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CNRS EDITIONS Maquette : Bleu T | Grotte de Lascaux II : Le cheval rouge et le taureau | Photo © Explorer Archives/Keystone-France www.cnrseditions.fr 2012 54 Gallia Préhistoire 54 2012 PRÉHISTOIRE DE LA FRANCE DANS SON CONTEXTE EUROPÉEN ISBN : 978-2-271-07562-8 ISSN : 0016-4127 52 e prix valable en France Étude tracéologique de l’outillage moustérien de type Quina du bonebed de Chez-Pinaud à Jonzac (Charente-Maritime). Nouveaux éléments en faveur d’un site de boucherie et de traitement des peaux Émilie Claud, Marie Soressi , Jacques J aubert , Jean-Jacques Hublin 3 Stratégies de subsistance des Aurignaciens de Solutré (Saône-et-Loire). Les apports de la fouille préventive de 2004 Nelly Connet, Grégory Bayle, Céline Bemilli, Bertrand Kervazo, Stéphane Konik, Michèle Julien et Marian Vanhaeren, avec la collaboration d’Eve Boitard et Danièle Molez 33 Le site d’habitat Blicquy/Villeneuve-Saint-Germain de Pontpoint « le Fond de Rambourg » (Oise) Françoise Bostyn, Rose-Marie Arbogast, Nicolas Cayol, Caroline Hamon, Yann Lorin, Frédéric Prodéo 67 Le cairn de Croaz Dom Herry et ses carrières de schiste (Saint-Nicolas-du-Pelem Côtes-d’Armor) Jean-Yves T inévez, Eric Nicolas, Eric Gaumé, Guirec Querré, Laurent Quesnel Avec la collaboration de François Le Provost, Stéphane Blanchet, Christine Oberlin, Johannes Van Der Plicht, Véronique Bardel et François Pustoc’h 191 Une inhumation sous tumulus de l’Âge du Bronze et une occupation de la fin du Néolithique à Gonesse, La Fosse aux Larrons (Val-d’Oise) Jacques Tarrête et Vincent Krier, coordinateurs, Jean-Jacques Puisségur (†) et Nicole Limondin-Lozouet, Chantal Leroyer et Gérard Firmin, Rose-Marie Arbogast, Henri Duday 239 Gallia Préhistoire 2012 54 GALLIA PREHISTOIRE.indd 1 12/11/12 11:24

Gallia 54 Gallia Préhistoire · al., 2009 et Niven et al., 2012). Les données archéozoologiques (Jaubert et al., 2008) et cémentochronologiques (Niven et al., 2012) indiquent

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GalliaPréhistoire

Préhistoire de la France dans son contexte euroPéen

ISBN : 978-2-271-07562-8ISSN : 0016-4127

52 e prix valable en France

Étude tracéologique de l’outillage moustérien de type Quina du bonebed de Chez-Pinaud à Jonzac (Charente-Maritime). Nouveaux éléments en faveur d’un site de boucherie et de traitement des peauxÉmilie Claud, Marie Soressi, Jacques Jaubert, Jean-Jacques Hublin . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

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Stratégies de subsistance des Aurignaciens de Solutré (Saône-et-Loire). Les apports de la fouille préventive de 2004Nelly Connet, Grégory Bayle, Céline Bemilli, Bertrand Kervazo, Stéphane Konik, Michèle Julien et Marian Vanhaeren, avec la collaboration d’Eve Boitard et Danièle Molez . . . . . . . 33

Le site d’habitat Blicquy/Villeneuve-Saint-Germain de Pontpoint « le Fond de Rambourg » (Oise)Françoise Bostyn, Rose-Marie Arbogast, Nicolas Cayol, Caroline Hamon, Yann Lorin, Frédéric Prodéo . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 67

Le cairn de Croaz Dom Herry et ses carrières de schiste (Saint-Nicolas-du-Pelem Côtes-d’Armor)Jean-Yves Tinévez, Eric Nicolas, Eric Gaumé, Guirec Querré, Laurent Quesnel Avec la collaboration de François Le Provost, Stéphane Blanchet, Christine Oberlin, Johannes Van Der Plicht, Véronique Bardel et François Pustoc’h . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

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Une inhumation sous tumulus de l’Âge du Bronze et une occupation de la fin du Néolithique à Gonesse, La Fosse aux Larrons (Val-d’Oise)

Jacques Tarrête et Vincent Krier, coordinateurs, Jean-Jacques Puisségur (†) et Nicole Limondin-Lozouet, Chantal Leroyer et Gérard Firmin, Rose-Marie Arbogast, Henri Duday . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

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Étude tracéologique de l’outillage moustérien de type Quina du bonebed de Chez-Pinaud à Jonzac (Charente-Maritime). Nouveaux éléments en faveur d’un site de boucherie et de traitement des peaux

A traceological study of Quina Mousterian stone tools of the bonebed at Chez-Pinaud (Jonzac, Charente-Maritime, France). New elements in favour of butchering activities and hide processing

Émilie Claud*, Marie SoreSSi**, Jacques Jaubert***, Jean-Jacques Hublin****

Mots clefs. Moustérien de type Quina, tracéologie, fonctionnement, chaîne opératoire, racloir, boucherie, dénaturation.

