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1 Ubi societas ibi jus Université Montpellier Faculté de droit et de science politique Année 2017/2018 : Licence 1 Semestre 1- Groupe B , Pr. S. Cabrillac Introduction au Droit – Plaquette de travaux dirigés Equipe pédagogique : Pierre BORDAIS, Sébastien FUCINI, Laura MARGALL, Alice ROQUES Liste des thèmes séance n° 1 : Réflexion générale sur le droit, p. 3 Première partie : La création du droit : les sources du droit séance n° 2 : La codification, p. 4 séance n° 3 : La hiérarchie des normes et préparation méthodologique à l’analyse de décisions de Justice, p. 5 séance n° 4 : La hiérarchie des normes et première analyse de décisions de Justice, p. 8 séance n° 5 : L’application de la loi dans le temps : illustrations, p. 10 séance n° 6 : La jurisprudence et la coutume, p. 13 Deuxième partie : La réalisation du droit séance n° 7 : Qualification, classification et interprétation, p. 18 séance n° 8 : La charge de la preuve, p. 20 séance n° 9 : Le droit de la preuve : révisions, p. 21 séance n° 10 : Correction du partiel du samedi 2 décembre Annexe : - Méthodologie, p. 22 - Sujets corrigés des partiels d’introduction au droit 2006 et 2001

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Ubi societas ibi jus

Université Montpellier

Faculté de droit et de science politique

Année 2017/2018 : Licence 1 Semestre 1- Groupe B , Pr. S. Cabrillac

Introduction au Droit – Plaquette de

travaux dirigés

Equipe pédagogique : Pierre BORDAIS, Sébastien FUCINI, Laura

MARGALL, Alice ROQUES

Liste des thèmes

séance n° 1 : Réflexion générale sur le droit, p. 3

Première partie : La création du droit : les sources du droit séance n° 2 : La codification, p. 4

séance n° 3 : La hiérarchie des normes et préparation méthodologique à

l’analyse de décisions de Justice, p. 5

séance n° 4 : La hiérarchie des normes et première analyse de décisions de

Justice, p. 8

séance n° 5 : L’application de la loi dans le temps : illustrations, p. 10

séance n° 6 : La jurisprudence et la coutume, p. 13

Deuxième partie : La réalisation du droit séance n° 7 : Qualification, classification et interprétation, p. 18 séance n° 8 : La charge de la preuve, p. 20

séance n° 9 : Le droit de la preuve : révisions, p. 21

séance n° 10 : Correction du partiel du samedi 2 décembre

Annexe :

- Méthodologie, p. 22

- Sujets corrigés des partiels d’introduction au droit 2006 et 2001

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Déroulement des séances et notation

I) Les 5 règles d’or

Règle n° 1 : La présence en séance est obligatoire (seule les absences

justifiées par un certificat médical seront admises).

Règle n°2 : Toutes les séances doivent faire l’objet d’une préparation

manuscrite (AUCUN document tapé ou envoyé par mail ne

sera admis). Les exercices à réaliser sont indiqués dans chaque séance.

Règle n°3 : Les ordinateurs portables sont interdits durant les séances de

travaux dirigés. Ils doivent rester dans vos sacs, de même que les

téléphones portables.

Règle n° 4 : Les changements d’horaire entre séances de travaux dirigés

ne sont pas autorisés. Une exception sera faite en justifiant d’un contrat de

travail dont les horaires sont incompatibles avec la séance initialement

attribuée.

Règle n° 5 : Il est impératif de venir en travaux dirigés avec la plaquette et

à partir de la séance n° 2 un code civil.

II) Engagement de l’équipe

La correction de toutes les séances sera diffusée sur l’ENT, ce qui

vous permettra de vous concentrer sur la compréhension lors des séances

et de ne prendre en note que l’essentiel.

III) Notation

La note de travaux dirigés sera établie à l’aide de trois notes :

- Une interrogation écrite lors de la séance n° 3 portant sur des définitions

- Une préparation relevée aléatoirement par votre chargé de travaux dirigés

- Un partiel écrit en trois heures

Les coefficients sont les suivants : (interrogation/10 + préparation à la maison

/10) + partiel/20 = total/2

Cette note globale sur 20 pourra être augmentée ou diminuée jusqu’à 2 points/20

par votre chargé de TD pour tenir compte de votre participation et du fascicule

rendu lors de la séance n°5.

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Séance n° 1 : Réflexion générale sur le droit

Exercice n° 1 : commentaire de texte

En suivant la méthode exposée dans l’annexe méthodologique, établissez le plan détaillé et

l’introduction du commentaire du texte suivant (ne pas rédiger le commentaire lui-même) :

« Le droit n’aurait ni de sens ni d’utilité dans le cas d’ailleurs théorique de l’homme

isolé, de Robinson dans une île inconnue. Il apparaît au contraire dès qu’il y a des hommes

vivant en société, Ubi societas, ibi jus1. Même les thèses les plus anarchistes ne peuvent se

dispenser d’un minimum de règles, ne fût-ce que celle qui reconnaîtrait effet aux conventions

et associations librement formées. Même les conceptions les plus autoritaires et les plus

tyranniques, ne peuvent se passer de règles pour manier le corps social et obtenir l’obéissance.

Dans toute société humaine l’organisation de la coexistence et de la vie en commun suppose

que des règles déterminent ce qui est permis ou défendu, ce qui est obligatoire et ce qui ne

l’est pas, en bref les contraintes et les libertés que la vie sociale comporte.

Toutefois les règles juridiques ne sont pas les seules qui tendent à régir la vie de

l’homme, en particulier dans la société. L’homme dans les diverses circonstances de sa vie

rencontre des règles de conduite qui avec une précision et une force variable tendent à régir

son comportement et à lui indiquer ce qui doit être. Par exemple, dans le groupe familial dont

il fait partie, existent certaines règles de vie familiale. La bienséance et les bons usages

sociaux, la morale, la religion interviennent aussi, tendant à imposer à l’homme leurs

préceptes dans les circonstances les plus variées de son existence et en particulier dans ses

rapports avec ses semblables. Il apparaît donc qu’il ne suffit pas de caractériser le droit

comme règle de vie sociale. »

G. Marty et P. Raynaud, Droit civil, Tome I : Introduction générale à l’étude du droit, Sirey,

1972, n° 2 et 3.

1 Ubi societas, ibi jus : Pas de société sans droit.

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Séance n° 2 : La codification

Exercice n° 1 : commentaire de texte

Etablissez le plan détaillé et l’introduction du commentaire de la définition du Code civil

donnée par Jean-Etienne-Marie Portalis :

« C’est un corps de lois destinées à diriger et à fixer les relations de sociabilité, de famille et

d’intérêt qu’ont entre eux des hommes qui appartiennent à la même cité . »

Cité par A. Fenet, Recueil complet des travaux préparatoires du Code civil, Librairie Videcoq,

1836, t. I, p. 464.

Pour trouver les éléments concernant l’auteur, allez consulter à la salle de lecture : Anthologie

de la pensée juridique, P. Malaurie, éditions Cujas

Exercice n° 2 : manipulation d’une édition du Code civil

1) Utilisation de l’index

Déterminez le texte applicable aux questions suivantes :

- pouvez-vous épouser votre tante ou votre oncle ?

- votre voisin vous permet de faire des fouilles sur son terrain, vous y découvrez un

coffre rempli de pièces anciennes. Qui en est le propriétaire ? - quelle est la définition légale de l’usufruit ?

2) Utilisation des tables

Dans votre édition du Code civil trouvez :

- l’article 7 de la loi du 30 ventôse an XII

- l’article 1er

de la loi du 1er

juillet 1901 relative au contrat d’association Combien existe-t-il de modes d’acquisition de la nationalité française ?

3) Utilisation des annotations

* la date des textes normatifs

De quand datent :

- le livre quatrième du code civil ?

- les dispositions instaurant le Pacs ? - l’alinéa 1

er de l’article 16-4 du Code civil ? l’alinéa 2 du même texte ?

** Les références bibliographiques Trouvez des références doctrinales sur le Pacs.

*** La jurisprudence

A quelle date apprécie-t-on l’intérêt légitime nécessaire au changement de prénom ?

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Séance n° 3 : La hiérarchie des normes

Exercice à préparer : travail sur la hiérarchie des textes

1) Déterminez la nature au regard de la hiérarchie des normes des documents n° 1 à 3.

2) Placez ces documents sur le schéma de la pyramide des normes

3) En tenant compte des qualifications effectuées, déterminez si le décret pourrait

contenir l’article 2 suivant « Le greffier peut recevoir un pacte conclu par un

partenaire mineur, il doit alors apposer une mention spéciale sur le pacte. » ?

Justifiez votre réponse

4) Si le document n° 3 précisait « dans ces cas-là, les partenaires peuvent justifier de

leur identité par un document délivré par une mutuelle ou une société de téléphonie

mobile », un greffier serait-il tenu de tenir compte de tels documents ?

Document n° 1

Décret n°2006-1806 du 23 décembre 2006 relatif à la déclaration, la modification, la

dissolution et la publicité du pacte civil de solidarité.

Article 1

Le greffier du tribunal d'instance dans le ressort duquel les partenaires d'un pacte civil de

solidarité fixent leur résidence commune enregistre leur déclaration conjointe. A cette fin, les

partenaires produisent l'original de la convention, les pièces d'état civil attestant l'absence

d'empêchement au regard des articles 515-1 et 515-2 du code civil, et, pour le partenaire de

nationalité étrangère né à l'étranger, le certificat délivré par le greffier du tribunal de grande

instance de Paris attestant qu'il n'est pas déjà lié à une autre personne par un pacte civil de

solidarité. Les partenaires produisent, le cas échéant, les pièces permettant la vérification du

respect des dispositions prévues aux articles 461 et 462 du code civil.

Les partenaires justifient de leur identité par un document officiel délivré par une

administration publique comportant leur nom, leur prénom, leur date et leur lieu de naissance,

leur photographie et leur signature ainsi que l'identification de l'autorité qui a délivré le

document, la date et le lieu de délivrance.

Le greffier du tribunal d'instance qui a enregistré la déclaration conjointe de conclusion d'un

pacte civil de solidarité vise et date l'original de la convention qu'il restitue aux partenaires.

Lorsqu'il constate que les conditions d'enregistrement de la déclaration ne sont pas remplies, il

prend une décision motivée d'irrecevabilité. Cette décision fait l'objet d'un enregistrement.

Les contestations portant sur l'enregistrement ou le refus d'enregistrement d'un pacte civil de

solidarité, de sa modification ou de sa dissolution sont soumises au président du tribunal de

grande instance, ou à son délégué, statuant en la forme des référés. Les contestations relatives

aux décisions d'irrecevabilité prises par l'autorité diplomatique ou consulaire sont portées

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devant le président du tribunal de grande instance de Paris ou son délégué statuant en la forme

des référés.

Document n° 2

Article 515-1 du Code civil

Un pacte civil de solidarité est un contrat conclu par deux personnes physiques majeures, de

sexe différent ou de même sexe, pour organiser leur vie commune.

Document n° 3

11ème législature

Question N° :

52962 de M. Dupilet Dominique ( Socialiste - Pas-de-Calais ) QE

Ministère

interrogé : justice

Ministère

attributaire : justice

Question publiée au JO le : 30/10/2000 page : 6202

Réponse publiée au JO le : 08/01/2001 page : 199

Rubrique : famille

Tête d'analyse : PACS

Analyse : enregistrement. formalités administratives

Texte de la

QUESTION :

M. Dominique Dupilet attire l'attention de Mme la garde des sceaux,

ministre de la justice, sur les modalités de conclusion d'un pacte civil de

solidarité. Il lui signale le cas d'une personne qui se trouve être dans

l'incapacité physique de se déplacer avec son futur compagnon ou future

compagne au greffe du tribunal d'instance aux fins de conclure ce pacte. Il

lui demande s'il n'est pas envisageable d'assouplir ce dispositif au regard

de ce cas particulier.

