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Mémoire de la Dordogne...avec Lino Ventura et Simone Signoret. On peut encore citer Germaine Tillion, déportée-résistante, Geneviève De Gaulle Antonioz, déportée-résistante,

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Mémoire de Id Dordogne Revue semestrielle des services

du patrimoine départemental

Editeur: Archives départementales de la Dordogne

N° 10/ JUIN 1991

DIRECTEUR DE LA PUBLICATION François BORDES

RÉDACTEUR EN CHEF Bernard REVIRIEGO

COMITÉ DE LECTURE François BORDES, Jean-Pierre CHADELLE, Joëlle CHEVÉ, Michel COMBET, Charles DARTIGUE PEYROU, Patrick ESCIAFERde la RODE, Bernard FOURNIOUX, Dominique GRANDCOIN, Claude LACOMBE, Bernard REVIRIEGO.

RÉDACTION Denis BORDAS, François BORDES, Alain DAVID, Louis-François GIBERT, Louis GRILLON, Serge MAURY, Pierre PAGEOT, Bernard REVIRIEGO, Marie-Lise SARLAT, Jean VIRCOULON.

TRAVAUX PHOTOGRAPHIQUES Denis BORDAS et Laurent TONDUSSON, (atelier photographique des Archives départe­mentales) .

MAQUETTE, MISE EN PAGE Thierry BOISVERT -ANPHOCOLOR.

PHOTOGRAVURE ANPHOCOLOR.

IMPRESSION Imprimerie FANLAC

ABONNEMENTS Deux numéros par an : 70 F

Prix à l'unité: 35 F Bulletin d'abonnement à l'intérieur de la revue. Diffusé par D.C.P. 9013

ISSN 1241-2228

Dépôt légal à parution

Le contenu des articles n'engage que la responsabilité de leurs auteurs.

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Ls Archives départementales ont la mission de conserver les docu­ments écrits, sonores, visuels qui constituent la mémoire du département. Elles ont aussi le devoir de les rendre accessibles aux: usagers.

Elles parviennent d'autant mieux: à s'acquitter de cette tâche qu'elles diffusent largement l'information relative à leurs activités; c'est justement l'objectif atteint sans conteste par cette revue, distribuée dans toutes les mairies du département mais également vendue dans les points "Presse" et reçue par près de 500 abonnés.

Autant de bonnes raisons pour inciter l'Assemblée départementale à valider une proposition du comité de rédaction : l'élargissement du som­maire à tous les sujets relatifs au patrimoine, qùil s'agisse de l'archéologie, des monuments historiques ou de l'ethnologie. Ainsi, parallèlement à la création d'un complément au magazine du Conseil général plus particu­lièrement consacré à la diffusion et la création artistique, ce journal témoignera, désormais, de l'action de tous les services du Conseil général liés au patrimoine. Il n'en continuera pas moins à rendre compte des ini­tiatives des associations périgourdines dans ce même domaine ou des études consacrées, ici ou ailleurs, à notre département.

Mémoire de la Dordogne remplira ainsi pleinement une doubre fonc­tion: offrir sur un même support un éventail plus large d'informations à tous ceux: qui se passionnent pour l'histoire et la préhistoire du Périgord, affirmer davantage la part que prend le Conseil général à cette recherche ainsi que son souci d'efficacité et de cohésion dans la restitution des tra­vaux: des uns et des autres.

Bernard C4ZE4U Président du Conseil général de la Dordogne

1

__ BIOGRAPHIE ______ _

1 - Mémoire de la DOldogne, nO 8 p. 43.

2

les femmes dans la Résistance

Par un curieux hasard, et comme une heureuse transition avec le numéro huit de "Mémoire de la Dordogne", le Comité National du Prix de la Résistance et de la Déportation a proposé, comme thème de réflexion aux élèves du secondaire, dans le cadre de son Prix National annuel, "Les femmes dans la Résistance".

Dans le dossier "Femmes en Périgord"1 cet aspect de la condition féminine avait été évoqué par Michel Combet dans son article sur "Le rôle social et culturel de la femme en milieu rural (1914-1960)" : Cette évolution se réalise par l'accès des femmes à la majorité poli­tique et syndicale, conquise après une participation active de celles-ci aux réseaux et aux actions de la Résistance, ou bien encore par Irène Voiry (p. 24), quand elle écrivait: Ce droit à la citoyenneté reconnu aux femmes (...) a été chèrement acquis par la participation massive des femmes à la Résistance ( ... ).

Il est donc particulièrement intéressant que, cette année, nos élèves de troisième, seconde et terminale se soient penchés sur cet épisode dramatique de notre histoire et aient mis en lumière le rôle essentiel joué par les femmes dans la Résistance. Malheureu­sement, ce rôle a souvent été occulté (ou oublié) à cause des hauts faits d'armes de leurs compagnons de combat, les hommes, exposés en première ligne, et ceci tout parti­culièrement en Dordogne, terre de Résistance s'il en fut.

Qui ne se souvient en effet du premier parachutage venu de Londres, à Prigonrieux, le 12 août 1943, de la spectaculaire évasion du camp de Mauzac, de la rocambolesque attaque du train de Neuvic et des "milliards de la Résistance", plus tard de la libération de Nontron, de Périgueux, de Bergerac, des

embuscades et de l'incessant harcèlement subis par la division Das Reich, se hâtant vers le front de Normandie, avec, pour conséquence ultime et terrible, la destruc­tion d'Oradour-sur-Glane, village martyr?

Qui ne se souvient en Dordogne, des exécutions massives perpétrées par les nazis de la division Brehmer, du S.D.2 de Michel Hambrecht et de leurs auxiliaires français, la milice de Denoix et la brigade Nord­Mricaine de Villeplana, lors de la terrible répression de l'année 1944 ? Qui ne se sou­vient de ces massacres, vingt-six otages à Brantôme, quarante-six fusillés à Périgueux, dont Charles Mangold et Marie Guyonnet, dite "la Blonde", cinquante-sept à Mussidan ou, encore, de la destruction totale, par le canon et par les flammes, après pillage, de Mouleydier, de Rouffignac, des Piles, de Saint-Germain-du-Salembre ?

A une rare exception près, seuls des hommes furent victimes de ces massacres. Les femmes, engagées dans la Résistance, ne payèrent-elles pas, cependant, un lourd tri­but ? Guy Penaud, dans son Histoire de la Résistance en Périgord 3, reprenant les chiffres de Morquin et de Nanteuil de la Barrë : Pendant toute la guerre, il y eut, en Dordogne (..) 548 déportés (dont un nombre très impor­tant de femmes) (...) 689 personnes fosillées (32 femmes, 657 hommes) et 89 tués au combat. Le Mémorial de la Résistance en Dordogne (..) sous la terreur nazie 5 authentifie ces chiffres.

Des figures emblématiques nationales

Cinquante ans ont maintenant passé depuis la libération de la France et l'armistice du 8 mai 1945. Après toutes ces années, la Résistance féminine, sur le plan national, ne subsiste, dans les mémoires de nos contem-

2 - Il s'agit du service

Allemand de sécurité

jouant pour les opéra­

rions militaires le même

rôle de répression que la gestapo pour la répres­

sion des civils.

3 - Histoire de la Résls-tance en Périgord

Périgueux, Fanlac, 1985.

4 - Historique des Unités combattantes de la Résistance. 1940-1944.

Dordogne, Vincennes,

Service historique de

l'armée de terre, 1974.

5 - A.N.A.C.R., Périgueux, Copédit,

1985.

porains, qu'à travers le nom de quelques femmes extraordinaires.

Marie-Madeleine Fourcade, fonda­trice, dès septembre 1940, du réseau ''Alliance'' est de celles-là. Seule femme chef de réseau, on lui rendit, à ses obsèques en 1989, les honneurs militaires.

Berthy Albrecht en est une autre. Elle organise avec Henri Frenay, en février 1942, le mouvemenr "Combat" après avoir créé à Lyon le premier journal clandestin de la zone sud, "Les Petites ailes de la France". En juin 1941, arrêtée, évadée, elle reprend la lutte jusqu'à ce qu'une trahison la fasse précipiter par la Gestapo à Fresnes, où elle meurt dans des circonstances demeurées mystérieuses.

Lucie Aubrac est peut-être celle qui est derneurée la plus présente dans les mémoires. Un film vient de lui être consacré illustrant la plus flamboyante de ses actions clandestines: l'épisode de l'évasion de son mari, Raymond Aubrac, qu'elle réussira à arracher des griffes de Klaus Barbie à Lyon, après la tragique arrestation de Caluire Qean Moulin, lui, n'aura pas cette chance ... ). Cet épisode fameux avait déjà inspiré J.P. Melville, le réalisateur de L'Armée de Ombres, avec Lino Ventura et Simone Signoret. On peut encore citer Germaine Tillion, déportée-résistante, Geneviève De Gaulle­Antonioz, déportée-résistante, Danielle Casanova, dirigeante des Jeunes Filles Communistes, qui mourut du typhus, après avoir soigné ses camarades àAuschwitz, ou la chanteuse Mireille, qui vient de disparaître et qui connut Malraux dans les maquis de Corrèze, ou bien encore une autre chanteuse plus proche de nous, Périgordins, puisque la fin de sa vie se passa au château des Milandes. Nous voulons parler de Joséphine Baker qui reçut la Légion d'Honneur à la fin de la guerre, pour l'ensemble de son action résistante.

Quelques grandes figures féminines de la Résistance en Périgord

Nous venons de citer Joséphine Baker, fille adoptive en Périgord Noir. N'existe-t'il-pas, en Dordogne, des femmes tout aussi extraordinaires qui ont combattu l'ennemi nazi sur notre sol même ? Nous voudrions ici rendre hommage et remettre

en pleine lumière trois d'entre elles, même si ce choix a quelque chose d'injuste et d'arbi­traire pour d'autres femmes qui se sont illustrées et ont, elles aussi, parfois connu une fin tragique ...

En premier lieu, et parce que son nom se perpétue, de génération en génération, nous voudrions évoquer la mémoire de Laure Gatet, qui a donné son nom au lycée de Périgueux où elle avait été elle-même élève de 1928 à 1931. Ingénieur chimiste, elle entra dans la Résistance bordelaise dès 1940, dans le réseau "Notre-Dame-de Castille". Arrêtée en 1942 par la police de Vichy, puis livrée à la Gestapo, elle est emprisonnée au Fort du Hâ, puis à la Santé, enfin au camp de Romainville. Elle fait par­tie du convoi du 23 janvier 1943 pour le camp de la mort d'Auschwitz-Birkenau, où elle mourra en mars 1943. Elle avait 29 ans.

La deuxième grande figure que nous voudrions évoquer est celle de Valentine Bussière qui a donné son nom à la crèche maternelle de Boulazac. Ecoutons le récit de Martial Faucon sur son action dans la Résistancé : C'est une belle et solide fille à l'opulente chevelure brune. A la voir circuler joyeusement en poussant vigoureusement sur les pédales, on n'imagine pas qu'elle puisse être une dangereuse «terroriste'~ chargée de porter des directives, des informations importantes ou même du matériel d'un bout à l'autre du département, rompue aux mots de passe et à la dissimulation, comme les vieux routiers de la Résistance. Valentine est en effet un intrépide agent de liaison de l'Etat-Major Interrégional ET.P.F (Francs-Tireurs et Partisans Français). Elle est arrêtée une pre­mière fois, tombant dans une souricière à Périgueux. Conduite par la police nazie au siège du S.D, elle est soumise à un interro­gatoire brutal par Villeplana lui-même. Comme ses papiers sont en règle et qu'elle ne transporte, pour une fois, rien de répré­hensible, elle est relâchée. Mais un mois et demi plus tard, alors que la répression nazie s'accentue, elle se trouve aux Piles, où plu­sieurs maquisards se reposent, lorsqu'une colonne ennemie fait son apparition. Elle donne l'alerte, leur permettant ainsi de s'échapper. Ils parviendront à s'échapper. Parmi eux se trouve Christian Lhonneur, qui a fait un récit poignant de cette journée dans

6 - A.N.A.C.R., La Résistance. Ln lutte contre

le tlflZisme et régime de

Vichy de 1939-40 à

1945 en Dordogne, Périgueux, Copédit, 1995, p. 408-409.

3

7 - "Sud-Ouest" du 24

octobre 1990 sous le

titre "Un bouquet pour

Valentine".

8 - Cf ouvrage cité note

6, p. 646 et 647.

9 - Cette action d'éclat est signalée dans Francs Tireurs et Partisam fran­çais en Dordogne, p. 294

et 295.

10 - Cf ouvrage ciré

note 6, p. 388 et 389.

4

le journal "Sud-Ouest"7 : Je pense souvent à cette jeune femme qui a donné sa vie, alors qu'elle ne connaisait même pas mon nom (.,,) ; puis dans l'ouvrage collectif publié par l'AN.AC.R. Dordogne 8

: Valentine, qui jusque-là nous avait suivis, a continué sa course ( .. ) malgré mon appel Où voulait-elle aller? Avertir quelqu'un d'autre sans doute ! ( .. ). Dans le crépitement des armes, j 'ai entendu des cris déchirants. Valentine peut-être ? Puis le bruit effrayant des maisons qui brûlaient ( .. ). Parmi les morts, il y avait Valentine que j'avais du mal à reconnaître, ayant été jetée dans les flammes; c'est affreux à voir un corps brûlé et qui brûle encore ( . .). Ce jour là, pour moi, c'est un ange que les Allemands venaient d'abattre. Voilà comment mourut une héroïne de la Résistance'~ Elle allait avoir 23 ans ...

Ginette Marois, "Dirka" (son nom dans la clandestinité), est une autre de ces jeunes femmes qui ont marqué les combats de la Résistance féminine. "Dirka", sœur d'Yves Marois, chef du détachement "Cyrano" -tous deux étaient instituteurs- est agent de liaison. Lors des combats de Port-Sainte-Foy, le 14 août 1944, au cours desquels les Allemands sont bloqués vers le Fleix sur la rive Nord de la Dordogne par le tir précis des forces de la Résistance, Ditka ( .. ) s'empare d'un bateau, traverse la rivière. Escaladant la rive opposée, elle circule parmi les Allemands avec une incroyable audace ( .. ). Un officier nazi hors de combat tient encore sa serviette de documents. Elle s'en empare, rejoint sa barque, retraverse la Dordogne et vient rendre compte au P.C du 6ème bataillon, avec la sacoche à la main ... Ceux qui ont été les témoins de cet exploit gar­dent le souvenir d'une fêle jeune fille blonde, avec un short haut relevé sur des jambes lacérées par les ronces des berges9• Yves Marois, alias lieutenant Cyrano, évoque ainsi cet exploit de sa sœur "Ditkà', apportant quelques nuanceslO

: Charles me fait remarquer que ce doit être ma sœur Ditka. A la jumelle elle est identifiée ( .. ). Ditka a traversé la rivière à la nage et se trouve au milieu des Allemands ( .. ). Un sourd grondement de convoi venant de Castillon nous arrive. Ditka l'entend, court vers nous. Nous ouvrons le feu, la colonne de secours réplique ( .. ). Ditka, à travers des ronciers, nous rejoint, ramenant la sacoche de l'officier Allemand ( .. ). Nous rejoignons les nôtres ( .. ). Ils font fête à Ditka qui est embrassée par tous.

Après sa mort, due à un banal accident de la route au retour d'une nouvelle mission réussie, le 18 octobre 1944, une citation à l'ordre de la Brigade lui fut décernée par le colonel Chêne, commandant les Forces Françaises de l'Aunis, pour son exploit du mois d'août précédentll • Quand elle perdit la vie, elle avait 23 ans.

Les femmes "sans-grade", indispensables pour la Résistance.

Nous aurions mauvaise conscience et commettrions une injustice, si, à côté de ces trois héroïnes au destin tragique, nous n'évo­quions pas d'un mot quelques autres figures marquantes de la Résistance féminine en Dordogne.

Marie-Louise (Astier) Blanchou, épouse de Jean-Dolet Blanchou, grand résis­tant ET.P.E de La Coquille, arrêtée en même temps que son mari le 24 septembre 1943. Elle fut traînée par les cheveux devant ses enfants en bas âge, blessée aux jambes, jetée dans l'auto des miliciens. Les tortures endu­rées lui firent perdre la raison mais elle ne donna jamais un seul nom de résistant et mourut en 1950 prématurément.

Jeanne Mazeau, "Nanou" dans la Résistance, arrêtée et déportée à Bergen­Belsen, où elle meurt en mai 45.

Fanny Wolf, 33 ans, réfugiée alsa­cienne, institutrice, arrêtée et morte à Ravensbrück.

Renée Reyraud, épouse de Gaston Reyraud, responsable ET.P.E, fusillé par les nazis à Villeneuve-de-Lonchapt ; seule avec ses deux garçons de huit et dix ans, elle fait de son appartement de Bordeaux, à deux pas de la Kommandantur, un lieu de rendez­vous pour les Résistants et même une imprimerie de tracts et de journaux.

Andrée Hivert, de Jumilhac-le-Grand, agent de liaison ET.P.E, succombe aux tor­tures en 1944, à l'âge de dix-huit ans.

Mme Faure, "la boulangère de Saint­Priest-Ies-Fougères" veuve avec trois enfants qui continue à apporter une aide efficace à la Résistance.

Mme Aubarbier, 71 ans, de Fanlac, accusée avec son mari, 77 ans, d'avoir aidé le maquis; elle est torturée, abattue et jetée dans les flammes de sa maison.

Il - Cf ouvrage cité

note 5, p. 251.

12 - Ainsi que le souligne

Roger Ranoux (lieute­

nant colonel "Hercule"

chef déparremental des

EH (Forces Françaises

de l'Intérieur) dans sa

préf:1cc à ET.P.E en

Dordogne, p. 25,

l3 - Cf ouvragt: cité

nore 6, p. 643.

Jeanne Boissard, du réseau Castille, chargée de mission de la "France Combattante", morte en déportation en 1945 à Ravensbrück.

Mme Givord, Mme Suret-Canale, Paulette Rousseau (22 ans) sous-lieutenant EEI, qui meurt de ses blessures au combat, Gaby Pierre-Bloch qui prépara l'évasion de son mari du camp de Mauzac en compagnie du "Frisé", Albert Rigoulet, Mme Dupuy, de Périgueux, qui entra en contact avec Hambrecht, le redoutable chef du S.D, en août 1944, pour obtenir la libération de Charles Mangold ("Vernois" dans la Résistance) ... Nous ne pouvons citer toutes celles, en Dordogne, qui risquèrent leur vie ou même la donnèrent car pour elles, comme pour leurs camarades masculins: Ce combat avait une âme, un idéal hérité des plus pures et des plus nobles traditions de notre peuple épris d'indépendance, de liberté, de jus­tice ... Cet idéal était incarné par des hommes et des femmes lucides et courageux qui furent des pionniers, souvent des victimes ... 12

Maurice Loupias, alias Bergeret, chef de l'AS. Sud (Armée Secrète), à la suite de R. Ranoux, fait un point définitif dans son article: "Les Femmes" : La Résistance, quel que fût le courage des hommes, n'eût pas été possible sans les femmes. Leur rôle pour avoir été moins "spectaculaire" que celui des combat­tants, n'en fut pas moins essentiel 13.

Je ne voudrais pas terminer cette évo­cation du rôle des femmes dans la Résistance en Dordogne, sans évoquer la mémoire de Marie Rigoulet, agent de liaison pendant la guerre. A Saint-Jean-d'Eyraud, près de Villamblard, grâce à la complicité de la pos­tière, elle échappa de peu aux nazis venus incendier le garage de son futur mari, alias "Le Frisé".

Marie Rigoulet a toujours répondu à mon appel, en dépit de son âge, pour venir témoigner, inlassablement, devant mes classes de troisième, de cette terrible période de l'occupation allemande. Parmi ses com­pagnons masculins, bien plus glorieux qu'elle par leurs actions d'éclat, Raymond Boucharel, Louis Le Cam, Roger Ranoux, J. Paul Seret-Mangold, Jacques Parouty, Roger Hassan, Christian Plaçais, André Laborderie et son tatouage d'Auschwitz et bien d'autres encore que je ne peux citer. Cette femme de

l'ombre, humble et discrète, n'a jamais ren­vendiqué pour elle-même la moindre action d'éclat. Elle a su, avec la douceur, le calme mais aussi l'enthousiasme de l'institutrice qu'elle a été, captiver mes jeunes élèves, qui retrouvent à travers ses paroles simples et justes, le quotidien de la vie de la Résistance. Marie Rigoulet est, depuis très longtemps une des chevilles ouvrières du Prix de la Résistance, aux côtés de Jacques Parouty d'abord, puis de J. P. Seret-Mangold et de Christian Plaçais, tout comme elle a été, avec Martial Faucon (AS., puis S.R.ET.P.E), celle de l'ouvrage collectif sorti en 1996, La Résistance (AN.AeR. Dordogne). Ecoutons-la dans l'article qu'elle consacre aux "Femmes dans la Résistance" : Les femmes n'ont jamais été totalement absentes des guerres qui, depuis la nuit des temps, secouent périodiquement l'humanité. De tous temps, elles ont eu à affronter celles que les hommes menaient et à en subir les conséquences ( .. ) Mais jamais elles n'avaient été autant concer­nées que pendant la seconde guerre mondiale 39-45 ( .. ). Je ne pourrai les citer toutes, car elles sont nombreuses et de plus, fort discrètes et, la guerre terminée, elles reprennent leur place au foyer, au bureau, à l'usine ... A la fin de son article, elle reprend ce qui a été la légitima­tion et la reconnaissance de l'action menée par les femmes dans la Résistance: Le 21 avril 1944, sur la proposition du général De Gaulle, l'Assemblée Consultative d'Alger votait une ordonnance qui donnait le droit de vote aux femmes, ce qui leur avait été refusé depuis 150 ans par toutes les Assemblées élues de la République 11.

Martial Faucon leur rend un bel hom­mage : Le rôle joué par les femmes dans ce terrible et impitoyable combat est enfin mis en évidence. Pas suffisamment peut-être, tellement rien n'eût été possible sans leur complicité, sans leur participation effective ( .. ) En profitant du fait qu'elles n ëtaient pas astreintes au travail obligatoire, elles suscitaient moins la méfiance, allant jusqu'à simuler de fausses grossesses (Linette Chapdeville, par exemple) ... Porteuses de messages sur les routes, dans les trains ou dans les autobus ( .. ), charriant des papiers "séditieux" et même des armes dans leurs paniers à provisions... L'ennemi ne s y est d'ailleurs pas trompé puisqu'il a finalement "peuplé" Rtvensbrük ou Auschwitz {souvent

14 - Cf ouvrage cité

norc 6, p. 639-64l.

