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www.siemens.com/pof Pictures of the Future Le Magazine de la Recherche et de l’Innovation | Printemps 2012 La nouvelle ère de l’électricité Recherche sans frontières Intelligence collective Plongée dans la source d’énergie universelle du futur Un environnement international moteur d’innovations Des flux de données transformés en informations exploitables Des solutions pour le monde de demain

Pictures of the Future Siemens Printemps 2012

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Siemens présente le nouveau numéro de Pictures of the Future, le magazine Siemens de la Recherche et de l'Innovation. Au sommaire : présentation des innovations Siemens dans le domaine de l'efficacité énergétique, des smartgrids, de la recherche médicale, du développement durable, et bien plus encore !

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Pictures of the FutureLe Magazine de la Recherche et de l’Innovation | Printemps 2012

La nouvelle ère de l’électricité

Recherche sans frontières

Intelligence collective

Plongée dans la source d’énergie universelle du futur

Un environnement international moteur d’innovations

Des flux de données transformés en informations exploitables

Des solutions pour le monde de demain

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2 Pictures of the Future | Printemps 2012

Pictures of the Future | Editorial

Couverture : au large de l’Irlande du Nord, SeaGen, la première centrale marémotrice commerciale au monde, fournit de l’électricité à quelque 1 500 foyers. Pour la maintenance, les rotors sont soulevés hors de l’eau grâce à un système de levage.

C’est officiel. Selon l’ONU, nous som-mes précisément 7 milliards d’êtres

humains depuis le 31 octobre 2011. 7 milliards d’individus ayant chaque jour davantage soif d’énergie. A l’heure où les changements climatiques s’accélèrent, où les prix du pétrole et du gaz flambent, l’électricité s’impose comme une ressource universelle. A tel point qu’elle est désor-mais présente dans tous les domaines de la vie courante et s’immisce dans des applications diverses telles que l’automobile ou les transports urbains. Optimiser l’offre, gérer la demande et améliorer l’efficacité énergétique sont donc devenus des axes prioritaires pour les Etats.

François Gerin

Directeur général adjoint Siemens France

développement. Pour cette édition, nous avons donc choisi d’aborder la question des compteurs intelligents mesurant en temps réel la consommation d’électricité des utilisateurs, et la transmettant, via le réseau informatique, au fournisseur d’énergie ainsi que le concept des « smart buildings ». Munis de capteurs hautement sophistiqués, ces bâtiments intelligents pourront ajuster eux-mêmes leur besoin en fonction de la disponibilité de la production électrique.

Nous vous invitons également à découvrir, dans ce nouveau numéro de Pictures of the Future, comment améliorer la fluidité du trafic routier, optimiser le rendement des éoliennes ou encore favoriser le travail collaboratif à l’échelle internationale.

Vous en souhaitant bonne lecture.

Parfaitement consciente des enjeux, la France s’est, quant à elle, engagée dans la voie d’une modernisation de ses systèmes électriques. Pour ce faire, l’Etat et l’ADEME (Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Energie) ont signé, fin 2010, une convention pour le développe-ment des réseaux électriques intelligents (« smart grids »). Associant infrastructure électrique et technologie informatique, ces réseaux intelligents assurent une gestion plus fine de l’équilibre entre l’offre et la demande d’électricité. En outre, ils favorisent l’intégration des énergies renou velables – éolienne, marémotrice ou photovoltaïque – sur l’ensemble du réseau.

Présent sur toute la chaîne énergé-tique, Siemens dispose dès à présent de l’expertise nécessaire pour répondre aux divers appels d’offre de ce marché en plein

De l’énergie pour tous

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Pictures of the Future | Printemps 2012 3

Intelligence collective

Recherche sans frontières

La nouvelle ère de l’électricité

4 Scénario 2035 Afrique électrique

6 Bâtiments intelligents Un bâtiment qui pense à tout

10 Réseaux intelligents Autoroutes de l’électricité

12 Centrales marémotrices Un raz-de-marée d’énergie

14 Voitures électriques Test grandeur nature

16 Présent et futur Evolution du mix énergétique

18 Scénario 2030 Enigme cosmique

20 Tendances Réseaux collaboratifs

23 Portrait de Charles Coushaine Le générateur d’idées

25 Biograph mMR Imagerie hybride

27 Galileo Le règne de la précision

28 Scénario 2030 Quand la ville parle

30 Gestion de la circulation Feu vert aux communications véhicule-infrastructure

33 Sécurité IT Anticiper les intrusions

34 Médias sociaux Entreprise 2.0

37 Parcs éoliens Générer plus d‘énergie

Pictures of the Future | Sommaire

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Panorama6 Un bâtiment qui pense à tout Les bâtiments adapteront bientôt

d’eux-mêmes leur consommation d’énergie à la production d’électricité verte, en éteignant par exemple automatiquement les installations les plus gourmandes, sans pour autant nuire au confort.

10 Les autoroutes de l’électricité Au laboratoire Smart Grid

d’Erlangen, les chercheurs de Siemens travaillent aux réseaux intelligents du futur. Pour les habitants d’Arbon, en Suisse, l’installation de compteurs intelligents a déjà révolutionné leur fourniture d’énergie.

12 Barrage sur des rivières invisibles Les centrales marémotrices

fonctionnent comme des éoliennes sous-marines, produisant de l’énergie grâce au flux et au reflux des marées. Au large de l’Irlande du Nord, l’une de ces centrales approvisionne déjà 1 500 foyers.

14 Test grandeur nature Siemens réalise son premier essai

à grande échelle pour tester la fiabilité des voitures électriques au quotidien, en mettant à contribution près de 100 salariés de l’entreprise. Ce programme d’essai s’intéresse en particulier aux technologies de recharge et à la communication entre le conducteur, les bornes de recharge et le réseau électrique.

2035Un village d’Afrique centrale, auparavant

coupé du monde extérieur, vient d’entrer

dans la nouvelle ère de l’électricité. Des

éoliennes et une centrale à biogaz fournissent

de l’électricité verte qui alimente appareils

électroménagers, bornes de recharge pour

véhicules électriques et éclairages publics.

Le centre médical du village est équipé

d’un système de refroidissement et de

climatisation fonctionnant à l’énergie solaire.

La route vers la nouvelle ère de l’électricité est cahoteuse et envahie d’herbes hautes.

De part et d’autre du sentier, la végéta-tion se dresse comme un mur multicolore. De temps en temps, nous apercevons une ou deux girafes, qui nous remarquent à peine tant

notre voiture est silencieuse : depuis quelque temps, les taxis-brousse électriques sont devenus la norme en Afrique centrale. Si notre batterie devait tomber à plat, un petit moteur à combustion prendrait le relais. C’est le docteur Salim Taylor, médecin du district, qui

4 Pictures of the Future | Printemps 2012

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La nouvelle ère de l’électricité | Scénario 2035

Afrique centrale, 2035. Dans un village isolé où le bois était le seul combustible utilisé auparavant, le gouvernement vient d’installer des équipements éco-performants, propulsant les habitants dans l’ère des nouvelles technologies. Un journaliste découvre comment l’électricité verte a changé leur vie.

Afrique électrique

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6 Pictures of the Future | Printemps 2012

fait aujourd’hui office de chauffeur et de guide. Pour un médecin, on ne peut pas dire que son mode de vie soit particulièrement sain : il a toujours un cigare aux lèvres et sa conduite est presque aussi abrupte que les sentiers que nous empruntons. Mais de ce côté-ci de l’équateur, personne n’en sait autant que lui sur ce pays, son évolution et ses habitants. Le docteur Taylor part faire ses visites heb-domadaires dans une petite localité isolée – l’occasion rêvée pour moi d’aller observer les premiers résultats d’un programme de dévelop-pement qui a littéralement électrisé le village.

« Zut ! », s’exclame le médecin, alors que la roue avant droite du véhicule disparaît dans un nid-de-poule. « C’est le dixième trou de cochon de terre depuis que nous avons quitté la route de graviers. » Il sort un nouveau cigare et l’allume en un clin d’œil. « Cette ‘route’ n’a de route que le nom, mais le village auquel elle mène a été véritablement transformé », dit-il. Le docteur Taylor en sait quelque chose : l’année dernière, lorsque les techniciens ont propulsé le village dans l’ère de l’électricité verte, il était présent pour conseiller les représentants du gouvernement et accompagner les habitants.

Jusqu’alors, le village était coupé du monde, sans électricité ni accès aux réseaux de communication. A travers son nouveau programme de développement durable des régions isolées, le gouvernement s’efforce d’étendre constamment les zones de couverture. « Nous ne voulons pas abolir les structures sociales et les traditions du village ; nous nous efforçons simplement d’améliorer les conditions de vie des habitants », explique le docteur Taylor.

« Vous avez vu ? Même aux abords du village, la végétation est toujours aussi dense. Il y a quelques années, les environs étaient complètement dévastés par la déforestation – mais aujourd’hui, les gens n’ont plus besoin de bois », commente le médecin en expirant un nuage de fumée. La végétation se désépaissit peu à peu, laissant place à une vaste plaine. Nous descendons une petite colline pour rejoindre le village qui apparaît en contre-bas.

A première vue, cet ensemble de huttes rondes a l’air plutôt traditionnel. Pourtant, dans la savane derrière le village, trois éoliennes tournent mollement dans la légère brise. Et au milieu du village, un bâtiment moderne attire l’œil : sur son toit, des panneaux photovoltaïques scintillent sous le soleil. En y regardant de plus près, on remarque aussi des mâts métalliques qui se révèlent être des lampadaires à LED.

« Nous voilà arrivés », dit le docteur Taylor avec un sourire, avant de descendre du véhicule. « C’est le centre médical », annonce-t-il en désignant le bâtiment au toit solaire. « Il est équipé d’un système de climatisation

qui fonctionne grâce à l’énergie solaire et une machine frigorifique à absorption. La fraîcheur y très appréciable. Mais aujourd’hui, on fait les visites à domicile. » Il sort une tablette tactile de sa poche et salue Abdul, le maire du village. « Abdul joue en quelque sorte le rôle d’aide-soignant. Il tient des registres réguliers sur l’état de mes patients, et m’envoie les données par radio. Il peut s’agir de photographies ou des résultats des analyses sanguines qu’il réalise grâce à des appareils automatiques de la taille d’un téléphone portable. Ainsi, je suis toujours bien informé de l’état de santé de mes patients. »

En nous rendant chez le premier patient, nous passons devant un container auquel sont reliées des bornes de recharge électrique. « C’est notre centrale au biogaz », dit fièrement Abdul. « Nous l’alimentons en déchets végétaux et en fumier. Les bactéries présentes dans la cuve produisent du méthane, qui est transformé en électricité par un procédé automatisé. Avec les éoliennes, cette centrale garantit notre autonomie énergétique. N’oublie pas de débrancher ton véhicule lorsque tu auras fini, Salim ! »

Alors que nous approchons d’une hutte ronde surmontée d’un toit végétal, une musique légère se fait entendre. La casserole qui mijote sur la cuisinière laisse échapper un fumet épicé, et une lampe à LED est suspendue au plafond. « Du ragoût de cochon de terre », dit le docteur Taylor avec satisfaction en jetant un œil à sa tablette. « Mon jeune patient va visiblement beaucoup mieux », constate-t-il en désignant un garçon d’une douzaine d’années, allongé sur un lit. Je demande : « Est-ce qu’il a le paludisme ? » « Le paludisme a quasiment disparu depuis la dernière campagne de vaccination », répond le médecin. « Les piqûres de serpent ne sont plus si terribles non plus. Grâce au système de réfrigération du centre médical, nous pouvons désormais stocker suffisamment de sérum et d’autres médicaments. Maintenant que le village est entré dans l’ère de l’électricité verte, les habitants ne sont plus aussi vulnérables. Jusque-là, en cas d’accident, il était impossible d’obtenir de l’aide. Aujourd’hui, les gens peuvent appeler les secours depuis leurs téléphones portables, ou se rendre au centre médical en vélo électrique. C’est d’ailleurs ce qui a été fatal à ce jeune garçon : il conduisait un vélo sans casque et il a eu un accident. Commotion cérébrale. »

Le médecin éclaire les yeux du patient avec sa lampe. « Il allait trop vite ? » « Encore un trou de cochon de terre », répond le médecin. La femme qui s’affaire devant la cuisinière électrique lui tend une cuillère de ragoût. « Au fait, la cause de l’accident n’a pas survécu », précise-t-il en souriant.

Florian Martini

La nouvelle ère de l’électricité | Bâtiments intelligents

Les bâtiments intelligents ajusteront bientôt d’eux-mêmes leur consommation électrique aux fluctuations de la production éolienne et solaire. Une étude récente montre la faisabilité technique de cette approche, qui vise à réguler les systèmes de ventilation et de pompage sans nuire au confort. Arrêter certains appareils pour éviter la surcharge du réseau est devenu chose courante aux Etats-Unis, mais de nouveaux systèmes automatisés peuvent encore optimiser le processus.

Un bâtiment qui pense à tout

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A l’inverse, lorsque les vents faiblissent, le prix de l’électricité augmente car des centrales de relais doivent être mises en service pour compléter la production.

Avec l’utilisation croissante d’énergie provenant de sources renouvelables, les contraintes pesant sur les réseaux électriques s’intensifient. L’Agence allemande de l’énergie estime qu’il faudra installer près de 3 600 km de nouvelles lignes en Allemagne d’ici 2020. Mais cela ne sera pas suffisant : pour aboutir à une plus grande transparence, à des modèles tarifaires plus flexibles et à une meilleure distribution de l’électricité, les réseaux devront devenir plus intelligents.

L’un des enjeux de demain réside également dans la création de nouveaux systèmes de stockage de l’énergie, capables d’emmagasiner le surplus de production lorsque les conditions météorologiques sont favorables et de réinjecter l’électricité dans le réseau, lorsque le vent faiblit ou que le ciel se couvre. Les véhicules électriques pourraient également être utilisés comme une énorme réserve d’énergie composée d’une multitude de batteries. Deux millions de véhicules électriques représenteraient ainsi une capacité de stockage de près de 40 GWh, soit autant que l’ensemble des centrales hydroélectriques à accumulation par pompage d’Allemagne.

Quand la consommation s’adapte à la production. Face à ces évolutions, une nouvelle solution se profile dans un tout autre domaine. Reposant sur un logiciel bien pensé, la technique du report de charge vise à optimiser la consommation d’électricité des bâtiments grâce à une meilleure gestion des équipements électriques : ils s’allument de préférence à un moment où l’éolien et le solaire produisent un surplus d’électricité, c’est-à-dire lorsque l’électricité est moins chère, et s’éteignent pendant la nuit ou lorsque la production éolienne est faible. Dans la logique actuelle, les centrales à gaz et à charbon sont mises en marche pour répondre à la consommation des ménages, des usines et des bureaux. A l’avenir, ce sera l’inverse : les bâtiments modifieront leur demande en électricité en fonction des disponibilités de la production. La consommation s’adaptera à la production.

En collaboration avec des experts de Siemens Building Technologies (BT), une équipe de l’Université technique de Munich (TUM) a montré qu’il était relativement simple d’allumer et d’éteindre différents équipements dans plusieurs types de bâtiments. Les chercheurs ont étudié pendant plusieurs mois les données issues de centres de gestion technique de bâtiments et portant sur toutes

La nouvelle ère de l’électricité | Bâtiments intelligents

Capable de réguler la climatisation et de stocker

l’énergie dans des voitures électriques, le bâtiment

du futur adaptera lui-même sa consommation

à la production d’électricité verte.

Un bâtiment qui pense à tout

Les panneaux photovoltaïques se mul-tiplient sur le toit des maisons, des

éoliennes sont installées sur les crêtes des collines ou dans des parcs offshore comme ceux de la mer du Nord ou de la mer Baltique… L’éolien et le solaire représentent à ce jour respectivement 7 % et 2 % environ de la production électrique en Allemagne, mais ils restent des sources d’approvisionnement peu fiables en raison des aléas climatiques. Ces dernières années, certains parcs éoliens situés en mer du Nord ont été arrêtés à plusieurs reprises afin d’éviter une surcharge du réseau local lorsque les vents étaient trop violents. Dans d’autres cas, le surplus de production a été exporté vers les pays voisins, qui n’en avaient pas réellement besoin. Ce type de situation entraîne une baisse des prix pou-vant même être synonyme de pertes pour les fournisseurs d’électricité, car ils doivent malgré tout s’acquitter des droits de transit.

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8 Pictures of the Future | Printemps 2012

sortes d’équipements, depuis l’activité du système de ventilation et des pompes à eau jusqu’à la température des pièces. Ils se sont par exemple demandé à quel rythme la température augmente dans un bureau construit en matériaux légers une fois que la climatisation est coupée. « La grande question pour nous, c’était de savoir pendant combien de temps il est possible d’éteindre certains équipements sans altérer le confort d’utilisation d’une pièce ou d’un bureau », explique Timm Rössel, assistant de recherche au département de génie climatique et domotique de la TUM. Les normes allemandes précisent que pour rester agréable à vivre, la température d’un bureau ne doit pas chuter en dessous de 21°C. Timm Rössel et son collègue Johannes Jungwirth, du département de gestion de l’énergie et génie des applications, ont analysé quatre types de bâtiments : les bureaux et administrations, les hôpitaux, les piscines couvertes et les écoles.

Le report de charge offre des perspectives particulièrement intéres santes dans les bâtiments de bureaux. Avec un taux d’occupation normal, il est possible d’arrêter entièrement la ventilation d’un bureau pendant 30 minutes sans que l’atmosphère ne devienne étouffante et ce type de coupure peut même être répété plusieurs fois par jour. Idem pour la ventilation des garages souterrains. Les chercheurs ont également voulu connaître la fréquence, mais surtout

Pour économiser l’énergie sans nuire au confort,

les chercheurs de Siemens développent des systèmes

de gestion des bâtiments permettant de réguler leur

consommation électrique.

Lumière du soleil

Lentille

Cellules photovoltaïques

Pompe

Electricité

Séparation du réfrigérant et de la solution saline sous l’effet

de la chaleur

Absorption des vapeurs de réfrigérant par la

solution saline

Refroidissement par vaporisation du réfrigérant à basse pression

La climatisation solaire : comment ça marche ?

