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Syria

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  • Ren Dussaud

    Temples et cultes de la triade hliopolitaine Ba'albeckIn: Syria. Tome 23 fascicule 1-2, 1942. pp. 33-77.

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    Dussaud Ren. Temples et cultes de la triade hliopolitaine Ba'albeck. In: Syria. Tome 23 fascicule 1-2, 1942. pp. 33-77.

    doi : 10.3406/syria.1942.4376

    http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/syria_0039-7946_1942_num_23_1_4376

  • TEMPLES ET CULTES

    DE LA TRIADE HLIOPOLITAINE A BA'ALBECK

    PAR

    REN DUSSAUD

    I. Les ruines.

    Les ruines de Ba' albeck comptent juste titre parmi les plus clbres de Syrie. Theodor Wiegand en attribue la dcouverte Martin Baugarten dont la visite remonte 1508 W. Toutefois, comme son rcit de voyage ne parut qu'en 1594, c'est en somme Pierre Belon qui, en 1553 et en 1554* dans Les observations de plusieurs singularitez a, le premier, appel l'attention sur ce site archologique en l'identifiant tort avec Csare de Philippe. La premire description attentive est due au conseiller du Roy, de Mnconys, qui sjourna Ba 'albeck en dcembre 1647 (2). Ds lors, les voyageurs se succdent de courts intervalles (3>. Il faut, cependant, attendre le milieu du xvme sicle pour tre en prsence d'un < vritable relev archologique d Dawkins et Wood (4).* L'agrable description de Volney en a t fortement influence. L'uvre de Cassas restant inacheve, Wood et Volney ont t les deux autorits o les voyageurs successifs se sont abondamment documents.

    Wiegand note que C. de Saulcy, dans son court sjour Ba' albeck, en mars 1851, a fait quelques bonnes observations (5). A l'exemple de Wood et de Cassas, Joyau s'attacha relever une documentation prcise qui a t

    I1) Theodor Wiegand, Baalbek, t. I, p. 1. (2) Voir Jalabert, C. R. Acad., 1906, p. 104. (3) Perdrizet, Revue des tudes anciennes, '

    1901, p. 228 et suiv., a publi le dossier de Mariette (xvme sicle); mais'il semble confondre (Wiegand, Baalbek, I, p. 4), la des* cription du temple rond, qui avait alors son

    Syria. XXIII.

    pribole, et que donne Granger, avec la cour hexagonale du grand temple.

    . (*) The ruins of Balbek, otherwise Heliopolis in Coelosyria, Londres, 1757; dition franaise la mme anne : 46 planches.

    1 (6) Th. WiEGANDr Baalbek, I, p. 7.'

  • Illustration non autorise la diffusion

    34 SYRIA

    recueillie par la Bibliothque de l'cole des Beaux- Arts, mais est reste indite (1>. Son plan a t utilis par le Guide d Chauvet et Isambert (Joanne).

    Tous ces efforts disperss devaient tre clipss par les fouilles de la mission allemande dont les rsultats sont consigns, dans trois volumes de texte et un de planches. Le dgagement des temples -a occup la mission de 1898 1905 sous ,1a direction d'Otto Puchstein dont la mort, en 1911, retarda la publication. Celle-ci fut prise en charge par Hermann Winnefeld avec la collaboration technique du directeur des fouilles, Bruno Schulz, et de D. Krenker. Winnefeld revint Ba'albeck en 1912 et y travailla avec l'architecte Heinrich Kohi; l'un et l'autre disparurent dans la grande guerre. Theodor Wiegand, accompagn de K. Wuizinger sjourna Ba'albeck en juin 1917 avant de mettre

    Fig. 1. La triade hliopolitaine reprsente sur la frise de la grande porte du temple de Bacchus. D'aprs Baalbek, II, p. 22.

    la dernire .main la publication qui marque une date pour la connaissance de l'organisation architecturale (2).

    Cependant, si remarquables que soient les vestiges de Ba'albeck- Hliopolis, leur intrt n'est pas uniquement monumental. Leur raison d'tre dans l'antiquit tenait aux cultes qui s'y droulaient autour de la triade hliopolitaine (Jupiter, Vnus et Mercure hliopolitains) et dont le prestige tait considrable. Les recherches que le Service des Antiquits a poursuivies en ces dernires annes ont beaucoup contribu claircir les problmes cultuels et, en particulier, l'attribution si discute des divers temples (4).

    Si l'on fait abstraction du petit temple rond, qui a peut-tre abrit la Tych

    t1) S. Reinach, Rev. archol., 1902, II, p. 20. (2) Th. Wiegand, Baalbek, Ergebnisse der

    Ausgrabungen und Untersuchungen in den Jahren 1898 bis 1905, 3 vol. de texte in-4 et 1 vol. de planches, Berlin et Leipzig, 1921-1923.

    (3) Bibliographie concernant la triade

    politaine, dans Monuments Piot, XXX, p. 85, n. 5, et dans Wiegand, Baalbek, II, p. 121 , note 3.

    (4) II ne sera pas inutile d'y insister puisque O. Eissfeldt, Tempel und Kulte syrische Sldte in hellensrm. Zeit, estime que la question n'est pas rgle.

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    TEMPLES ET CULTES DE LA TRIADE HLIOPOLITAINE A BA'ALBECK 35

    Fig. 2. Les deux principaux temples de Ba'albeck. D'aprs les relevs de Coupel.

  • 36 SYRIA

    de la ville W, deux temples de grandes dimensions ont t levs la mme poque et, bien que strictement spars l'un de l'autre, forment un ensemble jumel vident. Ils sont communment dnomms temple de Jupiter et temple de Bacchus (fig. 2) . Le temple de Jupiter est de beaucoup le plus consid: rable : dress sur un haut podium et ouvrant l'Est, il est prcd de deux cours. En effet, en avant de la cour rectangulaire, on a dispos une cour hexagonale

    Fig. 3. Ruines du temple de Jupiter hliopolitain. Au premier plan, en avant du grand escalier, les ruines de la tour-terrasse (monument M).

    prcde elle-mme d'imposants propyles. Le grand temple a t entirement dtruit; il n'en subsiste que six colonnes (fig. 3) qui, avec leur entablement dlabr, menaaient ruine (8). Aprs les grands dblaiements de la mission allemande, il importait de sauvegarder ce. qui restait en place et risquait de s'crouler .au moindre tremblement de terre. Un article retentissant de

    (x) Th. Wiegand, Baalbek, I, p. 47 et II, p. 126.

    (2) Notre figure 2 reproduit en le rduisant le plan schmatique dress par l'architecte Coupel, Syria, XVII, 1936, pl.LVT. La

    dance des deux temples apparat mieux encore sur la vue restitue vol d'oiseau dans Th. Wiegand, Baalbek, I, pi. 16.

    () Voir Parrot, Syria, X, 1929, pi. XVI, 3 et 4.

  • TEMPLES ET CULTES DE LA TRIADE HLIOPOLITAINE A BA'ALBECK 37

    M. Henry Bordeaux sonna l'alarme W. De grands et dispendieux travaux taient ncessaires; le Service des Antiquits les a entrepris et mens bien..

    MM. Anus et Coupel, architectes, Qutard, matre appareilleur, et Gaultier, matre charpentier, ont. repris en sous-uvre le formidable entablement (2) des six colonnes du grand temple, consolid les exdres de la cour rectangulaire, restaur la cour hexagonale et les propyles. Rien qu'autour des six colonnes, on a dblay plusieurs milliers de mtres cubes de terre, auxquels il a fallu suppler par l'tablissement d'un puissant mur de soutnement.

    Dans la cour rectangulaire, M. Seyrig a pris le parti, aussi heureux que hardi, de dblayer les vestiges de la basilique de Thodose (3>, construite avec des matriaux emprunts l'ancien sanctuaire, et qui dnaturait la perspective antique. Ainsi a pu tre remis en place l'ancien escalier menant de la cour au temple surlev. Une dcouverte importante autant - qu'imprvue s'en est suivie, dmontrant que l'autel' prsum des sacrifices (4) tait, en ralit, un large difice allure de tour (M de la fig. 2), dont nous examinerons la destination dans un instant. Le nouvel arrangement du grand temple et de la grande cour qui le prcde, apparat nettement dans la .planche LVII de Syria, XVII, 1936. Au centre et au second plan, on distingue la base de l'difice en question avec son amorce d'escalier. Notre figure 3 montre les lments essentiels de ce systme.

    Paralllement au grand temple, mais en contre-bas, est plac le petit temple dit temple de Bacchus. Prcisment parce que mieux conserv que son voisin, il a ncessit tous les soins du Service des Antiquits

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    place ont permis aux corniches de retrouver leur position primitive. L'aile sud du pronaos (fig. 2, C) a ncessit des travaux trs importants cause des lments fort pesants mouvoir et des colonnes de 90 100 tonnes remettre en quilibre (1>. La construction arabe (fig.. 2, N) qui mettait cette aile en pril fut dmonte.

    II. Caractristiques des divinits hliopolitaines.

    Pour examiner les questions relatives au culte hliopolitain que posent les temples de Ba'albeck^et leur dcoration, nous partirons de la magistrale tude que leur a consacre ici mme M. Henri Seyrig W et dans laquelle il a renouvel l'analyse monumentale. Sa dmonstration illustre le principe pos par M. Charles Picard, savoir que, dans le monde antique, domine le souci religieux d'accorder la dcoration des temples l'histoire lgendaire, locale, des dieux qui y trouvaient leur demeure (3) .

    M. Seyrig s'accorde avec M. Thiersch (4) pour reconnatre que les deux temples sont soumis la mme symbolique dcorative, mais il en, tire une conclusion diffrente : il ne peut admettre que le grand temple soit exclusivement celui de Jupiter hliopolitain, et le petit -temple, uniquement celui de sa pardre. En effet, on ne peut se soustraire l'impression, bien mise en vidence par Puchstein, que le petit temple est domin par le dcor bachique. Les constatations de M. Seyrig et le complment qu'y a apport M. Ch. Picard ne laissent plus de doute sur ce point, comme nous le verrons ci-aprs. Ds lors, la conclusion de M. Seyrig s'impose : les deux temples sont consacrs tous deux la triade, mais tandis que le grand temple tait affect au culte public, le petit temple tait rserv aux mystres dont nous examinerons plus loin, la nature. Ce point de vue s'accorde avec les dispositions du culte similaire de Hirapolis (Menbidj) o la triade syrienne habitait le mme sanctuaire.

    Pour bien comprendre cette organisation et la signification accorder

    l1) La colonne la plus incline fut dplace (8) Ch. Picard, Mlanges syriens, p. 321. au sommet de 0 m. 225 sans accident. L'aspect (4) Thiersch, Zu den Tempeln und zur dfinitif est donn dans Syria, 1936, p. 330, Basilika von Baalbek, dans Nachr. zu den fig. 9. - Gesellsch. der Wiss. zu Gottingen, Phil.-Hist.

    (2) La Triade hliopolitaine et les temples de Kl., 1925, p. 3 et suiv. Baalbek, dans Syria, X, 1929, p. 314-356.

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    aux cultes syriens, nous ferons appel la mythologie rvle par les textes de Ras Shamra (Ugarit), dont on sait qu'ils ne sont pas seulement remarquables par leur antiquit la copiequ'on en possde remonte la premire moiti du xive sicle avant J.-C. mais aussi parce qu'ils nous conservent une armature cultuelle archaque, peine dissimule par les combinaisons thologiques. Nous l'avons dj signal (1), mais il ne sera pas inutile d'y revenir pour, en faire l'application directe aux cultes d'Hliopolis-Ba'albeck, ce qui n'a pas encore t tent ; il en sortira quelques claircissements non ngligeables. .

    Nous devons immdiatement parer l'objection qui estimerait aventur de rapprocher des cultes spars par un intervalle 'de quinze cents ans. Cette objection fondamentale pour l'histoire politique ne porte pas en histoire des religions, car la permanence des rites et des croyances notamment dans les rgions syriennes, jusqu' la fin du paganisme, ne fait aucun doute. La puissance de conservatisme dans les croyances s'est particulirement exerce dans ce foyer d'intense religiosit, dont nous subissons encore le rayonnement, au point qu'en dpit de toutes leurs transformations, nos ftes de Pques et de Pentecte se rattachent, par del l'intermdiaire juif, au plus ancien fonds agraire cananen, et cela non seulement par la date, mais encore par le symbolisme du Dieu qui meurt pour renatre (2).