Texte de la

REPONSE :

La garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable

parlementaire que par circulaire Jus C 00200 66 C du 11 octobre 2000 des

instructions ont été données aux greffes des tribunaux d'instance afin de

permettre le déplacement du greffier au domicile de personnes désirant

conclure un pacte civil de solidarité mais se trouvant dans l'impossibilité

physique de se déplacer au tribunal d'instance de leur domicile. Le

déplacement du greffier aux fins d'enregistrement d'un pacte civil de

solidarité peut intervenir en cas d'empêchement durable pour la personne

de se déplacer, revêtant un cas de force majeure. L'impossibilité absolue

pour un partenaire de se déplacer doit être justifié par tout document utile

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tel un certificat médical en cas d'hospitalisation ou d'immobilisation au

domicile pour une affection pathologique invalidante ou à issue fatale. Si

l'hospitalisation ou l'immobilisation a lieu dans le ressort du greffe

compétent, le greffier se déplace auprès du partenaire empêché, en

présence de l'autre partenaire pour constater leur volonté commune de

conclure un pacte civil de solidarité. La procédure d'enregistrement se

poursuit aussitôt au greffe en présence du partenaire non empêché. Si

l'hospitalisation ou l'immobilisation a lieu hors du ressort du greffe du

tribunal d'instance où les intéressés entendent fixer leur résidence

commune, le greffier du tribunal d'instance du lieu de l'immobilisation se

déplace pour constater la volonté commune des partenaires de conclure un

pacte civil de solidarité. Il dresse un procès-verbal et transmet ce dernier

au greffe du tribunal d'instance du lieu où les partenaires entendent fixer

leur résidence commune, lequel effectue les formalités d'enregistrement du

pacte civil de solidarité.

Exercice n°2 : Préparation à la lecture de décision de Justice

1) Lire, en annexe de ce document p. 22, les indications méthodologiques « l’analyse d’une

décision de Justice » sauf le c) La valeur.

2) Rechercher la définition des notions nouvelles utilisées par cette fiche méthodologique (ces

définitions pourront faire l’objet de l’interrogation).

3) Lire les exemples de partiels corrigés utilisant cette méthodologie

4) Repérer tous les points qui vous posent des difficultés dans cette méthodologie pour

demander un éclaircissement à votre chargé de travaux dirigés.

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Séance n° 4 : La hiérarchie des normes

Exercice : Effectuez l’analyse de la décision suivante selon la méthodologie proposée en

annexe

Cour de Cassation

Chambre MIXTE

Audience publique du 24 mai 1975 REJET

N° de pourvoi : 73-13556 Publié au bulletin

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

SUR LE PREMIER MOYEN PRIS EN SES DEUX BRANCHES :

ATTENDU QU'IL RESULTE DES ENONCIATIONS DE L'ARRET DEFERE (PARIS, 7

JUILLET 1973) QUE, DU 5 JANVIER 1967 AU 5 JUILLET 1971, LA SOCIETE CAFES

JACQUES VABRE (SOCIETE VABRE) A IMPORTE DES PAYS-BAS, ETAT MEMBRE

DE LA COMMUNAUTE ECONOMIQUE EUROPEENNE, CERTAINES QUANTITES DE

CAFE SOLUBLE EN VUE DE LEUR MISE A LA CONSOMMATION EN FRANCE; QUE

LE DEDOUANEMENT DE CES MARCHANDISES A ETE OPERE PAR LA SOCIETE J.

WIEGEL ET C. (SOCIETE WEIGEL), COMMISSIONNAIRE EN DOUANE; QU'A

L'OCCASION DE CHACUNE DE CES IMPORTATIONS, LA SOCIETE WEIGEL A

PAYE A L'ADMINISTRATION DES DOUANES LA TAXE INTERIEURE DE

CONSOMMATION PREVUE, POUR CES MARCHANDISES, PAR LA POSITION EX

21-02 DU TABLEAU A DE L'ARTICLE 265 DU CODE DES DOUANES; QUE,

PRETENDANT QU'EN VIOLATION DE L'ARTICLE 95 DU TRAITE DU 25 MARS 1957

INSTITUANT LA COMMUNAUTE ECONOMIQUE EUROPEENNE, LESDITES

MARCHANDISES AVAIENT AINSI SUBI UNE IMPOSITION SUPERIEURE A CELLE

QUI ETAIT APPLIQUEE AUX CAFES SOLUBLES FABRIQUES EN FRANCE A

PARTIR DU CAFE VERT EN VUE DE LEUR CONSOMMATION DANS CE PAYS, LES

DEUX SOCIETES ONT ASSIGNE L'ADMINISTRATION EN VUE D'OBTENIR, POUR

LA SOCIETE WIEGEL, LA RESTITUTION DU MONTANT DES TAXES PERCUES ET,

POUR LA SOCIETE VABRE, L'INDEMNISATION DU PREJUDICE QU'ELLE

PRETENDAIT AVOIR SUBI DU FAIT DE LA PRIVATION DES FONDS VERSES AU

TITRE DE LADITE TAXE;

(…)

SUR LE DEUXIEME MOYEN :

ATTENDU QU'IL EST DE PLUS FAIT GRIEF A L'ARRET D'AVOIR DECLARE

ILLEGALE LA TAXE INTERIEURE DE CONSOMMATION PREVUE PAR L'ARTICLE

265 DU CODE DES DOUANES PAR SUITE DE SON INCOMPATIBILITE AVEC LES

DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 95 DU TRAITE DU 24 MARS 1957, AU MOTIF QUE

CELUI-CI, EN VERTU DE L'ARTICLE 55 DE LA CONSTITUTION, A UNE AUTORITE

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SUPERIEURE A CELLE DE LA LOI INTERNE, MEME POSTERIEURE, ALORS,

SELON LE POURVOI, QUE S'IL APPARTIENT AU JUGE FISCAL.D'APPRECIER LA

LEGALITE DES TEXTES REGLEMENTAIRES INSTITUANT UN IMPOT LITIGIEUX,

IL NE SAURAIT CEPENDANT, SANS EXCEDER SES POUVOIRS, ECARTER

L'APPLICATION D'UNE LOI INTERNE SOUS PRETEXTE QU'ELLE REVETIRAIT UN

CARACTERE INCONSTITUTIONNEL; QUE L'ENSEMBLE DES DISPOSITIONS DE

L'ARTICLE 265 DU CODE DES DOUANES A ETE EDICTE PAR LA LOI DU 14

DECEMBRE 1966 QUI LEUR A CONFERE L'AUTORITE ABSOLUE QUI S'ATTACHE

AUX DISPOSITIONS LEGISLATIVES ET QUI S'IMPOSE A TOUTE JURIDICTION

FRANCAISE;

MAIS ATTENDU QUE LE TRAITE DU 25 MARS 1957, QUI, EN VERTU DE

L'ARTICLE SUSVISE DE LA CONSTITUTION, A UNE AUTORITE SUPERIEURE A

CELLE DES LOIS, INSTITUE UN ORDRE JURIDIQUE PROPRE INTEGRE A CELUI

DES ETATS MEMBRES; QU'EN RAISON DE CETTE SPECIFICITE, L'ORDRE

JURIDIQUE QU'IL A CREE EST DIRECTEMENT APPLICABLE AUX

RESSORTISSANTS DE CES ETATS ET S'IMPOSE A LEURS JURIDICTIONS; QUE,

DES LORS, C'EST A BON DROIT, ET SANS EXCEDER SES POUVOIRS, QUE LA

COUR D'APPEL A DECIDE QUE L'ARTICLE 95 DU TRAITE DEVAIT ETRE

APPLIQUE EN L'ESPECE, A L'EXCLUSION DE L'ARTICLE 265 DU CODE DES

DOUANES, BIEN QUE CE DERNIER TEXTE FUT POSTERIEUR; D'OU IL SUIT QUE

LE MOYEN EST MAL.FONDE;

(…)

PAR CES MOTIFS :

REJETTE LE POURVOI FORME CONTRE L'ARRET RENDU LE 7 JUILLET 1973 PAR

LA COUR D'APPEL DE PARIS (1. CHAMBRE).

Pour information :

articles 54 et 55 de la Constitution française du 4 octobre 1958 :

Article 54

Si le Conseil constitutionnel saisi par le président de la République, par le Premier

ministre, par le président de l’une ou de l’autre assemblée ou par soixante députés ou soixante

sénateurs, a déclaré qu’un engagement international comporte une clause contraire à la

Constitution, l’autorisation de ratifier ou d’approuver l’engagement international en cause ne

peut intervenir qu’après révision de la Constitution.

Article 55

Les traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur publication,

une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve, pour chaque accord ou traité, de son

application par l’autre partie.

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Séance n° 5 : L’application de la loi dans le temps : illustrations

Exercice n° 1 : application de dispositions transitoires

La loi n° 2002-304 du 4 mars 2002 a modifié les règles de dévolution du nom, ces

modifications ont été insérées à l’article 311-21 du code civil. Etablissez une frise

chronologique retraçant l’entrée en vigueur des dispositions de cet article en application des

dispositions transitoires de la loi :

Publication au JORF du 5 mars 2002

Loi n°2002-304 du 4 mars 2002

Loi relative au nom de famille (1)

NOR:JUSX0104677L

version consolidée au 19 juin 2003 - version JO initiale

Article 23

Modifié par Loi n°2003-516 du 18 juin 2003 art. 11 (JORF 19 juin 2003 en

vigueur le 1er janvier 2005).

La présente loi n'est pas applicable aux enfants nés avant la date de son entrée en vigueur. Toutefois,

dans le délai de dix-huit mois suivant cette date, les parents exerçant l'autorité parentale peuvent

demander par déclaration conjointe à l'officier de l'état civil, au bénéfice de l'aîné des enfants

communs lorsque celui-ci a moins de treize ans au 1er septembre 2003 ou à la date de la déclaration,

l'adjonction en deuxième position du nom du parent qui ne lui a pas transmis le sien, dans la limite

d'un seul nom de famille. Le nom ainsi attribué est dévolu à l'ensemble des enfants communs, nés et à

naître.

Dans le cas où cette faculté est exercée par les parents d'un enfant âgé de plus de treize ans, le

consentement de ce dernier est nécessaire.

Cette faculté ne peut être exercée qu'une seule fois.

Article 25

Modifié par Loi n°2003-516 du 18 juin 2003 art. 13 (JORF 19 juin 2003 en

vigueur le 1er janvier 2005).

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11

L'entrée en vigueur de la présente loi est fixée au 1er janvier 2005.

Les dispositions de la présente loi sont applicables à Mayotte à compter du premier jour de la sixième

année de la promulgation de la présente loi.

Exercice n° 2 : Etablissez l’analyse de la décision suivante :

Cour de Cassation

Chambre civile 1

Audience publique du 14 juin 2007 Cassation

N° de pourvoi : 06-15512 Publié au bulletin

Président : M. ANCEL

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :

Vu l'article 2 du code civil ;

Attendu que nul ne peut être condamné à une peine disciplinaire qui n'était pas encourue à la

date à laquelle a été commise l'infraction poursuivie ;

Attendu que le 23 décembre 2004, des poursuites disciplinaires ont été engagées contre M.

X..., greffier de tribunal de commerce, pour des faits remontant aux années 2000 à 2002 ;

Attendu que pour condamner l'intéressé à la peine de l'interdiction temporaire prévue à

l'article L. 822-2 du code de l'organisation judiciaire issu de la loi du 11 février 2004, l'arrêt

attaqué retient que la loi nouvelle était applicable aux poursuites engagées postérieurement à

son entrée en vigueur ;

Qu'en se prononçant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 29 mars 2006, entre les

parties, par la cour d'appel de Besançon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans

l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour

d'appel de Besançon, autrement composée ;

Laisse les dépens à la charge du Trésor public ;

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Exercice non corrigé en séance (sa rédaction ne sera pas exigée). Pour faire vivre vos

connaissances et vos compétences, voici un exemple de cas pratique. Vous devez

systématiquement vous fabriquer de tels entraînements.

Votre voisin Lucas Duculot, apprenant avec plaisir que vous entreprenez des études

juridiques, en profite pour vous interroger gratuitement. Devant la multiplication des

réformes, il se demande quelles peuvent être les conséquences sur sa situation de l’adoption

de lois nouvelles.

Par exemple, il a entendu dire qu’une loi pourrait être votée pour éviter que les

banques françaises reportent, sur les particuliers, les difficultés financières qu’elles

rencontrent en raison des importantes spéculations financières qu’elles avaient effectuées sur

le marché immobilier de Saint Martin, anéanti par les intempéries de septembre. Or, si une loi

sur le crédit étudiant est adoptée en décembre (limitant à 2,8 % les intérêts des emprunts

finançant les études universitaires), il se demande si ses dispositions seront applicables au

crédit qu’il a contracté pour venir faire ses études à Montpellier (crédit souscrit en septembre

à 2,95 %)?

