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HAMLETde William Shakespeare, mis en scène par Daniel ... · Hamlet est un personnage complexe qui ne recule pas devant la vérité puisqu’il accepte d’écouter le spectre. Dans

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HAMLETde William Shakespeare, mis en scène par Daniel Mesguich au Théâtre de l’Epée de Bois – Cartoucherie de Vincennes – du 4 au 30 novembre 2014 du mardi au samedi à 20h30 – Dimanche à 16h00

Publié le 09 novembre 2014 par theatreauvent

Auteur : William Shakespeare Artistes : William Mesguich, Anne de Broca, Zbigniew Horocks, Philippe Maymat, Rebecca Stella, Eric Bergeonneau, Yann Richard, Florent Ferrier, Marion Fremont, Sarah Gabrielle, Tristan Willmott, Joëlle Lüthi Metteur en scène : Daniel Mesguich

Il est impossible d’autopsier HAMLET, la pièce la plus connue de Shakespeare sur laquelle des milliers d’érudits se sont penchés.

C’est l’histoire d’un homme qui a la révélation du meurtre de son père par son oncle et qui reçoit l’ordre par la voix d’un spectre de le venger. Cette révélation trouble d’autant plus l’esprit du héros que ce dernier avait l’intuition de cette infamie, étant déjà passablement dégoûté par le mariage de sa mère avec son oncle, dès le décès de son père.

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Hamlet est un personnage complexe qui ne recule pas devant la vérité puisqu’il accepte d’écouter le spectre. Dans sa position de voyant qui sait ce qui se cache derrière la bonhomie de son oncle, la perception de son entourage devient plus aigüe. En proie à une lucidité ténébreuse, il simule la folie pour mieux déchirer progressivement, les masques de ses proches. La vengeance qu’il doit accomplir étant inéluctable, il se trouve malgré lui dans la position d’un homme dont la vie des autres dépend. C’est ce malgré lui qui fait obstruction à son action immédiate.

Tant que les personnages vivent dans l’illusion, celle du bonheur, les rapports amoureux et filiaux, tout va bien, mais dès lors qu’un coin du voile se soulève signifiant la présence du mal et du vice, tout s’effondre.

Cette pièce parle dans le fond des limites psychiques humaines et de ces émotions qui n’ont pas d’autre choix que de passer par le langage de la folie, ou s’exorciser au théâtre.

C’est à travers le regard d’Hamlet que Daniel MESGUICH conçoit sa mise en scène aussi déconcertante que le personnage. Il fait sortir du miroir les doubles d’Hamlet et d’Ophélie. Hamlet et Ophélie aussi fous l’un que l’autre peuvent bien être plusieurs. Dans un monde où l’apparence est de rigueur, Hamlet décide de jouer son personnage aux yeux de tous et même de lui-même, ce qu’exprime fort bien William MESGUICH insaisissable.

La fameuse tirade d’Hamlet « être ou ne pas être … » que l’on attend comme la chute du Niagara sort confusément de la bouche du comédien qui doit assurer la pantomime du meurtre du père devant le roi et la reine. Petite déception vite oubliée lorsque dans la position du penseur de Rodin, le vrai Hamlet « s’y colle » enfin.

Plusieurs lits font leur apparition, lit de couple, lit d’enfant. Polonius devient un personnage haut en couleur. Une scène particulièrement violente nous montre Hamlet jetant dans les bras de sa mère le cadavre de Poloniums.

C’est Hamlet qui s’empare d’Hamlet sous les feux de ses fantasmes. Il est omniprésent dans ce spectacle, sous les traits de William MESGUICH, le socle et l’enclume dans la voix, et la prestance d’un Gérard Philipe.

Il y a une leçon de théâtre dans la pièce que donne Hamlet aux comédiens qui dit notamment que la scène doit offrir à la vie un miroir. Celui qu’offre Daniel MESGUICH est très personnel. Ce sont des éclats de verre saillants mais solides qui tendent vers le rêve. Entrée et sortie, nous retiendrons au final, cette vision d’Hamlet jouant au ballon devant son beau-père et sa mère, c’est la plus suggestive, la plus impertinente.

