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Hiver 2015 - Ifso Mag n°5 Le Waqf : un dispositif musulman au service de la solidarité intergénéra- tionnelle et de l’intérêt général. ANALYSE Economie Islamique Qu’entend-on par économie islamique - JL Karleskind Interview de M. Nouri Interview de M. Choudhury Managing Director of Al Rayan Bank Dossier Parole d’expert

Ifso mag n°5

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Gratuit - Hiver 2014 Hiver 2015 - Ifso Mag n°5

Le Waqf : un dispositif musulman au service de la solidarité intergénéra-tionnelle et de l’intérêt général.

ANALYSE

Economie Islamique• Qu’entend-on par économie

islamique - JL Karleskind

• Interview de M. Nouri

Interview de M. Choudhury Managing Director of Al Rayan Bank

Dossier

Parole d’expert

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Editorial

Financeparticipativeetfinanceislamique.

Connaissez-vous la nouvelle appellation de la finance isla-mique?La«financeparticipative».Plusprécisémentl’expres-sion«participatingfinance»remplacedeplusenplus«Islamicfinance»danslesétudesinternationalescommelerécentrap-port « World Islamic Banking Competitiveness Report 2014-15 »d’Ernst&Youngl’illustrebien.Rappelonsquecertainspays,commelaTurquie,utilisentdelonguedatecetteexpressionpourdésignerlafinanceislamique.

Qu’enpenser?Plutôtdubien.Sansparlerdufaitqueleterme«islamique»peutêtremalinterprété,onpeutsurtoutappré-cier l’accent mis sur le caractère participatif de cette forme de finance.Rappelonsquel’undesgrandsprincipesdelafinanceislamiqueestderemplacerl’intérêtparlepartagedespertesetdesprofits.Cedernierprincipeaboutitainsiàvaloriserlescontratsparticipatifscommelamusharakaetlamudarabaoùlefinanceurpartagelespertesetlesprofitsduprojetfinancéavecl’entrepreneur.

Encorefaut-ilquelafinanceislamiquelesoitvraiment.Eneffet,les contrats participatifs restent très peu pratiqués dans les faits parrapportauxcontratsdedettequesontlamurabahaetl’ijara.

Ainsi,peut-onespérerdansl’intérêtdelaconformitéauxprin-cipesmisenavantquelanouvelleexpression«financeparti-cipative»soitassociéeàuneévolutiondespratiquesdecettefinance.Ilnefautpassimplementquelestermesdecettefinanceenexpansionsoientdifférents,souspeinedevoirlafinanceisla-miquedeveniràtermeniparticipative,niislamique…

Laurent Weil Professeur, Université de Strasbourg

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Sommaire

Actualité ....................................................................................................... page 06

FinanceislamiqueenFrance,oùenest-onen2015?-E.Ghlamallah

Analyse ........................................................................................................... page 08

LeWaqf,undispositifmusulmanauservicedela solidaritéintergénérationnelleetdel’intérêtgénéral-M.B.OuldSass

Dossier ......................................................................................................... page 12

Qu’entend-on par économie islamique ?- JL Karleskind

La nécessité d’un modèle économique islamique pourledéveloppementetlapromotiondelafinanceislamique - Interview de Mr. M. Nouri

Parole d’expert .......................................................................................... page 20

InterviewdeMr.SultanChoudhury, ManagingDirectoroftheAlRayanBank-ParE.Ghlamallah

Les activités de l’IFSO ............................................................................ page 24

Agenda ........................................................................................................... page 27

Lesrendez-vousdel’IFSO Les rendez-vous de la Finance Islamique dans le monde.

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Avecune fourchettecompriseentre2,1et5mil-lionsdemusulmans,dont2millionsseraientde nationalitéfrançaise,laFrancecomptedavantagedemusulmansquepasmoinsdehuitpaysmembresdelaLiguearabe(Liban,Koweït,Qatar,Bahreïn, Émirats arabes unis, Palestine, Îles Comores et Djibouti).CechiffreindiquedefactoquelaFranceestlepremierpayseuropéenparl’importancedesacommunautémusulmaneetledemeureraàhorizon2030.

Un décollage plus difficile que prévu

On peut se demander pourquoi il semble si complexededévelopperenFrancecette financealternative,éthiqueetparticipativequ’estlafinanceislamique,alorsquelaFranceest,proportionnel-lementàsasuperficieetàsapopulation, leplus importantfoyermusulmandumondeoccidental.

Lesexplicationspeuventêtremultiples.Toutd’abord,ilexisteuneabsencedevolontépolitiquedepuislesefforts entrepris par Christine Lagarde lorsqu’elle était Ministre de l’Économie et des Finances en 2008.Eneffet,unréelvolontarismepolitiqueaété affichédanstouslespaysoùlafinanceislamiques’est développée de manière satisfaisante : adoption denouvelleslois,engagementdirectdesÉtatsviadesémissionssouverainesdeSukuk.Unautrefac-teurexplicatifrésidedanslefaitquelafinanceisla-miquen’étantpasdéveloppéedanslespaysd’originedesmusulmansdeFrance(Maghrebetanciennes colonies françaises), la populationmusulmane françaisen’estpassuffisammentconscientedel’im-portancedecesujet.

Les atouts du marché français

Les atouts dumarché français sont loin d’être négligeables.Prêtonsattentionautauxdebancari-sation des Français musulmans : ils sont parmi les musulmansaumondeàêtre lespluséquipésdecomptesbancaires.Aussi,avec41%desFrançais

musulmans«pratiquants»,selonl’institutdeson-dageIfop, lacibledeclientèlepourraitreprésen-ter plus de 2 millions de clients potentiels. Autre exempledelavivacitédumarchéfrançais,lemarchédelanourriturehalal,estestiméà5,5milliardsd’eu-ros,lapratiquesocialedel’islamenFranceaévoluévers la recherche d’une consommation plus respec-tueusedesonéthiqueetdesesvaleurs.Unacteuren mesure d’offrir des produits conformes et perfor-mantsauraitdoncdebellesperspectivesdedéve-loppement. Ce marché émergent dans le domaine de l’économie halal peut représenter une réserve de croissanceconsidérablepourledéveloppementdelafinanceislamiqueetdel’assuranceTakaful.

Ilexisted’ailleursdeuxuniversitésquidispensentunenseignementenfinanceislamique:l’UniversitédeStrasbourgavecunExecutiveMBAetunMaster2etl’UniversitédeDauphineavecunExecutiveMas-ter.Lesprofilsdespersonnesquisuiventcesforma-tionssontpluridisciplinaires:assureurs,actuaires,risketassetmanagers,juristes,banquiersprivésetd’affaires,etc.

Avecl’adoptiond’instructionsfiscalesdestinéesànepaspénaliserlesopérationsdefinanceislamiqueparrapportauxopérationsconventionnelles,lecadrejuridiqueestprésent.Deplusledroitdesassurancesprévoitdesstatutsparfaitementcompatiblesavecles principes du Takaful sans qu’il ne soit nécessaire de légiférer au d’amender. La France est d’après la revueSIGMAéditéeparSwissRelecinquièmemar-chémondialdel’assuranceavecuntauxdepénétra-tiondepresque10%.

Lerapportannuel2013delaFFSA(FédérationFran-çaisedesSociétésd’Assurance)faitétatde188mil-liardsd’eurosdecotisationstousmarchésenFrance,sidessolutionsTakafularrivaientàcapterneserait-ceque2%dumarchéfrançaislaFrancedeviendraile 2nd marché mondial du Takaful qui ne représente d’aprèsEYque11milliardsd’eurosen2014.

EzzedineGHLAMALLAHestchefd’entreprise,dirigeantdeSAAFI,cabinetdecourtageenassurances,spécialistedeladistributionetdelaconceptiondesolutionsd’accèsàl’assuranceetàlafinanceislamiques.Ilestdiplômédel’UniversitédeStrasbourgoùilaobtenusonExecutiveMBAen2013.Ilestégalementancienélèvedel’ÉcoleNationaledel’ASSurance,licenciéen2010enAssuranceBanqueFinance.Ilenseignelafinanceislamiqueàl’UniversitédeDroitdeCergyPontoise,animelarubrique«financeéthique»surlesiteSaphirnews.cometpublierégulièrementdesarticlesdansdesrevuestellesque l’Islamic Finance News ou l’Argus de l’Assurance.

ActualitéFinance islamique en France, où en est-on en 2015 ?

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Cela serait égalementun excellentmoyende se différencierdesplaceslondoniennesetluxembour-geoisesquiont fait lechoixd’émettredessukuk souverainsafind’attirer les investisseursmoyenorientaux.

Ce sont toutes ces raisonsquiexpliquentque laBanqueCentrale Européenne a estimé dans un rapportparuenjuin2013quelafinanceislamiquesemblaitavoirunbonpotentielàdévelopperenFrance.

Une offre limitée.

Malgrétout,ducôtédel’offre,lesproduitspropo-séssonttrèslimités:uneseulebanqueaujourd’hui réalise des opérations de financement Shari’a compliant.Effectivement,laBanqueChaabi,filialefrançaisedelabanquemarocaineproposeunesolu-tiondefinancementimmobilierMurabahaetuneconventiondecomptededépôt.Concernantl’assu-rance,iln’yapasdesolutionsTakafuldommages.

Seules existent des solutions Takaful famillequi se matérialisent par trois contrats d’assu-rance-vie :SalamÉpargne&PlacementdeSwissLife,AmâneExclusiveLifedeVITISLIFEetplus récemmentEthra’aTakafulFamilledelacompagnie LuxembourgeoiseAtlanticlux, filialedugroupeFWU.

Pourpermettrel’éclosion,puisledéveloppementd’un vrai marché pour la finance islamique et l’assurance Takaful en France, il est nécessaire d’investirpar la création et l’offredenouveaux produitsrépondantsauxbesoinsdelapopulation,il faut égalementdémystifier et fairepreuvede pédagogie . L ’of fre doi t créer le marché . La démystification doit pouvoir convaincre les institutionnels de la réserve de croissance consi-dérable qu’offre ce segment et les encourager à investir.Lapédagogiequantà elledoit servir à stimuler la demande.

Auxacteursprivésdes’organiser,investiretcréerlemarché...

Par Ezzedine Ghlamallah.

ActualitéFinance islamique en France, où en est-on en 2015 ?