De même, il a entendu parler d’un projet d’offrir un statut juridique aux beaux-parents

(c’est-à-dire au conjoint du père ou de la mère qui n’est pas le parent biologique de l’enfant) ?

Si cette loi est adoptée lui imposera-t-elle des obligations nouvelles ou lui accordera-t-elle

plus de droit (sachant que son père s’est remariée avec Elisée Unetereur, à la fois

fantastiquement riche, mais également terriblement directive à son égard) ?

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Séance n° 6 : La jurisprudence et la coutume

« Il y a une science pour le législateur, comme il y en a une pour les magistrats ; et l’une ne

ressemble pas à l’autre. La science du législateur consiste à trouver dans chaque matière, les

principes les plus favorables au bien commun ; la science du magistrat est de mettre ses

principes en action, de les ramifier, de les étendre, par une application sage et raisonnée, aux

hypothèses privées, d’étudier l’esprit de la loi quand la lettre tue. Il faut que le législateur

veille sur la jurisprudence : il peut être éclairé par elle, et il peut, de son côté la corriger »

J. E. M. Portalis, Discours préliminaire du premier projet de Code civil, 1801, red.

Massenet, Conflictuences, Bordeaux, 2004, p. 23.

« Qu’est-ce que la coutume, sinon les règles directement posées par la nation, non écrites,

c’est-à-dire écrites dans la pensée et la conscience des individus qui composent le groupe

social, connues pour cette raison sans être publiées, obéies sans être imposées ? Qu’est-ce

qu’une coutume, sinon la conscience et la volonté nationale ? »

R. Capitant, La coutume constitutionnelle, 1929 rééd : RDP 1979, 968.

Exercice n°1 : Etablissez l’analyse de la décision suivante selon la grille méthodologique de

l’annexe

Cour de cassation

Assemblée plénière

Audience publique du vendredi 24 janvier 2003

N° de pourvoi: 01-41757

Publié au bulletin Rejet

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, siégeant en ASSEMBLÉE PLÉNIÈRE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par :

1°/ Mme Evelyne X..., demeurant..., 2°/ Mme Lysiane Y..., demeurant...,

3°/ Mme Véronique Z..., demeurant...,

en cassation d'un arrêt rendu le 1er février 2001 par la cour d'appel d'Orléans (Chambre

sociale), au profit de l'association Promotion des handicapés dans le Loiret (APHL),

défenderesse à la cassation ;

La SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez s'est constituée en intervention en défense pour :

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1°/ la Fédération des syndicats nationaux d'employeurs des établissements et services pour

personnes inadaptées et handicapées,

2°/ le Syndicat national des associations pour la sauvegarde de l'enfant à l'adulte (SNASEA),

La Chambre sociale a, par arrêt du 23 mai 2002, décidé le renvoi de l'affaire devant

l'Assemblée plénière ;

Les demanderesses invoquent, devant l'Assemblée plénière, le moyen de cassation annexé au

présent arrêt ;

Ce moyen unique a été formulé dans un mémoire déposé au greffe de la Cour de Cassation

par la SCP Masse-Dessen, Georges et Thouvenin, avocat de Mmes X..., Y..., Z;

Donne acte à la Fédération des syndicats nationaux d'employeurs des établissements et

services pour personnes inadaptées et handicapées, au Syndicat national des associations pour

la sauvegarde de l'enfant à l'adulte, de leur intervention ;

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Orléans, 1er février 2001), que l'Association Promotion des

handicapés dans le Loiret (APHL), au sein de laquelle s'applique la Convention collective

nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars

1966, gère deux foyers qui accueillent des adultes handicapés ; que Mme X... et quatre autres

salariées de cette association, employées en qualité d'éducatrices, assurent une permanence de

nuit dans une chambre dite de " veille " mise à leur disposition dans chaque établissement

pour leur permettre de répondre aux sollicitations des pensionnaires et à tout incident ; que ces

heures de surveillance nocturne leur sont payées conformément à l'article 11 de l'annexe 3 de

la Convention collective prévoyant que les neuf premières heures sont assimilées à trois

heures de travail éducatif et qu'entre neuf heures et douze heures, chaque heure est assimilée à

une demi-heure de travail éducatif ; que les salariées, après avoir saisi, le 3 août 1998, la

juridiction prud'homale en réclamant des rappels de salaire, les indemnités de congés payés

afférentes et des dommages-intérêts, se sont prévalues, en cause d'appel, d'une jurisprudence

nouvelle de la Cour de cassation qui a décidé que les heures de surveillance nocturne

constituaient un temps de travail effectif et ne pouvaient être rémunérées selon le régime

d'équivalence institué par la Convention collective applicable ;

Attendu que les salariées font grief à l'arrêt d'avoir rejeté leurs demandes, alors, selon le

moyen :

1°) que le principe de prééminence du droit et la notion de procès équitable, résultant de

l'article 6. 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés

fondamentales, s'opposent, sauf pour d'impérieux motifs d'intérêt général, à l'ingérence du

pouvoir législatif dans l'Administration de la Justice afin d'influer sur le dénouement

judiciaire d'un litige ; qu'il était acquis aux débats que l'Association était chargée d'une

mission de service public et placée sous le contrôle d'une autorité publique qui en assure le

financement par le paiement d'un prix de journée, que le procès l'opposant au salarié était en

cours lors de l'entrée en vigueur de l'article 29 de la loi du 19 janvier 2000 et que ce texte,

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dont il n'est pas établi qu'un impérieux motif d'intérêt général le justifiait, remettait en cause,

au profit de l'Association, une jurisprudence favorable au salarié en matière d'heures

d'équivalence ; qu'au vu de ces constatations, la cour d'appel ne pouvait, sans violer les

dispositions de l'article 6. 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de

l'homme et des libertés fondamentales, refuser, ainsi qu'il lui était demandé, d'écarter l'article

29 de la loi du 19 janvier 2000 pour juger le litige dont elle était saisie ;

2°) qu'il résulte des articles L. 212-2 et L. 212-4 du Code du travail, dans leur rédaction alors

en vigueur, qu'un horaire d'équivalence peut être institué soit par un décret, soit par une

convention de branche ou un accord professionnel ou interprofessionnel étendu, soit par une

convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement soumis aux dispositions de l'article L.

132-26 du Code du travail ; qu'une convention collective agréée ne remplit pas ces conditions

; qu'en se fondant, par suite, sur l'institution d'un temps d'équivalence par la seule Convention

collective nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées

du 15 mars 1966, la cour d'appel a violé les dispositions susvisées ;

3°) qu'il résulte des constatations de l'arrêt attaqué que les salariées intéressées effectuaient

des heures de présence de nuit dans une chambre spécialement mise à leur disposition dans

l'enceinte du foyer afin d'être en mesure de répondre à tout moment, en cas de besoin, aux

sollicitations des personnes handicapées, et que, s'il y avait des temps d'inaction entre les

interventions, ils devaient être considérés par ailleurs comme des temps de travail effectif ;

qu'il s'en déduisait nécessairement qu'il s'agissait d'un temps pendant lequel les salariées

étaient tenues de rester en permanence à la disposition de l'employeur pour les besoins de

l'entreprise, de sorte que ces heures de garde de nuit constituaient un temps de travail effectif

qui devait être rémunéré comme tel ; que de ce chef, la cour d'appel a encore violé l'article L.

212-4 du Code du travail ;

Mais attendu que si le législateur peut adopter, en matière civile, des dispositions rétroactives,

le principe de prééminence du droit et la notion de procès équitable consacrés par l'article 6 de

la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales

s'opposent, sauf pour d'impérieux motifs d'intérêt général, à l'ingérence du pouvoir législatif

dans l'administration de la Justice afin d'influer sur le dénouement judiciaire des litiges ;

Et attendu qu'obéit à d'impérieux motifs d'intérêt général l'intervention du législateur destinée

à aménager les effets d'une jurisprudence nouvelle de nature à compromettre la pérennité du

service public de la santé et de la protection sociale auquel participent les établissements pour

personnes inadaptées et handicapées ; que dès lors, la cour d'appel, en faisant application de

l'article 29 de la loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000 au présent litige, a légalement justifié sa

décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Exercice n° 2: après une lecture attentive des trois documents suivants, indiquez le rôle joué

par la coutume dans chacune de ces hypothèses et déterminer la nature de la coutume dans les

documents 1 et 3.

Attention il n’est pas demandé de faire l’analyse de ces décisions de justice

Document n° 1

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Cour de cassation, chambre civile, Audience publique du jeudi 18 juillet 1929

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

CASSATION, sur le pourvoi du sieur X... et autres, d'un arrêt rendu, le 28 décembre 1923,

par la cour d'appel de paris, au profit des consorts Z....

LA COUR,

Vu l'article 1107, par. 2, du Code civil ;

Attendu qu'aux termes de cette disposition, des règles particulières aux transactions

commerciales sont établies par les lois relatives au commerce ;

Attendu qu'il résulte de la décision attaquée que, suivant conventions du 20 novembre 1916,

Renoux et Sargé, négociants en bois, se sont engagés à livrer à X..., également négociant en

bois, dix mille mètres cubes de bois de mines, dans un délai de trois ans, avec un minimum

annuel de fournitures de deux mille cinq cents mètres cubes ;

Que, suivant lettre du 20 novembre 1917, Delaval, Van den Heyden et Huet, autres négociants

en bois, se sont engagés, vis-à-vis du même X..., à prendre la suite du contrat passé entre lui et

Renoux et Sargé ;

Attendu que le marché n'ayant été exécuté qu'à concurrence de quatre-vingt-quatre mètres

cubes, X... a, par exploits des 13 et 17 février 1919 et 5 avril 1919 et 5 avril 1919, assigné,

devant le tribunal de commerce de la Seine, Renoux, Sargé, Delaval, Van den Heyden et

Huet, à l'effet de voir prononcer à leurs torts et griefs la résolution des conventions du 20

novembre 1916 et de s'entendre condamner solidairement à 56954 francs de dommages-

intérêts ;

Attendu que le tribunal de commerce ayant, par jugement du 24 avril 1920, résilié le marché

et condamné solidairement les cinq défendeurs à 25000 francs de dommages-intérêts envers

X..., Renoux et Sargé seuls ont interjeté appel de cette décision, tant contre leurs codéfendeurs

que contre X... et, que, devant la cour, ce dernier a conclu à la confirmation du jugement

condamnant Renoux et Sargé, solidairement avec leurs codéfendeurs ;

Attendu que la cour de Paris après avoir déclaré irrecevable à l'égard de Delaval et de Huet

l'appel formé par Renoux et Sargé, a, par arrêt du 28 décembre 1923, confirmé le jugement

sous réserve "que la solidarité ne se présumant pas il n'y avait lieu qu'à condamnation

conjointe des vendeurs originaires et cessionnaires" ;

Mais attendu que, s'il en est ainsi aux termes de l'article 1202 du Code civil, ce texte demeure

sans application en matière commerciale, ou à défaut de convention contraire ou de

circonstances relevées par les juges du fond la solidarité entre débiteurs est de règle ;

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D'où il suit qu'en refusant d'appliquer à une obligation commerciale le principe de la solidarité

pour un motif tiré d'une disposition du droit civil étrangère à cette matière, l'arrêt attaqué a

faussement appliqué et par conséquent violé les textes visés au moyen ;

Par ces motifs ;

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a décidé qu'il n'y avait lieu à condamnation

conjointe des vendeurs originaires et cessionnaires.

Document n° 2 :

Cass. com., 10 janv. 1995 ; SARL Invitance c/ Sté Crédit du Nord.

LA COUR ; (...)

