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1 CRIEVAT Centre de recherche etd’intervention surl'éducation etla vie au travail U niversité LavalQ uébec (Q uébec)Canada 13 m ai10 ______________ L ’ entretien constructiviste de conseil en orientation : une méthode pour aider les personnes à développer leurs compétences pour s’ orienter dans les sociétés de la modernité tardive ? _______________ Jean G uichard jean.guichard@ cnam.fr INETOP

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CRIEVAT

Centre de recherche et d’intervention sur l'éducation et la vie au travail

Université Laval Québec (Québec) Canada

13 mai 10

______________

L’entretien constructiviste de conseil en orientation : une méthode pour aider les personnes à développer leurs compétences pour s’orienter dans les sociétés

de la modernité tardive ? _______________

Jean Guichard [email protected]

INETOP

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Introduction : La mondialisation en cours depuis trois décennies a transformé les problèmes d’orientation :

On attend désormais des individus qu’ils construisent les compétences requises pour s’orienter. Pour les y aider : une forme d’entretien de conseil qui s’inscrit dans un modèle général synthétisant les connaissances actuelles sur la construction de soi.

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1. S’orienter dans les sociétés occidentales d’aujourd’hui 1.1 S’orienter : une tâche socialement produite

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S’orienter, c’est avoir le souci de soi, le souci du gouvernement de soi (Michel Foucault).

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1. S’orienter dans les sociétés occidentales d’aujourd’hui 1.2 La centralité de l’activité

de travail Les sociétés industrialisées occidentales reposent sur l’échange de travail.

Le travail s’y effectue dans des organisations complexes : chacun doit tenir certains rôles, s’inscrire dans une histoire collective, etc.

L’activité de travail joue un rôle majeur dans la construction identitaire individuelle.

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S’orienter, c’est avoir le souci de se réaliser par son activité professionnelle.

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1. S’orienter dans les sociétés occidentales d’aujourd’hui 1.3 S’orienter dans un monde incertain…

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Cette montée de l’incertitude se donne à voir, en France, au plus haut niveau de l’Etat : En 2006, le Commissariat Général du Plan qui était chargé, depuis 1946, de définir la planification économique du pays a été remplacé par le Centre d’Analyses Stratégiques. Dans la deuxième moitié du 20ème siècle, au niveau de l’Etat français, on pensait qu’il était possible d’orienter la construction de la société civile selon des plans rigoureusement élaborés. Corrélativement, on pensait que les individus pouvaient élaborer pour eux-mêmes des projets d’orientation au moins à moyen terme.

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S’orienter dans un monde incertain… Ce n’est plus formuler des projets. C’est être capable de stratégie : de repérer dans une situation les éléments essentiels permettant de définir des objectifs pour soi en fonction des ressources qu’elle offre.

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Wikipédia : « Alors que l’idée de plan est l'œuvre d'un raisonnement linéaire qui privilégie la relation objectifs - contraintes, (…) le raisonnement stratégique renverse les données du problème. Ce sont les ressources qui seront déterminantes, et non pas les objectifs. C'est en fonction de ces ressources qu'il faut sinon déterminer, du moins ajuster les objectifs. La réflexion (…) consiste en (…) la saisie de toutes les occasions et de toute conjoncture favorable, avec la minimisation des coûts et l'économie des énergies. Quant aux contraintes et aux obstacles, on essaye de les aménager, de les contourner, mieux encore, de les transformer en ressources ». L’art de l’individu, c’est la « planned happenstance » (Mitchell, Levin, & Krumboltz, 1999) : la capacité à se saisir d’événements fortuits et à les inscrire dans certaines perspectives personnelles.

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Cette distinction entre projet et stratégie est trop tranchée :

Pour qu’une conduite stratégique soit possible, il faut que l’individu ait le sens de soi. Avoir le sens de soi, dans nos sociétés instables, ne peut advenir que par l’engagement dans une activité réflexive sur soi, sur ses activités, sur ses attentes, sur le monde, etc.

Cela suppose un travail, jamais achevé, de personnalisation (Malrieu).

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Les sociétés occidentales ne fournissent plus des étayages établis et indiscutables.

