707

Click here to load reader

Notions droit privé Demogue

Embed Size (px)

Citation preview

  • Les notionsfondamentales du droitpriv : essai critique,

    pour servird'introduction l'tude

    des obligations / par [...]

    Source gallica.bnf.fr / Bibliothque nationale de France

  • Demogue, Ren. Les notions fondamentales du droit priv : essai critique, pour servir d'introduction l'tude des obligations / par Ren Demogue,.... 1911.

    1/ Les contenus accessibles sur le site Gallica sont pour la plupart des reproductions numriques d'oeuvres tombes dans le domaine public provenant des collections de laBnF.Leur rutilisation s'inscrit dans le cadre de la loi n78-753 du 17 juillet 1978 : *La rutilisation non commerciale de ces contenus est libre et gratuite dans le respect de la lgislation en vigueur et notamment du maintien de la mention de source. *La rutilisation commerciale de ces contenus est payante et fait l'objet d'une licence. Est entendue par rutilisation commerciale la revente de contenus sous forme de produitslabors ou de fourniture de service.

    Cliquer ici pour accder aux tarifs et la licence

    2/ Les contenus de Gallica sont la proprit de la BnF au sens de l'article L.2112-1 du code gnral de la proprit des personnes publiques.

    3/ Quelques contenus sont soumis un rgime de rutilisation particulier. Il s'agit :

    *des reproductions de documents protgs par un droit d'auteur appartenant un tiers. Ces documents ne peuvent tre rutiliss, sauf dans le cadre de la copie prive, sansl'autorisation pralable du titulaire des droits. *des reproductions de documents conservs dans les bibliothques ou autres institutions partenaires. Ceux-ci sont signals par la mention Source gallica.BnF.fr / Bibliothquemunicipale de ... (ou autre partenaire). L'utilisateur est invit s'informer auprs de ces bibliothques de leurs conditions de rutilisation.

    4/ Gallica constitue une base de donnes, dont la BnF est le producteur, protge au sens des articles L341-1 et suivants du code de la proprit intellectuelle.

    5/ Les prsentes conditions d'utilisation des contenus de Gallica sont rgies par la loi franaise. En cas de rutilisation prvue dans un autre pays, il appartient chaque utilisateurde vrifier la conformit de son projet avec le droit de ce pays.

    6/ L'utilisateur s'engage respecter les prsentes conditions d'utilisation ainsi que la lgislation en vigueur, notamment en matire de proprit intellectuelle. En cas de nonrespect de ces dispositions, il est notamment passible d'une amende prvue par la loi du 17 juillet 1978.

    7/ Pour obtenir un document de Gallica en haute dfinition, contacter [email protected].

  • iLL

    NOTIONSFONllilMLES DUDROITPRIVESSAI CRITIQUE

  • m MSMisAurmm

    De la rparation oivile des dlits. Ouvrogo couronn pur la facultdo droit do Pfti'is ot l'Acadmie do lgislation de ..Toulouse, Paris,Arthur Uoussoau,ditoiuv 1898,

    Essai d'une thorie gnrale de la subrogation relle. Paris,: Piolion, diteur, 1904.Des droits ventuels. Hypothses o ils prennent naissance. Na*

    ture et effets, Paris, Mbralrio du Sirey, 1906,Des modifications aux contrats par volont unilatrale. Paris, Li-

    brairie du Siroy, 1007.Obligations et contrats spolaux. Etude do jurisprudence (Revue de

    droit oivit, do 1902h 1910),Rapport au Congrs pnitentiaire international de Budapest sur

    l'amende comme peine complmentaire. 1905,Rapport au Congrs pnitentiaire international de Washington

    sur l'application de la peine de mort en France, 1910,La nationalit et la dnationalisation des socits. Rapport au

    Congrsdes socits,Bruxelles, 1910,La criminalit ot la rpression en Champagne au XVII 0sicle,

    Hoims, 1910.

  • LES

    NotionsFoncjamentalesduDroitprivESSAI CRITIQUE

    Pour servir d'Introduction hPtude des Obligations,

    PAU

    REN DEMOGUEPltOPtiBSRUH A LA l'ACUMIJ DR DHOIT DK I,'UWVEH81TK DK MM.K

    PARISMUIMHUt: NOUVWXfc DB DBO.IT KT DIS. JtJHISPHtJDKNCk

    Arthur ROUSSEAURDITKim

    14, RUE SOUPPLOT RT RUE ToULLIRRT |3

    1011

  • En me chargeant, ds mon entre dans l'enseignementdos Facults d'tudier la jurisprudence sur les Obligationsdans la Revue dedroit cwlt los membres du Comit Piroo-tout' do cette lievue oni par la contribu me suggre!* lesrflexions dont est sorti co livre. Qu'ils me permettent deleur en faire hommage.

  • AVKHTISSKMBNT

    Ce livre n'est pas une tude do droit positif, tes principesgnraux qui dominont lo droit priv positif ont t tudisdans ces dernires annes par M. Pianioiet M, Gapitantdans despagesx(ui on rendent un nouvel examen pou utilo,,lo me suis surtout plac a un point de vue critique pourmontrer sans chorcheH en rien dissimuler les conflits et les(Contradictions qui sans Joute agiteront toujours le droitcivil et mon but serait atteint si je pouvais suggrer auxtudiants dj sortis des tudes lmentaires quelques r-lloxions faisant mieux pntrer le fond dos institutions,

    Ainsi on peut esprer prendre mieux conscience do latransformation qui s'opre sous nos yeux dans cette matire,eh apparence si lente a changer, dos Obligations, Elle peutse concevoir injoux si l'on se garde d'oublier que les imita"tions et los consquences provenant d'une mme cause assu-rent a toutes les productions d'une poque une certaineressemblance, un certain stylo. La mnie clart, la mriilgance ttvec cet horizon un pou limit qui se trouve dansl'art de Trinon ot la musique d Glttckso retrouvent dansles constructions juridiques et le stylo de potiiier. Pendantune partie du xiX' sicle, une dcoration raide et lourde a

    correspondu tout Untesprit juridique d'une nettet et d'uneforce trs rmarquabloi mais excluant avec une rigueurpeu commune ce qui ne rentrait pas directcadres. De nos jours, un art nouveau s'est fait une p|acodont l'idal est do produire un charme fait do la souplesse

  • VIII AVMVT188KMKNT

    do sos formes, de son emprunt aux ralits journalires poino stylisos, d'une adaptation aux besoins pratiques,fjorsquo lo rocul du tomps aura produit son oflot, une cor-laine muslquo mmo no paratra pas trop loigne de cesdonnes. Est-il tonnant quo toutes los productions do notre

    esprit fassent actuellement uno sorte do symphonie avocces donnes PNe tond-il pas a se former un art juridiqueplus souple dans ses thories, les constructions juridiquostrop rigides tant aujourd'hui assez critiques, un droit plusprs dos ralits pratiques, empruntant plus aux donnesdo l'conomie politique, voisinant plus avec la jurispru-dence qui, malgr dos erreurs possiblos, est la vie ot traduitinconsciemment les besoins pratiques les plus forts, C'estco quo nous avons cherch dgager, tout on nous effor-

    ant; au milieu do cos transformations, de ces stylos diversdu droit,de voir ou pouvait tre lo permanent qui correspondaux aspirations do notre esprit.

  • PRlSMI.Hic;PAli-lK

    NOTION ET BASES DU DROIT

    GliAHTfi PUKM1EH

    LA NOTION DE DROIT

    Sonitor.la profondeur doTublnjo n'estdonuo u personne, niais on l'ait preuved'un esprit bien superficiel, si on ne cde la tentation d'y plonger parfois lo 10*gnrd. fiiwVN, Dialogues philosophiques,p, VU.

    Avoir ou n'avoir pus toi droit est une ide qui rpond videm-ment a uno proccupation d'avenir. Celui qui se pose une qtios-tiou ce sujet se demaudo ce qui se passera, s'il fait ou ne l'aitpas telle chose et si, on ce cas, los vnements seront conformes ses intrts.

    A ce point de vue les droits dont on peut lui parler, los intrtsqu'il peut avoir se prsentent lui comme trs divers en degrs. Ilslui apparaissent comme tant d'une protection plus ou moins diffi-cile, Ainsi lofait d'tre propritaire d'un immeuble, d'un meubleapparat comme avantageux en ce que dans lo premier cas, il estmatriellement possible do se mettre en possession de ce bien,mme si los autres hommes ne le veulent pus, si le possesseur s'y

    1

  • lREMIKN l'AIVNK G|1|>ITHR .MlRNIRA

    oppose. On peut y pntrer do force et s'y installer, Lu propritd'un moublo est dj moins fconde on rsultats certains, car sion pout le cacher pour lo protger, il pout copondant tre vol etno plus tre retrouv. Au contraire lo droit'a'l'honneur est d'uneprotection moins saro, car on no peut empcher absolument unindividu d'tre diffam, on noie pout que de manire indiroctoet incomplte.

    Non seulement, los intrts no so valent pas quant ii la protec-tion prventive qu'on pout leur accorder, mais au point de vuedu titulaire ils ne so valent pas quant la rparation dont ilssont susceptibles. Certains intrts tant lss, on pout remettretout dans l'tat antrieur, si on a dmoli un mur, endommagun immeuble, co fait pout tre effac par un rtablissement directdo l'tat antrieur. Dans d'autres cas, on pout obtenir un quiva-lent plus ou moins complet : une somme d'argent peut quivaloiru pou prs,a la destruction d'un moublo, elle compense moinsbien la perte du tableau d'un mattro dcd, Au contraire, iln'y a pas d'indemnit qui puisse suffisamment .compenser laperte d'un membre, celle do la vie, ou des imputations calom-nieuses contre une personne.

    Les intrts sont donc ingalement susceptibles, d'tre protgssoit prventivement, soit par rparation. Tout homme qui consi-dre ces intrts voit donc que les uns sont plus fragiles que lesautres, parce qu'ils sont ingalement menacs d'entraves par desvnements contraires.

    Une seconde choso est aussi importante pour los intrts detoute personne : pouvoir compter sur quoique chose de durable,en ce qui concerne leur protection ou mme leur lsion. Les faits

    qui favorisent nos intrts ou leur nuisent ont une valeur pro-portionne au caractre durable de leurs effets. Un orage, unegrle qui dtruisent la rcolte d'une anne laissent l'espoir dercoltes futures, un retard dans un paiement, un prjudice causdans un cas o il y a responsabilit laissent au crancier l'espoird'une compensation obtenue h l'amiable ou judiciairement et

  • U NOTION DR DHOtt.j

    n'ont qu'une importance secondaire, Au contrairo si une contreest habituellement dvastepar la grle, les orages, s'il y a danstoi pays une maison de commerce solidement tablie qui parattdovoir garder longtemps sa cliontlo, s'il y a dos bandes do mal-faiteurs qui dvastent rgulirement telle rgion sans tre inqui-ts, si des fonctionnaires cherchent entraver tello catgoried'entreprises, h favoriser telle autre, ce sont des faits durablosqui ont une grande importance, Sans doute ils sont encore incer-tains, destructibles, susceptibles de changement dans quoiquemosuro: rien en ce monde n'est certain ot ternel. Los maisonsles plus rputes peuvent disparatre, les partis au pouvoir treronverss, los administrateurs peuvent tre remplacs pas d'autresd'un esprit diffrent, Il y a cependant des probabilits que, fautede mioux, on doit tenir pratiquement pour des certitudos.Parmices probabilits dont l'observation s'imposo, puisque d'olles d-pondent la sauvegarde des intrts ou los atteintes qu'ils subi-ront, figurent en premier lieu les lois naturelles, imparfaitementconnues, qui nous donnent cependant dos suppositions souventconformes a ce qui so passera. J'y ferai rentrer los lois du mondepsychologique bien que beaucoup plus incertaines, plus vagues.

