Claude Levy-Strauss - La Voie Des Masques

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ClaudeLEVI-STRAIJSS Ni b Bruxellesle 2E 1908. Etudessecondairc I (Lycie janson de Sailly!, rieures ) la Faculti de Paris 0icence) et ) la (agrigation de-doctorat ds lettres, I

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Aprbs 2 ans d'ensei lycies de Mont-de-MLaon, est nomme mission universitaire au

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de fesseur I'universitd i (1934-)8\. l9)4 2t19 De et dirige plusieurs graphiques dans le et en Amazonie.De retour en France )

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la guerre, mobilisdQuitte la France aprb oour les Etats-Unis or)

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) la New School for de New York. EngagC dans les Forces fraaffecti ) la mission

franqaise auxavec H. Focillon. l. I. Perrin et d'autres I

hautes itudes de Ncril devient le Secritaire Rappeli en France en

Ministbre des A retourne aux pour y occuper les

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suppldmentaires clair-obscurdescavernes du et du croulant entassement trdsorsperdus,on des le visite tous les jours, de 10 heures) 5 heures, h,I'American Museum NoturalHistory: of c'estla vaste salle du rez-de-chaussde consacrdeaux tribus indiennesde la c6te nord du Pacifique qui va depuisI'Alaskajusqu') la Colombie britannique., *L'dpoque n'est pas lointaine,sansdoute, od les collectionsprovenant de cette partie duCape tapisserie. en Chilkat.

monde quitteront les musdesethnographiques pour prendreplace,dansles musdes Beauxdes Arts, entre I'Egypte ou la perse antiqueset le moyen 6geeuropden. cet art n'estpas inlgal Car aux plus grands, et, pendant le sibcleet demi qui nous estconnu de son histoire,il a t6moignd d'une diversitdsupdrieure la leur et ddployd ) des dons apparemment intarissables renoude vellement.,

* Ce sidcleet demi a vu naitre et fleurir non pas une, mais dix formes d'art diffdrentes : depuislescapes tapisserie Chilkat,encore en des inddites au ddbut du xrx" sibcle,et qui atrei_ gnent d'un seul coup ) la plus haute perfection du textile avecpour seulsmoyensle jaune aigu tird des mousses, noir extrait de I'dcorce le du cddre et le bleu cuivreux d'oxydes mindraux, jusqu'aux exquises sculptures argiliterendue en luisante comme I'obsidienne noire, qui illus_ trent la flamboyante d6cadence, stade du au bibelot, d'un art mis en possession d,outils d'acieret que I'acieraussiddtruira; en passant par la mode folle, qui devait durer quelques anndesseulement, des coiffures de danse,bla_

Pipesculptie en argilite LIaida.

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sonndesde figures sculptdessur fond de nacre, ceintes de fourrure ou de duvet blanc, d'oi descendenten cascadedes peaux d'hermine comme des boucles.Ce renouvellement incessant, cette sfiretd d'invention qui garantit le succbsoi qu'elle s'exerce,ce dddain des chemins battus poussant) desimprovisationstoujours nouvellesqui conduisentinfailliblement ) des rdussites dclatantes, pour s'en faire quelque idde,nos contemporains devaientattendreI'exceptionneldestind'un Picasso. Avec cettediff6rence,toutefois,que cesexercices pdrilleuxd'un homme seul, qui nous ont coupd le souffle pendant trente ans, une culture indigdne tout entibreles a pratiqudspendant cent cinquante ans et m6me davantage; car nous n'avonspas de raison de douter que cet art multiforme ne se soit ddveloppdau m6me rythme depuis ses plus lointainesorigines,qui restentinconnues. Cependant, quelquesoblets de pierre livrds par les fouilles attestentque cet art d'une individualitdpuissante, ddj) identifiabledanssesproductionsarchaiques, remonte) une dpoquefort ancienne, donnant ) ce terme la valeur relaen tive qui est de mise quand on I'applique ) l'archdologie n amdricaine.

Colfuredechef.Kwakiutl

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Masse tuer lesgros poissons. d Tlingit.

Poteau maison. de Tlingit.

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*Quoi qu'il en soit, e la fin du xrx. sibcle encore,un chapeletde villagess'dgrenait la sur c6te et dans les iles, depuis le golfe d'Alaska jusqu'au sud de Vancouver. Au moment de leur plus grandeprospdritd, tribus de la c6te les nord-ouest pouvaient rassemblercent ) cent cinquante mille Ames: chiffre ddrisoire quand on songe ) I'expressionintenseet aux legons ddcisives d'un art llabord tout entier dans cette lointaineprovince du NouveauMonde,par une population dont la densitd variait, selon les rdgions, de 0,1 ) 0,6 habitant au kilombtre carr6.. Au nord, c'dtaient les Tlingit auxquels on doit dessculptures d'une imaginationsubtile et podtiqueet de prdcieuxornements; puis, vers

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Poteaux maison. Haida. de

et le sud, les Haida, aux cuvres monumentales pleinesde vigueur; les Tsimshianqui leur sont comparables avec, peut-dtre, une sensibilitd

Tsimshian. repr|sentant face humaine. une Masque

repr(.sentantlune.BellaCoola. la Masque

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plus humaine;les BellaCooladont les masques affectentun style pompeux et oi le bleu de cobaltprddomine; Kwakiutl,) f imagination les ddbridde, selivrent, en crdantleursmasques qui de danse, de stupdfiantes ) ddbauches formes de

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Hochetc(,rtmonial. Kwakiutl (faceet dos).

Sculpture Salish.

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et de couleurs; les Nootka, que freine un rdalismeplussage; I'extrdme ) sud,enfin,lesSalish, dont le style trbs simplifid se fait anguleux et schdmatique, et chez qui s'oblitbrent les influences septentrionales.,()

N Sta tu e i te" d eb i e n v e n u e ,,ootka. d

Poteau maison. de Tlingit

.Pour les spectateurs rites d'initiation, des de .es masques dansequi s'ouvrentsoudainen un Jeur volets pour laisserapercevoir second -.'isage, parfois un troisibmederribrele second, attesde :ous empreints mystdreet d'austdritd, :aient I'omniprdsence surnaturelet le pul- 19 du

(di.tails). Poteaux maisons de Tlingit

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lulementdesmythes.Bousculant placiditdde la la vie quotidienne,ce message primitif reste si violent que I'isolement prophylactique des vitrines ne parvient pas, aujourd'hui encore,) prdvenir sa communication. Errez pendant une heure ou deux ) travers cette salle encombrde de ovivants piliers>; par une autre correspondance,les mots du podtetraduisentexactement

de Tlingit. Poteau maison.

les ddsignant poteauxsculpla locution indigbne t6s qui soutenaientles poutres des maisons: poteaux qui sont moins des choses que des 6tresuaux regardsfamiliers) puisque,les jours de doute et de tourment, eux aussi laissent guident I'habitant sortir ode confusesparole5n, et le de la demeure, conseillent le r6confortent, et lui montrent une issuehors de sesdifficultds. Mdme ) prdsent, il nous faudrait faire effort pour reconnaitreen eux le tronc mort et pour restersourd ) leur voix dtouffde;comme aussi, pour ne pas entrevoir derribre la glace des vitrines et de part et d'autre d'un visagetdndcannibale,claquant du bec breux, le nCorbeau en guise d'ailes, ou le uMaitre des mardes, commandant le flux et le reflux par un clignearticulds., ment de sesyeux ingdnieusement nCar presque tous ces masquessont des Un ) mdcaniques la fois naives et v6h6mentes. jeu de cordes,de poulies et de charnibres perde met aux bouches railler lesterreursdu novice, aux yeux de pleurer sa mort, aux becs de le d6vorer. Unique en son genre, cet art rdunit dans ses figurations la sdrdnitdcontemplative des statuesde Chartresou des tombes dgyptiennes,et les artificesdu Carnaval.Cestradi-

Masque articul|(fermt Kwakiutl. et ouvert).