5

après d'atroces tortures) de milliers de Françaises vouées à l'extermination. Ceci n'est qu'une brève et incomplète évocation d'une action menée sur tous les fonts, durant plu­sieurs années, par beaucoup d'actrices dont les noms resteront très souvent dans l'ombre ou connus seulement par un petit cercle familial ou des connaissances locales. Ce sont les résis­tants sans médailles, ceux sans lesquels n'eut pu émerger la phase ultime, celle du combat les armes à la main et du triomphe de la liberté.

Ce sont toutes ces résistantes que les élèves participant au Concours de la Résistance et de la Déportation ont essayé de sortir de l'ombre, avec l'aide des Résistant(e)s de Dordogne qui se dévouent sans compter pour que la mémoire vive.

"Je trahirai demain ... "

Je trahirai demain, pas aujourd'hui. Aujourd'hui, arrachez-moi les ongles, Je ne trahirai pas. vous ne savez pas le bout de mon cou­

rage. Moije sais.

vous êtes cinq mazns dures avec des bagues.

vous avez aux pieds des chaussures avec des clous.

Je trahirai demain, pas aujourd'hui. Demain.

Il me faut la nuit pour me résoudre, Il ne me faut pas moins d'une nuit Pour renier, pour abjurer, pour trahir. Pour renier mes amis, Pour abjurer le pain et le vin, Pour trahir la vie, Pour mourir. Je trahirai demain, pas aujourd'hui. La lime est sous le carreau, La lime n'est pas pour le barreau, La lime n'est pas pour le bourreau La lime est pour mon poignet. Aujourd'hui je n'ai rien à dire. Je trahirai demain.

Marianne Cohn, dite Colin, Déportée­Résistante

Alain DAVID

-- FORUM --------'1

6

Peintre illustrateur cherche

personne ayant une bonne connais­

sance architecturale et sociale

relative aux pigeonniers implantés

sur le département pour articles à " d 1 parrutre ans cette revue et, even-

tuellement, édition d'un livre.

Alain Pa/connet "Capfour"

24220 l-'ézac Tél: 05.53.29.57.48. (le soir).

LOI du 1--------- ASSOCIATION

1" juillet

1901

Mémoire en marche

L'association Mémoire en Marche a été créée le 1 juin 1996. Elle a pour but la pro­motion du patrimoine écrit, graphique, photographique et sonore du département de la Dordogne. En étroite relation avec les Archives départementales, elle mène des actions pédagogiques en direction des milieux scolaires. Elle s'associe également à l'ensemble des activités d'animation et de développement culturel que les Archives peuvent mettre en place.

Le succès rencontré par les expositions sur l'écriture (en 1992) puis sur les sceaux (en 1994) et la constatation des difficultés financières éprouvées par les écoles du dépar­tement à venir jusqu'à Périgueux ont incité l'association à créer, prioritairement, des ate­liers destinés à se déplacer dans les établissements scolaires qui en font la demande.

Le premier de ces ateliers, ''A chacun son sceau", est en fonction. Il se propose d'initier les élèves à la sigillographie, c'est-à­dire à l'étude des sceaux, de replacer ces objets dans le contexte de la civilisation du Moyen Age et de sensibiliser les enfants à la symbolique médiévale. Un diaporama et une plaquette pédagogique permettent une présentation historique et théorique du sceau. Copies et matrices de sceaux concréti­sent cette première approche. Dans un second temps, les élèves réalisent eux-mêmes un moulage en plâtre et choisissent un mode d'attache. La fiche descriptive du sceau est remise à l'élève qui repart ainsi avec un docu­ment scellé. L'atelier est animé par un professeur de l'IUFM ou par un étudiant en histoire, spécialistes du sujet.

Un deuxième atelier axé sur l'héral­dique est en préparation et pourrait être

opérationnel à partir de janvier 1998. D'autres ateliers sur l'écriture et sur l'impri­merie sont envisagés par la suite.

L'association a également entrepris une collecte de témoignages oraux auprès de cer­taines aSSOCIatiOnS d'immigrés du département sur la mémoire de leur com­munauté. Sont concernées les communautés laotiennes, marocaines, portugaises et turques.

Mémoire en Marche a enfin participé au projet mené par les Archives départemen­tales dans le cadre de Par les villages sur le thème des cinq sens. Un module de décou­verte du sens tactile (intitulé "Parcours noir") a permis aux visiteurs de prendre conscience de l'importance du toucher comme moyen de connaissance et des diffi­cultés éprouvées par les non-voyants et les mal-voyants. Ce module a été expérimenté par les classes de Milhac- d'Auberoche, de Villefranche-de-Longchat et de Marsac. Il a, ensuite, fonctionné au mois de juin aux Archives départementales de la Dordogne, où il a suscité, en particulier grâce aux visites "guidées" proposées par le G.I.H.P.

iii Un atelier.

7

8

(Groupement d'Insertion pour les Personnes Handicapées), un vif intérêt auprès du public.

L'association bénéficie du soutien du Conseil général de la Dordogne et, s'agis­sant des ateliers sigillographiques et héraldiques et de la mémoire de l'immigra­tion, d'une subvention de la D.R.A.C. Aquitaine.

Pour tout renseignement, contacter l'association,' Mémoire en Marche 9 rue Littré - 24000 Périgueux TeL " 05 53 03 33 32 ou 33

III Exemple de fiche, extraite de la pla­quette pédagogique relative aux sceaux.

________ MOULINS ET MEUNIERS __

1 - Voir dans ce numéro

la bibliographie sur Je

sujet.

Plaidoyer pour une histoire de l'industrie hydraulique

Si l'on a la curiosité d'examiner une feuille prise au hasard de la fameuse carte de Belleyme, première représentation cartogra­phique précise de la province du Périgord, on ne peut qu'être frappé par la multitude de petits signes (~) qui jalonnent le cours du moindre ruisseau de notre territoire. Ces sym­boles indiquent la présence de moulins, ou plutôt de tous les établissement mus grâce à l'énergie hydraulique. Qu'il s'agisse de mou­lins à blé, à huile, à papier ou à foulon, qu'il s'agisse de tanneries ou de forges, l'ensemble de l'équipement artisanal ou industriel lié à l'eau se voit ici localisé. Comment s'imaginer aujourd'hui, pour reprendre la formule du moine Glaber, ce "blanc manteaù' de mou­lins qui faisaient la vie du Périgord au XVIIIe siècle? Et comment ne pas s'étonner, sinon s'agacer, de l'absence d'une étude globale sur ce type d'équipement qui, jusqu'à l'âge de la récente industrialisation, constituait un élé­ment vital de notre région.

Car ces bâtiments, hormis quelques monographies ne touchant que certaines rones du Périgord! ou des analyses ne concer­nant qu'un type d'activité (les forges, par exemple), n'ont pas encore trouvé leur histo­rien. Pourtant l'intérêt d'une telle recherche n'est pas mince, même si elle apparaît com­plexe. Une multitude d"'entrées" se révèle en effet possible, de l'archéologie à l'histoire des techniques, de la sociologie à l'ethnologie, de l'économie à l'histoire du paysage. Mais toute ces spécialités doivent un jour se rejoindre pour raconter la grande histoire de l'Homme dans sa lutte permanente pour le progrès, pour la vie.

La Dordogne, anciennement Périgord, a été un grand pays de forges et il n'en reste que quelques murs ébranlés ou, au mieux, des bâtiments fort transformés. La Dordogne a également été un centre important de pro-

duction artisanale, puis industrielle, du papier et il ne subsiste aujourd'hui que de rares témoins des quelques soixante dix moulins à papier que j'ai à ce jour identifiés pour le XVIIe siècle. Les statistiques de l'époque révo­lutionnaire et de la première moitié du XIXe siècle font état avec une très grande précision de ces dizaines d'édifices, parfois modestes, qui n'ont pas survécu à une évolution écono­mique qui a provoqué leur disparition. Mais comment comprendre et analyser la situation présente d'un département sans pouvoir comprendre et analyser cette longue histoire qui couvre près de sept siècles?

Nombreux sont les mystères qui entou­rent encore cette histoire. Mais avant de pouvoir les résoudre, il faudra passer par cer­taines étapes fastidieuses de la recherche pour aboutir à une localisation, une identification et une chronologie extrêmement précises. L'état civil, qui mentionne souvent les métiers des artisans, permettra d'établir de véritables généalogies dévoilant de possibles stratégies matrimoniales à l'intérieur même des corps de métiers. Le dépouillement des minutes nota­riales, si fastidieux parfois, révèlera au travers des contrats d'afferme, au hasard des testa­ments, des contrats de mariage ou des contrats de vente de marchandises, l'impor­tance économique de ces familles ou de ces groupes humains pour qui l'eau représentait à la fois une source de profit et un danger per­manent.

Au bout de cette longue quête qui ne peut être qu'une oeuvre collective à laquelle chaque chercheur apportera sa contribution, se trouvera la satisfaction de leur avoir rendu hommage et d'avoir participé à la meilleure compréhension d'un passé sans lequel le pré­sent ne saurait être complètement assumé.

François BORDES

9

__ MOULINS ET MEUNIERS

El Meule découverte à Beynac.

Photo Denis Bordas

10

Broyer, moudre, concasser: des énergies humaines aux énergies naturelles maîtrisées

Depuis fort longtemps, les hommes ont été confrontés aux nécessités d'écraser, de mettre en poudre des matières premières pour leurs besoins domestiques, artisanaux ou alimentaires. Si les énergies mises en oeuvre n'ont cessé de croître depuis la Préhistoire, les techniques de base et les matériaux des outils à broyer restent éton-

• 1\ •

narnment constants Jusqu a nos JOurs. Dès le Paléolithique supérieur, en effet,

certaines pierres portant des traces d'usure et de coloration évoquent des broyeurs ayant pu servir à transformer des blocs d'oxyde de fer ou de manganèse en poudre à peinture. Pierre support posée et pierre active tenue en main composent déjà l'outillage nécessaire à ce type d'opération.

Plus tard, les objets attestés au Néolithique, chez les agriculteurs-éleveurs, puis durant la Protohistoire, chez les hommes de l'âge des métaux, reprennent le même principe. Les meules sont façonnées à partir de pierres grenues et abrasives (grès, granit...) et sont toujours composées de deux éléments : la meule dormante qui est de

forme généralement ovale et possède une surface plane et la meule active, plus petite, plus ronde, et façonnée dans une matière première analogue. Elle est appelée "main de meule" ou broyeur.

L'énergie nécessaire est produite direc­tement par la main de l'homme par des actions d'écrasement combinant percussion et frottement.

A Beynac (Dordogne), des meules de ce type ont été découvertes lors d'une fouille de sauvetage. Elles sont en granit, façonnées à partir de gros galets de rivière, vraisembla­blement issus des dépôts de la Dordogne proche. Elles ont été abandonnées à la suite d'une cassure survenue en cours d'utilisation ou lors de la réfection de leur surface par bouchardage. Cette opération permet par une action de percussion sur la surface active de la meule dormante de rendre à cette der­nière de l'accroche et du mordant en supprimant le lustrage dû au travail. Ces objets proviennent de niveaux archéolo­giques de la fin de l'âge du Bronze, environ un millénaire av. J.-c.

Plus tard, durant l'âge du Fer, les meules vont intégrer le mouvement rotatif; pour cela, elles sont désormais rondes et leurs deux parties sont de même dimension: l'ensemble mesure de 30 à 50 cm de dia­mètre et d'épaisseur. La meule supérieure peut être mobile autour d'un axe scellé dans la meule inférieure, même si le manche fixé sur la périphérie de la meule active ne per­met qu'un mouvement rotatif partiel en aller et retour. Le principe de rotation est donc inventé vers le IVe siècle av. J.-c.

Serge .MAURY

________ MOULINS ET MEUNIERS

1 - DonûllùoJJ : pro­priété assortie de tous

ses droits.

2 - Acaptc : droit de

mutation payable :1 chaque changement de

seigneur ct, parfois

aussi, à chaque change­

ment de tenancier.

3 - Parsonier : celui qui partage la possession

ou l'exploitation d'un

bien, d'un moulin par

c.xemplc.

4 - Cens : c' eST le plus

général des droit.s sei­

gneuriaux. Redevance,

presque toujours en

argcnr, duc annuelle­

ment par le vassal au

seigneur sur les terres ou

les biens (moulin par

exemple) qu'il exploirc.

Les moulins de l'abbaye Notre-Dame de Chancelade

Les moulins en général

L'étude de la meunerie au Moyen Age se heurte à divers obstacles. Le premier d'entre eux est lié à la difficulté de situer et d'identifier de façon précise les moulins, ces deux aspects étant d'ailleurs souvent liés. En effet, leurs noms ont souvent changé au cours des siècles, prenant tantôt celui d'un lieu-dit, tantôt celui d'un propriétaire ou d'un fermier. Certains d'entre eux ont été rebâtis sur leur ancien emplacement ou à côté de celui-ci. Ils ont alors pris le nom de Moulin Neuf par opposition à Moulin Vieux. Le même terme latin molendina a désigné au Moyen Age autant les bâtiments que les meules qu'ils abritaient; une confu­sion est donc possible. Parfois, la pluralité des meules sous un même toit a permis d'ap­peler moulin blanc la meule réservée au froment et moulin noir celle qui broyait les autres gratns.

Lorsqu'il s'agit d'étudier l'histoire et l'évolution de ces moulins, on rencontre en premier lieu le seigneur, celui qui en possède le dominiumi et perçoit l'acapte2 à chaque mutation de propriétaire ou de tenancier.

Fréquemment le moulin appattient à plusieurs co-propriétaires ou parsoniers3 qui perçoivent chacun une rente à proportion des parts qu'ils détiennent, rente qui peut être en nature, c'est-à-dire grain ou farine, ou en argent. Le cens\ enfin, est la redevance payée par le tenancier. Cens et rentes sont versés à des échéances régulières bien préci­sées par les actes et selon des mesures ou des monnaies bien déterminées elles aussi.

Le Glossaire de Ducange, si précieux pour le médiéviste, contient plusieurs pages de termes concernant le moulin, son travail et ses devoirs. C'est à son propos qu'il faut

retourner le proverbe en disant: Abondance de biens nuit. Car la richesse des vocables, au lieu d'aider à la clarification des problèmes, les multiplie souvent. Les synonymes étant nombreux, les confusions peuvent être d'au­tant plus fréquentes; chaque texte demande donc une analyse prudente.

Enfin, s'agissat1t de rivières et de mou­lins, on ne doit pas omettre la délicate question des divers droits qui leur sont liés : de pêche, d'occupation des rives, de passage d'embarcation, de péage, etc.

Les moulins de Chancelade

L'importance de la possession d'un moulin à l'époque médiévale n'est plus à démontrer, pas plus que les efforts faits par les moines ou moniales de toute robe pour les acquérir ou obtenir des droits sur eux, que ce soit par donation ou par achat. Les anciennes abbayes que renferme l'actuel département de la Dordogne n'ont pas été les dernières à entrer dans ce mouvement. Certaines d'entre elles, comme Cadouin ou Dalon, ont pu être étudiées sous cet aspect grâce aux extraits de leur cartulaire5• D'autres l'ont été à partir de documents isolés; c'est le cas pour Boschaud et Peyrousë. D'autres, enfin, mériteraient de l'être.

Les extraits du cartulaire de Chancelade que nous avons pu étudier nous ont livré, sur un siècle et demi environ, des détails intéressants sur plus d'une douzaine de moulins en relation avec l'abbaye7

• Ces actes sont malheureusement insuffisants pat' leur nombre et par leur contenu. En outre, leur recueil était clos vers 1250. Enfin, ils contenaient fort peu de renseignements sur les nombreux prieurés issus de Chancelade durant cette période. Or, il est évident, nous

5 - Maubourguet

Oean), Le cartulaire de l'abbaye de CtldouÎn,

thèse, f.1.culté de lettres

de Bordeaux, Cahors,

1926 ; Grillon (Louis),

Le domaine et la vie

économique de l'abbaye

de Oalon, thèse, unÎver­

sité de BordeaLLx, 1965.

6 - Grillon (Louis),

L'utilisation de l'eau {[ms

trois monastères cister­

ciens de la Dordogne

dans le compte-rendu

du second colloque de

Cadouin, aoùt 1995.

7 - Lédirion du L.-anu­

laire est en préparation

par nos soins.

11

8 - Nous devons

signaler que David Bouchillon, auteur d'un

T. E. R. sur l'abbaye de Chancelade a participé

à nos recherches.

L'abbaye NOh?-Dame de Chancelade. Les cha­

noines réguliers. Les

prieurés. L'environne­

ment Economique,

politique et religieux

(1100-1236),

Université de Bordeaux

III, octobre 1996.

9 - Si l'on sait que Saim­

Vi ncen t-S u r-l' 1s le

abritait un prieuré-cure

de Chancelade et que

l'abbaye y possédait

aussi un moulin dom il

sera question plus loin,

il est permis de supposer

que ce meunier avait pu

y faire son apprentissage

avant de venir dans

celui de l'abbaye.

10 - Mesturage, mesture,

mêture : mélange de

grains froment, seigle,

orge.

12

le verrons pour celui de Born, que ceux-ci possédaient des moulins ou des droits sur eux dans leur territoire propre.

Notre étude va comprendre deux par­ties : après avoir passé en revue les moulins mentionnés dans le cartulaire, nous en ver­rons quelques autres sur lesquels celui-ci est muet et que nous avons rencontrés au hasard de trouvailles archivistiques8

- 1 - LES MOULINS CITÉS DANS LE CARTULAIRE

1 - Les moulins de la Beauronne

A tout seigneur tout honneur. Nous commençons par le moulin de l'abbaye. Indispensable à la vie de la communauté, il fut construit en même temps que les bâti­ments conventuels. Son emplacement n'a jamais varié et il a fait l'objet d'une récente et heureuse restauration. On ne doit pas s'éton­ner de ne pas le voir mentionné dans le cartulaire pour une cession de rente ou un abandon de droit. Il n'y figure même pas comme repère topographique ou comme lieu de rédaction d'un acte quelconque. Ce silence persiste, à notre connaissance du moins, sur plusieurs siècles. Nous devons arriver au dernier tiers du XVIP siècle pour trouver un document le concernant. Ce der­nier est d'autant plus important qu'il donne des détails précis sur son équipement à cette époque. Il est probable que cet équipement n'avait guère changé, mis à part les rempla­cements pour usure, depuis ses origines.

Le premier juillet 1664, le frère Marc Clary, cellérier et futur abbé de Chancelade, renouvela le contrat cl' afferme du moulin de l'abbaye à Jehan Queyrol meunier natif du vil­lage de Faugieras paroisse de Saint Vincent 9. Il s'agissait du moulin joignant ladite abbaye ( . .) constant en trois moulins l'un à moudre froment et les autres deux a moudre mestu­rage 10 mais aussi ensemble les deux jardins joigniant ledit moulin comme aussi deux lou­pins de prés ( . .) de mesme que ledit Queyrol meunier les a jouis ci-devant. Le moulin com­prenait trois moulins garnis chascun de deux meules rouets serclés de fer et les arbres diceux aussy serclés de fer ( . .) un petit coing de fer ( . .) une barre de fer et cinq piches ensemble et

de toutes autres choses necessaires a moudre dont iceluy Queyrol s'est contanté lI. ( .. )

Lesdictes meules estant des espesseurs scavoir celles a lantrée dudit moulin de lespesseur sca­voir celle de dessoubz de six pouces et celle de dessus de lespesseur de quatre pousses estant gar­niye ladite meule d'un grand sercle de fer et celles du moulin blanc qui est au milieu de les­pesseur chascune de six pouces et celles de l'autre moulin noir de lespesseur scavoir celle du des­soubz de six pouces et lauttre de deux pouces. La ferme était concédée pour trois ans contre vingt-deux charges de blé mesture mesure de l'abbaye, dont cinq charges et quatre bois­seaux12 seraient portés de trois mois en trois mois au grenier du monastère. Queyrol a promis de ballier annuellement la somme de seize livres. ( .. .) Le bois necessaire pour acomo­der lesdicts moulins lui serait fourni par le cellérier. Il devait gérer en bon père de famille le bien à lui confié. Ce n'était pas tout. Il aurait en outre à aller chercher les blés de l'abbaye à la requête du cellérier, les conduire au moulin, moudre la quantité nécessaire à la consommation des religieux, sans quil puisse prandre aulcun droit de mou­dure, apporter la farine au monastère.

Il Moulin de l'abbaye de Chancelade, sur la Beauronne.

Photo Bernard Reviriego

Il - Le rouet est une

roue dentée. La piche

est un petit marteau à

deux têtes pointues ser­

vant à picher (piquer) la

meule à petits coups

pour lui redonner

l'aspérité perdue par

l'usure.

12 - Boisseau : mesure

de capacité, fraction du

setier.

Il Moulin de Beauronne, sur la Beauronne (com­mune de Chancelade).

Photo Bernard RevÎriego

13 - Visme : actuelle­

mem vîme, nom de

l'osier dans certaines

régions.

14 - Etaient témoins

Jehan Delagarde, ser­

gent royal, ct Jehan

Dejehan, dit Jandou,

tous dCLLx habitants de

Chancelade. AD. 24,

3 E 93, notaire

Debgardc.

15 - Témoins: HéUies

Marquet, des Grbes ct

Charles Ruisson, ch:

Chancelade::.

Quelques lignes étaient réservées au droit de pêche et à certail1s autres : Sera tenu ledit Queyrol de bailler {lU Reverend père Clary la moyttié de languille et auttre poisson qui se prandra dans la nfl,Sse d'un moulin sans que ledit Queyrol puisse pretandre aux vismes 13 ou auziers quy seront dans lesdicts jardins. On le voit, le moulin abbatial était moulin banal. Le meunier avait,' en outre, la tâche déplai­sante de dénoncer ceux qui iraient moudre

Il

ailleurs : Sera tenil le Reverand père Clary de faire aller tous le/ habit ans et juridictz de la présente juridictiov de Chancelade moudre audit moulin dei Chancelade en par ledit Queyrollui indiqu,ant ceux qui se trouveroient aller moudre en Jauttres moulim 14. Le 20 mars 1675, le noçaire Lagarde recevait dans le moulin une obligation de Jehan Queyrol et de Sicaire Lafaxe, son épouse, pour 1 500 livres à verser datlS le délai d'un an envers frère Gaspat'd Laborie au nom du syndic absent'5. .

