Cette Semaine N°90

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    CETTE EMAINETreizime anne Apriodique automne 2006 n90 Prix libre ou abonnement

    Ce que je mprise, cest lexistence que je mne, moi ; que je

    suis condamn mener pendant des annes encore. Instruction ;

    ducation. On mlve. Oh ! lironie de ce mot-l !

    Education. La chasse aux instincts. On me reproche mes dfauts ; on

    me fait honte de mes imperfections. Je ne dois pas tre comme je

    suis, mais comme il faut. Pourquoi faut-il ? On mincite suivre les

    bons exemples ; parce quil ny a que les mauvais qui vous dcident

    agir. On mapprend ne pas tromper les autres ; mais point nepas me laisser tromper. On minocule la raison ils appellent a

    comme a juste la place du cur. Mes sentiments violents sont

    criminels, ou au moins dplacs ; on menseigne les dissimuler. De

    ma conance, on fait quelque chose qui mrite davoir un nom : la

    servilit ; de mon orgueil, quelque chose qui ne devrait pas en avoir :

    le respect humain. Le crne dprim par le casque dairain de la

    saine philosophie, les pieds alourdis par les brodequins semelles de

    plomb dont me haussent les moralistes, je pourrai dcemment, vers

    mon quatrime lustre, me prsenter mes semblables. Jaurai du

    savoir-vivre. Je regarderai passer ma vie derrire le carreau brouill

    des conventions hypocrites, avec permission de la romantiser un

    peu, mais dfense de la vivre. Jaurai peur. Car il ny a quune chose

    quon mapprenne ici, je le sais ! On mapprend avoir peur.

    Georges DarienLe voleur 1897

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    2ette Semaine septembre 2006

    Le mouvement contre le PELa plainte des pleureuses 3Tirer sur une ambulance ? 6Le mouvement tudiant en rgion parisienne 7Limites du mouvementisme 10

    Nu sances techno- ndustr ellesNouveaux ravages anonymes de champs OGM 15Attaque contre le laboratoire de lANDRA 15

    Aux bars anonymes de lle de SeinMontreuil, encore faudrait-il quil y ait une lutte ! 2Nouvelles de la guerre sociale

    Ital eOpration 1001 16Lettres de prison de Mike et Juan 7Les procdures en coursTrop tard, messieurs, trop tardLa tempte teint la amme olympique 2

    Opposition au Tav Munich-Vrone 2Brves du dsordre 2

    EspagneLa lutte du quartier de Gamonal Burgos 22Sur le prisonnierisme 26

    exique Atenco, des machettes contre un aroport 30 Chronologie de cette lutte (2001-2002) 30 Impossible, R. Flores Magn (1911) 33 Solidarit avec la nouvelle rvolte dAtenco 34

    Gagne qui gagne, rien ne change 36 La commune de Oaxaca 37

    Belgique Brves du dsordre 9

    Brves du dsordre de partout 38

    Georges Darien, extrait du oleur(1897) 1 Le Rtif extrait du Rvolt (1909) 40

    CETTE SEMAINE

    BP 275 54005 Nancy cedex francehttp://cettesemaine.free.fr/[email protected]

    Abonnement : 12.50 euros / an(15.50 euros hors de france)

    ien enten u, es personnes quiouhaitent recevoir le journal nontpas orc ment se poser a question e

    labonnement, une demande suft

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    AMOBILISATION contre le Contrat Premirem auche a investi comme une vidence le

    terrain de lopposition la prcarisation gnrale

    du travail salari, qui simpose dans la phaseactuelle de restructuration capitaliste commemode privilgi de gestion de la force de travail.La question est de savoir quelles perspectivesde lutte un tel constat est en mesure dedgager. Car, enferre dans la litanie syndicaleet gauchiste de dfense des acquis sociaux et dudroit du travail, extrmement prgnante dans

    le cycle actuel de luttes, cette opposition peine se dgager dune stricte ractivit, qui consistedavantage invoquer un contre-modle destabilit et de scurit salariales incarn parexemple par le CDI. Une ractivit qui tablit

    une hirarchie des di rents contrats de ventede la force de travail en fonction du caractreplus ou moins tolrable de chacun dentre eux.Nous nous intresserons donc principalementici cette rhtorique, tout en sachant que

    les luttes sont parvenues delles-mmes parendroits, grce leur richesse, la dpassermatriellement et thoriquement.

    CPE, CDD, CDI, ETC.

    Da ord, le contrat de travail nest pas autrechose que la formalisation juridique durapport social quest le salariat. A lexistence

    dun march du travail dni comme libre,cest--dire sur lequel certains vendent dautres leur force de travail, rpond unecontractualisation de cette relation. Certes, sanature juridique a volu. Dabord limit unedimension purement individuelle (transactionentre deux individus), le contrat de travail, travers lavance de la lgislation socialecaractristique du ordisme et lapparition desconventions collectives, sinscrit progressi-

    vement dans un cadre collectif. Surtout,au-del de sa forme juridique, il sagitstructurellement de la dnition rglementaire

    des conditions de lexploitation, ou, pour ledire autrement, de la xation des modalits etde lintensit de lextraction de la plue value.Il ne sagit pourtant pas de dire loppos dessyndicats que tous les contrats sont quivalentsentre eux et assimilables lultime horreurdu travail orc . Lutilisation dune gurerepoussoir sense radicaliser la critique dusalariat et en accentuer la force de persuasion(du genre CPE, CDI, cest toujours le STO ou contre lesclavage salari ) entretient enfait la confusion en prenant la partie pour le

