Les Moines d'Occident_Tome 3

Embed Size (px)

Citation preview

  • 7/26/2019 Les Moines d'Occident_Tome 3

    1/523

    Source gallica.bnf.fr / Bibliothque nationale de France

    Les Moines d'Occident, depuissaint Benot jusqu' saint

    Bernard, par le comte deMontalembert,...

    http://gallica.bnf.fr/http://www.bnf.fr/
  • 7/26/2019 Les Moines d'Occident_Tome 3

    2/523

    Montalembert, Charles Forbes de (1810-1870). Les Moinesd'Occident, depuis saint Benot jusqu' saint Bernard, par le

    comte de Montalembert,.... 1860-1877.

    1

    Les contenus accessibles sur le site Gallica sont pour la plupartdes reproductions numriques d'oeuvres tombes dans ledomaine public provenant des collections de la BnF. Leurrutilisation s'inscrit dans le cadre de la loi n78-753 du 17 juillet1978 :- La rutilisation non commerciale de ces contenus est libre etgratuite dans le respect de la lgislation en vigueur et notammentdu maintien de la mention de source.- La rutilisation commerciale de ces contenus est payante et faitl'objet d'une licence. Est entendue par rutilisation commerciale la

    revente de contenus sous forme de produits labors ou defourniture de service.

    CLIQUER ICI POUR ACCDER AUX TARIFS ET LA LICENCE

    2 Les contenus de Gallica sont la proprit de la BnF au sens del'article L.2112-1 du code gnral de la proprit des personnespubliques.

    3 Quelques contenus sont soumis un rgime de rutilisationparticulier. Il s'agit :

    - des reproductions de documents protgs par un droit d'auteurappartenant un tiers. Ces documents ne peuvent tre rutiliss,sauf dans le cadre de la copie prive, sans l'autorisation pralabledu titulaire des droits.- des reproductions de documents conservs dans lesbibliothques ou autres institutions partenaires. Ceux-ci sontsignals par la mention Source gallica.BnF.fr / Bibliothquemunicipale de ... (ou autre partenaire). L'utilisateur est invit s'informer auprs de ces bibliothques de leurs conditions derutilisation.

    4 Gallica constitue une base de donnes, dont la BnF est leproducteur, protge au sens des articles L341-1 et suivants ducode de la proprit intellectuelle.

    5 Les prsentes conditions d'utilisation des contenus de Gallicasont rgies par la loi franaise. En cas de rutilisation prvue dansun autre pays, il appartient chaque utilisateur de vrifier laconformit de son projet avec le droit de ce pays.

    6 L'utilisateur s'engage respecter les prsentes conditionsd'utilisation ainsi que la lgislation en vigueur, notamment enmatire de proprit intellectuelle. En cas de non respect de cesdispositions, il est notamment passible d'une amende prvue par

    la loi du 17 juillet 1978.

    7 Pour obtenir un document de Gallica en haute dfinition,contacterreutilisationcommerciale@bnf fr.

    http://www.bnf.fr/fr/collections_et_services/reproductions_document/a.repro_reutilisation_documents.htmlmailto:[email protected]:[email protected]://www.bnf.fr/fr/collections_et_services/reproductions_document/a.repro_reutilisation_documents.htmlhttp://gallica.bnf.fr/http://www.bnf.fr/
  • 7/26/2019 Les Moines d'Occident_Tome 3

    3/523

  • 7/26/2019 Les Moines d'Occident_Tome 3

    4/523

  • 7/26/2019 Les Moines d'Occident_Tome 3

    5/523

  • 7/26/2019 Les Moines d'Occident_Tome 3

    6/523

  • 7/26/2019 Les Moines d'Occident_Tome 3

    7/523

    AVIS

    DES

    DITEURS

    Les

    tomes

    III

    IV

    et

    V des Moines

    d Occident forment

    une

    srie

    part

    consacre

    exclusivement

    l histoire de

    la

    Conversion de

    l Angleterre

    par

    les Moines. Au

    mois

    d avril dernier les

    tomes

    III

    et

    IV

    taient

    entirement

    imprims le

    tome

    V

    tait

    sous

    presse et

    il ne

    restait

    plus

    l auteur qu un petit

    nombre

    de

    pages

    crire

    pour

    combler diverses

    lacunes

    de

    son

    rcit

    lorsqu une cruelle

    maladie

    qui

    dure

    encore

    l a condamn

    interrompre

    son

    travail.

    Ne

    pouvant

    prvoir

    quelle

    poque

    il lui

    sera

    permis de le

    reprendre

    il

    a

    cd

    aux

    instances

    que nous

    lui

    avons

    faites en

    autorisant

    ds

    prsent

    la publication

    du

    tome

    III

    qui

    nous

    a paru

    pouvoir

    se

    dtacher facilement

    de

    la

    suite du

    rcit.

    Les

    tomes

    IV

    et

    V

    paratront

    ensemble

    dans

    le plus

    bref dlai

    possible.

    1er

    dcembre

    1866.

  • 7/26/2019 Les Moines d'Occident_Tome 3

    8/523

    LES

    MOINES D O IDENT

  • 7/26/2019 Les Moines d'Occident_Tome 3

    9/523

    PARIS.

    IMP.

    SIMON

    RACON

    ET

    COMP.

    RUE

    D ERFURTH

    1.

  • 7/26/2019 Les Moines d'Occident_Tome 3

    10/523

    LES

    MOINES

    Fide

    ac

    veritate.

    TOME

    TROISIME

    CONVERSION DE L ANGLETERRE

    PAR

    LES MOINES

    I

    JACQUES

    LECOFFRE ET

    CIE

    LIBRAIRES-DITEURS

    PARIS

    90

    RUE

    DONAPARTE

    80.

    LYON

    ANCIENNE

    MAISON

    PERISSE.

    1866

  • 7/26/2019 Les Moines d'Occident_Tome 3

    11/523

  • 7/26/2019 Les Moines d'Occident_Tome 3

    12/523

    PRAENOBI

    Ll

    VI

    RO

    EDVINO

    WYNDHAM

    QUIN

    COMITI

    DE DUNRAVEN

    HIBERNIAE

    ET

    BRITANNIC PARI

    ORDINIS

    S

    PATRICII EQUITl

    COMITI

    ITINERIS

    COMISSIMO

    AMICO

    IN ADVERSIS

    PROBATISSIMO

    CIVI

    PRISCAE

    FIDEI SIMUL

    AC

    PATRIAE

    LAUDI

    SERVANTISSIMO

    QUI INSUPER

    EX

    ANTIQUIS5IMA

    INTER CELTAS PROGENIE

    EDITUS

    CELTICIS CATHOLICISQUE

    REBUS

    STRENU

    SEMPER

    INCUBUIT

    TERTIUM HOC OPEROSI LABORIS

    VOLUMEN

    D D

    D

    CAROLUS

    COMES

    DE

    MONTALEMBERT

  • 7/26/2019 Les Moines d'Occident_Tome 3

    13/523

    NOTE

    TOUR

    LES

    I OSSESSEURS

    DE

    LA

    PREMIRE

    DITION

    DES

    TOMES

    I ET II.

    Pour

    obir

    des conseils d une grande autorit

    nous

    avons

    d

    dans la seconde dition des deux

    premiers

    volu-

    mes

    de

    cet

    ouvrage

    diviser

    en

    deux les anciens

    livres

    V

    et

    VI de

    sorte

    que

    le

    livre

    VII

    de la premire

    dition

    est

    devenu

    le livre IX de la seconde

    et

    que

    par

    Consquent

    le

    livre

    qui

    suit

    et

    qui

    ouvre

    le

    tome

    III

    a

    d

    recevoir le

    chiffre X.

    Mais

    cette

    solution

    de

    continuit

    n est qu apparente

    :

    le

    livre

    X

    du

    tome

    III

    n en

    fait

    pas

    moins

    suite

    au

    livre

    VII

    du

    tome

    II

    de

    la premire

    dition.

  • 7/26/2019 Les Moines d'Occident_Tome 3

    14/523

    LIVRE

    X

    ORIGINES

    CHRTIENNES

    DES

    ILES

    BRITANNIQUES

    Dilata

    locura

    tentorii lui

    et

    pelles

    ta-

    bernaculorum

    tuorum

    extende

    ne parcas:

    tongos fac funiculos

    tuos et

    clavos

    tuos

    consolida. Ad dexteram enim

    et

    ad

    laevam

    penetrabis

    :

    et

    semen

    tuum

    gentes

    haere-

    ditabit.

    ISAIAS.

    LIV

    2.

    5.

    MOINES

    D

    OCC.

    III

  • 7/26/2019 Les Moines d'Occident_Tome 3

    15/523

  • 7/26/2019 Les Moines d'Occident_Tome 3

    16/523

    CHAPITRE

    PREMIER

    La

    Grande-Bretagne

    avant

    la

    conversion

    des

    Saxons.

    Caractre

    du peuple

    anglais

    :

    hritier du peuple romain il

    ne

    lui

    emprunte

    que

    sa

    grandeur

    et

    son

    orgueil.

    D o

    lui

    est

    venue

    sa

    religion

    ?

    Des

    papes

    et

    des

    moines. Les

    moines

    ont

    lait

    l An-

    gleterre

    comme

    les vques

    ont

    faitla

    France.

    Les

    hros de la

    rsistance

    l Empire

    :

    Caractacus

    Boadicea

    Galgacus. Aucune

    trace

    du droit romain

    en

    Angleterre

    ;

    tout

    y

    est

    celtique

    ou

    teuto-

    nique.

    La

    Bretagne

    est

    la premire des nations

    occidentales

    qui

    sache vivre

    sans

    Rome

    et

    la

    premire

    qui sache

    rsister

    aux

    bar-

    bares.

    Ravages des

    Piets

    ;

    Gildas

    ;

    arrive des

    Anglo-Saxons

    en

    Bretagne

    ils

    y

    dtruisent l difice

    du

    christianisme

    primitif.

    Origines

    du

    christianisme breton

    ;

    le

    proto-martyr

    saint

    Alban.

    Ravagesdes

    Saxons

    ;

    secours

    prodigus

    par

    la

    Papaut

    Mission

    de

    Palladius

    puis

    de

    saint

    Germain d Auxerre.

    Bataille de

    l Allluia.

    Le

    Breton

    Ninian

    devient l aptre des

    Piets du

    Midi

    :

    son

    tablissement Whitehorn;frocit

    des

    Ca-

    ldoniens

    ;

    sa

    mort.

    Glastonbury

    ;

    lgende de

    Joseph d Arima-

    thie

    ;

    tombe

    du

    roi

    Arthur.