Un siècle pll.ls tat'd, le 21 février 1788, Jean Balzac, habitant dans la paroisse de Saint-Jean-de la Cité, sous-affermait pour un an le moulin à Pierre Dubreuil, habitant Paricaud, paroisse de Chancelade. Il fallut constater l'etat actuel des six meules assortie de

douze cercles de fir ; il a été unanimement convenu entr'eux que les deux du moulin le plus près de la porte qui est du côté du pré ( . .) sont ensemble de l'epaisseur de dix-huit pouces, que celles du moulin du milieu sont les deux ensemble epaisse vingt-deux pouces et qu'enfin celles du moulin près de la porte d'entrée sont de l'epaisseur toutes deux de seize pouces et demi ; plus encore ont convenu entr'eux que le moulin appelé grand moulin est sans boisure et que les autres deux quoyque assortis de leur boisure dans la rondeur ne sont couverts chasqu'un que deux planches. Le sous-fermier aurait à rendre en fin de bail deux barres de fer pesant ensemble vingt-cinq livres. La ferme serait de douze quintaux de foin et de cent vingt quatre bois­seaux de méture et dix livres d' argentlG

Les charges, on le voit, étaient un peu moindres que par le passé, mais il s'agissait d'une sous-ferme. Seules avait changé l'épaisseur des meules, celles-ci ayant conservé leur place dans le bâtiment qui les abritait.

Le moulin Maurel17 était situé dans la paroisse de Beauronne de Chancelade. Il apparaît de bonne heure dans le cartulaire. La famille Essando y céda tous ses droits.

16 - Le document

mentionne un acre anté­

rieur, reçu Lavergne,

dom la date est restée en

blanc. A.D. 24, 3 E

2729.

lï - Cart. de

Chancelade, f' 20 rO ;

24 rO et VO

; 25 rO ; à

quoi s'ajoute un acte

non folioté inséré dans

notre édition du cartu­

laire ~l paraîrre::.

13

18 - Les Essando fài­saient partie des

chevaliers de la Cité où

ils occupaient une des

tours.

19 - Setier : mesure de

capacité variable suivant

les régions. rémine,

comme le boisseau, cn

étaient des fractions.

20 - Le nom de ce

moulin demeure une

énigme. Etait-ce celui

du propriétaire, du

tenancier ou bien celui

du lieu-dit? On trouve,

dans un acte du 15

décembre 1706, la réfé­

rence à un mayncmenr

de Ponmoreau (A. D.

24, 2 E. 1838/7.82) ct,

dans un arpememem

du milieu du XV1II' siècle, l'appellation Pont

Moreau (A.D. 24, 1 E

41).

21 - Cart. de

Chancelade, f" 7 y" et

27 Y".

22 - Fief : domaine

noble concédé par le sei­

gneur à un vassal sous

condition d'hommage

et assujetti à certains ser­

vices et redevances.

23 - Séterée : mesure de

la superficie de terre

ensemencée par un

setier de grains.

24 - La Roche de

Bassillac était l'un des

fons dom la création est

attribuée à l'évêque

Frotaire au X" siècle. On

l'appelle aujourd'hui la

Roche de Goudeau.

25 - Bailli : officier de

justice agissant au nom

du seigneur.

26 - Cart. de

Chancelade, f" 19 y" -

20 r".

27 - Les mots mounar et

mo/endinaria évoquent

des droits seigneuriaux,

mais leur signification

reste à préciser dans

chaque cas.

14

La donation de Pierre Essando fut confirmée par Hélie de la Roche, son parsonier sans doute. Hélie Essando fit donation cl' une pièce de terre. Est-ce le même Hélie qui, devenu chevalier, confirmait le tout avant 116818 ? Une famille dite d'Angoulême, bien possessionnée elle aussi dans la région, se manifesta plus tard. Géraud, Guillaume, leur soeur, Pétronille, et leur neveu, Raymond, cédèrent, avant 1189, un cens de deux: setiers19 de froment lors de la réception à Chancelade de leur frère, un autre Guillaume. Plus tard encore, après 1205, Géraud (sans doute le même que ci-dessus) décida lui aussi de quitter le siècle et de se faire religieux:. Son neveu, vraisemblable­ment à défaut d'autre héritier mâle, confirma à nouveau toutes ces donations2o•

Un moulin non dénommé était de même sis sur la Beauronne21

• Deux: frères, Bernard et Arnaud de la Roche de Bassillac, y avaient cédé un fief22 à Hélie Petit. Ce der­nier céda à Chancelade sa part, c'est-à-dire le moulin, le pré au-dessus du "Pré Rond", l'eau pour la pêche en amont jusqu'au gué et deux: séterées23 de terre. Leur parent, Pierre de la Roche de Bassillac, confirma leur dona­tion24

• Ce moulin ne fait peut-être qu'un avec le moulin Maurel. En effet, les Petit étaient baillis25 des la Roche.

De nos jours, la Beauronne fait tour­ner, outre le moulin du monastère, deux: autres moulins qui relevaient de l'abbaye. Ils ne sont pas expressement cités dans le cartu­laire. Le premier, à mi distance du village des Grèzes et de celui de Paricaud, a longuement servi de pressoir à huile. Le second, implanté dans le village de Beauronne, présente des similitudes architecturales avec celui de l'ab­baye. Il pourrait en être contemporain et avoir été bâti par les chanoines, ce qui expli­querait le silence du cartulaire à son égard.

Le moulin du port appartenait, si l'on en croit une note marginale de Leydet reprise par Lespine (copistes du cartulaire), à la paroisse de Marsac. Le cartulaire le men­tionne dès avant 1143, par conséquent sous le premier abbé, Géraud de Monlauu26

• Ce sont les Saint-Astier, Geoffroi, Hélie, Bernard, leur soeur, Almois, et son époux:, Hélie de Villebois, qui cédèrent à l'abbaye tout ce qu'ils y possédaient, à savoir, trois parts du mounar du port, la molendinaria 27,

la dîme, ainsi que la pêche. Géraud Negrer (le tenancier peut-être) abandonna lui aussi ses droits contre le versement de trente sous angoumOlsms.

La paroisse de Beauronne possédait d'autres ruisseaux: qui, bien canalisés et endi­gués, auraient pu faire tourner une roue à aube28

2 - Les moulins de la Dronne

Le moulin de Rochereuil est situé près du pont d'Ambon, à la rencontre de quatre communes : Bourdeilles, Lisle, Creyssac, et Grand-Brassac, à laquelle il appartient. Près d'une vingtaine d'actes le concernent dans le cartulaire. Ce sont d'abord les Saint-Astier qui firent des donations, entre 1129 et 1143. Bernard et Geoffroi cédèrent le mounar et leur frère, Hélie, donna son accord. Leur soeur, Almois, avec son époux:, Hélie de Villebois, et leurs deux: fils, Pierre et Géraud, firent de même. Ils furent imités par les Montanceix, par Raymond et son frère Hélie, surnommé Vigoros, dès le 2 octobre 1150, puis par Arnaud de Montanceix en 1168. D'autres donateurs, les Volart, Pierre Willelmi et son épouse, Peta (ou Pétronille ?), Aymeri Jourdain, Seguin de Corsolas, Pierre Aymeri de Campust étaient-ils des parsoniers ou des févatiers29 des précédents?

Quatre actes jettent un jour intéressant sur les difficultés rencontrées par Chancelade avec des seigneurs devenus contestataires (nous en verrons d'autres cas) et sur les us en matière de pêche fluviale.

Entre 1129 et 1143, sous le premier abbatiat, Seguin Ponce de Creyssac avait donné tout ce qu'il possèdait sur l'écluse, le péage des bateaux: et la pêche dans toute l'eau qui lui appartenait et cela de jour comme de nuit. En retour, l'abbé lui avait donné cinquante sous périgourdins. Après sa mort, ses fils contestèrent cette donation; il s'agissait, semble-t-il d'une vente déguisée. Ils acceptèrent de la confirmer, mais l'abbé dut leur verser encore soixante sous angou­moisins. Pourtant, avant 1166, le fils aîné, un autre Seguin de Creyssac, contesta de nouveau la donation de son père, arguant du fait qu'il était trop jeune lors de celle-ci pour pouvoir donner à bon escient son accord.

28 - Voir A. D. 24, 2 E

183817.82 où l'on

trouve un relevé très

détaillé de toutes les

[enances de t'abbaye

dans la région, et notam­

ment sur Beauronne où

sont mentionnés plu­

sieurs ruisseaux.

29 - Févatier : titulaire

d'un fief.

30 - Cart. de Chancelade, f- 6 VO, ï 4

rO, 76 V

O - 77 rO

, 78 rO,

11 ï v', 136.

31 - A. D. 24. 2 E 1384/56] ; eUT. de Chancelade f· 6 ,,0, 1 19 ct 122.

Lisle, Rocheyrel ,Pays de Dronne, Péri90rd

Plus tard enfin, avant 1180, revenu à de meilleurs sentiments, le même Seguin, en compagnie de son épouse, Arsende, céda à Chancelade le droit de pêche sur l'eau de la Dronne, de jour comme de nuit et en toute saison, mais seulement avec des engins soi­gneusement précisés30

A environ cinq kilomètres en aval du précédent se trouve le moulin appelé jadis de Malastira, actuellement de Janchou. Lon connaît dans cette région une famille de Malastire jusque dans la première moitié du )(Ne sièclë. Les donateurs en sont essentiel­lement les Chabans à partir de 1189. Géraud de Chabans et son épouse furent d'accord avec leurs neveux, Pierre, Itier, Bernard et Géraud, qui cédèrent tous leurs droits. Un Géraud et son épouse accordèrent cinq setiers de froment de rente ; plus tard, vers 1217, Pierre-Bernard, chevalier de Lisle, sa femme, Almois, et leurs trois fils, Guillaume, Raymond et Gui, abandonnè­rent de même cinq setiers de froment. Aymeri de Lisle, fils d'Almois (d'une pre­mière union ?) se déclara d'accord.

Le moulin du pont de Parduz tirait ce nom du fait qu'il était situé auprès d'un pont conduisant à cette ancienne paroisse actuel­lement englobée dans la commune de Tocane-Saint-Apre. Le moulin appartient à celle de Montagrier.

Avant 1168, les Saint-Astier cédèrent à Chancelade des droits sur ce moulin. hier de Saint-Astier donna le mounar. Eble et son frère, Raymond, firent de même. Ils confir­mèrent cette donation entre les mains de l'abbé suivant. Après 1168, Pierre de Saint­Astier fit un échange avec son cousin, Hélie de Villebois, fils d'Itier du même nom. Hélie céda ses droits sur le moulin et reçut en contrepartie la part de Pierre sur une terre qu'ils possédaient en commun à Maroill (Mareuil? Maroitte ?). Ce qui permit à Pierre et à son épouse, Embergue, au nom de leurs enfants, de céder ces nouveaux droits acquis en se réservant toutefois un setier et demi­émine32 de froment. Olivier de Saint-Astier, devenu chevalier, abandonna à son tour ses droits sous la même réserve. Plusieurs parso­niers se partageaient ce moulin. Arnaud de Montanceix en céda les droits avant 1189. Raoul de Chalagnac et ses quatre fils, Hélie de la Brande, les frères Geoffroi, Raoul et hier de Chalagnac offrirent à l'abbaye un setier et demi-émine de froment ainsi que leur part du droit de pêche.

Dès avant 1168, Pierre de Fayolle et ses fils, Hélie et Pierre, cédèrent des terres joux­tant l'écluse et la rivière et reçurent de l'abbaye douze pièces de monnaie. Avant 1189, les frères Hélie, Pierre et Bernard de Fayolle se montrèrent généreux. Ils offi.-irent deux setiers de froment à porter au moulin

iii Moulin de Rochereuil, sur la Dronne (commune de Grand-Brassac).

Garte postale. Dessin de Christian Lachenaud. 1993.

32 - Emînc : mesure de

capacité variant d'une

région à J'aurfC.

15

33 - Cart. de

Chancelade, r' 117 y',

124, 126, 132 r' cr y',

133, 135 y', 136.

34 - Les Fayolle ont

affermé le moulin à ma

grand-tante Couturier

épouse Rousseau qui le

quittèrent pour achecer

celui de Bourdeille, le

17 juiller 1909 (note de

Louis Grillon).

35 - Fevalge : droit à

acquitter pour un fief

16

afin que les religieux aient une honnête et générale pitance, où figureraient du pain, de l'huile, des œufs, des fromages ou des pois­sons33

Le moulin de Salles se trouve à un kilomètre en aval du précédent, sur la com­mune de Tocane-Saint-Apre, et occupe une place importante dans le cartulaire de Chancelade34

Avant 1189, Géraud de la Brande, che­valier de Montagrier, et son frère, Pierre de Born, cédèrent tout ce qu'ils y avaient. Quelques années plus tard, entre 1222 et 1232, ltier de la Brande et son fils, Pierre, donnèrent deux parts d'un droit de fevatge 35

et en investirent l'abbé avec un chapeau de feutre noir. Cette famille de la Brande était co-propriétaire avec les Saint-Astier.

En effet, ceux-ci possédaient de nom­breux droits sur Salles puisque, en 1187, Geoffroi avait cédé tout ce qu'il y avait ou tout ce qu'on tenait de lui (ni om avia deO, à savoir, ses trois parts, une terre proche et les rives de la Dronne où les religieux pouvaient appuyer leur barrage, mais sous la réserve de neuf setiers de froment de rente. Son épouse, Raemberga, confirma la donation. Par un second acte, Geoffroi associa sa mère, Pétronille, et son propre fils, ltier, à la cession de tous ses droits sur le moulin et ses appar­tenances. A la même époque, les tenanciers abandonnèrent eux-aussi leurs droits : Adémar de Poichaut, puis ses parsoniers, Pierre de Poichaut et Albugua de la Bochardia, vraisemblablement son épouse, Géraud et Hélie Bochart, eux-mêmes fils d'Etienne, et Alais Bocharda. Avant 1205, deux Saint-Astier firent d'autres donations. A l'occasion de la profession religieuse de leur fils, ltier, ou de sa prise d'habit à Chancelade, Pierre de Saint-Astier et son épouse, Embergue, cédèrent une pièce de terre près du moulin. Hélie de Saint-Astier, sa sœur, Longabruna, son épouse, Esclarmonde de Montanceix et leur fils, Bernard, firent de même. A cette cession participèrent Arnaud de Montanceix, beau­frère de Hélie, et Bernard de Montanceix.

Une place toute particulière est à réser­ver à un généreux donateur. A plusieurs reprises on rencontre comme témoin des actes ci-dessus un chanoine de Saint-Astier, Pierre Arveu, prêtre, qui donna de l'argent

pour l'édification du moulin de Salles. Il fit de même pour l'installation de l'autel dédié à saint Thomas Becket dans l'abbatiale de Chancelade, donc vers 1178. Pierre Arveu se présenta certain jour devant le chapitre de Chancelade. Il demanda que les tenanciers présents et futurs du moulin soient obligés de fournir l'huile d'une lampe qui brûlerait à perpétuité, de jour comme de nuit, devant l'autel bâti de ses deniers. Ne peut-on en conclure que, comme tant d'autres moulins, Salles possédait un pressoir à huile de noix ? De ces actes, on peut conclure que, au moins entre 1178 et 1187, les religieux firent réédi­fier ou agrandir le moulin de Salles. Ils en conservèrent le dominium intégral, non sans difficulté car un gendre de Geoffroi de Saint­Astier, Géraud de Chassanol, chevalier de Vernode, détruisit "la tête de l'écluse", créant ainsi un grave dommage à l'abbaye. Labbé se tourna vers l'archevêque de Bordeaux qui manda le fautif en sa cour. Armés des docu­ments qu'ils mirent entre les mains du procureur archiépiscopal, Pierre Vigier, les religieux obtinrent gain de cause. Géraud de Chassanol dut leur laisser les droits d'éclu­sage et réparer le dommage par lui cause6

Chancelade conserva longtemps sa directe37 sur Salles puisque, le 9 février 1474, l'abbé Guillaume Adhémar investit les frères Cosselans du moulin et d'autres biens que ceux-ci avaient acquis des frères Martial et Vincent Mainha. Les nouveaux fermiers promirent d'acquitter tous les droits et devoirs et de faire tout ce qui se faisait habi­tuellement38

3 - Les moulins de la Donzelle

Le moulin d'Anglars se trouvait sur la Donzelle, affluent de la Dronne, dans la paroisse de Lisle39

• Il a disparu. Toutefois, un acte de 1460 le situe entre deux autres mou­lins aujourd'hui désaffectés, celui de Puymorin et celui de la Peyzie4°. Le cadastre napoléonien montre son bief, difficile à retrouver actuellement. Ce moulin existait avant 1167, date à laquelle Géraud d'Escatha céda à l'abbaye tout ce qu'il avait dans le mounar. Arnaud de Montanceix fit de même, vers la même époque, abandon­nant ses droits sur le moulin et ses terres.

36 - Catt. de

Chancelade, f' 94 r' -

97 r', 99 r', 170.

37 - Directe: droit d'un

seigneur sur le fonds qui

relève directement de

lui.

38 - A. D. 24, 3 H 7. Le moulin y est dit sur la

paroisse de Montagrier.

Les deux Cosselans se

prénommaient Pierre.

Lun d'eux était clerc.

En ce qui concerne les

moulins du Pom de Parduz et de Salles, voir

aussi l'ouvrage de Pierre

Pommarède, Tocane­

Saint-Apre.

39 - A. de Gourgues,

Dictionnaire topogra­

phique du département

de la Dordogne, parle d'un village et d'un

moulin sans mieux

situer celui-ci.

40 - Acte de 1460. A. D. 24, J. 1590. Pour ce

moulin et le suivant

nous avons tenu

compte des recherches

de David Bouchillon

sur le terrain.

Il Moulin de Saint-Vincent­sur-l'Isle.

Photo Denis Bordas.

41 - Cart. de Chancelade, 89 vo,

90 v". 91 rO, 136.

Sa donation fut confirmée par ses deux frères, Raymond et Hugues. En 1186, Bernard Fabri, de Lisle, avec l'accord de son épouse Alaiz, se démit des siens41

• Il est pos­sible qu'un différend ait surgi au cours des ans entre les Saint-Astiel~ seigneurs de Lisle et l'abbaye de Chancelade. Ceux-là promi­rent de rendre aux religieux le chemin conduisant au moulin et de ne rien exiger sur celui-ci ; ils ajoutèrent même un pré confrontant l'Isle. Cet acte intervint en 1211 dans un document solennel établissant une sorte de pariage entre les parties en ce qui regardait le bourg de Lisle. Chancelade fit un échange en 1219 avec l'abbaye de Brantôme. Celle-ci lui céda trois émines de mesture et une de froment sur la molina de l'Isle contre les mêmes quantités à prélever sur Anglars. En 1231, deux frères, Bernard et Etienne de Lisle, y cédèrent à leur tour un cens de quatre deniers. En août 1358, Gui de Saint­Astier et son fils, Itier, firent un échange de biens avec l'abbaye. Le moulin y est men­tionné. Les Saint-Astier cédaient à perpétuité, en raison de cette permutation,

six émines de grain de rente sur le moulin d'Anglars appartenant à Chancelade ainsi que la directe sur le même moulin. Plus tard, les Saint-Astier demandèrent une consulta­tion sur cet échange à un juriste qui déclara que l'échange avait manqué de plusieurs dis­positions légales. Nous ignorons la suite et la conclusion du procès42

Le moulin Martin était implanté sur la commune de Lisle. Labbaye en possédait un autre dans le manse43 Champaina et près du pont appelé Pastorel. Ces deux toponymes n'ayant pu être identifiés, on pourrait suppo­ser que ce moulin aurait porté le nom de son propriétaire, un nommé Martin. D'ailleurs, un lieu-dit la Martinie existe près de la Donzelle. Avant 1168, deux frères, Géraud et Itier Willelmi, cédèrent tout ce qu'ils avaient sur ce moulin. Une clause de ce document, en langue occitane, mentionne li vila de Champaina. S'agit-il des vilains44 de ce manse, ou Vila est-il un patronyme? Le même texte parle d'un droit d' oublie45

• Vers la même date, Etienne Delpoi abandonna aussi ses droits46

42 - i\. D. 24. 2 E

1834/56.ï. Sur la liasse

Lcspine a écrit

Fmgment d'une procé­

dure entre Guy dit

Guillot de Stzi1Jl-Asriel; dOJ/ze!, et l'abbé d,' Challcelade, contenant

lëuoncé de plffsicm)' actes

C01Jcerumlt kt maison de SilÎnt-Astier depuis l'alJ

1320jllsquen 1358.

43 - Manse : unité

d'exploitation qui com­

prend, en général, un

bâtiment d'exploitation,

des dépendances et des

terres cultivables. La

superficie correspond à

cc que pellt exploiter

une famille avec un ins­

trument aratoire Ct un

;}nelagc.

44 - Vilain: terme dési­

gnam des paysans ou

des roturiers libres (dis­

tincts des ser[~).

4") - Oublie : amende

due par le vassal qui

a\'ait négligé cl' acquitter

son devoir annuel au

jour indiqué.

46 - Cart. de Chancdade, f~ ï9 V

O -

80 l'0. 81,".

17

47 - Cart. de

Chancelade, 1" 138 r" ;

un autre acte, f> 145 vo,

où l'on retrouve les

mêmes personnages,

camenait peut-être une

autre donation au sujet

de ce moulin.

48 - A D. 24, 3 H 4. Voir aussi un acte nota­

rié du 13 avril 1693 dans lequel il est

affermé. AD. 24, 3 E

96, notaire Delagarde. Un autre moulin, dit

des Soucis, existait près

d'une perte de

l'Auvézère, à Cubjac.

Cette perte alimentait

elle-même un moulin

dans la commune de

Saint-Vincent-sur-l'Isle,

avant de se jeter dans

l'Isle. La région reo­

ferme de nombreux

gours ou résurgences

alimentés par ce courant

souterrain.

49 - Acte notarié du 14

février 1709 : Moulin de Crosviel autrement de Sale gourde. AD. 24, 3 E 1628.

