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LAW REFORM COMMISSION Issue Paper Aspects of Family Law [April 2014] Port Louis, Republic of Mauritius 4 th Floor, Cerné House Tel: (230) 212-3816/212-4102 Fax: (230) 212-2132 E-Mail: [email protected] URL http://lrc.gov.mu

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LAW REFORM COMMISSION

Issue Paper

Aspects of Family Law

[April 2014]

Port Louis, Republic of Mauritius

4th Floor, Cerné House

Tel: (230) 212-3816/212-4102

Fax: (230) 212-2132

E-Mail: [email protected]

URL http://lrc.gov.mu

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LAW REFORM COMMISSION

Chairperson : Mr. Guy OLLIVRY, QC, GOSK

Chief Executive Officer : Mr. Pierre Rosario DOMINGUE [Barrister]

Members : Mr. Satyajit BOOLELL, SC [Director of Public Prosecutions]

Mrs. Aruna D. NARAIN [Parliamentary Counsel]

Mr. Nicholas F. OHSAN BELLEPEAU [Deputy Master &

Registrar]

Mr. Rishi PURSEM, SC [Barrister]

Mr. Narendra APPA JALA, SA [Attorney]

Mrs. Wenda SAWMYNADEN [Notary]

Mrs. Luvishka SEEJORE BILTOO [Law Academic (UoM)]

Mrs. Daisy Rani BRIGEMOHANE [Civil Society]

Mr. Navin GUNNASAYA [Civil Society]

Secretary : Mrs. Saroj BUNDHUN

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Law Reform Cadre

Chief Executive Officer : Mr. Pierre Rosario DOMINGUE

Law Reform Officer : Mr. Sabir M. KADEL

: Dr. Goran GEORGIJEVIC

Administrative Support Staff

Secretary : Mrs. Saroj BUNDHUN

Confidential Secretary : Mrs. Neelamani BANSRAM

Senior Officer : Mrs. Marie Roselilette SOOBRAMANIA

Management Support Officer : Mrs. Kajal RAMDUT

Senior Office Attendant/Technical Assistant : Mr. Subhas CHUMMUN

Driver/Office Attendant : Mr. Claude François JEAN-PIERRE

Mr. Naraindranathsingh JANKEE

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About the Commission

THE LAW REFORM COMMISSION OF MAURITIUS consists of –

(a) a Chairperson, appointed by the Attorney-General;

(b) a representative of the Judiciary appointed by the Chief Justice;

(c) the Solicitor-General or his representative;

(d) the Director of Public Prosecutions or his representative;

(e) a barrister, appointed by the Attorney-General after consultation with the Mauritius Bar

Council;

(f) an attorney, appointed by the Attorney-General after consultation with the Mauritius Law

Society;

(g) a notary, appointed by the Attorney-General after consultation with the Chambre des

Notaires;

(h) a full-time member of the Department of Law of the University of Mauritius, appointed

by the Attorney-General after consultation with the Vice-Chancellor of the University of

Mauritius; and

(i) two members of the civil society, appointed by the Attorney-General.

Under the direction of the Chairperson, the Chief Executive Officer is responsible for all

research to be done by the Commission in the discharge of its functions, for the drafting of all

reports to be made by the Commission and, generally, for the day-to-day supervision of the staff

and work of the Commission.

The Secretary to the Commission is responsible for taking the minutes of all the proceedings of

the Commission and is also responsible, under the supervision of the Chief Executive Officer, for

the administration of the Commission.

The Commission may appoint staff on such terms and conditions as it may determine and it may

resort to the services of persons with suitable qualifications and experience as consultants to the

Commission.

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Executive Summary

Issue Paper “Aspects of Family Law”

[April 2014]

In the context of the review of the Code Civil Mauricien, the Commission has compared various

provisions of our Code on aspects of family law (“nullité du mariage pour violence et contrainte,

divorce par consentement mutuel, divorce pour faute, procédure de divorce, conséquences du

divorce pour les époux et notamment la prestation compensatoire, protection du logement

familial, courtage matrimonial”) with equivalent provisions in the French Civil Code.

This Issue Paper highlights some of the changes which can be made to our Code, and whether

there is a need to regulate “courtage matrimonial”.

The views of stakeholders are being sought on those aspects of the Code in need of reform.

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Law Reform Commission of Mauritius [LRC] Issue Paper «Aspects of Family Law» [April 2014] ---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

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Réforme du Droit de la famille : Thèmes divers

La nullité du mariage pour violence et contrainte

1. Il existe une identité partielle entre l’article 180 alinéa 1 de notre Code civil et l’article

180 alinéa 1 du Code civil français. Ainsi, les deux textes exigent que le consentement

des futurs époux soit libre, c'est-à-dire exempt de violence. Si ce n’est pas le cas, les

époux ou celui qui a été victime de la violence peuvent demander l’annulation du

mariage.

Néanmoins, on peut constater deux différences entre les articles susmentionnés :

Selon le texte français, outre les époux, le mariage contracté sous violence morale peut

aussi être attaqué par le Ministère public1.

Le texte français prend en considération non seulement la violence directe mais aussi la

violence indirecte, à savoir « l'exercice d'une contrainte sur les époux ou l'un d'eux, y

compris par crainte révérencielle envers un ascendant »2.

