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LE RETOUR À TERRE DU MARIN RETRAITÉ ET LE FACE-À-FACE CONJUGAL Yvonne Guichard-Claudic L'Harmattan | « Cahiers du Genre » 2001/2 n° 31 | pages 59 à 79 ISSN 1298-6046 ISBN 9782747522045 DOI 10.3917/cdge.031.0059 Article disponible en ligne à l'adresse : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- https://www.cairn.info/revue-cahiers-du-genre-2001-2-page-59.htm -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Distribution électronique Cairn.info pour L'Harmattan. © L'Harmattan. Tous droits réservés pour tous pays. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit. Powered by TCPDF (www.tcpdf.org) © L'Harmattan | Téléchargé le 23/06/2022 sur www.cairn.info (IP: 65.21.228.167) © L'Harmattan | Téléchargé le 23/06/2022 sur www.cairn.info (IP: 65.21.228.167)

Le retour a terre du marin retraite et le face-a-face conjugal

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Page 1: Le retour a terre du marin retraite et le face-a-face conjugal

LE RETOUR À TERRE DU MARIN RETRAITÉ ET LE FACE-À-FACECONJUGAL

Yvonne Guichard-Claudic

L'Harmattan | « Cahiers du Genre »

2001/2 n° 31 | pages 59 à 79 ISSN 1298-6046ISBN 9782747522045DOI 10.3917/cdge.031.0059

Article disponible en ligne à l'adresse :--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------https://www.cairn.info/revue-cahiers-du-genre-2001-2-page-59.htm--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

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Cahiers du Genre, n" 31

Le retour à terre du marin retraitéet le face-à-face conlugal

Yvonne Guichard-Claudic

Résumé

Le métier du marin scande le temps de la vie conjugale sur un rythme àdeux temps: une longue, la séparation, une brève, la cohabitation.L'arrivée du marin à la retraite bouleverse ces usages du temps etI'installation dans de nouveau( rythmes de vie fait I'objet de tâtonnementset de débats entre les conjoint(e)s. Â noter aussi, le pafiage d'un espacedomestique quotidiennement utilisé par les femmes et les enfanF et defaçon seulement épisodique par les hommes. La construction d'uneproximité au quotidien constitue une inversion des habitudes et conduit àréévaluer les routines et à repenser la distance conjugale, voire à négocierde nouvelles appartenanceq intra et exha-familiales.

Dans le milieu marin, la question de l'articulation viefami liale/vi e professionnel le prend une col oration particulière.Dans la mesure où le métier de marin exclut la possibilité d'uneparticipation régulière à la vie familiale et conjugale, lesfemmes de marins sont conduites à gérer cet éloignement et à( porter la famille > au quotidien. L'arrivée du marin à laretraite ouvre un chapitre entièrement nouveau de la vieconjugale, I'expérience de la vie en commun s'étantgénéralement limitée à la période des congés du marin l.

I Cet article repse sur une enquête par entrstiens, réalisée auprès de dixcouples de retraité(e)s, au sein desquels l'homme était marin $cheur; ellevient prolonger une étude antérieure, qui avait donné lieu à trente-huit

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La retraite est d'abord I'occasion d'une mise en question de

I'usage du temps. Le métier de marin scande en effet le temps

de la vie conjugale sur un ryttune à deux tmps : une longue, la

séparation, une brève, la cohabitation. A la séparation, qui

n'interdit pas toute forme de communication, mais en prescrit

en partie les formes et le contenu, succède une courte période de

vie commune, vouée à compenser en accéléré les manques

ressentis pendant les mois précédents. Une telle scansion du

temps informe les négociations, explicites ou implicites, qui

visent à ajuster les attentes mutuelles. Tout ne peut se dire ni se

faire pendant I'absence du mariru non plus que quand il est 1à;

son passage est si bref... L'arrivée du marin à la retraite

bouleverse ces usages du temps et I'installation dans de

nouveaux rythmes de vie fait l'objet de tâtonnements et de

débats.

Il faut aussi évoquer le partage d'un espace domestique

quotidiennement utilisé par les femmes et les enfants et de

façon seulement épisodique par les hommes. La construction

dnune proximité au quotidien constitue une inversion des

habitudes et conduit à réévaluer les routines et à repenser la

distance conjugale, voire à négocier de nouvellesappartenances, intra et extra-familiales.

Un nouveau rappott au temPs

Temps des congés, temps de ln retraire

Aujourd'hui, on se représente fréquemment la retraite comme

des congés payés, mais qui auraient la spécificité de se

prolonger pendant une durée indéfinie. Cette projection vautsurtout pour les retraités ( encore jeunes > et dotés de revenus

suffisants. De nombreux marins anticipent leur retraite de cette

façon, fondant leurs attentes sur l'expérience, satisfaisante ou

non, qu'ils ont eu de leurs congés. Ainsi M. O., ancien maltred'équipage:

interviews de femmes de marins Scheun (Guichard-Clatdic 1998). Dans les

deux cas, les marins $cheun concernés naviguaient au thon fropical, au large

de l'Afrique de I'Ouest ou des Seychelles. Ils élaient embarqués quatorze

semaines et bénéficiaient de sept semaines de congés.

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Le retour à terre du marin retraité

Je savais que ça allait bien se passer. Bon, j'ai un grand jardin,j'aime ço. Aller en rner, avec le beau-père, ou alors le beau-

frère. Et puis, il y a toujours quelque chose. C'est vrai que mescongés, je les passais comme ça, à droite à gauche à m'occuperet je savais donc qu'à la retraite...

La vision féminine diffère souvent. Les femmes sachant bien,elles, que les congés du marin ne constituent pas un tempsordinaire, comme devra l'être Ia vie quotidienne à la retraite.