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Dans la tradition musulmane, le Waqf est, principalement, un dispositif d’affectation des rendements d’une propriété privée au service de l’intérêtgénéral.Certes, l’Islamestune religionqui reconnait la propriété privée comme étant un droituniversel.Cependant,enparallèleaveccette reconnaissanceirrévocable,l’Islamencouragesesdisciples à assumer une certaine responsabilitésociétale au sein de la communauté dans laquelle ils vivent.

C’estainsiqu’ilrecommandeuncertainnombrededispositifssusceptiblesderenforcerunesolidaritéproactivenonseulementàl’égarddelacommunautémusulmane,maisaussienversl’Humanitédanssonensemble.

Parmicesdispositifsjuridiques,ontrouvelaZakat(aumônesobligatoires/purificatricesdelarichessedu point de vue spirituel), les Sadakat qui se présententcommeaumônesfacultativesetleWaqfquifaitl’objetdenotreprésentarticle.

Le plan de cet article se divise en deux parties essentielles.LapremièreproposeunbrefaperçusurlanaturedeWaqf,sonsenssémantiqueetsadéfi-nitionainsiquesaportéesocialeetsolidaire (1.)tandis que la seconde partie tente d’appréhender lapossibilitéd’intégrationduWaqfdans l’ordre juridiquefrançais(2.).

1. Le sens sémantique et la définition juridique du Waqf

Dupointdevueétymologique, leWaqf signifie « la suspension d’un mouvement » ou le fait d’immobiliserquelquechosepourunobjectifprécis.

Surleplanjuridique,nouspouvonsdéfinirleWaqf(pluriel :Awqaf) commeétantuncontratstipu-lantunedonationàperpétuité1 d’usufruit d’un actif productif,faiteparunepersonnephysiqueoumoraledanslebutd’assurer,defaçonintégraleoupartielle,lefinancementd’uneoeuvred’intérêtgénéraltoutengardantlanue-propriétédubienquifaitl’objetduWaqf2.

1 IlestpossibleaussiqueleWaqfsoitformulépourunedurée déterminée notamment selon l’école Malikite2 DanslarégionduMaghreb,onutiliseketermedeHoubouss(pluriel:Ahbass)pourdésignerleWaqf.

Dès la conclusionde ce contrat, le bienqui fait l’objet duWaqf devient automatiquement une propriété insaisissable et inaliénable au sens juridique du terme. De plus, la gestion de cefondsetlesbénéficesquiendécoulentdoiventêtre effectués dans le strict respect de la volonté du donateur-constituant notamment si celui-ci a manifesté son désir de voir le fonds investi dans un domaine particulier comme la santé ou l’éducation oul’accèsàl’eaupotable...etc.

T r ad i t i onne l l emen t , on d i s t i ngue t r o i s configurations de Waqf suivant la volonté du donateur-constituant.

L a p r e m i è r e c o n f i g u r a t i o n e s t c e l l e d u «WaqfPublic».Auseindecemontagel’actededonation d’usufruitestétabliauprofitd’unelargecatégoriedesbénéficiairesdésignésd’unemanièreglobale (ex : tous lespauvresd’une cité oud’unpays). CetypedeWaqfpeutaussiêtreorganisépartypedesservicespublicstelsqueleshôpitaux,lesécoles,etc…

Ladeuxièmeconfigurationpossible est celledu «WaqfFamilial»danslequell’actededispositionprévoitunerestrictiondesbénéficiairesauprofitde certaines personnes proches du donateur-consti-tuant.Laconfigurationdecetypedestructurepeutinduirecertainesperturbationsmacroéconomiquesnotammentlorsqu’onl’utiliseàgrandeéchelle.

Latroisièmeconfigurationestcelledu«Waqfmixte»ou « hybride » qui, comme son nom l’indique,contientà la foisdesélémentsde«WaqfPublic»etde«WaqfFamilial».Danscetteconfiguration, le donateur-constituant aura le droit de nommer des bénéficiairespublicsetdesbénéficiairesparticuliers.Ànoterque,le«WaqfPublic»restegénéralementleplususitédanslemondeetàcetitreonl’appellele «Waqf Khayrî» ou le véritableWaqf d’intérêt général.

Àcetégard,leWaqfsymboliseunecertainevolontéd’institutionnaliser la solidarité intergénération-nelleetconstitue,àcetitre,unintéressantmoyende développement local.

M. Mohamed-Bachir OULD SASS est expert en « droit musulman des affaires » (fiqh al mouaamalat) et en finance islamique, membre du Sharia Board (ACERFI) il intervient, en tant que professionnel, dans différents pays (Belgique, Maroc, Mau-ritanie…). Il enseigne également ces matières à l’Université de Strasbourg, depuis 2009. Membre de l’équipe de recherche de l’Université de Strasbourg « Banques et Finance islamique », projet financé par l’Agence Nationale de la Recherche, il est l’auteur de plusieurs articles de fond sur la question.

AnalyseLe Waqf, un dispositif musulman au service de la solidarité intergénérationnelle et de l’intérêt général

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Dans cette perspective, nous nous sommes interrogéssurlapossibilitéd’intégrerleWaqfdanslepaysageeuropéenetplusparticulièrementenFrance.

2. Les perspectives d’intégration du Waqf dans le paysage européen

En guise d’introduction de notre analyse de la possibilitéd’intégrationd’un telmodèledans lepaysageeuropéen, ilconvientderappelerquelaConventionEuropéennedesDroitsde l’Hommeprônelerespectdelalibertéd’initiativeycomprisles initiatives motivées par des convictions spiri-tuellesoureligieuses.Àcetégard,chaquereligiondoitêtrerespectéeetdoncnonentravéesaufpour d’impérieuxmotifsd’intérêtgénéral.

Dans les paysdedroit anglo-saxon, le trust est utilisé comme mécanisme d’intégration du Waqf. En France, nous estimons que le régime des fondationsrégiesdepuis1987(2-1)etdanscertainemesure la fiducie réintroduite dans le droit fran-çaisen2007(2-2),ainsiquelaloirelativeaufondsde dotation promulguée en 2008 puissent servir de supportjuridiquepourrecevoiretintégrerleWaqfdansl’ordrejuridiquefrançais(2-3).

1) L’intégration du Waqf à travers le régime des fondations

Lerégimejuridiquedesfondationsaétéposéparla loidu23 juillet1987sur ledéveloppementdu mécénat,offrantainsiplusdeclartéetdesécuritéjuridique.

Seloncette loi, les fondationsseprésententdans«L’acte par lequel une ou plusieurs personnes physiques ou morales [appelés fondateurs]décidentl’affectationirrévocabledebiens,droitsou ressourcesà la réalisationd’uneœuvred’intérêtgénéraletàbutnonlucratif».

Laloide1987adéfinitroistypesdefondations,lesunes dotées de la personnalité morale : les fondations d’utilitépublique,lesfondationsd’entreprisesetlesautres dépourvues de cette personnalité morale : les fondationsabritées.

Lafondationd’utilitépubliquenoussembleassezadéquate pour recevoir le Waqf en France. Dans ce cadre, lesfondateurspeuventêtredespersonnesphysiques ou des personnesmorales, à condi-tiond’avoir lacapacitédeconsentirdes libérali-tés.Lesfondateurs-personnesphysiquespeuventcréer une fondation directement par donation entre vifsoupartestament.Ilspeuventégalement,créer une fondation de manière indirecte soit par l’intermédiaired’unepersonnemorale existante

chargée alors de créer une telle structure avec les fonds donnés, soit par l’intermédiaire d’un légataire.Quantauxfondateurs-personnesmorales,ils peuvent constituer une fondation soit en effec-tuant une donation soit en se dissolvant pour transférerlesbiensàlafondation.

A noter que le principe de spécialité impose que lacréationde la fondationsoitutileà la réalisa-tiondeleurobjetsocial.Lepatrimoinedelafonda-tionpeutêtreconstituéparunensembledebiens consomptiblesounon,droitsetressources,etc…Unefoisquel’actedefondationestconclu,lepatri-moineyafférantestaffectéàlafondationpouruneduréeillimitéedemanièreirrévocable.

Toutefois, il restepossiblederemplacerunbienaffectéparunautrebiendemêmevaleuretayantlamêmeutilité.Demême,leConseild’Étatadmetqu’ilestpossibled’aliénerunepartiedesbiensfigu-rantàl’actif.Mais,demêmequececiestpossible, les statuts peuvent l’interdire.

Enfin, cepatrimoine est affecté àunbutd’inté-rêtgénéralnon lucratif cequiexclut les intérêts privés du fondateur ou de sa famille.Une fois l’utilitépubliquereconnuepardécret,prisaprèsavisduConseild’État, lafondationacquiert lapleine personnalité morale pouvant ainsi recevoir des dons et legs.

En nous basant sur ce qui précède nous pouvonsdirequelerégimejuridiquedefondationpermetl’intégrationdeWaqfpublicdanslepaysagefrançais.

2) Le Waqf via le régime de la fiducie- gestion.

La loi du 19 février 2007 a intégré dans le code civil,untitreconsacréàlafiducie.Conscientsde l’attractionqu’exerçaitlemécanismedutrustdanslesrelationséconomiques,lelégislateuratentéà plusieurs reprises de faire entrer le trust par l’intermédiairedelafiduciedansledroitfrançais.Toutefois, cette ambitiona toujours étébloquéepour des raisons fiscales et par crainte de fraude éventuelle sur les registres de mutation notamment danslescasoùlafiducieseraitàtitregratuit.

Aprèsune longue réflexion, le Sénat aprésentéunepropositiondeloile8février2005,finalement adoptée en première lecture par l’Assemblée nationale le 7 février 2007, non sans quelques modifications.

AnalyseLe Waqf, un dispositif musulman au service de la solidarité intergénérationnelle

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Cette proposition a donné naissance à l’article2011 du code civil qui définit la fiducie comme étant «l’opération par laquelle un ou plusieurs constituants transfèrentdesbiens,desdroitsoudessûretés,ouunensembledebiens,dedroits,oudesûretés,présentsoufuturs,àunouplusieurs fiduciairesqui,lestenantséparésdeleurpatrimoinepropre,agissentdansunbutdéterminéauprofitd’unouplusieursbénéficiaires».Etcelapouruneduréemaximale1dequatre-vingt-dix-neufans.Enpratique,lafiduciemetdoncenrelationtroisacteurs: leconstituant, lebénéficiaireetlefiduciaire.En2007,l’Assembléenationaleavoulurestreindrelafiducieauxpersonnesmoralessoumisesoupouvantêtresoumisesàl’impôtsurlessociétés.

