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HAL Id: pastel-00001535 https://pastel.archives-ouvertes.fr/pastel-00001535 Submitted on 27 Jul 2010 HAL is a multi-disciplinary open access archive for the deposit and dissemination of sci- entific research documents, whether they are pub- lished or not. The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers. L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destinée au dépôt et à la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, émanant des établissements d’enseignement et de recherche français ou étrangers, des laboratoires publics ou privés. Modélisation des aérosols de pollution en Ile-de-France. Alma Hodzic To cite this version: Alma Hodzic. Modélisation des aérosols de pollution en Ile-de-France.. Physique Atmosphérique et Océanique [physics.ao-ph]. Ecole Polytechnique X, 2005. Français. <pastel-00001535>

Modélisation des aérosols de pollution en Ile-de-France

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    Submitted on 27 Jul 2010

    HAL is a multi-disciplinary open accessarchive for the deposit and dissemination of sci-entific research documents, whether they are pub-lished or not. The documents may come fromteaching and research institutions in France orabroad, or from public or private research centers.

    Larchive ouverte pluridisciplinaire HAL, estdestine au dpt et la diffusion de documentsscientifiques de niveau recherche, publis ou non,manant des tablissements denseignement et derecherche franais ou trangers, des laboratoirespublics ou privs.

    Modlisation des arosols de pollution en Ile-de-France.Alma Hodzic

    To cite this version:Alma Hodzic. Modlisation des arosols de pollution en Ile-de-France.. Physique Atmosphrique etOcanique [physics.ao-ph]. Ecole Polytechnique X, 2005. Franais.

    https://pastel.archives-ouvertes.fr/pastel-00001535https://hal.archives-ouvertes.fr

  • THSE DE DOCTORAT DE LCOLE POLYTECHNIQUE

    presente pour obtenir le grade de

    Docteur en Sciences

    Spcialit : Physique et Chimie de lAtmosphre

    par

    Alma HODZIC

    MODLISATION DES AROSOLS

    DE POLLUTION EN ILE-DE-FRANCE

    Soutenue le 6 Octobre 2005 devant le Jury compos de

    Herv LE TREUT Prsident du juryRobert VAUTARD Directeur de thseGilles BERGAMETTI RapporteurRobert ROSSET RapporteurOlivier BOUCHER ExaminateurSasha MADRONICH ExaminateurChristian ELICHEGARAY InvitPhilippe LAMELOISE Invit

    Thse prpare lInstitut Pierre-Simon Laplace(Laboratoire de Mtorologie Dynamique, cole Polytechnique),

    finance par lAgence De lEnvironnement et de Matrise de lnergie et AIRPARIF

  • Ces trois annes de thse se sont droules au sein du Laboratoire de Mtorologie Dynamique lEcole Polytech-nique, o jai t chaleureusement accueillie ds les premiers jours. Cette priode a t source de riches expriencesprofessionnelles et humaines et de forts apports scientifiques.

    Mes remerciements sadressent en premier lieu mon directeur de thse Robert Vautard, qui a su me faire partagerson enthousiasme et sa passion pour la recherche. Jai particulirement apprci ses conseils scientifiques, ainsi que laconfiance et la grande libert quil ma accordes tout au long de ce travail.

    Mes remerciements sadressent galement aux membres du Jury et ses invits. Je remercie tout particulirementRobert Rosset et Gilles Bergametti davoir accept de rapporter cette thse. Je remercie Sasha Madronich et OlivierBoucher pour lintrt quils ont port ce travail. Je remercie Herv Le Treut pour mavoir fait lhonneur de prsider lejury. Enfin, je tiens remercier lADEME et AIRPARIF pour avoir permis la ralisation de ce travail en le finanant. Mesremerciements sadressent plus particulirement Philippe Lameloise et Christian Elichegaray pour avoir participau jury, et Nathalie Poisson pour son accompagnement au cours de la thse.

    Je remercie galement toute lquipe CHIMERE pour la disponibilit de chacun et leurs conseils scientifiques,mais aussi pour leur bonne humeur et leur gentillesse qui ont rendu ma thse encore plus agrable et enrichissante.Un merci tout particulier Bertrand Bessagnet qui ma fait dcouvrir le monde merveilleux des arosols et est restle tmoin de lavancement de cette thse tout au long de ces annes. Un grand merci galement Laurent Menut quia partag mon bureau pendant ces derniers mois de thse et qui ma beaucoup apport par ses encouragements et sonsoutien et ma permis de prendre plus de recul. Je remercie les autres membres de lquipe : Matthias Beekmann, CcileHonor, Nadge Lonard, Mohamed Maidi, Jean-Louis Monge, Isabelle Pison, Laurence Roul et Jean Roux.

    Je tiens aussi remercier tous ceux qui, par leur aide technique et scientifique, ont contribu la ralisation de ceprojet. Merci tout particulirement Hlne Chepfer, qui malgr son loignement gographique au Mexique a toujourst disponible et de bons conseils. Merci Patrick Chazette et Philippe Goloub pour les prcieuses discussions etconseils qui mont donn une bonne vision du monde de la tldtection. Merci Vincent-Henri Peuch pour lintrtport ce travail.

    Je remercie galement AIRPARIF pour son active collaboration ce travail par lintermdiaire de Mireille Lattuatiet Frdrique Moreto. Je tiens remercier AERONET, le LOA et le CNES pour la mise la disposition de leurs donnes

    Merci Eliane Rier, Martine Roux, France-Lise Robin et Stphane Sportouch pour leur aide prcieuse lors desdmarches administratives. Merci Marie-Claire Lanceau pour son travail de recherche bibliographique et sa bonnehumeur au quotidien.

    Bien sr, un tel projet naurait pu tre ralisable sans le support logistique et informatique apport par Jean-LouisMonge, Christophe Boitel, Raymond Armante, Karim Ramage, Patrick Rabranteau et Bernard Bonnet.

    Jaimerais dire un grand merci tous ceux qui ont rendu lambiance si agrable au LMD, sur qui jai pu compter,qui mont encourag quand jen avais besoin : Nicolas Arnault, Sophie Bastin, Asma Ben Rehouma, Michel Capderou,Marjolaine Chiriaco, Olivier Chomette, Chantal Claud, Juan Cuesta, Abdulaye Deme, Michel Desbois, Philippe Dro-binski, Thomas Dubos, Fadoua Eddounia, Fabien Gibert, Andr Guilbaud, Martial Haeffelin, Albert Hertzog, RobertKandel, Anne Mathieu, Yohan Morille, Flore Mounier, Eric Pequignot, Clmence Pierangelo, Christophe Pitras, RmyRoca, Claudia Stubenrauch, Andr Szantai, Franois Vial, Ta-Feng Yang. Merci Franck Chopin qui ma accueilli dansson bureau pendant les travaux.

    Tout au long de ma thse, jai pu mappuyer sur le soutien sans faille et les encouragements sans limites de mafamille et de mes amis. Je remercie tout particulirement mes chers parents et mon petit frre qui ont toujours t detrs bons conseils et dun optimisme toute preuve.

    Pour finir, un grand merci mon chri Grgory qui a partag cette thse au quotidien avec moi, et a su mapporterlquilibre ncessaire pour me faire oublier les moments difficiles. Quel courage !

  • Table des matires

    1 Introduction gnrale 91.1 Problmatiques de la pollution atmosphrique en milieu urbain . . . . . . . . . . 9

    1.2 Lenjeu de ltude des arosols atmosphriques . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10

    1.3 La rglementation et le dispositif de surveillance . . . . . . . . . . . . . . . . . 11

    1.4 tat de la pollution particulaire en Ile-de-France . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12

    1.5 Vers la modlisation des arosols de pollution . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13

    1.6 Objectifs scientifiques de la thse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15

    1.7 Plan de la thse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17

    2 Les arosols atmosphriques 192.1 Proprits physico-chimiques des arosols . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19

    2.1.1 Origine des particules . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19

    2.1.2 Distribution en taille et mcanismes de formation . . . . . . . . . . . . . 21

    2.1.3 Composition chimique des arosols . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23

    2.1.4 Les proprits hygroscopiques des particules . . . . . . . . . . . . . . . 26

    2.1.5 Le cas particulier de larosol urbain . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27

    2.2 Les proprits optiques de larosol . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28

    2.2.1 Sections efficaces et albdo de diffusion simple . . . . . . . . . . . . . . 29

    2.2.2 Indice de rfraction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30

    2.2.3 Coefficient dextinction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31

    2.2.4 paisseur optique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33

    2.2.5 Influence de lhumidit relative . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 34

    2.2.6 Influence du type de mlange considr . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35

    2.3 Modlisation des arosols : tat de lart . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37

    2.3.1 Paramtrisation de la composition chimique des particules . . . . . . . . 38

    2.3.2 Paramtrisation de la distribution en taille des particules . . . . . . . . . 41

    2.3.3 Performances des modles actuels et principales sources dincertitude . . 46

    2.4 Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 49

  • 6 TABLE DES MATIRES

    3 Modlisation des arosols de pollution avec le modle CHIMERE 513.1 Prsentation gnrale du modle CHIMERE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 52

    3.1.1 Le principe de modlisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 523.1.2 La gomtrie du modle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 533.1.3 Donnes mtorologiques dentre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 563.1.4 Le transport . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 563.1.5 Le mcanisme chimique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 573.1.6 La prise en compte des missions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 573.1.7 Les conditions aux limites et initiales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 59

    3.2 Prise en compte des arosols . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 603.2.1 Composition chimique et distribution des arosols . . . . . . . . . . . . 603.2.2 Modlisation de la dynamique des arosols . . . . . . . . . . . . . . . . 613.2.3 Chimie de larosol . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 643.2.4 Dpt de particules . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 66

    3.3 Amliorations apportes au cours de la thse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 673.3.1 Lquilibre thermodynamique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 673.3.2 Formation htrogne du nitrate dans le mode grossier . . . . . . . . . . 683.3.3 Restitution des proprits optiques des arosols . . . . . . . . . . . . . . 69

    3.4 Cadastre dmission interrgional des particules primaires . . . . . . . . . . . . 693.4.1 Les sources de particules primaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 703.4.2 Adaptations des missions brutes au format modle . . . . . . . . . . . . 713.4.3 Bilan des missions particulaires en Ile-de-France . . . . . . . . . . . . . 723.4.4 Evaluation du nouveau cadastre dmission des PM . . . . . . . . . . . . 74

    3.5 Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 78

    4 valuation de la distribution spatiale des PM au sol 794.1 Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 794.2 valuation statistique du modle CHIMERE lchelle europenne . . . . . . . 80

    4.2.1 Distribution spatiale des arosols en Europe . . . . . . . . . . . . . . . . 804.2.2 Rsultats de validation du modle CHIMERE en Europe . . . . . . . . . 81

