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Le journal culturel de l'Université des Sciences & Technologies de Lille ARCHIMEDE D LES NOUVELLES ' JANV FÉV 1999 ”Les uns pensent, dit-on, les autres agissent ! Mais la vraie condition de l’homme, c’est de penser avec ses mains”. Denis de Rougemont - Penser avec ses mains - 1935 L’IMAGE Dossier spécial : TENSIONS DANS L’IMAGE PLAIDOYER POUR UNE ICONOLOGIE VERTUS ET DANGER DES IMAGES DONNER À VOIR BREF TRAITÉ DU DÉSENCHANTEMENT L’INFINI RENCONTRES-DEBATS Projet : Le Bien Commun Théâtre : Macbêtes La pensée et le cerveau Le moment Machiavélien L’Image et l’Imaginaire... EN ASSOCIATION LE POLITIQUE Lecture : Dialogue Littoral Chorégraphie : ”Voyage” Colloque ”Arts et Mathématiques” Introduction au cycle LYDIE JEAN-DIT-PANNEL. “BABEL Z18

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Le journal culturel de l'Université des Sciences & Technologies de Lil le

A R C H I M E D EDL E S N O U V E L L E S

'

JANV

FÉV

1999

”Les uns pensent, dit-on, les autres agissent !Mais la vraie condition de l’homme, c’est de penser avec ses mains”.

Denis de Rougemont - Penser avec ses mains - 1935

L ’ I M A G EDossier spécial :TENSIONS DANS L’IMAGEPLAIDOYER POUR UNE ICONOLOGIEVERTUS ET DANGER DES IMAGESDONNER À VOIRBREF TRAITÉ DU DÉSENCHANTEMENT

L’INFINI

RENCONTRES-DEBATS

Projet : Le Bien CommunThéâtre : Macbêtes

La pensée et le cerveauLe moment MachiavélienL’Image et l’Imaginaire...

EN ASSOCIATION

LE POLITIQUE

Lecture : Dialogue LittoralChorégraphie : ”Voyage”

Colloque ”Arts et Mathématiques”

Introduction au cycle

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EDITO

Les amateurs de réveillons corsés, à peine sortis du précédent, vont se mettre rapidement à préparer le prochain, le réveillon du siècle. Quant au guichet financier de la mission interministérielle pour la célébration de l'an 2000, il sera très bientôt fermé. La juxtaposition des demandes de ceux qui souhaitent fêter dignement un tel événement aura été accomplie.

Le problème est que nous risquons de passer du siècle finissant au troisième millénaire sans se poser collectivement les bonnes questions et encore moins changer collectivement nos schémas de pensée, passages pourtant obligés, pour forger une nouvelle culture du "vivre ensemble".

D'où l'initiative, prise par quelques personnes, associations et institutions - dont notre Université - et qui associe le plus grand nombre de citoyens, de faire du passage à un siècle nouveau, l'occasion d'instaurer un travail collectif, dépassant l'événement, autour des préoccupations communes et convergeantes vers notre volonté de restaurer la citoyenneté.

On peut s'interroger sur la validité de cette initiative aujourd'hui, alors que la liberté de pensée et d'expression est conditionnée par la liberté de l'économie financière spéculative et improductive. Et que celle-ci est le terreau de l'extraordinaire dynamisme du néolibéralisme qui impose sa conception du monde, asservit les technosciences et uniformise la pensée. C'est ce que certains entendent par la mondialisation. Ce "machin" invisible, (vague, incontrôlable, génial, éblouissant, ni matériel, ni spirituel mais hypertechnologique, aussi nuisible qu'utile), met en réseau la planète terre, qui n'a jamais été aussi riche, et déconnecte le plus grand nombre d'humains, alors que nos sociétés n'ont jamais été aussi inégalitaires.

Je me range derrière les arguments et démonstrations des spécialistes - nouveaux économistes, sociologues, philosophes et politologues - et renvoie le lecteur à une littérature, désormais très abondante, qui accuse implacablement cette uniformisation de ”criminelle” et en montre clairement la barbarie.

Mon propos ici porte sur l'interrogation suivante : comment nous, citoyens, associations, collectifs divers et institutions, pouvons user de la liberté qui nous reste pour organiser la résistance contre cette nouvelle forme de sauvagerie dont les responsables sont "personne et tout le monde à la fois" ?

Instaurer une nouvelle culture du "vivre ensemble", c'est restaurer le "bien commun", renforcer la pensée dans la politique et régénérer la démocratie, seule capable de replacer l'homme au centre de la raison

par Nabil el HAGGARVice-Président de l’USTL, chargé de la Culture

EST-IL PERMIS D’ESPÉRER ?

d'être de l'État moderne démissionnaire.

Nous n'avons d'autre choix que celui de travailler ensemble, non plus pour faire de l'événementiel mais de l'authentique réflexion, en profondeur, accompagnée de l'action pensée et persévérante, seuls moyens d'empêcher la fuite en avant de l'État moderne et de fonder des liens nouveaux pour faire cesser cette barbarie actuelle qui ne porte pas son nom. La réflexion et l'action locale, régionale et nationale, bien située l'une par rapport à l'autre, l'une génératrice de l'autre, démentiront le "on ne peut rien". Elles pourront déstabiliser cette sorte "d'hypercrime" contre l'humanité : celui de l'appauvrissement intellectuel et économique de plus de 90% de l'humanité, de l'assassinat de la paix et du bien commun, et du massacre permanent du patrimoine universel, la planète terre.

Parce qu'il est permis d'espérer, parce qu'il est nécessaire de s'organiser et de réorganiser le collectif, il est temps que nous apprenions à joindre le culturel, l'éducatif, le social, le politique, le syndical et l'économique et à travailler collectivement. Parce qu'il est temps de réfléchir et de réagir ensemble, nous avions décidé de fêter l'an 2000 collectivement et autrement.

LES NOUVELLES D’ARCHIMÈDE

Ont collaboré à ce numéroPierre BEHAGUERudolph BKOUCHEJean-Paul DELAHAYECatherine LEFRANCOISMichel PARREAUJean-François REY

Directeur de la publication : Jacques DUVEAUDirecteur de la rédaction : Nabil el HAGGARRédaction - Réalisation : Isabelle KUSTOSZ Delphine POIRETTE Edith DELBARGE Corinne GUSTIN

Rémy WALLERéalisation - Impression : USTL A3

ISSN : 1254 - 9185

4 à 8

9 à 12

3 L’INFINI

AUTOUR DE L’IMAGE.

DOSSIER SPÉCIAL L’IMAGE.

LE POLITIQUE-PRATIQUES ARTISTIQUES

RENCONTRES-DÉBATS.

EN ASSOCIATION

À LIRE

EN RÉSUMÉ... EN CONCLUSION...

Flottements.Hologrammes.

Un monde fractal.Dangereuses visions.

Ciné dej.

Tensions dans l’image.Plaidoyer pour une iconologie.

Vertus et danger des images.Donner à voir. Bref traité du désenchantement.

Somm

aire

Théâtre : Macbêtes - Déballages...

Rendez-vous d’Archimède.Journées Archimède.

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14 - 15

18

19

16 - 17Colloque

Lecture - Chorégraphie

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L’INFINIL'infini du mathématicien est une vieille histoire : Euclide, dans ses Eléments, démontre par un rai-sonnement qu'on peut repren-dre aujourd'hui sans rien y chan-ger, qu'il n'y a pas de ”plus

grand” nombre premier, ce qui, pour lui, est une façon de dire qu'ils sont une infinité : si on suppose qu'il n'y a qu'un nombre fini de nombres premiers, alors leur produit augmenté d'une unité ne peut être multiple d'aucun d'eux et est donc divisible par un autre nombre premier, ce qui est absurde.

Le mathématicien, depuis plus de deux mille ans, réussit donc à parler d'une façon cohé-rente et claire de l'infini. Après l'infini des nombres entiers (ce que nous appelons aujourd'hui le dénombrable), il s'attaquera à l'infinitésimal (les quantités numériques qui deviennent aussi petites qu'on le veut) et cette maîtrise là constituera l'analyse avec son cortège de progrès magnifiques qui fon-deront la physique moderne.

Viendra plus tard avec Cantor la maîtrise de l'infini actuel (l'infini pris comme un tout) et la découverte surprenante qu'il y a plusieurs types d'infinis. Il lui faut d'abord admettre (ce qui faisait obstacle) qu'il y a autant de nombres premiers (ou de nombres pairs) que de nombres entiers (cet apparent paradoxe servira de support à une définition formelle de ce qu'est un ensemble infini : un ensemble infini est un ensemble qui peut être mis en correspondance, élément par élément, avec une de ses parties strictes). Ensuite il découvre qu'il y a plus de nombres réels

par Jean-Paul DELAHAYE,professeur d’informatique à l'USTL

EN CONFÉRENCE LE 18 MAI : ”L’INFINI DES MATHÉMATICIENS”

INI DE L’INFINI DE L’INFINI DE L’INFINI DE L’INFINI DE L’INFINI DE L’INFINI DE L’INFINI

que de nombres entiers : supposer qu'on puisse trouver entre eux une correspondance élément par élément conduit à une contradiction (dia-gonalisation de Cantor).

S'ouvre alors un monde d'infinis dont les mathé-maticiens n'ont pas terminé de visiter les profon-deurs... et les difficultés. C'est ce qu'on appelle les grands cardinaux qui représentent des infinis tellement abyssaux qu'on finit par douter qu'il puisse leur correspondre des réalités dans le monde matériel.

De leur côté, les physiciens, au lieu de cette plongée dans “toujours plus d'infinis” que les mathématiciens poursuivent encore, ont eu une attitude balançante.

Après avoir accepté l'infinité de l'espace (quand on l'identifie avec celui de la géométrie), ils semblent aujourd'hui hésiter : après tout il se pourrait bien, disent les relativistes, qu'à cause de sa géométrie particulière, le volume total de l'univers soit borné.De même, après l'acceptation du continu (l'infi-nitésimal) et les succès qu'ils en tirent, les physi-ciens, avec la mécanique quantique, semblent revenir en arrière : non, l'espace ne se découpe pas indéfiniment en petits morceaux, le grain de sable ne se sépare pas toujours en grains plus fins.

Simultanément à ces hésitations et à cause de la mathématisation toujours plus grande de leur discipline, les physiciens sont conduits à pratiquer bien d'autres manipulations de l'infini qui, parfois, dépassent en audace toutes les extravagances théoriques que les mathémati-ciens justifient.

