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UNIVERSITE GASTON BERGER DE SAINT LOUIS UFR des Sciences Agronomiques, de l’Aquaculture et des Technologies Alimentaires (S2ATA) MEMOIRE DE FIN D’ETUDES Pour l’obtention du diplôme de Master en Production et Transformation des Produits Agricoles (PTPA) Option : Productions Végétales et Agronomie (PVA) Par Présenté et soutenu par Mme Khady Diome Dione Le 18 Janvier 2020 Jury : Président : M. Farokh Niass, Maître de conférences, UFR S2ATA/UGB Membres : M. César Basséne, Maître-assistant, UFR S2ATA/UGB M. Aliou Faye, Chargé de recherche, CERAAS/ ISRA M. Ndiaga Ndiaye, Assistant, UFR S2ATA/UGB M. Anicet G. B. Manga, Maître de conférences, UFR S2ATA/UGB Encadrement : M. Anicet G.B Manga, Maître de conférences, UFR S2ATA/UGB M. Aliou Faye, Chargé de recherche CERAAS/ ISRA Année académique : 2019-2020 Titre : Identification participative des contraintes de production du mil (Pennisetum glaucum (L.) R. Br.) et tests d’intensification de la culture dans la commune de Nguekokh.

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UNIVERSITE GASTON BERGER DE SAINT LOUIS

UFR des Sciences Agronomiques, de l’Aquaculture et des Technologies

Alimentaires (S2ATA)

MEMOIRE DE FIN D’ETUDES

Pour l’obtention du diplôme de Master en Production et Transformation des Produits

Agricoles (PTPA)

Option : Productions Végétales et Agronomie (PVA)

Par

Présenté et soutenu par Mme Khady Diome Dione

Le 18 Janvier 2020

Jury :

Président : M. Farokh Niass, Maître de conférences, UFR S2ATA/UGB

Membres : M. César Basséne, Maître-assistant, UFR S2ATA/UGB

M. Aliou Faye, Chargé de recherche, CERAAS/ ISRA

M. Ndiaga Ndiaye, Assistant, UFR S2ATA/UGB

M. Anicet G. B. Manga, Maître de conférences, UFR S2ATA/UGB

Encadrement :

M. Anicet G.B Manga, Maître de conférences, UFR S2ATA/UGB

M. Aliou Faye, Chargé de recherche CERAAS/ ISRA

Année académique : 2019-2020

Titre : Identification participative des contraintes de production du mil

(Pennisetum glaucum (L.) R. Br.) et tests d’intensification de la culture dans la

commune de Nguekokh.

Page 2: UNIVERSITE GASTON BERGER DE SAINT LOUIS

I

DEDICACES

Je dédie ce travail à :

Mon cher mari Amadou Dione qui m’a toujours soutenu et encouragé ;

Mon père Abdou Diome qui m’a appris que seul le travail paie ;

Ma mère Fatou Séne qui a sacrifié toute sa vie au service de ses enfants ;

Mon oncle Abdou Ngom qui m’a toujours soutenu et qui me sert de référence ;

Ma chère grande sœur Amy Collé qui me sert de référence ;

Ma nièce Awa Boye qui j’aime beaucoup ;

Mes chers petits frères et petites sœurs ;

Mes tantes Awa Thiaw et Woly Diouf sans oublier mes cousins et cousines ;

Ma belle-famille ;

Mes amis et mes camarades de promotion.

Page 3: UNIVERSITE GASTON BERGER DE SAINT LOUIS

II

REMERCIEMENTS

La réalisation de ce mémoire n’aurait été possible sans l’intervention de certaines personnes.

Qu’elles trouvent ici l’expression de mes plus sincères remerciements pour leurs précieux

soutiens et conseils.

- J’exprime mes profonds remerciements à mon maître de stage en l’occurrence M. Aliou

Faye de l’ISRA de m’avoir accueilli et intégré au sein de son équipe ainsi qu’au

programme Sustainable Intensification Innovation Laboratory (SIIL) pour le

financement de l’étude ;

- Je tiens à remercier mon encadreur, M. Anicet Manga de l’UGB à qui j'adresse ma

profonde gratitude pour sa compréhension car il n'a pas manqué de me soutenir en

m’encourageant pendant la réalisation de ce travail ;

- Je suis également reconnaissante envers tous les professeurs et le personnel de

l’administration de l’UFR S2ATA ;

- Je remercie M. Farokh Niass d’avoir accepté de présider ce jury ;

- Je remercie également M. César Basséne et M. Ndiaga Ndiaye d’avoir accepté de

juger ce travail ;

- Je remercie Peace Corps Senegal (PCS) et Latress Taylor pour la collaboration ;

- Mes remerciements vont également à l’endroit de Cheikh Dieng et Mame Ass Séne,

propriétaires des parcelles de tests, de m’avoir accueilli et aidé dans la conduite des

essais ;

- Merci à toutes les personnes qui ont répondu présent lors du focus groupe, des entretiens

semi-structurés et de la journée porte ouverte ainsi que la famille Seck de leur

hospitalité ;

- Pour toutes les personnes que je n’ai pas citées les noms, qu’elles soient toutes assurées

de mes profondes gratitudes.

Page 4: UNIVERSITE GASTON BERGER DE SAINT LOUIS

III

SIGLES ET ABREVIATIONS

ANOVA : Analysis of variance

ANSD : Agence Nationale de la Statistique et de la Démographie

CIRAD : Centre de coopération International en Recherche Agronomique pour le Développement

CNRA : Centre Nationale de Recherches Agronomiques

DR : Dose Recommandée

DSP : Super Phosphate Double

FAO : Food and Agricultural Organization

FAOSTAT : Food and Agriculture Organization of the United Nations Statistics Division

ICRISAT : Institut International de Recherche sur les Cultures des zones Tropicales Semi-Arides

ISRA : Institut Sénégalais de Recherches Agricoles

JAL : Jour Après Levée

JAS : Jour Après Semis

KCL : Chlorure de Potassium

NPK : Azote, Phosphore et Potassium

PCS : Peace Corps Senegal

PTPA : Production et Transformation des Produits Agricoles

ROCAFREMI : Réseau Ouest et Centre Africain de Recherches sur le Mil

SIIL : Sustainable Intensification Innovation Laboratory

UNIFA : Union des Industries de la Fertilisation

Page 5: UNIVERSITE GASTON BERGER DE SAINT LOUIS

IV

RESUME

Le mil (Pennisetum glaucum) est la céréale la plus cultivée en pluviale au Sénégal. Cependant,

les rendements en milieu paysan (<0,8 t/ha) restent faibles par rapport au potentiel des variétés

améliorées (2,5 à 3,5 t/ha). Le présent travail mené dans la commune de Nguekokh avait pour

objectifs, (1) d’identifier les principales contraintes de production du mil dans la zone pour

(2), proposer des axes d’intensification possible de la culture. A cette fin, un focus groupe a

alors été organisé et à la suite duquel des essais sont mis en place dans deux parcelles

villageoises (Keur Bakary et Keur Baye Danael) en 2018. Un dispositif de type split-split-plot

a été mis en place afin de comparer les performances d’une variété améliorée (Thialack 2) à

celles d’accessions de mil locale avec deux densités de semis comportant six (6) doses de

fertilisation minérale. Les résultats du focus groupe ont montré que les contraintes majeures de

production sont liées à la disponibilité et à l’usage des terres. Les essais agronomiques ont

révélé que la forte densité de semis a permis une augmentation de 25,95% du rendement en

grains pour la variété améliorée et de 22,05% pour les accessions de mil local. L’origine des

semences (variété améliorée vs accessions) n’a pas eu d’effet significatif sur le rendement en

biomasse. La dose de fertilisation qui a donné le meilleur rendement varie d’une parcelle à

l’autre et correspond à la dose recommandée (DR) par la recherche dans la parcelle 1 et à 75%

de cette DR pour la parcelle 2. L'évaluation participative des essais avant récolte a montré que

71% des agriculteurs présents sont convaincus de la pertinence des technologies proposées.

Ainsi, l’adoption de la variété améliorée en forte densité de semis avec une dose de fertilisation

appropriée pourrait permettre une augmentation significative des productions de mil à

Nguekokh et contribuer à améliorer la sécurité alimentaire.

Mots clés : Mil, densité de semis, engrais minéral, intensification

Page 6: UNIVERSITE GASTON BERGER DE SAINT LOUIS

V

ABSTRACT

Pearl millet (Pennisetum glaucum) is the most cultivated cereal in rain in Senegal. However,

farmers’ yields (<0.8 t / ha) remain low compared to improved varieties potential

(2.5 to 3.5 t / ha). The present work carried out in Nguekokh commune, aims to (1) identify the

main millet production constraints in the area and (2), to test possible areas of pearl millet

cropping intensification. To this end, a focus group was organized and followed up by

implementation of demonstrative trials in two villages (Keur Bakary and Keur Baye Danael) in

2018. The experimental design is a split - split - plot to compare the performance of an improved

variety (Thialack 2) to local accessions in two sowing density with six (6) mineral fertilization

doses rates. Results from focus group show that the production constraints in relation with soil

appear as most important. The agronomic tests reveal that the high seeding density allows an

increase of 25. 95% in grain yield for the improved variety and 22. 05% for local millet.

The origin of seeds (improved variety vs local millet) has no significant effect on biomass yield.

The fertilization dose, which gives the best yield, varies from a plot to another and, corresponds

to the recommended dose (DR) of research in plot 1 and to 75% of this DR for plot 2.

Pre-harvest participatory evaluation tests show that 71% of the farmers are convinced on the

relevance of the proposed technologies. Massive adoption of the improved variety wat high

density of sowing with appropriate fertilization dose could allow significant increase of millet

production in Ngekokh and hereby, constitute a major pillar of food security.

