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Reviewing Studies Etudes critiques - Betrachtungen zur Literatur Pic de la Mirandole - Contribution a la connaissance de l’humanismephiloso- phique renaissant Le titre de cette breve analyse est precisement celui d’un livre que Jacques Queron vient de faire paraitre (2eme trimestre de 1986) au Service des publications de I’Universite de Provence. Avant d’en donner quelques cornmentaires, rappelons brievement qui etait Pic de la Mirandole. Jean Pic, Comte de la Mirandole, est ne pres de Modene le 24 fevrier 1463. I1 devait mourir, empoisonne dit-on par son secretaire, le 17 novembre 1494 a Florence. Extraordinairement preco- ce, il proposa, alors qu’il avait vingt-cinq ans a peine, de soutenir publiquement a Rome 900 the- ses sous le titre ede omni re scibili)). La ctDisputatioi, est interdite et un bref d’lnnocent VIIl (4 aoiit 1487) ordonne la destruction des ((Conclusioness. Pic ecrivit encore I’Apologia, I’Hepta- plus et de nombreux sonnets, maitrisant admirablement a la fois le latin, le toscan et I’italien. Bien que protege par Laurent de Medicis, il dut quitter I’ltalie (il se refugie a Paris de juillet 1485 a mars 1486), persecute surtout par les gens d’Eglise. Le livre de J. Queron est remarquablernent concis (140 pages d’un texte clair et aCrC) avec diverses notices qui en facilitent la lecture . . . 46 pages de notes, des reperes biographiques, une bibliographie fort complete, un index mominurn)). L’ouvrage comprend - apres un bref avant-propos ou I’auteur evoque notamment les histo- riens de la philosophie d’avant la Renaissance - trois parties. Dans la premiere, J. Queron retient - dans I’aeuvre de Pic de la Mirandole - I’essentiel de ce qu’il a ecrit de 1486 a 1494, c’est-a-dire de cette etonnante trilogie que constituent l’Oratio, les neuf cents Conclusiones et 1’Apologia. L’auteur y ajoute I’Inedit des douze livres des Disputationurn in Astrologiam. La seconde partie du livre est consacree a I’analyse du christianisme de Pic de la Mirandole. La dernitre nous vaut quelques pages remarquables qui illustrent bien la pensee du philosophe florentin, cccontre la fausse science et pour I’homme)). Enfin, dans la conclusion, les themes de la ((passion intellectuel- len et de la ctliberte d’espritn sont evoques dans un raccourci suggestif. Voila un livre qui devrait figurer dans la bibliothtque de tous ceux qui s’interessent a la Renaissance. Paul-Emile Pilet Les Instruments h vent d’H. Bouasse Ceux qui ont fait des etudes superieures de physique, disons entre 1945 et 1970, connaissent certainement tous le nom de H. Bouasse. Non pas que ce professeur toulousain ait retenu le sou- venir par une decouverte particulierement illustre ou par un enseignement tout specialement bril- lant! H. Bouasse est l’auteur d’un gigantesque traite de Physique expt!rimentale de pres de trente volumes parus entre 1920 et 1948. Ces livres sont aujourd’hui epuises et il faut @tre reconnaissant au Centre National des Lettres et a la Librairie Scientifique et Technique Albert Blanchard (a Paris) d’en avoir decide la reedition, du moins partielie. En effet, les ouvrages de Bouasse ne valent pas seulement par la description, remarquablement precise - accompagnee d’illustrations Dialectica Vol. 40, N”4(1986)

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Pic de la Mirandole - Contribution a la connaissance de l’humanismephiloso- phique renaissant

Le titre de cette breve analyse est precisement celui d’un livre que Jacques Queron vient de faire paraitre (2eme trimestre de 1986) au Service des publications de I’Universite de Provence. Avant d’en donner quelques cornmentaires, rappelons brievement qui etait Pic de la Mirandole.

Jean Pic, Comte de la Mirandole, est ne pres de Modene le 24 fevrier 1463. I1 devait mourir, empoisonne dit-on par son secretaire, le 17 novembre 1494 a Florence. Extraordinairement preco- ce, il proposa, alors qu’il avait vingt-cinq ans a peine, de soutenir publiquement a Rome 900 the- ses sous le titre ede omni re scibili)). La ctDisputatioi, est interdite et un bref d’lnnocent VIIl (4 aoiit 1487) ordonne la destruction des ((Conclusioness. Pic ecrivit encore I’Apologia, I’Hepta- plus et de nombreux sonnets, maitrisant admirablement a la fois le latin, le toscan et I’italien. Bien que protege par Laurent de Medicis, il dut quitter I’ltalie (il se refugie a Paris de juillet 1485 a mars 1486), persecute surtout par les gens d’Eglise.

