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PRATIQUES EN OPHTALMOLOGIE REVUE DIDACTIQUE MÉDICO-CHIRURGICALE Février 2012 • Volume 6 • n° 51 • 8 e d www.ophtalmologies.org L’avènement des OCTs de haute résolution a permis de progresser considérablement dans l’analyse de la choroïde. APPLICATIONS DE L’OCT “EN FACE” DANS LES PATHOLOGIES DE LA CHOROïDE De la rétine interne à la supra-choroïde… Rédigé par les Drs Benjamin Wolff, Mathieu Lehmann et Martine Mauget-Faÿsse MISE AU POINT PRATIQUES EN OPHTALMOLOGIE REVUE DIDACTIQUE MÉDICO-CHIRURGICALE ZOOM SUR… Les taches pigmentées du fond d’œil Dr Florence Coscas, Dr Sarah Tick, Dr Livia Lumbroso-Le Rouic COMPRENDRE La place des interventions de suppléance dans les paralysies totales du VI Dr Nicole Gambarelli EN PRATIQUE La maculopathie glaucomateuse sur les cellules ganglionnaires en OCT Dr Michel Zeitoun À SAVOIR Comparaison des lasers femtoseconde Partie 1 : chirurgie cornéenne Dr Michaël Assouline LECTURE CRITIQUE Décollement de rétine rhegmatogène Voyage spatiaux et anomalies ophtalmologiques Dr Guillaume Leroux Les Jardins

PRATIQUES EN OPHTALMOLOGIEtina France, la Fondation Voir & Entendre, la Founda-tion Fighting Blindness et du GIS-maladies rares. ß EN BREF Le prix de La fondation de L’œiL La Fondation

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PRATIQUES ENOPHTALMOLOGIER E V U E D I D A C T I Q U E M É D I C O - C H I R U R G I C A L E

Février 2012 • Volume 6 • n° 51 • 8 e

d www.ophtalmologies.org

L’avènement des OCTs de haute résolution a permis de progresser considérablement dans l’analyse de la choroïde.

ApplicAtions de l’oct “en fAce” dAns les pAthologies

de lA choroïdeDe la rétine interne à la supra-choroïde…

Rédigé par les Drs Benjamin Wolff, Mathieu Lehmann et Martine Mauget-Faÿsse

MISE AU POINT

PRATIQUES ENOPHTALMOLOGIER E V U E D I D A C T I Q U E M É D I C O - C H I R U R G I C A L E

Zoom sur…

Les taches pigmentées du fond d’œil Dr Florence Coscas, Dr Sarah Tick, Dr Livia Lumbroso-Le Rouic

Comprendre

La place des interventions de suppléance dans les paralysies totales du VI Dr Nicole Gambarelli

en pratique

La maculopathie glaucomateuse sur les cellules ganglionnaires en OCT Dr Michel Zeitoun

À saVoir

Comparaison des lasers femtoseconde Partie 1 : chirurgie cornéenneDr Michaël Assouline

LeCture Critique

Décollement de rétine rhegmatogèneVoyage spatiaux et anomalies ophtalmologiquesDr Guillaume Leroux Les Jardins

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• Directeur de la publication : Dr Antoine Lolivier

• Chef du Service Rédaction : Odile Mathieu• Rédactrice : Laure Guiheneuf• Directrice de la production : Gracia Bejjani • Assistante de Production : Cécile Jeannin • Chef de Studio : Laurent Flin • Maquette et illustration :

Élodie Lecomte, Antoine Orry• Chef de publicité : Emmanuelle Annasse • Service Abonnements : Claire Lesaint • Impression : Imprimerie de Compiègne

60205 Compiègne

RéDACteuR en Chef

Dr Pierre-Vincent Jacomet (Paris)

ReSPonSAble eDItoRIAl

Dr Michaël Assouline (Paris)

CoMIté De RéDACtIon

Dr Laurent Laloum (Paris)(Conseiller éditorial de la rédaction)Dr Cati Albou-Ganem (Paris),Dr Corinne Bok-BeaubePr Antoine Brézin (Paris), Pr Alain Bron (Dijon), Dr Catherine Favard (Paris), Dr Eric Gabison (Paris),Dr Jacques Laloum (Paris), Dr Gérard Mimoun (Paris), Dr Vincent Pierre-Kahn (Suresnes)

CoMIté SCIentIfIque

Pr Jean-Paul Adenis (Limoges), Pr Christophe Baudouin (Paris), Dr Yves Bokobza (Boulogne-Billancourt), Dr Georges Caputo (Paris), Dr Sylvie Chokron (Paris), Pr Béatrice Cochener (Brest), Dr Salomon-Yves Cohen (Paris), Dr Howard Cohn (Paris), Pr Joseph Colin (Bordeaux), Pr Gabriel Coscas (Créteil),Dr Marie Delfour-Malecaze (Toulouse),Pr Paul Dighiero (Poitiers), Dr Serge Doan (Paris), Dr Olivier Gout (Paris), Dr Jean-Claude Hache (Lille), Pr Jean-François Korobelnik (Bordeaux), Dr Yves Lachkar (Paris), Dr Evelyne Le Blond (Grenoble),Dr Dan Alexandre Lebuisson (Suresnes), Pr Frédéric Mouriaux (Caen), Pr Jean-Philippe Nordmann (Paris), Dr Pascal Pietrini (Saint Herblain), Pr José Sahel (Paris, Strasbourg),Dr Monique Schaison (Paris), Dr Eric Sellem (Lyon),DrJean-Bernard Weiss (Paris)

Pratiques en ophtalmologie est une publication ©expressions Santé SAS

2, rue de la RoquettePassage du Cheval blanc

Cour de Mai 75011 Paris

tél. : 01 49 29 29 29 - fax : 01 49 29 29 19e-mail : [email protected]

Site : www. ophtalmologies.orgRCS Paris b 394 829 543

n° de Commission paritaire : 0314t88767ISSn : 2106 – 9735

Mensuel : 10 numéros par an

Les articles de “Pratiques en Ophtalmologie” sont publiés sous la responsabilité de leurs auteurs.

Toute reproduction, même partielle, sans le consentement de l’auteur et de la revue, est illicite

et constituerait une contrefaçon sanctionnéepar les articles 425 et suivants du code pénal.

sommaireFévrier 2012 • Vol. 6 • N° 51

Assemblés à cette publication : 2 bulletins d’abonnement (2 pages et 4 pages).Photos de couverture : © DR

www.ophtalmologies.org

PRATIQUES ENOPHTALMOLOGIER E V U E D I D A C T I Q U E M É D I C O - C H I R U R G I C A L E

www.ophtalmologies.org

n ActuAlitÉs. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .p. 34

n lecturecritique •l’œiladelpheencasdedécollement

derétinerhegmatogène . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 35 •Anomaliesophtalmologiqueslors

desvoyagesspatiauxdelonguedurée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 36Dr Guillaume Leroux Les Jardins (Paris)

n zoomsur… lestachespigmentéesdufondd’œil Aspectscliniquesetangiographiques. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 37 Dr Florence Coscas, Dr Sarah Tick, Dr Livia Lumbroso-Le Rouic (Paris)

n miseAupoint Applicationsdel’oct“enface”danslespathologiesdelachoroïde Delarétineinterneàlasupra-choroïde…. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 42 Rédigé par les Drs Benjamin Wolff, Mathieu Lehmann et Martine Mauget-Faÿsse (Paris)

n comprenDre laplacedesinterventionsdesuppléance danslesparalysiestotalesduVi Dernièrestechniquesetcaspratiqueillustré . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 47 Dr Nicole Gambarelli (Marseille)

n enprAtique lamaculopathieglaucomateuse surlescellulesganglionnairesenoct unenouvelleapproche:sonintérêtpratique. . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 52 Dr Michel Zeitoun (Gonesse)

n àsAVoir comparaisondeslasersfemtoseconde partie1:chirurgiecornéenne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 57 Dr Michaël Assouline (Paris)

nAgenDA . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .p. 36nBulletinD’ABonnement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .p. 46

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actualités

34� Diabète & Obésité • Mars 2010 • vol. 5 • numéro 37

de la profession

Recherche

GPR179 : un nouveau gène impliqué dans la cécité nocturne

L a cécité nocturne congénitale stationnaire est une maladie génétique rare qui apparaît dès

la naissance. Une étude publiée le 10 février 2012 dans la revue American Journal of Human Gene-tics, a révélé l’implication de la mutation du gène GPR179 dans la maladie.L’étude a tout d’abord porté sur des familles at-teintes de la forme la plus sévère de la maladie. Après la réalisation d’un séquençage exomique, une technique de nouvelle génération qui permet de décoder l’ensemble des gènes d’une personne, la présence de mutations du gène GPR179 a été observée. Dans une seconde étape, l’étude a porté sur une plus large cohorte de malades. Les résul-

tats ont confirmé la présence de mutations pour trois familles supplémentaires. La fonction du gène GPR179 reste pour le moment inconnue même si les résultats préliminaires suggèrent un rôle cel-lulaire unique, distinct des autres gènes impliqués jusqu’à présent. L’identification de son implication dans cette pathologie en fait un candidat de choix comme marqueur biologique (facilitant le dia-gnostic et permettant d’écarter d’autres patho-logies se manifestant également par des cécités nocturnes). Ces travaux ont été réalisés grâce au soutien de Ré-tina France, la Fondation Voir & Entendre, la Founda-tion Fighting Blindness et du GIS-maladies rares. ß

EN BREFLe prix de La fondation de L’œiLLa Fondation de France, qui remet depuis 27 ans des prix à des chercheurs en ophtalmolo-gie ou en neuro-ophtalmologie, lance la Fondation de l’œil. La fondation propose des bourses aux jeunes chercheurs et clini-ciens. Pour présenter un projet, télécharger le dossier de can-didature sur www.fondationde-france.org ou demandez le par mail à : [email protected] date limite de dépôt des dossiers est le 23 mars 2012.

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Lecture critique

Pratiques en Ophtalmologie • Février 2012 • vol. 6 • numéro 51 35

Rétine

L’œil adelphe en cas de décollement de rétine rhegmatogène

4 The fellow eye in retinal detachment: findings from the Scot-

tish Retinal Detachment Study.

Mitry D, Singh J, Yorston D et al. Br J Ophthalmol 2012 ; 96 :

110-3.

Le décollement de rétine rhegmatogène (du grec rhegma,

rupture/déchirure) est une pathologie potentiellement céci-

tante qui survient souvent sur un terrain prédisposé par des

lésions rétiniennes périphériques. Ces lésions peuvent être

bilatérales. Plusieurs études épidémiologiques ont déjà sou-

ligné les risques sur l’œil adelphe mais sur des séries limitées

de patients (1, 2).

Ce travail est une étude descriptive prospective, multicen-

trique. Elle a évalué sur une durée de 2 ans les caractéris-

tiques cliniques de l’œil atteint et de l’œil adelphe en cas de

décollement de rétine (DR) rhegmatogène. L’ensemble des

DR de ce type survenus en Ecosse pendant cette période a

été étudié. Etaient exclus au niveau de l’œil atteint les cas

avec récidives de DR, un antécédent de chirurgie vitréo-réti-

nienne ou de traumatisme oculaire pénétrant.