Attendu, selon l'arrêt confirmatif critiqué, que le Crédit du Nord a clôturé le compte courant

de la société Invitance, à laquelle il avait consenti un découvert pendant plusieurs années ;

qu'un litige est né entre les parties au sujet (…) des modalités de la fixation du taux des

intérêts (…) et de la durée de l'année prise en considération pour le calcul de la dette

d'intérêts ; que (…) la cour d'appel a désigné un expert et dit que celui-ci devrait calculer, à

partir du solde du compte de la société Invitance au 10 septembre 1985, les découverts

successifs jusqu'à la clôture du compte en se conformant aux usages bancaires relatifs,

notamment à la capitalisation trimestrielle des intérêts, à l'année bancaire de trois cent

soixante jours (…)

( …) Vu l'article 1er du décret du 4 septembre 1985 relatif au calcul du taux effectif global

Attendu que, pour décider que l'expert qu'il désignait devrait tenir compte de l'usage bancaire

relatif à l'année de trois cent soixante jours pour calculer, à partir du solde du compte de la

société Invitance au 10 septembre 1985, les découverts successifs jusqu'à la clôture du

compte, l'arrêt retient que le calcul des intérêts doit être fait sur trois cent soixante jours et non

trois cent soixante-cinq jours, l'année bancaire n'étant que de trois cent soixante jours,

conformément à un usage qui trouve son origine en Lombardie, au Moyen-Âge, en raison de

son caractère pratique en ce que le chiffre de trois cent soixante, à la différence de celui de

trois cent soixante-cinq, est divisible par 12, 6, 4 et 2, ce qui correspond au mois, à deux mois,

au trimestre et au semestre, (…)

Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'il résulte du texte susvisé que le taux annuel de l'intérêt

doit être déterminé par référence à l'année civile, laquelle comporte trois cent soixante-cinq ou

trois cent soixante-six jours, la cour d'appel a violé ce texte.

Par ces motifs et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les deuxième et troisième branches du

premier moyen :Casse et annule, mais seulement en ce qu'il a décidé que l'expert qu'il

désignait devrait se conformer aux usages bancaires relatifs à l'année bancaire de trois cent

soixante jours, l'arrêt rendu le 20 septembre 1991, entre les parties, par la Cour d'appel de

Paris ; remet en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se

trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de

Versailles ; (...) .

Document n° 3 : Article 593 du Code civil.

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Séance n° 7 : Qualification, classification et interprétation

Avertissement : profitez de cette séance, pour regrouper l’ensemble des

questions méthodologiques que vous vous posez et pour recenser les termes

juridiques dont la signification vous paraît obscure afin d’interroger votre

chargé de TD sur ce point.

1°) Définissez les arguments d’interprétation suivants :

par analogie ; a fortiori, a contrario ; Specialia generalibus derogant

2°) Donnez une illustration, en justifiant vos déductions, de l’application de

l’argument a fortiori et de l’argument a contrario à la règle suivante : « Il est

interdit de se promener dans le massif de la Clape en période de sécheresse en

raison des risques d’incendie ».

3°) Voici le résumé donné par l’éditeur Dalloz d’une décision rendue en

application du texte suivant : « Sauf autorisation de justice, il est interdit, à peine de

nullité, à quiconque exerce une fonction ou occupe un emploi dans un établissement

hébergeant des personnes âgées ou dispensant des soins psychiatriques de se rendre acquéreur

d'un bien ou cessionnaire d'un droit appartenant à une personne admise dans l'établissement,

non plus que de prendre à bail le logement occupé par cette personne avant son admission

dans l'établissement. », indiquez quel argument d’interprétation il est possible

d’évoquer au soutien de cette solution. Justifiez votre réponse.

1. Personnes qui ne peuvent acquérir. Doit être annulée la vente à la directrice

d'une maison de retraite d'un droit d'usage et d'habitation sur une maison

appartenant à son beau-frère, pensionnaire de l'établissement, l'art. 1125-1,

rédigé en termes généraux, ayant vocation à s'appliquer quels que soient les liens

affectifs et familiaux unissant les parties. ● Civ. 1re, 12 juin 1990.

4°) Déterminez, dans l’extrait suivant, l’argument d’interprétation qui fondait la

solution de la Cour d’appel et qui a été censuré par la Cour de cassation (nb

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argument remplacé par « XXXXX » dans le document fourni). Justifiez votre

réponse.

Répertoire du Notariat Defrénois, 15 septembre 2001 n° 17, P. 1003 – note

Massip

« L'article 220 du Code civil, qui institue une solidarité de plein droit des époux

en matière de dettes contractées pour l'entretien du ménage ou l'éducation des

enfants, n'est pas applicable en matière de concubinage (Cass. civ. 1re, 2 mai

2001 (cassation), Bull. civ. I, à paraître).La juridiction du second degré a énoncé

que « l'union libre confère des droits de plus en plus nombreux qui rapprochent

cette situation du statut du mariage », de sorte qu'il convient de « faire

application aux concubins des mêmes obligations que celles des époux quant

aux dépenses d'entretien, au nombre desquelles figurent les factures de

fourniture d'électricité ». En somme, la cour d'appel avait appliqué aux

concubins les dispositions de l'article 220 du Code civil qui édicte, en ce qui

concerne les époux, une solidarité de plein droit pour les dettes ménagères. Un

tel arrêt ne pouvait manquer d'être cassé. La Cour de cassation a toujours

considéré - et elle vient de le réaffirmer par des décisions récentes - que le statut

du mariage ne peut être étendu par XXXXX au concubinage. Celui-ci n'est pas

soumis à des règles spécifiques et il convient d'appliquer, pour résoudre les

problèmes qui peuvent se poser, les principes du droit commun. »

5°) Dans le même extrait, déterminez quel est l’argument d’interprétation

implicitement utilisé par l’auteur au soutien de la solution rendue. Expliquez

votre réponse.

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Séance n° 8 : La charge de la preuve

Exercice n° 1 : Effectuez l’analyse de la décision suivante

Cour de Cassation Chambre civile 1 Audience publique du 15 novembre 1989

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article 1315 du Code civil ;

Attendu qu'aux termes de ce texte, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la

prouver ;

Attendu, selon les énonciations de l'arrêt attaqué, que M. Ferrato, négociant en matériaux, a

assigné M. Bergoin en paiement de la somme de 38 102,13 francs représentant le solde de

factures établies du 5 août au 12 décembre 1981 pour des fournitures qu'il prétendait lui avoir

livrées ; que M. Bergoin ayant soutenu que c'était le maçon, M. Gervasoni, auquel il avait

confié partie de la construction d'une villa, qui devait faire son affaire des matériaux, M.

Ferrato a mis en cause celui-ci ;

Attendu que pour condamner M. Bergoin à payer cette somme, l'arrêt énonce que celui-ci ne

conteste ni la livraison sur le chantier de la construction dont il est maître d'ouvrage, ni le prix

des matériaux, qu'il a accepté le règlement de l'une des factures litigieuses à concurrence de

35 781,85 francs, acquitté par chèque le 14 octobre 1981 et que ce paiement partiel, effectué

sans réserve, implique reconnaissance de sa qualité de débiteur du prix des matériaux dès lors

qu'il ne justifie pas avoir agi au nom et en l'acquit de M. Gervasoni dont aucun élément

n'établit l'intervention dans la commande des fournitures litigieuses ;

Attendu qu'en statuant ainsi, mettant à la charge de M. Bergoin la preuve de ce qu'il n'avait

effectué le paiement partiel qu'au nom et en l'acquit de M. Gervasoni, alors qu'il appartenait à

M. Ferrato de rapporter la preuve de ce que M. Bergoin était engagé envers lui à payer

l'ensemble des fournitures objet des factures, obligation dont l'existence ne pouvait être

déduite du seul paiement partiel effectué par M. Bergoin qui niait avoir passé commande, la

cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les quatre autres branches du moyen :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 19 mai 1987, entre les

parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties

dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la

cour d'appel de Montpellier

Exercice n° 2 :

1) Expliquer le rôle de la présomption sur la charge de la preuve

2) Déterminer la nature des présomptions suivantes :

- article 653 du Code civil ; article 730-3 du Code civil ; article 911 alinéa 2 du Code

civil ; article 1402 du Code civil

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Séance n° 9 : le droit de la preuve

Exercice : Traitez le cas pratique suivant

Au cours d’un traditionnel repas entre amis, votre cousin germain Jean Brouille a

annoncé son projet de participer au Championnat du Monde de Poker qui se tiendra cette

année à Paris.

Beau parleur, il a su communiquer à tous son enthousiasme. L’assemblée décida donc de

le soutenir dans cette aventure.

Patrick Burel, son meilleur ami, lui prêta 2000 euros, Monique 1700 euros, Jérôme

1500 euros, Laurence 2000 euros, Vincent 800 euros, Rémy 500 euros (qu’il a d’ailleurs

retiré au guichet de sa banque), vous même 800 euros et une de vos amies venue par

hasard partager ce bon moment le double.

Prudent, Patrick Burel a fait rédiger à Jean Brouille le texte suivant : « Aujourd’hui, 14

novembre 2011, j’ai reçu la somme de 2000 euros de Patrick Burel. Signé : Jean

Brouille ».

Monique a demandé la même lettre, par précaution l’a photocopiée et, comme toujours

fort distraite, a laissé l’original dans le magasin de photocopie qui l’a perdu.

Jérôme a également demandé la même lettre mais à la place de la signature Jean Brouille a

apposé une croix. Les autres n’ont rien demandé.

Lors du Championnat, Jean a écrit à Laurence pour lui raconter sa victoire et préciser

combien sa participation financière avait été utile. Touchée, Laurence a conservé cette

lettre.

Jean a également raconté sa victoire et remercié Vincent en lui envoyant un courriel

électronique.

Jean a remporté le Championnat et est parti s’installer définitivement la Côte d’Azur.

Apprenant la bonne nouvelle, tout le monde l’appelle pour le féliciter et demander son

remboursement. Jean répond qu’il n’a rien reçu, sauf de Patrick Burel mais qu’il s’agissait

d’une donation.

Compte tenu de sa réaction, Laurence en profite pour lui demander une indemnisation

pour avoir renversé, lors de ce fameux repas et dans le feu de l’action, une bouteille de vin

sur sa nouvelle robe de Barbary. Jean prétend n’avoir aucun souvenir de cet accident.

Déterminez et justifiez quelles sont les chances de chacun de récupérer ses fonds.

Séance n° 10 : correction du partiel

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Annexe méthodologique :

(à détacher en fin de semestre pour le semestre suivant, à conserver et à appliquer)

La méthode du commentaire de texte

La construction d’un commentaire de texte se fait classiquement en cinq phases, après une

lecture et deS relectureS attentives :

1°) la mise en situation du texte : il faut tenter de déterminer sa date et réfléchir sur

les incidences de cette date, son auteur, sa nature (discours, texte normatif, article de

réflexion, …etc …) et son contexte s’il s’agit d’un extrait.

2°) la recherche approfondie sur les mots du texte : c’est un travail indispensable de

définition des termes et notions du texte. Il doit être systématique pour éviter de passer à côté

d’un point essentiel. L’approche du droit passe avant tout par la précision et la rigueur du

vocabulaire.

3°) la recherche des constructions du texte :

- Sa construction typographique : c’est-à-dire sa structure (nombre de paragraphes, plan

adopté même s’il est implicite).

- Sa construction grammaticale : rechercher sa syntaxe, les mots de liaison, afin de

mettre en valeur le cheminement du propos (ex : le texte développe un principe, puis

des exceptions ; le texte pose des conditions à l’application d’une règle etc…)

- Sa construction logique : les types d’arguments utilisés (Est-ce des exemples ? Il

faudra alors tester leur pertinence, rechercher s’il n’existe pas des contre-exemples. Si

ce n’est pas le cas, il faudra voir si d’autres exemples peuvent venir renforcer la

démonstration de l’auteur ou l’énoncé de la règle. Est-ce des déductions ? des

comparaisons ?).

Les deux dernières recherches ne font, en général, que confirmer les éléments révélés par la

première, mais il convient de s’astreindre à effectuer ces vérifications pour éviter tout

contresens.

4°) la recherche des intérêts du texte et de sa pertinence. Ces points paraissent

souvent difficiles à déterminer, aussi pour éviter de rester sec il convient systématiquement de

se poser une question principale :

Quelle est l’intention du l’auteur ou du législateur ? Le but recherché est-il atteint ?

Pour y répondre, il faut s’aider des étapes précédentes. En effet, ce but est déterminé grâce à

la compréhension du texte, mais sa nature et son contexte doivent aussi être pris en compte.

S’il s’agit d’un texte normatif, il faut se demander si la règle est clairement énoncée, si elle est

facilement applicable, si elle répond aux aspirations de la société, si le texte normatif a été

modifié (sa pérennité est un indice de son efficacité, sa modification rapide pourra laisser

penser qu’il présente des défauts). Le texte a-t-il été accepté par la jurisprudence ? De quel

principe, découle la règle proposée ? A quoi s’oppose-t-elle ? etc….

