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1 Ministère de la Justice Direction de la Protection judiciaire de la Jeunesse Alexis BAEYENS Promotion 2011/2013 Le temps sport au CER de Cuinchy : La collaboration un moyen de limiter les situations de violences. Sous la direction de Oumaya Hidri NEYS, Maître de conférence en STAPS Mémoire de validation de la formation d'éducateur de Protection Judiciaire de la Jeunesse Master I Mention Sciences de l’Éducation et de la Société Spécialité « Travail éducatif et social » UFR Sciences de l'éducation Université Lille 3 École nationale de protection judiciaire de la jeunesse Pôle territorial de formation Grand Nord

Le temps sport au CER de Cuinchy - enpjj.justice.fr

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Page 1: Le temps sport au CER de Cuinchy - enpjj.justice.fr

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Ministère de la Justice

Direction de la Protection judiciaire de la Jeunesse

Alexis BAEYENS Promotion 2011/2013

Le temps sport au CER de Cuinchy :

La collaboration un moyen de limiter les situations de violences.

Sous la direction de Oumaya Hidri NEYS, Maître de conférence en STAPS

Mémoire de validation de la formation

d'éducateur de Protection Judiciaire de la Jeunesse

Master I – Mention Sciences de l’Éducation et de la Société

Spécialité « Travail éducatif et social »

UFR Sciences de l'éducation – Université Lille 3

École nationale de protection judiciaire de la jeunesse

Pôle territorial de formation Grand Nord

Page 2: Le temps sport au CER de Cuinchy - enpjj.justice.fr

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SOMMAIRE

INTRODUCTION

PREMIERE PARTIE : SPORT ET EDUCATION : définitions théoriques et politiques.

I. Constat de départ et premières définitions

A. Situation de référence et question de départ

B. Sport et institution : premières approches

1) Le sport : un support éducatif pour l’institution

2) Le sport : un support éducatif utilisé par le Centre Educatif Renforcé de

Cuinchy

II. Les politiques d’éducation par la pratique physique et sportive

A. Les politiques d’éducation par la pratique physique et sportive

1) L’opposition politiques/chercheurs

2) Les propositions pour une véritable éducation par le sport

B. Les études ayant utilisé le média sportif

1) Les travaux de R.Pfister et C.Sabatier

2) Le rapport à la règle selon Méard et Bertone

DEUXIEME PARTIE : LE JUDO A L’EPREUVE DE L’EXPERIMENTATION

I. Le projet et ses objectifs

II. La mise en oeuvre

A. Les moyens

1) Les moyens matériels

2) Les moyens humains

3) Les moyens financiers

B. Le déroulement

1) Les méthodes d’animation pédagogique

a) L’utilisation des invariants pédagogiques

Page 3: Le temps sport au CER de Cuinchy - enpjj.justice.fr

3

b) La mise en place de situations problèmes

c) L’utilisation d’une remédiation

2) Le calendrier de progression

III. L’évaluation

TROISIEME PARTIE : LES RESULTATS : EVALUATION DE

L’EXPERIMENTATION

I. Comparatif activité football/judo avec l'exploitation de la grille d'observation.

II- Résultats et analyse des entretiens individuels.

A. Résultats des entretiens.

B. Analyse des entretiens

1) Le sport une activité repérée au CER

2) Les règles et la notion de coopération ont été comprises.

3) Des jeunes capables de se projeter

III. La validation de nos hypothèses.

A. Le comportement des mineurs varient en fonction de l'activité proposée

B. La coopération permet de réguler les facteurs d'opposition

C. La coopération présente lors du temps sport peut être transférable dans d’autres

espaces sociaux

CONCLUSION

Bibliographie

Page 4: Le temps sport au CER de Cuinchy - enpjj.justice.fr

4

INTRODUCTION

L’activité sportive est un média utilisé par de nombreux éducateurs de la Protection

Judiciaire de la Jeunesse. En structure d’hébergement, en unité éducative de milieu ouvert, en

unité éducative d’activités de jour, ce média est largement utilisé. Football, basket ball, tennis

de table, jujitsu, boxe, natation, équitation… sont autant de sports pratiqués par les mineurs

placés sous main de justice.

Mes différents lieux de stage m’ont permis de relever que ce média était utilisé avec

des objectifs définis préalablement ou non. Un match de basket pouvait être organisé juste

avant le repas du soir alors que le soleil venait de faire une timide apparition, des ateliers

jujitsu sont mis en place chaque mercredi dans le cadre du dispositif accueil accompagnement

en milieu ouvert par exemple. Enfin, lors de ma prise de fonction, en tant qu’éducateur

préaffecté au Centre Educatif Renforcé1 de Cuinchy, j’ai découvert que l’utilisation de

l’activité sportive était quotidienne et qu’elle revêtait un caractère obligatoire.

« Le sport, média éducatif » est un thème largement abordé, sur lequel de nombreuses

études ont été menées. D’ailleurs, plusieurs élèves stagiaires de l’Ecole Nationale de la

Protection Judiciaire de la Jeunesse ont travaillé sur ce sujet.

Alors, que faire ? Se dire que le sujet est déjà « épuisé » et qu'il vaut mieux travailler

un autre thème, ou essayer d'ouvrir de nouveaux axes de travail et de nouvelles perspectives.

J'ai choisi la seconde possibilité. En effet, il s'agissait de proposer un mémoire professionnel

abordant un sujet pouvant être un apport pour le service dans lequel je suis pré-affecté. Le

CER de Cuinchy, structure de la Protection Judiciaire de la Jeunesse située dans le Pas de

Calais, propose des séances sportives quotidiennes. Pour autant, la remarque du directeur de

service lors d'une réunion de préparation de la session avec les éducateurs a attiré mon

attention : « les activités sportives ne sont pas traitées également par les éducateurs. Chacun

fait comme il peut avec des objectifs qui différent. Vous faites avec vos capacités personnelles

mais cela n'a pas forcement de sens pour les mineurs. Tout le monde n'est pas formé pour

utiliser l'activité physique et sportive.»2 Il y avait donc un besoin de la structure dans ce

domaine. J’y ai trouvé l’opportunité de repenser l’activité sous d’autres angles.

De plus, ancien étudiant en Sciences et Techniques des Activités Physiques et Sportives,

1 Les centres éducatifs renforcés ont vocation à prendre en charge, sur le fondement de l’ordonnance du

2 février 1945, des mineurs délinquants multirécidivistes en grande difficulté ou en voie de marginalisation

ayant souvent derrière eux un passé institutionnel déjà lourd. Ils se caractérisent par des programmes

d’activités intensifs pendant des sessions de trois à six mois selon les projets et un encadrement éducatif

permanent. Ils visent à créer une rupture dans les conditions de vie du mineur et à préparer les conditions de

sa réinsertion.

2 Benoist Jolly, directeur du CER de Cuinchy, réunion de préparation sur le projet de service, octobre 2012

Page 5: Le temps sport au CER de Cuinchy - enpjj.justice.fr

5

j’avais forcément une appétence particulière pour le sport, avec le sentiment de pouvoir

apporter ma contribution à ma nouvelle structure d’affectation.

Le Centre Educatif Renforcé de Cuinchy, comme indiqué précédemment, met en place

chaque jour, entre 18 et 19 heures une activité sportive et physique obligatoire pour les

mineurs. Ce créneau horaire quotidien utilisé de manière inégale par les éducateurs a donc

attiré mon attention dès mes premiers jours de prise de fonction. Une situation de tensions

entre deux mineurs avaient connu son (« malheureux ») dénouement lors d’un match de

football organisé sur l’un de ces créneaux.

A partir de cette situation d’affrontement entre deux mineurs, j’ai proposé à l’équipe

éducative une activité permettant de limiter les situations de violence. Mon projet est de

proposer un temps « activité physique et sportive » permettant réellement un travail sur les

comportements violents des mineurs pris en charge au C.E.R.

Il s’agira donc de démontrer dans ce mémoire qu’un sport tel que le judo, conçu

comme support de coopération entre les mineurs, peut permettre de limiter les conduites

agressives.

Pour cela, je chercherai à valider les trois hypothèses suivantes :

- Le comportement des mineurs varient en fonction de l'activité proposée

- La coopération permet de réguler les facteurs d'opposition

- La coopération présente lors du temps sport peut être transférable dans d’autres

espaces sociaux

J’exposerai mon propos en trois parties. La première partie me permettra, après avoir

énoncé plus précisément la situation de départ, de poser les premières définitions théoriques et

les politiques d’éducation en matière d’activités sportives et physiques. En effet, de nombreux

personnages politiques se sont engagés sur le principe de « l’éducation par le sport », idée

contrebalancée par plusieurs études.

Une seconde partie relatera l’expérimentation mise en place. Il s’agira de décrire

précisément le projet, sa mise en œuvre et d’apporter des axes d’évaluation.

Enfin, la troisième partie permettra d’effectuer un retour construit sur l’utilisation de

l’activité « judo » et de valider ou non nos hypothèses.

Page 6: Le temps sport au CER de Cuinchy - enpjj.justice.fr

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PREMIERE PARTIE : SPORT ET EDUCATION : définitions théoriques et

politiques.

Le média éducatif le plus couramment utilisé dans le domaine éducatif est sans

conteste l’activité sportive. Sa mise en place est souvent légitimée par un besoin pour le

mineur de travailler l’estime de soi, sa confiance en lui, son rapport à la violence ou à la règle.

L’utilisation de ce média répond-t-il à toutes les problématiques ? Est-il adapté à

l’ensemble des mineurs placés sous main de justice ?

Partant d’une situation éducative vécue, que j’expliciterai en première partie, j’en

définirai le cadre théorique et ferai un état des lieux des recherches menées en matière de

politique d’éducation par la pratique sportive et physique.

I ) Constat de départ et premières définitions

Ancien étudiant en Sciences et Techniques des Activités Physiques et Sportive, et

notamment en filière « éducation motricité », je suis tout particulièrement attaché à la mise en

place éducative des activités sportives au Centre Educatif Renforcé sur lequel je suis pré-

affecté. Le créneau « sport », investi de manière inégale par les mineurs a donc retenu toute

mon attention lors du choix de mon sujet de mémoire.

A. Situation de référence et question de départ.

Depuis le début de la journée, une tension existe entre deux jeunes confiés au C.E.R.

Déjà à deux reprises, les éducateurs ont dû intervenir pour séparer les mineurs qui voulaient

en venir aux mains. La raison de la tension n'est pas connue de l'équipe éducative.

A dix huit heures, lors de l'arrivée des éducateurs de nuit, un passage de consignes est

effectué. Les professionnels arrivant sur le service prennent donc connaissance de la tension

entre les deux adolescents. Afin de résoudre ce litige, l'équipe éducative décide d'organiser un

match de football durant le temps « sport » (qui est obligatoire) afin de « ressouder le

groupe » et d ' «évacuer les tensions ».

Page 7: Le temps sport au CER de Cuinchy - enpjj.justice.fr

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Lors de cette rencontre, les deux mineurs en question sont adversaires. Le choix des

équipes a été fait par affinité par les adolescents. Durant le match, plusieurs accrochages

physiques ou verbaux ont lieu, jusqu'à ce qu'une nouvelle bagarre éclate entre les deux

protagonistes. Face à cette situation de violence, les éducateurs décident de mettre fin à la

séance et de rentrer au Centre Educatif Renforcé. Les deux jeunes sont reçus tour à tour dans

le bureau des éducateurs pour effectuer un retour sur leur comportement. Les deux

adolescents se rejettent la faute : «il a commencé à me traiter », « c'est lui qui a mis des coups

en premier »... Ils sont sanctionnés par les éducateurs (retrait de la totalité des cigarettes le

jour suivant). Les mineurs seront également reçus dès le lendemain par le responsable d'unité

éducative.

Cette situation a fait naître un débat au sein de l’équipe éducative. Pour certains, les

éducateurs ayant eu connaissance de la tension entre ses deux mineurs auraient dû choisir un

autre sport que le football qui selon eux renvoie à l'affrontement. Pour d'autres, l'activité

sportive choisie n'a pas agi comme un révélateur de violence. En effet, ils sont persuadés que

l’affrontement était, en fin de journée, inévitable.

Ces échanges, et cette différence d’interprétation au sein de l’équipe éducative m’ont

longuement interrogé.

Quelles activités physiques et sportives peut proposer le CER de Cuinchy pour

tenter de canaliser les tensions entre les jeunes ?

Afin de répondre à cette question, il convient de définir le cadre théorique. Celui-ci me

permettra de mieux appréhender la notion de sport dans l’institution et plus particulièrement

en Centre éducatif renforcé.

B. Sport et institution : premières approches

Définir les notions théoriques est le préalable indispensable à ma réflexion. Le mot

« sport » est un terme générique. Je vais donc ici m’intéresser aux Activités physiques et

sportives. Que représentent-elles pour l’institution ? Comment sont elles présentées par les

formateurs? Comment sont-elles utilisées actuellement sur la structure qui m’accueille ?

Page 8: Le temps sport au CER de Cuinchy - enpjj.justice.fr

8

1. Le sport : un support éducatif pour l’institution

Pour l'institution, « les Activités Physiques, Sportives et Artistiques sont un support au

développement de soi et à l'apprentissage de la vie en société. Elles contribuent aux

apprentissages personnels, à l'éducation de chacun, elles favorisent l'intégration et l'inclusion

sociale et sont vecteurs de comportements sociaux positifs. »3

De même, la commission européenne a également reconnu différentes fonctions

principales au sport4 : « une fonction éducative, une fonction de santé publique, une fonction

sociale, une fonction culturelle, une fonction ludique »

Le guide des activités physiques et sportives précise alors que « toutes ces fonctions

font l'objet d'action éducative au sein des établissements et des services de la PJJ. Le sport

peut donc servir de média pour ces apprentissages. »

Ce guide indique également que l'activité physique est « un espace d'expression et de

spontanéité » permettant alors la mise en œuvre « d'un terrain d'observation privilégié des

comportements et attitudes des jeunes, qui se trouvent libérés lors de la pratique et qui

exprime alors leur manière d'être sans contrainte. »

Il précise enfin qu'il s'agit d'un « lieu de paroles privilégiés » et que « ces temps de

pratique peuvent donc être, pour l'éducateur, un outil supplémentaire à la compréhension, et à

la connaissance des jeunes dont il a la responsabilité. »

Je peux en déduire que ces temps doivent être investis pleinement par les éducateurs.