    Situation de la

    Bretagne de

    450

    550;

    quatre

    races

    diverses; les

    Piets

    les

    Scots

    les

    Bretons

    et

    les

    Saxons.

    D o

    viendra

    aux

    Saxons

    la

    lumire

    de

    l vangile?

    Il

    y

    a dans

    l Europe

    moderne

    sept

    lieues de la

    France

    en vue

    de

    nos

    plages du

    Nord

    un

    peuple

    dont l empire

    est

    plus

    vaste

    que

    celui

    d Alexandre

    ou

    des

    Csars

    1

    et

    qui

    est

    la

    fois

    le

    plus libre

    et

    le

    plus puissant

    le

    plus

    riche

    et

    le

    plus

    viril

    j

    1.

    Les

    dernires statistiques

    portent

    cent

    Soixante-Quatorze

    mil-

    lions

    le nombre des sujets

    ou

    des

    vassaux

    de

    la

    couronne

    d Angleterre.

  • 7/26/2019 Les Moines d'Occident_Tome 3

    17/523

    4

    ORIGINES

    CHRTIENNES

    le

    plus

    audacieux et le plus

    rgl

    qui

    soit au

    monde.

    Aucun

    peuple

    n offre

    une

    lude

    aussi

    in-

    structive

    un

    aspect

    aussi

    original

    des

    contrastes

    aussi

    tranges.

    A

    la fois

    libral

    et

    intolrant

    pieux

    et

    inhumain

    amoureux

    de

    l ordre

    et

    de

    la

    scurit

    autant

    que

    du

    mouvement et

    du bruit

    il

    unit

    un

    respect

    superstitieux

    pour

    la

    lettre

    de

    la

    loi

    la

    pratique

    la plus

    illimite

    de

    l indpendance

    individuelle. Vers

    comme

    nul

    autre

    dans

    tous

    les

    arts

    de la paix

    et

    nanmoins

    invincible

    la

    guerre

    parfois

    mme

    pris

    pour

    elle

    d une

    passion

    effrne

    ;

    trop

    souvent

    tranger

    l enthousiasme mais

    inca-

    pable

    de dfaillance

    il

    ignore jusqu

    la

    notion du

    dcouragement

    ou

    de la mollesse. Tantt il

    mesure

    tout

    l aune

    de

    ses

    profits

    ou

    de

    ses

    caprices

    tantt

    il

    s enflamme

    pour

    une ide

    ou

    une

    passion

    dsin-

    tresse.

    Aussi mobile

    que pas

    un

    dans

    ses

    affections

    cl

    ses

    jugements

    mais

    sachant presque toujours

    se

    contenir

    et

    s arrter

    temps

    il

    est

    dou

    la fois

    d une initiative

    que

    rien

    n tonne

    et

    d une

    per-

    svrance

    que

    rien

    n abat.

    Avide

    de

    conqutes

    cl

    de dcouvertes

    il

    erre

    et

    court

    aux

    extrmits

    de

    la

    terre

    puis

    revient plus

    pris

    que

    jamais

    du

    foyer

    domestique plus jaloux

    d en

    assurer

    la

    dignit

    et

    la

    dure

    sculaire.

    Ennemi

    implacable

    de

    la

    contrainte

    il

    est

    l esclave volontaire

    de

    la

    tradition

    et

    de

    la

    discipline

    librement

    accepte

    ou

    d un

    prjug hr-

    ditairement

    transmis.

    Nul

    peuple

    n a

    t

    plus

    souvent

    conquis

    nul

    n a

    su

    mieux

    absorber et transformer

  • 7/26/2019 Les Moines d'Occident_Tome 3

    18/523

    DES

    ILES

    BRITANNIQUES.

    5

    ses

    conqurants.

    Nul

    n a

    perscut

    le

    catholicisme

    avec

    un

    plus

    sanguinaire acharnement

    ;

    encore

    aujourd hui

    nul

    ne

    semble

    plus

    hostile

    l glise

    et

    cependant

    nul

    n en

    a

    plus besoin;

    nul

    aussi

    ne

    lui

    fait

    plus dfaut;

    nul

    n a

    laiss

    dans

    son

    sein

    un

    vide

    plus

    irrparable; nul

    enfin

    n a

    prodi-

    gu

    nos

    voques

    nos

    prtres

    nos

    religieux

    proscrits

    une

    plus

    gnreuse

    hospitalit.

    Inacces-

    sible

    aux

    orages

    modernes

    celte

    le

    a

    t

    un

    asile

    inviolable

    pour

    nos

    pres

    et

    nos

    princes

    exils

    non

    moins

    que pour

    nos

    plus

    violents

    ennemis.

    Ni

    l gosme

    parfois sauvage

    de

    ces

    insulaires

    ni

    leur

    indiffrence

    trop

    souvent

    cynique

    pour

    les dou-

    leurs

    et

    la

    servitude d autrui

    ne

    doivent

    nous

    faire

    oublier

    que

    l plus

    que

    partout

    ailleurs l homme

    s appartient

    lui-mme

    et

    se

    gouverne

    lui-mme.

    C est

    l

    que

    la noblesse

    de

    notre

    nature

    a

    dvelopp

    toute

    sa

    splendeur

    et

    atteint

    son

    niveau

    le

    plus

    lev.

    C est

    l

    que

    la

    passion gnreuse

    de

    l indpendance

    unie

    au

    gnie

    de

    l association

    et

    la pratique

    con-

    stante

    de

    l empire

    de

    soi

    ont

    enfante

    ces

    prodiges

    d nergie

    acharne

    d indomptable vigueur

    d h-

    rosme

    opinitre

    qui

    ont

    triomph

    des

    mers

    et

    des

    climats

    du

    temps

    et

    de

    la

    distance

    de

    la

    nature

    et

    de

    la

    tyrannie

    en

    excitant

    la

    perptuelle

    envie

    de

    tous

    les

    peuples

    et

    l orgueilleux

    enthousiasme

    des

    Anglais

    1.

    1.

    Jamais

    cet

    enthousiasme

    ne

    s est

    mieux

    formul

    que

    dans

    ces

    vers

    rpts

    avec

    transport

    par

    le

    grand

    moraliste

    anglais

    du

    dernier

    sicle

    Johnson le

    25

    octobre

    1775

    au

    retour

    de

    sa

    visite

    l le

    monastique

  • 7/26/2019 Les Moines d'Occident_Tome 3

    19/523

    6

    ORIGINES

    CHRTIENNES

    Aimant

    la

    libert

    pour

    elle-mme et

    n aimant

    rien

    sans

    elle

    ce

    peuple

    ne

    doit

    rien

    ses

    rois

    qui

    n ont

    t

    quelque

    chose

    que par

    lui

    et

    pour

    lui.

    Sur

    lui

    seul pse

    la

    formidable

    responsabilit

    de

    son

    histoire.

    Aprs

    avoir

    subi

    autant et

    plus

    qu aucune

    nation

    de

    l Europe

    les

    horreurs

    du

    despotisme

    po-

    litique

    et

    religieux

    au

    seizime

    et

    au

    dix-septime

    sicle il

    a

    su

    le

    premier

    et

    le

    seul

    s en

    affranchir

    pour

    toujours.

    Rintgr

    dans

    son

    vieux

    droit

    sa

    fire

    et

    vaillante

    nature

    lui

    a

    depuis

    lors

    interdit

    d abdiquer

    entre

    des

    mains quelconques

    ses

    droits

    ses

    destins

    ses

    intrts

    son

    libre arbitre.

    Il

    sait

    vouloir

    et

    agir

    pour

    lui-mme;

    gouvernant

    sou-

    levant

    inspirant

    ses

    grands

    hommes

    au

    lieu

    d tre

    sduit

    gar

    ou

    exploit

    par eux.

    Cette

    race

    anglaise

    a

    succd

    l orgueil

    comme

    la

    grandeur

    du peuple dont

    elle

    est

    l mule

    et

    l h-

    ritire

    du peuple

    romain; j entends

    les

    vrais

    Romains

    de la

    Rpublique

    non

    les

    vils Romains

    asservis

    par

    Auguste.

    Comme

    les Romains

    envers

    d Iona

    berceau

    du christianisme

    britannique

    o

    nous

    allons

    tout

    l heure

    transporter

    nos

    lecteurs

    :

    Stern

    o er

    each

    bosom Reason holds

    her state

    With

    daring aims

    irregularly

    great;

    Pride

    in

    their

    port

    dfiance

    in

    their

    eye

    I

    see

    the lords

    of

    human

    kind

    pass

    by

    ;

    Intent

    on

    high designs

    a

    thoughtful

    band

    By

    forms unfashioned

    fresh from

    nature s

    hand

    Fierce

    in

    their

    native

    hardiness

    of

    soul;

    True

    to

    imagined

    right

    above

    control

    While

    even

    the

    peasant

    boasts

    these rights

    to

    scan

    And

    learns

    to

    venerate

    himself

    as

    man.

    GOLDSMITH

    the

    Travlleer.

  • 7/26/2019 Les Moines d'Occident_Tome 3

    20/523

    DES

    ILES BRITANNIQUES.

    7

    leurs tributaires

    elle

    a

    t

    froce

    et cupide envers

    l Irlande

    infligeant

    ainsi

    sa

    victime

    jusqu en

    ces

    derniers

    temps

    la

    servitude

    et

    l abaissement

    qu elle

    rpudie

    avec

    horreur

    pour

    elle-mme.

    Comme

    la

    Rome

    antique

    souvent

    hae

    et

    trop souvent

    digne de

    haine

    elle inspirera

    toujours

    ses

    juges les

    plus

    fa-

    vorables

    plus d admiration

    que

    d amour. Mais plus

    heureuse

    que

    Rome

    aprs

    mille

    ans

    et

    plus elle

    est

    encore

    toute

    jeune

    et

    fconde. Un

    progrs lent

    obscur

    mais ininterrompu lui

    a

    cr

    un

    fonds

    inpuisable de

    force

    et

    de vie.

    Chez

    elle la

    sve

    dbordait

    hier

    et

    dbordera

    demain. Plus heureuse

    que

    Rome malgr mille inconsquences

    mille

    excs mille

    souillures elle

    est

    de

    toutes

    les

    races

    modernes

    et

    de

    toutes

    les nations

    chrtiennes

    celle

    qui

    a

    le mieux conserv

    les

    trois bases

    fondamen-

    tales de

    toute

    socit digne

    de

    l homme

    :

    l esprit

    de

    libert l esprit

    de famille

    et

    l esprit

    religieux.

    Comment

    celte

    nation

    o

    survit

    et

    triomphe

    un

    orgueil

    tout

    paen

    et

    qui

    n en

    est

    pas

    moins

    reste

    jusqu au

    sein de

    l erreur

    la

    plus

    religieuse

    de

    toutes

    les

    nations

    de

    l Europe

    1

    comment

    est-elle

    devenue

    chrtienne?