Le marin en congés n'est en effet pas dans une positionconjugale similaire à celle d'un homme qui cohabitequotidiennement avec sa compagne. La présence permanente decelle-ci à terre en fait la garante de la continuité conjugale etfamiliale, tandis que l'inscription physique du marin au foyern'est que temporaire. Alors que la composante domestique etmaternelle (quand elle existe) de son identité rappellecontintment à la femme son statut d'épouse, l'homme doitréintégrer un statut de conjoint, et éventuellement de père,devenu plus abstrait du fait de l'éloignement. Il bénéficie pourcela d'une bienveillance particulière, le temps qu'il réintègre lescomposantes de son rôle : c'est le temps des retrouvailles,marqué par des rituels de bienvenue. Femme, enfants, maisonsont souvent fin prêts pour recevoir celui qui rentre: laprésentation de soi est soignée, le ménage a été fait à fond afind'être ensuite plus disponible, la cuisine est améliorée. Lespremiers jours qui consacrent les retrouvailles ouvrent lapériode de quelques semaines pendant laquelle les conjointsvont cohabiter. Une période souvent caractérisée par uneaccélération du temps, d'où l'expression commune selonlaquelle, pendant cette parenthèse, << on vit à cent à I'heure >>.Ils'agit de rattraper en sept semaines tout ce qui n'a pu être faitpendant les quatorze semaines d'embarquement. Même si celase révèle littéralement impossible, une telle disposition d'espritconduit à multiplier les occasions festives et consommatoires:apéritifs prolongés, repas de famille, sociabilité amicale, maisaussi virées en ville, journées lèche-vitrines ou réalisation desprojets d'achat, ou encore, départ en vacances. La disciplinequotidienne est relâchée, les soirées se prolongent. Momentsvolés à I'ordinaire des jours. Moments construits, aussi, au prixd'un report des négociations dans le temps. Du fait de la

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relative brièveté de la cohabitation, la logique de la relationfamiliale devient une logique de I'extra-ordinaire, telle qu'on lapratique avec des invités, par exemple. Elle s'oppose à lagestion plus conflictuelle des problèmes quotidiens' Enparticulier certains usages, jugés tolérables pendant une courte

période, sont perçus comme devant nécessairement faire l'objetde négociations à plus long terme, notamment au moment où laretraite réunira durablement des partenaires jusque-là souvent

séparés.

La modifrcation du rapport au temps est donc décrite coûlme

un changement majeur. Auparavant, le temps personnel comme

le temps des reûouvailles du couple étaient scandés par

I'activité professionnelle du marin. Les congés étaient un temps

riche en activités organisées, faisant souvent I'objet d'uneplanification féminine. Diverses activités (projets de jardinage

ou de bricolage), prescrites par les femmes ou librementchoisies par les hommes, étaient à achever avant la fin des

congés. L'arrivée à la retraite est I'occasion de l'apprentissage

doun nouveau rythme. Les pratiques mises en Guvre de façoncoutumière pendant les congés doivent désormais être étalées

sur toute I'année. Cnest ce qu'enseigne Mme O. à son mari,dont on a vu qu'il envisageait la retraite comme des vacances de

longue durée. Loin de ressentir un ( coup de vieux >r en arrivantà la retraite, il se dépensait sans compter :

- Monsieur : Ah oui, je remuais ciel et tene.

-Madame : Au depart, j'ai été obligëe de lefreiner. < Qu'est-

ce que tu vas faire dans trois-quatre mois ? J'awai plu rien àte donner.

-Monsieur : Parce qu'avant, ce n'était pas pareil. C'était toulde suite au boulot. IIfaut apprendre à...

- Madame : Oui, et puis malgré son mois et demi de congés, ilfallait quand même programmer tout ce qu'il y avait à faire,tandis que maintenant, c'est cool.

On remarque le rôle de socialisation à la vie à tene qui est

endossé par les femmes. Un rôle très actif : Mme O.programmait les activités pendant les congés ; désormais, elleen programme l'étalement sur une plus longue durée. Au-delàc'est à la légitimation de I'entrée dans un nouveau statu! quiautorise l'inactivité, qu'elle procède. M. O. est en quelque sorte

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sommé (pacifrquement) de s'autoriser à prendre le temps.D'autres entrent beaucoup plus facilement dans cette logique dureport et de l'étalement dans le temps. C'est le cas de M. Q., unancien capitaine qui a pleinement réussi sa carrièreprofessionnelle et s'autorise une certaine flânerie :

En retraite, on se dit : < Demain il fera jour u tandis qu'avant,pendant les congés, je ne vais pas dire que tout étaitprogrammé, mais... Généralement, on partait en vacancespendant mon sëjour de telle date à telle date. Après, onfait ça,ça, et puis Ie mois et demi, il est passé. Tandis que maintenant,on reporte, on reporte, et puis tous les jours, il y a quelquechose, et puis au lieu de faire ça en un mois et demi, onfait çasar un temps bearcoup plus long.

Le débat sur laplanifuatlon de l'usage dutemps

Le changement de rythme peut introduire des tensions dansle couple si la conception de I'utilisation du temps à la refaiteest différente. Ainsi, en tant que femme au foyer, Mme Q. étaithabituée à s'organiser, planifiant son temps propre quand elleétait seule, le temps conjugal quand son mari était en congés.Désormais, elle ne planifie plus le temps de son conjoint, maisla présence de celui-ci lui rend parfois difficile de planifier lesien propre :

J'ai un mari qui est rêveur. Il peut très bien prenùe un journalou un livre, s'asseoir là, sur son fauteuil, regarder la mer, etpuis il est très bien là. Il peut passer une journée-là, comme ilpeut êûre en mer toute la journée, comme il peut être sur Ie quoi.(Monsieur : < Je n'ai pas de journée type. J'en ai pas. J'en aipas ù).Ça, quelquefois, quelque pqrt, ça me gêne, parce quej'aimerais bien dire : < Aujourd'hui, je fais ça, demain, je laisça 4 mais là, il n'y o plus moyen. Tout d'un coup, il vq arriveret puis il va me dire : < On va faire un tour ? u Non ! J'aicommencé quelque chose. J'aime pas partir en laissant quelquechose. J'aime bien sovoir. < Dis-moi le matin qu'on va sepromener, OK. Je m'organise pour ça t Ça va pas jusqu,auplanning, mais c'est vrai que j'ai toujours eu I'habitude d,êtreindépendante, de faire les choses quand j'avais erwie de lesfaire. Alors, quand je vois que ça traîne, je dis : < II y a quelquechose, là, qui ne va pas. Ilfaut crocher dedons >.