Résumé. L’industrie lithique du Moustérien de type Quina de Chez-Pinaud à Jonzac, en Charente-Maritime, est originale. Elle est fondée sur la production de supports bifaciaux par percussion marginale alors que le Moustérien de type Quina est connu pour son débitage de supports courts et épais par percussion interne. Par ailleurs, cette industrie est ici associée à une exceptionnelle accumulation d’ossements (bonebed). Les premières analyses montrent que ce site aurait été utilisé comme un lieu d’exploitation saisonnière du Renne. L’étude des traces d’utilisation permet d’apporter de nouveaux éléments sur la fonction du site au Moustérien de type Quina. Plusieurs centaines de pièces ont été observées à la loupe binoculaire à la recherche de traces d’utilisation, à l’issue de quoi 98 ont fait l’objet d’un examen complet, à l’échelle macro- et microscopique. L’échantillon retenu se compose d’éléments issus de différents moments de la chaîne opératoire de production Quina, retouchés ou non. Les modes de fonctionnement mis en évidence sont la coupe de matière carnée et cutanée, et la percussion contre des matières dures, organiques et minérales, ce qui indique la mise en œuvre sur le site d’activités de boucherie (en coupe et percussion) et de travail de la peau fraîche. Cette analyse apporte.

Keys Words. Quina Mousterian, Use Wear Analysis, Mode of Use, Lithic Production Sequence, Scraper, Butchering Activities, Denaturation.

Abstract. Quina Mousterian lithic industry of the site of Chez-Pinaud (Jonzac, Charente-Maritime) is original. It is based on the production of bifacial blanks by marginal percussion, while Quina Mousterian is usually characterized by the debitage of short and thick supports by internal percussion. Besides, the industry presented here is associated with an exceptionally large bone bed. First analyses show that Reindeer processing might have been a seasonal activity on the site. The use wear analysis allows us to propose new informations on the function of the site during the Quina Mousterian period. Several hundred pieces were observed under a binocular loupe for evidence of use wear traces, after which 98 were thoroughly examined y low and high power analysis. The sample taken consists of pieces, either or not retouched, originating from various stages in the Quina production sequence. The identified modes of use were meat and skin cutting as well as percussion against hard organic matter and minerals, indicating that butchering activities (cutting and percussion) as well as work on fresh hides were carried out on the site. This analysis thus brings new elements consistent with the site being used as a carcass processing workshop. The correction between the modes

* INRAP GSO Aquitaine, 33600 Pessac - Laboratoire PACEA, Talence, [email protected]** INRAP, 45590 Saint-Cyr-en-Val, MPI-EVA, D-04103 Leipzig, AnTET, ArScAn, Nanterre, [email protected]*** Laboratoire PACEA, université de Bordeaux 1, 33405 Talence, [email protected]**** PI-EVA, D-04103 Leipzig, Allemagne, [email protected]

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PROBLÉMATIQUE ET OBJECTIFS DE L’ÉTUDE

L’industrie lithique du Moustérien de type Quina du gisement de Chez-Pinaud à Jonzac est originale du fait des chaînes opératoires lithiques qui la caractérisent, mais aussi par l’exceptionnelle accumulation d’ossements à laquelle elle est associée. Ce Moustérien de type Quina est en effet fondé sur la production de supports bifaciaux par percus-sion marginale 1, méthode mal connue jusqu’à la découverte (Airvaux et Bouchet, 2004) et l’analyse de l’industrie lithique (Lenoir, 2004 ; Soressi, 2004). Les méthodes de production d’éclats courts et épais, détachés par percussion interne, abondamment décrits pour d’autres gisements Moustérien de type Quina sont ici peu nombreuses (Soressi, 2004 ; Soressi et McPherron in Jaubert et al., 2008). De plus, cette industrie provient d’un niveau épais dont la densité en restes osseux est très forte : 5232 restes de renne correspondant à 18 individus ont par exemple été découverts sur un peu moins de 3 m² et environ 30 cm d’épaisseur. Ces restes de grands mammifères, principalement du renne, ont été introduits sur le site pour en réaliser la boucherie (Jaubert et al., 2008, p. 216-219 ; Steele et al., 2009 et Niven et al., 2012). Les données archéozoologiques (Jaubert et al., 2008) et cémentochronologiques (Niven et al., 2012) indiquent que le site devrait avoir principalement été occupé à la fin de l’automne et pendant l’hiver. L’analyse iso-topique (Britton et al., 2011) indique quant à elle que plusieurs des rennes abattus à Jonzac avaient un parcours de migration similaire et pourraient donc appartenir à une seule ou à un petit nombre de harde(s).

