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Karlheinz Stockhausen – Mantra – Vendredi 29 janvier 2016

Mantra – Karlheinz Stockhausen · 2016-01-25 · 4 Karlheinz Stockhausen (1928-2007) titanesque est l’œuvre de Karlheinz Stockhausen: plus de trois cent soixante-dix numéros

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Et aussi ce week-end :

SAMEDI 30 JANVIER – 18hTable ronde Stockhausen, un compositeur « astronique » Avec Philippe Albèra, Laurent Feneyrou, Imke Misch et Ivanka Stoïanova

DIMANCHE 31 JANVIER DE 14H30 À 17H30Concert-promenade au MuséePlanète StockhausenTrio C Barré, Ensemble Linea et Jean-Jacques PalixÀ la rencontre d’un des compositeurs majeurs du xxe siècle, en prenant pour thème les signes du zodiaque ou ses sons électroniques novateurs.

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VENDREDI 29 JANVIER 2016 - 20H30Salle deS concertS

Mantra

Karlheinz StockhausenKlavierstücke I à XI

Pierre-Laurent Aimard, pianoMarco Stroppa, projection du son

entracte

Karlheinz StockhausenMantra

Pierre-Laurent Aimard, pianoTamara Stefanovich, pianoMarco Stroppa, électronique

Fin du concert verS 23H45.

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Karlheinz Stockhausen (1928-2007)

titanesque est l’œuvre de Karlheinz Stockhausen : plus de trois cent soixante-dix numéros d’opus (dont un cycle de sept opéras), qui jalonnent près de soixante ans de création ; dix-sept volumes d’écrits, où se déploient une pensée théorique de premier plan et une description de la plus grande minutie de ses partitions ; d’innombrables concerts, notamment du 14 mars au 14 septembre 1970, lors de l’exposition universelle à osaka, quand une vingtaine de solistes interprétèrent quotidiennement sa musique pendant plus de cinq heures, touchant près d’un million de visiteurs ; une intense activité pédagogique aux cours de cologne pour la nouvelle musique (1963-1968), à l’université de Pennsylvanie (1965), à l’université de californie (1966-1967), et à la Musikhochschule de cologne (1971-1977), et régulière-ment en europe, en amérique du nord et en asie, jusqu’à la création en 1998 des cours Stockhausen, à Kürten…

l’œuvre de Karlheinz Stockhausen se situe entièrement sous le signe de l’un et prend pour image la spirale, englobant dans ses rets, en un même vortex, tous les éléments de l’écriture musicale et de son interprétation. il en résulte une scrupuleuse codification des sons et de leurs dimensions constitutives, des durées et des formes, des gestes et des cycles, jusqu’à donner dans les dernières partitions, éditées avec soin, d’autres indications précises : jeu par cœur et sans chef, ce qui implique de connaître toutes les parties ; stylisation des mouvements corporels des interprètes ; pantone exact des lumières et des costumes ; évitement des actions hors de la sphère artis-tique (tourne des pages, intervention de régisseurs ou de techniciens…).

Bref, tout, absolument, participe de l’œuvre, donnée dans un concert qui prend à l’occasion les traits d’un rituel. une telle volonté, rigoureuse, est compositionnelle, mais aussi, et principalement, mystique et cosmique : dans le lointain sillage de la pensée grecque antique, et à proximité des traditions hermétiques et ésotériques, créer pour Karlheinz Stockhausen, c’est construire (ou reconstruire) l’ordre de l’univers. cette conception est déjà pleinement consciente dans Kreuzspiel (1951), où le musicien compare les sons aux étoiles dans la nuit. « On pense que c’est un chaos, mais quand on commence à l’étudier, on s’aperçoit que c’est une composition fantas-tique, qui tient ensemble avec ses constellations, ses planètes… » et dès la fin des années 1940, Karlheinz Stockhausen lit Hermann Hesse, avec lequel il

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correspond alors, et son Jeu des perles de verre, dont le personnage central, Josef Knecht, partage avec lui l’idée d’une humanité musicienne, soucieuse de « concevoir et former le monde musicalement ». non la musique dans le monde, mais le monde en tant que musique.

