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1 IUFM de l’Académie de Dijon Sophie BRUSSATIS Site de Dijon Date de la soutenance : 13/04/06 LANGUE SOURCE, LANGUE CIBLE : INTERACTIONS, INTERFERENCES ET REMEDIATIONS Contexte du mémoire : Discipline : Anglais Concours : CAPES externe Classe concernée : classe de seconde de 31 élèves Etablissement : Lycée Camille Claudel de Digoin Directeur de mémoire : M. Alain Morizot Assesseur :…………………………………… Année universitaire : 2005-2006

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IUFM de l’Académie de Dijon Sophie BRUSSATIS

Site de Dijon

Date de la soutenance : 13/04/06

LANGUE SOURCE, LANGUE CIBLE :

INTERACTIONS, INTERFERENCES ET

REMEDIATIONS

Contexte du mémoire :

Discipline : Anglais

Concours : CAPES externe

Classe concernée : classe de seconde de 31 élèves

Etablissement : Lycée Camille Claudel de Digoin

Directeur de mémoire : M. Alain Morizot

Assesseur :……………………………………

Année universitaire : 2005-2006

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RESUME

Tout naturellement, lorsqu’un élève apprend une langue étrangère, il se

heurte très rapidement à un obstacle redoutable : sa langue maternelle.

Les difficultés et les erreurs que ce conflit entraîne sont multiples et de ce

fait délicates à résoudre, mais ne peuvent en aucun cas être ignorées.

MOTS-CLES

LANGUE MATERNELLE/SOURCE – REMEDIATIONS – COMMUNICATION

INTERFERENCES

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TABLE DES MATIERES

II.. LLee rrôôllee pprriimmoorrddiiaall ddee ll’’eerrrreeuurr ................................................................55

A. Le statut de l’erreur .................................................................5

B. D’où provient l’erreur ? ............................................................6

C. L’erreur met à nu l’interlangue de l’élève.................................6

D. Mais comment corriger de façon spécifique ces erreurs ?.........7

IIII.. LLeess iinntteerrfféérreenncceess àà ll’’ééccrriitt ......................................................................77

A. Premiers indices.......................................................................7

B. La voix des élèves : le Questionnaire à Choix Multiples ............8

C. Mauvaise maîtrise de la langue source ..................................10

D. Mauvaise utilisation du dictionnaire. ....................................11

E. La notion de nature de mot. ...................................................12

IIIIII.. QQuuaanndd llee FFrraannççaaiiss ddeevviieenntt uunn aalllliiéé.. ................................1155

A. Mots transparents et stratégies de contournement ................15

B. Traduction et comparaison de deux systèmes linguistiques...16

C. Le rôle de l’analyse-constat....................................................17

IIVV.. IInntteerraaccttiioonnss eett iinntteerrfféérreenncceess àà ll’’oorraall ................................1188

A. Le rôle du classroom English .................................................18

B. Réflexe de survie de l’élève pour s’exprimer à l’oral : la

traduction.......................................................................................20

C. Les interférences phonologiques ............................................21

D. Le dialogue : un support intéressant et ludique .....................22

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IINNTTRROODDUUCCTTIIOONN « Mais pourquoi ne disent-ils pas comme nous, ce n’est pas logique ! ».

De telles questions et remarques m’ont fait comprendre que les élèves ne

différenciaient pas les deux systèmes linguistiques de la langue source ou

maternelle, le Français, et de la langue cible, l’Anglais. Ainsi, pour eux, le

modèle français est universel, et la mission consistant à leur faire

découvrir qu’il existe d’autres modèles implique de bouleverser leurs

acquis, ce qui est on ne peut plus déstabilisant pour eux comme ça le

serait pour tout un chacun.

De plus, alors qu’une différence culturelle est matériellement

perceptible (tous savent bien que les anglais roulent à gauche et non à

droite comme nous, et qu’ils dînent bien plus tôt !), il est bien plus difficile

de faire percevoir une différence linguistique qui est pourtant source de

nombreuses interférences. Mais quelles sont exactement ces

interférences ? D’où proviennent-elles, et comment en venir à bout tout

en respectant l’indéniable besoin du support de la langue maternelle qui

ne peut quoi qu’il en soit pas être ignorée ? Le but ultime serait de

parvenir à un juste équilibre entre l’utilisation de ce que la langue

maternelle peut apporter tout en gardant la distance nécessaire à la mise

en place d’un autre système linguistique.

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I. Le rôle primordial de l’erreur

A. Le statut de l’erreur L’erreur, longtemps considérée comme une faute grave à éviter autant

que faire se peut, est désormais non seulement acceptée en classe, mais

même encouragée, car non seulement elle ne peut être évitée, mais en

plus elle joue un rôle essentiel dans le processus d’apprentissage. Dès le

début d’année, j’ai observé qu’un élève, après avoir fait une erreur quelle

qu’elle soit, avait pour réflexe d’avoir honte, de rougir, et par conséquent

renonçait rapidement à toute prise de risque, parfois même à toute

tentative de communication. Depuis, je rappelle régulièrement à ma

classe que l’erreur d’un élève peut servir aux trente autres qui l’auraient

également faite. De plus, je leur explique qu’en faisant cette erreur, il rend

possible son explication et parfois sa disparition.

Enfin, je leur rappelai que plus petits, lorsqu’ils apprirent à

parler Français, leurs parents s’émerveillèrent de leurs premiers mots et

phrases, privilégiant sans aucune hésitation le sens plutôt que la forme. Il

me semble important de faire prendre conscience aux élèves qu’une des

priorités de l’apprentissage de l’anglais est la capacité à s’exprimer dans

cette langue, à communiquer et se faire comprendre. Raisons pour

lesquelles je mis en place dès le début d’année un système d’évaluation de

la participation orale qui ne pénalise en aucun cas l’erreur et encourage

toute prise de parole, quelle que soit sa qualité linguistique. Utilisant un

système de points, un élève lorsqu’il prend la parole gagne un nombre de

points proportionnel à sa production, tant en terme de quantité que de

qualité. En aucun cas il ne perd de points si sa phrase est par exemple

grammaticalement incorrecte. De plus, ceci encourage l’entraide

puisqu’un élève en difficulté est systématiquement aidé par un autre, qui

à son tour récoltera quelques points.

