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UNIVERSITE DE GRENOBLE Sciences Po Grenoble Sarah VOIRIN LA COOPÉRATION TRANSFRONTALIÈRE : UN CHAMP D’ACTION POUR L’ADAPTATION AU CHANGEMENT CLIMATIQUE. 2014 Master 2 Organisations Internationales Sous la direction de M. Stéphane Labranche

Cross-border cooperation - adaptation to climate change

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UNIVERSITE DE GRENOBLE Sciences Po Grenoble

Sarah VOIRIN

LA COOPÉRATION TRANSFRONTALIÈRE : UN CHAMP D’ACTION POUR L’ADAPTATION AU CHANGEMENT CLIMATIQUE.

2014Master 2 Organisations Internationales

Sous la direction de M. Stéphane Labranche

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UNIVERSITE DE GRENOBLE Sciences Po Grenoble

Sarah VOIRIN

LA COOPÉRATION TRANSFRONTALIÈRE : UN CHAMP D’ACTION POUR L’ADAPTATION AU CHANGEMENT CLIMATIQUE.

2014Master 2 Organisations Internationales

Sous la direction de M. Stéphane Labranche

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REMERCIEMENTS

Je tiens à remercier Stéphane Labranche, mon directeur de mémoire, pour sa disponibilité, son aide et ses conseils qui m’ont permis de réaliser ce travail. Son appui a été fondamental pour cadrer mon analyse.

Je tiens également à souligner l’accompagnement que m’ont fourni les membres de l’Observatoire national sur les effets du réchauffement climatique (ONERC), et en particulier Sylvain Mondon, mon directeur de stage, pour sa disponibilité et sa patience. Ses réflexions critiques et constructives m’ont aidé à concevoir mon mémoire.

Ce stage n’aurait pas eu lieu sans que Nicolas Bériot accepte ma candidature, et pour cela je le remercie.

Pour realiser les entretiens qui alimentent ce memoire, j’ai sollicite de nombreuses personnes, qui m’ont accorde leur temps et partage leurs informations. Un grand merci a Maïté Fournier, Sarah Tiefenauer, Mohamed Boulahia, Michel Aldon et Chantal Andrianarivo.

Je remercie egalement les membres du Departement de lutte contre l’effet de serre pour leur accueil, et particulierement Claire Bergé pour ses encouragements.

Pour la qualite et la sympathie de nos echanges, je veux remercier Marie-Pierre Méganck et Frédéric Schafferer du Ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie.

Je souhaite remercier Hélène Desbieys pour son appui et sa bonne humeur lorsque nous étions toutes les deux en stage à l’ONERC.

Je remercie évidemment tous mes proches pour leur soutien dans cette belle aventure.

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SOMMAIRE

INTRODUCTION GÉNÉRALE.................................................................................................................................. 6

CHAPITRE 1 : COOPÉRATION TRANSFRONTALIÈRE, UNE DIMENSION PERTINENTE POUR L’ADAPTATION AU CHANGEMENT CLIMATIQUE ?...................................................................................... 18

CHAPITRE 2 : APPROCHE EMPIRIQUE DE LA COOPÉRATION TRANSFRONTALIÈRE POUR L’ADAPTATION À TRAVERS TROIS ÉTUDES DE CAS................................................................................... 30

SECTION 1 : LE BASSIN DE LA MEUSE..................................................................................................................................... 31SECTION 2 : LE BASSIN MÉDITERRANÉEN.............................................................................................................................. 40SECTION 3 : LES ÎLES DE L’OUEST DE L’OCÉAN INDIEN........................................................................................................ 47

CHAPITRE 3 : ENSEIGNEMENTS POUR ENRICHIR UN PROCESSUS EN DEVENIR................................53

CONCLUSION GÉNÉRALE..................................................................................................................................... 62

BIBLIOGRAPHIE.................................................................................................................................................... 66

ANNEXES ................................................................................................................................................................. 78Annexe 1 - Présentation des missions de l’ONERC..................................................................................................................................79Annexe 2 - La démarche d’adaptation de l’Union Européenne..........................................................................................................81Annexe 3 - Étude comparée des processus d’adaptation au changement climatique dans les pays de l’espace européen (printemps 2014)...............................................................................................................................................................................89Annexe 4 - Listes des personnes ayant contribué à ma réflexion..................................................................................................100

TABLE DES MATIÈRES....................................................................................................................................... 102

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INTRODUCTION GÉNÉRALE

1. La Nécessité des Politiques Climatiques

a)L’adaptation au changement climatique : une politique climatique nouvelle.

L’adaptation au regard du changement environnemental n’est rien de nouveau. Les

individus et les systèmes socio-écologiques ont toujours répondu aux pressions

extérieures. Mais le changement climatique apporte un défi particulier : celui de pouvoir

anticiper les phénomènes climatiques. C’est pour cette raison que la compréhension de

l’adaptation au changement climatique est un défi critique de notre époque. L’adaptation

est ici conçue comme un phénomène dynamique, comme un processus plutôt que comme

un statut. En effet, un individu ou une organisation peuvent être bien adaptés à un

moment particulier dans l’histoire, mais le dynamisme du changement climatique requiert

une adaptation qui puissent co-évoluer avec lui. Le changement climatique n’est plus une

menace extérieure, mais un élément intime de l’histoire humaine, à la fois conséquence et

moteur des décisions prises en matière de développement par les individus, les

organisations et les gouvernements. Ce qui suggère qu’il est nécessaire d’anticiper les

impacts du changement climatique1. Nous devons dès aujourd’hui réfléchir à la manière

d’adapter notre société au changement climatique car, malgré les efforts pour réduire les

émissions de gaz à effet de serre, des changements profonds sont désormais

inéluctables, du fait de la concentration actuelle de gaz à effet de serre dans l’atmosphère

et de l’inertie du système climatique2.

L’adaptation à la variabilité et au changement climatique est définie par le Groupe

d’experts Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat (GIEC) comme « l’ajustement des

systèmes naturels ou humains en réponse à des stimuli climatiques ou à leurs effets, afin

d’atténuer les effets néfastes ou d’exploiter des opportunités bénéfiques »3. En somme,

1 PELLING, Mark. Adaptation to climate change : from resilience to transformation. Londres : Routledge, 2011. 224 p.2 Observatoire National sur les Effets du Réchauffement Climatique. L’adaptation de la France au changement climatique, rapport annuel au Premier Ministre et au Parlement, 2011.3 Groupe d’experts Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat. Troisième rapport d’évaluation, rapport du

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l’adaptation a pour but de réduire la vulnérabilité à la variabilité climatique et au

changement climatique. La vulnérabilité à la variabilité et au changement climatique est

définie par le GIEC comme « le degré auquel un système risque de subir ou d’être affecté

négativement par les effets néfastes des changements climatiques ». La vulnérabilité au

changement climatique est la rencontre de l’exposition d’un territoire aux impacts du

changement climatique et de la sensibilité d’une société telle qu’elle ne peut empêcher ces

impacts de créer des dommages sociaux, économiques ou environnementaux. La

vulnérabilité au changement climatique est donc à la jonction entre des facteurs naturels

et des facteurs anthropiques (économiques, sociaux, culturels, politiques). L’exposition

correspond à la nature et au degré auxquels un système est exposé à des variations

climatiques significatives sur une certaine durée. Les variations du système climatique se

matérialisent par des événements extrêmes tels que des inondations, des tempêtes ainsi

que l’évolution des moyennes climatiques. La sensibilité au changement climatique fait

référence à la proportion dans laquelle un élément exposé (collectivité, organisation…) au

changement climatique est susceptible d’être affecté favorablement ou défavorablement

par la manifestation d’un aléa. L’aléa au sens large constitue un phénomène, une

manifestation physique ou une activité humaine susceptible d’occasionner des dommages

aux biens, des perturbations sociales et économiques voire des pertes en vies humaines

ou une dégradation de l’environnement4. La vulnérabilité au changement climatique

apparaît donc comme le degré par lequel un système risque d’être affecté négativement

par les effets des changements climatiques sans pouvoir y faire face. En cas de période

de forte chaleur, la vulnérabilité d’un territoire dépend de son degré d’exposition à

l’augmentation des températures ; de ses caractéristiques socio-économiques telles que la

présence de populations fragiles, les personnes âgées, par exemple, qui vont conditionner

sa sensibilité à l’aléa chaleur ; et de sa capacité d’adaptation, c’est-à-dire des systèmes de

prévention mis en place et de l’accès aux équipements d’urgence.

Il existe deux types d’adaptation. La première est réactive ou spontanée, il s’agit d’une

réaction aux impacts du changement climatique après qu’ils se soient produits. La

seconde est anticipative et consiste à agir avant que les évolutions climatiques ne se

produisent, afin de réduire les vulnérabilités des territoires. Dans ce dernier cas, il s’agit

d’une adaptation qui résulte de décisions stratégiques délibérées, fondées sur une

Groupe de Travail II : « Impacts, Adaptation et Vulnérabilité », 2001. 4 Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie. Diagnostic de vulnérabilité d’un territoire au changement climatique. Éléments méthodologiques tirés de l’expérience internationale, 2012.

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perception claire des conditions qui pourront changer.

L’acceptation de la notion d’adaptation s’est déroulée en plusieurs étapes, avec des

tensions et demeure encore floue. Elle fut d’abord le fruit d’un consensus scientifique, puis

d’un consensus politique. L’adaptation apparaît formellement pour la première fois dans le

Deuxième rapport d'évaluation du GIEC en 1995. Le rapport conclut en ébauchant la

portée du soutien nécessaire pour l’adaptation. Il soutient qu’une adaptation efficace

dépend de la disponibilité des ressources financières, du transfert de technologies, des

pratiques culturelles, éducatives, managériales, institutionnelles, légales, réglementaires

intérieures et internationales. Ensuite l’adaptation entre dans le cadre des négociations

internationales sur le climat. Les années 2000 ont vu la montée en puissance de la notion

d’adaptation. Progressivement les gouvernements ont accordé plus d’attention à

l’anticipation des changements climatiques, face à l’incapacité de la communauté

internationale à adopter un accord international suffisamment contraignant pour limiter les

émissions de gaz à effet de serre, alimentant le changement climatique. En 2005, le

Programme de travail de Nairobi est adopté pour aider les États parties à la Convention

Cadre des Nations Unies pour le changement climatique (CCNUCC), et surtout les pays

en développement, à améliorer leur compréhension et leur évaluation des impacts et de

leur vulnérabilité au changement climatique ainsi qu’à prendre des décisions avisées sur

les actions et mesures concrètes d’adaptation. En 2009, la Conférence des Parties de

Copenhague reconnaît la nécessité d’améliorer l’action en matière d’adaptation pour

réduire la vulnérabilité et construire une résilience dans les pays en développement et

surtout dans les pays les plus vulnérables. Enfin, en 2010, en créant le Fonds Vert pour le

Climat, la Conférence des Parties de Cancún offre un véritable cadre pour l’adaptation

avec pour objectif de mettre en valeur l’action en matière d’adaptation et un focus

spécifique sur les pays en développement, et pour inciter les pays les moins avancés

(PMA) à formuler des plans d’adaptation nationaux (PANA).

b) Adaptation et Atténuation : deux politiques pour lutter contre le changement climatique.

Pour limiter les impacts négatifs du changement climatique, on peut soit réduire les

émissions de gaz à effet de serre (atténuation), soit s’adapter aux changements du climat

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(adaptation). Ces deux types de politiques climatiques n’ont cependant pas été traitées de

manière symétrique, l’adaptation au changement climatique ayant été longtemps reléguée

au second plan dans le débat sur le changement climatique. Ce déséquilibre traduit à la

fois les difficultés que soulève l’adaptation, comme le traitement de l’incertitude sur les

impacts futurs du changement climatique, par exemple, et la volonté d’esquiver la

discussion sur l’adaptation, perçue par certains acteurs comme une solution inférieure, car

n’agissant que sur les conséquences du changement climatique et non sur ses causes,

voire comme une solution dangereuse, car risquant de freiner la discussion sur

l’atténuation5.

De fait, on oppose souvent la gouvernance de l’adaptation à celle de l’atténuation en

considérant que l’adaptation, qui tente de réduire les conséquences du changement

climatique, est un enjeu de politique publique nationale alors que l’atténuation, qui agit sur

les causes du changement climatique, serait le seul enjeu qui ne pourrait se résoudre que

dans un cadre de coopération internationale.

A priori, les émissions de gaz à effet de serre d’origine anthropique contribuant au

changement climatique étant produites par tous les pays, leur atténuation devrait passer

par un effort collectif au niveau mondial. Et, le changement climatique ayant des impacts

au niveau local, l’adaptation devrait se résoudre individuellement au niveau national.

En réalité, chercher à réduire sa vulnérabilité individuellement à l’échelle nationale peut

conduire à des formes de mal-adaptation sur son territoire comme au-delà des frontières.

Pour s’adapter aux effets du changement climatique il peut alors devenir nécessaire de

coopérer avec les autres pays.

2. Les barrières à l’adaptation et les risques de mal-adaptation.

S’il est clair qu’il faut commencer dès maintenant à penser à adapter nos sociétés

au changement climatique, il n’est pas question d’agir avec précipitation, sinon cela

5 HALLEGATTE Stéphane, LECOCQ Franck, DE PERTHUIS Christian. Economie de l’adaptation au changement climatique, rapport du Conseil Economique pour le Développement Durable, 2010.

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risquerait d’engendrer de la « mal-adaptation ». Jared Diamond essaye de montrer dans

ses travaux que l’adaptation spontanée des sociétés est insuffisante6. On ne peut pas se

contenter d’une adaptation réactive. Il faut une adaptation préventive et même

transformatrice. C’est dans ce sens que Mark Pelling analyse la dimension sociale de

l’adaptation au changement climatique7. Il tente de nous montrer que jusqu’ici l’adaptation

a été pensée comme l’identification de ce qui doit être préservé et ce dont on peut se

passer plutôt que comme ce qui peut être réformé et ce que l’on peut gagner grâce à

l’adaptation. Il nous prévient contre le fait que les politiques et pratiques de l’adaptation ne

se réduisent à la recherche de la préservation d’un noyau économique plutôt que

permettant d’encourager la prospérité des développements culturels, sociaux aussi bien

qu’économiques. Il s’agit de comprendre l’adaptation comme un acte social et politique, un

acte particulièrement contemporain, qui porte en lui la possibilité de donner une nouvelle

forme au futur et aux relations de pouvoirs dans la société. Mark Pelling se réfère à Paulo

Freire8 qui nous met en garde sur le fait que sans une conscience critique, l’adaptation

risque de ne se limiter qu’à des efforts qui ne promeuvent que des actions pour survivre

mieux avec, qu’à chercher à changer les structures sociales et politiques. Ainsi la forme la

plus évidente de mal-adaptation au changement climatique est une adaptation prenant la

forme d’une résistance à un nouvel événement qui survient et, par la même, d’une

adaptation conservatrice en tant que volonté de retour à un état initial. La tentation de

s’adapter à un changement de situation actuel sans penser à l’évolution potentielle de

cette situation sur le long terme est si forte et paraît si naturel qu’il convient d’adresser le

problème de la mal-adaptation.

La mal-adaptation est définie par le GIEC comme « un changement opéré dans les

systèmes naturels ou humains qui font face au changement climatique et qui conduit - de

manière non intentionnelle - à augmenter la vulnérabilité au lieu de la réduire »9. En ce

sens, la mal-adaptation est une adaptation ayant eu l’effet inverse que prévu.

La mal-adaptation peut prendre plusieurs formes. Elle peut résulter d’une utilisation

inefficace de ressources comparée à d’autres options d’utilisation possibles. C’est le cas,

6 DIAMOND, Jared. Effondrement. Comment les sociétés décident de leur disparition ou de leur survie, Paris, Gallimard, 2006.7 op. cit. p.18 FREIRE, Paulo. Education for Critical Consciousness, 1969.9 op. cit. p.1

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par exemple, du recours massif à la climatisation individuelle au lieu de l’investissement

dans l’isolation. La mal-adaptation peut également se présenter sous la forme d’une

réduction de la marge d’adaptation future. Elle peut venir d’une erreur de calibrage, on

parle alors de sous-adaptation. Cela se produit dans le cas de la construction d’une digue

trop petite par rapport à l’augmentation du niveau de la mer résultant du changement

climatique. Et la mal-adaptation est aussi un transfert incontrôlé de vulnérabilité d’un

système à un autre, d’une période à une autre, d’un pays à un autre.

Dans le cas de la mise en œuvre d’une coopération transfrontalière pour favoriser

l’adaptation au changement climatique, le type de mal-adaptation qui nous intéresse est

celui du transfert de vulnérabilité. C’est dans cette perspective que Paul Vergès, président

de l’Observatoire national sur les effets du réchauffement climatique (ONERC)10, nous

encourage à réfléchir sur l’apport de la coopération transfrontalière pour l’adaptation au

changement climatique : « Le transfert de vulnérabilité au-delà des frontières d’un État

n’est pas une option acceptable. L’adaptation d’un territoire ne doit pas conduire à

fragiliser ses voisins »11. Puisque les frontières naturelles ne correspondent pas aux

frontières politiques et que donc les bassins de risques dépassent les frontières tracées

par les États, l’adaptation au changement climatique des régions transfrontalières est un

enjeu transnational. C’est pourquoi il est nécessaire d’intégrer la dimension

transfrontalière dans les projets d’adaptation au changement climatique.

3. La coopération transfrontalière : un type de solution pour éviter la mal-adaptation.

Selon la Mission Opérationnelle Transfrontalière (MOT), « la coopération

transfrontalière correspond aux relations de voisinage qu’entretiennent les collectivités

territoriales et leurs groupements de part et d’autre des frontières. »12 De plus, le but

principal de la coopération transfrontalière est de réduire les effets négatifs des frontières

en tant que barrières administratives, légales et physiques, de traiter des problèmes

10 cf. annexe 1 – Présentation des missions de l’ONERC.

11 Observatoire National sur les Effets du Réchauffement Climatique. Adaptation transfrontalière. La lettre aux élus, 2013.12 Mission operationnelle transfrontaliere, Guide de la cooperation decentralisee transfrontaliere, juillet 2010.

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communs et d’exploiter des potentiels inexploités. À travers la gestion conjointe de

programmes et de projets, la coopération transfrontalière est en charge d’une large

gamme d’enjeux, incluant notamment l’amélioration de la gestion conjointe des ressources

naturelles. De fait, si le changement climatique a des impacts sur les ressources naturelles

communes aux régions transfrontalières, les mesures d’adaptation qui en découlent

doivent également faire l’objet d’une coopération transfrontalière. C’est pourquoi la

coopération transfrontalière apparaît comme un levier pour débloquer des situations où

des régions transfrontalières ne peuvent pas bien s’adapter en le faisant individuellement

puisqu’elles sont interdépendantes les unes des autres.

Dans cette perspective, la coopération transfrontalière peut permettre, aux États qui

souhaitent s’adapter, d’éviter le transfert de vulnérabilité au changement climatique, et de

se détourner d’une trajectoire menant à la mal-adaptation. Elle peut également contribuer

à ce que les pays coopérant se partagent l’effort d’adaptation par la mutualisation des

compétences. Et dans le meilleur des cas, la coopération transfrontalière peut être un

levier pour que l’adaptation au changement climatique ne soit plus perçue comme une

contrainte et qu’elle permette même de récolter des bénéfices qui dépassent le seul fait

d’être adapté.

4. Les justifications de la méthode de travail.

De par ma formation pluridisciplinaire en sciences politiques j’ai été amenée à

réinvestir des connaissances et à utiliser des cadres de réflexion en provenance de

différents enseignements. Ainsi ce mémoire a été réalisé selon une approche croisant la

théorie des régimes internationaux, les politiques publiques internationales, le droit

international public, la sociologie des organisations internationales, les négociations

internationales sur le climat, la protection internationale de l’environnement et la

coopération décentralisée des collectivités territoriales.

D’une part, la démarche avec laquelle j’ai abordé ce sujet de mémoire est un travail de

recherche sous forme d'analyse, accompli à partir de l’étude de différents articles, rapports

et ouvrages en lien avec les thématiques de l’adaptation au changement climatique et de

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la coopération transfrontalière.

D’autre part, le stage que j’ai effectué à l’ONERC m’a permis d’avoir accès à la plupart des

données clés existantes aujourd’hui sur l’adaptation au changement climatique ; et grâce

au suivi de l’équipe de travail dans ses nombreuses et diverses missions, j’ai eu

l’opportunité d’observer et de participer à la construction pratique de l’approche nationale

de l’adaptation au changement climatique. En effet, pendant toute la durée de mon stage,

j’ai pu assister à des séminaires, à des conférences, et à des réunions de travail

informelles sur la thématique de l’adaptation.

Par ailleurs, il m’a également été permis de rencontrer la plupart des acteurs clés des

politiques d’adaptation. La méthode utilisée pour réaliser ce mémoire est donc d’allier à la

fois des enseignements théoriques et empiriques.

En outre, ce mémoire à été l’occasion de mobiliser le travail d’approfondissement

spécifique que j’ai effectué dans le cadre de mon stage à l’ONERC, à savoir : l’étude

comparative des processus d’adaptation au changement climatique dans les pays

européens13.

La France étant un des pays les plus en avance dans son processus d’adaptation au

changement climatique aujourd’hui et l’ONERC étant le point focal de l’adaptation en

France, il a semblé judicieux de prendre pour point de départ l’étude de la coopération en

matière d’adaptation aux frontières de la France selon des axes complémentaires. Ceci

implique d’explorer à la fois le pourtour métropolitain et les outre-mer afin de restituer au

mieux la pluralité des enjeux d’adaptation en fonction de leurs lieux d’émergence. Par

ailleurs, de l’analyse des différents processus d’adaptation existant dans l’espace

européen, que j’ai menée dans le cadre de mon stage à l’ONERC, ressort une diversité et

une richesse de solutions possibles pour s’adapter au changement climatique, qu’il a

semblé opportun de mettre à contribution pour délimiter le périmètre géographique de la

coopération transfrontalière en matière d’adaptation que je comptais traiter. De surcroît, la

pertinence de cette démarche est confortée par la pratique. En effet, la plupart des

13 Cf. Annexe 3 - Étude comparée des processus d’adaptation au changement climatique dans les pays de l’espace européen (printemps 2014).

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réunions internationales d’échanges formelles et informelles sur l’adaptation auquel

l’ONERC participe sont principalement des réunions entre pays européens, et qui plus est

transfrontaliers, et semblent cristalliser depuis un certain temps une demande croissante

d’aide à l’adaptation par mutualisation des compétences entre pays voisins.

5. Problématique.

L’adaptation au changement climatique est aujourd’hui reconnue comme un enjeu

de coopération internationale puisqu’elle vient d’être mise à l’agenda politique de la

CCNUCC au même titre que l’atténuation. Cependant et puisque cette reconnaissance est

récente, tous les aspects de l’adaptation ne sont pas encore pris en compte. La

mutualisation des compétences des acteurs de l’adaptation reste majoritairement affectée

à l’aide au développement tandis que la coopération aux frontières des États, comme

option pour gérer un risque commun accentué par le changement climatique et les

répercussions de ce risque d’un pays voisin à un autre, ne semble pas suffisamment

étudiée, en regard de l’importance que ce volet recouvre dans le processus d’adaptation.

