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25/11/2019 1 Les éco-villages en Italie Hind DAOUI Lola GAUTREAU Rémi VASSILEFF Source : Eco-village de Torri Superiore, Trip Advisor Cours Ville Durable et Ecologie. Géraldine Molina Option Phycite 2019-2020 Ecole Centrale de Nantes

Les éco-villages en Italieplus un ³contrat social´. Cependant, il ne faut pas verser dans l¶utopie : tout le monde ne simplique pas de la même façon, certaines personnes peuvent

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25/11/2019

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Les éco-villages en Italie

Hind DAOUI

Lola GAUTREAU

Rémi VASSILEFF

Source : Eco-village de Torri Superiore, Trip Advisor

Cours Ville Durable et Ecologie. Géraldine Molina

Option Phycite 2019-2020

Ecole Centrale de Nantes

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Index

Les éco-villages en Italie 1

Introduction 3

Concept d’un écovillage 3

Mise en place d’un écovillage 4

Pourquoi créer un écovillage ? 4

Mettre en place une charte 5

Les méthodes de prise de décisions 5

Les démarches administratives 7

L’installation 8

Résumé des difficultés 8

Panorama des éco-villages existants en Italie 11

Basilico, dans les collines toscanes 12

Le Peuple Elfi 13

La Communauté de Bagnaia 13

Damanhur 15

Impact environnemental des éco-villages 16

Impact social des éco-villages 21

Conclusion 22

Bibliographie

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I. Introduction

Neuf projets d’éco-villages sur dix ne voient jamais le jour. Même si le mode de vie

dans les éco-villages présente de nombreux avantage, il demande aussi beaucoup de travail.

Beaucoup de gens ont une vision utopiste de ces lieux.

Nous allons donc nous intéresser aux raisons qui font qu’une si grande proportion des

projets échouent, et les enseignements que nous pouvons en tirer, en tant que futurs

ingénieurs.

Nous allons dans un premier temps traiter l’aspect social des éco-villages. Quelles

sont les difficultés, et comment les surmonter ? Nous ferons ensuite une revue de quelques

éco-villages en Italie, avant de nous intéresser à l’impact environnemental des éco-villages,

grâce à une étude de cas. En effet, au-delà de la question sociale, la question

environnementale est importante, puisqu’elle reste un des argument majeur en la faveur des

éco-villages.

II. Concept d’un écovillage

1. Définition

Un écovillage est une organisation de quelques personnes, qui décident de se réunir

et de vivre en communauté autours de certaines valeurs, comme l’écologie, la solidarité et

l’autonomie. Il existe de nombreux éco-villages, avec des organisations, des tailles et des

valeurs différentes. La plupart des éco-villages se forment en milieux rural, mais il y a des

exemples d’éco-villages en zones périurbaines ou urbaines. Ces éco-villages sont souvent

construits autour de certaines activités comme la permaculture, l’art, l’artisanat, les pratiques

de bien être (méditation, ...).

2. Valeurs

Loin d’être exhaustif, nous avons listé les principales valeurs récurrentes dans les

écovillages. Pour la majorité, on retrouve des valeurs centrées sur le respect de

l’environnement, de l’être humain (plus largement du vivant), la solidarité, la pratique

d’échanges, de partages, une économie à échelle locale et l’emploi de techniques les moins

polluantes possibles. Ces valeurs semblent être en rupture avec le système social et

économique actuel ; la plupart des éco-villages adoptent en effet une posture de

décroissance, de sobriété.

III. Histoire des écovillage Italiens

En 2000, le processus d'élaboration de la Stratégie Nationale de développement

durable fut lancé suite à un accord entre le Ministère de l'environnement et de la protection

de la terre et l'ENEA (Organisme pour les nouvelles technologies, l'énergie et

l'environnement).

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L'objectif était de faire revenir l'Italie dans la croissance en suivant les grandes lignes

du développement durable ciblant cinq domaines qui sont : compétitivité, nature, gouvernance

publique, capital humain et culture.

Il convient de noter qu'un élément central de développement de l'Italie est son héritage

naturel, raison pour laquelle elle le place au cœur de la stratégie pour le développement

durable.

IV. Mise en place d’un écovillage

Dans cette partie nous allons développer les différentes phases qui mènent à la

création d’un éco-village, les difficultés rencontrées et les pièges à éviter.

1. Pourquoi créer un écovillage ?

Les projets d’éco-villages partent d’un constat de la situation actuelle. Nos sociétés

contemporaines occidentales sont déconnectées du vivant et détruisent l’environnement.

Nous courrons à notre propre perte, et un système qui se base sur la croissance et la

production infinie de richesses ne peut que s’écrouler. Partant de ces constats alarmistes, de

nombreuses personnes s’engagent pour l’écologie, dans leur travail, dans le milieu associatif,

ou par l’adoption de d’écogestes quotidiens. Cependant, de plus en plus de personnes ne

trouvent pas leur place dans la société et se rendent compte de ses dysfonctionnements.

Beaucoup se sentent prisonniers d’un système qui ne leur permet pas d’être heureux et en

correspondance avec leurs valeurs. Le fameux “métro, boulot, dodo” ne donne pas la chance

de s’épanouir, ni de nouer des liens sociaux. Ainsi, l’Italie est un des pays d’Europe où les

gens souffrent le plus de solitude : 13,2% des Italiens n’ont personne vers qui se tourner pour

demander de l’aide1 (moyenne européenne : 5,9%). Cet aspect semble très important. Lors

d’une étude dans un éco-village aux États-Unis, la majorité des habitants répondaient s’être

installés tout d’abord pour des raisons sociales². Selon cette même étude, les habitants de

cet éco-village ont décidés de s’y installer à la suite d’un changement dans leur vie, qui les a

menés à se questionner sur leur existence : l’arrivé d’un enfant, un divorce.

