Hegel Critique Du Formalisme

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  • LA CRITIQUE DU FORMALISME DANS LA PRFACE DE LAPHNOMNOLOGIE DE L'ESPRIT

    Jean-Michel Bue

    Assoc. R.I.P. | Revue internationale de philosophie

    2007/2 - n 240pages 161 180

    ISSN 0048-8143

    Article disponible en ligne l'adresse:--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

    http://www.cairn.info/revue-internationale-de-philosophie-2007-2-page-161.htm--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

    Pour citer cet article :--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

    Bue Jean-Michel, La critique du formalisme dans la Prface de la Phnomnologie de l'Esprit , Revue internationale de philosophie, 2007/2 n 240, p. 161-180. --------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

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  • La critique du formalisme dans la Prface de la Phnomnologie de lEsprit

    Jean-Michel Bue

    Comme on le sait, le reproche de formalisme adress par Hegel aux tenants de la philosophie de la nature ne date pas de la Prface de la Phnomnologie de lEsprit : on le trouve, en effet, clairement formul, dans une leon dIna, que Rosenkranz cite sans en indiquer la date exacte : aprs avoir voqu une terminologie trangre qui change les concepts, qui en eux-mmes sont mouvement, en quelque chose de solide et de fi xe, en sorte que svanouissent lesprit et la vie de la chose mme, et que la philosophie sombre dans un forma-lisme vide quil est ais comme tout de se procurer pour y prorer, mais qui parat trs diffi cile et profond ceux qui ne comprennent pas cette terminologie , Hegel prcise quil fait ces remarques cause, principalement, de laspect actuel de la philosophie, et nommment de la philosophie de la nature, o la terminologie de Schelling fait scandale , avant dajouter deux choses : dun ct, la profondeur de ce type de philosophie est une pure apparence, qui ne fait vrai dire que dissimuler [] la superfi cialit des penses , de lautre, ce dfaut ne concerne pas les ides de Schelling , quil convient au contraire de distinguer de lusage quen font ses lves , en soulignant que la vritable ide de la philosophie, telle quelle se rveille notre poque chez Schelling, est indpendante de ce formalisme .1 Deux points retiennent ici lattention : dune part, la fonction premire du concept de formalisme est, lvidence, une fonction dmystifi catrice, puisque son introduction vise dabord dissoudre lapparence de gnialit et de profondeur des philosophies de la nature, en en dcouvrant le vritable principe dans les oprations formelles de lentendement, qualifi es de superfi cialit des penses . Dautre part cette dmystifi cation ne touche en rien la philosophie de Schelling, dont Hegel dfend au contraire linnocence, en distinguant comme le fera encore la lettre du 1er mai 1807, annonant son ex-condisciple lenvoi de la Phnomnologie Schelling lui-mme de ses lves.2 La Prface de la Phnomnologie vrifi e-t-elle, cependant,

    1. K. Rosenkranz, Vie de Hegel ; trad. fr. P. Osmo, Paris, Gallimard, 2004, pp. 317-319.2. Briefe von und an Hegel, Hamburg, Meiner, 1953, I, 95 ; trad. fr. J. Carrre, Paris, Gallimard,

    1962, I, pp. 150-151.

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    le bien-fond de ces affi rmations ? Si, en un sens, elle confi rme la premire, en montrant que la prtendue gnialit de la Naturphilosophie procde en ralit dun formalisme dentendement, cette confi rmation mme ne vient-elle pas infi rmer le second point, en se fondant sur une rfrence implicite, mais relle la philosophie de Schelling elle-mme ? En sorte que le concept de formalisme ne garderait ici sa fonction initiale qu la condition den acqurir une toute autre, qui serait de rvler linanit de la prtention schellingienne arracher au dualisme la dernire scission dans laquelle il se tient ? 3 Mais, en ce cas, quoi renvoie une telle critique ? Sagit-il simplement de retourner contre la philosophie de Schelling le grief dempirio-formalisme que les textes antrieurs avaient avanc pour la dfendre contre Kant, Fichte, Reinhold, Jacobi ou Bardili ? 4 Et den mettre ainsi jour lincapacit saffranchir de lhorizon des philosophies de la subjectivit ? Ou sagit-il dautre chose, qui serait li, comme le suggre Schelling lui-mme dans sa rponse Hegel, au rle que joue lintuition dans sa philosophie ? 5 Quelque chose qui, plus qu la conception mme de la raison comme raison infi nie dont la dimension authentiquement spculative serait au contraire reconnue , tiendrait, pour lessentiel, au statut immdiat et substantiel que lui attribue Schelling, statut qui, en condamnant la raison ne dployer son infi nit que sur le mode dune rfl exion formelle et extrieure, lui interdirait par l mme de saisir le fi ni en ce quil comporte deffectif et de concret ?

    Dans le passage de la Prface o il introduit le grief de formalisme, Hegel, sans en donner proprement parler une dfi nition, en propose cependant une double caractrisation : dune part, ce grief concerne les philosophies de la nature de lpoque ; dautre part, il reproche celles-ci de ntre quune rfl exion extrieure, subsumant sous une forme immuable une multiplicit de matriaux trouvs lavance ; extriorit que Hegel interprte comme lexpression dun dfi cit spculatif, en marquant lcart entre ce quexige le concept de Naturphi-losophie une apprhension rationnelle ou conceptuelle de la nature qui voie en elle un dploiement de lIde absolue et ce quen sont les productions de fait : un formalisme monochrome , qui est aussi peu laccomplisse-

    3. Schelling, Fernere Darstellungen in smtliche Werke (S.W.), Stuttgart-Augsburg, Cotta, 1856-1861, I, 4, 404.

    4. Differenz des Fichteschen und Schellingschen Systems der Philosophie in Werke (W) in zwan-zig Bnden hrsg. von E. Moldenhauer und K. M. Michel, Theorie-Werkausgabe, Frankfurt. a. M, Suhrkamp, 1970, Bd. II, 96 sq. et 130 sq. ; trad. fr. M. Mery, Diffrence des systmes philo-sophiques de Fichte et de Schelling, Gap, Ophrys, pp. 98 sq. et 166 sq. Glauben und Wissen in W, II, 309 sq. (Kant), 332 sq. (Jacobi), 396 sq. (Fichte) ; trad. fr. M. Mery, Foi et savoir, Gap, Ophrys, pp. 211sq. , 228sq. , 272 sq.

    5. Briefe, I, 107, trad. cit. (modifi e) I, p. 178.

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  • La critique du formalisme dans la Prface de la Phnomnologie de lEsprit

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    ment de ce qui est exig, savoir la richesse jaillissant de soi des fi gures et leurs diffrences se dterminant elles-mmes, que [le seraient] des lubies arbitraires concernant le contenu .6 Reste que ce diagnostic ne semble pas dnu de toute ambigut : que signifi ent en effet cet cart et cet inaccomplissement ? Sagit-il dun cart de fait, imputable, comme suggrent les analyses qui prcdent, une situation o la science ne fait que commencer 7 et qui renverrait pour lessentiel la diffrence entre une philosophie de la nature authentique celle de Schelling et les avatars quen produisent ses disciples, en dnonant chez ceux-ci une tendance faire prvaloir lintuition et le sentiment sur la rigueur conceptuelle ? Ou sagit-il dun tout autre type dcart, dordre logique, qui tiendrait, non au principe spculatif lui-mme, autrement dit lIde absolue, dont le texte souligne prcisment la vrit pour soi , mais la comprhen-sion quen propose Schelling, cest--dire une comprhension de la raison qui, trop immdiate et trop substantialiste pour en permettre le dploiement effectif, condamnerait la science nen rester en fait toujours qu son commence-ment , en la menant invitablement au formalisme ?8

    A considrer attentivement le texte de Hegel, il semble que la dmarche quil met en uvre ne contribue gure dissiper cette ambigut : comme le rappelle lallusion aux lubies arbitraires (Einflle), laccusation de forma-lisme dcoule en effet dun itinraire qui prsente la dception suscite par le dfi cit spculatif de la Naturphilosophie comme la vrit dune autre dception : celle quprouvent les dfenseurs de la richesse du matriau et de lintel-ligibilit dentendement (Verstandlichkeit) 9 autrement dit les penseurs de lentendement analytique , partisans du mcanisme et du matrialisme des Lumires 10, face des productions quils jugent inconsistantes, et dont linconsistance serait due une gnialit qui sest imagine, en confondant science et prophtisme, que la science pouvait tre la propret sotrique de quelques singuliers 11 ; il est clair que cette faon de procder suppose une double opration : dune part, montrer que ce reproche, injuste et injustifi sil sagit de mettre en question lessence mme de la science12, cest--dire de rduire la Naturphilosophie un pur irrationalisme, cache une critique parfai-

    6. Phnomenologie des Geistes in W. III, 21 ; trad. fr. G. Jarczyk et P. J. Labarrire, Phnomnologie de lEsprit, Paris, Gallimard, 1993, pp. 78-79.