    tout. La mise au travail gnralise rpond auprocessus daccumulation capitaliste et dpasse

    donc tel ou tel type de situation exceptionnellemoralement ou historiquement insupportable.Le problme avec le salariat nest pas soncaractre orc, travers la contrainte extrmede lesclavage ou de la saisie pure et simple

    t obligatoire de la force de travail dansle contexte dune conomie de guerre parxemple. Ce quil convient de combattre est la

    normalit du rapport salarial dans ses formesctualises les plus banales, et auquel nous ne

    pouvons pas chapp, avec ou sans travail.Sans positionnement moral, les diffrents

    types de contrats de travail donnent en fait unendication sur ltat et lintensit du rapportexploitation, et pour cette raison rpondenthacun des conditions matrielles prcises.

    La critique de l institutionnalisation de laprcarisation du travail dont il est questionvec le CPE et le CNE se place bien en dee ce qui est en jeu. Dabord parce que ce qui

    pose problme est moins linstitutionnalisation

    e la prcarisation, que le mouvement rel deprcarisation qui est devenu la rgle du rapportalarial depuis plusieurs dizaines dannes.

    Une prcarisation du travail qui passepar la exibilisation de la main duvre etlabaissement tendanciel du cot du travail, sansretour en arrire possible. Ensuite parce que leCPE et le CNE appartiennent un dispositifgnral (annualisation par les 35 heures,mplois-jeunes, CES, RMA, projet de nouveau

    CDI...) visant faire entrer en adquationette situation avec les rgles juridiques isposition. Enn, parce que sattaquer une

    norme conditionnant lextraction de la plue

    value doit pouvoir non pas dessiner un retourun salariat plus scuris, mais bien nourrir

    les dsirs dabolition du salariat lui-mme.La dnonciation de l institutionnalisation

    e la prcarisation du travail salari trouveu sein du mouvement contre le CPE un dees principaux canaux dexpression dans laise en cause du recul inacceptable des droits

    ociaux. Des droits sociaux conquis au le dcennies de luttes sociales et ouvrires.

    Une vritable chape de plomb doctrinalee constitue, dont lampleur et lcho, maisgalement limpuissance et la tristesse qui sen

    gagent ncessitent de sen dfaire. Cetteoxa communment admise prend appui sures slogans tels que nos luttes ont construit

    nos droits , sur des mots dordres de dfensecharne du droit du travail ( on sest battu

    pour le gagner on se battra pour le garder ),ettant lindex un CPE accus dtre la

    tte de pont dune entreprise patronale etgouvernementale de dmantlement programm

    u Code du travail, ou encore de refonte duontrat de travail au prot du seul patron.

    La ncessit dun changement de perspectiveexprime alors en ces termes : ressasser

    linni la dfense du droit du travail et en

    ppeler lEtat pour garantir son intgritenace par lhydre librale, ou prendre acte

    pour la combattre) dune offensive cumulativeu capital consistant uidi er les conditionse lexploitation et garantir la mise au travail de

    e gron ement e a ata et a p a nte es p eureuses

    Retour sur le mouvement anti-CPE

    Le mouvement anti-CPE sest presque

    termin comme i avait commenc. out

    est rentr ans or re, ou presque. ar

    i nous reste e got es affrontementsco ectifs, u or e ans es rues qui

    laisse libre cours limagination de

    c acun, et avoir vcu aprs es

    meutes de novembre une seconde

    fois en peu e temps que que c ose

    de diffrent. Non par sa forme, seuleintensit a surpris, mais par son contenu

    rel, les rapports et les possibilits de

    nous avons ressentis, par ce sentiment

    iffus une continuit ans a

    conictua it qui aissera es traces.

    Et comme aprs novembre 2005, les

    procs continuent ans in iffrence u

    plus grand nombre. Si les peines sont

    p utt gres au regar e ce qui se

    distribue quotidiennement dans les cours

    e massacre e a pu ique nommes

    tribunaux, elles sont toujours trop

    our es. etit aperu ors e aris, au gr

    es trouvai es :

    yon, ut juin tp ane est

    condamn 6 mois ferme en appel,

    accus e vo avec vio ence u sac une

    RG.

    etz e 5 septem re, e procureur

    a rc am eux mois avec sursis contre

    uit personnes accuss avoir jet e 3

    avril des ballons de peinture sur le Medef

    et es projecti es sur es ics, et a0 000 euros un manifestant pour le

    ocage e a gare e 3 mars ver ict e

    19 septembre).

    A Caen, un manifestant se mange 3

    mois ferme en comparution imm iate

    suite aux affrontements u avri

    a gare. e 3 juin, eux tu iants se

    prennent 2 mois avec sursis pour e

    blocage du priphrique du 4 avril.

    A Toulouse le 31 mars, quatre

    manifestants sont con amns 3 mois

    dont 1 ferme, un autre 4 mois dont 1

    ferme.

    reno e e 25 mars, 2 manifestantsprennent mois avec sursis et un, 5

    mois avec sursis. Le 30 avril, 12 autres se

    prennent un tota e 32 mois avec sursis

    et un mois ferme.