Devant ces considérations environnementales et sociétales, certaines personnes

n’hésitent pas à sortir de leur zone de confort pour former ou rejoindre des éco-villages. Ils

peuvent ainsi redonner du sens à leur travail, nouer des liens sociaux et s’épanouir, tout cela

dans le respect de l’environnement.

Cependant, de nombreux projets d’écovillages ne voient jamais le jour. Les raisons

d’échec sont nombreuses, mais la plupart sont dues à un manque d’information, de

communication interne, ou bien à des manques de moyens. Nous allons donc nous intéresser

à ce qui fait le succès d’un écovillage.

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2. Mettre en place une charte

Une des principales raisons d’échec de projet d’écovillage est le manque de

communication et de compréhension. La vie en communauté, même si elle apporte de

nombreux avantages, n’est pas facile, et demande beaucoup de dialogue. Il faut savoir faire

des compromis, et faire passer l’intérêt du groupe avant le sien quand c’est nécessaire.

Beaucoup de gens se sont lancés dans des projets d’éco-villages sans avoir fait l'expérience

de la vie en communauté, et sans même vraiment connaître les gens avec qui ils voulaient

s’installer. Ajoutez à cela les difficultés extérieures (difficultés administratives, conditions de

vie difficiles, fatigue), cela peut vite donner un cocktail explosif.

Le plus important, avant même de se lancer dans des recherches de terrains, est de

trouver les gens avec qui fonder la communauté, et se mettre d’accord sur le fonctionnement

de celle-ci. Dans son livre, Creating a life together, Diana Leaf Christian conseille de faire des

réunions de groupe régulières pendant au moins un an avant de commencer les recherches.

Ces réunions ont plusieurs buts. Premièrement, apprendre à se connaître. Deuxièmement, se

mettre d’accord sur les objectifs de l’écovillage. Cherchons-nous l’autonomie alimentaire,

énergétique, les deux ? Voulons-nous bannir la technologie ? Cherchons-nous à avoir une

dimension pédagogique ? Quelle taille voulons-nous atteindre à terme ?

Le manque de structuration réaliste de l'organisation sociale peut aussi mettre en

péril un éco-village. Certains éco-villages sont mis en place sans vraiment de contrat, tout au

plus un “contrat social”. Cependant, il ne faut pas verser dans l’utopie : tout le monde ne

s’implique pas de la même façon, certaines personnes peuvent même faire preuve d’un

certain égoïsme. C’est ce qui s’est passé à la “ferme des enfants”, école alternative rattachée

à l’éco-village “le hameau des buis”. De gros problèmes ont éclatés, et la fondatrice a même

dû démissionner en 2018. D’anciens bénévoles ont décidé de porter plainte, car ils estiment

que leur situation aurait mérité un contrat de travail, au vu de la quantité de travail qu’ils ont

effectué3. Une meilleure communication et une organisation sociale plus structurée auraient

permis d’éviter ce genre de problème.

Cette phase est cruciale pour le développement de l’éco-village. Dans son étude, Andy

Kirby rapporte des témoignages des personnes présentes lors de l'établissement de la charte.

Pour certaines raisons, ils n’avaient pas beaucoup de temps, et devaient prendre des

décisions rapidement. Une personne témoigne que le fait de ne pas avoir pris le temps de

bien dialoguer et débattre a développé une certaine animosité entre les membres du village,

et qu’il a fallu beaucoup de temps, de travail et d’énergie par la suite pour apaiser ces tensions.

3. Les méthodes de prise de décisions

Une fois les objectifs fixés, il faut poser un mode de fonctionnement. Il existe de

nombreuses méthodes de prise de décisions. Nous allons nous intéresser à la méthode de

décision au consensus, les autres méthodes se basant en grande partie dessus, puis la

comparer à la méthode de prise de décision à la majorité. (Notons que l’étape du choix de la

méthode de prise de décision peut être fait en amont, pour décider de la charte).

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Méthode de décision au consensus :

Il n’y a pas de vote : la prise de décision se fait en groupe ; tout le monde peut (ou

doit, cela dépend des villages) exprimer son opinion. Au fur et à mesure de la discussion,

des solutions/engagements concrèt(e)s apparaissent. L’unanimité ne doit pas être forcément

atteinte ; il s’agit de faire cohabiter les différences, et de trouver un compromis. Ainsi,

contrairement au vote à la majorité, il ne s’agit pas d’une partie de la population qui “impose”

son choix.

Cette méthode n’est pas facile à mettre en œuvre et demande un cadre précis. Il faut

évidemment des objectifs en commun (ce qui est normalement le cas à l’échelle d’un éco-

village). Chaque personne doit être engagée dans le processus avec une volonté de partager

le pouvoir et ne doit pas faire passer ses intérêts privés devant ceux de la communauté. Cela

demande donc la bonne-foi de tous les participants. Un ordre du jour clair est nécessaire.

Cette méthode requiert beaucoup de temps et d’énergie, et peut faire ressortir certaines

tensions. C’est pour ça que la présence d’un facilitateur, si possible externe au village, peut

être utile.