S’il s’agit d’un discours, il faut se demander s’il est convaincant. S’il s’agit d’un article de

réflexion, il faut se demander si l’idée soutenue été reprise ou abandonnée par la suite.

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5°) La construction du plan du commentaire. Enfin, à partir de la syntaxe relevée,

des notions développées et des intérêts majeurs que présente le texte, on propose un plan de

commentaire. Ce plan doit restituer la logique du texte, donc il ne faut pas hésiter, dans un

premier temps, à « calquer » la construction du plan sur celle du texte. Cela évite, dans une

grande mesure, le hors sujet et surtout les contresens, le commentaire erroné, lacunaire,

contradictoire ou répétitif du texte.

L’analyse d’une décision de Justice

Le sens de l’exercice : Il s’agit de procéder de manière systématique à l’analyse d’une

décision de Justice afin de comprendre sa signification. Comment ? En « démontant » la

décision, c’est-à-dire en isolant ses quatre composantes essentielles : les faits, la procédure et

les prétentions des parties, le problème de droit et la solution de droit donnée par la décision

étudiée.

L’utilisation de cette grille d’analyse : Cette méthode est une première approche des décisions

de Justice, elle vous permettra de ne pas faire de contresens dans la lecture des premiers

documents qui vous seront donnés en travaux dirigés. Le plan de cette grille d’analyse devra

être systématiquement suivi, ainsi dégagés des soucis de construction vous pourrez vous

concentrer sur le sens des décisions abordées.

1) Les faits

Il s’agit de relever, d’une façon objective et dans leur ordre chronologique, les

événements qui ont donné lieu au litige.

2) La procédure et les prétentions des parties

Il s’agit de déterminer le cheminement judiciaire du litige (c’est-à-dire de déterminer

les juridictions qui ont eu à traiter du litige et le sens de leurs décisions) et les raisonnements

soutenus par les différents acteurs au procès.

a) La procédure

Il faut décrire les différentes étapes de la procédure, depuis l’introduction de l’instance

jusqu’à la décision étudiée, en utilisant le vocabulaire approprié.

Pour une décision de Cour de cassation, vous devez répondre aux questions suivantes :

Juridiction de 1ère

instance

- Qui est le demandeur (c’est-à-dire déterminer qui a pris l’initiative du procès) ?

- Qui est le défendeur (c’est-à-dire la personne contre laquelle le demandeur agit) ?

- Quelle est la première juridiction saisie, quand et dans quel sens a-t-elle statué ?

Cour d’appel

- Qui est l’appelant (c’est-à-dire déterminer qui conteste, devant la Cour d’appel, la

solution rendue en première instance) ?

- Qui est l’intimé (c’est-à-dire déterminer qui se défend contre cette contestation) ?

- Quand et dans quel sens a statué la Cour d’appel ?

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Cour de cassation

- Qui a formé le pourvoi (c’est-à-dire déterminer qui conteste, devant la Cour de

cassation, la solution rendue par la Cour d’appel) ?

- Quand et dans quel sens a statué la Cour de cassation ?

NB. La description de la procédure peut vous paraître anecdotique, en réalité elle est

essentielle car elle peut vous permettre d’identifier les positions de chaque juridiction et ainsi

de ne pas les confondre et donc de ne pas commettre de contresens sur celle que l’on vous

demande de commenter (car il est possible que la position à commenter prenne le contrepied

des précédentes). Cette description peut également vous permettre de déterminer si les

juridictions saisies sont unanimes ou non (ce qui, dans cette seconde hypothèse, peut vous

fournir des arguments pour critiquer la position commentée puisqu’elle n’est pas évidente).

Cette description doit reposer sur une analyse rigoureuse de la décision à

commenter et non sur des déductions divinatoires. En effet, la rédaction de certaines décisions

ne permet pas de remonter la chaîne jusqu’à la première instance, il faut alors le signaler et

non inventer.

Consultez le schéma simplifié de l’organisation judiciaire.

b) Les prétentions des parties

Il s’agit de démonter les raisonnements qui ont été soutenus par les différents acteurs

au procès, c’est-à-dire déterminer les arguments de chaque partie. Ce travail, s’il peut paraître

fastidieux, est absolument fondamental car il vous permet de vous entraîner à la construction

d’un raisonnement juridique et de déterminer la question de droit.

Vous devez répondre aux questions suivantes :

- Que demande concrètement le demandeur ? Quels sont ses arguments (c’est-à-dire

sur quels textes, sur quels principes se fonde-t-il ou sur quelles interprétations de

ces textes ou de ces principes fonde-t-il sa prétention) ? Placez-vous ici au stade du

pourvoi en cassation pour identifier le demandeur (car cela sera toujours

déterminable alors que, parfois, la décision ne permet pas de déterminer quelle est

la partie qui a introduit l’affaire en première instance).

- Que répond le défendeur ? Quels sont ses arguments pour repousser cette demande

(c’est-à-dire sur quels textes, sur quels principes se fonde-t-il ? Ou s’il se fonde sur

les mêmes : de quelle différence d’interprétation entend-t-il se prévaloir) ?

Lors de ce travail, vous devez partir des demandes concrètes pour arriver à la présentation

théorique et générale des arguments.

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Suggestion de présentation :

Demandeur au pourvoi Défendeur au pourvoi

Monsieur X demande …. (un résultat

concret, par exemple : le divorce ; des

dommages et intérêts ; une expulsion)

Pourquoi ? (dans la situation particulière,

par exemple : car il y a mésentente dans le

couple ; car le défendeur a endommagé sa

barrière ; car son locataire n’a pas payé son

loyer)

Pourquoi ? (en général, par exemple : car

l’article X autorise le divorce en cas de

mésentente ou oblige à réparation en cas de

faute ou permet l’expulsion pour non

paiement des loyers. Il s’agit ici de

déterminer le fondement juridique du

résultat concret que le demandeur réclame. Il

faut donc donner la référence exacte du texte

concerné ou la formulation précise du

principe invoqué)

Pourquoi ? (ici la formulation se situe

toujours à un niveau général, elle tend à

démontrer que le fondement invoqué

s’applique bien ou produit bien les effets

demandés)

Madame Y refuse …. (le même résultat

concret)

Pourquoi ? (dans la situation particulière)

Pourquoi ? (en général. Il s’agit ici de

déterminer le fondement juridique du refus

opposé au demandeur)

Pourquoi ? (il s’agit de déterminer le

raisonnement par lequel le défendeur

soutient que le fondement ne s’applique pas à

la situation ou ne produit pas les effets

demandés)

3) La question de droit

Cette étape est fondamentale, car elle témoigne de votre bonne compréhension de

l’affaire. Vous devez y apporter un soin particulier.

La question de droit est l’exposé en termes généraux de la question juridique.

Il s’agit donc de déterminer le point sur lequel s’opposent les raisonnements juridiques des

parties. Ce point est dégagé grâce à la confrontation des prétentions de chaque partie,

confrontation opérée lors de l’étape précédente (dernière phase du tableau des prétentions).

La formulation de cette question doit évidemment se faire sous forme interrogative.

Elle doit aussi se présenter sous forme générale (ou abstraite). En effet, à ce stade de

l’étude, la situation particulière des plaideurs ne nous intéresse plus (peu importe si

monsieur X et madame Y pourront divorcer ou si monsieur Y pourra demander l’expulsion

de madame Y). Il faut donc éliminer les arguments de fait et les noms des parties. Ce qui

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nous intéresse, c’est de déterminer quel est le raisonnement juridique pertinent, car il sera

susceptible de s’appliquer aux situations identiques. Il faut donc formuler la problématique

en remplaçant les éléments de fait par la catégorie à laquelle ils appartiennent ( exemples :

Des époux peuvent-ils divorcer pour mésentente ? Un propriétaire peut-il demander

l’expulsion de son locataire ?).

4) La solution de droit

C’est la réponse que la juridiction apporte à la question de droit. Il s’agit de vous

interroger sur le sens (a), la portée (b) et la valeur (c) de la décision étudiée.

a) Le sens

Déterminer le sens d’une décision consiste à dégager la règle abstraite retenue par la

juridiction. Cette phase se réalise en deux temps, il faut d’abord isoler la solution pour

déterminer ensuite sa signification.

Isoler la solution est simple, car celle-ci est la réponse à la question de droit formulée

au point n° 3. En aucun cas, la solution à analyser n’est « casse » ou « rejette », il ne s’agit

ici que de l’issue procédurale et particulière de l’affaire (elle n’intéresse que les parties et

leurs conseils). Ce qu’il faut mettre en valeur est la règle retenue par la juridiction pour

trancher le litige, car ce sont cette règle et son raisonnement qui seront peut-être reproduits

dans des cas similaires. C’est pour cette raison que l’on vous demande de les comprendre et

de les étudier.

Une fois isolée la solution de droit rendue par la juridiction, il faut cerner son

contenu. Pour cela, il vous faut définir et étudier le sens des termes employés et la façon dont

ils sont agencés (y compris la ponctuation qui est un indicateur essentiel). En vous appuyant

sur ce travail, vous devez proposer une formulation de la règle. Cette transcription permettra à

votre lecteur, à votre correcteur de voir si vous avez compris la décision. Elle est donc

primordiale. Cette transcription doit être fidèle à la décision et doit se présenter sous une

forme générale (c’est-à-dire, par exemple, qu’il ne s’agira pas d’énoncer que « monsieur

Dupont ou madame Karam ne peuvent se prévaloir de la loi nouvelle », mais de déterminer

quelle est la qualité juridique de ces personnes prise en compte pour le choix de la règle et de

remplacer leur nom par cette qualité, par exemple « les contractants ne peuvent se prévaloir

de la loi nouvelle ».).

Concrètement, cette rubrique intitulée sens de la solution doit

comprendre :

- la citation exacte de la solution de droit rendue par la juridiction (il s’agit ici d’un

travail de recopiage, mais il n’est pas inutile car il vous obligera à vous imprégner des

termes utilisés par les juges).

- la définition des termes principaux de la solution. Lorsque des termes importants de la

solution ne figurent pas dans les textes cités au visa, signalez-le car cela indique

souvent qu’ils ont été ajoutés par l’interprétation de la Cour.

- la transcription que vous en proposez.

A partir de ce travail, il vous faut évaluer la portée de la solution.

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b) La portée

Envisager la portée d’une solution consiste à déterminer son influence, à la fois, dans

le temps et dans l’espace juridique.

α) Dans le temps : au regard du droit existant

au regard des textes

Il vous faut ici déterminer si la décision opère une modification du droit antérieur, et dans

l’affirmative, montrer en quoi consiste ce changement. Pour mesurer ce changement, il faut

comparer la solution de droit rendue et le texte appliqué si la Cour de cassation se réfère à

un texte précis. Cette comparaison doit être minutieuse pour déterminer si la solution étudiée

ajoute ou retranche des éléments à la lettre du texte. Si cela est le cas, il faudra absolument

essayer de déterminer la justification de ces ajouts ou de ces retraits en démontrant soit que

cela découle d’un argument classique d’interprétation (a contrario, a fortiori, par analogie,

etc…) soit de la place du texte, soit de l’esprit du texte, soit d’une justification pratique…

Par rapport aux décisions antérieures

Il vous faut déterminer si la décision opère une modification des solutions antérieures et,

dans l’affirmative, montrer en quoi consiste ce changement. Vous ne pouvez vous contenter

ici d’indiquer qu’il s’agit d’un revirement de jurisprudence ou d’une jurisprudence constante,

sans justifier votre affirmation par une évocation précise des solutions antérieures. Il ne s’agit

nullement de se contenter d’aligner des dates de décisions. La mention de la date des

décisions pertinentes n’est que la première étape, il faut ensuite expliquer en quoi elles sont

identiques ou différentes de celle étudiée. Il est parfaitement inutile de recopier les références

des commentaires de ces décisions (vous n’êtes pas des moines copistes !).

Dans la même optique, vous devez indiquer si la solution est toujours d’actualité ou si elle a

été depuis écartée par des solutions ou des textes contraires.

β) Dans l’espace juridique : tentative de détermination du domaine de la solution

Il faut ensuite essayer de dresser la liste des conséquences juridiques que la solution pourra

produire. Cette délimitation du domaine de la solution se fait en deux temps.