Avec une belle distribution de comédiens, toute la mise en scène d’Hamlet par Hamlet, dérange, déconcerte, interroge, mais ne peut laisser indifférent.

Paris, le 9 Novembre 2014 Evelyne Trân

 

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Quoi de neuf ? “Hamlet“, encore et toujours, pour Daniel Mesguich… Quatrième fois, en presque quarante ans, que l’homme de théâtre se penche sur ce monument du patrimoine mondial de l’art dramatique. Quatre décennies qu’il tente d’en percer les mystères, d’en extraire la substantifique moelle, qu’il tricote et détricote chaque scène, affine les contours de chaque personnage, retraduit les plus infimes répliques. A l’Epée de Bois de la Cartoucherie, alors même qu’il a déjà promis de remettre son ouvrage sur le métier, jugeant impossible la finalité de l’entreprise, il en expose sa vision 2014. Une étape de travail donc (si l’on se fie à la note d’intention…), de facture classique mais inspirée, offrant au spectateur un fort joli songe d’“Hamlet“, teinté de rouge et or, onirique, envoûtant, souvent drôle, porté par une distribution impeccable, William Mesguich en tête (superbe technique et vigueur de jeu), ainsi qu’une adaptation de qualité exceptionnelle.

Car rarement, selon nous, se présente l’occasion d’entendre Shakespeare de la sorte. Bien sûr, dans sa traduction, Daniel Mesguich s’attache à rester au plus près du texte originel , à respecter le ton, l’esprit du dramaturge anglais qu’il maîtrise totalement, mais en féru de lettres, amoureux de notre langue, il compose également un script français extrêmement exigeant, au vocabulaire et aux tournures savamment étudiés, littéraire mais pas ampoulé, fluide et vivant, poétique, élégant et plein d’humour, jouant avec les mots. Nos mots. Conférant ainsi à l’ouvrage une puissance, une limpidité, une grâce textuelle assez peu commune….

Se saisissant de cette matière première délectable, il imagine, afin de narrer les tourments du prince du Danemark simulant la folie, s’employant à venger son père assassiné par un oncle désireux d’hériter de la couronne et d’épouser la reine (nous vous épargnerons ici les détails du pitch connu de tous…), une série de tableaux plutôt épurés aux images fortes et symboliques. Peu de décor. Un cadre de scène doré se dupliquant de temps à autre sur le plateau (théâtre dans le théâtre…). Une nuit profonde et étoilée de laquelle surgissent les protagonistes. Leur double aussi, parfois, pour des incarnations à deux voix troublantes et signifiantes. Hamlet se voit même prolongé de l’enfant qu’il était. Belles (et bonnes !) idées. Gertrude dans sa baignoire, Ophelia dans son lit de fillette, le traître Claudius dans une couche royale surdimensionnée… Nimbée de cette ambiance fantasmatique, mystérieuse et électrique, l’action se déroule jusqu’à l’issue tragique, ponctuée de virgules sonores un peu trop emphatiques à notre goût, en décalage avec le reste de la proposition, plus subtile. Mais ce sera là notre unique réserve.

Voilà qui fait magnifiquement théâtre, et qui a par ailleurs le bon goût d’être concis (le spectacle dure 2h45 quand certaines versions de l’oeuvre frôlent les 5 heures…).

N’hésitez pas !

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     Focus, Théâtre — 11 novembre 2014 17 h 14 min

Quand Hamlet vire Joker Posted by Hadrien Volle

Copyright : BM Palazon

Au théâtre de l’Epée de Bois, Daniel Mesguich met en scène Hamlet de Shakespeare, dans sa propre traduction. Le drame est entier, le public observe ainsi la descente vers la folie du prince du Danemark, après que son oncle a fait tuer son père et a épousé sa mère. Ce mythe, régulièrement adapté au théâtre, trouve ici toute son essence classique.