    7. W, III, 20 ; trad. cit. p. 78 ; cf. aussi W, III, 18 ; trad. cit. p. 76.8. W, III, 21 ; trad. cit. p. 79.9. W, III, 20 ;trad. cit. (modifi e) p. 78.10. B. Bourgeois, Prface et introduction la Phnomnologie de lEsprit, texte, traduction et

    commentaire, Paris, Vrin, 1997, p. 238.11. W, III, 19 ; trad. cit. p. 77.12. W, III, 19 ; trad. cit. p. 78.

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    tement justifi e, qui ne concerne pas cependant le contenu du discours natur-philosophique , mais uniquement sa forme, ou plus exactement limperfection dune forme, laquelle fait dfaut la compltude du dtail 13 ; autrement dit, montrer que ce qui est attribu, tort, la gnialit et la profondeur, est en ralit leffet dune pense rationnelle, mais dont la rationalit nest quune rationalit abstraite ou une rationalit dentendement, cest--dire un forma-lisme. Dautre part, trouver une confi rmation de la justesse de cette critique dans la faon de faire de ceux qui, ayant recueilli un matriau abondant et dj prpar et connu , prtendent en produire la connaissance et tout soumettre lIde absolue , l o ils se bornent en ralit lui appliquer une forme identique, dont l apparence ennuyeuse de diversit nest rien dautre que la rptition de la mme formule 14. La dmarche de Hegel prsente un avantage certain, puisquelle lui permet de confrer un ancrage historique une critique du formalisme qui en dnonce le dfi cit proprement spculatif, en faisant apparatre ce dfi cit comme la vrit des griefs que toute une part de la culture de lpoque adresse la Naturphilosophie ; mais elle prsente aussi linconvnient de mler deux critiques issues dhorizons diffrents celui de lentendement dans un cas, celui de la raison spculative dans lautre, en contribuant par l lambigut dun texte qui, faute dexhiber la justifi cation proprement logique de ce quil nonce sur le mode dun rcit vnementiel15, ne permet gure son lecteur de dcider si cette critique du formalisme vise la philosophie de Schelling elle-mme ou simplement les versions inspires quen ont propos ses satellites 16.

    La suite de la Prface, qui revient sur la question du formalisme pour en indi-quer plus prcisment la manire 17 clarifi e-t-elle les choses ? Hegel intro-duit ici une prcision nouvelle, puisque ce qui tait auparavant conu comme un inaccomplissement de lexigence spculative est prsent pens comme une dvitalisation de la forme authentiquement rationnelle, rabaisse un schma , aussi inerte que fantomatique18. Mais en quel sens entendre cette dvitalisation ? Comme une dgradation, lie un mauvais usage de la rationalit spculative, comme semble le laisser entendre lemploi du terme

    13. Ibid.14. W, III, 20 ; trad. cit. pp. 78-79. 15. W, III, 55 ; trad. cit. p. 115.16. Nous empruntons le terme X. Tilliette, Hegel et Schelling Ina in Labsolu et la philosophie,

    Paris, PUF, 1987, p. 113.17. W, III, 48 ; trad. cit. p.107.18. Ibid. Le texte rapproche ici schma (Schema ) de fantme ( Schemen). Cf. trad. cit. note

    3, p. 107.

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    rabaisser ? Ou comme la consquence dune comprhension insuffi samment spculative de cette rationalit elle-mme ? L encore la rapide gense histo-rique de la redcouverte de la forme rationnelle dans la philosophie moderne, destine justifi er cette ide de dvitalisation, est trop gnrale pour permettre une rponse : Hegel y clbre manifestement les mrites de la Doctrine de la science fi chtenne, crdite davoir su lever sa signifi cation absolue la triplicit , que Kant avait retrouve , mais seulement par instinct, et donc comme une forme encore morte , encore non conceptualise , et davoir ainsi permis la venue au jour de la science19; ce qui peut aussi se comprendre comme un loge de Schelling, dont la philosophie repose sur une reprise et une rinterprtation du concept fi chten, mais sans que soit prcis quoi renvoie exactement un tel loge : la rationalit de la philosophie de la nature schellin-gienne, dont la dgradation serait alors le fait de disciples infi dles ? Ou ce qui en est le fondement, cest--dire la conception de la raison absolue comme indiffrence totale du subjectif et de lobjectif quexpose la Darstellung meines System20, et dont la prsentation dvitalisante et dvitalise serait alors la philosophie de la nature elle-mme ?

    Force est, en outre, de constater que lorientation adopte par la suite de ce passage davantage centre sur les effets de cette dvitalisation de la forme que sur ses origines ne contribue pas lever lquivoque. Hegel y montre dabord comment le rapport soi du schma lui permet, en se multipliant linfi ni et en saisissant ensemble des dterminations qui paraissent pourtant fort loignes , dapprhender la nature comme un cercle de rciprocit ou un jeu d analogies superfi cielles , en engendrant un discours dont lapparence potique est propre susciter un tonnement admiratif et un sentiment de gnialit profonde ; puis il reconduit cette poticit apparente ce qui en est la vrit : le prosasme et la platitude de lactivit classifi catoire dun enten-dement mcanique et mortifre compare celle dun picier qui range des boites , dont le truc [] est aussi tt appris quil est facile de le mettre en uvre . Dmystifi cation qui conduit certes dnoncer un formalisme super-fi ciel, ou une vue-de-survol , cachant lessence vivante de la chose , en maintenant lentendement hors de la vie intrieure et de lauto-mouvement du contenu 21, mais qui laisse aussi totalement indcide la question de savoir

    19. Ibid.20. Darstellung meines System der Philosophie in SW I, 4, 114 ; trad. fr. E. Cattin, Exposition de

    mon systme de la philosophie, Paris, Vrin, 2000, p. 45. 21. Pour tout cela, cf. W, III, 48-52 ; trad. cit. pp. 108-112.

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    si cette superfi cialit tient un usage perverti de la philosophie de la nature schellingienne ou si elle est au contraire imputable loriginal lui-mme.

    A cet gard, le paragraphe de la Prface qui rsume toute cette polmique en rsume aussi toute lambigut : Hegel, qui voque de nouveau la dvitali-sation de la forme, prsente celle-ci comme un destin auquel lexcellent ne peut pas chapper , en prcisant deux choses : dune part, dans ce destin lui-mme est connatre la violence [ou la puissance (Gewalt)] dont il use sur les puissances-affectives (Gemter), sinon sur les esprits ; autrement dit, ce destin rvle lattrait, ou la fascination, que la raison exerce sur le cur ou le sentiment ; dautre part, il faut aussi y connatre le mouvement de formation luniversalit et dterminit de la forme, dans lequel consiste son achvement, et qui seul rend possible que cette universalit se trouve utilise pour la super-fi cialit 22, remarque nigmatique qui semble cependant suggrer que dans la dgradation et la superfi cialit qui caractrisent ici lusage de la forme, rsonne un cho lointain de la vise dunit concrte quest la vise spculative authen-tique ; en sorte que dans le dfaut mme de son laboration, ce discours continue faire signe vers lexigence dune laboration vritable le mouvement de formation luniversalit et dterminit de la forme dans lequel consiste l achvement de celle-ci exigence qui est lexigence proprement concep-tuelle et qui, prcise Hegel, est seule mme den fonder lusage superfi ciel autrement dit lusage formaliste en confrant celui-ci une lgitimit limite, mais relle. Or, y bien regarder, ce texte semble pouvoir se lire de deux faons : on peut certes y percevoir une sorte dhommage Schelling qui, dplorant la dgradation que font subir sa philosophie des disciples inspirs par le cur et le sentiment, voit l leffet dun destin malheureux comparable par exemple celui quvoquait le dbut de la Differenzschrift, propos de linterprtation historiciste des systmes philosophiques23 destin dans lequel cependant il est encore possible de reconnatre une trace de loriginal. Mais, on peut aussi entendre ce destin comme une ncessit intrieure, et discerner une critique radicale de Schelling en ce qui se donne pour un loge du caractre spculatif de sa philosophie : quen est-il en effet de l excellence dont parle le texte ? Ne dsigne-t-elle pas une profondeur et une intriorit vides, correspondant la faon dont Schelling interprte labsoluit de la raison ? Et en ce cas, la super-fi cialit et lextriorit autrement dit le formalisme , nen sont-elles pas la consquence invitable, au sens o le dbut de la Prface affi rme, propos des discours prophtiques , que lintensit dpourvue de teneur est la mme