« Parfois, la musique vibre au-dessus des nuages, et nous ne parvenons plus à entendre son écho. Très rarement, elle est vraiment infinie ; elle nous fait alors oublier la Terre ». dans une nouvelle écrite le 20 août 1948, « C’était comme un appel », Karlheinz Stockhausen annonce ainsi le projet de son œuvre. les mots sont ceux d’un organiste imaginaire de la cathédrale d’al-tenberg, où le compositeur avait lui-même grandi, en l’absence d’une mère (dépressive, internée et déclarée morte de « leucémie » en 1941, comme les autres patients de l’asile, victime de la politique d’euthanasie des malades mentaux organisée par le troisième reich), et loin d’un père qui sera porté disparu en 1945, vraisemblablement sur le front hongrois. le titre de la nouvelle introduit en outre ce mot que Stockhausen ne cessera d’utiliser par la suite : l’appel, Ruf, intimement lié à l’écoute. nous écoutons parce que nous appartenons à cet appel, musical, spirituel, sinon cosmique, qui nous est lancé. la radicalité de l’engagement de Karlheinz Stockhausen se mesure à cette aune. « Ce que j’accomplis ne vient pas de moi », reprennent en conséquence ses textes, lettres ou entretiens, établissant une équiva-lence entre l’acte de composer et une transcendance à laquelle fait écho la constante recherche de l’unité.

tout, dans la trajectoire de Karlheinz Stockhausen, en témoigne : la musique pointilliste des premiers Klavierstücke (1952), où chaque son doit être le centre d’une « galaxie » ; la composition par groupes, qui tendent à une « qualité d’expérience supérieure » ; l’établissement d’un continuum entre l’intervalle et le temps, gouvernés par un même principe, dans Gruppen (1957-1959) notamment ; l’unité du temps musical, qui élargit ce continuum à la forme ; ce que Stockhausen appelle la Momentform (« forme momentanée »), où chaque moment, aux caractères et à la qualité propres, se réfère sans cesse au tout ; la formule, dès Mantra (1970), plaçant les sons sous la lumière unique d’une mélodie revisitée, et qui organise les vastes proportions de l’œuvre ; la spirale, dans le cycle de sept opéras Licht (1977-2003) et l’ultime cycle, inachevé, des vingt-quatre heures du jour, Klang (2004-2007).

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« Quel est pour vous le bonheur accompli sur terre ? » au questionnaire de Marcel Proust, publié dans la Frankfurter Allgemeine Zeitung, le 18 juil-let 1980, Karlheinz Stockhausen répondait, déterminé : « Une œuvre musi-cale parfaite », avant d’ajouter, à une question ultérieure : « Quel serait pour vous le plus grand malheur ? Être abandonné de Dieu ».

Laurent Feneyrou

Les Klavierstücke de Stockhausen

Que ce soit Bach, Beethoven, Brahms, Schubert, chopin, liszt ou Scriabine, presque tous les grands compositeurs de l’histoire de la musique ont écrit des pages pour clavier qui font aujourd’hui partie des piliers du réper-toire pour piano et où l’art de la composition se double d’un défi lancé à l’interprète. les partitions pour piano de Karlheinz Stockhausen comptent désormais elles-aussi parmi les classiques du répertoire, notamment ses onze premiers Klavierstücke (« Pièces pour piano »), qui ont vu le jour entre 1952 et 1961. À cette première série se sont ajoutées cinq nouvelles pièces, de 1981 à 2003, dans lesquelles le piano est remplacé par un synthétiseur, un instrument que Stockhausen considérait comme le prolongement de l’instrument à touches traditionnel.

comme on peut l’observer dans nombre d’œuvres du XXe siècle, les parti-tions pour piano ont aussi souvent servi à essayer de nouvelles techniques de composition et de nouveaux modes de jeu. on en a des exemples dans les premières compositions dodécaphoniques d’arnold Schönberg, le Catalogue d’oiseaux d’olivier Messiaen, les Structures pour deux pia-nos de Pierre Boulez, ou les pièces pour piano préparé de John cage. les Klavierstücke de Stockhausen sont eux aussi marqués par un goût de l’expérimentation et une volonté d’innover.

au début des années 1950, Stockhausen projette un grand cycle de vingt et une pièces pour piano s’articulant en une série de six groupes (4 + 6 + 1 + 5 + 3 + 2) qu’il ne réalisera que partiellement. le premier groupe, les Klavierstücke i à iv, est l’œuvre n° 2 dans son catalogue, le deuxième groupe (v à X) l’œuvre n° 4 ; suit une page isolée, le Klavierstück Xi (œuvre n° 7). le premier groupe voit le jour entre février et juin 1952 à