Keywords: Millet, sowing density, fertilizers rate, intensification

Page 7: UNIVERSITE GASTON BERGER DE SAINT LOUIS

VI

LISTE DES TABLEAUX

Tableau 1 : Variétés de mil cultivées au Sénégal ..................................................................... 9

Tableau 2 : Description des différentes doses de fertilisation minérale pour les deux

écartements de semis (E1 : 90-90 cm et E2 : 90-45 cm) .......................................................... 18

Tableau 3 : Les contraintes de production du mil à Nguekokh .............................................. 21

Tableau 4 : Caractéristiques physiques et chimiques des sols des parcelles 1 et 2................. 22

Tableau 5 : Effet des différents traitements sur le rendement en biomasse ............................ 28

Page 8: UNIVERSITE GASTON BERGER DE SAINT LOUIS

VII

LISTE DES FIGURES

Figure 1 : Description du mil : système racinaire (a), tige avec feuilles (b) et épis du mil (c). 4

Figure 2 : Phases de croissance et de développement du mil (Maiti et Bidinger, 1981) .......... 5

Figure 3 : Loi de restitution ....................................................................................................... 7

Figure 4 : Loi des accroissements moins que proportionnels ................................................... 7

Figure 5 : Loi du minimum ....................................................................................................... 8

Figure 6 : Carte de localisation du site d’étude ....................................................................... 12

Figure 7 : Représentation décadaire de la pluviométrie de l’hivernage 2018 à Nguekokh .... 13

Figure 8 : Les engrais minéraux utilisés : Urée, 46 % N (a) ; DSP, 25 % P (b) ; Kcl, 61,3 %

K(c) ........................................................................................................................................... 14

Figure 9 : Un sous-groupe du focus groupe le 20 juin 2018 (a) ; Journée portes ouvertes le 10

octobre 2018 (b) ....................................................................................................................... 15

Figure 10 : Description du dispositif expérimental ................................................................. 16

Figure 11 : Schéma de la parcelle élémentaire : Ecartement 1 (a), Ecartement 2 (b) ............. 17

Figure 12 : Effets de l’écartement de semis sur le nombre total de talles par poquet. ............ 23

Figure 13 : Effets de l’écartement de semis sur le rendement en biomasse ............................ 24

Figure 14 : Effets de l’origine des semences sur la longueur des épis .................................... 25

Figure 15 : Effets de l’origine des semences sur le rendement en biomasse .......................... 26

Figure 16 : Effets de l’écartement de semis sur le rendement en grains selon l’origine des

semences ................................................................................................................................... 27

Figure 17 : Pourcentage d’appréciation de producteurs .......................................................... 29

Page 9: UNIVERSITE GASTON BERGER DE SAINT LOUIS

VIII

TABLE DES MATIERES

DEDICACES .............................................................................................................................. I

REMERCIEMENTS ................................................................................................................. II

SIGLES ET ABREVIATIONS ................................................................................................ III

RESUME .................................................................................................................................. IV

ABSTRACT .............................................................................................................................. V

LISTE DES TABLEAUX ........................................................................................................ VI

LISTE DES FIGURES ............................................................................................................ VII

TABLE DES MATIERES ...................................................................................................... VII

INTRODUCTION ...................................................................................................................... 1

CHAPITRE I : SYNTHESE BIBLIOGRAPHIQUE ................................................................. 3

1.1 Le mil ................................................................................................................................ 3

1.1.1 Origine, distribution géographique ............................................................................ 3

1.1.2 Position taxonomique et description de la plante ...................................................... 3

1.1.3 Phénologie du mil ...................................................................................................... 4

1.1.4 Exigences pédoclimatiques de la culture du mil ........................................................ 6

1.2 La fertilisation minérale et densité de semis du mil ......................................................... 6

1.2.1 La fertilisation minérale du mil .................................................................................. 6

1.2.2 Les lois de la fertilisation ........................................................................................... 7

1.2.3 Densité de semis du mil ............................................................................................. 8

1.3 Production et valorisation du mil au Sénégal : cas de Nguekokh .................................... 9

1.4 Les contraintes de la production de mil au Sénégal : cas de la commune de Nguekokh 10

CHAPITRE II : MATERIEL ET METHODES ....................................................................... 12

2.1 Présentation du site ......................................................................................................... 12

2.1.1 Situation géo-administrative .................................................................................... 12

2.1.2 Situation biophysique ............................................................................................... 12

2.2 Matériel ........................................................................................................................... 13

2.2.1 Le matériel végétal ................................................................................................... 13

2.2.2 Les engrais minéraux utilisés ................................................................................... 14

2.3 Méthodes ........................................................................................................................ 14

2.3.1 Démarche participative ............................................................................................ 14

2.3.2 Dispositif expérimental ............................................................................................ 15

Page 10: UNIVERSITE GASTON BERGER DE SAINT LOUIS

IX

2.3.3 La parcelle élémentaire et le carré de rendement ..................................................... 16

2.3.4 Mise en place et conduite des essais ........................................................................ 18

2.3.4.1 Echantillonnage et caractérisation des sols des parcelles d’essai...................... 18

2.3.4.2 Conduite des essais ............................................................................................ 19

2.4 Traitement et analyse des données ................................................................................. 20

CHAPITRE III : RESULTATS ET DISCUSSION ................................................................. 21

3.1. Résultats ......................................................................................................................... 21

3.1.1 Résultats du diagnostic participatif .......................................................................... 21

3.1.2 Résultats des tests en parcelles expérimentales ....................................................... 22

3.1.2.1 Caractéristiques physiques et chimiques des sols dans les parcelles 1 et 2 ...... 22

3.1.2.2 Effets de l’écartement de semis sur le nombre total de talles par poquet ......... 23

3.1.2.3 Effets de l’écartement de semis sur le rendement en biomasse ........................ 23

3.1.2.4 Effets de l’origine des semences sur la longueur des épis ................................ 24

3.1.2.5 Effets de la origine des semences sur le rendement en biomasse ..................... 25

3.1.2.6 Effets de l’écartement de semis selon l’origine des semences sur le rendement

en grains ........................................................................................................................ 26

3.1.2.7 Effets des différents traitements sur le rendement en biomasse ........................ 27

3.1.3 Restitution des résultats de l’expérimentation ......................................................... 29

3.2 Discussion ....................................................................................................................... 30

3.2.1 Analyse prospective du diagnostic participatif ........................................................ 30

3.2.2 Amélioration des facteurs de production ................................................................. 31

CONCLUSION ET PERSPECTIVES ..................................................................................... 35

REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES ................................................................................. IX

Page 11: UNIVERSITE GASTON BERGER DE SAINT LOUIS

1

INTRODUCTION

Sur les 820 millions de personnes touchées par l’insécurité alimentaire dans le monde, les

22,8% résident en Afrique et plus précisément en milieu rural comme le cas au Sénégal où

11,3% de la population totale est concernée (FAO et al., 2019).

Le mil, Pennisetum glaucum, représente la sixième céréale la plus importante au monde après

le riz, le blé, le maïs, l’orge et le sorgho en termes de surfaces emblavées et de production

(ICRISAT, 2016). Sa production mondiale, qui était de 32 millions de tonnes en 2016 est surtout

concentrée en Afrique et en Asie (FAO, 2018). L’Afrique contribue à hauteur de 46 % de la

production mondiale en 2013 (Moumouni, 2014). Elle vient principalement des pays d’Afrique

de l’Ouest dont le Nigeria qui est le leader, suivi du Niger, du Mali, du Burkina et du Sénégal,

pays qui occupe la 5 ème position avec une production annuelle de près de 600000 tonnes

(Moumouni, 2014). Au Sénégal, la culture du mil occupe 56% des surfaces emblavées en

pluviale avec une production de 891000 tonnes en 2017 (ANSD, 2018). En conséquence, le mil

constitue un pilier important de la sécurité alimentaire car cette céréale est la base de

l’alimentation quotidienne des populations rurales dans certaines parties du pays.

Malgré cette place importante que le mil occupe au Sénégal et dans la commune de Nguekokh

en particulier, sa culture est pratiquement extensive avec peu de technologies améliorées. Elle

se fait en période pluviale avec une seule récolte annuelle. La culture du mil connaît beaucoup

de difficultés avec des rendements stagnants à environ 0,8 t/ha, alors qu’en intensive avec des

variétés améliorées, les rendements atteignent 3,5 t/ha (Christianson et al., 1990 ; Diouf, 2001 ;

Catalogues variétale du Sénégal, 2012). Les raisons de ces faibles rendements du mil sont certes

nombreuses, mais le faible niveau de fertilité des sols, qui par ailleurs continuent à se dégrader,

l’inefficacité actuelle des formules de fertilisations développées depuis les années 70 appliquées

toujours et partout sans prise en compte de la variabilité pédoclimatique en plus des pratiques

culturales sont sans doute au cœur des problèmes. À cela, s’ajoute la faible adoption

/ méconnaissance des nouvelles variétés plus productives développées par la recherche,

conséquence de l’inefficacité de la vulgarisation des produits de la recherche. Le faible

rendement de la production du mil est peut-être aussi dû à la faible densité de semis du mil

(12346 poquets par ha) comparativement au maïs et au Sorgho semés jusqu'à plus de 55 000

pieds par ha.

Dès lors, il apparaît nécessaire, voire crucial, d’identifier les causes exactes de cette faiblesse

de rendement pour développer des alternatives afin d’améliorer durablement les rendements du

Page 12: UNIVERSITE GASTON BERGER DE SAINT LOUIS

2

mil. Ce qui pourrait contribuer à faire face à l’insécurité alimentaire en milieu rural comme

dans la commune de Nguekokh où les terres deviennent de moins en moins accessibles.

Hormis les politiques de stabilisation de la fin des années 70 suivies des premiers programmes

d’ajustement structurel au milieu des années 80 (Diarra, 2005), à nos connaissances, il n’y a

pas d’autres études s’intéressant à la faiblesse des rendements du mil, faites dans cette zone

précise. C’est pour cette raison essentielle que le programme USAID Feed the Future

Sustainable Intensification Innovation Laboratory (SIIL) coordonné au Sénégal par l’Institut

Sénégalais de Recherches Agricoles (ISRA) en collaboration avec Peace Corps Senegal (PCS)

ont jugé utile de mener cette étude dans la localité de Nguekokh, qui se trouve être parmi les

zones d’influence de ce programme.

L’objectif général de ce travail est de contribuer à la lutte contre l’insécurité alimentaire dans

la commune de Nguekokh par une amélioration de la production de mil. De façon spécifique,

il s’agit (1) d’identifier les contraintes liées à la production du mil dans la zone, (2) afin de

proposer des axes d’intensification possible de la culture du mil à travers :

Une démonstration des potentialités de la variété Thialack 2 plus productive comparée

aux accessions de mil local.