Le livre de J . Queron est remarquablernent concis (140 pages d’un texte clair et aCrC) avec diverses notices qui en facilitent la lecture . . . 46 pages de notes, des reperes biographiques, une bibliographie fort complete, un index mominurn)).

L’ouvrage comprend - apres un bref avant-propos ou I’auteur evoque notamment les histo- riens de la philosophie d’avant la Renaissance - trois parties. Dans la premiere, J. Queron retient - dans I’aeuvre de Pic de la Mirandole - I’essentiel de ce qu’il a ecrit de 1486 a 1494, c’est-a-dire de cette etonnante trilogie que constituent l’Oratio, les neuf cents Conclusiones et 1’Apologia. L’auteur y ajoute I’Inedit des douze livres des Disputationurn in Astrologiam. La seconde partie du livre est consacree a I’analyse du christianisme de Pic de la Mirandole. La dernitre nous vaut quelques pages remarquables qui illustrent bien la pensee du philosophe florentin, cccontre la fausse science et pour I’homme)). Enfin, dans la conclusion, les themes de la ((passion intellectuel- len et de la ctliberte d’espritn sont evoques dans un raccourci suggestif. Voila un livre qui devrait figurer dans la bibliothtque de tous ceux qui s’interessent a la Renaissance.

Paul-Emile Pilet

Les Instruments h vent d’H. Bouasse Ceux qui ont fait des etudes superieures de physique, disons entre 1945 et 1970, connaissent

certainement tous le nom de H. Bouasse. Non pas que ce professeur toulousain ait retenu le sou- venir par une decouverte particulierement illustre ou par un enseignement tout specialement bril- lant! H . Bouasse est l’auteur d’un gigantesque traite de Physique expt!rimentale de pres de trente volumes parus entre 1920 et 1948. Ces livres sont aujourd’hui epuises et il faut @tre reconnaissant au Centre National des Lettres et a la Librairie Scientifique et Technique Albert Blanchard (a Paris) d’en avoir decide la reedition, du moins partielie. En effet, les ouvrages de Bouasse ne valent pas seulement par la description, remarquablement precise - accompagnee d’illustrations

Dialectica Vol. 40, N”4(1986)

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toujours d’une grande clarte - d’une foule d’instruments de physique fondamentale et appli- quee. 11s ne meritent pas non plus d’Ctre relus uniquement pour les exposes critiques, fort bien faits au demeurant, des travaux de ses predecesseurs - qu’il fustige souvent avec humour. H. Bouasse a redige, en tCte dechacun des volumes de son traite, d’inoubliables prefaces. Aucunes de celles-ci, apres un demi-siecle, n’a vieilli. En les relisant, on y retrouve, tout a la fois, I’extra- ordinaire culture de I’auteur, son esprit railleur et ironique, son talent et sa vivacite de conteur, ses dons d’observation, son souci d’utiliser toujours une langue Claire et elegante qui le rend accessible a chacun, son interst pour I’anecdote sans jamais oublier I’essentiel ou se perdre, inuti- lement, dans le detail. Et nous qui nous rappelons avoir prepare nos examens de licence en com- pulsant les livres de H. Bouasse, conserverons a ce maitre le souvenir reconnaissant d’avoir ecrit, en tCte de chacun de ses livres, les prefaces que nous lisions avec delice, nous accordant ainsi d’agreables detentes au milieu d’etudes ardues, fastidieuses et difficiles parfois.

Parmi les ouvrages que redigea, sur une trentaine d’annees, le professeur Bouasse, les plus originaux sans doute sont ceux qu’il a consacre, a la fin de sa vie, a I’acousfique. Et en publiant les deux tomes sur les dnstruments d vent)), (1986), M. Kergomard, charge de recherche au CNRS, nous annonce qu’il sortira des presses du libraire Blanchard le volume sur les ((Tuyaux et resonafeurm ainsi que celui que Bouasse a consacre, en 1948, A la critique et a la refutation des theories sur l’acoustique. Ces ouvrages sur les dnstrumenfs de musiquea cordes el a membranes)), les N Verges et plaques, cloches el carillons)) seront egalement reedites.

