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Q UEL FUTUR ÉNERGÉTIQUE POUR LA PLANÈTE ? Q UELS ENJEUX , Q UELS CHALLENGES POUR LES PAYS PRODUCTEURS ? Intervention lors des Journées Parlementaires sur la Défense Economique Alger - 7 et 8 Juin 2008 © M. PREURE 2008

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QUEL FUTUR ÉNERGÉTIQUE POUR LA PLANÈTE ?

QUELS ENJEUX, QUELS CHALLENGES

POUR LES PAYS PRODUCTEURS ?

I n t e r v e n t i o n l o r s d e s J o u r n é e s P a r l e m e n t a i r e s

s u r l a D é f e n s e E c o n o m i q u e

A l g e r - 7 e t 8 J u i n 2 0 0 8

D r M o u r a d P R E U R E ( I F P S c h o o l )

E x p e r t P é t r o l i e r I n t e r n a t i o n a lP r o f e s s e u r d e S t r a t é g i e e t d e G é o p o l i t i q u e

M e m b e r o f t h e E n e r g y O i l a n d G a s C l u b ( P a r i s )

© M. PREURE 2008

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« Nous n’héritons pas de la terre de nos ancêtres, nous l’empruntons a nos enfants » Antoine de Saint-Exupery

« Tout ce qui n’est pas en train de naître est en train de mourir » Bob Dylan

PLAN

BRÈVE INTRODUCTION

1. LES CONVULSIONS DU MARCHÉ PÉTROLIER. VIVONS-NOUS UN CHOC PÉTROLIER ?

a) Une situation qualitativement nouvelleb). Nous vivons un nouveau paradigme pétrolier qui associe prix élevés et forte croissance économiquec). Nous vivons un choc pétrolier incontestablementd). Les mécanismes du marché et la spéculation ont amplifié les tendances

2. EST-CE DÉJÀ LA FIN DE L’ÈRE DU PÉTROLE ?

3. LA DIMENSION GÉOPOLITIQUE DE LA CRISE ET LES RÉPONSES DES PAYS PRODUCTEURS.

a). Le WEO 2007 dit que l’avenir de la Chine et de l’Inde concerne tout le monde. Pourquoi ne dit-on pas que celui des pays producteurs l’est tout autant !b). La nouvelle intégration de l’économie mondiale des hydrocarburesc). D’une interdépendance asymétrique à un partenariat de type nouveau. La problématique de l’insertion active et le rôle clé du partenariat NOC/I0Cd). Faut-il avoir peur du patriotisme pétrolier ?e). Le poids financier des pays producteurs ira croissant.

4. PERSPECTIVES À LONG TERME ET TRANSITION ÉNERGÉTIQUE.

a). Considérations généralesb). L’horizon 2030 c’est déjà aujourd’huic). L’avenir de l’industrie gazière : incertitudes et reconfigurations d). Les perspectives à très long termee). Scénarios et enjeux dans une vision de long terme pour les producteurs 

Dr M. PREURE – Intervention lors des Journées Parlementaires sur la Défense Economique – Alger 7 et 8 juin 2008 2

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BRÈVE INTRODUCTION

« L'âge de pierre ne s'est pas fini faute de pierres, l'ère du pétrole ne se finira pas faute de pétrole.  Cette boutade, attribuée à Zaki Yamani, est d’une criante réalité aujourd’hui. La planète serait-elle en train de passer de l’ère du pétrole vers une autre ère, plus immatérielle, moins saisissable, sans que nous le sachions, sans que nous ne nous en rendions même compte ? Risquerions-nous de nous retrouver, pantois, demain, désarmés irrémédiablement et encore étonnés du mauvais tour qui nous a été joué ? Les turbulences que connaît aujourd’hui l’industrie de l’énergie, et dont curieusement l’économie mondiale semble totalement indifférente, ne préparent-elles pas un ordre nouveau établissant une hiérarchie des nations encore plus impitoyable parce que désormais irréversible, et dont nous serions cette fois-ci, et de manière irréversible, les parias ? Le niveau de prix actuel n’est-il pas (au même titre que les prix issus des chocs haussiers des années soixante-dix) le niveau nécessaire pour permettre le passage à un nouvel ordre énergétique mondial, l’établissement d’une nouvelle géographie des ressources plus en phase avec la distribution de la puissance dans l’économie mondiale, une distribution dont les pays producteurs seraient encore une fois, et pour toujours, exclus ?

Pour dérangeantes qu’elles puissent être, ces questions sont nécessaires et cruellement actuelles. Elles exigent des réponses claires, précises et déclinées en objectifs et actions concrets. Ces réponses posent fondamentalement la question de la souveraineté nationale1

dans un monde interdépendant. Elles nous ramènent vers un nouveau paradigme de l’Etat-Nation dans un contexte d’accroissement de la complexité et de l’incertitude. La présence de ressources pétrolières est présentée par les esprits simples comme une malédiction, un peu comme si le Rhone en France, ou le Yang Tsé kiang en Chine, ou encore le Nil en Egypte pouvaient être considérés comme des malédictions. Nous avons à dessein comparé les ressources pétrolières à des fleuves, tant leurs vertus structurantes et leur impact multidimensionnel sont forts, tant ils sont aussi un vecteur de communication, de désenclavement et d’ouverture dans le monde. Mais bien entendu, tout dépend de l’usage qu’on en fait, et là est tout le problème.

Mais en même temps la présence de ces ressources induit des questions impératives : quelle politique de gestion des réserves nationales ? Quel rôle assigner à nos acteurs énergétiques nationaux ? Quel rôle l’Etat doit-il jouer en matière énergétique ? Quels problèmes de sécurité nationale sont posés par la situation énergétique internationale nouvelle en gestation ? Et par delà toutes ces questions, quel peut être aujourd’hui la définition de la souveraineté en matière énergétique ?

Les convulsions actuelles de l’industrie pétrolière internationale, comme tout ce qui touche au pétrole, depuis les crises politiques jusqu’au progrès technique, convergent toujours vers le marché et se manifestent toujours à travers le niveau des prix. Voilà pourquoi il ne faut pas s’arrêter à la simple observation des prix et s’inquiéter des tendances lourdes à l’œuvre et de leurs implications à long terme pour les pays producteurs. Nous y essayons modestement dans ce travail dont le but est de susciter le débat pour une meilleure compréhension des enjeux et des challenges qui attendent notre pays. Par delà ceux-ci il est visé plus fondamentalement la définition d’un nouveau paradigme de la souveraineté fondé sur l’excellence, l’innovation et la compétitivité des acteurs nationaux au premier rang desquels la compagnie pétrolière

1 M.PREURE 1992 – Ed. TECHNIP, Paris

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nationale solidement articulée à l’université et à la recherche scientifique nationale. Dans le même temps nous postulons que la crise actuelle signale l’instabilité du système énergétique mondial. Cette instabilité, porteuse de risques graves, provient d’un épuisement des ressources conjugué à une explosion des besoins mais plus fondamentalement d’un unilatéralisme des consommateurs, par ailleurs puissances dominantes de la planète, qui ont engagé un processus de transition énergétique dont les producteurs sont les grands absents et où ils apparaissent comme une contrainte, fermant leurs gisements aux investissements étrangers plutôt qu’un partenaire avec lequel, pour qu’elle réussisse, doit être conduite cette transition énergétique. Ce partenariat de type nouveau qui doit voir le jour serait porté par les entreprises, les compagnies pétrolières nationales et les compagnies pétrolières internationales. Il ouvrirait aux pays consommateurs de nouvelles voies pour réussir la transition énergétique et permettrait une insertion active des pays producteurs dans les dynamiques structurantes de l’industrie de l’énergie pour ce nouveau siècle. Ainsi, sans doute, pour les uns comme pour les autres, le pétrole redeviendrait « une chance historique de développement. »

1. LES CONVULSIONS DU MARCHÉ PÉTROLIER. VIVONS-NOUS UN CHOC PÉTROLIER   ?

a) Une situation qualitativement nouvelle

Dans l’industrie pétrolière, le marché est plus que le lieu où s’échangent les marchandises et où se forment les prix. Il est aussi le lieu où s’expriment et se réalisent les crises. Même si l’origine de ces crises est extra-économique (crise politique, politique de cartel etc.) elle s’accomplit toujours par un choc de prix. L’industrie pétrolière étant par nature politique, les crises politiques du Moyen-Orient se sont toujours traduites par des crises pétrolières et se sont exprimées sur le marché. Deux facteurs surdéterminent cette incertitude : la prise de conscience de la finitude de ces ressources d’une part (autant par les producteurs que les consommateurs), les convoitises des plus puissants acteurs sur ce qui reste et leurs manœuvres d’approche vis-à-vis des producteurs d’autre part. Nous vivons réellement une situation inédite. Ne pas en tenir compte, et s’en tenir aux approches traditionnelles responsabilisant soit les fondamentaux, soit la spéculation, ne peut conduire à une compréhension du phénomène. C’est une combinaison des deux premiers avec d’autres facteurs extra-pétroliers qui explique la situation que nous vivons et que pour notre par nous jugeons très dangereuse.

Pour comprendre la crise que nous vivons, nous devrons prendre en considération trois éléments majeurs :

La guerre d’Irak en 2003 a été un évènement majeur pour le marché pétrolier. On peut même parler de point de rupture. Il faut d’abord se souvenir qu’elle avait été précédée par les grèves qui avaient paralysé l’industrie pétrolière vénézuélienne en décembre 2002 et janvier 2003. De fait, la production vénézuélienne ne s’en est jamais vraiment relevée ; elle a été divisée par près de deux, passant de 3.56 Mbj en 1999 à quelque 1.87 Mbj fin 2007. Ce manque à produire va s’ajouter au manque à produire consécutif à la guerre d’Irak est qui est de l’ordre de 1.4 Mbj au minimum (sans prendre en compte le développement qui n’a pas été fait et qui était prévu). Quand on prend en compte le fait que précisément le boom de la demande chinoise est venu à ce moment précis, on mesure toute la violence de l’impact !

Une trop longue période de prix bas, et donc de sous-investissement, conjuguée à l’arrivée imprévue de la demande chinoise a certainement provoqué une situation

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inédite. Rupture des équilibres avec une consommation de pétrole qui s’est accrue en volume de 11% entre 2002 et 2007 malgré les prix élevés exerçant, une pression jusqu’alors inconnue sur l’offre, tant de brut que de produits raffinés. Les marges d’augmentation étant constituées essentiellement de bruts lourds, les capacités de conversion dans les raffineries n’ayant pas été développées, l’offre ne pouvait être au rendez-vous.

La tension très forte sur le marché s’est maintenue en 2007 et a confirmé son orientation haussière. Elle a aussi révélé l’absence de marges de manœuvres. Les capacités excédentaires de l’OPEC sont de 2.9 Mbj dont les ¾ sont situés en Arabie Saoudite et sont constituées de bruts lourds. Plus que jamais, le marché est à la merci de la moindre rupture d’approvisionnement due à un problème technique, une crise politique ou encore des causes climatiques. Le facteur politique est bien entendu très important puisque plus de 60% des réserves sont situées dans la zone fortement instable qu’est le Moyen Orient.

De fait, la demande des pays émergents a été notablement sous-estimée. Trois leçons sont à tirer du brutal changement des équilibres du marché :

Les pays émergents ne peuvent pas, avec des croissances économiques à deux chiffres, se contenter de faibles croissances de leurs besoins énergétiques.

Partant de très bas, leur demande énergétique en général et pétrolière en particulier, est structurellement faiblement élastique aux prix.

Leur impact sur le réchauffement de l’atmosphère sera difficile à contenir car le contenu en carbone de leurs réponses énergétiques est difficilement substituable.

b). Nous vivons un nouveau paradigme pétrolier qui associe prix élevés et forte croissance économique

La croissance économique a été de 5% en moyenne ces dix dernières années. De plus, la corrélation mécanique entre prix et inflation n’est plus évidente. La période 2001 – 2006 a connu une croissance économique mondiale vigoureuse et à forte intensité énergétique. Cette croissance est concentrée hors de l’OCDE. Les pays en voie de développement en ont assuré 67%. Dans chaque région du monde la croissance est supérieure à la moyenne des 10 ans. La contribution de la Chine (29%) approche celle de l’OCDE et dépasse la somme des contributions cumulées des Etats-Unis, du Japon et de UE. La croissance économique reste, toutes choses égales par ailleurs, moins intense en pétrole.