L’individu n’a d’autres alternatives que de déterminer progressivement par lui-même ce sens de la vie, ces valeurs fondamentales, ces « key-goods » (Charles Taylor, David Parker) qui vont assurer cette fonction de « holding » (Donald Winnicott) et lui permettre de s’orienter…

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S’orienter, c’est savoir se saisir des opportunités qui se présentent, voire en créer, dans les différents contextes où nous interagissons, en vue d’atteindre ceux des objectifs qui nous semblent alors fondamentaux dans certains de nos contextes de vie, ou de redéfinir ces objectifs primordiaux.

La définition et la redéfinition de ces objectifs majeurs constituent elles-mêmes une activité réflexive essentielle dans cette activité de s’orienter.

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1. S’orienter dans les sociétés occidentales d’aujourd’hui 1.4 Orientation et

organisation du travail L’organisation du travail a profondément changé…

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Pour le collaborateur des entreprises « boundaryless », s’orienter, c’est savoir :

- Formaliser ses compétences (= être capable d’une attitude réflexive d’un certain type par rapport à ses activités).

- Repérer les opportunités qui se présentent dans un contexte

professionnel (des opportunités en lien avec ses propres compétences).

- Savoir placer, investir judicieusement (comme un

placement à la bourse), ses compétences.

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S’orienter, pour les personnes dont la vie est précaire, suppose de savoir analyser sa situation dans ses différentes dimensions.

C’être être capable de mobiliser ses ressources de tous ordres, de chercher tous les types de soutiens dont elles peuvent espérer une aide de quelque nature que ce soit.

C’est savoir mettre en place des stratégies de coping visant tant agir sur la situation que sur la signification du problème, mais aussi à gérer le stress, etc.

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Vondracek, F.W., Lerner, R.M., & Schulenberg, J.E. (1986). Career development: A life span developmental approach. Hillsdale, N.J: Lawrence Erlbaum.

1. S’orienter dans les sociétés occidentales d’aujourd’hui 1.5 Le rôle des interactions et interlocutions en contextes

dans la construction des compétences nécessaires pour s’orienter

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Ces expériences dans une variété de contextes donnent l’occasion à l’individu d’y générer (ou non) et dans des proportions variables :

- Certaines compétences déterminées par les activités dans lesquelles il peut ou non s’engager,

- Des sentiments de compétences et, plus généralement, différents modes de rapports à soi (en termes d’intérêts, de qualités, de sentiments d’auto-détermination, etc.),

- Des représentations de certains rôles susceptibles de lui convenir,

- Des identifications à certains personnages ou figures de professionnels et, corrélativement, des rejets.

- Etc.

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Les individus peuvent avoir l’occasion d’interagir dans un nombre plus ou moins grand de contextes. Ces contextes peuvent être plus ou moins dissonants ou consonants entre eux.

Plus ils sont dissonants entre eux, plus les individus doivent s’engager dans des transitions méso-systémiques (Bronfenbrenner) : dans des vas-et-viens d’un contexte à un autre, les obligeant à une grande flexibilité dans leur manière d’être, d’agir, d’interagir et de se rapporter à eux-mêmes. Conséquence : on observe de grandes différences, en fonction de l’origine sociale et culturelle, du genre, des parcours scolaires et de vie des individus, quant à leurs compétences pour s’orienter.

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1. S’orienter dans les sociétés occidentales d’aujourd’hui 1.6 Capitaux de carrière et

d’identités On observe de grandes différences, en fonction de l’origine sociale et culturelle, du genre, des parcours scolaires et de vie des individus, quant à leurs compétences pour s’orienter. Robert DeFillippi & Michael Arthur (1994, 1996) : « Compétences de carrière »

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Knowing-how : les savoirs, connaissances, savoir faire, savoirs pratiques, attitudes, etc. permettant à la personne d’effectuer les activités qu’elle sait faire.

Knowing-who : les réseaux de relations sociales sur lesquels la personne peut compter.

Knowing-why : le sens que la personne accorde à ses différents investissements dans ses différents domaines de vie en relation avec ses attentes majeures relatives à son existence. Loïc Cadin : « capital de carrière ».

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James Côté (1996, pp. 425-426) : Capital d’identité(s) « Le terme de capital d’identités désigne ce que les individus investissent dans « qui ils sont ». Ces investissements produisent des dividendes potentiels sur les « marchés identitaires » des communautés de la modernité tardive.

