Monsabré. Exposition du dogme catholique. 1873-1890. Volume 08

8/8/2019 Monsabr. Exposition du dogme catholique. 1873-1890. Volume 08.

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JOHN M. KELLY LIBRARY

IN MEMORY OFCARDINAL GEORGE FLAHIFF CSB

1905-1989

University ofSt. Michael's Collge, Toronto


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CONFERENCES DE NOTRE-DAME DE PARIS

EXPOSITIONDU

DOGME CATHOLIQUECAREME 1880

VIII


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PROPRIETE DE L'EDITEUR

L'diteur rserre tous droits de reproduction et dotraduction.

Imprimatur :Parisiis, die 8 Decembris 1901.

Franciscus, Card. RICHARD.Arch. Parisiensis.

Cet ouvrage a t dpos, conformment aux lois >en janvier igo3.


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CONFRENCES DE NOTRE-DAME DE PARIS

EXPOSITIONDUDOGMECATHOLIQUEVIE DE JSUS-CHRIST

Par le T. R. P. J.-M.-L. MONSABRdes Frres PrcheursDIXIME DITIONCAREME 1880

PARIS (Vie)P. LETHIELLEUX, Librairie-diteur

10, RUE CASSETTE, 10


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APPROBATION DE L'ORDRE

Nous, soussigns, Matre en sacre Thologie et Prdi-cateur gnral, avons lu, par ordre du T. R. P. Provin-cial, les Confrences du T. R. P. Jacques-Marie-LouisMonsabr, Matre en sacre Thologie, lesquelles sontintitules : Exposition du dof/me catholique. Vie deJsus-Christ. Carme 1880. Nous les avons jugesalignes de l'impression.

Fr. Antomn VILLARD,Matre en sacre Thologie.

Fr. Paul MONJARDET,Prdicateur gnral.

IMPRIMATUR .*Fr. Bernard CHOCARNE,

Prieur provincial.


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QUARANTE-TROISIME CONFRENCEVIEDEJESUS. L ENFANT

Credo in Jesum-Christum quiconceptusest de Spiritu Sancto, natus ex Mario.Virgine, passus sub Pontio Pilato; cru-cifixus, mortuus et sepultus; descenditad inferos ; tertia die resurrexit mor-tuis; asccndit ad clos.sedet ad dexteramDei Patris omnipotentis : inde venturusest judicare vivos et mortuos.

minentissime Seigneur, Messeigneurs 1 , Messieurs,Nous sommes entrs respectueusement dans

la personne deJsus-Christ et nous avons contem-pl ses adorables perfections : sa science, sa pu-ret, sa puissance, son amour, sa saintet, la gran-deur et l'efficacit de ses abaissements et deses infirmits, l'excellence de la majest de sonsacerdoce. Au sortir de cette contemplation,nous nous sommes cris avec le prophte : Christ ! tu es beau par-dessus tous les en-fants des hommes : )) Speciosus forma prfiliis hominum.

1 . Son Eminence le cardinal Guibert, archevque de Pa-ns; Monseigneur Ravinet, ancien vque de Troyes ; Mon-seigneur Marshal, vque de Belley , archevque nommde Bourges.


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VIE DE JESUS.

Ce cri d'admiration sortira plus nergiqueet plus profond de nos mes convaincues etattendries, si nous considrons les perfectionsdu Sauveur, manifestes par des uvres, dansles phases diverses de sa sainte vie.

Certes, Messieurs, je n'ai pas la prtentionde refaire le livre inimitable o l'Esprit-Saintlui-mme a racont la vie de Jsus-Christ. Aucun rcit ne peut suppler ceux que nousont laisss les vanglistes. Il faut en lire et enrelire les pages admirables, si l'on veut savoircomment le Verbe incarn a vcu au milieu deshommes. Mon intention n'est donc pas de vousdispenser, en racontant moi-mme, de la lec-ture et de la mditation de l'vangile, mais,bien plutt, de vous guider dans vos pieusestudes, en vous traant un plan que vouspourrez suivre, s'il vous convient, et en fixantparticulirement votre attention sur les faitsvangliques qui appartiennent la fois audogme et l'histoire.

La critique contemporaine a contest auxvangiles leur authenticit et leur sincrit. Jene veux pas discuter avec elle. Les preuvessont faites contre ses ngations, vous pourrez


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LENFANT.

les trouver en plus d'un savant ouvrage. Jeprends les vangiles pour ce qu'ils sont, c'est--dire pour des rcits authentiques et sincresdel vie de notre sauveur * ,et, guid par monmatre saint Thomas, je veux rendre succes-sivement mes hommages l'enfant, l'ouvrier,au docteur, au thaumaturge, au prophte, aumartyr, au triomphateur.

Jsus-enfant ! ces deux mots sont pleins decharmes pour les mes chrtiennes; ils nousrappellent les plus touchants mystres denotre foi. Un Dieu entrant comme nous dans lafamille humaine; un Dieu recevant, dans lachair fragile dont il s'est revtu, le sang del'humanit pcheresse; un Dieu donnant enspectacle toutes les apparences de la faiblesse,de la misre et de l'impuissance; un Dieu, ce-pendant, si beau et si terrible dans ses infir-mits, qu'il ravit les curs de ceux qui l'ap-prochent et fait trembler les rois.

L'incrdulit dtourne ddaigneusement les1 . Voy. mon Introduction au dogme catholique : trente-

tra isime confrence : du Premier lment du tmoignagedans l'vangile, la Connaissance certaine; trente-quatrime confrence : du Second lment du tmoignage


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VIE DE JESUS.

yeux de son berceau. Si elle consent admi-rer l'homme fait, dont elle ne peut nier lasingulire vertu et la prodigieuse influence,elle jette un voile sur l'enfant et s'efforced'touffer sa grandeur dans une naissancevulgaire et obscure, dont l'histoire n'a rien raconter. Jsus, dit-elle, naquit Nazareth...on ignore quelle date prcise ; le nomqui lui fut donn tait fort commun... Ilsortit des rangs du peuple. Son pre Josephet sa mre Marie taient des gens de mdiocrecondition, des artisans vivant de leur travail,dans cet tat, si commun en Orient, qui n'estni l'aisance, ni la misre... sa famille tait asseznombreuse. Il avait des frres et des sursdont il semble avoir t l'an. Tous sont restsobscurs. Aprs cela, une description de Na-zareth : Dlicieux sjour, o l'me se sentun peu soulage du fardeau qui l'oppresse aumilieu d'une dsolation sans gale 1 . Et voiltout.

dans l'vangile y VAffirmation sincre; trente-cin-quime confrence : des Vains efforts du rationalismepour dtruire le tmoignage vangl' jue.

1. E. lienan, Vie de Jsus, ch. u.


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LENFANT.

Votre foi, Messieurs, proteste contre cettenarration tronque et mensongre. Je feraidroit ses protestations, en vous montrant lesgrandeurs de Jsus-enfant, dans le cadre provi-dentiel o il vient au monde, dans les miraclesde sa naissance, dans la prise de possession duroyaume que Dieu lui a promis.

En quelques lignes l'Eglise a crit un longpome pour annoncer la naissance du Sauveur.Dans l'ombre et le silence de la nuit qui pr-cde la fte de Nol, elle le donne chanter l'un de ses prtres ou l'un de ses lvites,et des profondeurs du sanctuaire retentissentzes simples et admirables paroles : Depuis lacration du monde, alors que Dieu, au com-mencement de toutes choses, tira du nant leciel et la terre, l'an cinq mille cent quatre-vingt-dix-neuf; depuis le dluge, Tan deuxmille neuf cent cinquante-sept; depuis la nais-sance d'Abraham, l'an deux mille quinze;


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VE DE JSUS.

depuis Mose et la sortie du peuple d'Isral dela terre d'Egypte, l'an quinze cent dix ; depuisle sacre du roi David, Tan treize cent deux ; dansla soixante-cinquime des semaines d'annesprdites par le prophte Daniel ; dans la centquatre-vingt-quatorzime olympiade; dans lasept cent cinquante-deuxime anne de la fon-dation de Rome et la quarante-deuxime durgne d'Octave-Auguste; tout l'univers tant enpaix et le monde entrant dans son siximege : Jsus-Christ, Dieu de toute ternit, filsdu Pre ternel, voulant consacrei le mondepar son misricordieux avnement, aprs avoirt conu de l'Esprit-Saint, les neuf mois de-puis sa conception tant accomplis, Jsus-Christ, Dieu fait homme, nat, Bethlem deJuda, de la Vierge Marie 1 . La premire fois que j'entendis cette sublime

1. Anno a creatione mundi, quando in principio Deuscreavit clum et terrain, quinquies millesimo centesimoumagesimo nono: A diluvio vero,anno bis millesimo nonagen-tesimo quinquagesimo septimo : A nativitate Abrahae, annobis millesimo quinto decimo : A Moyse et egressu populiIsral de Egypto, anno millesimo quingentesimo decimo :Ab unctione David in regem, anno millesimo trigesimo se-cundo : Hebdomada sexagesima quinta juxt.a Danielis pro-phetiam : Olympiade centesima nonagesima quarta : Ab


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l'enfant 9

proclamation, je sentis tout mon tre frmiret, aprs m'tre prostern sur le pav dutemple pour adorer le divin enfant, je me re-levai les yeux baigns de larmes. J'tais sousl'impression d'un langage unique dans l'histoire.Vous l'avez lue, Messieurs, et, quelque soinqu'on prenne d'encadrer noblement le berceaudes hros et des grands hommes, vous n'avezjamais vu, n'est-ce pas, rien qui ressemble cette calme et crasante majest ? L'enfant quivient au monde, ft-il le rejeton du sang le plusillustre, n'a rien dmler avec le pass. Il ap-parat sans tre longtemps attendu dans le flotmouvant des gnrations, et, s'il plat aux flat-teurs de clbrer sa naissance par de glorieuxhoroscopes, ils n'oseraient convoquer prs deson berceau le ciel, la terre, les rois, les peu-ples, les grands vnements. L'glise, vousurbe Roma condita anno septingentesimo quinquagesimosecundo : Anno imperii Octaviani Augusti quadragesimosecundo, toto orbe in pace composito, sexta mundi setate :lesusChristus aeternus Deus, aeternique Patris Filius, mun-durn volens adventu suo piissimo consecrare; de Spiritusancto conceptus, novemque post conceptionem decursismensibus,in Betlheem Judae nasciturex Maria virgine, fac-tus homo. (Martyrolog : Rom. octavo. kalendas. januarii25 dec.)


