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La Serbie Et Le Mouvement National Bulgare [1918]

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Studiu despre relatia dintre Serbia si miscarea nationala din Bulgaria.

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  • :

  • RICAN COMMISSION

    NEGOTIATE PEACETHE LIBRARY

    B1BL1QTHQUE DES PEUPLES BALKANIQUESM 5

    Iv. Mich. MINTSCHEW

    La Serbieet le

    Mouvement national bulgare

    UE3

    Prix : Fr. 2.

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    Lausannets 0*0

    Librairie centrale des nationalitsW1918 &%&

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    La Serbieet le

    Mouvement NationalBulgare

    no113

    Lausanne

    Librairie centrale des nationalitsRue Caroline

    1918

  • cDepartment of

    1919.

  • PRFACE

    Le voleur attrap et puni : voil le titreque Ton pourrait donner l'histoire de la politiqueextrieure serbe, en vue de l'extension de laSerbie vers les contres situes au sud et l'estde cette dernire, si, toutefois le vol avait en poli-tique le sens qui lui est attribu dans le Codepnal et s'il existait une sanction des crimes com-mis contre le droit des gens.

    Cependant, l'histoire a sa morale, il y a enelle une tendance laisser triompher les ides dedroit, d'ordre et de justice. Souvent cette force intimedemeure longtemps l'tat latent, mais elle clate unbeau jour sous forme de guerre ou de rvolution.

    Au moment mme o les convoitises crimi-nelles des Serbes se donnaient carrire par la poli-tique de l'Etat et dans l'aveuglement d'un mouve-ment national, la force historique appele ame-ner dans le conflit serbo-bulgare le triomphe de lamorale et la sanction du droit, se dveloppait enBulgarie.

    Tandis que les convoitises serbes taient arti-ficiellement veilles par la propagande d'aventu-riers de la politique et de l'intelligence, et se trou-vaient tayes par la ncessit imprieuse, pour laSerbie, d'une issue vers la mer, en Bulgarie lapousse vers la Macdoine tait la manifestationd'un' instinct organique, l'expression d'un violentamour et d'une infinie compassion pour le frreopprim ainsi que de la nostalgie du foyer occuppar l'tranger, la projection d'un attachement pro-fond autant qu'inconscient, naturel autant qu'irr-ductible, celui de la mre pour l'enfant, chair desa chair et sang de son sang. Ici, aucun calcul,aucune arrire-pense.

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    Nous considrions comme une folie les effortsdes Serbes pour prouver au monde que la Mac-doine tait serbe. Jusqu'en 1913, peu d'excep-tions prs, personne chez nous ne jugeait nces-saire d'engager des polmiques cet gard avecles agents serbes, ni de plaider noire cause auprs de l'opinion publique europenne. La cata-strophe de l'anne 1913 nous a appris qu'il nesuffisait pas pour nous de sentir la Macdoine bul-gare, mais que nous devions bien plutt nous pn-trer de cette vrit de faon consciente pour pou-voir, forces gales, la dfendre par la paroleaussi bien que par les armes et pour pouvoir pui-ser l'nergie ncessaire l'accomplissement denotre devoir patriotique cette double sourced'une volont indomptable, savoir : le cur etl'esprit.

    11 est ncessaire pour nous de connatre l'his-toire de nos relations avec les Serbes dans lepass, afin que nous sachions rgler celles-ci l'avenir.

    Il est indispensable que nous dvoilions aumonde la vrit avec la conviction dterminante quirsulte de l'histoire sous l'gide de la logique im-partiale des rflexions d'observateurs trangerssur les relations serbo-bulgares.

    En ce qui nous concerne, nous serions troptlatt que la prsente brochure pt y contribuerquelque peu.

    L'AUTEUR.

  • TLes mouvements nationaux clans la pninsule

    des Balkans.

    En mars 1830 une commission turco-russese trouvait en Serbie pour le trac des frontiresde l'Etat demi indpendant nouvellement pro-clam. Les plnipotentiaires russes, crit Cuni-bert *.), taient des jeunes gens intelligents, cul-tivs, ayant de bonnes manires; ils apprirentvite la langue serbe, qu'ils parlaient la per-fection. A la tte de la dlgation turque setrouvait un homme grossier, sacrifiant aux plai-sirs les plus bas qui, soudoy par Milosch, cdasur tous les points. Tandis que les commissairesrusses parcouraient montagnes et forts et ta-blissaient les frontires du pays, Hadji Kian de-meurait dans ses confortables appartements enfumant tranquillement son narghil, sans se cas-ser la tte conserver au Padischah un kilo-mtre de plus ou de moins de territoire. Lesjeunes officiers russes par contre, zls au travail,surmontrent rapidement toutes les difficults etla Serbie se vit attribuer une contre notable-ment plus grande, quoiqu'en plus d'un endroit lapopulation s'oppost, les armes la main, aupassage des commissaires.

    Le firman de Tanne 1830 cdait la Serbie lessix districts de: Krana, Timok, Paratschin, Krus-chevatz, Starivlaschki et du Danube. En ralit,on ne remit la Serbie qu'une partie de cesrgions, la Porte n'ayant pas admis les procs-verbaux de la Commission de dlimitation dans

    *) Cunibert Essai historique, 1885, t. I, pp. 307 et 308(Cf. Nil Popoff, Rossia i Serbia, 1869. t. I, p. 234 (en russe).

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    toutes leurs parties. Pour obtenir le territoireque les traits lui avaient cd, Milosch duts'engager avec la Porte dans de longues ngo-ciations au cours desquelles la cavalerie de St-Georges donna largement. Un peu plus tard,il sut' de nouveau mettre profit la situationembarrasse de l'Empire gravement menac enEgypte, en Albanie et en Epire par des soul-vements qu'il avait frquemment dchans ouencourags.

    La Serbie et la Grce russirent presque enmme temps, de longues annes avant la Bul-garie, s'organiser en Etats indpendants, celagrce une situation gographique pleine d'a-vantages.

    La prtendue renaissance tardive de notrepays n'y est donc pour rien. Les tentativesd'affranchissement, au contraire, ne manqurentpas. Elles commencrent ds le lendemain del'asservissement. Au commencement du XlXmesicle les insurrections en Bulgarie n'taient pasrares au moment mme o les mouvements natio-naux conscients commenaient se dessiner dansl'Empire Ottoman. Mais un rapide coup d'ilsur la carte suffisait montrer au Bulgare quesa patrie ne pouvait tre libre qu'aprs laSerbie, la Roumanie et la Grce. Vouloir s'man-ciper avant, c'tait s'exposer une lutte ingaleservant surtout l'affranchissement des autres. Serendant bien compte qu'il aurait la libert lejour o les Roumains, les Gres et les Serbescommenceraient en jouir, le peuple bulgarea toujours suivi avec une sympathie non dgui-se les mouvements nationaux de ses voisins.Ses propres hadouks et ses propres rvolu-tionnaires accouraient se battre aux cts deceux-ci et verser leur sang pour la grandecause. Ds l'anne 1821, le mouvement des ht-ristes valaques et la campagne d'Ipsilanti furentsoutenus par la plupart des Bulgares.

    Lors des rvoltes grecques, des milliers deMacdoniens accoururent, sous les drapeaux desinsurgs et rpandirent leur sang pour la libert

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    hellnique*). Au nombre des hros les plus envue de ces mouvements figure une longue listede noms bulgares. Les exploits de certains d'en-tre eux sont clbrs dans les chants nationauxgrecs d'un mme trait que ceux des hros grecs.L'insurrection grecque de 1827 fut immdiate-ment populaire en Bulgarie sous le nom de zavera (conspiration). Y prirent part parmiles Bulgares connus : Hadji Hristo, de StaraZagora,"en qualit de chef de la cavalerie bul-gare ; Hadji Steftcho, d'Okhrida, comme vovodede l'infanterie bulgare et surtout Marko Bojar,de Voden, dont les grecs hellnisrent le nom enMarko Botzaris"), sous lequel" il a glorieusementpass la postrit. Chez les historiens grecseux-mmes il est fait mention de bon nombrede hros Bulgares des insurrections grecques.

    Les hauts-faits de Kara-Georges, ainsi queles insurrections postrieures des Serbes enthou-siasmrent les vaillants volontaires de la mon-tagne bulgare, qui, avec l'ardeur, la vaillanced'autours, volaient au combat o, comme fousde la libert si longtemps souhaite, ils mou-raient pour le frre, hroquement, le sourireaux lvres.

    Voulant mettre profit ce ftichisme duBulgare pour l'ide de libert, Serbes, Grecset Roumains, ds les premires annes de leursoulvement national se mirent parcourir enagitateurs les territoires bulgares, recrutant deshommes pour leur cause et prparant le terrain un futur agrandissement de leurs Etats deve-nus indpendants. Les Grecs traaient jusqu'auxpentes des Balkans les frontires d'un nouveaugrand Empire Byzantin; certains mme, dousd'une imagination plus fantaisiste, allaient jus-

    *) Dr. B Both. Geschichte der christlichen Balkanstaaten,Leipzig 1917.

    **) Cyprien Robert. Les Slaves de la Turquie, p. 302 : L'unde ces Slave, Botchar, n Vodena, migr au Mont Soulion, estdevenu clbre dans toute l'Europe sous le nom grec de Botzaris .

  • qu'au Danube. Les Serbes, eux, voyant dans lesBulgares un peuple de mme race, susceptibled'tre assimil, rvaient d'une Grande Serbie etdu Royaume de Douschan. Les Grecs mettaient profit l'organisation ecclsiatique laisse entreles mains du Patriarche de Constantinople, tan-dis que les Serbes invoquaient l'affinit de raceet de langage. Et c'est ainsi que, gagn beaucoupplus tard l'ide nationale, le rveil nationaldu peuple bulgare tait aussi, au commencementdu XlXme sicle, moins avanc que celui deses voisins. Il s'insurgeait contre le rgimeturc, parce qu'il y voyait une complte ngationde la libert, ainsi qu'un obstacle la civilisa-tion et au progrs europens. Il oubliait sanationalit, frquentait les coles grecques,parce que avide de s'instruire et donnait l'hos-pitalit aux agitations rvolutionnaires des Ser-bes, parce que amoureux de l'indpendance.

    La domination turque avait fig sous une-forte couche de glace sculaire, les lmentsethniques des Balkans. Les ides humanitairesdu XVIIIme sicle y projetrent les rayons deleur chaleur; la fonte vint et avec elle e mou-vement. Pour les raisons que nous avons faitressortir dans le rapide expos historique ci-dessus, le mouvement commena par les pro-vinces situes aux confins de l'Empire ottoman.Voil pourquoi tant d'eaux de la fusion desglaces ethniques bulgares durent se dverserdans les courants chauds avoisinants.

    Ce ne fut pas le seule raison. La populationbulgare se trouvait sur la route des armes turquesqui allaient touffer les frquentes meutes deSerbie, de Grce et de Roumanie. Et, cettepoque, le Turc ne faisait pas de distinctionentre les nationalits; il n'y avait pour lui quedes rayas roum milleti . La haine et la soifde vengeance causes par tout mouvement d'in-surrection en Serbie, en Grce ou en Roumanie

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    retombait sur la tte des Bulgares. Il en taitde mme pendant les guerres russo-turques quivalurent aux Roumains, aux Serbes et aux Grecsl'indpendance politique et ne laissrent auxBulgares que foyers dtruits, villages anantiset territoires abandonns.

    Pendant les guerres de 1806, 1811, 1829,1852, 1854, les Bulgares afflurent dans les rangsdes armes russes, et au dpart de ces derni-res, ils fuyaient avec elles, s'expatriant en massepour s'installer en Bessarabie, Brala, Galatz,Bucarest et Kralvo*).