Le choc pétrolier que nous vivons est une manifestation de l’instabilité du système énergétique mondial. En fait le pétrole n’est pas seul concerné par cette boulimie énergétique. A l’exception du nucléaire, la consommation des différentes énergies s’est accélérée durant les années 2001 – 2006. La croissance de la consommation d’énergie primaire a plus que doublé par rapport aux cinq années précédentes, atteignant 3% durant la période 2001 – 2006, dont la moitié due à la seule Chine. Ce qui rend le système énergétique mondial de plus en plus instable c’est que de plus en plus, la croissance de la demande tend à se dérouler hors OCDE et échappe donc aux politiques volontaristes d’efficacité énergétique. Elle est difficile à contrôler et le sera davantage encore à l’avenir. La croissance économique dans les pays émergents est plus intense en énergie c'est-à-dire que la demande d’énergie a cru plus vite que le PIB entre 2001 et 2006 par rapport aux cinq années précédentes. L’augmentation de l’élasticité énergétique est remarquable et se situe essentiellement hors de l’OCDE dont les gains en efficacité énergétique restent sans effet sur les équilibres globaux.

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L’activité économique reste pour l’essentiel forte malgré la hausse des prix pétroliers. La croissance se ralentit dans les pays industrialisés mais reste robuste dans les pays émergents. Ce qui n’arrange rien, le niveau des prix a un impact inflationniste modéré car le coût de l’énergie sur les quarante dernières années a été de l’ordre de 5% du PIB mondial alors que sa contribution a été de l’ordre de 50%. Aux Etats-Unis comme en Europe, les carburants restent en termes de pouvoir d’achat inférieurs aux prix lors des chocs haussiers de la décennie 70. En fait, comme le dit très bien le président de TOTAL, « le pétrole n’est pas une énergie très coûteuse au regard d’autres biens de consommation. (…) En termes de pouvoir d’achat, le baril coûte même moins cher qu’en 1974. » Le niveau des prix contient difficilement la voracité de la demande. Même si celle-ci connaît un léger ralentissement coté OCDE, elle connaît une franche accélération dans le reste du monde dont les pays émergents, au premier rang desquels la Chine. D’autre part, il faut savoir que la taxation très forte en Europe (en moyenne plus de 50%) sur les produits pétroliers est assise sur les volumes (et donc calculée par litre) et non sur les prix. Ainsi l’augmentation du prix ne se répercute pas mécaniquement sur le prix à la pompe. L’augmentation est réduite de 50 à 70%.

Le signal qui semble être attendu de l’OPEC c’est l’ouverture de ses gisements aux investissements étrangers. Ce niveau des prix et la dramatisation qui l’accompagne sont une pression décisive sur l’Organisation en ce sens. Mais l’OPEC sait que se résoudre à ouvrir ses gisements annoncera certainement un nouvel ordre pétrolier avec le retour du système des concessions et une nouvelle définition de la souveraineté sur les ressources pétrolières. Cela signifierait la fin de l’Organisation. Qui plus est, elle sait aussi que même si elle parvenait à augmenter sa production, ce ne sera d’aucun effet sur les prix. La question n’est plus là. Il s’agit de traiter l’instabilité globale du système énergétique mondial qui a souffert des décennies durant de l’unilatéralisme des politiques des pays consommateurs et en souffre aujourd’hui encore où la transition énergétique n’est vue que du coté des consommateurs.

Il est cependant clair que les prix finiront par freiner la demande. La question est à quel niveau de prix et quand ? Dans tous les cas les politiques publiques serviront de levier, dans les pays occidentaux par la taxation qui peut être modulée, dans les pays émergents par les subventions qui peuvent l’être aussi à la baisse. Car la part dans le prix de la destruction de demande est à l’œuvre incontestablement. Pour l’heure, l’AIE révise lègerement à la baisse le niveau de la demande pour 2008 et … rejoint l’estimation OPEC soit près de 86.8 Mbj, soit une baisse de 1.4 Mbj par rapport à l’estimation initiale.

c). Nous vivons un choc pétrolier incontestablement

Il s’agit d’un choc atypique puisqu’il résulte non pas d’une rupture des approvisionnements, d’une part, puisque ensuite il n’a pas d’effets récessionnistes, du moins à court terme. Le consensus des experts le définit comme un choc de demande puisqu’il a été déclenché par une accélération de la demande, chinoise pour l’essentiel. Pour ma part, j’estime qu’il s’agit là d’une vision superficielle car l’amplitude des variations cache fondamentalement une défaillance structurelle de l’offre à court terme et de plus en plus amplifiée à long terme. Même si les ressources existent par rapport aux besoins actuels, les acteurs anticipent manifestement une rareté à long terme. De fait, l’offre n’augmente pas assez vite par rapport à la demande et le marché anticipe sans cesse le point de rupture qui semble très proche de l’avis des pétroliers, même si, comme on le sait, le facteur psychologique joue beaucoup dans les logiques boursières qui régissent le marché. Les

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capacités excédentaires, très réduites au regard de la demande, amplifient les réactions des acteurs.

Aujourd’hui producteurs et consommateurs donnent l’air de se regarder en chiens de faïence. Les consommateurs se posent en victimes, réclament plus de pétrole pour étancher la soif de leurs économies, les seconds arguent non sans raison que de nouvelles productions n’auraient aucun effet sur les prix. Ils posent une question stratégique à savoir que la sécurité de la demande doit accompagner la sécurité des approvisionnements. De fait les producteurs ont peu intérêt à construire de nouvelles capacités qui vont coûter de plus en plus cher (rappelons-nous l’inflation des coûts) et mettre sur le marché des volumes qui peuvent déséquilibrer le marché et dont ils prendraient seuls les risques. L’opacité de l’information et des statistiques pétrolières n’aident pas à un dialogue constructif. Quant à l’ouverture de l’amont des pays producteurs, présentée comme la panacée par les compagnies pétrolières, elle doit se poser, comme nous le verrons plus loin, dans une nouvelle perspective stratégique où les pays producteurs doivent être considérés comme acteurs à part entière de la transition énergétique à l’échelle mondiale, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui où on leur réclame leurs gisements pour permettre aux pays consommateurs de parvenir sans crise à un nouveau paradigme énergétique, tout en les laissant sur le bas coté de la route contempler au loin le monde occidental en train de construire un nouvel équilibre énergétique mondial dont ils seraient cette fois-ci irrémédiablement exclus.

Il reste évident qu’au-delà du peak oil (c’est à dire les années qui viennent !), le prix du pétrole tendra de plus en plus à s’aligner sur le prix de ses substituts. Cependant, la courbe de la demande, et donc forcément celle des prix (l’offre restant relativement inélastique à moyen terme) pourraient connaître des discontinuités, des ruptures dues à des déterminants extra pétroliers (économiques, réglementaires, voire politiques). La prévision est rendue extrêmement périlleuse du fait du caractère stratégique de cette ressource et de l’impréparation à sa substitution des plus grands consommateurs, par ailleurs puissances économiques et militaires dominantes de la planète. Des scénarios extrêmes, conduisant au final à la satisfaction de ces consommateurs gloutons, quels qu’en fussent les moyens, ne sont pas à exclure.

d). Les mécanismes du marché et la spéculation ont amplifié les tendances

Le monde avait vécu deux décennies durant faussement l’illusion de l’abondance et d’un pétrole bon marché. Les prix, partis, il faut le rappeler d’un plancher artificiellement bas depuis la crise asiatique de 1998, ont été multiplié par six en six ans passant de 20 à 100 dollars le baril, puis le premier trimestre 2008, dépassant les 120 dollars. Les analystes de Goldman Sach anticipent un prix de 148 dollars en 2009.

Il devient clair que le franchissement du seuil des 100 dollars est structurel. Il est difficile d’imaginer demain un pétrole en dessous de 60/80 dollars le baril. Mais néanmoins. Il faut garder à l’esprit toute la complexité de la formation du prix du pétrole qui semble avoir décroché conjoncturellement avec les fondamentaux, sans que l’on puisse parler selon nous de déconnexion véritable. A notre avis le prix comporte des parts qui peuvent être instables et se comporter indépendamment l’une de l’autre dans le temps :

Le coût marginal (coût dernier baril extrait d’un gisement) qui est estimé aux alentours de 65 dollars le baril.

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La prime géopolitique estimée de 15 à 20 dollars pourrait augmenter en cas de crise grave occasionnant une rupture des approvisionnements comme elle pourrait se réduire, ce qui nous semble peu probable.

La prise en compte de la dérive du dollar à la baisse comme ça peut l’être à la hausse, il ne faut pas l’exclure.

La part de la spéculation également estimée entre 10 et 20 dollars peut évoluer. Enfin, ce que les chercheurs de l’IFP, A. Sanière et F. Lescaroux, appellent le prix de

destruction de la demande et qu’ils évaluent à quelque 20 dollars le baril peut également évoluer dans le temps.

Le prix du pétrole a fortement intégré trois paramètres : la dérive du dollar, la baisse des stocks américains et enfin le déficit structurel de l’offre en brut et en produits raffinés. D’autre part, l’impact inflationniste des coûts de production, a été fort et ne cessera de l’être à l’avenir. Bien entendu la spéculation a amplifié la tendance haussière car elle a aggravé la volatilité naturelle du marché depuis qu’il a été emporté par les dynamiques boursières dans les années 80, se connectant par là même aux marchés financiers et subissant par ce fait leurs turbulences. Mais il ne faut pas exagérer l’impact de la spéculation comme on le fait souvent. L’appréciation de l’euro par rapport au dollar est un facteur qui a joué puisqu’il a diminué l’impact du choc pour l’Europe. Selon la Fondation Robert Schuman, elle aurait absorbé la moitié de la hausse du prix du pétrole.

La crise financière de 2007 est un important moment dans l’évolution du marché pétrolier. Nous avons vu que l’instabilité du système énergétique mondial dont le marché pétrolier n’est qu’une partie a engagé les prix pétroliers dans un trend haussier à peu près depuis 2003. La crise des subprimes de 2007 a momentanément interrompu la courbe haussière des prix car les opérateurs avaient un besoin pressant de liquidités et ont procédé à des ventes massives en juillet 2007. Mais symétriquement, l’incertitude liée aux marchés financiers a vite rendu les marchés pétroliers plus attractifs. Ainsi, dans le même temps la crise des subprimes de l’été 2007 a constitué le moment où la décorrélation prix du pétrole avec les fondamentaux s’est affirmée. Les actifs financiers n’inspirant plus tellement confiance, les spéculateurs se reportent sur les marchés pétroliers boursiers où ils sont en terrain connu en quelque sorte.

Les fonds spéculatifs alimentent la demande papier et influencent les prix. Le pétrole est devenu un placement recherché, générant ainsi une bulle spéculative autour de son prix. Et le risque d’éclatement de cette bulle est réel avec bien entendu de graves conséquences récessionnistes. La mondialisation financière est aussi passée par là avec la l’interconnexion des marchés financiers, la concentration des acteurs et l’avènement d’un marché international du risque. Les marchés pétroliers obéissant eux-mêmes à des logiques boursières et étant proches des marchés des différentes commodities, il était clair que nous allions assister à une évolution majeure dans la pratique des transactions pétrolières. Comme le reconnaît Yan Wang de l’Institut Mondial de la Banque : « La volatilité est également de plus en plus importante ; les fluctuations sont plus marquées qu’elles ne l’étaient dans les années 1990. » Aujourd’hui les spéculateurs (banques et institutions financières) parviennent à s’assujettir les marchés à termes pétroliers comme ils pèsent d’ailleurs dans les décisions des états-majors des compagnies pétrolières lesquels sont en situation permanente de négociation avec les marchés financiers. La boucle est bouclée.

Sur le long terme, nous ne devons pas non plus oublier ce que Denis Babusiaux appelle le caractère autodestructeur des prévisions énergétiques. En effet, prévoir des prix du

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pétrole à 300 dollars en 2030 c’est encourager les acteurs à créer les conditions pour que cette prévision ne se réalise pas : en investissant pour créer une offre concurrente, d’une part, en mettant en place des politiques pour contraindre la demande, d’autre part. Au lendemain des chocs haussiers de la décennie 70 les prévisions alarmistes de prix du pétrole à 80 dollars en 2000 ont convaincu les opérateurs pour investir dans l’exploration en Mer du Nord et dans les zones NOPEC en général ainsi que dans les économies d’énergie et les énergies alternatives. L’effet conjugué de ces investissements a crée un déséquilibre au détriment de l’offre OPEP et précipité les prix vers le bas. Donc, dans l’euphorie de la prospérité pétrolière, surtout ne pas oublier les leçons du passé !

2. EST-CE DÉJÀ LA FIN DE L’ÈRE DU PÉTROLE   ?

Le premier constat que nous devons faire est que le pétrole est une ressource épuisable, que près de la moitié des ressources de la planète a déjà été consommée. Ce que la terre a mis des centaines de millions d’années à former comme ressources, l’homme a réussi à l’épuiser en l’espace de près de 150 années. La terre compte encore près de 1 200 millards de barils de réserves dont 60% sont situées au Moyen Orient et près de 74% dans les pays de l’OPEC, comme nous l’avons vu plus haut.