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B. D’où provient l’erreur ?

L’erreur provient bien souvent du parasitage de la langue source sur la

compréhension du fonctionnement du système de la langue cible. Ces

nombreuses interférences créent pour l’élève une interlangue absolument

nécessaire et indispensable à l’apprentissage d’une nouvelle langue. Cette

interlangue fait partie du chemin menant vers la langue cible. Elle

constitue une sorte de pont entre la langue maternelle (qui peut pour

certains élèves être autre que le français) et la langue cible, ici

l’Anglais. Chaque élève se crée sa propre représentation du

fonctionnement du système anglophone, tant à l’oral qu’à l’écrit, ce qui le

mène certes à faire des erreurs, mais aussi à s’approprier la langue cible

et son fonctionnement.

C. L’erreur met à nu l’interlangue de l’élève

En effet, Lorsqu’un élève se trompe, faisant confiance à son interlangue

qu’il croit être le système anglophone, il s’approche en réalité grâce aux

corrections qui lui sont ensuite apportées de la « vérité » de l’Anglais. Petit

à petit, son interlangue semble vouée à disparaître, car même si celle-ci

contient sa propre logique, « ses propres règles » comme le dit Gaonac’h,

ces dernières ne sont pas nécessairement celles de l’Anglais. On

comprend mieux ce phénomène lorsque l’on observe des productions

d’élèves telles que * « I can to swim ». Dans la logique de l’élève, dans son

interlangue, nager se dit « to swim ». Par conséquent, je sais nager se dit

pour lui * « I can to swim ».

De tels exemples permettent de mettre à jour l’interlangue des élèves et

de toucher de bien plus près qu’à travers d’éventuels exercices de

grammaire la nature du système anglophone. Ainsi, au fil des séances, la

correction des erreurs dues au parasitage par la langue maternelle réduit

petit à petit l’interlangue des élèves et permet aux parasitages de se faire

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bien moins fréquents. On peut cependant se demander si de tels

parasitage disparaissent totalement, quel que soit le niveau de maîtrise de

chaque individu. Quoi qu’il en soit, les élèves doivent être encouragés à

l’erreur car elle permet de remettre en doute leurs hypothèses

linguistiques. Ainsi s’approprient-ils progressivement le système de la

langue cible par cette déconstruction constructive.

D. Mais comment corriger de façon spécifique ces erreurs ?

Il semble que pour remédier correctement à ces interférences, il faille les

distinguer par compétence. J’entends par compétence les quatre grands

domaines sur lesquels nous nous appuyons pour enseigner l’Anglais :

l’expression écrite et orale, et la compréhension écrite et orale. Nous

allons effectivement constater qu’à chaque domaine de compétences sa

solution.

II. Les interférences à l’écrit

A. Premiers indices

L’utilisation de la traduction à l’écrit du Français vers l’Anglais m’a été

révélée au milieu du premier trimestre, lors d’un premier devoir

d’expression écrite à faire à la maison sur le thème d’Halloween. L’objectif

de ce devoir était pour moi de faire une sorte d’état des lieux de ce qu’ils

savaient faire, afin de partir sur des bases positives pour l’année. Il

s’agissait également de voir si des difficultés majeures se posaient à la

majorité d’entre eux. En somme, cette première évaluation était d’ordre

diagnostique.

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J’avais choisi de donner le début d’une histoire qui plantait clairement

le décor, et ils avaient pour travail d’en imaginer la suite en deux cents

mots. Le sujet était le suivant : “ It’s cold outside and the wind is blowing.

It’s Halloween, but for you, it is just another sad evening. You are

watching TV, as usual, when suddenly, you hear a creaking downstairs.”

Quelques jours avant la date de remise des devoirs maison, certains

élèves sont venus me consulter au sujet de la traduction de certains mots

et expressions dont ils avaient besoin. Et à ma grande surprise, certains

m’ont présenté le devoir entièrement rédigé en Français. Evidemment, la

traduction mot à mot leur posait problème. Etonnée et prise au dépourvu

face à leur méthode de travail que je n’avais jamais imaginée possible, je

trouvais pour seul conseil « Ne rédigez pas votre devoir en Français pour

ensuite le traduire mot à mot ! ». Je ne trouvai sur le moment aucune

explication justifiant ce conseil.

Lors de la correction, je compris que cette méthode avait de toute

évidence été utilisée par beaucoup d’entre eux, les devoirs étant truffés de

calques de construction. Certaines expressions comme * « She tins the

TV » me laissèrent perplexe. Cet exemple me fit comprendre que le

problème était double : il était le résultat à la fois d’une mauvais

connaissance du Français, mais aussi d’un mauvais usage du

dictionnaire.

B. La voix des élèves : le Questionnaire à Choix Multiples

Dans le cadre de la réflexion menée pour ce mémoire, je décidai donc de

donner à mes élèves ce QCM visant à me renseigner de façon plus précise

sur leur façon de procéder lors de l’élaboration d’une expression écrite à

faire à la maison. Le QCM était le suivant :

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Comment est-ce que je prépare une expression écrite ?

On me donne le sujet :

Je le traduis

J’entoure les mots clés

Je le lis une fois et je commence le travail

Autre :

Qu’est-ce que j’écris en premier ?

Mes idées en Français sous forme de notes

Mes idées en Français intégralement rédigé

Mes idées en Anglais sous forme de notes

Mes idées en Anglais intégralement rédigé

Et ensuite ?