D’ailleurs, la formation des éducateurs de la Protection Judiciaire de la Jeunesse met en avant

3 axes que permettent de travailler les activités physiques :

Un travail sur l'empathie : en s'appuyant notamment sur les travaux du sociologue

Omar ZANNA5, qui propose de travailler la restauration de l'empathie par la mise en

place d'ateliers de pratique sportive.

Un intérêt sur l'opposition : Benoist JOLLY, ancien formateur à l'ENPJJ expliquait

qu’: « à travers l'engagement des corps dans le cadre de l'activité sportive, la rivalité

3 Guide méthodologique de l'usage des activités physiques et sportives dans l'action d'éducation, avril 2011

4 Premières assises européennes du sport - Olympie les 21 et 22 mai 1999

5 Omar ZANNA, restaurer l'empathie chez les mineurs délinquants, édition Dunod, 2010

Page 9: Le temps sport au CER de Cuinchy - enpjj.justice.fr

9

et l'opposition peuvent s'exprimer sans être destructrice, car elles sont médiatisées par

la règle qui limite et par le cadre qui autorise et réciproquement. »6 . Il ajoute que « la

coopération est la dimension qui vient compléter le processus de socialisation. »

Un travail sur le fond : Pour B.JOLLY : « il s'agit à travers le sport médiateur, d'aider

l'adolescent à retrouver une plasticité intellectuelle et des outils cognitifs qui lui

permettent de transférer dans la vie quotidienne les compétences mise en œuvre

pendant l'activité physique et sportive. »

Je viens de définir ce que sont les Activités Physiques et Sportives, il convient

désormais de s’intéresser à ce qui est mis en place au CER de Cuinchy, terrain de mon étude.

2. Le sport : un support éducatif utilisé par le Centre Educatif Renforcé

de Cuinchy

« S'appuyant sur un cadre ferme et des règles claires et cohérentes posées dès le

départ (activités obligatoires, pas de sorties libres, pas de retour famille avant 5 semaines,

vouvoiement des adultes, téléphone portable interdit), la pédagogie du C.E.R. repose sur la

volonté de faire avec les mineurs. »7

L'équipe du C.E.R., constituée d'un directeur de service, d'un responsable d'unité

éducative, d'une psychologue, de 10 éducateurs et d'un ouvrier professionnel accompagne les

mineurs, placés sur décision du juge des enfants, suite à la commission d'un délit ou d'un

crime le temps d'une session de 15 semaines, 24 heures sur 24 «dans tous les actes et toutes

les tâches de la vie quotidienne afin de favoriser un apprentissage des règles et d'atteindre

divers objectifs comme :

- Reprendre des habitudes de vie adaptées à l'insertion professionnelle

- Se confronter à l'effort

- Travailler une insertion sociale

- Mettre un terme aux actes de délinquance

- Réfléchir sur son parcours

6 Benoist JOLLY, action éducative, octobre 2012

7 Livret d'accueil du CER de Cuinchy, septembre 2012

Page 10: Le temps sport au CER de Cuinchy - enpjj.justice.fr

10

La session se partage donc entre des cycles de 15 jours sur place (chantier, atelier,

travail scolaire, sport) entrecoupée de quatre dégagements organisés hors région avec un

caractère sportif. »8

La vie quotidienne, très rythmée, est découpée comme suit9:

7h30 : Lever, petit déjeuner, douche

9h00 : Activités scolaires (arrivée des éducateurs de jour et départ des éducateurs de nuit)

12h00 : Préparation du repas puis repas

14h00 : Chantier

17h00 : Collation

18h30 : Sport (arrivée des éducateurs de nuit et départ des éducateurs de jour)

20h00 : Préparation du repas puis repas

22h00 : Coucher

Le projet de service précise que « l'activité sportive a une place prépondérante au sein

de la structure. » Concrètement, elle est présente aussi bien lors des temps sur la structure que

sur les camps hors région. Elle est mise en place pour favoriser un temps de décompression au

sein d'un espace réglementé pour les mineurs accueillis, mais est également présentée comme

un média capable de réguler les comportements violents des jeunes. Les activités pratiquées

sont principalement la boxe, le judo, la lutte, la musculation, le football et le basket-ball. Le

choix de l’activité dépend des compétences des éducateurs présents sur le service. Comme

toutes les activités du C.E.R., ce temps est obligatoire.

L’équipe éducative du CER a réfléchi à l’utilisation des activités physiques et

sportives. Celles-ci sont ici utilisées comme média éducatif et sont mentionnées dans le projet

de service, puis reprisent dans le document individuel de prise en charge.

A un autre niveau, des chercheurs et des hommes politiques se sont intéressés à ce

sujet. Je vous propose donc d’aborder les différentes politiques d’éducation par la pratique

physique et sportive, puis de traiter l’utilisation du média sportif par les chercheurs.

8 Projet de service du CER de Cuinchy, septembre 2010

9 Règlement intérieur du CER de Cuinchy

Page 11: Le temps sport au CER de Cuinchy - enpjj.justice.fr

11

II. Les politiques d’éducation par la pratique physique et sportive

"La période qui s'ouvre est favorable à une réflexion sur l'adaptation des politiques

publiques en faveur du développement du sport pour tous." C'est avec ce constat que la Cour

des comptes ouvrait en janvier 2013 son rapport très attendu sur le sport, "Sport pour tous et

sport de haut niveau : pour une réorientation de l'action de l’État". Cependant, les hommes

politiques et les chercheurs se penchent sur la question de l’éducation par le sport depuis

plusieurs décennies. Il conviendra donc dans cette seconde partie de retracer quelles ont été

les différentes politiques mises en œuvre et d’évoquer les études réalisées par les chercheurs.

A )Les politiques d’éducation par la pratique physique et sportive

La notion d’éducation par le sport suscite de multiples interrogations et débats. Les

points de vue divergent. Aussi, je mettrais tout d’abord en exergue l’opposition

chercheurs/politiques, puis j’essaierais de dégager quelques propositions pour une véritable

éducation par le sport.

1) L’opposition politiques/chercheurs

Pour Marc Préel10

, la politique d'éducation par les activités physiques est née presque

par hasard, en 1960. « Le général de Gaulle, furieux du zéro pointé des Français aux J.O. de

Rome, lance une grande politique du sport en France. Rapidement, dès le début des années

70, ces grands investissements dans les infrastructures sportives, qui vont de pair avec la

construction des « grands ensembles » architecturaux, se voient adjoindre une mission

d’œuvre sociale : améliorer l’épanouissement et la santé des Français et pacifier les rapports

sociaux des quartiers populaires. »

Quelques années plus tard, en 1990, «sous les ministres de la ville Michel Delebarre

puis Bernard Tapie, des équipements sportifs de proximité et des animations sportives de

quartiers, animés par des policiers et des éducateurs, voient progressivement le jour. »11

Ainsi, les dispositifs d'éducation par le sport se multiplient. Charrier et Jourdan nous

rappellent que : « depuis 2003, un pôle ressources nationales « sport éducation insertion » du

ministère des sports est chargé de coordonner les actions « d'insertion par les Activités

10 Marc Préel, le sport réduit-il (vraiment) la violence, revue sport à vif

11 Gasparini, L'intégration par le sport, genèse politique d'une croyance collective, revue société

contemporaine, Mars 2008

Page 12: Le temps sport au CER de Cuinchy - enpjj.justice.fr

12

Physiques et Sportives » alors qu'un programme « parcours animation sports » à destination

des jeunes des banlieues est lancé en 2006 par le ministre de la jeunesse et des sports, Jean

François Lamour. »12

Ces différentes politiques, pour marquer l'opinion publique, s'appuient notamment sur

les grands champions français. Pour Gasparini : « les exemples de Zinedine Zidane, Abdelatif

Benazzi, Brahim Asloum, Nicolas Anelka, Thierry Henry, et d'autres nous montrent qu'à la

différence de la culture, de l'économie ou de la politique, le sport semble pouvoir fonctionner

comme un ascenseur social »13

L'éducation par le sport semble ne faire aucun doute pour l'opinion politique, comme

le souligne le rapporteur du Conseil de l'Europe : « Le sport est une activité humaine qui

repose sur des valeurs sociales éducatives et culturelles essentielles. Il est un facteur

d'insertion, de participation à la vie sociale, de tolérance, d'acceptation des différences et de

respect des règles. »14

Pourtant, face à ses orientations politiques, les critiques s’élèvent. En effet, malgré les

différentes actions, l'éducation par les activités physiques et sportives ne semble pas faire

l’unanimité. Ainsi, Marc Préel pointe les investissements faits après les émeutes des cités en

2005 : « on y mit ce qu’on pouvait, dont du sport. 20 millions d’euros de plus pour

l’investissement sportif dans les quartiers difficiles. Une mesure de l’ordre du symbolique qui

porte les crédits du Centre national de développement du sport (C.N.D.S), nouvellement créé,

à 236 millions en 2007 (dont 120 millions d’euros sur trois ans pour un Plan national de

développement du sport). Mais même symbolique, cette rallonge en disait long sur l'idéologie

que pouvait apporter le sport dans la lutte contre la délinquance dans les quartiers. Il ne

fallait pas douter, montrer le chemin, et répéter, encore et toujours, l’évidence : le sport

prévient la violence. »15

Gasparini, quant à lui, est encore plus explicite : « Les contributions les plus récentes

montrent que le sport ne contient pas de vertus éducatives intrinsèques (Gastaut, 2003,

12 Charrier, Jourdan, Pratiques sportives et jeunes en difficulté : 20 ans d’innovations et d’illusions… et des

acquis à capitaliser , in M. Falcoz, M. Koebel (dir.), Intégration par le sport : représentations et réalités, Paris,

L’Harmattan, 2005.

13 Gasparini, L'intégration par le sport, genèse politique d'une croyance collective, revue société

contemporaine, Mars 2008

14 Rapporteur du conseil de l'Europe en 2003

15 Marc Préel, le sport réduit-il (vraiment) la violence, revue sport à vif

Page 13: Le temps sport au CER de Cuinchy - enpjj.justice.fr

13

Falcoz et Koebel,2005, Poli et Besson, 2007) »16

. Il ajoute que : « le recours au sport pour

« intégrer » les jeunes de cité est une simple réponse à un projet politique. ». L'auteur remet

en question également l'utilisation médiatique des grands champions, souvent fer de lance des

politiques d'éducation par le sport : «La réussite de quelques athlètes issus des milieux

populaires et sélectionnés dans les équipes de France de football, de boxe ou d’athlétisme, si

elle contribue au mythe du « salut social » par le sport fait cependant écran à la réalité de

l'impasse dans laquelle se trouvent nombres de jeunes en difficulté d'insertion.» Dans ses

recherches avec Knobe, Gasparini déclare que contrairement aux objectifs annoncés par les

politiques : « La pratique sportive peut aussi bien constituer un facteur d'intégration qu'un

facteur d'exclusion »17

S.Roché18

, sociologue, directeur de recherche au CNRS, a également mené une étude

pour s’attaquer à l'hypothèse d'une éducation par le sport. Non seulement ce n’est pas le cas,

conclut-il, mais c’est souvent l’inverse qui est constaté : « la proportion de délinquants est

deux fois plus élevée chez les jeunes pratiquant une activité sportive. »

Ainsi, Préel nous rappelle l'existence d'une opposition entre personnalités politiques,

pour qui le sport semble représenter un réel levier éducatif et chercheurs. En effet : « l'étude

de Roché ne lui avait pas attiré les bons sentiments de Jean-François Lamour, alors ministre

des sports. »19

De même, Luc Collard, alors maître de conférences à l’université Jules-Verne

d’Amiens (Picardie), s'était également opposé au ministre des sports à l'époque . Luc Collard

a mené une étude pour le compte de l’Education nationale20

. Sa conclusion : « le sport intensif

à l’école augmenterait l’agressivité des élèves. » Il raconte que lorsqu’il a montré les résultats

à l’équipe de De Robien (alors ministre de l'éducation nationale), « ils étaient atterrés,

révoltés, et expliquaient que les résultats étaient faux».

Ces études ne font pas que déranger les ministres. Elles heurtent aussi notre sens

commun, où le sport est devenu une valeur qui figure en bonne place : « le sport est

éducatif ». La première réaction est de rejeter cette idée, comme si la pratique sportive

comportait naturellement un facteur de prévention de la violence. Mais il convient de

16 Gasparini, l'intégration par le sport, genèse politique d'une croyance collective, revue société contemporaine,

Mars 2008

17 Gasparine, Knobe, Le salut par le sport ? Effets et paradoxe d'une politique locale d'insertion » déviance et

société, vol 29, n° 3, 2005

18 S.Roché, « plus de sport, plus de délinquance chez les jeunes », Recherches et Prévisions, n°82, 2005

19 Marc Préel, le sport réduit-il (vraiment) la violence, revue sport à vif

20 L.Collard, Sport et agressivité, édition Désiris , 2004

Page 14: Le temps sport au CER de Cuinchy - enpjj.justice.fr

14

s’interroger sur notre propre pensée. Ces études ont le mérite de donner quelques éléments de

faits sur le sport de masse, mais pose aussi légitimement la question d’une politique du sport

vieille de plus de trente ans. Comme le souligne Duret : « Les discours que l'on tenait il y a 20

ans sur l'intégration par le sport sont caducs non seulement parce que la réalité sociale est

modifiée mais encore parce que les manières de l'appréhender se sont elles mêmes

transformées. »21

Alors qu’en est-il du rôle du sport comme moyen de prévention de la violence ?

Quelles propositions peut-on faire pour une véritable éducation par le sport ?

2) Les propositions pour une véritable éducation par le sport

En partant du postulat que l’activité physique possède un réel potentiel éducatif, quels

pré-requis indispensables doit-on respecter pour faire du sport un véritable vecteur

d'éducation et de citoyenneté ? Je vais tenter de répondre à cette question en m’appuyant sur

différents auteurs ou chercheurs.

