LA FRANCE

AUX CENT

SECTES

Du même auteur :

La Piste Hô Chi Minh — Lattès 1972

Le guide de la France des faits-divers — Éditions N° 1, 1992

La Crim', les grandes affaires de la Brigade Criminelle — Éditions N° 1, 1995

Parole de flics, la brigade des stups — Éditions N° 1, 1996

JEAN PIERRE VAN GEIRT

LA FRANCE

AUX CENT

SECTES

VAUVENARGUES

REMERCIEMENTS

La publication de cette somme d'informations concernant les sectes en France n'aurait pu voir le jour si l'ensemble des béné- voles de l'ADFI en général et d'Hayat El Mountacir en particu- lier, avec l'aval de sa présidente Jeanne Tavernier, ne m'avaient ouvert leurs archives et prodigué leurs conseils. J'ai une pensée toute particulière pour la gentillesse, le dévouement et la patience à mon endroit du père Trouslard. Le rapport Gest fut une bonne base de départ et la DCRG un bon point de chute. À toutes et à tous merci. Merci surtout pour le combat qu'ils poursuivent.

@ GECEP, Vauvenargues, 1997 ISBN : 2-7443-0049-7

A MA SNOOPINETTE ET NOS CHICHOUX

À MON PÈRE

AVERTISSEMENT

La France aux cent sectes... Cent ? Et pourquoi pas quatre- vingt-dix ou mille, sur tout lorsque l 'on sait que le dernier rap- por t par lementai re en recensait près de deux cents.

D'abord parce que plusieurs sectes ont de multiples noms, parfois jusqu 'à vingt pa t ronymes différents. Une secte peut en cacher une autre et c'est au tan t de pièges pour le crédule qui s'inscrit tantôt à u n cours de connaissance de soi, tantôt à u n débat phi losophique ou, plus grave, qui décide d ' emmener ses enfants écouter « Le Petit Prince » en croyant de toute bonne foi à la simplicité de la proposition. Le naïf, le candide, la poire, le paumé, l'égaré, bref, vous ou moi, nous nous retrouverons en fait bel et bien entres les griffes d 'une secte.

Cent également parce que telle ou telle secte passe son temps en procès non seulement pour renflouer ses caisses mais égale- men t pour faire parler d'elle.

Cent sectes seulement, aussi, car certaines ne duren t m ê m e pas le temps d 'une floraison et meuren t avant m ê m e d'être reconnues. Juste le temps d'avoir grugé quelques gogos désespé- rément paumés dans notre société précaire et nombri l is te à l'excès.

Enfin cent sectes... de trop et donc une furieuse envie d'éviter le prosélytisme.

Jean Pierre Van Geirt

INTRODUCTION

Secte ? Vous avez dit secte !

Mais qu'est-ce qu 'une secte au juste ? La loi, m ê m e si elle est parvenue à pénaliser certains compor-

tements sectaires, ne le sait pas puisqu'elle n'a pas réussi à la définir jur idiquement . Les dict ionnaires ne sont d 'accord que sur l 'apparit ion du mot aux alentours des XIIIe et xive siècles. Le Littré, référence s'il en est, dit que la « secte est l 'ensemble des personnes qui font profession d 'une m ê m e doctr ine » ou « qui suivent une opinion accusée d'hérésie ou d 'e r reur» . Quant au Robert grand ou petit, il distingue « les personnes qui on t la même doctrine au sein d 'une religion » de ceux « qui professent une m ê m e doctr ine ». L'Église, elle, ratisse plus large. Dans le Dictionnaire des religions publié aux PUF il y a une dizaine d'an- nées, la secte est présentée comme, « au sens originel, u n groupe de contestat ion de la doctrine et des s tructures de l'Église, en t ra înant le plus souvent une dissidence. Dans u n sens plus étendu, tout mouvement religieux minori ta i re ». Les membres de la commission d 'enquête présidée par Alain Gest, lors de la publicat ion du dernier rappor t parlementaire, adopte ron t cette définition des sectes : « Groupes visant pa r des manœuvres de déstabilisation psychologique à obtenir de leurs adeptes une allégeance inconditionnelle, une d iminut ion de l 'esprit critique, une rup ture avec les références c o m m u n é m e n t admises (éthiques, scientifiques, civiques, éducatives), et en t ra înant des dangers pour les libertés individuelles, la santé, l 'éducation, les insti tutions démocrat iques. Ces groupes utilisent des masques philosophiques pour dissimuler des objectifs de pouvoir, d'em- prise et d'exploitation des adeptes. »