Je prends mon brouillon Français et je traduis mot à

mot

Je prends mon brouillon Français et je traduis idée

après idée

Je rédige petit à petit mon expression en Anglais

Autre :

Il me manque des mots :

Tant pis, j’invente ou je renonce à ma phrase

Je cherche dans le dictionnaire et je prends le

premier mot qu’il propose

Je cherche dans le dictionnaire et je lis toute la

définition jusqu’à avoir trouvé ce que je cherche

Autre :

Des observations générales peuvent être trouvées en annexe 1.

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C. Mauvaise maîtrise de la langue source

« Apprendre une et a fortiori plusieurs langues vivantes, c’est

développer une agilité intellectuelle précieuse pour mieux maîtriser sa

langue maternelle » (Qu’apprend-on au collège ?). Ainsi, aussi

contradictoire que cela puisse paraître, apprendre l’Anglais renvoie

régulièrement au Français. Il ne faut en effet pas oublier qu’à la différence

du petit enfant qui apprend sa langue maternelle par acquisition

naturelle et inconsciente, l’enfant découvre et apprend à l’école d’autres

langues vivantes étrangères non plus par acquisition mais par

apprentissage. Il n’est donc pas réellement conscient du fonctionnement

de sa propre langue, et lors de l’apprentissage de la première langue

vivante étrangère, l’élève est amené à conceptualiser la langue source afin

de pouvoir analyser le fonctionnement de la langue cible. On ne peut bien

évidemment pas apprendre une seconde langue sans être par exemple

conscient de l’existence de noms, de verbes ou encore d’adjectifs dans sa

propre langue. Pour apprendre une langue cible, l’élève a besoin de

références claires dans sa langue maternelle, même si celles-ci viennent

ensuite parasiter le processus d’apprentissage. Mais bien souvent, l’élève

ne possède pas suffisamment de références, ou bien elles sont erronées.

Dans l’exemple précédemment cité, le problème était d’ordre

orthographique. Pour l’élève, « j’éteins » s’écrit * « J’étain ». Dans d’autres

cas, le problème est davantage d’ordre syntaxique. Ainsi, un élève voulant

écrire * « Je ne sais pas y faire » le traduit en Anglais par * « I don’t know

there to do ». Dès lors, avant même de réfléchir sur le fonctionnement de

la langue cible, il faut obligatoirement faire réfléchir l’élève sur sa phrase

française et lui faire prendre conscience que de telles expressions

régionales ne peuvent évidemment pas trouver correspondance exacte en

Anglais !

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Ce problème de maîtrise de la langue source peut également être

partiellement résolu par une concertation avec le professeur de Français

afin de l’informer des difficultés orthographiques et stylistiques des

élèves. Ainsi, on peut envisager un partenariat avec le professeur

de Français et même avec toute l’équipe pédagogique de la classe visant à

porter la plus grande attention à ce sujet. Enfin, on peut également tout

simplement rappeler aux élèves de vérifier l’orthographe française avant

même d’en chercher la traduction dans une langue cible quelle qu’elle

soit.

D. Mauvaise utilisation du dictionnaire.

Le mauvais usage du dictionnaire est clairement apparu dans l’exemple

* « She tins the TV ». En effet, « tin » n’est pas un verbe mais un nom.

Cependant, l’élève n’a pas vérifié sa nature au moment de sa recherche, et

l’a donc sans plus attendre transformé en verbe, étant donné qu’il

recherchait bien un verbe. Il l’a ensuite conjugué comme il se doit au

présent aspect zéro, ce qui est déjà positif et montre que l’élève est en

phase d’acquisition partielle. Au moment de lui expliquer son erreur,

l’élève s’empressa de rétorquer : « mais c’était écrit dans le dictionnaire ! »

(sous-entendu, ça ne peut pas être faux !). A l’évidence, le Français a ici

été la première source d’erreur, mais s’est alors ajouté un problème de

méthodologie.

Par l’intermédiaire du QCM, deux de mes élèves m’avouèrent tout de

même renoncer à une phrase si celle-ci contenait un mot inconnu, et

quatre autres aller jusqu’à inventer le mot manquant ! Je fus cependant

relativement rassurée de voir que le reste d’entre eux considéraient savoir

rechercher l’information exacte recherchée dans le dictionnaire. Pourtant,

lors du module qui suivit, je m’aperçu que ça n’était pas vraiment le cas.

J’en ai donc conclu qu’un module d’apprentissage de l’utilisation du

dictionnaire s’imposait. Lors de ce module, nous avons clairement mis en

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évidence les sous-parties des définitions qui ne sont pas à négliger. Afin

que les élèves soient frappés de l’utilité de savoir utiliser le dictionnaire à

bon escient, je choisis intentionnellement de rechercher des mots et

expressions aux définitions longues et complexes qui comportaient

beaucoup de sous-parties. Lors de la recherche de l’expression « avoir des

yeux derrière la tête », tous ont admis qu’il fallait avant de se précipiter

sur le dictionnaire réfléchir au mot de l’expression que nous allions

sélectionner, puis survoler la définition toute entière et non la lire

consciencieusement (ce qui pour « eye » prendrait fort longtemps !).Lors

du QCM qui suivit, plus des deux tiers des élèves affirmaient à titre

anonyme et donc probablement en toute honnêteté savoir se servir du

dictionnaire et trouver exactement ce qu’ils y cherchent.

E. La notion de nature de mot.

Il me restait tout de même possible de procéder à un dernier exercice

pour m’assurer que la notion de nature de mot leur était bien claire. Je

mis donc en place un module sur un texte inconnu dans lequel j’avais

souligné des mots de natures variées et pour certains à structure

complexe, le tout en essayant de répertorier toutes les natures de mot.

Les élèves devaient les répertorier par nature, s’aidant principalement de

la place qu’ils occupaient dans la phrase. Ce type d’exercice consistant à

analyser un énoncé peut être allié d’une réflexion collective sur les règles

de dérivation des mots, suffixes et préfixes ayant un rôle primordial dans

l’identification de la nature des mots. J’envisage par conséquent de

travailler sur ces règles dès la rentrée des vacances de février.