L'infini est bien sûr, et depuis toujours, un pro-blème philosophique, et son usage - semble-t-il inévitable - en science fait se rejoindre dans une quête de compréhension jamais achevée les scientifiques et tous les hommes curieux.

Le cycle sur l'infini fera découvrir à tous à quel point c'est là un sujet actuel dont ni le mystique, ni le mathématicien, ni le physicien, ni le poète, ni le philosophe ne peut dire la vérité s'il parle seul, mais qu'ensemble, ils cernent et dévoilent peu à peu dans un travail lent qui, aujourd'hui, se poursuit sans relâche.

Un motif d’Op-Art dû à Hajime Ouchi, d’abord publié au japon, puis repris dans une collection popu-laire américaine pour graphistes (Japanese

Optical and Geometrical Art, 1977) intrigue les spécialistes de la perception visuelle. Une région circulaire, remplie d’une tex-ture en damier étiré selon l’horizontale, y est entourée d’une couronne circu-laire également texturée en damier, mais étiré selon la verticale. Quand on déplace le motif par un mou-vement de va et vient à l’horizon-tale, la région du centre semble se désolidariser de la page, et glisser sur la texture qui l’entou-re. On sait que les textures, très contrastées et fortement pério-diques induisent parfois des ins-tabilités visuelles, ou des couleurs illusoires, que l’on classe avec les effets de moirage. Repérée par Lothar Spillman, spécialiste des effets cinétiques dans la vision, et choisie pour figurer en couverture d’un de ses livres (L. Spillman et J.S. Werner, Visual Perception : The Neurophysiological Foundations, Academic Press, 1977), la figure d’Ouchi (ci-contre) entame une carrière scientifi-que.4

L’IMA

GEFLOTTEMENTS

par Jacques NINIOCNRS et École normale supérieure, Paris,

auteur de ”L’empreinte des sens : perception, mémoire, langage”, Jacob, Opus, 1996

EN CONFÉRENCE LE 9 MARS : ”DU RÉEL À L’IMAGE, LES ILLUSIONS PERCEPTIVES”

Deux chercheurs ita- liens, Nicola Bruno et Paola Bressan, ont étudié l’illusion et construit des variantes intéressan- tes. Ils ont montré que si une texture A est entourée d’une texture B entourée

à son tour par A, c’est B qui semble se déplacer. Ils ont également montré que l’effet de glissement est maintenu, sinon renforcé en

vision stéréoscopique. Il faut souligner que l’Italie produit, depuis des décennies, des travaux très imaginatifs dans le domaine

de la perception visuelle, auxquels les revues scientifiques établies ne donnent pas toujours leur vraie place.

Selon les chercheurs australiens Hine, Cook et Rogers, l’illusion est maximale pour des textures orientées à 60 degrés l’une de l’autre (vision Research, n° 35, 1995).

De pures rayures sont peu efficaces. L’aspect damier - ou plus exactement l’existence d’éléments à fron-tières nettes - semble important. Le mouvement peut impliquer une partie majeure de l’image. Deux por-tions d’image, qui comportent des orientations diffé-

rentes, peuvent se mouvoir simultanément selon des directions contraires. Le plus souvent, le mouvement

illusoire est fédérateur : les zones contenant des éléments dont les orientations sont corrélées se déplacent de

manière cohérente. Peut-être l’illusion est-elle la signature d’un processus qui tend à subdiviser l’environnement en

ensembles significatifs.

PHOTO : “POUR LA SCIENCE” - N° 223

5

L’IMAGE

Une caméra glisse sur des planches contacts, parfois embrasse la page entière, parfois scrute ses détails comme une loupe, parfois pointe comme un doigt une image repérée au crayon gras.

Une voix, celle du photographe, raconte les temps épinglés sur les empreintes directes de négatifs déjà historiques.William Klein imagine en 1988 le principe de la série “Contacts” qui, chaque année depuis, s’enrichit de quelques titres. Le Centre National de la Photographie, la SEPT et Riff Productions, le suivent dans cette aventure dont il est le premier personnage.William Klein sort de ses archives les planches contacts où figurent, presque dissimulées dans un foisonnement d’images que d’autres seraient heureux d’avoir réalisées, quelques unes de ses photographies les plus connues. Et d’une voix posée, en quinze minutes à peine, il conte les histoires de la photographie, l’histoire de ses photographies et l’histoire du film lui-même qu’il réalise. Comme penché sur son épaule, à sa table de travail, on découvre ainsi la genèse d’images désormais légendaires.

CINÉ-DEJ CINÉ-DEJ CINÉ-DEJ CINÉ-DEJ CINÉ-DEJ

CONTACTSSérie documentaire imaginée par Wil l iam Klein

Planches-Contacts de neuf photographes célèbresHelmut Newton, Sebastiao Salgado, Robert Doisneau,

Raymond Depardon, Ell iott Erwitt, Leonard Freed, Marc Riboud, Josef Koudelka

En partenariat avec la Maison Européenne de la photographiePrêt de Riff International Production

SÉANCE LE JEUDI 21 JANVIER 12H30Durée du programme : 2H06

Cité Scientifique - MACC, blv Langevin - Villeneuve d’AscqTARIF : 25 FRS (CINÉMA ET PANIER REPAS)

Responsable de la vidéothèque, Maison Européenne de la Photographie - Paris

Des noms incontournables de la photographie d’aujourd’hui le suivent dans les huit autres épisodes produits par Riff.Certains réalisent eux-mêmes leur film : Raymond Depardon, Elliot Erwitt, Léonard Freed. Les autres, Robert Doisneau, Josef Koudelka, Helmut Newton, Marc Riboud et Sebastiao Salgado s’associent à des réalisateurs connus, comme Sylvain Roumette ou à des personnalités importantes du monde de la photographie, comme Robert Delpire.Ainsi, chaque film, tout en respectant l’idée de William Klein, formidable car si évidente (a postériori...), est unique et propose un autoportrait de l’artiste dans ce qu’il a de plus intime : ces carnets de croquis ou de notes que sont les planches contacts. Leçon de photographie, leçon de simplicité et de clarté, mais aussi, paradoxalement peut-être, leçon d’humilité de la part de ces grands photographes, la série “Contacts” constitue dans son ensemble un témoignage unique sur la création photographique contemporaine.Elle est de ce fait un élément représentatif du fonds audiovisuel de la Maison Européenne de la Photographie. Ce musée du regard permet d’appréhender la photographie sous les différents supports par lesquels elle est diffusée : le tirage, montré dans le cadre d’expositions et de rétrospectives, le livre, le film et l’informatique, consultables en permanence dans la bilbliothèque-vidéothèque Roméo Martinez et dans l’auditorium Bernard-Pierre Wolff.La série “Contacts” fait ainsi partie d’un fonds de plus de 650 films que le public peut visionner librement, films sur les photographes, mais aussi films réalisés par eux. Vision panoramique de la production audiovisuelle sur ce sujet vaste, cette vidéothèque permet à tout un chacun, et tout particulièrement à un public d’étudiants et de chercheurs fidèle, de rencontrer par film interposé les grands artistes et leur oeuvre, la série “Contacts” constituant en ce sens une excellente prise de... contacts avec cet univers particulier de la création contemporaine.

CHEZ LE PHOTOGRAPHE

par Bertrand PRIOUR

6

L’IMA

GE

La nature nous donne à voir des formes que nous disons simples : le disque de la lune, la ligne d'horizon, la surface lisse d'un lac, l'oeuf, la trajectoire apparente

d'une planète. Le géomètre s'en saisit : son ambition est de les décrire, les analyser, en abstraire les caractéristiques significatives, puis les coder pour pouvoir transmettre la description, construire des modèles. Il ne peut décrire toutefois que ce qui présente des régularités. Mais les vagues, les montagnes, les nuages, les arbres nus en hiver ? Que dire de toutes les formes irrégulières, aux lignes toujours brisées, aux arborescences toujours répétées ? Une côte rocheuse, en rocher, en caillou, l'un de ses terrains, présentent à nos yeux la même irrégularité apparemment insaisissable. Que faire des phénomènes fugitifs, instables et apparemment désordonnés que nous côtoyons : tourbillons, éclats, fluctuations ? Pour le géomètre, il s'agit d'un véritable défi. A côté des droites, des cercles, des courbes continues, existe-t-il des objets mathématiques - c'est à dire rigoureuse-ment définis - qui rendent compte de telles structures ?

Dans les années 1970, le mathématicien Benoît Mandelbrot a entrepris de cristalliser en un concept les méthodes qui permettent d'analyser ces formes irrégulières, introduisant le terme désormais célèbre de fractal. On peut appeler fractal un objet ou une structure qui présente la même irrégularité à toutes les échelles et dans toutes ses parties. Cette propriété est baptisée auto-similitude. Une autre notion importante est celle de dimension fractale. Si l'on mesure par exemple la longueur d'une côte rocheuse, elle sera différente suivant que l'on compte à vol d'oiseau, en pas de géant, en pas d'homme, ou en pas de fourmi : en effet, la fourmi visite

Création Atelier Ecoutez VoirVisite guidée de l’exposition

Lundi 1er mars à 17h30

EXPOSITION EXPOSITION EXPOSITION EXPOSITION

UN MONDE FRACTALDU LUNDI 22 FEVIER AU VENDREDI 26 MARS

Bibliothèque Universitaire - Cité Scientifique - Villeneuve d’AscqENTRƒELIBRE

la moindre anfractuosité des cailloux, et parcourt une distance bien plus grande que l'homme, qui les enjambe, etc. Cette mesure fait apparaître, à côté des notions familières de dimension (1 pour la ligne, 2 pour le plan, 3 pour le volume), la dimension spécifique de la côte, qui n'est pas un nombre entier : 1,115 dans le cas de la côte d'Esterel. Un objet fractal peut donc être notamment caractérisé par sa dimension : une sorte de signature.