    Parmi ces probabilits importantes connatre, il faut fairerentrer les actions des autorits organises et fortes. Comprenantdes groupes d'hommes, ces dernires sont plus puissantes quedes individus isols, plus susceptibles aussi de maintenir lesdcisions qu'elles ont prises, ou quo leurs agents et reprsentantsont pris on leur nom. Kilos ont donc h la fois la force et la conti-nuit.

    Los habitudes qu'elles ont prises ot auxquelles on no peut sesoustraire, sont importantes connatre pour la protection desintrts. Elles peuvent s'exprimer de diffrentes faons, tre unsimple usage, une coutume ou uno rgle qu'elles ont tabliespour l'avenir et qu'elles observent,

    Quand il y a ainsi un fait, une situation durable ot probable,qu'elle provienne d'une bande organise et puissante, d'un Elat>

  • 4 l'IlKMlfcllK PAUTIK.~ OUAPirUK UUSMIKU

    de la force ou de la rus, de la menace, du mauvais vouloir ou dela corruption des individus,il y a une certaine suite dans les v-nements qu'on no peut ngliger.

    C'est dans cette zone des faits qui pourront se produire, parcequ'il y a des probabilits fortes pour cela, que se trouve le droit,cette nation vague et fuyante que nous allons essayer de dter-miner au point de vue de l'observation, puis au point de vue del'idal.

    Nous nous placerons dans cet examen surtout un point dovue critique et sciemment nous montrerons les difficults danstoute leur ampleur et les ncessits des contradictions, nousloignant en cela d'un grand nombre d'autours, qui seplaant aupoint de vue de l'action, des ides forces, ont bti des thories quin'ont gure rsist un examen pntrant et se sont rapidementdmodes,

    Que faut-il entendre par droit au point do vue do l'observationseule ? Quand le droit oxisto-t-il ? Cela est droit qui est impospar une force organise contre laquelle il n'y a pus de recours,.Droit est pratiquement synonyme de fuit social impos au besoinpar lu -contrainte (I ). Quand un jugement rgulier en la forme,non susceptible de recours, dcide une chose, cela est droit demme quand une administration prend une dcision qu'on nepeut attaquer ou quo l'on a attaqu en vain. De mmo lorsqu'uneloi a dcid une chose, cette loi tant inattaquable dans nos idesfranaises, h la diffrence dos ides amricaines, ce qu'elle dcideest le droit, Voil la notion la plus simple et la plus raliste dudroit, colle quo nous donne l'observation,Elle limine dj du do-maine du droit les simples faits contre lesquels une force orga-nise suprieure pout nous prmunir ou qu'elle s'efforcera d'effa-cor directement ou par quivalent, Quand un individu assassine

    (I) Cf. Picard, Le droit purt p. 40. Connue lo dit exactement M. Sehttlz,tMndividualisine Ceonomii/ue et social^ p, 1118;.li\ o II n'y u pus do force, iln'y'a.pUH de droit. V. lo moine. StuuH Mill. t/tilitarismet !)' d., ehup. V,p. KM-lul.

  • T,A NOTION l)K DROIT )

    au coin d'un bois, ft-il affili une bande organise, une

  • 6 PREMIERE PARTIE. CHAPITRE PREMIER

    droit, puisque celui-ci sans la force n'est pas le droit, au point devue pratique auquel nous nous plaons exclusivement pour l'ins-tant (1).

    De mme dans les rapports internationaux, cela est droit quiest soutenu par une force organise, non seulement la force desarmes, mais cette force indirecte et finalement puissante rsul-tant do pressions morales : sous forme d'observations, de protes-tations, actes diplomatiques plus ou moins solennels derrirelesquels on voit luire l'clair des baonnettes ou poindre los coa-litions (2).

    Bien entendu il n'est pas ncessaire,pour qu'une prtention soitqualifie droit, que la contrainte se soit en fait exerce. Il suffitqu'il y ait possibilit de cette contrainte si on en avait besoinpour raliser sa prtention (3). D'ailleurs, comme le remarque trsjustement Korkounov (4), l'ordre juridique est d'autant plus nor-mal que la contrainte s'exerce plus rarement. Et au fond, l'usagerpt de la contrainte est souvent une preuve de faiblosso pour,,celui qui l'emploie (b), et il arrive un moment o le droit ne peutplus se maintenir s'il n'est ratifi par l'accord desconsciences(6),

    (1) Ainsi no pouvant l'alro quo eo qui est juste fut fort, on u fuit quece qui est fort fol juste a dit Pascal (Penses, ed, Hrunscliwigg, fragm,208).

    (2) Cf. lliering, /week im tleeht, trait. Moulonuore, p. 217, Nous jugeonsmmo iniililo do compliquer on disant quo lu forco qui contraint doit trel'Etat. Pourquoi obscurcir une notion si dlfllclle i\ oclalrcir, lo droit, del'ide'd'Etat si complexe. V>eontr, Picard, le droit pur, p. 41 et p. 44.

    (3) Nous nous refusons donc do reconnatre avec Berolzheimer (llechtsundWirtscha/ls philosophie, IV, p. DO) lu contrainte comme quelque chosedo puroment extrieur au droit, V. dans lsons do cet auteur, Tanon, op.cil,, p.. 140.

    (4) Thorie gnrale du droit, p, 107. Lu dellnitlon du droit, comme normeeoercltlvo.

    (5) Les supplices'sont une prouve do faiblesse des gouvernements, djdit J.-J. Uotisseau. Cf, liindlng Norinon, p, 403, qui parle do l'unlngonlsinocontenu dans lu violence employe pour protgor lu droit, On peut esprer quela contrainte deviendra plus raie, M, Picard pense mme qu'elle dispara-tra, ce qui est douteux. V. Droit pur, p, 433.

    (0) Cf. Bougie, Solidarisme, p. 4b, Tanon, L'volution du droit et laconscience sociale, p. 147.

  • LA NOTION DE DROIT .7

    Bien entendu aussi la contrainte qui peut s'exercer peut trenon -seulement physique, mais encore morale. Celle-ci n'tantd'ailleurs souvent quo l'avant-coureur de celle l et dmontrantqu'en cas d'inexcution un inconvnient invitable d'une sortoou d'une autre se produira.

    Kn un sens, la force du droit est plus grande dans les civilisa-tions avanceso on a besoin de moins de contrainte physique.Mais alors, le droit n'est plus l'objet du mmo culte religieux. Onl'apprcie d'aprs la valeur do son. contenu (1). D'autre part lacontrainte tant plus ncessaire lorsque les gens n'ont pas cons-ciencedo leurs intrts (2), elle est moins employe lorsque les genssont plus clairs.

    Il faut cependant encore nous expliquer sur un autre pointpour donner une vue complte. D'aprs M. llauriott (3), il n'estpoint vrai quo la force et lo droit soient la mme chose,parce quedans le droit il y a un lment sacrificiel qui procde du mondede l'esprit. Il n'est donc pas vrai quo la force engendre le droit,mais il est vrai cependant que souvent ce sont les mmes organi-sations qui, engendres pur la forco pure, sont ensuite instituespar l'esprit et deviennent juridiques, 11n'y a donc point identitde nature entre la force et le droit, niais il y a succession histori-que d'une situation juridique une situation do fait dans le mmoobjet .

    Cotte succession do l'lut de droit l'tat de fait, en uncertain sens, correspond une apparence plutt qu' la ralit, un point do vue subjectif plutt qu'objectif. Quand un acte deforce so produit dans de telles circonslances cjul'on pourra ragircontre lui, cela est fait durable, cela est droit pour employerl'expression quo nous avons adopte *.il n'est donc pas ncessaireque ce fuit ait dj une certuine dure dans le pass. Mais s'il enest ainsi objectivement, une force-n'apparatra subjectivementcomme invincible qu' la suite de circonstances spciales, de ton*

    il) V. Tanon, Hwlittion du droit, p. 184...(2) V. llierlng, /week tin Hecht,p. 374.'(!!) La'science soeiale traditionnellet p. tlo,

  • 8.

    "'

    PREMIERE PARTIE. CHAPITRE PREMIER

    tatives infructueuses pour la combaltro, de la terrour qu'elle aurainspire et qui so sera propage, C'est on gnral l'usage qu'uneforce apparat comme un fait avec lequel on doit dfinitivementcompter ; et par suite c'esl au bout d'un certain temps seulementque ce caractre lui sera reconnu. Le droit a donc presque tou-jours pour lui une certaine anciennot quand on le reconnat toi.D'ailleurs souvent avec le tomps les oppositions qu'il rencontraits'motissent, sans compter los courtisans qui se multiplient, et fontla thorie, proposent la justification de ce qui a t fait. Tout gou-vernement a trouv do prtondus philosophes pour lgitimer toussesactes, mme les plus abominables.

    Les ides quo nous dfendons ici se trouvent d'ailleurs pouvoirs'abriter de la haute autorit d'ihering (1). Le droit, dit-il,existe pour se raliser, La ralisation est la vie et la ralit dudroit ; elle est le droit lui-mme, Ce qui no passe point dans laralit, ce qui n'existo quo dans les lois et sur lo papier n'estqu'un fantme de droit, ce ne sont que des mots, Au contraire,ce qui se ralise comme droit est droit, mme lorsqu'on no leretrouve pas dans los lois et quo lo peuple et la science n'en ontpas encore acquis la conscience (2).

    Ces constatations uniquement empruntes l'observation nousprsentent le droit d'une faon un peu diffrente do la manirehabituelle. Obissant aux tendances de notre esprit qui inclineaux catgories simples, aux frontires bien marques, qui chercheinconsciemment la scurit avec une force sur laquelle nousreviendrons, on so reprsente volontiers deux camps bien distincts,o viendraient so classer les actes conformes au droit et les actescontraires au droit, sauf hsiter ensuite beaucoup pour savoirdans quel camp tel ou tel acto peut so ranger et aboutir finale-ment des incertitudes.

    (1) isprit du droit romain, t, III, p. 18,(2>V. do moine, 1,1, p. 30 et sulv. lliorlng ajoute toutefois pctil-lro

    dans cette dernire.phrase un embryon do notion subjective on disant quele droit doit se raliser comme droit.

  • liA NOTION DE DOOIT 0

    Si nous nous contontons d'observer les faits, si nous cherchonsmoins h suivre purement et simplement les tendances de notre

    esprit qu' prsenter quelque chose de plus objectif( nous prou-vons des impressions tout autres. Les faits rels ou possiblesnous apparaissent comme so rangeant d'une ligne ininterrompueentre doux extrmes : lo droit et le non droit. Ils so rapproche-ront d'autant plus do la borne finale : non droit que los forces

    organises se ligueront plus contre otix pour les empcher, onarrter ou en dtruire les effets, Ils se grouperont d'autant plusprs autour de l'tendard du droit qu'ils rencontreront de la partdes forcos organises moins d'obstacles, plus do facilits leurexcution, par suite moins de possibilit de rsistance indivi-duelle, et que ces forces organises seront diriges par des volon-ts plus stables, capables de plus de suite, de persvrance dansles conceptions, capables aussi d'en assurer plus longtemps l'ex-cution.

    Los faits nous amnent ainsi constater que ces deux extr-mes : lo droit et le non droit, ont presque moins d'importance nu

    point de vue du nombre des actes qui y correspondent directe-ment que les situations intermdiaires (I). Car les autorits quiprotgent tel ou tel intrt peuvent changer do conceptions ; quola loi ou la coutume se 'modifie,' il en rsultera une atteinte l'in-trt de celui qui avait un droit, moins que son acte no soitdans ceux qui seront hors dos coups de la loi nouvelle, C'est cequi fait que lo droit est toujours quelque peu fragile polir les actes longue porto s droit de proprit, fondations, socits longueexistence, etc., il l'est moins pour les actes dont les consquencesdoivent durer peu et qui peine ns disparaissent dans le passde faon coinplto : car ce moment le droit se maintient parune puissante force d'inertie. Devant l'impossibilit de rviser

    (I) Pascal a certainement exagr lorsqu'il a dit : La force est trs rocon*nttissublo'et sans dispute, Elle l'est seulement dans une largo mesure,mais celle-ci est sufllsonto pour la vie pratique, qui se contente do proba-bilits, faute do mieux.