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l'enfant. 11

seront bnies toules les nations de la terre 1 ; David, un hritier qui conservera ternellemenlsa race et fera subsister son trne aussi long-temps que le soleil et la lune 2 . Un rejetonsortira de la tige de Jess, s'crie Isae, et unefleur s'lvera de sa racine. L'esprit du Seigneurse reposera sur ce rejeton: l'esprit de sagesse etd'intelligence, l'esprit de conseil et de force,l'esprit de science et de pit; et l'esprit decrainte de Dieu remplira la coupe de cette(leur 3 . ii

coutez donc, maison de Davfd, le Seigneurvous donnera lui-mme un signe: Voici que

1. In te (Abraham) benediccnlur universae cognationesma).(Gnes., cap. xti, '].)liencdicentur in semine luo (Isaac) omtes gentes terrae(Gnes., cap. xxvi, 4.)Benedicentur in le (Jacob) et in semine tuo cunctae tri-

bus terrae.(Gnes., cap. xxvm, 14.)2. Semel juravi in sanclo meo, si David mentiar : semen

cjus i.i aelernum manebit, et thronus ejus sicut sol in con-spectu meo et sicut luua perfecta in aeternum.(Psalm.LXXXV1U.)

3. Egredietur virga de radie Jesse, et flos de radieejus ascendet; et requiescet super eum spiritus Domini :spiritus Sapienti et intellectus, spiritus consilii et fortitu-dinis, spiritus scienli et pietalis; et replebit eum spiritustimoris Domini. (Isai., cap. xi, 12.)


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la Vierge concevra et enfantera un fils; on rap-pellera Emmanuel l . Emport sur les ailes del'inspiration, le prophte franchit les sicles, etcroit voir dj l'enfant qui doit venir: Le pe-tit enfant nous est n, le fils nous est donn ; sonnom est l'admirable, le conseiller, le Dieu fort,le pre du sicle futur, le prince de la paix 2. a Miracle nouveau ! s'crie Jrmie, la femmetoute seule sera mre de l'homme : CreayitDominus novum super lerram, fmina circum-dabit virum 3 .

Aimant divin, un enfant attire vers son ber-ceau les religieuses aspirations de l'antiquit ju-daque ; un enfant est aussi l'objet des dsirs etde l'attente de la gentilit. Le fils d'Isis doitvenger le monde des fureurs de Tryphon 4 . Ju-piter posera sa main caressante sur le frontd'une vierge et, de son toucher, un fils natra :

1. Audite ergo Domus David... Dabit Dominus ipse vobissignum : Ecce Virgo concipiet et pariet filium,et vocabi-tur nomen ejus Emmanuel .(lsai., cap. vu, 13, 14..)

2. Parvulus natus est nobis, et filius datus est nobis, etvocabitur nomen ejus, admirabilis, consiliarius, Deus for-tis, pater futuri saeouli, princeps paeis.(Isai., cap. ix, 6.)

3. Jerem., cap. xxi, 22.4. Plutarque, de lsid. et Osirid., n 24.


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L'INFANT 13

cher rejeton d'un pre ennemi qui s'offrira poursuccder aux souffrances de Promthe, figuredu genre humain chti par la colre divine 1 .Dans les dicules qui couronnent les pyramidesorientales, les vierges sacres attendent la visitedu Dieu qui doit les rendre mres du libra-teur. Le lotus gyptien, pntr du souffle d'enhaut, fconde la desse Vierge 2 , et la mresainte des Chinois mange, au bord de la fon-taine, la fleur virginale qui lui donne le pou-voir de mettre au jour un fils divin 3 . Sous lessombres arceaux des forts celtiques, lesdruides lvent une statue et un autel lavierge qui doit enfanter 4 . Les gnrations quise succdent se transmettent donc de l'une

1. Eschyle, Promthe.2. Tuvatxt oux uva-rov uveOfxa 7cXv]aiaat 8sou, xai rtva ev-

texe'iv apxa yev(>ea).(Plutarq., de Isid. et Osride.)3. Barrow, Travel in China, p. 473.4. Hinc Druidas in intimis penetralibus statuam erexe-

runt, lsidi seu Virgini hanc dedicantes, ex qua filius illeproditus erat.Ce renseignement d'Elias Schedius (de Diis Germanis,

cap. xm) est confirm par l'inscription trouve en 1833 surl'emplacement d'un temple paen, Chlons-sur-Marne :Virgini paritur Druides.(Annales de philosophie chrt.,t. Mil, p. 328.)


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U VIE DE JSUS.l'autre ce cri d'esprance : Un enfant viendra.Dj les potes saluent son avnement 1 . Voyezcomme le monde est profondment remu pardes catastrophes providentielles. Plus agit queles autres peuples, mais toujours vivant, Isralest partout ml aux gentils et projette sur lestraditions dfigures la lumire de ses oracles.Les dsirs dbordent, l'attente est son comble,les sicles, en chur, s'crient : Gieux,rpandez votre rose, nues, pleuvez le juste;que la terre s'entrouvre et germe le sauveur.

Il vient, l'enfant bni, il vient. L'Eglise nousmontre le ciel et la terre formant, avec les si-cles, un cadre immense autour de son berceau ;c'est juste. Le ciel est ferm par le pch, il val'ouvrir; la terre est dshonore, il va la puri-fier. Abraham est voqu; cela devait tre. N'a-t-il pas t choisi pour tre la souche d'un peu-ple destin garder plus fidlement les pro-messes divines, et pour transmettre au fils deces promesses, avec un sang prserv des abo-minations de l'idoltrie, l'hritage transfigurde son sacerdoce et de son souffle prophtique?

i. Cf. Vingt-neuvime confrence : la Plnitude destemps.


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l'enfant. 15

Voici Mose avec son peuple; il est sa placeprs du lgislateur de la nouvelle alliance, prsdu librateur du genre humain. David s'appro-che, je l'attendais; son sang illustre va coulerdans les veines de l'enfant-Dieu 1 . Les mouve-ments inverses des deux gnalogies, de la tigeau rejeton, du rejeton la tige, dcrivent leslongues prgrinations de la sve royale. Pardes courants divers, elle est arrive son but.La nature et la loi, la gnration et l'adoptionsont d'accord sur le mme enfant. Soit qu'onremonte par sa mre et par son grand- pre lecours des sicles, soit qu'on le descende jusqu'l'homme humble et chaste qui doit protger sesjeunes annes 2, David s'impose, et son fils a

1. Cf. Summ. theol., III IV, quajst. 31, A. % Utrumcaro Christi fuerit sumpla de David?

-. Il y a diffrentes opinions sur les gnalogies de N.-S.De graves auteurs, tant anciens que modernes, pensentque saint Matthieu et saint Luc ont donn tous deux la g-nalogie de saint Joseph. Pour expliquer les deux presqu'on lui attribue, ils invoquent la loi du Lvirat, en vertude laquelle Jacob, proche parent d'Hli, aurait pous saveuve. De cette manire Jacob, second mari de la mre desaint Joseph, est son pre naturel, Illi est son pre l-gal. Ainsi, saint Matthieu aurait crit lagnalogie naturellede saint Joseph, saint Luc sa gnalogie lgale. D'aprs cesentiment, Jsus est fils de David, parce que Marie sa mre


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droit au nom que lui donneront plus tard lesmisrables qui imploreront sa misricorde etles foules qui salueront sa bienvenue : Ayezpiti, fils de David! Hosanna au fils de David! La critique impie lui conteste cet honneur,mais qu'importe? Sa ngation attarde peut-elle peser autant, dans la balance de l'histoire,que le tmoignage des vanglistes, qui ontconsult les monuments et entendu la voix dupeuple ? Venez vous joindre au saint roi, chastest parente de saint Joseph, et, par consquent, de la mmefamille que lui. Cette parent n'est point suppose; elleest affirme implicitement par l'vangile, qui nous ditque Marie se fit inscrire, avec Joseph; Bethlem. Elle nepouvait tre comprise dans le recensement qui se faisaitdans la ville de David que parce qu'elle tait de la familleie David. L'opinion prcite offre encore plusieurs autreslifficults; elles ne sont point insurmontables. Mais cesdifficults disparaissent,si l'on admet une opinion qui nousparat plus probable, savoir, que saint Matthieu a donnla gnalogie lgale de Jsus-Christ par Joseph, saint Luc,sa gnalogie naturelle par Marie, fille d'Hli. Si Marien'est point nomme dans cette gnalogie, c'est parce queFauteur se conforme l'usage hbraque, qui ne tient aucuncompte des femmes dans l'numration des degrs gna-logiques. Joseph, dit Mdina, est appel fils d'Hli : quifuit Hli, parce qu'il est le mari de so fille, hropter vin-tulum matrimonii pater fili recte dici solet palermaritiyus. Melchior Canr. donne une explication plus ing-nieuse et, peut-tre, plus vraisemblable. Il prtend que


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L ENFANT. il

prophte qui Dieu a donn la connaissancedes temps, venez, Daniel. Vous avez clair lesoracles en prcisant l'poque de leur accom-plissement. Vos fameuses semaines touchent leur fin, il est temps que paraisse le saint dessaints.

Les grands peuples, aussi, lui doivent unhommage : et les Grecs, dont la langue harmo-nieuse crira bientt son histoire et sera l'undes premiers instruments de la diffusion de sa

dans ce texte de saint Lue : Et ipse Jsus erat incipiensquasi annorum triginta, ut putabatur filius Joseph quifuit Heli, ces paroles: ut putabatur filius Joseph, formentune parenthse, et que le relatif qui fuit Heli se rapporte Jsus.La parenthse, qu'on peut supposer, sans ^rt, dans le

latin, est plus apparente dans le grec:Ka. auTo yjv 6 'Iyjcto tocrsi excov Tpixovxa, >v u'o, to Ivojai-

e-co 'loicrfa, tou 'H>{, toO Maiir, xoO Aeui, etc.En effet, l'article toO, signe caractristique des degrs

gnalogiques, manque au nom de Joseph, d'o il suit quel'on doit lire wv v6 (; Ivo^exo 'Icoo-^,) xo 'Hli ; en fran-ais: Jsus, qu'on croyait fils de Joseph, tait fils d'Hli.Comment accorder, dans ce sentiment, le nom d'Hli,donn au pre de la sainte Vierge, avec la tradition qui

lui donne pour pre saint Joachim? Rien de plus facile.tlli est une abrviation du nom d'liakim. Or, Eliakim etJoachim se disent plusieurs fois l'un pour l'autre dans lasainte criture. Ainsi, au II" livre des Rois, Joachim, fils

CARME 1880. 2.


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doctrine et de l'tablissement de son rgne; etles Romains, qui n'ont conquis la terre que pourprparer des chemins ses aptres et lui c-der un jour la capitale de leur empire. Augustea soumis tous les peuples son pouvoir; le tem-ple de Janus est ferm ; l'univers est en paix. Ilcroit, le fier Csar, que le repos de ses armes vatourner au profit de sa gloire, en lui permettantde compter les richesses de ses provinces et lenombre de ses sujets; mais Dieu a d'autresvues que les siennes. En ces jours-l, ditl'-vangliste saint Luc, un dit fut port par CsarAuguste, afin qu'on dnombrt l'univers 1 . Ced'Elias, est appel EUakim (cap. xxm, 34). Ue mme, auIIe livre des Paralipomnes (cap. xxxvi, 4),le grand-prtrequi gouverne la Jude pendant la captivit de Manasssest appel EUakim au quatrime chapitre de Judith (iv, 5,7, 11), et Joafctm au quinzime (v, 9). Le motif de cettesubstitution de forme, dit l'abb Darras dans son Histoirede l'glise (2 e partie, l re poque, ch. xi), est que le motJoachimse prononait, en hbreu, Jehovakim; or, Jehovahest le nom trois fois saint, le tetragrammaton redoutabledu nom divin. Les Juifs ne l'articulaientjamais la lectureOn lui substitua le nom 'Adona, ou son quivalent ELCette dernire forme avait prvalu comme synonyme dansle nom d'Eliakim.

