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UNIVERSITE D’ANTANANARIVO
Faculté de Droit, d’Economie, de Gestion et de Sociologie
Département : ECONOMIE
--------------------------------
Option : Développement
--------------------------------
MEMOIRE DE FIN DE D’ETUDES POUR L’OBTENTION DU DIPLOME DE
MAITRISE ES-SCIENCES ECONOMIQUES
ENTRE COMMERCE INTERNATIONAL ET
INDUSTRIALISATION : QUELLE PERSPECTIVE DE
DEVELOPPEMENT POUR LES PAYS DU SUD ?
Impétrante : RANJEVARIVONY Nadia Laurenze
Encadrée par : Docteur RAKOTOVAO Heriniaina Andriananja
Année : 2012
Date de soutenance : 03 Juin 2013
REMERCIEMENTS
Je rends grâce à Dieu de m’avoir permis de réaliser ce travail.
Je tiens à exprimer toute ma gratitude, en particulier, à mon encadreur Monsieur
RAKOTOVAO Heriniaina Andriananja pour tout son aide, ses précieux conseils et son
temps, dans l’élaboration de ce mémoire. Qu’il trouve ici l’expression de ma profonde
reconnaissance.
Je remercie également Monsieur le Doyen de la faculté de Droit de l’Economie, de
Gestion et de Sociologie et Monsieur le Chef de département Economie, sans oublier tous les
enseignants du département Economie et tout le personnel administratif.
Aussi, je tiens à adresser mes vifs remerciements à ma famille qui m’a soutenue
moralement et financièrement.
Je remercie tous ceux ayant contribué de près ou de loin à la réalisation de ce
mémoire.
Un grand merci à tous.
LISTE DES TABLEAUX
Page
Tableau 1 : Répartition des recettes issues des industries extractives en 2010 en US$..........13
Tableau 2 : Croissance des exportations et des importations de marchandises des NPI
en millions US$........................................................................................................................29
Tableau3 : Prix mondiaux des produits primaires : 2006-2012 (variation en pourcentage
par rapport à l’année précédente)…………………………………………………………….38
Tableau 4 : Taux de croissance annuel moyen entre 2000 et 2009 en pourcentage ................42
LISTE DES ACRONYMES
ALE : Accords de Libre-Echange
BCM : Banque Centrale de Madagascar
CNUCED : Conférence des Nations-Unies pour le Commerce et le Développement
COI: Commission de l’Océan Indien
COMESA: Common Market for Eastern and Southern Africa
DIPP : Décomposition Internationale du Processus de Production
DIT : Division Internationale du Travail
DTS : Droit de Tirages Spéciaux
FAO : Food and Agriculture Organisation
FMI : Fonds Monétaire International
IDE : Investissement Direct étranger
INSTAT: Institut National de la Statistique
NDIT : Nouvelle Division du Travail
NPI : Nouveaux Pays Industrialisés
OCDE : Organisation de Coopération et de Développement Economique
OMC : Organisation Mondiale du Commerce
PAS : Programme d’Ajustement Structurel
PD : Pays Développés
PED : Pays en développement
PIB : Produit Intérieur Brut
PNB : Produit National Brut
SADC: Southern African Development Community
WISCO: Wuhan Iron and Steel Corporation
ZFI : Zones Franches Industrielles
ZLE : Zone de Libre-Echange
GLOSSAIRE
Accumulation du Capital : conversion du profit ou de la plus-value en capital.
Armée industrielle de réserve : ensemble de la population active se trouvant en situation de
chômage.
Avantage comparatif : un pays qui est moins efficace que les autres dans la production de
tous les biens sera moins inefficace dans la production d’au moins un bien.
Coût d’opportunité : Coût qui se présente lorsqu’une utilisation restreint les autres
utilisations possibles d’une ressource limitée. L’importance chiffrée d’un coût d’opportunité
correspond à la valeur d’une ressource dans le cas de son utilisation possible la plus
productive.
Destruction créatrice : phénomène qui marque la substitution des vieilles entreprises par de
nouvelles entreprises, causant la disparition des anciennes entreprises ou branches
(destruction) et l’apparition de nouveaux secteurs porteurs (création).
District industriel : Concentration d’un grand nombre de petites entreprises dans certaines
localités.
Dualisme sectoriel : Coexistence d’un secteur traditionnel (agricole) et d’un secteur moderne
(industriel).
Economie d’échelle : le fait d’une réduction des coûts moyens suite à une augmentation des
facteurs de production générant une augmentation de la production.
Entreprises industrielles : unités productives au sein d’une industrie, ayant pour fonction de
transformer les matières premières en produits manufacturés.
Externalité : bénéfices ou coûts qui ne sont pas reflétés dans le prix de marché mais qui
touchent des agents tiers sans que ces derniers payent ou reçoivent des dédommagements.
Industrialisation : processus caractérisé par le développement industriel d’un pays lié aux
nouvelles technologies et donnant naissance à des complémentarités entre activités
économiques.
Libre-échange : Système économique favorisant la libre-circulation d’un bien ou service.
Loi des débouchés : Loi avancée par J.B.Say qui stipule que l’offre ouvre des débouchés aux
produits. Comme les produits s’échangent contre d’autres produits, l’existence d’un produit
constitue un débouché pour d’autre(s) produit(s).
Plus-value : valeur créée par le travail de l’ouvrier salarié en sus de la valeur de sa « force de
travail » et appropriée gratuitement par le capitaliste.
SOMMAIRE
Introduction
Chapitre I : Industrialisation et développement dans l’histoire de la pensée économique
Section 1 : Industries et amélioration de bien-être
Section 2 : Vérifications empiriques du lien entre industrialisation et développement :
le cas malgache
Section 3 : L’industrialisation des pays du Sud : au détriment de la population
Chapitre II : Echanges internationaux et nouvelle division internationale du travail
Section 1 : Spécialisation et économies d’échelle comme fondements des échanges
internationaux
Section 2 : La nouvelle division internationale du travail et le développement des NPI
Chapitre III : Le libre-échange : moteur ou obstacle au développement des pays du Sud ?
Section1 : Principes fondateurs des politiques commerciales des pays en
développement
Section 2 : Les enjeux du libre-échange
Conclusion
Bibliographie
1
INTRODUCTION GENERALE
Le contexte de l’étude
Un demi-siècle après l’indépendance des pays colonisés, ces pays restent confrontés
au problème de développement. Les pays anciennement colonisés forment la majeure partie
des pays en développement (PED). Les inégalités entre les PED et les pays développés (PD)
persistent toujours. En 2007, l’indice de développement humain (IDH) dans les pays de
l’Organisation de Coopération et de Développement Economique (OCDE) atteint 0,932 alors
qu’il n’atteint que 0,514 en Afrique Subsaharienne (PNUD, 2007). L’espérance de vie à la
naissance s’élève à 51,5 ans en moyenne dans les pays moins avancés (PMA) et à 79 ans dans
les pays de l’OCDE (PNUD, 20007). Rostow (1962) explique le sous-développement comme
un retard de développement des PED. Le développement serait un phénomène inéluctable.
Cette idée sous-entend que le développement des pays pauvres doit passer par les étapes de
développement suivies par les pays industrialisés.
Néanmoins, avec le phénomène de mondialisation, un nouvel ordre économique
apparaît. Le monde ne se divise plus en deux (2) groupes de pays (PD et PED). La
mondialisation, avec l’ouverture des frontières, stimule le développement de quelques PED et
entraîne l’apparition des nouveaux pays industrialisés (NPI). En 2011, la part des NPI dans le
total des exportations de marchandises atteint environ 30,2% du total des exportations (OMC,
2012).
La Problématique
Avec la nouvelle division internationale du travail, l’industrialisation demeure-t-elle une étape incontournable pour le développement des PED conformément à la vision de Rostow (1962) ? Les PED sont handicapés par les problèmes d’infrastructures (insuffisance de routes, de ports, d’établissements scolaires…), de système de transport et de communication. La main-d’œuvre qualifiée reste insuffisante de même que le niveau de capital. Ces différents problèmes font obstacle aux stratégies d’industrialisation adoptées par les PED en général. Il s’avère nécessaire alors d’explorer d’autres voies pour se développer parmi lesquelles se trouve le commerce international. Sur le plan théorique, la nouvelle théorie du commerce international initiée par Krugman (1979) suggère une nouvelle interprétation des avantages comparatifs.
2
Chaque pays a intérêt à acheter chez les autres pays les produits qu’il ne peut produire à des coûts comparativement avantageux (Ricardo, 1817 ; Krugman, 1979). Sur le plan politique, la mondialisation redessine la division du travail des pays du Sud dans la production des matières premières. Ils doivent ainsi acheter les autres produits manufacturés dans les PD. De ce fait, l’étape de l’industrialisation comme le suggère Rostow (1962) ne serait plus indispensable pour les PED.
La méthodologie
Ce mémoire s’appuie essentiellement sur une revue de littérature. Le mémoire
comporte aussi quelques études empiriques. Les études empiriques sont effectuées à partir des
recherches sur internet. La consultation des sites de la banque mondiale, des rapports de
l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) et de la Conférence des Nations-Unies sur le
Commerce et le Développement (CNUCED) a fourni les données empiriques nécessaires. La
lecture d’ouvrages économiques et d’articles scientifiques suite aux visites de la bibliothèque
universitaire a permis d’établir une grille de lecture. La revue de littérature permet de situer le
débat théorique sur les contributions de l’industrialisation et du commerce international dans
le processus de développement. Le concept de division de travail et le modèle de
développement linéaire de Rostow (1962) défendent l’idée de la nécessité de
l’industrialisation. Le concept de division de travail avancé par Smith pose l’entreprise au
cœur du développement. L’entreprise permet l’accumulation de capital grâce à l’accumulation
des profits. Les capitaux permettent la mobilisation de travail. La division du travail accroît la
productivité des facteurs. L’accroissement de la productivité conduit à l’augmentation des
richesses. Par la suite, Rostow (1962) considère l’industrialisation comme une étape
nécessaire au développement d’un pays. Il définit un modèle de croissance à cinq (5) étapes
auquel un pays doit suivre pour se développer. La troisième étape du modèle appelée le
décollage ou « take-off » repose sur le développement industriel du pays. Par contre, la
nouvelle division internationale du travail (NDIT) et les nouvelles théories du commerce
international soutiennent l’échange international. Les PED peuvent s’approprier les produits
manufacturés avec la NDIT sans passer par l’industrialisation. Un pays peut gagner plus en
important qu’en produisant un bien dans la mesure où ce bien présente un désavantage
comparatif (Ricardo, 1813). La théorie des avantages comparatifs stipule qu’un pays gagne
aux échanges lorsqu’il se spécialise dans l’exportation d’un bien présentant un avantage
comparatif.
3
Les nouvelles théories du commerce international supposent qu’un pays bénéficie des
échanges lorsque ces derniers permettent de faire des économies d’échelle. Les échanges
offrent un marché plus vaste pour l’exportation d’un pays.
Le plan du mémoire
Le mémoire comporte trois (3) chapitres.
Le premier chapitre détermine les enjeux de l’industrialisation pour les pays du Sud.
Smith, Say, Rostow (1962) considèrent l’industrialisation comme la seule voie alternative de
sortir du sous-développement (section1). En effet, l’industrialisation permet d’améliorer le
niveau de vie de la population grâce aux créations d’emplois, au développement des secteurs
primaire et tertiaire, à la diffusion technologique… (section 2). Cependant, les pays du Sud ne
se développent pas grâce à l’industrialisation du fait que la croissance du secteur industriel
s’est faite au détriment de la population (section3). Ce fait renforce l’intérêt de l’échange
comme voie de développement.
Ainsi, le second chapitre défend l’idée que l’échange améliore le bien-être de la
population. Fondé sur les théories des avantages comparatifs et la nouvelle théorie du
commerce international, l’échange semble avantageux pour les pays échangistes (section1).
La NDIT et le développement des NPI tendent à estimer l’industrialisation comme n’étant
plus indispensable dans la mondialisation actuelle (section 2). Le commerce international
réussit aux NPI mais qu’en-est-il des PED ?
Le dernier chapitre a pour objet d’analyser la performance des pays du Sud dans le
domaine du commerce international. La première section analyse les principes fondateurs des
politiques commerciales des pays du Sud. La seconde section détermine les enjeux de la
libéralisation commerciale des pays du Sud.
4
Chapitre • : Industrialisation et développement dans l’histoire de la pensée économique
5
L’industrialisation désigne un processus caractérisé par le développement industriel
d’un pays (VOLKOV et al. ,1981).Les pays industrialisés sont généralement des pays à
revenu élevé (Etats-Unis, Japon, Canada…).Ces pays affichent un niveau de développement
élevé. Les Etats-Unis par exemple ont un IDH de 0,91, le Canada 0,908, la Norvège 0,943, le
Japon 0,901 en 2010 (PNUD, 2010). L’objet de ce chapitre consiste à analyser les enjeux de
l’industrialisation pour les PED.
Ce chapitre comporte trois sections. La première section porte sur le lien théorique
entre l’industrie et l’amélioration du bien-être de la population. La seconde section permet de
vérifier empiriquement ce lien entre industrialisation et développement. L’échec des stratégies
d’industrialisation des PED comme Madagascar remet en cause le modèle de croissance
linéaire de Rostow (1962) (section3).