Cela peut s’expliquer parce que l’adaptation elle-même est encore un concept mal

compris et que la plupart des pays ne sont pas suffisamment avancés dans l’élaboration

de leur stratégie et de leur plan d’adaptation pour comprendre l’intérêt de la coopération

transfrontalière dans le processus d’adaptation. Ceci pose problème puisque, comme

nous l’avons vu, la coopération transfrontalière est nécessaire dans certains cas, d’une

part pour se prémunir d’un éventuel transfert de vulnérabilités d’un pays à un autre, et

d’autre part, pour que les coûts d’adaptation du pays qui choisit de s’adapter ne soient pas

plus élevés qu’ils ne le devraient parce que le pays voisin ne le fait pas, et donc pour

éviter que l’adaptation de certains pays ne se traduisent par une mal-adaptation dans un

ou plusieurs autres pays.

Si la coopération transfrontalière est une des clefs pour améliorer le processus

d’adaptation au changement climatique, il s’agit alors de savoir comment développer ce

type de coopération et quels sont les obstacles à l’intégration de la coopération

transfrontalière dans les processus d’adaptation. En effet, même lorsque des pays

réussissent à se mettre d’accord pour se lancer dans un projet de coopération

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transfrontalière, ils ne s’y engagent pas forcément pour les mêmes raisons et ne mettent

pas en avant les mêmes priorités, cette divergence pouvant alors devenir un obstacle à la

coopération. C’est pourquoi nous veillerons à ne pas négliger les intérêts et les attentes

des différents acteurs quant à l’adaptation dans les projets de coopération transfrontalière

que nous étudierons. Toute la question étant de savoir dans quelle mesure la coopération

transfrontalière représente une opportunité pour s’adapter au changement climatique et de

comprendre quels sont les moteurs et les freins à cette coopération.

Quel cadre serait alors propice pour que la coopération transfrontalière soit intégrée dans

les processus d’adaptation et inversement comment mettre l’adaptation à l’agenda des

initiatives de coopération transfrontalière ? Certains projets de coopération transfrontalière

pour s’adapter au changement climatique fonctionnent bien, et ce, sans avoir eu recours à

une convention de coopération, qui n’est pas obligatoire, certes, mais est l’outil de droit

commun des collectivités et autorités locales pour les projets de coopération

transfrontalière ; tandis que d’autres projets, qui se sont développés sous l’égide d’une

convention ont des difficultés à engager des actions. Ceci pose la question de la

pertinence des conventions, des traités internationaux et donc des régimes internationaux

de coopération pour engendrer ou venir en appui des projets de coopération

transfrontalière pour l’adaptation. En effet, si les orientations stratégiques d’adaptation ont

une vocation strictement nationale et que la mise en œuvre des actions d’adaptation

s’effectue à l’échelon local, on peut se demander en quoi un régime de coopération

international serait un cadre pertinent pour développer des projets d’adaptation au

changement climatique.

6. Hypothèses de recherche.

Sur le plan scientifique, le changement climatique est un phénomène mondial qui

ne connaît pas de frontières, et ce, même si ses impacts sont et seront différents selon les

pays. Par conséquent étudier l’adaptation au changement climatique sous l’angle

transfrontalier apparaît approprié. Sur le plan éthique, il apparaît irrecevable de

promouvoir des mesures d’adaptation pour protéger un pays des impacts du changement

climatique si celles-ci ont des répercussions néfastes sur les pays voisins. Sur le plan

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économique, il n’est pas non plus rentable de mettre en œuvre des mesures d’adaptation

qui n’auraient aucun effet ou qui auraient des répercussions néfastes dans d’autres pays

puisque pour se prémunir de telles conséquences ces pays-là auraient tôt fait de renvoyer

à leur tour le problème vers son pays d’origine. À l’inverse, la coopération transfrontalière

est un moyen d’éviter des coûts supplémentaires d’adaptation dans le futur qui auraient

été générés par une mal-adaptation dans le présent. Sur le plan de l’actualité, l’Union

Européenne vient de publier sa stratégie d’adaptation en avril 2013, offrant ainsi un cadre

de pensée transnational à l’adaptation dont il semble opportun de se saisir pour faire

pencher le débat sur l’adaptation en direction de la coopération transfrontalière14.

Ce mémoire vise à montrer toute l’importance de la coopération transfrontalière pour

améliorer le processus d’adaptation. Si, d’une part, la coopération transfrontalière permet

à minima d’éviter le transfert de vulnérabilité au changement climatique, et par là même

permet de se détourner d’une trajectoire menant à la mal-adaptation ; elle est, d’autre part,

l’opportunité de se partager l’effort d’adaptation et de jouer des compétences de chacun

pour s’adapter si bien que certains secteurs pourront en récolter des bénéfices. Pour

toutes ces raisons une coopération entre pays transfrontaliers en matière d’adaptation au

changement climatique apparaît nécessaire et opportune.

7. Plan du mémoire.

Tout d’abord, ce mémoire va tenter de montrer la pertinence de la coopération

transfrontalière dans le processus d’adaptation au changement climatique. Dans le

premier chapitre, nous poserons le cadre général de la coopération transfrontalière. Nous

étudierons la coopération transfrontalière à travers la théorie des régimes internationaux.

Nous montrerons la spécificité de la coopération transfrontalière dans l’espace européen.

De plus, nous analyserons la place que peut recouvrir l’adaptation dans les initiatives de

coopération transfrontalière.

Dans le second chapitre, nous nous appuierons sur trois études de cas, réalisées au

14 Étant donné que les mesures d’adaptation au changement climatique sont souvent prises au niveau local,

l’idée d’une adaptation transfrontalière ne va pas de soi.

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travers d’entretiens semi-directifs auprès de personnes responsables ou impliquées dans

des projets de coopération transfrontalière. L’idée étant de confronter nos hypothèses

avec des initiatives concrètes en matière de coopération transfrontalière pour l’adaptation.

Nous procéderons de manière systématique par un diagnostic et une analyse des projets

de coopération transfrontalière dans les régions du bassin de la Meuse, de la mer

Méditerranée et de l’ouest de l’océan Indien. Dans ce deuxième chapitre, nous avons

choisi des études de cas représentant trois axes possibles et significatifs des formes que

peut prendre la coopération transfrontalière pour l’adaptation. Chacun des projets répond

à sa manière à une partie des défis de l’adaptation au changement climatique. L’analyse

de ces projets portera sur les difficultés et les opportunités, les problèmes potentiellement

ainsi que les écueils évités par les acteurs au cours de ces initiatives de coopération

transfrontalière pour l’adaptation.

Par ailleurs, le périmètre géographique, les acteurs et les enjeux de ces trois études de

cas n’étant pas les mêmes, il s’agira de tirer des enseignements de cette diversité

d’options pour enrichir l’adaptation. Dans le troisième chapitre, nous tenterons d’illustrer

l’idée que l’adaptation est un processus en devenir, loin d’être achevé et ouvert à

l’innovation, en mettant en lumière les différents types d’enseignements dont sont

porteuses les trois études de cas. De plus, étant donné la diversité des acteurs et des

approches qui façonne la coopération transfrontalière en matière d’adaptation, nous

proposerons une gouvernance de l’adaptation transfrontalière sans pilote attitré

encourageant la mutualisation des compétences. Enfin, nous montrerons l’inadéquation

de la recherche d’un modèle de référence en regard de la singularité des situations

d’adaptation et du foisonnement de solutions existantes.

Sarah Voirin | Institut d’Études Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014

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Page 18: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

CHAPITRE 1 : COOPÉRATION TRANSFRONTALIÈRE, UNE DIMENSION PERTINENTE POUR L’ADAPTATION AU CHANGEMENT CLIMATIQUE ?

1. Cadre général de la coopération transfrontalière.

Si les notions de coopération transnationale et de coopération transfrontalière sont

souvent utilisées de manière interchangeable, la notion retenue pour cette étude est la

coopération transfrontalière. C’est la coopération transfrontalière qui nous intéresse car la

notion de frontière à dépasser qu’elle recouvre est nécessaire à la compréhension de

notre sujet sur l’adaptation au changement climatique.

De plus, il ne peut s’agir de coopération transnationale car, selon la terminologie de

l’Union Européenne, le principe de la coopération transnationale est d’organiser des

partenariats au sein de grandes régions européennes, concerne des macro-régions et non

pas des espaces frontaliers d’étendue limitée.

La définition que nous utiliserons est celle retenue dans le Guide de la coopération

décentralisée transfrontalière de la MOT selon laquelle « la cooperation transfrontaliere

correspond aux relations de voisinage qu’entretiennent les collectivites territoriales et leurs

groupements de part et d’autre des frontieres. »15

Nous cherchons à montrer que la coopération transfrontalière est une dimension

pertinente pour l’adaptation au changement climatique. L’idée est de partir du principe que

l’étendue de territoire qui subit certains effets du changement climatique et qui donc doit

être adaptée à celui-ci constitue un bassin de risques qui dépasse les frontières des États.

Le bassin de risques étant définit dans le guide général de plan de prévention des

risques16 comme une « entité géographique homogène soumise à un même phénomène

15 op. cit. p.716 Ministère de l'Equipement, des Transports et du Logement, Ministère de l'Aménagement du Territoire et de l'Environnement. Plans de prévention des risques naturels (PPR), Guide général, ed. La Documentation française, 1999.

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Page 19: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

naturel », la coopération transfrontalière semble donc être le moyen de contourner les

barrières administratives formées par les frontières étatiques pour adapter ce type de

territoire au changement climatique.

Étant donné que l’adaptation au changement climatique implique des actions

transversales dans plusieurs domaines d’activités tels que la protection de

l’environnement, la gestion de l’eau, la gestion du territoire, la coopération transfrontalière

pour l’adaptation des bassins de risques au changement climatique peut prendre la forme

ou avoir un impact sur la gestion intégrée des ressources en eau des bassins

transfrontaliers. En protégeant les ressources en eau d’un bassin transfrontalier, la

coopération transfrontalière permet de ce fait d’assurer la paix, la subsistance des

populations qui y vivent, de contribuer a la securite regionale et au developpement

economique.

Dans cette perspective la coopération transfrontalière apparaît comme une opportunité

pour permettre aux bassins transfrontaliers d’être gérés de la même façon que les bassins

nationaux. Et ce d’autant plus que comme le rappelle le Conseil Mondial de l’eau il n’existe

aucune autorite internationale ou systeme judiciaire reconnu, pour arbitrer les litiges dans

le secteur des hydro-systèmes transfrontaliers.17

La coopération transfrontalière est, en tout cas, de plus en plus perçue comme la

conséquence logique d’une perspective intégrée de la gestion des fleuves majeurs

d’Europe. Cette tendance vers la coopération entre les États membres de l’Union

européenne est renforcée par les directives européennes dans le domaine de l’eau,

notamment la directive-cadre sur l’eau et la directive européenne sur les risques

d’inondation. La directive-cadre sur l'eau, adoptée le 23 octobre 2000 par le Parlement

européen, entrée en vigueur le 22 décembre de la même année, entend impulser une

politique de l'eau plus cohérente, en posant le cadre européen d'une gestion et d'une

protection des eaux par district hydrographique. La directive européenne relative à la

gestion des inondations, entrée en vigueur le 26 novembre 2007, demande aux États

membres d'identifier et de cartographier les bassins hydrographiques et les zones côtières

à risque et d'établir des plans de gestion. Entre la première et la deuxième directive une

évolution se dessine en faveur de la prise en compte du changement climatique dans la

17 Conseil mondial de l’eau. Bassins transfrontaliers. World Water Action, 2003, chap.3.

Sarah Voirin | Institut d’Études Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014

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Page 20: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

gestion intégrée des bassins hydrographiques et donc potentiellement des bassins

hydrographiques transfrontaliers.

L’intérêt d’étudier l’adaptation au changement climatique à travers la coopération

transfrontalière et non pas à travers une autre forme de coopération est, d’une part, que

les entités territoriales frontalières semblent posséder un meilleur degré d’adaptation aux

processus de changement en cours puisqu’elles montrent une tendance à coexister et

interagir avec d’autres catégories et organisations d’acteurs internationales. En effet, la

coopération transfrontalière se présente comme une dynamique multi-niveaux où

différents systèmes légaux se rencontrent : le droit international, le droit européen et les

lois nationales.

Dans cette perspective, la coopération transfrontalière pourrait être un instrument potentiel

du processus de « mainstreaming » de l’adaptation au changement climatique, c’est-à-dire

d’intégration de cette notion dans toutes les politiques publiques déjà existantes et à tous

les niveaux de gouvernance.

L’intérêt d’avoir recours à la coopération transfrontalière pour porter des projets

d’adaptation au changement climatique est, d’autre part, si l’on s’appuie sur l’analyse du

droit transnational que fait Anna Margherita Russo dans Perspectives on Federalism18,

publié en 2012, que cette forme de coopération porte en elle des sources de législations

en meilleure adéquation avec l’évolution des besoins légaux actuels et futurs par rapport à

la coopération étatique traditionnelle. En effet, le phénomène de globalisation a apporté la

crise de l’État. La crise de l’État a produit la fin du monopole d’État sur les sources légales

applicables sur son propre territoire. Ce phénomène a deux effets, d’une part, le droit

national ne peut pas, complètement en tout cas, couvrir la régulation des activités sur le

territoire étatique ; et d’autre part, il met en lumière l’importance de nouveaux phénomènes

légaux impliquant différentes organisations et institutions. La coopération transfrontalière

se présenterait donc comme une alternative à la coopération bilatérale d’État à État qui

relève plus d’une approche « top-down », c’est-à-dire du haut vers le bas de la hiérarchie

administrative. En effet, la coopération transfrontalière relève plutôt d’initiatives locales,

sont souvent le fait des collectivités territoriales, et témoigne donc d’une approche

18 RUSSO, Anna Margherita, Globalization and Cross-border Cooperation in EU Law: A Transnational Research Agenda. Perspectives on Federalism, 2012, vol. 4, n°3.

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Page 21: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

« bottom-up », c’est-à-dire du bas vers le haut de la hiérarchie administrative.

En ce sens, il serait intéressant de considérer la coopération transfrontalière comme une

arène de coopération potentielle pour palier le vide législatif entre les actions et mesures

d’adaptation au changement climatique au niveau national et local orientées par les

stratégies et plans nationaux d’adaptation et les actions et mesures d’adaptation au

changement climatique telles qu’elles sont prévues par le régime international de

coopération de la CCNUCC.

2. La coopération transfrontalière analysée à travers la théorie des régimes internationaux.

Afin d’obtenir une analyse intégrée de la coopération transfrontalière, il s’agit d’en

comprendre l’ensemble des motivations, des résultats attendus et les moyens mis en

œuvre par les acteurs impliqués dans ces projets de coopération. La théorie des régimes

internationaux nous apporte à cet égard un panel d’angles d’analyse suffisant pour avoir

une vision englobante des dynamiques qui sous-tendent la coopération transfrontalière.

On peut catégoriser les courants au sein de la théorie des régimes de différentes façons.

Pour notre analyse nous retiendrons qu’il existe trois courants principaux : le courant

réaliste, le courant libéral et le courant constructiviste. Au fondement de ces trois courants,

on retrouve la même notion de régime international, définie par Stephen Krasner comme

« un ensemble de principes, de normes, de regles et de procedures de prise de decision,

implicites ou explicites, autour desquelles les attentes des acteurs convergent dans un

domaine specifique des relations internationales. Les principes sont les croyances dans

les faits et les causes. Les normes sont des criteres de comportements definis en termes

de droits et d’obligations. Les regles sont des prescriptions specifiques a partir desquelles

on prend action. Les procedures de prise de decision sont les pratiques acceptees afin de

creer et de mettre en œuvre un choix collectif. »19 La notion de régime international fait

donc référence à une forme de coopération semi-institutionnelle.

19 KRASNER, Stephen. International Regimes, Ithaca, New York : Cornell University Press, 1983. 384 p.

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Page 22: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

Le courant realiste, tient que la presence d’une « puissance hegemonique »20 est

necessaire a la formation et a la persistance d’un regime. Charles Kindleberger a introduit

le terme d’hégémonie dans le champ des relations internationales et dans le champ de

l’économie politique à travers sa théorie de la stabilité hégémonique. Dans The World in

Depression: 1929–1939, publié en 1973, il montre que l’hégémonie relève de la capacité,

pour la puissance dirigeante d’une période spécifique, de fournir les biens publics

fondamentaux au niveau économique international. Il cite en particulier le libre-échange et

un système monétaire international stable comme deux biens publics particulièrement

précieux à l’échelle internationale. Il considère que le leader, tout en se montrant

bienveillant, est aussi le seul à disposer de la puissance nécessaire pour assumer les

coûts de fourniture de tels biens, mobiliser ses partenaires et leur imposer le respect des

règles. Selon la théorie de la stabilité, la concentration de puissance en un État dominant

facilite le développement des régimes forts alors que la fragmentation de puissance est

associée à l’effondrement des régimes. Les auteurs du courant réaliste considèrent l’État

comme l’unique acteur significatif détenant la légitimité politique. Le courant réaliste part

du principe que l’état normal des relations étatiques est un état d’anarchie voire de guerre

permanent, pense la politique extérieure des États comme une politique de puissance

dans une quête de sécurité et perçoit les États comme des acteurs rationnels qui

cherchent à maximiser leur intérêt national. Dans le courant réaliste, la coopération prend

la forme d’un marchandage dont la négociation est l’outil. Dans cette perspective, la

coopération transfrontalière est définie comme le résultat de la distribution ou de la

redistribution des intérêts et des ressources de chaque côté de la frontière. La coopération

transfrontalière est donc dépendante de la complémentarité des ressources, des possibles

échanges et compromis au sein du domaine de politique publique pertinent21. De ce point

de vue, une coopération transfrontalière pour le développement de projets d’adaptation au

changement climatique peut voir le jour si l’interdépendance des États riverains dans la

gestion intégrée des bassins de risques transfrontaliers surpasse leur capacité à résoudre

le problème individuellement.

Pour le courant liberal, la presence d’une puissance hegemonique n’est pas necessaire a

la persistance d’un régime car les États et les autres acteurs peuvent s’organiser afin de

20 KINDLEBERGER, Charles. The World in Depression: 1929–1939. University of California Press, 1973.21 WIERING Mark, VERWIJMEREN Joris, LULOFS Kris, FELD Christian. Experiences in Regional Cross Border Co-operation in River Management. Comparing Three Cases at the Dutch-German Border. Water Resources Management, 2010, vol. 24, n°11.

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Page 23: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

creer un regime. Selon l’approche liberale, un regime est une autoregulation internationale

dans laquelle des États et d’autres acteurs internationaux cooperent afin de maximiser

leurs gains ou minimiser leurs pertes. Le courant libéral part du principe que les États sont

soumis à des interdépendances complexes qui les poussent quasi inévitablement à

coopérer. Puisque les États sont poussés à coopérer, il s’agit de pouvoir prévoir le

comportement des autres États et c’est le rôle des institutions internationales, des régimes

internationaux. En effet, selon Keohane, l’un des fondateurs de la théorie des régimes

avec Krasner, les régimes internationaux « facilitent la coopération en réduisant

l’incertitude »22. Les régimes ont l’avantage de donner une structure relativement stable

aux échanges internationaux dans un secteur donné, de permettre aux acteurs de prévoir

leurs comportements respectifs et d’accroître leur information mutuelle. Pour le courant

libéral, la coopération transfrontalière est plus facilement établie quand elle se développe

au sein d’un régime international de coopération23. En effet, les régimes internationaux

serviraient à produire des normes et des valeurs communes et à encourager l’agrégation

et l’intégration des intérêts des États riverains impliqués. Dans cette perspective, le

développement de projets de coopération transfrontalière pour l’adaptation au

changement climatique serait favorisé par la mise en place d’un régime international de

coopération spécifique à l’adaptation au changement climatique.

Le courant constructiviste, quant à lui, souligne l’impact des idées. Au lieu de prendre

l’État pour une donnée et de supposer qu’il cherche tout simplement à survivre, les

constructivistes considèrent les intérêts et les identités comme des produits extrêmement

malléables de processus historiques spécifiques. Ils accordent une grande attention aux

discours prédominants au sein des sociétés parce que le discours reflète et façonne les

croyances et les intérêts, et établit les normes du comportement accepté. Les normes qui

prévalent à la coopération ne viennent pas seulement des États mais peuvent aussi être

produites par des réseaux de professionnels dotés d’une expertise scientifique dans des

secteurs particuliers de politique publique internationale appelées communautés

epistemiques transnationales. Selon l’approche foucaldienne de la theorie des regimes,

proche du constructivisme, de Stéphane Labranche, la persistance d’un régime dépend de

la croyance en sa légitimité par les acteurs. Son hypothèse est que la persistance dans le

temps d’un régime « dépend non pas de la capacité d’une puissance hégémonique à

22 KEOHANE, Robert. After Hegemony : Cooperation and Discord in the World Political Economy, Princeton University Press, 1984.23 op. cit. p.19

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Page 24: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

imposer des règles mais bien plutôt de l’internalisation, par ces acteurs, des valeurs et

principes qui sous-tendent ces règles », et « permettrait d’expliquer pourquoi et comment

un régime continue d’exister même lorsque la puissance hégémonique disparaît, qu’elle

change, ou qu’un régime puisse apparaître à partir d’efforts d’acteurs non

hégémoniques. »24 Dans la théorie constructiviste, la croyance des acteurs impliqués dans

le projet de coopération transfrontalière joue un rôle dans l’orientation de la prise de

décision. En effet, l’étude de la coopération pour la lutte contre la pollution

environnementale de la mer Méditerranée et la formation du Plan d’Action pour la

Méditerranée (PAM) de Haas25 a montré que la distribution de la puissance entre les pays

ou l’influence du pays présumé le plus fort de la région, dans ce cas la France, ne pouvait

pas expliquer le développement d’une coopération. La coopération dans la région a été dû

au fait que la communauté épistémique transnationale de Méditerranée partageait un

savoir commun sur la pollution environnementale, des croyances et des objectifs

communs qui ont été institutionnalisés dans des nouvelles institutions gouvernementales

et intergouvernementales et qui ont pénétré la prise de décision de cette façon. Dans cette

perspective, le développement de projets de coopération transfrontalière pour l’adaptation

au changement climatique dépendrait du degré de connaissance des acteurs locaux sur

l’adaptation au changement climatique et de leur capacité à diffuser un discours de

sensibilisation aux enjeux de l’adaptation au changement climatique de telle sorte qu’il soit

institutionnalisé et intégré dans les politiques publiques déjà existantes.

3. Cadre juridique de la coopération transfrontalière dans l’espace européen.

Nous faisons le choix d’étudier la coopération transfrontalière dans l’espace

européen car, d’une part, si la coopération transfrontalière n’est pas restreinte à l’Union

européenne, c’est dans cette enceinte de coopération que la coopération transfrontalière a

été développée à son maximum. D’autre part, nous avons choisi d’étudier l’apport de la

coopération transfrontalière à l’adaptation au changement climatique dans l’optique

d’améliorer le processus d’adaptation français porté par l’ONERC. C’est pourquoi le cadre

24 LABRANCHE, Stephane. La transformation des normes de participation et de durabilite en valeurs ? Reflexions pour la theorie des regimes. Études Internationales, 2003, vol. 34, n°4, pp.611-629. 25 HAAS, Peter M. Saving the Mediterranean : the politics of international environmental co-operation. New York : Columbia University Press, 1990, op. cit. p.19

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Page 25: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

de coopération transfrontalière étudié est européen.

Les premières formes de la coopération transfrontalière, qui n’ont été reconnues

juridiquement qu’en 1980 au moyen d'une convention du Conseil de l'Europe,

apparaissent dans l'immédiat après-guerre. Le rapprochement des collectivités territoriales

a été favorisé par le développement des échanges économiques, culturels ou sociaux

entre les États européens.