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Paris, où le compositeur suit la classe de Messiaen au conservatoire. les quatre pièces, qui durent chacune entre trente secondes et quatre minutes, reflètent l’intérêt que Stockhausen porte alors aux miniatures atonales et dodécaphoniques d’anton Webern, lesquelles avaient marqué le début d’un nouveau langage musical par leur brièveté aphoristique. À la rigueur compositionnelle de ces premiers Klavierstücke « pointillistes », le deuxième groupe (pièces v à X), écrit à partir de 1954, oppose un souci de prendre en compte le jeu vivant et variable de l’interprète. contrairement aux premières partitions de musique électronique de Stockhausen, où chaque détail est mesuré avec exactitude, c’est ici l’indéterminé, le non mesuré, le fluctuant du jeu instrumental qui est au centre de la composition. le Klavierstück Xi, dernière pièce de la première série, voit le jour en 1956. il consiste en dix-neuf entités indépendantes que l’interprète combine et enchaîne à son gré, à chaque exécution de manière nouvelle et personnelle – c’est ce que Stockhausen appelle la « forme équivoque » (vieldeutige Form).

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Karlheinz Stockhausen (1928-2007) Klavierstücke I à XI (Pierre-laurent aimard a choisi d’interpréter les Klavierstücke dans l’ordre suivant : iii, ii, iv, i, v, vi, vii, iiX, Xi, iX, X)

Klavierstücke i–iv

composition : 1952.

création : le 21 août 1954, à darmstadt, par Marcelle Mercenier

durée : 8 minutes.

Klavierstücke v–viii

composition : 1954.

création : le 21 août 1954, à darmstadt (v) ; le 1er juin 1955, à darmstadt (vi-vii),

par Marcelle Mercenier.

durée : 5, 25, 8, et 2 minutes.

Klavierstück iX

composition : 1954/1961.

création : le 21 mai 1962, à cologne, par aloys Kontarsky.

durée : 12 minutes.

Klavierstück X

composition : 1954/1961.

création : le 10 octobre 1962, à Palerme, par Frederic rzewski.

durée : 25 minutes.

Klavierstück Xi

composition : 1956.

création : 22 avril 1957, à new York, par david tudor.

durée : 14 minutes (variable).

durée globale : environ 99 minutes.

Pierre-laurent aimard parle de « musique qui ne craint rien » à propos des Klavierstücke I à XI, ajoutant : « Chaque Klavierstück est complètement différent des autres. Prenons par exemple le Klavierstück IX ou X, l’un et l’autre sont si radicaux ! Chacun des onze Klavierstücke a sa particularité et

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sa gestique propres, chacun est unique dans son architecture, son arche. Stockhausen introduit chaque fois quelque chose de nouveau. » Qualifiant ses onze premiers Klavierstücke de « dessins », Stockhausen a commenté : « Quiconque compose aujourd’hui de la musique pour piano, c’est-à-dire explore et élargit les possibilités d’un seul instrument, d’un seul interprète avec ses dix doigts et ses deux pieds, choisit sciemment les vertus de la discipline, de la concentration, de la simplicité, de la subtilité. » ces vertus sont directement sensibles dans les quatre premiers Klavierstücke, écrits dans l’ordre iii – ii – iv – i. Y sont absents motifs, thèmes ou mélodies au sens traditionnel, de même que les dimensions harmoniques ou ryth-miques habituelles, on y trouve seulement des « points sonores » isolés qui se transforment constamment et, de temps à autre, s’unissent pour former des groupes sonores plus importants. la création de ces pièces à darmstadt, à l’été 1954, s’acheva sur un concert de sifflets, tellement leur univers sonore était nouveau.

le deuxième groupe de Klavierstücke (v à X) vise à « donner une nouvelle perception temporelle de la musique, selon le compositeur, les variations, accélérations et ralentis infimes et “irrationnels” que fait un bon interprète ayant souvent tendance à être plus bénéfiques qu’un mètre mesureur » – mètre mesureur qu’utilisait Stockhausen à l’époque dans ses premières œuvres électroniques pour déterminer précisément les longueurs de bande magnétique.