À en croire les spécialistes du rappor t Gest et d'autres, il y a donc danger si il y a :

déstabilisation mentale, caractère exorbitant des exigences financières, rupture induite avec l 'environnement d'origine, atteintes à l 'intégrité physique,

embrigadement des enfants, discours plus ou moins antisocial, raciste et totalitariste, troubles à l'ordre public et importance des démêlés judi-

ciaires, éventuel détournement des circuits économiques tradition-

nels, trafic de drogue, d'armes, prostitution... stratégie d'ingérence, tentatives d'infiltration des pouvoirs

publics et, d'une manière plus générale, tous les réseaux de la vie sociale, économique et culturelle.

De nombreux et excellents ouvrages (voir la bibliographie à la fin de ce livre) traitent des multiples facettes des sectes. Cer- tains se bornent à relater d'émouvants témoignages, d'autres font des analyses sociologiques, politiques, économiques ou religieuses de ces phénomènes. Dont acte !

L'idée du présent volume se veut plus simple. En France, rien qu'en France, plus d'une centaine de sectes (toutes n'en ont pas le nom et la plupart s'en défendent, revendiquant le statut de religion, cercle de pensées, centre de recherches...) ont réussi à convaincre près de 200 000 de nos compatriotes. Quelques-uns sont des célébrités. Certains sont nos voisins. Tous sont à la recherche d'un mieux être qu'ils ne trouveront pas. Sinon pour- quoi le « suicide » collectif de Jonestown en Guyane faisant 923 morts en 1978 ou tout près de nous, en mars 1997, les 39 « suicides » de la Porte du Ciel, à Rancho Santa Fé ? Entre ces deux chiffres de désespoir, les sectes sont responsables d'au moins 214 autres suicides recensés. Sans parler des autres, tous ceux, anonymes, qui, au bout de tout et revenus de leurs der- niers espoirs, ont renoncé à se battre et quitté le royaume de la terre. Ils sont tombés dans les pièges tendus par les sectes et les « églises » nouvelles, les « religions » exotiques. Essorés physi- quement, financièrement et psychologiquement, ils ont cessé de vouloir être. À l'instant où vous lisez ces lignes, un homme, une femme, un enfant sont en danger de « secte ». Désemparés par le monde qui bascule, la vie dure, le chômage, la foi perdue, la famille éclatée... une triste fin de siècle, un sale tunnel pour les enfants du troisième millénaire. Alors les sectes, telles des vermines grouillant de partout, partent à la conquête du déses- poir et de son armée, les désespérés. Il ne reste qu'à les cueillir. Ils sont mûrs. Et les presser. Avant de les rejeter. Ce livre veut seulement signaler qu'en France plus de cent sectes règnent sur des êtres en voie de perdition. Qui et que sont-elles ?

LISTE DES SECTES

A AAO ACTION FATIMA-LA SALETTE ALLIANCE UNIVERSELLE AMIS DE L 'HOMME AMIS DE LA CROIX GLORIEUSE DE DOZULÉ AMWAY ANANDA MARGA ANTHROPOS ANTHROPOSOPHIE ANTOINISME L'ARBRE AU MILIEU ARCHE DE MARIE ARÈS ASSOCIATION SUBUD DE FRANCE — SUSILA DHARMA FRANCE AVATAR AZAZEL INSTITUTE INCORPORATED

B BHAGWAN (OSHO)

c CERCLE DE LA LICORNE CHATEAU DU MAGNET CHEVALIER DU LOTUS D'OR (MANDAROM) LA CITADELLE CLUB DES SURHOMMES COMMUNAUTÉ DE L'ARCHE COMMUNAUTÉ DE LA THÉBAIDE COMMUNAUTÉ DES CHRÉTIENS CONTRE-RÉFORME CATHOLIQUE CRAVONZOLA

D DAGHPO SHAMPA KAGYU

E E.T.R.E ECKANKAR ÉCOLE DE L'ESSENTIALISME-SUNDARI ÉCOLE DE LA VIE ABONDANTE ECOOVIE ÉGLISE CATHOLIQUE APOSTOLIQUE ÉGLISE DE LA SAINTE FAMILLE ÉGLISE DU CHRIST INTERNATIONALE ÉGLISE ÉVANGÉLIQUE DE PENTECÔTE DE BESANÇON ÉGLISE KHRISTIQUE DE LA JÉRUSALEM NOUVELLE ÉGLISE NÉO-APOSTOLIQUE