2. La possibilité que le Ministère public intervienne, introduite dans le Code civil français

lors d’une réforme en 2006, fait de la nullité du mariage pour violence et contrainte une

nullité relative pas comme les autres. Bien sûr, l’époux dont le consentement n’est pas

libre étant le titulaire du droit de demander l’annulation du mariage, la nullité en question

est une nullité relative. La possibilité de confirmer le mariage par une cohabitation

continue pendant six mois prouve elle aussi le caractère relatif de la nullité. Ici, « il ne

s'agit pas de faire respecter un ordre public social et matrimonial mais de protéger une

1 M. REBOURG, Prévention et répression des violences au sein du couple ou commises contre les mineurs. – A

propos de la loi n° 2006-339 du 4 avril 2006, La semaine juridique éd. G, n° 16/2006, act. 173, par. 1 2 REBOURG, note précit., par. 1

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personne »3, à savoir l’époux victime de la violence. Or, l’intervention du Ministère

public, absente de l’article 180 de notre Code civil, prouve que, outre l’intérêt particulier

de l’époux victime de la violence, l’intérêt général est aussi concerné par les mariages où

le consentement d’un des époux n’était pas libre. En effet, la réforme de 2006 « est venue

introduire l'ordre public où il n'y avait jusqu'ici qu'une protection du consentement et des

volontés privées par le biais d'une nullité relative, de protection »4. Ceci s’explique par le

fait qu’« au-delà de la liberté du mariage, c'est la liberté de la personne qui est en jeu,

gravement et la lutte contre les mariages forcés est évidemment une question d'intérêt

public »5. « Toutefois, bien qu'ouverte au Ministère public, l'action en nullité fondée sur

la contrainte n'est pas devenue pour autant une action en nullité absolue ordinaire, car,

outre qu'elle n'est pas ouverte à tout intéressé, le délai de prescription est resté

spécifique »6. Pour décrire cette nouvelle nullité hybride on parle de « nullité relative

d’ordre public »7. L’intervention du Ministère public vise à « pallier la peur des

représailles, qui empêche bien souvent les jeunes femmes contraintes au mariage de

demander la nullité »8. En effet, « les intéressées subissent parfois de telles pressions

familiales et sociales qu'elles ne sont pas en mesure d'agir »9.

Q : Eu égard à ce qui vient d’être dit, la question se pose de savoir s’il faut autoriser par

notre Code civil le Ministère public à demander l’annulation du mariage pour violence.

3. En droit mauricien des contrats, la simple crainte révérentielle envers le père, la mère ou

un autre ascendant n’est pas une cause de nullité du contrat. Ladite crainte n’est pas non

plus une cause de nullité du mariage, étant donné qu’il a toujours été admis que les juges

« devaient se laisser guider par les règles posées dans les articles 1111 à 1114 du Code

3 G. RAYMOND, Mariage. – Demandes en nullité. – Domaine et mise en œuvre, Jursiclasseur Code civil, art. 180 à

193, fasc. unique, novembre 2009, n° 115 4 Cons. const., 22 juin 2012, note V. LARRIBAU-TERNEYRE, Droit de la famille, n° 9/2012, comm. 132, par. 3

5 LARRIBAU-TERNEYRE, note précit., par. 3

6 LARRIBAU-TERNEYRE, note précit., par. 3

7 V. LARRIBAU-TERNEYRE, Le mariage, un peu, beaucoup… de plus en plus institution d’ordre public ?, Droit

de la famille, n° 6/2006, repère 6 8 D. FENOUILLET, Droit de la famille, Dalloz, 2008, 2

ème éd., p. 51, note de bas de page 1

9 REBOURG, note précit., par. 1

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civil »10

. En revanche, l’article 180 alinéa 1 du Code civil français autorise désormais

l’époux ayant consenti au mariage en raison de la crainte révérentielle envers un

ascendant à demander l’annulation du mariage. L’article 180 alinéa 1 consacre ainsi la

jurisprudence selon laquelle le mariage doit être annulé lorsque la crainte révérencielle

est source de contrainte privant l'un des époux de sa liberté de consentir 11

.

Q : Faut-il réformer notre Code civil en prévoyant que le mariage contracté en raison de

la crainte révérentielle envers un ascendant peut être annulé, la crainte révérencielle

étant susceptible de « peser sur la liberté de certains époux et plus particulièrement sur

des jeunes filles »12

?

4. Tant le droit mauricien que le droit français assurent la répression de la violence

intervenue lors de la célébration du mariage. « Peu importe la source de la menace (qu’il

s’agisse du conjoint lui-même ou d’un tiers) et le moyen employé (que la menace ait

suscité la crainte d’un mal personnel ou patrimonial, et qu’elle vise directement

l’intéressé ou ses proches). Il faut et il suffit que la contrainte exercée ait suscité chez

l’époux victime une crainte déterminante du consentement au mariage. »13

Néanmoins,

outre cette violence directe, le Code civil français prend en considération la contrainte,

c'est-à-dire la violence indirecte. Un arrêt de la Cour d’appel de Bordeaux du 21 février

2006 concernait une jeune fille d’origine étrangère qui était sous « la contrainte

permanente exercée par sa famille, son mari, son père et sa propre mère la traitant de »

prostituée en termes péjoratifs « pour stigmatiser son insuffisante soumission »14

. Le

mariage fut bien évidemment annulé. De façon similaire, dans un arrêt de la Cour d’appel

de Colmar du 28 avril 200515

, le mariage contracté sous la pression de la famille de la

fille fut annulé.

10

G. RAYMOND, Mariage. – Les conditions à réunir dans la personne des époux, Jurisclasseur Code civil, art. 144

à 147, fasc. unique, mars 2007, n° 65 11

T. civ. Montpelier, 16 juillet 1946, Gaz. Pal. 1946, 2. P. 183 ; 12

RAYMOND, op. cit., n° 68 13

FENOUILLET, op. cit., p. 50, n° 66 14

CA Bordeaux 21 fév. 2006, note V. LARRIBAU-TERNEYRE, Droit de la famille, n° 6/2007, comm. 121 15

CA Colmar, 25 avril 2005, note V. LARRIBAU-TERNEYRE, Droit de la famille, n° 1/2006, comm. 1

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Q : La question se pose donc en droit mauricien, la même que le Professeur Pierre

MURAT s’est posée en 2006 à propos du droit français16

, s’il faut inclure cette violence

indirecte consistant notamment dans des insultes et rabaissements psychologiques dans

le texte de l’article 180 du Code civil mauricien.