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tions d'une 6.galegrandeur et d'une pareille authenticitd,dont les boutiquesde foire et les cathddralesprdservent aujourd'hui les restes ddmembrds, rdgnent dansleur primitive unitd ici Ce don dithyrambique de la synthbse,ceme facult6.presque monstrueusepour apercevoir comme semblablece que les autres hommes congoivent comme diffdrent, constituent sans doute la marque exceptionnelle gdniale de et I'art de la Colombiebritannique. D'une vitrine ) I'autre, d'un objet ) son voisin, d'un coin ) I'autre d'un m6me objet parfois, on croirait passerde I'Egypte) notre xrresibcle,des Sassanidesaux carrouselsdes foires suburbaines.

Masque articul|.(Jerm(. et ouvert). Kwakiutl.

Masque articul|. ouyertet (h gauche) ferm6.Haida.

kt'Cffie en boissculpt(. peint. Tsimshian. et

CoJfre Kwakiutl. enbois sculptt peint. et fun|.raire

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(avecson emphase insodu palaisde Versailles lente sur les emblbmes les trophdes,son reet cours presque ddvergondd aux m6taphores ) plastiqueset aux alldgories) la for6t congolaise.Regardez prbs cesboites ) provisions, de de sculptdes bas-reliefet rehaussdes noir et en semblepurement de rouge: ieur ornementation d6corative. Des canons traditionnels veulent un cependantqu'y soient reprdsentds ours, un requin ou un castor, mais sans aucunede ces contraintes qui, ailleurs, brident I'artiste. Car l'animal y parait h la fois de face, de dos et de profil; vu en m6metempsd'en haut et d'en bas,

un Cofre en bois sculpt(.et peint repr6sentant ours tenant un homme Haida. dans gueule. sa

du dehorset du dedans.Par un extraordinaire mdlange conventionet de rdalisme, chirurde un gien dessinateur ddpouilldet ddsarticuld, I'a vidd mme de ses entrailles,pour reconstituerun nouvel 6tre coincidant par tous les points de son anatomie avec les surfacesparalldldpipddiques,et crder un objet qui soit ) la fois une boite et un animal, et, ) la fois aussi, un ou plusieurs animaux et un homme.La boite parie, elle veille efficacement sur les trdsors qui lui sont confids,dans un coin de la maison dont tout proclamequ'elle-mdme la carcasse est d'un plus gros animal oi I'on pdnbtre par la porte, gueule bdante,et ) I'intdrieur duquel se dressent,en cent apparences aimables tragiques, ou une for6t de symboles humainset non humains.,

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Plustard, j'ai connu d'autrescollections de Museum, la c6te nord-ouest.Cellede I'American victime comme beaucoup de I'aberration des conservateurs, perdu bon nombre d'attraits a par que la prdsentation conEue FranzBoasavait su si bien lui garder. Nous partageant, selon ) nosdisponibilitds moment,lespidces vendre du chezles antiquairesnew-yorkais- en un temps qui, lui aussi,sembleaujourd'hui mythique, oi ces cuvres ne suscitaientgubre d'intdr6t Max Ernst, Andrd Breton, GeorgesDuthuit et moi avons constitud des collections plus modestes; je dus vendre en l95l celle que j'avais rassemblde. culturel de I'AmConseiller j'avais eu, vers 1947,I'occasion d'acbassade, qudrir pour la Franceune cdlbbrecollection qui se trouve maintenantdans un musdede la c6te ouest des Etats-Unis:au lieu de dollars impoquelquestoiles sables,le vendeur aurait prdfdr6. Malgrdtous mesefforts, de Matisse de Picasso. et j'dchouai) convaincreles responsables notre de politique artistique qui, justement, se trouvaient en visite ) New York. Il est vrai qu') nationales n'avaient cettedpoque, collections les pas de peinture moderne h revendre, et on qualifia d'utopique mon projet de solliciter

directement deux artistes les quej'ai citds,quitte h leur laisser I'usufruit ou m6mela nue-propridtd de ces merveilleux objets: une fois en France, ils auraient bien, un jour ou I'autre, pris le cheminde nos musdes. Malgrd ces ddconvenues, sans doute en et partie ) cause d'elles, le lien presquecharnel que, dbsI'entre-deux-guerres,la vue desrares ) objets qui existaientalors dans les collections franqaises chez quelquesantiquaires, j'avais et noud avec I'art de la c6te nord-ouest,ne s'est jamaisrelich6.Jele ressentais encore tout rdcemment prbs des lieux oi cet art naquit et se ddveloppa, visitant les musdes Vancouver en de et de Victoria, et en le voyant revivre sous le ciseau le burin d'habiles ou sculpteurs orfbvres et indiens dont plusieursrestent dignes de leurs grandsdevanciers. Pourtant, au cours des anndes,ce sentiment de vdndrationrestaitmind par une inquidtude: cet art me posait un problbme que je n'arrivais pas ) rdsoudre. Certains masques, tous du mdme type, me troublaient par leur facture.Leur style, leur forme dtaientdtranges; leur justification plastique m'dchappait. Bien que profonddment fouillds par le ciseau du 29

rajoutdes, ddpit en sculpteuret munis de pibces de ces parties saillantesils offraient une apparencemassive:faits pour 6tre portds devant le visage,sans que I'envers,) peine concave,en vraiment le modeld. dpouse Beaucoup plus larges qu'un visage, ces masquessont arrondis au sommet, mais leurs c6tds, d'abord incurvds, se rapprochent et ou parallbles mmeobliques;le derdeviennent nier tiers prend ainsi I'aspectapproximatif d'un rectangle,ou d'un trapdzerenversd.A I'extrdmit6. infdrieure, la petite base est parfaitement horizontale,comme si on avait scid le masque une mAchoire en plein motif, lequel reprdsente au infdrieureaffaissde, milieu de laquellepend une grosse langue sculptde en bas-relief ou peinte en rouge. Environ au tiers de la hauteur du masque, la mAchoire supdrieurefait surle au-dessus, nez, parplomb. Immddiatement fois indiqud de fagon schdmatiqueou m6me absent, est le plus souvent remplacdpar une tete d'oiseautrbs saillante,entrouvrant ou ferse mant le bec; deux ou trois t6tes semblables en dressent haut du masquecomme descornes. Cesvariationsdans la forme du nez,le nombre 10 et la dispositiondes cornes,distinguentdivers

(Musqueam). Masque aihw6,.Salish sw

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types de masquesappeldsCastor,Canardbecscie,Corbeauet Serpentdans certainsgroupes; dans d'autres, Castor, Canard bec-scie,Corbeau, Hibou et Saumon de printemps. Mais, quel que soit le type,la forme glndrale reste la m6me, ainsi que celle des yeux, faits de deux cylindres de bois sculptds dans la masse ou rapportds et saillant puissamment hors des orbites. En regardant ces masques,je me posais Pourquoi cette les sanscesse mdmesquestions. forme inhabituelle et si mal adaptde ) leur fonction? Sansdoute les voyais-jeincomplets, d'un diaddmede car ils dtaientjadis surmontds plumes de cygne ou d'aigle des montagnes(les les unes entibrementblanches, autres blanches pluse au sommet) entre lesquelles dressaient de orndes boulesde duvet, sieursfinesbaguettes tremblantes) chaque mouvement du porteur. De plus, le bas du masque reposait sur une grandecollerette, ladis de plumesraideset plus rdcemmenten tissu brod6. Mais cesgarnitures, visibles sur de vieilles photographies,accentuent plut6t l'ltrangetd du masquesansdclairer mystdrieux: pourquoi cette bouche sesaspects largement ouverte, cette mAchoire infdrieure

pendanteexhibant une dnorme langue?Pourquoi ces tdtes d'oiseauxsansrapport apparent avecle reste,et disposdes la manibrela plus de incongrue? Pourquoicesyeux protubdrants qui constituentle trait invariant de tous les types? Pourquoi,enfin, ce style presqueddmoniaque ) quoi rien d'autre ne ressemble dans les cultures voisines,et mdme dans celle oi il a pris naissance ?