ÉGLISE UNIVERSELLE DE DIEU ÉGLISE UNIVERSELLE ET TRIOMPHANTE LES ÉMISSAIRES DE LA LUMIÈRE DIVINE ENERGY WORLD ENFANTS DE DIEU ERMITAGE DU CHRIST DE LA PAIX

F FACULTÉ DE PARAPSYCHOLOGIE DE PARIS FAMILLE DE NAZARETH FOI BAHA'IE FRATERNITÉ BLANCHE UNIVERSELLE FRATERNITÉ DU FRÉCHOU ANDIRAN

G GEPM GRAAL LE GRAND LOGIS GURU MAHARAJ JI (ÉLAN VITAL)

H HARMONIA HERBALIFE HUE FRANCE HUMANA FRANCE

1 IAM-FONDATION SAINT-GERMAIN INSIGHT SEMINARS INSTITUT DE RECHERCHES PSYCHANALYTIQUES ISO ZEN INVITATION À LA VIE INTENSE

J LES JARDINS DE LA VIE

K KRISHNA

L LANDMARK-LE FORUM

M MACROBIOTIQUE MAHIKARI LA MAISON DE JEAN MÉDITATION TRANSCENDANTALE LES MENNONITES METHERNITA MOON LES MORMONS LE MOUVEMENT (HUMANISTE)

N NOUVELLE ACROPOLE

0 ŒUVRE DE RÉINTÉGRATION CHRISTIQUE OFFICE CULTUREL DE CLUNY OGYEN KUNZANG CHOLING OMEGA-ACRÉO ORDRES DU TEMPLE ORDRE DU TEMPLE SOLAIRE ORDRE MONASTIQUE D'A VALLON ORDRE RÉNOVÉ DU TEMPLE

P LA PAROLE DE FOI-ÉVANGÉLISATION MONDIALE PARTI OUVRIER EUROPÉEN LE PATRIARCHE

R LES RAÉLIENS RAM CHANDRA REIYUKAI ROSE-CROIX

S SAINT-ERME SANCTUARY SCIENCE DU MENTAL SCIENTOLOGIE SHRI MATAJI (SAHAJA YOGA) SOKA GAKKAI SOLAZAREFF-ASSOCIATION POUR LA PROMOTION DES ARTS INDUSTRIEUX SRI CHINMOY SRI SATHYA SAI BABA SUICIDE DES RIVES

T TABITHA'S PLACE LES TÉMOINS DE JÉHOVAH TRADITION-FAMILLE-PROPRIÉTÉ TRANS-MUTATIONS TROIS SAINT CŒURS

u UNIVERSITÉ SPIRITUELLE DES BRAHMA KUMARIS

V VIE CHRÉTIENNE EN FRANCE LA VOIE INTERNATIONALE

LA FRANCE AUX CENT SECTES

Cette carte signale, département par département, les implantations des sectes les plus connues : plus d'une centaine, au total, en France. On y voit clairement que le phénomène concerne en premier lieu la région parisienne où les sectes installent leurs vitrines et opèrent leur recrutement, rélégant en province - essentiellement dans le midi mais aussi autour des grandes métropoles régionales - leurs activités plus "ésotériques".

A.A.O. ORGANISATION

D'ANALYSE ACTIONNELLE

L'HISTOIRE

C'est en 1976 que le peintre autrichien Otto Mühl, né en 1925, crée dans son pays le mouvement Aktion Ana- lystische Organisation. Mühl s'inscrit en droite ligne dans la contre-culture alternative issue de mai 1968, mais ce sont surtout les travaux du psychanalyste Wilhelm Reich (1897-1957) dont il va s'inspirer pour créer son mou- vement.

C'est avant tout une nouvelle pratique de vie sociale qui est proposée avec l'abolissement des notions de famille, de couple et de propriété. Des communautés très autarciques se forment en Autriche puis un peu partout en Europe jus- qu'au début des années quatre-vingts. Mühl conserve cependant la haute main sur l'organisation, veillant à la formation stricte de ses cadres dans son quartier général de Friedrichshof en Autriche.