    22. W, III, 51 ; trad. cit. p. 110. 23. W, II, 15 ; trad. cit. p. 83.

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  • La critique du formalisme dans la Prface de la Phnomnologie de lEsprit

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    chose que la superfi cialit 24 ? En sorte que Hegel laisserait entendre que la conception schellingienne de la raison, trop proche dun savoir immdiat de type sentimental ou fi diste, conduit une philosophie de la nature dont lindigence mme suffi t montrer la ncessit den produire une prsentation rellement spculative tche qui incomberait la philosophie hglienne elle-mme, et qui, seule, pourrait fonder la part de vrit que possde, en la dvitalisation mme quil fait subir au concept, le formalisme schellingien.

    On en conclurait que la seule faon de surmonter ces diffi cults est de sen remettre Hegel lui-mme, assurant Schelling que ses critiques ne visent que ceux qui abaissent (sa) science au niveau dun pur formalisme 25, si les nombreuses allusions, relativement transparentes qui parsment le texte, ne semblaient toutes indiquer le contraire. En effet, qui se rfre Hegel lorsque, aprs avoir voqu le confl it entre partisans de lentendement et partisans de la rationalit et divinit immdiates 26, il dclare que ceux-ci dsigns sans autre prcision comme les autres se font certes parfois la partie belle pour avoir une grande extension. Ils charrient sur leur terrain un matriau abondant, savoir ce qui est dj connu et ordonn, et en ayant affaire surtout aux bizarreries et aux curiosits, ils paraissent dautant plus possder le reste, dont le savoir sa manire tait dj venu bout, en mme temps aussi dominer ce qui ntait pas encore rgl, et donc soumettre tout lIde absolue, laquelle du coup parat tre connue dans tout et avoir atteint la science dploye , avant dajouter que, regarder de plus prs cette expansion, elle ne se montre pas tablie par le fait quune seule et mme chose se serait elle-mme confi gure de faon diverse, mais elle est la rptition dpourvue de fi gure dune seule et mme chose qui nest applique que de faon extrieure au matriau divers et reoit une apparence ennuyeuse de diversit 27 ? Si lon confronte cette description aux exposs de la philosophie de la nature que prsentent la Darstellung meines System ou les Fernere Darstellungen, il apparat vident que ces autres , qui croient dployer lIde absolue l o ils ne font en ralit que revtir dune

    24. W, III, 17 ; trad. cit. p. 74. On peut remarquer que le terme excellence (Vortreffl ichkeit) est employ en un sens ironique, ou dprciatif, dans le passage de la Prface qui se moque du truc des Naturphilosophen , cf. W. III, 50 ; trad. cit. p. 109. Cf. aussi W, III, 290 ; trad. cit. p. 366 ainsi que W, III, 481 ; trad. cit. p. 567 ; on peut enfi n noter que ladditif au 133 de lEncyclopdie de 1830 affi rme que cest pour un artiste en tant que tel une mauvaise excuse, lorsquil est dit que le contenu de ses uvres est, certes bon (et mme tout fait excellent), mais quil leur manque la forme adquate W, VIII, 266 ; trad. fr. B. Bourgeois, Encyclopdie des sciences philosophiques, I, la science de la logique, Paris, Vrin, 1970, p. 566.

    25. Briefe, I, 95 ; trad. cit. p. 151.26. W III, 19 ; trad. cit. p. 78.27. W III, 20 ; trad. cit. pp. 78-79.

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    forme extrieure des rsultats, plus ou moins tranges, mais dj connus et dj ordonns, ne font rien que ne fasse Schelling lui-mme, qui donne pour le rsultat dun dploiement de lIde absolue ce qui provient pour lessentiel de travaux de physiciens ou de Naturphilosophen, tels Steffens, Kielmayer, Eschenmayer ou encore Goethe, dont le concept de mtamorphose joue un rle central dans les exposs schellingiens28. De mme, quen est-il de la construction , ou de la multiplication linfi ni du schma dont parle la suite de la Prface ? Cette multiplication, comparable lopration mathmatique consistant lever un nombre la puissance, fait manifestement rfrence au rapport soi de lidentit ou lidentit de lidentit que thmatise la Darstellung et aux consquences qui en dcoulent : la rduction de toute diffrence qualitative une diffrence quantitative, ou encore le systme des Potenzen 29. Si lon ajoute que les allusions ironiques du texte sur lassimilation de lentende-ment llectricit, ou sur celle de lanimal lazote , renvoient, elles aussi, des thmes prsents chez Schelling30, il semble hors de doute que la cible de la polmique hglienne mme si elle svertue le dissimuler est bien la Naturphilosophie de Schelling lui-mme.

    Reste, on la vu, que laccusation de formalisme peut sentendre en deux sens : comme une dgradation accidentelle que sa mise en uvre ferait subir un principe authentiquement spculatif, ou comme la consquence ncessaire dune comprhension de ce principe qui en contredit le caractre spculatif. Or, l encore, cest en citant Schelling lui-mme, ou plus exactement les textes dans lesquels celui-ci rpond laccusation de formalisme, que la Prface lve lam-bigut, en dcouvrant dans cette dfense elle-mme la meilleure confi rmation du bien-fond de laccusation. Hegel voque ici la rponse des partisans de la Natur-philosophie ceux qui font tat de leur insatisfaction ce propos . Rponse qui consiste renvoyer lobjection dinconsistance autrement dit lobjection

    28. Cf. par exemple Darstellung, SW I, 4, 154 (Steffens), 188 (Kielmeyer), 210 sq. (sur la mta-morphose dans la nature organique) ; trad. citpp 89, 121,140 sq. Pour Eschenmayer, voir par exemple Uber den wahren Begriff der Naturphilosophie und die richtige Art ihre Probleme aufzulsen in SW I, 4, 81. Trad. fr. E. Cattin, Sur le vrai concept de la philosophie de la nature et la faon correcte de rsoudre ses problmes in op. cit. pp. 149 sq. Sur les sources de la philosophie schellingienne de la nature, voir Historisch-kritische Ausgabe. Reihe I : Ergnszungsband zu Bd. 5-9. Wissenchaftshistorischer Bericht zu Schellings naturphilosophis-chen Schriften 1797-1800, Stuttgart, Fromann-Holzboog, 1994.

    29. Cf. SW I, 4, 121, 123, 128, 134 sq. ; trad. cit. pp. 55, 57, 61, 67 sq. 30. W, III, 48-49 ; trad. cit. p. 109. Cf. SW I, 4, 207 ; trad. cit. p. 138 propos de lanimal et de

    lazote ; lanalogie entre lentendement et llectricit renvoie sans doute au paralllisme entre dterminations de lintelligence et dterminations de la nature que dveloppe le Systme de lidalisme transcendantal, mme si en toute rigueur Schelling met en parallle llectricit et la sensation. Cf. SW I, 3, 452.