dans le Klavierstück v, par exemple, la variable réside dans des groupes plus ou moins importants de « petites notes », c’est-à-dire d’appoggiatures qui sont disposées autour de notes centrales plus longues et peuvent être interprétées diversement. le Klavierstück vi joue sur des accélérations et des ralentis, le Klavierstück vii sur la résonance : des touches sont enfoncées délicatement de manière à ne pas produire de son, les cordes correspon-dantes résonant ensuite avec celles des touches que l’on joue normalement. le Klavierstück iX décline divers degrés de périodicité et d’« apériodi-cité » : un accord de quatre sons est répété au début cent trente-neuf fois « à espaces réguliers » en passant progressivement du fortissimo à un qua-druple piano. après un bref arrêt sur la cent quarantième itération, la répé-tition reprend quatre-vingt-sept fois de suite avant qu’une ligne mélodique tendre et succincte vienne contraster par sa « souplesse » avec l’élément « figé ». Par la suite, l’accord revient de temps à autre jusqu’à ce que le

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discours musical débouche sur des groupes sonores évoluant de manière linéaire, homophonique et irrégulière, et s’estompent progressivement.le Klavierstück Xi présente une « forme équivoque ». dix-neuf groupes de notes, de longueurs diverses, sont disposés sur une page. l’interprète doit choisir « sans idée préconçue » un groupe de départ et le jouer à la vitesse, avec l’intensité sonore et selon le mode de jeu (legato, staccato, portato, etc.) qu’il veut. À la fin de chaque groupe se trouve des indications sur la manière dont doit être joué le groupe suivant, lequel peut de nouveau être choisi librement. la pièce se termine lorsque l’interprète a atteint l’un des groupes pour la troisième fois.

Mantra

composition : 1970.

création : 18 octobre 1970.

effectif : deux pianos modulés en temps réel.

Éditeur : Stockhausen verlag, Kürten.

durée : environ 65 minutes.

composée en 1970 (les premières esquisses ont vu le jour parallèlement aux exécutions quotidiennes de musique intuitive de Stockhausen lors de l’exposition universelle d’osaka), Mantra, pour deux pianos transformés par modulation en anneau, est d’ordinaire considérée comme fondant une troisième étape dans son œuvre. cette nouvelle pratique se base sur des formules, qui se distinguent des prédéterminations sérielles antérieures par leur aspect mélodique. Si, pour Stockhausen, dans le discours sur ses œuvres, il importait de mettre en avant une forme de rupture, le regard rétrospectif peut conduire à nuancer les choses d’une manière différente.

la formule de base n’est en effet plus une succession abstraite de hauteurs, mais une Grundgestalt dans le sens schönbergien, à savoir une idée thé-matique associant une courbe mélodique au profil caractéristique à des durées spécifiques. dans la formule de Mantra, Stockhausen augmente cette association hauteurs-durées par des modes d’articulations et des traitements dynamiques (des intensités ponctuelles, des transforma-tions par répétitions de notes ou encore des profils en crescendo ou en

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diminuendo). de ce fait, le « mantra » devient un noyau multiparamétrique, dont les différentes composantes se manifesteront tour à tour à la surface de la composition. de plus, l’évolution de la pensée sérielle avait, dès la fin des années cinquante, conduit à revoir l’un des principes esthétiques initiaux du sérialisme, consistant à renouveler l’information sonore le plus rapidement possible dans toutes les dimensions acoustiques, pour lui juxtaposer son contraire dialectique : des « arrêts sur image » sonores. dans Kontakte ou Momente, il existe ainsi des passages où un phénomène sonore unique est passé au crible d’une loupe acoustique, qui en ausculte les moindres détails ; dans le genre « bruitiste », cette attitude fondera Mikrophonie I pour tamtam ; et dans Stimmung, les modèles vocaux arti-culant rythmiquement et phonétiquement les harmoniques varient une unique sonorité, de surcroît consonante. l’idée sérielle d’équidistribution des caractéristiques se trouve ainsi hissée à un niveau supérieur, chacune d’elles pouvant devenir pour un temps donné comme les lunettes à travers lesquelles on observe le « mantra ». cela explique le propos quelque peu militant de la part de Stockhausen, qui refuse de considérer Mantra comme une suite de variations.

