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ch Reihe an den Schulen | Collection ch dans les écoles | Collana ch nelle scuole ANDINA Fabio La pozza del Felice / Jours à Leontica Original / Originale: La pozza del Felice Rubbettion Editore, I-Soveria Mannelli, 2018 210 pages / pagine € 16.00 ISBN 978-88-498-5600-2 www.store.rubbettinoeditore.it/ Traduction / Traduzione: Jours à Leontica Editions Zoé, Chêne-Bourg, 2021 Traduit par / tradotto da Anita Rochedy 256 pages / pagine CHF 29.90 ISBN 978-2-88927-888-6 www.editionszoe.ch Biographie Fabio Andina Fabio Andina est né à Lugano en 1972. Il a fait des études de cinéma à San Francisco. Aujourd'hui il vit de nouveau en Suisse italienne, à Madonna del Piano, dans le Malcantone, et à Leontica. La pozza del Felice a reçu le prix Terra Nova de la Fondation Schiller et le prix Gambrinus. Biographie Anita Rochedy Après avoir grandi en France et m’être formée en Suisse, en Italie et en Allemagne, j’ai longtemps fait des allers-retours entre ces pays avant de résoudre la quadrature du cercle et de m’établir à Bienne, où je consacre aujourd’hui l’essentiel de mon temps à la traduction. Aujourd’hui, je traduis de l’italien pour l’édition, la presse et le théâtre, ainsi que de l’allemand pour diverses institutions et revues. Je rédige régulièrement des fiches de lecture pour diverses maisons d’édition et aime à proposer ici et là des titres qui me tiennent à cœur. Enfin, je me déplace volontiers dans les écoles pour réaliser des ateliers de traduction et parler de mon métier. Fondation Jan Michalski © Tonatiuh Ambrosetti

ANDINA Fabio La pozza del Felice / Jours à Leontica

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ch Reihe an den Schulen | Collection ch dans les écoles | Collana ch nelle scuole

ANDINA Fabio La pozza del Felice / Jours à Leontica

Original / Originale: La pozza del Felice Rubbettion Editore, I-Soveria Mannelli, 2018 210 pages / pagine € 16.00 ISBN 978-88-498-5600-2 www.store.rubbettinoeditore.it/ Traduction / Traduzione: Jours à Leontica Editions Zoé, Chêne-Bourg, 2021 Traduit par / tradotto da Anita Rochedy 256 pages / pagine CHF 29.90 ISBN 978-2-88927-888-6 www.editionszoe.ch Biographie Fabio Andina

Fabio Andina est né à Lugano en 1972. Il a fait des études de cinéma à San Francisco. Aujourd'hui il vit de nouveau en Suisse italienne, à Madonna del Piano, dans le Malcantone, et à Leontica. La pozza del Felice a reçu le prix Terra Nova de la Fondation Schiller et le prix Gambrinus.

Biographie Anita Rochedy Après avoir grandi en France et m’être formée en Suisse, en Italie et en Allemagne, j’ai longtemps fait des allers-retours entre ces pays avant de résoudre la quadrature du cercle et de m’établir à Bienne, où je consacre aujourd’hui l’essentiel de mon temps à la traduction. Aujourd’hui, je traduis de l’italien pour l’édition, la presse et le théâtre, ainsi que de l’allemand pour diverses institutions et revues. Je rédige régulièrement des fiches de lecture pour diverses maisons d’édition et aime à proposer ici et là des titres qui me tiennent à cœur. Enfin, je me déplace volontiers dans les écoles pour réaliser des ateliers de traduction et parler de mon métier. Fondation Jan Michalski © Tonatiuh Ambrosetti

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FABIO ANDINA

JOURS À LEONTICA

Traduit de l’italien par Anita Rochedy Édition originale: Fabio Andina, « La pozza del Felice »© 2018 – Rubbettino

www.rubbettinoeditore.it

Pour la présente traduction française : © Éditions Zoé, 46 chemin de la Mousse,

CH-1225 Chêne-Bourg, Genève, 2021www.editionszoe.ch

Maquette de couverture : Notter + VigneIllustration : © Emmanuel Breteau

ISBN 978-2-88927-888-6

Les Éditions Zoé bénéficient du soutien de la République et Canton de Genèveet de l’Office fédéral de la culture.

Ce livre paraît avec l’aide de la Fondation ch pour la collaborationconfédérale, grâce au soutien des 26 cantons.

La traduction est subventionnée par Pro Helvetia,fondation suisse pour la culture.

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UN

C’est lui qui frappe et me réveille. Il n’est même pas cinq heures et demie. Je descends l’escalier, ouvre la porte et le vois, dans le noir, sous un parapluie, chemise déboutonnée, short, pieds nus. Un vent froid s’engouffre et il pleut. Je m’habille et sors. Le thermo-mètre que la Vittorina m’a offert pend à un clou fiché dans le mur dehors. Cinq degrés. Il ne peut quand même pas faire aussi froid. Ou alors c’est que je n’ai pas l’habitude de me lever aux aurores.

J’avais croisé le Felice la veille devant ma baita, c’était un après-midi ensoleillé, sur les crêtes des montagnes se pressaient déjà les premiers nuages gris qui allaient obscurcir le ciel avant l’heure. J’étais en train de lasurer la porte de mon bûcher, il était passé habillé pareil, pas plus de chaussures aux pieds, et des kakis dans un sac plastique. Nous avions parlé un moment puis je lui avais demandé s’il serait d’accord que je le suive dans ses journées. Histoire de vivre un peu comme lui.

Nous descendons les trois marches en pierre et nous enfonçons à grands pas dans le brouillard, sous

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des trombes d’eau, le long du chemin caillouteux qui serpente entre les baite, ces bâtisses vieilles de plusieurs siècles et aussi imposantes que les pierres de leurs murs. Les poutres tordues sous le poids des piode et les petites fenêtres encore muettes. La lueur d’un lampa-daire de la commune nous éclaire un peu le chemin.

Au village on murmure depuis longtemps que le Felice part sur les sentiers tous les matins à une heure où le coq dort encore et qu’il va se baigner nu comme un ver dans une gouille glacée, quelque part dans un coin que seul le diable connaît. Certains disent qu’il y est toujours allé. À en croire d’autres, ça lui a pris dans les années soixante, après son voyage en Russie, ou encore plus tard, quand il est parti à la retraite. Certains situent la gouille aux abords du torrent Gurundin, du côté de la pinède Selvaccia. Pour d’autres, elle baigne dans les eaux de l’Altaniga, entre la bicoque du Celso et celles des Tognola, quand elle n’est pas au sommet de l’Alpe del Gualdo, ni plus ni moins qu’à 1 600 mètres.

Au sortir du village, nous empruntons la route can-tonale qui, de Leontica, monte au Nara. Le claque-ment de la plante des pieds du Felice sur le goudron trempé et le braiement du mulet de la Vittorina dans son pré un peu plus loin.

Lorsque nous arrivons devant l’enclos, la bête est déjà là qui nous guette, le Felice la flatte. Je fais de même, longuement. Le poil rêche et mouillé, déjà passé au manteau d’hiver, et le tambourinement de la pluie sur la plaque de tôle qui lui sert de refuge.

