Images Symboliques de l'Argent Et Classes d'Âge - Annette Langevin

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  • AbstractIt is at the level of the family that the symbolic construction of the role of money in society is mostdirectly perceived : which differentiates youth money from adult money. Other actors : the State, thebank, the media help confirm and complete this dual image. The deposit in a post office or a bankaccount is a special moment during which the symbolism of the money of young people takes on thisdual register. On the one hand, a computerised currency with stable sources which is self-regeneratingand on the other the currency of fundamental needs. The board and lodging provided by parents, thebasic minimum salary, benefits, courses, scholarships ...are all part of the juvenilisation of thoseexcluded from the exercice of complete adulthood Of those who are condemned to "pocket money",which does not lead to the adult symbolism of money.

    ZusammenfassungDer symbolische Aufbau der Rolle des Geldes in der Gesellschaft wird am unmittelbarsten auf Ebeneder Familie gesprt : was das unmndige Geld vom mndigen Geld unterscheidet. Andere Akteure : derStaat, die Bank, die Medien werden dieses doppelte Bild 6/7/- gen und ergnzen.Die Einzahlung auf ein Post - oder Bankkonto ist ein besonderer Augenblick wo die Symbolik desGeldes der Jugendlichen dieses doppelte Register einnimmt. Einerseits das Informatikgeld, mitstabilisierten Quellen, das sich selbst regeneriert und andererseits das Geld der Grundbedrfnisse. DieUntersttzung der Eltern im Bereich der Ernhrung und der Unterkunft, das Geld des Mindestlohnes,des Sozialeinkommens, der Praktica, der Studentenstipendien... tragen zur Verjugendlichungderjenigen bei, die von der Ausbung des vollen Erwachsenenalters ausgeschlossen sind : derjenigen,die zu einem "Taschengeld", das nicht in die Erwachsenensymbolik des Geldes mndet, verurteilt sind.

    ResumenEs a nivel de la familia donde se percibe mas directamente la construccion simbolica del papel deldinero en la sociedad : aquello que diferencia el dinero de los menores del dinero adulto. Otros actores: el Estado, la banca, los medios de comunicacin van a ratificar y completar esta doble imagen. Elingreso en una cuenta postal o bancaria es un momento particular donde el simbolismo del dinero delos jovenes adopta este doble registro. Por una parte el dinero in formalizado, de fuentes estables y quegestiona su propia regeneracion y por otra parte el dinero de las necesidades fundamentales. El apoyoalimenticio y al alquilar de vivienda por parte de los padres, el dinero del salario mnimo, del ingreso deinsercion, de cursos, de bacas de estudiante... contribuyen a la "juvenilizacion" de los excluidos delejercicio del completo estado adulto. De aquellos que estan condenados a la "propina semanal" parapequeos gastos que no desemboca en el simbolismo adulto del dinero.

  • autonomie et dpendance financire

    Images symboliques de

    l'argent et classes d'ge

    Annette LANGEVIN, Sociologue, charge de recherche au CNRS dans le Groupe de Recherche sur la Division Sociale et Sexuelle du Travail (GEDISST) Paris. Elle travaille sur l'volution des bornes d'ge tout au long du cycle de vie. A publi plusieurs articles sur les transformations des rapports l'argent en relation avec les ges sur le march du travail. C'est au niveau de la famille que se peroit le plus directement la construction symbolique du rle de l'argent dans la socit : ce qui diffrencie l'argent mineur de l'argent adulte. D'autres acteurs : l'tat, la banque, les mdias vont entriner et complter cette double image. Le dpt sur un compte postal ou bancaire est un moment particulier o la symbolique de l'argent des jeunes adopte ce double registre. D'une part l'argent informatis, aux sources stabilises et qui gre sa propre rgnrescence et d'autre part, l'argent des besoins fondamentaux. Le soutien alimentaire et locatif des parents, l'argent du SMIC, du RMI, des stages, des bourses estudiantines... participent la juvnilisation des exclus de l'exercice du plein tat adulte. De ceux qui sont vous un "argent de poche" qui ne dbouche pas sur la symbolique adulte de l'argent.

    Par Annette LANGEVIN

    La crise conomique que nous vivons a considrablement modifi les rapports l'argent dans la socit toute entire. Depuis 1975, la dtrioration progressive des sources de revenus provenant du salariat remet en cause les faons de vivre de la gnration des annes fastes.

    La famille est un des lieux o s'labore une volution profonde des pratiques et des reprsentations symboliques de la circulation et de la manipulation de l'argent mises l'preuve au quotidien. Elle s'approprie les images du systme bancaire qui encadre de plus en plus troitement l'argent. Elle rsiste aux mises en scne quotidienne des mdias qui introduisent domicile les reprsentations du systme marchand et de la spculation boursire. La famille s'adapte et apporte son soutien en parallle aux prestations sociales qui accompagnent pas pas la prise en charge conomique des jeunes par les adultes.