    C'est ainsi que nous pouvons apporter. un tmoignage nouveau et dcisif de la perptuit de l'ancien culte de Hadad Ba'albeck, grce au-x rapports troits qu'on peut tablir avec les pratiques que nous ont fait connatre les textes de Ras Shamra. Il s'agit de l'difice en forme de tour dcouvert par le Service des Antiquits dans la grande cour, et qui se dressait, en opposition toutes les rgles architecturales classiques, une trentaine de mtres en avant des escaliers du temple de Jupiter (fig. 2, M et fig. 3). La base, qui en subsistait, avait t, nous l'avons dit, prise, tort, pour l'autel aux holocaustes. Quelle que ft la destination de cette tour, remarque M. Seyrig, il est clair maintenant que la grande cour du temple de Jupiter ne contenait pas d'autel pour les sacrifices sanglants (3). D'autant qu'aucun chemin d'accs ne per-

    l1) Notamment Revue de l'Hist. des Religions, Isralite, 2e d., 1941, p. 332 : la Pque is- 1931, II, p. .400 et suiv. : Les mystres phni- ralite et sa signification premire. ciens. (8) Seyrig, Heliopolitana, dans Bulletin du

    (a> Voir nos Origines cananennes du sacrifice Muse de Beyrouth, I, p. 78.

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    mettait de conduire le gros .btail. dans les cours du temple. Toutefois, cela n'excluait pas les sacrifices sanglants, la condition de les limiter aux agneaux, chevreaux et oiseaux aisment transportables. Un passage- de l'pope de. Kert nous aidera le comprendre, en nous replaant dans les conditions qui se prsentaient Ba*albeck. Il s'agit, en effet, d'un sacrifice pratiqu au sommet d'une tour, ce qui nous autorise conjecturer qu'-Ba'albeck aussi l'autel devait se trouver en haut de la tour nouvellement dcouverte. Voici en quels termes le dispositif ancien est attest au xtve sicle avant J.-C. par le texte d'Ugarit dchiffr par M, Virolleaud :

    Prends l'agneau du sacrifice dans ta main, l'agneau du sacrifice dans (ta) droite, le chevreau (dans) les deux mains, la totalit de ton pain d'offrande. Prends, () mssr, l'oiseau du sacrifice. Verse du vin dans, une coupe d'argent, du miel dans une coupe d'or. Monte au sommet de la tour (*). *

    L, Kert lvera la main vers les cieux (2), et il sacrifiera aux dieux El et Ba'al. On notera* que ce dernier n'est autre que Hadad, prototype de Jupiter hliopolitin. De mme, Ras Shamra, on reconnat dans le naos du temple de Ba'al (fig. 4) une amorce d'escalier qui permettait aux prtres de monter sur la terrasse du sanctuaire. Nous avons expliqu ailleurs (3) que Msa, le roi de Moab, offrit en haut de la tour du sanctuaire, son fils "an en holocauste et aussi que le temple de Jrusalem, avant la rforme de Josias, possdait des autels installs sur la terrasse du temple.

    Nous pouvons donc nous engager, sans crainte, dans la voie des comparaisons; mais, auparavant, il nous faut remarquer qu'aprs avoir offert son sacrifice, Kert redescend de la tour et qu'il s'occupe de prparer le sacrifice de communion pour ses compagnons, ce qui suppose un* autre autel au sol.

    l1) Voir nos Dcouvertes de , Ras Shamra cananens ou les ziggourat babyloniennes ou (Ugarit) et VA. T., 2e edit, 1941,- p. 183. encore l'chelle de Jacob.

    (2) La tour est donc le moyen de s'adresser W Comptes rendus -Acad. des Inscr., 1941, plus directement aux dieux clestes; elle pro- p. 534. cde * de la mme notion que les hauts-lieux

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    Ainsi, dans le rituel que nous fait connatre l'pope de Kert, seul l'holocauste tait offert en haut de la tour; nous en avons tir l'explication du terme Kolah (holocauste) J1). Il est d'autant plus certain qu'on n'offrait sur la tour du temple de Ba'albck que des holocaustes d'agneaux, de chevreaux et d'oiseaux,

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    On sait que la Syrie ne connat que deux saisons nettement tranches : l'hiver qui amne de fortes prcipitations d'eau ou de neige dans la montagne et l't . absolument sec. Le systme hydrologique, trs particulier, s'oppose compltement celui de l'Egypte et de la Msopotamie (1). Cette observation est capitale, car en nous expliquant, physiquement si l'on peut dire, comment les anciens habitants de la Syrie sont parvenus envisager deux entits distinctes et cependant trs voisines, comme Hadad (Ba'al) et Aliyan son fils, elle carte a priori, pour ces cultes, toute origine gyptienne ou msopotamienne.

    La montagne avec ses nuages, ses orages, ses abondantes prcipitations, fait contraste avec le bas-pays (c'est le sens du terme Canaan), dessch une grande partie de l'anne,' mais toujours pourvu de sources qui assurent son irrigation. De l la distinction entre Hadad et Aliyan Ba'al.

    . Hadad, dieu des cimes '2), de la foudre et de la pluie, n'est pas le plus grand des dieux, mais pratiquement il est celui dont le paysan syrien se sent le plus dpendant; l'homme attach la terre prouvait un soulagement profond quand le dieu El, bienveillant et compatissant, annonait,, par la voix de ses prtres, la bonne nouvelle :

    Les cieux feront pleuvoir de la graisse, les ruisseaux feront couler du miel (8).

    C'est--dire, l'herbe engraissera le btail alors que les ruisseaux feront crotre et. fleurir les plantes;. en d'autres termes, suivant l'expression biblique, le pays dcoulera de lait et de mieL. D'ailleurs, Hadad (Ba'al) dfinit lui- mme ses fonctions :

    l1) Nous renvoyons aux deux importantes Comptes rendus Acad., 1907, p. 144 et suiv.), tudes de M. J. Weulersse, le Pays des dfinit Hadad : Adados libants et akroreits. Alaouites, 2 vol., 1940, etl'Oronte, tude de C'est le Ba'al Lebanon d'une inscription ph- fleuve,191Q;-ci. Syria, 1941, p. 286 et 288. Cela nicienne de Chypre, CIS, I, 5. ne veut pas dire que l'Egypte et la Msopotamie (3) I AB, III-IV, 6-7. .Voir nos Dcouvertes n'ont pas connu les rites agraires; mais ces de Ras Shamra (Ugarit) et l'A. T., 2e dit., pays les organisaient diffremment. p. 138 et suiv. .

    (2) Une ddicace de Rome (Gauckler,

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    Moi -seul, je rgne sur les dieux, pour engraisser les dieux et les hommes, pour rassasier les foules de la. terre l1).

    II y sera aid par son fils Aliyan, qui est spcialement le matre des eaux souterraines. Comment les anciens habitants du pays n'uraient-ils pas t frapps par les nombreuses sources qui jaillissent dans la plaine, non loin du rivage, parfois mme en mer, ou encore par les sources souvent puissantes qui sourdent tout le long du parcours de l'Oronte et alimentent ce fleuve sans affluent. C'est l le domaine du shophet des fleuves , Aliyan, fils de Ba'al. Cette filiation est un fait d'exprience ; les -gographes nous expliquent que le relief montagneux, calcaire et permable, de Syrie, absorbe la plus grande partie des prcipitations atmosphriques, et que l'eau, ainsi accumule dans le sous-sol, ressort au pied des montagnes.

    On conoit que l'action convergente des deux divinits tende se confondre dans les rcits mythiques de Ras Shamra"^, si bien que certains exgtes ont propos d'identifier Ba'al (Hadad) et Aliyan. Ces deux entits sont bien distinctes puisqu'elles se retrouvent respectivement dans Jupiter hliopolitain et Mercure hliopolitain, son -fils. Mais, d'autre part, il n'est pas surprenant que la dyade hliopolitaine apparaisse troitement unie, quelque soin qu'aient pris les prtres hliopolitains distinguer leurs attributs.

    En ce qui concerne les animaux-attributs, la rgle attribuait le taureau Hadad et le lion sa pardre, comme ce fut toujours Je cas Hirapolis et dans ses filiales (3). A Hliopolis on vnrait dans le temple de Jupiter hliopolitain un dieu qualifi de Gehnaios qui avait pris la forme du lion (4). Depuis longtemps, nous avons propos de reconnatre une reprsentation de ce dieu-lion, dit Gennaios, dans le mufle de lion, figur frquemment sur l'idole de Jupiter hliopolitain, et nous avons rapproch de cette reprsentation la ddicace de Kefr Nebo aux dieux Simios, Symbtylos (i. e. Simia) et

    l1) II AB, VII, 50-52. (8) Notamment Doura Europos, 3e Report, (8) C'est l un phnomne courant en mytho- pi. XIV. Voir Pauly-Wissowa, Realencycl.,

    logie phnicienne. Ainsi ^ 'Anat (sous la forme s. v. Hadad. aramenne *Att) . et / Ashtart s'unissent en (*) Damascius, Vie d'Isidore, dans'MiGNE, une entit Atargatis qui supplante Ashrat Patrol, gr., CIII, 1292, le passage reproduit auprs de Hadad. et traduit par Seyrig, l. c, p. 336 et suiv.

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    Lion (1). Par l, Gennaios voisinait avec la triade. M. Seyrig pousse plus loin et il identifie purement et simplement Gennaios-lion avec le dieu-fils; ainsi Gennaios deviendrait la troisime personne de la triade hliopolitaine {2). D'aprs M. Seyrig, cela expliquerait "que le lion tait donn au dieu-fils comme animal-attribut. De plus, et sans qu'on en voie bien les raisons, le dieu-fils revtirait le caractre solaire qu'on avait coutume jusqu'ici d'attribuer Jupiter hliopolitain lui-mme.

    L'inscription de Kefr-Nebo s'oppose ce qu'on considre le Gennaios- lion comme le dieu-fils qui est prcisment Simios. Le lion de ce texte pourrait n'tre que le lion, attribut d'Atargatis. Pas plus admissible est l'attribution de la nature solaire au dieu-fils. Ni le rcit de Damascius (3J, ni mme- l'pithte de Gennaios qu'on lui attribue ne l'imposent. Cette dernire est applique des entits fort diverses, comme Balmarqod (4) dont le sanctuaire se dresse encore Deir* el-Ql'a, au-dessus de Beyrouth, ou Malakbel (5) et mme Poseidon (6). Il faut, d'ailleurs, distinguer Gennaios et Gennas.- Gennaios forme de lion n'est pas ncessairement un dieu solaire. Par contre Gennas, associ au cheval, est indubitablement le Soleil. L'association avec cet animal remonte l'poque assyrienne, c'est--dire au temps o s'est dveloppe et rpandue la -pratique de l'quitation. Il suffira de citer la reprsentation de Shamash debout sur le cheval, dans le relief de Malta W. Le terme de Gennaios survit dans le mot arabe djinn.

    l1)- Notes de mythologie syrienne, p. 34; 85 et suiv. La plus rcente bibliographie de Simios-Simia est donne par H.* Seyrig, Syria, XX, 1939, p. 305, n. 1.

    (2) Seyrig, Syria, X, p. 236 et suiv. (3) Une boule de feu n'est pas forcment

    une reprsentation du soleil; celle dont parle Sozomne, Hist* eccl., 2, 5, est qualifie par lui d' Urania.

    (*) CIL, III, 6668 et 6673. Ici l'pithte de gennaios s'applique une divinit, qui nous cache Hadad. Le terme de marqod ne dsigne ni une ville ni les danss sacres, mais celui qui fait bondir, c'est--dire trembler la terre. De sa voix (clair), il brise les cdres et les fait bondir comme de jeunes taureaux , il fait bondir le Liban et le Sirion comme de

    jeunes buffles , images que Psaumes, XXIX, 6, reporte -sur Yahw, mais qui appartiennent en propre Hadad. Il ne serait pas impossible qu'il faille interprter dans cette voie l'expression tgl 'el 'tk jeune taureau, dieu qui jette bas (?) , V AB, D, 41, en comparant V AB, B, 10-11 o eAnat jette ('tkt) les ttes des hommes qu'elle combat.