5. L’article 181 du Code civil mauricien prévoit une espèce de confirmation tacite du

mariage entaché de violence. La demande en nullité ne sera pas recevable, lorsqu’il y a

eu une cohabitation continue pendant six mois depuis le jour où la violence a cessé. En

France, « selon l'article 181 du Code civil, le délai de recevabilité de la demande en

annulation, qui est normalement de cinq ans à compter de la célébration du mariage, »

était, « en cas de cohabitation continuée des époux, de six mois après que l'époux a

acquis sa pleine liberté (…). Afin d'élargir les possibilités d'annulation du mariage, la loi

supprime cette exception et porte le délai à 5 ans tout en conservant le même point de

départ. L'article 183 du Code civil est également modifié. Ce délai uniforme de cinq ans,

respecte ainsi le délai de droit commun, prévu pour les nullités relatives (C. civ.,

art. 1304). »17

Q : La question se pose s’il est opportun de faire passer le délai de 6 mois prévu aux

articles 181 et 183 du Code civil mauricien à 5 ans.

16

P. MURAT, Proposition de loi sur les violences intrafamiliales : beaucoup de symboles pour quelle efficacité ?,

Droit de la famille n° 4/2006, repère 4 17

REBOURG, note précit., par. 1

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Le divorce

Divorce par consentement mutuel

6. L’article 238-4 du Code civil mauricien prévoit que l’homologation d’une convention de

divorce par consentement mutuel dépend de la réalité et de la liberté du consentement de

chacun des époux. Cet article reste muet sur le caractère éclairé du consentement des

époux. En revanche, en France, « le juge homologue la convention et prononce le divorce

s'il a acquis la conviction que la volonté de chacun des époux est réelle et que leur

consentement est libre et éclairé ».

Q : Ne faut-il pas prévoir dans le Code civil mauricien que l’homologation d’une

convention de divorce par consentement mutuel dépend, entre autres, du caractère

éclairé du consentement des époux ?

7. L’article 238-4 du Code civil mauricien dispose que le juge examine la demande en

divorce par consentement mutuel avec chacun des époux avant de les réunir. L’article en

question ne mentionne pas les avocats. En revanche, aux termes de l’article 250 du Code

civil français, après avoir entendu les époux le juge « appelle ensuite le ou les avocats ».

Q : Faut-il prévoir à l’article 238-4 de notre Code civil que le juge doit appeler et

entendre le ou les avocats après avoir entendu les époux ?

8. L’article 238-5 alinéa 2 du Code civil mauricien contient une règle louable tendant à

valoriser autant que faire se peut l’accord de volonté des ex-époux. Au lieu de refuser

purement et simplement l’homologation de la convention de divorce, le juge « peut aussi

faire supprimer ou modifier les clauses » de la convention de divorce par consentement

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mutuel « qui lui paraissent contraires à l’intérêt des enfants ou de l’un des époux »18

. En

revanche, notre Code passe sous silence quelques règles intéressantes qu’on retrouve

dans le Code civil français.

1) Aux termes de l’article 250-2 du Code civil français, « en cas de refus d'homologation

de la convention, le juge peut cependant homologuer les mesures provisoires (…) que les

parties s'accordent à prendre jusqu'à la date à laquelle le jugement de divorce passe en

force de chose jugée, sous réserve qu'elles soient conformes à l'intérêt du ou des

enfants ». « Une nouvelle convention peut alors être présentée par les époux dans un

délai maximum de six mois. »

Q : Faut-il prévoir dans notre Code civil qu’en cas de refus d’homologation de la

première convention une nouvelle peut être présentée par les époux dans un délai

maximum de six mois ?

L’article 250-3 du même Code ajoute : « A défaut de présentation d'une nouvelle

convention dans le délai fixé à l'article 250-2 ou si le juge refuse une nouvelle fois

l'homologation, la demande en divorce est caduque »19

.

2) L’article 278 du Code civil français contient une règle absente de la version actuelle de

notre Code civil : « En cas de divorce par consentement mutuel, les époux fixent le

montant et les modalités de la prestation compensatoire dans la convention qu'ils

soumettent à l'homologation du juge. Ils peuvent prévoir que le versement de la

prestation cessera à compter de la réalisation d'un événement déterminé. La prestation

peut prendre la forme d'une rente attribuée pour une durée limitée. » « Le juge, toutefois,

refuse d'homologuer la convention si elle fixe inéquitablement les droits et obligations

des époux. »

18

Le texte de notre Code ne précise pas si le consentement des époux est nécessaire pour que le juge procède ainsi.

Vide : S. THOURET, Divorce. – Divorce par consentement mutuel, Fasc. unique, JurisClasseur, Code civil, art. 230

à 232, juin 2013, n° 17 19

THOURET, fasc. précit., nn° 21 et 22

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L’article 279 du Code français élabore le rapport qu’entretiennent la prestation

compensatoire et le divorce par consentement mutuel : « La convention homologuée a la

même force exécutoire qu'une décision de justice. » « Elle ne peut être modifiée que par

une nouvelle convention entre des époux, également soumise à homologation. » « Les

époux ont néanmoins la faculté de prévoir dans leur convention que chacun d'eux pourra,

en cas de changement important dans les ressources ou les besoins de l'une ou l'autre des

parties, demander au juge de réviser la prestation compensatoire. »

Q : Faut-il réglementer la prestation compensatoire dans les divorces par consentement

mutuel afin de combler la lacune qui existe actuellement dans notre système juridique ?

Divorce pour faute

9. L’article 230 du Code civil mauricien et l’article 242 du Code civil français définissent de

façon similaire la faute-cause du divorce : il s’agit des faits constituant une violation

grave ou renouvelée des devoirs ou obligations du mariage et imputables à l’un des

époux. Or, le Code français exige, à la différence du nôtre, que ces faits « rendent

intolérable le maintien de la vie commune ».

Q : Faut-il ajouter à l’article 230 du Code civil mauricien l’exigence du caractère

intolérable du maintien de la vie commune ?