Cf. Summ. theol. quaest3l, A. 3,: Utrum convenientergenealogia Chrisli ab Evangelisth tcxntur ?

i. Luc. cap. xi, 1.


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l'enfant, tf

dnombrement, c'est un homme qui l'ordonne ;mais c'est Dieu qui le veut pour amener sonfils au lieu o le prophte a plac son berceau,pour que sa royale gnalogie soit confirmepar des actes publics, pour que la ralit deson humanit sainte soit offciellementconstatefar la plus grande des autorits humaines. Que faites-vous, s'crie Bossuet, que faites-vous, princes du monde, en mettant tout l'uni-vers en mouvement, afin qu'on vous dresse unrle de tous les sujets de votre empire? Vous envoulez connatre la force, les tributs, les soldatsfuturs; et vous commencez, pour ainsi dire, les enrler. C'est cela ou quelque chose de sem-blable que vous pensez faire. Mais Dieu a d'au-tres desseins, que vous excutez, sans

ypenser,

par vos voies humaines. Son Fils doit natre Bethlem, humble patrie de David; il l'a faitainsi prdire par son prophte, et voil que toutl'univers se remue pour accomplir cette pro-phtie. Jsus, fils de David, nat dans la ville oDavid avait pris naissance. Son origine est at-teste par des registres publics; l'empire ro-main rend tmoignage la royale descendancede Jsus-Christ, et Csar, qui n'y pensait pas,


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excute l'ordre de Dieu 1 . L'incrdulit vou-drait bien supprimer ce tmoignage de Csaret de l'empire romain ; mais que peut-elle rpondre aux apologistes qui ont vu les actes dudnombrement et qui n'ont pas craint d'y ren-voyer les hrtiques et les empereurs 2 ?

Oui, Messieurs, la paix universelle s'est faite*dans le monde, afin que le prince de la paix na-qut dans les conditions prdites par les pro~

1. lvations sur les mystres, XVIe semaine: ve l-vation.

2. Tertullien, lgiste dont les dcisions figurent au Di-geste avec celles de Papinien, de Tribonius et d'Ulpien,crivait Rome mme en 204 : Les pices originales dudnombrement d'Auguste sni conserves dans les archivesde l\ome. Leur dposition relative la naissance de Jsus-Christ forme un tmoignage authentique : Decensu deniqueAugusti, quem testem fidelissimum Dominic nativitatisRomana archiva custodiunt. (Lib. contra Marcionem,cap. vu.)

Saint Justin, dans son apologie Antonin le Pieux (138),s'exprime ainsi : Jsus-Christ est n Bethlem, petiteille juive situe trente-cinq stades de Jrusalem; vouspouvez vous en assurer en consultant les tables de recen-sement de Quirinius, votre premier gouverneur en Jude.

B/]8Xe[A xcofJLY) xi eor'tv ev xvj x^P^ 'louSatwv, oc7r-/ou


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l'enfant. 21

phtes, et, pendant que l'univers est en paix au-tour de son berceau, le ciel est en fte. Pourclbrer son avnement et eu marquer la dateprcise 1 , Jupiter et Saturne, ramens au mmepoint, illuminent trois fois la terre de leurs ra-

1. Dans le Martyrologe que nous avons cit, l'glisefixe la naissance de Notre-Seigneur l'an 752 de Rome;elle suit en cela les calculs de Denis le Petit, fonds sur unedate prcise que nous donne saint Luc dans son Evangile : La quinzime anne de l'empire de Tibre, Jsus, ayantenviron trente ans, commena sa vie publique. Or, la quin-zime anne de l'empire de Tibre, si on le fait commen-cer la mort d'Auguste, correspond l'an 782 de Rome.Si nous retranchons de ce chiffre les trente ans de JsusChrist, nous avons 752.

Mais ce calcul, trs simple et trs conforme l'vangile,en apparence, est contredit par l'Evangile mme. SaintMatthieu nous dit que Jsus est n dans les jours d'Hrode(cap. h, 1). Or, Hrodeest mort du 28 mars au 2 avril 750.Pour natre dans son rgne, il est bien vident que Jsus-Christ a d venir au monde le 25 dcembre 749, au plustard. Dans cette hypothse, il faut placer entre le 25 d-cembre 749 et le 28 mars 750 la naissance du Sauveur,la prsentation, l'adoration des Mages et le massacre desInnocents; c'est trop peu de temps, surtout si l'on fait at-tention ce dtail qu'Hrode, calculant d'aprs le voyagedes Mages l'apparition de l'toile, fit tuer les enfants au-dessous de deux ans.

Il faut donc encore reculer d'une anne, c'est--dire au25 dcembre 748. Mais voici une autre difficult soulevepar le rcit de saint Luc.

Cet vangliste fait concorder la naissance de Jsus-


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L'ENFANT. 23m - - . - -i . .. ., .mis et dsir, du librateur du genre humain.

Les sicles remplis de dsirs, le ciel, la terre,les patriarches, les lgislateurs, les rois, les pro-phtes, les grands peuples, les matres du mon-de, la paix universelle aprs tant de rvolutions,le jubil des astres, voil le cadre providentielde la naissance de Jsus-Christ. Et, dans ce ca-dre, il faudrait mettre le berceau d'un enfantobscur, sans gnalogie et sans prestige ? Et,sur ce cadre, il faudrait crire les paroles vul-gaires d'un mcrant? Non, Messieurs, non. Lesparoles de l'Eglise sont seules en harmonie avecde si admirables prparations : Jsus Christusternus Deus, ceternique Patris filius, in Be-thlem Jude nascitur ex Maria Virgine, factushomo

i.

II

Jsus Christus nascitur /Jsus-Christ nat; cemot est plein de rvlations. Dieu aurait purenouveler pour son Fils le mystre de l'Eden,

i. Cf. Summ. theol., III P., quaest. 35, 4. 8: UtrumChristus fuerit congrua tempore natus f


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c'est--dire tirer son corps trs pur du flancd'un de ses justes endormis, et le montrer fhumanit,en disant : Voici la chair de ta chairet l'os de tes os. Mais il redoutait pour nousi'tonnement, les doutes, l'anxit que n'etpas manqu d'exciter l'apparition d'un hommeparfait. Nous voyons mieux la vrit de l'incar-nation dans un enfantqui prend, comme nous,possession del vie,etla constatation de sa nais-sance doit rpondre un jour, mieux que tousles raisonnements, aux rves nsenss et auxsuppositions absurdes des hrtiques. D'autrepart, l'uvre de rparation dcrte par laProvidence est plus complte et mieux qui-libre dans un Dieu-enfant. Tous les ges ysont reprsents, les deux sexes y sont honorsautant qu'ils peuvent l'tre, et de la femme,qui nous a prsent le fruit de mort, nous re-cevons le fruit de vie '

1. Licet Filius Dei carnem humanam assumere potueritde quacumque materia voluisset, convenientissimum tamenfuit ut de foemina carnem acciperet. Primo quidem, quiaper hoc tota humana natura nobilitaa est. Unde Augustin,dicit lib. 83 Qustionum : Hominis liberatio in ulroquesexu debuit apparere. Ergo quia virum oportebat susci-pere, qui sexus honorabilior est, conveniens erat, ut fra


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Il importait donc que les lois de la naturefussent accomplies sous nos yeux, autant qu'ille fallait pour nous donner la certitude dumoyen extrieur par lequel le mystre divin servlait nous; mais, pour l'honneur du Dieuqui s'incarnait, il importait que la nature ftsurpasse par des merveilles.

Elles n'ont pas t pargnes. L'vangile etla science thologique nous les montrent semultipliant, sous l'action d'un principe divin,dans le sein virginal de Marie et dans son fruitnei sexus liberatio hinc appareret, quod ille virde frninanatus est. Secundo, quia per hoc veritas incamationisastruilur. Undc Ambr. dicit in lib. de Incarn. : Aiulta inChristo secundum naturam invenies et ultra naturam :secundum conditionem etenim nature in utero fmi-nei scilicet corporis fuit, sed supra conditionem virgoconcepit, virgo generavit, ut crederes, quia Deus erat, quiinnovabat naturam, et homo erat, qui secundum naturamnascebatur ex homine. Et Aug. dicit in epist. ad Volusian :f Si omnipotens Deus hominem ubicumque formatum nonex materno utero crearet,sed repentinum inferret adspec-tibus, nonne opionem confirmaret erroris, nec hominemverum suscepisse ullo modo crederetur; et dum omniamirabiliter facit, auferret quod misericorditer fecit? Nuncvero ita inter Deum et hominem mediator apparuit, ut inunitate personae copulans utramque naturam et solita su-blimaret insolitis, et insolita temperaret. (Summ. theol..Il P., quaest 31, A. 4,6.)


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bni. Le ciel les annonce avant qu'ellesclosent, et salue leur adorable panouissementpar la voix de ses anges.

L'ange Gabriel, dit saint Luc, fut envoypar Dieu, dans une ville de Galile appele Na-zareth, vers une vierge marie un homme dunom de Joseph; et le nom de la vierge taitMarie. Depuis longtemps ce messager clesteavait reu de Dieu la confidence du grand mys-tre de l'incarnation, et la mission de rparer,dans l'uvre de notre restauration, l'influenceexerce par l'esprit superbe dans l'uvre denotre perdition. Sa premire ambassade avaitrvl au prophte Daniel l'poque prcise del'avnement de la justice ternelle, et six mois peine s'taient couls depuis qu'il en avaitfait pressentir les approches au prtre Zacharie,en lui annonant la naissance de son fils, leprcurseur. Le temps est venu. Une troisimefois il descend sur la terre, pour demander l'humanit son consentement; car Dieu est unroi si libral qu'il veut que nous acquiescionsaux noces mystrieuses de son Verbe avec notrenature. Une jeune fille del tribu de Juda a tchoisie pour reprsenter le genre humain dans


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ce solennel contrat ! . L'ange s'approche d'elle,et lui dit : Je vous salue, pleine de grce ; leSeigneur est avec vous : vous tes bnie entretoutes les femmes. Marie se trouble, car sonhumilit lui persuade qu'elle est indigne detant d'honneur : trouble pudique des vierges,auxquelles la louange semble une conspirationourdie contre la chre et dlicate vertu qui lesdonne Dieu seul . Marie se trouble ; mais l'angela rassure: Ne craignez point, Marie, car vousavez trouv grce devant Dieu. Voici que vousconcevrez et enfanterez un fils, que vous nom-merez Jsus. Il sera grand; on l'appellera Filsdu Trs-haut, le Seigneur Dieu lui donnera letrne de David son pre, et il rgnera ternelle-ment sur la maison de Jacob. Marie reconnat, ce langage, les saintes prophties qu'elle alongtemps mdites dans le temple et dont elle

1. Congruum fuit Reatse Virgini annunciari, quod essetChristum conceplura... ut volontaria sui obsequii muneraDeo offeret ad quod se promptarn obtulit dicens: Ecce an-cilla Domini, ut ostenderetur esse quoddam spiritualematrimonium, inter filium Dei et humanam naturam , ettdeo per annuntiationem expectabatur consensus Virginis,loco totius humanae natiuae.(Summ. theol.,111 P.,quaest30,4.1.)