Une personne ou une petite minorité ne peut pas bloquer le processus ; il n’y a pas de

droit de veto dans le sens strict du terme. Si une personne est en désaccord, et que le reste

de la communauté reconnaît le bien fondé des arguments de l’opposition, alors la décision

peut être bloquée. En revanche, si la communauté ne reconnaît pas ses arguments,

l’opposition peut alors se retirer du projet (ne pas s’impliquer mais ne pas empêcher les autres

de faire), ou bien peut se trouver chargé de la résolution du conflit.

Cette méthode permet donc une bonne communication interne, et peut permettre de

régler des conflits avant qu’ils ne s’enveniment et mettent à mal la pérennité du village.

Voici un tableau récapitulatif des avantages et inconvénients de cette méthode :

Avantages attendus Inconvénients potentiels

Méthode de décision au consensus

- Permet des prises de décision démocratiques

- Tout le monde doit s’exprimer, donc

on attend des participants qu’ils aient une bonne compréhension de la situation et des conséquences des décisions

- Personne n’est en désaccord avec

les décisions, ce qui permet de faire avancer le groupe de façon unie

- Évite les frustrations, qui peuvent

entraîner des scissions

- Les tensions qui en ressortent

- Requiert beaucoup de temps et d’énergie

- Peut faire ressortir des tensions lors

des phases de discussions et prises de décisions (mais permet d’éviter qu’elles ne s’enveniment, et donc apaise les relations)

- Risque de blocage d’une minorité

- Ne peut être mis en place pour des

grands groupes

- N’évacue pas complètement les effets de pouvoir : de bons orateurs peuvent réussir à imposer leur point

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auraient de toute façon finit par éclater : permet d’avoir des relations plus honnêtes

- Pas de conflit d’intérêt ou de

corruption

de vue

Méthode de décision à la majorité

- Facile à mettre en place

- Rapide

- Permet de prendre des décisions pour de très grands groupes (ville, pays…)

- Les participants ne sont pas impliqués dans le processus de discussion, donc peuvent facilement être “manipulés”

- Les habitants ne sont pas toujours au

courant des décisions prises (ou de leurs conséquences)

- Peut créer des frustrations

- Peut générer des conflits d’intérêt, de

la corruption…

- Il est plus compliqué de connaître l’avis de tous (sondages, enquêtes...)

Il faut toutefois noter qu’il y a des limites à ces comparaisons ; on ne gère pas un pays

de la même manière qu’on gère un village. Mais certains organismes (collectivités territoriales,

entreprises) pourraient s’inspirer dans une certaine mesure de la méthode de consensus.

4. Les démarches administratives

Nous n’allons pas rentrer dans le détail des démarches administratives, car à moins

de se lancer dans la création d’un éco-village, cela ne nous semble pas pertinent ici. Toutefois,

les démarches administratives sont un frein à la création des éco-villages. Il faut d’abord

trouver le bon terrain, à un prix abordable, vérifier que l’on peut faire ce qu’on veut dessus

(terrain constructible ou non…)

Pour l’achat, il y a plusieurs solutions : une personne peut effectuer l’achat, et ensuite

se faire rembourser par les autres membres de la communauté, créer une SCI (Société Civile

Immobilière). C’est cette dernière solution qui semble être la plus pertinente d’après certains

témoignages.

Dans Creating a life together, Diana Leaf Christian met en garde ; ce n’est pas à la

portée de tout le monde. Il ne suffit pas d’avoir l’envie et des connaissances en permaculture

et éco-construction. Elle conseille aux gens désirant se lancer dans la création d’un éco-village

d’avoir des connaissances solides en finance et gestion des biens immobiliers.

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Elle souligne qu’une seule personne ne peut pas avoir toutes les connaissances et

capacités pour fonder un éco-village. Il faut un groupe avec des personnalités et

compétences différentes et complémentaires. Certains seront plus cartésiens, et pourront

bien gérer le projet d’un point de vue administratif, tandis que d’autres seront plus dans “la

création”, la technique.

Beaucoup de projets n’aboutissent pas, parce que les gens n’avaient pas anticipé les

difficultés financières et administratives. Cela peut même mener à des situations complexes ;

à cause d’un manque de connaissances des meneurs et de communication entre les

membres, certaines personnes décident de se retirer du groupe lorsqu’elles se rendent

compte que le projet ne mène nul part. Les meneurs peuvent alors se retrouver endettés, et

les membres se retrouvent au tribunal.

5. L’installation

De nombreux projets n’atteignent pas ce stade, à cause des problèmes évoqués ci-

dessus. L’installation peut aussi apporter son lot de désillusions. De nombreuses personnes

idéalisent la vie en communauté et en éco-village. Les difficultés rencontrées pendant les

phases de mise en place de la charte et de recherche permettent de se rendre de compte de

la complexité des rapports humains, mais on pourrait penser qu’une fois le projet concrétisé

les tensions s’apaiseraient.

Cependant, la vie en éco-village n’est pas facile, et demande une certaine capacité

d’adaptation ; tout notre mode de vie tel que nous le connaissons est à revoir. Beaucoup de

gens idéalisent ce mode de vie ; c’est ce que certains appellent “le fantasme de la petite

maison dans la prairie”. On pense se reconnecter avec la nature, ramasser ses légumes et

les cuisiner, profiter du calme, de ses amis... La réalité est bien différente. Il faut beaucoup de

travail, et pour la plupart du travail physique. Devant toutes ces difficultés, certaines personnes

peuvent se sentir frustrées, déçues. D’où l’importance de bien insister dès le début du projet

sur son objectif, et ce que cela implique.