    Le premier veil de la conscience nationalefut l'uvre de Passy, moine du Mont Athos,qui crivit en 1762 son Histoire slovno-bulgare.Il rvla le brillant pass du peuple bulgare,l'invitant en tre fier et se librer de l'in-fluence trangre, spcialement de l'influencegrecque. Il attira l'attention sur le caractresacr de la langue nationale et donna les motifsdu culte du pass. Son uvre fut continue parSophrony, Ioury Vnline, Apriloff, Nophyte deRila. L'instruction prpara le mouvement reli-gieux. Les Bulgares s'engagrent dans la luttepour la libration du joug spirituel du Patriar-chat de Constantinople. Lutte d'une vhmenceparticulire en 1860 pour finir en 1870 par unevictoire complte des Bulgares.

    Par firman de la mme ann, la SublimePorte reconnut l'Exarchat bulgare. Le Patriar-chat refusa d'approuver ce firman. Le 11 mai1872, les Bulgares, officiellement soutenus, pro-clamrent l'indpendance de l'Eglise bulgare.Certains diocses de l'Exarchat taient dtermi-ns par le firman lui-mme ; d'autres devaientl'tre au moyen d'un plbiscite et cela, confor-mment l'art. 10 du firman. La majorit desdeux tiers de la population d'Okhrida et de Sko-pi (Uskub) se pronona contre le Patriarchat

    *) Georges Bousquet. Histoire du peuple bulgare. Paris,1909. p. 111.

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    et la Porte dlivra les brats pour la nomi-nation d'vqnes bulgares dans ces villes.

    Okhrida et Scopi sont le cur de la Mac-doine. Cette victoire bulgare si inattendue, quiavait en ralit un caractre plutt politique quereligieux, troubla la fois Serbes et Grecs, et,ds ce jour, commencrent entre les diffrentesnationalits de la Macdoine les luttes qui firentnatre la fameuse Question Macdonienne .

    Pour raliser leur unit, les Bulgares devaientdsormais combattre non seulument contre legrand Empire ottoman qui renfermait dans sonsein les territoires bulgares, mais encore contredeux nouveaux ennemis: la Grce et la Serbie,dj en possession de leur indpendance, et dispo-sant de puissants moyens de propagande moraleet matrielle. C'est surtout contre ces deux der-niers adversaires que se soulevrent l'cole etl'glise bulgares, tandis que les hadouks et lescomits rvolutionnaires, eux, luttaient contre lergime turc.

    La sympathie que l'Europe portait aux po-pulations chrtiennes de Turquie, les intrtsconomiques et politiques des grandes puissanceseuropennes, joints au dsir de celles-ci de voirla tranquillit rgner dans les Balkans, taientune garantie suffisante de l'obtention, tt ou tard,par la Bulgarie d'une libert dont la Roumanie,la Serbie et la Grce bnficiaient dj.

    Le firman de 1870 et le schisme existantentre l'Eglise grecque et l'Eglise bulgare consti-tuaient une autre garantie que l'lment bulgarene subirait plus l'influence religieuse et scolairedes agitateurs grecs; mais l'agitation serbe quise rvlait faisant valoir la communaut de race,l'identit de religion, la parent du langage, leprestige du slavisme causa ds cette poque auxmeneurs du peuple bulgare de srieuses craintesque la suite des vnements justifia amplement.

  • il

    II

    Convoitises serbes sur territoires bulgares.

    Au dbut de Tanne 1833., Krouchvatz,ville situe dans un des districts en litige, vi-vaient deux riches spahis de religion musulmane,les frres Frenghvitch. Selon l'habitude dutemps d'aprs laquelle les musulmans enlevaientles jeunes chrtiennes pour les enfermer dansleurs harems et leur faire embrasser la religionmahomtanc, les deux frres Frenghvitch s'em-parent un beau jour de deux jolies paysannes,deux surs, et les enferment avec leurs femmes.Le procd rvolta la population des districts deKrouchvatz et de Paratchine. Elle se soulevacomme un seul homme contre les musulmans etexera des reprsailles. Miiosch, qui n'attendaitque cela, donna l'ordre ses troupes de la fron-tire d'entrer en contact avec les rvolts, de leurprocurer des armes et de les pousser contre lesTurcs. De sorte que la rvolte s'tendit encore etque la population turque dut s'enfuir Lescovetzet Nisch, villes principales des pachaliks avoisi-nants.

    Assur du succs de l'insurrection dans lesdistricts en litige, Miiosch propose au deux pachasvoisins sa mdiation pour l'apaisement de l'-meute, en dclarant que s'ils font avancer leurstroupes contre les districts de Krouchvatz etde Paratchine il ne sera pas en tat de retenirla Serbie entire d'intervenir les armes la main.

    Finalement il proposa un armistice au coursduquel les districts rvolts seraient gouverns, l'instar de celui de Starovlakb, par des as-sembles spciales, qui sigeraient dans ces deuxvilles et se chargeraient de l'administration dela justice et de la perception des redevancesjusqu'au rglement dfinitif de la question parConstantinople. Ces conditions furent acceptespar les pachas. A la suite de ce succs, Miioscheut de nouveau recours aux moyens qui luiavaient russi vis--vis de la Sublime Porte sans

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    oublier la corruption. Tant et si bien que lesmaires et les assembles ne dpendant que delui, Milosch devint le matre rel des deux dis-tricts en litige. Il s'effora alors d'obtenir unereconnaissance formelle des rsultats obtenus.

    L'annexion de ces deux districts opre, res-tait encore en dehors, le plus important d'entreeux, celui de Krana, qui se composait de ceuxde Kladovo, de Ngotine ainsi que des villes dumme nom et d'une partie de celui de Zatchar.Krana dpendait directement d'Ada-Kal qui,au point de vue administratif dpendait du pachade Vidin.

    L encore, la mme histoire se rpte. Mi-losch, profitant de nouveau des difficults cres la Sublime Porte par la rvolte d'Ali-Pachad'Egypte qui, la suite d'une heureuse campagneen Syrie, menaait Constantinople, russit sefaire cder en bonne et due forme ce qu'il avaitdj pris en ralit.Aux termes d'un firman de ''anne 1833, il

    reoit les territoires faisant partie du pachalikde Vidin et dans lesquels se trouvaient les villesde Ngotine, Zatchar, Alexinatz et Kniajevatz.Le firman fixait les limites de ces territoirescomme suit: la rive gauche du Timok jusqu'Vrajogrntzi, et de l, jusqu' la hauteur dite de Toupan . De l, la frontire allait jusqu' larivire de Vesdnitza, pour ensuite se diriger endroite ligne vers le sommet de Vrchka Tchouka.De ce sommet, elle passait par Zatvorna poliana,Ostritchva poliana, Babine-noss, le mont deKitka o le district de Vidin cesse et o com-mence celui de Belogradtchik d'aprs la divisionadministrative de la Principaut de Bulgarie del'anne 1879. De cet endroit, la ligne frontirese dirigeait vers Kadis-boas et traversait Ros-sovit-Kamen, Sveti Nicolas et Pissana Bouka,d'o elle sortait de la montagne et courait lelong de celle du sandjak de Nisch.

    Kara-Georges et ses compagnons d'armesn'avaient jamais mis le pied dans ces localits.Milosch russit enfin ainsi annexer son Etat

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    des territoires bulgares qui, comme tels, avaientprix part aux insurrections de Kara-Georges. Leurpopulation avait cru que la libert de la Serbieleur assurerait la leur.

    C'est ainsi que la premire tentative de laSerbie de s'approprier des territoires bulgarespar les moyens et mthodes de la diplomatieprouve de Milosch fut couronne de succs.L'assurance serbe en fut accrue et ce fut lepoint de dpart pour la Serbie d'un travail pa-tient et tenace en vue d'une extension de sesfrontires aux frais de l'Empire ottoman qui, enraison de sa faiblesse financire, conomique etpolitique, n'tait pas en tat de rsister de faonsrieuse et systmatique. Bien que les aspirationsnationales serbes fussent plutt orientes versl'est, o quelques millions de serbes pur-sangvivent sous la domination de l'Autriche-Hongrie,cependant ceux-ci ne partageaient pas les sen-timents de leurs connationaux du jeune Etatserbe: ils jouissaient d'un rgime plus tranquille,plus libre et plus civilis que celui sous lequelvivaient leurs frres de l'est. En outre la lutteavec la solide organisation politique et militairede l'Autriche-Hongrie n'tait pas aussi facilequ'avec la Turquie. Les dirigeants de l'Etat serbelargirent leurs plans de conqute en cons-quence vers l'est et commencrent travaillersystmatiquement leur ralisation. Or, durantles premires annes l'objectif fut la valle dela Morava.

    Il tait ncessaire de provoquer parmi lapopulation de la Pomoravie (valle de la Morava)des dsordres et des soulvements. Le rgimeturc d'alors offrait tout moment conditions etprtextes favorables pareilles fins. Aussi bien,la population bulgare aspirait-elle ardemment une vie plus libre, mme sous la dominationtrangre et la Pomoravie, de population bulgare,tait limitrophe de la Serbie.

    A l'occasion de runions et de mariages onse rendait souvent dans les villages voisins enpassant la frontire et l les Bulgares pouvaient

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    voir leurs frres mener une vie libre leur per-mettant de travailler tranquillement et de pros-prer sans avoir trembler devant des malfai-teurs turcs. En prsence de cette situation, illeur tait encore plus pnible de supporter lesviolences et les perscutions des Turcs migrsde la Serbie de Milosch. Ces derniers s'taientinstalls ici et passaient leur ressentiment sur lapopulation chrtienne locale.

    Le paysan bulgare considrait la vie d'outre-frontires comme un idal. Mais cet idal nepouvait tre atteint que par la runion laSerbie : vnement qui s'tait ralis sous sesyeux pour les six arrondissements (Nahis) quivenaient d'y tre incorpors. La population bul-gare de Pomoravie plaait toutes ses esprancesen la dilection chrtienne du chef des Serbes.Elle lui envoyt trs souvent des dputations quirengageaient tendre son autorit aussi surleur rgion comme il venait de le faire sur lepays de leurs voisins.

    Dsormais les soulvements furent aussi l'ordre du jour dans le pachalik de Ydin commedans celui de Nisch ; leur programme visait lemode le plus ais de libration, savoir : larunion la Serbie *).

    En 1835, seize villages des environs de Nischse soulevrent; l'anne suivante l'agitation gagnagalement Pirot. Encourage par la Serbie, lapopulation se souleva, s'arma, au dbut de gour-dins, de faux et de haches dans l'attente d'armesde ses protecteurs. Les armes arrivrent parfois,mais pas toujours. Milosch tira avantage de toutmouvement, soit pour lever certaines prten-tions auprs de la Porte, soit pour lui proposerses services en qualit de pacificateur **). Lessoulvements furent trs cruellement touffs.Vie et biens des paysans bulgares de Pomoravieservaient ainsi de monnaie d'appoint la Serbie

    *) D< St. Romanski. Documents autrichiens sur l'insurrectionbulgare de Nisch en 1841. (Publi dans le Sbornik de l'Aca-dmie des Sciences bulgare, t. XXVI.)

    **) Ibid.

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    pour acquitter les avantages petits et grandsobtenus de Constantinople.

    Ce fut surtout en 1841, lors du soulvementde Nisch, que les Bulgares eurent le plus souffrir.Le professeur St. Romanski, qui aux archivesd'Etat Vienne a tudi les rapports contempo-rains de l'agent diplomatique autrichien Bu-carest, ainsi que ceux des consuls d'Autriche Belgrade et Galatz et ceux de l'internonceautrichien Constantinople, nous donne d'mou-vants dtails sur les souffrances bulgares ainsique sur l'attitude perfide de la Serbie.

    Nil Popoff (c< La Russie et la Serbie II e vol.p. 122-129), qui raconte l'histoire de ce premiergrand mouvement rvolutionnaire bulgare, ajouteque l'on trouva chez les insurgs des lettres deMilosch les poussant la rvolte. Au su de quoila Porte exigea que Milosch quittt la Valachieet s'embarqut pour l'Italie. Nanmoins, fidle la nolitique traditionnelle de Milosch, la Serbiese donne l'air d'avoir dompt un soulvement ets'acquiert de cette faon auprs du Sultan lessympathies auxquelles elle est redevable du bratreconnaissant la modification survenue dans lasuccession au trne en faveur d'Alexandre Kara-Georgevitch.

