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Danielle DEBORDEAUX Cet article n est pas le résultat d'une recherche systématique des travaux des plus intéressants faits à l'étranger en matière de mesure de la pauvreté. Il n'est que le reflet de quelques contacts que nous avons pu établir avec certaines équipes. Il nous semble que ces travaux méritent d ëtre mieux connus qu'ils ne le sont en France et qu'ils pourraient éclairer utilement nos réflexions. (1) B.S. Rowntree - Poverty : a study of town life - Londres - Mac Mill an 1901. B.S. Rowntree et G.R. Lavera - Poverty and the welfare state - Londres - Longmans, Green and co 1951. ' Beaucoup des recherches ont été conduites ou sont en cours de réalisation à l'étranger pour définir des seuils de pauvreté avec pour objectif de mesurer la pauvreté. Plusieurs séminaires colloques ont été organisés récem- ment sur la pauvreté où ce thème a été abordé. Nous n'avons pas la prétention de faire le bilan de tous les systèmes existants mais simplement d'en évoquer quelques uns illustratifs de trois des approches que nous suggérons de développer. 1 -approche de la pauvreté absolue au travers de l'exemple américain et allemand 2- approche en terme de condi- tions de vie · 3- approche subjective de la pauvreté. Elles sont, semble-t-il , assez peu répandues. Nous en évoquerons deux, après avoir rappelé les premiers travaux de Rowntree en 22 Grande-Bretagne : l'approche américaine et l'approche alle- mande. 11) Les travaux de Rowntree Rappelons que c'est B.S. Rowntree (1) qui a développé ce type d'approche au début du siècle en Angleterre. Il estimait que pouvaient être considérés comme pauvres ceux dont les revenus totaux sont insuffisants pour obtenir les biens essentiels qui permettent le maintien d'une santé purement physique. Il s'est servi des travaux des nutritionnistes qui avaient établi des niveaux d'éléments nutritifs indispensables pour des personnes de différents âges (en particulier ceux de W.O. Atwater, un nutritionniste américain et du Dr Dunlop qui avait expéri- mentés des régimes alimentaires pour les prisonniers en Ecosse susceptibles de maintenir leur poids). Il traduisit ces besoins en quantité de nourriture et calcula leur coût en se basant sur les prix les plus bas du marché. Il ajouta à ces coûts des "sommes minimum" pour couvrir les dépenses de RECHERCHES ET PREVISIONS n"14- 15

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Danielle DEBORDEAUX

Cet article n est pas le résultat d'une recherche systématique des travaux des plus intéressants faits à l'étranger en matière de mesure de la pauvreté. Il n'est que le reflet de quelques contacts que nous avons pu établir avec certaines équipes. Il nous semble que ces travaux méritent d ëtre mieux connus qu'ils ne le sont en France et qu'ils pourraient éclairer utilement nos réflexions.

(1) B.S. Rowntree - Poverty : a study of town life -Londres - Mac Mill an 1901. B.S. Rowntree et G.R. Lavera - Poverty and the welfare state - Londres -Longmans, Green and co 1951. '

Beaucoup des recherches ont été conduites ou sont en cours de réalisation à l'étranger pour définir des seuils de pauvreté avec pour objectif de mesurer la pauvreté. Plusieurs séminaires colloques ont été organisés récem­ment sur la pauvreté où ce thème a été abordé. Nous n'avons pas la prétention de faire le bilan de tous les systèmes existants mais simplement d'en évoquer quelques uns illustratifs de trois des approches que nous suggérons de développer. 1 -approche de la pauvreté absolue au travers de l'exemple américain et allemand 2- approche en terme de condi­tions de vie

· 3- approche subjective de la pauvreté. Elles sont, semble-t-il , assez peu répandues. Nous en évoquerons deux, après avoir rappelé les premiers travaux de Rowntree en

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Grande-Bretagne : l'approche américaine et l'approche alle­mande.

11) Les travaux de Rowntree Rappelons que c'est B.S. Rowntree (1) qui a développé ce type d'approche au début du siècle en Angleterre. Il estimait que pouvaient être considérés comme pauvres ceux dont les revenus totaux sont insuffisants pour obtenir les biens essentiels qui permettent le maintien d'une santé purement physique. Il s'est servi des travaux des nutritionnistes qui avaient établi des niveaux d'éléments nutritifs indispensables pour des personnes de différents âges (en particulier ceux de W.O. Atwater, un nutritionniste américain et du Dr Dunlop qui avait expéri­mentés des régimes alimentaires pour les prisonniers en Ecosse susceptibles de maintenir leur poids). Il traduisit ces besoins en quantité de nourriture et calcula leur coût en se basant sur les prix les plus bas du marché. Il ajouta à ces coûts des "sommes minimum" pour couvrir les dépenses de

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vêtements, chauffage, logement. Ces sommes minimum ont été définies en partie sur la base d'enquêtes sur les dépenses des ménages pauvres. Le coût total, variable selon la taille de la famille, correspondait au seuil de pauvreté. Lord Beveridge s'est basé sur les travaux de Rowntree, actualisés par enquête en 1936 et 1950, pour définir le montant de l'indemnité de subsistance. Ces travaux ont eu une influence non seulement en Angleterre (National Assistance Act de 1948 puis création du Supplémentary Bénéfit en 1966) où les taux calculés ont été réactualisés périodiquement en fonction de l'évolution des prix et des salaires mais également dans de nombreux autres pays :Etats­Unis, Canada, Australie, Afrique du Sud, Inde ... Ils ont aussi influencé la notion de "basic needs" développée par les organisations internationales.