La mise en scène est construite en dualité. L’ambiance de départ est à la fois glaciale et envoûtante : les lumières, tantôt monochromes, tantôt multicolores, la scène coupée en deux par une diagonale composée d’un tapis rouge, la toile du fond de scène composée d’étoiles, contribuent à établir ces changements entre chaud et froid dans l’ambiance royalo-spectrale du drame. Entre chaque scène, le décor glisse, mené avec entrain par les acteurs.

La dualité existe aussi grâce aux corps des personnages, des paires d’acteurs jouent certains rôles importants. Ils permettent ainsi au spectateur de voir le corps du comédien et la manière dont celui-ci se perçoit. On pense notamment à Hamlet qui se voit en l’apparence d’un enfant lorsque ses désirs surgissent de son être. On pense

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aussi à une Ophélie double, tout aussi impressionnante. On oscille ainsi un peu plus dans la construction de la folie qui finira par habiter chacun des protagonistes. Mesguich revisite la dimension fantastique au profit d’une dimension clairement psychanalytique de la pièce. On retient particulièrement la scène où Hamlet fait venir les comédiens pour rejouer le fratricide devant son oncle coupable : les acteurs qui vont incarner ledit oncle et la reine sont les mêmes que les incriminés, mais non encore costumés.

Copyright : BM Palazon

La dualité ressort encore grâce au mélange du jeu des comédiens. Il peut être dramatique et burlesque, comme Polonius, coiffé d’une perruque orange et affublé d’un maquillage très prenant, faisant face à Claudius, grand et grave, sans fard.

Le prince Hamlet lui-même varie entre les deux possibilités. Joué par William Mesguich, il est à la fois adolescent espiègle – jonglant avec un ballon de foot – et Joker, ennemi juré de Batman-Claudius et de l’humanité entière. Parfois, il est dans une exagération telle qu’il en devient grandiloquent, mais la nuance arrive toujours à propos pour ajouter tout le talent nécessaire au personnage. On regrettera juste que le chemin de la folie soit parcouru trop vite, trop haut, presque dès son apparition en scène.

Pour orchestrer l’ensemble, Daniel Mesguich fait appel à quelques dispositifs cinématographiques : la musique est omniprésente. Un moment d’intensité dramatique sera accompagné d’une montée de violons ou d’une volée de trompettes. Les scènes longues sont soutenues par des plages sonores lancinantes, type « sons bineuronaux ». On remarque aussi certaines scènes, rejouées à partir de différents points de vues.

Enfin, comme l’exige le drame, tout au long du développement, l’histoire va s’accélérant. Dès la mort de Polonius, Ophélie, puis Laërte suivent très vite. Cependant, la fin, extrême, ne sombre pas dans la parodie d’elle-même et laisse tout l’intérêt au spectateur de réfléchir à cette situation bien rendue. Un moment horriblement classique, donc ô combien parlant à nos âmes ?

 

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"Hamlet" : un Mesguich peut en cacher un autre... L'Hamlet, monté par Daniel Mesguich, à la Cartoucherie de Vincennes, constitue un événement théâtral, chargé d'histoire.

Atlanti-culture

Publié le 12 Novembre 2014

Daniel Mesguich.

Thème

Le jeune prince du Danemark est désemparé par la mort brutale de son père dont le fantôme lui révèle que son propre frère Claudius l’a empoisonné. Vengeance ! Hamlet s’y emploiera avec fureur d’autant que sa mère a aussitôt épousé le meurtrier et s’exhibe avec lui de manière sexuelle outrancière. Hamlet devient-il vraiment fou ou sa folie est-elle une ruse pour tromper son monde et accomplir la vengeance? Fait-il l’âne pour avoir du son? Là est aussi la question.

A l’époque de Shakespeare (1564-1616), épouser son ex beau-frère, même si le mari était mort, constituait un inceste. Le mot est dit dans la pièce.

Il y a mille histoires dans ce texte où tout est double et contradictoire ; et chaque meurtre, prémédité ou non, ferait un scénario de fait-divers aux actes irrémédiables.

