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Juillet - Août 2009 - Commission paritaire en cours - N° ISSN en cours Bureau de la SOFOP Président : J.M. CLAVERT 1 er Vice-Président : C.MORIN - 2 e Vice Président : C. BONNARD - FUTUR 2 e Vice Président : C. ROMANA Ancien Président : J.F. MALLET Secrétaire Général : J.L. JOUVE Trésorier : P. LASCOMBES Membres du Bureau : B. de BILLY, S. BOURELLE, P. JOURNEAU, A. KAELIN, P. MARY, P. WICART Editorial SO.F.O.P. Un cauchemar dans une théière par Henri Carlioz Je suis interne dans le Service d’Orthopédie pédiatrique du Professeur Niradnam. C’est un homme de grande qualité et qui le sait. Pour un avenir hospitalier dans sa spécialité il faut avoir été son élève. C’est la raison pour la- quelle je lui ai demandé de bien vouloir m’ac- cueillir au sein de son équipe. A peine arrivé dans ce sanctuaire consacré à lui autant qu’à l’enfant mal fait, un de ses collaborateurs qui ne se méfit pas encore de moi, m’a conseillé de demander au plus vite au maître un sujet de publication, accessoire- ment aussi sujet de travail. A la fin de la jour- née, au moment où l’on savait que Niradnam prenait son whisky quotidien et qu’il avait donc une euphorie accueillante, je sonnai à la porte de son bureau ; une lumière verte -entrez- (allumée), au dessous de la rouge -at- tendez- (éteinte) et au dessus de l’écossaise -Aberlour- (également allumée), m’autorisa à pénétrer dans le centre névralgique de l’Or- thopédiatrie. Le maître m’invita à m’asseoir et me trouva un sujet à son goût dès que je lui eus exposé ma requête. Un enfant venait d’être admis atteint d’une scoliose thoracique idiopathique et d’un genu varum unilatéral par maladie de Blount. Niradnam m’expliqua l’immense intérêt de cette observation ex- ceptionnelle ; il me fallait trouver le lien entre les deux maladies, et proposer un traitement après avoir lu et résumé la littérature, consulté les méta-analyses, décortiqué les scores d’éva- luation, et ne pas méconnaître les études mul- ticentriques. Mon exigeant patron me donnait quatre jours pour arriver à ses fins. Au terme de ce délai, je devais lui remettre un texte parfait d’au moins douze pages et demie, suivi d’une bibliographie exhaustive d’environ soixante- sept références anglaises ou américaines et de trois françaises (du 19ème siècle). Son nom devrait apparaître au moins trois fois dans le fil du texte, à quelque propos que ce soit. Impatient de me valoriser aux yeux de ce maî- tre dynamique je me mis avec ardeur au tra- vail. Pendant ces quatre jours, dès que je quit- tais l’hôpital vers 18 heures, je me précipitais vers la bibliothèque de la vieille Faculté, près de l’Odéon. En me servant de l’informatique et avec l’aide des index, je recueillis 700 réfé- rences dont le dépouillement et l’interpréta- tion m’occupèrent nuits et jours. Il n’était pas question de perdre du temps à dormir. A pei- ne osais-je écouter les résultats des élections européennes transmises par Radio Classique. Je me maintins en éveil grâce à l’honnête-thé (ou eau-nette-thé, ou O-Net Tea autres noms commerciaux du produit) que m’avait géné- reusement donné en abondance le Labora- toire C 1 … , pour me remercier de l’utilisation que je fais de ses orthèses. C’est un liquide to- nifiant mais dont la composition est inconnue et sans lequel je n’aurais pu mener à bien ma tâche. Lundi matin, il y a 24 heures de cela, je remis donc le texte achevé à Niradnam. Et j’allais me coucher car j’étais mort de fatigue. Quatre nuits sans dormir, c’était trop pour moi. C’est cet épuisement qui fut responsable du terri- ble cauchemar qui me chamboula, peu avant de rédiger mon pensum et de le remettre à la secrétaire du maître. Hébété de sommeil je m’étais effondré sur mon bureau. C’est dans cette position, la joue appuyée sur mon texte que je me réveillai hirsute, glacé d’angoisse et très vaseux. Le déroulement de ce cauchemar me revint petit à petit en mémoire. C’était un horrible salmigondis de mes lectures et réflexions ré- centes. Je suffoquais dans un énorme bous- set 2 plein d’Honnête-Thé où me poursuivait un requin-Niradnam prêt à me dévorer. Dans les bulles que je lâchais de peur et d’asphyxie, Edito ........................................................................1 par Henri Carlioz Qui était-il ? Walter Putnam Blount (1900-1992)...........................................................3 par Pierre Lascombes La maladie de Blount ........................................6 par Pierre Journeau Qu’auriez-vous fait dans cette maladie de Blount ? ............................................................9 par Dimitri Popkov La méthode de Blount pour les fractures supracondyliennes.......................................... 10 par Antoine de Gheldere, Marc Legname Peut-on se fier en chirurgie aux scores d’évaluation, aux études multicentriques, aux méta-analyses et à la médecine fondée sur les faits ? ....................................... 12 par Jean Dubousset Maladie d’Osgood-Schlatter : un signe clinique et une attitude thérapeutique... 15 par Jean-Noël Ligier Qu’auriez-vous fait dans cette maladie de Blount ? ............................................................... 16 par Dimitri Popkov L’enfant «pas comme les autres» ................ 17 par Rémi Kohler, Henri Carlioz la Gazette est dorénavant publié en format A4, afin d’être directement imprimée à partir de votre ordinateur via notre adresse : www.livres-medicaux.com Fondateur J.C. POULIQUEN † (Paris) Editorialiste H. CARLIOZ (Paris) Rédacteur en chef C. MORIN (Berck) Membres : J. CATON (Lyon) P. CHRESTIAN (Marseille) G. FINIDORI (Paris) J. L. JOUVE (Marseille) R. KOHLER (Lyon) P. LASCOMBES (Nancy) G. F. PENNEÇOT (Paris) M. RONGIERES (Toulouse) J. SALES DE GAUZY (Toulouse) R. VIALLE (Paris) et le “ GROUPE OMBREDANNE” Correspondants étrangers M. BEN GHACHEM (Tunis) R. JAWISH (Beyrouth) I. GHANEM (Beyrouth) Editeur SAURAMPS MEDICAL S.a.r.l. D. TORREILLES 11, bd Henri IV CS 79525 34960 MONTPELLIER Cedex 2 Tél. : 04 67 63 68 80 Fax : 04 67 52 59 05 La Gazette de la SO ciété F rançaise d’ O rthopédie P édiatrique N°27

La Gazette - Sauramps Médical · 2014-08-18 · par maladie de Blount. Niradnam m’expliqua l’immense intérêt de cette observation ex - ceptionnelle ; il me fallait trouver

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Juillet - Août 2009 - Commission paritaire en cours - N° ISSN en cours

Bureau de la SOFOPPrésident : J.M. Clavert

1er Vice-Président : C.Morin - 2e Vice Président : C. Bonnard - Futur 2e Vice Président : C. roMana

Ancien Président : J.F. Mallet

Secrétaire Général : J.l. Jouve

Trésorier : P. lasCoMBes Membres du Bureau : B. de Billy, s. Bourelle, P. Journeau, a. Kaelin, P. Mary, P. WiCart

Editorial SO.F.O.P.Un cauchemar dans une théièrepar Henri Carlioz

Je suis interne dans le Service d’Orthopédie pédiatrique du Professeur Niradnam. C’est un homme de grande qualité et qui le sait. Pour un avenir hospitalier dans sa spécialité il faut avoir été son élève. C’est la raison pour la-quelle je lui ai demandé de bien vouloir m’ac-cueillir au sein de son équipe.A peine arrivé dans ce sanctuaire consacré à lui autant qu’à l’enfant mal fait, un de ses collaborateurs qui ne se méfit pas encore de moi, m’a conseillé de demander au plus vite au maître un sujet de publication, accessoire-ment aussi sujet de travail. A la fin de la jour-née, au moment où l’on savait que Niradnam prenait son whisky quotidien et qu’il avait donc une euphorie accueillante, je sonnai à la porte de son bureau ; une lumière verte -entrez- (allumée), au dessous de la rouge -at-tendez- (éteinte) et au dessus de l’écossaise -Aberlour- (également allumée), m’autorisa à pénétrer dans le centre névralgique de l’Or-thopédiatrie. Le maître m’invita à m’asseoir et me trouva un sujet à son goût dès que je lui eus exposé ma requête. Un enfant venait d’être admis atteint d’une scoliose thoracique idiopathique et d’un genu varum unilatéral par maladie de Blount. Niradnam m’expliqua l’immense intérêt de cette observation ex-ceptionnelle ; il me fallait trouver le lien entre les deux maladies, et proposer un traitement après avoir lu et résumé la littérature, consulté

les méta-analyses, décortiqué les scores d’éva-luation, et ne pas méconnaître les études mul-ticentriques. Mon exigeant patron me donnait quatre jours pour arriver à ses fins. Au terme de ce délai, je devais lui remettre un texte parfait d’au moins douze pages et demie, suivi d’une bibliographie exhaustive d’environ soixante-sept références anglaises ou américaines et de trois françaises (du 19ème siècle). Son nom devrait apparaître au moins trois fois dans le fil du texte, à quelque propos que ce soit.Impatient de me valoriser aux yeux de ce maî-tre dynamique je me mis avec ardeur au tra-vail. Pendant ces quatre jours, dès que je quit-tais l’hôpital vers 18 heures, je me précipitais vers la bibliothèque de la vieille Faculté, près de l’Odéon. En me servant de l’informatique et avec l’aide des index, je recueillis 700 réfé-rences dont le dépouillement et l’interpréta-tion m’occupèrent nuits et jours. Il n’était pas question de perdre du temps à dormir. A pei-ne osais-je écouter les résultats des élections européennes transmises par Radio Classique. Je me maintins en éveil grâce à l’honnête-thé (ou eau-nette-thé, ou O-Net Tea autres noms commerciaux du produit) que m’avait géné-reusement donné en abondance le Labora-toire C1… , pour me remercier de l’utilisation que je fais de ses orthèses. C’est un liquide to-nifiant mais dont la composition est inconnue et sans lequel je n’aurais pu mener à bien ma tâche. Lundi matin, il y a 24 heures de cela, je remis donc le texte achevé à Niradnam. Et j’allais

me coucher car j’étais mort de fatigue. Quatre nuits sans dormir, c’était trop pour moi. C’est cet épuisement qui fut responsable du terri-ble cauchemar qui me chamboula, peu avant de rédiger mon pensum et de le remettre à la secrétaire du maître. Hébété de sommeil je m’étais effondré sur mon bureau. C’est dans cette position, la joue appuyée sur mon texte que je me réveillai hirsute, glacé d’angoisse et très vaseux.Le déroulement de ce cauchemar me revint petit à petit en mémoire. C’était un horrible salmigondis de mes lectures et réflexions ré-centes. Je suffoquais dans un énorme bous-set2 plein d’Honnête-Thé où me poursuivait un requin-Niradnam prêt à me dévorer. Dans les bulles que je lâchais de peur et d’asphyxie,

Edito ........................................................................1par Henri Carlioz

Qui était-il ? Walter Putnam Blount (1900-1992)...........................................................3par Pierre Lascombes

La maladie de Blount ........................................6par Pierre Journeau