    A Rennes le 17 mars, deux manifestants

    c meurs se prennent mois avec

    sursis et mois avec sursis. n autre

    manifestant c meur e 22 ans , accus

    e jet e mo otov se pren mois

    ferme. Le 24 mars, un SDF accus de jet

    e pav se pren 8 mois ont 3 ferme. e

    29 mars, un lycen de 18 ans accus de

    gra ation une armurerie, incen ie e

    poubelle et agression dun manifestant

    se pren 8 mois ferme. e jour- ,

    trois autres lycens du mme ge se

    mangeront u ferme, e un trois mois.

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    ette Semaine septembre 2006

    tous. Mme si les deux termes voqus sonte fait lis, lorganisation de lattaque contre

    lapprofondissement de la restructurationapitaliste ne saurait se satisfaire dunndiguement pleurnichard et timor du recules droits ouvriers et de la dfense bate duode du travail.

    La ataille prsente et venir na pas con eron grondement sourd aux hurlements

    plaintifs des pleureuses.

    LERVISIONNISMEPARLEDROIT

    La premire raison cela est que le postulates droits-sociaux-conquis-de-haute-

    lutte nest pas autre chose quun a prioridologique. Pour ceux qui en font un actee foi, il procde fondamentalement dune

    llusion rtrospective.Le mouvement social labellis de

    es dernires annes prsente en effetette spcicit de concentrer ses effortsrevendicatifs sur la dfense des droitsxistants, quil sagit de prserver des coupse boutoir dun libralisme dchan, et sur laonqute de droits nouveaux, cest--dire desispositions juridiques rgissant la vie sociale,

    t tablissant pour chacun un certains nombree prrogatives, de possibilits, de garanties.

    Une telle polarisation est caractristiquees limites intrinsques des luttes actuelles,

    nes de la dissolution du vieux mouvementuvrier. Ces limites ont merg dumantlement de la communaut-identit

    uvrire et de lchec du programmatismelafrmation de la classe ouvrire appele

    prendre possession des moyens de productionpour librer le travail) pour promouvoir une

    ommunaut dappartenance de substitution :la citoyennet. LEtat en assure lareproduction, partir du moment o il sagit

    une communaut qui lui est compltementntgre. Rien dtonnant ds lors que laolonisation de la mentalit revendicativectuelle par lidologie du droit saccompagneune statoltrie assume comme telle.

    Le reux de loffensive proltarienne depuis

    les annes 1970 rsonne dans la crispationur la dfense de lexistant, et notammentet existant dont la xation juridique a

    vertu de sacr. Nimporte quel mouvementocial se nourrit dun hritage, assum ou

    non, identi ou non. Les droits sociaux, surlesquels se cristallise lhritage de nombrede mouvements, apparaissent comme lesderniers oripeaux dune identit ouvrire

    pour laquelle on prouve de la nostalgie,mme sil est dsormais impossible de laauvegarder. En invoquant perptuellement

    les ri es tatises de la vieille identituvrire que sont ces droits, le dmocratismeitue en fait moins son point dancrage dans

    la vielle classe ouvrire que dans les oripeauxde celle-ci mdiatiss par lEtat, et donc dans

    lEtat lui-mme.Lillusion rtrospective qui anime lhystriedmocratiste en faveur des droits consistedonc tablir que les droits sociaux (et

    politiques) qui existent aujourdhui et quilagit de dfendre ont t conquis comme

    tels et dans la mme dmarche par les luttesuvrires du pass. Qu limage des ers

    militants des droits bafous des sans-papiers,des chmeurs, des salaris, des mal-logs,les ouvriers ont subsum leurs luttes dansla volont dinscrire leur droit au travail et lexistence dans le marbre de la loi. Que laomme des victoires de la lutte des classes et

    des batailles de la guerre sociale depuis 200ans nest pas autre chose que ldication

    lente, laborieuse et linaire de codesjuridiques. Elle consiste en fait prter auxproltaires en lutte contre leurs conditionsdexistence et de travail, voire contre leurondition et le travail eux-mmes, loutillage

    mental contemporain : celui de lo session

    itoyenne et judicialiste. Triste rvisionnisme.Sans proposer une gense historique dudroit du travail, lanons quelques rexions.Llaboration de droits sociaux, parmi lesquels

    les droits rgissant lexercice du travail salari,st un processus qui vient sanctionner desituations matrielles concrtes. On peut parxemple penser la formalisation juridiquedune situation de fait existant pralablementdans des branches dindustrie. Ainsi en est-ilde la loi de 1906 sur le repos he domadairequi sanctionne une pratique dj largementacquise, puisque une large majorit des

    grandes entreprises la n du XIXme siclehment le dimanche. De la mme manire

    la cration par lEtat dune assurance contreles accidents du travail se contente de relayerdes institutions patronales dj en place dans

    les grandes entreprises, avec des caissesdassistance alimentes par les cotisations,

    les subventions et les amendes ouvrires.Par ailleurs, la reprsentation de lactionouvrire entirement suspendue la volontde conqurir des droits se heurte la ralitde la praxis de la classe, cest--dire aucaractre anti, extra ou ante juridique denombreuses pratiques ouvrires. Parmi

    ces pratiques qui prcdent le droit et quinprouvent pas le besoin de sen remettre lui pour sexercer, gure par exemple

    lauto-rduction du temps pass au travail,cest--dire lhabitude darracher, au granddam des patrons, du temps non-travaill aurapport salarial : raccourcir les journes enquittant le travail lorsque celui-ci est termin,soffrir la Saint Lundi en chmant, oue ectuer la semaine en quatre jours de travailintensif... Les ouvriers, pourtant qualis,qui en France ou en Angleterre pratiquaientau XIXme sicle dans la quotidiennetde leur vie au travail la Saint Lundi nont