Une augmentation de la densité de semis du mil.

Et une optimisation de la fertilisation minérale.

Ce travail s’articule autour de trois grands chapitres. Le premier est une synthèse

bibliographique. Le deuxième présente le matériel et la méthodologie adoptée pour atteindre

les objectifs visés. Le troisième est consacré aux résultats et à la discussion. Une conclusion

assortie de perspectives sont proposées au terme de ce travail.

Page 13: UNIVERSITE GASTON BERGER DE SAINT LOUIS

3

CHAPITRE I : SYNTHESE BIBLIOGRAPHIQUE

1.1 Le mil

1.1.1 Origine, distribution géographique

Originaire de son ancêtre sauvage Pennisetum spp, le mil perlé a été domestiqué il y a 4000 ans

avant J.C. en Afrique de l’Ouest (Manning et al., 2011 ; Clotault et al., 2012). De récentes

recherches archéologiques et botaniques ont confirmé que le mil pénicillaire a été domestiqué

pour la première fois en Afrique, dans le Sahel au Nord de l’actuel Mali, il y a environ 4 500

ans (ICRISAT, 2015). Le mil perlé a atteint l’Amérique tropicale au XVIII ème siècle et les Etats-

Unis d’Amérique au XIX ème siècle où il est considéré presque comme une culture fourragère

(Andrews et Kumar, 2006). Sur le continent africain, on le trouve largement dans les pays de la

frontière Sud du désert du Sahara allant du Sénégal pour s’étendre vers la Somalie (Kurauchi

et al., 2009).

1.1.2 Position taxonomique et description de la plante

Le mil (Pennisetum glaucum.) appartient au règne Plantea, à la division des Magnoliophyta, à

la classe des Liliopsida, l’ordre des Cyperales, à la famille des Poaceae, à la sous-famille des

Panicoideae, à la tribu des Paniceae et du genre Pennisetum selon la classification

phylogénétique (Marchais et al., 1993).

Le mil est une plante à métabolisme de type C4, ce qui lui confère une efficience hydrique plus

importante que celle des plantes de type C3 (Edwards, 2012)

Le mil a un système racinaire fasciculé (Figure 1 a) qui peut coloniser un profil de sol jusqu’à

3,6 m de profondeur et explorer les couches les plus profondes du sol en cas de stress hydrique

(Ferraris, 1973).

Son port est érigé (Figure 1 b) et sa hauteur varie généralement entre 1 et 3 m et peut même

atteindre 4 m dans les zones humides (CIRAD-GRET, 2002). Les tiges du mil sont densément

velues, solides et pleines. Ses feuilles alternes sont longues, assez minces et peuvent être lisses

ou poilues avec une longueur qui peut varier de 20 à 100 cm pour une largeur comprise entre 5

et 50 mm (Moumouni, 2014). La longueur de l’épi (Figure 1 c) varie de 10 à plus de 1000 cm

de longueur (Ahmadi et al., 2002).

Le mil est une espèce diploïde avec 7 paires de chromosomes (2n=2x=14), annuelle, sexuée,

hermaphrodite, ce qui explique sans doute son hétérogénéité non négligeable.

Page 14: UNIVERSITE GASTON BERGER DE SAINT LOUIS

4

La fécondation croisée est favorisée parce que les organes mâles et femelles n’arrivent pas en

maturité en même temps (protogynie). C’est une espèce allogame (70 %) pour laquelle la

pollinisation est anémophile et occasionnellement entomophile (Ahmadi et al., 2002).

Le fruit est un caryopse nu de forme ovoïdale ou elliptique et longue d’environ 4 mm et de

couleur variable (blanche, jaune, gris ou bleu), les 1000 graines pèsent 4 à 8 g environ

(Denis ,1984).

Figure 1 : Description du mil : système racinaire (a), tige avec feuilles (b) et épis du mil (c)

1.1.3 Phénologie du mil

Le cycle phénologique du mil est marqué par trois (3) phases : la phase végétative, la phase

reproductive et la phase de maturation (Figure 2). La diversité des cultivars, l'existence de mils

hâtifs (65 à 90 jours) et tardifs (110 à 120 jours) rendent difficile la détermination de la durée

exacte de chaque phase.

La phase végétative

Cette phase débute par l'émergence de la coléoptile et continue jusqu'au point d'initiation de la

panicule. La levée débute avec l’apparition de la première feuille, 4 à 5 jours après semis (JAS),

et à sa fin, apparaissent les bourgeons de toutes les feuilles (chez les variétés précoces, 6 à 7

feuilles sont déjà développées) ainsi que les racines séminales et les racines adventives.

Le tallage débute environ 15 jours après levée (JAL) et se poursuit durant 10 à 20 jours chez

les variétés précoces (Maiti et Bidinger, 1981).

a b c

Page 15: UNIVERSITE GASTON BERGER DE SAINT LOUIS

5

Phase reproductive

La phase reproductive est marquée par l’épiaison, la floraison et la fructification, l’allongement

des entre-nœuds des tiges à partir de la base (Loumerem, 2004). L’épi développe des épillets

sur lesquels émergent des fleurs femelles d’abord et deux à trois jours après s’effectue la

floraison mâle. La floraison s’effectue du sommet de l’épi vers le bas et se termine entre 5 à 6

jours plus tard par la fécondation marquant ainsi la fin de la phase reproductive (Maiti et

Bidinger, 1981).

Phase de remplissage et maturation des grains

Le développement et la maturation du grain passent par 3 phases (laiteuse, pâteuse et vitreuse)

et arrivent à maturité physiologique 20 à 50 jours après la floraison selon les variétés (Maiti et

Bidinger, 1981). Six à sept jours après la pollinisation, le grain se développe rapidement et

devient visible. Durant ce stade, l’enveloppe de la graine s’engorge d’un liquide qui au début

est clair et puis devient laiteux. La fin de cette phase est marquée par la sénescence des feuilles

les plus basses et du développement d’une petite couche de tissu foncée dans la région du hile

de la graine (Loumerem, 2004).

Figure 2 : Phases de croissance et du développement du mil (Maiti et Bidinger, 1981)

0 : Levé ; 1-3 feuilles ; 2 – 5 : feuilles ; 3 : Initiation florale ; 4 : Apparition dernière feuille ;

5 : Gonflement ; 6 : 50 % floraison ; 7 : Grain laiteux ; 8 : Grain pâteux ; 9 : Maturité

Page 16: UNIVERSITE GASTON BERGER DE SAINT LOUIS

6

1.1.4 Exigences pédoclimatiques de la culture du mil

Le mil est une céréale dont les exigences paraissent les plus faibles en matière de fertilité du

sol. Le mil est très souvent cultivé sur les sols sableux, acides, pauvres en argile, mais ne

supporte pas la salure et l’excès d’eau. Le sol optimal est un sol sablo-argileux, bien drainé et

bien structuré pour faciliter la croissance du système racinaire (Caron et Granes, 1993).

Le mil est une plante photopériodique de type C4 (Edwards, 2012), qui exige une forte intensité

lumineuse (Moumouni, 2014). Le métabolisme de type C4 permet au mil de mieux tolérer la

sécheresse grâce à une meilleure efficience d’utilisation de l’eau. Ce qui favorise sa culture

dans des régions où la pluviosité annuelle se situe entre 150 et 800 mm (Loumerem, 2004).

En termes d’exigence de température, le mil supporte mieux que les autres céréales les

températures élevées. Avec une présence suffisante d’eau dans le sol, la formation des grains

et le développement floral peuvent se dérouler à des températures élevées. La plante est sensible

à des températures basses (< 10°C) durant les phases de germination et de floraison (Loumerem,

2004). La température moyenne pendant toute la végétation doit être d'environ 28°C

(Eldin, 1990).

1.2 La fertilisation minérale et densité de semis du mil

1.2.1 La fertilisation minérale du mil

Pour se développer, toute plante a besoin d'eau, de lumière, de carbone, d'oxygène et de divers

éléments. Ces éléments minéraux et l'eau sont fournis par le sol et leur insuffisance au moment

nécessaire, pourrait limiter leur croissance et leur développement se traduisant par de faibles

rendements.

La fertilisation a pour objectif de maintenir ou d'améliorer le pouvoir nutritionnel d'un sol en

vue de satisfaire les exigences des cultures et d'atteindre les potentialités de production du

milieu tout en respectant l'environnement. De ce fait, l’utilisation des engrais minéraux doit être

faite de façon raisonnée d’où la nécessité de connaitre les besoins en matière de fertilisation.

Selon Dutordoir (2006), les limites du nombre de talles fertiles, de la période de floraison et

donc de la réponse « plastique » du mil vont être fixées par les nutriments présents

(la fertilisation) au niveau du substrat. Au Sénégal, la dose de fertilisation appliquée sur la

culture du mil a été recommandée par l’Institut Sénégalais des Recherches Agricoles (ISRA)

dans les années 70-80 et correspond à 150 kg/ha de NPK plus 100 kg d’urée.

Page 17: UNIVERSITE GASTON BERGER DE SAINT LOUIS

7

1.2.2 Les lois de la fertilisation

La loi de restitution des sols, qui veut que les exportations d’éléments minéraux soient

compensées par des restitutions pour éviter l’épuisement des sols : exportations =

restitutions (Figure 3)

Figure 3 : Loi de restitution

Source : UNIFA, 2005

Loi des accroissements moins que proportionnels : cette loi stipule que quand on

apporte au sol des doses croissantes d’un élément fertilisant, les augmentations de

rendement obtenues sont de plus en plus faibles au fur et à mesure que les quantités

apportées s’élèvent (Figure 4)

Figure 4 : Loi des accroissements moins que proportionnels

Source : UNIFA, 2005

Page 18: UNIVERSITE GASTON BERGER DE SAINT LOUIS

8

Loi du minimum ou d’interaction ou loi de Von Liebzieg : cette loi dit que

l’importance du rendement d'une récolte est déterminée par l’élément, qui se trouve en

plus faible quantité par rapport aux besoins de la culture. L’action d’un élément peut

être modifiée par la présence ou l’absence d’un ou plusieurs autres éléments (Figure 5)

Figure 5 : Loi du minimum

Source : UNIFA, 2005

1.2.3 Densité de semis du mil

Par définition, la densité de semis désigne le nombre de poquets ou de pieds par unité de surface.

