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M1 SCIENCES DE LA MATIERE - ENS LYON Microscopie à Force Atomique Compte-rendu de Physique Expérimentale Réalisé au Laboratoire de Physique de l’ENS Lyon sous la supervision de Ludovic Bellon Bérut Antoine et Lopes Cardozo David Novembre 2009 ANNEE SCOLAIRE 2009-2010 Résumé : Dans le présent rapport sont étudiées la déformation statique et la relaxation dynamique d’un levier micrométrique de Microscope à Force Atomique, en comparaison avec la théorie de la décomposition en modes propres de vibration. Deux types de forces ont été considérés : une force ponctuelle à l’extrémité du levier et une force uniforme sur sa longueur. La mesure de la déflexion en fonction du temps a permis de mettre en évidence l’existence des modes propres de vibrations et de calculer les amplitudes relatives associées à chacun d’eux. La mesure de la déflexion le long du levier a permis de retrouver l’enveloppe théorique des modes propres et d’estimer la valeur de la force ponctuelle appliquée. Les problèmes rencontrés au cours des manipulations sont surtout liés au traitement du signal et à la non reproductibilité éventuelle des mesures.

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M1 SCIENCES DE LA MATIERE - ENS LYON

Microscopie à Force Atomique

Compte-rendu de Physique Expérimentale

Réalisé au Laboratoire de Physique de l’ENS Lyon

sous la supervision de Ludovic Bellon

Bérut Antoine et Lopes Cardozo David

Novembre 2009

ANNEE SCOLAIRE 2009-2010

Résumé :

Dans le présent rapport sont étudiées la déformation statique et la relaxation

dynamique d’un levier micrométrique de Microscope à Force Atomique, en

comparaison avec la théorie de la décomposition en modes propres de vibration.

Deux types de forces ont été considérés : une force ponctuelle à l’extrémité du

levier et une force uniforme sur sa longueur. La mesure de la déflexion en

fonction du temps a permis de mettre en évidence l’existence des modes

propres de vibrations et de calculer les amplitudes relatives associées à chacun

d’eux. La mesure de la déflexion le long du levier a permis de retrouver

l’enveloppe théorique des modes propres et d’estimer la valeur de la force

ponctuelle appliquée. Les problèmes rencontrés au cours des manipulations sont

surtout liés au traitement du signal et à la non reproductibilité éventuelle des

mesures.

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Introduction :

Le microscope à force atomique (AFM) permet tant de cartographier des surfaces avec une

précision pouvant aller jusqu’à l’angström que d’étudier des interactions ou des déformations dynamiques

sur des échelles inférieures au micromètre. C’est principalement ce deuxième aspect qui est étudié ici.

Nous mesurons la déflexion d’un levier d’AFM lors d’une relaxation suite à une excitation brève

(application d’une force ponctuelle à une extrémité ou transmission d’une accélération sur un temps

court), dans le but de mettre en évidence et d’étudier la décomposition en modes propres du mouvement

généré. Deux aspects principaux sont étudiés : la relaxation à l’extrémité du levier, en fonction du temps

et le profil statique le long du levier, lors de l’application de la force. Cette étude nous amène entre autres

à tracer des diagrammes temps-fréquence pour suivre l’évolution temporelle des amplitudes relatives

associées à différentes composantes fréquentielles, et à comparer les profils statiques obtenus avec ceux

prédits par la théorie.

Photographie du montage et des appareils de mesure

Plan :

Introduction : ................................................................................................................................................. 1

I) Présentation du montage et objectifs .................................................................................................. 2

A. Principe ........................................................................................................................................... 2

B. Montage .......................................................................................................................................... 2

C. Objectifs .......................................................................................................................................... 3

D. Un peu de théorie : décomposition en modes propres .................................................................... 3

II) Excitation du levier par une force de contact à son extrémité ..................................................... 5

A. Profil statique de déformation ........................................................................................................ 5

B. Mise en évidence du second mode, diagrammes temps-fréquence ................................................. 7

III) Excitation du levier par une force uniforme le long du levier ...................................................... 8

A. Diagrammes temps-fréquence ......................................................................................................... 8

B. Profil en fonction du temps ............................................................................................................. 9

Conclusion : ................................................................................................................................................. 10

Références : ................................................................................................................................................. 10

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I) Présentation du montage et objectifs