    Pourtant, travers ce qui diffrencie l'argent mineur de l'argent adulte, c'est au niveau de la famille que se peroit le plus directement une dstabilisation de la hirarchie symbolique des rapports l'argent.

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    Les discours sur l'argent aujourd'hui sont omniprsents. Il y a moins de dix ans, parler des liens familiaux en terme d'argent se heurtait un tabou. Une conspiration du silence pesait sur les critres conomiques ou moraux qui pourtant formaient la base d'un consensus familial qui pesait lourd sur les relations d'autorit entre proches. Les choix de l'conomie domestique taient implicites. Pourtant tout ce qui argumentait la rpartition des dpenses, le montant des attributions pour les uns et les autres l'intrieur du groupe familial, la part rserve l'enfant puis l'adolescent dans les accords ngocis entre poux... formaient un ensemble qui consacrait le bien-fond d'une pdagogie d'initiation des jeunes la manipulation de l'argent.

    Ces rgles familiales de l'utilisation de l'argent, internes au groupe, sont une des bases de la reprsentation des droits et des devoirs de l'ensemble de la catgorie adulte envers les jeunes. C'est cette prise en charge pcuniaire adulte, sur quoi se construit symboliquement la dpendance et la protection des jeunes qui est au cur des bouleversements actuels.

    La relle difficult des jeunes trouver leur autonomie financire va de pair avec la gnra- lisation de nouveaux comportements des adultes eux-mmes et, tenter de saisir l'tat de jeunesse travers ses rapports l'argent, passe aujourd'hui par une redfinition de ce que c'est que d'tre adulte en ces temps d'implosion du march du travail.

    L'tat de jeunesse, peut-il tre encore pens en terme de temps strictement dlimit, de phases de transition simplement prolonges ainsi qu'il est habituel de poser le problme ? Dans une optique trs diffrente ne faut-il pas se demander si l'tat de jeunesse n'est pas

    devenu une phase d'inculcation de comportements rigs en instrument social de minoration qui dborde trs largement la classe d'ge. La nouvelle gnration vit une "cole de la prcarit" salariale qui remet en cause la lgitimit symbolique de l'autonomie conomique adulte. L'immaturit symbolique et la dpendance conomique des jeunes ne font pas que se dplacer dans l'avance en ge, elles prfigurent la fragilit du statut social des plus faibles, quel que soit l'ge.

    On pourrait comptabiliser l'tat de dpendance de la jeunesse en terme de cot familial. Quelques informations trs gnrales permettent d'valuer trs sommairement les sommes dont bnficient les jeunes entre 15 et 25 ans qui vivent chez leurs parents ou en dpendent conomiquement. D'aprs l'exploitation des approches directes par enqutes ou selon des indications fournies par divers documents administratifs, on fixe trs approximativement le montant des sommes qui leur sont affectes 15 % de la consommation totale des mnages. Des chiffres dpassant les 400 milliards annuels sont avancs. Si on dispose d'tudes ponctuelles un peu plus prcises sur le cot de l'enfant de moins de dix-huit ans partir des enqutes auprs des familles, un flou certain demeure. Par ailleurs, nous ignorons tout des flux montaires qui circulent de manire informelle et fournissent aux jeunes des ressources en change de menus travaux pays de la main la main et dont bnficient indirectement les familles.

    Rester immature, devenir adulte Au cours d'une srie d'enqutes, j'ai pu

    suivre le cheminement et les adaptations progressives de la pdagogie et des interactions familiales que la circulation et la rpartition de

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  • l'argent rvlent. Ce qui relve d'une morale collective de justice et d'galit, voire de mixit dans les dotations familiales, est affirm ostensiblement : ...Non, il n'y a pas de diffrences de traitement entre nous . Derrire ces affirmations, l'observation des pratiques rvle des incertitudes et des incohrences. Elles se dissimulent derrire des principes de plus en plus difficiles mettre en uvre. Il apparat clairement que la volont d'encourager la jeune gnration ne pas se laisser emporter par la dgradation de la valeur des diplmes, du recul dans le temps de l'autonomie conomique, de l'inadaptation aux nouvelles rgles du march du travail... font que le soutien pcuniaire envers les jeunes reste au tout premier plan des choix conomiques des familles. Tant que cela est possible la limite du passe ton Bac ! sera atteinte puis dpasse, et souvent trs largement.

    L'thique des rapports l'argent aujourd'hui tient au dsquilibre vident entre une pdagogie qui remonte l'enfance des parents et leur propre formation et qui tait fonde sur le mrite et le travail, sur l'effort persvrant, la prvoyance, l'conomie... et les difficults relles d'accs l'autonomie que les adolescents affrontent aujourd'hui.