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    de formalisme une incapacit de semparer du point de vue absolu et de se tenir fermement lui 31. A lvidence, la remarque fait allusion toutes les analyses de la Darstellung ou des Fernere Darstellungen dans lesquelles Schel-ling, qui soutient que le fi ni nest quun phnomne dnu de toute subsistance relle au regard de linfi ni, laisse entendre que seule une rfl exion extrieure , confrant une autonomie illusoire ce qui, considr en soi , nest rien peut accuser sa philosophie de la nature de ntre quun formalisme vide32. Or, que montre cette rponse ? Elle revient, dit Hegel, opposer la connaissance diffrenciante et accomplie, ou cherchant et exigeant accomplissement , le savoir Un, que dans labsolu Tout est gal ; ou encore prtendre que consi-drer nimporte quel tre-l tel quil est dans labsolu ne consiste en rien dautre [] qu dire son propos que, certes, lon a parl maintenant de lui comme dun quelque chose , alors que dans labsolu, le A=A, [], il ny a rien de cette sorte, mais [que] l tout est Un 33. Ce qui traduit de la part de Schelling un double aveu : dune part, la connaissance du fi ni, loin den saisir leffectivit concrte et singulire, nest au contraire quune manire doprer la disso-lution du diffrenci et du dtermin , en projetant celui-ci dans labme du vide , ou dans la nuit o, comme on a coutume de dire, toutes les vaches sont noires 34. Dautre part, mme si cette vise est bien une vise spculative, au sens o elle rejette lentendement et son formalisme, ce rejet mme, qualifi de honte devant les diffrences du schma , qui les noie, comme relevant de la rfl exion, dans la vacuit de labsolu, dans le but dinstaurer lidentit pure, le blanc dpourvu de forme 35 repose sur une ngation de la rfl exion qui nen est quune ngation abstraite, do une dpendance de la raison vis--vis de ce dont elle croit se librer. Autrement dit, la conception schellingienne de la raison ou de la spculation relve encore dune rfl exion extrieure ; et cest pourquoi, lorsquelle tente de donner delle-mme une expression vivante en laborant une philosophie de la nature elle ne peut que succomber lentendement et sa puissance mortifre : Cette monochromie du schma et de ses dterminations dpourvues de vie, et cette identit absolue, et lacte-de-passer de lun lautre, lun est mme entendement mort que lautre, et mme connatre extrieur 36.

    31. W, III, 21 ; trad. cit. p. 79.32. Cf. SW I, 4, 116, 119 sq., 126 ; trad. cit. pp. 48, 52 sq., 60 ; cf. aussi les Fernere Darstellungen,

    SW, I, 4, 387 : Il ny a pas de fi nit relle, pas de fi nit en soi .33. W, III, 21 ; trad. cit. p. 79-80.34. Ibid. Limage de la nuit se trouve dans les Fernere Darstellungen, SW I, 4, 403. Sur les

    emprunts directs de formules de Schelling, voir F. Fischbach, Du Commencement en philoso-phie Etude sur Hegel et Schelling, Paris, Vrin, 1999, en particulier pp. 214 sq.

    35. W, III, 50 ; trad. cit. p. 110.36. Ibid.

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    Est-ce dire toutefois que Hegel ne ferait ici que retourner contre Schelling le grief dempirio-formalisme que la Differenzschrift adressait Reinhold ou Bardili ?37 Ou encore, que, reprenant laccusation de formalisme que Foi et savoir dirigeait contre Kant et Fichte, en liant celle-ci au principe de la subjectivit 38, il entendrait suggrer que Schelling, rest formellement fi ch-ten 39, a produit une philosophie qui, mme si elle sen dfend, reste en fait une philosophie de la subjectivit ?

    Il est indniable que llaboration du discours repose, chez Schelling, sur une rintroduction implicite du sujet : cest le sujet sachant qui dploie la forme Une immobile autour de ce qui est prsent l 40 ; et cest parce quil garde pour soi la ncessit et le concept du contenu que l entendement tabellaire nest quune rfl exion du savoir dans soi-mme 41. Mais, si lon peut dire, en ce sens, que la philosophie de lidentit redevient un systme de la rfl exion ds quelle tente de sortir de lunit nocturne , cela signifi e-t-il pour autant que Schelling aurait rintroduit la rfl exion sournoisement ou aprs coup 42 ? Cette rintroduction nest-elle pas au contraire la consquence mme de la faon dont il conoit lidentit absolue ? A cet gard, le passage le plus clbre de la Prface, dans lequel Hegel explicite le fondement de sa critique de Schelling en dclarant que selon son intellection [] tout dpend du fait de saisir et exprimer le vrai, non comme substance, mais tout autant comme sujet , apporte une prcision dcisive : loin de sen prendre au subjectivisme, il prsente en effet les philosophies de la subjectivit celle de Kant, et surtout celle de Fichte comme des penses qui demeurent dpendantes dune conception substantia-liste du vrai ; en donnant une expression conceptuelle ce qui tait dabord une raction, justifi e, contre le spinozisme, accus dengloutir lauto-conscience dans la substance Une , celles-ci ont conserv ce quavait d instinctif , cest--dire dimmdiat et de non conu, une telle raction : aussi lorsquil rige le Moi absolu en principe de la philosophie, Fichte lui attribue-t-il une simpli-cit ou une substantialit indiffrencie immobile qui est la mme que celle de la substance spinoziste43. Ds lors, quen est-il de la troisime

    37. Cf. ci-dessus note 4.38. W, II, 395 ; trad. cit. p. 273.39. B. Bourgeois, op. cit. p. 242.40. W, III, 20 ; trad. cit. p. 79. 41. W, III, 51 ; trad. cit. p. 111-112. Voir aussi lallusion du dernier chapitre, visant manifestement

    Schelling, au tiers qui rejette les diffrences dans labme de labsolu . W, III, 588 ; trad. fr. p. 690

    42. J. F. Marquet, Systme et sujet chez Hegel et Schelling in Restitutions. Etudes dhistoire de la philosophie allemande, Paris, Vrin, 2001, pp. 155 et 157.

    43. W, III, 21-22 ; trad. cit. p. 80-81.

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  • La critique du formalisme dans la Prface de la Phnomnologie de lEsprit

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    position , celle de Schelling, o le penser unit soi ltre de la substance comme telle , en saisissant limmdiatet et lintuitionner comme penser ? Le problme quelle soulve nest pas celui de la rechute dans le subjectivisme ; mais celui de la contradiction quelle semble comporter entre deux aspects : dun ct un contenu, authentiquement spculatif, puisquil exprime la ncessit de sursumer tout dualisme du sujet et de lobjet, ou de la pense et de ltre ; et de lautre un statut qui, en faisant de ce contenu un principe, ou, ce qui revient au mme, une totalit substantielle, immdiatement saisie en un acte dintuition intellectuelle, nen interdit pas proprement parler le dveloppement, mais tend cependant, en accordant celui-ci une importance secondaire, le rduire un simple formalisme, dnu de toute vritable effectivit : Il importe encore de [savoir] si cet intuitionner intellectuel ne retombe pas dans la simplicit inerte, et [s]il ne prsente pas leffectivit elle-mme dune manire ineffective 44. Autrement dit, Schelling a bien conu la raison comme raison absolue, mais, en en faisant un donn originaire, antrieur tout dveloppement discursif, na-t-il pas oubli, prcisment, que cette absoluit ne peut se rvler que parce quelle est conue ? Ou encore, na-t-il pas oubli que lunit de la subjectivit et de lobjectivit ne peut se montrer comme unit et comme unit absolue qu la condition de se rapporter la diffrence dont elle est la ngation ?45 Et cet oubli ne suffi t-il pas indiquer que la raison, irrductible une totalit substantielle et immdiate, est concevoir comme un pur procs discursif, cest--dire comme la pure ngativit , ou le pur rapport soi de la ngation, quest un savoir dont leffectivit, loin de dcouler de quelque principe immdiat, se confond au contraire avec le procs de mdiation infi nie quexprime le dveloppement systmatique ?46

    44. W, III, 22 ; trad. cit. p. 81.45. Cf. W, III, 40 ; trad. cit. p. 99 o Hegel rappelle que Lexpression de lunit du sujet et de

    [l]objet, du fi ni et de [l]infi ni, de ltre et [du] penser, etc., a cet aspect impropre que objet et sujet, etc., signifi ent ce quils sont en dehors de leur unit .