Dans son étude, Andy Kirby recense plusieurs témoignages de personnes déçues, qui

pensaient que la vie en éco-village serait plus facile, plus paisible avec plus de temps pour

soi.

6. Résumé des difficultés

Nous allons tenter de faire un bref résumé des difficultés qui ont pu être rencontrées,

et des solutions qui ont pu être mises en place. L’objectif de cette partie est aussi d’analyser

ce que ces échecs peuvent nous apprendre en tant que futurs ingénieurs, et en quoi notre

formation peut permettre de régler ces conflits.

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a) Le manque de connaissances, d’anticipation

Nous avons tendance à idéaliser nos projets. Dans le cas des éco-villages, nous

idéalisons les rapports humains, et le mode de vie sur place. Il est donc important de bien

faire comprendre aux personnes souhaitant s’investir dans le projet les difficultés qu’elles

rencontreront et de s’assurer dans la mesure du possible qu’elles sont “compatibles” avec la

vie en communauté. Dans notre formation, nous apprenons à avoir une vision à long terme

des projets (entre autres au niveau de la gestion de projet), et à anticiper les difficultés.

Dans son étude, Andy Kirby recense 3 catégories de problèmes : les challenges personnels,

les problèmes entre membres de la communauté et les autres problèmes (d’ordre

économique...). La majorité des interviewés disent avoir des problèmes avec les autres

membres de la communauté. Cette catégorie est elle-même divisée en trois catégories :

- Les problèmes avec la méthode de consensus. Nous l’avons vu plus haut, cette

méthode, même si elle a de nombreux avantages, est difficile à mettre en place et

demande beaucoup d’efforts. La plupart des gens ne sont sans doute pas préparés à

ce genre de méthode ; peut-être qu’une formation en amont permettrait d’éviter

certains problèmes. De plus, beaucoup d’éco-villages font appel à des “facilitateurs”.

En tant que futurs ingénieurs, nous pourrons être amenés à gérer des équipes, et donc

des conflits. Il est important dans un projet de telle envergure d’avoir une personne

organisée, avec des qualités en gestion de projet, en communication et qui sait être

gérer des situations compliquées.

- Les problèmes de communication. Ces problèmes sont similaires aux problèmes

avec la méthode de consensus, et demandent les mêmes qualités pour être gérés.

- Les problèmes des frontières. Ce problème est inhérent aux éco-villages: il s’agit de

trouver un compromis entre vie privée et vie publique. Même si l'objectif d’un éco-

village est de recréer du lien avec les gens, il faut savoir respecter les moments de

repos et la vie privée des individus. Ces points doivent être discutés en amont, lors de

l'établissement de la charte.

b) Les problèmes de répartition des tâches

Tout le monde ne s’implique pas de la même façon dans un projet. Ceci peut créer

énormément de frustrations et de tensions. Certains éco-villages choisissent une organisation

sans hiérarchie. Cela fonctionne pour certains, où tout le monde joue le jeu. Mais pour les

plus grands éco-villages, cela peut être compliqué. Sans avoir une hiérarchie stricte, il nous

semble pertinent de mettre en place un système de “responsables”. Il faut aussi être conscient

que tout le monde n’a pas les mêmes connaissances techniques et aptitudes physiques.

Essayer de regrouper les gens par compétences pour qu’ils puissent travailler plus

efficacement semble être une bonne solution, sans pour autant cloisonner ces groupes (le but

d’un éco-village est aussi l’acquisition de nouvelles connaissances). Nous pouvons peut-être

nous inspirer du fonctionnement de certaines entreprises, qui ont des méthodes de

management novatrice (hiérarchie horizontale...).

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c) Les problèmes d’ordre technique

Nous l’avons vu, il y a de nombreux freins administratifs et financiers. Il faut garder un

esprit cartésien et avoir des connaissances sur ces aspects. De par notre formation, nous

sommes entraînés à adopter cet état d’esprit.

Notre formation en gestion de projet semble être fondamentale ici, que ce soit d’un

point de vue de l’organisation ou de la communication. Il faut savoir anticiper les problèmes

et les résoudre avant qu’ils ne s’enveniment.

Dans cette partie nous nous sommes intéressés aux échecs des éco-villages. Ceci

peut paraître décourageant, mais il est important de comprendre les raisons de ces échecs

pour les éviter. Nous avons trouvé un compte rendu4 d’une personne étant intervenue comme

facilitateur dans un projet de petite taille (un père et sa fille), qui s’est soldé par un échec. Cet

article nous a semblé pertinent car il est un condensé de toutes les erreurs qui peuvent mener

à un échec.

Toutefois, les projets voyant le jour permettent à ses habitants de s’y épanouir. Nous

allons donc nous intéresser à quelques éco-villages italiens, leur mode de fonctionnement, et

l’impact positif que ces derniers peuvent avoir sur l’environnement.

Finalement, tout comme dans une entreprise, il apparaît que l’aspect management des

hommes, l’organisation et la logistique du village est l’un des aspects les plus complexe pour

qu’un éco-village fonctionne correctement.

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V. Panorama des éco-villages existants en Italie

Figure 1 : Les éco-villages italiens

Source : https://www.passerelleco.info/article.php?id_article=587

Nom de

l’éco-village

Date

de

créati

on

Nombre

d’habitants

Principales

caractéristiques

Autres détails

Basilico 2002 15 personnes Le potager

synergétique qui couvre

une grande partie de

besoin en nourriture de

village.