    Dans les rcits sur la place que tient l'argent dans le mode de vie familial, la discrtion est encore de rigueur et la plupart des adolescents sont incapables de fixer le montant exact du salaire du pre ou de la mre ainsi que la valeur montaire des biens des grands-parents. Les flous sur le contenu du contrat de mariage ou sur la volont testamentaire tmoignent encore des effets de ce tabou persistant qui psent sur la clart des relations l'argent familial.

    la condition qu'ils y mettent un minimum de bonne volont sur le plan des tudes, le contrat de soutien envers la jeune gnration est impratif : "les enfants d'abord". Pourtant le dcouragement atteint les parents et dans de nombreuses tudes sur "les jeunes aujourd'hui", ils avouent qu'ils craignent que le niveau de vie de leurs enfants ne soit srieusement menac dans l'avenir et infrieur leurs esprances. Alors on se crispe sur des valeurs qui ont guid les comportements de la gnration d'aprs-guerre et l'on refuse de voir qu'elles sont le plus souvent dclasses et obsoltes. On poursuit ces investissements stratgiques bien tablis qui passent par le diplme ou l'accs la Facult, mais sans trop de certitudes. Les parents vitent de rendre trop visibles et angoissantes pour les enfants les faiblesses de leur pouvoir de chargs de famille. Ils dissimulent le plus possible les limites de leurs ressources. De leur ct les enfants ne ddaignent pas de prolonger le plus longtemps possible l'illusion enfantine et rassurante que l'argent dont papa et maman disposent, serait quasiment inpuisable.

    Il s'agit pour le groupe familial de faire face aux impratifs extrieurs la famille qui amoindrissent son pouvoir d'achat : la pr-retraite impose, le chmage subi, la transformation des postes, la dvaluation du savoir-faire des parents sur le march du travail. Tant que cela reste supportable, les adultes tentent de protger les jeunes de l'affaiblissement de la pleine capacit des adultes subvenir aux besoins du collectif familial. "Les enfants d'abord", le mieux possible, le plus longtemps possible.

    Il faut pourtant viter une complte infantili- sation des jeunes travers la prolongation de cette dpendance. On voit paratre de temps en

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    Les ressources adolescentes ne doivent pas

    aFFaiblirla reprsentation Familiale des sources

    lgitimes d'argent rellement adulte.

    temps des articles de presse et des ouvrages qui dnoncent "l'exploitation interminable" des parents par les jeunes qui demeurent au domicile et s'y nourrissent. Mais dans l'ensemble, les adultes s'accommodent du mieux qu'ils peuvent des incohrences profondes du statut qui s'impose aux "jeunes". Leur rle profondment ambigu consiste subvenir aux besoins de jeunes qui ne peuvent pas se drober cette protection-l, sans pour autant les enfermer dans une immaturit sociale qu'ils rprouvent. C'est pourquoi, ils reconnaissent la lgitimit d'indpendance acquise en fonction de l'ge sur d'autres plans, ceux d'une "majorit" sociale ou sexuelle. Ils acceptent d'accueillir "la copine" ou "l'ami" au domicile et trouvent fond l'exercice du droit de vote ds 18 ans.

    Argent de poche et immaturit sociale La sortie de la prime enfance correspond

    l'octroi d'argent de poche qui symbolise l'infan- tilisation du statut social du "jeune". L'argent de poche joue un rle pdagogique d'initiation l'argent mais ne ressemble en rien une amorce d'mancipation financire comparable au rle adulte de manipulation de l'argent.

    Pour une phase qui peut se situer en-de de 13 ans la dmarche est aise. Nous sommes sur le terrain ferme du pouvoir parental et de la dpendance enfantine. L'argent infantile ne doit jamais entamer en quoi que ce soit ni l'autorit des parents ni leur rle de soutien.

    L'obligation d'entretien prend sa source dans le contrat de mariage qui stipule que les poux contractent ensemble, par le seul fait du

    mariage, l'obligation de nourrir, entretenir et lever leurs enfants . C'est un contrat qui affecte (mais sans plus

    de prcisions) une part des revenus du couple au bnfice de l'enfant. Le mariage situe par dfinition la famille dans un contexte de lgitimit juridique. Il faut souligner combien aujourd'hui les charges adultes vis--vis de la nouvelle gnration dpassent cette dfinition troite du soutien parental aux enfants. Les charges se sont tendues dans les faits toute une nbuleuse de parents. Parents de sang, d'adoption lgale et d'adoption de libre choix, parents divorcs, familles parent unique, couples de concubins, familles "recomposes" avec ou sans lgitimit juridique... Tous participent, avec ou sans contrat lgal, l'obligation de nourrir, entretenir et lever "leurs" enfants. L'enfant mineur devient un bien commun et une charge partage et l'obligation d'entretien est tacitement pratique aujourd'hui conjointement par le pre, et/ou par le beau-pre, par l'amie du pre... Le consensus fragile qui s'tablit et les barmes appliqus sont videmment examiner de prs mais s'ils correspondent toujours une reconnaissance de l'incapacit du mineur "grer au mieux ses intrts", ce n'est plus une obligation juridique au sens strict. C'est un "contrat d'honneur" qui s'tend aux formes non-institutionnelles de la parent. Ces pratiques continuent nanmoins accorder l'argent adulte, et lui seul, la charge de pourvoir aux besoins fondamentaux des enfants.