Section 1 : Industries et amélioration de bien-être
1.1Conception classique de l’entreprise : une unité productive à l’origine de la
croissance économique industrielle
L’entreprise est une unité productive. L’entreprise grâce à une combinaison de
facteurs de production (capital et travail), transforme les matières premières pour produire des
biens manufacturés. Smith dans son analyse de l’entreprise, se focalise essentiellement sur
l’entrepreneur. L’entrepreneur a pour fonction principale l’accumulation du capital. Il
cherche à maximiser son profit. Le profit désigne une source de revenu pour l’entrepreneur.
Dans le cas où l’entrepreneur se différencie du capitaliste, le profit représente la part de
revenu attribuée au capitaliste. Néanmoins, une partie du profit est accumulée pour former un
nouveau capital et se joindre à l’ancien. L’accumulation du capital conditionne la division du
travail (Smith, 1776). Le capital accumulé sert à mobiliser le travail. La division du travail
entraîne une spécialisation au niveau des travailleurs. A force d’un travail spécifié et répété,
chaque ouvrier devient de plus en plus habile. La division du travail incite aussi l’invention de
machines permettant de faciliter et d’abréger le travail de l’ouvrier. Par conséquent,
l’entreprise profite d’un gain de temps. Ce dernier permet d’accroitre la productivité des
facteurs de production. Ainsi, la division du travail incite l’augmentation de la production.
Selon Smith, la division du travail présente le plus d’avantage dans l’industrie. En effet,
d’une part, l’industrie bénéficie plus des progrès technologiques.
6
D’autre part, les capitaux s’orientent, dans la majorité des cas, vers le secteur industriel. Smith
considère que la main invisible oriente les capitaux vers les secteurs à forte valeur ajoutée.
L’ouvrier grâce à sa force de travail ajoute de la valeur à la valeur des intrants. Les biens
manufacturés présentent donc une valeur plus élevée par rapport aux biens non transformés.
Par conséquent, l’entreprise industrielle participe à la création de richesse grâce à la division
du travail et l’accumulation du capital. Marx partage la vision de Smith sur l’augmentation de
la production grâce à l’accroissement de la productivité du travail. La recherche de la plus-
value par l’entrepreneur ou le capitaliste tend à augmenter le niveau d’investissement en
machine au sein de l’entreprise. La plus-value indique la valeur créée par le travail de
l’ouvrier salarié en sus de la valeur de sa force de travail et appropriée gratuitement par le
capitaliste (VOLKOV et al. ,1981). La force de travail des ouvriers et l’investissement en
machine permettent ainsi d’augmenter la productivité de l’entreprise. Cependant, Marx se
détourne de la vision de Smith sur le mode de production capitaliste à long terme. Marx prédit
l’apparition de crises de surproduction. La recherche de plus-value amène à une
surexploitation des ouvriers, d’une part et à une concentration croissante des entreprises
industrielles d’autre part. Le salaire des ouvriers n’augmente pas pour autant du fait de
l’accroissement du taux de chômage. En effet, les petites entreprises ne pouvant concurrencé
les grandes entreprises ou les entreprises en fusion se trouvent obligées de fermer leurs portes.
Un grand nombre de travailleurs en chômage intensifie l’armée industrielle de réserve.
L’armée industrielle de réserve désigne un excédent de main-d’œuvre c'est-à-dire une partie
de la population active se trouvant en situation de chômage. L’intensité de l’armée industrielle
de réserve permet de maintenir les salaires au niveau le plus bas. Malgré la hausse de la
production, la demande ne suit pas l’offre. Les ouvriers souffrent d’une sous-consommation à
cause de l’insuffisance de salaire d’où la surproduction. Say (1803) s’oppose largement à
cette idée de surproduction. La loi des débouchés avancée par Say suppose l’impossibilité
d’une surproduction. La production offre des débouchés aux produits en s’échangeant contre
d’autres produits (Say, 1803). Le revenu des agents économiques sert uniquement à acquérir
des biens. La monnaie ne constitue qu’un moyen d’échange. Il n’existe donc pas de
thésaurisation car l’épargne est destinée à financer l’investissement. L’existence d’un plus
grand nombre de producteurs et donc de production facilite les débouchés. Par conséquent,
l’offre globale ne peut pas excéder la demande globale. L’existence d’une surproduction
globale paraît alors impossible. Say partage l’idée de Smith sur le rôle de l’industrie. La
production s’avère nécessaire d’après la loi des débouchés. L’industrie crée de la valeur grâce
à la valeur additionnelle provenant de la transformation des matières premières.
7
Ainsi, l’industrie favorise l’accroissement de richesse. L’entreprise industrielle est
d’autant plus performante avec l’application des innovations et du progrès technique dans le
système de production.
1.2 Progrès techniques, économies d’échelle et croissance économique
Afin d’assurer un taux de croissance élevé, l’apparition de nouvelles entreprises ne
suffit pas. Les entreprises doivent être performantes. Pour cela, elles doivent innover et
acquérir de nouvelles technologies.
Sur le plan microéconomique, la nécessité pour une entreprise d’innover peut
s’expliquer à partir de deux grandes raisons. La première est qu’elles sont soumises à une
rivalité concurrentielle (Porter, 1980). Le phénomène de destruction créatrice désigne le
second motif de l’innovation des entreprises (Schumpeter, 1912).La rivalité ou intensité
concurrentielle représente l’une des 5 (+1) forces de Porter1. Cette rivalité peut se présenter
sous forme de concurrence de prix, de nouveaux produits, de services à la clientèle, de
garanties…La rivalité est d’autant plus intense que le nombre de concurrents est élevé. La
rivalité s’intensifie avec le coût de sortie d’une industrie. Plus les barrières de sortie s’avèrent
élevées, plus les entreprises concurrentes montrent une plus grande rivalité. La rivalité
s’affaiblit lorsque le coût de remplacement d’un produit est élevé et/ou le degré de
différenciation du produit est faible. Il appartient désormais à l’entreprise de devenir plus
compétitive en adoptant des choix stratégiques comme l’innovation. Schumpeter (1912)
définit cinq (5) types d’innovations :
• création d’un nouveau produit
• nouvelle méthode de fabrication
• innovation dans l’organisation
• conquête d’une nouvelle source d’approvisionnement
• innovation de marchés c’est-à-dire l’ouverture d’un nouveau débouché.
L’innovation désigne la mise en application d’une invention dans l’économie (Schumpeter,
1912). Elle permet au progrès technique d’intégrer le processus de production .Dans un
premier temps, l’innovation réussit à l’entreprise bénéficiaire. Cette réussite suscite des
imitateurs. Puis il y a diffusion progressive de l’innovation.
1 Les 5(+1) forces de Porter désignent l’intensité concurrentielle, le pouvoir de négociation des clients, le pouvoir de négociation des fournisseurs, la menace des nouveaux entrants, la menace des produits de substitution, les contraintes légales imposées par l’Etat : lois, règlements et normes.
8
Les entreprises bénéficiaires des innovations tendent à faire baisser leurs prix en vue d’être
plus compétitives. Cette décision pose des difficultés pour les autres entreprises moins
performantes. Les entreprises moins compétitives sont amenées à disparaitre. Des travailleurs
se trouvent alors en situation de chômage. Par contre, la performance des entreprises fondées
sur des innovations favorise l’apparition de nouvelles activités, de nouveaux secteurs
porteurs. Ainsi de nouveaux emplois sont créés. Schumpeter (1912) désigne cette substitution
des entreprises vieillies par de nouvelles entreprises fondées par des innovations, par « le
processus de destruction créatrice ».
Sur le plan macroéconomique, utilisant le progrès technique dans le système de
production, les entreprises favorisent l’augmentation du taux de croissance économique.
L’amélioration des techniques de production permet d’augmenter la rentabilité du capital
investi. Au lieu d’un rendement décroissant, le capital connait un rendement croissant grâce
au progrès technique. L’efficacité productive du capital entraîne l’accroissement de la
production.
Le progrès technique explique une grande partie de la croissance. Solow (1956)
désigne cette partie comme la part de croissance non expliquée ni par le capital ni par le
travail, appelée aussi résidu de Solow. Il considère le progrès technique comme facteur
exogène à la croissance économique. Par la suite, Romer (1990) avance l’idée
d’endogénéisation du progrès technique. L’investissement en capital humain permet
d’endogénéiser une partie du progrès technique. Le progrès technique améliore la productivité
du travailleur en rendant un travail non qualifié en travail qualifié. Les gains de productivité
des facteurs permettent ainsi aux entreprises de faire des économies d’échelle. Le coût de
production unitaire diminue au fur et à mesure que le niveau d’inputs augmente. Le progrès
technique, grâce aux gains de productivité favorise alors l’accroissement des richesses.
Toutefois, « il ne suffit pas d’introduire de nouvelles technologies pour obtenir des gains de
productivité. La capacité d’une économie à capter les gains de l’innovation dépend de la
dynamique des industries » (Gaffard, 2006, pp. 245-246). Cette dynamique industrielle
dépend des spécificités des technologies acquises par les industries et de leurs conditions
d’apprentissage.
Le secteur industriel tient donc un rôle prépondérant dans l’obtention des gains issus
du progrès technique. Rostow (1962) qualifie l’industrialisation comme une étape
incontournable au développement d’un pays.
9
1.3 Le modèle de développement linéaire de Rostow (1962)
Rostow (1962) explique le sous-développement des PED comme un retard de
développement. Le développement serait donc un phénomène inévitable. Rostow (1962)
suppose qu’il suffit de calquer le développement des pays européens du XVème siècle au
XVIIIème siècle. Ainsi les PED finiront top ou tard à se développer. Rostow (1962) définit
alors cinq (5) étapes auxquelles chaque pays doit suivre pour se développer :
1-une société traditionnelle
Au premier stade « des étapes de la croissance » se trouve une société traditionnelle.
C’est une société rurale et agricole. L’activité principale de la population est l’agriculture. Au
moins 75% de la population active sont des producteurs agricoles .La productivité demeure
très faible. Les revenus issus de la production sont destinés à des fins de consommation. Il n’y
a pas donc d’épargne.
2. Les conditions préalables au décollage ou pré-décollage.
Cette seconde étape se caractérise par des changements de mentalité et de méthode de
travail. D’après Rostow (1962), l’édifice traditionnel évolue sous l’impulsion extérieure. Les
progrès économiques proviennent généralement de l’étranger. Le commerce extérieur, les
transports ainsi que l’agriculture se développent grâce à l’instauration d’une structure
favorable au développement (infrastructure, système bancaire…). L’agriculture connait des
gains de productivité. La croissance des productions agricoles avec le développement des
transports et des moyens de communication favorisent la commercialisation des produits
primaires. Les agents économiques commencent à épargner.
3. Le décollage ou « take-off »
« Le décollage est la période pendant laquelle la société finit par renverser les
obstacles et les barrages qui s’opposaient à sa croissance régulière » (Rostow, 1962, p.18).
La phase de décollage se caractérise par :
• un taux d’investissement assez élevé : passant de moins de 5% à plus de 10% du
revenu national.
• l’apparition d’industries motrices susceptibles de diffuser des effets d’entraînement en
amont et en aval. La création de ces industries et la propagation des innovations
facilitent le phénomène d’industrialisation.
10
• l’instauration d’un système politique, social et institutionnel orienté vers le
développement.
Rostow (1962) situe le décollage de l’Angleterre vers les vingt dernières années du XVIIIème
siècle, celui de la France et des Etats-Unis durant la période de 1830 à 1860.
4. La marche vers la maturité
C’est une période de croissance soutenue. La production se diversifie. De nouveaux
secteurs dominants apparaissent dans l’industrie. Le taux d’investissement augmente jusqu’à
20% du revenu national.
5. L’ère de consommation de masse
A ce stade, l’objectif de la société est la consommation et le bien-être. La production
s’oriente de plus en plus vers les biens de consommation durable et les services. Le niveau de
vie de la population est élevé grâce à l’amélioration des revenus. Cette étape se distingue par
une consommation de masse axée sur les biens d’équipement, les loisirs…Les Etats cherchent
à augmenter le niveau de consommation, ainsi que leur puissance et leur influence à
l’étranger.
Le modèle de développement linéaire de Rostow (1962) suppose alors que
l’industrialisation via la phase de décollage, désigne un point de passage obligatoire pour le
développement d’un pays. Toutefois, le modèle de croissance de Rostow (1962) se heurte à
plusieurs critiques. D’après Kuznets (1972), le modèle n’explicite pas les modalités de
passage d’une étape à une autre. Les limites de chaque étape sont floues. De plus, le modèle
manque de données empiriques. Le modèle de croissance de Rostow (1962) ne demeure pas
l’unique voie de développement. Toutes les étapes ne sont pas obligatoires. Puis, le modèle ne
tient pas compte des spécificités de chaque pays. Le concept marshallien de district industriel
désigne une voie spécifique de développement (différente du modèle de Rostow (1962) tout
en admettant l’intérêt de l’industrialisation). « Le concept de district industriel désigne une
concentration d’un grand nombre de petites entreprises dans certaines localités » (Marshall,
1890, p. 459).