    (6) L. Heuzey, C. R. Acad. des Inscr., 1902, p. 190-200; cf. nos Notes de mythologie syrienne, p. 57.

    (6) L. Jalabert, Ml. Universit St-Joseph, VII (1921), p. 387 et suiv.; cf. Ronzevaixe, ibid., XXI, p. 63-64. Peut-tre ce. Poseidon n'est-il- qu'une forme de Balmarqod.

    l7) Thureau-Dangin, les Sculptures rupestres de Malta, dans Revue d'Assyriologie, 1 925, p. 1 94.

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    TEMPLES ET CULTES DE LA TRIADE"

    HLIOPOLITAINE A BA'ALBECK 45

    En conclusion, nous pensons que le lion Gennaios garde Hliopolis un personnalit distincte de celle du dieu-fils, et qu'il est tout autre chose que les lions, qu'on a donns ce dernier comme animal-attribut (1). Notre opinion est confirme par le cippe octogonal de Fiki (fig. 6 et 7) que nous allons examiner/

    Dans cette localit situe sur le versant ouest de l'Antiliban/un peu au Sud

    Fig. 5. Jupiter hliopolitain. Bronze de la collection de Clercq.

    de Ras Ba'albeck, un curieux monument a t dcouvert que le P. Ronze- valle a tudi avec un soin particulier W. Les faces 1-3 du cippe octogonal montrent le Soleil (face 2) entre la Lune (face 1) portant une torche plutt qu'une palme et une^autre desse indtermine (3) (face 3) que nous cher-

    l1) Ainsi sur l'autel d'Antioche (Seykig, Syria,' X,pl. LXXXIII,* 4) les deux lions encadrant l'idole sont les attributs du dieu- fils, tandis que le lion passant, sur le socle, reprsente Gennaios.

    (2) Ronzevaixe, Jupiter hliopolitain, nova et vetera, dans Ml. Univers. St- Joseph, XXI, p. 87-129, pi. XXVI, 3-XXVIII.

    (3) La desse tiendrait de la main gauche une harpe verticale. Nous hsitons suivre

  • 46 SYRIA

    cherons ' identifier en traitant de la face 8. Les faces 4-6 sont consacres la triade hliopolitaine proprement dite. La desse, assise et portant l calathos est voile, la tunique retenue par une ceinture (4). Les animaux qui l'accostent, sont probablement des sphinx. Jupiter hliopolitain (5) - est reprsent au- dessus d'un naos fronton et quatre colonnes que flanquent deux taureaux. Quant au dieu-fils (6), son terme , particulirement histori, pose sur un socle qu'accostent deux animaux peu distincts W et que dcore "un astrisque sur lequel nous reviendrons pour carter son identification avec le foudre.

    12 3 4 Fig. 6. Divinits reprsentes sur les faces 1-4 du cippe octogonal de Fiki.

    La face 7 est dcore d'un assez large mufle de lion pos au-dessus d'une, desse assise et voile du type de la desse hliopolitaine de la face 4, mais de

    le savant archologue dans cette dfinition. Ni la forme, ni les dimensions ne permettent de penser une harpe qui devrait tre tenue par la main droite ; une corne d'abondance est * plus vraisemblable; cf. une figure comparable dans Dunand, le Muse de Soueida, pi. XXXVI, fig. B et C.

    l1) Le P. Ronzevalle, l. c, p. 120 et suiv., s'lve bien tort contre l'attribution du lion au dieu-fils pour lui affecter le veau. Des quatre monuments qu'il cite comme dcisifs ce sujet, l'un, le relief de Hermel, est- en

    trop mauvais tat pour qu'on se prononce (M. Virolleaud, Syria, V, p. 113, pi. XXVIII, y a vu des lions) ; le second, l'autel'd'Antioche, ne laisse aucun doute sur les pattes de lion (Seyrig, Syria, X, pi. LXXXIII, 4).- Pour les deux autres (main votive du Louvre et cippe de 'Ain Djoudj), nous sommes d'accord pour y reconnatre des taureaux, mais c'est prcisment qu'il s'agit de Jupiter hliopolitain et non du dieu-fils,, ce que dmontre le fait que le corps du dieu est constitu en a gane et non en a terme .

  • TEMPLES ET CULTES DE LA TRIADE HLIOPOLITAINE A BA'ALBECK 47

    dimensions plus rduites. Cette curieuse reprsentation nous parat avoir t ingnieusement lucide par le P. Ronzevalle. Il a dml, en effet, que les faces 6 et 7 groupent trois entits rpondant aux trois divinits de l'inscription de Kefr Nebo : Simios, c'est--dire le dieu-fils, le Lion et Simia: Cela confirme que le masque de lion des idoles de Jupiter hliopolitain ne doit pas tre interprt comme un simple attribut ou une reprsentation du dieu-fils ; il garde sa personnalit en dehors de ce dernier.

    La face '8 montre Ares nu, casqu, porteur, de la lance et du bouclier;

    5 ' 6 7 8 Fig. 7. Divinits reprsentes sur les faces 5-8 du cippe octogonale de Fiki.

    *

    son interprtation dans le cycle hliopolitain est imprcise; c'est probablement une entit ennemie du dieu-fils, ainsi qu'il apparat dans le mythe d'Adonis (1). En tout cas, la prsence d'Ares permet de conjecturer que la desse de la face 3, qui lui fait pendant, est Aphrodite. On rappellera l'pisode, de ce nautonier qui, croyait reconnatre Ares dguis conduisant Aphrodite vers le Liban dans un navire sidonien (2). Sur le bronze de Clercq, reproduit plus haut (fg. 5), on retrouve ce couple et, comme un astre figure au-dessus de la

    (*) Le P. Ranzevalle songe Bel; mais la figure de ce dernier est incertaine. Ares, en tant qu'ennemi d'Adonis, appartient au cycle de Hadad ; ici il pourrait tre simplement en relation avec le Soleil et par suite

    tifierait 'Azizos syrien,- quivalent de Phos- phoros.

    l2) Nonnos,. Dyon., . trad. Marcellus, II, p. 28-29/ - . .- .

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    desse, on en conclura une valeur sidrale. Ds lors, Aphrodite et Ares qui encadrent le Soleil et la Lune sur le cippe de Fiki, forment logiquement avec ces derniers un ensemble astral.

    On remarquera que les. divinits du cippe octogonal de Fiki se classent en deux groupes qui occupent quatre faces chacun. Le premier groupe qui comprend les divinits hlipolitaines se dcompose en deux triades avec Mercure hliopolitain comme lment commun; le second groupe est un ensemble astral d'accompagnement. \

    Vnus hliop. (face 4). Jupiter hliop. (face 5). Mercure hliop. (face 6). Mercure, hliop. (face 6). Lion (face 7). Simia (face 7). Ares (face 8). Lune (face 1). Soleil (face 2). Aphrodite (face 3).

    Si, comme le pense M. Seyrig, l'attribution du sphinx la desse marque une influence phnicienne et aussi gyptienne, on conoit que le lion ait pu tre affect au dieu-fils sans crainte de confusion. On peut, d'autre part, affirmer que la prsence du sphinx femelle indique l'poque slucide, car, comme on le constatera sur notre planche III, on a figur un sphinx femelle auprs de la desse W'et cette forme a t en particulire faveur- cette poque en Syrie.

    Toutefois, il ne faut pas perdre de vue que c'est l un simple artifice plastique, puisque le sphinx est un lion. Autrement dit, il n'est pas interdit de trouver dans certains cas un rappel de la desse sous les espces de son ancien animal-attribut, le lion , ainsi que l'a propos M. Thiersch.' Ce nous semble tre le cas des consoles alternes, lion et taureau (fig. 8), qui se rptent dans

    l1) C'est la seule statue en ronde-bosse de quelque importance qui provienne de Ba'al- beck; on ne peut donc douter qu'il s'agisse d'un monument du culte. On ne sait pas exactement o elle fut trouve. Joyau fut le premier la voir en 1865 et la dessiner; il en a rapport la tte de sphinx aujourd'hui au Louvre. La statue fut transporte en 1884 Beyrouth. A mon passage dans cette ville, je la signalai Salomon Reinach qui la publia dans Revue archologique, 1902, I, p. 19-33, pi. II-IV, sous le nom inexact d'Isis, l'attribuant au ne sicle de notre re. - Salomon

    Reinach l'ayant signale son tour Hamdy bey, celui-ci 'la fit entrer au muse de Stamboul en 1901. La publication de Baalbek, I, p. 46, pi. XIII, ne dfinit pas la desse, mais en donne la 'bibliographie complte. Notre planche est tablie d'aprs. une ancienne photographie de Bon fils.'

    l2) Nous y sommes autoris, notamment par les monnaies de Gabala qui, tout en accordant le sphinx la desse voile que le P. Ron- zevalle a justement rapproche de la- desse assise de Fiki, lui maintiennent l'attribution du lion; cf. Ronzevalle, op,cit., pi. XXXIII.

  • TEMPLES ET CULTES DE LA TRIADE HLIOPOLITAINE A BA* ALBECK 49

    chacun des deux temples (1). La confirmation en est apporte par le dcor de la frise de la grande porte du temple de Bacchus, o taureau et lion reprsentent forcment Jupiter hliopolitain et Vnus hliopolitaine, puisqu' ct est figur sous les traits d'un enfant le troisime personnage de la triade (2) (g- 1).

    Il faut noter que les attributs de la. desse ne manquent pas de subir l'influence des lgendes relatives la protection qu'elle accordait aux poissons Ascalon elle en avait pris en partie la forme ou relatant ses rapports avec son fils ou sa fille. Sur l'autel d'Hermel (3), la desse est accompagne de tritons qui ont t rapprochs de ceux des temples rr r Fig. 8. Ba'albeck. de Ba'albeck W. Motif de l'un et l'autre temple.

    III. Transformation de Hadad en Jupiter hliopolitain.

    Dans l'ancienne conception phnicienne et syrienne, aux forces vives de la nature qui se manifestent en hiver, poque o mme le dsert se couvre d'herbe et bientt de fleurs, s'opposent les forces vives qui desschent les pturages, mais font mrir les moissons, l'olive et le raisin, c'est alors la disparition de Ba'al :

    Ba*al entre dans le sein (de la terre), il descend par la bouche (de la terre) W,

    quand l'olive, produit (de la terre), et les fruits des arbres sont soumis aux ardeurs (du soleil) ().

    I1) Baalbek, I, pi. XXIII et LX, pour le grand temple; et II, p. 8, fig. 12 et p. 10, fig. 14 pour le petit temple.

    (2) Baalbek, II, p. 22, fig. 16. W Publi par Ch. Virolleaud, Syria, V,

    p. 113 et pi. XXVIII. Syria. XXIII.

    (*) Seyrig, Syria, X, p. 335. Tritons la rame dans Baalbek, I, pi. CXI.

    (5) La notion de bouche de la terre repose notamment sur le fait que la terre absorbe les liquides; cf. pour le sang, Gen., IV, 11.

    () I AB, II, 4-5. 7

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    Les forces vives, qui entrent alors en action, sont reprsentes par Mot, devenu Adonis basse poque. Les dveloppements mythiques et thologiques ont submerg la primitive conception agraire parce qu'on s'est de plus en plus proccup du sort de l'me spirituelle. L'abondance de la nourriture, assure par les rites saisonniers, pourvoyait l'entretien de la nphesh ou me vgtative W. Puis vint un temps o l'on pensa surtout au sort de la rouah ou me spirituelle. On trouva dans l'enseignement des mystres le moyen de calmer l'apprhension des fidles en leur indiquant la voie du salut. Par l l'intrt des mystres se dplaait et, une exgse nouvelle naissait. Ainsi ce n'est plus la desse qui pratique le sacrifice du dieu, comme * Anat le fit de Mot (2) ; on professe que, pour se drober aux assiduits de la desse, le dieu se mutilait lui-mme, tranchant ainsi l'pi fcond de sa jeunesse pour l'abandonner comme les prmices de la moisson (3). En nous rapportant la lgende qui avait cours alors, Damascius nous apprend que le nom phnicien topique d'Adonis tait Eshmoun (4>. Il est d'autant plus regrettable que les historiens modernes, comme Baudissin, aient cart ce prcieux renseignement, qu'il fournit le lien avec Simios (5> au travers du roman de Kombabos (6). Tout cela est assez compliqu; mais il y a plus inattendu encore.