LéSiOnS préDiSpOSanteS au niveau De L’œiL aDeLphe DanS prèS De ¼ DeS caSUn total de 1 130 DR a pu être analysé. Au niveau de l’œil

atteint, 87,6 % des yeux présentaient un décollement posté-

rieur du vitré (DPV, cliniquement décrit par la présence d’un

anneau de Weiss), avec une ou plusieurs déchirures dans

98,5 % des cas, et une déchirure géante dans 1,5 % des cas.

En l’absence de DPV (12,4 % des cas) le DR était causé par un

ou plusieurs trous (40 %), une dialyse à l’ora (47,8 %) ou un

retinoschisis (12,1 %).

5,8 % des yeux atteints de DR avaient bénéficié au préalable,

sans succès, d’une prophylaxie par laser ou cryothérapie au-

tour des zones à risque (déchirure, trou, palissades).

Au niveau de l’œil adelphe, une ou plusieurs déchirures

étaient retrouvées dans 8,4 % des cas. Dans 14,5 % des cas,

il s’agissait de dégénérescences palissadiques. Près d’un pa-

tient sur 4 (22,9 %) présentait donc au niveau de l’œil contro-

latéral des lésions prédisposantes susceptibles de bénéficier

d’une prophylaxie.

Dr BiLatéraL SiMuLtané DanS 1,5 % DeS caS7,3 % des patients ont eu, au niveau de l’œil controlatéral, un

DR survenu avant ou après la période de l’étude. La médiane

d’apparition du décollement était de 3,8 années.

Dans 1,5 % des cas, il existait un DR bilatéral simultané alors

que les symptômes visuels étaient unilatéraux.

Dans leur discussion, les auteurs rappellent que, dans cer-

taines études, la bilatéralisation du DR est retrouvée dans

30 % des cas (3), et soulignent donc l’importance de sur-

veiller l’œil adelphe. Ils insistent également sur la protection

incomplète contre le DR de la prophylaxie par laser ou cryo-

thérapie des zones à risque.

Pour conclure, cette étude souligne qu’en cas de décolle-

ment de rétine il est indispensable d’examiner initialement

attentivement la périphérie de l’œil adelphe afin de dépister

d’éventuelles lésions prédisposantes voire un DR bilatéral si-

multané. n

Nous avons lu pour vousPublications récentes

� Dr�Guillaume�Leroux�Les�Jardins*

1. Gonzales CR, Gupta A, Schwartz SD, Kreiger AE. The fellow eye of pa-tients with rhegmatogenous retinal detachment. Ophthalmology 2004 ; 111 : 518-21.2. Gonzales CR, Gupta A, Schwartz SD, Kreiger AE. The fellow eye of pa-tients with phakic rhegmatogenous retinal detachment from atrophic holes of lattice degeneration without posterior vitreous detachment. Br J Ophthalmol 2004 ; 88 : 1400-2.3. Gupta OP, Benson WE. The risk of fellow eyes in patients with rheg-matogenous retinal detachment. Curr Opin Ophthalmol 2005 ; 16 : 175-8.

BiBliographie

*�Hôpital�Hôtel-Dieu,�Groupe�hospitalier�Cochin-Hôtel�Dieu,�Paris

© Willie B. Thomas - istock

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Lecture critique

36� Pratiques en Ophtalmologie • Février 2012 • vol. 6 • numéro 51

Troubles ophtalmiques

Anomalies ophtalmologiques lors des voyages spatiaux de longue durée

4 Optic disc edema, globe flattening, choroidal folds, and hy-

peropic shifts observed in astronauts after long-duration space

flight.

Mader th, Gibson cr, pass aF et al. Ophthalmology 2011 ;

118 : 2058-69.

La station spatiale internationale (ISS) est en orbite à environ

35O km d’altitude et fait le tour de la Terre 5 fois par jour à une

vitesse de plus de 27 000 km/h (1, 2). Elle est le théâtre d’une

coopération scientifique internationale avec des équipes qui y

séjournent plus ou moins longtemps. Exposés à des conditions

de vie extrêmes, les membres d’équipage sont régulièrement

soumis à des évaluations médicales poussées.

Cette étude décrit les modifications oculaires parmi 7 astro-

nautes qui ont passé plus de 6 mois dans la station et l’évalua-

tion par questionnaire des changements visuels auprès de 300

autres astronautes avec des durées de séjour variables.

Les 7 principaux participants ont subi un examen ophtalmo-

logique complet avant et après le retour de leur mission avec

en plus réalisation d’un OCT et d’une Imagerie par Résonnance

Magnétique pour 6 d’entre eux.

œDèMe papiLLaire et pLiS chOrOïDienS A l’issue de leur mission, de nombreuses anomalies ophtal-

mologiques étaient retrouvées : œdème papillaire, plis choroï-

diens, aplatissement du globe pour 5 d’entre eux ; présence de

nodules cotonneux rétiniens pour 3 ; diminution à l’OCT de la

couche des fibres optiques pour 6 et altération de la vision de

près pour 6 d’entre eux.

5 sujets ont eu une hypermétropisation (shift hypermétropique)

allant de + 0,50 à + 1,75 dioptries. Un aplatissement du globe,

dans sa partie postérieure, était confirmé pour les 5 par IRM,

et une discrète élévation de la pression du LCR était retrouvée

après ponction lombaire pour 4 astronautes.

ShiFt hYperMétrOpique avec apLatiSSeMent Du GLOBeParmi les 300 astronautes ayant répondu au questionnaire, en

cas de vols de courte durée, 29 % des astronautes se plaignaient

d’une dégradation de leur vision de loin et de près. Ce chiffre

était de 60 % en cas de vols de longue durée. Pour certains, cette

dégradation persistait plus d’un an après le séjour spatial.

L’origine exacte de ces anomalies n’est pas connue. Les auteurs

émettent toutefois l’hypothèse que ces modifications au niveau

oculaires résultent des conséquences d’une exposition prolon-

gée à la microgravité. L’apesanteur pourrait être responsable

d’une redistribution des flux de liquide céphalo-rachidien au

niveau cérébral avec un retentissement sur l’œil, le nerf optique

et le volume choroïdien. Des protocoles d’études complémen-

taires sur les astronautes sont prévus pour approfondir ces ob-

servations. n

1. www.cieletespacephotos.fr/main.php/v/Espace/ISS/2. www.nasa.gov/mission_pages/station/main/index.html

BiBliographie

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INCLO 2012 – CONgrès de L’assOCIatION INNOvatIONs eN ChIrurgIe et Lasers OphtaLmOLOgIques24-29 mars 2012, pérou

• président du Congrès : Pr J.C. Rigal-Sastourne

• Coordination scientifique : Dr M. Assouline

• renseignements et inscriptions Gallic aviation département congrès

158, rue de la pompe – 75116 PARIS

Tél : 01 45 53 27 50 - Fax : 01 45 53 22 20

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118e CONgrès de La sOCIété FraNçaIse d’OphtaLmOLOgIe27-30 avril 2012, paris

• programme scientifique : Ce que le praticien ne doit pas ignorer : les

recommandations récentes en ophtalmologie, DMLA

exsudative : prise en charge, rétine maculaire du myope fort,

greffes de cornée, pathologie cornéenne inflammatoire,

Inflammation orbitaire, leucocorie chez l’enfant.

• renseignements et inscriptions Site : www.sfo.asso.fr

AgeNdA

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Zoom sur

Pratiques en Ophtalmologie • Février 2012 • vol. 6 • numéro 51 37

Lésions pigmentées bénignes

Les nævi choroïdiens Le nævus choroïdien est la plus fréquente des tumeurs intra­oculaires. Sa prévalence est très variable dans la littérature (1 à 30 %) mais il est généralement admis une prévalence comprise entre 20 et 30 % pour une popula­tion caucasienne. Son diagnostic est souvent fortuit en raison de son caractère asymptomatique. Les éléments du diagnostic positif des naevi bénins choroïdiens sont les suivants :• aspect en et FO++++ rétinopho-tographie et clichés monochro-matiques : il s’agit d’une lésion pigmentée (achrome dans 6 % des cas), ronde ou ovalaire, aux bords mal définis, flous, et mesurant habituellement moins de 6 mm de diamètre. A sa surface, on re­

* CHI Créteil ; Centre ophtalmologique de l’Odéon, Paris ** CHNO des XV-XX, Paris *** Institut Curie, Paris

trouve souvent des drusen et des altérations de l’EP, témoins de la chronicité de la lésion. Le cliché en lumière rouge permet une dé­limitation précise de la lésion cho­roïdienne et la surveillance d’une évolutivité possible ; • l’échographie B montre une lé­sion de faible épaisseur inférieure à 1,5 mm sans décollement séreux rétinien significatif, de diamètre inférieur à 6 mm parfois d’inter­prétation plus délicate ;

• l’examen OCT est utile seule­ment dans la recherche d’un dé­collement séreux rétinien. Le nævus bénin se traduit en OCT par une hyperreflectivité au sein de la choroïde dont la structure est conservée, souvent difficilement détectable et parfois associée à un œdème intra ­rétinien ;• en angiographie à la fluores-céine, le nævus se manifeste par une hypofluorescence variable, à tous les temps de la séquence

Les taches pigmentées du fond d’œil

Aspects cliniques et angiographiques

n Les lésions pigmentées du fond d’œil peuvent être séparées en deux groupes : les lésions

bénignes (nævi choroïdiens, mélanocytomes, hypertrophie congénitale bénigne de l’épithé-

lium pigmentaire (EP), adénomes de l’EP) et les lésions malignes (mélanome choroïdien, adé-

nocarcinome de l’EP plus exceptionnels). Des pathologies non tumorales (granulomes inflam-

matoires et lésions hémorragiques liées aux DMLA pseudo-tumorales, la CRSC hémorragique,

hématome choroïdien localisé ou macro-anévrysmes rompus, sclérites postérieures) peuvent

aussi avoir un aspect pigmenté.� Dr Florence Coscas*, Dr Sarah Tick**, Dr Livia Lumbroso-Le Rouic***

Figure 1 - rétinographie : lésion choroïdienne fréquente, de découverte systématique,

< 6 mm, plane, pigmentée, sans pigment orange. Angiographie : hypo fluorescence à

tous les temps, absence de Dsr, absence de pin points. oCt non nécessaire : confirme

l’absence de Dsr.

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Zoom sur

38� Pratiques en Ophtalmologie • Février 2012 • vol. 6 • numéro 51

sans DSR et sans pinpoints, en fonction de la pigmentation de la lésion et des altérations de l’EP. On y retrouve les drusen en sur­face qui s’imprègnent au cours de la séquence angiographique et qui sont à distinguer des pin points plus hyperfluorescents et punc­tiformes. En angiographie ICG (non nécessaire au diagnostic), les naevi sont habituellement hypo­fluorescents sans diffusion, sans vascularisation intrinsèque et sans modifications des vaisseaux choroïdiens péri­tumoraux (Fig. 1)

Le critère diagnostique princi­pal de la bénignité de la lésion est l’absence d’évolution. Ces lésions peuvent, par ailleurs, se compli­quer de décollement séreux réti­nien, de néovaisseaux choroïdiens, d’œdème cystoïde intrarétinien et d’altérations chroniques de la structure rétinienne en regard. Ils sont à surveiller sur Rétino Cou­leur annuellement.