Jusqu’alors la question de l’épuisement des réserves mondiales figurait parmi les tabous jalousement respectés. L’industrie, comme nous l’avions déclaré lors du Congrès mondial du gaz en 2000, baignait dans l’euphorie de l’abondance, bercée par les vertus du libre jeu des lois du marché. Mais des craquements dans l’unanimisme ambiant ont commencé à voir le jour avec l’article écrit par les deux géologues Jean Lahérère et Colin Campbell en 1998 : « The end of cheap oil », la fin du pétrole bon marché. Ces deux géologues figurent parmi les fondateurs de l’Association for Study of Peak Oil and Gas, l’ASPO2. Ce sont les premiers qui ont parlé, reprenant la célèbre courbe de Hubbert, de la fin prochaine du pétrole. Beaucoup considèrent Lahérère excessif, mais nous devons lui reconnaître des qualités de visionnaire. Il est le premier à avoir mis le doigt sur la faiblesse des prix du pétrole ainsi que la question sensible des réserves et leur surévaluation à la limite caricaturale.

La brusque accélération de la croissance chinoise a réveillé la planète de cette euphorie. Dès lors nous sommes plongés dans une atmosphère de dramatisation, qui s’accompagne toujours en pareil cas de culpabilisation des détenteurs de ressources, soit les producteurs. Nous y reviendrons. Le peak oil, à savoir le point à partir duquel la production mondiale de pétrole atteint son sommet et commence à décliner, semble être une question actuelle. Le consensus des experts le situe aujourd’hui entre 2008 et 2015.

Hier, le peak oil était considéré comme une fabulation d’experts en mal de notoriété. Aujourd’hui, il est entré dans la réalité et est présent dans tous les discours. Il l’est surtout dans les stratégies des IOC3 et des grands pays consommateurs. On ne peut pas en dire autant pour les pays producteurs qui souvent vivent encore dans les utopies des années soixante-dix, posant leur rôle dans l’industrie mondiale de l’énergie comme source d’approvisionnements et non pas comme acteurs énergétiques soucieux de leurs intérêts à long terme.

2 www.peakoil.net3 IOC : pour International Oil Companies. ie compagnies pétrolières internationales et NOC : pour National Oil Companies. ie compagnies pétrolières nationales (des pays producteurs).

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Pour l’institut allemand Energy Watch Group, qui s’appuie sur la conviction que les réserves ont été artificiellement gonflées, le peak oil a été atteint en 2006 et la production mondiale pourrait baisser au rythme de 7% l’an. Il anticipe une production de 58 Mbj en 2020 et 39 Mbj en 2030. Ses prévisions sont plus pessimistes que celles de l’ASPO. Si ces prévisions se réalisaient, les conditions seraient réunies pour des solutions extrêmes, parmi lesquelles des guerres du pétrole ne sont pas à exclure. EWG constate que trois des quatre plus gros gisements déclinent : Daqin en Chine, Burgan au Koweit et Cantarell au Mexique. Quant aux sables bitumineux, il n’en attend pas plus que 2 Mbj en 2015 avec tous les problèmes de rendement énergétique et d’émission de CO2 qu’ils posent.

Le Conseil Mondial de l’Energie (CME) n’est pas plus optimiste et pense que le ratio R/P (réserves sur production) pourrait être revu à la baisse en cas de révision possible des réserves OPEC, « lesquelles ont été brusquement gonflées dans les années 1980 pour des raisons politiques, présume-t-on pour maintenir les quotas, », affirme le CME. Le point d’inflexion de la courbe des ressources pétrolière se situe vers 2017/2022. C’est de l’ordre de l’urgence insiste-t-on.

L’affaire devient très sérieuse, et l’Agence Internationale de l’Energie, jusqu’alors optimiste quant aux grands équilibres pétroliers mondiaux, parle dans son dernier World Energy Outlook de « crunch » de craquement de l’offre d’ici 2015. Dans la survenue du peak oil deux éléments sont en effet à prendre en compte, d’une part l’accélération de la demande dont dépendra la production des années à venir, et celle-ci sera très probablement forte, d’autre part le potentiel des réserves. Et là figure une grande incertitude car il devient notoire que les réserves mondiales sont exagérément surévaluées. Selon Sadad El Husseini, ancien vice-président exploration – production de l’Aramco, saoudienne, les 1 200 Gbls de réserves mondiales seraient surévalués de 300 Gbls, c'est-à-dire du quart. Selon El Husseini, les grands champs pétroliers du Golfe sont en moyenne à 41% vides. El Husseini enfonce le clou lorsqu’il annonce que sitôt le pic atteint, les prix augmenteraient de 12 dollars par an. Cet ancien responsable saoudien qui affirmait récemment à Londres intervenir à titre d’expert indépendant a pu être considéré comme la voix « off » du régime saoudien. Le Royaume ne fait en effet plus mystère de son intention de conserver ses réserves pour les générations futures et ne songe plus à atteindre les objectifs de 22 Mbj en 2025 que souhaitaient lui voir produire les Etats-Unis. Il vient d’ailleurs de déclarer s’en tenir à un objectif de production de 12.5 Mbj jusqu’à 2020.

En fait le peak oil est déjà une réalité qui affecte beaucoup de pays producteurs. Nous venons de le voir cette semaine encore avec la sortie de l’Indonésie de l’OPEC pour la simple raison que ce pays n’est plus exportateur de pétrole ! Mais il n’est pas le seul à avoir connu son peak oil et de prestigieux gisements sont aujourd’hui classés au rang des grands malades ! Le gisement de Cantarell au Mexique, le deuxième mondial par la taille, opéré depuis 1938, et qui assurait jusqu’à récemment les 2/3 de la production Mexicaine, décline au rythme de 14% l’an. Son déclin est significatif de la maturité de toute la zone du Golfe du Mexique. D’ailleurs, selon le cabinet Wood MacKenzie, les découvertes dans cette zone sont à leur niveau le plus bas depuis dix ans. Les gisements de Mer du Nord et de Russie sont tout aussi en déclin. Pour nombreux pays importants, le peak oil est déjà une réalité : Etats-Unis (1971), Royaume Uni (1999), Norvège (2003), Indonésie (1977), Pays-Bas (1987), notamment.

Au Moyen-Orient, les deux plus grands gisements sont tout aussi sujets à inquiétude. Le gisement de Ghawar en Arabie Saoudite, le plus grand du monde, (exploité depuis 1948, il assure à lui seul 60% la production), est en déclin prononcé au rythme de 8% l’an. Le

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gisement koweitien de Burgan ne se porte pas mieux. Autant que les réserves saoudiennes les réserves koweitiennes sont notoirement surévaluées. Ainsi, selon un responsable de Wood McKenzie interviewé par la revue Pétrole et Gaz Arabes, celles-ci ne représenteraient plus que la moitié des quelque 100 Gbls annoncés. Le ministre koweitien du pétrole a d’ailleurs révélé que celles-ci ne seraient plus que de 48 Gbls. Récemment encore, un rapport interne de la compagnie nationale koweitienne KOC annonçant des réserves réelles de l’ordre de 24 Gbls, soit moins du quart des réserves officielles, a conduit le ministre du pétrole à la démission.

Il y a en effet une conspiration du silence autour des réserves et une grande incertitude sur les réserves de l’OPEC. Le débat sur les réserves mondiales repose sur une grosse hypocrisie. Alors que 46% des réserves de l’OPEP sont considérées par les spécialistes comme fausses ou exagérées (Par un simple jeu d’écriture, elles ont augmenté de 65% entre 1982 et 1991), les réserves hors OPEP ne sont pas logées à meilleures enseigne, notamment celles russes. Les réserves des compagnies occidentales elles-mêmes sont sujettes à polémique (on se rappelle le scandale Shell sur le niveau des réserves de ce groupe).

Nous observons que la situation est de plus en plus complexe, difficile, chaotique. Le pic des découvertes a eu lieu dans les années 60. Les découvertes sont moins nombreuses et de plus petite taille. Il n’y a plus de renouvellement des réserves depuis les années quatre-vingt. La consommation pétrolière mondiale est de l’ordre de 30 Gbls alors que les découvertes n’atteignent tout au plus que 10 Gbls dans le meilleur des cas. En 1955 les découvertes étaient de l’ordre de 30 Gbl/an alors que la production n’était que de 4 Gbl/an. De fait les découvertes se font de plus en plus rares et de plus en plus petites.

La planète n’arrive pas à remplacer les 30 Gbl (ou 86 Mbj) consommés par an (soit 1 Gbl tous les douze jours) Il sera très difficile d’aller beaucoup plus loin que le niveau actuel. Au niveau mondial, les découvertes ont atteint leur pic en 1965 avec 66 Gbl découverts et déclinent depuis. La planète consomme 6 barils pour un baril découvert. Il faut 5Mbj de nouvelle production en plus chaque année, soit remplacer les gisements qui existent (4 Mbj) et découvrir 1 Mbj chaque année. Il est unanimement admis que cet objectif est impossible à atteindre.

D’autre part, le baril de pétrole tend à s’alourdir. Le pétrole produit est de moins en moins bonne qualité et de plus en plus difficile à produire. La planète a mangé son pain blanc. Le meilleur pétrole est parti en fumée. La planète devra consommer de plus en plus d’argent pour produire du pétrole et celui-ci, comme nous le soulignerons plus loin, va requérir de plus en plus de technologie. Et quoi que fasse la technologie, la production déclinera de 8% l’an selon le consensus.

La question du peak oil renvoie à celle du niveau de production maximum possible. Après que l’AIE ait parlé de « crunch » de craquement de l’offre dès 2015, la mauvaise nouvelle a été annoncée non par un sombre géologue, mais par le président de TOTAL, Christophe de Margerie qui dans son style particulier, préférant « parler clairement, honnêtement, sans essayer de plaire aux gens, » a annoncé que le niveau de 100 Mbj était le maximum envisageable. Son point de vue converge avec celui de J. Mulva, le président de ConocoPhilips qui juge ce niveau difficilement atteignable. Il se rapproche aussi de l’avis de Shell dont le Directeur Exécutif E&P, Malcom Brinded admet le risque de pénurie très réel. Alors que la production mondiale en 2008 est estimée à 87 Mbj, ont se rend compte que seulement 13 Mbj de croissance de la production sont encore possibles !! Fatih Birol, le Chief

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Economiste de l’AIE est tout aussi singulièrement pessimiste lorsqu’il prévoit le déclin des productions NOPEC après 2010 et considère qu’à un rythme annuel de plus de 1.5% la croissance de la demande n’était pas soutenable d’un point de vue tant énergétique qu’environnemental. De fait la production tend à se stabiliser autour d’un pivot de 85 Mbj qui devrait être celui du plateau. Tout dépendra en effet des investissements à l’avenir.

La production plafonne par manque d’investissements. Pourtant les investissements amont vont de pic historique en pic historique. Ils sont cependant réalisés pour l’essentiel dans les zones hors OPEC et qui représentent seulement 1/6 du potentiel mondial selon Yves Mathieu de l’IFP. Et dans ces investissements amont il faut aussi savoir que l’essentiel va vers la production et le développement des gisements déjà découverts ; seulement 10% vont vers l’exploration. Ajoutons à cela que la hausse des coûts a absorbé 80% de la croissance de ces investissements ces deux dernières années. Le Cambridge Energy Reaserch Associates estime que les coûts ont doublé ces quatre dernières années. Le coût de développement d’un projet de grande envergure augmente de 20% l’an. Y. Mathieu pense que le plateau peut être maintenu jusqu’à 2030 si des investissements importants sont réalisés. Dans le cas contraire, il estime que la production chutera vers 60 Mbj dès 2010/2012.

Avant de conclure sur ce point, nous voulons apporter quelques clarifications :

D’abord distinguer la notion de ressources de celle de réserves (voir annexes). Les ressources présentes dans la nature peuvent être estimées à quelques 10 000 à 12 000 Gbls. De ces ressources seulement 60% sont réellement extractibles, soit entre 6 000 et 7 200 Gbls. Les réserves prouvées ne représentent que 1 200 Gbls. Pour un baril extrait, deux restent dans le réservoir en moyenne.

Ensuite souligner qu’il n’y a pas toujours croissance des réserves grâce à la technologie . L’amélioration du taux de récupération par les techniques de récupération assistée ne peut vraiment être prouvée qu’à la fin de la vie du gisement. Souvent, les techniques utilisées augmentent la production et accélèrent le déclin du gisement. Sid-Ahmed Ghozali indique que l’on ne connaît un gisement qu’après la production de toute l’huile qui y est contenue. Donc attention à la mystification dont sont très souvent victimes les pays producteurs qui sur conseil des compagnies étrangères opérant sur leur sol augmentent inconsidérément la production détruisant souvent irrémédiablement le gisement et perdant d’importantes quantités d’huile. La maîtrise technologique, nous ne le répéterons jamais assez, est aujourd’hui une dimension essentielle de la souveraineté. D’ailleurs Lahérère observe que généralement la production de pétrole est poussée au maximum grâce à la technologie (forages multidrains, EOR etc.) pour satisfaire le court terme au détriment du long terme. Lahérère est provocateur lorsqu’il affirme : « La technologie ne fait pas décroître le déclin, au contraire ! Elle laisse espérer des réserves qui n’y sont pas ! »

Ceci dit, la technologie est la clé pour l’accès des pétroles de demain. Les gisements du Moyen Orient seront en déclin et seront fortement consommateurs en technologie. La technologie sera la clé des pétroles difficiles : mers profondes et bruts extra-lourds ainsi que bruts à grandes profondeurs (6000 mètres). Elle sera un enjeu autant pour retarder le déclin des gisements existants autant que pour apporter de nouvelles solutions. Elle sera le moyen par lequel seront ralenties les tendances à l’œuvre pour établir un nouvel ordre énergétique et une nouvelle géographie des ressources. Voilà pourquoi les pays producteurs doivent impérativement la contrôler. Car la ressource clé aujourd’hui ce n’est déjà plus les réserves, c’est le moyen pour les mettre à jour et les produire, soit la technologie.