    4.3 valuation statistique du modle CHIMERE en Ile-de-France . . . . . . . . . . . 824.3.1 Prsentation de ltude . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 824.3.2 Rsultats de validation du modle CHIMERE en Ile-de-France . . . . . . 834.3.3 Article 1 : Modlisation des arosols en Ile-de-France . . . . . . . . . . 854.3.4 tudes de sensibilit complmentaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 99

    4.4 Caractrisation simule de larosol en Ile-de-France . . . . . . . . . . . . . . . 1054.4.1 Concentrations des PM10 et PM2,5 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1054.4.2 Composition chimique de larosol . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1074.4.3 Distribution granulomtrique de larosol . . . . . . . . . . . . . . . . . 111

    4.5 Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 112

  • TABLE DES MATIRES 7

    5 tude de la composition de larosol de pollution en Ile-de-France 1135.1 Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1135.2 Ltude de larosol urbain lors de la campagne ESQUIF . . . . . . . . . . . . . 114

    5.2.1 Les principaux rsultats de ltude . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1145.2.2 Article 2 : Validation du modle CHIMERE lors de la campagne ESQUIF 117

    5.3 Formation htrogne du nitrate dans le mode grossier . . . . . . . . . . . . . . 1535.3.1 Les principaux rsultats de ltude . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1535.3.2 Article 3 : Contribution de la formation htrogne du nitrate grossier en

    Europe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 155

    6 valuation de la distribution verticale des arosols 1776.1 Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1776.2 Fonctionnement du Lidar Nuages Arosols (LNA) . . . . . . . . . . . . . . . . . 178

    6.2.1 Principe du lidar de rtrodiffusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1786.2.2 Equation du lidar . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 179

    6.3 Comparaisons LNA / CHIMERE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1796.3.1 Objectifs de ltude et mthodologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1796.3.2 Principaux rsultats de la comparaison . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1806.3.3 Article 4 : Comparaisons LNA/CHIMERE . . . . . . . . . . . . . . . . 183

    7 Vers une validation laide des donnes spatiales 2037.1 Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2037.2 Observations spatiales POLDER . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2047.3 tude dun pisode de pollution partir des donnes POLDER-2 . . . . . . . . . 2057.4 Article 5 : Rsultats de la comparaison CHIMERE/POLDER-2 . . . . . . . . . . 207

    8 Conclusions et Perspectives 2258.1 Objectifs et rsultats . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 225

    8.1.1 valuation statistique des erreurs de modlisation en surface . . . . . . . 2268.1.2 valuation de la distribution verticale des arosols partir des donnes de

    tldtection . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2278.2 Perspectives de ce travail et enjeux scientifiques venir . . . . . . . . . . . . . . 229

    A Couplage avec le modle ISORROPIA 233

    B Modlisation des arosols lchelle continentale 241

  • Chapitre 1

    Introduction gnrale

    1.1 Problmatiques de la pollution atmosphrique en milieu urbain

    La pollution atmosphrique lie aux activits humaines nest pas un phnomne rcent. Sonorigine remonte linvention du feu : depuis toujours le chauffage au bois et au charbon estune source majeure de la pollution de lair dans les espaces confins. Cette pollution na cessdvoluer avec les progrs raliss au cours de lhistoire et ds lAntiquit, le dveloppement dela mtallurgie a conduit des missions de plomb dont des traces ont t retrouves dans lescalottes glaciaires (Hong et al. 1994). Toutefois, ce nest que depuis la rvolution industrielledu 19me sicle que lindustrialisation et lurbanisation outrance, accompagnes dmissionsnon contrles de polluants gazeux et particulaires dans latmosphre, ont eu des rpercussionsproccupantes sur la sant, lenvironnement et le climat.

    Les effets de la pollution se font tout dabord ressentir dans les zones industrialises et urba-nises. Ainsi, ds les annes 30-50, marques par une srie dpisodes tragiques, les populationsprennent conscience des effets nocifs de la pollution sur la sant : en 1930 dans la valle de laMeuse, puis en 1952, 1956 et 1957 Londres, laugmentation brutale des concentrations de di-oxyde de soufre et de particules atmosphriques lie des conditions mtorologiques stagnanteset lutilisation effrne des combustibles fossiles est lorigine dun fort excs de mortalit (plusde 4000 dcs en 1952, Brimblecombe (1987)).

    Dans les annes 50 apparaissent galement les premiers pisodes de pollutions photochimiques Los Angeles (Haagen-Smit 1952; Haagen-Smit and Fox 1956) : en prsence dun fort ensoleille-ment, les missions doxydes dazote et de composs organiques volatiles gnres essentielle-ment par le trafic automobile conduisent la formation de polluants secondaires tels que lozone.

    Au cours des annes 80, la pollution atmosphrique devient galement une proccupation lchelle rgionale avec la reconnaissance de son impact sur les cosystmes forestiers et les eauxde surface. Lacidification des pluies ( pluies acides ) lie loxydation des polluants gazeuxdans latmosphre tels que le dioxyde de soufre et les oxydes dazote sont responsables de laci-dification des lacs et le dprissement des forts en Europe et en Amrique du Nord.

  • 10 Introduction gnrale

    Cette prise de conscience du risque encouru pour lavenir de notre atmosphre et de la nces-sit dune politique adapte pour traiter ces problmes a t renforce par les tudes scientifiquesmenes depuis les annes 70, qui ont alert le grand public sur le dveloppement de la pollutionurbaine, mais galement sur les effets de la pollution lchelle plantaire, avec notamment ladestruction de la couche dozone et laugmentation de leffet de serre. Mme si des efforts im-portants en matire de rductions des missions industrielles ont t raliss depuis en Europe etaux Etats-Unis, permettant de limiter considrablement les rejets de polluants gazeux (tels que ledioxyde de soufre), les problmes de pollutions restent toujours dactualit, notamment avec ladcouverte rcente des dangers sanitaires lis aux fines particules et aux mtaux lourds. Dautrepart, la pollution photochimique se rgionalise, avec lapparition dpisodes extrmes, commecelui qui a touch lEurope en t 2003 en raison de conditions climatiques et de tempraturesexceptionnelles.

    Ces phnomnes de pollution deviennent particulirement inquitants dans les mgalopolesmergentes en Inde, Chine, Amrique Latine ou Afrique o plusieurs dizaines de millions dha-bitants subissent continuellement de svres pisodes de pollution. Les perspectives davenir nesont gure encourageantes avec une urbanisation croissante et non matrise des pays du sud. Se-lon lAgence de lEnvironnement, dici 2030 leur taux durbanisation passera de 30 70% laissantprsager des taux de pollution de plus en plus inquitants.

    Aujourdhui, cette pollution urbaine est la fois photochimique et particulaire. Cependant nosconnaissances sur les particules darosols, beaucoup plus complexes, sont nettement en retardpar rapport celles des polluants gazeux. En effet, contrairement dautres composs atmosph-riques, les arosols ne sont pas constitus par une entit chimique bien dfinie, mais un mlangehtrogne dont chaque lment est caractris par un tat, une composition chimique, une gra-nulomtrie et une dynamique dvolution dans latmosphre. Leur diversit provient de leur ori-gine et de leur nature. Ainsi, on peut distinguer les particules primaires, dorigine anthropique(ex. industrie, transport, chauffage rsidentiel) ou naturelle (ex. volcans, rosion, resuspension despoussires du sol, feux de brousse, embruns marins), mises directement dans latmosphre, etles particules secondaires, produites par des ractions chimiques et des processus complexes telsque la nuclation et la condensation. La connaissance de ces particules, de leurs mcanismes deformation et dvolution, ainsi que leurs interactions et effets sur lenvironnement sont encore malconnus et ncessitent de la part de la communaut scientifique des efforts de recherche importants.

    1.2 Lenjeu de ltude des arosols atmosphriques

    Ltude de la pollution particulaire a pris un essor considrable ces dix dernires annes. Lin-trt scientifique grandissant pour les arosols est motiv avant tout par les craintes quant leurseffets sur la sant publique et le climat terrestre, mis en vidence lors de nombreuses tudes scien-tifiques.

    A lchelle globale, les arosols sont au coeur des proccupations actuelles sur le changementclimatique. Les tudes rcentes ont dmontr que la prsence darosols dans latmosphre mo-

  • 1.3 La rglementation et le dispositif de surveillance 11

    difiait de faon importante le bilan radiatif terrestre, soit en augmentant directement la quantitde lumire rflchie vers lespace, soit en intervenant indirectement dans la formation des nuageset des prcipitations (Kiehl and Briegleb 1993; IPCC 2001; Anderson et al. 2003). Labsorptionet la diffusion du rayonnement solaire incident par les particules conduisent gnralement unrefroidissement du systme climatique pouvant compenser localement le forage positif d auxgaz effet de serre.

    Aux niveaux rgional et local, prs des grandes agglomrations urbaines et industrielles, lesarosols sont responsables des pisodes de pollution particulaire ayant des rpercussions sur laqualit de lair et la visibilit, et par consquent sur la sant humaine. De nombreuses tudespidmiologiques (Moshammer and Neuberger 2003; Hauck et al. 2004) confirment lexistencedun lien fort entre les concentrations en arosol et laugmentation des maladies respiratoires etcardiovasculaires observe ces dernires annes. Ainsi, les particules fines PM2,5 (de diamtrearodynamique infrieur 2,5 m) ont t associes un surcrot de mortalit denviron 6500victimes par an en France (AFSSE 2004), bien que les constituants de larosol responsables deleur toxicit et les mcanismes daction ne soient pas encore clairement identifis.

    Les arosols ont galement une influence sur la chimie atmosphrique. En raison de leurs effetssur le rayonnement, ils modifient les taux de photolyse et par consquent la production de lozone(Jacobson 1998). Ils peuvent jouer un rle dans la cration ou la destruction despces gazeusespar ractions htrognes, en catalysant leur surface des ractions chimiques (Jacob 2000).

    1.3 La rglementation et le dispositif de surveillance

    Ces effets nfastes pour lhomme et lenvironnement ont motiv la mise en place dun certainnombre de rsolutions et de dispositifs lgislatifs aux chelles mondiale et europenne, tels quela convention internationale de Genve de 1979 sur la pollution transfrontalire et les directiveseuropennes, visant lutter activement contre la pollution atmosphrique. Ces dispositifs imposentdes actions de surveillance et de prvision des concentrations des polluants, et dfinissent despolitiques de contrle et de rduction des missions. En France, la Loi sur lAir et lUtilisationRationnelle de lEnergie (LAURE) du 30 dcembre 1996 reconnat le droit de respirer un air quine nuise pas la sant, et implique la cration dun rseau de surveillance et la mise en place duneprocdure dinformation de la population, assurs par les Associations Agres de Surveillance dela Qualit de lAir (AASQA). En matire de pollution particulaire, lapplication de la directiveeuropenne de 1999 prvoit des seuils annuels et journaliers ne pas dpasser. Ainsi, pour lesPM10, les valeurs limites sont fixes 40 g m3 pour 2005 et 20 g m3 pour 2010 enmoyenne annuelle, tandis que la valeur moyenne journalire de 50 g m3 ne devrait pas tredpasse plus de 35 fois/an en 2005 et 7 fois/an en 2010.