Mais, lorsdesdébatssur la loidemodernisationdel’économiedu4août2008, leSénatapufaire passerl’abrogationdel’article2014ducodecivilqui prévoyait cette restriction pour le constituant. Désormais, le constituant, c’est-à-dire celui qui transfèresesbiens,droitsousûretésaufiduciairepeutêtresoitunepersonnemoralesoitunepersonnephysique.

En revanche, les fonctions de fiduciaire sont réservéesauxacteurssuivants:

• Établissementsdecréditsmentionnésàl’articleL.511-1ducodemonétaireetfinancier

• Trésorpublic, laBanquedeFrance, laPoste,la Caisse des dépôts et des consignations, les Instituts d’émissions d’outre-mer et des départements d’outre-mer posés {l’article L.518-1ducodemonétaireetfinancier.

• Entreprises d’investissements autres que lesétablissementsdecréditmentionnéesl’articleL.531-4dumêmecode.

• Entreprises d’assurance régies par l’article L. 310-1 du code des assurances.

• Avocats,depuis2008.

Le f iduciaire aura, selon les s t ipulat ions contractuelles, soit la charge de la gestion du patrimoine transféré au profit du bénéficiaire (fiducie-gestion),soitlagardedupatrimoinequiestalorspourlefiduciaireunegarantiecontreunedettedubénéficiaire(fiducie-sûreté).

Concernantleseffetsdecetypedecontrat,ilconvientde noter que la loi de la fiducie opère un certain «démembrement »depropriétépar la créationd’un patrimoine d’affectation distinct de celui du fiduciaire.

1 Rappelonsqueladuréedewaqf,quantàelle,peutaussiêtrelimitéedansletempsselonl’écolemalikite

Cette perception fait écho et laisse entendre qu’il est possible d’envisager, après quelques ajustements,l’instaurationduWaqfvialerégimedefiducienotammentlafiducie-gestion.

3) L’intégration du Waqf par le biais d’un fonds de dotation Waqf via le régime de la fiducie-gestion.

Afin d’attirer les financements privés pour les act ivités à but non lucratif , la loi de modernisation de l’économie du 4 août 2008 a créé le fonds de dotation voulu comme « un mode de financement complémentaire permettant de répondre durablement aux nouvelles exi -gences et contraintes budgétaires, unmode de gouvernance spécifique optimisant à la fois la t ransparence e t la sécur i té au regard des projets que les établissements aurontd é c i d é s , e t u n moy e n d ’ i n s c r i r e l e s institutions françaises dans une dynamique internationale.»2

L’article 140 de la loi de modernisation de l’économiedéfinitlefondsdedotationcomme«unepersonnemoralededroitprivéàbutnonlucratifquireçoitetgère,enlescapitalisant,desbiensetdroitsdetoutenaturequiluisontapportésàtitregratuitetirrévocableetutiliselesrevenusdelacapitalisa-tionenvuedelaréalisationd’uneœuvreoud’une missiond’intérêtgénéralou lesredistribuepourassisterunepersonnemoraleàbutnonlucratifdansl’accomplissementdesesœuvresetdesesmissionsd’intérêtgénéral.»

Concrètement,lefondsdedotationpeutêtrecréépar une ou plusieurs personnes physiques oumorales quel que soit le statut juridiquede ces dernières,pouruneduréedéterminéeouindétermi-née.L’objetdufondsestdefairefructifierleslibéralités consentiespourréaliseruneœuvreouunemissiond’intérêtquiluiestpropreoucelled’unautreorga-nismeàbutnonlucratif.

Le fonds est donc constitué ou non d’une dotation initiale et essentiellement des dons et legs quiluisontconsentis.Saufdérogationlégalepouruneœuvreouunprogrammed’actiondéterminéetprésentantune importanceouune indéniable particularité, les fonds publics ne peuvent être versés à un fonds de dotation. Le fonds peut disposerlibrementdesesressourcesdanslalimitede sonobjet social. En revanche, ladotation en capitalestintangible.Lefondsnepeutenutiliserquelesrevenus,saufdispositionstatutaireensenscontraire.

2 Cf.l’exposédemotifduprojetdeloirelativeàlamodernisation de l’économie du 4 août 2008

AnalyseLe Waqf, un dispositif musulman au service de la solidarité intergénérationnelle et de l’intérêt général

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De même si une donation est accompagnéed’une clause d’inaliénabilité stipulée dans un intérêtsupérieuretlégitimepouruntempsdéterminé, celle-cidevientinsaisissabletantquedurelaclaused’inaliénabilité.

Le fonds de dotation acquiert la personnalité juridique par déclaration à la préfecture, dansleressort delaquellelefondsasonsiège,etpar publication au journal officiel. Sur le plan organisationnel, le fonds de dotation doit être administré par un conseil d’administration d’aumoinstroismembresquidoivents’adjoindreuncomité consultatif dès que le montant de la dotation excèdeunmilliond’euros.

Force est de constater que les conditions de création de fonds de dotation sont proches de celles des fondations d’utilité publique à la différenceprès que l’objet est clairement l’immobilisationde dons ou legs en vue de les faire fructifier et affectersesfruitsàunprojetd’intérêtpublicdéterminé. Unecaractéristiquequinousrapprochedavantagede l’esprit du Waqf. Nous pouvons donc facilement imaginerlapossibilitédemettreenplaceunprojetdeWaqfpublicsousformed’unfondsdedotation.

Par Mohamed Bechir Ould Sass.

AnalyseLe Waqf, un dispositif musulman au service de la solidarité intergénérationnelle

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Danslesmilieuxdelafinanceislamique,ondiscutetrès rarement de ce qu’on entend par “économie islamique”. L’idée reçue généralement acceptée est quel’Islampromouvantlecommerce,professionduprophète(sAs)etprotégeantlapropriétéprivée,lesprincipes de l’économie islamique se confondraient avecceuxdel’économielibérale.Onreconnaitlalégitimité du profit et de l’enrichissement person-nel.Leslimitesfixéessontlerespectdelaparole donnée, la transparence et des interdictions spécif iques : interdict ion de l ’ intérêt , de l’incertitude spéculative, du commerceduvice,etc...Sansseconfondreavecl’espritducapitalismesacralisant le travail et le gain tel que décrit par MaxWeber1, il sembleraévidentque l’économie islamiquen’arienàvoiraveclecommunismeathée.

Pourtant, l’époquede laRévélationde l’Islama provoquéunerévolution,dans lapéninsuleara-biqued’abord,puisdansl’airearabo-musulmane s’étendant de l’Inde à l’Atlantique. Devant le message simple et égalitaire de l’Islam, lesanciens principes éthiques volent en éclat. Les hiérarchies sociales sont remises en cause. Les peuplesembrassentl’Islamenmasse.S’ouvreunepériode de grande prospérité économique.

1 Ethiqueprotestanteetespritducapitalisme,1904-1905

L’ouverture d’un marché immense avec une langue et un systèmededroit communy a sansdoute beaucoup contribué, comme ce fut le cas, unmillénaireplustôt,pour l’Empireromain.Cefutunâged’or,toutlemondeenconviendra.Ilyeutbiensûrdeszonesd’ombremaisbeaucoupdemusulmans ont la nostalgie de cette période et certainsmêmevoudraientlafairerenaître.Nousnepartageons pas ces aspirations réactionnaires.

Mais, jusqu’à aujourd’hui, les expériences individuelles de repentir, la fraternité de cer-tainescommunautés,lagénérositédesmusulmans pendant le Ramadan montrent que le message de l’Islam continue de transformer des vies et aussi des sociétés.

L’Iran a indubitablement été changée par la révolution islamique tout comme le Soudan etl’AfghanistandesTalibans.Ilnes’agitpasicidejugerdelavaleurdecesexpériences.Notonstoutefoisquecespaysonttousfaitl’objetdepressionsexté-rieuresénormes,guerreouverteoularvée,embargo économique,ostracismediplomatique.Lesrégimesinspirés de l’Islam n’ont pas le monopole de la résistance de l’ordre établi. Les Révolutions française, russe et cubaine furent férocement combattuesdel’étranger.

Jean-LucKarleskindestdiplômédelaGraduateSchoolofBusinessdel’universitédeStanford,d’IMDLausanneetduCNAMParis(Comptabilité).

Après 15 ans passés dans un grand groupe industriel en tant quecadrefinancierquil’amenédeFranceenSuisse,enItalie,enPologneetenRussie,Jean-LucKarleskindarriveauLuxembourgen2001.IlydevientleChiefFinancialOfficer(CFO)d’unesociétéinternationale de négoce de matières premières.

En2010,Jean-Lucpartfaireunvoyageautourdumondedontilferaunprojetderechercheéconomique.Ceprojetl’emmènenotamment au Soudan et enMalaisie où il observe de près l’économieislamique,ayantaccèsàlabanquecentraleduSoudanetàdesprofesseursdefinanceislamique.

Depuis2012,Jean-Lucaenseignélafinanceà laLuxembourgSchoolofCommerce,publiédenombreuxarticleséconomiquesdansdiversorganesdepresseetsursesblogsetadonnédes conférences sur l’économie islamique et l’entrepreneuriat au Luxembourg,enFrance,enAllemagneetenSuisse.Musulmanengagé,ilacofondéuncentreislamiqueauLuxembourgen2008etdepuis2011,ilestvice-présidentdelaShoura,l’assembléedesmusulmansduGrand-DuchédeLuxembourg.

Depuis 2014, il est conseil en finance d’entreprise chez EntrepreneurialProjectDevelopment,une sociétédont il est co-fondateur.