Qu’auriez-vous fait dans cette maladie de Blount ? ............................................................9par Dimitri Popkov

La méthode de Blount pour les fractures supracondyliennes.......................................... 10par Antoine de Gheldere, Marc Legname

Peut-on se fier en chirurgie aux scores d’évaluation, aux études multicentriques, aux méta-analyses et à la médecine fondée sur les faits ? ....................................... 12par Jean Dubousset

Maladie d’Osgood-Schlatter : un signe clinique et une attitude thérapeutique ... 15par Jean-Noël Ligier

Qu’auriez-vous fait dans cette maladie de Blount ? ............................................................... 16par Dimitri Popkov

L’enfant «pas comme les autres» ................ 17par Rémi Kohler, Henri Carlioz

la Gazette est dorénavant publié en format A4, afin d’être directement imprimée à partir de votre ordinateur via notre adresse : www.livres-medicaux.com

FondateurJ.C. POULIQUEN † (Paris)

EditorialisteH. CARLIOz (Paris)Rédacteur en chef C. MORIN (Berck)

Membres : J. CATON (Lyon)

P. CHRESTIAN (Marseille)G. FINIDORI (Paris)

J. L. JOUVE (Marseille)

R. KOHLER (Lyon)P. LASCOMBES (Nancy)G. F. PENNEÇOT (Paris)

M. RONGIERES (Toulouse)J. SALES DE GAUzY (Toulouse)

R. VIALLE (Paris)et le “ GROUPE OMBREDANNE”

Correspondants étrangersM. BEN GHACHEM (Tunis)

R. JAWISH (Beyrouth)I. GHANEM (Beyrouth)

EditeurSAURAMPS MEDICALS.a.r.l. D. TORREILLES

11, bd Henri IVCS 79525 34960 MONTPELLIER Cedex 2 Tél. : 04 67 63 68 80Fax : 04 67 52 59 05

La Gazette de la SOciété Française d’Orthopédie Pédiatrique

N°27

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j’écrivais pour calmer mon poursuivant, les résultats de mes recherches bibliographiques, ébauchant ainsi une BD orthopédiatrique.Tout se mélangeait dans mon cerveau endormi, fatigué et drogué.Le requin me mordit en un endroit très sensible pour que je dise ce que les méta-analyses conseillaient comme traitement du genu-varum : « Un corset de Milwaukee porté tête-bêche jusqu’à Risser 8 et seulement dans la piscine » dit et emporta hors du bousset la première bulle.La deuxième attaque du fauve, dont la tête me rappelait celle d’un candidat aux élections récentes, m’obligea à préciser les résultats de ce traitement original : « 28% de correction du varus à droite, 16% seulement à gauche, mais 60% des enfants n’avaient pas porté le corset dans le bon sens ». La bulle creva au ras de la surface de l’honnête-thé et resta vierge dans la BD imprimée par la suite.Proche de la suffocation, j’accrochai d’une main le bord du bousset et me hissai à l’extérieur. Mon genou droit cogna la paroi du tonnelet et mon Osgood-Schlatter se réveilla douloureusement ; il est vrai qu’il n’avait jamais été plâtré.Il ne suffisait pas d’échapper à la noyade dans l’honnête-thé, encore fal-lait-il que j’achève mon travail. Deux problèmes restaient en suspens : la radiographie de profil et l’importance des faits sur quoi serait fondée la médecine.Je n’étais plus dans le bousset où achevait de mourir de suffisance le requin, mais j’étais toujours dans les vaps ; je ne le savais pas mais je le sais maintenant.

Le cliché de profil me paraissait essentiel pour juger de l’amélioration du varus grâce au corset de Milwaukee. Cependant, il montrait trop souvent la perte de la courbure harmonieuse et cyphotique du fémur au profit d’une laide lordose gonale. Mais il ne faut pas exiger trop et mon ego anoxique et embrumé confondait deux célèbres aphorismes3

en concluant «qu’il n’y a d’excès que dans l’excès» de même que «tout plaisir est insignifiant».C’est juste avant de sortir de mon coma délirant que je résolus le deuxième et dernier problème : les faits n’ont aucune importance dans notre spécialité. En effet, ce sont les enfants contrefaits et eux seule-ment qui nous concernent. Alors, les faits…Il était temps que je revienne à une juste conscience. C’est ce que je fis involontairement. Aussitôt réveillé je courus donner mon texte à Sophie (je l’ai déjà dit, c’est la secrétaire du patron ; elle est adorable).Un mois plus tard, délai record, le JBJS publiait mon texte mais mon nom n’y figurait pas. Niradnam m’avait pourtant félicité pour la rigueur et la densité de mon travail ; il appréciait beaucoup les symboles de l’honnête-thé, du requin, de la suffocation admirative, et bien des cho-ses encore. C’est alors seulement que je compris avoir donné à Sophie le récit de mon cauchemar.

1. Je ne donne pas le nom du Labo pour éviter des poursuites.

2. Le bousset auvergnat est un tonnelet que les paysans emportent bien rempli aux champs

pour se désaltérer pendant le travail.

3. L’un est de H Césaide : «il n’y a de plaisir que dans l’excès» ; l’autre est de P Valéry : «ce qui est

excessif est insignifiant»

Editorial SO.F.O.P. (suite)

MANUEL DE SURVIE DU CHIRURGIEN 2ème tirageM. Revol, J.-M. Servant

Isbn : 978 284023 552 1395 pagesjanvier 2008

Disponible sur : www.livres-medicaux.com

33 €

“Voici enfin l’ouvrage dont on espérait secrètement l’avènement depuis long-temps : le « Manuel de Survie du Chirurgien ».Il s’agit en premier lieu d’un ouvrage didactique destiné à repérer et à déjouer les embûches en tout genre secrétées par l’environnement du chirurgien : ad-ministration, justice, nouvelles obligations professionnelles...L’une des forces de l’ouvrage vient de son caractère universel. Chacun, quelle que soit sa spécialité, jeune en formation ou vieux routier de la chirurgie, libéral ou hospitalier, y puisera nécessairement une information utile, parfois même vitale, sur un aspect mal maîtrisé de son activité.Mais l’intérêt de l’ouvrage ne s’arrête pas là : l’habileté des auteurs est d’y avoir intégré un grand nombre de textes officiels, difficile à réunir, et de fournir ainsi une base permanente et réactualisable de tout ce qui oriente et réglemente notre profession.La lecture de certains de ces textes donne « froid dans le dos ». L’impression va-gue de rétrécissement de l’espace mental que chacun ressent dans son activité, sans toujours trouver les mots justes pour l’exprimer, se transforme en la prise de conscience d’un terrifiant constat, au fur et à mesure que les auteurs juxta-posent les arguments : non seulement le chirurgien est menacé d’extinction, mais la chirurgie elle-même se trouve en péril...”

Alain C. Masquelet

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Qui était-il ? Walter Putnam Blount (1900-1992)par Pierre Lascombes

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Il y a une dizaine d’années, par une de ces belles journées de l’été des indiens, le Docteur André Ghibely de Sherbrooke, Québec, me faisait don d’un « textbook », ouvrage qu’il avait largement souligné et annoté lorsqu’il était résident en orthopédie ; ce livre, de couverture cartonnée noire, était simplement intitulé : « fractures in children – Blount » [1] (Fig. 1 et 2). Parcourant ce livre, j’y découvrais toutes les règles d’or du traitement conservateur, c’est-à-dire « orthopédique », des fractures de l’enfant. Peu a été innové depuis ni imaginé. Et si l’un de vos internes échoue dans une réduction aujourd’hui justifiée, faites lui lire cet ouvrage de Blount. Il y appréciera lui-même des dessins de Docteurs et de rééducateurs avec une tête d’âne illustrant parfaitement la mauvaise façon de traiter les pauvres enfants (Fig. 3, 4, 5). Ces dessins originaux, abondamment recopiés et modifiés, sont réellement ceux de Walter P Blount.

Walter Putnam Blount est né le 3 juillet 1900 à Oak Park (Illinois, USA). Si son père Ralph Blount était professeur et auteur scientifique, son grand-père Joseph Blount, M.D., fut chirurgien pendant la guerre civile américaine. Sa mère, Anna Ellsworth Blount, M.D., gynécologue obstétricienne à Oak Park et membre de l’American Medical Association (AMA), fut Présidente de la « Women’s National Medical Association ».

Quant à Ruth Bennet Blount, M.D., sœur de Walter, elle se destina à la pédiatrie à Chicago. Naître dans une famille médicale a très probablement donné à Walter Blount une maturité propice à la recherche et au brassage des idées.

C’est donc sans surprise que le jeune Blount rentre à l’Université de Médecine de l’Illinois, puis se qualifie en 1925 au Rush Medical College. Il se spécialise en chirurgie orthopédique au Wisconsin General Hospital, puis il traverse d’Ouest en Est l’Atlantique pour poursuivre sa formation à Londres. Pendant ces années, il visite plusieurs établissements européens qui sauront stimuler son intérêt pour le traitement des scolioses. C’est durant son séjour en Europe qu’il rencontre Frances Hoben, étudiante en Doctorat, star de hockey et footballeuse. Frances deviendra Mme Walter P. Blount en 1929. De cette union naîtront deux enfants Ralph et Jane, puis cinq petits-enfants. Pendant les années 30 et 40, Frances Blount sera très impliquée dans le droit de vote des femmes aux Etats-Unis.De retour aux Etats-Unis, Walter P Blount rejoint le Milwaukee Children’s Hospital, Wisconsin, situé sur les rives du lac Michigan à 70 miles au nord de Chicago. Chirurgien orthopédiste, il est naturellement concerné par la pathologie fréquente à cette époque à savoir les atteintes ostéo-articulaires de la tuberculose, les ostéomyélites aiguës et chroniques, et les séquelles orthopédiques de la poliomyélite. Un film sur ce sujet fut largement diffusé dans les bibliothèques du American College of Surgeon. Successivement Chef du Milwaukee Children’s Hospital, puis Professeur de Chirurgie à l’Université Marquette, Ecole Jésuite située à Milwaukee, il fut élu Président de l’AAOS en 1955-1956 (Fig. 5) et Vice-Président de la SICOT en 1966. Il fut en outre le fondateur de la Wisconsin Orthopaedic Society. Blount a ainsi participé à l’essor de l’orthopédie pédiatrique ; son rôle dans le développement du corset de Milwaukee fut mondialement reconnu.

Fig. 2 : WP Blount (1900-1992)

Fig.1 : Couverture du livre référence de WP Blount

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Qui était-il ? Walter Putnam Blount (1900-1992)par Pierre Lascombes

Après la mort de sa première épouse en 1966, Blount épousa, à l’âge de 66 ans, Jane Dunlok Telander. Il aimait la promenade, le vélo et le jardinage, ainsi que la lecture et l’écriture. Poursuivant ses activités académiques et ses consultations auprès des patients pendant de nombreuses années, il a longtemps gardé des contacts avec ses collègues et ses résidents. Depuis le 16 mai 1992, il repose en paix.

Qu’il nous soit permis de rendre hommage à cet homme qui vécut près de 92 ans, chirurgien orthopédiste pédiatre polyvalent hors pair qui, avant 1960, était aussi brillant en traumatologie pédiatrique [2] que dans le traitement des scolioses [3,4] en passant par les déviations axiales des membres [5,6] et la pathologie de la hanche [7], sujets qui sont toujours d’actualité.