    En effet, dans le syncrtisme dont nous essayons de fixer les lments, on s'attendrait voir se confondre les personnes d'Aliyan Ba'al et de Mot, et

    l1) Voir La notion d'me chez les Isralites et les Phniciens, dans Syria, 1935, p. 267 et suiv.

    (2) Voir nos Dcouvertes de Ras Shamra (Ugarit) et l'A. T.? 2e dit., p. 130.

    (8) Nonnos, Dionys., XXV, 313 et suiv. (4) Damascius, Vita Isid., 302 : Esmounos,

    fils de Sadykos; cf. Philon de Byblos, fig. 2,20 : Asclpios, fils de Sydyk et d'une Titanide. Or, dans les religions smitiques le Soleil est le saddiq par excellence, car comme disent les Accadiens, il est bel kitti u misri le gardien du droit et de la droiture . Nous verrons, prcisment, ci-aprs, que pour Pausanias, le Soleil est le pre de l'Asclpios phnicien. D'autre part, nous croyons trouver trace Dlos de l'quivalence Simios-Asclpios,

    langes Rdet, p. 132. La mutilation rapporte par Damascius est le meilleur commentaire il a chapp aux archologues qui ont publi le monument d'un bronze d'Adonis dress sur une base orne du phallus; cf. la description par E. Michon, Syria, VI, p. 307. Cette base se termine par des pattes de lion, ce qui peut tre un hasard, mais ce qui rappelle peut- tre aussi que le dieu- fils tait accompagn du lion.

    (6) Notes de myth, syrienne, p. 152; Mlanges Radet, p. 135.

    (6) Benveniste, la Lgende de Kombabos, Mlanges syriens, p. 249-258, a bien montr que l'aventure de Kombabos avait t trs artificiellement rattache au culte d'Atargatis.

  • TEMPLES ET CULTES DE. LA TRIADE HLIOPOLITAINE A BA'ALBECK 51

    leurs attributs se runir dans la mme main, celle de Mercure hliopolitain, La ralit est moins simple, car si les deux entits en question se fondent dans le dieu- fils de la triade syrienne et si les pampres restent l'attribut de ce dernier, l'pi qu'incarnait Mot lui-mme passe entre les mains de Hadad, notamment quand celui-ci prend les traits de Jupiter hliopolitain ou de Jupiter damas- cnien. Il y a l une particularit qui tient ce que le grand dieu tend absorber ses rivaux. L'un de ces derniers tait Ba'alsh'amim ou l'poque ara- menne Be'elsamin; mais il n'en faut pas moins viter d'identifier Hadad avec Be'elsamin, le dieu des cieux. Ce sont l deux entits essentiellement diffrentes (1).

    La dcouverte Doura-Europos d'un bas-relief identifiant Be'elsamin Zeus Kyrios jette un trait de lumire (2>. Le dieu est figur barbu, portant des pis et des fruits, dont des raisins, et recevant l'offrande d'un agneau; il tient la lance dans la gauche (fig. 9). Ds lors les trois ddicaces du Hauran Zeus Kyrios sont attribuer . Be'elsamin t3). Le culte du dieu tait particulirement en faveur dans cette rgion qui possdait Si1 un temple important consacr Be'elsamin et Dusars dans la seconde moiti du ier sicle avant J.-C. Nous utiliserons ci-aprs un linteau (fig. 16) mettant en rapport ces deux divinits qu'il faut se garder de confondre.

    Pour, sentir quel point la conception de Be'elsamin est distincte de celle

    l1) Sur Be'elsamin Palmyre, voir Seyrig, Syria, VI, 1925, p. 246 et suiv. Les archologues identifient volontiers Hadad et .Be'elsamin; ainsi S. Ronzevalle, Ml. Univ. Si-Joseph, XXI,' p. 24 : Be'el Samin, alias Hadad ; cf. p. 53 et 139. Nombre de textes s'y opposent, notamment la stle de Zakir o le roi de Hama invoque sparment Hadad sous le nom de ELWR et Be'elsamin, qui est son dieu particulier.

    (2) Doura Europos, Preliminary Report of the Seventh and Eighth Seasons, p. 292-302 et pi. XXXVII (C. Hopkins), Dans son tude du relief, le savant archologue accepte de distinguer entre Hadad (Ba'al) et Be'elsamin.

    (3) Ce sont les n 15, 177 et 178 de Dunand, le Muse de Soueda, 1934. La ddicace,

    Zeus Kyrios du n 15 est grave sur un autel figurant vraisemblablement Dusars dans une vigne. Il se peut, comme le pense M. Dunand, que l'aigle du naos monolithe (n 30) entre le Soleil et la Lune figure Be'elsamin. Aussi que la ddicace n 27 lui soit attribue. On peut galement recorinatre Be'elsamin dans les deux ddicaces de Hbran (Dunand, ibid., 175 et 176) Zeus Keraunios, en s'appuyant sur la bilingue de Tayyib, CIS, II, 3912; Chabot, Choix de monuments, p. 76. Par contre, il faut, avec Hopkins, l. c, p. 300, carter de Be'elsamin la reprsentation du dieu imberbe et radi d'un linteau du temple de Si'. On verra plus loin les raisons qui nous font penser que Be'elsamin (Ouranos) formait en Nabatne une triade avec Dusars et Allt.

  • 52 SYRIA

    de Hadad (Ba'al) et combien il est erron de les identifier, il suffit de constater qu' Palmyre, o la colonie juive tenait une large place, un certain syncrtisme a pu s'tablir entre Be'elsamin et Yahw ce qui n'a pas peu contribu transformer Be'elsamin en dieu anonyme (1) tandis que toute collusion entre Hadad, l'ennemi sculaire, et le Dieu des Juifs tait rigoureusement

    impossible. Mme les historiens des temps hellnistiques estiment que l'identification tente par Antiochus Epiphane entre Zeus et Yahw se fondait sur l'intermdiaire de Be'elsamin

  • TEMPLES ET CULTES DE LA TRIADE HLIOPOLITAINE A BA'ALBECK 53

    il faut, en effet, tenir compte du dveloppement de la thologie solaire (1) qui tendait placer le Soleil au premier plan des proccupations humaines, et amenait ainsi les grands dieux s'identifier plus ou moins lui. Dans la mythologie phnicienne de l'poque d'Ugarit, le Soleil en ralit la desse Sapas est une divinit dont le rle se rduit celui de messager et de hraut du grand dieu El. En Msopotamie Shamash (le Soleil) et Hadad sont associs dans la dtermination du sort/ En Syrie, le Soleil rend particulirement les' oracles. C'est le cas de l'Apollon de Hirapolis (2) et de Yarhibol Palmyre. Le fait qu' Ba'albeck, les oracles sont rendus par Jupiter hliopolitain, nous laisse dj supposer qu'il a absorb les fonctions du Soleil. Sous l'influence des ides rgnantes, le clerg local, se refusant abandonner Hadad; se rsolut l'identifier au Soleil. Le nom grec d'Hliopolis que reut la ville indique que cette .transformation date de l'poque des Sleucides.

    M. Seyrig s'est inscrit en faux contre cette explication, et l'autorit qu'il s'est acquise dans l'tude des cultes syriens exige qu'on examine attentivement sa thse. D'aprs lui, c'est le Mercure hliopolitain, identifi, croit-il, Gennaios, qui, concentrant tous les caractres du dieu Polaire, aurait t un moment donn le dieu le plus important du pays, le vritable Ba'al-Biqa', d'o le nom de Ba'albeck

  • 54 SYRIA

    que nous venons de dfinir W 'il nous renseigne exactement sur l'opinion de son temps qui se reflte d'autre part sur les monuments eux-mmes.

    En dehors de son caractre d'animateur de l'univers, que lui vaut son assimilation Jupiter, Jovem... animum ac spiritum mundi, selon la dfinition de Srique et qu'il exerce par l'intermdiaire des dieux qui parent son idole (2), Jupiter hliopolitain a des fonctions propres que marquent ses attributs soigneusement tiquets. Il faut donc s'efforcer de distinguer entre les attributions d'origine et les attributions rcentes. L'exemplaire que nous reproduisons' (fig. 5) permettra de suivre la discussion.

    De Hadad, le balanion ou idole de Jupiter hliopolitain conserve comme anciens attributs, les taureaux (3) et le foudre (4). On peut prtendre que le disque ail qui s'tale volontiers sur la poitrine et dans le dos de l'idole,- est un symbole cleste fort rpandu en Phnicie, qui revt un caractre divin trs gnral et non spcialement solaire. Mais il n'en est pas de mme du fouet que le dieu brandit dans la droite, et que, pour qu'on ne s'y trompe pas, il tient in aurig modum. Le rle de chevaucheur des nues qui est propre Hadad dans la haute antiquit on ne chevauchait qu'en char a facilit le rapprochement avec le char d'Hlios; mais pour juger de la valeur solaire que le fouet prsente ici, il faut considrer la symbolique locale qui ne permet aucune hsitation. Un bon exemple est offert par le cippe de Bted'el (fig. 10) o le buste du Soleil est accompagn du fouet (5). Si le fouet avait eu la valeur du foudre (6), pourquoi encombrer de ce dernier la main gauche du dieu dj charge d'pis ? Le long chiton manches courtes que porte le dieu est le vtement caractristique de l'aurige grec W, et ce trait nous avait incit admettre

    (*) Ci-dessus, p. 50, note 4. l2) "Ce point a t mis en lumire par Fr. Cu-

    mont, le Jupiter hliopolitain et les divinits des plantes, dans Syria, II, p. 40 et suiv.

    (3) Ou plus exactement des veaux. En effet, et contrairement ce que pensait le P. Ron- zevalle, voir ci-dessus, p. 46, note 1 c'est le dieu El qu'on qualifiait de taureau, shor (voir nos Dcouvertes de Ras Shamra, 2e edit., p. 95 et 100), tandis que Hadad tait qualifi de *egel, veau . (ibid., p. 100 et 119 : V AB, D, 41).

    (4) Tout un groupe de monuments syriens reprsentent Hadad sous la forme d'une main tenant le foudre; voir Seyrig, Syria, XX,, 1939, p. 189 et suiv.

    (5) Seyrig, Bulletin du Muse de Beyrouth, I, p. 93, fig. 4.

    (6) Voir Seyrig, Syria, X,' p. 347 et Bulletin du Muse de Beyrouth, I, p. 86; Furlani, Rendiconti dW Accademia dei Lincei, 1932, p. 574.

    (7) Ce chiton est revtu d'une simili-cuirasse ou gaine, qui a t tudie par H. Thiersch,

  • TEMPLES ET CULTES DE LA TRIADE HLIOPOLITAINE A BA'ALBECK 55

    que le type de Jupiter hliopolitain tait le rsultat d'une hellnisation de l'ancien Hadad, probablement au temps des Sleucides, car le type d'Hlios qui se reflte dans l'idole et qui a dtermin le nom de la ville, est celui du ive sicle avant notre re {1).

    On peut hsiter sur la valeur de l'aigle attribu au dieu de Ba'albeck, parce que, en tant qu'oiseau de Jupiter, il a servi tous les dieux promus au rang suprme. L'pithte d' pervier saint ou d' pervier magnifique la large envergure , qu'un texte de Ras Shamra applique Hadad (2), signale

    J

    Fig. 10. Les trois faces ornementes de l'autel de Bted'el.

    du moins d'anciennes affinits de l'oiseau de proie avec le dieu des hautes cimes. Au moment o nous rencontrons Jupiter hliopolitain accompagn de l'aigle, cet oiseau a, en Syrie, un caractre solaire trs net (3), et il n'est pas douteux qu'on lui reconnaissait cette valeur quand on le mettait en relation avec Jupiter hliopolitain. Un bronze.de Nizib associe le btyle d'Hlios l'aigle qui s'y pose (4). De mme la valeur solaire de l'aigle apparat dans la ^dicace :

    Ependytes und Ephod, 1936, avec examen critique des principales reprsentations de Jupiter hliopolitain, p. 73-98, pi. XIII-XX.