« Pour pouvoir être un acteur (player) sur ces marchés, il faut d’abord établir un sens de soi stable soutenu par les éléments suivants : des habiletés et savoir faire techniques et sociaux dans des domaines très variés, des répertoires de conduites efficaces, un développement psychosocial optimal et des relations dans des réseaux sociaux et professionnels clés.

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James Côté (1996, pp. 425-426) (suite) :

« Compte tenu du chaos apparent de la modernité tardive, [ce capital comprend] des habiletés à négocier avec d’autres certaines transitions dans l’existence telle que celles permettant de se faire reconnaître dans des communautés d’étrangers et de devenir membre de cercles ou groupes auxquels on aspire appartenir.

« Les investisseurs ayant le plus de succès sur les marchés

identitaires semblent avoir des portefeuilles de compétences comprenant deux types d’atouts :

- l’un d’ordre plutôt sociologique, - l’autre d’ordre plutôt psychosocial.

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James Côté (1996) : Atouts sociologiques : diplômes, appartenance à des groupes, clubs, associations, présentation de soi (vêtement, attraction physique, manière de parler, etc.).

Ces appartenances sont liées à des interactions quotidiennes permettant « d’accroître le capital d’identités en accumulant (accrueing) des concepts de soi et des modes de présentation de soi négociables » Atouts psychosociaux : Savoir explorer ses engagements et investissements, force de l’ego, sentiments d’efficacité personnelle, complexité et flexibilité cognitives, observation de soi (self-monitoring), capacités de pensée critique et de raisonnement moral, etc.

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1. S’orienter dans les sociétés occidentales d’aujourd’hui 1.7 Le développement des

compétences pour s’orienter Exemple : Les ateliers DAPP (NDAPP) visent à aider les jeunes à construire des anticipations de soi en termes d’activités professionnelles (et pas de métiers ou professions) :

- en analysant leur situation présente dans ses multiples aspects et

- en se centrant sur les activités, interactions et dialogues, dans lesquels ils pourraient s’investir dès maintenant.

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Il est nécessaire pour la personne de s’engager dans des activités réflexives visant à développer un sens de soi, un sens de soi qui ne soit pas « unidimensionnel » (Herbert Marcuse). Pour les adolescents et adultes émergeants : s’orienter, c’est d’abord construire certaine(s) mise(s) en perspective(s) de soi (de ses différents présents) du point de vue de certaines anticipations de soi qui importent pour soi aujourd’hui.

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Des interactions dialogiques de conseil constructiviste / constructionnistes visent à aider la personne à construire des récits de soi (aujourd’hui imaginaires) tels qu’elle pourrait les tenir à un certain moment, ou à certains moments de son futur (*) sur le thème :

« Voici ce qui, dans mon passé (donc dans son actuel présent, passé et futur) m’a conduit à…, ou m’a permis d’être ce que je suis aujourd’hui (cet aujourd’hui tel qu’elle l’imagine dans le futur) » (*) A un ou des moment/s où elle aurait le sentiment d’avoir accompli quelque chose dans l’un de ses domaines de vie).

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En résumé : Souci de soi : activité de connaissance de soi par soi tendue vers la réalisation d’un certain idéal. Narrativité : capacité à intégrer dans un récit unifié sur soi différentes vues de soi dans le futur permettant de mettre son présent en perspectives. Cf. La personnalisation de Philippe Malrieu Art de l’adaptation : capacité à repérer dans un contexte des éléments faisant sens pour soi et à s’en saisir pour les inscrire dans certaines perspectives personnelles déjà-là, ou définies ou redéfinies à ce moment. L’art de l’adaptation n’est donc pas une adaptation (un ajustement), mais une capacité à anticiper quelque chose pour soi dans ce contexte.

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2. Un entretien constructiviste de conseil en orientation Cet entretien s’adresse à des jeunes dont les interrogations majeures sont les suivantes :

- « Que pourrais-je bien faire plus tard ? », - « Que veux-je faire de ma vie ? », - « Comment y parvenir ? »

Objectif fondamental de cet accompagnement :

- Aider le consultant à définir certaines ANTICIPATIONS à propos de lui-même,

- Définir certaines conduites susceptibles d’accroître ses chances de voir ces anticipations se réaliser et

- S’engager dans de telles conduites.