Début 80, la claustration des membres s'assouplit et il leur devient possible de travailler à l'extérieur et de réin- vestir leurs revenus dans la communauté. A.A.O. est rebaptisée Kommune sans rien changer de sa doctrine fondamentale. Mais l'organisation traîne une réputation sulfureuse. On la qualifie de la « secte de l'amour libre »

et Otto Mühl se retrouve dans la ligne de mire de la justice autrichienne. En 1987, il est contraint de fuir son pays pour les Canaries après l 'ouverture d'une information judi- ciaire pou r plusieurs viols de mineurs de moins de seize ans. En 1992, extradé par l'Espagne, il a été condamné à sept ans de prison en Autriche.

Officiellement, aujourd'hui, la Kommune est dissoute et Otto Mühl est toujours sous les verrous. Certaines associa- tions satellites persistent cependant dans leurs « activités culturelles ».

LA DOCTRINE

Otto Mühl prône l'affranchissement de l'individu par la transgression des tabous tels que la famille stable, le mariage, la propriété privée, la religion, les codes esthétiques, la moralité bourgeoise... Le but est de for- mer des « individus sains et libérés, des surhommes », futurs dirigeants d'un État mondial « Aktion Analys- tische ».

LE CULTE

Les membres de A.A.O. vivent dans une communauté totale et pratiquent la Selbst Darstellung ou « représenta- tion de soi-même », des séances de thérapies quoti- diennes très impressionnantes. Dans des cris, des pleurs, des appels au meurtre, il s'agit d'une sorte d'exhibition émotionnelle sans retenue ayant pour but de libérer la haine infantile vis-à-vis des parents et de renier ses racines. Le tout se pratique devant les autres membres du groupe aussi bien pour les adultes que pour les enfants.

LA PROPAGANDE ET LE RECRUTEMENT

Dans les années 70-80, le prosélytisme dé la Kommune était particulièrement actif auprès des jeunes. De nom- breuses associations culturelles servaient de relais au mouvement, proposant sous le nom d'« atelier culturel » des activités manuelles, du théâtre, des enseignements psychologiques...

Pour Otto Mühl, il faut abat tre les bar- rières, t ransgresser les tabous, renverser la morale : l 'interdit, c'est l 'oppression. Pour Otto Mühl, c'est « t romboner » la libération. Oui mais voilà, tant va la cruche à l'eau, qu'à la fin elle se casse. En 1991, Otto Mühl a été condamné à sept ans de prison pou r « vio- lences sexuelles sur mineures ». Sept années d'abstinence pou r ce forçat de l'« a m o u r libre », sept années de réclusion pou r ce défonceur de limites... les juges ont-ils songé à l 'ampleur de leur chât iment ?

ACTION FATIMA-LA SALETTE

Jean Boyer (1923-1992) fut prêtre ouvrier du diocèse de Paris jusqu'en 1963, date à laquelle il se fait suspendre « a divinis » par Monseigneur Feltin. Il décide alors de s'ins- taller à Saint-Geours-de-Maremme dans les Landes, près de Bayonne, où il invite ses adeptes à venir le rejoindre pour échapper à la guerre généralisée dont il prédit l'im- minence et à l'Apocalypse qui doit lui succéder. Depuis la mort de Jean Boyer en 1992, la communauté qui ne compte plus que quelques dizaines de personnes tout au plus continue à promouvoir les messages de Fatima et La Salette.

Jean Boyer prévoyait la grande guerre mondiale ; elle ne vint pas. Jean Boyer annonçai t l'Apocalypse ; elle n 'eut pas lieu. Jean Boyer se serait-il fourvoyé dans toutes ses prédictions ? Je l'ignore, mais pou r finir, Jean Boyer at tendai t la vie éternelle et Jean Boyer est mort.

ALLIANCE UNIVERSELLE

L'HISTOIRE

Georges Roux (1903-1981) était un paisible inspecteur adjoint des PTT en Avignon. Père de six enfants, il exerçait ses dons de guérisseur depuis déjà quelques années lors- qu'il fut chargé d'une « mission divine ». Cette illumina- tion se produisit le 25 décembre 1950 et Georges Roux affirma alors : « Celui que vous appelez encore Georges Roux est en vérité Dieu lui-même... »

Dès lors, tout en poursuivant ses activités de guérisseur, il réunit peu à peu autour de lui un grand nombre d'adeptes. Deux ans plus tard, le 25 décembre 1952, auto- proclamé Georges-Christ (ou le Christ de Monfavet ainsi que le désigneront ses fidèles en référence au nom de son village près d'Avignon), il crée sa religion, L'Église chré- tienne universelle.