10. L’article 245-1 du Code civil français contient une règle absente de notre Code civil,

règle qui cherche à protéger l’intimité des ex-époux : « A la demande des conjoints, le

juge peut se limiter à constater dans les motifs du jugement qu'il existe des faits

constituant une cause de divorce, sans avoir à énoncer les torts et griefs des parties ».

Q : Faut-il incorporer la règle figurant à l’article 245-1 du Code civil français dans

notre Code civil ?

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Procédure de divorce

11. Le Code civil français contient un certain nombre de dispositions dont on ne retrouve pas

de pendant dans notre Code civil ni dans le Divorce and Judicial Separation Act.

12. Aux termes de l’article 248 du Code civil français, « les débats sur la cause, les

conséquences du divorce et les mesures provisoires ne sont pas publics ».

13. Selon l’article 249 du Code civil français, « si une demande en divorce doit être formée

au nom d'un majeur en tutelle, elle est présentée par le tuteur, avec l'autorisation du (…)

juge des tutelles. Elle est formée après avis médical et, dans la mesure du possible, après

audition de l'intéressé, (…) par (…) le juge ». « Le majeur en curatelle exerce l'action lui-

même avec l'assistance du curateur ».

Les articles 249-1, 249-2 et 249-4 du Code français ajoutent deux règles complémentaires

à l’article 249 :

« Si l'époux contre lequel la demande est formée est en tutelle, l'action est exercée contre

le tuteur ; s'il est en curatelle, il se défend lui-même, avec l'assistance du curateur. »

« Un tuteur ou un curateur ad hoc est nommé lorsque la tutelle ou la curatelle avait été

confiée au conjoint de la personne protégée. »

« Lorsque l'un des époux se trouve placé sous l'un des régimes de protection (…), aucune

demande en divorce par consentement mutuel ou pour acceptation du principe de la

rupture du mariage ne peut être présentée. »

Q : Faudrait-il incorporer ces règles dans le Code civil mauricien ?

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Conséquences du divorce pour les époux (et notamment la prestation compensatoire)

14. L’article 266 du Code civil français consacre une règle qui ne figure pas dans notre Code

civil : « Des dommages et intérêts peuvent être accordés à un époux en réparation des

conséquences d'une particulière gravité qu'il subit du fait de la dissolution du mariage soit

lorsqu'il était défendeur à un divorce prononcé pour altération définitive du lien conjugal

et qu'il n'avait lui-même formé aucune demande en divorce, soit lorsque le divorce est

prononcé aux torts exclusifs de son conjoint ».

Q : Faut-il ajouter à notre Code civil la règle sur la réparation des conséquences d’une

particulière gravité provoquées par un divorce pour rupture de la vie commune ou par

un divorce pour faute exclusive d’un époux ?

15. Selon l’article 265-2 du Code civil français, « les époux peuvent, pendant l'instance en

divorce, passer toutes conventions pour la liquidation et le partage de leur régime

matrimonial ». « Lorsque la liquidation porte sur des biens soumis à la publicité foncière,

la convention doit être passée par acte notarié ». En réalité, l’article 265-2 n’est qu’une

application particulière de l’article 268 du Code civil français. En effet, dans le but de

contractualiser autant que faire se peut le divorce20

l’article 268 du Code civil français

énonce une règle importante qui n’a pas d’homologue dans notre Code : « Les époux

peuvent, pendant l'instance, soumettre à l'homologation du juge des conventions réglant

tout ou partie des conséquences du divorce ». « Le juge, après avoir vérifié que les

intérêts de chacun des époux et des enfants sont préservés, homologue les conventions en

prononçant le divorce ».

Le domaine de l’article 268 du Code civil français dépasse, sans doute, la liquidation des

intérêts patrimoniaux des ex-époux. Outre les conventions portant sur le règlement des

intérêts patrimoniaux (la prestation compensatoire ou les pensions pour les enfants par

20

Vide : J. HAUSER, Ph. DELMAS SAINT-HILAIRE, Effets du divorce. – Conséquences du divorce pour les

époux. Effets d’ordre patrimonial. Prestation compensatoire. Dommages et intérêts, JurisClasseur, Code civil, art.

266 à 285-1, fasc. 10, septembre 2011, n° 8

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10

exemple), rentrent dans le champ d’application de l’article 268 les conventions

aménageant les conditions d'exercice de l'autorité parentale. Les conventions mentionnées

à l’article 268 du Code français peuvent donc dépasser le champ patrimonial21

.

Depuis la réforme de 2004, le juge français prononce la liquidation et le partage des

intérêts patrimoniaux des ex-époux à titre subsidiaire, ce dont témoigne explicitement le

texte de l'article 267 du Code civil22

. En effet, le Code civil français cherche à encourager

les époux à régler eux-mêmes, dans la mesure du possible et pendant la procédure de

divorce, les conséquences de la rupture23

.

« Dès lors, il ne s'agit pas seulement d'inciter à la liquidation et au partage conventionnel

du régime matrimonial mais aussi (…) d'inciter à régler toutes les conséquences

matérielles du divorce, même si elles n'ont pas une incidence obligatoire sur la

liquidation, comme par exemple la question de la prestation compensatoire ou des

pensions pour les enfants ou encore le sort du logement, mais aussi les conséquences

extra-patrimoniales, comme l'aménagement de l'exercice de l'autorité parentale ou la

conservation du nom du conjoint. »24

Q : Faut-il autoriser les époux mauriciens à soumettre, pendant l'instance, à

l'homologation du juge des conventions réglant tout ou partie des conséquences du

divorce ?