    L'argent de poche enfantin des moins de 13 ans se doit donc de n'tre qu'un outil d'initiation la manipulation de l'argent et la satisfaction des besoins au niveau le plus lmentaire.

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  • Il ne doit jamais entrer en concurrence avec ce qui est du ressort de l'argent adulte. L'argent de poche est palpable : il est fait de "sous", de pices ou de billets qui passent directement de main en main. On en apprcie la ralit en le manipulant de prs. Il est d'un usage journalier et modeste.

    L'argent de poche, c'est celui qui s'puise vite et par petites fractions, il permet de disposer de petites sommes dont la masse correspond tout au plus "en avoir plein les poches", mais pas plus. Le cadre est troit et les sucreries achetes sans contrle direct ne doivent en aucun cas couper l'apptit de l'enfant et

    blir le crmonial collectif du repas familial qui met si bien en scne la fonction d'entretien des parents.

    Les prrogatives de l'argent adulte Une tape dcisive est franchie lorsque

    l'argent devient "bancarisable"1. L'utilisation du chquier et de la carte bancaire est un phnomne de masse qui peut servir de repre pour situer un des passages d'un tat un autre, d'un systme de reprsentation un autre. Lorsque l'attribution ne se fait plus de la

    1 CHAMPENOIS, G., L'enfant, la famille, l'argent. Rapport de synthse, d. LGDJ, 1991.

    Tableau 1: Argent de poche vers 18 ans, selon le sexe et l'origine sociale

    Hommes (ensemble) dont

    - fils d'agriculteurs - fils d'artisans-commerants - fils de cadres - fils de professions intermdiaires - fils d'employs - fils d'ouvriers qualifis - fils d'ouvriers non qualifis

    Femmes (ensemble) dont

    - filles d'agriculteurs - filles d'artisans-commerants - filles de cadres - filles de professions intermdiaires - filles d'employs - filles d'ouvriers qualifis - filles d'ouvriers non qualifis

    Argent de poche reu vers 18 ans

    Oui, rgulirement

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    26 31 55 36 34 22 20

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    20 28 54 37 32 22 17

    Oui, mais pas rgulirement

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    47 39 30 36 28 39 37

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    45 36 27 36 31 41 39

    Map IN Uli

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    27 30 15 28 38 39 43

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    main la main par petites coupures mais donne lieu un transfert de fonds sur un compte postal ou bancaire, la symbolique de l'argent des jeunes change de registre et bascule dans l'univers adulte.

    Tout enfant de plus de treize ans ne dispose pas d'un compte en banque, loin de l, mais il est susceptible d'en bnficier. Le livret tenu par les Caisses d'pargne peut tre ouvert l'initiative d'autrui ou sa demande personnelle. Ds 16 ans le mineur a la capacit de retirer seul les fonds du livret qu'il a ouvert, sauf opposition du reprsentant lgal. Voil le jeune bnficiaire du compte bancaire entr dans le processus indcis de la prmajorit.

    L'argent concret, rduit de petites fractions dpenses sous surveillance directe et au fur et mesure, est proche du fminin et du domestique. Ce sont majoritairement les mres qui donnent directement les petites sommes rgulires de l'argent de poche aux enfants petits. Lorsque le pre intervient dans la ngociation des accords familiaux, le temps de la pdagogie de la petite enfance est pass et l'argent va s'assimiler aux flux montaires chargs de toute la symbolique du pouvoir adulte.

    Entre treize et dix-huit ans, l'argent adolescent dpend largement du bon vouloir des proches, parents et grands-parents. L'utilisation du chquier s'opre en principe sous leur responsabilit mais le fondement juridique de ces pratiques est encore mal rglement. L'argent qui nourrit les comptes adolescents ne relve pas d'un obligation contractuelle comme celui qui provient du salaire. En principe son utilisation doit tenir compte du rgime d'incapacit du mineur qui en bnficie. Nanmoins, entre 16 et 18 ans les barmes

    tablis, fruit des transactions en famille, correspondent le plus gnralement un fixe modeste que l'on peut assimiler un quasi- salariat familial mensuel. Cette somme fixe est assortie de dotations alatoires, pour des dpenses dfinies : achat de vtements, droits d'inscription pour les tudes, sport... La rglementation de l'utilisation de l'argent des comptes adolescents reflte cette errance entre l'incapacit totale et le plein exercice de l'autonomie.

    L'observation des efforts dploys par les milieux bancaires nous montre que, avant mme d'avoir rellement dtermin l'importance relle du pactole que reprsente l'argent des mineurs, tout un ensemble de stratgies qui convoitent l'argent dont ils disposent visent surtout modifier les pratiques de manipulation de l'argent des adultes.