Véritablement intéressé par les déformations des genoux, en varum ou en varus, il a modifié le traitement des corrections progressives par épiphysiodèse chirurgicale asymétrique du genou en inventant les agrafes dites de Blount, agrafes mesurant ¾ d’inch (1,9 cm) [5]. Le 7 février 1949, le Time Magazine rapportait que Blount « fascinait » pour sa capacité à traiter les enfants boiteux, qu’ils aient des genoux cagneux ou des jambes incurvées. En 1937, Blount a rapporté 13 observations sous le nom de « ostéochondrosis déformans tibiae » [6]. Philippe Erlacher avait décrit auparavant, en 1922, des cas de « tibia vara ».

Ainsi, cette affection nommée tibia vara est la maladie de Erlacher-Blount. Dans le cadre du traitement des formes infantiles précoces, Blount a décrit une attelle en fait rarement utilisée.

En 1963, Blount écrivait : « J’ai été très intéressé par la scoliose depuis 1928 lorsque j’ai étudié différents types de méthodes thérapeutiques inefficaces en Europe…La plupart des

traitements donnaient des résultats pires que leur absence ». Cette petite phrase est peut-être la raison d’un Blount mal aimé en Europe. Cela l’a pourtant conduit à se pencher sur le difficile traitement des scolioses. Son corset dit corset de Milwaukee, corset dynamique et actif mondialement connu, a été prescrit par des générations de scoliologues [3,4]. Qui d’entre nous n’a jamais suivi ces enfants à qui nous demandions de dégager leur menton de l’appui cervical du « Milwaukee » ? Bien entendu, au corset original de Blount réservé aux jeunes enfants pour éviter la compression costale, des modifications sont apparues ici ou là avec des appuis thoraciques… qui font que ce corset est aujourd’hui moins fréquemment utilisé. Jean Gabriel Pous avait proposé le « petit Pous » pour les très jeunes enfants.

Blount s’est aussi intéressé à la hanche. Quel orthopédiste pédiatre ne l’est pas ? Avant l’ère de l’arthroplastie totale, les atteintes sévères de l’articulation coxo-fémorale le poussait à prescrire la décharge par une canne. Son humour l’autorisait à écrire des articles avec pour titre : « ne jetez pas la canne » [7].Mais c’est dans le domaine des fractures de l’enfant que Blount a excellé, consacrant une grande partie de son activité à ce sujet. Son livre magistral fut publié en 1955 [1] puis une seconde édition en 1977. Parmi l’ensemble des fractures de l’enfant, Blount a particulièrement étudié le traitement des fractures des deux os de l’avant-bras, prouvant que les complications étaient rares à condition d’éviter les interventions chirurgicales lourdes avec abord du foyer de fracture. Dans le traitement des fractures supra condyliennes du coude, la technique dite de Blount reste largement utilisée dans nos régions (Fig. 6, in [1]). Elle a hélas mauvaise réputation en Amérique du Nord, par peur d’induire un syndrome des loges, complication peu décrite en Europe.

Fig. 3 : Illustration du livre Fractures in children de WP Blount (figure39) “Doctor, treat the patient, not the picture”

Fig. 4 : Illustration du livre Fractures in children de WP Blount (figure 40) “Carry the sand yourself and let the child get well ”

Fig. 5 : Illustration du livre Fractures in children de WP Blount (figure 45) “Strong arm methods will not straigthen the el-bow”

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Fig. 6 : Illustration du livre Fractures in children de WP Blount (figure 35) La méthode de Blount

Blount était un formidable orateur dont le thème favori était donc celui du traitement des fractures de l’enfant. Il était parfaitement convaincu de l’efficacité du traitement orthopédique de ces fractures à condition d’en maîtriser parfaitement les règles. « La croissance osseuse et le remodelage sont un atout avec lequel il faut savoir avantageusement composer ». Blount fut également un des premiers chirurgiens outre Atlantique à attirer l’attention sur les sévices à enfants en présence d’une fracture ancienne. Toute son expérience se trouve dans ses livres qui exposent les bases du traitement des fractures de l’enfant, livres qui ont servi de référence à toute une génération de chirurgiens orthopédistes nord-américains.Je ne saurai donc qu’inciter chacun d’entre nous à lire ou relire son livre fondamental sur les fractures de l’enfant : cet ouvrage à la fois monumental et simple reste une référence, gardant sa place au côté des « textbooks » plus modernes consacrés aux ostéosynthèses des fractures articulaires et à l’embrochage centromédullaire élastique stable.

Références 1. BLOUNT WP. Fractures in children. The Williams and Wilkins Compagny, 1955, 279 p.2. BLOUNT WP. Fractures in children are different. Bull Chic Med Soc, 1949 ; 24 : 52 : 511-6.3. BLOUNT WP, Schmidt AC, Keever ED, Leonard ET. The Milwaukee brace in the operative treatment of scoliosis. J Bone Joint Surg, 1958; 40 - A : 511-25. 4. BLOUNT WP, Schmidt AC, Bidwell RG. Making the Milwaukee brace. J Bone Joint Surg, 1958 ; 40-A : 526-8. 5. BLOUNT WP, Clarke GR. Control of bone growth by epiphyseal stapling; a preliminary report. J Bone Joint Surg, 1949 ; 31A : 464-78.6. BLOUNT WP. Tibia vara, osteochondrosis deformans tibiae. Curr Pract Orthop Surg, 1966 ; 3 : 141-56. 7. BLOUNT WP. Don’t throw away the cane. J Bone Joint Surg, 1956 ; 38-A : 695-708.

Qui était-il ? Walter Putnam Blount (1900-1992)par Pierre Lascombes

Réunions à venir

23-26 septembre 2009Scottsdale, Arizona, USA63ème réunion de l’AACPDM (American academy for cerebral palsy)www.aacpdm.org/meetings/2009

8-9 octobre 2009Montpellier Séminaire de recherche de la [email protected]

29 octobre-1 novembre 2009Pattaya, Thailande 6ème Congrès SICOT/SIROT www.sicot.org

18-19 mars 2010Arc-et-Senans 34ème séminaire de la SOFOPOrganisateurs Benoit de Billy et Michel Dutoit

7-10 avril 2010 zagreb 29ème réunion de l’Eposwww.epos.efort.org/zagreb2010

3-7 mai 2010 Waikoloa, Hawaii Réunion annuelle de la Posnahttp://www.posna.org

7-8 mai 2010Nantes 42ème réunion du GESorganisateur : Simon Le [email protected]

16-19 juin 2010Paris- Palais des CongrèsCongrès des Sociétés de PédiatrieSéminaire paramédical (16-17 juin)[email protected]

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HistoriqueIl semble que ce soit en 1922 que le premier cas de tibia vara infantile ait été publié par Erlacher. Il effectue une description clinique d’une « épiphysite déformante de l’extrémité supérieure du tibia », à propos d’un cas, en évoquant le caractère congénital de la maladie.Les années qui suivent voient émerger de nombreuses publications sur des cas isolés, mais qui ont toutes la particularité de proposer diverses hypothèses physiopathologiques : pour Mac Murdy (1922), l’aspect radiologique correspond à l’équivalent de la maladie de Legg-Calvé-Perthes, mais localisée au genou. Valentin (1922) suggère une origine infectieuse, alors que Mau (1924) considère que l’anomalie est la résultante d’une exostose ostéogénique. Rall insiste à deux reprises (1929 et 1934) sur la similitude entre les lésions tibiales et celles de l’ostéochondrite de hanche. En 1931 Lülsdorf donne une description relativement bien détaillée de « l’epiphysis tibiae deformans », qui servira de base à de nombreux auteurs pour y rattacher leurs observations. Toutefois son hypothèse est celle d’une atteinte inflammatoire de l’épiphyse.Il revient à W.P Blount en 1937, de décrire le tibia vara comme une entité à part entière, en reprenant tous les cas publiés jusqu’alors dans la littérature, auxquels vient s’ajouter sa série personnelle de 13 cas. Il réalise ainsi une précise description clinique, pathologique et radiographique, qui lui vaudra le privilège de donner son nom à cette maladie.A partir de ce moment, l’affection devient moins méconnue, et le rachitisme qui était la principale cause évoquée devant un tibia vara perd de sa prééminence. La notion de trouble de l’ossification enchondrale localisée, ou de dégénérescence du cartilage de croissance apparaît, sans que l’étiologie ne soit cependant clairement identifiée.En 1952, Langenskiold publie une étude portant sur 23 patients, et donne son nom à la première classification radiologique de la maladie (Fig.1). Ce travail présente aussi l’avantage d’attirer l’attention de la communauté scientifique sur la prévalence de cette maladie en Europe du Nord.Commence alors une nouvelle ère à partir des années 70 jusqu’à nos jours, car les publications ultérieures s’intéressent à la prise en charge chirurgicale et aux résultats, et ainsi qu’aux différentes stratégies thérapeutiques à adopter en fonction des stades. Les précurseurs ont été Langenskiold et Riska en 1964, qui introduisent la technique d’ostéotomie trans-épiphysaire associée au relèvement du plateau tibial médial. L’analyse des différents cas mondiaux pendant toutes ces années a permis de différencier les formes de l’enfant et de l’adolescent, ainsi que leur répartition géographique mondiale très particulière dans cette maladie.En 1983, Catonné publie une série de 26 cas suivis et traités, tout en ayant proposé quelques années auparavant une nouvelle classification basée, comme celle de Langenskiöld, sur l’aspect radiologique des lésions de l’extrémité proximale du tibia (Fig. 2).Enfin, durant les années 90, de nombreux auteurs américains (Schoenecker en 1985, Johnston en 1990 et Greene en 1993), apportent leur contribution à l’élaboration des stratégies thérapeutiques grâce à leurs observations chez les enfants noirs américains. Schoenecker propose d’ailleurs une échelle d’appréciation des résultats thérapeutiques en 3 stades.

Description de la maladieIl convient d’individualiser deux groupes dans la maladie de Blount, à la lumière des différentes observations rapportées. Cette distinction est nécessaire pour la plupart des caractéristiques de ces deux affections, dont le nom est pratiquement le seul facteur commun.

Le tibia vara infantileDébutant vers l’âge de 2 ans, cette forme est à distinguer du genu varum physiologique par son évolution qui n’a aucune tendance à l’amélioration spontanée. La plupart des séries retrouve une légère prédominance féminine, et les enfants d’origine africaine noire seraient plus souvent atteints, bien que quelques études scandinaves aient montré une prévalence accrue en Europe du Nord. La marche précoce a été incriminée comme facteur favorisant, mais aucun argument formel ne semble le confirmer. D’autres facteurs de risque ont été incriminés, comme le surpoids au-delà de 2 déviations standard. Ainsi les facteurs d’origine ethnique et les facteurs mécaniques de surpression précoce semblent jouer un rôle dans la survenue des formes précoces. Les formes familiales ont également été décrites, ce qui laisse supposer un possible déterminisme génétique. Un point reste cependant non résolu qui est l’atteinte uni ou bilatérale, avec parfois des évolutions différentes dans ces dernières (guérison spontanée d’un côté alors que l’autre continue son aggravation)

Le tibia vara de l’adolescentTous les auteurs sont unanimes sur la moindre fréquence tout à fait nette des formes de l’adolescent (c’est-à-dire débutant tardivement), par rapport au tibia vara infantile.On note des caractéristiques relativement précises dans cette forme : il existe une prédominance masculine manifeste, et la race noire semble être électivement atteinte. L’obésité est présente dans la majorité des cas, à tel point que certains auteurs se sont alarmés de l’augmentation de la prévalence dans la population noire américaine obèse où le chiffre de 2,5% a été avancé au sein de cette population à risque. Toutefois, à l’inverse de ce qui a été observé dans le tibia vara infantile, aucune forme familiale n’a été observée.Cette forme de l’adolescent n’est donc pas une forme infantile qui débuterait tardivement.