Si l’on considère la mélodie initiale, on y distinguera plusieurs caractéris-tiques. tout d’abord, elle comporte treize sons, le dernier son fermant la boucle chromatique par le retour au premier : cela confère aux sons limites de la formule une fonction de « nœuds de vibration » acoustiques – un aspect qui sera particulièrement important dans la conjonction avec la modulation des sons de piano. ensuite, on y rencontre deux stratégies mélodiques distinctes : la première, incluant les 8 sept premiers sons, se caractérise par un zigzag assez systématique des inflexions mélodiques fai-sant apparaître des intervalles toujours nouveaux, alors que la seconde, du septième jusqu’au treizième son, consiste (à l’exception du dernier intervalle) en une échelle descendante avec une répartition symétrique d’intervalles diminuant (tierce majeure, seconde majeure puis mineure) et réaugmen-tant de taille. ainsi, le phénomène même de respiration se contractant et se dilatant, caractéristique qui se retrouvera aussi dans l’exploitation d’un ambitus total toujours plus important, lie le noyau microscopique du « mantra » au résultat macroscopique de la forme musicale.

alors qu’en juin 1969, Stockhausen avait écrit à Henri Pousseur qu’il ne pou-vait se sentir que faiblement concerné par les réflexions de ce dernier sur

la question harmonique (« L’Apothéose de Rameau » : Pousseur y expose notamment comment le chant « We shall overcome » est transformé par projection sur des réseaux harmoniques variables pour engendrer la composition Couleurs croisées), en septembre 1969, Stockhausen invente une mélodie multiparamétrique lors d’un voyage en voiture de Madison à Boston, en imaginant tirer de là une œuvre d’une durée d’une bonne heure. Stockhausen est-il ce génie errant qu’il prétendait être ou simplement un enfant de son temps ? en tout cas, les réflexions sur des formes recon-naissables et leurs transformations jalonnent la pensée sérielle depuis son Chant des adolescents et furent corroborées par les lectures scientifiques que firent ces compositeurs (ruyer, Portmann, Guillaume).

Pascal Decroupet

http://philharmoniedeparis.fr/fr/magazine

LAURENT FENEYROU et MARCO STROPPA évoquent l’univers musical de KARLHEINZ STOCKHAUSEN dans

NOTES DE PASSAGE

LE MAGAZINE EN LIGNE DE LA PHILHARMONIE DE PARIS

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Karlheinz Stockhausen Karlheinz Stockhausen a composé 376 œuvres exécutables séparément. de 1977 à 2003, il a composé le cycle d’opéra Licht (lumière), les sept jours de la semaine, qui comporte quelque 29 heures de musique. les sept par-ties de cette œuvre pour la scène ont connu leur création mondiale intégrale : Donnerstag (Mardi) en 1981, Samstag (Samedi) en 1984 et Montag (lundi) en 1988, tous trois dans une produc-tion de la Scala de Milan ; Dienstag (Mardi) en 1993 et Freitag (vendredi) en 1996, tous deux à l’opéra de leipzig ; Sonntag (dimanche) en 2011, à l’opéra de cologne. Mittwoch (Mercredi) a été créé le 22 août 2012 par la Birmingham opera company. après Licht, Stockhausen avait le pro-jet de composer les heures du jour, la minute et la seconde. il a commencé le cycle Klang (Son), les 24 heures du Jour, et avait composé à sa mort, en décembre 2007, de la première heure Himmelfahrt (ascension) à la vingt-et-unième, Paradies (Paradis).Karlheinz Stockhausen a composé dès le début des années 1950. Ses premières compositions ponctualistes, telles Kreuzspiel (Jeu de croix) en 1951, Spiel (Jeu) pour orchestre en 1952 et Kontra-Punkte (contre-points) en 1952-1953, lui ont apporté une célébrité internationale. on peut qualifier l’œuvre du composi-teur de « musique spirituelle » ; ce trait est devenu de plus en plus évident, non seulement dans les compositions sur texte spirituel, mais aussi dans les