-

Torri

Supériore

1989 15 personnes Il dispose aujourd’hui

des techniques d’éco-

conception les plus

performantes,

notamment des

techniques d’isolation et

chauffage central dans

les murs.

Il est proche de la

frontière française, à

50km de Nice.

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Le Peuple

Elfi

- Plus de 150

personnes

Les habitants vivent de

récolte de fruits, et

produisent une grande

partie du reste de leur

alimentation.

C’est une

communauté répartie

sur une quinzaine de

sites, à moins d’une

heure de marche les

uns des autres :

quatre petits villages

et quatorze fermes.

Bagnaia 1979 20 Personnes Il repose sur des

principes de

collectivisation des

terres et des richesses,

d’autonomie alimentaire

et de partage du travail.

Les ressources de

village proviennent

essentiellement de la

vente des produits

cultivés localement et

de salaires des

habitants travaillant à

l’extérieur de l’éco-

village.

Damanhur 1975 - Les habitants

construisent leurs

maisons selon les

principes de la

construction

écologique, cultivent et

élèvent leurs animaux

d’une façon biologique,

et se soignent avec des

méthodes naturelles.

Il a été reconnu en

2005 comme un

modèle de société

durable de la part du

Global Settlements

Forum des Nations

Unies (ONU).

1. Basilico, dans les collines toscanes

Basilico a été fondé en 2002, c’est un éco-village récent et actif. Parties de rien, 15

personnes ont pu transformer un terrain négligé en un éco-village accueillant et vivable.

L’activité principale développée à l’intérieur de Basilico est le potager synergétique, et qui

couvre une grande partie de besoin en nourriture de village. D’autres éco-villages ont copié

l’idée du potager synergétique.

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2. Ecovillage de Torri Supériore

Torri Supériore était au départ un village « normal », en 1989, il s’est transformé en

écovillage. Cet écovillage dispose aujourd’hui des techniques d’éco-conception les plus

performantes, notamment des techniques d’isolation et chauffage central dans les murs, des

techniques de préchauffage d’eau par des panneaux solaires et une chaudière bois au GPL.

Le village compte des habitants de diverses nationalités, ce qui fait de lui un lieu

d’expérimentation sociale. Torri Supériore est devenu aussi une destination des touristes

souhaitant profiter de l’ambiance à la foi calme et conviviale de l’écovillage.

Des habitants travaillent dans une coopérative d’insertion sociale installée à 5 km du village

alimentant l’écovillage en légumes et fruits. L’écovillage et l’association font partie du même

réseau territorial qui s’appellent ‘Terre di confine’, les terres de la frontière.

Torri Supériore est devenu une destination pour les visiteurs désirant de se retrouver dans

une atmosphère conviviale tout en profitant des événements culturels ayant lieu au village.

3. Le Peuple Elfi

Le Peuple des Elfes, “popolo degli elfi” en Italien, est une communauté répartie sur

une quinzaine de sites, à moins d’une heure de marche les uns des autres : quatre petits

villages et quatorze fermes. La communauté regroupe plus de 150 personnes. La particularité

de cet éco-village est que la majorité des maisons ne sont pas connectées au réseau

électrique ; mais disposent de panneaux photovoltaïques.

Cette communauté vise l’autosuffisance sur tous les niveaux. C’est déjà presque le

cas d’un point de vue énergétique. Pour la nourriture, ils vivent des récoltes de fruits, et

produisent une grande partie du reste de leur alimentation. Historiquement, ils ne pratiquent

pas l’agriculture (c’est d’ailleurs ce qui est dit dans un article français5), et n’utilisent pas de

machines agricoles motorisées. Toutefois, selon d’autres sources6,7 (italiennes), ces villages

pratiquent l’agriculture, à cause de l’augmentation de la population. Un tracteur est même

utilisé dans un des villages.

4. La Communauté de Bagnaia

“La Comune di Bagnaia” a été fondée en 1979 par une dizaine de personnes issues

de diverses communautés. L’une des caractéristiques de cet éco-village est qu’il repose sur

des principes de collectivisation des terres et des richesses, d’autonomie alimentaire et de

partage du travail.

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Figure 2 : L’ancienne ferme Bagnaia rénovée, source : https://reporterre.net/A-Bagnaia-on-

partage-tout-la

Une vingtaine de personnes y vivent. Une des particularités de ce village est que ses

habitants ne possèdent ni propriété, ni argent ; tout est partagé, y compris les salaires. Les

habitants du village ont mis en place un système économique consistant à redistribuer toutes

les ressources. Ces dernières proviennent essentiellement de la vente des produits cultivés

localement et des salaires des habitants travaillant à l’extérieur de l’éco-village.

Ces richesses collectées sont ensuite distribuées aux habitants sous la forme d’ «

argent de poche », une somme d’environ 200 euros par mois et 900 euros par habitant pour

un mois de vacances. La plus grande partie des autres besoins est prise en charge par la

communauté, notamment la nourriture, un logement dans la grande ferme, les dépenses

d’essence, les visites médicales et frais de santé, la facture téléphonique et l’université pour

les enfants.

Le système de collectivisation de La Comune di Bagnaia a permis d’assurer un cadre

de vie convivial où chacun des habitants possède un habitat et un confort qu’il serait difficile

d’acquérir en choisissant la vie individuelle. Les décisions sont prises au consensus lors d’une

réunion hebdomadaire.