DossierQu’entend-on par économie islamique ? – Jean Luc Karleskind

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L’Histoire nous enseigne que l’Islam incite à la transformation plus qu’à l’adaptation. C’est ceque pense Tariq Ramadan. Il critique sévèrement la finance islamique: “Puisque l’onne veut pas d’intérêts,ontransformelesdonnéesdelaspécu-lationréelle,quirestepourtantunfaitintégré,enlaqualifiantd’islamique.Onchangelesmoyensetlestechniques,maisongardelesmêmesobjectifs: maximiser les profits.On appliquedes chargesadministrativesquisontleséquivalentsdesintérêts. Ce n’est pas une alternative, c’est une perver-sion.” Ramadan indique ce qui pose selon lui pro-blème:lamaximisationduprofit.Mais,n’étantpas économiste,ilnenousditpascequeseraituneéco-nomieislamiquevéritable.

Or,quelqu’unalemérited’avoirréfléchiàcequedevraitêtre l’économie islamiqueau20ème siècle. Rarementcitéhorsdumondechiitedontilestissu,il est pourtant un penseur d’une envergure rare. Sonouvrage,“BanquesansusureenIslam1”publiéen 1961 est lepremier livre exposant commentunebanquemodernepourraitopérersansutiliser l’intérêtsur lamonnaie.Mais,dans lapréface, il prévient: “Immergée dans une société dans laquelle lesystèmecapitalistedirigelafinance,lespenséesetlamorale...,unebanques’interdisantl’intérêtnepeut espérer produire tous les effets qui résulte-raientd’unesociétéislamique.”Pourcela,ilfaudraitquel’Etatimposeunordreéconomiquetelqu’ilestexposédansIqtisaduna,(Notreéconomie)dumêmeBaqiral-Sadrpuisquec’estdeluidontils’agit.

Dans “Notre économie”, Baqir commence par analyser le communisme puis le capitalisme. Ille faitenphilosophe, lisant les texteset lescriti-quantd’unpointdevuerationnel.Ilreconnaîtdesméritesauxdeuxidéologiesdominantsonépoqueet notammentunecertainejusticesocialedanslespays communistes et une grande prospérité matérielle danslespayscapitalistes.PuisBaqirproposeuneéconomiepolitiquebaséesurlessourcesislamiqueset alternatives au capitalisme et au communisme. Aufondementdusystème,setrouveleprincipedu califat,c’est-à-direque l’HumanitéestvicairedeDieu,nonpas“maîtreetpossesseurdelanature”comme chez Descartes mais gestionnaire de ressources provenant de Dieu. Cette vision du mondes’opposeàlavisioncapitalisteselonlaquellele droit de propriété individuelle primerait tous lesautresdroits.Enéconomieislamique, lesres-sourcesnaturelles:terre,matièrespremières,eau,fauneetfloreappartiennentàl’ÉtatislamiqueentantquevicairedeDieu.Cesressourcespeuventêtre exploitéespardesindividusàconditionquecetteexploitationservel’intérêtgénéral.

1 Al-Bankal-laRibawifial-Islam(Usury-freeBankinginIslam)

Pourillustrerlaportéeconcrètedecettepropositionquin’estpaspropreàl’Islam,rappelonsquec’esten vertu de ce principe de propriété collective que le premier gouvernement démocratiquement élu d’Irananationaliséen1952lepétroleiranienjusquelàdanslesmainsdel’Anglo-IranianOilCompany(AIOC),aujourd’huiBritishPetroleum(BP).Cegou-vernement,dirigéparlenationalisteMossadegh,futrenverséparuncoupd’EtatfomentéparlaCIAetleMI5britanniqueetfinancéparl’AIOC.Legouverne-mentdusocialisteSalvadorAllendeauChilinatio-nalise les ressources du sous-sol en 1971 et Allende meurten1972lorsd’uncoupd’Etatsoutenudirec-tementetouvertementparlesEtats-Unis.Onvoitque sur cette question de la propriété des ressources naturelles,Baqirsedémarquenettementducapita-lisme au nom des principes islamiques.

PourBaqir,lesproblèmessocio-économiquespro-viennent,nondelararetédesressourcesinsuffisantesàsatisfairelesbesoinsdetous,maisdelamauvaiseconduitedel’homme,desoncaractèreoppressifetdu gaspillage des ressources. Le fait qu’un homme sursept,soitunmilliarddepersonnes,soientmalnourris,queneufmillionsenmeurenttouslesans,soit25.000parjourdontunemajoritéd’enfants,alorsqu’enmêmetemps1,4milliardsd’adultessontensur-poidsdont500millionsd’obèses2,sembledon-nerraisonàBaqir.Lasolutionislamiquequ’ilavancea trois composantes :

1. Mettreuntermeàl’oppressiondueàl’injusterépartitiondesressourceséconomiques,

2. Discipliner lanaturehumainepourcontrôlerl’amour de soi et

3. Utiliserlesressourceséconomiquespoursatis-fairelesbesoinsdetous.

Selon l’économie islamique, la richesseproduiteappartientàceluiquitravailleetnonauproprié-tairedesmoyensdeproductioncommedansl’éco-nomie capitaliste. C’est ainsi que la farine appartient aupaysanquiarécoltélesgrainsetnonaumeu-nier. Le capital est un stock de travail accumulé. Il ne reçoit pas de rémunération en vertu de l’interdic-tionduriba’(l’intérêt).Ilestassociéauxprofitsetauxpertes.L’outillagereçoitunloyerservantàcou-vrirl’amortissement.Ilneparticipepasauprofit.Letravail est rémunéré par le salaire pour la quantité detravailfournietparunepartsurleproduitfinietdoncsurleprofit.

Toutefois,lasourcedel’injusticeneprovientnidumodèlesocial,nidelapropriétédesmoyensdepro-duction,maisdel’amourdesoiquipoussel’Hommeàassurersasurviepourluiseul.

2 VoirJeanFeyder“Lafaimtue”L’Harmattan2011

DossierQu’entend-on par économie islamique ? – Jean Luc Karleskind

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C’est l’expressionde l’instinctde survie, essen-tielpourlapréservationdelaviesurterre.Onleretrouvedanslarechercheduprofit,manifestationéconomiquedel’amourdesoi.Celainciteautravail,audépassementdesoi.Mais,leprofitsanscontrôlemoralmèneàdifférentesformesd’oppression.Danslesystèmecapitaliste,c’estl’exploitationd’autruietl’accaparement des ressources par la propriété. Dans lesystèmecommuniste,c’estl’oppressionpolitique,laluttepourlepouvoiretl’obtentiondeprivilègeset de passe-droits. Baqir pense que seule la religion peut canaliser la nature humaine car on ne peut la changercommelecroyaientlescommunistes.

Lareligion,etdonc l’IslampourBaqir, introduitdiversmécanismesdu contrôlede soi.D’abord,l’Homme en tant que vicaire de Dieu sur terre est res-ponsabledesesactesyincluséconomiques.Ensuite,surlabalancedivine,l’usure“gainmatérielappa-rent”estenréalitéuneperte.L’aumôneoulazakat“apparentepertematérielle”estungain.Puis,l’Is-lamdétestelegaspillage.Lapiétécontrebalancelanaturecompétitivedel’Homme.EnIslam,lafor-tunematériellen’estpasunbutmaisunfardeau.Lemusulmanviseauservice.Enfin,lathésaurisa-tionestfortementdécouragée,socialementetfiscale-mentparlazakat.Enbref,l’Islamviseàchangerlesvaleurssocialesliéesàlapossessiondelafortuneetde la propriété privée.

LedéveloppementéconomiqueprônéparBaqirestsimilaire au capitalisme mais avec une approche dif-férente.Lecapitalismepromeutlamaximisationduprofitindividueletdelapropriétéprivéesanslimite.L’économieislamiquemaximisel’utilisationdesres-sourcesdanssoncadredethéoriedeladistributiondelarichesseetdesesprincipesdejustice.Danslecadreislamique,l’Étatjoueunrôlecentraldedirec-tion de l’économie. Tout revenu non lié au travail est aboli.Lathésaurisationestdécouragéeparlazakat,unimpôtsurlafortunelevésurtous,musulmansounon,quin’estpasoptionnelcontrairementàl’au-mône(sadaqa).Auniveaudesvaleurs,l’Étatencou-ragelasobriétéquin’estpaslapauvreté.

Levicariatn’estpasdonnéàl’individumaisàl’hu-manité.Donc,pourassurer lapaixet l’harmoniesociale, lesbiensdoiventêtresouslaresponsabi-litécollective.L’Etatestleprincipalpropriétaire,carpropriétairedesressourcesnaturelles.Ilfixeladirec-tiondel’économieendonnantauxindividusledroitdepropriétépourunbutsocial.

Enfin,l’Etataunefonctionderedistribution.Eneffet,lesressourceséconomiquesnesontpasdistribuéesuniquementenfonctiondutravailetdesfacultésàproduiremaisaussienfonctiondesbesoins.Ilestdelaresponsabilitédel’Etatdesoutenirceuxquinepeuventproduiresuffisammentouquisontinaptes

àtravailler.Ildoitdoncleurassureruneviedigneet pas seulement le minimum vital. Tout en recon-naissantlesdifférencesderevenusentrelesgens,l’Étatislamiqueapourbutlaprospéritédetouslescitoyensenassurantuneviedigneàchacun.C’estplusoumoinsladéfinitiondel’État-ProvidencemisenplaceenOccidentaulendemaindelasecondeguerre mondiale et en voie de démantèlement dans l’èrenéo-libérale.

OnvoitqueBaqirdéveloppeunevisiondumondevisant àdonnerdes réponses auxproblèmesdenotretemps.Cetteoeuvremajeuresurl’économiefaitsuiteàFalsafatuna,(Notrephilosophie),publiéeen1959alorsqueBaqiravaitàpeine24ans.Engagépar la suite enpolitiquedans l’Irakde Saddam Hussein, cedernier le fit exécuterenavril 1980. Ilsembleraitquecefutparenfoncementàcoupsdemarteaud’uncloudanslatêteaprèsavoirfaittortureretexécuterAminaBaqir,lasoeurdusupplicié,soussesyeux.Acetteépoque,SaddamHusseinétaitle championde l’Occident etdespétromonarchiesduGolfe.Avecleursoutienfinancieretmilitaire,Husseinétaitsurlepointd’engagersonpaysdansune guerre de huit ans contre le voisin iranien. Les Iraniens avaient eu en effet la mauvaise idée de chasserdupouvoirMohammadRezaPahlavi,Sha-hinshah,roidesrois,restaurésurletrôneen1953parlecoupd’EtatdelaCIAetduMI5.Baqirétaitdanslemauvais camp. Il fallait l’éliminer.