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Cet extrait met en lumière le fait que M. Q. entend marquer

la coupure entre le temps de l'activité professionnelle et celui de

la retraite. Le premier, qui lui a par ailleurs procuré < du

bonheur ), était tout de même marqué par la discipline du

travail. Le second correspond au rejet de toute contrainte,notamment de contrainte d'emploi du temps. [l n'est d'ailleurspas exclu que ce rejet ne soit que temporaire, comme une sorte

de sas que l'on s'accorde les premiers temps de la retraite pour

marquer le changement de statut, expérimenter certaines

activités, quitte à passer ensuite à un temps un peu plus

structuré. Pour Mme Q., au contraire, la coupure entre hier et

aujourd'hui est moins nette, ou du moins devrait l'être. Elle a

construit son identité conjugale sur le modèle de la femme de

marin responsable, organisée, suffisamment autonome pourprendre des décisions seule et s'y tenir. Se couler dans les

rythmes de son conjoint, ce serait rompre avec cette identitéantérieure, jugée valorisante, perdre de I'autonomie. Cette

divergence dans I'utilisation du temps, entre un des partenaires

qui anticipe et planifie I'utilisation du temps quotidien 2, et

I'autre, pour lequel I'avenir immédiat doit rester ouvert peut

être aussi interprétée comme une forme de résistance de celuiqui refuse que son temps soit encadré ; quiue à prendre le risque

de le perdre si aucun désir ou aucune opportunité ne se présente.

En témoigne cet extrait de dialogue entre M. et Mme N.(respectivement militaire puis marin mécanicien et professeur

d'éducation physique et sportive) :

-Madame : On vil au jottr le iour, enfait. Toi, i1... il ne

supporte pas d'avoir des projets. Il n'anticipe jamais, et moi iepasse mon temps... je passais parce que ie suis obligée de

ralentir mes pensées, ie passais mon temps à dire : < Tiens ! Ilserait bien de faire ci, il serait bien de faire ça 4 mois il ne peutpas-

- Monsieur : Là, aujourd'hui, on a le copain. On a decide hierqu'on irail atn Glénans, mais j'aurais pas pu dire ce matin à

2 Cetæ précision est importante, car une absence de planification de I'usagedu temps quotidien peut très bien se conjuguer avec la programmation à longterme dc placements financiers, de I'achat d'un appartement ou du êglementde telle affaire de succession. Une même p€rsonne se projette de manière

variée dans les différentes æmporalités.

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' sept heures si j'irais au golf à dix heures, ou si je n'irais pas, ousi j'irais à midi. Au coup par coup, je décide ce qrc je fais. Jedécide ce que je fais au moment où j'ai envie de le fairelMadame, en fond : Et mo| pour organiser majournée...)

-Question : Et donc, c'est un peu Ie lue de la retraite, ça,pour vous ?

- Monsieur : Voilà. Ne plus anoir d'autoritë, de décision,d'horaires, de programme. J'ai soufert de ça... Enfin, j'aisupporté pendant ma vie professionnelle, mais ça ne me plaisaitpas de supporter ça. Maintenant, je peu m'en passer, je ne veîEpas me créer d'obligations de ce genreJà.

- Madame : Quand je démarre ma journëe, faut que je sache ceque je vais en faire. Tandis que lui... il ne veut pas savoir, leschoses arrivent. Et au dëpart, conme il ne voulait pas mecontrarier, il faisait ce que j'auis dit et il faisait Ia gueule parcequ'il avait dit oui et qu'il n'wait pas erwie de lefaire.

Ce débat sur la planification de I'usage du temps traduit ledésir de chacun de garder I'emprise sur son temps propre, maisn'est pas sans incidence sur le temps de I'autre. Il pose donc enfiligrane, la question du pouvoir dans le couple, du moins dansune de ses dimensions et engage à observer les négociations,implicites ou explicites, qui tentent d'y répondre. Dans les deuxcas relatés, il n'y a pas de négociation explicite. Ce sont les< petites phrases > de I'un et I'autre partenaire, maintes foisrépétées, qui font part à I'autre de I'existence d,un problème etde la résistance à se voir imposer son rythme. Dans les deux casobservés, I'issue de la négociation a consisté en la possibilitépour chacun de se ménager des temps solitaires.

Ce débat peut aussi s'interpréter en dehors de touteproblématique conjugale et n'est pas nécessairement sexué. Il ya ceux(celles) pour qui l'absence de bontraintes est déjà plaisir,ceux(celles) pour qui le désir, le plaisir surgissent inopinément,d'où l'attitude qui consiste à ménager le temps de l,émergencedu désir ou de l'opportunité. Cela suppose l,acceptation du faitque ne rien faire noest pas nécessairement perdre son temps. Lestenant(e)s de la planification ont une conception à la fois pluscloisonnée et plus utilitariste des temps qui composent unejournée : les occasions de plaisir demandent à êne suscitées, lestemps sont plus hiérarchisés, le temps du devoir passe, par

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exemple, avant celui du plaisir et les plaisirs eux-mêmes sont

affectés d'une sorte de coefftcient d'utilité.