MéLanocytoMes Il s’agit d’une lésion fortement pigmentée, d’origine papillaire ou choroïdienne, plus fréquente chez les patients mélanodermes. Les patients sont, la plupart du temps, asymptomatiques mais peuvent se plaindre de myodésop­sies unilatérales, de déficits cam­pimétriques et parfois de baisse d’acuité visuelle.Au FO et rétinophotographie, ils apparaissent de couleur brune, grise ou noire, aux bordures duve­teuses.L’échographie B montre un as­pect hyperechogène, sans excava­tion choroïdienne et une épaisseur en général inférieure à 3 mm. L’angiographie à la fluores-céine et au vert d’indocyanine montre une lésion hypofluores­cente, silencieuse aux cours de la séquence. Un œdème papillaire,

un décollement séreux rétinien et des accidents vasculaires associés peuvent parfois être mis en évi­dence.Les mélanocytomes sont capables à la fois de croissance et de trans­formation maligne, cette dernière atteignant 1 à 2 % des cas (Shields 2004, Zografos 2004).

L’hypertrophie congénitaLe de L’épithéLiuM pigMentaire (ep) Il s’agit d’une lésion bénigne d’hy­perpigmentation due à la différen­ciation aberrante des cellules de l’EP. Elle peut être isolée ou mul­tifocale. Deux entités cliniques peuvent être distinguées : • la forme unifocale se présente comme une tache pigmentée plane aux limites nettes, éventuel­lement entourée d’un fin liseré dé­pigmenté ; elle est généralement asymptomatique et de découverte fortuite ;• la forme multifocale ou la polypose adénomateuse fami-liale : syndrome de Gardner.

L’aspect en angiographie à la fluorescéine (non nécessaire au diagnostic) est celui d’une lésion silencieuse tout au long de la sé­quence. On peut parfois observer un rétinoschisis en regard ou une néovascularisation choroïdienne au cours de son évolution. La transformation maligne en adé­nome ou en adénocarcinome de l’épithélium pigmentaire est ex­ceptionnellement possible.

haMartoMe coMbiné de L’épithéLiuM pigMentaire et de La rétineLes hamartomes combinés de l’épithélium pigmentaire et de la rétine sont des tumeurs bénignes rares unilatérales affectant prin­cipalement les sujets jeunes. Leur

localisation est principalement postérieure et plus rarement péri­papillaire. Au pôle postérieur, ils se présen­tent sous la forme de lésions de faible relief à pigmentation noi­râtre mal délimitée, associées à une zone sus­jacente d’épaississe­ment rétinien et de modification des trajets vasculaires. Une mem­brane épirétinienne, des hémor­ragies et des exsudats lipidiques, voire un décollement de rétine ex­sudatif, peuvent être associés.

L’angiographie fluorescéinique permettra de caractériser au mieux la lésion en mettant en évi­dence des vaisseaux raréfiés sou­vent très tortueux et télangiecta­siques à sa surface, diffusant aux temps tardifs.

adénoMes et adénocarcinoMes de L’épithéLiuM pigMentaireLes adénomes et les adénocarci­nomes de l’épithélium pigmen­taire rétinien sont des tumeurs exceptionnelles, dont la plupart des cas rapportés sont isolés. Ils peuvent survenir de novo ou en réponse à diverses conditions ocu­laires.

Leur pigmentation plus superfi­cielle qu’au cours des lésions cho­roïdiennes, traditionnellement décrite comme brun­noir, peut être modérée, voire absente.

En angiographie à la fluores-céine, la lésion sera généralement limitée par le masquage induit par la pigmentation tumorale.

L’échographie B met en évidence une réflectivité tumorale variable, mais en règle générale plus élevée que celle d’un mélanome choroï­dien et sans excavation choroï­dienne.

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Les taCHes PIgmeNtées du fONd d’œIL

Pratiques en Ophtalmologie • Février 2012 • vol. 6 • numéro 51 39

Classification d’après shields et al., 20041. Symptômes visuels (clinique)2. Épaisseur tumorale initiale (écho) O 2 mm3. Pigment orange (couleurs)4. DSR5. Proximité du nerf optique6. Pinpoints (angiographie)

tableau 1 - Facteurs de risque de croissance d’une petite lésion choroïdienne pigmentée.

Figure 2 - Le mélanome choroïdien est la tumeur intra-oculaire primitive la plus fréquente

de l’adulte. AF : imprégnation inhomogène de la fluorescéine en fonction du degré de

pigmentation de la lésion avec pinpoints au pourtour de la lésion. iCg : hypofluorescence

initiale de la lésion, avec visibilité de la vascularisation tumorale et anneau d’hyperfluo-

rescence (les veines choroïdiennes au bord des mélanomes peuvent être repoussées latéra-

lement par la croissance de la tumeur). echo b : apprécie la taille et les contours de la tumeur

ses rapports aux autres structures et son évolutivité éventuelle. oCt : saillie choroïdienne et

éventuel DSR associé.

méLAnomes ChoroïDiensLe mélanome choroïdien est la tu­meur maligne primitive intra­ocu­laire la plus fréquente.

épidéMioLogieElle reste malgré tout une tumeur rare puisque son incidence an­nuelle est d’environ 5 à 9 cas par million de personnes en touchant plus particulièrement les popula­tions caucasiennes. Les principaux autres facteurs de risque décrits sont les suivants : âge > 50 ans, sexe masculin, l’existence d’une méla­nocytose oculaire congénitale.

diagnosticLes mélanomes choroïdiens sont souvent découverts de façon for­tuite (près de 40 % des diagnos­tics). Les autres circonstances de diagnostic sont une baisse d’acuité visuelle (extension de la tumeur au pôle postérieur, décollement séreux rétinien, œdème maculaire, mem­brane épimaculaire ou cataracte secondaires, hémorragie intra­vi­tréenne), une amputation du champ visuel, des myodésopsies et des dou­leurs oculaires (extension aux corps ciliaires, inflammation secondaire).Les mélanomes choroïdiens sont en général pigmentés (achromes dans 20 % des cas), nodulaires, bien circonscrits, en forme de dôme, ou typiquement en cham­pignon (“en bouton de chemise”) lorsqu’une rupture de la Bruch se produit au somment de la tumeur. Du pigment orange est souvent présent en surface de la lésion, siège également d’altérations de l’épithélium pigmentaire (Fig. 2). On définit les mélanomes plans diffus par une croissance latérale à tra­vers la choroïde avec une élévation minime (3 à 5 % des mélanomes).

Facteurs de risqueDevant une lésion pigmentée (pe­

tit mélanome ou nævus suspect), les facteurs de risque d’évolutivité sont les suivants : épaisseur supé­rieure à 2  mm, lésion symptoma­tique, présence de pigmentation orange à sa surface, présence de décollement séreux rétinien cli­nique, bord de la lésion à moins de 1,5 mm de la papille. L’association des 5 critères est très hautement

suspecte mais n’affirme pas la ma­lignité (Tab. 1).

anaLyse Les clichés autofluorescents montrent les anomalies de l’épi­thélium pigmentaires sous forme d’hypo­autofluorescence ou de plage hétérogène de l’autofluores­cence. L’accumulation de lipofus­

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Zoom sur

40� Pratiques en Ophtalmologie • Février 2012 • vol. 6 • numéro 51

cine correspondant au pigment orange est bien une zone d’hyper­autofluorescence sur les clichés autofluorescents. Au cours de la séquence angiogra-phique, on note une hyperfluo­rescence croissante de la lésion variable en fonction de sa pigmen­tation et des plages d’hypofluores­cence, puis apparaissent, au cours de la séquence angiographique, une diffusion liée à l’exsudation à travers le tissu tumoral, des pin­points (points hyperfluorescents en tête d’épingle), un décollement séreux rétinien périlésionnel et inférieur gravitationnel, et parfois une diffusion maculaire corres­pondant à un œdème maculaire cystoïde.L’angiographie au vert d’in-docyanine permet d’analyser la vascularisation choroïdienne intratumorale (dilatations des

D’une part, devant : 1 HIV ou hématomes 2 Formes pseudo tumorales (ATCD DMLA, terrain cardiovasculaire) 3 Mélanomes peuvent aussi saigner 4 Décollement de rétine inexpliqué 5 Hétérochromie irienne d’apparition récente / glaucome unilatéral 6 Dilatation des vaisseaux épiscléraux (mélanome uvéal antérieur)Devant une lésion choroïdienne suspecte, il est parfois difficile de différencier un petit “mélanome” d’un gros “nævus” (avis spécialisé si nécessaire).D’autre part, car : • Pronostic vital dépend du volume tumoral initial• Métastases : 25-50 % en fonction de la taille tumorale au moment du traite-

ment et durée du suivi, indépendant du type de traitement, essentiellement hépatiques++

penser au diagnostic

• Caujolle P, Gastaud P. Lésions pigmentées suspectes. JFO 2010 ; 33 : 131-5.• Desjardins L. Lésions næviques choroïdiennes. JFO 2010 ; 33 : 136-41.• Herbort CP, Bodaghi B, LeHoang P. Angiographie au vert d’indocyanine au cours des maladies oculaires inflammatoires. JFO 2001 ; 24 : 423-47.

• Zografos L. Tumeurs intraoculaires. Masson : Paris ; 2002.• Shields CL, Demirci H, Paterin MA et al. Clinical factors in the identification of small choroidal melanoma. Can J Ophtalmol 2004 ; 39 : 351-7.

Pour en savoir Plus

Mots-clés : taches pigmentées,

nævus choroïdien, mélanocytomes,

mélanome choroïdien

veines choroïdiennes, des boucles vasculaires). La lésion est hypo­fluorescente aux temps précoces de la séquence avec une imprégna­tion tardive variable. Les veines choroïdiennes au bord des méla­nomes peuvent être repoussées latéralement par la croissance de la tumeur. Les aspects sont très variables, allant de la lésion silen­cieuse à une tumeur fortement vascularisée.L’OCT permet de préciser les atteintes maculaires associées aux mélanomes : œdème macu­laire, membranes épimaculaires, syndromes de traction vitréo­ré­tiniennes et permet d’observer des décollements séreux infracli­niques.L’échographie B est indispen­sable au diagnostic et à la mise en place du traitement. La lésion est très hyperéchogène à son som­

met et plus hypoéchogène vers la base. L’excavation choroïdienne est due à la différence d’échogéni­cité entre la choroïde normale et la base d’implantation de la tumeur, moins échogène. L’échographie en mode B permet surtout de mesu­rer l’épaisseur et le diamètre maxi­mal basal de la tumeur.