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2. Un entretien constructiviste de conseil en orientation

2.1 Précisions terminologiques Cette proposition se réfère au modèle de la construction de soi synthétisé sous le titre « Se faire soi » (Guichard, 2004). Cet entretien vise à aider les consultants à :

- Cartographier le système actuel de leurs formes identitaires subjectives (SFIS) (passées, présentes et anticipées),

- Identifier des formes identitaires subjectives (FIS) correspondant à des anticipations de soi qu’ils souhaitent réaliser,

- S’engager dans des activités favorisant la réalisation de telles anticipations (et, corrélativement, dans certains cas, à s’engager dans un processus de transformation de leur système actuel de formes identitaires subjectives).

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- Forme identitaire subjective (FIS)

o un ensemble de manières d’être, d’agir et d’interagir en lien avec une certaine représentation de soi dans un certain contexte,

o Cette représentation de soi peut être plus ou moins claire et explicite : elle donne lieu à des affects et émotions plus ou moins vifs.

Exemple, pour un jeune, dans son lycée : « moi, lycéen de Bac Pro électrotechnique ».

Une FIS = un ensemble :

- D’actions et d’interactions (liées à des scripts d’actions) renvoyant à des savoirs, savoir-faire et savoir-être (des attitudes). o Exemple, pour la FIS « moi lycéen de Bac Pro

électrotechnique » : écouter le cours de technologie et prendre des notes, rêvasser pendant le cours d’histoire, faire systématiquement les exercices et répondre aux questions pendant le cours de maths, etc.

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Une FIS = un ensemble (suite) :

- De modes de rapports aux « objets » du monde en questions. o Même exemple : un certain rapport général au savoir et des

rapports particuliers aux différentes disciplines, des représentations des différentes manières de faire les tâches en question (habiletés d’approche des tâches), etc.

- De modes de rapports à soi (des généralisations d’observations de soi,

des sentiments de compétences, un certain sentiment d’autodétermination, une estime de soi, etc.).

o Même exemple : s’estimer bon en maths, sérieux, bon élève, présentant bien, etc.

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Une FIS = un ensemble (suite et fin) :

- De modes de rapports aux autres et d’interlocutions avec eux (des actions, interactions, interlocutions et représentations). o Même exemple : faire le clown en gym, savoir être considéré par

les autres comme le chouchou du prof de maths, interpréter avec plusieurs copains la scolarité au lycée professionnel comme une étape préparant à un baccalauréat de technologie, etc.

- Dans certains cas : d’anticipations futures liées à cet ensemble

d’actions, d’interactions, de rapports et de représentations. o Même exemple : se voir faire un BTS informatique.

Les formes identitaires actuelles comprennent :

- celles qui constituent le présent de l’individu, - celles, passées, qui marquent toujours le présent, - celles correspondant à certaines anticipations de soi (FISA).

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- « La subjectivité » : un ensemble articulé et dynamique de formes

identitaires subjectives Le concept de FIS renvoie à une conception plurielle et dynamique de l’identité individuelle : celle-ci apparaît comme constituée par l’ensemble – dynamique – de ces formes identitaires subjectives (Guichard, 2004). Une illustration : Hasni est un élève (fictif) de BEP électrotechnique de 17 ans, né en France, dans une famille dont les deux parents sont originaires du Maroc. Le schéma suivant : une vue approximative du système des formes identitaires subjectives (SFIS) de Hasni à un moment donné.

- Chacune de ses FIS est matérialisée par une sphère. - Les relations entre ces FIS sont matérialisées par les traits.

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Le système subjectif des formes identitaires subjectives de Hasni (une tentative d’illustration fictive)

Hasni, 17 ans, né en France, de parents originaires du Maroc est élève en Bac Professionnel électrotechnique.

Les 5 sphères formant un X au niveau intermédiaire figurent les FIS présentes.•La sphère centrale figure la FIS scolaire (par exemple : une forme réflexive de rapport au savoir. Cf. Jellab)•La sphère droite figure la FIS « employé les week-ends dans une PME d’assistance informatique à domicile »•La sphère gauche figure la FIS « amoureux de Nathalie »•Etc.