  • fO PREMIERE PARTIE. CHAPITRE PREMIER

    tous les actes passs, le trouble qui en rsulterait* la difficultqu'on rencontrerait, les forcesorganises s'arrtent, en employantdes expressions multiples, en parlant de prescriptions, de fins denon-recovoir diverses. Les forces organises qui no tolrent pasun fait nouveau d'un genre dtermin acceptent ainsi qu'un faitsemblable ait eu lieu dans le pass, sans chercher le dtruire. Ilen a toujours t ainsi, sauf de trs rares exceptions : dos poquesnettement rvolutionnaires, Et ainsi la force deschoses,ou pluttla disproportion de l'effort au rsultat obtenu est le plus fermesoutien de la non-rtroactivit des lois.

    Nousvenonsd'exposerqu'il y avait un droit en notre faveur lors-que notro intrt avait reu d'une force organise, d'une autoritconstitue si l'on prfre, une armature pour la protger et surlaquelle elle pouvuit compter do faon durable,

    Korce et dure en vue de satisfaire notro intrt, voil donc loslments principaux quo l'on dcouvre dans le droit positif parl'observation.Sans doute celte analyse du droit s'loigne un.pou de colle qu'on en donno volontiers en se contentant d'analy-ser sesdiverses sources : lois, rglements, coutume, etc. Mais onest oblig de constater qu'elle est la seule pratique. Un droitn'existe pleinement quo s'il peut tre ramen excution,et dansla mesure o il le peut. Une crance qui ne sera jamais suscoptibiod'tro paye et dont on no pourra tirer aucun autre avantage parcession, compensation, etc., si elle est un droit, ne reprsente pra-tiquement rien. Pour l'homme d'affaires, l'homme de bons sens,un droit dans ces conditions, ce n'est rien, d'autant plus que lepoint de vue juridique n'est pas une invention de l'esprit pour sasatisfaction thorique, destin procurer des satisfactions pla-toniques comme une belle panse, ou une remarque ingnieuse,mais quelque chose d'tabli pour un but pratique. Un droit quine rpondrait pas en fait l'intrt qu'il doit satisfaire, c'estdonc une sorte d'arme rouille qui ne peut tre d'aucun usage,Ce n'est que l'ombre d'un droit (I) Nous nous rservons seule*

    (t) Nousvoyouspour celaquo M, Uunan( Principesmorauxdu droit,

  • LA NOTION DE DROIV H

    ment d'attnuer un peu cetto formule par la suite, on. montrant

    quo ce droit sans porte pratique et directe pour son titulaire,quand il se heurte un adversaire dcid, n'est cependant passans une influence pratique tantt loigne, tantt rapproche,parune sorte de respect mystique ou irraisonn dont il est entour et

    qui lui donne une force morale importante. Mais alors ce n'est

    plus une force dirocto qu'il possde, c'est une sorte do force psy-chologique non mesurable.

    Ce point do vue sur lequel nous reviendrons tant mis part,il rsulte de l'observation mme de la vie essentiellement chan-

    geante, qu'un intrt revtu d'une armature de droit tellementforte que sa ralisation soit certaine, est extrmement rare, qu'undroit ne se prsente qu'avec des probabilits plus ou moins gran-des de ralisation pratique, sa force n'est jamais absolue, maissimplement relative. Mais dans nombre de cas cette valeur relativeest suffisante pour que l'on puisse faire suffisamment fonds surelle dans ta vie courante.

    On pensera peut-tre que le droit, cotte forco durable en puis-sance, a ainsi des limites assez vagues. Cela est exact. Lu clartdes notions est plus un besoin de l'esprit affam de scurit qu'unetraduction do lu ralit complexe des choses.

    D'ailleurs, nous sommes obligs de constater que tes usages dela vie des affaires, les notions techniques mme peuvent par cor'tains cts rentrer dans le droit, grce la notion de faute et auxconsquences juridiques que la loi attache la faute, Je suis oufaute si je ne prends pas dans mon chantier les prcautions qu'ilest d'usage de prendre,si je ne me munis pas d'appareils de secoursqui sont dj employs depuis quelques annes, Je suis en faute sije ne suis pus los usages des affaires, si je ne prviens telle personne

    Jlev.de mtaphjis., 1001,p, 700)vu trop pou loin quant, h l'exemple do Leib-nilz, il qualifie seulement la droit, do puissance morale, de pouvoir Idald'agir, d'Ide qui veut trouver sa ralisation dans les faits, Il exagre cequ'il tiro de cotte ide juste : que la philosophie empirique ne peut solution-ner le problme du droit,

  • 12 PREMIERE PARTIE, CHAPITRE PREMIER

    quand on a l'habitude de le faire en pareil cas, Le droit .s'arrteseulement s'il y a usago mal tabli ou simplo usage mondain.

    Nous faisons ainsi rentrer le droit dans une certaine impr-cision, Mais cela n'est pas pour nous effrayer, La ncessit du

    raisonnement logique ou de l'enseignement ont une tendance

    nous faire prsenter des limites anguleuses aux diverses notions.Mais dans aucun ordre d'tudes,il ne faut oublier le fameux : mtttra non procedit per mltus.W y a une srie de nuances do l'esse aunon esse. Le droit n'a aucun profond foss de sparation autourde lui (1). La force de l'opinion, force inorganise au sons exactdu mot, mais suggre, conduite, est dj une force demiorgani-so dont l'homme d'affaires doit se proccuper dans une certaino

    mesure. Il y a transition insensible des caractres du droit leurabsence (2), depuis la contrainte d'Etat, la contrainte corporativeou la contrainte familiale, jusqu' l'influence de quelques pen-seurs isols (3).

    En tous cas nous vitons par cet expos do prsenter le droitcomme susceptible d'tre vaincu, il peut tre viol, mais pour se

    redresser aussitt ou peu aprs, et cela nous semble prfrable des hymnes sur la beaut du Droit suivis de lamentations sur

    ses dfaites. Si celui-ci est envisag pratiquement, voil quidonne une faible ide de son utilit (4),

    Le droit dont la ralit nous donne la notion,couvredonc indiff-remment les actes les plus justes et les meilleurs comme les plus in-

    justes, l'abolition do l'esclavage comme tous les meurtres lgaux,toutes les spoliations lgales, et nous n'arrivons pas des cons-

    ul) Ainsi les obligations morales, les usages dont lo droit disciplinaireassure lo respect, les actes louables que des dcorations rcompensent,touchent A la situation Intermdiaire entre le droit et le non droit. Onpourrait y ajouter les obligations naturelles, les ler/es imperfeolae.

    (2) Ou rapprochera los idos diffrentes do Koikounov, p. 103 et siilv.dont los objections contre la contrainto no s'appliquent pas notro systi'ine d'observation.

    (3) Cf, Uno ide analogue ! Korkounov, op. cit., p. 80.(4) V, not, contra'. Picard, Droit pur, p. 4b\

  • LA NOTION DE DROIT 13

    tatations loignes do colles de itobbcs dans le Loviathan, cette

    diffrence que nous n'exigeons pas ces constatations en tho-

    rie que nous approuvons (1).Do cette notion exprimentale si triste, sauf ceux qui en ont

    profit ou esprent en profiter, jamais les esprits n'ont pu se con-tenter, ils ont presque toujours fait appel un droit suprieur,idal, la non scripla sedlala kxkh Loi suprieure aux lois (2),

    Cotte loi suprieure idale, quelle est-elle? Est-ce la morale?

    Non, mais c'en est un chapitre.Ce n'est pas la morale, Il n'est pas besoin do rpter ici ces

    explications devenues banales sur la distinction du droit et dela morale et deJaire observer que le droit et la moralene sont

    pus une seule et mme chose, n'ont pas un domaine galementtendu.

    Mais il faut constater que le droit est la partie do la morale

    qui parait prsenter une importance telle que les forces sociales,organises oit non, doivent se proposer pour but d'en assurer l'ap-plication (3),

    (i) Cf. des ides analogues dans -Danton, De la nature des choses, p. 28!).Aussi dirions-nous assez volontiers avec lierlng, mais nous plaant seule*ment au point do vtio positif : lo droit est lu politique do lu force, c'ost-i\-diro d'une organisation puissante, presbyte et instruite pur l'exprience(elle par 810111111101',ttichtitje Iteoht* p. 28).

    (2) V. dans Iteudaul, Le droit individuel et l'h'tat, p. 21)l\ 32, l'indicationdos auteurs de l'antiquit et dos temps modernes qui ont mis cette Idedepuis Sopboclo et Platon.

    (3) V. on ce sons, Ilettussire,7V/M//H's du droit, p. 0*3. V. cop. Moguln,La renie du droit, p. 103. Cf. tzoulet, La cit moderne, p. 4u6 5 (iour-colles-Seneuil, Prparation U l'tude du droit, p. 203 et 432, V, unuutro systme dans Hauriou, Science sociale traditionnelle, p. 18l), Cf..eu noire sons, .lolliuolc, Sooialistische liedeulung dos llechls, p, U2, et Char*inou, La renaissance du droit naturel, p. 123. Contrit', Tanon, vo-lution du droit, p. 140, qui voit lu euruclrlsliquo du droit dans lo proces-sus pour sa formation connue rgie do/co.iidul.lu : coutume ou loi. Ceci nonous semble pus dlsllnfluer la coului'ie !o lu morale. Korkounov (Thoriegnrale du droit, p. 1)2)dfend une '"'Si* thorie : la morolo aurait pourbut l'apprciation des intrts et le droit lu dlimitation dec.es mmesintrts (luisant surtout apparatre dans le droit ce grand ressort do scu-

  • 14 PREMIRE PAtVtlE. CHAPITRE PREMIER

    Il peut y avoir des rgles morales dont l'application par laforce ne soit pas susceptible d'tre rclame, ou n'apparaisse paspour une raison quelconque devoir tre rclame. On n'a jamaissong imposer par la force, du moins en thse gnrale, d'trebon, aimable, de n'tre pas paresseux, de n'tre pas monteur, etc.

    Mais il y a une partie des rgles morales qu'il apparat nces-saire d'imposer par la force (l). Ainsi les lgislations ont crudevoir, en thse gnrale, punir lo vol ou le viol, ou le meurtre.Il nous semble incontestable, presque naf, ddire que ce sont desraisons d'utilit seule (en donnant ce mot son sens relatif dofinalit) qui permettent de raliser une partie de la morale parla violence et par la ruse, par cet outillage complexe qui assurela mise en oeuvre du droit (2). Qui dit morale, dit plutt obliga-tion du for intrieur j qui dit droit, obligation du for extrieur.Et cette puissance donne la rgle morale ne peut s'expliquerquo par un but poursuivi, une utilit, une finalit poursuivie ;un certain aspect que l'on veut donner la socit, un certainordre qu'on veut y inottre, On peut donc dire quo c'est pour uneraison d'utilit, de finalit si l'on prfre, qu'une partie de lamorale est excutoire (3). Mais cela ne fait que nous rapprocherdes difficults les plus importantes,rite qui a tant d'Importance), s'il veut parler du droit positif, constater unfuit, c'est exact, mais s'il veut fixer un idal, ce qui est son objectif, celledlimitation so fera ncessairement suivant une apprciation. Mus loin 11reconnat qu'il on est ainsi, mais il se refuse cependant h ramener lo droit lu morale, certaines do ses rgles ayant prcisment pour but d'assurer cbucun la libert de ses convictions morales, mais on pout rpondre i\cela quo, dans cetto situation d'opinions disparates, la morale, thorieplus simple qu'on no lo croit en gnral (v. plus loin), ordonne prcismentqu'il on soit ainsi. Cf. sur les rapports du dreit et do la moraledes ide voisines des ntres dans liorolzhelmor, op. cit., IV, p, 140, et It,p. 28.