ChoriorétinopAthie hémorrAgique et exsuDAtive périphériqueLes décollements séro­hémor­ragiques périphériques de l’EP prenant un aspect pseudo­tumo­ral surviennent majoritairement dans une condition apparentée à une dégénérescence périphérique de l’épithélium pigmentaire liée à l’âge. Ces lésions sont un diagnos­tic différentiel fréquent des méla­nomes choroïdiens antérieurs. Il faut l’évoquer devant des lésions bilatérales et antérieures (90 % des cas), associées à la présence de sang et/ou d’exsudats.En échographie B, leur contenu est anechogène ou hétérogène, associant des zones hyper­ et hy­poréflectives mais le diagnostic différentiel avec un mélanome né­crotique peut être très difficile en cas d’hémorragie intravitréenne. n

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Mise au point

oCt “en faCe” et oCt “traditionnel” L’OCT “en face” est une technique d’exploration rétinienne dont l’uti-lisation remonte à près de 10 ans (1, 2). Cet OCT a pour principale ca-ractéristique de réaliser des coupes de la rétine dans un plan frontal (C-Scan) et non longitudinal (B-Scan) comme le font la plupart des OCTs (Fig. 1). La technologie Time-Domain utilisée par les premiers appareils OCT n’était pas suffisamment puis-

* Fondation Ophtalmologique Rothschild, service du Professeur JA Sahel, Paris

1. Optical Coherence Tomography

sante pour explorer les couches situées en arrière de l’épithélium pigmentaire rétinien (EPR) et en apprécier les détails. L’introduction de l’EDI OCT grâce à la technologie Spectral-Domain, a littéralement révolutionné notre approche des pathologies de la choroïde. L’EDI-OCT permet, en effet, une analyse quasi histolo-gique de l’anatomie choroïdienne normale et pathologique. L’OCT “en face” couplée à l’EDI-OCT nous permet ainsi d’obtenir des coupes frontales allant de la rétine interne (membrane limi-tante interne) jusqu’à la supra-

choroïde. L’association de l’OCT “en face” aux examens d’imagerie standard (angiographie à la fluo-rescéine, au vert d’indocyanine et OCT B-Scan) apporte des élé-ments très utiles pour la prise en charge des maladies rétiniennes et choroïdiennes. En effet, cet outil, nous permet d’obtenir des informations com-plémentaires à celles obtenues au moyen de l’OCT traditionnel ou “B-scan OCT” et pourrait per-mettre, dans certains cas, de s’af-franchir des produits de contraste.

la Choroïde norMale vue en oCt “en faCe” La choroïde est un tissu vasculaire contenant du tissu conjonctif, des mélanocytes, des macrophages et des lymphocytes. A l’instar des examens angiogra-phiques classiques, l’OCT “en face” permet une visualisation dans un plan frontal de toutes les couches de la choroïde, avec, d’avant en ar-rière : la choriocapillaire, située en arrière de l’épithélium pigmentaire, la couche des moyens vaisseaux de Sattler, la couche des gros vaisseaux de Haller et enfin la supra-choroïde en profondeur (Fig. 2).

les Maladies de la Choroïde vues en oCt “en faCe” L’exploitation de la technologie en face étant relativement récente,

xxxxxxxxxxxxxxxxxxxxx

La choroïde, qui constitue la partie vasculaire de l’œil située entre la sclère et la rétine, est restée très longtemps d’exploration difficile du fait de l’écran que représentait l’épithélium pigmentaire rétinien. En fait, la choroïde était seulement explorée par l’angiographie au vert d’in-docyanine qui permettait d’en voir la structure mais pas l’épaisseur, et par l’échographie B qui permettait d’en mesurer l’épaisseur mais sans apporter d’informations très précises quant à la localisation des anomalies recherchées. L’avènement des OCTs de haute résolution (ou Spectral domain), en particulier dans l’approche tridimensionnelle (3D) de l’imagerie, nous a permis de progres-ser considérablement dans l’analyse de la choroïde. Pour une analyse optimale de la choroïde, celle-ci doit idéalement coupler la “3D”, l’EDI (Enhanced depth Imaging) et l’OCT “en face”. Le propos de cet article décrit les applications de l’OCT “en face”, mais nous verrons que “3D”, “EDI” et “en face” sont indisso-ciables. Il est important de rappeler que l’analyse des structures est définie par une échelle de gris qui devra être préalablement déterminée : blanc pour l’hyper réflectivité et noir pour l’hyporéflectivité par exemple (mais une échelle inversée est aussi possible).

Introduction

applications de l’oCt1 “en face” dans les pathologies de la choroïdeDe la rétine interne à la supra-choroïde…Dr Benjamin Wolff*, Dr Mathieu Lehmann* et Dr Martine Mauget-Faÿsse*

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APPliCATiOnS de l’OCT “en FACe” dAnS leS PAThOlOgieS de lA ChOROïde

Pratiques en Ophtalmologie • Février 2012 • vol. 6 • numéro 51 43

nous sommes en phase de décou-verte de tout ce que peut nous apporter cette technique. L’amé-lioration des logiciels pour l’acqui-sition des images et leur analyse devraient enrichir les apports que peuvent nous donner cette jeune technique.

Tumeurs de la choroïde L’OCT “en face” permet d’obte-nir une mesure très précise des dimensions d’un nævus de la cho-roïde, identifié sous la forme d’une lésion hyper réflective située dans la choroïde. L’épaisseur du nævus sera appréciée au moyen d’une coupe B-Scan EDI-OCT (Fig. 3).Cependant, les tumeurs choroï-diennes n’ont été, pour l’instant, que peu explorées avec l’OCT “en face”. Cet examen pourrait néan-moins devenir un instrument de référence dans le suivi de ces lé-sions.

chorioréTinopaThie séreuse cenTrale (crsc) eT épiThéliopaThie réTinienne diffuse (erd)L’OCT “en face” a montré toute son utilité dans cette pathologie depuis de nombreuses années. Van Velthoven et al. ont en effet rapporté que les soulèvements séreux rétiniens étaient fréquem-ment entourés par de petits dépôts hyper réflectifs et que des décol-lements de l’épithélium pigmen-taires (DEP) étaient toujours pré-sents en cas de poussée de CRSC (3). Ceux-ci apparaissent à bords nets, et sont de forme régulière ovalaire ou ronde (4). L’apport de l’EDI-OCT, dans cette pathologie, a été considérable, nous permettant d’objectiver une augmentation de l’épaisseur cho-roïdienne chez les patients pré-sentant une CRSC. Ces données nous ont conforté dans l’idée que cette pathologie était en partie liée

figure 1 - examen maculaire en oCt

“en face” (C-scan) dans le plan de la

couche nucléaire interne (a) et en oCt

B-scan (B) au niveau de la fovéa.

figure 2 - imagerie “en face” de la choroïde. a : choriocapillaire. B : couche des moyens

vaisseaux de sattler. C : couche des gros vaisseaux de haller. d : supra-choroïde.

figure 3 - nævus plan de la

choroïde. l’oCt “en face” (a) nous

permet d’apprécier avec beaucoup

de précision ses contours et ses

dimensions dans le plan frontal.

l’épaisseur nous est donnée par

l’edi-oCt (B).

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Mise au point

à une hyperperméabilité choroï-dienne.Dans une étude réalisée à la Fon-dation Ophtalmologique Roths-child sur 20 yeux présentant une CRSC aigüe ou chronique, nous avons été conduit à mettre en évidence, grâce à l’OCT “en face”, des anomalies de la choroïde dans tous les cas. Des dilatations des gros vaisseaux choroïdiens peu-vent être observées et se superpo-sent aux anomalies vues avec l’an-giographie au vert d’indocyanine (Fig. 4). En cas de poussée aigüe, nous avons pu visualiser le point de fuite dans tous les cas sous la forme d’une lésion hyperréflec-tive dans le plan de l’épithélium pigmentaire (Fig. 5). ocT “en face” dans la dégénérescence maculaire liée à l’âge (dmla)L’OCT “en face” trouve aussi tout son intérêt dans la DMLA. Il per-met d’avoir une vision d’ensemble de la maladie. Les drusen séreux apparaissent comme des petites lésions arrondies normoréflec-tives à bords réguliers et hyper-réflectifs. Les pseudo-drusen, au contraire, apparaissent légè-rement hyperréflectifs avec des bords hyporéflectifs (Fig. 6). Les DEP néovascularisés se caracté-risent, contrairement à ceux de la CRSC, par un aspect polylobé (4). Les décollements séreux sont mis en évidence sous la forme de nappes très hyporéflectives en avant du plan de l’EPR. On ob-serve souvent des petits points hyperréflectifs en leur sein. Les pédicules vasculaires peuvent aussi être visualisés au niveau de la choroïde. L’OCT “en face” offre dans ce cas, et sans injec-tion de produit de contraste, des images comparables à celles ob-tenues avec l’angiographie à la fluorescéine et au vert d’indo-

figure 4 - dilatation des gros vaisseaux choroïdiens dans le cadre d’une erd. notez

la similarité des images obtenues avec l’oCt “en face” (a) et l’angiographie au vert

d’indocyanine (B).

figure 5 - Choriorétinopathie séreuse centrale à la phase aigüe. les points de fuite sont

visualisés sous la forme de mottes hyperréflectives (flèches). en inférieur, ils apparais-

sent au sein d’un décollement de l’épithélium pigmentaire à bords nets.

figure 6 - drusen séreux (a) et drusen réticulés (B) vus en oCt “en face”.

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APPliCATiOnS de l’OCT “en FACe” dAnS leS PAThOlOgieS de lA ChOROïde

Pratiques en Ophtalmologie • Février 2012 • vol. 6 • numéro 51 45

cyanine (Fig. 7). Des lésions dégé-nératives comme les tubulations rétiniennes externes sont mises en évidence sous la forme d’un réseau arborisé de formations tu-bulaires situées juste en avant de l’EPR (Fig. 8).

ocT “en face” eT paThologies choroïdiennes inflammaToiresL’imagerie “en face” apporte de nombreuses informations dans les atteintes choroïdiennes inflam-matoires.• Dans les choroïdites multifo-cales, l’OCT “en face” permet de visualiser les lésions choroï-diennes inflammatoires, dans le plan de l’épithélium pigmentaire, sous la forme de lésions arrondies hyper réflectives (Fig. 9). Ces foyers de choroïdites sont superposables à ceux identifiés grâce à l’angio-graphie au vert d’indocyanine. L’inflammation de la choroïde est parfois observée sous la forme de petits points hyperréflectifs au ni-veau de la choriocapillaire.• A la phase aigüe de la maladie de Vogt-Koyanagi-Harada, les kystes intrarétiniens sont visibles sous la forme de lésions hyporéflectives avec une bordure hyperréflective. La dilatation des vaisseaux choroï-diens est également bien visible. A la phase cicatricielle, les ano-malies de l’EP peuvent être vues sous la forme d’anomalies focales hyperréflectives.• Dans la choroïdite serpigineuse, Van Velthoven et al. ont montré qu’en cas de réactivation inflam-matoire, des foyers hyperréflectifs pouvaient être visualisés au niveau de la couche nucléaire externe (5).• Dans les “épithélites” réti-niennes aigües (ARPE), l’OCT en face met en évidence une lésion hyper réflective focale visualisée entre le plan de l’EPR et celui de la couche plexiforme externe.

figure 7 - Mise en évidence d’un pédicule vasculaire nourricier de néovaisseaux cho-

roïdiens au moyen de l’oCt “en face”.

figure 8 - tubulations rétiniennes externes vues en oCt “en face”. un réseau arborisé

de tubules interconnectés peut ainsi être mis en évidence (flèches).

figure 9 - patiente de 29 ans présentant une choroïdite multifocale compliquée de

néovaisseaux choroïdiens. l’oCt “en face” met en évidence plusieurs foyers hyperré-

flectifs (flèches) situés dans le plan de l’épithélium pigmentaire.