Le texte sur lequel nous avons travaillé s’inscrit dans la séquence

« Things to come » que j’ai déjà évoquée plus haut. Le texte suivant est un

extrait du chapitre cinq de The War of the Worlds de H.G.Wells :

“After the glimpse I had had of the Martians emerging from the cylinder in which they had come to the earth from their planet, a kind of fascination

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paralysed my actions. I remained standing knee-deep in the heather, staring at the mound that hid them. I was a battleground of fear and curiosity.

I did not dare to go back towards the pit, but I felt a passionate longing to peer into it. I began walking, therefore, in a big curve, seeking some point of vantage and continually looking at the sand heaps that hid these new-comers to our earth. Once a leash of thin black whips, like the arms of an octopus, flashed across the sunset and was immediately withdrawn, and afterwards a thin rod rose up, joint by joint, bearing at its apex a circular disk that spun with a wobbling motion. What could be going on there?

Most of the spectators had gathered in one or two groups--one a little crowd towards Woking, the other a knot of people in the direction of Chobham. Evidently they shared my mental conflict. There were few near me. One man I approached--he was, I perceived, a neighbour of mine, though I did not know his name--and accosted. But it was scarcely a time for articulate conversation.

"What ugly brutes!" he said. "Good God! What ugly brutes!" He repeated this over and over again.”

Classez les mots soulignés par nature:

Noms Pronoms Verbes Adjectifs Adverbes

Articles Prépositions Conjonctions

Afin d’avoir une double appréhension de leurs capacités à analyser la

nature de chaque mot selon son contexte, ce qui le précède et le suit, je

décidai de classer la première moitié des mots collectivement, et ensuite

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de leur laisser quelques minutes pour terminer seuls et de me rendre leur

feuille afin que je puisse m’assurer que tous maîtrisaient cette

compétence d’analyse qui prend racine dans leur maîtrise du Français.

Lors de la moitié effectuée ensemble, je fus surprise de voir que

beaucoup d’élèves paniquaient devant un mot inconnu et le classaient au

hasard dans n’importe quelle catégorie. Nous avons donc pris le temps de

décortiquer chaque mot inconnu lorsque c’était possible. Les plus grosses

difficultés furent rencontrées sur les adjectifs et les noms composés. Tous

furent très fiers de parvenir finalement sans plus de difficulté à

comprendre comment était formé chaque mot. Ceci m’encourage

doublement à prévoir ultérieurement un travail concentré sur les mots

composés.

Les résultats du travail fait seuls furent relativement corrects, mais je

fus surprise de remarquer que beaucoup butaient sur les mêmes mots. Le

mot « apex » par exemple fut de nombreuses fois considéré comme un

verbe au lieu d’un nom. Pourtant, sans même connaître le sens de ce mot,

il ne semblait pas particulièrement ardu de trouver sa nature. J’ai donc

supposé que face à un mot totalement inconnu (et qui plus est paraissant

étrange aux élèves), bon nombre des élèves perdaient partiellement leur

capacité d’analyse, cédant probablement plus ou moins à la panique et à

la peur du mot inconnu. J’en conclus donc que leur capacité d’inférence

face à l’inconnu demeure fragile et doit par conséquent être encouragée et

développée à l’avenir à travers de nouveaux modules d’analyse de mots en

contexte, exercice qui ne leur semblait absolument pas familier, et à l’aide

d’un travail sur les principes de dérivation des mots.

Mis à part l’analyse grammaticale de mot en contexte, quels autres

remèdes peuvent être apportés aux difficultés de compréhension à l’écrit ?

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III. Quand le Français devient un allié.

Bien que cela ne soit pas toujours le cas, le Français peut cependant

être envisagé comme une des solutions à certaines erreurs.

A. Mots transparents et stratégies de contournement

A l’écrit, les mots transparents s’avèrent être de bons piliers de la

compréhension. Ainsi, lors d’un devoir surveillé, un élève qui ne se

rappelait plus de « have to » pour exprimer l’obligation est en contrepartie

parvenu à se souvenir de « be obliged to ». Par conséquent, la part

d’origines latines de l’anglais peut tout à fait être utilisée en classe afin de

faciliter la compréhension. On note par ailleurs que cette stratégie de

contournement est également employée en situation authentique de

communication avec un anglophone. D’où l’importance de la multiplicité

des entrées lexicales et l’usage de synonymes (qu’ils soient ressemblants

au Français ou non) ou de périphrases pour mener l’élève vers

l’autonomie tant recherchée. Après de telles observations, je comprends

bien mieux l’utilité du « rephrase » et l’importance de l’employer très

fréquemment en classe.

De ce fait, on peut imaginer de donner, quand cela est possible et sans

non plus chercher à forcer la langue vers des chemins qui ne lui sont pas

propres, un équivalent dit transparent afin que tous les élèves s’y

retrouvent au niveau sémantique. Ceci contribue d’autant plus à

l’enrichissement lexical. On peut citer en exemple « rich » que tous

connaissent, et par une recherche de synonymes, injecter « wealthy » et

« well-off ». De cette façon, il est possible au niveau lexical du moins de

créer des ponts sémantiques du Français vers l’Anglais tout en donnant

aux élèves des stratégies lexicales de contournement.Il ne faut cependant

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pas oublier les faux amis, qui par contre peuvent eux créer quelques

confusions. On peut alors penser utile de les répertorier dans une fiche

spéciale au sein de la partie vocabulaire. L’intérêt de cette méthode

personnalisée en comparaison avec les listes de vocabulaires thématiques

encore souvent utilisées est que nous créons ensemble nos propres listes,

listes que nous pouvons enrichir au fur et à mesure de l’année alors que

ces mots sont vus en contexte et donc bien plus enclins à être mémorisés

par les élèves. N’ayant moi-même jamais trouvé plaisir ni résultats aux

listes thématiques toutes prêtes, je ne peux envisager cette solution pour

mes élèves.