    Cette entreprise de rorientation des comportements commence par la transformation des manires de nommer. Les jeunes s'initient et innovent de nouvelles faons de dire et de se reprsenter l'argent. travers la transformation du langage, le systme bancaire va imposer ses codes et initier les jeunes une mise distance symbolique et pratique de ces "flux montaires" dont ils sont porteurs. Il n'est plus question de fric ou de pognon mais d'un argent immatriel, virtuel, vhicul par des techniques de pointe.

    La poche et la tirelire sont remplaces par le micro-processeur et la "super smart card", et les informations de bouche oreille, les recommandations de papa ou de maman sur l'conomie et la dpense, s'effacent devant la tenue informatise du compte. Cet argent-l transite par les pupitres hyper-cabls de la banque et les touches du minitel tlmatique2.

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  • L'argent va perdre sa coloration affective et concrte pour devenir virtuel. C'est par un circuit technique que le jeune est tenu au courant des crdits, des dbits, de la plus-value. L'argent des mineurs devient alors un agent conomique "neutre". Mais il est encore un faire-semblant de la pratique de l'indpendance adulte.

    Consultons les dpliants des banques : le jeune y est le "grant actif" d'un numraire rduit son seul pouvoir marchand. Une fois obtenue la signature des adultes pour ouvrir le compte, le jeune, ds treize ans, peut utiliser son dpt et se livrer la "libre circulation des capitaux " qui permet la "libre circulation des personnes" par l'entremise des devises et des chques de voyage "dans l'Europe de demain". Toute une idologie de l'chappe belle sert de faire-valoir, et par le biais de la "super smart card", du "compte-jeune-pargne" ou du "grand rseau financier odysse" des comptes chques postaux. La libert de manipulation adulte s'introduit ainsi subrepticement travers des images d'vasion.

    Le rle "d'expert technique" du jeune innovateur est mis en avant, les reprsentations de sa comptence passent par toute une symbolique de la russite dynamique et festive. On retrouve ple-mle l'amricanisme, le blue-jeans, la pratique du sport intensif, la vitesse et la performance, le voyage hors des frontires, la matire plastique, les couleurs violentes, les musiques scandes, les appareils robotiss.

    L'accs des "jeunes" l'argent virtuel souligne la partition en une double image de l'argent dans la socit. D'une part, l'argent de la manipulation informatique par des adultes

    2 LANGEVIN, A., De la tirelire la Super smart card Autrement, 1991.

    qui grent des placements et d'autre part, l'argent qui ne couvre que les besoins fondamentaux des "mineurs".

    La symbolique de l'argent juvnile dborde la notion courante de majorit. Elle se trouve tendue aux bnficiaires du SMIC, du RMI, des stages rmunrs, des boursiers estudiantins... de tous les exclus de l'exercice du plein tat adulte.

    L'argent de ceux qui sont vous un "argent de poche" ne dbouche pas sur la pleine autonomie conomique qui suppose non seulement une prise en charge individuelle mais la protection de sa propre famille. Les sources de numraire de la protection familiale ou sociale correspondent une image de "mineur" immature.

    De la pr-majorit la juvnilit prolonge Dans le domaine du Droit et de la

    jurisprudence, si nous adoptons le chiffre de dix-huit ans comme pivot central de la dfinition de la catgorie d'ge, nous constatons que dans les faits le passage du Bac et l'obtention de la majorit lgale ne sont plus les bornes majeures du basculement d'un tat un autre. De part et d'autre, du moment-clef des dix-huit ans, nous voyons se dessiner deux tendances : l'une prcde les 18 ans et correspond la reconnaissance progressive d'une "prmajorit" qui grignote sur les ges d'incapacit des mineurs grer l'argent et l'autre qui, au-del des 18 ans, reprsente une stagnation dans un tat "juvnile" qui se poursuit bien au-del de la majorit lgale.

    Le travail rmunr des jeunes est soumis aux recommandations de la Convention Internationale du travail. Cette convention invite les parties signataires lever progressivement l'ge minimum d'admission l'emploi. Cet ge ne saurait d'une faon gnrale tre infrieur celui auquel cesse la scolarit obligatoire et

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  • La symbolique de l'argent des jeunes s'alimente quekues temPs avant l'accs au plein salaire. Ces pratiques sont de plus en plus banalises et correspondent une

    en tout cas 15 ans. Le seuil ainsi vaguement prolongation du temps juvnile.

    des sources mles, disparates et Floues en

    Fonction de la conjoncture conomique.

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    tabli est lev 18 ans pour les travaux susceptibles de nuire la sant et peut tre abaiss treize ans pour les activits ne comportant pas de risque pour le dveloppement physique ou pour la scolarit des adolescents3.

    Juridiquement 16 ans est considr comme l'ge d'admission au travail. La lgislation du travail agricole permet quelques travaux lgers partir de 12 ans, et 14 ans, est l'ge partir duquel les adolescents peuvent effectuer des travaux pendant les vacances scolaires. Alors que 15 ans est l'ge d'entre possible en apprentissage... Ces bornes d'ge fleurent bon la France rurale et artisanale o le jeune peut tre appel "donner un coup de main" alors que les parents responsables ne sont jamais bien loin.