Les Systèmes Dynamiques constituent une branche très active des mathé-matiques, issue des travaux d'Henri Poincaré au début du siècle. Elle est une source foisonnante d'objets fractals. Les plus beaux sont produits par la Dynamique en Nombres Complexes, qui a été développée dans les années 20 par les français Fatou et Julia. Dans ce contexte, la famille des ensembles de Julia et l'ensemble de Mandelbrot, qui en est le "chef d'orchestre", apparaissent comme des objets aussi naturels que le cercle en géométrie élémentaire.La géométrie fractale est un domaine où la pure spéculation intellectuelle l'emporte sur l'application. Toutefois, de nombreuses disciplines scientifiques y ont trouvé des sources d'inspiration et des procédés de modélisation. Signalons deux types d'applications :- l’analyse multifractale, avec l'outil de la transformation en "ondelettes" , permet de caractériser des objets matériels (électrode rugueuse), mais aussi des signaux construits à partir d'objets ou de phénomènes naturels (étude du génome, des fluctuations boursières, etc)- la compression fractale d'images est très utile pour le stockage, la transmission et la gestion en temps réel (images par satellite, vidéo numérique, etc).

L'exposition "Un monde frac-tal" est conçue pour condui-re le visiteur, en partant de son observation courante, au coeur de ce qui se passe en mathématiques. Ce chemin vers l'abstraction est facilité par la présence particulière des images fractales dont la beauté et le caractère fasci-nant induisent naturellement une certaine compréhension intuitive. Elles nous montrent que les objets apparemment réguliers ne sont pas les seuls concevables mathématique-ment. Et si la lune appelle la forme géométrique "parfaite" du cercle, le profil rugueux de la chaîne montagneuse, lui aussi, nous conduit à une forme de régularité, cachée, au coeur du mécanisme qui produira son image.

“BIJ

OU”

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IMAGE-SONDE BIEN DANGEREUSES VISIONS : AVENTURE POUR OEIL ET OREILLE

Interview de Gérard Hourbette, compositeur du Groupe Art Zoydpar Isabelle Kustosz.

IK : Le projet Dangereuses Visions se propose d'associer musique contemporaine et création visuelle. Art Zoyd s'est déjà penché par le passé sur l'idée d'associer son et image ?GH : Art Zoyd a toujours ressenti le besoin de travailler sur l'image et le son. En dehors de la collaboration avec le théâtre ou la danse, nous avons travaillé sur des films muets. Mais dans ce cas, on ne travaille pas vraiment sur l'image comme création visuelle, mais plutôt sur un scénario, un rythme, un temps. Quand Art Zoyd compose pour le cinéma muet, il ne s'agit pas de ”musique d'illustration", car cette musique ne donnerait qu'une "surinformation" par rapport aux images. Ce qui nous intéresse plutôt est de trouver des concordances, des rapports entre le temps de l'image et le temps de la musique.

IK : Quelle est la nouveauté avec Dangereuses Visions par rapport aux expériences déjà menées par Art Zoyd ?GH : Avec ce projet, nous travaillons dans l'autre sens, il s'agit de proposer à des créateurs d'images d'intervenir sur une création musicale.

IK : Mais, paradoxalement, le fait de proposer à des créateurs d'images d'intervenir sur vos compositions ne revient-il pas à leur demander de se contenter "d'illustrer" une musique ? GH : Nous avons effectivement voulu éviter le même écueil : le danger de la surinformation. Il ne faut surtout pas que les plasticiens créent des images d'illustration sur nos compositions. Il s'agit bien de créer ensemble une oeuvre cohérente sur les plans visuel et musical. L'an passé, une seule création visuelle de dump type avait été possible. Cette année, trois créations musicales sur quatre seront créées avec les plasticiens.

IK : En quoi ce genre d'expérience est-elle importante selon vous ?GH : Art Zoyd avait envie de prendre la mesure de l'orchestre symphonique. Et justement, je crois qu'en cette fin de siècle, l'orchestre symphonique a lui aussi besoin de nouvelles expériences, de nouvelles rencontres. L'ONL s'est aussitôt pleinement impliqué. Ce projet protéïforme est aussi une réflexion sur la musique contemporaine. C'est une aventure qui intéresse énormément de gens à un niveau mondial. Le Mexique, l’Autriche, l’Allemagne vont accueillir ce concept. Cette aventure revient à essayer d'emprunter un nouveau chemin : on peut certes aboutir à une impasse ou au contraire à un carrefour.

IK : Mais qu'en est-il du public ?GH : À en juger le succès des trois concerts de l'an passé, le public lui aussi a envie de ce type d'expérience. Dangereuses Visions est un titre qui correspond bien à cette idée d'expérience et d'aventure. La musique contemporaine a besoin de trouver des espaces, des moyens pour ces aventures, de même que le public recherche ces nouvelles propositions.

INTERVIEW INTERVIEW INTERVIEW INTERVIEW

Art Zoyd et l'Orchestre National de Lille s'associent pour un programme de musique d'aujourd'hui, alliant Orchestre symphonique, nouvelles

technologies du son et de l'Image.

CONCERT LE 15 MARS 20H00 AU NOUVEAU SIÈCLE (tarif étudiant : 50 frs)Renseignements ONL : 03 20 12 82 40

le 13 Mars à 20h30 , La Luna, Maubeuge et le 18 Mars au Barbican Centre-Londres

IK : Avez-vous pensé à un moment que vous preniez un risque sur un projet d'une telle envergure ?GH : Créer un spectacle total pour l'oeil et pour l'oreille c'est très difficile. Mais les soutiens ont été immédiats. Techniquement la projection d'images pendant le concert entraîne des contraintes lourdes : écrans, projecteurs, et surtout des problèmes de lumières pour les musiciens car la projection nécessite une salle très obscure. Les soucis techniques sont parfois très envahissants.

IK : En tant que compositeur, avez-vous pensé au travail de votre "binome" plasticienne Lydie Jean-Dit-Pannel ?GH : Ma musique est assez imagée, porteuse d'images, cinématographique, je suis donc très sensible au fait qu'une plasticienne va créer des images sur ma musique. L'an passé, la complicité avec dump type était telle que les images sans la musique ne pouvaient pas fonctionner. Lydie Jean-Dit-Pannel, qui créera cette année des images sur ma composition est une vidéaste audacieuse. Son oeuvre est très stylisée, figurative et pourtant décalée avec, sans doute, un peu d'humour. Et justement, pour une fois, ma pièce musicale sera "euphorique", ce qui n'est pas habituel. J'ai effectivement pensé en composant ma musique au travail de la plasticienne. C'est pourquoi j'ai fait des choix différents de ceux que j'aurais fait s'il n'y avait pas eu création visuelle. J'ai laissé des séquences plus longues, pour laisser les images s'épanouir, pour que l'oeil se détache de l'oreille.

IK : En quoi interviennent les nouvelles technologies dans ce projet ?GH : Granular Synthesis composera à la fois sa musique et ses images selon un procédé techniquement très avancé et complexe. Chaque image, chaque son sera décomposé en point, en échantillon, qui deviennent accessibles par clavier ou percussions. Ainsi les images, en plus des sons, seront déclenchées par les musiciens eux-mêmes.L'an passé, c'était plutôt le chef d'orchestre qui suivait le rythme de l'image. Jean-Claude Casadesus avait un casque qui lui donnait le tempo. Avec le système de Granular Synthesis qui sera adapté aux autres compositions, ce sont les images qui seront guidées par les musiciens.

IK : Ne pensez-vous pas pourtant que musique et image ne participent pas du même principe ?GH : La musique est selon moi l'art du temps. En ce sens, elle se différencie totalement des arts plastiques, car ceux-ci peuvent être perçus globalement, sur un simple coup d'oeil. Alors que la musique, au contraire, a besoin du temps : elle oblige l'auditeur à boire l'oeuvre jusqu’à la lie, celui-ci doit se soumettre au temps pour accéder pleinement à l'oeuvre. Il ne s'agit pas ici de

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Journal intime, confessions drolatiques, autobiogra-phie, mémoires, fabulation de soi ou spéléologie biographique, l’entreprise de Lydie Jean-Dit-Pannel mêle les genres, les souvenirs et les identités en de curieux chapitres de vie ou d’époque ; une seule constante, Lydie est toujours là. Toujours présente en plan rapproché, le plus souvent fixe, un visage rond un rien enfantin et des yeux clairs de chat, Lydie contemple l’écran, le spectateur potentiel ou son propre visage, on ne sait jamais.

Née en 1968, Lydie Jean-Dit-Pannel est une des jeunes artistes vidéos les plus prometteuses. Elle a trente ans, un petit garçon, Eliott, un mari depuis peu et a déjà mis en scène en trois chapitres, certes provisoires, son enfance, son adolescence, ses premiers pas dans l’âge adulte et, comme si cela ne suffisait pas, son futur jusqu’à l’an 2000.

Mais s’il y a les vies vécues, il y a surtout les vies à vivre.

Lydie se marie en blanc, Lydie se suicide au son d’une tendre comptine, Lydie filme l’assassinat de Chirac, façon Kennedy, ou se fait poursuivre par des radis volants...

Tout est permis ou plutôt tout est subi.

Les couleurs pètent, les icônes explosent en mini big-bangs, autour de jeux-vidéo qui s’intercalent.

Plasticienne du type “moi-je”, Lydie brode sur le réel et se joue et déjoue de cette loi première de l’image électronique qui permet de construire un double instantané et virtuellement infini de la réalité. Si donc “l’auto” et le “bio” sont très présents, la “graphie” l’est aussi. Inhérente à l’art vidéo, à cette image qu’on peut écrire ou dessiner grâce à l’ordinateur, inséparable d’un art-témoin dont la qualité de direct est indéniable.

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L’IMA

GE

Lydie JEAN-DIT-PANNEL participe au projet ”Dangereuses Visions”

Concert le 15 mars au Nouveau SiècleVoir interview p. 7

CINÉ-DEJ CINÉ-DEJ CINÉ-DEJ CINÉ-DEJ CINÉ-DEJ

AUTO-BIO-VIDÉO - SPÉCIAL LYDIE JEAN-DIT-PANNELCINÉ-DÉJ ”SPÉCIAL-VIDÉO”

SÉANCE LE JEUDI 11 FEVRIER 12H30Cité Scientifique - MACC, blv Langevin - Villeneuve d’Ascq

TARIF : 25 FRS (VIDÉO-PROJECTION ET PANIER REPAS)

Virginie Dupray

Tout comme d’autres inventions, les hologrammes, productions d’images en trois dimensions, interrogent l’évolution des techniques, des arts et de la pensée, et nous renvoient à bien des questions sur les rapports entre technique et esthétique...