Masoue aihw(..Cowichan. sw

A toutes ces interrogations,je suis restd incapable de rdpondre avant d'avoir compris que, pas plus que les mythes, les masquesne et en peuvents'interprdter eux-memes par euxEnvisagd au mdmes,comme des objets sdpards. un point de vue sdmantique, mythe n'acquiert un sensqu'une fois replacddans le groupe de sestransformations;de m6me,un type de masque, consid6rddu seul point de vue plastique, rdplique ) d'autres types dont il transformele galbe et les couleurs en assumantson individualitd. Pour que cette individualitd s'oppose) celled'un autre masque,il faut et il suffit qu'un que le m6me rapport prdvale entre le message premier masquea pour fonction de transmettre ou de connoter, et le messageque, dans la mdmecultureou dansuneculturevoisine,I'autre masquea chargede vdhiculer.Dans cette perspective,par consdquent,on devra constater assique les fonctions socialesou religieuses qu'on oppose gndes aux diverstypesde masques pour les comparer sont, entre elles, dans le mdme rapport de transformation que la plastique, le graphismeet le coloris des masques comme des objets matdenvisagds eux-mdmes 34 riels. Et puisqu') chaque type de masquesse

rattachentdesmythes,qui ont pour objet d'expliquer leur origine ldgendaireou surnaturelle et de fonder leur r61edans le rituel, I'dconomie, la socidtd,une hypothdseconsistant) dtendreit des euvres d'art (mais qui ne sont pas seulement cela) une mdthode qui a fait ses preuves dans I'dtude des mythes (qui sont aussi cela) trouvera sa vdrification si, en dernibre analyse, nous pouvons ddceler,entre les mythes fondateurs de chaquetype de masque,des rapports de transformation homologuesde ceux qui, du seul point de vue plastique, prdvalent entre les masquesproprement dits. Pour remplir ce programme, il importe de d'abord le type de masquequi nous considdrer a posd tant d'dnigmesafin de regrouper I'ensembledes informations dont on disposeh son sujet, c'est-)-diretout ce que I'on connait sur sa esthdtiques, techniquede fabrisescaractdres cation, I'usageauquel il est destindet les rdsultats qu'on en attend; enfin sur les mythes qui rendent compte de son origine, de son apparence et de ses conditions d'emploi. Car c'est seulementune fois constitud ce dossier global qu'on pourra le confronter utilement ) d'autres 35 dossiers.

ilLe type de masquequ'on vient de ddcrire est propre ) une douzaine de groupes indiens membres de la famille linguistique salish. Ces groupes occupaient deux territoires, chacun long d'environ trois cents kilombtres: sur le continent, au nord et au sud de I'estuairedu Fraser,et de I'autre c6td du ddtroit de Gdorgie, sur la partie orientale de I'ile Vancouver. On nom swaihw6, ces appellegdndralement masques qu'ils portent dans la vallde du Fraser'; les termes qui les ddsignentailleurs sont trds voipar reprdsentd un h ou un salishgdndralement ' Le phondme x est une fricative uvulaire.Plus exacteau point de vue phonitiqueseraitla ranscription'.sxwaixwe.

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swaihw6.Salish(Musqueom). Mosque

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swaihw6,. Cartededistributiondu masque

sins, et il semble inutile d'en dresserla liste sinon pour signalerque, dansla rdgionde Puget est Soundoi le masque inconnu,un mot presque le ddsigne potlatch, genrede identiquesqwtqw6, un au cdrdmonies cours desquelles h6te distriaux invitds qu'il rdunit, pour bue des richesses ) valider par leur prdsenceson accession un nouveau titre ou son passageh un nouveau sur statut. Nous reviendrons ce rapprochement. Dans le costumedes porteurs du masque, la couleur blanchedominait. La colleretteddiit dtait faite de plumesde cygne,ainsi mentionnde et que le jupon, les jambidres les brassards parfois en peaux de plongeon- ceintspar les Au lieu de plumes, certainsgroupes danseurs. Slaiamun, septentrionaux, Klahuse et employaient une paille d'espbce brillante, blancheaussi.Les masquestenaient h la main un sistre spdcial,form6 de coquillesde pecten sur un cerceaude bois. A I'dpoqueor) enfildes

swaihw(. du Srstre masque

Masque swaihw|. Cowichan.

Curtis visita les Cowichan de I'ile Vancouver. ces Indiens comptaient parmi eux sept propridtaires du masque swaihwd, qui se produisaient h l'occasion des potlatch mais dtaient absents des rites d'hiver. Quiconque voulait donner un potlatch ou une autre fdte profane payait les

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Masque swaihwitenantsonsistre Cowichan.

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ddtenteursdu masque afin de s'assurerleur concours.Ils dansaienten montrant le ciel du doigt pour rappeler que, comme on le verra, Les Musleurs ancdtresen dtaient descendus. queam de I'estuairedu Fraser,qui acquirentle masque de groupes en amont, le prdposaient et aux potlatch, aux mariages,aux fundrailles, I'initiation. profanesaccompagnant aux danses Dans certainsgroupes de I'estuaire,un clown cdrdmoniel, portant un masque un peu ditr6.swaihwd) coupsde rent, attaquaitles masques lance comme pour leur crever les yeux, et les danseurs faisaientmine de le chasser. Les masquesswaihwd, et le droit de les appartenaient excluporter danslescdrdmonies, sivement) quelquesligndesde haut rang. Ces privilbgesse transmettaientpar hdrrtageou par mariage:une femme,membred'une ligndepropfiltaire du masque,passaitce droit aux enfants qu'elle donnait ) son mari. Ainsi s'explique unique, qu'h partir d'un point d'originepeut-Ctre le masquese soit rdpandu depuis le continent jusqu') I'ile Vancouver,et, depuisI'estuairedu Fraser, sur prbs de deux cents kilomdtres au nord et au sud. Dans I'ile, chezles Cowichanet leurs voisins Nanaimo, la sortie des masques

Musqueam). (probablement Bas swaihw6. Fraser Masque

les avait un r6le purificateur:elle ulavaitu assistants. Et, dans toute 1'aire considdrde,les masquesportaient chance et favorisaient I'acquisition desrichesses. Bien que cette dernidre fonction soit partout prdsente,et qu'on puissedonc voir en elle un attribut invariant des masques,les mythes relatifs ) leur origine diffbrent nettement selon qu'ils proviennent de I'ile ou de la c6te continentale.