Commençons par l’avis de J.P.Acensi directeur de l’Agence pour l’éducation par le

sport, qui travaille depuis dix ans à l’aide aux projets sportifs dans les quartiers et veille à la

mise en place de bonnes pratiques dans la politique sportive. Pour lui, le progrès passe aussi

par une meilleure formation des éducateurs. « Le sport n’a pas de valeur éducative en tant

que tel », explique t-il. « Si les éducateurs sont mauvais, on aura de mauvais résultats. Et

c’est vrai que l’encadrement est souvent un peu trop léger ».

Un premier pré-requis pourrait donc être une formation spécifique en ce domaine des

éducateurs.

Pour Gasparini, le sport peut avoir un intérêt dans le travail social. Toutefois, il précise

que : « l'activité sportive doit s'inscrire dans le cadre d'un projet personnalisé, construit

simultanément par le(s) jeune(s) concerné(s) et par l'éducateur chargé du suivi »22

. Gasparini

et Knobe précisent cependant que l'utilisation des activités physiques et sportives n'est pas un

« produit miracle ». Selon eux : « L'effort développé dans le sport n’entraîne pas

mécaniquement un réinvestissement de cet effort dans d'autres situations, tout comme le

21 Duret, Sociologie du sport, edition PUF, 2006, p9

22 Gasparini, l'intégration par le sport, genèse politique d'une croyance collective, revue société contemporaine,

Mars 2008

Page 15: Le temps sport au CER de Cuinchy - enpjj.justice.fr

15

respect de la règle sportive n’entraîne pas forcement le respect de la règle sociale. »23

La notion de transfert, indispensable au travail éducatif, reste cependant accessible

pour Falcoz et Koebel, mais nécessite certaines conditions : « Le transfert de compétences ne

peut fonctionner que si les situations sont comparables et si le transfert s'accompagne d'une

réflexivité, c'est à dire d'une conscience de réutiliser la règle ailleurs. »24

Un second pré-requis avancé est donc l’inscription de l’activité dans un projet

personnalisé. Le sport pourrait, dans le cadre d’un suivi éducatif exercé par la Protection

Judiciaire de la Jeunesse, faire partie intégrante du Document Individuel de Prise en Charge.

Pour Roché, il faut simplement réfléchir aux conséquences des différents sports

pratiqués, mettre l’accent sur l’éducatif avec des jeux plus collaboratifs. « Cela aurait le

mérite de mettre moins à l’écart toute une population qui ne se sent pas concernée par cette

logique compétitive du sport. »25

L.Collard fait une proposition similaire : « Je ne suis pas pour qu’on se dise : le sport

rend agressif donc on va l’interdire dans les quartiers. Le vrai problème, c’est qu’on applique

le mauvais médicament. On va défendre les sports de combat ou le foot qui rendent agressifs,

alors qu’il faudrait plutôt privilégier les activités de pleine nature, type escalade ou

plongée.»26

Miser sur la technique plutôt que sur la compétition, travailler sur le long terme,

développer des sports moins agressifs et s’en donner les moyens sont des phrases souvent

prononcées par les chercheurs comme par les acteurs de terrain…

Le troisième pré-requis rejoint le précédent puisqu’il s’agit d’effectuer un choix

pertinent quant au sport « utilisé ». Nous pouvons ici faire allusion à la nécessité

d’individualiser la prise en charge.

Ainsi, l'utilisation d'une éducation par le sport fait débat. Véritable support éducatif

pour les uns, il est clairement remis en cause par les autres. Il est donc nécessaire d'effectuer

une recherche sur les études mettant « en jeu » le média sportif notamment dans le rapport à la

23 Gasparine, Knobe, Le salut par le sport ? Effets et paradoxe d'une politique locale d'insertion » déviance et

société, vol 29, n° 3, 2005

24 Falcoz et Koebel, Intégration par le sport : représentations et réalités, édition l'Harmattan, 2005

25 S.Roché, « plus de sport, plus de délinquance chez les jeunes », Recherches et Prévisions, n°82, 2005

26 L.Collard, Sport et agressivité, édition Désiris , 2004

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violence.

B ) Les études ayant utilisé le média sportif

Deux études portant sur l’utilisation du sport comme média éducatif vont m’éclairer

sur les activités qui peuvent être proposées aux mineurs dont nous avons la charge et celles

qui doivent être évitées car génératrice de violences (travaux de R. Pfister et C. Sabatier).

Elles m’informent également sur les règles transmises et véhiculées (travaux de Méard et

Bertone)

1 ) Les travaux de R.Pfister et C.Sabatier27

Dans un article parue dans la revue EPS, C.Sabatier et R.Pfister avaient mené une

étude sur les phénomènes d’agressivité dans l'utilisation du média sport collectif, et

notamment, le handball. Ils en avaient fait ressortir la notion « d’interaction adversive ».

Selon eux, « une interaction adversive désigne une action par laquelle on s'oppose, une

action réalisée contre autrui, au détriment d'autrui, éventuellement d'un objet ou d'une

circonstance, voire de soi-même ». Ainsi, les institutions en fixant des règles précises,

codifiées, gèrent ce rapport des individus entre eux et celui des individus avec le milieu.

Les interactions adversives sont donc définies de façon spécifique dans le domaine du

sport par référence au code de l'activité considérée. Il convient de différencier les interactions

codifiées (conformes au code, légales) et les interactions adversives non codifiées (IANC) qui

débordent le cadre du règlement, illégales, non conformes au code.

Les IANC se divisent elles-mêmes en deux catégories :

- « les IANC opératoires, relevant d'une agressivité instrumentale, restent liées à la

réalisation de la tâche. Elles ont exclusivement pour cible les adversaires et sont de nature

physiques (c'est-à-dire usage du corps, des membres inférieurs ou supérieurs avec contact

de la cible). Le dommage causé à l'adversaire n'est pas le but recherché, il est la

conséquence d'un but extérieur : entrer en possession du ballon, marquer, défendre son

27 C SABATIER et R PFISTER, Transgression des règles par l'enfant dans la pratique du hand ball en milieu

scolaire, revue STAPS n°36, Presse universitaire de grenoble

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camp... »

- « les IANC non opératoires, relevant d'une agressivité émotionnelle, réactive, ne

permettent pas à elles seules la réalisation de la tâche motrice. Le but est le tort causé à

autrui, ce qui diffère fondamentalement de l'agressivité instrumentale par la signification

psychologique. Elles peuvent être de nature diverse : verbale et/ou gestuelle (c'est-à-dire

avec des mouvements, des gestes du corps, des mains, des bras, à distance de la cible),

physique (c'est-à-dire avec mise en jeu du corps, des membres inférieurs ou supérieurs

allant au contact de la cible) et s'adresser à des cibles variées (partenaire, adversaire,

arbitre, public, soi-même, objet). »

Afin de mieux comprendre, voici un tableau récapitulatif :

Tableau 1 : Caractéristiques des IANC opératoires et non opératoires.

C.Sabatier et R.Pfister vont mettre en évidence les résultats suivants :

« Les IANC opératoires et non opératoires représentent respectivement 33 % et 67 %

de l'ensemble des observations. Les IANC opératoires recouvrent seulement 1/3 des

interactions recensées. Il est important de souligner la différence qui existe entre ce résultat et

ceux généralement obtenus dans la pratique adulte où « l'opératoire » occupe une part

importante, soit 95 % en handball (Pfister et al, 1991) et 85 % en football (Pfister, 1987).

Chez les enfants étudiés, la place que prend le «non opératoire » est prépondérante alors qu'il

représente une faible part dans la pratique adulte du handball et du football. »

Les IANC opératoires, semblent relever d’une pensée stratégique, qui reste fixée sur le

jeu. Elle parait ainsi plus accessible aux adultes. Le « non opératoire », quant à lui relève

IANC Fonction Cible Nature Exemples

Interaction

Adversive non

codifiée

Opératoire

Instrumentale

orientée vers

la réalisation

de la

tâche motrice

Adversaire Physique Préhension

Rétention

Percussion

Illégale non

conforme au

code.

Non opératoire

Réactive

Hostile, ne

permettant pas

d'opérer

directement la

tâche motrice

Adversaire

Arbitre

Partenaire

Soi-même

Objet Public

Autres

Verbale

Gestuelle

Physique

Altercation,

dispute, insulte,

menace.

Bousculer,

frapper...

en dehors de

l'action.

Page 18: Le temps sport au CER de Cuinchy - enpjj.justice.fr

18

davantage de l’émotion vécue pendant le jeu. « « L'agressivité émotionnelle, réactive » est

prépondérante dans le premier, alors que « l'agressivité instrumentale » est pour une large

part caractéristique du second. Ce processus évolutif représenté par le glissement d'une

agressivité émotionnelle vers une agressivité instrumentale semble sous l'influence des

facteurs « âge » et « expérience ».

En conclusion, C.Sabatier et R.Pfister mettent en évidence la présence de violences

volontaires portées sur l'autre lors de la mise en place d'activités sportives collectives,

notamment chez les jeunes. Mon objectif étant ici de me questionner sur l'utilisation des

activités sportives comme moyen de canaliser les tensions entre les jeunes, il convient de

m’interroger sur les éléments à mettre en œuvre pour éviter les actes agressifs notamment lors

d'activités collectives, faisant partie intégrante du projet du C.E.R. au travers l'apprentissage

de la socialisation des mineurs. En ce sens, la mise en place de règles structurantes et

sécurisantes me semble essentielle. Pour cela, je me suis rapproché des travaux sur les

rapports aux différentes règles, notamment ceux menés par Méard et Bertone (1996).

2) Le rapport à la règle selon Méard et Bertone

Méard et Bertone dans leur étude sur l’intégration des règles en EPS

28 définissent cinq

types de règles.

« les règles institutionnelles : elles sont écrites et dépassent le strict cadre de la

« leçon ». Elles sont de l’ordre de la loi. »

Exemples d’attitudes : Écoute l’éducateur, commencer la séance à l’heure, être en tenue de

sport...

« les règles groupales : elles sont des conventions, des arrangements (à la différence

des règles précédentes) ; elles sont spécifiques à chaque groupe, changeantes et la

plupart du temps implicites. Mais elles sont toujours sous-tendues par de grands

principes (égalité des droits, intégrité des personnes). »

28 A. Méard et S.Bertone, Autonomie de l’élève et intégration des règles en éducation physique, Paris, PUF,

1998

Page 19: Le temps sport au CER de Cuinchy - enpjj.justice.fr

19

Exemples d’attitudes : chacun range le matériel, les équipes doivent être équilibrées…

- « les règles des jeux sportifs : elles sont les conditions du jeu et comportent l’émotion

spécifique de l’activité. Ainsi, pour jouer, il faut que chacun accepte la loi. Ces règles

composent la logique interne de chaque activité. En même temps contraintes et sources de

création, elles induisent des adaptations, des solutions inédites de la part des joueurs. Comme

elles sont complexes, elles imposent une interprétation et des adaptations en fonction du

niveau, de l’âge du pratiquant et des conditions de l’environnement. »

Exemples d’attitudes : accepter les décisions de l’arbitre, s’arrêter quand on commet une

faute…

- « Les règles de sécurité : elles correspondent à des obligations visant le maintien de

l’intégrité des personnes et renvoient à une responsabilité individuelle. Elles sont non

négociables, imposées par l’intervenant aux jeunes ayant peu conscience du danger.

Cependant, elles peuvent être progressivement énoncées par le groupe. »

Exemples d’attitudes : arrêter mon étranglement quand mon camarade tape le sol, enlever les

bijoux, ne pas forcer sur les articulations…

- « Les règles d’apprentissage : elles correspondent aux opérations à découvrir et à faire

fonctionner. Elles peuvent être dictées par l’intervenant (tâche définie), induites par le modèle

à imiter, masquées lors de situations-problème et sont intimement liées aux principes et règles

d’action. »

Exemples d’attitudes : s’interroger face à une situation problème, solliciter l’éducateur,

solliciter ses partenaires…

Les fonctions des règles :

Ces règles ont plusieurs fonctions. En effet, Meard et Bertone distinguent :

- les règles à fonction opératoire (les règles d’apprentissage, du jeu et de sécurité) « qui

engagent prioritairement la mise en œuvre de résolutions cognitives et de pouvoirs moteurs. »

Page 20: Le temps sport au CER de Cuinchy - enpjj.justice.fr

20

- les règles à fonction sociale (les règles institutionnelles, groupales, du jeu et de sécurité)

« qui relèvent de processus socio - affectifs, relationnels, voire moraux. »

Il précise que les règles du jeu et les règles de sécurité ont une double fonction :

- « Les règles du jeu ont une fonction sociale car elles déterminent les pouvoirs respectifs des

joueurs. Elles véhiculent l’émotion de l’activité et peuvent être modifiées dans un but

didactique. Parce qu’elles sont à l’origine des règles d’apprentissage et qu’elles sont

manipulées par les jeunes (la motricité est directement issues de ce qui est « permis »), on

peut penser qu’elles ont aussi une fonction opératoire ».

- « Les règles de sécurité ont une fonction qui dépend du risque perçu par le jeune : soit le

risque (objectif ou imaginé) est perçu. Dans ce cas, il provoque une inhibition et, dès lors, la

règle introduite a plutôt une fonction opératoire (pour dépasser cette inhibition). Soit le

risque n’est pas perçu par le jeune, parce qu’il est éloigné (lésions lombaires) ou inconnu

(claquage musculaire) et alors, la règle de sécurité revient à une règle institutionnelle c’est à

dire une prescription scolaire définie par l’enseignant et indiscutable. »

Les règles de sécurité ont donc une fonction opératoire car elles définissent les

pouvoirs moteurs du jeune et une fonction sociale car, lorsque le risque n’est pas perçu par le

jeune, elles relèvent de l’intervenant et devient une loi.

La présence des règles est donc un premier élément, encore faut il qu’elle soit

intériorisée par les jeunes. Les deux auteurs se sont penchés également sur la question.