Elle peut aussi s’exprimer en kg de semence par ha ou alors en nombre de pieds par ha. Elle est

en fonction de la culture implantée, de la date de semis, du type de variété, des conditions de

semis et du type de sol.

Le mil est habituellement semé en poquets, dont l’espacement varie entre 0,45 m x 0,45 m et 1

m x 1 m en fonction du système de culture et de la nature du sol (Ahmadi et al., 2002).

Dans le Sahel, les agriculteurs sèment à de faibles densités (10 000 à 30 000 plants ha-1) et

pratiquent le démariage pour favoriser le tallage et pour que les talles fertiles contribuent au

rendement en grain (Bidinger et Raju, 2000). Au Niger, en sols sableux, on sème à 1 m x 1 m

soit 10 000 poquets/ha (Illiassou, 2009). Au Sénégal, la densité la plus répandue pour le mil en

milieu paysan est de 12 346 poquets à l’hectare, ce qui correspond à des écartements de

0,90 m x 0,90 m (Siene et al., 2010). Selon Siene et al. (2010), les densités élevées provoquent

une compétition entre les plantes. En effet, pour exprimer pleinement le rendement, il faut que

la plante utilise efficacement les ressources mises à sa disposition : lumière, eau, éléments

nutritifs et cette optimisation physiologique au niveau de la plante individuelle exige que la

densité de population dans la parcelle soit modérée. Selon Diouf (1990), la densité de semis du

Page 19: UNIVERSITE GASTON BERGER DE SAINT LOUIS

9

mil impacte son tallage parce que si cette densité est élevée, elle peut augmenter les rendements

du mil en cas d’utilisation d’engrais minéraux (Shapiro et Sanders, 1997).

1.3 Production et valorisation du mil au Sénégal : cas de Nguekokh

Au Sénégal, parmi les cultures céréalières pluviales, le mil occupe la place la plus importante

aussi bien du point de vue des surfaces emblavées (presque 75 %) que de la production (60 %)

(Ministère de l’Agriculture et de l’Élevage, 2001). Une production de 749 874 tonnes a été

enregistrée en 2015 pour une superficie de 922 008 hectares (ANSD, 2017). Contrairement au

sorgho et au maïs, qui sont cultivés généralement à l’Est et au Sud du pays, zones où la

pluviométrie est plus abondante, le mil se retrouve dans toutes les zones agro-écologiques du

Sénégal.

L’Institut Sénégalais de Recherches Agricoles (ISRA) a mis en place une multitude de variétés

cultivées en fonction des différentes zones agro-écologiques du Sénégal (Tableau1).

Tableau 1 : Quelques variétés de mil cultivées au Sénégal

Source : Catalogue officiel des espèces et variétés cultivées au Sénégal (2012)

Le mil reste la principale culture vivrière pour le monde rural, qui représente près de 70 % de

la population nationale. Malgré tout, il est généralement cultivé de manière extensive avec peu

de technologies améliorées et une faible utilisation des engrais minéraux rendant ainsi les

rendements faibles (500 à 600 kg/ha) (Ministère de l’Agriculture et de l’Élevage, 2001). Elle

se fait soit en culture pure, continue dans les champs de case, soit en rotation avec l’arachide

ou bien du manioc dans les champs de brousse ou alors en association avec le niébé.

Nom de la

variété

Année

d'obtention

Année

d'homologation

Rendement

potentiel (t/ha) Zone de production

Souna 3 1969 - 2,4 - 3,5 Fatick, Kaolack,

Tambacounda

IBV 8001 1980 1987 2,4 - 3,4 Kaolack, Fatick

IBV 8004 1980 1987 1 - 1,5 Thiès, Diourbel,

Louga

IBV 8402 1984 - 2 Thiès, Diourbel

ISMI 9507 1995 2010 2,5 Thiès, Diourbel

Gawane 2006 2010 2,5 Thiès, Diourbel

Thialack 2 2008 2010 2 - 3 Fatick, Kaolack

Sanio - - - Casamance

Page 20: UNIVERSITE GASTON BERGER DE SAINT LOUIS

10

Dans le système agraire du terroir de Nguekokh, trois types de systèmes de production sont mis

en œuvre :

Les exploitations familiales agriculteurs

Les exploitations familiales, qui associent agriculture et élevages

Les exploitations familiales éleveurs

Le mil est cultivé presque sur toute l’étendue du territoire même si l’élevage occupe une place

non négligeable dans cette zone. La superficie totale cultivée par famille varie de 2 à 8 hectares

et certains producteurs associent en général l’agriculture et l’élevage (Diarra, 2005).

Dans ce territoire, les grains du mil sont essentiellement utilisés sous forme de farine pour la

préparation de couscous, bouillie et autres plats (Nielegu, lakhou thiakhane, etc).

Ses sous-produits, telles que les tiges et les feuilles, sont utilisées surtout pour l’alimentation

du bétail, mais aussi pour la construction des habitations, des palissades, des enclos, greniers.

1.4 Les contraintes de la production de mil au Sénégal : cas de la commune de

Nguekokh

La vulgarisation des acquis de la recherche est souvent inadéquate et les paysans sont parfois

réticents par rapport aux innovations. En plus, la plupart des technologies développées n'ont

pas pris en compte les contraintes que doivent surmonter les paysans. C’est ce qui en partie

justifie l’utilisation encore de variétés traditionnelles connues pour être sensibles aux maladies

et parasites devenus endémiques et à faibles rendements résultant de la pauvreté des sols et des

mauvaises pratiques agricoles.

En termes d’attaques parasitaires, Striga hermonthica constitue encore un sérieux problème

pour la culture du mil. Les pertes de rendements dues à cette plante parasite sont comprises

entre 90 à 100 % (Wilson et al., 2000). Le mildiou ou maladie de l’épi vert, causé par un

champignon (Sclerospora graminicola) et le charbon causé, par un autre champignon

(Tolyposporium penicillariae) sont parmi les principales maladies du mil, mais le mildiou est

de loin la maladie la plus fréquente et la plus répandue dans les zones de production du mil. En

effet, les pertes de rendement occasionnées par cette maladie sont estimées entre 20 et 30%

(ROCAFREMI, 2002), en plus des autres dégâts, causés par les insectes et les oiseaux

granivores.

La culture du mil connaît aussi d’autres contraintes socio-économiques, qui peuvent se résumer

essentiellement à l’inadéquation entre le prix des intrants agricoles et aux difficultés d’accès

aux équipements et aux crédits agricoles, qui limitent l’adoption de nouvelles technologies de

Page 21: UNIVERSITE GASTON BERGER DE SAINT LOUIS

11

production. Selon Moumouni (2014), la culture du mil est surtout pratiquée par des paysans ne

disposant pas de moyens suffisants pour investir dans les activités agricoles.

À toutes ces contraintes, s’ajoute la forte réduction des espaces cultivables particulièrement

remarquée à Nguekokh. En effet, la zone est marquée par la proximité de trois pôles actifs :

Mbour, Dakar et les stations balnéaires de la petite côte, qui favorisent une urbanisation

galopante et entraîne une forte réduction des terres arables liées à une forte spéculation foncière.

Les terres deviennent en conséquence de moins en moins accessibles avec une augmentation

du prix de la terre et du fermage qui raréfient les possibilités d’emprunt (Diarra, 2005).

Page 22: UNIVERSITE GASTON BERGER DE SAINT LOUIS

12

CHAPITRE II : MATERIEL ET METHODES

2.1 Présentation du site

2.1.1 Situation géo-administrative

Cette étude est menée pendant l’hivernage 2018 dans la commune de Nguekokh (14°51’N, -

17°00’W), située dans le département de Mbour dans la Région de Thiès au Sénégal (Figure 6).

Figure 6 : Carte de localisation du site d’étude

2.1.2 Situation biophysique

- Le climat : Il est de type nord-soudanais et est balayé pendant 7 à 8 mois par la Mousson

atlantique et de 4 à 5 mois par l’Harmattan, vent sec venant de l’Est (Service Départemental du

Développement Rural de Mbour, 2017).

- Les principaux types de sols : Ce sont des sols de types ferrugineux tropicaux, faiblement

lessivés à texture sableuse appelés « sols Dior », les sols ferrugineux tropicaux à texture argilo-

sableux appelés « Deck Dior » et les sols ferrugineux tropicaux lessivés à texture argilo-

humifère dits « Deck » (Service Départemental de Développement Rural de Mbour, 2017).

Page 23: UNIVERSITE GASTON BERGER DE SAINT LOUIS

13

- La température : De Janvier à Mars, les températures moyennes varient entre 18° à 26°C et

d’Avril en Décembre, elles sont comprises entre 19° et 31°C (Service Départemental de

Développement Rural de Mbour, 2017).

- La pluviométrie : La commune de Nguekokh est caractérisée par une saison pluviale de 2 à

3 mois et une saison sèche de 9 à 10 mois. L’humidité relative de la zone est de 73,4% et son

ensoleillement moyen annuel est de 2800 heures (Service Départemental de Développement

Rural de Mbour, 2017). Cette zone connaît souvent des déficits pluviométriques qui peuvent

être considérables. Ainsi, la pluviométrie moyenne annuelle pour les 10 dernières années a été

de 562,06 mm alors que le cumul pluviométrique en 2018 est seulement de 260,4 mm et surtout

très mal reparti dans le temps comme le montre la Figure 7.