Les principales classificationsL’examen radiographique est indispensable au diagnostic de la maladie de Blount. L’analyse radiographique doit apprécier le degré de varus (Fig. 3a), ainsi que l’évolutivité lésionnelle de la maladie. A cet effet, il semble indispensable de réaliser un grand cliché des membres inférieurs de face en charge, en prenant garde de bien maintenir les rotules au zénith, ainsi que des radiographies de face et de profil centrées sur les genoux afin de décrire au mieux le stade de la maladie.De multiples classifications ont été décrites concernant toutes le tibia vara infantile, mais nous n’en retiendrons que 3. La classification de Langenskiöld, qui est la première historiquement publiée, la classification de Laville pour sa simplicité, et la classification de Catonné, pour son application thérapeutique.

La maladie de Blountpar Pierre Journeau

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La classification de LangenskiöldElle comporte 6 stades évolutifs. Il n’y a cependant pas de corrélation entre le stade évolutif et le degré de varus de la maladie.Stade 1 : ossification irrégulière de la métaphyse tibiale supérieureStade 2 : verticalisation du versant médial métaphysaire. Le bec métaphysaire se trouve surmonté d’une zone claire. Le versant médial du noyau épiphysaire se développe mal.Stade 3 : la métaphyse prend l’aspect d’une véritable marche d’escalier sur son versant médial. L’os épiphysaire commence à glisser dans la dépression créée par l’affaissement métaphysaire. Stade 4 : la zone médiale laissée libre par l’effondrement métaphysaire est occupée par l’épiphyse ossifiée.Stade 5 : la partie médiale de l’épiphyse forme un fragment triangulaire épousant la zone d’effondrement métaphysaire. Ce fragment osseux est à bords irréguliers. Le plateau épiphysaire apparaît dédoublé, et la surface articulaire altérée.Stade 6 : le plateau épiphysaire se soude progressivement à la métaphyse, sur son versant médial.

La classification de LavilleElle est très simple car décrit seulement 3 stades radiologiques, mais en y associant la mesure de l’angle épiphysaire (ou angle du plateau tibial médial). Elle a pour but de tenter de proposer un traitement adapté et spécifique aux lésions présentes.Stade 0 : tibia vara potentiel. Diagnostic de maladie de Blount incertain. La constatation de ce stade impose une surveillance clinique et radiologique.

Stade 1 : tous les critères radiologiques de maladie de Blount sont présents, et il n’existe pas de pont d’épiphysiodèse médial (Physe +). L’auteur propose une ostéotomie de valgisationStade 2 : il existe un pont d’épiphysiodèse médial. Il est proposé dans ce cas d’adjoindre une épiphysiodèse latérale en plus de l’ostéotomie correctrice, avec une éventuelle égalisation de longueur si nécessaire.Il existe un sous-groupe dans ce stade, avec l’existence d’un affaissement important du plateau tibial médial mesuré par l’angle de pente du plateau tibial (Fig. 3b), où l’auteur ajoute dans ce cas une ostéotomie de relèvement du plateau tibial médial.

La classification de CatonnéDernière en date, (1980), cette classification est indépendante de la laxité articulaire et de la valeur angulaire du varus. La description radiologique est très minutieuse, et elle effectue une corrélation directe entre le stade évolutif et le traitement le plus approprié, à l’instar de celle de Laville.

Stade 1 : c’est le stade initial de la maladie, où le diagnostic différentiel avec un genu varum physiologique est difficile. Les caractéristiques sont une asymétrie du noyau épiphsaire associée à la présence d’un bec métaphysaire médial au niveau duquel l’os prend un aspect hyper-dense.Stade 2 : il est caractérisé par une obliquité du versant médial de l’épiphyse tibiale proximale, et un aspect irrégulier de la métaphyse qui prend un caractère inhomogène et aplati. Le diagnostic positif de la maladie est formel à ce stade.Stade 3 : il existe une aggravation des lésions précédentes, marquée par la verticalisation de plus en plus importante de

La maladie de Blountpar Pierre Journeau

Fig. 3 : a) l’angle métaphyso-diaphysaire est l’angle formé par la droite unissant les deux becs métaphysaires médial et latéral, rapporté à l’axe de la diaphyse tibiale. Il est pathologique au-delà de 11°, et est prédictif de la survenue d’un tibia vara infantile, lorsque les signes épiphysaires ne sont pas formels. b) la pente épiphysaire est l’angle formé par les deux tangentes aux plateaux ti-biaux. Elle est pathologique au-delà de 15°

Fig 1 : la classification en 6 stades de Langenskiöld

Fig. 2 : la classification en 6 stades de Catonné

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la métaphyse et de l’épiphyse, ainsi que par la fragmentation de l’épiphyse et de la métaphyse réalisant des îlots de calcification. Il n’existe pas de pont osseux épiphyso-métaphysaire. L’épiphyse fémorale distale s’hypertrophie au niveau du condyle médial, venant combler le vide engendré par l’obliquité du plateau tibial médial. Stade 4 : c’est un stade évolutif décisif en raison de l’apparition d’un début d’épiphysiodèse spontanée survenant à la partie médiale de la métaphyse. Le pont épiphyso-métaphysaire est cependant peu étendu à ce stade. On assiste en revanche à une accentuation de l’obliquité de l’épiphyse fémorale distale, avec un valgus compensatoire progressif.Stade 5 : il correspond à la fusion d’au moins 50% du cartilage de croissance tibial proximal, uniquement dans sa partie médiale, le versant latéral restant totalement ouvert. La physe fibulaire proximale est également toujours ouverte. Néanmoins, la progression du varus à ce stade est rapide.Stade 6 : la fusion du cartilage conjugal est complète. Il rompt le cercle vicieux d’aggravation d’origine osseuse. En revanche le varus ligamentaire est toujours présent et permet la progression du varus.

Principes thérapeutiquesLa classification de Catonné parait être la plus complète, et est une aide précieuse à la décision thérapeutique. Toutefois, d’autres facteurs sont à prendre en compte comme l’âge de l’enfant, avec une charnière à 4 ans. Il semblerait que le risque de récidive soit moins important lorsque les ostéotomies sont pratiquées avant 4 ans. Par ailleurs, d’autres mesures radiographiques, en particulier l’angle de pente épiphysaire mérite d’être évalué. En effet, un angle élevé laisse augurer des complications articulaires et ligamentaires futures. Si cette pente n’est pas corrigée, l’inclinaison importante du plateau tibial médial accentue la distension ligamentaire latérale et provoque une subluxation du tibia sous le fémur lors de la mise en charge.Enfin, il existe un certain degré de torsion tibiale médiale, qui semble corrélée à l’importance du varus, et la correction doit tenir compte de cette déformation associée.On peut ainsi retenir comme facteurs pronostiques de récidive l’âge supérieur à 4 ans pour le premier traitement et le stade 4 de Langenskiöld (ou stade 3 de Catonné).

Les traitements orthopédiquesIls sont controversés, mais restent toujours d’actualité, en raison de certains succès thérapeutiques. Ils font appel à des attelles anti-varus, le plus souvent de port nocturne, voire à des plâtres de réduction. Leur tolérance est variable, et ils doivent donc être réservés aux enfants jeunes (moins de 4 ans), et atteints de forme débutante. Il peut permettre d’éviter le traitement chirurgical, mais les véritables séries comparatives manquent pour affirmer réellement leur efficacité face à l’histoire naturelle de la maladie.

Les traitements chirurgicauxLeurs indications reposent essentiellement sur les stades radiographiques.On distingue les techniques précoces utilisées surtout chez le jeune enfant, qui visent à corriger extemporanément la déformation varisante : ostéotomies de valgisation quelle qu’en soit la technique, en y associant un certain degré de dérotation latérale. Les techniques plus tardives font appel aux corrections des déformation épiphyso-métaphysaires : relèvement du plateau tibial médial, épiphysiodèse complémentaire latérale, distraction osseuse permettant de corriger à la fois le varus, la torsion tibiale médiale et l’inégalité éventuelle de longueur.Ces différentes interventions peuvent être associées entre elles, selon les déformations à corriger, ce qui impose une analyse précise des lésions et des déformations. La planification de la stratégie thérapeutique est alors essentielle.

ConclusionLa maladie de Blount reste une maladie rare dont l’étiologie, encore inconnue, semble faire intervenir des facteurs héréditaires et environnementaux, expliquant sa répartition très particulière.La forme infantile qui reste la plus fréquente, doit son pronostic médiocre à la survenue précoce de la déformation. Malgré son évolution possible vers la guérison spontanée, le tibia vara infantile a une tendance à la récidive malgré les traitements, tant que la maturation osseuse n’est pas acquise.Chez l’adolescent, l’évolution est écourtée par la fusion précoce des cartilages de croissance, et cette forme conserve un pronostic osseux satisfaisant. Sa gravité réside dans l’obésité morbide fréquemment associée, qui semble être un facteur péjoratif essentiel.

RéférencesBLOUNT W.P « Tibia vara : osteochondrosis deformans tibiae » J Bone Joint Surg. 1937;19:1-29BOUCHAIN J “La maladie de Blount de l’enfant et de l’adolescent: étude d’une série de 37 cas et revue de la littérature”Thèse de doctorat en médecine (N° 3023), 1999, Université de Bordeaux II, 217 pCATONNé Y, PACAULT C, AzALOUx H, TIRE J, RICHARD A, BLANCHARD P« Radiological appearance in Blount’s disease » J Radiol. 1980; 61:171-176CATONNé Y « La maladie de Blount » Cahiers d’enseignement de la SOFCOT. Conférence d’enseignement 1997 ; p147-163ERLACHER P « Deformierende prozesse der epiphysengegend bei kindern” Arch Orthop Unfallchir 1922; 20:81-96LANGENSKIöLD A “Tibia vara (osteochondrosis deformans tibiae: a survey of 23 cases” Acta Chir Scand 1952; 103:1-22LAVILLE JM, CHAU E, WILLENEM L, KOHLER R, GARIN C “Blount’s disease: classification and treatment” J Pediatr Orthop B 1999; 8:19-25

La maladie de Blountpar Pierre Journeau

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Qu’auriez-vous fait dans cette maladie de Blount ?

par Dimitri PopkovIl s’agit d’une fille âgée de 10 ans adressée pour un genou varum gauche associé à des douleurs de type mécanique. Sa taille debout est de 137 cm, son poids de 40 kg.L’examen clinique note le genou varum isolé gauche d’environ 10°. S’y associe une torsion tibiale interne de 10°. La marche se fait avec une légère boiterie. L’examen clinique du genou ne retrouve ni épanchement articulaire, ni laxité, ni pathologie fémoro-patellaire. Une inégalité de longueur des membres inférieurs est mesurée à 15 mm aux dépens du côté gauche plus court.Selon l’interrogatoire, cette déformation serait connue depuis l’âge de 3 ans. Toutefois, une certaine aggravation est rapportée.La radiographie debout de face des membres inférieurs permet la mesure des différents paramètres connus (Tableau 1).