L’intériorisation des règles

MEARD et BERTONE repèrent cinq niveaux d’attitudes, de conduites typiques dans le

processus d’intériorisation des règles :

- Tout d’abord, l’anomie (déviance involontaire) : « certains jeunes difficiles ignorent ou

rejettent l’appareillage réglementaire institutionnel, social. Les jeunes dégradent le matériel

de l’établissement, répondent de façon insolente à l’intervenant, briment les camarades plus

jeunes, refusent d’apprendre, de se faire évaluer. »

- Ensuite, l’autonomie négative (déviance volontaire). « Une forme d’attitude rassemble les

Page 21: Le temps sport au CER de Cuinchy - enpjj.justice.fr

21

conduites volontairement et ouvertement déviantes. La bande de délinquants substitue, aux

normes de la culture ambiante qui imprègne l’école, des règles relevant d’une norme non

reconnue socialement mais souvent extrêmement précise, rigoureuse et qui implique des

comportements de soumission. Les sociologues de l’école de Chicago ont montré que ces

conduites étaient souvent renforcées par la rigueur des systèmes « bien – pensants » qui

étiquettent ces « anormaux » et accentuent de ce fait leur identité de marginaux. On peut

penser que le système scolaire fait parfois connaître tant d’échecs répétés à l’enfant

anomique ou simplement non performant que celui-ci se construit une cohérence basée sur le

rejet global de l’école et la constitution d’une contre – culture. »

- Puis, l’hétéronomie. « C’est une catégorie de comportements qui se manifestent par la

docilité, la soumission à la règle scolaire, avec contrôle extérieur. Le système de règles est

imposé de l’extérieur et son application vérifiée, ce qui rend le sujet dépendant de l’adulte qui

énonce et fait respecter ce système de règles. Les élèves « hétéronomes » suivent les

prescriptions et entrent en activité d’apprentissage uniquement sous le contrôle du professeur.

Dés que celui-ci relâche sa supervision, l’élève devient passif ou dévie. L’élève ne comprend

pas la fonction, le sens de la règle et retient son caractère de contrainte. Cette attitude

renvoie à la notion « d’aliénation motivationnelle » qui se produit lorsque l’action d’un

individu a lieu sous une pression sociale. Dans ce cas, le sujet modifie les mobiles habituels

de son activité, il « s’immunise » des sources habituelles de la motivation en même temps

qu’il se déresponsabilise. »

- L’autorégulation. : « Dans ce cas, l’appareillage réglementaire est reconnu. L’élève

attribue un sens aux règles parce qu’il les relie à un principe, un contrat, une loi. C’est une

sorte de soumission volontaire, basée sur la reconnaissance d’une nécessité de la

réglementation. Cet accès à la fonction de la règle permet à l’enseignant de faire l’économie

du contrôle et même de la formulation de la règle. Les élèves suivent les prescriptions et

entrent en activité d’apprentissage sans le contrôle du professeur. »

- Enfin l’autonomie, « dernière étape observable chez les élèves qui se manifeste par une

capacité à négocier, à amender, à adapter une règle. Les élèves suivent les prescriptions,

entrent en activité d’apprentissage sans le contrôle du professeur, engagent des négociations

explicites et proposent de nouvelles règles, justement en rapport avec leur fonction dans la

réalisation d’une tâche. »

Page 22: Le temps sport au CER de Cuinchy - enpjj.justice.fr

22

Il est évident que je ne peux pas imaginer que les jeunes comprennent directement

l’intérêt de la mise en place d’une règle, et lui donne un sens. Pourtant, il semble que

l’intériorisation passe par la compréhension. Il s’agit du principe de la ruse pédagogique. Il

s’agit de créer des situations dans lesquelles le désir va être présent, mais où il va y avoir un

obstacle et cet obstacle permettra à l’éducateur d’introduire un savoir nécessaire, et

notamment, la mise en place des règles.

Je viens ici de clore ma partie théorique. Partant d’une situation de conflit entre deux

mineurs qui a trouvé son apogée durant une activité sportive, en l’occurrence un match de

football, je me suis intéressé à la définition même du sport dans mon institution et plus

particulièrement à la manière dont il est utilisé au Centre Educatif Renforcé de Cuinchy.

L'éducation par le sport utilisée comme une sorte de potion magique que l'on aime à

distribuer ici et là a connu ses heures de gloire et a été portée par les politiques dès les années

60. Les chercheurs se sont intéressés au sujet et ont remis en question cette idée. Les

éducateurs sportifs, les professeurs d'EPS, les encadrants de manière générale sont les

véritables acteurs de l'éducation par le sport mais celle-ci doit s'appréhender dans un cadre

défini, avec des objectifs clairs, pour avoir un impact réel. L'objectif doit rester celui de "se

réaliser" à travers le sport, d'acquérir de nouvelles compétences et de renforcer ses aptitudes

sociales.

Des règles doivent être posées et chaque règle répond à une exigence et à une finalité.

Leur intériorisation dépendra de l’attitude et de la conduite du mineur.

Le Centre Educatif Renforcé de Cuinchy souhaite utiliser le média sportif pour

canaliser les comportements violents des mineurs pris en charge. Il convient alors de réfléchir

aux activités à mettre en place mais aussi avec quelles règles. L’important, étant que ces

règles soient comprises et assimilées, d’où un regard particulier sur l’intériorisation de celles-

ci.

Mon projet est de proposer un temps « activité physique et sportive » permettant

réellement un travail sur les comportements violents des mineurs pris en charge au C.E.R. J’ai

donc proposé à l’équipe éducative de nous appuyer plus particulièrement sur un sport tel que

le judo.

Page 23: Le temps sport au CER de Cuinchy - enpjj.justice.fr

23

Mon étude part donc de la question suivante : En quoi le judo, conçu comme support de

coopération entre les mineurs, peut-il permettre de limiter les conduites agressives ?

Je chercherai à valider les trois hypothèses suivantes :

- Le comportement des mineurs varient en fonction de l'activité proposée

- La coopération permet de réguler les facteurs d'opposition

- La coopération présente lors du temps sport peut être transférable dans d’autres

espaces sociaux

Page 24: Le temps sport au CER de Cuinchy - enpjj.justice.fr

24

DEUXIEME PARTIE : LE JUDO A L’EPREUVE DE

L’EXPERIMENTATION

Cette deuxième partie fait état de l’expérimentation que j’ai mené au CER de Cuinchy.

A la recherche d’un sport qui permette le travail sur les comportements violents, j’ai souhaité

« mettre à l’épreuve » le judo. Ce sport véhicule des valeurs fondamentales qui s'imbriquent

les unes dans les autres pour édifier une formation morale. En Judo, les progrès individuels

passent par l’entraide et par l’union de notre force et de celle des autres. La présence du

partenaire, du groupe est nécessaire et bénéfique à la progression de chacun.

Je vous présenterai donc dans un premier temps le projet et les objectifs recherchés,

puis sa mise en œuvre et enfin l’évaluation de ma démarche.

I. Le projet et ses objectifs

J’ai réalisé cette étude avec un groupe de six jeunes placés au CER de Cuinchy. Les

mineurs accueillis, âgés de 13 à 18 ans, connaissent des difficultés d'ordre familial, judiciaire,

d'insertion ou de santé. Parfois, ces difficultés se cumulent. Certains mineurs ont été jugés ou

mis en examen pour des faits de violence avec arme et /ou en réunion.

Mon projet, comme je l’expliquais en première partie, fait suite à une altercation entre

deux jeunes lors de la mise en place d'un match de football. L'objectif de celui-ci était de

canaliser les tensions du groupe, apparues depuis le début de la journée. Force est de constater

que cet objectif n’a pas été atteint puisqu’une bagarre entre les deux adolescents a éclaté.

Mon projet repose sur la construction d'un cycle de judo. Ce sport a été choisi car il

s'agit d'un sport de préhension, qui est, avant d’être un sport de combat, un art martial, qui

permet d’accéder à différentes notions. Le code moral que porte le judo est chargé de sens :

politesse ( le respect d’autrui), courage ( faire ce qui est juste), amitié ( le plus pur des

sentiments humains), sincérité ( s’exprimer sans déguiser sa pensée), contrôle de soi ( savoir

se taire lorsque monte la colère), modestie ( parler de soi même sans orgueil), honneur ( être

fidèle à la parole donnée), et enfin respect ( sans respect, aucune confiance ne peut naître).

Au-delà de l’aspect technique, ce support permet également d’aborder une notion essentielle

dans la prise en charge des mineurs : l’empathie.

Page 25: Le temps sport au CER de Cuinchy - enpjj.justice.fr

25

Ce projet sera composé d’un objectif général, que je décomposerai en différents

objectifs intermédiaires.

Objectif général :

Passer d’un comportement où les mineurs s'opposent, à un comportement où ils sont

capables de travailler avec l'autre, par l’intermédiaire d’une pratique sportive codifiée : le judo

Objectifs intermédiaires :

1) Personnel

- Permettre au jeune de se dépenser,

- Utiliser ses compétences physiques et psychologiques en proposant une activité

physique et sportive faisant appel à une maîtrise technique et stratégique. L’utilisation de la

force n’est pas suffisante, je dois observer mon adversaire pour mettre en place des

techniques.

- L’initier à des activités encore parfois inconnues.

2) Social

- Apprendre à combattre avec l’autre tout en respectant sa personne et son intégrité

physique : « Je ne me bats pas, mais je combats. »

- Prendre des décisions aussi bien pour le gain du combat que pour éviter la blessure

du partenaire. Par exemple, je lâche la clé de bras si mon partenaire tape sur ma jambe.

- Partager des expériences, des avis, en échangeant face à une situation qui pose

problème.

- Apprendre des normes et codes sociaux.

3) Santé

- Agir en sécurité pour soi et pour les autres en respectant des règles : règles de jeu

(pas de clé au poignet), de sécurité (enlever les bijoux) ou sociales (on ne peut refuser

l’invitation d’un partenaire).

- Prendre conscience de ses limites. Pour que mon partenaire me respecte, je dois

accepter qu’il me soit supérieur. Ainsi, si je suis étranglé, je ne résiste pas inutilement.

- Prendre conscience de la nécessité d’avoir une hygiène alimentaire et corporelle.

Le projet étant défini, et les objectifs fixés, il convient de détailler sa mise en œuvre.

Page 26: Le temps sport au CER de Cuinchy - enpjj.justice.fr

26

II. La mise en œuvre

La mise en œuvre du projet requière un travail préparatoire. Aussi, j’expliciterai dans

un premier temps les moyens nécessaires, puis dans un second temps, je détaillerai le

déroulement de l’activité.

A. Les moyens

Trois types de moyens ont été repérés : des moyens matériels, humains et financiers

afin que l’activité puisse commencer et être pérenne.

1) Les moyens matériels

Le CER dispose d’une salle qui a été adaptée à la pratique sportive. Elle dispose d’un

espace recouvert par des tatamis.

Pour respecter les vêtements des jeunes, l’achat de Kimonos sera nécessaire. Cela

permettra également d’amener les jeunes à entrer dans une pratique codifiée: « je mets mon

kimono, et à partir de ce moment-là, je dois respecter certaines règles ». Celles-ci sont

expliquées par l’organisateur de la séance, en l’occurrence par l’éducateur.

2) Les moyens humains

L’activité sera menée par un éducateur diplômé, accompagné par un collègue, diplômé

ou non.

Trois éducateurs du CER sont diplômés en STAPS. Leur présence est indispensable

pour mener les séances en toute légalité.

Le projet, proposé en réunion de service, a fait l’objet de réactions positives. Certains

collègues se sont portés volontaire pour m’accompagner dans cette démarche.

3) Les moyens financiers

L’achat de kimonos sera nécessaire. Ce produit très résistant pourra être réutilisé à de

Page 27: Le temps sport au CER de Cuinchy - enpjj.justice.fr

27

nombreuses reprises sur les prochaines sessions. Le premier prix pour un kimono est de

13€95.

Il faudra 6 kimonos pour les jeunes et 2 pour les éducateurs, soit un total de 111€60.

B. Le Déroulement

Le projet a débuté trois semaines après le début de la session, soit en octobre 2012. En

mettant en place les séances dès le départ, l'objectif est de placer cette activité comme une

activité obligatoire au CER, tout comme le temps classe ou le chantier. Notre action repose

sur des méthodes d’animations pédagogiques, et prévoit un calendrier de progression.

1 )Les méthodes d’animations pédagogiques

Il me paraît intéressant sur ce point de faire appel à quelques méthodes observées lors

de mon stage en hébergement durant ma première année de formation. Il s’agira de les

compléter par différentes lectures, ainsi que par les apports théoriques dispensés par le site

central.

La première méthode d’animation pédagogique sera d’utiliser les invariants

pédagogiques de Célestin Freinet29

. Puis, je mettrais en place des situations problèmes et

solliciterai une remédiation cognitive chez les jeunes.

a) L’utilisation des invariants pédagogiques :

Ce terme utilisé par Célestin Freinet renvoie à un ensemble de pistes d’action qui sont

indispensables à toute œuvre pédagogique. Les invariants ne décrivent pas de méthodologie.

Ils s’attachent plutôt aux démarches, processus, stratégies, par lesquels ces pratiques sont

élaborées, aménagées, transformées. Ainsi, ce qui est invariant d’un pédagogue à l’autre, ce

n’est pas ce qu’il fait, mais la méthodologie employée pour parvenir aux résultats, c’est à dire

la façon dont il construit sa manière d’agir. Dans notre situation, différents invariants seront

29

Célestin Freinet ( 1896-1966), instituteur, est le fondateur d’une méthode pédagogique originale qui a

influencé l’enseignement primaire jusqu’à nos jours. La pédagogie Freinet, reposant sur l’expression libre

des enfants, le travail et la coopération, a été mise en œuvre dans l’école que le pédagogue a fondé à Vence en

1935 et qui est aujourd’hui encore fidèle à ses méthodes

Page 28: Le temps sport au CER de Cuinchy - enpjj.justice.fr

28

présents :

- La parole : l’éducateur donne du sens par le dialogue. Il intervient pour rappeler les

règles, pour encourager, pour réguler.