Pour I’instant, le lecteur a donc le privilege de pouvoir disposer des deux volumes sur les ctlnstruments u vent)) qui traitent des anches mitalliques et membraneuses, des tuyaux a anche et a bouche, de I’orgue, du cor . . . Le premier de ces volumes avait paru en 1929 et la preface - I’une des plus remarquables qu’ait signee H. Bouasse - est consacree a la Science et ci l’archeolo- gie. En une trentaine de pages tres denses, I’auteur reussit a nous parler des instruments de musi- que dans I’antiquite tout en nous faisant decouvrir comment on en jouait et a quelles occasions. Le second volume, publie en 1930, est introduit par une excellente preface consacree au bafouillage. H. Bouasse commence par nous dire ce qu’il faut entendre par la . . . ctbafouiller, c’est superposer la sottise a I’ignorance, tenir des propos incoherents, prononcer des paroles sans suite, ignorer le sens des mots et les joindre au petit bonheur)). C’est le pretexte, pour Bouasse, d’epiloguer sur la fausse science et le faux savoir, sur les Ctudiants plus. . . abrutis que surmenes, sur les professeurs dont les eleves sont les victimes, sur les gens instruits qui ne sont pas intelli- gents. Pour H. Bouasse, la caracteristique d’une bonne pidagogie est d’klaguer I’accessoire au profit de I’essentiel. Quand sur cent vingt copies de bachot, le professeur toulousain, qui doit les corriger, retrouve partout les mCmes fautes . . . comment ne concluerait-il pas que le bafouillage, c’est au programme et au maitre qu’on le doit? I1 ne reste a Bouasse qu’a plaindre les eleves . . . et a les ttexecuter))! Et de s’en prendre au ministre de I’Education nationale et aux institutions, aux enseignements trop nombreux et trop diversifies, aux confusions entretenues entre la science et la technique. Mais que l’on ne s’y trompe pas, sous des dehors badins et facetieux, Bouasse marque des points avec un talent dialectique inconstestable. Tout en racontant des histoires - chacune ayant une base rigoureuse d’observation scientifique - et en decrivant, avec le plus grand soin, appareils et experiences, le professeur Bouasse fait ceuvre d’epistemologiste, singulikrement aver- ti et critique. C’est en cela qu’il n’a pas vieilli et qu’il merite d’stre lu et relu . . . pour notre plus grand plaisir d’ailleurs.

Paul Emile Pilet

La logique de la Decouverte et du Discours Publies conjointement par ((Communication and Cognition)) a Ghent et ((Plenum Press)) a

New York, (1985), les rapports d’une recente conference consacree au theme ((The Logic of Dis- course and the Logic of Scientific Discovery)) viennent d’Ctre edites par J. Hinfikka et F. Van- damme.

Cet ouvrage de pres de 300 pages demontre I’interCt de la logiqueformelle et du langage pour une meilleure approche de I’kpistdmologie et de la methodologie scientifiques. Dix-sept rapports, redistribues selon quatre themes fondamentaux, illustrent les possibilites et les perspectives des recherches touchant a la fois a la linguistique, a la logiqiie et aux diversec methodes epistemolo- giques.

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II serait hors de propos, dans ces quelques lignes, de vouloir resumer toutes les contributions presentees au colloque de Ghent-Helsinki. Je me bornerai a mentionner quelques textes particu- lierement significatifs et plus directement accessibles.

Ainsi, dans la prkface de I’ouvrage, Fernand Vandamme rappelle-t-il qu’une dimarche rationnelle aussi bien de la Science que de la methodologie presuppose une meilleure connaissance des interrelations entre la decouverte et le discours d’une part, la justification de leur logique res- pective, de I’autre. ctln order . . . to make decisions for the realization of a better mankind, a bet- ter world and a better man in a better world, we need to be aware of the functioning and the integration of the logics of discourse, discovery and justification, used by man for making his construction of his world, his tools, his action strategies)).

Une etude interessante est celle de Juakko Hintikka consacree a . . . ((la vraie et la fausse logi- ques dam la decouverte scientifique,). Dautres textes doivent encore @tre mentionnks . . . D. Pearce and V. Rantalu sur ctla continuite de la decouverte scientifique)), D. Vervenne and D. de Wuele sur ctla construction des definitions dans le travail au jour le jour d’un laboratoire)), I . Niinituolo sur les ccparadigmes et les problernes visant a resoudre les operations irnposkes par la recherche)), T.A.F. Kuipers sur ctla logique de I’explication intentionnelle)).

11 faudrait bien sik citer tous les articles de ces ccproceedings)). Je ne puis qu’engager ceux qui s’interessent a la methodologie et a I’Cpistemologie des sciences en general de se procurer cet ouvrage a qui il manque - pour &tre encore plus utile - un index des matieres.

Paul Emile Pilet

Dialectica Vol. 40, N O 4 (1986)