reacutealiseacute lrsquoampleur de la probleacutematique et la neacutecessiteacute drsquoassurer une

politique unifieacutee en la matiegravere les projets se sont deacuteveloppeacutes de maniegravere indeacutependante et agrave

diffeacuterents eacutechelons avec plus ou moins de succegraves Ainsi la gouvernance initiale des SIS qui

regroupait drsquoune part des structures drsquoappui et de coordination en charge drsquoimpulser des

projets majeurs et drsquoautre part des structures plus opeacuterationnelles srsquoest tregraves vite reacuteveacuteleacutee

complexe et incoheacuterente En a reacutesulteacute de nombreuses critiques notamment de la part de la

Cour des comptes et de lrsquoIGAS ces deux instances srsquoaccordant sur lrsquoabsence de lisibiliteacute de la

gouvernance et sur lrsquoeacuteparpillement notable de lrsquoEtat en la matiegravere Degraves 2009 le Ministre de la

santeacute srsquoest donc inscrit dans une deacutemarche drsquoeacutevolution de cette gouvernance inspireacutee par les

recommandations concregravetes eacutemise pas des speacutecialistes de la question

521 Dans le cadre de la refonte de cette gouvernance le choix de confier agrave une agence

lrsquoASIP santeacute la maicirctrise drsquoouvrage des projets relatifs aux SIS sous la tutelle drsquoune

deacuteleacutegation placeacutee aupregraves du Ministegravere de la santeacute nrsquoest pas sans poser quelques petites

interrogations Cependant cette nouvelle gouvernance se reacutevegravele dans lrsquoensemble plus

efficace et pertinente que la preacuteceacutedente mecircme si aujourdrsquohui encore il est compliqueacute drsquoavoir

une vue drsquoensemble des projets en cours et dresser une cartographie de lrsquoensemble des acteurs

intervenants dans les projets SIS reste un deacutefi difficile agrave relever

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

286

Section 2 Les deacutefis agrave relever pour une gouvernance efficace

522 LrsquoEtat doit aujourdrsquohui relever deux deacutefis majeurs srsquoil souhaite ameacuteliorer la

gouvernance actuelle des SIS Ces deacutefis sont de nature diffeacuterente mais drsquoune importance

eacutegale Le premier technique concerne lrsquointeropeacuterabiliteacute des systegravemes drsquoinformation

(paragraphe 1) Le deuxiegraveme agrave la fois politique et organisationnel concerne la deacutefinition de la

place des acteurs reacutegionaux dans la gouvernance des SIS (paragraphe 2)

sect1 Lrsquointeropeacuterabiliteacute des SI un chantier prioritaire

523 Lrsquointeropeacuterabiliteacute des systegravemes drsquoinformation concept que nous tacirccherons de deacutefinir

preacuteciseacutement au cours de notre reacuteflexion apparait comme le chantier principal agrave mener agrave bien

aujourdrsquohui afin drsquoassurer une gouvernance stable des SIS Sans interopeacuterabiliteacute point de

salut pour les SIS car celle-ci apparait comme eacutetant la clef de voucircte drsquoun systegraveme coheacuterent

communiquant unifieacute et donc efficace Cette probleacutematique tregraves ancienne en matiegravere de SIS

(A) semble parfois difficile agrave reacutesoudre malgreacute certains projets majeurs deacuteveloppeacutes agrave ce sujet

(B)

A Enjeux drsquoune probleacutematique ancienne

524 Cette notion drsquointeropeacuterabiliteacute notion tregraves technique ne dispose pas de deacutefinition

leacutegale correctement eacutetablie (1) Pour tenter drsquoatteindre cette interopeacuterabiliteacute neacutecessaire agrave la

bonne communication des SIS entre eux plusieurs conditions techniques doivent ecirctre

preacutealablement mises en place (2) et suppose bien eacutevidemment que les SIS soient deacuteveloppeacutes

agrave partir de normes standardiseacutees (3)

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

287

1) Peacuterimegravetre de lrsquointeropeacuterabiliteacute

525 Il peut apparaicirctre difficile drsquoappreacutehender cette notion drsquointeropeacuterabiliteacute De maniegravere

technique elle peut ecirctre deacutefinie comme la capaciteacute de mateacuteriels de logiciels ou de protocoles

de fonctionner ensemble et agrave partager des informations619

526 La Cour des Comptes dans son rapport relatif agrave lrsquointeropeacuterabiliteacute des systegravemes

drsquoinformations srsquoeacutetait bien entendu essayeacute agrave cet exercice de deacutefinition preacutealable neacutecessaire agrave

son eacutetude Il en eacutetait ressorti la deacutefinition suivante laquo dans le domaine des systegravemes

drsquoinformation lrsquointeropeacuterabiliteacute peut ecirctre entendue comme une proprieacuteteacute des systegravemes

permettant agrave deux ou plusieurs agents (automates ou utilisateurs final) drsquoeacutechanger de

lrsquoinformation et drsquoen comprendre le sens indeacutependamment des bases technologiques utiliseacutees

et sans faire appel agrave une intervention humaine au cours de la chaine de communication que

cette communication soit synchroniseacutee (comme le teacuteleacutephone) ou deacutesynchroniseacutee (comme la

messagerie ) raquo620

Juridiquement ce concept nrsquoest pas reacuteellement circonscrit Il apparait pourtant bien

dans plusieurs textes leacutegislatifs621

Au long de notre deacuteveloppement nous nous appuierons

donc sur cette deacutefinition donneacutee par la Cour des comptes qui permet selon nous

drsquoappreacutehender les enjeux techniques de cette notion assez facilement

2) Preacutealables neacutecessaire agrave lrsquointeropeacuterabiliteacute

Lrsquointeropeacuterabiliteacute des systegravemes drsquoinformation neacutecessite que certaines conditions

essentielles soient reacuteunies afin drsquoecirctre correctement mise en place

a) Une identification unifieacutee des patients

527 En toute logique pour que des informations puissent ecirctre eacutechangeacutees au sujet drsquoun

patient il faut que celui-ci puisse ecirctre identifieacute correctement Cela suppose donc une

identification fiable et unifieacutee au sein des diffeacuterents systegravemes drsquoinformation fiabiliteacute qui ne

619 Deacutefinition du Larousse

620 Cour des comptes laquo Lrsquointeropeacuterabiliteacute des systegravemes drsquoinformation en santeacute raquo op cit p 5

621 V notamment en ce sens lrsquoarticle 43 de la loi ndeg 99-641 du 27 juillet 1999 portant creacuteation drsquoune couverture

maladie universelle JORF ndeg0172 du 28 juillet 1999 p 11229

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

288

peut ecirctre assureacutee par les simples noms preacutenoms et date de naissance pour des raisons

eacutevidentes drsquoidentitovigilances Crsquoest dans cette optique que le leacutegislateur en 2007 avait preacutevu

qursquoun laquo identifiant de santeacute des personnes prises en charge par un professionnel de santeacute ou

un eacutetablissement de santeacute [hellip] est utiliseacute dans lrsquointeacuterecirct des personnes concerneacutees et agrave des fins

de coordination et de qualiteacute des soins pour la conservation lrsquoheacutebergement et la transmission

des informations de santeacute raquo622

Alors que le Ministegravere de la santeacute srsquoorientait vers une

utilisation du NIR agrave cette fin la CNIL dans un rapport 20 feacutevrier 2007623

preacuteconisait pour sa

part la creacuteation agrave partir du NIR drsquoun identifiant speacutecifique non signifiant Dans le cadre de ses

missions lrsquoASIP Santeacute srsquoest ainsi vue confier la deacutelicate mission de mettre en œuvre cet

identifiant Dans un premier temps lrsquoagence a deacuteveloppeacute une solution permettant la mise en

œuvre drsquoun identifiant national de santeacute dit calculeacute (INS-C) Celui-ci pouvait ainsi ecirctre

inteacutegreacute par les eacutediteurs de logiciels de professionnels de santeacute dans leurs solutions techniques

Cependant cet INS-C nrsquoa pas eu le succegraves escompteacute et bien que cet identifiant devait ecirctre

temporaire afin de faciliter la mise en place drsquoun INS deacutefinitif (appeleacute INS-aleacuteatoire) lrsquoeacutetape

ultime nrsquoa jamais eacuteteacute franchie

528 La loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute reacutesoud cette difficulteacute puisqursquoelle

modifie lrsquoarticle L 1111-8-1 au Code de la santeacute publique qui preacutevoit deacutesormais que laquo le

numeacutero dinscription au reacutepertoire national didentification des personnes physiques est

utiliseacute comme identifiant de santeacute des personnes pour leur prise en charge agrave des fins

sanitaires et meacutedico-sociales dans les conditions preacutevues agrave larticle L 1110-4 raquo Cette

disposition est deacutefinitivement entreacutee en vigueur comme nous lrsquoavons vu preacuteceacutedemment

depuis la publication du deacutecret ndeg 2017-412 du 27 mars 2017 relatif agrave lutilisation du numeacutero

dinscription au reacutepertoire national didentification des personnes physiques comme identifiant

national de santeacute 624

Par ailleurs pour eacuteviter toute discordance avec les dispositions de la loi Informatique

et Liberteacutes la Loi Touraine a pris le soin de preacuteciser que laquo les dispositions de la loi ndeg 78-17

622 Deacutecret ndeg 2007-960 du 15 mai 2007 relatif agrave la confidentialiteacute des informations meacutedicales conserveacutees sur

support informatique ou transmises par voie eacutelectronique et modifiant le Code de la santeacute publique (dispositions

reacuteglementaires) JORF ndeg113 du 16 mai 2007 p 9362 623

Rapport du groupe de travail relatif agrave lrsquoeacutevaluation de la doctrine de la CNIL en matiegravere drsquoutilisation du NIR

20 feacutevrier 2007 Disponible sur [httpswwwcnilfr] Consulteacute le 17 avril 2016 624

Deacutecret ndeg 2017-412 du 27 mars 2017 relatif agrave lutilisation du numeacutero dinscription au reacutepertoire national

didentification des personnes physiques comme identifiant national de santeacute JORF ndeg0075 du 29 mars 2017

texte ndeg 23

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

289

du 6 janvier 1978 relative agrave linformatique aux fichiers et aux liberteacutes prescrivant une

proceacutedure particuliegravere dautorisation agrave raison de lutilisation du numeacutero dinscription au

reacutepertoire national didentification des personnes physiques dans un traitement de donneacutees agrave

caractegravere personnel ne sont pas applicables aux traitements qui utilisent ce numeacutero

exclusivement dans les conditions preacutevues au preacutesent I raquo

529 Finalement faute drsquoidentifiant de santeacute satisfaisant le leacutegislateur a retenu la solution

du NIR plus seacutecuriseacute et deacutejagrave en place Comme le souligne lrsquoASIP santeacute625

laquo le deacuteploiement

actuel des SI de santeacute autour du patient et de la notion de parcours impose en effet de faire le

choix drsquoun identifiant simple peacuterenne fiable et dans un contexte budgeacutetaire tregraves contraint

de privileacutegier lrsquoefficaciteacute agrave des solutions coucircteuses Le numeacutero de seacutecuriteacute sociale ou laquo NIR

raquo preacutesente ces caracteacuteristiques raquo

b) Lrsquoidentification des professionnels

530 A lrsquoinstar des patients lrsquoidentification des professionnels de santeacute au sein du SIS

permet la justification de leur identiteacute assure la traccedilabiliteacute de leurs accegraves et permet a fortiori

le controcircle du respect du secret professionnel

531 Crsquoest le systegraveme de carte de professionnel de santeacute (CPS) qui aujourdrsquohui a pour

mission drsquoassurer cette identification Cependant comme nous avons pu le voir

preacuteceacutedemment dans nos deacuteveloppements cette carte rencontre un succegraves mitigeacute626

notamment au sein des eacutetablissements de santeacute et sa mise en place demeure assez longue Sur

le terrain nombreux sont les eacutetablissements de santeacute qui ont mis en place des cartes

alternatives certaines comportant un systegraveme de signature eacutelectronique reconnue de type RGS

2 eacutetoiles627

625 laquo Projet de loi de santeacute les apports en matiegravere de deacutemateacuterialisation des donneacutees de santeacute raquo article

consultable sur [httpesantegouvfr] consulteacute le 22 mars 2016 626

Au sein des eacutetablissements hospitaliers agrave ce jour 237 075 cartes de la famille des CPx sont actives dont 100

064 cartes CPS 627

Au CHRU de Lille par exemple une carte drsquoeacutetablissement distribueacute agrave tous les professionnels est deacuteployeacutee

depuis 2011 Depuis 2015 certaines drsquoentre elles comportent un systegraveme de signature eacutelectronique de type RGS

2 eacutetoiles

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

290

3) La normalisation des systegravemes la condition technique essentielle

532 Il est impossible drsquoaborder la notion drsquointeropeacuterabiliteacute sans parler de la normalisation

des eacutechanges informatiseacutes En effet pour ecirctre interopeacuterables deux systegravemes devront ecirctre

baseacutes sur les mecircmes normes afin de srsquoassurer que les donneacutees eacutechangeacutees soient

compreacutehensibles et exploitables En matiegravere de SIS cette normalisation est double car elle

concerne agrave la fois lrsquoaspect informatique mais eacutegalement lrsquoaspect meacutedical dans le sens ougrave les

donneacutees reporteacutees au sein des dossiers informatiques ne devront permettre aucune

interpreacutetation contraire Les termes et eacuteventuels codes utiliseacutes devront ecirctre donc normaliseacutes628

533 Cette notion de normalisation est encadreacutee par le deacutecret ndeg 2009-697 du 16 juin 2009

relatif agrave la normalisation629

Sa deacutefinition est preacutevue agrave lrsquoarticle 1 du deacutecret laquo la normalisation

est une activiteacute dinteacuterecirct geacuteneacuteral qui a pour objet de fournir des documents de reacutefeacuterence

eacutelaboreacutes de maniegravere consensuelle par toutes les parties inteacuteresseacutees portant sur des regravegles

des caracteacuteristiques des recommandations ou des exemples de bonnes pratiques relatives agrave

des produits agrave des services agrave des meacutethodes agrave des processus ou agrave des organisations Elle vise

agrave encourager le deacuteveloppement eacuteconomique et linnovation tout en prenant en compte des

objectifs de deacuteveloppement durable raquo

534 En France crsquoest lrsquoAssociation Franccedilaise de Normalisation (AFNOR)630

qui a pour

mission de mettre en œuvre la normalisation et de la promouvoir Dans ce but elle dispose

drsquoun pouvoir drsquoeacutelaboration et drsquohomologation des normes quels qursquoen soit les domaines Une

norme est par principe drsquoapplication volontaire mecircme si certains textes reacuteglementaires

peuvent les rendre obligatoires631

Cependant comme le relevait la Cour des Comptes dans

son rapport laquo nombre de conventions techniques permettant drsquoassurer lrsquointeropeacuterabiliteacute se

628 Nous pensons ici particuliegraverement au PMSI et agrave la codification des actes meacutedicaux

629 Deacutecret ndeg 2009-697 du 16 juin 2009 relatif agrave la normalisation JORF ndeg0138 du 17 juin 2009 p9860 Ce texte

est pris en application des directives 9834CE du Parlement europeacuteen et du Conseil du 22 juin 1998 preacutevoyant

une proceacutedure dinformation dans le domaine des normes et reacuteglementations techniques et des regravegles relatives

aux services de la socieacuteteacute de linformation et 2006123CE du Parlement europeacuteen et du Conseil du 12 deacutecembre

2006 relative aux services dans le marcheacute inteacuterieur ensemble la notification ndeg 20080042F du 1er feacutevrier 2008

adresseacutee agrave la Commission des Communauteacutes europeacuteennes 630

LrsquoAFNOR est lrsquoorganisme franccedilais en charge de la normalisation mais il existe eacutegalement des organismes

internationaux tel que lrsquoISO (International Standards Organisation ndash Organisation internationale de

normalisation) LrsquoANSI (American National Standards Institute) le CEN (Comiteacute Europeacuteen de Normalisation) 631

Article 17 du deacutecret ndeg 2009-697 du 16 juin 2009 relatif agrave la normalisation JORF ndeg0138 du 17 juin 2009

p 9860

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

291

sont imposeacutees de fait eacutetant donneacute lrsquoimportance industrielle de leurs promoteurs raquo632

Ainsi le

poids et lrsquoinfluence des industriels en matiegravere de normalisation nrsquoest pas neacutegligeable

B Lrsquointeropeacuterabiliteacute une probleacutematique insoluble

535 Nombreux ont eacuteteacute et perdurent encore aujourdrsquohui les freins agrave la mise en place de

lrsquointeropeacuterabiliteacute des systegravemes drsquoinformation en santeacute La Cour des comptes les avait deacutejagrave

releveacutes en son temps tout comme lrsquoIGAS et aujourdrsquohui le constat reste malheureusement le

mecircme Pourtant des solutions ont eacuteteacute envisageacutees et des chantiers sont en cours (1) Mais

certaines limites restent aujourdrsquohui tregraves preacutesentes (2)

1) Le cadre drsquointeropeacuterabiliteacute des SIS

536 Afin de srsquoassurer que les conditions drsquointeropeacuterabiliteacute des systegravemes sont reacuteunies il est

essentiel de mettre en place des reacutefeacuterentiels drsquointeropeacuterabiliteacute Crsquoest ce qursquoa preacutevu

lrsquoordonnance du 8 deacutecembre 2005633

en soulignant qursquoun laquo reacutefeacuterentiel geacuteneacuteral

dinteropeacuterabiliteacute fixe les regravegles techniques permettant dassurer linteropeacuterabiliteacute des

systegravemes dinformation raquo634

des administrations de lrsquoEtat des collectiviteacutes territoriales des

eacutetablissements publics agrave caractegravere administratif et des organismes de seacutecuriteacute sociale635

Le

reacutefeacuterentiel geacuteneacuteral drsquointeropeacuterabiliteacute a eacuteteacute approuveacute par lrsquoarrecircteacute du 9 novembre 2009 portant

approbation du reacutefeacuterentiel geacuteneacuteral dinteropeacuterabiliteacute

537 Dans le domaine plus speacutecifique des systegravemes drsquoinformation en santeacute crsquoest agrave lrsquoASIP

Santeacute que revient drsquoassurer la mise en place de lrsquointeropeacuterabiliteacute En effet rappelons que cette

agence a notamment pour mission de deacutefinir promouvoir et homologuer des reacutefeacuterentiels

contribuant agrave lrsquointeropeacuterabiliteacute agrave la seacutecuriteacute et agrave lrsquousage des systegravemes drsquoinformation de santeacute

et de la teacuteleacutesanteacute ainsi que de favoriser le deacuteveloppement des systegravemes drsquoinformation partageacutes

dans le domaine de la santeacute et du secteur meacutedico-social afin de deacutevelopper la coordination et

la qualiteacute des soins (dont la teacuteleacutemeacutedecine) la preacutevention la veille et lrsquoalerte sanitaire

632 Cour des comptes laquo Lrsquointeropeacuterabiliteacute des systegravemes drsquoinformation en santeacute raquo op cit p 7

633 Ordonnance ndeg 2005-1516 du 8 deacutecembre 2005 relative aux eacutechanges eacutelectroniques entre les usagers et les

autoriteacutes administratives et entre les autoriteacutes administratives JORF du 9 deacutecembre 2005 p 18986 634

Id article 11 635

Id article 1er

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

292

538 Crsquoest dans ce contexte que lrsquoASIP Santeacute a eacutelaboreacute le cadre drsquointeropeacuterabiliteacute des

systegravemes drsquoinformation de santeacute (CI-SIS) Lrsquoobjectif principal du CI-SIS est de deacutefinir les

regravegles permettant lrsquointeropeacuterabiliteacute des SIS en santeacute Cette interopeacuterabiliteacute se situe agrave deux

niveaux diffeacuterents drsquoune part lrsquointeropeacuterabiliteacute technique qui va permettre le partage des

donneacutees de santeacute en favorisant les flux et les eacutechanges et drsquoautre part lrsquointeropeacuterabiliteacute des

contenus meacutetiers afin de permettre le traitement des donneacutees et leur compreacutehension Drsquoune

maniegravere geacuteneacuterale le CI-SIS est baseacute sur des normes internationales en matiegravere de SIS

ponctuellement adapteacutees aux speacutecificiteacutes franccedilaises quand cela est neacutecessaire

539 Reacutecemment lrsquoASIP santeacute a revu et corrigeacute entiegraverement la gouvernance de ce cadre

drsquointeropeacuterabiliteacute La nouvelle gouvernance du CI-SIS a eacuteteacute preacutesenteacutee en novembre 2015 aux

utilisateurs aux industriels et aux partenaires institutionnels Cette reacutenovation reacutesulte drsquoune

volonteacute de lrsquoASIP drsquoadapter le CI-SIS aux eacutevolutions des usages en matiegravere de SIS mais

eacutegalement de srsquoadapter aux eacutevolutions des normes internationales sur lesquelles le CI-SIS

srsquoappuie en majeure partie Pour cela les acteurs de SIS santeacute ont eacuteteacute fortement solliciteacutes et

leurs besoins en matiegravere drsquointeropeacuterabiliteacute ont eacuteteacute recueillis Enfin la loi de modernisation de

notre systegraveme de santeacute est venue ajouter636

un article L 1110-4-1 au Code de la santeacute

publique qui renforce le poids des reacutefeacuterentiels drsquointeropeacuterabiliteacute puisqursquoil preacutecise la chose

suivante laquo afin de garantir la qualiteacute et la confidentialiteacute des donneacutees de santeacute agrave caractegravere

personnel et leur protection les professionnels de santeacute les eacutetablissements et services de

santeacute les heacutebergeurs de donneacutees de santeacute agrave caractegravere personnel et tout autre organisme

participant agrave la preacutevention aux soins ou au suivi meacutedico-social et social utilisent pour leur

traitement leur conservation sur support informatique et leur transmission par voie

eacutelectronique des systegravemes dinformation conformes aux reacutefeacuterentiels dinteropeacuterabiliteacute et de

seacutecuriteacute eacutelaboreacutes par le groupement dinteacuterecirct public mentionneacute agrave larticle L 1111-24 Ces

reacutefeacuterentiels sont approuveacutes par arrecircteacute du ministre chargeacute de la santeacute pris apregraves avis de la

Commission nationale de linformatique et des liberteacutes raquo

540 Cependant agrave lrsquoheure actuelle bien que ces reacutefeacuterentiels soient precircts et disponibles sur le

site de lrsquoASIP Santeacute ils nrsquoont toujours pas eacuteteacute comme la loi lrsquoexige approuveacute par arrecircteacute du

636 Article 96 de la loi ndeg 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre systegraveme de santeacute JORF ndeg0022

du 27 janvier 2016 texte 1

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

293

ministre de la santeacute Ainsi nous comprenons tregraves vite lrsquoambiguiumlteacute de la situation les

eacutetablissements de santeacute sont supposeacutement contraints drsquoadopter des solutions respectant des

regravegles drsquointeropeacuterabiliteacute valideacutees par le ministegravere de la santeacute srsquoils souhaitent conserver ou

eacutechanger par voie informatique des donneacutees de santeacute mais le ministegravere tarde agrave fournir cet

arrecircteacute La situation est donc actuellement en suspens

Il ne srsquoagit pas du seul frein au bon deacuteveloppement de lrsquointeropeacuterabiliteacute des SIS et des

obstacles majoritairement techniques subsistent encore aujourdrsquohui

2) Les obstacles au deacuteveloppement de lrsquointeropeacuterabiliteacute

541 Comme le rapport drsquoinformation du deacuteputeacute Jean-Yves JEGOU le signalait deacutejagrave en

2007637

plusieurs types drsquoobstacles existent agrave un reacuteel aboutissement de lrsquointeropeacuterabiliteacute des

SIS Les constats effectueacutes il y a presque dix ans sont aujourdrsquohui encore valables mecircme srsquoil

est vrai que les obstacles techniques ont eacuteteacute consideacuterablement reacuteduits

542 Le premier obstacle technique majeur est bien entendu lrsquoexistence ou plutocirct agrave lrsquoheure

actuelle lrsquoinexistence drsquoun identifiant patient unique et unifieacute Jusque tregraves reacutecemment les

tentatives de mise en place de cet identifiant ont eacutechoueacute La loi de modernisation de notre

systegraveme de santeacute tente de reacutesoudre ce problegraveme en preacutevoyant lrsquoutilisation geacuteneacuteraliseacutee du NIR

comme identifiant patient unique Il faut maintenant que les acteurs concerneacutes srsquoadaptent pour

mettre en place cet identifiant Pour les eacutetablissements de santeacute cette utilisation devrait ecirctre

de toute maniegravere acceacuteleacutereacutee par la mise en place des Groupements Hospitaliers de Territoire

qui devront organiser une mutualisation de la gestion des systegravemes drsquoinformation et un

systegraveme drsquoinformation convergent drsquoici 2020 Le mecircme problegraveme se pose en termes

drsquoauthentification des professionnels de santeacute par le biais du systegraveme de carte CPS

notamment dont nous avons deacutejagrave exposeacute les limites actuelles agrave plusieurs reprises

543 Lrsquoautre obstacle technique majeur reacuteside dans la multipliciteacute des opeacuterateurs logiciels

sur le marcheacute En effet les industriels deacuteveloppent des solutions et des applications

diffeacuterentes afin de faire marcher le jeu de la concurrence De ce fait ces applications ne sont

pas communicantes entre elles Ainsi en 2007 la Cour des comptes parlait mecircme

637 JEacuteGOU Jean-Jacques laquo Systegravemes dinformation de santeacute le diagnostic est poseacute le traitement simpose raquo op

cit

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

294

laquo drsquoatomisation du parc de logiciels raquo la seule exception eacutetant les domaines de lrsquoimagerie

meacutedicale et des laboratoires dont les systegravemes drsquoinformations doivent ecirctre coupleacutes avec des

eacutequipements techniques dont le nombre de constructeurs est assez faible

544 Enfin un problegraveme organisationnel vient eacutegalement ralentir le deacuteveloppement peacuterenne

de lrsquointeropeacuterabiliteacute celui de lrsquourbanisation des systegravemes drsquoinformation Ce terme emprunteacute

au domaine des travaux drsquoarchitecture des villes a eacuteteacute repris par les professionnels de

lrsquoinformatique pour deacutesigner une deacutemarche visant agrave structurer le systegraveme drsquoinformation drsquoune

socieacuteteacute afin de le rationaliser et drsquoameacuteliorer ses performances et faciliter ses eacutevolutions

545 En matiegravere de systegravemes drsquoinformation de santeacute pour reprendre les propos drsquoYves

ROBIN laquo dans une organisation du niveau de complexiteacute de notre systegraveme de santeacute crsquoest

lrsquourbanisation ou le chaos raquo638

Or pour lrsquoauteur crsquoest bien agrave lrsquoEtat qursquoil appartient de poser

les bases de cette urbanisation afin drsquoharmoniser lrsquoorganisation des systegravemes drsquoinformation

de santeacute Ainsi pour lrsquoancien directeur de lrsquoASIP santeacute plusieurs leviers permettraient de

faire eacutevoluer la situation actuelle en matiegravere drsquointeropeacuterabiliteacute et drsquourbanisation Il serait

question dans un premier temps de la mise en place par lrsquoEtat drsquoun scheacutema global

drsquourbanisation qui serait en soutien drsquoune politique globale de deacuteveloppement de lrsquoe-santeacute

Ce scheacutema serait lrsquooccasion drsquoorganiser la reacutepartition des missions et compeacutetences respectives

de lrsquoensemble des acteurs intervenants en la matiegravere que ce soit au niveau national ou

reacutegional Il serait eacutegalement neacutecessaire drsquoeacutelaborer un reacutefeacuterentiel laquo univoque drsquoidentiteacutes des

personnes physiques et morales composants lrsquooffre de soins raquo afin de pouvoir eacutetablir ensuite

une politique drsquoauthentification des professionnels efficace et compatible avec les pratiques

actuelles Enfin une de ses derniegraveres preacuteconisations majeures a eacuteteacute suivie puisqursquoil conseillait

drsquoadopter le NIR comme identifiant patient unique

Lrsquointeropeacuterabiliteacute des SIS nrsquoest pas le seul deacutefi majeur agrave relever En effet afin drsquoecirctre

efficace la gouvernance des SIS doit accorder une place importante aux acteurs reacutegionaux

638 ROBIN Jean-Yves laquo Lrsquourgence numeacuterique Faire de la France un leader de lrsquoe-santeacute raquo LrsquoHarmattan 2015

p 57

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

295

sect2 La place strateacutegique des acteurs reacutegionaux dans la gouvernance des

SIS

546 Au niveau national lrsquoEtat seul ne peut pas drsquoune part eacutedicter la politique geacuteneacuterale

applicable en matiegravere de SIS et drsquoautre part la mettre en place de maniegravere uniforme sur

lrsquoensemble du territoire Il doit donc srsquoappuyer sur drsquoautres acteurs pour mettre en place et

eacuteventuellement adapter ces politiques Au niveau reacutegional ce sont les Agences Reacutegionales de

Santeacute (ARS) qui ont ce rocircle majeur (A) et qui servent notamment de lien avec les

eacutetablissements de santeacute et professionnels concerneacutes Reacutecemment cette organisation reacutegionale

srsquoest eacutetoffeacutee avec lrsquoapparition drsquoun nouvel acteur au rocircle strateacutegique le Groupement

Hospitalier de Territoire (B)

A LrsquoARS acteur charniegravere dans la mise en œuvre des politiques relatives

aux SIS

547 Depuis plusieurs anneacutees la France srsquoest engageacutee dans de nombreux chantiers de

dessaisissement des services de lrsquoEtat au profit drsquoautres organismes En matiegravere sociale le

Conseil National de modernisation des politiques publiques a entrepris depuis 2007 une

reacuteorganisation des services centraux et deacuteconcentreacutes de lrsquoEtat en la matiegravere639

Dans le

domaine sanitaire crsquoest la loi HPST qui a amorceacute un changement important par la creacuteation

des Agences Reacutegionales de Santeacute services deacutecentraliseacutes de lrsquoEtat en matiegravere de santeacute

publique640

639 CRISTOL Daniegravele laquo La reacuteorganisation des services de lrsquoEtat en matiegravere sociale raquo RDSS 2011 p 27

640 Article L1431-1 du Code de la santeacute publique laquo Dans chaque reacutegion et dans la collectiviteacute territoriale de

Corse une agence reacutegionale de santeacute a pour mission de deacutefinir et de mettre en œuvre un ensemble coordonneacute de

programmes et dactions concourant agrave la reacutealisation agrave leacutechelon reacutegional et infrareacutegional

- des objectifs de la politique nationale de santeacute deacutefinie agrave larticle L 1411-1 du preacutesent Code

- des principes de laction sociale et meacutedico-sociale eacutenonceacutes aux articles L 116-1 et L 116-2 du Code de

laction sociale et des familles

- des principes fondamentaux affirmeacutes au I de larticle L 111-2-1 du Code de la seacutecuriteacute sociale

Les agences reacutegionales de santeacute contribuent au respect de lobjectif national de deacutepenses dassurance maladie

Leurs compeacutetences sexercent sans preacutejudice et dans le respect de celles des collectiviteacutes territoriales et des

eacutetablissements et agences mentionneacutes aux articles L 1222-1 L 1313-1 L 1413-2 L 1418-1 et L 5311-1 du

preacutesent Code ainsi quaux articles L 312-8 du Code de laction sociale et des familles et L 161-37 du Code de la

seacutecuriteacute sociale raquo

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

296

548 Les ARS jouent ainsi un rocircle majeur dans de nombreux projets relatifs aux systegravemes

drsquoinformation en santeacute la DGOS srsquoappuyant sur elles pour la mise en œuvre de projets ou

amorcer des phases de test au niveau reacutegional Cet acteur preacutesente lrsquointeacuterecirct drsquoavoir les

pouvoirs et lrsquoorganisation suffisante (1) pour aider lrsquoEtat dans la mise en œuvre concregravete de

ses politiques Crsquoest pour cela qursquoelles ont pour les projets principaux la deacutelicate mission de

les deacutecliner ou parfois de les tester au niveau reacutegional Crsquoest notamment le cas du programme

hocircpital numeacuterique projet phare de la DGOS en matiegravere de SIS (2)

1) LrsquoARS laquo bras armeacute raquo de lrsquoEtat en matiegravere de politiques de santeacute

549 Les Agences Reacutegionales de Santeacute creacuteeacutees par la loi HPST sont des eacutetablissements

publics de lrsquoEtat soumis agrave son controcircle Contrairement aux Agences Reacutegionales de

lrsquoHospitalisation (ARH) qui eacutetaient des GIP dont lrsquoEtat eacutetait membre les ARS sont donc une

eacutemanation directe de lrsquoEtat Leur creacuteation srsquoinscrit dans le cadre plus large de la reacutevision

geacuteneacuterale des politiques publiques ainsi que de sa deacuteclinaison territoriale641

Ainsi comme lrsquoa

releveacute la Cour des comptes lors de son examen de la mise en place des ARS laquo la creacuteation

des ARS confirme le niveau reacutegional comme eacutechelon pertinent de deacuteclinaison et de gestion

des politique de santeacute publique raquo642

En effet rappelons que jusqursquoalors crsquoest lrsquoeacutechelon

deacutepartemental qui eacutetait largement privileacutegieacute

Srsquoinscrivant dans une logique drsquoassociations des compeacutetences les ARS regroupent agrave la

fois des administrations deacuteconcentreacutees de lrsquoEtat (les anciennes Directions Deacutepartementales de

lrsquoAction Sanitaire et Sociale ndash DDASS - et Direction Reacutegionales de lrsquoAction Sanitaire et

Sociale ndash DRASS -) des organismes drsquoassurance maladie (URCAM CRAM et DRSM) ainsi

que des structures mixtes qui associaient deacutejagrave Etat et assurance maladie (ARH) Ces agences

se voient confieacutees de nombreuses deacuteleacutegations de pouvoir et beacuteneacuteficient drsquoune autonomie et de

pouvoirs renforceacutes par rapport notamment aux ARH Enfin au niveau national les ARS sont

piloteacutees par un Conseil National de Pilotage (CNP) des ARS composeacute de repreacutesentants de

lrsquoEtat de repreacutesentant de la Caisse Nationale de Solidariteacute pour lrsquoAutonomie et de

641 Cour des comptes laquo La mise en place des Agences Reacutegionales de Santeacute raquo rapport annuel relatif agrave la seacutecuriteacute

sociale chapitre VIII septembre 2012 p 233 642

Id p 234

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

297

repreacutesentants des organismes drsquoassurance maladie643

Le CNP a pour rocircle de deacutelivrer en

amont lrsquoensemble des directives neacutecessaires pour que les ARS puissent mettre en œuvre au

niveau reacutegional la politique de santeacute deacuteveloppeacutee au niveau national Par ailleurs le CNP a

pour rocircle drsquoeacutevaluer les actions des ARS ainsi que de leurs directeurs Geacuteneacuteraux

550 Le choix de faire des ARS des eacutetablissements publics de lrsquoEtat nrsquoest pas anodin et va

dans le sens drsquoune reacuteorganisation geacuteneacuterale de la gouvernance du systegraveme de santeacute qui induit

un renforcement de lrsquoemprise de lrsquoEtat644

Les ARS sont les repreacutesentantes de lrsquoEtat dans les

reacutegions veacuteritables bras armeacutes de lrsquoEtat en charge de la mise en œuvre de la politique de

santeacute sur les diffeacuterents territoires Ainsi les ARS de par leur organisation et leurs pouvoirs

apparaissent comme lrsquoacteur majeur de la mise en œuvre de la politique deacuteveloppeacutee par lrsquoEtat

en matiegravere de SIS Pour reprendre les termes employeacutes par lrsquoASIP santeacute laquo acteur unique

chargeacute de lefficience des soins dans les territoires les ARS sont en premiegravere ligne pour le

deacuteploiement des systegravemes dinformation partageacutes de santeacute raquo645

Elles sont le relais

indispensable agrave lrsquoEtat au niveau des territoires de santeacute Elles preacutesentent eacutegalement lrsquointeacuterecirct

drsquoavoir une capaciteacute agrave adapter la politique nationale aux particulariteacutes de leurs territoires En

effet selon les reacutegions et au sein mecircme des reacutegions selon les territoires de santeacute les enjeux

en matiegravere de SIS ne seront pas les mecircmes Elles peuvent donc selon les besoins des

territoires et les acteurs en place instaurer les coopeacuterations neacutecessaires ou encore

accompagner le deacuteveloppement et la modernisation des SIH de certains eacutetablissements Pour

autant leur lien tuteacutelaire avec lrsquoEtat empecircche des deacuteveloppements anarchiques de systegravemes

drsquoinformation de santeacute totalement reacutegionaliseacutes et donc cloisonneacutes

551 Tout comme elle lrsquoest pour les politiques de santeacute publique plus traditionnelles lrsquoARS

apparait parfaitement leacutegitime non seulement pour appuyer et soutenir en reacutegion la politique

nationale de deacuteveloppement de SIS mais eacutegalement pour la deacuteployer de maniegravere concregravete sur

les territoires de soins Elle apparait comme le lien entre lrsquoEtat concepteur de ces politiques

et eacutetablissements de santeacute acteurs directs en charge de leur application LrsquoARS repreacutesentant

de lrsquoEtat et surtout de sa politique de santeacute dans les reacutegions va ecirctre le pivot sur lequel lrsquoEtat

643 Article L 1433-1 du Code de la santeacute publique

644 VIOUJAS Vincent laquo De la loi HPST agrave la loi ndeg 2016-41 du 26 janvier 2016 convergences et inflexions

dans lrsquoeffort de modernisation de notre systegraveme de santeacute raquo JCP-A ndeg 13 avril 2016 p 2092 645

laquo LrsquoARS acteur unique du systegraveme de santeacute en reacutegion raquo ASIP santeacute disponible sur [httpesantegouvfr]

consulteacute le 19 avril 2016

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

298

va pouvoir se reposer afin de tester et de mettre en place sa politique en matiegravere de systegravemes

drsquoinformation de santeacute Cependant les ARS beacuteneacuteficiant drsquoune certaine autonomie chacune

drsquoentre elles peut deacutevelopper une strateacutegie adapteacutee agrave sa reacutegion

2) LrsquoARS acteur essentiel de la strateacutegie hocircpital numeacuterique

552 Piloteacute et mis en place par la DGOS le programme hocircpital numeacuterique destineacute au

deacuteveloppement et agrave la modernisation des systegravemes drsquoinformation hospitaliers sur la peacuteriode

2012-2017 a eacuteteacute lanceacute le 25 novembre 2011 Ce programme a pour buts principaux de

coordonner lrsquoensemble des acteurs (eacutetablissements de santeacute ARS administration centrale

industriels) autour drsquoune feuille de route commune pour les SIH soutenir les projets

innovants et amener le systegraveme drsquoinformation de lrsquoensemble des eacutetablissements de santeacute au

palier de maturiteacute Hocircpital numeacuterique

553 Les Agences Reacutegionales de Santeacute ont pour mission la mise en œuvre agrave lrsquoeacutechelon

reacutegional et infrareacutegional des politiques nationales en matiegravere de santeacute A ce titre elles

deacuteclinent au sein de leur territoire le programme Hocircpital numeacuterique Les objectifs du

programme doivent ecirctre pris en compte dans les politiques reacutegionales de santeacute deacutefinies par les

ARS dans le cadre de documents strateacutegiques (programme reacutegional SI scheacutema directeur SI

programme de teacuteleacutesanteacute hellip) mais eacutegalement dans les contrats pluriannuels drsquoobjectifs et de

moyens (CPOM) qursquoelles signent avec les eacutetablissements de santeacute de leur territoire A titre

drsquoexemple les engagements reacuteciproques de lrsquoARS et drsquoun eacutetablissement de santeacute sur les

sujets relatifs aux systegravemes drsquoinformation hospitaliers sont formaliseacutes au sein du volet

systegraveme drsquoinformation du CPOM volet par ailleurs obligatoire

554 Comme le preacutecise le guide pratique agrave destination des agences reacutegionales de santeacute pour

la deacuteclinaison du programme hocircpital numeacuterique646

la DGOS attend de lrsquoARS qursquoelle prenne

laquo une part active dans la mise en œuvre du programme Hocircpital numeacuterique et ecirctre un reacuteel

promoteur du projet sur toute sa dureacutee raquo Ainsi la mise en œuvre opeacuterationnelle du

programme repose sur trois axes au sein desquels lrsquoARS aura un rocircle agrave jouer

646 Publieacute par lrsquoinstruction DGOSMSIOS ndeg 201-375 du 31 octobre 2012 BO santeacute protection sociale

solidariteacute ndeg 2012-12 du 15 janvier 2013 p 149

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

299

555 Le premier axe est consacreacute agrave la gouvernance du projet Les ARS participent agrave cette

gouvernance par le biais de plusieurs outils Drsquoabord elles integravegrent le programme au sein de

la politique reacutegionale de santeacute soit sous la forme drsquoune deacuteclinaison du plan drsquoaction national

agrave lrsquoeacutechelle des territoires de santeacute soit gracircce agrave la contractualisation avec les eacutetablissements par

le biais des CPOM En ce qui concerne plus speacutecifiquement les CPOM il est important de

noter que le Code de la santeacute publique preacutevoit expresseacutement que laquo le contrat fixe [hellip] les

engagements du titulaire en termes de deacuteveloppement des systegravemes drsquoinformation de

transmission des donneacutees informatiques et le cas eacutecheacuteant des activiteacutes de teacuteleacutemeacutedecine raquo

LrsquoARS a eacutegalement la possibiliteacute de mettre en place des structures de coopeacuteration visant agrave

faciliter la mutualisation des moyens A ce sujet nous verrons que lrsquoARS dispose depuis peu

drsquoun outil qui va si sa mise en œuvre fonctionne faciliter ces mutualisations les

Groupements Hospitaliers de Territoire (GHT)

556 Sur lrsquoaxe 2 consacreacute aux compeacutetences SI les ARS ont un rocircle essentiellement

peacutedagogique puisqursquoelles devront assurer la coordination des formations initiales et continue

Drsquoune maniegravere concregravete lrsquoARS pourra srsquoassurer que la dimension SI est bien inteacutegreacutee dans les

programmes de formations en srsquoappuyant notamment sur les deacuteleacutegations reacutegionales de

lrsquoANFH

557 En ce qui concerne lrsquoaxe 3 consacreacute agrave lrsquooffre de solution les ARS nrsquointerviennent pas

En revanche leur rocircle est strateacutegique sur lrsquoaxe 4 consacreacute au financement En effet crsquoest aux

ARS qursquoil appartient de seacutelectionner les dossiers qui seront retenus pour se voir octroyer un

soutien financier au titre du programme A noter que ce soutien nrsquoest pas neacutegligeable puisque

agrave titre drsquoexemple en 2015 154 millions drsquoeuros ont eacuteteacute alloueacutes agrave 600 eacutetablissements

diffeacuterents reacutepartis au sein de 23 reacutegions647

Les ARS sont donc au cœur de lrsquoorganisation du

financement du projet Cette mission tregraves speacutecifique a drsquoailleurs fait lrsquoobjet drsquoune instruction

du ministegravere de la santeacute648

647 Projet hocircpital numeacuterique rapport drsquoactiviteacute 2015 p 18

648 Instruction ndegDGOSPFMSIOS2013225 du 04 juin 2013 relative au lancement opeacuterationnel du volet

financement du programme hocircpital numeacuterique non publieacutee au JORF

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

300

3) Les maicirctrises drsquoouvrage reacutegionales appuis strateacutegiques aux ARS

558 Autres acteurs reacutegionaux incontournables et essentiels en matiegravere de mise en œuvre de

la politique des systegravemes drsquoinformation de santeacute les maicirctrises drsquoouvrages reacutegionales ou

MOAR

La speacutecificiteacute et la haute techniciteacute des projets relatifs aux Systegravemes drsquoinformation en

santeacute ont neacutecessiteacute de renforcer la maicirctrise drsquoouvrage reacutegionale en charge de ces projets Alors

que de nombreux rapports et notamment le rapport GAGNEUX preacuteconisaient de creacuteer dans

chaque reacutegion des structures de maicirctrise drsquoouvrage partenariales chaque reacutegion devant se

doter laquo sous la responsabiliteacute de lrsquoagence reacutegionale de santeacute drsquoune structure de maicirctrise

drsquoouvrage monteacutee en partenariat avec lrsquoensemble des acteurs raquo lrsquoASIP Santeacute a deacutecideacute de

faciliter la creacuteation et le deacuteveloppement de ces MOAR degraves 2010 en lanccedilant le programme

EMERGENCE Lrsquoobjectif de ce programme eacutetait drsquoaccompagner les acteurs reacutegionaux dans

la mise en place drsquoune maicirctrise drsquoouvrage reacutegionale qui viendrait en appui de lrsquoARS pour les

accompagner dans ses missions en matiegravere de SIS Ce programme srsquoinscrivait dans la

continuiteacute du programme de relance du DMP

559 Alors que certaines reacutegions comme la reacutegion Midi-pyreacuteneacutees nrsquoavaient pas attendu

pour creacuteer leur MOAR drsquoautres ont de leur cocircteacute fortement beacuteneacuteficieacute du programme

EMERGENCE et de lrsquoimpulsion de lrsquoASIP Santeacute pour la mettre en place Ainsi un rapport

relatif agrave lrsquoeacutetat des lieux des maicirctrises drsquoouvrages reacutegionales reacutealiseacute par le cabinet KPMG sur

commande de lrsquoASIP en novembre 2012649

preacutecisant qursquoagrave cette date 21 reacutegions (sur 26 agrave

lrsquoeacutepoque) beacuteneacuteficiaient drsquoune MOAR opeacuterationnelle Toutes ces structures de MOAR sans

exception ont fait le choix du GCS de moyens pour la grande majoriteacute drsquoentre elles GCS

priveacute mecircme si trois MOAR conservaient en 2012 le statut de GCS de moyens de droit

public Ce choix srsquoexplique agrave la fois pour les avantages juridiques du GCS (structure doteacutee de

la personnaliteacute juridique ayant une autonomie et un budget propre) mais eacutegalement par le fait

que cette formule se reacutevegravele parfaitement adapteacutee pour des coopeacuterations entre plusieurs acteurs

649 Cabinet KPMG laquo Etat des lieux des maicirctrises drsquoouvrage reacutegionales raquo rapport final novembre 2012

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

301

tregraves diffeacuterents (eacutetablissements publics eacutetablissements priveacutes structures associatives

professionnels de santeacute)

560 Cependant le choix du GCS preacutesente un point neacutegatif non neacutegligeable le fait que ce

type de groupement soit par deacutefinition au service exclusif de ses adheacuterents Or il apparait

difficile de faire des MOAR une structure drsquoappui aux ARS pour ses missions de santeacute

publique si cette mecircme MOAR ne peut pas srsquoadresser agrave lrsquoensemble des acteurs concerneacutes par

lrsquoARS Par ailleurs comme le soulignait agrave juste titre le rapport de KPMG sur les MOAR le

statut de GCS peut perdre en agiliteacute et en reacuteactiviteacute au fur et agrave mesure de lrsquoaugmentation de

ses membres Degraves lors le risque est que la MOAR devienne plutocirct une structure de

repreacutesentation qursquoune structure opeacuterationnelle Cependant les MOAR restent des acteurs

reacutegionaux indispensables au deacuteveloppement des SIS et de la mise en œuvre des politiques

nationales en la matiegravere

B Les GHT nouveaux acteurs strateacutegiques pour le SIS

561 Preacutesenteacutes comme une laquo [] strateacutegie de prise en charge partageacutee autour dun projet

meacutedical commun par les eacutetablissements publics de santeacute dun mecircme territoire

[] raquo permettant la gestion mutualiseacutee de laquo certaines fonctions transversales () raquo650

les

Groupements Hospitaliers de territoires nouveaux venus dans le monde des coopeacuterations

hospitaliegraveres sont des groupements preacutesentant de nombreuses atypies (1) Parmi leurs

nombreuses missions les GHT doivent notamment veiller agrave la convergence des SI de leurs

membres Cette nouvelle structure devient donc un acteur incontournable de la gouvernance

des SIS (2)

1) Les GHT une forme atypique de coopeacuteration

562 La loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute compleacuteteacutee par le deacutecret ndeg 2016-

524 du 27 avril 2016 relatif aux groupements hospitaliers de territoire651

modifie

profondeacutement lrsquoorganisation des coopeacuterations hospitaliegraveres opeacuterant un laquo reacuteel changement de

650 Ministre des Affaires sociales de la Santeacute et des Droits des femmes lettre de la mission daccompagnement

sur les groupements hospitaliers de territoire 17 novembre 2014 651

Deacutecret ndeg 2016-524 du 27 avril 2016 relatif aux groupements hospitaliers de territoire JORF ndeg0101 du 29

avril 2016 texte ndeg 24

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

302

paradigme raquo652

en instaurant les Groupements Hospitaliers de Territoires (GHT) En effet

lrsquoarticle 107 de la loi codifieacute aux articles L 6132-1 et suivants du Code de la santeacute publique

preacutevoit que laquo chaque eacutetablissement public de santeacute sauf deacuterogation tenant agrave sa speacutecificiteacute

dans loffre de soins territoriale est partie agrave une convention de groupement hospitalier de

territoire Le groupement hospitalier de territoire nest pas doteacute de la personnaliteacute morale Le

groupement hospitalier de territoire a pour objet de permettre aux eacutetablissements de mettre

en œuvre une strateacutegie de prise en charge commune et gradueacutee du patient dans le but

dassurer une eacutegaliteacute daccegraves agrave des soins seacutecuriseacutes et de qualiteacute Il assure la rationalisation

des modes de gestion par une mise en commun de fonctions ou par des transferts dactiviteacutes

entre eacutetablissements Dans chaque groupement les eacutetablissements parties eacutelaborent un projet

meacutedical partageacute garantissant une offre de proximiteacute ainsi que laccegraves agrave une offre de reacutefeacuterence

et de recours raquo Le GHT est preacutesenteacute comme un outil de coopeacuteration qui vise laquo agrave rationaliser

les modes de gestion soit par une mise en commun de fonctions soit par des transferts

drsquoactiviteacute entre eacutetablissements Les modes de gestion srsquoentendent ainsi de plusieurs maniegraveres

la gestion de lrsquooffre de soins drsquoune part (hellip) et la gestion des outils supports drsquoautre part

permettant une ameacutelioration des modaliteacutes de travail raquo653

Il est inteacuteressant de se pencher sur cette nouvelle forme de coopeacuteration creacutee par la loi

Touraine originale en plusieurs points

a) Speacutecificiteacute des GHT

563 Le GHT preacutesente la particulariteacute de nrsquoavoir de groupement que le nom En effet

contrairement aux GCS ou aux GIE les GHT ne donnent pas lieu agrave la naissance drsquoune

nouvelle personne morale et reposent sur un dispositif conventionnel En cela les GHT sont

les descendants directs des Communauteacutes hospitaliegraveres de territoires formule de coopeacuteration

introduite par la loi HPST et qui disparait drsquoailleurs avec la creacuteation des GHT654

En pratique

les GHT sont composeacutes drsquoeacutetablissements publics dont lrsquoadheacutesion est encadreacutee par une

convention constitutive signeacutee entre les diffeacuterents eacutetablissements membres et valideacutee par

lrsquoARS Notons qursquoun eacutetablissement public de santeacute ne peut ecirctre partie qursquoagrave un seul GHT et les

652 VARNIER Freacutedeacuteric laquo La coopeacuteration hospitaliegravere au service de la modernisation de notre systegraveme de

santeacute raquo RDSS 2016 ndeg 4 p 620 653

VEacuteRAN Olivier LACLAIS Bernadette TOURAINE Jean-Louis et ali Rapport fait au nom de la

commission des affaires sociales sur le projet de loi relatif agrave la santeacute ndeg 2673 mars 2015 p 46 654

V notamment en ce sens lrsquoarticle L 6211-21 du Code de la santeacute publique

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

303

coopeacuterations de ce type ne peuvent donc pas ecirctre deacutemultiplieacutees Lrsquoautre particulariteacute de ces

groupements est leur caractegravere obligatoire En effet les eacutetablissements de santeacute nrsquoont pas eu

drsquoautre choix que drsquoadheacuterer agrave un GHT et ce avant la date butoir du 1er

juillet 2016 fixeacutee par la

loi Ce caractegravere obligatoire constitue une rupture655

avec ce qui existait preacuteceacutedemment en

matiegravere de coopeacuteration hospitaliegravere Par ailleurs il est utile de preacuteciser que le leacutegislateur srsquoil a

encadreacute et preacutevu lrsquoensemble des dispositions relatives agrave la constitution des GHT il nrsquoen a

preacutevu aucune quant agrave leur dissolution ou encore au retrait des eacutetablissements Drsquoautres

eacutetablissements peuvent cependant participer agrave un GHT par le biais drsquoune association ou drsquoun

partenariat En effet la loi Touraine a ouvert la possibiliteacute aux eacutetablissements deacutejagrave membres

drsquoun GHT ou qui au contraire ne pourraient pas faire partie drsquoun GHT de par leur statut

(hocircpitaux des armeacutees eacutetablissements drsquohospitalisation agrave domicile eacutetablissements publics de

santeacute autoriseacutes en psychiatrie) drsquoecirctre tout de mecircme associeacute au projet meacutedical De mecircme tous

les GHT doivent ecirctre associeacutes agrave un CHU au titre des activiteacutes hospitalo-universitaires cette

association eacutetant traduite agrave la fois dans le projet meacutedical du groupement et dans une

convention drsquoassociation passeacutee entre lrsquoeacutetablissement support du GHT et le CHU concerneacute

Enfin les eacutetablissements priveacutes peuvent quant agrave eux ecirctre partenaires drsquoun GHT et ce en

signant une convention de coopeacuteration encadreacutee par les dispositions de lrsquoarticle L 6134-1 du

Code de la santeacute publique656

Ainsi le GHT est fondeacute sur un dispositif strictement conventionnel En effet le GHT

repose sur a minima deux conventions la convention constitutive drsquoune part et la convention

drsquoassociation avec un CHU drsquoautre part mecircme si celle-ci ne sera signeacutee que par

lrsquoeacutetablissement support

564 La convention constitutive preacutesente un reacuteel caractegravere strateacutegique en ce qursquoelle doit

preacuteciser des points majeurs du fonctionnement du GHT Elle doit ainsi fixer le projet meacutedical

partageacute les deacuteleacutegations eacuteventuelles drsquoactiviteacutes les transferts eacuteventuels de soins ou

655 VARNIER Freacutedeacuteric laquo La coopeacuteration hospitaliegravere au service de la modernisation de notre systegraveme de

santeacute raquo op cit p 620 656

laquo Dans le cadre des missions qui leur sont imparties et dans les conditions deacutefinies par voie reacuteglementaire

les eacutetablissements de santeacute publics ou priveacutes agrave but non lucratif peuvent participer agrave des actions de coopeacuteration y

compris internationales avec des personnes de droit public et priveacute Pour la poursuite de ces actions ils

peuvent signer des conventions participer agrave des groupements dinteacuterecirct public des groupements dinteacuterecirct

eacuteconomique ou des groupements de coopeacuteration sanitaire ou constituer entre eux des feacutedeacuterations meacutedicales

interhospitaliegraveres Pour les actions de coopeacuteration internationale les eacutetablissements de santeacute publics ou priveacutes agrave

but non lucratif peuvent eacutegalement signer des conventions avec des personnes de droit public et priveacute dans le

respect des engagements internationaux souscrits par lEtat franccedilais raquo

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

304

drsquoeacutequipement mateacuteriels lourds entre les eacutetablissements lrsquoorganisation des activiteacutes et la

reacutepartition des emplois meacutedicaux et pharmaceutiques les modaliteacutes de constitution des

eacutequipes meacutedicales communes et des eacuteventuels pocircles inter-eacutetablissements et enfin les

modaliteacutes pratiques drsquoorganisation et de fonctionnement du GHT Elle est eacutegalement la base

leacutegale de la deacuteleacutegation de compeacutetences entre les eacutetablissements et lrsquoeacutetablissement support Car

en effet lrsquoautre particulariteacute majeure des GHT est cet adossement agrave un eacutetablissement support

deacutesigneacute au sein de la convention et qui aura en charge drsquoexercer certaines fonctions pour le

compte des autres eacutetablissements et notamment la gestion commune drsquoun SIH convergent la

gestion du DIM la fonction achat la coordination des instituts et des eacutecoles de formation

Cette convention est drsquoautant plus importante que le GHT ne dispose ni de la personnaliteacute

morale ni drsquoun dispositif extrecircmement encadreacute comme crsquoest par exemple le cas pour les

GCS La convention se doit donc drsquoecirctre la plus preacutecise possible puisqursquoelle a la lourde tacircche

pour reprendre les propos de Catherine KELLER de compenser laquo lrsquoabsence drsquoincarnation

juridique de la coopeacuteration qursquoelle met en œuvre raquo657

565 Plus qursquoune simple mise en commun des moyens telle que lrsquoon peut la rencontrer

dans les coopeacuterations du type GIP ou GCS les GHT induisent une deacuteleacutegation drsquoactiviteacute658

Ce

que le texte preacutevoit relegraveve en effet de la deacuteleacutegation de compeacutetence puisque les eacutetablissements

doivent deacuteleacuteguer a minima quatre compeacutetences strateacutegiques - SIH DIM achats et formation -

agrave lrsquoeacutetablissement support qui agira alors pour leur compte Crsquoest avec une grande attention et

une grande preacutecaution que ces deacuteleacutegations drsquoactiviteacute devront ecirctre appreacutehendeacutees par les

diffeacuterents eacutetablissements En effet lrsquoeacutetablissement support devra mesurer lrsquoimpact de cette

deacuteleacutegation sur sa responsabiliteacute Par ailleurs la convention constitutive est la base juridique de

cette deacuteleacutegation de compeacutetence ce qui ne fait que renforcer son importance

b) Des questions en suspens

566 La mise en place des GHT soulegraveve plusieurs questions drsquoordre juridique Drsquoabord la

pertinence du qualificatif de coopeacuteration attribueacute aux GHT En effet il est neacutecessaire de se

demander si le terme de coopeacuteration est adapteacute pour deacutesigner les GHT agrave partir du moment ougrave

657 KELLER Catherine laquo De la communauteacute hospitaliegravere de territoire au groupement hospitalier de territoire

continuiteacute et rupture raquo JCP ndashA 2015 p 39 658

La deacuteleacutegation de compeacutetence peut ecirctre deacutefinie comme le fait pour une autoriteacute administrative de se dessaisir

dans les limites preacutevues par la loi drsquoun ou plusieurs de ses pouvoirs en faveur drsquoun autre agent qui les exercera agrave

sa place

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

305

la mutualisation de moyens arrive en second plan Pour certains auteurs le GHT ne serait

qursquoune eacutetape intermeacutediaire qui megravenera irreacutemeacutediablement vers une fusion des

eacutetablissements659

Il ne faut pourtant pas oublier le sens premier du terme coopeacuteration Le

dictionnaire donne la deacutefinition suivante de la notion de coopeacuteration laquo action de coopeacuterer

de participer agrave une œuvre commune raquo En droit public la coopeacuteration peut ecirctre deacutefinie comme

la mise en commun de moyens par plusieurs partenaires afin de reacutealiser des missions

communes Elle suppose donc un partage des tacircches des moyens mais eacutegalement des

responsabiliteacutes Or le meacutecanisme de deacuteleacutegation drsquoactiviteacute est pour sa part totalement

diffeacuterent En effet un seul eacutetablissement dans ce cas sera responsable de lrsquoexeacutecution des

missions et lui seul sera eacutegalement responsable en cas drsquoeacutechec Cependant le deacuteleacutegataire

deacutetiendra seul lrsquoautoriteacute deacutecisionnaire contrairement aux coopeacuterations ougrave les eacutetablissements

deacutecident ensemble dans le cadre drsquoinstances

567 Bien entendu cette analyse doit ecirctre nuanceacutee dans le cas des GHT En effet toutes les

activiteacutes ne font pas lrsquoobjet drsquoune deacuteleacutegation de compeacutetence Pour certaines il y aura reacuteelle

mutualisation des moyens Lrsquoexistence drsquoun projet meacutedical commun est drsquoailleurs la preuve

irreacutefutable de lrsquoexistence drsquoune forme de coopeacuteration Par ailleurs les textes preacutevoient

lrsquoexistence drsquoune gouvernance commune Ainsi lrsquoarticle L 6132-2 du Code de la santeacute

publique preacutevoit la mise en place drsquoun comiteacute strateacutegique chargeacute de laquo se prononcer sur la

mise en œuvre de la convention et du projet meacutedical partageacute raquo composeacute des directeurs des

eacutetablissements membres des Preacutesidents de CME et des Preacutesidents de CSIRMT des

eacutetablissements membres

Le GHT apparait donc agrave ce stade comme une formule hybride agrave la lisiegravere entre

coopeacuteration fonctionnelle et coopeacuteration organique et faisant appel agrave plusieurs meacutecanismes

juridiques tregraves distincts pour fonctionner

568 Nous pouvons ensuite nous interroger sur la reacuteelle simpliciteacute attacheacutee agrave lrsquoabsence de

personnaliteacute morale du GHT En effet le rapport intermeacutediaire de la mission Groupements