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Enfin, la durée de vie des réserves, ce fameux ratio qui agite politiques et pétroliers, est un indice très délicat et qu’il faut manier avec précaution. Son calcul comporte deux éléments : un numérateur, soit la production de l’année, et un dénominateur, soit le volume des réserves prouvées (1P exclusivement, voir annexes). Il suppose, en admettant que les réserves ne soient pas surévaluées, que la production reste constante, ce qui n’est jamais le cas. Si la production augmente, le ratio diminue. A l’inverse, de nouvelles découvertes l’augmenteraient. Ce que nous savons à coup sûr c’est surtout que la production augmente.

En conclusion de ce point, nous considérons qu’il faut pour les pays producteurs porter un regard plus serein sur leurs ressources. Ni alarmisme, ni euphorie. Nous arrivons à la fin de l’ère du pétrole incontestablement. Les ressources restantes sont plus précieuses et le seront plus encore à l’avenir. Il convient d’en user en tenant compte de cela. Les bonnes surprises que peut apporter le domaine minier à l’avenir ne changent rien à ce jugement. Les niveaux des prix actuels expriment, nous l’avons dit plus haut l’instabilité chronique désormais du système énergétique mondial et dont une part de responsabilité vient de la surévaluation, du gonflement et de la manipulation des estimations officielles des réserves des pays exportateurs, Mexique, Russie ou Moyen-Orient. Cette surestimation est, de notre point de vue l’une des causes de la fébrilité actuelle des acteurs pétroliers et aussi de leur manque de visibilité quant à l’avenir. En effet, dans cette industrie, avions-nous dit, la crise finit toujours par se manifester dans le marché. Concernant le peak oil, notre point de vue converge avec les experts qui pensent qu’il y aura plutôt un plateau ondulé qu’un pic. Nous estimons que nous entrons dans ce plateau et le marché réagit structurellement à ce signal. Le peak gas interviendrait quelque part entre 2015 et 2025. Nous pensons que les effets du peak oil sont sensibles dès aujourd’hui et expliquent pour une part les convulsions du marché pétrolier. Ils agiront très fort à partir de 2010 - 2012 et marqueront en profondeur les jeux d’acteurs. Il faut être conscient du fait que le marché n’attendra jamais la production de la dernière goutte de pétrole pour intégrer l’effet de rareté.

Mais l’investissement signifie-t-il forcément ouverture de l’amont des pays producteurs ? Si tel est le cas, ne vaut-il pas mieux le considérer dans le cadre d’une restructuration de l’industrie pétrolière mondiale où les producteurs trouvent la place qui le sied, celle d’un acteur à part entière, non plus seulement source d’énergie. Il est clair que là serait enclenché ce cercle vertueux où les prix entraîneraient véritablement une croissance de la production et une multiplication de la richesse pour tous.

3. LA DIMENSION GÉOPOLITIQUE DE LA CRISE ET LES RÉPONSES DES PAYS PRODUCTEURS.

a). Le WEO 2007 dit que l’avenir de la Chine et de l’Inde concerne tout le monde. Pourquoi ne dit-on pas que celui des pays producteurs l’est tout autant   !

De fait la production pétrolière mondiale montre de plus en plus des signes d’essoufflement. Alors que le reste de la production mondiale peine à maintenir son rythme, la production de l’OPEC stagne autour de 30 Mbj. L’apport de l’Angola n’a fait que remplacer le déclin de l’Indonésie. Selon Gulf Publishing, l’Arabie Saoudite qui a accéléré son activité de forage, produit 1 Mbj de moins qu’il y a deux ans. En effet l’investissement n’est pas tout. Il faut tenir compte de l’état des gisements en production

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depuis 60 ans comme Ghawar en Arabie Saoudite, le plus grand gisement au monde. Il y a réellement un changement structurel pour l’OPEC. Nombreux de ses membres sont dans l’incapacité d’augmenter leur production et ce pour des raisons qui tiennent essentiellement de la géologie. Le changement d’attitude saoudien, aujourd’hui favorable à un plafonnement de la production n’est-il pas lui aussi dû davantage à la géologie qu’à des considérations politiques ? Nous avons dit plus haut que les producteurs ont intégré dans leurs comportements la réalité de la finitude du pétrole. Ils s’aperçoivent dans le même temps que leur pétro-dépendance représente un grand danger et se préoccupent aussi des générations futures. Le roi Abdallah d’Arabie Saoudite a ordonné aux dirigeants pétroliers de son pays : « Chaque fois qu’il y a de nouvelles découvertes, laissez-les dans le sol, car (…) nos enfants en auront besoin. » L’Arabie Saoudite limite ainsi volontairement sa production à 12.5 Mbj jusqu’en 2020.

Auparavant les pays producteurs voyaient leurs intérêts diverger selon qu’ils étaient des pays à réserves longues, soutenant un prix modéré, qui constituerait une barrière à l’entrée pour les sources concurrentes et qui dans le même temps ne freinerait pas la demande, ou pays à réserves courtes et fortement peuplés, peu soucieux de la pérennité du marché plus préoccupés des rentrées immédiates nécessaires pour financer leur développement. Aujourd’hui, les pays à réserves longues semblent avoir pris acte que la hausse inexorable des prix est une tendance lourde et qui fait perdre au pétrole l’essentiel de ses défenses économiques. Voilà pourquoi ils veillent à en tirer le maximum d’avantages et pour les plus intelligents d’entre-eux s’investissent dans la technologie pour reculer le déclin de leurs gisements tout en s’intéressant sérieusement aux énergies renouvelables.

Echaudés par l’expérience de novembre 1997 où ils avaient augmenté leur production à la veille de la crise asiatique et d’un hiver doux qui ont déprimé le marché, les pays producteurs ne font pas trop confiance. Ils sont d’autant plus suspicieux qu’ils voient les pays consommateurs engager la transition énergétique sans les associer. La mauvaise humeur du ministre saoudien du pétrole concernant les biocarburants lors du dernier Sommet pétrolier de Paris rend bien compte de cet état d’esprit. Les producteurs ont toujours peur d’être encore une fois les dindons de la farce. Voilà pourquoi ils associent très justement sécurité des approvisionnement et sécurité de la demande. L’interdépendance entre tous les acteurs, très justement célébrée dans chaque messe pétrolière internationale, devrait se prolonger dans des actions concrètes. La transition énergétique devra être le cadre d’un partenariat de type nouveau et dont IOC et NOC seraient le cœur.

De fait l’émergence de nouvelles logiques de coopération semble de plus en plus impérative. Les nouveaux projets pétroliers seront dans tous les cas très coûteux, du fait du renchérissement des services pétroliers. Ils exigeront des montages plus complexes et un partage du risque plus délicat car le parapétrolier rechigne, maintenant qu’il est en position de force, à partager les risques avec les compagnies pétrolières, tendance qui s’était amorcée la décennie 90 avec des formules comme le contract to produce. Il faudra pour les NOC et les IOC trouver des positions de compromis où chacune gagnerait. Le meilleur moyen serait d’ouvrir l’amont international aux NOC par des partenariats croisés comprenant des échanges d’actifs en amont mais aussi en aval et la génération électrique.

b). La nouvelle intégration de l’économie mondiale des hydrocarbures

Nous avons dit que les IOC exerçaient une forte pression pour remonter vers l’amont pétrolier. L’économie mondiale des hydrocarbures a connu trois phases dans son histoire :

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Une première phase, depuis sa naissance au dix-neuvième siècle aux années soixante où elle était intégrée verticalement du puit à la pompe par les compagnies occidentales.

Les nationalisations des années soixante-dix ont produit une dé-intégration où les compagnies occidentales se sont trouvées amputées de leurs gisements, ne contrôlant plus qu’une petite partie de la production ainsi que tout l’aval de la chaîne pétrolière.

Depuis les années quatre-vingt s’est amorcé un processus de retour à l’intégration dont la force dominante est la remontée vers l’amont des compagnies pétrolières internationales. L’investissement dans les zones hors OPEC a momentanément donné aux IOC un répit qui leur a permis de reprendre des forces. L’épuisement de ces réserves les ramène à la case de départ et pose en termes urgents la question du contrôle des réserves à un moment où elles deviennent de plus en plus rares et coûteuses. Nous situons cela dans le contexte d’une nouvelle intégration, tendance lourde à l’œuvre dans l’industrie pétrolière. Mais cette nouvelle intégration ne pourra se réaliser réellement que si elle ouvre de véritables perspectives stratégiques aux NOC. En retour, les IOC pourraient trouver un nouvel élan et aller, de concert avec les NOC vers de nouvelles frontières.

Les IOC ne sont pas étrangères à la dramatisation de la situation actuelle, sollicitant des soutiens gouvernementaux pour infléchir les oppositions des pays producteurs à leur accès à l’amont de ces pays. Il y a un argument récurent pour expliquer ce « crunch » : le sous investissement dû à la fermeture des gisements des plus importants pays producteurs aux compagnies internationales. Cet argument est martelé sous tous les tons et accommodé à toutes les sauces possibles. Faute d’accès aux réserves, on va droit vers la pénurie et le crash, et les pays producteurs en seraient responsables. Une pression réelle, comme le souligne Nicolas Sarkis, est exercée sur ces pays pour les pousser à ouvrir leur amont aux investissements étrangers : « Au-delà des problèmes d’ordre financier, technique ou de gouvernance, ce qu’il est convenu d’appeler « accès » des sociétés internationales à l’amont pétrolier des pays producteurs couvre en réalité la question cruciale du contrôle des ressources du pays hôte et implique le retour, sous une forme ou une autre, à la période d’avant les nationalisations des années 70. » Nous l’aborderons plus loin, ce discours prépare une logique interventionniste qui s’inscrit en faux avec la notion de souveraineté telle qu’elle est classiquement perçue. L’avenir serait soit le retour au système des concessions, soit le chaos.

La loi algérienne de 2005, en donnant une plus grande initiative opérationnelle aux IOC dans l’amont, avait donné des espoirs et ouvert des perspectives aux compagnies internationales en ce sens. Mais son rapide amendement et la montée du nationalisme pétrolier dans le monde qui l’a accompagnée ont neutralisé la force de l’exemple et l’effet pédagogique attendu de cette loi qui devait ouvrir une voie, créer un précédent qui pèserait sur les autres pays producteurs, notamment ceux à réserves courtes. La remontée des compagnies internationales vers l’amont pétrolier, soit les gisements, devait ainsi être l’axe structurant de la nouvelle organisation de l’industrie pétrolière à l’avenir. A ce seul prix, les compagnies internationales jugent possible de reconstituer les capacités nécessaires pour permettre aux pays consommateurs de vivre avec le moins de traumatisme la transition énergétique. L’emballement du marché pétrolier et l’afflux de recettes ont, depuis, rendu obsolètes ces solutions.

Le niveau élevé des prix aggrave les pressions sur les pays producteurs pour ouvrir leur amont aux sociétés internationales et à leurs investissements. En fait, ce ne sont ni les

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investissements ni la technologie qui semblent être en cause. Si l’on écoute un esprit aussi avisé que Jean Lahérère, l’injection massive d’investissements et de technologies serait une solution illusoire qui n’aurait pour résultat que d’augmenter la production, mais certainement pas le taux de récupération. Elle n’aurait en définitive pour résultat que d’accélérer l’épuisement des gisements. Quant aux découvertes appelées à être faites, pourquoi ces pays ne laisseraient-ils pas cette ressource de plus en plus rare bien à l’abri dans le sous-sol pour les générations futures ? En vérité l’ouverture de l’amont semble être le seul moyen trouvé pour mettre en production des capacités d’ici 2030, soit d’ici que la planète ait trouvé un nouvel équilibre énergétique.