Le soleil pourrait bientôt refroidir votre bureau

Dans l’hémisphère nord, l’essentiel de la consommation énergétique est tourné vers la production de chaleur : plus l’hiver est rigoureux, plus la consommation de gaz naturel et de fioul augmente. Sous des latitudes plus chaudes, ce sont les climatiseurs qui représentent une part considérable de la consommation électrique et des émissions de CO2. A Bangalore, en Inde, des chercheurs de Siemens travaillent sur un système de climatisation solaire capable de produire sa propre électricité et de fonctionner en complète autonomie.

L’Inde présente des besoins considérables en matière de climatisation. Près de 60 % de la consommation électrique des bâtiments de bureaux est consacrée non pas à des lampes, à des ordinateurs ou à des serveurs, mais à des climatiseurs énergivores. C’est pourquoi une équipe de Siemens Corporate Technology basée à Bangalore met actuellement au point un climatiseur fonctionnant à partir de l’électricité qu’il produit lui-même. L’installation se compose d’un système de captage de la lumière destiné à récupérer la chaleur du soleil et d’une unité photovoltaïque produisant l’électricité. « Nous sommes en train d’affiner le concept et nous envisageons un test sur le toit de notre bâtiment à Bangalore début 2012 », explique le responsable du projet Peeush Kumar Bishnoi.Basé sur le principe déjà connu du réfrigérateur à absorption, le système utilise une solution saline et de l’eau faisant office de réfrigérant. Sous l’effet de la chaleur du soleil, l’eau se vaporise et se sépare de la solution saline. Elle est ensuite condensée et pompée dans un évaporateur, qui est la partie du système générant le froid. L’intérieur de l’évaporateur étant sous faible pression, la température ambiante suffit à faire évaporer l’eau, ce qui absorbe la chaleur de l’environnement et refroidit la pièce. La vapeur d’eau est ensuite à nouveau renvoyée dans la solution saline et le cycle peut recommencer pour refroidir l’environnement en continu. L’électricité produite sert à alimenter la pompe qui fait circuler l’eau et la solution saline dans le circuit.

L’idée d’une climatisation solaire n’est pas nouvelle, mais jusqu’à présent les installations de ce type ont toujours nécessité des systèmes photovoltaïques onéreux et trop imposants pour le toit de la plupart des bâtiments. Peeush Kumar Bishnoi et ses collègues cherchent donc à combiner la climatisation et la production électrique au sein d’une seule unité compacte et plus efficace. Le défi : obtenir assez de chaleur pour le processus de climatisation sans diminuer la production des cellules photovoltaïques. L’une des solutions serait ici d’utiliser un fluide spécial, capable d’extraire suffisamment de chaleur de la lumière solaire avant que cette dernière atteigne les cellules. « Il existe en Inde une demande énorme pour ce type de systèmes », explique Peeush Kumar Bishnoi. « Dans les régions rurales, beaucoup de personnes ne sont pas connectées au réseau ». D’après Peeush Kumar Bishnoi, la production des cellules photovoltaïques n’est pas suffisante pour les systèmes classiques de climatisation à compression mais peut alimenter les petites pompes des systèmes à absorption, ce qui signifie que cette technologie présente un énorme potentiel. On estime que pour couvrir les besoins en climatisation de ses bureaux, l’Inde aura besoin en 2015 de près de 31 000 MW, soit la production d’environ 30 grandes centrales à charbon. Si la technologie développée à Bangalore pouvait être déployée à large échelle, les économies d’énergie seraient gigantesques.

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la vitesse de fonctionnement des ascenseurs dans les bâtiments de bureaux. En diminuant la vitesse des ascenseurs plusieurs heures par jour en dehors des pics de fréquentation du matin et du soir, on pourrait réduire la consommation électrique d’environ 10 % sans entraîner de gêne pour les usagers.

Les possibilités d’amélioration sont également importantes dans le cas de bâtiments dotés d’un réseau d’eau non potable pour l’alimentation des chasses d’eau : il serait possible d’actionner les pompes avec un décalage de 12 heures sans aucun risque que les réservoirs se vident. Dans les hôpitaux, les efforts d’économie d’énergie pourraient se concentrer sur le matériel de stérilisation des instruments chirurgicaux. Pour les bâtiments abritant une piscine, le plus grand potentiel réside dans les compresseurs des systèmes de déshumidification. Ils peuvent en fait être coupés pendant plusieurs heures, tout comme les dispositifs de purification par UV et par ozone.

« Cette étude est cruciale pour nous car elle montre que les grands bâtiments présentent un potentiel de report de charge intéressant », résume Joachim Kiauk, chef de projet en charge de cette étude au sein de Siemens BT à Zoug, en Suisse. « Siemens travaille avec la TUM pour développer des outils logiciels

qui serviront bientôt à gérer les installations techniques des bâtiments en fonction de l’électricité disponible. »

Depuis 2011, les fournisseurs d’énergie allemands sont tenus de proposer des tarifs variables évoluant au cours de la journée en fonction de l’offre et de la demande. Bien que le système ne permette pas encore de variations à très court terme, les spécialistes estiment que dans un futur proche, le prix de l’électricité changera toutes les heures voire toutes les 15 minutes. Les systèmes de gestion technique des bâtiments arrêteront ou limiteront l’utilisation de certains équipements quand le prix de l’énergie est élevé, par exemple le matin ou le soir lorsque les sèche-cheveux, grille-pain et autres bouilloires augmentent la demande en électricité. Un système d’alerte minute par minute permettrait de rallumer pompes et ventilateurs de préférence lorsque les prix diminuent en raison d’une forte production d’origine éolienne et solaire.

De la température des bureaux au volume d’air ventilé, plusieurs centaines de para-mètres sont recueillis en permanence par les systèmes modernes de gestion tech-

nique des bâtiments. Pour que le logiciel de report de charge soit capable d’établir un lien entre toutes ces données, les chercheurs de TUM affinent les paramètres de calcul en se basant sur des simulations. « Dans l’idéal, il faudrait pouvoir intégrer ces algorithmes dans les technologies existantes comme notre système Desigo », ajoute Joachim Kiauk, de Siemens BT. Reste à savoir comment les produits Siemens intégreront les connais-sances nécessaires. « Il faut commencer par la recherche de base », explique Christoph Hielscher, responsable du développement des applications Smart Grid. « Notre but est de rendre les bâtiments intelligents : ils doivent être capables de savoir la vitesse à laquelle ils se refroidissent, la quantité de chaleur dont ils ont besoin, et le moment où ils peuvent éteindre certains appareils pour diminuer leur consommation. Chaque bâtiment est unique. »

L’effacement de la consommation. Aux Etats-Unis, la gestion de la charge du réseau est une problématique bien connue depuis des années. Mais l’intérêt n’est pas tant de gérer les fluctuations de la production que de pouvoir « effacer » la consommation électrique. Dans ce pays, les centrales électriques et les infrastructures parfois vieillissantes sont régulièrement poussées aux limites de leurs capacités, ce qui pose problème notamment en été lorsque des millions de personnes

Les futurs systèmes de gestion des bâtiments analyseront en temps réel des centaines de paramètres afin d’ajuster la consommation à l’offre d’électricité.

La ventilation des bureaux peut généralement être coupée pendant 30 minutes sans causer de gêne.

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10 Pictures of the Future | Printemps 2012

Unis se dirigent eux-aussi vers des bâtiments plus intelligents et une consommation énergétique optimisée par l’automatisation de la gestion de charge. « La prochaine étape serait de mettre en œuvre une technologie semblable à celle du projet de la TUM :

un système très flexible et réactif par rapport au prix de l’électricité », conclut Christoph Hielscher. Les avantages sont évidents. Aujourd’hui, l’effacement se limite à éteindre la climatisation au détriment des usagers, alors qu’un système de gestion intelligent pourrait plutôt choisir de réduire la vitesse des ascenseurs.

Tim Schröder

Les réseaux et les compteurs intelligents permettront à l’avenir de faire évoluer les systèmes d’approvisionnement électrique pour répondre à des contraintes plus complexes. Sur le site d’essais Smart Grid d’Erlangen, en Allemagne, les chercheurs de Siemens préparent les solutions de demain.

Autoroutes de l’électricité

Depuis la construction de ses premières centrales il y a près de 120 ans, l’Europe

a progressivement développé la distribution d’électricité à partir de prises de courant. « Depuis, nous avons avancé à l’aveuglette », explique Jürgen Knaak, Directeur général d’Arbon Energie AG. Son entreprise est le fournisseur d’énergie local de la petite ville suisse d’Arbon, qui compte 13 000 habitants. « Aujourd’hui encore, ni les consommateurs ni les fournisseurs ne savent exactement quand est-ce que l’électricité circule sur les lignes, ni en quelle quantité. » Ce ne sera bientôt plus le cas à Arbon grâce aux compteurs intelligents : Siemens a entrepris depuis 2007 de remplacer les quelque 8 700 compteurs domestiques de la ville par de nouveaux appareils plus perfectionnés. « Pour le secteur de l’électricité, c’est une véritable révolution. Comme l’arrivée des téléphones portables ou d’Internet », ajoute Jürgen Knaak.

A Arbon, « avancer à l’aveuglette » signifiait une absence presque totale de transparence

allument leur climatisation. Pour éviter les goulots d’étranglement, les fournisseurs d’électricité cherchent à inciter certains clients à ne pas consommer d’électricité sur les périodes de pointe : c’est l’effacement de la consommation.Par exemple, les particu-liers acceptant d’éteindre leur climatisation pendant plusieurs jours de grande chaleur sont récompen-sés par un tarif plus bas. La même approche s’applique aux industriels et aux entrepôts réfrigérés. Et la précision croissante des prévisions météorologiques rendant désormais possibles des alertes à court terme, les fournisseurs peuvent informer les clients concernés par e-mail ou par téléphone la veille seulement. Près de 80 % des consommateurs ayant opté pour l’effacement sont directement informés de cette manière. Cela peut sembler laborieux, mais un service d’appel national revient bien moins cher que la construction de nouvelles centrales ou infrastructures réseau.

Souhaitant développer les systèmes automatisés de gestion de la charge, Siemens a acquis la société SureGrid, qui développe des logiciels destinés aux ordinateurs centraux et aux systèmes de communication. L’ordinateur central de SureGrid, situé à Austin, au Texas, est capable d’accepter la requête d’un fournis-seur pour une certaine quantité d’électricité et de répartir automatiquement cette quantité entre les bâtiments d’une région. Dans une organisation classique, le fournisseur doit pré-voir davantage d’effacement que nécessaire car il n’a aucune garantie que le consomma-teur averti par e-mail se souviendra d’éteindre son climatiseur. Un système automatisé résout ce problème en rendant les calculs plus fiables et plus sûrs.

L’automatisation offre également un autre avantage. Les fournisseurs d’électri-cité se basent actuellement sur des prévisions météorologiques pour estimer grossièrement le moment et la durée de l’effacement. Là encore, ils appliquent une marge supplé-mentaire et demandent aux consommateurs d’éteindre leurs équipements pendant plusieurs heures – généralement plus longtemps que nécessaire. Un système automatisé permettrait aux fournisseurs de réagir juste avant qu’un goulot d’étranglement ne se forme, ce qui réduirait la durée de l’effacement.

Il est vrai que le marché de l’énergie américain diffère largement du marché européen. Les Etats-Unis sont principalement confrontés à des goulots d’étranglement sur le réseau, tandis que la problématique européenne concerne les fluctuations de la production éolienne et solaire. Mais les Etats-

Les bâtiments intelligents pourront réagir à une variation des prix de l’électricité toutes les 15 minutes.

La nouvelle ère de l’électricité | Réseaux intelligents

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Les réseaux et les compteurs intelligents permettront à l’avenir de faire évoluer les systèmes d’approvisionnement électrique pour répondre à des contraintes plus complexes. Sur le site d’essais Smart Grid d’Erlangen, en Allemagne, les chercheurs de Siemens préparent les solutions de demain.

Autoroutes de l’électricité

sur le fonctionnement réel du réseau électrique, les informations se limitant à une mesure périodique de la consommation des ménages, des entreprises et des industries. Des informations devenues insuffisantes. « La production et la distribution d’électricité sont de plus en plus complexes, et nous devons être à la hauteur », estime Jürgen Knaak. Actuellement en cours d’installation à Arbon, les compteurs « Amis » de Siemens sont des appareils dernier cri : capables non seulement de mesurer la consommation d’électricité, mais également de recueillir grâce à des interfaces les données relatives au gaz, à l’eau et au chauffage urbain. Ces données sont ensuite immédiatement transmises au fournisseur d’énergie, afin qu’il soit en permanence informé des besoins en électricité de chaque consommateur – des particuliers aux grands industriels. Environ 3 300 compteurs intelligents ont été installés à ce jour à Arbon, le déploiement devant être achevé fin 2013.

Une nouvelle ère se dessine en effet pour Jürgen Knaak – ainsi qu’un modèle d’activité synonyme de réussite pour son entreprise. Car sur le marché de l’électricité du futur, l’information sera aussi précieuse que l’énergie : les données permettront aux fournisseurs de proposer une tarification sur mesure et d’exploiter ainsi un véritable avantage concurrentiel.

Quant aux consommateurs, ils bénéfi-cieront d’une meilleure information sur la répartition de leur consommation au sein de leur entreprise ou de leur foyer. Mais pas seulement : ils pourront également gérer leur consommation de manière plus ciblée. Prenons l’exemple des services municipaux de la ville de Saint-Gall, qui pompent de l’eau potable dans le lac de Constance. Jürgen Knaak peut leur indiquer, presque à la seconde près, à quel moment il serait moins coûteux de mettre en marche leurs pompes, et leur proposer une tarification correspondante.

De son côté, Arbon Energie AG peut acheter l’électricité lorsque son prix est particulière-ment bas en raison d’une surproduction.

Compteurs intelligents. Et dans 10 ou 15 ans ? D’après Jürgen Knaak, les particuliers et les entreprises ne verront au premier abord pas de grande différence. Les prises conti-nueront de fournir du courant, et l’électricité sera bien sûr toujours disponible lorsqu’on en aura besoin. Mais les compteurs mécaniques d’aujourd’hui, qui sont généralement rele-vés une à deux fois par an, deviendront des pièces de musée.

Le réseau électrique du futur sera un réseau d’informations permettant de lancer les lave-linge à un moment où le prix du courant sera peu élevé. L’électroménager sera contrôlé de manière entièrement automatisée, les consommateurs pouvant allumer ou éteindre leurs appareils à distance par Internet ou demander à leur exploitant réseau de le faire. « Une fois systématisée, cette approche

La nouvelle ère de l’électricité | Réseaux intelligents

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pourrait sans doute entraîner une baisse significative de la consommation d’électricité », estime Michael Moser, responsable de domaine à la Section Recherche énergétique de l’Office fédéral suisse de l’énergie. La Suisse pourrait ainsi réduire sa consommation énergétique de 5 à 10 %. Une différence appréciable aussi bien pour les consommateurs que pour l’environnement.

De la voie de garage à l’autoroute. Les compteurs intelligents s’inscrivent dans la tendance des systèmes numériques de distribution d’électricité. La conception des réseaux représentera à l’avenir un défi techno logique et écono-mique plus important car l’élec tricité ne sera plus majoritairement générée par quelques grandes centrales mais par un grand nombre de petites et moyennes installations dont la production sera destinée, selon les moments, à être injectée dans le réseau ou à couvrir les besoins propres.

Les réseaux électriques, qui étaient jusqu’à présent presque toujours des rues à sens unique, deviendront de larges autoroutes de l’énergie alimentées aussi bien par des éoliennes que par des centrales fonctionnant grâce au gaz naturel ou à la biomasse, qui pourront être mises en service lors des pics de consommation. Pour faire face aux fluctuations engendrées par l’utilisation de sources renouvelables, les systèmes de stockage de l’énergie se multiplieront.

Les réseaux intelligents (smart grids) peuvent sembler un peu futuristes, mais les scientifiques sont déjà à l’œuvre pour élaborer différents systèmes très perfectionnés. Chez Siemens Corporate Technology (CT) à Erlangen, on combine les résultats d’expériences et de modélisations sophistiquées pour mettre au point des algorithmes de commande et des composants destinés aux réseaux intelligents. « Nous simulons par exemple le réseau électrique d’un village qui existe réellement en Allemagne, où une grande part de l’énergie est générée par des installations photovoltaïques », rapporte Jochen Schäfer, responsable du développement, du test et de la démonstration des composants matériels pour le projet phare Smart Grid au sein de CT.

L’une des rues de ce village a retenu l’attention des experts. « Il y a là beaucoup de gros producteurs d’énergie photovoltaïque et peu de petits consommateurs. Lorsque l’ensoleillement est important, cela peut être une situation critique pour la stabilité du réseau », note Jochen Schäfer. Afin de réaliser

différents tests, cette partie du réseau a donc été reconstituée en laboratoire à l’échelle 1:7, en intégrant à la fois les producteurs et les consommateurs d’électricité, ainsi que les résistances des lignes électriques.

Les capteurs solaires sont simulés par des onduleurs alimentés sur un réseau séparé, ce qui permet de faire varier les conditions de test et notamment l’intensité du rayonnement solaire. « Nous pouvons désormais tester et étudier les algorithmes de commande ou les situations critiques non seulement dans des modélisations informatiques, mais aussi dans la réalité », résume Joachim Bamberger, responsable du projet de recherche Smart Grid de Siemens.

En pratique, le scénario de démonstration peut faire passer des nuages au-dessus du village : la production des installations photovoltaïques (donc l’électricité injectée dans le réseau par les onduleurs) chute alors brusquement. Le village devant impérativement couvrir l’ensemble de ses besoins par sa propre production locale, c’est une batterie qui délivre provisoirement l’électricité nécessaire en attendant le démarrage de la centrale de cogénération.

Un mécanisme de tarification testé auparavant en modélisation permet d’ajuster la production d’électricité aux besoins réels. « Les composants d’ajustement, tels que la batterie et la centrale de cogénération, réagissent aux variations du prix de l’électricité sur le marché local », explique Joachim Bamberger. Le tarif augmente quand il y a moins d’énergie solaire disponible, ce qui entraîne la mise en service de systèmes de production ou de stockage plus coûteux comme la batterie et la centrale de cogénération. En parallèle, la consommation du village diminue car le prix de l’électricité influe par exemple sur le fonctionnement des pompes à chaleur et des groupes frigorifiques.