12) Seuil de pauvreté absolue aux Etat-Unis: S.S.A. Poverty index (1) Le seuil u.s. a été mis au point en 1964 par l'administration de la Sécurité Sociale en pleine période de guerre contre la pauvreté lancée par le Président Johnson. C'est le même critère physio­logique que celui auquel se référait Rowntree qui a été à la base de l'élaboration du seuil de pauvreté absolu américain. Il a été toutefois dans ce cas davantage tenu compte des comportements budgétaires des ménages. Le principe de son calcul repose sur l'estimation des dépenses alimentaires minimum , seul domaine de la consommation où un consensus est possible (cf. Mollie Orshansky (2) qui a été une des chevilles ouvrières du système).

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a) La 1ère étape a eu pour objectif la fixation du montant des dépenses alimentaires Depuis plus de 30 ans le Départment of Agriculture (D.A.) publiait des "Food Plans" qui traduisent les besoins nutrition­nels définis par le National Resarch Council en quantité et types de nourriture compatibles avec les préférences des familles américaines, telles que les révè­lent les enquêtes de consomma­tion. Chaque plan précise les quantités hebdomadaires de nourriture pour des in di v id us d'âge varié et de sexe différent. Le D.A. publie régulièrement les coûts estimés de ces "Food plans" en considérant que tous les repas sont pris à la maison et préparés avec des aliments achetés dans le commerce de détail. Le D.A. élabore plusieurs "Foods Plan" correspondant à des niveaux de vie différents, dont le lows-cost­plan adapté aux habitudes alimentaires des familles; appar­tenant au tiers le plus bas de l'échelle des revenus. C'est celui qui servait de référence, pendant des années, aux institutions d'assistance pour la distribution de leurs aides. Plus tard en 1961 un "economy food plan" moins cher (75% du low-cost plan) fut mis au point, adapté aux situations dites d'urgence. Le coût retenu pour la mise au point de l'index de pauvreté a été celui correspondant aux prix de janvier 84 du Economy food plan pour un individu isolé.

b) La deuxième étape du processus a consisté à déterminer la part gue représentent les dépenses alimen­taires dans le budget des familles. C'est une enquête de 1955 sur la consommation alimentaire (3) des ménages du D.A. qui a été utilisée.

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( 1) Social Security Adminis­tration. (2) Mollie Orshansky -Cownting the Poor : Ana th er look at the Poverty Profile u.s. Départment of Heath, Education and Welfare - Social Sécurity Bulletin J anuary 1965. (3) Questionnaire très détaillé avec check list des différents types de nourri­ture pour indiquer les quantités consommées pen­dant une semaine.

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(1) Francis Verillaud. La pauvreté aUx Etats-Unis -Revue françaiae des affaires sociales - Janvier mars 1986.

Elle avait permis d'établir que les dépenses alimentaires représen­taient le tiers des ressources du ménage après impôt pour l'ensemble des familles de plus de deux personnes, rurales et urbai­nes (avec des variations sensibles selon la taille, entre 27 et 46 %). Le seuil de pauvreté a été calculé en multipliant par trois le coût de l'Economy food plan pour les différents types de familles. Pour les personnes isolées, le montant des dépenses alimentaires a été estimé à 75% de celui d'un couple de l'Economy food plan. Pour les ménages ruraux les dépenses alimentaires ont été réduites de 40 %, afin de prendre en compte l'autoconsommation (enquête 1955 sur la consommation). Ainsi, il y a autant de seuils de pauvreté que de types de familles définies en fonction de leur taille, de l'âge de l'individu isolé (plus ou moins de 65 ans), de l'âge et du sexe du chef de famille (voir annexe). Le seuil de pauvreté a été révisé en 1969 et 1981 mais l'étalon de mesures n'a été recalculé qu'en 1969. Depuis on se contente de l'indexer sur les prix de détail. Or, comme dans tous les autres pays industrialisés, la part des dépen­ses consacrée au poste alimentaire a tendance à diminuer avec l'augmentation du niveau de vie. Ce seuil constitue toujours le seuil de pauvreté officiel aux Etats­Unis bien qu'il fasse l'objet de nombreuses critiques (sur le niveau des besoins alimentaires fixés; sur la non évaluation des besoins non alimentaires ; sur le coût estimé des produits ; sur la non prise en compte du travail domestique; sur la simple indexa­tion, sur les prix etc.). Les services fédéraux ont rapide­ment mis au point un seuil de pauvreté relative défini en