Hospitaliers de Territoire meneacutee par Jacqueline HUBERT et Freacutederic MARTINEAU et rendu

en mai 2015 procircnait une absence de personnaliteacute morale invoquant la lourdeur des

659 HOUDART Laurent HOUDART Steacutephanie CHAMPENOIS Guillaume laquoTout ce que vous avez toujours

voulu savoir sur les GHT raquo article disponible sur [httpwwwhoudartorg] Consulteacute le 20 avril 2016

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

306

coopeacuterations donnant lieu agrave creacuteation drsquoune nouvelle personne morale et estimant que cette

absence de personnaliteacute morale pouvait au contraire se reacuteveacuteler ecirctre une condition de reacuteussite

de la coopeacuteration660

Or cette simpliciteacute preacutesupposeacutee nrsquoexiste pas en reacutealiteacute661

En effet le

GHT existera par le biais de diffeacuterents montages conventionnels conventions qui pourraient

se deacutecliner sur trois niveaux diffeacuterents (convention constitutive convention(s) de partenariat

et convention(s) drsquoassociation) A ce sujet Jacques HARDY parle drsquoun laquo usage de la forme

contractuelle [hellip] pousseacutee aux limites de la neacutecessiteacute de creacuteer une personne morale deacutedieacutee agrave

la coopeacuteration raquo662

Par ailleurs lrsquoabsence de personnaliteacute juridique peut laisser craindre une

certaine fragiliteacute du dispositif mecircme si agrave ce sujet les avis de la doctrine divergent663

569 Cette absence de personnaliteacute juridique du GHT apporte selon nous une autre

difficulteacute importante celle de la reacutepartition des responsabiliteacutes au sein drsquoune structure sans

personnaliteacute juridique La reacuteponse est simple pour les activiteacutes deacuteleacutegueacutees agrave lrsquoeacutetablissement

support En effet celui-ci en tant que deacuteleacutegataires devra en assumer lrsquoensemble des

responsabiliteacutes et ce poids ne sera pas anodin pour lrsquoeacutetablissement qui aura la lourde charge

drsquoecirctre le support drsquoun GHT

570 Cependant pour ce qui est des activiteacutes mises en commun et notamment la mise en

place eacuteventuelle de pocircle inter-eacutetablissements il sera neacutecessaire pour chacun des membres du

GHT drsquoapporter une vigilance particuliegravere agrave la traccedilabiliteacute de lrsquoensemble de leurs actes La

reacutepartition des responsabiliteacutes sera donc toujours possible en appliquant les regravegles de droit

commun Force est de constater que lrsquoexistence drsquoune personne morale ducircment identifieacutee

660 HUBERT Jacqueline MARTINEAU Freacutederic laquo Mission Groupements Hospitaliers de Territoire raquo rapport

intermeacutediaire mai 2015 p 25 661

KELLER Catherine laquo De la communauteacute hospitaliegravere de territoire au groupement hospitalier de territoire

continuiteacute et rupture raquo op cit 662

HARDY Jacques laquo Les cateacutegories juridiques agrave lrsquoeacutepreuve de la reacuteforme administrative Le Cas des

groupements hospitaliers de territoire raquo AJDA 2017 p 919 663

V notamment en ce sens VARNIER Freacutedeacuteric laquo La coopeacuteration hospitaliegravere au service de la modernisation

de notre systegraveme de santeacute raquo op cit p620 qui estime que lrsquoabsence de personnaliteacute juridique nrsquoest pas

synonyme de fragiliteacute juridique les activiteacutes eacutetant simplement deacuteplaceacutees drsquoun eacutetablissement agrave un autre

conservant sa personnaliteacute morale V eacutegalement HARDY Jacques laquo Les cateacutegories juridiques agrave lrsquoeacutepreuve de la

reacuteforme administrative Le Cas des groupements hospitaliers de territoire raquo op cit Lrsquoauteur estime pour sa part

que laquo lrsquoabsence de personnaliteacute morale nrsquoest pas surprenante degraves lors qursquoun GHT personnaliseacute aurait

ineacutevitablement eacuteteacute le moyen et en mecircme temps le reacutesultat drsquoune fusion des eacutetablissements concerneacutes raquo

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

307

aurait permis drsquoeacuteviter ce genre de difficulteacutes Quoi qursquoil en soit cette nouvelle organisation

laquo interroge les eacutequilibres internes lieacutes agrave la place respective de chaque eacutetablissement raquo664

571 Enfin derniegravere difficulteacute majeure celle de lrsquoarticulation du GHT avec les coopeacuterations

deacutejagrave existantes En effet comme le souligne Catherine KELLER lrsquoabsence de personnaliteacute

juridique rend plus compliqueacutee lrsquoarticulation des coopeacuterations deacutejagrave en place - peu importe leur

forme - avec le GHT Alors qursquoune nouvelle personne morale aurait pu reprendre agrave son

compte les coopeacuterations existantes le GHT simple coopeacuteration fonctionnelle entre plusieurs

eacutetablissements devra cohabiter avec drsquoautres coopeacuterations la plupart existant sous la forme

de GCS de moyens Finalement cela amegravene agrave une autre question essentielle celle de la

peacuterenniteacute des coopeacuterations actuellement en place Question drsquoautant plus importante pour les

coopeacuterations existantes en matiegravere de compeacutetences qui devront ecirctre deacuteleacutegueacutees agrave

lrsquoeacutetablissement support Nous pensons ici par exemple aux ex-SIH devenus GIP dans le

domaine de lrsquoinformatique ou encore aux groupements dont la mission est la mutualisation

des achats hospitaliers Par ailleurs la question se pose eacutegalement pour les domaines pour

lesquels la deacuteleacutegation nrsquoest pas aujourdrsquohui obligatoire au sein des GHT mais ougrave une

mutualisation est fortement preacuteconiseacutee telle que lrsquoimagerie ou la biologie Aujourdrsquohui des

GHT qui mutualiseraient leurs activiteacutes de biologie seraient ameneacutes agrave coexister avec des GCS

parfois vieux de plusieurs anneacutees au sein desquels des eacutetablissements coopegraverent de maniegravere

efficace sur ces sujets Catherine KELLER srsquointerroge agrave juste titre sur ce sujet laquo les

eacutetablissements publics adheacuterents avec des eacutetablissements priveacutes de santeacute agrave des GCS de

moyens [hellip] vont-ils devoir renoncer agrave des anneacutees de dynamique coopeacuterative [hellip] ou

srsquoimpliquer dans une seacutedimentation coopeacuterative complexe raquo665

2) La mutualisation des SIS entre eacutetablissements de santeacute

572 laquo Vague de fond qui va modifier sur le long terme le marcheacute de linformatique et de

le-santeacute en France raquo666

Telle est la qualification donneacutee agrave lrsquoobligation de mise en place drsquoun

systegraveme drsquoinformation de santeacute convergent au sein des GHT qui devra ecirctre opeacuterationnel au

664 SAISON-DEMARS Johanne laquo Modernisation du systegraveme de santeacute une gouvernance hospitaliegravere agrave

geacuteomeacutetrie variable raquo RDSS 2016 p 633 665

KELLER Catherine laquo De la communauteacute hospitaliegravere de territoire au groupement hospitalier de territoire

continuiteacute et rupture raquo JCP ndashA 2015 p 41 666

Propos de Christophe Boutin preacutesident de Maincare Solutions lors dun entretien agrave TICsanteacute le 16 feacutevrier

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

308

31 deacutecembre 2020 eacutetant entendu que la lourde tacircche de geacuterer cela revient agrave lrsquoeacutetablissement

support de chaque GHT Ce dispositif agrave la fois innovant et parfaitement restructurant nous

amegravene agrave formuler plusieurs reacuteflexions Une premiegravere concernant le choix des mots qui nrsquoest

pas anodin En effet la loi parle bien de convergence des SIS Cependant cette convergence

srsquoopeacuterera au fil de lrsquoeau et non comme lrsquoa signaleacute le rapport de fin de mission de jacqueline

HUBERT et Freacutedeacuteric MARTINEAU agrave lrsquooccasion drsquoune opeacuteration laquo Big Bang raquo667

En effet

la loi Touraine instaure bien une convergence des SIS et non une fusion Le choix des termes

est important et le rapport se veut rassurant preacutecisant qursquoil ne srsquoagit pas drsquoun plan Marshall

de refonte des systegravemes drsquoinformation mais plutocirct la mise en place drsquoune gestion

preacutevisionnelle coheacuterente des investissements futurs en la matiegravere et des eacutevolutions des SIS en

place La solution de lrsquoimpleacutementation drsquoune brique logicielle drsquointeropeacuterabiliteacute a donc eacuteteacute

eacutecarteacutee au profit drsquoune convergence certes plus lente mais agrave terme plus efficace selon nous

puisqursquoelle permettra de trouver au sein de chaque GHT un systegraveme drsquoinformation unifieacute

avec des logiciels identiques La mutualisation de la fonction achats au sein du GHT devient

ici un atout majeur et facilitateur en la matiegravere

573 Drsquoun point de vue pratique cette convergence a pour but principal drsquouniformiser les

outils de travail des professionnels qui pourront ecirctre ameneacutes agrave lrsquooccasion de la mise en place

des projets meacutedicaux des GHT agrave travailler au sein de plusieurs eacutetablissements diffeacuterents Ce

sera aussi lrsquooccasion drsquouniformiser la gouvernance des systegravemes drsquoinformation santeacute au

niveau drsquoun territoire donneacute Degraves lors le nombre drsquoacteurs en charge de la mise en œuvre des

SIS et de la politique publique en la matiegravere sera consideacuterablement diminueacute ce qui facilitera

le dialogue et les eacutechanges entre drsquoune part lrsquoEtat agrave lrsquoorigine des grandes orientations

politiques en la matiegravere et drsquoautre part lrsquoARS et les eacutetablissements de santeacute principaux

utilisateurs mais eacutegalement exeacutecuteurs de ces politiques La convergence des SI au sein des

GHT nous apparait constituer une opportuniteacute inteacuteressante pour permettre drsquoameacuteliorer le

deacuteveloppement et lrsquoefficaciteacute des SIH Mecircme si cette solution ne permettra pas de prendre en

compte lrsquoensemble des speacutecificiteacutes de chaque membre drsquoun GHT elle preacutesente le grand

avantage de diffuser de maniegravere plus uniforme les politiques publiques En termes

drsquoorganisation pratique elle induit la mise en place drsquoune direction des systegravemes

drsquoinformation unique et centraliseacutee Elle neacutecessite eacutegalement la mise en place drsquoun scheacutema

667 HUBERT Jacqueline MARTINEAU Freacutederic laquo Mission Groupements Hospitaliers de Territoire raquo op cit

p 22

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

309

directeur des SIS unique Crsquoest drsquoailleurs ce scheacutema directeur qui est dans les deux anneacutees

qui suivront la promulgation de la loi Touraine et des deacutecrets drsquoapplication la prioriteacute

La convergence des SI au sein du GHT preacutesente toutefois selon nous quelques

difficulteacutes

574 La premiegravere que nous avons souleveacutee rapidement dans notre paragraphe preacuteceacutedent

concerne lrsquoavenir des coopeacuterations deacutejagrave en place en matiegravere de systegraveme drsquoinformation et leur

survie face aux GHT En effet nombreux sont les eacutetablissements qui se sont regroupeacutes sous

forme de GCS de GIP ou avant cela sous forme de SIH dans le but de mutualiser leurs

moyens en matiegravere de systegravemes drsquoinformation hospitaliers A ce sujet le rapport intermeacutediaire

de la mission GHT preacutecise bien que laquo les outils de coopeacuteration sont tregraves largement utiliseacutes raquo

eacutetant preacuteciseacute que 326 GCS (sur 621 existant agrave ce jour) sont constitueacutes dans le seul but de

mutualiser des fonctions informatiques Certains de ces groupements sont par ailleurs devenus

aujourdrsquohui des reacutefeacuterences en la matiegravere Citons par exemple le GIP SIB668

ou encore le GIP

e-sis Mais finalement ces groupements qui se sont avec le temps professionnaliseacutes au point

de devenir eacutediteurs de logiciels heacutebergeur agrave part entiegravere ne sont pas reacuteellement menaceacutes Au

contraire lrsquoavegravenement des GHT peut ecirctre synonyme de nouveaux clients En revanche

certaines coopeacuterations fonctionnelles entre plusieurs eacutetablissements de petites tailles seront

certainement ameneacutees agrave disparaitre ou tout du moins agrave se fondre dans les GHT ce au nom de

la convergence obligatoire des SIS

575 La deuxiegraveme interrogation porte sur lrsquoheacutebergement des donneacutees de santeacute de lrsquoensemble

des eacutetablissements membres du GHT Le rapport de la mission est assez clair sur ce sujet il

est preacutefeacuterable que lrsquoeacutetablissement support ne soit pas heacutebergeur En effet cela comme nous

lrsquoavons eacutetudieacute auparavant induirait de trop lourdes responsabiliteacutes mais eacutegalement une trop

lourde proceacutedure pour se faire agreacuteer En effet la convergence des SIS nrsquoimplique pas selon

nous que lrsquoeacutetablissement support endosse la responsabiliteacute de lrsquoarchivage des donneacutees de

santeacute responsabiliteacute par ailleurs lourde et complexe Cependant il devra peut-ecirctre pour plus

668 Le groupement dinteacuterecirct public Santeacute Informatique de Bretagne (SIB) est un eacutetablissement public de

coopeacuteration hospitaliegravere speacutecialiseacute dans les prestations informatiques agrave destination des eacutetablissements de santeacute Il

est par ailleurs agreacuteeacute heacutebergeur de donneacutees de santeacute

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

310

de coheacuterence orienter et coordonner le choix des eacutetablissements membres du GHT pour un

heacutebergeur agreacuteeacute unique

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

311

Conclusion de la section

576 Lrsquointeropeacuterabiliteacute des SIS reste un deacutefi technique majeur agrave relever dans le cadre de

lrsquoinstauration drsquoune gouvernance unifieacutee et coheacuterente des SIS Ce deacutefi est de taille et

aujourdrsquohui encore de nombreux obstacles empecircchent son parfait deacuteveloppement Pour autant

lrsquoASIP Santeacute y travaille depuis sa creacuteation et le leacutegislateur encore tregraves reacutecemment est venu

deacutebloquer en faisant du NIR lrsquoidentifiant de santeacute tant attendu

LrsquoEtat chargeacute de donner une impulsion globale en matiegravere de SIS doit eacutegalement

veiller au bon deacuteveloppement des politiques qursquoil eacutelabore en la matiegravere Pour lrsquoaider dans

cette mission il doit srsquoappuyer sur les acteurs preacutesents agrave lrsquoeacutechelon reacutegional A ce titre les

ARS et les GHT se reacutevegravelent alors essentiels agrave la diffusion et la mise en œuvre concregravete des

politiques nationales deacuteveloppeacutees en la matiegravere LrsquoARS en tant que repreacutesentant de lrsquoEtat

dans la reacutegion en matiegravere de politique de santeacute va ecirctre en charge de lrsquoapplication reacutegionale

des politiques deacuteveloppeacutees en matiegravere de SIS Les ARS ont drsquoailleurs joueacute un rocircle majeur

dans le programme Hocircpital Numeacuterique Les GHT nouveaux venus dans le paysage des

coopeacuterations hospitaliegraveres vont quant agrave eux permettre drsquoacceacuteleacuterer la convergence des SIS des

diffeacuterents eacutetablissements publics de santeacute

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute

313

Conclusion du chapitre

577 Instaurer une gouvernance efficace des SIS nrsquoest pas chose aiseacutee Les interlocuteurs

sont nombreux et eacuteclectiques (Etat Assurance maladie eacutetablissements de santeacute industriels du

secteur professionnels de santeacute) les enjeux ne sont pas forceacutement les mecircmes pour tous et les

besoins diffeacuterent souvent A cela srsquoajoute la techniciteacute du sujet et en conseacutequence la

neacutecessiteacute drsquoun soutien drsquoexperts Dans ce contexte lrsquoEtat a tenteacute drsquoinstaurer degraves 2009 une

gouvernance intelligente et efficace deacuteleacuteguant notamment la maicirctrise drsquoouvrage agrave une agence

speacutecialiseacutee en la matiegravere et supprimant les organismes redondants et inefficaces Cette

gouvernance nrsquoest bien entendu pas parfaite et se doit drsquoecirctre ameacutelioreacutee Pour ce faire

lrsquointeropeacuterabiliteacute des SIS fait partie des pistes principales agrave explorer Cette probleacutematique

assez technique une fois reacutesolue permettrait drsquoassurer une uniciteacute et une coheacuterence

neacutecessaires au sein des SIS ce qui facilitera ainsi leur deacuteveloppement

Par ailleurs lrsquoEtat ne peut pas ignorer lrsquoimportance des acteurs reacutegionaux qui jouent

un rocircle tregraves important dans la gouvernance des SIS En effet lrsquoEtat nrsquoa pas drsquoautre choix que

de srsquoappuyer sur les ARS pour diffuser et mettre en place ses politiques publiques relatives

aux SIS Mais lrsquoeacutechelon reacutegional permet eacutegalement drsquoadapter ces politiques parfois trop

geacuteneacuteralistes et non adapteacutees aux speacutecificiteacutes des territoires de santeacute Enfin les GHT

nouveaux acteurs dans le paysage ont eacutegalement un rocircle majeur dans la gouvernance des SIS

Ils vont en effet permettre la convergence de plusieurs systegravemes drsquoinformation hospitaliers

ameacuteliorant ainsi lrsquointeropeacuterabiliteacute des systegravemes et donc lrsquoensemble des projets qui pourront

par la suite ecirctre mis en œuvre en matiegravere de SIS par lrsquoEtat

315

Chapitre 2

La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

578 A ce stade de nos travaux nous constatons que le cadre relatif aux TIC en santeacute est

loin drsquoecirctre abouti ni mecircme adapteacute aux exigences ou aux besoins des professionnels En effet

la speacutecificiteacute mecircme du sujet agrave savoir lrsquoutilisation drsquooutils drsquoinformation et de communication

agrave distance dans le contexte sensible voir mecircme intime de la santeacute rend son appreacutehension par

le droit assez complexe

Drsquoun cocircteacute le cadre en place doit ecirctre suffisamment souple pour accorder agrave la

technologie la liberteacute dont elle a besoin afin drsquoeacutevoluer constamment Drsquoun autre cocircteacute le

patient son intimiteacute et sa vie priveacutee doivent ecirctre proteacutegeacutes Le leacutegislateur se retrouve donc

face agrave un paradoxe ne pas trop interdire en veillant de ne pas trop en permettre non plus En

parallegravele il doit eacutegalement jongler avec les diffeacuterents inteacuterecircts en preacutesence les professionnels

de santeacute qui souhaitent voir leurs outils et leurs techniques eacutevoluer en eacutetant adapteacutes agrave leur

pratique quotidienne les patients dont la seacutecuriteacute et celle de leurs donneacutees personnelles

doivent ecirctre assureacutees les industriels qui souhaitant profiter eacuteconomiquement de la

commercialisation et de lrsquoutilisation des nouvelles technologies Ces contraintes lieacutees aux

exigences des matiegraveres et du secteur concerneacutes se confrontent alors aux contraintes plus

classiques du leacutegislateur Il doit en conseacutequence construire un cadre juridique adapteacute agrave un

domaine innovant respectueux de la hieacuterarchie des normes et des cadres juridiques deacutejagrave en

vigueur

Cependant le cadre juridique actuel principalement construit au fil des eacutevolutions

technologiques srsquoavegravere aujourdrsquohui incertain fragilisant ainsi la seacutecuriteacute juridique (section I)

Il doit ecirctre repenseacute pour ecirctre adapteacute aux besoins actuels des professionnels de santeacute et ce afin

drsquoobtenir un juste eacutequilibre entre respect des droits des patients et de ses donneacutees et efficaciteacute

des technologies disponibles (section II)

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

316

Section 1 Le cadre juridique actuel source drsquoinseacutecuriteacute juridique

579 Lrsquoeacutetude du cadre juridique des TIC en santeacute nous amegravene agrave identifier deux difficulteacutes

majeures drsquoune part le cadre semble aujourdrsquohui trop complexe du fait notamment de sa

forme baseacute sur un empilement de reacutefeacuterences eacuteparses distinctes et parfois contradictoires

drsquoautre part il ne permet pas drsquoassurer la seacutecuriteacute juridique neacutecessaire au bon deacuteveloppement

et agrave une utilisation croissante des TIC en santeacute Degraves lors ce cadre se reacutevegravele aujourdrsquohui ecirctre

une source drsquoincertitudes et surtout drsquoinseacutecuriteacute juridique pour lrsquoensemble des acteurs du

domaine Pour eacutetayer nos propos il nous est neacutecessaire dans un premier temps de revenir sur

le concept mecircme de seacutecuriteacute juridique (Paragraphe I) avant de reacutefleacutechir aux origines de la

complexiteacute du cadre juridique actuel des TIC en santeacute et donc de son inseacutecuriteacute (Paragraphe

II)

sect1 Retour sur la notion de seacutecuriteacute juridique

laquo Les lois inutiles affaiblissent les lois neacutecessaires raquo669

580 Parfois qualifieacute de concept clandestin le principe de seacutecuriteacute juridique est pourtant

reacuteguliegraverement associeacute au concept drsquoEtat de droit et consideacutereacute comme une des finaliteacutes du

droit Ce principe est pourtant assez reacutecent et demeure une creacuteation purement jurisprudentielle

et doctrinale Par ailleurs le principe de seacutecuriteacute juridique induit plusieurs applications

concregravetes et fondamentales dans notre droit et notamment la preacutevisibiliteacute de la loi ainsi que la

clarteacute et lrsquoaccessibiliteacute de la norme Afin drsquoappreacutehender ce concept il nous est donc

neacutecessaire de nous attarder sur les principes de clarteacute et drsquointelligibiliteacute de la norme (A) avant

drsquoenvisager les solutions avanceacutees afin de garantir la seacutecuriteacute juridique du droit (B)

669 Montesquieu laquo De lrsquoesprit des lois raquo Partie 6 Livre XXIX laquo De la maniegravere de composer les lois raquo 1758

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

317

A Porteacutees des principes de clarteacute et drsquointelligibiliteacute de la norme

laquo Quand le droit bavarde le citoyen ne lui precircte plus qursquoune oreille distraite raquo670

581 Mecircme si selon le ceacutelegravebre adage laquo nul nrsquoest censeacute ignoreacute la loi raquo il est eacutevident qursquoune

loi qui ne serait pas appreacutehendable par le citoyen risquerait drsquoecirctre de ce fait ignoreacutee La

seacutecuriteacute juridique induit donc une clarteacute et un caractegravere intelligible afin drsquoassurer son

accessibiliteacute par le citoyen Ces concepts composantes de la notion de seacutecuriteacute juridique (2)

se doivent drsquoecirctre deacutefinis preacuteciseacutement (1)

1) Deacutefinition des principes

Quand on aborde la notion de seacutecuriteacute juridique drsquoautres principes sont reacuteguliegraverement

associeacutes Il srsquoagit des notions de clarteacute drsquointelligibiliteacute et drsquoaccessibiliteacute de la loi

582 Crsquoest le Conseil constitutionnel qui par plusieurs deacutecisions consacre le principe de

clarteacute de la loi avant de finalement lrsquoabandonner Bien que ces exigences de clarteacute et de

preacutecision dans la reacutedaction des dispositions leacutegislatives soient traditionnellement exigeacutees par

le Conseil constitutionnel en matiegravere peacutenale671

le principe de clarteacute de la norme est cependant

apparu de maniegravere explicite dans une deacutecision portant sur une loi relative au travail En effet

crsquoest dans sa deacutecision ndeg 98-401 DC du 10 juin 1998 portant sur la loi drsquoorientation et

drsquoincitation relative agrave la reacuteduction du temps de travail que la Haute juridiction preacutecise qursquoune

mesure deacutefinie de maniegravere suffisamment claire et preacutecise satisfaisait aux exigences poseacutees par

lrsquoarticle 34 de la Constitution Le Conseil constitutionnel exigeait deacutesormais des lois qursquoelles

comportent des laquo dispositions suffisamment preacutecises et des formules non eacutequivoques raquo672

Puis en 1999 les juges de la rue Montpensier ont deacutegageacute un objectif agrave valeur

constitutionnelle celui drsquoaccessibiliteacute et drsquointelligibiliteacute de la loi673

583 Cependant tregraves vite la doctrine a souligneacute la confusion possible entre ces deux

notions relativement proches Pour la doctrine le Conseil constitutionnel lui-mecircme eacutetait

670 Rapport du Conseil drsquoEtat laquo De la seacutecuriteacute juridique raquo 1991 La documentation franccedilaise

671 Les documents de travail du Seacutenat laquo La qualiteacute de la loi raquo seacuterie eacutetudes juridiques septembre 2007 p 15

672 Id p 16 agrave propos de la Deacutecision ndeg 2001-455 DC du 12 janvier 2002

673 Deacutecision ndeg 99-421 DC du 16 deacutecembre 1999

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

318

prompt agrave confondre le principe de clarteacute de la loi et lrsquoobjectif agrave valeur constitutionnelle

drsquoaccessibiliteacute et drsquointelligibiliteacute de la loi Une eacutetude de sa jurisprudence tend agrave deacutemontrer la

confusion reacutealiseacutee par les Sages eux-mecircmes674

Or pour certains auteurs laquo la volonteacute du

Conseil de distinguer principe de clarteacute de la loi et objectif drsquointelligibiliteacute et drsquoaccessibiliteacute

de la loi nrsquoaurait eacuteteacute leacutegitime qursquoau prix drsquoune politique jurisprudentielle rigoureuse justifiant

lrsquoutiliteacute respective de chacun des concepts raquo675

De mecircme certains auteurs confondaient

reacuteguliegraverement les deux allant parfois jusqursquoagrave invoquer un objectif agrave valeur constitutionnelle

de clarteacute et drsquointelligibiliteacute de la loi676

Il apparait effectivement assez complexe de mesurer la

diffeacuterence qui peut exister entre drsquoune part la clarteacute de la loi et drsquoautre part lrsquoaccessibiliteacute et

lrsquointelligibiliteacute de la loi La doctrine a donc tregraves vite manifesteacute son inteacuterecirct pour lrsquoobjectif agrave

valeur constitutionnelle drsquointelligibiliteacute et drsquoaccessibiliteacute de la loi preacuteconisant un abandon pur

et simple du principe de clarteacute de la loi laquo la malleacuteabiliteacute de lrsquoobjectif de valeur

constitutionnelle parait donc particuliegraverement adapteacutee agrave la recherche drsquoune plus grande

qualiteacute du droit [hellip] Au contraire le principe de clarteacute parce qursquoil semble vouloir recouvrir

une dimension objective induit une rigiditeacute qui cadre mal avec la relativiteacute de la notion de

laquo qualiteacute de droit raquo [hellip] qui [hellip] ne peut srsquoappreacutecier qursquoau regard des circonstances de

lrsquoespegravece raquo677

584 Crsquoest ainsi que le Conseil constitutionnel dans une deacutecision du 27 juillet 2006

abandonna la reacutefeacuterence au principe de clarteacute de la loi pour lui preacutefeacuterer lrsquoobjectif

drsquointelligibiliteacute et drsquoaccessibiliteacute de la loi comme reacutefeacuterence unique laquo consideacuterant qursquoil

incombe au leacutegislateur drsquoexercer pleinement la compeacutetence que lui confie la Constitution et

en particulier son article 34 que le plein exercice de cet exercice ainsi que lrsquoobjectif de

valeur constitutionnelle drsquointelligibiliteacute et drsquoaccessibiliteacute de la loi qui deacutecoule des articles 4

5 6 et 16 de la Deacuteclaration des droits de lrsquohomme et du citoyen de 1789 lui imposent

drsquoadopter des dispositions suffisamment preacutecises et des formules non eacutequivoques [hellip] raquo678

674 V notamment en ce sens MILANO Laure laquo Controcircle de constitutionnaliteacute et qualiteacute de la loi raquo Revue de

droit public ndeg 3 2006 p 637 675

Ibid 676

V notamment en ce sens LANDAIS Claire LE NICA Freacutedeacuteric laquo Seacutecuriteacute juridique la conseacutecration raquo

AJDA 2006 p 1028 677

GAY Laurence laquo Jurisprudence du Conseil constitutionnel raquo Revue franccedilaise de droit constitutionnel ndeg 50

avril-juin 2002 pp 385-445 678

Deacutecision ndeg 2006 - 540 DC du 27 juillet 2006

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

319

Deacutesormais seul lrsquoobjectif de valeur constitutionnelle drsquoaccessibiliteacute et drsquointelligibiliteacute

de la loi doit ecirctre respecteacute par le leacutegislateur et peut fonder une deacuteclaration de non-conformiteacute agrave

la Constitution679

2) Des composantes drsquoun concept plus large celui de seacutecuriteacute juridique

585 La notion de seacutecuriteacute juridique nrsquoapparait pas au sein de notre corpus constitutionnel

ou leacutegislatif et bien qursquoil la protegravege le Conseil constitutionnel nrsquoa pour autant jamais

consacreacute la notion de seacutecuriteacute juridique au sein de sa jurisprudence680

En revanche le Conseil

drsquoEtat a fait le choix de consacrer de maniegravere solennelle ce principe jusqursquoalors inexistant

dans le droit administratif Ainsi par une deacutecision en date du 24 mars 2006 le Conseil drsquoEtat

reacuteuni en Assembleacutee681

a pour la premiegravere fois affirmer le principe de seacutecuriteacute juridique En

lrsquoespegravece les juges avaient ducirc se prononcer sur la leacutegaliteacute du deacutecret du 16 novembre 2005

portant approbation du Code de deacuteontologie des commissaires aux comptes A cette occasion

la Haute juridiction preacutecise que laquo consideacuterant qursquoindeacutependamment du respect de cette

exigence il incombe agrave lrsquoautoriteacute investie du pouvoir reacuteglementaire drsquoeacutedicter pour des motifs

de seacutecuriteacute juridique les mesures transitoires qursquoimplique srsquoil y a lieu une reacuteglementation

nouvelle [hellip] raquo682

avant drsquoaffirmer pour le cas drsquoespegravece qui lui eacutetait soumis que laquo toutefois agrave

deacutefaut de toute disposition transitoire dans le deacutecret attaqueacute les exigences et interdictions qui

reacutesultent du code apporteraient dans les relations contractuelles leacutegalement institueacutees avant

son intervention des perturbations qui du fait de leur caractegravere excessif au regard de

lobjectif poursuivi sont contraires au principe de seacutecuriteacute juridique raquo Il est inteacuteressant de

noter que cette deacutecision symbolique fut par ailleurs rendue quelques semaines apregraves la

publication du rapport du Conseil drsquoEtat consacreacute agrave la seacutecuriteacute juridique683

586 Tous les auteurs nrsquoont cependant pas accueilli de la mecircme faccedilon cette deacutecision

certains consideacuterant que cet arrecirct laquo constitue un signal fort quant agrave lorientation de la

679 Les documents de travail du Seacutenat seacuterie eacutetudes juridiques laquo La qualiteacute de la loi raquo septembre 2007 p 22

680 DUTHEILLET de LAMOTHE Olivier laquo La seacutecuriteacute juridique le point de vue du juge constitutionnel raquo

rapport du Conseil drsquoEtat laquo Seacutecuriteacute juridique et complexiteacute du droit raquo mars 2006 p 369 681

CE Ass 24 mars 2006 KPMG et autres ndeg 288460 et s Rec p 154 AJDA 2006 p 1028 chron C

LANDAIS Claire et LE NICA Freacutedeacuteric RFDA 2006 p 463 concl AGUILA Yann BJCP 2006 p 173

concl AGUILA Yann 682

A noter que les dispositions de cette jurisprudence sont deacutesormais codifieacutees au sein du Code des relations

entre le public et lrsquoadministration agrave lrsquoarticle L 221-5 683

Rapport public du Conseil drsquoEtat laquo Seacutecuriteacute juridique et complexiteacute du droit raquo mars 2006

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

320

jurisprudence administrativeraquo684

tandis que drsquoautres plus frileux se demandaient si

lrsquoeacutevocation par le Conseil drsquoEtat dans ses consideacuterants drsquoun motif de seacutecuriteacute juridique

suffisait agrave lui seul pour en deacuteduire que la Haute juridiction venait consacrer le principe685

Bien qursquoenfin consacreacute ce principe proteacuteiforme pacirctit toujours aujourdrsquohui drsquoun manque de

deacutefinition preacutecise de ses contours

Finalement le principe de seacutecuriteacute juridique ne serait qursquoun laquo un pavillon qui

recouvre une multitude de principes plus speacutecifiques dont les caracteacuteristiques - et notamment

la valeur - peuvent ecirctre diffeacuterentes raquo686

Certains auteurs comme le rapporte Fabrice

MELLERAY sont mecircme alleacutes jusqursquoagrave parler laquo drsquoinstillation raquo dans notre droit drsquoune

perspective de seacutecuriteacute plutocirct que de la naissance drsquoun reacuteel principe687

587 Pour le Conseil drsquoEtat laquo le principe de seacutecuriteacute juridique implique que les citoyens

soient sans que cela appelle de leur part des efforts insurmontables en mesure de deacuteterminer

ce qui est permis et ce qui est deacutefendu par le droit applicable raquo688

Pour y parvenir il est

neacutecessaire que la norme reacuteponde agrave certaines exigences mateacuterielles et temporelles689

588 Lrsquoexigence mateacuterielle reacuteside principalement dans la qualiteacute de la norme eacutedicteacutee laquo la

loi permet ordonne eacutedicte raquo690

Cette exigence de qualiteacute renvoie agrave lrsquoobjectif de valeur

constitutionnelle drsquointelligibiliteacute et drsquoaccessibiliteacute de la loi En ce sens lrsquoaccessibiliteacute et

lrsquointelligibiliteacute de la loi sont deux des diffeacuterentes caracteacuteristiques qui composent le principe de

seacutecuriteacute juridique691

Pour autant comme lrsquoavait souligneacute le Seacutenat dans son eacutetude consacreacutee

au sujet la loi peut ecirctre complexe sans pour autant ecirctre contraire agrave la seacutecuriteacute juridique Le

Conseil constitutionnel a eu lrsquooccasion drsquoaffirmer cette position agrave plusieurs reprises Ce fut

684 LANDAIS Claire LE NICA Freacutedeacuteric laquo Seacutecuriteacute juridique la conseacutecration raquo AJDA 2006 p 1028

685 MELLERAY Fabrice laquo Lrsquoarrecirct KPMG consacre-t-il vraiment le principe de seacutecuriteacute juridique raquo AJDA

2006 p 897 686

CASSIA Paul laquo La seacutecuriteacute juridique un laquo nouveau raquo principe geacuteneacuteral du droit aux multiples facettes raquo

Dalloz 2006 p 1190 687

MELLERAY Fabrice laquo Lrsquoarrecirct KPMG consacre-t-il vraiment le principe de seacutecuriteacute juridique raquo op cit

en citant PACTEAU Bernard laquo La seacutecuriteacute juridique un principe qui nous manque raquo AJDA numeacutero speacutecial

1995 p 151 688

Rapport public du Conseil drsquoEtat laquo Seacutecuriteacute juridique et complexiteacute du droit raquo op cit p 281 689

Drsquoune maniegravere diffeacuterente Paul CASSIA fait le choix de deacutecomposer le principe de seacutecuriteacute juridique en

diffeacuterenciant son volet objectif de son volet subjectif 690

PORTALIS laquo Discours preacuteliminaire du Code civil raquo 1804 691

MATHIEU Bertrand laquo Les lois de finances au crible de la seacutecuriteacute juridiqueraquo LPA ndeg 10 2006 p 4

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

321

notamment le cas dans sa deacutecision ndeg 2000-437 DC du 19 deacutecembre 2000 En lrsquoespegravece la loi

de financement de la seacutecuriteacute sociale pour 2001 avait eacuteteacute soumise agrave son appreacuteciation Les

juges de la Haute juridiction avaient alors preacuteciseacute que laquo si la loi deacutefeacutereacutee accroit encore la

complexiteacute des circuits financiers [hellip] elle eacutenonce de faccedilon preacutecise les nouvelles regravegles de

financement qursquoelle instaure raquo Ainsi une loi pourra ecirctre intelligible mais complexifier les

regravegles en place sans que cela ne porte atteinte aux yeux du Conseil constitutionnel agrave la

seacutecuriteacute juridique692

589 Lrsquoexigence temporelle quant agrave elle reacuteside dans lrsquoimpeacuteratif de preacutevisibiliteacute du droit

dont deacutecoule le principe de non-reacutetroactiviteacute de la norme mais eacutegalement lrsquoobligation

drsquoinstaurer des mesures transitoires Le principe fondamental de non reacutetroactiviteacute de la norme

est poseacute par lrsquoarticle 2 du Code civil selon lequel laquo la loi ne dispose que pour lavenir elle

na point deffet reacutetroactif raquo Srsquoil eacutetait encore neacutecessaire drsquoinsister sur le caractegravere quasi sacreacute

de ce principe dans notre droit rappelons que cette disposition du Code civil existe et est

resteacutee inchangeacutee depuis 1803 En ce qui concerne les actes administratifs le principe

deacuteveloppeacute par la jurisprudence du Conseil drsquoEtat est le mecircme693

Enfin la neacutecessiteacute pour le

leacutegislateur drsquoinstaurer des mesures transitoires lors de la mise en place drsquoune nouvelle

reacuteglementation a eacuteteacute poseacute par le mecircme arrecirct venant reconnaitre lrsquoexistence du principe de

seacutecuriteacute juridique lrsquoarrecirct dit KPMG

La seacutecuriteacute juridique constitue donc un principe vaste aux contours non reacuteellement

deacutefinis de maniegravere stricte agrave lrsquoheure actuelle Il est toutefois possible drsquoameacuteliorer cette seacutecuriteacute

juridique gracircce agrave plusieurs outils

B Les outils de lutte contre lrsquoinseacutecuriteacute juridique

590 Aujourdrsquohui nombreux sont les articles de doctrine portant sur la notion de seacutecuriteacute

juridique Le Conseil drsquoEtat ainsi que les sages du Conseil constitutionnel se sont eacutegalement

saisis du sujet Crsquoest drsquoailleurs en grande partie agrave cette occasion que des pistes de lutte contre

692 Conseil constitutionnel deacutecision ndeg 2000-437 DC du 19 deacutecembre 2000 JORF ndeg298 du 24 deacutecembre 2000

p 20576 693

CE Ass 25 juin 1948 Socieacuteteacute du journal lrsquoAurore Rec p 289 Gaz Pal 1948 2 p 7 concl

LETOURNEUR JCP G 1948 II 4427 note MESTRE GAJA 1999 p 408

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

322

lrsquoinseacutecuriteacute juridique ont eacuteteacute avanceacutees (2) Mais avant drsquoenvisager celles-ci il est inteacuteressant

de srsquoattarder sur les causes de la fragilisation actuelle de la seacutecuriteacute juridique (1)

1) Les origines varieacutees de lrsquoinseacutecuriteacute juridique

591 laquo Ce mal on le sait est proteacuteiforme Lrsquoinseacutecuriteacute juridique se nourrit de lrsquoinflation

normative comme de lrsquoinstabiliteacute des regravegles ou encore du deacuteclin de lrsquoart de leacutegifeacuterer raquo694

Nicolas MOLFESSIS nous apporte par ce constat les principales causes de lrsquoinseacutecuriteacute

juridique En effet lrsquoinseacutecuriteacute juridique ou plutocirct la mise en danger de la seacutecuriteacute juridique

reacutesulte principalement drsquoune multiplication croissante des normes et de leur reacutevision

reacuteguliegravere Cet accroissement des normes trouve plusieurs sources diverses

592 La premiegravere est lrsquoapparition ces derniegraveres anneacutees de nouveaux domaines de

leacutegislation portant sur des speacutecialiteacutes parfois complexes Crsquoest par exemple le cas des

biotechnologies ou du secteur du numeacuterique qui comme nous lrsquoeacutevoquons tout au long de nos

recherches a des reacutepercussions dans de nombreux domaines et notamment celui de la santeacute

Ces secteurs lieacutes agrave la technologie de pointe eacutevoluent rapidement et le leacutegislateur a parfois des

difficulteacutes agrave suivre cette eacutevolution le temps du deacutebat parlementaire nrsquoeacutetant clairement pas le

mecircme que celui du progregraves scientifique Au final nous nous retrouvons avec un corpus de

textes eacutepars parfois contradictoires et souvent inadapteacutes

De mecircme le foisonnement des normes est accentueacute par lrsquoaugmentation des sources de

droit externes Si nous restons sur lrsquoexemple des Technologies de lrsquoInformation et de la

Communication le Conseil drsquoEtat dans son rapport annuel de 2006 a constateacute que pas moins

de 6 directives avaient eacuteteacute adopteacutees agrave ce sujet par lrsquoUnion europeacuteenne depuis le milieu des

anneacutees 1990695

Par ailleurs comme nous lrsquoeacutetudierons plus en deacutetails ulteacuterieurement le

regraveglement europeacuteen relatif agrave la protection des donneacutees personnelles publieacute le 4 mai 2016696

et transposable directement drsquoici 2018 bouleverse notre droit interne modifiant certaines

694 MOLFESSIS Nicolas laquo Combattre lrsquoinseacutecuriteacute juridique ou la lutte contre du systegraveme juridique contre lui-

mecircme raquo rapport du Conseil drsquoEtat laquo Seacutecuriteacute juridique et complexiteacute du droit raquo mars 2006 p 391 695

Rapport du Conseil drsquoEtat laquo Seacutecuriteacute juridique et complexiteacute du droit raquo mars 2006 p 240 696

Regraveglement (UE) 2016679 du Parlement europeacuteen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif agrave la protection des

personnes physiques agrave leacutegard du traitement des donneacutees agrave caractegravere personnel et agrave la libre circulation de ces

donneacutees et abrogeant la directive 9546CE JOUE 4 mai 2016 L 1191

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

323

dispositions de la loi Informatique et Liberteacutes de 1978 deacutejagrave pourtant modifieacutee agrave plusieurs

reprises

593 Le rapport du Conseil drsquoEtat insiste eacutegalement sur une nouvelle source possible du

droit qui est apparue avec la naissance des autoriteacutes administratives indeacutependantes En effet

certaines drsquoentre elles disposent drsquoun pouvoir normatif et toutes contribuent agrave lrsquoeacutelaboration de

regravegles applicables au travers de leurs deacutecisions Crsquoest ainsi le cas de la CNIL dont les

deacutecisions font loi dans le domaine speacutecifique de la protection des donneacutees agrave caractegravere

personnel

594 Autre source drsquoinseacutecuriteacute juridique reacuteguliegraverement releveacutee le contournement de la

proceacutedure parlementaire voire sa deacutenaturation visant notamment lrsquoutilisation abusive des

ordonnances de lrsquoarticle 38 de la Constitution ou encore agrave la proceacutedure drsquourgence Par ce biais

sont reacuteguliegraverement adopteacutees des ordonnances dite de simplification dont les conseacutequences

sur notre droit ne sont finalement pas celles attendues certains auteurs allant mecircme jusqursquoagrave

parler de cynisme du pouvoir exeacutecutif

Lrsquoatteinte agrave la seacutecuriteacute juridique passe eacutegalement par une atteinte directe agrave la qualiteacute de

la norme Une norme fragile ou une norme incomplegravete ne permettra pas drsquoassurer la seacutecuriteacute

juridique que tout citoyen est en droit drsquoattendre Or la loi est parfois paralyseacutee par lrsquoabsence

de publication des textes drsquoapplication697

595 Enfin face agrave ces sources du foisonnement de la norme que nous pouvons qualifier

drsquoobjectives nous trouvons des causes plus subjectives preacutesentant plutocirct un caractegravere

politique et sociologique Comme le reacutesume tregraves bien Guy Carcassonne laquo tout sujet drsquoun

vingt heures est virtuellement une loi raquo698

La force tregraves symbolique de la loi en France pousse

parfois les gouvernants agrave abuser de cet outil699

Or communication politique et droit ne font

pas forcement bon meacutenage et il en reacutesulte parfois des lois inutiles et un corpus juridique

complexifieacute Le meacutediateur de la Reacutepublique a eacutegalement reacutealiseacute ce constat rappelant agrave

697 MORVAN Patrick laquo Le principe de seacutecuriteacute juridique lrsquoantidote au poison de lrsquoinseacutecuriteacute juridique raquo

Droit social 2006 p 707 698

CARCASSONNE Guy laquo Penser la loi raquo Pouvoirs septembre 2005 p 39 699

De CLAUSSADE Jocelyne laquo Seacutecuriteacute juridique et complexiteacute du droit consideacuterations geacuteneacuterales du Conseil

drsquoEtat raquo Recueil Dalloz 2006 p 737

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

324

lrsquooccasion de son rapport annuel de 2005 laquo lrsquoempilement des textes souvent voteacutes trop

rapidement et dans le souci illusoire de reacutepondre par la preacutecipitation leacutegislative agrave des

emballements meacutediatiques et drsquoopinion raquo700

Cette inseacutecuriteacute juridique issue de sources varieacutees peut toutefois ecirctre contreacutee

2) Les pistes de seacutecurisation du droit

596 laquo La lutte contre lrsquoinseacutecuriteacute juridique est devenue en soi un objet de

reacuteglementation raquo701

Depuis plusieurs anneacutees les textes relatifs agrave la simplification du droit ont

tendance agrave se deacutevelopper Nous pouvons citer agrave titre drsquoexemple la loi ndeg 2014-1545 du 20

deacutecembre 2014 relative agrave la simplification de la vie des entreprises et portant diverses

dispositions de simplification et de clarification du droit et des proceacutedures administratives702

ou lrsquoordonnance ndeg 2015-1288 du 15 octobre 2015 portant simplification et modernisation du

droit de la famille703

Mais ces textes sont loin drsquoecirctre isoleacutes et le leacutegislateur a entendu

srsquoemparer des difficulteacutes poseacutees par la multiplication croissante des normes et les difficulteacutes

de lisibiliteacute pour le citoyen que cela engendre Malheureusement parfois les solutions

deviennent elles-mecircmes sources de dysfonctionnements Ainsi comme le soulignait Nicolas

MOLFESSIS dans son analyse le choix des ordonnances de simplification senseacutees

deacutesencombrer le parlement et simplifier rapidement et efficacement les normes en place a

abouti agrave lrsquoeffet inverse le nombre croissant de ces ordonnances participant agrave lrsquoinflation

normative est reacuteguliegraverement deacutenonceacute et critiqueacute704

597 Finalement il est avant tout neacutecessaire de reacutefleacutechir au but rechercheacute avant de mettre en

place certaines actions La seacutecuriteacute juridique principe deacutesormais consacreacute par le Conseil

drsquoEtat srsquoobtient par la mise en place de solutions concregravetes et non pas par la seule eacutediction

drsquoun principe Ainsi plusieurs solutions ont pu ecirctre avanceacutees En eacutetudiant les solutions

700 Meacutediateur de la Reacutepublique rapport annuel pour 2005 p 16

701 MOLFESSIS Nicolas laquo Combattre lrsquoinseacutecuriteacute juridique ou la lutte contre du systegraveme juridique contre lui-

mecircme raquo op cit p 391 702

Loi ndeg 2014-1545 du 20 deacutecembre 2014 relative agrave la simplification de la vie des entreprises et portant diverses

dispositions de simplification et de clarification du droit et des proceacutedures administratives JORF ndeg0295 du 21

deacutecembre 2014 p 21647 703

Ordonnance ndeg 2015-1288 du 15 octobre 2015 portant simplification et modernisation du droit de la famille

JORF ndeg0240 du 16 octobre 2015 p 19304 704

MOLFESSIS Nicolas laquo Combattre lrsquoinseacutecuriteacute juridique ou la lutte contre du systegraveme juridique contre lui-

mecircme raquo op cit p 394

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

325

adopteacutees par nos voisins le Conseil drsquoEtat avait notamment proposeacute dans son rapport de

2006 de mettre en place des proceacutedures drsquoeacutelaboration des textes plus rigoureuses705

Cette

neacutecessiteacute de rigueur avanceacutee par la Haute juridiction dans son rapport de 2006706

a conduit agrave

une reacuteforme introduite en 2009 par une loi organique707

Celle-ci resteacutee discregravete708

a pourtant

introduit agrave lrsquoobligation pour les auteurs drsquoun projet de loi drsquoen exposer les motifs au regard

notamment du droit applicable et drsquoen eacutevaluer les impacts qursquoils soient sociaux financiers

eacuteconomiques ou environnementaux Cette reacuteforme nrsquoa pourtant pas forceacutement eacuteteacute appliqueacutee

correctement le Conseil drsquoEtat lui-mecircme estimant que laquo mecircme si des progregraves notables sont agrave

mettre au creacutedit des administrations la qualiteacute des eacutetudes drsquoimpact ou srsquoagissant des lois de

finances des eacutevaluations preacutealables doit encore ecirctre sensiblement ameacutelioreacutes raquo709

Par ailleurs signalons que ce dispositif ne vaut que pour les projets de lois Ainsi

lrsquoensemble des textes eacutemanant des parlementaires eux-mecircmes ne sont pas soumis agrave ces eacutetudes

preacutealables Or comme le relegraveve Yves JEGOUZO lrsquoeacutevaluation a priori des lois joue un rocircle

mineur dans le processus de creacuteation de la norme eacutetant donneacute que ces derniegraveres anneacutees le

gouvernement a plutocirct privileacutegieacute la voie parlementaire et donc les propositions de lois pour

faire passer ses textes710

598 Au niveau reacuteglementaire des dispositions similaires ont eacutegalement eacuteteacute mises en place

Ainsi comme le rappelle par exemple la circulaire ndeg 5817SG du 1er

ministre en date du 12

octobre 2015 laquo lrsquoeacutevaluation preacutealable des projets de textes reacuteglementaires et le gel de la

reacuteglementation deacutefini par la circulaire du 17 juillet 2013 contribuent agrave lrsquoameacutelioration de la

qualiteacute du droit raquo En effet la circulaire du 17 juillet 2013711

preacutevoit que tout nouveau projet

de texte reacuteglementaire creacuteant des charges nouvelles pour les collectiviteacutes les entreprises ou le

public ne peut ecirctre adopteacute sans qursquoil soit en contrepartie accompagneacute drsquoune simplification

eacutequivalente Il est par ailleurs preacutevu une eacutevaluation preacutealable de lrsquoensemble des projets de

705 Rapport du Conseil drsquoEtat laquo seacutecuriteacute juridique et complexiteacute du droit raquo op cit p 300

706 Rapport du Conseil drsquoEtat laquo seacutecuriteacute juridique et complexiteacute du droit raquo op cit p 313 Le Conseil drsquoEtat

preacuteconisait de recourir agrave une loi organique afin de fixer les obligations en termes de proceacutedure et notamment de

subordonner tout deacutepocirct de loi drsquoune eacutevaluation preacutealable des impacts de la reacuteforme 707

Loi organique ndeg 2009-403 du 15 avril 2009 relative agrave lapplication des articles 34-1 39 et 44 de la

Constitution JORF ndeg0089 du 16 avril 2009 p 6528 708

JEGOUZO Yves laquo Lrsquoeacutetude drsquoimpact formaliteacute ou garantie de la qualiteacute de la loi raquo AJDA 2012 p 1425 709

Rapport annuel du Conseil drsquoEtat 2012 p 135 710

JEGOUZO Yves laquo Lrsquoeacutetude drsquoimpact formaliteacute ou garantie de la qualiteacute de la loi raquo op cit p 135 711

Circulaire du 17 juillet 2013 relative agrave la mise en œuvre du gel de la reacuteglementation JORF ndeg0165 du 18

juillet 2013 p 11993

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

326

textes reacuteglementaires applicables aux collectiviteacutes locales aux entreprises ou au public par le

biais de fiches drsquoimpact Enfin une information systeacutematique du public sur ces eacutevaluations

par le biais des publications des fiches drsquoimpact doit ecirctre mise en place Ce dispositif des

fiches drsquoimpact a par ailleurs eacuteteacute eacutetendu agrave lrsquoeacutevaluation preacutealable des projets de normes ayant

des conseacutequences sur les missions ou lrsquoorganisation des services deacuteconcentreacutes de lrsquoEtat textes

initialement exclus du dispositif

599 Il nous faut eacutegalement signaler le travail de deacutebroussaillage des circulaires qui avait

eacuteteacute effectueacute ces derniegraveres anneacutees notamment gracircce au deacutecret ndeg 2008-1281 du 8 deacutecembre

2008 relatif aux conditions de publication des instructions et circulaires712

En effet comme le

soulignait le leacutegislateur dans son rapport relatif au deacutecret ndeg 2008-1281 du 8 deacutecembre 2008

laquo la prolifeacuteration des circulaires fait lobjet de critiques reacutepeacuteteacutees de la part de membres du

Parlement mais aussi des collectiviteacutes territoriales des entreprises et plus largement de

lopinion raquo Ainsi afin drsquoeacuteviter une stratification des circulaires et pour permettre au citoyen

drsquoen prendre connaissance le deacutecret du 8 deacutecembre 2008 oblige les administrations agrave publier

leurs circulaires sur un site unique celui du Premier ministre713

Les circulaires qui ne

figurent pas sur ce site ne sont pas opposables aux administreacutes A noter que lrsquoensemble des

dispositions issues du deacutecret de 2008 a eacuteteacute codifieacute depuis le 1er

janvier 2016 au sein du Code

des relations entre le public et ladministration aux articles R 312-8 et R 312-9

Le leacutegislateur travaille donc agrave instaurer les conditions neacutecessaires agrave une ameacutelioration

de la seacutecuriteacute juridique

712 Deacutecret ndeg 2008-1281 du 8 deacutecembre 2008 relatif aux conditions de publication des instructions et circulaires

JORF ndeg0287 du 10 deacutecembre 2008 p 18777 713

Lrsquoarticle 1 du deacutecret preacutevoit que laquo les circulaires et instructions adresseacutees par les ministres aux services et

eacutetablissements de lrsquoEacutetat sont tenues agrave la disposition du public sur un site internet relevant du Premier ministre

Elles sont classeacutees et reacutepertorieacutees de maniegravere agrave faciliter leur consultation raquo

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

327

sect2 La complexiteacute du cadre juridique srsquoappliquant aux TIC en santeacute

laquo La loi protegravege-t-elle encore le faible lorsqursquoelle est aussi complexe foisonnante et

instable raquo

600 Cet extrait drsquoun entretien accordeacute par Mme Josseline de CLAUSADE Conseiller

drsquoEtat714

illustre bien les difficulteacutes que posent une loi et plus geacuteneacuteralement un cadre

juridique trop complexe pour ses utilisateurs En effet un cadre juridique qui serait trop flou

trop complexe et trop diversifieacute nrsquooffre pas la seacutecuriteacute juridique agrave laquelle le citoyen est en

droit de srsquoattendre Finalement quand le droit devient compleacutetement hermeacutetique au profane et

nrsquoest plus accessible qursquoaux plus aguerris des experts juridiques il est leacutegitime de se

demander srsquoil remplit encore son rocircle fondamental

Crsquoest agrave lrsquoeacutechelle des TIC en santeacute la question que nous pouvons leacutegitimement nous

poser Car force est de constater que le cadre juridique geacuteneacuteral dans lequel eacutevoluent les TIC

en santeacute nrsquoest pas des plus simples agrave appreacutehender (A) causant alors un sentiment global

drsquoinseacutecuriteacute juridique pour les professionnels qui y sont confronteacutees (B)

A Lrsquoutilisation des TIC agrave lrsquohocircpital une pratique eacutevoluant dans des

environnements normatifs distincts

601 Regraveglementer lrsquoutilisation des TIC en santeacute induit de prendre en compte un certain

nombre de paramegravetres nrsquoayant a priori rien agrave voir ni avec les technologies de

communication ni la santeacute agrave proprement parler Cependant lrsquoobtention drsquoun cadre juridique

adapteacute et donc facilement applicable passe par cet exercice complexe (1) Toutefois agrave lrsquoheure

actuelle le cadre existant ne fait qursquoempiler diffeacuterents textes parfois geacuteneacuteraux parfois hyper

speacutecialiseacutes sans reacuteelle coheacuterence entre eux (2)

714 Les documents de travail du Seacutenat seacuterie eacutetudes juridiques laquo La qualiteacute de la loi raquo op cit p 7

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

328

1) Multipliciteacute des matiegraveres agrave prendre en compte

602 Au-delagrave du droit lrsquointroduction des TIC dans la pratique meacutedicale laquo se situe au

carrefour de plusieurs approches scientifiques et de plusieurs champs sectoriels (meacutedecine

eacutethique droit eacuteconomie psychologie) raquo715

Cette multipliciteacute des matiegraveres agrave prendre en

consideacuteration est une des sources de difficulteacute agrave lrsquoeacutelaboration drsquoun cadre unifieacute

603 Drsquoune maniegravere geacuteneacuterale le deacuteveloppement des TIC touche toute la socieacuteteacute il modifie

lrsquoensemble des secteurs industriels et de service mais eacutegalement la vie au travail la vie

quotidienne et plus reacutecemment la faccedilon dont les personnes gegraverent leur santeacute Ainsi les

enjeux du deacuteveloppement des TIC en santeacute sont multiples et les consideacuterations qui entourent

son encadrement juridique sont nombreuses

604 Un des enjeux majeurs est bien entendu lrsquoenjeu eacuteconomique Il est clair que les

industriels du secteur ne vont pas srsquoaventurer agrave deacutevelopper une solution coucircteuse sans retour

sur investissement preacutevisible Degraves lors le cadre juridique peut devenir un frein srsquoil srsquoavegravere

trop contraignant pour les industriels ou au contraire un eacuteleacutement moteur srsquoil srsquoavegravere ecirctre

favorable en imposant par exemple certaines solutions techniques ou en allouant des creacutedits

pour le deacuteveloppement des TIC en santeacute

605 Au-delagrave de lrsquoaspect juridique se pose eacutevidemment la question du deacutebat eacutethique

fortement preacutesent dans des domaines ougrave lrsquoinnovation scientifique touche de tregraves pregraves agrave

lrsquohumain A titre drsquoexemple les deacutebats eacutethiques sont nombreux en bioeacutethique autour

notamment de lrsquoencadrement de lrsquoeacutetude du geacutenome et du deacuteveloppement de la meacutedecine

preacutedictive En ce sens lrsquoeacutethique nrsquoest pas absente des deacutebats relatifs aux TIC en santeacute Il porte

particuliegraverement sur la confidentialiteacute de lrsquoinformation meacutedicale son partage et donc sur la

protection de la vie priveacutee En effet les TIC permettent nous lrsquoavons vu716

de collecter

stocker partager et exploiter des quantiteacutes importantes de donneacutees Ces donneacutees qui sont

extrecircmement sensibles car touchant agrave lrsquointimiteacute des personnes qursquoelles concernent peuvent

ecirctre un bien preacutecieux pour de nombreuses personnes que ce soient les professionnels de

715 BERANGER Jeacuterocircme Le COZ Pierre laquo Reacuteflexion eacutethique sur la pluridisciplinariteacute et la confidentialiteacute de

lrsquoinformation en imagerie meacutedicale via les nouvelles technologies de lrsquoinformation et de la communication raquo

Cancerradiotheacuterapie 2012 ndeg 16 pp 215-218 716

V Supra ndeg 37

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

329

santeacute les chercheurs mais aussi les assureurs ou les organismes bancaires par exemple La

question est donc de savoir jusqursquoougrave proteacuteger les donneacutees de santeacute et avec qui les partager