Pourquicourtise lespétrodollarsaccumulésparles paysduGolfe avec des produits de finance islamique,iln’estdoncpastrèshabilederemuercesvieilleshistoiresd’économieislamique.Onpréfèreradoncseconcentrersurlatechnique,lesmotsarabes,lesShariaboards.Lesbanquiersycroient,oufontsemblant.Legrandpublicn’estpasdupe.Ramadanserait-il dans le vrai quand il parle de perversion de lafinanceislamique?

Par Jean-Luc Kalerskind.

DossierQu’entend-on par économie islamique – Jean Luc Karleskind

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Avant d’aborder son impact sur le développement et la promotion de la FI : En quoi consiste le concept ou modèle d’économie islamique ? Quelles sont les points qui la caractérisent ?

Toutd’abordjevousremerciedem’avoiraccordécetteoccasiondem’exprimerdanscenumérodel’IfsoMagetjevoussouhaiteboncourageetbonnecontinuation.

Parlerd’économie islamiqueoude finance isla-mique,surtoutenoccident,ilyaquelquesannées,étaitunesorted’utopieoumêmed’hérésieintel-lectuelle.Lesparadigmesdusystèmecapitalisteconventionnel n’acceptaient pas une approche diffé-rente.Pasd’économiesansbanquesnibanquessansintérêt.Telleétaitl’axiomefondamentaldusystème.Orlathèsedel’économieislamiqueetdesavariante lafinanceislamiqueestfondéesurdesparadigmesopposés.Ilfallaitjustedeuxdécenniespourinfirmercettethèseconventionnelleetconfirmeruneapproche totalement contradictoire. Le système bancaire islamiqueestdésormaisdevenuunfaitirréfutable.

Basé sur des postulats tout à fait différents, l’approcheislamiquedel’économieetdelafinancefaitnaîtreuneattentiontouteparticulièreduplusgrandnombre.Onparleainsideplusieursnotionset concepts tels que l’ « économie islamique », le«systèmeéconomiqueislamique»,dela«doc-trine économique islamique » oumêmede la «scienceéconomiqueislamique».Chaquenotionetconcept a ses adeptes et ses penseurs contemporains. Mais parler d’un modèle purement islamique de l’économie est assez prématuré. Il reste cependant àconstruire.Pourlaplupartdesadhérentsdecettethèse c’est un chantier en cours de construction. Les travauxavancentparallèlementaveclespratiques.

Danscecadreconceptuel,l’économieislamiquepeutêtreconçueentermesde:• Doctrine économique.• Scienceéconomique.• Systèmeéconomique(économiedemarché).

Mais la définition la plus adoptée est celle qui rallie l’économie islamique à une économie de marchéadosséeàdesactifsréelsoùlapratiquedel’intérêt,latitrisationdescréances(financiarisationdesdettes)etlaspéculationàdécouvert(laventedecequel’onnepossèdepas)sont,entreautres, formellement interdites.

Cette économie islamique se distingue par des caractéristiques principales dont les plus impor-tantes sont :

• Le fait qu’il s’agit d’une économie fondée sur la conciliationentrel’ÉconomiqueetleReligieux.

• Une économie qui se base sur deux axes parallèles:àlafoisl’axelucratifetl’axenon-lucratif.

• Uneéconomieéthiqueoùlamoralejoueunrôledistingué dans toute l’activité économique : production, consommation, distribution, commerce.

Danscesens l’économie islamiqueestbeaucoupplus largeque la finance islamique.Elleenglobeaussibienlasphèredelafinanceislamiquequebiend’autres sphères telles que la sphère non lucrative qui comprend le système de la Zakat, le systèmeduWaqf, du Takaful, de la production, de la consommation,del’industrieduhalal,del’industriedutourismealternatif«éthique»,etc.…

M.MohamedNOURIestéconomisteetexpertenfinanceislamique,professeurenéconomieislamiqueetfinanceislamiqueàESSECTunis(EMBAFinanceIslamique)etàl’IESHParis(Masterétudesislamiquessupérieures),Gérantd’AbrarFinanceConsulting(cabinetdeformationetdeconseilenfinance isla-miques),formateuragrééparleCIBAFI(conseilgénéraldesbanquesislamiques)àBahreïn,membredela commissionFinanceIslamiqueàParisEuroplaceetMinistèredesfinancesFrance,MembreduComitéfinanceislamiqueduministèredesfinancesTunisie,PrésidentduCOFFIS(ConseilFrançaisdelaFinance Islamique),formateurdecadresbanquiers(systèmebancaireislamique)auprèsdeplusieursbanquesenTunisie,Algérie,Maroc,Sénégal,Mali...

Diversarticlespubliésenarabeetenfrançaisdontàtitred’exemple:

- Lesprincipesdelafinanceislamiqueauservicedel’économiemondiale- L’économie islamique: une économie sans dette- Labanqueislamiquededéveloppement:del’accumulationducapitalaudéveloppementsocial.

DossierLa nécessité d’un modèle économique islamique pour le développement et la

promotion de la finance islamique - Interview de M. Mohamed Nouri

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En quoi l’économie islamique pourrait être le moteur du développement de la finance islamique ?

Aprèsundemi-siècleenvirondepratiquebancaireislamique,ilestsansdouteindispensabledefairelepointetétablir lebilandecette, siattrayante, expérience. Le bilan n’est certes pas mitigé malgré l es prob lémat iques qui ex i s tent . La réussite est remarquable mais d’énormescontraintesseposentetconstituentdevraisobstaclesàl’évolutionetl’extensiondelafinanceislamique.

Pour cette raison le véhicule de cette finance islamique a besoin d’unmoteur, une sorte de propulseur et de tremplin permettant le décol-lage avec un nouvel élan et vers de nouvelles perspectives et espaces variés. Ce moteur ne peut êtrequelecadredel’économieislamiqueavecsesdifférentes composantes. Certains trouvent que la financeislamiqueestcomparableàunoiseauquinepeutsurvolerqu’avecdeuxailesetuncorps.Lesdeuxailessontlesecteurbancaireetlesecteur assurances. Le corps n’est autre que l’économie islamiqueobservéesurtoutentermesdesystèmeouéconomie de marché islamique.

La finance islamique fait face aujourd’hui àdes problématiques sérieusesquipeuvent freiner sacroissance et barrer son attractivité. L’absenced’unmarchémonétaireislamique,d’unvraimar-chédecapitaux,d’unebanquecentralepartenaire,d’un systèmenormatifplus solide etplus cohé-rent,d’unegouvernanceplusperformanteetplusfidèleauxfondementsetprincipesdebasequiviseau-delàde la conformitéune finalité innovante, d’un capital humain plus important et surtout plus efficient et d’une assise éthique beaucoup plus partagée. Bref, d’un système adéquat avec ses principes et ses mécanismes de fonctionne-mentincluanttouteslesactivitésliéesàlasphère financièredansunmarchéquiadhèreauxmêmesprincipes.

C’est dans ce sens que la promotion de la finance islamique ne peut réussir que dans ce cadre générald’uneéconomieislamiquequis’adresseàtoussansaucuneexceptiondecaractèreethnique, religieuxouautre.Unsystèmeplutôthumanitaireque communautaire,inclusifetnonexclusif,équitableetnoninjuste,participatifetnonmonopolistique.

Selon vous, quels sont les moyens et facteurs de développement de l’économie islamique ?

Cinqfacteursprincipauxmesemblentdéterminantsde la réussite et du développement d’une économie islamique :

• Une volonté pol i t ique entreprenante : l’environnement politique dans lequel une économie islamique peut fonctionner et se développer doit être un environnement favorable oudumoins pragmatiquequineporte aucune intransigeance ou intolérance de caractère éthique, religieuxoupolitique. L’Indifférence politique dans le domaine économiqueetfinancierestprimordialecarelle permetlamobilitédelarichesse,l’attractiondesfonds,l’optimisationdesintérêtséconomiquesetdes avantages collectifs.

• U n m o d è l e é c o n om i q u e a d a p t é : l’économie islamique a besoin d’unmodèle appropriéquiintègretouteslesvarianteséthiques, financières,socio-économiques,endogènesetexogènes,danslequelunesynergieexisteentrelesdiverssecteursdel’activitééconomique,en l’occurrencelesecteurpublic,privé,lesecteur mixte(PPP),lucratifounonucratif.Untelmodèle estdésormaisunchantierquiresteàconstruire. Certains considèrent qu’il est en cours de construction,d’autresnelevoientpasencore,maisentoutcassanécessitéestindiscutable. Les initiatives existantes portent sur des secteursoudesapprochesspécifiques(modèlesde l’assurance islamique Takaful, modèle du systèmezakataire,modèledusystèmeWaqf,modèledusystèmebancaire,etc…)maiscequimanqueencoreestuntravaildemodèleglobalincluant toutes ces initiatives ainsi que d’autres dans un cadre de référentiel islamique.

• Un e a s s i s e é t h i q u e a u t h e n t i q u e : lerôledelamoraleetdel’éthiquedansunsystème économiqueestdevenu,sansaucuneéquivoque,une revendication internationale. On parleaujourd’huisansréticencedecommerceéthiqueou commerce équitable, deproduits bioqui respectent certaines éthiques largement partagées par des populations diverses, de produits labellisés « halal » dans divers secteurs:alimentaire,cosmétique,pharmaceu-tiqueoumédical,touristique,logistique,etc…Cettedynamiquevadans lemêmesensavecl’économie islamiquequiestcenséeêtreuneillustration pratique d’une économie éthique. L’économie islamique est un modèle essentiel-lementéthiquequiaccordeàlamoraleetauxvaleurs une place particulière.

• u n e a s s i s e f i n a n c i è r e a d é q u a t e : laphilosophieislamiquedelafinanceestfon-dée sur une approche de corrélation et de connexioninterdépendante.Contrairementàla conceptionconventionnelle,lafinancedoitêtreliéeàl’économieetdoitlaservirconstammentpouratteindrelesobjectifsassignésparlasociété.

DossierLa nécessité d’un modèle économique islamique pour le développement et la promotion de la finance islamique - Interview de M. Mohamed Nouri

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Cequiestconstatéaujourd’huidanslemondedelafinanceinternationaleesttotalementl’opposé:toutel’économieestauservicedelafinanceetcelle-ciestdominée par la spéculation et l’enrichissement sans cause.Lafinanceislamiqueavecsesacquisdurantledemi-sièclepassé estun facteur favorable au développement de l’économie islamique.