Après sa mort en 1981, c'est une de ses filles, Jacqueline, qui a pris la relève, s'identifiant elle-même à la divinité. Rebaptisé Alliance universelle en 1983, le mouvement est aujourd'hui en perte de vitesse. Après avoir compté jusqu'à 5 000 membres, Alliance universelle regroupe aujourd'hui tout au plus 2 000 fidèles, dont la moitié en France, répar- tis dans une cinquantaine de groupes.

LA DOCTRINE

Selon Georges Roux, tout le monde était capable de gué- rir à condition de croire en lui, Christ Georges. Il était donc inutile d'avoir recours à la médecine traditionnelle. Tant que l'on est en harmonie avec sa conscience et le cos- mos, la maladie n'a pas de prise sur l'individu, et il est donc facile d'en venir à bout.

L'Apocalypse était prévue au plus tard pour le 1 er janvier 1980...

LE CULTE

Le dimanche, les fidèles se recueillent avant de guérir les malades par l'imposition des mains. À ce titre, des plaintes ont été déposées pour non-assistance à personne en danger et exercice illégal de la médecine.

Trois sacrements sont pratiqués : le baptême, la commu- nion et le mariage.

LA PROPAGANDE ET LE RECRUTEMENT

Les fidèles sont de moins en moins nombreux, la faute en incombe sans doute à la prédiction non réalisée de Georges Roux quant à la date de l'Apocalypse, le 161 janvier 1980. Quoi qu'il en soit, les adeptes de l'Alliance univer- selle font la promotion de leur mouvement par l'intermé- diaire des trois ouvrages de Georges-Christ : Journal d'un guérisseur, Paroles du guérisseur, Mission divine dont le message est en outre relayé par un périodique, Lumière (deux autres titres qui l'avaient précédé, Messider et Le Témoin de la vie ont cessé de paraître).

En 1956, le mouvement fut assez puissant et médiatisé lors des élections législatives. En effet, l'Alliance univer- selle présenta des candidats avec pour programme : Dieu comme chef de gouvernement et une place au paradis pour les bons électeurs.

STATUT ET ORGANISATION

En France, le mouvement est constitué d'une cinquan- taine de petits groupes répartis sur le territoire. Le siège social se situe en Avignon. A Paris, le mouvement dispose d'une mission, l'Agence chrétienne universelle.

Les disciples du Christ de Monfavet sont comme les Témoins de Jéhovah. Pour eux, pas question d'aller consulter un médecin. Georges-Christ, leur gourou, l'a dit : la méde- cine est « nuisible ». Mais peut-être qu'il par- lait trop, Georges-Christ, parce qu'il est décédé, lui, en 1981, et... de maladie préci- sément.

AMIS DE LA CROIX GLORIEUSE DE DOZULÉ

Sur la Haute Butte de Dozulé, dans le Calvados, entre 1972 et 1978, Madeleine Aumont (née en 1924), mère de cinq enfants, aurait assisté à pas moins de quarante-neuf apparitions de la Vierge. Et les messages du Christ dont Elle est le porte-parole sont clairs, ils annoncent « le cata- clysme général de cette génération » et « une catastrophe telle qu'il n'y en a pas eu depuis le déluge ».

Le Christ aurait aussi réclamé la construction à Dozulé d'une croix lumineuse de 738 mètres de haut, ainsi que celle d'un bassin de purification et d'un sanctuaire.

Parallèlement dans les années 70, Albert Delbauche est professeur de yoga dans le département de l'Aisne et ses cours sont suivis par un public fidèle. Progressivement, le yoga va passer au second plan, et Albert Delbauche va développer ses théories philosophiques, politiques et reli- gieuses auprès de ses élèves. Le maître passe la vitesse supérieure en 1980. Il devient catholique pratiquant et prédit l'imminence de cataclysmes : guerres civiles, guerres nucléaires, destruction de Paris, Lyon et Marseille. C'est l'Apocalypse que prévoit Albert Delbauche. Et pour ce faire, il s'appuie sur les apparitions de Dozulé dont il se dit être le dépositaire des messages.