    46. Cf. W, III, 22 ; trad. cit. pp. 81-82. Les deux prcisions fournies dans ce passage : cette intel-lection doit se justifi er par la prsentation du systme lui-mme et la substance vivante est [] ltre qui [est] en vrit sujet en tant que la pure ngativit simple [], le ddouble-ment du simple, ou le redoublement op-posant, qui est nouveau la ngation de cette diversit indiffrente et de son opposition visent manifestement souligner que le vrai, conu comme sujet, est concevoir comme pure ngativit, dnue de toute positivit substantielle . En ce sens, le vrai nest rien dautre que le procs de la ralit fi nie, telle que la rvle dans son effec-tivit concrte le mouvement infi ni du discours, dont la substantialit ( saisir le vrai tout autant comme sujet (soulign par nous) - ) renvoie simplement sa capacit se fonder et se comprendre lui-mme. De ce point de vue, il ne sagit, ni dopposer le sujet la substance, ni de concevoir le vrai comme leur synthse extrieure (cf. par exemple D. Ptzold, Spinoza-Aufklrung-Idalismus :die Substanz der Moderne, Frankfurt a. M., Lang, 1995, qui parle p. 195 note 86 dune Spinoza-Fichte Synthese ), ni de remdier la dfi cience ontologique de la

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    Il parat clair, en tout cas, que les critiques que le texte rassemble sous le grief de formalisme le fait de produire une science inaccomplie, qui nest quune science mort-ne, voue rpter inlassablement son commencement, le fait de dployer une rfl exion extrieure incapable de se confronter la ralit concrte pour en saisir le mouvement vivant renvoient toutes la contradic-tion quest la prsence, au fond de la pense schellingienne, dune conception non-spculative du spculatif, qui ne comprend pas que lidentit nest identit absolue que parce quelle est absolue ngativit, ou, ce qui revient au mme, absolue diffrence ou absolue contradiction : Schelling a certes eu le mrite de vouloir en fi nir avec tout dualisme, mais en subordonnant le concept lintui-tion, en traitant la mdiation discursive comme un aspect inessentiel au regard de lintuition immdiate de labsolu, il ne fait quintroduire une autre forme de dualisme, qui, en interdisant au discours de reconnatre dans le fi ni le lieu o se donne voir concrtement linfi ni, lui interdit aussi de se dployer comme le procs de cohrence en et par lequel tout fi ni peut rvler ce quil recle, en sa fi nit mme, dinfi ni et de rationnel. En ce sens, le formalisme nest pas ici la consquence dune valorisation excessive de la forme, mais, paradoxalement, celle de sa dvalorisation : Schelling affi rme certes que la forme est identique lessence ; et il ne cesse de rpter, en insistant sur lidentit de labsolu et du savoir de labsolu, que limportance de la forme est gale celle de lessence,47 mais la ralit de sa philosophie ne contredit-elle pas toutes ces proclamations ? Ne rvle-t-elle pas au contraire que le discours ny est quun moyen, charg dexpliciter un contenu absolu dont la vrit est donne demble, dans limm-diatet dune intuition intellectuelle ? Si lon dclare que la forme est gale lessence, cest justement pour cela un malentendu que dopiner que le connatre pourrait se contenter de len-soi ou de lessence et faire lconomie de la forme ; que laxiome absolu ou lintuition absolue rendrait superfl us lexcution du

    substance en la pensant comme sujet, et en passant ainsi dune mtaphysique de la substance une mtaphysique de la subjectivit absolue , comme semblent le soutenir, ou le prsup-poser, en des sens diffrents, des interprtations comme celles de K. Dsing, Das Problem der Subjektivitt in Hegels Logik, Bonn, Bouvier, 1995, D. Henrich, Andersheit und Absolutheit des Geistes. Sieben Schritte auf dem Wege von Schelling zu Hegel in Selbstverhltnisse, Stuttgart, Reclam, 1982, J. F. Marquet, article cit, ou encore B. Bourgeois (cf. par exemple la note 4 p. 450 de sa traduction de la Science de la logique de lEncyclopdie, op. cit. qui voque le monisme hglien, en disant qu il est, non pas (tel le monisme spinoziste) un monisme de la substance [] mais un monisme du sujet . Sur le monisme hglien, voir G. Jarczyk, Monisme oui, monisme non, in G. Jarczyk, P. J. Labarrire, Hegeliana, Paris, PUF, 1986. Pour une critique des interprtations ontologisantes de Hegel, voir par exemple H. F. Fulda, Die Ontologie und ihr Schicksal in der Philosophie Hegels. Kantkritik in Fortsetzung kantischer Gedanken, in Hegel critique de Kant, Revue internationale de philosophie, n 4, 1999, pp. 465-483.

    47. Fernere Darstellungen in SW I, 4, 404 ; voir aussi Darstellung in SW I, 4, 121 ; trad. cit. p. 55.

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  • La critique du formalisme dans la Prface de la Phnomnologie de lEsprit

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    premier ou le dveloppement de lautre. Prcisment parce que la forme est aussi essentielle lessence quelle soi-mme, elle [= lessence] nest pas saisir et exprimer simplement comme essence, i.e. comme substance immdiate, ou comme auto-intuition pure du divin, mais tout aussi bien comme forme, et dans toute la richesse de la forme dveloppe ; cest par l qualors seulement elle se trouve saisie et exprime comme [quelque chose d]effectif. 48

    A quoi tient, cependant, cette dvaluation de la forme ? Celle-ci se traduit, on la vu, par une dvitalisation qui, en tant la forme la richesse qui fait delle une forme rationnelle ou conceptuelle, la transforme en un schma vide et abstrait. Or do vient une telle rduction ? Elle repose sur une opration qui consiste ramener toute diffrence qualitative une diffrence quantitative, juge seule capable dexprimer lindiffrence absolue, sans confrer au fi ni une subsistance par soi qui, en le sparant de linfi ni, en briserait lunit. Ds lors, ne peut-on en conclure que le problme tient, pour lessentiel, au rle que joue ici la rfrence la quantit et aux mathmatiques en gnral ? Cest ce que semble indiquer la Prface, lorsquelle prsente le connatre mathmatique comme le rgne dun formalisme, extrieur la chose , qui substitue la saisie de son effectivit vivante un ensemble de constructions arbitraires et artifi cielles ; mais, si cette critique vise bien lindigence de la mathmatique ordinaire 49, voue traiter exclusivement de ces matriaux inertes que sont lespace mort et l un pareillement mort , et si elle suggre par l mme que les emprunts de la philosophie de Schelling des concepts ou des modles mathmatiques sont autant de signes de la carence spculative de sa philoso-phie50, elle ne va pas cependant jusqu faire de ce mathmatisme lorigine dune telle carence. Lorsquil reprend le thme schellingien selon lequel lnonc tous les animaux ne suffi t pas faire une zoologie, en linversant, pour lui faire signifi er que le commencement, le principe ou labsolu, tel que dabord et immdiatement il se trouve nonc, est seulement luniversel 51,

    48. W, III, 24 ; trad. cit. pp. 82-83.49. La Prface parle de la mathmatique en gnral, sans distinguer la mathmatique ordinaire

    (W, IX, 52 ; trad. fr. B. Bourgeois (modifi e), Encyclopdie des sciences philosophiques II Philosophie de la nature, ed. de 1827 et 1830 259 Remarque, Paris, Vrin, 2004, p. 199), dpourvue de toute porte spculative, de la mathmatique de linfi ni, qui possde, elle, une dimension conceptuelle, mais la distinction correspond ce que suggre le texte de 1807, lorsquil dit (W, III, 45 ; trad. cit. p. 103) que l o elle compare la diagonale du cercle avec la circonfrence [la mathmatique] bute contre lincommensurabilit de cette mme circonf-rence, i.e. une relation du concept, un infi ni, qui chappe sa dtermination .