A. Principe

Le principe de la microscopie à force à atomique est simple : on dispose d’un levier de section

rectangulaire, généralement en silicium, éventuellement recouvert d’une couche conductrice, d’une

longueur approximative de 450 μm pour environ 50 μm de large (et 2 μm d’épaisseur dans notre cas),

encastré par l’une de ses extrémités et disposant d’une pointe de quelques micromètres de long à l’autre

extrémité. Un échantillon à analyser est approché de la pointe, provoquant une déflexion du levier par

contact, force de capillarité (en atmosphère humide) ou force attractive à distance (par exemple

interaction électrostatique si l’échantillon est chargé et que la pointe est rendue conductrice). La déflexion

est ensuite mesurée. On peut, comme pour les microscopes à effet tunnel, déplacer l’échantillon sous la

pointe en maintenant la déflexion constante, ce qui permet de cartographier la surface étudiée. Une autre

utilisation consiste à étudier la nature des interactions entre la pointe et un échantillon particulier ou la

déformation par la pointe du dit échantillon (courbes de force, déformation d’un polymère, réponse du

matériau à une excitation dynamique, etc.).

Dans des cas d’utilisations optimales, la résolution latérale peut atteindre la dimension atomique.

B. Montage

La particularité du microscope à force atomique (AFM) étudié au cours de ce TP est l’utilisation

d’un système interférométrique pour obtenir la déflexion du levier, en mesurant la différence de marche

entre deux faisceaux qui se réfléchissent respectivement sur la base (fixe) et un autre point (défléchi) du

levier. L’utilisation de deux capteurs, dont l’un est précédé d’une lame quart d’onde (notée λ/4 sur la

figure 1), permet de remonter au déphasage des signaux en s’affranchissant de leur amplitude.

figure 1 : schéma de fonctionnement du système interférométrique de mesure de la déflexion

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L’idée est la suivante : à l’aide d’un capteur nous obtenons le cosinus du déphasage, ce qui ne permet pas

de remonter de façon univoque au déphasage, on crée donc un faisceau en quadrature de phase (ce qui est

assuré la lame quart d’onde) qui nous permet donc d’obtenir le sinus du déphasage recherché. Il ne reste

alors plus qu’à faire un traitement des deux signaux mesurés pour remonter à la valeur du déphasage. Les

capteurs sont directement reliés à un oscilloscope et à un ordinateur, permettant de visualiser rapidement

les courbes obtenues et de remonter (après traitement informatique) à la déflexion du levier en fonction

du temps (qui est facilement obtenue à partir de la valeur du déphasage mesurée).

C. Objectifs

Le but des manipulations effectuées est d’étudier la déformation du levier en réponse à différentes

excitations et de comparer les résultats obtenus à ceux prédits théoriquement pour une poutre encastrée-

libre. L’oscillation du levier lors de la relaxation (après application d’une contrainte) peut se décomposer

comme la somme de solutions pour des oscillateurs harmoniques amortis (modes propres de vibration),

chacun plus ou moins excités selon la déformation initialement appliquée.

Pour cela deux méthodes d’excitations ont été employées :

Excitation par une force de contact, considérée ponctuelle : mise en contact et adhésion de la

pointe à une surface, puis retrait de cette dernière.

Excitation par une force uniforme sur levier : le support du levier est brusquement déplacé

verticalement, lui conférant une accélération.

figure 2 : schéma de la déflexion du levier z(x,t)

Pour ces deux méthodes, plusieurs réalisations ont été effectuées en différents points x du levier pour

cartographier sa déformation totale au cours du temps (en supposant que les excitations sont

reproductibles). D’autre part, les mesures faites à l’extrémité du levier ont été utilisées pour mettre en

évidence l’existence du second mode propre de vibration du levier dans l’espace fréquentiel et pour

comparer son amplitude à celle du premier mode propre.

D. Un peu de théorie : décomposition en modes propres

En considérant une poutre encastrée-libre, dans la limite des faibles sollicitations mécaniques, la

déflexion de la poutre z(x,t) suit l’équation d’Euler-Bernouilli :

𝜌𝑊𝐻𝜕2𝑧

𝜕𝑡 2 + 𝐸𝑊𝐻3

12𝜕4𝑧

𝜕𝑥 4 = 𝐹𝑒𝑥𝑡 𝑥

Avec :

E le module d’Young du levier ; 𝜌 sa masse volumique

H sa hauteur ; W sa largeur ; L sa longueur (x=0 : point d’encastrement)

Fext(x) la force linéique appliquée au point x

En l’absence de force extérieure, on peut réécrire :