    (1) Il est d'ailleurs difficile de dterminer o s'arrte la liste do ces rglesquo l'on doit imposer par contrainte. V. Picard, Droit pur, p. 301. ,,

    (2) Nous prenons ainsi lo mot d'utilit pour dsigner simplement unerelation, une concordance. C'est ainsi que lioudant analysait djii trs exac-tement ce terme, Le droit individuel et l'Etat, p, 170,

    (3) J'emploie Ici celle expression do droit idal, sans vouloir tien prjuger

  • LA fcOtlON DE hltOIt 15

    Il s'agit do savoir quoi est lo fondement qu'il convient de don-ner.au droit idal (dans la mesure o on peut le fixer) (1), ou sil'on prfre, la morale socialement excutoire,otde savoir quelleest la raison pour laquelle ce droit idal doit exister et pourquoitout ne doit pas rester dans le domaine de la morale pure.

    Tranchons d'abord ce second point qui est le plus facile. Dumoment quo l'on admet que l'existence de socits organises estun fait d'exprience do tous les temps et quo l'existence de forcessociales coordonnes est en quelque sorte fatale, qu'on ne peut pr-voir qu'elle disparaisse autrement que dans des instants d'anar-

    chie, il faut s'incliner devant ces ncessits videntes nes ducontact des hommes entre eux et do l'impossibilit de no pasfixer les limites do l'activit de chacun (2).

    Mais est-ce dire que les rgles los meilleures pour rgir lessocits humaines vont tre l'application pure et simple de don-nes reposant sur des fondements spciaux, positifs ou surnatu-rels et qui seraient la morale ?

    Nous ne pensons pas que le droit idal soit ainsi plac sous la

    dpendance de la morale.Ce serait bien plutt le contraire, Certaines rgles no sont mo-

    rales quo parce qu'elles appartiennent au droit idal, quo parceque l'conomie politique ou la science sociale les imposent. Lamorale en effet n'impose le respect de la proprit individuelle et

    n'enjoint d'employer la force pour l'assurer que parce que l'co-nomie politique juge cette institution lgitime et suprieurecomme rsultat une autre organisation, S'il tait dmontr quele rgime collectiviste est suprieur au rgime de la propritindividuelle, et si celui-ci tait proclam,il serait immoral do vou-loir substituer au rgime collectiviste celui qui fonctionne aujour-de lu question do savoir s'il y a un idal tint comme le voulait l'anciennethorie du droit naturel, ou s'il n'y en a pas, ou si enfin H n'y u pas,commecela est soutenu actuellement, un droit nalurel &contenu variable.

    (1) Cf. Ihorlng, OEuvres choisies, II, p. 10.(2) V. sur ce point los dveloppements do Ihorlng, /week im llecht^ trad.

    Mculonaoro p. 374.

  • 16 PUEMIEUE PARTIE. CHAPITRE PREMIER

    d'hui. De mmo, si l'on jugeait possible et prfrable d assurerl'lection dos juges par lo peuple, il serait immoral do vouloirassurer le maintien du mode actuel de nomination,

    Ce sont des considrations de finalit qui doivent guider l'ta-blissement des notions de morale, en prenant bien entendu lemot dans son sens le plus large, ne pouvant rien prciser pourl'instant. Et soit pour fixer certains buts atteindre, pour indi-quer les moyens de les atteindre,les sciences conomiques tiennent-une grande place.

    Cela dit, quelle utilit pratique y a-t-il fixer ce droit idal?Cette utilit est incontestable et elle existe plusieurs points devue. Le lgislateur pourra le raliser plus ou moins compl-tement. L'administration pourri s'en inspirer. Enfin le juge,dans les nombreux cas o il ne sera pas li par le texte,pourra en faire application. De faon plus gnrale, il s'efforceraplutt, dans le doute, de faire fonctionner le droit positif dans lesons du droit idal. Enfin celui-ci peut agir sur l'esprit public,,faonner l'opinion certaines ides, faire aboutir certaines r-formes.

    Toute ide mise et rpandue a des rpercussions considrables :proches ou lointaines. Emise, elle agit sur l'esprit dos innombra-bles personnes qui, n'ayant pus soit lo got, soit lo temps, soitl'intelligence de penser et de rflchir, secontentent d'ides toutesfaites qu'on leur infuse. Elle se rpand ensuite conformment ces lois capitales de 1imitation .dont'l'importance sociale est au-jourd'hui mise -sa vritable place (!).-Une lgislation idale, unprincipe lgislatif formul sont donc des ides forces de la pre-mire importance.

    Nous dirons mme que si le droit tel quo l'observation lo donneest toujours un peu incertain, le droit positif, envisag subjecti-vement, par la conception quo chacun s'en fait, a dj une force

    (t) V, Tarde, Les lois de l'imitation, ~ Cf. llauriou, La seiencesocialetra-ditionnelle,^. 278.elsuiv,

  • LA NOTION DE DROIT 17

    profonde, On observe les lois sans se rendre compte des cas oon pourrait les violer impunment.Lo terme de Loi, de Droit, pournotre esprit courte vue, veille l'ide d'une puissance irrsistible laquelle on se plie, on augmentant ainsi sa puissance. L'esprithumain, avide de direction, souvent de tranquillit, se soumet fa-cilement, et ainsi le droit n'a mme plus besoin de manifester sacontrainte, on lui obit bnvolement, l'assenti mont succde laforce et dans cette marche qui peut durer assezlongtemps versl'adoucissement de la vie sociale on voit un progrs que l'onprend aisment pour dfinitif.

    Au total il est mme souhaiter que ce respect idal du droit,bien qu'il repose peut-tre au fonds sur une erreur que necommettent pas les habiles, soit dvelopp autant que possible,devienne jusqu' un certain poiA un culte, raison de la tran-quillit qu'il donne, des forces sociales qu'il conomise, car il per-met par ailleurs une action plus fconde et plus active.

    Ainsi par cette observation quo nous faisons sur le droit po-sitif, analogue celle que nous venons de faire sur le droit idal,nous rintgrons dans la mesure ou il convient, celle du point devue ducatif,la force idale du droit (1) quo nous paraissions m-connatre dans les pages prcdentes lorsque nous nous placionsau seul point de vue de l'observation.

    L'intrt de la question tant dmontr, nous devons nousproccuper de la mthode employer pour la rsoudre : nous n'a-vons pour cela comme instruments employer, que l'observationdes faits, la machine raisonner qui seule mrite le nom doraison, et un certain sens commun, tin certain bon sens quo lesphilosophes eux mmes dcorent tort du nom de raison quin'est au fond qu'un ensemble de sentiments dont les motifs nous('ehappont ou font dfaut et que nous posons comme non douteuxdans leurs vidences trompeuses.

    (1) V. sur ce point Uorolzheimer, Systemdesitechts und Wirtschafts phi-losophie*IV, p, Suotsulv,

    .-. 2

  • 18 PREMIERE PARTIE, CltAPlTIlK PRBMIEU

    Nous voyons nottomont, quant la mthode suivre pourfixer un idal lgislatif ot judiciaire, qu'il faut abandonner cet esprit olassiquo ->dont la critique n'est plus faire aprs Taino,qu'il no faut plus secontenter do faire l'oxprienco un appeldrisoiro pour formuler ensuite quelquo principo dont onprtend faire le: Ssumo, ouvre-toi du droit tout entier, prin-cipe dont les consquences doivent tre frquemment rejetes, oudont la forme est si vague, si improiso qu'il ne projette finale-ment aucune lumire sur les problmes rsoudre.

    Cependant les systmes inspirs do cette mthode sont nom-breux, C'est d'abordTonsemblo dos thories du droit naturel.quiont t soutenues, surtout on Franco, au xvuip et au xix sicle.Sans entreprendre un expos do thories si connues,contentons-nous do constater avec Savigny (1) qu'elles ont prtendu faireplanor au dessousdu droit positif un droit absolu et normal "Motous les peuples pourraient adopter et substituer leur droit (a).

    Quel que soit le systme serattachant cepoint do vue, que l'ononvisago, il n'est pas contestablo qu'on ne saurait l'accepter, parl'impossibilit mmo d'appliquer tous les peuples, quel que soitleur tat do civilisation, quelles que soient les circonstances, unelgislation toute faito, ncessairement priori. Nous croyons quesur ce terrain, les critiques drosses cesthories par l'cole his-torique sont dcisives (2), ,

    (i) Droit romain,: I, p. SO, trnd. Guonoux.(2) V. encore cotte ide reprise do nos jours dans Rotho, Thorie du droit

    naturel, t. I, p, 01 ot suiv. V.poi.r plus do dtails sur cotto cole :'-Chrimont, La renaissance du droit naturel, p.10 et suiv.

    (3) V.en co sons : Suloillos.Ecolo historique et droit naturel, Itevuededrpitcivil, 1002, p. 80, Courcellos-flonouil, /rparation (i l'tude du droit, \t. 406 ;Boudant, Le droit individuel etl'fital, p. 104, Co dernier nous parait avoircritiqu cotto doctrine avec moins de sagesse quand, dans le mme ouvrage(p, 36 et suiv.), il reprocho au droit naturel doprtendre indiquer co qu'ilost souhaitable do voir immdiatement transformer on lois positives. Le d*faut de cette prtention est d'tro exagre, mais si elle tait au fond jus-tillo, il serait prfrablo d'avoir un guide sr, plutt que les directions soi-disant gnrales, en ralit imprcises quo l'on prsente d'ordinaire.

    Le tort vritablo de cotto thorie a t do prendre dans la conscionco hu-

  • h\ NOTION DE DROIT 10

    Faut-il, dfaut de cepoint de vue, accepter l'un dos nombreuxsystmes qui,sans prtendre difier une thorie complte do igis-lation idale, donnent cependant quelques principes dont on nedoit pas se dpartir : tantt la solidarit sociale avec M. LonDourgoois (1), tantt l'ide de justice, avec denombroux juriscon-sultes, tantt l'ide de droit individuel avee M, Boudant, tanttcolle de l'inviolabilit de la personne humaine avec M, ltoistol (2),tantt l'ide que le droit c'est la libert consacre ot rglo par ledevoir (3), ou encore ce principe que les hommes en socitdoivent tre dans la situation de mieux atteindre les buts qu'ilsse proposent (4) ou de pouvoir fairo leur devoir (ft), Ces principes,sur lesquels nous aurons revenir, nous paraissent on eux-mmesd'une valeur incontestable, comme reposant sur certains senti-ments ou certaines ides, mais le difficile n'est pas do les procla-mer, c'est de fixer les frontires de leur empire, do voir jusqu'oils peuvent aller en face de principes Opposs, i'encontre.- d-faits qui leur sont contraires, Si les deux qualits essentielles deces divers prinoipes ! leur tendue et leur force, ne sont pointfixs, ils restent l'tat d'espoirs vagues, inutiles, et je diraisvolontiers dangereux, car on ne voit pas o sont los garantiescontre cette chose terrible ; l'abus d'un bon principe (0), On pout, dfaut de ce systme, dire avec M. Planiol (7) que le droitnaturel se compose d'un petit nombre do maximes fondes sur

    niaine cortuins sentiments et d'en dduire la lgro, sans considrationsuffisante des faits, des dductions htives, sans so domandor si lo fonde-mont tait solide, s'il n'y avait pas dons les faits des raisons pour arrtor ladduction.du. principo, CMur l'insuffisance do ces thories : Tanon, Vvo-lution du droit et la conscience sociale, p. 4 suiv.

    (1) Lon Bourgeois, La solidarit.!2) Philosophie du droit, 1, p, 72.(3) Philosophie du droit civil, par Franck, p. 0.(4) Stammler Lehre des richtigen Itechts, p. 100,(a) Uoaussiro, Principes du droit, p. 46,(0) Happrochoi! sur la " valeur'' relativo do cos divers principes, Cruel, La

    vie du droit, p. 183 et suiv.(7; Trait lmentaire de droit civil, t. I, n. >.