De 1980 à 1982, entouré de ses élèves du cours de yoga, Albert Delbauche se rend tous les week-ends à Dozulé pour étudier les cahiers sur lesquels sont retranscrits les récits des apparitions de la Vierge. L'objectif est de publier Le Message de Dozulé.

En 1982, l'Association des Amis de la Croix glorieuse de Dozulé est créée pour organiser les pèlerinages à Dozulé et récupérer les dons en vue de la construction de l'im- mense croix lumineuse exigée par le Christ.

Fin 1982, devant l'imminence du cataclysme, Albert Del- bauche enjoint ses fidèles d'aller se réfugier en Loire- Atlantique où ils seront protégés. Ils seront une poignée à tout abandonner, famille, travail et maison pour suivre le maître.

En 1983, c'est la scission. S'apercevant de la superche- rie, des adeptes quittent Albert Delbauche pour former leur propre association.

En 1985, après une enquête approfondie, l'évêque de Bayeux a refusé de reconnaître l'authenticité des appari- tions et a interdit tout pèlerinage et propagande à propos de la « croix glorieuse ». Pourtant, aujourd'hui encore, quelques centaines de fidèles continuent de se réunir chaque année, en mars, sur les lieux.

Nous sommes dans les années 70 après J.-C. Toute la terre est envahie par l'impiété... Toute ? Non ! Dans un coin reculé du Calva- dos, un petit village résiste encore et tou- jours, Dozulé. Mais, pour les Amis de la Croix, croyez-moi, c'est la croix et la ban- nière, cette histoire... personne ne les prend au sérieux.

AMIS DE L'HOMME

L'HISTOIRE

C'est en 1919 que le Suisse Alexandre Freytag (1870- 1947) crée les Amis de l 'homme. À l'origine, il faisait part ie à Genève du cercle des Étudiants de la Bible, u n groupe animé par Charles Russel qui deviendra plus ta rd « Les Témoins de Jéhovah ». Il s'en désolidarise lorsqu'il affirme être le « dernier messager de l 'Éternel » annoncé dans l'Apocalypse. Pour lui le mouvement de Russel est rejeté par Dieu. Il fonde les Amis de l 'homme, u n mouvement phi lanthropique et millénariste, pour réaliser la mission divine qu'il a reçue : « apprendre aux h o m m e s la vie éter- nelle dès cette terre » et rassembler les 144 000 élus du Livre de l'Apocalypse. Autour d'Alexandre Freytag se const i tuent alors des groupes de fidèles, « noyau dur » d 'un hypothétique paradis terrestre.

À la mor t de Freytag en 1947, se produi t une scission dans le mouvement d'où naissent deux branches dis- tinctes : la française et la suisse. Sous l ' impulsion de Lydie Sartre (1898-1972) le mouvement décide du re tour à la terre dans le Lot-et-Garonne, à Frespech. Mais après la mor t de son successeur, l 'ancien officier Joseph Neyrand (1912-1981), les Amis de l 'homme se déchirent de nou- veau. Une nouvelle scission est inévitable. Les Amis de l 'homme deviennent les Amis sans frontières en 1984 et une autre association fidèle à Freytag se recrée, le Renou- veau des Amis de l 'homme.

Aujourd'hui, les Amis de l 'homme regrouperaient quelques dizaines de milliers d'adeptes à travers le monde. En France, bien que le mouvement soit en perte de vitesse, on compterai t encore deux ou trois mille adeptes. Le centre de Frespech, la plus grande communauté française, a fermé ses portes.

LA DOCTRINE

« La seule vraie Église est le petit troupeau des disciples du Christ, qui exclut l'égoïsme. » Les Amis de l'homme désirent rassembler les hommes en une grande famille universelle dont ils sont la première cellule commu- nautaire d'où jaillira « la nouvelle terre », le monde de demain.

LE CULTE

Le mouvement ne pratique pas la confession de foi et il n'y a pas de sacrements. Les adeptes se retrouvent dans des réunions où s'exprime « le langage du cœur ». Médita- tions collectives et examens de conscience constituent l'es- sentiel de leur programme rituel. Les Amis de l'homme respectent en outre un végétarisme strict et leurs relations sexuelles sont très régentées.