Nous continuons, il est en tenue estivale mais s’efforce de m’abriter en penchant son parapluie

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légèrement vers moi. Nous rejoignons puis passons la maison que le Floro habite avec son chat, le Rasta. Un vrai taudis, encore à peine visible dans cette obscurité, qu’il a retapé tant bien que mal une vingtaine d’années en arrière. Toit en Eternit, pas d’électricité, insalu-brité totale, l’eau arrive d’une rivière par un tuyau en caoutchouc. Les sanitaires, c’est le bois de frênes à côté. Les fenêtres sont plongées dans le noir, le Floro dort encore, nous continuons.

Un jour le Floro m’avait raconté que cette his-toire de gouille du Felice, c’était du grand n’importe quoi. C’est vrai, le Felice bat la campagne comme un vieux loup qui rôde. Il y a des années, tant que sa santé le lui permettait, il courait même par monts et par vaux, il disait que c’était le seul sport qui deman-dait rien. Il sortait de chez lui et se mettait à courir. Mais la plupart du temps il sait même pas te dire où il va, avait poursuivi le Floro. Comme la fois où on l’avait vu, là-haut à Cancorì, du côté du restaurant Genzianella, avec un sac à la main. Il était neuf heures du soir et il disait qu’il était parti cueillir des asperges sauvages.

Nous quittons la route cantonale au tournant du Vieux Mélèze, un arbre séculaire et solitaire, et cou-pons par un chemin de terre menant au pian di Sella, un plateau carré d’un kilomètre qui va des hauts du village à la lisière de la pinède Selvaccia. Une terrasse bordée par la profonde gorge du Gurundin et les lacets qui montent au Nara, avec ses prairies, deux trois baite de vacances et quelques étables. On reconnaît celle du Sosto au loin. Un petit projecteur sur la façade nous conduit jusqu’à l’entrée.

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On raconte aussi que l’hiver le Felice doit briser la glace à la surface de la gouille, qu’il prend un savon pour ses ablutions et que tôt ou tard il finira par y res-ter, dans sa gouille gelée, sec comme un clou. Et qui ira le chercher ? Les renards se le mangeront.

Le Sosto, quarante-cinq ans, carrure de paysan, barbe et cheveux hirsutes, Parisienne aux lèvres, se démène avec cette affaire de trayeuse mécanique et n’en finit pas de pester contre ces tuyaux qui font des nœuds alors forcément comment tu veux que ça tire. Nous le saluons et passons notre chemin.

Nous avançons dans la pénombre, attentifs au bruit de nos pas dans la boue. La lueur jaune d’un lampa-daire éclaire le petit pont de bois sur l’Altaniga. Je me demande où est la gouille, si nous allons remonter le cours d’eau, mais nous continuons.

Plus loin il y a encore l’autre petit pont, lui aussi en bois, qui surmonte le Gurundin. Nous le traversons. À cet endroit, le chemin de terre aboutit à un terrain de manœuvre, et le faible halo du dernier lampadaire se reflète dans les eaux tremblantes et noires des flaques. Devant nous, la pinède plongée dans le noir.

Le Felice ferme son parapluie, bifurque à droite et disparaît, englouti par la nuit. Je vais pour le rejoindre mais m’arrête brusquement au bout de quelques pas. Je ne vois plus rien. J’attends que mes yeux s’habituent. Toujours rien. Je retiens mon souffle et tends l’oreille. Je l’entends quelques mètres plus haut. Je suis à l’abri de la pluie, c’est déjà ça.

Nous remontons lentement un sentier escarpé et glissant qu’il m’est impossible de voir. J’essaie de me l’imaginer. Je marche les pieds en canard, en levant

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bien les genoux pour ne pas m’encoubler dans des pierres ou des racines de sapin ou je ne sais quoi encore, et je mets les mains devant mon visage de peur qu’une branche ne me crève un œil. Felice, je l’appelle.

Oh, il répond, d’une voix qui affleure dans le noir.Non rien, c’était pour savoir où t’étais.Ce sont les premiers mots que nous échangeons.

Un bon moment après il ajoute tout bas, fais gaffe à pas non plus valdinguer, peut-être par respect pour le silence qui règne dans la pinède.

Le Felice, comme du reste presque tout Leontica, ne parle que le patois du Val Blenio, également connu sous le nom de la vallée du Soleil.

Felice, je l’appelle encore, à voix basse cette fois.Oh.T’as pas de lampe de poche ?Une lampe ? Ma foi, je dois bien avoir ça quelque

part.Nous grimpons depuis un bon quart d’heure

quand soudain un craquement, comme une branche qui se casse, retentit, puis des pas lourds, assourdis, qui déguerpissent. Je m’arrête, étonné. Un cerf ? je demande.

Peut-être bien, c’en est plein ici. Sa voix m’arrive, réconfortante. Nous continuons. Je parviens à garder sa trace en guettant son souffle et le léger bruit de ses pas.

Au bout de quelques minutes je devine ses mollets, gris, à deux ou trois mètres de moi. Et les troncs noirs autour. La dense pinède au-dessus de nous commence progressivement à s’éclaircir. Je me demande l’heure

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qu’il est. Le jour ne devrait pas tarder. On entend une cloche sonner au loin, puis une autre et encore une autre. C’est le clocher de Leontica qui sonne l’angélus de six heures et demie. Une mélodie limpide et joyeuse. Il s’arrête, se tourne vers la vallée et reste planté là, absorbé, jusqu’à ce que les dernières notes, suspendues dans l’air, s’éloignent lentement et pour toujours.

Au sortir de la pinède la pente s’adoucit un peu et le Felice accélère le pas. Nous traversons une myriade de buissons de myrtilles et d’arbustes, de rhododen-drons et peut-être d’azalées alpines. Dans le noir ils se ressemblent tous. Ici et là on entrevoit les silhouettes sombres et basses du pin mugho et les troncs élancés de quelques sapins solitaires. Il pleut toujours et un vent à la limite du supportable me cingle le visage. J’ai le nez qui coule, je me mouche dans la manche dégou-linante et froide de mon pull. Le reste de mon corps est trempé de sueur.

J’arrive presque à voir où je mets les pieds main-tenant. Un sillon d’environ vingt centimètres de pro-fondeur et soixante de largeur. Comme ceux que creusent les vaches dans les alpages. J’entends le Gurundin murmurer à ma droite mais ne parviens pas à le voir. Si mes calculs sont bons, nous avons plus ou moins franchi les 1 500 mètres. Je n’en mettrais pas ma main à couper, cela dit, parce que j’ai encore de la peine à me situer et n’ai plus aucune notion du temps. Je ne porte pas de montre, quant à mon Natel il est resté chez moi. De toute façon, qui pourrait bien m’appeler à une heure pareille ? Le Felice non plus ne porte pas de montre. Il marche devant, léger et pieds nus malgré le froid qu’il fait, il ne porte rien d’autre

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que son short taillé dans un jeans, une chemise en flanelle à manches courtes déboutonnée et son para-pluie ouvert au-dessus de la tête.

Le mois dernier, en septembre, le Felice a eu nonante ans.