œuvres de « musique harmonique », de « musique intuitive », de « musique mantrique », jusqu’à la « musique cos-mique », telles Stimmung (réglage), Aus den sieben Tagen (À partir des sept jours), Mantra, Sternklang (Son d’étoile), Inori, Atmen gibt das Leben (le Souffle donne la vie), Sirius, Licht (lumière), Klang (Son).Pour presque toutes les premières mondiales de ses œuvres, lors d’in-nombrables exécutions ou d’enregis-trements exemplaires dans le monde entier, Stockhausen les a soit dirigées personnellement, soit exécutées ou en a orchestré l’exécution en tant qu’ingé-nieur du son.lors de l’exposition universelle de 1970, à osaka au Japon, dans un auditorium sphérique conçu par le compositeur, la plupart des œuvres composées avant cette date ont été exécutées, à raison de cinq heures et demie pendant 183 jours, par vingt instrumentistes et chanteurs, en totalisant donc une audience de plus d’un million de personnes.titulaire de nombreuses chaires de professeur invité en Suisse, Finlande, au danemark, aux Pays-Bas et États-unis, Stockhausen a été nommé professeur de composition à la Hochschule für Musik à cologne en 1971. en 1996, il a reçu le titre de docteur honoris causa de la Freie universität de Berlin et un autre de la Queen’s university (canada) en 2004. il était membre d’une douzaine d’acadé-mies des arts et des Sciences de par le monde, citoyen d’honneur de Kürten

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depuis 1988, commandeur dans l’ordre des arts et des lettres, récipiendaire de nombreux prix discographiques et, entre autres, de la Médaille de l’ordre du Mérite de la république fédérale d’allemagne (première classe), du ernst von Siemens Music Prize, de la Médaille Picasso de l’uneSco, de l’ordre du Mérite de l’État de Westphalie-rhénanie du nord, de divers prix de la Société allemande des éditeurs de musique pour la publication de ses partitions, du Prix Bach de Hambourg, du Prix de la culture de cologne, du Prix Polar Music. la plupart des premières œuvres du compositeur ont été publiées par universal edition à vienne. À partir de l’Opus 30, ses œuvres ont été publiées par la Stockhausen-verlag, fondée par le compositeur en 1975. depuis 1991, les mêmes éditions ont également publié l’édition complète de Stockhausen, totalisant 150 disques. outre ses com-positions musicales, il a aussi publié 10 volumes de Texte zur Musik (textes sur la musique) et une édition de Textes sur cd avec conférences et interviews.

Pierre-Laurent AimardFigure centrale de la musique contem-poraine et interprète majeur du réper-toire pianistique de toutes les époques, Pierre-laurent aimard jouit d’une brillante carrière internationale. il se pro-duit régulièrement dans le monde entier avec les meilleurs orchestres, sous la direction d’esa-Pekka Salonen, vladimir Jurowski, Peter eötvös, Sir Simon rattle ou riccardo chailly. Que ce soit comme

créateur, directeur ou interprète, il a été accueilli lors de nombreuses résidences dans des cadres aussi prestigieux que carnegie Hall et le lincoln center de new York, le Konzerthaus de vienne, la Philharmonie de Berlin, le Festival de lucerne, le Mozarteum de Salzbourg, la cité de la Musique, le Festival de tanglewood et le Southbank centre de londres. il est également directeur artistique du Festival d’aldeburgh. au cours de la saison 2015-2016, Pierre-laurent aimard est artiste en résidence des Wiener Symphoniker et interprète l’intégrale des concertos pour piano de Beethoven sous la direction de Philippe Jordan. ardent défenseur de la musique des XXe et XXie siècles, il participe au projet Stockhausen pour Musica viva à Munich avec des reprises à Paris et amsterdam, et interprète Ausklang de lachenmann à luxembourg. Ses récitals solistes le mènent à Francfort, amsterdam, Sydney, tokyo et londres. né à lyon en 1957, Pierre-laurent aimard s’est formé au conservatoire de Paris auprès d’Yvonne loriod puis à londres avec Maria curcio. Son début de carrière a été marqué par son succès au concours Messiaen en 1973 à l’âge de seize ans, suivi de son engagement trois ans plus tard par Pierre Boulez comme premier pianiste solo de l’ensemble intercon-temporain. Étroitement lié à de nom-breux compositeurs de renom tels que György Kurtág, Karlheinz Stockhausen, elliott carter, Pierre Boulez et George Benjamin, sans oublier son associa-tion de longue date avec ligeti dont