« Si les systèmes électroniques de commande modélisés s’avèrent efficaces, nous pouvons confirmer et démontrer les résultats par des tests en laboratoire », conclut Jochen Schäfer. Les résultats sont si concluants que les chercheurs de Siemens prévoient de débuter un essai pilote sur un réseau exploité par l’entreprise allemande Allgäuer Überlandwerk (AÜW). Un grand pas de plus vers les réseaux intelligents du futur.

Urs Fitze

Le vent souffle sur les collines vertes qui entourent le petit village côtier de

Strangford, dans le comté de Down, en Irlande du Nord. A quelques pas se trouve le port naturel de Strangford Lough, un havre bleu profond, digne de son nom celtique Cuan, qui signifie « la baie calme ». Pourtant, de grandes vagues balaient parfois l’anse. Ce n’est donc pas une coïncidence si Strangford fut appelé « le puissant fjord » par les Vikings qui s’y installèrent autrefois. Avec ses 30 kilomètres de long et sa surface totale de 150 km2, Strangford Lough est la plus grande baie de la mer d’Irlande. Elle abrite non seulement de pittoresques bateaux de pêche, mais aussi une tour d’acier noir et rouge qui surgit de l’eau, juste au-dessus de l’horizon. Cette tour fait partie de SeaGen, la première usine marémotrice commerciale au monde. Mise en service en 2008, elle produit 1,2 MW d’électricité à partir de la seule puissance des marées, assez pour alimenter un village de 1 500 foyers.

La nouvelle ère de l’électricité | Les centrales marémotrices

Implantée au large de l’Irlande du Nord, la première centrale marémotrice commerciale au monde approvisionne 1 500 foyers en électricité produite grâce à l’énergie des marées.

Les marées sont une source d’énergie

largement inexploitée ; or avec une densité

de flux d’énergie 800 fois supérieure à celle

du vent, elles sont une source d’électricité

très efficace et fiable.

Le réseau électrique du futur : un maillage d’informations complet et très transparent.

Un raz-de-marée d’énergie

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Pictures of the Future | Printemps 2012 13

Les marées représentent une source d’énergie propre largement inexploitée. Cette sous-utilisation tient au fait que la technologie était en phase de développement jusqu’à présent, et qu’elle revient très cher à exploiter offshore. Pourtant, le potentiel est énorme : les centrales marémotrices peuvent être construites partout où le flux et le reflux des marées génèrent de puissants courants. Parmi les emplacements offrant des conditions idéales, on peut citer l’Ecosse, la France, le Canada et l’est de l’Asie.

Le havre naturel de Strangford Lough est un emplacement intéressant pour diverses raisons. Tout d’abord, il n’est pas très profond, ce qui permet d’ancrer la centrale à environ 30 mètres de profondeur, explique Kai Oliver Kölmel, responsable de l’entité Ocean Power au sein de la Division Renewables de Siemens. « Les eaux peu profondes permettent d’ancrer plus facilement l’installation dans les fonds marins, » ajoute-t-il. « En outre, le mouvement des marées est plus puissant en eaux peu

profondes. Par exemple, le débit de l’eau dans ce que l’on appelle le goulet de Strangford atteint jusqu’à 4 mètres par seconde ; SeaGen a besoin d’au moins un mètre par seconde pour générer de l’électricité. »

Centrale électrique sous-marine. La centrale de Strangford Lough est exploitée par Marine Current Turbines, entreprise britannique dont Siemens détient une participation majoritaire. L’installation est similaire à une éolienne, la seule différence étant qu’elle est actionnée par l’eau et non par l’air. Chacun de ses deux trains d’entraînement pèse 27 tonnes et est équipé d’un rotor de 16 mètres de diamètre.

Les pales du rotor ont une amplitude de 180 degrés, qui leur permet de produire de l’électricité jusqu’à 20 heures par jour, que la marée monte ou descende. La tour, à laquelle les deux turbines sont fixées par une traverse, présente un diamètre de trois mètres. Selon la marée, la tour peut culminer à 20 mètres

au-dessus du niveau de la mer. Les rotors n’apparaissent pas au-dessus de l’eau ; un petit bateau peut même passer directement au-dessus de la turbine, les rotors étant situés à au moins trois mètres sous la surface. « La maintenance est facile, indique Kai Oliver Kölmel, car l’installation est aisément accessible et les traverses sur lesquelles sont fixées les turbines peuvent être soulevées au-dessus de l’eau par un système de levage hydraulique. »

Même si, en raison de coûts d’installation élevés, l’investissement dans les centrales marémotrices est environ deux fois supérieur à celui nécessaire pour une installation éolienne offshore, l’électricité ainsi produite présente plusieurs avantages. Par exemple, la densité de flux d’énergie de l’eau est 800 fois supérieure à celle du vent, ce qui rend la production d’électricité à partir de l’eau bien plus efficace.

Une centrale marémotrice de 1,2 MW comme celle de Strangford Lough peut produire autant d’électricité en un an qu’une éolienne offshore de 2,5 MW. Le rendement des centrales maré-motrices est plus aisément calculable, d’où une meilleure sécurité dans la planification. Après tout, les marées sont déterminées par la lune et la gravitation terrestre : elles ne dépendent donc pas des conditions météorologiques et peuvent être prédites des années à l’avance.

L’Agence internationale de l’énergie estime que le potentiel de production mondiale des centrales marémotrices est de 800 térawatt-heures par an, assez pour fournir de l’énergie à 250 millions de foyers. Marine Current Turbines continue d’investir dans les technologies marémotrices. L’entreprise prévoit notamment de démarrer la construction d’un parc de turbines marémotrices en 2013 au large de l’île de Skye, au nord-est de l’Ecosse. Une fois achevé, il fournira jusqu’à 4 000 foyers en électricité venue de la mer.

Sabine Sauter

La nouvelle ère de l’électricité | Les centrales marémotrices

Implantée au large de l’Irlande du Nord, la première centrale marémotrice commerciale au monde approvisionne 1 500 foyers en électricité produite grâce à l’énergie des marées.

Un raz-de-marée d’énergie

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La nouvelle ère de l’électricité | Voitures électriques

blanches et vertes abritent sous leur capot une motorisation électrique d’une puissance de 56 kW, qui entraîne les 1 300 kg que pèse le véhicule et permet d’atteindre une vitesse pouvant aller jusqu’à 90 km/h.

Près de 200 salariés de Siemens se sont portés candidats pour participer à ce projet, le plus grand essai de ce type jamais réalisé par l’entreprise, avec une flotte d’essai qui comptera 100 véhicules d’ici 2012. L’objectif de ce vaste projet, baptisé « 4-Sustainelectromobility » (4-S), est d’étudier l’intégration des voitures électriques dans le quotidien des automobilistes et d’identifier les améliorations à apporter.

« Le marché de l’électromobilité est particulièrement intéressant pour Siemens parce que nous disposons du savoir-faire

nous entendons en devenir le fer de lance ». Si le projet 4-S s’intéresse à tous les aspects de l’électromobilité du futur, il n’entend pas relever tous les défis techniques en même temps. Le parc, qui comptera à terme une centaine de voitures, sera mis en circulation progressivement, avec des nouveautés techniques qui s’ajouteront à chaque nouvelle phase du projet. Par exemple, les participants au projet rechargent actuellement la batterie de leur movE avec du courant alternatif 230 V sur une prise domestique. En rentrant le soir à la maison, il suffit de dérouler un câble et de le brancher sur la voiture, dont la batterie se rechargera entièrement en l’espace de six heures. Bientôt, les conducteurs de la movE disposeront d’un boîtier mural installé dans leur garage : un branchement en courant

les acteurs du projet 4-S, auquel participent l’équipe Siemens dédiée aux applications Smart Grid (réseaux électriques intelligents) ainsi que des équipes des Secteurs Energy et Industry. « Nous voulons savoir comment le réseau et les voitures électriques interagissent et élaborons pour ce faire différents modèles d’activité et d’utilisation », précise Ralph Griewing, responsable de l’activité eCar Infrastructure au sein de Siemens Energy.

Sur le plan technique, pour pouvoir assurer le chargement des batteries d’une flotte électrique, il convient d’établir, pour chaque voiture en circulation, une communication fiable entre le conducteur, le véhicule et les bornes de recharge. Tout d’abord, la borne de recharge doit être en mesure de détecter la présence d’une voiture raccordée ; si aucun

Un essai grandeur nature est actuellement mené dans les rues de Munich et

d’Erlangen, en Allemagne, pour tester la « movE », une voiture électrique aux couleurs de Siemens. La flotte d’essai compte actuellement 20 véhicules, qui ont été confiés à des salariés de l’entreprise pour en éprouver l’aptitude à un usage quotidien sur route. Entièrement silencieuses, ces petites voitures

nécessaire dans chacun des domaines qu’il recouvre – de la production dans les centrales à la distribution d’électricité aux clients, en passant par le transport de l’énergie et la motorisation électrique », explique Andreas Romandi, chargé du projet 4-S au sein de Corporate Technology, le département central de recherche de Siemens. « L’électromobilité est un marché extrêmement prometteur et

triphasé avec une puissance de sortie de 11 kW, qui permettra de recharger la batterie de 22 kWh en l’espace de deux heures environ. Pour installer ce boîtier, il suffira de tirer un seul câble de raccordement domestique jusque dans son garage.

A pleine charge. La question du chargement est un aspect essentiel sur lequel se penchent

Test grandeur natureSiemens réalise ses premiers essais à grande échelle pour tester son concept d’électromobilité de la production d’électricité à un usage quotidien sur route, en passant par la recharge des batteries grâce à un parc qui comptera à terme une centaine de véhicules électriques, équipés des dernières technologies de recharge, de communication et de motorisation issues des laboratoires Siemens.

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branchement n’est détecté, un système de sécurité doit empêcher toute alimentation électrique. Ensuite, le conducteur doit être identifié de manière univoque pour assurer au fournisseur d’électricité un suivi pour la facturation. Pour cela, chaque voiture pourrait être équipée d’un ordinateur de bord, activé par une carte à puce et fonctionnant comme un système de navigation doté de fonctionnalités dédiées à la mobilité électrique. Les conducteurs pourraient alors utiliser cet ordinateur de bord pour réserver une borne de recharge ou localiser la borne la plus proche.

Recharge rapide. Les premiers retours d’expérience du projet 4-S montrent que les voitures électriques sont prêtes pour un usage quotidien en ville et en périphérie urbaine. Néanmoins, plusieurs questions restent en suspens. Par exemple, quelle est la meilleure technologie de recharge ? Les concepteurs de Corporate Technology travaillent en collaboration avec BMW sur le développement de trois modes de recharge différents : en courant alternatif (CA), en courant continu (CC) et par induction. La question de la recharge des voitures électriques se heurte aujourd’hui à l’absence de norme européenne ou internationale en la matière. Avec un système en courant alternatif, les équipe-ments de recharge sont installés dans le véhicule, ce qui influe sur son prix. Avec un système en courant continu, la batterie peut être chargée rapidement sans régulateur de charge à son bord car, dans ce cas, l’unité de chargement est intégrée dans la borne de recharge. La question de savoir si le chargeur doit être installé à l’intérieur ou à l’extérieur du véhicule n’a pas encore été réglée à ce jour. Le chargement par induction constitue

une autre option intéressante, qui permet de recharger une batterie sans câble, en toute simplicité, grâce à un champ électrique. Mais avec cette option, l’électricité doit parcourir la distance qui sépare l’unité de chargement au sol et la batterie, ce qui entraîne des pertes. Siemens travaille actuellement avec BMW à l’élaboration d’une solution dans le cadre d’un projet dédié à la technique d’induction et financé par le Ministère fédéral allemand de la Recherche. Ce projet est entré dans sa phase de test mi-2011 à Berlin.

Les chercheurs de Siemens travaillent également sur une fonction de recharge rapide, grâce à laquelle l’électricité serait accumulée dans la batterie avec une plus grande puissance. Une telle fonction permettrait de réduire le temps de recharge à quelques minutes seulement. A ce jour, la borne Siemens la plus rapide, d’une capacité de charge de 22 kW, permet de recharger entièrement une batterie en près d’une heure.

L’ordinateur de bord indique les bornes de recharge disponibles et le chemin vers la borne la plus proche.

Pendant que le conducteur travaille, sa voiture

électrique fait le plein à une borne de recharge

sur le parking de l’entreprise. L’écran indique

l’autonomie restante et le niveau de batterie.

Page 16: Pictures of the Future Siemens Printemps 2012

C’est déjà deux fois plus rapide qu’avec la précédente génération de bornes.

Grâce à toutes ces technologies en cours de perfectionnement, la voiture électrique

aura prochainement une place de choix dans le paysage automobile. « Nous pensons que la voiture électrique s’imposera progressivement sur le marché de l’automobile – dans un premier temps, comme deuxième véhicule pour les trajets en ville », affirme Andreas Romandi. « Selon nos prévisions, il y aura 1,5 million de voitures entièrement électriques sur les routes allemandes d’ici 2020. » Selon lui, le marché de l’automobile sera plus diversifié à l’avenir. Les voitures hybrides, qui allient moteur thermique et moteur électrique, sont amenées à devenir incontournables pour tous les types d’usage, puisqu’elles peuvent également parcourir de longues distances. Quant à la voiture diesel, moins coûteuse, elle restera la meilleure option pour ceux qui empruntent souvent les autoroutes.

Un défi de taille. Martin Wietschel, directeur du département Energie de l’institut Fraunhofer de Karlsruhe, estime que la généralisation de l’électromobilité pourrait poser problème aux réseaux électriques locaux : « Si dix voitures électriques d’une même rue rechargent en même temps leur batterie, cela pourrait créer une surcharge sur les transformateurs un peu anciens ». C’est la raison pour laquelle l’équipe du projet 4-S travaille au développement d’un système

La nouvelle ère de l’électricité | Présent et futur

Evolution du mix énergétique

L a demande énergétique mondiale est amenée à augmenter encore fortement.

Selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE), la consommation mondiale d’énergie en 2035 aura augmenté de 36 % par rapport à 2008. Cette évolution tient avant tout à l’essor économique des pays émergents et à la croissance de la population mondiale. Or, les ressources fossiles sont limitées, en plus d’être la principale source d’émissions de CO2.

Selon l’AIE, ce dilemme peut être résolu par une amélioration de l’efficacité énergétique et par un recours accru à l’électricité dans des domaines où les combustibles fossiles sont encore dominants, pourvu que cette électricité soit produite sans émissions. « Nous croyons que l’électricité produite à partir de sources renouvelables sera à l’avenir la forme principale d’énergie finale », affirme Ulrich Wagner, membre du conseil d’administration du Centre aérospatial allemand (DLR). L’électricité propre couvrira une vaste gamme d’applications, des appareils électroménagers aux installations de désalinisation et aux véhicules électriques, en passant par les éclairages et les pompes à chaleur. D’après une étude de la Société allemande de physique (DPG) de 2010, « l’électricité est facile à produire et à transporter, et son utilisation est très pratique et souple ». L’AIE ajoute « qu’aucune autre forme d’énergie finale » ne connaîtra une hausse de la demande aussi rapide que l’électricité. En effet, la consommation mondiale d’électricité augmentera probablement de 70 % d’ici 2035, l’essentiel de cette hausse étant liée aux pays émergents comme la Chine.

Nombre de foyers et de bureaux du monde entier sont encore chauffés au gaz ou au fioul. Pourtant, si l’électricité doit à l’avenir être produite avec de faibles émissions de CO2, la DPG estime qu’il est raisonnable de moderniser les systèmes de chauffage des anciens bâtiments en y installant des systèmes électriques. De ce fait, mais aussi en raison de la demande accrue en appareils électriques dans les pays hors OCDE, la consommation d’électricité dans les bâtiments augmentera de 1,5 % par an d’ici 2035, malgré les mesures d’économie

Les voitures électriques du projet pilote Siemens ont une autonomie d’environ 120 km et peuvent être

rechargées en deux heures grâce à un boîtier mural installé à domicile.

16 Pictures of the Future | Printemps 2012

intelligent de régulation du chargement qui veillerait à ce que tous les véhicules d’une même zone ne se chargent pas simultanément à la puissance maximale. En

outre, un compteur intelligent placé dans le boîtier mural pourrait permettre au chargement de se faire en fonction du prix de l’électricité

actualisé en temps réel, qui serait donc moins élevé la nuit, lorsque les appareils électroménagers sont éteints, et les machines industrielles à l’arrêt.

Tim Schröder

Selon nos prévisions, il y aura 1,5 million de voitures entièrement électriques sur les routes allemandes d’ici 2020.

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Pictures of the Future | Printemps 2012 17

Sour

ce: A

IE 2

010

en %

Sour

ce: H

SBC

2020 : 18 millions de nouveaux véhicules électriques dans le monde

Véhicules électriquesVéhicules hybrides

20095

657

8 6509 226

2020e

0 2 000 4 000 6 000 8 000 10 000

en milliers d’unités

Déclin des sources fossiles dans le mix énergétique mondial

Géothermie 0,3 Eolien 1Biomasse et déchets 1,3

Hydraulique 16

Nucléaire 14

Gaz 21Pétrole 5,4

Charbon 41

Energies marines 0

Energies marines 0

2008 2035e

Charbon 32

Géothermie 1Eolien 8

Solaire PV 2Thermosolaire

1 Biomasse et déchets 4

Hydraulique 16

Nucléaire 14Gaz 21Pétrole 1

2020 : 1 000 milliards de dollars pour la production d’énergie à faible émission de CO2

Sour

ce: H

SBC

18

2009

80

192203

93

2020e

3687

368544

AgrocarburantsChaleur issue de sources renouvelables

Captage et stockage du CO2

Energie nucléaireElectricité issue de sources renouvelables

Investissements mondiaux, en milliards de dollars

2009

2020e

L’éolien couvrira plus de la moitié du marché mondial des renouvelables

Sour

ce: H

SBC

2020e

Petite hydraulique 49

Biomasse 71

Solaire 116

Géothermie 23 Eolien 285en milliards de dollars

La nouvelle ère de l’électricité | Présent et futur

Evolution du mix énergétique

d’énergie. La part de l’électricité dans la consommation mondiale d’énergie finale devrait donc passer de 27 % actuellement à 37 %.