La première analyse repose sur la définition et l’étude attentive des termes de la

solution pour délimiter les hypothèses visées. Cette détermination peut se heurter à des

hésitations, certains mots pouvant être définis de façon plus ou moins extensive. Il vous faut

mentionner ces différentes interprétations et éventuellement indiquer les raisons qui

justifieraient de privilégier l’une d’elles.

La deuxième analyse consiste à se demander si la solution a une force d’expansion au-

delà du domaine ainsi défini. Ainsi, on se demandera s’il faut appliquer la solution aux

situations voisines – par exemple au concubinage, si la solution est rendue à propos du

mariage-, s’il faut l’appliquer à la catégorie générale dans laquelle s’inscrit le problème traité

– par exemple à toutes les locations d’immeuble, si la solution est rendue à propos d’un

immeuble à usage professionnel. Pour effectuer cette deuxième analyse, il est nécessaire

d’avoir une vision assez générale du droit, aussi il est conseillé pour l’instant de vous en tenir

à la première.

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Quand vous serez familiarisés avec les étapes précédentes, il faudra vous interroger sur

la valeur de la solution.

c) La valeur

Réfléchir sur la valeur d’une solution consiste à apprécier son intérêt et son

opportunité d’un point de vue juridique, mais également à l’égard de considérations plus

générales.

α) D’un point de vue juridique

Il vous faut déterminer si la solution est cohérente par rapport aux principes et aux

textes qui régissent la matière.

Pour vous aider dans ce travail, vous devez vous poser systématiquement les

questions suivantes :

si la solution est rendue au visa d’un texte normatif : est-elle conforme à sa

lettre ? Est-elle conforme à son esprit ? La lettre du texte permettait-elle son

application à la question ? Si cette dernière réponse est négative : un argument

d’interprétation a-t-il était mis en œuvre ou peut-il permettre de critiquer le

raisonnement (a pari, a fortiori, a contrario), une maxime d’interprétation peut-elle

justifier la solution ou permettre de la critiquer (Exceptio est strictissimae

interpretationis, Ubi non distinguit, Specialia generalibus non derogant).

Pour toutes les solutions : est-elle cohérente par rapport aux solutions antérieures,

aux propositions doctrinales formulées sur la question, aux solutions tranchant les

questions voisines, aux textes internationaux …etc…

Les réponses à ces questions vous permettront de dresser une sorte de bilan de la décision

(arguments pour / arguments contre) permettant de porter une appréciation sur son contenu.

β) Au regard de l’objectif du droit : la bonne organisation des rapports humains

De façon plus générale, il faut vous demander si la solution est équitable, si elle est

viable (c’est-à-dire si sa mise en œuvre ne risque pas d’entraîner des complications ou des

effets pervers insurmontables), si elle est économiquement opportune (par exemple, si elle ne

crée pas une charge ou un avantage injustifiés à l’égard d’une certaine catégorie), si elle est

souhaitable d’un point de vue sociologique, …..etc….

Selon la teneur et le domaine de la solution, ces dernières interrogations ne fournissent

pas systématiquement des éléments intéressants. Aussi, si vous devez systématiquement vous

interroger sur ces points, il ne convient de mentionner les réponses auxquelles vous êtes

parvenus que si vous les juger dignes d’intérêt.

Annexe pour l’aide à la compréhension des décisions : organisation simplifiée des

juridictions et structure des deux types d’arrêt de la Cour de cassation :

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Méthodologie succincte du cas pratique

I) Détermination de la réponse

La détermination de la réponse suppose un travail organisé en quatre étapes.

La première étape est commune à tous les types d’exercice, même si elle est

malheureusement trop souvent négligée. Il s’agit d’opérer une lecture attentive et complète du

sujet. Pour atteindre ces qualificatifs, il convient de lire le sujet au moins trois fois, en son

entier et avec une attention soutenue (ceci n’est absolument pas une perte de temps). Il est

recommandé de profiter de ces lectures pour traduire la situation sous forme de schémas

(situant les protagonistes, leurs rapports) et pour établir une frise chronologique des faits. Il

est ensuite indispensable de qualifier les éléments qui vous sont présentés. Monsieur Pilou

est-il marié ou vit-il en concubinage ? Son fils Jean est-il mineur ? Pour résoudre cette

question, l’énoncé vous dit peut-être de façon anodine qu’il vient de réussir ou de rater son

permis de conduire. Ce sont ces points de détails qu’il ne faut pas rater. En effet, cette

anecdote vous indique que le protagoniste a plus de 18 ans et donc qu’il est majeur, ce qui

peut avoir une incidence sur les règles appicables. Il est possible que l’énoncé ne précise pas

un élément fondamental (par exemple l’âge de l’enfant), il faudra alors relever cette

incertitude et indiquer ses incidences (notamment si cela change quelque chose en

envisageant alors les deux hypothèses : minorité/majorité).

La deuxième étape est fondamentale : il s’agit d’identifier les questions juridiques

posées par les faits. Pour cela, il va falloir à l’aide du travail de qualification traduire la

question concrète (par exemple : « Que risque-t-il ? ») en termes juridiques (par exemple :

« Un père peut-il être responsable des dommages causés par son enfant mineur ? »). Cette

étape, même si elle peut paraître simpliste, est absolument essentielle car seule une bonne

formulation de la problématique permet ensuite de déterminer les règles applicables.

La troisième étape consiste à déterminer les règles générales répondant aux questions

dégagées. Elle doit permettre d’accumuler les références précises des règles concernées. Il

s’agira de tel texte de loi, interprété en ce sens par telle jurisprudence, conforté par telle

opinion doctrinale (en aucun cas, on peut se contenter de citer sans expliquer comment elle

peut guider la réponse une jurisprudence). Si aucune décision n’a été rendue pour interpréter

le texte concerné afin de le rendre applicable au cas précis, sa citation doit nécessairement

s’accompagner de l’argument d’interprétation qui peut le rendre applicable (littéral, par

analogie, a contrario…etc …).

Enfin, la dernière étape consiste à appliquer ces règles générales aux faits qui vous

sont soumis. Cette ultime phase est indispensable (si l’examinateur avait voulu vous faire

exposer vos connaissances théoriques, il aurait proposé un sujet de dissertation). Il faut donc

la mener avec application : par exemple en déterminant par rapport aux faits quel est le

recours le plus pertinent pour votre client (au regard du droit, mais aussi du contexte : par

exemple telle personne étant solvable, telle autre l’étant moins).

Il convient nécessairement de vérifier si les conditions d’application des règles

générales sont bien remplies, puis de détailler les conséquences de leur application (par

exemple s’il s’agit d’un délai de prescription d’indiquer clairement, si l’énoncé le permet, la

date à laquelle la prescription va jouer).

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Si plusieurs règles générales sont applicables, il conviendra de déterminer si une doit

être privilégiée (par exemple sur la base du raisonnement specialia generalibus derogant) ou si

elles peuvent être cumulées (dans ce cas, il faudra sans doute apprécier les avantages et

inconvénients respectifs de ces diverses voies pour votre client).

II) La présentation de la réponse

L’introduction doit être courte et elle ne doit absolument pas consister à recopier

l’énoncé. Elle doit résumer drastiquement les faits en leur restituant leur qualification

juridique.

Le plan doit être concret (par exemple : I) Les actions de la victime II) Les moyens de

défense du responsable) et comporter autant de parties que de questions distinctes.

Les développements doivent suivre le triptyque suivant :

qualification en termes juridiques de la question

détermination des règles générales applicables

application aux faits.

Le style doit être :

concis

simple (il faut privilégier les phrases sujet-verbe-complément)

précis (il convient de bannir les imprécisions qui figurent volontairement dans l’énoncé et qui

ont été choisies pour vous habituer à recevoir des clients par définition non juristes. Une fois

qualifiées les situations dans l’introduction, vous ne devez plus employés que les termes

exacts (par exemple un beau-fils n’est pas un fils).

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Annexe 2 : sujet et correction du partiel 2006/2007

Durée de l'épreuve : 3h – Document autorisé : Code civil

Etablir l'analyse de la décision suivante / 15 points Cour de Cassation, Chambre civile 2

Audience publique du 7 octobre 2004

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :

Vu les articles 9 du nouveau Code de procédure civile et 6 de la Convention européenne de

sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Attendu qu'en 1989 Mme X... a reçu de M. Y... une somme d'argent que les héritières de ce

dernier lui ont réclamée au motif qu'elle aurait été prêtée et non donnée ; qu'afin de rapporter la

preuve de leur allégation, elles ont versé aux débats une cassette contenant l'enregistrement

d'une conversation téléphonique effectué par M. Y... à l'insu de son interlocutrice, Mme X... ;

Attendu que pour condamner Mme X... à payer aux consorts Z... une somme de 150 000 francs

outre les intérêts et dire qu'elle serait redevable des conséquences fiscales d'une réintégration

de la créance au patrimoine de M. Y..., tardive en raison de son refus de reconnaître le prêt, la

cour d'appel a énoncé que le secret des correspondances émises par la voie des

télécommunications était opposable aux tiers mais pas à M. Y... qui avait pu valablement

enregistrer une conversation qu'il avait eue personnellement avec une autre personne, ni à ses

héritiers qui sont l'émanation de sa personne ;

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que sa production à la présente instance ne portait pas atteinte à la vie privée de Mme X...

dès lors qu'aucun fait relevant de la sphère de son intimité n'était révélée, la discussion

rapportée portant exclusivement sur le remboursement du prêt consenti par M. Y... et que

la production de la cassette était un moyen de preuve recevable ; Qu'en statuant ainsi,

alors que l'enregistrement d'une conversation téléphonique privée, effectué et conservé à

l'insu de l'auteur des propos invoqués, est un procédé déloyal rendant irrecevable en

justice la preuve ainsi obtenue, la cour d'appel a violé les textes susvisés ; PAR CES

MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen : CASSE ET

ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 16 janvier 2003, entre les parties,

par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état

où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour

d'appel de Paris

Pour information :

NOUVEAU CODE DE PROCEDURE CIVILE

Article 9

Il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au

succès de sa prétention.

CONVENTION EUROPENNE DES DROITS DE L'HOMME

Article 6 al 1er – Droit à un procès équitable

Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement,

publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et

impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et

obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière

pénale dirigée contre elle. Le jugement doit être rendu publiquement, mais l'accès

de la salle d'audience peut être interdit à la presse et au public pendant la totalité

ou une partie du procès dans l'intérêt de la moralité, de l'ordre public ou de la

sécurité nationale dans une société démocratique, lorsque les intérêts des mineurs

ou la protection de la vie privée des parties au procès l'exigent, ou dans la mesure

jugée strictement nécessaire par le tribunal, lorsque dans des circonstances

spéciales la publicité serait de nature à porter atteinte aux intérêts de la justice.

Exercice n° 2 / 5 points

1°) Donner la définition des termes « visa » (1 point) et « droits subjectifs » (1 point).

2°) Donnez une illustration, en justifiant vos déductions, de l’application de

l’argument a fortiori et de l’argument a contrario au texte suivant : « Sauf

autorisation de justice, il est interdit, à peine de nullité, à quiconque exerce une fonction

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ou occupe un emploi dans un établissement hébergeant des personnes âgées ou dispensant

des soins psychiatriques de se rendre acquéreur d'un bien ou cessionnaire d'un droit

appartenant à une personne admise dans l'établissement, non plus que de prendre à bail le

logement occupé par cette personne avant son admission dans l'établissement. »

Correction

Exercice n° 1 (NDLR : cette correction n’a pas été mise à jour en fonction des

évolutions postérieures pour vous permettre d’être dans la peau de l’étudiant

présentant ce partiel lorsque le sujet a été proposé en 2006)

Vous constaterez que la longueur du devoir attendu est COURTE, vous ne devez pas

mentionner dans votre copie d’éléments inutiles. Le hors sujet vous fera perdre des

points, du temps et vous empêchera de soigner la rédaction.

Analyse de la décision de la deuxième Chambre civile de la Cour de cassation

du 7 octobre 2004

1) Les faits

En 1989, madame X reçoit une importante somme d'argent (150 000 francs) de

monsieur Y. Monsieur Y enregistre à l'insu de madame X une de leurs conversations

téléphoniques pendant laquelle l'opération est décrite comme étant un prêt.