LA PROPAGANDE ET LE RECRUTEMENT

Les Amis de l'homme pratique une philanthropie active et aide les nécessiteux sans prosélytisme. Son action se fait essentiellement en direction des agriculteurs avec des distributions de matériel, des aides en main-d'œuvre pour les récoltes ou les moissons... Le mouvement édite une revue bi-mensuelle en Suisse traduite en sept langues : Le Moniteur du Règne de la Justice.

STATUT ET ORGANISATION

Les Amis de l'homme vivent en familles, les hommes et les femmes étant séparés à l'exception des couples avec enfants. Les membres renoncent à leurs biens propres et sont totalement pris en charge par le mouvement. Leur travail est bénévole. L'autoritarisme des cadres, des « gui- des », est avéré et expliqué par le caractère « divin » de leur mission. En France, le mouvement est organisé en association philanthropique.

Développer la philanthropie, apprendre aux homme la vie éternelle dès ici-bas, éta- blir une nouvelle terre... « Vaste program- me » aurait dit le général de Gaulle. Mais n'est pas ami des Amis de l'homme qui veut. Et, ce n'est peut-être pas si mal...

AMWAY

À l'origine du mouvement , il y a u n conte de fée à l 'amé- ricaine. En 1959, deux amis d'enfance, Richard De Vos et Jay van Andel, créent Amway, contract ion de « American way » o f life. Les deux hommes vendent des produi ts ali- mentaires au porte-à-porte et l 'entreprise va connaî t re un développement spectaculaire en assurant leur richesse. Elle est aujourd 'hui une mult inat ionale puissante qui revendique deux cent c inquante mille « distr ibuteurs » à travers une dizaine de pays, en majori té aux États-Unis, mais aussi en France. C'est une gamme de cent c inquante produits de ménage que proposent en vente directe les « distr ibuteurs ». Richissimes, De Vos et van Andel tou- chent 5 % des profits réalisés pa r Amway.

L'entreprise ne cesse de croître grâce à une s t ructure commerciale organisée de façon pyramidale et en perpé- tuelle extension. Les vendeurs touchent en effet, non seu- lement, u n pourcentage sur les produi ts qu'ils écoulent mais aussi sur les ventes réalisées pa r des personnes qu'ils ont préalablement recrutées le plus souvent p a r relations. D'où l 'intérêt de recruter autant, sinon plus, que de vendre.

Amway n'est pas une secte à p roprement parler, mais derrière la vente se cache une idéologie du profit, source de succès et d 'épanouissement, à forte connota t ion reli- gieuse. Les « distr ibuteurs » Amway part ic ipent à de nom- breuses réunions et soirées où le rêve amér ica in de la réussite est porté aux nues. Dans ces « trainings », circule l'idée sans cesse martelée que l'on peut réussir, que l 'on doit réussir, et tout de suite. Aux États-Unis, il est à noter que ce genre de manifestat ions commence souvent pa r des prières, ce qui n'est pas le cas en France. Les témoignages de réussite des distr ibuteurs Amway sont présentés et nombreux sont ceux qui affirment que l 'entreprise a modi-

fié leur vie et leur relation à Dieu. Mais De Vos refuse le terme d'entreprise chrétienne à propos d'Amway : « Il y a chez Amway des chrétiens formidables, mais le christia- nisme est une relation personnelle avec Jésus-Christ... »

Richard De Vos a publié un livre, Believe ! , vendu à plus de trois cent mille exemplaires, où il présente sa philoso- phie. Un savant dosage de libre entreprise et de religiosité typiquement américaine.

En bons « vendeurs », De Vos et Van Andel ont sélectionné leur produit. Eux, c'est l'ame- rican dream, l'american way of life qu'ils vous font miroiter. Vous savez, la joie ineffable de la société de consommation. Si vous entrez chez Amway et que vous faites des « clients », vous aurez la chance d'avoir enfin ce dont vous rêviez : un 4x4, un téléphone portable, un Tam-Tam, un ordinateur multi- média, etc, etc. Et pourquoi pas ? On peut n'être pas attiré par les régimes végétariens et les exercices acétiques de la méditation, et avoir pourtant quelque notion du bonheur !