    Comment

    et

    par

    quelles

    mains

    le

    christianisme

    y

    a-t-il jet

    de

    si

    indestructibles

    1. On s tonnera

    peut-tre de

    cette

    affirmation.

    Elle

    exprime

    une

    conviction

    fonde

    sur

    des

    comparaisons

    et

    des

    tudes

    personnelles

    faites

    pendant prs de

    quarante

    ans

    dans

    tous

    les

    pays

    de l Europe

    except

    en

    Russie. Elle

    s accorde

    d ailleurs

    avec

    les

    rsultats

    donns

    par

    l un des

    observateurs

    les plus

    consciencieux

    et

    les

    plus

    perspicaces

    de

    notre temps

    M Le

    Play.

  • 7/26/2019 Les Moines d'Occident_Tome 3

    21/523

    8

    ORIGINES

    CHRTIENNES

    racines?

    Question

    capitale

    coup

    sr parmi

    les

    plus

    capitales

    de

    l histoire

    et

    dont

    l intrt

    clate

    et

    redouble

    quand

    on

    songe

    que

    de

    la

    conversion

    de

    l Angleterre

    a

    dpendu

    et

    dpend

    encore

    la

    conversion

    de

    tant

    de

    millions

    d mes.

    Le

    chris-

    tianisme

    anglais

    a

    t

    le

    berceau

    du

    christianisme

    de l Allemagne

    ;

    du sein de

    l Allemagne

    des

    mis-

    sionnaires

    forms

    par

    les

    Anglo-Saxons

    ont

    port

    la

    foi

    en

    Scandinavie

    et

    chez les

    Slaves

    et

    chaque

    jour

    l heure

    qu il

    est

    soit

    par

    la

    fconde

    expan-

    sion

    de

    l orthodoxie irlandaise

    soit

    par

    l impulsion

    obstine de la

    propagande protestante il

    se

    cre

    des

    chrtients

    qui parlent anglais

    et

    vivent

    l an-

    glaise

    dans

    toute

    l Amrique du Nord dans

    les

    deux

    Indes

    dans

    l immense Australie

    et

    dans

    les

    les

    de

    l ocan

    Pacifique.

    C est

    presque une

    moiti

    du

    monde dont

    le

    christianisme

    dcoule

    ou

    dcou-

    lera

    de

    la

    source qui

    a

    jailli sur

    le

    sol

    britannique.

    Or

    celle

    question

    capitale il

    est

    permis de

    rpondre

    avec

    une

    prcision rigoureuse.

    Nul

    peuple

    au

    monde

    n a

    reu

    la

    foi

    chrtienne

    plus directe-

    ment

    de

    l Eglise

    romaine

    et

    plus

    exclusivement

    par

    le

    ministre

    des

    moines.

    Si

    comme

    l a

    dit

    un

    grand

    ennemi

    de Jsus-

    Christ

    la

    France

    a

    t

    faite

    par

    les

    vques

    il

    est

    bien

    plus

    vrai

    encore

    que

    l Angleterre

    chrtienne

    a

    t

    faite

    par

    les

    moines.

    De

    tous

    les

    pays

    de

    l Europe

    c est

    celui

    qui

    a

    t le

    plus

    profondment

    labour

    par

    le

    soc

    monastique.

    Ce

    sont

    les

    moines et

    les

  • 7/26/2019 Les Moines d'Occident_Tome 3

    22/523

    DES

    ILES

    BRITANNIQUES.

    9

    moines seuls qui ont

    port

    sem et cultiv

    dans

    celte

    le

    fameuse

    la

    civilisation

    chrtienne.

    D o

    venaient

    ces

    moines?

    De

    deux

    courants

    trs-

    distincts

    de

    Rome

    et

    de

    l Irlande.

    Le

    christianisme

    britannique

    est

    n

    du

    concours

    et

    quelquefois

    du

    conflit des

    missionnaires

    monastiques

    de

    l glise

    romaine

    et de

    l glise

    celtique.

    Mais

    avant

    celle

    conversion dfinitive

    due

    surtout

    un

    pape

    et

    des

    moines

    sortis des

    rangs

    bndic-

    tins

    il

    y

    eut

    dans

    la

    Grande-Bretagne

    un

    christia-

    nisme primitif dont

    l existence

    fort

    obscure

    est

    nan-

    moins

    incontestable

    et

    dont

    les

    destines

    et

    la

    catastrophe

    mritent

    un

    rapide

    aperu.

    De

    tous

    les

    peuples

    conquis

    par

    Rome

    les

    Bre-

    tons

    taient

    ceux

    qui

    avaient le

    plus

    longtemps

    rsist

    ses

    armes

    et

    le

    moins

    emprunt

    ses

    lois

    ou

    ses

    moeurs.

    Un

    moment

    vaincus

    mais

    non sou-

    mis

    par

    l invincible

    Csar

    ils

    avaient

    contraint

    le

    bourreau

    des

    Gaules

    et

    le

    destructeur

    de

    la

    libert

    romaine

    quitter leurs

    rivages

    sans

    y

    avoir

    fond

    la

    servitude.

    Moins

    heureux

    sous

    ses

    indignes

    suc-

    cesseurs

    rduits

    en

    province

    et

    livrs

    en

    proie

    l avarice

    la

    luxure

    la

    frocit

    des

    usuriers

    1

    des

    procurateurs

    et

    des

    lieutenants impriaux

    ils

    main-

    tinrent

    encore

    longtemps

    une

    attitude

    fire

    et

    digne

    qui

    contrastait

    avec

    l esclavage

    universel.

    Jam

    domili

    ut

    pareant

    nondum

    ut

    serviant2

    Sujets

    et

    non

    1. Tels

    que

    Snque

    lui-mme

    selon Dion

    Cassius.

    2.

    TACITE

    Agricola

    c.

    13

    Rsistance

    hroque

    de la Bretagne

    l empire romain.

  • 7/26/2019 Les Moines d'Occident_Tome 3

    23/523

    10

    ORIGINES

    CHRTIENNES

    esclaves

    c est

    le

    premier

    et

    le

    dernier

    mot

    de

    l histoire

    britannique.

    Mme

    sous

    Nron

    les

    Bretons

    riaient

    de

    ces

    vils

    affranchis

    que

    les

    Csars

    imposaient

    pour

    ministres

    et

    pour

    magistrats

    l univers

    dshonor 1.

    Bien

    avant

    d avoir t

    broye

    et

    ravive

    par

    les

    inva-

    sions

    successives

    de

    trois

    races

    germaniques

    les

    Saxons

    les

    Danois

    et

    les

    Normands

    cette

    noble

    race

    celtique

    avait

    produit

    des

    personnages

    qui

    grce

    Tacite

    resplendissent

    d une

    imprissable

    lumire

    au

    milieu

    de

    la

    dgradation

    du

    monde:

    Caractacus

    le

    glorieux

    prisonnier

    le

    Vercingtorix

    breton

    qui

    sut

    parler

    l empereur

    un

    langage

    digne

    des beaux

    jours

    de

    l

    Rpublique

    :

    Parce

    que

    vous

    voulez

    nous

    asservir

    qui

    vous

    dit

    que

    tout

    le

    monde ait

    envie

    de

    votre

    servitude

    2

    ;

    puis

    Boadicea

    la

    reine hroque

    donnant

    en

    spectacle

    son

    corps

    flagell

    et

    ses

    filles

    outrages

    pour

    en-

    flammer

    le

    patriotisme

    indign

    des

    Bretons

    trahie

    par

    la

    fortune mais sauve

    par

    l histoire; enfin

    Galgacus dont Tacite

    a

    immortalis le

    nom

    en

    lui

    prtant

    toute

    l loquence

    que

    la

    conscience

    et

    la

    justice pouvaient

    inspirer

    un

    honnte

    homme

    in-

    dign

    dans

    cette

    harangue

    que

    nous

    avons

    tous

    sue

    par

    coeur

    et

    qui

    sonnait

    la

    charge

    du combat

    o

    1.

    Hostibus

    irrisui

    fuit

    apud

    quos

    flagrante

    etiam

    tum

    libertate

    nondum

    cognita libertorum

    potentia

    erat

    :

    mirabanturque

    quod

    dux

    et

    exercitus

    tanti

    belli

    confector

    servitiis

    obedirent.

    Annal

    XIV

    59.

    2.

    Num

    si

    vos

    omnibus

    imperitare

    vultis. sequitur

    ut

    omnes

    servi-

    tutem

    accipiant?

    Ibid.

    XII

    57.

  • 7/26/2019 Les Moines d'Occident_Tome 3

    24/523

    DES

    ILES BRITANNIQUES.

    11

    les

    fils

    les

    plus

    reculs de

    la

    libert celtique

    devaient

    cimenter

    de

    leur

    sang

    le

    rempart

    insurmontable

    de

    leur indpendance

    montagnarde

    1.

    La

    Bretagne prludait ainsi

    au

    glorieux

    avenir

    que

    la

    libert

    s est

    cr

    travers

    tant

    d orages

    et

    tant

    d clipss

    dans

    cette

    le

    qui

    en

    est

    enfin

    devenue

    le

    sanctuaire

    et

    l indestructible abri.

    Le

    droit

    civil de Rome

    dont

    le

    joug

    pse

    encore

    aprs

    dix-huit

    sicles

    couls

    sur

    la

    France

    l Es-

    pagne

    l Italie

    et

    l Allemagne

    a sans

    doute

    rgn

    en

    Bretagne

    pendant l occupation romaine;

    mais il

    en

    a

    disparu

    avec

    le

    rgime

    des Csars.

    Ses

    malfaisantes

    racines n y

    ont

    jamais

    enlac touff

    ou

    empoisonn

    les

    vigoureux rejets

    de

    la

    libert

    domestique

    civile

    et

    politique.

    Il

    en

    est

    de

    mme

    pour

    tout

    le

    reste.

    Pas

    plus

    dans les institutions

    que

    dans

    les

    monu-

    ments

    de

    la

    Bretagne

    Rome

    impriale

    n a

    laiss

    aucune trace

    de sa hideuse domination.

    La

    langue

    et

    les

    moeurs

    lui

    ont

    chapp

    comme

    les lois.

    Tout

    ce

    qui

    n est

    pas

    celtique

    y

    est

    teutonique.

    Il

    tait

    r-

    serv

    Rome

    catholique

    la Rome

    des

    papes

    d im-

    primer

    une

    ineffaable

    empreinte

    sur

    cette

    le

    clbre

    et

    d y

    revendiquer

    pour

    l immortelle

    majest

    de

    l vangile l influence

    sociale

    qui partout

    ailleurs

    lui

    a

    t

    dispute

    ou

    drobe

    par

    l hritage

    fatal de

    la Rome

    des Csars.