Le 21 mai 1980, des États membres du Conseil de l’Europe signent la Convention-cadre

européenne sur la coopération transfrontalière des collectivités et autorités territoriales,

dite Convention de Madrid. Les parties contractantes s'engagent à faciliter et à promouvoir

la coopération transfrontalière. Elle est considérée comme l'acte fondateur du cadre

juridique de la coopération transfrontalière des collectivités et autorités territoriales en

Europe.

La Convention a pour but d'encourager et de faciliter la conclusion d'accords entre régions

et communes, de part et d'autre d'une frontière, dans les limites de leurs compétences. De

tels accords peuvent s'étendre, entre autres, au développement régional, à la protection

de l'environnement, à l'aménagement des infrastructures et des services publics, etc.

Pour tenir compte de la variété des systèmes juridiques et constitutionnels des États

membres du Conseil de l'Europe, la Convention offre toute une gamme d'accords modèles

permettant aux collectivités locales et régionales ainsi qu’aux États de placer la

coopération transfrontalière dans le cadre qui leur convient le mieux.

En 1990, la Commission européenne met sur pied la première génération de programmes

Interreg de coopération transfrontalière. Interreg est un programme européen visant à

promouvoir la coopération entre les régions européennes et le développement de

solutions communes dans les domaines du développement urbain, rural et côtier, du

développement économique et de la gestion de l’environnement. Il est financé par le

Fonds européen de développement régional (FEDER) à hauteur de 7,75 milliards d'euros.

L'actuel programme se dénomme Interreg IV, il couvre la période 2007-2013. La

coopération transfrontalière, c’est-à-dire, le développement régional intégré entre régions

transfrontalières est l’une des trois composantes du programme Interreg.

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Page 26: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

Les financements Interreg permettent le développement de la coopération transfrontalière,

mais arrivent aussi souvent sur un terrain où la collaboration locale existent déjà depuis

longtemps. L’initiative Interreg a ete mise en œuvre pour desenclaver les regions

frontalieres. La Commission europeenne stipule en effet que les regions frontalieres sont

penalisees par un double isolement : isolement par rapport aux regions frontalieres

limitrophes, et isolement par rapport a leur propre espace national dont elles sont une

peripherie.

Dans l’objectif thématique n°3 « coopération territoriale européenne » de la période de

programmation 2007-2013, l’aide consacrée à la coopération transfrontalière se concentre

selon les termes du règlement FEDER sur « le développement d’activités économiques,

sociales et environnementales transfrontalières au moyen de stratégies conjointes en

faveur du développement territorial durable ».

La coopération transfrontalière a vu un élargissement des zones de coopération par

rapport à l’ancien Interreg III, en particulier en ce qui concerne la coopération maritime, du

fait de l’application de la règle des 150 km. Cet élargissement touche notamment les

territoires riverains de la Manche ainsi que l’outre-mer pour la coopération transfrontalière

de la France.

La coopération transfrontalière ne constitue en aucun cas une compétence

supplémentaire pour les collectivités territoriales. Ces dernières ne peuvent coopérer que

dans les limites des compétences qui leur sont attribuées par leurs législations nationales.

Elles sont par ailleurs obligées de respecter les engagements internationaux pris par leurs

États nationaux respectifs. La coopération transfrontalière représente en revanche pour

les collectivités une opportunité supplémentaire d'utiliser leurs compétences.

Pour coopérer au travers des frontières, les collectivités locales et leurs groupements

peuvent s’appuyer sur différentes bases juridiques nationales, européennes et

internationales, qui définissent autant d’outils de coopération. Dans de nombreux États,

les collectivités territoriales peuvent signer des conventions de coopération ou créer des

organismes de coopération, parfois dotés de la personnalité juridique. Ces organismes,

décrits dans le chapitre suivant, peuvent notamment découler des accords signés dans le

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Page 27: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

cadre du Conseil de l'Europe ou du droit de l'Union européenne.

Chaque projet transfrontalier s’inscrit dans un cadre juridique et opérationnel qui lui est

propre, en fonction de la nature des partenaires concernés de part et d’autre de la

frontière, de la thématique concernée et du type d’action envisagé.

Selon la typologie établie par la MOT26, les collectivités locales peuvent avoir recours à

deux types de projets opérationnels : les projets transfrontaliers immatériels et les projets

transfrontaliers d’investissement. Les projets transfrontaliers immatériels correspondent à

des projets de coopération transfrontalière sans réalisation d’investissements publics, soit

tout projet transfrontalier qui ne s’appuie pas sur des investissements matériels des

partenaires. Il s’agit par exemple de la gestion d’un institut de formation transfrontalier. Un

projet transfrontalier d’investissement peut, quant à lui, prendre la forme d’un équipement

transfrontalier en matière de traitement de l’eau, par exemple.

4. Quelle place pour l’adaptation dans les initiatives de coopération transfrontalière ?

Au-delà d’un traitement national et local, les actions transfrontalières dans le

domaine du changement climatique ont une vraie valeur ajoutée car les effets du

changement climatique ne connaissent pas de frontière. Il est essentiel d’apporter une

réponse transfrontalière à ces défis, dès lors que les enjeux dépassent les frontières et

dans la mesure où la situation d’un pays peut affecter celle de ses voisins. Ainsi, les

territoires transfrontaliers pourraient devenir des espaces de gestion commune et de

mutualisation de moyens dans le domaine de l’adaptation au changement climatique.

Le livre blanc intitulé « Adaptation au changement climatique : vers un cadre d’action

européen »27, qui établit le cadre défini par l’Union européenne en matière d’adaptation

aux changements climatiques, et la stratégie européenne d’adaptation publiée en avril

2013 fournissent un premier cadre juridique sur lequel la coopération transfrontalière pour

26 op. cit. p.727

cf. Annexe 2 – La démarche d’adaptation de l’Union Européenne.

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Page 28: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

l’adaptation au changement climatique peut s’appuyer.

Pour la période 2014-2020, les programmes financés par les fonds européens, et

notamment ceux de coopération territoriale, peuvent soutenir des actions dans ce

domaine en vertu de l’objectif thématique n°5 « Promouvoir l’adaptation aux changements

climatiques, ainsi que la prévention et la gestion des risques ».

L’adaptation aux changements climatiques ainsi que la prévention et la gestion des

risques sont parmi les priorités des politiques européennes, au titre du pilier « croissance

durable » de la Stratégie Europe 2020, dont l’un des cinq objectifs est relatif au

changement climatique et aux énergies durables.

Au-delà des projets de coopération sectoriels, l’adaptation au changement climatique

nécessite une approche globale à l’échelle des territoires, que ce soit pour maîtriser la

mobilité par des politiques coordonnées d’urbanisme et de transports ou pour concilier le

développement économique avec la préservation de l’environnement, par exemple.

Etant donnée que l’adaptation au changement climatique ne constitue pas une politique

publique spécifique en soi et qu’elle a vocation à s’intégrer dans les politiques publiques

régissants des domaines d’activités déjà en place, la coopération transfrontalière dans ce

domaine nécessitera d’établir des synergies entre les actions en faveur de l’adaptation au

changement climatique et de la gestion des risques avec celles développées dans le

domaine de la protection de l’environnement, de l’innovation, de l’énergie, du

développement économique, et des transports, autres objectifs de coopération territoriale

pour la période 2014-2020.

Toutefois, même si la coopération transfrontalière apparaît comme une opportunité pour

l’adaptation au changement climatique, elle n’en est pas moins au départ un facteur de

complexité et de coûts supplémentaires pour les collectivités territoriales. En effet, le

manque ou l’hétérogénéité des données statistiques, l’absence d’études transfrontalières ;

la méconnaissance des acteurs, des législations et des modes de gestion de part et

d’autre de la frontière; la disparité des compétences ; l’absence de référentiels, de

mécanismes de concertation et d’outils de gestion collective ; le manque de participation

de la population ; et l’intérêt très variable des élus pour l’adaptation au changement

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Page 29: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

climatique peuvent entraver la coopération transfrontalière dans ce domaine.

Cependant, Aurélia Aebischer et Stéphane La Branche ont montré dans leurs travaux sur

la coopération transfrontalière autour du lac Léman que les grandes différences entre les

systèmes politiques français et suisse n’ont pas empêché la mise en place d’un régime de

cooperation et le manque d’harmonisation n’a pas constitue un obstacle a la cooperation

transfrontaliere28. De la même manière, il est permis de penser que, pour les trois études

de cas retenues dans ce mémoire, les différences politiques ne seront pas un obstacle à

la coopération transfrontalière pour l’adaptation au changement climatique.

La coopération transfrontalière pour l’adaptation aux changements climatiques nécessite,

comme le recommande la MOT, « la pleine association des citoyens, qui doivent être

sensibilisés, informés, voire formés, et associés à la gestion de l’espace commun, de ses

coûts et de ses bénéfices, directement et au travers de l’action conjointe de leurs élus. »29

De nombreux types d’action sont a priori mobilisables pour développer des projets de

coopération transfrontalière tournés vers l’adaptation au changement climatique. On

pourrait envisager par exemple de se fixer des stratégies et des plans d’adaptation aux

changements climatiques au niveau transfrontalier, de créer des bases de connaissance

et de renforcer les capacités d’observation des données climatiques à l’échelle des

bassins transfrontaliers, de développer des mécanismes pour l’échange d’informations de

part et d’autre de la frontière touchant à l’adaptation au changement climatique ou à la

gestion des risques et de réinvestir les outils et systèmes de gestion des situations de

catastrophe pour l’adaptation au changement climatique comme les systèmes de

détection et d’alerte précoces, la cartographie et l’évaluation des risques. Nous verrons

dans la partie suivante quels types d’action les acteurs des différents projets de

coopération transfrontalière ont effectivement utilisés pour promouvoir l’adaptation au

changement climatique.

28 AEBISCHER Aurélia, LABRANCHE Stéphane. Les espaces tiers dans les régimes internationaux. Le cas du Lac Léman. Études Internationales, 2007 vol 38, n°2.29 Site web de la Mission opérationnelle transfrontalière, thème «Changement climatique, gestion et prévention des risques» : http://www.espaces-transfrontaliers.org/ressources/themes/changement-climatique-gestion-et-prevention-des-risques/changement-climatique-risques-2/

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Page 30: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

CHAPITRE 2 : APPROCHE EMPIRIQUE DE LA COOPÉRATION TRANSFRONTALIÈRE POUR L’ADAPTATION À TRAVERS TROIS ÉTUDES DE CAS.

À partir de références bibliographiques et d’entretiens téléphoniques avec les

personnes directement en charge ou impliquées dans les projets de coopération

transfrontalière qui ont promu l’adaptation au changement climatique dans le bassin de la

Meuse, autour de la mer Méditerranée et dans l’ouest de l’Océan Indien, j’entends

dresser, pour chacune des sections correspondantes, un diagnostic et une analyse de

facteurs favorisant ou entravant la coopération transfrontalière en matière d’adaptation au

changement climatique. Le diagnostic de la première partie exposera la vulnérabilité au

changement climatique des différents pays impliqués dans les projets de coopération

transfrontalière. Pour ce faire, je compte m’appuyer sur la définition de diagnostic de

vulnérabilité au changement climatique de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise

de l’énergie (Ademe). L’Ademe définit le diagnostic de vulnérabilité comme ce

qui « permet d’identifier et de distinguer les signes observables d’une défaillance et d’un

problème ou sa cause et origine » et le diagnostic de vulnérabilité au changement

climatique comme ce qui par permet, à la fois « d’évaluer qualitativement la vulnérabilité

d’une organisation, d’une structure ou d’un territoire aux risques liés au changement

climatique en étudiant notamment son exposition et sa sensibilité » et « de hiérachiser ce

niveau de vulnérabilité liés au différents impacts, par rapport à l’ampleur des

conséquences et à la probabilité d’occurrence de ses impacts. »30

L’analyse de facteurs favorisant ou entravant la coopération transfrontalière en matière

d’adaptation au changement climatique de la seconde partie se concentrera sur les

opportunités et les barrières à la coopération transfrontalière en matière d’adaptation au

changement climatique ainsi que les réussites issues des projets de coopération

transfrontalière qui ont promu l’adaptation au changement climatique et relèvera les pistes

d’amélioration possibles pour ces projets.

30 Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie. Diagnostic de vulnérabilité d’un territoire au changement climatique. Éléments méthodologiques tirés de l’expérience internationale, 2012.

Sarah Voirin | Institut d’Études Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014

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Page 31: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

Section 1 : Le bassin de la Meuse

1. Diagnostic de vulnérabilité menant à la coopération transfrontalière pour s’adapter au changement climatique.

a) Le constat d’une vulnérabilité actuelle et de futurs impacts en prévision.

La Meuse est un fleuve navigable transnational d’Europe du Nord-Ouest long de

950 km et représente une zone densément peuplée d’environ 9 millions d’habitants. Le

bassin hydrologique ou bassin versant de la Meuse a une superficie de 36 000 km2, dont

un tiers en Région wallonne, et s’étend sur cinq États : la Belgique, la France, l’Allemagne,

le Luxembourg et les Pays-Bas. Son débit varie considérablement selon les saisons :

3100 m3/s en hiver à la frontière Pays-Bas/Wallonie, seulement 10-40 m3/s l'été.

Principalement alimenté par les pluies, il n'a pas de glacier et peu de nappes phréatiques

pour amortir les écarts de précipitations. Un lien direct existe donc entre l’évolution des

précipitations et les variations de débits maximaux et minimaux. De nombreux enjeux sont

menacés dont des infrastructures et industries majeures, d'inestimables héritages

historiques et écologiques. Les berges du fleuve Meuse constituent un secteur vulnérable

aux inondations, avec des enjeux importants en termes de population et d'industries

installées dans ce bassin versant.

La Meuse n’est pas toujours perçue de la même façon par les pays riverains.

Abusivement, la Meuse est souvent considérée comme une rivière affluente du Rhin et

non un fleuve en lui-même. En particulier, elle ne fait pas partie des grands fleuves

français enseignés à l'école primaire en France peut-être car elle n'y fait que la moitié de

son parcours total. Par contre, en Belgique et aux Pays-Bas, elle est considérée comme

un fleuve important car elle sert au transport de marchandises et a façonné l'histoire et la

géographie de ces pays.

Si la Meuse n’a pas la même importance pour tous les pays c’est sans doute parce qu’elle

Sarah Voirin | Institut d’Études Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014

30

Page 32: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

ne les traverse pas tous de la même façon. La perception du fleuve n’est pas la même que

l’on se situe en amont ou en aval du fleuve, selon la distance parcourus dans un pays et

selon la nature des zones traversées. La Meuse prend sa source en France, puis traverse

la Belgique, pour arriver à son embouchure aux Pays-Bas, et enfin se jeter dans la mer du

Nord. Parallèlement, les affluents de la Meuse traverse l’Allemagne et le Luxembourg. La

Belgique est donc le pays le plus traversé par le fleuve Meuse qui y assure de

nombreuses fonctions. Il traverse la région naturelle de l’Ardenne, l'ancien bassin houiller

wallon dans la province de Liège, puis il contribue au refroidissement de la centrale

nucléaire de Tihange, ensuite il longe les installations sidérurgiques de Seraing, un peu

avant Herstal, ses eaux sont utilisées pour alimenter le Canal Albert, et de Namur à Visé, il

sert à la production d'électricité avec six centrales hydroélectriques. Le fleuve semble

également jouer un rôle dans la richesse du milieu naturel de la partie néerlandaise

puisqu’elle contient quarante-trois zones classées Natura 2000, une zone pour les eaux

conchylicoles, cent trente-quatre lieux de baignades, cinq plans d’eau de surface, et trois

masses d’eau souterraines qui sont destinées à l’alimentation en eau potable.

b) Une coopération transfrontalière de longue date.

Cependant, malgré les divergences de perception, la coopération transfrontalière

existe depuis longtemps entre les États du bassin de la Meuse. La coopération

transfrontalière dans le bassin de la Meuse existe depuis 1994 avec la signature à

Charleville-Mézières de l’Accord concernant la protection de la Meuse. Depuis 1995, la

Région flamande et les Pays-Bas coopèrent pour réguler la distribution de l’eau durant les

périodes d’étiages. Depuis 1998, les pays du bassin de la Meuse se sont engagés avec

un Plan d’Action Inondations Meuse. L’Accord international sur la Meuse, dit « Accord de

Gand » a été signé en 2002 par la Belgique, la France, le Grand-Duché de Luxembourg,

les Pays-Bas et l’Allemagne et est entré en vigueur le 1er décembre 2006. L'objectif de

l'accord est d'arriver à une gestion durable et globale de l'eau du district hydrographique

de la Meuse. Cet accord est fondamental pour la prise en compte de l’adaptation dans les

projets de coopération transfrontalière puisqu’il crée la Commission Internationale de la

Meuse (CIM), à l’origine du lancement du projet AMICE. Le projet AMICE a en effet été

initié à partir des résultats des études réalisées sur les changements climatiques futurs et

Sarah Voirin | Institut d’Études Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014

31

Page 33: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

synthétisées dans « Les conséquences du changement climatique sur les débits du fleuve

Meuse », sous l’impulsion de la Commission Internationale de la Meuse en 2005. Les

résultats de ces études ont montré que d’ici à 2050 ou 2100, le bassin versant risque de

subir fortement les effets du changement climatique. Il y aurait une augmentation de la

fréquence des inondations en hiver, une augmentation des étiages, plus probablement

dus à une hausse de la demande en eau qu'à une hausse des températures, avec

notamment une diminution globale des précipitations saisonnières pouvant aller jusqu'à

-39% en été pour la période 2071-2100. Les résultats de cette étude ont également mis en

avant le besoin de s'accorder sur les scénarios et d’examiner conjointement les effets

d'une meilleure coordination des politiques de gestion de l'eau pour la régulation et la

gestion des crues et pour anticiper les potentiels conflits d’usage de l’eau en période

d’étiage, par exemple. À partir de ces résultats, les partenaires d’AMICE ont souhaité

s’engager dans un projet de coopération transfrontalière devant conduire à une stratégie

d'adaptation, via les scénarios de changement climatique et de débits établis pour le

bassin versant.

c) Le projet AMICE.

AMICE constitue le sigle pour « Adaptation of the Meuse to the Impacts of Climate

Evolutions ».

Le point de départ de la réflexion qui a abouti au lancement du projet AMICE a été la prise

de conscience du décalage entre l’existence de stratégies d’adaptation au niveau national

et l’absence de concertation au niveau transnational sur la question. Les partenaires

d’AMICE se sont lancés dans ce projet plutôt dans l’optique d’apporter des solutions que

d’éviter le transfert de vulnérabilités d’un pays à un autre31. L’adaptation au changement

climatique est rapidement apparu comme l’enjeu le plus important à traiter pour les

partenaires.

Le projet AMICE a été lancé à l’initiative de l’Établissement public d’aménagement de la

Meuse et de ses affluents (EPAMA), le 5 décembre 2008 pour une période de mise en

31 Entretien avec Maïté Fournier cf. Annexe 4 – Listes des personnes ayant contribué à ma réflexion.

Sarah Voirin | Institut d’Études Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014

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Page 34: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

œuvre de trois ans de 2009 à 2012.

Il a été financé par le programme INTERREG IV B Europe du Nord-Ouest, son budget

total s’élevait à 8,9 millions d’euros (2,8 millions d’euros de la part du FEDER et 6,1

millions d’euros de la part des autorités locales, régionales et nationales, des agences et

associations de l’eau).

Le projet compte dix-sept partenaires dont trois français, huit belges, trois allemands, trois

néerlandais.

Le défi principal auquel le projet a souhaité répondre était de savoir comment concevoir de

nouvelles structures de gestion de l’eau capables de traiter des inondations, de la

sécheresse et de l’augmentation de la demande en eau, de manière intégrée.

Les objectifs visés ont été de définir une stratégie d'adaptation commune aux impacts du

changement climatique sur les inondations et la sécheresse, reconnue à l’échelle du

bassin fluvial international de la Meuse; de mettre en place un dispositif de mesures

bénéfiques et transférables à l’ensemble du bassin de la Meuse; de renforcer et élargir le

partenariat des acteurs dans le bassin international de la Meuse ; et d’impliquer la

population et les autorités publiques à travers une meilleure connaissance des enjeux et le

développement d’un sentiment d’appartenance au bassin de la Meuse et d’une prise de

conscience des risques d’inondations et de sécheresse.

Les moyens déployés pour atteindre ces objectifs ont été de réunir les partenaires du

projet autour de cinq modules thématiques de travail; de réaliser une étude du

comportement hydrologique actuel et futur du bassin, et de déterminer les caractéristiques

prévues des inondations, ainsi que les mesures de gestion des eaux de crue qui doivent

être prises; de définir des scénarios, partagés à l’échelle du bassin international, en lien

avec le changement climatique; de réaliser la première simulation hydraulique du fleuve et

des cartes de risques associées; et d’identifier des points chauds, c’est-à-dire des

secteurs et des usages de l’eau menacés par les futures inondations et périodes de

sécheresse.

Sarah Voirin | Institut d’Études Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014

33

Page 35: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

2. Analyse des facteurs de coopération transfrontalière favorisant ou entravant la promotion de l’adaptation au changement climatique.

a) Opportunités.

Le contexte de coopération a été un élément favorable pour le lancement du projet

et qui a par là-même contribué à la prise en compte de l’adaptation dans la région. Le

bassin versant de la Meuse était déjà perçu par les partenaires d’AMICE comme un

bassin international au moment de la construction du projet, du fait d’une coopération de

longues dates entre les différentes agences de l’eau.

La perception de la coopération transfrontalière dans la région est un autre élément qui a

facilité le lancement du projet et son bon fonctionnement. La coopération transfrontalière

apparaît dès le début du projet comme évidente : les partenaires d’AMICE issus de tous

les pays partagent une vision de la Meuse comme un bien commun et une passion

commune. La plupart d’entres eux sont même nés dans une ville au bord de la Meuse

expliquant sans doute cet attachement profond au fleuve.

Le choix des acteurs a été également crucial dans le bon déroulement du projet. Si le

projet a aussi bien fonctionné c’est en effet en partie parce que les partenaires d’AMICE

possédaient une expérience de terrain et une bonne connaissance du bassin versant de la

Meuse32.

L’organisation des réunions de travail telles qu’elle s’est déroulée durant le projet a été

une opportunité pour faciliter la prise en compte de l’adaptation au changement climatique.

En effet, la volonté de décloisonnement entre les groupes de travail thématiques (au

moins un partenaire de chaque pays par groupe de travail) a sans doute créé un cadre

favorable aux échanges.

Le projet a bénéficié d’un cadre intellectuel et politique favorable à la prise en compte de

l’adaptation au changement climatique33. En effet, la publication de projections 32

Entretien avec Maïté Fournier cf. Annexe 4 – Listes des personnes ayant contribué à ma réflexion.33

Entretien avec Maïté Fournier cf. Annexe 4 – Listes des personnes ayant contribué à ma réflexion.

Sarah Voirin | Institut d’Études Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014

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Page 36: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

régionalisées et du Quatrième rapport d’évaluation du GIEC en 2007, offrant un meilleur

accès aux données climatiques ainsi que la médiatisation internationale qui s’est portée

sur le changement climatique et la reconnaissance de l’adaptation à la conférence de

Copenhague en 2009 ont coïncidé avec le début de la période de mise en œuvre du

projet.

Le Programme INTERREG IV B de l’Union Européenne est apparu comme une

opportunité de financement du projet AMICE. C’est ainsi qu’un programme de financement

destiné à la coopération transfrontalière permet de promouvoir un projet d’adaptation au

changement climatique.