Au début, les activités économiques se concentrent sur un territoire présentant des avantages
comparatifs (ressources naturelles, système de transport et de communication…). Un grand
nombre d’entreprises de petite taille se concentre au sein de l’agglomération. L’existence de
ces entreprises donne lieu à des économies externes.
11
Une économie externe ou externalité désigne des bénéfices ou des coûts qui touchent des
agents économiques tiers sans qu’ils soient tenus de payer ou d’en recevoir un
dédommagement de telle manière que les coûts ou bénéfices ne sont pas reflétés dans les prix
du marché (Weber, 1997). Une externalité désigne une influence directe des actions d’un
agent économique sur les fonctions objectives des autres agents (fonction d’utilité, fonction
de production) (Meade, 1973). Les économies externes provenant du district industriel
apparaissent sous forme de diffusion technologique, de diffusion de l’apprentissage, d’accès à
des services spécialisés à moindre coût. Ces derniers entrainent une spécialisation et une
amélioration de la qualité de la main-d’œuvre. A ce niveau, la concentration des entreprises
ne dépend plus des avantages comparatifs mais plutôt des économies externes. Ces économies
externes incitent le développement des activités industrielles et commerciales auxiliaires. Le
développement de l’Italie à la fin des années 1970 et au début des années 1980 s’appuie
essentiellement sur le district industriel (Bagnasco, 1977). Afin de démontrer le lien entre
industrialisation et développement, qui jusqu’ici n’a été discuté que sur le plan théorique, des
vérifications empiriques s’avèrent nécessaires.
Section 2 : Vérifications empiriques du lien entre industrialisation et développement : le cas malgache
2 .1 Création d’emploi et amélioration des revenus
La main-d’œuvre représente un facteur déterminant du fonctionnement des entreprises
industrielles. En effet, l’offre d’emplois constitue un moyen pour satisfaire leurs besoins en
capital humain. En contrepartie, les travailleurs bénéficient des revenus ou salaires qui leurs
sont attribués. Donc, théoriquement, la création d’entreprises industrielles contribue à la
réduction du chômage. Les salaires perçus par les employés leur permettent d’augmenter leurs
pouvoirs d’achat (par rapport à une situation de chômage). Ensuite, les entreprises contribuent
à l’augmentation des recettes fiscales grâce aux impôts prélevés par l’Etat (impôts sur les
bénéfices, droits et taxes de douanes, redevance….).
Pour le cas de Madagascar, le tissu industriel est encore fragile. L’industrie malgache
n’emploie qu’environ 3,5% de la population active (INSTAT, 2005).
Cela s’explique par la prédominance du secteur primaire d’une part. Le secteur primaire
emploie environ 82% de la population active (INSTAT, 2005). D’autre part, les entreprises se
concentrent dans les grandes villes. 91% des entreprises franches (EF) par exemple se
trouvent dans la région d’Analamanga (INSTAT, 2007).
12
Toutefois, l’existence des EF avec l’expansion des industries extractives minières constituent
les pierres angulaires du tissu industriel malgache. Les EF comptent 120000 employés en
2007 soit 1/3 de la main-d’œuvre du secteur secondaire (INSTAT, 2007). La part des EF dans
le Produit Intérieur Brut (PIB) a largement évolué depuis les années 90. Si pendant la période
1991-1995, la part des EF dans le PIB s’évalue à 0.5%, la période 2006-2008 affiche un taux
de 5.4% (ODRES, 2009). Enfin, les EF tiennent une place importante dans le commerce
extérieur. La part des EF dans la valeur des exportations totales s’élève à 5.6% en 2005
(BCM, 2006). Quant aux industries extractives minières, ce secteur se remarque tout d’abord
par l’attractivité des investissements directs étrangers (IDE). L’IDE dans le secteur extractif
évolue de 47 milliards d’Ariary en 2005 (moins de 9% du stock total d’IDE) à près de 5800
milliards d’Ariary (75% du total des IDE en 2009) (Banque mondiale, 2011). Bien que le
nombre d’emploi créé au sein de l’industrie extractive ne soit pas très significatif par rapport
au nombre total d’emploi au niveau du pays, l’apparition des entreprises extractives (comme
QMM, Ambatovy, …) a son importance au niveau local. L’apparition de Rio Tinto/ QMM
(Qit Mineral Madagascar) par exemple permet à 1306 personnes en 2011 de se doter d’un
emploi dont 646 en sous-traitance (Rio Tinto/ QMM, 2011). Pour le cas d’Ambatovy, 18000
emplois sont créés en 2010 dont 6426 emplois d’expatriés pendant la phase de construction
(Ambatovy, 2010). Ambatovy prévoit de maintenir 2800 emplois permanents et 3500 emplois
de contractuels pendant la phase d’exploitation (Ambatovy, 2010). Au niveau des recettes
fiscales, une étude basée sur 122 sociétés minières ayant payé plus de 10 millions d’Ariary de
frais d’administration minière et 14 compagnies dans la recherche pétrolière permet de
constater que les recettes issues des industries extractives s’élèvent à 239.110.093 US $
(comme le montre le tableau suivant).
13
Tableau 1 : Répartition des recettes issues des industries extractives en 2010 en US$ à
Madagascar
Type de recette Montant en US $
Frais d’administration minière 7560970
Redevances (au profit de l’Etat et des administrations sectorielles) 461861
Impôts et taxes 18548281
Droits et taxes de douane 8588352
Sous-total 39.110.093
Droit WISCO 100.000.000
Total 139.110.093
Source : EITI Madagascar (2012)
Les 100 millions d’US $ versés par l’entreprise WISCO (Wuhan Iron and Steel Corporation)
désignent des recettes fiscales exceptionnelles à titre de mise à disposition du périmètre
minier de Soalala. Néanmoins, les recettes fiscales issues des industries extractives ne
constituent que 2.6% des recettes totales collectées par la direction générale des impôts
(Banque mondiale, 2011).
La contribution du secteur industriel au développement paraît donc faible à
Madagascar compte tenu du niveau des emplois et des recettes fiscales issues du secteur. La
contribution du secteur secondaire au PIB demeure la plus faible par rapport aux deux autres
secteurs (secteur primaire et secteur tertiaire). Sa part s’élève à 15.70% contre 34.30% pour le
secteur primaire et 50% pour le secteur tertiaire (INSTAT, 2006).Toutefois, l’existence
d’entreprises peut créer des emplois indirectement, pas forcément au niveau du secteur. Le
secteur industriel contribue au développement du secteur primaire et tertiaire.
2.2 Industries comme facteur d’urbanisation et de tertiarisation :
Le secteur primaire et le secteur secondaire sont étroitement liés. Le secteur primaire
offre les matières premières nécessaires à la production industrielle. « L’industrie ouvre à
l’agriculture des débouchés nouveaux et lui fournit les biens qui lui permettent d’accroître sa
productivité » (Albertini, 1967, p. 233). Souvent, les entreprises productrices de produits
manufacturés utilisent comme matières premières des produits agricoles. En contrepartie, les
industries fournissent au secteur agricole les matériels et équipements nécessaires à
l’amélioration de la productivité du secteur en question.
14
Le secteur industriel permet d’absorber le surplus de main-d’œuvre du secteur primaire
(Lewis, 1954). D’après le modèle de Lewis (1954), la société se caractérise par l’existence
d’un dualisme sectoriel. D’un côté, il y a le secteur traditionnel dominé par l’agriculture. De
l’autre côté se trouve le secteur moderne un secteur industriel appelé aussi secteur urbain. Le
secteur moderne et le secteur traditionnel se différencient par le mode d’organisation de la
production. Le secteur moderne se base sur l’utilisation du travail salarié par les capitalistes.
Le secteur moderne ou urbain se caractérise par une forte productivité. Le secteur traditionnel
quant à lui, repose sur l’organisation traditionnelle de production basée sur le travail familial
et non sur le travail salarié. Le secteur traditionnel se caractérise par une faible productivité.
Le modèle pose comme hypothèse l’existence d’un surplus de main d’œuvre dans le secteur
traditionnel. Ce surplus peut être transféré vers le secteur moderne sans ou à un coût de
déplacement très faible. La migration de la main-d’œuvre du secteur traditionnel vers le
secteur moderne n’induit pas alors une perte de production dans le secteur traditionnel. Le
secteur moderne offre un salaire élevé par rapport au secteur traditionnel motivant la
migration des paysans vers le secteur industriel. Le processus de transfert de capital humain
se poursuit jusqu’au point où le surplus de main d’œuvre du secteur traditionnel est absorbé
par le secteur moderne. Bien que le secteur moderne offre une opportunité pour la main-
d’œuvre du secteur traditionnel, tout le surplus de main-d’œuvre ne peut être absorbé. De
plus, la création d’emplois urbaine augmente le chômage urbain (Todaro, 1969). La décision
de migration dépend du calcul effectué par le migrant. Certes, le secteur industriel incite
l’exode rural (Todaro, 1969). Contrairement à la conception de Lewis (1954), la décision de
migration ne repose pas uniquement sur le niveau de salaire. Dans le modèle de Todaro
(1969), les migrants sont considérés comme rationnels. La décision de migration dépend du
« salaire espéré » par le migrant et son coût de migration (coût d’opportunité2, coût de
transport, coût psychologique…). Donc, malgré un taux de chômage urbain élevé, l’individu
décide d’immigrer vers le secteur moderne si ses gains (espérés) semblent plus élevés que ses
coûts.
La migration de la main-d’œuvre du secteur agricole vers le secteur industriel
s’intensifie avec l’apparition d’externalités positives créées par les entreprises. La plupart du
temps, les entreprises se situent dans les zones urbaines.
2 Les coûts d’opportunité désignent des coûts qui se présentent lorsqu’une utilisation restreint les autres utilisations possibles d’une ressource limitée. L’importance chiffrée d’un coût d’opportunité correspond à la valeur d’une ressource dans le cas de son utilisation possible la plus productive (CEMT/CS (97)12).
15
Cet emplacement est dû le plus souvent à l’accessibilité au réseau et au système de transport
développé. Cependant, il peut arriver que les entreprises se trouvent hors des villes et sont
soumises aux problèmes de communication et d’infrastructures. Certaines d’entre-elles
décident de créer de nouvelles infrastructures pour le développement même de l’entreprise. La
construction de nouvelles infrastructures (route, pont, port…) permet à la population de
bénéficier des avantages offerts tels que la faculté de migration, de commerce, …Ainsi, le
secteur industriel est source d’urbanisation. Il renforce la concentration des activités
économiques dans les villes. Cela amène dans un premier temps à la concentration de la
population dans la zone urbaine. Dans un second temps, le développement des infrastructures
mène à une déconcentration des activités économiques grâce au système de transport et de
communication développé.
L’industrie participe aussi au développement du secteur tertiaire. La croissance des
industries favorise la tertiarisation. La tertiarisation peut être assimilée à la croissance du
secteur tertiaire. Elle désigne une augmentation de la part du secteur tertiaire dans l’économie.
La tertiarisation est mesurée à travers la part du secteur tertiaire dans la production de
richesse (PIB) ou à travers l’emploi de la population active au niveau du secteur. Le
développement des industries nécessite une augmentation de la demande d’activités tertiaires.
Cette augmentation se traduit par une demande accrue du secteur secondaire en services
notamment en publicité, en formation du personnel... La hausse de la demande des services
est aussi due à l’externalisation des services. Il s’agit de sortir de l’entreprise, certaines
activités alourdissant les coûts de l’entreprise. De ce fait, l’entreprise va sous-traiter certaines
activités telles que le transport du personnel, la restauration…Pour le cas de Madagascar, la
création du port d’Ehoala illustre un exemple concret des avantages offerts par l’existence
d’entreprises industrielles. Rio Tinto QMM et l’Etat malgache ont financé la construction du
port d’Ehoala à hauteur respectivement de 240 millions de dollars US et de 35 millions de
dollars US. La création du port s’avère nécessaire pour QMM de telle manière que
l’exportation des minerais s’effectue par voie maritime. Le port comporte trois (3) quais. Rio
Tinto QMM utilise le quai principal environ une semaine par mois. Le reste du temps, tous les
quais sont utilisés pour l’exportation et l’importation des différents produits (agricoles,
miniers, produits de la mer…). L’existence du port favorise aussi le trafic associé au tourisme
de croisière.
L’industrialisation contribue alors au développement du secteur primaire et tertiaire.
16
Des PED tels que Madagascar, Cameroun,…se sont tournés vers la création d’entreprises
comme stratégie de développement. Toutefois, malgré leur effort d’industrialisation, ces PED
restent pauvres.
Section 3 : L’industrialisation des pays du Sud : au détriment de la population
Rostow (1962) impose l’industrialisation comme une étape nécessaire au
développement du PED. Le développement n’est qu’une question de temps. Cependant, les
stratégies d’industrialisation des PED n’aboutissent pas aux résultats escomptés.