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attend le prochain accomplissement. Mais cesprophties ne sont pas faites pour elle, elle arenonc la maternit. Rsolue demeurervierge, elle n'ambitionne que l'honneur d'treun jour la servante de la mre du Messie. Dieua d'autres vues. 11 convoite pour son Fils l'-trange etinexplicable maternit d'une vierge.Les lois de la nature s'y opposent? qu'importe,rien n'est impossible au Tout-puissant: n'a-t-il pas fcond les mres striles? Qui l'emp-chera de fconder une vierge? L'Esprit-Saint surviendra en vous, dit l'ange, et lavertu du Trs-Haut vous couvrira de sonombre, et ce qui natra de vous sera la sain-tet mme, on l'appellera Fils de Dieu. Etvoici qu'Elisabeth, votre parente, a conuelle-mme un fils dans sa vieillesse: noussommes au sixime mois de celle qu'on ap-pelait strile. Je suis la servante duSeigneur, rpond Marie, qu'il me soit faitselon votre parole *.

Messieurs, que de miracles raconts sansemphase dans cet adorable rcit, o les aver-

i. Voy. Luc, cap. i, depuis le verset 26 jusqu' 38


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tissements, les promesses et les preuves sesuccdent avec un ordre parfait l ! Le principenaturel de la gnration humaine suppl parl'action divine; deux honneurs inconciliables,la virginit et la maternit, s'unissant et serehaussant mutuellement en une seule per-sonne; une fille des hommes vrit lementMre de Dieu; un Dieu ternel et une femmemortelle pouvant dire du mme enfant: Monfils; toutes les perfections, au degr suprme,dans un enfant qui vient de natre.

Mystres inacceptables, dit l'incrdulit; car,qui donc les a vus? Qui donc les a constats?Qui donc peut en rendre tmoignage?

Qui donc? Mais celle-l mme en qui ils sesont accomplis. Elle en a gard fidlement lesecret, tant qu'il tait ncessaire d'effacer saj}oire devant celle de son fils. Quand le tempslut venu de parler, ses rvlations tombrent, deson cur reconnaissant, dans le cur fidledes aptres, et maintenant elles s'imposent notre foi. Voudrait-on rcuser la parole de Ma-

1. Cf. Summ. theol., III P., quaest. 30, A. 4: Utrum an-nunciatio convenienti fuerit ordine perfecta?


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rie? Ce serait se rvolter contre une des plusaugustes lois du tmoignage. Le droit reconnatla suprme autorit du tmoin qu'il appelleexceptionnellement majeur : omni exceptionemajor. En effet, un homme peut tre si levdans son intelligence, si grand par son caractre,si minent par ses vertus, si unique par sa po-sition, que ses affirmations soient, de tout point,indiscutables. Gomment le rcuser, lorsque,rendant tmoignage des faits merveilleux qui sesont passs en lui-mme, il confirme son t-moignage par des faits de mme nature? Or,Messieurs, la mre du Christ est un tmoinexceptionnellement majeur. La position qu'ellea prise dans le monde chrtien, la vnrationuniverselle dont elle est l'objet depuis l'originede l'glise, nous imposent le respect de sa pa-role et de ses rvlations, d'autant qu'elle a faitelle-mme un prodige qui sert de garantie ceux dont elle tmoigne. A l'heure mystrieuseo personne ne connaissait encore celui qu'elleportait dans son chaste sein, si ce n'est Elisa-beth, dont le fils avait tressailli, avant de natre,aux approches du Verbe incarn, elle a lancsur les sicles futurs cet oracle : Toutes les


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gnrations m'appelleront bienheureuse ivBeatam me dicent omnesgneraiones f . Une petitefille de quinze ans oser ainsi affronter l'avenir!C'est de la plus haute folie, si cela n'est divin.Or, Messieurs, cela est divin, parce que l'oracles'est accompli. Je n'ai pas besoin de le prouverlonguement. Vous savez tout aussi bien quemoi que, dans tous les ges du Christianisme etmaintenant encore, la science thologique, leslettres, les arts, les monuments, la prire,rendent hommage la bienheureuse ViergeMarie, mre de Jsus-Christ. Prophtesse vri-dique, elle imprime aux paroles tombes deses lvres sacres un cachet divin qui la re-commande notre confiance. Il faut donccroire toutes les merveilles que les vanglistesont crites sous sa dicte.

femme sublime, incomparable prophtesse!A qui croirais-je, si je ne croyais pas votre pa-role? Je crois donc tout ce que vous avez dit dudivin enfant que j'adore. Je crois que Dieu n'apas voulu partager avec un homme imparfaitsa dignit de pre, l'gard de celui qu'il en-

1. Voy. Luc, cap. I, depuis le verset 39 jusqu' 56.


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gendre de toute ternit '. Je crois qu'il a voulucarter, de la gnration temporelle de son trspur et trs saint Fils, l'action redoutable etsuspecte d'un principe qui, tout-puissant qu'isoit dans son opration et respectable dans sonessence, a reu la marque du pch et s'estimprgn des passions d'une longue suite de g-nrations 2 . Je crois que toute la Trinit s estsubstitue la force mystrieuse qui, selon leslois de la nature, produit la vie humaine, etqu'il est juste, cependant, de faire honneur decette uvre l'Esprit-Saint. Il est l'amour vi-vant et substantiel dont Dieu s'aime ternelle-ment dans les cieux, la source des grces, leprincipe de notre filiation surnaturelle et detoute saintet ; et l'incarnation est, par excel-lence, l'uvre de l'amour divin, la grce su-prme qu'aucun mrite n'a prpare ; elle met

1. Cum Chrislus sitverus et naturalis Deifilius, non fuitconveniens quod alium patrem haberet quam Deuro, neslignitas patris transferretur ad aiium.(Samm. theol., 111 P.,fust. 28, A. i.)'

2. In conceptione viriexfmina non est aliquid immun-dum, in quantum est opus Dei... Est ibi tamen aliqua im-munditiaexpeccatoproveniensproutcum libidine quisconci-yitur ex commistione maris et fmin : quod in Christoion fuit. (Summ. theol., III P-, quaest. 31, A. 4, ad.S.^


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dans la famille humaine le vrai Fils de Dieu, ce-lui que l'ange a appel la saintet mme 1 . Jecrois donc que Jsus-enfant a t conu del'Esprit-Saint, non par un acte gnrateur quipermet au fils de dire celui qui l'engendre :Mon pre, mais par un acte crateur qui rem-place les fonctions d'une loi naturelle 2 . Je croisque cette merveille s'est accomplie dans lechaste sein d'une vierge, sans la dpouiller duprivilge d'innocence et de puret qu'elle avaitmis, par un vu, sous la garde de Dieu. Credoin Jesum Christum, qui conceptus est de SpirituSancto, natus ex Maria virgine.

J'entends bien que la science physiologique sercrie contre ces affirmations de notre foi : Gelane s'est jamais vu, dit-elle : cela est impossible.Cela ne s'est jamais vu, soit; cela est impossible

,

non. Une science suprieure la physiologieme dit, par la bouche de l'ange, que rien n'estimpossible Dieu : Non eril impossibile apudDeum omne verbum. moins de rechercher,

l.Cf. Summ.theol.,IHP., quaest. 31, A.l. Utrum SpiritusSanctus fuerit principium activum conceptionis Chrsti?

2. Cf. Ibid., A. ^lUtrum Christus debeat dici canceptusde Spiritu Sancto ? A. 3 : Utrum Spiritus Sancrtus diadebeat pater Cl^-isti secundum carnem?

CARME 1880. 3.


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comme le font ls matrialistes obstins, l'ab-jection dans notre origine, moins de s'engager,avec eux, dans un ddale d'absurdits scienti-fiques contre lesquelles proteste l'exprienceaussi bien que notre dignit, il faut bien ad-mettre que l'espce humaine a commenc, etque ses premiers gnrateurs ont reu de Dieuseul, avec la vie, le pouvoir de la communiquer. Mais, si Dieu a. dj fait l'homme sansl'homme, pourquoi ne se reprendrait-il pas cet acte souverain, ne serait-ce que pour nousmontrer les merveilles de sa toute-puissance?La maternit virginale, dit saint Thomas,comble les possibles, relativement la produc-tion de letre humain. Adam, le pre deshommes, est sorti d'un obscur limon vivifi parle souffle de Dieu ; Eve, mre des vivants, a tprise dans les flancs de celui qu'elle devaitpouser; la race humaine obit au commande-ment divin : Crescite, multiplicamini, et nat del'homme et de la femme; il ne restait plusqu'un mode de production : natre de la femmeseule, et par l'unique concours de l'oprationdivine 1 .

1. Per hune modum completur omnis diversitas gnera-


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I/ENFANT. 35

Dieu rservait cet honneur Jsus-Christ,non seulement pour nous montrer les ressourcesde sa puissance, mais pour mettre la naissancetemporelle de son Fils en harmonie avec sonternelle gnration, et pour nous donner en luile type de notre spirituel enfantement. C'est del'esprit pur par excellence, de la substancevierge de Dieu mme, sans aide et sans effort,que procde dans les cieux le Verbe immacul.Pouvait-il se revtir de notre chair ailleurs quedans le sein d'une vierge affranchie des troublesmystrieux et des douleurs dont se paie, selonla loi commune, l'honneur de la maternit ! ; etn'tait-il pas juste qu'il reprsentt, par sationis humanae. Nam primus homo productus est ex hmoterr


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naissance, ceux qui, profitant de son incarnation,deviendraient les fils de Dieu en renaissant,comme dit l'aptre saint Jean, non du sangni de la volont de l'homme, mais de la vertu deDieu. Ddit potestatem fdios Dei fieri hisqui non exsanguinibus, neque ex voluntate car-nis, neque ex voluntate viri, sedex Deo natisunt d .