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il a enregistré l’intégrale des œuvres pour piano. il a récemment donné en première mondiale Responses – Sweet disorder and the Carefully Careless de Harrison Birtwistle ainsi que la dernière composition de carter, Epigrams pour piano, violoncelle et violon, écrite pour lui et créée au Festival d’aldeburgh en juin 2013. Que ce soit comme enseignant à la Hochschule de cologne ou par les conférences et les ateliers qu’il anime dans le monde entier, Pierre-laurent aimard apporte un regard très personnel sur la musique de toute époque. ancien professeur associé au collège de France (2008-2009), il est membre de l’acadé-mie des Beaux-arts de Bavière. il été nommé instrumentiste de l’année 2005 par la royal Philharmonic Society puis par Musical America en 2007. en lien avec le Klavier-Festival de la ruhr, il a lancé en 2015 un projet fondateur de ressources en ligne autour de l’interprétation et de l’enseignement du répertoire pianistique de ligeti, avec la vidéo de master classes ou de concerts de ses Études et d’autres pièces du compositeur. Pierre-laurent aimard a fait paraître avec succès une vaste discographie. Son premier disque chez deutsche Grammophon, L’Art de la fugue de Bach, a reçu le diapason d’or et le choc du Monde de la Musique, classé premier au palmarès classique Billboard et en tête des téléchargements sur itunes. au cours des dernières années, Pierre-laurent s’est vu remettre diverses récompenses telles que le prix ecHo Klassik à plusieurs reprises, comme pour son album soliste Hommage à Messiaen

(2009), le Grammy award pour Concord Sonata and Songs d’ives (2005) et le Prix d’honneur de la critique discographique allemande (2009). après le Liszt Project (2001) et les Préludes de debussy (2012), la liste de ses parutions chez deutsche Grammophon s’est encore étoffée avec un nouvel enregistrement du premier livre du Clavier bien tempéré de Bach (2014).

Tamara Stefanovichinterprète remarquée d’un vaste réper-toire, tamara Stefanovich se produit dans le monde entier, accueillie par de grandes salles telles que carnegie Hall à new York, la Philharmonie de Berlin, le Suntory Hall de tokyo, le royal albert Hall et le Wigmore Hall de londres. elle est régulièrement à l’affiche de festivals internationaux : lucerne, la roque d’an-théron, ravenne, aldeburgh, Salzbourg, le festival Styriarte de Graz, le Klavier-Festival de la ruhr et la Beethovenfest de Bonn. Pour cette saison, la pianiste est invitée par le festival Pianoespoo d’Hel-sinki, le théâtre de la Scala de Milan, l’international Piano Series du Southbank centre de londres, la Fondation Juan March de Madrid et le Wigmore Hall de londres. aux côtés de Pierre-laurent aimard, elle interprète Mantra dans le cadre du festival Stockhausen Musica Viva de Munich, au Muziekgebouw d’amsterdam et à la Philharmonie de Paris. Plus tard dans la saison, elle se produit avec l’orchestre Philharmonique de tampere sous la direction d’anu tali. au nombre de ses engagements

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récents, on citera ses débuts avec le Sarasota orchestra, des concerts avec l’orchestre Symphonique de la radio bavaroise, l’orchestre Symphonique de la Mdr de leipzig, l’orchestre Symphonique de la Wdr de cologne, le chamber orchestra of europe et l’orchestre Symphonique d’islande, sans oublier le succès de sa vaste tournée de récitals aux États-unis marquant le quatre-vingt-dixième anniversaire de Pierre Boulez. la pianiste s’est produite avec les orchestres symphoniques de cleveland et de chicago, le london Symphony, le london Philharmonic, le Philharmonia orchestra, le Bamberger Symphoniker, le Britten Sinfonia, la deutsche Kammerphilharmonie de Brême, l’orchestre de chambre de Suède et le london Sinfonietta. tamara Stefanovich a collaboré avec esa-Pekka Salonen, vladimir ashkenazy, osmo vänskä, Susanna Mälkki et vladimir Jurowski ainsi qu’avec les compositeurs Pierre Boulez, Peter eötvös et György Kurtág. elle enseigne à la Hochschule für Musik de cologne et est réguliè-rement en charge de projets éduca-tifs au Barbican centre de londres, à la Philharmonie de cologne et au Klavier-Festival de la ruhr. elle parti-cipe également à un projet pionnier d’analyses pédagogiques interac-tives en ligne des Notations de Boulez : www. explorethescore.org. Sa dis-cographie compte le Concerto pour deux pianos, percussion et orchestre de Bartók avec Pierre-laurent aimard, Pierre Boulez et le london Symphony