Mme N. incarne cette seconde conception de façon presque

caricaturale. Une partie de son temps est contraint par les

services qu'elle rend quotidiennement à sa grand-tante et

plusieurs fois par semaine à sa mère ; elle suit un régime

alimentaire et consacre également du temps à s'approvisionner

en produits frais et à préparer toutes sortes de légumes ; elle

pratique de nombreux sPoft, prend un ou deux bains quotidiens

à la belle saison et fait partie d'une chorale. Voici un résumé

doune de sesjournées :

Je me lève vers... huit heures et demie, on va dire, donc après,

na grand-tante, donc ie vais en ville et puis il est déià midipassé ... Ça, c'est quand on ne va put au golf dès le matin. Ce

n'est pas le tundi. Et puis après, actuellement par exemple, jevais aller me baigner avec ma mère, ou la promener, ou bien le

golf ou rien, ou bien le mérage. II y a touiours quelque chose.

Un emploi du temps qui laisse peu de place à I'improvisation

ou à la flânerie, aussi Mme N. ne conçoit-elle que difficilementde ne rien faire :

-Qundie me lève, d'abord, c'est le petit-dsieuner. De temps

en lemps, il m'anive de faire ùt ménage, qz.tand il me reste du

temps. II faut que ie fonce voir ma grand'tante. Je ne pew pas.

Je ne me vois pas m'installer. C'est quelque chose que je ne

perû pas. M'installer, c'est quelqaefois quand i'en ai marre de

faire des visifes. Je dis, auiourd'hui je ne fais rien, ie me mets

dans le fouteuil. Je dis, ie ne fais rien, monfauleuil, mes revùtes'

nuis je ne me vois pas m'installer, lire w livre.

- Question : Vous trornez ça culpabilisant ?

- Madame M. : Ben, il y a les cowses à penser, il y a ensuite Ie

repas. Je passe quand même... Même siie n'élabore pas tous les

repas, on passe qtnnd même du temps à Ia cuisine certairæment,

dorc je n'ai pas le temps de prendre un livre et de rester là des

heures à lire. Dans la vie courante, le repas est entre midi etmidi et demi, sept heures, sept heures et demie, ie ne vais pas me

dire, ben on mangera demain si on a le temps, donc c'est,c'est... c'est du temps qui est pris, quand même.

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Le retour à terre du marin retraité

Plus souvent que leurs conjoints, les femmes rencontrées 3 serévèlent organisatrices du quotidien, prolongeant en cela leurexpérience antérieure du temps morcelé entre diverses activités,professionnelles, domestiques, familiales. Même à la retraite,elles continuent à assumer une bonne partie du travaildomestique, et même quand celui-ci est plus ou moins parlagé,elles assument la charge mentale associée à I'ajustement desdifférentes temporalités (Haicault 1984) composant la journée,la semaine... Quand, à la prise en charge des nécessités de lavie quotidienne, viennent se surajouter des objectifs personnelshiérarchisés en termes d'utilité, sociale ou individuelle, laretraite est loin d'être synonyme de lâcher prise et de nouvellescontraintes viennent structurer le quotidien.

Trouver la < bonne distance,, conlugale

En s'inscrivant dans la filiation de travaux qui analyse lesrelations conjugales comme la difficile construction d'unéquilibre entre proximité et écart, Vincent Caradec (1996') acherché à rendre opérationelle la notion de distance conjugale,en l'appliquant aux couples à la retraite depuis peu. Le rapportconjugal est défini comme la façon dont une personne<< souhaite se positionner, avec son conjoint, par rapport à larnaison >. Il permet notamment rendre compte des ajustementsque réalisent les conjoints pour trouver une distance qui lessatisfasse tous deux et des difficultés qui peuvent naître d'écartsdifficiles à résorber.

Il examine également la distance conjugale intérieure, c'est-à-dire la façon dont les conjoints se partagent I'espacedomestique, les tâches ménagères, et se ménagent des momentsconjugaux et des moments solitaires.

Ces deux dimensions de la distance conjugale organiserontnotre propos.

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3 Les dix entretiens analysés ici prennent place au sein d,un corpus pluslarge, composé.de vingt entretiens approfondis recueillis auprès de retraiteleyset d'un questionnaire auquel ont répondu 282 personnes en stage depréparation à la retraite (Pennec et a|.2000).

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(Jn nouveau parîage de l'espace et du travall domesttquc

Dans le milieu marin, le passage à la retraite est appréhendé

comme une transition délicate, du fait de la radicalité des

transformations introduites dans la vie conjugale par lacohabitation à plein temps. En témoigne cette anecdote,

rapportée par Mme P. :

Ce qui me fait rire, c'est qu'on a'vait rencontré un monsieur àTrévignon, il allait acheter des langoustines, il lravaillait à

I'armement, je ne le connaissais pas tellement et il me

dBmande : < Ça va ? u Je dis : tt Oui, ça va. ), -Lui: < Ça ne

fait pas encore six mois ; après six mois, vous allez voir, ça vachanger. Ma femme, qu bout fu six mois, elle ne me supportaitplus. >. Qui que ce soit, la première chose qu'on nous

demandait, c'était ça : < Çava ? Ça moche bien ?

Du fait de ces anticipations, l'énonciation des difficultés est

assez libre. Celles-ci ne sont pas présentées comme remettantnécessairement en cause les sentiments portés au conjoint maisplutôt comme des problèmes d'adaptationo que l'on espère

hansitoires.

L'espace domestique, auparavant utilisé essentiellement par

les femmes et les enfants, doit, à la retraite, être partagé avec les

hommes. Les modalités de ce partage, fortement sexué, ne

diffèrent guère des pratiques maintes fois observées (Guillou1992\. Aux hommes I'extérieur et les espaces périphériques (legarage, le sous-sol), aux femmes le cæur des espaces intérieurs.À l'intérieur même de ces espaces, une division plus fine des

travaux qui s'y effecfuent: aux hommes les travaux nécessitant

force physique ou technicité, au jardin, par exemple, la tailledes haies, la manipulation du motoculteur quand I'espace à

tondre est vaste ; aux femmes les travaux domestiques, lebricolage de précision (peinture, tapisserie...), I'entretien des

parterres. On noa là, cependant, que des tendances générales,

qui demandent à être nuancées par I'examen des cas

individuels, et en tenant compte de ce qui fait la spécificité des

situations observées. Avant la retraite de leur conjoint, lesfemmes étaient considérées comme polycompétentes, en dehors

de Ia période des congés, au cours de laquelle elles se

déchargeaient éventuellement de certains travaux. Par ailleurs,la présence du conjoint peut venir perturber un << ordre > (au

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Le retour à ierue du marin retraité

sens de rangement, mais aussi d'usage des lieux) dont ellesassuraient auparavant la direction, quitte à temporiser le tempsdes congés.