Et puis, Messieurs, dans le monde nouveauque devait crer e Verbe incarn, Dieu prpa-rait de glorieuses destines la virginit. L'antiquit la connaissait peine ; le christia-nisme l'a vue se multiplier, et prendre la ttedes grands services gratuits dont bnficie l'hu-manit. Jetez un coup d'oeil sur le monde ca-tholique; le sacerdoce, l'apostolat, la prire,l'enseignement des pauvres, le culte de la mi-sre,n'y sont-ils pas, pour l'ordinaire, le partage

1. Quod Christus sit conceptusde virgine conveniens fuitpropter finem incarnationis Christi. Quae ad hoc fuit, uthomines renascerentur in filios Dei, non ex voluntate car-nis, neque ex voluntate viri, sed ex Deo, idest ex ipsa Deivirtute, cujus rei exemplar apparere debuit in ipsa concp-tione Christi: unde August. dicit in libro de Sancta virgi-nitate: Oportebat caput nostrum insigni miraculo secun-dum carnem nasci de Virgine, Ecclesia secundum spiritumnascitura. (Summ. theol., 111 P., o^aest. 28, A. 1, c.)


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des vierges? Des vierges l'autel, pour donnercomme une nouvelle naissance l'agneau sanstache et l'offrir son pre ; des vierges, pour vo-ler jusqu'aux extrmits du monde et enfanter Jsus-Christ les peuples infidles ; des viergesdans la solitude, pour compenser par de longuesoraisons les oublis religieux del famille chr-tienne, pour prier, gmir, supplier comme desmres plores, afin d'carter de la tte despeuples coupables les coups de la justice di-vine; des vierges l'cole, pour donner l'meignorante du peuple la vie intellectuelle; desvierges dans les rduits infects o se cache lamisre; des vierges dans les hpitaux; desvierges, pour prodiguer l'infortune et dpen-ser au chevet de la souffrance des tendressesplus que maternelles; des vierges, partout desvierges. Savez-vous, Messieurs, d'o sont nsces essaims laborieux et dvous, prompts tous les services? Du fait thologique, dontvous entendez prsentement l'apologie Ah!Dieu savait bien ce qu'il faisait, en confiant une maternit virginale son uvre fondamen-tale. Il crait un type puissant, dont l'influ-ence devait retentir en tous les ges chrtiens.

2


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C'est la Vierge Mre qui nous attire sa suite,par le parfum pntrant de sa puret ; c'est ellequi engage au service du roi des rois l'immenseet active lgion des vierges : Adducentur rgivirgines post eam *

.

OMre de mon Sauveur, en vovantles fruitsde votre virginit, je crois que vous tes vierge ;vierge avant, pendant et aprs votre miracu-leux enfantement. Ah ! je voudrais tre angepour chanter, en de chas tes hymnes, votre beau-t unique entre toutes les beauts. Contraire-ment la loi, en vous l'honneur maternel nedtruit pas l'intgrit virginale, et l'intgritvirginale rehausse l'honneur maternel d'unclat que lui refuse la nature. Vous tes mred'autant plus admirable que vous tes vierge,et vierge d'autant plus tonnante que vous tesmre. J'ai vu les arbres de nos vergers se cou-vrir au printemps de fleurs blanches comme laneige; qu'ils taient beaux leurs rameaux char-gs d'esprance ; et l'automne venu, je les trou-vais plus beaux encore, lorsqu'ils ployaient sousle poids de leurs fruits dors ; mais depuis long-

i. Psalm. \li\.


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tements douloureux 1 . Elle tait vierge quand lamystrieuse opration de l'Esprit-Saint, rpon-dant son fit, forma dans son sein la chair sa-cre du Sauveur; son fils vient de natre, elleest vierge encore ; elle sera vierge toujours,Toujours, car le fils parfait, qui est unique danslescieux, doit tre unique sur la terre; toujours,car le sanctuaire de l'Esprit-Saint ne peut pasperdre, dans un vulgaire hymne, son augusteconscration; toujours, car il est impossible quele cur reconnaissant de Marie, possdant leplus beau des fils, le plus cher des trsors, dsireavoir encore moins que ce qu'il possde ; tou-jours, car l'humble Joseph a compris qu'il nepeut plus tre que le chaste adorateur des mys-tres que le ciel lui a rvls 2 .

1. Cf. Surnm.' theol.,111 P., quaest.28, A. 2: Utrum ma-ter Dei fuerit virgo in partit? Item, qusest, 35, A. 6.

2. Absque omni dubio detestandus est errorHelvidii, quidicere praesumpsit, matrem Christi post partum Josephesse carnaliter cognitam, et alios filios genuisse. Hoc enimprimo derogat Christi perfectioni, qui sicut secundum di-vinam naturam unigenitus est Patris, tanquam perfeclusperomnia filius ejus: ita decuit ut esset unigenitus matristanquam perfeotissimum germen ejus. Secundo hic errorinjuriam facit Spiritui Sancto, cujus sacrarium fuit utrusvirgiicMis, in quo carnem Christi formavit : unde non de-


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11 est vrai que Jsus-enfant est appel le pre-mier n de Marie. Mais je sais que ce terme ju-daque et lgal dsigne, dans le langage sacr,le fils unique aussi bien que l'an des nombreu-ses familles. Il est vrai que l'vangile me parledes frres et des surs de Jsus ; mais je saisque, chez les Hbreux, on donnait ce nom auxproches parents. Enfin, je sais que l'hrsieet l'incrdulit, peu au courant des usages ju-daques, ou dcides n'en pas tenir compte,nous disputent la perptuelle virginit de Marie;mais notre foi respectueuse s'en rapporte cesparoles de l'glise : Mre, aprs votre enfan-tement, vous tes demeure Vierge sans souil-lure! i)Postpartum, Virgo, inviolata permansisti

Jj'honneur de nos mres selon la nature, c'estcebat, quod de eaetero vioiaretur per commistionem viri-lem. Tertio derogat dignitati et sanctitati matris Dei, quseHigratissima videretur, si tanto filio contenta non esset, etsi virginitatem, qu in ea miraculose conservata fuerat,sponte perdere vellet per carnis conu bitum. Quarto etiamipsi Joseph esset ad maximam praesumptionem imputan-dum, si eam quam, rvlante angelo de Spiritu SanctoDeum concepisse cognoverat, polluere attentaret. Et sim-pliciter est asserendum, quod mater Dei s'icut virgo con-cepit, et virgopepeiit, ita etiam et virgo post partum sem-piternum permansit (Summ. theol.. IIIP.,quaest,28, A. 3.)


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leur inaltrable fidlit au serment d'amour quienchane leur vie la vie de nos pres. Nousne pouvons souffrir que cette fidlit soit soup-onne. Eh bien! l'honneur de notre mre se-lon la grce, c'est son inviolable respect pour lachaste et miraculeuse opration qui lui a don-n le Christ pour fils, sans offenser sa virginit ;ce aussi, les oreilles de ceux qui aiment Jsus-Christ se rvoltent-elles, dit saint Basile, lors-qu'elles entendent dire que Marie a cess d'trevierge *

.

Marie est vierge ; mais ne croyez pas, Mes-sieurs, qu'il manque quelque chose sa mater-nit; qu'elle ne soit que le chemin vnrablepar lequel le Fils de Dieu vient nous. Elle estaussi vritablement mre qu'il est possible del'tre, puisqu'elle a donn au fruit bni de sesentrailles tout ce que les mresdonnent leursfils, puisque c'est de sa trs pure substance quel'action cratrice de TEsprit-Saint a form iecorps sacr du Sauveur 2 . Et parce que ce corps

1. ......|ay) xaxaolxeo'Qat x>v (ptXoxptffftov ty)v ocxoyjv, oti rtoxlinaGOLio eivai 7iap6vo Y) eoxoxo. (Homil.XXV, deNdtivitaleChristi.)

2. Cf.Summ.theol., 111 P., qusest. 35. A. 3: Utrumsecun


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prcde, dans l'ordre de la prdestination et del'excellence, toutes les cratures du ciel et de laterre; Dieu peut faire un monde plus grandque celui qu'il a cr, dit saint Bonaventure, ilne peut pas faire une mre plus grande que lamre de Dieu 1 . Marie est mre de Dieu, c'est--dire, une petite fille des hommes devient laparente etcomme le complment de la Trinit,dans l'uvre par laquelle le Dieu trois foissaint se manifeste nous, et ramne sa gran-deur infinie la circulation universelle de la viequ'il a cre pour sa gloire. Marie est mre deDieu, c'est--dire, une petite fille des hommesest pouse par la vertu divine et donne de sasubstance un Dieu. Marie est mre de Dieu,c'est--dire, une petite fille des hommes est,ici-bas, la plus parfaite image de Dieu; car,comme il y a dans les cieux un pre divin quidit au Dieu qu'il engendre ternellement : Tu esmon Fils, il y a sur la terre une mre humaineparte nihil potest fieri melius, sicut non potest aliquidmelius esse Deo. (Summ. theol., 1 P., quast. 25, A. 6,ad 4.)

1. Majorem mundum potest facere Deus; majorera ma-trem quam matrem Dei facere non potest {Specul., cap.VIII.)


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qui dit au fruit bni de ses chastes entrailles:Tu es mon fils; et le fils de la mre humaineest le mme que le fils du pre divin 1 . Enfin,Marie est mre de Dieu, c'est--dire, une pe-tite fille des hommes a droit l'obissance etaux hommages d'un Dieu. tonnez-vous doncque les peuples chrtiens l'honorent d'un culteminent, qui ne peut avoir au-dessus de lui quel'adoration.

Messieurs, je crois vous entendre me repro-cher d'avoir oubli mon sujet. J'avais promisde vous parler des grandeurs de Jsus, et voilque ma parole est toute sa mre. Pourtant,je n'ai pas fait fausse route, car c'est pour Jsus-enfant que Marie est si grande, c'est de Jsus-enfant qu'elle reoit les plus vifs rayons de sagloire privilgie. Aprs avoir sem les prodigessur le long chemin des sicles pour prparer lavenue de son Fils, Dieu les concentre dans laVierge Mre; c'est par cette porte vivante, cons-telle des plus tranges merveilles, que le mi-racle des miracles, l'Enfant-Dieu, entre dansle monde. Je ne vous dirai pas les perfections

1. Cf. Summ. theo!., III P., quaest. 35, A. b.Utrumin Christo sint du filiationes?


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4(> VIE DE JESUS.

qu'il possde ds les premiers instants de savie, nous les avons adores ensemble; rappe-lons ici nos souvenirs 1 ; ouvrons les yeux auxmiraculeuses clarts qui illuminent la froidenuit de la nativit, et prtons l'oreille au can-tique des anges : ce Gloire Dieu au plus hautdes cieux : y> Gloria in altissimis Deo.

III

Gloire Dieu! son rgne, depuis longtempsannonc et attendu, commence au berceau deJsus-enfant. Rome et Bethlem se disputentl'empire du monde. A Rome, Csar Augustea vu rentrer, Tune aprs l'autre, ses lgionstriomphantes. Il se croit le matre de l'universet interprte en faveur du monstrueux pouvoirqu'il a fond les oracles qui promettent ktville aux sept collines une ternelle domination.Vain rve de l'orgueil aveugl! L'empire desCsars n'aura qu'un temps. Ivre du sang des

1 . Cf. Perfections de Jsus-Christ : spcialement 3637, 38, 39me confrences.