L’analyse des traces d’usure sur l’industrie en silex peut contribuer à préciser les activités pratiquées sur le gisement et donc à déterminer la fonction de celui-ci, étape indispensable pour mieux cerner les stratégies d’occupation du territoire par

1. Suivant les recommandations de Roussel et al. (2009, p. 235), il nous semble plus prudent de qualifier la percussion plutôt que la dureté du percuteur (probablement tendre) comme déjà proposé dans des publi-cations précédentes (Soressi, 2004 ; Jaubert et al., 2008). En effet, les qualificatifs de dureté actuellement disponibles pour les percuteurs sont imprécis : la dureté d’un calcaire est par exemple variable et un calcaire peut aussi bien être utilisé en percussion rentrante que tangen-tielle (Roussel et al. 2009). Or, la morphologie du talon et de l’éclat, principaux critères utilisés ici pour déterminer la percussion renvoie alors directement au geste et non pas à la nature du percuteur. De plus, des blocs calcaires ont bien effectivement été utilisés ici (Roussel et al., 2009 et cf. infra). Nous en resterons donc à un vocabulaire des-criptif : d’un côté percussion marginale ou tangentielle et de l’autre percussion rentrante ou interne (suivant en cela le vocabulaire employé par Soriano et al. 2007)

les Néandertaliens contemporains du Moustérien Quina. En effet les traces d’utilisation peuvent révéler la pratique sur le site d’activités de traitement de matériaux qui n’ont pas été conservés, tels que le bois végétal ou la peau, et dont la mise en évidence peut compléter notre connaissance sur la fonction d’un site. Notre objectif ici est donc de documenter les modes de fonctionnement de l’outillage en silex et les activités prati-quées in situ. Cette étude nous permettra également d’évaluer les relations entre les modes de fonctionnement identifiés et les différentes catégories techno-typologiques composant l’outil-lage.

PRÉSENTATION DU SITE DE CHEZ-PINAUD

HISTORIQUE DES TRAVAUX

Le site paléolithique de Chez-Pinaud est localisé à une centaine de kilomètres au nord de Bordeaux, sur la commune de Jonzac (Charente-Maritime), haute Saintonge, dans la vallée de la Seugne, affluent de rive gauche de la Charente. Il s’agit en fait d’un complexe de sites paléolithiques moyen et supérieur qui s’inscrit dans un modeste cirque rocheux effacé par le colmatage d’un ancien méandre.

Le premier2 gisement découvert est celui qui possède la plus longue séquence et qui nous concerne ici. Il se trouve en pied de falaise, sa découverte étant due à l’ouverture d’une carrière souterraine exploitant le calcaire turonien et coniacien. Le chemin des fardiers a recoupé perpendiculairement des niveaux archéologiques conservés au pied de l’affleurement calcaire colmaté de nos jours par la sédimentation. J. Airvaux procéda entre 1998 et 2003 à une série de sondages et fouilles en gradins qui révélèrent rapidement l’important potentiel du gisement (Airvaux et Bouchet, 2003). Une première stratigraphie de référence a été établie grâce à deux grandes coupes sagittales implantées de part et d’autre du chemin d’accès à la carrière et un sondage profond en pied de la coupe ouest. Plusieurs niveaux de Moustérien de type Quina, du Moustérien à denticulés, puis du Moustérien de tradition acheuléenne (MTA) à bifaces, un « Castelperonien ancien » et des ensembles plus pauvres du

2. Un second site de plein air a été découvert à un peu plus d’une centaine de mètres en aval du pied de falaise en 2003. Dénommé Chez-Pinaud 2, il a été fouillé dans le cadre d’une opération préventive et a livré un niveau d’occupation aurignacien (Airvaux et al., 2003). Plus récemment, deux diagnostics d’archéologie préventive ont été réalisés par l’Institut national de recherches en archéologiques pré-ventives : ils ont permis de préciser le contexte sédimentaire local et de découvrir plusieurs nouveaux locus paléolithique moyen et paléoli-thique supérieur (Connet, 2010).

donc de nouveaux éléments compatibles avec une utilisation du site comme un atelier de traitement primaire des carcasses. Les parallèles entre les modes de fonctionnement des outils analysés et leurs caractéristiques techno-typologiques permettent d’apporter un nouvel éclairage sur la signification de l’opération de « dénaturation » des racloirs, qui semble succéder dans plusieurs cas à une utilisation des racloirs pour percuter des matières dures.

of use of the tools analysed and their typo-technological characteristics make it possible to shed new light on the meaning of the scrapers « denaturation » process, which in several cases occurred after the scrapers were initially used to chop hard materials.