La remontée des compagnies internationales vers l’amont des pays producteurs se trouve freinée par un ensemble de facteurs structurels et qui tendent à trouver des racines dans un patrimoine symbolique tiré de la longue histoire militante des pays producteurs. Le spectre de Mossadegh n’est pas loin du radicalisme iranien, autant d’ailleurs que le patriotisme novembriste algérien a pesé de manière décisive sur les velléités ultra-libérales en Algérie. Le Mexique zapatiste quant à lui vit difficilement la fin de son histoire pétrolière, la deuxième de son histoire. Il risque par ses convulsions d’aggraver la radicalisation du mouvement tout en lui donnant en Amérique Latine, véritable centre de gravité du retour du nationalisme, une réelle profondeur historique. Les projets visant à privatiser la société nationale PEMEX, par exemple, se sont heurtés à l’opposition nationaliste dans le pays. 100 000 manifestants sur la place centrale de Mexico et surtout les parlementaires qui sont allés jusqu’à barricader le podium du président de l’Assemblée nationale le 14 mars dernier on freiné les ardeurs libérales du gouvernement.

En fait, les compagnies internationales ne semblent pas pouvoir s’approprier le rôle directeur dans la Nouvelle intégration de l’industrie des hydrocarbures qui est une tendance lourde. Elles devront partager les rôles avec des compagnies nationales d’autant plus fortes qu’elles détiennent les réserves. Même la possibilité de porter au pouvoir des ultralibéraux devient de plus en plus hypothétique. On peut voir dans la situation nouvelle ce qu’a vu un éditorialiste du Monde, à savoir que « le pouvoir a changé de camp », au profit des pays producteurs, s’entend. Mais cette vision est réductrice. Les producteurs comme les consommateurs ne doivent pas lire la situation nouvelle à travers les grilles des décennies passées. Nous allons vers un nouveau paradigme où producteurs comme consommateurs sont responsables collectivement des équilibres énergétiques de la planète comme de la protection de l’environnement et doivent agir en partenaires. Les Etats doivent prendre le relais et inciter les acteurs réels du jeu pétrolier, soit les firmes, à poser la question de leurs relations nouvelles en termes de coopération de type nouveau.

Le pouvoir aurait-il vraiment changé de camp ? Les NOC détiennent 85% des réserves, (63% selon Wood McKenzie). Les IOC n’en détiennent plus que 15% qu’elles peinent à reconstituer à mesure qu’elles produisent. De fait, comme l’expliquait le président de l’ENI italienne lors du dernier Forum International de l’Energie, « les positions relatives des compagnies internationales et des compagnies nationales sont en train de changer, et pas en notre faveur. » En effet dans les années 60, les IOC contrôlaient les ¾ des réserves et 80% de la production. Aujourd’hui, elles contrôlent 6% des réserves de pétrole et 20% des réserves de gaz ; 24% de la production de pétrole et 35% de celle de gaz.

Ni les producteurs ne peuvent fermer indéfiniment leurs gisements aux demandes des consommateurs, sauf à ne plus exclure des issues militaires violentes, ni les consommateurs ne peuvent se suffire à penser et mener la transition énergétique en

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excluant les producteurs. La préservation des ressources des producteurs pour les générations futures est une revendication légitime car ces pays n’ont bien souvent rien de bien consistant à laisser à ces futurs citoyens, soit des dynamiques de développement auto-entretenu en phase avec les logiques de la Nouvelle économie fondée sur la connaissance, les réseaux de savoir et les technologies à haute charge en matière grise. Le leurre pour les producteurs ce serait soit de vider le sous-sol sous prétexte de financer le développement, soit d’exposer leurs pays à la marginalité dans une relation antagonique avec les puissances qui constituent les moteurs de la croissance mondiale.

Pour les producteurs, les pressions pour la remontée vers l’amont ne vont pas manquer de se traduire à l’avenir par des tensions politiques et des conflits armés. Nous aurons alors un nouveau paradigme de la sécurité nationale où la meilleure garantie de protection des ressources nationales est d’avoir des acteurs énergétiques suffisamment puissants et détenant la technologie, qui sont déployés internationalement et ont des intérêts croisés avec les acteurs énergétiques internationaux. Les Etats doivent construire dès à présent (mais n’est-ce pas déjà trop tard ?) ces acteurs et imposer par leur diplomatie à leurs partenaires internationaux une place pour ces champions nationaux. A ce titre l’ouverture de l’amont des pays producteurs pourrait être un facteur de progrès au lieu d’être un abcès de fixation des tensions internationales.

c). D’une interdépendance asymétrique à un partenariat de type nouveau. La problématique de l’insertion active et le rôle clé du partenariat NOC/IOC

Les acteurs énergétiques mondiaux sont interdépendants incontestablement. Seulement, pourrions-nous dire, certains sont plus dépendants que d’autres. Entendez par les pays producteurs qui sont généralement mono-exportateurs d’hydrocarbures et dont les économies reposent essentiellement sur cette ressource. Dès lors que celle-ci marque quelques signes d’essoufflement, que la planète en a pris acte et engage sa transition, il serait totalement absurde de continuer à faire comme avant. Facile à dire ! Car la prospérité pétrolière actuelle a des vertus anesthésiantes, euphorisantes. Et pourtant, plus que jamais, tous les acteurs ont intérêt à ce que les producteurs retrouvent quelque rationalité dans la conduite de leurs affaires pétrolières. Le plus grand danger pour les consommateurs est l’indifférence, se contentant d’exiger une augmentation de la production en attendant que la science et les politiques publiques permettent l’avènement d’une nouvelle ère énergétique. Attitude cynique qui peut parfaitement fonctionner même si elle est porteuse de graves risques d’explosion. Mais qui sera là en 2050 pour essuyer les plâtres !

Les relations entre NOC et IOC ont connu des crises très sérieuses comme celle qui a opposé la PDVSA vénézuélienne et le Major Exxon, ce dernier ayant même parvenu, un temps à geler 12 milliards de dollars d’actifs internationaux de PDVSA. Cette crise a révélé la fragilité des sociétés nationales lorsqu’elles ont des actifs à l’étranger. Elle pourrait se reproduire dans des conflits en cours entre Sonatrach et l’espagnol Repsol. Mais cela ne doit pas annuler les bénéfices du développement international des NOC car celui-ci est inscrit dans leur logique d’entreprise. Elles doivent devenir des compagnies comme les autres et par conséquent se déployer hors de leur marché domestique. Il n’est pas sûr d’autre part que Exxon (ou toute autre compagnie qui suivrait son exemple) tire avantage à long terme de son conflit avec PDVSA car qui des NOC accepterait de traiter désormais avec une compagnie capable de tels excès ?

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Mais en même temps, il faut dire que le partenariat entre NOC et IOC est inscrit dans l’histoire et ne manquera pas de révolutionner l’industrie pétrolière à l’avenir. Pour avoir été l’organisateur du premier Forum des NOC, nous en sommes convaincu. C’est à travers les entreprises que se créera ce partenariat de type nouveau qui ouvrirait de réelles perspectives stratégiques tant aux NOC qu’aux IOC qui peuvent être ainsi vecteur d’adaptation et acteur réel de la transition énergétique. Certaines NOC deviennent selon l’expression de Nader Sultan, des Compagnies pétrolières nationales internationales. Il faut que des relations nouvelles, une culture nouvelle prévalent. Ces relations seraient des relations entre pétroliers, tous soucieux de produire la richesse, de partager le risque. Il faut pour cela que les grands pays consommateurs n’opposent pas aux NOC l’obstacle de leur souveraineté, voire de manière fallacieuse les règles de la concurrence et les lois anti-trust voire même la sécurité nationale, chaque fois que ces dernières songent à se déployer dans leurs marchés et à acquérir des actifs.

Dès 2010 deviendra impérative la question de nouvelles relations producteurs – consommateurs et l’affirmation d’un besoin de remontée plus décisive vers l’amont par les plus puissants pays consommateurs. On peut s’attendre à des configurations géopolitiques inédites avec comme manifestation une opposition frontale Chine – OCDE. La restructuration du paysage des NOC devrait accompagner ce processus avec la privatisation des plus fragiles (notamment du point de vue des réserves). La PEMEX mexicaine, tabou parmi les tabous, est déjà sur les rangs. L’absorption de NOC par les Majors, voire la formation d’oligopoles nouveaux, traversés par des liens industriels, technologiques ou même des liens en capital devrait devenir possible. Si les pays du Moyen-Orient n’ouvrent pas leur amont, ils ont déjà ouvert l’aval et le gaz. Voici une brèche qui risque de s’élargir. Mais quelques NOC figureront sur la ligne d’arrivée et pourraient rejoindre les seven sister. Les NOC issues des pays émergents comme la Russie, la Chine et la Malaisie vont peser très fort. On pourrait voir apparaître un quatuor de tête avec l’Aramco séoudienne, la Brésilienne Pétrobras, la Malaisienne Pétronas et la Russe Gazprom.

Il y a en effet une forte probabilité d’accroissement des risques géopolitiques. Les foyers de tension se concentrent singulièrement autour des zones de production. Les effets entropiques du brasier irakien parviennent jusqu’en Algérie et se démultiplient à l’infini dans l’inconscient collectif arabe. La stabilité du Moyen Orient deviendra de plus en plus une question prioritaire pour la diplomatie internationale. D’autre part, il semble bien que la régulation du système par le couple Etats-Unis/Arabie Saoudite a été efficace mais a atteint ses limites. Il faudra aller vers de nouvelles approches, plus novatrices avec comme condition un juste traitement de la question palestinienne. D’autre part, le monde doit comprendre que le grand risque aujourd’hui est une fragilité des pays producteurs. Davantage qu’une trop grande force des producteurs, c’est bien leur faiblesse que les consommateurs doivent redouter. En effet, dans la majorité des pays producteurs, la seule présence du pétrole est un facteur de déstabilisation : soit il suscite des déséquilibres économiques et sociaux, soit il aggrave des désordres préexistants.

Le debriefing de l’expérience irakienne n’a pas encore été fait vraisemblablement. L’occupation militaire des zones de production ne semble pas être une solution opératoire ni fiable sur le long terme. L’entretien de pouvoirs inféodés, couvrant une présence militaire, non plus à l’ère des réseaux numériques et de la télévision par satellite. Les tentatives d’implanter des dirigeants politiques acquis au « consensus de Washington » et aux options ultralibérales au sein des pouvoirs des Etats producteurs et la consolidation de leur force de

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l’extérieur devient hypothétique dans l’ambiance de nationalisme pétrolier et l’autonomie acquise par les Etats producteurs du fait de l’aisance financière.

d). Faut-il avoir peur du patriotisme pétrolier   ?

Il est clair que la complexité de l’avenir énergétique ira croissant. Il serait dangereux de n’y voir que le symptôme à savoir le déséquilibre de plus en plus important entre les ressources et les besoins. L’énergie est la veine jugulaire de l’économie mondiale. Les pays producteurs sont à la croisée des chemins. Ils disposent d’une ressource vitale pour leurs économies et s’aperçoivent subitement que cette ressource va disparaître très bientôt, que l’on est entré dans le dernier acte de la pièce. Que faire alors que bien souvent l’effet de levier des réserves pétrolières sur le développement national est complètement anéanti par le phénomène de « dutsch disease » ou malaise hollandais qui se caractérise par l’inhibition par le secteur des hydrocarbures de tous les autres secteurs de l’économie nationale. Les importations rendues possibles par les généreuses recettes d’hydrocarbures, par exemple, concurrencent toute production nationale et poussent à son déclin. Bien entendu, la gouvernance n’est pas épargnée puisque l’Etat tend à devenir un Etat redistributeur dans une économie de rente où la corruption prolifère comme dans un bouillon de culture.

Ainsi, encore sous l’effet euphorisant de la richesse pétrolière, il faut penser des lendemains plus conformes aux règles de l’économie internationale et donc restructurer l’économie en conséquence. Il faut surtout se préparer au pire. Dans ces conditions, le patriotisme économique est salutaire. Il ne doit pas apparaître comme une attitude hostile mais comme un regard plus sévère sur soi-même, comme une autocritique sans complaisance pour préparer l’élan. En cela, il est un rapprochement, un pas fait vers l’Autre qui doit, pour être ami être aussi partenaire. Pour reprendre le mot de Romain Gary, le patriotisme c’est l’amour des siens, il ne peut être vu comme la haine des autres.

Il revient à l’Etat de jouer un rôle clé dans la transition énergétique. Pour cela il doit encourager l’émergence d’un champion national dans l’énergie basé sur toutes les compétences et toutes les potentialités du pays. Il s’agit de se désinhiber sur ces questions. Oui, il faut que les ressources de la nation servent de levier à son développement. Elles sont plus qu’une simple marchandise, elles ont le pouvoir de donner un visage nouveau à l’avenir de nos enfants. Dans ce sens, il faut se départir des illusions sur le fétichisme du marché qui a été porté au rang de vérité absolue par la pensée ultralibérale et le « consensus de Washington ». L’intervention de l’Etat n’est pas une anomalie qui fausse le libre jeu des lois du marché. Souvenons-nous des accents brejnéviens du gouverneur de Californie lorsque la Silicon Valley s’était retrouvée plongée dans le noir lors de la crise énergétique californienne. Car l’énergie est une industrie capitalistique et de long terme et qui ne peut être livrée au seul libre jeu des lois du marché. L’Etat doit affirmer résolument son rôle de régulateur, de planificateur à long terme et d’animateur du développement scientifique et technologique, car la technologie est précisément la clé des équilibres énergétiques de demain. L’Arabie Saoudite offre un bon exemple en investissant fortement dans la science et la technologie pour diversifier son économie et ses sources de revenus. Si l’on en croit M. Naimi, le ministre saoudien du pétrole, son pays veut devenir un pôle de recherche dans l’énergie solaire et espère être un exportateur majeur d’électricité dans les 30 à 50 années à venir.