D’autre part, l’existence d’un cadre institutionnel de protection de la Meuse à travers la

Commission internationale de la Meuse semble une opportunité pour ancrer le projet de

coopération transfrontalière sur l’adaptation dans la durée.

b) Lacunes et barrières.

Des problèmes administratifs ont ralenti la collecte des données et les projections

climatiques étaient encore difficiles d’accès (en dehors de la communauté du climat) au

moment du lancement du projet34. En effet, le portail DRIAS les futurs du climat qui fournit

des services climatiques n’existait pas encore.

L’intégration de scénarios climatiques dans les paramètres de mise en œuvre des projets

ne faisait pas partie de la pratique des gestionnaires de l’eau et donc il s’agissait d’une

technique non maîtrisée.

Il s’est avéré difficile d’accorder les projections nationales pour disposer de données à

l’échelle du bassin versant, notamment du fait de certaines incompatibilités techniques.

Une construction collective s’appuyant sur des contributions de tous a été nécessaire car

les projections climatiques au niveau de chaque partenaire ne permettaient pas de

34 Entretien avec Maïté Fournier cf. Annexe 4 – Listes des personnes ayant contribué à ma réflexion.

Sarah Voirin | Institut d’Études Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014

35

Page 37: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

répondre au besoin.

D’autre part, le projet a manqué de moyens humains dans sa réalisation, notamment

parce que les acteurs devaient partager leur temps de travail entre leurs missions

habituelles et ce projet de coopération35. Ce manque de moyens consacrés à la mise en

œuvre d’un projet est caractéristique de ce qu’Oran R. Young appelle le problème de

l’adéquation (« fit »)36 entre les systèmes biophysiques et les systèmes de gouvernance

créés pour gérer l’apparition de problèmes environementaux. En effet, il semble que dans

beaucoup de cas, il y a un manque critique de resources nécessaires pour enclencher un

contrôle systématique des activités, ce qui conduit à des efforts superficiels, souvent

échouant à capter les changements socio-économiques importants au moment opportun

et de manière appropriée.37 Dans le cas du projet AMICE, la recherche d’une meilleure

adéquation entre le système de coopération transfrontalière pour l’adaptation au

changement climatique et le système biophysique du bassin de la Meuse pourrait se

manifester, par exemple, par l’adoption d’une plus grande flexibilité dans la répartition du

temps de travail entre les moments consacrés au travail administratif habituel des

partenaires et les moments où ils travaillent sur le projet de coopération transfrontalière.

Ceci leur permettrait de dégager temporairement plus de temps libre pour se consacrer au

projet sans affecter leurs missions habituelles sur le long terme.

Le concept d’adaptation au changement climatique lui-même a été difficile à expliquer. A

priori, il n’apporte pas de changement perceptible localement pour la population et les

modifications qu’il entraîne ne sont pas aussi visibles que des aménagements d’ingénierie

mis en place dans le cadre de l’atténuation au changement climatique. Ce qui a rendu

d’autant plus difficile à faire comprendre la valeur ajoutée de l’adaptation aux collectivités

locales. Si elles n’ont pas montré d’opposition au projet, les collectivités locales n’ont pas

n’ont plus montré d’enthousiasme pour le projet.

Enfin, on a observé que l’adaptation au changement climatique avait encore du mal à être

35 Entretien avec Maïté Fournier cf. Annexe 4 – Listes des personnes ayant contribué à ma réflexion.

36 YOUNG, Oran R. The Institutional Dimensions of Environmental Change : Fit, Interplay, and Scale. Cambridge, Massachusetts : MIT Press, 2002. 237 p.37 YOUNG, Oran R. Matching Institutions and Ecosystems: The Problem of Fit. Les séminaires de l’Iddri, 2002, n°2. Conférence dans le cadre du séminaire Economie de l’environnement et du développement durable, coorganisé par l’Iddri et le Ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie. Paris, 25 juin 2002.

Sarah Voirin | Institut d’Études Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014

36

Page 38: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

mise en avant au moment du lancement du projet AMICE puisque c’est la coopération

transfrontalière qui a prévalu sur l’adaptation pour obtenir des financements.

c) Réussites.

Tous les aménagements qui avaient été prévus dans le cadre du projet AMICE ont

été achevés.

Le projet AMICE a permis de découvrir de nouvelles formes de coopération

transfrontalière pour s’entraider à s’adapter au changement climatique jusque-là

insoupçonnées. Grâce au projet AMICE, l’Allemagne a, par exemple, découvert que l’eau

pouvait être fournie aux Pays-Bas pour les aider à mieux afronter les périodes de

sécheresse, sans conséquence nationale significative38.

Le projet AMICE a permis de disposer de projections climatiques au niveau du bassin

versant et de faciliter l’échange de données entre les organismes des différents pays.

Des signes montrent que le projet AMICE a bien fonctionné et qu’il continue. Les

prochaines études sur l’adaptation dans le bassin de la Meuse vont intégrer les résultats

d’AMICE. En effet, les universités de Metz, Liège, Aix-La-Chapelle et Maastricht

poursuivent aujourd’hui l’affinage des projections climatiques pour la Meuse. De plus, les

résultats d’AMICE seront utilisés pour la mise en œuvre de la Directive-cadre sur l’eau de

l’Union européenne39 : l’adaptation sera prise en compte dans la norme sur le bon état

écologique des cours d’eau, sur la qualité de l’eau.

Ensuite, une stratégie d’adaptation au changement climatique pour le bassin de la Meuse

sera peut-être élaborée par la CIM, à l’issue de ces résultats.

38 Entretien avec Maïté Fournier cf. Annexe 4 – Listes des personnes ayant contribué à ma réflexion.

39 La Directive-cadre sur l'eau de l’Union européenne, adoptée le 23 octobre 2000 par le Parlement européen et entrée en vigueur le 22 décembre de la même année, entend impulser une politique de l'eau plus cohérente, en posant le cadre européen d'une gestion et d'une protection des eaux par district hydrographique.

Sarah Voirin | Institut d’Études Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014

37

Page 39: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

Par ailleurs, la conférence de clôture du projet AMICE a été un véritable succès et pourra

être pris en exemple pour le lancement d’autres projets de coopération transfrontalière sur

l’adaptation au changement climatique. La conférence a, en effet, mobilisé trois cents

personnes et la participation de la Commission Économique pour l’Europe des Nations

Unies (CEE-ONU) a sans doute apporté une visibilité au-delà de l’Europe de l’ouest au

projet. Enfin, le fait que le projet ait une suite et que l’adaptation au changement climatique

continue d’être prise en compte dans le nouveau projet témoigne du succès du projet

AMICE.

Enfin, si les résultats du projet AMICE ne seront pas nécessairement intégrés dans les

politiques des élus locaux en tant que résultats relevant d’un projet d’adaptation au

changement climatique mais peut-être seulement en tant que résultats ayant traits à la

gestion de l’eau, l’adaptation au changement climatique sera en tout cas prise en compte.

Ce résultat positif pouvant s’interpréter comme la manifestation du mainstreaming de

l’adaptation au changement climatique.

d) Pistes d’amélioration.

D’une part, au lieu d’une stratégie d’adaptation, comme cela avait été l’objectif de

départ du projet AMICE, les partenaires n’ont élaboré qu’une simple feuille de route. Les

partenaires ont manqué d’anticipation par rapport à l’état d’avancement du projet et ne

possédaient pas de mandat pour rédiger un document politique comme une stratégie.

D’autre part, le projet n’a pas bénéficié du portage politique escompté par les partenaires

d’AMICE qui n’ont pas réussi à suffisamment sensibiliser le grand public et les élus locaux

à la prise en compte de l’adaptation au changement climatique dans les projets

d’aménagement du territoire.

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Page 40: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

Section 2 : Le bassin Méditerranéen

1. Diagnostic de vulnérabilité menant à la coopération transfrontalière pour s’adapter au changement climatique.

a) Le Constat d’une vulnérabilité actuelle et de futurs impacts en prévision.

La mer Méditerranée est une mer intercontinentale presque entièrement fermée,

entre l’Europe, l’Afrique et l’Asie, et qui s’étend sur près de 2,5 millions de kilomètres

carrés. Elle a la particularité d’être bordée par deux rives comprenant des pays

développés au nord et des pays en développement au sud.

Cette région du monde souffre d’importants problèmes de stress hydrique, de

désertification, de pertes de biodiversité et d’évènements climatiques extrêmes tels

qu’inondations et sécheresses. Elle est considérée comme un « hot spot » du changement

climatique. Les scénarios du GIEC projettent une hausse moyenne des températures de 2

à 3°C à l’horizon 2050, et de 3 à 5°C à l’horizon 2100 pour la région, ainsi qu’une

diminution des précipitations estivales de 35 % sur la rive sud et de 25 % sur la rive nord

d’ici la fin du siècle.

b) Un vaste cadre international de coopération transfrontalière.

La prise en compte de l’adaptation au changement climatique comme objet de

coopération en Méditerranée commence à peine à voir le jour et passe d’abord par le biais

de la protection de l’environnement marin contre la pollution et du développement durable.

En 1975, le Plan d’Action pour la Méditerranée (PAM) a été adopté sous l’égide du

Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE) par seize pays

Sarah Voirin | Institut d’Études Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014

39

Page 41: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

méditerranéens et par l’Union Européenne pour aider les pays méditerranéens à évaluer

et à contrôler la pollution marine, à formuler leurs politiques environnementales nationales,

à promouvoir la capacité des gouvernements à identifier les meilleures options pour des

modèles alternatifs de développement, et à optimiser les choix dans l’allocation des

ressources.

Entre 1976 et 1978, la Convention de Barcelone pour la Protection de la mer Méditerranée

contre la pollution est adoptée.

À la fin des années 1970, le Plan Bleu pour l’environnement et le développement en

Méditerranée est créé dans le cadre du PAM. Le Plan Bleu est à la fois une association et

un centre d’observation, d’analyse et de prospective. Il a vocation à être une interface

entre la production de données scientifiques et la décision politique. Il est financé par la

France, la Commission Européenne, le Fonds pour l’environnement mondial et la Banque

mondiale. Le Plan Bleu a pour missions : le développement de bases de données sur

l'environnement, l’économie et la société ; l’analyse et la prospective concernant les

principaux enjeux de développement durable à l’échelle du bassin méditerranéen et de

ses composantes écologiques ou géographiques, en utilisant des méthodes systémiques ;

la publication et la diffusion des résultats de ses études et synthèses ; le développement

et l’animation de réseaux d’experts dans les pays méditerranéens et l’aide à la

construction des capacités ; et le soutien à la stratégie méditerranéenne pour le

développement durable dans le cadre de la Commission méditerranéenne de

développement durable.

En 1996 est créée la Commission méditerranéenne de développement durable dans le

cadre du PAM avec pour mission de préparer une stratégie méditerranéenne de

développement durable.

Entre 2007 et 2013, le Programme de coopération transfrontalière de Bassin Maritime

Méditerranée est adopté. Il s’agit du Programme pour la mise en œuvre des activités de

coopération transfrontalière dans le contexte de la Politique Européenne de Voisinage

(PEV), en complément des efforts conduits dans le cadre du Partenariat Euro-

Méditerranéen. Son but est de développer une zone de paix, stabilité, prospérité et de bon

voisinage entre les pays Méditerranéens de l’Union européenne et les pays partenaires

Sarah Voirin | Institut d’Études Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014

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Page 42: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

méditerranéens.

En janvier 2008 est signé le Protocole de gestion intégrée des zones côtières (GIZC) qui

entra en vigueur en mars 2011 et dont la mise en œuvre a été prévue dans le cadre d’un

Plan d’action pour la période 2012-2019. Ce Protocole a été établi par nécessité d’un

instrument juridique contraignant car les politiques de gestion intégrée des zones côtières

mise en place dans le cadre de la Convention de Barcelone n’avaient qu’une valeur de

« soft law », ne reposaient que sur une base volontaire, et leur application était quasi nulle

en raison de leur caractère facultatif et non contraignant.

En septembre 2009 est organisée la 13e réunion de la Commission méditerranéenne du

développement durable invitant les Parties contractantes à mettre en œuvre des mesures

urgentes d’adaptation afin de renforcer la résilience de l’espace méditerranéen au

changement climatique.

Et enfin, lors de la même année 2009, la déclaration de Marrakech est adoptée par les

Parties contractantes à la Convention de Barcelone sur la protection du milieu marin et du

littoral de la Méditerranée. À travers cette déclaration, les États parties mettent en avant le

fait qu’ils considèrent le changement climatique comme un défi majeur pour l’humanité, et

qu’il faille prendre en compte les impacts du changement climatique et l’adaptation au

changement climatique. Ils s’engagent à renforcer les consultations entre les pays de la

région ; à promouvoir la coopération méditerranéenne en matière de lutte contre les effets

du changement climatique dans la région et à renforcer les mécanismes institutionnels ; à

assurer l’intégration des questions de changement climatique dans les politiques de

développement ; à faire en sorte que l’adaptation au changement climatique soit

pleinement prise en compte dans la révision de la stratégie méditerranéenne de

développement durable au cours du prochain exercice biennal ; à favoriser les synergies

entre la Convention de Barcelone, l’Union pour la Méditerranée (UpM) et la Politique

européenne de voisinage (PEV) ; et à renforcer la capacité du Plan d’Action pour la

Méditerranée (PAM).

La coopération transfrontalière en Méditerranée se développe donc dans le cadre d’une

multiplicité d’accords régionaux et d’organisations régionales tournés vers le

développement durable et donc potentiellement porteurs de projets d’adaptation au

changement climatique.

Sarah Voirin | Institut d’Études Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014

41

Page 43: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

c) Le projet d’intégration de l’adaptation au changement climatique dans la stratégie méditerranéenne de développement durable.

La promotion de l’adaptation au changement climatique par le biais de la

coopération transfrontalière en est à ses débuts en Méditerranée et n’existe pour l’instant

que par l’intégration de l’adaptation au changement climatique dans la stratégie

méditerranéenne de développement durable. Cette stratégie méditerranéenne pour le

développement durable, publiée en 2005, a intégré l’adaptation aux impacts du

changement climatique dans ses sept domaines d’action prioritaires dès le départ et sa

révision est en cours à l’été 2014 pour renforcer cette prise en compte de l’adaptation au

changement climatique.

En parallèle avec le projet de révision de la stratégie méditerranéenne de développement

durable, des séminaires sont régulièrement organisés par le Plan Bleu pour développer et

maintenir un dialogue sur l’adaptation au changement climatique entre les pays riverains.

En 2012, par exemple, a été organisée une conférence au Caire sur l’adaptation au

changement climatique en Méditerranée. Cette conférence a donné l’occasion à la

présentation du système d’alerte précoce lié à la submersion marine de Météo France, le

Plan Canicule, et le plan national d’adaptation au changement climatique français. Il en est

ressorti que les pays méditerranéens avaient au moins une perception commune de leur

priorité d’adaptation : la vulnérabilité des grandes zones urbaines au changement

climatique. Et cette conférence a eu pour effet de donner une impulsion pour initier un

travail commun sur la stratégie méditerranéenne pour le développement durable, sur un

guide méthodologique, et sur une plateforme d’échange de données climatiques40.

40 Entretien avec Sylvain Mondon cf. Annexe 4 – Listes des personnes ayant contribué à ma réflexion.

Sarah Voirin | Institut d’Études Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014

42

Page 44: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

2. Analyse des facteurs de coopération transfrontalière favorisant ou entravant la promotion de l’adaptation au changement climatique.

a) Opportunités.

D’une part, la stratégie méditerranéenne de développement durable est en cours de

révision afin de mieux y intégrer l’adaptation au changement climatique.

D’autre part, le projet d’adaptation au changement climatique du Delta du Nil dans le cadre

de la gestion intégrée des zones côtières (GIZC) en cours pourrait à terme servir

d’exemple et donner l’impulsion nécessaire pour le lancement de projets de coopération

transfrontalière pour l’adaptation au changement climatique. Le projet a été lancé en 2009

pour une période de mise en œuvre de six ans. Ce projet a été développé par l’Institut de

Recherche sur les zones côtières et l’Autorité de Protection du Littoral du Ministère des

Ressources en Eau et de l’Irrigation de l’Égypte a pour but d’intégrer la gestion de la

montée du niveau de la mer dans le développement de la Zone côtière de Basse Élévation

de l’Égypte dans le Delta du Nil. Il est attendu que ce projet permette le développement de

la capacité d’adaptation des institutions responsables de la gestion des zones côtières ; la

mise en œuvre de mesures d’adaptation proactives ; de tirer des leçons et des bonnes

pratiques de ces projets d’adaptation. Ces résultats sont censés être atteints en renforçant

le cadre de régulation et la capacité institutionnelle pour améliorer la résilience des

aménagements côtiers et le développement des infrastructure ; en mettant en œuvre des

mesures innovantes et respectueuses de l’environnement qui facilitent l’adaptation dans le

Delta du Nil ; et en mettant en place un cadre de suivi et d’évaluation et des systèmes de

gestion de la connaissance sur l’adaptation. Le projet a dors et déjà montré des résultats.

En effet, des sites potentiels pour des aires pilotes et une liste des mesures d’adaptation

ont été identifiés attendant d’être finalisés lors de la réception des résultats finaux en

provenance d’études additionnelles.

Sarah Voirin | Institut d’Études Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014

43

Page 45: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

b) Lacunes et barrières.

Pour mener à bien des projets de coopération transfrontalière en matière

d’adaptation au changement climatique il est nécessaire de s’accorder au moins sur des

orientations stratégiques communes.

Or, d’une part l’harmonisation des priorités d’adaptation au changement climatique peut

être rendue difficile par la différence d’avancement dans les stratégies et plans

d’adaptation des pays méditerranéens, lorsqu’il y en a.

Et d’autre part, la mise en œuvre d’actions d’adaptation concrètes n’est pas encore

amorcée dans la plupart des pays qui ont adopté une stratégie d’adaptation, ce qui ne

crée pas un cadre stimulant pour le lancement de projets de coopération transfrontalière

sur l’adaptation au changement climatique.

Enfin, les changements de régime récents sur la rive sud de la Méditerranée depuis les

révolutions arabes et les tensions permanentes au proche-orient ne permettent pas de

créer un cadre politique stable nécessaire à l’engagement des États dans des projets de

développement de long terme et explique sans doute l'implication parfois très modérée de

pays méditerranéens dans le processus d’adaptation au changement climatique.

c) Réussites.

Dans le bassin méditerranéen, la coopération transfrontalière a permis de faire

émerger une discussion sur des sujets techniques en lien avec l’adaptation; de faire naître

une préoccupation pour l’adaptation; et de faire intégrer l’adaptation au changement

climatique dans la stratégie méditerranéenne de développement durable41.

Au stade d’avancement où en est le projet d’intégration de l’adaptation au changement

41 Entretien avec Sylvain Mondon cf. Annexe 4 – Listes des personnes ayant contribué à ma réflexion.

Sarah Voirin | Institut d’Études Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014

44

Page 46: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

climatique à la stratégie méditerranéenne de développement durable, sa réussite réside

pour l’instant dans le fait d’être un projet qui s’inscrit dans la durée et qui a une suite. 42 En

effet, la nouvelle version de la stratégie méditerranéenne du développement durable

prévue pour 2015 est actuellement en cours de consultation. Et d’autre part, la possibilité

d’une stratégie méditerranéenne spécialisément dédiée à l’adaptation a été évoquée lors

des séminaires entre pays méditerranéens sur le changement climatique et pourrait

devenir un projet potentiel de coopération transfrontalière dans la région.

d) Pistes d’amélioration.

La prise en compte de l’adaptation au changement climatique dans la stratégie

méditerranéenne de développement durable pourra servir de première étape vers une

planification qui définira des actions et des mesures concrètes d’adaptation.

Le projet de plateforme n’a aujourd’hui pas abouti car les pays n’ont pas réussi à se mettre

d’accord notamment sur la localisation et le développement de la plateforme. Ceci peut

être l’occasion pour les pays partenaires du projet de choisir un autre médium de diffusion

des données climatiques, qui soient moins contraignants, ou de prendre acte du fait qu’ils

ne sont peut-être pas encore arrivés à un stade de coopération sur l’adaptation au

changement climatique qui leur permette d’avancer plus loin pour l’instant.

42 Étant donné que la coopération transfrontalière pour l’adaptation au changement climatique en

Méditerranée n’en est qu’au stade de l’acceptation de la notion d’adaptation, on ne parle évidemment pas ici

de réussite réelle de l’adaptation au changement climatique entraînant une diminution des impacts du

changement climatique.

Sarah Voirin | Institut d’Études Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014

45

Page 47: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

Section 3 : Les îles de l’ouest de l’océan Indien.

1. Diagnostic de vulnérabilité menant à la coopération transfrontalière pour s’adapter au changement climatique.

a) Le Constat d’une vulnérabilité actuelle et de futurs impacts en prévision.

Tout d’abord, les États et territoires insulaires de l’ouest de l’océan Indien sont déjà

très vulnérables aux aléas climatiques actuels. D’une part, ils souffrent d’une vulnérabilité

physique : ils sont fortement exposés aux catastrophes naturelles, leurs écosystèmes sont

fragiles, et leur disponibilité de terres est faible (sauf Madagascar). D’autre part, ils font

face à une vulnérabilité politique et socio-économique : par la concentration de la

production économique, de la population et des infrastructures sur le littoral; par des

économies peu diversifiées; par leur urbanisation souvent rapide; par la limitation de

capacités institutionnelles, économiques, scientifiques et technologiques; et par leurs

dynamiques démographiques fortement dépendantes des ressources naturelles.

Les phénomènes météorologiques seront plus intenses et pourront se traduire par une

augmentation de la saison cyclonique, et de la fréquence des inondations et des

sécheresses. La hausse du niveau marin se traduira par une plus forte salinisation des

terres et des réserves d'eau douce, déjà limitées ; par une propagation plus rapide des

maladies infectieuses comme le paludisme, la chikungunya, et la dengue; par des

glissements de terrains ; et conduiront au blanchissement des coraux (conséquence de

l’acidification et de la hausse de température de l’eau de mer).

Sarah Voirin | Institut d’Études Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014

46

Page 48: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

b) Un cadre international de coopération transfrontalière.

Le cadre de coopération dans lequel les projets de coopération transfrontalière pour

l’adaptation au changement climatique dans la région de l’ouest de l’océan Indien ont

émergé s’appuie, en premier lieu, sur la Commission de l’Océan Indien (COI). Elle a été

créée en 1984 et l’adaptation au changement climatique fait partie de ses axes d’action

stratégiques depuis. Elle regroupe cinq pays avec des niveaux de développement très

différents : d’un côté les pays développés avec la France à travers La Réunion, et les pays

émergents comme les Seychelles et l’Île Maurice, et de l’autre les pays les moins avancés

comme les Comores et Madagascar.

D’autre part, le cadre de coopération s’est bâti autour de la Convention de Nairobi créée

entre 1985-1996 pour la protection, la gestion et le développement de l’environnement

marin et côtier de la région de l’Afrique du Sud et de l’Est. Elle comprend les États parties

à la COI. L’adaptation au changement climatique ne fait pas partie de ses axes d’action

stratégiques mais deux de ses axes peuvent être reliés à une approche de l’adaptation

basée sur les écosystèmes, à savoir, les récifs coralliens et leurs écosystèmes associés

ainsi que les aires marines protégées.

Ces deux arènes de coopération semblent donc avoir la capacité d’influencer les

politiques climatiques de différents pays dans la région de l’ouest de l’océan Indien.

c) Le chemin vers un réseau régional d’observation des effets du changement climatique et autres projets.