𝑚𝑐𝜕2𝑧

𝜕𝑡 2 + 𝑘𝑐

𝐿4

3𝜕4𝑧

𝜕𝑥 4 = 0

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Avec :

mc = ρLWH la masse du levier et 𝑘𝑐 = 𝐸𝑊𝐻3

4𝐿3 sa constante de raideur

Dans l’espace de Fourier, on écrit alors : z(x, t) = Φ(x)eiωt avec ω une certaine pulsation. On obtient

alors l’équation pour les modes propres :

L4d4Φ

dx4= α4Φ(x)

Avec :

𝛼4 =3𝑚𝑐𝜔

2

𝑘𝑐 une constante

Les conditions aux limites (en l’absence de force) sont alors :

z x = 0, t = 0 ; 𝜕𝑧 (𝑥=0,𝑡)

𝜕𝑥= 0 ; 𝜕

2𝑧(𝑥=𝐿 ,𝑡)

𝜕𝑥 2 = 0 ; 𝜕3𝑧(𝑥=𝐿 ,𝑡)

𝜕𝑥 3 = 0

On en tire la condition suivante sur les valeurs possibles de α :

1 + cos 𝛼 cosh 𝛼 = 0

En notant 𝛼𝑛 les différentes solutions de cette équation (triées par ordre croissant) on peut montrer que les

modes propres prennent alors la forme :

Φ𝑛 𝑥 = (cos(𝛼𝑛

𝑥

𝐿) − cosh(𝛼𝑛

𝑥

𝐿)) −

cos 𝛼𝑛 + cosh 𝛼𝑛

sin 𝛼𝑛 + sinh 𝛼𝑛

(sin(𝛼𝑛

𝑥

𝐿) − sinh(𝛼𝑛

𝑥

𝐿))

figure 3 : quatre premiers (dans l’ordre : noir, violet, bleu, rouge) modes propres spatiaux de la poutre

encastrée-libre (α1≈1,875 α2≈4,694 α3≈7,854 α4≈10,997)

On peut montrer que ces fonctions forment une base orthonormale des fonctions de [0 ; L] dans ℝ, et

toute déflexion peut être décomposée sur la base des modes propres :

𝑧 𝑥, 𝑡 = 𝑍𝑛

𝑛

𝑡 Φ𝑛(𝑥)

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Chaque Zn(t) est régi par une équation d’oscillateur harmonique de pulsation 𝜔𝑛 = 𝛼𝑛

4𝑘𝑐

3𝑚𝑐 et donc pour

chaque mode propre, la déflexion en un point x se comporte simplement comme un oscillateur

harmonique.

Expérimentalement on peut mesurer les fréquences propres du levier en regardant le spectre de la

déflexion mesurée pour une excitation uniquement due au bruit thermique. On obtient ainsi, avec une

fréquence d’échantillonnage de 5MHz, les fréquences propres des trois premiers modes : 8600 Hz, 54

kHz et 157 kHz.

II) Excitation du levier par une force de contact à son extrémité

A. Profil statique de déformation

Une surface est approchée de la pointe selon une rampe (approche progressive, mise en contact

pendant un certain temps, retrait progressif). On mesure l’évolution au cours du temps de la déflexion

z(x,t) en différents points x du levier, comme on peut en voir un exemple sur la figure 4. Ces points x sont

pris tous les 25 μm à partir de l’extrémité du levier. Pour chaque point on effectue dix séries de mesures

de manière à tester la reproductibilité et à pouvoir effectuer des moyennes. Notre fréquence

d’échantillonnage est de 204 800 Hz.

figure 4 : moyenne des courbes de déflexion du levier mesurées à son extrémité, pour une

excitation créée par l’approche-retrait d’une surface mise en contact, en fonction du temps

Pour pouvoir comparer et moyenner les courbes, il faut les synchroniser et enlever d’éventuels

offsets. L’instant choisi pour synchroniser les courbes a d’abord été le point de décrochage (minimum du

signal mesuré), puis par la suite le premier passage à zéro car mieux déterminé. On constate néanmoins la

persistance d’un écart d’un ou deux points (en temps) entre les courbes pour des acquisitions en un même

x. Ces décalages sont problématiques pour moyenner les courbes, on risque de « tuer » les hautes

fréquences : en effet, ces décalages introduisent un déphasage aléatoire entre les courbes qui peut être

suffisant pour que la moyenne mette à zéro les fréquences trop élevées. En particulier les mesures

précédentes ne permettent pas de mettre en évidence une excitation du second mode propre de vibration

lors de la relaxation : sur une acquisition filtrée numériquement en passe-haut (à 30 kHz) on constate que

l’amplitude du signal obtenu (qui doit donc correspondre à l’excitation du deuxième mode propre de