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Mise au point

ConClusionL’OCT “en face” est une technique d’imagerie nouvelle qui ouvre d’importantes perspectives dans la compréhension et le suivi des maladies rétiniennes et choroï-diennes. Cet OCT nous a permis de mettre en évidence des entités sémiologiques nouvelles et d’en caractériser d’autres de façon plus précise. Cependant, l’OCT “en face” n’en est qu’à ses débuts et les images obtenues restent d’inter-

prétation complexe. Les appareils actuels se heurtent encore à cer-tains problèmes techniques liés à la courbure de l’œil et à la méthode d’acquisition, pouvant être source d’imprécisions dans l’analyse des images.L’imagerie oculaire en trois di-mensions constitue un tournant dans l’exploration des pathologies rétiniennes alors que cette ap-proche existe depuis déjà plusieurs années en radiologie convention-

nelle (IRM et TDM). Cette tech-nologie récente accroît l’arsenal diagnostique en ophtalmologie et pourrait nous permettre notam-ment de s’affranchir des produits de contraste dans l’avenir. n

mots-clés : oCt “en face”, exploration en oCt,

pathologies de la choroïde

1. Podoleanu AG, Dobre GM, Webb DJ, Jackson DA. Simultaneous en face imaging of two layers in the human retina by low-coherence reflec-tometry. Optic Letters 1997 ; 22 : 1039-44. 2. Podoleanu AG, Dobre GM, Seeger M et al. Low coherence interferometry for en-face imaging of the retina. Lasers and Light 1998 ; 8 : 187-92.3. Van Velthoven ME, Verbraak FD, Garcia PM et al. Evaluation of central serous retinopathy with en face Optical coherence tomography. Br J Ophthalmol 2005 ; 89 : 1483-8.

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Pratiques en Ophtalmologie • Février 2012 • vol. 6 • numéro 51 47

Comprendre

La première description des techniques de suppléance remonte aux années 1903

(Jackson) et 1907 (Hummelsheim). Le principe est d’utiliser des muscles fonctionnels pour aider ou remplacer le mouvement du muscle droit latéral paralysé (1, 2).Pour certains auteurs, il y aurait “réinnervation partielle” de ce muscle à partir des muscles trans-posés, pour d’autres l’effet obtenu serait essentiellement d’ordre “mécanique”.

Quels sont les patients ConCernés ?La technique s’adresse à des para-lysies totales ou très importantes du VI pour lesquelles la chirurgie classique est largement insuffi-sante.Il peut s’agir de graves trauma-tismes crâniens, de fractures du rocher ou de séquelles neuro-chirurgicales après exérèse de vo-lumineuses tumeurs.

* Centre Monticelli-Paradis, Marseille

a Quel moment Cette Chirurgie intervient-elle ?Les interventions de suppléance s’intègrent dans un processus global de prise en charge et se si-tuent bien évidemment “en fin de course”.Schématiquement :• soit le patient nous est adressé par un service de rééducation ou par un service de neuro-chirurgie pour la prise en charge d’une para-lysie totale séquellaire ; • soit nous suivons le patient de-puis le début pour une paralysie du VI sévère mais récente et un certain délai d’attente est alors né-cessaire.La prise en charge sera classique : il faudra expliquer au patient sa pathologie, le rassurer et l’exhor-ter à la patience. Dans les premières semaines, l’oc-clusion d’un œil est souvent le seul moyen lorsque la déviation est importante et la diplopie gê-nante. Dans un second temps, un équi-pement par prismes de forte

puissance, toujours prescrits en press-on, peut être une alterna-tive.On peut prescrire jusqu’à 15 diop-tries base temporale sur chacun des deux verres ou de plus fortes puissances, jusqu’à 25 dioptries, sur un seul verre. Une améliora-tion peut être amenée même si la correction prismatique n’est pas totale, au prix d’une position vi-cieuse de la tête compensatrice.

L’utilisation du Botox® a un grand intérêt chez ces patients. Au bout de quelques semaines ou mois après le début des troubles, une injection de Botox® dans le droit médial homolatéral peut être réalisée. Elle permettra une réduction de la déviation, amélio-rera le confort du patient et évitera la contracture du muscle droit mé-dial (Fig. 1). Le Botox® est parfois réutilisé plus tard dans le traitement, en asso-ciation avec une chirurgie de sup-pléance (3, 4).

La chirurgie ne sera jamais en-visagée avant six mois ou un an

xxxxxxxxxxxxxxxxxxxxx

la place des interventions de suppléance dans les paralysies

totales du viDernières techniques et cas pratique illustré

n Les interventions de suppléance sont d’utilisation assez rare. Elles permettent néanmoins

une amélioration importante du mouvement d’abduction dans une paralysie totale du VI. Les

techniques et les indications sont précisées.� Dr Nicole Gambarelli*

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Comprendre

48� Pratiques en Ophtalmologie • Février 2012 • vol. 6 • numéro 51

d’évolution, lorsqu’on est absolu-ment sûr qu’aucune amélioration n’est possible.

Nous utilisons toujours dans un premier temps une chirurgie conventionnelle de recul/ré-section : dans ces paralysies to-tales du VI, nous avons à traiter des déviations très importantes pouvant dépasser 60 dioptries, et les dosages chirurgicaux doivent être généreux. On peut être amené à réaliser des reculs de 10 mm du droit médial et des résections de 10 mm du droit latéral (Fig. 2). Dans certains cas, une chirurgie complémentaire sur l’œil adelphe peut être utilisée, à type d’affaiblis-sement du droit médial controla-téral avec ou sans utilisation d’une Faden operation (5).Mais la chirurgie conventionnelle est en général insuffisante. Le pa-tient se trouve amélioré, il per-siste une Et en position primaire, une position vicieuse de la tête compensatrice et une abduction inexistante.C’est à ce moment-là que la chirurgie de suppléance prend sa place, elle aura pour vocation de finir de corriger la déviation en position primaire, mais également d’améliorer le mouvement d’ab-duction.

les teChniQues de transposition

On peut utiliser des transpositions totales ou partielles. (6-10).• Les transpositions totales : O’Connor, en 1921, propose une transposition de la totalité des deux muscles verticaux pour sup-pléer le droit latéral paralysé. Les deux verticaux sont réinsérés aux extrémités correspondantes du droit latéral ; des variantes à la po-sition de cette réinsertion ont été

a b

Figure 1 – Botox®.

Figure 2 - recul/résection.

Figure 3 - transpositions totales.

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La PLaCe des interventions de suPPLéanCe dans Les ParaLysies totaLes du vi

Pratiques en Ophtalmologie • Février 2012 • vol. 6 • numéro 51 49

porale des deux muscles verticaux. Ces deux languettes sont réinsé-rées au ras de l’insertion du droit latéral. Une variante a été décrite par O’Connor en utilisant les moi-tiés nasales des droits verticaux. Ces languettes sont glissées sous les moitiés temporales restées en place puis fixées de la même façon que précédemment, près du droit latéral. L’efficacité s’en trouve aug-mentée (Fig. 4). Dans le même esprit, pour augmenter l’efficacité de la suppléance, Kauffman a pro-posé d’utiliser la technique de Hummelsheim mais en croisant les languettes musculaires sous le droit latéral.C’est la technique que nous uti-lisons le plus volontiers à l’heure actuelle et qui nous donne le maxi-mum d’efficacité. Le muscle droit latéral est souvent désinséré et éventuellement “reréséqué” (Fig. 5).

La technique de Jansen réalise une myopexie entre le droit laté-ral et les droits verticaux. Les trois muscles sont divisés en deux moi-tiés et on solidarise chaque moitié du muscle paralysé avec la moitié proximale du muscle voisin. Cette technique est décrite comme moins risquée sur le plan de la tro-phicité du globe, puisqu’il n’y a pas de désinsertion musculaire. Elle est néanmoins assez déla-brante et rend une éventuelle réintervention bien difficile ; elle n’est plus guère utilisée de nos jours (Fig. 6).

notre expérienCe pratiQueNous avons repris les paralysies du VI opérées dans l’année 2011 : 59 patients ont été opérés, 48 par chirurgie conventionnelle, 11 par chirurgie de suppléance. Ces 11 cas se présentaient dans

a

b

Figure 4 - transpositions partielles.

Figure 6 - technique de Jansen.

Figure 5 - planche photos opératoires.

décrites par Uribe et Gobin (Fig. 3). • Les transpositions partielles : Hummelsheim, en 1907, a proposé d’utiliser deux languettes muscu-laires représentant la moitié tem-

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Comprendre

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un contexte neurologique grave : traumatismes crâniens avec coma, schwanomes, cavernomes, ménin-giomes, etc, ayant entraîné, entre autres conséquences, une paraly-sie totale du VI.

Dans cette série, on note une grande majorité d’adultes, puisque sur 59 patients, nous n’avons re-trouvé que 3 enfants. Il s’agissait de contextes neurologiques graves, de déviations très importantes, mais la chirurgie conventionnelle a suffi 2 fois sur 3 : • Manon, 12 ans, double paraly-sie du VI par hémorragie ménin-gée, traitée par résection des deux droits latéraux ;• Aurore, 6 ans, paralysie du VI gauche par épendymome de la fosse postérieure, traitée par intervention

de recul/résection œil gauche ;• Lorenzo, 7 ans, paralysie du VI gauche par traumatisme crânien grave, déjà opéré par recul/résec-tion et réopéré par intervention de suppléance du droit latéral gauche, technique de Hummelsheim, mo-difiée Kauffman.

Un cas clinique nous permet d’il-lustrer l’effet que l’on peut at-tendre d’une telle chirurgie : M. P., 68 ans, traumatisme crânio-facial grave avec paralysie du VI droit. Il est en Et 20° de près, 30° de loin avec diplopie (Fig. 7). La limitation de l’abduction est ma-jeure, l’œil droit n’atteignant pas la ligne médiane (Lancaster n°   1) (Fig. 8).Une première intervention est réalisée : recul de 8 mm du droit

médial droit, résection de 8 mm du droit latéral droit.A l’issue de cette chirurgie il per-siste une Et de 12° de près, 16° de loin (Lancaster n° 2) (Fig. 9). Une intervention de suppléance est utilisée suivant la technique précédemment citée.En post-opératoire, le patient est pendant quelques jours, en légère divergence consécutive qui se sta-bilise sur une petite convergence de loin, il est centré de près (Lan-caster n° 3) (Fig. 10). L’abduction est améliorée mais on peut noter une légère limitation de l’adduction créée par la chirurgie (Fig. 11).

en ConClusionInsistons sur l’apport très intéres-

Figure 7 – a. position primaire. B. regard à gauche. C. regard à

droite.

