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Disponib le en l igne sur www.sc iencedi rec t .com
Cas clinique
Kyste hydatique du massif facial
Maxillo-facial location of hydatic cyst
C. Hafsa a,*, T. Ben Alaya b, S. Kriaa a, S. Jerbi a, M. Golli a, M.H. Hamdi c, A. Gannouni a
aService d’imagerie medicale, CHU Fattouma-Bourguiba, avenue 1er-Juin, Monastir 5000, Tunisieb Service de radiologie, clinique hospitalo-universitaire de medecine dentaire de Monastir, Monastir 5000, TunisiecService de medecine et chirurgie buccales, clinique hospitalo-universitaire de medecine dentaire de Monastir, Monastir 5000, Tunisie
i n f o a r t i c l e
Historique de l’article :
Recu le 8 octobre 2007
Accepte le 11 janvier 2008
Disponible sur Internet le
2 juin 2008
Mots cles :
Maxillofaciale
Kyste hydatique
Tomodensitometrie
IRM
Keywords:
Facial massif
Hydatid cyst
CT scan
MRI
r e s u m e
Objectifs. – La localisation maxillofaciale du kyste hydatique est rare et represente 2 % des
cas. L’objectif de ce travail est de rappeler les signes cliniques et radiologiques en insistant
sur les difficultes diagnostiques.
Materiels. – Nous presentons deux observations de kyste hydatique a localisation maxi-
llofaciale. Les deux cas ont ete explores par un panoramique dentaire, une echographie et
une tomodensitometrie. L’imagerie par resonance magnetique a ete pratiquee dans un cas.
Resultat. – Dans la premiere observation, il s’agit d’une jeune fille de 23 ans qui a consulte
pour une tumefaction jugale a extension pharyngienne evoluant par poussee. La deuxieme
observation est celle d’une jeune fille de 16 ans qui a consulte pour une tumefaction
genienne et masseterine avec un trismus serre. Dans les deux cas, l’imagerie a suspecte
le diagnostic du kyste hydatique et l’examen anatomopathologique l’a confirme.
Conclusion. – Le kyste hydatique est une pathologie parasitaire endemique qui touche
surtout le poumon et le foie. Sa localisation au niveau de la sphere maxillofaciale est
exceptionnelle. Devant une masse kystique dans une zone endemique, le diagnostic du
kyste hydatique doit etre envisage. La TDM et l’IRM permettent un bilan lesionnel precis. Le
traitement est chirurgical.
# 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits reserves.
a b s t r a c t
Objective. – A maxillofacial location of a hydatid cyst is rare, accounting 2% of cases. The
purpose of this study was to review clinical and radiological features by emphasizing
diagnostic difficulties.
Materials and methods. – Two observations of hydatid cyst with a maxillofacial location are
presented. Two cases were investigated by panoramic dental radiography, an ultrasound
and CT scan. MRI was done in one case.
bse
ary
Results. – The first o
tumefaction with ph
a 16-year-old girl, which
* Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (C. Hafsa).
0003-438X/$ – see front matter # 2008 Elsevier Masson SAS. Tous drodoi:10.1016/j.aorl.2008.01.004
rvation reports a 23-year-old woman who consulted for jugal
ngeal extension evolving in spurts. The second observation was
consulted for a genian and masseter tumefaction with a tight
its reserves.
trismus. In both cases, the imaging studies suggested the diagnosis of the hydatid cyst
confirmed by the anatomopathologic exam.
Conclusion. – The hydatid cyst is an endemic parasitic pathology involving most often the lung
and the liver. The maxillofacial location is exceptional. In cases of a cyst mass in an endemic
zone, the diagnosis of the hydatid cyst must be entertained. CT scan and MRI provided a
complete lesion workup. Treatment is surgical.
# 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits reserves.
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1. Introduction
L’hydatidose est une anthropozoonose cosmopolite qui
sevit a l’etat endemique dans certains pays mediterraneens,
latino-americains et oceaniques [1]. Elle est due au develop-
pement chez l’homme de la larve de l’Ecchinococcus granulosus
transmise par le chien [1]. La localisation maxillofaciale est
rare, souvent asymptomatique et represente 2 % des cas [2]. Le
diagnostic de kyste hydatique repose sur des arguments
epidemiologiques, biologiques et surtout radiologiques.
A propos de deux observations cliniques de kyste hyda-
tique a localisation maxillofaciale, nous discuterons la place
de l’imagerie dans le diagnostic positif, en insistant sur les
difficultes diagnostiques et therapeutiques dans ces localisa-
tions inhabituelles.
2. Patients et methodes
2.1. Observation no 1
Mademoiselle T.H. agee de 23 ans, d’origine rurale et sans
antecedent pathologique notable, consulte pour une tumefac-
tion jugale droite, indolore et sans fievre. Le bilan biologique
est normal. L’echographie montre une formation kystique
multivesiculaire. L’IRM met en evidence une lesion kystique
multivesiculaire en hyposignal en sequence ponderee (SP) T1
et en hypersignal SP T2 avec des cloisons en hyposignal (Fig. 1).