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martyrs, excr des peuples opprims, dpecpar les barbares, il abandonnera un jour sa ca-pitale dvaste au monarque suprme. Ce mo-narque est Bethlem; c'est l qu'il s'essaie rgner sur l'univers.

Quoi donc? Un enfant, qui n'a pu trouverplace dans les htelleries et que sa triste mreest oblige de coucher dans une mangeoired'animaux aprs l'avoir envelopp d'un pauvrelange, c'est le matre du monde? Oui, Mes-sieurs ; Ftable est son palais, la crche sontrne, le pauvre lange sa pourpre. Dans ce mi-srable tat, il commence exercer son pouvoirsouverain et nous dorme, en ceux dont il ravitou pouvante les curs, comme une rductionde son rgne universel.

coutez ce rcit que j'emprunte l'vangile.Pendant que Jsus vient au monde, des ber-gers veillent sur une colline voisine de Bethlem la garde de leurs troupeaux. Ils sont pauvres,l'enfant pauvre les a choisis pour tre ses pre-miers adorateurs; et, parce qu'ils sont filsd'un peuple depuis longtemps habitu lavisite des anges, il leur envoie un messagercleste, don.4 la divine lumire les enveloppe et


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les frappe de terreur. Ne craignez pas, ditl'ange ; je viens vous annoncer une grande joiepour vous et pour tout votre peuple. Un sau-veur vous est n aujourd'hui dans la cit deDavid; c'est le Christ Seigneur. Et voici lesigne auquel vous le reconnatrez; vous trou-verez un enfant envelopp de langes et couchdans une crche : c'est lui. Et, tout coup,se joignit l'ange une foule de l'arme cleste,louant le Seigneur et chantant: ce Gloire Dieuau plus haut des cieux, et paix sur la terre auxhommes de bonne volont,

Les anges se retirent; et les hommes debonne volont, au lieu de suspecter la mer-veille dont ils viennent d'tre tmoins, parhorreur pour le mystre trange qui leur estannonc, se laissent entraner vers le mystreparla merveille. a Passons, disent-ils, jus-qu' Bethlem et voyons ce qui s'est fait.Usarrivent en hte, trouvent Marie et Joseph, etl'enfant dans sa crche, et reconnaissent lavrit de ce qui leur a t dit. Leur foi naveest rcompense par des rvlations queTvangile passe sous silence, mais qu'il laissedeviner, car tout le monde est dans l'admira-


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l'enfant. 49

tion de ce que racontent les bergers; et Mariesilencieuse mdite, dans son cur, le premiereffet des charmes et de la toute-puissance deson divin fils 1 .

Les simples et les pauvres soni appels; maisl'enfant de Bethlem a des ambitions plusgrandes. Huit jours aprs sa naissance, il re-oit, en change de son premier sang, le nomde Jsus, qui veut dire sauveur, et affirme ainsiles droits qu'il prtend faire valoir sur le mondeentier. Les justes viennent bientt reconnatreces droits; ils n'ont pas besoin de signes ex-trieurs, habitus qu'ils sont obir avec unecrainte respectueuse aux mouvements de l'Es-prit-Saint. Un instinct divin, une parole int-rieure les conduit dans le temple au momento, selon la loi, Jsus s'offre au Seigneur dansles bras de-sa mre. Le vieux Simon reconnatdans cet enfant obscur le promis de Dieu, il leprend, le presse sur son cur, et entonne lecantique de l'ancien testament qui s'en va, pourfaire place au nouveau: Seigneur, renvoie enpaix ton serviteur, car mes yeux ont vu le salut

I- Voy. Luc, cap. H, depuis le verset 1 jusqu'au 20e .CARME 1880. 4.


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que tu nous as prpar, la lumire qui va clai-rer les nations et la gloire de ton peupleIsral. Anne la prophtesse s'unit ses trans-ports et devient l'aptre du rdempteur ! .

Mais Simon vient de prononcer des parolesprophtiques en lesquelles se rsume tout lergne du Christ. Cet enfant sera la ruine etla rsurrection d'un grand nombre, il a tplac dans le monde comme un signe de con-tradiction. y> L'vnement suit de prs la pro-phtie. Hrode se trouble, Jrusalem est enmoi, car trois Mages, accompagns d'une richecaravane, arrivent d'Orient conduits par unetoile. Ce sont des savants ; Dieu contenteleur raison par des calculs astronomiques quileur permettent de reconnatre une constella-tion , depuis longtemps prdite et attenduecomme le signe mystrieux de l'avnement d'unnouveau roi. Ce sont des puissants; ils viennentrendre hommage au monarque que les cieuxannoncent.


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Synagogue, claire par les prophtes, les en-voie Bethlem, et l'toile leur indique la de-meure de celui qu'ils cherchent. Cruelle dcep-tion ! Ils croyaient entrer dans un palais : unehumble maison leur ouvre ses portes, et lesvoil devant l'enfant de deux pauvres gens. Mais,sur le visage innocent de cet enfant, la beautvictorieuse d'un Dieu rayonne et sduit leurscurs. Ils tombent genoux devant lui, et pardes prsents symboliques: l'or, l'encens et lamyrrhe, ils adorent sa divinit, sa royaut, sonhumanit sainte et les prcoces douleurs qu'ilendure pour le salut du genre humain.Jsus-enfant prosterne donc auprs de son ber-

ceau les savants et les puissants; en mme temps,il pouvante le cur d'un roi jaloux, qui djmdite sa mort. Il faut, pour le soustraire aumassacre dans lequel on croit l'envelopper, queJoseph et Marie l'emportent en Egypte, o tasdieux s'croulent sur son passage et d'o il nereviendra qu'aprs la mort d'Hrode 1 .

1. Voy. Matth., cap. u, depuis le verset 1 jusqu'au 23*.Cf. Summ. theol., totam quaest. 36 : de Manifestatione

Christi nali.A quelle ?poque les Mages vinrent-ils Jrusalem et de


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jet, je dois appeler votre attention sur la royalegrandeur de l'enfant qui commence son rgneet prend souverainement possession de ses su-jets. Ds les premiers jours de son existenceterrestre, il nous donne un abrg de l'histoireglorieuse que les sicles vont crire aprs lui,en trois mots: LeGhristest vainqueur, le Christcommande, le Christ rgne: Christus vincit,aussi furent-elles promptement suivies de la retraite enEgypte. Les politiques du monde seront ternellementle jouet de leurs propres prcautions, que Dieu tournecomme il lui plat; et il fait que tout ce qu'il veut s'ac-complisse, sans que les hommes puissent l'empcher,puisqu'il fait servir leurs finesses ses desseins. (El-vations, xix, 4.)Une autre opinion place l'adoration des Mages aprs la

prsentation, probablement le 6 janvier de l'an 749 deRome, un peu plus d'un an aprs la naissance de Jsus-Christ. Prenant la lettre de texte de saint Matthieu, ellefait partir la sainte famille pour l'Egypte la nuit mme quisuivit le dpart des Mages. Le Pre Papebrock, dans lesActa sanctorim (april,) et le Pre Patrizzi, dans sonouvrage sur les Evangiles (Hb. III, dissert. xx),ont r-uni tous les lments de cette question chronologique. Lelong sjour que la sainte famille dut faire Bethlem, d'a-prs ce sentiment, peut s'expliquer facilement, dit l'abbDarras (Hist. de l'glise, 2me part. l r8 poque, ch. m, 3 note), si l'on tient compte de toutes les donnesqui nous sont fournies par le texte sacr : 1 L'vangilenous apprend que la sainte Vierge habitait Nazareth avantson mariage, mais il ne nous dit pas le moins du monde


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Christus rgnt, Christus imperat. En effet,dans l'action prcoce de Jsus-enfant, commedans l'action perptuelle du Christ sur l'hu-manit, nous constatons les mmes moyens etles mmes effets.

Les mmes moyens, c'est--dire les miracleset la grce : les miracles pour branler l'mehumaine, la grce pour briser les orgueilleusesqut saint rfosepn y tut nxe. 2 Loin d'attribuer cne rsi-dence, mme intentionnelle, saint Joseph avant l'poqueo il reut la mission d'tre le gardien de Marie et le prenourricier de Jsus, l'vangile suppose prcisment toutle contraire. En effet, lorsque, avertie par l'ange, la saintefamille quittera l'Egypte pour revenir en Palestine, cen'est point en Galile, o tait situe Nazareth, que Josephse propose de retourner, mais dans la tribu de Juda (inJuda), o tait situe Bethlem. La crainte d'Archlas,fils d'Hrode, qui rgnait en Jude, et un avertissementdivin le dterminent seuls revenir Nazareth; et l'his-torien sacr note cet incident comme une circonstanceprovidentiellement mnage, en dehors de toutes lesprobabilits humaines : Ut adimplerelur qnod dictum estper prophetas : quoniam Nazarus vocabilur. (Matth.,cap. il, 23.)

Dans un sentiment comme dans l'autre, aucune difficul-t n'est insoluble.Les Mages vinrent Bethlem conduits par une toile.

Quelle tait cette toile? Saint Thomas, avec toute l'anciennetradition, la considre, non comme un astre faisant partiedes constellations clestes, mais comme u?i phnomne denouvelle cration (stella de novo creata) apparaissant et


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rsistances de la raison devant, les insondablesmystres de la foi, et lui en faire admirer, mal-gr le scandale des apparences, les sublimesbeauts.

Les miracles et la grce ont soumis au Christenfant les pauvres, les justes, les sages et lespuissants; et, l o ils n'ont pas produit leureffet normal, ils ont sem l'pouvante et la haine.N'est-ce pas ce que nous voyons plus tard, lors-

se mouvant,au gr de la volont deDieu,dans les hautes iv-gions de l'atmosphre. (Summ. theol. III. P., qust. 36,a. 7.) Cette opinion a l'avantage de s'accorder sans effortavec le texte sacr, qui suppose un mouvement de l'toiledes Mages d'Orient en Occident, des apparitions et des dis-paritions obissant une volont libre plutt qu' des loisnaturelles.

Les savants modernes pensent que les Mages ont re-gard comme le signe divin de l'avnement annonc parleurs traditions la triple conjonction de Jupiter et deSaturne, dont nous avons parl plus haut. Ils se dirig-rent vers l'Occident, o leur apparaissait ce phnomne si-dral.