Translation: Thierry Donnadier

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Stratégies de subsistance des Aurignaciens de Solutré (Saône-et-Loire) Les apports de la fouille préventive de 2004

Subsistence strategies of the Aurignacians at Solutré (Saône-et-Loire, France). New elements from the 2004 preventive excavation

Nelly Connet 1, Grégory Bayle 2, Céline Bemilli 3, Bertrand Kervazo 4, Stéphane KoniK 5, Michèle Julien 6 et Marian vanhaeren 7, avec la collaboration d’Eve Boitard 8 et Danièle molez 9

1. INRAP, 122 rue de la Bugellerie, F-86000 Poitiers, UMR 7041, ArScAN, équipe AnTET, 21 allée de l’Université, F-92023 Nanterre, [email protected]. INRAP, 3-5 rue René Cassin, F-28000 Chartres, UMR 6173, CITERES, LAT, BP 60449, F-37204 TOURS Cedex 03, [email protected]. INRAP, 30 boulevard de Verdun, Immeuble Jean Mermoz, F-76120 Le Grand-Quevilly, UMR 7209, Archéozoologie, Archéobotanique, 55 rue Buffon, F-75005 Paris, [email protected]. Ministère de la Culture et de la Communication, Sous-direction de l’Archéologie, Centre National de Préhistoire 38 rue du 26e RI, F-24000 Périgueux, UMR 5199 PACEA, Équipe Préhistoire, Paléoenvironnement, Patrimoine, avenue des facultés, F-33405 Talence, [email protected]. INRAP Centre – Ile-de-France, adresse actuelle : Ministère de la Culture et de la Communication, Sous-direction de l’Archéologie, Centre National de Préhistoire, 38 rue du 26e RI, F-24000 Périgueux, UMR 5199 PACEA, Équipe Préhistoire, Paléoenvironnement, Patrimoine, avenue des facultés, F-33405 Talence, [email protected]. UMR 7041, ArScAN, Laboratoire d’Ethnologie Préhistorique, 21 allée de l’Université, F-92023 Nanterre.7. UMR 5199, PACEA, Équipe Préhistoire, Paléoenvironnement, Patrimoine, avenue des facultés, F-33405 Talence, [email protected]. Inrap, 18 rue de la Chapelle, F-89510 Passy.9. UMR 7041, ArScAN, Laboratoire d’Ethnologie Préhistorique, 21 allée de l’Université, F-92023 Nanterre.

Mots-clés. Solutré, Bourgogne, Aurignacien, faune, industrie lithique, industrie osseuse, parure.

Résumé. En 2004, après plus d’un siècle de recherches sur le site de Solutré, une fouille préventive s’est déroulée dans les couches aurignaciennes jouxtant les fouilles des années 1970 1980 de J. Combier. Deux ensembles archéologiques constitués d’éboulis de dallettes calcaires ont été fouillés sur 15 m². La couche 2, objet du présent article, est datée entre 27 000 et 30 000 BP. Elle est particulièrement riche en vestiges fauniques, avec près de 48 000 restes dominés par le cheval puis le renne. Ces animaux ont été dépecés à proximité immédiate de leur lieu d’abattage, tout au long

Keywords. Solutré, Burgundy, Aurignacian, fauna, lithic industry, bone industry, ornaments.

Abstract. In 2004, after more than a century of research on the site of Solutré, a preventive excavation was conducted within the Aurignacian layers located next to the excavations carried out by J. Combier in the 1970s and 80s. Two archaeological units consisting of small, broken limestone slabs were excavated on a 160 sq. ft. surface. Layer 2, presented in this paper, is dated between 27,000 and 30,000 BP. With nearly 48,000 pieces, mainly Horse and Reindeer, it is particularly rich in faunal remains. These animals were slaughtered and then dismembered in the immediate vicinity,

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INTRODUCTION

Solutré constitue un des sites fondateurs de la science préhistorique en France au XIXe s et est célèbre pour ses accumulations de restes de chevaux. Cette abondance quasi mono-spécifique dans certaines couches a inspiré un grand nombre de théories et hypothèses dont celle de la précipitation des animaux du haut de la Roche, image d’Épinal qui malheu-reusement perdure dans l’imaginaire collectif (Poplin, 1990). Depuis les premières fouilles menées par Henry Testot-Ferry et Adrien Arcelin en 1866, des recherches de plus ou moins

grande ampleur ont investi la quasi-totalité de la plateforme en contrebas de la Roche de Solutré, dessinant un site s’étendant sur plus de 9 000 m² (fig. 1 et 2) et représentant 7 m de strati-graphie archéologique (Aurignacien, Gravettien, Solutréen et Magdalénien). Après un arrêt des fouilles au milieu du XXe s., Jean Combier entrepris à partir de 1968 les premières fouilles modernes accompagnées d’analyses sur la nature des accumu-lations (Combier et Montet-White, 2002).

Nous proposons de revisiter l’occupation aurignacienne de Solutré à la lumière des données de la fouille préventive (Inrap) menée en 2004 lors de l’aménagement des abords du site et

Fig. 1 – Localisation de Solutré et du secteur fouillé en 2004 dans le plan général des fouilles modernes.