    Limplantation des rseaux de mesure au voisinage des grandes agglomrations a permis desuivre lvolution spatio-temporelle des concentrations des particules et des autres polluants ga-zeux. Selon des tudes rcentes (Van Dingenen et al. 2004; Putaud et al. 2004) menes sur une

  • 12 Introduction gnrale

    trentaine de sites en Europe, les concentrations moyennes annuelles des PM10 dans les zones ru-rales, priurbaines et urbaines varient entre 10 et 40 g m3 et sont gnralement conformes auxobjectifs de qualit fixs pour 2005 (40 g m3). Cette grande variabilit des concentrations etdes caractristiques de larosol entre ces diffrents sites europens souligne limportance de lacaractrisation locale des arosols, particulirement dans de grandes villes o ils rsultent aussibien du transport continental que des sources locales de pollution. Cest le cas notamment de largion parisienne qui fera lobjet de notre tude. Elle est influence la fois par des masses dairpollues provenant des rgions de fortes missions telles que le Benelux ou la Ruhr et charges enpolluants primaires et secondaires, auxquelles viennent galement sajouter les missions localesdes polluants.

    1.4 tat de la pollution particulaire en Ile-de-France

    La rgion parisienne a t dote ds les annes 60 de rseaux de surveillance de la qualit delair, exploits par les laboratoires de la ville de Paris et de la Prfecture de Police. Depuis 1979,cette surveillance est assure de faon continue par AIRPARIF, qui a contribu la modernisationdes quipements et la diversification des polluants mesurs. Les mesures de la pollution particu-laire, disponibles depuis plus de 40 ans, ont fortement volu : lancienne mthode de mesure ditedes fumes noires qui consistait mesurer le degr de noirceur dun filtre collecteur pour d-terminer la teneur en particules carbones a t progressivement remplace par la mesure horairede la masse totale de particules fines (PM10 et PM2,5). Ainsi, depuis 1997, le rseau comporte 16points de mesures pour les PM10 et 5 pour les PM2,5, principalement concentrs dans la ville deParis.

    Ces mesures indiquent que la pollution particulaire a considrablement volu en rgion pa-risienne depuis les annes 60 (Figure 1.1). La modification de lactivit conomique locale, ainsique lutilisation croissante du gaz naturel et de lnergie nuclaire en remplacement du fuel et ducharbon, sont lorigine dune forte baisse des concentrations des particules atmosphriques. Lesteneurs moyennes hivernales des fumes noires ont baiss de 80% en quarante ans, passant deplus de 160 g m3 environ 20 g m3 pour les sites de pollution urbaine de fond non influencsdirectement par le trafic automobile. Les niveaux semblent se stabiliser depuis 1992. Les donnesde PM10 et PM2,5 ne permettent pas encore une analyse significative de leur volution, mais les ni-veaux atteints sont en dessous des seuils fixs comme objectif de qualit pour la pollution de fond.Malgr cette trs forte diminution des fumes noires ces dernires dcennies, grce aux progrsraliss dans le domaine des missions industrielles et du chauffage urbain, les particules restentun problme dactualit. En effet, la nature de ces particules a chang avec le dveloppement duparc automobile de type Diesel, qui met des particules trs fines pouvant pntrer facilement dansles voies respiratoires. Les mesures futures de rduction devront ainsi porter la fois sur la masseet le nombre de fines particules.

    Ces mesures de particules permettent un diagnostic local prcis des niveaux de pollution etltude de leur volution temporelle. Cependant, mme si les capteurs sont placs des endroits

  • 1.5 Vers la modlisation des arosols de pollution 13

    FIG. 1.1 volution de la pollution particulaire Paris entre 1956 2000. Source AIRPARIF.

    stratgiques, on peut sinterroger sur la reprsentativit des mesures ponctuelles sur la pollutiondune rgion. En effet, en raison de leur faible couverture spatiale notamment en dehors des zonesurbaines, ltude de lvolution spatio-temporelle des concentrations des particules semble forte-ment limite partir des seules observations au sol. Par ailleurs, les observations de routine portantsur la masse totale des arosols ne permettent pas une caractrisation de leur composition chimiqueet de leur distribution granulomtrique, paramtres essentiels la comprhension de leur impactsanitaire. Actuellement, seule la modlisation numrique peut permettre de dcrire cette diversiten composition et en taille des arosols, ainsi que leur volution dans latmosphre rsultant din-teractions complexes entre, dun ct, leurs missions et transformations chimiques et, de lautre,les conditions environnementales responsables de leur diffusion.

    1.5 Vers la modlisation des arosols de pollution

    Les modles sont ainsi devenus des outils indispensables pour ltude de la pollution atmo-sphrique. Ils offrent une reprsentation simplifie des processus atmosphriques complexes, entranscrivant les quations dvolution des missions, de la chimie et du transport des polluantsdans latmosphre. Ils permettent ainsi dintgrer lensemble des connaissances actuelles et de lesvrifier en confrontant les simulations numriques et les observations.

  • 14 Introduction gnrale

    A lorigine, les problmes de pollution concernaient principalement des composs primaireschimiquement peu ractifs (CO et SO2 prs des sources) et les tudes de modlisation portaientuniquement sur leur transport et leur dispersion dans latmosphre laide de modles mtorolo-giques. Avec lapparition de la pollution photochimique, des modles plus complexes ont d tredvelopps afin de prendre en compte les processus de formation des polluants secondaires tels quelozone partir de leurs prcurseurs primaires. Les premiers modles de chimie-transport ddis ltude de la pollution atmosphrique ont ainsi t dvelopps dans les annes 1970 (Reynoldset al. 1973) et taient consacrs uniquement ltude des polluants gazeux.

    Des progrs considrables ont t raliss depuis (Meng et al. 1998), notamment grce au d-veloppement des moyens de calcul numrique. Les modles actuels permettent ainsi de simuler defaon raliste le transport et la chimie des principaux polluants photochimiques et commencent intgrer depuis peu des paramtrisations darosols plus ou moins complexes (Seigneur 2001;Hass et al. 2003; Zhang et al. 2004). Ils fonctionnent diffrentes chelles spatio-temporelles :utiliss aussi bien lchelle globale (> 200 km de rsolution) ou continentale (10 100 km dersolution) avec des zooms rgionaux sur des zones urbaines (1 10 km de rsolution), ils per-mettent deffectuer des simulations allant de quelques jours pour ltude des pisodes de pollution, plusieurs annes dans le cas dlaboration de scnarios climatiques.

    Les modles ddis ltude de la pollution urbaine visent rpondre la fois aux exigencesde surveillance et de prvision de la qualit de lair et aux objectifs de recherche scientifique. Ilssont des outils oprationnels mis en oeuvre en temps rel pour la prvision des pisodes de pollu-tion permettant danticiper les risques lis aux pics de pollution et de mettre en place des mesuresde rduction des missions afin de limiter lexposition des populations. Ils constituent galementune aide prcieuse linterprtation des observations et permettent une description de la distri-bution spatio-temporelle des polluants sur les zones faiblement couvertes en observations. Cestparticulirement vrai pour les arosols dont les mesures sont concentres dans les zones urbaineset ne contiennent pas dinformation sur leur composition. Enfin, les modles sont des outils derecherche permettant de tester les paramtrisations thoriques et dtudier les processus influen-ant la pollution atmosphrique. Leur application dans le cadre de llaboration des scnarios derduction des missions long terme est une aide considrable la prise de dcision.

    Contrairement la modlisation des composs gazeux dont les mcanismes dvolution sontbien connus aujourdhui, celle des arosols est en constante volution et comporte encore de nom-breuses incertitudes. Des interrogations subsistent tant au niveau de la prise en compte des mis-sions anthropiques et naturelles que sur lvolution et le vieillissement des arosols dans latmo-sphre, ou encore sur les mcanismes de formation des composs secondaires et leur partition entreles phases gazeuses et particulaires (Seigneur 2005). Nos connaissances sont galement limitessur les mcanismes dinteractions entre larosol et les phases aqueuses et gazeuses qui conduisent une modification de son volume, de sa composition chimique et donc de ses proprits. Bien quedes progrs incontestables aient t raliss dans la comprhension et la modlisation des pro-cessus lis la physique et la chimie des arosols, un certain nombre de questions se posentaujourdhui quant lutilisation de ces modles de faon oprationnelle :

  • 1.6 Objectifs scientifiques de la thse 15

    Les modles actuels arrivent-ils reproduire de faon raliste la distribution spatio-temporelledes concentrations darosols dans la basse troposphre ? Quen est-il de leur compositionchimique et de leur distribution granulomtrique ?

    Les modles actuels prennent-ils en compte les principaux processus de formation et dvo-lution des arosols dans latmosphre ? Les paramtrisations actuelles sont-elles satisfai-santes pour prvoir les pisodes de pollution ?

    Que nous apprennent-ils sur les proprits des arosols dans les zones proches ou loignesdes sources (composition, distribution en taille, proprits optiques) ?

    Ainsi, lutilisation de modles darosols ncessite au pralable une valuation de leurs perfor-mances laide des observations, afin de sassurer de leur capacit prvoir les concentrationsdes particules ou encore fournir une rponse correcte aux scnarios de rduction dmissions. Lavalidation des modles constitue donc une tape cl pour lamlioration de la prise en compte desarosols et doit tre mene conjointement leur dveloppement.

    Le modle CHIMERE, qui fera objet de cette thse, a t dvelopp pour rpondre cet ob-jectif de surveillance et de prvision de la pollution atmosphrique. Il est utilis de faon opra-tionnelle depuis lanne 2000 pour la prvision de la pollution photo-oxydante aux chelles conti-nentale et rgionale, tout dabord dans le cadre du projet PIONEER (Prvisibilit et Incertitudesde lOzoNe lEchelle Europenne et Rgionale) puis au sein de la plate-forme nationale de sur-veillance de la qualit de lair PREVAIR. Sa capacit simuler correctement les concentrationsdozone aux niveaux rgional et europen a t dmontre plusieurs reprises et sa sensibilitaux donnes dentre a t identifie (Schmidt et al. 2001; Vautard et al. 2001; Vautard et al.2003). Depuis 2002, le modle CHIMERE intgre galement un module darosol dvelopp encollaboration entre lInstitut Pierre Simon Laplace, lINERIS et le Laboratoire dArologie. Cemodule prend en compte des paramtrisations complexes dcrivant la chimie multiphasique, lathermodynamique et la microphysique des particules. Il est encore en phase de dveloppement etde validation et ses performances sont testes depuis deux ans en temps rel en mode prvision lIPSL.