Ce phnomne eut, d'aprs les calculs de Kepler et d'Ici-1er, plusieurs apparitions et disparitions. La premire ap--parition fut le signal du dpart; la dernire indiquale pointd'arrive. Mais, dans ce sentiment, ii faut suivre l'ordre li-turgique et fixer l'arrive des Mages au 6 janvier 74.8, caren 749 le phnomne avait disparu. On peut fondre cesopinions en une seule, et dire que les Mages ont t avertis


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L'toile, c'est la doctrine du Christ, si haute,si pure, si harmonieuse, si fconde, que les es-prits droits et levs qui cherchent sincrementla vrit ne peuvent s'empcher de lui rendrehommage. L'toile, c'est l'Eglise, tellementfidle aux promesses d'indestructible vitalitqui lui ont t faites, tellement ferme au milieudes temptes lorsque tout croule autour d'elle,qu'il est impossible de n'y pas reconnatre unsigne divin. En rponse ces merveilles, et pourconfirmer leur action, la grce, continuellementrpandue, attire mystrieusement les curs,donne la foi le courage de s'affirmer par desuvres, et fond ensemble les lments diversdu vaste royaume dont tous les sujets obissentau mme matre: Jsus-Christ.Vous le voyez, Messieurs, ce qui s'est faitdans le monde chrtien, depuis plus de dix-huitsicles, n'est que la reproduction plus amplede ce qui s'est fait la crche. Et remarquezque, sous l'action des mmes moyens, les mmesphnomnes se reproduisent dans le mmeordre. Ce sont gnralement les pauvres et lesignorants, ceux qu'on appelle des gens de rien,qui se soumettent les premiers au sceptre du


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roi Jsus. Partout et eu tout temps ils sont lesprivilgis de son choix, comme si Dieu devaitcette compensation leur tat humili, et cet tercompense leur simplicit, moins rebelleque la fire raison des sages aux manifestationsde la puissance divine et l'tranget des mys-tres.Peu aprs viennent les mes intelligenteset droites, moins attentives aux signes ext-rieurs qu' l'instinct divin qui les tourmenteet les entrane vers les lumineuses rgions obrille la vrit. Les savants et les puissants ar-rivent en dernier lieu, parce qu'ils partent dupays lointain de l'orgueil, des dlices et de lajouissance, et que leur raison, lente se satis-faire, retarde leur acquiescement au vrai. Iln'est pas jusqu'au trouble, aux inquitudesfroces et aux fureurs d'Hrode que nous nevoyions se reproduire en prsence du mouve-ment qui conduit les mes Jsus-Christ. Le^rois et les princes de ce monde ont plus d'unefois ensanglant le royaume du Sauveur, etdes millions de chrtiens ont succd, dans lessupplices, auxchers enfants que l'glise appelleles Fleurs du martyre. Sous le coup des per-scutions, le Christ rsiste dans ses membres;


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mais, quelquefois aussi, il s'en va dans l'exilattendre des jours meilleurs , qui lui per-mettront de revenir aux lieux bnis o il luiplat de prodiguer ses prodiges et. ses grces.L o il s'exile, sa divine vertu le suit; nous

en avons pour preuve, Messieurs, une page del'histoire moderne. Nos prtres, proscrits parlarvolution, ne craignirent pas d'aller demanderl'hospitalit au peuple anglais. Leur prsencesur le sol britannique fut comme un fermentsacr qui touffa la rancune protestante etrveilla la foi catholique. Depuis qu'ils ontpass par l, les lois draconiennes de l'hrsies'endorment, l'une aprs l'autre, dans la pous-sire des parchemins, et le rgne de latolrance,sincrement inaugur, favorise le grand mouve-ment de conversion qui ramne l'Angleterre la foi de ses pres. Nos prtres sont revenus et,avec eux, la foi de Jsus-Ghrist; qu'on les pros-crive encore, ils sauront rendre fcond leurexilet ramener parmi nous le Christ triomphant,lorsque la mort aura moissonn la misrablerace des Hrodes, si l'infamie ne prcde lamort pour les touffer.De ces comparaisons historiques vous devex


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conclure, Messieurs, que tout est harmonieuxdans le rgne du Christ, que sa naissance n'estpoint un fait obscur et vulgaire, mais la prise depossession d'un roi, qui donne l'avenir desgages, par une rduction prophtique de l'im-mense action qu'il doit exercer un jour sur lemonde entier.

Allons donc ensemble la crche adorer notreroi. C'est un enfant, mais les sicles, le ciel,la terre, les patriarches, les lgislateurs, les rois,les prophtes, les peuples illustres, les matresdu monde, les oracles, les grands vnements,la paix universelle, les constellations,encadrentson berceau, et les plus tonnantes merveillesse multiplient pour fter sa naissance. 11 neparle pas encore, mais il est si beau et si fort deses charmes qu'il peut ravir les curs et lessoumettre son joug ador. Il soutient lemonde, et il se laisse bercer dans les bras de samre, qu'il remercie d'un regard caressant, pournous enseigner honorer et aimer cette trspure Vierge comme elle mrite d'tre aime ethonore, et nous abandonner sa maternelleprotection. Il est l'gal de Dieu, et il semontre petit pour nous apprendre nous hu-


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mi lier, ne pas trop faire les hommes en pr-sence des mystres, mais les accepter avec lasimplicit et la candeur des enfants


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Messeigneurs ! , Messieurs,

Jsus-enfant a jet l'alarme dans e curd'un roi, qui craint de voir crotre le revendi-cateur attendu de son trne usurp. Avant dedonner cong aux illustres visiteurs que la Sy-nagogue, sur la foi des oracles, envoie dans lapetite ville de Bethlem, Hrode leur promethypocritement d'aller bientt joindre ses hom-mages leurs hommages, s'ils reviennent lerenseigner sur ce qu'ils auront vu. Il mditaitdj le massacre des Innocents. Mais les anges,qui avaient annonc la naissance de l'enfant-Dieu, veillaient sur son berceau. Les Mages,

1. Monseigneur Richard, coadjuteur de Paris; Mon-seigneur ttavinet, ancien vque de Troves.

CARME 1880. 5.


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avertis des sinistres projets d'Hrode- retour-nrent dans leur pays sans passerpar Jrusalem,et Joseph, rveill par un messager cleste, pritl'enfant et sa mre, et s'enfuit avec eux enEgypte.

rL'Evangile ne nous dit rien des fatigues dece voyage ni des douleurs de cet exil, maispour qui sait ce que les pauvres ont souffrirlorsqu'ils migrent sur une terre trangre, ilest facile de le deviner.

Hrode tant mort, crit TEvangliste saintMatthieu, voil que l'ange du Seigneur apparut Joseph, qui dormait en Egypte. Il lui dit :Lve-toi, prends l'enfant et sa mre, et va dansla terre d'Isral, car ceux qui recherchaient lavie de l'enfant sont morts. Joseph, se levantdonc, prit l'enfant et sa mre, et vint en Isral.Et apprenant qu'Archlas rgnait en Jude laplace d'Hrode son pre, il craignit d'y aller ; et,averti de nouveau dans son sommeil, il se re-tira en Galile et vint habiter dans une villeappele Nazareth l .

C'tait l que, cinq ans auparavant, l'angetait venu demander l'humanit son consen-

i. Matth., cap. H, 19-29. Luc, cap. il. 39.


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tement pour les noces du Verbe avec notre na-ture ; l qu'avait retenti le fit qui appela l'Es-prit- Saint dans le sein d'une vierge ; l que Marieavait port avec un profond respect et cachavec une pieuse discrtion le mystre divin; lque Joseph avait appris vnrer la maternitvirginale de son pouse et le fruit bni qu'elleattendait. Ils croyaient avoir dit adieu cetteville consacre par l'incarnation du Verbe ; maisDieu les y ramne pour prparer dans l'ombreune nouvelle manifestation de son fils. Les an-nes vont s'couler autour de la sainte famille,silencieuses et vulgaires, claires seulementd'un trait de lumire que les hommes oublie-ront bientt, et cela durera jusqu' ce que Jeans'crie : Ecce agnus Deif Voici l'agneau dtDieu! y>Ne dois-je pas respecter le silence des saintes

Lettres, et passer discrtement prs de la petitemaison de Nazareth, sans jeter un regard dansson intrieur? Non, Messieurs; les vanglistesse proposaient de faire connatre au monde lavie publique de leur matre, sa doctrine, ses mi-racles, son sacrifice, son triomphe et l'tablis-sement de son uvre ternelle; mais ils n'ont


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pas prtendu nous interdire de suivre, par lapense, la vie obscure de Jsus adolescent, decontempler sa merveilleuse croissance, de de-mander son religieux silence et son humbletravail des leons pour notre propre vie. Allonsdonc Nazareth comme nous sommes alls Bethlem ; voyons ce qui s'y passe, et instrui-sons-nous prs de celui dont les actions les plussimples et les plus ignores doivent tre f-condes pour ceux qui savent les mditer chr-tiennement.

1

Non loin desbordsde YAdriatique, surle som-met d'une colline d'o l'on aperoit les flotsazu-rs de la mer, s'lve une petite ville, presqueun bourg, qu'on appelle Lorette. Lesvoyageursque rien ne presse s'y arrteraient peut-trepour jouir un instant de la fracheur de la briseet des beauts du site ; ceux qui se htent nelui jetteraient qu'un coup d'oeil en passant, s'iln'y avait l une divine attraction. Sous le dmed'une vaste basilique, une toute petite chambreinvite les plerins l'adoration. Bramante l'a


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souterraine o reposaient Joseph et l'enfant;je reconstruisais, sur les flancs de la maison,l'appentis mobile qui servait d'atelier au char-pentier et a celui qu'on appelait son fils; j'en-cadrais cette modeste demeure d'un doux etgrandiose paysage clair par un beau ciel, verslequel s'lvent les cimes du Carmel, du Tha-bor, du Liban, et j'avais sous les yeux la terresainte et le mystrieux sanctuaire o Jsus secacha pendant plus de vingt-cinq ans.

Que faisait-il en cet obscur sjour, o nepntrait jamais l'il indiscret du monde? Ilcroissait et se fortifiait, nous dit l'vang-liste, comme croissent et se fortifient les en-fants : Puer autem crescebat et confortaba-tur; et, pour se rendre utile dans la famillepauvre o il avait choisi de vivre, il employaitses petites forces au service de ses parents. Onmontre encore Nazareth la fontaine o il allaitpuiser de l'eau pour sa mre, car ce Notre Dame,dit saint Bonaventure, n'avait point d'autreserviteur que lui . Les anges invisibles l'ac-compagnaient toujours et adoraient les tracesde ses pas, et lui, te roi des anges, semblableaux enfants pauvres^ se laissait commander,


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par ses cratures, les plus humbles offices dela vie domestique.