Le chemin menant vers la création d’un réseau régional d’observation des effets du

changement climatique a commencé d’abord avec la tenue de la conférence « L’Union

Européenne et l’Outre-Mer : Stratégies face au changement climatique et à la perte de

biodiversité » à La Réunion, en juillet 2008. Cette conférence a été initiée par l’Union

Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN), le Conseil Régional de La

Réunion, l’ONERC, en partenariat avec les Ministères français de l’Intérieur et de l’outre-

Sarah Voirin | Institut d’Études Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014

47

Page 49: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

mer et des collectivités territoriales et s’adresse à l’outre-mer européen. La conférence

avait pour objectif de proposer de nouvelles stratégies et programmes d’actions sur

l’adaptation au changement climatique, les énergies durables, la conservation de la

biodiversité et la gestion des écosystèmes. Cette conférence a réussi à susciter l’intérêt

des États et territoires de l’outre-mer européen sur l’adaptation au changement climatique.

Ensuite, la coopération transfrontalière pour l’adaptation au changement climatique a pris

la forme du projet ACCLIMATE, financé par le Fonds français pour l’environnement

mondial (FFEM), le Ministère des affaires étrangères de la France, l’Agence française de

développement (AFD), et la région La Réunion. Le projet a été mis en œuvre entre 2008

et 2012 par les États membres de la COI avec pour objectifs de mieux comprendre les

évolutions climatiques à l'échelle de la région, d’identifier les vulnérabilités aux impacts du

changement climatique, et d’élaborer une stratégie régionale d'adaptation qui permette de

réduire ces vulnérabilités. Le projet a donné lieu à l’émergence d’un dialogue sur

l’adaptation au changement climatique entre les États membres de la COI, à la réalisation

d'une série d'analyses et d'études qui a permis d'identifier les défis et les enjeux majeurs

de l'adaptation au changement climatique dans la région, et à la validation de la stratégie

régionale d’adaptation au changement climatique des pays de la COI lors de la conférence

de St Denis de clôture du projet en décembre 2012.

Puis cette coopération transfrontalière pour l’adaptation au changement climatique s’est

poursuivie à travers le projet ISLANDS qui a été mis en œuvre entre 2012 et 2014 par les

petits Etats insulaires en développement de la région de l'Afrique Orientale et Australe et

de l’océan Indien, à savoir, les Comores, La Réunion, Madagascar, l’Île Maurice, les

Seychelles et Zanzibar. Le projet avait pour objectif la mise en œuvre de la stratégie de

développement durable de la région de l’ouest de l’océan Indien, appelée aussi « stratégie

de Maurice » et a eu pour résultat de permettre la définition et la promotion du projet de

« Réseau régional d’observation des effets du changement climatique » en février 2014.

Et enfin, le projet de « Réseau régional d’observation des effets du changement climatique

» a été initié et est en cours depuis 2012. Ce projet fait partie du dispositif de mise en

œuvre souhaité par la stratégie régionale d’adaptation au changement climatique des

pays membres de la COI. Il a vocation à favoriser les échanges d’informations cohérentes

et la coopération transfrontalière et inter-organismes. Ses objectifs sont de capitaliser,

Sarah Voirin | Institut d’Études Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014

48

Page 50: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

d’harmoniser et diffuser les données et informations permettant une meilleure

compréhension des modèles de prévision des effets du changement climatique, à l’échelle

de la région de l’ouest de l’océan Indien, ainsi qu’aux échelles nationale et locale. Il

fonctionnera sur la base d’une coordination de la collecte et la mise en commun de

données auprès des pays membres de la COI43.

2. Analyse des facteurs de coopération transfrontalière favorisant ou entravant la promotion de l’adaptation au changement climatique.

a) Opportunités.

Tout d’abord, la COI apparaît comme un cadre qui a favorisé la coopération

transfrontalière sur l’adaptation au changement climatique entre les pays de la région de

l’ouest de l’océan Indien. Sa force est d’être une institution inter-gouvernementale qui

adresse les questions de développement et de gouvernance à travers différents secteurs

dans les pays concernés, de posséder une forte capacité à mobiliser des financements, et

d’avoir une forte influence sur les politiques des pays de la région.

Ensuite, la coopération transfrontalière sur l’adaptation au changement climatique a

bénéficié d’une certaine uniformité entre États et territoires insulaires de la région. Ils ont,

en effet, en commun d’être exposés à des impacts du changement climatique similaires ;

le fonctionnement de certains de leurs écosystèmes marins est régional; et ils partagent

dans une certaine mesure une vision commune des priorités nationales, en matière de

gestion de la ressource en eau, d’environnement, de sécurité alimentaire, de santé,

d’activité économique du tourisme et d’aménagement du territoire.

De plus, la contribution de la France à travers La Réunion au projet de réseau régional

d’observation crée également des conditions favorables à la prise en compte de

l’adaptation dans les projets de coopération transtrontalière dans la région. La participation

de la France s’est en effet traduite par l’apport de données, d’une expertise et d’une

43 Entretiens avec Nicolas Bériot cf. Annexe 4 – Liste des personnes ayant contribué à ma réflexion.

Sarah Voirin | Institut d’Études Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014

49

Page 51: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

capacité de financement par le biais de l’ONERC, des Schémas Régionaux Climat Air

Énergie (SRCAE) et Plans Climat-Énergie Territoriaux (PCET) de La Réunion, de la

stratégie nationale et du plan national d’adaptation français.

b) Lacunes et barrières.

La situation géographique rend la perception de l’enjeu transfrontalier lointain

puisqu’en effet, si l’océan est la frontière, les États et territoires insulaires sont séparés par

plusieurs centaines de kilomètres.

Des lacunes importantes au niveau régional, en termes de disponibilité et d’accessibilité

des données aux échelles appropriées ou qui soient spécifiques aux différents secteurs, et

des lacunes dans les bases de données écologiques et socio-économiques pour

comprendre et différencier les facteurs climatiques des facteurs non-climatiques

constituent des contraintes à l’élaboration de données régionales, conditions nécessaires

à la mise en œuvre de projets de coopération transfrontalière sur l’adaptation au

changement climatique.

L’insuffisance de la politique de soutien à la recherche sur le changement climatique, de la

coordination des recherches au niveau régional, et de la compréhension de l’implication

des impacts climatiques sur les écosystèmes et secteurs spécifiques sont également

autant de barrières à la mise en œuvre de projets de coopération transfrontalière sur

l’adaptation au changement climatique.

L’action de la COI en faveur du développement de projets de coopération transfrontalière

sur l’adaptation au changement climatique est entravée par sa très forte dépendance à

l’implication des États membres et par le fait que sa stratégie régionale d’adaptation soit

encore jeune, puisqu’elle vient d’être adoptée en 2012.

Les marques de similitude des pays de la région peuvent difficilement effacer des

différences qui vont avoir un impact sur la prise en compte des questions d’adaptation au

Sarah Voirin | Institut d’Études Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014

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Page 52: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

changement climatique. En effet, les pays de la région de l’ouest de l’océan Indien ne sont

pas tous au même stade de développement économique; ils n’ont pas la même approche

des enjeux environnementaux; et pour certains d’entre eux les priorités de développement

ont du mal à intégrer l’adaptation. De fait, ces différences risquent d’agir comme un

obstacle à la construction d’une vision de l’adaptation au changement climatique

commune.

Enfin, d’autres éléments ont considérablement ralenti l’élaboration du projet : la difficulté à

comprendre le mandat du réseau régional d’observation pour les pays de la COI au

départ, la méfiance des pays entre eux par crainte d’un usage inaproprié de leurs

données, et leurs doutes sur la capacité financière de la COI à passer de la stratégie à

l’action44.

c) Réussites.

La coopération des pays membres de la COI a eu le mérite de continuer vers des

projets d’adaptation toujours plus concrets puisqu’on est passé d’orientations stratégiques

générales avec la stratégie régionale d’adaptation au changement climatique à la

conception d’une véritable plateforme d’échange de données climatiques avec le réseau

régional d’observation des effets du changement climatique.

44 Entretiens avec Jérôme Duvernoy cf. Annexe 4 – Liste des personnes ayant contribué à ma réflexion.

Sarah Voirin | Institut d’Études Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014

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Page 53: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

CHAPITRE 3 : ENSEIGNEMENTS POUR ENRICHIR UN PROCESSUS EN DEVENIR.

Si l’on reprend l’idée d’une adaptation évolutive et transformiste de Jean-Baptiste

de Lamarck, c’est-à-dire d’une notion d’adaptation au milieu naturel, l’adaptation peut être

perçue comme un effort continu du vivant pour tirer profit du milieu naturel dans lequel il

évolue45. Cela est déjà le cas dans un contexte de stabilisation sur une période de

plusieurs siècles des phénomènes météorologiques quand les agriculteurs doivent

s’adapter en prenant en compte le cycle des saisons pour pouvoir tirer un meilleur

rendement de la terre. Cela l’est encore plus dans un contexte de changement climatique

dont la vitesse d’évolution, l’ampleur des impacts, et la multiplicité des causes impliquées

ne correspondent pas aux références du passé. La particularité de l’adaptation au

changement climatique est d’être un processus en devenir. D’une part, l’acceptation de la

réalité du changement climatique, qui ne relève pas de l’ordre de phénomènes naturels

mais de phénomènes sociaux et des représentations, elle-même est encore jeune, et par

voie de conséquence, le processus d’adaptation au changement climatique n’en est qu’à

ses débuts. Et, même si un accord international était conclu à Paris en 2015, pour

stabiliser rapidement la quantité de gaz à effet de serre émise dans l’atmosphère et par ce

biais la source anthropique des changements climatiques, les effets de l’atténuation du

changement climatique ne seront perceptibles qu’avec un décalage de plusieurs

décennies du fait de l’inertie du système climatique. D’où l’idée que l’adaptation est un

processus qui ne connaît pas de fin. Pour la première fois, l’homme dispose d’informations

robustes sur l’évolution du climat à long terme. Ainsi, l’adaptation réactive qui a prévalu

jusqu’à présent peut être désormais complétée voire remplacée par une adaptation

anticipative.

Dans cette perspective, il est nécessaire de tirer des enseignements des projets

d’adaptation, qui ont déjà été mis en œuvre ou qui sont en passe de le devenir afin de

réajuster et mettre à jour notre perception de l’adaptation à chaque étape d’avancement

de ces projets. Ces enseignements ont donc moins vocation à être érigés en une théorie

de l’adaptation qu’à être considérés comme un état des lieux de l’adaptation au

45 SIMONET, Guillaume. Le concept d’adaptation : polysémie interdisciplinaire et implication pour les changements climatiques. Natures Sciences Sociétés, 2009, vol. 17.

Sarah Voirin | Institut d’Études Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014

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Page 54: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

changement climatique à un moment donné de l’histoire de l’humanité dans certaines

parties du monde. Il ne semble pouvoir en être autrement du fait de la contingence des

actions d’adaptation.

1. Les facteurs de coopération qui influencent la prise en compte de l’adaptation au changement climatique.

La nature et le cadre de développement des projets de coopération transfrontalière

ont une influence sur la prise en compte de l’adaptation au changement climatique. D’une

part, à travers les cas analysés au chapitre précédent, on observe que le cadre

géographique dans lequel est mis en œuvre un projet de coopération transfrontalière peut

avoir une influence sur la perception de l’aspect transfrontalier, qui n’est pas le même

selon que les pays impliqués dans le projet de coopération soient reliés par un fleuve, par

une mer ou par un océan. La conception du risque de transfert de vulnérabilité qui résulte

de cette perception de l’aspect transfrontalier n’est donc également pas la même selon

ces circonstances. De plus, la façon d’appréhender l’adaptation au changement climatique

par le prisme de la coopération transfrontalière s’en trouve changée également. D’autre

part, il ressort de ces trois types de projets que la nature des États impliqués peut

également avoir un impact sur la perception de l’enjeu que représente l’adaptation au

changement climatique. Le niveau de développement des pays impliqués dans un projet

de coopération transfrontalière peut avoir un impact sur la façon dont ils vont percevoir

l’adaptation individuellement et dont ils vont la mettre en application collectivement. Dans

les régions du bassin méditerranéen et de l’ouest de l’océan Indien, qui contrairement à

celle du bassin de la Meuse, comportent des pays en développement, il faut

impérativement faire de l’adaptation un enjeu de développement pour qu’elle soit prise en

compte dans les projets de coopération transfrontalière.

Sarah Voirin | Institut d’Études Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014

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Page 55: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

2. Le cadre propice à la coopération transfrontalière pour l’adaptation.

Pour fonctionner un régime régional de coopération transfrontalière sur l’adaptation

nécessite à minima des priorités nationales compatibles et au mieux une vision commune

sur un nombre, même limité, d’aspects de l’adaptation. Dans les trois cas étudiés, on a vu

que les pays impliqués dans les projets avaient réussi à se mettre d’accord sur un certain

nombre de priorités d’adaptation. Dans le bassin de la Meuse, les partenaires d’AMICE

issus des différents pays riverains se sont accordés pour s’adapter ensemble à

l’augmentation des périodes de sécheresse et d’inondation due au changement

climatique. Dans le bassin méditerannéen, les pays de la rive nord comme de la rive sud

considèrent que la vulnérabilité des grandes zones urbaines du littoral au changement

climatique est la préoccupation première en matière d’adaptation. Dans la région ouest de

l’océan Indien, la priorité nationale pour les États et territoires insulaires est de préserver

des impacts du changement climatique les ressources naturelles vivrières et celles

dédiées au tourisme.

D’après ce que nous enseigne les trois études de cas, un régime régional de coopération

pourrait être propice à la mise en œuvre de projets d’adaptation transfrontaliers dans la

mesure où le lancement des projets peut être impulsé par des organisations régionales de

coopération. En effet, le Plan Bleu et la COI ont été moteurs dans le développement

d’axes stratégiques d’adaptation régionaux. Cependant, le rôle de ces organisations reste

limité lorsqu’il s’agit de s’impliquer dans les projets. En effet, une fois la mise en œuvre du

projet AMICE commencée, la CIM n’est quasiment plus intervenue pour suivre l’état

d’avancement du projet. De fait, un régime régional de coopération semble moins un

cadre d’impulsion de projets de coopération qu’un cadre de pérennisation de ceux-ci.

C’est sans doute dans cette perspective que les partenaires d’AMICE ont considéré qu’il

revenait à la CIM de proposer une stratégie régionale d’adaptation pour le bassin de la

Meuse et donc franchir l'étape que le projet n'a pu passer.

Sarah Voirin | Institut d’Études Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014

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Page 56: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

3. Les outils nécessaires pour la promotion de l’adaptation dans les projets de coopération transfrontalière.

Tout d’abord, les trois études de cas illustrent l’idée que l’adaptation est une notion

complexe, pas encore stabilisée pour tous et que l’un des plus grands obstacles à

surmonter pour promouvoir l’adaptation dans les projets de coopération transfrontalière

est encore de parvenir à faire comprendre ce qu’est l’adaptation au changement

climatique. Ce fut le cas des collectivités locales dans le bassin de la Meuse au départ

(ainsi que pour les deux autres cas étudiés).

Ensuite, il ne faut pas non plus sous-estimer le besoin de financement qui oriente souvent

les projets de coopération transfrontalière sur l’adaptation bien plus que la nécessité de

l’adaptation. Dans le cas du projet AMICE, le besoin de financement a influé sur l’affichage

du projet. Pour obtenir des financements, les partenaires d’AMICE ont en effet, bien plus

mis en avant le fait qu’il s’agisse d’un projet de coopération plutôt que le fait que ce soit un

projet qui porte sur l’adaptation au changement climatique46. Dans le cadre de la

coopération transfrontalière pour l’adaptation en Méditerranée, la différence de capacité

de financement des projets d’adaptation transfrontaliers entre les pays développés de la

rive nord et des pays en développement de la rive sud rend difficile l’acceptation de la

nécessité de s’adapter au changement climatique et donc l’élaboration de projet

d’adaptation en commun. La promotion de l’adaptation par les projets de coopération

transfrontalière semble donc devoir s’accomplir dans le cadre d’un système de

gouvernance suffisamment flexible pour parvenir à capter les intérêts de tous les pays

représentés dans les projets.

D’autre part, l’analyse empirique de ces trois projets de coopération transfrontalière sur

l’adaptation montre que le risque de transfert de vulnérabilité d’un pays à un autre est

rarement le point de départ de la réflexion qui pousse les pays à coopérer sur des projets

d’adaptation au changement climatique. C’est un concept quasiment absent dans les

projets étudiés. La seule référence au risque de transfert de vulnérabilité que l’on peut

trouver reste implicite et est perceptible à travers la revendication très forte d’une solidarité

entre les pays riverains de la Meuse dans le projet AMICE vis-à-vis des impacts liés au

46 Notons cependant que cela ne constitue pas un problème en soi.

Sarah Voirin | Institut d’Études Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014

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Page 57: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

changement climatique en particulier en période d’étiage.

Enfin, on remarque que lorsque tous les outils institutionnels, économiques, techniques

existent et sont mobilisables, un portage politique fort est souvent nécessaire pour les

activer.

4. Les bénéfices de la promotion de l’adaptation par la coopération transfrontalière.

D’une part, il n’y aurait pas de vision régionale des tendances climatiques et pas

d’harmonisation des priorités d’adaptation sans coopération entre pays d’un même bassin

transfrontalier. Dans le cas du bassin de la Meuse par exemple, sans le projet AMICE de

coopération transfrontalière on n’aurait pas pu obtenir des données climatiques à l’échelle

du bassin versant de la Meuse et donc on n’aurait pas envisagé des mesures d’adaptation

cohérentes à cette échelle.

Et d’autre part, développer la connaissance des impacts climatiques au niveau régional

permet de mutualiser les savoir-faire, les connaissances et les moyens. Promouvoir

l’adaptation au changement climatique par la coopération transfrontalière évite certains

coûts de transaction et donne une autre ampleur aux projets d’adaptation.

Ainsi, l’analyse de ces projets très différents montrent qu’étudier l’adaptation au

changement climatique sous l’angle de la coopération transfrontalière revêt un intérêt

particulier au motif du transfert de vulnérabilité.

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Page 58: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

5. Vers une adaptation transfrontalière à géométrie variable.

a) Bonnes pratiques : motifs de discussion sur l’adaptation transfrontalière.

Les enseignements que nous avons tirés des projets d’adaptation au

changemement climatique étudiés pourront alimenter la réflexion sur l’adaptation et la

coopération transfrontalière et inspireront peut-être certains acteurs dans le

développement de leurs futurs projets. Cependant, il ne s’agit en aucun cas d’ériger des

modèles d’actions d’adaptation transposables dans des contextes différents et dans

différentes parties du monde. En effet, pour Oran R. Young, le contexte détermine de

manière centrale comment les systèmes biophysiques et les systèmes de gouvernance

vont pouvoir être en adéquation. C’est pourquoi il considère qu’un arrangement

institutionnel adapté pour la gestion d’une ressource en particulier puisse ne pas l’être

pour une autre ressource47. D’autre part, selon Young, le succès des régimes

environnementaux est fortement dépendant des facteurs contextuels. Des chemins

multiples conduisent à la résolution des problèmes environnementaux. C’est généralement

une erreur de considérer qu’il existe une voie unique devant être identifiée et suivie48.

L’enseignement principal que nous retenons justement des projets d’adaptation étudiés

est qu’il n’y a pas de bonnes pratiques en soi. Les bonnes pratiques pour les uns ne

seront pas les mêmes pour les autres. Le processus d’adaptation tel que nous l’avons

étudié est un processus continu qui dépend intrinsèquement du contexte particulier dans

lequel il évolue. Dans cette perspective, les actions d’adaptation au changement

climatique étudiées ne sont pertinentes que dans leur contexte d’émergence. En effet, les

trois projets d’adaptation transfrontaliers que nous avons analysés possèdent, au-delà de

leurs similitudes, des spécificités incompressibles.

D’autre part, le risque de mal-adaptation du fait d’un transfert de pratiques inappropriées

d’un contexte à un autre, nous invite à émettre une clause de réserve vis-à-vis de la

47 op. cit. p.3448 YOUNG, Oran R. Effectiveness of international environmental regimes: Existing knowledge, cutting-edge themes, and research strategies. Proceedings of the National Academy of Sciences of the United States of America (PNAS), 2013, vol 108, n°50.

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Page 59: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

tendance à toujours rechercher des modèles et à vouloir s’y conformer.

Enfin, si les bonnes pratiques servent souvent à baliser un terrain vierge et à rassurer les

acteurs qui souhaiteraient mettre en place des projets d’adaptation au changement

climatique, elles peuvent également brider l’esprit d’initiative et l’imagination, et par

conséquent entraver la démarche vers une véritable expérimentation.

b) Des initiatives spontanées : sortir du tout normatif.

Tout d’abord, puisque les projets d’adaptation transfrontaliers étudiés se sont

développés sans l’existence d’un cadre spécifique à la coopération transfrontalière pour

l’adaptation au changement climatique, il ne semble pas nécessaire de promouvoir un

régime international de coopération associé. Le fait qu’il existe un certain nombre de

points communs entre les différents projets d’adaptation transfrontaliers étudiés ne signifie

pas forcément qu’il faille institutionnaliser, normer et réguler cette forme particulière de

coopération.

Ensuite, la création d’un énième cadre de coopération ne va pas nécessairement

améliorer la démarche d’adaptation transfrontalière. La création d’un nouveau régime

international de coopération ne rendrait pas plus efficace cette démarche et pourrait

résulter en une perte d’énergie et de ressources qui auraient pu être directement allouées

à la mise en œuvre des projets.

Par ailleurs, si le développement de projets d’adaptation transfrontaliers ne dépend pas

nécessairement de la création d’un régime, c’est-à-dire de l’adoption d’institutions, c’est

aussi parce que, selon Young49, les institutions ne sont jamais le seul facteur qui explique

si une coopération a marché ou non. Les institutions opèrent en lien avec d’autres forces

motrices (démographiques, économiques, et technologiques) qui affectent les processus

environnementaux.

En outre, non seulement le recours à un régime international et à des institutions n’est pas

nécessaire pour développer des projets d’adaptation transfrontaliers mais en plus, les

49 op. cit. p.34

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Page 60: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

institutions peuvent elles-mêmes contribuer à entraver ce développement. En effet, pour

Young50, les institutions ont la caractéristique de pouvoir être à la fois la source du

problème et la solution au problème qu’elles ont pour vocation de résoudre.

D’autre part, on a vu que les projets de coopération transfontalière sont souvent des

projets « bottom-up », dont l’impulsion vient plus des collectivités territoriales que de

l’administration centrale de l’État et fonctionnent mieux sans la lourdeur d’un cadre.

Enfin, notre démarche ne se situe pas dans la recherche d’un système de gouvernance

idéal de la coopération transfrontalière pour l’adaptation. Nous cherchons plutôt à partir de

la réalité actuelle de la coopération transfrontalière pour l’adaptation que nous pouvons

observer, et à essayer de comprendre ce qui en elle fonctionne déjà. Nous pouvons en

conclure que la coopération transfrontalière en faveur de l’adaptation est aujourd’hui un

processus qui n’est pas institutionnalisé.

c) La gouvernance transnationale du changement climatique : un cadre de coopération déjà existant.

Étant donné que la coopération transfrontalière pour l’adaptation au changement

climatique s’inscrit déjà dans le cadre d’une coopération transnationale plus vaste, la

prochaine étape semble moins de créer un nouveau cadre de coopération, dont le mandat

pourrait encombrer celui de la gouvernance transnationale de l’adaptation, que de

chercher à donner une cohérence à cette nébuleuse de projets d’adaptation épars en

coordonnant la coopération transfrontalière pour l’adaptation avec les mesures

d’adaptation déjà existantes. En effet, améliorer la coordination des projets d’adaptation

transfrontaliers avec les projets d’adaptation à d’autres échelles (nationale, locale,

transnationale, internationale) permettrait d’éviter des chevauchements, de réduire les

coûts de transaction, et de mutualiser les compétences.