  • 20 PREMIERE PAhTIE, CHAPITRE PREMIER

    l'quit ot le bon sens, qui s'imposont au lgislateur lui-mme,qui sont on trs petit nombre, rduit des notions trs ..lmen-taires, inutiles formuler en articles de lois. Mais les principesainsi affirms do libert des hommes, de protection do la vie, dutravail no permettent que dos solutions pou prcises, et on peutleur trouver de continuelles exceptions non moins justifies, Lamme critique peut donc tre adresse cette thorie (1).

    Et on peut en dire autant plus forte raison de ceux qui, avecM. Deslandres, croient trouver le principe du droit dans le respectde la loi morale (2), qui -veulent tablir un certain et prsenter lesrgles du droit comme des principes.

    En opposition trs nette avec la doctrine du droit naturel, s'estleve, on lo sait, celle do l'cole historique, esquisse dj parSavigny dans son Trait du droit romain (.3), Le droit populairedans cette thorie serait la base commune des autres droits :droit lgislatif et droit scientifique. S'il est parfois cach par eux,il se continue cependant au milieu d'eux. Ce droit gnral surlequel reposent tous les autres qui ont pour mission de s'accorderavec lui, a un but gnral qui lui est assur ot que chaque peupleest appel raliser historiquement. Le lgislateur doit avoir de-vant les yeux ce but gnral et s'en rapprocher constamment,sans nanmoins porter atteinte l'nergie de la vie individuelle;ainsi il prtera la plus heureuse assistance l'action insensiblede l'esprit populaire (4). C'est donc une thorio trs voisine decelle dveloppe vers la mme poque par Hegel, qui, conform-ment aux principes de sa philosophie panthiste, voit dans l'his-toire du monde et du droit, l'Esprit du monde en train de sedgager pou peu, cet esprit s'incarnant successivement dans

    (1) V. Cruot, La. vie du droit, p, 189.(2) La crise do la scienco politique et le problme do la mthode, Pev.

    dedr, public, t. XV, p. 421.(3) T. I, p. 45 et suiv.(4) V. parmi los plus rcents exposs do cette thorie.v. Saloillos, art, cit ;

    Tanon, L'volution du droit et de la conscience sociale, p. 1 et suiv. ; Korkou-nov, op. cit., p. 1157 ot suiv, *,Ghormoni, op. -ci'*., p. 60, et suiv,

  • LA NOTION DK DROIT 21

    celui des grands peuples civilisateurs anoiens et modernes, ("estchez,tous deux, le mme rospoct do l'esprit mystrioux qui soraiten quelque sorte lo support dos phnomnes sonsiblos, Au fond,cotto thorie est plus qu'un appel trs largo l'oxprionco, olloest, et c'est l une condamnation, l'annihilation de la thorie de-vant los faits, une vritable renonciation,

    Lo problme d'un idal lgislatif se trouve aujourd'hui reprison Franco sous un aspect nouvoau extrmement sduisant, souslos auspicos do M Suloillesqui, la suite d'articlos de Stammleret do L. von Bavigny, a dfondu la thorie d'un droit naturel contenu variable (i). Aprs avoir affirm qu' tout moment ilfaut se proccuper de la justice, il nous parle do l'apprciationquo, dans un milieu historique d'une poque donne et sous lesconditions sociales qu'il prsente, on doit se faire de la justice (p, 105), et il ajoute que le juge a seulement lo droit de faireapplication concrte dos ides do justice absolue que peut luisuggrer un idal do droit naturel abstrait, si ses conceptionsont trouv dj une objectivit extrieure lui et susceptible d'im-pratif juridiquo, et si, pur une mthode exprimentale, le jugetrouve rendre sa conception plus solide Cette mthode, il latrouve dans l'analogie juridique, la conscience juridique collectiveet le droit compar.

    Il rsulte de ces passages trs caractristiques que le jugdoit prendre comme idal du droit les conceptions courantes,manifestes par ces divers moyens : esprit public du pays, droitcompar, etc.

    Mais quels seront les guides de ces conceptions courantes, queldevra tre le guid de la pense juridique collective, de l< vo-lont lgislative? Ce sera l'ide de justice apprcie une poqueet dans dos conditions donnes. Tout en proclamant une jus-tico absolue, M. Saleilles arrive donc une thorie relative, en

    (I) V. l'article prcit do la Revue de droit civil, 1002. Happr. de ces idesKorkounov, op. cit., p. 80 : la relativit dudioit et Alvarez, Une nouvelleconception des ludes juridiques, p. 188. V. dans lo mme sens : Char-mont, La Renaissance du droit naturel, p. 217,

  • 22 PREMIKRF. PARTIR, OIIAPITRE PREMIER

    voyant dans l'idal d'une poque, une imago suffisante d'un idalabsolu,

    Cesdivers systmes tant exposs, que fautil en pensor?Nouscroyons d'abord la possibilit, la ncessitde mettre un idalau dessus des faits (1),

    Cetto possibilit d'un droit idal au-dessus du droit positifs'oxplique fort bien, malgr les raisonnements contraires quel'on a invoqus, On a dit que les deux choses ne peuvent gurecoexister (2), le droit positif tirant, affirme-t-on, toute sa forco dosaconformit au droit naturel, il ne pourrait s'en distinguer, cars'il on diffrait, il cesserait par l mme d'tre respectable, et lacoexistence d'institutions juridiques diffrentes no s'expliqueraitpas. Cet argument qui a gn considrablement les auteursanciens, n'a aucune porte, si l'on remarque avec lhoring quole droit no se forme que par une lutte. Cette application de l'op-position universelle fait qu'il est naturel que le droit idal soitcontinuellement inobsorv, Ceux qui ont prtondu le contraireno l'ont fait quo par suite d'une conception fausse d!un ordrenaturel de choses tellement puissant, qu'il se raliserait lente-ment et forcment, sans le moindre heurt, ide qui fut une desexagrations de l'cole historique,

    Malgr l'cole historique, malgr l'importance de l'cole socio-logiquo qui sa suite a cru tout limiter l'tude des lois de l'vo-lution, nous croyons la ncessit d'un idal, car il y a dans l'ac-tivit humaine quoique chose de conscient, de voulu, qu'il fautdiriger. Le nier, c'est mettre les lois du monde physique au mmerang que les principes de l'action humaine ot rduire le droit une tude descriptive, c'est aussi refuser de guider le lgisla-teur (3).

    (1) Ceci est indiqu do tous cts. V. en ce sens, G, Rehard.Mtbodo d'-. tudo do la question sociale, Revue socialiste, 1807, 1.1, p. 137.

    (2) Cf. Korhounov, op. cil,, p. 148.(3) Cf. Co rle indiqu -par Lovi, Ver un programma di /ilosophia del

    diritto. Turin, 100S, p, 147.

  • L NOTION DE DROIT 23

    C'ost une confusion grave contre laquelle on tend protesteraujourd'hui (1).

    Ces groupes de solutions ainsi indiqus que faut-il penser? Ilnous semble d'abord que, pour fixer un idal social, il faudra tenir

    compte des situations do fait (2) : soit dos impossibilits absoluossoit dos modifications que le temps, les dcouvertes, les change-ments conomiques ont apportes des situations en apparenceidentiques, Los rapports entre patrons et ouvriers doivent onbonne justice tre autrement rgls lorsque le patron n'est que lechef d'un petit atelier, ou un compagnon qui se fait aider par quel-ques camarados ou le chef d'une industrie normo. La lgislationdoit tre diffrente suivant les degrs et les genres de civilisation.Kilo doit tenir compte en outre des situations conomiques, des si-tuations psyohologiques,des caractres permanents ou temporairesde chaque peuple ; actif ou indolent, intelligent, port au com-merce ou l'agriculture, propre se gouverner lui-mmo, amou-roux.de son indpendance, ou docile un gouvernement autori-taire (3).

    "

    Autrement dit, la lgislation dans chaque cas doit tenir comptenon seulement de quelques apparences, mais de l'ensemble dosdonnes du problme, donnes toujours variables avec les poqueset les pays. Et il y a par suite une place considrable faire l'observation dans tout problme de droit (4),

    (t) Gaston Richard, La philosophio du droit au point do vuo soeiologiquo,Rev, philos., 1000, t. I, p, 8.6.

    (2) Nous acceptons ploinoment n ce point do vuo la remarque do GpurcellosSenouil (op cil,, p. 207), La sourco du droit est tout indiquo, c'est l'tudede In science sociale dans toutes ses parties, l'tude dos inclinations natu-relles d l'hommeet dos suites ncessaires qu'ont sur la vio et le dvelop-pement dos socits, les diverses rgles de droit qui pouvont lro intro-duites.

    (3) V. uno numration de aes divers factonrs dans Picard, Droit pur,p. 303 et suiv.

    (4) M., p, 210. Cf. sur lo lien entre l'idal du droit ot In scienco sociolo,Tanon, op. cit., p, 42,

  • 24 PREMIERE PARTIE.>- CHAPITRE - FRKMIKIl .

    Mais cotto part faite aux faits changeants, il en rosto toujours'une nutro quo l'humanit dovra fairo un cortain idal. Celui-cino s'appliquera qu'avec do nombreuses rserves, c'est certain.Mais si troitos que soiont sesfrontires, il reste toujours, son do-maine ne peut tre supprim (1), Co fut l l'orrour ossontiollo dol'colo historique d'avoir cru que lo droit tait comme un fleuvenorme suivant une direction, sans qu'il y eut lui en assignerune, et d'avoir pour ainsi dire voulu romplacor lo dogmatismeexagr do l'cole du droit naturol par le nant dogmatique (2).

    Nous croyons ncessairede rapprocher cesdonnesdosthoriesprsontes par M, Lvy llruhl dans son ouvrage ; La morale et lascience des moeurs (3), d'autant plus quo nous avons considrquo lo droit rationnol n'tait qu'une partio do la moralo, Danscette remarquable tudo, il nous ost expos qu'il n'y a pas et qu'ilne peut y avoir de moralo thorique, Soit qu'elle se rattache des jdes mtaphysiques, ou qu'inductive elle omprunte auxsciences la connaissance dos faits dont olle a besoin, soit qu'elletablisse ce qui doit tre, sans le considrer dans le rapport tivo'oco qui est, la morale parat galement sans valour M, LvyBruhl. Il lui reproche de reposer sur deux postulats : l'identitfoncire do tous les hommes, et le caractre harmonieux et orga-nique du contenu de la conscience morale, alors que le premierne se prsente pas avec le caractre qu'on lui donne et que le se-cond ost uno erreur : la conscience morale voluant lentement.

    Et alors la place do cotte morale thorique, dont on a voulutirer toute une morale pratique, il faut se proposer comme objetd'tudes la science des moeurs. A un individu normal, vivantdans une socit quel qu'elle soit, la ntre par exemple, une ra-lit sociale s'impose qui lui prexistait et qui lui survivra, Il n'enconnat ni l'origine, ni la structure, Obligations, interdictions,

    (1) V. on co sons, Houdunt,op cit., p, 106.(2)Cf. Tanon, Evolution du droit, p. 00.(3) On rapprochera do cette thorie les ides do M. Durkhelm, Division

    du travail social, p, 450, h propos do la mornlodes socits organises, et A-

    liayot, L'ide du bien.