Les débouchés de l’électricité dans l’automobile s’annoncent également très prometteurs. Selon la DPG, « la mobilité électrique peut limiter la consommation de pétrole et réduire les émissions de CO2 et d’autres polluants, à condition que l’électricité ne soit pas produite à partir de sources fossiles ». Le gouvernement allemand prévoit un million de véhicules électriques sur les routes d’Allemagne d’ici 2020, et cinq millions en 2030 (en incluant les hybrides, équipés d’un moteur électrique et d’un moteur thermique).

Les Etats-Unis et la Chine tablent tous deux respectivement sur un million de

véhicules électriques en circulation dès 2015. D’après une étude menée en 2010 par la banque HSBC, le marché de la mobilité électrique devrait s’élever à 473 milliards de dollars d’ici 2020, avec 8,7 millions de voitures électriques et 9,2 millions de voitures hybrides.

Pour ouvrir cette nouvelle ère de l’électricité, l’essentiel est de parvenir rapidement à une production d’électricité décarbonée. Selon les prévisions de l’AIE, la part de l’électricité mondiale produite à partir de ressources fossiles (charbon, gaz et pétrole) devrait descendre à environ 55 % en 2035, contre 67 % aujourd’hui. Sur la même période, la part d’électricité produite à partir de sources renouvelables, notamment l‘hydraulique, l’éolien et le solaire, passera de 19 % à 32 %, prévisions qui se reflètent aussi

dans les anticipations du marché. Les experts de Siemens estiment que dès 2020, plus de la moitié des investissements mondiaux dans les centrales électriques porteront sur des installations à énergies renouvelables. La HSBC prévoit que le marché de la production d’énergie à faibles émissions de CO2 passera de 422 milliards de dollars en 2009 à 1 043 milliards de dollars en 2020.

Outre l’hydroélectrique, les principales sources d’électricité non émettrices de CO2

seront l’éolien, et dans une moindre mesure, le solaire. Selon les prévisions de la HSBC, en 2020, l’éolien se taillera la part du lion sur le marché des renouvelables, avec 285 milliards de dollars. Le solaire devrait suivre avec un montant de 116 milliards de dollars.

Anette Freise

Page 18: Pictures of the Future Siemens Printemps 2012

Panorama20 Réseaux collaboratifs Les technologies novatrices

sont souvent le fruit de projets internationaux réunissant universités, instituts de recherche et entreprises. Le partage des connaissances ne connaît désormais plus de frontières.

23 Générateurs d’idées Comment naissent les inventions ?

Où les scientifiques puisent-ils leur inspiration ? Une chose est sûre : l’avenir appartient aux pionniers de la recherche sans frontières.

25 Imagerie hybride Le Biograph mMR constitue une

première mondiale dans le domaine de l’imagerie médicale. Il permet aux médecins d’assurer l’acquisition simultanée de la position, du fonctionnement et du métabolisme des organes internes des patients.

27 Système de navigation Galileo Ce projet européen de système

de positionnement par satellites rendra bientôt possible de nouvelles applications dans le domaine de la mobilité.

2030Des scientifiques d’une station spatiale

internationale ont découvert sur une sonde

une forme de vie jusque-là inconnue. Ils ont

envoyé un échantillon sur la Terre pour le

faire analyser par un réseau de chercheurs.

D’où viennent ces micro-organismes ?

Leur ADN révolutionnera-t-il la science ?

Le microbiologiste Aleksandr Miller, présent

sous la forme d’un hologramme, répond

à ces questions.

18 Pictures of the Future | Printemps 2012

Page 19: Pictures of the Future Siemens Printemps 2012

fois à BRSS après avoir traversé la ceinture d’astéroïdes entre Mars et Jupiter. Nous avons alors fait une découverte sensationnelle : dans des particules de poussière qui s’étaient déposées à la surface de la sonde, nous avons observé des éléments caractéristiques de micro-organismes. Avions-nous trouvé une forme de vie extraterrestre ? Nous avons immédiatement envoyé un échantillon à notre module de recherche « Microcosm ». Ce module nous permet de mener des recherches en apesanteur, tandis que notre section principale est en rotation pour créer une pesanteur artificielle qui nous protège

Journal de bord électronique de la station spatiale BRSS (Boundless Research Space

Station). Rapport de Desmond Blacc, chef de station. Nous recevons aujourd’hui la visite du professeur Aleksandr Miller, microbiologiste mondialement connu, qui vient de nous rejoindre par hologramme depuis Skolkovo, la ville russe de la science. Nous attendons que la liaison sonore soit établie. Aleksandr Miller devrait très probablement nous confirmer que nous nous trouvons à l’aube d’une nouvelle ère scientifique. Laissez-moi vous expliquer pourquoi. Il y a trois mois, notre sonde spatiale « Scienceflight » s’est arrimée pour la première

Recherche sans frontières | Scénario 2030

2030. A bord de la station BRSS, des astronautes cherchent des réponses aux questions essentielles de notre époque.

Ils viennent de découvrir des micro-organismes dans l’espace et pressentent l’avènement d’une nouvelle ère de la recherche,

mais ces bactéries doivent d’abord être analysées. Un réseau international de chercheurs, basé sur Terre,

leur prête main forte.

Enigme cosmique

Pictures of the Future | Printemps 2012 19

Page 20: Pictures of the Future Siemens Printemps 2012

20 Pictures of the Future | Printemps 2012

En matière de R&D, le 21ème siècle est résolu-ment placé sous le signe du dynamisme. Un

dynamisme qui s’accompagne d’une mondiali-sation soutenue, qui intensifie la concurrence à l’échelle de la planète. Aussi les entreprises, mais aussi les nations, sont-elles confrontées à de nouveaux défis. Selon le cabinet de conseil en stratégie Booz & Company, dans les pays industrialisés tels que l’Allemagne et les Etats-Unis, les dépenses en R&D ont reculé de plus de 3 % en 2009 par rapport à l’année antérieure. Sur cette même période, elles ont en revanche grimpé de 41,8 % en Chine et en Inde.

Un glissement de la R&D vers les pays émer-gents s’opère donc progressivement. Ce phé-nomène offre cependant aux poids lourds de la R&D des pays industrialisés, tels que Siemens, de multiples opportunités de continuer à jouer un rôle majeur sur un marché international en pleine mutation.

de l’atrophie musculaire et osseuse – une précaution inenvisageable il y a dix ans.

Mais revenons à notre « Microcosm » : nos partenaires chinois y mènent des recherches biomédicales. Ces dernières années, grâce à l’analyse de protéines en conditions de microgravité, ces chercheurs ont découvert de nouveaux marqueurs biologiques utiles pour la détection précoce des maladies et développé des substances innovantes pour traiter le cancer. Ces travaux menés en collaboration avec des scientifiques américains et européens ont été récompensés par un prix Nobel. Ce succès montre comment les réseaux internationaux de ce type permettent de générer des sommes de connaissances phénoménales et de les mettre en application.

Nous profitons nous-mêmes chaque jour des bénéfices de la collaboration internationale, et nous nous efforçons de minimiser les risques de conflits liés aux différences culturelles. J’ai d’ailleurs l’intention d’imposer à tous les chercheurs des formations virtuelles aux relations interculturelles – même si ces cours portent seulement sur la préparation des repas à bord de la station. Mais plus sérieusement, je voulais vous

parler des bactéries. Nos chercheurs se sont passionnés pour cette découverte. Ils ont analysé les fragments d’ADN et discuté des résultats avec nos biochimistes russes, mais sans parvenir à aucune conclusion satisfaisante. Quelle frustration ! Nos chercheurs sont parmi les meilleurs au monde dans le domaine des alliages innovants qui ont permis, par leur résistance exceptionnelle à la chaleur, de mettre en service sur Terre la première centrale électrique à fusion, il y a deux ans. Nous comptons également dans nos rangs des scientifiques de renom dans le domaine de la croissance osseuse et de la structure des cytosquelettes. En collaboration avec un réseau mondial regroupant des universités, des instituts de recherche et des entreprises, nous proposons des réponses à bon nombre de défis auxquels l’humanité est aujourd’hui confrontée : la raréfaction des matières premières, le changement climatique ou encore les problèmes de santé d’une population mondiale vieillissante.

Pourtant, nous étions tout simplement incapables de trouver une réponse acceptable à cette question : quelle forme de vie avions-nous découverte ? Nous avons donc envoyé un échantillon à Skolkovo via un vaisseau d’approvisionnement de la classe Circinus, un

successeur de la navette spatiale développée par les Etats-Unis, la Russie et la Chine. Les micro-organismes devaient y être étudiés sous la supervision du professeur Miller. Pourraient-ils nous aider à combattre les maladies ? A découvrir de nouvelles sources d’énergie ? Mon collègue écossais James Farquharson a alors émis une hypothèse assez hardie : pour lui, ces micro-organismes venaient sûrement de la Terre. Je n’ai pu m’empêcher de parier avec lui une bouteille de whisky, et je m’attends à gagner ce pari d’un moment à l’autre, lorsque le professeur Miller nous communiquera ses conclusions. En ce moment-même, j’ai sous les yeux une coupe transversale de ces bactéries, projetée devant lui sous forme d’hologramme. Nous n’attendons plus que le son… Ah, ça vient.

« Kkkrrzzz… Bonjour, BRSS, vous m’entendez ? Ici Aleksandr Miller, de Skolkovo. Après des semaines de recherche, de discussions et d’analyses, nous sommes en mesure de répondre à votre question. Votre échantillon contient bien des micro-organismes inconnus. En réalité, je devrais plutôt dire « relativement » inconnus. Comme vous le voyez sur l’hologramme projeté

devant moi, ils sont par certains aspects différents des formes de vie que nous connaissons sur Terre. Cependant, ils ont aussi un point commun

avec elles : ils proviennent de notre planète. Nous estimons qu’ils datent d’il y a au moins 500 millions d’années. Cette espèce ultra-résistante a probablement été propulsée dans l’espace par un impact de météorite. Malgré leurs origines terrestres, ces bactéries sont très intéressantes car elles contiennent des séquences génétiques que nous ne connaissions pas. Cette découverte pourrait avoir un impact sur les biotechnologies ou l’énergie. Nous aimerions coopérer avec vous pour mettre en place des projets de recherche dans ces domaines. Certains de nos collègues de Princeton, Shanghai, Bangalore et Skolkovo sont déjà prêts à se lancer dans l’aventure, et nous sommes certains d’obtenir le soutien financier des Nations Unies. Vous recevrez dans les prochains jours nos analyses ADN, accompagnées de la structure protéique et cellulaire. Pouvons-nous compter sur vous ? »

« Professeur Miller, ici Desmond Blacc. Je vous parle au nom de toute l’équipe. Nous sommes enthousiasmés par votre proposition de coopération et l’acceptons avec plaisir. Nous vous recontacterons. Fin du message ! Pour le journal de bord : je n’ai plus qu’à offrir à Farquharson une bonne bouteille de Scotch des Highlands. »

Sebastian Webel

« Grâce à la microgravité, nous avons développé de nouveaux traitements du cancer. »

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Pictures of the Future | Printemps 2012 21

Recherche sans frontières | Tendances

Pour conserver une longueur d’avance en matière d’innovation sur le plan mondial, les entreprises comme Siemens se doivent d’exploiter au mieux leur réseau international de connaissances. Malgré les défis qui se posent, des opportunités colossales s’ouvrent aux chercheurs et développeurs.

Séparation du CO2 au MIT (en haut), étude

de virus à Berkeley (au centre), nouveaux

systèmes d’éclairage (en bas), optimisation

du réseau électrique : le partage de connaissances

profite à la recherche.

Réseaux collaboratifs

de projets collaboratifs financés par l’UE. Le projet « Internet of Things at Work », par exemple, regroupe, sous la coordination de Siemens Corporate Technology, des scienti-fiques qui étudient l’Internet du futur, afin de relier non pas les personnes, mais les machines.

D’autres projets européens en cours, dans lesquels Siemens intervient également, visent à favoriser l’utilisation des sources d’énergie renouvelables. « L’objectif des programmes communautaires de financement de la R&D est d’organiser les connaissances à l’échelle européenne afin d’établir des bases solides pro-pices à l’innovation », explique Ina Sebastian, de Siemens Corporate Technology à Munich, en charge des projets financés par l’UE aux-quels Siemens participe (une cinquantaine, à l’heure actuelle). « La Com mission met tout en œuvre pour garantir une véritable consolida-tion du savoir et éviter que deux organisations

étudient chacune le même sujet. Cet aspect est essentiel pour prévenir les conflits d’intérêts et les désaccords sur l’utilisation des résultats des recherches », affirme Ina Sebastian. Cette approche clarifie par ailleurs les questions touchant au dépôt de brevets et assure une protection adéquate de la propriété intellec-tuelle, tout en favorisant le développement de produits innovants.

Melting-pot international. Siemens prend part à des programmes de recherche dans le monde entier. Aux Etats-Unis par exemple, le Groupe étudie de nouvelles technologies de captage et de stockage du CO2 dans le cadre d’un projet financé par le Ministère américain de l’énergie. « Grâce à ce type de collaboration, Siemens peut s’impliquer dans de multiples activités de recherche et d’innovation », pré-cise Ina Sebastian. « Par ailleurs, les réseaux

L’innovation en ligne de mire. Rassem-bler différentes sources d’expertise demeure un moyen efficace pour les entreprises de se maintenir à la pointe de l’innovation. C’est l’une des raisons pour lesquelles Siemens par-ticipe depuis 1984 aux programmes-cadres de recherche mis en place par la Commission européenne. Ces derniers visent à réunir les scientifiques et experts européens les plus brillants de divers organismes de recherche, universités et entreprises en vue de renforcer la compétitivité de l’Europe sur le plan interna-tional. Les sommes investies par l’UE dans ces programmes démontrent la priorité accordée à l’innovation. Le budget du premier programme-cadre (1984-1987) s’élevait ainsi à quelque 3,3 milliards d’euros, contre 17,5 milliards d’euros pour le sixième programme-cadre (2002-2006) et 50 milliards d’euros pour le septième (2007-2013). Siemens participe à une grande variété

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22 Pictures of the Future | Printemps 2012

internationaux établis au travers de ces projets concentrent de nouvelles connaissances inestimables. Cette démarche s’inscrit dans la politique Open Innovation adoptée de longue date par Siemens. »

Chaque année, Siemens met ainsi en place plus de 1 000 nouveaux programmes de collaboration avec des instituts de recherche, d’autres entreprises et des universités. Le Groupe entretient également des partenariats stratégiques axés sur des programmes de recherche conjoints, sur l’identification des jeunes talents et sur le développement de réseaux, en collaboration avec plusieurs universités prestigieuses. Dans cette optique, Siemens a implanté dans ces établissements des « Centers of Knowledge Interchange » (centres d’échanges de savoirs), dirigés par des Responsables grands comptes dépêchés sur place. Les CEO des filiales régionales et des entités opérationnelles, parfois même des membres du Directoire de Siemens, parrainent certaines des universités concernées.

Les frontières entre entités opération-nelles, pays et cultures s’estompent de plus en plus en interne. « Lorsque des chercheurs de différents pays se rassemblent, on obtient un formidable melting-pot de connaissances », commente Tabea Arndt, responsable Corporate Technology en charge du dévelop-pement des supraconducteurs, un domaine de recherche réunissant des scientifiques des quatre coins de la planète.

« Chaque culture dévoile sa propre perspec-tive. Par exemple, alors que les Européens sont incollables en recherches sur les matériaux, les scientifiques de pays tels que le Japon, carac-

térisés par des matières premières peu abon-dantes et une densité de population très élevée, sont maîtres dans l’art d’utiliser au mieux les matériaux au sein de solutions compactes. Nos partenaires en innovation élargissent considé-

rablement notre horizon : un atout précieux pour les activités de recherche de Siemens. »

Et cela vaut égale-ment quand des experts IT de Bangalore travaillent avec leurs homologues de Munich ou de Shanghai

sur des programmes intelligents de traitement des images destinés à la vidéosurveillance ou lorsque des ingénieurs de Siemens Healthcare collaborent aux Etats-Unis et en Allemagne au développement du tout premier scanner IRM-TEP corps entier et préparent son lance-ment commercial.

Vers de nouveaux marchés. La « recherche sans frontières » présente d’autres avantages. « Les programmes de recherche collaborative avec nos partenaires internationaux nous en apprennent énormément sur les exigences de leurs marchés respectifs et nous permet-tent d’adapter nos processus et solutions aux conditions locales », précise Ina Sebas-tian. Selon Deutsche Bank Research, plus de 90 % des entreprises technologiques majeures mettent en place ce type de recherche hors de leur marché domestique. Les sites de R&D privilégiés sont ainsi les pays émergents, capables de répondre à des exigences techniques complexes à moindre coût.

Il ne s’agit pas ici de simplement transfé-rer les activités de R&D mais d’en établir de nouvelles – comme le dicte la philosophie d’entreprises telles que Siemens, désireuses de demeurer à la pointe de l’innovation et du développement technologique à long terme. Si quelqu’un découvre, en Inde, comment développer un produit de façon à ce qu’il puisse

être vendu à un dixième de son prix d’achat aux Etats-Unis, les segments de produits plus haut de gamme peuvent eux aussi en tirer parti. Des équipements médicaux aux solutions énergétiques, Siemens innove depuis long-temps dans le cadre de son initiative SMART, qui met à contribution l’expertise de son réseau international de recherche.

Obstacles interculturels. En dépit de ses atouts et succès scientifiques et économiques, la coopération internationale se heurte parfois à des écueils, souvent liés aux relations interpersonnelles. « Selon sa culture, chacun aborde ses activités et gère les choses de manière différente, en se conformant à un mode d’apprentissage qui lui est propre », explique Alois Moosmüller, professeur de communication interculturelle à l’université Ludwig-Maximilians de Munich. « Une entre-prise doit être en mesure de s’adapter à cette diversité. Nous sommes souvent confrontés à des situations d’incompréhension mutuelle. C’est ce qui entrave les projets collaboratifs au sein des équipes, leurs membres étant de plus en plus réfractaires à l’idée de travailler ensemble de manière constructive. »

Les conflits de ce type sont assimilés à de simples divergences d’opinion chez Siemens, qui, outre son réseau international de recherche, opère dans 190 pays et dispose depuis 2003 d’un centre interne de conseil et de formation, le « Learning Campus ».