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5. Damanhur

Figure : Photo de l’écovillage Damanhur

Source : http://www.damanhur.org/fr/qu-est-ce-que-damanhur

Crée en 1975, il se situe au coeur des collines alpines du nord du Piémont, en Italie,

entre Turin et Aoste. Damanhur a été conçu par Falco Tarassaco dans le but d’avoir un lieu

permettant de réunir solidarité, partage et respect de l’environnement. Il a attiré l’attention du

monde entier et a été reconnu en 2005 comme un modèle de société durable de la part du

Global Settlements Forum des Nations Unies (ONU).

Le principe régissant la vie à Damanhur est le respect de l’environnement, les

habitants construisent leurs maisons selon les principes de la construction écologique,

cultivent et élèvent leurs animaux d’une façon biologique, et se soignent avec des méthodes

naturelles.

Cet écovillage compte plusieurs centres et associations, il est possible de le visiter toute

l’année et de participer à des séminaires et cours et consulter les livres pour connaître la

pensée du fondateur Falco Tarassaco.

Falco Tarassaco (1950 – 2013) est le fondateur de Damanhur. Il a publié trente livres parlant

sur sa vision de la vie, fondée sur la solidarité, l’amour réciproque, le respect de

l’environnement et le partage.

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VI. Impact environnemental des éco-villages

Les objectifs principaux d’un éco-village sont d’une part le respect de I'être humain,

d’autre part le respect de l’environnement. En effet, les éco-villages cherchent à employer des

techniques non polluantes et des matériaux sains, utilisent des énergies renouvelables et

effectuent le recyclage des déchets. Il nous est apparu intéressant de chercher à quantifier

l’impact environnemental d’un éco-village. Pour cela, nous avons voulu comprendre comment

ces problématiques écologiques étaient prises en compte dans la vie d’un éco-village et dans

sa construction. Nous avons donc mené une étude de cas pour l’éco-village de Granara, un

des villages pionniers du développement durable en Italie, situé dans les Apennins, à la

frontière de la Toscane. Nous avons choisi ce village en particulier car c’est un village pionnier

et exemplaire en matière de développement durable et d’éco-construction qui propose des

cours et séminaires sur les thématiques des technologies appropriées aux éco-villages,

d’éducation de l’environnement et d’éducation sociale pour vivre en communauté.

1. Etude de cas des solutions techniques : village de Granara

Cette étude de cas explique les solutions mises en place dans l’éco-village de Granara

pour avoir un impact environnemental positif et un faible impact carbone. Pour cela, cet éco-

village utilise la permaculture, l’éco-construction, la production verte, des énergies alternatives

et d’autres pratiques. Nous avons donc détaillé les pratiques de l’éco-village de Granara sans

aller trop loin sur l’aspect technique sachant que le rapport sur l’éco-construction détaillera

mieux ces solutions.

a) Aspect bioclimatique

Les méthodes utilisées pour la construction de l’éco-village ont permis de renforcer

l’aspect bioclimatique du village et se rapprocher de l'autosuffisance énergétique en

maximisant l’utilisation des énergies renouvelables.

Dans un premier temps, il a été choisi de construire l’éco-village de manière

traditionnelle, en pierre. Grâce à l’épaisseur des murs et la pierre utilisée, les murs sont

massifs et permettent de contrôler l’entrée de chaleur. Les toits ont été reconstruits en bois

ventilés. De plus, des serres bioclimatiques ont été insérées dans les logements, situées au

sud, afin de protéger des rayons solaires élevés pendant les mois d’été et de permettre

l’entrée du soleil pendant l’hiver. Afin d’exploiter l’énergie solaire de la manière la plus simple,

de grandes fenêtres ont été utilisées pour un gain direct d’énergie ainsi que des murs

d’accumulation, voir mur Trombe-Michel ci-dessous.

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Schéma fonctionnement mur Trombe

Source : http://www.caue54.com/glossaire.asp?defId=75&lookfor=&search=M

Finalement, les techniques utilisées pour la construction de l’éco-village de manière à

préserver l’aspect bioclimatique sont synthétisées dans le schéma ci-dessous

Schéma éco-construction dans l’éco-village, adaptation par Lola Gautreau du schéma

proposé par le rapport d’architecture et durabilité de l’éco-village Granara (voir bibliographie)

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Glossaire du schéma :

- L'adobe est de l’« argile qui, mélangée d'eau et d'une faible quantité de paille hachée

ou d'un autre liant, peut être façonnée en briques séchées au soleil ».

- Le pisé est un mode de construction en terre crue, comme l'adobe ou la bauge. On le

met en œuvre dans des coffrages appelés banches.

- Le kénaf aussi appelé « chanvre du Deccan », est une plante annuelle de la famille

des Malvaceae originaire d'Afrique qui est apparentée au jute.

- Le contreventement est un assemblage de charpente destiné à lutter contre les

déformations horizontales d'une construction.

- Le biocalce est un enduit à base de chaux

b) Aspect énergétique

Le village de Granara a une excellente exposition au soleil et témoigne de la présence

de vents constants très forts provenant du sud. Pour cette raison depuis le début du projet, il

a été jugé possible d’obtenir l'objectif d'indépendance énergétique grâce à l’utilisation de

panneaux solaires, des techniques d'économie d'énergie, des turbines à eau, l’utilisation de

biogaz et des éoliennes.

Le projet a été un succès malgré les difficultés rencontrées. Granara semble être

autonome du point de vue énergétique et produit même plus d’énergie que son besoin annuel.