Figure 7 : Représentation décadaire de la pluviométrie de l’hivernage 2018 à Nguekokh

(Source : poste pluviométrique de Nguekokh, 2018)

2.2 Matériel

2.2.1 Le matériel végétal

Généralement, les producteurs de Nguekokh conservent leurs propres semences à la fin de

chaque campagne hivernale. Or, le mil est une plante strictement allogame (70%) et par

conséquent la reconduction des semences d’une variété pendant plusieurs années aboutit à des

accessions de mil avec des caractéristiques agro-morphologiques divers et généralement moins

productives. Pour les besoins de cette étude, ces accessions locales de mil cultivées par les

producteurs sont ainsi comparées à une variété améliorée, le Thialack 2, qui a été homologuée

par l’ISRA en 2010. La hauteur des plants en maturité de la variété Thialack 2 peut atteindre

250 cm, son cycle de maturation est entre 90 et 95 jours. La variété Thialack 2 s’adapte bien

0

20

40

60

80

100

120

Dec 1 Dec 2 Dec 3 Dec 1 Dec 2 Dec 3 Dec 1 Dec 2 Dec 3 Dec 1 Dec 2 Dec 3

Juin Juillet Août Septembre

Plu

vio

mèt

rie

(mm

)

Mois

Page 24: UNIVERSITE GASTON BERGER DE SAINT LOUIS

14

dans différentes zones du pays et est peu sensible au mildiou. Son rendement potentiel est de 2

à 3 tonnes par ha (t /ha) et la longueur de l’épi peut atteindre 70 cm (catalogue officiel des

espèces et variétés cultivées au Sénégal). Elle a des feuilles qui restent vertes après la maturité

de l’épi contrairement aux accessions locales. Ce qui fait que, le mil de type Thialack 2 est ainsi

considéré parmi les variétés aptes à un double usage (grains pour les Hommes et biomasses

pour les animaux).

2.2.2 Les engrais minéraux utilisés

Les doses de fertilisation minérales par poquet sont constituées de combinaisons d’engrais

minéraux simples urée (46 - 0 - 0), Super Phosphate Double (DSP ; 0 - 25 - 0) et le chlorure de

Potassium (Kcl ; 0 - 0 - 61,3) (Figure 8)

Figure 8 : Les engrais minéraux utilisés : Urée, 46 % N (a) ; DSP, 25 % P (b) ; Kcl, 61,3 % K(c)

2.3 Méthodes

2.3.1 Démarche participative

Afin d’identifier de façon participative les contraintes qui gangrènent la production du mil dans

la commune de Nguekokh, un focus groupe est organisé le 20 juin 2018 dans ladite commune

(Figure 9 a). Lequel focus groupe a eu lieu avec les producteurs des villages de Keur Bakary,

Keur Mbaye Danael, Cop Gayane et Nguekokh Sérère qui se trouvent être des villages

d’interventions du Corps de la paix Sénégal. Au total 37 personnes (tout âge confondu) dont 22

producteurs, 9 productrices, 3 volontaires du corps de la paix venant de différentes régions du

pays, mon maître de stage ainsi que moi-même avons participé à ce focus. Il est constitué de

questions-réponses, de discussions en sous-groupes et de débats ouverts.

En plus du focus groupe, d’autres entretiens semi-structurés (ou semi-directifs) sont organisés

avec cinq autres paysans dans des ménages différents pour avoir plus de précisions sur les

questions abordées.

a b c

Page 25: UNIVERSITE GASTON BERGER DE SAINT LOUIS

15

L’ensemble de ces entretiens et le focus groupe avec la population ont permis d’identifier les

différentes contraintes agricoles de la localité.

Après analyse et hiérarchisation des problèmes, ceux liés aux sols ont demeuré les plus

cruciaux. Pour une prise de décision participative concernant les activités à mener, une séance

de restitution des résultats du focus groupe est organisée le 30 juin 2018 avec les producteurs.

Ainsi, la mise en place de parcelles de tests d’intensifications de la culture du mil est décidée

de façon participative. De ce fait, deux parcelles sont installées: la parcelle 1 dans le village de

Keur Mbaye Danael et la parcelle 2 dans le village de keur Bakary. Ces deux parcelles de tests

ont été distantes de 900 mètres avec des types de sols différents.

Au terme de la conduite des essais, une journée porte ouverte est organisée avec 67 producteurs

dont 16 femmes et 51 hommes venant de 4 villages (keur Bakary, Cop Gayane, Nguekokh

sérère et keur Mbaye Danael) de la commune de Nguekokh. Ceci pour permettre aux

producteurs de voir la différence entre la variété Thialack 2 et les accessions de mil, mais aussi

pour avoir leurs appréciations par rapport aux technologies d’intensification de la culture du

mil testées.

Figure 9 : Un sous-groupe du focus groupe le 20 juin 2018 (a) ; Journée portes ouvertes le 10

octobre 2018 (b)

2.3.2 Dispositif expérimental

Pour chacune des deux parcelles, un dispositif expérimental en split-split-plot (Figure 10) est

mis en place. Chaque dispositif a renfermé trois (03) répétitions (R1, R2 et R3) qui sont séparées

par des allées de 2 m et chaque répétition a comporté deux sous-blocs qui sont séparés par des

allés de 1,5 m (variété ou accession par sous bloc). Les sous-blocs sont ensuite divisés en deux

sous-sous-blocs qui sont séparés par des allées de 1 m (un écartement par sous-sous-bloc).

a b

Page 26: UNIVERSITE GASTON BERGER DE SAINT LOUIS

16

Chaque sous-sous-bloc est découpé en six parcelles élémentaires où sont appliqués six niveaux

de fertilisation (un niveau par parcelle élémentaire). La superficie totale de chaque dispositif

expérimental a été de 1849,5 m2.

V1 : accession de mil

V2 : Thialack

Figure 10 : Description du dispositif expérimental

2.3.3 La parcelle élémentaire et le carré de rendement

Encore appelée unité expérimentale, la parcelle élémentaire correspond à l’unité élémentaire

qui reçoit un traitement. Un traitement correspond à une combinaison des trois facteurs étudiés.

Dans la présente étude, une parcelle élémentaire a comporté 5 x 5 soit 25 poquets à l’intérieur

de laquelle est délimité un carré de rendement de 3 x 3 soit 9 plants. Compte tenu de la

différence des écartements de semis sur la ligne, la superficie de la parcelle élementaire a varié

(20,25 m2 pour l’écartement 1 et 10,12 m2 pour l’écartement 2) ainsi que celle du carré de

rendement (7,29 m2 pour l’écartement 1 et 3,64 m2 pour l’écartement 2) (Figure 11).

68,5 m

27 m

2m

1,5m 1m

T3

E2 : écartement 2 (0,9-0,45m)

E1 : écartement 1 (0,9-0,9m)

Page 27: UNIVERSITE GASTON BERGER DE SAINT LOUIS

17

Vert : poquets des carrés de rendement

Bleu : poquets des bordures

a b

Figure 11 : Schéma de la parcelle élémentaire : Ecartement 1 (a), Ecartement 2 (b)

Les facteurs étudiés sont au nombre de trois :

a. Origine des semences qui a été le facteur principal avec deux modalités (accessions de

mil locales et Thialack 2)

b. Ecartement de semis qui est considéré comme facteur secondaire avec deux modalités

(Ecartement 1 = 0,9-0,9m et Ecartement 2 = 0,9 - 0,45m)

c. Dose de fertilisation qui a été le facteur tertiaire avec (06) niveaux (Tableau 2)

Les doses de fertilisation (Tableau 2) sont calculées à partir du nombre de poquets par hectare

qui varie selon l’écartement de semis, E1 : 12346 poquets/hectare et E2 : 24692 poquets /hectare

Le calcul de ces combinaisons est effectué en se basant sur la dose de fertilisation recommandée

par l’ISRA à savoir 150 kg/ha de NPK +100 kg urée. Dans la présente étude, l’engrais ternaire

15-15-15 est choisi comme engrais de référence pour calculer les combinaisons d’engrais

simple par poquet.

4,5 m

2,7 m

4,5 m

2,7 m

0,9m

Page 28: UNIVERSITE GASTON BERGER DE SAINT LOUIS

18

Tableau 2 : Description des différentes doses de fertilisation minérale pour les deux

écartements semis (E1 : 90-90 cm et E2 : 90-45 cm)

Quantité par ha Quantité par poquet

Urée

(kg) NPK (kg)

Urée (g) DSP (g) Kcl (g)

Niveau E1 E2 E1 E2 E1 E2

N1 Témoin 0 0 0 0 0 0 0 0

N2 DR 100 150 12,1 6,03 7,29 3,64 2,97 1,49

N3 25% DR 25 37,5 3,02 1,5 1,8 0,91 0,74 0,35

N4 50% DR 50 75 6,03 3 3,64 1,82 1,49 0,75

N5 75% DR 75 112,5 9,05 4,5 5,47 2,73 2,23 1,12

N6 125% DR 125 187,5 15 7,53 9,1 4,55 3,7 1,86

DR : Dose Recommandée par la recherche ; DSP : Super Phosphate Double ;

KCl : Chlorure de Potassium E1 : Ecartement 1 ; E2 : Ecartement 2

2.3.4 Mise en place et conduite des essais

2.3.4.1 Echantillonnage et caractérisation des sols des parcelles d’essai

Avant l’installation des tests, des échantillons de sols sont prélevés dans les parcelles ciblées

afin de procéder à des analyses au laboratoire. Le prélèvement est effectué comme suit :

- Pour chaque parcelle, dans chacune des trois répétitions du dispositif expérimental, trois

points sont choisis suivant la méthode de la diagonale ;

- Des échantillons sont prélevés sur ces points dans l’horizon 0-20 cm à l’aide d’une

tarière hélicoïdale ;

- Les trois échantillons obtenus dans chaque répétition sont mélangés pour donner un

échantillon composite, ce qui correspond à 3 échantillons composites par parcelle.

Ces échantillons sont analysés au laboratoire du Centre National de Recherches Agronomiques

(CNRA) de Bambey. Les paramètres suivants ont été mesurés :

Le potentiel hydrogène (pH) selon la méthode standard.

Cette méthode a consisté à prélever 10 g de sol non broyé pour chaque échantillon, mélangés

avec 25ml d’eau distillée dans des éprouvettes. Ces dernières sont agitées pendant 1mn puis

laissées au repos pendant 30mn. La lecture est effectuée à l’aide d’un pH-mètre et a consisté à

plonger l’électrode dans la suspension de solution et à lire la valeur du pH.

Page 29: UNIVERSITE GASTON BERGER DE SAINT LOUIS

19

Les teneurs en carbone total, phosphore assimilable et azote total

Les teneurs en carbone total, phosphore assimilable et azote total ont été déterminées

respectivement par les méthodes de Walkley et Black (1934) ; Olsen (1982) et Kjeldahl (1883)

modifiée.