Le Learning Campus prépare les collabora-teurs Siemens à la culture dominante de leur futur lieu de travail une fois qu’ils ont reçu leur affectation sur un site à l’étranger, qu’il se situe en Chine, en Inde ou en Amérique du Nord. La politique de ce centre de formation répond à un objectif précis : garantir le succès du travail d’équipe en favorisant la compréhension interculturelle. Parce que face à la dynamique de mondialisation actuelle, plus personne ne peut se permettre de se replier sur lui-même dans sa tour d’ivoire culturelle.

Sebastian Webel

Siemens scelle plus de 1 000 partenariats par an avec des instituts de recherche, des entreprises et des universités.

Un réseau de recherche international. A gauche : visioconférence entre Boston et Munich. A droite : développement d’échographes pour le marché indien.

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Pictures of the Future | Printemps 2012 23

D’où viennent les idées ? Bonne question ! », s’exclame Charlie

Coushaine, inventeur, dans son bureau de Rindge, dans le New Hampshire. Etalées devant lui, des petites ampoules halogènes pour phares de voiture, des lampes à diodes électroluminescentes (LED) pour véhicules et des LED pour porte-clés, pour la cuisine et même pour la douche.

« C’est sûr, il faut avoir l’esprit ouvert aux idées neuves », explique Charlie Coushaine, l’un des inventeurs les plus féconds de chez Osram Sylvania, une filiale d’Osram basée à Danvers, dans le Massachusetts. Depuis presque 20 ans, d’abord sur le site d’Hillsboro, dans le New Hampshire, puis dans le Massachusetts, il développe des lampes halogènes et des systèmes à LED pour la voiture et pour la

maison. Parmi ses créations, il y a la première lampe halogène standardisée pour phares de voiture et une lampe à LED pour la douche.

Après un diplôme de génie mécanique obtenu dans les années 1980 à la Northeas-tern University de Boston, il travaille pour une entreprise spécialisée dans les automatismes. En 1988, il rejoint Sylvania, reprise en 1993 par Osram, filiale de Siemens. Sa première mission : concevoir un équipement automatisé ultra-rapide pour l’assemblage des ampoules. En 1993, l’entreprise cherche des volontaires pour concevoir un nouveau mécanisme pour des phares de voiture orientables. Charlie Coushaine répond présent, par besoin d’explorer de nouvelles voies. « Il faut prendre des risques de temps en temps », estime-t-il.

Sa plus grande réussite est sans doute

la mise au point de Joule, un système de phares arrière à LED, également le tout premier dispositif à LED standardisé pour l’automobile. Pour développer ce système très performant, Charlie Coushaine a travaillé en équipe. Tous les éléments du dispositif (cavité réfléchissante, cristal semi-conducteur, câblage, gaine et douille) sont associés de façon à optimiser le rendement et l’efficacité. « Cette approche systématique a été finale-ment la plus grande innovation née du projet Joule », résume Charlie Coushaine.

Comme toutes les LED, le système Joule produit un rayonnement très intense, s’allume instantanément, a une longue durée de vie et consomme peu. D’autre part, ayant été standardisé sur le principe du « plug and play » (prêt à l’usage), il a pu être aisément mis

Recherche sans frontières | LED

Depuis presque vingt ans, Charles Coushaine invente des applications innovantes pour les lampes halogènes et les diodes électroluminescentes.

Le générateur d’idées

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24 Pictures of the Future | Printemps 2012

Charles Coushaine, 50 ans, a joué un rôle crucial

dans le succès fulgurant des diodes

électroluminescentes (LED). Il a même inventé

une lampe à LED pour les douches mal éclairées,

alimentée par l’écoulement de l’eau.

en œuvre sur un grand nombre de gammes de voitures. La seconde génération de phares arrière Joule, donnant une plus grande luminosité avec des diodes plus petites, est aujourd’hui produite à grande échelle. Ces phares sont utilisés sur de nombreux véhicules du monde entier, notamment la Ford Mustang et des modèles d’Audi, de BMW et de Volkswagen. En 2007, Charlie Coushaine et son équipe ont reçu le Prix de l’innovation Osram pour le système Joule.

L’expertise de Charlie Coushaine dans le domaine des LED était bien connue au sein de l’entreprise, avant même qu’il ne reçoive le prix. Quelques années avant la fin du projet Joule, un collègue du service marketing lui demande s’il peut conce-voir une lampe à LED adhésive que l’on pourrait accrocher où l’on veut dans sa voiture. Les enquêtes réalisées auprès des consommateurs avaient mis en évi-dence un marché potentiel pour ces appareils. Charlie Coushaine accepte, bien qu’il n’ait pas le temps de prendre en charge de projet supplémentaire. Il parvient toutefois à concevoir la lampe, en travaillant

domestique, et demande à Charlie Coushaine d’en faire partie. Pour lui, cela impliquait de passer à la conception et au développement de produits à base de LED pour le marché grand public. « Depuis ce changement, je ne passe généralement pas plus de deux ou trois mois sur chaque projet. C’est bien plus ludique : je peux me défouler de façon créative », indique-t-il.

Il commence en général par concevoir un modèle sur ordinateur, souvent chez lui, puis en parle avec son équipe. L’ébauche est alors envoyée, avec des spécifications fonctionnelles détaillées, à des sous-trai-tants en Chine, qui fabriquent l’appareil, souvent en modifiant la conception d’origine. « Ce n’est pas surpre-nant ; ils sont experts en fabrication et font sou-vent des modifications de conception ; nous y sommes ouverts, tant que la fonctionnalité spécifiée ne change pas. Ils apparaissent même comme co-auteurs sur certains brevets », explique Charlie Coushaine.

Une lampe à LED avec haut-parleur. Charlie Coushaine a ainsi 159 inventions à son actif, et détient 184 brevets et 59 familles de brevets. Et les idées continuent d’affluer, comme cette lampe à LED à haut-parleur intégré, sur laquelle on peut transférer de la musique sans fil, comme avec un lecteur MP3. « Les chaînes de magasins ont déjà ma-nifesté leur intérêt ; on pourrait, par exemple, jouer une musique différente dans les cabines d’essayage pour hommes et pour femmes », prévoit-il. Parmi ses autres idées, on compte aussi un carillon éolien à piles éclairé par LED et un appareil pour stériliser les planches à découper à l’aide de rayons ultraviolets.

D’où viennent toutes ces idées ? « De partout », explique en souriant Charlie Coushaine, nommé ‘Inventeur de l’année’ par Siemens en 2010. « Elles naissent lors de conversations autour d’une table, dans la salle

le week-end. Cet objet fait maison est devenu le « Dot-It », une petite lumière ronde que l’on allume et éteint en appuyant brièvement sur sa surface. Aujourd’hui, des millions d’exemplaires de ce produit ont été vendus dans le monde. Charlie Coushaine y a travaillé pendant plusieurs années, parallèlement au projet Joule. « Je travaille toujours sur plusieurs projets à la fois », explique-t-il. En 2006, il a reçu le Prix Osram Star, notamment pour la conception intelli-gente du « Dot-It », dont il détient le brevet.

Brainstorming créatif. Après le succès du système « Dot-It », Osram Sylvania crée le « New Ventures Group », chargé de concevoir des produits d’éclairage à usage

Laissant libre cours à sa créativité, notre inventeur est parvenu à des solutions surprenantes : un chemin de table à éclairage à LED, des lampes de poche à LED pliables, et même une lampe à LED intégrée à une pomme de douche. Cette dernière invention répond au fait que, dans nombre de logements, la douche est mal éclairée. La solution imaginée par Charlie Coushaine produit de l’électricité au moyen d’une petite génératrice actionnée par une micro-turbine, mise en mouvement par l’écoulement de l’eau.

de bain, au cours de discussions informelles avec des collègues… et bien sûr aussi des supérieurs et des enquêtes clients. »

Même lorsqu’il part en randonnée, Charles Coushaine a de nouvelles idées. Il est pas-sionné de « geocaching », une sorte de chasse au trésor guidée par GPS, ouverte à tous les âges, dans laquelle divers objets sont cachés et leurs coordonnées publiées sur Internet. Mais il ne suffit pas de trouver l’endroit : une fois sur place, il faut trouver le petit coffre lui-même, parfois caché dans un arbre ou sous un pont. « Nous avons nous aussi caché une boîte près de chez nous. Le thème de la boîte, remplie de petits objets, est naturellement ‘la lumière’ », confie Charlie Coushaine.

Hubertus Breuer

Charles Coushaine est titulaire de 184 brevets – et les idées continuent d’affluer.

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Pictures of the Future | Printemps 2012 25

Recherche sans frontières | Biograph mMR

Un système innovant d’imagerie médicale est actuellement à l’essai à Munich. Tout premier scanner à combiner résonance magnétique et tomographie par émission de positons, le Biograph mMR assure l’acquisition simultanée de la position, du fonctionnement et du métabolisme des organes internes.

La réputation du CHU « Klinikum rechts der Isar » de Munich en matière d’avancées

scientifiques n’est plus à faire. En 2008, l’établissement créait l’événement avec une greffe spectaculaire de deux bras entiers. En novembre 2010, il faisait à nouveau parler de lui à l’occasion de l’installation par Siemens Healthcare, dans son service de médecine nucléaire, du tout premier système IRM-TEP corps entier intégré. Depuis, ce dernier est toujours en phase d’évaluation à des fins d’usage clinique.

Système hybride de 3 teslas, le Biograph mMR (pour résonance magnétique moléculaire) a pour particularité de combiner deux modalités majeures : la tomographie par émission de positons (TEP) et l’imagerie par résonance magnétique (IRM).

Ces deux techniques présentent des différences notables (voir encadré p. 26), mais les informations qu’elles fournissent sont parfaitement complémentaires. Un système IRM peut en effet réaliser des clichés anatomiques avec une résolution de l’ordre du millimètre, tandis qu’un scanner TEP permet d’étudier le métabolisme cellulaire.

« Grâce au Biograph mMR, nous sommes désormais en mesure de réaliser des acquisitions corps entier en IRM et TEP simultanément, puis de les superposer », indique le professeur Markus Schwaiger, directeur du service de médecine nucléaire de la « Klinikum rechts der Isar », qui est très

Imagerie hybride

optimiste quant aux applications cliniques. « Nous nous concentrons sur les applications oncologiques et plus précisément sur les patients atteints d’un cancer. Ce qui nous intéresse, ce sont les avantages de ce système par rapport aux méthodes d’examen conventionnelles. Nous espérons qu’il nous aidera à améliorer nos diagnostics », ajoute-t-il.

Les espoirs du professeur Schwaiger sont fondés puisque les médecins qui utilisent le Biograph mMR peuvent déterminer si la taille d’une tumeur a diminué mais également si son activité, donc son métabolisme, a ralenti. Ils sont ainsi capables d’évaluer l’efficacité d’un traitement, par exemple une chimiothérapie.

Le Biograph mMR pourrait également s’avérer utile dans le cadre du diagnostic des maladies neurodégénératives, notamment grâce à l’identification de certaines zones du cerveau affichant un ralentissement de l’activité métabolique, révélateur de troubles psychiques. Hermann Requardt, CEO du Secteur Healthcare de Siemens, n’a aucun doute sur le potentiel offert par la réunion des modalités TEP et IRM au sein d’un même système. « Pour relever les défis imposés par les systèmes de soins, nous nous devons de déceler les maladies de manière précoce et précise, et de les traiter correctement tout en gardant un œil sur les coûts associés », affirme-t-il. « Nous pourrons ainsi éviter les thérapies ne présentant aucune efficacité ou prescrites suite à des diagnostics erronés. »

« Les tests d’utilisation clinique nous aideront à surveiller l’évolution des maladies. Nous exploiterons les informations obtenues pour développer un programme thérapeutique individuel pour chaque patient », précise le professeur Schwaiger. « Cette nouvelle technologie hybride devrait aussi nettement améliorer la précision de l’identification des tumeurs et de la réalisation des biopsies, ainsi que le confort des patients. » Parallèlement, le Biograph mMR pourrait favoriser le développement de nouveaux biomarqueurs, mais aussi de nouvelles approches thérapeutiques du cancer, des cardiopathies et des troubles neurologiques. L’IRM ayant recours à des champs magnétiques et non à des rayonnements ionisants, cette technique d’examen est particulièrement adaptée aux enfants et au suivi des patients.

Outre sa précision spatiale et temporelle, le Biograph mMR se distingue par sa capacité à effectuer simultanément des acquisitions IRM et TEP du corps entier en 30 minutes environ. Auparavant, il était nécessaire de réaliser deux examens distincts, puis de combiner les images obtenues – un processus fastidieux et offrant moins de précision en raison du mouvement inévitable des patients et de leurs organes entre les deux acquisitions. Le Biograph mMR garantit par conséquent un diagnostic plus fiable et un confort accru des patients, qui n’ont ainsi à subir qu’un seul examen.

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26 Pictures of the Future | Printemps 2012

Prouesse technologique. Quels ont été les défis de l’intégration de l’IRM et de la TEP dans un seul et même système ? « Techniquement, il nous a fallu résoudre les problèmes liés à la fusion de deux machines très imposantes. Mais nous nous sommes surtout heurtés à des obstacles technologiques », explique Walter Märzendorfer, responsable de l’activité Magnetic Resonance de Siemens Healthcare. A cette fin, les entités Molecular Imaging d’Hoffman Estates (Etats-Unis) et Magnetic Resonance d’Erlangen (Allemagne)

IRM, cependant, la déviation par le champ magnétique de la cascade d’électrons générée par ces photomultiplicateurs empêcherait toute mesure d’un signal clair – un obstacle de taille à l’intégration de ces deux technologies.

La solution ? « Sur le Biograph mMR, les photomultiplicateurs ont été remplacés par des photodiodes à avalanche, bien plus compactes », explique Matthias Schmand, responsable du programme PET Detector Research and Development de Siemens Healthcare. Ces photodiodes mesurent le flux

Les images haute résolution du scanner IRM-TEP

corps entier Biograph mMR ouvrent aux médecins,

à l’instar du professeur Schwaiger (ci-dessus),

de nouvelles perspectives en oncologie,

cardiologie et neurologie, favorisant la détection

précoce des maladies et la définition de stratégies

thérapeutiques efficaces.

Principe de l’imagerie par résonance magnétique (IRM)L’IRM se caractérise par un fort contraste des tissus mous, idéal pour l’identification des modifications

pathologiques des organes. Elle détecte en effet les atomes d’hydrogène des protéines et des tissus adipeux

constituant les organes. Un champ magnétique de très forte intensité, par exemple 3 teslas (60 000 fois plus

puissant que celui de la Terre), est utilisé pour aligner les noyaux de ces atomes selon l’orientation des lignes

du champ magnétique. Simultanément, un signal radio est émis afin de perturber légèrement cet alignement.

Lorsque l’émission du signal est interrompue, les atomes reprennent la position imposée par le champ

magnétique. Leur réalignement est cependant plus ou moins rapide en fonction de la région concernée

(foie, graisse sous-cutanée ou fluide corporel) et peut donc être visualisé par le biais de l’IRM.

Principe de la tomographie par émission de positons (TEP)La TEP est principalement utilisée pour étudier le métabolisme cellulaire au sein des tissus. Un traceur est

injecté par voie intraveineuse au patient. Il s’agit généralement d’une solution de glucose contenant du fluor

radioactif d’une demi-vie courte – fluodésoxyglucose 18F-FDG –, rapidement absorbée par les cellules qui

se servent du glucose comme source d’énergie. Les cellules caractérisées par une forte activité métabolique,

telles que les cellules tumorales, peuvent alors être visualisées car elles présentent une concentration

du traceur supérieure. Le traceur radioactif se désintègre dans les cellules et émet des positons, qui

s’entrechoquent avec les électrons – leurs antiparticules – des tissus environnants. Cette collision entraîne un

processus d’annihilation qui produit deux photons gamma, émis à l’opposé l’un de l’autre. Ceux-ci sont mesurés

par un anneau de détecteurs intégré à un tube entourant le patient. Lorsque deux détecteurs identifient

simultanément un photon gamma, le système détermine la présence d’un positon dans le corps du patient

sur la ligne fictive reliant les deux détecteurs. La configuration en anneau autorise un nombre de lignes infini.

Leurs points d’intersection constituent une zone à forte activité cellulaire.

ont concentré leur expertise et impliqué un immense réseau international de partenaires dans leurs efforts de développement, en faisant notamment appel à des chercheurs du CHU de Tübingen et du centre de recherche de Jülich, en Allemagne, du centre d’imagerie Athinoula A. Martinos de Boston et de l’université Emory d’Atlanta, aux Etats-Unis. « Ce travail d’équipe a été exemplaire », se réjouit Walter Märzendorfer.

L’une des approches majeures de cette collaboration a consisté à modifier radicalement le détecteur TEP. Les scanners TEP entraînent l’émission de photons gamma dans le corps du patient qui sont transformés en photons secondaires au niveau des cristaux de scintillation, à l’avant du détecteur. Ces photons sont normalement amplifiés par des photomultiplicateurs (tubes électroniques de plusieurs centimètres de long) avant d’être mesurés. En présence d’un système

électronique créé par les photons en utilisant un système à couche semi-conductrice peu sensible aux champs magnétiques externes. « Les photodiodes à avalanche présentent un autre avantage : grâce à leurs dimensions réduites, elles peuvent facilement être intégrées à un équipement IRM », poursuit Matthias Schmand.

Vers une médecine personnalisée. « Le Biograph mMR permettra des avancées significatives dans le domaine de la médecine personnalisée et de la compréhension de maladies telles que celle d’Alzheimer », conclut Walter Märzendorfer. Une révolution technologique est donc en marche à la « Klinikum rechts der Isar ». Mais ce ne sera pas la première fois, en 177 années d’existence, que l’établissement se distingue par son esprit novateur.

Sebastian Webel

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Page 27: Pictures of the Future Siemens Printemps 2012

C’est en octobre 2011 que les deux premiers satellites de Galileo, le système européen

de navigation par satellite, ont été lancés depuis le Centre spatial de Kourou en Guyane. A la fois concurrent et complément du GPS (Global Positioning System), Galileo est un système de navigation civil développé par l’Agence spatiale européenne et financé par l’Union européenne. Il sera opérationnel dès 2014 avec au moins 18 satellites en orbite, mais la constellation finale comprendra 30 satellites orbitant à 23 200 km d’altitude et positionnés de sorte que tout utilisateur soit couvert en permanence par au moins huit satellites en tout point du globe, y compris aux pôles.