  • h\ NOTION DE DROIT 28

    montra, lois, usages mmes et convonances, il lui faut se confor-mer toutes ces prescriptions, sous peines de sanctions diver-ses (1),

    L'tudo des obligations morales qu'uno socit impose sosmembres, c'est lu science dos nneurs, A cette science viendras'adjoindre un art rationnel moral employant l'amliorationdes moeurs ot dos institutions existantes la connaissance dos loissociologiquos ot psychologiques. Il no so formora qu'au fur et mosuro du progrs des sciences dont il dpend, trs lentementpout tre, par inventions successiveset partiolles. Il devra agirsur la ralit pour la modifier dans los limites assez,troites ola connaissance dos lois rendra notro intervention possible , Ilno prtendra pas une universalit do droit (2) ; comme il sefonde sur l'tudo positive do la ralit sociale, il n'hsitera pas reconnatre que chaque socit a sa morale comme sa langue, sareligion, et sans mconnatre co que l'tude compare pourrarvlor do commun dans le dveloppement des morales des diff-rentes socits, l'intorvention sciontifique no consistera pas en desmesures identiques partout. A supposer connues toutes les con-ditions passeset prsentes de deux socits trs diffrentes: lantre et la chinoise, les applications proposes l'amliorationde l'une ot de l'autre no concideront certainement pas.

    Nous nous faisons un plaisir de reconnatre ce qu'il y a dansces thories moralos do commun avec les conceptions de droitque nous exposons. Si le droit idal n'est qu'une fraction do lamorale, il n'y a rien d'tonnant ce que, dans des domaines sirapprochs qu'ils font plus que se toucher, puisqu'ils sepntrontpartiellement, il y ait des thories communes, notammont celle-oi ; dans la morale comme dans le droit idal, il y a quelquechose de subordonn aUx temps, aux lieux, aux circonstances,quelque chose de changeant (3). Nous sommes les prem iers re-

    (!) P. 102.(2) P. 270.(3) Gf, sur ce point : K. Faguet, En lisant Nietache,p,324 ot suiv. -- Wdo

    mme Navlllo, Moralo conditionnelle, Rev, philosophique, 1000, t. II, p. 372,

  • 20 PREMIERE PARTIE. (WAPITRE PREMIER

    connatre qu'en moralo comme on droit.los rgles aproposer ne sontpas pour ces raisons faciles indiquer, Nous n'avons plus l'en-thousiasme du XVIIIsicle qui croyait avoir trouv du premiercoup l'organisation rationnelle des socits ot nous approuvonspleinement cette remarque de M, Lvy llruhl (1) l'art socialrationnel, qu'il s'agisse de l'action individuelle ou de l'actioncollective, ost fairo tout entier. Il ne se formera qu'au fur et amosure du progrs des sciences dont il dpond ot quand l'artsocial commencera tiror des conclusions pratiques des sciencessociologiques, elles porteront d'abord sur dos points plus oumoins particuliers, Cet art paratra ncessairement fragmentaire,incomplet (comme le sont notro mcanique (applique et notremdecine) il n'aura pas lo caractre d'un ensemble achev et co-hrent (2),

    Nous pensons cependant que cette thorie prsente une lacuneanalogue celle de l'cole historique et quo malgr la modestiequ*olle montro actuellement, ollo laisse place une critique grave,Pour tablir un art moral rationnel, la 'notion d'art tant unechose relative, il faut se proposer une certaine fin (3), il fautrevenir la question centrale qu'on peut bien masquer, mais quiexistera toujours, Pourquoi la vie est-elle faite, quel est sonbut ? Est-ce plus de vies, une vie suprieure ou encore un autrebut? Il faut fairo rontrer costorribles problmes, ou bien franche-ment, ou subrepticoment, on les tenant pour rsolus dans unsens dtermin (4).

    M) P. 200.(2) P. 257.(!!) Rapprochez Korkounov, Thorie gnrale du droit, Normes leohniquen

    et normes thiques, p. '43 et Ihoring, /week im Redit, trad. Meulenaere, p. 10,Tarde, L'occident et lo rationnel on histoire chez, Gournot, Revue de mla'physique, 1005, p. 340,

    (4) C'est ta mme critique que nous adresserons a M. Belot, Etudes demorale positive, 1907, p, 508, quand il nous dit quo la socit est une finot la moralo une technique sociale . Quels seront les traits caractristi-ques do celto socit pour laquello on travaillera?

    U'oillours non seulement d'autres thories do moralo continuent a lro

  • IK NOTION DE DROIT 27

    Comme le disait fort bion Renan (1), A cot du fieri, il fautconserver l'esse, ct du mouvemont, lo moteur, au contre dela roue, le moyeu immobilo , il faut do mmo diriger l'amliora-tion des moeurs ou du droit vers un but fixe, ou alors le relatifn'indiquera do relation aveorion,co qui est inconcevable,

    fit oncore tout n'est pas termin on seposant, ou on supposantrsolu, ce problmo qui a toujours hant l'humanit, qu'elle loveuillo ou non, Ce but qu'on assigne la vie, quollo est sa valotirpar rapport ces circonstances comploxes, variables? Quelle estla mosuro rolative do ces deux quantits? Quand l'homme, mpar un principe suprieur ou peut-tre par plusieurs, devra-tilrsister ces conditions spciales dont nous parlons ? Quanddovra-t-il s'incliner? Ya-t-il des cas o on doit se montrer nova-teur et, disons lo mot, rvolutionnaire?

    Certaines personnes ont senti qu'il fallait bien donner l'huma-nit quelque chose de stable sous certains rapports, et qu'il y avaitl une aspiration de l'esprit dont il fallait tenir compte. A dfautd'un idal, elles ont cherch tout u moins du ct technique lascurit que l'on rclame et dvelopp que les droits obissaiont

    exposes (V. F.nndry, La morale rationnelle, 1000), mais celle quo nous cri-tiquons a t rfute par nombro d'auteurs. V. Fouille, La scienco desmoeurs romplucera-t-olle la moralo, Revue des Deux-Mondes, (005, l" octo-hro, spcialomont, p. 548 ot doit-on fondor une science moralo, Rev. philo-sophique, 1007, t. II, p, 440 ; Cahtecor. La science positive do la moralo,Itev. philosoph,,1004, p, 237, priuc, p. 301 ; Cnntcor, Etude do moralopositive, Rev. de tntaphys,, 1908, p. (10; Gaultier, l/lndpondanco do lamoralo, Revue philosoph,, 1008, t. I, p, 271. On verra spcialement dosides analogues aux ntres dans l'article prcit do M.Nnv\\\e,Moralo condi-tionnelle, p. 501 et suiv. M, Lovy Itruhl a essay do rpondro os repro-ches, Hevue philosophique, 1000, t. II, p. 11, on indiquant qu'un idalpourrait tre dcouvert pou A pou ot varier avoc le lomps, Il fait donc lui-mme rentrer l'idal dans l'objet do ses tudes.

    D'ailleurs tout art comporte un idal ou plusieurs. Il on ost ainsi desarts qui doivent atteindre un des idnls du beau. Si la mdocino taitplusavanco, elle so demanderait si l'idal doit tro d'ossuror une longueVio, avec une sant mme mdiocre, ou une sant parfaite, tlut-ell*? durermoins longtemps,

    (i) Dialogues philosophiques, p, 140.

  • 28 PREMIRE PARTIE, CHAPITRE PREMIER

    ncessairement certaines rglos, so coulaient forcment danscertains moules. C'est cette tendance quo nous dovons les deuxlivres do M. Roguin sur la Mgte de droit et de M, Picard sur leDroit pur, Co fut l la premire et trs modeste manifestation onfaveur d'une renuissance du droit naturel,

    U y a videmment dans cette tentative quelque chose d'exact :l'ide mmo de droit, cortainos fins ncessairement poursuiviesappellont certaines rglos ncessaires, mais combien pou (1).Nous verrons plus loin, on tudiant la tochniquo ot nous auronsoccasion de montrer qu'il y a on elle quelque choso de variablesuivant la lin poursuivie.

    Ce n'tait qu'un premior pas trs prudent vors une tontative

    plus hardie : celle de la dfinition d'un certain idal.Comment dfinir cet idal ncessaire, dont l'application sera

    plus ou moins large suivant les circonstances (2), mais dontl'importance reste indniable, M, Saleillos, dans l'articlo quonous avons cit, indique que c'est la justice Mais co tormo quiest trs comprhensif, peut-il suffire prciser la solution del'obscur et complexe problme qui nous proccupe ? Cherchons dessiner ce qui n'a t qu'esquiss dans cette remarquabletude,

    Notons d'abord qu'ici nous quittons lo terrain des contingenceset que nous prtendons chercher un idal permanent. Ce fut enefiet la lacune laisse par Montesquieu dans l'Esprit des lois, qued'avoir parl de la justice comme d'un simple rapport de conve-nance qui existe entre deux choses, sans faire entrer dans cottedfinition rien de permanent, aucun idal abstrait (3),

    (1) Cf. Jean-Kscarra, Homarques sur lo droit pur, Revue de droit civil,1000, p. 111 115,

    (2) Notons quo cette ide qu'il y a un idal do justice avec une certaineadaptation aux circonstances est assez familiro aux jurisconsultes moder-nes. V. Aubry et Rau, Droit civil, 1.1, p. 2, 5" d.; Baudry-Lacantinerieet Houques Fourcado. Les personnes, t. I, p, li ; Pillot, Principes de droitinternational priv, p. 2.

    (3) V, on ce sens la critique de Boudant, Le droit individuel et l'Etat,p. 114.

  • U NOTIONDE DROIT 29

    Cot idal qu'il s'agit do dfinir, quo nous cherchons au-dossusdes innombrables complications mouvantes dos faits, c'est le butmme de lavie (I),.fit co n'on ost mme pas le but subjeotif, telquo chacun do nous a pu so lo forgor, d'aprs sos ides, ses goiitspropros, ses croyancos, C'est le but do la vie envisag objective-ment, but qui doit exister on dehors do nous et avec une puis-sance telle qu'il s'impose chacun, qu'il devienne pour chacunun devoir de l'atteindre, do le laisser atteindre aux autres, sinonde leur faciliter cotto tche.

    Mais ce but objectif, existe-t-il et on ce cas quel est-il? Caron ne peut so contenter do cette expression vague, pas plus quede parler de la nature do l'homme.

    Affirmer ou nier son existence, c'est se prononcer sur une

    question philosophique des plus graves, je dirai volontiers laplus grave, et en fixer lo contenu, c'ost s'attaquer une difficult

    quo l'on ne peut gure claircir que par des vues de l'esprit. Noussommes en dehors de ces questions qui puissent tre saisies etlucides en les prenant dans une armature de constatations etde raisonnements,

    Ce problme d'ordre objectif, nous ne pouvons l'aborderque par nos ides subjectives (2), je dirai mme plus volontierspar nos sentiments, en nous demandant si telle conception, la-

    quelle on peut rattacher de longues ohanes de consquences, nese trouve pas d'accord avec notre conscience, c'est--dire une des

    portions vibrantes,mais des plus obscures de notre Ame. Et en facede cette faon unique, mais ncessairement imparfaite (nos idessubjectives n'tant pas un critrium absolu de la vrit objective)de s'attaquer ce troublant problme, nous voyons bien des con-

    (1) C'est ce que Kant, a trs bien dgag dans la Mtaphysique du droit,on disant que l'homme est une fin on soi et en voyant-la la basedu droit.Cf. Oudel, Essai dephilosophie du droit, p. 14; M\raus,Encyclopdie dudroil,p. 110.

    (2) Biorling, Juristische Principionlphre,l. I, p. 145,fait remarquer coqu'ily fl ainsi d'objectif et de subjectif dans lo droit, Cf. do Tourtoulon, Principesphilosophiques de l'histoire du droit, p. 55 ot surtout p. 10 et suiv.

  • 30 PREMIERE PARTIE. CHAPITRE PREMIER

    copiions diffrentes sinon opposes se prsenter nous oveoforce (1).