Quel eacutequilibre peut ecirctre trouveacute entre bonne utilisation des donneacutees de santeacute et protection de la

vie priveacutee Cette question rejoint celle relative agrave la possible reconnaissance drsquoun droit de

proprieacuteteacute des personnes sur leurs donneacutees personnelles717

Finalement doit-on envisager un

reacutegime de dispositions des donneacutees de santeacute similaire agrave celui qui srsquoapplique aux eacuteleacutements du

corps humain interdisant de maniegravere stricte toute possibiliteacute de commercialisation de celles-

ci Ou au contraire doit-on adheacuterer agrave la theacuteorie de lrsquolaquo Empowerment raquo qui pourrait permettre

aux personnes selon certains partisans du concept de devenir de veacuteritables acteurs de la

protection de leurs donneacutees renforccedilant ainsi celle-ci Toutes ces questions sont aujourdrsquohui

encore discuteacutees dans le cadre notamment du deacutebat relatif agrave lrsquoouverture eacutelargie de lrsquoaccegraves agrave

certaines donneacutees de santeacute lrsquoensemble srsquoinscrivant dans le cadre plus large de lrsquoopen-data en

santeacute

606 De fait suite au rapport rendu en 2014 agrave la Ministre de la santeacute Madame Marisol

TOURAINE par la Commission open-data constitueacutee en novembre 2013 la Ministre a tregraves

vite affirmeacute sa volonteacute de deacutevelopper lrsquoopen-data en santeacute Le rapport de la Commission

deacutefinit lrsquoopen-data comme laquo lrsquoouverture et le partage de donneacutees par leur mise en ligne dans

des formats ouverts en autorisant la reacuteutilisation libre et gratuite par toute personneraquo718

Derriegravere ce terme anglophone se cache donc lrsquoouverture au public des donneacutees de santeacute et ce

dans le but de promouvoir la deacutemocratie sanitaire favoriser lrsquoautonomisation du patient mais

aussi et surtout deacutevelopper la recherche et lrsquoinnovation en santeacute Crsquoest ainsi que sur la base

de cette eacutetude la loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute719

vient dans son chapitre V

intituleacute laquo creacuteer les conditions dun accegraves ouvert aux donneacutees de santeacute raquo preacutevoir les conditions

du deacuteveloppement de lrsquoopen data en santeacute La volonteacute du leacutegislateur est de laquo reacuteformer lrsquoaccegraves

aux donneacutees de santeacute afin que leurs potentialiteacutes soient utiliseacutees au mieux dans linteacuterecirct de la

collectiviteacute et du principe de valeur constitutionnelle de protection de la santeacute tout en

assurant la confidentialiteacute des donneacutees personnelles qui procegravede du droit au respect de la vie

priveacutee autre exigence de rang constitutionnel dautant plus forte quil sagit de donneacutees

717 V Supra ndeg 111 et s

718 Rapport de la Commission Open Data en santeacute p 9

719 Loi ndeg 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre systegraveme de santeacute JORF ndeg0022 du 27 janvier

2016 texte ndeg 1

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

330

sensibles raquo720

Ces nouvelles dispositions sont la preuve de lrsquoextrecircme importance des

questions eacutethiques relatives aux limites de lrsquoutilisation des donneacutees de santeacute face agrave la neacutecessiteacute

de proteacuteger la vie priveacutee

607 Enfin le deacuteveloppement des TIC en santeacute pousse de maniegravere indirecte agrave se pencher

sur la question de la place et de lrsquoutilisation des reacuteseaux sociaux En effet ces derniers

directement lieacutes au deacuteveloppement de lrsquoutilisation des TIC dans la socieacuteteacute sont aujourdrsquohui

tregraves preacutesents Qursquoils soient professionnels (VIADEO LinKedin) ou personnels (Facebook

Twitter) leur existence leur importance et leur force ne peuvent ecirctre ignoreacutees Le secteur

hospitalier nrsquoy eacutechappe pas et nombreux sont les eacutetablissements qui ont fait le choix drsquoouvrir

et deacutevelopper un compte Facebook ou un compte Twitter De mecircme les personnels de ces

eacutetablissements deacutetenant un ou plusieurs comptes sur les reacuteseaux sociaux sont eacutegalement

nombreux Aussi lrsquoutilisation de ces reacuteseaux nous amegravene agrave nous poser des questions majeures

agrave la fois en termes de respect de la vie priveacutee (vie priveacutee des personnels mais eacutegalement des

patients) et de respect de la liberteacute drsquoexpression Lrsquoerreur majeure est de consideacuterer les

reacuteseaux sociaux comme eacutetant des lieux clos ougrave les informations eacutechangeacutees restent priveacutees En

effet selon les paramegravetres de confidentialiteacute seacutelectionneacutes les informations pourront ecirctre

consideacutereacutees comme publiques ou priveacutees Il est donc neacutecessaire de se reporter aux conditions

geacuteneacuterales drsquoutilisation du reacuteseau social trop souvent ignoreacutees par les utilisateurs A titre

drsquoexemple les conditions geacuteneacuterales drsquoutilisation de Facebook et plus speacutecifiquement leur

politique drsquoutilisation des donneacutees preacutevoient la chose suivante laquo le terme informations

publiques fait reacutefeacuterence aux informations que vous partagez avec tout le monde dans votre

profil public ou encore aux contenus que vous partagez sur une Page Facebook ou sur un

autre forum public Les informations publiques sont accessibles agrave tout le monde au sein

comme en dehors de nos Services et peuvent ecirctre vues ou retrouveacutees agrave lrsquoaide de moteurs de

recherche en ligne drsquoAPI et de meacutedias hors ligne tels que la teacuteleacutevisionraquo721

Ainsi un utilisateur qui fait le choix dans ses paramegravetres de seacutecuriteacute drsquoun profil

public doit savoir que toutes ses informations seront publiques et donc accessibles agrave tous y

compris par le biais de moteurs de recherche Par ailleurs une personne commentant un profil

public ou partageant des informations (photos commentaires ou autres) sur un profil une

720 Exposeacute des motifs loi ndeg 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre systegraveme de santeacute disponible

sur [httpswwwlegifrancegouvfr] consulteacute le 1er

septembre 2016 721

Politique drsquoutilisation des donneacutees Facebook disponible sur [httpswwwfacebookcom] Consulteacutee le 29

aoucirct 2016

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

331

page ou un groupe public doit avoir agrave lrsquoesprit que ces informations seront publiques peu

importe si son profil personnel est par ailleurs priveacute Il est donc important de srsquointeacuteresser aux

conditions geacuteneacuterales drsquoutilisation ainsi qursquoagrave la politique drsquoutilisation des donneacutees du reacuteseau

social et ce agrave chaque fois qursquoelles sont mises agrave jour afin de parameacutetrer au mieux son profil et

proteacuteger ses donneacutees

608 Toute la difficulteacute de lrsquoencadrement de lrsquoutilisation des reacuteseaux sociaux par les

professionnels des eacutetablissements de santeacute reacuteside dans la juste adeacutequation entre le respect de

la liberteacute drsquoexpression des professionnels drsquoune part et le respect par ces derniers de leurs

obligations professionnelles drsquoautre part En effet rappelons que les professionnels travaillant

agrave lrsquohocircpital et plus speacutecifiquement les professionnels de santeacute sont deacutebiteurs drsquoune obligation

de respect du secret professionnel722

De mecircme ces professionnels en tant qursquoagents publics

doivent respecter une obligation de confidentialiteacute de neutraliteacute et de reacuteserve723

Ces

obligations sont bien entendu valables sur les reacuteseaux sociaux eacutegalement La liberteacute

drsquoexpression sur les reacuteseaux sociaux est donc permise mais celle-ci doit srsquoexercer dans le

respect du patient de lrsquoinstitution de ses collegravegues et de sa profession Ainsi la diffamation

lrsquoinjure ou encore le deacutenigrement vont venir limiter cette liberteacute drsquoexpression Dans ce

contexte le caractegravere public drsquoune information diffuseacutee sur les reacuteseaux sociaux va avoir son

importance En effet alors que la diffamation publique est consideacutereacutee comme un deacutelit

punissable drsquoune amende de 12 000 euros la diffamation priveacutee est quant agrave elle une

contravention punie drsquoune amende de 38 euros Mecircme chose pour lrsquoinjure qui sera plus

durement reacuteprimeacutee si elle est publique (amende de 12 000 euros ndash article 33 de la loi du 29

juillet 1881724

) que si elle est priveacutee (contravention de premiegravere classe ndash article R 621-2 du

Code peacutenal) Degraves lors il est leacutegitime de se demander ce qui peut bien ecirctre consideacutereacute comme

public sur un reacuteseau social La jurisprudence nous apporte quelques reacuteponses agrave ce sujet

Ainsi la Cour drsquoAppel de Lyon725

a par exemple consideacutereacute qursquoun licenciement eacutetait

fondeacute sur une cause reacuteelle et seacuterieuse pour un salarieacute qui laquo en nactivant pas les critegraveres de

confidentialiteacute de son compte Facebook a pris le risque que ses propos quil pensait priveacutes

soient accessibles agrave dautres salarieacutes de la socieacuteteacute eux mecircme titulaires dun compte

722 Article L 1110-4 du Code de la santeacute publique

723 V notamment en ce sens les dispositions de lrsquoarticle L 1110-4 du Code de la santeacute publique mais eacutegalement

les dispositions de lrsquoarticle 25 de la loi ndeg 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des

fonctionnaires Loi dite loi Le Pors JORF du 14 juillet 1983 p 2174 724

Loi du 29 juillet 1881 sur la liberteacute de la presse JORF du 30 juillet 1881 p 4201 725

CA Lyon ch soc sect A 24 mars 2014 ndeg 1303463

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

332

Facebookraquo Selon les juges les propos peu flatteurs auraient exceacutedeacute le droit agrave la liberteacute

drsquoexpression de leur auteur En revanche comme le preacutecise la Cour administrative drsquoappel de

Rouen laquo la seule existence de propos injurieux et calomnieux sur le reacuteseau social ne suffit

pas en elle-mecircme agrave justifier du licenciement drsquoun salarieacute il incombe agrave lrsquoemployeur de

deacutemontrer le caractegravere public des correspondances litigieuses raquo 726

Ainsi lrsquoemployeur qui

souhaiterait sanctionner un agent pour des propos tenus sur un reacuteseau social devra drsquoabord

eacutetablir le caractegravere public des propos

La notion de liberteacute drsquoexpression confronteacutee aux obligations des professionnels de

santeacute et plus geacuteneacuteralement des fonctionnaires doit donc eacutegalement ecirctre prise en compte dans

le cadre de la reacuteflexion relative agrave lrsquoencadrement des TIC en santeacute

2) Lrsquoempilement leacutegislatif et regraveglementaire relatif aux TIC en santeacute

609 Lrsquoencadrement de lrsquoinnovation et drsquoune maniegravere geacuteneacuterale des sciences et techniques

par le droit reacutesulte de lrsquoagreacutegation de plusieurs disciplines preacuteexistantes (droit de la santeacute de

la proprieacuteteacute intellectuelle de lrsquoenvironnement) 727

et crsquoest lagrave que reacuteside toute la difficulteacute de ce

type de matiegravere Les TIC en santeacute nrsquoeacutechappent pas agrave la regravegle

610 Lors du congregraves annuel de lrsquoAssociation pour la promotion de la seacutecuriteacute des SI en

santeacute (Apssis) plusieurs participants ont pointeacute du doigt ce qursquoils ont qualifieacute de laquo maquis

reacuteglementaire raquo728

des SI en santeacute Si nous reprenons cette expression anecdotique crsquoest parce

qursquoelle reflegravete bien selon nous lrsquoeacutetat du cadre juridique actuel des SIS En effet la difficulteacute

majeure reacutesulte aujourdrsquohui du fait que lrsquoutilisation des TIC en santeacute eacutevolue dans deux cadres

normatifs bien distincts celui de lrsquoinformatique et des outils de communication drsquoune part

et celui de la santeacute drsquoautre part729

ces deux domaines reacutepondant agrave des contraintes speacutecifiques

et tregraves strictes Drsquoailleurs Caroline ZORN-MACREZ deacuteplorait au sujet de ces diffeacuterents textes

laquo leur meacutethode drsquoeacutelaboration au coup par coup conduisant agrave multiplier les antinomies

726 CA Rouen 15 novembre 2011 ndeg1101827

727 VERGES Etienne laquo Lrsquoeacutevolution scientifique et technologique au prisme du droit aperccedilu drsquoune relation agrave

plusieurs facettes raquo In laquo Variations eacutevolutions meacutetamorphose raquo PU St Etienne Institut universitaire de France

2012 p 371 728

Deacutepecircche TIC Santeacute laquo Le maquis reacuteglementaire de la seacutecuriteacute des SI en santeacute pointeacute du doigt raquo 7 avril

2016 disponible sur [httpwwwticsantecom] Consulteacutee le 1er

septembre 2016 729

DEBOST Claire laquo Lrsquoappreacutehension juridique de la relation de soin au prisme des nouvelles technologies raquo

Jurisdoctoria ndeg 8 2012 p 104

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

333

textuelles raquo730

Cependant si lrsquoon pousse la reacuteflexion un peu plus loin et au vu de notre eacutetude

nous comprenons tregraves vite que ces deux environnements normatifs sont eux-mecircmes assez

compliqueacutes agrave appreacutehender faisant parfois appel agrave drsquoautres branches du droit ou devant tout

du moins tenir compte drsquoautres cadres juridiques

611 Cet laquo empilement leacutegislatif et reacuteglementaire raquo pour reprendre lrsquoexpression de Philippe

BICLET731

est aggraveacute par lrsquoabsence de permeacuteabiliteacute entre les diffeacuterentes couches Certains

textes sont en effet adopteacutes sans prendre en consideacuteration ce qui aurait pu ecirctre preacutevu par

ailleurs De cela reacutesulte agrave la fois des difficulteacutes majeures drsquointerpreacutetation mais eacutegalement des

difficulteacutes dans la mise en place concregravete des TIC en santeacute La cartographie du cadre juridique

actuel donne lrsquoimpression que le sujet nrsquoa pas eacuteteacute traiteacute reacuteellement dans sa globaliteacute mais bout

par bout selon les besoins des acteurs Cette faccedilon de proceacuteder ne peut malheureusement que

donner lieu agrave de nombreuses incoheacuterences Le constat sans appel qui avait eacuteteacute fait par Nicolas

MOLFESSIS peut ecirctre repris ici et appliqueacute aux TIC en santeacute laquo une mecircme situation

juridique se trouve [hellip] placeacutee sous lrsquoempire de diverses regravegles speacuteciales qui srsquoadditionnent

pour deacuteterminer par agglutination [hellip] le droit applicable raquo732

612 Aujourdrsquohui mecircme si un corpus juridique relatif agrave lrsquoutilisation des TIC en santeacute

commence agrave se deacutevelopper laquo cette reacuteglementation eacuteparse manque de coheacuterence et nuit agrave sa

juste application par les professionnels de santeacute raquo733

Par ailleurs ce corpus nrsquoest pas toujours

en coheacuterence avec les diffeacuterents textes geacuteneacuteralistes applicables Enfin lrsquoensemble de cet

encadrement juridique se construit sans concertation avec les principaux inteacuteresseacutes agrave savoir

les professionnels de santeacute Ceux-ci se voient opposer de nouvelles contraintes agrave la fois

techniques et juridiques qui parfois mecircme ne reacutepondent pas agrave leur besoin734

La difficulteacute

actuelle est lrsquoentre-deux dans lequel se situe le corpus juridique relatif aux TIC en santeacute Il

nrsquoest pas encore abouti puisque certaines situations sont encore peu ou pas encadreacutees mais

certaines mesures qui le composent sont suffisamment contraignantes pour freiner les

eacutevolutions technologiques ou les projets qui pourraient y ecirctre lieacutes

730 ZORN-MACREZ Caroline laquo Chroniques martiennes des donneacutees de santeacute numeacuteriseacutees Bregraveves observations

sur une reacuteglementation surreacutealiste raquo RDS ndeg 36 juillet 2010 pp 331-342 731

BICLET Philippe laquo Heacutebergement et eacutechange des donneacutees de santeacute raquo Meacutedecine et droit 2010 p 159 732

MOLFESSIS Nicolas laquo Combattre lrsquoinseacutecuriteacute juridique ou la lutte contre du systegraveme juridique contre lui-

mecircme raquo op cit p 392 733

DEBOST Claire laquo Lrsquoappreacutehension juridique de la relation de soin au prisme des nouvelles technologies raquo

op cit p 113 734

Ibid

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

334

613 Finalement nous pouvons leacutegitimement nous poser la question de lrsquoopportuniteacute drsquoune

intervention renforceacutee du leacutegislateur sur ce sujet Lrsquoinnovation et lrsquoeacutevolution constante

qursquoinduit ce type de technologie neacutecessitent une certaine souplesse qursquoun cadre juridique trop

contraignant risquerait de freiner De mecircme une superposition de textes eacutepars conduit agrave une

absence de lisibiliteacute et drsquoefficaciteacute de lrsquoencadrement juridique

Au-delagrave de cette probleacutematique de lisibiliteacute des textes se pose eacutegalement parfois la

question des limites de leur applicabiliteacute certains drsquoentre eux preacutevoyant parfois des conditions

strictes drsquoapplication sans pour autant apporter les outils neacutecessaires agrave leur mise en œuvre

B Un cadre juridique source drsquoincertitudes

614 Lrsquoempilement des textes applicables srsquoavegravere souvent source de difficulteacutes pour les

acteurs et utilisateurs des TIC en santeacute En effet la question du texte applicable agrave lrsquoespegravece va

se poser agrave plusieurs reprises donnant parfois lieu agrave interpreacutetations diverses et eacuteventuelles

prises de risques notamment de la part des eacutetablissements dans la mise en œuvre de leurs

projets Mais lrsquoinseacutecuriteacute juridique reacutesulte eacutegalement du fait que certains textes soient

inaboutis causant lagrave encore des problegravemes drsquointerpreacutetation et de mise en œuvre Tout cela

concourt agrave creacuteer une inseacutecuriteacute juridique dans le deacuteveloppement des TIC agrave lrsquohocircpital

615 En la matiegravere dispositions de droit commun et dispositions particuliegraveres cohabitent

Ainsi le leacutegislateur a nous lrsquoavons vu fait le choix drsquoencadrer de maniegravere speacutecifique les

modaliteacutes de conservation et drsquoeacutechange de donneacutees de santeacute par voie informatique

Cependant pendant longtemps le leacutegislateur nrsquoest pas alleacute au bout des choses creacuteant ainsi

des situations intermeacutediaires au sein desquelles les regravegles eacutetaient inabouties et donc

difficilement applicables et opposables

616 Cette affirmation est particuliegraverement vraie dans le cas des modaliteacutes drsquoapplication du

deacutecret dit confidentialiteacute Comme nous avons pu le voir preacuteceacutedemment dans nos

recherches735

ce deacutecret renvoyait pour son application concregravete agrave des reacutefeacuterentiels qui auraient

735 V Supra ndeg 242 agrave 243

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

335

ducirc ecirctre publieacutes par voie drsquoarrecircteacutes les eacutetablissements devant alors se mettre en conformiteacute avec

les dits arrecircteacutes dans le deacutelai drsquoun an suivant leurs publications Or ces arrecircteacutes nrsquoont jamais eacuteteacute

publieacutes Face agrave la lenteur du pouvoir reacuteglementaire la question de la valeur de ce texte srsquoest

rapidement poseacutee En effet dans quelle mesure le deacutecret confidentialiteacute pouvait-il ecirctre

consideacutereacute comme eacutetant reacuteellement applicable et donc opposable aux eacutetablissements de santeacute agrave

partir du moment ougrave lrsquoun des eacuteleacutements essentiels agrave sa mise en œuvre nrsquoa jamais eacuteteacute publieacute

Pour reacutepondre agrave cette question il nous semble inteacuteressant de nous arrecircter sur la notion de deacutelai

raisonnable deacuteveloppeacute en droit administratif et sur les actions qui auraient pu ecirctre meneacutees agrave

lrsquoencontre de ce deacutecret

617 Tregraves tocirct le Conseil drsquoEtat a reconnu que la responsabiliteacute de lEacutetat pouvait ecirctre

engageacutee du fait de la non-intervention des deacutecrets dapplication dans un deacutelai raisonnable736

Cependant le juge eacutetudie chaque cas ougrave le non-respect drsquoun deacutelai raisonnable serait invoqueacute

aupregraves de lui et il est neacutecessaire qursquoun preacutejudice reacutesultant du retard soit eacutetabli laquo le retard

[nrsquoeacutetant] pas en soi un preacutejudice raquo737

Ce principe ne srsquoapplique pas seulement aux deacutecrets

qui devraient ecirctre pris en application drsquoune loi mais eacutegalement aux arrecircteacutes preacutevus par des

deacutecrets Le Conseil drsquoEtat dans une deacutecision rendue le 29 juin 2011738

a ainsi consideacutereacute que

laquo lrsquoexercice du pouvoir reacuteglementaire comporte non seulement le droit mais aussi lrsquoobligation

de prendre dans un deacutelai raisonnable les mesures qursquoimplique neacutecessairement lrsquoapplication

de la loi hors le cas ougrave le respect drsquoengagements internationaux de la France y ferait

obstacle que lorsqursquoun deacutecret pris pour lrsquoapplication drsquoune loi renvoie lui-mecircme agrave un arrecircteacute

la deacutetermination de certaines mesures neacutecessaires agrave cette application cet arrecircteacute doit

eacutegalement intervenir dans un deacutelai raisonnable raquo La Haute juridiction peut drsquoailleurs se

montrer parfois tregraves stricte nrsquoheacutesitant pas agrave enjoindre lrsquoEtat deacutefaillant de prendre les textes

drsquoapplication attendus en assortissant sa deacutecision drsquoune astreinte739

618 Il est vrai que cette notion de deacutelai raisonnable ne repose sur aucun texte Cependant

au fil des anneacutees la notion a eacuteteacute deacuteveloppeacutee et affineacutee agrave la fois par le juge europeacuteen et par le

Conseil drsquoEtat Dans le cas du deacutecret confidentialiteacute les arrecircteacutes neacutecessaires agrave la bonne

736 CE Ass 27 novembre 1964 Veuve Renard Rec p 590

737 ABIKHZER Franck laquo Le deacutelai raisonnable dans le contentieux administratif un fruit parvenu agrave

maturiteacute raquo AJDA 2005 p 985 738

CE 29 juin 2011 Steacute Cryo-Save France ndeg 343188 739

V notamment en ce sens CE 28 juillet 2000 Assoc France Nature Environnement ndeg 204024 Rec 2000

p 322 CE 28 mars 1997 UNAF ndeg 180943 Rec 1997 p 124

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

336

application du texte nrsquoavaient toujours pas eacuteteacute adopteacutes agrave la veille de la promulgation de la loi

de modernisation de notre systegraveme de santeacute soit presque 9 anneacutees apregraves lrsquoentreacutee en vigueur

du texte Bien que la jurisprudence eacutetudie chaque cas de maniegravere indeacutependante il nous

apparaicirct cependant qursquoune dureacutee de 9 ans aurait difficilement pu ecirctre consideacutereacutee comme eacutetant

un deacutelai raisonnable Les eacutetablissements auraient drsquoailleurs pu saisir le Ministre en charge de

la santeacute drsquoune demande tendant agrave lrsquoadoption de ces reacutefeacuterentiels Dans lrsquohypothegravese drsquoune

reacuteponse neacutegative ou sans reacuteponse de sa part dans un deacutelai de deux mois il leur aurait alors eacuteteacute

possible de lui adresser ensuite un recours gracieux et le cas eacutecheacuteant deacuteposer un recours pour

excegraves de pouvoir aupregraves du Conseil drsquoEtat afin drsquoobtenir lrsquoannulation du deacutecret

confidentialiteacute Pour autant cela nrsquoaurait pas eacuteteacute selon nous dans lrsquointeacuterecirct des eacutetablissements

de santeacute En effet ceux-ci souhaitaient avant tout seacutecuriser leurs pratiques par lrsquoadoption des

reacutefeacuterentiels

619 Pendant longtemps lrsquoabrogation du texte a eacuteteacute envisageacutee un nouveau texte eacutetant

supposeacutement en cours drsquoeacutelaboration740

Dans lrsquoentre-temps les professionnels nrsquoavaient pas

drsquoautre choix que de srsquoen reacutefeacuterer aux reacutefeacuterentiels de lrsquoASIP santeacute Aujourdrsquohui toutefois la

loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute741

a tenteacute de reacutesoudre cette difficulteacute Comme

le preacutecisaient les motifs de la loi le but du leacutegislateur eacutetait drsquoharmoniser laquo des regravegles de droit

dans un domaine ougrave leacutevolution rapide de la leacutegislation a pu conduire agrave des eacutecarts raquo Pour

autant il nous semble que les mecircmes erreurs ont eacuteteacute commises

En effet lrsquoarticle 96 de cette loi vient creacuteer un article L 1110-4-1 au Code de la santeacute

publique qui dispose laquo afin de garantir la qualiteacute et la confidentialiteacute des donneacutees de santeacute agrave

caractegravere personnel et leur protection les professionnels de santeacute les eacutetablissements et

services de santeacute les heacutebergeurs de donneacutees de santeacute agrave caractegravere personnel et tout autre

organisme participant agrave la preacutevention aux soins ou au suivi meacutedico-social et social utilisent

pour leur traitement leur conservation sur support informatique et leur transmission par voie

eacutelectronique des systegravemes dinformation conformes aux reacutefeacuterentiels dinteropeacuterabiliteacute et de

seacutecuriteacute eacutelaboreacutes par le groupement dinteacuterecirct public mentionneacute agrave larticle L 1111-24 Ces

740 SAMARCQ Nicolas BRIOIS Seacutebastien laquo Donneacutees de santeacute agrave caractegravere personnel les enjeux de la

diffusion des TIC raquo Expertises 2010 p 386 741

Loi ndeg 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre systegraveme de santeacute JORF ndeg0022 du 27 janvier

2016 texte ndeg 1

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

337

reacutefeacuterentiels sont approuveacutes par arrecircteacute du ministre chargeacute de la santeacute pris apregraves avis de la

Commission nationale de linformatique et des liberteacutes raquo

620 Lrsquoobligation de se reacutefeacuterer agrave des reacutefeacuterentiels approuveacutes par arrecircteacute ministeacuteriel nrsquoest plus

simplement regraveglementaire mais bien leacutegale Cette obligation acquiert donc un poids

suppleacutementaire Mecircme srsquoil est vrai que les travaux de lrsquoASIP relatifs aux reacutefeacuterentiels de

seacutecuriteacute et drsquointeropeacuterabiliteacute sont bien avanceacutes le risque que ces reacutefeacuterentiels ne soient jamais

opposables aux acteurs concerneacutes reste le mecircme En effet nous sommes aujourdrsquohui encore

dans lrsquoattente de publication drsquoun arrecircteacute Le leacutegislateur a gagneacute du temps mais il va bien

devoir agir dans un deacutelai raisonnable

Par ailleurs il nous semble important drsquoattirer lrsquoattention sur un deacutecret pris en

application de lrsquoarticle 96 de la loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute et ses

conseacutequences sur le deacutecret confidentialiteacute En effet le deacutecret ndeg 2016-994 du 20 juillet

2016742

vient modifier les articles R 1110-1 agrave R 1110-3 du Code de la santeacute publique

initialement issus du deacutecret confidentialiteacute Lrsquoancienne section I de la premiegravere partie du livre

1er

du titre premier du chapitre preacuteliminaire de la partie regraveglementaire du Code de santeacute

publique preacuteceacutedemment intituleacutee laquo confidentialiteacute des informations meacutedicales conserveacutees sur

support informatique ou transmises par voie eacutelectronique raquo devient deacutesormais laquo Conditions

deacutechange et de partage dinformations entre professionnels de santeacute et autres professionnels

des champs social et meacutedico-social raquo

Ainsi lrsquoensemble des dispositions introduites par le deacutecret confidentialiteacute disparaissent

purement et simplement Ce deacutecret qui avait causeacute de nombreuses interrogations quant agrave ses

modaliteacutes drsquoapplication disparait donc de maniegravere assez discregravete

742 Deacutecret ndeg 2016-994 du 20 juillet 2016 relatif aux conditions deacutechange et de partage dinformations entre

professionnels de santeacute et autres professionnels des champs social et meacutedico-social et agrave laccegraves aux informations

de santeacute agrave caractegravere personnel JORF ndeg0169 du 22 juillet 2016 texte ndeg 21

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

338

Conclusion de la section

621 Lrsquoappreacutehension du principe de seacutecuriteacute juridique et de lrsquoensemble de ses corollaires

nous permet drsquoeffectuer une analyse critique sur le cadre actuel des TIC en santeacute et de

constater qursquoil se reacutevegravele finalement vecteur drsquoinseacutecuriteacute juridique Il est vrai que la

construction de ce cadre est un deacutefi de taille Non seulement cela neacutecessite de faire appel agrave

plusieurs branches du droit (droit civil droit peacutenal droit de la santeacute droit de lrsquoInternet) mais

cela induit eacutegalement de tenir compte des enjeux eacutethiques et eacuteconomiques du domaine Le

leacutegislateur doit donc appreacutehender lrsquoensemble de ces contraintes dans leur globaliteacute et prendre

le recul neacutecessaire afin de construire un cadre coheacuterent compreacutehensible et donc seacutecuriseacute

Or le cadre actuel nrsquoest qursquoune succession de textes eacutepars parfois contradictoires ce

qui rend complexe sa compreacutehension par les acteurs concerneacutes Par ailleurs le cadre semble

parfois inabouti certains arrecircteacutes pourtant essentiels nrsquoayant jamais eacuteteacute adopteacutes Bien que la loi

de modernisation de notre systegraveme de santeacute tente de corriger certaines de ces lacunes le

chemin vers un cadre plus lisible nous semble encore long

Tout cela conduit agrave un cadre creacuteateur drsquoincertitude et vecteur drsquoinseacutecuriteacutes Il nous

semble donc aujourdrsquohui essentiel de le repenser

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

339

Section 2 Un cadre juridique agrave repenser

622 Actuellement le cadre juridique relatif aux TIC en santeacute peut paraitre difficilement

accessible aux personnes qui y sont confronteacutees Nous pensons ici plus particuliegraverement aux

personnels de santeacute mais eacutegalement aux eacutetablissements de santeacute parfois deacutepourvus face agrave la

complexiteacute des regravegles existantes Il est donc neacutecessaire de repenser si ce nrsquoest entiegraverement

tout du moins en partie le cadre des TIC en santeacute En effet il nous apparait clairement agrave ce

stade de nos recherches que le cadre juridique actuellement en place constitue un reacuteel frein au

bon deacuteveloppement des TIC en santeacute (Paragraphe I) Le leacutegislateur doit donc reacutefleacutechir agrave un

cadre innovant qui serait agrave la fois moteur et protecteur (Paragraphe II)

sect1 Le cadre actuel frein au deacuteveloppement peacuterenne des TIC agrave lrsquohocircpital

laquo La science avance plus vite que le droit et lui soumet de plus en plus souvent des situations

ineacutedites et embarrassantes raquo743

623 Souvent lrsquoinnovation va plus vite que le droit qui se contente de suivre et drsquoencadrer

a posteriori Cest le constat qui est reacuteguliegraverement reacutealiseacute quand on aborde la question des

liens entre droit sciences technique et innovation Toutefois quand on y regarde de plus pregraves

cela nrsquoest finalement pas aussi simple qursquoil y parait Lrsquoinnovation scientifique et technique et

le droit sont en reacutealiteacute engageacutes dans une relation complexe dont lrsquoeacutequilibre est souvent

difficile agrave atteindre (A) Crsquoest pourquoi il nous faut peut-ecirctre aujourdrsquohui nous eacuteloigner de nos

outils juridiques classiques souvent contraignant pour nous orienter vers les solutions plus

originales et surtout plus flexibles proposeacutees par le droit souple (B)

A Lrsquoencadrement juridique de lrsquoinnovation un eacutequilibre deacutelicat

624 Comme le souligne Anne LAUDE laquo le dispositif juridique ne saurait ecirctre un frein agrave

lrsquoimpeacuterieuse neacutecessiteacute drsquoinnovation Bien au contraire il se doit drsquoecirctre un outil

743 MATTEI Jean-Franccedilois laquo Rapport au premier ministre sur lrsquoeacutethique meacutedicale raquo 1993

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

340

drsquoencadrement au progregraves scientifique raquo744

Lrsquoeacutetude du lien entre sciences technologies et

droit nrsquoest pas reacutecente et deacutejagrave en 1966 David F CAVERS745

tentait de deacutemontrer que le droit

nrsquoeacutetait pas qursquoun laquo instrument de prohibition et obstacle au deacuteveloppement de la

connaissance et des innovations raquo746

625 Meacutedecine et Technologies de lrsquoInformation et de la Communication sont deux

domaines ougrave lrsquoinnovation est essentielle Parfois cependant lrsquoinnovation nrsquoest possible que

par la transgression Il est donc neacutecessaire de trouver un eacutequilibre entre progregraves et

encadrement afin de maintenir une seacutecuriteacute neacutecessaire pour les patients Il est neacutecessaire de

rechercher des laquo compromis preacutecaires entre les exigences juridiques et les nouvelles reacutealiteacutes

techniques raquo747

Car le deacuteveloppement des TIC ne fait pas que modifier les conditions dans

lesquelles le droit va srsquoappliquer elle creacutee de nouvelles situations jamais appreacutehendeacutees

jusqursquoalors par le droit et auxquelles les regravegles existantes ne peuvent srsquoappliquer Pour

illustrer cela Bertrand WARUSFEL cite agrave juste titre lrsquoexemple du deacuteveloppement des bases

de donneacutees et des droits qui peuvent y ecirctre affeacuterents Ainsi il est rapidement apparu que

lrsquoapplication ou non de la protection issue du droit drsquoauteur agrave ces bases nrsquoeacutetait pas une

question qui pouvait se trancher aussi facilement De lagrave est neacute au niveau europeacuteen des regravegles

propres agrave la structure et au contenu des bases de donneacutees regravegles que nous avons par ailleurs

exposeacutees preacuteceacutedemment dans nos recherches et pris en exemple afin de tenter de qualifier le

droit drsquoun eacutetablissement de santeacute sur le dossier patient748

626 Dans ses travaux consacreacutes au sujet Etienne VERGES affirmait que laquo drsquoune part le

droit est un outil de contrainte qui limite la liberteacute des chercheurs et qui fait obstacle au

progregraves scientifique Drsquoautre part lrsquoeacutevolution du droit est trop lente et ne parvient pas agrave

suivre le rythme imposeacute par le progregraves scientifique raquo749

Bien que le leacutegislateur ait pu parfois

744 LAUDE Anne laquo Lrsquoencadrement juridique de lrsquoinnovation raquo Les tribunes de la santeacute 12004 (ndeg2) pp 37-

46 745

CAVERS David laquo Law and science some points of confrontation raquo in laquo Law and the social role of

scienceraquo Rockefeller University Press 1966 p 5 746

VERGES Etienne laquoLrsquoeacutevolution scientifique et technologique au prisme du droit aperccedilu drsquoune relation agrave

plusieurs facettes raquo in laquo Variation eacutevolutions meacutetamorphoses raquo PU St Etienne Institut universitaire de France

2012 p 371 747

WARUSFEL Bertrand laquo Le droit des nouvelles technologies entre technique et civilisation raquo La lettre de

la rue Saint Guillaume Revue des Anciens eacutelegraveves de Sciences-Po ndeg 127 juin 2002 pp 52-59 748

V Supra ndeg 111 et s 749

VERGES Etienne laquoLrsquoeacutevolution scientifique et technologique au prisme du droit aperccedilu drsquoune relation agrave

plusieurs facettes raquo op cit p 371

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

341

intervenir tardivement dans certains domaines innovant - ce qui a drsquoailleurs pu lui ecirctre

reprocheacute - pour autant il a fait preuve drsquoune grande reacuteactiviteacute dans drsquoautres domaines Crsquoest

notamment le cas drsquoInternet domaine ougrave le leacutegislateur a pris soin de rapidement adapter le

droit commun agrave ce nouvel outil et plus geacuteneacuteralement au deacuteveloppement des technologies du

numeacuterique

Dans son eacutetude Etienne VERGES tente de deacutemontrer les diffeacuterents rocircles du droit vis-

agrave-vis de lrsquoinnovation scientifique et technologique Ainsi il apparait que le droit peut agrave la fois

avoir un rocircle drsquoencadrement mais eacutegalement drsquoincitation par le biais de politiques publiques

allant en ce sens Nous ajouterons agrave cela le rocircle protecteur du droit vis-agrave-vis de lrsquoinnovation

rocircle majeur qui ne doit pas ecirctre oublieacute

627 Le cadre contraignant comporte plusieurs niveaux En effet il peut tout drsquoabord srsquoagir

de lrsquointerdiction pure et simple des activiteacutes (crsquoest le cas par exemple du clonage humain

interdit par les lois bioeacutethiques) Il existe eacutegalement des reacutegimes drsquoautorisation preacutealable

ainsi les protocoles de recherche impliquant la personne humaine ne peuvent ecirctre mis en

œuvre sans lrsquoavis preacutealable du comiteacute de protection des personnes750

qui va avoir pour rocircle

drsquoeacutetudier les conditions dans lesquelles la seacutecuriteacute des participants agrave lrsquoessai sera assureacutee mais

eacutegalement la pertinence du projet et de sa meacutethodologie Il srsquoagit dans les deux cas drsquoune

contrainte a priori dans le but de seacutecuriser en amont les innovations scientifiques et

technologiques Mais le droit intervient aussi a posteriori dans une optique de reacuteparer les

conseacutequences neacutegatives du fait du deacuteveloppement des innovations Il srsquoagit alors de mettre en

œuvre la responsabiliteacute des commettants afin de reacuteparer les dommages qui seraient survenus

Pour Etienne VERGES cette mise en œuvre de la responsabiliteacute laquo est essentielle dans une

socieacuteteacute technoscientifique dans laquelle le deacuteveloppement des innovations srsquoaccompagne drsquoun

risque incompressible La responsabiliteacute du fait drsquoune activiteacute agrave risque constitue le corollaire

de la liberteacute drsquoexercice de lrsquoactiviteacute scientifique et technologique raquo751

628 Cependant il arrive que le cadre contraignant soit pointeacute du doigt par les industriels

Dans le cas de lrsquoencadrement des TIC en santeacute le Conseil National du Numeacuterique (CNNum)

750 Articles L 1121-1 agrave L 1126-11 du Code de la santeacute publique

751 VERGES Etienne laquoLrsquoeacutevolution scientifique et technologique au prisme du droit aperccedilu drsquoune relation agrave

plusieurs facettes raquo op cit p 371

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

342

dans son eacutetude de 2015 consacreacute au numeacuterique en santeacute752

preacuteconise drsquoailleurs drsquoadopter des

laquo proceacutedures pragmatiques de reacutegulation du marcheacute de la santeacute connecteacutee en phase avec les

cycles courts de lrsquoinnovation raquo753

Pour le CNNum cela passe par un assouplissement du

controcircle a priori au beacuteneacutefice drsquoun renforcement du controcircle a posteriori et de la veille

sanitaire La flexibiliteacute mais eacutegalement un traitement rapide des dossiers (par le biais de laquo fast

tracks raquo - guichets rapides) sont eacutegalement essentiels Effectivement nous ne pouvons

qursquoadheacuterer agrave cette solution impliquant un droit plus pragmatique et plus reacuteactif face aux

cycles de lrsquoinnovation particuliegraverement courts Par ailleurs actuellement certaines

proceacutedures par exemple en matiegravere de protection des donneacutees de santeacute peuvent ecirctre

particuliegraverement longues et coucircteuses ce qui comme le souligne lrsquoeacutetude du CNNum peut

srsquoaveacuterer extrecircmement pesant sur le modegravele eacuteconomique deacuteveloppeacutee par les acteurs des TIC en

santeacute A terme cela preacutesente indubitablement des conseacutequences dommageables pour les petits

industriels moins compeacutetitifs et donc drsquoune maniegravere geacuteneacuterale pour les acteurs concerneacutes

qursquoils srsquoagissent des professionnels ou des patients se retrouvant face agrave un marcheacute au choix

restreint et peut ecirctre moins bien deacuteveloppeacute qursquoil ne pourrait lrsquoecirctre par ailleurs

629 A cocircteacute de ce cadre qualifieacute de contraignant il existe eacutegalement un cadre incitatif En

effet le droit se reacutevegravele ecirctre parfois un outil au service de lrsquoinnovation Certaines politiques

publiques sont mecircme tregraves incitatives puisqursquoelles participent directement au deacuteveloppement

de la recherche et de lrsquoinnovation Dans le domaine de la santeacute nous pouvons citer agrave titre

drsquoexemple les MERRI ndash Missions drsquoEnseignement de Recherche de Reacutefeacuterence et

drsquoInnovation ndash financements accordeacutes dans le cadre de la tarification agrave lrsquoactiviteacute et des

Missions drsquoInteacuterecirct Geacuteneacuteral drsquoAide agrave la contractualisation (MIGAC) aux eacutetablissements de

santeacute en fonction de leurs activiteacutes de recherche754

630 Plus geacuteneacuteralement le droit permet de creacuteer les outils institutionnels neacutecessaires au bon

deacuteveloppement de la recherche Crsquoest ainsi qursquoest neacutee en 2005 lrsquoagence Nationale de la

Recherche (ANR) agence dont la mission est de financer les projets de recherche Crsquoest elle

qui pilote le plan drsquoInvestissements drsquoavenir et qui a par ailleurs geacutereacute lrsquoappel agrave projets RHU

752 CNNum laquo La santeacute bien commun de la socieacuteteacute numeacuterique raquo rapport remis agrave la Ministre des Affaires

sociales de la Santeacute et des Droits des femmes 2015 753

VERGES Etienne laquoLrsquoeacutevolution scientifique et technologique au prisme du droit aperccedilu drsquoune relation agrave

plusieurs facettes raquo op cit p 14 754

Article L 162-22-13 du Code de la seacutecuriteacute sociale

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

343

(recherche hospitalo-universitaire) ayant abouti au soutien financier agrave hauteur de 325

millions drsquoeuros de projets de recherche en santeacute preacutesentant un fort potentiel de transfert

rapide vers lindustrie ou vers la socieacuteteacute755

631 Enfin le droit est eacutegalement un outil de protection de lrsquoinnovation et plus

particuliegraverement de ses reacutesultats En effet une innovation pour vivre et se deacutevelopper doit

ecirctre proteacutegeacutee et valoriseacutee Le droit au travers du droit de la proprieacuteteacute intellectuelle apporte

une palette complegravete drsquooutils destineacutes agrave proteacuteger (brevet droit drsquoauteur) et valoriser (contrats

de cession ou de licence) les creacuteations issues de lrsquoinnovation Finalement le droit permet de

laquo garantir la valeur eacuteconomique des reacutesultats scientifiques raquo756

Innovation sciences et droit sont au cœur drsquoune relation complexe aux enjeux

nombreux et parfois opposeacutes Cependant loin drsquoecirctre un ennemi de lrsquoinnovation le droit

lrsquoaccompagne lrsquoencadre et la facilite mecircme parfois Mais il faut pour cela reacuteussir agrave trouver le

juste eacutequilibre parfois preacutecaire Cet eacutequilibre passe peut-ecirctre par une solution alternative aux

outils normatifs tels qursquoon les connait le droit souple

B Le recours au droit souple une solution agrave envisager

632 Souvent qualifieacute de droit mou (sans sanction) voire parfois de droit flou (sans

preacutecision) ou droit doux (sans obligation)757

le droit souple a longtemps eacuteteacute deacuteconsideacutereacute par

la grande majoriteacute des juristes En 2013 pourtant le Conseil drsquoEtat a choisi drsquoen faire lrsquoobjet

de son eacutetude annuelle vantant alors les meacuterites drsquoun droit qursquoil avait vivement critiqueacute dans

des eacutetudes anteacuterieures Cette notion tregraves actuelle nrsquoest pourtant pas reacutecente et il nous faut nous

y attarder (1) avant de deacutemontrer lrsquointeacuterecirct que le droit souple preacutesente en matiegravere

drsquoencadrement des TIC en santeacute (2)

755 Sur lrsquoappel agrave projets RHU V notamment [httpwwwagence-nationale-recherchefr]

756 VERGES Etienne laquoLrsquoeacutevolution scientifique et technologique au prisme du droit aperccedilu drsquoune relation agrave

plusieurs facettes raquo op cit p 14 757

THIBIERGE Catherine laquo Reacuteflexion sur les textures du droit raquo RDT Civ 2003 p 599

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

344

1) La notion de droit souple

633 Depuis plusieurs anneacutees nous assistons que ce soit au niveau international europeacuteen

ou en droit interne agrave un deacuteveloppement des instruments alternatifs agrave la loi et au regraveglement

qui mecircme srsquoils nrsquoont pas de force contraignante vis-agrave-vis des personnes agrave qui ils srsquoadressent

leur permettent laquo drsquoorienter leur comportement raquo

634 Utiliseacutee de plus en plus couramment la notion de droit souple pouvait faire reacutefeacuterence agrave

toute une panoplie de documents tels que les avis et recommandations drsquoAAI les normes (du

type norme ISO) les certifications les labels ou encore les guides de bonne pratique Cette

notion a tregraves vite attireacute lrsquoattention du Conseil drsquoEtat qui alors qursquoil lrsquoavait critiqueacute dans ses

rapports de 1991 et de 2006 a adopteacute dans son eacutetude de 2013 une position quelque peu

diffeacuterente quant au droit souple invoquant alors la compleacutementariteacute du droit souple avec les

sources traditionnelles du droit permettant ainsi de renforcer la qualiteacute de ce dernier

Finalement pour la Haute juridiction laquo parler de droit souple crsquoest admettre qursquoil srsquoagit de

droit raquo758

A cette occasion la Haute juridiction a tenteacute de deacutefinir ce concept afin drsquoen

deacutelimiter les contours proposant ainsi laquo une eacutechelle de normativiteacute gradueacutee qui va du droit

souple au droit dur raquo759

Pour le Conseil drsquoEtat le droit souple serait donc composeacute de

lrsquoensemble des instruments reacutepondant agrave trois conditions cumulatives ils ont pour objet de

modifier ou orienter le comportement de leurs destinataires ils ne creacuteent pas par eux-mecircmes

des obligations et ils preacutesentent par leur contenu ou leur mode drsquoeacutelaboration un degreacute de

formalisation et de structuration qui les apparentent aux regravegles de droit760

635 Dans leur eacutetude les magistrats du Conseil drsquoEtat relegravevent quatre utiliteacutes au droit

souple la premiegravere concerne sa substitution au droit dur quand le recours agrave ce dernier nrsquoest

pas envisageable La deuxiegraveme concerne lrsquoappreacutehension des pheacutenomegravenes eacutemergents et

notamment des eacutevolutions technologiques dans ce contexte le droit souple constitue une

eacutetape preacutealable agrave lrsquoutilisation du droit dur face agrave des pheacutenomegravenes encore en mutation et qui

neacutecessitent donc un cadre facilement eacutevolutif La troisiegraveme porte sur lrsquoaccompagnement de la

mise en œuvre du droit dur par le droit souple aux travers des chartes ou encore des

758 Etude annuelle du Conseil drsquoEtat laquo Le Droit souple raquo questionsreacuteponses 2013

759 RICHARD Jacky laquo Droit souple pour une doctrine de recours et drsquoemploi raquo Recueil Dalloz 2013 p 2512

760 Etude annuelle du Conseil drsquoEtat laquo Le Droit souple raquo 2013 p 9

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

345

deacutemarches de conformiteacute Enfin le dernier avantage reacuteside dans lrsquoalternative que constitue le

droit souple au droit dur dans certains domaines ougrave cette solution permet de concilier les

besoins de reacutegulation et les neacutecessiteacutes drsquoune certaine liberteacute

636 Droit souple et droit dur sont seacutepareacutes par une frontiegravere finalement assez permeacuteable le

droit souple pouvant ecirctre une eacutetape avant drsquoarriver au droit dur ou pouvant mecircme parfois ecirctre

pris en compte par le juge761

Par ailleurs le Conseil drsquoEtat parle mecircme drsquoeacutechelle de

normativiteacute gradueacutee srsquoaffranchissant des theacuteories de Kelsen pour affirmer qursquoil existerait une

continuiteacute sous forme de gradation entre le droit dur et le droit souple Cependant le droit

souple ne sera efficace que si son effectiviteacute est assureacutee crsquoest-agrave-dire srsquoil emporte lrsquoadheacutesion

des personnes auxquelles il srsquoadresse Crsquoest le cas srsquoil en vient agrave ecirctre consideacutereacute comme un

standard ou si sa violation emporte des conseacutequences neacutegatives pour la personne qui ne le

respecterait pas Enfin la leacutegitimiteacute de ces regravegles de droit souple repose en grande partie

sur lrsquoimplication des acteurs dans son eacutelaboration Lrsquoeacutetude du Conseil drsquoEtat sur le sujet a

donc permis de reacutepondre au besoin qui existait de laquo mieux saisir une notion deacutejagrave fuyante bien

que drsquoapparition reacutecente raquo762

637 Depuis cette eacutetude le deacuteveloppement du droit souple et son utilisation nrsquoont cesseacute de

croitre Par ailleurs le Conseil drsquoEtat admet mecircme deacutesormais763

la possibiliteacute de former un

recours en excegraves de pouvoir contre des actes qui ne reacutepondent pas aux critegraveres classiques de la

deacutecision faisant grief et qui srsquoapparentent plutocirct agrave du droit souple764

Ainsi agrave lrsquooccasion de

ses deacutecisions Socieacuteteacute Fairvesta International GMBH et Socieacuteteacute Numeacutericable lrsquoAssembleacutee

apregraves avoir rappeleacute que laquo les avis recommandations mises en garde et prises de position

adopteacutees par les autoriteacutes de reacutegulation dans lrsquoexercice des missions dont elles sont investies

peuvent ecirctre deacutefeacutereacutes au juge de lrsquoexcegraves de pouvoir lorsqursquoils revecirctent le caractegravere de

dispositions geacuteneacuterales et impeacuteratives ou lorsqursquoelles eacutenoncent des prescriptions individuelles

dont ces autoriteacutes pourraient ulteacuterieurement censurer la meacuteconnaissance raquo est venue preacuteciser

que laquo ces actes peuvent eacutegalement faire lrsquoobjet drsquoun tel recours [hellip] lorsqursquoils sont de nature

761 CE 11 deacutecembre 1970 ndeg 78880 Creacutedit foncier de France Rec p 750 DP 1971 1224 note WALINE

JCP G 1972 II 17132 note FROMONT AJDA 1971 p 196 D 1971 p 674 note LOSCHAK 762

DEUMIER Pascale laquo Saisir le droit souple par sa deacutefinition ou par ses effets raquo eacutetude annuelle du Conseil

dEtat 2013 p 247 763

CE Ass 31 mars 2016 Socieacuteteacute Fairvesta International GMBH ndeg 368082 AJDA 2016 p 717 com

DUTHEILLET de LAMOTHE Louis ODINET Guillaume 764

DUTHEILLET de LAMOTHE Louis ODINET Guillaume laquo Un recours souple pour le droit souple raquo

AJDA 2016 p 717

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

346

agrave produire des effets notables [hellip] ou ont pour objet drsquoinfluer de maniegravere significative sur les

comportements des personnes auxquels ils srsquoadressent raquo Le juge doit alors controcircler ces actes

au mecircme titre qursquoil controcircle les deacutecisions faisant grief La Haute juridiction ne srsquoarrecircte pas lagrave

puisqursquoelle est venue tregraves reacutecemment preacuteciser le point de deacutepart du deacutelai de recours contre les

actes de droit souple des autoriteacutes de reacutegulation en le fixant agrave deux mois agrave compter de la mise

en ligne de lrsquoacte incrimineacute765

Le Conseil drsquoEtat poursuit donc la construction preacutetorienne relative agrave lrsquoutilisation et agrave

la place du droit souple en faisant ainsi de ce droit un outil juridique agrave part entiegravere qui peut

ecirctre une bonne alternative dans certains cas speacutecifiques et notamment selon nous dans le cas

de lrsquoencadrement de lrsquoutilisation des TIC en santeacute

2) Le deacuteveloppement du droit souple pour encadrer les TIC en santeacute

638 La meacutedecine et les nouvelles technologies sont deux domaines en mutation

permanente Ainsi leur encadrement mecircme srsquoil est indeacuteniablement neacutecessaire se doit drsquoecirctre

suffisamment souple et flexible pour srsquoadapter aux eacutevolutions permanentes Cependant ces

matiegraveres sont paradoxalement des matiegraveres ougrave le droit applicable peut se reacuteveacuteler dans certains

cas complexes et dans drsquoautres presque inexistants Il est donc leacutegitime de se demander si le

droit souple tel que deacutefini par le Conseil drsquoEtat dans son eacutetude de 2013 ne constituerait pas

une alternative pertinente permettant drsquoassurer un cadre juridique agrave lrsquoutilisation des TIC en

santeacute suffisamment souple pour un deacuteveloppement efficace et peacuterenne

Plusieurs exemples viennent argumenter en ce sens En effet le leacutegislateur qui srsquoeacutetait

atteleacute agrave lrsquoencadrement strict de lrsquoheacutebergement des donneacutees de santeacute quel qursquoen soit leur

support semble aujourdrsquohui faire machine arriegravere face agrave lrsquoampleur de la tacircche766

De mecircme

lrsquoencadrement tregraves strict de la communication et de lrsquoeacutechange des donneacutees de santeacute

informatiseacutees mise en place par le deacutecret confidentialiteacute est aujourdrsquohui inabouti les

diffeacuterents arrecircteacutes neacutecessaires agrave la mise en œuvre du deacutecret nrsquoayant jamais eacuteteacute publieacutes767

Finalement il apparaicirct que des outils plus souples que les textes juridiques classiques

765 CE 13 juillet 2016 Socieacuteteacute GDF Suez ndeg 388150 JCP A 2016 2252 note Olivier Le BOT

766 Article 204 de la loi ndeg ndeg 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre systegraveme de santeacute agrave propos

de la mise en place drsquoune certification des heacutebergeurs de donneacutees de santeacute agrave la place de leur agreacutement actuel 767

V Supra ndeg 242 agrave 243

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

347

seraient peut-ecirctre plus adapteacutes agrave lrsquoencadrement des TIC en santeacute Le recours au droit souple

doit donc ecirctre envisageacute de maniegravere seacuterieuse dans ce cas

639 Argument fort en faveur drsquoune utilisation plus preacutesente du droit souple dans le cas des

TIC en santeacute celui-ci est deacutejagrave tregraves preacutesent en droit meacutedical comme en droit des nouvelles

technologies Ainsi en matiegravere meacutedicale les recommandations de bonnes pratiques (RBP)

deacuteveloppeacutees dans les anneacutees 1990 sont aujourdrsquohui tregraves ancreacutees A titre drsquoexemple la Haute

Autoriteacute de Santeacute creacuteeacutee en 2004 est en charge de lrsquoeacutelaboration de RBP dans le domaine

sanitaire Il en est de mecircme pour lrsquoAutoriteacute Nationale de Seacutecuriteacute du Meacutedicament (ANSM)

dans son domaine speacutecifique drsquoaction De leur cocircteacute les socieacuteteacutes savantes meacutedicales

produisent reacuteguliegraverement de guidelines qui recueillent une tregraves forte adheacutesion de la part des

professionnels concerneacutes

640 Les RBP preacutesentent lrsquoavantage laquo par leur normativiteacute souple de preacuteserver agrave la fois la

liberteacute de prescriptions des meacutedecins et le droit pour le patient drsquoecirctre soigneacute selon les

donneacutees acquises de la science raquo768

Pourtant la question de la nature juridique de ces RBP

srsquoest poseacutee tregraves rapidement et le juge a apporteacute certaines preacutecisions agrave leur sujet La Haute

juridiction avait deacutejagrave eu lrsquooccasion de preacuteciser que les RBP en matiegravere meacutedicale constituaient

des instruments drsquoaide agrave la deacutecision pour les praticiens mais eacutegalement pour le juge769

Dans

le cadre de son arrecirct Conseil National de lrsquoOrdre des Meacutedecins770

le juge administratif va

plus loin et considegravere que certaines RBP sont susceptibles de recours pour excegraves de pouvoir agrave

partir du moment ougrave elles sont reacutedigeacutees sur le mode impeacuteratif En lrsquoespegravece le Ministre de la

santeacute avait refuseacute de retirer un arrecircteacute portant homologation de RBP eacutemises par lrsquoancienne

agence nationale drsquoaccreacuteditation et drsquoeacutevaluation en santeacute (aujourdrsquohui la Haute Autoriteacute de

Santeacute) Ces RBP avaient eacuteteacute prises sur la base de lrsquoarticle L 1111-9 du Code de la santeacute

publique qui preacutecisait alors que laquo un deacutecret en Conseil dEtat fixe les conditions dapplication

du preacutesent chapitre Les modaliteacutes daccegraves aux informations concernant la santeacute dune

personne et notamment laccompagnement de cet accegraves font lobjet de recommandations de

bonnes pratiques eacutetablies par lAgence nationale daccreacuteditation et deacutevaluation en santeacute et

homologueacutees par arrecircteacute du ministre chargeacute de la santeacute raquo

768 KRZICH Delphine laquo Force normative et efficaciteacute des recommandations de bonne pratique en matiegravere

meacutedicale raquo RDSS 2014 p 1087 769

V en ce sens CE 12 janvier 2005 ndeg 25600 770

CE 26 septembre 2005 ndeg 270234 Conseil National de lrsquoOrdre des Meacutedecins Rec 2005 p 395

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

348

Pour le Conseil drsquoEtat ces RBP laquoqui visent normalement agrave donner aux professionnels

et eacutetablissements de santeacute des indications et orientations pour lapplication des dispositions

leacutegislatives et reacuteglementaires relatives agrave laccegraves des patients aux informations meacutedicales

nont pas en principe mecircme apregraves leur homologation par le ministre chargeacute de la santeacute le

caractegravere de deacutecision faisant grief elles doivent toutefois ecirctre regardeacutees comme ayant un tel

caractegravere tout comme le refus de les retirer lorsquelles sont reacutedigeacutees de faccedilon

impeacuterative raquo771

Ainsi ces RPB qui par leur caractegravere impeacuteratif viennent modifier

lrsquoordonnancement juridique constituent des actes faisant grief susceptibles de recours en

excegraves de pouvoir Il nous est possible de faire un parallegravele ici avec la jurisprudence

Duvignegraveres772

du Conseil drsquoEtat qui venait faire la distinction entre circulaires impeacuteratives et

circulaires interpreacutetatives773

641 Le Conseil drsquoEtat a par la suite confirmeacute sa jurisprudence agrave plusieurs reprises En 2011

drsquoabord agrave lrsquooccasion de lrsquoarrecirct Formindep774

ougrave il vient preacuteciser que les recommandations de

bonnes pratiques eacutelaboreacutees par la Haute Autoriteacute de Santeacute sur la base de dispositions leacutegales

laquo ont pour objet de guider les professionnels de santeacute dans la deacutefinition et la mise en œuvre

des strateacutegies de soins agrave viseacutee preacuteventive diagnostique ou theacuterapeutique les plus approprieacutees

sur la base des connaissances meacutedicales aveacutereacutees agrave la date de leur eacutediction raquo il poursuit en

en preacutecisant laquo queu eacutegard agrave lobligation deacuteontologique incombant aux professionnels de

santeacute [hellip] dassurer au patient des soins fondeacutes sur les donneacutees acquises de la science telles

quelles ressortent notamment de ces recommandations de bonnes pratiques ces derniegraveres

doivent ecirctre regardeacutees comme des deacutecisions faisant grief susceptibles de faire lobjet dun

recours pour excegraves de pouvoir raquo De mecircme en 2013 le Conseil drsquoEtat adopte une position

similaire vis-agrave-vis des RBP adresseacutees par lrsquoAFSSAPS (aujourdrsquohui ANSM)775

Il apparaicirct

donc clairement que progressivement les RPB prennent une place majeure dans le domaine

du droit meacutedical

771 CE 26 septembre 2005 op cit

772 CE 18 deacutecembre 2002 Mme Duvignegraveres ndeg 233618 Rec 2002 p 463 concl P FOMBEUR Dr adm

2003 comm 73 et repegravere 3 Proceacutedures 2003 ndeg 154 note S DEYGAS AJDA 2003 p 487 chron F