18

4 - Les moulins de l'Isle

Le moulin de Saint-Vincent se trou­vait dans la paroisse du même nom (aujourd'hui commune de Saint-Vincent­sur-l'Isle) où l'abbé de Chancelade nommait un de ses chanoines comme prieur-curé. II fait l'objet d'une seule mention, peut-être de deux, dans le cartulaire. Avant 1143, sous le premier abbatiat, trois personnages, Gui Geoffroi, Pierre Aimeric et Aimeri Aisart, cédèrent tout ce qu'ils y possédaient47

A une époque difficile à préciser, mais sans doute à la fin du XVIIe siècle, l'abbaye y percevait encore un droit d'acapte de cinq sols. Il y était désigné sous le nom de mou­lin des Soucis48

Le moulin de Crosviel, actuellement moulin de Saltgourdé9 est implanté sur la commune de Périgueux et fait l'objet de trois actes intéressants.

Onze chanoines de Saint-Etienne-de­la-Cité réunis dans leur salle capitulaire donnèrent la moitié du mounar et la moitié de la terre qui le jouxtait vers Marsac, sous la réserve de quatre setiers de froment de rente, mesure de Saint-Etienne, à verser en sep­tembre, à la fête de Notre-Dame. Lacte fut confirmé dans le choeur de la cathédrale entre les mains de l'abbé Géraud II de Monlauu et sous l'épiscopat de Pierre Mimet, ce qui le situe entre 1169 et 1182.

Le second acte est clairement daté de 1182. Douze chanoines de la collégiale Saint-Front cédèrent à leur tour la moitié du moulin et de la terre qui en dépendait vers Poillenac, sous le devoir de deux setiers de froment de rente exigible à la fête de la Nativité de Saint-Jean-Baptiste.

Le troisième document soulève un problème. Dans les notes de Lespine, on trouve les lignes suivantes : Vers 1172 acte par lequel il est porté que Guillaume de Bourdeille donna à l'abbaye de Chancelade en se faisant religieux dans ladite abbaye tous les droits qu'il avait sur le moulin de Crosviel. Mais le texte latin de l'acte, s'il nous apporte confirmation de la profession de Guillaume pour finir pieusement sa vie, parle, certes, d'un don fait par lui mais sans en préciser la nature. Il est toutefois à relever que, parmi les témoins des deux actes capitulaires sus-

dits, figurent des Bourdeille, dont un Guillaume50

Les aliénations successives du temporel des ecclésiastiques furent préjudiciables à l'abbaye, bien que l'abbé ait vendu en pre­mier lieu ce qui l'intéressait le moins51

Laveu s'en trouve au début d'un relevé: C'est ce que l'abbé de Chancelade met en vante pour l'alienation du domayne de son abbaye qui {soit} moins dommageabfe52.

Les revenus que l'abbaye tirait du moulin de Crosviel furent sensiblement diminués. Lors de la cinquième aliénation, Marguerite de la Rebuterie, dame de Sallegourde, acquit, pour 77 écus 2/3 et les frais de procédure, plusieurs terres et le droit d'augaiI 53

• Il estoit dehu audit sieur abbé sur le moulin de Cros Vieil de rente annuelle fon­cière et directe, la quantité de quatre boyceaulx bled froment, quinze solz d'argent et la tierce partie du poisson qui se prend à l'eaugail du moulin lorsqu'on tire le tramail, sciz ledit moulin en la paroisse Saint Martin les Périgueux. Suivent les confionts. S'agissant d'un moulin de Périgueux, on nous excu­sera de les donner en détail: il confronte aux pretz de Cafaret et de Chapoulete par le devant, et au fleuve de l'Isle par un cousté et aux tenences du sieur de Sallegourde, et l'eau­gail dudit moulin comprend depuis l'abeuradour de Beaupuy jusques à la font du Sauze, qui est joignant le grand chemin par lequel on va du pont de la Cité à Razac, ( . .) aux terres et pretz de monsieur de Périgueux à cause de sa mestairie de Chamiers le tout par un cousté dudit fleuve sur main senestre, et par l'aultre cousté tenant au grand chemin par lequel on va de Périgueux au pont de la Beauronne sur main dextre. Le document ajoute : Les dites rentes et eaugail rapportent que bien peu de proffict à ladite abbaye pour n'estre payée annuellement que a grandz fraiz et par procés. La nouvelle propriétaire et ses successeurs auraient à payer un sol d'acapte à chaque mutation d' abbé'4.

Ce n'est pas tout car Lespine a tiré d'un Extrait ( .. ) des aliénations du temporel du diocèse de Périgueux: Le 20 novembre 1597 (..) 4 boisseaux de froment sur le moulin de Crosviel sans doute vendu à Jean Bertin, bourgeois et marchand de la ville de Périgueux. Il faut noter que ce dernier, lors de la première aliénation, avait déjà acquis, le

50 - Cart. de

Chancelade, f' 395-

397. Ces actes sont intéressants à un autre

titre car ils contiennent

des listes de chanoines

de l'époque. Dans le

premier on trouve un

parent de l'abbé, à savoir Etienne de

Monlauu, le second

donne en outre la fonc­

tion exercée par

quelques chanoines.

51 - Becquart (Noël),

"Les aliénations du rem­

porel ecclésiastique au

diocèse de Périgueux de

1563 à 1585", dans

Annales du Midi, t. 86,

n" 118 (1974), p. 325 -

333.

52 - A D. 24, 3 l-I 3.

53 - Bellussièrc (E de),

"Aliénation des rentes

ecclésiastiques en

Périgord, en 1584",

dans Bulletin de la sHAP, 1898, p. 251-255, où route la procédure est relatée en

détail du 1" mai 1584

au 7 novembre 1587.

Augail et droit d'augail : bief cl' un moulin ; il était peçu sur lui un

droit daugaiL

54 - Même description

en A D. 24, B 3557.

55 - Fonds Périgord, L

25, fb21.

56 - Commune de

Montrem.

57 ~ Aitius, AiciffS latins

donnent diverses formes

en langage vulgaire ;

certains à résonnance

germanique comme

Aeso, Aizo ; les plus COll~

rams SOnt Ai1.., Airl:.

R'1ppdons que les noms

étaient alors formés du

prénom ct du prénom

du père.

58 - Honneur: étendue

de la juridiction d'une

seigneurie.

59 - Frère lai: frère e.xer~

çanr les tâches promnes;

religieux non prêtre.

60 - Grange: domaine

agricole composé de

bâtiments et de terres,

la plupart du temps

exploité par des rcli~

gieux.

61 - Lacte est dit dis­

paru. Nous en donnons

le résumé d'après le Fonds Périgord, t. 33, f' 378, où Lcspine a tiré le

sien sur l'original, sile de MOl1ttluccLv, /lUX

ilrchives de Cb/meelmlt', en 1790. Il fit de même

pour d'autres que nOlis

verrons plus loin.

27 novembre 1564, et pour cent livres, des biens de Chancelade55 •

Le nom du moulin de la Roche de Montanceix56 ne saurait nous étonner : il évoque parfaitement sa situation au pied d'une falaise au sommet de laquelle un fort veillait sur la vallée de l'Isle. Par qui fùt construit ce moulin? On l'ignore. Quoi qu'il en soit, en 1202, Umberga, veuve d'un cer­tain Aiz, et deux de ses enfants, Hélie Aiz et PierreAiz, donnèrent, la veille de l'Ascension ce qu'ils y possédaient5ï

• C'est peut-être ce même Hélie Aiz qui avait pris l'habit à Chancelade afin de pouvoir y être enterré, léguant à cet effet aux religieux un setier de grains. Le jour de son inhumation, sa veuve et leurs enfants confirmèrent la donation. D'autres Aiz firent de même. Aeso, fils d'Itier Aiz, donna ce qu'il avait sous réserve de cinq setiers de froment dont deux à verser dans l'honneur58 de Montanceix. Parallèlement, Arnaud de Montanceix ven­dit une terre "à la tête de l'écluse". Bertrand de Montanceix fut d'accord. Lun, au moins, de ces deux actes fut signé dans la chapelle épiscopale Saint-Jean, à la Cité. Lévêque, Raymond de Castelnau [1198-1210], confirma lui-même la cession des droits sur le moulin qu'abandonna Raoul, frère d'Arnaud. Enfin, un Fortanier, sans doute membre de leur famille, archidiacre et prévôt de Castelnau, céda son fevatge sur le moulin, par un acte passé en la collégiale Saint-Front. Il semble qu'à la suite de toutes ces dona­tions Chancelade eut le plein dominium sur ce moulin. Il faut relever qu'un frère lai59 de Chancelade, Pierre FiloI, s'en occupait. Y était-il le seul religieux? C'est l'unique men­tion de ce genre que l'on relève dans le cartulaire, mise à part celle d'un frère lai chargé d'une grangéO de l'abbaye.

Le 31 mars 1238, Eblon de Saint­Astier, seigneur de Montanceix, transigea avec Chancelade sur un procès au sujet du moulin. Labbé et les religieux quittèrent à perpétuité le dominium du moulin aux sei­gneurs de Montanceix. Cet acte fut passé en présence de Pierre de Saint-Astier, évêque de Périgueux, d'Archambaud II, comte de Périgord, et de Boson, seigneur de Grignols61

• En 1244, Blaise de Saint-Astier, seigneur de Montanceix, passa un accord

avec le comte de Périgord et les habitants du Puy-Saint-Front pour raison du port de la rivière de 11sle et péage de toute marchandise. Même si le texte complet a disparu, on peut supposer que le passage des bateaux par l'écluse y était évoquë2

• En 1287, Raymond de Saint-Astier, donzeI, fils d'Eblon, et son épouse, Esclarmonde, cédent un prè sur la paroisse de Montrem.

Arnaud Pierre de Grignols, donzel 63

, céda encore, en 1262, quelques rentes sur le moulin64.

A la fin du )0.fc siècle, il était abs, c'est­à-dire abandonné, pour ne pas dire ruiné. Le seigneur était alors Archambaud de Bourdeille, damoiseau, seigneur aussi de Crognac. Deux frères, habitants de Montrem, Antoine et Pierre Jay, eurent l'in­tention de remettre le moulin en état de marche. A qui revenait alors la directe? Ils se tournèrent cl' abord vers Chancelade dont le syndic leur signa un bail emphytéotique auquel Archambaud fit Opposltlon. S'ensuivit un procès qui fut porté devant le présidial de Périgueux avant d'aller, en appel, devant le parlement de Bordeaux où il était en instance en 1493. La situation aurait pu s'éterniser, comme tant d'autres, si les deux parties n'avaient décidé de s'en tenir à un arbitrage. Le 25 juillet de cette année-là, dans la maison de Jacques de Pratis (Desprès), chanoine et archidiacre de la Double, se trouvèrent maître Jean de Leymarie, procureur du seigneur en vertu d'une procuration établie par Mathieu de Parietibus (Desmurs), notaire présent à l'acte, et de Antoine Jay, dit Mouline, agis­sant aussi au nom de son frère absent65

• Jean de Leymarie exposa les faits. Chacune des parties affirmait posséder la directe du mou­lin. Or le syndic de l'abbaye avait seul affermé celui-ci avec ses eaugails, écluses, rivages, eysines 66, cours d'eau et toutes appartenances. Il fut décidé que le seigneur de Montanceix laisserait le moulin à la fondalité de l'abbaye. Il le laisserait aux Jay en acense perpétuelle pour la moitié des fi-uits, tant des grains de toute nature que des poissons pris dans les eaugails et les écluses, dont ils devraient rendre compte exact à leurs seigneurs. Les Jay construiraient à leurs frais un moulin mou­lant dans les deux années à courir. Il comprendrait plusieurs meules, l'une à fro-

62 ~ Roux (chanoine

Jean), IU/lentllire du tré~

sor rie lil maison riu

Consulat de Périgueux, Périgueux, S.H.A.P., 1934, p. 165, n" 597.

63 - Donze! : synonyme

de damoiseau ou

d'écuyer.

64 - Fonds Périgord, t.

33, F' 379 r" cr v" ; voir

note n° 41.

65 - Lacte se trouve aux

A. D. 24, 12 J 92. On aura noté le surnom

rén:lateur de Antoine

Jay. Nous retrouverons

la famille Jay pour d'autres moulins.

66 - Epine: pem dési~

gncr un bâtimenr à

usage de grange, des

dépendances ou,

encore, des terrains dis­

ponibles à construire.

19

67 - Vidimer : délivrer

une attestation par

laquelle on certifie

qu'un acte est conforme

à l'original.

68 - Cart. de Chan­

celade, f" 136. Voir

Poupard (Laurenr), Les

moulins à eau de fa Basse

ValUe de nsle entre

Périgueux et Bém:vent,

maîtrise d'histoire de

l'art, Université de

Bordeaux III, 1985-

1986.

69 - Cart. de

Chancelade, f' 43 r' ; en

occitan.

20

ment et l'autre à seigle, et, éventuellement, d'autres meules à huile et à foulon à drap, dans la mesure où ces dernières ne porteraient pas tort aux précédentes. Les Jay verseraient chaque année à Chancelade, au nom d'Archambaud de Bourdeille, quatre charges de froment, dont une de leur propre grain. Ils acquitteraient en outre le tiers de vingt sols exonérant ainsi leur seigneur de tout devoir envers l'abbaye jusqu'à ce que soit précisée l'assignation des charges prévues, tant en nature qu'en argent. Le procureur se démit alors du moulin, n'y retenant que la moitié des fruits mentionnée dans l'acte, et en investit Antoine Jay pour lui et son frère absent. Archambaud de Bourdeille fut d'ac­cord. Toutefois, le 29 juillet, il reçut dans son château de Montanceix deux chanceladais, frère Hélie Ladoys et frère Pierre de Brolio (Dubreuil) syndic. Il tenait à reprendre devant eux quelques clauses et à en ajouter d'autres. Les Jay installeraient les pêcheries à leurs frais. Ils verseraient vingt sols tournois pour les meules à huile et à drap. Ils mou­draient les grains comestibles pour sa propre table ; de même pour son huile, et cela sans contrepartie aucune. Ils useraient des mesures de Montanceix et jouiraient des eysines anciennes nécessaires à l'installation du moulin.

Un nouveau différend surgit au XVIIe siècle entre les Bourdeille et l'abbaye. C'est alors que Chancelade fit vidimd7 une copie de l'acte, le 30 juillet 1602. Quant aux Bourdeille, ils furent en mesure de produire l'acte passé le 31 mars 1238 avec Eblon de Saint-Astier. La fin de ce procès reste incon­nue.

Le moulin de Longua se trouvait sur la paroisse de Saint-Médard-de-Mussidan. Il n'est connu que par la cession de ses droits qu'en fit Arnaud de Montanceix, avant 1189. Ses frères, Hugues et Raymond, don­nèrent leur accord68

Il en va de même pour le moulin de Saint-Martial, sis sur la paroisse de Saint­Martial-d'Artenset. En 1228, Archambaud, comte de Périgord, céda le moulin que Pierre Vigier tenait à fief de lui, deux sous de cens et tour le bois nécessaire au moulin que les religieux pouvaient prendre dans ses bois69.

- 11- LES MOULINS NON CITÉS DANS LE CARTUlAIRE

1 - Les moulins du Toulon

Chancelade possédait des biens dans le quartier du Toulon (actuellement commune de Périgueux). Avant 1205, Pierre de Sarnac, chevalier de la Cité où il occupait une des tours, donna à l'abbaye un hôpital élevé par ses soins sur un fond propre ainsi que toutes ses appartenances. Cette donation était faite pour le salut de son âme, celle de son épouse, vraisemblablement inhumée dans la chapelle de l'établissement, et celle de ses parents.

Vers la même époque, en tout cas avant 1217, Audoin de Senelac céda tout ce qu'il avait a far a l'espital deI Tolon. Entre 1232 et 1236, Hélie d'Angoulême abandonna à son tour sa terre de Beaupuy (Belpoi) au-dessus de l'hôpital. Sa femme Marguerite et leurs trois fils, Raoul, R. (sans doute autre Raoul), et Hélie, confirmèrent cette donation cepen­dant que Hélie de Sarnac qui devait un cens de cinq sols à cette famille s'engageait à le verser dorénavant à Chancelade70

De cet hôpital on ne connaît guère que son existence. Il est fait parfois mention d'une maladrerie ayant aussi existé dans ce quartier. Mais l'on sait par ailleurs que les hôpitaux accueillirent parfois des contagieux en cas d'épidémie71

Quoiqu'il en soit Chancelade eut jadis au Toulon un de ses prieurés dédié à saint Antoine ermite. Cette dédicace est à souli­gner, saint Antoine étant, en effet, invoqué pour la préservation des épidémies. Le feu Saint-Antoine était une maladie qui avait fait des ravages vers le XIe siècle. C'était peut-être simplement un érysipèle gangréneux que l'on pouvait alors confondre avec une lèpre. Un ordre hospitalier de Saint-Antoine avait été fondé mais on ne peut assurer que l'hô­pital confié à Chancelade ait appartenu à cet ordre72.

Il est donc permis d'avancer que, pour porter un tel nom, unique dans les noms des prieurés chanceladais, le prieuré Saint­Antoine du Toulon pourrait avoir été créé sur les bâtiments de cet hôpital (ou à partir de ceux-ci) devenus vacants par suite de la récession des maladies endémiques.

70 - Cart. de Chance­

lade, f' 8 r', 14 r', 46 r'.

71 - Higounet-Nadal

(Arlette), Périgueux aux

XlV et .xv siècles, Bordeaux, Fédération

historique du Sud­

Ouest, 1978, p. 83 et p.

89 - 90. Répétons après

elle que l'histoire

ancienne de ce quartier

est mal connue.

72 - Marion (M.),

Dictionnaire des Insti­tutions de la France aux XYlf et XVIlf siècles,

Paris, 1989, article

Hôpitaux.

73 - Poupard, déjà cité.

74 - A. D. 24, 3 H 6. Grasset éL1Ït sans doute

le nom d'un fermier

précédent.

75 - Il s'agit de Saint­

Vincem-sur-l'Islc où se

trouvait le moulin dom

il a déjà été question 0-

dessus.

Nous ajouterons que le titre de "prieur de Saint-Antoine", devenu purement hono­rifique par la suite, fut porté successivement par des chanceladais jusqu'à la révolution, le dernier titulaire étant Joseph Prunis, bien connu par ailleurs.

Lorigine du moulin d'Estournel ou de Grasset est inconnue. Le cartulaire men­tionne bien un B [ernard] Estornell parmi les témoins d'un acte passé vers 1187-1188, mais le rapport entre eux n'est pas certain.

Que sait-on de ce moulin? 'Texistence d'un complexe de trois ou quatre moulins sur le ruisseau du Toulon, issu de l'abîme, rend parfois l'identification malaisée surtout lorsqu'ils ne sont nommés que moulins du Toulon73

".

Heureusement, un acte du 30 novembre 158374 nous donne une situation précise. Le moulin d'Estournel autrement de Grasset sur le ruysseau du Toulon ( .. ) et conftontant entre le fleuve de Lisle d'une part et avec les moulins du sieur de Bourdeille qui est sitz sur led ruysseau ( . .) et avec les prés de maistre Pierre Jay greffier pour le Roy. Le mou­lin était alors acensé à David, maître papetier, par l'abbé Arnaud de Solminihac.

Lacte d'arbitrage d'un procès nous per­met de connaître une partie de l'histoire antérieure du moulin. Le 2 juillet 1618, Alain de Solminihac avait fait assigner le tenancier en paiement de vingt-neuf années d'arrérage d'une rente de douze boisseaux de froment et autant de mesture. Mais, le 9 novembre suivant, voulant aller aux uni­versités pour y parfaire ses estudes, il nomma de concert avec frère Gabriel de Dignac, prieur de Saint-Mamet, le frère François de Ribeyreys en qualité de procureur aux affaires de l'abbaye pendant et durant l'ab­sence dudit sieur abbé seulement. Jadis, le moulin mouvait en partie de la fondalité de Chancelade, l'autre partie mouvant de celle de noble Bernard Dupuy, sieur de Trigonant. Le 12 avril 1491, l'abbé avait acquis cette autre part en échange de huit ftoment boisseaux mezure de Perigueux, douze sols tournois, geline une, et demy-livre de cire de rente foncière et directe due sur certains mayne­ments especiffiés audit contrat et situés au lieu de Saint Vincent?5. En 1618, le tenancier du moulin était Géraud de Pelletengeas, maître

pintier. Assigné, comme nous l'avons dit, en 1618, il se tourna vers messire Pierre de Jay, écuyer, sieur de Saint-Germain-du-Salembre et héritier de son iieul, autre Pierre de Jay, greffier en la sénéchaussée, qui avait acensé autrefois le moulin et quelques près atte­nants à Raymond David, auteur du sieur de Pelletengeas, pour soixante livres tournois et dix rames de papier, plus vingt-cinq écus d'entrage avec promesse de le tenir quitte de toute redevance à l'abbaye. Lacte avait été reçu, le 19 avril 1559, par Saint-Angel, notaire royal76

• Alors, Pierre de Jay se tourna à son tour vers messire Jean de Méredieu advocat en Parlement et sièges royaux de Périgueux. Celui-ci put prouver que, par contrat du 23 octobre 1590, feu son père, Pierre de Méredieu, bourgeois et marchand de Périgueux, avait acheté la rente susdite pour soixante livres argent et dix rames de papier à Adrian de Cloqueinan, écuyer, sieur de la Ferrière, en sa qualité de procureur de Loys de Belair, baron de Cozes. Noble Bernard de Jay, écuyer, sieur de Beaufort et frère du comparant, était témoin de ce contrat et avait alors promis, lui aussi', qu'il n'y aurait pas de redevance à verser à Chancelade. Mais d'antiens livres de ladite abbaye puis cent ans en ça prouvaient, quant à eux, que la rente avait été versée à l'abbaye par des ascendants du comparant jusqu'au 7 septembre 1567. A cette date, l'abbé Antoine de Montardit avait vendu devant Picon, notaire royal, une rente de vingt­quatre boisseaux de grains à Pierre de Jay, sieur de Beaufort, moyennant la somme de six centz livres soubz la caution de Jehan de Montardit, sieur de Lascoutz. Pierre de Jay exhibait encore une sentence arbitrale du 30 mars 1598 entre l'abbé Arnaud de Solminihac et Bernard de Jay son père qui flXait à quarante-cinq sols seulement la rente foncière et directe sur un moulin et les près attenants. D'ailleurs Pierre de Jay lui-même avait déjà racheté trois sols sur cette rente. Il alléguait que cet accord avait eu lieu au moment des aliénations du temporel ecdé­siastique7ï• Le procureur de Chancelade rétorquait que la sentence arbitrale invoquée concernait en fait seullement quelques prés estanz en environ et non un moulin. D'ailleurs ce n'était qu'un simple advis d'ad­vocats foict sans aulcun compromis et

76 - Est-il besoin de

souligner que cet acre de

1559 paraît en contra­

diction avec celui de

1583 mentionné ci-des­sus.