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vibration) est au niveau du bruit ce qui montre la nécessité de faire des moyennes pour réduire le niveau

du bruit. Or un écart temporel d’un point est suffisant pour faire interférer de manière destructive les

fréquences au delà de 50 kHz (un quart de la fréquence d’échantillonnage) lorsque l’on moyenne. On se

contente donc pour ces mesures de tracer le profil statique du levier, avec les valeurs z(x) correspondant à

l’instant juste avant le décrochage, pour chaque x (instant repéré par un trait rouge sur la figure 4).

On compare la déformation statique du levier (juste avant le décrochage) au modèle théorique. En

considérant l’équation d’Euler Bernoulli (cf. I) D.) avec et les conditions aux limites :

z x = 0 = 0 ; 𝜕𝑧 (𝑥=0)

𝜕𝑥= 0 ; 𝜕

2𝑧(𝑥=𝐿)

𝜕𝑥 2 = 0 ; 𝜕3𝑧(𝑥=𝐿)

𝜕𝑥 3 =12𝐹𝑡𝑖𝑝

𝐸𝑊𝐻3

Où Ftip est la force statique appliquée à son extrémité (constante si on suppose les mesures reproductibles)

On obtient :

𝑧 𝑥 = 2𝐹𝑡𝑖𝑝𝑥²(3𝐿 − 𝑥)

𝐸𝑊𝐻3

En pratique les incertitudes sur H sont trop grandes pour qu’on puisse se servir de la valeur telle quelle

dans le modèle. Pour compenser cela et pouvoir tracer le profil théorique, on estime expérimentalement la

constante de raideur du levier à son extrémité : 𝑘𝑐 = 𝐸𝑊𝐻3

4𝐿3 en comparant les oscillations de l’extrémité

du levier dues au bruit thermique avec un modèle d’oscillateur harmonique.

La seule inconnue restant dans l’équation est alors Ftip ; on la calcule donc en inversant la formule

précédente. Pour chacun des couples {x,z(x)} on estime l’incertitude sur x ( ± 10 μm) et z ( ± 1 nm

obtenu à partir de l’amplitude du bruit thermique) et on en déduit l’incertitude sur Ftip obtenue (figure 5).

Figure 5 : valeurs de la force appliquée au bout du levier, calculée en différents points le long de

celui-ci, et incertitudes associées (les incertitudes sur la position x sont toutes égales à 10 μm)

On constate qu’en dehors des points proches de l’encastrement pour lesquels l’incertitude est très grande

(du fait d’une déflexion mesurée très faible), l’incertitude est de l’ordre de 2% de la valeur obtenue. On

obtient donc que Ftip calculée est à peu près constante pour toutes les positions x où l’incertitude est

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raisonnable, ce qui montre une bonne correspondance entre la formule théorique et la mesure

expérimentale.

On retient une valeur moyenne pondérée par l’inverse des incertitudes : Ftip = 3,03.10-8

N

Ce qui est un ordre de grandeur raisonnable pour le type d’interaction mise en œuvre.

On cherche ensuite à mettre en évidence les différents modes propres de vibration. On a vu que

cela n’était pas possible avec ces mesures. On va donc augmenter la fréquence d’échantillonnage et la

force appliquée, pour pouvoir faire des moyennes sans éliminer le second mode et améliorer son

amplitude par rapport au bruit.

B. Mise en évidence du second mode, diagrammes temps-fréquence

Cette fois on effectue 100 mesures à l’extrémité du levier avec une fréquence d’échantillonnage de

5 MHz. Les écarts temporels ne dépassent pas quelques points entre les courbes, on peut donc les

moyenner sans risque (les fréquences possiblement éliminées sont celles supérieures à 125 kHz). On

observe alors une diminution du niveau du bruit entre courbes moyennée et brutes de l’ordre d’un facteur

10.

Pour mettre en évidence les différents modes de vibration et leur évolution temporelle, on réalise des

diagrammes temps-fréquence. On calcule donc le spectre du signal sur une fenêtre temporelle de taille

suffisamment réduite pour ne pas contenir l’intégralité des oscillations d’un mode avant son

amortissement complet, fenêtre que l’on décale temporellement le long du signal afin de pouvoir

représenter l’évolution des composantes spectrales en fonction du temps. Pour avoir un ordre de grandeur

du temps d’amortissement de chaque mode propre on peut estimer théoriquement les facteurs de qualité

qui leurs sont associés (le nombre d’oscillations observées est à peu près égal au facteur de qualité).