    W Nos Notes de mythologie syrienne, p. 49. (2) II Kert, 6-9; cf. nos Dcouvertes de Ras

    Shamra, 2e dit., p. 134-135.

    (3) Notes de mythol. syr., p. 15 et suiv.; Cumont, tudes syriennes, 1917, p. 59 et suiv., dit justement : le roi des oiseaux tait en relation avec l'astre-roi .

    l4) Notes de mythol. syr., p. 22 et fig. 9.

  • Illustration non autorise la diffusion

    56 SYRIA

    Aquilam Soli Alagabalo(1K Notre point de vue est nettement appuy par un relief, provenant de Ba' albeck, o Jupiter hliopolitain en buste est plac sur

    deux aigles adosss entre lesquels apparat un mufle de taureau (2).

    Toutefois, l'idole de Jupiter hliopolitain - ne s'explique pas seulement grce une contamination de Hadad avec les cultes .solaires. .Les pis que le dieu tient dans la main gauche et qui ornent son calathos, l'pi qui figure dans le champ des monnaies reprsentant son temple (3V indiquent nettement que Ha- Fig. 11. Bucrne sur un sarcophage *

    provenant -de Phnicie. Muse du Louvre. dad est devenu le dieu des moissons. Cette conception, qui

    a t gnrale dans la Syrie moyenne puisque le Hadad de Damas y participe (4),

    l1) CIL, VI, 708. (2) M. Seyrig, Syria, X, pi. LXXXII, 1,

    a donn une excellente reproduction de ce relief du Muse de Berlin; mais, y reconnaissant un mufle de lion, il l'attribue au dieu- fils, et' c'est mme l son meilleur appui pour voir dans ce dernier le dieu solaire par excellence. Mais la tte de lion est toujours reprsente comme un cercle; le mufle de taureau au contraire se renfle dans sa partie infrieure (voir notre fig. 11). De plus, l'il du lion, vu de face, est rond, tandis" que l'il du taureau est oblique; cf. Baalbek, I, pi. XXIII. Il s'agit donc bien d'une reprsentation de Jupiter hliopolitain dont on a soulign le caractre solaire.

    (9) A l'estimation d'Eckhel et la suite des thories de Lajard, Recherches __ sur le culte du cyprs pyramidal (Mm. Acad. Inscr., XX,

    2e partie), thories qui avaient pour objet de dmontrer, la faveur d'une conception androgyne de la divinit, le monothisme primitif (l'article Couve, Hermaphroditus, du Diet, des Antiquits, dpend de Lajard), on avait admis que les monnaies de Philippe le pre associaient le cyprs au temple de Jupiter hliopolitain. Saulcy, d'autre part, dclarait dans sa Numismatique de la Terre Sainte, p. 13 : Quant au cyprs, tout le monde sait qu'il tait consacr au Soleil, et qu'il en symbolisait par consquent le culte dvelopp Hliopolis. Nous ayons montr, Notes de mythol. syr., p. 92 et suiv., fig. 23," l'inanit de ces conceptions en ce qui concerne les reprsentations d' Hliopolis o le soi-disant cyprs est un pi de bl.

    (4) L'idole de Jupiter damascnien porte l'pi de bl ds 84 av. J.-C. sur les monnaies

  • TEMPLES ET CULTES DE LA TRIADE HLIOPOLITAINE A BA'ALBECK 57

    marque une volution profonde des anciennes croyances; on peut mme dire une rvolution. A ce propos, relevons qu'il ne faut pas se hter de trop dnigrer. Macrobe. Il est indispensable, certes, de le soumettre, comme tous nos informateurs, une critique svre; -mais il faut reconnatre que nombre de ses renseignements ont t vrifis par les documents, et chaque fois que Baudissin a pris le contrepied de ses indications, il est tomb dans . l'erreur (1). Quand notre exgte dcrit le balanion : lva tenet fulrhen et spicas quse cuncta Jovis Solisque consociatam potentiam monstrant

  • 58 - SYRIA

    IV. Lgendes, mystres et processions.

    Le terrain tant ainsi dblay, nous aborderons les pratiques qui avaient cours autour des deux grands temples accoupls. Nous avons vu dj que M. Seyrig a mis en vidence

  • TEMPLES ET CULTES DE LA TRIADE HLIOPOLITAINE A BA* ALBECK 59

    n'apparat nulle part nettement, c'est simplement parce que le fils procde du pre. Abstraction faite du syncrtisme solaire final aboutissant la divinit unique, ni Mot, ni Eshmoun ou mme Adonis ne sont proprement parler le Soleil, et pas davantage Simios Hirapolis, ni par suite son homologue le Mercure hliopolitain. Ce dernier, d'ailleurs, n'est jamais qualifi d'Hlios ou de Sol, ni 'aniktos, et si c'est lui, comme il est probable, que reprsente la figure centrale de l'autel de Bted'el (fig. 11), on constatera qu'il est dpouill de tout attribut solaire W.

    Il est probable que la conjonction venait de s'tablir entre Hadad-Aliyan et El-Mot^. quand, l'poque hellnistique, les Syriens entrrent en contact avec les mystres grecs construits sur les mmes bases naturistes. Au troisime jour des Anthestries, on dposait dans des marmites des semences de tout genre; on les faisait bouillir et on les offrait Dionysos et Herms. Comment s'tonner qu'avecla vogue des modes grecques, les mystres d'Hlio- polis aient adopt les noms et parfois les lgendes d'Herms et de Dionysos ?

    Toutefois, il ne faut pas se laisser garer par le placage du dcor grec : les rites syriens concernant l vigne sont anciens et c'est ce qu'exprimait Hrodote quand il prtendait que les rites du culte dionysiaque taient originaires de Phnicie(2). Nonnos ne fait que suivre cette opinion lorsqu'il affirme que Dionysos et pour nourrice une Phnicienne au nom vocateur de Mystis. C'est elle qui aurait institu les ftes nocturnes en l'honneur du dieu. C'est elle qui invente le tambourin, les grelots bruyants et les retentissantes cymbales d'airain, pour empcher les initis de s'endormir au cours des crmonies. La premire, elle allume les torches de mlze pour clairer les danses de la nuit. Elle imagine de tresser les fleurs en guirlandes, elle ceint sa chevelure d'un bandeau de pampres et elle enroule le lierre autour du thyrse. Elle invente le rite de la corbeille mystique, pleine des instruments de la divine initiation, jouets de l'enfance de Dionysos. Rha lve le jeune dieu et le fait monter sur son char tran par des lions (3).

    Toute une srie de monuments attestent la vogue de ces symboles et de

    (*) Seyrig, Bulletin du Muse de Beyrouth, ' (a) Hrodote, II, 122. I ,1937, p. 91 et suiv. La ddicace est faite (3) Nonnos, Dionys., IX, 111 et suiv. On un dieu hliopolitain dont malheureusement voit par ce dernier tra^t comment les lions le nom a disparu. de la desse ont pu tre attribus au dieu-fils.

  • 60 - SYRIA

    l'initiation dionysiaque en Phnicie : ce sont, les sarcophages de plomb (1), o les lments caractristiques sont encadrs de lierre et de vigne. Ces sarcophages sont parfois organiss en temple {2> et peut-tre visait-on par l le temple de l'initiation. Sur un petit ct, les btons rayonnent et forment comme une toile, parfois combinaison de thyrses (3). Prcisment ce signe symbolique se retrouve Ba'albeck et nous y reviendrons.

    La mme proccupation de noter l'initiation du dfunt se rvle dans le tombeau de Palmyre, o l'on a peint Dionysos, avec le nimbe radi, couch sous une vigne (4). Ds lors, on ne considrera plus comme simplement dcorative la fresque dcouverte dans une tombe d'Ascalon (5> o la vigne se dveloppe sur le plafond et entoure divers motifs (fig. 12). La fresque du fond figure deux nymphes assises, peu prs nues et symtriques. Une main saisit un roseau comme un thyrse, l'autre pose sur une amphore d'o s'chappe un flot d'eau. Ces sources alimentent un bassin o s'battent divers poissons on pense involontairement au lac d'Ascalon dans lequel se noya Derkto (Atargatis) o s'abreuve un taureau et qu'entoure une luxuriante vgtation, notamment des lotus. Il n'est pas douteux que l'action vivifiante de la vigne et de l'eau est figure ici, pour le plus grand bnfice des morts (6).

    La notion de salut est gnrale cette poque. Mme, dans les milieux judo-chrtiens, elle s'exprime sous une forme analogue, par exemple dans

    (*) Bibliographie de ces monuments > dans R. Mouterde, Ml. Unw. St-Joseph, XXI, p. 203. Syria en a publi de nombreux exemplaires; cf. V, p. 46 et suiv., pi. XVI (Virol- leaud) ; XV, p. 337 et suiv. et XVI, p. 51 et suiv. (Maurice Chhab) ; XVIII, p. 229 (E. von Mercklin). Dans l'tude qu'il vient de donner sur La stle du Danseur d'Antibes (P. Geuthner, 1942), M/ Fr. Cumont publie fig. 11-15 deux sarcophages en plomb provenant de Tyr. Recherchant le sens premier de l'emploi du iierre et du laurier dans les cultes funraires, il y reconnat des symboles d'immortalit inspirs par la prennit du feuillage. --

    l2) Ainsi Virolleaud, Syria, V, pi. XVI; cf. p. 46-47; Maurice Chhab, Syria, XV,

    p. 339 et pi. XLI. (3) Ce signe figure non seulement sur le petit

    ct -d'un autre sarcophage (Clermont-Gan- neau, Album d'antiq. orient., pi. LX), il se mle aussi aux attributs des grands cts.

    (4) H. Ingholt, Quelques fresques rcemment dcouvertes Palmyre, extr. des Acta archxo- logica, III, 1932; voir le commentaire de M. Fr. Cumont, dans Syria, XIII, 1932, p. 396.

    (6) J. Ory, A painted tomb near Ascalon, dans .Quarterly of the department of antiquities in Palestine, VIII; 1938, p. 38-44, pi. XXV- XXIX.

    (6) Nous renvoyons Andr Parrot, le Refrigerium dans l'au-del ; cf. Syria, 1938, p. 177-179..

  • TEMPLES ET CULTES DE LA TRIADE HLIOPOLITAINE A BA'ALBECK 61

    la mosaque de Tunis (1) o avec les symboles juifs (chandelier sept branches) et chrtiens (alpha, omga, rho grec en forme de croix), figurant des poissons et des oiseaux aquatiques symboles ordinaires du sjour des bienheureux

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    62 SYRIA

    Pour les initis, il ne pouvait y avoir de doute que la naissance et l'enfance du dieu, symboles du terme auquel aspirait le myste, prissent une importance toute spciale dans l'iconographie du mystre (1> . Il est clair ds lors que les mystres en liaison avec la triade hliopolitaine se pratiquaient dans le petit

    temple, et cela explique la sparation rigoureuse de ce ^ sanctuaire d'avec le grand temple affect au culte public.

    Les artistes syriens et leurs inspirateurs, en adoptant les lgendes et motifs dionysiaques, pourraient bien les avoir quelque peu transforms. Du moins, J. Chamonard n'a-t-il pas craint d'attribuer un mosaste syrien les particularits qu'il a releves dans une reprsentation de Dionysos dcorant la Maison des masques , Dlos

  • TEMPLES ET CULTES DE LA TRIADE HLIOPOLITAINE A BA'ALBECK 63

    au Mercure hliopolitain (1); mais il procde d'une conception voisine. Parmi les monuments qui, en marge des grands cultes de Ba'albeck, nous

    mettent en contact avec les croyances contemporaines, il faut citer le relief rupestre de Ferzol (2), qui fixe une scne mythique fort instructive. Le jeune dieu, vtu de la nbride, tient dans la gauche un chevreau et un bouquet, dans la droite . abaisse un branchage dont la dtermination est secondaire (3). Nous avons l le jeune Herms-Dionysos qui, debout, prcde le dieu solaire cheval, passant droite (4). Le dieu solaire porte des rayons autour de la tte; il tient les rnes de son cheval dans la droite et le globe dans la gauche ts'. Au second plan, entre les deux personnages, se dresse un palmier.* Nous n'insisterons pas sur le sens gnral de cette scne. Toutefois, nous pensons toujours que le Soleil est ici reprsent en marche et parvenu son poirit culminant marqu par le palmier en guise de meta (6). Le branchage abaiss de son compagnon signifie que la route va maintenant descendre, et on ne peut trouver d'illustration plus exacte au renseignement donn par l'empereur Julien, au sujet du Soleil prcd dans sa course descendante par Herms-Monimos

  • Illustration non autorise la diffusion

    64 SYRIA .

    la mme poque l'association du Jupiter, hliopolitain et du jeune Mercure hliopolitain. Nous en tirerons plus loin la conclusion ncessaire.