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référence au seuil de pauvreté absolue. En 1965, on a constaté que le seuil de pauvreté absolue était de 44% inférieur au revenu médian des ménages américains. Le seuil de pauvreté relative a donc été fixé à ce ni veau. Identiques, par définition, en 1965 les deux seuils sont différents aujourd'hui, le seuil de pauvreté relative est 14% au-dessus du seuil de pauvreté absolue. Un point fait pl us parti­culièrement l'objet des criti­ques (1): le revenu pris en compte dans la mesure où les aides en nature qui sont de plus en plus importantes en sont exclues. La seconde critique concerne la prise en compte des impôts : ils sont déduits du revenu pour définir la situation des ménages par rapport au seuil de pauvreté alors qu'ils ne le sont pas pour l'accès aux programmes anti-pauvreté. Enfin on lui reproche de ne pas tenir compte de l'irrégularité des revenus et de son éventuelle sous­estimation etc. Ce seuil absolu de pauvreté ainsi défini est utilisé pour mesurer l'extension de la population pauvre dans les statistiques officielles. Le "Bureau of the census" réalise chaque année une enquête nationale et représenta­tive dont il publie les résultats. En 1984, le taux de pauvreté officiel étaitde 14,4%. La définition du seuil a été légèrement modifiée en 1981 en supprimant les distinctions établies entre ménages ruraux et urbains et entre chef de famille de sexe différent; en créant une catégorie supplémentaire de famille de huit personnes et plus (impact de ces changements en 1980: le taux de pauvreté était de 13,2 % au lieu de 13% avec l'ancienne définition). Le seuil de pauvreté fait par

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ailleurs l'objet d'analyses dyna­miques très intéressantes réali­sées aux Etats-Unis dans le cadre du PSID (Panel Study of Income Dynamics) mis en œuvre à l'Université du Michigan depuis 1968. Les panélistes sont interrogés chaque année (ils étaient 5.000 au départ, 7.000 aujourd'hui, parmi lesquels les pauvres ont été volontairement sur-représentés) sur la situation économique de leur famille, leurs emplois, l'ensemble de leurs ressources et d'autres aspects de leur vie. Lorsque des individus quittent leur ménage d'origine et fondent leur propre ménage, ils sont encore suivis. Cette base de données longi­tudinales permet en particulier de distinguer des familles plus ou moins. profondément pauvres selon le temps pendant lequel elles restent au-dessous du seuil de pauvreté.

13) Le panier allemand de la ménagère pauvre En RF A, la pauvreté est mesurée à la fois en terme absolu et relatif; le seuil de pauvreté relatif est défini par rapport aux taux de 40% et 60% du revenu disponible par u.c. (1). Le seuil de pauvreté absolu est défini par rapport au revenu nécesaire pour satisfaire des besoins essentiels dits "normaux". Sont pauvres ceux dont les ressources se situent .au-dessous de ce revenu · ils peuvent alors bénéficier d'une aide sociale régulière de subsistance. Il a été mis en place dans le cadre de la Loi Fédérale sur l'Aide Sociale du 30juin 1961 qui a instauré l'aide de subsistance visant à garantir à chacun un minimum vital (l'équi­valent du RMI français). C'est le niveau du montant garanti qui est considéré comme le seuil de

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pauvreté absolue. Ce montant n'a pas été fixé arbitrairement mais à partir d'enquêtes. En effet, les besoins normaux ont été déterminés sur la base des enquêtes sur le budget des ménages réalisées par l'Office statistique fédéral. Les résultats de ces enquêtes sont exploités par le Deutscher Verein für offentliche und private fürsorge (Association allemande pour l'assistance privée et publique), organisme central qui regroupe les responsables publics et bénévoles du travail social en RFA. Un schéma des besoins normaux ou, en d'autres mots, "un panier de la ménagère", a été établi en 1955, 1962 et 1970, en se référant aux habitudes de vie et de consommation de la catégorie inférieure des ménages (c'est-à­dire ceux composés de deux adultes au moins ne disposant que d'un faible revenu (2) Le panier comprend les rubriques suivantes: -alimentation; -énergie de cuisson et d'éclairage (chauffage non compris) et autres dépenses d'électricité; -entretien de chaussures, des vêtements et du linge et répara­tion d'ustensiles ménagers, achat du linge et d'ustensiles ménagers de faible valeur; -soins corporels et nettoyage; -besoins personnels de la vie quotidienne (voir en annexe 2 la liste détaillée d'une des rubriques). Ne sont pas pris en compte dans les besoins normaux, les dépenses liées au logement (les coûts de logement étant très variables) au chauffage (même raison) et à l'acquisition de vêtements, linge, chaussures et ustensiles de ména­ges neufs (besoins variables en fonction de l'ancienneté de la situation d'indigence).

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( 1) u.c. : unité de consom­mation. Echelle différente de celle d'Oxford : 1 pour le premier adulte, 0,8 pour le dewuème adulte, 0,45 pour un enfant de moms de 7ans, 0,65 pour un enfant de 8 à 11 ans, 0,75 pour un enfant de 12 à 15 ans, 0,90 pour un enfant de 16 à 21 ans. (2) Pas de précisiOn sur le mveau de revenu pris en compte.