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Les versions de I'ile relatent qu'aux premiers temps, les ancdtresdes masquestombbrent du ciel. Leur visage6tait en tous points semblableaux masquesactuels.Deux personnagesarrivdrent d'abord sur la terre; ils chassbrent le troisibme qui les suivait de peu, par crainteque son odeur corporelle,disentles uns, le bruit de son sistre,disentles autres,n'effrayit En les saumons. touchantle sol, le quatribmefit trembler la terre. Ils dtaient six en tout, et chacun apportait un bien particulier: arme, ou engin de chasse de pdche,ustensiledomesmagique... tique,rembde Un homme habitait ddla la rdgion. Il avait une fiIle. et. comme celle-ci 6tait faindante,il lui fit dpouserun des nouveaux venus rdputd bon chasseur.Accompagndede deux esclaves,la jeune fille parcourut une longue route jusque chez son prdtendu ) qui elle offrit des saumons Les sdchds. voyageursrequrentde la viande en Mais le mariagetourna mal: les trois dchange. enfantsauxquelsla femme donna le jour moururent en bas Age,et son 6poux la renvoyachez son pbre. Le m6me ancdtreddcidaalors d'dpouserla fille qu'un de sescompagnonsavait eue d'une

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dtrangbre.Beaucoupd'enfants leur naquirent. En compagniede son frbre (arriv6 du ciel immddiatement aprbs lui), il ddcouvrit un jour le Mais, en ddpit des chien, qui les aida ) chasser. mises en garde de son aind, ce frbre se rendit avecsafemme: sexuelle d'incontinence coupable comme prdvu, le chien disparut. Les deux hommes partirent ) sa rechercheet arrivbrent de prbs d'une chute que les saumonsessayaient remonter. Cela les fit rdfldchir; ils confectionnbrent des nassesen vannerie et les suspendirent le long de la chute: beaucoupdes poissons qui sautaienty retombaient.Ils les firent sdcheren quantitd, et, chargdsde leurs provisions,ils rentrdrentau village. que d'autres,cetteversion Plus ddveloppde n'en apparait que moins cohdrente.Les dpisodes sont sans lien, et le rdcit s'achbvede fagon abrupte sur une partie de pdchequi n'a pas de r6le dans I'intrigue et ne lui apportepas plusieurs une conclusion.Pourtant,on discerne paralldlismes:le principal anc6tre contracte I'un deux mariagessuccessifs, avec une dpouse (elle dtait sur terre aYantlui), et 6loiant|,rieure gn(,e puisque membre d'un peuple diffdrent; 45

(n6e bien I'autre avec une dpousepost|,rieure aprds qu'il fut arriv6.sur la terre) et prochaine (fille d'un de sescompagnons).

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A l'occasionde chaquemariage,deux types de d'auxiliaires se manifestent:les esclaves la et premibrefemme,qui sont des pdcheurs vraides semblablement mdles; et le chien de chasse ddcouvertpeu aprbsle secondmariage.Dansla pensdedes Salish, le chien est, en effet, une sorte d'esclave:uM6meun chien ou un esclave travaillera mieux s'il est bien traitd,, dit-on du c6td de PugetSound.Nous ignoronssi I'animal du mythe est mdle ou femelle,mais les Salish de I'intdrieurmettaienten connexionlesfemmes et les chiens. Un mythe okanagon explique upourquoi il existe aujourd'hui des femmeset

deschiens,.En invoquant rituellementI'Amede I'ours tud b la chasse,on lui promet: *Nulle femme ne mangerata chair, nul chien ne t'insultera." Il dtait interdit aux femmes et aux chiens d'uriner prbs des dtuves rdservdesaux hommes,et on tuait le chien qui aurait urind au m6me endroit qu'une femme. En fait, dans le mythe, le renforcementdu lien entre le chasseur et son chien implique, comme on I'a vu, Ie reldchement de celui entre I'homme et son dpouse. se montrant trop passionnd, mari En le lbsesa femme,car cetteviolation destabousde chasse prive desservices son chien,et il ne le de peut donc tuer le gibier dont un mari a pour devoir d'approvisionner son dpouse.A cette double faute d'un mari envers sa femme rdpondent,dans la premidre partie du mythe, les fautesd'une femmeenversson pdreet envers son mari : fautecontrela culture quand la demoiselleparesseuse refusede coudrelespeaux pour faire des vdtements: et faute contre la nature quand, maride,elle se montre incapablede procr6.erdes enfants viables. Pour tout le reste,les versions de I'ile restent rebelles aux efforts de formalisation.C'estseulement les comparant en aux versions continentales que leur construc- 47

donc tion pourra s'dclairer. Considdrons-les maintenant. tous diffdrences, lesgroupes Avec demenues du moyen et du basFraserfont le m6mer6cit. I1 y avait une fois un jeune garEonatteint d'une sorte de ldpre. Son corps exhalait une odeur puante, et m6me ses proches le fuyaient. Le malheureuxrdsolut de se suicider en se jetant dans un lac. Il dchouaau fond de I'eau, sur le toit d'une demeure garddepar des plongeons (Gavia sp.) et dont tous les habitantssouffraient un d'un mal mystdrieux(ou, selondesversions, atteints de bdbd ou la fille du chef seulement, convulsionsaprdsque le hdrosleur a crachdsur En le dos ou I'estomac). dchangede sa propre gudrison,il gudrit le ou les malades,obtint la jeune fille en mariage,et vit pour la premidre les fois les masques, sistreset les costumesdes danseurs swaihw6.En suitede quoi il seretrouva miraculeusementtransportd h I'endroit d'oi il avait plongd; ou bien le castor et le saumon de I'espbcedite Cohoe - parfois des animaux plus nombreux, cf. les noms des masques,supra,I-32 - lui ouvrirent un passagesouterrainqui ddbouchaitprbs de la ville

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actuellede Yale. Le hdros envoya ou conduisit sa seur jusqu'au lac, et il lui ordonna d'y jeter sa ligne de p6cheavec ou sanshameqon(avecdes plumes en guised'appit dans une version).Ellecaptura et amena h la surface les esprits aquatiques. Ceux-ci se ddgagbrent,et regagnbrentles profondeurs en abandonnant un masque et un sistre.Les deux jeunes gens placbrentces prdcieux oblets dans un panier ddcord,tressd pour I'occasion ou ils les enveloppdrent dansla plus i belle couvertureque possddait leur mbre. Tant6t le hdros remet h l'eau le masque original aprbs en avoir exdcutdune copie qu'il charge son cousinde porter en public (parceque, dit le mythe, il n'a pas lui-m6meles moyens d'assumer cettefonction); tant6t, pour le m6memotif, il donne I'original ) son jeune frbre. Mais qu'il s'agisse I'originalou d'unecopie,danspresque de toutesles versions,le masquepasse dot ) la en scur ou ) la fille du hdros quand elle se marie. Une seules'dcarte la norme en racontantque de le masquetomba aux mains d'ennemis. dtait Il prdcieux,en effet; ) son premier possesseur, il confdra le pouvoir de gu6rir les convulsions et les maladiesde peau, et, d'une faqon glndrale, 49