77 - Sur les aliénations,

voir références déjà citées en notes. [Dans

l'Extrait des aliéna­tions ... fuite en l'année

1563, au Fonds

Périgord, l. 25. on

trouve en effet

Chancelade, en 159830 mars, 48 sols de rente

foncière et directe sur le rnoulin d'Estourneau,

autrement de Grasset situé sur le ruisse/lU du Toulon (racheté),

cOJifivlltant avec le fleuve de I1sle, et au moulin du

seigneur de Ladouze, sis sur ledit ruisseau, le pout

entre deux appelé du

Toulo11.

21

78 -A. D. 24, 3 E 127!.

Dans ce minutier se

trouvent d'autres actes

passés par F. de

Ribeyrcys, notamment

en septembre et en

octobre 1619.

22

conséquemment non obligatoire mesme au pré­judice d'une abbaye de laquelle les abbés ne sont que comme oeconomes et administrateurs. De plus, à cette sentence arbitrale était atta­ché un acte d'acense du 15 avril 1466, reçu par Joanin Forquin, notaire, qui mention­nait un moulin appelé deI Toulon propre a esmoudre les cousteaux et tous autres feremens soubz la rente annuelle de vingt sols et cinq sols d'achapte. Cette acense avait été passée par Raymond Lacoste, prêtre, au nom et comme procureur-syndic de Chancelade avec Aymeri Jourde, serrurier, et Pierre Thomasson coustelier. Le frère François de Ribeyreys eut beau jeu de trouver dans cet acte la preuve qu'il s'agissait d'un autre mou­lin que celui d'Estournel. Celui-ci n'était-il pas à l'origine un moulin à bled ( .. ) a present converty en moulin à papier alors que l'acense de 1466 visait un moulin mailleret propre à esmoudre coust eaux et autres feremens ?

Le procès durait depuis trois ans et menaçait de s'éterniser. Aussi les parties en présence prevoyant le doubteux evenement dicelluy décidèrent de s'en remettre à la déci­sion de quatre avocats au parlement de Bordeaux, Pierre de Jehan, Nicolas et Hélie Alexandre, Bertrand Boudon, promettant de se soumettre à leur verdict. Les arbitres décidèrent que Pierre Jay, sieur de Saint­Germain-du-Salembre, verserait à l'abbaye une charge de froment, mesure de Chancelade, portable au grenier de l'abbaye et ce dans trois ans prochains, en la fête de Saint-Michel. Le fermier d'Estournel serait déchargé de la rente due ainsi que des arré­rages. Le sieur de Montréal, héritier de Jehan de Montardit, sieur de Lascoutz, serait de même déchargé de la caution promise en 1567. Les parties ayant accepté l'arbitrage, l'acte fut reçu, le 25 octobre 1619, par le notaire Magoe8

On pourrait croire cette affaire définiti­vement terminée. Et pourtant, on ne sait pourquoi, Chancelade continua à revendi­quer la fondalité du moulin d'Estournel. En effet, le 15 décembre 1706, le frère Jean Lachenaud, syndic de l'abbaye, constitua son procureur maître Pierre Garreau, procu­reur ès sièges royaux de Périgueux, y habitant paroisse de Saint-Front. Tous deux firent signifier par Jean Reveilhas, sergent royal habitant Chancelade, paroisse de

Beauronne, à Françoise de Montozon, héri­tière de Pierre Chancel sieur de la Borie de Barbadaud, habitante de Périgueux, d'avoir à comparaître devant le sénéchal afin de reconnaître la seigneurie foncière et directe de l'abbaye sur un certain nombre de biens. On voit parmi ceux-ci que l'abbé est seigneur foncier et direct du moulin d'Estournaux situé sur le ruisseau du Thoulon paroisse Saint Martin de Périgueux confrontant du costé de l 'orian au moulin de M le chevallier de Cablan et avec le moulin de Cucupey du costé du couchant et avec la rivière de L'isle du costé du midy sur lequel est deu froment xij bois­seaux, mesture xij boisseaux, acapte 1 livre de cire le tout portable à l'abbaye de Chancellade. Plus est deub, audit sieur scindic de renthe fon­ciere et directe sur deux preds contigus audit moulin argent xxiij sols accapte demy livre de cire et un sol dargenf9

Il ne saurait être question à des siècles de distance de définir les droits de chacun. Il nous suffit de savoir que Chancelade a bien possédé jadis, dans le quartier du Toulon, le moulin appelé d'Estournel qui, de moulin à farine, devint ensuite moulin à papier. Mais l'abbaye possédait encore un second moulin, mailleret celui-ci, bien distinct du précédent comme le prouve l'acense de 1466.

Nous nous sommes attardés sur l'his­toire du moulin d'Estournel pour trois raisons. La première est de montrer que nous sommes loin de connaître toutes les posses­sions anciennes de Chancelade ; minutes notariales et fonds de procédure nous réser­vent encore des trouvailles. Ensuite nous constatons que toutes les archives de l'ab­baye n'avaient point disparu lors du brwement de 1575 puisqu'il était possible en 1619 d'invoquer des documents remon­tant à plus d'un siècle, au moins. Enfin ce procès est un bon exemple des efforts déployés par les abbés du XY' siècle pour conserver leurs biens et ceux, parfois vains, de Alain de Solminihac et des abbés suivants pour les recouvrer 0.

L'abbaye de Chancelade était seigneur foncier et direct du Moulin Neuf, ou mou­lin de Cuquepeyl, proche du moulin d'Estournel, tout au moins en 1709, date à laquelle le syndic entame une procédure de main-mise sur le moulin pour défaut de

79 - A. D. 24, 2 E

1838/7. Acte fort inté­ressant, premièrement

parce qu'il nous fait

connaître d'anciennes

propriétés de l'abbaye,

mais aussi parce qu'il

précise tOUS leurs

confroors et leurs

charges.

80 - Il est à souhaiter

que les différents mou­

lins du Toulon soient

clairement distingués.

Pour celui qui appartint

au seigneur de Ladouze,

voir son évolution dans

le Bulletin de la 5.HA.P., 1916, p. 283.

Voir aussi Poupard, déjà

cité.

81 - Acte notarié du 14

fCvricr 1709 concernant

la main-mise du moulin

de Cuquepey autrement le MOIi/in Nellf par le

syndic de l'abbaye. A. D. 24, 3 E 1628.

PAS DU II/OULiN l\I E UF

III Moulin Neuf (commune de Périgueux). D'après un relevé de 1696.

AD. 24, 1 Fi Dordogne 79.

82 - Voir Poupard, déjà

cité.

83 - Sur Pierre Pasmureau [1725 -

1798J voir Boucr

(Robert), Le clergé dit Périgord au temps de la Révolution Franfaise, Piégut-Pluviers,

Dclraconcepr. 1994, r.

2, n" 1454.

\ J

~/

paiement des rentes foncières et des droits seigneuriaux. Ce moulin s'est aussi appelé moulin d'Aiguepas, moulin de Barbadaud, MoulineauS2.

2 - Les moulins du prieuré chanceladais deBom

En l'année 1765, le P. Pierre Pastoureau, prieur de Sainte-Catherine-de­Born et curé de son annexe Blis, était en procès avec son abbé83

• Le même fait s'était produit dans le passé. On est toutefois en droit de s'étonner qu'il se soit reproduit après la réforme de Chancelade. Il semble que l'on s'y soit peu à peu éloigné de l'esprit dont Alain de Solminihac avait été, au siècle pré­cédent, à la fois l'instigateur et le modèle. Pierre Pastoureau avait rempli à Chancelade les fonctions de syndic. C'est dire qu'il était rompu aux affaires et qu'il avait eu le temps de se familiariser avec les documents, encore nombreux, conservés dans le chartrier. On

peut imaginer que, avant de prendre posses­sion de son prieuré, il avait eu le temps de fourbir ses armes84

• Il s'appuyait, en premier lieu, sur un document du 19 mars 1336 pour réclamer à son abbé une part des reve­nus de plusieurs moulins voisins de son prieuré. Cet acte qui avait uni la moitié des revenus de Born à la menseS5 communau­taire, mentionnait il est vrai, des molendina. Mais ce mot se trouvait dans une énuméra­tion de biens divers comme il s'en trouve en tout acte notarié soucieux de n'omettre aucun article qui puisse donner lieu à contestation ultérieure. Or aucun nom de moulin particulier n'y paraissait. Desquels pouvait-il donc s'agirB6 ?

Pierre Pastoureau rédigea (ou fit rédi­ger) un mémoire invoquant encore plusieurs folios du terrier des assences autrement de Joujay couvert de baume verte conservé à l'ab­bayeS? D'après ce recueil, Arnaud Raymond, abbé de Chancelade de 1327 à 1359, avait acensé en 1349 de concert avec Eymeri de Bescle, alors prieur de Born, les revenus des moulins de Redro et deI Chambier ou Caubier. De même, quelques années plus tard, ils acensèrent à nouveau tous les droits et revenus à eux appartenant tant en bled quargent et dixmes es moulins de Redro et deI Chambier sis en la justice d'Auberoche. On trouvait en outre au septantième feuillet de Joujay une reconnaissance du Moulin Neuf ou de la Borde. Le 3 août 1461, l'abbé Guillaume Adhémar (1459-1478) avait acensé les moulins de Redro et de Gouteblave sans que le prieur du moment, Antoine d'Escure, y ait fait une quelconque opposi­tion. Il est vrai qu'il aurait passé auparavant une transaction avec son abbé, transaction aux termes de laquelle il se serait contenté de quelques rentes assignées sur d'autres biens en échange de celles perçues sur sa part des moulins. Au 101 ème folio du terrier de Joujay se trouvait la première mention d'un acense du moulin de Redrol passé par l'abbé seul, sous le devoir de quatre charges de froment, la moitié des poissons et vingt sols d'acapte. Le tenancier était tenu de foire bâtir ledit moulin dans cinq ans. C'est la preuve que celui-ci avait subi des dommages aupara­vant. Lauteur du mémoire concluait qu'il était présumable que l'abbé avait, avant

84 - Grillon (Louis), Le prieuré cballceladais Sa i}j te- Ca tberi lIe-de­

Born ; travail à paraître.

P. Pastoureau avait suc­

cédé à R. OrE'lUte

décédé cn 1?62.

85 - Mense commu­

nautaire : partie des

revenus d'une abbaye

dt:'"Volue à la commu­

nauré, par oppositÎon à

la mense abbatiale.

86 - Deux copies papier

de cet acte de 1336 se

trouvent aux A D. 24,

1 Mi 558 ; le résumé se

trouvera dans le travail

mentionné dans la note

précédenœ.

87 - Cc mémoire se

trouve aLL'i: A D. 24, 1

l'vIi 558. Le terrier de

Joujay, actuellemcnr

disparu, est aussi men­

tionné par Antoine

Teyssandier dans son

Mémoire inslructif sur l'élitt de l'tlbba)'e de Chancelade et ftz succes­sion de ses {lbbés. AD.

24, 2J 935.

23

88 ~ Cc mémoire se

trouve avec celui du

prieur et un brouillon

de consultation juri­

dique aux A. D. 24, 1

Mi 558.

89 - Nous 1'avons

souligné dans notre

introducdon; on peut

cn fournir de multiples

exemples.

24

1461, obligé le prieur de Born à lui céder ses droits sur les moulins dépendant de son prieuré contre ce que Pierre Pastoureau qua­lifiait de modique pension.

Devrait-on revenir à l'état antérieur ? Le mémoire rédigé pour l'abbé, en contre­partie du précédent, apportait des renseignements plus récents que ceux du )(\/e siècle sur les moulins concernés88

• Mais les droits sur ceux-ci méritaient d'être bien assis juridiquement. Le vicaire de Blis demande en qualité de prieur de Born la moi­tié des grains des moulins qu'il suppose être possédés par l'abbé de Chancelade parce que dans l'acte d'union de 1336 il est dit qu'il aura medietatem emolumentorum molendino­rum. On répond à cet article que l'abbaye de Chancellade ne jouit d'aucun moulin qui luy

vienne de la cure de Blis et prieuré de Born et qu'ainsi la demande du vicaire perpétuel de Blis n'est pas fondée. ( .. ) On observe ici que par le mot molendina on entend pas la pluspart du tems plusieurs moulins dont les batiments sont séparés, mais plusieurs meules qui sont dans le même batiment 89.

Lauteur du mémoire faisait ensuite remarquer que l'abbaye aurait autant d'inté­rêt que le prieur à connaître les moulins en question! C'est donc qu'il n'avait plus la fon­dalité directe et foncière sur chacun d'entre eux. Pierre Pastoureau précisait, certes, qu'il s'agissait des moulins de Redrol, Goutteblave, deI Chaubier et de Moulin Neuf mais présomption n'était pas preuve. Et l'abbé, de son côté, pouvait apporter les preuves qu'ils avaient appartenu longtemps à la mense abbatiale mais que certains avaient disparu ou lui avaient échappé.

Le "Moulin pointu"90 : Anciennement il y avait sur le ruisseau de Born une mouline ou moulin qu'on appelait le Moulin pointu qui est tombé par vétusté ou que les eaux ont

entraîné, ce moulin a passé il y a longtemps dans la maison de Lardimalie, il peut bien se faire que primordialement il appartenait au prieuré et à l'abbaye par la même voye qu'on a perdu tant d'autres choses.

De ce "Moulin pointu" il ne reste ni trace ni souvenir quelconque dans la com-

Il Moulin de Redrol. sur l'Auvézère (commune du Change).

Photo Denis Borclas.

90 - Commune de Blis­

et-Born.

iii Moulin de Goutteblave, sur le Chaubier (commune du Change).

Photo Thieny Tillet.

91 - Pour la disparition de cc moulin, voir

Thierry 11l1et : Etudes Historiques sur Blis-et­

Born, l. At/ilS tOpOll)'­

mique, 1995.

92 - Commune d'Eyliac.

93 - Commune du

Change. En A. D. 24, 2 E 1823/151 se trouve

unc demande d'arré­

rages signifiée au

fermier, Roux, par le

frère P. L'lmy, le premier juin 1632.

mune de Blis-et-Born. On aura d'ailleurs relevé que Pierre Pastoureau ne le mention­nait pas dans son mémoire91

Le moulin du Chaubier92, appelé aussi "del Chambier" et "Caubier" par P. Pastoureau. Nous pensons qu'il pourrait s'agir d'un des moulins (existant ou disparu) installé sur le Chaubier, ruisseau issu du gour du même nom.

Le moulin de Redro193 : En 1217,

Robert de Seneleus et son fière donnèrent à Chancelade un setier de rente qu'ils avaient sur le moulin de Redroux en reconnoissance de ce que l'abbaye avait reçu un de leurs fières comme religieux. Par le même acte ils cédèrent les terres joignant le moulin. Furent témoins le prieur de Born, Raymond de Chamlazac, et Jean de Lajac. Ainsi parle l'un des mémoires (Mémoire pour le prieur J. A la vérité, les extraits du cartulaire rassemblés par nos soins ignorent cet acte. Mais, en revanche, ils mentionnent plusieurs membres de cette famille de Seneleus, généreuse donatrice entre 1153 et 1189. Quant à Robert de

Seneleus, nous allons le retrouver94• En effet

le mémoire précise encore qu'un Robert che­valier, qui doit être le nôtre puisque le cartulaire lui attribue aussi cette qualité, avait cédé en 1225, en compagnie de son épouse, une partie des ténements de la Richardie et de Belesmas qui leur appartenaient. Les autres parts furent données, en 1233, par Foucaud Desteners d'Auberoche et, vers le même temps, par deux frères, Bernard et Raymond de Sanilhac95

Chancelade avait la seigneurie du mou­lin de Redrol puisque, nous l'avons vu, l'abbé l'avait acensé, le 3 août 1461, sous le devoir de grains portables au grenier de Chancelade, acense renouvelée d'ailleurs avant 1480. Et, le 2 mai 1513, une recon­naissance était passée en faveur de l'abbé. Entre temps la rente avait perdu de son importance puisque un acensement passé après le départ d'un sieur Moulinaud (nom prédestiné s'il ne s'agit d'une erreur de trans­cription) la ramenait à deux charges de froment9G • Une liste d'acaptes, datée de 1690, précise que le moulin de Redroux doit une acapte de vingt sols.

94 - Nous Il' avons

aucune raison de douter

de la vérité de CCt acte.

Si le témoin Jean de

Lajae est par ailleurs

inconnu, plusieurs

Chamlaz.K fiJfcnt rdi­

gitux chanccladais. On

peur voir deux Senelem

dans l'entourage comtal

vers 1153. Avant 1189

Etienne de Senclcus fut

vigier du Puy-Sai nt­

Front.

95 - Une panic de ce

premier acte se rrouve

en effet dans le cart. de

Chancelade. r 153. Bélcsmas se trouve sur le

cadastre de Blis-et­

Born en D 1 entre la Richardie et le Gué de

Rigoulès ; voir Thierry

Tillet, ouvrage cité. Les autres actes som incon­

nus mais les Sanilhac

sont bien représemés

dans le canulaire. Il

pourrait y avoir une

mauvaise lecture dans le

mémoire; lire Foucaud

des Senas d'Auberoche ?

96 - Voir aussi un acte

d'afferme notarié de ce

moulin. le 13 avril

169.3. A. D. 24. 3 E 96, notaire Delagarde.

25

97 - Goutreblave, lieu­dit à cheval sur

Blis-eu-Born et Le

Change. Voir cadastre Blis-er-Born en D 1.

98 - Il doit s'agir du

moulin situé non loin

de Blanzac et du châ­

teau de Laborde, dans la

commune du Change.

26

Le moulin de Goutteblave97• Il est

situé près d'une résurgence. La construction actuelle date du XVIIIe siècle. Un acense­ment de ce moulin avait été passé le 14 avril d'une année non spécifiée par le mémoire, mais sûrement ancienne puisque celui-ci mentionnait à la suite des actes de recon­naissance de 1492 et du 10 mars 1516. D'ailleurs, preuve supplémentaire aux yeux du rédacteur, le 27 décembre 1499, le fer­mier du moulin, un nommé Cornut, qui mariait sa fille à Guillaume Beaumont, cédait à celui-ci la ferme du moulin à charge de continuer à payer la redevance habituelle à Chancelade. Une dernière reconnaissance était datée du 19 juillet 1706. Enfin, la liste des acaptes mentionnait : Plus sur la tenance de Gouteblave dans Born acapte 1 L. de cire.

En 1225, Gérard Aimeri d'Auberoche avait donné le Moulin Neuf, ou de la Borde,98 avec quelque sesterées de terre atte­nante en s'y réservant toutefois un setier de froment de rente. Les extraits du cartulaire que nous connaissons sont muets sur ce per­sonnage et sur sa donation. On ne peut donc en préciser les dates. Il nous faut attendre le 27 avril 1461 pour trouver un acte d'acense pour trois charges de froment portables au grenier de l'abbaye. Chancelade avait donc la seigneurie du moulin. Suivaient d'autres reconnaissances datées du 10 mars 1517 et du 4 août 1593. Chancelade céda cette rente, le 20 octobre 1662, à un certain Archambaud dont le patronyme n'est pas indiqué, sous la réserve d'une croix d'argent d'acapte à chaque mutation d'abbé ou de rentier. Entre temps le prieuré de Born était tombé aux mains d'un commendataire, un sieur de la Sale, membre de la famille de Blanzac. Aussi, le 9 décembre 1631, un acte de partage fut-il signé devant Delagarde, notaire royal. Chancelade et le sieur de la Sale, vicaire perpétuel de Blis et prieur com­mendataire de Born, jouiraient chacun de la moitié des rentes jusqu'à égalité parfaite. Pour atteindre celle-ci l'abbaye céda à l'autre partie ses rentes sur le ténement de la Poussardie.

Vint le moment où les chanceladais récupérèrent à la fois leur prieuré de Born et la paroisse annexe de Blis qu'ils devaient conserver jusqu'à la Révolution. Le 8 avril

1693, ils firent prononcer une sentence à l'encontre d'un la Sale qui refusait de payer le cens prévu par l'acte de 1461. Un nouvel acte d'acense, daté du 27 avril 1761, nous montre que la rente de froment sur ce mou­lin restait inchangée, soit trois charges de froment portables au grenier de l'abbaye. Il nous démontre surtout que l'abbaye avait recouvré cette rente entièrement, aux dépens des prieurs.

D'autres moulins sur l'Auvézère

Le moulin de la Sudrie ou de Chardou99 relevait de l'abbaye, tout au moins en 1460. Le 2 décembre de cette année, le moulin de Chardou fait l'objet d'une reconnaissance en faveur de l'abbé de Chancelade. En 1555 et 1560, Pierre Sudrie vendit à Gabrielle de Beaupuy, dame de Cubjac, certaines parts sur le moulin de Sudrie, ou de Chardou, mouvant de l'abbé de Chancelade. Le 19 novembre 1662, l'abbé cèda sa rente, par échange avec Jeanne Darlot, également dame de CubjaclOo•

Le moulin du pont de Cubjac. Le 3 avril 1516, l'abbé de Chancelade et François de Belcier officialisent une transac­tion : l'abbé cède son droit de redevance ou aumône venant du vicomte de Limoges sur le moulin du pont de Cubjac, moyennant certains revenus sur le mas de la Valade, paroisse de Tocane, que lui donne Belcier. Cet accord est confirmé, le 15 avril 1517, à l'occasion d'une enquête sur les dépenses (1050 livres) liées à la réédification du mou­lin en ruine de CubjaclO l

Le rédacteur du mémoire en faveur de l'abbé concluait, en 1765, que les accenses reconnoissances et possessions de tant de siècles par l'abbaye ( . .) suffisent assés pour établir que les droits de ladite abbaye sur lesdits mou­lins sont de toute évidence et ne peuvent former le moindre doute. Les droits de l'abbaye sûre­ment, ceux du prieur lui étant niés. Lors de sa déclaration de biens, à la révolution, Pierre Pastoureau ne put y faire figurer les rentes des moulins dont il avait en vain réclamé une pare02

99 - Commune de

Cubjac. Le lieu-dit la

Sudric existe toujours.

