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Diarrhée Motrice
Marie Lequoy DES 13 décembre 2008
Introduction Diarrhée due à une accélération du transit
intestinal (ATI) ou diarrhée motrice (DM) concept typiquement français travaux de coprologie fonctionnelle de R.
Ggoiffon [1]. AIT au cours de diarrhées chroniques
indéniable ATI cause ou conséquence de
l'augmentation du flux intraluminal que traduit la diarrhée? Difficile à démontrer
Physiopathologie Lien entre l’ATI et la diarrhée
relation inverse entre le temps de transit (TT) oro-anal (et donc le temps de contact avec la muqueuse intestinale) et le poids des selles de 24 h
Impossible de prouver que la diminution du temps de transit est responsable de la diarrhée
les accélérateurs de transit peuvent agir sur le transport intestinal par d'autres mécanismes, osmotiques et sécrétoires [2].
l'augmentation de l'activité contractile segmentaire et des mouvements villositaires favorise le brassage du chyme, diminue l'épaisseur de la couche d'eau non agitée favorise donc l'absorption [2]: pas de malabsorption dans
les DM
Physiopathologie ATI conséquence de l'augmentation du
flux intraluminal Perfusion de solution électrolytique dans
jéjunum: augmentation compensatrice du calibre de l'intestin
limitée donc ATI
Action antisécrétoire associée à l’action motrice des frénateurs du transit
Physiopathologie ATI cause de l'augmentation du flux intraluminal
Événements moteurs intestinaux: augmentation de la différence de potentiel trans-
muqueuse traduction probable d'une sécrétion ionique
Faible augmentation du poids de selle dans les DM Pas d’anomalie du transport hydro-ionique en
l’absence de diarrhée de cause connue en cas de perfusions de solutions électrolytiques
la codéine et le lopéramide n'augmentent l'absorption hydro-ionique que par leur effet moteur.(Fordtran)
Profils moteurs Colon: Rôle majeur
ATI colique constante dans la DM Durée du transit dans le côlon normal 10 fois
supérieure à celle du transit du grêle [2]. Electromyographie pancolique des 24h:
anomalies phasiques très particulières : nette augmentation en durée et intensité de
la réponse motrice colique à l'alimentation (" long spike bursts " ou LSB non propagés et propagés ou MLSB fortement propulsifs), accompagnée d'une activité MLSB nocturne inhabituelle [13]
disparition des " short spike bursts " ou SSB et des MLSB rétrogrades rectosigmoïdiens, freinateurs du transit [13].
Profils moteurs Manométrie colique des 24h et scintigraphie
coliques couplées chez sujets souffrant d'une diarrhée dite fonctionnelle: marqueur radioactif injecté en bolus à l'angle
gauche disparaît du transverse et du sigmoïde dans les 100 minutes suivant un repas
Pas d’augmentation post prandiale de l'index moteur, mais augmentation des contractions propagées (HAPC) [15].
Intestin grêle: rôle mineur ATI du grêle constante dans les DM mais ne peut
expliquer seule la diarrhée
Diagnostic positif Examen Clinique
Nombre élevé d'émissions contrastant avec un volume fécal quotidien modéré (<500g).
Horaire matinal et post-prandial précoce des selles. Caractère souvent impérieux, parfois précédé par
des coliques douloureuses. Présence dans les selles de débris végétaux. Efficacité des ralentisseurs du transit. Pas de déshydratation ni de trouble
hydroélectrolytique ou acidobasique Absence de retentissement sur l'état général et
l’appétit. Influence du stress
Diagnostic positif Examens complémentaires
Test au rouge carmin: TACS* < 6h +++ (TACS : Temps d’apparition du carmin dans les selles)
Fécalogramme : poids < 400 g/jour stéatorrhée d'entraînement < 12 g /jour
EPS et coproculture négatifs (inutile en pratique)
Pas de syndrome carentiel
Diagnostic différentiel Syndrome rectal (ténesme, impériosité, selles afécales) Diarrhée osmotique
involontaire (intolérance au lactose, consommation excessive de fructose, de sucre-alcools, d'oligofructosaccharides)
Cachée: laxatifs osmotiques : ATI secondaire à l'augmentation du flux intra-luminal avec grandes ondes propulsives coliques.
Diarrhées volumogéniques: ex: syndrome de Zollinger-Ellison
Diarrhées sécrétoires: ex colites microscopiques, (par malabsorption iléale des sels biliaires, fonctionnelle ou par atrophie villositaire)
CAUSES DIGESTIVES CAUSES ENDOCRINIENNES
DYSAUTONOMIE IDIOPATHIQUE ( >80% cas)
Cholécystectomie Hyperthyroïdie Vagotomie tronculaire
Colopathie fonctionnelle
Gastrectomies partielle et totale
Cancer médullaire de la thyroïde
Bloc coeliaque
Interventions de drainage gastrique
Syndrome carcinoïde Médicaments
Résections iléales - Courtes (sels biliaires) - Longues (acides gras)
Affections médullo-encéphalique syndrome de Shy Drager (Parkinson, tabès dorsolombaire)
Maladies iléales -Maladie de Crohn -iléite et ilécolite radique -Atrophie villositaire iléale primitive -Fistule et court circuit intestinaux
Polyneuropathie - Diabète - Amylose - Alcoolocarentielle - Insuffisance rénale - Déficit en héxosaminidase - Neuropathie autonome chronique familiale
Diagnostic Étiologique
Causes digestives Reconnues par l'anamnèse, l'iléo-coloscopie avec
biopsies et le transit baryté du grèle Gastrectomie Résections iléales
Malabsorption des sels biliaires (résections < 80 cm) test d’absorption au Se HCAT
Malabsorption des graisses (résections > 80 cm) diarrhée d'origine colique mixte: motrice et
sécrétoire [5]. Résections étendues du grêle,
réduction de la surface absorbante disparition des freins physiologiques [5].