Monsieur Y décède. Ses héritières (les consorts Z) demandent alors à madame X

le remboursement de la somme remise, en affirmant qu'elle avait été versée dans le cadre

d'un contrat de prêt et non dans celui d'une donation, comme l'atteste l'enregistrement

effectué.

2) La procédure et les prétentions des parties

a) La procédure

Les héritières de monsieur Y (les consorts Z) assignent madame X en

remboursement de la somme prêtée devant un tribunal de grande instance.

Ce tribunal de grande instance rend un jugement inconnu, appel est alors interjeté.

Le 16 janvier 2003, la Cour d'appel de Versailles statue en faveur des consorts Z et

condamne madame X à rembourser le prêt et diverses pénalités.

Madame X se pourvoit en cassation.

Le 7 octobre 2004, la deuxième Chambre civile de la Cour de cassation casse et

annule l'arrêt de la Cour d'appel de Versailles.

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b) Les prétentions des parties

Demandeur au pourvoi Défendeurs au pourvoi

Madame X conteste l’obligation de

rembourser la somme remise.

Les consorts Z demandent le

remboursement de la somme

remise.

Car la remise n'était pas un prêt,

mais une donation et qu'on ne peut

pas tenir compte de

l'enregistrement pour prouver le

contraire

Car la remise était un simple prêt

comme le prouve l'enregistrement

Car l'enregistrement ayant été

effectué et conservé à son insu ne

peut être valablement produit en

justice

Car l'enregistrement, ne portant

pas atteinte à la vie privée, peut

valablement être produit en justice

3) La question de droit

La Cour de cassation s'est ici interrogée sur la question suivante :

Peut-on utiliser n'importe quel procédé pour obtenir un moyen de preuve ?

(autres formulations possibles : Peut-on utiliser un procédé déloyal pour produire un

moyen de preuve ? / L'enregistrement dissimulé d'une conversation peut-il constituer une

preuve recevable ?)

4) La solution de droit

a) Le sens

A cette question, la Cour a répondu « Vu les articles 9 du nouveau Code de

procédure civile et 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et

des libertés fondamentales ; (...) l'enregistrement d'une conversation téléphonique privée,

effectué et conservé à l'insu de l'auteur des propos invoqués, est un procédé déloyal

rendant irrecevable en justice la preuve ainsi obtenue ».

Afin d'éclairer le sens de la solution de droit ainsi rendue, nous définirons ses

termes principaux.

A l'insu : en cachette, c'est-à dire en dissimulant, en mentant.

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Procédé : façon d'agir. Il s'agit donc de contrôler la façon dont les plaideurs ont obtenu

l'élément de preuve qu'ils produisent. Cette question est distincte de celle de la nature de

la preuve (par exemple, l'écrit ou le témoignage). Ce n'est donc pas sur le mode de preuve

que la Cour de cassation se prononce dans cette solution, mais sur la façon dont il a été

constitué.

Déloyal : qui n'est pas correct, qui n'adopte pas une conduite honnête. Ce terme renvoie à

un standard général de conduite et non pas à des dispositions légales précises. Il faut

souligner que ce terme ne figure dans aucun des textes invoqués par la Cour de cassation

dans son visa.

Irrecevable : ne pouvant être accepté et pris en compte par les juridictions.

En justice : mise en oeuvre du droit par les tribunaux

Preuve : démonstration de l'existence d'un fait ou d'un acte.

Il résulte de cette analyse de texte que la Cour de cassation écarte du débat

judiciaire les preuves obtenues de façon incorrecte, c'est-à-dire grâce à un comportement

qui n'est pas sincère.

b) La portée

α) Dans le temps : au regard du droit existant

Par rapport au visa

La Cour de cassation a statué au visa des articles 9 du NCPC et de l'article 6 de la

Convention Européenne des Droits de l'Homme. Elle s’est donc référée à deux textes. Or,

cette invocation cumulée des deux textes est utilisée pour accroître leur portée, pour

dépasser la lettre de chacun de ces textes. Ainsi, cette invocation permet à la Cour de

cassation d'imposer aux plaideurs un comportement « loyal » dans l'obtention des preuve,

c'est-à-dire d'aller plus loin que le comportement « légal », qu'elle aurait pu fonder sur la

lettre de l'article 9 du NCPC « conformément à la loi ». Etre loyal suppose non seulement

de respecter les prescriptions légales, mais aussi d'agir avec correction (il reviendra aux

décisions postérieures et à la doctrine de déterminer les contours exacts de cette notion).

Par rapport à la jurisprudence antérieure

Cette décision constitue un arrêt de principe car, si la jurisprudence avait déjà été

sensible à la façon dont les éléments de preuve présentés avaient été obtenus, elle n'avait

sanctionné ces procédés que sur la base de textes légaux précis (par exemple, la violation

de la vie privée, c'est-à-dire de l'article 9 du Code civil pour la production de lettres

missives ou celle d'une correspondance informatique non professionnel du salarié : Cass.

Soc., 2 octobre 2001 : Bull. Civ. V, n° 291). C'est donc la première fois que la Cour de

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cassation affirme de façon solennelle le principe général de la loyauté de la preuve.

β) Dans l’espace juridique : tentative de détermination du domaine de la solution

La Cour de cassation a statué au visa des articles 9 du NCPC et de l'article 6 de la

Convention Européenne des Droits de l'Homme Il s'agit de textes très généraux. Ces

références donnent donc une ampleur maximale à la solution rendue car elle ne sera pas

limitée à un mode de preuve en particulier (comme cela aurait pu être le cas si la Cour

avait cité un texte relatif à l'un de ces modes de preuve, par exemple l'aveu), ni à la preuve

d'un type d'événement (comme cela aurait pu être le cas, si elle avait parlé de fait ou d'acte

juridique).

Toutefois, si cette exigence est générale, en pratique ses conséquences se

manifesteront davantage lorsque le point à prouver est soumis à la preuve par tous

moyens (car, pour un écrit préconstitué, les hypothèses d'obtention incorrecte sont plus

rares).

c) La valeur

α) D’un point de vue juridique

L'exigence instaurée ici par la jurisprudence se nourrit de la même inspiration que

certaines dispositions légales traditionnelles, ainsi deux modes de preuve (l'aveu et le

serment) reposent sur la loyauté de celui qui les effectue. Toutefois, il est vrai, qu'en

pratique, ils sont peu utilisés. La jurisprudence a voulu donner, par le principe affirmé, un

renouveau à la moralité de la preuve (en rendant inutiles les comportements visant à

tromper et à surprendre les autres). L’instauration d’une telle exigence, au-delà de la lettre

des textes, ne devrait-elle pas relever du législateur ?

β) Au regard de l’objectif du droit : la bonne organisation des rapports humains

Cette solution traduit toute la difficulté du droit de la preuve, en mettant en avant

l'exigence morale (et donc la condamnation des comportements douteux), elle limite les

éléments de preuve recevables (c'est-à-dire elle diminue les chances de faire apparaître la

vérité objective comme l'espèce l'illustre).

Exercice n° 2

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Le texte interdit au personnel des établissements hébergeant des personnes âgées d’acheter les

biens de ces personnes car le personnel pourrait être tenté de profiter de la dépendance de ces

personnes âgées pour obtenir des prix avantageux. A fortiori, pour ce personnel il est interdit

de recevoir une donation de la part des personnes âgées hébergées car une donation opérant

un transfert du bien sans contre partie est encore plus dangereuse pour ces personnes âgées

qu’une vente.

Le texte interdit la vente de biens de personnes âgées au personnel des établissements dans

lesquels elles sont hébergées. A contrario, ces personnes âgées peuvent vendre leurs biens à

toutes les autres personnes.

Attention. Les copies ayant indiqué qu’avec une autorisation il était possible pour le

personnel concerné d’acquérir un bien appartenant à une personne admise dans

l’établissement n’ont fait qu’appliquer la lettre du texte. Il n’y a aucune déduction dans ce

dernier exemple. Nous ne sommes absolument pas en présence d’un raisonnement a contrario.

Il en est de même pour les copies qui ont fourni comme exemple du raisonnement a fortiori

l’interdiction de prendre à bail le logement occupé par la personne avant son admission. Il

s’agit encore une fois de l’application pure et simple de la lettre du texte.

Les arguments a contrario, a fortiori et a pari sont invoqués dans des hypothèses où il n’existe

pas de règle pour trancher le cas qui se présente et où on s’interroge sur la pertinence

d’utiliser une règle ou les indications données pour d’autres hypothèses. Il ne s’agit

absolument pas de justifier à l’aide de ces arguments le contenu d’un texte, sa lettre.

Annexe 3 : sujet et correction du partiel 2011/2012

Durée 3 heures, Code civil autorisé

Exercice n° 1 : 5 points

1°) Définissez les arguments suivants :

- par analogie

- a fortiori

- a contrario

2°) Appliquez, en justifiant vos déductions, ces arguments à la règle suivante :

« Il est interdit de déjeuner dans les amphithéâtres»

Exercice n° 2 : 15 points

Effectuez l’analyse de la décision suivante :

Cour de cassation, chambre civile 1, Audience publique du jeudi 11 juin 2009

N° de pourvoi: 08-16914 , Publié au bulletin Rejet

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Attendu qu'imputant sa contamination par le virus l'hépatite C au traitement de ses varices,

réalisé entre le 27 septembre 1981 et le 11 janvier 1982 par injection d'un liquide sclérosant,

Mme X... a recherché la responsabilité de M. Y..., son médecin ;

Attendu que M. Y... fait grief à l'arrêt confirmatif (Bordeaux, 16 avril 2008) de l'avoir déclaré

responsable de la contamination de Mme X... par le virus de l'hépatite C et de l'avoir

condamné à lui verser une indemnité en réparation de son préjudice, alors, selon le moyen,

que toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement ; qu'en conséquence,

une partie à un procès ne peut se voir opposer une règle de droit issue d'un revirement de

jurisprudence lorsque la mise en oeuvre de celle-ci aboutirait à la priver d'un procès équitable

; qu'en 1981 et 1982, la jurisprudence mettait à la charge du médecin, en matière d'infection

nosocomiale, une obligation de moyens et n'a mis à sa charge une obligation de sécurité de

résultat qu'à compter du 29 juin 1999 ; que l'application du revirement de jurisprudence du 29

juin 1999 à la responsabilité des médecins pour des actes commis avant cette date a pour

conséquence de priver le médecin d'un procès équitable, dès lors qu'il lui est reproché d'avoir

manqué à une obligation qui, à la date des faits qui lui sont reprochés, n'était pas à sa charge ;

qu'en décidant néanmoins que M. Y... était tenu d'une obligation de sécurité de résultat en

raison des actes qu'il avait pratiqués sur Mme X... entre le 27 septembre 1981 et le 11 janvier

1982, bien que ceux-ci eussent été réalisés avant le revirement de jurisprudence ayant

consacré l'existence d'une obligation de sécurité de résultat, la cour d'appel a privé M. Y... du

droit à un procès équitable, en violation des articles 1147 et 5 du code civil et 6 de la

Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Mais attendu que la sécurité juridique, invoquée sur le fondement du droit à un procès

équitable pour contester l'application immédiate d'une solution nouvelle résultant d'une

évolution de la jurisprudence, ne saurait consacrer un droit acquis à une jurisprudence figée,

dès lors que la partie qui s'en prévaut n'est pas privée du droit à l'accès au juge ; que le moyen

n'est pas fondé en sa première branche ;

Et attendu qu'aucun des griefs du moyen unique, pris en ses autres branches, ne serait de

nature à permettre l'admission du pourvoi ;

PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi

Pour information :

CONVENTION EUROPENNE DES DROITS DE L'HOMME, Article 6 al 1er – Droit à un

procès équitable :

Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans

un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera,

soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de

toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. Le jugement doit être rendu

publiquement, mais l'accès de la salle d'audience peut être interdit à la presse et au public

pendant la totalité ou une partie du procès dans l'intérêt de la moralité, de l'ordre public ou de

la sécurité nationale dans une société démocratique, lorsque les intérêts des mineurs ou la

protection de la vie privée des parties au procès l'exigent, ou dans la mesure jugée strictement

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nécessaire par le tribunal, lorsque dans des circonstances spéciales la publicité serait de nature

à porter atteinte aux intérêts de la justice

Obligation de moyens : obligation qui pèse sur un débiteur de mettre en œuvre tous les

moyens dont il dispose pour satisfaire son créancier. Dans cette hypothèse, le seul fait qu’un

résultat précis n’est pas réalisé ne suffit pas à engager la responsabilité du débiteur.