    Aussi

    aprs

    avoir t

    la

    dernire

    parmi

    les

    na-

    1.

    Initium libertatis

    totius Britannioe...

    Nos

    terrarum

    aclibertatis

    extremos...

  • 7/26/2019 Les Moines d'Occident_Tome 3

    25/523

    12

    ORIGINES

    CHRTIENNES:

    tions

    de

    l Occident

    subir

    le

    joug

    romain

    fut-elle

    la

    premire

    s en

    dfaire

    ;

    la

    premire

    qui

    sut

    ab-

    jurer

    l autorit

    impriale

    et

    apprendre

    au

    monde

    comment

    on

    pouvait

    se

    passer

    d empereur.

    Lorsque

    l impuissance

    de

    l Empire

    en

    face

    des

    incursions

    barbares

    eut

    clat

    en

    Bretagne

    comme

    ailleurs

    les

    Bretons

    ne

    s abandonnrent

    pas

    eux-mmes.

    Les

    petites

    souverainets

    nationales

    les

    clans

    aristocra-

    tiquement

    organiss

    dont

    les

    divisions

    avaient fait

    triompher

    l invasion

    romaine

    reparurent

    sous

    des

    chefs

    indignes.

    Une

    sorte

    de

    fdration

    se

    constitua

    et

    ses

    chefs

    signifirent

    l empereur

    Honorius

    par

    une

    ambassade

    reue

    Ravenne

    en

    410

    que

    d-

    sormais la

    Bretagne

    comptait

    se

    dfendre

    et

    se gou-

    verner par

    elle-mme

    1.

    Un

    grand

    crivain

    l a

    dj

    remarqu

    :

    de

    tous

    les

    peuples soumis

    l empire

    romain

    les

    Bretons

    sont

    les seuls

    dont

    la

    lutte

    contre

    les

    barbares

    ait

    une histoire

    et

    l histoire

    de

    celte

    rsistance

    a

    dur

    deux

    sicles.

    A la

    mme

    poque

    dans la

    mme

    situation

    les Italiens

    les

    Gaulois

    les

    Espagnols

    n ont rien

    de

    pareil

    2.

    Ils

    se

    laissrent

    tous

    craser

    et

    abmer

    sans

    rsistance.

    Toutefois la

    Bretagne

    elle-mme

    n avait

    pas

    subi

    1.

    Romanum

    nomen

    tenens

    legem abjiciens.

    GILDAS

    de

    Excidio

    Bri-

    tanniae.

    ZOSIME

    Hist.

    novae

    lib.

    VI p.

    576 581.

    Cf. LINGARD

    History

    of

    England

    c.

    1.

    AMDE THIERRY

    Arles

    et

    le

    Tyran

    Constantin

    p.

    509.

    2.

    GUIZOT

    Essai

    sur

    l histoire

    de

    France

    p.

    2

    Seuls

    en

    Gaule

    les

    Arvernes

    les

    compatriotes

    de Vercingtorix

    eurent

    un

    beau

    moment

    lorsque

    Ecdicius

    fora

    les Goths

    de

    lever le

    sige

    de

    Clermont

    en

    471;

    mais

    ce

    ne

    fut

    qu un

    clair

    dans

    la

    nuit.

    La

    Bretagne

    est

    la

    premire

    des

    nations

    occidentales

    qui

    sache

    se

    passer

    de

    Csar.

  • 7/26/2019 Les Moines d'Occident_Tome 3

    26/523

    DES

    ILES

    BRITANNIQUES.

    15

    impunment

    trois sicles

    et

    demi

    de

    servitude

    imp-

    riale:

    Comme dans la

    Gaule

    comme

    dans

    tous

    les

    pays

    soumis

    l empire

    romain

    la dpendance

    et

    la

    corruption avaient

    la longue

    nerv amolli

    et

    ruin

    ces

    vaillantes

    populations. Les fils de

    ceux que

    Csar

    n avait

    pu

    conqurir

    et

    qui

    avaient

    si

    hroquement

    lutt

    sous Claude

    cl Nron

    se

    crurent

    bientt

    hors

    d tat de

    tenir

    tte

    aux

    barbares

    amissa virtule

    pariter

    ac

    libertate. Ils rclamrent

    en

    vain

    l inter-

    vention des lgions romaines

    :

    celles-ci revinrent

    dans l le

    deux

    reprises

    diffrentes

    mais

    sans

    rus-

    sir

    la dlivrer

    ou

    la

    protger. Du

    reste

    les

    bar-

    bares

    qui venaient

    branler

    et

    renverser

    la

    domina-

    tion des Csars

    en

    Bretagne n taient

    pas

    des

    tran-

    gers comme

    le

    furent

    les Goths

    en

    Italie

    et

    les Francs

    en

    Gaule. On

    ne

    peut

    voir

    autre

    chose

    que

    les

    peu-

    plades

    non

    soumises

    de la Bretagne elle-mme dans

    ces

    Caldoniens

    qui

    sous

    Galgacus

    avaient rsist

    victorieusement

    Agricola

    et

    qui

    sous

    les

    noms

    nouveaux

    de

    Scots

    et

    de Piets

    faisant brche

    tra-

    vers

    les

    fameux

    remparts

    levs

    contre

    eux

    par

    An-

    tonin

    et

    par

    Svre

    et

    renouvelant

    tous

    les

    ans

    leurs

    dvastations

    sanguinaires

    arrachrent

    la

    Bretagne

    perdue

    et

    dsole

    par un

    demi-sicle

    de

    ravages

    ce

    cri

    de dtresse

    que

    tout

    le

    monde

    connat

    :

    Les

    barbares

    nous

    repoussent

    jusqu la

    mer

    la

    mer

    nous

    rejette

    vers

    les

    barbares.

    Nous

    n avons

    plus

    que

    le

    choix d tre

    gorgs

    ou

    noys

    1.

    1. Actio

    ter

    cousuli

    gemitus

    Britannorum.

    Repellunt

    nos ar-

    418-421.

    Ravages

    des

    Pictes.

    446.

  • 7/26/2019 Les Moines d'Occident_Tome 3

    27/523

    14

    ORIGINES

    CHRTIENNES

    Arrive

    s

    Anglo-Saxons.

    449.

    Tout

    le

    monde sait aussi comment les Bretons

    acceptrent

    imprudemment

    contre

    les

    Piets

    le

    se-

    cours

    de

    la

    race

    belliqueuse

    et

    maritime

    des

    Anglo-

    Saxons

    et

    comment

    non

    moins

    cruels

    et

    non

    moins

    redoutables

    que

    les

    Pictes

    ces

    auxiliaires

    devenus

    les

    conqurants

    du

    pays

    y

    fondrent

    une

    domination

    ou

    pour

    mieux

    dire une nationalit

    nouvelle

    qui

    a

    persist victorieusement

    travers

    toutes

    les

    con-

    qutes

    et toutes

    les

    rvolutions

    subsquentes.

    Ces

    guerriers

    issus de la

    grande

    famille

    germanique

    comme

    l taient

    selon

    l opinion

    commune

    les

    Bre-

    tons

    eux-mmes

    se

    rapprochaient

    de ceux-ci

    par

    leurs institutions

    et

    leurs

    moeurs; ce

    qui

    n empcha

    pas

    les

    indignes

    de leur

    opposer

    pendant

    prs

    de

    deux sicles

    une

    rsistance hroque bien

    qu

    lalon-

    gue

    infructueuse

    1.

    Entirement

    trangers

    la civilisa-

    lion

    romaine

    les Anglo-Saxons

    n eurent

    garde

    de

    con-

    server

    ou

    de

    rtablir

    les

    vestiges

    du rgime imprial.

    Mais

    en

    dtruisant

    la

    jeune

    indpendance

    des Bre-

    tons

    en

    refoulant

    dans

    les

    rgions

    montueuses

    de

    l Ouest

    les

    populations

    que

    n atteignaient

    pas

    les

    longs

    couteaux

    dont

    ils

    tiraient

    leur

    nom2

    ces

    paens

    renversrent

    et

    anantirent

    pour

    un

    temps

    sur

    le

    sol

    ensanglant

    de

    la

    Grande-Bretagne

    un

    difice

    autrement

    auguste

    que

    l empire

    romain

    et

    bari

    ad

    mare

    repellit

    mare

    ad barbaros.

    Inter

    haec

    oriuntur

    duo

    genera

    funerum

    :

    aut

    jugulamur

    aut

    mergimur.

    1.

    Elle

    n a

    t

    nulle

    part

    aussi

    bien

    raconte

    que

    par

    M.

    Arthur

    de

    la

    Borderie

    dans

    la

    Revue

    bretonne

    de 1804.

    2

    Sax

    couteau

    pe

    en

    vieux

    allemand

  • 7/26/2019 Les Moines d'Occident_Tome 3

    28/523

    DES ILES

    BRITANNIQUES.

    15

    autrement

    solide

    que

    la nationalit celtique

    l di-

    fice

    de

    la

    religion

    chrtienne.

    On

    sait

    avec

    certitude

    que

    le

    christianisme fut

    im-

    plant

    en

    Bretagne ds

    le second

    sicle de

    l re

    chr-

    tienne;

    mais

    on

    ne

    sait rien

    de positif

    sur

    l ori-

    gine

    ou

    l organisation

    de

    cette

    glise primitive.

    Toutefois

    au dire

    de

    Terlullien

    elle

    avait

    pntr

    en

    Caldonie

    au

    del des limites

    de

    la province

    ro-

    maine

    1

    .

    Elle

    fournil

    la perscution de Diocltien

    son

    contingent

    de

    martyrs

    et

    au

    premier

    rang

    parmi

    eux

    un

    jeune

    diacre

    Alban

    dont

    la

    tombe

    devait

    plus tard

    tre

    consacre

    par

    l un

    des

    prin-

    cipaux monastres anglo-saxons. Elle

    apparut

    aussi-

    tt aprs

    la paix de

    l glise

    en

    la

    personne

    de

    ses

    vques

    aux

    premiers

    conciles de l Occident.

    Elle

    survcut

    la

    domination

    romaine

    mais

    ce

    ne

    fut

    que

    pour

    lutter

    pied

    pied

    et

    reculer enfin

    avec

    les der-

    nires tribus

    du

    peuple breton

    devant les envahis-

    seurs

    saxons

    aprs

    un

    sicle

    entier d efforts

    et

    de

    souffrances

    de

    massacres

    et

    de profanations. Pen-

    dant

    tout

    ce

    temps

    d un bout

    de

    l le

    l autre

    les

    Saxons

    promenrent

    l incendie

    le

    meurtre

    et

    le

    sa-

    crilge;

    renversant

    les

    difices

    publics

    comme

    les

    maisons

    particulires

    dvastant

    les

    glises

    brisant

    les

    pierres

    sacres

    des autels

    gorgeant

    les

    pasteurs

    avec

    leurs

    ouailles 2.