Il faut aussi savoir que le patriotisme économique est désormais clairement assumé dans les principaux pays occidentaux et que dans le domaine pétrolier, il dérange moins que

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l’instabilité. Le meilleur exemple est la Norvège où la compagnie pétrolière nationale et les sociétés parapétrolières lui doivent leur rang mondial aujourd’hui. Mais comme le dit un opérateur français : « On ne parle jamais du nationalisme norvégien parce que la fiscalité reste stable et est intégrée par tous les opérateurs. »

Les cinq thèses sur lesquelles doit être fondée la stratégie énergétique d’un pays producteur aujourd’hui :

Dans le contexte hautement compétitif de la mondialisation caractérisée par une montée de la complexité, de l’interdépendance et de l’incertitude, la puissance des Etats repose sur la puissance des firmes.

La puissance pétrolière des Etats producteurs provient des performances de leurs acteurs énergétiques nationaux, non pas du niveau de leurs réserves et de leurs productions.

La compétition autour des prix pétroliers s’est déplacée vers une compétition autour des performances des acteurs pétroliers.

Les relations entre acteurs pétroliers sont des relations entre firmes, non plus des relations entre Etats et reposent sur des logiques concurrentielles.

Les hydrocarbures de demain seront des hydrocarbures de haute technologie. Les énergies de demain le seront aussi en général. La technologie est la clé des relations énergétiques futures. Il importe désormais de construire la puissance pétrolière sur la technologie.

Maîtriser la transition énergétique doit être le fondement de toute stratégie énergétique pour un pays producteur. Ceux-ci doivent se donner les acteurs nécessaires pour engager la transition énergétique. Pour un pays comme l’Algérie ce serait la fusion des grands acteurs énergétiques pour former un champion national disposant de la taille critique et déployé sur tous les métiers de l’énergie pour se mouvoir dans l’industrie mondiale de l’énergie. Le développement international de ce champion national doit être résolument appuyé par l’Etat. Les pays producteurs doivent se rendre compte que les hydrocarbures sont une ressource épuisable. Cela implique trois choses :

Ils doivent contenir leur consommation propre Ils doivent préserver leurs gisements et ne produire que ce qui est nécessaire à

leurs économies. Ils doivent comprendre que le prix de cette ressource épuisable doit prendre en

compte le coût de son remplacement.

Dans le cadre des contrats de partage production signés dans les projets d’exploration , la part qui revient à la compagnie étrangère (cost oil et profit oil) rémunère son investissement et le risque qu’elle a pris. Elle est évaluée en dollars bien entendu, le plus souvent la monnaie du contrat. Mais elle est réalisée en volume. Le partenaire étranger est payé en production, c'est-à-dire en barils. Dans la mesure où le prix du baril augmente, mécaniquement la quantité diminue. Cela a deux conséquences pratiques : les compagnies pétrolières internationales ont moins de pétrole et sont donc plus dépendantes encore des pays producteurs, ceci d’une part, d’autre part, les pays producteurs ont moins de barils à produire contractuellement. Ils sont en mesure, s’ils le veulent, de réduire leur production pour préserver des richesses en voie d’épuisement comme on l’a vu. Car le grand danger aujourd’hui est de monétiser inutilement ses réserves.

De fait nous constatons souvent des aberrations stratégiques dans les pays producteurs qui produisent au dessus de toute mesure et sans tenir compte de leurs besoins

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financiers. Ils procèdent à une financiarisation inutile de leurs réserves, se contentant de produire pour placer leurs recettes dans des banques occidentales. Si nous regardions les choses scientifiquement, nous verrions qu’il y a réellement aberration. En effet pour simplifier, la célèbre théorie d’Hotelling4 nous enseigne que le prix d’une ressource épuisable doit croître au moins en dessous du taux d’intérêt à long terme pour que son possesseur consente à la produire. En clair. Si vous produisez une quantité qui va s’épuiser à l’année n, et si son prix de l’année 0 à l’année n croît moins vite que le taux d’intérêt, vous avez avantage à la produire et placer les recettes de la vente en banque. Mais si le prix augmente plus vite que le taux d’intérêt à long terme (ce qui sera incontestablement le cas du pétrole), vous n’avez aucun avantage à la produire aujourd’hui. Pour reprendre l’heureuse expression du professeur Chitour, « votre meilleure banque c’est votre sous-sol. »

e). Le poids financier des pays producteurs ira croissant.

Les avoirs à l’étranger des pays exportateurs de pétrole sont estimés par le cabinet McKinsey entre 3400 et 3800 milliards de dollars en 2007. Selon Morgan et Stanley, les fonds souverains passeront de 2 830 milliards de dollars en 2007 à quelque 12 000 milliards en 2015. La tendance devrait aller vers la généralisation des fonds souverains et un plus grand interventionnisme des pays producteurs dans la scène énergétique. Il reste que beaucoup n’ont ni les traditions, ni les compétences ni la qualité de gouvernance surtout pour s’engager dans cette voie. Il est fort probable à l’avenir que les Etats producteurs renforcent leur présence dans les marchés financiers internationaux avec des fonds souverains dont la force bénéficierait de l’effet de levier des prix pétroliers. On risquerait alors de connaître des frictions avec les Etats consommateurs du même type que la crise qui avait opposé Kuwait Investment Office et l’Etat britannique lors de la privatisation de British Petroleum dans les années 80.

Par rapport aux chocs des années 70, cette fois-ci les pays producteurs placent aussi leur argent sur des marchés financiers hyper-sophistiqués. Les masses engagées participent à la hausse des prix des actifs financiers et de l’immobilier. L’économie occidentale ne s’en sort pas si mal que ça puisque le renchérissement des prix pétroliers se traduit mécaniquement par un afflux de ressources dans la sphère financière. Les plus values générées par ce phénomène compensent largement, selon Patrick Artus, les prélèvements pétroliers. Jean-Marie Chevalier le résume très bien : « On donne du revenu aux pays pétroliers, et eux nous donnent du crédit. ». Mais dans le même temps, le système est rendu extrêmement fragile, car une crise pétrolière et/ou un éclatement de la bulle spéculative risquent alors de provoquer des effets récessionnistes en cascade. On entrerait alors dans une crise économique d’une ampleur jamais connue.

4. PERSPECTIVES À LONG TERME ET TRANSITION ÉNERGÉTIQUE.

a). Considérations générales

La question posée par la transition énergétique est aujourd’hui de répondre le plus longtemps possible aux besoins pour lesquels le pétrole est irremplaçable, tout en intégrant la contrainte environnementale à court et moyen terme. Répondre à ces besoins et préparer dans le même temps les substituts, repousser le point de rupture, considérant l’incertitude posée

4 Hotelling H (1931) “The economics of exhaustible resources. Journal of Political Economy” 39,2Voir aussi Oil and Gas Exploration and Production, IFP Publication, Edition TEchnip, Paris, 2007, page 48

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tant par les réserves que par la pression de la demande, devient aujourd’hui extrêmement difficile. L’accès direct aux gisements peut paraître comme la solution la plus fiable. Mais il faut faire avec les souverainetés de plus en plus chatouilleuses des pays producteurs.

L’objectif est donc de repousser le point de rupture le temps que la technologie vienne à bout des challenges qui lui sont posés et établisse une nouvelle hiérarchie, soit une nouvelle géographie des ressources plus conforme aux rapports de force mondiaux. Malheureusement les termes de l’équation sont posés ainsi. La grave question de la transition énergétique n’est pas posée en termes de partenariat producteurs – consommateurs, mais d’un point de vue unilatéral de consommateurs. Elle implique dans l’immédiat modification des comportements consuméristes et optimisation des rendements énergétiques. Elle suppose à moyen et long terme de nouveaux systèmes énergétiques plus économes et préservant mieux l’environnement.

L’enjeu est de taille, et l’on regrette l’unilatéralisme de l’approche. A aucun moment les producteurs ne sont vus autrement que comme source, jamais ils n’apparaissent comme acteurs, comme partenaires d’une transition énergétique dont ils constituent un déterminant de la réussite et dont ils seront soit les bénéficiaires, soit, s’ils restent sur le bord de la route, encore une fois les grandes victimes. On est tenté à ce sujet de comparer le choc haussier en cours avec ceux des années soixante-dix et se rappeler que ces derniers avaient rendu possible, par le niveau élevé des prix et l’afflux des pétrodollars dans les banques occidentales qui s’ensuivit, les importants investissements dans les zones NOPEP et l’établissement d’une géographie des réserves plus favorable aux pays consommateurs. Serait-ce que l’histoire est un éternel recommencement ?

Assiste-t-on, dans l’euphorie qui s’empare encore une fois des pays producteurs, qu’accompagnent tragiquement leur incapacité et leur incompétence à placer ailleurs que dans les pays consommateurs leur bas de laine pétrolier, à une forme nouvelle d’aliénation où les producteurs financent la transition énergétique qui demain va les marginaliser définitivement ? Mais, tant mieux ou tant pis, l’histoire n’est pas un éternel recommencement ! La poussée démographique, les nouvelles dynamiques économiques, les évolutions erratiques de la géopolitique des régions de production, mais aussi, pourquoi l’exclure, les dynamiques comportementales dans les pays industrialisés vis-à-vis de l’énergie, imprévisibles, pourraient enfanter un monstre. Le réchauffement planétaire conjugué à une amplification de l’entropie et une multiplication des turbulences risquent de faire éclater le fragile équilibre de la planète. Voilà pourquoi, la transition énergétique est l’occasion à ne pas manquer pour construire un partenariat de type nouveau entre le Nord et le Sud autour de l’énergie.

La mondialisation connaîtrait-elle des ratés à l’allumage et qui commencerait par la remise en cause de l’universalité du mode de vie occidental, qui se prolongerait, à travers le renchérissement du transport aérien et maritime, à une redéfinition de l’espace global ? Peut-on imaginer un tarissement des courants d’échanges qui conduirait à une crise globale ? Certains s’empressent de parler même de dé-mondialisation possible. Il est clair aujourd’hui que le modèle de vie occidental n’est pas soutenable, ni sur le plan énergétique, ni sur le plan environnemental. Il ne peut être élargi à la planète, ni même aux seuls pays émergents. Comment le leur expliquer ? La situation est explosive en Chine où le Charbon représente 65% du bilan énergétique et où le taux d’équipement automobile est en dessous de toute norme. Il sera bien difficile de convaincre le reste du monde que le mode de vie occidental,

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énergétivore et consumériste, ne peut lui être accessible. Le XXIème siècle enregistrerait ainsi son premier tabou !

Plus dangereux, certains esprits commencent à plaider pour un pétrole consacré comme « bien public mondial », c'est-à-dire au dessus des souverainetés nationales et s’inquiètent de la gouvernance de cette ressource de plus en plus rare. On sait que les intellectuels se chargent bien souvent du rôle d’ouvreur de pistes pour les militaires et les politiques. La notion de droit d’ingérence humanitaire est suffisamment éloquente en ce sens. Nous sommes ramenés dans les utopies de bonne gouvernance mondiale, dans une vision wilsonienne des relations internationales où encore une fois le bien commun doit être préservé, par la force s’il le faut. On ne peut pas ne pas voir aussi à travers ce prisme le rejet de la corruption dans les pays producteurs, qui plus est capables en dehors de toute rationalité économique de créer la rareté. C’est une facette, la plus opaque de la transition énergétique et qu’il faut considérer aussi parmi les hypothèses de travail. La notion de gouvernance mondiale du pétrole, facteur de rationalité est à l’œuvre. La mauvaise humeur du sénat américain vis-à-vis de l’OPEC va un peu dans ce sens.

b). L’horizon 2030 c’est déjà aujourd’hui

Comme le dit si bien Fatih Birol, le Chief Economiste de l’AIE, la principale rareté ce n’est pas la ressource mais le temps. Tout le monde a été pris de court par l’accélération subite des tendances à l’œuvre, tant pour l’offre (peak oil) que pour la demande (Chine). Cette lutte contre le temps marque déjà les jeux d’acteurs.