16. Les articles 254 et suivants du Code civil mauricien régissent la pension alimentaire.

Elle est due par l’époux contre lequel le divorce pour faute est prononcé et par l’époux

qui a pris l’initiative du divorce pour rupture de la vie commune25

(art. 254). Cette

21

V. LARRIBAU-TERNEYRE, Effets du divorce. – Conséquences du divorce pour les époux. – Effets d’ordre

patrimonial. – Liquidation et partage des intérêts patrimoniaux des époux, JurisClasseur, Code civil, art. 266 à 285-

1, fasc. 5, décembre 2012, n° 5 22

« À défaut d'un règlement conventionnel par les époux, le juge (...) ordonne la liquidation et le partage de leurs

intérêts patrimoniaux ». 23

LARRIBAU-TERNEYRE, fasc. précit., n° 15 24

LARRIBAU-TERNEYRE, fasc. précit., n° 16 25

En revanche, en France, « la loi du 26 mai 2004 a dissocié les conséquences du divorce de la question des torts,

dans un souci de pacification du divorce ». (LARRIBAU-TERNEYRE, fasc. précit., n° 8)

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pension incarne le devoir de secours après le divorce. L’article 270 alinéa 1 du Code civil

français rompt avec cette pratique : « Le divorce met fin au devoir de secours entre

époux. » L’alinéa 2 du même article introduit le concept de prestation compensatoire :

« L'un des époux peut être tenu de verser à l'autre une prestation destinée à compenser,

autant qu'il est possible, la disparité26

que la rupture du mariage crée dans les conditions

de vie respectives ». « La prestation compensatoire devient le pivot du rééquilibrage des

intérêts des ex-époux, et ce, en devenant la technique de référence dans toutes les formes

de divorce, y compris (…) le divorce pour faute à l’égard de l’époux condamné à ses torts

exclusifs. »27

« Il s’agit dorénavant de détacher des torts respectifs de chaque époux dans

le divorce, l’utilisation des instruments du rééquilibrage de l’après divorce

patrimonial »28

. Cette prestation a un caractère forfaitaire. Elle prend la forme d'un

capital dont le montant est fixé par le juge.

17. L’article 270 alinéa 3 du Code civil français contient une règle qui pourrait être

transposée en droit mauricien : « Toutefois, le juge peut refuser d’accorder une telle

prestation si l’équité le commande, (…) lorsque le divorce est prononcé aux torts

exclusifs de l’époux qui demande le bénéfice de cette prestation, au regard des

circonstances particulières de cette rupture ». Cette règle établit « une sorte d’indignité

dont la jurisprudence aura à déterminer les limites puisqu’il est fait référence à

l’équité »29

.

L’article 274 du Code français précise :

« Le juge décide des modalités selon lesquelles s'exécutera la prestation compensatoire

en capital parmi les formes suivantes : 1° Versement d'une somme d'argent, (…) ; 2°

Attribution de biens en propriété ou d'un droit temporaire ou viager d'usage, d'habitation

ou d'usufruit, le jugement opérant cession forcée en faveur du créancier. Toutefois,

26

L’appréciation de cette disparité relève du pouvoir souverain d’appréciation des juges du fond. (Cass. 1ère

civ. 6

mars 2013, Dr. famille, 2013, comm. 51, obs. V. LARRIBAU-TERNEYRE ; Cass. 1ère

civ. 30 janv. 2013, Dr.

famille, 2013, comm. 51, obs. V. LARRIBAU-TERNEYRE) 27

HAUSER, DELMAS SAINT-HILAIRE, fasc. précit., nn° 2 et 8 28

HAUSER, DELMAS SAINT-HILAIRE, fasc. précit., n° 8 29

HAUSER, DELMAS SAINT-HILAIRE, fasc. précit., n° 11

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l'accord de l'époux débiteur est exigé pour l'attribution en propriété de biens qu'il a reçus

par succession ou donation. »

18. L’article 275 du Code civil français reflète un humanisme et une compréhension pour le

débiteur :

« Lorsque le débiteur n'est pas en mesure de verser le capital dans les conditions prévues

par l'article 274, le juge fixe les modalités de paiement du capital, dans la limite de huit

années, sous forme de versements périodiques indexés selon les règles applicables aux

pensions alimentaires.

Le débiteur peut demander la révision de ces modalités de paiement en cas de

changement important de sa situation. A titre exceptionnel, le juge peut alors, par

décision spéciale et motivée, autoriser le versement du capital sur une durée totale

supérieure à huit ans.

Le débiteur peut se libérer à tout moment du solde du capital indexé.

Après la liquidation du régime matrimonial, le créancier de la prestation compensatoire

peut saisir le juge d'une demande en paiement du solde du capital indexé. »

19. Le législateur français se soucie aussi de certains créanciers jugés particulièrement

vulnérables : « A titre exceptionnel, le juge peut, par décision spécialement motivée,

lorsque l'âge ou l'état de santé du créancier ne lui permet pas de subvenir à ses besoins,

fixer la prestation compensatoire sous forme de rente viagère. »30

Cette rente ressemble à la pension alimentaire, ce que l’article 276-3 du Code civil

français ne manque pas de souligner en autorisant la révision/la suspension et la

suppression : « La prestation compensatoire fixée sous forme de rente peut être révisée,

30

L’article 276-1 contient des précisions importantes sur cette rente : « La rente est indexée ; l'indice est déterminé

comme en matière de pension alimentaire. » « Le montant de la rente avant indexation est fixé de façon uniforme

pour toute sa durée ou peut varier par périodes successives suivant l'évolution probable des ressources et des

besoins. »

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suspendue ou supprimée en cas de changement important dans les ressources ou les

besoins de l'une ou l'autre des parties. » « La révision ne peut avoir pour effet de porter la

rente à un montant supérieur à celui fixé initialement par le juge. »

20. Aux termes du dernier alinéa de l’article 270 du Code civil français, le juge peut refuser

d'accorder une prestation compensatoire si l'équité le commande :

-en considération des ressources et besoins des époux ;

-lorsque le divorce est prononcé aux torts exclusifs de l'époux qui demande le bénéfice de

cette prestation, au regard des circonstances particulières de la rupture.