    Il va sans dire que la raison principale dessoulvements bulgares et de celui de Nisch enparticulier, c'tait l'arbitraire de l'administrationturque. Les insurgs de Nisch demandaient l'ap-plication du hatichrit de Gulhan qui jusqu'un certain point poursuivait la suppression deces abus. Le soulvement de Nisch fut touffe aumilieu de cruauts inoues. Les atrocits turquesprovoqurent l'intervention de l'Europe, qui com-mena parler des Bulgares et de leurs droits.Les gouvernements russe et franais envoyrentleurs dlgus pour se rendre compte sur placedes plaintes des Bulgares ainsi que des cruautscommises par Sabri-Pacha, commandant deNisch. Le gouvernement russe envoya le sna-teur Kodinetz, et le gouvernement franais Blan-qui, membre de l'Acadmie franaise.

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    Blanqui *) ainsi que Kodiuetz **) tmoignentque l'insurrection de Nisch est Bulgare. La presseeuropenne, elle aussi, se mit parler du sou-lvement bulgare de Nisch, Pirot et Lescovetzet de la situation intolrable des Bulgares. Lesrevues les plus considrables et les plus influentesde France, de Russie et d'Autriche et, parmielles, la Revue des Deux-mondes , le VestnikEvropy firent largement accueil la dfensedes Bulgares insurgs de Nisch.

    Indpendamment des documents des archivesautrichiennes, publis dans l'tude du D r St. Ro-manski, la presse serbe de 1840 et des annessuivantes, elle mme, tmoigne que l'insurrectionde Nisch est une insurrection en territoire bul-gare d'une population bulgare.

    La conduite de la Serbie fut encore plushonteuse lors du soulvement de Vidin en 1851,soulvement que les Serbes abandonnrent sonpropre sort aprs l'avoir eux-mmes provoqu.

    Bien mieux il y eut trahison de la part dugouvernement serbe qui livra au gouvernementturc la lettre que les maires des arrondissementsde Vidin, Belogradtchik et Lom avaient adressau prince Alexandre Karageorgevitch pour leprier de leur donner des armes.

    Le prince Michel continua ultrieurement l'gard des Bulgares la mme politique, maismodifie en la forme, et, au point de vue de latactique, en conformit la situation et aux con-ditions nouvelles que ces derniers s'taient djcres aussi bien dans l'Empire turc qu'auprsdes grandes puissances europennes.

    La renaissance des Bulgares commena rela-tivement plus tard que celle des Serbes et desGrecs, la Bulgarie n'ayant t gagne que beau-

    *) Blanqui. Voyage en Bulgarie, Paris 1843, p. 177.**) Conf. Le rapport de Kodinetz dans l'ouvrage du Dr Ro-

    manski Documents autrichiens, etc. , dj cit.

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    coup plus tard aux ides politiques de l'Europedont elle tait isole; en revanche, la renaissancen'en fit que de plus rapides progrs. Le peuplebulgare, assoiff de civilisation, travailla soninstruction avec une ardeur surprenante pourl'Europe et inquitante pour ses voisins. Sous cerapport, il se distingue extraordinairement de sesvoisins, les Grecs. Tandis que ces derniers avaientparu sur la scne politique du XIXe sicle, lesarmes la main, le Bulgare inaugura son rveilpar l'impression de livres et par la fondationd'coles. Les tentatives srieuses de rvolutionen Bulgarie furent prcdes d'une longue p-riode d'efforts en vue de l'ducation du peupleen rveil. De telle sorte qu'il y eut en Bulgarieun foyer de lumire qui jusqu' un certain pointmaintint l'quilibre entre le progrs politique etle dveloppement intellectuel du peuple bulgare.C'est dans le caractre propre que la renaissancebulgare reut de ce foyer qu'il faut chercher lesvertus et de la mentalit du peuple bulgare etde sa volont grce auxquelles il repoussa lergime politique du Sultan, secoua le joug spi-rituel de l'Eglise grecque et put triompher destentatives de conqute des Serbes, des Grecs etRoumains arrivs avant lui l'indpendance po-litique.

    Les coles grecques de Bulgarie constituaientun bien plus grave danger que la tyrannie desTurcs, car elles taient en train de dnationaliserles Bulgares. En regard d'un rseau trs tendud'coles grecques, les Bulgares, eux, ne dispo-saient en 1750 que de 21 cellules souterraines demonastres o, la drobe, des moines de bonnevolont donnaient aux enfants un enseignementreligieux qui dans une certaine mesure pouvaitcontribuer l'entretien de la nationalit bulgare.En 1780, il y avait 48 de ces cellules, en 1834leur nombre ateignait 189, dont 38 dans les villes.Si dans ces coles primitives on enseignait lalecture de la littrature ecclsiastique slave, onenseignait, en revanche, rarement l'criture etle calcul. C'taient des coles monastiques du

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    Moyen Age, dans lesquelles les lves se prpa-raient la prtrise. Une nouvelle tape de l'uvrescolaire bulgare fut marque par les coles lino-slaves ouvertes en certaines villes par des Bul-gares partisans des Hellnes. C'est l que seprparrent les premiers instituteurs des colespurement bulgares qui ne tardrent pas treouvertes un peu partout dans les villes de Bulgarie.La rforme de la mthode et des matires d'en-seignements pratique par des matres illustrestels que Pierre Bron, Nophyte Rylski et Cons-tantin Fotinoff fit faire l'cole bulgare un nou-veau pas dcisif. C'est elle qui introduisit dansles coles bulgares l'enseignement de l'histoirenationale.

    En 1851-52, N. Ghroff Philippopoli et B.Ptkoff Kalofer la mirent au programme descoles secondaires. En 1859, l'histoire bulgareest en outre tudie dans celles de Gabrovo etde Tirnovo pour ne figurer qu'en 1865 au pro-gramme de toutes les coles secondaires de gar-ons et de filles, ainsi qu' celui des colesprimaires. Le parfum vivifiant du pass pntraitainsi de l'cole dans la famille et par l dans lamasse du peuple, donnant par ce canal aux aspi-rations nationales un essor vertigineux. Les dif-ficults causes pour l'ouverture des coles parles Turcs et les Grecs, par les autorits ecclsias-tiques et administratives, au lieu de dcouragerles Bulgares, ne firent qu'intensifier leur zle pourl'uvre scolaire et dvelopper en eux un fana-tisme encore plus ardent pour l'instruction et lascience.

    En 1877, il y avait dans le diocse de Phi-lippopoli 305 coles primaires et secondaires,avec 356 instituteurs et 12,000 lves et 24 colesde filles avec 37 instituteurs et 2265 lves*). En

    ') Georges Bousquet. Histoire du peuple bulgare , Paris1909, p 151 : Alors, comme aujourd'hui, les familles les plusmodestes s'imposaient les plus rudes privations pour envoyerleurs enfants l'tranger conqurir cette instruction qui devaitlargir l'horizon devant eux et devenir entre leurs mains l'ins-trument de ratlrancliissement national.

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    1874, il y avait Drnovo, bourgade et arron-dissement du mme nom comprenant agglom-rations et villages ainsi que des fermes isoles,940 lves des deux sexes pour 10,685 habitants,cela faisait, en d'autres termes, un lve par1,15 habitants. L'instituteur, l'tude duquel sontemprunts ces chiffres l ) fait, pour cette mmepoque, une comparaison intressante entre lenombre d'habitants et celui des lves en Europeoccidentale et en Amrique et il trouve qu'enSaxe il y avait 1 lve par 7 habitants, en Prusse1 lve par 8 habitants et aux Etats-Unis 1 lvepar 5 habitants.

    En 1870, il y avait, dans les villes et les vil-lages de Bulgarie et de Thrace, 1472 coles pri-maires de garons et de filles et environ 350 enMacdoine, soit en tout 1822 coles. Le meilleurmoyen de se rendre compte des efforts du peuplebulgare et son progrs rapide est de les com-parer au nombre des coles de Grce, de Rou-manie et de Serbie aux poques correspondantes.

    En 1830, il y avait en Grce 71 coles pri-maires, 405 en 1835, 1248 en 1873, et 1468, dont276 coles prives, en 1878 -).

    La Serbie commena organiser ses colesprimaires partir de l'anne 1835, lorsque futinstitu le Ministre de l'instruction publique. En1855, elle avait en tout 330 coles primaires,secondaires et suprieures 3 ), et en 1885, 565 co-les primaires l).

    En 1878, la Roumanie avait 2182 coles devillages et 232 coles urbaines, soit en tout 2414coles primaires 5).

    En 1876, la suite des insurrections qui

    1) Revue Tchitalicht , 5e anne, N" 6, p. 120.2) Chassiotis, p. 183-496. La Grande Encyclopdie , t. 19,

    p. 292.

    3) Professeur Voukitchevitch et D.-J. Selise. Serbes etBulgares , pp. 152 et 153.

    4| Statistique du Rovauine de Serbie, VIIe livraison, 1896,p. 64.

    5) Meyer. Konv. Lexicon, t. XIII.

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    eurent lieu dans la Bulgarie du nord et danscelle du sud, les consuls et les correspondants desjournaux europens qui avaient visit quelques-unes des villes et des villages dvasts des en-virons de Pazardjik, Sliven, Panagurischt etKoprivschtiza taient surpris des grands progrsdes Bulgares au point de vue du rgime scolaireet de l'instruction. Il est facile de juger du degret du genre de ce progrs par les correspon-dances de M. Gahan publies dans le^ DailyNews sous le titre de Cruauts turques enBulgarie au courant de l'anne 1876 >. Les rap-ports de cet Amricain, nomme de cur et pu-bliciste de talent, correspondent la premirepriode du rgime scolaire bulgare celle d'a-vant l'affranchissement de la Bulgarie.

    En Angleterre et en Europe en gnral,crit M. Gahan, on se fait une opinion tout fait fausse des Bulgares. J'ai toujours entendudire, et en ralit je le croyais moi-mme aussijusque dans ces derniers temps, que c'taientdes sauvages peine plus civiliss que les Indiensd'Amrique. Figurez-vous mon tonnement lors-que j'appris que presque chaque village bulgareavait son cole et que les coles qui avaientchapp la dvastation se trouvaient dans unesituation florissante. Elles sont entretenues l'aide d'impositions volontaires, perues non seu-lement sans aucune coercition de l'autorit pu-blique, mais encore en dpit des nombreusesdifficults cres par celle-ci. L'instruction dansles coles est gratuite et identique pour les richescomme pour les pauvres. On trouverait difficil-ment un enfant bulgare ne sachant ni lire nicrire. En gnral, le pourcent des gens pou-vant lire et crire en Bulgarie n'est pas moindreque celui existant en Angleterre et en France *).Les progrs de la littrature, l'augmentation dunombre des salles de lecture et des bibliothques

    *i Mac Gahan. Les atrocits turques en Bulgarie. (Traduc-tion bulgare, 1880.)

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    marchaient de pair en Bulgarie avec le dvelop-pement du rgime scolaire. Le thtre lui-mmecommena prosprer.

    Dans les salles de lecture, les instituteurscommencrent encourager l'cole du dimanche.L'ide fut promptement et vivement accueillie dela population et les salles de lecture se transfor-mrent en coles du dimanche et en locaux pourcours du soir, qu'artisans, ouvriers, contre-matres et domestiques frquentrent. Ici on con-sidrait le travail comme un office quasi litur-gique. 11 est facile de juger du zle dont on taitanim par le fait touchant suivant, rapport parle journal bulgare Makdonia de 1870. Unsimple artisan, membre de la salle de lecturemunicipale de Koukouch, prs de Salonique,lgua a son lit de mort cette salle toutes sesconomies amasses au prix d'un rude labeuret de grandes privations, pour pouvoir acheterdes livres destins la bibliothque.