    1.

    Britannorum inaccessa

    Romanis

    loca

    Christo

    vero

    subdita.

    TER-

    TULL.

    Adv.

    Judaeos

    c.

    7.

    2.

    Accensus manibus paganorum

    ignis...

    ab

    orientali

    mare

    usque

    ad

    occidentale...

    totam

    prope

    insulae

    pereuntis

    superficiem obtexit. Rue-

    Origine

    du

    christianisme

    en

    Bretagne.

    514.

    L glise

    bretonne

    noye

    dans le

    sang

    par

    les

    Saxons.

  • 7/26/2019 Les Moines d'Occident_Tome 3

    29/523

    16

    ORIGINES

    CHRTIENNES

    Ces

    preuves si

    cruelles et

    si

    prolonges

    durent

    ncessairement

    troubler

    les

    communications

    habi-

    tuelles

    des

    chrtiens

    de

    Bretagne

    avec

    l Eglise

    ro-

    maine.

    De l

    ces

    diversits

    de

    rites

    et

    d usages, surtout

    en ce

    qui

    louchait

    la

    clbration

    de

    la

    Pque,

    dont

    il

    sera

    tant

    question

    dans

    la

    suite.

    Mais

    ds

    pr-

    sent

    il

    convient de

    constater

    que

    l tude

    la

    plus

    atten-

    tive

    des

    monuments

    authentiques

    ne

    rvle

    aucune

    lutte

    doctrinale,

    aucune

    diversit de

    croyance

    entre

    les

    vques

    bretons

    et

    l vque

    des vques

    Rome.

    D ailleurs,

    la

    Rome des

    papes

    prodiguait

    dj

    ses

    lumires

    et

    ses

    consolations

    sa

    fille

    d outre-mer,

    au

    moment

    mme

    o

    la

    Rome

    des

    Csars

    l aban-

    donnait

    d irrparables dsastres.

    Avant

    mme

    d tre condamne

    cette

    lutte

    mor-

    telle

    contre

    le

    paganisme

    germanique,

    l Eglise

    bre-

    bant

    sedificia

    publica, simul et

    privata;

    passim sacerdotes

    inter al-

    taria

    trucidabantur,

    praesules

    cum

    populis, sine

    ullo

    respectu

    ho-

    noris, ferro

    pariter

    et

    flammis absuinebantur.

    BEDA,

    Hist

    ecclesicstica

    gentis

    Anglorum,

    lib.

    I,

    c.

    15. Cf.

    GILDAS,

    de

    Excidio Britannae.

    Les

    opinions

    sont

    partages

    quant

    la destruction

    complte

    ou

    partielle

    des

    Bretons

    dans les

    pays

    conquis

    par

    les Saxons.

    Palgrave

    surtout

    a

    contest la tradition

    ordinaire

    sur ce

    fait.

    Cependant

    les historiens

    saxons

    eux-mmes

    ont

    constat plus d un

    exemple

    d extermination

    complte.

    Les

    premiers

    Saxons

    tablis

    par

    Cerdic,

    fondateur

    du

    royaume

    de

    Wessex,

    dans l le

    de

    Wight,

    y

    anantirent

    toute

    la

    popu-

    lation

    indigne.

    Paucos

    Britones.

    ejusdem

    insulae

    accolas,

    quos

    in

    ea

    invenire

    potuerunt... occiderunt

    :

    coeteri

    enim

    accola;

    ejusdem

    insulte

    ante

    aut

    occisi

    erant,

    aut

    exules

    aufugerant.

    ASSER,

    p.

    5,

    ap.

    Lingard,

    I,

    19. Hoc

    anno

    490)

    AElla

    et

    Cissa

    obsederunt

    Andredesces

    -

    ter

    dans

    le

    Sussex)

    et

    interfecerunt

    omnes

    qui

    id

    incolerent,

    adeo

    ut

    ne

    unus

    Brito

    ibi

    superstes

    fuerit.

    Chron.

    Anglo-Sax., ad ann.

    490,d.

    Gibson.

  • 7/26/2019 Les Moines d'Occident_Tome 3

    30/523

    DES

    ILES

    BRITANNIQUES.

    17

    tonne

    avait

    connu

    les

    prilleuses

    agitations

    de l h-

    rsie. Pelage,

    le

    grand

    hrsiarque

    du

    cinquime

    sicle, le

    grand ennemi

    de

    la

    grce,

    tait

    n dans

    son

    sein.

    Pour

    se

    dfendre

    de

    la

    contagion de

    ses

    doctrines,

    elle

    appela

    son secours

    les

    vques

    or-

    thodoxes des

    Gaules.

    Le

    pape

    Clestin,

    qui,

    vers

    la

    mme

    poque,

    envoyait le

    diacre

    romain

    Palladius

    comme

    premier

    vque des

    Scols

    d Irlande

    ou

    des

    Hbrides

    1,

    averti

    par

    ce

    mme

    Palladius

    du

    danger

    que

    courait

    la foi

    en

    Bretagne,

    chargea

    noire

    grand

    vque

    d Auxerre, saint

    Germain,

    d aller

    y com-

    battre

    l hrsie

    plagienne.

    Deux fois

    ce

    pontife

    va

    visiter

    la

    Bretagne et

    la

    fortifier dans

    la

    foi

    ortho-

    doxe

    et

    l amour

    de la

    grce

    cleste. Germain,

    accom-

    1.

    Palladius

    ad

    Scotos in

    Christum

    credentesordinatus

    a papa Celes-

    tino

    primustepiscopus

    mittitur.PROSPER,

    Chron.

    Consulare ad

    ann.

    429.

    Dans

    un

    autre

    ouvrage, ce

    contemporain ajoute

    :

    Et ordinato

    Scotis

    episcopo,dura

    Romanam

    insulam

    studet

    servare

    catholicam,

    fecit

    etiam

    Barbaram Christianam.

    Lib.

    contra Collat.,

    c.

    14.

    Mais

    le

    peu

    de

    succs de

    cette

    mission,

    dont

    il

    n est

    pas

    mme

    question dans les

    an-

    ciens

    monuments

    historiques

    de l Irlande, rend

    assez

    plausible

    la

    con-

    jecture de M.

    Varin,

    qui

    pense que

    Palladius

    fut

    seulement

    charg

    des

    Scots

    dj

    tablis

    dans

    les

    Hbrides

    et

    sur

    la

    cte

    occidentale

    de

    la

    Caldonie.

    C est

    ici

    le

    lieu

    de

    mentionner

    un

    saint

    que

    l on

    vnrait

    dans

    l glise

    d Ecosse

    comme

    disciple

    de

    Palladius,

    saintTernan,

    qua-

    lifi

    d archevque des

    Pictes

    dans

    les livres

    liturgiques

    d Aberdeen,

    lesquels

    font

    de

    saint

    Palladius

    (

    }-

    vers

    450)

    le

    contemporain de

    saint

    Grgoire

    le

    Grand

    ( i 604).

    La

    mmoire

    de

    ce

    saint

    vient d tre

    remise

    en

    lumire

    par

    la

    publication

    rcente

    d un fort

    curieux

    mo-

    nument

    liturgique

    :

    liber

    ecclesie

    Beali

    Terrenani

    de

    Arbuthnolt,

    seu

    Missale

    secundum

    usum

    Ecclesiae

    sancti

    Andreae

    in

    Scotia, due

    au

    docteur Forbes,

    vque

    anglican

    de

    Brechin.

    Mais

    l article

    consacr

    par

    les

    Bollandistes

    a

    ce

    saint (Act.

    SS.

    Junii,

    t.

    II,

    p.

    553-555)

    ne

    rsout

    aucune

    des

    incertitudes

    qui

    rgnent

    sur

    son

    existence.

    MOINES

    D OCC.

    III.

    2

    Mission

    du

    diacre

    Palladius

    chez

    les

    Scots,

    424

    ou

    451,

    et

    de l vque

    saint

    Germain

    d Auxerre,

    contre

    les

    Plagiens.

  • 7/26/2019 Les Moines d'Occident_Tome 3

    31/523

    118

    ORIGINES

    CHRTIENNES

    429-446.

    pagn

    la

    premire

    fois

    par

    l vque

    de

    Troyes

    1

    et

    la

    seconde

    par

    l vque

    de

    Trves

    ne

    veut

    d a-

    bord

    employer

    contre

    les

    hrtiques

    que

    les

    armes

    de

    la

    persuasion.

    Il

    prche

    aux

    fidles

    non-seule-

    ment

    dans les

    glises mais

    dans

    les

    carrefours

    et

    dans

    les

    champs.

    Il

    argumente

    publiquement

    con-

    tre

    les

    docteurs plagiens

    en

    prsence

    des

    peuples

    assembls

    et

    passionnment

    attentifs

    avec

    leurs

    fem-

    mes

    et

    leurs

    enfants

    2.

    Soldat

    dans

    sa

    jeunesse

    l illus-

    tre

    vque

    retrouve

    l ardeur

    intrpide

    de

    son

    premier

    mtier

    pour

    dfendre le peuple

    qu il venait

    vang-

    liser.

    A

    la

    tte de

    ses

    proslytes

    dsarms il

    marche

    contre

    une

    horde

    de Saxons

    et

    de

    Piets

    dj

    ligus

    contre

    les

    Bretons

    et

    les

    met

    en

    fuite

    en

    faisant

    r-

    pter trois

    fois

    par

    toute

    sa

    troupe

    le cri

    d allluia

    rpercut

    par

    les

    montagnes

    voisines. C est

    la

    jour-

    ne

    connue

    sous

    le

    nom

    de Victoire

    de

    l Allluia

    3.

    Heureux

    s il

    avait

    pu prserver

    jamais

    les vain-

    queurs

    du

    fer

    des

    barbares

    comme

    il russit

    les

    gurir du

    poison

    de

    l hrsie

    car

    aprs

    lui

    le pla-

    gianisme

    ne

    reparut

    en

    Bretagne

    que pour

    recevoir

    un

    dernier

    coup

    au

    synode

    de

    519.

    Grce

    aux

    dis-

    ciples

    qu il

    forma

    et

    qui

    devinrent

    les

    fondateurs

    1.

    Saint

    Loup

    form

    l cole

    monastique

    de

    Lrins

    et

    si

    connu par

    sa

    victoire

    morale

    sur

    Attila.

    Voir

    tome

    I

    page

    241.

