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N° d’ordre : 4532 UNIVERSITÀ DEGLI STUDI DI ROMA “La Sapienza” Dipartimento di Scienze ell’Antichità UNIVERSITÉ DE BORDEAUX 1 Ecole doctorale : Sciences et Environnement THÈSE présentée à L’UNIVERSITÉ BORDEAUX 1 en co-tutelle avec L’UNIVERSITÉ LA SAPIENZA DE ROME par CARMEN SANTAGATA POUR OBTENIR LE GRADE DE DOCTEUR SPÉCIALITÉ : Préhistoire L'UTILISATION DE ROCHES AUTRES QUE LE SILEX AU PALÉOLITHIQUE ANCIEN ET MOYEN Choix économiques, techniques et fonctionnels, sur la base de l'étude des gisements de Sainte-Anne I (Haute-Loire, France) (MIS 5 et 6) et de Notarchirico (Basilicata, Italia) (MIS 14 à 17) Tome I Soutenue le 12 juin 2012 Devant la commission d’examen formée de : MM. A. DELAGNES Chargée de recherche au CNRS, HDR Examinateur invité J. JAUBERT Professeur à l’Université de Bordeaux 1 Président MH. MONCEL Directeur de recherche au C.N.R.S. Rapporteur M. MUSSI Professeur à l’Université La Sapienza de Roma Directeur de thèse C. PERETTO Professeur à l’Université de Ferrara Rapporteur M. PIPERNO Professeur à l’Université La Sapienza de Roma Examinateur invité JP. RAYNAL Directeur de recherche au C.N.R.S. Directeur de thèse 2012

L'utilisation de roches autres que le silex au Paléolithique ancien et

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  • N dordre : 4532

    UNIVERSIT DEGLI STUDI DI ROMA

    La Sapienza

    Dipartimento di Scienze ellAntichit

    UNIVERSIT DE BORDEAUX 1

    Ecole doctorale :

    Sciences et Environnement

    THSE

    prsente

    LUNIVERSIT BORDEAUX 1

    en co-tutelle avec

    LUNIVERSIT LA SAPIENZA DE ROME

    par

    CARMEN SANTAGATA

    POUR OBTENIR LE GRADE DE

    DOCTEUR

    SPCIALIT : Prhistoire

    L'UTILISATION DE ROCHES AUTRES QUE LE SILEX AU

    PALOLITHIQUE ANCIEN ET MOYEN

    Choix conomiques, techniques et fonctionnels, sur la base de l'tude

    des gisements de Sainte-Anne I (Haute-Loire, France) (MIS 5 et 6)

    et de Notarchirico (Basilicata, Italia) (MIS 14 17)

    Tome I

    Soutenue le 12 juin 2012

    Devant la commission dexamen forme de : MM. A. DELAGNES Charge de recherche au CNRS, HDR Examinateur invit