On note au passage qu’un devoir d’expression écrite effectué non pas à

la maison en temps libre mais en temps limité en classe s’avère parfois

bien meilleur. Les contraintes que représentent l’absence d’aide lexicale et

grammaticale obligent l’élève à puiser dans ce qu’il sait dire et non dans

ce qu’il veut dire, évitant ainsi de nombreux calques et autres erreurs.

Ces types d’exercices mènent ainsi vers l’autonomie communicative tant

recherchée, car l’élève est obligé de « mobiliser au moment opportun le

matériau linguistique, même restreint, dont il dispose » (Instructions

Officielles de 1985)

B. Traduction et comparaison de deux systèmes linguistiques.

« La comparaison entre deux langues, si elle est pratiquée

avec réflexion, permet de mieux faire ressortir les caractères

et le comportement de chacune. »

Vinay et Darbelnet

Bien qu’une traduction systématique de toute production anglaise soit à

proscrire, il semble parfois utile et productif d’avoir recours au Français

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pour clarifier le fonctionnement du système linguistique anglais. Ainsi,

lors de la séquence « Things to come » dont le principal objectif était

l’expression du futur, je m’aperçus que pour expliquer l’emploi du présent

simple et du présent BE + -ING pour parler d’actions prévues et certaines,

la comparaison avec le Français clarifiait les choses pour les élèves. Tout

comme on dit « je pars demain matin », l’Anglais peut dire « I leave

tomorrow morning » ou « I’m leaving tomorrow morning ». Dans de tels

exemples , on peut sans hésitation affirmer que le Français s’allie à la

compréhension du système anglophone. Il ne faut cependant pas oublier

que cet outil ne peut être utilisé qu’à très faible dose et n’intervient qu’au

moment de l’analyse-constat effectuée en Français qui permet donc de

tels parallèles.

C. Le rôle de l’analyse-constat

Mais qu’en est-il donc de la place du Français lors de l’analyse-

constat ? En premier lieu, quand doit-elle intervenir ? Après expérience, le

meilleur moment pour procéder à une analyse-constat paraît être la fin de

séance, après que la classe ait utilisé la notion ou l’élément grammatical

correspondant à l’objectif fixé au départ. De plus, procéder à l’analyse-

constat à la fin de l’heure permet aux élèves de prendre du recul sur ce

qu’ils viennent de faire, de réfléchir sur ce qu’ils ont dit et sur comment

ils l’ont dit (voir annexe 2). Placée en milieu de séance, elle impliquerait

d’alterner l’usage du français et de l’anglais, ce qui perturberait

profondément la logique du déroulement de la séance. Elle est enfin par

nature impossible à placer en début de séance : aucun constat ni aucune

analyse ne peuvent être faits sans une activité antérieure et immédiate.

Procéder à l’analyse-constat d’énoncés de la séance précédente semble

fort maladroit, car cela implique de faire récapituler par les élèves des

productions au fonctionnement non totalement élucidé.

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En second lieu, il est possible de s’interroger sur les raisons du choix de

la langue maternelle au moment de l’analyse-constat. J’ai à plusieurs

reprises vus certains élèves tout à coup comprendre le fonctionnement et

le sens de nouvelles expressions lorsque nous travaillions sur l’expression

de l’obligation bien avant l’analyse-constat. J’entends ou je vois assez

souvent dans les yeux de mes élèves des « aaahhhh, j’ai compris ! » alors

même que nous utilisons de nouvelles expressions. Le fait que l’analyse-

constat doive avoir lieu est indéniable, car elle participe à la phase de

conceptualisation du fonctionnement du système anglophone, phase

absolument indispensable. De plus, ces éclairs de compréhension ne se

produisent hélas pas chez tous les élèves ! Reste alors à s’interroger sur le

choix de la langue utilisée pour effectuer l’analyse-constat. Si l’élève était

en situation réellement authentique d’apprentissage, c’est à dire dans un

pays anglophone, et qu’il y prenait des cours d’Anglais, toute explication

se ferait en Anglais. Cependant, je suppose que procéder à l’analyse-

constat en Anglais dans un pays non anglophone entraînerait des

difficultés supplémentaires de compréhension et de conceptualisation qui

ne sont pas forcément nécessaires et ne se justifient peut-être pas

suffisamment. Il ne semble pourtant pas impossible de penser que cela se

produise à l’avenir dans d’autres classes que la terminale littéraire, étant

donné que nous tendons de plus en plus à recréer des conditions

d’apprentissage authentiques.

IV. Interactions et interférences à l’oral

A. Le rôle du classroom English

« Good afternoon everyone ! How are you today ?”. C’est ainsi que

débutent toutes mes séances depuis quelques mois. Cependant, au cours

de mes premières séances, ce n’était pas le cas. J’accueillais mes élèves à

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la porte d’entrée en leur disant « bonjour », et non « hello ». La différence

me paraissait alors bien mince.

Cependant, au cours d’expériences pendant mes séances, j’observai que

celles durant lesquelles je faisais régulièrement usage du Français se

soldaient souvent par un échec. Certes, le contenu de mes cours devait y

être pour quelque chose. Mais je m’aperçus très vite que les séances que

je menais intégralement ou presque en Anglais étaient bien plus réussies

en terme d’attention des élèves. Ne faisant moi-même aucune entorse au

100% Anglais, les élèves osent très peu le faire et sentent bien que cela

n’est pas le bienvenu. Je décidai donc de ne plus répondre aux questions

posées en Français, cela me paraissant bien trop facile et surtout

destructeur du bain anglophone que j’ai constaté nécessaire. De plus, le

panachage incite les élèves à utiliser le français, puisque l’enseignant le

fait, et diminue ainsi leur prise de risque. Il n’est en effet pas très rentable

pour eux de prendre le risque de faire une erreur (qui en est encore un

pour eux) si en cas de difficulté l’enseignant traduit immédiatement. Par

conséquent, l’acceptation de l’Anglais comme seul moyen de

communication dans la classe est non seulement nécessaire à

l’apprentissage mais contribue également à accroître mon autorité

d’enseignante et à dynamiser la classe. Il est en effet fort peu probable

que les élèves se mettent à bavarder en anglais entre eux ! Par le

classroom English se crée bien plus naturellement une atmosphère de

classe propice au travail, à la réflexion et à la communication.