3.1 Les problèmes d’industrialisation des pays en développement : « les éléphants blancs » et « les cathédrales dans le désert »
L’industrialisation requiert une forte intensité capitalistique. Elle demande un niveau
d’investissement important. Pour cela, le niveau d’épargne et/ou les capitaux étrangers
doivent être élevés. Pourtant, « dans un PED: le capital est rare car l’épargne est
insuffisante. La main d’œuvre est abondante. Les importations sont très fortes et le pays
connait une pénurie chronique de devises » (Albertini, 1967, p .234). Les causes de l’échec
d’industrialisation des PED s’expliquent en grande partie par le fait que ces pays sont
généralement des pays anciennement colonisés. L’économie des PED est dominée par
l’économie de traite : une stratégie coloniale de développement. L’économie de traite incite la
spécialisation de l’économie dans la production de matières premières et l’importation de
biens manufacturés en provenance de la métropole. Les entreprises industrielles existant sont
des propriétés coloniales. Les PED, surtout les pays africains, au lendemain de leurs
indépendances, tentent de se redresser en empruntant la voie de l’industrialisation… (Judet,
1980).
Pour le cas de Madagascar, la première République marque déjà un « début »
d’industrialisation. Des unités industrielles sont créées telles que les usines de textiles
COTONA et SOTEMA, la papeterie d’Ambohimanambola PAPMAD, les usines d’allumettes
de Moramanga…Ces entreprises demeurent des propriétés d’Etat et des étrangers. Le monde
rural n’en profite pas et reste pauvre. La paupérisation de la population, l’existence des
entreprises étrangères et coloniales (comme la Marseillaise) poussent la population à se
révolter et à réclamer une vraie indépendance. Cette manifestation aboutit au renversement du
pouvoir en place. Après une période de transition (1972-1975), le régime suivant (sous la
présidence de Didier Ratsiraka) se devait alors de décoloniser l’économie malgache.
17
Le régime se base alors sur un principe de malgachisation et une politique d’investissement à
outrance. Dès lors, l’Etat procède à la nationalisation des entreprises telles que :
• les entreprises de commercialisation (ROSO, SOMACODIS, SINPA …)
• les entreprises de transformation (GALLAND, Malaise…)
• les grandes entreprises comme EEM, Shell, Esso, GOROJ, AGIP, Marseillaise
de Madagascar.
La période 1977-1981 est marquée par des investissements à outrance. L’étude sur la
réalisation de ces investissements n’est pas élaborée de façon approfondie. Les usines créées
sont improductives. Parmi ces éléphants blancs figurent l’usine d’engrais chimique ZEREN,
l’usine mécanique TOLY, l’usine de café KAFEMA…La main mise de l’Etat sur l’économie
est un échec. La priorisation de l’entreprise au détriment de l’agriculture aboutit à une
récession économique. L’offre de crédit aux agricultures est restreinte. La production agricole
diminue. Les recettes d’exportation diminuent également. Le prix des produits agricoles
augmentent. La pénurie, l’inflation, la détérioration des termes de l’échange, avec l’arrivée du
second choc pétrolier, poussent l’Etat à s’endetter lourdement. Le déficit des transactions
courantes de la balance de paiement s’est élevé à 18% du PIB contre 6% en 1970. Le déficit
budgétaire a triplé de 1970 à 1980. L’inflation est passée de 6.8% en 1978 à 18% en 1980. Le
service de la dette qui était de 6% des recettes d’exportation en 1978 est passé à 52% en
1981 (Dinga-Dzongo, 1994).
Les stratégies d’industrialisation des PED ne leur permettent pas de se développer.
Cette situation remet en cause la vision de Rostow (1962). L’industrialisation ne mène pas
forcément au développement. La situation des PED diffère largement de celle des PD. Le
modèle de croissance de Rostow(1962) présente d’autres lacunes. Il ne tient pas compte du
développement durable. Même si l’industrialisation favorise le développement, l’existence
des entreprises industrielles nuit à l’environnement.
3.2 Menaces de l’industrialisation sur le capital naturel : pénurie des ressources et pollutions
Le capital naturel désigne la valeur des ressources naturelles utilisées dans la
production d’un bien. Selon Gillis et al. (1998), le capital naturel représente la valeur des
réserves des ressources naturelles d’un pays (ressources halieutiques, forêts, gisements
miniers, eau et cadre naturel…).
18
En général, les entreprises utilisent les ressources naturelles comme intrants dans la
production. Les entreprises industrielles usent d’une quantité importante de ressources
pouvant mener à une pénurie de ressources.
L’existence des entreprises industrielles nuit à l’environnement. Les industries
favorisent la pollution. Elles émettent des produits polluants (dioxyde de soufre et d’azote,
particules radioactives…) sous forme de gaz ou de particules fines et du gaz carbonique. Les
industries de transformation d’énergie et l’industrie manufacturière constituent les principaux
émetteurs de dioxyde de soufre à hauteur respective de 49% et de 34% (BDQA, 2010). Le
dioxyde de soufre est utilisé dans des procédés industriels. Le dioxyde de soufre est un gaz
qui se transforme en acide sulfurique. Ce gaz détériore la qualité de l’air. Il nuit à l’appareil
respiratoire. 2.4 millions de personnes3 meurent chaque année à cause des particules fines
présentes dans l’air. Le dioxyde de soufre ne demeure pas l’unique élément polluant l’air.
D’autres éléments comme le chrome, les hydrocarbures, les mercures utilisés par les
industries polluent aussi l’air ainsi que l’eau. 41tonnes de chrome4 polluent l’air chaque année
en France et 200000 tonnes d’hydrocarbures dispersées dans les airs retombent dans les
océans avec la pluie. 3,4millions de personnes5 en moyenne décèdent chaque année à cause de
la pollution aquatique. L’industrialisation des PED renforcerait la dégradation de
l’environnement. Des PED comme Madagascar, Gabon, Botswana, Ghana émettent une
quantité considérable de produits polluants détruisant la couche d’ozone chaque année. La
variation de l’émission de produits polluants détruisant la couche d’ozone atteint 132,4% à
Madagascar, 83,3% au Gabon, 66,7% en Botswana, 42,3% au Ghana en 2011 (DSNU, 2011).
L’apparition des entreprises crée donc des nuisances sur l’environnement et sur le
niveau de santé de la population. Etant donné les problèmes d’industrialisation dans les PED,
les PED ne devraient-ils pas reconsidérer ses atouts et se spécialiser dans le domaine où ils
sont le plus avantagés ?
Conclusion du premier chapitre
Ce chapitre avait pour objet de déterminer si l’industrialisation représente une solution
adéquate pour sortir les PED de la pauvreté.
3 Données à partir du site www.ecobase21.net consulté le 18/04/13 4 Données à partir du site www.ecobase21.net consulté le 18/04/13 5 Données à partir du site www.ecobase21.net consulté le 18/04/13
19
Rostow considère l’industrialisation comme une étape incontournable au développement.
Théoriquement, l’industrie favorise la croissance. Elle réduit le taux de chômage et améliore
le revenu des agents économiques. L’industrialisation contribue au développement du secteur
primaire et du secteur secondaire.
Cependant, les PED ne sont pas spécialistes en termes d’industrie. L’expérience de la
majorité des PED montre leur faiblesse dans le domaine de l’industrialisation. Le problème
d’industrialisation des PED nous mène à reconsidérer une autre voie de développement :
l’échange international. En effet, au lieu de s’aventurer dans un domaine dans lequel un pays
n’a ni expérience ni spécialisation, un pays doit, selon la théorie des avantages comparatifs, se
spécialiser dans le domaine où il a le plus d’avantage comparatif. Le commerce international
permettrait aux PED d’acquérir les produits manufacturés et à haute technologie sans passer
par l’industrialisation.
20
Chapitre II : Echanges internationaux et nouvelle division internationale du travail
21
L’échec de l’industrialisation de la majorité des PED conduit à considérer le
commerce international comme une autre voie de développement. Ce chapitre a pour objectif
d’expliquer comment l’échange peut améliorer le bien-être de la population.
Le chapitre comporte deux sections. La première section explique l’intérêt de
l’échange sur le plan théorique. La théorie des avantages comparatifs et les nouvelles théories
du commerce international en constituent les principaux outils d’analyse. La seconde section
analyse la performance des NPI sur le plan international.
Section 1 : Spécialisation et économies d’échelle comme fondements des échanges
internationaux
1.1 Théorie des avantages absolus, théorie des avantages comparatifs et théorie des
dotations factorielles
Depuis la théorie d’Adam Smith, plusieurs théories se succèdent et mettent en avant
l’intérêt du commerce international.
• La théorie des avantages absolus
Après en être attribué le mérite sur la division du travail, Adam Smith élargit ce
concept sur le plan international. Il introduit l’idée d’une division internationale du travail. La
division internationale du travail devient le fondement du libre-échange. La théorie des
avantages absolus d’Adam Smith stipule qu’un pays doit se spécialiser dans le domaine où il
est le producteur le plus efficace. En d’autre terme, un pays a intérêt à se spécialiser dans le
domaine dans lequel il peut produire à moindre coût. Cette spécialisation dicte le type de
production et d’exportation de biens favorable à chacun des pays. La production mondiale est
partagée selon la division internationale du travail en fonction de l’avantage absolu de chaque
pays. L’exemple suivant permet de mieux appréhender ce modèle d’avantage absolu. Prenons
deux pays A et B et deux produits a et b. En situation d’autarcie, le pays A produit 6 unités de
a et 1 unité de b en une heure de travail. Le pays B quant à lui produit 1 unité de a et 2 unités
de b en une heure de travail. Cela signifie que 6 unités de a s’échangent contre 1 unité de b
dans le pays A. Dans le pays B, 1 unité de a s’échange contre 2 unités de b. La production
mondiale par heure de travail s’élève à 7 unités de a et 3 unités de b en une heure chacune. Le
pays A est plus efficace dans la production de a et le pays B dans la production de b. A
possède donc un avantage absolu dans la production et B dans la production de b.
22
Si chaque pays se spécialise en fonction de l’avantage absolu alors A ne produit que le bien a
et B ne produit que le bien b.
Après spécialisation, le pays A peut produire 12 unités de a sans produire le bien b. Le pays B
quant à lui peut produire 4 unités de b sans produire le bien a. La production totale de bien a
s’élève alors à 12 unités et du bien b à 4 unités. L’échange permet alors d’acquérir les biens
que le pays ne produit pas. Supposons que 6 unités de a s’échangent contre 2 unités de b. Au
lieu d’une unité de b, le pays A bénéficie d’une unité supplémentaire de a grâce à l’échange.
Le pays B par contre bénéficie de 5 unités supplémentaires de a grâce à l’échange.
Ainsi la division internationale du travail basée sur l’avantage absolu génère
l’augmentation de la production mondiale et l’amélioration du bien-être. Toutefois, la théorie
des avantages absolus atteint sa limite lorsqu’un pays n’a pas d’avantage absolu. Il se peut
aussi qu’il existe des pays ayant des avantages absolus sur tous les produits. Les limites de la
théorie de Smith conduit Ricardo à sa théorie de l’avantage comparatif.
• La théorie des avantages comparatifs ou coûts comparatifs
Selon Ricardo, le fait qu’un pays soit en désavantage absolu pour tous les produits par
rapport à un pays n’influence pas ses gains tirés de l’échange. Le pays a intérêt à s’ouvrir au
commerce international en se spécialisant dans les produits où son désavantage est le plus
faible. Ainsi, un pays doit se spécialiser dans le secteur où il a un avantage comparatif. Dans
le modèle des avantages comparatifs, le travail demeure le seul facteur de production. Les
différences entre les pays (différences de productivité) conduisent au commerce international.
Dans son ouvrage « Principe de l’économie politique et de l’emploi »(1817), Ricardo prend
l’exemple de deux pays le Portugal et l’Angleterre produisant deux biens le vin et le drap. Le
tableau ci-après représente la quantité de travail nécessaire pour la production de 100 litres de
vin et 100 mètres de draps pour chacun des deux pays.
Portugal Angleterre Vin (100 l) 8 0 heures de travail 120 heures de travail Draps (100 m) 90 heures de travail 100 heures de travail Total 170 heures 220 heures
Dans la théorie des avantages absolus, il n’y aurait pas d’échange car le Portugal a un
avantage absolu pour les deux produits.
La spécialisation de chaque pays est déterminée selon le rapport de coût. Un pays
possède un avantage comparatif dans le produit présentant le rapport de coût le plus faible. Le
tableau ci-dessous donne les résultats des rapports de coût.
23
Coût Portugal/Coût Angleterre Coût Angleterre/Coût Portugal
Vin 80/120=0.66 120/80=1.33
Drap 90/100=0.9 100/90=1.13
Compte tenu de ces résultats, le Portugal doit se spécialiser dans la production de vin
et l’Angleterre dans la production de draps. Le tableau suivant montre la quantité de travail
nécessaire à un niveau de production de chaque produit s’il existe une spécialisation.