La paroi de cette lesion kystique se rehausse moderement
apres l’injection de gadolinium (Fig. 2). Devant l’origine de la
patiente et l’aspect IRM de la lesion, le diagnostic de kyste
Fig. 1 – IRM, coupe coronale en sequence ponderee T2 :
masse kystique homogene avec une paroi propre. Les
cloisons sont en hyposignal.
hydatique est suspecte. La serologie de l’hydatidose est
positive. Une exerese chirurgicale avec une toilette du site
operatoire au serum physiologique est pratiquee. L’examen
histologique retrouve un kyste constitue d’une membrane
externe anhiste, feuilletee, eosinophile, a laquelle adhere une
membrane fine tapissee par des vesicules et des scolex
correspondant a la membrane germinative proligere. Il
n’existe pas d’autre localisation hydatique. Avec un recul de
quatre ans, on ne note pas de recidive.
2.2. Observation no 2
Une adolescente de 16 ans, d’origine rurale, consulte pour
une tumefaction genienne et masseterine droite evoluant
depuis deux ans avec apparition depuis un mois d’un trismus
serre. L’examen endobuccal met en evidence une tumefaction
fluctuante et douloureuse au niveau de la commissure
intermaxillaire droite. La muqueuse en regard est saine. La
radiographie panoramique montre une osteolyse de la
tuberosite maxillaire et du processus pterygoıde (Fig. 3). La
deuxieme molaire maxillaire droite (17) n’a plus de support
osseux, mais ne presente pas de resorption radiculaire. Le
germe de la troisieme molaire maxillaire droite (18) est refoule
en regard de la region apicale de la 17. Les diagnostics
envisages sont, notamment :
� u
Fi
in
ne lesion extraosseuse d’allure kystique ou tumorale,
devant l’osteolyse diffuse de la tuberosite maxillaire et les
limites floues de la lesion ;
� u
ne surinfection ;� u
n processus malin.g. 2 – IRM, coupe coronale en sequence ponderee T1
jectee : rehaussement discret de la paroi du kyste.
Fig. 5 – Scanner : coupe coronale en fenetre osseuse
montrant la presence d’une bulle d’air au sein du kyste.
Fig. 3 – Orthopantomogramme montrant une osteolyse
geographique de la branche mandibulaire droite.
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La TDM met en evidence une masse hypodense heterogene
au niveau du muscle pterygoıdien medial droit qui est epaissi.
Au sein de cette lesion, on note la presence d’une bulle d’air et
d’une membrane flottante qui se rehausse apres injection du
produit de contraste (Figs. 4 et 5). Le processus pterygoıde droit
est lamine et la branche mandibulaire presente une excava-
tion de sa corticale interne, traduisant l’effet de masse
engendre par la lesion.
Devant cet aspect, les hypotheses diagnostiques retenues
sont soit un kyste retentionnel, soit un kyste hydatique
complique, bien que cette localisation soit exceptionnelle.
La serologie de l’hydatidose (Elisa) est negative. L’exerese
par un abord muqueux en regard de la lesion avec lavage du
foyer operatoire par du serum physiologique est realisee.
L’ouverture de la piece operatoire permet de visualiser un
kyste multivesiculaire qui contient des membranes hydati-
ques fletries. L’examen anatomopathologique confirme le
diagnostic de kyste hydatique infecte. La recherche d’autres
localisations hydatiques est negative et on ne note pas de
recidive.
Fig. 4 – Scanner : coupe coronale injectee en fenetre partie
molle montrant une masse heterogene du muscle
pterygoıdien medial droit dont la paroi prend le contraste.
3. Discussion
L’hydatidose est une maladie endemique en Tunisie [3]. Elle
est causee par le developpement chez l’homme, hote inter-
mediaire accidentel, de la forme larvaire d’un tenia du chien :
E. granulosus. En raison de ce mode de transmission, cette
parasitose sevit dans les pays d’elevage du mouton, hote
intermediaire habituel. L’homme s’infeste soit en ingerant des
embryophores au contact d’un chien parasite par l’ingestion
de viande de mouton, soit en ingerant des legumes souilles par
un chien infeste. L’œuf eclot dans l’estomac, puis libere
l’embryon qui franchit la paroi intestinale et gagne par voie
porte le foie. Si l’embryon passe la barriere hepatique, d’autres
localisations sont possibles. L’embryon se transforme en larve
hydatique, puis il atteint un viscere. Les organes les plus
touches sont le foie (65 %) et le poumon (25 %) [4].
L’hydatidose maxillofaciale est tres rare. Elle represente 2 %
des cas [4]. L’infestation peut se faire par voie hematogene ou
lymphatique [3]. Certains auteurs rapportent la possibilite
d’infestation directe par voie buccale ce qui expliquerait la
localisation au niveau des glandes salivaires [5].