A location of the site and of the sector excavated in 2004 in the general scheme of the recent excavations.

de l’année, avec une plus forte proportion à la fin de l’automne et en hiver. Les traitements des animaux ont été variés (boucherie, prélèvement de matière première, fabrication d’objets en os) et ont eu lieu en grande partie sur le site. L’assemblage lithique associé se compose principalement d’outils retouchés et de quelques déchets, en relation étroite avec le traitement des animaux. Une industrie osseuse comprenant des retouchoirs et un lissoir est également présente, illustrant une certaine diversification des activités. Enfin, trois objets de parure, usés, ont été découverts. En l’état des connaissances, deux de ces éléments de parure rattachent les groupes aurignaciens de Solutré à un vaste territoire correspondant à tout l’ouest européen, du sud-ouest de la France au nord-ouest de l’Europe.

all year round, but in greater numbers in late autumn and in the winter. Animal processing was varied (butchering, cutting of raw material, production of bone objects) but took place on the site for the most part. The associated lithic assemblage mainly consists of retouched tools and a few debris closely related to animal processing. A bone industry composed of retouchers and a smoother is also represented, illustrating diversified activities. Lastly, three worn ornaments were found. Given current knowledge, two of them indicate that the Aurignacian groups of Solutré are related to a wide territory encompassing Western Europe, from south-west France to north-west Europe.

Translation: Thierry Donnadier

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Le site d’habitat Blicquy/Villeneuve-Saint-Germain de Pontpoint « le Fond de Rambourg » (Oise)

A new Blicquy/Villeneuve-Saint-Germain settlement site at Pontpoint “le Fond de Rambourg” (Oise, France)

Françoise Bostyn 1, Rose-Marie ArBogAst 2, Nicolas CAyol 3, Caroline HAmon 4, Yann lorin 5, Frédéric Prodéo 6

Mots clé. Blicquy/Villeneuve-Saint-Germain, Oise, habitat, céramique, parure, industrie en os, macro-outillage en grès, industrie en silex, tracéologie Résumé. Le site d’habitat Blicquy/Villeneuve-Saint-Germain de Pontpoint « le Fond de Rambourg », fouillé dans un cadre préventif, se caractérise par son bon état de conservation lié à son implantation topographique au pied d’une des buttes sableuses qui modèlent le fond de la vallée de l’Oise. La fouille a révélé au moins trois unités d’habitation et une fosse isolée dont le mobilier permet de conclure à l’existence de deux phases d’occupation. Le mobilier issu de deux unités d’habitation présente des caractéristiques très proches du Rubané récent du Bassin parisien et oriente la datation vers une phase ancienne du Blicquy/Villeneuve-Saint-Germain, phase peu documentée à ce jour. L’autre unité d’habitation et la fosse, moins riches, ont livré du mobilier ciblant l’occupation du même secteur à la fin du Blicquy/Villeneuve-Saint-Germain.

Keywords. Blicquy/Villeneuve-Saint-Germain, Oise valley, habitat, pottery, ornaments, bone industry, sandstone macrotools, flint industry, use-wear analysis.

Abstract. The new Blicquy/Villeneuve-Saint-Germain settlement site at Pontpoint “le Fond de Rambourg” (Oise, France), where a preventive excavation was conducted, is characterized by its good state of preservation owing to its topographical location at the foot of one of the sandy hillocks that shape the Oise valley floor. The excavation yielded at least three housing units and an isolated pit the objects of which provide evidence of two phases of occupation. The features of the objects found in two housing units are quite similar to those of the Paris Basin Late Bandkeramik, suggesting they probably date from Early Blicquy/Villeneuve-Saint-Germain, a culture as yet little documented. The objects found in the third housing unit and the pit, fewer in number, seem to indicate that the same area was occupied during the late Blicquy/Villeneuve-Saint-Germain.

Translation : Thierry Donnadier

1. Inrap Nord-Picardie, UMR 8215, Trajectoires De la sédentarisation à l’état, 77ter rue J.-B. Lebas, F-59493, Villeneuve d’Ascq, [email protected]. CNRS/UMR 7044, MISHA, 5 allée du Général Rouvillois, F-67083 STRASBOURG cedex, [email protected]. Inrap Nord-Picardie, UMR 8215, Trajectoires De la sédentarisation à l’état, 518 rue Saint Fuscien, F-80000 Amiens, [email protected]. CNRS-UMR 8215, Trajectoires De la sédentarisation à l’état, Maison de l'archéologie et de l'ethnologie, 21, allée de l'Université, F-92023 Nanterre cedex, [email protected]. Inrap Nord-Picardie, Centre archéologique d’Achicourt, 7 rue Pascal, F-62217 Achicourt, [email protected]. Inrap Grand-Sud-Ouest, [email protected]

recouvert les structures. Ce phénomène de scellement résulte d’un choix d’implantation dans une zone topographiquement intermédiaire. La moyenne vallée de l’Oise comporte sur l’ensemble de son tracé une série de larges méandres, comme celui de Pont-Sainte-Maxence, où se trouve le site du Fond de Rambourg (fig. 1), chacun ponctué par plusieurs buttes sableuses. Celles-ci constituent les points culminants du méandre et correspondent aux courbes de niveau supérieures à 31,25 m (fig. 2). La courbe des 30 m marque le passage dans

INTRODUCTION

Le site de Pontpoint « le Fond de Rambourg » a été découvert et fouillé dans le cadre du programme de surveil-lance systématique des sablières de la moyenne vallée de l’Oise. Deux campagnes de fouilles successives ont été menées sur ce site en 1996 et 1997. Le décapage réalisé sur une surface d’environ deux hectares en 1996 a révélé un site très bien conservé en raison de la présence d’une couche sableuse qui a