    En dehors de l'uvre d'instruction, certainessalles de lecture poursuivirent encore des butsde bienfaisance : elles sontinrent des lves l'tranger, ouvrirent de nouvelles coles et vin-rent en aide aux lves et aux communes dansle besoin. Telles taient les salles de lecture deConstantinople, Philippopoli, Vidin, Toultcha, etc.La premire organise fut celle de Constantinoplequi, en 1870, dita une revue sous le nom de Tchitalischt (Salle de lecture). Mais le cou-ronnement des socits d'instruction fut la So-cit littraire bulgare ;>, qui, fonde Brala en1870, et compose de savants et d'crivains,aprs l'affranchissement, se dveloppa en Bul-garie pour y devenir l'Acadmie des Sciences.Son organe Perioditchesko spissani est lapremire revue acadmique bulgare.

    Des salles de lecture avec socits fmininescommencrent se fonder ds l'anne 1856. En1870 il y avait des salles de lecture en Bulgariedans les villes suivantes : Tirnovo, Svischtov,Roustchouk, Vidin, Lom, Vratza, Sophia, Toul-tcha, Gabrovo, Gorna-Orkhovitza, Schoumen,

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    Razgrad, Gorna - Djoumaa , Tatar - Pazardjik ,Trcvna, Pleven, Lovetch en Thrace , dansrelies de Philippopoli, Sliven, Stara- Zagora,Yambol,Klissoura, Koprivschtitza, Kazanlikjvar-nobat, Kotel, Karlovo, Kalofer, Sopot, Panagu-rischt, Tchirpan en Macdoine, dans celles dePrilep, Vls, Koukouch, Voden, Doupnitza,Kustendil, Samokov, Scopi, Schtip. Certainesvilles, comme Schoumen, Roustchouk,etc. avaientleurs deux salles de lecture. 11 importe de remar-quer ici qu'en Macdoine il n'y avait ni salles delecture serbes, ni bibliothques serbes.

    En dehors des salles de lecture, les institu-teurs travaillaient encore dans leurs propres con-grs professionnels. L'initiative de ces congrsqui constiturent, en Bulgarie, une des manifesta-tions les plus caractristiques de l'lan qui entra-nait le peuple vers la civilisation dans la priodeantrieure l'affranchissement, vint des institu-teurs eux-mmes. Les congrs des instituteursbulgares furent les premiers dans toute la Tur-quie. Y prenaient part les instituteurs des villeset des villages de tout un dpartement ou diocse.Ils taient convoqus pour un ordre du jour biendtermin. On y changeait des ides et l'on yprenait des dcisions sur des question de pda-gogie, sur des programmes, l'objet de l'ensei-gnement primaire, la mthode et le rgimescolaire, sur l'ducation et la littrature pdago-giques proprement dites. Le premier congrsd'instituteurs bulgares eut lieu en 1868 Stara-Zagora. A Philippopoli il y en eut deux: l'un en1X70 et l'autre en 1874. Antrieurement l'af-franchissement de la Bulgarie, il y en eut encoredans les villes suivantes: Gabrovo, Prilep, Toul-tcha, Schoumen, Samokov, Lovetch, Roustchouket Vidin. Jusqu'en 1874, les congrs avaient lieusur l'initiative des instituteurs et des comitsscolaires, mais partir de cette anne, aprsl'organisation de l'Exarchat, et l'appel de mtro-polites la tte des diocses, ils furent convoquspar des circulaires manant de l'Exarchat et desmtropolites respectifs. A Stara-Zagora les rgles

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    ments des instituteurs et du comit scolaire pr-voyaient deux ou trois congrs par an, et cela,pendant les vacances de Nol, de Pques et defin d'anne scolaire. Il en tait de mme pourcertaines autres villes.

    Paralllement au mouvement scolaire et audveloppement gnral des lumires, se dessinaitaussi l'volution de la question religieuse. Dj,les premiers insurgs avaient soulev la ques-tion des vques bulgares auprs du gouverne-ment turc : en 1840 Nisch, en 1850 Vidm, pro-testant contre les iniquits de l'piscopat grec.Ils avaient entre autre exigs que des Bulgaresfussent promus l'piscopat*).

    Les exigences des insurgs de 1841 produi-sirent leur effet. Le gouvernement turc accordadsormais une attention particulire au Patriar-chat grec et s'effora de faire cesser les abusdont les Bulgares se plaignaient ou tout aumoins de les limiter. Mais, comme ces abus neprirent pas fin et que le peuple accabla deplaintes le Sultan Medjid au cours de son voyage travers la Bulgarie en 1844, la Porte confia parirad de 1847 trois laques la mission de con-trler le Patriarchat, savoir : au grand logo-thte Aristarkhi et aux anciens gouverneurs deSamos, les Princes Bogoridi et Psycharis, aux-quels elle confra le droit de prendre part auxsances du Patriarchat. Le Patriarche et le Sy-node essayrent de rejeter cette immixion delaques dans les affaires ecclsiastiques, maisen vain.

    Les Bulgares basaient leurs rclamationssur le hati-schrif de Gulhan de 1839, par lequel

    *) Cyprien Robert. T. II, p. 318 : Elle (la Porte) envoyaaussitt dans le pachalick de Sofia, son commissaire Tevfik-Beypour connatre les griefs des rvolts et y faire droit. Ces griefs

    pouvaient tre aisment rsums : les insurgs voulaient des star-chines lus par la nation, des impts quitables, l'abolition deshumiliations, l'expulsion des propritaires armniens qui pui-saient le pays au nom des pachas ; ils exigeaient aussi des vques

    qui comprissent au moins leur langue.

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    le Sultan Abdul-Mdjid promettait ses sujetsun certain respect de l'individu et de la con-science. Aprs la guerre de Crime, les Puis-sances europennes obligrent la Sublime Porte promulguer le hati-houmaoun du 16 fvrier1856, par lequel le Sultan s'engageait de nouveau garantir ses sujets la libert de leur confes-sion et publiait tout une srie de dispositionsadministratives concernant la condition des con-fessions dans l'Empire. Depuis lors, le mouve-ment religieux des Bulgares se dveloppa d'unefaon extraordinairement rapide. Ds 1857 tousles vchs bulgares adressrent au Sultan desrequtes demandant que les vques pussent trelus par le peuple. La Porte convoqua une As-semble, laquelle devaient prendre part desreprsentants des 28 diocses. L, les vquesgrecs prtendirent qu'il n'y avait pas de peuplebulgare et que la nomination des vques nedevait pas avoir lieu par voie d'lection. A cetteoccasion, bon nombre de paroles blessantes fu-rent prononces contre les Bulgares, et leursdlgus furent mme exclus de l'Assemble. *)A partir de ce moment, le peuple bulgare futgagn l'ide d'une Eglise indpendante. Unfort courant se manifesta en vue d'agrger l'E-glise bulgare l'Eglise Romaine et d'arriverainsi l'indpendance religieuse. Les partisansde cette orientation, la tte de laquelle setrouvait Dragan Tzankoff, qui depuis se fit unnom en Bulgarie comme homme politique, nour-rissaient l'espoir que par l les Puissances euro-pennes, surtout la France, prendraient un intrtplus vif au sort du peuple bulgare et intercde-raient en faveur de ses droits auprs de laSublime Porte. Mais par l, on inspirait aussi l'Angleterre la crainte de voir Napolon ITI ten-dre galement son protectorat sur les Balkans,de sorte que la diplomatie anglaise insista auprsde la Porie pour que les exigences bulgares

    *) Georqes Bousquet, p. 147.

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    reussent satisfaction. L'effroi n'avait pas d'ail-leurs t moindre du ct de la Russie qui avaitdj enfreint les dispositions du trait de Parisqui la contraignaient, pour un temps, renoncer ses plans l'gard de la Turquie. Le repr-sentant de la Russie Constantinople, le ComteIgnatieff, y avait une grande autorit. Jusqu'alors,les Bulgares ne rencontraient souvent auprsdes reprsentants de la Russie que des difficultsdans leurs luttes pour leur indpendance reli-gieuse au lieu d'assistance pour leur cause. Maisl'insistance des Bulgares devint d'autant plusnergique que plus grandes taient les rsistancesqu'ils rencontraient: leur confiance en leurs pro-pres forces et en leur bonne cause surmontatoutes les difficults.

    En gros, crit le Prince Grgoire Trou-betzko *), la diplomatie russe devint en peu detemps le jouet du parti progressiste bulgare. De sorte que la Russie, elle aussi, modifia samanire de voir et sa tactique dans la questionreligieuse bulgare.

    Lorsque le Patriarche grec Grgoire VIcomprit qu'il serait bientt oblig de s'inclinerdevant les faits accomplis, il chercha prvenirles vnements par un projet contenant des con-cessions. Le 2 mai 1867 il remit en secret auComte Ignatieff un projet de rglement de laquestion ecclsiastique bulgare, en lui dclarantqu'il n'tait pas, en principe, contre l'indpen-dance de l'Eglise bulgare, mais seulement contreses limites ethniques. Le projet accordait auxBulgares une Eglise autonome, mais comprenantseulement les diocses situs au-del des Bal-kans, savoir: ceux de Vidin, Nisch, Kustendil,Vrania, Sophia, Lovetch, Samokov, Roustchouk,Tirnovo, Preslav, Silistra et Varna.

    Le Comte Ignatieff accueillit le projet avecbienveillance et tlgraphia St-Pterbourg : Siles Bulgares ont conserv un grain de sagesse

    *) La Russie et le Patriarchat cumnique , dans la re-vue Vestnik Evropiy 1902, N 6, p. 501.

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    politique et quelque peu d'attachement l'Or-thodoxie, ils s'empresseront d'accepter cettefaveur inattendue, qui tend solutionner unequestion considre comme insoluble. Les Bul-gares firent en effet preuve de sagesse politique :ils rejetrent le mmoire. Les protestations lesplus nergiques contre lui vinrent de Macdoine*).Les habitants de Skopi, Debre, Vls, Strou-mitza, Prilep, Bitolia, Okhrida et d'autres villesenvoyrent au gouvernement des suppliques parlesquelles ils demandaient une administrationecclsiastique indpendante pour tout le peuplebulgare.

    Entretemps des circonstances accessoires fa-vorables se produisirent : en 1867 eut lieu larvolution de Crte. La population du Royaumede Grce s'mut. Les Puissances europennessoulevrent la question crtoise. La SublimePorte se trouvait la veille d'une guerre avecla Grce. Dans le cours de l'anne 1868 des in-surgs bulgares firent leur apparition dans lesmontagnes des Balkans. Dans l'adresse que cesderniers envoyrent aux ambassadeurs des Puis-sances Constantinople, on indiquait commeune des causes de la rvolte la question religieusebulgare que le gouvernement turc ne voulait pasrsoudre. On y lisait que les prires instantesen faveur de la reconnaissance d'une hirarchienationale, avaient t rejetes avec mpris 11 ansdurant. La Sublime Porte s'empressa d'apaiserles esprits en promettant de procder h la solutionde cette question plus que mre. En 1860 sur-vinrent de nouveaux vnements favorables quifirent grandement avancer la cause. En corr-lation avec les troubles de Bosnie et d'Herzgo-vine, il y eut de l'agitation en Montngro. Laquestion d'Egypte fut elle aussi souleve. Dsavant le printemps 1870, l'instigation des no-tables bulgares, des requtes dans lesquelles lepeuple bulgare demandait unanimement l'rec-tion d'une Eglise autonome, commencrent

    *) Cf. G. Troubetzko op. cit. pp. 12-13.

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    affluer de tous cts Constantinople. Ces de-mandes produisirent leur effet. Le 28 fvrier 1870,le Grand-Vizir Ali-Pascha remit aux reprsen-tants bulgares un flrman crant une Eglise bul-gare indpendante sous le nom d'Exarchat bulgare.L'article 10 dudit flrman donnait des garantiespour la fixation des frontires ethniques du peuplebulgare. Ce flrman lui-mme constituait une desplus grandes victoires morales et un des gainsmoraux les plus considrables du peuple bulgareau XIXe sicle. C'tait une uvre de la dmo-cratie bulgare.