    2

    Divinus

    per

    eos

    sermo

    ferme

    quotidie

    non

    solum in

    ecclesiis

    verum

    etiam

    per

    trivia

    per

    rura

    praedicabatur...

    Immensa

    multitudo etiam

    cum

    conjugibus et

    liberis

    excita

    convenerat et

    erat populus

    expectator

    et

    futurus

    judex...

    VIX

    manus

    continet

    judicium

    tamen

    clamore

    tes-

    tatur.

    BEDE

    I 18.

    3.

    Pugna

    alleluiatien.

  • 7/26/2019 Les Moines d'Occident_Tome 3

    32/523

    DES

    ILES

    BRITANNIQUES.

    10

    des principaux

    monastres de la Cambric

    c est

    notre

    grand

    saint

    gaulois

    que

    remontent

    les

    pre-

    mires

    splendeurs

    de la vie cnobitique

    en

    Bretagne.

    Le

    clbre

    vque

    d Auxerre

    et

    ses

    confrres

    ne

    furent

    pas

    les

    seuls

    pontifes

    que

    l glise

    romaine

    commit

    la

    garde

    et

    la

    propagation

    de la

    foi

    en

    Bretagne.

    Vers

    la

    fin

    du

    quatrime

    sicle au

    plus fort

    des

    invasions

    caldoniennes

    le

    fils d un

    chef

    breton

    Ninias

    ou

    Ninian

    avait

    t

    Rome

    se

    tremper

    dans les

    sources

    de l orthodoxie

    et

    de

    la disci-

    pline

    et

    aprs

    y

    avoir

    vcu

    pri

    et

    tudi

    pen-

    dant vingt-quatre

    annes

    l cole des

    Jrme

    et

    des

    Damase

    1

    il

    y

    avait

    reu

    du

    pape

    Siricius

    le

    caractre

    piscopal.

    Revenu

    en

    Bretagne il

    eut

    l audacieuse

    pense

    d opposer

    aux

    flots

    toujours

    plus rapprochs

    et

    toujours

    plus

    terribles

    des

    bar-

    bares du

    Nord

    la seule

    digue

    qui

    pt

    les

    arrter

    et

    la

    seule

    force

    qui

    pt

    les

    dompter

    en

    les

    trans-

    formant.

    Il

    entreprit

    de

    les

    convertir

    la foi

    chrtienne.

    Il avait

    d abord

    tabli le

    centre

    de

    son

    diocse dans

    un

    canton

    recul

    de

    cette

    rgion

    inter-

    mdiaire

    situe

    entre

    les

    deux isthmes qui

    coupent

    la Grande-Bretagne

    en

    trois portions ingales. Cette

    rgion

    sans cesse

    dispute

    par

    les

    Pictes aux

    Bre-

    tons et

    aux

    Romains

    n avait

    t

    rduite

    en

    province

    sous

    le

    nom

    de

    Valentia

    que

    du

    temps

    de

    l empe-

    1.

    Nynia episcopo

    reverentissimo

    et

    sanctissimo

    viro

    de

    natione Brit-

    tonum

    qui

    erat

    Romae

    regulariter fidem

    et

    mysteria veritatis edoctus;

    BEDE

    III

    4

    Le Breton

    Ninian

    entreprend

    de

    convertir

    les Piets.

    570-594.

  • 7/26/2019 Les Moines d'Occident_Tome 3

    33/523

    20

    ORIGINES

    CHRTIENNES

    reur

    Valentinien

    et comprenait

    tous les

    pays

    entre

    le

    mur

    d Antonin

    au

    nord

    et

    le

    mur

    de

    Svre

    au

    midi.

    L extrmit

    occidentale

    de

    cette

    province

    et

    la

    plus

    voisine

    de

    l Irlande

    portait

    ds

    lors

    le

    nom

    de

    Galwidia

    ou

    Galloway 1

    ;

    elle forme

    une

    sorte

    de

    pres-

    qu le

    dcoupe

    par

    la

    mer

    en

    plusieurs

    vastes

    et

    larges

    promontoires.

    Ce

    fut

    au bord

    d un

    de

    ces

    golfes

    sur

    un cap

    d o

    l on

    distingue

    les

    ctes

    lointaines

    du

    Cumberland

    ey

    de

    l le

    de

    Man

    que

    Ninian

    constitua

    un

    foyer

    ecclsiastique

    en

    levant

    une

    glise

    en

    pierre.

    Ce

    genre

    de

    construction in-

    connu

    jusqu alors

    en

    Bretagne

    valut

    la

    nouvelle

    cathdrale

    et

    au

    monastre

    qu il

    y

    adjoignit

    le

    nom

    de

    Candida

    casa ou

    White

    horn

    qui

    subsiste

    en-

    core 2.

    Il

    consacra

    cette

    glise

    saint

    Martin

    cet

    illustre

    aptre

    des Gaules

    auprs

    de

    qui

    il

    s tait

    arrt

    Tours

    en

    revenant

    de Rome

    et

    qui

    selon

    la

    tradition

    lui avait

    donn

    des

    maons

    capables

    de

    1.

    Cette province

    ainsi dnomme pendant

    tout

    le

    moyen

    ge

    est

    reprsente

    sur

    les

    cartes

    modernes

    par

    les

    comts de Wigton

    et

    de

    Kirkeudbright.

    2. White

    blanc;

    Horn

    hern

    du

    saxon

    AErn

    maison. On

    montre

    encore

    dans

    une

    le voisine de

    la

    cte

    une

    petite glise ruine qu on

    dit

    avoir

    t

    btie

    par

    saint

    Mnian.

    Le diocse fond

    par

    lui dis-

    parut aprs

    sa

    mort;

    mais les

    Anglo-Saxons

    le

    rtablirent

    ainsi que la

    communaut laquelle

    le

    clbre

    Alcuin

    adressa

    une

    pitre

    intitule

    :

    Ad fratres

    S.

    Niniani

    in

    Candida

    Casa.

    Une

    nouvelleinvasion

    desPictes

    venus

    cette

    fois

    d Irlande

    dtruisit

    une

    seconde fois

    le

    diocse

    de

    Gal-

    loway

    qui

    ne

    fut

    rtabli

    qu au

    douzime

    sicle

    sous

    le

    roi

    David

    I.

    Les

    belles

    ruines

    de

    cette

    cathdrale

    relativement

    moderne

    et

    dtruite

    par

    les

    presbytriens

    se

    voient

    dans

    la

    ville

    actuelle de

    Whitehorn.

    Le

    tombeau

    de

    saint

    Ninian

    fut

    toujours

    un

    lieu

    de

    plerinage

    trs-

    frquent

    jusqu

    la Rforme.

    Son

    tablissement

    White-Horn.

  • 7/26/2019 Les Moines d'Occident_Tome 3

    34/523

    DES ILES

    BRITANNIQUES.

    21

    construire

    une

    glise

    d aprs

    l usage de

    Rome.

    L image

    du

    saint

    pontife

    qui venait de mourir

    au

    moment

    o

    Ninian

    s tablit

    dans

    sa

    Maison

    blanche

    le

    souvenir de

    son

    courage

    de

    ses

    laborieux

    efforts

    contre

    l idoltrie

    et

    l hrsie

    de

    sa

    charit

    si

    g-

    nreusement

    indigne

    contre

    les

    perscuteurs

    1

    taient

    bien

    dignes

    de

    prsider

    la

    carrire

    apos-

    tolique du

    nouvel

    vque

    breton

    et

    de lui

    in-

    spirer

    le dvouement

    ncessaire

    pour

    entamer

    la

    con-

    version

    des

    Pictes.

    Qui

    donc

    en

    parcourant

    de

    nos

    jours

    l Ecosse

    mridionale

    des

    rives

    du

    Solway

    celles du Forth

    et de

    la

    Tay

    en

    passant

    des

    gigantesques mtro-

    poles de

    l industrie

    aux campagnes

    fcondes

    par

    tous

    les

    perfectionnements modernes de l agriculture

    en

    rencontrant

    partout

    les

    preuves

    et

    les

    produits

    de

    la civilisation

    la plus raffine

    qui donc

    songe en-

    core aux

    obstacles

    qu il

    a

    fallu

    surmonter

    pour

    arracher

    celte

    contre

    la

    barbarie?

    On

    n oublie

    que

    trop

    facilement

    ce

    que

    devait

    tre

    l tat du

    pays

    quand Ninian

    en

    devint

    le

    premier mission

    naire

    et

    le premier

    vque.

    Et

    cependant

    les

    ailleurs

    profanes

    et

    sacrs

    Dion

    et

    Strabon saint

    Jean

    Chry-

    sostome

    et

    saint

    Jrme

    ont

    dpeint

    l envi

    l horrible

    cruaut

    les

    moeurs

    sauvages

    et

    bru

    laies

    de

    ces

    habi-

    tants

    du nord de

    la

    Bretagne qui

    successivement

    connus

    sous

    le

    nom

    de

    Caldoniens

    de

    Meatae

    1.

    Voir

    tome

    I

    p.

    220-224.

    397.

    Frocit

    des

    peuples

    vangliss

    par

    Ninian

  • 7/26/2019 Les Moines d'Occident_Tome 3

    35/523

    22

    ORIGINES

    CHRTIENNES

    d Attacoyi

    1

    de

    Scots

    et de

    Picyes

    n taient

    trs-

    probablement

    que

    les

    descendants

    des

    tribus

    bre-

    tonnes

    que

    Rome

    n avait

    pas

    pu

    dompter2.

    Tous

    sont

    d accord

    pour

    leur

    reprocher

    la

    promiscuit

    incestueuse

    de

    leurs mnages

    et

    jusqu

    l anthro-

    pophagie

    3;

    tous

    expriment

    l horreur

    qu inspiraient

    aux

    sujets

    de

    l Empire

    ces

    monstres

    humains

    qui

    devaient

    leur

    dernier

    nom

    de

    Pictes

    l usage

    de

    marcher

    au

    combat

    tout

    nus

    en

    dcouvrant ainsi

    leurs

    corps

    tatous

    comme ceux

    des

    sauvages

    de

    l ocan

    Pacifique

    de

    dessins

    bizarres

    et

    de

    cou-

    leurs

    diverses.

    Ce

    fut

    nanmoins

    au sein

    de

    ces

    for-

    midables

    adversaires

    de

    la foi

    et

    de la

    civilisation

    que

    Ninian

    ne

    craignit

    pas

    de

    s aventurer.