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1. DRAC, Service régional de l’archéologie, 35700 Rennes ; UMR 6566 CReAAH. « Centre de Recherche en Archéologie, Archéosciences, Histoire ».2. INRAP Grand-Ouest, 35577 Cesson Sévigné.3. INRAP Grand-Ouest, 35577 Cesson Sévigné, UMR 6566 CReAAH. « Centre de Recherche en Archéologie, Archéosciences, Histoire ».4. UMR 6566 CReAAH « Centre de Recherche en Archéologie, Archéosciences, Histoire », Université Rennes 1, Campus Beaulieu, 35042 Rennes.5. UMR 6566 CReAAH « Centre de Recherche en Archéologie, Archéosciences, Histoire », Université Rennes 1, Campus Beaulieu, 35042 Rennes.6. Archéologue et prospecteur amateur, Le Collédic, 22480 Saint-Nicolas-du-Pelem.7. INRAP Grand-Ouest, 35577 Cesson Sévigné.8. Dessin, Illustration, 9 rue des Giroflées, 29800 Landerneau.9. Centre de Datation par le Radiocarbone, UMR 5138 « Archéométrie et Archéologie », Université Claude Bernard Lyon I, 69622 Villeurbanne.10. Centrum voor Isotopenonderzoek, Rijksuniversiteit, Groningen.11. UMR 6566 CReAAH « Centre de Recherche en Archéologie, Archéosciences, Histoire », Université Rennes 1, 35042 Rennes.

Le cairn de Croaz Dom Herry et ses carrières de schiste (Saint-Nicolas-du-Pelem Côtes-d’Armor)The Croaz Dom Herry cairn and its schist quarries (Saint-Nicolas-du-Pelem, Côtes-d’Armor)

Jean-Yves Tinévez 1, Eric nicolas 2, Eric Gaumé 3, Guirec Querré 4, Laurent Quesnel 5 Avec la collaboration de François le ProvosT 6, Stéphane BlancheT 7, Christine oBerlin 8, Johannes van Der PlichT 9, Véronique BarDel 10 et François PusToc’h 11

Mots clés. Bretagne, Néolithique moyen II, tombes à couloir, cairn, carrières de schiste, datations radiocarbone, ciseau, fibrolite, perles, chloritoschiste, chloritite, stéatite.

Résumé. En 2005, un diagnostic archéologique préventif préalable à l’aménagement d’un centre commercial est à l’origine de la découverte d’un ensemble funéraire regroupant un cairn du Néolithique moyen, plusieurs tombelles en pleine terre et un tumulus de l’âge du Bronze sur une surface de sept hectares au sud de la commune de Saint-Nicolas-du-Pelem. Une fouille préventive mise en œuvre en 2006 à l’emplacement du projet immobilier a permis d’étudier deux carrières utilisées au Néolithique pour l’extraction de moellons de schiste et localisées à quelques mètres en arrière des vestiges de cairn. Ces derniers seront ensuite étudiés de façon exhaustive en fouille programmée en 2007 et 2008. Les restes du cairn mis au jour sur ce substrat de schiste étaient en position dominante sur l’extrémité d’une croupe naturelle exposée à l’est, caractéristique des lieux de construction habituels de ces grands monuments du Néolithique moyen. La présence de deux fosses et de poteries datant de la fin du Moyen Âge indique l’époque de destruction quasi systématique du

Keywords. Brittany, Middle Neolithic II, passage tombs, cairn, schist quarries, radiocarbon dates, chisel, fibrolite, beads, chlorite schist, chloritite, steatite.

Abstract. In 2005, a preventive archaeological diagnosis prior to the construction of a shopping centre led to the discovery of a funerary complex composed of a Middle Neolithic cairn, several burial mounds and a Bronze Age tumulus over a seven hectare area to the south of the village of Saint-Nicolas-du-Pélem (Côtes-d’Armor, France). A preventive excavation carried out in 2006 where the building project was located made it possible to study two quarries used during the Neolithic for the extraction of schist blocks and situated a few metres behind the remains of the cairn. The latter were then thoroughly examined during a research excavation in 2007 and 2008. The remains of the cairn exposed on this schist substratum were in a dominant position at the top of a natural elevation facing east, which is typical of the sites where these large Middle Neolithic monuments were usually built. The presence of two pits and pottery dating from Late Middle Age indicates that the monument, probably exploited as a quarry, was almost completely destroyed at the time, aggravated by the ensuing cultivation