    A Tpoque du premier Empire bulgare, uneEglise indpendante avait t organise au IX p

    sicle par le tzar Simon, et l'poque dusecond Empire, par Jean Assen 11(1218-1240). Maisl'Eglise indpendante bulgare du XIXe sicleelle, est le fruit d'une lutte organise, systma-tique, longue et opinitre du peuple bulgare toutentier. C'est une rfutation brillante des asser-tions de la propagande serbe d'aprs laquelleil n'y aurait jamais eu de Bulgares en Macdoineet que leur apparition serait une cration del'Exarchat bulgare. L'histoire tmoigne prcis-ment que c'est le contraire qui est la vrit, c'est--dire que l'Exarchat est la cration du peuplebulgare de tous les pays bulgares et, en toutpremier lieu, des pays macdoniens.

    Dsormais Constantinople devint pour lesBulgares un centre de culture morale. Les in-tellectuels bulgares s'y adonnrent avec un zleardent au dveloppement de leur culture natio-nale. C'est ici que furent fonds

    1 journaux et revuesqui furent rpandus dans tous les pays bulgares.En 1843 le Dr Iv. Bogoroff y avait dj fond le Tzarigradski Vestnik (Journal de Constanti-nople) ; en 1859, Dragan Tzankoff, le Bulgaria ;en 1863, N. Mikhalovski, le Sovetnik (leConseiller) ; en 1856, T. Bourmoff, le Vrm (Temps); en 1861, P. R. Slaveikoff, la revue Ptchlitza (Abeille) et le journal humoristique Gada (Cornemuse), et en 1867 le Mak-donia ; en 1867, lv. Nadenoff, le Pravo (le

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    Droit), en 1864, N. Ghndovitch, la Turquie et plus tard le mme Iv. NaaVnoff publia le Napredok (Progrs). Parurent ensuite le Vek , le Den , les revues Bulgarski kni-jitzi , Tchitalischt , etc., etc. De cette faon,la presse bulgare gagna en force en jouant dansl'Empire ottoman un grand rle dans les luttesde Tindpendance religieuse ei politique du peu-ple bulgare ainsi que dans la dfense des paysbulgares contre les avides prtentions des Serbeset des Grecs *).

    A la presse priodique, il faut encore ajouterles feuilles volantes, les livres et brochures,ainsi que les mmoires adresss aux reprsen-tants des Puissances et la Sublime Porte elle-mme. Pour donner une ide de la vigueur etde la prvoyance de la pense politique bulgare cette poque, nous voulons tout simplementrappeler le mmoire adress au Sultan vers l'an-ne 1870 par un des comits rvolutionnaires bul-gares. Nous nous contenterons d'en citer ici lefragment suivant :

    Les ides et intentions des autres peuplesde l'Empire, les Bulgares excepts, ne sont plusun secret pour personne. Nous ne craignonspas d'tre taxs de calomniateurs en dclarantce qu'eux-mmes ne cachent point. Les uns, lesGrecs, travaillent la restauration de l'Empirebyzantin, et les autres,- les Serbes, l'agrandis-sement de leur territoire. Nous ne condamnonsles tendances ni des uns, ni des autres, tantqu'elles se tiennent dans les limites du droit,mais aussitt qu'elles le dpassent et qu'ellesempitent sur le droit d'autrui, nous serons forcsde nous y opposer. Les uns comme les autrespeuvent se flatter de l'espoir que la ralisationde leur plan sera atteinte par le concours dupeuple bulgare, au cas o ils lui promettraientles avantages rsultant de la libert. Et en v-rit, la promesse de libert, de quelque ctqu'elle vienne, excite le sentiment national du

    'i l>. Mischeff.

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    Bulgare et lui fait palpiter le cur de joie. Maisle Bulgare prfrerait manifester sa reconnais-sance sous le protectorat des Sultans si ceux-ciprenaient le titre de ses tsars.

    Sire ! Il n'y a pas un Bulgare, connaissantles intrts de son pays et de sa nation, quiregarde d'un bon il les efforts des uns, visant la restauration de l'Empire byzantin et ceuxdes autres ayant pour but l'extension de leurpays, les uns et les autres aux dpens des autresnationalits; parce que si la perte d'un territoireau Sud-Est de la monarchie ou d'un autre auNord-Ouest diminue l'clat du trne resplendis-sant de Votre Majest Impriale, elle blesse aussil'intgrit du peuple et du pays bulgares. Malgrtout cela, nous parlerions contre notre consciencesi par des flatteries nous cherchons vous per-suader qu'un mouvement des Grecs vers lesfrontires de l'Albanie ou de la Macdoine, c'est--dire l o l'lment bulgare commence, oubien qu'un mouvement des Serbes aux environsdes limites septentrionales de la Bulgarie, neseraient pas soutenus par les Bulgares de cesparages...

    Malgr les torts que lui causent les plansdes peuples voisins en question, notre peupleprendrait naturellement parti pour les uns etpour les autres, non pas parce que les uns sontde mme confession et les autres de mme racequ'eux, mais bien parce que la libert lui estrefuse et qu'il n'a rien d'autre dfendre, pasmme le foyer de ses pres. Voil pourquoi leBulgare, dans sa simplicit de cur, verra unlibrateur clans tout tranger conqurant de sonpays, ainsi qu'il en a t jusqu' prsent. Alors,que faire pour empcher le Bulgare de s'allier l'tranger? Comment lui inspirer le dsir dedfendre l'Empire comme son propre pays? Larponse est trs simple : ?n lui accordant l'in-dpendance laquelle il aspire et en confirmantses droits qui l'attacheront l'Empire, comme son propre foyer natal...

    Sire ! 6 millions de Bulgares, actifs et plein

  • -S-de sant et de courage, qui habitent l'Empire partir des degrs de l'illustre trne de Votre MajestImpriale jusqu'aux confins de la Thessalie etjusqu'aux frontires de la Serbie et de l'Albanie,indissolublement unis au peuple ottoman pardes intrts communs, ne sont pas quantit ngli-geable. Et si notre indpendance pouvait trereconnue et confirme sous le sceptre glorieuxdes sultans, et si les sultans voulaient tre enmme temps tsars des Bulgares, pourquoi n'of-fririons-nous pas notre appui et notre force lamonarchie ottomane ainsi que les magyars lefont pour l'Autriche et l'Algrie pour la France...Alors, la diplomatie sera toute surprise de voirun gant l'endroit o elle est habitue voirun corps faible. De cette manire disparatrait jamais tout prtexte d'immixtion et de menacede n'importe quelle puissance trangre. En outre,aucune puissance trangre ne pourrait plus lou-cher vers Constantinople, en donnant commeraison la dlivrance des chrtiens, parce queceux-ci seraient dj libres et voudraient lerester... En un mot, l'intgrit de l'Empire otto-man serait mieux assure par ces mesures sageset justes, que par tous les traits diplomatiqueset ainsi la question d'Orient serait rsolue d'elle-mme *).

    Tout en travaillant l'uvre scolaire et re-ligieuse, le peuple bulgare n'oublia pas non plusla prparation de l'ultima ratio , celle de laforce. Les guerres frquentes et prolonges dela Russie, de la Serbie et de la Grce contre laTurquie, au lieu de la libert, n'avaient valu auxBulgares que misie et dvastations (1800, 1811,1829, 1852, 1854 et 1860). Les dsillusions prouvesl'amenrent modifier ses vues sur les voies etmoyens employer pour arriver l'indpen-

    *) P. Miliukoff, Les relations serbo-bulgares dans la Ques-tion macdonienne , dans [a Revue Perioditcheski BalgarskiPregled . 5e anne, livraison 9-10, p. 63-65.

  • - Si -

    dance. Cela surtout aprs le trait de Paris (1856)qui avait aboli le droit de protectorat de la Russiesur les chrtiens de l'Empire ottoman. Les Bul-gares caressrent de plus en plus l'ide de con-qurir eux-mmes de haute lutte la libert,terme de tous leurs efforts. Les traditions glo-rieuses ne manquaient pas, celles des insur-rections de Pirot (1830), de Nisch (1840), de Vidin(1851), dont la rduction dans des flots de sangavait aliment le feu sacr dans plus d'un curet d'un esprit A Bucarest fonctionnaient descomits rvolutionnaires, diteurs de journauxrvolutionnaires (le Dounavski Lbd de SavaRakovski, le Svoboda > et plus tard le Nesavis-simost de Luben Karaveloff). Luben Karaveloffdevint le philosophe de la rvolution et VassilLevski, Boteff, St. Stanbouloff, comme ses pro-pagandistes par le verbe et par le fait, commeses chefs main arme.

    A tous, Roumains et Serbes offraient l'hos-pitalit. C'tait pour eux un utile moyen depression au moment favorable pour obtenir dela Turquie les avantages politiques ou cono-miques dont ils pouvaient eux-mmes avoirbesoin *.

    Ce mouvement national organis de tout lepeuple bulgare amena le Prince Michel de Serbie aiguiller dans des voies nouvelles la politiquede ses prdcesseurs l'gard des Bulgares. Aulieu de semer l'agitation dans les masses et deles exciter des soulvements, par l'interm-diaire de ses agents, il noua des relations avecles chefs et les reprsentants de ce peuple l'cole, l'glise et surtout avec les dirigeantsdes comits rvolutionnaires.

    A cette poque, la Serbie avec la dynastie des

    *) Fr. Dam. Histoire de la Roumanie contemporaine ,Paris 190U, p. 188.

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    Obrnovitcli, qui venait d'tre restaure, taittoute l'enthousiasme de plans grandioses. Venantde consolider sa vie intrieure, elle se prparait marcher la tte d'un mouvement d'affran-chissement au dehors des frontires des Slavesdu Sud. Elle s'tait persuade tre le seul repr-sentant de l'idal politique et populaire euro-pen parmi les Slaves de la Pninsule desBalkans et avait l'intention de jouer, au milieud'eux, le rle du Pimont. Le Prince Michel estconsidr comme le protagoniste de cette idedans sa premire phase, c'est--dire dans cellede Pimont des Balkans , et cela, non sansraison, car c'est lui le premier qui, partir dujour de son avnement au trne (1860) jusqu'aujour de sa mort

    .

    prmature (1868), s'est misd'une manire nergique, systmatique et cons-tante la ralisation du Grand uvre . Cetteide tait son principe directeur de la politiqueextrieure serbe.

    Ds l'anne 1859, raconte P. Miliukoff *,Michel dveloppait Londres, dans une conver-sation avec Kossuth, un programme d'ensemblelogique de politique pan-serbe.

    Pour s'affranchir du protectorat de l'Autricheet pour ne pas tomber en mme temps souscelui de la Russie, la Serbie doit s'appuyer sur uneconfdration danubienne, avec la Roumanie et laHongrie comme membres, et, au moment de ladsagrgation de la Turquie, grouper autourd'elle en une masse compacte tous les Slavesdu Sud. Tel serait le rsum de l'ide fonda-mentale de cette conversation. Aussitt son av-nement, Michel commena organiser les forcesmilitaires de son pays et fit adopter par laSkoupschtina une loi aux termes de laquelle l'arme permanente de 6000 hommes se trou-vrent encore ajouts 50,000 hommes de terri-toriale. En dpit des protestations de l'Autriche

    > Voir cette conversation dans la brochure de M. S. lJirot-chanatz, lNi).">. Cf. g Le Prince Michel et la Solidarit des Balkani-ques (en serbe).

  • 33

    et de la Turquie, l'instruction et l'armement de l'arme nationale furent mens trs rapide-ment. Dans l'intervalle de 1861 1862, des volon-taires des contres slaves voisines entrrent dansles troupes de milice serbe en qualit de repr-sentants des Slaves du Sud, et dans le nombre,galement des Bulgares, qui formrent une L-gion bulgare sous le commandement du pa-triarche de la rvolution bulgare, Sava Rakovski.