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(l)Chefde ménage: 100; à partir de 22 ans: 80 %; 16 à 21 ans: 90%; 12 à 15 ans: 75 %; 8 à 11 ans: 65 %; jusqu'à 7 ans: 45 %. (2) Der Sp1egel : 24-12-84, 0°52

Le panier tient compte des différences de besoin entre les adultes, les jeunes et les enfants de différents âges par un système de pondération (1). La Deutscher Verein établit la liste des besoins normaux et la transmet au Ministre fédéral de la Jeunesse, de la Famille et de la Santé ainsi qu'aux ministres compétents des Lânder. La détermination des coûts correspondants appelés "taux normaux" incombe aux autorités compétentes des Lânder qui doivent tenir compte du coût réel de la vie et des différences locales (cf. le règlement d'application de la loi fédérale sur l'aide sociale du 20juillet 1962). Elles doivent en particulier veiller à ce que ces taux, majorés du coût moyen du logement, restent inférieurs à la rémunération moyenne nette des catégories de salaires inférieurs majorés des allocations familiales et de l'allocation logement. Il semble que, en pratique, les différences soient faibles d'un land à l'autre. Ce seuil de pauvreté absolue est actuellement l'objet de contro­verses en particulier à cause de son effet direct sur le montant de l'aide de subsistance versé. En effet, avec l'accroissement du chômage, le nombre de bénéfi­ciaires de l'aide (dont les revenus sont inférieurs au seuil) a considé­rablement augmenté : 500.000 en 1973, 1 million de ménages en 1983 mettant en situation finan­cière difficile les liinder. Il y a donc des pressions pour diminuer le montant du seuil. Parallèlement de nombreuses études et a vis d'experts considèrent que le taux normal de l'aide actuellement attribuée ne correspond plus à son

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objectif: couvrir les besoins essen-tiels de la vie quotidienne. La Deutscher Verein a proposé en 1961, une version actualisée du panier dont le coût serait 30% plus élevé (la dernière enquête servant de base à l'établissement des taux normaux date de 1970). D'après un article du Spiegel (1), on a alors retiré à cette organisation sa compétence pour la détermination du panier-type et mis en place un groupe de travail ad'hoc pour mettre au point un nouveau panier-type. Trois modifications sont proposées pour réduire le montant de l'aide : -la ration alimentaire serait estimée non plus à partir du comportement alimentaire de personnes vivant seules mais à partir de la moyenne de consom­mation par personne d'une grande famille (qui devrait engendrer des économies d'échelles) - la base de calcul serait non plus les prix moyens mais les prix les plus bas du marché -certains produits sont exclus (ingrédients pour la cuisine ainsi que les montants prévus pour les pertes). Mais cette formule reviendrait encore trop cher aux communes ... D'où la solution de rechange proposée : se baser sur des compor­tements de consommation de groupes à faibles revenus et non plus sur un panier type (ce qui signifie l'abandon de la notion de besoins). Le montant de l'aide pourrait alors être facilement ajusté à la situation financière des communes. En attendant le seuil a été réévalué en 1982 et 1983 mais avec un taux inférieur à la hausse des prix.

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Nous en avons un exemple en France, constitué par l'élaboration de l'indicateur de précarité mis au point par Villeneuve et dont nous avons rendu compte dans l'article précédent sur la mesure de la pauvreté. Ce type d'approche a été notamment développé par Peter Townsend en Grande­Bretagne et Paul Dickes au Luxembourg.

21) L'approche de Peter Townsend (1) C'est une approche multi­dimentionnelle de la pauvreté en terme de privation relative (relative deprivation) qui se veut alternative par rapport aux définitions de la pauvreté en terme de revenus. L'ensemble de la démarche est décrite dans un ouvrage paru en 1979 (1). La définition de la pauvreté que retient l'auteur est la suivante (Voir chapitre 1) : ·~es individus familles ou groupe de la population peuvent être considérés en état de pauvreté quand ils manquent des ressources nécessaires pour obtenir l'alimentation type, la participa­pation aux activités et avoir les conditions de vie et les commodités qui sont habituellement ou sont au moins largement encouragées ou approuvées dans les sociétés auxquelles ils appartiennent. Leurs ressources sont si signi(i­cativement inférieures à celles qui sont déterminées par la moyenne individuelle ou familiale qu'ils sont, de fait, exclus des modes de vie courants, des habitudes et des

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activités". Il s'agit d'une approche dite "objective" par son auteur qui se base sur l'analyse des compor­tements. Pour lui la notion de privation qualifie bien une approche de la pauvreté par rapport à une approche en terme d'inégalité sans qu'il soit nécessaire de recourir à la notion de pauvreté absolue ou de besoins minimum. Ce concept de privation relative avait déjà été exploré par des chercheurs américains dans les années 50 mais pour décrire les sentiments de privation plutôt que les conditions comme l'a fait Peter Townsend. L'analyse repose sur les résultats d'une enquête menée en 1968-69 auprès d'un échantillon représen­tatif de la population de 2 000 ménages. P. Townsend insiste, à de nom­breuses reprises, sur le caractère expérimental de sa démarche et les )imites de son entreprise dues en partie à la faible taille de l'échantillon. Celle-ci peut être résumée de la façon suivante : -sélection de 60 indicateurs de privation à partir d'analyses qualitatives conduites auprès de populations pauvres. (L'auteur observe qu'idéalement il aurait fallu conduire une analyse exhaustive des habitudes de vie de la majorité de la population). Ces 60 indicateurs couvrent à peu près tous les domaines de la vie quotidienne: habitudes alimen­taires, habillement, chauffage, équipement du foyer, équipement de la maison, conditions de travail, santé, niveau d'instruc­tion, qualité de l'environnement urbain, loisirs, vie sociale. -Analyse de corrélations de chaque indicateur avec le niveau du revenu du ménage. -Pour illustrer la démarche,

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(1) Peter Townsend: Poverty 1n the United Kingdom - A survey of household - Resources and Standards of living Penguin books1979.