Il avait toutes les grces touchantes et aima-bles du jeune ge, et pourtant rien de puril,ni dans les traits de son grave et doux visage,ni dans ses paroles, ni dans ses actions ; car, pen-dant que la nature, en son corps trs pur, gra-vitait lentement vers sa plnitude, la sagessedivine remplissait sa sainte me et la grce ypuisait tous ses dons : Plenus sapientia etgratia Dei erat in Mo *

Cependant, par respect pour l'autorit deceux qui il tait soumis, et pour ne pas pren-dre sur eux l'ascendant d'un matre, il tem-prait les manifestations extrieures de ses per-fections caches, comme le jeune arbre, qui nedploie que petit petit ses bourgeons, sesfeuilles et ses fleurs avant de nouer ses fruits;comme le soleil, qui, aprs avoir lgrementblanchi l'horizon, le colore des rougeurs crois-santes de l'aurore avant d'inonder l'espace deses rayons victorieux et de montrer sa face res-plendissante. De temps en temps, Joseph etMarie tressaillaient sous l'impression de quelque

1. Luc, cap. u, 4i>.


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parole profonde o vibraient les accents de lasagesse ternelle, etl'enfant se taisait pour leurlaisser le loisir de mditer ce qu'ils venaient d'entendre*Un jour, pourtant, un jet de lumire d'un

clat plus vif et plus soutenu traversa les t-nbres de la vie cache. On pouvait croire quel'heure des grandes manifestations tait arrive.Laissons l'vangliste raconter, en son simplelangage, cette scne adorable.


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continuer le miracle stupfiant d'un enfant quiconfond par sa doctrine la science des sages?videmment le monde sera profondment

remu parce spectacle insolite, et le Fils de Dieuimposera avec d'autant plus de facilit l'autoritde sa mission que le contraste sera plus frap-pant entre son jeune ge et la grandeur des v-rits qu'il annonce. il ne peut plus y avoir Nazareth que des annes perdues.

Ainsi raisonne notre humaine sagesse, Mes-sieurs; mais Jsus a d'autres desseins. Il luifaut encore dix-huit annes d'ombre, de silenceet d'humbles services, dix-huit annes que l'-vangliste rsume en ces quelques paroles :

Jsus descendit de Jrusalem avec ses pa-rents, et il vint Nazareth, et il leur tait soumis,et sa mre conservait toutes ces choses en soncur; et Jsus croissait en sagesse.en ge eten grce devant Dieu et devant les hommes 1 .

La libre pense, proccupe de cette conci-sion vanglique, s'efforce de remplir, par dessuppositions, l'espace silencieux qui spare lamanifestation au temple de la vie publique.Celui-ci veut que Jsus ait trouv dans ses

t. Luc. cap. il. 51-52.


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voyages annuels Jrusalem l'excellente oc-casion de se former l'esprit, au milieu du con-cours des juifs et des judasants de tout payset de toute opinion 1 . Celui-l fait intervenir levieux prtre Zacharie, pre de Jean-Baptiste, etl'investit d'un prceptorat problmatique 2 . Unautre invoque la nature, la fois riante etgrandiose, des matres ignors auprs desquelsJsus apprend lire et crire, l'tude soli-taire, les livres de l'ancien testament, la posiereligieuse des psaumes, les prophtes et sur-tout Isae, les ouvrages apocryphes, entre autrescelui de ce juif exalt qu'on appelle Daniel, l'in-fluence du grave et austre Hillel, mort depuiscinquante ans, mais toujours vivant dans sesaphorismes 3 . Hypothses gratuites et pu-riles, quand elles ne sont pas ridicules. Jsusn'avait apprendre des hommes rien qui ptle prparer l'trange et sublime mission qu'ildevait remplir plus tard. Il voulait tonner lesauditeurs de sa parole apostolique, comme iltonna les sages du temple, et ceux qui con-

1. Strauss, Vie de Jsus.2. Salvador, Vie de Jsus.3. E. Renan, Vie de Jsus.


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constants progrs de la sagesse et de la grce.Des profondeurs infinies de sa personne, o ilse recueillait, Jsus tirait chaque jour quelquenouveau trsor qu'il faisait passer de son curfilial dans le cur de ses parents par de tendrescolloques et de ferventes prires, quand il nedemeurait pas plong dans la contemplation desperfections infinies et comme noy dans uneamoureuse union avec son Pre cleste. Ainsi,il prparait sa grande uvre de salut et deperfection sur deux mes chres, les plusnobles et les plus saintes qui eussent jamaishonor la cration et rjoui fil de Dieu.

L'ombre entourait toujours la modeste de-meure de l'ouvrier, mais le jour grandissait l'intrieur. Toutes les beauts panouies deJsus faisaient pressentir que son heure taitproche. Enfin, on apprit que Jean disait au d-sert : Je suis la voix qui crie : prparez lechemin du Seigneur 1 . Ce fut, pour Joseph, lesignal du dpart ; sans souffrance et sans agonie,il s'endormit entre les bras et sur le cur deson fils adoptif, et il alla dire aux mes saintes

1. Ego vox Llamatitis in deserto dirigite viam Domini.(Joan., cap. i, 23.)


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qui depuis si longtemps attendaient leur dli-vrance : a Rjouissez-vous! J'ai vu la rosetombe du ciel; j'ai vu la chaste nue d'o lejuste est sorti; j'ai vu le dsir ; j'ai vu le ire-jeton de David; j'ai vu le fils de la Vierge; j'aivu le Messie; j'ai vu Emmanuel; j'ai vu Jho-vah, notre juste ; c'est mon Jsus! Il va bien-tt venir. j>

Messieurs, avez-vous encore sur les lvres etdans le cur des pourquoi*! Etes-vous encoretents d'crire sur le seuil de la maison de Na-zareth : annes perdues? Arrtez-vous, je vousprie, car je prtends vous prouver que les annesobscures de Jsus-ouvrier furent des annesimmensment fcondes.

Il

C'est une habitude divine de mettre lesprparations en rapport avec la dignit del'uvre qu'elles prcdent. A diverses reprisesle monde physique et le monde moral nous ontrvl cette loi. Nous la voyons encore une foisexprime dans la vie cache du Sauveur. En-voy pour rgnrer le monde par sa doctrine,


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austre, o les mes contemplatives se vouent,cornme Marie et Joseph, l'adoration silencieusedes perfections de Jsus- Christ, et aussi lemonastre recueilli , o l'homme apostoliques'abreuve de science et de grce divines pour serendre digne d'annoncer le royaume de Dieu,o il ploie sa volont sous le joug d'une cons-tante obissance pour apprendre commanderaux mes et Tes diriger dans les voies du salutet de la perfection. Grce ces prparations,l'Eglise obtient de ses ouvriers un travail gn-reux et soutenu, dont la parfaite unit assure lafcondit.

Qu'il serait dsirer, Messieurs, que tousles hommes publics fissent leur Nazareth, etne se missent l'ouvrage qu'aprs avoir long-temps tudi et mdit les redoutables ques-tions qu'ils agitent, qu'aprs avoir demand Dieu, avec son infaillible lumire pour rem-dier aux dfaillances de leur esprit, un suppl-ment de force pour soutenir leur volont auxprises avec les difficults de la vie sociale etpolitique. Que de surprises, que de dceptions,que d' insanits, que de hontes, que de catastro-phes seraient pargnes aux peuples infortuns


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du .sein desquels on voit surgir ces lgions d'ovriers de parole, de plume, de suffrage et dedcrets qui, pour arriver et pour travailler lamasse sociale, n'ont souvent d'autre titre etd'autre prparation que l'ambition, l'audace,des opinions de rechange, des passions de secteet le souci de leur intrt. Mais la prudenceme dfend d'appuyer plus longtemps l'archetde ma parole sur cette corde sensible laquelleje pourrais faire dire de trop fortes vrits. Je neviens pas vous agiter, Messieurs, je viens vousinstruire. Sachez donc, malgr ce qui se passeautour de vous, sachez prendre vos exemplesl o Dieu les a mis. Et si quelques-uns d'entrevous aspirent exercer quelque ministre pu-blic ou l'exercent dj, qu'ils aillent Nazarethapprendre que les prparations doivent tred'autant plus longues, laborieuses et saintes quele ministre est plus noble, son action plusvaste et son but plus lev.

Je n'insiste pas davantage sur cette leon dela vie cache du Sauveur; j'ai hte de vousmontrer combien sont grands et utiles pourvous les abaissements de Jsus-ouvrier. Com-prenez bien son dessein: non seulement il veut


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mriter par l'humiliation, ce qui serait dj unimmense profit pour l'humanit, mais, restau-rateur de toutes les ruines faites par le pch,il veut, en consacrant la plus grande partie desa vie l'exercice d'une humble profession,nous rappeler tous la ncessit et la dignitoublies du travail, relever dans l'estime deshommes une condition mprise, donner l'ou-vrier l'amour de son tat, enfin, nous apprendre le respecter et nous y intresser.Le travail est un fardeau que la gnralit des

hommes porte avec impatience et dont elle nedemande qu' s'affranchir; et pourtant, c'estune loi primordiale, une loi contemporaine dudcret qui nous investissait de la souverainetsur les cratures infrieures, une loi que le p-ch a faite austre et dure porter, mais qu'iln'a ni cre ni dnature. Vous me permet-trez, Messieurs, de vous exposer cette loi; ellevous fera comprendre toute la porte du faitdivin sur lequel j'ai appel aujourd'hui votreattention, et que je prtends faire sortir del'obscurit de Nazareth pour lui donner toutesa gloire.La loi du travail a ses racines en Dieu mme,


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en Dieu, que l'glise appelle dans ses hymnesl'auteur et le fabricateur de l'univers : Patra-tor orbis, fabricator mundi. Il est le premier ou-vrier; son uvre, c'est lemonde. Non pas, certes,qu'il se soit fatigu le faire, comme se fatiguel'homme de peine son travail; il n'y a que lesthologiens grossiers du paganisme qui puissentparler ainsi. Dieu a dit, et tout a t fait : Ipsedixit, etfactasunt. ce II a command, et toutltcr : Mandavit, et creata sunt * . Pronon-cer un fit, c'est la manire de travailler du di-vin ouvrier, et cela doit tre: Dieu est une pureintelligence, et le travail d'une intelligence s'ex-prime par la parole, per verbum, et non par lejeu des muscles.

Mais, puisque Dieu opre si facilement, il au-rait pu crer le monde d'une seule venue, direune fois pour toutes son fit, au lieu de le rp-ter. Eh bien, non. Pour nous donner l'exempledu travail, il met dvelopper son ouvrage deslenteurs calcules. Au commencement, ilcre la matire informe, immense assemblagede tous les lments ; puis, il dgage la lumire,

1. Psalm. xxxii.


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afin qu'il travaillt : ut operaretur*. Sansdoute, ce premier travail de l'homme ne devaittre ni difficile ni ingrat; mais il tait la loiprimordiale de son activit, la condition d'unprogrs dont Dieu avait prpar tous les l-ments. L'uvre de Dieu tait bonne en toutesses parties. Chaque phase de la cration, cha-que arrangement des tres, chaque explosionde la vie se termine par un tmoignage queDieu se rend lui-mme :


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la chaleur, l'lectricit,lemagntisme,lesagentschimiques, la vertu salutaire des minraux etdes plantes,

Documents

Monsabré. Exposition du dogme catholique. 1873-1890. Volume 08