    Il d-

    pensa

    les

    vingt

    annes

    qu il lui

    restait

    vivre

    en

    efforts

    infatigables

    pour

    les

    initier

    la

    lumire d en

    haut

    pour

    les

    ramener

    du

    cannibalisme

    au

    chris-

    tianisme

    lui

    le

    fils

    et

    le

    reprsentant

    de

    cette

    race

    bretonne

    qu ils

    taient

    accoutums

    depuis plus

    d un

    sicle

    massacrer

    dpouiller

    et

    mpriser

    et

    cela

    au

    moment

    mme

    o

    l empire

    romain

    re-

    prsent

    par

    Honorius

    abandonnait

    la

    Bretagne

    ces

    implacables

    dvastateurs.

    1. Ces

    Attacoti

    auxquels

    saint Jrme

    attribue

    des

    moeurs

    et

    des

    cruauts

    impossibles

    raconter

    habitaient

    selon

    l opinion

    commune

    la

    contre

    pittoresque

    au

    nord de

    la Clyde

    aujourd hui

    parcourue

    par

    tant

    de

    voyageurs

    entre

    le

    Loch-Lomond

    et

    le

    golfe

    appel Loch-Fin.

    2.

    PALCRAVE

    Rise

    and

    progress of

    the English

    comnonwealth.

    Tome

    I

    p.

    419.

    Ceci

    n est

    vrai du

    reste

    que

    des

    Pictes

    car

    les

    Scots

    ve-

    naient

    incontestablement

    d Irlande

    la Scolia

    du

    moyen

    ge.

    3. Voir

    surtout saint Jrme

    in

    Jovinianum.

    lib.

    II.

    4

  • 7/26/2019 Les Moines d'Occident_Tome 3

    36/523

    DES ILES

    BRITANNIQUES.

    25

    Il

    ne reste malheureusement

    aucun

    dtail au-

    thentique

    sur

    sa

    mission

    1,

    aucun

    trait qui

    rappelle,

    mme

    de

    trs-loin,

    la

    mission si

    nettement

    carac-

    trise de

    son

    successeur,

    saint

    Columba, l aptre

    des

    Pictes

    du Nord,

    un

    sicle

    et

    demi plus tard.

    Nous

    savons

    seulement qu il russit

    fonder,

    au

    sein des

    races

    piets,

    une chrtient

    qui ne

    fut

    plus extirpe

    ;

    puis

    que,

    franchissant les limites

    as-

    signes

    par

    gricola

    et

    Antonin

    la domination

    romaine

    au

    temps

    de

    sa

    plus

    grande splendeur,

    il alla prcher la foi jusqu au pied de

    ces

    monts

    Grampians,

    o

    le beau-pre de Tacite

    avait

    ga-

    gn

    sa

    dernire

    et

    infructueuse

    victoire

    2.

    Nous

    savons

    que sa

    mmoire

    est

    reste

    en

    bndiction

    chez

    les

    descendants des

    Piets

    et

    des

    Scots

    et

    que

    de

    nombreuses glises

    consacres

    sous son vo-

    cable

    conservent

    aujourd hui

    mme

    le souvenir du

    culte

    que

    lui

    voua la

    reconnaissance

    de la

    postrit

    5 ;

    nous savons

    enfin

    que,

    dj septuagnaire, il revint

    1. Les

    Bollandistes

    die

    16 Septembr.) n admettent

    pas

    l authenticit

    de la

    vie de

    Ninian,

    crite

    au

    douzime

    sicle

    par

    le

    saint abb AElred,

    laquelle

    ne

    contient

    que

    des

    miracles

    comme

    il s en

    trouve

    partout,

    sans

    aucun

    trait

    spcialement

    caractristique.

    2.

    Ipsi

    australes

    Picti,

    quiinfra

    eosdem

    montes

    habent

    sodes...relicto

    errore

    idololatriae,

    fidem

    veritatis

    acceperant,

    proedicante eis

    verbum

    Ninia episcopo.

    BEDE,

    III,

    4.

    5.

    Mme

    au

    del

    des

    monts

    Grampians

    :

    l endroit

    o le

    Glen-Ur-

    quhart

    dbouche

    sur

    le

    Loch-Ness,

    et

    o saint

    Columba voir

    plus loin,

    liv.

    XI, chap.

    IV)

    alla

    visiter

    un

    vieux

    Picte

    mourant,

    on

    voit

    une

    cha-

    pelle

    ruine

    qui

    porte

    le

    nom

    de

    Saint-Ninian,

    d o l on

    peut

    supposer

    que sa

    mission avait dpass

    la

    frontire

    qui lui

    est

    ordinairement

    assigne.

  • 7/26/2019 Les Moines d'Occident_Tome 3

    37/523

    24

    ORIGINES

    CHRTIENNES

    mourir

    dans

    son

    monastre

    de

    la

    Maison-Blanche

    aprs

    avoir

    pass

    les

    derniers

    temps

    de

    sa

    vie

    a

    se

    prparer

    au

    jugement

    de Dieu

    dans

    une

    caverne

    laquelle

    se

    voit

    encore

    mi-cte

    d une

    haute

    et

    blanche

    falaise

    de

    celte

    plage du

    Galloway

    que

    bal-

    lent

    sans

    cesse

    les

    flots

    imptueux

    de

    la

    mer

    d Ir-

    lande

    1.

    Dans

    celte

    glise

    primitive

    de

    Bretagne

    si

    cruel-

    lement

    prouve

    par

    les

    paens

    du

    Nord

    et

    de

    l Est

    par

    les Pictes

    et

    les

    Saxons

    il

    y

    avait

    bien d autres

    monastres

    que

    celui de Ninian

    White-Horn.

    Toutes

    les glises

    chrtiennes

    de

    ce

    temps taient

    pourvues

    d institutions cnobitiques

    et

    Gildas

    le moins

    sus-

    pect

    des

    annalistes

    bretons

    ne

    laisse

    aucun

    doute

    cet

    gard

    pour

    la Bretagne

    2.

    Mais

    l histoire

    n en

    a

    gard

    aucun

    souvenir dtaille.

    En

    dehors

    de

    la Cam-

    brie dont il

    va

    tre

    parl

    un peu

    plus loin

    la

    seule

    grande institution

    monastique dont

    le

    nom

    ail

    triomph

    de

    l oubli

    se

    rattache

    la

    lgende

    plutt

    qu

    l histoire

    mais elle

    a

    occup

    une

    trop

    grande

    place

    dans

    les

    traditions

    religieuses

    du

    peuple

    an-

    glais

    pour

    qu il

    soit

    permis

    d en

    omettre

    une

    men-

    tion

    rapide.

    Il

    fut un

    temps

    o

    les

    nations

    catholi-

    ques

    aimaient

    se

    disputer

    la

    prsance

    et

    l an-

    ciennet

    dans

    la

    profession

    de la

    foi

    chrtienne

    et

    allaient

    se

    chercher

    des

    anctres

    directs

    parmi

    les

    tres

    privilgis

    qui

    avaient

    connu

    chri

    servi

    le

    1. Lives of

    the English

    saints.

    1845 n

    XIII p.

    151.

    2.

    De

    Excidio

    Britanniae

    p.

    43-55.

    Mort

    de

    Ninian.

    452.

    Abbave

    de

    Glastonbury.

    Lgende

    de

    Joseph

    d Arimathie.

  • 7/26/2019 Les Moines d'Occident_Tome 3

    38/523

    DES

    ILES

    BRITANNIQUES.

    25

    Fils de

    Dieu

    pendant

    son passage

    sur

    la

    terre.

    Elles

    croyaient

    par

    ces

    gnalogies

    lgendaires

    se

    rappro-

    cher

    en

    quelque

    sorte

    du Calvaire

    et

    assister

    aux

    mystres

    de

    la Passion.

    C est

    ainsi

    que

    l Espagne

    a

    victorieusement

    revendiqu

    pour

    aptre

    le

    fils

    de

    Zbde le

    frre

    de

    saint

    Jean

    ce

    Jacques

    que

    Jsus

    avait

    associ

    aux

    splendeurs

    du

    Thabor

    et

    aux

    an-

    goisses

    du

    Jardin

    des Oliviers.

    C est

    ainsi

    que

    le

    midi

    de la

    France

    se

    glorifiait

    de faire

    remonter

    ses

    origines

    chrtiennes

    cette

    famille

    dont les douleurs

    et

    l amour

    sont

    enchsss dans

    l vangile

    Marthe

    qui fut

    l htesse de Jsus

    ;

    Lazare

    que

    Jsus

    res-

    suscita

    ;

    Madeleine

    qui fut

    le

    premier

    tmoin

    de

    la

    rsurrection

    de Jsus

    ;

    leur

    voyage

    miraculeux

    de

    la Jude

    en

    Provence

    au

    martyre de l un

    la

    retraite

    de

    l autre

    dans la

    grotte

    de la

    Sainte-Baume

    toutes

    ces

    admirables

    traditions

    que

    l rudition

    la

    plus

    so-

    lide est venue

    de

    nos

    jours

    encore

    justifier

    et

    con-

    sacrer 1.

    L Angleterre

    d autrefois

    avec

    beaucoup

    moins de fondement aimait

    se

    dire qu elle

    devait

    les

    premires

    semences

    de la foi

    Joseph

    d Arima-

    thie

    ce

    disciple

    riche

    et

    noble

    2

    qui avait dpos

    le

    corps

    du Seigneur dans le

    spulcre

    o

    Madeleine

    venait

    pour l embaumer.

    Les

    Bretons et

    aprs

    eux

    1.

    Voir

    le

    grand

    et

    savant

    ouvrage

    publi

    par

    M.

    Paillon

    directeur

    Saint-Sulpice

    sous

    le titre

    de

    :

    Monuments

    in

    dits

    sur

    l apostolat

    de

    sainte

    Marie

    Madeleine

    en

    Provence

    etc

    Paris

    1848. Cf.

    BOUCHE

    D-

    fense

    de

    la

    foi

    de

    Provence

    pour

    ses

    saints

    Lazare

    Maximin

    Marthe

    et

    Madeleine.

    2.

    Nobilis

    decurio.

    S. MARC.

  • 7/26/2019 Les Moines d'Occident_Tome 3

    39/523

    20

    ORIGINES

    CHRTIENNES

    lesAnglo-Saxons

    et lesAnglo-Normandsse

    racontaient

    de

    pre

    en

    fils

    que

    Joseph,

    fuyant

    les

    perscutions

    des Juifs

    et

    n emportant

    avec

    lui

    pour

    tout

    trsor

    que

    quelques

    gouttes

    du

    sang

    de

    Jsus-Christ,

    avait

    d-

    barqu

    l ouest

    de

    l Angleterre,

    avec

    douze

    compa-

    gnons

    ;

    qu il

    y

    avait

    trouv

    un

    asile

    dans

    un

    site

    d-

    sert,

    entour

    d eau

    1,

    et

    qu il

    y

    avait

    construit

    et

    con-

    sacr

    la

    bienheureuse

    Vierge Marie

    une

    chapelle

    dont

    les

    murs

    taient forms

    de

    branches

    de

    saule

    entrelaces

    et

    dont

    Jsus-Christ lui-mme n avait

    pas

    ddaign

    de

    clbrer

    la

    ddicace.