Comme évoqué un peu plus haut, mener intégralement ou presque les

séances en anglais transforme l’anglais non plus en simple matière parmi

d’autres, mais comme nouveau moyen de communication. Bouton parle

« d’absence du caractère de nécessité puisqu’il (l’élève) dispose déjà avec

sa langue maternelle d’un outil de communication ». Cependant, en

adhérant au classroom English, on crée ce caractère de nécessité puisque

les élèves ne disposent plus que de l’anglais pour communiquer. Il devient

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alors l’outil de communications authentiques, comme par exemple quand

un élève demande à ouvrir la fenêtre, à allumer la lumière, etc. Reste à

voir quels chemins il parcourt pour parvenir à communiquer…

B. Réflexe de survie de l’élève pour s’exprimer à l’oral : la traduction

La traduction simultanée à l’oral ralentit considérablement le rythme

d’expression. La qualité authentique du rapport de communication

diminue alors très nettement.

Solution possible : encourager la question « What’s the English

for… ? ». Cependant, après tentative d’application de cette solution, la

question devient bien trop redondante et, bien qu’utile, constitue une

entrave à la communication et coupe encore une fois la spontanéité de la

prise de parole et de l’échange. Cette observation semble signifier que

pour les élèves, l’Anglais n’est pas tant l’outil de communication

recherché mais une contrainte, un nouvel obstacle freinant la

compréhension du cours d’Anglais. D’où l’importance d’un cours mené

intégralement en anglais : l’anglais devient alors véritablement le seul

moyen de communiquer. De plus, le va-et-vient permanent entre les deux

langues tend à superposer leurs fonctionnements, ce qui n’est pas sans

poser problème.

Suite à ces observations, il m’a alors fallu envisager d’autres remèdes à

l’automatisme de traduction. J’ai donc décidé de diminuer autant que

possible l’usage de la question « What’s the English for… ? ». Cela ne

résolvant pas les difficultés lexicales et grammaticales des élèves, je tente

désormais de les faire paraphraser, tout comme chacun le fait dans sa

langue maternelle quand un mot vient à manquer. A la période de

Thanksgiving, une élève souhaitait dire que tous les Américains se

réunissaient. Comme elle ne connaissait pas le verbe « gather », elle dit

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simplement « people are together ». L’idée principale était passée. Je

n’exclus pas pour autant d’injecter moi-même le mot ou l’expression

recherchés, à condition que selon moi ce soit la meilleure solution en

termes de possibilités de la classe et de temps. Il ne me semble en effet

pas judicieux de m’acharner à vouloir que l’élève paraphrase si cela paraît

trop complexe. Ainsi, lorsqu’un jour la classe voulut exprimer l’idée

d’appartenance à un groupe, ne voyant aucun moyen autre que le verbe

« belong » qu’aucun ne connaissait, je décidai de le leur donner et de

l’écrire au tableau.

Enfin, il peut être intéressant de proposer aux élèves de réfléchir sur

l’idée qu’ils souhaitent exprimer et de voir de quels outils ils disposent

pour ce faire, quitte à les faire reprendre telle ou telle fiche faite en classe.

D’où l’intérêt du choix du classeur plutôt que du cahier, car il peut être

divisé en parties (diary, grammar, communication, vocabulary…) et

permet l’accès relativement rapide à l’objet de la recherche. Bien que cela

puisse freiner le rythme de communication dans un premier temps, on

peut espérer que par la suite, l’élève n’aura plus besoin d’ouvrir son

classeur pour rechercher l’élément manquant, mais trouvera à force

d’habitude instantanément ce qu’il souhaite parmi ce qu’il a appris : il

sera autonome. En parvenant ainsi à faire disparaître la traduction

simultanée lors de la prise de parole en classe ou hors de la classe, on

s’achemine vers la libération de la communication et un échange bien

plus spontané et authentique.

C. Les interférences phonologiques On ne peut cependant pas oublier la composante phonologique, marque

évidente de différence avec le Français, qui pose bien souvent problème et

vient entraver la bonne marche de la communication. En effet, le message

n’est bien souvent plus compréhensible pour un anglophone si la

prononciation, l’accentuation ou l’intonation sont erronée, alors qu’il peut

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être compris si le problème est d’ordre grammatical ou même syntaxique.

L’aspect phonologique détermine réellement la limite entre « je comprends

ce que tu me dis » et « je ne comprends pas ». On peut citer comme

exemple les interférences dues aux différences de rapport entre graphie et

phonie entre les deux langues. Ainsi, bien des élèves prononcent enough

[inoug] ou encore about [about]. De même, la plupart des élèves n’a pas

conscience de la présence d’accents de mots en Anglais, ni du sens que

l’intonation peut ajouter. Naturellement, presque tous effectuent

systématiquement et malgré eux une intonation descendante en fin de

phrase, comme cela se fait en Français.