La matière organique

La matière organique est déterminée selon la formule MO = Teneur en carbone x 1,72

(avec 1,72 le coefficient stable des sols cultivés).

La texture des sols

Elle a été déterminée à partir du triangle texturale références des sols

2.3.4.2 Conduite des essais

Le semis des deux variétés de mil est effectué à sec le 10 juillet 2018 dans les deux parcelles à

l’aide d’un rayonneur. Dans le cadre de notre étude, deux écartements de semis sont choisis :

- Pour l’écartement 1, le mil est semé en respectant les normes agronomiques prescrites

par l’ISRA soit 0,9 m entre les lignes et 0,9 m sur la ligne correspondant à 12346 poquets

par ha.

- Pour l’écartement 2, le mil est semé à l’écartement 0,9 m entre les lignes et 0,45m entre

les poquets soit 24692 poquets par ha.

Un démariage manuel à 3 plants par poquet est effectué pendant le premier sarclo-binage à la

houe qui a eu lieu 10 jours après levé (JAL, on considère que la levé c’est 3 jours après la

première pluie utile).

Du fait du déficit pluviométrique très particulier noté pendant l’hivernage 2018 à Nguekokh,

deux irrigations d’appoint de 20 mm chacune sont apportées sur nos parcelles les 26 et 35 JAL.

L’application des engrais est faite de façon localisée à l’aide de gabarits et a eu lieu juste après

le démariage. Les autres opérations culturales après le démariage, ont consisté en un sarclo-

binage au 54ème JAL. En outre, des traitements phytosanitaires à base de Diméthoate sont

effectués suite à une observation de perce-oreilles (Forficula auricularia) pendant la floraison

femelle. À maturité (95 JAL), les épis de mil et la biomasse aérienne sont récoltés pour toutes

les deux variétés.

2.3.5 Observations et mesures

Les observations et les mesures sont réalisées spécifiquement sur les poquets du carré de

rendement.

Le nombre de talles (total et fructifère)

Page 30: UNIVERSITE GASTON BERGER DE SAINT LOUIS

20

Ils sont comptés manuellement en même temps, au moment de la floraison mâle plus

précisément 50 (JAL).

La longueur des épis

Elle est mesurée juste après la récolte à l’aide d’une règle graduée. C’est la partie de l’épi qui

contient les inflorescences sur la panicule de mil jusqu’au bout de celle-ci.

Les rendements

À maturité, les épis et la biomasse de chaque carré de rendement sont récoltés. Le rendement

en biomasse est déterminé à l’aide d’un peson (marque Sharp) après trois semaines de séchage

au soleil.

Après battage, le rendement en grains est déterminé à l’aide d’une balance de précision de

0,001g (marque sartorius).

Les rendements en grains et en biomasse de chaque parcelle utile sont ensuite extrapolés à

l’hectare suivant la formule :

R = (p*12346)/n pour écartement (0,9x0, 9 m)

R = (p*24692)/n pour écartement (0,9x0, 45 m) avec :

- R = rendement à l’hectare

- p= la quantité de la production sur la parcelle utile

- n = nombre de poquet par parcelle utile (en considérant le nombre de poquets survécus)

2.4 Traitement et analyse des données

La saisie des données est faite sur feuille de tableur Excel. L’analyse de variance (ANOVA) est

effectuée sur toutes les variables mesurées, suivie d’un test de normalité et d’un test de

comparaison (test Tukey) seuil 5% en utilisant le logiciel R version 3.2.4.

Page 31: UNIVERSITE GASTON BERGER DE SAINT LOUIS

21

CHAPITRE III : RESULTATS ET DISCUSSION

3.1. Résultats

3.1.1 Résultats du diagnostic participatif

À travers le focus groupe organisé le 20 juin 2018 et les entretiens semi-structurés, les

contraintes de production du mil dans la zone de Nguekokh sont identifiées de façon

participative. Dans le Tableau 3, sont consignées ces contraintes sous forme hiérarchique. Les

contraintes liées aux sols, se traduisant par insuffisance des terres et la baisse de fertilité de ces

terres demeurent les plus cruciaux.

Tableau 3 : Les contraintes de production du mil à Nguekokh

4-Problèmes liés aux matériels

agricoles

Insuffisance des terres ;

Baisse de fertilité des terres 1-Problèmes liés au sol

2- Problèmes liés aux semences

3- Problèmes liés aux ravageurs

5- Problèmes de financement

L’inaccessibilité des semences ;

Méconnaissance des nouvelles variétés ;

La cherté des semences certifiées

Oiseaux granivores ;

Termites ;

Nématodes

Manque de matériels agricoles sophistiqués ;

Matériel agricole archaïque

Difficulté d’accès au crédit ;

Manque de financement

Sources des problèmes Typologie des problèmes

Page 32: UNIVERSITE GASTON BERGER DE SAINT LOUIS

22

3.1.2 Résultats des tests en parcelles expérimentales

3.1.2.1 Caractéristiques physiques et chimiques des sols dans les parcelles 1 et 2

Les caractéristiques physiques et chimiques des sols des parcelles sont consignées dans le

Tableau 4. Il est constaté que les sols des deux parcelles ont des caractéristiques complètement

différentes du point vue couleur (observation). Les analyses d’échantillons de sol ont permis de

confirmer que en termes de phosphore assimilable, la parcelle 2 (25 ppm) présente de meilleurs

résultats par rapport à la parcelle 1 (5ppm) ainsi que pour la matière organique qui correspond

à 0,04 % pour la parcelle 1 et 1,18% pour la parcelle 2.

Tableau 4 : Caractéristiques physiques et chimiques des sols des parcelles 1 et 2

pH

eau

PAss

(ppm)

CT

(%)

NT

(%)

MO

(%)

C/N

Argiles

(%)

Limons

(%)

SF

(%)

Texture

Parcelle 1

7,37

5

0,32

0,03

0,04

13,36

3,24

2,19

94,57

Sableuse

Parcelle 2

8,27

25

0,69

0,06

1,18

13,87

9,57

2,23

88,2

Sablo-

limoneuse Les valeurs présentées sont les moyennes des trois répétions avec : Potentiel hydrogène (pH), Matière organique

(MO), azote total (NT), Carbone / Azote (C/N), Sables Fins (SF), Phosphore Assimilable (PAss), Carbone Total

(CT)

Page 33: UNIVERSITE GASTON BERGER DE SAINT LOUIS

23

3.1.2.2 Effets de l’écartement de semis sur le nombre total de talles par poquet

Dans la Figure 12 sont consignés les effets de l’écartement de semis sur le nombre total de talles

par poquet. L’analyse des résultats a montré que le nombre total de talles par poquet n’a pas

significativement changé d’une parcelle à l’autre (p=0,09).

Cependant, l’analyse statistique des résultats dans la parcelle 1, a révélé que l’écartement de

semis possède un effet significatif (P=0,01) sur le nombre total de talles. Le meilleur résultat

est obtenu avec l’écartement 1 (90-90 cm), qui donne en moyenne 12,31 ± 0,20 talles par

poquets par rapport à l’écartement 2 (90-45 cm) qui donne 9,31± 0,23 talles en moyenne par

poquets.

Par contre sur la parcelle 2, l’analyse statistique a montré que la densité de semis n’a pas

d’influence significative sur le nombre total de talles par poquet (p=0,07).

Figure 12 : Effets de l’écartement de semis sur le nombre total de talles par poquet.

Les valeurs sont les moyennes des 3 répétions. Les lettres en minuscule comparent les effets des écartements.

Ainsi, les moyennes portant des lettres minuscules identiques ne sont pas significativement différentes au seuil de

5% selon le test de Tukey.

3.1.2.3 Effets de l’écartement de semis sur le rendement en biomasse

Les résultats de l’analyse de variance des effets de l’écartement de semis sur le rendement en

biomasse sont illustrés par la Figure 13. Cette analyse a montré que le rendement en biomasse

varie significativement en fonction de la densité de semis. Sur l’ensemble des deux parcelles

0

2

4

6

8

10

12

14

16

18

90 -90 90 - 45 90 - 90 90 - 45

Parcelle 1 Parcelle 2

No

mb

re t

ota

l d

e to

tal

de

tall

es

Ecartement de semis (cm)

bab ab

a

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24

l’écartement de semis réduit induit un rendement significativement supérieur (p=0,002) à celui

de l’écartement standard semis (0,9-0,9m).

Sur la parcelle 1, le rendement a plus que doublé (p=0,001) avec l’écartement réduit et

correspond à 7413 ± 314 kg/ha contre 3937 ± 307 kg/ha pour l’écartement standard soit une

augmentation de 88,29% en valeur relative si l’écartement de semis est réduit.

Sur la parcelle 2, cette même tendance se dessine avec une différence hautement significative

entre les effets des différents écartements (p= 0,0007). L’écartement réduit donne un rendement

de 7702 ± 663 kg/ha contre 4249 ± 260 kg/ha pour l’écartement standard soit une augmentation

de 81,26 % en valeur relative.

Figure 13 : Effets de l’écartement de semis sur le rendement en biomasse

Les valeurs sont les moyennes des 3 répétions. Les lettres en minuscule comparent les effets des écartements.

Ainsi, les moyennes portant des lettres minuscules identiques ne sont pas significativement différentes au seuil de

5% selon le test de Tukey.

3.1.2.4 Effets de l’origine des semences sur la longueur des épis

La Figure 14 montre les effets de l’origine des semences sur la longueur des épis. L’analyse

statistique révèle que la longueur des épis varie significative d’une parcelle à l’autre (p=0,04).

La parcelle 2 donne le meilleur résultat (53,67 cm) par rapport à la parcelle 1 où le meilleur

résultat est de 51,04 cm.

0

2000

4000

6000

8000

10000

12000

90 -90 90 - 45 90 -90 90 - 45

Parcelle 1 Parcelle 2

Ren

dem

ent

en B

iom

asse

(kg/h

a)

Ecartement de semis (cm)

a

b

b

a

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25

À l’échelle de la parcelle, l’analyse montre que la longueur des épis de la variété Thialack 2 est

significativement supérieure (p=0,03) à celle des épis des accessions de mil sur la parcelle 1.