    jamais ressenti la vre juridique den faireun droit reconnu par la socit et lEtat.Dans le mme ordre dides, en 1936, alorsque les occupations dusines ont pris n, larsistance au travail sest poursuivie : quand

    bien mme les 40 heures ont t acquises,les ouvriers poursuivent leur habitude labsentisme, aux retards, au ralentissementdes cadences et linsubordination ladiscipline usinire. Comme pouvait ledclarer un cadre de Renault, dans lesdiffrents ateliers, les ouvriers ont modi de

    leur propre initiative les heures de prsence,

    se prsentant une heure plus tt ou une heureplus tard leur travail, et le quittant enconsquence.La conception judiciariste de lactionouvrire semble donc procder duneconfusion, somme toute largement rpandue,entre la matrialit des luttes et des conduitesdes proltaires la base, et larsenalrevendicati des encadrements syndicauxet politiques du mouvement ouvrier .Entre la multiplicit et lextrme richesse des

    pratiques relles de la classe, et les grandescampagnes syndicales et socialistes en faveurde telle avance sociale, dont lexistenceest en effet suspendue une identication

    par lEtat et le capital. A la n du XIXmesicle, le mouvement ouvrier sest

    justement structur, a tendu son empriseorganisationnelle et gagn en lgitimit

    politique en mme temps quil a commenc se penser dans lhorizon du droit. Sa

    lgalisation, son rection en interlocuteur eten reprsentant impliquent de fait de bornerson action et ses pratiques cet horizon.

    A CEUX QUI VEULENT CASSER LCODE DUTRAVAIL...

    Les exigences en termes de gestion etde reproduction de la force de travailimprimes dans le droit apparaissent si lonsintresse au fameux Code du travail en

    Retour sur le mouvement anti-CPE

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    voie, donc, de dmolition. Le discours sur sonmantlement est dailleurs assez trange.

    Comme si le Code du travail, nouveau texteacr, tait autre chose quune lgislation

    perfectible en fonction des besoins actualisse la mise en uvre de la force de travail.st-ce que les amnagements lgislatifsn matire de rpression, la acilitation deertaines procdures de police ou de justice,

    e faon adapter les prrogatives policires,le jugement et lenfermement aux exigences

    e lEtat et du capital conduisent des levese bouclier scandalises contre la dmolitione notre vieux Code pnal ?

    N par voie lgislative en 1910 et enrichi parla suite, le Code du travail est par dnitionune codication, celle des lois ouvrires

    ises en place par la Troisime Rpubliquepartir des annes 1870-80. La questionui se posait alors tait soit de dgager unspace autonome pour les droits et devoirs

    relatifs lexercice du travail salari, aurisque de fonder un droit ouvrier ou une

    lgislation de classe , soit de maintenir cesroits nouveaux au sein de lancien Codeivil, au risque de le faire clater. Les dites

    lois ouvrires de la jeune Rpublique sontu fondement de la lgislation concernant

    lorganisation du travail (interdiction dutravail des enfants et rglementation dutravail de nuit), sa dure (loi de 1906 surle repos dominical), la scurit (mise la

    harge de lemployeur lobligation de garantirlouvrier contre le risque daccident, rgles

    hygine et de scurit dans les usines),le contrat de travail (institution dun dlai

    e pravis et dun recours avec dommages-ntrts contre le licenciement abusif), etc.

    Alors, quid de ces droits-conquis-de-haute-lutte ? Certes, cette uvre lgislative estune prise en acte par lEtat de la croissance

    e la classe ouvrire et de son potentiel delutte. Mais ce qui est en fait alors en jeu estune vaste entreprise de domestication de

    la classe, condition de son intgration auonctionnement paci de la socit capitaliste.

    Face lmergence dun proltariat de grandendustrie guett par la sous qualication,

    le capital et lEtat se doivent dentretenirun nouveau rapport avec la main duvrendustrielle : pour le capital, sassurer laormation et la reproduction dune force de

    travail rgule ncessaire aux mutations delappareil productif, et pour lEtat garantirles conditions de cette formation et de cettereproduction.La rgulation juridique de la classe ouvrire

    par cette codication renvoie la ncessit dexer des rgles prcises admises et reconnues

    par ceux que lon veut rguler. De produireun ensemble de droits et de devoirs faisant de

    la communaut ouvrire une entit intgre,un acteur du jeu social, et, travers ses

    reprsentants lgaux mls au fonctionnementtatique, un partenaire. Cette rgulation

    juridique fonctionne dailleurs de pair avecune entreprise de rgulation patronale desuvriers sur les lieux de travail (et au-del),

    travers le renforcement de la disciplinedusine et les tentatives dencadrement

    paternaliste. Lobjectif est alors globalementde rgulariser lemploi industriel, ce quiimplique un changement radical de modes de

    vie et de comportements ouvriers lgard dutravail, considrs comme des obstacles lauidit du march du travail et la formationdune main duvre police : stabilisation auein dune mme unit productive en tarissant

    les uctuations dactivit (limitation de lamo ilit ouvrire dune entreprise ou dunergion lautre), dpendance accrue aualaire (limitation des revenus de lconomie

    non-marchande) ou encore ancrage de lanormalit salariale dans le temps de la vieuvrire. Le code du travail inscrit donc sa

    ncessit dans une domination accrue duapital sur la ralit du travail ouvrier.

    DROITDUTRAVAILOUDFAITESDUPROLTARIAT ?