Le grondement du Gurundin à droite nous accom-pagne, et ma perception des formes et des distances se précise pas à pas. Les nuages sont en train de se lever et les silhouettes sombres des montagnes commencent à se détacher du ciel, qui s’éclaircit timidement.

Après un silence interminable, le Felice dit bòn et s’arrête, je m’arrête à mon tour, reprends mon souffle, et là je la vois.

Une tache couleur de plomb entre les roches noires.

La gouille.Il se déshabille. Sa peau, qui contraste avec le noir

qui nous enveloppe, semble resplendir. Il ne porte pas de slip. Il accroche son short et sa chemise à une branche de sapin tout près et, sans y réfléchir à deux fois, s’immerge tout entier dans la gouille, nu comme un ver, exactement comme le disait la rumeur. Je reste immobile et retiens ma respiration, de peur que le moindre de mes gestes m’arrache à ce moment.

Il est sous l’eau et ne laisse dépasser que son nez. De la vapeur s’en échappe. Je me décale sous le sapin pour me protéger de la pluie, même si à ce stade je suis déjà presque trempé jusqu’aux os. Et là j’attends. Je sens mes épaules se frigorifier et commence à être secoué de frissons. Je frappe mes bras contre mes flancs, me frotte les mains, bats des pieds. J’attends.

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Il se redresse, sort de la gouille, retourne s’abriter sous son parapluie et s’installe sur un rocher, d’où il regarde immobile les petits points blancs des lampa-daires de la vallée. Il me tourne le dos. Je contemple alors la gouille d’encre. Je me demande comment je fais pour toujours me retrouver dans des situations pareilles, j’ai froid, il pleut, il fait nuit noire. Mais c’est moi qui l’ai cherché. Je me déshabille, me jette à l’eau dans un semblant de plongeon, je hurle aussi quelque chose mais ne sais pas quoi et m’écorche au passage les genoux sur les cailloux du fond.

J’aimerais n’avoir rien d’autre que le nez qui dépasse, comme lui, mais impossible, l’eau est beaucoup trop froide. Je le rejoins d’un bond. Il lève légèrement son parapluie et l’approche de moi. Nous restons comme ça, nus et silencieux, à sécher dans le vent.

Il faut dire que le ciel est en train de se dégager, la pluie commence à se calmer et derrière le Simano, il fait de plus en plus clair. Une fois secs, nous nous rhabillons et nous mettons en marche dans le jour naissant.

Des langues de brume montent, rapides, de la vallée et, en flottant, laissent les cimes des sapins leur gratter la panse. Puis elles nous rejoignent et nous étreignent, froides et humides, jusqu’à ce que je ne voie plus au-delà de trois ou quatre mètres. Là-haut, sur une de ces montagnes, on pourrait se perdre, avec un brouillard pareil, ou se sentir encore plus seuls.

Le Felice arrache la pointe tendre d’une brindille de mugho sortie de nulle part, la met à la bouche et la mâche sans l’avaler. Il la chique, en fait. Puis la

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brume passe son chemin, les nuages s’écartent, un rayon de soleil nous saisit et la vallée s’illumine.

Passé le terrain de manœuvre nous continuons, revigorés, par le sentier bordé de châtaigniers et de frênes nus. Des frênes avec de profondes balafres à la hauteur des dents des cerfs, sur les écorces les morsures de la faim des hivers passés. Nous marchons en évitant de mettre les pieds dans les ornières bourbeuses des tracteurs. Nos traces d’il y a une petite heure sont en partie visibles, en partie sous la boue. Partout autour, des prairies rincées et dans l’air une odeur de frais.

Avant d’entrer dans l’étable, le Felice crache une bouillie verte. Le mugho. La trayeuse mécanique tire maintenant à plein régime et le Sosto, immobile, est planté devant une citerne dont il contrôle le niveau de lait.

Travailleur, lance le Felice, auquel répond le ho du paysan, les yeux scotchés sur le nombre de litres.

Sosto, je le salue à mon tour. Il se tourne et me scrute de ses petits yeux. Je vais pour lui dire quelque chose, que la gouille existe vraiment, qu’elle est là-haut, derrière la pinède Selvaccia, dans le Gurundin, mais le Felice me regarde par en dessous avec des yeux pleins de retenue. Bòn, abrège-t-il, nèm.

Ciao hein.Ciao Sosto.C’est ça, ciao.Le Haflinger militaire et sa petite remorque pour les

boilles à lait attendent devant l’étable. Sans plaques, acheté il y a des dizaines d’années par son défunt père, l’Anselmo, à une vente aux enchères de l’armée suisse à Thoune. Nous continuons à dévaler d’un bon

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pas en direction du village. Je fais claquer mes chaus-sures contre le goudron pour les décrotter. Les pieds du Felice se lavent tout seuls dans l’herbe mouillée le long de la route.

Le Floro a l’air de dormir encore, rien ne bouge, même du côté de la cheminée. On le distingue bien maintenant, son taudis, une étable retapée n’importe comment. Une verrue au milieu de quatre chalets de vacances, volets fermés, paraboles sur toits flambant neufs de piode taillées à l’identique, barrières en bois de châtaignier et abris de voitures. Une fois encore je me dis que la maison du Floro est vraiment le mouton noir de Leontica.

Le mulet, fumant dans l’air vif, vient de nouveau quémander des caresses. Nous nous exécutons. De ses naseaux sortent des nuages de vapeur nauséabonds.

Une fois au village, le Felice va chercher du bois dans sa remise, moi je passe à la maison enfiler des vêtements secs avant de le rejoindre. Je le retrouve assis sur une chaise, les jambes croisées et les yeux rivés sur une crevasse du mur recouvert de chaux. Je ne dis pas un mot. J’approche la chaise de la petite table sans nappe et m’assois. Le fourneau est allumé. Le feu crépite, il fait bon.

L’eau bouillante qui déborde de la casserole le fait se lever d’un bond. Il prend des herbes séchées dans une boîte en carton et les met à infuser. Il ouvre un tiroir du buffet, glisse une main dedans et en sort du chocolat. Dans le deuxième tiroir il prend un pain roulé dans du papier journal, déplie la feuille et l’étale au centre de la table pour y mettre des châtaignes grillées d’une autre boîte. Il ouvre une fenêtre et récu-

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père sur le chambranle un bocal de yogourt en verre qu’il pose devant moi. Il verse la tisane fumante dans une tasse, dit bòn, tourne sa chaise et s’assoit face à moi. En deux coups de cuillère à pot il m’a préparé le petit-déjeuner. Une tisane d’herbes séchées, un yogourt aux noisettes, du chocolat noir, du pain et une poi-gnée de châtaignes grillées, froides et dures comme des cailloux. La tisane est amère, mais elle a le mérite de faire aussitôt disparaître mes frissons. Alors que je me sers une deuxième tasse, il remet du bois à brûler, règle l’arrivée d’air du poêle puis sort en laissant la porte ouverte.