EXPOSITION EXPOSITION EXPOSITION EXPOSITION EXPOSITION

RELIEFSEXPOSITION DE 30 HOLOGRAMMES proposée par le Forum des Sciences dans le cadre de ”En forme les couleurs”

En collaboration avec la Maison des Sciences de Liège

DU LUNDI 1ER FEVIER AU VENDREDI 19 FEVIERBibliothèque Universitaire - Cité Scientifique - Villeneuve d’Ascq

ENTRƒELIBRE

”Les uns pensent, dit-on, les autres agissent !

Mais la vraie condition de l’homme, c’est de penser avec ses mains”.

JANV

FÉV

1999

L’IMAGE EN 9 DATES

L’IMAGEDenis de Rougemont - Penser avec ses mains - 1935

Dossier :

2 Février 99L’IMAGE ET L’IMAGINAIRE

9 Mars 99LES ILLUSIONS PERCEPTIVES

23 Mars 99L’HOMME MODERNE FACE À L’IMAGE

20 Avril 99IMAGE ET INCONSCIENT

4 Mai 99MÉDIA, ÉDUCATION, DÉMOCRATIE

21 Janvier 99CINÉ-DEJ ”CONTACTS”

11 Février 99AUTO-BIO-VIDÉO

Février 99EXPOSITION : HOLOGRAMMES

Février - Mars 99EXPOSITION : UN MONDE FRACTAL

TENSIONS DANS L’IMAGE" Si on supprime l'image, c'est l'univers entier qui disparaît "

NicéphoreAntirrhétiques 818 - 820

L'Image, dans la grande diversité de ses formes matériel-les ou mentales, s'instaure dans le monde par le jeu de multiples tensions qui en soulignent les enjeux. Nos

Rendez-vous d'Archimède se proposent de ne réduire l'image ni à sa visibilité, ni à sa lisibilité (car dans ce cas nous resterions finalement prisonniers de l'hégémonie du verbe et du logocentrisme). Nous avons choisi de nous intéresser à l'image comme reflet et catalyseur de notre tentative de maîtrise du monde réel, de révélation du monde imaginaire et de dépassement de la pensée au-delà des limites du ”logos”.

Complexité du monde emprisonnée dans un cadre, "réel mis en boîte", projection de nos idées et de notre tempo-ralité, l'image est ce qui est vu, mais aussi ce qui est imaginé et parfois matérialisé sur un support quelconque. La première tension qui travaille l'image réside sans doute dans ce "va et vient" du réel à l'imaginaire.Support pour le développement de l'esprit, elle serait en outre ce qui donne à "penser plus", un "raccourci pour la pensée" qui chemine d'un point à un autre, une dilatation du concept que seule la richesse de ses possibilités permet. La considérer comme une passerelle jetée vers le savoir, c'est oublier qu'elle est aussi objet de désirs. A la fois outils et stimuli, les images se nourrissent alors de cette tension de l'esprit et du corps qui s'y projettent tous deux, en confrontant entendement et sensibilité.

Omniprésente, tantôt elle apparaît soumise à l'homme, tantôt elle semble le soumettre. C'est là que se dessine encore une troisième tension : de l'homme et de l'image, lequel des deux maîtrise l'autre ? Car alors que l'homme crée l'image et la charge de sens par le regard qu'il lui porte, l'image nous montre en retour comment elle s'impose à lui et peut-être comment elle le précède (N'est-elle pas le schème opératoire de notre expérience du monde ? N'est-elle pas le prisme à travers lequel se livre le réel ?). Elle interagit jusqu'à révéler et influencer les comportements humains car elle oriente nécessairement la façon dont nous évaluons, jugeons et comprenons l'environnement qui fait notre quotidien.Telles sont les orientations que vont prendre nos cinq conférences-débats consacrées à l'image cette année. Bien sûr, d'autres tensions pourraient être soulignées et feront sans doute l'objet d'une prolongation de notre cycle sur la saison 99-2000.

par Isabelle KUSTOSZ

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sauvage, libérée des médiations d’un monde commun, c’est-à-dire de la culture ?

- enfin, les images (photographies, films, logiciels d’image de synthèse) sont de plus en plus assimilées à des biens matériels et immatériels qui n’existent que par des marchés économiques, qui rendent possible production, reproduction, stockage et diffusion. La rétribution du peintre d’une cour princière dans le passé ou même le prix de vente d’un tableau existant en un unique exemplaire sont sans commune mesure avec les capitaux engagés par l’industrie contemporaine des images.

Les investissements nécessaires pour une superproduction américaine avec effets spéciaux, le coût de fonctionnement des réseaux de télévision, les investissements et bénéfices des fabricants de matériels audiovisuels montrent non seulement que l’image a un prix mais que la création et la diffusion d’images génèrent un réseau financier qui suppose et confère un pouvoir socio-politique redoutable. Du fait de cette concentration de pouvoirs, un metteur en scène d’un film à succès peut toucher de nos jours les rêves de centaines de millions de spectateurs sur la planète, une grande agence de photographie peut détenir un monopole sur la diffusion de tel ou tel document iconographique explosif, etc. Dès lors, l’image ne devient-elle pas avant tout un bien marchand, un enjeu économique, voire politique qui engendre de nouvelles puissances oligarchiques aux conséquences encore mal appréciées ?

Ces trois questions, parmi beaucoup d’autres, et des plus importantes encore, sont souvent ignorées ou méconnues ; elles illustrent pourtant l’ampleur et la complexité des problèmes posés par le monde et le marché des images contemporaines. Elles permettent en tout cas d’entrevoir que les usages que nous faisons aujourd’hui des images bouleversent en profondeur des mécanismes ancestraux de la vie psychique et culturelle. Seule une véritable science des images, une iconologie, nous permettrait donc de mieux cerner quelques racines de la crise culturelle que traverse l’humanité aujourd’hui.

Nos recherches sur les images visuelles paraissent aujourd’hui bien en retard par rapport à celles menées par les sciences portant sur le langage. Car leur longue histoire (la rhétorique date des anciens Grecs) a permis de développer, surtout dans la deuxième moitié de ce siècle, des approches

globales des pratiques langagières, écrites et orales, qui maîtrisent tout le spectre qui va des organes de phonation à l’art de l’interprétation du sens. Il serait temps de percevoir l’urgence d’un semblable projet pour nos images audiovisuelles, en tenant compte des spécificités qui caractérisent ces deux modes d’expression de l’humanité. Car les images visuelles occupent de plus en plus de notre temps, elles s’insèrent dans des activités de plus en plus nombreuses, leur création est de plus en plus à la portée de chacun. Et nous sommes finalement bien ignorants à leur égard. Quelques exemples parmi beaucoup d’autres :

- les images s’accumulent et s’enchaînent à toute vitesse dans notre environnement public et privé. Nous sommes harcelés d’images dans nos déplacements extérieurs (publicité), dans les espaces de loisirs (cinéma) et sur nos écrans domestiques (téléviseur, moniteur d’ordinateur). Autant le langage digital se prête à une accumulation de textes (dans le cas des bibliothèques) et de paroles (dans le bavardage quotidien), dans la mesure où le médium (sons et lettres) ne sert que de support, autant les images visuelles, par leur consistance spatiale et optique, nécessitent un temps de perception, de réception, d’interprétation, d’intériorisation et même de rêverie. Or nos technologies audiovisuelles nous imposent paradoxalement une accélération de stimuli qui nous frustrent de la durée même du regard. Quelles sont les conséquences de ce télescopage pour la durée même d’information des images et pour la profondeur de leur réception ? Ne risque-t-on pas ainsi de dénaturer les puissances de l’image et d’appauvrir la densité même de leur rencontre ?

- l’image, longtemps réservée à une élite artistique qui savait dessiner ou peindre, est devenue une forme visuelle dont la création est de plus en plus accessible à chacun. La massification de l’appareil photographique d’abord, la démocratisation de logiciels permettant des compositions et des variations iconiques mettent la fabrication d’images à la portée de tous. Les hommes sauront bientôt produire, mécaniquement ou électroniquement, une image comme ils savent écrire. Mais comment évaluer toutes ces productions ? Les pellicules de négatifs photographiques contiennent sûrement aussi peu d’images ”géniales” que n’en contenaient les correspondances écrites des siècles passés. Mais si les poèmes et les romans recevaient généralement une sanction historique du fait de leur diffusion publique, comment l’infla-tion d’images visuelles, qui pourtant circulent à grande échelle, peut-elle aujourd’hui être confrontée à des critères de jugement esthétique ? La démultiplication des créateurs d’images n’est plus couplée avec des systèmes sociaux de confrontation publique et de consécration artistique. Cette prolifération et cette indivi-dualisation des images ne rendent-elles donc pas caduques la formation de critères culturels et de canons esthétiques ? L’image ne devient-elle pas une oeuvre anomique,

PLAIDOYER POUR UNE ICONOLOGIEpar Jean-Jacques WUNENBURGER

Les images sont aujourd’hui tellement variées et tellement présentes que chacun court le risque d’être traumatisé par une image imprévisible. Cette image peut être jugée “trop violente” ou “trop sexuelle”. Mais elle peut être simplement bouleversante pour des raisons qui échappent à celui qui en est