Tableau 1paramètre MI droit MI gauche

MAD -10.3 mm 30.4 mm

mLDFA 87° 86.7°

aLDFA 81.7° 81.1°

mMPTA 88.7° 73.5°

aMPTA 87.3° 71.6°

aPPTA 74°

Angle du plateau 7.5° 11.9°

Les signes d’une dystrophie physaire tibiale proximale et médiale sont évidents. L’IRM confirme l’épiphysiodèse médiale partielle de cette physe proximale tibiale gauche. En revanche, le reste de l’articulation du genou paraît normal, en particulier les structures du pivot central et les ménisques.

Sur la radiographie en charge des membres inférieurs, la reconstruction graphique permet de tracer les axes et de pointer l’intersection (CORA) entre l’axe anatomique diaphysaire tibial et l’axe anatomique du tibia proximal. Le mMPTA mesure 87.3° du côté sain. Il est reporté sur le tibia pathologique, ce qui permet de déterminer la position du CORA à 0,3 cm au-dessus du niveau de la physe.

Fig. 1 : aspect clinique

Fig. 2 a : MAD (30.4 mm) montre le genou varum

Fig. 2b : l’angle mécanique confirme le genou varum tibial avec un mMPTA égal à 73,5º

Fig. 2c : l’angle anatomique aMP-TA est égal à 71,6º

Fig. 3 : Le CORA est situé au ni-veau épiphyso-métaphysaire à 0,3 cm au-dessus du niveau de la physe.

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En 1954, Walter P. Blount [1] décrivait une méthode de stabilisation des fractures supracondyliennes en extension du coude de l’enfant. Le principe d’immobilisation du coude en flexion était déjà connu depuis longtemps, mais W.P. Blount a eu le mérite de défendre cette technique tout en attirant l’attention sur le risque de survenue d’un syndrome de Volkmann face à une fracture supracondylienne. C’est principalement cette complication majeure qui rend la technique très impopulaire outre-Atlantique. Cependant des travaux allemands et français ont permis de démystifier cette technique en démontrant de bons résultats sans complications.

Pour comprendre le mécanisme de réduction à foyer fermé, il faut connaître l’ensemble des lésions anatomiques. Les fractures supracondyliennes en extension sont le résultat d’un mouvement d’hyperextension du coude. La fracture commence en antérieur pour déchirer le périoste en avant avec une extension plus ou moins élargie vers le bord latéral ou médial. Plus le déplacement du fragment distal est important, plus la rupture du périoste est importante. Heureusement, la portion postérieure du périoste est souvent intacte. Son importante résistance permet sa mise sous tension lors d’un mouvement de flexion du coude ; il joue un véritable rôle d’attelle de stabilisation interne.

La réduction est faite sous anesthésie générale en décubitus dorsal et sous contrôle de l’amplificateur de brillance. Elle se décompose en quatre temps. Le premier temps consiste en une traction dans l’axe du bras, coude en extension. La traction doit être douce et prolongée afin de préserver l’intégrité du périoste postérieur. Le deuxième temps corrige le trouble de translation dans le plan frontal par de petites pressions sur le fragment distal. Le trouble de rotation est corrigé par la pronosupination de l’avant-bras : la pronation entraîne une rotation médiale du fragment distal, alors que la supination entraîne une rotation latérale. Le troisième temps est une flexion progressive du coude tout en maintenant la traction.

Le pouce de la main du chirurgien qui fait contretraction appuie sur l’olécrâne afin de réduire la fracture. L’autre main continue la traction et fléchit l’avant-bras sur le bras sans forcer jusqu’à 120°. Le quatrième temps consiste à placer la main en pronation pour assurer une meilleure stabilité.

Une fois les critères de bonne réduction évalués à l’amplificateur de brillance, de face comme de profil, il faut vérifier la présence du pouls radial et du pouls capillaire. L’absence de l’un des deux après quelques minutes d’attente impose de choisir une autre technique au risque de provoquer un syndrome de Volkmann. Il faut aussi vérifier la stabilité de cette réduction dans le plan frontal et sagittal, ce qui permettra de prévenir un éventuel déplacement secondaire si la stabilité de la fracture est insuffisante. La contention est réalisée par un gantelet plâtré fixé à un jersey avant d’être noué autour du cou (Fig. 1). La surveillance en milieu hospitalier est au minimum de 24 heures pour vérifier l’absence de complications secondaires. Des consignes précises sont données aux infirmières du service : évaluer l’importance du gonflement, le temps de recoloration (pouls capillaire), le contrôle de la sensibilité et de la motricité des doigts. Le jersey autour du cou est parfois resserré le lendemain par le chirurgien de façon à augmenter la flexion du coude. Avant la sortie, il est répété aux parents l’interdiction formelle de toucher au montage (même pour la toilette) sous peine d’une perte de réduction. Le premier contrôle clinique et radiographique à lieu à une semaine ; un cliché de profil strict et un cliché de face, coude en flexion sans enlever le bandage, est demandé. L’immobilisation maintenue trois à quatre semaines est toute à fait bien tolérée par l’enfant.

Pour comprendre la stabilité de la méthode de Blount, il faut se référer aux travaux expérimentaux sur cadavres réalisé il y a plus de 25 ans. Abraham [2] a démontré sur des fractures induites chez le singe que la position de réduction la plus stable était une flexion maximale du coude associée à une pronation de l’avant-bras de 90°, peu importait le déplacement du fragment distal. En effet, cette position met en tension le périoste postérieur et médial ; et elle entraîne une compression latérale et centrale au niveau du foyer de fracture. Au contraire la position en supination est inductrice de cubitus varus. Plus récemment, Khare [3] démontra que la force responsable d’une déformation en cubitus varus était due uniquement au triceps. En effet, en flexion du coude, une force excentrique du triceps entraîne une ouverture externe due à son insertion olécrânienne médiale par rapport au trait de fracture. Cet auteur démontra aussi que la position en pronation était plus stable et il l’expliquait par un transfert des forces appliquées grâce au rôle de « manivelle » du radius. Lors de la pronation, une force vers le bas est appliquée au radius distal alors qu’elle est vers le haut au niveau de l’ulna. La position en pronation provoque un croisement des 2 os de l’avant-bras ce qui donne un effet inverse des forces appliquées en distale. Au niveau de l’ulna proximal la force est appliquée vers le bas mettant en tension le périoste médial, alors qu’au niveau du radius proximal la force est appliquée vers le haut assurant

Fig. 1 : immobilisation avec gantelet. Noter l’importante flexion du coude et la main en pronation

1 A.C.C et 2 DES au CHU Brabois Hôpital d’Enfants, Chirurgie Infantile A, Rue du Morvan, 54500 Vandoeuvre les Nancy

La méthode de Blount pour les fractures supracondyliennes

par Antoine de Gheldere 1 et Marc Legname 2

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La méthode de Blount pour les fractures supracondyliennes

par Antoine de Gheldere 1 et Marc Legname 2

ne compression au niveau du foyer de fracture (Fig. 2). Ces expérimentations cadavériques ont été confirmées par les mêmes constatations en peropératoire.

Il existe malgré tout des contre-indications à la technique. Les fractures supracondyliennes en flexion (4% des fractures supracondyliennes) sont par définition une contre-indication étant donné que le périoste postérieur est rompu. Pour la même raison, les rares fractures souffrant d’instabilité majeure avec déchirure du périoste antérieur et postérieur sont contre-indiquées. Tout syndrome ischémique qui ne se lève pas rapidement est une contre-indication, sous peine d’entraîner un syndrome de Volkmann. Un gonflement important du coude peut rendre la réduction difficile et constitue une contre-indication car l’oedème va venir comprimer le paquet vasculo-nerveux. Et finalement, une fracture instable lors des manœuvres de testing doit faire préférer une ostéosynthèse pour éviter un déplacement secondaire.

Les indications pour débuter avec la méthode de Blount en première intention sont donc représentées par toutes les fractures supracondyliennes en extension qui ne présentent aucune contre-indication précitée (Fig. 3).

Fig. 2 : rôle de la pronation lors de l’immobilisation du coude en flexion maximale

Fig. 3 : principe du traitement des fractures supracondyliennes

Références1. BLOUNT WP. Fractures in children. Baltimore, The Williams and Wilkins Co 1954.2. ABRAHAM E, Powers T, Witt P, Ray RD. Experimental hyperextension supracondylar fractures in monkeys. Clin Orthop Relat Res. 1982; 171 : 309-18.

3. KHARE GN, Gautam VK, Kochhar VL, Anand C. Prevention of cubitus varus deformity in supracondylar fractures of the humerus. Injury. 1991; 22 : 202-6.

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Peut-on se fier en chirurgie aux scores d’évaluation,

aux études multicentriques, aux méta-analyses et à la médecine fondée sur les faits ? par Jean Dubousset

Les scores d’évaluation Dans ma pratique de chirurgien orthopédiste pédiatre, spécialisé dans les problèmes de rachis, de tumeurs souvent malignes de l’appareil locomoteur ou de pathologie neuro-musculaire, j’avais la chance de ne pas avoir à mettre en doute les informations concernant la douleur. Lorsqu’un enfant se présente avec un rachis raide et douloureux, il y a peu de doute sur l’organicité du problème et le devoir du chirurgien est d’en faire le diagnostic, de le traiter correctement et si possible de le guérir. Des situations où les signes cliniques sont simulés, comme dans la « scoliose hystérique » sont tout à fait exceptionnelles chez l’enfant.Bien que maintenant retraité, je participe toujours à de nombreux congrès, où l’on peut voir de plus en plus d’évaluations des résultats par des « questionnaires », générant des scores, qui me laissent de plus en plus perplexes. L’augmentation du nombre de ces scores (plus de 40 différents) démontre tout d’abord qu’aucun n’est réellement satisfaisant.

Certains de ces scores sont même payants si vous désirez les utiliser, et cela démontre pour moi l’intrusion de l’argent et du profit au détriment de la vérité et de l’éthique. La plupart de ces scores tentent d’évaluer l’état pré et postopératoire et le bénéfice du traitement, en mélangeant des mesures cliniques, des aptitudes fonctionnelles et la douleur. C’est par exemple le cas pour l’évaluation particulièrement difficile des « lombalgies ».Pour moi, « scorer » l’item douleur d’après un questionnaire ressemble à de la fausse science.

Pourquoi ? Parce que, lorsque vous demandez à un patient de remplir un questionnaire (de plus en plus complexe) vous allez l’amener à se poser des questions auxquelles il n’aurait jamais pensé auparavant, soulever de nouveaux problèmes créant ainsi dans son cerveau une nouvelle pathologie. C’est pourquoi je considère ces questionnaires non seulement sans fondement scientifique, mais en plus de cela, je les considère comme dangereux sur le plan psychologique pour le patient.

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C’est pourquoi je ne leur accorde aucune confiance, sans compter que parfois le questionnaire n’est même pas rempli par le patient lui-même mais par toute sa famille !Y-a-t-il une solution ? Je pense qu’aucune n’est parfaite et que la bonne voie à suivre serait de revenir aux premiers engagements d’Hippocrate, qui recommandent une relation de confiance et de vérité avec son patient, de la première à la dernière consultation et ceci même si des complications venaient à survenir.Mais si vraiment nous voulons apprécier les résultats avec un minimum de biais, je proposerai la chose suivante : le patient écrit une lettre concernant les maux dont il souffre avant la première consultation, lettre qui ne comporterait pas son nom mais simplement la date, son âge, le maximum de renseignements concernant la durée de ses troubles, la fréquence et l’intensité des symptômes, etc.