La répartition du trqvail domestiqueLa question d'une éventuelle nouvelle répartition du travail

domestique n'est pas envisagée de façon homogène par lescouples rencontrés. L'image de la femme de marin, à la foismère et maîtresse de maison superlative est certescommunément valorisée par les conjoints, mais certainshommes, plus que d'autres, ont une conscience précise desservitudes. du quotidien. Pour ceux-là, comme le prévenantM.O., la ietraite sonne l'heure où il pourra venir seconder safemme dans des travaux qu'il juge trop pénibles pour elle :

Le potager, c'est moi. J'avais un potager, ici, avant, nais bon, ilfallait tonber à Ia bonne période pour bêcher. Quand je n'étaispas là, c'était Ie beau-père qui foisait. Planter les légumes ettout çq, c'est aussi des corvées, et pour une femme, je disais :( Ce n'est pas tellement une solution d'aller remuer la pelle ettout ça (Madame : La terre préparée, c'était très bien). Doncj'ai dit: < On met Ia pelouse partout et on verra ça après, enretraite ù.

il ne s'agit pas pour ce couple d'une remise en cause de ladivision sexuelle traditionnelle du travail. Au contraire, laretraite va permettre de revenir à une situation plus << normale >pour la femme, ce qui n'empêche pas le couple d,effectuernombre de travaux domestiques ensemble. M. O. décrit ainsileur collaboration au jardin :

Quand on est dans Ie jardin, quand je tonds, maintenant c'estmoi qui tonds, tu fais les fleurs et tout ça. Et Ie soir, il fautarroser, on arrose tous les deux. Comme j,ai de I'eau dans lejardin, je tire de I'eau, j'ernoie les arrosoirs.

Certains hommes ont une conscience plus floue des effortsdomestiques déployés au quotidien. Cette prise de conscienceleur a été épargnée tout au long de leur vie active, d'autant plus,on l'a vu, que les congés pouvaient constituer une sorte deparenthèse. C'est le cas de M. Q., qui a consacré toute sonénergie à sa carrière de capitaine et a été totalement déchargé

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des soucis domestiques par une femme ( pygnalionne > (Singly(de) 1996).

- Monsieur : On connaît son épouse mais on ne connaît pas

toutes les choses à fond. Il y a beaucoup de détails que iedécotmre, quoi, et que ie ne connaissais pas auparnant, une

fuite à un robinet, des bricoles à faire, que ie ne faisais pas

avant.

- Madame : Voilà, pour lui c'est des bricoles, pour moi, ça a de

l'importance.

Aussi, Mme Q. a-t-elle entrepris d'initier son conjoint aux

responsabilités domestiques, ainsi qu'à la gestion du patrimoinefinancier. Peut-être aura-t-elle plus de succès dans ce second

domaine, car le premier ne I'intéresse guère. Ce qui est en jeu,

au-delà de la répartition immédiate des tâches, pas si lourdepour deux personnes qui disposent de temps, c'est lareconnaissance d'un travail invisible effectué pendant les

longues années où le conjoint était actif :

Une bêtise, hein.,. Quand vous tondez la pelouse, si vous ne

nettoyez pas la tondeuse, elle ne va pasfaire db ans. Elle afaitdix ans ovant ; là, elle rc fera phn db ans. Je prends sowenl çacomme comparaison Si j'avais vécu awsi décontractée que ces

messiews, on n'aurait pas ce qu'on a là, quond même. S'il avait

fallu payer jardinier, peintre, machin, truc chouette. Moi, ie le

fais parce que j'aime ça aussi, mais enfin, quelque part quandmême atæsi, c'est peut4tre bien d'aller à la plage tous les jours,mais en/in bon, il y a qund même... un efort aussi.

Ces efforts de socialisation s'étendent aussi à I'usage des lieux :

La lumière ! Quel sujet de discorde, la lumière ! Partout oùj'arrive, Ia lumière est allumée. Sur les bateaux, on n'éteintjamais Ia lumière.

La discorde reste cependant canalisée dans des limites assez

étroites, car l'arrivée à la retraite est vue comme une périoded'adaptation, période au cours de laquelle Mme Q. espère

instaurer de nouvelles routines quotidiennes jusque-là ignorées

de son conjoint. Lui parle << d'apprentissag€ rr, un apprentissageauquel il ne semble adhérer que mollement. Peut-être cetteforme de résistance passive conduira-t-elle sa partenaire àréviser ses attentes domestiques à la baisse.

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Parmi tous les couples rencontrés, ce qui est évoqué, ce n'estpas tant I'idéal d'une répartition égalitaire du travail entre lesconjoints que la socialisation des hommes à la préoccupationdomestique.

La cuisine

La cuisine est une activité qui peut être partiellementappropriée par les hommes. Dans la plupart des cas, il s'agitmoins d'une collaboration que d'une alternance de la prise deresponsabilité, les hommes se spécialisant davantage dans leregistre festif. Certains cependant, à I'image de M. O.,collaborent aussi au quotidien, voire se chargent d'une activitépeu appréciée par leur compagne, renouant ainsi avec uneactivité de leur jeunesse. Dans cette génération, en effet, denombreux marins du pont 4 ont commencé leur carrière commemousses, ce qui supposait alors de faire la cuisine pourI'ensemble de l'équipage. Ils en ont gardé la connaissance dessavoir-faire de base, et pour certains le goût de la cuisine. Cesconnaissances se sont parfois enrichies au contact des marinsafricains ou seychellois et des recettes exotiques peuvent venirenrichir le patrimoine culinaire familial. Au cours de cetteenquête comme lors de la précédente, de tels conjoints< cuisiniers > ont été rencontrés à plusieurs reprises et leursperformances étaient généralement appréciées.