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dit la m6me version du mythe, utout vient le facilement qui possbde masque,. h Les mythes du continent offrent un autre commun: ils localisentavec prdcision caractbre leur intrigue. Elle se ddroule,disent les uns, h Iwawus ou Ewawus,village h trois kilombtres environ en amont de la ville actuellede Hope. Le lac oi le hdros cherchela mort est le lac de Kaukwdou Kawkawa,prbsde I'embouchure la rivibre Coquihalla,affluentde la rive gauche du Fraserori elle se jette ) la hauteur de Hope. hdrosd6bouche souterrain,le Aprbssonparcours prbs de Yale,et c'est vers Yale aussique toute sa famille va pdcher. Les Indiens Thompson, groupe Utamqt, Ils ont une versiontrbs proche desprdcddentes. nommentle villageWau'us et le situent) quatre ) ou cinq kilombtres I'estde Hope.Une version provenant du bas Fraserdonne plus d'importanceh la saur. Au ddbut du rdcit, elle vit seule avec son frbre; quand elle remonte le masque que les espritsdu lac attachent) son hameqon, elle croit d'abord avoir ferrd un poisson; elle prend peur ) la vue des plumeset s'enfuit.Son se frbre la renvoie,elle recommence, saisitenfin du masque,l'enveloppedans une couvertureet

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le met dans son panier. Son frbre I'exhibe dans certaines danses. Dordnavant, le masque se transmettrapar h6ritageou par mariage,mais il arrive aussiqu'il soit vold au coursdesguerres, puisque les accident sans grande consdquence pas les chants et les dtrangersne connaissent qui danses rendentle masqueefficace. A I'embouchure de la rividre Harrison, aussisur le bas Fraser,on raconte que le premier anc6treeut deux fils et deux filles.Celles-ci allaientchaquematin ) la pdche.Un jour, elles remontbrent bout de leur ligne quelquechose au de lourd, et virent les yeux protubdrantset les Elles plumesdu swaihwd(ici nommd sqoAdqod). leur pdre; l'6tre surnatureldisparut, appeldrent abandonnantson masqueet son costume.Les de descendants cettefamille prirent femmedans et des tribus dtrangbres, c'est ainsi que le port se du masque rdpandit'.

'Au mois de juillet D7a, j'ai entendu sur le bas Fraserune version un peu diffdrente provenant de Sardis, prds de Chilhwack. Le masque aurait dtd p6chd dans Harrison Lake par deux seurs cdlibataires farouchement hostiles au mariage, dont I'unique frdre dtait animd des m6mes sentiments.Le masque avait un bec allongd, et il dtait ornd de plumes auxquelles le frdre dut son salut: un jour que des ennemis le poursuivaient, i1 se sauva b la nage, et on ne

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Au sud de la frontibre du Canadaet des Etats-Unis, Lummi de I'Etat de Washington les nomment le masquesxoaxi et lui donnent une gros visage) la bouche forme un peu diffdrente: duquel manquentune ou deux dentsde devant, permettantau porteur de voir un peu par I'inUne t6te de corbeauau bec pointd vers terstice. le bas tient lieu du nez; elle se continue vers le haut par une forme humainedont la t6te ronde surmontele masque,hdriss6de fines baguettes auxquelleson a coll6 du duvet de cygne. Le portait un jupon danseur, jusqu'hla ceinture, nu des en laine de chbvresauvage, jambidresfaites d'une ddpouillede cygne,et il tenait ) la maindevina pas sa prdsencesous les plumes qui dmergeaientseulesde 1'eau. Cet incident ddmontra les vertus du masque. Plus tard, un chaman le compldta d'un costumede danseen plumes d'aigle; les deux sceursse rdformdrent et consentirent ) se marier, I'une chez les Souamish.1'autrechez les Sumas. Comme d'autres que nous allons passer en revue, cette version dvoque de manibre implicite une situation initiale quasi incestueuse:le frbre et les scurs sont abusivement rapprochds par leur commune hostilitd au mariage, qui les incite ) vivre ensemble; mais b la fin et comme ailleurs, I'obtention du masque et son emploi conduisent les femmes au mariage exogame. De son c6td, 1e motif du leurre flottant rappelle un dpisode analogue de ia version squamish (infra, I-62-O) qui provient prdcisdment de 1'un des deux groupes orl les hdroines se maribrent. Je remercie le chef Malloway, de Sardis, qui a bien voulu me faire ce rdcit, ainsi que les D" W. G. Jilek et L. M. Jilek-Aall qui m ' ont m dnagdune r enc ont r ea v e c l u i .

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un sistre du type ddjd dlcrit (I-39). Toute personneusurpantle masqueaurait le visagecouvert d'ulcbres. clown cdrdmoniel Un participait aux danses.Il portait un masque rouge d'un c6td,noir de I'autre,avecune bouchede travers et des cheveux en ddsordre.Les spectateurs ne devaientpas rire ) sa vue, sinon ils seraient eux aussi atteints d'ulcbres,au corps et dans les voies respiratoires.Ce clown pourchassaitles danseurs masquds, cherchaiten particulier) et leur crever les yeux (cf. supra,I-42) qui, comme ailleurs,sont fortementprotubdrants. Lesmasques sxoaxiseproduisaient I'occah sion descdrdmonies profanescommelespotlatch. En dtaient exclusles danseursqui avaient gagn6 la protection d'un esprit gardien, par crainte qu'en se manifestant hors de propos,celui-cine fasse perdre son caractbre ) la cdrdmonie. Le mythe d'origine mdrite une attention spdciale. Un garqon,orphelin de mdre, se prdparait ) I'initiation. Son pbre le traitait durement, lui infligeait toutes sortes d'6preuves, lui interet disaitmdmede s'approcher son uniqueseur. de Celle-ci, prise de pitid, alla le voir en cachette; elle promit h son frbre de I'accompagnerau 53

cours de sa prochaine dpreuvepour I'aider ) trouver un peu de nourriture.Ellelui donna des mais, au retour, le garqon racinesde fougbres, se sentit malade; soupEonnantquelque ddsobdissance, pbre le chassaet lui promit une son mort prochaine. Le hdros partit ) I'aventureet son corps se couvrit d'ulcbres.Certain qu'il allait mourir, il rdsolutde marchersi loin qu'on ne retrouverait pas son cadavre.Un jour, dpuisdpar la fatigue et la maladie, il s'arrdta prbs d'un ruisseau. Deux hommes peints I'un en rouge, I'autre en noir, lui apparurentpendantson sommeilet lui prddirent qu'il touverait le lendemain deux saumonsrespectivement rcuge et noir.II devrait les prdparer selon les rites, les faire cuire et les ddposersur un lit de choux puants (Lysichiton), mais, quelqueddsir qu'il en e0t, s'abstenir de les manger. A cette condition, il ne souffrirait plus la faim. Cette paire bicolore de saumons qui provoquentle hdrosfait dvidemmenr penser au danseurpard.d'un masquerouge d'un c6td, :roir de I'autre, qui provoque ) sa faqon les rorteurs des masquessxoaxi (supra, I_53).Les .:dicationsmanquentpour explorercettepiste. 3.evenons donc au rdcit mythique.