Il montre cette lettre au médecin, qui la met dans une enveloppe, qu’il cachette avec le nom du patient et la date du jour. Ensuite le praticien mène sa consultation comme d’habitude, pose le diagnostic et réalise la chirurgie si besoin. Trois mois après l’intervention, ou lors d’une visite de contrôle, le patient refait exactement la même chose, écrit une lettre avant chaque consultation. Ces lettres seront ensuite analysées de façon « aveugle » par une équipe médicale totalement indépendante (mais suffisamment entraînée à ce genre de travail) parfois loin du lieu de pratique du médecin concerné (autre ville, autre pays).Ainsi, l’obtention des résultats concernant l’étude des douleurs, ou de la fonction se réalisera avec le minimum de biais. Les personnes chargées des analyses seraient rétribuées par de l’argent public provenant d’organismes d’état tels que la sécurité sociale, ou de compagnies d’assurance privées, sociétés de production ou de distribution de matériel médical….Je pense que de telles expérimentations doivent être mises en place pour des pathologies bien précises, arthrose de genoux , coxarthrose ou lombalgies chroniques par exemple. Ceci pourrait ensuite être étendu à d’autres groupes de pathologies.

Etudes multicentriquesPersonnellement je n’ai jamais vu un patient strictement comparable à un autre, même pour une pathologie identique (par exemple scoliose ou même tumeur maligne). Donc si nous acceptons bien l’idée de la réalisation d’études multicentriques épidémiologiques sur des signes cliniques ou radiologiques, l’idée de réaliser ces études multicentriques pour étudier un traitement chirurgical est mauvaise car l’acte chirurgical est réalisé par un individu unique. Cette pratique varie de tout au tout d’un chirurgien à un autre, même si l’acte chirurgical a été parfaitement enseigné.

Par exemple, une laminectomie décompressive pour sténose lombaire peut être réalisée avec des techniques si variées, que les résultats de la laminectomie par une étude

multicentrique intégrant ces différentes manières de faire n’est pas interprétable. Avec toute l’honnêteté du monde, je dois dire que personnellement, je n’ai jamais réalisé exactement la même chirurgie pour la même pathologie d’un patient à l’autre (ex : arthrodèse D5-L1 avec instrumentation pour une scoliose). Il y a toujours quelques petits détails qui rendent l’intervention unique, exactement comme on peut dire que chaque patient est unique.

Il est préférable de réaliser une étude monocentrique dont le degré de significativité est augmenté par le fait que la chirurgie est toujours réalisée par le même chirurgien. Bien sûr, il faudrait là encore que ce travail soit analysé par une équipe complètement indépendante mais compétente.Mélanger les résultats d’un grand nombre de centres, utilisant des techniques différentes ne me paraît donc pas recevable concernant les actes chirurgicaux, aussi bien pour celui qui mène l’étude que pour le statisticien.

Méta-analyse Encore un bon moyen d’introduire des erreurs dès que nous parlons de traitement chirurgical. Il est bien connu que très peu de papiers sont correctement documentés, avec un degré suffisant de significativité concernant les résultats, non seulement d’un point de vue statistique mais également d’un point de vue médical. Les méta-analyses consistant en fait à additionner les erreurs contenues dans chacun des articles, c’est pour moi le meilleur moyen de livrer de fausses informations.

Il est vraiment très dommage de constater que cette méthode soit si bien classée dans l’échelle de confiance des évaluations des pratiques médicales et chirurgicales, alors qu’il est clair qu’elle ne fait qu’additionner erreurs et fautes contenues dans chaque article.Encore une fois, je fais bien plus confiance en une étude sérieuse réalisée par une institution sérieuse, où les résultats sont réellement interprétés par une personne compétente et extérieure à l’institution.Je pense que ceci doit être développé partout pour chaque travail, avant de penser à mener une méta-analyse.

« Evidence based medicine, EBM » (médecine fondée sur les faits)Toutes ces considérations premières conduisent au concept d’ « Evidence based medicine », et de nombreuses critiques peuvent êtres faites lorsqu’il s’agit de chirurgie, par exemple pour les problèmes de lombalgies.

L’EBM peut être utile pour évaluer l’efficacité d’une nouvelle drogue, d’un nouveau vaccin, d’un nouvel agent chimique si les conditions d’utilisation et de contrôle des résultats sont scientifiquement rigoureuses. A l’opposé ce n’est pas un aussi bon concept, pas tellement fiable, et donc non utilisable comme « référence opposable » lorsque l’on étudie

Peut-on se fier en chirurgie aux scores d’évaluation,

aux études multicentriques, aux méta-analyses et à la médecine fondée sur les faits ? par Jean Dubousset

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des actes chirurgicaux nécessités pour des pathologies où dominent les problèmes douloureux.Il existe de telles variations dans la mesure de qualité de vie pour chaque individu, de telles variations dans la perception, la description et les perturbations liées à la douleur, qu’il est quasi impossible de faire une bonne analyse préopératoire et postopératoire pour chaque cas sans introduire le moindre biais, réduisant considérablement de ce fait la fiabilité d’un tel concept.

Vous n’avez pas besoin de l’« evidence based medicine » pour enseigner à vos étudiants que l’appendicite aiguë réclame un traitement chirurgical urgent. La compréhension de la pathologie et les connaissances de l’évolution sans chirurgie nous ont appris la conduite à tenir.Est-ce que l’ « evidence based medicine » peut vous aider dans le traitement d’une maladie de Legg-Perthes-Calvé ? Non, parce que nous n’en connaissons toujours pas la pathogénie ni l’étiologie. Dès lors, le patient est traité selon les connaissances et l’expérience du chirurgien.C’est pourquoi le plus important pour éviter ce concept d’« evidence based medicine » est d’enseigner et de chercher, car l’évidence est quelque chose de difficile à accommoder avec la nature humaine et sa psychologie, que ce soit celle du patient ou celle du médecin.

Bien sûr la nécessité de surseoir à l’augmentation du coût de la santé justifie de contrôler l’efficacité des différents moyens d’arriver aux mêmes résultats dans une même maladie. Nous n’avions pas besoin du concept d’ « evidence based medicine » pour comprendre très rapidement que la pose d’une prothèse totale de hanche réglait définitivement le problème étudié.Il est clair et honnête de considérer qu’une amélioration du dessin de la pièce ne sera pas remboursée par la compagnie d’assurance à un niveau supérieur que le modèle de base, et le chirurgien doit utiliser celle qui donnera le meilleur résultat dans ses mains.Un exemple similaire, mais qui concerne cette fois ci la scoliose. Le but est de corriger la déformation du mieux possible, pas seulement pour des raisons esthétiques, mais surtout pour la fonction, et pour ce faire, vous pouvez mettre des vis à tous les niveaux possibles ou seulement en des points stratégiques. Le rachis « rectiligne » sur la radiographie n’est pas le premier objectif recherché, car, bien souvent le rachis rectiligne de face l’est aussi de profil, ce qui n’est pas du tout physiologique ! Il y a de plus une différence significative de coût entre la technique « vis aux

points stratégiques » et la technique « vis à chaque niveau ». Dans mon esprit, le coût et le remboursement devraient être les mêmes, pour une même étendue d’arthrodèse, quel que soit le nombre d’implants utilisés.

ConclusionPour moi, tous ces problèmes mis à jour viennent du fait que les principes du serment d’ Hippocrate ont été dévoyés de façon pernicieuse par l’appât du gain… Il nous faut donc adapter ces principes d’Hippocrate à notre temps :

1. L’appréciation des résultats de telle ou telle technique doit être contrôlée par des observateurs indépendants. Ce sera le cas pour les items concernant les données techniques mesurables en pré et postopératoire, chirurgie et radiographie comprises. Pour la douleur, la technique proposée est de faire rédiger une lettre par le patient avant chaque consultation pour expliquer ses plaintes, lettre analysée par des observateurs indépendants et compétents.

2. Attention aux études multicentriques. Il faut leur préférer les études monocentriques si elles respectent les critères énoncés ci-dessus.

3. C’est seulement après le respect de ces contraintes qu’une méta analyse devient fiable.

4. L’evidence based medicine n’est plus utile si le médecin veut bien se conformer aux principes d’Hippocrate, avec une remise à jour permanente de ses connaissances. 5. Il faut réfléchir plutôt à l’« observation based medicine », meilleure pour le patient et la société, lorsqu’elle est faite par un chirurgien honnête.

6. L’honnêteté doit rester la qualité majeure du praticien traitant un patient, le soignant du mieux qu’il peut, n’hésitant pas à l’adresser à un collègue s’il l’estime plus compétent, s’il estime que le traitement sera mieux mené dans ces conditions.

7. L’industrie médicale ne doit pas influencer sur les indications de traitement mais doit plutôt supporter la recherche et l’enseignement.

Cette mise au point est-elle pure utopie ou peut-on espérer qu’elle devienne un jour réalité ?

Peut-on se fier en chirurgie aux scores d’évaluation,

aux études multicentriques, aux méta-analyses et à la médecine fondée sur les faits ? par Jean Dubousset

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Cet article ne s’adresse pas à ceux qui pensent : que la maladie d’Osgood-Schlatter génère un •encombrement inutile des salles d’attente, que les ados n’ont qu’à faire moins de sport,•que les parents des futurs zidane sont parfois •insupportables...

Cet article peut intéresser ceux qui sont déçus par leurs discours lénifiants concernant la bénignité de la maladie et surtout par leurs résultats du fait des difficultés de l’observance d’un arrêt sportif prolongé.Le signe dont il est question, retrouvé a posteriori dans le livre de Tachdjian, se recherche en position verticale, en mettant en tension le quadriceps incriminé (extension de hanche et flexion du genou). On pose alors la question rituelle: « Où est-ce-que ça tire? ». Quand « ça tire » dans le quadriceps, l’arrêt sportif assorti d’exercices d’étirement du quadriceps (une minute, trois fois par jour) permettent souvent de soulager l’ado qui sera revu un mois plus tard pour envisager une éventuelle reprise des activités sportives.

Quand « ça tire » au niveau de la tubérosité antérieure du tibia, cela signifie, à mon sens, une mobilité à la jonction os-tendon. Les exercices d’étirement sont douloureux et donc nuisibles. L’arrêt prolongé des activités sportives, habituellement proposé, peut permettre, s’il est respecté, de guérir la maladie de la même façon qu’une hémorragie finit toujours par s’arrêter. Pour guérir rapidement, le moyen le plus approprié est l’immobilisation par un appareil rigide fémoro-jambier pour

une durée de quatre semaines. L’acceptation du plâtre pose rarement problème ; la demande d’immobilisation est même souvent le motif de la consultation, le bouche à oreille ayant joué son rôle. En privé, l’achat par les parents du plâtre ou de la résine est plus une motivation qu’un obstacle. Pour le chirurgien, il s’agit d’une contrainte non rémunérée dans le public et si peu dans le privé (NzMP007=33,32 euros).