Le ciel est parfaitement dégagé et le vent est tombé. Le soleil est tiède, une vingtaine de centimètres au-dessus du Simano. Je retrousse les manches de mon pull et m’installe confortablement sur le banc de gra-nit à droite de la porte d’entrée. Nous restons comme ça, immobiles et muets comme deux lézards. Le dos contre le mur de pierres vives de la baita.

Un voile de brouillard en contrebas nous cache la vue des villages de Dongio, Acquarossa et Lottigna. Derrière, le chien de la Sabina, la maîtresse d’école, aboie et un autre plus loin lui répond. Aujourd’hui comme hier, dans le ciel au-dessus de nos têtes, les hirondelles volent en tous sens et trissent sans discon-tinuer. Elles sont des centaines et des centaines. Elles forment leurs colonies avant la migration. Dirigées par une main invisible, elles se posent toutes ensemble sur les fils de l’électricité, s’élancent dans les airs, rasent les toits en piode puis reviennent se jucher sur les fils. Depuis quelques années elles repoussent de plus en

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plus le moment du départ. Le réchauffement mon-dial a aussi gagné Leontica.

Le Felice se tient assis sur le banc de gauche, ses yeux clos offerts au soleil. Son vieux visage buriné par les saisons, ses bras robustes et ses pieds aussi calleux et rêches que l’écorce du Vieux Mélèze. Peut-être sent-il que je l’observe, car il remue les lèvres et dit, le froid va pas tarder, comme s’il pensait tout haut. Je regarde ailleurs. Il va bientôt neiger, je l’entends murmurer, c’est l’hiver qui arrive. J’observe le sommet gris du Simano, puis encore le ballet des hirondelles avec leur trissement strident, puis son jardin potager. Un jardin propre en ordre avec des carreaux tirés au cordeau et des légumes aux feuilles saines, la terre grasse et aérée qui respire l’humidité. Salade, radis, poireaux, pommes de terre, oignons, ail, persil, céleris, côtes de bettes, romarin, sauge, lavande, menthe, thym, mauve. Branches de bouleau et de hêtre là où des haricots poussaient l’été dernier. Je lui avais offert un sachet de graines et elles avaient donné tellement qu’il se baladait avec des seaux remplis de haricots qu’il dis-tribuait à la ronde. Contre le muret, le compost. Dans le coin gauche un vieux poirier penche vers la vallée. Une dizaine de poires sur les branches du haut. Dans le coin de droite, un superbe plaqueminier si chargé de kakis que ses branches touchent presque terre. Je me lève, tends une main et en cueille un. Je le mange en faisant attention à ne pas m’en mettre partout.

Tu veux quelque chose du jardin ? il me demande, immobile à l’exception de ses lèvres.

D’ici on entrevoit ma baita. La porte d’entrée et celle du bûcher, le toit en piode, la cheminée. Ma

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FABIO ANDINA

LA POZZA DEL FELICE

© 2018 - Rubbettino Editore88049 Soveria Mannelli - Viale Rosario Rubbettino, 10 - tel (0968) 6664201

www.rubbettino.it

Il presente romanzo, seppur prenda spunto da alcuni fatti realmente accaduti, è un’opera di mera fantasia.

Pertanto, qualsiasi riferimento a fatti, luoghi o persone reali è puramente casuale.

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Uno

È lui che bussa e mi sveglia. Non sono nemmeno le cinque e mezza. Scendo le scale e apro la porta e lo vedo lì nel buio sotto a un ombrello, camicia sbot-tonata, braghette corte, scalzo. Entra un’aria fredda e piove. Mi vesto ed esco. A un chiodo piantato nel muro qui fuori c’è appeso il termometro regalatomi dalla Vittorina. Cinque gradi. Non è mica così fred-do, mi dico. Sarà che non sono abituato a svegliarmi tanto presto.

Ieri avevo incontrato il Felice fuori dalla mia baita in un pomeriggio di sole, sulle cime delle montagne si addensavano le prime nuvole grigie che avrebbero poi oscurato il cielo ancora prima del tramonto. Sta-vo dando l’impregnante alla porta della legnaia, era passato vestito uguale e sempre a piedi nudi e con un sacchetto di plastica pieno di cachi. Avevamo scambia-to due parole poi gli avevo chiesto se potevo seguirlo nelle sue giornate. Per vivere un po’ come fa lui.

Scendiamo i tre gradini di sasso e c’immergiamo a passo spedito dentro la nebbia e sotto l’acqua e lungo il viottolo acciottolato che serpeggia fra le baite. Baite vecchie di secoli e imponenti come le pietre delle loro mura. Le travi dei tetti storte sotto

La luce di un qualche lampione posato dal comune c’illumina un poco la via.

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In paese si mormora da una vita che il Felice ogni mattino s’incammina mentre il gallo ancora dorme e va, solo il diavolo lo sa dove, a immergersi tutto nudo come un verme in una pozza d’acqua gelida. Alcuni dicono che ci è sempre andato. Altri che ha attaccato ad andarci dopo il suo viaggio in Russia negli anni sessanta. E poi c’è chi sostiene che invece ci va solo dalla pensione. Per alcuni la pozza è lungo il torrente Gurundin, dalle parti della pineta Selvaccia. Per altri nel torrente Altaniga, tra la cascina del Celso e le cascine Tognola. E per altri ancora addirittura in cima all’Alpe del Gualdo, a milleseicento metri di quota.

Lasciato il paese alle spalle imbocchiamo la stra-da cantonale che da Leontica sale verso il Nara. Lo

bagnato e il nitrire del mulo della Vittorina nel suo recinto poco più avanti.

Una volta di fronte al recinto, la bestia è già lì ad aspettarci e il Felice l’accarezza. Faccio lo stesso, a lungo. Il pelo ruvido e bagnato, già mutato nel mantello invernale, e il rumore della pioggia tam-burellante sulla tettoia di lamiera.

Proseguiamo, lui vestito come d’estate cerca di tenermi al coperto spostando l’ombrello un poco di lato. Raggiungiamo e superiamo la casa del Floro e del suo gatto, il Rasta. Una stamberga, ora quasi invisibile nel buio, che ha sistemato alla buona una ventina d’anni fa. Tetto di Eternit, niente elettricità, niente abitabilità, acqua tirata in casa con un tubo di gomma da un torrente. Per gabinetto il vicino bosco

proseguiamo.Una volta il Floro mi aveva detto che quella del-

la pozza del Felice è tutta una gran balla. Che sì, è vero che cammina e cammina come un vecchio

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pure su e giù per le montagne, che era l’unico sport dove non c’è bisogno di niente, diceva. Usciva di casa e iniziava a correre. Ma spesso non sa neppure lui dove va, aveva continuato il Floro. Come quel-la volta che l’avevano visto alle nove di sera su a Cancorì nei paraggi del ristorante Genzianella con un sacchetto in mano. E sosteneva che era in giro a cercare asparagi selvatici.