    Sava Rakovski apportait son aide, allaitcombattre et mourir pour l'ide d'une confd-ration balkanique qui l'enthousiasmait bien qu'avecun certain scepticisme, dont le bien fond se vrifiaplus tard. Dans le monde diplomatique du jour,crivait-il dans son journal de Bucarest, il n'ya ni humanit, ni amour du prochain, ni foi :tout y est gosme et avantage personnel. Aujour-d'hui c'est le droit du plus fort qui domine . Et si l'on s'occupe des Bulgares , ajoutait-il,pour complter sa pense, il faut y chercherau fond un intrt spcial . Les Bulgares sontentours d'ennemis de tous les cts; aussi n'ya-t-il personne qui dsire leur dveloppement,mais tous veulent profiter de leur faiblesse et celas'adresse aussi tous les Slaves. Voil pourquoi ilest prfrable pour nous que nous sachions d'unemanire certaine quels sont nos ennemis, pluttque d'en avoir de secrets qui se cachent sous lemasque de bons amis.

    En 1862, les Serbes attaqurent la garnisonturque de Belgrade. Les volontaires et la Lgionbulgare de Rakovski prirent aussi part au san-glant combat en leur qualit d'excellents tireurs.La garnison turque rpondit aux provocationsserbo-bulgares par le bombardement de Belgradeet fournit ainsi la diplomatie serbe un prtextepour exiger de la Sublime Porte de nouvellesconcessions. Maintenant la Lgion bulgare tait devenue inutile. Au moment o Rakovskivenait d'adresser au peuple bulgare une procla-mation enflamme pour l'appeler un soulve-ment gnral et se prparait passer en Bul-garie la tte de sa lgion, le gouvernement

    3

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    serbe le fora a quitter immdiatement Belgradeet la Serbie.

    Quatre ans plus tard des orages clatrenten Europe. L'Autriche fit, avec la Prusse etl'Italie, une guerre qui eut pour consquence laperte de Venise et l'exclusion de l'Autriche dela Confdration germanique. Les principautsdanubiennes de Moldavie et de Valachie saisirentl'occasion favorable qui s'offrait elles au len-demain de la bataille de Sadowa pour s'unir etlire un Prince hrditaire. La Grce, elleaussi, profita du moment pour contraindre la Su-blime Porte certaines concessions. Seul, lePrince Obrnovitch laissa passer le moment,retenu qu'il tait par des ngociations avec laGrce (jusqu' la fin de 1867), ainsi qu'avec leMontngro relativement l'union de celui-ciavec la Serbie.

    La Convention militaire fut conclue l'au-tomne 1868. Aprs la conclusion des trait d'al-liance avec le Montngro et la Grce, le PrinceMichel, poursuivant l'ide de l'unification desSlaves du Sud, entra aussi en ngociations avecles Slaves d'Autriche et de Turquie. Aux termesd'un accord avec un patriote croate, la Croatiedevait profiter de la crise intrieure d'o est sortile dualisme et qui a valu la Hongrie l'galitde traitement avec l'Autriche (1867). La Croatiedevait s'unir la Dalmatie pour entrer ensuitedans la confdration des Slaves du Sud. Enmme temps, la Serbie devait s'adjoindre laBosnie, le Montngro, l'Herzgovine et la Bul-garie.

    Dans ce dernier but, le Prince Michel s'a-boucha avec le comit rvolutionnaire bulgarede Bucarest. Aprs l'expulsion des lgionnairesde Belgrade, le dsenchantement provoqu parla Serbie ne s'tait pas encore dissip dans cer-tains cercles rvolutionnaires bulgares, maisl'ide du Prince Michel parut si attrayante, chauffasi fort les imaginations et flatta si passionment1rs comits secrets altrs de libert, que lavieille humiliation fut bientt oublie cl que lamfiance disparut.

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    Comme contre-poids aux esprits plus rassis,aux hommes politiques plus pratiques qui avaientadress au Sultan le mmoire mentionn plushaut, le comit rvolutionnaire de Bucarest, di-rig par des littrateurs et des potes, bouillantsentants des Balkans, labora, le 14 janvier 1867,en rponse l'invitation venue de Belgrade, le programme des relations politiques entre lesBulgaro-Serbes ou de leurs rapports amicaux et l'envoya au prsident du Conseil des Ministresserbes, 1. Garaschanin.

    Ds maintenant, rpondit Garaschanin, *)nous ne pouvons pas encore tout d'un coup nous en-tendre dans ce sens, et cela, non par notre faute, carnous n'avons pas hsiter devant les conditionsproposes. L'obstacle, ce sont les chefs eux-mmes qui ont sign le programme. Nous nevoudrions pas, en effet, nous entendre sur unprojet qui, dans le cas o il ne serait pas approuvpar le peuple bulgare lui-mme, pourrait nouscauser plus de difficults que nous valoir deprofit.

    ) Voil pourquoi je pense qu'il est ncessaireque le comit entreprenne d'exposer ses ides ses compatriotes et lorsqu'il sera vident qu'ellessont admises par la partie la plus clairvoyanteet la plus influente des chefs de la nation pourle plus grand bien de l'avenir bulgare, que l'onprocde alors la discussion et la rdactionde l'accord qui deviendra galement obligatoirepour Serbes et Bulgares .

    De cette faon, la Serbie prtendait amenerle comit prendre des engagements pour l'u-vre commune, sans, de son ct, s'engager riende ferme. Le comit, quoique sous le charme dela grande ide libratrice du Prince Michel, nepouvait pas oublier tout fait les dceptions dupass et les leons qu'on y puisait. Aussi, larponse de Garaschanin fut-elle reue avec unecertaine perplexit.

    *) Cf. P. Miliukoff, op. cit. p. 245. Bucarest, le 14 janvier1867.

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    En avril 1867, le comit rvolutionnaire con-voqua Bucarest un Congrs auquel des dl-gus des diffrents pays de Bulgarie assistrent.Le Programme fut prsenter a la discussionde cette assemble qui prit cet gard les rso-lutions suivantes :

    1. L'Union des Serbes et des Bulgares doitse raliser fraternellement sous le nom d' Empiredes Slaves du Sud .

    2. L'Empire des Slaves du Sud se compo-sera de la Serbie et de la Bulgarie (la partiebulgare comprendra les territoires de : Bulgarie,Tlirace, Macdoine).

    3. Le chef du Gouvernement commun constituer sera le souverain serbe actuel, MichelObrenovitch, avec transmission hrditaire.

    4. Le drapeau national de cet Empire devratre commun et aux armes des deux peuples.Il en sera de mme des monnaies.

    5. Chaque pays conservera sa langue' com-me langue officielle. Aussi les fonctionnairesdevront-ils tre de la nationalit au milieu delaquelle ils vivent et parlent la langue de la con-tre.

    6. Les lois serbes en vigueur devront tretraduites en bulgare et seront introduites enBulgarie. Toutes les dispositions de l'Empiredes Slaves du Sud seront sans exception publiesdans les deux langues, serbe et bulgare et simul-tanment.

    7. La religion orthodoxe est la religion domi-nante ; mais les confessions sont libres.

    s. Les affaires religieuses seront gres parun synode indpendant et mixte, avec des repr-sentants des deux peuples. Le synode sera repr-sent par le mtropolite-primat et par les vo-ques d'apirs leurs diocses rpartis sur la basede la nationalit de la population. C'est le synodequi ('-lit les vques, mais la nomination de cesderniers sera confirme par le gouvernement.

    '.. Le chef de l'Etat nomme les ministres detelle sorte que parmi eux il y ait des Serbes etdes Bulgares.

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    10. Les reprsentants de la nation serontlus proportionnellement par les deux peuplesde l'Etat, et cela, suivant les dispositions lec-torales aujourd'hui existantes en Serbie.

    11. La capitale de l'Empire des Slaves du Sudsera celle que dtermineront les reprsentantsde la nation.

    12. Le chef du synode et du clerg aurason domicile dans la capitale*).

    Pour la mise excution de ces dcisionsgnrales, le Congrs lut une Ouprava desept personnes demeurant Bucarest, qu'il char-gea de continuer travailler en vue d'atteindrele but pralabement indiqu. L'accord devait avoirforce de loi aprs signatures apposes par legouvernement serbe et par ' Ouprava.

    Le procs-verbal ci-dessus ne donna pasnon plus satisfaction Garaschanin , d'abordparce qu' cette poque les Serbes avaient djdonn libre cours leur propagande tendant faire croire que la Macdoine est serbe, tandisque le Congrs bulgare avait dtermin les ter-ritoires de la future union qui devraient treconsidrs comme bulgares et, en deuxime lieu,parce que Garaschanin n'ignorait pas une autretendance des cercles rvolutionnaires bulgares, savoir celle de raliser le dualisme en Turquie,ide dangereuse pour les plans serbes qui pou-vaient, d'une faon rapide et sre, unifier lepeuple bulgare en une puissante organisationpolitique, garantie par l'empire ottoman.

    Outre le Programme, Pirottchanetz placeencore dans son livre un trait en due forme,soi-disant conclu entre le gouvernement serbeet l' Ouprava. .Mais bien des considrationsinduisent penser que ce trait est apocryphe.L'une d'elles est que Pirottchanetz ne nous yfait pas savoir les noms de ceux qui l'auraientsign

    ;la deuxime est que ce trait ne figure

    *) Iv.-Ev. Gheschoff. Evlog Ghorghieff , Traits de savie et documents pris dans ses archives. Revue de la Socit lit-traire de Bulgarie iA'l-i, I, 1900, Sofia, C. I'. Miliukoll, p, 247.

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    nulle part parmi les documents historiques bul-gares ; la troisime, que ce trait serait en con-tradiction avec la dcision du congrs qui fixeque les contres qui devront constituer la Bul-garie sont : la Bulgarie proprement dite, laThrace et la Macdoine. L'Ouprava aurait toblige de s'en tenir exactement la dcisiondu Congrs et n'aurait pas os conclure destraits et s'attribuer, par l, des droits plusgrands que ceux qui lui avaient t donns par leCongrs. Enfin, si Garaschanin avait eu le soucide demander un accord reposant sur le consen-tement du peuple, il aurait t encore plus cir-conspect lors de la conclusion d'un trait falsi-fiant la volont du peuple exprime par unedcision solennelle.

    Il est avr que le mouvement d'union serbo-bulgare et d'unification des Slaves du sud tait, cette poque, soutenu et encourag par ladiplomatie russe. L'initiative de la convocationdu Congrs bulgare Bucarest fut prise parl'agent diplomatique russe de cette ville et parcelui de Serbie, Magazinovitch. L'ide elle-mme n'tait pas trs populaire parmi les Bul-gares qui avaient concentr tous leurs effortsdans la lutte contre le Patriarchat grec pourobtenir l'indpendance religieuse et l'unificationethnique dans les limites de l'Empire turc. C'estpeut-tre parce que le prince Michel compritque les Bulgares, en se rapprochant des Turcs eten obtenant une hirarchie ecclsiastique, trslarge, opposeraient bientt une barrire de granitaux convoitises serbes sur les territoires bulga-res, c'est peut-tre aussi parce que, aprs sonvoyage de 1867 en Europe, il fut persuad que, tout ses complications diplomatiques, cette dernirene manifesterait aucun intrt pour l'Orient etne serait pas porte le soutenir dans la ralisa-tion de ses plans audacieux, c'est peut-tre enfin,pour l'une et pour l'autre de ces raisons, que, aprsson entrevue avec Andrassy, Michel s'empressa,en rentrant en Serbie, de remplacer Garaschaninpar Yov. Ristitch, diplomate habile et circonspect.

    Ds cette mme anne, il se rapprocha des

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    Turcs, chassa les Bulgares qui tudiaient clansles coles serbes et renvoya les lgions bul-gares qui, en 1862, avaient combattu avec le plusgrand courage contre les Turcs de Belgrade*).Et c'est ainsi que le Prince Michel se renditcoupable de trahison contre sa propre ide d'unroyaume des Slaves du Sud. Ceci froissa les Russesau plus haut degr. Aprs l'assassinat du PrinceMichel (1868), la Serbie s'adonna l'influenceautrichienne. Alors, les sympathies des Russesse tournrent vers les Bulgares**).