DONNAT et D CASAS 773

MARKUS Jean-Paul laquo Nature juridique des recommandations de bonnes pratiques meacutedicales raquo AJDA

2006 p 308 774

CE 27 avril 2011 Association pour une formation meacutedicale indeacutependante ndeg334396 JurisData ndeg 2011-

007009 775

CE 4 octobre 2013 Steacute Laboratoires Servier ndeg 356700

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

349

642 Du cocircteacute des TIC le droit souple est eacutegalement tregraves priseacute En effet il srsquoavegravere ecirctre un

outil particuliegraverement adapteacute agrave un domaine ougrave les eacutevolutions sont constantes Ainsi les

acteurs priveacutes de ce domaine srsquoengagent dans la conception de normes afin de geacuterer leurs

relations Ces normes laquo se distinguent eacutegalement par leur origine extra eacutetatique et la

neacutegociation qui conduit agrave leur eacutelaboration raquo776

Le domaine des TIC voit alors se deacutevelopper

les chartes et les autres guides de bonnes pratiques

Aujourdrsquohui nous pouvons donc facilement imaginer que ces outils puissent

eacutegalement ecirctre utiliseacutes en matiegravere de TIC en santeacute Drsquoailleurs les eacutetablissements de santeacute face

aux lacunes du cadre actuel et afin de seacutecuriser leurs pratiques construisent leurs propres

chartes et regraveglements inteacuterieurs en matiegravere de systegravemes drsquoinformation hospitaliers Le but de

ces textes est drsquoorganiser le bon usage des TIC dans le cadre notamment du traitement des

donneacutees de santeacute mais eacutegalement de la prise en charge des patients

776 SARR Minata laquo Droit souple et commerce eacutelectronique raquo Jurisdoctoria 2012 ndeg8 p 52

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

350

sect2 Le leacutegislateur sur la voie de la modernisation du cadre juridique

643 Que ce soit au niveau national ou au niveau europeacuteen le leacutegislateur cherche agrave adapter

les regravegles en place afin de seacutecuriser les pratiques lieacutees agrave lrsquoutilisation des TIC en santeacute Il a en

effet eu lrsquooccasion de constater agrave de multiples reprises la neacutecessiteacute de reacutenover le cadre en

place aujourdrsquohui devenu trop complexe et inadapteacute aux nouvelles pratiques et technologies

qui se deacuteveloppent rapidement

Alors que le leacutegislateur franccedilais a souhaiteacute corriger certains dysfonctionnements qui pouvaient

devenir pesant (B) le leacutegislateur europeacuteen pour sa part srsquoest concentreacute sur un sujet qui lui est

cher depuis de nombreuses anneacutees celui de la protection des donneacutees agrave caractegravere personnel

(A)

A Une volonteacute europeacuteenne drsquounifier la protection des donneacutees personnelles

644 A lrsquoissue drsquoune proceacutedure leacutegislative particuliegraverement fastidieuse (1) le Regraveglement

europeacuteen relatif agrave la protection des personnes physiques agrave lrsquoeacutegard du traitement des donneacutees agrave

caractegravere personnel et agrave la libre circulation des donneacutees777

a enfin eacuteteacute adopteacute Il apporte de

nombreuses modifications notamment en terme de droits des personnes concerneacutees par un

traitement de donneacutees agrave caractegravere personnel mais aussi au sujet des proceacutedures et obligations

preacutealables agrave la mise en œuvre drsquoun traitement automatiseacute de donneacutees agrave caractegravere personnel

(2)

1) Une proceacutedure leacutegislative longue et deacutelicate

645 Adopteacute le 27 avril 2016 agrave lrsquoissue drsquoun trilogue entre le Conseil de lrsquoUnion

europeacuteenne la Commission europeacuteenne et le Parlement europeacuteen le regraveglement (UE)

2016679 relatif agrave la protection des personnes physiques agrave lrsquoeacutegard du traitement des donneacutees agrave

caractegravere personnel et agrave la libre circulation des donneacutees entrera en vigueur le 25 mai 2018 Ce

regraveglement voit enfin le jour apregraves quatre longues anneacutees de discussions et de neacutegociations

777 Regraveglement (UE) 2016679 du Parlement europeacuteen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif agrave la protection des

personnes physiques agrave leacutegard du traitement des donneacutees agrave caractegravere personnel et agrave la libre circulation de ces

donneacutees et abrogeant la directive 9546CE JOUE ndeg L 119 du 4 mai 2016 p 1

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

351

Initialement en effet le projet de regraveglement avait eacuteteacute adopteacute en Commission europeacuteenne le 25

janvier 2012 dans le but de reacutenover le cadre juridique applicable issu de la directive

9546CE du 24 octobre 1995 texte devenu quelque peu obsolegravete face agrave lrsquoaugmentation de

lrsquoutilisation de lrsquooutil informatique et plus speacutecifiquement de lrsquoInternet En effet selon

plusieurs eacutetudes du Groupe de lrsquoarticle 29778

la directive de 1995 soulevait certaines

difficulteacutes drsquointerpreacutetation

Alors que lrsquooutil utiliseacute en 1995 eacutetait la directive neacutecessitant ainsi une transposition par

chacun des Etats membres dans son droit interne la reacuteforme est quant agrave elle baseacutee sur un

autre outil juridique le regraveglement Celui-ci preacutesente en effet lrsquoavantage de creacuteer les mecircmes

regravegles applicables dans tous les Etats membres et donc en ce sens de diminuer les diffeacuterences

qui peuvent exister entre les Etats Cela a pour conseacutequence de reacuteduire la marge de manœuvre

que pourraient avoir les Etats avec une directive et qui permettrait drsquoadapter certains

eacuteleacutements agrave leur droit interne

646 Le processus leacutegislatif srsquoest aveacutereacute long et laborieux779

Bien eacutevidemment les enjeux

eacuteconomiques ont eacuteteacute une des causes majeures de la longueur de la proceacutedure dont lrsquoissue eacutetait

initialement annonceacutee pour 2014 Comme le preacutecise le regraveglement dans ses consideacuterants laquo le

droit agrave la protection des donneacutees agrave caractegravere personnel nrsquoest pas un droit absolu il doit ecirctre

consideacutereacute par rapport agrave sa fonction dans la socieacuteteacute et ecirctre mis en balance avec drsquoautres

droits fondamentaux conformeacutement au principe de proportionnaliteacute raquo Le texte srsquoest donc

attacheacute agrave trouver le juste eacutequilibre entre protection des donneacutees et de la vie priveacutee liberteacute

drsquoexpression et enjeux eacuteconomiques Pour certains auteurs lrsquoobjectif prioritaire de ce texte est

bien de construire un marcheacute unique numeacuterique780

Par ailleurs comme le souligne agrave juste titre Ceacuteline CASTETS-RENARD dans son

analyse du Regraveglement781

une autre difficulteacute majeure rencontreacutee par le leacutegislateur europeacuteen a

eacuteteacute de trouver lrsquoeacutequilibre entre la volonteacute drsquouniformiser le cadre relatif agrave la protection des

donneacutees personnelles en Europe en choisissant lrsquooutil du regraveglement et drsquoautre part la

possibiliteacute pour chaque Etat drsquoarticuler ces nouvelles normes avec celles deacutejagrave existantes dans

778 V Notamment en ce sens avis ndeg 82010 16 deacutec 2010 WP 179 avis ndeg 52009 12 juin 2009 WP 163

779 Alors que le projet adopteacute en janvier 2012 a eacuteteacute soumis agrave discussions au sein du Conseil de lrsquoUnion

europeacuteenne le 7 deacutecembre 2012 celles-ci se sont termineacutees en mars 2014 et le Parlement nrsquoa eacuteteacute saisi du projet

que le 12 mars 2014 le trilogue entre le Conseil le Parlement et la Commission ne deacutebutant qursquoen avril 2016 780

CASTETS-RENARD Ceacuteline laquo Bregraveve analyse du regraveglement geacuteneacuteral relatif agrave la protection des donneacutees

personnes raquo Dalloz IPIT 2016 p 331 781

Ibid

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

352

sa leacutegislation interne Ainsi il est important de souligner que le Regraveglement initialement outil

contraignant laisse ici une marge de manœuvre importante aux Etats membres puisqursquoil

preacutevoit que certains points du texte pourront donc ecirctre preacuteciseacutes par chaque Etat membre

2) La mise en place drsquoun cadre reacutenoveacute

647 Sans revenir sur lrsquointeacutegraliteacute du texte il est important drsquoen souligner les points

principaux qui repreacutesentent selon nous les avanceacutees majeures dans la protection des donneacutees

agrave caractegravere personnel Le Regraveglement srsquoattache en premier lieu agrave deacutefinir deux notions

essentielles drsquoune part celle de donneacutees personnelles en son article 41 et drsquoautre part celle

de consentement Ainsi les donneacutees personnelles sont laquo toute information se rapportant agrave une

personne physique identifieacutee ou identifiable [hellip] est reacuteputeacutee ecirctre une laquopersonne physique

identifiableraquo une personne physique qui peut ecirctre identifieacutee directement ou indirectement

notamment par reacutefeacuterence agrave un identifiant tel quun nom un numeacutero didentification des

donneacutees de localisation un identifiant en ligne ou agrave un ou plusieurs eacuteleacutements speacutecifiques

propres agrave son identiteacute physique physiologique geacuteneacutetique psychique eacuteconomique culturelle

ou sociale raquo

648 Le consentement quant agrave lui est deacutefini comme eacutetant laquo toute manifestation de volonteacute

libre speacutecifique eacuteclaireacutee et univoque par laquelle la personne concerneacutee accepte par une

deacuteclaration ou par un acte positif clair que des donneacutees agrave caractegravere personnel la concernant

fassent lobjet dun traitement raquo

Passeacute cet exercice de deacutefinition il srsquoattache ensuite agrave instaurer un cadre reacutenoveacute de la

protection des donneacutees agrave caractegravere personnel au sein de lrsquoUnion europeacuteenne

a) Le renforcement du droit des personnes

Avec ce nouveau Regraveglement les droits des personnes dont les donneacutees agrave caractegravere

personnel font lrsquoobjet drsquoun traitement sont renforceacutes

649 Il nous semble inteacuteressant de nous attarder drsquoabord sur le droit au consentement De

maniegravere assez classique le regraveglement reprend lrsquoobligation pour la personne concerneacutee par un

traitement de donneacutees agrave caractegravere personnel drsquoy consentir de maniegravere libre et explicite (article

7 du Regraveglement) agrave deacutefaut le traitement ne sera pas en principe licite (article 6 du

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

353

Regraveglement) Mais la nouveauteacute apporteacutee par le Regraveglement reacuteside dans la possibiliteacute pour la

personne de retirer son consentement En effet agrave tout moment il est possible de revenir sur le

consentement accordeacute en vue drsquoun traitement de donneacutees agrave caractegravere personnel Bien entendu

et en cela le texte est bien fait le regraveglement preacutevoit expresseacutement que le retrait nrsquoest valable

que pour lrsquoavenir et ne remet aucunement en question la liceacuteiteacute du traitement initialement

fondeacute sur le consentement preacutealable Cependant le leacutegislateur europeacuteen ajoute une mention

quelque peu surprenante puisqursquoil conclut cette disposition par la phrase suivante laquo il est

aussi simple de retirer que de donner son consentement raquo Peut-ecirctre qursquoavec cette formulation

le leacutegislateur europeacuteen a entendu appuyer sur la faciliteacute qui doit ecirctre accordeacutee agrave la personne de

revenir sur son accord Notons que la formule bien qursquoelle nous surprenne a le meacuterite drsquoavoir

eacutevolueacute par rapport celle de la proposition de regraveglement dans sa version de 2014 puisqursquoil eacutetait

initialement preacutevu qursquo laquo il devrait ecirctre aussi simple de retirer son consentement que de le

donner raquo Cette formulation qui relevait plus du vœu pieu que drsquoune reacuteelle obligation leacutegale

aurait pu ecirctre source de difficulteacutes782

puisqursquoelle nrsquoaurait fait peser qursquoune simple obligation

de moyens sur le responsable du traitement Pour conclure sur le consentement notons que le

Regraveglement maintient une seacuterie drsquoexceptions agrave son recueil Ces exceptions783

sont les mecircmes

que celles preacutevues par la loi Informatique et Liberteacutes

De plus le Regraveglement laisse une marche de manœuvre aux Etats membres sur ce point

puisqursquoils pourraient laquo maintenir ou introduire des dispositions plus speacutecifiques pour adapter

lrsquoapplication des regravegles du preacutesent regraveglement raquo En drsquoautres termes cette liste drsquoexception

nrsquoest pas limitative et elle pourra ecirctre augmenteacutee par chacun des Etats membres selon ses

besoins

782 BOIZARD Maryline laquo Le consentement agrave lrsquoexploitation des donneacutees agrave caractegravere personnel une douce

illusion raquo Communication commerce eacutelectronique ndeg 3 mars 2016 eacutetude 6 783

Lrsquoarticle 6 du Regraveglement europeacuteen preacutevoit que laquo le traitement nest licite que si et dans la mesure ougrave au

moins une des conditions suivantes est remplie

a) la personne concerneacutee a consenti au traitement de ses donneacutees agrave caractegravere personnel pour une ou plusieurs

finaliteacutes speacutecifiques

b) le traitement est neacutecessaire agrave lexeacutecution dun contrat auquel la personne concerneacutee est partie ou agrave lexeacutecution

de mesures preacutecontractuelles prises agrave la demande de celle-ci

c) le traitement est neacutecessaire au respect dune obligation leacutegale agrave laquelle le responsable du traitement est

soumis

d) le traitement est neacutecessaire agrave la sauvegarde des inteacuterecircts vitaux de la personne concerneacutee ou dune autre

personne physique

e) le traitement est neacutecessaire agrave lexeacutecution dune mission dinteacuterecirct public ou relevant de lexercice de lautoriteacute

publique dont est investi le responsable du traitement

f) le traitement est neacutecessaire aux fins des inteacuterecircts leacutegitimes poursuivis par le responsable du traitement ou par

un tiers agrave moins que ne preacutevalent les inteacuterecircts ou les liberteacutes et droits fondamentaux de la personne concerneacutee

qui exigent une protection des donneacutees agrave caractegravere personnel notamment lorsque la personne concerneacutee est un

enfant raquo

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

354

650 Le Regraveglement consacre son chapitre III aux droits des personnes concerneacutees par un

traitement De maniegravere assez classique par rapport agrave la leacutegislation actuelle le regraveglement

deacutebute par le rappel de lrsquoobligation drsquoinformer la personne preacutealablement agrave la mise en œuvre

du traitement de maniegravere claire intelligible et facilement accessible Finalement le texte fait

du responsable du traitement le deacutebiteur drsquoune obligation de transparence renforceacutee vis-agrave-vis

des personnes concerneacutees A noter que les droits drsquoaccegraves et de rectification sont maintenus

651 Mais le texte innove eacutegalement puisqursquoil vient creacuteer de nouveaux droits Ainsi les

personnes concerneacutees par un traitement de donneacutees agrave caractegravere personnel pourront deacutesormais

obtenir la limitation de leur traitement Ce droit assez original suspend lrsquoutilisation des

donneacutees collecteacutees par le responsable du traitement (le temps drsquoobtenir la rectification de

donneacutees inexactes ou encore si le responsable nrsquoa plus besoin des donneacutees mais qursquoelles sont

neacutecessaires agrave la personne concerneacutees pour faire valoir ses droits par exemple) qui continue

neacuteanmoins agrave en assurer la conservation

De mecircme le droit agrave lrsquooubli (appeleacute droit agrave lrsquoeffacement) qui eacutetait deacutejagrave en partie

consacreacute par la loi Informatique et Liberteacute en son article 40 est rappeleacute par le regraveglement qui

preacutevoit de nouveaux cas drsquoapplicabiliteacute Deacutesormais la personne pourra obtenir lrsquoeffacement

de ses donneacutees si celles-ci ne sont plus neacutecessaires agrave la finaliteacute du traitement ou comme nous

lrsquoavons vu si elle deacutecide de retirer son consentement La personne concerneacutee par un

traitement de donneacutees agrave caractegravere personnel beacuteneacuteficie eacutegalement drsquoun droit agrave la portabiliteacute de

ses donneacutees crsquoest-agrave-dire le droit drsquoobtenir du responsable du traitement lrsquoensemble des

donneacutees qui la concerne dans un format structureacute

Corollaire direct des droits la possibiliteacute drsquoobtenir reacuteparation du fait de la violation de

ceux-ci est eacutegalement preacutevue par le Regraveglement en son chapitre VIII Ainsi laquo toute personne

ayant subi un dommage mateacuteriel ou moral du fait drsquoune violation du preacutesent regraveglement a le

droit drsquoobtenir du responsable de traitement ou du sous-traitant reacuteparation du preacutejudice

subi raquo (article 82 du regraveglement) Par ailleurs une reacuteclamation agrave lrsquoencontre drsquoun responsable de

traitement deacutefaillant peut ecirctre formuleacutee par voie de recours administratif juridictionnel ou

aupregraves de lrsquoautoriteacute de controcircle Une action juridictionnelle peut ecirctre par ailleurs deacuteposeacutee agrave

lrsquoencontre drsquoune autoriteacute de controcircle

b) Un nouveau cadre de controcircle et de sanction

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

355

laquoReacuteorganisation et documentation ce sont les maicirctres mots qursquoil faut retenir du Regraveglement

geacuteneacuteral sur la protection des donneacutees ndeg 2016679 raquo784

652 Point majeur de ce regraveglement celui-ci vient creacuteer le deacuteleacutegueacute agrave la protection des

donneacutees (Data Protection Officer ndash DPO) Ainsi sa deacutesignation est obligatoire pour toutes les

entreprises du secteur public quelle que soit la nature des traitements reacutealiseacutes Les

eacutetablissements de santeacute qui ne srsquoeacutetaient pas encore doteacutes drsquoun correspondant informatique et

liberteacutes (CIL) vont donc devoir drsquoici mai 2018 se mettre agrave la recherche drsquoun DPO Le

Regraveglement fixe une liste de ce que devront ecirctre a minima les missions de ce nouvel acteur Si

certaines sont similaires agrave celle de notre actuel CIL de nouvelles missions apparaissent

cependant Il srsquoagit du controcircle des regravegles internes de lrsquoentreprise en matiegravere de protection des

donneacutees agrave caractegravere personnel une mission de conseil et de veacuterification de lrsquoexeacutecution des

analyses drsquoimpact devant ecirctre reacutealiseacutees par lrsquoentreprise et enfin une mission de coopeacuteration

et de contact avec lrsquoautoriteacute de contact (ce qui mecircme si la loi Informatique et Liberteacutes ne le

preacutevoit pas eacutetait deacutejagrave le cas des CIL en grande majoriteacute)

Le DPO dispose bien entendu drsquoune indeacutependance dans lrsquoexercice de ses missions et

ne rend des comptes qursquoau niveau le plus eacuteleveacute de la hieacuterarchie de lrsquoentreprise En cela rien

de nouveau par rapport au CIL

653 Dans chaque Etat membre une autoriteacute de controcircle indeacutependante doit ecirctre mise en

place afin de controcircler la bonne application du Regraveglement mais eacutegalement proteacuteger les droits

des personnes785

Finalement sur ce point la France est en avance puisque la CNIL est en

place depuis de nombreuses anneacutees Ses missions et peut-ecirctre ses moyens devront cependant

ecirctre adapteacutes au nouveau Regraveglement Nous ne nous attarderons donc pas sur ces dispositions

En termes de sanctions un nouveau reacutegime drsquoamende plus dur est mis en place Lrsquoarticle 83

de Regraveglement vient poser le cadre geacuteneacuteral permettant aux autoriteacutes de controcircle de sanctionner

les responsables de traitement deacutefaillants Les amendes pourront srsquoeacutelever jusqursquoagrave 10 000 000

euros ou 2 du chiffre drsquoaffaires annuel mondial dans certains cas (en cas de violation des

conditions relatives au consentement des enfants par exemple) ou dans drsquoautres cas jusqursquoagrave

784 BOURGEOIS Matthieu BOUNEDJOUM Amira laquo Reacuteforme europeacuteenne des donneacutees personnelles

registres internes et DPO la neacutecessaire reacuteorganisation des entreprises raquo JCP Entreprises et Affaires ndeg 22 juin

2016 p 1326 785

Chapitre VI du Regraveglement

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

356

20 000 000 euros ou 4 du chiffre drsquoaffaires annuel mondial en cas drsquoilliceacuteiteacute du traitement

notamment Par ailleurs pour tous les cas qui ne seraient pas reacutegleacutes par lrsquoarticle 83 du

Regraveglement lrsquoarticle 84 preacutevoit la possibiliteacute pour chaque Etat membre de preacutevoir drsquoautres

mesures drsquoamendes

654 Malgreacute ce durcissement nous nous interrogeons sur la pertinence de ces amendes

Bien sucircr le texte preacutevoit une amende maximale modulable par lrsquoautoriteacute de controcircle

compeacutetente Malheureusement comme nous avions deacutejagrave pu le constater786

les amendes

excessives ne sont jamais prononceacutees et finissent par ne plus ecirctre dissuasives

C) Des nouvelles formaliteacutes

655 Autre point essentiel de ce Regraveglement la modification des formaliteacutes preacutealables agrave la

mise en œuvre drsquoun traitement de donneacutees Le responsable du traitement doit deacutesormais

mettre en place un registre des activiteacutes du traitement Ce registre srsquoimpose agrave toutes les

entreprises avec un ameacutenagement pour les entreprises de moins de 250 employeacutes Le

responsable de traitement et son sous-traitant sont tous deux en charge de la tenue de ce

registre Autre nouveauteacute non neacutegligeable la neacutecessiteacute dans certains cas de reacutealiser une

analyse drsquoimpact relative agrave la protection des donneacutees Crsquoest en effet le cas lorsqursquoun

traitement est susceptible drsquoengendrer un risque trop eacuteleveacute pour les droits et liberteacutes des

personnes physiques Cela concerne notamment les traitements de profilage sur la base duquel

des deacutecisions juridiques peuvent ecirctre prises la surveillance systeacutematique agrave grande eacutechelle

drsquoune zone accessible au public ou les traitements agrave grande eacutechelle de donneacutees qui reacutevegravelent

lrsquoorigine raciale ou ethnique les opinions politiques les convictions religieuses ou

philosophiques ou lrsquoappartenance syndicale ainsi que les donneacutees geacuteneacutetiques et biomeacutetriques

Cependant le Regraveglement nrsquoapporte pas plus de preacutecisions et laisse aux autoriteacutes de controcircle

de chaque Etat membre le soin de publier une liste des types drsquoopeacuteration de traitement pour

lesquelles une analyse drsquoimpact sera neacutecessaire Dans lrsquohypothegravese ougrave lrsquoanalyse drsquoimpact

reacutealiseacutee deacutemontre que le traitement envisageacute preacutesente un risque eacuteleveacute pour le respect du droit

des personnes le responsable du traitement doit se rapprocher de lrsquoautoriteacute de controcircle

786 V Supra ndeg 91

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

357

Ainsi le leacutegislateur europeacuteen a travailleacute agrave la reacutenovation du cadre relatif agrave la protection

des donneacutees agrave caractegravere personnel En France le leacutegislateur srsquoest atteleacute quant agrave lui agrave diffeacuterents

chantiers

B Une volonteacute franccedilaise de moderniser le cadre applicable

656 Le leacutegislateur franccedilais tente de moderniser le cadre juridique de lrsquoutilisation des TIC

en santeacute Cela passe sur le long terme par un important travail drsquoencadrement du numeacuterique

drsquoune maniegravere geacuteneacuterale (2) et agrave plus court terme par un chantier de correction de certains

dysfonctionnements (1)

1) La loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute patch correctif de certains

dysfonctionnements

657 La loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute787

adopteacutee le 26 janvier 2016

contient plusieurs dispositions relatives agrave lrsquoutilisation des TIC en santeacute Certaines font partie

inteacutegrante de la loi et drsquoautres ont eacuteteacute adopteacutees par voie drsquoordonnance788

Pourtant force est

de constater que certaines de ces mesures pourtant reacuteellement impactantes sont passeacutees

presque inaperccedilues Elles nrsquoont fait lrsquoobjet drsquoaucun commentaire de la part de la doctrine

celle-ci preacutefeacuterant se focaliser sur les mesures phares de la loi telles que les GHT ou la refonte

du service public hospitalier

Pourtant le leacutegislateur a entendu agrave travers cette loi simplifier ou uniformiser certaines

dispositions applicables aux TIC en santeacute devenues trop complexes

658 Bien entendu la refonte du DMP est une des mesures principales relatives aux TIC en

santeacute et preacutesente dans ce texte Plus qursquoun simple patch correctif789

les mesures preacutevues par

787 Loi ndeg 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre systegraveme de santeacute JORF ndeg0022 du 27 janvier

2016 texte 1 788

Ordonnance ndeg 2017-27 du 12 janvier 2017 relative agrave lheacutebergement de donneacutees de santeacute agrave caractegravere

personnel JORF ndeg0011 du 13 janvier 2017 texte ndeg 17 Ordonnance ndeg 2017-29 du 12 janvier 2017 relative

aux conditions de reconnaissance de la force probante des documents comportant des donneacutees de santeacute agrave

caractegravere personnel creacuteeacutes ou reproduits sous forme numeacuterique et de destruction des documents conserveacutes sous

une autre forme que numeacuterique JORF ndeg0011 du 13 janvier 2017 texte ndeg 21 789

Nous utilisons volontairement cette expresseacutement tireacutee de lrsquoinformatique Dans ce cadre un patch deacutesigne un

morceau de Code apportant un correctif agrave un programme

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

358

lrsquoarticle 96 de la loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute et son deacutecret drsquoapplication790

repreacutesentent selon nous lrsquoultime tentative du leacutegislateur de sauver ce projet ambitieux dont

on ne compte plus les eacutechecs depuis plus de 10 ans Mais lrsquoarticle 96 vient eacutegalement

transformer le consentement du patient neacutecessaire preacutealablement agrave tout heacutebergement

externaliseacute de donneacutees de santeacute aupregraves drsquoun heacutebergeur agreacuteeacute en simple non opposition Il

reacutesout ainsi certaines difficulteacutes pratiques reacuteguliegraverement rencontreacutees par les professionnels

659 Les mesures les plus discregravetes mais pour autant importantes se situent au sein du titre

V de la loi consacreacute aux mesures de simplification Ainsi lrsquoarticle 204 de la loi preacutevoit la

possibiliteacute pour le Gouvernement de venir laquo dans les conditions preacutevues agrave larticle 38 de la

Constitution et dans un deacutelai de douze mois agrave compter de la promulgation de la preacutesente loi

[hellip] prendre par ordonnances les mesures dameacutelioration et de simplification du systegraveme de

santeacute relevant du domaine de la loi raquo Par ce biais le Gouvernement a pu poser par voie

drsquoordonnance certaines regravegles en matiegravere drsquoheacutebergement de donneacutees de santeacute791

Les

dispositions en matiegravere drsquoagreacutement des heacutebergeurs de donneacutees de santeacute preacutevues au Code de la

santeacute publique ont eacuteteacute harmoniseacutees avec celles relatives agrave lrsquoagreacutement des personnes

deacutepositaires drsquoarchives publiques telles que preacutevues agrave lrsquoarticle L 212-4 du Code du

patrimoine Cette disposition deacutemontre bien la volonteacute du leacutegislateur drsquoappreacutehender ce type de

probleacutematique dans sa globaliteacute Par ailleurs et nous lrsquoavons eacutetudieacute en deacutetail preacuteceacutedemment

la proceacutedure drsquoagreacutement est largement simplifieacutee et la certification remplacera la proceacutedure

du comiteacute drsquoagreacutement des heacutebergeurs

Enfin par voie drsquoordonnance792

le Gouvernement a apporteacute une solution agrave la

probleacutematique concregravete que rencontrent tous les eacutetablissements de santeacute aujourdrsquohui agrave savoir

creacuteer les modaliteacutes de destruction des dossier meacutedicaux papiers qui ont eacuteteacute numeacuteriseacutes

2) La loi pour une Reacutepublique numeacuterique

a) Les travaux preacutealables du Conseil drsquoEtat

790 Deacutecret ndeg 2016-914 du 4 juillet 2016 relatif au dossier meacutedical partageacute JORF ndeg0155 du 5 juillet 2016

791 Ibid

792 Ordonnance ndeg 2017-29 du 12 janvier 2017 relative aux conditions de reconnaissance de la force probante des

documents comportant des donneacutees de santeacute agrave caractegravere personnel creacuteeacutes ou reproduits sous forme numeacuterique et

de destruction des documents conserveacutes sous une autre forme que numeacuterique JORF ndeg0011 du 13 janvier 2017

texte ndeg 21

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

359

660 En 2014 le Conseil drsquoEtat avait consacreacute son eacutetude annuelle793

au numeacuterique et aux

droits fondamentaux Ce choix qui constituait selon le Conseil drsquoEtat une audace de sa part

eacutetait pourtant apparu comme eacutevident notamment car lrsquoessor du numeacuterique dans notre socieacuteteacute

avait forceacutement des conseacutequences sur les droits fondamentaux des personnes Le Conseil

drsquoEtat se devait donc de revecirctir son rocircle de gardien des droits et liberteacutes fondamentaux A

lrsquooccasion de cette eacutetude la Haute juridiction a donc constateacute que non seulement le numeacuterique

a permis drsquoobtenir la reconnaissance de nouveaux droits fondamentaux autonomes tels que le

droit agrave la protection des donneacutees personnelles et le droit drsquoaccegraves agrave Internet mais il a

eacutegalement bouleverseacute le reacutegime juridique de certaines liberteacutes fondamentales En effet agrave

lrsquoheure de lrsquoInternet les moyens classiques de protection de la liberteacute drsquoexpression et de la vie

priveacutee ont pu ecirctre mis agrave mal La loi ndeg 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans

lrsquoeacuteconomie numeacuterique794

a permis de stabiliser le reacutegime relatif agrave la liberteacute drsquoexpression795

mais les questions relatives aux limites de la liberteacute drsquoexpression restent vives En soi ce nrsquoest

pas tant la question des limites agrave apporter agrave la liberteacute drsquoexpression qui se pose mais plutocirct les

moyens pour lutter contre les contenus illicites normalement interdits Pour le Conseil drsquoEtat

il eacutetait donc neacutecessaire de repenser la protection des droits fondamentaux face agrave lrsquoessor du

numeacuterique

661 Cette protection nrsquoest possible que par une responsabilisation accrue des utilisateurs

Cette notion revient comme nous avons pu le constater tregraves reacuteguliegraverement En accordant plus

de moyens drsquoactions en cas de violation de leurs droits mais eacutegalement en leur accordant une

plus grande maicirctrise de leurs donneacutees personnelles les utilisateurs des outils numeacuteriques

pourraient se proteacuteger plus facilement Drsquoailleurs agrave lrsquooccasion de cette eacutetude le Conseil

drsquoEtat a avanceacute la possibiliteacute de consacrer un droit agrave lrsquoautodeacutetermination informelle de

lrsquoindividu plutocirct que celui drsquoun droit agrave la proprieacuteteacute estimant qursquoil convenait drsquoeacutecarter ce qursquoil

a qualifieacute de logique patrimoniale dans la protection des donneacutees

662 Face agrave ces diffeacuterents constats le Conseil drsquoEtat avait formuleacute cinquante propositions

tendant notamment agrave lrsquoameacutelioration de la deacutefinition des droits fondamentaux agrave lrsquoegravere du

793 Conseil drsquoEtat eacutetude annuelle laquo Le numeacuterique et les droits fondamentaux raquo 2014 La documentation

franccedilaise 794

Loi ndeg 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans leacuteconomie numeacuterique JORF ndeg0143 du 22 juin

2004 p 11168 795

Conseil drsquoEtat eacutetude annuelle laquo Le numeacuterique et les droits fondamentaux raquo dossier de presse 2014 p 5

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

360

numeacuterique au renforcement des pouvoirs des individus vis-agrave-vis de leurs donneacutees agrave la

redeacutefinition des moyens de protection des droits fondamentaux et du rocircle des autoriteacutes

publiques et agrave lrsquoorganisation de la coopeacuteration europeacuteenne et internationale

663 En parallegravele de cette eacutetude tregraves instructive sur lrsquoimpact du numeacuterique sur les droits

fondamentaux le Conseil national du numeacuterique a meneacute entre octobre 2014 et feacutevrier 2015

une concertation qui a permis au Gouvernement drsquoeacutelaborer sa strateacutegie numeacuterique Le 9

deacutecembre 2015 le projet de loi pour une Reacutepublique Numeacuterique a eacuteteacute adopteacute en conseil des

Ministres Enfin la loi pour une Reacutepublique Numeacuterique a eacuteteacute adopteacutee le 7 octobre 2016796

b) Les enjeux de la loi

664 La loi issue drsquoune vaste concertation nationale en ligne797

se deacutecompose en trois

axes la circulation des donneacutees et du savoir la protection des droits dans la socieacuteteacute

numeacuterique et lrsquoaccegraves au numeacuterique Les motifs du projet de loi preacutecisent bien que lrsquoobjectif

du Gouvernement avec ce projet est double laquo drsquoune part donner une longueur drsquoavance agrave

la France dans le domaine du numeacuterique en favorisant une politique drsquoouverture des donneacutees

et des connaissances drsquoautre part adopter une approche progressiste du numeacuterique qui

srsquoappuie sur les individus pour renforcer leur pouvoir drsquoagir et leurs droits dans le monde

numeacuterique raquo798

665 A travers ce texte le leacutegislateur entend drsquoune part favoriser lrsquoinnovation lieacutee au

numeacuterique par des leviers incitatifs et drsquoautre part encadrer en amont cette innovation et

assurer la protection des individus Cette loi preacutesente lrsquoambition drsquoencadrer dans sa globaliteacute

le deacuteveloppement du numeacuterique en France Il est vrai que la loi pour une Reacutepublique

Numeacuterique tente de toucher toutes les sphegraveres du droit concerneacutees par le numeacuterique Qualifieacutee

de polymorphe799

la Reacutepublique numeacuterique touche effectivement au droit public au droit

796 Loi ndeg 2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une Reacutepublique numeacuterique JORF ndeg0235 du 8 octobre 2016 texte

ndeg1 797

Selon le communiqueacute de presse du Conseil des Ministres en date du 9 deacutecembre 2015 laquo En seulement trois

semaines pregraves de 21 000 participants ont publieacute 8 500 contributions A lrsquoissue de cet exercice le Gouvernement

a retenu cinq nouveaux articles drsquoinspiration citoyenne dans son projet et a inteacutegreacute pregraves de 90 modifications du

projet raquo disponible sur [httpwwwgouvernementfr] Consulteacute le 31 aoucirct 2016 Cependant cette notion de

laquo co-eacutecriture citoyenne raquo avanceacutee par le Gouvernement est parfois critiqueacutee V notamment en ce sens PASTOR

Jean-Marc laquo Les politiques publiques dans la reacutepublique numeacuterique raquo Dalloz actualiteacutes 19 deacutecembre 2015 798

Exposeacute des motifs de la loi disponible sur [httpswwwlegifrancegouvfr] Consulteacute le 19 mars 2017 799

DALEAU Jeanne laquo Reacutepublique numeacuterique apregraves la consultation publique la discussion parlementaire raquo

Dalloz actualiteacutes 28 janvier 2016

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

361

des affaires mais eacutegalement au droit de la consommation au droit de la proprieacuteteacute intellectuelle

et au droit peacutenal Certaines des dispositions preacutevues par le texte meacuteritent drsquoailleurs que nous

nous y attardions

666 Dans le cadre de lrsquoaxe relatif agrave lrsquoincitation agrave la circulation des donneacutees le

gouvernement propose bien eacutevidemment drsquoeacutelargir lrsquoouverture des donneacutees publiques en

France LrsquoOpen Data est effectivement un enjeu primordial agrave lrsquoheure du deacuteveloppement du

numeacuterique Le premier titre preacutevoit ainsi la mise en ligne obligatoire sur le site Internet des

administrations des documents administratifs librement communicables Mais le point qui

attire le plus notre attention est lrsquointroduction de la notion de donneacutees drsquointeacuterecirct geacuteneacuteral afin de

permettre notamment un accegraves simplifieacute aux statistiques publiques

667 En ce qui concerne le renforcement de la protection dans la socieacuteteacute numeacuterique nous

pouvons constater que certaines propositions issues de lrsquoeacutetude annuelle du Conseil drsquoEtat ont

eacuteteacute reprises En effet de nouveaux droits sont creacuteeacutes et notamment le droit agrave la libre disposition

de ses donneacutees par un individu (lrsquoautodeacutetermination informelle) Lrsquoexposeacute des motifs de la loi

preacutecise drsquoailleurs que la piste de la creacuteation drsquoun droit de proprieacuteteacute sur les donneacutees

personnelles nrsquoest pas retenue notamment car laquo la valeur des donneacutees personnelles drsquoun

individu est tregraves limiteacutee de lrsquoordre de quelques centimes drsquoeuros raquo800

Cet argument tregraves

pragmatique finira certainement de convaincre les personnes qui militaient encore pour ce

droit et qui nrsquoavaient peut-ecirctre pas encore inteacutegreacutes pleinement les risques qui existent agrave

reconnaitre un droit de proprieacuteteacute des personnes sur leurs donneacutees personnelles

668 Par ailleurs la loi introduit eacutegalement le droit agrave la portabiliteacute des donneacutees en totale

redondance avec le Regraveglement europeacuteen relatif agrave la protection des donneacutees adopteacute en avril

2016 tout comme lrsquoest lrsquoensemble de dispositions venant modifier la loi Informatique et

Liberteacutes Il aurait eacuteteacute preacutefeacuterable que le leacutegislateur ne creacutee pas un doublon avec le Regraveglement

europeacuteen Mecircme si celui-ci nrsquoentrera en vigueur au plus tard qursquoen mai 2018 il aurait eacuteteacute

souhaitable drsquoeacuteviter de creacuteer encore une fois une superposition de textes portant sur le mecircme

sujet au risque de creacuteer des dispositions divergentes

800 Exposeacute des motifs du projet de loi pour une Reacutepublique numeacuterique agrave propos de lrsquoarticle 26 disponible sur

[httpswwwlegifrancegouvfr] Consulteacute le 31 aoucirct 2016

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

362

Si cette loi a le meacuterite de srsquoemparer drsquoun sujet complexe agrave encadrer quelques erreurs

sont deacutejagrave preacutesentes et il aurait eacuteteacute preacutefeacuterable drsquoinscrire ce texte dans la ligne directe des

mesures prises au niveau europeacuteen et notamment celles contenues dans le Regraveglement

europeacuteen afin drsquoeacuteviter de rendre illisible le cadre juridique

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

363

Conclusion de la section

669 Le cadre juridique des TIC en santeacute doit ecirctre reacutenoveacute cela est incontestable Il est vrai

qursquoil peut parfois ecirctre compliqueacute de trouver le bon eacutequilibre entre le droit souvent vu comme

un outil contraignant et lrsquoinnovation technologique rapide et neacutecessitant une grande liberteacute

Pourtant quand cet eacutequilibre est atteint droit et innovation sont alors des allieacutes de taille le

droit permettant agrave lrsquoinnovation de se deacutevelopper au sein drsquoun cadre agrave la fois protecteur pour

les usagers mais aussi incitatif et valorisant pour les chercheurs Cependant la flexibiliteacute

neacutecessaire doit ecirctre rechercheacutee dans des outils juridiques un peu moins classiques Le droit

souple apparait alors comme constituant une solution adapteacutee En matiegravere de TIC en santeacute

cela est drsquoautant plus vrai que les deux domaines concerneacutes agrave savoir la meacutedecine et les

technologies de communication utilisent deacutejagrave depuis longtemps les outils issus du droit

souple

670 Bien qursquoils ne semblent pas explorer cette piste pour lrsquoinstant le leacutegislateur europeacuteen

et le leacutegislateur franccedilais se sont toutefois tous deux atteleacutes agrave la modernisation du cadre

juridique des TIC en santeacute chacun dans des domaines diffeacuterents Le leacutegislateur europeacuteen

reacutenove ainsi le travail qursquoil avait reacutealiseacute en 1995 en matiegravere de protection des donneacutees agrave

caractegravere personnel tandis que le leacutegislateur franccedilais tente de reacuteparer certains

dysfonctionnements preacutesents depuis longtemps Il fait aussi preuve drsquoinitiative agrave travers la loi

relative agrave la Reacutepublique Numeacuterique Il marque ainsi sa volonteacute drsquoaccompagner le

deacuteveloppement des TIC dans leur globaliteacute en remplissant agrave la fois un rocircle protecteur (en

eacutedictant de nouveaux droits fondamentaux) mais eacutegalement incitateur (en tentant de rendre

accessible agrave tous les outils du numeacuterique)

Il faut toutefois qursquoil veille agrave garder un rythme soutenu en la matiegravere srsquoil ne veut pas

ecirctre tregraves vite deacutepasseacute De mecircme il doit apprendre de ses erreurs et veiller agrave ne pas ecirctre de

nouveau redondant avec drsquoautres textes au risque de complexifier encore plus le cadre

juridique

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

365

Conclusion du chapitre

671 Le cadre juridique de lrsquoutilisation des TIC agrave lrsquohocircpital construit au fur et agrave mesure

nrsquoest qursquoune succession de textes eacutepars et parfois inaboutis qui mis bout agrave bout ne forment

absolument pas un ensemble coheacuterent A lrsquoheure actuelle ce cadre juridique ne remplit pas

correctement son rocircle en eacutetant source drsquoune certaine inseacutecuriteacute juridique Pour lutter

efficacement contre cela il est neacutecessaire de limiter lrsquoinflation leacutegislative Le leacutegislateur doit

se montrer plus rigoureux dans lrsquoeacutelaboration des normes en tacircchant de privileacutegier la qualiteacute

de celles-ci plutocirct que leur quantiteacute La reacutenovation de ce cadre semble donc ineacuteluctable

Pour cela il nous apparait indispensable que le droit srsquoadapte aux exigences des

innovations technologiques Reacuteactiviteacute inventiviteacute et souplesse doivent donc ecirctre les maicirctres-

mots de ce nouveau cadre juridique Le leacutegislateur devra peut-ecirctre srsquoorienter vers les solutions

proposeacutees par le droit souple qui longtemps critiqueacute apparait aujourdrsquohui pour beaucoup (et

notamment par le Conseil drsquoEtat) comme une alternative efficace pour encadrer certains

domaines neacutecessitant une forte flexibiliteacute En cela cette solution semble ecirctre adapteacutee pour

venir en partie constituer le cadre juridique des TIC en santeacute Enfin soulignons que le

leacutegislateur europeacuteen et le leacutegislateur franccedilais se preacuteoccupent drsquoores et deacutejagrave de moderniser le

cadre juridique des TIC en santeacute Le regraveglement europeacuteen relatif agrave la protection des personnes

physiques agrave lrsquoeacutegard du traitement des donneacutees agrave caractegravere personnel et agrave la libre circulation

des donneacutees propose un encadrement global reacutenoveacute du traitement des donneacutees agrave caractegravere

personnel Les TIC en santeacute neacutecessitant la collecte et le traitement de donneacutees de santeacute seront

donc directement impacteacutees par cette reacuteforme Le leacutegislateur franccedilais quant agrave lui a profiteacute de

la loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute pour glisser quelques nouveauteacutes et surtout

quelques simplifications en ce qui concerne la conservation et lrsquoeacutechange de donneacutees de santeacute

Par ailleurs la loi pour une Reacutepublique numeacuterique ambitionne de venir reconnaitre de

nouveaux droits fondamentaux issus directement du deacuteveloppement des TIC Pour autant

ceci nrsquoest que le deacutebut drsquoun chantier bien plus grand De nombreuses incoheacuterences subsistent

et de nouvelles technologies deacuteveloppeacutees dans le secteur de la santeacute doivent ecirctre appreacutehendeacutees

par le droit Le chemin est donc encore long

Dans lrsquoattente les eacutetablissements de santeacute ne restent pas sans reacuteagir Ils sont en effet

venus compenser les lacunes du leacutegislateur en tentant de se reacuteguler eux-mecircmes afin de

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire

366

proposer des solutions technologiques innovantes agrave leurs professionnels et leurs patients tout

en srsquoassurant que les droits de ces derniers seront respecteacutes

367

Conclusion du titre

672 Le bon deacuteveloppement des SIS en France a besoin drsquoune gouvernance efficace Pour

que des projets drsquoampleur neacutecessitant une ligne de conduite nationale unifieacutee (tel que le DMP

par exemple) puissent aboutir il est en effet neacutecessaire que lrsquoEtat prennent les choses en main

et instaure le cadre de conduite propice agrave leur bon deacuteveloppement Les pouvoirs publics srsquoy

attegravelent et la gouvernance reacutenoveacutee en place depuis 2009 a le meacuterite drsquoecirctre plus lisible pour

les diffeacuterents acteurs La gouvernance et la conduite des projets de SIS ne peuvent reposer

seulement sur lrsquoeacutechelon national et ainsi au niveau reacutegional les ARS et les GHT repreacutesentent

les appuis essentiels pour les eacutetablissements de santeacute

Pour reacuteussir agrave seacutecuriser lrsquoutilisation des TIC dans la pratique meacutedicale les pouvoirs

publics doivent eacutegalement reacutefleacutechir agrave la refonte du cadre juridique actuel En effet lrsquoinfluence

de sources de droit exteacuterieure lrsquoapparition de nouveaux domaines complexes et proteacuteiformes

(tel que les TIC en santeacute) ou encore la propension du gouvernement agrave leacutegifeacuterer de maniegravere

meacutediatique deacutegradent de plus en plus la qualiteacute de nos normes Aujourdrsquohui la complexiteacute

entourant les TIC en santeacute posent une difficulteacute majeure pour eacutetablir un cadre lisible et

compreacutehensible par tous les acteurs A la deacutecharge du leacutegislateur il est vrai que les enjeux

entourant les TIC en santeacute sont nombreux et varieacutes Il faut adopter une vision globale de la

matiegravere en prenant en compte les contraintes juridiques bien eacutevidemment mais eacutegalement

les contraintes eacutethiques eacuteconomiques et techniques Une reacuteforme srsquoimpose donc afin de

pouvoir apporter aux eacutetablissements lrsquoenvironnement juridique clair dont ils ont besoin

Neacuteanmoins la seacutecurisation de lrsquoutilisation des TIC dans la pratique meacutedicale peut ecirctre

amorceacutee par les eacutetablissements eux-mecircmes plus agrave mecircme drsquoidentifier leurs besoins en la

matiegravere En accompagnant lrsquoinformatisation de leurs pratiques par une reacuteflexion portant sur la

seacutecurisation de ces derniegraveres les eacutetablissements sont ainsi assureacute drsquoun deacuteveloppement serein

et sucircr de lrsquoutilisation des TIC

TITRE 2

LES ETABLISSEMENTS DE SANTE

ACTEURS CLES DE LA SECURISATION DE

LrsquoUTILISATION DES TIC A LrsquoHOcircPITAL

370

673 Comme le pointait agrave juste titre la Cour des Comptes dans son eacutetude de 2016 consacreacutee

agrave la modernisation des systegravemes drsquoinformation hospitaliers laquo loin de srsquoatteacutenuer la complexiteacute

des processus drsquoinformatisation des hocircpitaux a plutocirct tendance agrave srsquoaccroitre raquo801

Les

eacutetablissements de santeacute pour relever le deacutefi de lrsquoinformatisation doivent faire face agrave une

probleacutematique multiple non seulement ils doivent srsquoassurer drsquoinstaller un systegraveme

drsquoinformation hospitalier qui soit agrave la fois efficient et adapteacute aux besoins des professionnels

pour leur pratique quotidienne mais ils doivent eacutegalement veiller agrave ce que ce systegraveme

drsquoinformation respecte la leacutegislation en vigueur en matiegravere drsquoutilisation des TIC de traitement

des donneacutees agrave caractegravere sensible et de droits des usagers Trouver ce juste eacutequilibre nrsquoest pas

toujours aiseacute pour les eacutetablissements de santeacute qui doivent agir dans un cadre financier et

juridique contraint ce dernier eacutetant parfois comme nous le constatons depuis le deacutebut de nos

recherches fluctuant et difficile agrave appreacutehender Dans ce contexte particulier les

eacutetablissements de santeacute vont pouvoir jouer un rocircle essentiel dans la seacutecurisation de leurs

pratiques compensant ainsi les lacunes du leacutegislateur et des pouvoirs publics en la matiegravere

Ainsi les eacutetablissements disposent de plusieurs outils permettant drsquoencadrer au mieux

leur deacutemarche drsquoinformatisation les placcedilant ainsi au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

(chapitre premier) Le CHRU de Lille est drsquoailleurs un exemple de seacutecurisation reacuteussie qui

meacuterite que nous nous y attardions (chapitre second)

801 Cour des Comptes laquo La modernisation des systegravemes drsquoinformation hospitaliers une contribution agrave

lrsquoefficience du systegraveme de soins agrave renforcer raquo rapport sur lrsquoapplication des lois de financement de la seacutecuriteacute

sociale Chapitre VIII septembre 2016 p 330

371

Chapitre 1

Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la

seacutecurisation de leurs pratiques

674 Le deacuteveloppement des systegravemes drsquoinformation hospitaliers se reacutevegravele ecirctre un chantier

long et joncheacute drsquoembuches A titre drsquoexemple le CHU de ROUEN suite agrave un incident lors du

deacuteploiement de la prescription informatiseacutee au sein de son systegraveme drsquoinformation a ducirc

revenir de maniegravere transitoire au papier802

Aujourdrsquohui force est de constater que les

eacutetablissements de santeacute ne sont pas tous eacutegaux en termes de deacuteveloppement de leur systegraveme

drsquoinformation hospitalier Alors que certains peinent agrave deacuteployer leur dossier patient

informatiseacute (AP-HP CHU de Rouen)803

drsquoautres ont eu lrsquooccasion de deacutevelopper avec

succegraves une solution interne qursquoils peuvent deacutesormais diffuser au sein drsquoautres eacutetablissements

(Hospices civils de Lyon)804

675 Ces diffeacuterences en termes drsquoavanceacutee ont des sources multiples Ainsi il arrive parfois

comme le souligne la Cour des Comptes que laquo des deacuterives de deacutelais de coucircts et de qualiteacute se

cumulent raquo805

Cependant les eacutetablissements de santeacute ne sont pas totalement deacutemunis face agrave

ce deacutefi de taille qursquoest le deacuteveloppement de leur systegraveme drsquoinformation hospitalier Ainsi ils

vont pouvoir ecirctre les acteurs directs de la seacutecurisation de leurs pratiques

En amont drsquoabord puisqursquoils vont pouvoir inscrire le deacuteveloppement et la mise en place de

leur systegraveme drsquoinformation hospitalier dans une deacutemarche strateacutegique leur permettant ainsi

drsquoanticiper le mieux possible les difficulteacutes et les risques lieacutes agrave lrsquoinformatisation des pratiques

meacutedicales (Section I) Puis en aval une fois le systegraveme drsquoinformation hospitalier mis en

place les eacutetablissements vont pouvoir user drsquooutils juridiques et manageacuteriaux afin drsquoanticiper

certains risques et sanctionner des pratiques incorrectes (Section II) Dans la pratique bien

eacutevidemment ces diffeacuterentes solutions se superposent et devront ecirctre mises en œuvre

simultaneacutement

802 Id p 337

803 Id p 353

804 Id p 353

805 Id p 339

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

372

Section 1 Les pistes de seacutecurisation a priori

676 La mise en œuvre et le deacuteveloppement des TIC dans la pratique meacutedicale doit ecirctre

reacutefleacutechie en amont par les eacutetablissements de santeacute Les risques lieacutes agrave lrsquoutilisation des TIC

qursquoils soient drsquoordre juridique ou technique peuvent ecirctre anticipeacutes et les pratiques peuvent

degraves leur origine ecirctre seacutecuriseacutees Ainsi la mise en place drsquoune strateacutegie drsquoeacutetablissement autour

du deacuteveloppement du systegraveme drsquoinformation hospitalier est une condition essentielle agrave une

utilisation sereine des TIC (Paragraphe I) Par ailleurs les eacutetablissements de santeacute peuvent

eacutegalement faire appel agrave des experts dans le domaine qui sauront les guider et les

accompagner dans la mise en place de leur systegraveme drsquoinformation hospitalier (Paragraphe II)

sect1 La gestion strateacutegique de lrsquoinformatisation agrave lrsquohocircpital

677 Lrsquoensemble des applications informatiques utiliseacutees agrave lrsquohocircpital qursquoil srsquoagisse des

logiciels meacutedicaux ou des simples logiciels administratifs (gestion de la paie par exemple ou

de la facturation) srsquoorganise dans le cadre preacutecis du Systegraveme drsquoInformation Hospitalier (SIH)

Il nous est neacutecessaire de deacutefinir ce concept de SIH (A) avant de reacutefleacutechir aux modaliteacutes

permettant de geacuterer de maniegravere strateacutegique son deacuteveloppement (B)

A Le Systegraveme drsquoinformation hospitalier

1) Bref rappel historique

678 Le systegraveme drsquoinformation hospitalier tel qursquoil existe aujourdrsquohui au sein des

eacutetablissements de santeacute a mis du temps agrave se deacutevelopper Ce sont les fonctions purement

administratives qui dans un premier temps ont eacuteteacute informatiseacutees Ainsi certaines fonctions

ayant trait agrave la gestion des ressources humaines (la paie notamment) mais eacutegalement les

fonctions financiegraveres (la facturation ou encore la comptabiliteacute) ont eacuteteacute informatiseacutees par le

biais notamment drsquoapplication deacuteveloppeacutees au niveau national806

806 ANAP laquo Audit des systegravemes drsquoinformation hospitaliers aupregraves drsquoeacutetablissements repreacutesentatifs raquo rapport

final mars 2014 p 13

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

373

679 En 1972 le statut des syndicats inter-hospitaliers est creacuteeacute807

Ce type de coopeacuteration se

deacuteveloppe alors afin de mutualiser les efforts et les moyens en matiegravere drsquoinformatique

hospitaliegravere Les centres Reacutegionaux de lrsquoInformatique Hospitaliegravere (CRIH) apparaissent agrave la

mecircme eacutepoque Il srsquoagit de structures publiques qui laquo sont en charge drsquoassurer le

deacuteveloppement la maintenance et lrsquoexploitation de lrsquoinformatique hospitaliegravere raquo808 Ce sont

les CRIH qui dans un premier temps vont deacutevelopper et proposer des solutions logicielles

aux eacutetablissements de santeacute Cependant agrave partir de 1989 le marcheacute va srsquoouvrir aux industriels

du secteur priveacute

680 Par ailleurs en 1982 la creacuteation du Programme de Meacutedicalisation des Systegravemes

drsquoInformation (PMSI) va renforcer la neacutecessiteacute pour les eacutetablissements de srsquoinformatiser de

maniegravere fiable afin de recueillir les donneacutees relatives agrave lrsquoactiviteacute meacutedicale et les transmettre

aux autoriteacutes compeacutetentes En effet le nouveau mode de financement de lrsquoactiviteacute agrave savoir le

budget global introduit par Jean de KERVASDOUE (alors Directeur des Hocircpitaux)809

impose aux eacutetablissements de santeacute de valoriser au mieux leur activiteacute en tenant un releveacute le

plus preacutecis possible de celle-ci Ce ne sont toutefois que les preacutemisses du PMSI qui sera

geacuteneacuteraliseacute en 1995810

681 Puis apregraves le deacuteveloppement de lrsquooffre informatique relative au secteur meacutedico-

technique (biologie et imagerie) entre 1990 et 2000 crsquoest la production de soins qui va

commencer agrave ecirctre informatiseacutee agrave partir de 2000 Cette informatisation ne trouve cependant pas

sa source dans une volonteacute drsquoameacuteliorer la prise en charge ou drsquoinformatiser de maniegravere

intensive la pratique meacutedicale La justification est purement meacutedico-eacuteconomique En effet

avec la loi de financement pour 2004 apparait la tarification agrave lrsquoactiviteacute811

deacutesormais les

ressources des eacutetablissements de santeacute deacutependent de leur activiteacute Le deacuteveloppement de

lrsquoinformatique et notamment de lrsquoinformatique meacutedicale devient alors aux yeux des

807 Deacutecret ndeg72-353 du 2 mai 1972 relatif agrave la creacuteation des syndicats inter-hospitaliers et agrave leurs conseils

dadministration JORF du 4 mai 1972 p 4605 808

ANAP laquo Audit des systegravemes drsquoinformation hospitaliers aupregraves drsquoeacutetablissements repreacutesentatifs raquo op cit p

13 809

Ancien nom de lrsquoactuelle Direction Geacuteneacuterale de lrsquoOffre de Soins (DGOS) 810

Arrecircteacute du 20 septembre 1994 relatif au recueil et au traitement des donneacutees dactiviteacute meacutedicale et de coucirct

viseacutees agrave larticle L 710-5 du Code de la santeacute publique par les eacutetablissements de santeacute publics et priveacutes viseacutes aux

articles L 714-1 L 715-5 du Code de la santeacute publique et aux articles L 162-23 L 162-23-1 et L 162-25 du

Code de la Seacutecuriteacute Sociale et agrave la transmission aux services de lEacutetat et aux organismes dassurance maladie

dinformations issues de ces traitements JORF ndeg 242 18 octobre 1994 p 14761 811

Loi ndeg 2003-1199 du 18 deacutecembre 2003 de financement de la seacutecuriteacute sociale pour 2004 JORF ndeg293 19

deacutecembre 2003 p 21641

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

374

eacutetablissements de santeacute un veacuteritable enjeu strateacutegique Les eacutetablissements de santeacute aideacutes et

motiveacutes par le plan hocircpital 2007 vont donc se lancer dans lrsquoinformatisation de la production

de soins de maniegravere acceacuteleacutereacutee

Par ailleurs et comme nous lrsquoavons vu preacuteceacutedemment les politiques nationales

incitatives vont se deacutevelopper poussant les eacutetablissements de santeacute agrave deacutevelopper leur systegraveme

drsquoinformation hospitalier

2) Tentative de deacutefinition de la notion de systegraveme drsquoinformation hospitalier

La notion de systegraveme drsquoinformation hospitalier peut agrave premiegravere vue paraicirctre assez

vague Pour comprendre les enjeux mais eacutegalement les difficulteacutes lieacutees agrave sa mise en place

ainsi qursquoagrave sa seacutecurisation il est donc neacutecessaire de tenter drsquoen deacutefinir les contours

682 La circulaire du 6 janvier 1989 relative agrave lrsquoinformatisation des hocircpitaux publics812

preacutecise que le systegraveme drsquoinformation hospitalier peut ecirctre deacutefini comme laquo lensemble des

informations de leurs regravegles de circulation et de traitement neacutecessaires agrave son fonctionnement

quotidien agrave ses modes de gestion et deacutevaluation ainsi quagrave son processus de deacutecision

strateacutegique raquo Dans son audit des systegravemes drsquoinformation hospitaliers publieacute en mars 2014813

lrsquoANAP revient sur la deacutefinition drsquoun systegraveme drsquoinformation hospitalier Ainsi le rapport

preacutecise que le systegraveme drsquoinformation hospitalier qui ne peut se reacuteduire au seul systegraveme

informatique laquo est la combinaison drsquoorganisations avec les Technologies de lrsquoInformation et

de la Communication raquo814

A lrsquoappui de cette deacutefinition le rapport cite lrsquoauteur R De

COURCY pour lequel laquo un systegraveme drsquoinformation (SI) est un ensemble organiseacute de

ressources (mateacuteriels logiciels personnel donneacutees et proceacutedures) qui permet de collecter

regrouper classifier traiter et diffuser de lrsquoinformation dans un environnement donneacute raquo815

683 Drsquoun point de vue strictement technique un SIH va se construire agrave partir de briques

fonctionnelles les pro-logiciels Ces briques sont ensuite assembleacutees les unes aux autres

812 Circulaire ndeg 275 du 6 janvier 1989 relative agrave lrsquoinformatisation des hocircpitaux publics non parue au JORF

813ANAP laquo Audit des systegravemes drsquoinformation hospitaliers aupregraves drsquoeacutetablissements repreacutesentatifs raquo rapport final

mars 2014 814

Id p 11 815

Ibid citant DE COURCY (R) Les systegravemes drsquoinformation en reacuteadaptation Queacutebec Reacuteseau international