Sur la figure 6 on voit le diagramme temps-fréquence de la moyenne des signaux, filtrée passe-haut à 30

kHz.

figure 6 : diagramme temps-fréquence de la déflexion à l’extrémité du levier, moyennée, filtrée passe-

haut (30 kHz), pour une excitation par approche-retrait d’une surface en contact

On observe clairement l’existence d’une composante associée à la fréquence du deuxième mode propre

qui s’atténue avec le temps. En traçant l’amplitude RMS associée à cette fréquence en fonction du temps,

on constate un amortissement sur environ 0,5 ms. Cela correspond à un facteur de qualité de l’ordre de

27.

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On peut ensuite comparer les amplitudes associées à chaque mode propre et les confronter aux

amplitudes théoriques. Pour cela, on filtre le signal autour de la fréquence du mode propre dont on veut

l’amplitude (pour se débarrasser de l’influence des autres modes), puis on intègre le spectre de puissance

de ce signal autour de la fréquence propre. On obtient ainsi l’amplitude RMS associée à chaque mode

propre.

Les valeurs théoriques donnent :

Apremier mode = 97 % Atotal

Asecond mode = 3,0 % Atotal

On peut penser que l’écart observé est dû à une trop faible reproductibilité des mesures : il n’est pas

garanti que les conditions initiales soient exactement les mêmes pour toutes les mesures à l’instant du

décrochage, en particulier on n’est pas sûr que la vitesse initiale puisse bien être prise nulle. On peut donc

avoir des déphasages entre les mesures sur la composante du second mode à cause de ces conditions

initiales, ce qui peut suffire à diminuer son amplitude lorsqu’on moyenne, d’où la différence avec la

valeur théorique. Comme on a vu qu’il n’était possible de mettre en évidence le second mode sans

moyenner avec cette technique, nous avons mis en œuvre une autre méthode plus reproductible pour

exciter le levier.

III) Excitation du levier par une force uniforme le long du levier

A. Diagrammes temps-fréquence

Le levier est cette fois excité par un mouvement vertical bref et rapide du support sur lequel il est

encastré. Cela correspond à une force qui n’est plus ponctuelle mais uniforme sur le levier. La fréquence

d’échantillonnage est de 5 MHz. On réalise une mesure de la déflexion en bout du levier lors d’une

acquisition pendant laquelle le support est abaissé et remonté plusieurs fois (avec une fréquence

suffisamment faible pour permettre la relaxation du levier entre temps).

On constate sur les diagrammes temps-fréquence qu’il n’est pas nécessaire de faire des moyennes sur les

courbes pour mettre en évidence la composante du second mode propre. On voit même apparaître la

fréquence du troisième mode propre (voir figure 7).

figure 7 : diagramme temps-fréquence obtenu sur la déflexion à l’extrémité du levier, non moyennée, non

filtrée, pour une excitation créée par une impulsion du support dans lequel le levier est encastré

Les valeurs mesurées sont :

Apremier mode = 99,6 % Atotal

Asecond mode = 0,4 % Atotal

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On voit bien sur la figure 7 l’apparition, à partir de 1 ms (ce qui correspond à l’instant où l’impulsion est

donnée au support du levier) de trois composantes non nulles pour les fréquences des trois premiers

modes propres (8600 Hz, 54 kHz et 156 kHz). Ces trois composantes spectrales s’atténuent d’autant plus

vite que leur fréquence est élevée.

On peut ensuite, calculer les amplitudes relatives théoriques associées aux différents modes et les

comparer à celles mesurées expérimentalement. Ici les amplitudes sont directement mesurées à partir de

l’amplitude maximale du signal filtré autour de la fréquence propre du mode que l’on veut considérer. On

vérifie également que les rapports d’amplitude ainsi obtenus sont semblables à ceux obtenus en prenant

les amplitudes RMS des spectres comme dans l’expérience précédente.

Les valeurs théoriques donnent :

Apremier mode = 98,5 % Atotal

Adeuxième mode = 1,35 % Atotal

Atroisième mode = 0,15 % Atotal

On a cette fois une bien meilleure concordance entre le modèle est l’expérience. Seuls les résultats

associés au troisième mode ne semblent pas tout à fait satisfaisants, cela est normal, puisque son

amplitude n’est que quatre fois supérieure à celle du bruit.