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(1) Allocation d'assistance différentielle. (2) Peter Townsend: A soeiological approch of the measurement of poverty · A rejoinder to Professor Amartya Sen · Oxford Economie Pa pers 35-1983. (3) P. Dickes - La pauvreté appréhendée sur l'angle des conditions d'existence -Recherches et propositions -Cahiers Economiques de Nancy 1988 vol20 n° 1. (4) J.H. Mack and S. Lansley; Survey Mori 1984 - George Allen and Unwin Ltd -1985.

sélection de 12 indicateurs "repré­sentatifs" pour construire un indice de privation par addition des privations vécues. Le score obtenu peut varier de 0 à 12 ; le score moyen est de 3,5 et le score de 6 obtenu par 20 %des ménages est considéré comme révélateur d'une situation de pauvreté. -Vérification que le score de privation obtenu décroît quand le revenu net augmente. -Repérage du seuil de pauvreté par analyse de la distribution (par taille) des ménages ayant obtenu au moins 6 comme score de privation, en fonction de leur revenu. L'hypothèse est que le seuil de pauvreté correspond au point de l'échelle des revenus où le pourcentage de ménages devient significativement plus élevé. Autrement dit ; au-dessous de ce seuil de revenu, la privation semble s'intensifier, s'accélérer. L'auteur reconnaît que l'analyse qu'il conduit ne démontre pas de façon absolue l'existence d'un seuil mais la forte probabilité de son existence. La démonstration qui est ici de type "statistique" nécessiterait un échantillon plus important pour être menée à bien ainsi qu'une sélection pl us rigoureuse des indicateurs retenus pour élaborer l'indice de privation. L'auteur conduit de nombreuses autres analyses en fonction du score de privation obtenu par les ménages et montre en particulier le rôle important des ressources autres que le revenu (capital détenu par exemple). Il pose la question de la méthode à définir pour convertir les différentes ressources (capital, accès à des équipements collectifs) en équiva­lent revenu et soulève le délicat problème des règles d'équivalence pour tenir compte de la composi­tion des ménages. Il propose des pistes de réflexion po\Jr poursuivre

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les investigations dans ces deux domaines. Bien que ne diposant pas de la solution idéale, il établit un système d'équivalence à partir de l'analyse des seuls revenus nets de différents types de famille ayant un score de privation d'au moins 6. Il est ainsi en mesure de chiffrer le nombre de "pauvres" selon son indice de privation et d'analyser leurs caractéristiques. Remarquons que le nombre de pauvres obtenus par sa méthode est bien supérieur au nombre de pauvres "officiels" (dont les reve­nus se situent au niveau assuré par le Supplémentary Bénéfit) (1): 25% des ménages contre 7,1% (et 23,8 considérés dans les marges de la pauvreté c'est-à-dire disposant de 140% du niveau du Supplementary Benefit). La lecture de l'ouvrage de P. Townsend soulève beaucoup d'interrogations outre celles formulées explicitement par l'auteur et appellerait des préci­sions (par exemple, le méthode de sélection des douze postes servant au calcul du score de privation). Ses travaux ont été néanmoins très stimulants et ont provoqué controverses et mises au point (2) ainsi que d'autres démarches plus ou moins voisines, destinées à affiner la méthode. Ainsi en est-il des travaux de Mack et Lansley (1983) et de Desai et Shah (1985) dont rend compte Paul Dickes (3) dans un article récent. Les premiers (4) insistent sur la perception sociale des besoins (les postes doivent être des "nécessités", reconnues comme telles par au moins 50% des sujets et pouvoir être satisfaites par un apport d'argent). Si les items retenus sont différents de ceux de P. Townsend, ils couvrent les mêmes domaines et les auteurs en retiennent 18 pour calculer le

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score de privation. Les seconds ont élaboré un modèle économétrique, sur les données recueillies par P. Townsend, afin notamment de différencier dans les réponses l'effet "objectir' du revenu de l'effet lié aux goûts personnels (modèle Probit) (1).

22) L'approche de P. Dick es C'est à partir d'une recherche réalisée par le G.E.P.P. (Groupe d'Etude sur les problèmes de pauvreté) de 1978 à 1980 dans le cadre du 1er programme européen de lutte contre la pauvreté (2) que P. Dickes a mis au point la méthode de mesure de la pauvreté objective. L'objectif de cette recherche comparative couvrant cinq pays différents (et sept régions dont la Lorraine en France soit 7 x 200 interviews) était d'étudier la pauvreté persistante. Elle reposait, comme l'approche de P. Townsend, sur la notion de pauvreté relative (le manque n'est signe de pauvreté qu'en fonction de la manière dont la ressource qui peut la combler est distribuée dans la population) saisie au travers des différents domaines définissant les conditions d'exis­tence (notion de cumul de désa­vantages). Cette démarche se différencie toutefois de celle de P. Townsend de plusieurs façons ; les quatre­vingt six postes retenus incluent les ressources financières appré­hendées grâce à plusieurs items; il est fait appel à un modèle de mesure formalisé (modèle probabi­liste de Rasch) (3) pour sélection­ner les trente-deux items qui serviront à calculer par somma­tion, le score obtenu et établir ainsi une échelle objective de pauvreté permettant de mesurer le degré de pauvreté des ménages selon leur position sur l'échelle. L'application de ce modèle permet