    J. JAUBERT Professeur lUniversit de Bordeaux 1 Prsident

    MH. MONCEL Directeur de recherche au C.N.R.S. Rapporteur

    M. MUSSI Professeur lUniversit La Sapienza de Roma Directeur de thse

    C. PERETTO Professeur lUniversit de Ferrara Rapporteur

    M. PIPERNO Professeur lUniversit La Sapienza de Roma Examinateur invit

    JP. RAYNAL Directeur de recherche au C.N.R.S. Directeur de thse

    2012

  • TOME I

  • 5

    SOMMAIRE

    TOME I

    Rsum 13

    Riassunto 13

    Abstract 14

    Remerciements 17

    INTRODUCTION

    Les prsupposs idologiques 21

    Le concept de variabilit 21

    Les normes techniques 21

    La relation variabilit/normes techniques 22

    1. LA PROBLMATIQUE

    1.1 Le cadre de ltude

    1.1.1 Variabilit technique et variabilit des matires premires 27

    1.1.2 Systmes techniques et contexte social 28

    1.1.3 Systmes techniques et traditions culturelles 28

    1.1.4 Un problme rcurrent dans le temps et dans l'espace 29

    1.2. Quelques exemples de production dans diffrentes matires premires

    dans le cadre de la prhistoire europenne

    1.2.1 La variabilit technique dans le Palolithique infrieur 31

    1.2.2 La variabilit technique dans le Palolithique moyen 32

    1.2.3 La variabilit morphotechnique lie la gestion diffrentielle

    de la matire premire 33

    2. LA MTHODOLOGIE

    2.1 Les techniques de dbitage

    2.1.1 Le dbitage orthogonal 39

    2.1.2 Le dbitage SSDA 39

  • 6

    2.1.3 Le dbitage Discode : techniques et mthodes 40

    2.1.4 Le dbitage Levallois : techniques et mthodes 41

    2.1.5 Le dbitage en tranches de saucisson 42

    2.1.6 Le faonnage bifacial

    La technique 43

    Les classifications morpho-techniques: tat de la recherche 43

    La finalit de la production 48

    2.2 Les outils mthodologiques 57

    2.2.1 Les fiches descriptives 58

    La fiche dtude des produits de dbitage 58

    La fiche dtude des nuclus 59

    La fiche dtude des bifaces 59

    2.2.2 Les schmas diacritiques 60

    2.2.3 Le schma en quartiers 60

    2.3 Analyse de la chane de dbitage 62

    2.3.1 Lexique des produits 62

    2.3.2 Descripteurs technologiques 66

    2.4. Analyse des supports bifaciaux

    2.4.1 Lexique des produits 70

    2.4.2 Descripteurs technologiques 72

    3. LES GISEMENTS

    3.1 La grotte de Sainte Anne

    3.1.1 Histoire des recherches 83

    3.1.2 Contexte archologique et physiographie 83

    3.1.3 Cadre go-morphologique 85

    3.1.4 La stratigraphie 88

    3.2 Le bassin de Venosa

    3.2.1 Histoire des recherches 89

    3.2.2 Contexte archologique et physiographie 89

    3.2.3 Cadre gomorphologique 90

    3.2.4 Impact environnemental du volcanisme et occupations

  • 7

    humaines 92

    3.3 Le site de Notarchirico

    3.3.1 Cadre gomorphologique 94

    3.3.2 Les niveaux archologiques 96

    4. DEMARCHES ET PREMIRES OBSERVATIONS

    4.1 Les acquis typo-technologiques

    4.1.1 Le site de Sainte Anne I 103

    4.1.2 Le Bassin de Venosa et le site de Notarchirico 104

    4.2 Les matires premires

    4.2.1 Ptro-archologie des roches volcaniques 106

    4.2.2 Les quartz 109

    4.2.3 Les silex 111

    Observations gnrales sur les silex de Sainte Anne 1 118

    4.2.4 Les matires de la plaine de Venosa 120

    Les calcaires (V1) 120

    Les calcaires silicifis (V2). 120

    Les arnites et calcarnites silicifies (V4) 120

    5: ANALYSE TECHNOLOGIQUE

    5.1 Sainte Anne I

    5.1.1 Lindustrie lithique en basalte

    5.1.1.1 Le niveau J1 125

    5.1.1.2 Le niveau J2 144

    5.1.2 Lindustrie lithique en phonolite

    5.1.2.1 Le niveau J1 158

    5.1.2.2 Le niveau J2 163

    5.1.3 Lindustrie lithique en silex

    5.1.3.1 Le niveau J1 167

    5.1.3.2 Le niveau J2 184

    5.1.4 Lindustrie lithique en quartz

    V.1.4.1 Le niveau J1 201

  • 8

    V.1.4.2 Le niveau J2 209

    5.1.5 Le dbitage : lanalyse des rapports dimensionnels 214

    5.2 Les bifaces des collections du bassin de Venosa

    5.2.1 Finalit de lanalyse des produits bifaciaux 219

    5.2.2 Analyse des caractres des bifaces 220

    5.2.2.1 Notarchirico 220

    5.2.2.2 Ensemble Loreto-Lichinchi 230

    5.2.2.3 San Domenico 236

    5.2.2.4 Castelluccio 245

    5.2.2.5 Synthse technique des bifaces 256

    5.2.3 Analyse des caractres des bauches de biface

    5.2.3.1 Notarchirico 262

    5.2.3.2 Ensemble de Loreto-Lichinchi 273

    5.2.3.3 San Domenico 276

    5.2.3.4 Castelluccio 280

    5.2.3.5 Synthse technique des bauches 283

    5.2.4 Le type de faonnage 285

    5.2.5 Analyse des produits du faonnage : les ngatifs des

    enlvements des bifaces 290

    5.2.5.1 Notarchirico 290

    5.2.5.2 Loreto-Lichinchi 291

    5.2.5.3 San Domenico 292

    5.2.5.4 Castelluccio 293

    5.2.6 Analyse des produits du faonnage : les ngatifs des

    enlvements des bauches de biface

    5.2.6.1 Notarchirico 295

    5.2.6.2 Loreto-Lichinchi 295

    5.2.6.3 San Domenico 296

    5.2.6.4 Castelluccio 297

    5.2.7 Lanalyse de certains rapports morphomtriques

    5.2.7.1 Le dgr de faonnage 298

    5.2.7.2 La prsence de standardisation morphomtrique 300

  • 9

    5.2.8 Analyse des rapports entre les bifaces et les bauches 302

    Notarchirico 303

    Loreto-Lichinchi 304

    San Domenico 305

    Castelluccio 305

    5.3 Le site en plein air de Notarchirico

    5.3.1 Le niveau B 307

    5.3.2 Le niveau E/E1 315

    5.3.3 Synthse technique des niveaux en place sur le site

    de Notarchirico 321

    6 CONCLUSIONS 325

    Dualisme variabilit/standardisation dans les sites du Plistocne moyen 326

    Les chanes de faonnage 326

    Cohabitation dbitage/faonnage 331

    La variabilit dans le Palolithique infrieur 331

    La variabilit dans le Palolithique moyen 333

    Des projets pour le futur .. 339

    ANNEXE : les tableaux 341

    1. Sainte Anne. 343

    a. Lindustrie en basalte du niveau J1 343

    b. Lindustrie en basalte du niveau J2 369

    c. Lindustrie en phonolite du niveau J1 401

    d. Lindustrie en phonolite du niveau J2 407

    e. Lindustrie en silex du niveau J1 415

    f. Lindustrie en silex du niveau J2 437

    g. Lindustrie en quartz du niveau J1 461

    h. Lindustrie en quartz du niveau J2 471

    2. Plaine de Venosa.

    a. Les bifaces de Notarchico 489

    b. Les bifaces de Loreto 509

  • 10

    c. Les bifaces de San Domenico 513

    d. Les bifaces de Castelluccio 519

    e. Les bauches de Notarchico 535

    f. Les bauches de Loreto 549

    g. Les bauches de San Domenico 553

    h. Les bauches de Castelluccio 557

    i. Ltude des ngatives sur les bifaces 563

    j. Ltude des ngatives sur les bauches 577

    3. Le site de Notarchirico.

    a. Le niveau B 583

    b. Le niveau E/E1 595

    RFRENCES 609

    Tables des figures 627

    Tales des graphiques 629

    Tables des tableaux 630

    Tables des planches 658

    TOME II

    LES PLANCHES

    PARTIE I : catalogue des sries en place

    1. Le niveau B de Notarchirico, planches 1-19 9

    2. Le niveau E/E1 de Notarchirico, planches 20-45 31

    3. Le niveau J1 de la grotte de Sainte Anne 1, planches 46-108 61

    4. Le niveau J2 de la grotte de Sainte Anne 1, planches 109-173 127

    PARTIE II : catalogue des sries supports bifaciaux de la plaine de Venosa

    1. Les bifaces

    1.1. La srie de Notarchirico, planches 174-232 199

    1.2. Lensemble Loreto-Lichinchi, planches 233-259 261

    1.3. La srie de San Domenico, planches 260-282 291

    1.4. La srie de Castelluccio, planches 283-320 317

  • 11

    2. Les bauches

    2.1. La srie de Notarchirico, planches 321-371 359

    2.2. Lensemble Loreto-Lichinchi, planches 372-385 413

    2.3. La srie de San Domenico, planches 386-401 429

    2.4. La srie de Castelluccio, planches 402-424 447

    3 Les autres types techniques

    3.1. La srie de Notarchirico, planches 425-437 475

    3.2. Lensemble Loreto-Lichinchi, planches 438-446 491

    3.3. La srie de San Domenico, planches 447-450 503

    3.4. La srie de Castelluccio, planches 451-452 509

    4 Comparaison entre les pointes des supports bifaciaux

    4.1. Les pointes des bifaces, planches 453-479 515

    4.2. Les pointes des bauches, planches 480-493 545

    5 Lgende

    Lgende pour la lecture diacritique des supports bifaciaux 561

    Morphologies des pointes des supports bifaciaux 562

  • 13

    Rsum

    La question principale laquelle nous avons tent de rpondre est la suivante: est-ce que la variabilit des matires premires (caractristiques ptrographiques et morphologie des supports) a conditionn la production des hommes prhistoriques dans le temps et dans lespace ? La mise en place de fiches descriptives technologiques spcifiques pour chaque catgorie dobjets nous a permis danalyser les caractres techniques propres chaque produit et de slectionner les variables principales qui ont jou un rle important dans lvaluation des contraintes et ont guid la production lithique. Lanalyse critique des contextes lithostratigraphiques et la prise en compte des diversits techniques, technologiques ou chronologiques des industries permettent de reconsidrer les paradigmes la base de la diffrentiation des techniques: produits du faonnage bifacial (biface, bauche), systme de production Levallois, systme de production Discode. Ces termes ont trop longtemps masqu la variabilit exprime par la production technique des tailleurs du Palolithique. Cest vers lanalyse de la pluralit des comportements humains et des socits quil faut se diriger maintenant. Mots-cls : Acheulen, Palolithique infrieur, Palolithique moyen, production bifaciale, Levallois, Discode, variabilit, matire premires, technologie lithique.

    Riassunto Lutilizzazione delle rocce diverse dalla selce nel Paleolitico antico e medio : scelte economiche, tecniche e funzionali, sulla base dello studio dei siti di Sainte-Anne I (Haute-Loire, France) (SIO 5-7) e di Notarchirico (Basilicata, Italia) (SIO 14-17). La questione principale alla quale abbiamo tentati di rispondere la seguente: la variabilit delle materie prime (caratteristiche petrografiche e morfologia dei supporti) ha condizionato gli uomini preistorici durante la produzione nel tempo e nello spazio? La creazione e lutilizzo di schede di analisi specifiche per ogni categoria di oggetti ci ha permesso di analizzare i caratteri tecnici specifici dei prodotti e di selezionare le variabili principali che hanno giocato un ruolo importante nella valutazione delle necessit alla base della produzione litica. Lanalisi critica dei contesti lito-stratigrafici e la considerazione delle diversit tecnica, tecnologica o cronologica delle industrie permette di riconsiderare i paradigmi alla base della differenziazione delle tecniche: prodotti del faonnage bifacciale (bifacciale, bauche), sistema di produzione Levallois, sistema di produzione Discoide. Questi termini hanno per troppo tempo celato la variabilit dei caratteri che durante il Paleolitico era necessario prendere in considerazione nella produzione litica. Adesso bisogna dare un nuovo indirizzo agli studi, indirizzandoli verso la presa di coscienza della pluralit dei comportamenti umani e delle societ paleolitiche. Parole chiave : Acheuleano, Paleolitico inferiore, Paleolitico medio, supporti bifacciali, Levallois, Discoide, variabilit, materie prime, Tecnologia litica.

  • 14

    Abstract The use of geomaterials different from flint in Early and Middle Paleolithic. Economical technical and functional choices after the study of two sites : Sainte-Anne I (Haute-Loire, France) (MIS 5-7) and Notarchirico (Basilicata, Italy) (MIS 14-17). We tried to answer the question: has the variability of raw materials (from petrographical characteristics and morphological aspects) influenced prehistoric knappers during the production both in time and space? The creation and use of specific descriptive files for each category of objects allowed us to analyze the technical characteristics of the products and to select the variables that played a major role in the assessment of needs at the base of the lithic production. Critical analysis of the litho-stratigraphic contexts and consideration of technical, technological or chronological diversity allows to reconsider the paradigms underlying the differentiation of the techniques: products faonnage (double sided, bauche), Levallois production system, discoid production system. These terms have for too long concealed the variability of the characters in Paleolithic lithic production. We have now to reconsider the purposes of lithic studies and to aim to decipher the plurality of individuals and palaeolithic societies behaviours. Key-words : Acheulian, Lower Palaeolithic, Middle Palaeolithic, bifacials, Levallois, Discoide, variability, raw materials, lithic technology. Carmen Santagata Universit Bordeaux 1, UMR 5199 PACEA PPP, Btiment B18, avenue des Facults 33400 Talence ; Universit La Sapienza di Roma, Dipartimento di Scienze dell'Antichit, Piazzale Aldo Moro 5, Roma; [email protected]

  • A Alessandra et mon pre

  • 17

    ............................................................................................................... Remerciements Ce mmoire est laboutissement dune recherche qui a commenc dsormais il y a 6 ans. Cette tude est, dune certaine manire, seulement une tape dun parcours personnel et scientifique qui a toujours t conduit, sur le terrain et pendant lanalyse du matriel, avec autant de curiosit que de plaisir ; je souhaite nommer et remercier toutes celles et tous ceux qui ont contribu, chacun sa faon, sa ralisation. Mes remerciements vont dabord mon directeur de thse, le professeur Jean-Paul Raynal, qui a dirig ce travail et qui ma permis dtudier les sries lithiques des diffrents niveaux de Sainte Anne 1. Merci pour son soutien, son attention et sa patience, merci de mavoir guide tout en me laissant suffisamment libre, merci pour la qualit des sances de travail que nous avons pu partager. Mes remerciements surtout pour sa capacit me soutenir du point de vue humain durant les moments les plus difficiles de ma vie prive. Merci au professeur Marcello Piperno qui ma permis daccder de faon illimite toutes les collections acheulennes souhaites. Je le remercie aussi pour avoir t mon tuteur durant les premires annes de ma formation, me permettant de participer de nombreuses missions et fouilles en Italie et ltranger. Sa confiance en mes capacits mas permis dentamer cette collaboration fertile avec larchologie franaise. Je remercie Paul Fernandes, Grard Vernet, Guy Kieffer pour leur contribution dans la rdaction de cette thse travers leurs recherches concernant lencadrement ptrographique des matires premires. Je tiens tout particulirement remercier Paul pour les nombreuses sances de travail toutes les heures du jour et de la nuit, pour les discussions et le temps que nous avons partags Goudet et Laussonne; merci Grard de mavoir consacr une partie de son temps de travail, surcharg lpoque. Je noublie pas de rappeler que les dessins des artefacts ont t raliss par Marianne Hiberc-Raynal que je remercie pour mavoir toujours accueilli chaleureusement en ces nombreuses annes. Je remercie le professeur Madame Mussi qui, malgr elle ait pris en charge ma thse en un deuxime temps, a tout de mme consacr toute son attention la lecture de mon travail pour ensuite en discuter et nous confronter. Dune faon ou dune autre, plusieurs sont les personnes mavoir facilit ce travail. Je suis extrmement reconnaissante Jacques Jaubert et Anne Delagnes tout dabord pour la confiance quils mont accorde me permettant ainsi de continuer mon travail et surtout davoir compris que les difficults auxquelles je faisais face taient indpendantes de ma volont et impossibles grer diffremment lpoque. De la mme manire, je souhaite remercier le professeur Alberto Cazzella qui, ne me connaissant qu travers mon curriculum et ma documentation sanitaire (!!), sest plusieurs

  • 18

    fois charg de dfendre ma cause auprs du Conseil de Facult et du Secrtariat de lUniversit de Rome. Je remercie lUniversit de Bordeaux 1 de mavoir attribu une aide financire, dont le soutien a t fondamental pour la gestion de mes dplacements et les frais de voyages auxquels jai d faire face. Aussi, je remercie les secrtariats et les administrations des deux Facults pour avoir toujours t disponibles me soutenir et ce avec beaucoup de courtoisie. Merci Monsieur Garcia, Responsable du Centre Opratif Mixte de Venosa et Madame Ciciriello, Archologue Directeur Coordinateur, pour laccueil au Muse de Venosa et tout le personnel du Dpartement. Je tiens remercier tout particulirement Monsieur Michele Savarese e Michele Soldo, sans leur extrme disponibilit je naurais probablement pas russi voir tous les bifaces et les matriaux de Notarchirico. Merci Anne Delagnes, Marie-Hlne Moncel, Sylvain Soriano, Alain Tuffreau, Ivana Fiore, Cristina Lemorini: nos discussions ont t extrmement utiles et formatrices. En particulier je tiens remercier Marie-Hlne Moncel pour son encouragement dvelopper et conclure ce travail. Je tiens remercier pralablement tous les membres du jury qui ont accept de porter leur intrt mon travail. Leurs commentaires me permettront damliorer ce manuscrit qui je lespre ne reprsente quune tape dun plus long parcours. Je les remercie pour leurs dons bibliographiques, leurs corrections et leurs commentaires. Je tiens galement remercier les collgues qui au fil du temps se sont succds dans les laboratoires de Goudet et de Laussonne, et tout particulirement mes collgues des dernires annes Camille, Audrey, Vincent, avec qui jai partag les moments de bonheur autant que les priodes les plus difficiles de chaque campagne de fouilles dans une ambiance et un change toujours agrables. Souvent leur prsence et leur esprit dquipe mont permis de consacrer plus de temps la prparation de ma thse. Je les remercie pour a. Un grand merci toutes les personnes avec qui je travaillais et qui ont eu la patience de mattendre me permettant ainsi de terminer ma thse, tout particulirement Monsieur Filippo Barattolo et Monsieur Antonio Salerno.