    La mise en place du droit est certes lexpression tel moment de lhistoire dun rapport de forcentre des groupes aux intrts antagonistes, la

    formalisation dun conit dintrt matriel,par exemple entre une revendication ouvriret la rsistance patronale cette mmerevendication. Mais cela ne veut pas dire que

    les proltaires en lutte le sont pour conqurirde nouveaux droits. Les luttes concrtesnont jamais en vrit pour objet des droits.Mme si une grve nat dune revendicationontre des conditions de travail vcuesomme insupportables, contre telle ou telle

    mesure disciplinaire ou en faveur duneaugmentation salariale, ce qui est en jeu estautre chose quune simple reconnaissancedun quelconque droit . Le problme nestdailleurs pas le fait en soi de revendiquer,mais les pratiques qui sagencent partirt au-del de la revendication. Ce qui estn jeu, cest lexercice dune puissance

    de classe et lla oration de solidaritsffensives concrtes contre les formes du

    travail salari ou le travail salari lui-mme.

    Mme le combat pour la rduction de ladure de la journe de travail dpasse ladmarche du droit ou du droit de :

    laspiration travailler moins, la mise enause du surmenage et de lenchanement

    un temps dict par les ncessits de laproduction mettent en jeu autre chose quunereconnaissance par un tiers. Dautre part,

    lorsquil sagit de dfendre la rduction dutemps pass au travail contre une mesurequi tend la remettre en cause, ce qui estressenti comme impossible de ne pas lcherest moins un droit que des bribes de vie et de

    temps arraches la valorisation capitaliste.Lirruption du droit procde en fait de laformalisation dun statu quo, cest--direnon pas de la ormalisation juridique des

    termes mmes de la lutte mais de son issue,de lissue du rapport de forces. A limage desgrands accords conclus par les courtiers de

    la force de travail que sont les encadrementssyndicaux, le patronat et lEtat (accordsMatignon en 1936, accords de Grenelle en1968), certains des droits sociaux dont il estquestion, dont le sacro-saint droit du travail,

    sont donc conquis non par les luttes mais parleur issue, cest--dire quils expriment leslimites de ces mmes luttes, et leur chec.Au lieu de victoires ouvrires, lacquisitionde droits nouveaux en sanctionne davantage

    les dfaites. Au prix du dsarmement deloffensive, il sagit pour les ouvriers de gagner,toujours en de de ce qui sest jou dans lalutte, des protections, des avantages circoncits,des amnagements dans leur exploitation,et pour le capital dliminer certains de sesarchasmes pour permettre une reproductionuidie de la main duvre, et en touscas de toujours prserver les rgles du jeu.Labsorption de toutes les mesures que

    lui impose la lutte ouvrire est lune desillustrations de la capacit intrinsquedautorgulation du capital. Ce que concde

    le capital la classe ouvrire sinscrit dansune dmarche de neutralisation, qui cherche dissocier les revendications politiquesnales des revendications conomiques,

    partielles et immdiates. La lgalisationdes syndicats (en France par exemple

    par la loi de 1884) est partie prenantede ce processus : elle ouvre la voie desrapports certes conictuels mais galement

    contractuels, dont linstitutionnalisationminimise les dbordements hors ducadre dsormais x de la ngociation.La conscration de la dfaite proltarienne

    par le droit trouve un de ses symptme

    Retour sur le mouvement anti-CPE

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    dans ldication de ce qui constitue jusquaujourdhui la quintessence dune victoireouvrire absolue : le droit de grve. Ici, le

    terme de droit prend tout son sens. Il sagiten effet moins dune prrogative unilatrale(jai le droit faire telle chose, point barre)quun ensemble de rgles qui commandent etordonnancent une pratique, ici la cessation de

    travail. Le droit de grve apparat donc comme

    une limitation contractuelle et lgale de lactionde classe, et pour les syndicats qui sy plient avecdlectation, comme une autolimitation. Avec

    le pravis de grve, les syndicats simposent eux-mmes des rgles qui, au lieu de surprendre

    lennemi et de saboter ses plans, lavertissent lavance du mouvement de grve - ventuel.Le temps lui est donc laiss pour prparer

    les moyens de sa dfense et de prendre sesdispositions pour assurer le on onctionnementde la production (par exemple, des mesuresncessaires pour la gestion des stocks ou pourmaintenir un niveau de service sufsant).Dans les conditions limitatives du droit, la

    grve devient moins une arme de lutte quunesimple abstention de travailler limite dans le

    temps et lespace, une protestation symbolique,une dmonstration pacie et ordonne.Non seulement cela ne la prserve pas de laraction policire, tant donn que lEtat tolreou ne tolre pas une grve pour des raisonsstrictement juridiques, mais en fonction durapport de force rel qui sexerce. Ensuite,reconnatre, respecter le droit de grve et se plieraux rgles quil impose quivaut reconnatreune dfaite perptuelle des proltaires et lasubordination codie de leur action lEtat.

    Nous laissons donc aux adorateurs du codedu travail le choix dinscrire dans les textes

    juridiques le droit au refus du travail, lagrve sauvage, la destruction de machines,au sabotage, la bastonnade des petits-chefs,

    lincendie des usines et la dfenestration despatrons...La question qui merge de la mise en place duCPE et du CNE, et de la lutte qui sy opposeest donc plus celle des mutations dans lagestion et la reproduction de la main duvreque celle dun recul intolrable des acquissociaux, mme si ceci se traduit par cela.Plutt que de pleurer sur le CDI et se lamentersur des acquis qui de toutes faons nen sont

    plus, plutt que dentretenir lillusion dunendiguement du processus de prcarisation parun retour impossible au compromis fordiste,

    prfrons attaquer le salariat et la reproductionde la classe. Pour prendre dans la guerre qui nousest faite une place qui nous ouvre la perspectivedabolir la fois le capital et le proltariat.