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de tester l'hypothèse du caractère unidimensionnel de la pauvreté (existence d'un continuum latent auquel se réfèrent les items sélectionnés) et du concept de cumul des handicaps. Ceci est un résultat important sur lequel il conviendrait sans doute de revenir dans la mesure où il est en désaccord avec les travaux réalisés par J .L. Borkowski (4) sur l'enquête "Situations défavo­défavorisées" de l'INSEE qui montraient que le degré de cumul semble le plus souvent faible. Les auteurs vérifient que la mesure de la pauvreté (figurée par le score) est corrélée avec l'évaluation monétaire (situation sur l'échelle des revenus). Mais les tests réalisés montrent que la mesure est plus générale et explique quelque chose que le revenu n'explique pas. Il n'est toutefois malheureusement pas précisé comment a été défini le seuil de pauvreté sur l'échelle objective de pauvreté. Paul Dickes a appliqué la même méthode sur les données du panel socio-économique au Luxembourg (au CEPS - Centre d'Etude des Populations, de pauvreté et de politiques sociales) en enrichis­sant la problématique : la notion d'impuissance sociale s'ajoute à la notion du cumul des handi­caps) (5). Il a été ainsi conduit à réfléchir sur les différentes études réalisées, leur divergences (formu­lation théorique) et leurs conver­gences (résultats), ce qui lui a permis de lister les difficultés mal résolues par les uns et les autres (6) problème de la défini­tion des univers d'items, problè­mes liés aux unités d'analyse, rejet par le modèle de Rasch des variables subjectives, opportunité du choix du modèle de Rasch par rapport à d'autres modèles plus souples etc.

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(1) Meghnad Desai and Anup Shah An econometnc approach to the measurement of poverty -London School of Economies - Welfare State Programme - 1985. (2) P. Dickes, Bernard Ga•lly, P1erre Hausman, Gaston Scheber- Les désavantages de la pauvreté: définitions, mesure et réalités en Europe - Mondes en développement Tome 12 n"45 1984. (3) P. Dickes - Modèle de Rasch pour items dichotomiques: théorie technique et applicatiOn à la mesure de la pauvreté -Cah1ers économiques de Nancy 1984. (4).J. L. Borkowsk1 : les inégalités et leurs cumuls parmi les personnes âgées: niveau de v1e, santé, Isolement, archives et documents n• 142 octobre 1985. (5) P. Dickes- Un indicateur pour mesurer la pauvreté objective - Théorie et application dans la première vague du panel soc•o-économ•que luxembourgeois - Document PSELL n• 5- 1987. (6) Paul Dickes - La pauvreté appréhendée sous l'angle des conditions d'existence · Recherches et propositions - Cahiers économiques de Nancy 1988 vol. 20 n"l.

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(1) H. Dell eck et B. Cantillon - Les indica­teurs d'insécurité d'existen­ce et l'évaluation de la Sécurité Soc1ale en Belgique- Communication à la réunion d'un groupe d'experts sur le rôle de la recherche en Sécurité Sociale-AISS-Juin 1987.

L'auteur tente ensuite de tirer les leçons de l'expérience et de mettre au point une nouvelle approche. Il rappelle les choix méthodologi­ques faits par les divers auteurs sur les points suivants: - unité d'analyse -qualités formelles des postes -contenu des postes - contrôles des postes en tant qu'indicateur de privation leurs avantages et leurs inconvé­nients et fait des propositions que l'on peut résumer en six points: - la pauvreté est un construit latent - la pauvreté est un construit social - la pauvreté est une impuissance sociale - la pauvreté est relative (les différences sont graduelles) - la pauvreté est objectivée par des désavantages ("de privation") se rapportant aux différents domaines de l'existence - la pauvreté est mesurée par le cumul des désavantages.

Nous avons déjà évoqué ce type d'approches dans le 1er chapitre à propos du programme européen de lutte contre la pauvreté d'une part, de l'étude de l'ADEPS portant sur la comparaison de plusieurs lignes de pauvreté d'autre part. En annexe 3 sont rappelées les types de questions testées dans les deux recherches du programme européen qui incluaient cette dimension subjective. Nous présenterons deux approches, retenues par l'étude ADEPS: -celle du Centre for Social Po licy de l'université d'Anvers appelée

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indicateur de sécurité d'existence- celle de l'université de Tilburg aux Pays-Bas appelée Subjective Poverty line. Ce type d'approche privilégie la perception qu'ont les ménages de leur situation. Ce serait eux les mieux à même de juger si une situation vécue correspond à une situation de pauvreté.

31) Indicateur de sécurité d'exis­tence: les minima socio-vitaux (1) Cette méthode a été développée par une équipe de l'université d'Anvers. Elle repose sur l'hypo­thèse que les ménages eux-mêmes sont les meilleurs évaluateurs des seuils de pauvreté d'existence. Les minima socio-vitaux ont pour objet de déterminer le revenu, pour tous les types de ménages existants, qui est jugé nécessaire pour pouvoir vi v re convena­blement. Ils sont établis à partir des réponses à trois questions : 1- A combien doit s'élever, selon vous, le revenu minimum net par mois d'un ménage comme le vôtre (donc : autant de personnes et de même âge) pour s'en sortir tout juste? Cette question -permet de déterminer le revenu jugé néces­saire. 2- Avec votre revenu mensuel actuel, tout compris, pouvez-vous vous en sortir très difficilement, difficilement, plutôt difficilement, plutôt facilement, facilement, très facilement, en ce qui concerne votre ménage ? 3- La question relative au revenu disponible réel total des ménages Dans les trois questions, on peut voir que c'est le ménage qui est considéré comme l'unité statis­tique pertinente. Les réponses à ces questions sont utilisées de la façon suivante : - seuls les ménages ayant répondu qu'ils s'en sortaient plutôt diffiei-