D’où la nécessité de travailler régulièrement sur ces points à l’aide de

divers exercices sur cassette ou sur d’autres supports. J’avoue avoir pour

l’instant trop mis de côté cette compétence et envisage très

prochainement des activités phonologiques sur le document vidéo que

nous étudions actuellement, à savoir « The War of the Worlds » de

Spielberg. On peut quoi qu’il en soit penser à des exercices de

discrimination orale d’accent de mot et d’intonation. Je prévois de les

représenter à l’aide respectivement de gros et petits ronds et de courbes

soit à dessiner entièrement par les élèves, soit à choisir parmi plusieurs

(voir annexe 2). De telles activités s’allient bien évidemment à une

remédiation orale quotidienne des productions orales erronées des élèves

dont « on peut se servir et transformer leur analyse en stratégie

pédagogique pour, à court terme, améliorer la qualité » (Moirand).

D. Le dialogue : un support intéressant et ludique

En plus de ces activités sur support vidéo, je compte effectuer un travail

sur la prononciation dans le cadre de la création de courtes scènes de

théâtre que les élèves ont écrites eux-mêmes. Face aux difficultés dues au

décalage entre graphie et phonie auxquelles les élèves sont régulièrement

confrontés et donc à l’évidente tendance à prononcer le mot anglais écrit

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comme on prononcerait un mot français, j’ai pensé que le support

théâtral et de façon plus générale la forme du dialogue sont bien souvent

les premières formes par lesquelles les élèves accèdent à l’anglais en

dehors de la classe, au travers de chansons, ou de films en version

originale. L’atmosphère de la classe s’y prêtant bien, j’ai décidé de me

lancer dans ce projet à la rentrée des vacances de Noël.

Pour mon plus grand plaisir, les élèves se sont montrés très

enthousiastes. A mon sens, ils se sentent bien plus libres quand ils créent

des dialogues que quand ils doivent s’exprimer sur un texte et donner

leur avis sur un document. C’est en tous cas ce qui est clairement

apparu, et pas seulement au début du projet, mais tout au long de son

élaboration. Nous sommes partis du principe que pour toute action, il y a

une situation de départ, puis un événement qui peut bouleverser la

situation initiale. A eux ensuite de choisir cette situation de départ, de

répartir les rôles (les groupes sont constitués de trois ou quatre élèves) et

d’écrire le script et les didascalies nécessaires. Ce travail leur plaît

tellement qu’à l’occasion d’un module où nous devions corriger un devoir

surveillé, tous corrigèrent plus consciencieusement que jamais le devoir

pour pouvoir passer au théâtre au plus vite !

Au delà du remarquable travail de création et d’imagination qu’ils ont

effectué, nous allons maintenant passer à la mise en scène à proprement

parler, jouer leurs scènes afin de mettre en place le rythme et

l’enchaînement des interventions, mais aussi travailler sur la phonologie,

ceci s’avérant indispensable au vu des remarques précédentes. L’intérêt

de choisir ce support est qu’ils l’ont eux-mêmes créé, et ressentent par

conséquent un attachement à leur texte et une grande fierté qui leur

donnent envie de perfectionner leurs prestations autant que faire ce peu,

même si cela implique beaucoup de travail ! Chaque groupe travaillera

sur son texte et aura pour tâche de trouver la juste intonation de phrase,

de repérer les mots accentués de chaque phrase et de s’assurer de la

prononciation de tous les mots (voir annexe 3). Une fois toutes ces

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activités terminées, nous profiterons des modules pour aller en salle

multimédia afin de taper leurs scripts et que tous en possèdent un

exemplaire, pour finalement, lors d’une heure de classe entière, faire une

représentation finale qui ne se fera pas sans une certaine excitation de la

part de tous !

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CCOONNCCLLUUSSIIOONN Dans cette étude, j’ai tenté à partir d’exemples concrets en situation de

classe, de sondages auprès des élèves, d’expériences faites avec eux et de

considérations générales, non seulement de comprendre l’origine des

interférences entre la langue maternelle et la langue cible, mais également

d’envisager différentes remédiations qui se doivent propres à chaque type

d’interférences. Cependant, quel que soit le type d’interférence, il me

semble juste de rejoindre Newmark quand il exprime l’idée suivante :

« The cure for interference is simply the cure for ignorance : learning ».

En ce qui concerne les interférences dans le domaine de l’expression

écrite, les élèves sont parvenus à acquérir une certaine autonomie

méthodologique : les expressions écrites intégralement rédigées en

Français avant d’être traduites littéralement ont disparu au profit d’une

réflexion préalable sur les mots clés que tous ou presque ont adopté. De

plus, les élèves semblent maintenant avoir accepté l’idée que comprendre

n’est pas traduire et vice-versa. La notion de systèmes linguistiques

différents commence à se mettre en place et nous avons ensemble pris

conscience du fait que les systèmes anglais et français ne peuvent et ne

doivent être mis en parallèle qu’avec grande précaution et parcimonie. Au

sujet des stratégies de contournement, je dois continuer à les développer

afin de mener les élèves sur les voies d’une autonomie

communicationnelle.

L’ultime étape consistera à faire prendre conscience aux élèves que

cette diversité linguistique s’étend aux domaines culturels et constitue la

marque d’une façon de percevoir le monde qui reste propre à chaque

pays. Réside ici une des plus belles missions de l’enseignant : celle de

l’ouverture au monde extérieur.

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AANNNNEEXXEESS

1. Observations suite aux résultats du QCM

Les résultats de ce QCM anonyme furent très intéressants et me

révélèrent la « méthode » des élèves. J’ai donc décidé de leur rendre

compte des résultats en module et de faire ensemble une ébauche

d’expression écrite en s’essayant à d’autres méthodes.

Une des questions auxquelles je sentis un besoin urgent de réponse fut

Est-il nécessaire de traduire le sujet afin de le comprendre dans son

intégralité ?

Avant tout, quelques chiffres : vingt-trois d’entre eux m’ont affirmé

commencer par la traduction du sujet. En contre partie, seulement quatre

entouraient les mots clés, alors que cela paraît bien plus utile qu’une

simple traduction du sujet qui ne laisse entrevoir aucune réponse. Dans

d’autres matières telles l’histoire-géographie, le français ou encore la

philosophie en classes de première et terminale, les élèves auront à

réfléchir sur des sujets complexes aux multiples entrées. Je décidai donc

de les préparer un tant soit peu à la méthode d’analyse du sujet qu’ils

devront de toute façon maîtriser au plus vite.