    Pour montrer quel point les reprsentations dionysiaques trouvaient faveur en Syrie, nous reproduisons une applique en bronze, conserve au Muse de Beyrouth et provenant d'un point mal dtermin du Liban ou de la Bqa'. L'intrt de cette pice rside dans sa fabrication locale, car le Dionysos porte

    une nbride avec, en relief, une tte d'animal qui n'est pas celle d'un flin, mais plutt celle d'un blier W (fig. 14).

    Parmi les lgendes dionysiaques, celle qui mettait aux prises Dionysos et Ly- curgue trouva la plus grande audience, parce qu'elle faisait revivre les anciennes luttes de Mot contre Ba'al et Aliyan. Sous les enjolivements littraires de Y Iliade (2), on distingue que Lycurgue, fils de Dryas, est l'esprit qui rgne en hiver sur, la vgtation, aprs avoir dtruit les dernires feuilles de la vigne et des arbres fruitiers. Mis en droute, Dionysos fuit jusqu'au sein de la mer les atteintes de Lycurgue, mais il renatra au printemps, et bientt, couronn de lierre, il se rpandra dans tout le pays avec son cortge de nymphes et de satyres, gnies des eaux, des chvres et des plantes agrestes ; alors

    Lycurgue sera rduit l'impuissance, enlac par les rameaux de la vigne. Plus tard, Nonnos expliquera que, venant d'Asie-Mineure, le fils de Sml

    franchit le Taurus et l'Oronte, visite Byblos et Tyr, puis traverse le. Carmel

    Fig. 14. Applique en bronze de Zahl. Muse de Beyrouth.

    (*) Le P. Ronzevalle, l. c, p. 46-47 et pi. XV donne trois vues de ce bronze. Il penche mais peut-tre y a-t-il t quelque peu incit par la ncessit de justifier sa thorie qui associe le veau -au dieu- fils pouf une tte de veau, tout en reconnaissant

    que les oreilles pendantes rappellent cependant plutt celles d'un chevreau. Nous avons vraisemblablement ici encore une association de symboles emprunts Herms et Dionysos.

    (2) Iliade, 130-140.

  • TEMPLES ET CULTES DE LA TRIADE HLIOPOLITAINE A BA'ALBECK 65

    pour atteindre la fabuleuse Nysa. Cette dernire est dfinie comme une ville construite dans les rochers et riche en essences odorifrantes (1).' Nonnos garde le souvenir que Dusars, le grand dieu des Nabatens, avait t identifi par eux Dionysos et il faut localiser Nysa Ptra, o l'on vnrait aussi, nous le verrons dans un instant, un dieu antibachique, Shai* al-qaum (2).

    Pour se rendre compte quel point lgendes et dcors grecs \mt t utiliss par les Syriens dans les reprsentations de leurs mythes agraires, il suffit de considrer trois linteaux du Hauran publis par M. Maurice Dunand. Le savant archologue a bien montr que l'un d'eux (fig. 15, 1) figurait la naissance de Dusars- Dionysos (3) : le jeune dieu merge de pampres dont l'ordonnance rappelle, en. plus exubrant, le dcor duv temple de Bacchus Ba*albeck.

    Un autre linteau (fig. 15, 2) nous fait probablement assister aux pousailles de Dusars. Le sculpteur, empruntant la lgende du jugement de Park (4>, a pris soin de graver en grec sur la pierre le nom des divinits mises en scne. Sous le nom de Zeus, il faut reconnatre Be*elsamin, le globe cleste en main, accompagn de sa pardre Hra (peut-tre G) et de ses -filles Athna-Allat et Aphrodite- Astart (5>. Herms est ici d'identification incertaine. Quant Paris, au bonnet phrygien, c'est Dusars-Dionysos (6), et cela explique la vigne qui court tout le long du linteau, l' arrire-plan, et donne son sens la scne reprsente.

    Le troisime linteau (7) (fig. 15, 3) pourrait bien nous faire assister la conclusion de cette histoire. Dusars, coiff ici encore du bonnet phrygien et que contemple l'aigle solaire a choisi pour p'ardres les deux filles de Be'elsamin, car il figure entre Allat-Athna vers laquelle se dirige le lion(8)

    Nonnos, XX, 143 et suiv.; cf. RHR, 1931, II, p. 403 et suiv.

    (2) De l le renseignement mal transmis par Diodore de Sicile, XIX, 94, sur les abstinences des Nabatens, en particulier celle concernant la vigne et le vin; cf. Clermont- Ganneau, Recueil' d' arch, orient., IV, p. 369, et notre Mission dans les pays dsertiques, p. 464 et suiv.

    (8) Dunand, le Muse de Soueida, 1934, n 3 et pi. V, 3; voir Syria, VII, 1926, pi. LXIII.

    (4) Dunand, ibid., n 1 et pi. IV; voir Syria. XXIII.

    Comptes rendus Acad. des Inscriptions, 1924, p. 328 et suiv., et Syria, XVI, 1935, p. 214 et suiv.

    15) Cette filiation est donne par Philon de Byblos; cf. le tableau gnalogique dans nos Dcouvertes de Ras Shamra, 2e d., p. 113.

    16) La mme entit divine apparat avec la panthre sur la faade de Meshatta voue l'exaltation de la vigne.

    (7) Dunand, ibid., n 2 et pi V, 2; cf. Syria, VII, pi. LXIII.

    l8) Un bon exemple d'Allat-Athna aux 9

  • C/3

    Fig. 15. Trois linteaux du Hauran.

    1, Naissance de Dusars-Dionysos. 2. pousailles du mme dieu.

    3. Dusars-Dionysos et ses deux pardres.

  • TEMPLES ET CULTES DE LA TRIADE HLIOPOLITAINE A BA'ALECK 67

    son animal attribut et Astart-Aphrodite ayant ros auprs d'elle. Cette interprtation n'est qu'une application du ddoublement bien connu en ces rgions de la desse cleste en toile du matin (al-'Uzza) et toile du soir (1). Ces explications permettent encore, croyons-nous, de reconnatre dans le linteau, form par les deux lments n 39 et 40 de l'ancien Muse de Soueda, ls dieux Be*elsamin et Dusars {2) (fig. 16). M. Dunand a tabli que ces -deux fragments proviennent de Si'' dont la mme, enceinte runissait les temples des deux dieux. L'association de Be'elsamin et de Dusars correspond au renseignement fourni par Arrien, savoir que les deux grandes divinits vnres

    Fig. 16. Be'elsamin ( droite) et Dusars ( gauche).

    par les Arabes taient Ouranos et Dionysos (3). Mme renseignement sous une autre forme dans Strabon : Zeus et Dionysos (4).

    Suivant la remarque de Clermont-Ganneau, le pote Antimachos, ds avant Nonnos, avait plac Nysa en Arabie, pour en faire la capitale de l'anti- bachique Lycurgue (5). Or, prcisment, plusieurs ddicaces au dieu Lycurgue ont t trouves en Nabatne (6). Nonnos assure que Lycurgue rclamait des

    lions a t publi par G. Ploix de Rotrou et H. Seyrig, Khirbet el-San (entre Slamiy et Palmyre) dans Syria, -XIV, 1933, p.. 14 et pi. IV, 2). L'inscription palmyrnienne, Can- tineau, Syria, XIV, p. 181, mentionne Allt.

    l1) Pour le ddoublement de la plante Vnus en o les deux 'Uzza au al-'Uzza et Mant , voir nos Arabes en Syrie avant l'Islam, p. 132 et suiv.

    (2) Dunand, ibid., n 39 et 40, pi. XXXIX et XL. La figure 40 n'est pas celle d'une

    desse; mais une reprsentation effmine de Dusars-Dionysos semblable celle du linteau n 2. Une reprsentation diffrente de Dusars est donne par la statue de Ghariy ; cf. Dunand, ibid., a0 42, pi. VII, 42.

    (8) Arrien, Exped. Alex., VII, 20. (4) Strabon, p. 741. (5) Clermont-Canneau, Recueil d'arch.

    orient., IV, p. 398,' VIII, p. 290. W Waddington, n 2286 a; Dunand, op.

    cit., n 16 avec bibliographie et n 174.

  • 68 SYRIA

    libations de sang et non de vin. Prcisment encore, une ddicace au dieu nabato-arabe Shai' al-qaum signale que ce dieu ne boit pas de vin, c'est-- dire qu'il interdit de lui offrir des libations de vin (1).'

    La Syrie accueillit avec empressement la lgende grecque qui s'adaptait si heureusement aux anciens cultes syriens et en renouvelait l'intrt. Un pisode devint particulirement populaire, celui de l'attaque de Lycurgue contre Ambrosie. Sur le point de succomber, la vaillante nymphe appelle sa mre, la Terre, son secours. Celle-ci s'entrouvre, et la nymphe, disparaissant, chappe aux coups de Lycurgue' pour ressortir bientt sous" forme d'un ceps de vigne qui enlace son ennemi et l'immobilise. M. Mayence a dcouvert dans ses fouilles d'Apame, en 1930, un bas-relief figurant Lycurgue, reconnais- sable ce qu'il tient la double hache et ce qu'il est enlac par les rameaux de la vigne (8).

    Mais voici que l'il singulirement exerc de M.- Ch, Picard a dcel de chaque ct de l'adyton mme du petit temple de Ba' albeck, deux pisodes de la lgende de Dionysos. A gauche, Ambrosie mtamorphose en vigne pour chapper aux poursuites de Lycurgue ; droite, le chtiment subi par Lycurgue pour le punir de la violence qu'il fit aux nourrices de Dionysos (3). Cette jolie dcouverte montre quel point la dcoration du petit temple se rattache, comme Puchstein et M..Seyrig s'taient employs le montrer, au cycle des* lgendes de Dionysos, et prcisment celles qu'avaient adoptes les cultes agraires syriens. Ds lors, nous comprenons comment le fils de Sml s'est intgr dans les croyances et les crmonies syriennes, y compris les mystres. Pour les initis syriens, Dionysos tait par excellence l'esprit de la vgtation, comme Plutarque, si bien inform, nous le dit quand il identifie Adonis et Dionysos : rcv S' "A&ovtv ov% evepov alla kdvvaov shoci vo^ovat{i) . Cette identification s'explique si, avec Plutarque, on considre dans Dionysos le dieu qui est

    (M Enno Littmann, Journal asiatique, 1901, et Lycurgue portent un pagne autour des II, p. 374-390; Clermont-Ganneau, Recueil reins. Arch, orient, IV, p. 382 et suiv. ; V, p. 45 (3) Ch. Picard, Les frises histories autour et 179. de la cella et devant l'adyton, dans le temple de

    l2) F. Mayence, Une nouvelle reprsentation Bacchus Baalbeck, Mlanges syriens, p. 319- du chtiment de Lycurgue, dans 'Mlanges 343. syriens, p. 975-979, pi. II, 2. Le savant archo- (4) Plutarque, Qusest. convival., IV, 5, 3. logue note, comme un trait local que Bacchus

  • TEMPLES ET CULTES DE LA TRIADE HLIOPOLITAINE A BA'ALBECK 69

    dtruit, qui disparat, qui abandonne 1^ vie et qui renat ensuite l'existence (1). La dcouverte Doura-Europos, d'un sanctuaire o dans la mme enceinte,

    on a difi un temple Adonis et un temple Atargatis (2), tmoigne que l'identit du fils de Hadad et d'Atargatis, Simios, avec Adonis, tait consacre au 11e sicle de notre re. Dans la mme enceinte sont difis en 181-182. un

    1 pristyle et un cellier (oinochyteion) destins aux repas sacrs en l'honneur d'Adonis (eis ta Adonidos). Cette institution des repas de communion aprs l'accomplissement du sacrifice, avec les chairs dont le sang et la graisse avaient t consacrs, remonte des temps immmoriaux. Il suffira ici, de citer l'allusion qu'on en trouve dans Jrmie, XVI, 5-9, d'abord parce que les exgtes l'ont mconnue, et .aussi parce que le bet mishth du verset 8 correspond l' oinochyteion du texte de Doura consacr la clbration des Adonies. Le mme passage de Jrmie jette quelque lumire sur les pratiques du marzah ou thiase : il ne s'agit pas comme on l'a cru de rites funbres, mais de rites de conscration : incisions et tte rase (3).

    tant donn ces pratiques, on ne sera pas surpris de constater qu'un des ddicants de Y oinochyteion de Doura revendique le titre de desmophylax, surtout si l'on en rapproche le desmos dont il est question dans une inscription du temple des dieux syriens au Janicule (4). Ce lien sacr, comme le dmontrent les textes cits par M. Cumont (5), est un serment par lequel l'initi jure de ne rien rvler de l'enseignement qu'il reoit et qui lui confre le droit de participer au repas de communion.