Le dernier Word Energy Outlook, publié par l’Agence Internationale de l’Energie, tranche d’ailleurs radicalement avec l’optimisme qui le caractérisait jusqu’alors, juge la situation « alarmante » et parle de « crunch », de craquement de l’offre d’ici 2015 suivi d’une « escalade abrupte des prix ». Selon les estimations de l’AIE, on assisterait à une envolée des besoins de la Chine et de l’Inde. La première verrait ses besoins passer de 7.1 Mbj en 2006 à quelque 16.5 Mbj en 2030 ; quant à l’Inde, elle passerait de 2.6 à 6.5 Mbj à cette échéance. Tout ceci renforce notre opinion que derrière le choc de demande vu par les experts, il y a un choc structurel d’offre.

Le pessimisme de l’AIE quant aux ressources est manifeste. L’édition 2007 du World Energy Outlook ramène le niveau de la demande en 2030 à 116 Mbj. Prenant acte du pessimisme des acteurs pétroliers estimant qu’un niveau de 100 Mbj était difficile à atteindre et considérant que le premier scénario n’est pas soutenable tant au plan énergétique qu’au plan environnemental l’AIE envisage un scénario alternatif à 102.3 Mbj, jugé plus réaliste. L’accroissement de capacité pour répondre à la demande serait de l’ordre de 37.5 Mbj entre 2006 et 2015. L’investissement nécessaire pour développer les nouvelles fournitures énergétiques d’ici 2030 est estimé à 20 000 milliards de dollars. L’OPEC, quant à elle prévoit dans son World Oil Outlook une demande légèrement supérieure à l’estimation de l’AIE, soit 117, 6 Mbj.

Les besoins énergétiques mondiaux devraient augmenter de 55% d’ici 2030. La consommation de charbon devrait tripler pour atteindre 28% du bilan énergétique mondial, suivi par le gaz naturel à 22%. Freiner la demande est le premier objectif affirmé. Facile à dire ! Difficile d’infléchir les tendances dans un délai aussi court. Voilà pourquoi, il faut agir vite. Les pays en développement vont constituer 74% de la hausse de la demande d’énergie.

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Selon les prévisions de l’AIE dans son dernier WEO, le parc automobile en Chine a augmenté au rythme de 37% l’an de 2000 à 2006 pour atteindre 17 millions de véhicules. Mais il n’a pas épuisé tout son potentiel d’évolution puisque 14 Chinois sur 1000 ont une voiture contre 460 Européens et 580 Américains. On n’ose pas imaginer la situation lorsque 50 Chinois sur 1000 auront une voiture. En Inde où le ratio représente le dixième du niveau européen, le parc de véhicules devrait passer de 67 millions de véhicules en 2006 à quelque 300 à 400 millions en 2030. La Chine deviendrait le premier consommateur d’énergie en 2010. Elle représente déjà 46% de la croissance de la demande les cinq dernières années. Elle représente 73% de la croissance de la production de charbon depuis 2001. Le centre de gravité du système énergétique mondial tend ainsi à se déplacer de plus en plus vers l’est avec comme moteurs la Chine et l’Inde.

De notre point de vue, jusqu’en 2011, la hausse des capacités satisfait la demande. Au-delà on aurait un décrochage avec une forte probabilité de crise énergétique. Reste à voir entre 2008 et 2010 jusqu’où la croissance supportera-t-elle les prix élevés. Un phénomène de rebond, où les prix subiraient un infléchissement pourrait fortement se produire avec un accroissement de la volatilité et des phases successives de hausse et de baisse des prix autour d’un pivot de 85 dollars le baril, soit en monnaie constante, à peu près la même amplitude que les vingt dernières années. Ce phénomène sera rattrapé par l’accélération des demandes chinoises et indiennes. Quels impacts auraient les politiques volontaristes d’économie d’énergie ? Difficile à savoir car la demande part de si bas que l’effet sur les équilibres semble difficile à contenir.

Les relations entre acteurs tendront à devenir de plus en plus tendues voire conflictuelles du fait de la rareté de la ressource, l’intensification accrue de la concurrence et la multiplication des acteurs convoitant ces ressources. Des tensions réelles risquent de devenir récurrentes et se conclure vraisemblablement par un nouveau Yalta. L’outil militaire va voir son rôle valorisé et associé de plus en plus aux recherches d’équilibres ou à la défense des souverainetés mais aussi à la sécurisation des grandes routes maritimes et terrestres (gazoducs) par lesquelles transite l’énergie. L’Etat nation ne semble plus être un rempart suffisant pour des ressources devenues rares et néanmoins toujours vitales à l’économie mondiale. Les hydrocarbures ne cesseront d’être tout au long du siècle, et en attendant un nouveau paradigme énergétique, la colonne vertébrale du système énergétique mondial (autour de 50% de la demande mondiale d’énergie encore les 30 prochaines années). L’économie mondiale sera de plus en plus vulnérable aux crises politiques et les grandes questions touchant à la gouvernance mondiale deviendront encore plus impératives. En effet l’apparition de l’économie monde et le décloisonnement des espaces économiques nationaux, ne se sont pas accompagnés d’instantes supranationales de régulation, d’arbitrage et de concertation dotés de réels pouvoirs.

La Chine, et dans une moindre mesure l’Inde, convoite les sources traditionnelles des pays de l’OCDE. L’Europe ne dispose pas d’une sphère d’influence stratégique propre sur le plan de ses approvisionnements énergétiques qu’elle peine à sécuriser. On peut considérer qu’elle est plus vulnérable que les Etats-Unis qui disposent aujourd’hui d’un réel monopole militaire. Cette même question se posera dans un très proche délai à la Chine, dans une moindre mesure à l’Inde qui constitue, articulée au Golfe arabo-persique, une véritable sous-région, en mesure d’assurer son autonomie énergétique. Les progrès de la marine de guerre chinoise, aujourd’hui désormais troisième mondiale sont un important signal.

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Il est maintenant certain que le peak oil engagera vigoureusement la planète vers un nouveau mix énergétique. La question de la sécurité des approvisionnements se posera en termes beaucoup plus larges :

Volume des réserves et « accessibilité politique ». Facteur temps par rapport au progrès technique Contraintes de géopolitique et instabilité structurelle dans les zones de production et

de transit. Quelles configurations régionales ? Relations conflictuelles/partenariales entre grands consommateurs Diversification et flexibilité des approvisionnements Interdépendance et mise en place de dispositifs partenariaux internationaux. Transparence de l’information car on ne peut pas continuer à fonctionner avec autant

d’information capitales manipulées (réserves) ou non maîtrisées (croissance de la demande des pays émergents).

Les pays producteurs ne doivent pas non plus considérer que la contrainte écologique est une préoccupation de riches. Le sort de la planète nous concerne tous et il convient de prendre en charge cette préoccupation pour amener les premiers responsables du réchauffement climatique à assumer leurs responsabilités. Ceux dont le passif en la matière est de longues années d’industrialisation énergétivore qui a abouti à l’accumulation actuelle de CO2 dans l’atmosphère doivent participer plus que les autres nécessairement. Les combustibles fossiles représenteront encore 90% des besoins en 2030 avec une part prépondérante pour le pétrole. L’énergie serait responsable de 80% des émissions de CO2. Il semble que les émissions de CO2 augmenteraient de 55% d’ici 2030, ce qui laisse augurer, selon le rapport Stern, commandé par le gouvernement britannique, une augmentation des températures de 2° d’ici 2035 si rien n’est fait.

c). L’avenir de l’industrie gazière   : incertitudes et reconfigurations

Les réserves de gaz dépassent les 181 000 milliards de mètres cubes, concentrées essentiellement au Moyen Orient (Qatar et Iran) et en Russie, soit plus de 60 ans de production au rythme actuel. Elles équivalent aujourd’hui les réserves pétrolières. Structurellement l’industrie gazière connaît une tendance lourde à l’éloignement entre zones de production et marchés avec un poids de plus en plus important du transport et des pays de transit. De même, la géopolitique gazière tend de plus en plus vers le modèle pétrolier. La consommation de gaz a augmenté de 2.5% en 2006, soit un niveau supérieur de sa moyenne de 10 ans. Le commerce de gaz s’est tassé, il progresse désormais moins vite. Le gaz est consommé par les producteurs plus que par le passé. Le gaz, qui était le combustible de choix dans la génération électrique, est en train de perdre ses positions au profit du charbon à cause des prix et du dynamisme de la demande chinoise. Le charbon est d’ailleurs la source d’énergie à la plus forte croissance, même si le gaz maintient son dynamisme hors Chine. La génération électrique restera le moteur de la croissance de l’industrie gazière, à l’avenir. On estime que le gaz y contribuerait pour 30%. A l’horizon 2030, selon l’AIE, la part du gaz dans la production d’électricité devrait être multipliée par trois.

Le GNL représente 22% du commerce mondial du gaz. Selon de CERA, les volumes de GNL échangés vont croître de 6.5% à 8% d’ici 2020 où le GNL représenterait 20% de la consommation mondiale d’énergie et 25% du marché américain. Le goulot d’étranglement se situe dans les capacités de production. Nous assistons à une tendance à l’augmentation de la taille des méthaniers et l’allongement de leurs routes. Le GNL et le dynamisme de la demande américaine vont constituer un accélérateur à l’interconnexion des marchés des trois bassins

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(Amérique, Asie-Pacifique et Europe) et à la globalisation du marché du gaz. Par ce phénomène, ce marché tendra à échapper aux logiques de long terme qui l’ont structuré et sera de plus en plus un marché de court terme, volatil et hautement compétitif.

L’Union européenne pense contenir sa demande pétrolière à une croissance totale de 6% d’ici 2030. Cependant dans ce scénario, 200 millions de tep devraient provenir du gaz naturel et des énergies renouvelables. Le nucléaire ne semble pas bénéficier de la nouvelle situation créée par les prix élevés du pétrole puisque sa part devrait baisser de 20% d’ici 2030. Cependant, les incertitudes posées par une cartellisation du marché gazier européen et l’apparition d’une OPEC du gaz peuvent faire sortir de leurs cartons certains projets gelés. Il est important de le dire ici, car les dix prochaines années, d’importantes décisions seront prises. Les centrales électriques construites au lendemain de la seconde guerre mondiale seront mises hors de service. De plus d’ici 2030 nombreuses centrales nucléaires arriveront aussi en fin de vie. Le gaz naturel a une chance à ne pas rater. La politisation de cette industrie risque de compromettre sa place dans nombreux pays, notamment européens, et lui faire perdre de réelles opportunités pour être l’un des pivots de la transition énergétique. La dépendance gazière devrait s’établir pour l’Europe à 70% en 2020 et 81% en 2030 contre 54% en 2004.

Il faut se préparer à une hégémonie du Moyen-Orient sur l’industrie gazière mondiale . Cette zone à fort potentiel va tripler sa production gazière d’ici 2030 et sera un important acteur dans le GNL (Qatar, Iran). Elle va forcément attaquer les marchés traditionnels de l’Algérie. Il faut donc préserver des volumes pour se battre demain pour défendre ses parts de marché. L’autre grand acteur gazier des décennies à venir est la Russie qui détient les premières réserves mondiales.

d). Les perspectives à très long terme

A plus long terme, alors que la population mondiale aura doublé entre 1970 et 2030 pour atteindre 8 milliards d’habitants, la tendance est la suivante :

Plus de richesse, plus de ménages, plus d’équipements par ménage et plus de demande de mobilité et de possession d’automobiles par personne (car ownership). On prévoit aussi un frein à l’urbanisation et une baisse de la densité.

Equipements et transports demanderont des énergies à performances élevées. Selon Enerdata, l’accroissement des besoins en 2100 sera entre 1.5 fois et 3 fois le

niveau de l’an 2000. Impératif premier : efficacité énergétique, éviter le gigantisme du système énergétique

mondial. Imaginer des systèmes énergétiques capables de fournir plus en consommant moins.

En Europe, Enerdata propose comme objectif de satisfaire une hausse de 40% des besoins avec une quantité d’énergie 20% plus faible. Vision moyenne : 60% de gain d’efficacité énergétique dans les transports.

Le croissance de la demande pétrolière est estimée à 1.6% l’an les 25 prochaines années. Le secteur des transports ne devrait pas trouver de substitut au pétrole avant la seconde moitié du siècle. Le mix énergétique atteindrait selon de Conseil Mondial de l’Energie le niveau de 15 à 20 Gtep en 2050 (10 actuellement en comptant les énergies non commerciales.) Les transports représenteront une part de plus en plus importante de la consommation énergétique tout au long du siècle. Si la part des transports dans la demande d’énergie se maintient à 20%, pour une consommation de 20 Gtep en 2050, le transport consommerait 4 Gtep. Si la part du

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pétrole dans le transport se maintient à 95%, il faudrait consacrer la totalité du pétrole extrait au secteur des transports. Cela apparaît impossible avec le peak oil qui aurait été atteint avant 2015 ! Selon Pierre-René Bauquis, le pétrole n’assurerait que 50 à 60% des carburants, soit 2 à 2.5 Gtep. Par quoi serait fourni le reste ? carburants de synthèse, hydrogène, hybridation, etc.