Les scientifiques et les ingénieurs de Siemens font partie de ceux qui ont participé à cette nouvelle technologie. A Siemens Space, à Vienne, ils sont chargés de vérifier le bon fonctionnement de l’un des principaux composants des satellites : les horloges atomiques à l’origine de la précision exceptionnelle du nouveau système. Et à Erlangen, la Division Mobility crée de nouveaux concepts permettant d’exploiter le signal Galileo à partir de technologies existantes, avec pour résultat des solutions entièrement novatrices pour le secteur des transports.

L’un des avantages majeurs de Galileo sera sa précision. Ses satellites sont en effet les premiers à embarquer des horloges ma-ser à hydrogène passif, qui ne divergent que d’une seconde en 3 millions d’années. C’est sur cette stabilité que repose l’ensemble du

système : à partir du signal horaire émis par le satellite, le récepteur situé sur terre compare sa propre heure à celle du satellite et calcule la distance qui les sépare. Le processus de localisation nécessite quatre satellites, trois pour obtenir les coordonnées dans l’espace et un quatrième pour corriger l’horloge du récepteur, qui n’est pas une horloge atomique. La position exacte des satellites étant connue, il suffit au récepteur de résoudre un simple système d’équations pour déterminer où il se trouve lui-même. « Un écart de 10 nanosecondes entraînerait un décalage de plusieurs mètres sur Terre », résume Hans Steiner, de Siemens Space.

Avec une précision d’un mètre, Galileo présente un intérêt énorme pour la Division Mobility, qui développe des applications fondées sur la navigation par satellite. Dans le domaine de la gestion du trafic, Galileo pourrait par exemple s’avérer particulièrement utile pour ajuster la durée des feux de circulation. A l’heure actuelle, on peut placer des boucles inductives sous la chaussée pour mesurer le trafic des différents axes et réguler automatiquement les feux aux intersections. En utilisant Galileo, le bus serait capable d’indiquer aux feux de signalisation les plus proches sa vitesse et sa position au mètre près. Ces feux pourraient alors rester verts assez longtemps pour laisser passer le bus, évitant ainsi un freinage inutile et une consommation supplémentaire de carburant.

Ce n’est que l’une des multiples applications actuellement étudiées dans deux centres d’essais Galileo situés en Allemagne : celui de Siemens à Wegberg-Wildenrath et celui d’Aldenhoven géré par l’Université d’Aix-la-Chapelle (RWTH). Les deux sites testent

des transmetteurs émettant un signal identique à celui de Galileo, afin d’essayer les équipements en conditions réelles. Au centre d’essais ferroviaire de Siemens à Wegberg-Wildenrath, les ingénieurs cherchent à utiliser les récepteurs Galileo pour optimiser la vitesse et la consommation énergétique des trains. Par exemple, les trains pourraient réguler leur vitesse pour tirer le meilleur parti possible du rayon de chaque virage et réduire au minimum les freinages en descente. A Aldenhoven, les projets se concentrent sur l’avenir des voitures électriques. La précision de Galileo permettrait aux conducteurs de ce type de véhicules de localiser exactement les stations de recharge dans leur rayon d’autonomie, et peut-être même de réserver une borne. « Une fois que Galileo sera opérationnel, de nombreuses autres applications verront le jour », se réjouit Dieter Geiger, de Siemens Mobility. D’après lui, Galileo pourrait bien marquer le début d’une nouvelle ère de la mobilité.

Helen Sedlmeier

Pictures of the Future | Système de navigation Galileo

Des services de navigation avec un mètre de précision ? Ce sera possible dès 2014 grâce au système européen de navigation par satellite Galileo. Siemens travaille aujourd’hui sur de premières applications, notamment pour les trains et les voitures électriques.

Le règne de la précision

Les 30 satellites Galileo rendront bientôt possible

de nouvelles applications dans le domaine de la

mobilité, depuis le repérage de la prochaine borne

de recharge électrique jusqu’à l’optimisation de la

vitesse d’un train en fonction du profil de la voie.

Pictures of the Future | Printemps 2012 27

« Un écart de 10 nanosecondes entraînerait un décalage de plusieurs mètres sur Terre. »

Page 28: Pictures of the Future Siemens Printemps 2012

Panorama30 Feu vert aux solutions

intelligentes de gestion de la circulation

A Houston, au Texas, les véhicules et les feux de signalisation aux intersections seront bientôt en mesure de communiquer entre eux en temps réel. Une technologie qui contribuera à fluidifier la circulation, répondre aux urgences, éviter les collisions et réduire la pollution sonore et environnementale.

33 Anticiper les intrusions Siemens développe des stratégies en réponse aux nouvelles menaces en provenance d’Internet.

34 Entreprise 2.0 Le Web 2.0 impose une nouvelle culture d’entreprise qui révolutionne les habitudes de travail. Quelle place occupe les médias sociaux dans les processus d’innovation au sein des entreprises ?

37 Générer plus d’énergie L’intelligence collective au service d’un rendement optimal et d’une usure minimale.

2030A l’approche d’une tempête sans précédent,

le service de gestion des urgences de la ville de

Houston mobilise des bataillons d’agents logiciels.

Passant au crible les systèmes d’information

des infrastructures de santé, de gestion du trafic,

d’électricité et d’évacuation des eaux usées,

ces agents s’assurent que toutes les installations

sont armées pour résister à l’ouragan. Grâce

à une image 3D interactive, le maire a sous les

yeux l’état de la ville en temps réel.

28 Pictures of the Future | Printemps 2012

Elle venait droit sur nous. Rose. Des centaines de kilomètres de cumulonimbus

tourbillonnants, des vents à plus de 300 km/h, une onde de tempête prévue à au moins sept mètres, et assez de pluie pour inonder la moitié de la ville de Houston.

Des satellites quadrillant l’Amérique du Nord avaient détecté une dépression tropicale dans la mer des Caraïbes une semaine auparavant. Les flux de données indiquaient une menace de plus en plus précise à mesure que la dépression avançait vers le nord, amassant humidité et puissance lors de son passage au-dessus des eaux chaudes du Golfe du Mexique.

Vingt-quatre heures avant que le moindre

nuage ne vienne assombrir le ciel bleu de Houston, le service de gestion des urgences (OEM) se préparait au pire. Sur les immenses écrans interactifs du centre, on pouvait voir la tempête s’approcher. En surimpression sur le panorama de Houston en temps réel, l’affichage des paramètres vitaux de la ville donnait à la salle des allures de service de soins intensifs surdimensionné.

Dès les premières prévisions, les agents logiciels de l’OEM avaient automatiquement lancé l’échange d’informations avec leurs homologues chargés des infrastructures, de la gestion du trafic à la production d’électricité, en passant par la santé, la sécurité et l’évacuation

Page 29: Pictures of the Future Siemens Printemps 2012

Intelligence Collective | Scenario 2030

Alors qu’une tempête géante s’approche des Etats-Unis, le service de gestion des urgences dresse pour le maire un tableau de la situation. Dans la salle interactive du service, tout ce qui se passe à Houston est représenté en temps réel, à un niveau de détail exceptionnel.

Quand la ville parle

Pictures of the Future | Printemps 2012 29

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30 Pictures of the Future | Printemps 2012

des eaux usées. Les agents – des entités autonomes, spécialisées et ultrasécurisées – se consacraient chacun à un domaine précis, tel que la surveillance des systèmes d’information de tous les hôpitaux de la ville. Leur mission : vérifier si les installations disposent des res-sources nécessaires, des groupes élec tro gènes aux réserves d’eau, organiser l’appro vi-sionnement des éléments manquants et signaler tout problème éventuel à la centrale de l’OEM.

« Et que font ces petits fouineurs, à l’heure où nous parlons ? », demanda le maire, Celeste D’Angelo, comme si elle savait pertinemment ce que je pensais des agents.

« Vous vous souvenez du système de gestion du trafic que nous avons mis en place il y a quelques années ? », lui demandai-je. « Ils l’ont passé au crible, intersection par intersection, pour s’assurer que tous les feux pourraient continuer à fonctionner pendant plusieurs jours en cas de coupure de courant. Et ils ont donné l’ordre de réparer ou remplacer toutes les batteries défaillantes. Nos véhicules de maintenance automatisés sont déjà à l’œuvre. Ils ont aussi contrôlé les systèmes de communication de tous les véhicules municipaux, de Dallas à Austin, des ambulances aux camions de pompiers, en passant par les voitures de police, les bus et les véhicules de service. Nous voulons être absolument certains qu’à chaque fois qu’un véhicule d’urgence arrivera à une intersection, le feu passera au vert. »

« Et que se passera-t-il si un fou a décidé de quitter la ville au dernier moment et grille un feu alors qu’un véhicule prioritaire traverse l’intersection ? », suggéra Celeste D’Angelo.

« Dans ce cas, un signal d’urgence serait envoyé au véhicule qui s’apprête à passer au feu rouge. Son moteur serait alors coupé automatiquement et le freinage serait déclenché suffisamment à l’avance pour que le véhicule s’arrête en douceur avant d’atteindre l’intersection. Si vous le permettez, nous allons activer ce système immédiatement. Le service juridique avait des doutes sur la légitimité de son utilisation, mais maintenant que l’état d’urgence a été déclaré… »

« Autorisation accordée », répondit le maire. Nous nous trouvions à l’intérieur de l’image 3D de l’OEM, où nous avions l’impression de voler au-dessus de la ville et à travers ses rues. Alors que l’œil du cyclone était encore à plus d’une centaine de kilomètres, le ciel commençait à s’assombrir et quelques éclairs zébraient déjà l’horizon.

« Comment planifiez-vous l’évacuation ? », demanda Celeste D’Angelo. « Tous les êtres humains et toutes les machines se trouvant à moins de 60 km des côtes ont reçu un message prioritaire », dis-je. « J’ai – je veux

dire, les agents ont – surveillé la diffusion du message sur tous les réseaux sociaux et les réseaux de machines. Nous estimons qu’il a été transmis à près de 99 % de la population et à 100 % des machines et systèmes susceptibles d’être affectés par l’ouragan. Les gens sont encouragés à quitter la ville dès que possible », ajoutai-je. « Ils peuvent emprunter les itinéraires suggérés par leur véhicule. Nous ne prévoyons pas d’embouteillages importants car toutes les intersections de la région sont mises en réseau. Si le trafic devient trop dense à certains endroits, des itinéraires de substitution seront envoyés en temps réel aux systèmes de navigation des véhicules. »

« Que font vos agents pour éviter l’inonda-tion ? », demanda le maire. « Premièrement, la demande en eau diminue rapidement à mesure que les habitants quittent la ville, ce qui maximise les capacités d’absorption du système d’évacuation des eaux usées », expliquai-je. « En outre, nous venons d’ouvrir certaines vannes et d’en fermer d’autres, ce qui nous permettra d’acheminer l’eau vers des zones ciblées. Nous estimons que cette mesure réduira le risque d’inondation de 76 %. »

« En ce qui concerne l’énergie », ajoutai-je, « la demande chute également en raison de l’évacuation de la ville. Nous estimons que dans moins de 4 heures, nous pourrons arrêter quelques-unes des centrales les plus anciennes. Les grands parcs éoliens offshore prendront le relais si nécessaire, et le surplus d’électricité qu’ils produiront pendant la tempête sera capturé dans des centres de stockage, transformé en hydrogène pour être utilisé plus tard, ou injecté dans les batteries des véhicules en stationnement à San Antonio et Austin. A l’heure où nous parlons, les agents logiciels de nos parcs éoliens communiquent avec leurs homologues du service météorologique national. Ils calculent le réglage optimal de l’angle et de la vitesse des hélices pour minimiser les dégâts et optimiser la production d’électricité. »

J’aurais pu continuer des heures. J’aurais pu lui indiquer la vitesse précise de chaque hélice dans chaque parc éolien, le nombre exact de places de stationnement libres dans chaque parking de la ville, le nombre de secouristes disponibles, heure par heure et secteur par secteur, dans tout le comté de Harris. Submergée par cette multitude d’informations, j’en oubliai presque de regarder le ciel, toujours plus sombre et menaçant. Je sentis le très léger vacillement du bâtiment lorsque la première bourrasque de Rose s’engouffra dans la ville.

« Vous m’impressionnez », reconnut le maire en me regardant avec curiosité. « Vous avez l’air tellement vivante. Est-ce possible que vous ne soyez que l’interface 3D de l’OEM ? »

Arthur F. Pease

Houston, Texas. Un ouragan approche. D’importantes inondations sont prévues

et la ville est évacuée. Pourtant, la circulation est fluide sous le ciel menaçant. De temps en temps, on voit passer à vive allure les lumières bleues et rouges d’une ambulance ou d’une voiture de police. Comme par magie, les feux de circulation passent au vert dès qu’un véhicule d’urgence s’en approche. Tout se déroule comme prévu. Personne ne veut revivre le cauchemar de 2008, un cauchemar prénommé Ike.

Peut-on évacuer l’une des principales agglomérations américaines aussi facilement que le laisse entendre ce scénario ? Le comté de Harris, un territoire de 4 500 km2 qui comprend Houston et sa région, se classe au troisième rang des comtés les plus peuplés des Etats-Unis, avec plus de 4 millions d’habitants. C’est ici qu’est mis en place un projet pilote qui pavera la route à une nouvelle gestion du trafic pour répondre non seulement aux situations d’urgence survenant dans le sud-est du Texas, mais aussi pour réguler la circulation toute l’année et dans tout le pays.

Ce projet exploite les technologies développées actuellement dans le cadre du programme IntelliDriveTM du Département des transports américain (DOT). Il s’agit d’un

Intelligence Collective | Gestion de la circulation

La ville de Houston installe actuellement un système permettant aux feux de circulation de communiquer en temps réel. Cette technologie, développée dans le cadre d’un programme pionnier lancé par le Département des transports américain (DOT), pourrait paver la route à de nouveaux services, grâce aux données transmises par les véhicules en vue d’optimiser les flux, de répondre aux urgences, d’éviter les collisions et de réduire la pollution sonore et environnementale.

Feu vert aux communications véhicule-infrastructure

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Pictures of the Future | Printemps 2012 31

Les ambulances pourront bénéficier d’un nouveau

système de gestion des feux de circulation

qui s’adaptera au nombre et à l’ordre de priorité

des véhicules s’approchant d’une intersection.

Intelligence Collective | Gestion de la circulation

La ville de Houston installe actuellement un système permettant aux feux de circulation de communiquer en temps réel. Cette technologie, développée dans le cadre d’un programme pionnier lancé par le Département des transports américain (DOT), pourrait paver la route à de nouveaux services, grâce aux données transmises par les véhicules en vue d’optimiser les flux, de répondre aux urgences, d’éviter les collisions et de réduire la pollution sonore et environnementale.

Feu vert aux communications véhicule-infrastructure

projet de recherche visant à mettre en réseau de façon sûre et interopérable tous les types de véhicules avec l’infrastructure de gestion de la circulation et les appareils mobiles. En tant que leader sur le marché américain de la gestion de la circulation, comptant parmi les princi-paux fournisseurs de l’industrie automobile mondiale, Siemens a un rôle majeur à jouer.

Au cours de la première phase de ce projet, déjà largement entamée, l’entité Intelligent Traffic Solutions (ITS) de la Division Mobility à Austin (au Texas) a équipé près de 400 intersections à travers le comté de Harris d’un système de commande simple et peu coûteux qui régule les feux de circulation grâce à un algorithme calculant à tout moment le nombre de véhicules à l’approche. Pour ce faire, ce système utilise un ordinateur opérant sous Linux, une antenne et une carte-lecteur sans fil permettant d’exploiter, dans le respect de l’anonymat, les adresses des smartphones situés dans les véhicules proches.

« Lors d’une étude, nous avons constaté que notre système pilote, installé à Houston dans les mêmes boîtiers que les lecteurs de cartes de péage, donnait à peu près les mêmes estimations du temps de trajet, mais à moindres frais », explique David

Miller, responsable de l’innovation chez ITS. « Seules quelques voitures transportant des smartphones en veille suffisent à donner des estimations très précises de la densité et de la vitesse du trafic. »

Ces données sont collectées via une application unique financée par le DOT et développée par la faculté de transport de l’Université Texas A&M, qui fonctionne avec un logiciel conçu par Siemens Corporate Technology à Princeton, dans le New Jersey. Les commandes de signaux Siemens disposées aux intersections à travers le comté traitent ces informations pour produire des estimations en temps réel extrêmement précises sur le nombre de véhicules et leur vitesse. Ces données sont alors transposées sur une carte routière, qui est consultable sur smartphone. Durant une évacuation, ce système permettra à chaque conducteur de choisir le trajet le plus rapide, préservant ainsi le carburant. La circulation sera alors mieux répartie et ne se concentrera plus sur les routes surchargées.

En outre, les commandes de signaux de Siemens dispersées dans le comté de Harris sont mises en réseau par fibre optique et reliées aux serveurs et logiciels Siemens du centre de gestion d’urgence Transtar, situé à Houston. « Poussée à l’extrême, cette

technologie pourrait optimiser la circulation dans toute la ville ou être adaptée à une situation d’urgence précise. C’est l’exemple type de ce que l’on appelle l’intelligence collective, c’est-à-dire l’agrégation d’une multitude de données destinée à produire des informations permettant de proposer de nouveaux services », explique Justinian Rosca, responsable de l’équipe en charge de l’intégration logicielle, à Princeton. Avec David Miller, il a déposé de nombreux brevets pour cette technologie.

Priorité aux premiers secours. La prochaine étape ? S’il reçoit les financements nécessaires, le comté de Harris prévoit d’équiper ses 2 000 véhicules de service (ambulances, voitures de police, camions de pompiers, bus) d’appareils GPS communiquant avec les nouvelles tech-nologies de commande aux intersections sur une fréquence standard. « L’une des leçons que nous avons tirées de l’ouragan Ike a été que les équipements de communication des différents districts de Houston n’étaient pas interopérables », explique David Miller. « Il est clair que des équipements interopérables permettraient d’améliorer la coordination générale de l’évacuation ». La récente adop-tion par la Commission fédérale américaine des communications de la norme 5,9 GHz pour les communications véhicule-véhicule ou véhicule-infrastructure, dans le cadre du programme IntelliDrive, est un premier pas.