Portugal Angleterre
Vin (200 l) 160 heures 0 heures
Draps (200 m) 0 heures 200 heures
Total 160 heures 200 heures
Le tableau de consommation après échange se présente comme suit :
Portugal Angleterre
Vin 100 litres 100 litres
Draps 100 mètres 100 mètres
Quantité de travail utilisé 160 heures 200 heures
L’échange fondé sur la théorie des coûts comparatifs permet de bénéficier des gains en
termes d’heure de travail. Les deux pays peuvent garder leur niveau de consommation en
travaillant moins ou augmenter la production grâce au supplément d’heure de travail. Par
conséquent, « l’échange est profitable pour chaque pays…. Il n’y a donc aucune exigence que
le pays soit compétitif ou que l’échange soit équitable…. D’abord un pays gagne aux
échanges même s’il a une productivité plus faible que le pays partenaire dans toutes les
industries. Ensuite, le commerce est profitable même si les industries étrangères doivent leur
compétitivité uniquement à des bas salaires. Troisièmement, le commerce est profitable même
si les exportations d’un pays incorporent plus de travail que ses importations ». (Krugman et
Obstfeld, 2001, p.36).
Les différences de productivité entre les pays donnent lieu au commerce international
et à des gains de l’échange. La théorie des avantages comparatifs ne considère qu’un seul
facteur de production : le travail. Selon ce modèle, l’avantage comparatif ne proviendrait que
de la différence dans la productivité du travail.
24
La théorie d’Heckscher-Ohlin-Samuelson (HOS) donne une vue plus réaliste des échanges.
Elle prend en compte d’autres facteurs de production comme la terre, le capital, les ressources
naturelles.
• La théorie des dotations factorielles ou loi des proportions des facteurs
La théorie des dotations factorielles ou théorème de Heckscher-Ohlin-Samuelson
(HOS) est une extension de la théorie des avantages comparatifs. Au lieu de considérer
exclusivement le facteur travail, le théorème HOS raisonne en terme de dotation en facteur
(capital, travail, ressources naturelles). Les différences entre les pays ne se situent pas au
niveau de la différence de productivité mais plutôt au niveau de l’intensité des facteurs. La
théorie des dotations factorielles est avancée par Hecksher et Ohlin en 1933 et complétée par
Samuelson en 1941. Le théorie d’Hecksher-Ohlin stipule que chaque pays a intérêt à se
spécialiser dans la production et l’exportation de biens incorporant le facteur de production
abondant et importer par conséquent les marchandises pour lesquels le facteur de production
est rare. Ainsi, « l’échange international correspond à un échange de facteurs abondants
contre de facteurs rares » (Nême, 1991, p.75). Samuelson complète le théorème avec la
tendance à l’égalisation des rémunérations des facteurs. Au fur et à mesure de l’échange, le
pays utilise de plus en plus le facteur abondant relatif au produit destiné à l’exportation. Ce
facteur abondant devient plus cher. Par contre, l’importation de bien incorporant le facteur
rare entraîne la diminution de la demande de ce facteur. Ce facteur rare devient moins rare.
Ainsi, l’exportation permet d’augmenter le prix du facteur en abondance et le rend
relativement rare. L’importation rend les facteurs rares relativement moins rares.
L’échange international entraine donc une diminution des différences de rémunération
de facteurs. Par conséquent, le commerce international tend vers l’uniformisation entre les
pays. Néanmoins, les différences de ressources n’expliquent pas à elles seules la structure des
échanges. Des théories plus récentes comme les nouvelles théories du commerce international
se rapprochent plus de la réalité.
1.2 Les nouvelles théories du commerce international
Les théories traditionnelles du commerce international se limitent au fait que ce sont
des théories statiques. Elles omettent l’évolution des facteurs de production au cours du
temps. La théorie du cycle de vie de produit de Vernon et les nouvelles théories du commerce
international initiées par Krugman (1979) donnent une analyse plus dynamique des échanges.
25
• La théorie du cycle de vie du produit de Vernon
Les avantages comparatifs d’un pays varient au cours du temps. La dotation factorielle
d’un pays évolue en fonction de son degré de développement.
La théorie du cycle de produit montre le lien entre l’évolution des caractéristiques des
produits et le commerce international. Au départ, de nouveaux biens sont créés par les pays
riches. La production est consommée localement. L’accroissement de la demande locale
stimule la production jusqu’à entrainer un surplus de production. Cet excédent favorise à son
tour les exportations. A la seconde phase, le produit devient un produit standardisé. En effet,
la production se fait à grande échelle. Les entreprises locales commencent à délocaliser leur
fabrication à l’étranger. Ce dernier exporte son surplus de production vers les PED. Au final,
le produit devient un produit ancien. La production s’effectue dans les PED moins
industrialisés. La théorie du cycle de produit se vérifie à travers l’analyse de Vernon (1986)
des différentes phases du cycle des produits des Etats-Unis. Le schéma ci-dessous permet
d’illustrer cette analyse.
Schéma : Cycle de vie du produit de Vernon
1. phase de lancement : le produit est réservé au marché national américain
2. phase de croissance : le produit s’exporte vers les pays partenaires
3. phase de maturité : la production est délocalisée en Europe afin de diminuer le coût de
production
4. phase de déclin : la production est délocalisée vers les pays en voie de développement. Source : Vernon, 1986
26
Nous pouvons en déduire de la théorie de Vernon que les échanges semblent
favorables au PED grâce à la diffusion progressive de la technologie. Cependant la diffusion
technologique vers les PED n’est pas aussi évidente.
• Echanges internationaux et économie d’échelle
Il y a économie d’échelle lorsque les rendements des facteurs de production s’avèrent
croissants. En d’autre terme, au fur et à mesure que la production augmente, la productivité
marginale des facteurs s’accroit et le coût unitaire diminue. Les échanges internationaux sont
favorables dans la mesure où ils permettent de faire des économies d’échelle. Si chaque pays
ne produit qu’un nombre limité de biens et bénéficie d’économie d’échelle en ne produisant
pas les autres biens alors il doit s’ouvrir au commerce international. Ainsi, les échanges
servent à acquérir les biens non produits par le pays. Prenons l’exemple de deux pays C et D
et de deux produits c et d. Supposons qu’avec la même quantité d’inputs, les deux pays
produisent les quantités de biens c et d soit 5 unités de c et 5 unités de d chacun. La
production mondiale s’élève à 10 unités de c et 10 unités de d. Si C abandonne la production
de d et utilise les quantités d’inputs destinés à la fabrication de d pour augmenter la
production de c alors la production de c s’élève à 15 unités. Si D abandonne la production de
c au profit de d alors la production de d s’élève à 15 unités. Dans ce cas, les deux pays
peuvent faire des économies d’échelle en se réservant sur la production d’un bien. La
production mondiale des deux biens s’accroit éventuellement. Par conséquent, l’échange
international favorise l’économie d’échelle et l’existence d’un marché plus grand.
• Echanges internationaux et concurrence monopolistique
Le modèle de concurrence monopolistique part du relâchement de l’hypothèse de
concurrence parfaite. L’hypothèse de l’homogénéité des produits est rejetée. Les producteurs
différencient leurs produits en vue d’influer les choix des consommateurs. Les produits ne
sont donc plus homogènes mais restent substituables. La différenciation des produits peut
porter sur la qualité du produit, sur les innovations, sur la publicité… L’objectif de chaque
entreprise est de se rapprocher d’une situation de monopole. Le modèle de concurrence
monopolistique est initié par Edward Hastings Chamberlin (1933). Il a été popularisé par
Avinash Dixit et Joseph Stiglitz (1977) puis repris par Paul Krugman (1979). Le modèle de
concurrence monopolistique repose sur l’hypothèse que chaque firme se comporte en
monopoleur.
27
Néanmoins, malgré la situation de monopole d’une entreprise, la possibilité qu’une firme
puisse entrer dans le secteur en question pousse le monopoleur à se conduire en situation de
concurrence. L’augmentation du nombre de firmes au sein d’une industrie favorise la
concurrence et entraîne une diminution de prix. L’industrie attire de nouvelles firmes tant que
le prix excède le coût moyen.
Dans le cas contraire, les entreprises les plus faibles sortiront de l’industrie. « Le nombre
d’entreprises dans une industrie à concurrence monopolistique et le prix qu’elles demandent
sont affectés par la dimension du marché ». (Krugman et Obstfeld, 2001, p.151). Selon
Krugman et Obstfeld (2001), la dimension du marché est influencée par l’échange
international. L’application du modèle de concurrence monopolistique au commerce
international se base sur le lien entre l’échange et la dimension du marché. Pour un pays
caractérisé par des économies d’échelle, l’échange international donne une dimension plus
grande du marché. Cette dernière incite les entreprises à produire plus et par conséquent le
coût moyen diminue. Cette diminution génère l’accroissement des nombres de firmes au sein
de l’industrie et entraîne donc une plus grande variété de biens ainsi qu’une baisse de
prix. « En conséquence, le commerce international offre l’occasion de gains mutuels, même si
les pays ne différent pas par leur ressource ou technologie » (Krugman et Obstfeld, 2001,
p.150).
Compte tenu de toutes les théories des échanges internationaux évoquées ci-dessus, le
commerce mondial paraît donc favorable. Le développement des NPI renforce ces théories.
Section 2 : La nouvelle division internationale de travail et le développement des
nouveaux pays industrialisés
2.1 La nouvelle division internationale du travail
Les caractéristiques des échanges internationaux évoluent au cours du temps. La
division internationale du travail traditionnelle (DITT) caractérise les débuts du commerce
entre PD et PED. Conformément aux théories traditionnelles des échanges, le commerce
international s’effectue suivant les spécialisations des pays échangistes. Les PD (pays du
Nord) produisent et exportent des produits manufacturés contre des produits primaires
provenant des PED (pays du Sud en général). Les échanges Nord-Sud renforcent le
développement des PD et favorisent le développement de quelques PED. « Les PED
bénéficient des efforts de Recherche-Développement des pays industrialisés. Ceux-ci diffusent
le savoir à travers les biens exportés vers les PED, d’où un effet externe favorable.
28
Ainsi, un pays peut combler son retard de développement en acquérant la technologie
existante » (Basdevant, 2002, p.176). Les PED bénéficient donc des transferts de technologie
grâce au commerce international. L’émergence de ces PED modifie peu à peu la structure des
échanges. En effet, l’apparition de nouveaux pays industrialisés (NPI) donne naissance à une
nouvelle division internationale du travail (NDIT).
Les pays du Nord exportent les produits à haute technologie et les services. Les NPI
deviennent des exportateurs de produits manufacturés. Les pays du Sud exportent les biens
primaires. La NDIT représente donc un moyen pour les PED d’acquérir les produits
manufacturés et à haute technologie sans passer par l’industrialisation. Le progrès de la
technologie et la communication joue aussi un rôle dans la structure des échanges.
Auparavant, il était question d’échanges interbranches. Les produits manufacturés
s’échangent contre des produits primaires. A l’heure actuelle, les échanges intra-branche se
développent d’où le terme décomposition internationale du processus productif (DIPP). Les
composants d’un produit sont fabriqués de façon autonome dans différents pays. Ensuite, ils
sont exportés et réunis en un seul endroit afin d’être assemblés pour donner naissance au
produit en question. La libéralisation des échanges (avec la diminution des droits de douane et
des frais de transport) et la Recherche-Développement effectuée par les entreprises facilitent
la DIPP.
La DIPP et la NDIT renforcent donc l’intérêt des échanges internationaux. La
politique d’ouverture au commerce mondial favorise le développement des NPI.
2.2 Le développement des nouveaux pays industrialisés : une réalité
Les NPI désignent un groupe de pays, intermédiaire entre ceux dits « pays
industrialisés » ou PD et les PED. Les NPI sont des anciens PED, qui par leur stratégies de
développement, réussissent à s’intégrer plus ou moins dans le monde des PD.
L’industrialisation rapide accompagnée d’une politique de croissance tournée vers l’extérieur
favorise le développement des NPI. Les quatre (4) dragons (Corée du Sud, Taiwan, Hong-
Kong et Singapour) figurent parmi les premières NPI. Viennent ensuite d’autres groupes de
pays tels que les Tigres (Malaisie, Philippines…), les Jaguars (Brésil, Mexique, Argentine,
Chili…) … La réussite des stratégies de développement des NPI se fait grâce à l’accès des
NPI à la compétitivité internationale. Ces trente dernières années sont marquées par une forte
croissance des exportations pour les NPI.
29
Comme le montre le tableau 2, le taux de croissance des exportations des NPI est à 2 chiffres
en moyenne pour la période 1990-2000. La période 1990-2007 montre aussi un taux de
croissance assez important.
Tableau 2 : Croissance des exportations et des importations de marchandises des NPI en millions US$
Exportation Importation
Taux de croissance annuel
moyenne en % Taux de croissance annuel
moyenne en %
Pays Marchandises (M$
US) en 2007 1990-2000 2000-2007
Marchandises (M$ US) en 2007
1990-2000 2000-2007
Singapour 299272 11.7 13.4 263155 8.3 8.9
Hong-Kong 349386 8.4 9.6 370132 8.9 8.8
République de Corée
371489 15.8 13.6 356846 10.0 8.3
Argentine 55933 8.4 7.2 44780 17.7 11.0
Brésil 160649 5.1 11.1 126581 16.7 6.0
Malaisie 176211 13.5 7.4 146982 10.6 7.2
Mexique 271990 15.5 4.1 296275 13.2 4.8
Turque 107215 10.7 13.6 170057 11.1 12.1
Thaïlande 153103 9.6 9.1 140795 2.6 10.1
Taiwan 246377 3.1 7.9 219649 4.8 4.2
Indonésie 118014 9.1 1.9 92381 - 10.5
Chine 1217776 13.8 26.2 955950 12.8 18.8
Inde 145325 6.9 12.4 216622 9.0 17.6
Philippines 50466 16.0 4.6 57985 11.3 4.3
Pour comparaison
Pays à revenu élevé
9784163 - - 10242758 - -
Japon 712769 2.6 4.8 621091 5.3 3.5
Etats-Unis 1162479 6.6 4.4 2020403 9.1 5.2
France 553398 8.4 4.8 616229 6.6 6.3
Union européenne 27 4158254 - - 4068352 - -
Canada 418974 9.1 1.1 389600 9.0 4.6
Pays à faible revenu
230764 - - 257014 - -
Source : Banque Mondiale (2009)
30
La première colonne montre une liste des NPI. A titre comparatif, des pays à revenu
élevé (Japon, Etats-Unis, France…) et des pays à faible revenu ont été retenus.