les Le h6ros observatrbs exactement prescriptions de ses visiteurs nocturnes; des grenouilles sortirent de sesjoues et de sa poitrine et sautbrentsur les saumons.La nuit suivante, ils les deux hommesr1.apparutent; ordonnbrent ) leur prot6gd de suivre le cours d'un torrent 11 dans les montagnes. se laissa qui s'enfonEait porter par le courantjusqu'h une vastedemeure des aux murs de laquelledtaientaccrochds costumes de danse.Un vieillard I'accueillit,s'excusa de ne rien pouvoir lui donner sur place. Qu'il retourne ) son village, ajouta-t-il, exige qu'on purifie sa maison et qu'on tressedeux paniers. Le jour suivant, continua I'h6te, la scur du h6rosdevrait secoupertrois longueurs de cheveux,les nouer bout ) bout et les immerger commeune ligne de P6che. et La saur s'exdcuta, retira sa ligne quand elle la sentit lourde. On entendit de sourdes rumeursqui venaientdu fond de I'eau; la jeune fille amena sur la berge un masque qu'elle trouva hideux, auquel dtaient attach6sdeux sistres.Elle p6cha ensuite un secondmasque; son frdre les mit chacundansun panier.La nuit il venue, devant le village assembld, entonna le chant des masquesqu'il fit porter par des 55

garqons robustes choisis entre ses proches Par parents(supra,l-49). la suite,divers villages I'engagdrentpour qu'il exhibe les masques et dans leurs cdrdmonies, il devint trbs riche. des A la diffdrence versionsde I'ile, on voit que cellesdu continent ont une intrigue claire et bien construite.Mais on voit aussique I'intient au fart cohdrence apparentedespremibres qu'ellesse bornent ) en inverser tous les dpiuneautreintrigue sodes, qu'il leur faut 6laborer et permettantde les remettrebout ) bout, quitte h et modifier I'ordre dans lequel ils se succbdent, placer en fin de rdcit I'image transformded'un dpisodedont la forme originale se trouvait au ddbut. Cette manipulation transparait d61hdans ici I'origine premidreattribu6eaux masques et 1l l). Dans les versionsdu Fraser, faut les hisser jusde laborieusement leur s6joursubaquatique qu'h la surfacede la terre; dans cellesde I'ile, du ils tombent spontandment ciel sansintervenSi tion extdrieure. le point d'arrivde,c'est-)-dire le sol, restele m6me,dansun casils proviennent du ciel, donc du haut; dans I'autre,du monde chthonien que les mythes situent au fond des

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eaux. Par tous leurs ddtails,les versionsde I'ile et celles de la c6te continentalemaintiennent entre elles le m6me rapport d'inversion. Les unes mettent au premier plan de I'intrigue la relation entre mari et femme, les autres celle entre frbre et scur. A l'dpisode initial des mythes de la c6te, relatif au fils malade et ingudrissable d'une mbre (une version prdcise que le pbreest mort), tenu ) distance causede ) jette ) I'eau- allant donc sa puanteuret qui se du haut vers le bas (axe vertical)- rdpondent, dans les versions de I'ile, d'une part, la fille paresseuse incapable d'un pbre (les mythes et ne disent rien sur I'ascendant maternel)et qui se ddplaceau loin pour trouver un mari (axe horizontal), d'autre part le troisibme ancdtre tombd du ciel, tenu ) distancede peur que le bruit de son sistreou que son odeur corporelle ne fasse fuir lespoissons. Seule versionlummi la adopte la formule pdre-filsen prdcisantque la mbre est morte, mais au prix d'une inversion qui opposecettevariante du continente toutes les autres.En effet,le hdrosy tombe malade par suitede sa ddsobdissance, celle-ci estla cause et de I'exil qu'il subit,au lieu qu'ailleurs, s'exile il volontairementen raison sa maladie. de ,7

Dans les versions de I'ile, la jeune fille dpousele premier masque;mais elle paresseuse prive celui-ci du moyen de devenir un ancdtre, puisque tous les enfants nds de leur union meurent en bas Age.Dans cellesdu continent, la au contraire,le jeune homme malade6pouse fille du chef des esprits aquatiques,qui est le et premier des masques, il gudrit aussitous les autresqui, du fait de son mariageet de la santd retrouv6e, pourront devenir des anc6tres.En suite de quoi I'hdroine des versionsde I'ile, le hdrosde cellesdu continentsont renvoy6s,elle chez son pdre, lui chez sa mbre. Le premier masquedes versions de I'ile dpousealors une proche parentequi n'est pas une scur, tandis que, dans les mythes du continent, le hdros enr6le sa scur ) laquelle,surtout dans la version lummi, I'unit une intimitd de caractdre fait Cetteintimitd excessive presque incestueux. dont, dansles sexuelle pendant) I'incontinence se versionsde I'ile, un des protagonistes rend coupableavec sa femme, et cela, bien que les eussent inter6td deux types de rapprochement dits par le pbre du hdros dans un cas, et dans I'autre par le frbre de I'individu concernd. ,8

Dbs lors, on comprend la raison d'tre de Iabizarre partie de p6chesur laquelles'achbvent abruptementles versionsde I'ile. Ayant placd au ddbut au lieu de la fin du rdcit I'origine des et masques, faisant tomber ceux-cidu ciel contrairement aux versions du continent oi ils du sont hissds fond de I'eau,les versionsde I'ile ne savent littdralementplus comment finir. Il ) leur faut une conclusion;mais, ndcessaire ce titre, celle des versions du continent ne peut plus subsisterque sous la forme paradoxale qui d'une p6chehors eau de poissons s'efforcent de remonter une chute, et qui retombent dans en des nasses vannerie. Cette affabulation fait qui pendanth la p6chede masques exactement se trouvent au fond de I'eau, et qu'on ddpose dans des paniers confectionndsexprbs. Ainsi : symdtriques I'une obtient-on deux conclusions oi deshumainspchent) la ligne desmasques qui sont dans I'eau, pour les mettre dans des protopaniers;I'autre oi des 6tressurnaturels, fabriquentdespaniersqu'ils typesdesmasques, ) suspendent I'air libre, selon une techniquede pdcheconquepour les besoinsde la cause,afin d'y capturerdes poissonsqu'une gymnastique 59 hors de I'eau. a trbs spdciale transportds

De cette analyse, deux conclusions se On constated'abord qu'il est plus ddgagent. facile de transformerles versionsdu continent la en cellesde I'ile que d'effectuer mdmeopdration en sensinverse.Car les versionsdu continent sont logiquement construites,alors que celles de I'ile ne le sont pas, mais acquibrent une logique ddrivdede I'autre si, et seulement si, on les interprbte comme le r6sultat d'une transformation dont les premibres illustrent I'etat initial. Il en ddcouleque les versionscontinentalesdoivent 6tre tenues pour primitives et cellesde I'ile ddrivdes,confirmant I'opinion de des spdcialistes cette rdgion du monde qui placentsur le moyen FraserI'origineet le centre de diffusion des masques swaihwd, mais en moins vagues, assez faisantvaloir desarguments convaincantsque ceux tirds de la comparaison Loin, donc, ) laquellenous venonsde procdder. de tourner le dos ) I'histoire,I'analysestructurale lui apporteune contribution. Cela dtant, on notera le caractbrehybride d'une version squamish,qui sembleavoir pour oblet principal de rendre compte d'une anciennemigration depuisla c6tejusqu'auxiles.