    Brutes ouvrires

    Avril 2006

    [Version lgrement remanie, parue dans CPE :

    retour sur quelques pratiques et discours qui ont traversle mouvement, avril-mai 2006, pp. 2-5]

    Retour sur le mouvement anti-CPE

    [Tract trouv en aot Paris]

    Avant de se noyer la n du mois pour leplus grand bien de tous, il avait affrontune dernire grve contre les cadencesinfernales dans son usine de Roanne.Les piquets commencent le 4 mai, avant

    uEdouard ne la mette en lock-out le 9.Aid par les cadres, les huissiers et surtoutles gendarmes qui patrouillent en continu, le

    illionnaire espre ramener la raison sesgueux qui osent relever la tte. Le blocage

    u stock de 40 000 pneus pour berlines deluxe continuera jusquau 12 mai, avant quehacun ne retourne au chagrin (et Edouardompter ses talbins).

    Ce fru de thologie et de chants grgoriens,e laisse dsormais que la prire comme

    remde ses inconsolables dles, de loin lesplus nombreux. Des esclaves rsigns pouronserver leur gagne-misre aux confrresui pensent dj se partager le magot, 9000entre eux ont suivi la messe conclbre

    par le prtre Etienne Michelin, son frre, enleur bonne ville de Clermont-Ferrand auxboutiques fermes. 3000 privilgis en bleu

    e travail se sont masss dans le stade Marcel-Michelin pour suivre la crmonie sur crangant. Il faut dire que Michel Rollier, cousinissu de cousins germains dEdouard et sonuccesseur la tte de la multinationale,vait eu le cur de leur octoyer deux heurese permission (non rmunres, faut pasonfondre pneu et neuneu) pour assister laesse.

    Quant nous, noustenons chaleureusement remercier le ligneur-leyeur La Libert quila envoy au fond, et quia cette fois bien mrit

    son nom. Une ordurea crev voil unepollution maritime quonne regrettera pas.

    Le corps dEdouard Michelin, 43 ans, a t repch le26 mai 2006, ottant au milieu de casiers de pche 10 km au nord de lle de Sein, dans le Finistre. Le PDG

    du groupe de pneumatiques tait sorti en mer vendredimatin pour pcher le ar de ligne dans le raz de Seinavec le prsident du comit des pches dAudierne

    Un requin sest noy...

    ... il ne fera plus la tourne des bars

    Michelin cest dabord un esprit. De laparticipation de Pierre la Cagoule fascisteen 1935-36 la frquentation de lOpus Deipar Franois, on a de la continuit dans lafamille. Et comme il faut bien vivre aussi, ona bti sa fortune sur les milliers dhectaresdont on sest empar en Indochine pour yplanter des hvas (arbres caoutchouc).Avant-guerre, ce sont ainsi pas moins de

    2 000 travailleurs tonkinois sur 45 000 quisont morts dans les plantations coloniales degrand-papa entre 1917 et 1944.

    Hritier dune longue tradition maeusepaternaliste riche en sang et en sueur,Edouard dut rapidemment faire ses preuves.On se souvient de son arrive fracassante latte de lentreprise en juin 1999, qui avait eule mrite de remettre les pendules lheure :licenciement de 10 % du petit personnel(7500 postes) suivis de 20 % de hausse dubnce. Les degche qui en appelaient

    lintervention de lEtat, alors que son boulotest prcisment dassurer la pacicationsociale au service de lexploitation, nentaient pas revenus.

    On se souvient que les libertodes de Reex (groupe parisien du rseau NoPasaran) avaient soutenu lentreprise ngriste de dissociation et de balance aprsGnes en 200 , par a pu ication un ouquin e Samiz at nomm ultitudes

    en marche contre lEmpire. Aprs leur passage lEHESS occupe, ils se sontfendus publiquement dune Rponse France Inter et M. Pierre-Michel Menger[directeur de recherches dans cette cole], ayant t cits la veille par ce crtin surcette antenne comme responsables des quelques vols et dgradation. Cette fois,leur prose suinte non pas la dissociation formelle mais celle, plus insidueuse, de ladmarquation publique, cest--dire adresse au Pouvoir, an disoler une partie decelles et ceux avec qui ils ont pourtant partag une occupation ouverte. A les lire,comment tre n quelque chose li ces antifascistes responsables qui montrentpatte blanche quand on ne le leur demande mme pas. Quen sera-t-il alors lorsquelennemi lexigera deux ?

    Extrait (25 mars 2006) :Nous ne sommes en rien i s aux vo s et aux gra ations commises EHESS.Ces actes peuvent avoir t commis par nimporte qui tant le va-et-vient des cesgens tait rgulier. Il est trop facile de donner ainsi en pture lopinion publique

    es noms organisations po itiques souf s par une que conque ofcine po ici re.Depuis le dbut du mouvement tudiant, les mdias relayent rgulirement lideselon laquelle tous les individus ou organisations radicales sont synonymes devio ence, e pi age, permettant ainsi occu ter e travai et es initiatives e cesmme personnes.

    irer sur une ambulance ?