ANANDA MARGA

L'HISTOIRE

Le mouvement Ananda Marga, que l 'on pourra i t tra- duire pa r « le chemin de la félicité », a été fondé au début des années cinquante par le Bengali Prabhat Ranjan Sar- kar qui s'est rebaptisé Sri Ananda Murti. Il s'agit d 'une secte néo-hindouiste. Ananda Marga s'est donné pou r bu t de former une élite « su rhumaine » à par t i r de ses yogis prosélytes dont la vocation est d 'éduquer la « société sai- ne » et de prendre la tête du « monde libéré ».

Une organisation internationale est é t roi tement liée à Ananda Marga, le Proutiste universel chargé du volet poli- tique et activiste. Très présent en Inde, Ananda Marga a connu de nombreux démêlés avec la justice et les forces de l'ordre. E n 1971, son fondateur, Sri Ananda Murti, est inculpé de meur t re mais relaxé pa r la suite. Le mouvement proutiste est déclaré hors-la-loi en 1975 pou r les r isques terroristes qu'il fait courir. En 1982, dix-sept proutis tes sont tués pa r la police lors d 'une manifestat ion à Calcutta. Huit militants s ' immolent en Inde pour protester contre les persécutions dont serait victime le mouvement . Une Australienne fait de même devant le siège de l'ONU à Genève...

Le mouvement a son siège mondial à Calcutta. E n Inde, on compterai t deux millions de disciples et trois cent mille à travers le monde. Ananda Marga est présent en Europe,

no tamment en Angleterre (siège européen), en France, en Allemagne, en Scandinavie, mais aussi en Australie ou en Afrique. En France, il n'y aurai t que quelques dizaines d'adeptes mais extrêmement virulents.

LA DOCTRINE

Elle repose sur un élitisme clairement affiché. Le mou- vement vise à prendre ni plus ni moins la direction du monde, grâce à ses membres « réalisés ».

LE CULTE

Le culte d'Ananda Marga puise ses rites aux sources de l'hindouisme traditionnel : méditation, danse, récitation des mantras. La réalisation de soi est recherchée par l'Atma Moksartham.

Les yogis du mouvement donnent une grande dimen- sion altruiste à leur vie par une présence auprès des malades, des nécessiteux, des prisonniers en Inde comme dans d'autres pays du tiers monde.

LA PROPAGANDE ET LE RECRUTEMENT

L'altruisme n'est pas gratuit. Les yogis prosélytes sollici- tent souvent les jeunes grâce à d'attirants voyages, des missions d'assistance humani ta i re derrière lesquelles se masque une stratégie d 'enrôlement délibérée. Une fois recruté, le nouveau membre est soumis à un enseignement très éprouvant. L'asservissement est parfois total entre la base et les cadres. Les techniques de fanatisation ont cours, pour preuve les nombreux suicides collectifs qui ont émaillé l 'histoire du mouvement.

STATUT ET ORGANISATION

Ananda Marga pour l'aspect philosophique et reli- gieux, le Proutiste universel pour l 'action politique et financière, le mouvement est ext rêmement hiérarchisé et structuré. Ses méthodes totalitaires ont été à de nom- breuses reprises dénoncées. Il s'agit d 'un mouvement qua- lifié de « dangereux » par les experts malgré sa façade d'aide au développement, de mission de santé ou d'alpha- bétisation.

Si vous observez bien, ils changent tou- jours de nom, les gourous, quand ils fondent une secte. Honte ou prudence, allez savoir. Celui-là, il s'appelait Prabhat Ranjan Sarkar avant de se surnommer Sri Ananda Murti. Il faut dire que Sri et cetera, ça pose mieux son homme, surtout quand on projette de créer une race de yogis surhumains pour conqué- rir le gouvernement mondial. À cette fin, toutefois, il a fondé un mouvement poli- tique : le proutisme. Comme quoi, on peut être surhumanisé et n'avoir aucun sens du ridicule.

À l'heure où vous lisez ces lignes, un homme, une femme, un enfant sont "en danger de " secte .

La vie difficile, le chômage, la foi perdue, la famille éclatée... Une triste fin de siècle, un sale

tunnel pour les enfants du troisième millénaire... Désemparés par un monde qui leur échappe,

des milliers de nos compatriotes sont tombés dans le piège des sectes et de leur quincaillerie ésotérico- philosophico-religieuse. En France, elles sont plus d'une centaine à régner sur des êtres en voie de perdition.

Qui et que sont-elles ? C'est la question à laquelle ce livre s'efforce d'apporter une réponse.

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