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temps,quandil y avait encore Aux premiers trbs peu de genssur la terre, deux frbresentendirent du bruit sur le toit de leur maison.C'dtait un homme qui dansait, portant un masque sxaixi (le mot squamishpour swaihwd).Ils I'inmais I'homme refusa et vitbrent ) descendre, continua ) danser.Finalement,il consentit et affirma aussit6t 6tre I'aind. uNon, dirent les frbres,tu es le plus jeune, nous dtions lh avant

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Danseur swaihwi en action

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toi. n Sur ce, I'homme se remit ) danser sans le vouloir s'arrdter.Les frbres, excddds, chassbrent versI'avaljusqu') une baie.L), I'inconnu dpousaune femme trouvde on ne sait oi, et ils dotde d'un eurent une nombreusedescendance Les vif tempdrament et dnergique. phoquesvisitaient parfois un rdcif proche de leur village. Quand cesanimaux aboyaient,les habitantsdu village primitif, plus dloigndde la c6te, accouraient; mais en pure perte,car leursrivaux, qui dtaient ) pied d'cuvre, avaient ddj) tout tud. ne Cet6tat de choses fit qu'empirer,et la famine r6gnachezles premiershabitants. Il y avait chez eux un sorcier qui conqut Il un stratagdme. passa des mois, des anndes peut-6tre, fabriquerun phoqueartificiel.Quand ) il apparut sur le fleuve, les gens de I'amont Ceux de firent semblantde se mettre en chasse. voulurent harI'aval, alertdspar le branle-bas, ponner en premier le faux gibier qui les attira vers I'aval, plus en amont. Puis il redescendit ) entrainantles hommesaccrochds la corde du et harpon,et, ) leur suite,les femmes les enfants Le et qui avaientplid bagage embarqud. phoque de bois se dirigea vers la grande ile. Quelques la familles,dont leshommesavaientlAchd corde

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en cours de route, abordbrent ) I'ile Kuper (toute proche de I'ile Vancouver, en face de Ceux qui tinrent bon arril'estuairedu Fraser). vbrent ) Nanoose(un peu plus au nord et sur la c6te de I'ile Vancouver).C'est pourquoi les sont amis des Squamishde la c6te continentale gensqui vivent de I'autre c6td du ddtroit. Cette version confirme notre interpr6tation. Car, se ddroulantentrele continentet I'ile, elle adopte toujours des partis intermddiaires. du Au lieu de tomber du ciel ou d'dmerger fond d'un lac, le premier masque surgit sur le toit d'une maison: h mi-hauteur entre le haut et le bas, et 1) mdme oi, dans les versions(aquatiques,,atterrit le hdrosrendantune visite invoI-4S).Il est lontaire aux esprits du lac (supra, accueillipar deux frbresformant une paire non I'oppositionmarmarqude,en qui se neutralise qude soit d'un mari et d'une femme, soit d'un frbre et d'une scur. Bien que d'origine encore relativement cdleste,ce masque n'est pas le puisqueles frbreset leurs conpremier ancdtre, citoyenshabitaient ddidla terre,et qu'ils jouent un r61e plus important que celui, trbs effacd, attribud par les versionsde I'ile h un seul individu reconnu comme premier occupant.Enfin, 6 3

l'opposition entre I'axe horizontal et I'axe verpuisquele masque tical estelle aussineutralisde, descendseulementdu toit d'une maison, et au qu'une chasse phoque, qui se d6rouleentidrement ) la surface de la mer, remplaceune p6cheh la ligne dans desabimeschthoniens. Venonsmaintenantau secondpoint. On a ) vu qu'en passantdes versionscontinentales final les celles I'ile,l'dpisode remplace masques de par des poissons (supra,I-59). Poissons,ils I'dtaientsans doute ddl) dans les versionsdu mais continent,non pas au senspropre, certes, au sensfigurl, puisqu'on les p6cheh la ligne. Et sont assimilds pas n'est-ce parceque lesmasques ) des poissons,au propre et au figurl, qu'ils Un ont une languefortement pendante? mythe donc aussisalishmais provenant ccur d'al6ne, de I'intdrieur,parle d'un espritdes eaux p6chd par une femme qui a pris sa langue pour un poisson. Inversant cette analogie - mais la comparaisonde mythes plus ou moins dloignds vdrifie souvent ce genre de transformationdu les Chinook Clackamas bas Columbia conun naissent ogre nommd nlangue, d'aprbs sa langue de feu, ddvoratrice,que tranchent des

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poissons ) nageoire coupante. Ces poissons qu'on retrousont sansdoute des Scorpdnidds, Des Salishde I'ile vera plus loin (infra,l-92-93). Vancouverprovient une sculpturereprdsentant un masqueswaihw6dont la partie ailleursoccupde par la langue porte en relief I'effigie d'un poisson;tandis que, des Lilloet aux Shuswap, prdvaut, dans I'int6riew, une croyanceen des ) espritsaquatiques moitid humainset h moitid une Toutes ces indicationssuggdrent poissons. double affinitd des masquesswaihw6 avec les poissons: mdtaphorique, puisque la grosse langue pendante,qui est un de leurs attributs ) ressemble un poisson avec caractdristiques, quoi on peut la confondre; et mdtonymique et pour autant qu'on les p6che, que c'estpar la languequ'on attrapeles poissons:oLemonstre aquatiquefemelle,conte un autre mythe ccur d'al6ne, resta lh, avec I'hameqon dans la b o u c he ..., Entre autres Salish de I'intdrieur, nous venonsde citer les Lilloet. On ne peut affirmer catdgoriquementque leurs masques appelds swaihwd aux masques sdinnuxcorrespondaient de leursvoisinsdu Fraser,car aucunexemplaire n'est parvenujusqu') nous. Celasembletoute- 65

fois probable, compte tenu, d'une part, des trouvds en territoire lilloet or) poteaux sculptds swaihwd, I'on reconnaitsanspeinedesmasques et, d'autre part, du fait que,commecesderniers masques, ceux dits sdinnux dtaientle privilbge qui les portaient ) I'ocde ligndesparticulibres des casiondes potlatch, et qu'ils repr6sentaient Le 6tresmi-humains,mi-poissons. mythe d'origine diffbre pourtant, malgr6 certainesanalogibs: visite h des 6tres surnaturels,habitants d'un monde souterrain,amis de I'eau et puisMais, au lieu que le hdros,qui santsmagiciens. les leur fait unevisiteinvolontaire, rendemalades une en et puis les gudrisse reEoive remerciement dpouse,ce sont ici les esprits aquatiquesqui font pdrir de maladieles jeuneshommesvenus leursfilles.L'un de ceuxdansI'espoird'dpouser rdussitenfin ) se ci, dotd de pouvoirs magiques, concilier ses h6tes et ) s6duire deux sceurs et grAce sa peau lumineuse douce au toucher. ) bien qu'end'un ldpreux, donc le contraire C'est suite il se changeen vieillard infirme qu'une de la ses deux dpouses, seule restdefidble, transporte dansun panier. des mythes d'originedes D'autresaspects swaihw6se retrouventintactschez les 67 masoues

Sculptureen bois de l'ile Vancouver,reprisentantun swaihw(' (cf. pouryud'unelangueenforme de poisson p. 65).