Cette évolution connue sous le nom de Dedicated Short Range Communication (DSRC, pour communications spécialisées à courte portée) rendra possible la production d’appa-reils embarqués standard pour les véhicules d’urgence. « Cet équipement a un rayon d’ac-tion de plus de 400 mètres. Via DSRC, il peut envoyer sa localisation GPS à une application située dans une commande d’intersection et indiquer que le véhicule à l’approche doit être prioritaire », explique David Miller. « Cette application est capable de détecter la direc-tion et la vitesse, ce qui permet au signal de donner un feu vert quelle que soit la vitesse du véhicule. » Cette solution ne garantira pas seulement l’interopérabilité des véhicules de premiers secours et des infrastructures ; il devrait également faire baisser leur temps de trajet tout en réduisant le risque de collision aux intersections. Siemens déve loppe actuel-lement un appareil de ce type à des fins de recherches pour le DOT. S’il est agréé, il entrera dans la « liste des produits qualifiés » du DOT pour subir des tests et être commercialisé.

Prêt pour les technologies ITS. Quand on voit les dommages causés par l’ouragan Ike, il est facile de comprendre pourquoi Houston veut se préparer au mieux à la prochaine

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32 Pictures of the Future | Printemps 2012

Les échanges en temps réel entre les véhicules et

la signalisation amélioreront les flux et la sécurité,

tout en réduisant le bruit et la pollution.

situation d’urgence. Mais qu’est-ce qui a poussé le DOT à choisir le concept IntelliDrive ? « Depuis 60 ans, les Etats-Unis n’ont eu qu’un mot d’ordre : « Plus de routes », explique Christy Peebles, responsable de Siemens ITS à Austin. Aujourd’hui, il n’y a plus de place dans les villes et celles-ci doivent réduire le bruit, la pollution et l’insécurité. Tous les éléments sont rassemblés pour le succès des technologies ITS, et les Etats-Unis sont à la pointe ». Elle ajoute que les échanges d’informations véhicule-véhicule destinés à surveiller les distances de sécurité à l’avant et à l’arrière contribuent déjà à éviter les accidents dans les situations où le conducteur ne peut pas réagir assez rapidement. « Mais la pièce manquante du puzzle, c’est la communication véhicule-infrastructure. Elle peut réduire significativement les collisions aux intersections, fluidifier la circulation et optimiser la consommation de carburant. Les constructeurs automobiles sont très intéressés par cette technologie car ils estiment qu’elle créera une demande. Ils insistent auprès du Département des transports pour l’obtenir. »

Siemens est en excellente position pour satisfaire cette demande. Par exemple, lors d’un essai sur route réalisé en octobre 2009 dans la ville californienne de Palm Desert, Siemens (soutenu par les équipes de Corporate Technology de Princeton, dans le New Jersey, et de Vienne, en Autriche), ainsi que BMW et le Département californien des transports ont fait la démonstration d’un système DSRC totalement fonctionnel comprenant la commande de signaux aux intersections, le logiciel, l’équipement sans fil embarqué et le système d’affichage. En somme, toutes les technologies véhicule-infrastructure de Siemens. La commande compare en permanence la distance entre la BMW série 7 et les feux tricolores. « A l’approche de l’intersection, se souvient David Miller, nous voyions le compte à rebours du feu représenté sur le tableau de bord : « Je suis vert, mais dans 5, 4, 3, 2, 1 seconde(s), je serai rouge ». La minuterie du feu de

signalisation et la voiture communiquaient en temps réel, la voiture savait donc qu’elle ne pourrait pas passer le feu. Elle a donc éteint le moteur au meilleur moment pour économiser du carburant et a utilisé le système de récupération de l’énergie de freinage pour recharger les batteries. « Par ailleurs, ajoute David Miller, le feu contrôlait la température de l’habitacle. Comme il savait combien de temps l’attente durerait, il a pu régler ces systèmes très gourmands en énergie. Puis, deux secondes avant que le feu ne redevienne vert, il rallumait le moteur. »

Des feux communicants. Des feux de circulation qui ne font pas qu’échanger avec votre voiture, mais qui optimisent aussi ses fonctions ? Les technologies utilisées à Palm Desert diminuent de 15 % la consommation de carburant des véhicules BMW à transmission manuelle, qui éteignent automatiquement leur moteur au point mort.

Les avantages ne s’arrêtent pas là. Chaque année, des milliers de personnes sont tuées ou gravement blessées dans des collisions latérales, qui se produisent par exemple quand un conducteur ne respecte pas un feu rouge et va s’encastrer dans un autre véhicule. Si la communication intersection-véhicule devenait standard, de tels accidents disparaîtraient. « Si, par exemple un feu s’apprête à passer au rouge et qu’il détecte une voiture s’approchant à grande vitesse, les intersections intelligentes de demain auront deux choix », explique Christy Peebles. « Soit elles obligeront la voiture à s’arrêter, soit elles resteront au vert, comme pour un véhicule d’urgence, et laisseront passer le contrevenant. »

Cela rappelle Big Brother ? Peut-être. Mais, comme le souligne Christy Peebles : « C’est fantastique de pouvoir se dire que les enfants iront à l’école en sécurité. La gestion des feux de circulation n’est qu’une des nombreuses facettes d’IntelliDrive, que nous entendons soutenir grâce à la technologie Siemens ».

De même, cette techno logie, intégrée dans un réseau urbain, peut garantir une durée et une distance de trajet minimum aux véhicules de secours. Dans ce cas, le système véhicule-infrastructure connaîtra le trajet d’une ambulance, d’une voiture de police ou d’un camion de pompier et s’arrangera pour fluidifier la circulation avant leur passage. Pour Christy Peebles, cela est rassurant pour tous, « car de nombreux accidents sont liés aux véhicules d’urgence ».

Plus prosaïquement, ces technologies peuvent aussi aider les bus à être à l’heure. Si l’infrastructure sait qu’un bus est en retard, elle lui accordera plus de feux verts. Cela facilitera la vie des usagers. Mais l’un des intérêts majeurs de la technologie IntelliDrive est l’avantage qu’elle propose aux automobilistes. « Imaginons qu’il n’y ait pas de véhicules d’urgence à

proximité, que les bus soient à l’heure, et que vous soyez seul », explique David Miller. « Si votre véhicule est équipé du bon appareil, le feu passera au vert juste pour vous ! » Evidemment, cela est également valable pour les piétons et cyclistes portant un appareil compatible avec IntelliDrive. Ceux-ci deviendront détectables par les véhicules équipés du système IntelliDrive : un plus pour la sécurité. »

Où cela va-t-il nous mener ? « Je pense que tous ces changements se mettront en place rapidement », affirme David Miller. « Une fois que les appareils embarqués seront disponibles et que les conducteurs verront qu’ils peuvent faire passer le feu au vert, ce système décollera. Il rendra la conduite plus sûre pour tous. Il permettra de réaliser des économies de carburant. Et les mises à jour du logiciel pourront intégrer de nouveaux services comme la réservation de places de stationnement et une tarification variable selon les événements. »

Il prévoit également un effet sur les dynamiques de circulation. « Dès que les voitures pourront faire passer les feux au vert, elles commenceront à s’accumuler car de nombreux systèmes de navigation verront qu’un trajet est plus rapide qu’un autre. Cela se fera tout seul, car quand un feu détectera une masse de véhicules venant vers lui, il passera automatiquement au vert. Ce sont les premiers pas de la conduite automatisée. En d’autres termes, le système proposera aux voitures le trajet qu’il identifie comme le meilleur, les voitures suivront les instructions, et leur nombre influencera le comportement des feux. Finalement, vous pourrez lâcher le volant ! ». Avant que ce scénario ne devienne réalité, les technologies IntelliDrive auront déjà aidé les villes comme Houston à surmonter les ouragans en toute sécurité.

Arthur F. Pease

La communication véhicule- intersection pourrait réduire significativement les collisions.

« S’il détecte une masse de véhicules à l’approche, le feu passera automatiquement au vert. »

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Pictures of the Future | Printemps 2012 33

Intelligence Collective | Sécurité IT

Stuxnet a clairement révélé que les infrastructures industrielles n’étaient pas à l’abri des hackers. Siemens développe des stratégies en réponse aux nouvelles menaces en provenance d’Internet, notamment la mise à disposition plus rapide de mises à jour de sécurité.

Les sites industriels supervisés et commandés

à distance ne cessent de se multiplier. Or, plus

la conception des logiciels est ouverte et les

interfaces nombreuses, plus le risque

d’intrusion est élevé.

Le 15 juillet 2010, Siemens apprenait l’existence d’un nouveau virus informatique :

un cheval de Troie visant les ordinateurs Windows et s’activant uniquement en présence du logiciel d’automatisation Siemens Simatic. Une semaine plus tard, Siemens avait déjà développé un programme supprimant ce virus. Et début août, Microsoft avait réussi à corriger la vulnérabilité de son système d’exploitation Windows. A la fin de l’année 2010, 24 clients Siemens à travers le monde avaient rapporté la présence du cheval de Troie sur leurs systèmes. Ce dernier a pu être systématiquement éliminé sans impact sur les solutions d’automatisation concernées.

Néanmoins, les experts IT étaient en alerte. « Stuxnet est le tout premier virus conçu pour s’attaquer directement aux processus de production », commente Johann Fichtner, responsable de l’équipe Siemens CERT de cyber-sécurité, en charge de contrer les actions des hackers. De toute évidence, Stuxnet a été développé par de véritables professionnels qui y ont consacré un temps et des efforts considérables. Des rumeurs suggèrent même que ce virus avait pour seul objectif de détruire les centrifugeuses des installations d’enrichissement d’uranium de la centrale iranienne de Natanz. Rares sont ceux qui connaissent la vérité, mais cet incident a dévoilé l’éventualité de différentes menaces. Des programmes malveillants pourraient en effet paralyser entièrement des infrastructures en interrompant les processus des centrales électriques, des sites de production et des systèmes de gestion de la circulation.

Anticiper les intrusions

L’attaque de Stuxnet n’a pas réellement surpris Johann Fichtner dans la mesure où la probabilité de ce type d’incident est connue de longue date. De nombreux spécialistes espéraient malgré tout que les pare-feu entre les réseaux publics et internes bloqueraient toutes les agressions exploitant Internet. Cependant, Stuxnet se propage également via des clés USB infectées. « En théorie, des millions d’installations pourraient être menacées », précise Johann Fichtner. Les motivations des hackers sont multiples, de l’espionnage industriel au sabotage. Alors qu’il s’agisse de manipulation des données ou d’un virus, l’industrie doit être prête à faire face à toutes les menaces informatiques.

Accès aux données de production. Plusieurs tendances de l’automatisation industrielle font désormais le jeu des hackers. Tout d’abord, la stricte séparation entre le monde du bureau et le monde industriel, où machines et installations sont commandées par des programmes spécifiques, s’estompe peu à peu, tant sur le plan physique que logiciel. Ce phénomène est dû au fait que les opérateurs souhaitent superviser les sites à distance, tandis que les équipes opérationnelles exigent un accès aux données de production en vue de calculer les coûts en toute transparence, par exemple. Ainsi, de plus en plus d’infrastructures sont connectées à Internet et indirectement contrôlées par des systèmes d’exploitation de bureau. Les experts sont donc confrontés à un dilemme. « Les clients veulent que nous basions nos applications sur des normes ouvertes. Il nous

faut évidemment nous plier à leurs demandes », explique Georg Trummer, responsable de la sécurité IT chez Siemens Automation. « Mais cela nous expose aux problèmes de sécurité caractéristiques des PC. »

Une autre évolution laisse présager une augmentation du nombre d’attaques : les cyber-invasions sont de plus en plus ciblées. Autrefois, les virus agissaient au hasard. Les hackers visaient le plus grand nombre d’ordinateurs sur Internet en espérant atteindre une faille de sécurité. Aujourd’hui, les cyber-criminels ont recours à des méthodes plus sophistiquées. Ils envoient leurs programmes malveillants vers quelques ordinateurs gérant des fonctions critiques de sécurité, généralement à des fins d’espionnage industriel. Les virus ne sont donc pas détectés tout de suite et peuvent provoquer de lourds dommages avant d’être neutralisés par les antivirus.

Les systèmes informatiques de bureau et industriels fusionnent peu à peu, de manière irréversible. Malheureusement, la conscience des menaces et la mise en œuvre de mesures appropriées pour y parer ne progressent pas au même rythme. Après l’attaque de Stuxnet, les experts Siemens ont analysé les installations infectées, dont une en Asie de l’est. « Nous y avons identifié de nombreux autres virus », indique Georg Trummer. Les mesures de sécurité implémentées étaient donc insuffisantes. Les spécialistes ont également découvert une ligne téléphonique permettant d’accéder par simple appel à une installation critique. Certaines entreprises font même le choix de ne pas utiliser de mots de passe pour

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34 Pictures of the Future | Printemps 2012

contrôler l’accès informatique à leurs systèmes. « C’est une aberration ! », affirme Georg Trummer.

Etat d’alerte permanent. Siemens doit veiller à ce que tous ses collaborateurs soient en permanence conscients des aspects liés à la sécurité informatique. Le CERT a appris à des centaines de développeurs logiciels Siemens les principes de la programmation sécurisée afin de bannir les pratiques susceptibles d’ouvrir des brèches aux hackers. Les experts du CERT insistent sur une séparation catégorique du code et des données. Les hackers peuvent facilement supprimer les protections par mot de passe des logiciels dont la programmation manquerait par exemple de rigueur : tel est le type d’erreur que les formations CERT tentent d’éradiquer.

A présent, les éditeurs de logiciels fournissent régulièrement des mises à jour pour les services critiques tels que les systèmes de commande d’usine. Mais les opérateurs des sites industriels sont souvent réticents à les utiliser, craignant que les opérations ne soient perturbées. Aussi, parmi les nombreuses mises à jour Windows disponibles, seules quelques-unes sont installées sur les PC utilisés sur les sites industriels. Et bien souvent, elles ne sont téléchargées que des mois – voire des années – après leur sortie.

« Il nous faut trouver une solution garantissant l’application rapide des mises à jour de sécurité », commente Johann Fichtner. Parallèlement, les experts du CERT interviennent de plus en plus en tant que consultants au cours de la phase de développement logiciel et ne sont plus uniquement sollicités en cas de problème.

Les défis rencontrés par les spécialistes de la sécurité iront en s’amplifiant à mesure que se généraliseront les systèmes complexes en réseau tels que les « smart grids ». Et pour garantir l’efficacité des futurs réseaux électriques décentralisés, l’intelligence collective sera de mise. Mais cela suppose un certain degré de confiance de la part de toutes les personnes impliquées. De nouveaux risques pourraient également voir le jour. Un particulier disposant d’un panneau photovoltaïque sur sa toiture pourrait, par exemple, manipuler son compteur intelligent afin qu’il indique une valeur erronée de courant injecté dans le réseau. Empêcher ce type de fraude nécessiterait un système de détection intelligent. « Un réseau de distribution intelligent s’apparente à un organisme : il a besoin d’un système immunitaire. Après tout, le corps humain ne fait pas non plus aveuglément confiance à tout ce qui circule dans son sang », conclut Johann Fichtner.

Bernd Müller

Alistair Gammie, Senior Director en charge des solutions diagnostiques chez Siemens

à Swindon, au Royaume-Uni, s’apprête à conclure avec un client brésilien un contrat de plusieurs millions d’euros portant sur des laboratoires de diagnostic. Tout a commencé lorsque, en visitant un des laboratoires de ce client, Alistair Gammie a découvert un problème dans le système de lecture des codes-barres. Sur le moment, il ne dispose pas de la solution qui lui permettrait de remporter la commande – du moins, pas encore. Le soir

même, il décrit son problème sur le forum interne de l’entreprise. Le lendemain matin, Alistair Gammie découvre des e-mails envoyés par 23 collègues d’Allemagne, d’Inde et des Etats-Unis. Grâce à eux, il parvient à rédiger cinq propositions en seulement deux jours et remporte le contrat.

Pour accélérer les processus d’inno-vation, les entreprises doivent renforcer leurs capacités de mise en réseau. C’est pourquoi des géants des technologies de l’information comme Google, IBM, Apple

Les réseaux sociaux favorisent

la coopération au sein des équipes

internationales, en aidant les salariés

à surmonter la distance

et les différences culturelles.

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Pictures of the Future | Printemps 2012 35

Intelligence Collective | Media sociaux

Pour beaucoup, la vie sans Wikipédia, Amazon ou Facebook est devenue inenvisageable. Mais le Web 2.0 a aussi changé nos façons de travailler. Siemens utilise les médias sociaux pour accélérer l’innovation et les processus de résolution des problèmes.

Entreprise 2.0

et Microsoft ont misé sur les réseaux sociaux dès le début. Pour faire émerger de nouvelles idées, IBM organise par exemple des brainstormings en ligne impliquant des milliers de salariés dans le monde. Une étude menée par le cabinet de conseil McKinsey auprès de plus de 3 000 entreprises a montré que la plupart d’entre elles retiraient un avantage économique des médias sociaux et que pour 18 % d’entre elles, ce bénéfice se traduisait par une hausse du chiffre d’affaires.

Il y a cinq ans, Siemens est devenu l’une des premières entreprises du DAX à utiliser les outils du Web 2.0 en créant un wiki interne, des blogs de collaborateurs et des forums spécialisés qui ont accéléré le partage des connaissances. Le forum « Technoweb » de Siemens permet ainsi à tous les salariés, qu’ils soient développeurs ou adjoints administratifs, de poser des questions techniques complexes ou de demander une simple assistance opérationnelle. Ce forum, sur lequel 9 000 utilisateurs discutent de

sujets variés répartis en 850 thèmes, a ainsi accéléré les processus de travail.

La fonction « Demande urgente », qu’a utilisée Alistair Gammie, permet de demander de l’aide en un clic, au lieu de passer des bases de données et des moteurs de recherche au peigne fin ou de passer des heures au téléphone. La question est classée dans une catégorie ciblée, puis transmise par e-mail à tous les utilisateurs de Technoweb qui s’intéressent à ce domaine : un cercle beaucoup plus vaste que celui des contacts personnels. Il devient ainsi possible de faire appel à des experts travaillant dans les services les plus éloignés de l’entreprise.