    Le syncrtisme que nous avons dfini, n'empchait pas les anciennes croyances de se conserver dans les lgendes que renouvelait l'apport grec; il ne changeait surtout rien au droulement des ftes dont une des plus importantes consistait) tout comme Hirapolis, mener en procession la statue

    (*) Cit par Decharme, Mythol. de la Grce antique, p. 467. '

    (2) F. E. Brown, dans Excavations at Dura- Europos, 7e, et 8e rapports, 1939, p. 134 et suiv.; cf. Syria. 1940, p. 345. Une inscription grecque de Doura (3e rapport n 146; cf. Cu- mont, Syria, XIII, p. 306, note 2) fournit la triade Saddoud (pithte de Hadad, peut-tre un partie, passif quivalent de l'arabe sadd,

    juste, droit). Atargatis et Adonis. l8) Voir Syria, XVII, 1936, p. 386 et suiv.

    Sur les salles manger pour repas de commu- nion, voir Seyrig, Syria, XVIII, p, 376 et suiv. Pour la survivance de la tte rase dans ces crmonies, l'poque romaine,voir ci-aprs, p. 70.

    (4) Voir Syria, 1940, p. 345 et suiv. (6) Syria, 1941> p. 292 et suiv.

  • 70 SYRIA

    du dieu vers une source sacre. Cette dernire est, vraisemblablement, localiser" 'Ain Djoudj, six kilomtres de la ville, ou au bassin {Klarbassin) sur lequel mi-chemin de la source se dressait un dicule (1) huit colonnes qui abritait un cippe portant sur la face principale l'image de Jupiter hlio- politain entre deux taureaux et, au-dessous, Thermes du-dieu-fils (fig. 17). Sur les faces latrales on retrouve le taureau surmont du foudre ail.

    On se prparait cette procession vers la source sacre par de svres

    Fig. 17. Trois faces du cippe de 'Ain Djoudj prs de Ba'albeck.

    purifications : rasa capite longi temporis castimonia puri (2). Il ne semble pas que la desse pardre participt cette crmonie. Le cippe que nous venons d'examiner ne porte l'image que de Jupiter hliopolitain et du dieu- fils. Macrobe ne parle que du transport de Jupiter hliopolitain, mais puisqu'il s'agit d'un culte pratiqu une source, le dieu-fils, matre des sources, ne pouvait tre absent. La desse pardre ne figurait pas dans- le cortge, probablement parce qu'elle n'tait en rapport qu'avec les eaux o s'battent les poissons, tritons et autres animaux aquatiques plus ou moins mythiques. On se rappelle sa proccupation, Hirapolis, de sauver, disait-on, de la^vue fatale

    (x) Baalbek, I, p. 29 et suiv., fig. 13 et 14. (2) Macrobe, Saturn., I, 23, 13. Comparer

    Lucien^ De dea syra, 55 et la rfrence ci- dessus Jrmie.

  • TEMPLES ET CULTES DE LA TRIADE HLIOPOLITAINE A BA'ALBECK 71

    de Hadad, les poissons du lac sacr. Ici, il ne s'agit que d'eau courante non poissonneuse. Nous allons trouver une confirmation de cette particularit.

    Une dcouverte due M. Krenker, en 1902, illustre les rites pratiqus la source. A 'Ain Djoudj mme, ou dans le bassin (Klrbassin) plus proche, on a trouv nombre de plombs figurant symboles, divinits et acolytes, sans aucune reprsentation de la desse(1). Dans toute l'Asie occidentale, on menait en procession des enseignes divines. Ce sont des imitations de telles enseignes que figurent les plombs trouvs par M. Krenker, et dont M. Seyrig, en reprenant leur tude, a fourni d'excellentes reproductions (2). Ces plombs sont munis leur base d'une tubulure dans laquelle on emmanchait une tige de bois qui permettait de porter l'objet. Au terme de la procession, on dtachait facilement l'enseigne de son montant en bois, et on la jetait dans la source ou le bassin intermdiaire pour assurer la prennit du cours d'eau.

    Ainsi,-tout comme sur le cippe de la fig. 17, les seules grandes divinits de ces enseignes processionnelles sont Jupiter hliopolitain (3) et le dieu-fils (4). Une enseigne reproduite de nombreux exemplaires figure le. disque solaire dans le croissant lunaire, thme banal des reprsentations syro-phniciennes ; le disque est parfois remplac par le buste du soleil jeune (5). Les autres plombs ne reprsentent que des acolytes, et c'est pourquoi on les traite avec quelque libert : ainsi le Mercure grco-romain (6) qu'il ne faut pas confondre avec le Mercure hliopolitain et qui n'tait admis que comme- un comparse dans la suite des dieux de Ba'albe'ck, est figur nu. De mme, un gnie la palme (7) et un gnie vendangeur {8). Si cette dernire dfinition est exacte, la crmonie

    t1) Le -plomb figur dans Syria, X, pi. LXXXIV, 5, reprsente sans aucun doute Jupiter hliopolitain : l'animal de gauche tourne la tte de face, et l'on distingue des embryons de corne.

    12) Syria, X, pi. LXXXIV-LXXXVI. 13) Syria, X, pi. LXXXIV, 1; 3; 5. (4) Ibid., pi. LXXXV, 4; 5 (avec mention

    EPMH). I8) Ibid., pi. LXXXVI. Parfois deux crois

    sants concentriques sont figurs. Comparer la double paire d'uraei sur certaine reprsentation du disque ail hliopolitain, Monuments

    Piot, XXX, p. 82, n. 2. Parfois d'ailleurs le disque aux uraei tend se confondre avec le disque dans le croissant ; cf. Seyrig, Syria, XIV, p. 261, fig. 6. Il faut noter qu'en gnral, dans la symbolique phnicienne et mme punique, quand le croissant est renvers, c'est qu'il enserre la plante Vnus, et, quand ses pointes sont diriges vers le haut, c'est qu'il enserre le Soleil.

    () Ibid., pi. LXXXV, 1; 2; 3. (') Ibid., pi. LXXXIV, 6. t8) Ibid., pi. LXXXIV, 4.

  • 72 SYRIA

    vers la source se pratiquait l'automne, une poque correspondant la fte des Tabernacles. Mais il y avait probablement deux crmonies de ce genre par an, comme Hirapolis, l'une se pratiquant au printemps, * l'issue

    de l'hiver/ l'autre l'automne. Ces deux dates correspondent aux moments critiques de l'existence des deux dieux si intimement lis, Hadad et Aliyan Ba'al. ^u printemps, ils doivent disparatre devant Mot qui instaure son rgne;, on pratique alors les rites qui ont pour objet d'assurer leur survie. A l'automne, le rgne de Hadad et d'Aliyan recommence; ce que marquent les rites qui se superposent aux crmonies clturant les vendanges.

    V. Le Mercure champtre extra-muros.

    Les intressants sondages que M. Daniel Schlumberger a rcemment pratiqus [sur la colline de Sheikh 'Abdallah, hors de V enceinte de Ba albecky apportent-ils un" lment nouveau touchant la rpartition des temples de Ba'albeck entre les membres de la triade ? Nous dirons -immdiatement que les conclusions qu' la suite de M. Seyrig, nous avons enregistres, et qui attribuent la triade, troitement unie, les deux sanctuaires hliopolitains jumels, sont trop solidement fondes pour tre branles par une donne nouvelle extrieure au sanctuaire> comme celle qu'apporte M. Daniel Schlumberger {1). Il nous faut simplement rechercher comment celle-ci s'insre dans l'ordre tabli.

    D'aprs une monnaie de Ba'albeck figurant un temple sur une colline qu'on gravissait par de nombreux degrs, Winnefeld avait conjectur que ce temple tait situ sur la colline de Sheikh 'Abdallah (2). Et comme le. champ - de la monnaie portait un caduce, il avait attribu ce temple au Mercure hlio- politain. M. Daniel Schlumberger a eu l'excellente ide d'entreprendre * les sondages ncessaires pour vrifier la conjecture, et sa recherche a t couronne de succs. .A n'en pas douter, il a retrouv l'escalier monumental qui, en s'accrochant aux flancs de la colline de Sheikh 'Abdallah et rachetant une diffrence de niveau de 33 mtres, est figur sur la monnaie en question.

    l1) Le temple de Mercure Baalbeck-Hlio- (2) Autre solution dans Parrot, Syria, X, polis, dans Bulletin du Muse de Beyrouth, - p. 117. et suiv. III, p. 25-36.

  • SYRIA, XXIII PI. Ill

    BA' ALBECK

  • SYRIA, XXIII PI. IV

    Porte du Temple de Bacchus.

  • TEMPLES ET CULTES DE LA TRIADE HLIOPOLITAINE A BA'ALBECK 73

    Nombre d'inscriptions confirment l'existence sur cette colline d'un sanctuaire consacr Mercure. La plus brve et en mme temps la plus caractristique consiste en une dalle de calcaire (0 m. 86 X 0 m. 61 X 0 m. 44) qui porte simplement le nom du dieu au gnitif (fig. 18). De telles bornes devaient dlimiter la proprit du sanctuaire, et prcisment la monnaie de Philippe l'Arabe, qui a permis l'identification, montre que le temple tait entour d'une plantation d'arbres, fort vieux si l'on en juge par leur tronc tortueux. C'est cette plantation, proprit du dieu champtre, qu'on se contentait d'entourer de bornes places de distance en distancej comme on le constate galement Laodice ad mare (Lattaqui) o prcisment il s'agit d'une plantation et de tabernai, qui taient la proprit du dieu Adonis (1). Par analogie on -peut conjecturer que la colline de Sheikh 'Abdallah tait, dans l'antiquit, un lieu de promenade en mme temps que de plerinage, et cela explique les frais consentis pour tablir l'escalier, d'accs.

    Au-dessous du nom divin de la borne de Sheikh 'Abdallah, a t grave une sorte d'toile six branches, dont le caractre astral est plus probable, Fig 18 _ Ci ce qu'il nous semble, qu'une interprtation par le de Sheikh 'Abdallah. foudre, attribut qui serait dplac ici. Ce caractre * astral est d'une valeur trop gnrale pour servir . caractriser une divinit. Cependant, le rapprochement, entrevu par M. Schlumberger, avec l'astrisque du-cippe octogonal de Fiki (fig. 7, 6), s'impose, et aussi avec le signe semblable d'un plomb de Ba'albeck. Ce mme symbole nous parat figur galement sur plusieurs sarcophages en plomb du cycle dionysiaque (2). Mme un de ces sarcophages porte Herms nu; tenant un caduce, entre un sanglier et un lion marqu de l'astrisque la cuisse (3). On sait que le sanglier appartient au cycle de Hadad.

    t1) Haussoullier et Ingholt, < Syria, V, ' XXI, p. 209. L'astrisque sur l'paule du p. 333 et suiv., avec rectification, p. 341. lion, marquant sans doute son appartenance

    (2) Ci-dessus, p. 60/ Ishtar et desses assimiles, est trs ancien, (8) Avi-Yonah, Quart. Depart, of Ant. of . voir Syria, X, p. 177 (Beisan); on est en droit

    Palestine, IV (1934), p. 94 et suiv., pi. LVII; de lui conserver ici un caractre astral sinon cf. R. Mouterde, Ml. Univ. St-Joseph, identique du moins analogue.