    1.6 Objectifs scientifiques de la thse

    Ce travail de thse sinscrit dans le cadre de cet effort damlioration des modles numriquesde chimie-transport darosols, avec pour principal objectif la mise en place de mthodes de va-lidation permettant une valuation objective des incertitudes intervenant dans la modlisation desparticules au niveau rgional. Dans la suite de ce manuscrit, par simplification nous parlerons de modles darosols au lieu de modles de chimie-transport darosols .

    Aujourdhui lvaluation des modles darosols est limite par un certain nombre de pro-blmes. Elle souffre tout dabord du manque de donnes sur la rpartition tridimensionnelle desarosols ne permettant pas de valider et de contraindre les modles. En effet, les mesures darosol

  • 16 Introduction gnrale

    disponibles de faon continue sont peu nombreuses et principalement localises dans lagglom-ration urbaine, ce qui rend difficile lvaluation de la distribution spatiale au niveau rgional. Deplus, ces mesures de routine sont effectues au sol et ne sont pas reprsentatives des concentra-tions simules en altitude. Seules des mesures indirectes issues de la tldtection active par lidarsont disponibles sur la verticale, mais ne sont pas utilises pour la validation des modles car ellesne sont pas directement comparables avec les sorties des modles. Ainsi, labsence de mesuresdirectes de particules dans la basse troposphre ne permet pas de valider le mlange vertical desparticules dans la couche limite. Par ailleurs, le manque de donnes sur la spciation chimiqueet la distribution granulomtrique des particules ne permet pas de valider leurs processus de for-mation et dvolution dans latmosphre. Seules quelques campagnes de mesures fournissent cesinformations de faon ponctuelle. En raison de toutes ces limitations, une question se pose alors :Comment valider les modles darosol de faon objective et complte ?

    Pour rpondre cette question, nous nous intresserons au cours de la thse aux limites destechniques actuelles de validation des modles darosols, bases sur lutilisation des seules don-nes au sol. Pour pallier ce manque dobservations, nous chercherons galement dvelopperune nouvelle mthode de validation permettant dexploiter les observations par tldtection ac-tive et passive depuis le sol et depuis lespace. Dautre part, la confrontation avec ces observationspermettra lidentification des erreurs et incertitudes de modlisation, mais galement un retour po-sitif sur un certain nombre de paramtres cls du modle. La connaissance de ses limites et de sasensibilit bnficiera son utilisation en oprationnel pour la prvision.

    Ces diffrents points seront abords au cours de la thse autour de trois thmes principauxvisant quantifier et corriger les erreurs de modlisation, proposer de nouvelles techniques devalidation, et caractriser les proprits des arosols dans une agglomration urbaine telle queParis.

    valuation des performances du modle CHIMERE et amlioration des paramtrisationsexistantes

    Un travail de validation du modle CHIMERE sera men tout au long de la thse en se ba-sant sur lutilisation conjointe des mesures in situ fournies par les rseaux de surveillance de laqualit de lair, les instruments lidar et photomtre solaire, ainsi que les donnes satellitaires etles observations aroportes issues des campagnes de mesure. La confrontation des simulationsdu modle avec ces observations permettra de juger de sa capacit simuler les concentrations etles proprits des arosols lchelle europenne et plus particulirement dans une agglomrationurbaine telle que Paris. Ces tudes de validation seront menes aussi bien sur de longues priodes,typiquement saisons estivale et hivernale, que sur des pisodes de pollution comme celui qui sestproduit lors de la canicule de lt 2003.

    Au cours de ces tudes, nous nous intresserons aux trois aspects essentiels de la validation, savoir la qualit des donnes dentre, les paramtrisations du modle et les observations. Nouschercherons ainsi quantifier dune part les incertitudes lies aux donnes dentre du modle,

  • 1.7 Plan de la thse 17

    telles que les champs mtorologiques, les missions et les conditions aux limites influenant laformation et le transport des particules, et dautre part les incertitudes intervenant dans les para-mtrisations du modle. Enfin, nous nous interrogerons sur les incertitudes dans les observationsutilises pour la validation, lies aux artefacts de mesure et leurs interprtations. Ces validationspermettront de diagnostiquer les principales erreurs du modle, que nous tenterons de corriger,et didentifier certains processus manquants. De nouvelles paramtrisations seront proposes afindamliorer la reprsentation des arosols dans le modle. Elles concerneront principalement laprise en compte dans le modle des mcanismes de formations des nitrates dans le mode grossier.

    Dveloppement de nouvelles techniques de validation

    Un intrt particulier sera port lutilisation des donnes de tldtection disponibles au-jourdhui sur un grand nombre de sites et fournissant des informations complmentaires sur ladistribution verticale des arosols. Nous proposerons ainsi une mthodologie de calcul permet-tant de traduire les concentrations darosol simules en sortie de modle en grandeurs optiquesdirectement comparables avec les mesures. Ceci ouvrira une nouvelle porte vers lutilisation desobservations satellites, qui ont une plus grande extension spatiale et permettent de suivre plusaisment les masses dair et de valider les modles.

    Caractrisation de larosol urbain

    Pour rpondre aux objectifs de description et de caractrisation de larosol urbain, une tudephnomnologique sera mene en rgion parisienne. Elle bnficiera de la synergie entre les si-mulations du modle CHIMERE et les mesures des proprits chimiques et optiques des arosols.Nous nous intresserons ainsi la composition chimique de larosol et la distribution spatialede ses principaux constituants, afin de comprendre linfluence de la production locale des parti-cules par rapport leur transport longues distances. Ltude dtaille de la composition et de ladistribution granulomtrique des arosols dans lenvironnement pri-urbain sera galement meneau cours dun pisode de pollution estivale et sappuiera sur les observations de la campagne demesure ESQUIF effectue dans la rgion parisienne en t 2000.

    1.7 Plan de la thse

    Ce travail est organis en huit chapitres et deux annexes. Les rsultats des tudes menes sontprsents sous forme de cinq articles dont deux ont t publis, un a t accept pour publicationet deux ont t soumis dans des journaux scientifiques.

    Le chapitre 2 prsente le contexte scientifique de ltude, introduisant les notions essentiellessur les proprits physicochimiques et optiques des particules atmosphriques, ainsi que les prin-cipes gnraux de modlisation des arosols. Une discussion sur les modles actuels et leurs per-formances sera galement mene et permettra didentifier les difficults rencontres actuellementen matire de modlisation des arosols. Nous aborderons ces difficults au cours de la thse ettenterons dapporter une contribution.

  • 18 Introduction gnrale

    Le chapitre 3 propose une description du modle CHIMERE et de son module darosol, objetsde cette tude de validation. Un intrt particulier sera port aux amliorations apportes au coursde la thse. Parmi ces amliorations, lintgration dans le modle du nouveau cadastre dmissionsdes particules primaires en Ile-de-France sera prsente et une validation qualitative de ce cadastresera effectue laide des observations.

    Dans le chapitre 4, la capacit du modle simuler la distribution spatio-temporelle des aro-sols sera value lchelle europenne, puis dans la rgion Ile-de-France par confrontation avecles mesures routinires au sol. Lors de cette validation nous chercherons identifier les principaleserreurs du modle et tester sa sensibilit aux donnes dentre et certaines paramtrisations.Une fois le modle valid, il sera utilis pour dresser une caractrisation phnomnologique desproprits de larosol urbain en Ile-de-France incluant la composition et la distribution granulo-mtrique moyennes de larosol.

    Le chapitre 5 est consacr ltude spcifique de la pollution particulaire au cours dun pisodede pollution estivale document lors de la campagne ESQUIF en Juillet 2000. Ltude cherchera valuer la capacit du modle simuler la composition chimique et la granulomtrie de larosolurbain, ainsi que son volution dans le panache de lagglomration parisienne en se basant sur undispositif exprimental au sol et en altitude sans prcdent en Ile-de-France. De nouveaux m-canismes de formation des arosols, mis en vidence lors de cette comparaison, seront introduitsdans le modle et leur impact sera test.

    Dans le chapitre 6, la distribution verticale des arosols dans la basse troposphre simule parle modle sera value de faon objective laide des observations lidar et photomtre solaire.La mthode dveloppe pour la restitution des paramtres optiques observs tels que les profilsde rtrodiffusion lidar partir des sorties modles sera prsente. Les liens entre la compositionchimique et la distribution granulomtrique de larosol avec sa signature optique seront explors.Les rsultats de la comparaison seront discuts lors dun pisode de pollution, mais galement surune base annuelle. Nous nous intresserons galement aux limites de lutilisation des donnes detldtection active pour la validation des modles.

    Dans le chapitre 7, la comparaison des proprits optiques de larosol sera tendue aux don-nes satellites de linstrument POLDER. Cette tude visera dune part valuer la capacit dumodle simuler un pisode de pollution extrme survenu en t 2003 grce la large couverturespatiale du satellite, et dautre part elle cherchera caractriser les processus dominant le signaloptique de larosol. Lutilisation simultane des simulations modles et des donnes satellitespermettra galement de quantifier les incertitudes lies la restitution des proprits darosol partir des donnes spatiales. Finalement, leur utilisation ventuelle pour la surveillance de laqualit de lair sera galement examine.

    Le dernier chapitre contient les conclusions de ce travail et prsente les perspectives.

    Notons galement quen Annexe B une comparaison sera mene entre les utilisations off-line et on-line du modle ISORROPIA pour le calcul des concentrations lquilibre ther-modynamique des espces semi-volatiles.

  • Chapitre 2

    Les arosols atmosphriques

    Ce chapitre est ddi la prsentation des notions fondamentales sur les arosols et leurs pro-prits, ainsi qu la description des principes gnraux de modlisation numrique des particules.Dans la premire section (2.1), les diffrents constituants des arosols et leurs proprits micro-physiques sont dcrits. Ils sont essentiels la comprhension des interactions entre les arosolset le rayonnement, prsentes dans la deuxime section (2.2). Dans la dernire partie (2.3) de cechapitre introductif, nous faisons un point sur les connaissances actuelles et les principales avan-ces en modlisation des arosols. Les diffrentes approches de la prise en compte des particulesdans les modles sont dcrites en sappuyant sur une tude bibliographique, et leurs avantages etinconvnients sont discuts.

    2.1 Proprits physico-chimiques des arosols

    Les arosols sont des constituants majeurs de latmosphre au mme titre que les polluantsgazeux. Cependant, leur diversit en taille et en composition chimique lie la varit de leurssources en font lun des constituants les plus complexes de latmosphre. Ils sont dfinis commeune suspension de fines particules liquides et/ou solides dans lair. Cette dfinition introduit lanotion de systme complexe multiphasique. Ainsi, une description complte de larosol passepar la connaissance de sa distribution en taille, de sa composition chimique et de sa morphologie.

    2.1.1 Origine des particules

    La variabilit des sources dmission et des processus de formation des particules conduit une grande varit de types darosols. En fonction de leurs origines, les arosols peuvent treclasss en deux catgories :

    Les arosols primaires, mis directement dans latmosphre partir de sources naturellesou anthropiques. Les sources naturelles sont lies lrosion et la resuspension des pous-sires minrales du sol, les poussires volcaniques, les feux de biomasse ou les sels marins.