La deuxième colonne désigne la valeur des exportations des marchandises en millions d’US$
en 2007. La troisième et quatrième colonne désignent le taux de croissance annuel moyen des
exportations respectivement pour la période 1990-2000 et 2000-2007. La cinquième colonne
montre la valeur des importations des marchandises en millions d’US $. La sixième et
septième colonne désignent le taux de croissance annuel moyen des importations
respectivement pour la période 1990-2000 et 2000-2007. Chaque ligne indique alors pour
chaque pays retenu les valeurs des exportations et des importations en 2007 et le taux de
croissance annuel pour les périodes 1990-2000 et 2000-2007. Nous pouvons tirer du tableau
que les exportations et les importations des NPI ne cessent d’évoluer depuis 1990. Le taux de
croissance annuel des exportations et des importations demeure en effet positif durant la
période 1990-2007. La valeur des exportations des NPI est inférieure à celle des pays à revenu
élevé en 2007 (6066206 millions d’US$ contre 9784163 millions d’US$). Toutefois, les NPI
affichent un taux de croissance annuel moyen plus élevé que les pays à revenu élevé. Les
exportations des NPI dépassent largement celles des pays à faible revenu (6066206 millions
d’US$ contre 230764 millions d’US$) de même que les importations (3405990 millions
d’US$ contre 257014 millions d’US). Ainsi, le commerce des NPI donne un résultat positif
(croissance des exportations, niveau des importations supérieur à celui des importations…).
La progression des exportations des NPI ne demeure pas sans conséquences. La
période 2000-2007 indique un taux de croissance important pour les NPI et même plus élevé
que celui des PD. Le taux de croissance annuel moyen du PIB des NPI durant la période
2000-2007 s’articule autour des 5%. Par exemple, Singapour a un taux de croissance de 5,8%,
Hong-Kong 5,2%, République de Corée 4,7%, Thaïlande 5,3% (Banque mondiale, 2009). Les
PD quant à eux ont un taux de 2,4% en moyenne (Banque mondiale, 2009). Les Etats-Unis
ont un taux de croissance annuel moyen de 2,6% durant cette période, le Japon 1,7%, la
France 1,8% (Banque mondiale, 2009).La croissance des NPI permet d’améliorer le niveau
de vie de la population dans ces pays. Le niveau de santé de la population s’améliore en se
référant au niveau de l’espérance de vie (80 ans pour le Singapour, 71 ans pour l’Indonésie,
79 ans pour la République de Corée…) (Banque mondiale, 2009).
31
Conclusion du second chapitre
L’intérêt de ce second chapitre est de mettre en évidence les raisons pour lesquelles un
pays s’ouvre au commerce international. Un pays décide d’échanger des biens contre d’autres
s’il lui est possible de gagner plus en échangeant que de rester isolé.
Les différences entre les pays ouvrent la possibilité d’échanges internationaux mutuellement
avantageux, selon la théorie des avantages comparatifs. La nouvelle théorie du commerce
affirme l’importance des économies d’échelle et des bénéfices tirés de l’échange. Le
développement d’un pays via l’échange international est donc possible et le cas des NPI
vérifie cette hypothèse.
L’industrialisation par promotion des exportations bouleverse la situation des NPI et
les propulse vers le chemin du développement. D’ailleurs, l’échange permet à quelques pays
des NPI (Hong-Kong, Corée du sud,…) d’intégrer le groupe des pays développés. Cependant,
si l’échange conduit au développement des NPI, qu’en-est-il des PED ?
32
Chapitre III : Le libre échange : moteur ou obstacle au développement des pays du Sud ?
33
L’échange international constitue un facteur important de la réussite économique de la
plupart des pays d’Asie (Hong-Kong, Singapour…) et de quelques pays d’Amérique Latine
(Mexique, Brésil…). Pour le cas des pays du Sud notamment les pays Africains, l’insertion
dans le commerce international est stimulée par l’adoption de politiques libérales depuis les
années 80. Ce dernier chapitre a pour objet de déterminer les enjeux du commerce
international pour les PED.
Deux (2) sections composent le chapitre. La première donne une analyse des principes
fondateurs des politiques commerciales des pays du Sud. La seconde section détermine les
enjeux du libre-échange.
Section 1 : Principes fondateurs des politiques commerciales des pays en développement
1.1 Le libre-échange et l’insertion des pays du Sud au commerce international
Le libre-échange désigne un système économique favorisant la libre circulation des
biens et services. Théoriquement, plusieurs moyens permettent de favoriser le libre-échange.
Il y a d’une part, la suppression des barrières douanières (tarifs, droit de douane…). D’autre
part, les accords internationaux notamment les accords bilatéraux, la création d’une zone de
libre-échange, les accords multilatéraux facilitent libéralisation des échanges. Ainsi, les PED
devaient supprimer tout obstacle constituant un frein à l’expansion des échanges.
L’adoption des politiques fiscales orientées vers le maniement des barrières douanières
et la multiplication des accords de libre-échange (ALE) constituent les principaux instruments
de facilitation du commerce dans les PED. Les barrières douanières désignent les taxes
imposées sur les produits importés dans un pays. L’existence de ces taxes entraîne une
augmentation des prix des produits importés. Sur le plan polit ique, l’accroissement des
barrières douanières constitue un moyen de protéger les entreprises nationales contre la
concurrence étrangère. Elles constituent aussi une source de revenus pour l’Etat. Les PED
utilisent alors l’abaissement des tarifs douaniers afin de promouvoir les importations de
produits manufacturés. La réduction des droits de douane appliqués aux produits
manufacturés est passée de 30% vers le début des années 80 à moins de 10% en 2007
(Banque mondiale, 2007). Cette diminution entraîne des gains pour les consommateurs suite à
la diminution des prix des produits importés. Elle favorise aussi l’entrée massive des
investisseurs étrangers surtout les investissements directs étrangers (IDE). Ces IDE peuvent
prendre plusieurs formes. La plupart des cas, dans les PED, les IDE s’orientent vers les EF.
34
A Madagascar par exemple, le nombre d’entreprises franches augmente de 53% de 2002 à
2006 (BIT-République de Madagascar, 2007).
L’adhésion des pays du Sud dans les communautés régionales telles que la
Commission de l’Océan Indien (COI), le Marché Commun de l’Afrique de l’Est et de
l’Afrique Australe (COMESA), la Communauté de Développement de l’Afrique Australe
(SADC) facilite la promotion IDE et l’insertion internationale des PED. L’intégration
économique régionale permet aux pays membres de bénéficier d’un marché plus vaste. La
suppression des barrières douanières dans la zone de libre-échange (ZLE) permet aux pays
d’exporter avec plus de facilité et d’importer librement les produits à des prix intéressants. La
concurrence étrangère incite les producteurs nationaux à devenir plus compétitifs et plus
performants. D’ailleurs, l’utilisation des matières premières importées suite à la suppression
des taxes entraîne une diminution des coûts de production.
A un niveau plus étendu, l’adhésion des pays du Sud à l’OMC permet aux PED de
bénéficier de certaines dispositions comme d’une assistance technique ou encore
de « traitement spécial et différencié ». L’initiative « Aide pour le Commerce » lancée par
l’OMC à la conférence ministérielle de Hong-Kong en 2005 tend à renforcer la capacité des
PED. L’Aide pour le commerce représente un moyen pour faciliter les échanges des PED,
surtout des pays les moins avancés (PMA). L’objectif de cette aide est de surmonter toutes les
obstacles au commerce international des PED. L’OMC conclut dix (10) avantages de
l’accession d’un pays dans l’organisation :
1. Le système contribue à maintenir la paix
2. Le système permet de traiter les différends de façon constructive.
3. Un système fondé sur des règles et non sur les rapports de force rend à chacun la
vie plus facile.
4. La libération des échanges abaisse le coût de la vie.
5. Elle offre plus de choix aux consommateurs et élargit la gamme des qualités
proposées.
6. Le commerce accroît les revenus.
7. Le commerce stimule la croissance économique
8. Les principes fondamentaux rendent le système plus efficace sur le plan
économique et réduisent les coûts.
9. Le système met les gouvernements à l’abri des intérêts particuliers.
35
10. Le système encourage les bonnes pratiques de gouvernement.
Le libre-échangisme permet donc à un pays de faciliter son commerce international.
L’intérêt du pays dans le libre-échange ne se résume pas à ce fait. Théoriquement, le libre-
échange apporte d’autres avantages comme la diffusion technologique, la croissance et
l’emploi.
1.2 Etendue du marché, diffusion technologique et investissements directs étrangers
Théoriquement, l’échange permet à un pays d’accéder à un marché plus vaste. Le
libre-échange accroît les débouchés aux produits locaux. L’adhésion d’un pays aux
communautés régionales stimule la croissance économique. Les destinations des exportations
sont plus diversifiées. Cette diversification favorise la croissance des exportations et par
conséquent la croissance économique. Le commerce international permet donc de surmonter
l’étroitesse du marché. La suppression des barrières tarifaires améliore la qualité et la quantité
des produits nationaux. La suppression ou la diminution des barrières douanières stimule les
importations. En effet, les producteurs étrangers voient leurs coûts diminuer suite à cette
mesure. Ils sont donc plus incités à introduire leurs produits sur le marché national. La
présence des produits importés oblige les producteurs nationaux à être plus performants. Les
produits importés renforcent la compétitivité des producteurs. La concurrence entre les
entreprises nationales et étrangères ne porte pas uniquement sur la productivité des facteurs de
production et sur les prix. La concurrence concerne également la qualité des produits. Les
entreprises attirent la clientèle en offrant des produits différenciés. Les produits sur le marché
ne sont donc pas homogènes. L’amélioration de la qualité des produits n’est pas due
uniquement aux importations. L’exportation exige un niveau de qualité de produit requis. Ce
niveau de qualité est déterminé par les barrières non tarifaires. Les produits exportés doivent
répondre aux normes requises.
Toujours sur le plan théorique, le commerce international favorise le développement
industriel d’un pays. Le libre-échange favorise l’entrée massive des IDE. L’entrée des IDE
s’accompagne de l’apparition de nouvelles entreprises. L’implantation de ces nouvelles unités
de production dépend avant tout des coûts de facteurs de production. La taille du marché et
les politiques d’attractivité du pays influent aussi sur les flux d’IDE. Plus les coûts des
facteurs de production sont moindres, nombreuses sont les entreprises étrangères
nouvellement créées. Le plus souvent, ces entreprises produisent des biens destinés à être
exportés. Les IDE renforcent donc l’exportation du pays.
36
L’apparition des nouvelles entreprises crée des emplois pour la population locale. Le nombre
d’empois offerts semble plus élevé d’autant plus que le coût de travail est faible. Les
entreprises à forte intensité de main-d’œuvre permettent à un plus grand nombre de personnes
de se doter d’un emploi. Néanmoins, les unités de production nouvellement créées peuvent
s’agir d’entreprises à forte intensité capitalistique. Le transfert de technologie s’accentue avec
l’existence de ces entreprises et des produits importés. L’ouverture au commerce international
favorise la diffusion technologique (Romer, 1993 ; Grossman et Helpman, 1991). La diffusion
du progrès technique dépend de la capacité d’absorption de la technologie au niveau du pays.
Cette capacité se résume en l’aptitude d’apprentissage et d’imitation des savoirs
technologiques dans le processus de production. Ainsi, le commerce engendre des externalités
de connaissance (Fougeyrollas et al., 2005). Le commerce permet la diffusion du savoir grâce
au phénomène d’accumulation de connaissances technologiques. L’utilisation du progrès
technique améliore à sont tour la productivité des facteurs et par conséquent la croissance
(Solow, 1956 ; Romer, 1990).
D’après les hypothèses évoquées ultérieurement, le commerce international semble
bénéfique pour un pays. Toutefois, il s’avère nécessaire de vérifier empiriquement ce dire.
Section 2 : Les enjeux du libre-échange
L’évolution du commerce international permet de vérifier le lien entre l’échange et le
développement. Bien que le commerce soit un facteur de croissance, une répartition équitable
de la croissance n’est pas évidente.
2.1 Commerce extérieur : facteur de croissance
La croissance économique des pays du Sud s’accroît depuis les années 2000. Durant la
période 2004-2011, les PED affichent un taux de croissance annuel moyen de 6,33%
(CNUCED, 2012). Cette croissance est due en grande partie au commerce international.