bouleversé. En fait, dans tous les cas, si une image est traumatique, c'est parce qu'elle réveille un traumatisme personnel enfoui. Le problème est que si ce traumatisme est réveillé chez plusieurs spectateurs qui se le cachent à eux-mêmes, leur relation risque de s’organiser autour de cette image qui, à la fois, évoque et cache leur traumatisme passé non assimilé. L’image alors devient la “colle” qui cimente le groupe et qu’il risque d’objectiver dans une mise en scène réelle délictueuse, voire horrible.Comment faire, alors, pour nous protéger de telles situations ? La première condition est de reconnaître que les images ne sont pas seulement du visuel. Toutes les images, aussi bien psychiques que matérielles, mobilisent des sensations, des émotions, des états du corps. Il s’agit d’en reconnaître l’importance. Et pour cela, il faut nous dégager d’une pensée de l’image comme signe pour penser l’image comme une relation. Mais en même temps, les images nous invitent à en parler. Elles sont cette réalité intermédiaire entre le corps et le langage que l’homme invente en permanence pour commencer à penser le monde et à se penser lui-même. C’est à cette originalité de l’image, entre corps et mot, qu’il nous faut toujours revenir. La seconde condition consiste à mieux comprendre comment les images agissent sur nous. Pour cela, il est essentiel de comprendre que toute image est une RELATION dans laquelle sont mobilisés deux types d'opération psychique, de CONTENANCE et de TRANSFORMATION. 1) Le pouvoir de contenance des images correspond d’abord à leur capacité à pouvoir faire croire qu'elles "contiennent" en réalité une partie de ce qu’elles représentent. Il correspond aussi au désir “d’entrer” dans l’image. Ce désir est devenu familier avec le discours sur les images virtuelles, mais ce fantasme habite notre rapport à l’image dès ses débuts et chaque nouvelle technologie en réactive le rêve. Enfin, c’est le pouvoir d’enveloppement des images qui contribue à alimenter l’illusion qu’une image est perçue de la même manière par tous ses spectateurs, comme si elle était un bain enveloppant en même temps chacun d’entre eux et que tous jouissent, ensemble, des mêmes images. 2) Les pouvoirs de transformation sont eux aussi multiples. La lecture d’une image peut provoquer un déplacement, une action ou un changement intérieur de son spectateur. Elle peut également agir sur les images elles-mêmes : toute image fait appel à d’autres images légèrement différentes (“transformées”), mais proches, avec lesquelles elle puisse entrer en ”série”. Enfin, les images peuvent permettre de transformer la réalité.L’ensemble de ces opérations psychiques définissent le bonheur d’être dans l’image. Alors elle peut porter tous les désirs : sexuels, narcissiques et d’appartenance. Mais d’autres fois, l’image devient ce qui bloque la dynamique du désir. Alors elle est sidération et violence. C’est toujours parce qu’un détail de l’oeuvre entre en résonance pour un spectateur précis, à un moment précis, avec un traumatisme psychique de son histoire passée resté en souffrance d’élaboration.L’image dangereuse est l’image qui bloque et sidère la pensée. Ce risque nécessite, pour être prévenu, des mesures pédagogiques et éducatives, soutenues par une volonté politique.

VERTUS ET DANGERS DES IMAGES

A la limite, aujourd’hui, il n’y a plus d’image : seulement des lignes électroniques, des trajectoires, des processus opérationnels. Réel et imaginaire deviennent indiscernables, se mélangent volontairement. Plus de succession temporelle dans la littérature ou le cinéma, plus d’espace “perspectiviste” dans la peinture. A l’image “classique”

encore liée à la perception et aux règles d’association a succédé l’image brisée et désarticulée de la modernité. La sortie de la représentation impose des mutations : monde onirique des phantasmes, mémoire labyrinthique, pensée des bifurcations. Libérée de son rôle de mixte, l’imagination est introuvable. Certains ont préféré l’éliminer en la réduisant à un avatar des philosophies du sujet : telle était la tendance des divers structuralismes et des formalistes. Ça pensait, mais l’imagination n’était qu’un moyen de colmater les brèches (Lacan) ou une illusion du sujet sur lui-même et sa propre créativité. Le prix à payer était exorbitant : la transcendance du symbolique censé structurer de l’intérieur les rapports au monde. Au Dieu de la tradition se substituait la loi du Père. Les religions passent, les dévots restent...Comment tenir alors ensemble : l’imagination comme schème et création, l’imaginaire comme structure ?

DONNER A VOIRpar Hélène VÉDRINE

par Serge TISSERON

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Nicolas GRIMALDI, professeur émérite de philosophie - Université de Paris I, La SorbonneSerge TISSERON, psychiatre, psychanalyste et écrivain

Hélène VEDRINE, professeur d’Histoire de la Philosophie - Université de Paris I Panthéon Sorbonne Jean-Jacques WUNENBURGER, directeur du Centre Gaston Bachelard de recherches

sur l’imaginaire et la rationalité, Université de Bourgogne

“BREF TRAITÉ DU DÉSENCHANTEMENT” - EXTRAIT -PUF - Perspectives Critiques, 98

L’attente indifférencie le présent. Elle le considère à la manière dont Pissaro avait traité certains paysages parisiens : comme un grimoire tremblotant et coloré sur le fond duquel elle guette que vienne à se profiler la forme de ce qui est attendu. Comme l’avaient manifesté les expériences de la Gestalttheorie, l’attention que nous donnons à la forme de l’avenir nous rend inattentifs à celle du présent, au point d’en suspendre la prégnance, de l’estomper, d’en gommer les déterminations. Si je guette l’arrivée de l’autobus ou du train, je cesse de me rendre attentif à l’agitation du boulevard ou du quai. Quoi qui s’y produise, avec tant de fracas que ce soit, c’est à peine si je l’observe. La même attente des péripéties, des renversements et des bouleversements qui se produisent au théâtre m’empêche de voir non seulement le décor que j’ai pourtant sous les yeux, mais encore les mille détails de la salle et des spectateurs tout proches. De quelque façon, l’attente déréalise le présent. Elle met entre parenthèses cette présence qu’elle éprouve aussi inessentielle que provisoire. Corrélativement, elle surdétermine l’avenir en l’imaginant. Car l’attendre, c’est se tendre vers lui tout entier. De la sorte, l’avenir que l’attente nous fait imaginer obsède tellement notre représentation qu’il éclipse toute la réalité du présent.

Qu’arrive toutefois ce que nous attendions. Que l’avenir imaginé devienne présent. Si conforme soit-il à l’image que nous en formions, il a tout aussitôt perdu toute l’intensité dont nous l’avions investi. En se réalisant, il prend place parmi l’infinité de toutes les autres choses, simplement, banalement, relativement. Sollicité par tant d’autres présences, l’attention que nous lui donnons s’égaille, s’éparpille, se divise, s’amenuise, et se lasse. Ce qui était presque l’unique objet de notre représentation se dilue dans la contiguïté de tout ce qui l’entoure. Distingué par notre attente tant qu’il était à venir, il lui a suffi de devenir présent pour rentrer dans le rang.

De surcroît, comme c’est une seule et même chose d’avoir conscience et d’attendre, nous n’avons pas plus cessé d’attendre que nous n’avons cessé d’être conscient lorsque s’est réalisé ce que nous attendions. Cette corrélation de la forme et du fond qui nous faisait guetter la forme de l’avenir sur le fond du présent commence à l’estomper dès qu’elle devient présente et déjà la résorbe dans la trame du réel. A nouveau disponibles pour l’à venir, nous attendons encore, guettant sur ce fond indifférencié du présent l’apparition de la forme qui la rénovera.

Jacques Aumont, L'Image, Nathan 1994Hans Belting, Image et Culte : une histoire de l'image avant l'époque de l'art, Cerf, 1998, traduit de l'allemandRégis Debray, Vie et mort de l'Image : une histoire du regard en Occident, Gallimard, 1994Georges Didi-Huberman, Ce que nous voyons, ce qui nous regarde, Les Editions de Minuit, 1992Pierre Fresnault-Deruelle, L'Image manipulée, Edilig, 1983Nicolas Grimaldi, Bref traité du désenchantement, PUF, Perspectives critiques, 1998Frédéric Lambert, Mythographies : la photo de presse et ses légendes, EdiligMarie-José Mondzian, Discours contre les iconoclastes, Klincksieck, 1990 Image, icône, économie, Seuil, 1996 L'Image naturelle, Le nouveau commerce, 1995Jacques Ninio, L'empreinte des sens : perception, mémoire, langage, Jacob, Opus,1996Odile Souville, L'Homme imaginatif, Minard, 1995Serge Tisseron, Psychanalyse des images, Dunod, 97 Y-a-t-il un pilote dans l'image, Aubier, 1998Hélène Védrine, Les grandes conceptions de l'imaginaire, Biblioessai, 90Jean-Jacques Wunenburger, Philosophie des images, PUF, 1997

BIBLIOGRAPHIE

A propos de l’image que l’on se fait de son propre avenir...

D’où vient le sortilège de l’avenir ? D’où vient que nous trouvions parfois plus d’intensité à ce qui est imaginé qu’à ce qui est perçu, c’est-à-dire à l’irréel qu’au réel ? Cette analyse est l’occasion de confronter l’imagination, l’attente et le désir.

par Nicolas GRIMALDI

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LE POLITIQUE“MACBETES, LES NUITS TRAGIQUES”

DE CLAIRE DANCOISNE - THÉÂTRE DE LA LICORNE

DEUX REPRÉSENTATIONS : JEUDI 4 FEVRIER À 13H 00 & 19H 00

Cité Scientifique - Bât des Thèses (face B.U) - Villeneuve d’AscqDURÉE : 45 MN

ENTRÉE LIBRE SUR RETRAIT PRÉALABLE DES PLACES À L’USTL CULTURE

Chaque année en fin de saison, les ateliers de pratiques artistiques de l’USTL Culture montent sur scène pour une grande soirée : ”Les ateliers s’affichent”. À cette occasion, plusieurs représentations théâtrales ont lieu.

1998 : ”Déballage...” remporte un vif succès...D’après les textes de Xavier DURRINGER (réunis dans ”Chroniques” - Éditions Théâtrales) et sur une mise en scène de Paul LAURENT est né un spectacle drôle et corrosif. Une série d’esquisses prélevées dans l’univers quotidien des jeunes aujourd’hui, des questions telles que l’image de soi, la relation à l’autre, le rapport à la société ou encore le sentiment amoureux, ”déballées” sur scène avec humour et sincérité : un grand jeu qui a suscité un réel engouement de la part du public.

L’histoire d’un couple diabolique et tyrannique à la con-quête d’un pouvoir absolu et éternel sur... une population d’insectes. Le spectacle réunit théâtre, mime, marion-nettes et masques sur une scène restreinte. Ambiance insolite et tragique, humour et dérision, morale politique et philosophique ; les acteurs réalisent une performance étonnante, une proximité réelle s’installe, le spectateur est dans un autre monde...

Shakespeare revu et corrigé :quand l’oeuvre tourne au polar noir et au cauchemar ! Meurtre, prise de pouvoir,combat, mort...

THÉÂTRE THÉÂTRE THÉÂTRE THÉÂTRE THÉÂTRE THÉÂTRE

PRATIQUES ARTISTIQUES“DÉBALLAGE...”

par l’atelier Théâtre de l’USTL Culture, encadré par PAUL LAURENT

LES 21, 22 & 23 FEVRIER À 20 H 00AU BIPLAN, rue Colbert à LILLE (03 20 12 91 11)

TARIF : 30 - 40 FRS (PLACES À RETIRER AU BIPLAN)

”Déballage...” - 2° acte en 98-99 !Le spectacle est à nouveau proposé cette année, c’est l’occasion pour les participants à l’atelier de se produire hors cadre universitaire, sur des scènes régionales. Rendez-vous pour une première représentation en janvier au Biplan...