21. Selon notre Code civil, la pension alimentaire peut être révisée en fonction des ressources

et besoins de chacun des époux (art. 255). L’article 271 du Code civil français prend les

ressources et besoins des époux au moment même de la fixation de la prestation

compensatoire31

, ce qui se comprend aisément eu égard à sa nature forfaitaire : « La

prestation compensatoire est fixée selon les besoins de l'époux à qui elle est versée et les

ressources de l'autre en tenant compte de la situation au moment du divorce et de

l'évolution de celle-ci dans un avenir prévisible. » Le texte français dresse par la suite la

liste d’éléments qui guideront le juge dans sa prise de décision sur la prestation

compensatoire32

.

31

HAUSER, DELMAS SAINT-HILAIRE, fasc. précit., nn° 27 s. 32

Le juge prend en considération notamment :

- la durée du mariage ;

- l'âge et l'état de santé des époux ;

- leur qualification et leur situation professionnelles ;

- les conséquences des choix professionnels faits par l'un des époux pendant la vie commune pour l'éducation des

enfants et du temps qu'il faudra encore y consacrer ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la

sienne ;

- le patrimoine estimé ou prévisible des époux, tant en capital qu'en revenu, après la liquidation du régime

matrimonial ;

- leurs droits existants et prévisibles ;

- leur situation respective en matière de pensions de retraite en ayant estimé, autant qu'il est possible, la diminution

des droits à retraite qui aura pu être causée, pour l'époux créancier de la prestation compensatoire, par les

circonstances visées au sixième alinéa.

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22. L’article 272 alinéa 2 du Code civil français contient une précision très

importante : « Dans la détermination des besoins et des ressources, le juge ne prend pas

en considération les sommes versées au titre de la réparation des accidents du travail et

les sommes versées au titre du droit à compensation d'un handicap ».

23. Selon notre Code civil, à la mort de l’époux débiteur la charge de la pension passe à ses

héritiers (art. 257). Il s’agit donc d’une charge personnelle. En revanche, l’article 280

alinéa 1 du Code civil français prévoit qu’« à la mort de l'époux débiteur, le paiement de

la prestation compensatoire, quelle que soit sa forme, est prélevé sur la succession. Le

paiement est supporté par tous les héritiers, qui n'y sont pas tenus personnellement,

dans la limite de l'actif successoral et, en cas d'insuffisance, par tous les légataires

particuliers, proportionnellement à leur émolument, sous réserve de l'application de

l'article 927 ». Néanmoins, aux termes de l’article 280-1 alinéa 1, « par dérogation à

l'article 280, les héritiers peuvent décider ensemble de maintenir les formes et modalités

de règlement de la prestation compensatoire qui incombaient à l'époux débiteur, en

s'obligeant personnellement au paiement de cette prestation. A peine de nullité, l'accord

est constaté par un acte notarié. Il est opposable aux tiers à compter de sa notification à

l'époux créancier lorsque celui-ci n'est pas intervenu à l'acte ».

Q : Pour le cas de divorce, faut-il remplacer la pension alimentaire, qui existe

actuellement dans notre droit civil, par la prestation compensatoire en s’inspirant des

solutions du Code civil français ?

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La protection du logement familial

24. L’article 216 du Code civil mauricien dispose que les époux ne peuvent l’un sans l’autre

disposer des droits par lesquels est assuré le logement de la famille33

, ni des meubles dont

il est garni. Cet article assure ainsi la protection de tous les droits par lesquels le logement

de famille est assuré, à savoir la propriété de la maison (appartement) et le bail34

. Le

Code civil mauricien exige donc une volonté conjointe des époux et en fait dépendre la

validité d’un acte de disposition portant sur le logement de famille et les meubles le

garnissant35

. La notion d’acte de disposition englobe la vente, l’échange, la donation, le

bail ; si le logement de la famille est loué, la cession du bail et la résiliation du bail en

font aussi partie. Les époux doivent être d’accord non seulement sur la conclusion de

l’acte de disposition mais aussi sur son contenu36

.

« En exigeant le double consentement des époux pour tout acte de disposition des droits

par lesquels est assuré le logement de la famille, le législateur manifeste un souci d’action

commune qui garantit un contrôle mutuel de l’un à l’égard de l’autre. »37

Ainsi, la règle

analysée du Code civil mauricien empêche qu’un époux mette unilatéralement et

arbitrairement en péril l’intérêt d’autres membres de sa famille.

L’article 216 alinéa 3 du Code civil mauricien, n’ayant pas d’homologue dans le Code

civil français, exclut la protection du logement familial « lorsque les époux ont opté pour

le régime légal de séparation de biens régi par les dispositions des articles 1475 à 1478 ».

Ainsi, dans l’affaire Marc Alain Bouton contre The Mauritius Commercial Bank

Limited38

, jugée par la Cour suprême de Maurice, le requérant avait affirmé que son

33

Seule la résidence principale est considérée comme le logement de la famille, la résidence secondaire ne l’est

jamais (Cass. 1ère

, 19 oct. 1999, Bull. civ. I, n° 284). 34

J. REVEL, Les régimes matrimoniaux, Dalloz, 4ème

éd. 2008, pp. 54-55, n° 67 35

L’article 216 al. 2 du Code civil mauricien prévoit la nullité relative pour le cas où l’acte de disposition serait

passé sans le consentement d’un des époux. - L’affaire J. Murugan contre L. Murugan and Ors.35

, jugée par la Cour

suprême de Maurice, reposait sur la vente du logement familial par le mari sans le consentement de l’épouse.

Néanmoins, la vente ne fut pas annulée pour une raison d’ordre procédurale : la demande d’annulation n’a pas été

faite dans les délais prévus à l’article 216 du Code civil mauricien. (2003 SCJ 169) 36

REVEL, op. cit., pp. 58, n° 70 37

REVEL, op. cit., pp. 55-56, n° 68 38

2005 SCJ 60

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épouse avait consenti une sûreté au profit de la banque sans son consentement et que cette

sûreté devrait être annulée. Néanmoins, dans le présent cas l’épouse n’avait pas à

demander le consentement de son époux : ils étaient mariés sous le régime de séparation

de biens et les deux premiers alinéas de l’article 216 ne s’appliquent pas à de tels époux.