L’axe central représente le passé (en bas), le présent (au centre) et le futur (au sommet)•La sphère inférieure figurer la FIS « fils d’immigré du Maroc élevé dans la Cité X »•La sphère supérieure centrale figure la FIS anticipée « étudiant en BTS informatique »•La sphère supérieure arrière droite figure la FIS anticipée « technicien en informatique »•La sphère supérieure arrière gauche figure la FIS anticipée « vivant en couple avec des enfants »

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- Remarques à propos de ce schéma

Ce schéma ne constitue qu’une image extrêmement simplifiée de la subjectivité de l’individu :

- Il ne relie pas les FIS avec des modèles extérieurs (personnes ou personnages) auxquels l’individu s’est identifié ou s’identifie. Il n’établit aucun lien avec certaines figures rejetées.

- Il ne met pas en évidence les inscriptions sociétales de l’individu. Notamment : l’offre de catégories sociales dans lesquelles se penser et de certains modes de rapport à soi.

- Il masque le dynamisme de la subjectivité : les processus d’identification, d’interprétation, les développements métacognitifs, etc.

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- Objectifs de l’entretien

Permettre au consultant de :

- Repérer les FIS majeures dans lesquelles il se construit actuellement, - Prendre conscience de ce qui constitue concrètement chacune d’elles

(actions, interactions, rapports à soi, représentations, etc. Cf. la définition précédente),

- Prendre conscience des FIS qui tien(nen)t une place centrale dans son SFIS et de celles dont la place est plus périphérique,

- Repérer les relations entre ces FIS (concurrence, complémentarité, etc.) Concrètement : ce qui advient dans l’une constitue-t-il un obstacle ou une ressource pour ce qui se passe dans une autre ?

- Sélectionner une / des FIS anticipé(e)s (notamment : professionnelle ou scolaire) dans la réalisation de laquelle / desquelles il souhaite s’engager,

- Augmenter ses chances d’y parvenir et modifier en conséquence – si nécessaire – son système subjectif de formes identitaires.

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2. Un entretien constructiviste de conseil en orientation

2.2 Conduite de l’entretien

- Schéma de l’interaction de conseil

I. Construction de l’alliance de travail II. Prise de conscience par le consultant des grands domaines

constitutifs de sa vie actuelle III. Mise à jour du système des formes identitaires subjectives (SFIS)

correspondant aux principales sphères d’activités et expériences de vie du consultant

IV. Détermination de FIS anticipées dans la réalisation desquelles le consultant estime important de s’engager et définition des modalités pratiques de cet engagement

V. Conclusion de l’interaction de conseil

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Schéma de l’interaction de conseil

I. Construction de l’alliance de travail

Objectifs : construire un lien, s’accorder sur les objectifs et les moyens

Trois éléments essentiels : o Permettre au consultant (client) de formuler les questions

majeures qui l’amènent. o Lui indiquer les objectifs fondamentaux et les grandes lignes de la

démarche. En l’occurrence : Lui permettre de préciser ou de découvrir certaines

perspectives d’avenir auxquelles il tient. L’aider à définir des moyens pour s’engager dans leur

réalisation. Cela suppose qu’il analyse sa situation présente dans ses

différents aspects. o Nécessité d’un travail conjoint : le conseiller accompagne le

consultant dans SON travail d’analyse et de formulation.

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Schéma de l’interaction de conseil II. Prise de conscience par le consultant des grands domaines

constitutifs de sa vie actuelle (première exploration)

- Vos différentes sphères d’activités présentes Quels sont les principaux contextes (situations) où il interagit

aujourd’hui ? - Les expériences qui ont compté dans votre vie

Expériences, évènements, personnes, personnages qui ont joué un rôle dans sa vie.

- La vie que vous aimeriez avoir dans le futur

Domaine/s important/s, activités, renoncements. - Bilan de la séquence

Sphères principales / secondaires d’activités et interactions actuelles

Expériences passées importantes Anticipations actuelles / antérieures.