Ainsi, parce que l’adaptation au changement climatique est une question plurifactorielle, et

que la coopération transfrontalière qui la soutient implique une grande diversité d’acteurs

50 op. cit. p.34

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et d’approches (États, collectivités locales, agences spécialisées de l’État, entreprises,

organisations non-gouvernementales, organisation intergouvernementales...), il n’existe

pas de solution unique et de modèle de référence pour orienter les projets d’adaptation

transfrontaliers.

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Page 62: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

CONCLUSION GÉNÉRALE

L’analyse des trois types de projets de coopération transfrontalière pour l’adaptation

au changement climatique a élargi mon champ de recherche au-delà des politiques

d’adaptation au changement climatique. Elle m’a conduit à étudier le cadre juridique de la

coopération transfrontalière et m’a permis d’en déterminer les outils capables d’influencer

la prise en compte et la promotion de l’adaptation dans les projets transfrontaliers. Par

ailleurs, les résultats de mes entretiens avec les personnes impliquées dans ces projets

de coopération transfrontalière ainsi que les théories des relations internationales que j’ai

étudiées, notamment celle de l’adéquation entre les systèmes de gouvernance et les

systèmes biophysiques dans la résolution des problèmes environnementaux d’Oran R.

Young, confirment mes hypothèses de recherche et me permettent d’affirmer que la

coopération transfrontalière est bel et bien une voie pertinente pour améliorer le processus

d’adaptation au changement climatique.

D’une part, j’ai montré que la coopération transfrontalière peut devenir un point d’appui

pour l’amélioration du processus d’adaptation au changement climatique des territoires

transfrontaliers. Tout d’abord, la coopération transfrontalière permet d’éviter un transfert

de vulnérabilité entre pays transfrontaliers menant à la mal-adaptation. Ensuite, la

coopération transfrontalière permet de construire une vision régionale des tendances

climatiques et une harmonisation des priorités d’adaptation entre pays d’un même bassin

transfrontalier. En effet, la coopération transfrontalière possède une valeur ajoutée pour la

promotion de projet d’adaptation au changement climatique dans la mesure où elle rend

possible une gestion intégrée commune des impacts du changement climatique dans un

bassin de risque traversant plusieurs États. L’intérêt d’avoir recours à la coopération

transfrontalière est également dû au fait qu’elle représente un instrument potentiel

d’intégration (mainstreaming) de l’adaptation au changement climatique dans les autres

politiques publiques à tous les niveaux de gouvernance. La coopération transfrontalière

semble aussi un domaine d’action complémentaire des politiques nationales d’adaptation

et la gouvernance internationale de l’adaptation.

D’autre part, j’ai exploré les facteurs qui permettent de développer une coopération

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transfrontalière promouvant l’adaptation au changement climatique, à travers l’analyse des

obstacles et du cadre propice à l’intégration de la coopération transfrontalière dans les

processus d’adaptation. Afin de mettre en œuvre des projets de coopération

transfrontalière pour l’adaptation au changement climatique il semble qu’il faille surmonter

le manque de connaissance sur l’adaptation et d’accès aux données climatiques,

l’insuffisance de moyens humains, la difficulté à comprendre la notion d’adaptation de

certains acteurs impliqués dans les projets, les différences de priorités entre les

partenaires transfrontaliers, l’absence de vision commune sur l’adaptation, les différences

d’état d’avancement dans les stratégies nationales d’adaptation, l’instabilité politique, la

difficulté à percevoir l’enjeu transfrontalier et la différence de niveaux de développement

entre les pays. Le cadre propice à une coopération transfrontalière en matière

d’adaptation serait donc un contexte dans lequel un régime de coopération régional existe

déjà entre les pays riverains d’un même bassin de risque, où la perception de l’enjeu

transfrontalier est partagée, les financements et l’expertise disponibles, et les priorités

nationales compatibles.

Ensuite, j’ai pu en déduire que les projets de coopération transfrontalière pour l’adaptation

n’ont pas nécessairement besoin du cadre d’un régime international pour se développer et

que si un régime de coopération régional semble par contre un cadre propice dans

l’impulsion ou la pérennisation des projets d’adaptation transfrontaliers, il ne suffit pas pour

garantir la bonne mise en œuvre et le suivi des projets.

De ce fait, au-delà du cadre de coopération institutionnalisé dans lequel les intérêts des

partenaires transfrontaliers convergent, les différentes conclusions tirées des trois cas

d’études me rapproche de la théorie constructiviste parce qu’il semble que ce soit surtout

grâce à un cadre cognitif fort sur l’adaptation au changement climatique et à la présence

de communautés épistémiques transnationales dans les régions étudiées que des projets

de coopération transfrontalière sur l’adaptation se soient développés.

Ainsi j’ai pu en conclure que si les projets d’adaptation transfrontaliers n’ont pas eu besoin

d’un cadre spécifique pour se développer et qu’ils se sont appuyés tantôt sur les politiques

nationales d’adaptation, tantôt sur un cadre de coopération régional plus large, c’est que

nul n’est besoin de créer un régime transfrontalier de coopération spécifique pour

l’adaptation. En outre, la création d’un régime de coopération spécialement dédié à la

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coopération transfrontalière pour l’adaptation au changement climatique impliquerait une

institutionnalisation, la détermination de nouvelles règles et normes décrivant un modèle

auquel il faudrait se conformer. Face à cela, la diversité des pratiques et les particularités

de chaque contexte dans lequel se déploient des projets d’adaptation transfrontaliers

apparaissent comme une richesse à développer plutôt que comme un ensemble à

uniformiser. C’est pourquoi je pense que la promotion de projets d’adaptation

transfrontaliers passera par leur coordination avec les projets d’adaptation développés à

d’autres échelles (locale, nationale, internationale, transnationale) et leur intégration dans

la gouvernance transnationale de l’adaptation et non par la recherche d’un modèle de

référence pour les orienter.

Étant donné que mon travail ne se situe pas dans une démarche exhaustive, des

recherches complémentaires seraient souhaitables pour rapprocher les trois études de

cas que j’ai présentées avec d’autres projets d’adaptation transfrontaliers afin

d’approfondir la réflexion sur les relations entre la coopération transfrontalière et

l’adaptation au changement climatique.

En effet, d’autres terrains d’études seraient à explorer pour consolider mes conclusions,

comme les projets transrégionaux d’adaptation au changement climatique développés

dans le cadre l’observatoire pyrénéen du changement climatique (OPCC) ou les initiatives

développées dans le cadre de la stratégie alpine d’adaptation au changement climatique

élaborée par la plateforme sur les risques naturels de la Convention alpine (PLANALP).

Par ailleurs, des changements récents et à venir dans la gouvernance mondiale du climat

et des risques naturels pourraient avoir un impact positif sur la prise en compte de l’aspect

transfrontalier de l’adaptation au changement climatique. En effet, les projets d’adaptation

transfrontaliers qui se développeront dans le futur bénéficieront sans doute d’un meilleur

accès à l’information climatique, notamment grâce la mise en œuvre du cadre mondial

pour les services climatologiques (CMSC) promu par l'organisation météorologique

mondiale (OMM) pour répondre aux besoins des utilisateurs en matière d’information

climatologique passée et future.

Ensuite, la révision du cadre d’action de Hyogo pour la stratégie internationale de

prévention des catastrophes naturelles (SIPC) en 2015 constitue une opportunité pour

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ouvrir la discussion internationale sur la question du transfert de vulnérabilité au sein d'un

bassin de risque.

Enfin, la tenue de la 21e conférence des parties à Paris en 2015 nous permettra de savoir

si la dimension transfrontalière de l’adaptation au changement climatique peut devenir un

enjeu de négociation au sein de la convention cadre des nations unies sur les

changements climatiques et faire partie d’un accord climatique mondial.

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Page 66: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

BIBLIOGRAPHIE

• OUVRAGES

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• TEXTES RÉGLEMENTAIRES – DOCUMENTS OFFICIELS

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Loi n° 2009-967 du 3 aout 2009 de programmation relative a la mise en œuvre du Grenelle de l'environnement.

Loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement.

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• DOCUMENTS D'ORIENTATION

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Projet AMICE, http://www.amice-project.eu/fr/

• CONFÉRENCES, RÉUNIONS DE TRAVAIL ET SÉMINAIRES

Audit de la 6e Communication nationale sur la politique française en matière de changement climatique, Ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie (MEDDE), La Défense (avril 2014).

Audit de l’Observatoire national sur les effets du réchauffement climatique (ONERC) par la Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, Assemblée nationale, Paris (avril 2014).

Audition de l’Observatoire national sur les effets du réchauffement climatique (ONERC) par Mme Laurence Rossignol, sénatrice de l’Oise, dans le cadre de son rapport d’information sur les coûts actuels avérés du changement climatique, Sénat, Paris (mars 2014).

Conférence Défi Climat 2014 « Les politiques climatiques 2014-2030 », Ministère de l’économie, des finances et de l’industrie (mars 2014).

Conférence « Présentation du World Energy Outlook de l’AIE : Contexte énergétique

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mondial et transition énergétique nationale », Ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie (MEDDE), Paris (février 2014).

Conférence « Rendez-vous du Quai d’Orsay » consacré à Paris Climat 2015, Ministère des Affaires Étrangères (MAE), Paris (mai 2014).

Conférence « 11e Forum International de la Météo et du Climat "Comment se préparer au climat de demain ?" », Conseil économique, social et environnemental (CESE), Paris (avril 2014).

Réunion Club ViTeCC, CDC Climat, Paris (mars 2014).

Réunion de département, Département de la lutte contre l’effet de serre (DLCES), Direction générale de l’énergie et du climat (DGEC), Ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie (MEDDE), La Défense (mars 2014).

Réunion de département, Département de la lutte contre l’effet de serre (DLCES), Direction générale de l’énergie et du climat (DGEC), Ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie (MEDDE), La Défense (mai 2014).

Réunion de préparation de la semi-COP de Bonn de juin 2014, dans le cadre de la préparation de la Conférence des Parties sur le changement climatique - Paris 2015 (COP 21), Ministère des Affaires Étrangères (MAE), Paris (février 2014).Réunion de présentation du projet de Réseau Action Climat-France (RAC-F) de valorisation du 2e volume du Cinquième rapport du Groupe d’experts Intergouvernemental sur l’Évolution du Climat, publié en 2014, financé par l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME) et par l’ l’Observatoire national sur les effets du réchauffement climatique (ONERC), siège de Réseau Action Climat-France (RAC-F), Montreuil (mai 2014).

Réunion de présentation du projet de WWF France d’exposition itinérante sur l’adaptation au changement climatique autour des grands fleuves de France, Ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie (MEDDE), La Défense (février 2014).

Réunion de présentation du Rapport au Premier ministre et au Parlement de l’Observatoire national sur les effets du réchauffement climatique (ONERC) « Les outre-mer face au défi du changement climatique », publié en 2012, Ministère des Outre-mer, Paris (mars 2014).

Réunion du groupe d’experts franco-chinois sur le changement climatique n°2, CERI Sciences-Po, Paris (juin 2014).Réunion du groupe Interfonds (GIF), négociations européennes et actualisation de l’Accord de Partenariat, Délégation interministérielle à l’aménagement du territoire et à l’attractivité régionale (DATAR), Paris (mars 2014).

Réunion du groupe protection civile (PROCIV), « Prévention des risques de catastrophe : position de l'Union européenne sur le post-Hyogo”, Conseil de l’Union européenne, Bruxelles (avril 2014).

Réunion « 3rd International Exchange : Governance of Climate Change Adaptation : From

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Strategy and Action Plan to Implementation », Project C3-Alps « Capitalising Climate Change Knowledge for Adaptation in the Alpine Space », Bureau fédéral de l’environnement, Berne (avril 2014).

Séminaire « Lecture technique des volumes 2 et 3 du 5e rapport d’évaluation du GIEC », Ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie (MEDDE), La Défense (mai 2014).

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Page 75: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

TABLE DES SIGLES

ADEME : Agence De l'Environnement et de la Maitrise de l'Energie

AFD : Agence Francaise de Developpement

AEE : Agence Européenne de l'Environnement

AMICE : Adaptation of the Meuse to the Impacts of Climate Evolutions

CDC : Caisse des Dépôts et des Consignations

CCNUCC : Convention-Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques

CEDD : Conseil Economique pour le Développement Durable

CEE-ONU : Commission Économique pour l’Europe des Nations Unies

CIM : Commission internationale de la Meuse

CMSC : Cadre Mondial pour les Services Climatologiques

CNRS : Centre National de la Recherche Scientifique

COI : Commission de l’Océan Indien

COP : Conférence des Parties

DAEI : Direction des Affaires Européennes et Internationales

DATAR : Délégation interministérielle à l’Aménagement du Territoire et à l’Attrativité Régionale

DGEC : Direction Générale de l'Energie et du Climat

DGPR : Direction Générale de la prévention des risques

DRIAS: Donner acces aux scenarios climatiques Regionalises francais pour l'Impact et l'Adaptation de nos Sociétés et environnements

EPAMA : Etablissement Public d’Aménagement de la Meuse et de ses Affluents

FEDER : Fonds Européen de Développement Régional

FFEM : Fonds Français pour l’Environnement Mondial

FIDA : Fonds International de Développement Agricole

GES : Gaz à Effet de Serre

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Page 76: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

GIEC : Groupe d'experts Intergouvernemental sur l'Evolution du Climat

GIZC : Gestion Intégrée des Zones Côtières

INRA : Institut National de la Recherche Agronomique

IRD : Institut de Recherche pour le Développement

MEDDE : Ministère de l'Ecologie, du Développement Durable et de l'Energie

MOT : Mission Opérationnelle Transfrontalière

OCDE : Organisation de Coopération et de Développement Économiques

OECC : Office Espagnol du Changement Climatique

OFEV : Office Fédéral de l'Environnement de la Suisse

ONERC : Observatoire National sur les Effets du Réchauffement Climatique

OPCC : Observatoire Pyrénéen du Changement Climatique

PAM : Plan d’Action pour la Méditerranée

PANA : Programme d'Action National sur l'Adaptation

PCET : Plan Climat-Energie Territorial

PEV : Politique Européenne de Voisinage

PLANALP : Plateforme Risques Naturels de la Convention Alpine

PMA : Pays les Moins Avancés

PNACC : Plan National d'Adaptation au Changement Climatique

PNUE : Programme des Nations Unies pour l’Environnement

SIPC : Stratégie Internationale de Prévention des Catastrophes Naturelles

SNACC : Stratégie Nationale d'Adaptation au Changement Climatique

SRCAE : Schéma Régional Climat Air Énergie

UE : Union Européenne

UICN : Union International pour la Conservation de la Nature

UpM : Union pour la Méditerranée

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UKCIP : United-Kingdom Climate Impacts Programme

ViTeCC : Villes, Territoires et Changement Climatique

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ANNEXES

Annexe 1 - Présentation des missions de l’ONERC.

Annexe 2 - La démarche d’adaptation de l’Union Européenne.

Annexe 3 - Étude comparée des processus d’adaptation au changement climatique dans les pays de l’espace européen (printemps 2014).

Annexe 4 - Listes des personnes ayant contribué à ma réflexion.

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Annexe 1 - Présentation des missions de l’ONERC.

L’Observatoire national sur les effets du réchauffement climatique en France

(ONERC) a été créé par la loi du 19 février 2001, à la demande du Parlement et du

Gouvernement qui souhaitaient prendre en compte les questions liées aux effets du

changement climatique. L’ONERC est rattaché depuis 2008 à la Direction Générale de

l’Energie et du Climat (DGEC), sous la tutelle du ministère de l’écologie, du

développement durable et de l’énergie (MEDDE). L’Observatoire est doté d’un conseil

d’orientation de vingt-sept membres dont le président est le sénateur Paul Vergès, le

directeur est M. Laurent Michel et le secrétaire-général M. Nicolas Bériot.

L’ONERC a tout d’abord pour mission de collecter et diffuser les informations, études et

recherches sur les risques liés au réchauffement climatique et aux phénomènes

climatiques extrêmes. L’Observatoire fonctionne en réseau avec des organismes

scientifiques (CNRS, Météo-France, IRD, INRA, etc.) pour connaître les impacts du

réchauffement climatique et des phénomènes climatiques extrêmes en France (métropole

et outre-mer). L’ONERC organise la collecte des informations et les rassemble dans ses

bases de données. Il propose, sur son site web, des outils afin d’aider les décideurs à

mieux appréhender les enjeux liés au bouleversement du climat et à planifier des actions

d’adaptation : indicateurs, simulations du climat futur et documentation. Il remet chaque

année un rapport au Premier ministre et au Parlement.

Par ailleurs, l’ONERC travaille en liaison avec le Groupe d’experts Intergouvernemental

sur l’Évolution du Climat (GIEC) dont il est le point focal pour la France depuis 2001. Le

point focal national est l’intermédiaire par lequel s’effectue le relais de l’information entre le

GIEC et les États. Créé en novembre 1988, à la demande du G7 (aujourd’hui G8), par

deux organismes de l’ONU : L’Organisation météorologique mondiale (OMM) et le

Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE), le GIEC évalue l’état des

connaissances pour envisager des stratégies d’atténuation et d’adaptation. Le GIEC a

pour mandat d'évaluer, sans parti pris et de manière méthodique, claire et objective, les

informations scientifiques, techniques et socio-économiques disponibles en rapport avec

la question du changement climatique. Il travaille à rendre compte des différents points de

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Page 80: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

vue et des incertitudes, tout en dégageant clairement les éléments qui relèvent d'un

consensus de la communauté scientifique. Le GIEC n'est donc pas un organisme de

recherche, mais un lieu d'expertise visant à synthétiser des travaux menés dans les

laboratoires du monde entier, en fonction d'un problème précis, pour lequel les États l'ont

mandaté.

D’autre part, l’ONERC a pour mission de formuler des recommandations sur les mesures

de prévention et d’adaptation à envisager pour limiter les risques liés au changement

climatique. L’ONERC a préparé une stratégie nationale d’adaptation au changement

climatique, qui a été adoptée par le gouvernement au cours du Comité Interministériel sur

le Développement Durable du 13 novembre 2006.

L’Observatoire a également piloté, en 2010, la concertation nationale sur l’adaptation au

changement climatique et il a coordonné la préparation du premier plan national

d’adaptation de la France, rendu public le 20 juillet 2011.

Par ailleurs, l’ONERC a pour mission de contribuer au dialogue sur le changement

climatique avec les pays en développement. De nombreux pays en développement

proches de la France métropolitaine ou d’outre-mer sont particulièrement vulnérables aux

changements climatiques (Méditerranée, océan Indien, Caraïbes, Pacifique).

Enfin, l’ONERC apporte son expertise sur l’adaptation aux négociations internationales sur

le climat dans le cadre du cycle des conférences des parties (COP), aux côtés du

Ministère des Affaires Etrangères.

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Page 81: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

Annexe 2 - La démarche d’adaptation de l’Union Européenne.

Pourquoi s’adapter au niveau européen ?

Plusieurs raisons concourrent à la nécessité de s’adapter, non pas seulement au niveau

national et local, mais également au niveau européen. De nombreux impacts du

changement climatique et de nombreuses mesures d’adaptation ont des dimensions

tranversales. Les impacts du changement climatique et l’adaptation affectent le marché

commun et les politiques communautaires (agriculture, eau, biodiversité, pêche, réseaux

d’énergie). Les vulnérabilités au changement climatique et l’adaptation déclenche un

nouveau cadre de solidarité. Les programmes de l’Union européenne pourraient compléter

les ressources des États membres dédiées à l’adaptation. De potentielles économies

d’échelle peuvent être significatives pour le renforcement des capacités, la recherche,

l’information et la mutualisation des données, et les transferts de connaissance.

Le rôle de l’Union Européenne dans le processus d’adaptation au changement

climatique.

L’Union européenne a, tout d’abord, un rôle à jouer dans le développement des processus

d’adaptation des États membres ainsi que dans l’intégration de l’adaptation dans la

politique communautaire.

D’autre part, étant donné que certains effets du changement climatique dépassent les

frontières nationales, dans les bassins fluviaux et maritimes et les régions

biogéographiques, l’adaptation au niveau européen devrait se traduire par une solidarité

entre les États membres pour que les régions défavorisées et les régions les plus

durement touchées par le changement climatique soient à même de prendre les mesures

d’adaptation qui s’imposent. L’Union européenne a donc un rôle particulièrement important

à jouer pour inciter les États membres à prendre en compte la dimension transfrontalière

dans la mise en œuvre de leurs actions d’adaptation.

La démarche de l’Union européenne en matière d’adaptation au changement climatique

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Page 82: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

s’est déroulé en trois étapes : la publication du Livre Vert Adaptation au changement

climatique en Europe: les possibilités d’action de l’Union européenne, du Livre Blanc

Adaptation au changement climatique: vers un cadre d'action européen , et de la Stratégie

européenne d’adaptation au changement climatique.

Livre Vert Adaptation au changement climatique en Europe: les possibilités d’action

de l’Union européenne.

Le livre vert de l’Union européenne sur l’adaptation au changement climatique a été publié

le 29 juin 2007. Il s’agit du premier document officiel de l’Union européenne sur

l’adaptation aux impacts du changement climatique. Il a été conçu sur la base du travail et

des résultats du Programme européen sur le changement climatique. Le livre vert indique

que l’Europe fait face à un double défi : des réductions drastiques dans les émissions de

gaz à effet de serre et une adaptation aux impacts du changement climatique.

Le livre décrit des pistes d’action potentielles à l’échelle de l’Union européenne de façon à

initier un débat public et une large consultation à travers toute l’Europe. Il s’en est suivi

une conférence majeure lançant le débat public sur l’adaptation en Europe qui a eu lieu à

Bruxelles le 3 juillet 2007.

Le livre vert propose également une série de questions afin que les parties intéressées

évaluent si l'orientation présentée par la Commission les satisfait, fassent part de leurs

souhaits concernant les priorités de l’Union européenne et proposent éventuellement des

idées supplémentaires. Sur la base des contributions et réactions au livre vert, la

Commission décide de l'orientation à venir de son action.

Livre Blanc Adaptation au changement climatique: vers un cadre d'action européen.

Le livre blanc de l’Union européenne sur l’adaptation au changement climatique a été

publié le 1er avril 2009.

Le livre blanc propose un cadre européen sur l’adaptation pour renforcer la résilience de

l’Union européenne face aux impacts du changement climatique. Il a été conçu sur la la

base de la vaste consultation lancé en 2007 par le livre vert sur l’adaptation en Europe.

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Page 83: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

L'objectif du livre blanc est de mieux comprendre le changement climatique et d'examiner

les mesures d'adaptation envisageables ainsi que la façon d'intégrer l'adaptation dans les

principales politiques communautaires.

Le livre blanc propose, d’une part, d'améliorer les connaissances en matière d'adaptation

au niveau communautaire par la mise en place d'ici 2011 d’un centre d'échange

d'informations sur les effets du changement climatique, et, d’autre part, de tenir compte

des impacts environnementaux dans tous les domaines politiques, notamment ceux de la

santé, de l'agriculture, de la sylviculture, de la biodiversité et des politiques marines et

côtières. Dans chaque domaine, les décideurs politiques sont invités à calculer les coûts

d'action et d'inaction.