Il semble certain que les moteurs thermiques continueront à dominer la première moitié du siècle avec une montée des biocarburants, de l’hybridation et des gains d’efficacité et de rendement. Cependant, le transport aérien et maritime n’ont pas montré encore toute les possibilités de leur développement avec la mondialisation. Notamment le transport aérien risque de connaître un essor important. La baisse des prix des billets depuis 20 ans les met à un très bas niveau. Les moteurs thermiques passeront la main entre 2030 et 2050 à travers l’hybridation puis les piles à combustible. Le pétrole est voué à être réservé aux transports aériens de longue distance.

Le nucléaire ne devrait pas connaître de véritable essor avant la mise en service des réacteurs de 4ème génération avant 2030/2040. Les challenges sont l’élimination des déchets à vie longue, les avancées technologiques vers des réacteurs « plus démocratiques » de petite et moyenne capacité (300 – 500 Mw) à des coûts plus accessibles qui élargiraient l’accès aux pays en développement, cela en supposant que les questions de non prolifération nucléaire soient traitées de manière plus sereine et ne continuent pas à parasiter le développement tant nécessaire de cette filière. Se posera aussi avec acuité à l’avenir le problème de l’épuisement des ressources, et des batailles pour contrôler les derniers bassins miniers. Dans tous les cas, des logiques partenariales devraient être initiées avec beaucoup plus de volontarisme et un esprit visionnaire par les pays détenteurs de la technologie. Ces logiques impliqueront nécessairement un partenariat dans la recherche et un transfert de technologie sans a priori vers les pays en développement à haut potentiel comme l’Algérie. On pense qu’en Europe, à travers l’électricité et l’hydrogène, le nucléaire pourrait couvrir 60% des besoins.

L’objectif posé à la transition énergétique sur un horizon plus large est d’inverser la part des énergies fossiles (90%) et non fossiles (10%) d’ici la fin du siècle5. A l’horizon 2050, l’IFP prévoit 30% à 40% d’énergies non fossiles, ce qui est un véritable challenge. Il reste à imaginer des concepts nouveaux de partenariats producteurs – consommateurs conduisant harmonieusement vers l’atteinte de ces objectifs.

e). Scénarios et enjeux dans une vision de long terme pour les producteurs  

Nous pouvons imaginer trois grandes périodes et trois horizons :

2008/2015 : Adaptation par :o l’amélioration des rendements énergétiqueso les économies d’énergie (nouveaux comportements)o encouragement des énergies renouvelableso R&D importante dans ce domaine

2015/2030 : Evolutions incrémentales par o l’innovation et l’optimisation des systèmes o les substitutions énergétiques,

5 Un excellent travail de prospective énergétique a été fait par des experts français sous la direction de Jean Syrota. Ce travail a formalisé un certain nombre d’horizons et d’objectifs et développé une analyse d’une grande pertinence. Il mérite d’être consulté par toute personne intéressée par ces questions. (In Bulletin de l’Industrie Pétrolière N° 10867 à 10872 –Juin 2007)

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o les énergies renouvelables, o les biocarburants de 2ème et 3ème génération, o les carburants de synthèse o Réduction sensible des émissions et séquestration de CO2o l’hybridation.

2030/2050 : Ruptures technologiques. o On va vers la fin du paradigme fossile.o Accumulateurs, transports de l’électricité sur de longues distanceso Nucléaire (4ème génération), la fusion thermonucléaire n’interviendrait que

vers le dernier quart du siècle.o Renouvelables. o Hydrogène.

Les pays producteurs doivent repenser leurs politiques énergétiques nationales et lancer des actions structurantes en ce sens. Voici quelques idées non exhaustives :

Rationaliser, optimiser et économiser l’énergie Améliorer les rendements des systèmes énergétiques Préserver les ressources du sous-sol et ne produire qu’en fonction des besoins

nationaux. Repousser les limites de la production pétrolière grâce au progrès technique. Se donner le temps nécessaire au développement d’énergies de substitution au

pétrole dans les usages où il est irremplaçable. Cet enjeu doit être considéré à travers tout le système énergétique mondial et ne doit pas exclure les producteurs.

Diversifier le mix énergétique avec une plus grande place au gaz naturel et énergies renouvelables.

Agir sur les comportements des consommateurs. Depuis l’école, les individus doivent être préparés à de nouveaux comportements.

La production électrique devra évoluer vers la filière électro-nucléaire. En 2030 des centrales de petite et moyenne capacité avec dessalement d’eau de mer devraient être en opération.

Réduire les émissions de CO2 Imposer aux constructeurs automobiles et aux importateurs la bicarburation

(essence/GPL ou gaz naturel) et l’introduction des motorisation hybrides. Maîtriser le développement du secteur du transport par des investissements dans le

transport en commun Développer le rail pour contenir le développement du transport aérien domestique Agir de manière volontariste sur le secteur de l’habitat en encourageant les

technologies à faible intensité énergétique. Les techniques de construction traditionnelles comme la construction en terre crue doivent faire l’objet de soutiens gouvernementaux pour leur développements conceptuels et leur vulgarisation.

Engager les universités et la recherche nationale dans les sciences et technologies nucléaires pour être au rendez-vous de 2030.

Mais plus fondamentalement, les pays producteurs doivent engager résolument leur développement scientifique et technologique national. Car le pétrole du futur sera plus technologique. Pour le Cambridge Energy Reaserch Associates, le pétrole dit « technologique sera dominant à l’avenir. En 2015, 34% de la production sera constituée par un pétrole extrait en mers profondes, des pétroles quasi-solides (bruts extra-lourds), des carburants de synthèse. » La technologie sera en effet l’élément clé à l’avenir. Dans un paradigme fossile, elle sera le levier par lequel les tendances à l’œuvre seront ralenties ou orientées le temps des

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reconfigurations de la géographie des ressources au profit des grands consommateurs (ultra deep, bruts extra-lourds, carburants de synthèse, biocarburants de deuxième et troisième génération, charbon propre, hybridation etc.).

A la moitié du siècle, la planète parviendra vraisemblablement vers un nouveau paradigme énergétique de plus en plus décarboné et de moins en moins lié aux sources fossiles. La technologie sera au rendez-vous avec des systèmes énergétiques inédits et qui seront cette fois-ci totalement sous le contrôle des pays industrialisés. Voilà pourquoi les pays producteurs doivent dès à présent, et alors que leur pouvoir de négociation n’a jamais été aussi fort, mettre la science et technologie au cœur de tous les projets partenariaux internationaux. Ils doivent pour cela mobiliser tous leurs acteurs, entreprises, universités y compris leur diplomatie. Ils doivent comprendre définitivement qu’aujourd’hui la souveraineté est dans les universités, dans les centres de recherche, elle est dans la compétitivité des entreprises, des champions nationaux.

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ANNEXES

Pour la clarté de l’exposé nous allons préciser un certain nombre de notions.

Pétrole conventionnel et pétrole non conventionnel Le pétrole conventionnel est celui qui est produit aujourd’hui dans les conditions technico-

économiques que l’on pourrait dire normales. Le pétrole non conventionnel représente les hydrocarbures denses et fortement visqueux,

voire qui se présentent à l’état solide. Ces hydrocarbures sont rendus liquides et légers au bout d’un processus technologique coûteux en finances et en technologie. Les bruts extra lourds du Venezuela ainsi que les sables asphaltiques du Canada en font partie.

Depuis peu on intègre de plus en plus souvent dans cette catégorie les biocarburants, les carburants de synthèse tirés du gaz naturel (GTL) et du charbon (CTL) etc.

La notion de réserves renvoie toujours à la quantité d’huile récupérable aux conditions technologiques et économiques du moment. Il existe trois catégories de réserves, classifiées selon leur probabilité de récupération : Les réserves prouvées ou 1P sont les quantités de pétrole que l’on est sûr de récupérer avec

une probabilité de 90%. Sont bien entendu pris en compte les paramètres techniques et économiques.

Les réserves probables ou 2P prennent en compte les premières ainsi que des quantités plus difficiles à récupérer avec une probabilité de 50%.

Les réserves possibles ou 3P sont celles encore plus difficiles et dont la probabilité de récupération est de l’ordre de 10%.

Le fameux rapport R/P, soit la durée de vie des réserves et qui s’exprime en années prend en compte les réserves prouvées, soit les 1P qui sont divisées par la production de l’année. Il faut aussi ajouter que l’évaluation des 1P est ici toujours prudente, partout dans le monde. Des « bonnes surprises » ne sont jamais à exclure. On ne calcule jamais la durée de vie des réserves en partant des réserves probables voire possibles. Cela n’a aucun sens.Les déclarations de réserves sont une affaire très sérieuse. Les compagnies pétrolières sont tenues par les autorités régulant les marchés boursiers à une extrême rigueur et surtout s’en tenir aux 1P, soit les réserves restantes dans les gisements ainsi que celles découvertes et faisant l’objet d’un plan de production approuvé par les organes statutaires de la compagnie. Le groupe Shell a, par exemple, été pris dans une tourmente boursière non pas pour avoir falsifié des réserves mais tout simplement pour avoir comptabilisé des réserves dont les plans de développement n’avaient pas encore été votés.

Le taux de récupération dans les gisements est aujourd’hui de l’ordre de 30% en moyenne dans le monde, c'est-à-dire plus simplement que sur trois barils se trouvant dans un gisement, on ne peut en récupérer qu’un seul. L’utilisation de techniques de plus en plus sophistiquées et coûteuses devrait à l’avenir améliorer les choses.

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Unités de mesure des volumes de pétrole et de produits.

1 baril = 159 litres. 1 baril = 0.1364 tonnes 1 tonne de pétrole = 7,33 barils. 1 baril/jour = environ 50 tonnes/an Mbj : Millions de barils par jour Gbl : Millards de barils En règle générale sont utilisés : -M pour million soit 106

-G pour giga soit 109

-T pour téra soit 1012

Les huit challenges technologiques de l’industrie pétrolière

1. Amélioration du taux de succès de l’exploration par : Des progrès dans l’imagerie du sous-sol (sismique en trois dimensions) La modélisation géologique des bassins permettant de mieux anticiper les potentiels de

découvertes.2. Amélioration du taux de récupération dans les gisements par : Les technologies de visualisation et de management des réservoirs (caractérisation et

simulation du réservoir, monitoring de la production, utilisation répétée dans le temps de la sismique 3D pour maîtriser les écoulements de fluides, etc.)

Les technologies du forage (measurement while drilling, forages dirigés, horizontaux et multidrains etc.)

Les techniques de récupération assistée (gaz miscibles, tensio-actifs, etc.) Ces questions deviendront de plus en plus impératives avec le vieillissement des

gisements, notamment les grands champs du Moyen-Orient, qui deviendront de plus en plus consommateurs de technologie .

3. L’exploitation des pétroles difficiles : Pétroles extra lourds et sables asphaltiques, gisements onshore par grandes profondeurs

(plus de 6000 mètres) ou fortement acides.4. Offshore profond (plus de 2000 m de profondeur d’eau) ou très profonds (plus de 3000

mètres). Systèmes de production totalement sous-marins commandés depuis la surface Pompes polyphasiques Ecoulement des fluides, liaison fond - surface5. Abaisser les coûts de la chaîne GNL. Usines de GNL de petite taille, nouveaux procédés de liquéfaction et amélioration des

rendements énergétiques. Augmentation de la taille des méthaniers (au-delà de 135 000 m3), allongement de leurs

routes (baisse des coûts, meilleurs rendements, réduction boil off etc.).6. Carburants de synthèses : gas to liquid (GTL) et coal to liquid (CTL).7. Biocarburants de deuxième (paille) et troisième génération (algues marines).8. Protéger l’environnement Adaptation du raffinage à la sévérisation des normes environnementales (soufre, plomb

etc.) Séquestration, stockage du CO2

Les réserves algériennes d’hydrocarbures

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Les réserves pétrolières sont estimées à 12.3 Gbls par BP Statistical Review, soit au rythme de production actuel une durée de vie de 16.8 ans.

Les réserves gazières sont estimées à 4.5 Tm3, soit au rythme de production actuel 53.3 ans.

Selon l’US Geological Survey, Les probabilités de découvertes en Algérie sont de : 95% : 1.7 Gbls 50% : 6.9 Gbls 5% : 16.3 Gbls

Le rythme de découvertes est de 18 en 2006 et 20 en 2007. Mais le taux de reconstitution des réserves reste très faible avec 25.2% en 2005 et 51.1% en 2006. Il semble que les découvertes faites soient de très petite taille. Il faut alors s’interroger si la majorité d’entre-elles sont économiquement exploitables. Dans le cas contraire, le taux de renouvellement des réserves consommées devrait être revu à la baisse. (Source Pétrostratégies)

Les 12 pays membres de l’OPEC

Pays Production Mbj

Algérie 1.369Angola 1.392Arabie Saoudite 9.208Indonésie 0.883Iran 4.073Irak 2.020Koweit 2.665Libye 1.751Nigeria 2.234Qatar 0.803UAE 2.568Venezuela 3.107

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