    La vie a-t-elle un but extrieur elle-mme, L'humanitn'existe-t-elle que pour un tre suprieur ollo dans la dpendanceduquel elle se trouve et qui elle sodoit (2) ? Faut-il .dfaut .d'unbut donner simplement la vie un sens, uuo ligne do march,la vie devant visor principalement et surtout au dveloppementde la vie, l'accroissement do l'espce. Cello^ct soruit alors l'ob-jet d'un respect quasi superstitieux, mme dans l'humanit laplus base ou la plus pitoyable, dans los criminels, les fous, losesprits les plus forms toute lumire, sauf savoir si ce respectn'est pas un simple moyen pour un autre but plus lointain, Fautil en un mot dire avec Courcelle-Seneuil, que le droit doit.commola morale, viser une utilit suprme ayant pour sujet le genro hu-main et so dfinissant par los conditions qui dveloppenteii lui laplus grande somme de vie (3),

    Ou faut-il dire (4) ; en sommo la fin de l'humanit, c'est do pro-duire des grands hommes. La grande oeuvr s'accomplira par lascience. L'essentiel est de produire de grands gnies et un publiccapable de les comprendre, Peu importe les masses. La nature nes'arrte pas de tels soucis. Tous doivent servir des fins sup-rieurs. Chacun est houreux son rang, l'lite des tres intelligentsdominant le monde pour y faire rgner le plus de raison possible,lo but de la nature tant non pas quo tous les hommes voient le

    (1) Il no suffit donc pas do parler avec Aurons do la nature de l'trocomme base du droit (V. Philosophie du droit, t, I, p. 101 ou do l'utilit so-cialo avec van Kykoii [Mthode positive d'interprtation, p. flO). Suffit-ilmmo do dire avec Lhoring (/week im Reehl, p, 202 et suiv.), le droit ga-rantit les conditions do la vie on socit, c'est son but. Kt ces conditions,c'est la consorvotion de l'espce, |o travail, lo commerce juridique. Kncoresora-t-il parfois ncessaire do savoir suivant quoi plan, dans quel but doittro organise la vie sociale. Kt il ho le dit pas.

    (2) V. en ce sons : de Varelllos Sommioros, Principes fondamentaux du droitp, 34 et suiv.

    (3) Op.cit., p. 424. Cf. p, 371 et suiv. L'utilit comme principe de morale,(4) V. sur co point ttonan. Dialogues philosophiques. Raves,-.p, 90 et suiv.

  • LA NOTION DE DROIT 31

    vrai, mais que lo vrai soit vu parquolquos-uns otquo la traditions'en conserve.

    Ou bien faut-il voir le but de la vie moins dons son dveloppe-ment ou encore dans le bonheur desgnrations futures quo danslo bonheur dos individus qui existent (1). Ce qui conduit soproposer dos fins plus terre torro, dans la mesure o l'ensem-ble do l'humanit pourra on profiter do sorte que collo-ci serauno masso dgnre n'ayant d'autre souci quo do goter lesplaisirs ignobles do l'homme vulgaire , sauf tout au plus chorchor persuader cttto humanit do revenir dosgots sup-rieurs, fitencoroco bonheur dans chaque cas sera-t-il dans uneactivit'dbordante, ou dans uno vie calme de sensations lento-mont savouro? Termes toutfaitopposs,auxquel/on pout, dansuno notable mesure rattacher les diffrences entro la conceptionde la vio dans le mondo occidental et la civilisation orientale (2),

    Verra ton surtout l'idal do la socit dans la libert (3) : doc-trine vague, car cotte libert sauvegardo-t-ollo simplement cha-

    (1) Cos conceptions do In vio ragissent la fois sur la moralo ot sur lodroit. Si la nouvollo moralo est conformo aux soucis d'intrts plus nom-breux, moins particuliers, plus tondus, la moralo ancionno tait adapto ula prvision d'intrts moins momentans, plus durablos. La porte dossacrifices oxigo par les devoirs acluols s'lond bion plus loin proportion,nollomont dans l'espace quo dans le tomps, tandis quo auparavant los sacri-fices qio commandaient les devoirs avaient une utilit troitomont circons-crite l'ontourogo immdiat de l'individu, mais prolonge dans un avenirrelativement considrable, Toutes les vertus proprement domestiques ot pa-triarcales, locales ot primitives sont dos privations subios pour l'avantaged'une soulo famillo il est vrai, mais de toute la postrit do celte famillo.A l'invorso la morulo modorno trs coulante sur los vices dont nos petitsnoveux auront seuls souffrir, blAiho svrement los fautes dont nos con-temporains mmo loigns pourraient supporter lo contre coup (Torde,Lois de l'imitation, p, 388). Ut l'on voit tout ce quo cos ides peuvont avoird'importance quand on s'occupora dos graves problmes do l'alcoolisme,do lapolice dos moours, de l'ge pour lo mariugo, du mariage des inlordits, etc.

    (2) V, Sur les caractres do la civilisation occidentale, Kidd, L'volutionsociale, p. 117 otsuiv.

    (3) C'est u quoi tendent notamment ceux qui avec les anciennes thoriesformelles du droit dflnissont lo droit une dlimitation dos volonts et nonuno dlimitation dos intrts. V, KorkounoV, op, cit., p. 114ot suiv.

  • 32 PREMIERE PARTIE, < CHAPITRE PREMIER

    cun un idal limit, ou est-elle un moyen pour surexciter le dsirde vivre do faon active ? N'est-elle pas plutt au fond, une doctrinede dsespoir, qui ne voyant aucune voie sre pour guider l'huma-nit, cherche a abandonner chacun lui-mme dans la plus largemesure possible, ne laissant la rglementation qu' empchercertains heurts trop forts (1),

    Ces conceptions varies, et il y en a peut-tre beaucoup d'autres,il parait difficile de les juger l'aide de nos procds habituels, l'aide de ces suites de constatations et de dductions qui noussont familires, car il s'agit de trouver celles-ci un point de d-part qu'on ne peut dcouvrir dans un certain ordre de la nature,lequel ne s'applique pas ncessairement l'homme. Que prouveen eiet ce fait que la solidarit par exemple existe dans la nature

    qui nous dit que l'homme doit ncessairement se conformer, lui,d'une espce unique, un ordre qui domine des tres infrieurs.N'a-t-il pas plutt des raisons de s'en carter, quand en vertu decette solidarit la nature sacrifie des espces entires pour qued'autres trouvent les conditions essentielles de leur vio (2). Sila nature a une loi, no devons-nous pas, tout aussi bien que dela suivre, essayer do la limiter et dire qu' il faut gter et conso-ler les hommes des rudesses obliges del nature (3). Une seulechose serait vritablement probante : dmontrer qu'un plan r-

    gulier s'impose nous et nous entrane et que nous ne pouvonsen rien nous y soustraire, ou qu'il correspond notre idal et quonous devons aider le raliser aussi compltement que possible.Mais il faudrait au pralable tablir quel doit tre cet idal. Si lanature, comme disait lleuan, agit notre gard comme un pooit, p. I.'ks.

  • 36 '.PREMIRE PARTIE, '"-CHAPITRE PREMIER

    mais encore des ides. L'homme n'est pas seulement heureuxquand il a du p'aiu manger. La satisfaction de ses idespeut luitre aussi chre que celle de sesbesoins matriels.Le brahme indouqui risquerait sa Vie pour empcher un infidle de voir la statuedeson dieu, le congrganisto qui no quitte son couvent que con-traint par la force, 1-homme aux convictions ardentes qui nuira sesintrts pcuniaires pour faire prendre des mesures anticlrica-les, sont domins par une ide commune ; attacher plus d'impor-tance aux satisfactions de leur esprit qu'aux commodits de la vie,

    Si nous tirons de l des consquences pratiques, nous voyonsque c'est surtout dans lo domaine des besoins matriels que l'onpeut rencontrer dans un pays donn et une poque donne destraits communs entre tous les hommes. Bien plus, on peut affir-mer (sans prtondre ressusciter la vieille doctrine du droit natu-rel) que, dans tous les pays, on rencontre grce ces besoinsma-triels une base assezsolide pour une partie de la philosophie dudroit, On voit dit moins 'assez.nettement le but atteindre. Toutsans doute n'est pas dit. Car bien des chemins peuvent y tondre,Quel ost le meilleur? Rservons cette question.

    Pour nous rsumer, nous arrivons cette constatation qu'il y unu-dessus des faits mouvants, un certain idal pour le droit, nousne sommes jamais srs de l'avoir dcouvert,

    Etant donn que nous ne pouvons srement atteindre unothorie objectivement vraie du sens de ht vie, nous devons nousproccuper des conceptions subjectives rgnantes, puisque leproblme du droit idal doit tre forcment rsolu qu'il y a cepoint de vue ncessit pour chacun, dans la mesure, au moinso il contribue former l'opinion, so dterminer dans un sensdonn. Muis nous ne pouvons attacher ces conceptions Uneimportance exclusive.

    Nous somms en face d'un problme auquel il faut donner unerponse, quand nime nous n'aurions pas pour cela scientifique-ment les lments ncessaires. Nous le forons par dosvues de notre

  • LA NOTION DE DROIT 37

    esprit et en tenant compte de lapsychologie gnrale de t homme,Parmi les conceptions subjectives dont nous devons nous proc-

    cuper il; y a on premier lieu les conceptions morales, celles du bienet du mal, celles do la justice, de la libert, etc., et ces autresides fondamentales quo nous parcourrons dans les chapitres stti*vants. Mais celle-ci n'ayant qu'une valeur limite, par dfinitionmnie,ellos ne peuvent pas no pas tenir compte do tout l'ensembledes faits sociaux (1). Relative elle-mme, notre conception d'unechose absolue doit se concilier, entrer en rapport avec les autresdonnes relatives. Seulomcnt les conflits no sont pas pour celatranchs. Qui dira d'abord la valeur relative des diverses concep-tions dominantes ? Qui dira on outre leur valeur par rapport auxl'irconstances spciales, aux donnes, variables par nature, duproblme lgislatif ?

    En face de questions si complexes, quelle direction peut pren-dre le droit? Il y a un point certain, En prsence do conceptionstrs diverses, dfaits mouvants, lo droit se heurto des probl-mes qu'il peut chercher rsoudre, en conciliant divers pointsde vue. Il y a ici tout un art qui s'est dj notablement dveloppet dont le dveloppement futur nous apparat comme presqueindfini, tant donn quo de nouveaux problmes so prsenterontconstamment, que des dcouvertes que nous ne pouvons prvoirpeuvent se produire et perfectionner cet art.

    Il y a nombre de cas au contraire, o certaines donnes duproblme paratront et seront suns doute rellement inconcilia-bles, cause de leur nombre et do leur caractre non mesurable,d'autant plus qu'il n'y a de science vritable que de quantits,sinon ayant une mesure commune, d moins susceptibles entreelles d'un certain niesurage approximatif, Lo droit ne pourraen pareil cas qu'liminer pltis ou moins certaines donnes et

    adapter les moyens existants au but ou aux buts accepts, Celleconciliation-limite, ou cotto adaptation do toutes choses lin

    (I) Sur co point nous Nommesd'accord avec M, Landry (I.a superstitionles principes, Revuede mtaphysique et de morale, 1U01J,p. 121), quandil dit que les principes n'ont pas do valeur absolue, mais qu'ils sont bien-luisants dans Une certaine mesure, il cause de l'Imperfection des hommes.

  • 38 PREMIRE PARTIE. CHAPITRE PREMIER

    seul but est dj un important travail dont la russite n'est pasngligeable.

    Conciliation entre les thories en prsence, voil en somme lebut, en partie irralisable d'ailleurs, qu'il faut poursuivre, La

    simplification, par unit d'ide et dductions logiques est un besoinde l'esprit qui ne correspond pas compltement la ralit desfaits. On en a nettement l'impression en voyant toute la philoso-phie du droit aboutir toujours dfendre comme principe unetransaction, ou un principe simple en apparence qui cache unecomplexit. Les faits sont trop divers pour se plier convenable-ment la nature et au besoin d'agir de notre esprit.