- L’animation au sein d’un collectif : il y a pédagogie quand on s’attache à inscrire le

développement de chaque sujet dans un espace social. Ainsi, les objectifs individuels ne

peuvent s’atteindre que par la participation de l’ensemble du groupe. Pour atteindre les

objectifs, je dois considérer mon adversaire davantage comme un partenaire que comme un

opposant.

- La posture de l’éducateur : les séances mises en place, les objectifs visés ne font

pas appel à de grandes théories. L’éducateur « fait avec » ; il fait avec une situation, des

jeunes, un environnement... Ici, la situation s’imagine au départ avec le comportement

inadapté d’un mineur. C’est ce comportement qui vient déterminer l’intervention. De

fait, l’attitude de l’adolescent, qui utilise des techniques dangereuses, dans un cadre non

réglementé, devient alors un véritable support pédagogique pour l’éducateur.

b) La mise en place de situations problèmes

La situation problème30

est une situation que l’éducateur imagine dans le but de créer

un espace de réflexion et d’analyse autour d’une question à résoudre. Chaque séance de judo

devra être pensée pour poser un problème au groupe : comment puis-je sortir d’une

immobilisation ? Comment faire chuter mon partenaire sans tomber avec lui ?...

Mais, se pose alors la question de l’appréciation de la difficulté proposée. Pour

certains jeunes, la situation sera comprise et cernée rapidement, alors que pour d’autres, elle

sera vécue comme une difficulté.

Cette régulation doit être favorisée par l’accompagnement de l’éducateur, mais aussi

des autres jeunes, en essayant, en faisant des erreurs, en comparant, en acceptant d’être

« cobaye » . L’objectif est de créer une réelle dynamique de groupe.

c) L’utilisation d’une remédiation

La remédiation offre une réelle occasion de différencier les apprentissages. L’objectif

30 Cf cours de F..Audebrand : « les situations problèmes », ENPJJ, mars 2012

Page 29: Le temps sport au CER de Cuinchy - enpjj.justice.fr

29

pour les jeunes, est de pratiquer une activité de combat, tout en considérant l’autre.

Quand l’adolescent effectue un étranglement sur son camarade, il est centré sur lui-

même, et n’a que peu d’intérêt envers son camarade. Mais, peut-être est-ce une situation qu’il

a pu vivre ou subir lui-même auparavant ? Il convient alors de proposer une approche

différente.

D’ailleurs, pour Bloom31

: « la remédiation, pour être efficace, doit proposer des

activités d’apprentissage différentes de celles qui ont conduit à l’échec ». Ainsi, l’utilisation

du judo, basée sur un partenariat avec l’adversaire vient bouleverser la logique de départ des

jeunes confiés au CER. Il s’agit de passer d’une attitude de duel, où le seul but est de

soumettre l’autre, à une logique de coopération, où mon action dépend de la réaction de

l’adversaire.

2) Le calendrier de progression

La progression sera décomposée en deux périodes. Une première période sur du travail

au sol, et une deuxième sur les liaisons debout-sol. Chaque période sera composée de deux

séquences, elles-mêmes composées de deux séances. Chaque séance aura comme « fil rouge »

une situation de référence, représentant la situation problème.

Durant les séances, des parties techniques permettront aux jeunes d’avoir des pistes de

réflexions face à la situation de référence.

Période 1 2 séquences 2 séances

31 B. Bloom, Caractéristiques individuelles et apprentissages scolaires, Labor, 1979

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30

Période 2 2 séquences 2 séances

Période 1 : Découverte du travail au sol

Séquence 1 : Mettre les jeunes dans une situation

d’opposition afin d’évaluer leurs capacités à s’opposer

individuellement à différents adversaires.

Séquence 2 : Permettre aux élèves de découvrir et

d’explorer les techniques efficaces au regard d’un

problème posé

Séance 1 :

Situation de référence :

Déséquilibrer mon adversaire

en étant accroupi

Objectif :

Etre capable de penser à une

stratégie d’action en prenant en

compte les déplacements de

mon adversaire (je pousse, je

tire…)

Apports techniques :

Tirer, repousser, pousser,

bloquer

Séance 2 :

Situation de référence :

Empêcher mon adversaire de

se retourner à partir de la

position sur le dos.

Objectif :

Etre capable d’utiliser mon

poids de corps pour

immobiliser l’adversaire, tout

en s’adaptant à ses actions

Apports techniques :

Hon gesa gatame (contrôle

fondamental par le travers),

Yoko shio gatame (contrôle

latéral)jambes/épaules)

Séance 1 :

Situation de référence :

Deux jeunes face à face, un

genou au sol. Saisie

obligatoire avant le début

du combat. Combat de

1mn30.

Objectif :

Amener son partenaire

d’une station (genou) à une

autre (sol), en utilisant des

techniques de déséquilibre

(pousser, tirer, retourner…)

Apports techniques :

Crochet de jambe, Sankaku

jime (technique du

triangle)

Séance 2 :

Situation de référence :

Un des jeunes en situation

d’immobilisation. Il a 30

secondes pour sortir.

Objectif :

prendre conscience des

possibilités laissées par

l’adversaire pour retourner

une situation défavorable en

situation favorable.

Apports techniques :

Ude gatame (contrôle du

bras en extension), Kata juji

jime (etranglement en croix,

mains inversées)

Page 31: Le temps sport au CER de Cuinchy - enpjj.justice.fr

31

Période 2 : Découverte des liaisons debout /sol

Séquence 1 : Amener mon adversaire au sol à partir de

la station debout

Séquence 2 : Enchainer techniques debout et

techniques au sol

Séance 1 :

Situation de référence :

Je saisis mon adversaire

qui avance sur moi.

Comment dans ces

conditions puis-je l’amener

au sol ?

Objectif :

Trouver des principes

d’actions efficaces pour

déséquilibrer mon

adversaire lorsqu’il avance

vers moi.

Apports techniques :

Ippon seoi nage (technique

d’épaule), O gochi

(technique de hanche)

Séance 2 :

Situation de référence :

Je saisis mon adversaire qui

cette fois ci recule.

Comment, dans ces

conditions puis-je l’amener

au sol ?

Objectif :

Trouver des principes

d’actions efficaces pour

déséquilibrer mon adversaire

lorsqu’il recule.

Apports techniques :

O soto gari (grand fauchage

extérieur), Ko uchi gari (petit

fauchage intérieur)

Séance 1 :

Situation de référence :

Un jeune face à deux

adversaires. Le premier

vient combattre debout. Dès

la première chute, le

deuxième adversaire

enchaine sur un combat au

sol.

Objectif :

Etre capable de s’adapter à

un changement technique

(passage debout/sol) mais

aussi à un changement de

partenaire et donc de

stratégie.

Apports techniques :

Ippon seoi nage (genoux au

sol), Tani otoshi (barrage de

la jambe au sol)

Séance 2 :

Situation de référence :

Enchaînement de combat :

chaque jeune passe à tour

de rôle devant le même

adversaire. La station de

départ du combat est à

l’initiative de l’adversaire.

Si au bout de 30 secondes

aucun point n’est marqué,

changement de station

obligatoire (si debout passe

au sol, si au sol passe

debout). Le changement de

partenaire s’effectue dès le

premier point marqué ou

après 1 minute.

Objectifs :

Etre capable d’enchainer

combat debout et combat

au sol, avec le même

partenaire ou avec un

partenaire différent.

Apports techniques :

Reprise de l’ensemble des

éléments du cycle.

Page 32: Le temps sport au CER de Cuinchy - enpjj.justice.fr

32

III. Évaluation

L'évaluation de cette étude sera menée en deux temps. Un premier temps qui donnera

lieu à une comparaison suite à l'observation du cycle Judo et de la séance de Football au

travers l'exploitation de la grille d'observation suivante. Je répondrai en toute objectivité à

chacune des questions figurant dans la deuxième colonne.

Pourquoi utiliser une grille ?

La grille d'observation permet de se détacher du déroulement de l'activité et de prendre

un regard neutre et extérieur nécessaire au travail d'analyse. De plus, elle prend en compte, à

la fois, les interrogations de l’éducateur et les réactions des acteurs.

Concernant les items, ils sont volontairement larges afin de ne pas avoir un travail d'analyse

trop figé, mais permettent tout de même de cadrer l’observation afin de pouvoir en faire une

analyse par la suite.

Un deuxième temps donnera lieu à la mise en place d'un entretien avec chacun des

jeunes, s'appuyant sur la grille d'entretien ci-dessous. Cette grille sera ensuite réutilisée afin de

mettre en avant les thèmes majeurs abordés par les mineurs interrogés. Ces thèmes nous

Activité football Activité judo

Avant l'activité Comment la proposition est-elle

faite ?

Comment réagissent les jeunes ?

Quels arguments sont avancés ?

Pendant l'activité Quelle situation est proposée par

les éducateurs ?

Quelles règles sont imposées ?

Quelles interactions (physiques et

verbales) apparaissent entre les

jeunes ?

Après l'activité Que font les jeunes après

l’activité ?

Que font les jeunes dans la

soirée ?

Que disent les jeunes par rapport

à leur participation à l'atelier ?

Page 33: Le temps sport au CER de Cuinchy - enpjj.justice.fr

33

permettront ensuite de créer des indicateurs permettant de valider ou non nos hypothèses.

Jeune: Prénom, La famille : parents, profession, fratrie

Profil: âge, sexe, ville, placé depuis le…,

parcours institutionnel (nombre de

placements…), pratique une activité

sportive en dehors

Le média sport par rapport aux autres

médias du CER

Les sports pratiqués au CER durant la

session

Après la session

-Quelles activités sont pratiquées au

CER ?

- Quelles activités sportives?

-Quand ?

- Qui pratique ?

- Quelle préférence

(sport/Chantier/Scolaire) ?

- Qu’apporte la pratique d’une activité

physique?

-Quels objectifs pour toi ?

- Qui mène les séances ?

- Qui choisit l’activité?

- Quelle est la sanction si tu ne participes

pas ?

- Quelle catégorie de sport? (selon lui)

Différence entre sport

collectif/individuel

Quelle tenue portes-tu pendant

les activités ?

Quand ont lieu les activités ?

Où ?

Quelles sont les règles ?

Qui arbitre?

Qu’est ce que la coopération ?

- Différence entre sport au CER et camp ?

- A quoi le sport peut-il servir ?

-Comment se sent-on à la fin de la

séance ?

- Préférence sport au CER ou en camp ?

- Quelle séance qui t as marquée plus

qu’une autre ?

- Qu’est ce que le sport t'a

apporté ?

- Ces apports vont-ils

t’aider? Même en

dehors du sport ?

- Qu'est ce que tu aurais

aimé faire ?

- Qu'est ce qu'on devrait

changer ?

- Tu vas t’inscrire dans un

club ?

- Tu vas garder contact avec

les jeunes ?

- Avec les éducateurs ?

- Tu vas pratiquer

autrement ?

- Ca a changé quelque chose

pour toi ?

Pourquoi utiliser l'entretien ?

Pour Oumaya Hidri Neys, « l’entretien est une méthodologie qui permet de recueillir

des données de type qualitatif »32

. Il s'agit ici d'analyser le sens donné, par les jeunes placés au

CER de Cuinchy, à une pratique : ce qu’ils pensent de « telle pratique », de « telles règles »,

« tel fonctionnement », …

J’utiliserai ici l'entretien semi directif car, selon Oumaya Hidri Neys « il laisse la

possibilité de s’entretenir tout en guidant de façon discrète mais claire la conversation (sans

« emprisonner l’individu »). Il donne une plus grande souplesse et une plus grande liberté de

32 Intervention sur l’entretien, cours Master 1ere année STAPS Management du sport, octobre 2012

Page 34: Le temps sport au CER de Cuinchy - enpjj.justice.fr

34

parole à l’interviewé qui ne doit pas se sentir enfermé dans un échange de questions et

réponses. »

Afin d’instaurer un cadre contractuel initial, j’indiquerai les motifs et l’objet de la

demande :

L’objectif de l’entretien : « il s’agit d’une recherche menée dans le cadre de mon mémoire

sur la mise en place des activités physiques au CER. » Je ne précise pas la notion de

coopération pour ne pas les influencer.

Le choix de l’interviewé et le mode de prise de contact : « Je souhaite avoir ton avis parce

que tu es au CER depuis début septembre et que, comme chacun des jeunes tu vas pouvoir me

donner ton opinion».

L’enregistrement de l’entretien : « Par contre, j'ai besoin de t’enregistrer, parce je ne

pourrais jamais me souvenir de ce que vont me dire les 6 jeunes. »

Le choix d’interroger uniquement les mineurs est non les professionnels s’expliquent

par le fait, que je souhaite que l’apport éventuel du judo par l’utilisation de la coopération soit

ressenti directement par le jeune, et non une déduction comportementale faite par l’éducateur.

Trois hypothèses ont été avancées afin de valider l’idée qu’un sport tel que le judo,

conçu comme support de coopération entre les mineurs, peut permettre de limiter les

conduites agressives. Comme je viens de vous l’exposer, le projet me permettant de vérifier

mes hypothèses repose donc sur un objectif principal : passer d’un comportement où les

mineurs s'opposent, à un comportement où ils sont capables de travailler avec l'autre, par

l’intermédiaire d’une pratique sportive codifiée : le judo.

Outre des moyens matériels, humains et financiers, la mise en œuvre de mon étude

s’appuie sur des méthodes d’animation spécifiques et un calendrier de progression. La

validation, quant à elle nécessite une évaluation objective reposant sur différentes grilles et

des indicateurs précis.

Il convient désormais, d’étudier dans une troisième partie, les résultats de

l’expérimentation.

Page 35: Le temps sport au CER de Cuinchy - enpjj.justice.fr

35

TROISIEME PARTIE : Les résultats : évaluation de l'expérimentation :

Cette troisième partie est consacrée à l’évaluation de notre expérimentation. Pour ce

faire, il convient tout d’abord d’effectuer un comparatif entre l’activité judo et l’activité

football, puis d’analyser les résultats des entretiens réalisés auprès des mineurs. Enfin, je

terminerai mon étude par la validation (ou non) des hypothèses déterminées en introduction.

I. Comparatif activité football/judo avec l'exploitation de la grille

d'observation.