    50. W, III, 43-45 et 47 ; trad. cit. pp. 102-103 et 106.51. W, III, 24 ; trad. cit. p. 83. A vrai dire Schelling avait voqu dans les Fernere Darstellungen

    (SW I, 4, 362) lanatomiste qui croit voir immdiatement la plante ou lorganisme ani-mal en les dissquant, alors quil naperoit que la chose particulire, quil appelle plante

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  • Jean-Michel Bue174

    lorsquil souligne que le sujet du jugement, pris pour soi comme un sujet fi xe, nest quun son dpourvu de sens 52, Hegel semble aller dans une tout autre direction, qui fait du substantialisme schellingien la consquence dune conception rductrice du discours, incapable denvisager celui-ci sous un autre angle que celui de la prdication et du jugement. Que montre en effet lanalyse de la proposition prdicative dveloppe la fi n de la Prface ? Hegel entend certes y mettre en vidence lincapacit du jugement exprimer le vrai ; do la critique dune structure o la diffrence, bien qunonce, ne joue quun rle inessentiel qui incite se reprsenter le sujet comme un substrat fi xe, dont lessence serait immdiatement saisie hors du procs qui, en le rapportant un autre, est pourtant ce qui lui permet de se poser et de se saisir comme sujet53. Mais il entend aussi souligner que cet obstacle ne peut tre surmont qu la condition de mettre en uvre une autre attitude que celle qui se contente dcarter le problme en renvoyant lapprhension de ce qui excde la structure du jugement un intuitionner intrieur 54. Or cette attitude ne correspond-elle pas, fondamentalement, celle quadopte la Darstellung de Schelling lorsque, prsupposant que la diffrence implique par la structure prdicative nest rien en soi , elle affi rme que lidentit absolue, envisage comme un lien qui vaut indpendamment des termes quil relie, est concevoir comme une identit de lidentit (A=A) 55 ? A lvidence, Schelling a peru lui aussi les limites de la proposition prdicative. Mais il croit les surmonter en subordonnant le concept, toujours souponn de transformer en diffrence qualitative ce qui est et doit rester une diffrence quantitative, lintuition, seule capable selon lui dapprhender labsolu en sa plnitude. Nest-ce pas l reproduire, sur un autre mode, la structure dont on cherche dnoncer linsuffi sance, en rintroduisant une scission entre une substance une et des dterminations qui nen seraient que des dterminations accidentelles 56 ? Et surtout, nest-ce pas riger en

    ou corps . Propos auquel le dbut de la Prface semble faire allusion, en en inversant le sens, lorsquil dclare (W, III, 10 ; trad. cit. p. 68). que la reprsentation universelle de lanatomie ne suffi t pas possder la Chose mme , mais exige de devoir se proccuper du particu-lier . Cest le mme thme que dveloppe la remarque sur les animaux et la zoologie. Cf. F. Fischbach, op. cit. p. 216.

    52. W, III, 26 ; trad. cit. p. 85.53. W, III, 57 ; trad. cit. p. 118.54. W, III, 61 ; trad. cit. p. 122.55. SW I, 4, 121, trad. cit. pp. 54-55. Cf. aussi Fernere Darstellungen I, 4, 412. ( Labsolue

    inessentialit des opposs dans la forme sexprime dj parfaitement dans la proposition de lidentit, A=A ).

    56. Sur ce point, comparer la Prface, W, III, 57 ; trad. cit. p. 118 et W, III, 587 ; trad. cit. p. 689, o la phrase la substance pour soi seule serait lintuitionner vide de contenu, ou lintuitionner dun contenu qui, comme [contenu] dtermin naurait que [l]accidentalit vise lvidence Schelling.

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  • La critique du formalisme dans la Prface de la Phnomnologie de lEsprit

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    absolu cette structure prdicative elle-mme, sans percevoir que le discours, capable de prsenter les limites de la proposition ordinaire et de les dpasser, est essentiellement un discours spculatif, o le vrai, conu comme sujet , nest rien dautre que la marche sengendrant elle-mme, se dveloppant et revenant soi quest son propre mouvement dialectique 57 ?

    En dautres termes, cette conception du discours qui nenvisage la sursomption de ses limites que comme une sursomption immdiate 58 reste une conception dogmatique, au sens o le dogmatisme de la faon de penser dans le savoir et dans ltude de la philosophie nest rien dautre que lopinion selon laquelle le vrai subsiste dans une proposition qui [est] un rsultat fi xe ou que lon sait aussi de faon immdiate59. Mais, si tel est le cas, si le formalisme schellingien a pour source la prsence de ce rsidu dogmatique au sein mme dune conception de la raison qui en est une conception spculative, ne peut-on dire que dans la philosophie de Schelling sexprime une diffi cult qui, en son fond, nest rien dautre que celle que ne cesse de rencontrer la Phnomnologie elle-mme, sous la forme de loubli qui amne la conscience, en chacun des nouveaux parcours dexprience en lesquels elle sengage, riger en certitude immdiate ce qui est en ralit le rsultat du chemin quelle a parcouru60 ? Et, en ce sens, ne peut-on parler dune homologie structurelle entre cette rsurgence de limmdiatet au cur dun savoir qui semble en tre la sursomption, et la persistance, dans la section Religion et dans ses fi gures, dune saisie de labsolu qui en reste une saisie reprsentative61 ?

    57. Comme le rapporte Rosenkranz, op. cit. p. 322, Hegel reproche au fond Schelling de ne pas laborer une Science de la logique : Schelling met en place lide spculative, dune faon tout fait gnrale, sans quelle soit elle-mme lobjet daucun dveloppement, et il passe aus-sitt la fi gure quelle a en tant que philosophie de la nature . cf. aussi sur ce point W, III, 21 ; trad. cit. p. 80 qui affi rme que le formalisme [] ne disparatra pas de la science [] jusqu ce que le connatre de leffectivit absolue soit parfaitement venu au clair sur sa nature et W, III, 25 ; trad. cit. p. 83-84 qui lie lhorreur de la mdiation labsence de familiarit avec la nature de la mdiation et du connatre absolu lui-mme .

    58. W, III, 61 ; trad. cit. p. 100. 59. W, III, 41 ; trad. citp. 100. Sur le dogmatisme schellingien, interprt comme un retour

    en de du criticisme kantien , cf. A. Simhon, La Prface de la Phnomnologie de lesprit de Hegel. De la Prface de 1807 aux Recherches de 1809, Bruxelles, Ousia, 2003, p. 78.

    60. Sur cette rsurgence constante de limmdiatet, cf. par exemple pour lautoconscience W, III, 137-138 ; trad. cit. pp. 208-209, pour la raison W, III, 180 ; trad. cit. pp. 254-255 ; par ailleurs lintroduction la section religion (W, III, 498 ; trad. cit. p. 586) parle de lesprit [entendu] comme lesprit immdiat qui nest pas encore la conscience de lesprit ; pour la religion elle-mme, voir infra. Sur limmdiatet quengendre loubli du devenir antrieur, tant dans lhistoire de la conscience que dans celle de lesprit-du-monde, cf. aussi W, III, 590 sq. ; trad. cit. p. 694.

    61. La reprsentation ne peut certes se confondre avec lintuition, mais elle en conserve limmdia-tet. Cf. W, III, 33-34 ; trad. cit. pp.92 sq. En outre, le dernier chapitre de la Phnomnologie