LA PENSÉE ET LE CERVEAUAVEC JEAN-DIDIER VINCENT

professeur, Chaire de Neuroendocrinologie de l’Institut Universitaire de FranceUniversité de Paris XI, Faculté de Médecine de Paris-Sud, directeur de l’Institut Alfred Fressard CNRS,

auteur de ”La chair et le diable”, O. Jacob, 1996.

MERCREDI 13 JANVIER A 18 H 30BÂT C1, AMPHI KUHLMANN - Cité Scientifique - Villeneuve d’Ascq

ENTRƒELIBRE

Dans le Genre des Miroirs, le Prince de Machiavel occupe une place singulière par sa manière de corréler le problème de l'Etat et celui du vivre politique, de faire surgir, depuis la vérité effective de la chose, la figure d'un prince impossible, Prince sans qualités, mais devant faire usage de toutes les qualités, les bonnes comme les mauvaises, selon ce que la situation exige.Le Prince de Machiavel, à peine un sujet, au moment même où il est au centre du paysage et marque son effacement d'un style particulier en affinité avec les humeurs des forces politiques , présente le modèle de la décision politique. Il nous intéresse à ce titre comme pensée de l'exécutif, quel que soit le degré de complexité de l'administration des choses. C'est par là que l'oeuvre de Machiavel transcende toute assignation à un "moment machiavélien".En cette figure se joue l'équivoque indispensable du moral et du politique et la problématicité de la virtù face à la malignité de la Fortune. Une virtù qui vient nommer la rencontre de la force et de la ruse, et, au delà une puissance de surcroît à distance des forces politiques tout en prenant appui sur le peuple.La virtù du Prince ne se comprend que depuis un rapport des humeurs entre les forces politiques qui n'est pas un rapport entre des intérêts ou des passions ; rapport singulier dans lequel la virtù du prince représente la pointe extrême de l'humeur politique en même temps que ce qui le surpasse.Le caractère inédit de la pensée de Machiavel, ancrée dans la langue de son temps, tient d'abord à cette corrélation entre la virtù du Prince (l'exécutif) et la raison des humeurs (le rapport politique). C'est ce rapport qui nous éclaire sur notre temps.

Gérald SFEZ

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LE VIVANT ET L’HUMAIN

Les contributions scientifiques de Jean-Didier VINCENT se situent dans le cadre d’une branche récente de la Biologie : la Neuroendocrinologie, dont il est un des pionniers. Cette discipline est consacrée à l’étude des interactions entre glandes et système nerveux et aux approches du cerveau considéré lui-même comme une glande endocrine. La Neuroendocrinologie qu’il développe rapproche les phénomènes hormonaux avec des évènements comportementaux et les mécanismes qui les sous-tendent.

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À NOTER : changement de date

DIAPORAMA : PROMENADE NATURALISTE EN AFRIQUE DE L’ESTPAR JACQUES BROCARD

professeur de chimie à l’USTLVice-Président chargé des Relations Internationales

et amateur passioné de la faune africaine

MARDI 26 JANVIER A 18 H 30BÂT des Thèses (face B.U) - Cité Scientifique - Villeneuve d’Ascq

ENTRƒELIBRE

RENCONTRES - DÉBATS RENCONTRES - DÉBATS

CYCLE

LE POLITIQUECYCLE

LE PRINCE SANS QUALITÉS ET LES HUMEURS POLITIQUESAVEC GÉRALD SFEZ

maître de conférences à l’Institut d’Études Politiques à Paris, professeur agrégé de philosophie, auteur de ”Machiavel, le prince sans qualités”, Kimé, 1998

MARDI 19 JANVIER A 18 H 30BÂT C1, AMPHI KUHLMANN - Cité Scientifique - Villeneuve d’Ascq

ENTRƒELIBRE

LE BIEN COMMUN, PRÉPARATION COLLECTIVE DE LA JOURNÉE D’ÉTUDES

JEUDI 4 FÉVRIER DE 16 H 00 À 19 H 00Bât des Thèses (face B.U) - Cité Scientifique - Villeneuve d’Ascq

ENTRƒELIBRE

Une intervention qui abordera la question de la définition de ”l’Infini”. À défaut de pouvoir le définir, nous en avons une ”idée”, qui ne peut jamais atteindre ce-dont-elle-est idée. Nous cherchons à ”dire” l’infini, tout en sachant que nous ne pouvons pas ”connaître” l’infini. Cette tension ”travaille” notre parole.

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USTL Culture propose de préparer collectivement une journée d’études sur le bien commun qui se déroulera en décembre 99, juste avant le passage tant attendu à l’an 2000.Notre principe : associer le plus grand nombre, individus, associations, organismes pour préparer ensemble ce grand débat qui représente, selon nous, une des interrogations capitales des prochaines décennies.Il nous importe d’inviter le public à être à la fois notre partenaire et un véritable acteur dans la préparation de ce projet, qui ne peut en effet être basé que sur une participation active et collective.

16h00 : Présentation des enjeux par Nabil el HAGGAR et Jean-François REY

17H00 : Débat public

18h00 : Synthèse participative

19h00 : ”Macbêtes” par le Théâtre de la Licorne (voir p. 13),un spectacle qui réunit théâtre, mimes, marionnettes et masques autour

de l’oeuvre de Shakespeare... revue et corrigée !

RENDEZ-VOUS D’ARCHIMÈDERENCONTRES - DÉBATS RENCONTRES - DÉBATS

L’INFINICYCLE

L’INFINI À L’ÉPOQUE ANTIQUE ET MÉDIÉVALEAVEC TONY LÉVY

chargé de recherches au CNRSau centre d’Histoire des Sciences et des Philosophies Arabes et Médiévales

auteur de ”Figures de l’infini : les mathématiques au miroir des cultures”, 1987, SeuilET FRANÇOISE MONNOYEUR (sous réserve)

auteur de ”L’infini des philosophes”, Belin, 1995 et “L’infini des mathématiciens”, Belin, 1992 .

MARDI 9 FÉVRIER A 18 H 30BÂT C1, AMPHI KUHLMANN - Cité Scientifique - Villeneuve d’Ascq

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LE BIEN COMMUN, PRÉPARATION COLLECTIVE DE LA JOURNÉE D’ÉTUDES

JEUDI 4 FÉVRIER DE 16 H 00 À 19 H 00Bât des Thèses (face B.U) - Cité Scientifique - Villeneuve d’Ascq

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JOURNÉES ARCHIMÈDE JOURNÉES ARCHIMÈDE

L’IMAGECYCLE

L’IMAGE ET L’IMAGINAIREAVEC HÉLÈNE VÉDRINE

professeur d’histoire de la philosophie à Paris I, La Sorbonneauteur de ”Les grandes conceptions de l’imaginaire”, BiblioEssai 90

ET NICOLAS GRIMALDIprofesseur émérite de Philosophie à Paris I, La Sorbonne

chaire d’histoire de la philosophie moderne et chaire de Métaphysiqueauteur de ”Bref traité du désenchantement”, PUF, Perspectives critiques, 1998

MARDI 2 FEVRIER A 18 H 30BÂT C1, AMPHI KUHLMANN - Cité Scientifique - Villeneuve d’Ascq

ENTRƒELIBRE

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EN AS

SOCIA

TION

CONCERT Jazz et MathsLundi 1er Mars 1999 à 20h00

MACC, bld Langevin - Cité ScientifiqueEntrée libre sur retrait préalable des places

à l’USTL Culture

EXPOSITION“Un monde fractal”

Du 22 Février au 26 Mars 1999Bibliothèque Universitaire - Cité Scientifique

Entrée libre

Un des premiers constats faits par l’esprit humain est de s’apercevoir de l’existence de quelque

chose de beau autour de lui.

Ce constat est vite devenu un problème, c’est-à-dire un sujet de réflexion.Je pense par exemple aux problèmes de perspec-tive dont se sont occupés Leonard de Vinci et Albrecht Dürer : un beau tableau est celui qui reproduit au mieux le sujet qu’on est en train de peindre. Or, si l’on regarde les bords d’une longue route devant nous, on a l’impression que ces bords finissent par se rejoindre. L’introduction d’un point à l’infini “commun“ à deux droites parallèles et la géométrie projective sont à l’état embryonnaire sur les tableaux du Quattrocento, même si certains théorèmes (Ménélaus) de cette branche de la géométrie sont déjà connus depuis l’antiquité. Après la Révolution Française et la naissance de l’Ecole Polytechnique à Paris, la géométrie projec-tive connaît un développement rapide à des fins militaires. En 1813, J.V. Poncelet écrit son Traité des propriétés projectives des figures alors qu’il est prisonnier en Russie. Ensuite, au XIXème siècle, grâce à Steiner, Von Staudt, Chasles et d’autres mathématiciens, la géométrie projective se déve-loppe considérablement jusqu’à trouver ses liens avec les géométries non-euclidiennes et l’algèbre,

COLLOQUE COLLOQUE COLLOQUE COLLOQUE

“ARTS ET MATHÉMATIQUES”EN ASSOCIATION AVEC L’IREM DE LILLE

Renseignements : IREM 03 20 43 41 81ou 82 - Fax : 03 20 33 71 61http://www.univ-lille1.fr/irem

LUNDI 1ER ET MARDI 2 MARSMACC, bld Langevin - Cité Scientifique - Villeneuve d’Ascq

ENTRƒELIBRE

par Valério VASSALODirecteur de l’IREM de Lille,

Institut Régional de l’Enseignement des Mathématiques

pour donner ensuite naissance à la géométrie algébrique. Les systèmes différents de l’école sont souvent organisés de façon incohérente à l’intérieur d’une même discipline ; de plus, ils mettent de côté les liens entre disciplines. Cela est vrai du collège à l’université, mon idée étant qu’à la maternelle et à l’école primaire, l’esprit de curiosité lié à la recherche du beau est encore laissé assez libre de “vagabonder“.Dans le petit livre ”Comment je vois le monde“, Albert Einstein disait “Il ne suffit pas d’apprendre à l’homme une spécialité. Car il devient ainsi une machine utilisable mais non une personnalité. Il importe qu’il acquiert un sentiment, un sens pratique de ce qui vaut la peine d’être entrepris, de ce qui est beau, de ce qui est moralement droit. Sinon, il ressemble davantage, avec ses connaissances professionnelles, à un chien savant qu’à une créature harmonieusement développée. Il doit apprendre à comprendre les motivations des hommes, leurs chimères et leurs angoisses pour déterminer son rôle exact vis-à-vis des proches et de la communauté“.Et quelques lignes plus loin, il conclut ainsi : “Les excès du système de compétition et de spécialisation prématurée sous le fallacieux prétexte d’efficacité, assassinent l’esprit, interdisent toute vie cultu-relle et suppriment même les progrès dans les sciences d’avenir. Il importe enfin, pour la réalisation d’une parfaite éducation,

de développer l’esprit critique dans l’intelligence du jeune homme. Or, la surcharge de l’esprit, par le sys-tème de notes, entrave et transforme nécessairement la recherche en superficialité et absence de culture. L’enseignement devrait être ainsi : celui qui le reçoit le recueille comme un don inestimable mais jamais comme une contrainte pénible“. Ces Journées Académiques “Arts et Mathématiques“ organisées par l’IREM de Lille ont pour but de contri-buer à la recherche du sens du beau dans une partie très limitée du savoir par l’approche des mathémati-ques en plusieurs directions telles que la poésie, la musique, la peinture, la philosophie et la physique.