Lors de la séance de module qui suivit, nous avons donc commencé par

les mots clés afin de voir ensemble s’il était réellement intéressant de

commencer par là. Le sujet était le suivant « What is your vision of the

future ? ». Nous travaillions alors sur une séquence intitulée « Things to

come ». En travaillant en Français sur les trois mots clés soulignés, tous

les élèves ont constaté qu’effectivement, réfléchir sur les mots clés

apportait bien plus qu’une simple traduction du sujet. De plus, avec cette

méthode, il n’est plus nécessaire de traduire le sujet, les mots clés ayant

déjà élucidé son sens. Au fur et à mesure de leur réflexion sur ces mots

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clés, nous retranscrivions leurs idées en Français non rédigé, tout en

écrivant en anglais à côté les mots spécifiques ou expressions dont nous

aurions besoin pour exprimer telle ou telle idée. Le retour au Français

lors de cette phase de travail n’est certes pas indispensable, mais

s’agissant des premiers pas des élèves vers une nouvelle méthode de

travail, j’ai pensé qu’il était moins terrifiant pour eux de commencer ainsi,

bien qu’à long terme l’idéal serait de parvenir à partir directement en

anglais, évitant ainsi tout parasitage entre les deux systèmes.

Le QCM révéla également que bon nombre d’élèves prenaient soit des

notes en français ou même rédigeaient intégralement leur devoir en

français. Ensuite, la moitié d’entre eux traduisaient tout littéralement.

Ceci me révéla que pour les élèves, l’anglais était purement et simplement

la traduction du français. Beaucoup pensaient même tout à fait sérieux et

rigoureux de procéder ainsi car cela leur permettait de « vraiment tout

dire ». A leur sens, procéder autrement leur donnait l’impression de

perdre du sens, de ne pas tout exprimer. Leur logique était de prendre un

mot, de chercher sa traduction, et de passer au suivant sans prendre en

compte l’entité phrase et le fait qu’ « un mot n’a pas de sens en soit : il n’a

de sens que dans et par le contexte » (Galichet)

Pour la rentrée des vacances de février, les élèves ont à me rendre un

autre devoir d’expression écrite à faire à la maison. Sur le sujet papier, j’ai

bien spécifié les règles du jeu (nombre de mots, passages obligés…), et

notamment l’obligation d’utiliser les éléments vus ensemble en module. A

ma grande surprise (et à ma grande joie !), l’élève même qui était venue

me voir en tout début d’année avec son devoir maison entièrement rédigé

en Français s’est présenté à moi dix jours avant les vacances avec une

première réflexion en Français sur les mots clés du sujet. Toutes ses idées

étaient pertinentes, et elle m’avoua trouver cette méthode bien plus

productive et riche. Le passage par une réflexion première en Français

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sera éliminé lors de la prochaine production d’une expression écrite afin

de faire disparaître les possibles interférences qu’il peut entraîner.

2. Exemple d’analyse-constat

Depuis plusieurs mois, presque tous les lundis, les élèves doivent être

prêts à raconter leur week-end, ce qui se fait la plupart du temps au

prétérit. Nous avons donc dernièrement fait un petit point sur l’usage et la

formation du prétérit lors d’un travail sur un article de journal qui relatait

un fait passé.

Tout au long du commentaire de l’article, diverses productions furent

écrites au tableau, telles :

« People were really scared ».

« Everybody felt frightened ».

« Did it happen ? »

En partant de ces productions, nous en avons conclu que le prétérit

était utilisé pour parler d’actions révolues, terminées, et qu’il exprimait

un décalage, une rupture. Dans les exemples ci-dessus, le décalage est

d’ordre temporel. Nous sommes ensuite revenu sur les règles de formation

du prétérit et sur son opérateur. Je leur donnai enfin un court exercice

d’application à faire à la maison afin de m’assurer que tout était bien

compris.

3. Activités phonologiques sur le support « The War

of the Worlds »

1) Les accents de mot (travail effectué après la recherche de mots

manquants à partir d’un texte à trous)

Tu vas maintenant ré-écouter l’extrait dont tu as le script. Les mots ci-

dessous proviennent de ce même passage. A toi de trouver quelles sont la

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ou les syllabes accentuées dans chaque mot en choisissant parmi les

divers schémas accentuels proposés (schémas du type 0000).

2) L’intonation

Tu vas entendre une série de dix phrases. A toi de cocher le schéma

intonatif qui convient à chacune.

Exemple : « Do you want to die ? »

4. Activités phonologiques à partir des courtes

scènes de théâtre des élèves

Du mot à la phrase

1) Dans chaque groupe, que chacun recopie son propre texte.

2) D’après toi, dans chaque phrase, quels mots sont porteurs de sens ?

Souligne-les.

3) Si tout va bien, tu as maintenant souligné tous les mots qui seront les

plus accentués lorsque tu diras ton texte !

4) Maintenant, essaie de trouver la juste intonation pour chaque phrase

en t’aidant du travail effectué sur « The War of the Worlds ». Dessine

ensuite le schéma qui correspond (exemple au tableau).

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BIBLIOGRAPHIE

GAONAC’H, D. THEORIES D’APPRENTISSAGE ET ACQUISITION

D’UNE LANGUE étrangère. Didier, 1987

VINAY, J.P – DARBELNET, J. Stylistique comparée du français et de

l’anglais : méthode de traduction. Didier, 1977

MOIRAND, S. Situation d’écrit. Paris : CLE International, 1979

BOUTON, C.P. L’acquisition d’une langue étrangère. 1974

INSTRUCTIONS OFFICIELLES de 1985