  • 20 Les arosols atmosphriques

    Les sources anthropiques sont issues principalement des rejets industriels (fumes, pous-sires,...), des trafics routier et arien, des combustions (usines, chauffage,...), de lincinra-tion des ordures ou encore des chantiers de construction ;

    Les arosols secondaires, rsultant de ractions chimiques en phase gazeuse (oxydation parlozone ou les radicaux hydroxyles) formant des espces condensables capables de se fixersur les particules existantes. Les arosols secondaires peuvent tre galement forms parla nuclation homogne dhydrocarbures, tels que les hydrocarbures aromatiques polycy-cliques (HAP).

    TAB. 2.1 Estimation des missions annuelles (Tg/an) des principaux types darosols pour lanne 2000 (IPCC2001).

    SOURCES H.Nord H.Sud Global Min-MaxAEROSOLS SECONDAIRESSulfateissus de SO2 anthropique 106 15 122 69-214issus des gaz biogniques 25 32 57 28-118issus de SO2 volcanique 14 7 21 9-48Nitrateissus des NOX anthropique 12,4 1,8 14,2 9,6-19,2issus des NOX biogniques 2,2 1,7 3,9 1,9-7,6Carbone organiqueissu des COV anthropiques 0,15 0,45 0,6 0,3-1,8issu des COV biogniques 8,2 7,4 16 8-40AEROSOLS PRIMAIRESMatire organiqueFeux de biomasse 28 26 54 45-80Combustibles fossiles 28 0,4 28 10-30Dbris biogniques - - 56 0-90Carbone suieFeux de biomasse 2,9 2,7 5,7 5-9Combustibles fossiles 6,5 0,1 6,6 6-8Poussires industrielles - - 100 40-130Sels de mer 1440 1900 3340 2000-6000Poussires dsertiques 1800 349 2150 1000-3000Total sources anthropiques 153 18 271 134-403Total sources naturelles 3320 2326 5704 3097-9393

    Le Tableau 2.1 prsente la contribution des principales sources dmissions naturelles et anthro-piques estimes au niveau global pour lanne 2000 (IPCC 2001). Il illustre la grande diversit destypes dmissions et les incertitudes lies leur dtermination. Nous remarquons que les sourcesnaturelles sont responsables de plus de 90% des missions totales de particules, contre seulement5-10% pour les sources anthropiques. Les sources naturelles sont constitues principalement da-rosols minraux (38%) et de sels marins (59%). Quant la composante anthropique, elle est do-mine par les composs inorganiques (sulfates et nitrates) forms par la conversion gaz-particule

  • 2.1 Proprits physico-chimiques des arosols 21

    de leurs prcurseurs, et les particules secondaires (Andreae 1994), telles que le carbone organiquersultant de la condensation des composs organiques volatiles. La quasi-totalit des missionsanthropiques sont attribues lhmisphre nord (>90%) en raison de fortes activits industrielles.Ainsi, en France, les missions anthropiques des particules sont estimes prs de 500 kT pourles PM10 et 270 kT pour les PM2,5 pour lanne 2003 (Figure 2.1, CITEPA (2005)). Ces mis-sions sont principalement attribues aux activits dans lindustrie manufacturire (en particulierles chantiers de construction), lagriculture et le secteur rsidentiel (combustion) qui reprsententplus de 70% des missions totales de PM en France. Le trafic routier est galement une des sourcesmajeures de particules primaires prs des grandes agglomrations urbaines (voir section 3.4).

    FIG. 2.1 missions anthropiques des PM2,5 et PM10 en France pour lanne 2000 (unit Gg=kT). Source (CITEPA2005).

    2.1.2 Distribution en taille et mcanismes de formation

    La taille des particules atmosphriques varie de quelques nanomtres plusieurs dizainesde microns et influe sensiblement sur leur temps de sjour dans latmosphre, pouvant aller dequelques heures plusieurs semaines. De plus, les mcanismes de formation des particules, leursproprits physiques et optiques, ainsi que leur impact sur lenvironnement et la sant varientconsidrablement en fonction de leur taille. La distribution granulomtrique peut tre reprsenteen nombre, en masse, en volume ou en surface. Son volution est contrle par un systme com-plexe de processus physiques. Les mesures exprimentales de distribution spectrale proposes parWhitby (1978) font apparatre trois modes principaux :

    Le mode de nuclation contient des particules ultrafines de diamtre infrieur 0,1 m,formes principalement par condensation de vapeurs chaudes au cours de procds de com-

  • 22 Les arosols atmosphriques

    FIG. 2.2 Reprsentation schmatique de la distribution granulomtrique des arosols et de leurs mcanismes deformation et de dposition. Adapt de Whitby and Cantrell (1976).

    bustion temprature leve ou par nuclation homogne lors de leur refroidissement. Cesparticules peuvent ensuite grossir par coagulation entre elles ou avec les particules plusgrosses et ainsi passer dans le mode suprieur, ce qui constitue la perte principale dans cemode. Bien que le plus grand nombre de particules atmosphriques apparaisse dans le modenuclation, ces particules apportent une faible contribution la masse totale de particulesen raison de leur trs petite taille.

    Le mode daccumulation contient des particules de diamtre compris entre 0,1 et 2 mrsultant de la coagulation de particules en mode de nuclation et de la condensation devapeurs sur les particules existantes dont la taille augmente alors dans la gamme. Ce modecontribue de faon majeure la surface et la masse totale des arosols dans latmosphre.Le mode daccumulation est appel ainsi car les procds dlimination atmosphrique sontmoins efficaces dans cette gamme de tailles. Ces fines particules peuvent rester dans lat-mosphre durant des jours ou des semaines. Les dpts sec et humide (lessivage par lesprcipitations) sont les principaux processus par lesquels ces particules sont finalement li-mines de latmosphre.

  • 2.1 Proprits physico-chimiques des arosols 23

    Le mode de sdimentation ou grossier contient des particules de plus de 2 m, gnrale-ment formes par des procds mcaniques tels que lrosion olienne, les bris des vaguesocaniques, les oprations de broyage dans lindustrie, etc. Ces particules sont efficacementlimines par dcantation sous laction de la gravit. Leur dure de vie est donc faible, delordre de quelques heures quelques jours. Elles contribuent peu la concentration ennombre des particules, mais beaucoup leur masse totale.

    2.1.3 Composition chimique des arosols

    Les divers processus de formation et dvolution des particules dans latmosphre, voqusprcdemment, conduisent une grande varit de formes et de compositions dans le temps etlespace. Larosol atmosphrique est constitu dun mlange complexe de matire organique (lecarbone organique) et inorganique (le carbone suie ; les ions inorganiques dont les principaux sontsulfate, nitrate, ammonium, chlore, sodium, calcium ; les poussires minrales ; les mtaux telsque magnsium, aluminium, fer ; et leau).

    FIG. 2.3 La distribution en taille dC/dlogD des principaux composs inorganiques de larosol (ions sulfate, nitrate,ammonium, chlorure, sodium et hydrogne), adapt de Wall et al. (1988).

  • 24 Les arosols atmosphriques

    2.1.3.1 La composante carbone de larosol

    Dans les particules darosol, le carbone se trouve sous forme de carbone lmentaire (BC),appel aussi carbone suie et de carbone organique (OC), mis dans latmosphre lors des proces-sus de combustion incomplte dans le trafic, lindustrie et les feux de biomasse (Cachier 1998).Lors de la combustion, les missions produites contiennent directement du carbone suie ainsi quedes gaz, dont certains sont des prcurseurs darosols secondaires. Les arosols carbons sontconstitus gnralement dun coeur de graphite entour dune pellicule de composs organiquesoxygns. Quand ces fonctions organiques sont prpondrantes, on parle de carbone organique,alors quon parle de carbone suie lorsque le noyau de graphite domine. Cest la qualit de la com-bustion qui dtermine labondance relative de chacun des constituants. Ainsi, le rapport OC/BCdonne une bonne indication du type de pollution et de la proximit des sources. Dans le cas desarosols urbains, le rapport OC/BC est compris entre 1,5 et 2 (McDow et al. 1996).

    Le carbone suie BC. Le carbone suie provient essentiellement de la combustion de fuels fossilesou de feux de biomasse. La suie contient 50 70% de carbone amorphe, non soluble, dont lastructure est proche de celle du graphite, et 30 50% dhydrocarbures partiellement oxyds etdhydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP). Elle est compose de sphres agglomresen longues chanes carbones, formant de petites particules de 10 nm 100 nm de diamtre etconstituant le noyau de larosol. La formation de particules de suie au cours de la combustionest complexe : elle dbute par la formation de particules ultrafines (de 1 30 nm de diamtre) parnuclation homogne des HAP, qui sagglomrent ensuite pour former des particules de suie plusgrosses. Les particules de suie sont caractrises par un grand rapport surface/masse (prs de 100m2 g1) et constituent donc un substrat important pour la chimie htrogne.

    Les composantes organiques primaires et secondaires OC. La partie centrale de larosol,constitue de carbone lmentaire, est souvent entoure dune fine couche (film) amorphe pr-sentant de nombreuses fonctions organiques. Lorsque ces fonctions sont abondantes, on est enprsence de carbone organique particulaire. Une partie des espces organiques (primaires) se fixeds leur mission sur les particules (alcanes, acides organiques, etc.). Les espces carbones se-condaires (acides et diacides carboxyliques, aldhydes, etc.) se retrouvent quant elles en phaseparticulaire, suite loxydation des prcurseurs organiques gazeux.

    Les composs organiques secondaires sont des constituants importants de larosol qui peuventreprsenter une fraction significative de sa masse lors des pisodes de pollution et avoir un impactsur la visibilit et la diffusion de la lumire et lvolution des proprits physicochimiques delarosol lors du transport. Ils peuvent tre dorigine anthropique, forms partir des compossaromatiques, des alcanes et des alcnes longue chane, ou dorigine biognique, forms partirdes monoterpnes, des sesquiterpnes et des composs oxygns (Pun et al. 2000). Il existe unegrande incertitude sur lorigine et les modes de formation de ces produits organiques (Gelencseret al. 2000; Zappoli et al. 1999). A ce jour, seule leur formation partir des pinnes et de quelquesmonoterpnes est connue. Elle peut se produire en phase gazeuse (Griffin et al. 1999) ou en phase

  • 2.1 Proprits physico-chimiques des arosols 25

    aqueuse (Aumont et al. 2000). Larosol organique secondaire reprsente une fraction importantedu mode daccumulation.