• U n c a p i t a l h u m a i n q u a l i f i é : Enréalitélefacteurhumainestprimordialàlafoisaudéveloppementdelafinanceislamiqueet de l’économie islamique en général. Tous lesacteursdelafinanceislamiques’accordentsur le fait que la formation des compétences et d’uncapitalhumainqualifié,estaujourd’huil’undesenjeuxcritiquespouraccompagnerledéveloppement de cette industrie. Le secteur se développeeneffetplusvitequesacapacitéà former des experts. La finance islamique abesoindespécialistesetd’expertsdelafinance,qui doivent également disposer ou acquérir unetrèsbonnecompréhensionduréférentiel islamiqueLedéfidevientplusimportantsionviselamiseenplaced’unsystèmecompletd’uneéconomieislamiquecarchaquesecteur,chaquebranche,chaqueactivitééconomiquenécessi-tera une attention particulière en matière de formationetdequalification.

C o m p t e t e n u d e l ’ i n t é r ê t d e c e r t a i n s gouvernements occidentaux vis-à-vis de la FI pour attirer des capitaux et favoriser leur croissance, le développement de la FI est-il seulement dépen-dant d’un modèle islamique de l’économie ? L a F I p e u t - e l l e t r o u v e r é g a l e m e n t s o n accroissement dans un système conventionnel ?

L’économie islamique est un domaine d’étude récent, qui n’a pas encore atteint le niveau de sophistication de l’économie conventionnelle. La stratégie de modélisation de cette économie a biendémarrédepuisquelquesannées.Enparallèleàlaconstructiond’unethéoriedel’économieisla-mique,uneconcrétisationmarquantedecettepen-séeaétédansledomainedelafinanceislamiqueet part icul ièrement les banques is lamiques , lesassurancesTakaful, lesmarchésdecapitaux, l’industriedu«Halal»,lessystèmesàcaractèrenonlucratiftelsquelaZakat,leWaqfetc...

Cependant tous ces chantiers se déploient et progressent dans une économie encore large-ment dominée par les paradigmes conventionnels. Ellecohabiteavecunsystèmequiest,sommetoute,en contradiction avec ses principes directeurs.

La question qui se pose est que si cette intégration de lafinanceislamiqueetlesautressecteursenparal-lèle dans une économie conventionnelle peut lui

permettre ou non d’atteindre ses objectifs et confronter les contraintes et lesproblématiquesqui se posent.Une cohabitation avec la finance conventionnelle est-elle possible, ou encore nécessaireafinderéaliserlesfinalitéséconomiqueset sociales de l’économie islamique dans le sens de maqasid de la charia ?

Laréponsenesemblepasévidenteetsimple.Jusqu’àprésentlacohabitationfonctionnedansplusieurscasetexpériencesqualifiéesderéussiesdansunmodèlehybrideavecl’économieconventionnelle.Maisenmêmetempscettesituationnepeutpasperdurersansentacherlesprincipesdebaseetporteratteinteàlacrédibilité.

D’oùl’impérieusenécessitéd’élaborerunmodèle,une sorte de cadre général fédérateur de toutes les composanteséconomiques,financièresetsocialesdel’économieislamique.Celadit,rienn’empêcheune vraie cohabitation entre les deux systèmes conventionneletislamiquevoirmêmeunecertainesynergiesanspourautanttoucherauxparadigmesde chacun.

Cettecohabitationestplutôtnécessairepourl’uncomme pour l’autre. Historiquement parlant,une telle situation a été un point marquant de la civilisation musulmane en relation avec les autres civilisations.

Il faut soulignerqu’unecohabitationentredeux systèmes,deuxmodèles,sedistingued’uneintégra-tionouuneadaptationdelafinanceislamiqueparrapportàl’économieconventionnelle.

Compte tenu des valeurs universelles que la FI véhicule son développement n’est-il pas dépendant d’une volonté de changement universel pour supplanter un modèle économique à bout de souffle et totalement étranger des défis auxquels le monde est confronté aujourd’hui (écologie, santé, emploi, sécurité alimentaire)?

Justement, lanécessitéde construireunmodèlepropreàl’économieislamique,estplusquedouble:

• D’unepart, unenécessité interne aumondemusulman qui aspire au décollage et au développement économique, un décollagerecherché et attendu par ces populations depuis plus d’un demi-siècle.

• D’autrepart,unenécessitéhumaineetuniver-selledansunepériodeoùlesystèmeconven-tionnelestàboutdesouffle.Unsystèmequiadémontrésadéfaillanceàmaintesreprisesetquinécessitecommeaexprimésesleaderspoli-tiquesetéconomiques,unerefontetotale.

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Cetterefontecoïncideaveclaferveurqueconnaîtl’économie islamique et ses principes directeurs quisont,commeleconfirmeplusieurstémoignagesoccidentaux,logiques,debonsensetnotammentéthiquesetsocialementresponsables.

Le monde est en quête d’un nouveau modèle économiqueplushumainetplusjuste.L’économieislamiqueàtraverssesvaleursuniversellesetsoncaractèreinclusifpeutjouerunrôlenonnégligeabledans ce chemin.

Parmi ces valeurs universel les , f igure la solidarité économique, la responsabilité sociale, lacompétitivitéloyale,lepartagedesrisques,despertesetdesprofitsetlaconnexionstricteàl’économieréelle.Autrementdit,refonderuneéconomiebaséesurlesressourcesàlaplaced’uneéconomiebasée fondamentalementsurladette.Uneéconomieréelleet non virtuelle.

Laréférenceàl’Islamenmatièreéconomiquen’ajamais étéune contrainte.Au contraire, tout aulongde la civilisationmusulmane, les échanges commerciaux et économiques ont joué un rôle important dans la coopération et le rapprochement entre les peuples.

Al’heureactuelle,lafinanceislamiqueestaussibienadoptée par des populations non musulmanes que musulmanes(Malaisie,Grande-Bretagne,Indonésie,Inde,Afrique,etc…).

Dans le monde dans lequel nous vivons, où se situe l’économie islamique? Quel est son poids au niveau mondial ? Le fonctionnement économique des pays musulmans est-il basé à proprement dit sur un modèle islamique? À l’inverse est-il plutôt un modèle « occidental » ou hybride?

Aujourd’hui, lemodèle économique islamiquen’existepasentantquemodèlemaisilcommenceà surgir en tant que composantes dumodèle(Banques, Assurances, Fonds d’investissement,Industrieduhalal,secteurnonlucratif:Zakat/Waqf,etc..).C’estunpasinsurmontableverslaconstruc-tiondumodèle.Aucunpaysn’estarrivéàmettreenplace un modèle complet inclusif de toutes les activi-tés,touslessecteursettouslesparamètresmicroet macro-économiques. Des initiatives ont commencé spontanément sans pour autant se fonder sur un modèle théorique et opérationnel adapté. Mais elles restentcependantsoit isolées (Soudan, Iran)soitinachevées(Malaisie, Indonésie,certainspaysdel’orient).

Ces expériences fonctionnent soit selon unmodèlehybride, soit à l’occidentale.Des efforts remarquablessontfournisparlaBanqueIslamique

de Développement dans une vision stratégique d’aboutirjustementàcettefinalitésuprêmeàsavoirl’élaborationd’unmodèleéconomiqueseréférantauxvaleursuniversellesislamiquesetquiaspireàdevenirunprojethumanitaire.

Certains détracteurs pensent qu’il ne peut y avoir de système financier islamique tant que l’on utilise des monnaies telles que le Dollar ou l’Euro, que leur répondriez-vous ?

Certes lamonnaiedemeureaujourd’hui lepivot central de l’économiemondiale, la grande roue chargéededéplacerlesrichessesselonl’expressionmêmed’AdamSmith.C’estpourquoi,lamonnaienedoitpasdevenirl’objetdel’échangeensoi.Elledoitresterunmoyend’échangeetuneréservedevaleur.Lacrisequeconnaîtlesystèmeconvention-nelàl’heureactuelleestdueengrandepartieàcedétournementdelafonctiondelamonnaieetdurôledelafinance.Lebutessentieldelamonnaieetdelafinanceestdefaciliteretdepromouvoirl’échangeet les activités de l’économie réelle.Or avec la prédominance du modèle d’une économie de dette,letauxd’intérêtestdevenul’undesfacteurs importants de déstabilisation dans l’économie capitaliste. Il est responsable du comportement erratique sans précédent de l’économie mondiale. Ni un taux faible, ni un taux fort, ne semblent stimuler la croissance et favoriser la stabilité. Paradoxalement,aulieudepréserver lafonction initialedelafinanced’êtreauservicedel’écono-mie,toutel’économiemondiales’esttransforméeenunoutilauservicedelafinanceetlesspéculateurs boursiers.

Il est donc temps de repenser la finance et changerdemonnaiemondiale.Déjà les revendi-cations dans cette perspective se multiplient et s’accroissent. L’économie islamique ne peut que confirmer cette défaillance et adhérer à cette revendication.

Propos recueillis par M. Beldjoudi et K. Bahroune

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You are the Managing Director of Al Rayan Bank, could tell us more about your career in the Islamic finance industry?

I was appointed to the newly-created post ofChiefExecutiveOfficer (CEO) in June2014after successfullyoverseeingtheBank’sacquisitionbyMasrafAlRayanQSC(AlRayan),aQatar-based Islamicbank.Thisfollowed3yearsasManagingDirector(Interim)oftheBank.Theappointmentalsorecognized our achievements including delivering yearonyeargrowthincustomerbase,depositsandassetssincetheBankbegan.

IBBiscelebratingits10yearanniversarythisyearand I am the Bank’s longest-serving employee. IjoinedIBBwhenitwasformedin2004andhavesincesetuptheBank’sHeadOfficeoperationsandBranch Network. I have also led the development and implementation of IBB’s full product range and servicedeliverychannels.Asaresult,theBanknowoffers the largest range of Islamic retail financial productsintheUKandhasattractedover50,000 customers.