En revanche, dans les arrêts Sondhoo contre Hong Kong and Shangai Banking

Corporation Ltd and Anor39

et Aubeelock contre Aubeelock and Ors.40

, la Cour suprême

de Maurice considère que, si les époux sont mariés sous le régime légal de communauté,

le consentement des deux époux est nécessaire même lorsque le logement familial est

assuré par le bien propre à un des époux.

Ainsi, en droit mauricien, « le logement de la famille échappe à la maîtrise de l’époux qui

en serait l’unique propriétaire41

, à condition que les époux soient mariés sous le régime de

la communauté de biens. En revanche, et curieusement, l’époux-propriétaire exclusif du

logement familial ne connait aucune restriction juridique lorsque les époux sont mariés

sous le régime de séparation de biens.

Q : Faut-il supprimer l’article 216-3 du Code civil mauricien ?

39

1999 MR 160 40

1999 MR 199 41

A. KARM, Mariage. – Organisation de la communauté conjugale et familiale. – Communauté de résidence (art.

215 al. 2 et 3), JurisClasseur, Code civil, art. 212 à 215, fasc. 30, août 2011, n° 41

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Le courtage matrimonial

25. La mise en contact de deux personnes en vue d’une éventuelle célébration du mariage

n’est pas un phénomène inconnu à Maurice.42

Le courtage matrimonial n’est pas

réglementé à Maurice. En France, « jusqu'à une époque récente le législateur n'avait (…)

pas jugé utile d'intervenir dans une opération qu'il considérait comme soumise en tous

points au droit commun des contrats »43

. « Devant le développement de ces activités et

certains abus, après plusieurs projets, la loi est venue enfin réglementer pour partie cette

activité. »44

En France, le courtage matrimonial est réglementé dans la loi n° 89-421 du

23 juin 1989 (Journal Officiel 29 Juin 1989, art. 6). Plus précisément, cette loi réglemente

le contrat de courtage matrimonial. Il est utile de remarquer que « l'arrivée de l'internet a

encore compliqué les choses, les offres de rencontres et les serveurs les proposant

concurrençant directement les professionnels classiques, encore que, sur leur site, ceux-ci

soutiennent souvent que le taux de réussite (difficile à chiffrer ?) serait supérieur quand

une véritable agence rapproche les candidats »45

.

« La loi n° 89-421 du 23 juin 1989 (JCP G 1989, III, 62881) (…) comporte un très long

article 6 divisé en cinq parties qui concerne le courtage matrimonial. Il faut compléter cet

article par les dispositions pénales de référence prévues à l'article 9 de la même loi (et

mises à jour du Code pénal par une loi du 16 décembre 1992 faisant désormais référence

aux articles 313-1, 313-7 et 313-8 du Code pénal) et par celles de l'article 14 prévoyant

une application dans un délai de six mois suivant la publication du texte. Il a été

accompagné d'un décret n° 90-422 du 16 mai 1990(Journal Officiel 22 Mai 1990) fixant

le contenu de certaines formalités. Ces dispositions ne présentent pas une véritable

originalité par rapport aux textes désormais courants de protection des

consommateurs. »46

42

Vide http://www.marryme.mu/terms.php 43

J. HAUSER, Mariage.-Courtage matrimonial, Jurisclasseur Code civil, art. 144 à 147, fasc. 20, août 2009, n° 2 44

HAUSER, fasc. précit., n° 2 45

HAUSER, fasc. précit., n° 2 46

HAUSER, fasc. précit., n° 18

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18

26. Le § I de l'article 6 de la loi n° 89-421 du 23 juin 1989 circonscrit l'effet du texte aux

offres de rencontres en vue de la réalisation d'un mariage ou d'une union stable proposée

par un professionnel.

Le § III de l’article 6 de la loi de 1989 impose des mentions obligatoires47

telles que nom,

adresse, siège social, numéro de téléphone du courtier et sexe, âge, situation familiale,

secteur d'activité professionnelle, région de résidence et qualités de la personne

recherchée par elle pour le contractant. Le décret d'application (D. n° 90-422, 16 mai

1990, art. 1er) reprend et précise ces mentions. « Pour répondre à des reproches

fréquemment présentés invoquant des annonces fictives pour attirer d'éventuels clients, le

texte impose que le professionnel puisse prouver le caractère sérieux de l'offre en

justifiant de l'existence d'un accord de la personne présentée sur le contenu de l'annonce

et sa diffusion. »48

Il n’est pas inutile de remarquer que l’offre de rencontre dont fait mention la loi 1989

n’est pas une véritable offre en ce qui concerne la relation entre le client de l’agence

matrimoniale et la tierce personne intéressée, mais plutôt une espèce d’invitation à entrer

en pourparlers49

émise au profit du client en vue de la célébration d’un éventuel mariage.

En effet, la publication d'une annonce matrimoniale ne constitue pas une offre publique

liant l'offrant à l'égard du premier acceptant. « L’offre » en question comporte une

réserve d'agrément50

en raison de l’élément intuitu personae de l’opération.

La loi de 1989 ne s’applique qu’aux professionnels qui font des offres de rencontre à des

simples particuliers, c'est-à-dire des consommateurs. Elle « ne s'appliquera donc pas à

toutes les personnes qui, à titre non professionnel, se chargent de rechercher une

47

Selon la cour d'appel de Lyon (1er

juill. 1992) l'offre qui permettait d'accéder par minitel à un fichier national et

régional moyennant le versement d'une somme au centre-serveur et dont les annonces proposées ne comportaient

pas toutes les mentions requises ne tombait pas néanmoins sous le coup de la loi. La Cour de cassation en a jugé

autrement (Cass. crim., 28 sept. 1994, n° 92-84.302 : JurisData n° 1994-001994 ; Contrats, conc. consom. 1995,

comm. 44, obs. G. RAYMOND). 48

HAUSER, fasc. précit., n° 24 49

Comp. avec : G. GEORGIJEVIC, Droit civil mauricien, Les contrats, partie générale, Editions universitaires

européennes, 2011, p. 47 50

Cass. 2ème

civ. 28 avr. 1993, obs. J. HAUSER, RTD civ. 1995, p. 604

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19

personne convenant pour une union projetée »51

. Les tantes, cousins et cousines sont donc

exclus du champ d’application de cette loi… Le Cour de cassation s’est chargée de

l’interprétation de la notion de « professionnel »52

.