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lement à la question concernant lasécurité d'existence, ont été pris en considération pour le calcul des minima socio-vitaux - est calculée, à propos de ces ménages, la moyenne du revenu jugé nécessaire (ou de leur revenu réel total s'il est inférieur) pour 8 types de ménages (1) - une nouvelle moyenne est calculée après avoir éliminé les valeurs extrêmes (celles qui s'écartent de la moyenne d'au moins 2 écarts-types) - le calcul n'est considéré comme valable qu'à partir du moment où il concerne au moins 30 ménages. Ainsi sont calculés les minima socio-vitaux pour les huit types de ménages les plus fréquents. Pour les autres types de ménages, on ajoute pour chaque personne supplémentaire les coûts mini­mum estimés à partir des minima calculés. Deux indicateurs sont élaborés, objectifs et subjectifs . . sont en état d'insécurité d'existence objective, les ménages dont les revenus sont inférieurs au minimum socio-vital du type du ménage qui lui correspond. . sont en état d'insécurité d'existence subjective, les ménages estimant éprouver certaines difficultés à boucler leur budget (s'en sortent très diffici­lement, difficilement ou plutôt difficilement). Un score d'insécurité d'existence objective peut être calculé: revenu réel minimum socio-vital. Une norme plus sévère a été définie, celle correspondant à 75% des minima socio-vitaux calculés, afin de cerner la catégorie de ménages se trouvant dans un état d'insécurité d'existence très prononcé. Les prestations minimales existantes (revenu garanti aux personnes âgées et allocations minimales de chômage) sont nettement plus

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proches de cette norme la plus res tric ti ve. En outre, les auteurs établissent une hiérarchie dans la pauvreté en combinant indicateur d'insécurité objectif et subjectif. Ainsi en Flandre en 1985 (2): - 20,9% des ménages sont en insécurité objective (norme 100 %) - 14,3% des ménages sont en insécurité objective + subjective - 61 % des ménages sont en insécurité objective (norme 75 %) - 3% des ménages sont en insécurité objective + subjective (norme 75 %).

32) Subjective poverty line, S .P.L. Cette méthode est proche de la précédente. Elle repose sur deux questions: -l'une concernant le revenu minimum tout juste nécessaire pour joindre les deux bouts -l'autre concernant le revenu effectif total du ménage. Les auteurs démontrent la pertinence et la stabilité de la relation entre la réponse subjec­tive et d'une part le revenu r·éel, d'autre part la taille du ménage. Les seuils de sécurité sont mesurés sur la base d'un calcul de régression. Une seconde méthode propose d'affiner la mesure de taille du ménage en introduisant une pondération en fonction de l'âge des membres du ménage.

L'Australie envisage actuellement d'élaborer une ligne de pauvreté subjective et ceci pour 3 raisons essentielles (3) : -disposer d'une indication supplémentaire pour fixer un seuil de pauvreté; -profiter de la méthode d'ajus­tement (méthode S.P.L.) prévu pour les personnes dans des situations différentes (problème des échelles d'équivalence) -aider au choix de la bonne

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(1) 1. Personne âgée isolée ; 2. actif 1solé ; 3. couples de personnes âgés ; 4. un actif, une personne âgée; 5. couple act1f; 6. couple actif ayant un enfant; 7. couple actif ayant 2 enfants; 8. couple actif ayant 3 enfants. (2) Indicateurs de la Sécurité Soctale 1976-1985 Résultats globaux - Revue belge de Sécurité Soc1ale n° 4-51986. (3) swrc News letter Soc1al Welfare Research Centre. Umvers1ty of New South Wales.Jwn 1987.

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méthode d'indexation du seuil de pauvreté. Les australiens souhaitent surtout se faire une idée sur la pertinence de cette approche en la comparant avec une approche par les condi­tions d'existence. D'ores et déjà un programme d'enquête systématique inclut une

ANNEXE1

question subjective (A votre avis, quel est le minimum de ressources dont une famille de 4 personnes a besoin par semaine pour rester en bonne santé et vivre décem­ment?). Une application sera tentée selon la méthode S.P.L. pour déterminer des échelles d'équivalence.

Weighted average o(poverty income criteria Cl) for families of différent composition, by household size, s~x of hedad and farm or nonfarm residence

Nonfarm Farm Nonfarm Farm

Nomberorfamlly Male Fe male Male Fe male Male Female Mala Fe mala

Tot.al head be ad

Tot.al head be ad

Tot.al head be ad

Tot.al head head

membres

Walght.ad average or IDCOmes or economy leval Welgbt.ad average or~ncomes or losw-cosL leval

1 (under age 6~1 $1580 $1~0 $1 ~25 $960 $990 $920 $188~ $1970 $11120 $11~ $1 lBS $1090

1 (aged 6~ or over) 1470 1480 140~ 885 800 880 1 74li 177~ 1735 10~ 1 ()liS 1.040

2 (under age ~~ 20~ 2.06li 1975 1240 1240 1180 2.71li 2740 2li70 1640 164li 1.:140