Figure 8 - lancaster n° 1.

Figure 9 - lancaster n° 2.

Figure 10 - lancaster n° 3.

A

B

C

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La PLaCe des interventions de suPPLéanCe dans Les ParaLysies totaLes du vi

Pratiques en Ophtalmologie • Février 2012 • vol. 6 • numéro 51 51

sant de ces techniques en cas de paralysie totale du VI avec aboli-tion complète du mouvement.Elles interviennent en dernière intention, après parfois une cure de Botox® et un premier temps chirurgical conventionnel.Du fait de la multiplicité des muscles touchés, le risque d’is-chémie du segment antérieur doit rester présent à l’esprit du chirur-gien (11, 12) et imposer une grande rigueur dans la réalisation de l’acte chirurgical. n

1. Berard PV, Quere MA. Chirurgie des strabismes, Rapport SFO, Masson : Paris, 1984.2. Roth A, Speeg-Schatz C. La chirurgie oculo-motrice. Masson : Paris, 1995.3. Leiba H, Wirth GM, Amstutz C, Landau K. Long-term results of vertical rectus muscle transposition and botulinum toxin for sixth nerve palsy. J AAPOS 2010 ; 14 : 498-501.4. Flanders M, Qahtani F, Gans M, Beneish R. Vertical rectus muscle transpo-sition and botulinum toxin for complete sixth nerve palsy, Can. J Ophthal-mol 2001 ; 36 : 18-25.5. Klainguti G, Gianoli F, Mataftsi A. Retro-equatorial myopexy following Hummelsheim transposition in treatment of 6th cranial nerve paralysis. Klin Monbl Augenheilkd 2003 ; 220 : 170-5.6. Bansal S, Khan J, Marsh IB. Unaugmented vertical muscle transposition surgery for chronic sixth nerve paralysis. Strabismus 2006 ; 14 : 177-81.7. Neugebauer A, Fricke J, Kirsch A, Rüssmann W. Modified transposition

procedure of the vertical recti in sixth nerve palsy. Am J Ophthalmol 2001; 131 : 359-63.8. Struck MC. Augmented vertical rectus transposition surgery with single posterior fixation suture: modification of Foster technique. J AAPOS 2009 ; 13 : 343-9.9. Brooks SE, Olitsky SE, DeB Ribeiro G. Augmented Hummelsheim pro-cedure for paralytic strabismus. J Pediatr Ophthalmol Strabismus 2000 ; 37 : 189-95.10. Foster RS. Vertical muscle transposition augmented with lateral fixa-tion. J AAPOS 1997 ; 1: 20-30.11. Murdock TJ, Kushner BJ. Anterior segment ischemia after surgery on 2 vertical rectus muscles augmented with lateral fixation sutures. J AAPOS 2001 ; 5 : 323-4.12. Fresina M, Campos EC. Corneal “dellen” as a complication of strabismus surgery. Eye (Lond) 2009 ; 23 : 161-3.

BiBliographie

Mots-clés : paralysie totale du vi,

Chirurgie de suppléance,

ischémie du segment antérieurFigure 11 – a. position primaire. B. amélioration de l’abduction. C. petite limitation de

l’adduction.

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en pratique

52� Pratiques en Ophtalmologie • Février 2012 • vol. 6 • numéro 51

premier examen Ce patient de 52 ans cumule les facteurs de risque : une hémor-ragie papillaire gauche (Fig. 1), une pachymétrie fine (492 microns) et des antécédents familiaux.Cependant, le champ visuel est normal, ainsi que les fibres op-tiques et le RNFL. La tension ocu-laire corrigée de la pachymétrie est acceptable.En l’absence d’atteinte de la struc-ture ou de la fonction, on propose un suivi régulier sans traitement.

Deuxième examenUn an plus tard, le patient consulte pour une gêne visuelle de l’œil gauche. L’acuité est normale ainsi que l’OCT maculaire. Le champ vi-suel est considéré comme normal. La papille et la tension paraissent correctes. Nous verrons plus loin que la confrontation structure-fonction sur les cellules ganglion-naires, non disponibles alors, aurait pu nous mettre sur la voie d’une atteinte glaucomateuse dé-butante. On rassure donc (à tort) le patient.

troisième examen Encore un an plus tard, la situation a évolué. Au fond d’œil, la papille * CHR de Gonesse, service du Dr Annelise Hirsch, Val d’Oise

[email protected]

présente maintenant une encoche inférieure de l’anneau neuro-réti-nien (Fig. 2).

En OCT, la papille droite et ses fibres optiques sont normales.En comparaison, l’OCT des fibres optiques de l’œil gauche montre une atteinte du faisceau temporal inférieur (Fig. 3).Mais cet examen, pour précieux qu’il soit, ne nous renseigne nulle-ment sur la présence ou l’absence d’une maculopathie glaucoma-teuse.

La maculopathie glaucomateuse sur les cellules ganglionnaires en oCtUne nouvelle approche : son intérêt pratiqueDr Michel Zeitoun*

L’examen du glaucomateux, ou du suspect de l’être, comporte un exa-men de la structure confronté à un examen de la fonction. L’OCT de la papille est un examen de la struc-ture des fibres optiques péripapil-laires et son apport au diagnostic est important. Le champ visuel teste la fonction qui, fort heureusement, est touchée plus tardivement que les cellules ganglionnaires et leurs fibres.Jusqu’à présent, la macula avait la réputation d’être longtemps in-demne, jusqu’au stade terminal, grâce à sa richesse en cellules gan-glionnaires. En effet, autour de la fovéa se trouve un amas de cellules ganglionnaires formant un bourrelet périfovéal.L’étude en OCT Spectral Domain de ce bourrelet va révéler des atteintes parfois précoces de l’aire maculaire.A travers une histoire clinique, nous allons comprendre l’intérêt de cette nouvelle analyse.

Introduction

Figure 1 - Découverte fortuite d’une

hémorragie papillaire inférieure (flèche).

a ce stade, la papille est normale ainsi

que les fibres optiques.

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LA mACuLOpAtHie GLAuCOmAteuse suR Les CeLLuLes GAnGLiOnnAiRes en OCt

Pratiques en Ophtalmologie • Février 2012 • vol. 6 • numéro 51 53

Le champ visuel, normal à droite, est surprenant à gauche : il montre un point pathologique juxta-fo-véolaire (Fig. 4). Ce scotome absolu à 3° du point de fixation n’était pas facilement prévisible au vu de la position de l’encoche papillaire, et fait naître des hésitations et des doutes sur son authenticité.

Le nouveau programme d’ana-lyse des cellules ganglionnaires du Cirrus de Zeiss© (Fig. 5) apporte des éléments décisifs : à droite, la couche ganglionnaire est normale avec un bourrelet ganglionnaire périfovéolaire bien riche, alors qu’une atteinte arciforme juxta-fovéolaire inférieure à gauche est visible, concordant parfaitement avec le scotome (Fig. 6).La superposition du champ visuel en déviation et de l’OCT se fait par logiciel graphique en inversant l’OCT et en le mettant à l’échelle.

Cette atteinte doit ensuite être vé-rifiée sur le scan vertical où l’apop-tose des cellules ganglionnaires et des fibres optiques inféro-fovéo-laires est retrouvée (Fig. 7).A l’heure de l’OCT Spectral Do-main, il est facile et nécessaire de repérer la rétinopathie glaucoma-teuse qui accompagne la neuropa-thie.

Figure 2 - L’anneau neuro-rétinien de

la papille gauche présente maintenant

une forte encoche inférieure.

Figure 3 - Cette encoche se poursuit par une atteinte des fibres optiques temporales

inférieures.

Figure 4 - sur le champ visuel, il existe un petit scotome absolu juxta-fovéolaire supé-

rieur.

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en pratique

54� Pratiques en Ophtalmologie • Février 2012 • vol. 6 • numéro 51

Cette coupe montre également qu’il n’y a physiologiquement pas de cellules ganglionnaires au ni-veau de la fovéa. Les cellules gan-glionnaires des cônes centraux sont déportées vers le bourrelet ganglionnaire : il faut bien avoir présent à l’esprit que le bour-relet ganglionnaire est res-ponsable de la vision centrale en matière de glaucome et que l’atteinte du bourrelet est une atteinte des degrés centraux.

La maculopathie glaucomateuse est une atteinte grave de la vision ayant une répercussion immé-diate sur les capacités fonction-nelles du malade et doit inciter à des mesures énergiques pour la stabiliser.La maculopathie peut être iso-lée et initiale, comme dans le cas présent, ou accompagner des at-teintes plus périphériques. Elle peut être sectorielle ou diffuse.Il est certain que l’OCT de la couche ganglionnaire est l’examen le plus précoce pour la dépister, bien avant l’apparition du scotome au champ visuel.

La stratégie du Cirrus se concentre sur le bourrelet ganglionnaire péri fovéal, le plus riche en cellules gan-glionnaires. Son but est le dépistage et le suivi de la maculopathie glau-comateuse.Il étudie spécifiquement la couche cellulaire ganglionnaire avec la couche plexiforme, sans la couche des fibres optiques (Fig. 8).La comparaison avec le champ vi-suel se fera avec les 4 points juxta-fovéaux du relevé 24°-2 ou bien les 8 degrés centraux du relevé 10°-2, qui est la zone analysée par la base normative.Dans ces limites, l’examen est fiable et reproductible, hormis l’interfé-rence avec d’autres maculopathies. Grâce à une segmentation en 6

Figure 8 - L’algorithme du Cirrus isole les corps cellulaires ganglionnaires (et la plexiforme

interne) en les séparant des fibres optiques (coupe horizontale, entre les lignes colorées). Cet

algorithme privilégie l’atteinte locale, l’atteinte des fibres pouvant se manifester à distance.

Figure 5 - Les cellules ganglionnaires sont normales à droite, mais à gauche, l’atteinte

arciforme des cellules ganglionnaires temporales inférieures est significative avec un

secteur dans le rouge : c’est une maculopathie glaucomateuse avérée.

Figure 6 - superposition du CV 24-2

en déviation à la cartographie après

inversion et mise à l’échelle par un

logiciel graphique : le déficit fonctionnel

scotomateux correspond exactement

à l’atteinte anatomique du bourrelet

ganglionnaire.

Figure 7 - La coupe verticale montre

bien l’atteinte apoptotique de la couche

ganglionnaire ainsi que des fibres op-

tiques en inférieur de la fovéa (flèches).

C’est la rétinopathie glaucomateuse qui

accompagne toujours la neuropathie.

par ailleurs, les cônes centraux sont

relayés par les cellules du bourrelet

ganglionnaire qui est donc responsable

de la vision centrale.

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secteurs, la comparaison chif-frée supérieure – inférieure et droite – gauche est aisée ainsi que le suivi, secteur par secteur. On prêtera également attention aux moyennes par rapport à la norme, ainsi qu’aux minimales qui indiquent si une atteinte est lo-calisée (nettement inférieure à la moyenne), ou diffuse (proche de la moyenne) (Fig. 5).