    A ce moment, les Bulgares se trouvaientau plus fort de leur lutte pour l'indpendancereligieuse. Au dbut, la conduite de la Serbie ce sujet fut indcise. Elle travailla tout d'abord l'unisson de la Russie et soutint jusqu' uncertain point les rclamations des Bulgares. Et cen'est qu a partir du moment o dans la discussionon laissa de ct la question des diocses pure-ment serbes de Bosnie et d'Herzgovine et devieille Serbie que les Serbes envisagrent entoute tranquillit les ngociations entre les Bul-gares et le Patriarche. Les Serbes n'avaient pasalors encore dfinitivement abandonn l'ided'une alliance serbo-bulgare. L'agent serbe Constantinople envoyait l'poque son gou-vernement des rapports comme celui-ci : Nousdevrions reconnatre l'Eglise bulgare : nos pro-pres intrts l'exigent ainsi que les intrtsde ce peuple qui nous est apparent, avec lequelnous sommes tenus de vivre en paix, en bonneintelligence et en amiti pour notre avenir com-mun... Par la reconnaissance de l'Eglise bulgare,nous ne ferons qu'tre sincres envers nous-mmes; car nous n'avons cess de protester dubon droit des Bulgares. Par cette mesure nousparalyserions aussi les manoeuvres de nos enne-mis qui sont persuads que dans le cas o lesBulgares russiraient, nous nous sparerions deces derniers***) .

    *) St. Novakovitcli. Srpska kniga , Belgrade 1900, p. 62.**) Professeur M. Voukitchevitch et D.-X. Semis, p. 139.***) P. Miliakoff, p. 266.

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    Peu de temps s'tait coul depuis la con-fection de ce rapport que les vnements mon-traient en effet que les Serbes se sparaient desBulgares, ds que ceux-ci eurent atteint leursfins. Ils passrent au camp ennemi c'est--dire celui des Grecs.

    Conformment l'art. 10 du firman, parlequel la Sublime Porte instituait l'Exarchatbulgare, certains diocses pour lesquels les Bul-gares rclamaient des vques devaient trefixs au moyen de plbiscites parmi les popula-tions du lieu*). En vertu de cette disposition etde la volont de la population locale manifested'une faon unanime et nergique la SublimePorte dlivra un brat accordant des vques Okhrida et Scopi (Uskub). Mais Okhrida etScopi sont le cur de la Macdoine.

    C'est ce jour l que naquit la question ma-cdonienne. L'esprit national bulgare porta unpremier coup crasant l'idal imprialiste desSerbes et des Grecs. Mais ces derniers ne dsesp-rrent pas. Avec des mthodes, des forces et desmoyens nouveaux, tantt unis, tantc sparment,ils engagrent une lutte acharne contre l'l-ment bulgare en Macdoine et, par suite, contretout le peuple bulgare.

    Ton ide ne prira point : telles furentles paroles que les Serbes gravrent sur le mo-nument du Prince Michel. Elles tmoignent del'opinion politique serbe qui n'avait pas changmme aprs la mort violente du Prince. Dsor-mais, l'ide d'une Confdration balkanique, d'uneunion avec la Bulgarie est dlaisse, pour fairelargement place celle, lance dix annes au-paravant, que la Macdoine est serbe. La vic-toire bulgare au sujet de la question religieuse

    *) Aht. 10 du firman du 11 mars 1870: Si toute la popula-tion orthodoxe, ou tout au moins, les deux tiers de cette popula-Lion le dsirent, leurs affaires culturelles seront dvolues l'Exar-chat. Ainsi, dans d'autres localits que celles indiques ci-dessus,et si ce vu a t clairement exprim, on fera comme la popula-tion le dsire. Mois cette permission ne peut tre accorde qu'avecle consentement ou sur la demande de toute la population ou, aumoins, de ileux tiers d'entre elle ,

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    arracha le masque de la politique serbe, quiouvrit maintenant ouvertemeut et sans pudeurl're des attentats contre les pays bulgares.

    Lorsqu'en 1875 l'insurrection de la Bosnieet de l'Herzgovine eut commenc, la Serbiecrut que le moment favorable pour raliserl'ide du Pimont des Balkans tait arriv.Elle dclara la guerre la Turquie, mais futvaincue.

    A la veille de la guerre turco-russe quiclata quelques temps aprs la conclusion dutrait de paix serbo-turc, la Serbie s'empressa desonder le gouvernement russe sur les conditionsauxquelles la Serbie pourrait aussi entrer enguerre avec la Turquie. Jovan Marinovitch, d-lgu dans ce but Ptersbourg, tait porteurde la part du gouvernement serbe des instruc-tions suivantes: 1. Exiger de la Russie uneassistance financire ; 2. Obtenir d'elle la garan-tie que le cercle serbe de Krana ne sera pasvictime d'une invasion possible de la part desTurcs, pour que la Serbie ne soit pas par l isolede la Russie ; 3. S'informer des compensationsterritoriales que recevrait la Serbie pour sa col-laboration. La Russie donna une rponse gn-rale : l'affaire des compensations sera rgle lorsde la conclusion de la paix et la Serbie pourraen recevoir dans la mesure du service rendu.Les Serbes ne se dcouragrent pas et poursui-virent les ngociations. Le Prince Milan en per-sonne se rendit Ploescti o se trouvait alorsl'empereur Alexandre II, pour traiter des condi-tions de son intervention arme. L'empereur luifit la rponse suivante : Je ne vous engagepas, je ne vous force pas, mais vous pouvez, sivous voulez et ne manqua pas en prsencedes gands-ducs, des gnraux et des ministres,de lui reprocher la guerre dclare la Tur-quie une anne auparavant comme une grandefaute.

    Les Russes passent le Danube; ils sont de-vant Plvna. Le sige de cette forteresse traneen longueur: il impose l'arme russe des sacri*

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    fices lourds et pnibles. C'est prcisment le mo-ment o l'arme russe a le plus besoin de secours. si les armes serbes ne passent point la fron-tire dans un espace de douze jours, dclarel'empereur de Russie lui-mme au colonel serbeKatardjiou, plnipotentiaire du Prince de Serbie au-prs du quartier gnral russe, la Serbie est perdueet son avenir national est jamais compromis. Sila Serbie persiste dans l'inactivit elle perdraaussi les sympathies de la Russie tout entire.Si elle entre en guerre elle poura prtendre un avenir et je soutiendrai ses aspirations.S'abstient-elle de prendre part la lutte, je lalaisse elle-mme : dites cela au Prince et songouvernement. Dites aussi au Prince que s'il faitmarcher ses armes dans un espace de douzejours, il me rendra un service important et queje compte sur lui. Vous n'avez rien craindredu ct de l'Autriche.*) Aussitt, sur le dsirde l'agent serbe, il fut tlgraphi au ministredes finances russe d'envoyer au Prince Milan unmillion de roubles. Mais le Prince Milan et songouvernement trouvaient toujours des prtextesde faire traner les pourparlers dans le but detirer profit de la situation prcaire des armesrusses, pour contraindre l'empereur de Russie prendre des engagements concrets au sujet desfuturs compensations territoriales. Sur ces entre-faites, Plvna capitule (le 28 novembre) et laroute de Constantinople est ouverte. La guerreest presque dcide pour les armes russes, lavictoire parat assure, alors (le 1 er novembre1877), le gouvernement serbe s'empresse deprendre part la guerre bien que les questionssur lesquelles on ngociait avec les Russes et quiconstituaient un motif apparent de ne point par-ticiper aux oprations, ne fussent pas encorergles.

    La marche des oprations militaires desSerbes et, plus tard, leur rgime terroriste

    'i P. Miliukoff. Relations entre les Serbes et les Bulgares .Recueil du journal RousI;o-bogr

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    l'gard de la population des territoires occups,dvoilrent clairement les buts de l'interventionserbe. Les Serbes n'avaient contre eux que descorps turcs insignifiants qui, d'aprs Ristitch *)s'levaient environ 46,000 hommes, ainsi r-partis : A Vidin, Koula et Blogradtchik 8530;aux environs de Pirot, Bla-Palanka et Svti-Nicolas, approximativement 11,800 ; Nisch,Mramor, Prokoupl et Kourschoumly, 8000; Novi-Bazar, Snitza, Vischgrad et Plvl, envi-ron 17,000; soit, en tout, 45,340 hommes. Enoutre, les Russes avaient dj rsolu le problmecapital. Plvna tait pris ; les Russes taient surles derrires de ces troupes turques ne repr-sentant que des hordes composes d'lmentsrunis au hasard et incapables de toute rsistance.Les Serbes s'emparrent de Nisch, Pirote, Bla-Palanka et Vrania, et, au lieu de se joindre auxRusses, envoyrent leurs troupes Kossovo qu'ilsjugrent plus utile d'occuper, cela d'autant plusque la localit tait dj abandonne par lesarmes turques.

    Lorsque le moment de la conclusion de lapaix fut proche, Miloslav Protitch fut envoy Ptersbourg pour dfendre les intrts serbesavec les instructions suivantes : 1. Exigence de lareconnaissance de l'indpendance de la Serbie;2. Garantie la Serbie des ddommagementsterritoriaux dtermins. Les Serbes levaientdes prtentions sur: Vischgrad, Phaga, Belo-Pol, Brana, Dbre, Vls, Schtip, Djoumaa,Kustendil, Radomir, Dragoman, le col des Ghina,Konaschtitza, Stara-Planina, le col de Svti-Nicolas, jusqu' Blogradtchik et Koula avecVidin. Ces localits dlimitent un territoire quiconstitue: 1. le dpartement de Nisch, avec lesdistricts de Nisch, Pirot, Vrania, Leskovetz,Prokoupl, Kourschoumly et Trn. ; 2. le dpar-tement de Prisren, avec les districts de Prisren,Louma, Diakovo, ipek etTtovo; 3. le dparte-

    *) Histoire diplomatique de la Serbie (en serbe), 1898. p,60-64.

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    ment de Skopi, avec les districts de Skopi, Kou-inanovo, Kratovo, Kgri-Palanka, Kotchani, Rado-vich. Schtip; 4. le dpartement de NoviBazar,avec' les districts de Novi-Bazar, Mitrovitza, Yas-solvitz, Tarnovitz, Blo-Poptzi, Prpol, Kola-schin, Snisch, Novivarosch et Plvl. *)

    Pour raliser ces exigences, les Serbes en-voyrent le colonel M. Leschanin, appuyer lecolonel Katardjiou. Le colonel Leschanin taitporteur des lettres du Prince Michel au Grand-duc Nicolas et au Comte Ignatieff. Aussi bien Ptersbourg qu'au quartier gnral russe, les en-voys serbes sont reus avec tonnement. De saconversation avec Giers, Protitch eut l'impressionque les intrts bulgares n'taient plus d'ores etdj protgs contre les Turcs mais bien contreles Serbes. **)Giers rpondit Protitch que tous les territoires

    occups par les Serbes taient bulgares- et quede Tavis des Russes il tait injuste de livrerle peuple bulgare aux mains des Serbes *'). Telletait l'gard des Bulgares le bon vouloir del'opinion publique russe, que la propagande chau-vine serbe n'avait pas encore pu induire enerreur sur la situation. Protitch eut soin de ga-gner sa cause quelques journaux russes. LeRoussky Mir et le Novoj-Vrmia ouvrirent leurscolonnes aux Serbes et par l commena dansl'opinion publique la propagande serbe; elle d-buta par la Russie pour lever la tte plus tard,gagner en largeur et en profondeur et atteindrepeu peu le summum de la virtuosit dans sesmthodes. Dj cette poque l'empereur de Russieprescrivit une enqute pour sparer le bon grain dela vrit de l'ivraie, du doute et des procdstendancieux ainsi que pour tablir sur la base desconstatations faites qu'en effet Nisch, Pirot, Vra-nia et Leskovetz taient habits par des Bul-

    *) Ristitch, p. 111-113,

    i Ihid. p. 116-117.