À l'inverse, et en l'absence de telles pratiques, les femmesvoient leurs obligations culinaires augmenter sérieusement.C'est le cas pour Mme P., à qui l'élaboration quotidienne dedeux vrais repas pose problème et qui compare son casn à sondésavantage, avec celui d'amies à elle :

J'ai une amie, elle avait ses habitudes, elle avoit son jour pouraller à Quimper, et elle appréhendait vraiment. L'autre jour,elle me disait que Jinalement, ça s'était bien passé, mqis sonmari, c'est pareil, c'est lui quifait à manger, c'est lui quifaittout, alors elle a trowé ça bien. J'entends beaucoup dire, que cesoit mon beau-frère (M. O.) ou Denis J. Lui, c'est pareil, il aimefaire à manger. Alors les femmes, elles se sentent bien, quoi.Parce qae c'est ça qui est tenible. On ne sait plus quoifaire à

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4 Par opposition à ceux qui favaillent ( à la machine >.

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manger. Moi, ie passe (nec très peu, et lui... il faut touious un

hors-d'æntre, que ce soit le soir ou le midi et puis ie n'ai pas

erwie de faire la même chose non plus, parce que si ie faisaisdettx ou trois fois Ia même chose, là peut-être, il dirait : tt J'oidejà nangé ça hier t. Alors pour moi, c'est vrai que c'est... Çam'ennuie.

Mme P. se trouve ici réinvestie dans un rôle de femme au

foyer qu'elle interprétait à sa façon quand son mari naviguait, et

de façon allégée depuis que ses enfants ont quitté la maison.

L'arrivée de son conjoint correspond pour elle à un

alourdissement des contraintes domestiques et à une

fiansformation de son rythme de vie qui la conduit à déclarer :

Quand les hommes sont là, ça change complètement la vie.

Franchement. Les premiers temps, ça va très bien, on aI'impression que c'est des vacances, mais après, petit à petit, on

commence à sentir... ie ne sais pas, on a I'inpression d'êtreprisonnière peul-être, je ne sais pas. n faû que les repas soient

faits à l'heure, il faut que... Je ne sais pas, moi, il y q toule une

notnelle vie.

Ces phrases sont les premières de I'entretien. Elles sontprononcées alors que le conjoint n'est pas encore présent. MmeP. prend des précautions, dépersonnalisant le propos (< les

hommes ll, ( ça D, ( on >l), mais en même tempso tout se passe

comme si elle voulait résumer d'emblée une impression fortequ'elle n'aura peut-être pas I'occasion de transmetFe au cours

de l'entretien collectif. On remarque aussi que, tout comme lacharge mentale que représente I'obligation culinaire, l'emprisedu conjoint sur le temps quotidien est vécue comme unecontrainte aussi forte que la réalisation concÈte des tâches.

À I'inverse, le couple O., assez fusionnel pourtant, définitI'autonomie de chacun par la souplesse des attentes à l'égard duconjoint, que ce soit en termes d'horaires ou d'activitéspartagées :

Madame : On fait certaitus choses ensemble, mais pas tout nonplu. On est quand même indépendants, à côté, Moi, je vais allerfaire les cottses, je vais aller là où je veux. Tu ne vas pas être lùm,ec ta montre : < Elle n'est pas encore arrivée ,), olt (( II fautqu'elle soit là à telle heure >. Moi, c'est pareil, si t'as erwied'aller voir des copains, tu vas. On aime bien être ensemble,

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mais chacun garde quond même une autonomie à côté. Deuxtélnisions. Chacun regarde son programme.

Il est vrai qu'une division sexuelle du travail moins rigidefacilite ces compromis. M. O. cuisine, on l'a vu. En l'absencede sa femme, il prend facilement le relais.

Trouver sa place

Aniver à la retraite, c'est pour le marin trouver sa place dansun espace privé auparavant peu pratiqué. Cela relève en partiede son initiative, mais il revient aussi à sa compagne de luiménager cette place. Dans la plupart des couples renconûés, descompromis sont élaborés, qui tentent de ménager les aspirationsparfois contradictoires des conjoints.

Dans l'espace domestique

S'il y a débat autour de la maîtrise de l'espace domestique,c'est que les hommes ont parfois des difficultés à sel'approprier. C'est en tout cas l'objet de maintes anecdotes.Même les zones généralement connotées masculines leur sontparfois contestées. M. U. est un ancien capitaine qui a < malfini 5 > sa carrière et rêve encore de convoyer des bateaux deloautre côté de l'Atlantique. Son énergique épouse l'a aidé àsurmonter ses diffrcultés de fin de carrière. Par contre, elleaccepte mal les modifications de l'utilisation de I'espacedomestique que voudrait introduire son mari. Au jardin parexemple:

Je voulais installer un pigeonnier, mais ma bonne femme n'estpas trop d'accord. Ça va fufriser son paysage. Il y a souvent despigeons saavages qui viennent Ià, des tourterelles, parce que jemets de la graine. Moi, c'est mon plaisir de voir ça.

Un ordre avait été mis en place avant la retraite, que I'arrivéedu conjoint vient perturber. Chacun a sa représentation de laconfiguration souhaitable de I'espace domestique et de I'usagequi peut en être fait, mais ces représentations ne convergent pasnécessairement.

r Pour se voir confier le commandement d'un thonier, un capitaine doit avoirde bons résultats, faute de quoi, après quelques campagnes peu satisfaisantes,le commandement lui est enlevé, situation qu'a connue M. U.