    Syria. XXIII. ' 10

  • 74 SYRIA

    Les prcisions archologiques apportes par M. D. Schlumberger fournissent une intressante contribution l'intelligence des cultes syriens en soul

    ignant leur complexit. Manifestement, en effet, le culte de la colline de Sheikh 'Abdallah, situe hors des murs de la ville, se distinguait de celui du grand sanctuaire de Ba' albeck. chappant aux doctrines du clerg d' Hliopolis, tranger notamment aux pratiques de l'initiation, le culte de la colline de Sheikh 'Abdallah s'ouvrait largement la foi populaire et paysanne. Les grandes marches d'environ 13 mtres de large, entailles aux flancs de la colline, permettaient aux fidles d'accder en. foule au temple, qu'aucune enceinte ne cachait . la vue du public, et dont le terrain sacr n'tait dlimit que par des bornes portant le nom du dieu. Par l ce modeste sanctuaire rejoignait le culte du jeune dieu champtre rpandu par tout le Liban (1)," et' que le relief de Ferzol nous dfinit moins comme le pardre de Hadad que comme celui du Soleil. De nombreuses ddicaces attestent son individualit en ce qu'elles le nomment seul en lui attribuant le titre de dominus, avec parfois une dtermination locale (2). C'est lui qu'il faut reconnatre dans le^deus bonus puer Phosphorus ou Azizus bonus puer. Il fait groupe avec Hespros reprsent dans le Hauran par Monimos et Palmyre par Arsou (3). Bien que les sculpteurs des soffites de Btocc et du temple de Bacchus Ba' albeck ne leur aient mis dans les mains qu'une guirlande (4), ce sont ces deux enfants divins qu'on a voulu reprsenter en tant que gnies de la vgtation, de part et d'autre de l'aigle, valeur probablement solaire, tenant le caduce dans ses serres (5).

    (*) II suffira de citer le dieu champtre de Yammoun (Ronzevalle, op. cit., pi.' IX-X), si semblable au jeune dieu de Ferzol, et le dieu-ptre - (ibid., pi. XII), - galement de Yammoun, le corps termin en herms (notre fig. 13).

    (2) Ainsi, dans l'inscription que nous avons releve Ham (Antiliban) : Mepxoopta Scojjiivco xa>tr/] X[i.

  • TEMPLES ET CULTES DE LA TRIADE HLIOPOLITAINE A BA'ALBECK 75

    Que ces enfants ne soient pas un simple motif dcoratif, la variante que porte un softe du temple de Bel Palmyre, le souligne nettement. M. Seyrig a montr que nous tions en prsence de l'aigle de Zeus Blos entre Yarhibol et 'Aglibol (1). Mais ici nous pntrons sur. un terrain quelque peu diffrent, qui n'est pas proprement syrien. En tenant dans ses serres le serpent qui fixe la route suivie par l'astre du jour (2), l'oiseau de Zeus Blos du soffite de Palmyre manifeste la toute puissance de son dieu qui rgle le cours des astres. On reconnat ce trait l'influence babylonienne qui est l'origine du culte de Bel palmyrnien (3). L'importance de Palmyre- ne doit pas cependant nous faire perdre de vue qu'en ralit Bel n'est qu'une appellation trs rpandue en Msopotamie. En Syrie, elle semble comme le nom de Zeus, s'appliquer au grand dieu (4).

    une reprsentation similaire de Tell Arr (Seyrig, Syria, XIV, p. 257), mais nous ne serions pas surpris que l'aigle y soit accompagn d'Azizos-Phosphoros qui, prenant la tte du cortge, tient le serpent qui symbolise la route suivre, et de Monimos-Hespros la torche.

    (x) Syria, XIV, p. 255. (2) Mme signification du serpent sur le

    relief de Hama au dieu solaire cavalier, cit ci-dessus.

    (3) Une indication dcisive sur l'origine babylonienne du Bel palmyrnien quelles que soient les modifications ultrieures a t apporte par l'inscription fixant la ddicace du naos au 6 nisan (32 de notre re) ; cf. Comptes rendus Acad., 1932, p. 99. Le rapprochement avec la date des ftes de Yakitu Babylone est accept par M. Cantineau, Syria, p. 173. Nous restons perplexe en prsence de la stle prescrivant un sacrifice holocauste chaque anne au Bon Jour pour toujours (Seyrig, Syria, XIV, p. 277 et suiv.) la date du 6 nisan 163. Bien que la stle porte un foudre ail, nous nous demandons si ce texte ne" vise pas Bel. Un autre trait fort net de tradition msopotamienne est la constitution d'une triade compose de trois dieux sans le secours d'une desse, tradition qui a affect aussi le Be'elsamin palmyrnien. On ne

    peut se dfendre du sentiment que les deux dieux Be'elsamin et Bel, d'origine diffrente, mais entrs en rivalit Palmyre, se sont emprunt certains caractres. A propos du Bel palmyrnien, de l'inscription bilingue de Cos publie par Levj della Vida, Mlanges syriens, p. 883 et suiv. voir Syria, XXIII, p. 133 et suiv., la rectification de "M. du Mesnil du Buisson.

    (4) La question de l'appellation Bel est reprendre; mais, vrai dire, notre documentation est dficiente; on la trouvera runie dans Seyrig, Syria, XX, 1939, p. 302. Nous nous demandons si, sous l'influence aramenne de basse poque, et en dehors de Palmyre, Bel n'a pas t adopt en Syrie, comme une forme.de Ba'al, autrement dit de Hadad. Il semble qu'on puisse le dduire du relief de Killiz (Fr. Cumont, tudes syriennes, p. 257 et suiv.) o l'autel est accost de deux taureaux; voir Seyrig, Syria, XIV, p. 241, n. 2. D'autre part, le nom de Belus a t donn au Nahr Na'aman, qui se jette dans la Mditerrane prs d'Acre. Or, les noms divins qu'on donne des fleuves, sont gnralement emprunts au cycle de Hadad. Pline sait que ce fleuve Belus s'tait prcdemment nomm Pagidus : nous avons l videmment l'pithte paqid, qui, en Msopotamie, est applique de nombreuses divinits* mais qui semble en

  • 76 SYRIA'

    Pour en revenir Ba'albeck, on peut se demander si ce ne sont pas le Soleil et son juvnile compagnon, dieu des fruits et des troupeaux, fort en faveur dans le Liban (1), que le clerg d'Hliopolis aurait, l'poque "hellnistique, identifis avec Hadad et son -fils. Le mme nom de Mercure, attribu au second personnage des deux dyades, ne peut tre l'effet du hasard, et tmoigne d'un systme raisonn.

    CONCLUSION

    La confusion. que font apparatre les sources de basse poque et qui ont exerc la sagacit des exgtes s'claire en grande" partie^ si l'on se rfre l'organisation du culte haute poque o, en face du groupe form par le dieu El et son fils Mot, apparat le groupe de Hadad (Ba'al) et de son fils Aliyah. Le* syncrtisme tardif a disjoint cette rpartition logique; mais il a agi diffremment suivant les lieux. En ce qui concerne Ba'albeck, jadis, ainsi qu'en tmoignent les plus anciens noms de dynastes locaux (2), le culte s'adressait tout comme Hirapolis-Menbidj, aux dieux syriens Hadad, Ashrat (Atar- gatis) et Simios. A une poque que nous ne pouvons dterminer, la rgion libanaise vit l Soleil, s'identifiant probablement avec le dieu El, devenir le grand dieu. Auprs de lui, on vnrait- particulirement le jeune dieu en qui se manifestaient les forces reproductives des troupeaux et des futures' rcoltes.

    A l'poque hellnistique, le clerg de Ba'albeck, rompant avec la tradition que conservera Hirapolis, tablit un hardi syncrtisme. Il identifie le Hadad local au Soleil, couvre du nom de Zeus la nouvelle entit, et fait adopter pour la ville le nom d'Hliopolis. En mme temps, Simios est identifi au jeune

    Syrie caractriser un dieu ayant Hra pour pardre. A la bibliographie donne par Cari .. H. Kraeling, Gerasa, city of the Decapolis, 1938, p. 333 et suiv.', ajouter Ch. Picard, Syria, XVII, p. 315 et suiv. : Pakeidokosos Dlos et notre note dans Syria, 1941, p. 295. Une autre rivire Belos, affluent de l'Oronte, est rvle par le nom de Sleukobelos.

    W L'Herms criophore de Rimt, prs Sada,

    actuellement au Cabinet des mdailles (E. Ba- belon et A. Blanchet, Catalogue des bronzes antiques de la Bibl. nat., p. 199-200; nos Notes de myth, syr., p. 60 et suiv.), a t trouv entre deux bustes d'Hlios.

    (2) L'A. T. mentionne trois rois de Syrie qui, ds le ixe sicle, portent les noms de Ben-Hadad, et un roi Tab-Ramman (lire ainsi au lieu de Tab-Rimmon).

  • TEMPLES ET CULTES DE LA TRIADE HLIOPOLITAINE A BA'ALBECK 77

    dieu champtre et reoit le nom d'Herms. De plus, sous le couvert des rites concernant la vigne et les vendanges, on donne libre accs aux lgendes de Dionysos et on y adapte les mystres locaux.

    Toutefois, et bien que nombre de sanctuaires du Libati aient plus ou moins t contamins par ls cultes d' Hliopolis, ptres et paysans de la montagne continuaient vnrer le Soleil et son pardre, comme l'atteste le relief de Ferzol. Au premier s'adressent les ddicaces Zeus Hlios ou - Kronos Hlios, au second les ddicaces Mercure qualifi de dominus. Cette dyade conserve le souvenir du dieu El et de son fils Mot. Bien qu'une certaine attraction se soit produite entre eux, Mercure-Mot est distinguer du Mercure hlio- politain, troisime membre de la triade, en ce que ce dernier a, pour prototype Aliyan, fils de Ba'al, autrement dit Simios.

    Ren Dussaud.

    Fig. 19. Caduce Ba'albeck.

    InformationsAutres contributions de Ren DussaudCet article cite :Ren Dussaud. Notion d'me chez les Isralites et les phniciens, Syria, 1935, vol. 16, n 3, pp. 267-277.

    Pagination3334353637383940414243444546474849505152535455565758596061626364656667686970717272.172.27374757677

    PlanI. Les ruines. II. Caractristiques des divinits hliopolitaines. III. Transformation de Hadad en Jupiter hliopolitain. IV. Lgendes, mystres et processions. V. Le Mercure champtre extra-muros. Conclusion

    IllustrationsFig. 1. La triade hliopolitaine reprsente sur la frise de la grande porte du temple de Bacchus.Fig. 2. Les deux principaux temples de Ba'albeck.Fig. 3. Ruines du temple de Jupiter hliopolitain.Fig. 4. Le temple de Ba'al (Hadad) Ras Shamra (Ugarit)Fig. 5. Jupiter hliopolitain.Fig. 6. Divinits reprsentes sur les faces 1-4 du cippe octogonal de Fiki.Fig. 7. Divinits reprsentes sur les faces 5-8 du cippe octogonale de Fiki.Fig. 8. Ba'albeck.Fig. 9. Relief de Doura-EuroposFig. 10. Les trois faces ornementes de l'autel de Bted'el.Fig. 11. Bucrne sur un sarcophageFig..12. Dcor peint dans une tombe d'Ascalon.Fig. 13. Statuette de Yammoun.Fig. 14. Applique en bronze de Zahl.Fig. 15. Trois linteaux du Hauran.Fig. 16. Be'elsamin ( droite) et Dusars ( gauche).Fig. 17. Trois faces du cippe de 'Ain Djoudj prs de Ba'albeck.Planche III : Ba' albeckPlanche IV : Porte du Temple de Bacchus.Fig 18. Cippe de Sheikh 'Abdallah.Fig. 19. Caduce Ba'albeck.