Gestion des connaissances. « L’intelligence collective peut être utilisée efficacement à l’aide des médias sociaux, qui favorisent l’interaction entre les collaborateurs à l’échelle du Groupe », explique Manfred Langen, impliqué dans la gestion des connaissances chez Siemens depuis 12 ans. Les médias sociaux de l’entreprise ont également stimulé la capacité d’innovation. En 2010, Siemens a fait partie, pour la huitième fois depuis 2001, des finalistes du classement « The European Most Admired Knowledge Enterprises » et obtenu le prix du meilleur système de gestion des connaissances en Europe.

Une recherche et développement répartie dans le monde entier, des partenariats à court terme, des processus et des produits de plus

en plus complexes : autant de paramètres qui rendent indispensable le filtrage efficace des connaissances. Pourtant, les entreprises manquent souvent de méthodes intelligentes pour structurer les flux de données. Par exemple, comment trouver les experts les mieux placés pour résoudre un problème spécifique sans inonder les boîtes e-mail de tous les collaborateurs ? Siemens travaille sur un « Atlas des technologies » qui établit des liens sémantiques entre les termes et les technologies. Cependant, personne n’a pour

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36 Pictures of the Future | Printemps 2012

grâce au réseau wiki. Dans la wikisphère du Groupe, des équipes virtuelles rédigent des contributions communes et développent le glossaire de Siemens. Par ailleurs, 70 wikis spécifiques utilisés pour la résolution de problèmes au quotidien contribuent à améliorer les processus de travail, les produits et les services.

L’entité Metals & Mining dispose ainsi d’un wiki destiné aux équipes de maintenance, dans lequel sont répertoriées 220 mines et usines de laminage, de la Malaisie à la Bolivie. Grâce à un atlas en ligne, les ingénieurs peuvent obtenir des informations historiques, géographiques et techniques sur le site de leur choix. Ils ont également accès à des données actualisées – par exemple les noms des techniciens travaillant sur le site, les mesures, réparations ou conversions de logiciels déjà réalisées – et peuvent consulter des rapports, des photos et des graphiques.

Ce wiki fournit en outre des informations sur les démarches relatives aux visas et les itinéraires à privilégier : on y apprendra par exemple que telle mine d’argent bolivienne est située à environ 4 000 m d’altitude, et que le site est accessible par jeep privée via Calama, au Chili, ou par avion à hélices depuis La Paz. Des renseignements très précieux, car une entreprise est susceptible de perdre des millions si un site reste fermé pendant ne serait-ce que 24 heures.

Aujourd’hui, 20 % des entreprises aux Etats-Unis et en Europe utilisent des blogs, wikis ou autres forums, qui accélèrent considérablement les processus. Le maître mot : « Entreprise 2.0 » — une nouvelle culture d’entreprise qui révolutionne les habitudes de travail. « Dans dix ans, les médias sociaux auront complètement remplacé les e-mails », prédit Helmut Lehner, expert en communication.

D’après une étude de McKinsey, deux tiers des entreprises interrogées prévoient d’investir dans des outils liés aux médias sociaux car elles voient en l’entreprise 2.0 une promesse d’avantages concurrentiels. L’institut d’études de marché Forrester estime que l’investissement des entreprises dans les outils du Web 2.0 sera multiplié par dix d’ici 2013, pour atteindre 4,6 milliards de dollars. Le nouveau défi de ces entreprises : réussir l’intégration des médias sociaux dans leur stratégie. Pour Alistair Gammie en tout cas, le pari du Web 2.0 est déjà gagné.

Silke Weber

Les jeunes salariés, en particulier, sont très familiers des réseaux sociaux tels que Facebook ou Xing, sur lesquels ils ne discutent pas seulement de sujets privés : plus de 20 000 collaborateurs de Siemens évoquent sur ces réseaux des thèmes liés à l’entreprise. Il va de soi que des informations internes risquent d’être divulguées par ce biais, le moindre commentaire étant susceptible d’être lu par la communauté toute entière. Mais Siemens préfère s’en remettre au sens des responsabilités de ses salariés.

Quant à la blogosphère interne, elle permet aux salariés de discuter des thèmes actuels en temps réel, de partager leur expertise ou de créer leur propre blog. Quelque 6 000 collaborateurs livrent ainsi leur regard singulier à travers des blogs d’événements, de managers ou d’experts. « En véhiculant une culture de communication ouverte, les blogs peuvent mener à une meilleure perception des évolu-tions de l’entreprise et à davantage de par-tage des connaissances et des expériences »,

analyse Helmut Lehner, Community Manager de la blogosphère et de la wikisphère de Siemens. En outre, étant hébergés sur l’Intranet, ces réseaux sont moins exposés à la cybercriminalité et aux risques liés à la propriété intellectuelle.

Travailler dans la wikisphère. Les médias sociaux sont particulièrement utiles aux entreprises opérant à l’échelle mondiale : en plus de réduire les coûts de communication, ils favorisent la coopération au sein des équipes internationales et limitent les risques de projets redondants. Ainsi, si trois équipes géographiquement éloignées sont confrontées à des problèmes similaires, elles pourront rapidement s’en rendre compte

l’instant trouvé la solution idéale, pas même les entreprises spécialisées dans la génération automatique d’ontologies et la modélisation sémantique des flux d’information.

Open Innovation. Les communautés en ligne sont toutefois un outil éprouvé pour décloisonner les connaissances. Elles peuvent favoriser le développement de nouveaux produits et constituer ainsi un avantage concurrentiel. « Les médias sociaux sont importants pour accélérer la transition entre l’émergence des idées et leur mise sur le marché », estime Thomas Lackner, responsable de la stratégie Open Innovation chez Siemens. « La mise en commun des connaissances et des points de vue des différents collaborateurs joue un rôle essentiel en la matière. » Un des objectifs clés est l’utilisation stratégique de l’expertise non exploitée des salariés et des connaissances apportées par les partenaires externes.

C’est dans cette optique que l’entreprise organise des événements tels que le « Siemens Sustainability Idea Contest », une plateforme en ligne sur laquelle, pendant huit semaines,

les collaborateurs du monde entier ont pu soumettre leurs idées. Sur 850 propositions de produits durables et de concepts d’économie d’énergie, les meilleures ont été sélectionnées par la communauté via un système de notation par étoiles.

Bernhard Lang, chercheur chez Siemens en Russie, a remporté le concours grâce à son idée de « digue intelligente » — un système utilisant des capteurs pour prédire, au mètre près, la stabilité des digues. Cette innovation est actuellement testée à Eemshaven, aux Pays-Bas. D’autres idées sont en phase de préparation en vue d’une mise sur le marché : les questions liées aux brevets sont examinées, des stratégies et des business plans sont élaborés.

L’investissement des entreprises dans les outils du Web 2.0 devrait être multiplié par 10 d’ici 2013.

Par son concept de digues intelligentes, Bernhard Lang a su convaincre la communauté virtuelle de Siemens.

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Pictures of the Future | Printemps 2012 37

Dans les parcs offshore, les premières éoliennes

reçoivent plus de vent que les dernières et génèrent

des turbulences de plusieurs kilomètres qui

réduisent les performances des derniers rotors.

L’intelligence collective basée sur des modèles mathématiques coordonne parcs éoliens et turbines à gaz. Pour un rendement optimisé et un processus de vieillissement ralenti.

Générer plus d’énergie

Nous avons tous assisté à un concert sans rien voir à cause d’un géant assis

devant nous. Si les éoliennes avaient des sentiments, celles placées en dernière position d’un parc ressentiraient la même frustration. En effet, les premiers rotors, qui bénéficient d’un vent non altéré, génèrent plus d’énergie que les

derniers. Par ailleurs, les dernières turbines doivent faire face à des turbulences de plusieurs kilomètres de long produites par les premiers rotors, qui font fluctuer leur production. Si les premières turbines laissaient les dernières générer plus d’énergie, la production du parc tout entier s’en trouverait améliorée.

Dragan Obradovic, de Siemens Corporate Technology (CT) à Munich, travaille en étroite collaboration avec les ingénieurs de Siemens Wind Power pour transformer cette idée en un logiciel qui prévoit les effets du vent et le comportement du parc tout entier en quelques secondes et transmet immédiatement ses commandes aux turbines.

Intelligence Collective | Parcs éoliens intelligents

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38 Pictures of the Future | Printemps 2012

Le logiciel mesure la production, la vitesse des rotors, la température ainsi que d’autres facteurs. Chaque turbine est reliée par fibre optique à une unité de commande centrale qui coordonne tout le système et modifie par exemple l’angle des pales. « Tout le parc fonctionne donc comme un seul générateur doté d’une intelligence collective », explique Dragan Obradovic.

Siemens Wind Power à Brande, au Danemark, teste ce logiciel depuis deux ans dans la ferme éolienne de Lillgrund au large des côtes suédoises. « Nous sommes certains que le rendement augmentera de plusieurs pourcents », explique Henrik Stiesdal, responsable des technologies chez Siemens Wind Power. « Cela reviendra à recevoir une éolienne gratuite pour l’achat de 20 turbines ! », ajoute le Professeur Thomas Runkler, responsable de l’entité technologique mondiale « Intelligent Systems and Control », qui est à l’origine de l’algorithme.

Dragan Obradovic travaille déjà à une mise à jour de ses modèles mathématiques afin de prendre en compte le processus d’usure normale des turbines. Les turbulences qui naissent dans les flux éoliens créent des vibrations sur les pales et les mâts des dernières éoliennes, qui les font vieillir plus vite. « L’optimisation du rendement et le ralentissement du processus de vieillissement sont deux objectifs contradictoires », explique Dragan Obradovic, dont le logiciel permettra de concrétiser ces deux projets. Les données collectées alimentent les modèles mathématiques utilisés pour calculer les interactions entre les turbines. Si les rotors s’usent trop vite, leur rendement chute. On peut alors réduire le rendement des turbines situées à l’avant afin de ralentir les turbulences. Ici, il s’agit d’éviter aux éoliennes le même destin que James Dean : vivre vite et mourir jeune.

Dans les fermes éoliennes, la direction du vent influe sur la production des différentes turbines.

Des simulations permettent aux experts de déterminer la direction et la puissance des

turbulences. Les chercheurs de Siemens ont développé un logiciel qui utilise ces données

pour optimiser la production des parcs.

Des réseaux neuronaux pour les turbines. La commande des turbines à vapeur ou à gaz est encore plus complexe. Elles doivent produire une fréquence de courant alternatif constante grâce à une rotation continue. Si la consommation augmente ou si les parcs éoliens produisent moins lors d’un jour sans vent, les turbines à gaz doivent produire plus. Sans cela, la fréquence du courant variera. Des capteurs contrôlent certains facteurs comme la pression de l’air, la température des gaz d’échappement, les émissions et le comportement du réseau.

Volkmar Sterzing et ses collègues, qui font également partie de l’équipe du Professeur Runkler, ont développé des réseaux neuronaux artificiels qui utilisent ces données pour prédire les émissions des turbines en quelques secondes. Leur logiciel contrôle l’approvisionnement en carburant et vérifie que les turbines gardent un niveau de production optimal pour générer le moins d’émissions possible. Ces réseaux neuronaux apprennent en permanence de ces données et, avec le temps, optimisent l’exploitation de la turbine.

Dans quelques années, le logiciel sera prêt à l’exploitation. Dans la plus grande turbine à gaz du monde, à Irsching, en Bavière, 1 000 réseaux neuronaux contrôlent les composantes du système grâce à environ 5 000 points de mesure. « Cela mènera à une réduction visible des émissions, même durant les variations de charge causées par les parcs solaires et éoliens », explique Volkmar Sterzing. A l’avenir, de tels logiciels serviront également à uniformiser le processus de combustion. Ils allongeront la durée de vie des composantes des turbines.

Bernd Müller

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Pictures of the Future | Printemps 2012 39

Maîtriser la complexitéLes nouvelles technologies investissent notre vie quotidienne et simplifient un grand nombre de tâches dans de multiples domaines. Parallèlement, le monde se complexifie et il devient très difficile de comprendre comment les systèmes interagissent et comment il est possible de les gérer au mieux. Comment concevoir les logiciels de façon à assurer leur fiabilité, leur sécurité et leur stabilité ? Comment réorganiser l’infrastructure énergétique de pays tout entiers pour permettre à une multitude de petites unités de production d’énergie décentralisées, au rendement fluctuant, de compléter efficacement les grandes centrales assurant l’approvisionnement énergétique de base ? Comment organiser les villes du futur de façon à offrir à leurs habitants des infrastructures durables et efficaces, qu’il s’agisse de transport ou d’approvisionnement en eau ? Concevoir, mettre en œuvre et optimiser des systèmes aussi complexes : une difficulté majeure pour les chercheurs et les développeurs. Chez Siemens, des milliers d’ingénieurs s’y attèlent – qu’il s’agisse de concevoir des capteurs, des moteurs ou des outils de simulation, ou encore de programmer et d’optimiser des systèmes complets.

Vers une meilleure efficacitéTout produit, service ou processus peut voir son efficacité améliorée. Malgré les progrès réalisés ces dernières années dans l’amélioration du rendement énergétique, 50 % de l’énergie primaire en moyenne est encore dissipée sous forme de chaleur, que ce soit pendant sa production, sa transformation ou son transport. Une gestion intelligente des pertes de chaleur pourrait permettre d’éviter un cinquième des émissions mondiales de CO2. Un gaz à effet de serre qui pourrait par exemple être exploité à l’échelle commerciale dans la production de composés chimiques, de biocarburant ou de plastique biodégradable. Responsables de 40 % de la consommation énergétique mondiale, les bâtiments pourraient voir leur empreinte écologique réduite et même produire à leur tour de l’énergie. Dans le monde entier, les scientifiques de Siemens traquent les potentiels d’efficacité, par le biais de la recherche sur les matériaux, la simulation et l’optimisation, mais aussi la bio-ingénierie, la mise en réseau de capteurs et l’exploitation de la chaleur dissipée à basse température.

Mutations économiquesLe monde évolue de plus en plus vite. Dans les pays en développement et dans les pays émergents, une classe moyenne toujours plus nombreuse dispose désormais des ressources nécessaires pour satisfaire une envie croissante de consommer.

Ces régions deviennent des centres de production et d’innovation de plus en plus importants. En matière de création de valeur, on assiste à une complète redistribution des cartes à l’échelle mondiale. Certaines conceptions apparemment inébranlables sur les effets de la mondialisation dans les différentes régions du globe sont aujourd’hui remises en question.Comment envisager les réseaux logistiques de demain ? Comment faire travailler ensemble des sites de production répartis en différents endroits du globe ? L’exigence d’une croissance respectueuse de l’environnement est-elle compatible avec cette dynamique ? Autant de questions auxquelles les experts de Siemens tentent d’apporter des réponses durables en termes de productivité industrielle, de production d’énergie économe en ressources et d’infrastructures des villes, qui s’imposent de plus en plus comme les centres de décision de ce nouvel ordre économique mondial.

Pictures of the Future| Prochain numéro

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© 2012 par Siemens AG. Tous droits réservés.Siemens Aktiengesellschaft

PUBLICATION ORIGINALE :

Edité par : Siemens AGCorporate Communications (CC) et Corporate Technology (CT)Wittelsbacherplatz 2, 80333 Munich (Allemagne)Dr. Ulrich Eberl (CC), Arthur F. Pease (CT)[email protected] (tél : +49 89 636 33246)[email protected] (tél : +49 89 636 48824)

Comité de rédaction :Dr. Ulrich Eberl, rédacteur en chefArthur F. Pease, directeur de publication (édition anglaise)Florian Martini, direction de la rédactionSebastian Webel

Ont également participé à ce numéro : Dr. Hubertus Breuer, Urs Fitze, Anette Freise, Bernd Müller, Sabine Sauter, Tim Schröder, Helen Sedlmeier, Silke Weber

Edition graphique : Judith Egelhof, Irene Kern, Doreen Thomas,Manfred Viglahn, Publicis Publishing, MunichInternet (www.siemens.com/pof) : Volkmar DimpflInformations historiques : Dr. Frank Wittendorfer, Siemens Corporate ArchivesBases de données : Susan Süß, Publicis ErlangenDirecteur artistique / lithographie: Rigo Ratschke, Büro Seufferle, StuttgartIllustrations : Arnold Metzinger, Wolfram Gothe, Martin PeschkesInfographie : Jochen Haller, Büro Seufferle, Stuttgart

Crédits photographiques : L. Benevello (p. 2), Osram Sylvania (24 au centre), ESA/ P. Carril (27), US Department of Transportation/ ITS JPO (32), Vattenfall / Christian Steiness (37). Les droits de Copyright relatifs aux autres photographies appartiennent à Siemens AG.

Pictures of the Future, Biograph mMR, Soarian, etc. et d’autres dénominations sont des marques déposées par Siemens AG. Les autres dénominations commerciales et noms de produits mentionnés dans ce magazine peuvent être des marques déposées sur lesquelles les sociétés dépositaires ont un droit de propriété. Le matériel médical dont il est fait mention dans la présente publication n’est pas nécessairement disponible sur le marché aux Etats-Unis. Certains équipements sont en cours d’expérimentation ou en cours de développement, et doivent être autorisés ou contrôlés par la FDA (Agence fédérale américaine des produits alimentaires et médicamenteux). Leur future mise sur le marché aux Etats-Unis ne peut pas être garantie.

Le contenu éditorial des articles de cette publication ne reflète pas nécessairement l’opinion de l’éditeur. Ce magazine contient des visions du future dont l’exactitude ne peut en aucun cas être garantie par Siemens.

Pictures of the Future est une parution semestrielle.Toute reproduction totale ou partielle de cette publication nécessite l’autorisation du comité de rédaction. Cette obligation s’applique aussi à l’archivage dans des bases de données électroniques et à la publication sur Internet.

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Adaptation : Siemens SAS – Direction de la communication9, boulevard Finot – 93527 Saint-Denis Cedex 2Directeur de la publication : Christophe de MaistreCoordination : Valérie RasselTraduction : TiceroRéalisation : ComellinkImpression : GEERS Ce document est imprimé en Belgique sur un papiercertifié FSC attestant de la gestion durable des forêts.

www.siemens.fr ISSN : 1777-1439

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