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INTRODUCTION

En Bretagne, la recherche archéologique consacrée au Néolithique s’est longtemps orientée vers le mégalithisme. Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, l’équipe de recherche constituée au CNRS sous la direction de P.-R. Giot s’est rapide-ment investie dans l’étude des grands cairns du Nord Finistère, Barnenez, Carn et Gaignoc. Cette impulsion s’est poursuivie les décennies suivantes sur de nombreux sites régionaux, certains prestigieux comme Gavrinis, le Petit-Mont, le complexe Table des Marchands-Grand Menhir-Er Grah, l’ensemble de Saint-Just, et bien d’autres moins connus comme Quelarn, Saint-Thois… Avec le développement de l’archéologie préventive et une meilleure protection des sites déjà recensés et conservés en élévation, les opérations consacrées au mégalithisme funéraire se sont faites de plus en plus rares avec ces dernières années, par exemple, l’étude de l’ensemble du Souc’h à Plouhinec (Finistère) achevée en 2008. La plupart de ces recherches a concerné des monuments localisés en zones côtières, notamment pour les sites les plus anciens datés du Néolithique moyen. La découverte lors d’un diagnostic archéologique des vestiges d’un cairn à Saint-Nicolas-du-Pelem était ainsi inattendue à plus d’un titre, en l’absence de tout élément de signalement préalable d’une part et du fait de sa localisation au cœur de la Péninsule armoricaine d’autre part, à une distance variant respectivement de 40 à 60 km des côtes de La Manche et du littoral atlantique (fig. 1).

Située au sud-ouest du département des Côtes-d’Armor, la commune de Saint-Nicolas-du-Pelem est naturellement composée de deux entités géologiques et topographiques bien distinctes, un vaste plateau granitique au nord d’altitude variant de 220 à plus de 300 m et au climat rude, une zone dépressionnaire sédimentaire au sud. Le bourg se développe sur la zone de contact, versant abrupt du massif granitique bien exposé au sud.

LE CONTEXTE ARCHÉOLOGIQUE

Ce territoire fait l’objet depuis plus de quarante ans d’une prospection archéologique pédestre systématique menée avec assiduité par François Le Provost. Elle couvre notamment la partie nord de la commune, sur le plateau du Collédic. Plus d’une quarantaine de sites ont ainsi été inventoriés et mettent en évidence une occupation de cette zone du Centre Bretagne dès le Mésolithique, avec une densité particulière de sites du Campaniforme et de l’âge du Bronze (fig. 2).

Du Mésolithique, on notera le gisement de Kergoubleau dominant la vallée du Blavet en aval des gorges de Toul Goulic, à l’ouest de Saint-Nicolas et plusieurs gisements sur le plateau du Collédic au nord.

Pour la période néolithique, le patrimoine mégalithique est uniquement représenté par quatre menhirs en granite dont trois sont regroupés à quelques centaines de mètres de distance les uns des autres, en bordure du plateau granitique au nord de Saint-Nicolas. Ces monolithes sont dressés en position topo-graphique dominante par rapport au réseau hydrographique, à une altitude oscillant entre 200 et 225 m. Leur localisation sur le massif granitique de Quintin au nord de la commune de Saint-Nicolas peut se justifier par l’aptitude du socle à fournir des blocs adéquats contrairement à la partie sud du territoire au substrat schisteux. On notera tout particulièrement la taille considérable du menhir du Rossil, en lisière du Bois du Castel, avec ses 7,30 m de hauteur et plus de 10 m de circonférence à la base, l’un des plus imposants du département des Côtes-d’Armor.

En revanche, jusqu’à la découverte du cairn de Croaz Dom Herry, le domaine funéraire dans ce secteur du Centre Bretagne était caractérisé par une absence de sépultures mégalithiques. On notera toutefois la découverte fortuite lors de travaux en 1990, au lieu-dit Guern-an-Groc’h, d’une fosse contenant un

monument, probablement exploité en carrière, situation aggravée par la suite par la mise en culture du terrain. Conservé au mieux sur deux ou trois assises de moellons superposés, le cairn dessine un plan quadrangulaire orienté nord sud, large de huit mètres pour une longueur d’origine estimée à une vingtaine de mètres. L’absence de sol végétal scellé sous le cairn indique une préparation du terrain préalable à sa construction par enlèvement exhaustif du paléosol et écrêtement partiel des affleurements du substrat schisteux. Dans le cairn, le plan de quatre chambres funéraires se distingue nettement par la présence soit de dalles de granite brisées au niveau de la sole des labours dont la base est solidement ancrée dans le substrat, soit de la fosse de calage des éléments complètement arrachés. Les quatre chambres disposées côte à côte sont de même morphologie, plan presque circulaire de trois mètres de diamètre s’ouvrant en façade orientale par un couloir court et étroit. Le rare matériel archéologique associé est caractéristique du Néolithique moyen. Il se réduit à quelques éléments de parure en roche qui ont fait l’objet d’analyses, un vase à paroi lisse et quelques tessons. Aucun reste d’ossement n’est conservé en raison de la forte acidité du sous-sol de schiste. L’ancienneté de ce type de monument à chambres circulaires et couloirs courts, connu en zone littorale, est confirmée par plusieurs datations radiocarbone à la charnière des Ve et IVe millénaires. Architecture inédite en Centre Bretagne jusqu’à cette découverte, le cairn de Croaz Dom Herry constitue dans la péninsule un jalon intermédiaire entre les côtes nord et sud.