100 - A. D. 24, 2 E

912/1.

lOI - A. D. 24, 2 E 912/1.

102 - Voir note n° 88.

Conclusion

Après avoir parcouru, à partir de trop rares documents, l'histoire de quelques moulins de Chancelade, il nous paraît pos­sible de proposer une grille utile à qui voudrait entreprendre l'érude de moulins ayant appartenu à ses anciens prieurés et qui sont encore mal connus pour ne pas dire Ignorés.

Quand l'abbaye fut fondée, le domi­nium de la plupart des moulins mentionnés dans le cartulaire était déjà entre les mains de seigneurs laïcs ou ecclésiastiques, ainsi que toutes sortes de droits afférents. Seul le mou­lin de Salles, mis à part celui de l'abbaye (et, sans doute, celui de Beauronne), fut une création, ou une re-création, des religieux. Encore durent-ils acquérir la terre sur laquelle le bâtir, les rives où relier leur barrage et leur écluse nécessaire, sans compter le droit d'usage de l'eau sur un parcours déli­mité.

Il est vrai que quelques familles seule­ment se partageaient la possession des moulins concernés. Par le jeu des héritages, dotations et partages, ceux-ci avaient vu, au cours des ans, se multiplier les ayant-droit. L'exemple le plus frappant n'est-il pas celui de Arnaud de Montanceix qui abandonna à l'abbaye les droits qu'il avait sur cinq mou­lins tournant sur l'Isle ou sur la Donzelle ? En outre, tous ces seigneurs, n'exploitant pas eux-mêmes leurs moulins, les avaient donné à fief et à ferme, faisant ainsi d'autres ayant­droit.

Dès la fondation de l'abbaye, les Chanceladais, comme les cisterciens leurs contemporains, furent conscients de l'enjeu économique représenté par la meunerie. Ils n'eurent de cesse d'en recevoir, de s'en faire céder ou d'acquérir des parts de droits divers et de rentes. Le mouvement fut initié par les premiers abbés et on le voit perdurer, grâce au cartulaire, jusque vers la moitié du XIIIe siècle.

On voit aussi que quelques seigneurs se repentirent de leur générosité ou que leurs héritiers les contestèrent. Ce qui donna lieu

à des procès portés devant l'autorité épisco­pale et, en appel, devant l'archiépiscopale.

Le document de 1336 concernant le partage en deux des biens du prieuré de Born entre celui-ci et Chancelade montre que l'abbaye s'appauvrit en un siècle au point de ne plus pouvoir satisfaire à ses obli­gations, notamment à l'accueil traditionnel des pauvres affluant de la ville proche. Plus tard, le prieur de Born dut même échanger la perception des rentes en nature, du moins celles provenant des moulins, contre une pension fixe. Nous soulignons cet exemple qui ne fut certainement pas isolé. L'abbaye put ainsi percevoir seule les revenus de ses moulins. Mais les guerres qui affligèrent la région ne furent guère favorables à ces éta­blissements.

Après la guerre de Cent Ans, on constate les efforts des abbés réguliers succes­sifs pour conserver ou recouvrer leur bien. Ne les voit-on pas faire rebâtir des moulins abandonnés ? La gestion des abbés com­mendataires fut moins heureuse. Le dernier d'entre eux surtout eut à subir les pertes de revenus dues à l'aliénation du temporel ecclésiastique. L'un des soucis matériels du réformateur de Chancelade, Alain de Solminihac, fut d'inventorier, grâce aux archives subsistantes, les biens ayant jadis appartenu à l'abbaye afin de les recouvrer. Son essai est parfaitement illustré par son long procès au sujet du moulin d'Estournel.

En débutant, notre intention n'était point de poursuivre aussi loin dans le temps notre recherche ; nous y avons été amenés. Elle l'est encore moins de la continuer jus­qu'aux ventes révolutionnaires des biens de première origine. Il est sûr, en tout cas, que la Révolution tourna la page d'une histoire qui n'avait fait que pâlir des origines à la fin du XVIII< siècle.

Louis GRILLON Bernard REVIRIEGO

27

__ MOULINS ET MEUNIERS _______ _

Il Moulin de Bretou (com­mune d'Eymet). 1995.

Photo Denis Bordas.

28

Au fil de l'eau ... Des moulins sur le Dropt

"E aux vives': tel était le thème de l'opération "Par les villages 95" menée par l'A.D.D.C. Les Archives départementales de la Dordogne avaient confié à Denis Bordas, photographe aux Archives, une mission de collecte photographique portant sur six moulins à eau installés sur le Dropt, dans le canton d'Eymet : Moulin Neuf (commune de Saint-Aubin-de-Cadelech), Serres et Siganens (commune de Razac-d'Eymet), Peyrelevade, Bretou et Eymet (commune d'Eymet).

Ce travail fit l'objet d'une exposition à Eymet puis aux Archives départementales de la Dordogne.

"Dresser un état des lieux photogra­phiques des bâtisses, réhabilitées ou pas, telle était ma mission. Mon désir était de rendre sen­sible au regard digues, canaux et pierres. De ballades en découvertes, j'ai rencontré, au delà des traces des activités passées, des lumières déli­cates, des reflets où l'on se plongeait avec envie. J'ai voulu rendre compte d'un travail au delà du travail transmettre une atmosphère parti­culière, une histoire cachée, des visions croisées. L'âme semble nonchalante, mais elle est regar-da " nte.

Denis BORDAS

III Moulin de Siganens (commune de Razac­d'Eymet). 1995.

Photo Denis Bordas.

MOULINS ET MEUNIERS

III Moulin d'Eymet (com­mune de d'Eymet). 1995.

Photo Denis Bordas.

29

__ MOULINS ET MEUNIERS

1 - Vircoulon Oean),

"L'hiver 1829 à Sainte­

Foy", dans Revue

Historique et Archéolo­

gique du LiboumaÎs et de

kt Vaille de kt Donkg"e, T LVIII, 1990, p. 131.

2 - En 1786, mention

de Louis Barde et de

Jean Barde jeune, meu­

niers au Renier, dans le

registre de la taille

(Archives municipales

de Sainte-Foy, CC 82). Louis Barde fait son tes­

tament au Grand

Reynierle 21 mai 1788 (A.D. 33, 3 E 21 Ill).

3 - Parcelle nO 52 bis

(Archives communales

d'Eynesse, en Gironde).

4 - Le moulin est édifié dans la parcelle n" 540 (Archives communales

d'Eynesse).

5 - En 1839, deux char­

pentiers de moulins,

Pierre Boisseau ct son

beau-frère, Jean Videau,

habitent au lieu des

Réniers, COmmune

d'Eynesse (documenta­

tion de M. Jacques

Matignon), Ont-ils édi­

fié cette moulinasse ? Notons qu'en 1877,

M. Jean Pinlou, char­pentier de moulins,

habire à Eynesse (A.D. 33,3 E 46 065).

30

La disparition du métier de meunier autour de Sainte-Foy

L'hiver de 1829 marque la fin des moulins à nef La Dordogne gèle d'une rive à l'autre. La débâcle est terrible: d'énormes blocs de glace coulent la plupart des moulins à nef. L'administration profite de cet événe­ment pour interdire leur reconstruction. Avec leur disparition et, surtout, celle des chaînes qui les arriment aux rives et des palis­sades qui précipitent le courant sur leur roue à aube, la navigation sur la Dordogne va enfin se faire sans entraves.

La disparition des moulins a deux conséquences. D'une part, les "moulinasses" sur ruisseau (moulins à eau) et les moulins à vent connaissent un regain d'activité. D'autre part, les personnes travaillant sur les moulins à nef doivent retrouver du travail.

Les meuniers et propriétaires de mou­lins se rétablissent rapidement. A Eynesse, les Barde exploitent le moulin des Reyniers et, parfois, celui de Beausaut depuis plusieurs générations2

• En 1836, Jacques et Louis Barde possèdent toujours un moulin à bateau sur la Dordogne : ils sont imposés pour divers biens qu'ils possèdent à "Beau Saut" et au bourg, et entre autres un moulin flottant au Petit Régnier dont la mutation est faite en 18433

• Mais, en 1852, ils dispo­sent d'un moulin à eau installé sur un bief de la Gravousé. Pierre Faure, descendant des meuniers Barde, et actuel propriétaire de ce moulin, pense que ses assises sont fort anciennes. C'est une hypothèse qu'il faudra vérifier. En attendant une étude de l'archi­tecture de cette bâtisse, on dispose d'informations certaines : cette moulinasse ne figure pas sur le plan cadastral de 1836. Elle a donc été édifiée, en partie ou en tota­lité, entre 1836 et 18525•

L'exemple des moulins à nef de la Beauze (sur la Dordogne, devant Port­Sainte-Foy) et de la Nougarède (sur la Dordogne, devant Le Fleix) montre com­ment l'administration gère et contrôle leur destruction. En 1834, elle pousse les pro-

priétaires à accepter une indemnité de l'Etat en contrepartie de la destruction des mou­lins6

• En 1835, les sieurs Audebert, Marot frères et autres, propriétaires du moulin de la Beauze reçoivent ainsi une indemnité de 2500 francs? Les sieurs Audebert frères, Bonneau et Borie, propriétaires, tentent de conserver celui de la Nougarède en le dépla­çant. Ils prétendent l'enlever de la passe utilisée par les gabarriers. Le préfet déter­mine donc un emplacement sur l'efficacité duquel le maire de Pineuilh émet des doutes8

• En fin de compte, les propriétaires du moulin de la Nougarède acceptent l'in­demnité qui leur est proposée pour faire démolir leur usine flottante. La somme est élevée: 22 500 francs9

Lorsque les Barde abandonnent leur moulin à nef pour installer une moulinasse sur la Gravouse, c'est en propriétaires qu'ils réagissent. Leur démarche illustre-t-elle celle des autres propriétaires de moulins à nef? Nous l'ignorons encore, et quelques réponses sont peut-être enfouies dans la documentation que nous avons accumulée (plus de deux mille références d'actes concer­nant moulins et meuniers du pays foyen). Il faut aussi vérifier que tel propriétaire de moulin à nef, dépossédé de son outil de tra­vail par la débâcle de l'hiver 1830, ou par les prescriptions administratives, a pu abandon­ner ce type d'activités et investir l'indemnité qu'il a perçue dans d'autres formes de pro­duction.

La disparition des moulins à nef reporte momentanément une part d'activité sur les moulinasses et les moulins à vent. Il est certain que ces deux types de moulins connaissent une embellie à partir des années 1830. Mais il est difficile de mesurer ce phé­nomène: nous ne disposons d'aucun livre de compte tenu par des meuniers, à quelque époque que ce soit. D'autres moyens d'ap­proche existent, sans que nous puissions établir leur valeur. Ainsi, on pourrait tenter

6 - Arréré du préfèt de la Gironde du 4 mars

(Archives municipales

de Pineuilh).

7 - Lettre du sous-préfet

de Libourne au maire

de Pineuilh, du 17 janvier 1835 (Archives

municipales de

Pineuilh).

8 - Le maire de Pineuilh rédige alors le brouillon

d'une lettre qu'il destine

au sous-préfet de

Libourne: Une difficulté plus invincible est celle-ci, c est que dans l'état actuel

de la rivière et vu l'éléva­tion des eaux le tiers du

canal occupé par elles

n 'of Fe pas du côté de kt rive gauche la moitié de fa profondeur nécessaire

pour l'y foire fomer l'usine. Je suis certain de ce que j'avance puisque j ay flit sonder la rivière sous mes yeux. La place de cette partie de la rivière fi 'était pas géométrique

mais seulement figuratif. on ne fixe pas sur kt dis­tance de la ,ive droite au

poÎnt ou doit être le mou­lin ... Orje défie que cUms les eaux hautes, mqyen­

nes, et basses, l'usÎne dûement mouÎllée puisse

fourner et foire foline (Archives municipales

de Pineuilh).

9 - Lettre du sous-préfet

de Libourne au Maire

de Pineuilh, du 18 avril

1837 (Archives munici­

pales de Pineuilh).

10 - AD. 24, 3 E 16 53?, 3 E 16 53? et 3 E 16538.

Il - AD. 24, 3 E 16 538.

12 - AD. 24, 3 E 16 54?

13 - Pîerre Delbos aîné,

ancien meunier, habite

à la Ferrière, commune

de Gageac-cr-Rouillac (A.D. 24, 3 E 16 545).

14 - AD. 24, 3 E 16 548.

15 - AD. 24, 3 E 16 548 Ct 16550.

16 - AD. 24, 3 E 16 544.

1? - A.D. 24, 3 E 16 545.

18 - AD. 24, 3 E 16 566, 16 558 et 16 577.

de mettre en évidence une augmentation des impôts payés par le meunier, et en particulier de la patente : la patente d'Audebert, au pont de la Beauze, augmente en 1840, et Audebert est fort mécontent, On constate surtout que des meuniers se reconvertissent : avec la fin des moulins à nef, un certain nombre de postes de travail ont disparu.

Tel meunier propriétaire de son mou­lin à nef reconstruit ailleurs son instrument de travail. Tel autre préfère abandonner la profession et se reconvertit. C'est le cas de Jean Monteil père. En 1845, il apparaît comme ancien meunier et aujourd'hui pro­priétaire et demeure au lieu du Grand Cros, commune de Gardonne lO

• L'année suivante, il apparaît de nouveau comme meunier. Il a trouvé du travail au moulin de Gueyneau, dans la commune de La Forcell

. En 1854, il travaille dans le moulin de Laysse, à Lamonzie-Saint-Martin! 2.

A partir des années 1850, Pierre Delbos aîné suit une voie analogue!3. Il appartient à une famille de meuniers instal­lée depuis plusieurs générations dans le village de la Ferrière, à Gageac-et-Rouillac. L'un de ses frères est agriculteur à la Ferrière. En 1850, Pierre Delbos avait acheté à Jeanne Guiraud, veuve de Jean Mérens, meunier, un moulin à eau et ses dépendances situé à la Ferrière!4. Il vend quelques biens pour régler ce qu'il doit à Jeanne Guiraud, achète des terres et devient propriétaire15

• Par la suite, le 25 juillet 1852, il loue et afferme pour 15 années à courir le 24 juin prochain à Jean Goubier ainé, meunier demeurant au moulin de Brajaud, commune de Gageac Rouillac, un moulin à eau à deux meules tournantes, situé au lieu de la Ferrière, une maison attenante et divers fonds!6. Enfin, dans le courant de l'an­née 1853, il abandonne définivement son métier de meunier pour se consacrer à l'agri­culture!?

Voyons maintenant le cas de Jean Goubier. Il semble qu'il ne s'agisse pas du meunier qui vient d'affermer le moulin de la Ferrière en 1852, mais de l'un de ses proches parents. Goubier appartient en effet à une famille de meuniers dont la plupart des membres exercent leur activité dans les années 1850.

En 1860 ou 1861, Jean Goubier aban­donne la meunerie pour devenir agriculteur. Alors âgé de 64 ans, il avait tenu sa dernière place dans le moulin de Laboye, situé dans la commune de Puyguilhem!8. Comme Pierre Delbos, il continue, comme ses aïeux, de

résider à la Reille, "près les Vachers", com­mune de Thénac. Il y possède deux parcelles de terres de près de cinq hectares. Il y meurt en 1873!9.

Avec Jean Monteil, Pierre Delbos et Jean Goubier, se confirme l'aptitude des meuniers à se reconvertir immédiatement dans l'agriculture quand le travail de meune­rie vient à manquer. Il est probable que les reconversions de Jean Monteil et Pierre Delbos, de 1845 à 1856, sont liées à la dis­parition des moulins à nef.

Cette crise de l'emploi ne tarde pas à être aggravée par l'apparition de la vapeur. Cette énergie nouvelle commence à concur­rencer celle qu'apportaient traditionnel­lement l'eau et le vent. En 1859, un sieur Martin reçoit l'autorisation de faire usage, dans son établissement de Pineuilh, d'un appareil à vapeur destiné au mouvement de deux paires de meules avec criblage et bluterie, et composé de,' 1 - une machine à vapeur de 14 cv. construite par M }t1aldant et compagnie à Bordeaux,' elle sera à cylindre horizontal fixe à détente fixe et sans condensation; 2 - une chau­dière à vapeur de forme cylindrique en tôle de capacité 4 635 litres, construite par MM Maldant et compagnie, composée d'un généra­teur, de deux bouilleurs, ledit appareil éprouvé et timbré sous la pression de 5 athmosphères-°. Nous ignorons la durée de cette entreprise. Elle marque toutefois l'apparition de la minoterie moderne en pays foyen. C'est donc à la fin des années 1850 qu'il faut pla­cer l'arrivée des minoteries modernes qui, en une trentaine d'années, vont supplanter totalement les moulins traditionnels.

On relève fréquemment la qualifica­tion d'individus qualifiés d'ancien meuniers. Certains ont, peut-être avec l'âge, aban­donné une fonction pénible pour en exercer une qui l'est à peine moins: agriculteur. Ces cas sont peu nombreux après la disparition des moulins à nef. Ils iront en se multipliant quand la concurrence des minoteries à vapeur produira son plein effet. Beaucoup de reconversions surviennent dans les années 1870. Elles se poursuivent jusqu'à la fin du siècle alors que, dans le même temps, les meuniers cessent de former leurs fils à leur métier. Le meunier qui se reconvertit est souvent le dernier d'une longue lignée.

Quelques-uns deviennent agriculteurs, d'autres, boulangers. Dans la chaîne qui va de la production du blé à sa transformation en pain, leur nouveau métier se situe en aval ou en amont de la meunerie. En 1874,

19 Archives munici­

pales de Thénac ct A.D.

24, 3 E !6 558. Je remercie M. Chapelet,

maire de Thénac, ct

mon ami M. ChristÎan

Dcdicu, secrétaire de

mairie pour leur obli­

geance.

20 - Archives munici­

pales de Pineuilh.

31

21 - A.D. 24, 3 E 16

578.

22 - AD. 24, 3 E 16

578.

23 - AD. 24, 3 E 16

585.

24 - AD. 24, 3 E 16

587.

25 - A.D. 24, 3 E 16

586.

26 - AD. 24, 3 E 16 587.

27 - AD. 24, 3 E 16

534.

28 - AD. 24, 3 E 16

545.

29 - A.D. 24, 3 E 16

549,16550 Ct 16 574.

30 - AD. 24, 3 E 16

539.

32

Léonard Baron, ancien meunier, et la dame Marie Guichard sont actuellement tous les deux cultivateurs et demeurent au lieu de Labastide commune de Monestier1

• Cette même année, Pierre Geneste, ancien meu­nier, et son épouse, la dame Marguerite Loncle, sont propriétaires cultivateurs et demeurent au lieu des Ganfards, commune de Saussignac22

• En 1876, Etienne Parrot, ancien meunier, et actuellement propriétaire cultivateur ayant demeuré au moulin des Combes, commune de Thénac, demeure au lieu du Marène, commune de Saint-Méard­de-Gurçon23

En 1877, le sieur Pierre Faugère père, ancien meunier, et la dame Marie Gougeon son épouse, sont propriétaires cultivateurs et résident au lieu de Cappe, commune de Monestier4

• Cette même année, le sieur Vital Jolivat frIs, ancien meunier, aujourd'hui propriétaire cultivateur ayant demeuré au lieu des Bournizeaux, commune de Loubés-Bernac, demeure au lieu des Prioleaux, commune de Thénac5

• Pierre Maury, ancien meunier, est devenu charretier. Il habite au chef-lieu de la commune de Gardonne, et fait actuellement le courrier de Gardonne à Sigoulèf6.

D'autres meuniers deviennent boulan­gers. Comme pour l'agriculture, ces reconversions sont rares dans les années 1840 et se multiplient à partir de 1850. François Baron appartient à une famille de meuniers qui ont exploité des moulins à Ligueux et à Thénac au XVIIIe siècle. En 1843, deux de ses frères sont meuniers, un autre est cultivateur ; sa sœur, Jeanne, est sans profession et son autre sœur, Catherine, a épousé un meunier, Pierre Counord. Tous sont restés dans la région où ont vécu leurs ancêtres : Gageac-et-Rouillac, Saussignac, Gardonne. A cette époque, François Baron vient d'abandonner son métier de meunier pour devenir cultivateur. Il réside aux Plaguettes, dans la commune de Saussignac? En 1853, nous retrouvons François Baron boulanger, au chef-lieu de la commune de Cunèges28

• Il continue à prati­quer un peu d'agriculture, puisqu'il achète quelques parcelles29

Pierre Fourtou, ou Fourton, appartient aussi à une famille de meuniers citée dans un acte de 184730

: son père, Etienne, est meu­nier, ainsi que son frère, Jacques ; sa sœur aînée, Catherine, a épousé un cultivateur, Jean Freyssinet; la seconde, Marie, a épousé un meunier, Thomas Rivière-Beaunac ; sa troisième sœur, Jeanne, a épousé un tisse-

rand, Jean Audouin ; les trois dernières, Catherine, Marie, et Catherine plus jeune, demeurent avec leur père au moulin de Larchère, dans la commune de Pomport31

Pierre Fourtou meurt en 1855 dans son moulin de Larchère. Il laisse deux enfants mineurs, Pierre et Jean32

• Ces deux enfants se détournent de la meunerie. Pierre va s'instal­ler au Fleix comme marchand de blé. En 1863, il prend à moitié une métairie située à Saussignac et une autre située à Saint-A vit­du-Moiron, qu'il donne à travailler à titre de colon partiaire 33. En 1868, Pierre Fourtou est défrnivement installé comme boulanger à SaussignaCJ4

• Son frère Jean va suivre la même voie. En 1880, il habite toujours avec sa mère au moulin de Larchère. Il est alors ouvrier boulanger35•

Dans les années 1890, il ne reste plus guère de meuniers exploitants. Le moulin sert encore de logement. L'exiguité de ses pièces va présenter d'autant plus d'inconvé­nients qu'il n'est plus un outil de travail. Les anciens meuniers portent leurs efforts sur leur nouvelle profession. L'agriculteur s'ins­talle dans une ferme et le boulanger vit dans la maison qui abrite son fournil. Les moulins sont abandonnés et on cesse de les entretenir quand on ne les démolit pas. En 1900, le moulin des Crux, situé sur un bief du Seignal, à Ligueux, est désigné comme actuel­lement démoli. Dans les années 1920, M. A. Rebeyrolle a vu ses ruines et le tracé du bief dans le pré. Aujourd'hui, ces traces ont entiè­rement disparu36•

Quelques moulins sur ruisseau ont subsisté jusqu'à nos jours. Avec eux, a per­duré la pratique de la meunerie. Les gens ont continué d'y porter des grains afrn de faire concasser le maïs destiné aux volailles. Pendant l'occupation allemande, ces mou­lins ont fait farine malgré les interdictions et la surveillance de l'administration pétainiste. Le moulin de Maître Pierre, à Eynesse, et celui du Moustelat, à Pessac, ont conservé leur mécanisme intact. Ce sont de véné­rables rescapés d'un type de moulinasse dont l'origine remonte à la frn du XVc siècle. Pour un chercheur et pour un touriste, ce sont des témoins historiques de grande valeur.