    ***** Enfin je ne saurais oublier les plus importants.. Derrire tout chercheur se cache sa famille, ce qui lui permet dassurer chaque jour les conditions morales de sa ralisation professionnelle. Merci infiniment Maman et Papa de votre patience, votre confiance et votre soutien indfectible qui mont aid travailler lesprit serein... Maman, cest aussi grce tes attentions quotidiennes que ce travail a pu voir le jour. Merci Anna et Gennaro pour votre soutien. Merci infiniment Anna pour avoir t mes cts et pour mavoir aid sans ne jamais me mettre la pression: sans ton aide constante ce travail

  • 19

    naurait probablement pas t termin. Ton aide de tous les jours, (et parfois des nuits!) a reprsent la rsolution beaucoup de moments de difficult. Merci Alessandro et Nadia pour leur encouragement, leur soutien ou simplement leur attente silencieuse et patiente que les moments de difficults passent .. Merci Alessandro dtre le frre que je nai pas eu, merci de ta prsence qui, parfois mieux que les mots, a reprsent une aide et un soutien prcieux. Merci mon chri pour ton aide morale, pratique, pour ton soutien et ton amour Merci pour ton encouragement, ton coute et ton analyse clairvoyante lors des moments difficiles. Merci toi, ma petite Alessandra, pour la joie indescriptible que tu as apporte, sans laquelle ce travail naurait pu voir le jour.

  • 21

    INTRODUCTION Les prsupposs idologiques En ce qui concerne ltude des ensembles lithiques lattention des chercheurs se pose toujours depuis des annes sur le concept de variabilit et sur la faon diffrente avec laquelle celle-ci se manifeste. Notre tude est motive par la tentative dencadrer cette notion dans les contextes palolithiques et plus prcisment par la recherche du sens du mot variabilit dans le cadre de lutilisation diffrentielle de plusieurs matires premires. Cette tude a t confronte deux limites: la variabilit des caractristiques morpho-techniques rencontres et les normes suivies par le tailleur dans la production. Le concept de variabilit Nombreuses sont les causes qui influencent le dveloppement dun comportement technique (Navarro, 2002), mais il semblerait nanmoins que la variabilit puisse tre interprte comme le rsultat de diffrentes adaptations prsentes par un groupe humain en fonction du contexte environnemental. Cest la raison pour laquelle dans lanalyse des technocomplexes palolithiques, linterprtation des industries doit tre rattache au contexte socio-conomique de provenance. La mise en place dun systme technique nest pas seulement le rsultat dun choix technique prcis et mis au point du dbut du dbitage/faonnage jusqu la fin de la production, mais la rponse aux contraintes morphologiques et ptrographiques rencontres par hasard par les tailleurs. Il semblerait y avoir donc deux possibilits : 1. choisir ds le dbut la faon de procder en considrant la morphologie du support

    dorigine et suivant les normes techniques acquises (avec le risque de devoir interrompre la production avant lpuisement du nuclus);

    2. changer la faon de procder pendant la production lapparition de certaines contraintes (souplesse adaptative du schma mental et mise en uvre de nouvelles solutions techniques).

    Les normes techniques La norme est un choix accept par la majorit des chercheurs qui ne peut sexprimer quau sein dune variabilit pour fixer une faon particulire de faire (Maigrot et Plisson, 2005). Elle ressort fondamentalement du contexte social et se dfinit implicitement par sa mise en pratique dans un espace de communication et dchange. Par consquent la pratique sociale (synonyme de faon particulire dagir) est ncessairement le prolongement de la norme technique. Lapport fondamental de la technologie est davoir donn le moyen de faire une distinction entre variabilit et diffrence, c'est--dire de relier les pices aux principes structurels inhrents leur processus de production et de faire la part entre des produits de

  • Introduction

    22

    morphologie diffrente, mais relevant dun mme principe de production, et des produits de mme morphologie, mais relevant au contraire de principes diffrents. La relation variabilit/normes techniques Plusieurs auteurs ont cherch analyser et codifier le rapport qui relie pendant le Palolithique la variabilit des contraintes du milieu et des besoins socio-conomiques des hommes et leurs normes techniques de rfrence. Pour Batalla Llasat (2003), compte tenu de lventuelle homognit chronologique entre les sries analyses, dun point de vue strictement technique, le concept de variabilit est mettre en relation avec la faon dont le tailleur se rapporte la production doutils au sens large. Il sagit des concepts de :

    complexit

    simplicit Le rapport entre eux doit tre encadr dans la variabilit lie aux choix techniques et aussi aux dynamiques sociales. Cet lment met davantage en vidence la variabilit des situations possibles. Parfois, les outillages simples savrent tre de prcieux indicateurs des comportements socio-conomiques et de la complmentarit technique qui existe parfois dans les socits palolithiques. Ce qui peut tre qualifi de simple dun point de vue technique ne renvoie gnralement pas une situation simple ni dun point de vue conomique ni a fortiori dun point de vue social (Astruc, Bon, Lea, 2006) : il sagit plutt de la ralisation dun mode de pense complexe. Dautre part, parfois la complexit technique savre mener la ralisation dun but fonctionnellement simple (il sagit par exemple de la production de lclat Levallois). Daprs nous, la variabilit technique peut se manifester sous plusieurs formes :

    dans le rapport matires premires/choix techniques : plusieurs chanes opratoires, diffrentes matires premires (rapport synchronique) ou diffrentes poques (rapport diachronique). Dans ce cadre, mme la morphologie du support de base a pu conditionner les choix techniques et la morphologie finale de certains outils ou supports doutils1. Cest le cas de lutilisation diffrentielle des matires premires par rapport aux techniques observes, notamment, dans le site de La Borde (Jaubert, 1990). Dans dautres cas, lhomognit technique est dmontre par la production - dans la mme matire premire - de supports de chanes opratoires varis : la morphologie des produits est la mme ;

    dans la complexit technique : les mmes outils ont pu tre le produit de diffrentes conceptions de faonnage ainsi que de dbitage (par exemple : biface-nucleus ; choppers ; etc), dautre part, partir de diffrentes matires premires le tailleur a pu mettre en place la mme chane opratoire (cest le cas, notamment, du site de La Roca dels Bous en Catalogne du nord o la srie atteste lexploitation de silex, de quartzite et dautres roches selon une conception discode: (Terradas et alii, 1991) ;

    dans la complexit fonctionnelle : un mme outil peut avoir plusieurs utilisations et tre en mme temps le produit dune complexit technique (biface) ;

    1 Dans le niveau J1 de Sainte-Anne II (Polignac, Haute-Loire), la morphologie finale des nuclus Levallois en silex

    dpend de la morphologie des supports dorigine (plaquettes).

  • Introduction

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    dans la complexit opratoire et complexit conceptuelle, notions introduites par les travaux de Tixier (1980), ceux de Roche (1990), Roche et Texier (1991) et Delagnes (1995). De nombreux cas de figures sont prvus par les auteurs : o complexit conceptuelle faible et complexit oprationnelle faible (galet taill) ; o complexit conceptuelle leve et complexit oprationnelle faible (pointe

    Levallois) ; o complexit conceptuelle faible et complexit oprationnelle leve (bolas).

    Dans le cadre de la complexit conceptuelle leve nous rservons un discours part au concept de standardisation morphologique des produits qui nest pas forcment relier leur prdtermination. Pour certains produits la standardisation est le rsultat de la prdtermination (clat Levallois ou hachereaux) ; dans dautres cas (biface), la standardisation morphologique nest pas lie la prdtermination technique, mais plutt le rsultat dune prdtermination dans les caractristiques des enlvements faonns (Mourre, 2006). Un cas particulirement intressant est celui o lon observe la succession de plusieurs chanes opratoires sur le mme site et dbites dans le bloc/galet de matire premire (concept de matrice ou chane opratoire secondaire : Bougignon et al., 2006) : lindice de complexit est li la ramification des chanes oprationnelles. Il sagit par exemple de la mthode Kombewa ou la mthode Le Pucheuil, prsentes parfois aux cts des systmes techniques prsentant un plus faible degr dlaboration : cela nous suggrant une possible complmentarit entre systmes techniques de production lithique simples et complexes (Roche et Texier, 1991; Texier et Roche, 1995). Ces diffrents niveaux dlaboration seraient donc plutt mettre en relation avec lorganisation socio-conomique des groupes et la complmentarit fonctionnelle de leur production. Dautre part, en accord avec les auteurs, gnralement nous nobservons pas une dichotomie entre systmes simple et complexe dans le Palolithique moyen mais plutt une alternance de phases simples et de phases complexes dans la mme chane opratoire (tant pendant la phase de production, que pendant la phase de gestion des outillages). Ces diffrentes options sinscrivent dans des systmes techno-conomiques structurs, en particulier pour ce qui concerne les modalits dacquisition /gestion des ressources par les hommes, lorganisation des territoires et les schmas de mobilit adopts. En conclusion, du point de vue technique, la variabilit semblerait tre la fois expression dune faon de penser simple (jutilise la matire que jai trouve par hasard suivant la faon la meilleure sans respecter ncessairement les rgles techniques) et complexe cause du rle jou par le contexte social2 des socits prhistoriques, strictement li aux possibilits conomiques et aux possibilits techniques des hommes dagir sur leur milieu pour rpondre leurs besoins.

    2 Pour contexte social on considre autant le contexte culturel ( la base des choix techniques) que les

    contraintes conomiques auxquelles les hommes ont d faire face soit pour choisir un produit et comment le choisir (supports retouchs, supports tranchants bruts, morphologies predetermines etc.) soit pour arriver au but de la production (choix de la matire premire et de la technique avant et pendant la production, dans le but de lutilisation finale de lobjet).