Le tout magnifié et rendu universel par les thèmes shakespeariens de l’amour, la haine, les ravages mortifères du pouvoir, l’ambiguité des parentés, la philosophie, la psychanalyse bien avant l’heure, la poésie… En croyant tuer l’ usurpateur, Hamlet tuera le père de celle qu’il aime, sans savoir l’aimer : Ophélia. Depuis, la longue chevelure de la jeune fille flotte au fil des rivières…

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Points forts

1) Le père.

Le père du spectacle : Daniel Mesguich. Fidèle à un voeu de sa jeunesse, il monte Hamlet tous les dix ans depuis près de 40 années : "Comme si c’était me ressourcer, pour ne pas perdre le Danemark, ce nord…" Shakespeare lui-même ne réécrivit-il pas sa pièce à plusieurs reprises ?

Mesguich est aussi le père du jeune prince car c’est sa voix que l’on entend dans celle du spectre. Et nous l’espérions sa voix, tant elle est unique, magnifique, familière, si juste, si inspirée et remplie de rigueur et de pensée théâtrale. Nous aurions été déçus qu’il ne soit pas un peu présent dans ce spectacle. Et puis… Shakespeare lui-même interprétait le spectre.

Acteur et metteur en scène prolixe sur les grandes scènes françaises et internationales, D. Mesguich, formé avec Antoine Vitez et Pierre Debauche, est devenu très populaire par la télévision et ses rôles dans des films comme "La banquière" avec Romy Schneider. Il fut aussi Berlioz et Napoléon. Les gens l’aiment. Ils aiment les voix singulières et très reconnaissables, qui accompagnent leur vie.

Des vedettes comme Richard Anconina, Sandrine Kiberlain, Philippe Torreton…furent ses élèves. Directeur du Conservatoire National, de 2007 à 2013, l’aventure se sera terminée dans le bruit et la fureur à la suite d’une lettre de contestation d’un groupe d’élèves mais cela le public n’en a cure. Les sièges des institutions culturelles sont forcément éjectables. Et depuis, Mesguich n’est pas resté en pilotage automatique.

"Mettre en scène Hamlet, c’est aspirer à mettre en scène le théâtre" écrit-il dans sa présentation publiée avec la pièce, aux éditions Albin Michel.

2) Le fils. William Mesguich, le fils du metteur en scène, joue Hamlet. William… comme William Shakespeare, of course…. Ne sommes-nous pas dans un dédoublement intéressant ?

Le fils ressemble au papa. Un côté Samouraï et implacable, tout dans la présence-distance, comme lui. Il n’imite pas sa voix. Jeune et beau héros, flamboyant dans ses longs manteaux de cuir ou de drap, il ne porte qu’un gant rouge ensanglanté et une seule botte aussi. La seconde est portée par son double, un jeune adolescent. Car chez D. Mesguich tout est en double et en miroir depuis toujours. Comme le nom de sa compagnie, "Miroir et Métaphore".

William M nous émeut dans la fameuse tirade que l’on attend comme un air d’opéra tant de fois ouï mais toujours désiré. Un vrai silence se fait alors dans le public. Le chagrin est palpable. On ne dévoilera pas le suspens car pendant un moment nous pensons que cette tirade n’aura pas lieu. Chaque metteur en scène voulant recréer le fameux "Etre ou ne pas être"….Telle est aussi la question.

3) L’esprit.

L’intelligence. La réflexion. L’intensité du commentaire. Le texte. On entend le texte. Les allitérations et les assonances ne sont pas des gros mots à éviter. Il y a le texte, mais aussi "le second texte… le texte invisible" c’est à dire "composé des commentaires, des analyses… des souvenirs d’autres mises en scènes…". Bref, D. Mesguich se livre à un travail autobiographique fait de sa propre vie et de ses recherches théâtrales et philosophiques.

Points faibles

Le visuel, le décor ne sont pas toujours à la hauteur. Sur fond de ciel noir piqué de mille étoiles comme si la Grande Ourse s’était désarticulée, des cadres de miroirs sans miroirs se dédoublent et le rideau de scène, rouge, à l’Italienne, est entouré d’un grand encadrement doré. Seulement, les scènes d’intérieurs ont une esthétique moins heureuse , un peu cheap, avec de grands rideaux assez laids, des chaises d'invités argentées et un sol en carrelage noir qui crie misère. L’ensemble visuel rappelle un style décoratif banalisé dans les années 80…1980. C’est dommage car cela donne au spectacle un côté un peu vieillot.