Le village est connecté au réseau auquel il apporte le surplus d’énergie inutilisée. L’énergie

est produite par des systèmes photovoltaïques, cinq panneaux assez petits sont présents sur

les toits des logements, une installation isolée a été installée pour la bibliothèque ainsi qu’une

usine de plus grande puissance de 14 kWp (kilowattpeak) qui permet une production moyenne

annuelle de 16 000 kWh.

L’eau est chauffée par des panneaux solaires thermiques qui, dans certains cas, ne

se limitent pas seulement à cette fonction, mais servent aussi à préchauffer les

environnements internes, grâce à la biomasse. Il y a aussi des douches extérieures utilisant

des panneaux solaires.

c) Gestion de l’eau

Sur le territoire de Granara, il existe deux canaux de drainage naturel, le Rio del Frasso

et le Rio delle Alborelle. Bien que le village ne souffre pas de gros problèmes de manque

d’eau, l’idée fondamentale est de l’économiser au maximum. Pour cela, des toilettes sèches

ont été créées à l’extérieur mais aussi à l’intérieur des maisons. L’idée est donc de ne pas

utiliser de l’eau inutilement et d’utiliser le compost créé pour les potagers. Cela donne la

possibilité de sauvegarder la ressource en eau, même pour un village avec beaucoup

d’habitants.

L’économie d’eau est donc fondamentale mais les aspects de récupération,

réutilisation et recyclage de l’eau sont aussi très importants. Un système d'accumulation d'eau

de pluie et un système d’accumulation d’eau de source dans des citernes ont été utilisés et

permettent la séparation des eaux potables et non potables. Les ressources en eau potable

proviennent du réseau public et celles récupérées sont utilisées pour les potagers et les

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champs. Un système de phyto-épuration a été mis en place et permet de restituer à la terre

des eaux épurées provenant des eaux grises des maisons.

Une autre particularité de l’expérimentation menée par le village de Granara a consisté

en la conception et la construction d’un « biolago » (bio-lac ou étang) qui, alimenté par les

eaux de pluie, permet un équilibrage de manière autonome entre la flore et la faune présentes

dans le milieu.

Les schéma ci-dessous synthétise la gestion des ressources dans l’éco-village de Granara:

Schéma synthétique de la gestion des ressources dans l’éco-village, adaptation par Lola

Gautreau du schéma proposé par le rapport d’architecture et durabilité de Granara (voir

bibliographie)

2. Analyse émergétique d’un éco-village

L’émergie (ou mémoire de l’énergie) peut être définie comme la somme de tous les

apports d’énergie requis de manière directe ou indirecte ramené à l’énergie fournie par le

soleil. Il apparaît alors intéressant d’effectuer une analyse “émergétique” d’un éco-village pour

mesurer son potentiel de durabilité, ce type d’analyse permet alors de prendre le système

“éco-village” au complet. Une analyse émergétique a été effectuée pour un éco-village situé

dans le sud-est de la Sicile par le département de méthodologie physique et chimique pour

l’ingénierie (DMFCI) de l’Université de Catane. Il faut noter que ce type d’évaluation est

complexe en raison des nombreux facteurs à prendre en compte. Dans cette partie nous

expliquons rapidement les méthodes de calcul et quelques chiffres clés de cette étude.

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Cette étude distingue trois types d’apports énergétiques :

1. Énergie locale renouvelable,

2. Énergie locale non renouvelable

3. Flux achetés ou importés

Les calculs alors effectués ont permis d’obtenir le coefficient de charge environnementale

de l’éco-village, son coefficient de rendement émergétique et son indice de durabilité.

Ces indices permettent ensuite d’évaluer la production d’énergie, le système de traitement

des eaux usées et les pratiques agricoles appliquées dans l’éco-village.

a) L’éco-village et ses solutions

L’éco-village est situé dans une exploitation de 88 ha, dont 51 sont consacrés à

l’agriculture, les 37 ha restants se composent d’un bois avec des arbres fruitiers, et des zones

de pâturage présentant un étang permettant de purifier les eaux usées provenant du village.

Les solutions utilisées dans l’éco-village dans l’éco-village sont les suivantes :

- Utilisation de système photovoltaïque pour la production d’électricité

- Utilisation de panneaux solaires pour le chauffage et l’eau chaude sanitaire

- Ampoules basse consommation

- Peintures organiques

- Utilisation de bois cultivé localement

- Utilisation de pierre locale

- Toiture en tuiles d’argile naturelle

- Construction innovante en “mur de respiration” permettant un échange d’air

- Installations communes (buanderie, cuisines, salons) évitant les doubles

emplois inutiles

- Économie et le recyclage de l'eau par la création d'un lagon

- Produits agricoles cultivés et produits localement (légumes, huile d’olive, fruits,

blé etc.)

- Élevage local (moutons, volailles, lapins, porcs)

b) Le calcul de flux d’énergie

Pour mieux comprendre comment est effectué ce type d’étude, nous pouvons travailler

sur l’exemple des panneaux photovoltaïques. Grâce à des chiffres standards de

consommation d’électricité pour ce village, on peut déterminer qu’il faut 482 panneaux solaires

sur une surface de 445 m2 pour produire la quantité suffisante d’électricité. Le calcul

émergétique prend alors en compte l’énergie solaire, le coût d’installation, l’énergie de

production, l’énergie de maintenance. On obtient alors un flux d’émergie de 2,36E16 sej (solar

energy joule) / an. Les critiques à apporter à ce calcul est le fait qu’il ne prend pas en compte

l’ensemble de la pollution environnementale comme par exemple le transport des panneaux

solaires, ou bien la pollution due à l’extraction du lithium présent dans ces panneaux.