Lasciamo la strada cantonale al tornante del Vec-chio Larice, un larice centenario e solitario, e taglia-mo per una sterrata addentrandoci nel pian di Sella. Sella è un terrazzo squadrato di un chilometro di

al margine inferiore della ripida pineta Selvaccia. È delimitato ai lati dalla profonda gola del torrente Gurundin e dai tornanti che salgono verso il Nara. Un terrazzo con i suoi prati da pascolo e una qual-che stalla e due o tre baite di vacanza. In lontananza si vede la stalla del contadino Sosto. Un faretto sulla

Si racconta anche che in inverno il Felice deve spaccare il ghiaccio che si forma sulla pozza, e che si porta dietro una saponetta per lavarsi e che prima o poi ci rimane dentro, in quella pozza gelida, secco come un chiodo. E che allora chi lo troverà mai più, se lo mangeranno le volpi.

-no, barba e capelli incolti e Parisienne in bocca, sta

-

gli si sono fatti su i tubi e non tira mica bene. Allora lo salutiamo e ci rimettiamo in cammino.

Avanziamo nella quasi oscurità ascoltando il ru-more dei nostri passi sulla fanghiglia. La luce gialla di un lampione illumina il ponticello di legno sul

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torrente Altaniga. Mi domando dove sarà mai la pozza, se adesso cominceremo a risalire lungo que-sto corso d’acqua, ma invece proseguiamo.

Più avanti c’è l’altro ponticello, anch’esso di le-gno, che sovrasta il torrente Gurundin. Lo attraver-siamo. Qui, lo sterrato termina con una piazzola

nelle scure pozzanghere tremolanti. Davanti a noi, la buia pineta.

Il Felice chiude l’ombrello, taglia a destra e scompare, inghiottito dall’oscurità. Faccio per rag-giungerlo, ma dopo alcuni passi mi fermo con un sussulto. Non vedo più niente. Aspetto che i miei occhi si abituino. Niente. Trattengo il respiro e ten-do l’orecchio. Lo sento qualche metro più avanti. Almeno sono al riparo dalla pioggia.

Stiamo risalendo con passo lento un sentiero ripido e scivoloso che non riesco a vedere. Cerco d’immaginarmelo. Cammino mettendo gli scar-poni di taglio e alzando le ginocchia per evitare d’inciampare in un sasso o in una radice d’abete o in non so cosa, e tengo le mani davanti al viso

Felice, lo chiamo.

Niente, chiamavo solo per saper dov’eri. Sono le prime parole che ci scambiamo. E dopo un gran pezzo lui fa stai poi attento di non andar con le balle per aria, a bassa voce, forse per rispetto al silenzio che regna in pineta.

Il Felice, come d’altronde quasi tutti gli abitanti di Leontica, parla soltanto il dialetto della Valle di Blenio, anche chiamata Valle del Sole.

Felice, lo richiamo, anch’io a bassa voce.Oh.Ma non ce l’hai una pila?

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Una pila? Mah, forse una pila dovrei avercela, da una qualche parte.

A occhio staremo risalendo da un quarto d’ora quando si sente uno schiocco improvviso, come di un ramo spezzato, seguito dal tonfo di passi pesanti che si allontanano veloci. Mi arresto sorpreso. Cer-vo? faccio.

qui. La sua voce mi arriva rassicurante. Proseguia-mo. Riesco a stargli appresso ascoltando il suo re-spiro e il lieve rumore dei suoi passi.

Minuti dopo comincio a vedergli i polpacci, grigi, lì davanti a due o tre metri. E i tronchi neri tutt’at-

diradarsi. Chissà che ora è. Starà venendo giorno, mi dico. Poi si sente un rintocco lontano di una campana, poi un altro e un altro ancora. Sono le campane di Leontica che scampanano l’Ave Maria delle sei e mezza. Una melodia limpida e gioiosa. Lui si ferma e si volta in direzione del fondovalle e

nell’aria, s’allontanano lente e per sempre.Fuori dalla pineta la pendenza si addolcisce un

poco e il Felice accelera il passo. Proseguiamo fra una miriade di scuri cespugli di mirtilli e di arbusti di rose delle alpi e forse anche di azalee alpine. Con il buio sembrano tutti uguali. Qua e là si scorgono le sagome nere e basse di pini mugo e quelle slanciate di abeti solitari. Continua a piovere e il vento quasi insopportabile tira ruvido pungendomi la faccia. Mi cola il naso e l’asciugo nella manica bagnata e fred-da del maglione. Il resto del mio corpo è accaldato.

Adesso il sentiero è quasi visibile sotto i miei piedi. Un solco profondo una spanna e largo tre. Co-me quelli che fanno le mucche negli alpeggi. Sento bisbigliare il torrente Gurundin alla mia destra ma

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non riesco a vederlo. Facendo due calcoli, a questo punto saremo arrivati più o meno a millecinquecen-

riesco ancora a orientarmi e ho perso la cognizione del tempo. Non porto l’orologio e il Natel l’ho la-sciato a casa. Tanto chi vuoi che mi chiama a qua-est’ora? Nemmeno il Felice ce l’ha, l’orologio. Lui è davanti a me, leggero e a piedi nudi con il freddo che fa, veste soltanto delle braghette tagliate fuori

maniche corte, sbottonata, e con l’ombrello aperto sopra la testa.

Lo scorso mese di settembre, il Felice ha compiu-to novant’anni.

Accompagnati dal gorgoglìo del Gurundin alla nostra destra, a ogni passo distinguo sempre meglio sia le forme che le distanze. Le nuvole si stanno alzan-

contro il cielo che rischiara appena appena.-

zio, il Felice dice bòn e si ferma. Mi fermo anch’io,

Una macchia plumbea fra le rocce nere.La pozza.Si spoglia. La sua pelle in contrasto con il buio

tutt’attorno pare che risplenda. Non indossa le mu-tande. Appende le braghette e la camicia a un ramo di un abete lì vicino, e senza pensarci su due volte s’immerge nella pozza, tutto dentro, tutto nudo co-me un verme proprio come si sentiva dire in giro. Rimango immobile e trattengo il respiro, timoroso che il più minuscolo movimento possa distogliermi da quel momento.

È immerso nell’acqua e lascia fuori giusto il naso. -

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rarmi dalla pioggia anche se tanto sono già quasi

e inizio a essere scosso dai brividi. Picchio le braccia sul corpo, mi sfrego le mani, batto gli scarponi per terra. Aspetto.

Si alza in piedi, esce dalla pozza, si ripara dalla pioggia con l’ombrello e si mette immobile su un sasso a guardare i puntini bianchi dei lampioni giù in valle. Mi dà di spalle. Allora contemplo la scura pozza. Mi dico chi me lo fa fare, ho freddo, piove, è buio. Però l’ho voluto io. Mi spoglio e m’immer-

ma non so che cosa. E mi sbuccio le ginocchia sul fondo sassoso.

Vorrei lasciare fuori il naso come lui ma non ci riesco, è troppo freddo. Con un balzo gli sono da parte. Alza un poco l’ombrello e lo sposta verso di me. Rimaniamo così, nudi e in silenzio a farci asciu-gare dal vento.

Che adesso sta aprendo il cielo, la pioggia sta ces-sando e da dietro il Simano si fa sempre più chiaro. Una volta asciutti, ci rivestiamo e c’incamminiamo nel giorno nascente.