    Ce qui parait par contre tout fait contemporain est la rduction de la salarisation du travail partir de critres d'ge. Dans la catgorie des 16-18 ans le Code du travail prvoit que le SMIC supportera un abattement de 20 % si le salari a moins de 17 ans et de 10 % s'il a entre 17 et 18 ans. Ce dlai de carence entre ge minor et ge adulte est argument par le manque d'exprience professionnelle, et on sait que toute la classe d'ge des 18-25 ans est soumise depuis quelques annes ces sas, et les formations les plus solides ou les plus prestigieuses ne sont pas pargnes par ce type de rduction des revenus du travail pendant

    3 VERKINDT, P. Y., Le droit des revenus professionnels du mineur , L'enfant, la famille, l'argent, d. LGDJ, 1991.

    Du cot familial et malgr les difficults conomiques, l'argent intermittent procur par des "petits boulots" se doit toujours de garder un statut infrioris par rapport aux revenus des parents quelle que soit l'ampleur du pcule. Plus les "petits boulots" occasionnels se prsentent comme rentables plus ils sont ressentis comme bienvenus mais lgrement dangereux. Cet argent ne doit pas entrer en concurrence avec les projets d'insertion professionnelle prvus car c'est (pour les parents) la clef majeure de l'entre dans le circuit adulte. Les ressources adolescentes ne doivent pas affaiblir la reprsentation familiale des sources lgitimes d'argent rellement adulte. Y compris dans les familles modestes, l'argent des "petits boulots" garde son image d'appoint vers au chapitre du bien-tre individuel du jeune. Il sert payer le scooter, le voyage de vacances, l'quipement sportif, les disques, la chane haute-fidlit. La famille dans son ensemble se rsigne difficilement lui octroyer une place dans un usage collectif existentiel, par exemple pour participer aux notes de chauffage du foyer ou l'chance de remboursement des emprunts. L'argent des "petits boulots" ne peut faire masse qu'avec l'argent prcaire des adultes en difficult sur le plan salarial.

    Prcarit et semi-dpendance La diffusion des donnes statistiques et des

    enqutes par sondage participent une prise de conscience collective de l'volution contradictoire de l'tat de jeunesse dans la socit.

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  • Des tudes font tat du rajeunissement de comportements "adultes" dont les signes les plus spectaculaires sont la plus grande prcocit des rapports sexuels, le rajeunissement et la gravit des actes de violence criminelle, la manipulation de la drogue. l'autre extrme, des bornes d'ge habituelles, lorsqu'on voque "les moins de 25 ans" dans les discours politiques sur le march du travail, on ne sait pas prcisment s'il faut entendre 25, ou bien 28 ou 29, ou peut-tre mme 30 ans.

    Selon le sexe4, selon le groupe social ou la fragilit individuelle devant les processus d'exclusion, l'image de la dpendance financire et locative englobe une priode de la vie qui empite sur ce qu'il convenait de considrer comme la limite ne pas dpasser il y a encore peu de temps5. L'adolescence prolonge des annes quatre-vingt est devenue

    l'immaturit impose et la sujtion la famille et aux aides sociales de la gnration de la crise du salariat.

    Si l'on se sert des estimations INSEE ou celles du Ministre du travail, on va retrouver les bornes administratives et sociales habituelles : fin de la scolarit, premier emploi de plus de 6 mois ou inscription dans un cadre qui devrait y conduire, accs un logement indpendant, vie en couple autonome financirement, naissance du premier enfant. Il convient de repenser ces critres de passage d'un tat un autre.

    4 Cette ide est dveloppe dans LANGEVIN, A., Ages, genres et march du travail , Femmes et partage du travail, d. Syros, Paris, paratre en fvrier 1996. 5 BATTAGLIOLA F., BROWN, E et JASPARD, M., De la jeunesse l'ge adulte : itinraires et facteurs de prcahsation, Rapport de recherche, CNAF, 1995.

    3

    Tableau 2 : Premiers "Jobs" Ia selon le sexe

    Premiers "jobs" Ia

    Baby-sitting Cours particuliers Encadrement d'enfants Travail dans un commerce Travail en usine ou dans un bureau Travaux agricoles Aider un proche dans son travail30 Services rmunrs des particuliers411 Autres petits travaux

    Hommes

    %

    11 11 18 26 30 36 16 20 11

    A quel ge ?2b (Moyenne)

    17,5 19,2 18,0 17,2 17,9 15,2 16,0 16,5 18,1

    Femmes

    %

    49 17 25 37 28 21 11 7 13

    A quel ge ?2b (Moyenne)

    16,2 18,6 17,6 17,4 18,3 16,1 17,0 17,7 18,3

    1a La question est introduite ainsi : Avant de parler de votre premier emploi, nous allons voquer les premires activits, mme trs occasionnelles, qui vous ont permis de gagner de l'argent. Parmi les petits travaux suivants, lesquels avez-vous pratiqus ? 2b La question tait : partir de quel ge ?