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En deux mots...

Le théâtre de l’Epée de bois, tout en bois, comme son nom l’indique, a quelque chose d’élisabéthain, à la lisère de la forêt de Vincennes. Un lieu simple, chaleureux et confortable. On y va jusqu’au bout de la nuit. La recherche de Daniel Mesguich sur Hamlet, une forme de folie douce, fait partie de l’Histoire du théâtre. Lui-même fait partie de l’Histoire du théâtre et de nos vies, depuis ses débuts à l’époque de Patrice Chéreau . Nous attendons sa prochaine mise en scène. Bien avant un nouvel Hamlet , dans dix ans….

Shakespeare l’écrit: "Dieu a fait naître l’homme pour réajuster le temps".

Recommandation

Excellent

Infos et réservation

"L'Hamlet", de William Shakespeare. Mise en scène : Daniel Mesguich Avec William Mesguich, Anne de Broca, Philippe Maymat, Sarah Gabrielle, Laurent Montel ( ou Z.Horoks), Rebecca Stella, Yan Richard, Eric Bergonneau, Marie Frémont, Florent Ferrier, Tristan Willmott, Joëlle Lüthi.

Théâtre de l’Epée de bois, à la Cartoucherie de Vincennes. Route du Champ de Manoeuvre 75012 Paris. Tél. : 01 48 08 39 74. Du 4 au 30 novembre.

Read more at http://www.atlantico.fr/decryptage/hamlet-daniel-mesguich-peut-en-cacher-autre-cartoucherie-vincennes-theatre-epee-bois-critique-avis-culture-tops-william-1852378.html#ULvbhUDRGvzErcjI.99  

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Sapho chante Léo FerréHAMLETThéâtre de l'Epée de Bois (Paris) novembre 2014

Drame de Shakespeare mis en scène par Daniel Mesguich, avec William Mesguich, Anne de Broca, Zbigniew Horocks, Philippe Maymat, Rebecca Stella, Eric Bergeonneau, Yann Richard, Florent Ferrier, Marion Fremont, Sarah Gabrielle, Tristan Willmot et Joëlle Lüth.

S'il y a un texte que Daniel Mesguich a souvent monté, c'est "Hamlet" de Shakespeare dont il propose une quatrième version. Difficile alors de prétendre qu'il ne connait pas son sujet.

Effectivement, dès les premières scènes, on est au royaume du Danemark et on rentre directement dans l'action. Devant un ciel constellé d'étoiles, Hamlet, à la fois acteur et témoin de ses propres actes, virevolte aux quatre coins du plateau et se divertit d'une joie désespérée de la farce tragique en train de se jouer après l'assassinant de son père.

Dans une mise en scène surprenante parfois et audacieuse comme toujours chez Daniel Mesguich, l'action se déploie puis s'accélère, aboutissant au final où les personnages sont entraînés dans le tourbillon funeste qu'ils ont provoqué. Mais on aura vu au passage quelques morceaux de bravoure ainsi qu'une vertigineuse mise en abyme.

Incarnant le rôle-titre, William Mesguich offre une prestation absolument magnifique avec flamme, puissance et panache. Au milieu d'une distribution solide, on retiendra également Laurent Montel qui fait un Polonius des plus réjouissants.

Alors certes, les puristes pourront trouver quelques parti-pris ou anachronismes discutables (comme faire d'Hamlet l'inventeur du football !) mais force est de reconnaître que cet "Hamlet" revisité offre une flamboyante version, nourrissante et avec quelques idées géniales et brillantes sur ce qu'elle dit de l'art du théâtre, comme avec ce Polonius mort dont le comédien ôte la perruque et, tel un fantôme, quitte l'action par la salle,

Toujours surprenante mais totalement cohérente, la version de la tragédie de Shakespeare est somptueuse et à voir indiscutablement tant cette lecture soulève de réflexions sur cette pièce dont on n'aura jamais fait le tour et sur le théâtre en général.