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    7 Cette Semaine septembre 2006

    Ce texte ne peut parler que dumouvement qui sest dvelopp partirdes facs parisiennes et qui en a dbord,les auteurs ne peuvent pas pour linstantanalyser ce qui sest pass tant enbanlieue parisienne que dans les autresvilles, le mouvement ut pluriel mais sescomposantes se sont dveloppes enparallle, avec des interactions certesmais peu de communication directe.Cest dailleurs une des caractristiquesde ce mouvement que de stredploy sous des formes diffrentesuivant les conditions spatiales et

    les segments dacteurs en lutte, cecimriterait une analyse approfondie..

    Ce texte est un brouillon, des chosesont rptes, dautres manquent, despoints doivent tre approfondis.

    La naissance du mouvement

    prs une campagne syndicale classiquequi peine mobiliser dans les universits,quelques tablissements de province sonten bullition (Rennes, Toulouse). Cesteulement aprs les vacances de fvrier

    que des minorits activistes dcident deloquer les facs sur la rgion parisienne

    avant mme dorganiser la mobilisation.

    Les piquets de grve prexistent la grveelle-mme. Lors de ce mouvement, sur lagion parisienne, se sont des minorits

    activistes qui porteront bout de bras lagrve de facto (les tudiants ne pouvantlus accder aux cours) et jamais les AGe regrouperont p us e es usagers euniversit, ce qui est certes une force maisanmoins qui nest pas un raz de mare etas exactement un mouvement de masse .

    Le schma est plus ou moins le suivant : surune fac de 30 40 000 usagers on trouvede 200 300 activistes qui font vivrea lutte, de 1 500 2 000 tudiants qui

    articipent aux A et aux mani estations.Les minorits activistes :

    n mlange htrogne dune moiti deilitants syndicalistes ou politiques de

    auche et dextrme gauche et dune autreoiti dlectrons libres. Tous ont peu

    dexprience ( part celle des ex-lycensayant particip activement au mouvementde lanne prcdente), et la grande majoritdentre eux tiennent sauvegarder lunitdu mouvement .

    Les participants aux AG :

    La prsence relativement massive aux AG(relativement au faible nombre de ceux quiiennent les piquets de blocages et participent

    aux actions) saccompagne dune attitude

    de participation minimale, dune prsence la limite de la passivit, une sorte deconsumrisme de la lutte. On arrive lAG,on vote la reconduction de la grve et onentre chez soi (si tant est que les votes sontepousss la n des AG pour ne pas voires amphis se vider ds le vote accompli).La minorit agissante, bien que sur despositions toujours plus radicales (solidaritavec les meutiers de novembre et lesans-papiers, critique de la LEC dans son

    ensemble, volont dextension aux salaris)a besoin du soutien (mme sil nest quepassif) de la masse des tudiants poure pas rester seule face la rpression

    tant de ladministration que de lEtat.

    Tout au long du mouvement, on sera enprsence de deux sujets dpendants lunde lautre mais qui ne seront jamais sur la

    me longueur donde : les lments actifsdont le discours se radicalise et la massedes tudiants qui se prononce clairementcontre le CPE (et seulement contre le CPE)

    ais dlgue la lutte aux premiers.Dun ct une forte minorit fortementnvestie dont le discours anticapitalisteafrme toujours plus et qui pratique un

    activisme volontariste, de lautre une masseumriquement croissante de lopinion

    publique seulement prte (et encore pas

    trop) afrmer une position en dlantdans la rue et ventuellement en votant desotions lors des AG. Les syndicalistes de

    a gauche plurielle Unef et Confdrationtudiante (CE) constituent dailleurs leseprsentants naturels de cette masse. Lesilitants gauchistes (un pied dans lun,

    un pied dans lautre) forment le pontentre ces deux composantes qui autrementignoreraient.

    Au dpart cette alliance savre payante, lesinorits activistes ont besoin du nombre

    et de la lgitimit que cela leur confre et

    e mouvement dopinion juge relativementefcace le bordel que mettent les radicaux (y compris les syndicalistes gauche plurielle).Cest ce besoin de complmentarit,a ncessit de lunit entre des forcesantagonistes, qui explique la forme ultrabureaucratico-dmocratique que prendra lautte dans les universits : pour la premireois dans lhistoire des luttes tudiantes, lesassembls de grvistes sont remplaces pardes assembles gnrales auxquelles sontconvis lensemble des tudiants (grvisteset non-grvistes, pro ou anti CPE). Cestcette sorte de parlement de luniversit

    qui se prononcera sur la reconduction dea grve et des blocages mais aussi sur lesodalits de la lutte. Les 200 actifs sont

    ellement et formellement mandats etdlgus par les 1 500 prsents/passifs

    lAG pour mener la lutte en leur nom. La grve par procuration qui pointe son nezdepuis 10 ans a nalement trouv sa forme,la chose est entrine et elle sorganise entant que telle.