  • LA PROBLMATIQUE

  • La problmatique

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    1.1 Le cadre de ltude

    La gestion diffrencie des matires premires (roches volcaniques, calcaires, quartzites ) dans les sries du Palolithique ancien et moyen que nous avons analyses correspond bien au concept restreint dconomie des matires premires systmatis par Perls (1991). Ce concept nous porte nous interroger sur la variabilit des modalits de mise en uvre des chanes opratoires sur des matires autres par rapport aux productions sur silex. Le point de dpart de lanalyse - suivant une approche techno-conomique a t la caractrisation ptrographique et lanalyse des modalits dacquisition de ces matires premires3. Dans le Palolithique ancien et moyen le registre dans lequel la complexit des comportements est le mieux visible est celui de la gestion des ressources et du degr de mobilit des populations de chasseurs-cueilleurs au sein du territoire : diffrentes rponses ont t donnes par les hommes en fonction des ressources disponibles et des activits mener (Bourguignon et al., 2006). 1.1.1. Variabilit technique et variabilit des matires premires Nombreuses sont les questions que nous nous sommes poses. Pendant ces priodes, le choix de la matire repose essentiellement sur un critre de proximit, rarement sur la souplesse la taille. Mais n'est-ce que cela ? Une matire diffrente a-t-elle permis des choix techniques identiques ? Dautre part, le choix des matires utilises reflte-t-il un choix conomique, fonctionnel ou social ? La variabilit technique peut-elle dpendre de l'habilet du tailleur au-del de la qualit de la matire premire ? Est-ce quon observe des changements dans les modalits de gestion de ces matires au cours du temps ? Est-ce que ces diffrentes modalits dpendent de la prsence/absence de la mme matire sur le long terme? Plusieurs tudes ont soulign la prsence sur le mme site de matires premires diffrentes et ont montr la variabilit des critres techniques appliqus par les tailleurs prhistoriques sur ces matires. Dans le cadre des tudes sur les quartz (Mourre, 1997), lanalyse technique a dj montr que des modalits de gestion diffrentes avaient t suivies pour une mme matire, mais que, dans certains cas, des chanes diffrentes avaient t suivies pour des matires diffrentes. Toutefois, lexception de ces travaux, les matires autres (roches volcaniques et calcaires) ont rarement t lobjet dune tude technologique. Est-ce que les critres techniques fondamentaux de chaque chane opratoire ont t compltement ou partiellement utiliss voire modifis suivant les matires premires (chane opportuniste) ? Est-ce que les diffrentes caractristiques lithologiques ont

    3 Lanalyse de la srie en silex du site de Sainte-Anne I a t conduite par Paul Fernandes ; lanalyse de la srie

    en roches volcaniques par Jean-Paul Raynal et Guy Kieffer. Les matires premires des sries de Venosa ont t caractrises par Grard Vernet (Universit de Clermond-Ferrand).

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    dtermin la variabilit des caractristiques techniques dans la mise en place des systmes techniques ? Ou, au contraire, est-ce que cest la morphologie du support qui a oblig le tailleur modifier la gestion des convexits pendant le dbitage/faonnage ? L'utilisation des paramtres labors pour les assemblages lithiques en silex a d tre adapte, soit interprte diffremment par rapport aux contraintes des diffrentes matires premires, la matire nayant pas forcment permis des choix technologiques identiques et les produits ayant des caractristiques techniques diffrentes ? Il nous a sembl ncessaire de dfinir et d'utiliser des descripteurs technologiques adapts pour mieux cerner les stratgies d'exploitation de l'environnement et l'organisation technique et conomique de la production sur chaque matire premire. 1.1.2. Systmes techniques et contexte social Lacquisition et la gestion diffrentielle de la matire permettent de mettre en vidence des contraintes sociales : la varit technique peut dpendre de la possibilit de sapprovisionner en matires premires varies, lorsquun choix est disponible, mais aussi de l'habilet du/des tailleurs traiter la mme matire ou des matires diffrentes. En outre, dans les assemblages o les chanes de dbitage et de faonnage ont coexist, un mme objet (cf. biface) peut-il avoir une signification et une utilisation diffrentes, si la matire dont il est fait change ? La prsence sur le mme site de plusieurs matires premires dbites (ou faonnes) aurait pu rpondre des contraintes techniques diffrentes. Cest partir de l que lexamen et la dfinition des diffrentes modalits de coexistence entre diffrentes matires, ainsi que lobservation de leur gestion, ont pu permettre de dgager des critres de complexit sociale (capacit dadapter chaque matire aux ncessits sociotechniques). Le critre suivant serait de prendre en considration les biotypes (habitats, modalits de chasse, typologie des sites bivouacs, halte de chasse, habitat saisonnier, occupation de longue dure) et les ressources naturelles disposition des hommes prhistoriques pour comprendre la faon dont les choix techniques du tailleur dpendent des caractristiques des sites et de la fonction des objets (prsence de supports retouchs ou de certaines phases de dbitage /faonnage) (Barsky, 2001). 1.1.3. Systmes techniques et traditions culturelles La comprhension des choix techniques pourra permettre daborder les questions lies au type de relations qui se cachent derrire chaque srie lithique et le rle potentiel que les ressources lithiques ont pu avoir dans l'organisation sociale et culturelle lpoque du Palolithique infrieur et moyen : rgionalisation des techniques et modalits de peuplement et d'exploitation des territoires concerns (Batalla Llasat, 2003). Est-ce que la variabilit est lie au facis culturel des socits qui ont mis en place des choix techniques ou plutt au rapport idation/savoir-faire technique de chaque tailleur? Dans le cas des industries bifaces, est-ce que leur variabilit gnrale pourrait tre normalement le rsultat dun grand nombre de paramtres (environnement, aires spcialises, conditions de vie, traditions culturelles) ? Est-ce que celui-ci pourrait tre le rsultat, comme dans certains sites du Palolithique moyen, dun comportement opportuniste ou au contraire

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    dun comportement assez labor vis--vis de leur environnement et de la matire premire animale ? (Auguste, 1991, 1993). La variabilit technique observable est gnre par plusieurs facteurs : la variabilit des faits et gestes des tailleurs, le choix de la matire premire et surtout lobjectif raliser sachant que celui-ci peut tre modifi tout moment mi-squence. Dautre part, mme au niveau du facies culturel, les tudes sur lapparition, la dissipation et sur la diffusion de certains types doutils tendent montrer que la relation terminologique Acheulen et Palolithique infrieur, propos des assemblages avec et sans bifaces, nest plus envisageable (site de High Lodge : Ashton, 1992) : certaines industries sur le mme site ne prsentent pas de vritables modifications dans loutillage dans le temps alors que dautres en prsentent. Il nexiste donc aucun modle prcis, tout comme il nexiste aucun lien de dveloppement ou dvolution systmatique entre loutillage et le dbitage. De nombreux critres et arguments peuvent tre retenus pour linterprtation de cette variabilit. Dailleurs, ces sites peuvent montrer des traditions culturelles trs proches ou trs loignes tant du point de vue topographique que chronologique : en rgle gnrale, le mme groupe humain pourrait se sparer et emporter avec lui les mmes traditions et les mmes choix techniques qui pourraient voluer dans le temps. Normalement, ce sont les traditions techniques qui sadaptent aux ncessits des hommes par rapport leur milieu (et donc la matire premire et aux fonctions des outils) et qui vont influencer la production. 1.1.4. Un problme rcurrent dans le temps et dans l'espace Il sagit de rpondre quelques questions. Est-il possible que les sites les plus rcents soient caractriss par une variabilit techno-conomique mineure ou majeure (rapport modernit /variabilit) ? Mais encore, le dplacement dans lespace, la mme poque, est-il lorigine de la variabilit technique par rapport la diffrentiation en matires premires ? La grande varit des matires autres que le silex utilises pendant le Palolithique augmente les possibilits interprtatives de la variabilit technique observable : dans quelle mesure certains modles techniques sont lis des variables temporelles (Delagnes et Meignen, 2006) et/ou spatiales (Jaubert et Farizy, 1995) et, par consquent, est-ce que ces systmes techniques du Palolithique moyen peuvent dfinir des tendances volutives ? Ce dbat est fortement li la conceptualisation technique et culturelle dHomo neanderthalensis. Si on exclut la dernire phase du Palolithique moyen (Cabrera et alii, 2000 ; Mallo, 2001 ; Pelegrin, 1995 ; Slimak, 2004), traditionnellement, ces systmes techniques sont dfinis comme une unit homogne sans signes dinnovation technique, par opposition aux tendances observes au Palolithique suprieur (Gamble, 1999). Les dernires tudes montrent que diversit et flexibilit sont des attributs caractristiques de cette priode, en soulignant lexistence dune certaine variabilit dans les trajectoires volutives du Palolithique moyen pendant le Plistocne suprieur (Hovers et Kuhn, 2006). Suivant cette perspective diachronique, on pourra chercher dcrire les tendances lies aux

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    comportements techniques et dtecter des phnomnes de continuit (ou stases) pendant le Plistocne suprieur dans le mme contexte gographique (sites ou rgions). Daprs cette perspective, la coexistence de connaissances techniques nimplique pas ncessairement lexistence de groupes culturels sgrgus, mais au contraire, ce sont des options techniques diffrentes partages dans un mme groupe. Notre espoir est de tenter de donner une rponse ces questions et dautres poses par les collections lithiques analyses.

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    1.2. Quelques exemples de production dans diffrentes matires premires dans le cadre de la Prhistoire

    europenne. Depuis quelques annes, les chercheurs ont port leur attention sur lutilisation des diffrentes matires premires de la part des tailleurs prhistoriques. Leurs observations ont montr que les hommes ont gnralement utilis plusieurs matires premires sous forme de diffrentes morphologies/natures pour la production doutils. Dautre part, rcemment, les auteurs ont parfois analys les chanes opratoires utilises sur les sites suivant les diffrentes matires premires en rponse leurs besoins, aux contraintes du territoire ou simplement aux soi-disant schmas mentaux de leurs traditions. partir de la littrature disponible, nous avons choisi un petit nombre de sites pour lesqueles nous avons pu observer le rapport variabilit technique/matire premire dans le but dencadrer ltude des industries des sries analyses dans le plus vaste contexte europen de variabilit technique. Un examen rapide dun petit nombre de sites du Palolithiques infrieur et moyen (priode de rfrence pour notre tude), nous montre que la variabilit mise en place par les tailleurs prhistoriques autant dans la production que dans la gestion des supports est norme, tant par rapport aux techniques employes (variabilit technique) que par rapport aux rgles imposes par diffrents types de contraintes (rapport variabilit morpho-technique/matire premire). 1.2.1. La variabilit dans le Palolithique infrieur Ltude des sites de la valle de la Somme, du bassin de lEscaut en France et en Belgique nous rvle une extrme variabilit dans la composition de loutillage, dans la production et dans la gestion des supports issus du dbitage Levallois et non Levallois. Les tudes ont montr quil ny a pas forcement de lien entre chane de dbitage, dveloppement de loutillage et sa diversification morphologique (Lamotte, 2001). La disponibilit de matire premire aux alentours des sites de Roca del Bous et Trag ne permet pas de comprendre lpuisement des nuclus comme rsultat dune stratgie pour suppler labsence de roches aptes la taille, comme certains auteurs ont suggr dans dautres cas (Kuhn, 1991, 1995 ; Brantingham et Kuhn, 2001). La tradition technique et culturelle ou suivant Boda (1991) le subconscient technique et lintrt pour la recherche de supports de dimensions rduites - expliqueraient le maintien des nuclus jusqu leur transformation en volumes dont lexploitation est difficile. Des avantages, comme le contrle productif long terme des modalits de taille et la variabilit morphologique des supports qui peuvent tre obtenus grce celles-ci, seraient des paramtres prdterminants. Par consquent, la rengociation de la mthode de taille nest pas ncessaire, mme pas au moment o apparaissent des difficults associes la taille de ces volumes rduits. Dans ce contexte, les connaissances techniques taient lgrement affectes par des conditionnements externes. Le choix des mthodes de conservation et des techniques de taille, mme sil aboutit des rsultats incohrents comme dans les cas ici