Lilloet,mais) propos de I'origine du cuivre. On sait que les peuplesde cette partie du monde prisaient fort ce mdtal, qu'ils obtenaientjadis lesquelles se par troc de tribus septentrionales, le procuraient auprbs d'lndiens de la famille qui athapaskan I'extrayaient) I'dtat linguistique les et natif. Aux tempshistoriques, navigateurs

Poteaux fun6raires.Lilloet

trafiquantsintroduisirentle cuivre feuillard qui I'autre. rapidement supplanta Une grand-mbreet son petit-fils, content les Lilloet, survivaient seuls h une dpiddmie' de CommeI'enfant ne cessait pleurer,la vieille, pour le distraire,lui fabriquaune ligne de p6che avec ses cheveux, et elle mit une pelote de

cheveuxsur I'hameqonen guise d'app|t. Ainsi 6quip6,lejeune h6rosp6chale premiercuivre, Sa talisman qui le rendit bon chasseur. grandmbres6chala viande,tanna et cousit les peaux; Le Il ils devinrentriches. hdrosdlcidadevoyager. les fit la connaissance Squamish, invita ainsi des que d'autrestribus. Devant sesh6tes,il chanta, exhibasoncuivreet distribualesrichesses dansa, Deux chefs lui offrirent leurs filles accumuldes. en mariage; ils requrent en dchangedes morceauxde cuivre. Le jeune homme et sesfemmes eurentbeaucoupd'enfants,surtout desfils auxleursfilles,non quelsd'autreschefsaccordbrent sansrecevoir du cuivre h leur tour. C'est ainsi que le mdtal se r6pandit dans toutes les tribus. le Ceux qui en possddaient tenaient pour un bien trbs prdcieuxdont ils ne voulaient pas se tant cette matidre rare leur confdrait dessaisir, de prestige. Ce mythe attribue donc au cuivre la m6me origine aquatiqueque d'autres mythes prdtent au masque swaihwd. L'un est p6chd comme procure pareillement I'autre, et leur possession aussi la richesse. Cuivreet masquese rdpandent par la voie de mariagescontractdsdans des 70 groupesdtrangers,avec cette diff6renceque le

n'estpasle mdme:le masque sens circulation de swaihwd va de la femme au mari et ) leurs tandis que le cuivre va du mari au descendants, pdre de la femme, donc h un ascendant.On dirait qu'en passantdes tribus du Fraseraux Lilloet, le mythe sur I'origine des masques swaihwdsubitune sortede fission:on le retrouve en partie dans le mythe d'origine des masques sdinnux,qui sont probablementla m6mechose que le swaihwd;et, pour I'autrepartie,dansle mdtallique mythe d'originedu cuivre, substance sans rapport apparent avec les masquesbien que, sous I'angle dconomiqueet sociologique, la elle remplisse mdmefonction sousrdservedu sensdanslequelcirculentles prestations. Un mythe skagit raconte la m6me histoire que les mythes du Frasersur le swaihwd,sauf que les espritssurnaturelsqui rdsidentau fond des eaux accordent ) leur visiteur non les des mais les urichesses quatre points masques, ) cardinauxo, bienscomparables ceux que procure ailleurs soit le masque,soit le cuivre. A I'autre extrdmitd de I'aire de diffusion des masquesswaihwd, les Kwakiutl ont un mythe sur un garqonnomm6 He'kin. Toujoursmalade, 7l

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il la peau couverted'ulcdres, se rdfugieau sommet d'une montagne pour attendre la mort. Une crapaudequi se trouve l) le gu6rit aYecun onguentmagique,lui donne une plaque de cuiobjets que les Kwavre ouvragde(cesdtranges kiutl et leurs voisins tenaient pour leurs biens les plus prdcieux,et qui jouaient un r6le considdrable dans les transactionssociales,dconoet miqueset rituelles), elle lui confbrele nom de Le Laqwagila. hdrosretourne Faiseur-de-Cuivres, et chezles siens,sa scur I'accueille le fdlicitede sa nouvelle apparence.Il lui fait pr6sent du cuivre (pour qu'elle I'apporte en dot h son futur mari,. NonobstantI'inversion du lieu oi le hdros cherchela mort (sommet d'une montagne au ) lieu de lac profond),ce mythe affecte I'origine du cuivre la m6me intrigue et plusieurs des dans ddtailsqui nous sont apparussignificatifs les mythes d'origine du swaihwd,en particulier le r61e imparti h la saur. MOmela crapaude dans cesmythes, secourable 6tait ddjdprdsente sous la forme des grenouillesqui, dans la verdu sion lummi, s'dchappent corps du hdroset le ddlivrent de sa maladie.Ce batracienjoue aussi un r6le dans une version du bas Fraser ddi)

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I-48), bien qu'on n'ait pas fait utilisde(supra, un sort ) cet dpisode:quand le hdros s'arr6te au bord du lac oir il veut se noyer, il p6che d'abordun saumonet le r6tit; mais,au moment il de le manger, trouve ) saplaceunegrenouille. 7J

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Ce coup du sort le pousseh bout, et il met son projet ) exdcution. Comme il fallait qu'il se jetAt ) I'eau pour rencontrerles espritsgudrisseurs et donateursdes masques,on peut dire au que la grenouille,substitude saumon,est la causeindirectede sa bonne chance.De m6me, dans la version lummi, les grenouillesle ddlivrent de leur prdsencemaldfiqueen dchange, pourrait-on dire, de sa renonciationaux deux saumons sur lesquels sautent les batraciens, ) comme pour s'y incorporerou se substituer eux (supra,I-5r). Le mythe kwakiutl et ceux des Salishinstituent le mdme rapport de corrdlation et d'opposition entre crapaudeou grenouille et saumon,et ils donnent au batracien un r6le identique,dans une intrigue relative ) I'acquisitionsoit du cuivre, soit du swaihwd. De tout ce qui prdcdde,quelquesconclusions provisoires se dlgagent. On a mis en dvidencecertainstraits invariants des masques tant sous leur aspectplasswaihwd envisagds tique que souscelui de leurs mythes d'origine. Ces invariants plastiquesincluent la couleur blanchedu costume,due b I'emploi frdquentde plumes de cygne et de duvet; la langue pendante et les yeux protubdrantsdes masques;

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enfin, les t6tes d'oiseauxremplaqantparfois le nez ou surmontant la t6te. Si I'on se place maintenant au point de vue sociologique,on ou relbve que la possession le concours des des I'acquisition richesses, favorisaient masques danslespotlatchet autres qu'ils comparaissaient cdrdmoniesprofanes, mais dtaient exclus des en rites sacrdsde I'hiver; qu'ils appartenaient nobleset setransmetligndes propre ) quelques taient seulementpar hlritage ou par mariage' enfin,lesmythes D'un point de vue sdmantique, font ressortir une double affinitd des masques d'une part, et avec swaihw6:avecles poissons, de le cuivre, d'autre part. Est-ilpossible comet prendrela raison d'6tre de cestraits dispersds Tel de les articuleren systbme? est, au point oti le nous en sommes, doubleproblbmeque posent swaihwd. lesmasques

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mDansI'ile Vancouver,lesgroupesde langue avec les Nootka h I'ouest,et salishvoisinaient avec les Kwakiutl au nord. Cette proximitd explique que les deux peuplesaient empruntd aux Salishles masquesswaihw6,et m6me leur nom qui sedit en kwakiutl xwdxwd ou kwdkwd. nootka D'une factureplus rdaliste,les masques un et kwakiutl repr6sentent visageanim6 d'une tous les violente,mais ils prdservent expression au caractbres nousavonsreconnus swaihwd. que Certainsexemplairesprovenant des Kwakiutl sont peints en blanc et portent, ) la partie supdrieure,des motifs stylis6s rappelant les chez olumesdont s'ornentles mdmesmasques

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xw Masque 6.xw Kwakiutl. t..

xwdxw6,tant nootka Et les Salish. les masques les que kwakiutl, ont la languependante, yeux en protubdrants,et des appendices forme de parfois,plus caprit6tesd'oiseaux celles-ci, portaientun Les rdparties. danseurs cieusement sistre identique ) celui du swaihwd. On ne du sauraitdouter qu'il s'agisse m6me masque, plus transposd dans un style moins hidratique, lyrique et plus vdhdment.xw xw Masques 6. (,.N ootka.

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