En effet, la croissance des exportations des PED explique environ 40% de l’évolution du PIB
(ONU, 2008). L’évolution des exportations des PED durant la décennie 2000-2009 favorise
l’augmentation du taux de croissance dans ces pays. Depuis les années 2000, les PED
commencent à être plus performants dans le domaine de l’échange international.La part des
PED dans le commerce mondial passe de 1.21% à 2.09% durant la décennie 2000-2009
(OMC, 2010).
37
Cette croissance s’explique par l’augmentation de la valeur des exportations des PED. La
valeur des exportations des PED a largement évolué. Cette évolution résulte de
l’augmentation en volume des exportations des PED et de la hausse des prix de produits de
base. La croissance des exportations en volume provient de la hausse de la demande
extérieure suite à la libéralisation des échanges. Les droits de douanes moyens appliqués par
les PD aux produits agricoles, aux textiles, et aux vêtements en provenance des PED
connaissent une baisse considérable. En 2009, les droits de douanes appliqués aux produits
agricoles s’élèvent à 7,8% contre 10,5% en 1996 (ONU, 2011). Pour les textiles, les droits de
douanes passent de 7,3% (1996) à 5,1% (2009) et pour les vêtements, de 11,4% en 1996 à
8,1% en 2009 (ONU, 2011). L’évolution des exportations des PED s’explique aussi par
l’augmentation rapide du prix international des produits de base. Le tableau suivant montre
l’évolution des prix des produits primaires durant la période 2006-2012.
38
Tableau 3 : Prix mondiaux des produits primaires : 2006-2012 (variation en pourcentage par rapport à l’année précédente)
Produit/groupe 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2011-2012 par rapport
à 2003-2008
Ensemble des produits 30,2 13,0 24,0 -16,9 18,2 17,4 70,8
Ensemble des produits (en DTS) 30,5 8,6 19,5 -14,5 19,5 13,5 64,1
Ensemble des produits alimentaires
16,3 13,3 39,2 -8,5 7,4 17,8 77,9
Produits alimentaires et boissons tropicales
17,8 8,6 40,4 -5,4 5,6 16,5 77,7
Boissons tropicales 6,7 10,4 20,2 1,9 17,5 26,8 97,5
Café 7,1 12,5 15,4 -6,9 27,3 42,9 124,7
Cacao 3,5 22,6 32,2 11,9 8,5 -4,9 52,4
Thé 11,7 -12,3 27,2 16,5 -1,0 11,4 55,1
Produits alimentaires 19,0 8,5 42,5 -6,0 4,4 15,4 75,8
Sucre 49,4 -31,7 26,9 41,8 17,3 22,2 144,1
Viande bovine -2,4 1,9 2,6 -1,2 27,5 20,0 62,8
Maïs 24,4 38,2 34,0 -24,4 13,2 50,1 106,3
Blé 26,6 34,3 27,5 -31,4 3,3 35,1 48,3
Riz 5,5 9,5 110,7 -15,8 -11,5 5,9 61,8
Bananes 18,5 -0,9 24,6 0,7 3,7 10,8 61,5
Graines oléagineuses et huiles végétales
5,0 52,9 31,9 -28,4 22,7 27,2 78,9
Soja -2,2 43,0 36,1 -16,6 3,1 20,2 60,5
Matières brutes agricoles 13,3 12,0 20,5 -17,5 38,3 28,1 89,1
Cuirs et peaux 5,1 4,5 -11,3 -30,0 60,5 14,0 20,2
Coton 5,9 10,2 12,8 -12,2 65,3 47,5 120,9
Tabac 6,4 11,6 8,3 18,0 1,8 3,8 47,9
Caoutchouc 40,6 9,5 16,9 -27,0 90,3 32,0 154,0
Bois tropicaux -4,7 19,5 39,3 -20,6 1,8 13,8 32,4
Minéraux, minerais et métaux 60,3 12,8 6,2 -30,3 33,7 12,7 53,7
Aluminium 35,4 2,7 -2,5 -35,3 30,5 10,4 8,3
Phosphate 5,3 60,5 387,2 -64,8 1,1 50,3 92,3
Minerai de fer .. 77,4 26,8 -48,7 82,4 15,0 37,9
Étain 18,9 65,6 27,3 -26,7 50,4 28,0 139,4
Cuivre 82,7 5,9 -2,3 -26,3 47,0 17,1 78,1
Nickel 64,5 53,5 -43,3 -30,6 48,9 5,0 7,7
Plomb 32,0 100,2 -19,0 -17,7 25,0 11,8 65,8
Zinc 137,0 -1,0 -42,2 -11,7 30,5 1,5 10,0
Or 35,9 15,3 25,1 11,6 26,1 27,8 182,5
Pétrole brute 20,4 10,7 36,4 -36,3 28,0 31,4 80,5
Articles manufacturés 3,4 7,5 4,9 -5,6 1,9 8,4 ..
Source : CNUCED (2012)
39
Le tableau 3 montre les variations en pourcentage des prix mondiaux des produits primaires
depuis 2006. La première colonne représente les différentes catégories de produits primaires.
La deuxième jusqu’à la septième colonne indique la variation du prix des produits primaires
pour l’année en question par rapport à l’année précédente. La dernière colonne désigne la
variation du prix des produits primaires pour la période 2011-2012 par rapport à 2003-2008.
Chaque ligne correspond donc aux variations des prix pour un type de produit. Nous pouvons
en déduire du tableau que les prix des produits primaires ne cessent d’augmenter depuis 2006.
L’année 2009 représente une exception. La diminution des prix de produits primaires en 2009
s’explique par la crise de 2008-2009. Cependant, l’année 2010 connait une reprise. Le prix
des produits primaires continuent à augmenter jusqu’en 2012. Le prix des produits primaires a
largement évolué. En effet, la variation des prix de l’ensemble des produits primaires pour la
période 2011-2012 par rapport à 2003-2008 atteint 70.8% (CNUCED, 2012). L’évolution du
prix des produits de base varie selon le produit. Concernant les produits agricoles, la variation
des prix de ces produits est due aux conditions météorologiques et aux mauvaises récoltes
dans des pays comme l’Amérique du Sud et les Etats-Unis (CNUCED, 2012). Pour le pétrole,
les hausses du cours s’expliquent par les tensions géopolitiques en Asie. La hausse des prix
des produits primaires s’avère positive pour le commerce international des PED et par
conséquent pour leur croissance. La variation des prix des produits primaires influent sur le
volume des exportations et des importations des PED. Une hausse des prix correspond à une
augmentation des exportations et des importations dans ces pays. D’après le rapport du
CNUCED (2012), au niveau des exportations, le volume des exportations augmente de 3.2%
en 2008 et diminue de 9.7% en 2009. Le volume des exportations s’accroît de 15.4% en 2010
et de 7% en 2011. Au niveau des importations, le volume des importations diminue de 28.6%
en 2009 et augmente de 15.5% en 2010 et de 17% en 2011. (CNUCED, 2012).
L’augmentation des prix des produits primaires stimule le commerce international des PED.
Le taux de croissance annuel moyen du commerce international des PED s’élève jusqu’à 14%
pendant la période 2000-2009 (OMC, 2010). Ce chiffre atteint le double de celui du
commerce mondial (8%) (OMC, 2010). La croissance des exportations tend à augmenter le
niveau de la croissance économique dans les PED.
Outre la croissance économique, le commerce international entraîne une
diversification de la base productive grâce aux IDE et aux entreprises nouvellement créées.
40
2.2 Entrée massive des IDE et diversification de la base productive des pays en
développement
La diversification des exportations des PED traduit une diversification de la base
productive. Au début de la libéralisation des échanges vers les années 80, les exportations des
PED restent concentrées sur un nombre restreint de produits. Durant la période 1980-2000, les
exportations des pays du Sud se caractérisent essentiellement par l’exportation de produits
traditionnels. Ce sont des produits primaires, le plus souvent des produits agricoles. Les
exportations de ces produits occupent une part considérable dans le total des exportations des
PED. Trois (3) produits parmi les principaux produits exportés par les pays du Sud (variables
selon le pays) occupent plus de la moitié des exportations en 1990 (Banque mondiale, 1999).
Pour Cameroun, cette part atteint 65.9%, Ghana 70.3%, Madagascar 66.6%, Kenya 62.4%,
Côte d’Ivoire 50.1%...(Banque mondiale, 1999). Cette tendance des exportations des pays du
Sud s’explique par l’héritage colonial. L’économie se spécialise dans la production des
matières premières destinées à être exportées. Il n’y a pas de diversification de la base
productive. De ce fait, la majorité des PED sont tributaires d’un seul produit. 21 pays
d’Afrique subsaharienne, 14 pays d’Amérique Latine, 6 pays dans les îles du Pacifique Sud
sont lourdement tributaires d’un seul produit (FAO, 2001). Durant la période 1986-1988, la
part d’un produit agricole dans le total des exportations de marchandises atteint 84% pour la
Burundi, 66% pour l’Ethiopie, 92% pour Ouganda, 73% pour Cuba (FAOSTAT, 2002).
Malgré ces valeurs considérables, la part des exportations mondiales des produits agricoles
demeure faible. La part des exportations mondiales de produits agricoles de base n’est que de
7% durant la période 1980-1989 (FAOSTAT, 2002).
Toutefois, les exportations des PED commencent à être plus diversifiées depuis la fin
des années 90. Durant la période 1997-1999, la part du principal produit exporté dans le total
des exportations diminue à 75% pour la Burundi, 54% pour l’Ouganda, 35% pour Cuba
(FAOSTAT, 2002). Pour le cas de Madagascar, la part des trois principaux produits dans le
total des exportations passe de 66.6% (1990) à 33.1% (1998) (Banque mondiale, 1999). La
part des exportations de café et d’épices dans le total des exportations passe de 50% (en 1980)
à 20% (en 1998) (Banque mondiale, 1999). La diversification des exportations se poursuit
durant la décennie 2000-2009. Le tableau 4 montre le taux de croissance annuel moyen des
exportations des PED par groupe de produits entre 2000 et 2009.
41
Tableau 4 : Taux de croissance annuel moyen des exportations des PED par groupe de produits entre 2000 et 2009 en %
Groupe de produits Taux de croissance annuel moyen 2000-
2009
Matières agricoles 5.6
Textiles 8.8
Machines et matériels de transport 14.8
Produits des industries de transformation 6
Produits alimentaires 10.1
Vêtements 10.2
Combustibles et minéraux 19.3
Autres 17.3
Source : auteur propre(2013)6
La première colonne désigne le type de produits exportés par les PED. La deuxième
colonne indique le taux de croissance annuel moyen des exportations entre 2000 et 2009.
Chaque ligne montre alors le taux de croissance annuel moyen des exportations de chaque
groupe de produits exportés par les PED. La croissance des exportations des produits des
industries de transformation, des machines et matériel de transport, de vêtements traduit une
diversification de la base productive. Cette dernière résulte de l’apparition croissante des
entreprises due à l’entrée massive des IDE. Les PED attirent près de la moitié du total des
IDE (UNCTAD, 2012). L’entrée des IDE favorise le développement des secteurs
économiques (secteur primaire, secteur secondaire, secteur tertiaire) au niveau des pays du
Sud. 200 milliards de $ sont investis dans le secteur primaire suite à la hausse des prix des
matières premières (UNCTAD, 2011). Au niveau du secteur secondaire, les IDE s’orientent le
plus vers les industries extractives et les EF. Les entreprises créées dans les PED sont surtout
des EF orientées vers les branches « textile et habillement » et des industries extractives.
Après les combustibles et minéraux (60% de l’ensemble des exportations des PED), les
« vêtements » occupent la seconde place dans l’exportation des PED (OMC, 2010).
6 Tableau effectué à partir des données de l’OMC (2010)
42
Les exportations dans la catégorie « vêtement » constituent 15% des recettes d’exportation
des PED (OMC, 2010). Chaque année, le volume d’exportation des PED en vêtement
augmente de 10% en moyenne depuis 2000 (OMC, 2010). Au niveau du secteur tertiaire,
l’IDE dans ce secteur atteint 510 milliards de $ en 2011 (UNCTAD, 2012). Les exportations
des services commerciaux des PED évoluent considérablement depuis le début du XXIème.
Malgré la faible participation des PED dans le commerce mondiale des services (0.5%), la
croissance des exportations de services commerciaux des PED est significative pour ces pays.
En moyenne, les exportations des services commerciaux atteignent 12.3% par an entre 2000
et 2009 (OMC, 2010). L’évolution des exportations de service semble bénéfique pour ces
pays. Les services nécessitent en effet une proportion plus élevée de main-d’œuvre.
Le commerce international permet donc aux PED de bénéficier des IDE. Ces derniers
leur a permis de diversifier leurs bases productives grâce au développement des secteurs
économiques (primaire, secondaire et tertiaire). Toutefois, le développement ne se limite pas
au degré d’ouverture du pays et à la croissance. Malgré la libéralisation, le marché ne peut
assurer une répartition équitable des fruits du commerce extérieur.