    C est

    ce

    qu on

    a

    racont depuis et ailleurs

    de

    deux

    grandes

    et

    c-

    lbres

    glises

    monastiques,

    celles

    de

    Saint-Denis

    en

    France

    et

    de Notre-Dame des

    Ermites

    en

    Suisse

    3.

    1.

    GUILLELMUS

    MALMESBUIUESSIS,Antiq. Glastonb.,

    ap.

    GALE,

    Script,

    rer.

    Britann.,

    t.

    III,

    p.

    295.

    Cf.

    BARONIUS,

    Ann.,

    ad

    ann.

    48.

    DUGDALE,

    MO-

    nasticon,

    t.

    I,

    p.

    2.

    Les

    Bollandistes

    et

    divers

    autres

    historiens

    mo-

    dernes

    se

    sont

    donn beaucoup

    de peine

    pour

    rfuter

    cette

    tradition.

    Elle

    est

    encore

    rapporte

    dans

    la lettre

    que

    quelquesmoines adress-

    rent

    la

    reine

    Marie,

    en

    1555,

    pour

    demander le rtablissement

    de

    leur

    abbaye

    (ap.

    DUGDALE,

    t.

    I,

    p.

    9

    de la nouvelle dition).

    A

    cause

    de

    cette

    tradition

    de Joseph

    d Arimathie,

    les

    ambassadeurs d Angleterre

    rcla-

    mrent

    la

    prsance

    sur

    ceux

    de

    France,

    d Espagne

    et

    d Ecosse,

    aux

    conciles

    de

    Pise

    en

    1409,

    de

    Constance

    en

    1414,

    et

    surtout

    de

    Ble

    en

    1454,

    parce que, selon eux, la

    foi

    n avait

    t

    prche

    en

    France que

    par

    saint

    Denis,

    et

    postrieurement

    la mission

    de Joseph

    d Ari-

    mathie.

    USSHER,

    de

    Prim. Eccl.

    Brit.,

    p.

    22.

    2.

    Le

    trait

    suivant,

    rapport

    par

    Guillaume

    de

    Malmesbury,

    montre

    quel point

    cette

    tradition

    tait

    accepte

    en

    France jusque

    dans

    le

    douzime

    sicle

    :

    Monachus

    quidam

    Glastoniae,

    Godefridus

    nomine

    (de

    cujus

    epis-

    tola

    hoc

    eapitulum

    assumpsimus),

    tempore

    Henrici

    Blesensis

    abbatis

    Glastoniensis, cum in pago

    Parisiacensi

    apad

    Sanctum

    Dionysium

    moraretur

    ;

    senior

    quidam

    ex

    monachis

    interrogavit

    eum

    :

    Quo

    ge-

  • 7/26/2019 Les Moines d'Occident_Tome 3

    40/523

    DES

    ILES

    BRITANNIQUES.

    27

    Ce

    lieu,

    prdestin devenir

    le premier sanctuaire

    chrtien

    des les

    Britanniques,

    tait

    situ

    sur

    un

    af-

    fluent du

    golfe

    o

    se

    jette la

    Saveme;

    il

    prit

    plus

    tard

    le

    nom

    de Glastonbury,

    et

    telle avait

    t,

    selon

    l'opinion

    populaire

    et

    invtre,

    l'origine

    de

    la grande

    abbaye

    de

    ce

    nom, que

    vinrent

    peupler plus tard

    des

    moines

    originaires

    d'Irlande

    1.

    Ce

    sanctuaire

    des

    lgendes primitives

    et

    des traditions nationales

    de la

    race

    celtique passait

    en

    outre

    pour

    renfermer

    la tombe du roi Arthur,

    qui

    fut,

    comme

    l'on sait,

    la

    personnification de

    la

    longue

    et

    sanglante rsistance

    des

    Bretons

    l'invasion

    saxonne,

    le champion h-

    roque

    de

    leur libert,

    de leur langue,

    de

    leur

    foi,

    et

    le

    premier

    type

    de

    cet

    idal chevaleresque du

    moyen

    ge, o

    les

    vertus

    militaires

    se

    confondaient

    avec

    le

    service de

    Dieu

    et

    de Notre-Dame

    2.

    nus

    ?

    Unde domo

    ?

    Respondit

    :

    Normannum,

    e

    Britanniae

    monasterio,

    quodGlastingeia

    dicitur, monachum.

    Papae

    inquit,

    an adhuc

    stat

    illa

    perpetuae

    Virginis

    et

    misericordiaeMatris

    vetusta

    ecclesia?

    Stat,

    in-

    quit.

    Tum ille lepido

    attactu caput

    G.

    Glastoniensis demulcens, diu si-

    lentio

    suspensum

    tenuit,

    ac

    sic demum

    ora

    resolvit

    :

    Hoec gloriosis-

    simi

    martyris Dionysii ecclesia

    et

    illa,

    de

    qua

    te

    asseris,

    eamdem

    privilegii

    dignitatem babent; ista in Gallia,

    illa in Britannia,

    uno

    eodem

    tempore

    exortae,

    a

    summo

    et

    magno

    pontifice

    consecratae.

    Uno

    tamen

    gradu illa supereminet

    :

    Roma etenim

    secunda

    vocatur.

    1.

    Il

    faut

    consulter

    sur

    cette

    clbre

    abbaye,

    comme sur

    toutes

    celles

    que nous nommerons

    par

    la suite,

    le

    recueil si curieux intitul

    :

    Mo-

    nasticon

    Anglicanwn,

    par

    Dugdale,

    avec

    les admirables

    planches de

    W. Hollar,

    qui

    se

    trouvent

    dans les

    ditions du dix-septime

    sicle.On

    crut

    avoir dcouvert

    les

    ossements

    du

    roi

    Arthur

    Glastonbury,

    sous

    le

    rgne de Henri

    II, la

    fin du douzime sicle.

    2.

    Voir

    tout

    le

    cycle

    des

    pomes

    de la

    Table-Ronde

    en

    Angleterre,

    en

    France

    et

    en

    Allemagne,

    et

    surtout

    les

    trois grands

    pomes

    intituls

    :

    Spulture

    du

    roi

    Arthur.

  • 7/26/2019 Les Moines d'Occident_Tome 3

    41/523

    28

    ORIGINES

    CHRTIENNES

    Bless

    mort

    dans

    un

    de

    ces

    combats

    contre

    les

    Saxons

    qui

    duraient

    trois jours

    et

    trois

    nuits

    de

    suite

    il

    fut

    transport

    Glastonbury

    y

    mourut cl

    y

    fut

    enseveli

    en

    secret

    en

    laissant

    sa

    nation

    la vaine

    esprance

    de

    le

    voir

    reparatre

    un

    jour

    1

    et

    toute

    l Europe

    chrtienne

    une

    gloire

    lgendaire

    un

    sou-

    venir destin

    rivaliser

    avec

    celui

    de

    Charlemagne.

    Ainsi la posie

    l histoire

    et

    la

    foi

    trouvaient

    un

    .

    foyer

    commun

    dans

    ce

    vieux

    monastre

    qui

    fut

    pen-

    dant

    plus de

    mille

    ans

    une

    des

    merveilles de l An-

    gleterre

    et

    qui

    resta

    debout florissant

    et

    grand

    comme

    une

    ville

    entire

    jusqu aujour

    o

    Henri

    VIII

    fil

    pendre

    et

    carteler

    le

    dernier

    abb devant

    le

    grand portail du sanctuaire

    confisqu

    et

    profan

    5.

    Mais

    il

    nous

    faut

    rentrer

    dans

    la

    ralit

    de

    l his-

    toire

    et

    dans

    l poque qui doit

    nous occuper

    celle

    qui

    s tend

    de

    la

    moiti du

    cinquime

    sicle

    au

    mi-

    Parceval Tituret

    et

    Lohengrin qui roulent

    sur

    le culte du Saint

    Graal

    ou

    Sang

    Ral

    c est--dire du

    sang

    de Notre-Seigneur

    recueilli

    par

    Jo-

    seph d Arimathie

    et

    conserv

    dans

    le

    vase

    qui avait

    servi

    Jsus-Christ

    pour

    l institution

    de

    l Eucharistie.

    1.

    Cf.

    THIERRY

    Hist.

    de

    la conqute d Angleterre

    liv.

    I

    p.

    59.

    LAPPENBEBG

    t.

    I

    p.

    104-107.

    M.

    de

    la Borderie dans

    son

    beau rcit

    de la

    lutte

    des

    Bretons insulaires

    contre

    les

    Anglo-Saxons

    a

    fort

    bien

    distingu

    le

    personnage

    hyperbolique

    des traditions lgendaires

    du

    vritable

    Arthur

    chef de la ligue

    des

    Bretons du Sud

    et

    de

    l Ouest

    et

    vainqueur

    des

    Saxons

    ou

    plutt

    des Angles

    dans douze batailles.

    2.

    Le 14

    mai

    1558.

    Ce

    martyr

    fut

    accus

    d avoir

    drob

    la

    main

    du

    spoliateur

    quelques

    portions du

    trsor de l abbaye

    ;

    il

    fut

    pour-

    suivi

    et

    mis

    mort

    par

    les

    soins

    de John

    Russell

    fondateur

    de la mai-

    son

    des

    ducs

    de

    Bedford

    et l un

    des

    principaux

    instruments

    de

    la

    tyrannie

    de

    Henri

    VIII.

    542

    547.

    Situation

    de

    la

    Bretagne

    de

    450

    550.

  • 7/26/2019 Les Moines d'Occident_Tome 3

    42/523

    DES ILES BRITANNIQUES.

    29

    lieu

    du

    sixime, pendant

    cette

    priode

    qui vil

    les

    Mrovingiens fonder

    en

    Gaule

    la

    royaut

    franque

    si

    aime

    des moines,

    et

    saint

    Benot

    planter

    sur

    le

    mont

    Cassin le berceau du plus

    grand

    des

    ordres

    monastiques.La

    Grande-Bretagne,

    destine

    devenir

    la plus prcieuse

    conqute

    des

    Bndictins,

    offrait

    alors le spectacle

    de quatre

    races diverses

    luttant

    avec

    acharnement

    les

    unes

    contre

    les

    autres.

    Au

    nord, les Pictes

    et

    les

    Scots,

    encore

    trangers

    et

    hostiles

    la

    foi

    du

    Christ,

    retranchs derrire

    les

    monts

    et

    les

    golfes

    qui

    les

    faisaient r