La petite contrainte est la source d’une véritable gratification quand, un mois après le déplâtrage, la tubérosité antérieure du tibia est indolore et que la radiographie de profil « parties molles » montre la fusion des petites ossifications avec le reste du tibia (Fig. 1a et 1b), alors que ce n’est pas toujours le cas du côté opposé non plâtré et a priori moins atteint (Fig. 2a et 2b). Il ya bien sûr des échecs marginaux (douleurs sous plâtre, forme avancée ou trop ancienne...) mais le bilan global est largement positif.

J’ai mis dix ans à ne pas pouvoir présenter ce sujet dans nos congrès : les préoccupations des membres éminents de la SOFOP sont manifestement autres. Il n’empêche, d’une part, que c’est aux orthopédistes infantiles (à qui d’autres ?) de proposer un enseignement sur ces sujets bénins mais tellement plus fréquents qu’une maladie de Morquio. D’autre part, les patients attendent une réponse mieux adaptée qu’une dispense de sports, sinon, la Nature ayant horreur du vide thérapeutique, ils se tournent vers des traitements au mieux peu efficaces (antalgiques, ultrasons, ostéopathie), voire inutiles (anti-inflammatoires) ou même nuisibles (musculation).

Maladie d’OSGOOD-SCHLATTER : un signe clinique et une attitude thérapeutique

par Jean Noël Ligier

Fig.1a : genou gauche (le plus douloureux) avant immobilisation.(J0)

Fig.1b : genou gauche un mois après déplatrâge.(J30)

Fig 2a : genou droit avant.(J0)

Fig.2b : genou droit (non immobilisé).(J30)

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Qu’auriez-vous fait dans cette maladie de Blount ? la proposition de Dimitri Popkov

Un des objectifs du traitement peut être la correction de la déformation associée à une égalisation de la longueur des membres inférieurs. Plusieurs options sont envisagées :

La méthode du chondrodiastasis permet de corriger la déformation de façon progressive au niveau de la physe, c’est-à-dire au niveau de la déformation. Cette technique, comparable à une ostéotomie d’ouverture, est réservée aux formes tardives de la maladie et elle trouve ces indications chez les adolescents peu de temps avant la fermeture des physes. La reprise de la croissance spontanée après la distraction dans la physe peut rester discutable. Pourtant, dans un travail de chirurgie expérimentale, de Pablos a montré que la reprise de la croissance physaire est possible car la rupture de la physe siège entre le front d’ossification et la zone de maturation du cartilage de croissance. En outre, l’implantation de fiches ou de broches au niveau de l’étroite épiphyse tibiale a un risque de complications telles que la fracture de l’épiphyse, l’infection articulaire, l’enraidissement du genou. Cette méthode est donc insuffisante chez un enfant jeune, car elle nécessite fréquemment un second geste chirurgical d’égalisation de longueur des membres inférieurs. Ce second geste peut parfois être évité si la distraction a tenu compte de l’inégalité prévisionnelle.

Une autre méthode consiste à assurer une correction et un allongement progressifs simultanés à l’aide d’un fixateur externe, soit de type T de Garches, soit circulaire de type Ilizarov ou TSF après une ostéotomie métaphysaire. La forme précoce de la maladie, chez le jeune enfant, peut être une indication à cette proposition. Clarke a présenté une série de 38 patients d’un âge moyen de 10,6 ans où un allongement et une correction du varus tibial ont été réalisés simultanément. L’angle tibio-fémoral atteint était de -2,3° à -3,9°. Dans ces formes infantiles, il est admis qu’un traitement précoce, avant l’âge de 4 ans, peut diminuer considérablement le taux des récidives de la déformation (46 % avant l’âge de 4 ans contre 94%au delà de 4 ans), le taux des lésions méniscales et ligamentaires, ainsi que les risques arthrosiques à long terme . Après l’âge de 4 ans la correction par un fixateur externe diminue également les risques de récidive des déformations (72%) en comparaison avec les corrections extemporanées (94%).

La nécessité d’une hypercorrection reste controversée. Certains auteurs proposent une hypercorrection, tandis que d’autres souhaitent obtenir une morphologie tibiale considérée comme normale. Pourtant, dans les formes infantiles, les fréquentes récidives surviennent dans un délai de 2 à 6 ans.

Quant aux tentatives de corriger la déformation par une hémiépiphysiodèse, toutes les techniques se révèlent peu efficaces. Les différents auteurs ne trouvent pas de critères fiables, poids, âge, importance de la déformation…, pour prédire et planifier exactement ce traitement.

En ce qui concerne la fibula, les troubles de croissance conduisent parfois à une position haute qui peut justifier une épiphysiodèse proximale préventive [4], voire son abaissement lors de l’allongement et de la correction progressive tibiale.

Une ostéotomie d’élévation du plateau tibial médial est nécessaire lorsque l’angle du plateau médial est supérieur ou égal à 15°.

Dans le cas de notre observation, deux types d’intervention peuvent être proposés : 1. Une première opération consiste à effectuer la correction progressive du genu varum associée à un allongement d’égalisation de longueur grâce à un fixateur externe. De façon à éviter tout risque de récidive du genu varum, une épiphysiodèse de la physe tibiale restante et de la physe fibulaire proximale est proposée, soit dans le même temps, soit secondairement. En raison de l’âge de la patiente (10 ans) et en fonction de sa croissance résiduelle, une nouvelle intervention chirurgicale consistera en une épiphysiodèse complémentaire controlatérale, du genou sain.2. Une alternative à ces gestes multiples consiste à anticiper sur la récidive de la déformation et sur l’inégalité de longueur à venir. En raison de son âge osseux (11 ans) et de sa petite taille (- 1 DS), la croissance prévisible du tibia proximal normal serait de 12 mm. A cause de l’épiphysiodèse tibiale proximale médiale, une angulation maxima pourrait atteindre 12°. Dans ce contexte, il est proposé de réaliser un hyperallongement progressif tibial de + 10 mm associé à une hypercorrection progressive de 7° en valgus tibial et à un abaissement de la fibula. En fonction de la progression de la diminution de l’hypercorrection, une éventuelle épiphysiodèse de la physe tibiale restante sera envisagée ultérieurement. Agissant ainsi, la morphologie finale du tibia sera physiologique. Il est par ailleurs fort probable que l’épiphysiodèse controlatérale pourra être évitée.

Technique chirurgicale de la deuxième optionPour mener à bien la correction du varus et l’allongement du tibia proximal, l’utilisation d’un fixateur circulaire de type Ilizarov ou TSF est notre préférence. Une correction tridimensionnelle est plus facile avec ces types d’appareil. Le fixateur TSF permet facilement la dérotation des fragments de façon progressive, sans avoir à modifier le fixateur lui-même. Un deuxième avantage consiste à pouvoir positionner la charnière virtuelle exactement au niveau du CORA. Il n’est donc pas nécessaire de déterminer la planification complexe du montage externe qui prend en compte la correction des déformations et l’allongement. Par comparaison, le matériel d’Ilizarov nécessiterait la mise en place de charnières au-dessus de l’anneau proximal, ce qui rend le montage encombrant. L’ostéotomie tibiale peut être réalisée en percutané, de façon à respecter les principes de la « méthode d’Ilizarov ». L’ostéotomie de la fibula est utile car elle facilite la rotation progressive des 10° de torsion tibiale médiale. La consolidation de la fibula est précoce car cet os est situé du côté convexe et la consolidation sera précoce. De plus, cette ostéotomie permet l’abaissement de la tête de la fibula.

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« Où on va, papa ? » Ce livre de Jean-Louis Fournier est paru l’été 2008. Si vous ne l’avez pas encore lu, vous en avez au moins entendu parler car c’est un succès éditorial: longtemps en tête des ventes dans les palmarès des libraires, un tirage exceptionnel une traduction en 23 langues, le Prix Fémina décerné en octobre 2008, des chroniques multiples dans la presse. Dire qu’il concerne directement les pédiatres est vrai, parce qu’il est le récit d’un père qui a eu deux enfants « handicapés », mais infiniment réducteur. Nous avons été, l’un et l’autre, marqués par ce livre, dès sa sortie, l’un des plus beaux jamais lus. Comme une évidence, nous souhaitions rencontrer l’auteur de ces pages si particulières : Jean-Louis Fournier a accepté très simplement notre invitation à

déjeuner, à Paris en Mars dernier : un déjeuner entre amis !L’homme est chaleureux, simple et direct, à l’image de son livre.

« Cher Mathieu, Cher Thomas, On n’a pas eu de chance, vous et nous. C’est tombé du Ciel, ça s’appelle une tuile. .. Il y a ceux qui disent : « l’enfant handicapé est un cadeau du ciel . Quand on reçoit ce cadeau on a envie de dire au ciel « ô ! Fallait pas…. »Ainsi commence son livre, qui ne pourra être lu autrement que d’une traite. Jean-Louis Fournier est un « blessé de la vie ». Son père, médecin généraliste à Arras « tutoyait les Byrrh » et en est mort très jeune (lire : Il n’a jamais tué personne mon papa, témoignage affectueux pour cet homme qu’on trouvait trop souvent au bistrot mais qui soignait la misère avec charisme..). JLF a eu deux enfants handicapés, nés avec de la paille dans la tête. J’ai loupé mes enfants comme on rate une mayonnaise ! nous dit-il, alors j’ai voulu transformer mes fils en héros de roman. C’est le seul cadeau que je pouvais leur faire, un livre qu’ils ne peuvent pas lire.Mathieu, l’aîné, mourra après une opération sur sa colonne : « Sa scoliose a augmenté ; une opération sur sa colonne vertébrale doit être tentée. Elle est tentée, il est totalement redressé. Trois jours plus tard il meurt droit. Finalement, l’opération qui devait lui permettre de voir le ciel a réussi. » Thomas, de deux ans son cadet vit dans un centre d’adultes ; il a 45 ans. Et puis naît Marie : « Notre chance s’est appelée Marie. Elle était normale et très jolie. C’était normal, on avait fait deux brouillons avant ! » Par nature, Jean Louis-Fournier cultive le sens de l’humour et de la dérision. Déjà tout petit, dans une école religieuse près d’Arras sa ville natale, il déplace une statue de la Vierge de la cour de récréation jusque sur des toilettes à la turque…parce qu’il ne la trouvait pas jolie ! (lire «J’irai pas en enfer», écrit dans la veine du Petit Nicolas de Goscinny) Il conçoit et réalise un dessin animé : Antivol, l’oiseau qui a le vertige. Cet oiseau « pas comme les autres » est un merveilleux mélange d’imagination, à la façon des Shadocks, et de poésie

L’enfant « pas comme les autres »par Rémi Kohler et Henri Carlioz

Soucieux du bien-être de ses lecteurs, la Gazette va s’efforcer de s’ouvrir le plus régulièrement pos-sible à la Culture Générale. Drôle d’idée pourront penser certains. Si il n’est pas déraisonnable ni prétentieux de penser que nos lecteurs peuvent tirer quelques profits dans leur vie professionnelle des rubriques « classiques » de la Gazette, s’enrichir en s’attardant quelque temps à lire une critique de livre, de pièce de théâtre, de film…, tient de la gageure pour les chirurgiens que nous sommes, orthopédistes de surcroît.C’est pourtant le défi qu’ont accepté de relever Rémi Kohler et Henri Carlioz. Et pour notre premier plongeon dans ce bouillon de culture, ils ont choisi un homme formidable auteur d’un livre extra-ordinaire. Et ça tombe bien, cet écrivain était l’ami de Pierre Desproges à qui la Gazette emprunte cette précieuse réflexion :« La culture, c’est comme un parachute. Quand on n’en a pas, on s’écrase »Alors d’avance merci à Rémi et Henry d’en fournir à ceux de nos lecteurs, sûrement fort peu nom-breux, qui en auraient besoin ! NDLR