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    prsents explique lapparente contradiction entre lintense exploitation des nuclus et un contexte o la disponibilit des matires premires nest pas un problme. Ce fait implique un contrle conscient des squences de taille, mme si essentiellement le processus nest pas modifi : il est possible que cette flexibilit technique par rapport la matire puisse tre mise en rapport avec la prsence de nuclus avec des attributs techniques mixtes entre les mthodes Levallois et Discode, que les auteurs ont classs comme bifaciaux centriptes hirarchiques. Le gisement de Gouzeaucourt (Lamotte, 1992) a t rattach la fin du courant acheulen et plus exactement au Palolithique moyen de facis cambrsiens (PMC) qui se caractrise dans les sites du Nord de la France par une prsence plus ou moins importante du dbitage Levallois et par le fait que perdurent des lments acheulens (nombreux bifaces) aux cots dun outillage plus ou moins conforme celui du Palolithique moyen. Lauteur, daprs les tudes qui utilisent le concept de chane opratoire et analysent les diffrentes phases du processus technique (Boda et alii, 1990; Geneste, 1991 ; Karlin, 1992 ; Pelegrin, 1990) et la possible signification volutive de la variabilit des systmes techniques lithiques du Palolithique moyen (Delagnes et Meignen, 2006), a pu identifier, dans ce systme technique, diffrentes mthodes de taille, celles-ci comprises comme stratgies conceptuelles dexploitation technique individualises. 1.2.2. La variabilit dans le Palolithique moyen Ces dernires annes, les chercheurs ont reconnu de nombreuses mthodes qui accompagnent la production lithique principale (Discode et/ou Levallois) pendant le Palolithique moyen. Mais la dlination de ces systmes techniques a vari au cours du temps ? En Europe, le dbitage Levallois se dveloppe ds le stade isotopique 9-8 (Roebroeks et alii, 1988 ; Rigaud, 1988 ; Tuffreau et Somme, 1988) notamment sur les sites de Biache-Saint-Vaast (Tuffreau et alii, 1988) ou Orgnac (Moncel, 1989) - et perdure jusquau stade isotopique 3 (par exemple Valladas et alii, 1987 ; Delagnes, 1992 ; Meignen, 1993 ; Soressi, 1999) prsentant diffrentes modalits de production. Aussi, la mthode Discode semble avoir t utilise principalement au cours des stades isotopiques 4 et 3, en France mais galement dans le sud de lEurope (par exemple Locht et Swinnen, 1994; Farizy et alii, 1994 ; Moncel, 1998 ; Pasty, 2000, 2001 ; Peresani, 1998 ; Slimak, 1998-1999 ; Michel et alii, 2001). Dcrite initialement par Bordes (1950, 1961) et rvise par Boda (1993), elle a t lobjet de plusieurs discussions afin de dfinir sa diversit interne (Peresani, 2003 ; Slimak, 2004). Paralllement, dans plusieurs contextes archologiques, les chercheurs ont individualis dautres mthodes de taille prsentes de manire sporadique sur les sites : il sagit, par exemple, du dbitage de type Pucheuil dcrit dans le niveau 6 de Pucheuil (Delagnes, 1993), la technique de la plateforme alternante (Ashton, 1992), ou la mthode SSDA (Forestier, 1993). Gographiquement, dautres mthodes sont plus rpandues comme les systmes laminaires du nord-est de lEurope (Rvillion et Tuffreau, 1994), ou la mthode Quina, reconnue au sud et centre de la France et en Belgique (Bourguignon, 1996, 1997, 1998), et sporadiquement dans la Pninsule Ibrique (Baena et alii, 2005; Carrin, 2003).

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    Le dbitage dclats allongs se dvelopperait au stade isotopique 3 daprs les dates disponibles pour les sries tudies (Soressi, 2002) et est connu en Prigord en mme temps que les dbitages Levallois et Discode, parfois ils sont prsents dans les mmes ensembles. Il nest pas possible pour le moment de dterminer si ce dbitage a t utilis dans une rgion restreinte et/ou de manire exclusive dans une rgion prcise. En mme temps, la matire premire ne semble pas avoir dtermin sa mise en uvre au dtriment dautres systmes de dbitage contemporains : les sries du Moustier (Soressi, 2002) montrent quun choix a t effectu pour tailler des clats allongs - ou des supports discodes - l o un dbitage Levallois aurait trs bien pu tre ralis. Les diffrents systmes de dbitage se succdent ou se juxtaposent tout au long de la squence stratigraphique sur la mme matire premire. Ce panorama implique que la dichotomie classique entre technocomplexes Levallois et non-Levallois nest plus valide parce quelle ne permet pas de reconnatre la croissante diversit technique du Palolithique moyen. Les chanes opratoires observes expriment la variabilit interne sur laquelle dbattent les auteurs (Boda, 1988, 1991, 1993, 1994 ; Dibble, 1995; Brantingham et Kuhn, 2001) et, suivant Boda et dautres (entre dautres, Boda et alii, 1990; Boda, 1991, 1993; Bourguignon et alii, 2004; Delagnes, 1992, 1995), on doit admettre une certaine diversit technique dans la mise en place des systmes de concept Levallois et, en gnral, des systmes techniques du Palolithique moyen. Cependant, mme sil existe un accord dans lobservation des diffrentes mthodes de dbitage pendant le Plistocne suprieur en Europe Occidentale (Baena et alii, 2005 ; Duran et Soler, 2006 ; Jaubert et Farizy, 1995 ; Lenoir et Turq, 1995 ; Moncel, 1997, 2001 ; Slimak, 2004 ; Vaquero, 1999), la signification techno-conomique et culturelle de la variabilit na pas t claircie. 1.2.3. La variabilit morpho-technique lie la gestion diffrentielle de la matire premire Dans le panorama des sries lithiques tudies par les chercheurs, il existe de trs nombreux cas dans lesquels les tailleurs prhistoriques ont utilis plusieurs matires premires parfois de diffrentes qualits et diffrentes typologies et morphologies de supports bruts pour la production, cause des contraintes naturelles, en premier lieu la facilit du ramassage (Matilla, 2004). Dans ces cas, les auteurs ont rflchi sur les diffrentes problmatiques mises en place par des matires inaptes la taille ou des supports avec morphologie non favorable : cest probablement le cas des quartz gros grains (ou peut-tre de la phonolite : connu la grotte de Sainte-Anne I, ce volume) ou de la prsence de diaclase dans les silex et dans les roches volcaniques (ce volume). Lokalelei 2 C (West Turkana, Kenya, 2,4 Ma) labondance relative de matire premire dans lenvironnement immdiat de chaque site, la nature, la morphologie et les dimensions des blocs ou des galets disponibles ont eu une influence dterminante sur les caractres technologiques des sries lithiques (Moiano, 2010).

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    Dans le site de Soucy (Yonne ; stade isotopique 9) (Lhomme et Connet, 2001), plusieurs matires premires ont servi au faonnage des pices bifaciales : leur production et consommation sont fractionnes dans le temps et dans lespace. Les pices bifaciales sont des supports doutils qui se dplacent et qui de ce fait traduisent un investissement stratgique substantiel qui contraste avec la production doutils sur clat, motive par des besoins immdiats : ici les supports bifaciaux sont plutt standardiss alors que les outils sur clat apparaissent typologiquement varis. Cagny lEpinette (Lamotte, 2001 ; stade isotopique 9), la mauvaise qualit de la matire premire a guid le faonnage. Les tudes montrent que les hommes ont su saffranchir de la mauvaise qualit du silex lors du faonnage de leur outillage en ralisant leurs bifaces, outils bifaciaux partiels et outils sur galets partir de fragments de silex glifracts (Tuffreau et Ameloot-Van-der Heijden, 1991 ; Leopold, 1986, 1987). Ces travaux montrent aussi quil y a un vident choix morphologique des rognons de silex de dpart et un souci de laptitude la taille des rognons (Tuffreau, 1989, Leopold, 1993). Sur ce site, les bifaces ont des morphologies et des dimensions varies alors que les structures du faonnage (Boda, 1997) semblent identiques. Lindustrie lithique des gisements du Plistocne infrieur de Barranco Len et Fuente Nueva 3 (de Lumley et alii, 2004 ; les dpts de ces deux sites ont t dats dun ge compris entre 1,77 Ma et 1,07 Ma) est reprsente par un ensemble lithique produit dans des roches ramasses dans un rayon de moins de 2 km autour du site et en abondance dans un rayon de 5 10 km. Exceptionnellement, Fuente Nueva 3, de trs rares pices en quartzite dorigine plus lointaine ont t apportes. Le tailleur a mis en place une stratgie diffrentielle des matires premires. Le calcaire a t presque exclusivement employ pour le faonnage des galets amnags, alors que le silex a surtout t slectionn pour la production des clats. Le systme dexploitation des ressources minrales, parmi dautres, valorise la thse que ces deux sites ne correspondent pas des habitats, ils paraissent lis une activit spcifique dexploitation des carcasses des grands animaux : lhippopotame Barranco Len, llphant mridional Fuente Nueva 3 niveau suprieur). La prdominance dclats bruts de taille, le plus souvent de petites dimensions (10 - 40 mm de longueur), de Barranco Len et de Fuente Nueva 3, semble indiquer quils servaient plutt la dcoupe et au raclage pour retirer la viande qui restait sur les carcasses des animaux abandonnes par des grands carnivores dans les zones marcageuses proches des rives du palo - lac de Baza. Dans le Massif Armoricain (Molines et alii, 2001 ; stades isotopiques 5-4), lexploitation de matires premires de nature diffrente ne donne pas lieu une mise en uvre diffrentielle au niveau des modes de production. Lutilisation dune autre roche est plus quun choix, elle reprsente une ncessit relle face aux difficults dapprovisionnement en silex dont la disponibilit est dtermine par la variation des niveaux marins. Au niveau de lutilisation de la production de dbitage, ici un comportement technique diffrenci face lutilisation de ces deux roches a pu tre mis en vidence. Dans ses travaux, Navarro (2002) compare les gestions techno-conomiques des matires premires mises en place Payre (stade isotopique 6) et dans lAbri Romani (46.000 BP), et souligne, dans cette dernire srie, labsence dune gestion diffrentielle des diffrentes matires premires, contrairement la srie de Payre.