Enfin, sur l’épaisseur maculaire globale (Fig. 9), on pouvait deviner l’atteinte arciforme inférieure em-piétant sur le bourrelet ganglion-naire, mais il faut noter que la car-tographie de cette zone est dans le vert (alors que la zone supérieure de la macula dépasse la norme par richesse cellulaire). La mesure de l’épaisseur rétinienne globale n’est donc pas un bon indicateur de glau-

come, contrairement à l’étude de la couche ganglionnaire. De plus, elle ne permet pas un suivi fin, secteur par secteur, et peut être artéfactée par les pathologies des couches ex-ternes.

retour sur Le Deuxième examen Sur le Cirrus, l’analyse des cellules ganglionnaires peut se faire à pos-tériori sur un macular cube enre-gistré. Nous avons donc repris le deuxième examen déclaré normal (Fig. 10-12).Le champ visuel d’alors montrait un seul point bizarre juxta-fovéo-laire avec une perte de 10 dB que l’on avait négligé (Fig. 10).En fait, dès ce stade, l’analyse des cellules ganglionnaires (non disponible alors) pouvait mon-trer une discrète atteinte arci-forme du bourrelet ganglionnaire gauche en temporal inférieur de la fovéa réalisant une “marche temporale” (Fig. 11). La confronta-tion avec le champ visuel d’alors est édifiante (Fig. 12) : cette atteinte anatomique se superpose exacte-ment à la perte de 10 dB difficile à interpréter isolément. Rétros-pectivement, c’est à ce stade que se fait l’entrée dans la maladie, même si l’épaisseur du bourrelet gauche est encore partout dans le vert, donc dans la norme, et le champ visuel peu significatif.Les atteintes débutantes, mi-nimes et peu concluantes de la structure et de la fonction, de-viennent significatives si elles coïncident exactement.

Enfin, l’évolution entre le deu-xième (Fig. 11) et le troisième exa-men (Fig. 5) montre que l’analyse est reproductible sur l’œil sain, et suffisamment précise sur l’œil atteint pour détecter une perte de cellules ganglionnaires en un an.

Figure 9 - on reconnaît l’atteinte arciforme inférieure sur la cartographie d’épaisseur

globale, mais les zones atteintes ne sont pas reconnues pathologiques sur la base nor-

mative : elles sont en vert. L’étude de la couche ganglionnaire est plus pertinente.

Figure 10 - retour sur le deuxième examen. Le champ visuel était normal partout sauf

un point juxta-fovéolaire incongru de perte de 10 dB qui a été ignoré.

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en pratique

56� Pratiques en Ophtalmologie • Février 2012 • vol. 6 • numéro 51

Figure 11 - retour sur le deuxième examen. Le bourrelet ganglionnaire gauche

montrait une atteinte arciforme temporale inférieure débutante réalisant une “marche

temporale”. elle n’atteint pas encore le seuil statistique de significativité car tous les

secteurs sont dans le vert.

Figure 12 - retour sur le deuxième

examen. superposition du CV 24-2

en déviation à la cartographie après

inversion et mise à l’échelle : le déficit

fonctionnel modéré correspond exacte-

ment à l’atteinte anatomique débutante

du bourrelet ganglionnaire. Les deux

examens, non significatifs isolément, se

confirment mutuellement. Cette atteinte

est donc certaine, comme l’évolution l’a

prouvé au troisième examen.

Figure 13 - L’analyse normative est limitée au cercle des 8 degrés centraux ; au-delà,

l’analyse n’est pas significative et n’est pas effectuée (cas de glaucome sévère attei-

gnant toute l’ hémirétine inférieure visible sur la coupe verticale au niveau des flèches,

avec une nette asymétrie des couches ganglionnaires inférieures apoptotiques, par

rapport aux couches saines de l’hémirétine supérieure).

1. Zeitoun M. Formes cliniques de glaucome maculaire en tomographie en cohérence optique. J Fr Ophtalmol 2012. In press. Dis-ponible en ligne depuis le 19 Octobre 2011.

pour en savoir plus

Cependant, il faut noter que l’ana-lyse n’est pas effectuée au-delà du cercle des 8 degrés centraux car la couche ganglionnaire devient unicellulaire et son atteinte diffi-cile à détecter (Figure 13, autre pa-tient, cas de glaucome sévère sur l’hémi rétine inférieure).

ConCLusionEn 2012, il n’est plus concevable d’ignorer la maculopathie glau-comateuse. Du fait de sa gravi-té, sa recherche doit faire par-tie du bilan systématique et du suivi de tout glaucomateux, dès le stade initial. Grace à l’OCT de la couche gan-glionnaire, cette recherche bé-néficie elle aussi de la confron-tation structure–fonction pour confirmer, infirmer et surtout anticiper les atteintes du champ visuel. Cette maculopathie ne doit plus être une surprise du champ visuel n

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Pratiques en Ophtalmologie • Février 2012 • vol. 6 • numéro 51 57

à savoir

* Centre Iéna Vision & Clinique de la Vision, Paris www.ienavision.fr

PrinciPes généraux

PulseLes lasers femtoseconde utilisent une longueur d’onde de 1 053 nm dans l’infrarouge proche, similaire à celle du laser Nd YAG mais avec des durées de pulse beau-coup plus courtes (de l’ordre d’une femtoseconde au lieu d’une nanoseconde). L’effet disruptif obtenu par ce temps très court du cla-quage optique limite les lésions tissulaires adjacentes et peut être modulé par la variation de quelques para-mètres simples :• disposition géométrique des pulses ;• fréquence (durée ou taux de répétition) des pulses ;• énergie des pulses ;• taille des spots.

Clivage du tissuLe claquage optique dépend d’une relation entre la du-rée et l’énergie du pulse (un pulse plus long nécessite une énergie plus élevée). Ce claquage optique induit la formation d’un plasma ionisé et d’une bulle de cavita-tion, dont l’expansion permet le clivage (disprution) du tissu. La taille des bulles de cavitation détermine l’énergie et l’espacement requis pour obtenir un cli-vage continu du tissu (faible énergie petite bulle espacement plus réduit nécessaire, avec une augmen-tation du nombre et un éventuel chevauchement des impacts).

Ouverture numérique OPtiqueL’ouverture numérique optique du laser permet de ré-gler le diamètre et le volume des spots. Une ouverture plus élevée améliore la focalisation et la précision de la profondeur du traitement et diminue l’énergie néces-saire en réduisant la dispersion.

FréquenCeLes premiers modèles avaient une fréquence faible (15 KHz) et une énergie très élevée, entraînant la for-mation de bulles de grandes tailles et d’une interface

xxxxxxxxxxxxxxxxxxxxx

Le Lasik a été révolutionné par l’introduction du premier laser femtoseconde (IntraLase en 2001 par Abbott Médi-cal Optics).

La réalisation du volet au laser femtoseconde a amélioré la sécurité et la précision optique de l’intervention et est devenue la technique de choix pour tous les chirurgiens ayant accès à la technologie.

D’autres applications sont apparues rapidement dans le domaine de la chirurgie cornéenne :• incisions relaxantes arciformes ;• kératoplasties lamellaires ;• kératoplasties à géométrie de bord mécaniquement stable (en “champignon”, en “chapeau” en “sapin de noël” ;• correction de la presbytie par kératotomies annulaires relaxantes intrastromales concentriques (IntraCor).

Cinq modèles de lasers femtoseconde sont actuellement disponibles pour la chirurgie cornéenne :• IntraLase FS150 (Abbot Medical Optics)*;• LDV Da Vinci (Ziemer) ;• Femtec (Technolas Perfect Vision) ;• Visumax (Zeiss Meditec)*;• UltraFlap 200 (Wavelight Alcon).

Quatre modèles sont ou seront proposés commerciale-ment à court terme pour la chirurgie de la cataracte, et seront abordés plus en détails dans la deuxième partie de cet article :• Lensar ;• LensX ;• Optimedica ;• Femtec (Technolas Perfect Vision)*.

* dont nous disposons à la Clinique de la Vision – Paris

Introduction

comparaison des lasers femtosecondePartie 1 : Chirurgie cornéenneDr Michael Assouline*

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58� Pratiques en Ophtalmologie • Février 2012 • vol. 6 • numéro 51

à savoir

de dissection plus grossière que celle obtenue avec les modèles plus récents (150-1 000 KHz).

Les fréquences élevées, avec une petite taille de spot et une faible énergie, contribuent à l’obtention de sur-faces plus lisses et à réduire l’inflammation induite par l’onde de choc mécanique associée à l’effet tissu-laire. Cette onde de choc est responsable par exemple du syndrome de photophobie transitoire (TLS pour transient light sensitivity) observé avec les premiers modèles.

durée de la PrOCédureLe temps de la procédure est également réduit par une fréquence plus élevée (plus de 30 secondes initiale-ment et 6 à 17 secondes actuellement pour un volet de Lasik).

disPOsitiOn géOmétriqueLa disposition géométrique des impacts dans l’espace est extrêmement variée pour un même modèle, en fonction des applications souhaitées, et selon les mo-dèles de laser.

Cette disposition géométrique doit tenir compte de l’interférence des nouveaux impacts avec les bulles de cavitation déjà formées dans le tissu, notamment lors des superpositions destinées à la création d’incisions verticales (bord du volet, anneau limitant d’une kéra-toplastie, incisions relaxantes cornéennes, anneaux de l’IntraCor).

mOdes de déCOuPesLes modes de découpes lamellaires “horizontales” actuels sont soit de type raster (balayage horizontal linéaire analogue à celui d’une télévision) soit de type spirale (débutant au centre et s’étendant vers la péri-phérie ou l’inverse). L’interface semble plus lisse avec le mode raster que le mode spirale pour l’Intralase, mais d’autres modèles (Visumax par exemple) utili-sent préférentiellement le mode spirale.

anneau de suCCiOnEn chirurgie cornéenne, la précision de la délivrance géométrique des impacts est garantie par l’aplanation mécanique de la cornée et la solidarisation de l’inter-face laser avec la surface oculaire au moyen d’un an-neau de succion.

Le type de cet anneau de succion (aussi appelé PI pour patient interface) et la pression d’aspiration varient se-lon les modèles.

Les modèles utilisant une interface plane (AMO Intra-Lase, Waveligh Alcon, et LDV Ziemer) nécessitent une pression plus forte pour aplatir la forme cornéenne.

Les modèles utilisant une interface concave de cour-bure proche de celle de la cornée (Visumax Zeiss Me-ditec, Femtec Technolas Perfect Vision) apportent le bénéfice d’une pression “d’aplanation” plus faible et également d’une moindre distorsion de la forme cor-néenne lors de la délivrance des impacts, ce qui permet une meilleure exactitude géométrique de leur disposi-tion effective (par exemple meilleure circularité des volets de Lasik et des tunnels pour implantation de segments intracornéens, meilleure orthogonalité des anneaux de l’IntraCor).