Lingue di nebbia risalgono veloci dal fondoval-le e, galleggiando, si fanno grattare la pancia dalle punte degli abeti della pineta. Poi ci raggiungono e ci avvolgono per accarezzarci, fredde e umide,

a me. E quassù, su una montagna, ci si potrebbe perdere, con una nebbia così, o ci si potrebbe sentire ancora più soli.

Il Felice strappa la punta tenera da un rametto di mugo sbucato dal nulla e se la mette in bocca e la mastica, ma non la deglutisce. La mastica come una cicca. Poi la nebbia passa oltre, le nubi si diradano e un raggio di sole ci colpisce e la vallata si accende.

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Dalla piazzola di giro proseguiamo leggeri e rac--

stagni e frassini spogli. Frassini con vistose cicatrici all’altezza delle bocche dei cervi, le cortecce prese a morsi per la fame degli inverni passati. Camminia-mo rimanendo fuori dai solchi paltosi lasciati dai trattori. Le nostre impronte di un’oretta fa sono in parte visibili e in parte riassorbite dal fango. Tutt’at-torno, prati da pascolo lavati dall’acqua e nell’aria profumo di freschezza.

Prima di entrare in stalla, il Felice sputa una pol-tiglia verde. Il mugo. Adesso la mungitrice munge a pieno regime e il Sosto è fermo in piedi a controllare il livello del latte in un bidone.

Lavoratore, gli fa il Felice, e il contadino gli ri-

Sosto, lo saluto a mia volta. Si volta e mi fruga con i suoi occhietti. Faccio per dirgli qualcosa, che la pozza esiste davvero, che è su dopo la pineta Sel-vaccia, nel Gurundin, ma il Felice mi guarda sotto

Ciao nè.Ciao Sosto.Allora ciao.

il piccolo rimorchio agganciato per il trasporto dei bidoni del latte. Senza targhe, comperato decenni fa dal suo poro babbo Anselmo a un’asta dell’esercito svizzero a Thun. Proseguiamo con passo di marcia giù verso il paese. Picchio gli scarponi sull’asfalto per pulirli dal fango. I piedi del Felice si lavano da soli nell’erba bagnata lungo il bordo della strada.

Il Floro sembrerebbe che dorma ancora, tutto è immobile, anche il camino. Adesso la sua stamber-ga, una stalla fatta fuori alla carlona, è ben visibile. Sputata fra quattro chalet di vacanza con le impo-

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ste chiuse, parabole sui tetti nuovi di piode tagliate uguali e le staccionate di castagno e le tettoie per le macchine. Penso per l’ennesima volta che l’abita-zione del Floro è proprio la pecora nera di Leontica.

Il mulo fumante nell’aria pungente ci si fa di nuo-vo incontro per farsi accarezzare. Lo accontentiamo.

Una volta in paese, entra nella sua cascina a pren-dere della legna e io vado un salto da me a cambi-armi con qualcosa di asciutto, poi lo raggiungo. Lo trovo seduto su una sedia, le gambe incrociate e lo sguardo piantato su una crepa nella parete intona-cata a calce. Non gli dico niente. Avvicino la sedia al tavolino senza tovaglia e mi siedo. La cucina econo-mica è accesa. Il legno scoppietta e l’aria è tiepida.

L’acqua che sta bollendo fuori dal pentolino lo fa alzare in piedi. Recupera delle erbe secche da una scatola di cartone e le mette in infusione. Apre un

estrae una barretta di cioccolato. Dall’altro cassetto tira fuori del pane fatto su in un giornale, lo srotola e mette il foglio di carta in mezzo al tavolino per poi metterci delle castagne arrostite che preleva da

davanzale recupera uno yogurt in vasetto di vetro e me lo mette lì davanti. Versa l’infuso fumante in una tazza, dice bòn, gira la sedia e mi si siede di fronte. In quattro e quattr’otto mi ha preparato la colazione. Una tisana di erbe secche, uno yogurt alle nocciole, cioccolato nero, pane e una manciata di castagne arrostite, fredde e dure come sassi. La tisana è amara, ma almeno mi riscalda in un atti-mo tutti i brividi che mi portavo dentro. Mentre mi

-tro la cucina economica, regola la leva della canna fumaria e poi va di fuori lasciando la porta aperta.

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Il cielo si è aperto del tutto e il vento è cessato. Il sole è tiepido, una spanna sopra al Simano. Tiro in-dietro le maniche del maglione e mi metto comodo sulla panca di granito alla destra della porta d’en-trata. Rimaniamo così, immobili e muti come due lucertole. Le schiene appoggiate al muro in sasso a vista della baita.

Dongio, Acquarossa e Lottigna. Qua dietro il cane della maestra Sabina abbaia e più lontano un altro gli risponde. Anche oggi come ieri, nel cielo sopra le nostre teste è un via vai ed è un cinguettio conti-nuo di balestrucci. Centinaia e centinaia. Si stanno formando le colonie per la migrazione. Guidati da

della luce, poi si alzano in volo, fanno un giro ra-

D’altronde, il riscaldamento globale è arrivato an-che quassù a Leontica.

Il Felice è seduto sulla panca di sinistra, gli occhi chiusi puntati verso il sole. Il vecchio volto segnato dalle stagioni, le braccia robuste e i piedi callosi e ruvidi come la corteccia del Vecchio Larice. Forse,

-bra e dice c’è qua il freddo, come se stesse pen-sando a voce alta. Distolgo lo sguardo. La neve è qua dietro, lo sento dire, c’è qua l’inverno. Osservo allora la grigia vetta del Simano, poi ancora il volo dei balestrucci con quel loro cinguettio stridulo e

in squadra e le verdure con le foglie sane, la terra grassa e arieggiata che sa di umido. Insalata, rapa-nelli, porri, patate, cipolle, aglio, prezzemolo, seda-no, coste, rosmarino, salvia, lavanda, menta, timo, malva. Frasche di betulla e di faggio dove in estate

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crescevano i cornetti. Gli avevo regalato una bustina di semi e ne erano venute fuori così tante piante che i fagioli andava in giro a regalarli con i secchielli da pittore. Contro il muro di cinta, il compostaggio. All’angolo sinistro c’è un vecchio pero che pende verso valle. Una decina di pere in alto. All’angolo destro c’è un bel caco carico a tal punto che alcuni rami toccano quasi terra. Mi alzo, allungo una mano e ne colgo uno. Me lo mangio stando attento a non sbrodolarmi.

Vuoi qualcosa dall’orto? mi domanda immobile, tranne che per la bocca.

Da qui si vede un pezzo della mia baita. La porta d’entrata e quella della legnaia, il tetto in piode, il

faceva il formaggio e il burro, una volta, prima della

soltanto il deposito del latte. Il latte delle mucche -

frigerante, ma tutti andarono avanti a chiamarlo

L’Emilio mi aveva raccontato che una volta di vacche ce n’erano dappertutto, qui a Leontica. Stalle in ogni angolo. Dopo la piazza. Sotto il cimitero. Dietro al bar. Per salire su verso il Nara, nel pian di Sella e di là a Negrentino. Dappertutto. Anche chi non faceva il contadino di mestiere aveva almeno una mucca da latte dietro casa. E i maiali da ingras-so. E le pecore e le capre e i conigli e le galline. Da settembre a giugno, quando le mucche non erano

latte al giorno. Mille. L’Emilio ci ha lavorato per

agli inizi degli anni settanta trasportava il latte da Leontica a Biasca. Un camioncino. Avanti e indietro.