Nicolas Arnstam www.froggydelight.com

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Hamlet  de  Shakespeare  traduction,  et  mise  en  scène  de  Daniel  Mesguich  au  Théâtre  de  l'Epée  de  bois  jusqu'au  30  novembre    

10/11/2014

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   Poète  présent  Après  le  massacre  vu  au  Français  la  saison  dernière  signé  Dan  Jemmet(  Lulu  de  décembre  2013  )  vous  direz:  cela  ne  peut  être  que  mieux.    C'est  aller  vite  en  besogne.    Daniel  Mesguich    n'en  n'est  pas  à  sa  première  version.  Dans  sa  note  d'intention  il  déclare  régulièrement  ressentir  la  nécessité  de  se  mesurer  à  l'oeuvre,  dans  ce  qu'il  nomme  magnifiquement"  non  pas  un  duel  meurtrier,  mais  un  duel  d'amour".  Sensation  palpable  tout  au  long  de  la  représentation.    Si  on  peut  regretter  des  costumes  contestables  de  Dominique  Louis,  en  dehors  de  ceux  d'Hamlet  et  de  Claudius  qui  mélangent  habilement  les  modes  de  plusieurs  siècles,  si  l'emploi  de  la  musique  parait  souvent  envahissant,  à  ces  détails  près,  l'ensemble  de  la  représentation  a  l'immense  qualité  de  nous  faire  entendre  le  texte,  tout  le  texte.  Rendu  dans  une  langue  à  la  fois  poétique  et  moderne,  il  en  fait  miroiter  toutes  les  facettes,  des  plus  crues  aux  plus  lyriques,  des  plus  viles  aux  plus  chevaleresques,  des  plus  violentes  aux  plus  amoureuses,  des  plus  veules  aux  plus  métaphysiques.    Fabuleuse  musicalité  qui  vous  emporte  et  vous  transporte.  Vertigineuse  variation    sur  la  folie,  l'  amour,  le  crime.    William  Mesguich,  dont  j'avais  déjà  mesuré  le  talent  dernièrement  dans  "  Descartes-­‐Pascal"  est  un  Hamlet  qui  m'a  conquise.    D'une  rare  présence  scénique,  sa  jeunesse  et  son  physique  correspondent  au  héros.    Tourments  visionnaires,  amours  impossibles,  affres  de  la  torture  mentale  le  traversent  intensément.  Exaltation,  abattement,  épanchement,  révèlent  un  engagement  aussi  total  que  maîtrisé.  Qu'il    désespère,  défie,  menace  ou  s'épanche,  le  personnage  est  là,  prenant,  troublant,  dérangeant.    Anne  de  Broca,  Gertrud,  est  particulièrement  bouleversante  dans  son  récit  de  la  mort  D'ophélia.  