Activité football Activité judo

Avant l'activité Comment la

proposition est faite ?

Comment réagissent

les jeunes ?

Il est 18h...Lors du passage

de consignes, les éducateurs

de journée informe les

éducateurs du soir que deux

jeunes se sont « accrochés »

toute la journée. Pour faire

face à cette situation, les

éducateurs du soir décident

de mettre en place une

activité football pour

« ressouder » le groupe.

Cette activité est obligatoire

dès lors que les éducateurs

ont décidé de la mettre en

place.

Les jeunes acceptent

l'activité. Néanmoins, un

des deux mis en cause dans

les altercations déclare : « je

joue, mais je ne tiens pas

avec lui ! »

L'activité judo est proposée dès le

début de la session. Elle est

imposée au même titre que le

temps classe ou les chantiers.

Cette activité est obligatoire.

Les jeunes participent à l'activité.

Le groupe n'ayant pas encore eu

de « vécu » ensemble, il ne

semble pas y avoir d'affinité

particulière entre les jeunes.

Aucun mineur ne manifeste son

désaccord.

Page 36: Le temps sport au CER de Cuinchy - enpjj.justice.fr

36

Quels arguments sont

avancés pour lancer

l'activité ?

« Les gars, vous me

paraissez tendus ! On va

faire un petit foot, ça va

vous faire du bien. »

« En plus, ça permettra de

prendre l’air. »

« Nous allons faire un cycle de

judo. C'est un sport de combat,

mais on ne va pas apprendre à se

battre. On va apprendre à réagir

en fonction des réactions de

l'autre. Ce qu'on va apprendre en

judo, je ne veux jamais le voir à

l'extérieur de la salle. »

Pendant

l'activité

Quelle situation est

proposée par les

éducateurs ?

Quelles règles sont

imposées ?

Quelles interactions

« illicites » (physiques

et verbales)

apparaissent entre les

jeunes ?

Les éducateurs proposent un

match à 4 contre 4 avec «

gardien volant » (3 jeunes +

1 éducateur). Les éducateurs

choisissent les deux jeunes

mis en cause dans les

tensions pour former les

équipes.

9 interactions physiques :

3 crocs en jambes, 2 tirages

de maillots, 4 charges

illicites. Sur ces 9

interactions physiques 5 se

passent entre les 2 jeunes en

querelles sur la journée.

7 interactions verbales

principalement insultes et

menaces dont 6 ont lieu

entre les deux protagonistes.

La partie est interrompue

par la bagarre qui éclate

entre les 2 jeunes.

Jeu de déséquilibre de l'adversaire

en partant de la position

accroupis.

Nous ne notons pas d’interactions

physiques illicites. Toutefois on

note 2 interactions verbales,

faisant suite à des excès

d'engagement : «tu m’as

niqué ! », « Bâtard, tu m’as broyé

l’épaule ».

Après l'activité Quelles interactions se

passent immédiatement

Les jeunes s'amusent de la

situation entre les deux

Les jeunes échangent sur les

techniques étudiées et partagent

Page 37: Le temps sport au CER de Cuinchy - enpjj.justice.fr

37

après l'activité ?

Quelles interactions se

passent dans la soirée ?

Que disent les jeunes

par rapport à leur

participation à

l'atelier ?

autres mineurs. Ils les

encouragent à en

découdre : « tu vas le

maîtriser », « montre lui qui

est le patron », « à ta place,

je l’aurais défoncer », « ça

va être le feu ce soir ». Les

deux autres mineurs

continuent à s'insulter. Le

déroulement du match et le

résultat ne sont pas présent

dans les discours.

La situation semble apaisée.

Les éducateurs ont

sanctionné les deux jeunes.

Ils seront vus par le

responsable d'unité

éducative. Pas de dialogue

entre les jeunes, ils

regardent une émission de

télévision.

Aucun retour particulier sur

l'activité

quelques expériences vécues

durant la séance ou dans leur

vie : « une fois, moi, un mec, il

m’a fait exactement la même

chose, il m’a fait trop mal ! »,

« toi, t’as pas mal aux bras ?, moi

j’ai plus de bras ! », « c’est

physique quand même, je suis

mort… ».

Les jeunes jouent tous ensemble à

un jeu de société (monopoly). On

ne repère pas d'affinité

particulière entre les jeunes.

Chacun semble prendre sa place

dans le groupe.

Un jeune dit souhaiter s'inscrire

au club de sa ville. Il a déjà été

initié à un sport de combat.

Plusieurs questions sont posées

par rapport à l'organisation de la

prochaine séance et des

techniques qui seront enseignées.

Un jeune dit ne pas apprécier

l'activité. Selon lui, il n'y a pas de

but puisqu'on ne peut pas l'utiliser

ailleurs qu'en salle de sport : «ça

ne sert à rien de faire ca ».

Page 38: Le temps sport au CER de Cuinchy - enpjj.justice.fr

38

Commentaires :

La proposition de l'activité football intervient suite à un événement : l'altercation entre

les deux jeunes. Elle n’avait pas été programmée dés le démarrage de la journée et donc elle

n’était pas préparée. L'activité judo, quant à elle, est inclue dans le programme des activités et

anticipée. Elle est préparée et donnera lieu à un cycle de progression avec différents objectifs

à atteindre.

La situation proposée diffère également : l'activité football est proposée comme un

match, le but étant alors de battre l'autre. Les éducateurs veillent à séparer les deux jeunes qui

se sont « accrochés » dans la journée et donc à ne pas les mettre dans la même équipe. Ils sont

ainsi, de fait, adversaires.

La situation de judo est présentée comme faisant partie d'un projet. Ce n'est pas une

activité isolée, et elle donnera lieu à d'autres séances. L'objectif n'est pas de battre l'autre mais

d'utiliser au sein d'un exercice de référence des techniques enseignées. Pour réussir à mettre

en place les techniques, il faut coopérer (se laisser faire).

L'activité football donne également lieu à de nombreuses interactions non conformes.

Les deux jeunes qui se sont affrontés sur cette journée semblent profiter du jeu pour

s'échanger quelques coups, ce qui finira pas entraîner une bagarre. On note également

quelques insultes, faisant souvent suite aux coups reçus par les joueurs.

L'activité judo n'a pas donné lieu à des comportements violents. Il est demandé aux

jeunes d'être coopératifs et de ne pas imposer de résistance à l'adversaire. On note tout de

même deux interactions verbales non conformes, faisant suite à des douleurs dues à des excès

d'engagement d'un adversaire réalisant une technique trop brutalement.

A la fin de l'activité football, la séance paraît totalement « éclipsée » par la bagarre

entre les deux jeunes. En effet, c'est cette altercation et non l'activité qui semble au cœur des

attentions des jeunes. Aucune remarque par rapport au déroulement de la séance ni même au

résultat n'a été relevée. Lors de la soirée, chaque jeune regarde la télévision calmement.

L'activité judo semble être davantage au cœur des débats. Les jeunes échangent leurs

ressentis (douleur physique, expériences précédentes…). Un jeune mentionne le fait qu'il ne

comprenne pas le sens de cette activité. Lors de la soirée, l'ensemble du groupe participe à un

Page 39: Le temps sport au CER de Cuinchy - enpjj.justice.fr

39

jeu de société.

Je viens d’effectuer un comparatif entre l’activité « football » et l’activité « judo » en

exploitant les résultats de ma grille d’observation. Afin de pouvoir compléter mon étude, il

convient désormais d’examiner les résultats des entretiens individuels menés auprès des

mineurs ayant participé à la session du CER et donc aux différentes activités.

II- Résultats et analyse des entretiens individuels.

Afin d'éclaircir les résultats obtenus lors des entretiens, j'ai choisi de procéder à une

analyse thématique ( les règles, la notion de coopération, le comportement des mineurs durant

l’activité) via les grilles d'entretien utilisées. Ceci m'a permis d'élaborer littéralement les

résultats dans le but de répondre aux hypothèses de travail.

L’ensemble des mineurs a été interrogé sur la base d’entretiens semi directifs. Ils ont

été réalisés quelques jours avant la fin de la session CER, soit l’avant dernière semaine.

Résultats des entretiens.

Six grilles d’entretien ont été réalisées. J’ai retranscrit fidèlement les propos de chaque

mineur.

Page 40: Le temps sport au CER de Cuinchy - enpjj.justice.fr

40

Jeune 1: Kévin La famille:

Mére : sans emploi Père : Agent territorial 1 sœur

Profil: 17 ans, habite Arras, 3éme

placement. A pratiqué le football en club

ainsi que des activités ponctuelles dans les

autres foyers.

Le média sport par rapport aux autres

médias du CER

Les sports pratiqués au CER durant la

session

Après la session de CER

Activités pratiquées au CER

Les chantiers, le sport et l'école.

Activités sportives

Judo, football, basket, musculation

Préférence parmi les activités

pratiquées

« Ben le sport, comme tout le monde ! »

Objectifs des éducateurs (vu par le

jeune)

« C'est pour qu'on soit crevé avant d'aller

se coucher ».

Objectifs du jeune

« C'est pour me muscler, et apprendre des

nouveaux trucs, comme au judo ».

Animateur de séance

« Ca dépend, des fois on joue juste comme

çà, y a pas d'exercice. »

Choix de l'activité

« Les educs, mais des fois, on peut dire ce

qu' on veut faire. »

Sanction prévue

« Ils disent que c'est obligatoire, mais y en

a plein qui font pas et y a jamais eu de

sanctions. De toute façon ils vont faire

quoi ? On est déjà puni rien que d'être

ici ! »

Catégorie de sport

« En équipe ou tout seul, ça dépend. On

fait du combat, du sport collectif, de la

musculation. »

Différence entre sport collectif/sport

individuel

« individuel c'est tout seul et sport

collectif, ben c'est en équipe. »

Tenue pendant les activités

« Je mets mon survêtement, sauf au judo,

on doit mettre la veste. »

Règles

« Ben ça dépend les sports. Au foot, c'est

les règles du foot, au basket les règles du

basket. Après la muscu, c'est surtout la

sécurité. Le judo aussi. »

Arbitrage

« Personne, on s'arbitre tout seul »

Coopération

« C'est un truc au judo. C'est quand

l'autre doit se laisser faire pour apprendre

les techniques »

Séance marquante

En camp c’était la descente en rappel de

80m. Sinon au CER, ma première séance

de judo. C'était bizarre. On devait faire du

combat mais sans se battre...

Apports

« J'ai découvert de nouveaux

trucs. J'ai pu voir mes

limites ».

Projection

« Euh non. Je vois pas en

quoi jouer au foot ça va

m'aider. »

Les manques

« Des trucs, plus de fight

comme boxe, free fight... »

« Ben déjà demander aux

jeunes ce qu'ils ont envie de

faire. Et après faire du

combat sans avoir le droit de

se battre c'est bizarre. »

Inscription en club

« J'ai envie de faire du

combat. Je vais voir »

Changement de pratique

« Ben non, pourquoi ? »

Bilan

« Ouais, j'ai vu que j'étais

capable de faire des trucs de

fou, comme l'escalade ou le

parapente. »

Page 41: Le temps sport au CER de Cuinchy - enpjj.justice.fr

41

Jeune 2 : Julien

16 ans, originaire d’Ostricourt

La famille:

Mère : agent d'entretien Père : mécanicien 2 sœurs, 3 frères

Profil: , 2éme placement. A pratiqué la

boxe en club.

Le média sport par rapport aux autres

médias du CER

Les sports pratiqués au CER durant la

session

Après la session de CER

Activités pratiquée en CER

Les chantiers, la cuisine, les camps, le

sport.

Activités sportive

Football, tennis, judo, musculation

Préférence

« Les chantiers, ça passe plus vite »

Objectifs des éducateurs (vu par le

jeune)

« C'est pour découvrir de nouveaux

sports ».

Objectif du jeune

« Moi ça me serre surtout pour me calmer.

Et c'est bien aussi pour l'ambiance avec

les autres »

Animateur de séance

« Les éducs. »

Choix de l'activité

« Les éducs aussi.»

Sanction prévue

« Ben y'en a pas. Le sport c'est pas

obligatoire. On doit juste venir, mais si on

fait pas c'est pas grave. »

Catégorie de sport

« Du duel ou du sport collectif »

Différence entre sport co/individuel

« Ben en sport co, c'est toute l'équipe, y'a

toujours quelqu'un pour te rattraper. En

individuel, tu peux compter que sur toi-

même. »

Tenue pendant les activités

« Des vêtements de sport et en judo faut le

kimono. »

Règles

« Ca dépend aussi du sport. Mais y en a

surtout au judo ou en muscu pour pas

qu'on se blesse. Il faut enlever les bijoux,

pas forcer sur les techniques, pas faire les

techniques en dehors... »

Arbitrage

« Les éducs »

Coopération

« C'est quand on travaille avec l'aide de

l'autre ».

Séance marquante

« Moi j'aime bien le judo. Je fais du

combat déjà. J'ai bien aimé la séance sur

les étranglements, parce que fallait nous

faire confiance pour faire ça. »

Apport « Ben moi j'étais

plutôt bourrin avec la boxe.

Là j'ai appris à faire des

choses plus techniques et j'ai

aussi appris des choses aux

autres. »

Projection « Ben je sais pas,

j’pense que j'ai conscience de

ce qui peux être dangereux,

surtout par rapport au judo.

Je vois les limites. En plus

j'ai vu que fallait aussi avoir

quelqu'un pour avancer,

comme avec la coopération

en judo. »

Les manques « De la boxe,

ça me manque.

Il faut demander aux jeunes

qui font du sport en club de

donner des cours. »

Inscription en club « J’le

suis déjà. »

Changement de pratique

« Je pense que je vais essayer

à la boxe d'être moins

bourrin, travailler ma

technique, être plus malin.

C'est mieux de progresser à

deux aussi. »

Bilan « Ben j'ai vu d'autres

manières de travailler. J'avais

jamais travaillé comme çà

avec mon coach. »

Page 42: Le temps sport au CER de Cuinchy - enpjj.justice.fr

42

Jeune 3 : Michael

17 ans , originaire d’Arras

La famille:

Mére : En recherche d'emploi Père : Ouvrier 1 sœur

Profil: 2éme placement. N'a jamais

pratiqué en club.