2.3 Les coûts de la libéralisation commerciale : imperfections des marchés, inégalité de
développement, et vulnérabilité de la population paysanne
Les politiques commerciales des pays du Sud depuis le début des années 80 reposent
essentiellement sur les mesures imposées par les bailleurs de fonds. En contrepartie des prêts
et des allègements des dettes des PED, ces derniers doivent libéraliser leurs marchés. Ces
réformes s’appuient sur la croyance des bailleurs de fonds notamment le FMI en l’infaillibilité
du marché (Stiglitz, 2002). Le marché devait permettre de réguler les activités des agents, de
stimuler la concurrence, afin d’assurer la croissance et la redistribution équitable de la
richesse. Cependant, les marchés ne sont pas parfaits. Le marché ne peut garantir une
répartition équitable de la richesse (Stiglitz, 2006). Les PD et les grands groupes industriels
demeurent les principaux bénéficiaires de l’intégration économique des PED. Les PED
diminuent ou suppriment même leurs barrières tarifaires et non tarifaires. Par contre, les PD
ferment leurs barrières aux produits agricoles et textiles venant des PED. Les FMN profitent
de l’ouverture des marchés des pays du Sud. Suite à la diminution des barrières, les
entreprises étrangères tirent avantage de la diminution des coûts de production et de la faible
compétitivité des pays du Sud.
43
Les barrières imposées par les PD ne permettent pas aux PED de concurrencer les entreprises
étrangères. De plus, les PD disposent d’une longueur d’avance dans la production de biens
manufacturés.
L’innovation et les progrès techniques au niveau des PD renforcent la performance de leurs
entreprises. Bien que l’échange stimule la compétitivité des pays du Sud grâce aux transferts
technologiques, la diffusion technologique n’est pas évidente. D’un côté, le niveau
d’éducation et la formation du capital humain dans les PED ne garantissent pas l’absorption
du progrès technique. De l’autre côté, l’existence de brevets et de droits de propriété
intellectuelle peuvent entraver la diffusion technologique (Stiglitz, 2006). Selon Stiglitz
(2006), même si les brevets permettent de rémunérer les innovations, ils entraînent une
situation de monopole pendant un certain temps. Les brevets déposés font obstacle à la
diffusion et à l’utilisation des connaissances. Les PED sont donc lésés par rapport aux PD. Par
conséquent, l’inégalité de développement persiste entre PED et PD. L’ouverture des PED au
commerce extérieur n’a pas permis de réduire considérablement les inégalités mondiales. En
20 ans (de 1988 à 2008), le coefficient de Gini sur le revenu ne diminue que de 2,9% (de
69,2% à 66,3%) (CNUCED, 2012). A ce rythme, il faudrait attendre d’ici 541 ans pour que
les revenus soient distribués équitablement.
L’inégalité de développement se manifeste aussi à l’intérieur même du pays. Les
bénéfices tirés des échanges internationaux ne profitent pas à toute la population des pays du
Sud. La hausse des prix des produits de base notamment les denrées alimentaires nuit au bien-
être des ménages les plus pauvres. Ces derniers se trouvent obligés de réduire leur niveau de
consommation ou de s’endetter pour maintenir leur dépense. La hausse des prix
internationaux des produits de base de 2007-2008 a maintenu ou poussé 105 millions de
personnes sous le seuil de pauvreté et 48,6 millions durant la période 2011-2012 (Banque
mondiale, 2012). Les intérêts des paysans producteurs de produits primaires s’opposent donc
à ceux des ménages en situation de pauvreté. Les producteurs de produits de base consentent
pour une hausse des prix afin de stimuler la production et l’exportation. Néanmoins, ces
paysans restent vulnérables face aux chocs externes. Par exemple, la crise financière vers les
années 2009 influe négativement sur la situation de ces paysans. La crise a entraîné la baisse
du cours de produits de base et celle du niveau du commerce international. L’effet de ces
dernières est d’autant plus néfaste lorsque les paysans ne se spécialisent que dans la
production d’un seul bien. A Madagascar par exemple, les paysans habitant la région Sava se
spécialisent dans la production de vanille en abandonnant les autres cultures vivrières.
44
La crise de 2009 entraîne une réduction des prix de la vanille sur le marché mondial. En
moyenne, le prix de vente de vanille passe de 23,3$/kg en 2008 à 19,1$/kg (BCM, 2011).
La valeur des exportations de vanille de Madagascar passe de 19,6 millions de DTS (2008) à
10,3 millions de DTS (2009) (BCM, 2011). La valeur des exportations de vanille continue de
baisser durant la période 2011-2012. Entre 2011 et 2012, cette valeur s’amenuise de 57%
(INSTAT, 2012). En général, la production et l’exportation désignent l’unique source de
revenu des paysans dans la région Sava. La baisse des exportations oblige ces derniers à
restreindre leur niveau de consommation.
Conclusion du chapitre 3
Ce dernier chapitre a pour intérêt d’analyser les enjeux de l’échange international sur
l’économie des PED. Les politiques commerciales adoptées par les PED ont pour objectif de
stimuler la libéralisation des échanges. La libéralisation des échanges depuis 1982 se base sur
l’hypothèse d’ouvrir un marché plus large pour les PED, d’attirer les IDE et les progrès
techniques. Ces politiques de libre-échange ont pour objectif de stimuler la croissance
économique et de réduire le chômage.
Le début du XXIème siècle paraît favorable pour les PED. La part des PED dans le
commerce mondial s’accroît considérablement. Les exportations sont plus diversifiées. La
hausse des exportations induit une augmentation du taux de croissance économique. Le libre-
échange favorise l’entrée massive des IDE. Cette dernière entraîne une modification de la
structure de la production dans les PED suite à l’augmentation de taille des secteurs primaire
et tertiaire. Toutefois, la répartition des fruits des échanges est inéquitable. Les populations
pauvres continuent à s’appauvrir suite à l’augmentation des pris des produits de base.
45
CONCLUSION GENERALE
Ce mémoire a pour objet de dépasser la conception de l’industrialisation comme
l’unique alternative de sortir de la pauvreté. Avec la mondialisation, l’intérêt du commerce
international augmente face aux échecs des stratégies d’industrialisation des pays du Sud. Le
présent mémoire est élaboré sur la base d’une revue de littérature, donnant naissance à un
débat théorique entre échange international et industrialisation. Les ouvrages de Smith (1776),
de Say (1803), de Rostow (1962) mènent à considérer l’industrialisation comme indispensable
à l’amélioration du bien-être de la population. Les entreprises sont sources de richesses. Les
entreprises, sous l’effet de la division du travail, favorise l’accumulation du capital. Cette
dernière permet è la richesse de s’accroître (Smith, 1776). Ricardo, Hecksher et Ohlin (1933),
Krugman (1979) de leur côté défendent l’intérêt de l’échange international. L’échange
conduit au développement dans la mesure où le pays se spécialise dans la production et
l’exportation de bien(s) présentant un avantage comparatif et lui permettant de bénéficier des
économies d’échelle (Ricardo, 1817 ; Krugman, 2001). Les études empiriques (à partir des
données de la banque mondiale, de l’OMC, du CNUCED…) montrent la portée du débat sur
la réalité.
Théoriquement, l’industrialisation comme le commerce extérieur mène au
développement. D’un côté, le développement industriel favorise la croissance. La division du
travail au sein des entreprises et les progrès techniques accroissent la productivité des facteurs
de production. Le niveau de vie de la population s’améliore grâce aux emplois créés
directement ou indirectement suite à l’apparition des entreprises. De l’autre côté, selon la
théorie des avantages comparatifs, une économie gagne plus en termes de productivité et de
production en s’ouvrant vers l’extérieur. Fondé sur la nouvelle théorie du commerce
international, l’échange est avantageux lorsqu’il permet de réduire les coûts moyens grâce aux
économies d’échelle. Parallèlement à ces théories, le but d’un pays n’est pas de rechercher un
commerce équitable ou d’améliorer les termes de l’échange. L’objectif du pays réside dans
l’obtention d’un surplus de gain en échangeant que d’être en autarcie. Les PED doivent donc
se spécialiser dans l’exportation des matières premières si ces dernières présentent des
avantages comparatifs. Dans ce cas, la NDIT permet aux PED d’acquérir les produits
manufacturés sans passer par l’industrialisation.
46
Toutefois, les PED ne sont pas condamnés à ne produire, perpétuellement, que des biens
primaires. La NDIT représente un moyen de rattraper le retard technologique.
Les technologies se diffusent à travers le commerce international. Le libre-échange incite
l’entrée des IDE et puis l’apparition de nouvelles entreprises. L’échange favorise ainsi la
compétitivité des entreprises nationales.
Dans la réalité, les stratégies d’industrialisation adoptées par les pays du Sud au
lendemain de leurs indépendances n’aboutissent pas au développement. Les politiques
d’industrialisation sont élaborées de façon brutale, sans études sérieuses. La population
continue à s’appauvrir. Depuis, les PED favorisent le libre-échange. Les conséquences du
commerce extérieur sur le développement ne sont pas immédiates. D’ailleurs, le
développement désigne un lent processus. Il a fallu attendre la décennie 2000-2009 pour que
le commerce international affecte (positivement) la population. La croissance économique
tend à augmenter. La base productive des pays du Sud se diversifie. Les secteurs secondaire et
tertiaire commencent à se développer. Le commerce international a donc une influence
positive sur l’économie d’un pays. Cependant, le commerce international n’a su effacer le
développement inégal entre les pays et au niveau des pays. Une partie de la population souffre
de la hausse des prix des produits de base tandis que pour d’autre, cette hausse est bénéfique
pour l’amélioration de leur niveau de vie
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TABLE DES MATIERES
INTRODUCTION GENERALE ............................................................................................ 1
Chapitre • : Industrialisation et développement dans l’histoire de la pensée économique ........ 4
Section 1 : Industries et amélioration de bien-être ................................................... 5
1.1Conception classique de l’entreprise : une unité productive à l’origine de la
croissance économique industrielle................................................................................. 5
1.2 Progrès techniques, économies d’échelle et croissance économique .............. 7
1.3 Le modèle de développement linéaire de Rostow (1962) ............................... 9
Section 2 : Vérifications empiriques du lien entre industrialisation et
développement : le cas malgache...................................................................................... 11
2 .1 Création d’emploi et amélioration des revenus ........................................... 11
2.2 Industries comme facteur d’urbanisation et de tertiarisation : ...................... 13
Section 3 : L’industrialisation des pays du Sud : au détriment de la population ..... 16
3.1 Les problèmes d’industrialisation des pays en développement : « les éléphants
blancs » et « les cathédrales dans le désert » ................................................................. 16
3.2 Menaces de l’industrialisation sur le capital naturel : pénurie des ressources et
pollutions ..................................................................................................................... 17
Chapitre II : Echanges internationaux et nouvelle division internationale du travail ............. 20
Section 1. Spécialisation et économies d’échelle comme fondements des échanges
internationaux .................................................................................................................. 21
1.1 Théorie des avantages absolus, théorie des avantages comparatifs et théorie
des dotations factorielles .............................................................................................. 21
1.2 Les nouvelles théories du commerce international ....................................... 24
Section 2. La nouvelle division internationale de travail et le développement des
nouveaux pays industrialisés ............................................................................................ 27
2.1 La nouvelle division internationale du travail .............................................. 27
2.2. Le développement des nouveaux pays industrialisés : une réalité ............... 28
Chapitre III : Le libre échange : moteur ou obstacle au développement des pays du Sud ? .... 32
Section 1 : Principes fondateurs des politiques commerciales des pays en
développement ................................................................................................................. 33
1.1 Le libre-échange et l’insertion des pays du Sud au commerce international . 33
1.2 Etendue du marché, diffusion technologique et investissements directs
étrangers ...................................................................................................................... 35
Section2. Les enjeux du libre-échange .................................................................. 36
2.1 Commerce extérieur : facteur de croissance ................................................. 36
2.2 Entrée massive des IDE et diversification de la base productive des pays en
développement ............................................................................................................. 40
2.3 Les coûts de la libéralisation commerciale : imperfections des marchés,
inégalité de développement, et vulnérabilité de la population paysanne ........................ 42
CONCLUSION GENERALE .............................................................................................. 45
Nom : RANJEVARIVONY
Prénom : Nadia Laurenze
Titre : ENTRE COMMERCE INTERNATIONAL ET INDUSTRIALISATION :
Quelle perspective de développement pour les pays du Sud ?
Nombre de page : 46
Nombre de tableaux : 4
RESUME
Depuis la révolution industrielle, l’industrialisation apparaît comme l’unique voie de
développement. Certes, l’industrialisation mène au développement, toutefois, l’intérêt du
commerce international augmente face à l’échec de l’industrialisation des pays du Sud. Un
pays gagne aux échanges conformément à la théorie du commerce international. La nouvelle
division internationale du travail permettrait aux PED de se doter des produits manufacturés
sans passer par l’industrialisation. L’industrialisation rapide associée aux politiques
commerciales a permis le développement des nouveaux pays industrialisés. Le commerce
international à lui seul permettrait-il aux pays du Sud de sortir de la pauvreté ?
Mots-clés : industrialisation, entreprises industrielles, économie d’échelle, libre-échange,
avantage comparatif
Encadreur : Docteur RAKOTOVAO Heriniaina Andriananja
Adresse de l’auteur : lot II U 56 B Bis Andrainarivo, Antananarivo 101