«Où on va, papa ?», Prix Fémina 2008

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L’enfant « pas comme les autres »par Rémi Kohler et Henri Carlioz

comme dans le film Le Roi et l’oiseau de Grimaud. C’est le seul truc bien à la télé ! aurait dit Pierre Desproges à Jean-Louis Fournier à propos de cette animation, lorsqu’ils se rencontrent par hasard, sans savoir qu’il en était l’auteur ! De là naîtra une complicité et une amitié sans faille .Vous souvenez-vous de cette série inénarrable du même Desproges, diffusée dans les années 80 sur FR3, « La Minute nécessaire de Monsieur Cyclopède » ? Son réalisateur ? JL Fournier. Etonnant, non ! Il écrit dans son livre, à propos d’une visite de Desproges dans l’établissement pour adultes où était Thomas : « Cette visite l’a beaucoup remué. Il était fasciné par ce monde étrange où des enfants de vingt ans couvrent de baisers leurs ours en peluche… Lui qui adorait l’absurde, il avait trouvé des maîtres. »

A côté de son métier, la télé, pour laquelle il réalise plusieurs documentaires sur la peinture, JL Fournier écrit plus d’une vingtaine de livres à ce jour, tous empreints du même humour, ironique, incisif, voire caustique. Il devient un virtuose de l’aphorisme, façon Pierre Dac, parce que, dit-il, faire rire, c’est le plus court chemin d’un homme à un autre.Ainsi : Vous savez comment on s’aperçoit qu’on est vieux ? Quand, même bronzé, on reste moche !Dans le CV de Dieu, Dieu revient sur terre et se présente à un entretien d’embauche, car il s’ennuie ; il sera recalé ! Ou encore Je vais t’apprendre la politesse, p’tit con, sorte de pastiche du Traité des bonnes manières de la Baronne, et Mon dernier cheveu noir, avec quelques conseils aux anciens jeunes, livre désopilant, recommandé aux « séniors » de plus de 60 ans, agrémenté de recettes pour ne pas vieillir ,…Etre désinvolte, léger, jamais pesant, savoir dire des bêtises, cultiver l’inutile et les roses, la dérision et les potirons, rester curieux et ambitieux.. Vaste programme ! On comprend mieux comment l’auteur, avec une telle histoire personnelle et un tel talent pour l’autodérision, a pu écrire ce livre si particulier. « Où on va, papa ? répète Thomas à l’arrière de la voiture. Au bout de la centième fois cela devient irrésistible : Thomas est le roi du running gag ! »« Où on va, papa ?» est un livre inclassable : pas un roman, comme le proposait son éditeur, ni un récit, pas un documentaire sur les enfants handicapés non plus ; un livre

unique et dérangeant, en apparence, mais débordant de tendresse, exutoire probable d’une longue souffrance. Le meilleur de ses livres, selon son auteur, en tout cas le fruit d’une longue maturation. Il ne faut pas le raconter : ce ne sera jamais aussi bien que le lire ! Il juxtapose de courtes scènes, tendres et cruelles, dans un style concis ; le texte est débarrassé du superflu ; Jean-Louis Fournier insiste sur l’importance de la chute ; jugez-en : « Peur d’avoir un enfant anormal, comme on pense à la fin du monde, quelque chose qui n’arrive qu’une fois. J’ai eu deux fins du monde…… »Cet homme, passionné par la musique - sauf celle de Jean-Michel Jarre nous précise t’il -, la peinture, la poésie, - et les voitures- aurait tellement aimé visiter avec eux des Musées, leur offrir des livres…s’ils avaient été comme les autres.« Le plus beau cadeau que l’on puisse faire à un enfant, c’est de répondre à sa curiosité, lui donner le goût des belles choses. Avec Mathieu et Thomas, je n’ai pas eu cette chance. Il n’y a jamais eu qu’une seule question : où on va, papa ? »Ce livre est souvent cynique, d’un cynisme affectueux pour ses enfants et dur pour lui-même. « Thomas et Mathieu grandissent. J’ai pensé que j’allais leur offrir un grand rasoir coupe chou. On les enfermerait dans la salle de bains et on les laisserait se débrouiller avec leur rasoir… J’ai raconté cela à ma femme pour la faire rire. »On y trouve aussi de la tendresse :« Quand on les met dans les corsets, ils ressemblent à des guerriers romains avec leur cuirasse. Quand on les prend dans les bras, on a l’impression de tenir un robot. Le soir on a besoin d’une clef à molette pour les déshabiller et on retrouve deux petits oiseaux déplumés qui tremblent…. » A-t-on jamais aussi bien décrit la rudesse de nos traitements orthopédiques ?Et puis de la poésie : « Mes petits oiseaux, je suis bien triste de penser que vous ne connaîtrez pas ce qui, pour moi, a fait les plus grands moments de ma vie….Vous ne saurez jamais conjuguer à la première personne du singulier et à l’indicatif du présent le verbe du premier groupe : aimer…. »C’est encore un oiseau, une colombe blanche, qui inspire à l’auteur ce beau passage : « Le monde des oiseaux et des hommes a rarement été en telle harmonie. Entre cervelles d’oiseaux, le courant passe. Saint François d’Assise n’est pas loin, et Giotto, avec ses tableaux pleins d’oiseaux. »

L’auteur était conscient, bien sûr, du risque de froisser certains lecteurs par cet humour froid, au deuxième degré ; d’où ses mises en garde, en forme de justification : « Tu n’as pas honte, Jean-Louis, toi, leur père, de te moquer de deux petits mioches qui ne peuvent même pas se défendre ? Non, ça n’empêche pas les sentiments »« Un père d’enfants handicapés doit avoir une tête d’enterrement. Il faut avoir le physique de l’emploi, c’est une question de savoir vivre. J’ai souvent manqué de savoir-vivre. C’était la seule façon que j’avais trouvée de garder la tête hors de l’eau. » Et plus loin : « Quand on parle des enfants handicapés, on prend un air de circonstance, comme quand on parle d’une catastrophe. Pour une fois je voudrais essayer de parler de vous avec le sourire…. Je n’avais pas envie de me moquer de vous. C’est peut-être de moi que je voulais me moquer. Prouver que j’étais capable de rire de mes misères…. »

Jean-Louis Fournier

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L’enfant « pas comme les autres »par Rémi Kohler et Henri Carlioz

Il nous dira dans la conversation : Vous savez, il faut toujours dédramatiser, parce que les larmes troublent le regard…

En fait, ce qui a frappé Jean-Louis Fournier, c’est le nombre de lettres qu’il a reçues depuis la publication de son livre (notamment de nombreux médecins) ; plus que le succès commercial, ces témoignages sont à ses yeux la vraie justification de ce cadeau fait à ses enfants. Il se souvient en particulier d’une femme qui lui a dit « J’ai connu moi aussi cette situation d’avoir deux enfants handicapés et vous m’avez permis de rire de mon malheur ».

Dans ce livre, on trouve une belle définition du « handicap » que nous, professionnels attentifs à la sémantique, devrions méditer:« Un enfant qui naît, c’est un miracle. Un enfant handicapé, c’est un miracle à l’envers… Je n’aime pas ce mot handicapé. C’est un mot anglais qui voudrait dire « la main dans le chapeau ». Je n’aime pas non plus le mot « anormal ». Qu’est-ce que cela veut dire « normal » ? Je préfère ceux qui sont au dessus, et pourquoi pas, en dessous. Quant je parle de mes enfants, je préfère l’expression « pas comme les autres ». Einstein, Mozart, Michel Ange n’étaient pas comme les autres ! » Il revient encore là-dessus lors de notre conversation : ces enfants pas comme les autres ont toute leur place dans notre société. Que serait-elle si elle n’était faite que d’êtres performants comme nous, de champions olympiques ou de polytechniciens ?

Il a écrit pour eux ce beau poème, inédit, qu’il nous permet de reproduire :

Laissons la parole, pour finir, à Jean-Louis Fournier, dans son dernier chapitre : « …Mes enfants sont indatables. Mathieu est hors d’âge et Thomas doit avoir dans les 100 ans… Quand ils étaient petits, il fallait changer leurs chaussures, prendre chaque année une pointure supérieure. Seuls leurs pieds ont grandi, leur QI n’a pas suivi. Avec le temps il aurait eu plutôt tendance à diminuer. Ils ont fait des progrès à l’envers. Quand on a eu toute sa vie des enfants qui jouent avec des cubes et qui ont un nounours, on reste toujours jeune. On ne sait plus très bien où on en est. Je ne sais plus bien qui je suis, je ne sais plus très bien où j’en suis, je ne sais plus mon âge. J’ai l’impression d’être embarqué dans une grande farce. Je ne suis pas sérieux. Je ne prends rien au sérieux. Je continue à dire des bêtises et à en écrire. » Entre tristesse et sérénité, quelle bouffée d’humanité ! …Avant de se séparer, Jean-Louis nous raconte une anecdote : « Récemment on m’a demandé ce que je préférais, et sur quoi je voulais parler ; que croyez vous que j’ai répondu ? »les autres...Ce fût, en effet, ma réponse. Merci infiniment, Jean-Louis, d’avoir écrit ce livre « extra-ordinaire » ; vous avez vu juste, écrit juste ! Puisse le succès de ce livre, et ce qu’il signifie, vous faire supprimer, lors d’une prochaine édition, cette toute dernière phrase : « Ma route se termine en impasse, ma vie finit en cul-de-sac ».

Je le regarde, il me regardeIl a un air étrange.Il n’est pas beauMoi je me crois beau.Il rit parfois, pour rienIl pleure aussi, pour rien.A quoi pense-t-il ?Pense-t-il ?Mystère.Il semble vouloir me parlerSes mots ne ressemblent à rien

Il dit des bêtisesIl me tend la mainpeut-être qu’il veut que je l’emmène.Il veut m’embrasserJe n’ai pas trop envie,il bave.Il me regarde comme si j’étais le bon Dieu.Il me faire rire, il me fait pleurer.Il a besoin de moiMoi aussi j’ai besoin de lui.

L’enfant pas comme les autres

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ANOMALIES OSSEUSES CONSTITUTIONNELLESG. Genin

Isbn : 978 284023 534 7684 pages2700 images couleurouvrage reliéOctobre 2008

Disponible sur : www.livres-medicaux.com

198 €

L’ouvrage des anomalies osseuses constitutionnelles tire son originalité d’une approche pluridisciplinaire, permettant de rapprocher dans un seul livre les compétences de dif-férents spécialistes : pédiatres, obstétriciens, généticiens, radiologues et orthopédistes pédiatriques. Il s’agit d’un travail de synthèse en accord avec le fonctionnement actuel des centres d’expertise périnatale. Il s’agit du seul ouvrage dans la littérature française et anglosaxone qui permette d’aller au-delà des seules données de la radiologie conven-tionelle, en développant l’importance contribution des autres méthodes d’imagerie, in-cluant l’échographie 3D ou 4D, l’ IRM anténatale, le scanner anté- et post-natal.