CIDIH et facteurs environnementaux 1992 ndeg 5 vol 1-2 p 7-10

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

375

chacune eacutetant classeacutee au sein drsquoun domaine fonctionnel Le rapport de lrsquoANAP tente avec

succegraves selon nous de scheacutematiser lrsquoorganisation en briques fonctionnelles drsquoun SIH type816

Ainsi au sein drsquoun SIH nous pouvons retrouver en termes de domaines fonctionnels le

pilotage meacutedico-eacuteconomique la production de soins cliniques la production de soins medico-

technique et les fonctions support Au sein mecircme de ces domaines seront deacuteveloppeacutees des

briques fonctionnelles Toute la difficulteacute reacuteside dans lrsquoassemblage de ces briques

fonctionnelles entre elles En effet le systegraveme drsquoinformation hospitalier comme on peut le

constater va ecirctre composeacute de plusieurs centaines de logiciels diffeacuterents Or ces briques

associeacutees les unes aux autres ne forment que rarement un ensemble coheacuterent

Lrsquointeropeacuterabiliteacute encore inexistante des diffeacuterentes solutions logicielles est une cause de cette

difficulteacute Toutefois cette difficulteacute reacutesulte eacutegalement de la consideacuteration porteacutee aux SIH par

les directeurs drsquoeacutetablissement En effet leur vision actuelle des SIH est encore trop peu

strateacutegique

B Une gestion strateacutegique indispensable

Progressivement les directions drsquoeacutetablissement ont pris conscience des enjeux qui

entouraient le systegraveme drsquoinformation hospitalier Drsquoabord consideacutereacute comme un simple sujet

technique le SIH devient peu agrave peu un sujet strateacutegique Malgreacute tout tous les eacutetablissements

de santeacute nrsquoont pas agrave ce jour deacuteveloppeacute une reacuteelle strateacutegie autour de leur systegraveme

drsquoinformation

684 Dans son eacutetude de 2014 lrsquoANAP observe que laquo si des progregraves sont notables du

chemin reste encore agrave parcourir pour que le SIH trouve deacutefinitivement sa place au sein de la

strateacutegie de lrsquoeacutetablissement raquo817

Pour illustrer ses propos lrsquoANAP avance le fait

qursquoaujourdrsquohui encore le fonctionnement du SIH et ses possibles eacutevolutions ne sont pas pris

en compte dans lrsquoeacutelaboration du projet meacutedical drsquoeacutetablissement Or agrave une eacutepoque ougrave la

pratique meacutedicale srsquoinformatise il est eacutevident que les projets meacutedicaux doivent srsquoappuyer en

partie sur lrsquoexpertise des directions des systegravemes drsquoinformation (DSI)

816 Ce scheacutema est repris en annexe de nos travaux annexe I

817 ANAP laquo Audit des systegravemes drsquoinformation hospitaliers aupregraves drsquoeacutetablissements repreacutesentatifs raquo op cit p

23

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

376

685 Le constat reacutealiseacute par la Cour des Comptes agrave lrsquooccasion de son eacutetude nationale de 2016

consacreacutee aux systegravemes drsquoinformation hospitaliers818

est un peu plus nuanceacute En effet pour la

Cour des Comptes laquo les 41 eacutetablissements de lrsquoenquecircte se sont doteacutes drsquoune strateacutegie

informatique raquo819

La Cour souligne toutefois que laquo ce pilotage strateacutegique associe encore

insuffisamment lrsquoutilisateur raquo820

Autrement dit les outils deacuteveloppeacutes dans le cadre du SIH ne

sont pas toujours preacutesenteacutes en amont aux principaux utilisateurs ce qui peut se reacuteveacuteler parfois

tregraves bloquant agrave lrsquoissue drsquoun projet

Il apparaicirct alors essentiel pour les eacutetablissements de laquo penser les systegravemes

drsquoinformation comme un outil au service de la strateacutegie de lrsquoeacutetablissement assurer la stabiliteacute

des strateacutegies informatiques dans la dureacutee capitaliser sur une premiegravere expeacuterience

drsquoinformatisation maicirctriser la conduite de projet associer en continu les utilisateurs

anticiper les risques et inteacutegrer degraves la conception du projet les gains drsquoefficience

rechercheacutes raquo821

Dans son rapport lrsquoANAP identifie quatre deacuteterminants au bon deacuteveloppement des

SIH au sein des eacutetablissements de santeacute

686 En premier lieu lrsquoANAP considegravere que laquo la maturiteacute de la strateacutegie doit se traduire

par une inteacutegration systeacutematique du sujet SIH dans lrsquoensemble des projets de

lrsquoeacutetablissement raquo822

En effet le SIH ne doit plus ecirctre un simple outil servant la mise en œuvre

de projets internes mais bien un projet agrave part entiegravere Une culture du SIH doit ecirctre distilleacutee au

sein de lrsquoeacutetablissement et aupregraves de lrsquoensemble des personnels Pour cela lrsquoeacutetablissement de

santeacute doit donc drsquoabord eacutelaborer une strateacutegie autour du deacuteveloppement de son SIH

818 Cour des Comptes laquo La modernisation des systegravemes drsquoinformation hospitaliers une contribution agrave

lrsquoefficience du systegraveme de soins agrave renforcer raquo Rapport sur lrsquoapplication des lois de financement de la seacutecuriteacute

sociale Chapitre VIII op cit 819

Id p 333 820

Ibid 821

Rapport sur lrsquoapplication des lois de financement de la seacutecuriteacute sociale Chapitre VIII laquo La modernisation des

systegravemes drsquoinformation hospitaliers une contribution agrave lrsquoefficience du systegraveme de soins agrave renforcer raquo Cour des

Comptes septembre 2016 p 360 822

ANAP laquo Audit des systegravemes drsquoinformation hospitaliers aupregraves drsquoeacutetablissements repreacutesentatifs raquo op cit p

35

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

377

composeacutee drsquoun scheacutema directeur des systegravemes drsquoinformation (SDSI)823

dont la mise en œuvre

sera superviseacutee par un comiteacute strateacutegique

687 Mais la strateacutegie nrsquoest pas le seul deacuteterminant au succegraves du deacuteveloppement drsquoun SIH

Il faut eacutegalement que les professionnels soient associeacutes agrave ce deacuteveloppement de maniegravere active

Par exemple les groupes de travail doivent ecirctre composeacutes de professionnels de terrain bien

eacutevidemment inteacuteresseacutes par lrsquoinformatique Ce sont ces professionnels qui feront le lien entre

la Direction des Systegravemes drsquoInformation et les utilisateurs

688 La maturiteacute des logiciels et de lrsquointeropeacuterabiliteacute est le troisiegraveme deacuteterminant au bon

deacuteveloppement des SIH selon lrsquoANAP En effet le SIH est composeacute de nombreuses briques

fonctionnelles et de plusieurs centaines de logiciels Il est donc plus que neacutecessaire de

reacutefleacutechir en termes drsquourbanisation du SIH afin que le systegraveme construit soit coheacuterent

fonctionnel et surtout communiquant

689 Enfin le dernier deacuteterminant concerne la meacutethode deacuteveloppeacutee pour mettre en place le

SIH Il est neacutecessaire que la gestion de projet soit rigoureuse et prenne notamment le temps

drsquoidentifier les impacts de lrsquoinformatisation cadrer et prioriser les projets donner un rythme

au deacuteploiement et ne pas oublier de mettre en place une deacutemarche de conduite du

changement En effet trop souvent les eacutetablissements de santeacute ont consideacutereacute que crsquoeacutetait agrave

lrsquoinformatique de srsquoadapter aux pratiques Or aujourdrsquohui il est neacutecessaire que les pratiques

eacutevoluent gracircce agrave lrsquoinformatique Il est donc essentiel pour cela que les organisations actuelles

srsquoadaptent et integravegrent pleinement lrsquoinformatique Lrsquoeacutetablissement de santeacute devra donc veiller

agrave lrsquoaccompagnement manageacuterial de lrsquoinformatisation

823 Le rapport de la Cour des Comptes preacutecise agrave ce propos que la plupart des eacutetablissements de son enquecircte

disposaient drsquoun tel scheacutema

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

378

sect 2 Lrsquoappui sur des ressources qualifieacutees

690 Le deacuteveloppement drsquoun SIH neacutecessite de hautes connaissances techniques Les

directeurs des eacutetablissements de santeacute doivent donc srsquoentourer des compeacutetences neacutecessaires

afin de mener agrave bien lrsquoinformatisation des fonctions administratives et meacutedicales de leurs

eacutetablissements

Les eacutetablissements peuvent alors faire le choix de recruter des experts informatiques

afin de les inteacutegrer directement agrave leurs eacutequipes (A) Ils peuvent eacutegalement faire appel sous

certaines conditions agrave de socieacuteteacutes exteacuterieures qui pourront alors les accompagner dans leur

deacutemarche de deacuteveloppement du SIH (B) Drsquoune maniegravere geacuteneacuterale les eacutetablissements

srsquoappuient sur ces deux possibiliteacutes afin de renforcer lrsquoexpertise relative aux SIH en leur sein

A Le recrutement de compeacutetences speacutecialiseacutees

691 Les eacutetablissements de santeacute dans le cadre de la mise en place de leur strateacutegie

informatique doivent srsquoentourer drsquoexperts Cependant le recrutement de compeacutetences

speacutecialiseacutees et notamment drsquoingeacutenieurs informatiques reste un deacutefi de taille pour les

eacutetablissements de santeacute A ce sujet la Cour des Comptes observe dans son rapport de

septembre 2016824

que certains eacutetablissements tels que lrsquoAP-HP le CHU de Saint Etienne ou

encore le Groupe hospitalier public du sud de lrsquoOise ont rencontreacute de reacuteelles difficulteacutes agrave

assurer de tels recrutements les amenant agrave se deacutetacher des statuts de la fonction publique

hospitaliegravere825

692 Il est vrai que les statuts de la fonction publique hospitaliegravere peuvent parfois ecirctre un

obstacle au recrutement de personnel hautement speacutecialiseacute Pour comprendre les raisons de

ces difficulteacutes il nous faut nous pencher sur les regravegles applicables au sein de la fonction

publique hospitaliegravere en matiegravere de recrutement du personnel

824 Cour des Comptes laquo La modernisation des systegravemes drsquoinformation hospitaliers une contribution agrave

lrsquoefficience du systegraveme de soins agrave renforcer raquo Rapport sur lrsquoapplication des lois de financement de la seacutecuriteacute

sociale Chapitre VIII op cit 825

Id p 334

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

379

Le principe qui est par ailleurs le mecircme au sein de toutes les fonctions publiques est

celui du recrutement de personnel titulaire de la fonction publique En effet lrsquoarticle 3 de la

loi Le Pors826

dispose que laquo sauf deacuterogation preacutevue par une disposition leacutegislative les

emplois civils permanents de lEtat des reacutegions des deacutepartements des communes et de leurs

eacutetablissements publics agrave caractegravere administratif sont agrave lexception de ceux reacuteserveacutes aux

magistrats de lordre judiciaire et aux fonctionnaires des assembleacutees parlementaires occupeacutes

soit par des fonctionnaires reacutegis par le preacutesent titre soit par des fonctionnaires des

assembleacutees parlementaires des magistrats de lordre judiciaire ou des militaires dans les

conditions preacutevues par leur statut raquo

693 Le leacutegislateur a cependant preacutevu quelques exceptions permettant dans certains cas

aux eacutetablissements publics de santeacute de faire appel agrave des agents recruteacutes par voie contractuelle

Ainsi lrsquoarticle 9-1 de la loi ndeg 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires

relatives agrave la fonction publique hospitaliegravere827

preacutevoit que laquo les eacutetablissements peuvent

recruter des agents contractuels pour assurer le remplacement momentaneacute de fonctionnaires

ou dagents contractuels autoriseacutes agrave exercer leurs fonctions agrave temps partiel ou indisponibles

[hellip] Le contrat est conclu pour une dureacutee deacutetermineacutee Il est renouvelable par deacutecision

expresse dans la limite de la dureacutee de labsence de lagent agrave remplacer raquo Lrsquoarticle poursuit

en preacutecisant que laquo pour les besoins de continuiteacute du service des agents contractuels peuvent

ecirctre recruteacutes pour faire face agrave une vacance temporaire demploi dans lattente du recrutement

dun fonctionnaire raquo Enfin laquo les eacutetablissements peuvent recruter des agents contractuels

pour faire face agrave un accroissement temporaire dactiviteacute lorsque celui-ci ne peut ecirctre assureacute

par des fonctionnaires raquo Lrsquoarticle 9 de cette mecircme loi dispose quant agrave lui que laquo par

deacuterogation agrave larticle 3 du titre Ier du statut geacuteneacuteral les emplois permanents mentionneacutes au

premier alineacutea de larticle 2 peuvent ecirctre occupeacutes par des agents contractuels lorsque la

nature des fonctions ou les besoins du service le justifient notamment lorsquil nexiste pas de

corps de fonctionnaires hospitaliers susceptibles dassurer ces fonctions ou lorsquil sagit de

fonctions nouvellement prises en charge par ladministration ou neacutecessitant des

connaissances techniques hautement speacutecialiseacutees raquo Ainsi les eacutetablissements de santeacute peuvent

recruter par voie contractuelle des ingeacutenieurs informatiques qualifieacutes agrave partir du moment ougrave

826 Loi ndeg 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires Loi dite loi Le Pors JORF

du 14 juillet 1983 p 2174 827

Loi ndeg 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives agrave la fonction publique hospitaliegravere

JORF du 11 janvier 1986 p 535

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

380

ils justifient que la nature des fonctions qui seront exerceacutees neacutecessite des connaissances

techniques hautement speacutecialiseacutees

694 Cependant lrsquoautre difficulteacute rencontreacutee par les eacutetablissements de santeacute dans le cadre

du recrutement concerne la reacutemuneacuteration des agents En effet par principe les agents

titulaires de la fonction publique ont droit agrave laquo une reacutemuneacuteration comprenant le traitement

lindemniteacute de reacutesidence le suppleacutement familial de traitement ainsi que les indemniteacutes

institueacutees par un texte leacutegislatif ou reacuteglementaire Les indemniteacutes peuvent tenir compte des

fonctions et des reacutesultats professionnels des agents ainsi que des reacutesultats collectifs des

services Sy ajoutent les prestations familiales obligatoires raquo828

Ainsi en ce qui concerne les

agents qui seraient titulaires de la fonction publique lrsquoeacutetablissement de santeacute nrsquoa pas de marge

de manœuvre et devra en termes de reacutemuneacuteration srsquoen tenir aux dispositions statutaires

695 Pour les contractuels en revanche les eacutetablissements vont pouvoir se permettre

drsquoaccorder des reacutemuneacuterations supeacuterieures agrave celles preacutevues par les grilles statutaires En effet

lrsquoarticle 1-2 du deacutecret ndeg 91-155 du 6 feacutevrier 1991829

preacutevoit la chose suivante laquo Le montant

de la reacutemuneacuteration est fixeacute par lautoriteacute administrative en prenant en compte notamment

les fonctions occupeacutees la qualification requise pour leur exercice la qualification deacutetenue

par lagent ainsi que son expeacuterience raquo La reacutemuneacuteration peut donc pour les agents

contractuels ecirctre fixeacutee contractuellement et elle est laisseacutee en theacuteorie agrave la libre appreacuteciation

de lrsquoautoriteacute administrative Toutefois la jurisprudence est venue apporter un beacutemol agrave ce

principe Ainsi pour reacutemuneacuterer un agent contractuel un employeur public se doit de prendre

en compte la reacutemuneacuteration des agents titulaires exerccedilant des fonctions eacutequivalentes ainsi que

le niveau de diplocircme et lrsquoexpeacuterience professionnelle des autres agents contractuels qui

exercent des fonctions eacutequivalentes830

696 Par ailleurs la liberteacute drsquoaction de lrsquoemployeur public en matiegravere drsquooctroi drsquoune prime agrave

un agent contractuel a eacuteteacute soumise agrave questionnement Le Conseil drsquoEtat dans une deacutecision en

date du 23 mars 2009 preacutecise que les agents contractuels de la fonction publique hospitaliegravere

828 Article 20 de la loi Le Pors

829 Deacutecret ndeg 91-155 du 6 feacutevrier 1991 relatif aux dispositions geacuteneacuterales applicables aux agents contractuels des

eacutetablissements mentionneacutes agrave larticle 2 de la loi ndeg 86-33 du 9 janvier 1986 modifieacutee portant dispositions

statutaires relatives agrave la fonction publique hospitaliegravere JORF ndeg 35 9 feacutevrier 1991 p 2058 830

CAA Marseille 9 avril 2013 ndeg11MA00840

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

381

ne pouvaient se voir octroyer le beacuteneacutefice de la prime de service831

Srsquoest alors poseacutee la

question de lrsquoattribution drsquoautres primes agrave des agents contractuels Une reacuteponse claire a eacuteteacute

apporteacutee agrave cette question par lrsquoinstruction ndeg DGOSRH42015108 du 2 avril 2015 relative au

reacutegime indemnitaire applicable aux agents contractuels des eacutetablissements relevant de la

fonction publique hospitaliegravere832

Ce texte faisait suite aux nombreuses sollicitations du

Ministre de la santeacute agrave ce sujet tant par les organisations syndicales que par les eacutetablissements

de santeacute ayant fait lrsquoobjet drsquoun controcircle de la Cour des Comptes au sujet des modaliteacutes de

reacutemuneacuteration des agents contractuels et plus particuliegraverement le versement des primes et

indemniteacutes Le raisonnement tenu par la DGOS dans cette instruction est le suivant selon les

dispositions du deacutecret ndeg 91-155 du 6 feacutevrier 1991833

les modaliteacutes de reacutemuneacuteration de

lrsquoagent contractuel sont fixeacutees par leur contrat Lrsquoarticle 20 de la loi Le Pors quant agrave lui pose

le principe selon lequel il nrsquoy a pas de prime ou drsquoindemniteacute sans texte leacutegislatif ou

reacuteglementaire Or selon la DGOS laquo aucune disposition de la loi du 9 janvier 1986

susmentionneacutee nrsquoinstaure que les agents contractuels de la FPH sont soumis aux dispositions

de cet article Par ailleurs lrsquoarticle 54 du deacutecret du 6 feacutevrier 1991 rend applicables agrave ces

agents les regravegles fixeacutees par le deacutecret du 24 octobre 1985 susmentionneacute qui se borne agrave deacutefinir

chacun des eacuteleacutements de la reacutemuneacuteration principale mentionneacutee agrave lrsquoarticle 20 du titre Ier du

statut geacuteneacuteral et agrave preacuteciser leurs modaliteacutes de calcul Ainsi lrsquoabsence de renvoi agrave cet article

20 ne signifie pas une interdiction mais une possibiliteacute de verser des primes et indemniteacutes aux

agents contractuels de la FPH sans que celles-ci soient neacutecessairement institueacutees par un texte

leacutegislatif ou reacuteglementaire raquo834

Ainsi et comme lrsquoa fixeacute la jurisprudence sans texte

reacuteglementaire certains eacuteleacutements de la situation des agents contractuels peuvent ecirctre fixeacutes par

le biais du contrat835

En revanche seule lrsquoautoriteacute deacutetentrice du pouvoir de nomination sous

laquelle sont placeacutes les agents contractuels pourra instaurer une prime en leur faveur836

697 Sous reacuteserve de respecter lrsquoensemble de ces dispositions un eacutetablissement de santeacute

pourra donc embaucher des agents contractuels et leur accorder une prime Cette souplesse

831 CE 23 mars 2009 ndeg312446

832 Instruction ndeg DGOSRH42015108 du 2 avril 2015 relative au reacutegime indemnitaire applicable aux agents

contractuels des eacutetablissements relevant de la fonction publique hospitaliegravere non parue au JORF 833

Deacutecret ndeg 91-155 du 6 feacutevrier 1991 relatif aux dispositions geacuteneacuterales applicables aux agents contractuels des

eacutetablissements mentionneacutes agrave larticle 2 de la loi ndeg 86-33 du 9 janvier 1986 modifieacutee portant dispositions

statutaires relatives agrave la fonction publique hospitaliegravere JORF ndeg35 du 9 feacutevrier 1991 p 2058 834

Id p 2 835

CE Ass 30 janvier 1997 avis ndeg 359964 836

CE 23 mars 2009 ndeg 312446

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

382

accordeacutee aux eacutetablissements de santeacute va leur permettre dans une certaine mesure drsquoaccroitre

leur attractiviteacute vis-agrave-vis drsquoemployeurs priveacutes Ils pourront donc envisager de recruter des

compeacutetences hautement speacutecialiseacutees dans le cadre de la mise en place de leur SIH

B Lrsquoappel aux ressources exteacuterieures

698 Pour deacutevelopper leur SIH de maniegravere seacutecuriseacutee et peacuterenne les eacutetablissements de santeacute

peuvent eacutegalement faire le choix de faire appel agrave des ressources exteacuterieures Ce choix peut se

traduire par lrsquoachat de prestations ou drsquooutils informatiques aupregraves de socieacuteteacutes exteacuterieures ou

par la mutualisation des ressources informatiques entre eacutetablissements de santeacute Cette

possibiliteacute ayant deacutejagrave fait lrsquoobjet drsquoune eacutetude preacuteceacutedemment837

nous nous focaliserons ici sur

les modaliteacutes drsquoappui sur des socieacuteteacutes exteacuterieures

699 Les eacutetablissements de santeacute nrsquoont pas pour mission principale de deacutevelopper des

solutions informatiques ni de les mettre en œuvre dans le cadre drsquoun SIH coheacuterent

Cependant ils sont porteurs drsquoun besoin bien deacutefini et parfois mecircme drsquoun projet preacutecis A ce

titre ils sont les maicirctres drsquoouvrage (ou maicirctrise drsquoouvrage) du projet Crsquoest agrave eux qursquoil revient

de deacutefinir lrsquoobjectif du projet son calendrier et le budget qui lui sera consacreacute Cependant le

maicirctre drsquoouvrage nrsquoa pas toujours les compeacutetences techniques neacutecessaires pour mener agrave bien

son projet Crsquoest pourquoi il doit faire appel aux compeacutetences drsquoun maicirctre drsquoœuvre Celui-ci

aura pour responsabiliteacute de reacutealiser le projet dans les deacutelais et les coucircts fixeacutes Par ailleurs

lrsquoeacutetablissement de santeacute en tant que maitre drsquoouvrage pourra srsquoentourer drsquoune assistance agrave la

maicirctrise drsquoouvrage ayant pour mission de lrsquoaccompagner dans la gestion et le pilotage du

projet

Ainsi la conception du SIH et notamment la conception de nouveaux logiciels qui

vont venir lrsquoalimenter peut ecirctre confieacutee agrave des socieacuteteacutes prestataires (1) Lrsquoeacutetablissement peut

eacutegalement ecirctre accompagneacute dans sa gestion strateacutegique du SIH par une socieacuteteacute de conseil (2)

837 V supra ndeg 222 agrave 224

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

383

1) Lrsquoaide agrave la conception du SIH

700 La conception de logiciels informatiques est un secteur industriel en plein essor qui

neacutecessite par ailleurs une expertise technique et scientifique de haut niveau A lrsquoheure

actuelle rares sont les eacutetablissements qui ont fait le choix de deacutevelopper en interne une

solution logicielle permettant de reacutepondre agrave leurs besoins Le rapport de la Cour des Comptes

publieacute en septembre 2016 cite cependant lrsquoexemple reacuteussi des Hospices Civils de Lyon (HCL)

qui ont fait le choix drsquoecirctre leur propre eacutediteur en ce qui concerne le dossier meacutedical

informatiseacute Ainsi agrave partir de 2012 les HCL ont deacuteveloppeacute leur propre dossier patient

informatiseacute nommeacute Easily Le deacuteploiement de cette solution srsquoest fait par ailleurs sans

retard et la solution convient aux utilisateurs838

Mais ce cas reste une exception et en grande

majoriteacute les eacutetablissements de santeacute font le choix de faire appel agrave des eacutediteurs pour leur

fournir les solutions logicielles dont ils ont besoin

701 A lrsquoheure actuelle le choix en la matiegravere est assez vaste En effet plusieurs centaines

drsquoeacutediteurs839

de solutions logicielles sont actuellement preacutesents sur le marcheacute franccedilais

Cependant ces acteurs preacutesentent la particulariteacute drsquoecirctre principalement de petites entreprises

certains se speacutecialisant par ailleurs dans des marcheacutes dits de niche Cette surspeacutecialisation

pose une difficulteacute importante aux eacutetablissements de santeacute qui nrsquoauront aucune visibiliteacute sur

la peacuterenniteacute de ce type de structure et donc sur la solution mise en place A titre drsquoexemple le

CHU de Nicircmes avait choisi son eacutediteur pour le dossier patient informatiseacute en 2009 Cet

eacutediteur a eacuteteacute racheteacute en 2011 et a proposeacute de nouvelles solutions logicielles alors que le

marcheacute passeacute par le CHU de Nicircmes eacutetait encore en cours et la solution initiale en cours de

deacuteploiement Cette opposition entre le titulaire du marcheacute et le CHU de Nicircmes a meneacute agrave un

contentieux entre les parties reacutegleacute en 2014 mais entraicircnant de fortes pertes financiegraveres pour

le CHU de Nicircmes840

838 Cour des Comptes laquo La modernisation des systegravemes drsquoinformation hospitaliers une contribution agrave

lrsquoefficience du systegraveme de soins agrave renforcer raquo rapport sur lrsquoapplication des lois de financement de la seacutecuriteacute

sociale Chapitre VIII op cit p 353 839

Plus de 300 selon le rapport de lrsquoANAP contre 277 selon le rapport de la Cour des Comptes 840

Cour des Comptes laquo La modernisation des systegravemes drsquoinformation hospitaliers une contribution agrave

lrsquoefficience du systegraveme de soins agrave renforcer raquo Rapport sur lrsquoapplication des lois de financement de la seacutecuriteacute

sociale Chapitre VIII op cit p 352

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

384

Face agrave la techniciteacute du sujet et agrave lrsquoampleur de lrsquooffre sur le marcheacute parfois peu visible

il peut srsquoaveacuterer neacutecessaire pour les eacutetablissements de santeacute drsquoecirctre accompagneacute en amont du

choix de la solution au moment mecircme de la deacutefinition de leurs besoins

2) Lrsquoappui agrave la maicirctrise drsquoouvrage

702 Dans le cadre de son rapport rendu en septembre 2016 la Cour des Comptes a

souligneacute les faiblesses actuelles des maicirctrises drsquoouvrage des projets informatiques deacuteveloppeacutes

par les eacutetablissements de santeacute841

La maicirctrise drsquoouvrage est pourtant fondamentale

puisqursquoelle est le point de deacutepart de lrsquoensemble du projet Elle se doit drsquoecirctre solide si

lrsquoeacutetablissement souhaite voir son projet meneacute agrave bien Ainsi la Cour des Comptes au cours de

ses controcircles a pu constater les lacunes suivantes laquo absence de reacuteunion des compeacutetences

techniques requises dimensionnement insuffisant des eacutequipes analyse imparfaite des besoins

compreacutehension insuffisante des attentes des utilisateurs tout au long du deacuteploiement du

projet raquo842

703 Ces difficulteacutes ne sont pas sans conseacutequences puisqursquoune maicirctrise drsquoouvrage faible va

entrainer des retards dans le calendrier de deacuteploiement des solutions informatiques et surtout

des deacutepassements du budget fixeacute A ce sujet le constat est sans appel agrave lrsquoheure actuelle et en

ce qui concerne les eacutetablissements controcircleacutes par la Cour des Comptes agrave lrsquooccasion de son

enquecircte relative aux SIH843

la moitieacute des opeacuterations financeacutees par le plan hocircpital 2012 ont

deacutepasseacute agrave la fois les enveloppes financiegraveres et les calendriers fixeacutes844

704 A la suite de son audit des SIH lrsquoANAP avait quant agrave elle constateacute que les directions

des systegravemes drsquoinformation eacutetaient encore laquo trop souvent deacutemunies pour geacuterer et piloter les

projets en lien avec les professionnels meacutetiers et industriels raquo845

Alors que les ressources

841 Cour des Comptes laquo La modernisation des systegravemes drsquoinformation hospitaliers une contribution agrave

lrsquoefficience du systegraveme de soins agrave renforcer raquo Rapport sur lrsquoapplication des lois de financement de la seacutecuriteacute

sociale Chapitre VIII op cit p338 842

Id p 338 843

A lrsquooccasion de cette enquecircte la Cour des comptes a controcircleacute lrsquoAP-HP les HCL 4 CHU un CHR un EPSM

32 CH un centre de lutte contre le cancer un GIP et un GIE 844

Cour des comptes laquo La modernisation des systegravemes drsquoinformation hospitaliers une contribution agrave

lrsquoefficience du systegraveme de soins agrave renforcer raquo Rapport sur lrsquoapplication des lois de financement de la seacutecuriteacute

sociale Chapitre VIII op cit p 338 845

ANAP laquo Audit des systegravemes drsquoinformation hospitaliers aupregraves drsquoeacutetablissements repreacutesentatifs raquo op cit p

30

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

385

techniques en interne des eacutetablissements sont aujourdrsquohui preacutesentes la gestion de projet reste

une faiblesse des eacutequipes informatiques des eacutetablissements de santeacute

Lrsquoappel agrave une prestation drsquoappui agrave maicirctrise drsquoouvrage aupregraves drsquoune socieacuteteacute exteacuterieure

permettrait aux eacutetablissements drsquoeacuteviter ces eacutecueils Or aujourdrsquohui cela est encore rare846

les

eacutetablissements de santeacute nrsquoayant pas acquis le reacuteflexe de faire appel agrave un appui externe en ce

qui concerne la maicirctrise drsquoouvrage847

846 Cour des comptes laquo La modernisation des systegravemes drsquoinformation hospitaliers une contribution agrave

lrsquoefficience du systegraveme de soins agrave renforcer raquo Rapport sur lrsquoapplication des lois de financement de la seacutecuriteacute

sociale Chapitre VIII op cit p 333 847

ANAP laquo Audit des systegravemes drsquoinformation hospitaliers aupregraves drsquoeacutetablissements repreacutesentatifs raquo rapport

final mars 2014 p 30

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

386

Conclusion de la section

705 Avant mecircme de deacutevelopper le recours aux TIC et de les inteacutegrer agrave la pratique

quotidienne les eacutetablissements doivent reacutefleacutechir agrave la construction de leur Systegraveme

drsquoInformation Hospitalier Celle-ci doit se faire de maniegravere strateacutegique et la mise en place du

SIH doit devenir un projet agrave part entiegravere de lrsquoeacutetablissement de santeacute Cette vision strateacutegique

permettra aux eacutetablissements de santeacute drsquoanticiper des eacuteventuels aleacuteas et donc seacutecuriser en

amont lrsquoutilisation qui sera faite des TIC ainsi mises en place

Le deacuteveloppement peacuterenne du SIH passe eacutegalement par lrsquoappel agrave des ressources

expertes sur le sujet Ainsi le recrutement drsquoingeacutenieurs informatiques speacutecialiseacutes et le recours

agrave des socieacuteteacutes prestataires sont deux solutions envisageables pour les eacutetablissements de santeacute

afin de srsquoentourer des expertises neacutecessaires

Les solutions sont compleacutementaires et peuvent bien eacutevidemment ecirctre mises en œuvre

de maniegravere concomitante En effet mecircme en embauchant directement des ingeacutenieurs

informatiques experts dans leur domaine les eacutetablissements de santeacute ne souhaitent pas se

lancer dans la creacuteation et lrsquoeacutedition directe de solutions logicielles

Les eacutetablissements de santeacute doivent en tout eacutetat de cause penser agrave srsquoentourer des

ressources neacutecessaires et suffisantes afin de srsquoassurer de mener agrave bien et dans les meilleures

conditions le deacuteveloppement de leur SIH

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

387

Section 2 Les pistes de seacutecurisation a posteriori

706 Le deacuteveloppement drsquoun SIH structureacute va permettre aux eacutetablissements de santeacute

drsquointeacutegrer de maniegravere peacuterenne et seacutecuriseacutee les TIC agrave la pratique de ses professionnels

Cependant mettre agrave disposition un outil fiable et adapteacute ne fait pas tout A posteriori

lrsquoeacutetablissement de santeacute va pouvoir venir seacutecuriser leur utilisation quotidienne Pour cela il

dispose de deux types de leviers le levier juridique et le levier manageacuterial

Par le biais du levier juridique (paragraphe 1) lrsquoeacutetablissement de santeacute va pouvoir

rappeler voire parfois mecircme eacutedicter la regravegle en matiegravere de bon usage de lrsquooutil ainsi mis agrave

disposition Il pourra eacutegalement veiller agrave ce que les agents srsquoengagent agrave une utilisation

correcte des TIC Le levier manageacuterial (paragraphe 2) quant agrave lui va permettre agrave

lrsquoeacutetablissement de santeacute de former les agents agrave une utilisation adeacutequate des TIC et dans

lrsquohypothegravese drsquoune violation des regravegles eacutedicteacutees mettre en place des sanctions agrave lrsquoencontre de

lrsquoagent

sect1 Lrsquoutilisation drsquooutils juridiques

707 Pour les eacutetablissements publics de santeacute les enjeux drsquoune bonne utilisation des TIC

par ses agents sont multiples En premier lieu lrsquoeacutetablissement doit srsquoassurer que les outils sont

utiliseacutes de maniegravere agrave reacutealiser les missions qui lui sont propres (le soin la recherche et

lrsquoenseignement) Il doit srsquoassurer ensuite que cette utilisation permet drsquoassurer la continuiteacute

des soins la seacutecuriteacute des patients mais eacutegalement la confidentialiteacute des donneacutees de santeacute ainsi

que celle des donneacutees personnelles recueillies Enfin il est essentiel pour lrsquoeacutetablissement de

srsquoassurer qursquoil nrsquoest pas fait une utilisation indue abusive voire illeacutegale des outils

informatiques qursquoil met agrave disposition de ses agents En effet lrsquoeacutetablissement de santeacute pourrait

voir sa responsabiliteacute engageacutee du fait des fautes commises par ses agents dans le cadre de

lrsquoutilisation des TIC ou par le biais de lrsquoutilisation de ces outils Les eacutetablissements de santeacute

doivent donc trouver un eacutequilibre entre les risques qursquoils encourent du fait drsquoune potentielle

mauvaise utilisation des TIC par leurs agents et les conditions dans lesquelles ils souhaitent

que ces outils soient utiliseacutes afin de reacutepondre agrave leur mission premiegravere

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

388

Pour reacuteguler cela lrsquoeacutetablissement de santeacute a donc inteacuterecirct de faire le choix drsquoinstaurer

une limitation et un controcircle de lrsquoutilisation qui est faite des TIC par ses agents (A) Pour

accompagner cette deacutemarche il peut faire appel agrave un outil de droit souple de plus en plus

utiliseacute la charte informatique (B)

A Le controcircle et la limitation de lrsquoutilisation des TIC

laquo Ce sont moins les NTIC ndash nouvelles technologies de lrsquoinformation et de la communication ndash

qui mettent agrave lrsquoeacutepreuve le droit du travail que le droit du travail qui se manifeste ici

comme norme reacutegulatrice de lrsquoemploi des NTIC raquo848

708 Aujourdrsquohui il nrsquoest pas rare que le mateacuteriel informatique mis agrave disposition des agents

soit parfois utiliseacute agrave drsquoautres fins que le strict exercice de leurs missions professionnelles

Comme le soulignait Jean-Pierre GRIDEL849

dans son eacutetude consacreacutee agrave lrsquoutilisation de

lrsquooutil informatique mis agrave la disposition du salarieacute pour les besoins de son activiteacute

professionnelle lrsquooutil informatique est laquo susceptible de deacutetournement dans son utilisation raquo

Or contrairement aux cas ougrave il apparait clairement que le deacutetournement du mateacuteriel mis agrave

disposition doit ecirctre automatiquement sanctionneacute850

le deacutetournement de lrsquooutil informatique agrave

des fins priveacutees ne peut srsquoenvisager de la mecircme maniegravere

En effet dans ce contexte particulier les liberteacutes fondamentales des agents (1) vont se

confronter aux obligations professionnelles dont ils sont deacutebiteurs vis-agrave-vis de leur employeur

mais eacutegalement au pouvoir dont dispose lrsquoemployeur de controcircler voire restreindre

lrsquoutilisation qui peut ecirctre faite par ses agents des outils qursquoil leur met agrave disposition dans un but

purement professionnel (2)

848 LYON-CAEN Geacuterard laquo Deacutebat autour de lrsquoarrecirct Nikon France raquo Semaine Sociale Lamy nordm 1046 15 octobre

2001 Disponible sur [httplamylinelamyfr] consulteacute le 16 janvier 2017 849

GRIDEL Jean-Pierre laquo Lrsquoentreprise et lrsquoutilisation en justice de lrsquoinformation issue de lrsquooutil informatique

mis agrave la disposition du salarieacute pour les besoins de son activiteacute professionnelle En hommage agrave la haute meacutemoire

du professeur Pierre Catala raquo Communication commerce eacutelectronique ndeg 7-8 juillet 2016 eacutetude ndeg 13 850

V notamment en ce sens CE 6 Mai 2011 ndeg 330020 Dans cette deacutecision la Haute juridiction a rappeleacute

qursquolaquo un agent public qui deacutetourne de lobjet de sa mission un veacutehicule de service pour lutiliser agrave des fins

personnelles sans y ecirctre autoriseacute par ladministration commet une faute personnelle deacutetachable de lexercice de

ses fonctions raquo

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

389

1) Le droit agrave la vie priveacutee dans le cadre professionnel enjeux et limites

709 Lrsquoarticle 25 Septies de la loi Le Pors851

preacutevoit que laquo le fonctionnaire consacre

linteacutegraliteacute de son activiteacute professionnelle aux tacircches qui lui sont confieacutees raquo De mecircme par

principe le mateacuteriel professionnel mis agrave la disposition drsquoun agent par son employeur ne peut

faire lrsquoobjet que drsquoune utilisation strictement professionnelle et la jurisprudence considegravere que

lrsquoutilisation par un agent du mateacuteriel qui lui eacuteteacute fourni pour drsquoautres fins constitue une

faute852

Cependant en ce qui concerne lrsquoutilisation de la messagerie professionnelle (a) ainsi

que drsquoInternet et de lrsquoordinateur (b) ces principes souffrent de plusieurs exceptions et vont

ecirctre mis en regard de certaines liberteacutes fondamentales dont disposent tous les citoyens et donc

les agents dans le cadre de leurs fonctions professionnelles

a) La messagerie professionnelle

710 En droit priveacute crsquoest en 2001 agrave lrsquooccasion du ceacutelegravebre arrecirct laquo Nikon raquo853

que la Cour de

Cassation srsquoest prononceacutee pour la premiegravere fois sur la protection de la vie priveacutee sur le lieu

de travail A cette occasion les juges ont eu agrave se pencher sur la question de lrsquoutilisation de la

messagerie professionnelle agrave des fins personnelles par un salarieacute En lrsquoespegravece un salarieacute de la

socieacuteteacute Nikon France avait signeacute avec les socieacuteteacutes Nikon Corporation et Nikon Europe BV

un accord de confidentialiteacute lui interdisant de divulguer des informations confidentielles

communiqueacutees par ces deux socieacuteteacutes Quelques anneacutees plus tard le salarieacute a eacuteteacute licencieacute pour

faute grave agrave la suite notamment de lrsquoutilisation agrave des fins personnelles du mateacuteriel mis agrave

disposition par son employeur Saisi drsquoun pourvoi en cassation la Haute juridiction est venue

preacuteciser que laquo le salarieacute a droit mecircme au temps et au lieu de travail au respect de lrsquointimiteacute

de sa vie priveacutee que celle-ci implique en particulier le secret des correspondances que

lrsquoemployeur ne peut degraves lors sans violation de cette liberteacute fondamentale prendre

connaissance des messages personnels eacutemis par le salarieacute et reccedilus par lui gracircce agrave un outil

informatique mis agrave sa disposition pour son travail et ceci mecircme au cas ougrave lrsquoemployeur aurait

interdit une utilisation non professionnelle de lrsquoordinateur raquo Ainsi nous pouvons constater

851 Loi ndeg 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires Loi dite loi Le Pors JORF

14 juillet 1983 p 2174 852

CAA Douai 2 deacutecembre 2010 ndeg 09DA01118 853

Cass Soc ndeg99-42942 2 octobre 2001

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

390

que pour les magistrats de la Cour de Cassation laquo le droit principalement celui des liberteacutes

individuelles nrsquoa pas agrave srsquoincliner devant lrsquoeacutetat de la technologie crsquoest agrave la technologie de

srsquoadapter [hellip] aux exigences fondamentales du droit raquo854

711 Cet arrecirct vient poser le principe du respect de lrsquointimiteacute de la vie priveacutee au sein de la

sphegravere professionnelle en y appliquant de maniegravere stricte le droit au secret des

correspondances Pour reprendre les termes de Geacuterard LYON-CAEN855

le cloisonnement

entre vie priveacutee et vie professionnelle disparaicirct Cette deacutecision est parfaitement transposable

aux administrations publiques ougrave lrsquoagent pourra voir ses correspondances priveacutees proteacutegeacutees

par le secret des correspondances856

712 Ainsi lrsquoemployeur ne peut pas acceacuteder aux courriels de ses agents qui relegraveveraient de

la sphegravere priveacutee sous peine de risquer une condamnation peacutenale lrsquoatteinte au secret des

correspondances eacutetant reacuteprimeacutee notamment par les articles 226-15857

et 432-9858

du Code

peacutenal Cependant pour ecirctre proteacutegeacute par le secret de la correspondance il est neacutecessaire que

ces messages soient identifieacutes comme ayant un caractegravere priveacute En lrsquoabsence de reacuteelle

deacutefinition leacutegale malgreacute une tentative resteacutee lettre morte859

crsquoest agrave la deacutefinition construite par

les juges qursquoil faut srsquoen remette Ainsi ces derniers acceptent communeacutement de consideacuterer

comme eacutetant un message priveacute le courrier eacutelectronique dont lrsquoobjet preacutecise la mention

854 LYON-CAEN Geacuterard laquo Deacutebat autour de lrsquoarrecirct Nikon France raquo Semaine Sociale Lamy Nordm 1046 15

octobre 2001 disponible sur [httplamylinelamyfr] Consulteacute le 16 janvier 2017 855

Ibid 856

Article 1er

de la loi ndeg 91-646 du 10 juillet 1991 relative au secret des correspondances eacutemises par la voie des

communications eacutelectroniques JORF ndeg 162 13 juillet 1991 p 9167 857

Lrsquoarticle 226-15 du Code peacutenal dispose laquo le fait commis de mauvaise foi douvrir de supprimer de

retarder ou de deacutetourner des correspondances arriveacutees ou non agrave destination et adresseacutees agrave des tiers ou den

prendre frauduleusement connaissance est puni dun an demprisonnement et de 45000 euros damende Est

puni des mecircmes peines le fait commis de mauvaise foi dintercepter de deacutetourner dutiliser ou de divulguer des

correspondances eacutemises transmises ou reccedilues par la voie des teacuteleacutecommunications ou de proceacuteder agrave

linstallation dappareils conccedilus pour reacutealiser de telles interceptions raquo 858

Lrsquoarticle 432-9 du Code peacutenal dispose laquo le fait par une personne deacutepositaire de lautoriteacute publique ou

chargeacutee dune mission de service public agissant dans lexercice ou agrave loccasion de lexercice de ses fonctions

ou de sa mission dordonner de commettre ou de faciliter hors les cas preacutevus par la loi le deacutetournement la

suppression ou louverture de correspondances ou la reacuteveacutelation du contenu de ces correspondances est puni de

trois ans demprisonnement et de 45 000 euros damende Est puni des mecircmes peines le fait par une personne

viseacutee agrave lalineacutea preacuteceacutedent ou un agent dun exploitant de reacuteseaux ouverts au public de communications

eacutelectroniques ou dun fournisseur de services de teacuteleacutecommunications agissant dans lexercice de ses fonctions

dordonner de commettre ou de faciliter hors les cas preacutevus par la loi linterception ou le deacutetournement des

correspondances eacutemises transmises ou reccedilues par la voie des teacuteleacutecommunications lutilisation ou la divulgation

de leur contenu raquo 859

V notamment en ce sens la proposition de loi seacutenatoriale ndeg 385 de juin 2006 dont le but eacutetait de deacutefinir le

courrier eacutelectronique professionnel

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

391

personnel ou priveacute860

Au contraire un message agrave caractegravere mixte eacutemis par un agent

public sur sa messagerie professionnelle et contenant drsquoune part des eacuteleacutements drsquoordre

professionnel et drsquoautre part des opinions personnelles au sujet de lrsquoorganisation de son

service est consideacutereacute comme relevant de la sphegravere professionnelle861

En revanche un

employeur peut sanctionner un agent qui en acceacutedant aux courriers eacutelectroniques priveacutes drsquoun

de ses collegravegues se serait lui-mecircme rendu coupable drsquoune atteinte au secret des

correspondances priveacutees862

Ainsi une toleacuterance vis-agrave-vis drsquoune utilisation priveacutee de la messagerie professionnelle

est aujourdrsquohui communeacutement admise eacutetant entendue que cet usage doit se faire dans des

proportions raisonnables

b) Lrsquoutilisation drsquoInternet et du mateacuteriel informatique agrave des fins priveacutees

713 Lagrave encore le principe est le mecircme lrsquousage du mateacuteriel informatique ainsi que des

connexions Internet mis agrave disposition de lrsquoagent par son employeur doit ecirctre strictement

professionnel Cependant une toleacuterance est admise dans la mesure ougrave lrsquousage priveacute reste

raisonnable Le curseur quant au caractegravere raisonnable ou non de lrsquoutilisation de lrsquooutil

informatique et drsquoInternet a eacuteteacute placeacute par la jurisprudence et par la CNIL La CNIL dans son

rapport drsquoactiviteacute de 2003863

considegravere qursquo laquo une interdiction geacuteneacuterale et absolue de toute

utilisation drsquoInternet agrave des fins autres que professionnelles ne parait pas reacutealiste dans une

socieacuteteacute de lrsquoinformation et de la communication raquo Ainsi lrsquoautoriteacute administrative

indeacutependante considegravere qursquoil est socialement admis qursquoune utilisation agrave des fins personnelles

du mateacuteriel professionnel puisse ecirctre effectueacutee tant que cet usage nrsquoamoindrit pas les

conditions drsquoaccegraves au reacuteseau et ne diminue pas la productiviteacute du salarieacute

714 Cependant lagrave encore les fichiers personnels doivent ecirctre identifieacutes comme tels sous

peine drsquoecirctre accessible par lrsquoemployeur sans lrsquoaccord du salarieacute En effet pour la Cour de

Cassation il apparait que laquo les dossiers et fichiers creacuteeacutes par un salarieacute gracircce agrave lrsquooutil

860 V notamment en ce sens CAA Nancy 2 aoucirct 2007 Commune de Lons-le-Saunier c Mme E Mazzier ndeg

07NC00217 861

CA Rennes 14 janvier 2010 ndeg 972010 Dans cette affaire les juges ont estimeacute notamment que la reacuteponse

apporteacutee agrave une question professionnelle par lrsquoagent mis en cause eacutetait le preacutetexte qui avait conduit cet agent a

exprimeacute son opinion personnelle Degraves lors les juges ont consideacutereacute que laquo indeacutependamment du ton employeacute et de

la restriction dune reacuteponse faite au seul expeacutediteur dun message geacuteneacuteral la correspondance litigieuse est bien

dessence professionnelle raquo 862

CE 25 janvier 2006 ndeg 280165 863

CNIL 24egraveme

rapport drsquoactiviteacute 2003 p 497

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

392

informatique mis agrave sa disposition par son employeur pour lrsquoexeacutecution de son travail sont

preacutesumeacutes sauf si le salarieacute les identifie comme eacutetant personnels avoir un caractegravere

professionnel raquo864

En revanche cette protection de la vie priveacutee ne va pas jusqursquoagrave proteacuteger les favoris

de navigation sur Internet qui ne preacutesentent pas un caractegravere personnel865

Ainsi lrsquohistorique

de navigation Internet ne pourra jamais contrairement aux fichiers informatiques ecirctre proteacutegeacute

par le droit au respect de la vie priveacutee celui-ci ne pouvant jamais ecirctre identifieacute de maniegravere

directe comme eacutetant personnel Par ailleurs la jurisprudence se montre tregraves claire agrave ce sujet

et le controcircle des connexions Internet drsquoun salarieacute par son employeur est possible puisque ces

connexions sont preacutesumeacutees avoir un caractegravere professionnel866

2) Les possibiliteacutes de reacutegulation et de controcircle offertes agrave lrsquoemployeur

715 Dans un souci agrave la fois de seacutecuriteacute du reacuteseau informatique mais eacutegalement drsquoefficaciteacute

dans le fonctionnement de ses services lrsquoemployeur va pouvoir tout en respectant les liberteacutes

fondamentales des agents controcircler voire limiter lrsquoutilisation des outils informatiques des

agents En effet un controcircle de lrsquoutilisation qui peut ecirctre faite des TIC par les agents permet agrave

lrsquoeacutetablissement de preacutevenir une atteinte interne ou externe agrave son systegraveme drsquoinformation Par

ailleurs lrsquoeacutetablissement pourrait comme nous lrsquoavons souligneacute auparavant voire sa

responsabiliteacute engageacutee du fait drsquoune utilisation prohibeacutee des TIC par ses agents Comme le

soulignait lrsquoavocat geacuteneacuteral de la Cour de Cassation S KEHRIG dans le cadre de lrsquoarrecirct

NIKON France laquo Srsquoil est certain qursquoen vertu de son pouvoir de direction lrsquoemployeur a le

droit de controcircler et surveiller lrsquoactiviteacute de ses salarieacutes pendant le temps de travail [hellip] ce

droit peut mecircme drsquoailleurs se transformer en devoir eu eacutegard aux regravegles de responsabiliteacute

civile du commettant [hellip] raquo867

Ce risque est le mecircme pour les eacutetablissements de santeacute qui

sont par principe responsable du fait de leur agent sauf agrave venir deacutemontrer lrsquoexistence drsquoune

faute deacutetachable du service

864 Cass Soc 18 octobre 2006 Jeacutereacutemy L-F c Techni-soft ndeg 04-48025

865 Cass Soc 9 feacutevrier 2010 ndeg 08-45253

866 Cass Soc 9 juillet 2008 ndeg 06-45800

867 Conclusion de M KEHRIG avocat geacuteneacuteral Disponibles sur [httpswwwcourdecassationfr] Consulteacute le 16

janvier 2017

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

393

716 Le controcircle mis en place par lrsquoemployeur doit reacutepondre au mecircme principe que celui

qui dirige lrsquoutilisation priveacutee des outils professionnels par lrsquoagent le principe de

proportionnaliteacute Par ailleurs il paraicirct eacutevident que la mise en place drsquoun tel controcircle ne devra

ecirctre motiveacute par lrsquounique volonteacute de lrsquoemployeur drsquoinstaurer une surveillance de ses agents En

effet la cybersurveillance des salarieacutes est tregraves encadreacutee et lrsquoemployeur ne sera pas libre de ses

mouvements Ce controcircle peut ecirctre deux ordres soit global soit cibleacute

717 En premier lieu en effet lrsquoemployeur peut deacutecider de mettre en place un controcircle

global de lrsquoensemble des utilisations des TIC reacutealiseacutees par ses agents Par exemple il lui est

possible de controcircler lrsquoensemble des connexions Internet reacutealiseacutees par ses agents ou mecircme

utiliser des fichiers de journalisation pour connaitre lrsquoensemble des flux informatiques reacutealiseacutes

au sein du systegraveme drsquoinformation Dans la mecircme logique il peut controcircler le trafic de la

messagerie professionnelle sans prendre connaissance du contenu de lrsquoensemble des e-mails

eacutechangeacutes Dans les deux cas nous nous situons dans un controcircle que nous pouvons qualifier

de masse et geacuteneacuteraliseacute de lrsquoutilisation des TIC A ce niveau il srsquoagit principalement pour

lrsquoemployeur de srsquoassurer que son systegraveme drsquoinformation est correctement conccedilu pour

supporter la charge qui lui est imposeacutee mais eacutegalement srsquoassurer qursquoil nrsquoexiste pas de failles

de seacutecuriteacute Cependant agrave partir du moment ougrave ces pratiques induisent une collecte

drsquoinformations agrave caractegravere personnel telles que deacutefinies par la loi Informatique et Liberteacutes

lrsquoemployeur devra effectuer les deacuteclarations neacutecessaires aupregraves de la CNIL Par ailleurs dans

tous les cas la mise en place drsquoun controcircle des accegraves et connexions induit en vertu du

principe de loyauteacute une information a priori des agents Si ces conditions sont remplies alors

lrsquoemployeur pourra par la suite si la situation lrsquoexige utiliser ces eacuteleacutements ainsi recueillis

dans le cadre drsquoune proceacutedure disciplinaire agrave lrsquoencontre de son agent868

718 Dans un second temps sous certaines conditions strictes lrsquoemployeur va pouvoir

eacutegalement consulter les dossiers de son agent pourtant identifieacutes comme eacutetant personnels En

effet par principe lrsquoemployeur peut demander agrave lrsquoagent drsquoacceacuteder aux fichiers identifieacutes

comme eacutetant personnels en preacutesence de celui-ci ou si celui-ci a eacuteteacute informeacute preacutealablement

Dans ce cas la violation de la vie priveacutee ou dans le cas des courriels du secret des

correspondances ne sera pas constitueacutee Par ailleurs selon la jurisprudence lrsquoemployeur peut

868 CA Rouen 11 septembre 2007 ndeg 07180

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

394

eacutegalement acceacuteder agrave ces fichiers sans lrsquoaccord du salarieacute en cas de risque ou eacuteveacutenement

particulier869

Cependant encore faut-il que lrsquoemployeur puisse justifier drsquoun tel risque ou

eacuteveacutenement particulier

Par ailleurs comme la jurisprudence judiciaire a deacutejagrave eu lrsquooccasion de le preacuteciser870

la

preacutesence de fichiers informatiques ou de courriels identifieacutes comme personnels ne fait pas

obstacle agrave la mise en œuvre de lrsquoarticle 145 du Code de proceacutedure civile Ainsi un huissier

pourra reacutecupeacuterer des copies des fichiers en preacutesence du salarieacute En lrsquoespegravece il srsquoagissait drsquoun

employeur qui pensait que le mateacuteriel informatique qursquoil mettait agrave disposition de son employeacute

servait agrave favoriser des actes de concurrence deacuteloyale Le juge a estimeacute que cette raison eacutetait

leacutegitime et a ordonneacute agrave un huissier de saisir une copie des eacuteleacutements susceptibles de

caracteacuteriser un acte de concurrence deacuteloyale

719 En revanche il nous semble important de preacuteciser que mecircme si lrsquoadministrateur

reacuteseau peut acceacuteder agrave certains courriels drsquoordre priveacute dans le cadre de sa fonction visant agrave

assurer la seacutecuriteacute du reacuteseau informatique de lrsquoentreprise cela ne peut se faire qursquoagrave certaines

conditions Ainsi un employeur peut parfaitement confier agrave son administrateur reacuteseau soumis

agrave une obligation de confidentialiteacute une enquecircte speacutecifique suite agrave un incident de seacutecuriteacute

mecircme si cette enquecircte conduit agrave la prise de connaissance par lrsquoadministrateur de courriels

proteacutegeacutes par le secret des correspondances871

Toutefois lrsquoadministrateur reacuteseau ne pourra en

aucun cas se deacutelier de son obligation de confidentialiteacute pour communiquer ces messages agrave son

employeur A ce sujet la Cour de cassation est venue preacuteciser notamment que mecircme si la

seacutecuriteacute du reacuteseau informatique drsquoune entreprise justifie que son administrateur reacuteseau fasse

usage de lrsquoensemble des possibiliteacutes techniques qursquoil a agrave sa disposition afin de prendre les

mesures qui srsquoimposent laquo la divulgation du contenu des messages [hellip] ne [relegraveve] pas de ces

objectifs raquo872

720 Enfin bien eacutevidemment en amont de ce controcircle lrsquoemployeur peut leacutegitimement

limiter voire mecircme parfois bloquer les utilisations de lrsquooutil informatique A titre drsquoexemple

869 Cass Soc 17 mai 2005 ndeg 03-40701

870 Cass Soc 10 juin 2008 ndeg 06-19229

871 Cass Soc 17 juin 2009 SA Sanofi Chimie c M GUZZI et a ndeg 08-40274

872 CA Paris 11

egraveme chambre F et a 17 deacutecembre 2001

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

395

il pourra mettre en place des dispositifs permettant le filtrage des sites Internet non autoriseacutes

(sites agrave caractegravere pornographique par exemple mais eacutegalement les sites des reacuteseaux sociaux

srsquoil le juge utile) Il pourra eacutegalement interdire la possibiliteacute pour les agents de teacuteleacutecharger de

nouveaux logiciels sur leur poste de travail Pour des raisons de seacutecuriteacute toujours et afin

drsquoeacuteviter la propagation de virus informatique lrsquoutilisation des cleacutes USB personnelles non

seacutecuriseacutees pourra ecirctre prohibeacutee (mecircme si en pratique lrsquoemployeur devra dans la plupart du

temps proposer une solution alternative qui consistera par exemple agrave fournir lui-mecircme des

cleacutes seacutecuriseacutees) De mecircme dans le cadre de lrsquoutilisation de logiciels (comme cela est le cas

pour les logiciels de dossiers meacutedicaux par exemple) certains agents verront en vue de leur

fonction ou de leurs missions leur droit drsquoaccegraves agrave certaines donneacutees limiteacute

B La mise en place drsquoune charte informatique

721 Le recours aux chartes informatiques que cela soit au sein des entreprises priveacutees ou

des administrations publiques srsquoest deacuteveloppeacute depuis plusieurs anneacutees Deacutefinies par une

circulaire de 2008873

comme eacutetant des laquo outils permettant agrave lrsquoinverse du regraveglement inteacuterieur

dont le champ est leacutegalement limiteacute de reacuteunir en un document selon un contenu et un degreacute

de preacutecision variables les engagements et obligations respectifs de lrsquoemployeur et des

salarieacutes dans le cadre de lrsquoexeacutecution du contrat de travail raquo les chartes se reacutevegravelent ecirctre des

tregraves utiles pour lrsquoemployeur agrave condition drsquoecirctre utiliseacutees convenablement Elles permettent en

effet agrave ce dernier de mettre agrave plat les laquo regravegles du jeu raquo en matiegravere drsquoutilisation des TIC par ses

agents

laquo A deacutefaut de textes officiels et normatifs sur le sujet raquo874

la charte preacutesente lrsquoavantage

de formaliser de maniegravere claire et opposable les regravegles applicables au sein de lrsquoeacutetablissement

en matiegravere drsquoutilisation des outils informatiques et des TIC Lrsquoavantage majeur de cet outil

est bien entendu sa grande souplesse Encadreacute par aucun texte contrairement au regraveglement

inteacuterieur de lrsquoeacutetablissement de santeacute par exemple aucun contenu a minima nrsquoest imposeacute

Libre agrave lrsquoeacutetablissement de lrsquoeacutelaborer avec lrsquoensemble des informations qursquoil souhaite y faire

figurer En revanche pour des questions pratiques il est eacutevident que cet outil ne doit pas

873 Circulaire DGT 200822 du 19 novembre 2008 relative aux chartes eacutethiques dispositifs drsquoalerte

professionnelle et au regraveglement inteacuterieur Ministegravere du travail des relations sociales de la famille et de la

solidariteacute non parue au JORF 874

CAA Nancy 2 aoucirct 2007 Cne Lons-le-Saunier JCP A 2007 ndeg 2039 note ndeg 07NC00217 de D JEAN-