Par contre sur la parcelle 2, aucune différence significative n’a été notée entre les effets des

deux variétés (p=0,10).

Figure 14 : Effets de l’origine des semences sur la longueur des épis

Les valeurs sont les moyennes des 3 répétions. Les lettres en minuscule comparent les effets de l’origine des

semences. Ainsi, les moyennes portant des lettres minuscules identiques ne sont pas significativement différentes

au seuil de 5% selon le test de Tukey.

3.1.2.5 Effets de l’origine des semences sur le rendement en biomasse

La Figure 15 illustre l’effet de l’origine des semences sur le rendement en biomasse. Une

analyse d’ensemble de la Figure montre que le meilleur résultat (6618 kg/ha) est obtenu au

niveau de la parcelle 2 avec la variété Thialack qui a donné le meilleur résultat dans toutes les

deux parcelles. Néanmoins, l’analyse de variance révèle que ces différences de rendement ne

sont pas significatives (p=0,07) au seuil de 5%. En conséquence, dans la présente étude, le

facteur origine des semences n’influence pas significativement le rendement en biomasse dans

les deux parcelles testées.

0

10

20

30

40

50

60

Variété locale Thialack 2 Variété locale Thialack 2

Parcelle 1 Parcelle 2

Lo

ngueu

r d

es e

pis

(cm

)

Origine des semences

Accession Accession

b

a ab

a

Page 36: UNIVERSITE GASTON BERGER DE SAINT LOUIS

26

Figure 15 : Effets de l’origine des semences sur le rendement en biomasse

Les valeurs sont les moyennes des 3 répétions. Les lettres en minuscule comparent les effets de l’origine des

semences. Ainsi, les moyennes portant des lettres minuscules identiques ne sont pas significativement différentes

au seuil de 5% selon le test de Tukey.

3.1.2.6 Effets de l’écartement de semis selon l’origine des semences sur le rendement en

grains

Les effets de l’écartement de semis selon l’origine des semences sur le rendement en grains sur

la parcelle 1 sont représentés dans la Figure 16. L’analyse statistique a montré une différence

significative (p=0,01) entre les effets des différents écartements selon l’origine des semences.

L’écartement de semis réduit donne le meilleur rendement et ceci quelle que soit l’origine des

semences. Le passage du nombre de poquets par hectare du simple au double est traduit par une

augmentation du rendement en grains correspondant à 222, 2 kg /ha pour les accessions et

311, 2 kg /ha pour la variété Thialack 2. Cette dernière, semée à haute densité offre le meilleur

rendement (1198, 3 kg /ha) par rapport aux accessions de mil qui, semée à haute densité, ont

donné 1007, 4 kg/ha au maximum.

En ce qui concerne la parcelle 2, une attaque d’oiseaux granivores avant la récolte a fait que le

rendement en grains n’a pas pu être évalué.

0

2000

4000

6000

8000

Accession Thialack 2 Accession Thialack 2

Parcelle 1 Parcelle 2

Ren

dem

ent

en b

iom

asse

( k

g/h

a)

Orignine des semences

a a a a

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27

Figure 16 : Effets de l’écartement de semis sur le rendement en grains selon l’origine des

semences

Les valeurs sont les moyennes des 3 répétions. Les lettres en minuscule comparent les effets de l’écartement de

semis selon l’origine des semences. Ainsi, les moyennes portant des lettres minuscules identiques ne sont pas

significativement différentes au seuil de 5% selon le test de Tukey.

3.1.2.7 Effets des différents traitements sur le rendement en biomasse

Le Tableau 5 met en évidence les effets des différentes doses de fertilisation sur le rendement

en biomasse du mil sur les deux parcelles. Le meilleur rendement est obtenu au niveau de la

parcelle 2 et le témoin engendre le plus faible rendement dans toutes les deux parcelles. Le

rendement en biomasse n’a pas augmenté proportionnellement à la dose de fertilisation. Par

ailleurs, à partir de la dose optimale, le rendement en biomasse devient presque constant dans

la parcelle 2 et chute pour la parcelle 1 malgré l’augmentation de la dose d’engrais minéral.

Une analyse comparée des résultats obtenus au niveau des deux parcelles montre que la dose

d’engrais optimale pour la parcelle 2, qui est égale à 75 % de la dose recommandée est inférieure

à celle de la parcelle 1, qui correspond à la dose recommandée par l’ISRA à savoir 150 kg de

NPK + 100 Kg/ha d’urée (46%).

S’agissant des effets intra-parcelle, une différence significative (p=0,04) a été notée entre les

différents traitements sur la parcelle 1. En effet, le rendement obtenu avec le témoin absolu est

significativement inférieur à celui de tous les autres. Le T2 (dose recommandée) a donné le

meilleur rendement (6177 kg/ha) dans la parcelle 1. Sur la parcelle 2, l’analyse de variance a

0

200

400

600

800

1000

1200

1400

90 -90 cm 90 -45 cm 90 -90 cm 90 -45 cm

Variété locale Thialack 2

Ren

dem

ent

en g

rain

s (k

g/h

a)

Ecartement de semis selon l'origine des semences

Accession

a

cb

b

c

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28

montré aussi que la dose de fertilisation influence significativement (P=0,03) le rendement en

biomasse. Le meilleur rendement est obtenu avec le T5 (75% dose recommandée) qui donne

7006 kg/ha.

Tableau 5 : Effet des différents traitements sur le rendement en biomasse

Traitement Parcelle 1 Parcelle 2

T1 (Témoin) 2606 ± 1133 c 5190 ± 421 b

T2 (Dose Recommandée : DR) 6177 ± 428 a 5835 ± 312 a

T3 (25% DR) 5575 ± 358 ab 5546 ± 391 ab

T4 (50% DR) 5509 ± 327 ab 6521 ± 501 a

T5 (75% DR) 5994 ± 377 a 7006 ± 412 a

T6 (125% DR) 5814 ± 327 a 5984 ± 387 a

Les valeurs sont les moyennes des 3 répétions. Les lettres en minuscule comparent les effets des traitements.

Ainsi, les moyennes portant des lettres minuscules identiques ne sont pas significativement différentes au seuil

de 5% selon le test de Tukey.

Page 39: UNIVERSITE GASTON BERGER DE SAINT LOUIS

29

3.1.3 Restitution des résultats de l’expérimentation

Au terme de la conduite des essais, une journée porte ouverte a été organisée. Suite à une

évaluation de ces producteurs par rapport à nos technologies, il en découle de cette évaluation

que 71% (Figure 17) des producteurs sont convaincus de la pertinence des technologies

d’intensification du mil proposées à savoir la réduction de l’écartement de semis et l’adoption

des variétés améliorées.

Figure 17 : Pourcentage d’acception des producteurs

71

29

Les produteurs qui acceptent la technologie Les producteurs qui sont retissents

Page 40: UNIVERSITE GASTON BERGER DE SAINT LOUIS

30

3.2 Discussion

3.2.1 Analyse prospective du diagnostic participatif

À l’instar de toutes les zones rurales du Sénégal, la production du mil à Nguekokh souffre de

plusieurs problèmes tels que l’insuffisance des terres et la baisse de la fertilité des sols, qui sont

citées parmi les plus cruciaux. En réalité, ce problème serait une des conséquences directes de

la forte pression démographique entre autre, qui se traduit par une surexploitation des terres

conduisant ainsi à la baisse des rendements des cultures et donc à l’insécurité alimentaire

presque chronique (König, 2012). Une autre explication du manque de terres pourrait être la

position géographique de cette commune. En effet, la zone est marquée par la proximité de trois

pôles attractifs : Mbour, Dakar et les stations balnéaires de la petite côte, qui favorisent une

urbanisation galopante et entraînent une forte réduction des terres arables liées à une forte

spéculation foncière (Diarra, 2005). De ce fait, les terres deviennent de moins en moins

accessibles à cause de l’augmentation de leur prix et du fermage, ce qui rend difficile les

possibilités pour contracter un emprunt.

Parallèlement à ce problème de manque de terres, existe aussi celui des semences qui se traduit

par la méconnaissance des nouvelles variétés ou encore l’inaccessibilité et la cherté des

semences certifiées, indiquent les agriculteurs dans le focus groupe organise à Nguekokh en

Juin 2018. Ceci à notre avis, poserait la question de l’inefficacité de la vulgarisation des acquis

de la recherche, mais aussi parfois de la réticence des paysans par rapport aux innovations.

Selon Garric (2019), cela pourrait être dû au fait que beaucoup de paysans ne voient pas l’intérêt

de payer alors qu’ils n’obtiennent pas forcément de meilleurs rendements avec les semences

certifiées par rapport aux semences paysannes. Et, c’est ce qui, par ailleurs, ressort des résultats

obtenus du focus groupe à Nguekokh où le taux d’adoption des variétés améliorées reste encore

très faible.

Les oiseaux granivores constituent aussi une contrainte de production non négligeable réduisant

ainsi la motivation des agriculteurs à produire du mil (d’après les agriculteurs ayant pris part au

focus groupe de juin 2018). Selon Mbaye (1993), les pourcentages de dégâts sur le mil, le riz

ou le sorgho varient de 10 à 30 % pour ces espèces nuisibles. Dans le cadre de notre étude, il a

été observé que les oiseaux granivores étaient exclusivement à l’origine de la perte de

rendement notée dans la parcelle 2, car celle-ci était très isolée par rapport aux autres parcelles

de mil de la zone.

Page 41: UNIVERSITE GASTON BERGER DE SAINT LOUIS

31

Le manque de financement, de matériels agricoles sophistiqués et d’appui dont se plaignent les

agriculteurs de la commune de Nguekokh comme souvent dans le monde rural serait

étroitement lié à l’absence de politiques agricoles adéquates, cohérentes et durables dans ce

pays.

3.2.2 Amélioration des facteurs de production

Les caractéristiques physiques et chimiques des sols des deux parcelles sont nettement

différentes. En effet, le sol de la parcelle 2 s’avère être le meilleur que celui de la parcelle 1.