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Schéma de l’interaction de conseil III. Mise à jour du SFIS correspondant aux principales sphères

d’activités et expériences de vie du consultant (deuxième exploration)

Objectifs : Aider le consultant/client à explorer ses principales sphères d’activités actuelles, ses expériences passées marquantes et ses anticipations en vue de lui permettre de prendre conscience :

- De ses modes actuels de rapports à soi, à ses expériences et aux autres dans chacune de ces sphères / expériences et anticipations,

- De l’importance qu’il accorde à certaines d’entre elles, - Des relations qu’il établit entre ses principales sphères d’activité actuelles,

expériences passée marquantes et anticipations (de son SFIS). Deux temps :

- Analyse par le consultant de chacune des sphères présentes, expériences passées, anticipations, qu’il juge importantes Le conseiller l’aide en lui posant des questions du type : « Que diriez-

vous de vous en tant que… (par exemple : lycéen) ? - Le Système des Formes Identitaires Subjective du consultant

Le conseiller propose une synthèse au consultant et la discute avec lui.

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Schéma de l’interaction de conseil IV. Détermination de FIS anticipée(s) dans la réalisation de

laquelle/desquelles le consultant estime important de s’engager et définition des modalités concrètes de cet engagement

Objectif : se rapporter à sa situation présente depuis la perspective de cette anticipation et transformer cette situation en conséquence. Trois temps :

- Détermination de la / des FIS anticipée/s majeure/s pour le consultant Rôle important du conseiller : parfois aider le consultant à imaginer

certaines anticipations ou à s’autoriser certaines attentes. - Lecture de la situation présente depuis cette perspective future

Repérer dans cette situation tous les obstacles et adjuvants à la réalisation de cette / ces anticipation/s.

- Modifications de la situation présente En développant quels investissements actuels ? En renonçant à quelles

activités ou attentes actuelles ? En s’investissant dans quelles activités nouvelles ?

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Schéma de l’interaction de conseil IV. Détermination de FIS anticipée(s) dans la réalisation de

laquelle/desquelles le consultant estime important de s’engager et définition des modalités concrètes de cet engagement

- Remarques à propos de cette séquence Elle vise à produire un remaniement plus ou moins important du SFIS du consultant/client. Les remaniements peuvent prendre des formes différentes :

- Transformation d’une ou plusieurs FIS (Exemple : établissement d’un nouveau rapport à telle ou telle discipline scolaire),

- Emergence d’une nouvelle FIS actuelle (Exemple : Engagement dans une activité associative),

- Obsolescence d’une FIS présente (Exemple : passer moins de temps avec la bande des copains du quartier).

- Restructuration du SFIS (une FIS occupant désormais une place plus centrale).

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Schéma de l’interaction de conseil V. Conclusion de l’interaction de conseil

Objectifs :

- Faire le bilan de la démarche Celle-ci répond-t-elle bien aux attentes initiales du consultant ainsi

qu’à celles qu’il a formulé ensuite ? - Faire le point sur les activités dans lesquelles le consultant est

déterminé à s’engager. - Indiquer les limites de la démarche

Il ne s’agit pas de la détermination d’un plan de vie : tout au plus d’un projet.

Ce qui importe, c’est moins l’anticipation définie aujourd’hui que les processus réflexifs développés à cette occasion.

- Mettre un terme à la relation C’est au consultant de conduire désormais par lui-même une telle

réflexion à l’occasion de dialogues intérieurs ou avec des personnes significatives de son entourage.

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Conclusion Cette intervention d’accompagnement en orientation :

- Est ambitieuse et coûteuse Son intention fondamentale est d’aider la personne à développer

certains modes d’interrogation à propos de soi et de son existence constitutifs de la norme sociale actuelle de développer sa réflexivité.

Elle nécessite un engagement long du conseiller et du consultant/client.

- A une visée émancipatrice

- Mais reste profondément ancrée dans le cadre des injonctions des

sociétés occidentales d’aujourd’hui Sa question fondamentale n’est pas celle du « bien vivre ensemble »

ou du « bien commun », mais de la construction de soi

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L’entretien constructiviste de conseil en orientation : une

méthode pour aider les personnes à développer leurs compétences pour s’orienter dans les sociétés de la

modernité tardive ? _______________

MERCI POUR VOTRE ATTENTION

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Jean Guichard [email protected]

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