PIERRE

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

396

devenir un catalogue technique des modaliteacutes drsquoutilisation des TIC La charte peut eacutegalement

interdire certaines utilisations des TIC sans que cela puisse ecirctre contesteacute Ainsi une charte

informatique qui interdit lrsquoutilisation de la messagerie professionnelle agrave des fins politiques est

leacutegale875

722 Pour autant bien eacutevidemment lrsquoabsence de charte ne veut pas dire absence de regravegles

ou absences de sanctions Dans certains cas ce nrsquoest pas la violation de la charte qui sera

sanctionneacutee mais bien la violation drsquoune obligation deacuteontologique du professionnel agent de

la fonction publique876

La charte reste cependant le moyen le plus efficace drsquoinformer les

agents sur les usages qui ne seront pas toleacutereacutes Elle preacutesente eacutegalement un inteacuterecirct peacutedagogique

vis-agrave-vis des agents en matiegravere de seacutecuriteacute informatique car il ne faut pas oublier que laquo la

seacutecuriteacute ne simpose pas elle sinculque raquo877

Cependant afin drsquoecirctre totalement efficace la

charte informatique devra ecirctre opposable aux agents Car tout comme la jurisprudence

reconnaicirct la possibiliteacute de srsquoappuyer sur ces chartes pour sanctionner un salarieacute elle rappelle

eacutegalement la neacutecessiteacute que ces chartes soient avant toute chose opposable878

723 Au sein drsquoun eacutetablissement de santeacute le Directeur drsquoeacutetablissement dispose de plusieurs

solutions pour rendre opposable sa charte informatique Il peut drsquoabord faire le choix

drsquoannexer cette charte au contrat de travail des agents permettant ainsi drsquoen faire un

document contractuel opposable aux agents en cas de violation celle-ci En revanche cette

possibiliteacute nrsquoest envisageable que pour les personnels contractuels Pour les titulaires de la

fonction publique hospitaliegravere cette solution sera impossible En effet par principe les agents

titulaires de la fonction publique sont reacutegis par leurs statuts issus de la loi (pour les

fonctionnaires de la fonction publique hospitaliegravere il srsquoagit de la loi ndeg 86-33 du 9 janvier

1986 portant dispositions statutaires relatives agrave la fonction publique hospitaliegravere879

) et du

875 CAA Nancy 2 aoucirct 2007 Cne Lons-le-Saunier op cit

876 CAA Paris 12 feacutevrier 2008 ndeg 06PA04287

877 CAPRIOLI amp Associeacutes laquo Deacutemarche pour la mise en place dune charte informatique et communications

eacutelectroniques dans les collectiviteacutes territoriales raquo disponible sur [httpwwwcaprioli-avocatscom] Consulteacute le

16 janvier 2017 878

Conseil des prudrsquohommes de Paris 10 juin 2014 ndeg 1302093 879

Loi ndeg 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives agrave la fonction publique hospitaliegravere

JORF du 11 janvier 1986 p 535

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

397

regraveglement880

Seuls des textes de cet ordre peuvent donc modifier les regravegles qui viendront

reacutegir leur statut

724 Cependant une autre solution existe au sein des eacutetablissements de santeacute afin de

permettre de donner agrave la charte une valeur juridique suffisante agrave la rendre opposable Il suffit

pour cela drsquoen faire un eacuteleacutement du regraveglement inteacuterieur Cette solution est par ailleurs deacutejagrave

valideacutee par la jurisprudence pour les entreprises priveacutees881

Il srsquoagit drsquoun avantage dont

disposent les eacutetablissements de santeacute par rapport aux collectiviteacutes territoriales par exemple

Ainsi en annexant au regraveglement inteacuterieur de lrsquoeacutetablissement la charte informatique celle-ci

deviendra de fait opposable agrave tous les agents de lrsquoeacutetablissement contractuels ou titulaires

Cela induit en revanche de respecter un circuit de validation interne preacutealable qui inclut

notamment une preacutesentation en comiteacute technique drsquoeacutetablissement Toutefois la jurisprudence

nrsquoexige pas toujours un passage devant les instances et notamment une consultation du

Comiteacute technique Par exemple une Cour Administrative drsquoAppel a deacutejagrave eu lrsquooccasion de

juger que lrsquoagent qui meacuteconnait les regravegles drsquoutilisation de la messagerie professionnelle

fixeacutees au sein de la charte informatique commet une faute disciplinaire mecircme si cette mecircme

charte nrsquoa pas fait lrsquoobjet drsquoun examen en comiteacute technique le chef drsquoeacutetablissement disposant

du pouvoir reacuteglementaire en matiegravere drsquoutilisation de la messagerie882

Neacuteanmoins lrsquoemployeur se doit drsquoinformer ses agents des regravegles encadrant

lrsquoutilisation du mateacuteriel informatique qui leur est mis agrave disposition883

A lrsquooccasion de

plusieurs litiges aux Prudrsquohommes la charte informatique a eacuteteacute progressivement reconnue

comme opposable au salarieacute et sa violation a justifieacute dans plusieurs cas des licenciements pour

faute grave En 2006 par un arrecirct en date du 21 deacutecembre884

la Cour de Cassation avait

mecircme fait reacutefeacuterence de maniegravere explicite agrave la charte informatique drsquoune entreprise dont la

violation avait entraineacute le licenciement pour faute grave drsquoun salarieacute885

880 Par exemple le deacutecret ndeg 91-155 du 6 feacutevrier 1991 relatif aux dispositions geacuteneacuterales applicables aux agents

contractuels des eacutetablissements mentionneacutes agrave larticle 2 de la loi ndeg 86-33 du 9 janvier 1986 modifieacutee portant

dispositions statutaires relatives agrave la fonction publique hospitaliegravere JORF ndeg 35 du 9 feacutevier 1991 p 2058 881

Cass Soc 15 deacutecembre 2010 ndeg 09-42691 882

CAA Nantes 2 juillet 2010 ndeg 10NT00319 883

WALLE Emmanuelle laquo A nouvelles technologies nouvelles causes de licenciement raquo Gaz Pal 23 avril

2011 ndeg 113 p 20 884

Cass Soc 21 deacutecembre 2006 ndeg 05-41165 J-H Pettre csteacute Ad 2 One SA 885

CAPRIOLI Eric laquo Charte informatique et droit du travail raquo Communication commerce eacutelectronique ndeg 7-8

juillet 2001 commentaire 101

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

398

La charte informatique est eacutegalement un moyen pour lrsquoemployeur drsquoinformer de

maniegravere loyale ses salarieacutes de lrsquoensemble des mesures eacuteventuelles de surveillance et de

controcircle des accegraves et de lrsquoutilisation des outils informatiques Degraves lors elle permet ensuite

lrsquoutilisation de ces traces lors drsquoeacuteventuelles proceacutedures disciplinaires

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

399

sect2 Lrsquoutilisation drsquooutils manageacuteriaux

725 Lrsquoimpact de lrsquointroduction des TIC au travail fait lrsquoobjet de nombreuses eacutetudes depuis

plusieurs anneacutees La doctrine srsquoest pencheacutee agrave la fois sur les risques induits par lrsquointroduction

des TIC sur la santeacute du salarieacute886

et ses conditions de travail mais eacutegalement sur les risques

lieacutes agrave un controcircle abusif des salarieacutes par leur employeur887

ou encore sur lrsquoimpact des TIC sur

lrsquoaction syndicale888

Derniegraverement avec le deacuteveloppement du teacuteleacutetravail notamment crsquoest le

droit agrave la deacuteconnexion qui a fait lrsquoobjet de multiples eacutetudes889

726 Lrsquointroduction des TIC comme outil de travail induit pour lrsquoemployeur la neacutecessiteacute

drsquoaccompagner la mise en place de ces outils mais eacutegalement de veiller agrave leur bonne

utilisation voire de reacuteguler drsquoeacuteventuelles utilisations qui ne seraient pas en accord avec la loi

ou les pratiques internes fixeacutees par le biais de la charte informatique Pour ce faire

lrsquoemployeur va disposer drsquooutils manageacuteriaux efficaces En amont lrsquoadministration

hospitaliegravere pourra et mecircme devra assurer la formation des utilisateurs des TIC afin qursquoils

puissent adapter leurs pratiques agrave ces nouveaux outils (A) Puis dans lrsquohypothegravese ougrave lrsquoagent

nrsquoaurait pas effectueacute une utilisation correcte de ses outils lrsquoemployeur aura la possibiliteacute de le

sanctionner (B) Ces deux outils manageacuteriaux vont permettre aux eacutetablissements de santeacute de

seacutecuriser lrsquoutilisation des TIC agrave lrsquohocircpital

886 V notamment en ce sens FANTONI-QUINTON Sophie LEBORGNE-INGELAERE Ceacuteline laquo Limpact

des TIC sur la santeacute au travail raquo JCP-S novembre 2013 ndeg 48 pp 16-21 887

V notamment en ce sens De GIVRY Emmanuel laquo Tic et surveillance du salarieacute regards de la CNIL raquo

JCP-S octobre 2013 ndeg 41 pp 24-26 BAREGE Alexandre BOSSU Bernard laquo Les TIC et le controcircle de

lrsquoactiviteacute du salarieacute raquo JCP-S octobre 2013 ndeg 41 pp 13-23 888

V notamment en ce sens GAURIAU Bernard laquo Les TIC et lrsquoaction syndicale raquo JCP-S octobre 2013 ndeg

41 pp 18-24 889

V notamment en ce sens De MONTVALON Luc laquo Droit agrave la deacuteconnexion lrsquoarbre qui cache la forecirct raquo

Semaine sociale Lamy novembre 2016 ndeg 1743 pp 19-20 MATHIEU Chantal PERETIE Marie-Madeleine

PICAULT Alex laquo Le droit agrave la deacuteconnexion une chimegravere raquo Revue droit du travail Dalloz octobre 2016 ndeg

10 pp 592-598

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

400

A La formation des utilisateurs

727 La formation professionnelle des agents publics obligation leacutegale agrave la charge tant de

lrsquoemployeur et de lrsquoagent (1) va srsquoaveacuterer ecirctre un outil manageacuterial preacutecieux (2) pour

accompagner la mise en place des TIC

1) La formation professionnelle une obligation leacutegale reacuteciproque

728 Comme le preacutevoit la loi Le Pors laquo le droit agrave la formation professionnelle tout au long

de la vie est reconnu aux fonctionnaires raquo890

La formation professionnelle au cours de sa

carriegravere est un droit essentiel de lrsquoagent public qui srsquoinscrit dans un cadre regraveglementaire et

financier assez preacutecis preacutevu notamment en ce qui concerne la fonction publique hospitaliegravere

par le deacutecret ndeg 2008-824 du 21 aoucirct 2008 relatif agrave la formation professionnelle tout au long

de la vie des agents de la fonction publique hospitaliegravere891

et par la circulaire ndeg

DHOSRH4201057 du 11 feacutevrier 2010 relative agrave la mise en œuvre du congeacute de formation

professionnelle des agents de la fonction publique hospitaliegravere Cependant ce nrsquoest que

reacutecemment que la formation professionnelle des agents publics a pris une place importante

En effet jusqursquoen 2007 les agents beacuteneacuteficiaient drsquoun droit agrave une laquo formation permanente raquo892

Srsquoinspirant des regravegles applicables en droit du travail le droit de la fonction publique a eacutevolueacute

et consacreacute au travers de la loi de 2007 de modernisation de la fonction publique893

un droit

fondamental pour lrsquoagent public agrave la formation continue tout au long de sa vie professionnelle

Cette loi consacre notamment la reconnaissance de lrsquoexpeacuterience professionnelle pour les

promotions internes ainsi que dans les concours administratifs et deacuteveloppe la validation des

acquis de lrsquoexpeacuterience (VAE) Elle introduit eacutegalement le droit individuel agrave la formation qui

nrsquoexistait pas jusqursquoalors dans la fonction publique

890 Article 22 loi ndeg 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires Loi dite loi Le

Pors JORF du 14 juillet 1983 p 2174 891

Deacutecret ndeg 2008-824 du 21 aoucirct 2008 relatif agrave la formation professionnelle tout au long de la vie des agents de

la fonction publique hospitaliegravere JORF ndeg 0196 23 aoucirct 2008 p 13285 892

Lrsquoarticle 22 de la loi Le Pors dans sa reacutedaction applicable jusqursquoen 2007 disposait que laquo Le droit agrave la

formation permanente est reconnu aux fonctionnaires Ceux-ci peuvent ecirctre tenus de suivre des actions de

formation professionnelle dans les conditions fixeacutees par les statuts particuliers raquo 893

Loi ndeg 2007-148 du 2 feacutevrier 2007 de modernisation de la fonction publique JORF ndeg31 6 feacutevrier 2007 p

2160

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

401

Ainsi et comme lrsquoa souligneacute agrave juste titre Emmanuel AUBIN en parlant de

travaillisation894

du droit de la fonction publique le droit du travail a eu une veacuteritable

influence positive en la matiegravere sur le droit de la fonction publique

729 Ce droit fondamental de lrsquoagent agrave la formation opposable agrave lrsquoadministration se

traduit pour lrsquoemployeur en une obligation assez forte Celui-ci devra notamment prendre agrave

sa charge les frais de formation De mecircme dans lrsquohypothegravese ougrave la formation de lrsquoagent se

deacuteroulerait en dehors du temps de travail il devra attribuer agrave lrsquoagent une allocation de

formation895

Mais lrsquoobligation de lrsquoemployeur public va plus loin puisqursquoil doit eacutegalement se

montrer actif en la matiegravere Ainsi les dispositions de lrsquoarticle 37 du deacutecret de 2008 lui

imposent de mettre en place laquo un document pluriannuel dorientation de la formation des

agents raquo document qui devra ecirctre par ailleurs laquo soumis pour avis au comiteacute technique

deacutetablissement raquo En outre laquo ce document dorientation est fondeacute sur lanalyse de leacutevolution

des effectifs des emplois des compeacutetences et des missions de leacutetablissement Il porte sur les

prioriteacutes les objectifs et les moyens de la formation professionnelle des agents au regard de

ces eacutevolutions Il prend eacutegalement en compte lanalyse de la situation compareacutee des hommes

et des femmes et laccegraves de tous les agents agrave la formation Dans le cadre ainsi deacutefini le chef

deacutetablissement arrecircte tous les ans le plan de formation apregraves avis du comiteacute technique

deacutetablissement qui se reacuteunit agrave cet effet au cours du dernier trimestre preacuteceacutedant la peacuteriode

couverte par ce plan Les plans de formation des eacutetablissements prennent en compte les

prioriteacutes nationales de formation et les plans de santeacute publique deacutefinis par le ministre chargeacute

de la santeacute Le suivi de la reacutealisation du plan ainsi que leacutevaluation de ses reacutesultats doivent

associer le comiteacute technique deacutetablissement raquo896

Lrsquoobligation qui pegravese sur les eacutetablissements de santeacute en matiegravere de formation est donc

importante et la formation professionnelle doit faire lrsquoobjet au sein des eacutetablissements de

santeacute drsquoun projet construit par lrsquoemployeur

894 AUBIN Emmanuel laquo Les dispositions relatives agrave la formation professionnelle des fonctionnaires tout au

long de la vie raquo AJDA 2007 p 511 895

Lrsquoarticle 16 du deacutecret ndeg 2008-824 du 21 aoucirct 2008 relatif agrave la formation professionnelle tout au long de la vie

des agents de la fonction publique hospitaliegravere preacutevoit que laquo Les heures de formation reacutealiseacutees par un agent

dans le cadre du droit individuel agrave la formation en dehors du temps de travail donnent lieu au versement dune

allocation de formation dun montant eacutegal agrave 50 du traitement horaire de lagent concerneacute raquo 896

Article 37 deacutecret ndeg 2008-824 du 21 aoucirct 2008 relatif agrave la formation professionnelle tout au long de la vie des

agents de la fonction publique hospitaliegravere JORF ndeg 0196 23 aoucirct 2008 p 13285

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

402

730 Cependant cette obligation nrsquoest pas agrave sens unique et il arrive parfois que le droit agrave la

formation de lrsquoagent soit eacutegalement assorti de contraintes pour celui-ci Par ailleurs dans

certains cas lrsquoagent va ecirctre deacutebiteur vis-agrave-vis de son employeur drsquoune obligation de se

former et lrsquoirrespect de cette obligation pourra ecirctre sanctionneacute En effet la formation est

eacutegalement parfois une obligation pour lrsquoagent Une obligation leacutegale tout drsquoabord puisque

lrsquoarticle 22 de la loi Le Pors dispose que laquo ceux-ci peuvent ecirctre tenus de suivre des actions

de formation professionnelle dans les conditions fixeacutees par les statuts particuliers raquo Mais

avant cette modification de la loi Le Pors intervenue en 2007 la jurisprudence avait deacutejagrave

preacuteciseacute qursquoune administration pouvait imposer agrave un agent une formation en rapport avec ses

fonctions exerceacutees897

731 Par ailleurs les fonctionnaires sont tenus par principe agrave une obligation drsquoobeacuteissance

hieacuterarchique Ainsi le refus par un agent drsquoassister agrave une formation qui lui est imposeacutee par

son supeacuterieur hieacuterarchique pourrait conduire agrave des sanctions disciplinaires A titre drsquoexemple

dans une deacutecision en date du 9 avril 2009 la Cour Administrative de Nancy898

a eu agrave se

prononcer sur une deacutecision de blacircme prononceacute agrave lrsquoencontre drsquoun fonctionnaire qui avait refuseacute

une formation En lrsquoespegravece il srsquoagissait drsquoun caporal-chef des sapeurs-pompiers

professionnel qui avait refuseacute de participer agrave la premiegravere seacuteance de formation institueacutee par

une deacutecision du conseil dadministration du service deacutepartemental dincendie et de secours de

la Moselle Il ressortait eacutegalement des eacuteleacutements du dossier que cet agent avait par ailleurs

inciteacute ses collegravegues agrave refuser cette formation Un blacircme lui a eacuteteacute infligeacute par son employeur La

Cour Administrative drsquoAppel a consideacutereacute que cette sanction disciplinaire nrsquoeacutetait pas entacheacutee

drsquoerreur manifeste drsquoappreacuteciation

A noter qursquoen droit priveacute lrsquoobligation de formation pegravese eacutegalement lourdement sur le

salarieacute qui est tenu de se former dans le cadre de lrsquoexeacutecution de son contrat de travail Par

exemple la jurisprudence a deacutejagrave reconnu qursquoun salarieacute qui refusait une formation proposeacutee

par son employeur afin drsquoassurer le maintien de ce salarieacute dans son emploi pouvait ecirctre

licencieacute pour motif disciplinaire899

897 ANTOINE Dominique laquo La formation professionnelle dans la fonction publique en France ndash Compte rendu

dun rapport de la promotion Reneacute Cassin de lENA raquo RF adm publ 2002 ndeg 104 p 611 898

CAA de Nancy 9 avril 2009 ndeg 08NC00449 899

V notamment en ce sens Cass Soc 12 mai 2004 ndeg 02-40772 Cass Soc 18 mars 2009 ndeg 08-40378

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

403

2) La formation professionnelle un outil manageacuterial strateacutegique

732 Les dispositions de lrsquoarticle 1er

du deacutecret de 2008900

preacutecise que laquo la formation

professionnelle tout au long de la vie des agents titulaires et non titulaires de la fonction

publique hospitaliegravere a pour but de leur permettre dexercer efficacement leurs fonctions

durant lensemble de leur carriegravere dameacuteliorer la qualiteacute du service public hospitalier de

favoriser leur deacuteveloppement professionnel et personnel et leur mobiliteacute Elle contribue agrave

creacuteer les conditions dun eacutegal accegraves aux diffeacuterents grades et emplois entre les hommes et les

femmes raquo

733 La formation professionnelle continue preacutesente de nombreux avantages manageacuteriaux

Elle permet notamment aux agents drsquoadapter leurs compeacutetences aux nouvelles exigences des

emplois et notamment aux exigences des nouveaux outils901

En cela la formation

professionnelle laquo participe agrave la qualiteacute et agrave la mutabiliteacute du service public raquo902

puisqursquoelle

permet lrsquoeacutevolution des agents de leurs compeacutetences et eacuteventuellement de leurs postes La

formation professionnelle permet eacutegalement agrave lrsquoemployeur drsquoameacuteliorer la gestion des

ressources humaines903

Dans le cadre de lrsquointroduction des TIC dans la pratique meacutedicale la

formation est eacutevidement essentielle Elle touche par ailleurs un domaine assez vaste ce qui

peut la rendre complexe En effet il srsquoagit aussi bien de former les agents agrave lrsquoutilisation des

logiciels meacutedicaux (logiciel dossier informatique logiciel de gestion de la pharmacie logiciel

drsquoimagerie) que de les former aux nouvelles pratiques comme la teacuteleacutemeacutedecine Drsquoailleurs en

la matiegravere lrsquoobligation de formation des utilisateurs est clairement acteacutee dans le deacutecret de

2010 faisant de celle-ci lrsquoune des conditions preacutealables agrave la mise en œuvre drsquoune action de

teacuteleacutemeacutedecine Ainsi lrsquoarticle R 6316-9 du Code de la santeacute publique introduit par le deacutecret

ndeg 2010-1229 du 19 octobre 2010 relatif agrave la teacuteleacutemeacutedecine preacutevoit que laquo Les organismes et

les professionnels libeacuteraux de santeacute qui organisent une activiteacute de teacuteleacutemeacutedecine sassurent

que les professionnels de santeacute et les psychologues participant aux activiteacutes de teacuteleacutemeacutedecine

ont la formation et les compeacutetences techniques requises pour lutilisation des dispositifs

900 Deacutecret ndeg 2008-824 du 21 aoucirct 2008 relatif agrave la formation professionnelle tout au long de la vie des agents de

la fonction publique hospitaliegravere JORF ndeg0196 du 23 aoucirct 2008 p 13285 901

AUBIN Emmanuel laquo Les dispositions relatives agrave la formation professionnelle des fonctionnaires tout au

long de la vie raquo AJDA 2007 p 511 902

FORTIER Charles laquo Le deacutefi de la continuiteacute du service public de lrsquoeacuteducation nationale assurer les

remplacements raquo AJDA 2006 ndeg 33 pp 1822-1829 903

ESPAGNO Delphine laquo La formation professionnelle enjeu de la modernisation de la fonction publique raquo

AJFP 2007 p 116

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

404

correspondants raquo Le texte va mecircme plus loin puisqursquoil fait eacutegalement peser sur les

eacutetablissements de santeacute comme sur les professionnels libeacuteraux organisant une activiteacute de

teacuteleacutemeacutedecine une obligation de formation vis-agrave-vis des patients904

734 En termes de management la formation est un levier important qui preacutesente plusieurs

avantages pour lrsquoemployeur Drsquoabord elle assure agrave lrsquoemployeur un gain de performance En

effet en permettant agrave ses agents de mettre agrave jour drsquoacqueacuterir ou de perfectionner les

compeacutetences techniques neacutecessaires agrave son poste il srsquoassure que ses agents soient toujours

adapteacutes agrave leur poste et donc productifs Toujours dans cette logique la formation va permettre

agrave lrsquoemployeur de srsquoassurer que son agent srsquoadapte aux eacutevolutions qui interviennent sur son

poste ou dans le cas qui nous inteacuteresse sur les outils utiliseacutes Enfin la formation

professionnelle des agents agrave lrsquoutilisation des TIC va permettre agrave lrsquoemployeur de seacutecuriser les

pratiques en limitant les risques de meacutesusages ou de mauvaise utilisation Il srsquoagit ici pour

lrsquoemployeur drsquoun moyen drsquoanticiper au mieux les risques lieacutes agrave une mauvaise utilisation des

TIC par ses agents

B La sanction drsquoune mauvaise utilisation des TIC

735 Au sein de la fonction publique hospitaliegravere la proceacutedure disciplinaire est encadreacutee de

maniegravere tregraves stricte par les textes reacuteglementaires (1) Mais sous reacuteserve du respect de cette

proceacutedure le Directeur drsquoeacutetablissement en tant qursquoautoriteacute deacutetentrice du pouvoir de

nomination sera libre de prononcer une sanction disciplinaire agrave lrsquoencontre de lrsquoun de ses

agents si cela srsquoavegravere neacutecessaire (2) Dans le cadre de lrsquoutilisation des TIC dans la pratique

meacutedicale ce pouvoir permettra de sanctionner le non-respect de leurs obligations

deacuteontologiques par les agents mais eacutegalement une eacuteventuelle utilisation des TIC qui ne serait

pas en accord avec les regravegles applicables que celles-ci soient issues des textes leacutegislatifs et

reacuteglementaires ou simplement des regravegles internes tel que nous lrsquoavons vu preacuteceacutedemment

904 Article R 6316-3 du Code de la santeacute publique laquo Lorsque la situation limpose la formation ou la

preacuteparation du patient agrave lutilisation du dispositif de teacuteleacutemeacutedecine raquo

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

405

1) Le cadre drsquoexercice du pouvoir disciplinaire

736 Au terme des dispositions de la loi Le Pors les agents publics disposent de droits

mais ils sont eacutegalement soumis agrave plusieurs obligations professionnelles et deacuteontologiques

Celles-ci ont drsquoailleurs eacuteteacute renforceacutees par la loi ndeg 2016-483 du 20 avril 2016 relative agrave la

deacuteontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires905

La violation de ces obligations

constitue alors une faute qui peut ecirctre sanctionneacutee disciplinairement Par principe crsquoest agrave

lrsquoautoriteacute investie du pouvoir de nomination agrave savoir le directeur drsquoeacutetablissement qursquoil

appartient de mettre en place srsquoil lrsquoestime opportun une proceacutedure disciplinaire Cette

proceacutedure srsquoorganise dans un cadre preacutecis et strict et la deacutecision de sanction disciplinaire

pourra ecirctre soumise agrave lrsquoappreacuteciation du juge administratif

737 Lrsquoensemble de la proceacutedure disciplinaire va ecirctre dirigeacutee par le respect du principe du

contradictoire A chaque eacutetape de la proceacutedure lrsquoagent devra avoir connaissance des faits qui

lui sont reprocheacutes et pourra eacutegalement acceacuteder agrave lrsquoensemble des documents eacutecrits venant

eacutetayer ces faits (rapports eacutecrits teacutemoignages ou tout autre eacuteleacutement de preuve) Drsquoailleurs le

droit drsquoobtenir communication de son dossier administratif est un droit fondamental de lrsquoagent

mis en cause tout comme celui de se faire assister par la personne de son choix Lrsquoabsence du

respect du contradictoire empecircchant lrsquoagent de pouvoir preacuteparer correctement sa deacutefense est

reacuteguliegraverement sanctionneacute par le juge administratif906

Pour certaines sanctions envisageacutees (les

sanctions du deuxiegraveme troisiegraveme et quatriegraveme groupe907

) la saisine de la Commission

905 Loi ndeg 2016-483 du 20 avril 2016 relative agrave la deacuteontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires

JORF ndeg0094 21 avril 2016 906

V notamment en ce sens CE 5 mai 1944 Dame veuve Trompier-Gravier ndeg 69751 Rec p 133 Dans cet

arrecirct la Haute juridiction preacutecise qursquoen cas de sanction administrative ou disciplinaire un agent qui nrsquoa pas eacuteteacute

inviteacute agrave preacutesenter ses moyens de deacutefense est fondeacutee agrave soutenir que la deacutecision attaqueacutee a eacuteteacute prise dans des

conditions irreacuteguliegraveres et est entacheacutee drsquoexcegraves de pouvoir CAA Versailles 19 feacutevrier 2009 n 07VE02328 A

lrsquooccasion de cette deacutecision les juges ont preacuteciseacute que dans le cadre drsquoune proceacutedure disciplinaire le rapport

disciplinaire doit ecirctre communiqueacute agrave lrsquoagent et ne doit pas se reacutefeacuterer agrave drsquoautres eacuteleacutements non verseacutes au dossier de

lrsquoagent CE 21 novembre 2012 M A C la communauteacute de communes du Grand Cahors ndeg 345140 Cet arrecirct

preacutecise que dans le cadre drsquoune proceacutedure de discipline un agent doit ecirctre inviteacute dans un deacutelai de nature agrave lui

permettre drsquoassurer sa deacutefense agrave prendre connaissance du rapport qui saisit de son cas le conseil de discipline A

deacutefaut la proceacutedure de discipline engageacutee est irreacuteguliegravere 907

Lrsquoarticle 81 de la loi ndeg 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives agrave la fonction

publique hospitaliegravere preacutevoit que laquo les sanctions disciplinaires sont reacuteparties en quatre groupes Premier

groupe Lavertissement le blacircme Deuxiegraveme groupe La radiation du tableau davancement labaissement

deacutechelon lexclusion temporaire de fonctions pour une dureacutee maximale de quinze jours Troisiegraveme groupe La

reacutetrogradation lexclusion temporaire de fonctions pour une dureacutee de trois mois agrave deux ans Quatriegraveme groupe

La mise agrave la retraite doffice la reacutevocation Parmi les sanctions du premier groupe seul le blacircme est inscrit au

dossier du fonctionnaire Il est effaceacute automatiquement du dossier au bout de trois ans si aucune sanction nest

intervenue pendant cette peacuteriode Lexclusion temporaire de fonctions qui est privative de toute reacutemuneacuteration

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

406

Administrative Paritaire Locale reacuteunie en Conseil de discipline est obligatoire Celui-ci

rendra un avis qui nrsquoaura qursquoune valeur consultative La deacutecision finale sera rendue par le

directeur drsquoeacutetablissement

2) La sanction drsquoun meacutesusage des TIC

738 La jurisprudence relative aux sanctions du fait drsquoune mauvaise utilisation des TIC est

assez fournie Elle se base principalement sur des violations par les agents publics de leurs

obligations fondamentales telles que deacutefinies au sein de la loi Le Pors En effet mecircme dans le

cadre de lrsquoutilisation des TIC les agents demeurent soumis au respect du secret professionnel

de la confidentialiteacute mais eacutegalement deacutebiteur drsquoune obligation de neutraliteacute et de laiumlciteacute

Crsquoest souvent la violation de ces obligations qui amegravene agrave des sanctions les TIC nrsquoeacutetant qursquoun

moyen comme un autre ayant ameneacute la reacutealisation de la faute Ainsi il a eacuteteacute jugeacute qursquoun

enseignant qui portait agrave la connaissance de collegravegues des eacuteleacutements consideacutereacutes comme

confidentiels par le biais drsquoun message eacutelectronique manque agrave son obligation de discreacutetion

professionnelle et lrsquoavertissement prononceacute agrave son encontre agrave cette occasion nrsquoest pas aux

yeux du juge administratif une sanction disproportionneacutee au regard des faits908

739 Toujours en ce qui concerne lrsquousage de la messagerie lrsquoemployeur pourra sanctionner

les agents qui auront envoyeacute depuis leur messagerie professionnelle des courriels ne

respectant pas leurs obligations deacuteontologiques Ainsi le manquement agrave lrsquoobligation de

discreacutetion professionnelle909

agrave lrsquoobligation de reacuteserve910

ou mecircme le manquement agrave

lrsquoobligation drsquoobeacuteissance hieacuterarchique911

pourront ecirctre sanctionneacutes Enfin tout comme un

employeur sera sanctionneacute dans lrsquohypothegravese drsquoune violation du secret des correspondances de

peut ecirctre assortie dun sursis total ou partiel Celui-ci ne peut avoir pour effet dans le cas de lexclusion

temporaire de fonctions du troisiegraveme groupe de ramener la dureacutee de cette exclusion agrave moins de un mois

Lintervention dune sanction disciplinaire des deuxiegraveme ou troisiegraveme groupes pendant une peacuteriode de cinq ans

apregraves le prononceacute de lexclusion temporaire entraicircne la reacutevocation du sursis En revanche si aucune sanction

disciplinaire autre que lavertissement ou le blacircme na eacuteteacute prononceacutee durant cette mecircme peacuteriode agrave lencontre de

linteacuteresseacute ce dernier est dispenseacute deacutefinitivement de laccomplissement de la partie de la sanction pour laquelle

il a beacuteneacuteficieacute du sursis raquo 908

CAA Nantes 8 mars 2007 ndeg 06NT01199 909

Ibid Sanction de 1er

groupe (avertissement) prononceacutee agrave lrsquoencontre drsquoun enseignant qui avait reacuteveacuteleacute des

eacuteleacutements relatifs agrave la notation des eacutepreuves de matheacutematiques au baccalaureacuteat 910

CAA Paris 21 novembre 2006 ndeg 04PA00634 911

CAA Nancy 2 aoucirct 2007 Cne Lons-Le-Saunier ndeg 07NC00217 A cette occasion les magistrats ont rappeleacute

que le fait pour un agent de ne pas respecter les prescriptions en matiegravere drsquoutilisation de la messagerie

professionnelles fixeacutees par une note de service peut donner lieu agrave sanction disciplinaire pour deacutesobeacuteissance

hieacuterarchique

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

407

sa part un agent qui ne respecterait pas le secret des correspondances priveacutees pourra ecirctre

sanctionneacute disciplinairement

740 Ainsi la jurisprudence a eu plusieurs fois lrsquooccasion de se prononcer sur le caractegravere

fautif de lrsquoaccegraves par un agent agrave la messagerie drsquoun de ses collegravegues Le Conseil drsquoEtat dans

une deacutecision du 13 mai 2005912

est venu confirmer la sanction drsquoexclusion temporaire des

fonctions pour une dureacutee de deux ans prononceacutee agrave lrsquoencontre drsquoun inspecteur geacuteneacuteral de

lrsquoeacuteducation nationale En lrsquoespegravece lrsquoagent sanctionneacute chargeacute de preacutesider le concours du

CAPES drsquoallemand srsquoeacutetait connecteacute agrave plusieurs reprises agrave la messagerie eacutelectronique de

lrsquoinspecteur chargeacute de preacutesider le concours du CAPES drsquoanglais Ayant pris connaissance des

sujets agrave cette occasion il avait ensuite creacuteeacute une adresse eacutelectronique agrave partir de laquelle il

avait faussement informeacute la direction en charge de lrsquoorganisation du concours que des

candidats avaient pu se procurer les sujets

Le meacutesusage des TIC agrave lrsquohocircpital pourra donc donner lieu agrave sanctions disciplinaires de

la part de lrsquoemployeur

912 CE juge des reacutefeacutereacutes 16 mai 2005 ndeg 280166 JurisData ndeg 2005-068570

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

408

Conclusion de la section

741 Les eacutetablissements de santeacute disposent drsquoun panel drsquooutils leur permettant de seacutecuriser

la mise ne place et surtout lrsquoutilisation des TIC en leur sein

Drsquoabord ils peuvent avoir recours agrave des outils juridiques Crsquoest le cas notamment de la charte

informatique qui leur permettra drsquoacter un certain nombre de regravegles qursquoils souhaitent voir

srsquoappliquer en la matiegravere Ces chartes sont souvent accompagneacutees drsquoun controcircle et drsquoune

limitation de lrsquoutilisation des outils informatiques par les agents

Par ailleurs les eacutetablissements de santeacute peuvent eacutegalement utiliser des outils

manageacuteriaux qui vont leur permettre drsquoaccompagner lrsquoutilisation progressive des TIC mais

eacutegalement de sanctionner en cas de comportement deacuteviant

Lrsquoaccompagnement de lrsquointeacutegration des TIC agrave la pratique professionnelle se fera par le

biais de la formation aux outils et notamment gracircce agrave la formation professionnelle continue

des agents La possibiliteacute de sanctionner un comportement deacuteviant est quant agrave elle accordeacutee au

directeur de lrsquoeacutetablissement en tant qursquoautoriteacute deacutetentrice du pouvoir de nomination A ce

titre il pourra prononcer des sanctions disciplinaires agrave lrsquoencontre drsquoun agent

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques

409

Conclusion du chapitre

742 Les eacutetablissements de santeacute peuvent ecirctre les acteurs de la seacutecurisation de lrsquoutilisation

des TIC en leur sein en intervenant agrave chaque eacutetape de la vie des TIC dans lrsquoeacutetablissement

que cela soit au moment du deacuteveloppement au moment de la mise en place ou encore lors de

leur utilisation courante afin de seacutecuriser les pratiques

743 En amont lors du deacuteveloppement et de la mise en place des TIC les eacutetablissements

vont pouvoir geacuterer de maniegravere strateacutegique le deacuteveloppement de leur SIH Il est en effet

essentiel pour les eacutetablissements de santeacute que la mise en place de leur SIH devienne un projet

agrave part entiegravere inteacutegreacute au projet global de lrsquoeacutetablissement Car le SIH nrsquoest pas une quantiteacute

neacutegligeable qui pourra srsquoadapter aux pratiques le moment venu Il srsquoagit au contraire

aujourdrsquohui drsquoun outil strateacutegique essentiel auquel les pratiques actuelles vont devoir

srsquoadapter Afin de geacuterer au mieux ce projet les eacutetablissements peuvent drsquoentourer drsquoexperts

du domaine Deux choix srsquooffrent alors agrave eux embaucher directement ces ressources ou faire

appel agrave des prestations de service aupregraves de socieacuteteacutes speacutecialiseacutees Dans les faits les

eacutetablissements de santeacute auront inteacuterecirct agrave cumuler les deux solutions

Puis une fois les TIC mises en place les eacutetablissements de santeacute vont pouvoir

seacutecuriser leur utilisation par le biais drsquooutils juridiques et drsquooutils manageacuteriaux Ainsi la mise

en place drsquoune charte informatique permettra drsquoencadrer au mieux lrsquoutilisation des TIC Par

ailleurs par le biais de la formation les eacutetablissements de santeacute pourront accompagner leurs

agents dans lrsquoutilisation de ces nouveaux outils et donc lrsquoeacutevolution de leurs pratiques

professionnelles Enfin dans lrsquohypothegravese drsquoune utilisation des TIC qui ne serait pas en

adeacutequation avec les obligations professionnelles des agents ou avec la charte informatique de

lrsquoeacutetablissement le directeur pourra sanctionner disciplinairement lrsquoagent fautif

A lrsquoinstar du CHRU de Lille qui srsquoest engageacute pleinement dans lrsquoaccompagnement et

le suivi du deacuteveloppement de lrsquoinformatisation des pratiques meacutedicales en son sein les

eacutetablissements de santeacute en srsquoinscrivant dans une telle deacutemarche en tireront de seacuterieux

beacuteneacutefices

411

Chapitre 2

Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

744 Le Centre Hospitalier Reacutegional Universitaire de Lille (CHRU) est un des plus grands

CHRU de France reacuteguliegraverement classeacute parmi les trois meilleurs hocircpitaux de France par les

diffeacuterents palmaregraves des hocircpitaux913

et positionneacute au 3egraveme rang franccedilais pour les eacutetudes et les

essais cliniques (SIGREC) En 2013 le CHRU de Lille disposait drsquoune capaciteacute drsquoun peu plus

de 3000 lits Son activiteacute repreacutesentait 199 956 prises en charge en hospitalisation 1 401 291

venues en consultation En termes de moyens humains le CHRU emploie 15 303

professionnels dont 7592 soignants et 3576 meacutedecins actifs ou en formation

745 Le CHRU de Lille intervient au sein drsquoune reacutegion qui avec environ 4 millions

dhabitants se caracteacuterise par une des plus importantes densiteacutes de population en France Il

repreacutesente un centre de recours essentiel au sein drsquoune reacutegion ougrave les indicateurs de santeacute de la

population sont en-deccedilagrave de la moyenne nationale Le CHRU de Lille assure eacutegalement un rocircle

majeur dans la permanence des soins notamment gracircce agrave son service drsquourgence qui a

comptabiliseacute en 2013 plus de 88 000 passages Enfin pour certaines activiteacutes de haute

speacutecialisation le CHRU de Lille est le seul eacutetablissement de prise en charge pour le Nord-

Pas-de-Calais voire de lrsquointerreacutegion Nord-Ouest

746 Le CHRU de Lille srsquoattache agrave ecirctre au cœur des innovations technologiques en

acqueacuterant un eacutequipement de pointe et en renouvelant reacuteguliegraverement son parc deacutequipement

biomeacutedical Il srsquoengage eacutegalement dans le deacuteveloppement de lrsquoutilisation des TIC et plus

particuliegraverement dans le cadre de la teacuteleacutemeacutedecine en deacuteveloppant une politique active en la

matiegravere En effet degraves 1991 il a mis en place une eacutequipe deacutedieacutee au deacuteveloppement des projets

de teacuteleacutemeacutedecine dans la reacutegion Aujourdrsquohui de nombreux reacuteseaux de teacuteleacutemeacutedecine ont eacuteteacute

mis en œuvre (TELURGE TELEEG TELEIMAGERIE LOGINAT Flandre Ophtalmo) et

de nouveaux projets sont actuellement agrave lrsquoeacutetude Crsquoest dans ce contexte particulier que

lrsquoeacutetablissement doit aujourdrsquohui deacutevelopper un SIH efficient seacutecuriseacute et peacuterenne

913 V notamment le classement effectueacute par Le Point chaque anneacutee Disponible sur [httpwwwlepointfr]

consulteacute le 20 mars 2017

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

412

747 En 2016 le CHRU de Lille ainsi que 40 autres eacutetablissements publics de santeacute ont eacuteteacute

cibleacutes par la Cour des comptes pour une eacutetude de leur systegraveme drsquoinformation914

Ce controcircle

du CHRU de Lille a fait lrsquoobjet drsquoun rapport rendu en juillet 2016 qui a servi agrave alimenter

lrsquoeacutetude nationale de la Cour des comptes sur lrsquoeacutetat du deacuteveloppement des SIH Ce fut

lrsquooccasion pour lrsquoeacutetablissement drsquoeffectuer son propre bilan Ainsi drsquoune maniegravere geacuteneacuterale

lrsquoorganisation interne du CHRU qursquoil srsquoagisse de la gouvernance de son SIH ou des projets

qursquoil deacuteveloppe deacutemontre la volonteacute de lrsquoeacutetablissement de seacutecuriser lrsquoutilisation des TIC en

santeacute en son sein (Section I) Par ailleurs le CHRU de Lille porte une attention toute

particuliegravere agrave la protection des donneacutees informatiseacutees (Section II)

914 Cour des comptes laquo La modernisation des systegravemes drsquoinformation hospitaliers une contribution agrave

lrsquoefficience du systegraveme de soins agrave renforcer raquo rapport annuel de la Cour des comptes sur lapplication des lois de

financement de la seacutecuriteacute sociale 2016

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

413

Section 1 Une volonteacute marqueacutee de seacutecuriser lrsquoutilisation des TIC en

santeacute

748 Afin de deacutevelopper une offre de soins performante le CHRU de Lille srsquoappuie de plus

en plus fortement sur son SIH qui est devenu un outil indispensable agrave tous les professionnels

dans leurs relations avec les patients mais eacutegalement entre eux Le SIH est eacutegalement un outil

preacutecieux dans la mise en place et le maintien de liens avec les professionnels et partenaires

exteacuterieurs Dans ce contexte le deacuteveloppement drsquoun SIH seacutecuriseacute est un enjeu fondamental

pour le CHRU de Lille qui doit assurer aux patients la seacutecuriteacute des soins dispenseacutes et la

confidentialiteacute des donneacutees qui les concernent mais eacutegalement garantir aux professionnels de

santeacute la disponibiliteacute de leurs outils informatiques

Crsquoest pourquoi le CHRU de Lille a choisi de structurer une partie de son organisation

autour de la seacutecuriteacute du SIH (Paragraphe I) tout en veillant agrave diffuser en son sein une culture

de la seacutecuriteacute informatique (Paragraphe II)

sect1 Une organisation interne tourneacutee vers la seacutecuriteacute du SIH

749 Le CHRU de Lille a tregraves vite fait le choix de mettre en place une strateacutegie lieacutee au

deacuteveloppement de son SIH A lrsquooccasion de la reacuteflexion portant sur le nouveau projet

drsquoeacutetablissement (projet 2012-2016) des dysfonctionnements lieacutes agrave la gestion des projets

informatiques avaient eacuteteacute constateacutes915

Lrsquoorganisation a alors eacuteteacute repenseacutee (A) afin de

permettre au CHRU de Lille de mettre en place une gestion optimale des projets lieacutes au

deacuteveloppement de son SIH Drsquoailleurs en matiegravere de seacutecuriteacute du SIH le CHRU a eu

lrsquooccasion de deacutevelopper plusieurs projets ambitieux (B) sur lesquels il est inteacuteressant de

srsquoarrecircter

915 Chambre reacutegionale des comptes laquo CHRU de Lille enquecircte systegraveme drsquoinformation hospitalier raquo rapport

drsquoobservations deacutefinitives mars 2016 p 9

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

414

A Preacutesentation de lrsquoorganisation du CHRU en matiegravere de SIH

750 Le CHRU de Lille a agrave cœur de srsquoassurer de la seacutecuriteacute de son systegraveme drsquoinformation

afin de garantir notamment la confidentialiteacute des donneacutees de santeacute de ses patients Par ailleurs

son statut de centre de recours et drsquoopeacuterateur drsquoimportance vitale au sens de la protection

civile lui impose de fortes exigences en matiegravere de seacutecuriteacute et de disponibiliteacute de ses

eacutequipements

Depuis plusieurs anneacutees son organisation interne reflegravete cette volonteacute de seacutecuriser les

pratiques en matiegravere de TIC en santeacute En matiegravere de gestion de son SIH il a ainsi mis en place

une gouvernance axeacutee autour de trois instances (1) et srsquoest doteacute de ressources speacutecifiques en

matiegravere de seacutecuriteacute Par ailleurs le CHRU de Lille a construit une veacuteritable strateacutegie autour du

deacuteveloppement de son SIH (2)

1) La gouvernance du SIH

751 Le CHRU de Lille a mis en place un scheacutema de gouvernance de la politique du

systegraveme drsquoinformation composeacute de trois instances le Deacutepartement des Ressources

Numeacuteriques (DRN) en charge du fonctionnement et de la coheacuterence du SIH le Comiteacute

Strateacutegique du Systegraveme drsquoInformation (CSSI) composeacute de membres de la Direction et en

charge de veacuterifier la coheacuterence strateacutegique du SIH avec lrsquoensemble des objectifs de

lrsquoeacutetablissement et enfin le Comiteacute Opeacuterationnel du Systegraveme drsquoInformation (COSI) qui veacuterifie

que les applications deacuteveloppeacutees reacutepondent correctement aux besoins des utilisateurs afin

drsquoecirctre reacuteellement utiliseacutees

Le COSI et le CSSI ont eacuteteacute particuliegraverement actifs lors de lrsquoeacutelaboration du Scheacutema

Directeur des Systegravemes drsquoInformation (SDSI) du CHRU de Lille Cependant une fois ce

scheacutema mis en place ces instances se sont moins reacuteunies916

La Chambre reacutegionale des

comptes relegraveve dans son rapport que le CSSI contrairement agrave son objectif afficheacute ne remplit

pas son rocircle de priorisation des projets et nrsquoest qursquoune instance de validation des propositions

formuleacutees par le COSI A titre drsquoexemple le CSSI nrsquoa jamais fait appel agrave des expertises ou

analyses gracircce auxquelles il aurait pu se prononcer sur la priorisation des projets agrave lrsquoappui de

916 Id p 10

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

415

critegraveres techniques ou eacuteconomiques objectiveacutes La Chambre a drsquoailleurs preacuteconiseacute de revoir

cette organisation agrave lrsquooccasion de la mise en place du prochain projet drsquoeacutetablissement du

CHRU de Lille917

752 Le DRN pour sa part est le fruit drsquoune reacutecente reacuteorganisation Ainsi lrsquoancienne

Direction des Systegravemes drsquoInformation (DSI) du CHRU de Lille a eacuteteacute reacuteorganiseacutee et a disparu

au profit drsquoune deacuteleacutegation directement rattacheacutee au Directeur geacuteneacuteral Cette reacuteorganisation a

eu pour objectif de donner plus de visibiliteacute aux chefs de projet informatique en creacuteant

notamment une sous-direction deacutedieacutee

753 Par ailleurs le CHRU de Lille dispose drsquoun Responsable de la Seacutecuriteacute du Systegraveme

drsquoInformation (RSSI) qui a la particulariteacute drsquoavoir eacutegalement la casquette de Correspondant

Informatique et Liberteacute (CIL) Ce dernier travaille en eacutetroite collaboration avec la Direction

des Affaires Juridiques (DAJ) Il a en charge la conception et lrsquoanimation de la deacutemarche

seacutecuriteacute du SIH en veillant notamment agrave ce que les niveaux de seacutecuriteacute soient conformes agrave la

reacuteglementation et aux normes applicables en la matiegravere Crsquoest agrave lui qursquoil revient de garantir la

seacutecuriteacute la disponibiliteacute et lrsquointeacutegriteacute du SIH de lrsquoeacutetablissement

Au CHRU de Lille le RSSI est accompagneacute dans ses missions par un prestataire

exteacuterieur dans le cadre notamment de la deacutemarche SMSSI engageacutee par le CHRU de Lille degraves

2011918

Son rocircle est essentiel puisque crsquoest lui qui sera garant de la coheacuterence des projets

envisageacutes avec la reacuteglementation applicable dans le domaine de la seacutecuriteacute informatique A ce

titre il valide par exemple lrsquoensemble des conventions passeacutees avec des prestataires de

service informatique sur le volet seacutecuriteacute

754 Enfin de maniegravere ponctuelle la DRN fait appel agrave la DAJ afin de seacutecuriser certains

projets A titre drsquoexemple la DAJ a eu lrsquooccasion drsquoaider agrave la reacutedaction des conventions de

teacuteleacutemeacutedecine lors de la mise en place ou du renouvellement de certains reacuteseaux de

teacuteleacutemeacutedecine Drsquoailleurs la DAJ est repreacutesenteacutee dans la plupart des comiteacutes de pilotages des

projets informatique (COPIL teacuteleacutemeacutedecine ou COPIL dossier patient par exemple) ou a

minima associeacutee au titre drsquoexpert

917 Chambre reacutegionale des comptes laquo CHRU de Lille enquecircte systegraveme drsquoinformation hospitalier raquo op cit p 9

918 V Infra ndeg 760 agrave 763

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

416

2) La gestion strateacutegique du SIH

755 Le CHRU de Lille a souhaiteacute geacuterer de maniegravere strateacutegique le deacuteveloppement de son

SIH Pour cela il a fait le choix de deacutevelopper un projet consacreacute au SIH faisant partie

inteacutegrante du projet drsquoeacutetablissement 2012-2016 Ainsi dans ce cadre le volet systegraveme

drsquoinformation du projet drsquoeacutetablissement est venu deacutefinir les orientations strateacutegiques du

CHRU de Lille en matiegravere de systegraveme drsquoinformation orientations elles-mecircmes deacuteclineacutees dans

le cadre du Scheacutema Directeur du Systegraveme drsquoInformation (SDSI)

Ce scheacutema directeur a pour ambition de deacutefinir les cibles agrave atteindre afin de soutenir

les objectifs strateacutegiques de lrsquoeacutetablissement en matiegravere de SI tout en tenant compte des

besoins exprimeacutes par les utilisateurs Ceux-ci avaient drsquoailleurs eacuteteacute recenseacutes en amont de

lrsquoeacutelaboration du projet SIH par le COSI Le SDSI permet eacutegalement drsquoeacutetablir un plan

drsquoaction permettant drsquoatteindre la cible fixeacutee par le bais drsquoune mise en œuvre progressive

mais peacuterenne du SIH Par ailleurs cela garantit une coheacuterence de lrsquoensemble du SIH

756 Afin drsquoeacutelaborer le SDSI le CHRU de Lille a deacutefini huit orientations strateacutegiques

elles-mecircmes deacuteclineacutees en objectifs opeacuterationnels Bien eacutevidemment la premiegravere orientation

fixeacutee concerne lrsquoameacutelioration de la qualiteacute et de la seacutecuriteacute de prise en charge du patient et

lrsquoaide agrave la prise de deacutecision meacutedicale et soignante par le biais du systegraveme drsquoinformation

hospitalier Le but ici est de deacutevelopper la prise en charge des patients par le biais des TIC en

deacuteveloppant notamment les logiciels drsquoaide agrave la deacutecision meacutedicale mais eacutegalement la

prescription informatiseacutee dans le cadre du circuit du meacutedicament La deuxiegraveme orientation

concerne le deacuteveloppement drsquoun SIH contribuant agrave la performance meacutedico-eacuteconomique de

lrsquoeacutetablissement En effet faciliter la diffusion de donneacutees fiables dans le cadre du PMSI est un

enjeu strateacutegique important pour lrsquoeacutetablissement de santeacute Le deacuteveloppement drsquoun SIH

efficace en la matiegravere est donc neacutecessaire La troisiegraveme orientation concerne le patient de

maniegravere plus directe puisqursquoil srsquoagit pour le SIH de permettre au patient drsquoecirctre un acteur de

sa prise en charge et de proposer une prise en charge personnaliseacutee et globale A ce titre le

CHRU de Lille srsquoest engageacute dans la creacuteation et la mise en place drsquoune plate-forme patient

accessible depuis Internet et par laquelle les patients pourront prendre des RDV en ligne

Le systegraveme drsquoinformation doit eacutegalement permettre de faciliter la continuiteacute drsquoaccegraves

notamment agrave lrsquoexteacuterieur de lrsquoeacutetablissement (orientation ndeg 4) venir en appui des activiteacutes de

recherche des professionnels de lrsquoeacutetablissement (orientation ndeg 5) et permettre agrave

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

417

lrsquoeacutetablissement de remplir sa mission hospitalo-universitaire en matiegravere drsquoenseignement

(orientation ndeg 6) Drsquoune maniegravere plus pratique le SIH doit garantir la seacutecuriteacute des donneacutees et

pouvoir fonctionner en continue afin que les applications soient toujours accessibles

(orientation ndeg 7) Enfin le CHRU doit mettre en place un SIH ergonomique pour ses agents

afin drsquoameacuteliorer leurs conditions de travail (orientation ndeg 8)

Lrsquoensemble de ces orientations ont eacuteteacute mises en œuvre aux travers notamment du

deacuteveloppement de cinq projets informatiques identifieacutes comme eacutetant prioritaires le projet

Circuit informatiseacute du meacutedicament et des produits de santeacute le projet Informatisation de la

production de soins le projet Systegraveme drsquoArchive et de Partage des Images (PACS) le projet

Informatisation des blocs opeacuteratoires et des sites interventionnels et le projet Multimeacutedia

au lit du patient

B Le deacuteveloppement de projets ambitieux relatifs agrave la seacutecuriteacute

757 Conscient des enjeux mais eacutegalement des fortes responsabiliteacutes qui pegravesent sur lui en

matiegravere de seacutecuriteacute informatique le CHRU de Lille a fait le choix de deacutevelopper des projets

ambitieux en matiegravere de seacutecuriteacute du SIH

Il nous semble utile de nous attarder plus particuliegraverement sur deux drsquoentre eux qui

ont particuliegraverement modifieacute lrsquoorganisation du CHRU en termes de seacutecuriteacute informatique le

projet carte drsquoeacutetablissement drsquoune part (1) et le projet Systegraveme de Management de la

Seacutecuriteacute des Systegravemes drsquoInformation (SMSSI) drsquoautre part (2)

1) Le projet carte drsquoeacutetablissement

758 Comme nous avons pu le constater pendant longtemps le leacutegislateur exigeait

lrsquoutilisation de la Carte de Professionnel de Santeacute (CPS) pour la transmission de donneacutees de

santeacute par voie eacutelectronique Afin de se mettre en conformiteacute avec les dispositions du deacutecret

confidentialiteacute le CHRU de Lille srsquoest engageacute degraves 2007 dans le deacuteploiement drsquoune carte

drsquoeacutetablissement Cette carte a pour objectif initial de concilier les exigences des textes de loi

et les contraintes du fonctionnement hospitalier Ainsi la carte drsquoeacutetablissement devait se

substituer agrave la CPS gracircce agrave des certificats constituant en quelque sorte une version

deacutemateacuterialiseacutee de la CPS et embarqueacutes sur la carte drsquoeacutetablissement Dans ce cadre le CHRU

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

418

de Lille eacutetait le site pilote national drsquoune deacutemarche drsquoexpeacuterimentation meneacutee par le

Groupement pour la Modernisation des Systegraveme drsquoInformation Hospitalier (GMSIH) le

Groupement drsquoInteacuterecirct Public des Cartes de Professionnels de Santeacute (GIP CPS) et la Direction

de lrsquoHospitalisation et de lrsquoOrganisation du Soin (DHOS)

759 Cette carte magneacutetique est une carte multi-usage qui controcircle lrsquoaccegraves au systegraveme

drsquoinformation permet lrsquoidentification lrsquoauthentification et la traccedilabiliteacute des accegraves au sein des

diffeacuterentes applications informatiques Mais elle permet eacutegalement un accegraves aux parkings aux

bacirctiments dont lrsquoaccegraves est limiteacute et au self Deacuteployeacutee de maniegravere tregraves large sur

lrsquoeacutetablissement cette carte est aujourdrsquohui remise de maniegravere systeacutematique aux nouveaux

employeacutes accompagneacutee de la charte drsquoutilisation de cette carte qui doit ecirctre signeacutee En

pratique la carte drsquoeacutetablissement permet non seulement de seacutecuriser lrsquoaccegraves au SIH et aux

donneacutees qursquoil contient mais eacutegalement drsquoassurer la traccedilabiliteacute des actions reacutealiseacutees au sein des

diffeacuterents logiciels qui composent le SIH Enfin elle permet aussi de signer eacutelectroniquement

les documents et de geacuterer plus facilement lrsquoensemble des droits drsquoaccegraves accordeacutes aux agents

Un second projet mis en place par le CHRU de Lille a eacutegalement retenu notre

attention

2) Le projet Systegraveme de Management de la Seacutecuriteacute du Systegraveme drsquoinformation (SMSSI)

760 Le Systegraveme de Management de la Seacutecuriteacute du Systegraveme drsquoInformation est un systegraveme

de gestion de lrsquoensemble des politiques mises en place dans le cadre de la seacutecuriteacute du SIH

Ce systegraveme permet de mettre en œuvre une deacutemarche ayant pour but de maicirctriser la seacutecuriteacute

du SIH Le SMSSI permet de garantir la disponibiliteacute et lrsquointeacutegriteacute du SIH mais eacutegalement de

garantir la confidentialiteacute des donneacutees sensibles et des traces informatiques Il permet

eacutegalement de faciliter les deacutemarches de certification de lrsquoeacutetablissement (la seacutecuriteacute du SI est

en effet eacutevalueacutee au travers du critegravere 5b) En termes drsquoaffichage enfin le SMSSI permet de

deacutemontrer lrsquoeffort de lrsquoeacutetablissement dans la garantie de la seacutecuriteacute de son SIH

761 Par principe un SMSSI est eacutelaboreacute selon une norme La plus connue en la matiegravere et

celle actuellement mise en œuvre au CHRU de Lille est la norme ISO 27001 Au CHRU de

Lille le projet SMSSI a eacuteteacute amorceacute en 2011 Il a deacutemarreacute par une phase drsquoeacutetude de 2011 agrave

2013 pendant laquelle un diagnostic et une analyse des risques ont eacuteteacute reacutealiseacutes Cette analyse

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

419

a eacuteteacute reacutealiseacutee agrave partir drsquoun diagnostic technique ainsi que des besoins de seacutecuriteacute identifieacutes lors

des diffeacuterentes reacuteunions de travail organiseacutees par lrsquoeacutequipe de prestataire en charge du projet

avec les diffeacuterents services du CHRU de Lille A lrsquoissue de cette analyse a eacuteteacute dresseacutee une

cartographie des risques de seacutecuriteacute lieacutes aux diffeacuterentes activiteacutes (production de soin

facturation hellip) et aux donneacutees du CHRU de Lille

762 Lrsquoensemble des travaux meneacutes dans le cadre du projet SMSSI a permis drsquoeacutelaborer un

reacutefeacuterentiel de seacutecuriteacute qui preacutesente les enjeux de la deacutemarche seacutecuriteacute les rocircles et

responsabiliteacute de lrsquoensemble des acteurs ainsi que les regravegles de seacutecuriteacute du SIH Ce reacutefeacuterentiel

seacutecuriteacute se compose de trois documents la Politique Geacuteneacuterale du Systegraveme drsquoInformation

(PGSSI) qui fixe les principes applicables en matiegravere de gouvernance de la seacutecuriteacute du SIH

les politiques opeacuterationnelles qui fixent les regravegles de seacutecuriteacute et la charte drsquoutilisation du SIH

qui rappelle les droits et obligations des utilisateurs du SIH Par ailleurs ce projet a eacuteteacute

lrsquooccasion de proposer une meacutethodologie dinteacutegration de la seacutecuriteacute dans les projets

permettant de garantir un niveau de seacutecuriteacute eacutequivalent pour lrsquoensemble des projets

deacuteveloppeacutes Deacutesormais lrsquoensemble des projets informatiques doivent donc ecirctre soumis agrave

lrsquoeacutequipe en charge de la seacutecuriteacute afin de reacutealiser une analyse de risques preacutealable Cela permet

donc drsquoassurer une ameacutelioration continue de la seacutecuriteacute du SIH au CHRU de Lille