of the land. The current remains of the cairn, two or three stone courses high, delineate a north-south quadrangular plan, eight metres wide for an estimated original length of twenty metres or so. The absence of a soil sealed beneath the cairn suggests that the paleosol was completely removed and the outcrops of underlying schist partially levelled off prior to the construction of the cairn. Inside the cairn the layout of four funerary chambers can clearly be made out by the presence either of granite slabs broken by ploughing, with bases firmly anchored in the substratum, or by a completely empty bedding socket. The four chambers, placed next to one another, have the same shape, an almost circular design, three metres in diameter, with a short narrow passage on the eastern facade. The associated archaeological material is scarce and typical of the Middle Neolithic. It only consists of a few stone ornaments that have been analysed, a vase with a smooth wall and a few sherds. No bone remains have been found because of the high acidity of the schist bedrock. Several radiocarbon dates confirm that this type of monument with circular chambers and short passages, well known in coastal areas, dates to the end of the 5th millennium and the beginning of the 4th millennium. The Croaz Dom Herry cairn, a type of construction unknown in Central Brittany before this discovery, fills a gap between the north and south coasts of the peninsula.

Translation: Thierry Donnadier

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Une inhumation sous tumulus de l’Âge du Bronze et une occupation de la fin du Néolithique à Gonesse, La Fosse aux Larrons (Val-d’Oise) Bronze Age tumulus inhumation and Late Neolithic occupation at La Fosse aux Larrons (Gonesse, Val-d’Oise, France)

Jacques TarrêTe 1 et Vincent Krier 2, coordinateurs, Jean-Jacques Puisségur (†) et Nicole Limondin-LozoueT 3, Chantal Leroyer 4 et Gérard Firmin 5, Rose-Marie arbogasT 6, Henri duday 7

Mots clé. Âge du Bronze ancien/moyen, Néolithique final, études environnementales, 14C, tumulus, inhumation, céramique, lithique, faune.

Résumé. Découvert fortuitement en 1976 suite à un décapage industriel, un tumulus à couronne de pierres comportant une inhumation centrale a fait l’objet d’une fouille de sauvetage. Situé dans la vallée du Crould au nord de Paris, les diverses études environnementales (géoarchéologie, malacologie, palynologie) ont permis de restituer l’évolution du paysage durant le Subboréal et l’insertion des occupations humaines successives. La stratigraphie révèle une première implantation caractérisée par une couche archéologique partiellement conservée comportant des vestiges céramiques, lithiques et des restes de faune. Des artefacts de même nature se retrouvent dans la constitution du tumulus édifié ultérieurement en partie au détriment de cette occupation initiale. L’étude du monument montre en effet un creusement périphérique destiné à collecter des sédiments pour former un noyau central ceinturé d’une couronne de pierres recouverte d’une chape de terre elle-même surmontée d’un mince niveau organique. Au centre se trouvait un inhumé de sexe masculin dépourvu de mobilier, objet d’une étude anthropologique détaillée. Les datations 14C, les analyses environnementales et l’examen du mobilier concordent pour situer avec vraisemblance les restes d’habitat au début du Néolithique final et l’édification du tumulus à la charnière de l’Âge du Bronze ancien et moyen.

Keywords. Early Bronze Age, Middle Bronze Age, Final Neolithic, environmental studies, 14C dates, inhumation, pottery, lithic industry, fauna.

Abstract. A rescue excavation was launched after a tumulus with a stone lining, containing a central inhumation was accidentally exposed by construction work in the Crould valley, north of Paris, in 1976. The various environmental studies (geoarchaeology, malacology, palynology) made it possible to reconstruct the evolution of the landscape during the Subboreal in relation with successive human occupations. Stratigraphy shows that the first occupation is characterized by a partially preserved archaeological layer containing pottery, lithic and faunal remains. Artifacts of the same nature were found in the tumulus, the construction of which had partly destroyed the earlier occupation. The study of the monument revealed that a circular ditch was used to provide sediments for a central core, surrounded by a lining of stones covered by a layer of soil, itself overlain by a thin organic level. The centre of the monument contained a male burial with no grave goods. A detailed anthropological analysis was undertaken of this individual. According to 14C dates, environmental analyses and the study of the artifacts, the occupation most likely dates to the beginning of Final Neolithic and the building of the tumulus to the transition between the Early and Middle Bronze Age.

Translation: Thierry Donnadier

1. Ministère de la culture et UMR7041 ArScAn, Éthnologie préhistorique, Maison René-Ginouvès Nanterre ([email protected])2. INRAP, direction interrégionale Centre-Île-de-France, PANTIN ([email protected])3. CNRS UMR 8591, Laboratoire de Géographie Physique, Meudon ([email protected])4. MCC/U.M.R6566 CReAAH, Université de Rennes 1, RENNES ([email protected]) 5. 49 Avenue Lazare Carnot, 21340 NOLAY6. CNRS-UMR7044, MISHA, Strasbourg ([email protected])7. PACEA, UMR5199, Université de Bordeaux 1, Laboratoire d’anthropologie des populations du passé ([email protected])

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