Le média sport par rapport aux autres

médias du CER

Les sports pratiqués au CER durant la

session

Après la session de CER

Activités pratiquée au CER

L'école, le chantier et le sport

Activité sportive

Escalade, lutte, judo, football,

musculation, tennis

Préférence

« Ben sport, comme tout le monde ! »

Objectifs des éducateurs

« Ca dépend, quand on fait foot, c'est pour

se défouler, sinon, lutte ou judo c'est pour

apprendre des techniques et apprendre à

travailler avec l'autre sans faire mal.

Après l'escalade, c'est pour se faire peur

je pense. »

Objectif du jeune

« Moi c'est surtout pour me défouler. Et

j'aime bien aussi, parce que c'est des

jeux. »

Animateur de séance

« Les éducs »

Choix de l'activité

« Les éducs aussi »

Sanction

« Ben on peut avoir du temps en moins sur

les retours en week end. »

Catégorie de sport

« On a fait du sport co, du sport de nature,

du sport de force et du sport de combat »

Différence entre sport co/individuel

« Sport co c'est l'équipe, individuelle c'est

moi tout seul. »

Tenue pendant les activités

« On met ce qu'on veut, sauf lutte et judo,

c'est le kimono »

Règles

« Y'en a surtout en judo et en lutte, parce

que c'est surtout des techniques. C'est

dangereux, il faut pas se faire mal. Après

les autres sports, c'est les règles de

d'habitude. »

Arbitrage

« Les éducs. Mais des fois, on doit aussi

s'arbitrer tout seul. En combat par

exemple, y'a pas d'arbitre, on doit se

démerder. C'est l'autre qui dit s'il a mal. »

Coopération ?

« C'est quand on fait les trucs à deux pour

être meilleur. »

Séance qui marquante

« J'ai bien aimé la lutte quand on devait

combattre chacun son tour contre le même

adversaire. A la fin il était mort ! »

Apport : « Moi j’faisais pas

de sport avant. Maintenant

j'aime bien. J'ai vu aussi que

le sport de combat c'est pas

forcement violent. Là, j'ai

appris des choses et j'ai pas

eu mal. Je trouve aussi qu'en

sport on était plus pote avec

les autres. »

Projection : « Ben oui, je

sais maintenant qu'on est

meilleur à deux.. ».

Manques « Des sports genre

paintball, karting...

Il faudrait sortir plus, pas

rester toujours enfermé. »

Inscription en club

« Peut être... »

Changement de pratique

« Je vais déjà m'inscrire... »

Bilan

« Déjà j'ai appris à faire du

sport. Je sentais pas mes

muscles avant. Je pensais que

les sports de combats

fallaient toujours se faire

défoncer. Là j'ai appris qu'on

pouvait apprendre avec

l'autre, mais faut se laisser

faire. Au début c'est pas

facile. »

Page 43: Le temps sport au CER de Cuinchy - enpjj.justice.fr

43

Jeune 4 : Jordan

16 ans originaire de Roubaix

La famille:

Mère : mère au foyer Père : sans emploi 2 frères

Profil: 1er placement. N'a pas pratiqué

de sports en club

Le média sport par rapport aux autres

médias du CER

Les sports vécus au CER Après la session de CER

Activités pratiquée au CER

La cuisine, les chantiers, les courses, le

sport, l'école

Activités sportives

Combat, foot, tennis

Préférence

« Le sport, parce que on est tous

ensemble ».

Objectifs des éducateurs

« Y a un educ qui m'a dit que ce qu'on

apprend au sport on peut le réutiliser

ailleurs. »

Objectifs du jeune

« C'est pour qu'il y ait une bonne

ambiance dans le groupe ».

Animateur de séances

« Les éducs »

Choix de l'activité

« Les éducs, mais y a moyen de les faire

changer d'avis...enfin, ça dépend qui fait

le sport. »

Sanction

« Ils tapent sur les week-end »

Catégorie de sport

Combat, raquette, nature, sport co

Différence entre sport co/individuel

« Individuel c'est un face à face toi contre

l'autre, sport co, c'est la guerre, eux

contre nous. »

Tenue pendant les activités

« Le kimono pour le combat, sinon c'est

libre. »

Règles

« Ben c'est les règles comme d'habitude.

Après en combat faut faire attention à

l'autre parce qu'on fait des trucs chauds

quand même ».

Arbitrage

« Un educ. Mais souvent y en a pas en

fait, parce que les éducs jouent aussi. On

peut pas être arbitre et joueur. »

Coopération

« C'est faire un truc ensemble. Genre on a

besoin de tout le monde pour réussir. »

Séance marquante

« Quand on a été au tennis, parce que

j'avais jamais été sur un vrai terrain. On a

pas fait un match, on devait essayer de

faire le plus d'échanges possibles ».

Apports

« J'ai découvert de nouveaux

jeux. C'était bien quand il y

avait pas de compétition,

parce que moi je suis nul en

sport. »

Projection

« Vu que j'ai appris des

techniques, j'ai plus

confiance. J'aimais bien aussi

quand on travaillait avec les

autres. On progresse plus

avec les autres »

Manques

« Je sais pas, c'était bien là.

Y a des sports ou on

progresse pas. Comme quand

on fait que des matchs. Moi

j'aime bien les exercices.

Faut en faire plus. »

Inscription dans un club

« Oui, peut être »

Changement de pratique

« Moi j'osais pas faire du

sport parce qu'on peut se

faire mal. Là, j'ai jamais eu

mal et j'ai pas fait mal à

l'autre non plus. Si je fais un

sport, je vais essayer de faire

ça aussi »

Bilan

« Oui, j'ai fait des trucs que

je pensais pas. Et aussi j'ai

appris à travailler avec les

autres »

Page 44: Le temps sport au CER de Cuinchy - enpjj.justice.fr

44

Jeune 5 : Akim

16 Ans originaire d’Hazebrouk

La famille:

Mère : Mère au foyer Père : inconnu 1 sœur, 3 frères

Profil: , 1er placement en foyer, mais a

déjà été pris en charge 3 fois en famille

d'accueil. A pratiqué le judo en club.

Le média sport par rapport aux autres

médias du CER

Les sports pratiqués au CER durant la

session

Après la session de CER

Activités pratiquées au CER

« L'école, le sport, la cuisine, le graf, les

courses, la peinture, la tondeuse. »

Activités sportives

« Muscu, judo, foot »

Préférence

« Rien »

Objectif des éducateurs

« C'est pour qu'on dorme, comme ça après

on est plus calme. »

Objectifs du jeune

« C'est pour que je devienne bœuf ! »

Animateur de séance

« Les éducs »

Choix de l'activité

« Les éducs »

Sanction

« Rien, le sport c'est pas obligatoire, faut

juste venir pour voir ».

Catégorie de sport

« Intérieur ou extérieur »

Différence entre sport co/individuel

« Sport co c'est tout le monde, individuel

c'est moi contre l'autre. »

Tenue pendant les activités

« En combat faut mettre le kimono, sinon

je viens en short. »

Règles

« Ben y en a pas. Juste au judo faut pas

faire mal et pas utiliser les techniques en

dehors »

Arbitrage

« Personne, juste en judo, on doit

s’arrêter si l'autre le demande. C'est un

peu lui l'arbitre. »

Coopération

« C'est faire avec l'autre »

Séance marquante

« La lutte, quand on était accroché tous

ensemble, et qu'on devait tout faire pour

ne pas tomber en s'appuyant sur les

autres. On a trop rigolé. »

Apports

« J'ai appris des bonnes

techniques et je me suis fait

des potes »

Projection

« Non, je pense pas »

Manques

« Des rencontres avec des

autres foyers.Proposer des

choix pour que les jeunes

s'inscrivent où ils veulent. »

Inscription dans un club

« Ben oui, j'ai envie d'aller

au foot. »

Changement de pratique

« J'ai envie de faire des trucs

d'équipe maintenant »

Bilan

« Avant je faisais tout tout

seul, mais maintenant, c'est

vrai, on peut être meilleur

avec les autres »

Page 45: Le temps sport au CER de Cuinchy - enpjj.justice.fr

45

Jeune 6 : Thomas

17 ans, originaire de Loos

La famille:

Mère : commerçante Père : Plombier 1 sœur

Profil: 6éme placement. A pratiqué le

football en club.

Le média sport par rapport aux autres

médias du CER

Les sports vécus au CER Après la session de CER

Activités pratiquées au CER

Sport, peinture, classe, maçonnerie,

mécanique

Activités sportives

Foot, musculation, tennis de table, judo,

lutte.

Préférence

Le sport et les chantiers

Objectifs des éducateurs

« C' est pour calmer les tensions de la

journée et créer un bon groupe, une bonne

ambiance. »

Objectif du jeune

« Apprendre de nouveaux gestes,

découvrir de nouveaux sports. »

Animateur de séances

« Les éducs, mais on peut intervenir

aussi »

Choix de l'activité

« Les éducs. Mais souvent quand on voit

qui fait la nuit, on sait ce qui va y avoir

comme sport. »

Sanction

« On peut avoir de l'argent de poche en

moins, et si vraiment on abuse, on peut

avoir le week-end diminué. »

Catégorie de sport

« Sport d'équipe, sport de duel, sport de

combat »

Différence entre sport co/individuel

« sport co, c'est un travail d'équipe, sport

individuel, je suis tout seul. »

Tenue pendant l'activité

« Short tee shirt et en combat on doit

mettre le kimono. »

Règles

« Les règles de sport classique, sauf en

combat. On fait de la coopération, donc

on doit apprendre à faire avec les autres.

C'est pas des combats en fait. Y a pleins de

règles à respecter. On fait pas n'importe

quoi."

Qui arbitres ?

« On s'arbitre seul, mais les éducs

viennent aussi. »

Coopération

« C'est faire les choses avec l'aide des

autres ».

Séance marquante

« Au judo quand tous les autres devaient

combattre avec moi les uns après les

autres. Je croyais que j'étais plus fort,

mais au bout de 2 combats, j'étais

tellement mort qu'ils m'ont tous battu

après. »

Apports

« Ben franchement avec le

judo, j'ai vu qu'on était

meilleur à plusieurs, avec

l'aide des autres. »

Projection

« Ben oui, justement pas

rapport à ça, je vais peut être

plus m'aider de mon

entourage. »

Manques

« J'aurai bien aimé des

compétitions, des tournois.

La salle de combat, elle est

trop petite pour 6 »

Inscription dans un club

« Je vais continuer le foot. »

Changement de pratique

« Je pense que j'essayerai de

jouer plus en équipe. Avant je

voulais tout dribbler. »

Bilan

« Ben je crois qu'il faut faire

plus appel aux gens qui

veulent t'aider, comme en

combat. »

Page 46: Le temps sport au CER de Cuinchy - enpjj.justice.fr

46

Les entretiens retranscrits, il convient désormais de les analyser afin d’en dégager les

axes forts.

B ) Analyse des entretiens

L’analyse des entretiens met trois points en évidence : le sport est une activité repérée

au CER, les règles et la notion de coopération ont été comprises.

1) Le sport une activité repérée au CER

Un large panel d’activités sportives

Les différents entretiens mettent en évidence un large panel d'activités sportives

relevés par les jeunes : le football, le judo, la lutte, le tennis, le tennis de table, la musculation,

le basket ball, l'escalade, le surf, le parapente.

Une activité réellement obligatoire ?

La place de l'activité sportive apparaît confuse au CER. Pour trois jeunes, elle est

obligatoire au même titre que les chantiers ou que l'activité scolaire. Il s’agit ici d'ailleurs de

la règle officielle. Ainsi, pour les 3 mineurs, le fait de ne pas s'investir dans l'activité sportive

peut entraîner des permissions réduites pour les week-ends.

Cependant pour les autres jeunes, la pratique du sport n'est pas obligatoire. Seule la

présence est obligatoire : «le sport, ce n'est pas obligatoire, faut juste venir pour voir. ». Il

semble que la non participation aux activités sportives n'est pas réellement sanctionnée. Cela

induit le fait que le temps « sport » occupe une place différente des chantiers ou de l'activité

scolaire. L’absence de participation ou l’oisiveté sur ces deux derniers temps est réellement

sanctionnées.

Des objectifs divers

Les mineurs différencient les objectifs annoncés par les éducateurs et les objectifs

qu'ils visent personnellement.

Les objectifs poursuivis par les mineurs ne sont pas similaires, ceux ci ayant des

attentes propres. En revanche, il est surprenant de voir que les jeunes fixent des objectifs très

Page 47: Le temps sport au CER de Cuinchy - enpjj.justice.fr

47

différents à l’activité en fonction des adultes qui travaillent ou qui l’encadrent.

Certains des objectifs poursuivis par le jeune et poursuivis par l’éducateur ( selon le jeune

toujours) sont communs : apprendre à travailler avec l'autre, se défouler, découvrir.

Les objectifs relevés sont les suivants :

Pour les éducateurs (vu par les jeunes): fatiguer les jeunes, découverte, se défouler (3),

apprendre à travailler avec l'autre, se faire peur, partager des connaissances.

Pour les jeunes : se muscler (2), découvrir (2), se calmer (2), dynamique de groupe (2)

2) Les règles et la notion de coopération ont été comprises.

Certaines règles repérées

Toutes les activités sportives proposées par le CER ne semblent pas bénéficier de

règles précises. Ainsi, lorsqu'une activité football est proposée, les règles ne semblent pas

annoncées : « c'est les règles de d'habitude ».

A l'opposé, des règles précises sont données pour le judo. Elles concernent la sécurité

et la tenue : port du kimono, règles de sécurités pour éviter la blessure du partenaire. Celles ci

sont mises en avant par l'ensemble des jeunes interrogés. On peut donc penser qu'elles sont

intégrées et appliquées.

L'arbitrage des séances est mis en question par les jeunes. En effet, les éducateurs

participent aux activités. Ainsi, un des jeunes posent clairement la question : « normalement

les éducateurs arbitrent. Mais ils jouent aussi. Peut-on arbitrer et jouer ? ».