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    On peut rappeler en effet que lautoconscience de lEsprit quest la Religion nat au mme titre que lautoconscience du dbut de la Phnomnologie dune lecture du parcours antrieur qui, en en sparant le rsultat de son devenir, trans-forme ce rsultat en un savoir immdiat : cest parce quil rifi e son infi nit, telle que la rvle concrtement le procs de reconnaissance mutuelle advenu dans la fi gure du mal et de son pardon , que lEsprit en vient se saisir comme un Esprit religieux, spar de sa vie dans son monde effectif ; et quil peut sattribuer ainsi une intriorit et une transparence soi qui font de ses fi gures une apprhension extrieure reprsentative de linfi nit qui sy montre, y compris l o, comme dans la religion manifeste, cette infi nit est une infi nit proprement spirituelle62. Cest en tout cas en ce sens que la Prface dclare,

    semble pouvoir autoriser cette homologie , dans la mesure o il ne cesse de lier le problme de la sursomption de la forme reprsentative de la religion celui de la sursomption dune saisie substantialiste de lEsprit absolu. Cf. par exemple W, III, 583-585 ; trad. cit. pp. 684-687. De ce point de vue, Schelling, accus, comme on la vu, de ne pas avoir su donner au discours philosophique sa forme adquate do son formalisme , produit certes une apprhension de labsolu dont le contenu est plus abstrait, ou plus pauvre, que ne lest celui de la reprsentation de la Trinit et de son effectuation dans la vie de la communaut chrtienne ; mais ce contenu absolu est saisi sur un mode impliquant une scission de lintrieur et de lextrieur qui est celui l mme en lequel se montre linsuffi sance de la forme religieuse. En dautres termes, l homo-logie dont nous parlons nimplique pas que Schelling serait demeur en quelque sorte trop chrtien ; elle signifi e simplement que le christianisme laisse subsister une diffi cult, dont le systme de Schelling apparat comme lexpression historique la plus signifi cative sur le plan proprement spculatif. Cf. sur ce point le paralllisme que tente dtablir la fi n du dernier chapitre entre la sursomption de la forme religieuse et le travail que lesprit a accompli comme histoire effective , cest--dire ici comme histoire de la philosophie, paralllisme qui se conclut par une vocation de la philosophie de Fichte, prsente comme prisonnire dun substantialisme , dont le texte met en vidence linsuffi sance en faisant manifestement allu-sion la philosophie de Schelling. Cf. W, III, 585-588 ; trad. cit. pp. 687-691. Cf. ce propos P. J. Labarrire, Structures et mouvement dialectique dans la Phnomnologie de lEsprit de Hegel, Paris, Aubier, 1968, pp. 227-230.

    62. Le texte semble suggrer une telle rifi cation par la faon mme dont il prsente le terme Dieu comme identique au oui qui rconcilie (W, III, 494 ; trad. cit. pp. 580-581), lequel avait t dsign plus haut comme lesprit tant-l qui intuitionne (soulign par nous) le pur savoir de soi-mme comme essence universelle dans son contraire (W, III, 492 ; trad. cit. p. 579.). Le Dieu de la fi n de la section Esprit semble ainsi correspondre une scission, opre par un savoir immdiat ou intuitif entre le moyen-terme et ce dont il est la mdiation (les deux Je qui se savent comme le pur savoir (W, III, 494 ; trad. cit. p. 581). De ce point de vue, la sparation de la conscience et de lautoconscience de lEsprit explicite dans lintroduction la section Religion (W, III, 497 ; trad. cit. p. 585) semble rsulter de cette scission, qui, sparant le moyen-terme des extrmes quil unifi e, spare en mme temps le rsultat du procs (le savoir de soi de labsoluit de lEsprit) du procs effectif dont il est le rsultat, cest dire le procs de la reconnaissance mutuelle des deux Je auquel conduit le dveloppement de lensemble des fi gures de la section Esprit. En outre, lintroduction la Religion insiste sur le fait que cette sparation se traduit par une intriorit et une transparence soi du savoir religieux qui sont lorigine de lextriorit qui fait de lui un savoir reprsentatif (ibid.) ; elle souligne galement que cette intriorit-extriorit est ce qui empche la religion de se rapporter leffectivit comme une effectivit libre ( W, III, 496-498 et 501 ; trad. cit. pp. 585-586 et 591), au

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    dans des termes qui pourraient sappliquer mutatis mutandis la philosophie de Schelling, que la religion du temps moderne autrement dit le christianisme saisit bien labsolu comme esprit mais sur le mode dune substance spiri-tuelle qui, ntant esprit que pour nous ou en soi , doit encore le devenir pour soi, en prcisant cependant que ce pour soi, envisag dans sa fi gure religieuse accomplie, reste encore lui-mme un pour soi seulement pour nous 63. Ce rsidu dogmatique, li la scission de lintrieur et de lextrieur, propre la reprsentation, la Phnomnologie, on le sait, en dcouvre lexpression, sous la forme d une fi gure particulire de la conscience , dans la fi gure de la belle me, o lunit simple du concept est prsente, mais comme un pur rapport soi que son intriorit voue ntre quune apprhension extrieure du concept, lequel, se tenant fermement op-pos sa ralisation et tentant de se main-tenir dans les limites de cette abstraction reprsentative, ne fait ainsi que renier sa propre cohrence64. Or, deux choses semblent ici remarquables : dune part, le dernier chapitre utilise, pour caractriser la belle me, un langage identique celui quutilise la Prface pour caractriser la philosophie de Schelling, en parlant lui aussi dune auto-intuition du divin 65 pour dsigner le fait que lEsprit naffi rme son infi nit quen se refusant au procs de fi nitisation qui, constituant la sursomption de sa substantialit , lui permettrait dacqurir une

    sens o lEsprit absolu de la fi n de la Phnomnologie se sacrifi e , en se rapportant une nature dont laltrit est atteste par sa contingence (W, III, 590 ; trad. cit. p. 693). Cf. aussi le dbut du chapitre sur le savoir absolu, refusant une sursomption unilatrale de la reprsentation, ou de lob-jet de la conscience , qui mnerait un simple retour dans le Soi et ne ferait ainsi que reconduire la structure religieuse (W, III, 575 ; trad. cit. p. 674).

    63. W, III, 28 ; trad. cit. p. 87.64. W, III, 580 ; trad. cit. p. 680. 65. Ibid. Cf. le texte de la Prface in W, III, 24 ; trad. cit. p. 83. Sur cette auto-intuition du

    divin cf. aussi W, III, 481-482 ; trad. cit. p. 566-567 ; on pourrait certes stonner de cette assimilation la pure immdiatet substantielle du comble du subjectivisme, dans laquelle la substance sest dissoute (W, III, 482 ; trad. cit. p. 568) quest la belle me. Mais cette absence mme de substantialit, ou cette pure intriorit, compare celle du Moi absolu de Fichte (W, III, 481 et 587 ; trad. cit. p. 568 et 690) se caractrisent tout autant par une rduction de la pro-cessualit et du dynamisme infi nis du concept une inertie et une clture sur soi, correspondant la dfi nition de la substantialit que propose la Prface, lorsquelle parle du cercle qui repose ferm dans soi et qui comme substance tient ses moments (W , III, 35 ; trad. cit. p.93) ; en ce sens la fi gure de la belle me semble surtout exprimer une saisie du sujet ou du concept, qui demeure dogmatique . Mme si le subjectivisme fi chten, kantien ou romantique en constitue lexemple privilgi, elle correspond aussi, en ce sens, lunila-tralit, pourtant inverse, de la philosophie de Schelling. Aussi Hegel peut-il suggrer que le systme fi chten garde en lui un aspect spinoziste (W, III, 22 et 587 ; trad. cit. pp. 81 et 689) ou encore attribuer Schelling une pense de la vie de Dieu et du connatre divin conus comme un jeu de lamour avec soi-mme , laquelle font dfaut le srieux, la douleur, la patience et [le] travail du ngatif (W, III, 23 ; trad. cit. p. 82), qui pourrait aussi bien valoir pour le subjectivisme abstrait en gnral.