Obligation de résultat : obligation qui pèse sur un débiteur de fournir à son créancier un

résultat précis. Dans cette hypothèse, la responsabilité est engagée du seul fait que ce résultat

n’est pas réalisé (la responsabilité est donc plus facilement engagée qu’en présence d’une

obligation de moyens, l’obligation qui pèse sur le débiteur est ainsi plus lourde).

Article 1147 du Code civil, rédaction alors applicable : « Le débiteur est condamné, s'il y a

lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à

raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient

d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de

sa part. »

Correction de l’exercice n° 2

- (NDLR : cette correction n’a pas été mise à jour en fonction des évolutions

postérieures pour vous permettre d’être dans la peau de l’étudiant présentant ce

partiel lorsque le sujet a été proposé en 2006)

- Les passages introduit par (NDLR) sont des explications données pour vous

permettre de comprendre la correction, ce ne sont pas des passages attendus dans

une copie.

Analyse de la décision de la première Chambre civile de la Cour de cassation

du 11 juin 2009

1) Les faits

Entre le 27 septembre 1981 et le 11 janvier 1982, madame X est traitée pour un

problème de varices par monsieur Y, médecin qui procède à des injections d’un liquide

sclérosant. Madame X est contaminée par le virus de l’hépatite C.

Le 29 juin 1999, dans une toute autre affaire, la Cour de cassation alourdit les

obligations pesant sur les médecins en présence d’une infection nosocomiale (c’est-à-dire

d’une infection contractée dans un établissement de soin). Elle considère que leur

responsabilité est engagée par le seul fait de l’infection. Cette obligation repose sur une

nouvelle interprétation jurisprudentielle, le texte normatif [NDLR : l’article 1147 du Code

civil] n’ayant pas été modifié.

2) La procédure et les prétentions des parties

a) La procédure

Madame X assigne monsieur Y, médecin en responsabilité devant le tribunal de

grande instance compétent.

Cette juridiction fait droit à sa demande, c’est-à-dire reconnait la responsabilité du

médecin et le condamne à indemniser madame X [NDLR : le texte de l’arrêt de la Cour de

cassation permet de détermine le sens de la décision de première instance, car il évoque

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l’arrêt confirmatif de la Cour d’appel de Bordeaux, ce qui indique que la Cour d’appel a statué

dans le même sens que la juridiction de première instance]. Monsieur Y interjette appel.

Le 16 avril 2008, la Cour d'appel de Bordeaux retient la responsabilité du médecin et

le condamne à indemniser madame X.

Monsieur Y se pourvoit en cassation.

Le 11 juin 2009, la première Chambre civile de la Cour de cassation rejette le pourvoi.

b) Les prétentions des parties

Demandeur initial Défendeur

Madame X demande réparation au médecin

Y.

Le médecin Y refuse d’indemniser madame

X.

Car elle a contracté une infection

nosocomiale durant un traitement qu’il lui a

administré.

Car il n’est pas tenu d’indemniser l’infection

nosocomiale qu’elle a contractée durant le

traitement

Car, en vertu de la jurisprudence actuelle, le

médecin est tenu d’une obligation de sécurité

de résultat en présence d’une infection

nosocomiale

Car à l’époque où les soins ont été prodigués,

la jurisprudence considérait que le médecin

n’était tenu que d’une obligation de moyens

Car on ne peut se prévaloir de l’interprétation

jurisprudentielle existant au moment des faits

Car doit lui être appliquée l’interprétation

jurisprudentielle existant au moment des faits

Car un revirement de jurisprudence s’applique

à tous les faits

Car un revirement de jurisprudence ne peut

s’appliquer aux faits antérieurs à la décision

qui l’opère

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3) La question de droit

La Cour de cassation s'est ici interrogée sur la question suivante :

Quels sont les effets d’un revirement de jurisprudence sur les faits accomplis antérieurement ?

(Autres formulations possibles : Quels sont les effets dans le temps d’un changement

d’interprétation jurisprudentielle ? / Les revirements doivent-ils être rétroactifs ?/ A-t-on un

droit acquis à une jurisprudence figée ?)

4) La solution de droit

a) Le sens

A cette question, la Cour a répondu « Mais attendu que la sécurité juridique, invoquée

sur le fondement du droit à un procès équitable pour contester l'application immédiate d'une

solution nouvelle résultant d'une évolution de la jurisprudence, ne saurait consacrer un droit

acquis à une jurisprudence figée, dès lors que la partie qui s'en prévaut n'est pas privée du

droit à l'accès au juge ; que le moyen n'est pas fondé en sa première branche ».

Afin d'éclairer le sens de la solution de droit rendue, nous analyserons ses termes

principaux.

Sécurité juridique : le terme sécurité désigne les situations qui sont à l’abri du danger. Cette

notion appliquée au domaine juridique fait référence à un droit dont la mise en œuvre respecte

les prévisions des intéressés, à un droit qui ne fait pas subir à ses sujets des perturbations

imprévues.

Le fondement est l’argument, le motif avancé au soutien d’une prétention.

Le droit à un procès équitable est un droit établi par l’article 6 de la CEDH pour garantir la

probité et la qualité du traitement judiciaire.

L’application immédiate est la mise en œuvre sans délai d’une règle. On notera que

l’expression est utilisée de façon ambigüe. En effet, dans la problématique voisine qu’est

l’application de la loi dans le temps : elle vise l’application de la loi nouvelle à tous les faits

postérieurs à son entrée en vigueur. Or, ici il s’agit d’appliquer la règle à des faits antérieurs à

son apparition.

Solution nouvelle : il s’agit ici d’une règle différente due à une « évolution ». Le choix du

vocabulaire est ici intéressant, car si les termes retenus montrent bien qu’un changement s’est

produit ils n’insistent pas sur le contraste avec la solution antérieure. En effet, le terme

« évolution » fait dans le langage courant référence à une transformation graduelle et le choix

de l’adjectif « nouvelle » évite d’employer les termes « différente » ou « contraire ».

Corroborant ces éléments, il faut également noter que le vocable « revirement » n’est pas

employé. Pourtant, c’est bien de cela dont il s’agit. Toutefois, si la Cour de cassation n’a pas

souhaité utiliser le terme, c’est sans doute car il renvoie, dans le langage courant, à un

changement complet et brusque.

Jurisprudence : ce terme englobe plusieurs significations. Ces deux principales acceptions

sont « l’ensemble des décisions rendues pendant une certaine période dans une certaine

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matière » et « la solution apportée par une juridiction à une question juridique discutée et qui,

en raison de l’autorité morale de la juridiction concernée et/ou de la qualité du raisonnement

juridique est reprise par les autres juridictions ». Ce second sens est celui utilisé ici par la

Cour de cassation.

Se prévaloir : tirer un avantage ou un parti de quelque chose.

Droit acquis : droit qui étant valablement entré dans le patrimoine d’une personne en

application de la règle ancienne ne peut plus être remis en cause par l’application d’une

nouvelle règle. Cette notion a surtout été utilisée dans la réflexion menée à propos de la loi

dans le temps. Elle doit attirer l’attention sur la similitude des problématiques et la question

de la rétroactivité.

Jurisprudence figée : interprétation d’un texte qui ne pourrait pas évoluer. A noter que

l’adjectif « figé » a une connotation en général négative (renvoyant aux idées de sclérose, de

paralysie). Son utilisation ici montre que la Cour de cassation entend privilégier le caractère

évolutif de la jurisprudence et justifier ainsi son caractère rétroactif (en effet, pour viser la

même réalité, elle aurait pu utiliser les adjectifs « établie », « stable » ou « constante » qui ne

présentaient pas cette connotation).

Etre privé : ne pouvoir utiliser obtenir quelque chose.

Accès au juge : droit de faire entendre sa cause par une juridiction.

Ainsi, la Cour de cassation considère qu’un changement de jurisprudence doit

s’appliquer sans considération de la date des faits concernés (c’est-à-dire y compris aux faits

antérieurs). Il n’est donc pas possible d’invoquer l’interprétation qui prévalait au moment où

les faits se sont réalisés. Une seule limite est admise : lorsque l’évolution jurisprudentielle

pourrait priver un justiciable de son droit de saisir le juge.

b) La portée

Ce débat sur l’encadrement du caractère rétroactif de la jurisprudence ne pouvait être

tranché par l’application de textes internes, car officiellement dans notre système juridique la

jurisprudence n’est pas une source de droit. Aussi, ni la Constitution, ni le Code civil

n’encadrent l’application dans le temps des règles qu’elle institue.

Ce constat explique que la discussion et la réponse donnée par la Cour de cassation se

soient focalisées sur un texte international : l’article 6 de la CEDH. Néanmoins, ce texte

n’évoque pas explicitement le problème, il instaure un droit général à un procès équitable.

L’enjeu est donc de déterminer si un procès équitable suppose la prévisibilité des règles

applicables, et plus précisément des règles prétoriennes. La réponse de la Cour de cassation

est négative : l’article 6 de la CEDH ne permet pas d’encadrer de façon générale l’application

dans le temps des positions jurisprudentielles. Le seul rôle reconnu à ce texte est d’encadrer

les solutions relatives à l’accès au juge.

Le principe retenu (application du revirement indépendamment de la date des faits

jugés) n’est pas nouveau, en effet cette position a déjà été affirmée dans des termes identiques

par un arrêt de la première Chambre civile de la Cour de cassation du 21 mars 2000.

Toutefois, une décision de l’Assemblée plénière de la Cour de cassation en date du 21

décembre 2006 avait accepté sur le fondement de l’article 6 de la CEDH de moduler dans le

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temps les effets des revirements de jurisprudence. Or, l’ampleur de cette admission suscitait

des profondes divergences d’interprétation.

La décision commentée est venue préciser qu’il ne s’agissait que d’une exception,

cantonnant donc l’ouverture opérée par l’Assemblée plénière aux seules hypothèses où il est

question du droit à l’accès au juge.

Pour saisir l’intérêt et les incidences de la décision commentée, il faut tenter de

déterminer le domaine exact de l’exception, c’est-à-dire des hypothèses auxquelles est

cantonné l’effet de l’article 6 de la CEDH. La Cour évoque la privation de l’accès au juge,

donc cela ne devrait concerner que les règles de procédure et celles de prescription. Il faut

souligner que ce domaine est très réduit.

c) La valeur

Cette décision est un facteur d’insécurité juridique. Un citoyen se conformant

aujourd’hui à une interprétation jurisprudentielle peut voir demain son comportement critiqué

car la règle a changé.

Cette insécurité a été perçue et encadrée pour les lois nouvelles, pourquoi ne pas

étendre cette protection aux règles créées par la jurisprudence ? En effet, la comparaison avec

l’application de la loi dans le temps met en lumière les inconvénients de la solution retenue.

Ainsi, en ce qui concerne la loi, la rétroactivité est, en principe, écartée par l’article 2 du code

civil. De plus, les juges ont même limité la possibilité pour le législateur d’édicter des lois

rétroactives. En effet, les juridictions ont imposé qu’il existe une justification à cette

rétroactivité, c’est-à-dire ont considéré que le choix de la rétroactivité par le législateur n’était

plus discrétionnaire. (CEDH décision du 28 octobre 1999 qui exige que la rétroactivité soit

justifiée par d’« impérieux motifs d’intérêt général » et Cass, AP, 23 janvier 2003 reprenant

la même formule). Le contraste doit ici être souligné entre la limitation de la rétroactivité de la

loi et l’admission de celle de la jurisprudence.

De plus, l’application de cette solution ne se fera pas sans difficulté d’interprétation,

car il n’est pas évident de cerner le champ d’application de l’exception. Quelles sont

précisément les matières où une interprétation jurisprudentielle pourrait priver le justiciable de

son droit d’accès au juge ?

Néanmoins, il est vrai que ce n’est peut-être pas à la Cour de cassation de déterminer

elle-même quel va être le statut de ses décisions. L’évolution de ce statut appelle sans doute

l’intervention du législateur ou du moins un renouvellement de la réflexion sur les sources du

droit français et la remise en cause de la présentation héritée de l’époque révolutionnaire selon

laquelle la jurisprudence n’est pas, dans notre système, une source de droit.