Je terminerai avec la conclusion de René Thom - un des plus grands mathématiciens de ce siècle - conte-nue dans l’introduction de son livre “Stabilité structu-relle et morphogénèse“ (1972). Ici Thom introduit la notion de catastrophe, dont il présente des applica-tions allant de la physique (Optique Géométrique, singularités des fronts d’onde) à la Linguistique en passant par la Biologie. Cette conclusion peut aider à comprendre comment notre siècle a connu d’autres esprits libres tels que Benoît B. Mandelbrot capable de s’intéresser aux mathématiques “différemment“ en introduisant les objets fractals (1975) et dont il sera question dans l’exposition organisée par l’USTL Culture.”...On peut néanmoins se poser légitimement une question : quantité de phénomènes familiers (au point qu’il n’attirent plus l’attention !) sont cependant de théorie difficile, par exemple, les lézardes d’un vieux mur, la forme d’un nuage, la chute d’une feuille morte, l’écume d’un bock de bière... Qui sait si une réflexion mathématique un peu plus poussée sur ce genre de petits phénomènes ne se révèlerait pas finalement plus profitable à la science ?”

Au programme : la poésie, la musique, la peinture, (Léonard De Vinci), l’architecture baroque, l’harmo-nie, les fractales... : leur rapport aux Mathématiques.

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EN ASSOCIATIONÉCHANGE AVEC DIALOGUE LITTORAL

ET LA MAISON DES ÉCRIVAINS

J’ai un tatouage sur le bras d’Annie SaumontCivils de plomb de G.O. Châteaureynaud

Civils de plomb (extrait) ”Ils sont lourds, lourds ! Comment peuvent-ils peser à ce point ? Le plomb lui-même n’est pas aussi lourd. D’où tiennent-ils cette formidable densité ? Elle ne se révèle qu’à l’instant où on les tire au jour. Aussi longtemps que nous les contenions, ils n’étaient qu’ima-ges clignotantes. Même pas de vraies images, au fond, des intermittences, des idées d’images, des espèces de signes... Des signes, des idéogrammes flous, peut-être moins encore. Avant, quand nous nous efforcions de nous représenter les absents ou les morts, c’était comme si nous avions reconnu et nommé des fumées, des écharpes de brume, des vapeurs. Mon grand-père, dont je croyais garder en moi le souvenir intact, j’ai bien du admettre que je ne le voyais pas, quand je pensais à lui auparavant. Je l’évoquais à l’économie, une esquis-se, deux coups de crayon mental qui le résumaient, ethop ! Il était pourtant en moi tout entier, dans toutes ses dimensions, dans ses moindres détails, puisqu’il est tel aujourd’hui devant moi, semblable à lui-même avec une exactitude tâtillonne, mais plus lourd, infiniment plus lourd ! Les inventeurs du procédé ignorent eux-mêmes la raison de ce poids. Lors des premières tentatives, on s’était attendu au contraire à voir apparaître des créatures impondérables, prêtes à se déliter et à partir en lambeaux ou en flocons au moindre souffle d’air. On avait réfléchi à l’avance au moyen de les retenir... Loin de s’envoler dans les airs, de s’accrocher dans les arbres ou de dériver sous les plafonds, les ressuscités pèsent d’un poids incompréhensible sur la terre retrouvée... Que n’aurions nous donné, hier, pour entraper-cevoir nos disparus, pour avoir l’illusion de leur toucher la main ? A présent, on les a chez soi à vie, on peut les couver du regard ou les étreindre autant qu’on veut, pour le coût d’un séjour d’un mois à la mer en pension complète ou d’un très bel instrument de musique, ou encore... Peu importe, c’est donné. La sculpture la plus hideuse est plus chère, et il faut l’assurer. Tandis que votre tante ou votre cousine ne revêtent de valeur qu’à vos yeux... Les exemplaires successifs d’un ressuscité demeurent d’une rigoureuse identité, à une différence près, le poids. Il connait d’un échantillon à l’autre des disparités sensibles et inexplicables...”.

Tarif réduit : 30 F - Tarif plein : 50 FBilleterie sur place

(Trio, 40mn) précédé deSacSacoche et hirondelles (Duo, 20 mn)

VOYAGE est la nouvelle création de la Compagnie du 8 renversé, fondée en 1986 à Paris par la danseuse chorégraphe Carla FORIS, et désormais basée à Lille.

Le voyage d’un homme et d’une femme entre l’est et l’ouest, dans un temps restreint, où le regard et la sensibilité de chaque prota-goniste s’entrecroisent.Voyage nous entraîne dans les rues, les quar-tiers mal éclairés de Budapest à travers les dia-positives projetées d’une plasticienne, Isabelle Chartier.La musique - bande son tissée des extraits de l’oeuvre d’Éric Tanguy, de Bartok, de la musique traditionnelle hongroise - crée une sorte de confrontation entre les différents uni-vers. À travers cette recherche polyphonique, la création nous emporte au-delà du temps réel.

FORUM FnacPassion Théâtre sur InternetMercredi 20 Janvier 1999 à 17h30

Présentation de l’association par Manuel ARIES etsignature de la convention avec l’USTL.

L E C T U R E S L E C T U R E S

JEUDI 28 JANVIER À 18 H 00 B.U. (Salle de culture générale) - Cité Scientifique

ENTRƒELIBRE

C H O R É G R A P H I E

LECTURESpar BRIGITTE MOUNIER et ANNE CONTI

JEUDI 14 JANVIER À 20 H 00MACC, bld Langevin - Cité ScientifiqueENTRƒELIBRE

VOYAGECHORÉGRAPHIE DE CARLA FORISPAR LA CIE DU 8 RENVERSÉ

SACSACOCHE (création 1997)Un duo drôle qui met en scène l’hésitation et les émotions contrastées liées au départ en voyage d’un homme etd’une femme. Ils évoluent dans un décor urbain rendu poétique où les musiques de rap, fados, cris d’oiseaux et les airs de Chaplin créent un ailleurs un peu irréel.

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par Rudolf BKOUCHEprofesseur de mathématiques à l'USTL

À LIRE

Penser la modernité. L'ouvrage de Denis de Rougemont reste aujourd'hui l'un de ceux qui peuvent aider à penser la modernité par-delà les effets de mode et la course à travers les dernières techniques pompeusement baptisées nouvelles technologies.

"Non je ne vais pas demander qu'on détruise les machines et je n'ai pas le moindre mépris pour les balances, surtout si elles sont justes. Mais je demande qu'on prenne ces outils pour ce qu'ils sont, non pour des règles et pour des normes de pensée.”Ainsi s'exprime Denis de Rougemont, rappelant que la machine apporte à l'homme dans la mesure où c'est la pensée qui la commande. Il est vrai que Denis de Rougemont va bien au-delà de la classique dichotomie de la théorie et de la pratique qui voudrait que l'on distingue ceux qui pensent et ceux qui agissent. C'est l'un des points forts de l'ouvrage que ce refus de la mutilation que constitue cette distinction.Mais il ne suffit pas de dénoncer une telle mutilation, il faut encore en distinguer les origines, ce que nous propose Denis de Rougemont lorsqu'il explicite la double figure de la raison, émancipatrice "lorsqu'elle met au service d'un idéal à conquérir ses puissances conjuguées de critique et de mise en ordre", tyrannique lorsqu'elle conduit aux plates rationalisations ; et l'auteur d'expliquer comment "la culture de la bourgeoisie a confondu tous ses progrès avec ceux de la raison scientifique". C'est ici moins la science, fille de la raison, qui est en cause que sa prétention à l'universalité, prétention qui conduit moins à former l'homme qu'à le réciter ; c'est une telle réduction qui conduit à se tenir à l'écart de l'action. Ainsi restent d'un côté les clercs qui s'interdisent toute action pour mieux penser, de l'autre, les actifs (les agités !) qui oublient leur cerveau au nom des nécessités de l'action.Face à une telle mutilation, Denis de Rougemont propose moins de définir le "penser avec ses mains", ce qui ne serait qu'une autre forme de mutilation que de "formuler quelques critères de la pensée qui est pensée avec ses mains". En proclamant que c'est dans l'acte lui-même que se définit le "penser avec ses mains", la pensée de Denis de Rougemont se présente comme une mystique de l'union de la pensée et de l'acte et nous oblige à prendre en compte la part irréductible de non-rationnel de l'homme, mais n'est-ce pas cette part irréductible qui fait l'humanitude de l'homme ?

DENIS DE ROUGEMONT - PENSER AVEC LES MAINS(1935), NOUVELLE ÉDITION, IDÉES/GALLIMARD, PARIS 1972

J'ai dit plus haut l'actualité de ce texte. Il faudrait alors dire combien pèse aujourd'hui une pensée devenue machinale lorsque certains proclament que c'est la machine elle-même qui définit les normes de pensée. Denis de Rougemont parlait de pensée prolétarisée pour dire cette pensée mutilée qui oublie ses mains pour mieux réciter le monde ; la pensée machinale d'aujourd'hui continue cette pensée prolétarisée, la soumettant, peut-être plus encore qu'au milieu de ce siècle, à ses impératifs

CONCOURS DE NOUVELLES 99

Renseignements et dépôt des nouvelles avant le

28 FÉVRIER

AU CROUS DE LILLE74, RUE DE CAMBRAI

59043 LILLE CEDEXTÉL : 03 20 88 66 12

Denis DE ROUGEMONT est l’auteur de la citation qui nous accompagnera au long de cette saison 98-99 : à lire en première page de ce journal.