    Mais la ncessit mme o on se retrouve ainsi de laisser decot certains lments, certains desiderata, amne forcment dessolutions qui, qualifies meilleures que d'autres, n'en sont pasmoins imparfaites. Les intrts qu'elles froissent tant souvent

    importants, qu'ils soient gaux aux intrts protgs ou moindres,et les hommes ayant mieux conscience des maux dont ils souf-frent que des avantages dont ils profitent, il en rsulte un besoinde changement-qui' s'oprant dordinaire lentement cause dosntrts opposs qu'il froisse, dos routines qu'il drange, de la

    force d'imitation qu'il combat, et c'est l le point de dpart desvolutions qui s'oprent suivant la ligne de moindre rsistance (1).Mais leur rsultat n'tant pas plus parfait que celui qui a prcd,des mouvements nouveaux so produisent (2) ; c'est ainsi qu'onconstate parfois de curieux retours vers les points de dpart (3),

    (t) Collo-cl est naturellement conditionne par une massd'lments quonous no pouvons rappeler ici. (!f. Picard, op. cit., p. 303, ' '

    (2) Cotte prsoncodeslments nouveaux dans l'volution a t trs bloiiluise on valeur par M. Tanon, A'Evolution du droit et la conscience sociale,p. 24,

    (l) Comme lo remarque fort.bien Tarde, L'opposition universelle, p, 201, Quelque soit le procd employ pour supprimer le conflit des croyanceset des Intrts et pour tablir leur accord,il arrive presque toujours (n'arrive-Ull pas toujours ?)'quo l'harmonie ainsi produite a cr un antagonisme d'ungenre nouveau. Aux contradictions, aux contrarits do dtail, ou a substituuno contradiction, une contrarit de masse qui va chercher olto aussi ase rsoudre, sauf h

    .'engendrer ses oppositions plus hautes et ainsi do suitejusqu' la solution flualu,., Lo progrs des sciences rvle dos antinomies

  • I.A NOTION. DE DROIT 39

    retours avec des perfectionnements sans doute. Car une chose

    reste susceptible de dveloppements trs prolongs, c'est la techni-

    que, l'art de concilier les intrts par des mesures plus exacte-ment adaptes au but, Quel perfectionnement en effet ne prsen-tent pas les institutions modernes, o se dveloppent des tendances

    formalistes, compares avec celles du formalisme antique, celuidu vieux droit romain par exemple.

    L'volution .-ne nous apparat plus alors avec ce caractre rocti-

    ligne ou du moins rgulier qu'on s'tait plu lui donner, avecson caractre de loi fatale, mais comme une srie malheurousede tentatives pour faire vivre cte cte, avec des destines plusou moins heureuses, des conceptions sans doute inconciliablesdans une large mesure (l). Cette situation fait qu'en gnralrationnelles solubtos ou insolubles que l'ignorance antrieure dissimulait...La question est do voir si ces dplacements do contradictions et do contra-rits ont t avantageux, ot si l'on peut esprer que l'harmonie des int-rols et des esprits soit Jamais complte, sans compensation do dissonance {si, on d'autres termes, uno certalno somme do mensonges ou d'erreur, doduperie ou do sacrifice no sera pas toujours ncessaire pour maintenir lapaix sociale. Quand le dplacement des contradictions et des contraritsconsiste les contrallsor, Il y a assurment avantage. SI profonds quosoient les mystres rvls par le progrs dos scionces, si grand que soitl'ablmo creus entre les coles philosophiques par les questions nouvellesoi'i ellos socombattonl par des arguments puiss nu mmo arsenal scienti-fique, il n'est pas permis do regretter les temps d'ignorance o ces pro-blmes no so posaient pas,

    V. d'ailleurs dans lo mme sens, sur les contradictions qui paraissentaujourd'hui fatales et dont l'affirmation est un grand progrs philosophi-que, lltturlou, op, cit,, p. 110 et suiv.

    Nous partageons cos Ides, mais cependant pas de faon complte. Nouscroyons exagr de dire que la marche consiste toujours centraliser lescontradictions. Si c'est lii le progrs sclentlllquo, coninio c'est notre coliviclion ce n'est pus toujours la marche a suivre en pratique Kl bien desconflits no so rsolvont pratiquement quo parce qu'on les dissimule ondcentralisant le dbut. Telle la tolrance, l'urbanit, dont los limitesincertaines, sources do conflits par consquent, dconcentrent certainesluttes, moussont certaines contradictions qui cependant subsistent. Laconcentration des conflits n'est donc ni une murcho ncessaire, ni un pro-cd toujours pratiquement soubaliablo.

    (1) Golnmo le dit fort bien Tarde, Lois- de l'imitation, p, 711,'toutes lesinventions no sont pus accumulables, beaucoup ne sont quo stihsMtnahU'S,

  • *0 PREMIERE PARTIE, CHAPITRE PREMIER

    les mouvements d'ides ne peuvent aller jusqu' leur extrme, parsuite de l'opposition de principes d'une valeur peu prs gale.Il y a dos extrmes qui ne peuventtre atteints/ ou qui tout auplus sont atteints un moment par suite de circonstances excep-tionnelles, mais aussitt abandonns C'est en gnral un grandmalheur quand des principes sont ainsi pousss jusqu'au bout,et les jurisconsultes romains l'avaient dj bien vu en faisant cotteremarque si vraie : summum jus, summa injuria. Il y a desextrmes qu'il est dangereux d'atteindre, il en rsulte une rac-tion, un trouble tat de fait toujours dangereux. L'humanit setrouve ainsi appele naturellement des compromis, qui limite-ront en tendue ce que j'appellerai les oscillations do l'volution.Elle ne parait d'ailleurs jamais tre appele trouvor l'quili-bre (2), pour les raisons quo j'indiquais tout l'heure (3).

    Les donnes contradictoires souvent des problmes poss fontque tout obligs de les rsotulro que nous sommes, nous no pou-vons lo fairo do faon satisfaisante, nous nous trouvons forcmentdans un rgime de concessions, de transactions diverses (4), qui

    (1) f,o quo M. Picard (Droit pur, p. 344) appelle l'panouissementparallle et normal des grandes forces sociales.Cf, eod., loe, cit., p. 301)).

    (2) Comme le remarque oncoro Tarde, op, cil,, p. 70, l'galit n'estqu'une transition entre doux hirarchies, comme lu libert n'est qu'un pas-sage euti'o doux disciplines.

    (3) Kn somme, physiques ou vivantes, toutes les ralits extrieures nousdonnent le mme spedaclo d'ambitions infinies, irritllsos et irralisables,qui s'aiguillonnent ot so paralysent rciproquement, Ce qu'on noinmo onelles llxil, Immutabilit des lois do la nature, ralit par excellence, n'estau fond quo leur Impuissance d'aller plus loin dans leur vole vraimentnaturelle ot do so raliser plus pleinement Kh bien, il en est du mmo deces influences llxes (momentanment fixes) d'ordre social que la stnltslt-que dcouvre ou prtend dcouvrir, car les ralits sociales, ides ot besoinsne sont pas moins ambitieuses que les autres et c'est "on. biles que sersolvent i\ l'analyse ces entits sociales qu'on noinmo les munira, les ins-titutions; la langue, la lgislation, la religion, les sciences, l'industrie etl'art (Tarde, Lois de l'imitation, p. 120. - Cf, Izoulot, op, cit,, p, 047).Leproblme dlvltlulre. Synthse do la solidarit et do la libert (qui n'estqu'un compromis).

    (4) La ncessit de transactions pour ''solutionner les contradictions

  • LA NOTION DE DROIT M

    fait quo chaque principe n'est pas ls de faon trop directe et

    trop forte (1). Ce rgime qui no peut se dduire logiquementd'aucun principe absolu est le seul supportable, mais, prtantsi facilement l! flanc la critique, il reste bien fragile (2).

    Voil quel est l'avenir qui parait rserv au droit. Sans douteles difficults n'apparaissent pas premire vtio avec ce caractre

    pour deux raisons. D'abord les inconvnients d'une solutionadmise peuvent s'attnuer par l'accoutumance. L'intinct d'imita-tion fait prendre longtemps une solution comme la moins mau*

    sociales a t fort bien luise on vidence par M. Haurlou, op, cil,, p, 114 etsuiv,,-qui a montr ..quo nous n'avions quo trois moyens pour viter les con-tradictions': l'limination do certains lments, In synthse ot' ortflri la tran-saction. Celte dernire a un rle considrable, elle so roncontro partout,dans toutes les institutions sociales. Cf. sur l'application do l'ide detransaction>bion que le principe gnral n'y soit pas exprim : Cruet, op,cit., p, 302 ; Picard, Droit pur, p. 241, qui dit quo les droits doivent treemploys civiliter.

    (1) Cf, Stuort Mill, Logique, t. II, p. bo.(2) Aussi, avec ces donnes, nous croyons fort admissible la thorie do

    Tarde d'aprs laquelle la socit passerait par des priodes d'Imitationcoutume, puis'd'imitation modo (Lois de l'imitation, p. 207 ot suiv,), pourrevenir /t un tat intermdiaire, thorie quo reprend Al. Ilaurlou (op. cit.,23 et suiv,), pour dire quo lo inonde posso par des priodes do moyenAge et do renaissance pour aboutir do demi-moyen Age, c'est--dire iV'unrgime intermdiaire

    L'volution sociale ressemblerait donc plutt uno srie d'oscillationsdiminuant graduellement d'umplltudo. Soulomont nous no croyons pusqu'il y ail ici,'comme pour un pendule, un point mort dfinitivement ultoi-gniibio". Il est fort probable, l'tat atteint tant toujours peu stillsfulsuiil,(pio do nouveau* mouvements se produiront. Souvent ou eirottdes demandespeu Importantes aboutissent dvelopper un tel dsir do l'objet demand(pie l'on "n'hsite pus tenter les plus grands bouleversomonts pour obtenirsullsfactloii. Ainsi do dbats sur la rtribution du travail est sorti tout lesyndicalisme rvolutionnaire (V. Max. Leroy, Syndicats et services publics,p. 188). Alors do la lutte qui se manifeste, sort onsuilo un mouvemontd'oscillation suivant un nouveau plan. 151 do celle observation dcoulel'utilit-qu'il y a parfois fairo dos demandes exagres, des mouvementsvvolutionnalros, mettre on mouvomont do grandes choses pour aboutirii des petits effets.

    Knsullo II faut tenir compte des lments nouveaux qui rompent lo plandes oscillations sociales ot en ongendreiil de nouvelles,

  • 42 PREMIRE PARTIE > OUAPITftB PREMIER

    valse, jusqu'au jour o un penseur, un esprit premire vueparadoxal, fait pntrer dans le"publie une solution nouvelle, querpand l'instinct d'imitation*-'Ce jour-la,' on dit volontiers avecPascal : La coutume fait toute l'quit par cette seule raison

    qu'elle est reue. C'est le fondement mystique de son autorit,Qui la ramne son principe l'anantit (1). Kt la tradition netarde pas tre jete terre.

    Ensuite bien des circonstances dans les civilisations modernestendent masquer ces difficults. La facilit avec luquelle on

    rpand les ides par le journal, lo livre, renseignement dvelop-pent une srie de raisonnements courte vue, accessibles tous,une srie d'ides que l'on considre comme intangibles, du moinsUn certain temps. Les originalits, parlant les divergences, s'effa-cent devant une plate et commode uniformit .do pense.'.

    La croyance la valeur absolue des ides favorables la durede cet quilibre instable, dont nous avons parl, a aussi l'avantagede correspondre un besoin de l'esprit, surtout on notro pays : la

    simplicit. Le raisonnement a d'autant plus do prise sur l'intelli-

    gence qu'il est simple et ainsi notre esprit tend fausser la ra-lit, lut donner une uniformit qu'elle n'a pas, comme un

    rayon de lumire color prte faussement une teinte identiqueaux objets qu'il vient frapper. Ils en sont bien mis en clart, maisd'une faon