orchestra chez deutsche Grammophon, nominé pour le Grammy, ainsi que des parutions chez avi et Harmonia Mundi comme la création de pièces pour piano solo de thomas larcher. Son dernier disque regroupe le Concerto pour piano et orchestre et les Dix Études pour piano de Hans abrahamsen avec l’orchestre Symphonique de la Wdr de cologne chez Winter & Winter. en 2015, elle a enregistré chez ecM Quasi une Fantasia et le Double Concerto de Kurtág avec l’asko/Schönberg ensemble et reinbert de Leeuw. Formée par Lili Petrović, tamara Stefanovich s’est distinguée en devenant à treize ans la plus jeune étudiante de l’université de Belgrade. Sa formation universitaire englobe des disciplines extra-musicales telles que la psychologie et l’éducation. la pianiste s’est perfectionnée au curtis institute of Music de Philadelphie avec claude Frank puis avec Pierre-laurent aimard à la Hochschule de cologne.

Marco Stroppacompositeur, chercheur et pédagogue, Marco Stroppa, né à vérone (italie) en 1959, étudie la musique en italie (piano, musique chorale et direction de chœur, composition et musique électronique). entre 1984 et 1986, grâce à une bourse de la Fondation Fulbright, il poursuit des études scientifiques (informatique, sciences cognitives et intelligence artificielle) au Media laboratory du Massachusetts institute of technology des États-unis. en 1982, il s’installe à Paris, où il travaille comme compositeur

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et chercheur à l’ircam ; les contacts inin-terrompus avec l’institut depuis son arri-vée en France ont été déterminants dans sa formation musicale et sa démarche théorique et artistique, en particulier dans les domaines du contrôle de la synthèse du son par ordinateur, avec Jean Bresson, et de l’écriture de l’inte-raction, avec arshia cont. Parallèlement, Marco Stroppa a développé une acti-vité d’interprète à l’électronique de quelques œuvres essentielles du réper-toire du XXe siècle, en particulier avec Pierre-laurent aimard. après Kontakte, Mantra est la deuxième œuvre de Karlheinz Stockhausen qu’ils jouent ensemble. À l’instar du maître allemand, il considère que jouer de l’électronique et diffuser le son pendant les concerts ont la même importance artistique que le jeu instrumental.

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9 et 10 avril

Passions. Amours perdues, amours cachées

Berlioz - Wagner

Grand soir Manoury - Schönberg - Bach…

Turangalîlâ Ives - Messiaen

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ÉCOUTER EN DÉCOUVREURKARLHEINZ STOCKHAUSENtextes réunis et introduits par Imke Mischtraduits de l’allemand par Laurent Cantagrel et Dennis Collins

L E S É D I T I O N S D E L A P H I L H A R M O N I E

Karlheinz Stockhausen (1928-2007) a fait preuve d’une créativité sans égale : près de quatre cents œuvres, dont le cycle Licht et ses vingt-neuf heures de musique est l’aboutissement monumental. Le compositeur a tracé des sillons dans lesquels les générations ultérieures se sont inscrites, par-delà les frontières esthétiques, de la musique contemporaine aux musiques populaires et électroniques. Ce que l’on sait peut-être moins, c’est que cet artiste protéiforme, inventeur de langages musicaux inouïs, n’eut de cesse de prendre la parole ou la plume pour défendre ses positions et éclairer ses auditeurs. Écouter en découvreur réunit pour la première fois en français une sélection de textes de différentes natures couvrant l’ensemble de la carrière de Karlheinz Stockhausen.

La rue musicale [Écrits de compositeurs]448 pages • 15 x 22 cm • 32 €

cahier couleur 16 pagesISBN 979-10-94642-06-1 • JANVIER 2016

La rue musicale est un « projet » qui dépasse le cadre de la simple collection d’ouvrages. Il s’inscrit dans l’ambition générale de la Philharmonie de Paris d’établir des passerelles entre différents niveaux de discours et de représentation, afin d’accompagner une compréhension renouvelée des usages de la musique.

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