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    De nombreux cas de variabilit technique dans la chane opratoire Discode ont t remarqus par Mourre (2003) qui souligne lexistence de sites dans lesquels le tailleur sest adapt la variabilit des matires premires prsentes sur le territoire avec la mise en place de systmes techniques convergents sans obir tous les critres de prdtermination (Boda, 1994). Dans la couche 9 (stade isotopique 5) de labri Bourgeois-Delaunay (Matilla, 2004), nous sommes en prsence dun outillage sur clat en quartz et quartzite associ une panoplie en silex. La mme gestion diffrentielle des matires premires a t observe Coudoulous I (stade isotopique 6), au Rescondoudou (stade 5) et Mauran (stade isotopique 3) dans le Bassin de la Garonne (Jaubert et Mourre, 1996) ou encore dans les niveaux moustriens de lAbreda et de Reclau Viver en Catalogne espagnole (Bracco, 1997), mme si les adaptations la matire sont diffrentes selon les sites. lAbreda et Reclau Viver, les nuclus en quartz, sur lesquels il nexiste aucune phase de remise en forme, sont polydriques ou convergents. Les nuclus en silex sont Levallois rcurrents centriptes. Les mthodes de dbitage semblent diffrer selon les matriaux (Bracco, 1997). Coudoulous I la mthode Levallois est aussi exclusivement rserve au silex. En revanche au Rescondoudou, en Aveyron le matriau nest pas lorigine dun traitement diffrentiel. Le dbitage Levallois a t effectu aussi bien sur le silex que sur le quartz. Mauran la mthode de dbitage Discode est applique aux deux matriaux principaux silex et quartzite, bien que le dbitage Levallois ait pu tre pratiqu sur ce dernier (Jaubert et Mourre, 1996). Les produits obtenus par ces diffrentes mthodes ont des morphologies trs varies. Cependant tous les clats en silex ou en quartz servent de support aux outils retouchs, racloir et denticul (Bracco, 1997, Jaubert et Mourre, 1996). Sur ces sites, lhomme tente de satisfaire au mieux ses besoins par lapplication de mthodes de taille diffrentes. Tous les produits conformes aux critres dsirs sont cependant slectionns. Cette utilisation jusqu lexhaustion des supports rvle une gestion particulire de la matire. La disponibilit de la matire, lemploi de matriaux divers, lapplication de mthodes de dbitage diffrentes ou la compensation de la mdiocrit du silex par des techniques appropries sont des raisons techniques et techno-typologiques souvent nonces pour expliquer les choix effectus (Tavoso, 1984 ; Bracco, 1997 ; Bracco et Slimak, 1997). Toutefois la part de la tradition culturelle et celle de la nature du site doivent peut-tre dans certains cas tre considres. En effet les facis de production semblent souvent tre lis au mode de vie des artisans (Jaubert, 1997).

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    2.1. Les mthodes de dbitage 2.1.1 Le dbitage orthogonal Il est souvent ralis sur des galets ou des blocs paralllpipdiques. Il ny a pas de gestion du volume. Le dbitage orthogonal utilise des surfaces de dbitage et des plans de frappe totalement indpendants pour la production de sries rduites denlvements unipolaires parallles les unes par rapport aux autres. Les plans de frappe sont gnralement corticaux. Ainsi les plans de frappe et les sries ne sont pas rcurrents les uns par rapport aux autres. Ce dbitage orthogonal sapparente une gestion de surface naturelle. Les produits prsentent souvent des rsidus corticaux distaux ou latraliss envahissants en dehors des clats dentames et des talons corticaux (Duran, 2002). 2.1.2 Le dbitage SSDA Les supports clactoniens se caractrisent notamment pour leurs dimensions rduites en longueur, mais surtout pour leurs talons lisses, larges et inclins, devenus par extension talons clactoniens , puisquen fait la majorit des auteurs a eu tendance regrouper sous ce terme tout clat prsentant ces mmes caractres morpho-techniques. De rcentes tudes conduites sur les industries clactoniennes de High Lodge (Ashton, 1992 ; Ashton et Mac Nabb, 1992 ; Forestier, 1992, 1993) ont abouti la mise en vidence dun schma opratoire o la gestion du volume est clairement dfinie. Dans le dbitage clactonien, un seul axe morphologique - laxe longitudinal du rognon - semble guider la production. Les surfaces de dbitage vont se positionner de part et dautre de cet axe selon un schma dit en chevron . La premire srie (pisode A) est produite de faon tangentielle par rapport laxe longitudinal. La deuxime srie (pisode B) sera dbite partir des ngatifs des enlvements antrieurs de la srie A, mais toujours de faon tangentielle par rapport laxe de dbitage. Laxe longitudinal joue le rle daxe symtrique, et cela quel que soit le nombre de ples ouverts (selon la morphologie initiale du bloc). Pour chacun des ples, le tailleur va recrer virtuellement cet axe de symtrie, il ne changera pas daxe en cours de dbitage, mais il orientera le bloc de faon ce quun autre axe longitudinal se dessine. Ces surfaces ne sont pas hirarchises mais adjacentes et scantes, jouant ainsi, chacune son tour, le rle de surface de dbitage puis de plan de frappe. Nanmoins, larticulation autour de laxe longitudinal seffectue de faon ce que les deux surfaces soient obliques par rapport celui-ci et quelles soient exploites selon un plan de fracturation scant. Plusieurs ples du bloc pourront tre entams selon cet algorithme de base. Le dbitage peut tre compris dans son ensemble comme une rcurrence du schma qui sadapte selon la structure volumtrique du nuclus (Forestier, 1992), bien quil ny ait pas rellement de gestion volumtrique du nuclus, mais simplement une application du schma jusqu son puisement. Ce systme ne permet pas une production de supports trs varie.

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    2.1.3 Le dbitage Discode : technique et mthodes Tel quil a t dfini par . Boda (1993), dans le Discode, les plans de fracturation des enlvements sont, quelle que soit la surface concerne, scants par rapport la ligne dintersection entre les deux surfaces. On observe la production dune srie continue denlvements de direction centripte ou cordale sur une mme surface ou sur les deux, de faon alterne. Cette mthode de dbitage suit six critres de convexit. Le volume du nuclus est conu en deux surfaces convexes asymtriques, scantes, dlimitant un plan dintersection. Les deux surfaces ne sont pas hirarchises : lune est conue comme surface de dbitage, lautre est conue comme surface de plans de frappe, mais leurs rles peuvent tre intervertis durant une mme squence opratoire. La surface de dbitage est amnage de faon ce que certains produits obtenus ses dpens soient prdtermins. Le critre technique de prdtermination consiste amnager une convexit priphrique plus ou moins prononce. Cette convexit densemble a le rle de contrler les dtachements latraux et distaux de chaque enlvement prdtermin. La surface de prparation du plan de frappe est amnage de faon ce que les enlvements prdterminants - prdtermins puissent rpondre aux objectifs fixs. Ces amnagements sont spcifiques aux mthodes adoptes pour les dtachements des enlvements prdtermins. Les plans de fracture des enlvements prdtermins et prdterminants sont scants aux plans dintersection des deux surfaces. La technique de dbitage est exclusive tout au long du schma opratoire, il sagit de la percussion au percuteur de pierre. La percussion a lieu sur la surface du plan de frappe quelques millimtres seulement du fil cr par lintersection des deux surfaces et non sur le fil lui-mme. En consquence, laxe de percussion des enlvements prdtermins est imprativement perpendiculaire la surface recevant limpact. La gnralisation des tudes technologiques a conduit lobservation de lexistence dun certain nombre de variantes aux grands principes du dbitage Discode dcrits par Boda. Notamment, dans son tude, JF Pasty (2000) reconnat, ct du dbitage Discode classique (dfini bifacial ), diffrents types dexploitation discode : 1. modalit discode unifaciale : ces nuclus prsentent gnralement une morphologie

    quadrangulaire allonge ou circulaire, selon ltendue des plans de frappe. Ces derniers sont le plus souvent partiellement prpars et, dans une moindre mesure, ils le sont entirement, soit pas du tout. En section, les nuclus sont soit pyramidaux que bipyramidaux. La surface de dbitage prsente des ngatifs denlvements scants de direction essentiellement centripte et dans une moindre mesure cordale.

    2. modalit discode exploitation rduite : les nuclus sont rests ltat de mise en forme. Certains sont certainement des bauches destines tre exploites ultrieurement, dautres en revanche sont des nuclus dont lexploitation a t interrompue pour diverses raisons (accidents de dbitage, mauvaise qualit de la matire premire).

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    2.1.4 Le dbitage Levallois : techniques et mthodes Cest partir des travaux de E. Boda (1986, 1988 a-b, 1991, 1993, 1994) que nous abordons la description du dbitage Levallois. Cette technique suit six critres fondamentaux, ici dcrits. Le volume du nuclus est conu en deux surfaces convexes asymtriques, scantes, dlimitant un plan dintersection. Les deux surfaces sont hirarchises : lune est productrice denlvements dfinis et varis (prdtermins), lautre est conue comme une surface de plans de frappe des enlvements dfinis. Au cours dune mme squence de production, leur rle ne peut pas tre interverti. La surface de dbitage est amnage de faon ce que les produits obtenus ses dpens sont prdtermins : les critres techniques de prdtermination consistent amnager des convexits latrales et distales qui ont le rle de guider londe de choc de chaque enlvement ainsi prdtermin. La surface de prparation du plan de frappe est amnage de faon ce que les enlvements prdterminants-prdtermins puissent rpondre aux objectifs fixs. Ces amnagements sont propres aux mthodes choisies pour le dtachement des enlvements prdtermins. Les plans de fracture des enlvements prdtermins sont parallles aux plans dintersection des deux surfaces. La technique de dbitage reste exclusive tout au long du schma opratoire : il sagit de la percussion directe au percuteur de pierre. La percussion a lieu quelques millimtres de la charnire sur la surface du plan de frappe et non sur la charnire : cette particularit a pour consquence que laxe de percussion des enlvements prdtermins doit imprativement tre perpendiculaire. Un axe non-perpendiculaire reprsente un obstacle au contrle de la percussion. Plusieurs variantes la mthode de dbitage Levallois ont t observes suivant la direction des enlvements prdtermins : prfrentielle, rcurrente centripte, rcurrente unipolaire, rcurrente bipolaire orthogonale, rcurrente bipolaire oppose. La mthode clat prfrentiel (mthode linale) a lobjectif de produire un seul clat prdtermin pour chaque surface amnage. La mthode Levallois rcurrente, quelle soit unipolaire, bipolaire ou centripte, est dfinie par lexploitation de plusieurs surfaces successives, entrecoupes chaque fois par des squences de remise en forme (plus ou moins importantes) de la surface de dbitage. Le dbitage Levallois est caractris par la prsence dune seule surface de dbitage prdtermine sur le nuclus. Il peut parfois y en avoir deux, mais dans ce cas, elles sont subparallles et une reconfiguration de lancienne surface de dbitage est ncessaire afin de les transformer en surfaces de plan de frappe, ceci dans le but de recrer un angle adquat pour la production des enlvements prdtermins.