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On s'engueule. Je n'ai pas I'habitude de me faire commander,

alors il y a des fois, il y a des... Ça ne va iamais loia mais on

voit que ce n'est pas pweil. Quand on a des conges d'un mois et

demi, Ia bonnefemme, elle laisse passer, quoi. 1...1 I'e garage,

c'est moi, et encore... parce qu'nant, c'était du ciment, comme

dans tous les garages, et elle a voulu mettre du carrelage.Impeccable. C'est propre et tout, mais quand il pleut, il faullaisser la voiture dehors pour ne pas salir. Non mais ça ne va

pas ! C'est suiet à discussion. J'ai mon établi en bas avec totts

mes outils. Mon petit-lîls, il vient avec moi. Alors, elle arrive des

fois, on est en train de taper et elle dit : <t Vous ne tapez pas strle carrelage. Vous allez cæser le carrelage ! >.

Cet exemple nous montre qu'en I'absence de compromis, ilpeut y avoir lutte pour I'appropriation de certains espaces. Lapropension à la surenchère domestique de la part de certaines

femmes qui trouvaient dans l'excellence ménagère lajustification de leur place au foyer tend à aggraver le conflit. Lecouple U. envisage de déménager vers le Sud, afin d'échapper à

I'emprise du milieu marin local. Ce projet pennet aussi de

fantasmer la sortie du conflit domestique par I'appropriationcommune d'un nouvel espace, au sein duquel les routinesquotidiennes seraient à construire de concert.

Le lit conjugalLe lit conjugal constitue un de ces espaces communs,

auparavant unilatéralement approprié par les femmes la majeurepartie du temps. Dormir quotidiennement à deux demande aussi

un réapprentissage, qui n'est pas toujours couronné de succès.

Mme P., par exempleo se plaint du fait que non seulement, au

départ, son mari prenait toute la place, mais en plus il ronfle.Situation classique, mais qu'elle doit affronter aujourd'huiquotidiennement. Plutôt que de faire chambre à parq solution àlaquelle M. P. est fermement opposé, Mme P. prend désormaisdes somnifères. Pourtant, le couple est désormais seul dans unegrande maison et dispose de plusieurs chambres disponibles,mais le lit commun est un espace hautement symbolique de lasexualité du couple (Monsieur : << On ne va quand même pas

faire chambre à part à 50 et 53 ans. >). Certes les conjointsdisposent du temps et de I'espace nécessaires pour se retrouverselon leurs désirs, mais faire lit commun multiplie les occasions

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de rencontre et permet de simplifier les formes de la demande.A I'inverse, le fait de faire chambre à part peut être ressenticomme une forme de désolidarisation et suppose de trouver denouvelles formes de négociation pour exprimer une demandesexuelle. En matière de mode de vie à la retraite, les exigencesde M. P. se limitent à la table et au lit, qui symbolisent à euxseuls la << normalité > conjugale. En dehors de ces deux tempscommuns de la journée, il pêche, bricole..., libre à sa femme des'organiser comme elle l'entend. Trouver sa place, ce peut doncêtre affirmer sa présence au sein d'espaces et de temps limités,mais non négociables.

Négocier la dîstance conjugale extérieure

Dans ces couples éloignés de façon récunente pendant la vieactive, I'attitude conjugale de chacun ne présentait pasnécessairement de stabilité temporelle. L'attitude fusionnelle dutemps des retrouvailles alternait avec une attitude indépendantependant la durée de I'embarquement. Dans plusieurs des casexposés précédemment, nous avons vu que l'un des conjointspouvait éprouver des difficultés à abandonner son attitudeindépendante, tandis que I'autre rêve toujours de fusionconjugale. Des écarts qui se creusent de façon tropprofondément conflictuelle peuvent ouvrir la voie à unepossible séparation, en cas d'échec de la négociation conjugale.

Penchons-nouso pour terminer, sur un exemple denégociation conjugale visant à réduire les divergencesd'attitudes et à faire évoluer la distance conjugale. M. L. est unmécanicien parti prématurément en retraite suite à un congémaladie de longue durée. Sa femme fait des ménages chaquematin, partageant son temps entre deux employeurs. Lespremiers temps de la retraite sont difficiles, Mme L. se voyantcontrainte de limiter son attitude indépendante et M. L. neparvenant pas à satisfaire ses désirs fusionnels :

Madame : Ah si, les six premiers mois, ça a été dur, pour lui etpour moi. Je ne sovais plus comment organiser mes journées ettout ça. Il était Ià... Quand il anit à bricoler autour de lamaison, dans Ie jardin et tout ça, ça allait, mais dès qu'il n'avaitplus rien à faire, il disait : < Où on va aujourd'hui ? On va ici,on va là l. II était toujours à demander à partir, à partir, à

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partir. Mais, ie dis, mais on ne peut pas. On ne peut pas allerembêter les gens comme ça. Ou alors quand mon beau-ftère

rentrait d'Afrique, il était tout le temps là-bas.

Mme L. est alors conduite à planifier les activités de son

conjoint quand elle part au travail : soins à sa mère invalide,

cuisine, jardinage... Par contre, si elle n'a pas renoncé à son

activité, elle a appris à brider ses désirs d'indépendance pour

accompagner les activités de son conjoint I'après-midi :

- Iæs six premiers mois, ie me suis dit : < Ce n'est pas possibleje ne vais pas powoir vivre avec lui entre les pattes toute Iajournëe 4 et puis si. Sornent, hei4 i'ai étë obligée de laver mon

linge le soir parce qu'il voulait partir dans Ia journée. Ah, tu

feras ça après, ceci, cela.

- Question : Et il voulait tout Ie temps que vous alliez avec lui ?

- Madame L : Ah oui, tout seul, mon mafi ne va pas promener'

Là maintenant, il va au match, il ne veut pas y aller tout seul. IIn'a pas de copains pour aller au match. Non, on est tout letemps ensemble, on fait des marches ensemble. On rattrape le

temps... je pense que lui... on n'a pas vécu beaucoup ensemble,

alors il veut maintenant qu'on soit ensemble. Non, ie m'habitueet ça me plaît. Qu'est-ce que vou:t voulez ? Ça je pense que si iepartais avant lui, un iour, il serait malheureux. II seraitmalheuretu et c'est ça que ie voudrais, I'habituer à s'occuper

de tout. J'arrive maintenant à le faire aller à Ia poste ou ...(soupir).