Jean VIRCOULON

31 - AD. 24, 3 E 16

539.

32 - AD. 24, 3 E 16

548.

33 - AD. 24, 3 E 16 560. Cette métairie est

située à Saussignac. Son exploitation se fora à titre de colon partiaire.

34 - AD. 24, 3 E 16

571 et 16 577. Il est

toujours boulanger à

Saussignac en 1885

(AD. 24, 3 E 18 401).

35 - AD. 24, 3 E 13

320.

36 - Acte de vente du 26 décembre 1900 : tm

ancien moulin à eau

deNtellentent démoli (. . .) figuré au plan cadastral de ladite commune de

Ligueux sous les entiers numéros 340,341,343, 346, 348 bis, 342, et 345 (Documentation

de M. A RebeytoIle, de

Ligueux - canton de

Sainte-Foy-la-Grande, en Gironde).

________ MOULINS ET MEUNIERS __

1 - Sur l'histoire de ces

moulins flonants, voir:

Peyroncl (A.), "Les

moulins-bateaux. Des

bateliers immobiles sur

les fleuves d'Europe",

dans Le c!Jasse-marù,

n° 11, avril 1984,

Quelques dessins de moulins-bateaux

Mentionnés dès le Xe siècle avant J.-c. sur le Tibre, décrits par Vitruve dans ses Dix livres d'architecture, les moulins flottants furent vraisemblablement mis au point de façon définitive par le général romain Bélisaire, lors du siège de Rome par les Ostrogots en 537-538. Si les sources se mul­tiplient à leur sujet à partir des Xe_XIe siècles, il faut attendre l'année 1493 pour voir l'une des premières représentations graphiques d'un moulin-bateau, sur le Danube bava­rois, à Ratisbonne. C'est d'ailleurs sur l'ensemble du bassin de ce fleuve que le " ul' b " "ul" f" mo Ill- ateau ou mo III a ne verra son plus grand essor aux XVII" et XVIII' siècles1

En France, dès le Moyen Age, près de soixante-dix de ces moulins flottants encom-

braient déjà les berges et les ponts de Paris. Nombreux sur la Garonne, le Tarn et le Lot (on en compte soixante à Toulouse au XI' siècle avant qu'ils ne soient remplacés par des moulins fixes dès le siècle suivant), on ne sai­sit leur présence en Périgord qu'au milieu du XVI' siècle2

• On en dénombre alors pas moins de 56 entre Siorac-en-Périgord et Branne, près de Libourne.

Leur type est particulier : alors que les moulins-bateaux parisiens se présentent sous la forme de monocoques à deux roues laté­rales3 [fig. 1], ceux de la Dordogne sont des "catamarans" ressemblant aux moulins de la Loire. La roue à aubes est en effet position­née entre une coque supportant à la fois l'habitation et, surtout, l'ensemble des méca­nismes, et une autre plus petite faisant office

III Rgure1

2 - Le documenr essen­

tid est le procès-verbal de la rivière Dordogne

dressé par Gabriel d'Amours, conseiller du

Rni, en 1554: A.D, 24,

J li ï, Il fera l'objer

d'une communication

au colloque des Sociétés

sJ.vames du Midi de la France à Castelnaudary

le 26 juin 199ï par E

Bordes ct Y. L1boric.

3 - Voir en particulier les

dessins de L'EllC)'c!O­pérlje de Diderot et

d'Alembert.

33

III Figure 2

III Figure 3

4 - Sur les spécificités

périgordines, voir

Mouillac (L.), "Contri­

bution à l'étude des

moulins sur bateaux de

la rivière Dordogne",

dans Bergerac et le

Bergeracois, Actes du

XLII' Congrès d'Etudes

régionales de la Fédé­

ration historique du

Sud-Ouest, Bordeaux,

1992, p. 261-270.

5 - Gravure reproduite

dans l'article de J. Cubelier de Beynac, "Les moulins à nef de la

moyenne Garonne au

XVIII' cr au XIX' siècle", dans Revue de

l'Agenais, 107 (1980), p. 45-59.

34

de flotteur4 [fig. 2]. Ce type de construction se retrouve sur une vue perspective d'Agen en 16485, dans laquelle trois de ces moulins à nef sont dessinés au premier plan,

Il faut attendre la seconde moitié du XVIIIe siècle pour voir la première représen­tation graphique de tels équipements pour notre région. Le terrier du Fleix, conservé aux Archives municipales de Bergerac, superbe et rare document, nous en fournit un dessin naïf mais néanmoins intéressant : on distingue nettement la structure des deux coques portant la roue médiane, ainsi que les deux chaînes stabilisant le moulin-bateau dont l'une est fixée sur la berge [fig. 3].

Un carnet de croquis du début du XIXe siècle de la région de Sainte-Foy-Ia-Grandé, nous montre avec plus de précision le mou­lin en lui-même, les systèmes de jonction des

deux coques, de même que la palissade de pieux dirigeant le courant depuis la rive jusqu'au bâtiment. Ici, les deux chaînes d'an­crage sont fixées dans l'eau [fig. 4].

A l'époque de la dis­parition des moulins à nef, l'administration des Ponts et Chaussées dresse les plans et les profils des der­niers établissements existants afin de réglemen­ter leur usage et leur situation. Cela nous four­nit quelques documents supplémentaires dont deux dessins du moulin du Barrail, alors dépen­dant de la commune de Sain t-Aulaye-de-B reuilh7

,

en face d'Eynesse. Le pre­mier date de 18208 [fig. 5]

III Figure 4

6 - Coll. part. J. Vircoulon, que nous

remercions ici de sa col­

laboration toujours

érudite.

7 - Aujourd'hui com­

mune de Saim­

Antoine-de-Breuilh.

8 - A.D. 24, 3 S 26.

Il FigureS

et concerne une éventuelle reconstruction

du moulin au lendemain de la terrible

débâcle glacière de l'hiver 1819-1820 qui,

avec celle de 1830, fut l'une des causes prin-

cipales de la fin de ce type d'équipement. Le rapport qui accompagne ce plan précise que le mécanisme extérieur consistait simplement dans une roue de 4,00 m de diamètre et d'au­tant de largeur, portant à sa circonférence 24 palettes qui plongent dans l'eau de 0,30 m et en reçoivent le choc par une grande surface. Un rang de gros piquets clayonnés formait un entonnoir afin d'amener le plus d'eau pos­sible vers la roue, surtout en période d'étiage. Le second dessin, de 18379 [fig. 6], repré­sente le profil en travers du moulin et de la digue de pieux alors existante.

Des 56 moulins à nef de 1554, il n'en reste plus sur la carte de Belleyme, au XVIIIe siècle, que 20, localisés entre Prigonrieux et Branne. A la suite des difficultés climatiques du premier tiers du XIXe siècle, et en raison des problèmes qu'ils occasionnaient à la navigation, aucun ne survécut au-delà des années 1850, disparaissant ainsi de notre documentation et de la mémoire collective des gens de la rivière.

François BORDES

Il Figure 6

9 - A.D, 24, 3 S 430 n"

34.

35

__ MOULINS ET MEUNIERS _______ _

1 - Le terme "mouline",

qui subsiste encore dans

de nombreux topo­

nymes, s'applique au

moulin à fer. Le terme

"malinal" désigne l'em­

placement actuel ou

passé d'un ou de plu­

sieurs moulins.

2 - A.D. 24, 2 E 1802/116-2. Pathus ou

pactus : encombrement

au sol du bâtiment ;

défuge ou défuire : canal d'écoulement après le

moulin ; peyssière :

pêcherie.

3 - Ibidem, pièce 9.

36

Quelques moulins micro-industriels du Sarladais

A côté des moulins qui produisent des farines ou de l'huile, certains ont pour vocation de fabriquer du fer, du papier ou de transformer du textile. Il s'agit seulement ici de donner quelques exemples sarladais de cette industrie primitive.

1 - Les moulines à fer!

Les moulines du Céou

Le souvenir de deux petites moulines est attaché à l'entrée du Céou en Périgord. Se prononçant sur la succession de Pierre de Durfort, baron de Salviac en Quercy, le 23 juin 1545, le parlement de Toulouse attribue à la veuve de son ftls Guy, comme mère de ses enfants, le molinal de la moline de Pouncarral assise sur la rivière de Seu avec tous les pathus, défoges, peyssières, et appendances dudit moli­nal 2

• La mouline se présente donc comme un moulin bladier placé en dérivation du ruis­seau et comprenant même le piège à poisson.

Un peu plus bas sur le cours du Céou, un inventaire de la seigneurie de La Fontade (en mai 1585) signale au village de Jardel-bas, sur la rivière de Seu, un moulin à bled à deux meules courantes que le sieur de Léobard a fait bastir tout de neufet garnir de meules, plus une mouline à fer qui est tombée en ruines 3. Le souvenir de ces deux petites forges est conservé dans le fonds Calvimont-Saint­Martial des archives de la Dordogne car cette famille avait hérité de parents, au XVIIIe

siècle, les seigneuries de Costeraste, Coupiac et La Fontade, démembrées de la baronnie de Salviac. Ces moulines devaient être en activité au siècle précédent, comme celle qui leur succède sur le cours du Céou.

Nous arrivons en effet au bourg péri­gourdin de Gaumier, fief, aux XVe et XVIe

siècles, de la famille de Rampoux. L'agglomération de Gaumier se compose encore de nos jours de deux parties: le bourg autour de l'église, et, un peu en aval, un groupe de maisons qui porte le nom de "la mouline". Cette mouline, déjà mentionnée en 1493, devait présenter de l'importance pour les seigneurs de Gaumier: Le 21 février 1506 (n.s.), Jean de Rampoux, seigneur de Pechimbert et Gaumier y reçoit des recon­naissances4

Quelques actes entre janvier 1506 (n.s.) et février 1514 (n.s.), nous renseignent plus précisément sur le statut et le fonction­nement de cette mouline.

Nous voyons paraître le nom d'Antoine de Mestrebernard alias Coaraza ou Coarassa, originaire de Coarraze, localité de l'actuel département des Pyrénées­Atlantiques5, comme détenteur de la mouline de Gaumier, en janvier 15066

• En avril 1511, Antoine de Mestrebernard est alors décédé, Jean de Rampoux acense la mouline à prudent homme Vital Auricoste, ferrier de la mouline, le 16 de ce mois pour la période allant jusqu'à la Madeleine à venir et ensuite pour trois ans, moyennant 146 quintaux de fer par an (le quintal faisait un poids de cent livres). Un acte de février 1514 confirme la mort d'Antoine de Mestrebernard, car sa veuve, Béatrix Labertrandia reconnaît, au nom de ses trois garçons et de sa fille, à Jean de Rampoux, des biens situés sur la paroisse de Gaumiers7

L'acte d'avril 1511 donne quelques détails sur l'équipement de la mouline. Elle est pourvue de molis, incude, tenalhas, man­chas (meules qu'il faut sans doute traduire

4 - A.D. du Lot Registre de Guillaume Cassanhcs, notaire à Salviac, fol. 33,

aimablement communi­

qué par Jean Lanigdllt.

5 - Arrondissement de

Pau, canton de Nay.

6 - Il doit déjà être ins­

tallé depuis un certain

temps puisque, à cette

époque, il vend une

rcrre.

7 - Ibidem, fol. 183, 253 vO.

8 - lbidem,fol. 184 yo.

9 - Notamment : E.

Peyronnet, Les flnciennes

forges du Périgord, Bordeaux, 1958.

par rouets, enclume, tenailles, pinces) et autres choses nécessaires pour fabriquer le fer. Une transaction du même mois entre Jean de Rampoux et Jean de Fenelo, recteur de Saint-Michel-La-Feuille, porte, notam­ment, la revendication du recteur sur un foyer (foc) de la mouline avec son outillage qui, outre les précédents éléments, com­prend des maillets ou marteaux (malhis) et un soufflet (bolz). Il aurait existé un contrat d'afftayrement (d'association) entre le père du recteur et celui de Jean de Rampoux pour l'exploitation de la mouline. Par cette tran­saction, le recteur cède ses droits sur la mouline et sur d'autres biens à Jean de Rampoux moyennant 320 livres tournoises8

Bien que cette mouline de Gaumier ne soit pas mentionnée dans les ouvrages consa­crés aux anciennes forges du Périgord9

, il semble qu'elle ait été encore en activité vers le milieu du XIX" siècle. J'ai en mémoire une lettre du maire de Bouzic, de cette époque, se plaignant au sous-préfet de Sarlat du trouble des eaux provoqué par le lavage des minerais à Gaumier, les rendant impropres à leur consommation par le bétail.

Un peu en aval de Gaumier, le cours du Céou longe la paroisse de Saint-Martial avant de pénétrer sur le territoire de Bouzic.

Un moulin, actuellement dénommé "le Moulin grand", est attesté dès 1300. Au cours des siècles, ce moulin a appartenu principalement aux seigneurs de Saint­Martial. A la fin du xV' et au début du XVI< siècle, c'est la famille de Gontaud-Saint­Geniès qui tient la seigneurie de Saint-Martial. Pendant un certain temps, il a existé une mouline à proximité du "Moulin grand". Un acte de 1515 reçu par Jean de Custojoul, notaire, fait état de la reconnais­sance à Gui de Gontaud par Antoine Richard, forgeron de Daglan, de la moitié par indivis de la mouline, alors appelée de Saint-Clar, sous la rente de 25 quintaux de fer bon et marchand, payables moitié à la Noêl et moitié à la Saint-Jean. Mais, en sep­tembre 1527, un accord entre Jean de Gontaud, fils de Gui, et Antoine Richard précise: Attendu qu on ne peut pas forger dtlns la forge, Richard construira icelle en un moulin bladier JO. Les propriétaires actuels du "Moulin grand" trouvent encore dans leur potager de nombreuses scories ferreuses.

La mémoire ne s'est pas conservée d'autres moulines sur le cours du Céou, et pour celles que nous venons d'évoquer, le chant des marteaux s'est tu depuis long­temps.

iii Extrait de la carte de Belleyme sur lequel figu· rent les petites moulines du Céou. Dans l'ordre : moulines de Pontcarral, de Jardel·bas, de Gaumier, du moulin-grand. XVIII' siècle.

10 - A.D. 24, 2 E 1802/6-1 et 6 (inven· raire de titres).

37

Il - AD. 24, IV E

49/2 : par exemple, fol. 45.

12 - Ibidem : par

exemple, fol. 47 et 47 v".

13 - Lartigaur Ocan),

Les origines des du Pouget

de Nadaillac, Université de Botdc.,ux III, 1985.

14 - Du même, "Les débuts de la papeterie

de Groléjac", BSHAP,

1974, p. 291 à 294.

15 - AD 24, 3 E

15466.

38

La mouline de Grolejac

L 15 novembre 1501 11, une enquête

sur les limites des juridictions de Domme et de Grolejac recueille des témoignages d'an­ciens faisant état de repères fixés une cinquantaine d'années auparavant et main­tenant noyés au fond de l'étang de Grolejac. Cet étang qui figure à la fin du XVIIIe siècle sur la carte de Belleyme avait été aménagé pour le fonctionnement d'une mouline. On peut donc dater la création de la mouline de la deuxième moitié du 'XV, siècle.

Une enquête de 151312 porte sur le tènement des Farguettes, situé sur les contre­forts du plateau de Born, à la limite de Domme et de Nabirat, dont l'utilité (la jouissance et l'usage) était revendiquée par les habitants du village de Liaubou-Haut, paroisse de Nabirat. Comme signes de ce droit d'usage, les témoins font état de la conversion de bois en charbon en édifiant des "ruchaudes" sive "carbonnières" (meules pour la fabrication du charbon de bois) et de la vente de ce charbon par les habitants de Liaubou aux ferriers de la mouline de Grolejac.

Vers cette époque, sont co-seigneurs de Grolejac la famille de Salignac et Etienne du Pouget auquel la co-seigneurie a été apportée par son épouse Alpays de Lagrange. La mou­line de Grolejac figure dans un dénombrement de 1504, effectué par cette dernière, après la mort de son mari13

• Vers la fin du siècle, les deux familles se partagent toujours la seigneurie. Le 20 juin 1570, Anne de Messigniac, pour son fIls Armand de Salignac et Clémence du Pouget, pour elle et pour son mari, Béraud de Chaunac de Lanzac, arrentent la mouline pour en faire un moulin à papierl4

• Il y a encore un pape­tier à Grolejac en 1664, Pierre Dupontl5

Vingt-cinq ans plus tard, la mouline à fer reprend du service. Le 6 juin 1690, Barthelemy de Gontaud-Saint-Geniès de Lanzac, arrière-petit-fils de Béraud de Chaunac, afferme à Antoine de Bars de la Gazaille et à Raymond de Boucher de la Tour du Roc la forge et les fourneaux à fer et le cours de l'eau pour les faire travailler, avec la maison et jardin proche de ladite forge et mou­line, avec les appentis ou halles pour le plassage (pour stockage) de la mine (minerai) et du

charbon, et ce, pour 6 années complètes moyennant 650 livres annuelles. Il est pré­cisé que les preneurs paieront 30 sous par brasse de bois prise du sieur de Lanzac, 3 livres par quintal de fer laissé sur place, 24 livres par semaine pour exploiter le minerai appartenant au seigneur de Grolejac. Si les preneurs font édifier un nouveau fourneau, ils ne pourront, à la fin de leur ferme, emporter ni arbre ni roue. Les preneurs ne font cette afferme que pour employer leur ouvrage pour les canons ou autres pour le ser­vice du roi. Cependant, si les preneurs fournissent des meules et rouets, le seigneur de Lanzac devra les rembourser après esti­mation. En 1695, Raymond de Boucher et Jean de Valette qui avait dû prendre la place d'Antoine de Bars, portent plainte pour un vol de bois et de charbon destinés à la forge de Grolejac, où ils ont ordre de faire des bou­lets de canon pour le roi 16.

La mouline passe en d'autres mains au début du XVIIIe siècle. Sous Barthelemy d'Estresse, seigneur de Grolejac, successeur de Barthelemy de Gontaud-Saint-Geniès, on trouve, installés à Grolejac pour exploiter la mouline, Me Jean Delbos, notaire de Domme et Bertrand Soulié de Lalande. Assistant un de ses neveux qui se marie en février 1711, Me Jean Delbos est qualifié de notaire royal et juge du Repaire et est dit habiter Grolejad7

• Il est associé pour l'ex­ploitation de la mouline avec Bertrand Soulié de Lalande qui vient de Lortal, sur le ruisseau de Manaurie. Sa famille exploite des forges dans la vallée de ce ruisseau.

Les maîtres de forge n'ont pas toujours le nez dans leurs fours comme en témoigne le billet suivant : Je permets aux sieurs Delbos et Lalande, mes fermiers de la forge de Grolejac de mettre sur mon étang un gabarot pour leur utilité et faire nettoyer les cours des eaux dans les ruisseaux, pour le service de la forge. Plus, de chasser sur ledit étang, aux canards, pendant le temps de leur ferme et de tenir la main à ce qu aucune autre personne n y aille chasser ni tirer aux canards, (. .) à Souillac le 18 décembre 1715, signé Grolejac8

Lorsque Bertrand Soulié épouse, en 1724, Toinette Delbos, fille de Me Jean, les associés se partagent 105 000 livres de pro­fie 9

• L'année suivante, à Domme, une affaire oppose Me Jean Delbos à son vieil ennemi

16 - AD. 24, 3 E 15495 (Lagrange

notaire à Sarlat) ; B

1453. A la même

époque, Raymond

Boucher de la Tour du

Roc et Antoine de Bars

afferment à des maîtres

de forges celle de Ponrroudié (Sainr­

Avit): Ibidem 3 E 15497, Lagrange

notaire, 17 mars 1696, contrat de trois ans de

1693.

17 - AD. 24, B 3422, fol. 85 va, insinué 12

juillet 1713.

18 - Archives privées.

En 1715, le seigneur de

Grolejac est toujours Barthelemy d'Estresse;

Cf. La Chapelle (Pierre

de), "Les mutations de

la seigneurie de

Grolejac", BSHAP,

1961, p. 148 à 152.

19 - Cette indication

figure au rcstament de

Me Jean Delbos du 4

février 1743, reçu

Chassaing.

III Extrait de la carte de Belleyme. Mouline de Grolejac et moulin à papier de Carsac. On remarque la taille considérable de l'étang alimentant la mou­line. A proximité, le village de Liaubou-haut dont les habitants foumissaient les terriers en charbon de bois. Le moulin à papier de Carsac est encore indiqué comme Upapeterie" à la fin du XVIII' siècle.

39

20 - Nous avons conté

cette affaire dans "Une

réussite sociale au

XVlII' siècle, Les Delbos de Bonnely -

Domme 1670-1807", Bulletin de la Société des Amis de Sarlat, nO 24 (1986), p. 7.

21 -AD. 24, II C 700, fol. 20 vo

, acte reçu

Sabouraud, notaire à

Domme.

22 -Peyronner (E.), op. cir., p. 80 er 223.

23 - J'en connais deux

dans la commune de

Bouzic, une à Daglan,

une à Proissans, arron­

dissement de Sarlat, une

à Vayrac, près de

Gourdon, dans le Lot.

40

Pierre Delol, marchand boucher, qui l'aurait assassiné (agressé), sur un grand chemin. Ayant obtenu contre Delol un décret de prise de corps et ce dernier s'étant échappé, Jean Delbos, avec l'aide de son fils et de son gendre Bertrand Soulié, organise un véri­table siège de la maison Delol (actuelle maison Mazet, à l'angle sud-ouest de la place de la halle). Pour cela, Soulié avait fait venir plusieurs forgerons de Grolejac. L'un deux s'appelle Jean, de grande taille, les cheveux courts et noirs, un visage plein et rond, de l'âge de 27 à 28 ans, portant un habit fort obscur. Le siège dure du 15 au 17 novembre 172Yo.