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    L'encadrement des ges par le scolaire empite de plus en plus sur les ges d'inclusion dans la vie salarie. Le scolaire semble ensuite se prolonger par des temps courts rpartis au sein mme de la vie de travail. En 1970, les 2/3 des 15-19 ans sont scolariss et en 1993, cette proportion atteint 90 %, alors que pour les 20- 24 ans la proportion passe de 15 % 40 %.

    Cette juvnilisation des rapports l'argent par le scolaire fait l'objet de dispositions lgislatives successives qui reculent les bornes et qui, une fois pass la (nouvelle) frontire, rintroduit des normes et des comportements du statut scolaire au cur mme du salariat. Deux exemples rcents illustrent ce double mouvement : les bnfices de la Scurit Sociale Etudiante viennent d'tre tendus jusqu'au seuil de 28 ans, une proposition du Ministre des Armes permet de bnficier d'un complment de formation durant un temps de service militaire largi d'autant.

    Pourquoi crire "semble se prolonger", c'est que tout l'esprit de l'enseignement est concentr autour de stratgies de rentabilit des efforts en continu alors que les temps courts de stages en cours de salariat ne sont le plus souvent que des dures non cumulables, des sas de pitinement, des temps gels immobiles. Rintroduire des dures dites d'enseignement, c'est masquer l'essentiel qui est que le cumul stratgique d'investissements crreles entre eux et qui jouent sur le long terme, est la base mme des rgles de positionnement social que gre l'enseignement.

    Alors que tout dans le systme scolaire de base tend privilgier la continuit et le cumul, l'ge juvnile devient progressivement une priode d'initiation la pratique des courts termes additionns sans liens rels entre eux et

    une prise en charge calcule au niveau de la survie immdiate.

    La phase des 15-25 ans est faite d'alternances entre salariat et prise en charge sociale ou parentale. Les attentes, les ruptures et les fractionnements du parcours y sont la rgle et prparent ce que chacun connatra une priode de chmage, une ou plusieurs fois au cours de sa vie professionnelle . Cette discontinuit systmatise, d'exclusions et de rinsertions successives font de la juvnilisation une vritable "cole des temps prcaires" o les replis obligs sur des courts termes successifs, bloquent le projet portant sur la longue priode.

    La juvnilisation des moins de 25 ans comporte un volet essentiel, celui de la compression du montant des ressources. Cette compression construit la dpendance conomique de toute une classe d'ge par rapport la phase adulte. Le lgislatif banalise le fait que la rentabilit pcuniaire "juvnile" reste situe un niveau majoritairement infrieur celle de la phase adulte. Les montants des SIVP, des TUC... sont toujours au-dessous des seuils d'indemnits compensatoires adultes. Symboliquement la marge pcuniaire des moins de 25 ans est construite en appoint (au mme titre que ce qui qualifiait l'argent fminin dans la famille). Cette rgulation des rtributions des ges juvniles tablit systmatiquement la dpendance la classe d'ge adulte.

    Cette juvnilisation des ressources va avec l'incapacit reproduire les modles de l'institution familiale de la gnration antrieure et a provoqu un mouvement de recul des ges au mariage ou la mise en couple stabilis et celui de la venue au monde du premier enfant. L'infertilit des moins de 25 ans est induite par la fixation d'un seuil de revenus situ au-des-

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  • sous de ce qui est peru comme autonomie et prise en charge familiale adulte. De plus, tout ce qui entre dans le calcul des revenus juvniles : les sommes de dbut de carrire, les rmunrations des stages, les indemnits de chmage- jeune... est limit l'entretien de la personne elle-mme. L'individualisation des revenus juvniles s'oppose toute ide de prise en charge tendue un autre que soi.

    Les facteurs de minoration Les phases de flou et d'attentes incertaines,

    marques par le caractre ritratif d'activits parcellises et le plus souvent non cumulables, dbouchent sur des interdits de projet et des enfermements dans le court terme. Les stages courts en alternance avec des priodes limites de chmage ou les emplois d'attente, aboutissent la perte des acquis pour les plus faibles. Non seulement, on perd son temps d'entre dans le circuit adulte mais on intriorise cette pdagogie de minoration du temps.

    La phase juvnile est le lieu d'apprentissage de la flexibilit d'un temps constamment ramnag dont la disponibilit est constante et la mobilisation intermittente. Au dbut des annes 1990, 1/3 des moins de 25 ans occupait un emploi stable dure indtermine, cette proportion se rduit 1/4 aujourd'hui. Les temps d'expectative et d'incertitude prcdent les temps courts, les moins de 25 ans qui restent actifs d'une anne sur l'autre passent de 90 % en 1970 77 % en 1993. Le quart de la population juvnile qui est "active" est stable 77 %.

    La symbolique de l'argent des jeunes s'alimente des sources mles, disparates et floues en fonction de la conjoncture conomique.