Le livre rappelle, par ailleurs, que la plupart des mesures d'adaptation seront mises en

œuvre au niveau national ou régional et que le rôle de l'Union européenne sera de

soutenir ces efforts en adoptant une approche intégrée et coordonnée, notamment en ce

qui concerne les questions et les politiques transfrontières qui sont largement intégrées au

niveau de l'Union.

Le cadre d’action établi par le livre blanc a vocation à évoluer à mesure que de nouvelles

données climatiques deviennent accessibles, il vise à compléter les actions des États

membres, et se concentre sur quatre piliers clés : la construction d’une base de

connaissance plus solide, la prise en compte des impacts du changement climatique dans

les politiques clés de l’Union européenne, le financement de l’adaptation et le soutien à

des efforts internationaux plus larges en matière d’adaptation au changement climatique.

Stratégie européenne d’adaptation au changement climatique.

La stratégie d’adaptation au changement climatique de l’Union européenne a été adoptée

le 16 avril 2013 et a pour but de rendre l’Europe plus résistante aux impacts du

changement climatique. Il s’agit d’adopter une approche cohérente en complétant les

activités des États membres.

Pour ce faire, à travers une série de recommandations, la stratégie européenne

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Page 84: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

d’adaptation au changement climatique répond à trois objectifs : promouvoir les processus

d’adaptation des États membres, y compris par le biais de financements ; intégrer

l’adaptation dans les politiques communautaires, surtout dans les secteurs clés

vulnérables comme l’agriculture et les pêcheries ; et mieux informer la prise de décision.

Afin de promouvoir l’action des États Membres, la Commission européenne encourage

tous les États Membres à adopter des stratégies d’adaptation très complètes, leur fournit

un cadre pour l’intégration de l’adaptation aux politiques publiques déjà existantes ainsi

que des financements pour les aider à construire leur capacité d’adaptation et à agir. En

effet, la Commission européenne propose d’allouer au moins 20% du budget de l’Union

européenne à l’action sur le climat pour la période 2014-2020.

Pour intégrer l’adaptation dans les politiques communautaires, surtout dans les secteurs

clés vulnérables, l’Union européenne s’engage à rendre plus résistante l’infrastructure

européenne, en promouvant l’utilisation de l’assurance contre les catastrophes naturelles

et d’origine anthropique.

Tandis que pour mieux informer la prise de décision, l’Union européenne entend

s’attaquer aux lacunes dans les connaissances en matière d’adaptation. L’Union

européenne cherchera donc à développer encore plus la plateforme européenne

d’adaptation au climat (Climat-Adapt) comme une sorte de « magasin tout en un » de

l’information sur l’adaptation en Europe, en améliorant la base de connaissances au

niveau régional sur les impacts du changement climatique, la cartographie des

vulnérabilités, les coûts et les bénéfices des mesures d’adaptation pour façonner les

politiques publiques à tous les niveaux.

Le rôle de l’Agence Européenne de l’Environnement dans le processus d’adaptation en Europe.

L’agence européenne de l’environnement a été créée en 1993 et siège à Copenhague.

Elle a pour mandat, d’une part, d’aider la communauté européenne et les États membres

à prendre des décisions informées pour améliorer l’environnement, pour intégrer des

considérations environnementales dans les politiques économiques et pour avancer vers

un modèle de développement durable, et, d’autre part, de coordonner le réseau européen

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Page 85: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

d’information et d’observation sur l’environnement (Eionet).

L’objectif de l’agence européenne de l’environnement est de produire des données

environnementales intégrées européennes, pan-européennes et régionales, des batteries

d’indicateurs, des évaluations et des analyses thématiques de façon à fournir une base de

décision solide pour les politiques environnementales au niveau de l’Union européenne et

des États membres et pour la coopération avec les pays candidats ou potentiellement

candidats ainsi que pour ceux qui font partie de la politique européenne de voisinage

(PEV).

L’agence européenne de l’environnement développe des activités et produit des analyses

sur les impacts, la vulnérabilité et le changement climatique incluant : des analyses pour

les utilisateurs de Copernicus (Programme européen d’observation de la Terre) ; des

indicateurs d’impacts et de vulnérabilité et des informations sur les coûts des impacts et

de l’adaptation au changement climatique ; des analyses des problèmes d’adaptation

nationaux et sectoriels, comprenant des aperçus des stratégies et actions d’adaptation

aux niveaux transnational, national et des villes ; des analyses des tendances des risques

naturels, et des liens entre la réduction des risques de catastrophes et l’adaptation au

changement climatique ; des analyses de la vulnérabilité et de l’adaptation de régions

spécifiques ; le maintien et la gestion de la plateforme européenne d’adaptation.

L’agence européenne de l’environnement est également l’auteur d’un rapport sur les

processus d’adaptation en Europe publié en septembre 2014 : National adaptation policy

processes across Europe. Ce rapport a été écrit dans un contexte d’informations limitées

sur les activités d’adaptation dans les pays européens. Une sorte de questionnaire

adressé aux pays de l’Union européenne auquel ils doivent répondre sur une base

volontaire constitue la base de ce rapport. Ce rapport a pour but de partager les

expériences, les leçons apprises et les bonnes pratiques en matière d’adaptation. Le

rapport est organisé autour de 8 thèmes, incluant : la visibilité de l’adaptation ; la

génération et la création de connaissances ; la planification de l’adaptation ; la

coordination de l’adaptation; l’implication des parties prenantes ; la mise en œuvre de

l’adaptation ; la coopération transnationale ; et le suivi, le reporting et l’évaluation.

La visibilité se réfère à la conscience du besoin d’adaptation comme réponse au

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Page 86: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

changement climatique. La visibilité a une dimension publique et se reflète dans la prise

de conscience du public au sens large, incluant les communautés, le monde des affaires,

les organisations. La visibilité a aussi une dimension politique qui se reflète dans le fait

que l’adaptation atteigne l’agenda politique national et dans la volonté d’agir pour

l’adaptation. Les pays rapportent une augmentation de la prise de conscience publique du

besoin d’adaptation et attestent que l’adaptation a atteint l’agenda politique national. Les

déclencheurs pour se lancer dans l’adaptation identifiés par la majorité des pays sont

d’abord les événements climatiques extrêmes, puis les pertes économiques, ensuite les

politiques européennes, et enfin la recherche scientifique. La visibilité des impacts du

changement climatique et du besoin d’adaptation apparaît surtout quand, dans l’opinion

publique et dans la politique, les objectifs économiques visés sont mis à mal par les

impacts du changement climatique.

La connaissance se réfère dans ce contexte principalement à l’information scientifique et

technique liée au risque, à la vulnérabilité et à l’adaptation au changement climatique. La

génération de connaissances se réfère aux processus qui mènent à la production de

preuves scientifiques et techniques en lien avec l’adaptation au changement climatique,

comme les programmes de recherche et les évaluations de vulnérabilité. L’utilisation de

connaissances se réfère à l’usage du dispositif de preuves scientifico-techniques par des

acteurs pour soutenir une élaboration des politiques bien informées. Ce rapport montre

qu’une amélioration des connaissances en matière d’adaptation peut-être observée, que

des évaluations de risque et de vulnérabilité sont disponibles dans la majorité des pays

européens, que les estimations des coûts, bénéfices et incertitudes représentent la

principale lacune dans les connaissances en matière d’adaptation pour alimenter les

évaluations des risques et des vulnérabilités, et que les évaluations des risques et des

vulnérabilités doivent encore être mises en place au niveau local.

La planification de l’adaptation se déroule en trois étapes : identifier les options

d’adaptation possibles, c’est-à-dire collecter et décrire un large spectre d’options

d’adaptation possibles, incluant les mesures soft, green, grey et combinées ; évaluer les

options d’adaptation, c’est-à-dire estimer les options au regard de leur efficacité à s’atteler

à de potentiels impacts venant du changement climatique, leur mise en œuvre dans le

temps, les effets directs et indirects en termes environnementaux, sociaux et économiques

aussi bien que les coûts et les bénéfices, et autres critères ; et prioriser les options

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Page 87: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

d’adaptation, c’est-à-dire sélectionner les options d’adaptation préférées à développer et

mettre en œuvre plus tard. Il ressort de ce rapport que l’identification, l’évaluation et la

priorisation des options d’adaptation sont principalement basées sur des approches

qualitatives ; que la priorisation est considérée comme une étape importante dans la

plupart des instructions pour l’adaptation mais est rarement appliquée dans les pays

européens ; que l’analyse coûts/bénéfices n’est utilisée que par peu de pays européens

pour prioriser les options d’adaptation par manque d’information disponibles sur les coûts

de l’adaptation, impliquant de fait beaucoup de choix subjectifs ; que les pays européens

recommandent d’utiliser des méthodes variées pour la priorisation pour stimuler

l’apprentissage sur l’adaptation, que la planification des activités d’adaptation est perçue

comme étant la plus avancée dans le secteur de la biodiversité.

La coordination horizontale de l’adaptation est un mécanisme qui se réfère aux institutions

et aux processus en place pour soutenir l’intégration de l’adaptation dans les politiques

sectorielles. Elle implique que les acteurs responsables des différentes aires politiques au

sein d’un niveau administratif échangent de l’information et ajustent leurs activités de

façon à s’assurer que les efforts d’adaptation résultent en une action cohérente répondant

aux impacts inévitables du changement climatique. Tandis que la coordination verticale

est un mécanisme qui se réfère aux institutions et aux processus en place pour soutenir

l’intégration de l’adaptation à travers des niveaux administratifs multiples au sein d’un pays

(national, provincial, régional, local, communal). Elle implique que l’information sur et les

approches de l’adaptation soient transférées et échangées efficacement au sein de

chaque aire politique du niveau national jusqu’au niveau infra-national et vice versa. Il

ressort de ce rapport que les mécanismes de coordination verticale sont en place dans les

pays qui sont en train de mettre en œuvre des politiques d’adaptation ; que des

mécanismes de coordination efficaces ont été assurés lorsque les politiques d’adaptation

ont progressé vers la phase de mise en œuvre, que les processus d’échange de savoir,

de communication et de division des tâches contribuent à une coordination réussie, mais

des problèmes liés à la coordination peuvent survenir néanmoins ; et que la diversité des

mécanismes de coordination et de partage des leçons apprises va probablement

bénéficier au développement d’une coordination efficace pour l’adaptation.

En ce qui concerne les facteurs d’implication des parties prenantes identifiés par les pays

comme réussis, ils restent généraux : sensibilisation, renforcement des capacités,

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Page 88: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

implication dès les premières étapes du processus, transparence du processus, continuité

du processus.

La mise en œuvre de l’adaptation n’en est qu’à un stade initial en Europe au moment de la

publication de ce rapport. Il ressort de ce rapport que les pays peuvent, par ailleurs, avoir

des mesures d’adaptation très avancées en place dans des secteurs prioritairement

sélectionnés, tout en étant à un stade d’adaptation initial d’élaboration politique ; que les

secteurs considérés comme prioritaires pour la mise en œuvre de l’adaptation sont

d’abord l’eau, puis l’agriculture, et ensuite la forêt ; que les instruments politiques utilisés

pour la mise en œuvre de l’adaptation les plus fréquemment enregistrés sont d’abord la

fourniture d’information, puis l’intégration de l’adaptation dans les politiques publiques déjà

existantes (mainstreaming), et enfin le développement de plans d’action ; et que la

fourniture d’information ne mène pas nécessairement à l’adoption de mesures

d’adaptation.

Les exemples d’aires de coopération transnationale retenus par les pays sont les Alpes, la

Mer Baltique, la région du Danube, et les Pyrénées. Il ressort de ce rapport qu’il n’existe

pas de lien apparent entre la prise en compte de la coopération transnationale dans le

processus politique national d’adaptation et le stade d’évolution du processus politique ;

que la coopération transnationale en matière d’adaptation au changement climatique a

augmenté avec la reconnaissance de l’adaptation comme un domaine de politique

publique ; et que le fait que les ressources naturelles soient partagées entre plusieurs

pays motivent la coopération transnationale en matière d’adaptation.

Quant au suivi, au reporting et à l’évaluation des mesures d’adaptation au changement

climatique, seulement quatre pays pouvaient être considérés comme étant dans une

phase de suivi, de reporting ou d’évaluation (Danemark, Finlande, France, Royaume-Uni)

au moment du rapport. Il ressort donc de ce rapport qu’il n’y a pas d’information disponible

suffisante en termes de bilan des mesures d’adaptation pour en tirer des enseignements.

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Page 89: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

Annexe 3 - Étude comparée des processus d’adaptation au changement climatique dans les pays de l’espace européen (printemps 2014).

Partie 1

1. Explication du périmètre d’étude.

Dans l’optique de la préparation du second plan national d’adaptation au

changement climatique français et en vue de se préparer à une éventuelle mise à l’agenda

politique de l’adaptation plus affirmée grâce à l’effet d’entraînement de la publication de la

stratégie d’adaptation de l’Union européenne en avril 2013 et de la prochaine COP à Paris

en 2015, l’ONERC m’a chargée de comparer les processus d’adaptation en œuvre en

France avec ceux des autres pays européens, afin de repérer les pistes d’amélioration et

d’enrichir sa vision globale des processus d’adaptation en Europe.

Dans cette perspective, il s’agit de dresser un bilan de l’état d’avancement actuel des

processus d’adaptation dans les pays de l’espace européen51.

La méthode utilisée a consisté à examiner l’ensemble des stratégies et des plans

d’adaptation nationaux des pays européens, complété par des entretiens avec les chargés

de mission de l’ONERC, la littérature existante sur l’adaptation au changement climatique

(publications des institutions européennes, rapports annuels de l’ONERC, travaux de

l’Agence européenne de l’environnement, plate-forme européenne d’adaptation, rapports

de l’OCDE...) et sur les observations relevées au cours de réunions de travail

internationales (Convention Alpine à Berne, Risques naturels à Bruxelles, préparation des

négociations climatiques à Paris). Pour chaque pays, ont été identifiés les objectifs

d’adaptation visés, les différentes étapes du développement de la stratégie et l’élaboration

et la mise en œuvre du plan et les modes de gouvernance employés (cf. tableau ci-après).

2. Définition des catégories.

L’étude des stratégies et des plans d’adaptation des pays de l’espace européen

permet de distinguer deux catégories de pays : la première catégorie comprend les pays

51 Par « espace européen » nous entendons ici l’ensemble des pays membres de l’Union européenne, la

Suisse et la Norvège.

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les plus avancés dans leurs processus d’adaptation, c’est-à-dire ceux qui ont déjà adopté

une stratégie et un plan d’adaptation ; et la seconde catégorie comporte les pays qui ont

seulement adopté une stratégie d’adaptation sans avoir encore développé de plan d’action

pour la mettre en œuvre. Il existe également un troisième groupe composé de pays

n’ayant pas encore adopté de stratégie d’adaptation et qui n’est tel que par manque

d'information suffisante sur leurs processus d’adaptation.

3. Les pays les plus avancés : France, Finlande, Royaume-Uni, Allemagne, Pays-Bas, Danemark, Hongrie, Espagne.

a) Caractéristiques.

Les stratégies et plans nationaux d’adaptation des pays de la première catégorie

ont la particularité d’avoir émergé dans un contexte institutionnel favorable où des lois et

des plans d’action sur la thématique du changement climatique existaient déjà. Ce cadre a

sans doute permis aux stratégies et plans nationaux d’adaptation de s’ancrer en retour

dans un dispositif légal. Les pays de cette catégorie se caractérisent également par le fait

d’avoir déjà mis en œuvre un certain nombre d’actions d’adaptation mentionnées dans

leurs plans nationaux. Ils ont en commun d’avoir déjà commencé à développer des outils

et mécanismes de suivi et d’évaluation des actions d’adaptation, même si ces outils n’ont

pas encore abouti.

b) Particularités des stratégies et plans d’adaptation.

La Finlande a la particularité d’avoir été le premier pays européen à se doter d’une

stratégie nationale d’adaptation.

La France se distingue des autres pays de ce groupe par la mise en œuvre déjà bien

amorcée des actions d’adaptation prévues dans son Plan national d’adaptation52. Le Plan

Canicule, lancé après la catastrophe de 2003, est l’une des actions d’adaptation de la

France qui est restée emblématique au-delà de l’hexagone.

Les plans nationaux d’adaptation de la France et des Pays-Bas présentent deux

52 L’évaluation à mi-parcours du Plan national d’adaptation de la France atteste que 96% des actions et 81% des mesures prévues ont déjà été engagés.

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Page 91: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

approches de l’adaptation, opposées et différentes des plans nationaux d’adaptation des

autres pays européens dans la mesure où le plan d’adaptation de la France prend en

compte de nombreux secteurs de l’économie alors que celui des Pays-Bas ne priorise

pratiquement que le secteur de l’eau dans son processus d’adaptation au changement

climatique.

4. Les pays intermédiaires : la Suisse, le Portugal, la Belgique, Malte, la Pologne et la Norvège.

Les pays de cette catégorie ont en commun d’avoir élaboré leurs stratégies

nationales d’adaptation au changement climatique avant la parution de la stratégie

d’adaptation de l’Union européenne sans pour autant qu’on puisse dire si elles ont eu une

influence sur cette dernière. Ces pays viennent tout juste d’élaborer leurs stratégies et ne

sont pas encore entrés dans la phase de planification des actions d’adaptation.

5. Pays les moins engagés.

Les autres pays de l’Union européenne53 n’ont pas encore développé de stratégie

d’adaptation au changement climatique, mais cela ne signifie pas pour autant que ces

pays n’ont pas amorcé leur processus d’adaptation. Les pays de cette catégorie sont déjà

pratiquement tous entrés dans une phase de production de la connaissance sur les

impacts du changement climatique et certains sont en train d’élaborer leur stratégie

d’adaptation.

L’Italie a commencé à élaborer sa stratégie et son plan d’adaptation depuis 2012.

La République d’Irlande a déjà adopté un cadre national pour l’adaptation au changement

climatique en décembre 2012 et prévoit de publier des plans d’adaptation sectoriels et

locaux dans le courant de l’année 2014.

La Lituanie n’a pas développé de stratégie nationale spécifique pour l’adaptation mais a

publié en 2008 une stratégie nationale pour la mise en œuvre de la Convention Cadre des

53 Les pays de l’Union européenne qui n’ont pas adopté de stratégie nationale d’adaptation sont : la République d’Irlande, la Lituanie, l’Estonie, la Lettonie, la Slovaquie, la Slovénie, la Roumanie, la Suède, l’Italie, Chypre, la Bulgarie, le Luxembourg, la Croatie, la Grèce, et la République Tchèque.

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Page 92: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

Nations Unies pour le Changement Climatique (CCNUCC) prévue pour 2012 dont le

troisième élément porte, entre autres, sur la gestion des mesures d'adaptation.

6. État d’avancement de l’adaptation en Europe.

Il ressort de cette étude que sur les vingt-sept pays membres de l’Union

européenne seulement quinze pays ont déjà adopté une stratégie d’adaptation et neuf

pays ont adopté un plan d’adaptation au changement climatique.

Toutefois, dans l’ensemble, la majorité des pays ayant déjà adopté une stratégie et un

plan d’adaptation n’en sont encore qu’au stade de l’étude d’impact des effets du

changement climatique sur leur territoire et de l’investissement dans le développement

des connaissances, peu d’entre eux sont déjà dans une phase de mise en œuvre des

actions d’adaptation et aucun n’a encore réalisé d’évaluation finale de son plan.

En raison de leur contenu parfois assez éloigné de la mise en œuvre, certains documents

présentés comme des plans s’apparentent plutôt à des stratégies en se situant au niveau

d’orientations et objectifs thématiques. En effet, les mesures décrites dans les plans

nationaux d’adaptation se révèlent parfois être des actions et les actions décrites sont en

fait des principes pour orienter la démarche d’adaptation.

Le type de mesure d’adaptation le plus répandu est celui des mesures sans regret et le

domaine d’action auquel s’applique la plupart des mesures d’adaptation correspond à la

production et à la diffusion d’information. Ce choix de mesures s’explique par le moindre

coût politique et économique qu’elles entraînent et aussi parce que les pays n’en sont

encore qu’au stade de la production de la connaissance et à la sensibilisation du public et

des politiques aux enjeux de l’adaptation.

Au-delà des stratégies et plans nationaux, l’adaptation s’est également développée au

niveau européen. En effet, l’Union européenne a publié un livre vert sur l’adaptation en

2007, un livre blanc en 2009 et une stratégie d’adaptation en 2013.

L’Union européenne a un rôle à jouer dans le développement des processus d’adaptation

des États membres ainsi que dans l’intégration de l’adaptation dans la politique

Sarah Voirin | Institut d’Études Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014

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Page 93: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

communautaire puisque de nombreux impacts du changement climatique et de

nombreuses mesures d’adaptation ont des dimensions transversales ; que les impacts du

changement climatique et l’adaptation affectent le marché commun et les politiques

communautaires (agriculture, eau, biodiversité, pêche, réseaux d’énergie) ; que les

programmes de l’Union européenne pourraient compléter les ressources des États

membres dédiées à l’adaptation ; et que de potentielles économies d’échelle peuvent être

significatives pour le renforcement des capacités, la recherche, l’information et la

mutualisation des données, et les transferts de connaissance. Pour ce faire, à travers une

série de recommandations, la stratégie européenne d’adaptation au changement

climatique répond à trois objectifs : promouvoir les processus d’adaptation des États

membres, y compris par le biais de financements ; intégrer l’adaptation dans les politiques

communautaires, surtout dans les secteurs clés vulnérables comme l’agriculture et les

pêcheries ; et mieux informer la prise de décision, en s’attaquant aux lacunes dans les

connaissances en matière d’adaptation et développant encore plus la plate-forme

européenne d’adaptation au changement climatique.

D’autre part, étant donné que certains effets du changement climatique dépassent les

frontières nationales, dans les bassins fluviaux et maritimes et les régions

biogéographiques, l’adaptation au niveau européen devrait se traduire par une solidarité

entre les États membres pour que les régions défavorisées et les régions les plus

durement touchées par le changement climatique soient à même de prendre les mesures

d’adaptation qui s’imposent. L’Union européenne a donc un rôle particulièrement important

à jouer pour inciter les États membres à prendre en compte la dimension transfrontalière

dans la mise en œuvre de leurs actions d’adaptation. D’ailleurs, des exemples de projets

de coopération transfrontalière pour mettre œuvre des actions d’adaptation financés par

l’Union Européenne existent déjà et ont rendus certains pays européens plus résilients

aux impacts du changement climatique, comme le projet AMICE dans le bassin de la

Meuse.

7. Construction de l’approche d’adaptation.

Dans l’ensemble, les pays de l’espace européen ont généralement eu recours à

une consultation publique impliquant un large spectre de parties prenantes de l’adaptation

et d’acteurs de la société civile pour élaborer leur approche de d’adaptation.

Sarah Voirin | Institut d’Études Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014

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Page 94: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

La plupart des pays de l’espace européen ont choisi une approche de l’adaptation par

priorité, mettant en avant certains secteurs économiques.

Il semble que l’approche de l’adaptation dominante en Europe soit une approche

sectorielle et non transversale même si une place est laissée aux champs d’action

transversaux. La plupart des champs d’action prioritaires des plans d’adaptation sont des

champs d’action sectoriels et peu d’entre eux sont des champs d’actions transversaux. En

Allemagne sur les quinze champs d'action prioritaires du plan national d’adaptation, treize

champs d'action sont sectoriels et seulement deux champs d'action sont transversaux. En

France sur les vingt fiches-actions du plan national d’adaptation, seulement deux sont

dédiées aux actions transversales et à la gouvernance.