AsCEO,IamnowworkingwithIBB’snewparentcompany,MasrafAlRayanQSC(MAR)todeliverastrategydesignedforgrowthandprofitability.Futureplansconsistofexpandingpropertyfinanceto businesses, including development finance.IBBaimstobroadenitsappealandcustomerbase fur ther , encompass ing both Musl im and non-Muslim professionals. The Bank will also expanditsservicesforGulf-basedcustomerslookingtoinvestintheUK.

PriortojoiningIBB,IheldrolesatCharlesSchwabEurope,BarclaysPrivateBankandDeloitte.IamaCharteredAccountant,holdaBachelorofArtsHonoursDegreeinEconomics&EconometricsandaMastersinBusinessAdministration(MBA)with distinction.Iamalsoactivelyinvolvedinvariouscommunity and Government advisory groupsto help the continued development of the British IslamicFinancialServicesindustry.

We know that IBB changes his name to become Al Rayan Bank, could you explain to our readers what were the reasons of this rebranding?

IBBbecamepartofMasrafAlRayanQSC(MAR), thefifthlargestIslamicbankintheworldandthesecondlargestbank(bymarketcapitalization)inQatar,inJanuary2014.ThechangetoAlRayanBankrepresentsthelatestchapterintheBank’shistory,inwhichitwillexpanditsretailandcommercial product offering to awider audience,with the backing of a strong and successful parent. Importantly,theBankwillpreservethespiritofIBB,remainingaBritishIslamicbankdedicatedtostrong,faith-basedethicsandgreatcustomerservice.

AsAlRayanBank, the long termstrategy is forgrowthbybuildingupon itsown, aswell as itsnewparent’s,strongfoundations.Withourcapitalgrowing to£100million following investment from MAR,theBankhasbeguntostrengthenitsproductofferingandwidenitsappealtoabroaderrangeofcustomers.

In1994,ChoudhurygraduatedwithaBA(Hons)inEconomicsandEconometricsfromtheUniversityofNottingham.HisinterestinIslamicfinancebeganatthistime.In2001,hegraduatedwithdistinctioninMBAfromAstonBusinessSchool.

Afterqualifyingasacharteredaccountant,hisdesiretoenterthefieldofIslamicfinancebecameclearwhenhewentonHajj(thelargestIslamicpilgrimagetoMecca, SaudiArabia)in2002.

From1994to1998,ChoudhuryworkedinAssuranceandAdvisoryPracticeatDeloitte&Touche.From1998to2003,hewasDirectorofbrokerageoperationsatCharlesSchwabEuropeandBarclaysPrivateBank.

InJanuary2004,ChoudhuryjoinedthefoundingmanagementteamoftheIslamicBankofBritain(IBB),thefirstdedicatedIslamicbankintheWest.Hewasappointed CommercialDirectorinJune2007.HesetuptheIslamicBankofBritain’sHeadOfficeOperationsandBranchNetworkandhasledthedevelopmentandimplementationofthebank’sproductrangeandservicedeliverychannels.

ChoudhuryisamemberofvariousCommunityandGovernmentadvisorygroupsandhascontributedtothedevelopmentofIslamicFinancialServicesintheUnitedKingdom.HeisaCharteredMemberoftheCharteredInstituteforSecurities&Investment (forwhomhesitsontheEmployerPanelfortheIslamicFinanceQualification).

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TheseincludeUK-basedbusinessfinancecustomers,individualsfromtheGulfseekingbankingservicesandfinanceintheUK,andnon-MuslimUKretailcustomers.

TheunionbetweenMARandIBBhasenabledtheBanktoretain itscorevalueswhilstboosting itscapabilitiesinordertoachievesignificantbusinessgrowth.

Does it mean, that the term “Islamic” will gradually erase in the industry?

IBB ischanging itsname toAlRayanBank,andevolving to widen its target audience and offering. However,itstillremainsanIslamicbankofferingShariacompliantfinanceandintendstopreservethe spirit of IBB. This means that it remains a Bri-tishbankdedicatedtostrong,faith-basedethicsandgreat customer service.

Sinceitsinceptionin2004,IBBhasattractedover50,000customers,includinganincreasingnumberofnon-Muslimcustomers,drawntoitsmarket-lea-ding profit rates and great customer service. The Bank’s Islamic foundations have not deterred these non-Muslimcustomers,whoareultimatelyseekinggoodvalue,fairtreatmentandethicalbehavior.

By changing its name, therefore, IBB is simply reflecting thebeginningofanewchapter in theBank’shistoryinwhich,asAlRayanBank,itwillcontinuetopioneerShariacompliantbanking,andgrowfromtheexcellentfoundationsthathavebeenlaidoverthelast10years.AsAlRayanBankwewillhaveareachultimatelybeyondBritainaspartofanambitiousglobalgroup.

Al Rayan Bank’s activities will continue to be monitoredbyanindependentShariaSupervisoryCommittee and a dedicated Sharia compliance officer. Itwill alsocontinue tooperateasaUK regulatedbank,andcustomers’depositswillremainprotectedbytheFinancialServicesCompensationScheme.

What are the main challenges you face?

The main challenge IBB has faced over the last 10 years is the lack of understanding amongst consumer s abou t how I s l ami c bank ing productswork.IBB’smarketingefforts,throughboth traditional,aswellasincreasinglythroughonlinemeans,havebeenworkinghardtocombatthis.

The investment in improving awareness and understanding has helped IBB overcome this challengetoasignificantdegree,thoughthereisstillmuch to do.

However,progresshasbeendemonstrated fromthe findingsofan independent,nationalsurvey,whichwasconductedinAugust2013.Thesurveywasconducted,throughtelephoneinterviews,by independentresearchcompany,EuropeonbehalfofIBB. It looked into British consumers’ understanding of,andattitudestowards,Islamicfinance.

300 British Muslim and non-Muslim consumers across the UKwere questioned: a third of all respondents(i.e.100)werenon-MuslimandathirdofallrespondentswereacombinationofMuslimandnon-MuslimcustomersofIBB.Keyresultsinclude:

• 66%ofthosesurveyedfeltthatShariafinanceisappropriateinamodernwesternsociety,suchastheUK

• 65%understoodthatthewayIslamicbankingworksisdifferenttothewayconventionalban-king works

• 60%agreedthatSharia finance isrelevant toallfaiths(N.B.withinthisfiguretherewasno significantdifferenceinattitudesbyindividualsofdifferentfaithswiththemajorityofnon-Mus-lims surveyed–57%–agreeing that IslamicfinanceisrelevanttoUKconsumersofallfaiths)

• 81%ofIBB’scustomersarelikelytouseShariacompliantfinanceagain;theresultsbeingthesame for Muslim and non-Muslim customers

Aspecificfocusonthe200Muslimcustomersandprospectivecustomerssurveyedshowedthat:

• 36% of Musl ims current ly use Shar ia compliantfinance,ofwhich9%useitexclusively

• Afurther45%ofMuslims,whodon’tcurrentlyuseShariacompliantfinance,areverylikelytoconsider doing so in the future

• Combined, therefore,81%ofMuslimseithercurrentlyuseorwouldconsiderusingIslamicfinance.

Thefindings,therefore,revealedahighlevelofsup-port for Islamic financeamongstUKconsumers,bothMuslimandnon-Muslim.

Anadditionalchallenge,whichallUKIslamicBankssufferfrom, is lackofscaleastheyarerelativelynew.Astheirmarketsharegrows,alongwiththeirbalancesheets,weshouldseethembecomemoreofachallengetomainstreambanking.

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How do you see the development of the retail Islamic financial market in U.K?

Fromaregulatoryperspective,theUK’sstancetodatehasbeentocreatea ‘levelplayingfield’ for Islamic Banks, rather than providing any advantage for them. This approach has meant that theUKGovernmenthassteadily‘levelled’thelegal,regulatoryandtaxenvironmentforIslamicBanks.ThenatureofthissupportisfarinadvanceofanyothercountryintheEuropeanUnion.

The Treasury and other UK Government departments have recognised the growing importance of Islamic finance.DavidCameron,PrimeMinister, at theWorld Islamic EconomicForuminLondoninOctober2013announcedhisambitiontopositiontheUKasthewesternhubforIslamicfinance,alongwithanumberofmeasurestosupportthisobjective.

SincethentheUKGovernmenthasissueda£200millionSovereignSukuk, theworld’s first tobelaunched outside the Islamic world.

Importantly too, for the retail Islamic finance market,theGovernmenthasintroducedanumberof init iat ives aimed at widening consumers’ accessibility to Sharia compliant retail financial products.

For example, earlier this year the GovernmentextendeditsHelptoBuyschemetoincludeShariacomplianthomefinance.TheHelptoBuy:HomePurchasePlanGuaranteeschemewaslaunchedinFebruary2014,andwasdevelopedbytheTreasurywith support from IBB.

This was an important milestone for the Islamicfinanceindustryand,inparticular,Muslim consumers. It allowed themtobenefit from thesame Government support offered to consumers of in te res t -based mor tgages , g iv ing access to low-deposit home finance based on Sharia principles.

Inresponsetothis,IBBlaunchedtheUK’sfirstHomePurchasePlantobebackedbytheGovernment’sscheme.Customerscannowsecurehomefinancewithaninitialcontributionofjust10%ofthevalueoftheproperty.ThisishalftheamountpreviouslyrequiredbytheBank.

Similarly, theGovernmenthasalso initiated thedevelopmentofShariacompliantstudentfinance.Again it hasworked in conjunctionwith IBB’s ShariaComplianceandProductDevelopmentteamtodevelopasolutioninthisarea.Ifsuccessful,itishopedthiswillberolledin2016.

What would you see as areas for improvement and what would be the means to implement to achieve these objectives?

Liquidity,andtheabilityforIslamicbankstoincreasethenumberoftoolstheycanaccesstoimprovethis,isoneofthekeyareasthatneedstobeimproved.

However, this is being addressed by the UK’s regulatoryauthoritieswith the introductionofanumberofmeasures.Earlierthisyear,forexample,theGovernment issueda£200millionSovereignSukuk,whichisworld’sfirsttobelaunchedoutsidethe Islamic world.

Also,inOctobertheBankofEnglandwasreportedinthemediatobelookingintodevelopingaliquiditymanagementtoolforusebyIslamicbanks.

At thesametime,Britain’sexportcreditagency,UKExportFinance(UKEF),expectstoguaranteean Islamicbondnextyear,issuedbyacustomerofEuro-peanplanemakerAirbus[AIR.PA].