Ce type de calcul est effectué pour toutes les solutions citées ci-dessus, on obtient

alors l'évaluation finale en terme d’émergie de l’éco-village (voir Annexe).

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c) Conclusions de l’étude

L’étude montre que l’énergie renouvelable locale représente 67 % de la production

totale du village et que l’indice de durabilité (ID) s'élève à 6,68. Un ID faible (inférieur à 1)

révèle une économie axée sur la consommation fortement développée, alors qu’un ID élevé

(supérieur à 10) révèle une économie qualifiée de “non développée”. L’ID national moyen en

Italie s’élève à 0,17, ce qui démontre une utilisation massive d’énergies non renouvelables,

de nombreuses importations d’énergie et de matériaux achetés et une forte dégradation de

l’environnement. La valeur assez élevée de l’indice de l’éco-village semble donc indiquer que

son économie constitue un exemple à suivre en vue de parvenir à un développement plus

durable.

VII. Impact social des éco-villages

L’objectif de l’éco-village est de créer une micro-société régie par des règles éthiques,

spirituelles et politiques. Ces règles font l’objet d’un contrat social explicite acceptée par les

habitants de l’éco-village. Les éco-villages sont des lieux où théoriquement chacun peut

s’exprimer, échanger, partager, créer des initiatives. Pas besoin d’aller jusqu’au

supermarchés pour acheter à manger, généralement les éco-villages disposent d’un jardin où

les habitants viennent échanger, planter et récolter les légumes de jardin collectif. Des repas

collectifs sont organisés, les habitants se répartissent les tâches entre cuisine, vaisselle et

rangement. Les repas sont vendus aux habitants à un prix symbolique, l’argent collecté sert

à financer les projets. Dans cette partie, on reprend les points importants de la vie sociale

dans les éco-villages de manière générale.

a) Les jeunes de des éco-villages

Les jeunes y trouvent leur bonheur car généralement d’autres enfants dans la même

tranche d’âge y vivent, ils peuvent donc jouer, se baigner dans la nature plutôt que dans des

piscines dévoreuses d’eau et contenant du chlore. Les maisons de quelques voisins peuvent

se transformer en garderies en l’absence des familles travaillant loin du village contrairement

aux habitudes de maisons de ville renfermées et ne favorisant pas l’ouverture aux voisins. A

l’écovillage, tout est partagé, les familles tissent des relations profondes et solides.

b) Vie en éco-communauté

Pour éviter les frustrations et multiplier les satisfactions, la plupart des éco-

communautés italiennes favorisent la méthode du consensus : cette méthode est, à la

différence de la méthode de vote majoritaire où l’avis de la minorité est complètement ignoré,

basée sur la prise en compte des avis de tous les membres de la communauté. Une personne

de l’écovillage, jour le rôle de modérateur et faisant en sorte que chaque membre puisse

exprimer son point de vue et dire s’il accepte, s’abstient ou refuse une idée. Il est possible à

un seul membre de bloquer un projet par son véto, mais pour ce faire, il doit démontrer que

ce projet pourrait à terme, mettre certains aspects fondamentaux de la communauté en

danger.

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c) Les difficultés

Comme nous l’avons vu dans la quatrième partie, regrouper plusieurs personnes autour

d’un tel projet est compliqué. Si la phase de création est délicate, il convient de rester vigilant

tout le temps, et de continuer à dialoguer.

Conclusion

Le concept d’écovillage est “élastique” et permet à un groupe de personnes de

s’engager et préparer un projet ensemble, en partageant temps et espace. Cependant, en

raison de leur travail, certaines familles ne peuvent pas quitter la ville. Le concept d’écovillage

étant flexible, on peut penser à appliquer le même modèle en ville, ce qui donnera “les

écoquartiers”. Ces derniers ne sont qu’une autre forme des éco-villages permettant de

s’adapter au rythme de la vie, mettant l’accent sur le partage d’un projet commun plus que sur

le partage de l’espace.

Ce travail de recherche sur les éco-villages nous montre d’une part l’importance de

l’aspect social d’un projet qui paraît finalement comme le plus complexe à gérer, complexité

à laquelle nous ferons face en tant que ingénieurs dans le milieu du management des

collaborateurs, le travail d’équipe, la gestion des conflits, la médiation… D’autre part, l’étude

des solutions techniques adoptées dans les éco-villages a été très intéressante du point de

vue de la structure et la thermique du bâtiment. Ce sujet a permis de nous ouvrir les yeux sur

la simplicité de certaines solutions comme le mur-trombe. Enfin, certaines solutions paraissent

parfois viables pour des projets à plus grandes échelles comme la gestion des eaux usées et

eaux grises avec de la phyto-épuration par exemple qui semble intéressante et prometteuse.

En étudiant toutes les solutions possibles, il nous est apparu un triste constat, nous nous

sommes demandé pourquoi toutes ces techniques, datant pour la plupart de quelques

centaines d’années, ne sont désormais plus utilisées ?

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delle Costruzioni AIUC, Corso di Laurea in Progettazione dell’Architettura - a.a. 2016-2017 -

Sessione di Laurea Settembre 2017

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Annexe : Analyse énergétique de l’éco-village