    Notons galement quon parle souvent de la matire organique particulaire (POM) la place decarbone organique, qui inclut en plus du carbone, les atomes dhydrogne et doxygne constituantcette matire. La quantit de la POM peut-tre dduite de la masse dOC en appliquant un facteurmultiplicateur variant entre 1,2 et 1,7 selon le type darosol (Hegg et al. 1997; Turpin et al. 2000).Dans cette thse la valeur de 1,3 propose par Chazette and Liousse (2001) est utilise.

    2.1.3.2 Les arosols inorganiques

    Le sulfate et le nitrate sont des espces secondaires produites principalement par des rac-tions chimiques partir de leurs prcurseurs. Ainsi, les radicaux OH peuvent oxyder SO2 et NO2,respectivement en acide sulfurique (H2SO4) et en acide nitrique (HNO3). Le sulfate peut tre ga-lement produit par loxydation du DMS (dimthylsulfure) en rgions maritimes. Ces ractions seproduisent principalement pendant la journe, mais peuvent aussi avoir lieu la nuit, avec une cin-tique beaucoup plus lente. Pendant la nuit, les nitrates sont produits principalement par loxydationde NO2 par O3 qui conduit la formation des radicaux NO3. Ces derniers ragissent leur touravec le NO2 pour former du N2O5 qui peut shydrolyser en nitrate.

    Loxydation du SO2 en sulfate est beaucoup plus rapide en phase aqueuse (brouillard, nuages,etc.), quen phase gazeuse. Elle se produit par raction avec O3, H2O2 et O2. De mme, lhydro-lyse de N2O5 en nitrate est acclre en phase aqueuse. Compte tenu de sa pression de vapeursaturante de lordre de 106 hPa, H2SO4 se trouve essentiellement en phase particulaire. Il sas-socie gnralement avec NH3 pour former du sulfate dammonium. Au contraire, le HNO3 a unepression de vapeur saturante leve et ne passe en phase gazeuse que par dissolution dans les par-ticules aqueuses, ou en sassociant avec lammonium pour former du nitrate dammonium dans lemode daccumulation. Il peut aussi se fixer sur des composs particulaires, tels que les sels marinsou les poussires calcaires du mode grossier par raction avec Ca2+ ou Na + (Harrison and Kito1990; Wakamatsu et al. 1996).

    2.1.3.3 Les poussires minrales

    Larosol minral dorigine terrigne est form par lrosion des sols sous laction du vent :entrans par le vent, les gros grains de poussire se mettent rouler et rebondir sur le sol (pro-cessus de saltation), ce qui dtruit les agrgats et permet la mise en suspension des particules plusfines qui pourront tre transportes sur de longues distances. La vitesse seuil drosion qui rguleles missions dpend de la rugosit de la surface, de la taille des grains et de lhumidit des sols(Marticorena and Bergametti 1995). Les principales rgions dmission se situent dans les dsertsde lhmisphre nord. Ainsi, lors des pisodes sahariens , des quantits importantes de pous-sires minrales peuvent tre souleves des zones dsertiques du continent africain et transportesau-dessus de lEurope et de lAtlantique Nord. Les missions de poussires sont difficiles valuercar elles dpendent de facteurs climatiques. Elles reprsentent lune des contributions majeures aucontenu en arosol de latmosphre, en particulier dans les rgions tropicales et subtropicales.

  • 26 Les arosols atmosphriques

    Les estimations des missions globales indiquent quentre 1000 et 3000 Tg/an (IPCC 2001) sontinjectes par an dans latmosphre avec une trs forte variabilit spatiale et temporelle.

    Ces particules sont gnralement de grande taille : plus de 80% de poussires terrignes sontsitues dans le mode grossier, contre seulement 20% dans le mode daccumulation. Leur dure devie est trs variable car les plus grosses sont dposes rapidement sous leffet de leur poids alorsque la fraction submicronique peut rsider plusieurs semaines dans latmosphre. Leur composi-tion varie en fonction de leur origine. Ces particules ont la caractristique dtre peu hydrophiles.

    2.1.3.4 Les sels marins

    Larosol marin est produit principalement par lclatement des bulles dair emprisonnes lasurface des ocans sous laction du vent (Blanchard and Woodcock 1980; Monahan 1986). Cetteproduction est directement lie la vitesse du vent de surface, mais dpend galement de ltatde la mer et de la temprature de surface. Deux sortes de gouttelettes sont ainsi projetes danslatmosphre : les gouttes de film et les gouttes de jet. Leur formation se produit principalementdans lcume provoque par le dferlement des vagues lorsque la vitesse du vent est suprieure trois mtres par seconde. Le rayon des arosols marins est gnralement submicronique dans lecas des gouttes de film et compris entre 1 et 5 m dans le cas des gouttes de jet.

    Lorsque le vent dpasse les 15 ms1, dautres mcanismes de formation entrent en jeu,tels que lcrtement lors du dferlement des vagues, et produisent des particules de lordre dequelques dizaines de micromtres, jusquau millimtre. Du fait de leur grande taille, ces particulessont rapidement dposes par sdimentation et natteignent que rarement les ctes.

    2.1.4 Les proprits hygroscopiques des particules

    Le caractre hydrophile des particules dsigne leur pouvoir absorber leau. En prsence defortes humidits, leau fixe peut devenir le constituant majoritaire de larosol hydrophile, cequi peut entraner la modification de sa composition et par consquent de ses proprits optiques(section 2.2). La composante minrale (NO3 , NH

    +4 , Na

    +, etc.) est gnralement responsable desproprits hydrophiles de larosol (Saxena et al. 1995). Ainsi, les particules dorigine marine oules particules forte teneur en soufre sont fortement hydrophiles. Au contraire, les composs orga-niques, principalement dorigine primaire, tels que les alcanes, les alcnes et les acides organiques,sont gnralement hydrophobes. Cependant, la prsence de composs organiques dans larosolpeut modifier son pouvoir hygroscopique. Daprs Saxena et al. (1995), leur prsence dans laro-sol accrotrait considrablement la masse deau fixe par la particule pour des humidits ambiantesdpassant les 80%.

    Loxydation des composs organiques conduit une plus grande oxygnation des mol-cules (formation des fonctions alcool R-OH, acide carboxylique R-CHO, hydroperoxyde ROOH,)et donc des composs moins volatiles et plus hydrophiles. Cette modification des proprits hy-drophiles de larosol entrane leur grossissement en prsence de fortes humidits du fait dune

  • 2.1 Proprits physico-chimiques des arosols 27

    plus grande hydratation . Les composs organiques nitrs (R-NO2) et amins (R-NH2) sontgalement des constituants hydrophobes.

    2.1.5 Le cas particulier de larosol urbain

    Larosol urbain est un mlange de particules primaires mises principalement par le transportet lindustrie (combustion des fuels fossiles), et de particules secondaires formes par les pro-cessus de conversion gaz-particule. La distribution granulomtrique en masse de larosol urbainest gnralement caractrise par deux modes, le mode daccumulation et le mode grossier. Cedernier est constitu de poussires minrales gnres mcaniquement par lrosion des routes,lusure des pneus ou labrasion des freins, et peut contribuer de faon significative la masse delarosol prs des grands axes routiers.

    Ltude mene par Putaud et al. (2004) a permis de dresser une caractrisation chimique d-taille de larosol pour diffrents sites europens (urbains, ruraux, trafic). Une composition assezhomogne des PM2,5 et PM10 a t observe sur les diffrents sites urbains. Comme illustr sur laFigure 2.4, larosol urbain (PM2,5 et PM10) est compos en moyenne de 5 10% de carbone suie,20% de matire organique, 35 45% de matire inorganique et 5 10% de poussires minrales.Cette prdominance de la matire organique et de la fraction inorganique secondaire dans la com-position de larosol atteste de limportance des processus de formation des particules secondaireset du transport longue distance. La fraction grossire de larosol est constitue principalementde poussires minrales (>20%) et du sel marin (10%). La fraction non identifie ( unknown ) delarosol reprsente entre 17 et 45% de la masse totale, ce qui illustre les difficults de mesure dela composition des particules, en raison de la grande varit de ses constituants et des limites desinstruments de mesure. La diffrence entre les sites urbains et ruraux rside principalement dansla contribution relative plus importante de nitrates et dammonium en zone urbaine, et de sulfatesen zone rurale.

    Dautre part, ltude a montr que les principaux pisodes de pollution particulaire (PM10> 50 g m3) se produisent en priode hivernale, en raison de situations mtorologiques stag-nantes empchant la dispersion des polluants. Lors de ces pisodes, la contribution relative desnitrates la masse totale devient prpondrante. Ceci sexplique par la plus grande stabilit dunitrate dammonium en phase particulaire pendant les priodes froides et la rduction des artfactsinstrumentaux lie la perte de masse par vaporation.

    Finalement, ltude de larosol urbain lors des campagnes de mesure (Mallet et al. 2003; Ca-chier et al. 2005; Chazette et al. 2005) a montr quil est un bon traceur du panache urbain parlintermdiaire de ses proprits optiques. En effet, lvolution de sa composition chimique (vo-lution du caractre hydrophile), de ses proprits structurales (volution de la granulomtrie) ou desa concentration, se traduisent par une modification de ses proprits optiques. Ainsi, la connais-sance de ces dernires (par lobservation) permet den dduire lorigine et lvolution de larosol.Dans ce qui suit, nous rappelons les notions essentielles concernant les proprits optiques delarosol.

  • 28 Les arosols atmosphriques

    FIG. 2.4 La composition moyenne annuelle des PM2,5, PM10 et PM102,5 observe sur plusieurs stations euro-pennes (urbaines et rurales). Adapt de (Putaud et al. 2004).

    2.2 Les proprits optiques de larosol

    Linteraction des arosols avec le rayonnement est conditionne par leurs proprits optiques.Ces dernires sont directement lies la composition chimique de larosol, sa distribution entaille et sa forme (section 2.1), ainsi qu la longueur donde considre. Dans cette section,nous prsentons les principales proprits optiques des particules, dterminant les processus dediffusion et dabsorption du rayonnement solaire par les arosols. Celles-ci sont dfinies par lessections efficaces et les coefficients dabsorption et de diffusion dune part, et par les indices derfraction dautre part. Le formalisme dcrit ici sera utilis dans la suite de la thse lors du calculdes paisseurs optiques et des profils de rtrodiffusion lidar. Les longueurs donde considresdans notre tude se situent dans le visible et le proche infrarouge (400-900 nm).

  • 2.2 Les proprits optiques de larosol 29

    2.2.1 Sections efficaces et albdo de diffusion simple

    Au cours de sa propagation dans latmosphre, les rayons lumineux interagissent avec les par-ticules et les molcules rencontres dans le milieu quils traversent. Ainsi, le rayonnement incidentest principalement diffus et absorb par les particules dont la taille caractristique est du mmeordre de grandeur ou dun ordre de grandeur suprieur la longueur donde incidente. La diffusioncorrespond un changement de direction dans la propagation du rayonnement incident, tandis quelabsorption dsigne la transformation de lnergie incidente en dautres formes dnergies, tellesque la chaleur par exemple. Le comportement optique dun milieu diffusant est troitement li auxproprits des diffuseurs qui le constituent, tels que la taille, la forme, la composition ou lindicede rfraction dpendant de la longueur donde utilise.