763 Cette deacutemarche SMSSI est aujourdrsquohui renforceacutee par les nouvelles obligations

regraveglementaires qui pegravesent sur les eacutetablissements de santeacute en matiegravere de seacutecuriteacute de leur SIH

En effet face aux menaces pesant sur les SIH des eacutetablissements de santeacute et suite agrave quelques

incidents graves de seacutecuriteacute919

le leacutegislateur est venu renforcer le cadre juridique applicable

en la matiegravere Ainsi la loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute920

a introduit au sein du

Code de la santeacute publique un article L 1111-8-2 qui preacutevoit que laquo les eacutetablissements de santeacute

et les organismes et services exerccedilant des activiteacutes de preacutevention de diagnostic ou de soins

signalent sans deacutelai agrave lrsquoagence reacutegionale de santeacute les incidents graves de seacutecuriteacute des

systegravemes drsquoinformation raquo Le deacutecret ndeg2016-1214 du 12 septembre 2016 relatif aux conditions

919 Selon le Ministegravere des Affaires Sociales plus de 1300 attaques informatiques contre des eacutetablissements de

santeacute ont eacuteteacute recenseacutees en 2015 dont 18 attaques cibleacutees Chiffres disponibles sur [httpwwwticsantecom]

consulteacutes le 20 mars 2017 Les eacutetablissements de santeacute sont particuliegraverement cibleacutes par les attaques de type

ranconware qui visent agrave paralyser lrsquoensemble du SIH et bloquer lrsquoaccegraves aux donneacutees tant que nrsquoest pas verseacutee

une ranccedilon 920

Loi ndeg 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre systegraveme de santeacute JORF ndeg 0022 du 27 janvier

2016 texte ndeg 1

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

420

selon lesquelles sont signaleacutes les incidents graves de seacutecuriteacute des systegravemes drsquoinformation921

preacutecise quant agrave lui les conditions et modaliteacutes de mise en œuvre du signalement des incidents

graves de seacutecuriteacute des systegravemes drsquoinformation Selon ce texte laquo sont consideacutereacutes comme

incidents graves de seacutecuriteacute des systegravemes dinformation les eacuteveacutenements geacuteneacuterateurs dune

situation exceptionnelle au sein dun eacutetablissement organisme ou service et notamment les

incidents ayant des conseacutequences potentielles ou aveacutereacutees sur la seacutecuriteacute des soins les

incidents ayant des conseacutequences sur la confidentialiteacute ou linteacutegriteacute des donneacutees de santeacute

les incidents portant atteinte au fonctionnement normal de leacutetablissement de lorganisme ou

du service raquo Nous ne pouvons toutefois que constater le caractegravere impreacutecis de la deacutefinition de

la notion drsquoincident grave Le RSSI aura donc un rocircle majeur agrave jouer dans ce cadre puisqursquoil

lui appartiendra de conseiller le directeur geacuteneacuteral de lrsquoeacutetablissement en charge de la

deacuteclaration des incidents aupregraves de lrsquoARS Celle-ci pour sa part sera chargeacutee de faire

remonter aupregraves de lrsquoASIP santeacute parmi ces incidents ceux qursquoelle aura qualifieacute de

significatifs crsquoest-agrave-dire ceux laquo ayant un retentissement potentiel ou aveacutereacute sur lorganisation

deacutepartementale reacutegionale ou nationale du systegraveme de santeacute et les incidents susceptibles de

toucher dautres eacutetablissements organismes ou services raquo A noter que ces dispositions

nrsquoentreront en vigueur qursquoagrave compter du 1er

octobre 2017

Le projet SMSSI est donc un projet majeur du CHRU de Lille dans la seacutecurisation de

son SIH

921 Deacutecret ndeg 2016-1214 du 12 septembre 2016 relatif aux conditions selon lesquelles sont signaleacutes les incidents

graves de seacutecuriteacute des systegravemes dinformation JORF ndeg0214 du 14 septembre 2016 texte ndeg 15

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

421

sect2 La diffusion drsquoune culture de la seacutecuriteacute informatique

764 La seacutecuriteacute du SIH nrsquoest pas seulement lrsquoaffaire du directeur de lrsquoeacutetablissement de

santeacute Tous les utilisateurs du SIH doivent y participer et crsquoest pourquoi le CHRU de Lille

srsquoattache agrave diffuser une veacuteritable culture de la seacutecuriteacute informatique aupregraves de ses agents Pour

cela le CHRU de Lille sensibilise au quotidien ses agents par le biais de diffeacuterentes actions

de formation et de communication (A) Par ailleurs le CHRU de Lille a mis en place une

regraveglementation interne par le biais de chartes informatiques afin de rappeler aux agents leurs

obligations en matiegravere drsquoutilisation du SIH (B)

A La sensibilisation des utilisateurs du SIH

Les utilisateurs du SIH du CHRU de Lille sont reacuteguliegraverement sensibiliseacutes aux enjeux

lieacutes agrave la seacutecuriteacute Cette sensibilisation passe par des actions de formation (1) mais eacutegalement

par des actions de communications cibleacutees (2)

1) Les formations

765 Le CHRU de Lille a souhaiteacute sensibiliser ses agents agrave la question de la seacutecuriteacute du SIH

et aux risques encourus en cas de mauvaises pratiques Ces formations ont pris plusieurs

formes afin de toucher le plus grand nombre drsquoagents

Drsquoabord agrave chaque journeacutee drsquoaccueil des nouveaux recruteacutes ainsi qursquoagrave la session

drsquoaccueil des nouveaux internes une preacutesentation relative aux bons usages des outils

informatiques et notamment de la carte drsquoeacutetablissement est reacutealiseacutee Les principes de base

lieacutes agrave la seacutecuriteacute du SIH (mot de passe fort ne pas precircter ses identifiants hellip) sont alors

rappeleacutes

Puis de maniegravere ponctuelle la Direction des Affaires Juridiques est ameneacutee agrave

dispenser des formations sur ce sujet Celles-ci ont plutocirct pour but de rappeler aux agents les

regravegles applicables en matiegravere de confidentialiteacute et de secret professionnel dans le cadre de

lrsquousage des TIC en santeacute Ces formations sont programmeacutees en fonction des demandes des

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

422

services et peuvent ecirctre adapteacutees soit au public concerneacute soit aux probleacutematiques

rencontreacutees par le service Cette formule permet plus de souplesse mais aussi une meilleure

reacuteactiviteacute face aux besoins des eacutequipes Elle permet eacutegalement drsquoadapter le message deacutelivreacute

A titre drsquoexemple les formations suivantes ont pu ecirctre dispenseacutees confidentialiteacute et systegraveme

drsquoinformation la confidentialiteacute ou encore le secret professionnel

En 2016 une demande plus particuliegravere srsquoest deacuteveloppeacutee au sein des services la

formation relative aux bons usages des reacuteseaux sociaux En effet les services ont pu constater

une augmentation des meacutesusages lieacutes agrave lrsquoutilisation des reacuteseaux sociaux Une offre speacutecifique

agrave cette probleacutematique srsquoest donc deacuteveloppeacutee

Par ailleurs en 2015 le CIL en lien avec la Direction des Affaires Juridiques avait

proposeacute plusieurs sessions de formation sur la theacutematique rappel des obligations en matiegravere

drsquoaccegraves au dossier meacutedical Ces sessions avaient pour but drsquoune part de rappeler la

leacutegislation applicable en matiegravere de secret professionnel et drsquoautre part celle relative agrave la Loi

Informatique et Liberteacutes Plusieurs creacuteneaux drsquoune heure trente avec inscription libre ont eacuteteacute

programmeacutes Malheureusement cette formation nrsquoa susciteacute que peu drsquoinscriptions et lrsquoaction

nrsquoa pas eacuteteacute reconduite sur 2016

Enfin dans le cadre de la deacutemarche SMSSI une plateforme e-learning deacutedieacutee agrave la

seacutecuriteacute SI a eacuteteacute mise agrave disposition des agents du CHRU de Lille afin de les accompagner

dans le deacuteveloppement de bonnes pratiques et les sensibiliser agrave la seacutecuriteacute

A ces actions de formation des agents srsquoajoutent des actions de communication

interne

2) Les actions de communication

766 Le RSSI du CHRU de Lille en lien avec son eacutequipe seacutecuriteacute et dans le cadre du projet

SMSSI organise de faccedilon reacuteguliegravere des actions de communication en lien avec la seacutecuriteacute du

SIH Ainsi reacuteguliegraverement des e-mails sont transmis agrave lrsquoensemble des agents posseacutedant une

boite professionnelle afin de leur rappeler commun reacuteagir face agrave un e-mail suspect Cette

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

423

action permet drsquoeacuteviter les tentatives de phishing922

ou de ranconware en invitant les

utilisateurs du SIH agrave signaler ce genre de courriel au RSSI

Le RSSI a eacutegalement eu lrsquooccasion de mettre en place une campagne de

communication intituleacutee lrsquoordinateur agrave lrsquohocircpital ce nrsquoest pas comme agrave la maison qui avait

pour but de rappeler les regravegles de bonne utilisation des outils informatiques De mecircme un

espace deacutedieacute agrave la seacutecuriteacute du systegraveme dinformation a eacuteteacute mis en place sur le site Intranet du

CHRU de Lille regroupant notamment des fiches de bonnes pratiques de seacutecuriteacute SI agrave

destination des professionnels

Il a eacutegalement mis agrave disposition de ses personnels six bornes de deacutecontamination de

cleacutes USB avec six antivirus mis agrave jour tous les quarts drsquoheure

Lrsquoensemble de ces deacutemarches permet de diffuser au sein du CHRU de Lille une

veacuteritable culture de la seacutecuriteacute informatique Ainsi chaque agent participe agrave son niveau agrave

maintenir lrsquointeacutegriteacute la seacutecuriteacute et la confidentialiteacute des donneacutees

En parallegravele de la sensibilisation des agents le CHRU de Lille a souhaiteacute reacutediger des

chartes informatiques

B La mise en place de chartes informatiques

767 En 2012 le RSSI en lien eacutetroit avec la Direction des Affaires Juridiques et appuyeacute

par une socieacuteteacute de conseil exteacuterieure a reacutedigeacute quatre chartes informatiques afin drsquoencadrer

lrsquoutilisation du SIH Ces chartes ont pour objet de fixer les regravegles drsquoutilisation du systegraveme

drsquoinformation hospitalier Elles ont eacuteteacute mises en place dans le cadre du projet SMSSI et en

lien avec la Politique de Seacutecuriteacute des Systegravemes drsquoInformation Ces quatre chartes srsquoadressent

agrave quatre types drsquoacteurs diffeacuterents

922 Le phishing (hameccedilonnage ou filoutage) est une technique par laquelle des personnes malveillantes se font

passer pour de grandes socieacuteteacutes ou des organismes financiers qui vous sont familiers en envoyant des megravels

frauduleux et reacutecupegraverent des mots de passe de comptes bancaires ou numeacuteros de cartes de creacutedit pour deacutetourner

des fonds Deacutefinition du ministegravere de lrsquoeacuteconomie et des finances

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

424

La premiegravere srsquoadresse agrave lrsquoensemble des agents du CHRU de Lille appeleacutes agrave utiliser le

SIH Elle est annexeacutee au regraveglement inteacuterieur du CHRU et agrave ce titre dispose de la mecircme force

Elle est par ailleurs accessible aux agents via lrsquoIntranet de lrsquoeacutetablissement La deuxiegraveme

srsquooppose aux tiers exteacuterieurs au CHRU de Lille et qui dans le cadre de prestations de service

seraient ameneacutees agrave acceacuteder au SIH du CHRU Cette charte est systeacutematiquement annexeacutee aux

contrats de prestations de service

La troisiegraveme charte concerne une population plus speacutecifique puisqursquoelle srsquoapplique aux

administrateurs (administrateurs des reacuteseaux drsquoapplications informatiques de bases de

donneacuteeshellip) qursquoils soient internes au CHRU de Lille ou prestataire de service

Enfin la derniegravere charte concerne lrsquoinfogeacuterant du CHRU de Lille crsquoest-agrave-dire le prestataire en

charge de la gestion lrsquoexploitation lrsquooptimisation et la seacutecurisation du systegraveme drsquoinformation

du CHRU de Lille

768 Lors de leur mise en place ces chartes ont toutes suivi le mecircme processus drsquoeacutelaboration

et ce afin de leur confeacuterer une force contraignante Ainsi elles ont fait drsquoabord lrsquoobjet drsquoune

preacutesentation pour information au sein de lrsquoinstance repreacutesentative du personnel de

lrsquoeacutetablissement (Comiteacute Technique drsquoEtablissement) Puis apregraves avoir eacuteteacute eacutegalement

soumises agrave lrsquoapprobation du directoire elles ont eacuteteacute annexeacutees au regraveglement inteacuterieur de

lrsquoeacutetablissement et publieacutees sur le site Intranet de lrsquoeacutetablissement Ces chartes qui constituent

une source de droit dit mou permettent ainsi au CHRU de Lille de donner une force

contraignante aux regravegles qursquoil a souhaiteacute mettre en place en son sein Une violation de celles-

ci pourrait entrainer une sanction disciplinaire dans le cadre des agents ou une rupture du

contrat pour les prestataires de services

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

425

Conclusion de section

769 Le CHRU de Lille conscient des enjeux lieacutes agrave la seacutecuriteacute et au bon fonctionnement de

son SIH a mis en place une organisation tourneacutee vers la seacutecuriteacute A lrsquooccasion de

lrsquoeacutelaboration de son projet drsquoeacutetablissement il srsquoest ainsi inscrit dans une gestion strateacutegique

du deacuteveloppement de son SIH srsquoattachant agrave mettre en place un SIH agrave la fois efficace et

seacutecuriseacute Ainsi sa gouvernance interne repose sur des instances en charge de la coheacuterence de

lrsquoensemble des projets informatiques et lrsquoeacutetablissement de santeacute a fait le choix de creacuteer un

poste de RSSI directement en charge de la seacutecuriteacute du SIH Par ailleurs lrsquoensemble du

deacuteveloppement du SIH est penseacute de maniegravere strateacutegique et directement inteacutegreacute au projet

drsquoeacutetablissement Dans ce contexte le CHRU de Lille a notamment deacuteveloppeacute deux projets

ambitieux le projet carte drsquoeacutetablissement drsquoune part et le projet SMSSI drsquoautre part

Le CHRU de Lille srsquoattache eacutegalement agrave sensibiliser lrsquoensemble des utilisateurs de son SIH

aux enjeux lieacutes agrave la seacutecuriteacute de celui-ci Plusieurs actions ont donc eacuteteacute deacuteveloppeacutees dans ce

sens

Drsquoabord le CHRU forme ses agents reacuteguliegraverement aux questions lieacutees agrave la seacutecuriteacute du

SIH mais eacutegalement au bon respect de la confidentialiteacute Des campagnes de sensibilisation

sont reacuteguliegraverement mises en œuvre afin de rappeler reacuteguliegraverement aux agents les bonnes

pratiques agrave appliquer Par ailleurs il a mis en place des chartes informatiques agrave valeur

contraignante afin de rappeler aux utilisateurs du SIH leurs obligations en matiegravere

drsquoutilisation des TIC

Ainsi le CHRU de Lille de par son organisation interne mais eacutegalement au travers

des diffeacuterentes actions de communication et de sensibilisation qursquoil megravene deacutemontre sa

volonteacute de seacutecuriser lrsquoutilisation des TIC en santeacute par ses agents

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

426

Section 2 Une volonteacute affirmeacutee de proteacuteger les donneacutees de santeacute

770 En tant que centre hospitalier universitaire le CHRU de Lille est ameneacute agrave produire une

quantiteacute importante de donneacutees de santeacute sous forme deacutemateacuterialiseacutee Ces donneacutees neacutecessaires

agrave la bonne prise en charge des patients preacutesentent eacutegalement un inteacuterecirct non neacutegligeable pour

la recherche en santeacute Il est donc neacutecessaire pour le CHRU de Lille de srsquoassurer que la

fiabiliteacute lrsquointeacutegriteacute et surtout la confidentialiteacute de ces donneacutees soient maintenues

En ce qui concerne plus particuliegraverement la confidentialiteacute le CHRU de Lille a fait le

choix drsquoecirctre innovant et de confier cette mission agrave une commission creacuteeacutee speacutecifiquement

pour cela La mecircme logique a eacuteteacute adopteacutee en ce qui concerne la gestion des deacutemarches CNIL

(paragraphe 1) Ces commissions et plus particuliegraverement la Commission Confidentialiteacute de

lrsquoInformation Meacutedicale (CCIM) preacutesentent un bilan drsquoaction assez positif (paragraphe 2)

sect1 La creacuteation de structures adrsquohoc pour geacuterer la confidentialiteacute des

donneacutees de santeacute

771 Afin de reacutepondre correctement aux nombreuses questions agrave la fois juridiques et

techniques que pose le deacuteveloppement du systegraveme drsquoinformation hospitalier et plus

particuliegraverement la mise en place du dossier meacutedical informatiseacute le CHRU de Lille a fait le

choix de creacuteer deux commissions internes agrave composition pluridisciplinaire afin de trancher

les questions en suspens

Crsquoest ainsi que dans un premier temps la commission confidentialiteacute de lrsquoinformation

meacutedicale (CCIM) a eacuteteacute installeacutee en 2011 (1) Puis dans un cadre plus speacutecifique afin drsquoaider

le CIL dans ses missions une commission informatique et liberteacute a eacuteteacute creacuteeacutee en 2016 (2)

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

427

A La Commission Confidentialiteacute de lrsquoInformation Meacutedicale (CCIM)

La CCIM a eacuteteacute creacuteeacutee pour reacutepondre agrave un besoin accru de srsquoassurer de la confidentialiteacute

des donneacutees au moment ougrave le CHRU de Lille deacuteveloppait son dossier patient informatiseacute (1)

Au fil des ans son organisation et ses missions ont eacuteteacute ameneacutees agrave eacutevoluer (2)

1) Contexte de la creacuteation de la CCIM

772 En 2010 dans une logique drsquoinformatisation croissante de la pratique meacutedicale le

CHRU de Lille a entameacute le deacuteploiement drsquoun nouveau logiciel de gestion du dossier patient

informatiseacute Le choix opeacutereacute a eacuteteacute celui drsquoen faire le logiciel pivot du SIH autour duquel les

autres applications informatiques devront srsquoorganiser La mise en place de ce logiciel a alors

neacutecessiteacute une reacuteflexion relative agrave lrsquoattribution des droits drsquoaccegraves en son sein Non seulement

ces droits devaient ecirctre en adeacutequation avec les besoins des diffeacuterents agents selon leur

fonction mais eacutegalement avec les regravegles juridiques applicables en matiegravere de secret

professionnel En theacuteorie il suffisait drsquoappliquer les regravegles relatives au secret partageacute agrave

lrsquoeacutequipe de soins tel que deacutefini agrave lrsquoarticle L 1110-4 du Code de la santeacute publique Cependant

la traduction de ce principe juridique dans le cadre drsquoune matrice technique des droits drsquoaccegraves

srsquoest reacuteveacuteleacutee ecirctre plus complexe que preacutevue

773 Initialement cette mission a eacuteteacute confieacutee agrave un groupe de travail composeacute en majoriteacute

de meacutedecins de meacutedecins du Deacutepartement de lrsquoInformation Meacutedicale de techniciens de la

direction des systegravemes drsquoinformation des repreacutesentants du prestataire fournisseur de la

solution logicielle et du Directeur des affaires juridiques Ce groupe de travail a eu agrave preacuteciser

pour chaque profil utilisateur le contenu accessible crsquoest-agrave-dire agrave quelles parties du dossier le

profil est susceptible de donner accegraves et le peacuterimegravetre accessible crsquoest-agrave-dire agrave quel niveau de

structure ce profil permet drsquoacceacuteder (ensemble de lrsquoeacutetablissement pocircle ou service) Cette

matrice des droits drsquoaccegraves a eacuteteacute ensuite valideacutee par lrsquoensemble des instances du CHRU de

Lille et ce afin de pouvoir ecirctre parfaitement opposable agrave lrsquoensemble des utilisateurs

A lrsquooccasion du deacuteploiement de ce logiciel et de lrsquoapplication effective des regravegles drsquoaccegraves

des difficulteacutes sont apparues quant au bon respect de la confidentialiteacute des donneacutees de santeacute

Par ailleurs alors qursquoil appartenait agrave la commission meacutedicale drsquoeacutetablissement de trancher

lrsquoensemble des questions lieacutees agrave la confidentialiteacute des donneacutees meacutedicales informatiseacutees ce

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

428

dispositif a vite montreacute des limites les reacuteponses apporteacutees nrsquoeacutetant pas suffisamment concregravetes

et rapides Se posaient notamment les questions concregravetes relatives agrave la gestion des rendez-

vous meacutedicaux des deacutetenus visibles dans le logiciel agrave lrsquoaccegraves aux dossiers meacutedicaux des

personnels du CHRU par leurs collegravegues accegraves constateacute de maniegravere reacutecurrente ou encore agrave la

neacutecessiteacute de rendre strictement confidentiel lrsquoaccegraves agrave certains services (comme la psychiatrie

ou encore les consultations meacutedico-judiciaires)

774 En parallegravele il est tregraves vite apparu clairement que le praticien responsable de

linformation meacutedicale923

pour assurer au mieux son rocircle de conseil aupregraves du Directeur

Geacuteneacuteral en matiegravere de confidentialiteacute devait ecirctre assisteacute dans ses missions En effet le

meacutedecin responsable de lrsquoinformation meacutedicale ne pouvait seul assumer ces missions de

conseil pour lesquelles une reacuteponse juridique eacutethique mais aussi technique eacutetait neacutecessaire

Ainsi il a eacuteteacute deacutecideacute de creacuteer une structure adrsquohoc chargeacutee drsquoanalyser les interrogations

portant sur la confidentialiteacute des donneacutees meacutedicales et de mettre en place les proceacutedures

neacutecessaires pour en garantir le respect

La commission confidentialiteacute de lrsquoinformation meacutedicale ndash CCIM ndash srsquoest ainsi reacuteunie

pour la premiegravere fois le 29 mars 2011

775 Le choix a eacuteteacute fait de placer cette commission sous lrsquoautoriteacute directe du Directeur

Geacuteneacuteral eacutetant entendu qursquoelle devrait preacutesenter un bilan de son activiteacute devant la CME Par

ailleurs agrave deacutefaut de consensus au sein du groupe sur la solution agrave mettre en place les

difficulteacutes persistantes eacutetant soumises pour avis agrave la CME avec les solutions envisageables

de maniegravere agrave ce que le Directeur Geacuteneacuteral puisse ensuite arrecircter les mesures agrave prendre

conformeacutement aux dispositions de lrsquoarticle R 6113-6 du Code de la santeacute publique La

commission srsquoest donc vue confier agrave lrsquoorigine un rocircle de conseil et drsquoeacuteclairage vis-agrave-vis du

Directeur Geacuteneacuteral

923 Selon les dispositions de lrsquoarticle R 6113-6 du Code de la santeacute publique le meacutedecin responsable de

lrsquoinformation meacutedicale conseille le directeur geacuteneacuteral de lrsquoeacutetablissement sur la dureacutee de conservation des archives

meacutedicales la reacuteception des demandes des usagers concernant leur droit drsquoaccegraves et de rectification preacutevu par la

loi informatique et liberteacutes du 6 janvier 1978 et les droits drsquoaccegraves aux donneacutees meacutedicales nominatives ou

lrsquoeacutelimination des dossiers archiveacutes Par ailleurs mecircme si crsquoest au directeur geacuteneacuteral qursquoil appartient de prendre

toutes dispositions utiles pour preacuteserver la confidentialiteacute des donneacutees meacutedicales nominatives notamment en ce

qui concerne les drsquoattribution et de controcircle des autorisations drsquoaccegraves ceci doit se faire en lien avec le Preacutesident

de la CME et le meacutedecin responsable de lrsquoinformation meacutedicale

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

429

776 Cette structure agrave majoriteacute meacutedicale est piloteacutee par le meacutedecin responsable de

lrsquoinformation meacutedicale et composeacutee drsquoun meacutedecin en charge du dossier patient un meacutedecin

repreacutesentant du comiteacute opeacuterationnel du systegraveme drsquoinformation COSI un meacutedecin deacutesigneacute par

la CME un repreacutesentant de la sous-commission qualiteacute et seacutecuriteacute des soins un repreacutesentant

de la coordination geacuteneacuterale de soins un repreacutesentant de la direction du systegraveme drsquoinformation

hospitalier le correspondant CNIL et un repreacutesentant de la direction des affaires juridiques

A lrsquoensemble de ces membres peuvent ecirctre associeacutees de maniegravere ponctuelle des personnes

ressources sur certains sujets tel que le responsable des archives ou le repreacutesentant des

secreacutetaires meacutedicales par exemple

2) Missions et eacutevolution de la CCIM

777 Les premiers travaux de la CCIM ont avanceacute difficilement Assez rapidement la

commission srsquoest trouveacutee en charge de nombreuses questions strateacutegiques agrave reacutesoudre sans en

avoir ni le pouvoir ni la leacutegitimiteacute pour trancher correctement et efficacement ces questions

En effet cette commission qui nrsquoavait initialement qursquoun rocircle drsquoeacuteclairage a commenceacute agrave

rendre des avis sans aucune force contraignante ni reacuteelle leacutegitimiteacute Par ailleurs agrave lrsquooccasion

de ses rapports drsquoactiviteacute la CCIM a constateacute que des risques majeurs existaient en termes de

respect de la confidentialiteacute des donneacutees de santeacute lieacutes agrave la fois agrave lrsquoorganisation des droits

drsquoaccegraves aux diffeacuterentes applications du SIH ainsi qursquoagrave lrsquoabsence totale de suivi et drsquoanalyse

des accegraves aux donneacutees par les utilisateurs

778 Elle a donc souhaiteacute proposer une reacuteorientation de ses prioriteacutes ainsi une augmentation

de ses moyens En 2014 soit trois ans apregraves sa mise en place la CCIM a formuleacute agrave lrsquointention

de la Direction geacuteneacuterale du CHRU de Lille une proposition de fonctionnement en termes de

gestion de la confidentialiteacute meacutedicale Lrsquoorganisation proposeacutee reposait sur drsquoune part une

gestion de la confidentialiteacute au sein du SIH par le deacutepartement de lrsquoinformation meacutedicale

avec lrsquoappui et la validation systeacutematique de la CCIM et drsquoautre part sur la gestion

opeacuterationnelle assureacutee par le Deacutepartement de lrsquoinformation meacutedicale en lien avec lrsquoensemble

des directions techniques compeacutetentes (et notamment la direction des ressources numeacuteriques)

Lrsquoensemble des actions agrave mener pour aboutir agrave une organisation optimiseacutee et peacuterenne en

matiegravere de gestion de la confidentialiteacute ainsi que les moyens humains et financiers agrave

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

430

mobiliser eacutetait eacutegalement preacuteciseacute dans cette proposition Cependant bien que la direction

geacuteneacuterale de lrsquoeacutetablissement ait agrave maintes reprises reacuteaffirmeacute le besoin drsquoorganiser la gestion

de la confidentialiteacute et a confirmeacute le rocircle preacutepondeacuterant de la CCIM en la matiegravere aucune

preacutesentation en Directoire du projet nrsquoa eu lieu

779 Toutefois la CCIM a continueacute sa reacuteorganisation afin de poursuivre au mieux ses

travaux Crsquoest ainsi que 4 nouveaux grands axes de travail ont eacuteteacute redeacutefinis la deacutefinition des

droits drsquoaccegraves la gestion de ces droits lrsquoanalyse des pratiques et des traces drsquoaccegraves et enfin

lrsquoinformation et la communication autour de la confidentialiteacute En parallegravele la Deacutepartement

de lrsquoInformation Meacutedicale a obtenu la creacuteation drsquoun poste de meacutedecin agrave 60 consacreacute agrave la

confidentialiteacute Le redimensionnent des attributions et des moyens de la CCIM a permis de

donner une toute nouvelle envergure agrave cette commission dont les travaux ont eacuteteacute plus riches

sur les anneacutees 2015 et 2016

Cette commission est ameneacutee agrave eacutevoluer dans les anneacutees agrave venir sa charge de travail et

son champ drsquoaction ne cessant drsquoaugmenter Une organisation plus structureacutee doit ecirctre mise

en place et sa leacutegitimiteacute doit ecirctre deacutefinitivement ancreacutee

B Le Comiteacute CNIL

780 Le CHRU de Lille bien que doteacute drsquoun agent occupant la fonction de Correspondant

Informatique et Liberteacutes agrave 50 de son temps nrsquoarrivait pas agrave faire face agrave lrsquoensemble des

formaliteacutes exigeacutees en la matiegravere Tregraves rapidement la Direction des Affaires Juridiques et le

CIL ont travailleacute en eacutetroite collaboration afin drsquoameacuteliorer le respect des regravegles en la matiegravere

En ce sens et comme nous lrsquoavons vu preacuteceacutedemment une campagne de sensibilisation par le

biais de formations avait eacuteteacute mise en place sans reacuteel succegraves Par ailleurs afin de satisfaire agrave

lrsquoobligation leacutegale drsquoinformation des patients relative aux traitements de donneacutees les

concernant une information par voie drsquoaffichage drsquoune part et par le biais du livret

drsquoaccueil drsquoautre part a eacuteteacute reacutealiseacutee Cependant face agrave la techniciteacute et agrave la reacutecurrence de

certaines probleacutematiques (notamment lieacutees agrave lrsquoencadrement de la recherche en santeacute) il a eacuteteacute

deacutecideacute de creacuteer un comiteacute deacutedieacute veacuteritable dispositif transverse au cocircteacute du Correspondant

Informatique et Liberteacutes permettant de garantir la protection des donneacutees agrave caractegravere

personnel notamment par des actions en amont telle que lrsquoeacutelaboration des mesures adapteacutees agrave

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

431

la protection des donneacutees mais eacutegalement des action concregravetes comme lrsquoinstruction des

demandes speacutecifiques ou complexes et bien entendu le suivi des eacutevolutions leacutegislatives et

regraveglementaires sur la question particuliegraverement fournies ces derniegraveres anneacutees

781 Ce comiteacute a eacuteteacute penseacute par le CIL comme une eacutemanation de la CCIM Ainsi on

retrouve dans la composition de ce comiteacute des membres eacutegalement preacutesents agrave la CCIM

(notamment le DIM et la Direction des Affaires Juridiques) Sa composition est

multidisciplinaire avec toutefois une forte repreacutesentation des acteurs de la recherche

meacutedicale et notamment les coordonnateurs des attacheacutes de recherches cliniques en prise

directe avec les deacutemarches CNIL et les probleacutematiques qursquoelles peuvent poser

Tregraves pragmatique ce comiteacute entend apporter des reacuteponses pratiques aux questions qui

lui sont soumises Il participe agrave la diffusion de lrsquoinformation en matiegravere de leacutegislation

Informatique et Liberteacutes Ainsi agrave lrsquooccasion de la publication des meacutethodologies de reacutefeacuterence

le comiteacute a travailleacute agrave lrsquoeacutelaboration drsquoun support drsquoinformation

782 Son premier chantier a consisteacute en un travail de simplification des deacutemarches CNIL au

sein de lrsquoeacutetablissement Au CHRU de Lille un accegraves Intranet agrave une rubrique deacutedieacutee est mise

en place depuis plusieurs anneacutees Cependant les deacuteclarations de traitement nrsquoeacutetaient pas

nombreuses par manque de visibiliteacute et de clarteacute de cette rubrique Par ailleurs les deacutemarches

pouvaient parfois paraitre trop longues ou fastidieuses pour les responsables de traitement

(notamment dans le cas des thegraveses) qui preacutefeacuteraient les contourner Ainsi le premier travail du

Comiteacute CNIL a eacuteteacute drsquoameacuteliorer cette proceacutedure Le formulaire de deacuteclaration a eacuteteacute modifieacute et

des questions plus preacutecises ont eacuteteacute ajouteacutees permettant de qualifier plus facilement le

traitement (notamment pour la recherche) et de limiter les demandes de preacutecisions aupregraves du

deacuteclarant

Une nette eacutevolution des deacuteclarations a alors eacuteteacute observeacutee Ainsi en mars 2017 une

augmentation de 44 des deacuteclarations par rapport agrave 2016 a pu ecirctre constateacutee Pour compleacuteter

ce dispositif une permanence CNIL a eacuteteacute mise en place de maniegravere hebdomadaire et assureacutee

par des membres de lrsquoeacutequipe seacutecuriteacute du SIH

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

432

Actuellement le comiteacute continue son travail drsquoeacutetude des situations plus complexes tout en

suivant lrsquoeacutevolution de la leacutegislation applicable afin drsquoadapter ses pratiques

sect2 Bilan des reacutealisations de ces structures novatrices

783 Il nous apparait inteacuteressant agrave ce stade de nos recherches de nous attarder sur les

reacutesultats obtenus par la creacuteation de ce type de structures et plus particuliegraverement sur les

reacutealisations de la CCIM commission ayant veacutecu suffisamment longtemps pour qursquoun premier

bilan soit dresseacute

Les pistes de travail de cette commission ont eacuteteacute nombreuses Il nous semble

cependant inteacuteressant de nous arrecircter plus particuliegraverement sur le travail de reacuteflexion autour de

la mise ne place drsquoune regraveglementation interne en matiegravere de confidentialiteacute de lrsquoinformation

(A) ainsi que sur le travail portant sur lrsquoanalyse des traces drsquoaccegraves et la reacuteponse apporteacutee aux

accegraves indus (B) Enfin il faut preacuteciser que lrsquoaction de cette commission a eacuteteacute reconnue par

lrsquoARS au niveau reacutegional qui lui a deacutecerneacute en 2015 le label laquo droit des usagers raquo (C)

reconnaissant ainsi le travail particuliegraverement novateur mais aussi protecteur des droits des

patients de cette commission

A Lrsquoeacutelaboration drsquoune reacuteglementation interne

784 Partant du principe que pour ecirctre opposables les regravegles relatives agrave la confidentialiteacute

devaient ecirctre parfaitement connues des utilisateurs la CCIM a meneacute et megravene encore agrave ce

jour un chantier de mise en place drsquoune regraveglementation interne

Cette regraveglementation se compose de deux parties drsquoun cocircteacute un regraveglement inteacuterieur de

lrsquoinformation meacutedicale plutocirct geacuteneacuteral et de lrsquoautre des regraveglements inteacuterieurs drsquoapplication

speacutecifiques agrave chacun des logiciels Ces deux chantiers qui sont encore en cours drsquoeacutelaboration

agrave lrsquoheure actuelle meacuteritent tout de mecircme que lrsquoon srsquoy attarde

Lrsquoideacutee de reacutediger un regraveglement inteacuterieur de lrsquoinformation meacutedicale au CHRU de Lille

nrsquoest pas nouvelle En reacutealiteacute quand la CCIM srsquoest empareacutee de la question il srsquoagissait plutocirct

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

433

drsquoune mise agrave jour drsquoun preacuteceacutedent regraveglement initialement reacutedigeacute en 2001 mais jamais appliqueacute

faute de validation institutionnelle Le but premier de ce regraveglement est de remettre agrave plat

lrsquoensemble des regravegles applicables en matiegravere de partage et drsquoutilisation des donneacutees issues de

lrsquoactiviteacute meacutedicale Il repreacutesente un atout particuliegraverement preacutecieux dans le cadre de la

recherche et des modaliteacutes drsquoaccegraves et de reacuteutilisation des donneacutees de santeacute dans le cadre drsquoune

recherche reacutetrospective notamment

785 Deacutebuteacutee en 2014 cette mise agrave jour nrsquoa cependant pas abouti agrave lrsquoheure actuelle Deux

eacuteleacutements peuvent expliquer les difficulteacutes rencontreacutees par la CCIM dans la gestion de ce

travail Drsquoune part la commission est reacuteguliegraverement saisie par drsquoautres probleacutematiques

consideacutereacutees comme plus urgentes notamment en termes de droits drsquoaccegraves au SIH Victime en

quelques sortes de son succegraves mais nrsquoayant pas drsquoeacutequipe deacutedieacutee pour geacuterer lrsquoensemble des

missions et demandes confieacutees la CCIM ne peut srsquoatteler agrave tous les chantiers confieacutes et doit

donc en prioriser certains Dans ce contexte la reacutedaction du regraveglement inteacuterieur de

lrsquoinformation meacutedicale nrsquoa malheureusement jamais eacuteteacute prioriseacute

Drsquoautre part la theacutematique de la recherche meacutedicale et plus particuliegraverement des

modaliteacutes de partage de lrsquoinformation meacutedicale au sein de lrsquoeacutetablissement dans un but de

reacuteutilisation agrave des fins de recherche est un sujet particuliegraverement sensible et strateacutegique Ce

sujet neacutecessite un arbitrage institutionnel avant de pouvoir ecirctre inteacutegreacute au sein du regraveglement

inteacuterieur de lrsquoinformation meacutedicale Crsquoest pourquoi aujourdrsquohui le CCIM nrsquoa pas encore

adopteacute son regraveglement inteacuterieur

786 Sur ce sujet un parallegravele peut ecirctre effectueacute avec les regraveglements inteacuterieurs du

Deacutepartement de lrsquoInformation Meacutedicale (DIM) qui existent dans certains eacutetablissements

hospitaliers En effet dans les eacutetablissements qui ne se sont pas doteacutes drsquoune commission

deacutedieacutee agrave la protection de la confidentialiteacute le Meacutedecin responsable de lrsquoinformation meacutedicale

et donc par extension le DIM doivent geacuterer cette mission De maniegravere classique ces

regraveglements inteacuterieurs reprennent les missions du DIM sa place dans lrsquoeacutetablissement et les

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

434

moyens qui lui sont attribueacutes Les rocircles des diffeacuterents acteurs ainsi que les regravegles de traitement

et de transmission de linformation y sont eacutegalement preacutesents924

Le travail de regraveglementation interne de la CCIM concerne eacutegalement les diffeacuterents logiciels

meacutedicaux composant le SIH du CHRU de Lille Partant de lrsquoexemple de la charte

informatique reacutedigeacutee en 2012 et annexeacutee au Regraveglement Inteacuterieur de lrsquoeacutetablissement la CCIM

a souhaiteacute dupliquer ce modegravele Lrsquoideacutee eacutetait donc de reacutediger le regraveglement inteacuterieur

drsquoutilisation de chaque application logicielle sur un modegravele identique Ces regraveglements ont

deux objectifs principaux drsquoune part deacutefinir clairement les droits drsquoutilisation des diffeacuterents

profils dans lrsquoapplication et drsquoautre part rappeler aux utilisateurs leurs obligations

notamment en termes de seacutecuriteacute et de confidentialiteacute

La reacutedaction de ces regraveglements inteacuterieurs des applications meacutedicales a deacutebuteacute en 2015

et demeure en cours aujourdrsquohui

La CCIM a eacutegalement travailleacute sur un autre sujet important celui des accegraves indus aux

donneacutees de santeacute

B Analyse et sanction des accegraves indus

787 Sur une peacuteriode de 18 mois entre 2013 et 2015 le CHRU a vu le nombre de plaintes

de professionnels de santeacute pris en charge au sein du CHRU de Lille pour accegraves indu agrave leur

dossier meacutedical informatiseacute augmenter de maniegravere significative

Ces plaintes sont en reacutealiteacute de deux sortes drsquoun cocircteacute les plaintes qui eacutemanent

drsquoagents qui craignent une rupture dans la confidentialiteacute de leur donneacutees souvent par

manque de confiance dans le SIH et drsquoun autre cocircteacute les plaintes reacutesultant de constats

objectifs de lrsquoexistence drsquoune violation du secret professionnel Srsquoest alors poseacutee pour la

CCIM la question de la position agrave adopter

924 V notamment en ce sens Le deacutepartement dinformation meacutedicale Information informatique et programme

de meacutedicalisation des systegravemes dinformation Fascicule Informations Hospitaliegraveres ndeg27 1990 pp 60-63

plusieurs regraveglement inteacuterieurs de DIM sont disponible sur Internet Crsquoest le cas notamment du Centre Hospitalier

Edouard Toulouse agrave Marseille ou celui du Centre Hospitalier de Montperrin

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

435

En effet lrsquooutil informatique permet une traccedilabiliteacute des accegraves au dossier meacutedical

informatiseacute Cependant la CCIM a ducirc reacutefleacutechir aux modaliteacutes drsquoexploitation de ces traces

drsquoun point de vue technique bien eacutevidemment mais surtout drsquoun point de vue juridique Une

reacuteflexion a eacuteteacute meneacutee pour savoir sur quels fondements ces traces drsquoaccegraves pourraient ecirctre

transmises aux personnes qui en feraient la demande La CCIM souhaitait en effet rendre

accessible aux patients qursquoils soient agents du CHRU de Lille ou non lrsquoensemble des traces

drsquoaccegraves agrave leur dossier meacutedical

788 Ainsi partant du principe que les traces drsquoaccegraves agrave un dossier meacutedical informatiseacute

faisaient partie inteacutegrante de ce dossier lui-mecircme communicable au patient au titre des

dispositions preacutevues par lrsquoarticle L 1111-7 du Code de la santeacute publique la CCIM a

consideacutereacute que celles-ci pourraient donc ecirctre communiqueacutees agrave toute personne en faisant la

demande Cependant dans un souci de loyauteacute vis-agrave-vis de ses agents une communication

large a eacuteteacute effectueacutee agrave ce sujet avant que la proceacutedure de communication des traces soit

effective Au deuxiegraveme semestre 2015 cette proceacutedure a eacuteteacute deacutefinitivement mise en place

Les demandes nrsquoont cesseacute depuis drsquoaugmenter Cependant nous pouvons constater que le

nombre de demandes reste tregraves faible en proportion de lrsquoactiviteacute du CHRU de Lille Ainsi

depuis la mise en place de cette proceacutedure 32 demandes de communication de traces drsquoaccegraves

ont eacuteteacute enregistreacutees et traiteacutees Huit de ces demandes eacutemanaient de patients 19 drsquoagents pris

en charge au CHRU de Lille et cinq de cadres drsquoagents suspectant un comportement

inadeacutequat Dans ce contexte la DAJ a par ailleurs rencontreacute six personnes ayant demandeacute

ces traces drsquoaccegraves afin notamment de les renseigner sur les suites possibles agrave donner

Par ailleurs il a eacuteteacute deacutecideacute que les accegraves indus aux dossiers meacutedicaux constateacutes agrave cette

occasion feraient lrsquoobjet drsquoune transmission aupregraves du Deacutepartement des Ressources

Humaines afin drsquoenvisager au cas par cas des sanctions disciplinaires ou a minima un

rappel des regravegles applicables Cette proceacutedure permet au CHRU drsquoecirctre transparent vis-agrave-vis de

ses patients mais eacutegalement de les rassurer En effet il nrsquoest pas rare qursquoune suspicion de

violation du secret professionnel soit infondeacutee et la transmission des traces permet de calmer

les craintes du patient agrave ce sujet Elle permet eacutegalement de sensibiliser les agents aux regravegles

applicables en matiegravere de partage de lrsquoinformation meacutedicale et leur rappeler leurs obligations

en matiegravere de secret professionnel et de confidentialiteacute

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

436

La CCIM fortes de ces actions a souhaiteacute concourir au label droits des usagers du

Ministegravere de la santeacute

C La labellisation de lrsquoaction de la CCIM

789 En 2015 la CCIM a souhaiteacute concourir au label droits des usagers mis en place par

le Ministegravere de la santeacute via les ARS depuis 2011 Elle a ainsi soumis son projet intituleacute

laquo deacutemarche qualiteacute et gestion des risques de la CCIM raquo Ce projet drsquooptimisation de la

confidentialiteacute des donneacutees de santeacute eacutetait en reacutealiteacute composeacute de trois projets unitaires et

indissociables deacuteveloppeacutes en 2015 la participation agrave la semaine seacutecuriteacute patient la

reacutealisation drsquoune deacutemarche drsquoeacutevaluation des pratiques professionnelles et la reacutedaction des

regraveglements inteacuterieurs des applications meacutedicales Ces trois projets meneacutes de front avaient

pour but drsquoameacuteliorer la culture des professionnels de reacuteglementer de maniegravere claire et

applicable et drsquoameacuteliorer en conseacutequence le respect des droits des usagers

Il est inteacuteressant de nous attarder sur le contenu de ces trois projets qui ont permis agrave la

CCIM drsquoobtenir son label droit des usagers925

790 En 2015 la CCIM a participeacute aux actions internes du CHRU meneacutees agrave lrsquooccasion de la

Semaine Seacutecuriteacute Patient Lrsquoaction de la CCIM agrave cette occasion srsquoest mateacuterialiseacutee par une

preacutesentation de la Commission et de ses travaux aupregraves des professionnels du CHRU de Lille

sur un stand deacutedieacute au sein des diffeacuterents hocircpitaux de lrsquoeacutetablissement Ainsi lors de cette

action les membres de la CCIM ont pu rappeler agrave de nombreux professionnels les principes

du secret meacutedical et du secret professionnel et ont eu lrsquooccasion de distribuer des documents

de communication926

portant sur le respect de la confidentialiteacute des donneacutees meacutedicales dans

la pratique de soin et dans la recherche en santeacute Certains des stands ayant eacuteteacute installeacutes dans le

hall drsquoentreacutee des hocircpitaux les patients inteacuteresseacutes ont eacutegalement eu lrsquooccasion de poser leurs

questions relatives agrave la seacutecuriteacute et agrave la confidentialiteacute de leurs donneacutees de santeacute Drsquoune

maniegravere plus geacuteneacuterale cette action a eacuteteacute lrsquooccasion drsquoune campagne de communication

925 Les modaliteacutes drsquoobtention de ce label sont reprises en annexe de nos travaux annexe II

926 Ces documents sont repris en annexe de nos travaux annexe III

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

437

massive au sujet de la CCIM et de ses actions encore trop meacuteconnus des professionnels de

lrsquoeacutetablissement en 2015

791 Par ailleurs la CCIM a reacutealiseacute en 2015 un audit interne sous forme drsquoeacutevaluation des

pratiques professionnelles (EPP) et portant sur lrsquoaccegraves aux donneacutees meacutedicales informatiseacutees

et leur partage Ce travail a eacuteteacute reacutealiseacute suite agrave une augmentation des plaintes pour accegraves indu

au dossier meacutedical informatiseacute mais eacutegalement en raison de lrsquoobservation de meacutesusages

importants dans lrsquoutilisation du systegraveme drsquoinformation Les objectifs poursuivis par cet audit

eacutetaient multiples Du point de vue des professionnels du CHRU il visait principalement agrave les

sensibiliser sur la probleacutematique de la confidentialiteacute des donneacutees en les faisant reacutefleacutechir sur

leurs propres pratiques Du point de lrsquoeacutetablissement ce questionnaire permettait de faire

connaitre aupregraves des professionnels lrsquoexistence de la CCIM et le travail reacutealiseacute au niveau

institutionnel au sujet de la confidentialiteacute

Un questionnaire de 30 questions927

a donc eacuteteacute mis en ligne sur lrsquoIntranet de

lrsquoeacutetablissement pendant deux mois et lrsquoensemble des agents du CHU eacutetaient inviteacutes agrave y

reacutepondre Deux mille trois cent deux personnes ont participeacute (sur les 15 000 personnes

environ travaillant au CHU)928

A lrsquoissue de cet EPP des risques de rupture de la confidentialiteacute ont eacuteteacute repeacutereacutes agrave

plusieurs niveaux A partir de ces reacutesultats la CCIM va pouvoir engager des actions

correctrices Par ailleurs les reacutesultats de cet audit ont fait lrsquoobjet drsquoune large communication

agrave lrsquoeacutechelle de lrsquoeacutetablissement mais au-delagrave eacutegalement puisque les travaux de la CCIM et plus

speacutecifiquement ce travail drsquoaudit ont fait lrsquoobjet drsquoune communication agrave lrsquooccasion drsquoune

journeacutee drsquoeacutetudes consacreacutee au secret professionnel et organiseacutee par le CHRU de Lille en

partenariat avec la faculteacute de droit de lrsquoUniversiteacute de Lille Droit et Santeacute Cette

communication a eacutegalement eacuteteacute publieacutee au sein de la Revue Geacuteneacuterale de Droit meacutedical lui

assurant une certaine visibiliteacute parmi les professionnels du droit de la santeacute929

927 Ce questionnaire est repris en annexe de nos travaux annexe IV

928 DUMESNIL Chloeacute laquo Informatisation des donneacutees et protection du secret lrsquoexemple des travaux de la

commission de confidentialiteacute des informations meacutedicales du CHRU de Lille raquo RGDM ndeg 61 deacutecembre 2016

p 79 929

Id pp 77-79

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

438

792 Enfin comme nous lrsquoavons vu preacuteceacutedemment la CCIM a travailleacute agrave la reacutedaction des

regraveglements inteacuterieurs des principales applications informatiques preacutesentesay au sein du SIH

du CHRU de Lille

Ces trois actions ont composeacute le projet global laquo deacutemarche qualiteacute et gestion des

risques de la CCIM raquo qui a reccedilu le label reacutegional Droits des usagers 2015

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

439

Conclusion de la section

793 Le CHRU de Lille a creacuteeacute deux commissions adrsquohoc afin de geacuterer drsquoune part la

protection de la confidentialiteacute des donneacutees de santeacute et drsquoautre part lrsquoensemble des

formaliteacutes CNIL

En effet face agrave lrsquoaugmentation constante du nombre de donneacutees sensibles produites et

enregistreacutees au sein du SIH le CHRU de Lille a confieacute agrave la CCIM la mission de veiller au

strict respect des regravegles de partage de celles-ci Par ailleurs afin drsquoaider la CIL dans ses

missions un Comiteacute CNIL srsquoest mis en place permettant notamment de simplifier et rendre

plus visibles les deacutemarches preacutealables neacutecessaires agrave la mise en place drsquoun nouveau traitement

de donneacutees au sein du CHRU de Lille

Ces deux commissions preacutesentent une composition pluridisciplinaire sensiblement

identique Ainsi lrsquoensemble des acteurs concerneacutes par la confidentialiteacute des donneacutees y sont

repreacutesenteacute notamment le DIM le CIL la communauteacute meacutedicale la communauteacute soignante la

DRN et la DAJ

En instaurant ces commissions le CHRU de Lille a deacutemontreacute sa volonteacute de proteacuteger

activement les donneacutees de santeacute de ses patients Aujourdrsquohui le bilan des actions de ces

commissions et plus particuliegraverement de la CCIM est globalement positif mecircme si cette

commission manque encore aujourdrsquohui drsquoune leacutegitimiteacute forte et de moyens humains suffisant

pour mener agrave bien toutes ses missions

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille

441

Conclusion du chapitre

794 Le CHRU de Lille a souhaiteacute inscrire le deacuteveloppement et la peacuterennisation de son SIH

dans la strateacutegie globale de lrsquoeacutetablissement Le Scheacutema Directeur des Systegravemes drsquoInformation

(SDSI) a donc eacuteteacute adopteacute agrave lrsquooccasion du projet drsquoeacutetablissement 2012-2016 A cette occasion

huit grandes orientations ont eacuteteacute deacutefinies elles-mecircmes mises en œuvre par le biais de cinq

projets prioritaires

Par ailleurs deux projets importants en termes de seacutecuriteacute du SIH ont eacuteteacute mis en œuvre

et meneacutes agrave bien au CHRU de Lille Drsquoune part le projet carte drsquoeacutetablissement qui a permis

de fournir agrave lrsquoensemble des agents de lrsquoeacutetablissement une carte permettant drsquoassurer le

controcircle des accegraves mais eacutegalement lrsquoauthentification et la traccedilabiliteacute des actions au sein des

diffeacuterentes applications informatiques Drsquoautre part le projet SMSSI deacutemarche qui a

permis au CHRU de Lille de garantir lrsquointeacutegriteacute et la disponibiliteacute de son SIH mais eacutegalement

drsquoeacutelaborer une meacutethodologie permettant drsquointeacutegrer de maniegravere systeacutematique la seacutecuriteacute au sein

des projets informatiques deacuteveloppeacutes

Le CHRU srsquoattache eacutegalement agrave diffuser aupregraves de ses agents une veacuteritable culture de

la seacutecuriteacute du SIH par le biais de formations mais eacutegalement drsquoactions de communication et

de sensibilisation Enfin le CHRU de Lille deacutemontre une reacuteelle volonteacute de proteacuteger les

donneacutees de santeacute qursquoil produit Ainsi il a creacuteeacute deux structures adrsquohoc pour mener agrave bien cette

mission la CCIM et le comiteacute CNIL La CCIM commission particuliegraverement novatrice

preacutesente un bilan drsquoactions positif mecircme si son manque de moyens et des interrogations

quant agrave sa place au sein de lrsquoeacutetablissement freinent lrsquoavanceacutee de ses travaux

443

Conclusion du titre

795 Afin de seacutecuriser au mieux lrsquoutilisation des TIC au sein des eacutetablissements de santeacute

ces derniers doivent intervenir agrave chaque eacutetape depuis la mise en place des TIC jusqursquoagrave leur

utilisation quotidienne Face aux lacunes des pouvoirs publics et aux difficulteacutes causeacutees par

les impreacutecisions du droit les eacutetablissements peuvent agir et impulser la seacutecurisation des

pratiques qui leur manque Finalement ils beacuteneacuteficient drsquoune marge de manœuvre qui leur

permet drsquoecirctre inventifs et drsquoeacutelaborer des solutions qui leurs sont parfaitement adapteacutees creacuteant

ainsi le contexte propice au deacuteveloppement de techniques de plus en plus innovantes

Cependant il leur faut pour cela penser de maniegravere globale leur politique de deacuteveloppement

des SIH Cette reacuteflexion doit ecirctre amorceacutee en amont en deacuteveloppant une veacuteritable strateacutegie

au sein mecircme du projet drsquoeacutetablissement Les eacutetablissements ne doivent pas oublier qursquoils

disposent par ailleurs drsquooutils juridiques et manageacuteriaux qui pourront leur permettre drsquoassurer

une utilisation des TIC qui sera fiable et respectueuse des contraintes juridiques

deacuteontologiques et eacutethiques

En la matiegravere le CHRU de Lille constitue un exemple de seacutecurisation reacuteussie

Soucieux drsquoinstaurer les meilleures conditions possibles pour le deacuteveloppement de son SIH il

a su geacuterer de maniegravere strateacutegique diffeacuterents projets relatifs agrave la seacutecuriteacute tout en assurant une

seacutecurisation accrue des donneacutees de santeacute

445

Conclusion de la seconde partie

796 A ce stade de notre eacutetude nous avons pu constater que les pouvoirs publics avaient un

rocircle strateacutegique agrave jouer dans la seacutecurisation de lrsquoutilisation des TIC en santeacute Une impulsion

nationale doit ecirctre donneacutee en la matiegravere afin drsquoassurer la coheacuterence des projets deacuteveloppeacutes et

seule une gouvernance forte de lrsquoe-santeacute pourra y parvenir Le deacuteploiement des projets pourra

quant agrave lui se faire au niveau reacutegional en srsquoappuyant sur les ARS mais eacutegalement sur la

dynamique qui apparaitra avec la naissance des GHT

Bien qursquoune inflation leacutegislative dans le domaine soit eacutevidemment agrave proscrire

laquo certains points de droits constituent clairement des verrous au regard du deacuteveloppement de

lrsquoe-santeacute raquo930

Ainsi le cadre doit ecirctre reacutenoveacute afin drsquoaccompagner lrsquoinnovation dans le

numeacuterique en santeacute et assurer la seacutecuriteacute juridique neacutecessaire agrave la bonne utilisation des TIC

dans la pratique meacutedicale

Dans cette dynamique geacuteneacuterale de seacutecurisation les eacutetablissements de santeacute ont un rocircle

essentiel agrave jouer Ils peuvent en effet identifier leurs besoins et seacutecuriser au mieux leurs

pratiques quotidiennes A titre drsquoexemple le CHRU de Lille srsquoattache agrave seacutecuriser au mieux

lrsquoutilisation des TIC dans la pratique quotidienne de ses agents

930 ROBIN Jean-Yves laquo Lrsquourgence numeacuterique Faire de la France un leader de lrsquoe-santeacute raquo LrsquoHarmattan 2015

p 193

447

Conclusion geacuteneacuterale

laquo Nous sommes agrave la croiseacutee des chemins [hellip] les prochaines anneacutees seront

deacuteterminantes pour le devenir de notre modegravele et le numeacuterique peut ecirctre notre

meilleur allieacute comme notre pire ennemi pour preacuteserver ce qui doit lrsquoecirctre et

transformer ce que nous choisirons collectivement de reacuteformer raquo931

797 A lrsquoissue de nos travaux nous pouvons constater que lrsquoutilisation des TIC dans la

pratique meacutedicale ne fait pas lrsquoobjet drsquoun cadre juridique speacutecifique et unifieacute Reacutefleacutechir agrave

lrsquoappreacutehension des TIC en santeacute par le Droit crsquoest faire appel agrave diffeacuterentes sources du droit

Tout comme il nrsquoexiste pas une seule utilisation possible des TIC dans la pratique meacutedicale il

nrsquoexiste pas un seul cadre juridique applicable Les eacutetablissements de santeacute vont donc devoir

reacutefleacutechir au cas par cas et repeacuterer les diffeacuterentes contraintes juridiques qui srsquoimposent agrave eux

798 Drsquoune maniegravere geacuteneacuterale lrsquoinformatisation des donneacutees de santeacute conseacutequence premiegravere

de lrsquointroduction des TIC dans la pratique meacutedicale relegraveve du droit commun de la protection

des donneacutees personnelles Cependant le caractegravere particulier et multiple de ces donneacutees exige

le respect de diffeacuterentes regraveglementations applicables Elles neacutecessitent eacutegalement une

protection particuliegravere et le leacutegislateur ne srsquoest pas contenteacute de proteacuteger le secret

professionnel A cela il a souhaiteacute ajouteacute un cadre relatif agrave lrsquoheacutebergement et agrave la

communication des donneacutees de santeacute informatiseacutees Ce cadre montre cependant certaines

limites

799 Les TIC en santeacute ont eacutegalement permis de chambouler les pratiques habituelles en

matiegravere de prise en charge du patient Deacutesormais celle-ci peut ecirctre entiegraverement

deacutemateacuterialiseacutee les professionnels de santeacute pouvant envisager une prise en charge agrave distance

en srsquoappuyant notamment sur des dossiers meacutedicaux partageacutes Ces dossiers meacutedicaux

communeacutement appeleacutes dossiers meacutediaux eacutelectroniques ne beacuteneacuteficient aucunement drsquoun statut

931 ROBIN Jean-Yves laquo Lrsquoe-santeacute en question raquo I2D ndash Information donneacutees amp documents 20163 (Volume

53) p 58

Conclusion geacuteneacuterale

448

eacutedicteacute par la loi agrave lrsquoexception de lrsquoun drsquoentre eux le Dossier Meacutedical Partageacute Pour ce

dossier ambitieux placeacute sous le controcircle direct du patient et accessible via une plateforme

unique entiegraverement deacutemateacuterialiseacutee le leacutegislateur a souhaiteacute mettre en place un reacutegime

exorbitant de droit commun932

La prise en charge deacutemateacuterialiseacutee du patient par le biais drsquoun

outil de teacuteleacutemeacutedecine a eacutegalement fait lrsquoobjet drsquoun cadre speacutecifique mais celui-ci sous des

aspects de simpliciteacute impose de trop nombreuses contraintes administratives aux

eacutetablissements de santeacute A cela srsquoajoute un bouleversement des pratiques et des regravegles

habituelles en matiegravere de droit des patients et de responsabiliteacute professionnelle