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-vano comperato. Per venirci su in vacanza. L’aveva sistemato il Felice quando ero un bambino. Adesso è una signora baita. E da un anno ci abito, fuggito dalla città.

Il deposito del latte l’avevano trasferito nella sede attuale, un locale al pianterreno della Casa Comunale. Più moderno, più igienico. A norma. Serbatoio isotermico refrigerante in acciaio inox da quattromila litri. Un camion cisterna veniva su da Biasca due o tre volte alla settimana per svuotarlo. Ora viene tutti i lunedì soltanto per il latte del Sosto. E l’Emilio, perso quell’impiego, aveva venduto il

lavorando con il Felice a restaurare baite e stalle, fare su muri e a riparare tetti in piode.

Il Felice ha fatto il muratore tutta la vita, su e giù per la Valle di Blenio. Uno dei suoi ultimi lavori è stato il tetto del vecchio lavatoio qui davanti a casa sua. L’acqua vi scorre tutto l’anno. Anche d’inverno. Non gela mai. Di tanto in tanto, qualcuno lo usa ancora per lavare quelle coperte troppo grandi per entrare nelle macchine da lavare. Da bambino, con gli altri bambini del paese, chiudevamo il buco dello scarico e ci facevamo il bagno per giocare.

No, gli rispondo, guardando ancora una volta l’orto. Non ho bisogno niente. Caso mai ti chiedo.

Allora prende un lungo respiro e dice forza, al-zandosi in piedi. Fa tre passi e si mette ad arieggiare l’aiuola dei porri a mani nude, con le dita, come si farebbe con una zappetta. Preciso e metodico, da sinistra a destra facendo il cerchio a ogni piantina. Prima di rialzarsi, raccoglie e stringe nel pugno del-la terra. Apre il pugno e osserva la pallottola scura, umida e compatta, l’annusa, poi la fa cadere sbricio-

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mi riesce di vedere. L’orto è ben curato. Raccoglie due rametti di rosmarino ed entra in casa. E subito esce con il foglio di giornale fatto su in una mano e il pentolino nell’altra e va a buttare sul compo-staggio le bucce delle castagne e le erbe usate per la tisana. Poi rientra. Dopo un attimo lo raggiungo, richiudendomi la porta alle spalle.

Seduto al tavolino, su un assetto di legno sta ta-gliuzzando il rosmarino con un coltello consumato

rosmarino sminuzzato lo mette in un pentolino ri-

un pizzico di sale. Ecco, mica troppo, che il sale non fa mica troppo bene, pensa a voce alta. Mette il pen-tolino sul lato meno caldo della cucina economica, pulisce il coltello e l’assetto nel lavandino, da dietro la porta recupera una scopa di saggina e spazza il

Nell’orto è arrivato l’Emilio, ottantotto anni, aspetto distinto, che si aggira con una foglia d’in-salata in mano scrutando il terreno come alla ricerca di qualcosa. Il Felice lo studia con interesse poi gli dice un po’ freddino stamattina e l’Emilio gli fa be’, ma uno lo troverò be’.

Il Felice si avvia. Lo seguo. Alla destra della sua baita c’è la cascina dove impila la legna e posteg-gia la macchina. Una vecchia Suzuki blu piccola e stretta tanto da permettergli di passare fra le baite lungo il viottolo acciottolato per raggiungere la stra-da comunale all’angolo di casa mia.

Montiamo sulla Suzuki, ci allacciamo le cinture e il Felice inserisce la chiave e la gira sulla prima tacca. Con una mano sul volante e l’altra sulla leva del freno a mano mi guarda e mi dice spingi? Slaccio la cintura e smonto. Il Felice lascia il freno a mano e

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la macchina esce di culo piano piano dalla cascina. Con una spinta lo aiuto a girarla nella giusta direzio-ne, poi do un’altra spinta per accelerarla, innesca la marcia e il motore si accende. Lancio un’ultima oc-chiata all’Emilio che continua a cercare qualcosa fra le aiuole dell’orto. Monto in macchina e partiamo. Mi chiedo dove siamo diretti. Mi lascio trasportare.

Facciamo sì e no trecento metri e posteggiamo in piazza. Alla fontana, un ciclista sta riempiendo la borraccia. È sudato e rosso in viso. È da poco salito dal fondovalle. Un po’ più di quattro chilometri di tortuosi tornanti scolpiti nella roccia. Fuori dal bar Gallo Cedrone ci sono due o tre contadini con il ros-so in una mano e la sigaretta nell’altra. Li salutiamo e entriamo dal Marietto Del Negozietto.

Ha quasi cinquant’anni e vive giù a Corzoneso con la mamma Giacinta, vedova e invalida e in-chiodata al letto, prossima agli ottanta. Lavora nel negozietto da sempre, l’aveva iniziato il suo poro babbo, l’Evelino. È un tantino lento di comprendo-

del tutto. Inoltre, si porta marchiata sulla fronte la pessima fama del lumacone.

La campanella in ottone sulla porta sbatacchia e annuncia la nostra entrata. Una coppia di turisti lucernesi, che abita in uno chalet sopra ai posteggi delle seggiovie, si sta facendo preparare dei pani-ni. Lui, un generico quarantenne, scarponi da pas-seggio e sacco da montagna. Lei, una prosperosa bionda tutta gambe e culo. Il Marietto fa parere di non averci visto entrare e tiene lo sguardo imbesuito

-le chiappe della svizzerotedesca, con quello sinistro. Il Felice mette sul banco della cassa la sua spesa.

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e aspetta. La preparazione dei panini al prosciutto

alla cassa, raccoglie la sua spesa e usciamo, facendo risuonare la campanella.

Aveva posteggiato la Suzuki in leggera discesa. Cinture, chiave, frizione, mette in seconda e molla il freno a mano, prendiamo un po’ di velocità, lascia la frizione e il motore s’avvia. Ci lasciamo Leontica alle spalle e scendiamo verso il fondovalle. Ma dopo alcu-ni tornanti il Felice accosta la Suzuki, la spegne e tira il freno a mano ed esce. Lungo il letto di un torrente secco da una vita, ci sono alcuni castagni centenari.

dalla tasca delle braghette un sacchetto di plastica e iniziare a raccogliere castagne, cauto nel non pestare un qualche riccio con i piedi nudi. Smonto a mia vol-ta e lo aiuto. Ne raccolgo una manciata. Le osservo. Sono piccole. Troppo piccole, mi dico.

Queste qui, son magríne, che vengon giù dopo le altre. Son castagne tardive, queste qui, mi dice. Come se avesse letto nei miei pensieri.

Ci fermiamo a Corzoneso e posteggiamo in disce-sa di fronte alla chiesa. Il Felice piglia il sacchetto di castagne tardive e s’incammina. Lo seguo senza dire niente. Due anziane nei loro grembiuli lisi ai gomiti e un po’ unti sul davanti sono sedute su una panchina e osservano il volo dei balestrucci. Come a teatro.