Le kyste hydatide ou vesicule hydatique est rempli du
liquide hydatique incolore, eau de roche et entouree de deux
membranes qui sont accolees l’une a l’autre :
� la
membrane externe ou cuticule ;� la
membrane interne parasitaire dite proligere ou germina-tive et mere de tous les elements de la larve. Par bourgeon-
nement, elle donne les vesicules ou capsules proligeres qui
elaborent les scolex (tetes des futurs tenias). Ces vesicules
peuvent se detacher pour devenir des vesicules filles ou se
dechirer liberant les scolex qui s’accumulent dans le fond du
kyste et forment le sable hydatique.
Cliniquement, on note un syndrome tumoral non specifique
d’evolution progressive. Lorsque le kyste devient volumineux, il
peut etre responsable d’une compression des organes de
voisinage. Le kyste peut provoquer des phenomenes inflam-
matoires en cas d’infection et des reactions allergiques en cas
de fissuration ou de rupture. L’hypereosinophilie n’est ni
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constante nispecifique,elleest retrouvee enphased’invasionet
au cours des ruptures de kystes et n’apporte qu’un argument de
presomption. Dans les localisations cervicofaciales primitives,
le taux de positivite des examens immunologiques est de 10 a
14 %, alors que la sensibilite de l’immunologie augmente
nettement en cas de complication ou d’autre localisation
associee [6].
L’echographie des parties molles constitue l’examen de
premiere intension. Elle met en evidence une masse kystique
avec une membrane flottante (type II) ou multivesiculaire
(type III), qui sont pathognomoniques du kyste hydatique. Le
diagnostic est plus difficile en cas des formes univesiculaire a
contenu anechogene (type I) et pseudotumoral (type IV). Dans
les localisations profondes et quand le kyste est calcifie (type
V), l’echographie n’a pas d’interet [7]. La TDM vient confirmer
les donnees de l’echographie [1]. Elle met en evidence une
masse hypodense entouree d’une paroi propre. L’injection de
produit de contraste modifie rarement sa densite, mais cela est
fonction du degre de la vascularisation peripherique du kyste,
comme dans la premiere observation. La presence d’images
areiques et d’une membrane flottante est tres evocatrice d’une
surinfection du kyste. L’IRM est actuellement l’examen de
choix. Le kyste se presente comme une masse circonscrite, en
hyposignal SP T1, en hypersignal SP T2, et qui se modifie peu
ou pas apres injection de gadolinium [4]. La mise en evidence
de vesicules filles avec des cloisons en hyposignal SP T1 et T2
est pathognomonique du kyste hydatique. Si le kyste est
complique (surinfecte, fissure, rompu), il presente un signal
heterogene aussi bien en ponderation T1 que T2, avec un
rehaussement de la paroi apres injection de gadolinium. L’IRM
permet de juger de la viabilite du kyste, celle-ci est suggeree
par un signal intense en T2, la mort du kyste est suspectee
devant une diminution relative de l’intensite du signal. Enfin,
l’IRM permet l’etude des rapports du kyste avec les structures
vasculaires et nerveuses adjacentes [7]. Lorsque le diagnostic
de kyste hydatique est suspecte, il est necessaire de recher-
cher une autre localisation en realisant une echographie
abdominale et une radiographie du thorax.
Le diagnostic de certitude est pose, d’une part, par la
decouverte peroperatoire d’une membrane proligere et,
d’autre part, par l’examen anatomopathologique de la piece
d’exerese chirurgicale. La biopsie radioguidee est certes a
eviter en raison du risque de choc anaphylactique parfois
mortel et d’une dissemination le long de son trajet [3].
Le traitement du kyste hydatique est chirurgical. Trois
principales options sont possibles : la resection simple et la
perikystectomie partielle ou totale. La resection simple a kyste
ferme doit etre preferee pour les lesions isolees et periphe-
riques. Avant l’enucleation du kyste, il faut proceder a sa
sterilisation. Cette derniere est obtenue par l’aspiration du
contenu du kyste et le lavage par un scolicide (serum
hypertonique, solution de formol, eau oxygenee ou nitrate
d’argent) pendant environ 30 minutes. Il est important de
proteger le reste du champ operatoire par des champs imbibes
de scolicide, afin d’empecher la dissemination potentielle du
parasite. La resection du dome saillant realise une kystope-
rikystectomie partielle et se justifie en cas de clivage difficile
entre le kyste et le tissu adjacent [6]. L’association du
traitement medical par l’albendazole est necessaire en cas
de fissuration ou de rupture du kyste et de localisation
hydatique associee. Le traitement prophylactique cherche a
interrompre le cycle naturel du parasite, la contamination du
chien et de l’herbivore et la contamination de l’homme en
evitant la promiscuite avec les chiens.
4. Conclusion
Le kyste hydatique a localisation maxillofaciale est
exceptionnel. Il faut envisager ce diagnostic devant toute
masse kystique chez un patient en provenance d’une zone
endemique. La TDM et surtout l’IRM permettent d’approcher
le diagnostic et realisent un bilan lesionnel complet. Le
traitement du kyste hydatique de localisation maxillofaciale
est chirurgical.
r e f e r e n c e s
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