Les iléopathies: diarrhée choléréique parfois isolée Colites inflammatoires chroniques,
ATI par mouvements de masse du côlon Exsudation [4].
Causes digestives
Cholécystectomie: DM avec malabsorption des sels biliaires. Etude de Fort à Barcelone 1996 [14]
Cholécystectomie donne DM par ATI colique Séquelle survenant tôt en post op (1 mois) et
persistant au moins 4 ans après cholécystectomie À 1 mois: temps transit colique: 51 +/- 5h vs 38h +/-
5h après chirurgie À 4 ans: 40 +/- 4h vs 105 +/- 8 minutes en post op
Causes endocriniennes Hyperthyroïdie
Diarrhée 40 à 70 % des cas [6]. Au cours crise aiguë thyrotoxique = signe de gravité. Peut alterner avec une constipation, peut être au premier
plan du tableau clinique et révéler la maladie [6]. Stéatorrhée parfois massive (qui peut se voir sans pertes
hydriques concomitantes) en partie liée à une augmentation des ingesta [7].
Amaigrissement contrastant avec polyphagie Dosage de la TSH +/- T3 T4, scintigraphie thyroïdienne L'hypersécrétion hormonale est directement responsable
de la diarrhée.
Causes endocriniennes Cancer médullaire de la thyroïde
Rare se développe à partir des cellules C, sporadique ou familial et dans ce cas, soit isolément, soit
dans le cadre d'une néoplasie endocrine multiple de type IIa (syndrome de Sipple) ou IIb.
Diarrhée dans 28 à 42 % [6], fréquence diminue car diagnostic plus précoce de la maladie.
Survenue de la diarrhée est corrélée à la masse tumorale, atteignant 42 % en présence de métastases contre 18 % en leur absence [6]. Palpation de la tumeur
Peut être révélatrice, parfois associée à des flushes. Dosage de la Thyrocalcitonine plasmatique, toujours
élevée au stade de DM.
Causes endocriniennes Syndrome carcinoïde
La DM = symptôme permanent le plus fréquent au cours du syndrome carcinoïde.
+/- stéatorrhée associée [8]. Recherche des autres éléments du syndrome
carcinoïde: flushes ( mais diarrhée isolée dans 15 % des cas).
Palpation du foie à la recherche de métastases (simple palpation peut déclencher un flush)
Dosage de l'acide 5-hydroxy-indol-acétique urinaire (5-HIAA) augmentation quasiment constante.
De faibles augmentations isolées de la sérotonine circulante sont sans valeur.
La sérotonine est le principal agent responsable de la DM, peut-être en synergie avec d'autres médiateurs humoraux [8].
Syndrome dysautonomique Cause fréquente souvent méconnue Diabète de type 1, ancien et mal équilibré: cause la plus fréquente. Recherche autres dysautonomie digestive
troubles moteurs oesophagiens reflux gastro-sophagien gastroparésie (scintigraphie gastrique) incontinence fécale (manométrie anorectale) [9].
Recherche signes de dysautonomie extradigestive néphropathie, recherche protéinurie cystopathie, apnées du sommeil, difficultés sexuelles, hyper - ou au contraire hyposudation [10] la tachycardie de repos, l'hypotension orthostatique sans accélération supplémentaire du
pouls, un myosis ou un syndrome de Claude Bernard-Horner.)
Dysautonomies Le lopéramide et au besoin la codéine efficace si forme
mineure Vagotomies tronculaires DM durable et invalidante
dans 3 % des cas. Bloc coeliaque: DM en règle transitoires. Les médicaments
Les sénnosides libérateurs de prostaglandine [11] et les prostaglandines [12] :effet propulsif puissant sur le côlon et faible action directe sur le transport hydro-ionique [12].
L'érythromycine i.v. a un effet prokinétique sur le grêle, discret sur le côlon.
Traitement Traitement étiologique si possible Les freinateurs du transit intestinal utilisés
sont surtout le lopéramide et la codéine Le lopéramide doit être pris à heures fixes
pour éviter la diarrhée et pas en fonction du nombre de selles comme on le fait pour une diarrhée aiguë.
Posologie 12mg/24h
Stratégie Si la cause de la diarrhée est déjà connue ou évidente,
il faut déterminer la part de l'ATI (souvent plurifactorielle).
Si l'étiologie n'est pas connue, un examen clinique minutieux la révèle souvent.
Indication à une iléo-coloscopie et à une endoscopie haute avec biopsies systématiques ou dirigées devant toute diarrhée chronique restée inexpliquée après l'examen clinique et les explorations biologiques de routine car indispensables au diagnostic différentiel. (ex: colites microscopiques dont le diagnostic est histologique)
La recherche de dysautonomie peut être fructueuse. TSH, 5-HIAA si contexte évocateur
Stratégie Si tout est négatif,
Cas le plus fréquent +++ traitement d'épreuve au lopéramide à dose
suffisante (12 mg/24h) Si efficace: confirme le diagnostic de TFI Si inefficace: chercher les causes de
diarrhées de mécanisme mixte (motrices et soit sécrétoires, soit osmotiques, soit encore volumogéniques). Prise clandestine de laxatifs ++
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