    -. //

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    gares*). Le Prince Tcherkasky, lui-mme, quin'avait aucune sympathie pour les Bulgares,s'leva contre les prtentions serbes.

    Le trait de San-Stfano fut conclu par leComte Ignatieff sur la base de la frontire ethni-que de la Bulgarie **). Lorsque plus tard un agentserbe lui reprocha d'avoir alors observ uneattitude partialement, bienveillante aux Bulgaresle Comte Ignatieff, bondit de sa place, et sortit deson casier une liasse de documents utiliss lors dela conclusion de la Paix de San-Stfano. Il talaquelques cartes et manuels scolaires serbes quidmontraient que les territoires donns auxBulgares n'taient nullement serbes, mais bul-gares***).

    Cependant le trait de San-Stfano dut tresoumis une rvision de la part des puissanceseuropennes. Il fut annonc que dans ce but uncongrs se runirait Berlin. Les diffrents Etatsse htrent de s'entendre sur les questions encoreavant la runion de l'assemble. Ce fut alors quela Serbie la recherche de cessions de territoireset d'appui pour ses intrts s'adressa l'Au-triche. L'Autriche n9 voulut pas entendre parlerde cessions de territoires sur les frontires de laBosnie et de l'Herzgovine. Ristitch, envoy pourtraiter avec Andrassy tlgraphiait le 28 mai (8juin): J'ai eu un long entretien avec Andrassy.Il accepte un agrandissement territorial du ctde Vrania et Pirot. Il est en outre prt nous

    *) St. Tchilinghiroff.

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    donner son appui aux conditions suivantes : laSerbie devra conclure un trait de commerce avecl'Autriche et cder l'exploitation de ses chemins defer la Socit des chemins de fer ottomans .Le Prince Milan consentit et la Serbie obtint aucongrs de Berlin tout un territoire compos depays bulgares, savoir: la Pomoravie. Mais lesSerbes restrent mcontents de ces grandes aqui-sitions. Quelle consolation nous reste-t-il alors ? demandait Ristitch aux plnipotentiaires russes. Il vous reste cette consolation, rpondit le

    baron Jomini, que cet tat de choses n'est quetemporaire et que dans quinze ans, au plus tard,nous rglerons notre compte avec l'Autriche *).

    Mais aprs le congrs de Berlin, disentles auteurs de l'Enqute Carnegie, PAutriche-Hongrie tait entre en relations plus troitesavec le roi Milan de Serbie. Celui-ci signa en1881 un trait secret aux termes duquel ( 7) PAu-triche-Hongrie dclara officiellement qu'elle nefera pas d'opposition, qu'elle est mme prte soutenir la Serbie vis--vis d'autres puissances,au cas o la Serbie trouverait la possibilit des'entendre avec celles-ci sur l'extension de sesfrontires au sud, sans s'agrandir du ct duSandjak de Novi-Bazar . En 1889, quand cetrait fut renouvel, PAutriche-Hongrie promit entermes encore plus clairs qu'elle soutiendral'expansion serbe dans la valle du Vardar .Par ce trait, PAutriche-Hongrie aiguillait l'Etatserbe vers les pays du sud comme compen-sation alors que ces pays jusque dans les an-nes 1860-1870 de l'aveu" gnral, mme du ctserbe, avaient t regards comme bulgares.Par l, elle enlevait la Serbie tout espoir des'agrandir l'ouest et de s'agrger de ce ctcette partie du peuple serbe, habitant la Bosnieet l'Herzgovine **).

    *) P. Miliukoff, p. 276.

    "i Enqute dans les Balkans. Rapport prsent aux Direc-teurs de la Dotation Carnegie pour la paix internationale, par lesmembres de la Commission d'enqute. Paris 1914, p. 7.

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    Le peuple bulgare avait maintenant la possibi-lit de diriger ses destines dans un tat nationallibre et indpendant. De mme qu'auparavant enGrce et en Serbie, de violentes temptes se d-chanrent sur la Bulgarie jusqu' ce que la viepublique et politique du pays pt tre canalisedans un courant rgulier. La Serbie pleine d'en-vie et de rancune, n'attendait que le momentpropice pour se jeter sur la Bulgarie et satisfairedes apptits qu'elle n'avait pu satisfaire au con-grs de Berlin. Le 6 (19) septembre 1885, par lecoup d'Etat de Philippopoli, la Bulgarie du Nordet celle du Sud se dclarrent unies et procla-mrent le Prince Alexandre de Battenberg sou-verain commun des deux provinces. Au mo-ment o les Bulgares, s'attendant une attaquede la part de la Turquie, dont les droits souve-rains taient lss par cet vnement, avaientrassembl leur arme la frontire turque, onfaisait Belgrade des prparatifs dans un butd'agression ou, du moins, de chantage.

    La politique serbe ne pouvait pas viser en-traver l'union de la Bulgarie avec la Roumlie;cependant, en ce moment, elle comptait, pour lemoins, maintenir Tquilibre politique dans la p-ninsule et obtenir une garantie pour son avenirnational. Une rectification de frontire vers l'Estet un agrandissement au Sud : tel tait le but dugouvernement serbe en cette circonstance. Voi-l ce que notait alors dans son journal Pi-rot tcluinet z qui tait en ce moment un des mem-bres du gouvernement serbe.Le roi Milan, qui, cette poque se trouvait

    hors de Serbie, s'empressa de prendre langue Vienne, et de l dj il tlgraphia son gou-vernement de commencer* la mobilisation. Le 8(21) septembre, il retourna Belgrade et convo-qua un Conseil des ministres sous sa prsidence.Il fit part ses ministres des dmarches qu'ilavait faites Vienne, communiqua ses impres-sions dont la substance tait que les grandespuissances n'taient pas encore au courant desvnements et qu'elles voulaient surtout viter

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    toute complication. Mais les dsirs des diplo-mates ne sont pas dcisifs pour nous, observa-t-il.Nous sommes forcs en raison du trait de Berlinde dfendre nos intrts politiques et nationaux,advienne que pourra . Le Conseil des ministresapprouva ces vues et envoya Voukaschin Ptro-vitch Vienne pour y conclure un emprunt envue de la guerre projete.

    Milan ordonna Voukaschin Ptrovitch de serendre auprs de Kalnoky et de Kalay et de leurdclarer que la Serbie ne voit pas la possibilitde ne pas attaquer la Bulgarie ? Kalnoky se pro-nona rsolument contre le projet serbe. Ilconseilla de ne mobiliser qu'une division et dela concentrer Nisch. Lorsque cela aura taccompli sans bruit, dit-il, le gouvernement serben'aura qu' s'adresser aux grandes Puissances ainsiqu' nous, et rclamer ou bien le rtablissement dustatu quo en Roumlie ou la concession la Serbied'une compensation correspondante pour que l'-quilibre entre la Serbie et la Bulgarie ne soit pasrompu (*). Si votre roi suit mon conseil, dites-lui que j'espre, dans le cas ou la Bulgarie gar-derait la Roumlie Orientale, que la Serbie re-cevra en compensation au moins le pays envi-ronnant Trn et Breznik, avec ces deux villeselles-mmes. Mais si, malgr mes conseils d'ami,il dclare la guerre, il ne recevra rien, dans lecas mme o l'arme serbe serait victorieuse. Kalay parla dans le mme sens et prdit mme Voukaschin, que les Serbes seraient battus. Vous ne connaissez pas les Bulgares, dit-ilentre autres, vous les prenez pour des jardi-niers , mais ce sont des hommes braves et prts combattre. Je crains qu'une guerre avec euxne vous mne pas bonne fin; mieux vaudraitne pas en dcoudre avec eux (**).

    La prdiction de Kalay s'accomplit. Bien

    *) D r Wladan Djordjvitch. Histoire de la guerre serbo-bulgare 1908, t. 1. p. 51 en Serbe.

    *') S. Radeff. Les constructeurs de la Bulgarie contempo-raine , t. 1. p. U3.

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    laisss en plan par les officiers russes et surpristratreusement, tandis que leurs forces taientconcentres la frontire turque, les Bulgaresse tournrent marches forces contre l'ennemi.(La Bulgarie ne disposait pas alors de cheminsde fer.) 11 y avait l militairement un tour deforce qui remplit le monde d'admiration. Ils vain-quirent et le poursuivirent jusqu' Pirot et Nisch.C'est alors que l'Autriche sauva la Serbie parl'intervention.

    Aprs 1885, la propagande serbe en Mac-doine recommena, plus nergiquement que ja-mais, opinitre et systmatique. Toute une lit-trature chauvine vit le jour pour convaincreles Serbes et le dehors que la Macdoine taitserbe : l'Histoire et la Science y taient falsifiesad hoc. Un tat de chose vident, flagrant taitni, des efforts et des sacrifices taient consentispour cacher la vrit manifeste que la populationtait bulgare, et qu'elle parlait bulgare, ayant uncaractre et une conscience foncirement bulgares.

    Par suite de l'impossibilit de s'tendre l'ouest, la Serbie cherchait air et espace pourson existence. Elle avait besoin d'une sortie duct de la mer et de voies pour sortir de l'tatd'isolement dans lequel elle se trouvait. Lesthories nouvelles sur la Macdoine et les thsesdes littrateurs chauvins serbes taient accueilliespar le peuple serbe tout entier avec avidit etavec un sentiment de soulagement. Les ides ra-jeunies des Panta Stretkovitch, Miloschvitch etDraguischvitsch tinrent bientt toute la Serbiesous le charme. Et dsormais dans ce paysgar, il n'y eut plus personne pour se pro-noncer contre l'annexion de la Macdoine laSerbie. Cette tendance devint comme un principefondamental, un dogme sacr et intangible dela politique extrieure de la Serbie. 11 n'y avaitde diffrence de vues entre les partis que relati-vement au moment o cette question devait tresouleve et o il fallait procder sa solution.A cette poque, l'Autriche elle aussi qui voulaitparalyser la propagande serbe en Bosnie et Her-

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    zgovine encourageait les prtentions serbes surla Macdoine *).

    Dans la priode comprise entre les annes1885 et 1912, anne de la ralisation de la ligue balcanique , en Serbie deux courants luttaientl'un contre l'autre. Le premier voulait l'an-nexion la Serbie de la Macdoine tout en-tire. C'tait celui de l'ancienne gnration etdes chauvins extrmes, qui rvaient la restau-ration de l'Empire du tzar Douchan. Le secondcourant, plus modeste et plus pratique taiten faveur d'un partage fraternel de la Ma-cdoine entre Serbes et Bulgares. Mais cettegnrosit elle-mme n'allait pas plus loin qu'accorder aux Bulgares la contre limite par lavalle de la StroUma, en se rservant pour soi-mme toute la Macdoine occidentale et centrale.A ces deux courants la Bulgarie opposait l'idede l'autonomie de la Macdoine, assure que decette faon la population bulgare serait dlivredu terrorisme tranger et qu'on liminerait l'agi-tation, les insinuations et les sductions tran-gres. On voyait l ausi le moyen de mettre lespays bulgares l'abri de tout attentat du dehors.

    Dans les dernires annes, aprs s'tre per-suad que, malgr la falsification de l'histoire etde la science, pratique longtemps par les pro-fesseurs et les publicistes serbes, malgr les nor-mes sacrifices gaspills en agitations, malgr lesfondations d'coles, le rgime des bandes et lespratiques de corruption en Macdoine, ce paysdemeurait bulgare, avec une population d'uneconscience nationale bulgare profondment enra-cine et inbranlable et que cette population necessait d'aspirer la runion la Bulgarie, lamajorit du peuple serbe consentit l'ide d'unpartage de la Macdoine aprs entente avec laBulgarie, sous la forme d'une alliance entre lesdeux peuples.

    Cette ide d'alliance trouvait en Serbie beau-

    ')