    Considrons un flux lumineux incident dintensit I0 (Wm2). Il subit sur son trajet uneextinction aprs interaction avec les diffuseurs atmosphriques, provoquant la diminution de sonintensit I (I < I0). La section efficace dextinction Cext (m2) permet de quantifier lattnuationde la puissance (W ) du faisceau incident par une cible de section efficace r2 :

    Cext =

    I0(2.1)

    On en dduit le facteur defficacit dextinction (sans unit) :

    Qext = Cext/( r2) (2.2)

    Cette extinction du rayonnement incident est provoque par les effets combins de labsorption etde la diffusion de lnergie incidente. Ainsi, la section efficace dextinction peut tre considrecomme la somme des sections efficaces de diffusion Cdif et dabsorption Cabs, dfinies de faonanalogue comme tant le rapport entre lintensit diffuse (respectivement absorbe) et lintensitdu faisceau incident.

    La section efficace de diffusion est une valeur globale qui nindique pas dans quelle directionla diffusion seffectue. Elle peut scrire alors comme lintgrale sur tout lespace des sectionsefficaces de diffusion dans les diffrentes directions :

    Cdif =

    4Cdif () d (2.3)

    Dans le cadre de notre tude, lors du calcul des profils lidar (section 6), nous nous intressons plusparticulirement la diffusion dans la direction oppose la direction incidente ( radians), ap-pele rtrodiffusion. Ainsi, la section efficace de rtrodiffusion C (m2) peut tre dfinie commele rapport entre la puissance diffuse radians () et le faisceau incident I0 :

    C =()

    I0(2.4)

    Le rapport entre les sections efficaces de diffusion et dextinction est appel lalbdo de dif-fusion simple dfini par :

    =CdifCext

    =QdifQext

    (2.5)

  • 30 Les arosols atmosphriques

    Ainsi, reprsente la fraction de lattnuation lumineuse qui est diffuse par une particule, tandisque 1 reprsente sa fraction absorbe.

    Rappelons que lhypothse de diffusion simple dans laquelle nous nous plaons ici consiste admettre que chaque rayon lumineux subit au maximum une seule diffusion. Le cas des rayonsayant t diffuss par plusieurs particules (diffusion multiple) est suppos ngligeable. Cette hy-pothse est gnralement vrifie en atmosphre, except en prsence de couches darosols ou denuages trs denses.

    2.2.2 Indice de rfraction

    Lindice de rfraction est une proprit optique importante de larosol, car il dtermine lepouvoir dextinction du rayonnement incident par les particules. Il permet de relier la compositionchimique de larosol avec ses proprits optiques. En plus de la composition chimique de la-rosol, il dpend aussi de la longueur donde. Il est dfini comme la somme dune partie relle n,dterminant la vitesse de propagation dans le milieu, et dune partie imaginaire k, lie labsorp-tion des arosols :

    m = n ik (2.6)

    Lindice de rfraction varie de faon importante en fonction de la longueur donde. Toutefois dansle domaine visible (400-800 nm) cette variabilit est faible (Volz 1973) et lindice de rfractionpeut tre suppos constant. Les valeurs trouves dans la littrature pour les diffrents constituantsdarosols 550 nm sont prsentes dans le Tableau 2.2. La partie relle est gnralement compriseentre 1,33 (arosol satur deau) et 1,55 (arosol soluble) et peut atteindre des valeurs de 1,75 enprsence de larosol carbon. La partie imaginaire varie entre des valeurs proches de zro pourles arosols purement diffusants et 0,44 pour les arosols trs absorbants comme les particules desuie.

    TAB. 2.2 Indice de rfraction pour les principaux composs darosol 0% dhumidit relative et la longueurdonde de 550 nm (source Mallet et al. (2003).

    Type darosol Indice rel (n) Indice imaginaire (k)Particules primaires anthropiques 1 1,75 0,44Arosols organiques secondaires 1,55 0,05Particules solubles (sulfate, nitrate, ammonium) 1,53 6 103

    Poussires minrales 1,53 5, 5 103

    Sel marin 1,55 108

    Eau 1,33 01 : Les particules primaires anthropiques regroupent le carbone organique et le carbone suie,ainsi que la matire inorganique non soluble.

    Dans latmosphre, les particules darosol sont gnralement composes de plusieurs consti-tuants. Il est alors ncessaire de dterminer lindice de rfraction du mlange. En considrant lhy-pothse du mlange homogne, lindice de rfraction du mlange m peut alors tre dfini comme

  • 2.2 Les proprits optiques de larosol 31

    la moyenne des indices de chaque constituant individuel mi pondre par leur fraction massiquefi (Seinfeld and Pandis 1997) :

    m =n

    i=1

    mi fi (2.7)

    Lhypothse du mlange homogne nest bien videmment pas vrifie dans latmosphre, o lesarosols sont constitus dagglomrats dune ou plusieurs espces solides, entoures dun filmvisqueux ou recouvertes des condensats (Seinfeld and Pandis 1997). Toutefois, elle constitue unebonne approximation pour le calcul de lindice de rfraction du mlange, avec une incertitudeinfrieure 20% par rapport un calcul explicite en mlange htrogne (Sloane 1983).

    Notons galement que lindice de rfraction varie en fonction de lhumidit relative ambiante :la condensation de la vapeur deau la surface de larosol entrane une diminution de son indicede rfraction qui tend vers celui de leau. Cette diminution modifie alors considrablement les pro-prits diffusantes et absorbantes de larosol (Hanel 1976). Ce point sera discut dans la section2.2.5.

    2.2.3 Coefficient dextinction

    Le coefficient dextinction, not (m1), dfinit lextinction du faisceau lumineux au coursde son trajet de longueur z dans un milieu diffusant contenant un ensemble de particules. Si lecoefficient dextinction est constant sur la distance z (milieu uniforme), lvolution de lintensitsur ce mme trajet est donne par I(z) = I0 exp(z). Comme lextinction totale rsulte dunepart de lextinction par diffusion et dautre part de lextinction par absorption, elle scrit :

    = dif + abs (2.8)

    Pour une population de particules, le coefficient dextinction peut tre calcul partir dessections efficaces caractrisant chaque type de particules et en connaissant leur distribution granu-lomtrique, leur composition chimique (indice de rfraction) et leur forme. En fonction de la taillecaractristique des particules deux thories sappliquent : la diffusion de Rayleigh et la diffusionde Mie dans le cas des particules sphriques.

    2.2.3.1 Diffusion molculaire de Rayleigh

    La diffusion de Rayleigh intervient lorsque la dimension de la particule diffusante est petitedevant la longueur donde. Dans le visible et le proche infrarouge, lapproximation de Rayleighsapplique pour des particules dont le rayon est infrieur 0,1 m. Les sections efficaces de diffu-sion et dabsorption sont alors dfinies par (Ulaby et al. 1943) :

    Cabs =2

    (

    2r

    )3

    Im(K) (2.9)

    Cdif =22

    3

    (

    2r

    )6

    |K|2 (2.10)

  • 32 Les arosols atmosphriques

    Avec K = (m2 1)/(m2 + 2) o m est lindice de rfraction.

    2.2.3.2 Diffusion particulaire de Mie

    La thorie de diffusion de Mie est utilise pour rendre compte de la diffusion par les particulessphriques dont la taille est du mme ordre de grandeur ou dun ordre de grandeur suprieur la longueur donde. Elle dcrit la diffusion lastique (sans change dnergie) dune onde planelectromagntique par une particule sphrique de diamtre D et dindice de rfraction m. Ainsi,pour un ensemble de particules de diamtre compris entre Dmin et Dmax caractrises laltitudez par une distribution en taille n(D, z) (n(D, z)dD reprsentant le nombre de particules par unitde volume) et une section efficace Cext(D, m), le coefficient dextinction scrit :

    (z) =

    Dmax

    Dmin

    Cext(D, m) nN (D, z) dD (2.11)

    Le coefficient dextinction est frquemment exprim en fonction de la distribution en masse desarosols dfinie par nM (D) = D

    3

    6 nN (D). On en dduit alors :

    (z) =

    Dmax

    Dmin

    6

    D3Cext(D, m) nM (D, z) dD (2.12)

    Une notion couramment utilis est lefficacit dextinction, dfinie par :

    Eext(D, m) =6

    D3Cext(D, m) (2.13)

    Ces proprits absorbantes et diffusantes des particules sont fortement corrles leur tailleet leur composition. Cette dpendance est illustre sur la Figure 2.5 qui reprsente lefficacitdextinction en fonction du diamtre de la particule 532 nm pour trois valeurs de lindice derfraction, correspondant aux particules solubles (sulfate, nitrate et ammonium), aux arosols pri-maires antropiques et leau (voir Tableau 2.2). Cette figure montre que lefficacit dextinctionest maximale pour les arosols dont le diamtre est compris entre 0,1 et 2 m. Ces particules cor-respondent celles du mode daccumulation dont le diamtre sec est compris entre 0,1 et 1 m etqui peut atteindre 2 m aprs hydratation. Cela signifie que ce sont les particules appartenant aumode daccumulation qui vont interagir principalement avec le rayonnement, et par consquent cemode sera optiquement le plus actif. Ceci est dautant plus vrai que ces particules ont une grandedure de vie dans latmosphre (section 2.1).

    La variation des proprits optiques des particules en fonction de leur composition chimique,et donc de leur indice de rfraction associ, est galement importante. Ainsi, les valeurs maxi-males dextinction pour les espces considres sont obtenues pour des diamtres trs diffrents :D(H2O) = 0, 85 m ; D(solubles) = 0, 5 m ; D(primaires) = 0, 2 m. La fraction primaire ex-plique lessentiel du pouvoir absorbant de larosol, tandis que la fraction soluble est responsable

  • 2.2 Les proprits optiques de larosol 33

    a)0.01 0.10 1.00 10.00

    Diametre (m)

    0

    2

    4

    6

    8

    10

    12

    Effi

    caci

    te d

    ext

    inct

    ion

    (m2 g

    1 )

    m=1.33i*104

    m=1.53i*0.006m=1.75i*0.44

    b)0.01 0.10 1.00 10.00

    Diametre (m)

    0

    2

    4

    6

    8

    Effi

    caci

    te d

    e di

    ffusi

    on (

    m2 g

    1 )

    m=1.33i*104

    m=1.53i*0.006m=1.75i*0.44

    c)0.01 0.10 1.00 10.00

    Diametre (m)

    1

    1

    3

    5

    7

    Effi

    caci

    te d

    abs

    orpt

    ion

    (m2 g

    1 )

    m=1.33i*104

    m=1.53i*0.006m=1.75i*0.44

    FIG. 2.5 Lefficacit dextinction, de diffusion et dabsorption des arosols. Les calculs sont effectus pour lalongueur donde de 532 nm.

    principalement de ses proprits diffusantes. En effet, lextinction par absorption se produit uni-quement pour des particules primaires (carbones) ayant un diamtre infrieur 0,2 m, tandis quelextinction par diffusion est principalement due aux composs solubles. On peut noter galementquune diminution de lindice de rfraction entrane une augmentation de lefficacit de diffusion,et surtout, un dplacement du diamtre correspondant au maximum dextinction par diffusion versdes valeurs plus grandes. Dans ce cas, le pouvoir diffusant de larosol augmente. Ceci signifiegalement que la prsence de leau dans la particule est susceptible de modifier sensiblement sesproprits diffusantes. Ce point est approfondi dans la section 2.2.5.