Beau-père et gendre laissent l'exploita­tion de la mouline de Grolejac, au plus tard en 1730. Cette année-là, François Dessec du Breuil qui avait acheté en 1720 la seigneurie de Grolejac, afferme, le 21 juin 1730, la mouline à François Traversier, maître de forges des Arques en Quercy, pour 800 livres et 5 quintaux de fer par an21.

Le rapport du subdélégué de Sarlat, dans les années 1770, mentionne la forge de la mouline, mais indique qu'elle ne travaille pas. Elle est encore mentionnée dans une enquête préfectorale, en 1811, elle ne tra­vaille toujours pas22.

Correspondant à des besoins locaux au XV siècle, l'étendue de l'étang de la mouline témoigne des ambitions de ses créateurs. A la fin du XVIe siècle, que ce soit inadaptation aux conditions économiques, crise du bois ou autre, la mouline est remplacée par un moulin à papier. Les guerres de Louis XIV qui consomment des canons et des boulets redonnent vie à la forge qui semble rester rentable dans le premier quart du XVIII< siècle. Puis, c'est de nouveau la chute. Dans un certain nombre de cheminées du Périgord méridional et du Quercy, subsis­tent quelques taques de cheminées aux armes des Boucher de la Tour du Roc, datées de la fin du XVII" siècle23

• Les taques sont des sous-produits de la fabrication des canons et de leurs boulets.

Moulines dans la région des Eyzies

La famille de Mestrebernard est à l'origine de la fondation ou de la restauration de nombreuses moulines en Périgord et en Quercy. Selon Jean Lartigaut, ce solit des

colons, principalement installés à Lherm, village proche de Catus en Quercy. Dans les années 1482-1485, on trouve à Lherm Dominique, Pierre et Vital de Mestrebernard24. Dans les minutes du notaire Pechaut (de Podio Alto), trois Mestrebernard (Vital, Pierre et Jean), sont chargés de transformer un moulin bladier de quatre meules en mouline à fer, par Jean de Beynac, seigneur de la Roque-aux-Péagers et de Tayac. L'acte est daté du 10 août 1473, donc antérieur à ceux que nous venons de citerS. Les Mestrebernard sont dits habiter la paroisse de Notre-Dame de Lherm. Le mou­lin à transformer se situe sur la Beune, en face de la maison de Beyssac, en amont de Vielmolis et en aval d'un moulin de Beune. Il est précisé que les preneurs pourront utiliser les bois du seigneur pour les constructions ou le charbon et qu'ils pourront creuser des fosses ou des mines pour le minerai, selon la coutume du pays de Cahors. Le cens ou rente est de 30 quintaux de fer torsat (tordu), payable à la Noêl.

D'autres moulines se trouvent sur la Beune, en aval, dans la paroisse de Tayac. Un acte du 3 septembre 1488 porte la cession par Jean Martin, ferrier des Eyzies, alors vil­lage de cette paroisse, à Jean Bescat, des droits qu'il possède sur la moitié de la mou­line deI Ronnelet, sur le ruisseau de Beune26. L'outillage comporte soufflets, tenailles, roues, arbres, billots, ringards, tourillons ... Il s'agit là de l'ancêtre de la forge des Eyzies, notamment étudiée par Jean Cubelier de Beynac7. En juin 1553, Antoine del Bruelh vend à Léonard Tutard, forgeron habitant la forge des Aysias une chenevière au territoire del Ronnelet. En juillet 1593, sire Jean Labourderie, habitant du bourg de Meyrals, est qualifié de maître de la forge des Ayzies. Il figure à diverses reprises dans les minutes de Me del Montet, au moins jusqu'en 1602. Des confronts, en 1621, donnent en clair à la forge des Eyzies le nom de "forge del Ronnelet"28.

2 - Moulins à papier

Nous donnerons deux exemples de petits moulins à papier, l'un sur le Céou,

24 - On signale des Mestrebernard à Saint­Cirq-Madelon (Lor), en 1489 cr 1495. Anroine est cité à Gaumier en

1506; d'autres membres

de la famille sont à la

mouline de Besse en

Périgord, en 1507. Lartigaut Oean) , Les

campagnes du Quercy après kt. guerre de Cent Am, Toulouse, 1978, p. 89, 414, 424. Cf. aussi Auricoste (Françoise), La

bastide de Villeji'dnche­du-Périgord, Bayac,

1992, p. 89.

25- AD. 24, 3 E 1980 (série 1472-1474).

26 -Ibidem, 3 E 1981, Guillaume La Borie

notaire, cahier IX.

27 - Cubelier de Beynac, "La forge des

Eyzies", XXXIX' congrès de la Fédération

historique du Sud­

Ouest à Sarlat en 1986,

Périgueux, 1987.

28-AD. 24, 3 E 1990, de Onis, notaire à

Saint-Cyprien, fol.

259; 3 E 1987 cr 1988, passim (Del Monter).

29 - Gibcrt (Louis­

François), "Le moulin à

papier de Ll Cassagne", lvlémoire de fa Dordogne.

n° 3, p. 20 à 22.

30 - AD. 24. Il 3386. fol. 182 ,,0, J. Tarde notaire, insinué le 15 f~vrier 1614.

dans la paroisse de Daglan, l'autre sut l'Enéa, dans celle de Carsac.

Nous avons évoqué, ici même2'\ le

moulin à papier de La Cassagne, construit en 1613 et démoli avant la fin du XVIIIe siècle. Le papier se fabriquait à partir de chif­fons qui devenaient une marchandise rare au point qu'en 1673, François de Monzie, lieu­tenant particulier, faisait défense à des marchands de transporter des chiffons hors du ressort de la sénéchaussée de Sarlat.

Le moulin à papier du Cuzoul

Le dernier jour du mois de novembre 1613, à Daglan, était traité le mariage de Guillaume Bardy, maître papetier, habitant la papeterie du Cuzoul, avec Jeanne Martel du bourg de Daglan30

• Cet acte atteste le fonctionnement de ce moulin à papier, jumelé avec un moulin bladier, au début du XVIIe siècle. Le Cuzoul, en aval du bourg de Daglan sur le Céou, faisait partie de la sei­gneurie du Peyruzel, acquise, par François de Mirandol, en 1595, de Marc de Cugnac de Giverzac. Dans un dénombrement au roi du 8 juillet 1672, Samuel de Mirandol, descen­dant de François, déclare : Je possède, dans la juridiction du Peyruzel un moulin banier (bana/J à bled, ensemble un autre moulin, à papier, situés sur le ruisseau du Seu (Céou), ( .. )

et des prés et terres, conftontant, à l'orient, le petit canal qui vient de lëtang dudit moulin .JI.

Le tout fait une rente annuelle de 200 livres, 6 rames de papier, 6 douzaines de cartons, une paire de chapons, un quarton d'avoine, payables par les héritiers de Me Moïze Boyer, notaire royal. Al' époque, ces moulins étaient donc affermés.

Divers fermiers succèdent à Me Boyer. En 1676, Pierre Bugat, originaire du Fraysse (Saint-Cybranet), est papetier au Cuzoul.

En 1707, Jean Doblanc, maître papetier demeurant au Cuzoul afferme maison, moulin à bled et à papier à Jean Bois, mar­chand des Escloux (La-Chapelle-Péchaud). Quatre ans après, il met en demeure Bois d'effectuer les réparations qu'il avait promis de faire, notamment à la papeterie, car les bâtiments se vont tomber et risquent de tuer le remontrant en se démolissant 32.

En février 1723, Joseph de Mirandol, seigneur de Pechaud et du Peyruzel, habitant au bourg de Daglan, afferme moulin à bled et moulin à papier à Jean Garrissou, garçon papetier de Daglan, pour 230 livres par an. Jean Tavernaud, maître papetier, est fermier du Cuzoul en 1727 et sous-afferme à des meuniers33

• Dans les actes postérieurs, il ne semble plus être question de moulin à papIer.

Il Moulin du Cuzoul (com­mune de Daglan).

Photo Louis-François Gibert.

31 - A.D. de la Gironde, C 4184.

32 - A.D. 24, 3 E

lO 148 (Agar, notaire à Daglan) ; 3 E 10235

(Mondy, notaire à Saint-L1urcnr).

33 - Ibidem, II C 696, fol. 78 ,,0 ; II C 660, fol. 16 \,0,

41

34 -Ibidem, 3 E 15452 à 3 E 15462, passim.

35 - Informations figu­rant dans l'article de

Jean Lardgaut cité en note 14. Saint-Paul­

Lizonne, arr. de Ribérac,

canto de Verteillac.

36 - Gibert (Louis­François), "Les dix

moulins de Daglan aux

XVII' et XVIII' siècles",

Bulletin de la Société des Amis de Sarh" n" 19 (1984), p. 65 à 69.

42

Le moulin à papier de la Ginèbre

Ls minutes de Rey, notaire à Sarlat, comportent un certain nombre d'actes rela­tifs à la famille Cledat et à leur moulin à papier situé à la Ginèbre, paroisse de Carsac (actuellement commune de Carsac-Aillac)34.

Le 20 avril 1627, Pierre Cledat, maître papetier, habite la papeterie de la Ginèbre et réalise un échange avec Me Jean Austier, pro­cureur aux sièges de Sarlat. Pierre Cledat teste le 12 avril 1629. Il a deux garçons d'un premier mariage, trois garçons et trois filles en deuxièmes noces avec sa très chère femme Guilhonne Lauzannes. Il doit survivre car, le 22 décembre 1633, il vend à Jean Selves, bourgeois et marchand de Sarlat, 40 charges de papier qu 'il lui promet pour dans un an. Le papier doit être bon et marchand eu égard au travail qui se doit faire en ladite papeterie. Selves paiera la charge 38 livres: 10 livres en argent et 28 livres en marchandises vendues par Selves. Ils sont en compte, car Cledat doit 1 400 livres à Selves depuis février 1631. Pierre Cledat teste de nouveau en 1638.

Sa première femme se nommait Toinette de Chaumels. Il est à remarquer qu'en 1577 on trouve des Chaumels à la pa,?eterie de Grolejac et un Jean Cledat, papetier, originaire de Saint-Paul-Lizonnë. Il ressort d'autres actes que Pierre Cledat a marié son fils Jean avec Jeanne Parre, d'une famille de papetiers de la région de Siorac, et sa fille Marie avec Pierre Delpong papetier de la paroisse de Marquay. Les moulins à papier comme les moulins à bled se prêtent à une endogamie professionnelle.

La papeterie existait encore au XVIIIe siècle, car elle figure sur la carte de Belleyme.

3 - Moulins à textiles

Sous l'Ancien Régime, dans nos régions, les moulins à textiles n'existent qu'en annexe d'autres moulins, moulins bla­diers en général. Aménagés en foulons, en mailleries (de malhar: fouler les draps) ou en teintureries, on les nomme aussi, parfois,"moulins battants". Si nous prenons l'exemple des dix moulins de Daglan3G

, on trouve des installations de foulons aux mou­lins de la Borie, du Peyrier et de Concazal,

sur le Céou, de Picamy sur la Lousse, soit quatre moulins sur huit opérationnels.

Quelques documents se rapportent à ces activités :

- Le 14 juin 1676, Guillaume Benoy, maître teinturier de Blois, prend comme apprenti teinturier Jean Roudel, fils d'autre Jean, de Daglan. Benoy lui apprendra son métier pendant deux ans. Il le nourrira et l'entretiendra d'habits, souliers et chapeaux. Le père paiera 90 livres.

- En décembre 1745, Jean Chaut, meunier de Picamy est qualifié de maître temtuner.

- En janvier 1753, dans un échange, Etienne Lavergne et Isabeau Cabanel, conjoints, délaissent à Jean Chaut, de Picamy, les droits qu'ils ont sur le moulin et foulon de la Borie.

- Le 13 mars 1770, les demoiselles Bouquet qui sont propriétaires du moulin du Peyrier vendent à Marc Confoulens, tein­turier de la Borie, l'emplacement nécessaire pour bâtir, couvrir et servir un foulon, à savoir 24 pieds de roi au carré (64 m2) du côté de l'étang du moulin et 26 pieds en des­cendant du côté de la défuge du foulon. Le prix est fixé à 199 livres et 18 sols.

- Le 8 mars 1772, Jeanne de la Palisse et son fils François Lacombe, propriétaires du moulin de Concazal, afferment pour sept ans à Joseph Bouquet, teinturier, un foulon à Concazal, moyennant 45 livres.

Le 18 février 1779, Marc Confoulens, clerc de la Borie, vend à Me Pierre Revaugier, avocat de Daglan, un fou­lon et son pactus à la Borie, moyennant 288 livres, à savoir 200 livres pour les fonds et 88 livres pour les battants, roues et autres bois37.

Au siècle suivant, certaines de ces activités se continuèrent et furent complé­tées, dans la deuxième moitié du siècle, par des carderies qui subsistèrent jusqu'à une époque récente.

Louis-François GIBERT

37 - A.D. 24, 3 E 10148, II C 746, 750, 723,728.

________ MOULINS ET MEUNIERS __

Moulins et moteurs hydrauliques. Bibliographie

1) Généralités

- Actes du cinquième symposium/The International Molinological Society ; Fédération Française des amis des moulins, France, 5 au 10 avril 1982. - Saint Maurice: Fédération Française des amis des moulins, 1984.

- AZEMA O.-P.), Les moulins de France, Rennes, Ouest-France, 1995 [AD. 24, B 1104].

- BAUMGARTNER (E), Manuel du constructeur de moulins et du meunier, 3 voL, Paris, Ch. Beranger, 1903-1905.

- BERGERON (L.), "Les moteurs hydrauliques et leurs applications indus­trielles en France (XVIIIe-XXe siècle)", dans Terrain, mars 1984, n° 2, p. 18-22.

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François BORDES Marie-Lise SARIAT (Conservation du

patrimoine départemental)

1----------A L'ECOLE

Aperçu sur l'histoire du développement urbain en Dordogne

"L s villes en France de la fin de la guerre de Cent Ans à l'essor des villes nou­velles", tel a été pour la présente année scolaire le sujet du concours de l'Historien de Demain que la Direction des Archives de France organise annuellement. En rapport avec cette épreuve, le Service Educatif des Archives départementales de la Dordogne et le personnel de ces mêmes archives ont pré­senté, du 1 0 février au 28 mars, une exposition relative à la naissance et à la crois­sance des villes du Périgord. Périgueux, Bergerac, Sarlat et les bastides furent les cités choisies pour illustrer ce thème.

Au temps de la période romaine, le Périgord ne connaît qu'une seule et véritable ville, Vésunna, capitale des Pétrocores, la ville de Périgueux actuelle (voir quatrième de couverture). Avec les invasions barbares et la fin de la paix romaine, la ville se replie à l'in­térieur de ses murailles dont la construction avait débuté dès la fin du III' siècle et qui ceinturaient un modeste espace de quelques hectares.

Plus d'un demi-millénaire plus tard, châteaux-forts et établissements religieux -abbayes ou prieurés- attirent une partie de la population. Ainsi naissent des aggloméra­tions qui se développent au Bas Moyen Age, de la fin du Xl' siècle au milieu du XIVe siècle, en profitant de l'expansion démogra­phique et de la croissance agricole. Cette période du Moyen Age connaît une véritable "floraison de la vie urbaine".

Par leur population que l'on peut esti­mer de 4 à 6.000 habitants, par leurs activités et par leur organisation municipale, trois villes se détachent alors nettement : Sarlat, Bergerac et Périgueux. Parallèlement à ces cités principales s'affirment alors de

nombreux bourgs aux caractères urbains plus ou moins marqués: Nontron, Thiviers, Excideuil, Mussidan, Montpon, Ribérac, Terrasson, Mareuil, Montignac, Le Bugue, Brantôme.

Plus tardivement que certaines autres provinces du Sud-Ouest, le Périgord voit également, durant la seconde moitié du XIII' siècle, l'édification de villes nouvelles, de bastides, dont Monpazier est l'exemple le plus célèbre. A la fin du Moyen Age, la trame du réseau urbain périgourdin tel qu'il se pré­sente aujourd'hui était donc pratiquement mise en place.

Passées les épreuves de la guerre Cent Ans, les trois villes dominantes enregistrent au début du XVIe siècle une nouvelle période de prospérité avant de connaître une longue somnolence qui ne devait prendre fin qu'au XIXe siècle. A la fin de l'Ancien Régime, dans un département peuplé de plus de 400.000 personnes, les citadins constituent à peine 5 % de l'ensemble de la population. Ils se répartissent entre Périgueux, Bergerac, Sarlat qui comptent chacune entre 4.500 et 6.000 habitants, et quelques petites villes et gros bourgs habités par 1.000 à 3.000 individus.

La lenteur des transformations écono­miques permet de comprendre que, à l'exception de Périgueux et de quelques rares centres, la croissance urbaine demeure bien modeste dans le Périgord de la première moitié du XIX' siècle. Entre 1806 et 1851, Sarlat n'enregistre qu'une progression démo­graphique de 13 %, Bergerac de 20 % ; par contre, Périgueux réalise un doublement de sa population et devient avec ses 12.000 habitants l'agglomération la plus importante du département, devançant Bergerac qui venait en tête à la veille de la Révolution.

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ANNEE POPULATION ANNEE POPULATION

1790-1793 5700 1886 29611 1801 6442 1891 31 434 1806 8035 1901 31 976 1821 9096 1906 31 361 1826 9269 1911 33548 1831 9637 1921 33 144 1836 11 576 1926 33389 1841 12 187 1931 33988 1846 12180 1936 37615 1851 12488 1946 40865 1856 14773 1954 40785 1861 19140 1962 41 134 1866 20401 1968 40091 1872 21 864 1975 37670 1876 24169 1982 35392 1883 25969 1990 32848

SOURCES:

1790-1793: SERIE L (COLL. AD DORDOGNE) 1883-1936: SERIE M (COLL. AD DORDOGNE)

1801 : SERIE M (COLL. A.D DORDOGNE) 1946-1990: RECENSEMENTS I.N.S.E.E. 1806-1876: CALENDRIERS DE LA DORDOGNE (COLL. AD DORDOGNE)

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Dans la seconde moitié du XIX' siècle, ces deux cités majeures bénéficient d'une progression bien marquée - 147 % pour Périgueux entre 1851 et 1911, 55 % pour Bergerac - et se détachent ainsi nettement de Sarlat qui ne gagne que 9 %. Pendant ces mêmes décennies, des villes-bourgs perdent des agriculteurs et voient ainsi diminuer leurs effectifs : Nontron, Excideuil, Le Bugue, de 5 à 15 %, Montignac, de 25 %. A la veille de la première guerre mondiale, Périgueux compte deux fois plus d'habitants que Bergerac, 33.000 contre 16.000. Le chef-lieu du département a bénéficié d'un important affiux de population lié à sa crois­sance économique et à l'implantation des ateliers ferroviaires de la Compagnie de Paris-Orléans. Plus modestement, Bergerac apparaît comme un petit centre régional qui organise la collecte des produits agricoles de sa région, tout particulièrement le vin. Derrière, seulement six localités regroupent plus de 2.000 habitants : Sarlat, Terrasson, Nontron, Mussidan, Thiviers, Montignac.

De la fin de la première guerre mon­diale aux lendemains de la seconde, les deux villes majeures continuent à progresser, mais de manière sensiblement différente. Périgueux grandit moins vite que Bergerac qui bénéficie de l'affermissement de sa fonc­tion tertiaire, mais aussi du coup de fouet

procuré par la Poudrerie nationale fondée au début du premier conflit mondial et qui emploie 750 personnes en 1954. Durant le troisième quart du XXe siècle, alors que la population départementale perd plusieurs milliers d'habitants, l'expansion écono­mique entraîne une croissance de la plupart des villes, grandes ou petites. Le rythme annuel de développement est alors de 0,8 % pour Périgueux, de 0,9 % pour Bergerac, de 1,5 % pour Sarlat, de 2 % pour Terrasson. Si, pour Périgueux et Bergerac, cette pro­gression n'est que la poursuite d'une tendance qui a débuté au XIX' siècle, elle constitue par contre une véritable transfor­mation pour les petites villes.

Cette poussée démographique engendre une extension des espaces construits, mais, bien évidemment, l'éten­due de ceux-ci varie fortement d'une cité à l'autre. Alors que les petites villes ne recou­vrent fréquemment qu'une centaine d'hectares, Sarlat et Terrasson s'étendent alors sur 200 à 250 hectares, Bergerac sur plus d'un millier et Périgueux sur plus de deux mille.

Alain DAVID et Pierre PAGEOT, professeurs du service éducatif

Il Monpazier.

Photo aérienne Roger Henrard. AD. 24, 6 Fi Monpazier 13.

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48

-s <> ... 1 ... 1 c:L • r- ~

ÉDITORIAL Bernard Cazeau Président du Conseil général de la Dordogne

I:j BIOGRAPHIE

- , Les femmes dans la résistance Alain David p. 2

LOI ASSOCIATION

du 1" ;uillet

1901 L...-__ --' Mémoire en marche p.l

DOSSIER MOULINS ET MEUNIERS

LA DISPARITION DU MÉTIER DE MEUNIER AUTOUR DE SAINTE-FOY

PLAIDOYER POUR UNE HISTOIRE DE L'INDUSTRIE HYDRAULIQUE François Bordes p. 9 Jean Vircoulon p.30

BROYER, MOUDRE, CONCASSER: DES ÉNERGIES HUMAINES AUX ÉNERGIES NATURELLES MAÎTRISÉES Serge Mattty p. 10

LES MOULINS DE L'ABBAYE NOTRE-DAME DE CHANCELADE Louis Grillon - BernardReviriego p. 11

AU FIL DE L'EAU ••• DES MOULINS SUR LE DROPT Denis Borchs p.28

~FORUM

lUJ p.6

QUELQUES DESSINS DE MOULlNS­BATEAUX François Bordes p. 33

QUELQUES MOULINS MICRO­INDUSTRIELS DU SARLADAIS Louis-François Gibe/t p. 36

MOULINS ET MOTEURS HYDRAULIQUES -BIBLIOGRAPHIE François Bordes -Marie-Lise Sarlat p.43

[ij] A L'ECOLE

• . Aperçu sur l'histoire du dévelop-_ . ~ pement urbain en Dordogne

Alain David Pierre Pageot p. 45

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