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La  première  Ophélia,  Sarah  Gabrielle  ?,  est  délicieuse.  Laurent  Montel  en  Polonius,  incarne  parfaitement  les  ridicules  du  courtisan  et  l'autorité  du  père  abusif.  Philippe  Maymat  est  un  Claudius  abject  mais  digne,  les  jeunes  Eric  Bergeonneau,  Horatio,  et  Yan  Richard,  Laertes,  sont  tous  deux  mieux  que  justes.  Citons  enfin  le  merveilleux  fossoyeur  de  Florent  Ferrier.    Pour  employer  un  truisme,  la  mise  en  scène  de  Daniel  Mesguich  est  parfaitement  "  théâtrale"  avec  les  spectaculaires  éclairages  de  Mathieu  Courtaillier.  Beaux  effets  d'"  encadrement"  des  scènes,  réellement  découpées  par  de  grands  cadres  or.  Belle  économie  dans  le  décor,  chacune  des  scènes  seulement  symbolisée  par  les  éléments  indispensables.  Longue  table  et  chaises  transparentes  pour  le  banquet,  lit  d'enfant  et  simples  bandes  d'étoffe  rose  pour  la  chambre  d'Ophélia,  crânes  disséminés  sur  le  sol  au  cimetière,  et  magnifiques  masques  d'insectes  géants  lors  de  la  représentation  théâtrale.  Intéressante  idée  pour  la  tirade  de  la  faire  dire  par  un  comédien  de  la  troupe  une  première  fois.  Commencée  en  français,  puis  reprise  en  anglais,  on  souhaiterait  l'écouter  ainsi  dans  son  entier  .  Après  seulement,  nous  l'entendrons  de  la  bouche  d'Hamlet.  Moins  évident  à  mes  yeux,    cependant,  le  recours  aux  doubles  d'Hamlet  et  d'Ophélia,  dans  les  scènes  de  la  fin.Je  regrette  de  ne  pouvoir  vous  en  fournir  la  clé.    Une  authentique  esprit  "  saltimbanque"  baigne  cette  salle  de  l'Epée  de  Bois  à  la  charpente  dénudée.  Le  spectacle  de  Daniel  Mesguich  y  trouve  tout  naturellement  l'atmosphère  propice.  Son  Hamlet  s'y  fait  pleinement  entendre.  Un  Shakespeare  servi  par  son  metteur  en  scène.  

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Daniel Mesguich : « Hamlet est comme un trou noir » 1 novembre 2014 Laissez un commentaire

DR

En 1977, répondant à l’invitation de Georges Lavaudant et Gabriel Monnet, alors codirecteurs du Centre dramatique national des Alpes, Daniel Mesguich mettait en scène à Grenoble sa première version de l’œuvre de Shakespeare. Depuis il y revient régulièrement. Le spectacle fut ensuite repris à Nanterre dans le cadre du Festival d’Automne. en 1986, au Théâtre Gérard-Philippe de Saint-Denis, il a présente une deuxième version de la pièce et joue le rôle titre.En 1996, une troisième version de Hamlet voit le jour à La Métaphore de Lille. Pour cette quatrième version c’est son fils William qui incarne le rôle titre.

Rencontre avec le metteur en scène en plein répétition à l’Épée de Bois.

Pourquoi cette envie de monter une nouvelle fois Hamlet ?

J’avais monté de façon un peu présomptueuse ce texte une première fois à la demande de Georges Lavaudant à Grenoble en 1977 et je croyais mettre en scène un grand classique de plus. Et je me suis rendu compte que c’est Hamlet qui me mettait en scène et pas l’inverse tellement ce texte est vertigineux. Et j’avais fait vœux à l’époque de le monter tous les dix ans. Voici la quatrième version, calculez mon âge !

Comment avez-vous procédé ? Est-ce que vous faites référence à vos précédentes mises en scène ?

Oui je pars de ce que j’ai déjà fait ou de ce que je crois avoir fait, car en fait j’ai oublié. Je ne me souviens pas de chaque moment, mais les choses reviennent petit à petit. Il n’y a pas de page blanche pour moi, la page est très souillée. Je pars de l’existant pour mieux m’en éloigner et je pense qu’à chaque fois c’est un peu différent. J’essaye de réveiller le petit sens possible que l’on ne verrait pas tout de suite lors d’une lecture hâtive de la pièce. Lévinas dit « II  ne  faut  pas  se  demander  ce  que  veut  dire  un  dire,  il  faut  se  demander  ce  que  peut  dire  un  texte », donc je cherche ailleurs.

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Qu’est-ce qu’il y a de magique dans ce texte ?

Hamlet, comme toutes les pièces de Shakespeare, c’est toujours du théâtre dans le théâtre. C’est une histoire incroyable de vengeance, d’un prince mélancolique et un peu fou, violent avec sa mère, qui veut tuer l’imposteur, on dirait du « cape et d’épée », c’est Alexandre Dumas. Mais quand on se penche sur chacune des phrases c’est un abime qui s’ouvre. Chaque phrase est double, triple, quadruple. Toutes les lectures sont possibles. On peut faire une lecture psychanalytique, une lecture politique, une lecture philosophique. Tout est possible. Hamlet est comme un trou noir qui est une terre d’accueil en réalité. Prenez la phrase « être  ou  ne  pas  être », elle ne veut rien dire. Elle est vide. Et tout ce que vous pouvez penser, elle l’accepte. Allez-y, entrez. Et c’est ce qui fait que c’est un vertige. C’est du théâtre qui est aussi sa propre théorie.