L'auto-arbitrage semble ainsi être privilégié avec des interventions ponctuelles des éducateurs

le plus souvent pour veiller aux règles de sécurité.

La coopération définie

L'ensemble des jeunes est en capacité de poser des mots sur la notion de coopération.

La définition est parfois laconique, mais l'esprit de la coopération semble intégré : « c'est

faire avec l'autre. » Certains jeunes précisent que l'on peut être meilleur en fonctionnant en

coopération : « on est plus fort à plusieurs. »

Toutefois, on notera qu'un adolescent renvoie le terme coopération comme une

spécificité de l'activité judo. Ainsi, on peut se poser la question de la réelle compréhension de

Page 48: Le temps sport au CER de Cuinchy - enpjj.justice.fr

48

la notion par ce mineur.

3) Des jeunes capables de se projeter

Un court bilan des activités en termes d’apports et de manques a été effectué par les

mineurs. La notion de coopération semble également être « sortie » de l’enceinte de la

structure.

Des apports...

Les adolescents ayant pratiqué les activités sportives au CER reconnaissent des

apports personnels. Ainsi, on retrouve la notion de découverte, de progression avec l'autre, de

développement de confiance...

Un jeune a également noté le plaisir qu'il avait eu en l'absence de compétition car : « il

était nul en sport. ».

Un autre jeune a relevé le fait d'avoir appris une autre méthode de travail (la

coopération) qu'il ne connaissait pas dans son club de sport.

Voici les apports relevés par les jeunes interrogés : découverte, connaissance de ses

limites (2), partage, progression avec les autres, augmentation de la confiance en soi,

nouvelle façon de travailler, absence de compétition.

… Et des manques.

Les jeunes placés m’ont signalé des manques dans la conduite des activités sportives.

Ainsi pour trois d'entre eux, ils ne sont pas suffisamment sollicités dans le choix des sports.

Un mineur propose également de faire appel aux jeunes ayant des compétences pour mener

les séances.

Pour deux jeunes, il est également noté la volonté de sortir du CER, de ne pas rester

dans les murs pour peut-être rencontrer d'autres jeunes, faire des tournois...

Enfin, un jeune met en évidence le matériel insuffisant de la structure avec une salle de

sport inadapté (Il s'agit en effet d'un bureau réaménagé en salle de sports).

Une coopération qui sort des murs.

L'idée de la coopération paraît avoir convaincu le groupe de mineurs. En effet, cinq

Page 49: Le temps sport au CER de Cuinchy - enpjj.justice.fr

49

jeunes sur les six expriment le fait « d'être meilleur à plusieurs ». Certains sont également

capables de se projeter au delà de l'activité sportive en évoquant l'intérêt de s'appuyer sur la

famille ou l'entourage. L'idée de collectif revient également régulièrement. Ainsi, on s'aperçoit

qu'un mineur pratiquant le football fait le rapprochement en évoquant le fait qu'il jouera « plus

collectif ».

Enfin, fort de l'expérience sportive au CER, la totalité des jeunes disent vouloir

poursuivre ou reprendre une activité sportive à l'issue du placement.

Pour terminer l’analyse des entretiens, il convient de préciser que chaque adolescent

interrogé a été en capacité de relater une séance qui l’a marqué. On remarque que les séances

de lutte/judo sont régulièrement citées. C'est aussi, le sport qui a bénéficié du plus grand

nombre de séances. Ainsi 5 jeunes décrivent des séances marquantes avec ces activités

supports. Sur ces 5 jeunes, 4 décrivent des séances de coopération, une approche qu'ils ne

connaissaient pas visiblement. Le 5éme jeune a soulevé la notion de confiance qui avait été

laissé par les éducateurs et les jeunes pour accepter de travailler les étranglements.

Il convient désormais de valider ou non nos hypothèses. Elles étaient au nombre de

trois :

- le comportement des mineurs varient en fonction de l’activité proposée,

- la coopération permet de réguler les facteurs d’opposition,

- la coopération présente lors du temps sport peut être transférable dans

d’autres espaces sociaux.

III. La validation de nos hypothèses.

L’activité physique, conçue comme support de coopération permet-elle de limiter les

conduites agressives ? C’est à cette question qu’il convient de répondre en validant ou non

mes trois hypothèses.

A ) Le comportement des mineurs varient en fonction de l'activité proposée

Si on revient sur la comparaison entre l’activité football et l’activité judo, j’observe

une attitude totalement différente des mineurs au cours de ces deux activités. Le match de

football a donné lieu à de nombreuses tensions, à des situations de violences (cf tableau

Page 50: Le temps sport au CER de Cuinchy - enpjj.justice.fr

50

comparatif), tandis que l’activité judo a favorisé davantage l’échange et l’apprentissage entre

les jeunes. D’ailleurs, cela se retrouve dans les objectifs avancés par les jeunes : dynamique

de groupe, travailler avec l’autre.

Cependant, je note également que ces deux activités sont proposées de manière

totalement différente : l’une est proposée pour faire face aux comportements des jeunes, pour

apaiser une tension, offrir un nécessaire défouloir (le football), tandis que l’autre est proposée

comme un projet à long terme. Ainsi, est ce le comportement des mineurs qui changent en

fonction de l’activité ou est ce le comportement des mineurs qui changent en fonction de

l’objectif de l’activité mise en place ?

J’ai pu voir dans l’exploitation des entretiens que l’offre sportive proposée par le CER

était très large. Cependant, le projet de l’atelier sport ne semble pas réellement défini, et

chacun propose ce qu’il peut dans ce créneau, sans réellement d’objectifs communs définis

par l’équipe éducative. Les règles de participation des jeunes ne sont d’ailleurs pas très

claires : participation obligatoire ou non ? Tous ces facteurs sont des « variables » sur les

comportements des jeunes.

Alors, oui, le comportement des mineurs a varié avec le changement d’activité, mais

pouvais je réellement comparer deux activités ayant des objectifs différents et n’ayant pas lieu

dans le même contexte ?

B ) La coopération permet de réguler les facteurs d'opposition

La mise en place du cycle judo a permis d’intégrer la notion de coopération, notion sur

laquelle l’équipe insistait beaucoup pendant les séances. Il semble que la coopération ait

trouvé tout son sens auprès des jeunes. Ainsi, comme j’ai pu l’analyser lors du dépouillement

des résultats des entretiens, les jeunes sont capables de définir le terme mais surtout d’en

comprendre les objectifs. Il n’est alors pas anodin d’entendre les adolescents avancer

que : « on est meilleur à plusieurs », « je vais jouer plus collectif », « j’ai appris à partager »,

« on progresse avec les autres »…

La coopération est un état d’esprit que les jeunes pris en charge doivent intégrer. A

l’aide de l’équipe éducative, je suis parvenu sur les séances de judo à cette idée et cela a

permis de réguler les facteurs d’opposition.

Page 51: Le temps sport au CER de Cuinchy - enpjj.justice.fr

51

Toutefois, au-delà de l’esprit de coopération, les règles imposées par les adultes, jouent

également une variable déterminante dans les relations entre les mineurs. Ici, chacun a su

mettre en avant l’importance des règles de sécurité dans l’activité judo, tout comme il a pu

signaler l’absence de règles précises lors de l’activité football : « c’est les règles de

d’habitude ». La règle rassure les mineurs et leur fixe un cadre d’évolution commun

permettant de limiter les facteurs d’opposition : « si je veux que mon partenaire me respecte et

si je veux avancer avec lui, je dois respecter les règles qui s’imposent à tous. »

On peut donc avancer que la mise en place d’activité de coopération est un facteur

limitant des oppositions entre les jeunes.

C) La coopération présente lors du temps sport peut être transférable dans

d’autres espaces sociaux

L’objectif de cette étude était d’intégrer la notion de coopération au travers la mise en

place d’un cycle judo. Cependant, je l’ai évoqué, la coopération n’est évidemment pas la

propriété de l’activité sportive. Pour être réellement bénéfique, elle doit être transférée dans

tous les espaces sociaux.

S’il était illusoire de pouvoir mettre cela en place sur le temps de cette étude, les

adolescents semblent avoir compris que la coopération était transférable au-delà de la salle de

sport. Ainsi, ils ont pu aborder l’importance de faire appel à leurs proches en cas de

difficultés, l’importance de pouvoir compter sur l’autre, le fait de progresser plus vite à

deux…

L’absence de compétition, relevé par un jeune durant les entretiens a sans doute

participé à cette compréhension. En effet, la compétition, renvoie à l’affrontement, à la

nécessité d’avoir un vainqueur et donc, un perdant. Ainsi, l’absence de compétition a permis à

tous les jeunes de garder des expériences positives des séances de judo et de pouvoir se

centrer sur la collaboration et non sur le fait de gagner, ce qui aurait pu renvoyer à des

situations d’échec.

La coopération présente lors des activités judo peut ainsi être transférable dans tous les

espaces sociaux.

Page 52: Le temps sport au CER de Cuinchy - enpjj.justice.fr

52

CONCLUSION

La mise en place des activités physiques et sportives comme moyen d’éducation ne

fait pas l’unanimité. Pour certains même, c’est une utopie, s’appuyant sur la réussite de

certains champions, qui reste exceptionnelle.

Néanmoins, mon étude basée sur l’utilisation du judo au sein du CER de Cuinchy

montre une évolution dans la relation entre les jeunes et dans leur état d’esprit tout au long de

la session, qui semble aller au-delà du simple temps « sport ».

Cependant, cette évolution est-elle intrinsèque à l’activité ? Il serait présomptueux de

l’affirmer. Il semblerait que ce soit davantage l’utilisation de la coopération au sein du média

sport qui produise un effet positif sur le comportement des jeunes.

Ainsi, on peut penser que l’activité physique n’a pas de valeur éducative en tant que

telle, mais, à partir du moment où elle est pensée, construite, elle devient un support éducatif

pouvant faire levier dans une prise en charge.

Ici, au-delà de la pratique du judo, c’est véritablement la coopération qui semble avoir permis

aux jeunes d’évoluer dans leurs relations et avoir permis d’atténuer les tensions pouvant

exister entre les jeunes.

L’activité n’est alors qu’un support. L’intérêt de cette étude réside dans le fait de

démontrer que peu importe le support que l’on utilise, à partir du moment où l’on peut mettre

en place un système de coopération entre les mineurs. De ce fait, si la coopération peut être

imaginée en chantier, en atelier scolaire ou ailleurs, l’évolution peut être tout autant positive.

L’utilisation du sport, comme moyen éducatif n’a de sens que s’il est utilisé comme

support, comme moyen de transmission et non comme un outil direct qui comporterait des

valeurs intrinsèques. C’est avec de la pédagogie, des règles, la présence de l’adulte, un projet,

que le sport devient un média éducatif.

Cela constitue une véritable évolution dans mon esprit, car au départ de cette étude,

mon sens commun s’orientait sur l’utilisation des activités physique et sportives comme un

moyen simple de faire intégrer des valeurs éducatives aux jeunes, notamment dans les

relations d’opposition. Le constat de départ de cette étude est ainsi venu compromettre une

pensée, un mode de fonctionnement.

Page 53: Le temps sport au CER de Cuinchy - enpjj.justice.fr

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Pour conclure ce mémoire, il me parait important de préciser que cette étude fut

l’occasion de se pencher sur un domaine d’activité que je pensais bien connu. Pourtant, les

découvertes se sont multipliées et les apprentissages diversifiés. Cela vient me rappeler que

l’éducateur est en formation continue, formation qu’il doit nourrir par une alternance

perpétuelle entre théorie et pratique afin de proposer l’accompagnement le plus adapté et le

plus efficace aux mineurs pris en charge.

Page 54: Le temps sport au CER de Cuinchy - enpjj.justice.fr

54

BIBLIOGRAPHIE (Par ordre d’apparition dans le mémoire)

Ouvrages

Omar ZANNA, restaurer l'empathie chez les mineurs délinquants, édition Dunod,

2010

CHARRIER, JOURDAN, « Pratiques sportives et jeunes en difficulté : 20 ans

d’innovations et d’illusions… et des acquis à capitaliser », in M. Falcoz, M. Koebel

(dir.), Intégration par le sport : représentations et réalités, Paris, L’Harmattan, 2005.

L.COLLARD, Sport et agressivité, édition Désiris , 2004

DURET, sociologie du sport, edition PUF, 2006, p9

FALCOZ et KOEBEL, Intégration par le sport : représentations et réalités, édition

l'Harmattan, 2005

BLOOM, Caractéristiques individuelles et apprentissages scolaires, Labor, 1979

Articles

M.PREEL , le sport réduit-il (vraiment) la violence, revue sport à vif

W.GASPARINI, l'intégration par le sport, genèse politique d'une croyance collective,

revue société contemporaine, Mars 2008

M.PREEL, le sport réduit-il (vraiment) la violence, revue sport à vif

W.GASPARINI, KNOBE, « Le salut par le sport ? Effets et paradoxe d'une politique

locale d'insertion » déviance et société, vol 29, n° 3, 2005

S.ROCHE, « plus de sport, plus de délinquance chez les jeunes », Recherches et

Prévisions, n°82, 2005

C.SABATIER et R.PFISTER, Transgression des règles par l'enfant dans la pratique

du hand ball en milieu scolaire, revue STAPS n°36, Presse universitaire de Grenoble

MEARD et S.BERTONE, Autonomie de l’élève et intégration des règles en éducation

physique, Paris, PUF, 1998

Textes institutionnels

Guide méthodologique de l'usage des activités physiques et sportives dans l'action

d’éducation, avril 2011

Livret d'accueil du CER de Cuinchy, septembre 2012

Projet de service du CER de Cuinchy, septembre 2010

Page 55: Le temps sport au CER de Cuinchy - enpjj.justice.fr

55

Règlement intérieur du CER de Cuinchy, septembre 2012

Cours/Conférences

Premières assises européennes du sport - Olympie les 21 et 22 mai 1999

B.JOLLY, « action éducative », ENPJJ, octobre 2012

F..AUDEBRAND : « les situations problèmes », ENPJJ, mars 2012

O.HIDRI NEYS : « Intervention sur l’entretien », cours Master 1ere année STAPS

Management du sport, octobre 2012