À ÉCRIRE

EN RÉSUMÉ... EN CONCLUSION...

DU SINGE À L'HOMME SAVANT

Il y a six millions d'années, la lignée des hominidés s'est séparée de celle des pongidés (grands singes). Résumer cette histoire dans un cours de soixante heures était déjà une gageure pour Claude Louis Gallien, Professeur à Paris-V et auteur de Homo, histoire plurielle d'un genre très singulier, (ed PUF 1998). Mais sa performance fut encore plus impressionnante quand il résuma ces six millions d'années en soixante petites minutes pour le public d'Archimède.

DEBOUT, GROSSE TÊTE, BAVARD ET NU : ECCE HOMO

Que sait-on ? Que l'homme résulte d'une évolution biologique. Les hominidés résultent de l'évolution biolo-gique des primates et les Homo Sapiens que nous sommes, d'une évolution des hominidés, depuisl' Australopithèque, l'homo habilis, l'homo erectus et enfin l'homme de Neandertal.Que sait-on encore aujourd'hui ? Que ce qui fait de l'homme un singe pas comme les autres, c'est qu'il se tient debout, qu'il a une grosse tête, qu'il sait parler et qu'il est nu. A noter qu'avec le chimpanzé nous avons treize paires de chromosomes en commun. 98 % de notre génome est commun à celui du chimpanzé. Pourquoi sommes-nous alors si différents ? Parce que certains gènes apportent des différences bien plus fondamentales que d'autres ; ce sont les gènes de structure et les gènes de régulation du développement (dits "Architectes").

SCIENCES ET RELIGION NE FONT PAS TOUJOURS BON MÉNAGE :

La ressemblance entre l'homme et le singe posa bien des problèmes aux scientifiques occidentaux. Parce que l'occident chrétien a développé une conception du temps linéaire, il a fondé le mythe de la création du monde et de l'homme par un Dieu. De la fin du moyen-âge jusqu'à la fin du 19 ème siècle, l'idéologie voulait que l'homme ait été créé à l'image de Dieu. Au XVIIème, Isaac de la Peynère, devant la découverte des pierres taillées qu'on croyait le fruit de phénomènes naturels, émis l'hypothèse que ces pierres auraient été taillées par des hommes primitifs : il distingue alors une humanité pré-adamique de l' humanité de ces contemporains. Ainsi développe-t-il le concept de double humanité : une malfaisante et démoniaque (dont la mère n'était pas Eve mais Lilith), et la nôtre, apparue avec Adam.Plus tard, Boucher de Perthes, au XIX ème, évoquera l'hypothèse d'un double déluge et d'une double création : notre humanité aurait survécu au deuxième déluge grâce à l'Arche de Noé.Pour Darwin coexistent l'évolution biologique des ani-maux et la "création séparée" pour les hommes. On voit comment les croyances ont pu orienter les recherches de générations de scientifiques, et provoquer nombre d'erreurs grotesques.Huxley, en 1863, écrira pour la première fois que l'homme ne doit pas être dissocié du reste du monde animal et qu'il s'apparente aux grands singes africains.NOUS SOMMES TOUS DES AFRICAINS :

Il y a 11 millions d'années en Afrique apparaissent, à l'issue d'un accident géologique, les australopithèques, premiers ancêtres de la lignée humaine. Ce sont des charognards qui vivent dans les arbres. Un saut évolutif, il y a deux millions d'années, donne l'homo habilis :

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un végétarien, petit, léger, complètement bipède. Pourquoi dit-on que c'est le premier homme ? Il est le premier à avoir franchi, le "Rubicon cérébral" (au delà d'un volume cérébral de 500 cm3, on parle d'homme, or l'homme habile a un cerveau de 600 cm3).C'est l'Homo Erectus (l'homme debout) qui lui a suc-cédé. Il est beaucoup plus massif, plus résistant. C'est le premier à avoir vécu en société, en petits groupes de vingt à trente individus. Chasseur-migrateur, il suivait les troupeaux, utilisait le feu, pratiquait le cannibalisme et possédait un langage. Parmi les Erectus, une séquence particulière se produit en Europe où apparaissent les Néandertaliens. Gallien aime à penser que c'est lui le premier homme, car il est un peu poète. Il pratique des rituels, de la magie, il crée l'art, offre des fleurs aux morts et surtout joue de la flûte. Parmi les Néandertaliens, on compte l'Homme de Cro-Magnon qui est peut-être l'inventeur de la culture.L'Homo Sapiens (l'homme sage) qui résulte de l'Erec-tus, apparaît en Afrique il y a 200 000 ans, mais seulement 40 000 ans en Europe et 30 000 ans en Amérique.

MICRO OU MACRO - ÉVOLUTION :

A la thèse de la micro-évolution à la Darwin, c'est-à dire des mutations génétiques lentes en fonction de l'adaptation des sujets à leur environnement, on préfère aujourd'hui celle de la macro-évolution, qui privilégie la thèse des accidents brutaux. Imaginons qu'à un moment des sujets anormaux se soient révélés plus résistants que d'autres et soient finale-ment devenus l'origine d'une nouvelle norme. Il a

suffi par exemple que la phase embryonnaire ait été allongée pour que le cerveau se complexifie et se développe davantage. Le nombre de neurones entre les homo habilis et les homo sapiens a doublé en passant de 7 à 14 milliards. C'est donc le prolongement de la phase embryonnaire qui a permis l'apparition de l'homo sapiens (dont le cerveau a un volume de 1400 cm3 en moyenne).Un peu d'humilité : accidents et anormalités nous ont fait tels que nous sommes. Nous avons encore à tester notre longévité, car l'histoire des Homo sapiens est finalement très récente. Pourra-t-elle se compter en millions d'années (comme celle des Australopithèques) ? Ou serons-nous les premiers hominidés à précipiter leur propre disparition ? Pour durer, sans doute faudrait-il que l'homo sapiens soit un peu plus sage !

Propos retranscris par Isabelle KUSTOSZde la conférence donnée par CLAUDE-LOUIS GALLIEN

le 10 Novembre 1998

L’ÉVOLUTION DE L’HOMME

PHOTO : “HOMO, HISTOIRE PLURIELLE D’UN GENRE TRÈS SINGULIER”DE CLAUDE-LOUIS GALLIEN, PUF, 98

Ustl Culture

JANV

FÉV

1999

CHORÉGRAPHIE Voyage

Le Prince sans qualités et les humeurs politiques avec Gérald Sfez

THÉÂTRE “Déballages...”

DIAPORAMA Promenade naturaliste en afrique de l’est

LECTURE Civils de plombs ET J’ai un tatouage sur le bras

EXPO : Reliefs

Agenda

Pour les spectacles gratuits, il est préférable de retirer préalablement les billets à l’USTL Culture(disponibles un mois avant les manifestations), le nombre de places étant limité.

Jeudi

MardiJeudi

14 janvier 20h00

18h30

19 janvier

21, 22, 23 janv. 20h00

18h30

Mardi 26 janvier 18h30Jeudi

Mardi

28 janvier

1er-19 fév.2 février 18h30

Jeudi 4 février 13h00et19h00

THÉÂTRE Macbêtes, les nuits tragiquespar le Théâtre de la Licorne

Jeudi 11 février 12h30 CINÉ-DÉJ Auto-Bio-Vidéo

22 fév.-26 mars EXPO : Un monde fractal

18h30 L’infini à l’époque antique et médiévaleavec Tony Levy et Françoise MonnoyeurMardi

1er et 2 mars

9 février

Biplan - Lille30 FRS

Amphi KuhlmannENTRÉE LIBRE

Bât des Thèses (face B.U)ENTRÉE LIBRE

Bât des Thèses (face B.U)ENTRÉE LIBRE

MACC, blv Langevin25FRS. Cinéma & panier repas

MACC, blv LangevinENTRÉE LIBRE

Amphi KuhlmannENTRÉE LIBRE

Bât des Thèses (face B.U)ENTRÉE LIBRE

Bibliothèque UniversitaireENTRÉE LIBRE

Bât des Thèses (face B.U)ENTRÉE LIBRE

Bibliothèque UniversitaireENTRÉE LIBRE

JOURNÉE ARCHIMÈDE Le bien commun : Préparation collective16h00

La pensée et le cerveau avec Jean Didier Vincent13 janvier Amphi KuhlmannENTRÉE LIBRE

MACC, blv Langevin30 FRS, 50 FRS

L’image et l’imaginaireavec Hélène Védrine et Nicolas Grimaldi

Amphi KuhlmannENTRÉE LIBRE

12h30Jeudi 21 janvier CINÉ-DÉJ Contacts MACC, blv Langevin25FRS. Cinéma & panier repas

COLLOQUE Arts et maths

”Comme vous !”Exposition jusqu’au 28 Janvier 1999

Bibliothèque Universitaire - Cité Scientifique35 portraits de français issus de l’immigration ou

d’étrangers vivant en France.Reflets d’une France multiculturelle.

Photographies réalisées par Emmanuel Goulliart.

18h00

Orchestre National de LilleGrand Concert pour les étudiants, les mem-bres du personnel et les amis de l’USTLAu programme :PAULET - CHOPIN - TCHAÏKOVSKI - JANACEKJeudi 4 Mars - Nouveau Siècle à 20h00Entrée libre sur retrait des places à l’USTL Culture.

Merc.

Merc. 20 janvier 17h30 FORUM FNAC Passion Théâtre sur Internet

28 janvierJusqu’au EXPO : “Comme vous !”

FNAC - Lille

Bibliothèque UniversitaireENTRÉE LIBRE

USTL Culture - Bât. A3 - Cité Scientifique 59 655 Villeneuve d’Ascqdu lundi au jeudi de 8h30 à 18h00et le vendredi de 8h30 à 17h00 sans interruption

Tél : 03 20 43 69 09 - Fax : 03 20 43 69 59 www.univ-lille1.fr [email protected]

Nabil EL HAGGARVice-Président de l’USTL

chargé de la Culture Isabelle KUSTOSZ

Directrice - USTL CultureCorinne GUSTIN

Administration-ComptabilitéDelphine POIRETTE

CommunicationEdith DELBARGE

Editions-CommunicationMichèle DUTHILLEUX

Logistique-OrganisationJohanne COLLIER

Rahdia HASNAOUIKarine WILLAME

SecrétariatEmeric AELTERS & Rémy WALLE

Assistants