Coest une autre vision de la vie conjugale qui nous est

proposée ici. Elle s'inscrit dans une forme de continuité par

rapport aux rôles précédemment occupés par Mme L., même

s'ils ne correspondent pas à ceux qu'elle avait anticipés. Mèreet épouse superlative du temps où son conjoint était embarqué,

elle le demeure à son seul usage désormais. Non que M. L. ne

participe pas aux tâches domestiques, bien au contraire, mais

s'il en est I'exécutant" Mme L. en reste le chef d'orchestre. [l ya ici partage des tâches sans qu'il y ait vraiment partage des

responsabilités. Mme L. s'en accommode (< Que voulez'vous ? >) avec une forme de fatalisme. Il faut dire qu'une série

d'événements biographiques, intervenus brutalement, I'ontconduite à s'inscrire de façon accentuée dans ce rôle de prise en

charge de I'ensemble des membres de la famille. Au fond, pourM. et Mme L., on reste dans I'esprit de la distribution

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parsonienne des rôles 6, malgré quelques écarts dansI'interprétation concrète qui en est donnée. Ces écarts sontjustement ce qui permet de négocier un compromis entre lesdésirs d'indépendance de Mme L. et les attentes fusionnelles deson conjoint. Conformément au modèle parsonien, M. L. a étéle pourvoyeur de revenus principal de la famille, jusqu'à sondépart en retraite, tandis que sa femme ne s'est portée quesecondairement sur le marché du travail, après avoir < élevé >ses enfants en restant au foyer. Le fait que son mari ne touchepas une retraite complète fournit à Mme L. un excellent prétextepour continuer à travailler, même si cela ne plalt qu'à moitié àson conjoint. Cela justifie aussi qu'il s'implique davantage dansles tâches domestiques qui relèvent ( normalement > dudomaine de compétences féminin. Pendant les quelques annéesqui les séparent de la retraite de Mme L., son conjoint auraappris à occuper utilement ses matinéeso hors de la présence desa femmeo tandis qu'elle-même, faisant retour sur une attitudeadoptée autrefois pendant les congés, aura su se rendredisponible et partager des temps communs.

Cette étude est double, a lu foil""ntrée et < déspécifiée >, ausens de Jacques Commaille (1993) 7. Centrée sur un milieucaractérisé par une forte dissymétrie des engagements familiauxet professionnels des hommes et des femmes pendant le tempsde I'activité professionnelle. Déspécifiée dans la mesure où cescouples constituent une sorte de lieu-laboratoire, un espacesocial limité incarnant des éléments stéréotypiques de lasituation des hommes et des femmes au moment du passage à laretraite. Si, pour tous et toutes, I'arrivée à la retraite accroît

6 Rappelons que I'homme y assure le rôle instrumental, de pourvoyance desrevenus de la famille, kndis que la femme assure I'intégration affective de lafamille et se charge des tâches ménagères.7 Pour Jacques Commaille, une opération de déspécification consiste àétudier des situations particulières, non tant pour rendre compte de processusextrêmes et sÉcifiques que pour rendre plus visibles des processus sociauxgénéraux.

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considérablement les possibilités de temps partagés, pour les

couples étudiés, la vie commune à plein temps constitue une

nouveauté radicale. Ce qui se joue pour tous, c'est un nouveau

rapport au temps et à I'espace domestique et extérieur.L'exemple des marins et de leurs compagnes nous monhe que

trouver sa place, pour les un(e)s et pour les autres, c'est pouvoirparticiper à la défînition de ce que vont être les temps et les

espaces personnels et les temps et les espaces commwn.

Les femmes intronisent le << rentrant > dans un universdomestique dont il n'avait qu'une connaissance partielle, car

limitée au temps extra-ordinaire des congés. Elles s'engagent

dans un travail intensifde socialisation du conjoint. Il ne s'agitpas tant de revoir la répartition des tâches, de remettre en cause

la division conjugale E du travail, au nom d'un idéal égalitaireque de partager la préoccupation domestique. Unepréoccupation exclusivement assumée par elles auparavant et

dont la reconnaissance à I'heure de la retraite valide a posteriori

une identité de femme autonome.

Du caractère plus ou moins fusionnel ou indépendang plus ou

moins centrifuge ou centripète des attitudes de chaquepartenaire et du caractère plus ou moins compatible de ces

configurations d'attitudes peuvent naltre des conflits et une

renégociation de la distance conjugale (Caradec 1996). Ladéfinition du degré d'autonomie souhaitable apparalt aussi

directement en relation avec les représentations du temps que se

font les conjoint(e)s. Pour les un(e)s, préserver son autonomieo

c'est pouvoir réaliser les activités qu'ils(elles) ont planifiées,sans être entravé(e)s par des projets de dernière minuteformulés par le(la) partenaire conjugal(e). Pour les autres, celapasse par une certaine souplesseo la volonté expliciæ de ne pas

s'enfermer mutuellement dans des horaires trop stricts ou unprogramme trop dense. On peut faire I'hypothèse que ce rejetd'une planification trop serrée du temps, au moins dans cettepremière période de retraite, explique le peu doempressement de

la plupart des personnes rencontrées à s'engager dans des

activités associatives, qu'elles soient sportives, artistiques,

I J'emprunte ici, en le travestissant, le titre de I'ouvrage de Marie-AgrrèsBarrère-Maurisson (1992) la divistonfaniliale du trwail. Lavie en double.

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Le retour à terre du msrin retraitë

politiques ou autres. On conçoit aussi que les efforts fémininsde socialisation du conjoint soient plus ou moins couronnés desuccès suivant que leur représentation de I'usage souhaitable dutemps rencontre ou pas celle de leur partenaire.

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