Pour chaque mode propre, en une position donnée, on a un oscillateur harmonique amorti, donc une

dépendance en temps de la déflexion de la forme : 𝑧 𝑡 = 𝑧0 cos(𝜔𝑡)𝑒−

𝜔𝑡

2𝑄

On peut donc remonter au coefficient de qualité associé à chaque mode en traçant en fonction du temps le

logarithme de l’amplitude du spectre du signal à la fréquence propre qui nous intéresse. On obtient une

droite de pente −𝜔

2𝑄 où ω est la pulsation propre du mode considéré et Q le facteur de qualité associé. On

trouve ainsi Q = 26 pour le second mode, valeur proche de celle précédemment obtenue.

B. Profil en fonction du temps

Comme précédemment on réalise des mesures le long du levier, tous les 25 μm à partir de son

extrémité. On essaye cette fois de voir l’évolution de la composante du second mode propre en fonction

du temps, le long du levier. En particulier, on doit voir l’apparition d’un nœud dans l’enveloppe,

caractéristique du second mode (figure 3). On peut comparer les courbes obtenues aux modes propres

théoriques (cf. I) D. pour leur obtention).

On constate sur la figure 8 une bonne concordance entre le modèle théorique et l’expérience. On peut

noter que le léger écart qui semble exister entre les positions théorique et expérimentale du nœud peut être

dû aux perturbations introduites par le troisième mode (qui n’est pas éliminé ici puisque le signal n’a été

filtré que passe-haut et non pas passe-bande).

On peut également regarder l’évolution temporelle du profil du levier en traçant pour différents temps t

les z(x,t) en fonction de x. On y voit nettement les oscillations du premier mode, perturbées par

l’existence du second mode propre. Si l’on veut s’en convaincre on peut tracer simultanément la

déflexion et la déflexion filtrée passe-bas (pour n’y conserver que le premier mode propre), et ainsi voir

les différences apportées par l’existence du second mode propre de vibration.

On voit ainsi que la décomposition en modes propres est facilement mise en évidence avec cette

technique d’excitation du levier et que l’on peut récupérer quantitativement les amplitudes relatives et

facteurs d’amortissements associés aux différents modes.

Les valeurs mesurées sont :

Apremier mode = 98,4 % Atotal

Adeuxième mode = 1,30 % Atotal

Atroisième mode = 0,30 % Atotal

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figure 8 : profil du levier filtré passe-haut à 30 kHz, tracé en différents instants (rouge), superposé avec

l’enveloppe théorique du second mode propre (bleue)

Conclusion :

L’étude de la relaxation d’un levier micrométrique pour deux types d’excitations nous a permis de

retrouver les résultats théoriques associés à la décomposition en modes propres du mouvement de

vibration. Dans le cas d’une force ponctuelle appliquée à l’extrémité du levier nous avons pu mettre en

évidence, dans le mouvement d’oscillation de l’extrémité du levier, l’existence de composantes non nulles

(non confondues avec le bruit thermique) selon les deux premiers modes propres de vibration. Nous

avons aussi pu tracer la déflexion statique le long du levier et retrouver l’expression théorique de la force

appliquée à son extrémité avec une bonne approximation. Dans le cas d’une force uniforme appliquée sur

le levier, nous avons pu obtenir des composantes mesurables sur les trois premiers modes de vibration, et

également retrouver les amplitudes théoriques associées à chacun de ces modes. Nous avons aussi pu

tracer la déflexion en fonction du temps, le long du levier, et retrouver l’enveloppe spatiale théorique des

deux premiers modes. Les problèmes rencontrés furent principalement liés au traitement du signal

(séparation entre signal et bruit, choix d’une fréquence d’échantillonnage, moyenne sur les courbes

obtenues) ou éventuellement d’ordre pratique (non reproductibilité des mesures lors de l’excitation du

levier par application d’une force ponctuelle à son extrémité). Nous avons néanmoins globalement pu

mettre en évidence le comportement attendu, et retrouver certains résultats quantitatifs.

Remerciements : Nous remercions notre encadrant Ludovic Bellon pour son aide apportée pendant tout la

durée des Travaux Pratiques et pour ses conseils lors de la rédaction de ce rapport.

Références :

Bruit thermique et dissipation d’un microlevier, thèse de Pierdomenico PAOLINO sous la direction de

Ludovic Bellon, soutenue le 24 novembre 2008.

Atomic force microscopy and its applications, cours de Ludovic Bellon.

http://perso.ens-lyon.fr/ludovic.bellon/ page personnelle de Ludovic Bellon.