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    2.1.5 Le dbitage en tranches de saucisson partir de ltude de la srie de Roc-de-Marsal (1988), Alain Turq a observ lexistence dun mode de dbitage qui ne ncessite aucune prparation du plan de frappe et surtout il na besoin daucune variation de comportement du tailleur dans les diverses phases de production. Le dcorticage ne constitue pas une phase particulire : la mise en place des surfaces seffectue par le mme enchanement de gestes. Cependant les rgles techniques qui rgissent la production ne sont pas dfinies : elles sadaptent aux contraintes qui dfinissent la conception volumtrique du nuclus. Le dbitage commence par lenlvement dun clat dentame, souvent asymtrique. Ensuite, sans quil y ait un vritable dcorticage, la phase de plein dbitage commence par la production en srie dclats en tranches de saucisson. Deux phases distinctes sont dfinies en fonction du type de support produit. La premire phase est consacre la production des clats dos, dos naturel enveloppant ou dos naturel, et correspond lexploitation des extrmits du rognon : ce type de support peut tre produit singulirement sur chaque surface ou alternativement sur lune ou sur lautre partir dune ou de plusieurs extrmits du bloc, tout au long de la chane opratoire, pour dfinir des sries rcurrentes aux dpens des deux surfaces, elle correspond lamnagement de la convexit distale et participe llargissement des surfaces de dbitage. La seconde phase se caractrise par la production des clats talon-dos, des couteaux dos et des clats asymtriques. La production de ces supports sorganise sur le volume restant du nuclus. Ce nest qu ce moment-l quapparaissent les trs rares clats de dcorticage, les clats de prparation du plan de frappe ou de mise en forme du nuclus, tirs pour permettre de poursuivre le plus longtemps possible la phase de production. Daprs ce schma, la totalit de la production seffectue aux dpens dune surface prfrentielle et les surfaces naturelles sur le pourtour total du nuclus suffisent gnralement runir les conditions ncessaires au dtachement des clats. Lpaisseur consquente des talons peut sexpliquer soit comme la caractristique technique de la production de grands clats, soit par la volont dobtenir des talons faisant office de dos. En fonction de la dtermination des produits recherchs, Turq propose trois schmas de production diffrents, sans envisager pour autant la possibilit de pouvoir raliser les trois simultanment sur une mme surface. Pourtant il semble difficile denvisager un schma ne produisant que des clats en tranches de saucisson, dautant plus quil signale que ceux-l sont rares au sein des industries (1992). Ces nuclus apparaissent multidirectionnels : aprs la premire squence de production, un nouveau plan de frappe a t exploit, parfois sommairement dgag par un ou deux enlvements pour lexploitation de la mme surface de dbitage. Le dbitage sest poursuivi selon ce modle de faon opportuniste jusqu labandon du nuclus. Il est rare que deux enlvements conscutifs soient du mme type: aprs lenlvement dun clat talon-dos, on enlve un produit talon brut de dbitage. Turq spcifie quexprimentalement ce dbitage ne peut tre ralis avec un certain succs que sur des blocs oblongs ou galets de silex diamtre pas trop important (1989). Il est possible, (daprs L. Bourguignon, 1997), que la production de ces supports particuliers soit lie au module de la matire premire. Leur frquence dans les industries sera donc fonction du taux dintroduction de ce type de bloc brut dans les occupations.

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    2.1.6 Le faonnage bifacial La technique La mthode de faonnage bifacial offre des variantes importantes en fonction des priodes concernes, mais le concept de base est identique : ce sont les schmas opratoires, les techniques et les manires de faire qui diffrent. Le faonnage bifacial comporte deux phases principales : bauchage et finition. Lbauchage consiste mettre en place, de faon simultane, deux surfaces plus ou moins convexes de part et dautre dun plan dquilibre bifacial dfini par les deux surfaces qui dlimitent un contour matrialis par une arte. Plus le volume initial se rapproche de la morphologie finale souhaite, moins le travail dbauchage est important. Pour une pice bifaciale faonne partir dun bloc pais, avant lbauchage, il faut procder lpannelage du bloc ; mais, pour une pice bifaciale faonne sur clat, la morphologie dsire peut tre obtenue en une ou deux gnrations denlvements seulement, aprs une chane opratoire produite avec prdtermination pour lacquisition du support. Le travail de finition consiste rgulariser le contour de lobjet en fonction dun second plan dquilibre bilatral, perpendiculaire au plan dquilibre bifacial. La finition sapparente la retouche : cest ce travail qui donne lobjet sa morphologie dfinitive. Du point de vue des techniques, ds le Plistocne moyen, la fabrication dun mme objet bifacial prsente lalternance de la percussion directe au percuteur de pierre, pour lamnagement initial du support et lbauchage, et au percuteur tendre pour la finition. Ces deux oprations engendrent des clats caractristiques. Cette description implique que les bifaces soient toujours des outils vrais : toutefois, dans la littrature nous avons des exemples dautres explications fonctionnelles pour les supports bifaciaux. Les classifications morpho-techniques: tat de la recherche Ltude technologique des chanes de faonnage bifacial prsentes sur les sites de Venosa et de Sainte-Anne I ne peut pas aboutir sans une mise en perspective dans le cadre gnral des tudes antrieures, qui ont concentr leur attention sur les diffrents caractres morphomtriques, typo-technologique et fonctionnels des supports bifaciaux. Appeles haches diluviennes par Boucher de Pertes (1847), puis coups de poing ou instruments chellens par G. de Mortillet (1883) il sera qualifi biface par A Vayson de Pradenne en 1920. La dfinition la plus connue est celle de F. Bordes (1961) leur caractristique commune est dtre taills sur leurs deux faces, par retouche totale ou au moins envahissante . Toutefois, nombreux sont les auteurs qui ont contribu une classification du biface: Boucher de Perthes (1847), Mortillet (1866), Capitan (1900), Breuil (1905), Neuville (1931), Vayson de Pradenne (1937) et Bordes (1961) parmi les principaux, sans compter les auteurs qui ont t amens introduire localement une terminologie adquate leurs tudes (Pradel, 1942 ; Chavaillon, 1964 ; Gruet, 1945 ; Heinzelin, 1962 ; Roe, 1968 a-b ; Graham et Roe, 1970).

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    Les plus importantes classifications analysent les supports bifaciaux suivant plusieurs de ces catgories: 1. les caractres morphologiques, 2. les caractres techniques, 3. la finalit de la production, 4. lutilisation. Chacune de ces catgories pourrait tre analyse dans la perspective du rapport avec la matire premire. Caractres morphologiques Les mthodes danalyses mtriques et morphologiques sont les moyens dtude les plus communs et la longueur, la largeur et lpaisseur des bifaces figurent parmi les principales mensurations effectues sur loutil. ces donnes certains auteurs ont ajout la mensuration du rayon de courbure du sommet et la dtermination de la position de la largeur maximale (Alimen et Vignal, 1952). La mthode considre la plus complte est celle de Bordes (1961) alors que la plus rcente est celle de Balout (1967). Bordes ajoute la mensuration de la longueur du biface (L), la largeur maximale (l), et lpaisseur maximale (e), la distance entre la largeur la plus grande et la base (a), la largeur la moiti de la longueur (n) et la largeur aux trois quarts de la longueur (o). Le rapport entre certaines de ces donnes nous renseigne sur lallongement et larrondi des bords et de la base des bifaces. Balout ajoute aux indices de Bordes ceux de dissymtrie, de convergence, dallongement et sectionnels (Camps, 1990). D. Roe (1981) prend en compte lpaisseur du sommet du biface, environ 4/5 du biface, et lpaisseur de la base, environ 1/5 du biface. Suivant la mthode de Bordes et de D. Roe, L. Copeland et F.Hours (1979) regroupent ces outils en cinq groupes principaux :

    les formes rondes : discodes, discodes partielles et nucliformes ;

    les formes ovalaires : ovalaires, ovalaires allonges, subovalaires, ovalaires partielles, limandes ou elliptiques, ovalaires paisses, pointues ;

    les formes amygdalodes : courtes, allonges, atypiques, partielles, cordiformes, cordiformes allonges, subcordiformes allonges, subcordiformes partielles ;

    les formes lancoles : lancoles, ficons, logniformes, plcyformes, tridriques, formes rares ;

    les formes triangulaires y compris les subtriangulaires, partielles, paisses. Depuis toujours la variabilit du biface, quelle soit dimensionnelle ou morphologique, a retenu lattention des chercheurs, dans le but de lutiliser pour la classification des industries, du point de vue tant chronologique (Breuil et Koslowski, 1931 ; Bordes, 1954) que culturel (Bordes, 1960 ; Tuffreau, 1987 ; Roe, 1981). Dans la classification typologique visant la caractrisation des diffrentes priodes de lAcheulen, les chercheurs ont mis en vidence les diffrences morphologiques des supports bifaciaux (Turq, 2000):

    lAcheulen moyen archaque : les bifaces sont peu standardiss, ils ont des formes irrgulires aux arrtes sinueuses, aux larges plages corticales envahissant les deux

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    faces. Ils ont souvent t obtenus en une seule gnration denlvements sur chaque face. Les objets pointus dominent mais il existe des tranchants transversaux souvent troits et quelques hachereaux sur clat;

    lAcheulen moyen : le pourcentage des bifaces diminue. Ces objets sont amygdalodes ou lancols et ont un contour plus rgulier, des arrtes plus soignes des une retouche secondaire des bords ;

    lAcheulen suprieur : les bifaces sont plus standardiss, plus allongs, pointus et surtout lancols. La retouche est plus soigne, les bords mieux rgulariss et frquemment rectilignes.

    La prsence de pices trifaciales semble tre plus lie lexploitation de la morphologie naturelle de certains supports. Daprs Bordes (1961), les bifaces peuvent tre classs en trois groupes :

    les bifaces classiques : lancols, ficrons, micoquiens, triangulaires, triangulaires allongs, cordiformes, cordiformes allongs, subcordiformes, ovalaires, amygdalodes, discodes, limandes ;

    les bifaces non classiques : longeniformes, losangiques, naviformes, nucliformes, divers, partiels, abbevilliens ;

    les hachereaux. Parfois, certains nuclus peuvent tre transforms en outils bifaodes : il sagit le plus souvent de nuclus de type acheulen dont seule la pointe est reprise. Rcemment, linterprtation du biface a t prcise (Texier, 1989 ; Roche et Texier, 1990) et reprise (Inizan et alii, 1995). Le dveloppement des tudes lithologiques et technologiques a fait surgir dautres facteurs potentiels de variabilit : les contraintes des matires premires (Villa, 1981 ; Turq, 1992 ; Ashton et Mc Nabb, 1994 ; White, 1995), le processus de rduction (Mc Pherron, 1994), lidentification des diffrents stades de fabrication de loutil jusqu labandon (le stade reprsent par loutil long bord tranchant et multiples angles de coupe : biface vrai ; par le biface-nuclus - Breuil et Kelley, 1956 ; Tixier, 1958-1959 - ou par le biface de support doutil retouch - Boda et alii, 1990, 1996). Par ailleurs une notion de mobilit a t parfois associe au biface (Geneste, 1985 ; Feblot Augustin, 1997). Caractres techniques Un certain nombre dtudes ont cherch claircir les squences des gestes la base de la production des supports bifaciaux. Boda a dcrit le biface comme une pice bifaciale ayant subi une opration de faonnage cest--dire lamnagement dune pice au sein dune masse de matire investie ds le dbut de lapproche progressive de la forme et du volume final (Boda, 1997). Dans certaines pices les caractristiques des bords sont installes en mme temps que le volume : ces pices sont donc fonctionnelles. Les autres ont leur priphrie traite aprs linstallation du volume et sapparentent des supports doutils multiples et varis. Belhouchet (2001-2002) a cherch codifier la squence des gestes qui sont la base de la production des bifaces et a observ la varit des supports utiliss.