Passiamo davanti alla Casa Comunale, pitturata -

tro una stradina lastricata che conduce a un pugno di baite. Le prime tre sono riattate e ben tenute, i giardinetti esotici con le pergole cariche di kiwi e le palme e gli ulivi, mi chiedo come possano resistere gli inverni di quassù. Le staccionate di pali in lari-ce torniti, le imposte chiuse dipinte di blu e rosso

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e giallo, le parabole sui tetti di piode nuove e le tettoie per le macchine e le bucalettere. Leggo Van

olandesi. Passiamo oltre. Le ultime due baite sono

e le bucalettere non ci sono.Il Felice bussa alla porta di quella messa peggio

delle due. Dopo una lunga attesa, apre una signora anziana, grembiule blu.

Bondì, le dice il Felice porgendole il sacchetto, e lei, prendendolo, ringrazia mèrsi. Ci salutiamo e ritorniamo alla Suzuki, ingrana la marcia e l’avvia al primo colpo, e ripartiamo. In valle, per dire grazie si dice mèrsi. Una storpiatura dal francese, portato da quegli emigranti spazzacamini che ritornavano da Parigi con un qualche soldo. Alcuni ritornava-no. Altri, invece, facevano perdere le loro tracce, e chissà adesso in quali cimiteri sono sepolti, mi aveva raccontato un giorno il Felice.

Arrivati nel fondovalle, passiamo il ristorante Valle del Sole di Acquarossa e ci fermiamo all’in-crocio che immette nella cantonale. Il Felice rivolge lo sguardo a destra verso la pizzeria Da Beppe e lo studio medico del dottor Gianmaria, poi a sinistra

Svoltiamo a sinistra, attraversiamo il ponte e prose-guiamo lemme lemme verso nord. Raggiungiamo e ci lasciamo alle spalle il museo di Lottigna, poi la Cima Norma di Torre, poi Aquila.

Felice, dove si va?Rivöii.Eh?Rivöii, ripete, con un tono più deciso, credendo

forse che non avessi sentito bene.Arriviamo a Olivone, Rivöii, e posteggiamo in

leggera discesa davanti al bar Posta. Anche qui i

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balestrucci si stanno radunando per la partenza e fanno un gran chiasso. Entriamo. La giovane barista lo conosce. Buongiorno Felice.

Bondì.Com’è?

quando non tribuliamo più, amen.Amen, ripete la giovane barista, mettendogli sul

tavolino La Regione e una bustina di tè di menta. Il Felice comincia a sfogliare il giornale leccandosi un dito e partendo dall’ultima pagina come fanno gli anziani. In questo bar ci sarò entrato sì e no dieci volte ma questa giovane barista non l’ho mai vista.

al bancone, tre contadini con gli stivali di gomma inzaccherati di letame bevono un rosso e parlano ad alta voce del tempo.

Il primo domanda agli altri due ei voialtri, dite che c’è qua l’inverno, eh?

Il secondo risponde mah, non so, è poi fatto an-che lui alla sua maniera.

so mica chi è quello messo peggio, nè?Ridacchiano un poco.Mi allungo sulla sedia e prendo il Giornale del

Popolo dal tavolino vicino. Lo apro ma poi devo subito richiuderlo e spostare le spalle per lasciare

acqua bollente con dentro un cucchiaino. Il Felice toglie dall’involucro la bustina del tè e l’immerge nella tazza tenendola per il cordino. Mentre legge, la fa andare su e giù. L’acqua si colora sempre più scura. Poi toglie la bustina, la strizza fra le dita e ci arrotola attorno il cordino prima di posarla sul piattino, e prende a girare il cucchiaino nella tazza

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anche se non ci ha messo lo zucchero. Gira e legge. Senza fretta. Alla pagina dei morti sussulta. Questo qui lo conoscevo, dice, indicando con il suo dito forte e nodoso l’annuncio di morte di un signore classe millenovecento e ventinove. Meglio lui che

di tribulare.Un articolo parla della disoccupazione nel can-

ton Ticino. La disoccupazione cresce, mormoro, e il Felice richiude di scatto il suo giornale. La politica è tutta ‘na gran porcada, parlandoci sinceramente, e il mondo è in mano a dei gran farabutti, dice tutto

Vero. E tutto il mondo è paese, dice la giovane barista.

Il Felice scola il tè di menta, si alza, paga e se ne va. In gamba, dice, con i suoi piedi nudi già oltre la porta.

Allora ciao Felice, fa la giovane barista.Richiudo il giornale e lo raggiungo. Montiamo in

la marcia e la Suzuki si mette in moto. Direzione sud.

-no scorrono le classiche cartoline alpine dell’alto Ticino di una giornata tardo autunnale. All’altezza di Lottigna tagliamo giù a destra e ci addentriamo nei campi agricoli del pian Castro. Stalle, trattori, cani, mucche, manzette, asini e cavalli. Posteggiamo

scorre su un letto di grossi massi che emergono ravvicinati l’un l’altro. Buzze profonde anche un metro, schiuma bianca e rumorosa, una decina di balzi per attraversarlo. Il Felice si siede su un sasso e nell’acqua gelida immerge i piedi. Faccio lo stesso, dopo essermi tolto scarponi e calze. L’acqua ci scorre

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davanti da destra a sinistra, costante e precisa come il passare del tempo.

Guardo in su. Il cielo stretto, le montagne alte. Le Alpi ticinesi. Mi oriento. A destra il nord con il Pizzo Sosto dalla vetta rocciosa che va su tagliente e appuntita e per questo è anche chiamato il Cervino della Valle di Blenio. A sinistra la valle porta verso le regioni prealpine ticinesi che poi si aprono nella Pianura Padana in Italia. Dietro, a est, ci sono l’A-dula e il Simano. Di fronte le vette del Pizzo Erra e della Bassa di Nara e a metà montagna Leontica, le sue baite, alcuni chalet. Nel centro del paese balza subito all’occhio la chiesa di San Giovanni Battista, stile romanico del dodicesimo secolo. Se strizzo gli occhi posso vedere sia casa mia che quella del Fe-lice.

A destra del paese, solitaria nei prati al di là del torrente di Negrentino, che scende giù in picchiata dentro gole profonde, si vede la chiesetta romanica dell’undicesimo secolo dedicata a San Carlo. Ma tutti la chiamano chiesetta di Negrentino. Poco più sopra, la partenza della seggiovia del Nara con i

gialli e a forma d’uovo, brillano al sole appesi alla fune. Quelli vecchi erano di ferro zincato con tre assi dipinte di rosso e una coperta militare per pro-teggerti le ginocchia dal freddo. Quando si andava a sciare, il più delle volte la coperta era un blocco di ghiaccio e poi, se chiudevi la sbarra di sicurezza, due volte su tre rimaneva congelata e all’arrivo a Cancorì dovevano fermare la seggiovia per liberarti. Quando hanno sostituito quei vecchi seggiolini li hanno venduti a cinquanta franchi al pezzo e alcuni

casa di vacanza della valle con dentro i vasi di ge-rani. O lungo un sentiero per fare sedere i turisti e