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    vritable effectivit. Dautre part, limpasse laquelle est ainsi accule la belle me, nest surmonte, moyennant son ouverture laction effective, que pour ressurgir sous une autre forme, dans le repli sur soi de la conscience jugeante, et le refus quoppose son universalit abstraite la rconciliation concrte laquelle lengage la conscience agissante66. Si lhomologie que nous voquions possde quelque pertinence, ne peut-on dire que cette rsurgence correspond sur un plan logique ce quest dans la philosophie de Schelling la rsur-gence du dogmatisme au cur dun savoir dont la comprhension spculative semblait en signifi er la sursomption ? Et ne peut-on ajouter quelle est lie au maintien dune scission entre immdiatet et mdiation qui, de mme quelle interdit la conscience jugeante dapercevoir en laction effective le contenu susceptible de remplir sa forme vide, interdit Schelling de reconnatre que seul son dveloppement discursif permet la concrtisation dune intuition de labsolu dont lidentit, prise pour elle-mme, nest quune forme vide ? De plus, la relecture du procs des fi gures remarquables de la conscience67 quopre le dernier chapitre de la Phnomnologie fournit sur ce point une prcision essentielle : Hegel remarque, propos de lentrer en scne du pur savoir non oprant, non effectif, de lessence quest la conscience jugeante, que cette entrer en scne sien dans cette opposition est la participation elle 68. Ce qui revient dire quen se refusant la mdiation pour prserver son immdiatet, la conscience ne fait que se drober une opposition sans laquelle son repli sur soi serait pourtant impossible, puisquelle se soustrairait par l mme au procs dinfi nie cohrence dont cette opposition est le ressort dcisif. Ne peut-on dire, en un sens analogue, que la philosophie de Schelling nlve une prtention immdiate labsolue cohrence que parce quelle se refuse au procs discursif qui en est la condition ? Et que son formalisme traduit un refus dadmettre quil ne saurait exister, aux yeux de la philosophie, dautre ralit que celle qui consiste, pour tout fi ni se montrer tel quil est en vrit, dans le procs infi ni quest la cohrence dveloppe du discours ? Ce refus trouve en tout cas son expression la plus nette dans la question, qui na cess de tourmenter Schelling, du passage de linfi ni au fi ni. Or tel est prcisment le point quvoque, pour en rcuser la pertinence, le chapitre Force et entendement lorsquil dclare que la question de savoir comment de [l]essence pure, comment hors delle vient la diffrence ou ltre-autre est une chose propos de quoi nous navons pas besoin de questionner, moins encore de regarder comme philosophie le

    66. W, III, 490 sq., 578, 581 ; trad. cit. pp. 576 sq., 678, 681.67. W, III, 576 ; trad. cit. p. 674 sq. Sur ce point cf. P. J. Labarrire, op. cit. pp. 191 sq.68. W, III, 581 ; trad. cit. p. 681.

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  • La critique du formalisme dans la Prface de la Phnomnologie de lEsprit

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    tourment dont est charge une telle question, ou mme de tenir que pour elle [= la philosophie] elle ne souffre pas de rponse , car le ddoublement est dj advenu , puisque la diffrence sest trouve exclue de lgal soi-mme, et place ct de lessence pure, en sorte que ce qui devait tre lgal soi-mme est [] dj lun des ddoubls plutt que dtre lessence absolue 69. Autrement dit, le problme que Schelling dclare insoluble, ou quil rsout en lui dniant toute ralit70, est un problme toujours dj rsolu, dans le milieu du discours, o infi ni et fi ni, universel et particulier ne peuvent se rvler absolu-ment un que parce quils sont toujours dj absolument opposs. Ce qui montre simplement que la philosophie peut se librer de toute prsupposition pralable, et se dployer comme savoir spculatif, ds lors quelle se comprend comme un savoir qui nest rien dautre, ni de plus, quun savoir, ou, si lon prfre, un savoir absolu. Cest dailleurs l, nous semble-t-il, ce que dclare le dernier chapitre de la Phnomnologie, lorsque, reprenant le vieil adage selon lequel rien ne se trouve su qui ne soit dans lexprience , il y dcouvre lide que lexprience accomplie, autrement dit la ralisation effective du procs de mdiation ordonn la mise jour de son propre sens quest le procs phnomnologique, permet au savoir qui se sait comme savoir dapercevoir, aprs coup, mais aprs coup seulement, en toute saisie immdiate du vrai, lexpression substantielle , ou si lon prfre rifi e , de son propre procs de cohrence : Il faut que lon dise [] que rien ne se trouve su qui ne soit dans lexprience ou, selon que la mme-chose se trouve aussi exprime, qui ne soit prsent-l comme vrit sentie, comme ternel intrieurement rvl, comme sacr objet-de-foi ou quelque expression que lon utilise par ailleurs. Car lexprience est justement ceci : le contenu et il est lesprit est en soi substance, et donc ob-jet de la conscience. Mais cette substance qui est lesprit est le parvenir de soi ce quil est en soi ; et cest seulement comme ce devenir se rfl chissant dans soi quil est en soi en vrit lesprit. Il est en soi le mouvement quest le connatre, la transfor-mation de cet en soi dans le pour soi, de la substance dans le sujet, de lob-jet de la conscience dans [l] ob-jet de lautoconscience, i.e. dans [un] ob-jet tout aussi bien sursum, ou dans le concept. Il est le cercle faisant retour dans soi, qui prsuppose son commencement et ne latteint quau terme. 71

    69. W, III, 132 ; trad. cit. p. 202.70. Cf. Philosophische Briefe ber Dogmatismus und Kriticismus in SW I, 1, 314 ; trad. fr. J. F.

    Courtine in Premiers crits (1794-1795), Paris, PUF, 1987, p. 185 ; Darstellung in SW I, 4, 120 ; trad. cit. p. 53 ou encore Bruno oder ber das gttliche und natrliche Prinzip der Dinge. Ein Gesprch. in SW, I, 4, 257 sq. ; trad. fr. J. Rivelaygue, Bruno ou Du principe divin et natu-rel des choses, Paris , LHerne, 1987, pp. 88 sq.

    71. W III, 585 ; trad. cit. pp. 686-687. Cf. aussi le texte immdiatement antrieur (W, III, 584 ; trad. cit. p. 686), dans lequel Hegel parle de la ncessit denrichir la participation qua

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    On le voit, la critique du formalisme schellingien quexpose la Prface de la Phnomnologie ne saurait se rduire une polmique purement historique ou purement personnelle. En dernire analyse, le problme pos par une philoso-phie qui contredit sa propre intention spculative en faisant de celle-ci un prin-cipe immdiat, se confond avec celui quentend rsoudre la Phnomnologie elle-mme72, en sursumant toute saisie de lEsprit qui, parce quelle sen veut une saisie immdiate, en reste une saisie dogmatique, moyennant lappropria-tion progressive dune histoire73, dont ce dogmatisme qui en est le produit74 nexprime que le refoulement. De ce point de vue, on comprend quun texte, initialement conu comme une Prface au tout du systme, puis devenu de fait une Prface la Phnomnologie75, ne cesse de faire signe vers une philosophie celle de Schelling dont le dogmatisme rsiduel impose toute pense qui refuse de se satisfaire de labsolu abstrait 76 deffectuer jusquau bout le parcours dexprience dont la Phnomnologie est la prsentation.

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    lautoconscience la conscience, de mettre en mouvement limmdiatet de len- soi-la forme dans laquelle la substance est dans la conscience ou inversement, len-soi [tant] pris comme lintrieur, de raliser et de rvler ce qui est dabord intrieur i. e. de le gagner la certitude de soi-mme ; cf. aussi la caractrisation de lexprience comme mouvement o limm-diat, le non-expriment, i.e. labstrait, que ce soit de ltre sensible ou du simple seulement pens, saline, et ensuite fait retour soi partir de cette alination (W , III, 38-39 ; trad. cit. p. 97).

    72. A cet gard, le texte de 1807 ralise le programme que Hegel exposait dans un projet de lettre Voss o il crivait propos de son futur systme de la philosophie : il doit ressortir au moins ceci : cest que je moppose lerreur du formalisme qui, avec un schmatisme inutile la science, ne sert qu dissimuler lignorance, briller aux yeux des ignorants et ne rien dire de la Chose mme Briefe I, 55 ; trad. cit.( modifi e) p. 94.

    73. W, III, 31 sq. ; trad. cit. pp. 89-90.74. Cf. W, III, 19 ; trad. cit. p. 76.75. On sait que la Prface, rdige en Janvier 1807, aprs le texte de la Phnomnologie, tait ini-

    tialement conue comme une Prface lensemble du systme de la science, dont la science de lexprience de la conscience , rebaptise Phnomnologie de lEsprit devait tre la premire partie. Sur ce point, voir P. J. Labarrire, op. cit, p. 25 sq. et Introduction une lecture de la Phnomnologie de lEsprit, Paris, Aubier, 1979, p.52.

    76. Dans un fragment de 1831, destin orienter la rvision de la Phnomnologie, dont il pro-jette une nouvelle dition, Hegel note propos de la Prface : labsolu abstrait dominait alors . Cf. sur ce point G. Jarczyk, P. J. Labarrire, Prsentation de leur traduction de la Phnomnologie de lEsprit, pp. 37 sq.

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