    La pdagogie issue de l'thique des gnrations de ceux qui sont parents aujourd'hui est devenue inadapte. Un segment de cette

    gogie reste clair, c'est la pratique de l'argent de poche de la petite enfance. Il reprsentait l'immaturit sociale de l'argent des enfants en pralable l'autonomie conomique, signe essentiel de l'accs au statut adulte. Finir ses tudes, gagner sa vie, quitter le logis parental, se marier et fonder son propre foyer, jalonnaient la phase de transition entre enfance et maturit.

    Aujourd'hui 1' "immaturit" symbolique de l'argent juvnile s'tend une avance en ge qui s'est considrablement dplace dans le parcours de vie en dpit de l'mergence d'une prmajorit de la gestion des biens, des pratiques sexuelles, de la criminalit "lourde".

    Les donnes statistiques nous rvlent que l'immaturit sociale des ressources est conditionne par l'miettement, l'alatoire, la fixation de bases de ressources trop faibles. Les aides de la famille d'origine et celles de l'tat, interdisent de considrer comme acquise l'autonomie pcuniaire adulte des "jeunes" qui en bnficient. En ce sens, les bornes d'ge ne font rien l'affaire.

    Deux modles se ctoient. D'une part, le modle adulte d'un argent aux sources stabilises, qui dpasse la satisfaction des besoins primordiaux et qui permet des projets sur le long terme, et d'autre part, un argent "immature", individualis, parcellis et cantonn dans l'immdiate survie. Cet argent "juvni- lis" est le lot de ceux qui sont encore errants dans leur qute d'une utilisation "adulte" de l'argent qui fut un modle pour la gnration des annes d'essor conomique. Toute l'ambigut des images symboliques contemporaines vient de ce que la prcarit des sources de revenus du march du travail dstabilise la fois le statut adulte et le statut juvnile des rapports l'argent.

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    Symbolic images oF money and age groups It is at the level of the family that the symbolic construction of the role of money in society is most directly perceived : which differentiates youth money from adult money. Other actors : the State, the bank, the media help confirm and complete this dual image. The deposit in a post office or a bank account is a special moment during which the symbolism of the money of young people takes on this dual register. On the one hand, a computerised currency with stable sources which is self-regenerating and on the other the currency of fundamental needs. The board and lodging provided by parents, the basic minimum salary, benefits, courses, scholarships ...are all part of the juvenilisation of those excluded from the exercice of complete adulthood Of those who are condemned to "pocket money", which does not lead to the adult symbolism of money.

    Imgenes simblicas del dinero y clases de edad Es a nivel de la familia donde se percibe mas directamente la construccin simblica del papel del dinero en la sociedad : aquello que diferencia el dinero de los menores del dinero adulto. Otros actores : el Estado, la banca, los medios de comunicacin van a ratificar y completar esta doble imagen. El ingreso en una cuenta postal o bancaria es un momento particular donde el simbolismo del dinero de los jvenes adopta este doble registro. Por una parte el dinero in formalizado, de fuentes estables y que gestiona su propia regeneracin y por otra parte el dinero de las necesidades fundamentales. El apoyo alimenticio y al alquilar de vivienda por parte de los padres, el dinero del salario mnimo, del ingreso de insercin, de cursos, de bacas de estudiante... contribuyen a la "juvenilizacion" de los excluidos del ejercicio del completo estado adulto. De aquellos que estn condenados a la "propina semanal" para pequeos gastos que no desemboca en el simbolismo adulto del dinero.

    Symbolbilder von Geld und Altersklassen Der symbolische Aufbau der Rolle des Geldes in der Gesellschaft wird am unmittelbarsten auf Ebene der Familie gesprt : was das unmndige Geld vom mndigen Geld unterscheidet. Andere Akteure : der Staat, die Bank, die Medien werden dieses doppelte Bild 6/7/- gen und ergnzen. Die Einzahlung auf ein Post - oder Bankkonto ist ein besonderer Augenblick wo die Symbolik des Geldes der Jugendlichen dieses doppelte Register einnimmt. Einerseits das Informatikgeld, mit stabilisierten Quellen, das sich selbst regeneriert und andererseits das Geld der Grundbedrfnisse. Die Untersttzung der Eltern im Bereich der Ernhrung und der Unterkunft, das Geld des Mindestlohnes, des Sozialeinkommens, derPraktica, der Studentenstipendien... tragen zur Verjugendlichung derjenigen bei, die von der Ausbung des vollen Erwachsenenalters ausgeschlossen sind : derjenigen, die zu einem "Taschengeld", das nicht in die Erwachsenensymbolik des Geldes mndet, verurteilt sind.

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    InformationsAutres contributions de Annette Langevin

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    IllustrationsTableau 1 : Argent de poche vers 18 ans, selon le sexe et l'origine socialeTableau 2 : Premiers "Jobs" I selon le sexe

    PlanRester immature, devenir adulteArgent de poche et immaturit socialeLes prrogatives de l'argent adulteDe la pr-majorit la juvnilit prolongePrcarit et semi-dpendanceLes facteurs de minoration