800 Lrsquoutilisation des TIC dans la pratique meacutedicale reacutepond ainsi tantocirct agrave des regravegles de droit

commun et tantocirct agrave des regravegles speacutecifiques Les eacutetablissements de santeacute peuvent rapidement se

retrouver perdus face agrave lrsquoensemble de ces diffeacuterentes regravegles de droits qui sont autant

drsquoobstacles sur leur voie du deacuteveloppement de pratiques innovantes en matiegravere de TIC en

santeacute Le droit perd alors son rocircle de seacutecurisation et plus qursquoun simple frein aux initiatives il

peut parfois ecirctre source drsquoincertitudes

Pour y remeacutedier plusieurs voies doivent ecirctre emprunteacutees

801 Une impulsion doit ecirctre donneacutee au niveau national Une vision globale du numeacuterique

en santeacute est en effet neacutecessaire afin de favoriser lrsquoinnovation et drsquoassurer aux diffeacuterents

acteurs impliqueacutes un environnement propice Crsquoest pourquoi la gouvernance des Systegravemes

drsquoInformation en Santeacute se doit drsquoecirctre solide lisible et force de proposition Par ailleurs le

cadre juridique actuel applicable aux TIC en santeacute doit ecirctre repenseacute Ceci repreacutesente

certainement aujourdrsquohui lrsquoexercice le plus complexe Le droit en place doit ecirctre lrsquoallieacute des

acteurs concerneacutes et non lrsquoennemi redouteacute Il faut donc un cadre adapteacute aux exigences de ces

technologies innovantes crsquoest-agrave-dire un cadre souple et reacuteactif Cependant la reacutenovation du

cadre juridique ne doit pas passer agrave notre sens par lrsquoeacutediction de nouvelles regravegles mais par une

simplification de celles deacutejagrave en place

802 Les eacutetablissements de santeacute ont eacutegalement un rocircle essentiel agrave jouer dans la seacutecurisation

de leurs pratiques Ils doivent pour cela envisager de maniegravere strateacutegique le deacuteveloppement et

932 V notamment en ce sens ZORN-MACREZ Caroline laquo Donneacutees de santeacute et secret partageacute raquo op cit p 305

Conclusion geacuteneacuterale

449

la gestion de leur systegraveme drsquoinformation hospitalier Cette vision leur permettra drsquoanticiper les

eacuteventuelles contraintes et mener agrave bien leurs diffeacuterents projets Par ailleurs ils disposent

drsquooutils juridiques et manageacuteriaux efficaces pour leur permettre drsquoencadrer lrsquoutilisation des

TIC dans la pratique meacutedicale par leurs agents Ils accompagneront ainsi ces nouvelles

pratiques en rappelant les regravegles applicables et en formant leurs agents agrave lrsquoutilisation

approprieacutee des TIC Ils peuvent aussi sanctionner des comportements deacuteviants et ainsi assureacute

une utilisation sereine et respectueuse des contraintes juridiques eacutethique et deacuteontologique des

TIC dans la pratique meacutedicale Lrsquoexemple du CHRU de Lille et de lrsquoensemble des actions

qursquoil a pu mettre en place deacutemontre bien que les eacutetablissements de santeacute peuvent ecirctre agrave

lrsquoorigine drsquoune seacutecurisation reacuteussie de leurs pratiques

803 Nos travaux nous ont donc permis drsquoappreacutehender le cadre juridique dans lequel

srsquoinscrit lrsquoutilisation des TIC dans la pratique meacutedicale et constater ses lacunes Aujourdrsquohui

une seacutecurisation de lrsquoutilisation des TIC en santeacute est neacutecessaire Notre eacutetude ne se veut pas

exhaustive et si les possibiliteacutes du numeacuterique en santeacute sont nombreuses les questionnements

juridiques qui srsquoy rapportent le sont tout autant Ce dont nous sommes certains crsquoest que le

numeacuterique en santeacute repreacutesente lrsquoavenir du systegraveme de santeacute actuel et il est essentiel de

srsquoinscrire dans cette deacutemarche drsquoutilisation croissante des TIC dans la pratique meacutedicale

451

Table des Annexes

Annexe I Scheacutema de lrsquoorganisation en briques fonctionnelles drsquoun SIH type

Annexe II Preacutesentation et modaliteacutes drsquoobtention du label droits des usagers

Annexe III Documents de communication de la CCIM

Annexe IV Questionnaire drsquoeacutevaluation des pratiques professionnelles de la CCIM

452

Annexe I Scheacutema de lrsquoorganisation en briques fonctionnelles drsquoun SIH type

Ce scheacutema est issu des travaux en cours meneacutees par lrsquoASIP Santeacute et lrsquoANAP sur les SI de

santeacute

Preacutesentation et modaliteacutes drsquoobtention du label droits des usagers

453

Annexe II Preacutesentation et modaliteacutes drsquoobtention du label droits des

usagers

Preacutesentation et modaliteacutes drsquoobtention du label droits des usagers

454

Preacutesentation et modaliteacutes drsquoobtention du label droits des usagers

455

Preacutesentation et modaliteacutes drsquoobtention du label droits des usagers

456

Preacutesentation et modaliteacutes drsquoobtention du label droits des usagers

457

Preacutesentation et modaliteacutes drsquoobtention du label droits des usagers

458

Preacutesentation et modaliteacutes drsquoobtention du label droits des usagers

459

Preacutesentation et modaliteacutes drsquoobtention du label droits des usagers

460

Preacutesentation et modaliteacutes drsquoobtention du label droits des usagers

461

Preacutesentation et modaliteacutes drsquoobtention du label droits des usagers

462

Preacutesentation et modaliteacutes drsquoobtention du label droits des usagers

463

Documents de communication de la CCIM

464

Annexe III Documents de communication de la CCIM

Documents de communication de la CCIM

465

Documents de communication de la CCIM

466

Documents de communication de la CCIM

467

Documents de communication de la CCIM

468

Documents de communication de la CCIM

469

Questionnaire drsquoeacutevaluation des pratiques professionnelles de la CCIM

470

Annexe IV Questionnaire drsquoeacutevaluation des pratiques professionnelles de la

CCIM

Questionnaire drsquoeacutevaluation des pratiques professionnelles de la CCIM

471

Questionnaire drsquoeacutevaluation des pratiques professionnelles de la CCIM

472

Questionnaire drsquoeacutevaluation des pratiques professionnelles de la CCIM

473

Questionnaire drsquoeacutevaluation des pratiques professionnelles de la CCIM

474

475

Bibliographie

I Ouvrages manuels et thegraveses

A Ouvrages et manuels geacuteneacuteraux

B Ouvrages speacuteciaux

C Contributions agrave un ouvrage

D Thegraveses

II Articles et doctrines

III Rapports et eacutetudes

IV Avis et deacutelibeacuterations

V Deacutecisions commenteacutees

Bibliographie

476

I Ouvrages manuels et thegraveses

A Ouvrages et manuels geacuteneacuteraux

- CAPITANT Henri Introduction agrave lrsquoeacutetude du droit civil A Peacutedone 5egraveme

eacutedition

1929

- CHAPUS Reneacute Droit administratif geacuteneacuteral Tome 1 15egraveme

eacutedition Montchrestien

2001

- CORNU Geacuterard Vocabulaire juridique PUF 2011

- Montesquieu De lrsquoesprit des lois Partie 6 Livre XXIX laquo De la maniegravere de composer

les lois raquo 1758

B Ouvrages speacuteciaux

- BENSOUSSAN Alain Informatique et liberteacutes Francis Lefebvre Paris 2010

- CATALA Pierre Le droit agrave leacutepreuve du numeacuterique PUF 1998

- COELS Jean-Marie Le droit des obligations agrave lrsquoeacutepreuve de la teacuteleacutemeacutedecine PUAM

2006

- DESGENS-PASANAU Guillaume La protection des donneacutees agrave caractegravere personnel

Lexis-Nexis 2egraveme

eacutedition Paris 2016

- DUPONT Marc BERGOIGNAN-ESPER Claudine PAIRE Christian Droit

hospitalier Dalloz 7eacuteme eacutedition 2009

- DUPUY Olivier La gestion des informations relatives au patient Les eacutetudes

hospitaliegraveres 2005

- DUSSERRE Liliane DUCROT Henry ALLAERT Franccedilois-Andreacute Lrsquoinformation

meacutedicale lrsquoordinateur et la loi Editions meacutedicales internationales 2eacuteme eacutedition

1999

- HOERNI Bernard Ethique et deacuteontologie meacutedicale 2egraveme eacutedition Masson 2000

- LAUDE Anne TABUTEAU Didier Droit de la santeacute 3egraveme

eacutedition PUF 2012

Bibliographie

477

- LECHOPIR Nicolas Les valeurs de la recherche Enquecircte sur la protection des

donneacutees personnelles en eacutepideacutemiologie Michalon 2011

- MACKAAY Ejan Nouvelles technologies et proprieacuteteacute actes du colloque tenu agrave la

Faculteacute de droit de lUniversiteacute de Montreacuteal les 9 et 10 novembre 1989 Theacutemis

1991

- MATTATIA Fabrice Internet et les reacuteseaux sociaux que dit la loi 2egraveme

eacutedition

Eyrolles 2016

- MOQUET-ANGER Marie-Laure Droit hospitalier 3egraveme

eacutedition LGDJ 2013

- PY Bruno Le secret professionnel LrsquoHarmattan 2005

- SAISON-DEMARS Johanne Droit hospitalier 3egraveme

eacutedition Gualino 2011

- RIGAUX Franccedilois POULLET Franccedilois LEONARD Thierry La vie priveacutee une

liberteacute comme les autres Larcier 1992

C Contribution agrave un ouvrage

- CADIET Loiumlc La notion drsquoinformation geacuteneacutetique en droit franccedilais In La geacuteneacutetique

humaine de lrsquoinformation agrave lrsquoinformatisation TheacutemisLitec diffusion 1992 p 52

- CAVERS David laquo Law and science some points of confrontation raquo in laquo Law and the

social role of scienceraquo Rockefeller University Press 1966 p 5

- POULLET Yves LEONARD Thierry Les liberteacutes comme fondement de la

protection des donneacutees nominatives in La vie priveacutee une liberteacute parmi les autres

Larcier 1992

- VERGES Etienne laquo Lrsquoeacutevolution scientifique et technologique au prisme du droit

aperccedilu drsquoune relation agrave plusieurs facettes raquo In laquo Variations eacutevolutions

meacutetamorphose raquo PU St Etienne Institut universitaire de France 2012 p 371

D Thegraveses

- ETIEN-GNOAN NDa Brigitte Lrsquoencadrement juridique de la gestion eacutelectronique

des donneacutees meacutedicales thegravese Lille 2014

Bibliographie

478

- ZORN-MACREZ Caroline Secret partageacute et donneacutees de santeacute pour un droit de la

personne agrave la protection de ses donneacutees de santeacute partageacutees PUN 2010

- CAVALIER Mathilde La proprieacuteteacute des donneacutees de santeacute thegravese Lyon 2016

Bibliographie

479

II Rapports et eacutetudes

- ASIP Santeacute

o Programme de relance du DMP et des systegravemes drsquoinformation partageacutes de

santeacute synthegravese de la concertation Juillet 2009

o Rapport drsquoactiviteacute 2012

- Association Franccedilaise des Heacutebergeurs Agreacuteeacutes de donneacutees de santeacute Les heacutebergeurs

agreacuteeacutes de donneacutees de santeacute acteurs cleacutes de la confiance numeacuterique en santeacute livre

blanc de lrsquoassociation franccedilaise des heacutebergeurs agreacuteeacutes de donneacutees de santeacute 2014

- BRAIBANT Guy Donneacutees personnelles et socieacuteteacutes de lrsquoinformation rapport au 1er

ministre La Documentation franccedilaise 1998

- CATALA Pierre TRICOT Bernard Rapport de la commission Informatique et

liberteacutes La Documentation franccedilaise 1975

- CHAMBRE REGIONALE DES COMPTES CHRU de Lille enquecircte systegraveme

drsquoinformation hospitalier rapport drsquoobservations deacutefinitives 2016

- COMITE DrsquoAGREMENT DES HEBERGEURS

o Premier rapport drsquoactiviteacute 2011

o Deuxiegraveme rapport drsquoactiviteacute 2012-2013

- CONSEIL DrsquoETAT

o Les autoriteacutes administratives indeacutependantes rapport public La

Documentation franccedilaise 2001

o Le Droit souple eacutetude annuelle du Conseil drsquoEtat questionsreacuteponses 2013

o Le numeacuterique et les droits fondamentaux rapport public La Documentation

franccedilaise 2014

o Le numeacuterique et les droits fondamentaux eacutetude annuelle La documentation

franccedilaise 2014

- CONSEIL NATIONAL DE LrsquoORDRE DES MEDECINS

o Teacuteleacutematique de santeacute 2006

Bibliographie

480

o Linformatisation de la santeacute livre blanc 2008

o La teacuteleacutemeacutedecine livre blanc 2009

o Deacuteontologie sur le web livre blanc 2009

o Teacuteleacutemeacutedecine et autres prestations meacutedicales eacutelectroniques rapport de

mission 2016

- COUR DES COMPTES

o Le partage des donneacutees entre les systegravemes drsquoinformation rapport public annuel

sur la seacutecuriteacute sociale chapitre X 2007

o Lrsquoaccegraves en ligne aux dossiers meacutedicaux rapport public annuel sur la seacutecuriteacute

sociale Chapitre VII 2008

o Les systegravemes drsquoinformation dans les EPS rapport public annuel sur la seacutecuriteacute

sociale Chapitre VIII 2008

o La gestion du GIP Dossier meacutedical personnel rapport public annuel chapitre

VI 2009

o Le coucirct du dossier meacutedical personnel depuis sa mise en place communication

agrave la commission des finances de lrsquoassembleacutee nationale 2012

o La modernisation des systegravemes drsquoinformation hospitaliers une contribution agrave

lrsquoefficience du systegraveme de soins agrave renforcer rapport sur lrsquoapplication des lois

de financement de la seacutecuriteacute sociale Chapitre VIII septembre 2016

- DIONIS du SEJOUR Jean ETIENNE Jean-Claude Les teacuteleacutecommunications agrave haut

deacutebit au service du systegraveme de santeacute rapport de lrsquooffice parlementaire deacutevaluation des

choix scientifiques et technologiques La documentation franccedilaise 2004

- DOOR Jean-Pierre Rapport dinformation sur le dossier meacutedical personnel rapport

deacuteposeacute par la commission des affaires culturelles familiales et sociale de lAssembleacutee

Nationale La documentation franccedilaise janvier 2008

- DOSIERE Reneacute VANNESTE Christian Rapport drsquoinformation sur les autoriteacutes

administratives indeacutependantes rapport fait au nom du comiteacute drsquoeacutevaluation et de

controcircle des politiques publiques AN 28 octobre 2010

- ETIENNE Jean-Claude LASBORDES Pierre Le dossier meacutedical personnel (DMP)

quel bilan deacutetape pour quelles perspectives rapport fait au nom de lOffice

parlementaire deacutevaluation des choix scientifiques et technologique Seacutenat 2009

Bibliographie

481

- FAGNIEZ Pierre-Louis Le masquage drsquoinformations par le patient dans son DMP

rapport au ministre de la santeacute et des solidariteacutes janvier 2007

- FAROUDJA Jean-Marie Questions sur lrsquoinformatisation des dossiers meacutedicaux le

partage et lrsquoheacutebergement des donneacutees rapport de la commission nationale

permanente adopteacute lors des assises du Conseil National de lrsquoordre des meacutedecins du 18

juin 2005

- FIESCHI Marius Les donneacutees du patient partageacutees la culture du partage et de la

qualiteacute des informations pour ameacuteliorer la qualiteacute des soins rapport au ministre de la

santeacute de la famille et des personnes handicapeacutees La Documentation franccedilaise janvier

2003

- FOYER Jean Rapport au nom de la commission des lois constitutionnelles de la

leacutegislation et de ladministration geacuteneacuterale de la reacutepublique sur le projet de loi (ndeg

2516) relatif agrave linformatique et aux liberteacutes la proposition de loi (ndeg 1004) de Pierre-

Bernard Cousteacute tendant agrave creacuteer une commission de controcircle des moyens

dinformatique afin dassurer la protection de la vie priveacutee et des liberteacutes individuelles

des citoyens la proposition de loi (ndeg 3092) de Franccedilois Villa et plusieurs de ses

collegravegues sur les liberteacutes les fichiers et linformatique Assembleacutee Nationale t1 ndeg

3125 Paris 1977

- GAGNEUX Michel Refonder la gouvernance de la politique dinformatisation du

systegraveme de santeacute Douze propositions pour renforcer la coheacuterence et lefficaciteacute de

laction publique dans le domaine des systegravemes dinformation de santeacute La

Documentation franccedilaise mai 2009

- GAGNEUX Michel BOARETTO Yann CHOLLEY Franccedilois Rapport sur le

dossier meacutedical personnaliseacute (DMP) Inspection geacuteneacuterale des finances La

Documentation franccedilaise novembre 2007

- GAGNEUX Michel COMBLE Pierre-Henri De KERGOMMEAUX Loiumlc Pour un

dossier patient virtuel et partageacute et une strateacutegie nationale des systegravemes drsquoinformation

de santeacute Inspection geacuteneacuterale des affaires sociales Avril 2008

- GARREC Reneacute Rapport ndeg 146 fait au nom de la commission des lois Projet de loi

relatif aux archives Seacutenat deacutecembre 2007

- GRATIEUX Laurent OLLIVIER Laurent Audit de lrsquoorganisation et du pilotage

des organismes œuvrant agrave lrsquoinformatisation du systegraveme de santeacute IGAS Rapport ndeg

2006-113 novembre 2006

- GT33CSIS‐CSF Permettre lrsquoeacutemergence drsquoune strateacutegie industrielle en matiegravere de e-

santeacute en soutien de la politique de santeacute publique en associant les industriels Lever

les freins au deacuteploiement de la teacuteleacutemeacutedecine rapport eacutelaboreacute par le groupe de travail

Bibliographie

482

sur la teacuteleacutemeacutedecine reacuteuni dans le cadre du Comiteacute Strateacutegique de Filiegravere Santeacute mai

2015

- Haute Autoriteacute de Santeacute

o Efficience de la teacuteleacutemeacutedecine eacutetat des lieux de la litteacuterature internationale et

cadre drsquoeacutevolution juillet 2013 disponible sur [httpwwwhas-santefr]

Consulteacute le 15 mai 2017

o Les protocoles de coopeacuteration article 51 de la loi HPST Rapport drsquoactiviteacute de

la HAS 2013 disponible sur [httpwwwhas-santefr] Consulteacute le 15 mai

2017

- JEacuteGOU Jean-Jacques

o Linformatisation dans le secteur de la santeacute prendre enfin la mesure des

enjeux rapport drsquoinformation fait au nom de la commission des finances

Seacutenat 2005

o Systegravemes dinformation de santeacute le diagnostic est poseacute le traitement simpose

rapport dinformation fait au nom de la commission des finances Seacutenat 17

octobre 2007

- LABORDES Pierre

o Rapport sur le Dossier meacutedical personnel (DMP) quel bilan drsquoeacutetape pour

quelles perspectives office parlementaire deacutevaluation des choix

scientifiques et technologiques La Documentation franccedilaise 2008

o La teacuteleacutesanteacute un nouvel atout au service de notre bien-ecirctre La documentation

franccedilaise 2009

- PICARD Jean-Marie Dossier Meacutedical Personnel proposition de contenu enquecircte

qualitative meneacutee aupregraves de professionnels sous lrsquoeacutegide de la CNAMTS

- PONSOT Dominique Valeur juridique des documents conserveacutes sur support

photographique ou numeacuterique La documentation Franccedilaise septembre 1995

- SENAT La qualiteacute de la loi les documents de travail du Seacutenat seacuterie eacutetudes

juridiques septembre 2007

- SIMON Pierre ACKER Dominique La place de la teacuteleacutemeacutedecine dans lrsquoorganisation

des soins Direction de lrsquoHospitalisation et de lrsquoOrganisation des Soins 2008

Bibliographie

483

- TUumlRK Alex Rapport relatif agrave la protection des personnes physiques agrave lrsquoeacutegard des

traitements de donneacutees agrave caractegravere personnel et modifiant la loi ndeg 78-17 du 6 janvier

1978 relative agrave lrsquoinformatique aux fichiers et aux liberteacutes Seacutenat 2003

- VASSELLE Alain Rapport ndeg424 fait au nom de la commission des affaires sociales

projet de loi relatif agrave lassurance maladie juillet 2004

Bibliographie

484

III Articles

- ABIKHZER Franck laquo Le deacutelai raisonnable dans le contentieux administratif un fruit

parvenu agrave maturiteacute raquo AJDA 2005 p 985

- ALLAERT Franccedilois-Andreacute QUANTIN Catherine laquo Le dossier personnel du

patient reacuteflexions sur le portail drsquoaccegraves unique et le masquage du dossier raquo IRBM

2009 p 144

- ANTOINE Dominique laquo La formation professionnelle dans la fonction publique en

France ndash Compte rendu dun rapport de la promotion Reneacute Cassin de lENA raquo RF

adm publ 2002 ndeg 104 p 611

- AYELA Christophe laquo Le droit de la preuve en France raquo Gaz Pal 2012 ndeg 45 p

15

- BACACHE-GIBEILI Mireille laquo Le secret meacutedical partageacute raquo Gaz Pal 2008 ndeg

365 p 44

- BAHR Anne BULACH Claudette FABER Steacutephanie laquo Comment appliquer la loi

Informatique et Liberteacutes agrave la recherche meacutedicale raquo RGDM 2012 ndeg 45 p 54

- BALLET Philippe laquo Ougrave en est la proceacutedure drsquoagreacutement des heacutebergeurs de donneacutees

de santeacute agrave caractegravere personnel raquo Gaz Pal 2007 ndeg 109 p 20

- BANAT-BERGER Franccediloise laquo Archives et protection des donneacutees personnelles raquo

Revue Lamy Droit de lrsquoImmateacuteriel 2013 ndeg 95 p 93

- BARBRY Eric laquo Lrsquoordonnance relative aux communications eacutelectronique cherchez

la faille raquo Gaz Pal 2011 ndeg 288 p 12

- BAREGE Alexandre BOSSU Bernard laquo Les TIC et le controcircle de lrsquoactiviteacute du

salarieacute raquo JCP-S 2013 ndeg 41 p 13

- BARY Marion laquo Lrsquoexistence contestable drsquoun droit subjectif agrave lrsquoinformation raquo LPA

2010 ndeg 195 p 15

- BEAUJEAN Isabelle laquo Lrsquoinquieacutetant devenir des dossiers des patients conserveacutes par

les eacutetablissements publics de santeacute au-delagrave du deacutelai de 25 ans raquo RDS ndeg 45 2012 p

36

- BERANGER Jeacuterocircme Le COZ Pierre laquo Reacuteflexion eacutethique sur la pluridisciplinariteacute et

la confidentialiteacute de lrsquoinformation en imagerie meacutedicale via les nouvelles technologies

de lrsquoinformation et de la communication raquo Cancerradiotheacuterapie 2012 ndeg 16 p 215

Bibliographie

485

- BERGOIGNAN-ESPER Claudine laquo Le respect du secret meacutedical dans la leacutegislation

de notre pays reacutealiteacute ou illusion raquo D 2008 p 1918

- BERGONZOL Freacutedeacuteric laquo Preuves de force chez les Tiers de confiance raquo solutions et

logiciels [en ligne] 2011 disponible sur [httpwwwsolutions-numeriquescom]

consulteacute le 15 mai 2017

- BICLET Philippe

o laquo Heacutebergement et eacutechange des donneacutees de santeacute raquo Meacutedecine et droit 2010 p

159

o laquo Le dossier meacutedical dans tous ses eacutetats raquo Meacutedecine et droit 2006 p 174

- BOILEAU Chrystelle laquo Lrsquoeacutequipe meacutedicale une existence eacutevidente pour le

professionnel de santeacute mais discutable pour le juriste raquo RGDM 2004 ndeg 14 p 34

- BOIZARD Maryline laquo Le consentement agrave lrsquoexploitation des donneacutees agrave caractegravere

personnel une douce illusion raquo Communication commerce eacutelectronique ndeg 3 mars

2016 eacutetude 6

- BORGETTO Michel LE GOFFIC Caroline laquo La teacuteleacutemeacutedecine raquo RDSS 2011 ndeg 6

p 985

- BOSSI Jeanne

o laquo Comment organiser la protection des donneacutees de santeacute raquo RDSS 2010 ndeg 2

p 208

o laquo Le rocircle de lrsquoagence des systegravemes drsquoinformation partageacutes de santeacute dans la

proceacutedure drsquoagreacutement raquo Actualiteacutes JuriSanteacute 2011 ndeg74 p 9

o laquo La circulation des donneacutees de santeacute raquo RGDM 2004 numeacutero speacutecial p 55

o laquo Le cadre juridique du partage drsquoinformation dans les domaines sanitaires et

meacutedicosocial Etat des lieux et perspectives raquo Meacutedecine et droit 2013 p 6

- BOUDIN Agnegraves DESMARAIS Pierre laquo La fourniture de prestations de service par

un eacutetablissement de santeacute public raquo JCP Administrations et collectiviteacutes territoriales

2012 p 2041

- BOUNEDJOUM Amira laquo Reacuteforme europeacuteenne des donneacutees personnelles les

nouveauteacutes pour les droits des personnes raquo JCS Entreprises et Affaires 2016 ndeg 22

p 1327

Bibliographie

486

- BOURDAIRE-MIGNOT Camille laquo Teacuteleacuteconsultation quelles exigences Quelles

pratiques raquo RDS 2011 p 1003

- BOURGEOIS Matthieu BOUNEDJOUM Amira laquo Reacuteforme europeacuteenne des

donneacutees personnelles registres internes et DPO la neacutecessaire reacuteorganisation des

entreprises raquo JCP Entreprises et Affaires ndeg 22 juin 2016 p 1326

- BOYER-BEVIERE Beacuteneacutedicte laquo Les principales reacuteformes de la loi ndeg 201-300 du 5

mars 2012 sur les recherches impliquant la personne humaine RGDM ndeg 44 2012 p

225

- BRAC DE LA PERRIERE Marguerite FERRE Elise laquo Lrsquoheacutebergement des donneacutees

de santeacute des textes agrave la pratique raquo Gaz Pal 2011 ndeg 204 p 21

- BRISSY Steacutephane laquo Les deacutefinitions des cateacutegories de recherches sur la personne et

leurs eacutevolutions raquo Gaz Pal 2009 ndeg 143 p 11

- BRUNET Franccedilois laquo De la proceacutedure au procegraves le pouvoir de sanction des autoriteacutes

administratives indeacutependantes raquo RFDA 2013 ndeg 28 p 113

- CAMBON Linda laquo Objets connecteacutes mobiles communicants en preacutevention

deacutepasser lrsquooutil penser lrsquointerventionhellip raquo Santeacute Publique 2016 vol 28 ndeg 1 p 5

- CAPRIOLI Eric

o laquo Le Conseil drsquoEtat annule deux sanctions prononceacutees par la CNIL raquo

Communication commerce eacutelectronique 2010 ndeg 2 p 42

o laquo Charte informatique et droit du travail raquo Communication commerce

eacutelectronique ndeg 7-8 juillet 2001 commentaire 101

- CARCASSONNE Guy laquo Penser la loi raquo Pouvoirs septembre 2005 p 39

- CASSIA Paul laquo La seacutecuriteacute juridique un laquo nouveau raquo principe geacuteneacuteral du droit aux

multiples facettes raquo Dalloz 2006 p 1190

- CASTETS-RENARD Ceacuteline laquo Bregraveve analyse du regraveglement geacuteneacuteral relatif agrave la

protection des donneacutees personnes raquo Dalloz IPIT 2016 p 331

- CHEMTOB-CONCE Marie-Catherine

o laquo Dossier meacutedical personnel et dossier pharmaceutique raquo Gaz Pal 2007 ndeg

174 p 2

o laquo La protection des donneacutees de santeacute agrave caractegravere personnel raquo RGDM 2004

numeacutero speacutecial p 111

Bibliographie

487

- CHEMTOB-CONCE Marie-Christine CAILLEUX Anne laquo Lrsquoimpact des nouvelles

dispositions de la loi relative aux recherches impliquant la personne humaine raquo

Meacutedecine et droit 2013 p 30

- CONTIS Maiumlalen laquo La teacuteleacutemeacutedecine nouveaux enjeux nouvelles perspectives

juridiques raquo RDSS 2010 ndeg 2 p235

- CORGAS-BERNARD Cristina laquo Responsabiliteacute civile meacutedicale et nouvelles

pratiques numeacuteriques lrsquoexemple de la teacuteleacutemeacutedecine raquo LPA 2014 ndeg 164 p 27

- CORMIER Maxence laquo Lrsquoinformatisation des archives meacutedicales hospitaliegraveres raquo

RDSS 1994 p 456

- COYOL Jeacuterocircme laquo Reacuteflexion sur la responsabiliteacute meacutedicale agrave la suite de

lrsquointroduction du dossier meacutedical personnel (DMP) raquo Meacutedecine et droit 2006 p 85

- DALEAU Jeanne laquo Reacutepublique numeacuterique apregraves la consultation publique la

discussion parlementaire raquo Dalloz actualiteacutes 28 janvier 2016

- DAVER Corinne laquo La teacuteleacutemeacutedecine entre inteacuterecircts des patients et responsabiliteacute raquo

Meacutedecine et droit 2000 ndeg 41 p 21

- DEBOST Claire

o laquo La geacuteneacuteralisation de la messagerie seacutecuriseacutee un pas de plus vers lrsquoeacutechange

drsquoinformations personnelles de santeacute seacutecuriseacute raquo RDS 2014 p 955

o laquo Lrsquoappreacutehension juridique de la relation de soin au prisme des nouvelles

technologies raquo Jurisdoctoria ndeg 8 2012 p 104

- DE CLAUSSADE Jocelyne laquo Seacutecuriteacute juridique et complexiteacute du droit

consideacuterations geacuteneacuterales du Conseil drsquoEtat raquo Recueil Dalloz 2006 p 737

- DE GIVRY Emmanuel laquo Tic et surveillance du salarieacute regards de la CNIL raquo JCP-

S octobre 2013 ndeg 41 p 24

- DE LARD Brigitte laquo Heacutebergement de donneacutees et coopeacuteration raquo Actualiteacutes Jurisanteacute

2011 ndeg 74 p 6

- DE LAMBERTERIE Isabelle LUCAS Henri-Jacques laquo Informatique liberteacutes et

recherche meacutedicale raquo CNRS eacuted 2001 p 68

Bibliographie

488

- DE LAMBERTERIE Isabelle laquoLa place du consentement dans la collecte et le

traitement des informations sensibles La situation en France raquo RGDM ndeg 13 2004

p 62

- DE MONTCLER Marie-Christine

o laquo Le droit souple entre dans le preacutetoire raquo AJDA 2016 p 572

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501

Index alphabeacutetique

Les numeacuteros renvoient aux paragraphes

A

Agence Reacutegionale de Santeacute 33 378 385-389 546-560 563 573 576 et s 672 763 783

789 796

Agreacutement 152 179 et s 182-189 212 215 224 232 300 332 393 659

Archives

hospitaliegraveres 124 157 162-168 174 193 207

publiques 124 156 158-169 174-177 202 206 251 659

Article 29 (Groupe de lrsquo) 65 67 104 645

ASIP santeacute 183 185-187 195 219 243-245 277 306 312 325 341 346 355-356 361

410 478 501 503 et s 518-521 527-529 537-540 545 558 et s 576 619 763

Autodeacutetermination informelle 116-118 661 667

Autoriteacute Administrative Indeacutependante (AAI) 81 83 93 634 713

C

Carte de Professionnel de Santeacute (CPS) 130 et s 195 244-247 250 407 484 504 515 531

544 758

Clarteacute de la loi 582-584

Comiteacute drsquoagreacutement 187 232-235 659

Commission drsquoAccegraves aux Documents Administratifs (CADA) 169 239 et s 174-177

Commission Nationale de lrsquoInformatique et des Liberteacutes (CNIL) 47 85 89 93 97 101 et

s106 140 146-152 171-173 181-185 240 242 291 300-305 325 358 379 391 458

693 713 782

Consentement

aux soins 21 427 431 434 et s 437

au traitement automatiseacute des donneacutees 55 59 96 97-98 103-107 116 647-649

agrave lrsquoheacutebergement des donneacutees 225-232 658

agrave lrsquoouverture drsquoun DMP 274 286 295 335-338 341 346 360

502

Coopeacuteration 48 219-224 320 394-397 401 407 550 555 559 561-568 571 574 576

662 679

D

Data Protection Officer (DPO) 652

Deacutecret confidentialiteacute 130 et s 242 245 et s 248 616 618 620

Donneacutees de santeacute (deacutefinition) 62-65

Donneacutees personnelles (protection des ~) 48-51 66 78 227 592 646 et s 592 646 et s

660 et s667 707 798

Dossier (deacutefinition)

Hospitalier 265

Meacutedical Electronique 269 271 281

Meacutedical Partageacute 268 274-282

Pharmaceutique 267

Droit souple 623 631-639 642 669 671 707

Droit agrave lrsquooubli 54 170 et s 651

E

Equipe de soins 126-129 150 772

Etablissement public de santeacute (deacutefinition) 4

Responsabiliteacute des ~ 458 460 463

Evaluation des pratiques professionnelles (EPP) 789 791

F

Formation professionnelle 727-734 741

G

Groupement

drsquoInteacuterecirct Economique (GIE) 224

drsquoInteacuterecirct Public (GIP) 223 511-517

Hospitalier de Territoire (GHT) 561-577 657 672 796

503

Gouvernance des systegravemes drsquoinformation hospitaliers 476-485 489-500 504-510 518 520-

523

H

Heacutebergement de donneacutees 179 212 et s 215 218 222 659

Heacutebergeur de donneacutees 184 211 et s 214 218 393

Hocircpital (voir eacutetablissement de santeacute)

I

Identifiant National de Santeacute (INS) 324 326 505 527 et s

Intelligibiliteacute de la loi 582-584 588

Interopeacuterabiliteacute 243 247 325 420 482 485 488 490 et s 497 504 et s 522-527 532

534-541 544-546 572 576 et s 619 et s 683

N

Numeacutero drsquoinscription au Reacutepertoire (NIR) 324-326 410 527 529 542 545 576

P

Proprieacuteteacute (des donneacutees de santeacute) 110 et s 115 118-124 605 667

R

Recommandations de Bonnes Pratiques (RBP) 639-641

Reacutefeacuterentiels de seacutecuriteacute 181 242 620

Reacuteseaux sociaux 607 et s 720 765

S

SAFARI (projet) 44

Secret

meacutedical 150 175 207 251 288 331 346 475 790

partageacute 126 129 132 150 153 235 346 430 772

professionnel 22 65 71-73 78 99 108 125 128 145 150 et s 173 234 288 331-

333 346 530 608 738 772 787 790 et s 798

504

Seacutecuriteacute juridique (deacutefinition) 585-589

Systegraveme drsquoinformation hospitalier (deacutefinition) 682-683

T

Tarification agrave lrsquoactiviteacute (T2A) 629 681

Technologies de lrsquoInformation et de la Communication (deacutefinition) 2

Teacuteleacutemeacutedecine 10 et s 13 25-29 212 367-399 402-405 407 410 426-433 435 437-442

445-450 455 464-469 733 746 745

Teacuteleacuteconsultation 11 25 et s 374 383 407 436 438 445

Teacuteleacuteexpertise 8 12 375 383 434 445 et s 448 450

Teacuteleacuteprescription 371 407

V

Vie priveacutee 21 22 37 44 46 48 56 86 333-334 473 578 605-607 646 660 710 et s

714 718

505

Table des matiegraveres

Remerciements 1

Sommaire 1

Principales abreacuteviations 3

Introduction Geacuteneacuterale 7

sect1 Les multiples possibiliteacutes offertes par lrsquointroduction des TIC dans la pratique meacutedicale 9

A Les TIC nouvel espoir pour les prises en charges difficiles 10

B Les TIC outil majeur dans la mise en place drsquoactions de preacutevention en santeacute 13

sect2 Les TIC des outils sources de risques eacutethiques et juridiques majeurs 15

A Les risques pesant sur la vie priveacutee du patient 15

B Les risques laquo drsquoubeacuterisation raquo de la meacutedecine la nouvelle crainte 17

sect3 Probleacutematique de la thegravese 20

PREMIERE PARTIE LE CADRE JURIDIQUE DE LrsquoUTILISATION DES TIC A

LrsquoHOcircPITAL UN CADRE INCOMPLET 23

TITRE 1 TIC ET INFORMATISATION DES DONNEES DE SANTE UN CADRE

PARFOIS INADAPTE 27

Chapitre 1 Le traitement informatiseacute des donneacutees du patient 29

Section 1 La protection des donneacutees du patient 30

sect1 La leacutegislation de droit commun agrave disposition du droit de la santeacute 30

A La loi Informatique et Liberteacutes pilier de lrsquoencadrement 30

1) La France parmi les preacutecurseurs 30

2) Une protection forte 34

B La protection speacutecifique des donneacutees de santeacute 39

1) Les donneacutees de santeacute des donneacutees sensibles 39

2) Des meacutecanismes de protection propres aux donneacutees de santeacute 43

sect2 Une protection agrave lrsquoefficaciteacute relative 48

A Le controcircle et la sanction du non-respect de la loi Informatique et Liberteacutes des

mesures disproportionneacutees 48

1) La CNIL une autoriteacute administrative indeacutependante doteacutee drsquoun pouvoir de controcircle

neacutecessaire 48

2) La limite des sanctions preacutevues par les textes 51

B La protection limiteacutee des donneacutees de santeacute 56

1) Les limites de lrsquointerdiction de traitement des donneacutees sensibles 56

2) Le consentement mis agrave mal 60

Conclusion de la Section 63

Section 2 Les modaliteacutes de partage des donneacutees relatives au patient 64

506

sect1 Les regravegles geacuteneacuterales 64

A La deacutelicate question de la proprieacuteteacute des donneacutees de santeacute 65

1) La recherche drsquoune qualification du droit des individus sur leurs donneacutees 65

2) Tentative de qualification du droit des professionnels de santeacute sur le dossier meacutedical 68

B La difficile application des regravegles relatives au secret partageacute 72

1) Le secret partageacute une deacuterogation au secret professionnel strictement encadreacutee 72

2) Les limites de lrsquoapplication du secret partageacute aux TIC 75

sect2 Le cas particulier de la recherche meacutedicale des regravegles de protection speacutecifiques 77

A Le cadre juridique des recherches impliquant la personne humaine 77

B Lrsquoencadrement particulier des traitements des donneacutees de santeacute dans le cadre de la

recherche 80

1) Les principes applicables aux traitements de donneacutees agrave caractegravere personnel dans le

cadre de la recherche meacutedicale 81

2) Les Meacutethodologies de Reacutefeacuterences MR001 et MR003 83

C Les donneacutees de santeacute utiliseacutees dans le cadre de la recherche des donneacutees moins bien

proteacutegeacutees 85

Conclusion de la section 89

Conclusion du chapitre 91

Chapitre 2 Les modaliteacutes de conservation et de communication des informations relatives

aux patients 93

Section 1 La conservation des donneacutees de santeacute en tant qursquoarchives hospitaliegraveres 95

sect1 Les regravegles speacutecifiques aux archives publiques 95

A Les conseacutequences de la qualification drsquoarchives publiques 96

1) Deacutefinitions leacutegales 96

2) Conseacutequences juridiques 98

a) Les conseacutequences relatives agrave la dureacutee de conservation des donneacutees 98

b) Les conseacutequences relatives agrave la suppression des donneacutees 100

B Archives publiques archives hospitaliegraveres et secret meacutedical des regravegles parfois en

opposition 103

sect2 La conservation agrave lrsquoegravere des TIC le cadre de lrsquoheacutebergement des donneacutees de santeacute 106

A Lrsquoheacutebergement des donneacutees de santeacute de lrsquoagreacutement agrave la certification 106

1) Des regravegles agrave la mise en place laborieuse 107

2) Lrsquoagreacutement des heacutebergeurs une proceacutedure critiqueacutee 109

a) Points essentiels de la proceacutedure 109

b) Une proceacutedure remise en cause 110

c) Lrsquoadoption deacutefinitive drsquoune proceacutedure de certification 112

B La reprise de lrsquoexistant lrsquoeacuteventualiteacute de la numeacuterisation des dossiers papier 113

507

1) Les conditions de la numeacuterisation des dossiers existants 114

a) Les regravegles applicables en droit commun 115

2) Le devenir des dossiers papier numeacuteriseacutes 119

a) La reacuteponse des Archives de France 119

b) Les apports de la loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute 121

Conclusion de la section 122

Section 2 Heacutebergement et communication des donneacutees un cadre limiteacute 123

sect1 Lrsquoheacutebergement des donneacutees de santeacute un cadre incomplet 123

A Choix de lrsquoheacutebergeur et questions en suspens 123

1) Lrsquohypothegravese drsquoun eacutetablissement de santeacute heacutebergeur de donneacutees 124

2) Quelles conditions pour le choix du tiers heacutebergeur 126

a) Lrsquoobligation drsquoun marcheacute public 126

b) Les possibiliteacutes de coopeacuteration 127

B Quelle place laisseacutee au respect du droit des patients 130

1) La disparition progressive du consentement 130

a) Le consentement eacuteleacutement initialement essentiel agrave lrsquoheacutebergement 130

b) Le consentement du principe agrave lrsquoexception 131

c) La disparition du consentement au profit de la non opposition 132

2) Le meacutedecin de lrsquoheacutebergeur garant du respect de la confidentialiteacute des donneacutees 133

sect2 La construction laborieuse du cadre relatif agrave la communication des donneacutees de santeacute 135

A La communication des donneacutees de santeacute des prescriptions difficilement applicables

en lrsquoeacutetat 135

1) Des questions en suspens 135

2) Des reacutefeacuterentiels non parus 137

B Lrsquoutilisation systeacutematique de la carte de professionnel de santeacute une utopie

abandonneacutee 139

Conclusion de la section 142

Conclusion du chapitre 143

Conclusion du titre 145

TITRE 2 TIC ET PRISE EN CHARGE MEDICALE UN CADRE EN EVOLUTION 147

Chapitre 1 La deacutemateacuterialisation des dossiers meacutedicaux lrsquoexemple du DMP 149

Section 1 Le DMP un Dossier meacutedical eacutelectronique institutionnel 150

sect1 La place incertaine du DMP dans le champ des dossiers meacutedicaux 150

A Tentative de deacutelimitation du cadre juridique des DME 151

1) Le dossier meacutedical un dossier aux formes multiples 151

2) Deacutelimitation des contours du DME 154

508

B DMP DME et autres dossiers meacutedicaux une articulation indispensable 157

1) Le DMP un projet novateur 157

2) Le DMP compleacutement ou concurrent des autres dossiers 159

sect2 Le DMP un encadrement juridique eacutevoluant avec difficulteacutes 162

A Les premiers pas du DMP des orientations incertaines 162

1) Origines et principes fondamentaux du DMP 162

2) Des eacutevolutions au greacute des critiques 165

a) Les apports pratiques 165

b) Les apports sur le fond 166

B Une rapide remise en question du projet initial 168

1) Un premier bilan neacutegatif 168

a) Le rapport GAGNEUX 168

b) Le bilan de la CNIL 169

2) Une premiegravere relance mitigeacutee 171

3) La loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute un nouveau souffle pour le DMP 172

Conclusion de la section 175

Section 2 Le DMP les limites drsquoun projet ambitieux 176

sect1 Des ambitions louables mais deacutemesureacutees 176

A Un outil plein de promesses 176

1) Lrsquoameacutelioration et la coordination des soins un enjeu majeur 177

2) La seacutecuriteacute de lrsquooutil une prioriteacute 178

B Des lacunes certaines 181

1) Le DMP un outil agrave geacuteomeacutetrie variable 181

2) Les droits et devoirs des patients un manque de clarteacute 182

sect2 Un outil agrave lrsquoavenir incertain 185

A Un outil mal perccedilu 186

1) DMP et responsabiliteacute 186

2) La theacuteorie du masquage 189

B Un projet voueacute agrave lrsquoeacutechec 191

1) Le coucirct important du DMP 191

2) Les beacutemols face agrave la relance de la loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute 193

Conclusion de la section 196

Conclusion du chapitre 197

Chapitre 2 Lrsquoutilisation des TIC dans la prise en charge du patient 199

Section 1 La prise en charge agrave distance un cadre naissant 200

509

sect1 La teacuteleacutemeacutedecine une pratique ancienne reacutecemment consacreacutee par le leacutegislateur 200

A Un cadre speacutecifique strictement deacutefini par la loi HPST 201

1) La teacuteleacutemeacutedecine seule pratique agrave distance leacutegalement deacutefinie 201

a) Deacutefinition des diffeacuterentes pratiques 201

b) Les cinq actes de teacuteleacutemeacutedecine 203

2) Une proceacutedure preacutealable stricte 204

B Un cadre lourd frein au deacuteveloppement de lrsquoactiviteacute 206

1) Etat des lieux de lrsquoactiviteacute en France 207

2) Le poids des proceacutedures preacutealables 208

a) La contractualisation avec les acteurs 208

b) Les proceacutedures induites par lrsquoactiviteacute 209

3) Pistes drsquoeacutevolution 213

sect2 Lrsquoinformatisation des prescriptions meacutedicales un cadre en construction 215

A La prescription par voie eacutelectronique une possibiliteacute encore limiteacutee 215

1) La prescription par e-mail une possibiliteacute leacutegalement encadreacutee 215

2) Les voies de deacuteploiement de la e-prescription 218

a) La note drsquoorientation du CLIO santeacute 218

b) Le projet europeacuteen EPSOS 219

B La prescription informatiseacutee une pratique encourageacutee par les pouvoirs publics 220

1) Lrsquoincitation agrave lrsquoinformatisation du circuit du meacutedicament 220

2) La certification obligatoire des logiciels de prescription meacutedicale 223

Conclusion de section 225

Section 2 Prise en charge meacutedicale et TIC des regravegles de responsabiliteacute bousculeacutees 226

sect1 Droit des usagers et responsabiliteacute meacutedicale lrsquoadaptation du droit commun 226

A Information et consentement du patient une obligation maintenue et renforceacutee 226

1) Lrsquoobligation classique eacutetendue aux speacutecificiteacutes des TIC 227

2) La mise en œuvre des droits des patients 230

a) La question de la forme de lrsquoinformation 230

b) La preuve de lrsquoinformation et du recueil du consentement 232

B Responsabiliteacute meacutedicale des regravegles classiques aux risques drsquoapplication multiplieacutes

234

1) La responsabiliteacute meacutedicale une responsabiliteacute pour faute 234

2) La reacutepartition de la responsabiliteacute entre les diffeacuterents acteurs de la teacuteleacutemeacutedecine 236

sect2 Teacuteleacutemeacutedecine et responsabiliteacute des regravegles speacutecifiques agrave prendre en consideacuteration 239

A Deacutefaillance des logiciels et responsabiliteacutes 240

510

1) Qualification juridique des logiciels 240

2) Responsabiliteacute du fait des produits deacutefectueux 242

B Nouveaux acteurs et nouvelles responsabiliteacutes 246

Conclusion de section 250

Conclusion du chapitre 251

Conclusion du titre 253

Conclusion de la premiegravere partie 255

SECONDE PARTIE LES VOIES DE SECURISATION DE LrsquoUTILISATION DES TIC

A LrsquoHOPITAL 257

TITRE 1 LrsquoIMPULSION DE LA SECURISATION AU NIVEAU NATIONAL 259

Chapitre 1 Une gouvernance forte des systegravemes drsquoinformation en santeacute une prioriteacute 261

Section 1 Lrsquoeacuteparpillement notable de la gouvernance actuelle 262

sect1 Des difficulteacutes pour instaurer une gouvernance stable et efficace 262

A Lrsquoeacutevolution de la gouvernance des systegravemes drsquoinformation en santeacute en France 262

1) Les structures de coordination 263

a) La Mission pour lrsquoinformatisation du systegraveme de santeacute 263

b) Le Conseil supeacuterieur des systegravemes dinformation de santeacute 264

2) Les structures opeacuterationnelles 265

a) Le groupement pour la modernisation du systegraveme dinformation hospitalier 265

b) La Mission Nationale drsquoAppui agrave lrsquoInvestissement Hospitalier 267

c) Les GIP DMP et CPS 268

B Un bilan mitigeacute 269

1) Les rapports de la Cour des comptes 269

2) Le rapport de lrsquoIGAS 271

C Les propositions GAGNEUX et FIESHI 272

sect2 Un manque de visibiliteacute sur la gouvernance des projets en cours 274

A Le nouvel organigramme de la gouvernance des SIS 274

1) Une structure de coordination la deacuteleacutegation agrave la strateacutegie des systegravemes drsquoinformation

de santeacute 274

2) Des structures opeacuterationnelles en appui 276

a) LrsquoASIP Santeacute 276

b) Lrsquoagence Nationale drsquoAppui agrave la Performance 278

B Les limites de cette nouvelle organisation 279

1) Le scheacutema de gouvernance choisi par lrsquoEtat 279

a) LrsquoASIP une nouvelle venue dans le paysage des agences de lrsquoEtat 279

b) LrsquoASIP un GIP sous tutelle 280

511

2) Un manque de visibiliteacute des projets en cours 283

Conclusion de la section 285

Section 2 Les deacutefis agrave relever pour une gouvernance efficace 286

sect1 Lrsquointeropeacuterabiliteacute des SI un chantier prioritaire 286

A Enjeux drsquoune probleacutematique ancienne 286

1) Peacuterimegravetre de lrsquointeropeacuterabiliteacute 287

2) Preacutealables neacutecessaire agrave lrsquointeropeacuterabiliteacute 287

a) Une identification unifieacutee des patients 287

b) Lrsquoidentification des professionnels 289

3) La normalisation des systegravemes la condition technique essentielle 290

B Lrsquointeropeacuterabiliteacute une probleacutematique insoluble 291

1) Le cadre drsquointeropeacuterabiliteacute des SIS 291

2) Les obstacles au deacuteveloppement de lrsquointeropeacuterabiliteacute 293

sect2 La place strateacutegique des acteurs reacutegionaux dans la gouvernance des SIS 295

A LrsquoARS acteur charniegravere dans la mise en œuvre des politiques relatives aux SIS 295

1) LrsquoARS laquo bras armeacute raquo de lrsquoEtat en matiegravere de politiques de santeacute 296

2) LrsquoARS acteur essentiel de la strateacutegie hocircpital numeacuterique 298

3) Les maicirctrises drsquoouvrage reacutegionales appuis strateacutegiques aux ARS 300

B Les GHT nouveaux acteurs strateacutegiques pour le SIS 301

1) Les GHT une forme atypique de coopeacuteration 301

a) Speacutecificiteacute des GHT 302

b) Des questions en suspens 304

2) La mutualisation des SIS entre eacutetablissements de santeacute 307

Conclusion de la section 311

Conclusion du chapitre 313

Chapitre 2 La refonte du cadre juridique un effort neacutecessaire 315

Section 1 Le cadre juridique actuel source drsquoinseacutecuriteacute juridique 316

sect1 Retour sur la notion de seacutecuriteacute juridique 316

A Porteacutees des principes de clarteacute et drsquointelligibiliteacute de la norme 317

1) Deacutefinition des principes 317

2) Des composantes drsquoun concept plus large celui de seacutecuriteacute juridique 319

B Les outils de lutte contre lrsquoinseacutecuriteacute juridique 321

1) Les origines varieacutees de lrsquoinseacutecuriteacute juridique 322

2) Les pistes de seacutecurisation du droit 324

sect2 La complexiteacute du cadre juridique srsquoappliquant aux TIC en santeacute 327

512

A Lrsquoutilisation des TIC agrave lrsquohocircpital une pratique eacutevoluant dans des environnements

normatifs distincts 327

1) Multipliciteacute des matiegraveres agrave prendre en compte 328

2) Lrsquoempilement leacutegislatif et regraveglementaire relatif aux TIC en santeacute 332

B Un cadre juridique source drsquoincertitudes 334

Conclusion de la section 338

Section 2 Un cadre juridique agrave repenser 339

sect1 Le cadre actuel frein au deacuteveloppement peacuterenne des TIC agrave lrsquohocircpital 339

A Lrsquoencadrement juridique de lrsquoinnovation un eacutequilibre deacutelicat 339

B Le recours au droit souple une solution agrave envisager 343

1) La notion de droit souple 344

2) Le deacuteveloppement du droit souple pour encadrer les TIC en santeacute 346

sect2 Le leacutegislateur sur la voie de la modernisation du cadre juridique 350

A Une volonteacute europeacuteenne drsquounifier la protection des donneacutees personnelles 350

1) Une proceacutedure leacutegislative longue et deacutelicate 350

2) La mise en place drsquoun cadre reacutenoveacute 352

a) Le renforcement du droit des personnes 352

b) Un nouveau cadre de controcircle et de sanction 354

C) Des nouvelles formaliteacutes 356

B Une volonteacute franccedilaise de moderniser le cadre applicable 357

1) La loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute patch correctif de certains

dysfonctionnements 357

2) La loi pour une Reacutepublique numeacuterique 358

a) Les travaux preacutealables du Conseil drsquoEtat 358

b) Les enjeux de la loi 360

Conclusion de la section 363

Conclusion du chapitre 365

Conclusion du titre 367

TITRE 2 LES ETABLISSEMENTS DE SANTE ACTEURS CLES DE LA

SECURISATION DE LrsquoUTILISATION DES TIC A LrsquoHOcircPITAL 369

Chapitre 1 Les eacutetablissements de santeacute au cœur de la seacutecurisation de leurs pratiques 371

Section 1 Les pistes de seacutecurisation a priori 372

sect1 La gestion strateacutegique de lrsquoinformatisation agrave lrsquohocircpital 372

A Le Systegraveme drsquoinformation hospitalier 372

1) Bref rappel historique 372

2) Tentative de deacutefinition de la notion de systegraveme drsquoinformation hospitalier 374

513

B Une gestion strateacutegique indispensable 375

sect 2 Lrsquoappui sur des ressources qualifieacutees 378

A Le recrutement de compeacutetences speacutecialiseacutees 378

B Lrsquoappel aux ressources exteacuterieures 382

1) Lrsquoaide agrave la conception du SIH 383

2) Lrsquoappui agrave la maicirctrise drsquoouvrage 384

Conclusion de la section 386

Section 2 Les pistes de seacutecurisation a posteriori 387

sect1 Lrsquoutilisation drsquooutils juridiques 387

A Le controcircle et la limitation de lrsquoutilisation des TIC 388

1) Le droit agrave la vie priveacutee dans le cadre professionnel enjeux et limites 389

a) La messagerie professionnelle 389

b) Lrsquoutilisation drsquoInternet et du mateacuteriel informatique agrave des fins priveacutees 391

2) Les possibiliteacutes de reacutegulation et de controcircle offertes agrave lrsquoemployeur 392

B La mise en place drsquoune charte informatique 395

sect2 Lrsquoutilisation drsquooutils manageacuteriaux 399

A La formation des utilisateurs 400

1) La formation professionnelle une obligation leacutegale reacuteciproque 400

2) La formation professionnelle un outil manageacuterial strateacutegique 403

B La sanction drsquoune mauvaise utilisation des TIC 404

1) Le cadre drsquoexercice du pouvoir disciplinaire 405

2) La sanction drsquoun meacutesusage des TIC 406

Conclusion de la section 408

Conclusion du chapitre 409

Chapitre 2 Un exemple de seacutecurisation reacuteussie le CHRU de Lille 411

Section 1 Une volonteacute marqueacutee de seacutecuriser lrsquoutilisation des TIC en santeacute 413

sect1 Une organisation interne tourneacutee vers la seacutecuriteacute du SIH 413

A Preacutesentation de lrsquoorganisation du CHRU en matiegravere de SIH 414

1) La gouvernance du SIH 414

2) La gestion strateacutegique du SIH 416

B Le deacuteveloppement de projets ambitieux relatifs agrave la seacutecuriteacute 417

1) Le projet carte drsquoeacutetablissement 417

2) Le projet Systegraveme de Management de la Seacutecuriteacute du Systegraveme drsquoinformation (SMSSI) 418

sect2 La diffusion drsquoune culture de la seacutecuriteacute informatique 421

A La sensibilisation des utilisateurs du SIH 421

1) Les formations 421

514

2) Les actions de communication 422

B La mise en place de chartes informatiques 423

Conclusion de section 425

Section 2 Une volonteacute affirmeacutee de proteacuteger les donneacutees de santeacute 426

sect1 La creacuteation de structures adrsquohoc pour geacuterer la confidentialiteacute des donneacutees de santeacute 426

A La Commission Confidentialiteacute de lrsquoInformation Meacutedicale (CCIM) 427

1) Contexte de la creacuteation de la CCIM 427

2) Missions et eacutevolution de la CCIM 429

B Le Comiteacute CNIL 430

sect2 Bilan des reacutealisations de ces structures novatrices 432

A Lrsquoeacutelaboration drsquoune reacuteglementation interne 432

B Analyse et sanction des accegraves indus 434

C La labellisation de lrsquoaction de la CCIM 436

Conclusion de la section 439

Conclusion du chapitre 441

Conclusion du titre 443

Conclusion de la seconde partie 445

Conclusion geacuteneacuterale 447

Table des Annexes 451

Annexe I Scheacutema de lrsquoorganisation en briques fonctionnelles drsquoun SIH type 452

Annexe II Preacutesentation et modaliteacutes drsquoobtention du label droits des usagers 453

515

453

516

454

517

455

518

456

519

457

520

458

521

459

522

460

523

461

524

462

525

463

Annexe III Documents de communication de la CCIM 464

526

464

Annexe IV Questionnaire drsquoeacutevaluation des pratiques professionnelles de la CCIM 470

470

527

471

528

472

529

473

Bibliographie 475

I Ouvrages manuels et thegraveses 476

530

A Ouvrages et manuels geacuteneacuteraux 476

B Ouvrages speacuteciaux 476

C Contribution agrave un ouvrage 477

D Thegraveses 477

II Rapports et eacutetudes 479

III Articles 484

IV Avis et deacutelibeacuterations 497

V Deacutecisions commenteacutees 498

Index alphabeacutetique 501

Table des matiegraveres 505

Lrsquoutilisation des technologies de lrsquoinformation et de la communication agrave lrsquohocircpital

Lrsquoutilisation des TIC agrave lrsquohocircpital prend une place de plus en plus importante et son deacuteveloppement ne cesse de

croicirctre Le cadre juridique applicable se reacutevegravele cependant complexe agrave appreacutehender composeacute agrave la fois de textes de

droit commun et de textes plus speacutecifiques le tout formant un ensemble pas toujours coheacuterent Pour

accompagner au mieux lrsquoutilisation des TIC agrave lrsquohocircpital le leacutegislateur doit trouver le juste eacutequilibre entre cadre

propice pour le deacuteveloppement de ces pratiques protection des droits fondamentaux et seacutecurisation des

pratiques Or agrave lrsquoheure actuelle le cadre juridique applicable agrave lrsquoutilisation des TIC agrave lrsquohocircpital ne permet pas

drsquoassurer cet eacutequilibre deacutelicat Les pouvoirs publics ont donc un rocircle strateacutegique agrave jouer dans la seacutecurisation de

lrsquoutilisation des TIC agrave lrsquohocircpital Une impulsion nationale doit ecirctre donneacutee en la matiegravere afin drsquoassurer la

coheacuterence des projets deacuteveloppeacutes au travers drsquoune gouvernance forte Le cadre juridique doit quant agrave lui ecirctre

reacutenoveacute afin drsquoaccompagner lrsquoinnovation dans le numeacuterique en santeacute et assurer la seacutecuriteacute juridique neacutecessaire agrave

la bonne utilisation des TIC Dans ce contexte les hocircpitaux ont un rocircle essentiel agrave jouer afin de seacutecuriser leurs

pratiques

Mots clefs franccedilais TIC ndash hocircpital - teacuteleacutemeacutedecine ndash dossier meacutedical eacutelectronique -

donneacutees de santeacute ndash donneacutees personnelles - e-santeacute

The use of information and communication technologies in hospitals

The use of ICT has become increasingly important in hospitals However the legal framework structuring its use

is very complex to grasp Indeed it is made up of general laws as well as specific ones and makes this

framework sometimes unconsistent To provide an optimal legal framework for the ICT to expand safely the

legislator needs to strike the right balance between protecting fundamental rights and securing practices As the

current legal framework does not provide this delicate balance public authorities have a strategic role to play to

ensure a secure use of ICT within hospitals To guarantee the development of consistent projects a strong

governance has to set up a national leadership The legal framework needs to be rehabilitated to support digital

innovation in Healthcare and to ensure a legal protection required for an appropriate use of ICT Hospitals have

then a key role to play in securing their practices

Keywords ICT ndash hospitals ndash telemedecine ndash electronic medical record ndash health data ndash

personal data - eHealth

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