Quelle est la scène la plus difficile à appréhender ?

C’est le spectre le problème. Le spectre est la condition essentielle de tout spectacle. Il est là, on le voit et en fait il n’est plus, il est mort. Il est les deux à la fois. Dites-moi comment vous montez le spectre et je vous dirais ce que je pense de la pièce. Il y a deux Hamlet quand on joue la pièce. Autrement dit je ne fais pas venir un fantôme, j’essaye qu’il y ait deux fois Horatio, deux fois Marcellus, deux fois Bernardo sur les remparts, et il y a deux fois Hamlet. Et c’est cela l’effet spectre.

Propos recueillis par Stéphane CAPRON – www.sceneweb.fr

 

Page 15: HAMLETde William Shakespeare, mis en scène par Daniel ... · Hamlet est un personnage complexe qui ne recule pas devant la vérité puisqu’il accepte d’écouter le spectre. Dans

Hamlet, de William Shakespeare. Mise en scène, traduction et adaptation de Daniel Mesguich. Avec William Mesguich, Anne de Broca, Laurent Montel, Philippe Maymat, Sarah Gabrielle et Rebecca Stella, Eric Bergeonneau, Yan Richard, Florent Ferrier, Marie Frémont, Tristan Willmott, Joëlle Lüthi. Théâtre de l’Epée de Bois (Cartoucherie de Vincennes, 12e). Du 4 au 30 novembre 2014. Hamlet, fils en déshérence de père, la mère adultère, l’oncle devenu beau-père par meurtre auriculaire, la blonde Ophélie en chemin de folie, Polonius fantoche bouffi, les comparses grinçants ou déloyaux, et les crânes de la mémoire … tout a été dit sur leurs aventures au pays d’Elseneur. Tout ? Voire… Le territoire en est si vaste que nul ne saurait l’embrasser, même du regard. Alors Daniel Mesguich a opté pour l’immensité des constellations dans l’antre si obscur de leurs petites et grandes tueries. Il offre l’inquiétude d’une schizophrénie collective où la mesquinerie du politique s’entremêle au délire des fractures et des indignations, où les masques de la pantomime précipitent dans l’abîme le théâtre immédiat, où les héros se clonent en écho de leurs désarrois, où les mots accentuent l’évanescence du baroque. Témoin faussement puéril des orgies parentales, Hamlet dribble avec une mappemonde, tandis que le fossoyeur ensemence le terrain funéraire des multiples Yorick du souvenir. Clair obscur, brillance exacerbée jetée sur la noirceur des complots, rien n’est apaisé ni tendre, la parole amoureuse se fait insulte, l’inceste n’est jamais loin. Mélange des genres et des époques, que donne à voir l’anachronisme délibéré des costumes et des postures. Comment mieux rendre l’irréductibilité intemporelle de Shakespeare, sinon en en plongeant les racines dans les chœurs et les masques de la tragédie antique ? Les barreaux des lits et la débauche des agapes répondent à l’omniprésent portique, frontière mouvante mais inexpugnable entre raison et folie, entre traîtrise et dévoilement, horreur tragique et ricanement sardonique. La traduction de Daniel Mesguich s’ancre résolument dans le baroque et le flamboyant, au risque d’une obscurité asphyxiante à laquelle elle n’échappe pas par moments. Jeu de mots pour jeu des maux, dont l’impression d’un « sur-jeu » peut-être superflu s’atténue dans le presque silence du carnage final, étonnant et bienvenu, … Ne boudons surtout pas notre plaisir ! William, Hamlet et Daniel, trois bons compères, n’ont décidément pas fini de nous surprendre.

Annick Drogou