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    Il a not que:

    lbauchage (Inizian et alii, 1995) est effectu avec dtachements envahissants, qui dterminent la forme gnrale de la pice. Les enlvements tablissent les convexits gnrales de lobjet ;

    la finition consiste rgulariser le contour de lobjet par une gnration denlvements damnagement qui affectent les zones priphriques : les bords, le dos et la pointe (Leroi Gourhan, 1964 ; De Heinzelin de Braucourt, 1962 ; Brzillon, 1968). Ces enlvements ont peu dinfluence dans la morphologie gnrale.

    Deux macromorphologies de bord existent:

    le bord brut de dbitage,

    le bord retouch, codifi, suivant le dgr dexhaustion provoqu par la retouche. partir de ces observations initiales, il reconnait trois phases dans la production des bifaces: les caractristiques de ces phases varient suivant le type de support. Phase 0. Phase de slection de la matire premire et acquisition des supports. Phase 1. Transformation des supports : le faonnage. Phase 2. Production de loutil. Bifaces sur galets :

    dans la phase 0, de gros clats avec talon lisse perpendiculaire la face inferieure sont produits la percussion dure;

    dans la phase 1, le faonnage alternant sur les deux faces participe entretenir le plan dquilibre bilatral suivant les caractristiques des enlvements. Le biface peut avoir une section plane ou convexe : o section plane, produite par des dtachements laminaires, partir de lun des

    bords ; o section convexe, produite par de dtachements envahissants et symtriques sur

    les deux bords. Bifaces sur clats:

    les dtachements sont minces et envahissants, produits par percussion tendre

    les prformes ont une section plane - convexe et sont en pointe ou ovalaires

    le faonnage se termine avec la production dun outil (phase 2) : a) racloir simple sur un support plano - convexe en pointe ou ovalaire ; b) retouche scalariforme et zone active latrale convexe sur un support avec section du

    bord plane convexe ; c) outil convergent (3 types: en pointe, alterne, grattoir sur support ovalaire) avec

    retouche large ou marginale suivie dune petite srie de retouches scalariformes ; d) outil double faonn avec dtachements larges ou marginaux suivis par retouches

    scalariformes. Daprs Boda, Belhouchet utilise le terme UTF (unit tecno-fonctionnelle) pour indiquer la zone caractrise par la retouche : toutefois, il semblerait quaucune tude tracologique nait t conduite pour vrifier la fonctionnalit de cette zone. Daprs Cliquet (2001), les bifaces sont les pices affectes par une retouche couvrant la totalit des deux faces : les vritables bifaces conservent leur morphologie initiale malgr les raffutages successifs ; les bifaces supports doutils sont les bifaces dont la forme volue en fonction des amnagements successifs en cours dutilisation. Ces derniers prsentent un

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    tat dexhaustion plus avanc que les vritables bifaces au moment de labandon et prsentent des petites dimensions. Cliquet (2001) reconnait trois moments dans la chane de faonnage, qui respectent des rgles diffrentes selon le type de support choisi : 1. dgrossissage, mise en forme et afftage sur bloc (rares) ; 2. mise en forme et afftage sur plaquette ; 3. faonnage sur clat de gel ou de dbitage (dominants). Malheureusement, mme si la chane de faonnage semble tre complte, lauteur na pas dcrit les produits du faonnage ; dautre part, cause du nombre limit de pices, il ne peut donner dindication propos du poids, de la position et de leurs caractristiques. Pour sa part, Barsky (2001) nous montre des particularits techniques lies au faonnage des supports bifaciaux produits la Caune de lArago. Lanalyse des produits de dbitage et de faonnage prsents sur le site et ltude des supports bifaciaux prsents, est la dmonstration dune ressemblance technique des objets issus des chanes de faonnage et de dbitage Discode au niveau des premires tapes de dgrossissage, dcorticage et amnagement initial du support, ceci pour toutes les matires premires. propos des rapports technique/matire premire, Chabay (1993) analyse les chanes opratoires mises en place sur diffrentes matires premires pouvant tre rassembles par densit et caractres ptrographiques dans le but de trouver des caractres technologiques communs dans les bifaces produits partir de ces matires. M.H. Moncel, dans ltude de la srie dOrgnac 3 (2001), reconnat la prsence dun lien prcis morphologie support - technique utilise dans la recherche de dimensions et de symtries / dissymtries spcifiques. D'aprs son tude, le tailleur a t frquemment intress par lamnagement exclusif des bords et de la pointe de loutil bifacial : que ce soit la technique utilise pour le faonnage (dbitage centripte ou de type Discode ou encore un dbitage Levallois rcurrent centripte ou unipolaire), cette convergence des bords et la symtrie bifaciale parat donc tre vraiment recherche travers le travail soign ultrieur ou antrieur lbauchage. Dautre part, mme lutilisation de la pointe (avre par exemple par la pointe casse Orgnac ou au Lazaret) et les analyses tracologiques ralises sur des bifaces des sites de Soucy dans lYonne montrent des zones actives rduites conduisant au mme constat. Le maintien des zones brutes pourrait sexpliquer par le besoin de zones de prhension (Lhomme et alii, 1998). Par contre, dans son travail Turq (2001) a tent de dmontrer que la variabilit technique du biface na pas toujours de rapports avec les contraintes lies aux matires premires. Dans ce but, il a choisi des sites gographiquement proches o le silex de bonne qualit - est issu de sources comparables. Les critres retenus pour lanalyse sont les suivants :

    dimensions

    poids

    longueur du tranchant

    angles de coupe maximale et minime

    origine des matires premires

    type de support

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    Lanalyse a dmontr que sur ces sites les bifaces taient tous faonns sur des matires premires locales contrairement aux autres objets parfois produits en matriaux exognes : il semblerait que la mobilit du biface sur de longues distances soit trs faible voire inexistante dans le cas des sites en grotte. Mme les tudes sur les sites anglais (Ashton, White, 2001) ont particip la discussion sur le rapport faonnage/matire premire/distance du site. Les travaux de White (1995, 1996, 1998) ont dmontr que, sur la base de lanalyse du cortex, on peut envisager une corrlation importante entre type dassemblage et source de la matire premire : les sites domins par la forme ovalaire sont pratiquement toujours proches des gites de silex de bonne qualit (principalement primaires) alors que les sites domins par les formes pointues sont gnralement associs des galets de silex de qualit mdiocre. Toutefois, ce propos Anderson (1987), suivant ltude sur la distorsion entre le nombre dclats de taille de biface et les bifaces sur les sites (Bordes 1954, 1955), a avanc lhypothse selon laquelle les bifaces avaient t transports hors du gisement pour effectuer des tches ailleurs ce qui suppose une mobilit dans lenvironnement proche. La finalit de la production La variabilit technique et morpho-mtriques mise en place par le tailleur dans le faonnage des supports bifaciaux a t diffremment explique par les chercheurs. Toutefois, quelles que soient les causes conomiques ou simplement les contraintes morpho-techniques qui ont guid la production, le tailleur na jamais d oublier les schmas conceptuels de production lis au cadre des traditions culturelles dans lequel il tait situ. Contraintes techniques Pour certains technologues, la variabilit morpho-technique lisible sur les produits de faonnage est la consquence de la variabilit des contraintes conomiques et fonctionnelles mises en place dans la production. Dans son article sur la variabilit des bifaces acheulens, bien quil soit convaincu du rle de la tradition culturelle sur la morphologie de ces outils (ci-dessous), White (op. cit.) introduit parmi les causes secondaires de cette variabilit lutilisation des diffrentes matires premires et des supports de morphologie varie : les supports dorigine ont toujours conditionn le faonnage. Dautre part, la mauvaise qualit de la matire premire est aussi parmi les premires causes de fragmentation des objets pendant le faonnage. Dans le cadre du dbitage, Gamble, Smith et Apsimon (2000), propos du Clactonien, affirment que lintroduction de cette technique est la consquence de la prsence sur place dune matire premire sujette la fragmentation. Dans lanalyse des supports bifaciaux, les auteurs refusent le rle que la tradition culturelle a pu avoir sur les choix techniques des tailleurs (critique de la thorie de White sur la fonctionnalit des bifaces ovalaires par rapport aux bifaces pointe) et , ils portent plutt leur attention sur la ncessit dutiliser une liste de critres techniques, parmi lesquelles ils considrent:

    la diffrence morphologique profil de la pointe / profil du biface

    le rapport dimension clats/pourcentage cortex/technologie adopte

  • La mthodologie

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    Pour dautres auteurs, la prdtermination de certains caractres techniques est la consquence des contraintes naturelles ou fonctionnelles. Daprs Achton et McNabb (1994), les hommes taient guids par le Mental construct qui leur permettait de faonner des produits bifaciaux, symtriques et sharp durable edges. Le biface est surtout un outil, le produit des contraintes du territoire : la morphologie du galet dorigine conditionne gnralement la morphologie du biface ; le choix dune morphologie spcifique, sans tenir compte de la morphologie du support, peut provoquer un gaspillage de matire. Dans le site de Boxgrove, lauteur reconnat deux typologies de bifaces :

    les bifaces ovalaires, caractriss par profil lenticulaire, talon trs dbit, haut niveau de finition, moins que 5% de cortex. Le faonnage a produit beaucoup dclats faonns au long de tout leur primtre ;

    les bifaces pointe, avec profil tapering, talon non dbit. Ils ne sont pas trs faonns et conservent plus que 10% de cortex. Pourquoi les uns sont privilgis par rapports aux autres ? Les raisons sont techniques, fonctionnelles ou technologiques, jamais culturelles : lexprience dmontre quil est plus facile de produire un biface ovalaire ( partir de plusieurs types de matire premires) et que lon peut lutiliser 360 (le biface pointe a un usage plus spcifique). McPherron (1994) tente de dmontrer que la variabilit morphologique des bifaces dcoule de la technologie et de lintensit de la rduction et elle est subordonne des variables telles que la matire premire, sa qualit, sa disponibilit et la taille des blocs disponibles initialement. Cette thorie sinspire des travaux de Rolland et Dibble qui considrent quil existe un lien entre lintensit de la rduction et la variation typologique de loutillage sur clat dans les assemblages du Palolithique moyen dEurope et du Proche-Orient (Rolland et Dib