Inaddition to this, theUKGovernmentrecentlyannouncedapolicystatementknownasPS4/14.ThiswillenableIslamicbankstowidentherangeofassetstheyholdintheirliquiditybufferstoincludegovernment,centralbank,multilateraldevelopmentbank,evencorporate issuers,so longastheyareinvestmentgrade,regardlessofcountryofissuer.

All together, the initiatives are set to create an environmentwhichwill greatly benefit Islamicbanks. Forexample,PS4/14willenablethemtogrowtheirfinancingbusinessandofferevenmorecompetitive rates.

According to a recent art ic le by Reuters (http://uk.reuters.com/article/2014/11/02/uk-britain-islam-banks-idUKKBN0IM04B20141102), depending on howquicklyitmovesahead,theplanfortheliquiditymanagement tool could conceivablyputBritainahead of some Gulf countries in providing options in this area.

Do you have some advice for entrepreneurs in France who want to implement islamic finance in this country?

I t has taken over a decade to achieve a reasonableeco-systemforIslamicbankingintheUK.Forthisreason,givingadvicetoentrepreneursis challenging,asitstillverymuchworkinprogressfortheBritishIslamicfinanceindustry.

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Nevertheless, the f irst important step for entrepreneursistoprovethatthereisaviablemarketforIslamicfinancebyundertakingmarketresearchandestablishingthelevelofdemand.Afterthis,theyshouldmobilisesomecapitaltocreateafinancialins-titution.Thatcapitalshouldcomefromamixtureoflocal and overseas investors.

I t i s then important to address the f i rst regulatorychallenge,whichistocreateadepositbase.Thiswillprovidethefundingforassetproducts. ThesolutiontothismustbewithintheboundsofShariaandacceptabletotheregulators.ItmaybethatWakalabasedsavingsaccountsarethebestoption,astheyarelesscontentiousforWesternregulators.

Thenassetsneedtobedeveloped.Thiswillbeamix-tureofIslamicTreasuryassetsandthedevelopmentof a Home Finance product. Again we will have to ensurethattaxationissuesareresolvedintermsofalocalpropertytax,orStampDutyasitisknownintheUK,sothattheIslamicproductcanbetreatedasfinance.

With these building blocks, and the associated regulatorypermissions, entrepreneurswillhavethefoundationofanIslamicbanktostartfurther product innovation. It is also fundamental that there is political commitmentfromthecountry’sleadersaswellasaunifiedmovementofsupportandlobbyingfromtheMuslimCommunity.Thisshouldbecoupledwith an education programme for all the relevant stakeholders,includingpoliticians,civilservants,legislatorsaswellasthecustomerbase.

Finally, starting an Islamic bank requires the understanding that all great things start with small steps.Sowhilstallthestepsoutlinedabovemayseemquitedaunting, it is important tomobilise supportersandstartlobbyingnow.

Propos recueillis par Ezzedine Ghlamallah

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Hégire Business Club & IFSO à Dubaï le 27 octobre 2014

A l’occasionduWorld IslamicEconomic ForumayantlieuàDubaïdu28au30Octobre2014,l’IFSOa organiséunerencontre/paneldediscussionavecdes experts du domaine autour de l’Economie Islamique,FinanceetAssuranceIslamique.Présence:-AbdelwahedMoummad(EMBA2014/Présidentdel’IFSO),- FouadElHajji (EMBA2014/Vice-présidentdel’IFSO),-EzzedineGhlamallah(EMBA2013/DirecteurdeSAAFI/Trésorierdel’IFSO),-MaximeCaboch-Prigent(EMBA2013)

Université de la Finance Islamique à Tours le 08 novembre 2014

Intervention : -AbdelwahedMoummad(EMBA2014/Présidentdel’IFSO),- FouadElHajji (EMBA2014/Vice-présidentdel’IFSO),-TarikBengaraïAbouNour(Porte-paroleduChariaBoardduCIFIE),-HichamBoughanem(EMBA2013/FIConsult),-ValentineBaudoin(AvocateauBarreaudeParis-KramerLevinNaftalis&FrankelLLP),-MouradChabchoub(DirecteurDéveloppement&Partenariat–Noorassur)

L’IFSO au 10ème WIEF de Dubaï - 28/30 octobre 2014

Présence:-HichamBoughanem(EMBA2013/FIConsult),-MaximeCaboch-Prigent(EMBA2013),-AbdelwahedMoummad(EMBA2014/Présidentdel’IFSO),-HalaMekkaoui(EMBA2014/Vice-présidentedel’IFSO),- FouadElHajji (EMBA2014/Vice-présidentdel’IFSO),-EzzedineGhlamallah(EMBA2013/DirecteurdeSAAFI/Trésorierdel’IFSO)

Les activités de l’IFSO

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Université de la Finance Islamique à Villeurbanne le 08 novembre 2014

Intervention :

-AbdelwahedMoummad(EMBA2014/Présidentdel’IFSO),

- FouadElHajji (EMBA2014/Vice-présidentdel’IFSO),

-HassanNaciri(570easi),

-MalikNekka(AvocataubarreaudeLyon)

Conférence Finance, des solution innovantes au service de l’économie réelle à Paris le 17 décembre 2014

C’est sous le sceau de l’ouverture que s’est déroulé le17décembreàParisuncolloqueayantpourthème «Finance,dessolutions innovantesauservicedel’économieréelle»,organisépar l’IFSO, lachaireéthiquedeParis1,l’UniversitédeStrasbourg,etlaParisSchoolofBusiness.

Avec Mehmet Asutay (professeur à Durham University), Nasser Hideur (secrétaire général d’AlBaraka,Algérie),etFaizalManjoo(enseignantàMarkfieldInstitute),l’ouvertureàl’internationalétaitmanifeste.(…)Voirarticlesursaphirnews.com

Université de la Finance Islamique à Toulouse le 20 décembre 2014

Intervention : -AbdelwahedMoummad(EMBA2014/Présidentdel’IFSO),-NabilAbdellaoui(EMBA2014),-EzzedineGhlamallah(EMBA2013/DirecteurdeSAAFI/Trésorierdel’IFSO),-MohamedBachirOuldSass(ACERFI/enseignantàl’universitédeStrasbourg),-TarikBengaraïAbouNour(Porte-paroleduChariaBoardduCIFIE,-ValentineBaudoin(AvocateauBarreaudeParis-KramerLevinNaftalis&FrankelLLP),-KacemIbnAbdeljalil(DirecteurAdjointMarketing&Communication–ChaabiBank),-MaximeCabioch-Prigent(EMBA2013/BanquierPrivée)

Les activités de l’IFSO

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Rachid BELABBAS, Dirigeant et Fondateur d’Alardine est Consultant / Formateur en Finance de marché. Titulaire d’un Mastère spécialisé en Ingénierie Financière et d’un DEA en Analyse économique. Il a exercé plus de 10 années dans la Finance de Marché (Ingénierie Financière), opérations de marché (Back/Middle Office) et Gestion de portefeuilles.

Alardine, cabinet de recrutement et de formation spécialisé en Banque/Finance/ Assurances depuis 2011, lance Alardeen International, sa branche internationale.

Alardeen International a pour ambition :

• D’accompagner les recruteurs des secteurs de la Banque/Finance/Assurances dans le développement de leur activité en trouvant des expertises reconnues en Europe,

• De répondre aux fortes attentes des professionnels et offrir des débouchés aux candidats qui souhaitent intégrer un milieu professionnel conforme à leur projet professionnel et à leurs valeurs en terme d’éthique et de responsabilité sociétale.

Les domaines d’expertise d’Alardeen International sont : Islamic Finance, Capital Markets,

Asset Management, Risk Management (Asset/Liability Management ALM),

Corporate Finance, Insurance,

Compliance,IT (Information Technology).

Alardeen International s’appuie sur l’expertise, le savoir-faire et l’expérience de sa structure nationale Alardine dans le sourcing, la formation et le placement des candidats (formation et accompagnement de plus de 120 candidats en Banque/Finance - Certification Professionnelle AMF).

Alardeen s’est également entouré de partenaires professionnels et institutionnels de premier rang, experts et reconnus dans le domaine de la Finance islamique.

Pour en savoir plus, contactez nous : [email protected]

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Les Rendez-vous de la Finance Islamique dans le Monde

Date Evènement Lieu19-20 Janvier 2015 MiddleEastandAfricaInsuranceSummit EAU,Dubaï

25 Janvier 2015 ICIBFI 2015 : XII International Conference on Islamic Banking,FinanceandInvestment Suisse,Zurich

28-29 Janvier 2015 2nd AnnualFutureofGlobalTakaful Malaisie,KualaLumpur

04-05 Février 2015 4th Retail Banking Conference Malaisie,KualaLumpur

18 Mars 2015 IFN2015StudentForum Malaisie,KualaLumpur

25 Mars 2015 IFN Qatar Forum 2015 Qatar,Doha

01 Avril2015 IFN Forum Investor 2015 EAU,Dubaï

02 Avril 2015 IFNForumUSInvestor2015 EAU,Dubaï

22 Avril 2015 IFN Indonesia Forum 2015 Indonésie,Jakarta

LesRendez-vousdel’IFSO

Date Evènement Lieu30 Janvier 2015 Colloque-RemisedediplômepromoEMBA2013/2014 France,Strasbourg(67)

Février 2015 UniversitédelaFinanceIslamique France,Creil(60)

Mi-Mars 2015 UniversitédelaFinanceIslamique Suisse,Genève

Fin Mars 2015 UniversitédelaFinanceIslamique France,Grenoble(38)

Avril 2015 UniversitédelaFinanceIslamique France,Lyon(69)

Mai 2015 UniversitédelaFinanceIslamique France,Marseille(13)

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IFSO MagLaTribunedelaFinanceIslamique

Responsable de publication : MustaphaBeldjoudi,KarimBahroune

Contributeur pour ce numéro : Mohamed-BechirOuldSass,Jean-LucKarleskind,MohamedNouri,MustaphaBeldjoudi,KarimBahroune,EzzedineGhlamallah

Conception graphique : MustaphaBeldjoudi

RevueTrimestriellenumériquepubliéeparIFSO,IslamicFinanceSpecialistsOrganisation,Strasbourg

Courriel : [email protected]

Gratuit - Hiver 2014