Une explication possible de cette situation pourrait être les différents précédents culturaux de

ces parcelles. Par ailleurs, il se trouve que la parcelle 1 avait comme précédent cultural du

manioc, qui selon Akanza et Yao-Kouamé (2011), est réputé comme une plante susceptible

d’épuiser le sol au regard des mobilisations minérales qu’entraîne sa culture. Quant à la parcelle

2, le précédent cultural était constitué de cultures maraichères avec une utilisation non

négligeable d’engrais minéral. Or, les cultures maraichères au Sénégal se font généralement

pendant la saison sèche froide favorisant ainsi un repos du sol avant l’installation de

l’hivernage. Dès lors, la meilleure qualité du sol de la parcelle 2 par rapport à la parcelle 1

pourrait donc découler des résidus d’engrais minéraux utilisés pour les cultures maraichères ou

encore de ce temps de repos dont le sol a pu bénéficier avant l’installation de notre essai.

Ce qui n’est pas le cas de la parcelle 2 où le manioc est enlevé juste avant le semis du mil.

L’écartement de semis réduit (90 - 45 cm soit 24692 poquets/hectare) donne moins de talles par

poquets par rapport à l’écartement de semis standard (90 - 90 cm soit 12346 poquets /hectare)

sur la parcelle 1. Ceci poserait la question de la concurrence des plants pour l'humidité, la

lumière et les éléments nutritifs si la densité de semis est importante. Nos résultats corroborent

ceux de Moulia et al. (1999) ; Siene et al. (2010) qui stipulent que le nombre de talles diminue

avec l’augmentation de la densité de semis. Par contre, cette approche n’est pas vérifiée sur la

parcelle 2 où le nombre de talles n’a pas connu une diminution significative avec

l’augmentation de la densité de semis. Les analyses d’échantillons de sols provenant des

parcelles 1 et 2 ont montré que la parcelle 2 avait des propriétés physico-chimiques bien

meilleures que celle de la parcelle 1. Alors, s’il y a assez d’éléments nutritifs dans le sol, la

concurrence est réduite même si la densité de semis augmente, ce qui pourrait donc justifier la

situation observée dans la parcelle 2. Des résultats similaires ont été obtenus avec les études de

Gala et al. (2011), qui ont montré que le nombre de talles évolue avec l’augmentation

d’éléments nutritifs.

Page 42: UNIVERSITE GASTON BERGER DE SAINT LOUIS

32

Parallèlement au nombre total de talles, l’augmentation de la densité de semis a permis une

augmentation nettement significative du rendement en biomasse, mais cette fois sur toutes les

deux parcelles. Tout de même, des améliorations de 88,29% et de 81,26% ont été notées

respectivement dans les parcelles 1 et 2 même si le nombre de talles est plus important dans

l’écartement standard dans la parcelle 1. Cela peut être expliqué par le passage de l’écartement

de semis standard (90 - 90 cm) à l’écartement de semis réduit (90 - 45 cm), qui permet de

doubler le nombre de poquets par hectare. Ces résultats sont conformes à ceux de Siene et al.

(2010), qui établissent que les densités élevées permettent de produire les plus grandes

biomasses sèches. Ils sont aussi conformes à bien d’autres études qui ont démontré que le

rendement en biomasse augmente avec l'accroissement de la densité de population comme ceux

de Payne, (1997) et de Bagayoko (2012). Par contre, De Rouw (2004) a établi qu’une densité

de semis élevée n’est pas vraiment nécessaire pour obtenir un rendement élevé dans le Sahel.

En termes de longueur des épis, le Thialack 2 donne le meilleur résultat par rapport aux

accessions locales et ceci dans les deux parcelles. Le caractère épis longs pouvant atteindre 70

cm (catalogue officiel des espèces et variétés cultivées au Sénégal 2012) constitue un caractère

génétique phare de la variété Thialack 2. Donc, il est bien normal que dans le cadre de cette

étude, la variété Thialack 2 présente de meilleurs résultats par rapport à ces accessions de mil.

Cela est d’autant plus plausible que les accessions de mil locales sont issues de semences

paysannes reconduites durant plusieurs années. Or, le mil est une plante allogame à 70%

(Ahmadi et al., 2002), en conséquence, la reconduction des semences d’une variété pendant

plusieurs années aboutit à des variétés paysannes (accessions) qui présentent des

caractéristiques agronomiques plus diversifiées. Selon Sy et al. (2015) presque dans toutes les

exploitations, les semences sont choisies sur la récolte de l'année précédente par le chef de carré.

Cette pratique continue de sélection des semences a fait que les variétés cultivées deviennent

des accessions hétérogènes.

Avec la variété améliorée, Thialack 2, une augmentation du rendement en grain par rapport aux

accessions de mil locale a été notée. Selon Sy et al. (2015), la longueur des épis a un impact sur

le rendement en grains, ce qui pourrait sans doute expliquer d’une part, la différence de

rendement existant entre le Thialack 2 aux épis longs et les accessions de mil aux épis moins

longs. D’autre part, des observations faites sur le terrain nous ont montré que les parcelles de

production de mil étaient bien infestées de mil sauvages. De cette manière, le caractère

allogame, fait que la cohabitation de ces deux types de mil pourrait favoriser le transfert de

gènes conférant ainsi au mil cultivé à Nguekokh des caractères similaires à celui du mil

Page 43: UNIVERSITE GASTON BERGER DE SAINT LOUIS

33

sauvages dont la taille courte des épis, un tallage excessif et naturellement une baisse des

rendements. Il reste que l’origine de ce mil sauvage semble être inconnu à notre avis, pourrait

avoir deux explications : la première met en jeu la présence du mil sauvage dans la semence

des producteurs et la deuxième repose éventuellement sur la présence d’un stock de semence

de mil sauvage dans le sol des parcelles des producteurs.

L’origine des semences n’a pas d’influence significative sur le rendement en biomasse quelle

que soit la parcelle. Les études de Norman et Arkebauer, (1991), ont montré que la production

de la biomasse chez les cultures est fonction de la quantité de rayonnement absorbée par le

couvert végétal et de l’efficience de conversion de ce rayonnement en matière sèche. Ce qui

pourrait bien être à l’origine des résultats observés dans cette étude. Néanmoins, la particularité

du Thialack 2 est que les feuilles restent vertes après la maturité contrairement aux autres

variétés et accessions de mil dont les feuilles se dessèchent à la maturité. Cette particularité

confrère au Thialack 2 sa bonne qualité de fourrage et pourrait être une motivation pour les

paysans de choisir cette variété.

D’une parcelle à l’autre, il a été observé que le rendement en mil et en biomasse change en

fonction de la dose de fertilisation ainsi que de la dose d’engrais optimale. Cette situation

pourrait bien découler de la différence de type de sol notée sur les deux parcelles. Par ailleurs,

les résultats d’analyse de sols ont montré que la parcelle 1 de texture sableuse, était moins riche

que celle de la parcelle de texture sablo-limoneuse, qui d’ailleurs est plus favorable à la culture

du mil.

La baisse de rendement observée à partir de la dose optimale sur chaque parcelle aboutit

pratiquement aux mêmes conclusions que les lois de la fertilisation comme celle des

accroissements moins que proportionnels, qui stipulent que quand on apporte au sol des doses

croissantes d’un élément fertilisant, les augmentations de rendement obtenues sont de plus en

plus faibles au fur et à mesure que les quantités apportées s’élèvent (UNIFA, 2005).

Dans le cadre de ce travail, la dose optimale varie d’une parcelle à l’autre d’où la nécessité pour

chaque producteur de connaitre les caractéristiques de son sol avant d’envisager une fertilisation

minérale.

La faiblesse du rendement notée avec le témoin sur toutes les deux parcelles témoigne de

l’importance de l’utilisation de fertilisants pour accroitre les rendements. Selon la FAO (2000),

les éléments dont la plante a besoin en plus grande quantité sont l’azote, le phosphore et le

potassium. Chez le mil, les éléments Azote, Phosphore et Potassium (NPK) jouent un rôle

Page 44: UNIVERSITE GASTON BERGER DE SAINT LOUIS

34

déterminant dans le développement végétatif et la reproduction du mil (Kimba, 2010). En

conséquence, l’apport de ces éléments explique la supériorité des rendements des autres

traitements par rapport au témoin n’ayant pas reçu d’engrais minéral.

Page 45: UNIVERSITE GASTON BERGER DE SAINT LOUIS

35

CONCLUSION ET PERSPECTIVES

Les résultats obtenus dans cette étude montrent que la production du mil dans la commune de

Nguekokh souffre encore d’énormes difficultés dont les plus urgentes semblent être liées à la

disponibilité ainsi qu’à la qualité des terres d’une part, et d’autre part à la qualité et productivité

des variétés cultivées. La variété Thialack 2, qui est une variété améliorée de surcroit à double

usage s’adapte bien à Nguekokh et montre des performances bien meilleures que celles des

variétés paysannes. Cette performance est d’ailleurs encore meilleure en conditions de forte

densité de semis avec l’adaptation de la dose de fertilisation optimale mais, varie d’une parcelle

à l’autre et plus le sol est pauvre plus elle augmente confirmant ainsi la nécessite de revisiter

les formules de fertilisation des cultures en les adaptant aux contextes pédoclimatiques. Dans

un contexte de forte urbanisation qui engendre une baisse des terres agricoles et d’une

agriculture, qui se veut de plus en plus durable en termes de productivité, l’intensification de la

culture du mil à travers l’adoption des variétés améliorées ; l’augmentation de la densité de

semis et l’optimisation de la fertilisation minérale pourraient bien constituer une option crédible

afin de faire face à l’insécurité alimentaire en milieu rurale. Des études complémentaires

pourront être envisagées pour :

1. Etablir une méthode simplifiée en vue d’estimer les degrés de fertilité du sol d’une parcelle

pour pouvoir raisonner et optimiser les apports de fertilisants.

2. Améliorer les itinéraires techniques existant prenant en compte les contraintes du milieu afin

d’optimiser la production.

3. Vulgariser les résultats au travers d’essais multi locaux dans plusieurs endroits de la

commune reste cependant nécessaire pour confirmer les potentialités réelles de ces pratiques

d’intensification durables de la culture du mil. Ce qui pourrait contribuer à résoudre le problème

de l’insécurité alimentaire qui affecte la commune de Nguekokh

Page 46: UNIVERSITE GASTON BERGER DE SAINT LOUIS

IX

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