2 (aged 6li or over) ~~ 1~ 1845 1 110 1110 1120 2460 2.470 2420 1480 1480 148S

3 2440 2.4~ 23~ 1410 1.410 130li 3160 3170 S070 1890 189li 18Sli

4 S ISO S ISO s lili 192li 192li 1885 4 00~ 4.010 S920 2410 2410 2.S7li

li 3885 368~ 3660 2.210 2210 2 220 4675 4 680 4 595 2815 2815 2.79li

4135 4 135 4 110 2 500 2495 2 530 li 250 52~5 5141 31~ s 16li 3165

?or more ~090 5100 ~000 SOli~ SOIIS 2985 6S9~ 6405 6270 3 840 S8~ S7~

1 For defini LIDO or poverty enta na, see LezL

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ANNEXE2

Extrait du panier de la ménagère de RF A

PRODUITS QUANTITE PAR MOIS

ENGRAMMES

Pain bis (pain de seigle) 2385 Pain gris 2385 Pain Blanc 1135 Pâtisserie à pâte levée (croissants, chaussons) 1000

Biscottes --Pâtisserie (sablés) 720

Farine de blé (type 405) 640 Semoule de blé (pas pour enfants) 40

Nouilles, pâtes 85 Macaroni 85 Riz long grain 150 Flocons d'avoine 55 Fécule (pour enfants) 100 Poudre à crème renversée 55 Lentilles (légumes secs) 100 Pois (légumes secs) 55

Pommes de terre 6100 Choux blancs 200 Choux frisés 220 Choux fleurs 230 Choux rouges 200 Choux raves --Carottes 250 Epinards 100 Lai tues pommées 360 Poireaux 650 Oignons 410

Haricots verts 160 Pois (cosses) 20 Tomates 350 Concombres 280

Conserves de légumes, petits pois fins 285 Conserves de légumes, haricots verts 285 Conserves de légumes, légumes frais 250 Conserves de légumes, asperges en morceaux 250

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ANNEXE3

Extraits du rapport final de la Commission des Communautés

Européennes

!:.. La perception de la misère en Europe Les principales questions exami­nées étaient les suivantes: - Dans quelle mesure le public est­il conscient de l'existence de la pauvreté dans sa ville, son quartier, son village ? - Quelles sont, à son avis, les causes de la pauvreté? -Ces attitudes procèdent-elles des systèmes de valeurs et de la position sociale et économique des intéressés? Méthode Des échantillons représentatifs de la population totale ordinaire de chaque Etat membre ont été choisis par échantillonnage aléa­toire dans certains pays et par échantillonnage stratifié dans les autres. Les auteurs reconnaissent que les très pauvres et les indigents sont presque certai­nement exclus de leurs échantil­lons. Environ 8.600 personnes ont été interrogées à l'aide d'un ques­tionnaire structuré, dans le cadre du sondage européen dit "Euro Baromètre". Le questions posées étaient les suivantes: a) Revenus familiaux -les revenus familiaux sont-ils "suffisants pour vivre correc tement" (ou plus ou moins que suffisants)? -Quel est le revenu "absolument nécessaire" pour le ménage? - A quel échelon se place le revenu familial sur une échelle à sept échelons allant de riche à pauvre? b) Satisfaction -Dans l'ensemble êtes-vous satis­fait "de la vie que vous menez"? -En êtes-vous plus ou moins satisfait que dans le passé? - La société dans son ensemble est­elle juste ou injuste à votre égard ? c) Perception de la pauvreté -Y a-t-il dans votre ville, quartier ou village des gens dont les conditions générales d 'existence

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vous paraissent vraiment "très mauvaises" par rapport aux autres gens (c'est-à-dire des gens dans la misère ?) -Quelles sont les causes et les origines les plus fréquentes de la misère (à choisir sur des cartes pré-établies). Les données relatives aux revenus et à d'autres caractéristiques de l'échantillon ont été tirées des questions utilisées pour les enquêtes Euro-Baromètre. ?.:. Etude de la pauvreté subjective Les personnes interrogées ont été invitées à définir trois niveaux de bas revenus : a) Revenu minimum Il a été fixé sur la base de la question: quel est selon vous le revenu total net minimum pour un foyer tel que le vôtre; c'est-à­dire le revenu en-dessous duquel vous ne pourriez pas joindre les deux bouts? b)Revenu équivalent au seuil de la pauvreté Il a été fixé sur la base de la question: "Quel serait le revenu net de votre foyer avec lequel vous vous considérez comme vraiment pauvre? c) Revenu usatisfaisant" Il a été fixé sur la base de la question : "De quel revenu total net du foyer auriez-vous besoin, dans les conditions familiales actuelles pour que votre foyer vive sans problèmes ?" En outre, elles ont été invitées à définir d'autres niveaux de vie en répondant à la question suivante: "Dans mes (nos) conditions, je considère un revenu net de ... (1) très mauvais, (2) mauvais, (3) in­suffisant, (4) suffisant, (5) bon, (6) très bon. Cette dernière infor­mation a été recueillie pour faci­liter la comparaison au niveau international de déclarations sub­jectives et la définition politique des seuils de pauvreté. Ainsi, la signification des expressions "join­dre les deux bouts", "sans diffi­culté" et "très pauvre" a pu être mise en rapport avec des niveaux de vie allant de "très mauvais" à "très bon"

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