    2.2.4 paisseur optique

    Lpaisseur optique dune couche darosols, note , dsigne lextinction du rayonnementincident due la prsence des particules dans cette couche. Elle est dfinie comme lintgrale ducoefficient dextinction (z) sur la hauteur de la couche z :

    (z) =

    z(x) dx (2.14)

    Lpaisseur optique varie avec la longueur donde. Dans le visible, lpaisseur optique des a-rosols de pollution contenus dans la colonne atmosphrique (en absence de nuages) peut dpasser0,5 550 nm et 0,3 865 nm (http ://aeronet.gsfc.nasa.gov/). Les mesures effectues pendantla campagne ESCOMPTE montrent que 90% de lextinction par les particules est due aux aro-sols anthropiques, et seulement 10% aux arosols dorigine naturelle (sels marins et poussiresminrales) (Mallet et al. 2003). Les arosols inorganiques tels que le sulfate dammonium sontresponsables de plus de 50% de lextinction, alors que les composs organiques et le carbonesuie en expliquent chacun prs de 20%. Les nitrates, trouvs essentiellement dans le gros mode(Cachier et al. 2005), ne reprsentent que 5% de la contribution.

    Lpaisseur optique peut tre dtermine exprimentalement par lintermdiaire de la tld-tection passive (photomtre solaire, Holben et al. (1998) ou active (lidar, Haeffelin et al. (2005),

  • 34 Les arosols atmosphriques

    Bsenberg et al. (2003)) partir du sol ou laide des satellites. Elle peut galement tre calculepar les modles (Hodzic et al. 2004). La restitution des paisseurs optiques partir des sortiesmodles et leur comparaison avec les observations font lobjet des Chapitres 6 et 7.

    2.2.5 Influence de lhumidit relative

    Dans latmosphre, les arosols solubles et hydrophiles grossissent par absorption et conden-sation de vapeur deau lorsque lhumidit relative augmente (Pilinis 1989). Cette modification deleur diamtre moyen et de leur composition chimique se traduit par une modification de leur indicede rfraction et peut avoir un impact significatif sur leur efficacit optique. Ce sont principalementles proprits diffusantes de larosol qui sont modifies et dans une moindre mesure ses propri-ts absorbantes (Sloane 1983). La prise en compte des effets de lhumidit sur les particules estalors essentielle lors de la restitution des proprits optiques des arosols partir des observationsou des simulations modles.

    Lvolution de lindice de rfraction en fonction de la teneur en humidit peut tre calcule laide des relations dHanel (1976). Elles permettent de dduire les indices de rfraction lhumi-dit ambiante RH , dits humides mw partir des valeurs thoriques de lindice sec m (Tableau2.2) :

    mw = mH20 + (m mH20)(rw

    r

    )

    3(2.15)

    rw = r (1 RH)e (2.16)

    o mH2O indice de rfraction de leau ; r et rw rayons sec et humide ; e coefficient dpendant dutype darosol : e = 0, 285 pour les particules hydrophiles (Hanel 1976) ; e = 0, 25 pour lamatire organique (Chazette and Liousse 2001).

    a)0 0.2 0.4 0.6 0.8 1

    Humidite relative

    1.3

    1.4

    1.5

    1.6

    1.7

    Par

    tie r

    eelle

    (n)

    b)0 0.2 0.4 0.6 0.8 1

    Humidite relative

    0

    0.1

    0.2

    0.3

    0.4

    0.5

    Par

    tie im

    agin

    aire

    (k)

    c)0 0.2 0.4 0.6 0.8 1

    Humidite relative

    0

    2

    4

    6

    8

    10

    Fac

    teur

    de

    gros

    siss

    emen

    t (V

    w/V

    )

    FIG. 2.6 Lvolution de lindice de rfraction et du volume de la particule en fonction de lhumidit relative. Lefacteur de grossisment reprsente laccroissement du volume avec lhumidit : Vw/V = (1RH)3e pour RH < 1,o V et Vw volumes de la particule sche et humide.

    Lvolution de lindice de rfraction, ainsi que la variation du volume moyen de la particule enfonction de lhumidit relative sont illustres sur la Figure 2.6. On peut noter que la condensation

  • 2.2 Les proprits optiques de larosol 35

    a)0.01 0.10 1.00 10.00

    Diametre (m)

    0

    2

    4

    6

    8

    Effi

    caci

    te d

    e di

    ffusi

    on (

    m2 g

    1 )

    Fraction soluble (m=1.53i*0.006)

    RH=0%RH=50%RH=90%

    b)0.01 0.10 1.00 10.00

    Diametre (m)

    0

    2

    4

    6

    8

    Effi

    caci

    te d

    e di

    ffusi

    on (

    m2 g

    1 )

    Fraction primaire (m=1.75i*0.44)

    RH=0%RH=50%RH=90%

    c)0.01 0.10 1.00 10.00

    Diametre (m)

    1

    1

    3

    5

    7

    Effi

    caci

    te d

    abs

    orpt

    ion

    (m2 g

    1 )

    Fraction primaire (m=1.75i*0.44)

    RH=0%RH=50%RH=90%

    FIG. 2.7 Limpact de laugmentation de lhumidit relative (RH variant de 0%, 50% et 90%) sur lefficacitde diffusion et dabsorption 532 nm pour un arosol soluble (m = 1, 53 i0, 006), et pour un arosol primaire(m = 1, 75 i0, 44). Lefficacit dabsorption est ngligable pour les arosols solubles (non reprsente ici).

    de la vapeur deau la surface de larosol entrane une diminution significative de son indice derfraction qui tend vers celui de leau, ainsi quune augmentation importante de son volume. Ainsi,pour une humidit avoisinant les 90%, le volume de la particule est augment de plus de 6 fois, parrapport au volume de la particule sche. Ces modifications ont des consquences sur les propritsabsorbantes et diffusantes des arosols. En effet, la diminution de la partie imaginaire de lindicede rfraction avec laugmentation de lhumidit se traduit par une baisse du pouvoir absorbant delarosol, tandis que laugmentation de la taille des particules par hydratation accrot la masse departicules dans le mode daccumulation, optiquement le plus actif et par consquent augmente ladiffusion. Ceci est illustr sur la Figure 2.7 pour deux types darosol : les arosols solubles et hy-drophiles, et les arosols primaires, caractriss par leurs indices de rfraction respectifs (Tableau2.2). Pour les particules primaires, on peut voir une nette baisse de leur efficacit dabsorption aveclaugmentation de lhumidit relative (Figure 2.7c) ; pour les particules solubles labsorption estngligable quelle que soit lhumidit. Avec laugmentation de lhumidit ambiante, lefficacitde diffusion (grandeur par unit de masse m2g1) diminue lgrement et le diamtre correspon-dant au maximum de diffusion se dcale vers des valeurs plus grandes. Par contre, lextinction pardiffusion des particules crot par augmentation de leur masse.

    2.2.6 Influence du type de mlange considr

    Comme nous lavons vu prcdemment, linteraction des arosols avec le rayonnement dpendfortement de leur composition chimique par lintermdiaire de lindice de rfraction. Ainsi, unereprsentation correcte de la composition lors du calcul des proprits optiques est essentielle etdautant plus complexe que les arosols sont rarement constitus dun seul compos, mais dunmlange complexe et multiphasique. La reprsentation de leur composition lors du calcul desproprits optiques ncessite alors des hypothses sur la manire dont ces diffrents constituantsde larosol sont mlangs entre eux.

  • 36 Les arosols atmosphriques

    On distingue deux types de mlange : le mlange externe et le mlange interne, schmatisssur la Figure 2.8. Le mlange externe suppose que les diffrents constituants de larosol sontspars les uns des autres et proviennent dune mme source, autrement dit les diffrentes espcessont colles les unes aux autres, sans jamais interagir. Cette hypothse est vrifie uniquementprs des sources dmissions o on admet gnralement que les arosols ont une nature chimiquecaractristique de la source. En revanche, lvolution des proprits physico-chimiques et de lastructure interne de larosol lors de son transport favorisent le mlange partiel ou total de sesdiffrents consistuants loin des sources dmission : on parle alors de mlange interne.

    Le choix du type de mlange est donc important car il peut modifier les proprits optiquesde larosol (Seinfeld and Pandis 1997) comme illustr sur la Figure 2.9. Considrons un arosolcompos dun mlange de 50% de carbone suie et de 50% de sulfate dammonium. La Figure2.9 montre que lextinction par diffusion est plus importante en mlange interne quen mlangeexterne, tandis que lextinction par absorption est favorise en mlange interne : le carbone suieaugmente sa capacit dabsorption par un facteur deux lorsquil est en mlange interne avec lesulfate dammonium. Ceci est dautant plus important que la fraction inorganique (sulfate dam-monium) est grande. Toutefois, les deux effets se compensent et lextinction totale ne semble passignificativement modifie. Ces diffrences sexpliquent par le fait quen mlange interne tous lesconstituants participent labsorption du rayonnement, tandis que dans lhypothse du mlangeexterne, seuls les composs dont la partie imaginaire de lindice de rfraction est leve vont ab-sorber. Dans le cas de la diffusion, la capacit hydrophile de larosol, donc sa croissance aveclhumidit, est plus grande en mlange interne, car tous les composs grossissent, mme ceux quine sont pas hydrophiles, ce qui augmente le pouvoir diffusant des particules.

    Contrairement aux modles globaux o les arosols sont gnralement supposs en mlangeexterne non interactif (Chin et al. 2004), les modles de chimie-transport rgionaux (Bessagnetet al. 2004; Cousin et al. 2005) considrent les particules en mlange interne, ce qui signifie que

    FIG. 2.8 Reprsentation schmatique des mlanges externe et interne du (NH4)2SO4 et du carbone suie.

  • 2.3 Modlisation des arosols : tat de lart 37

    FIG. 2.9 Lvolution des coefficients dextinction, de diffusion et dabsorption en fonction du type de mlangeconsidr (interne ou externe) dans le cas dun arosol compos de carbone suie et de sulfate dammonium. SourceSeinfeld and Pandis (1997).

    toutes les particules de mme taille ont tout instant, la m