27. Selon la loi de 1989 relative au courtage matrimonial, l’offre de rencontre émise par le

professionnel doit viser la réalisation d'un mariage ou d'une union stable53

. Néanmoins,

les auteurs d’envergure, tel que CARBONNIER, se sont montrés hostiles à l’introduction

de l’union stable dans le texte de loi. « Comme l'intention de stabilité n'est pas plus

contrôlable que la stabilité elle-même n'est susceptible d'être garantie, on peut se

demander si une légitimité ne risque pas d'être accordée à des activités que le Code

pénal réprime comme activité de proxénète. »54

28. La loi française réglemente les annonces publiques liées aux activités de courtage

matrimonial, ce qui semble très important : ces annonces représentant une véritable

publicité et un sujet de nombreuses contestations en ce qui concerne la réalité des offres

publiées55

. « À côté des indispensables renseignements sur le professionnel lui-même (L.

n° 89-421, 23 juin 1989, art. 6-III : Journal Officiel 29 Juin 1989), il est donc plus

original de voir le texte, un peu comme dans certaines offres publiques d'achat, imposer

des mentions obligatoires informatives sur l'offre publiée : sexe, âge, situation familiale,

secteur d'activité professionnelle, région de résidence de la personne concernée, qualités

de la personne recherchée par elle »56

. « Pour répondre à des reproches fréquemment

présentés invoquant des annonces fictives pour attirer d'éventuels clients, le texte impose

que le professionnel puisse prouver le caractère sérieux de l'offre en justifiant de

l'existence d'un accord de la personne présentée sur le contenu de l'annonce et sa

diffusion ».

51

HAUSER, fasc. précit., n° 22 52

Cass. 1ère

civ. 21 févr. 1995, n° 93-12.991 : JurisData n° 1995-000352 ; Contrats, conc. consom. 1995, comm.

112, obs. G. RAYMOND ; D. 1995, inf. rap. p 97 ; RTD civ. 1995, p. 603, obs. J. HAUSER 53

CA Dijon, 27 mai 1992 : RTD civ. 1993, p. 327, obs. J. HAUSER 54

In HAUSER, fasc. précit., n° 23 55

HAUSER, fasc. précit., n° 24 56

HAUSER, fasc. précit., n° 24

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29. L'offre de rencontres émise par un professionnel doit faire l'objet d'un contrat écrit et en

double exemplaire ; l'un des deux exemplaires doit être impérativement remis au

contractant. La violation de cette obligation constitue une infraction pénale57

.

30. Quant au contenu obligatoire du contrat, la loi française oblige à mentionner le nom du

professionnel, son adresse ou celle de son siège social, la nature des prestations fournies,

ainsi que le montant et les modalités de paiement du prix. Le décret d'application n° 90-

422 du 16 mai 199058

, quant à lui, va plus loin encore pour ce qui est des mentions

relatives à la personne recherchée. Le décret précise qu’une annexe doit mentionner la

catégorie d'âge, la région de résidence, la situation familiale et professionnelle ainsi que

les autres qualités estimées essentielles par le cocontractant.

L’omission d’une des mentions prévues par la loi et devant figurer dans le contrat

débouche sur une nullité relative. En revanche, l'omission des mentions de l'annexe sera

seulement passible d'une peine d'amende prévue pour les contraventions de 5e classe59

.

31. La durée du contrat est également fixée par la loi afin d’éviter des engagements trop

longs révélant l'inertie ou l'inefficacité du professionnel. Le contrat est donc

impérativement à durée déterminée ; cette durée ne peut en aucun cas excéder un an. Le

renouvellement par tacite reconduction n’est pas envisageable60

.

32. La résiliation pour motif légitime doit être prévue au contrat. Le motif légitime pourrait

être, selon les travaux parlementaires, la maladie, l'accident ou le changement de

résidence ou encore la non-présentation de candidats répondant au profil souhaité ou

enfin d'avoir trouvé un compagnon ou une compagne par ses propres moyens61

.

57

D. n° 90-422, 16 mai 1990, art. 4, 2° 58

Journal Officiel 22 Mai 1990 59

D. n° 90-422, 16 mai 1990, art. 4, 1° : Journal Officiel 22 Mai 1990 60

Cass. 1ère

civ. 24 juin 1997, n° 95-18.524 : Dr. famille 1997, comm. 115, obs. H. LECUYER 61

HAUSER, fasc. précit., n° 25

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33. Selon la loi française, le cocontractant du professionnel peut revenir sur son engagement

dans un délai de 7 jours62

. De plus, il est interdit de recevoir un paiement ou un dépôt

sous quelque forme que ce soit avant l'expiration du délai63

. Aucune indemnité n'est due

en cas d'exercice de ce droit de rétractation.

Q : Faut-il réglementer le courtage matrimonial ?

62

La Cour de cassation française a sanctionné par la nullité le fait que l'inexactitude de la date portée au contrat ne

permettait pas de s'assurer du respect des dispositions d'ordre public sur le délai de rétractation (Cass. 1ère

civ. 13

janv. 1998, n° 96-12.047, Dr. famille 1998, comm. 48, obs. H. LECUYER). 63

La violation de cette obligation constitue une infraction pénale : D. n° 90-422, 16 mai 1990, art. 4 et

notamment Cass. crim. 10 janv. 2012, note G. RAYMOND, Contrats, Concurrence, Consommation, n° 5/2012,

comm. 139