L’élément déclencheur de la stratégie d’adaptation dans la plupart des pays ont souvent

été la manifestation de phénomènes climatiques extrêmes, comme la canicule de 2003 en

France, par exemple. Ce qui veut dire qu’au départ le processus d’adaptation s’est

développé comme une approche réactive et que la proposition de mesures d’adaptation

préventives est venue après.

Plusieurs pays ont intégré une évaluation du coût des impacts du changement climatique,

du coût des actions d’adaptation et du coût de l’inaction pour façonner leur stratégie et

plan mais partout l’évaluation des coûts liés à l’adaptation n’en est encore qu’à un stade

initial.

S’il n’existe pas de modèle unique d’adaptation en Europe, chaque pays priorisant les

mesures d’adaptation les plus adaptées à la spécificité de son territoire et des impacts du

changement climatique sur celui-ci, il existe de nombreux points communs aux différentes

stratégies nationales d’adaptation favorisant54 ou limitant55 leur succès. L’Union

54 Parmi les points communs aux différentes stratégies nationales d’adaptation favorisant leur succès on peut citer : l’intégration de l’adaptation dans les politiques sectorielles, la consultation des responsables de l’adaptation de tous les secteurs à tous les niveaux et de la société civile dans l’élaboration de l’approche d’adaptation, un effort de communication et de sensibilisation, et le choix d’un processus évolutif de mise jour des objectifs et des mesures d’adaptation en fonction des données scientifiques accessibles.55 Parmi les points communs aux différentes stratégies nationales d’adaptation limitant leur succès on peut citer : l’absence de considérations pour les impacts transfrontaliers, le besoin d’évaluations plus approfondies des risques et des vulnérabilités liés au changement climatique, le manque de plan d’action, le manque de suivi et d’évaluation des stratégies nationales d’adaptation, et le manque de financement pour la mise en œuvre de ces stratégies.

Sarah Voirin | Institut d’Études Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014

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Page 95: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

européenne s’est appuyée sur ces points communs pour proposer, dans sa stratégie, une

approche de l’adaptation qui a vocation à être commune à tous les pays européens.

La stratégie d’adaptation de l’Union européenne n’a donc pas influencé le développement

des stratégies nationales existantes puisqu’elles se sont développées avant la parution de

celle-ci, mais à l’inverse certaines d’entre elles ont contribué à l’élaboration de la stratégie

d’adaptation de l’Union européenne.

L’Union européenne peut jouer un rôle de soutien aux pays encore peu engagés dans le

processus d’adaptation et n’ayant pas encore adopté de stratégie d’adaptation ; et

d’accompagnement des pays dans un stade intermédiaire d’avancement de leur

processus d’adaptation. D’ailleurs, les pays n’ayant pas encore développé de stratégie ou

de plan d’action revendiquent l’apport de la stratégie européenne d’adaptation pour

avancer dans leur processus d’adaptation. D’autre part, même vis-à-vis des pays avancés

dans leur processus d’adaptation, l’Union européenne peut encore jouer un rôle en

facilitant le partage d’expériences sur l’adaptation.

8. Modes de gouvernance de l’adaptation.

La responsabilité du pilotage de l’adaptation revient généralement aux Ministères

de l’Environnement dans la plupart des pays de l’Union européenne.

La volonté d’intégrer l’adaptation dans les politiques publiques existantes est présente

dans tous les pays de l’espace européen mais sa mise en œuvre n’en est encore qu’à un

stade initial.

Par ailleurs, lorsque des actions d’adaptation existent au niveau local, elles ne s’inscrivent

pas toujours dans un dispositif de planification national. Les actions et mesures inscrites

dans les plans nationaux d’adaptation n’ont d’ailleurs pas vocation à se décliner dans les

stratégies et plans locaux. En France, par exemple, les Plans Climat Énergie Territoriaux

(PCET) et les Schémas Régionaux Climat Air Énergie (SRCAE) n’ont pas nécessairement

vocation à être en adéquation avec le plan national d’adaptation.

Dans de nombreux pays, l’échelon local est considéré comme le plus pertinent pour

Sarah Voirin | Institut d’Études Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014

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Page 96: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

développer une stratégie d’adaptation. Au royaume-uni le niveau local est considéré

comme étant en première ligne pour définir une stratégie adaptée à son territoire tandis

que le niveau national doit s'assurer de mettre à disposition des outils adaptés, un

environnement institutionnel propice, vérifier la mise en œuvre de l'adaptation au niveau

local et assurer l’arbitrage en cas de différends régionaux. En Allemagne les länder

développent leurs propres stratégies locales d’adaptation. En Autriche toutes les provinces

(excepté deux) ont déjà développé leur propre stratégie ou leur propre plan d'adaptation.

La structure gouvernementale des pays ne semble pas avoir d’influence sur le découplage

entre stratégies et plans d’adaptation. En effet, dans les États fédéraux d’Allemagne,

d’Autriche et de Suisse aussi bien que dans les États centralisés comme la France, les

collectivités territoriales développent leurs propres stratégies et plans d’adaptation en

conformité avec les orientations stratégiques nationales existantes.

Enfin, la coordination de l’adaptation semble facilitée et mieux réussie dans les États à

structure fédérale, comme l’Allemagne et l’Autriche, que dans les États plutôt centralisés,

comme la France, étant donné que les administrations locales (régions, provinces,

municipalités) de ces États-là ont déjà l'habitude d'avoir des grandes responsabilités et de

prendre des initiatives et notamment sur les questions liées au changement climatique.

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Page 97: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

Annexe 3 - Tableau comparatif des processus d’adaptation au changement climatique dans les pays de l’espace européen (section pays avancés).

Partie 2

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Pays avancés

Étapes Finlande France Allemagne Royaume Uni Autriche Pays-Bas Danemark Hongrie Espagne Suisse

Co

nn

aiss

ance

s

Études et recherches 1990 1970

plusieurs plusieurs plusieurs plusieurs plusieurs

en cours 1999 1997-2011 2006 1998-2001

2006 2009 2012 2006 2007 2003-2007 2002 2007

2009 2003 2003-2005 2003

Str

atég

ie

2005 2006 2008 2008 2012 2008 2008 2008 2006 2012

2009 2007

Dispositif législatif

oui 2009-2010 2008-2013

Consultation du public non 2010-2011 2007 non

Pla

n

2008 2011 2011 2012 2012 2008-2025 2006 et 2009 2014

2009 Annuel A commencé Bisannuel 2008 et 2011

Dispositif infra-national

Entité pilote ONERC, DGEC

Pér

enn

isat

ion

2008 2014 prévue pour 2015

2012-2013

prévue pour 2015 prévue pour 2017

Organismes de recherche sur le climat

Programmes de recherche impacts

Diagnostic national des impacts

Diagnostic de vulnérabilités

Orientations nationales (stratégie)

Options d'adaptation (élaboration du plan)

Loi Grenelle de 2009

Loi sur le Changement Climatique de 2008

Loi sur les Deltas de 2012

loi sur le changement climatique de 2007

Concertation avec les parties prenantes

Loi CO2 révisée en 2013

Actions et mesures coordonnées (plan)

2013 pour l’Angleterre

Programme annuel depuis 2010

Secteurs concernés par les actions

Agriculture sylviculture, pêcheries, élevage, ressources en eau, biodiversitéIndustrie, énergie, transport, aménagement, santé,Tourisme etassurance

Actions transversales, santé, eau, biodiversité, risques naturels, agriculture, forêt, pêche, tourisme, énergie, industrie, transport, aménagement, information, éducation, recherche, finance, littoral, montagne, coopération et internationale, gouvernance

Santé, construction, eau, littoral, biodiversité, agriculture, forêt, pêche, énergie, finance, transport, commerce et industrie, tourisme, aménagement, assurance

Aménagement, agriculture, pêche forêt,Biodiversité, eau, santé, industrie, commerce, services, tourisme, transport

Agriculture, sylviculture, eau, tourisme, énergie, risques naturels, aménagement, assurance, santé, biodiversité, transport

Sécurité, eau, aménagement, deltas, littoral, rivières

Littoral, aménagement, eau, énergie, agriculture, forêt, pêche, santé, sécurité, biodiversité

Biodiversité, santé, eau,agriculture, élevage, forêt, aménagement

Biodiversité, eau, littoral, forêt, agriculture, santé, tourisme, aménagement, chasse et pêche, montagne, transportindustrie, énergie, finance, assurance

Eau, risques naturels, agriculture, forêt, énergie, tourisme, biodiversité, santé, aménagement

Suivi/évaluation de la mise en œuvre des actions

Tous les 5 ans depuis 2010-2011 pour le Royaume-Uni et 2013 pour l’Ecosse

tous les 2 ans à partir de fin 2014

Prévu pour 2016-2017

Agenda 21, PCET, SRCAE

stratégies et plans d’adaptation des villes et des Länder

plans départementaux de l’Angleterre, programme d’adaptation trans-départemental de l’Irlande du Nord

stratégies et plans locaux d’adaptation des provinces autrichiennes

La Stratégie Locale pour le Changement Climatique et les stratégies et plans locaux d’adaptation des communautés autonomes

Intégration des orientations nationales d’adaptation dans les activités des Cantons

Ministère de l’Agriculture et

de la Forêt

Kompass, Agence Fédérale de l'Environnement (UBA)

Département de l’Environnement, de la Nourriture et des Affaires Rurales (Defra)

L’Agence pour l’Environnement de l’Autriche

Commissaire au Programme Delta

Ministère du Climat, de l’Énergie et de la Construction

Office Espagnol du Changement Climatique (OECC), Ministère de l’Agriculture, de l’Alimentation et de l’Environnement.

Office fédéral de l'environnement (OFEV)

Évaluation à mi-parcours de la stratégie/du plan

Mise à jour de la stratégie/du plan

Évaluation finale de la stratégie/du plan

Évaluation de l'impact des actions

Évaluation de l'utilité de la politique publique

Page 98: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

Annexe 3 - Tableau comparatif des processus d’adaptation au changement climatique dans les pays de l’espace européen (section pays intermédiaires).

Partie 3

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Pays intermédiaires

Étapes Belgique Portugal Malte Norvège Pologne

Co

nn

aiss

ance

s

Études et recherches

Diagnostic national des impacts 2004 1999 2010

Diagnostic de vulnérabilités 2010

Str

atég

ie

2010 2010 2012 2013 2013

Dispositif législatif

Consultation du public oui

Pla

n

Dispositif infra-national

Entité pilote Ministère de l’Environnement

Pér

enn

isat

ion

Organismes de recherche sur le climat

Le Programme Klimaforsk

Programmes de recherche impacts

Le Programme Klimaforsk

Orientations nationales (stratégie)

Options d'adaptation (élaboration du plan)

Concertation avec les parties prenantes

Actions et mesures coordonnées (plan)

Secteurs concernés par les actions

Eau et îlots de chaleur

Aménagement, eau, sécurité, santé, énergie, industrie, tourisme, agriculture, forêts, pêche, littoral, biodiversité

Finance, législation, développement durable, eau, agriculture, santé, tourisme, communication, éducation

Approche de la gestion de l’environnement basée sur les écosystèmes, renforcement institutionnel, infrastructures, eau

Agriculture, forêt, eau, biodiversité, Littoral, énergie, aménagement, transport, santé, tourisme, actions transversales

Suivi/évaluation de la mise en œuvre des actions

« Les villes du futur », initiative conjointe entre le gouvernement et les 13 plus grandes villes du pays dans le but de réduire les émissions de gaz à effet de serre et de s’adapter au changement climatique

Évaluation à mi-parcours de la stratégie/du plan

Mise à jour de la stratégie/du plan

Évaluation finale de la stratégie/du plan

Évaluation de l'impact des actions

Évaluation de l'utilité de la politique publique

Page 99: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

Annexe 3 - Tableau comparatif des processus d’adaptation au changement climatique dans les pays de l’espace européen (section pays moins avancés).

Partie 4

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Pays moins avancés

Étapes Italie Lituanie Lettonie Suède Chypre Grèce

Co

nn

ais

sa

nc

es

Études et recherches oui

plusieurs

2009 et 2013 2008 2007 2006 2008 2010 2011

Diagnostic de vulnérabilités 2009

Str

até

gie

En cours

Dispositif législatif

oui 2011

Consultation du public 2012-2013

Pla

n

Eau et montagne

Dispositif infra-national

Entité pilote

ren

nis

ati

on

Républiqued’Irlande

Organismes de recherche sur le clim atProgram mes de recherche impacts

Diagnostic national des impacts

Orientations nationales (stratégie)

En cours depuis 2012 et prévue pour 2014

Options d'adaptation (élaboration du plan)

En cours et prévu pour 2014

Concertation avec les parties prenantes

Actions et mesures coordonnées (plan)

Secteurs concernés par les actions

Biodiversité, pêche, aménagement, agriculture, eau, forêt

Aménagement, biodiversité, énergie, industrie, transports, agriculture, forêt, santé

Eau, agriculture, forêt, biodiversité, aménagement, littoral, santé, assurance

Suivi/évaluation de la m ise en œuvre des actions

Direction générale du développement durable, du climat et de l’énergie

Département du Climat et des Énergies Renouvelables, Ministère de l’Environnement.

Évaluation à m i-parcours de la stratégie/du plan

Mise à jour de la stratégie/du plan

Évaluation finale de la stratégie/du plan

Évaluation de l'im pact des actions

Évaluation de l'utilité de la politique publique

Page 100: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

Annexe 4 - Listes des personnes ayant contribué à ma réflexion.

M. Michel Aldon, actuellement Directeur de projet Schéma d’Aménagement Régional (SAR) au Conseil Régional de La Réunion et anciennement référent technique pour le volet changement climatique du projet Islands 1 (2012-2014).

Mme Chantal Andrianarivo, actuellement expert biodiversité pour le projet Biodiversité de la Commission de l’océan Indien et conseillère régionale au Programme des Nations Unies pour l’Environnement et anciennement conseillère technique chez Western Indian Ocean Coastal Challenge.

Mme Claire Bergé, chargée de mission, bureau des marchés carbone, Direction générale énergie climat, Ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie.

M. Nicolas Bériot, secrétaire-général de l’Observatoire national sur les effets du réchauffement climatique, Direction générale énergie climat, Ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie.

M. Mohamed Boulahia, anciennement chef de projet international au Plan Bleu pour le projet de stratégie méditerranéenne d’adaptation au changement climatique.

M. Vincent Bourcier, chargé de mission, Observatoire national sur les effets du réchauffement climatique, Direction générale énergie climat, Ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie.

Mme Hélène Desbieys, anciennement en mission professionnelle à l’Observatoire national sur les effets du réchauffement climatique, dans le cadre d’un mastère spécialisé.

M. Jérôme Duvernoy, chargé de mission, Observatoire national sur les effets du réchauffement climatique, Direction générale énergie climat, Ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie.

Mme Maïté Fournier, actuellement chef de projet « Étiages » chez Institution interdépartementale d'aménagement du fleuve Charente et ses affluents (EPTB Charente) et anciennement chef de projet international - gestion de l'eau chez EPAMA pour le projet AMICE.

M. Stéphane Labranche, titulaire de la Chaire Energie-Climat de l’Institut d’Études Politiques de Grenoble, chercheur associé à Pacte – UMR CNRS, et membre du GIEC.

Mme Marie-Pierre Méganck, chargée de mission, Cellule des affaires européennes et internationales, Direction générale de prévention des risques, Ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie.

M. Sylvain Mondon, chargé de mission, Observatoire national sur les effets du réchauffement climatique, Direction générale énergie climat, Ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie.

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Page 101: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

M. Bertrand Reysset, actuellement chargé de mission au Fonds international de développement agricole et anciennement chargé de mission à l’Observatoire national sur les effets du réchauffement climatique, Direction générale énergie climat, Ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie.

M. Frédéric Schafferer, chargé de mission, Direction des affaires européennes et internationales, Ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie.

Mme Sarah Tiefenauer, chef de projet international chez EPAMA pour la suite du projet AMICE.

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Page 102: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

TABLE DES MATIÈRES

INTRODUCTION GÉNÉRALE.................................................................................................................................. 61. La Nécessité des Politiques Climatiques....................................................................................................................... 6

a)L’adaptation au changement climatique : une politique climatique nouvelle.................................................................................6b) Adaptation et Atténuation : deux politiques pour lutter contre le changement climatique...................................................8

2. Les barrières à l’adaptation et les risques de mal-adaptation...........................................................................9

3. La coopération transfrontalière : un type de solution pour éviter la mal-adaptation. .......................11

4. Les justifications de la méthode de travail............................................................................................................... 12

5. Problématique...................................................................................................................................................................... 14

6. Hypothèses de recherche.................................................................................................................................................. 15

7. Plan du mémoire.................................................................................................................................................................. 16

CHAPITRE 1 : COOPÉRATION TRANSFRONTALIÈRE, UNE DIMENSION PERTINENTE POUR L’ADAPTATION AU CHANGEMENT CLIMATIQUE ?...................................................................................... 18

1. Cadre général de la coopération transfrontalière................................................................................................18

2. La coopération transfrontalière analysée à travers la théorie des régimes internationaux..............21

3. Cadre juridique de la coopération transfrontalière dans l’espace européen............................................24

4. Quelle place pour l’adaptation dans les initiatives de coopération transfrontalière ?.........................27

CHAPITRE 2 : APPROCHE EMPIRIQUE DE LA COOPÉRATION TRANSFRONTALIÈRE POUR L’ADAPTATION À TRAVERS TROIS ÉTUDES DE CAS................................................................................... 30

SECTION 1 : LE BASSIN DE LA MEUSE..................................................................................................................................... 311. Diagnostic de vulnérabilité menant à la coopération transfrontalière pour s’adapter au

changement climatique......................................................................................................................................................... 31a) Le constat d’une vulnérabilité actuelle et de futurs impacts en prévision....................................................................................31b) Une coopération transfrontalière de longue date.....................................................................................................................................32c) Le projet AMICE..........................................................................................................................................................................................................33

2. Analyse des facteurs de coopération transfrontalière favorisant ou entravant la promotion de

l’adaptation au changement climatique........................................................................................................................ 35a) Opportunités................................................................................................................................................................................................................35b) Lacunes et barrières. ..............................................................................................................................................................................................36c) Réussites........................................................................................................................................................................................................................38d) Pistes d’amélioration...............................................................................................................................................................................................39

SECTION 2 : LE BASSIN MÉDITERRANÉEN.............................................................................................................................. 401. Diagnostic de vulnérabilité menant à la coopération transfrontalière pour s’adapter au

changement climatique......................................................................................................................................................... 40a) Le Constat d’une vulnérabilité actuelle et de futurs impacts en prévision...................................................................................40b) Un vaste cadre international de coopération transfrontalière...........................................................................................................40c) Le projet d’intégration de l’adaptation au changement climatique dans la stratégie méditerranéenne de développement durable...............................................................................................................................................................................................43

2. Analyse des facteurs de coopération transfrontalière favorisant ou entravant la promotion de

l’adaptation au changement climatique........................................................................................................................ 44a) Opportunités................................................................................................................................................................................................................44b) Lacunes et barrières................................................................................................................................................................................................45c) Réussites........................................................................................................................................................................................................................45d) Pistes d’amélioration...............................................................................................................................................................................................46

SECTION 3 : LES ÎLES DE L’OUEST DE L’OCÉAN INDIEN........................................................................................................ 471. Diagnostic de vulnérabilité menant à la coopération transfrontalière pour s’adapter au

changement climatique......................................................................................................................................................... 47a) Le Constat d’une vulnérabilité actuelle et de futurs impacts en prévision...................................................................................47b) Un cadre international de coopération transfrontalière........................................................................................................................48c) Le chemin vers un réseau régional d’observation des effets du changement climatique et autres projets..................48

2. Analyse des facteurs de coopération transfrontalière favorisant ou entravant la promotion de

l’adaptation au changement climatique........................................................................................................................ 50a) Opportunités................................................................................................................................................................................................................50

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Page 103: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

b) Lacunes et barrières................................................................................................................................................................................................51c) Réussites........................................................................................................................................................................................................................52

CHAPITRE 3 : ENSEIGNEMENTS POUR ENRICHIR UN PROCESSUS EN DEVENIR................................531. Les facteurs de coopération qui influencent la prise en compte de l’adaptation au changement

climatique.................................................................................................................................................................................... 54

2. Le cadre propice à la coopération transfrontalière pour l’adaptation........................................................55

3. Les outils nécessaires pour la promotion de l’adaptation dans les projets de coopération

transfrontalière......................................................................................................................................................................... 56

4. Les bénéfices de la promotion de l’adaptation par la coopération transfrontalière.............................57

5. Vers une adaptation transfrontalière à géométrie variable............................................................................58a) Bonnes pratiques : motifs de discussion sur l’adaptation transfrontalière. ................................................................................58b) Des initiatives spontanées : sortir du tout normatif................................................................................................................................59c) La gouvernance transnationale du changement climatique : un cadre de coopération déjà existant.............................60

CONCLUSION GÉNÉRALE..................................................................................................................................... 62

BIBLIOGRAPHIE.................................................................................................................................................... 66

ANNEXES ................................................................................................................................................................. 78Annexe 1 - Présentation des missions de l’ONERC..................................................................................................................................79Annexe 2 - La démarche d’adaptation de l’Union Européenne..........................................................................................................81Annexe 3 - Étude comparée des processus d’adaptation au changement climatique dans les pays de l’espace européen (printemps 2014)...............................................................................................................................................................................89Annexe 4 - Listes des personnes ayant contribué à ma réflexion..................................................................................................100

TABLE DES MATIÈRES....................................................................................................................................... 102

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Page 104: Cross-border cooperation - adaptation to climate change

RÉSUMÉ

Des efforts collectifs sont entrepris au niveau international pour réduire les émissions de

gaz à effet de serre afin de limiter l’ampleur du changement climatique sur nos sociétés et

sur les écosystèmes dont elles dépendent. Cependant, l’inertie du climat est telle que

nous pouvons déjà ressentir les effets du changement climatique aujourd’hui et que nous

allons continuer d’y être exposés encore pendant longtemps. Nous devons donc faire en

sorte de ne pas subir les effets du changement climatique, en rendant nos sociétés moins

vulnérables, en nous adaptant. C’est ainsi qu’à côté de l’atténuation au changement

climatique a commencé à émerger une autre politique climatique au milieu des années

2000 : il s’agit de l’adaptation au changement climatique.

L’adaptation au changement climatique est une politique climatique jeune, encore mal

comprise. En cela, elle présente à la fois l’opportunité de questionner notre rapport au

monde et de nous rendre acteur des changements induits par les phénomènes

climatiques, mais aussi le risque de figer les rapports sociaux, économiques, culturels et

humains par peur de vouloir préserver l’environnement tel qu’on le connaît des impacts

d’un climat qu’on ne peut prévoir totalement.

Cette ambivalence devrait nous conduire à une réflexion sur la mal-adaptation et les

moyens de s’en détourner. Étant donné que les politiques d’adaptation ne s’appliquent

quasiment qu’aux niveaux national et local, rien n’assure qu’il existe une concertation

suffisante sur la question capable d’empêcher que les actions d’adaptation développées

dans un pays n’aient des répercussions néfastes sur ses voisins. Face au risque de mal-

adaptation que représente le transfert de vulnérabilité d’un pays à un autre, la coopération

transfrontalière apparaît comme un levier pour améliorer le processus d’adaptation au

changement climatique.

Mots clés : changement climatique – vulnérabilité – risque – impacts – adaptation – mal-

adaptation – résilience – coopération transfrontalière – gouvernance – processus.

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