La succion exercée par l’interface patient (PI) est lo-calisée à la sclère pericornéenne, et peut être pénali-sée par un chémosis conjonctival (inflammatoire lié à une conjonctivite ou mécanique, par exemple à la suite de la répétition infructueuse de plusieurs tentatives d’aplanation). Dans le Visumax, la succion est apliquée directement au limbe et à la cornée périphérique.

FOCalisatiOnEn chirurgie intraoculaire de la cataracte, le contrôle de la focalisation précise du laser au niveau du tissu cible (capsule et noyau cristalliniens notamment) né-cessite l’emploi d’une technologie spécifique d’ima-gerie 3D en temps réel, de haute résolution par OCT ou microscopie confocale, capable d’intégrer les va-riations minimes mais significatives de position de ces structures avec les modifications peropératoires de la pression intraoculaire ou artérioveineuse. Ces systèmes seront peut-être appliqués à la cornée par la suite.

sPécificités de chaque PlateformeChacune des plateformes femtoseconde cornéennes présente des spécificités propres.

laser intralase Fs150 (abbOt mediCal OPtiCs) (Fig. 1)

Le laser Intralase FS150 (Abbott Medical Optics) est la 5e génération de laser femtoseconde pour cette marque. Le dernier modèle offre une fréquence nette-ment améliorée (de 15 à 150 KHz) ainsi que des pos-sibilités de programmation très étendues, notamment pour les chirurgies cornéennes comme les volets de Lasik (Flap procedures, Intralasik ou UltraLasik), l’implantation d’anneaux intracornéens (Ring pro-

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ComParaIson des lasers femtoseConde

Pratiques en Ophtalmologie • Février 2012 • vol. 6 • numéro 51 59

cedures), les incisions arciformes relaxantes (IEK) , et les kératoplasties lamellaires ou transifixiantes.

C’est celui que nous utilisons le plus actuellement (et depuis 2005) pour la découpe des volets, les IEK et les segments intracornéens pour le kératocône.

Ce laser utilise des pulses d’énergie assez élevée (1,2 à 1,8 MJ selon les procédures).La principale conséquence de cette énergie élevée est la formation de la couche de bulles opaques (OBL pour Opaque Bubble Layer), qui pénalisent l’homogé-néité de l’effet photoablatif du laser excimer et l’utili-sation d’Eyetracker basés sur la reconnaissance de la microtexture de l’iris. Il est possible de programmer une poche d’expansion permettant l’évacuation de ces bulles, mais ceci se fait au détriment du diamètre maxi-mum du volet. Il est également possible d’attendre quelques minutes la dissipation des bulles disruptives, ou de les “effacer” par friction, notamment si la pho-toablation périphérique, au niveau de la charnière, jouent un rôle important pour l’effet réfractif attendu.

Pour la réalisation des volets cornéens, l’IntraLase offre une qualité de contrôle visuel (à l’écran) du posi-tionnement de la découpe très performante en cas no-tamment de difficulté de centrage de l’anneau de suc-cion. Cependant, le recentrage digitalisé de la découpe entraîne souvent une réduction du diamètre possible de la découpe (normalement jusqu’à 9,50 mm) qui li-mite l’utilité de cette capacité d’ajustement. Une amélioration a été introduite dans la dernière ver-sion pour modifier l’angle de découpe des bords du vo-let (normalement de 80°, possible jusqu’à 120° actuel-

lement) dans le but de façonner un biseau permettant l’engrènement périphérique du volet et d’améliorer sa stabilité en réduisant le risque d’invasion épithéliale. L’intérêt de cette capacité d’ajustement est également diminué par la nécessité de réduire, dans le cas d’un angle de découpe élevé, le diamètre maximum du volet réalisable.Pour les kératoplasties, la qualité de la découpe lamel-laire profonde (au-delà de 250 µm) paraît insuffisante pour rivaliser avec les techniques manuelles prédesce-métiques. L’interface patient plane nécessite une pression de succion assez élevée pour garantir la stabilité de l’im-mobilisation du globe et la qualité de la découpe.

Cette pression élevée utilisée crée un risque non né-gligeable (et concrétisé au moins une fois, à notre connaissance, par l’un de nos collègues britanniques) d’hémorragie expulsive lors de la découpe nécessaire aux kératoplasties transfixiantes.Par ailleurs, la pression élevée requise pour l’aplana-tion au moyen d’une interface plane crée une distor-sion plus importante de la forme cornéenne, qui péna-lise légèrement l’exactitude géométriques des tracés en cas de déformation cornéenne préexistante. Par exemple, dans le kératocône, la tunnellisation requise pour l’implantation de segments intracornéens est moins circulaire et parfois mois facile à centrer, sans que ces problèmes entraînent une limitation significa-tive de l’efficacité clinique.La pression de succion s’accompagne également vo-lontiers (de façon quasi constante) d’ecchymoses conjonctivales bénignes et transitoires mais esthéti-quement gênantes dans le contexte d’une chirurgie ré-fractive avec réhabilitation visuelle immédiate.

laser FemteC (teChnOlas PerFeCt visiOn) (Fig. 2)

Le laser Technolas Femtec utilise une interface concave et une faible pression d’aplanation. Sa fré-quence insuffisante jusqu’ici le rendait moins efficace pour la réalisation des volets de Lasik et nous ne l’avons utilisé jusqu’ici que pour l’application IntraCor, pour la correction multifocale de la presbytie chez les sujets emmétropes. L’intérêt de ce laser va donc se renforcer du fait de l’augmentation de la fréquence et de l’adjonction sur la même plateforme d’un système dédié à la chirurgie de la cataracte au laser femtoseconde, incluant, outre les interfaces patients spécifiquement adaptées et les fonctions logiciel, un système de contrôle en temps réel 3D OCT performant et un microscope opératoire de qualité chirurgicale.

figure 1 - intralase fs150 amo.

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à savoir

laser ldv (Ziemer) (Fig. 3)

Le laser Da Vinci LDV (Ziemer) est une plateforme très compacte et efficace, peu coûteuse, pouvant être transférée d’un centre à l’autre du fait de sa mobilité.Ce laser travaille avec une fréquence très élévée (1 MHz) avec des pulses de très faible énergie (1 NJ), dans le but d’améliorer la régularité de l’interface de découpe en réduisant la formation de la couche de bulles opaques (OBL).Nous l’avons vue fonctionner de nombreuses fois mais nous n’en avons pas d’expérience personnelle.L’interface patient nécessite l’utilisation d’une subs-tance viscoélastique (comme pour un verre à 3 mi-roirs) et la présence d’air peut interférer avec la qualité de la découpe.Dans ce modèle, il n’existe pas de contrôle visuel direct ou indirect en cours de découpe (une simulation infor-matique renseigne simplement l’opérateur sur l’état d’avancement de la découpe). Il n’existe pas non plus de possibilité de découpe verticale, et l’anneau limi-tant des volets est découpé à la façon d’un microkéra-tome, par extension horizontale de la découpe. Principalement dédié au volet du Lasik, ce laser per-met également la réalisation de tunnellisation pour le kératocône et de kératoplasties lamellaires.

laser visumax (Zeiss mediteC) (Fig. 4)

Le laser Visumax (Zeiss Meditec) utilise un système original de succion limbique cornéenne au moyen d’une interface patient concave avec une très faible pression. Nous apprécions particulièrement la simplicité d’em-ploi, l’absence de bulles opaques et d’ecchymoses conjonctivales.

Par contre, dans notre expérience (encore restreinte, comparativement à celle de l’IntraLase), il semble que les volets soient d’un diamètre plus petit que ceux que nous obtenons avec l’IntraLase.La fréquence du laser est de 500 KHz, ce qui permet une faible énergie des pulses (inférieure à 1 µJ). Cette plateforme assez encombrante mais au design très réussi permet également de réaliser des procédures réfractives 100 % femtoseconde, sans utilisation de laser excimer, par le biais d’une découpe lenticulaire intrastromale avec extraction d’un disque réfractif soit après découpe d’un volet classique (procédure Flex), soit après découpe lamellaire et ouverture d’une petite incision (procédure Smile). Cette dernière approche présente plusieurs avantages théoriques :• éviter l’emploi d’un deuxième laser (suppression de l’excimer : gain de temps et de coût) ;• éviter la découpe complète de l’anneau limitant du

figure 2 - femtec technolas Perfect vision. figure 3 - ldv (da vinci) Ziemer.

figure 4 - visumax Zeiss meditec.

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ComParaIson des lasers femtoseConde

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volet classique et éviter de ce fait la section des nerfs cornéens périphériques, responsable des séche-resses oculaires transitoires observées avec les volets conventionnels ;• améliorer la prédicitibilité des traitements périphé-riques (médiocre pour le laser excimer). laser Wavelight Fs200 ultraFlaP (alCOn) (Fig. 5)

Le dernier laser disponible est le WaveLight FS200 Ul-traFlap (Alcon) qui utilise un système d’aplanation si-milaire à celui de l’IntraLase. Sa fréquence plus élevée et la plus faible énergie des pulses permettent d’espérer une réduction des bulles opaques (OBL). Le volet est ty-piquement réalisé en 6 secondes. Le système de succion est contrôlé automatiquement pour réduire la pression et la distorsion cornéenne qui en résulte. Le centrage du volet peut être modifié après installation de la succion. La focalisation précise permet une qualité de découpe améliorée. Le contrôle automatisé de la focalisation axiale (“z”), de la température des composants et le ca-librage du faisceau contribuent également à réduire la déviation standard de la profondeur de découpe, per-mettant la réalisation fiable de volets très fins. Ce laser peut être intégré dans le réseau diagnostic et de traite-ment constitué par la plateforme Wavelight analyzer et le laser excimer Wavelight EX500.

Le tableau 1 résume les caractéristiques techniques de ces lasers. n

figure 5 - Wavelight ultraflap 200 alcon.

mots-clés : laser femtoseconde, chirurgie cornéenne,

intralase, femtec, ldv, visumax, ultraflap 200

modèle intralase fs150 ldv da vinci femtec visumax ultraflap 200

fabricant Abbott Medical Optics

Ziemer Technolas Perfect Vision

Zeiss Meditec Waveligth Alcon

fréquence des pulses

150 KHz 1 MHz 80 KHz 500 KHz 200 KHz

durée du pulse 500 fs 250 fs 500 fs 400 fs 350 fs

taille des spots 5 µm 1 µm 2 µm 1 µm 5 µm

energie des spots 500-1 300 nJ 100 nJ 500 nJ 300 nJ 300-1 500 nJ

interface patient Plane Plane Concave Concave Plane

succion Elevée Basse Basse Basse Elevée

contrôle succion Manuelle Ordinateur Capteur Ordinateur Manuelle

Bulles opaques oui non non non non ?

diamètre max volet 9,5 mm 10 mm ? 9 mm ?

tunnellisation pour segments

oui oui oui oui oui

spécificité • angle découpe volet 120°

• kératoplasties autoétanches

• incisions arciformes relaxantes

• pas de contrôle visuel découpe

• pas de découpe verticale

• transportable• compact• peu coûteux

• intraCor• plateforme

cataracte possible

• flex• smile• Succion

limbique

tableau 1 - comparatif technique des différents lasers femtoseconde.