    Deux mouvements pour le prix dun

    Dun ct il y a ceux qui veulent utiliserla couverture du plus large mouvementdopinion possible (ce qui lui permet de nepas se faire laminer par la rpression et rendpossible le blocage des facs) pour menerune critique du systme capitaliste ; delautre il y a cet ectoplasme (prsent partout,ne se matrialisant nulle part) qui estime,par exprience, que seules des actions

    pectaculaires-mdiatiques sont capables dele faire perdurer mme en tant que simplemouvement dopinion. Dailleurs la massedes tudiants ne dsire pas autre chose quede faire pression sur le gouvernement pourne le faire cder que sur cette attaque prcisecontre la valeur des diplmes. Les syndicatsUnef et CE, en tant que reprsentants decet ectoplasme nont aucune raison deinquiter du fait que sur le terrain (dans

    les actions comme dans les rsolutions proclames) le foss se creuse toujoursdavantage entre activistes no-syndicauxet la base amorphe du mouvement(et donc eux-mmes). Dans le monde dela reprsentation politico-mdiatique ilstiennent toujours les rnes et les agitationsdes radicaux constituent avant tout poureux une arme pour maintenir a pression.Les quelques milliers de personnes quitiennent les piquets de blocage, organisentet participent activement aux actionsnont jamais constitu un danger puisquemaintenus dans le carcan dmocratiquedes AG sans lequel ils seraient isols,ils sautorgulent eux-mmes malgrs lateneur de leurs rodomontades. Pour ne

    pas se retrouver isols face la rpression(de ladministration comme des ics etde la justice) ils sautocondamnent uneemi-impuissance. Face une situation

    o, les syndicats ayant abandonn leterrain, une palette de choix tait possible,de fait ils furent peu nombreux ceux quiosrent bousculer les limites mises en placeauparavant. Les propositions de semparerdes btiments universitaires pour en faire autre chose , les actions de blocage dutrac des marchandises (et parmi celles-ci, laprincipale, la marchandise force de travail),les manifs sauvages dans les quartiers

    populaires, les descentes dans les lieuxde travail... furent en fait peu nombreuseset la limite du symbolique sur Paris.Nanmoins elles ont eu le mrite dexisteret ont t porteuses dune vraie dynamique

    Le mouvement tudiant anti-CPEen rgion parisienne

    Retour sur le mouvement anti-CPE

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    8ette Semaine septembre 2006

    durant un moment. Portes par une minoritau sein de la minorit et peu compatiblesavec le fonctionnement des AG souverainesratiquant le centralisme dmocratique ellesont pas provoqu lbullition, trs vite sur

    Paris il y eut surtout des initiatives fortementcentralises et planies en interfac (lactionobligatoire du mardi et du jeudi). Parmi lesactivistes estudiantins, de plus en plus seentent coincs dans un carcan autolimitatif

    et partent sorganiser ailleurs, certains

    e voient en groupes de potes, dautresejoignent EHE , autre c angent e ac

    ou errent de manifs en actions.

    Lorganisation bureaucratico-dmocratique

    Pour les quelques milliers (peut tre 10 000ur toute la France, en tout cas jamaislus de 3 000 sur la rgion parisienne)

    dtudiants actifs dans la lutte, la ncessitde sappuyer sur une forte lgitimit se poseds le dpart. Dans la premire phase du

    ouvement (son extension quantitative

    lintrieur de luniversit) les deuxendances dans les A.G sont, dune parte camps responsable cest dire lesyndicalistes (gauche et extrme gauche

    confondues) et les no-syndicalistes (leson-syndiqus responsables et ralistes) et

    de lautre les agitateurs plus emballs para possibilit de bordel qui soffre que para perspective dun large mouvement deasse, la premire tendance tant largementajoritaire. Lultra dmocratisme est rig

    en principe intangible, il saccompagnedun bureaucratisme paralysant touteossibilit dagitation pour les franges

    adicales. Cest une force dinertie colossaleoulue par limmense majorit, aucun

    conit (et donc dbat rel) ne peut sydvelopper (on saffronte physiquement sept heure du matin sur les piquets delocage entre bloqueurs et anti-grvistes etaprs-midi on polmique entre gentlemenen AG ; on dnonce et insulte lUnef et onartage civilement la tribune avec elle), lesadicaux ou mme les syndicats de droite y

    ont toute libert de parole, de toute faone consensus et lunitarisme se chargerontde niveler le discours sur le plus petitdnominateur commun. Cette attitude quiermettra la paralysie des universits (avec

    des piquets ne dpassant que rarement 200ersonnes sur des facs de 30 40 000,es anti-bloqueurs actifs ntant que trsgrement infrieurs en nombre) et donc la

    possibilit mme de lexistencedu mouvement, deviendraapidement un obstacle organisation ncessaire uneelle dynamique (condition

    galement ncessaire la viedun mouvement de lutte)qui signie extension versextrieur et approfondis-ement es raisons e avolte.

    Lauto-organisation des tu-diants en tant qutudiants nest quuncorporatisme qui paralyse le mouvementLa composante tudiante de la fractionactive du mouvement, si elle a multiplies appels lextension du mouvement vers les salaris , les chmeurs ou les sans-papiers , a tenu dans la ralit conserveres formes dorganisation sur son lieu de

    travail et ainsi, en fait de salaris, elle napu se lier quavec le personnel enseignant

    et non-enseignant des universits. Poures autres (chmeurs, prcaires ou sans-papiers) un dlgu de temps en temps a tribune pour afrmer les passerelles virtuellement possibles entre des luttes quie feront que se ctoyer pisodiquement,

    et aprs une belle salve dapplaudissementschacun retourne son ghetto.

    Le double discours li la double naturedu mouvement (volont de dpassementET volont de prserver lunit) enferrea minorit active dans une contradiction,dune part la ncessit de sorganiser sur

    SA fac en tant que ce quon est dans etpour le capital (tudiant, employ ou prof)pour garantir la possibilit et la prennitsdes AG (cette forme permettant dutiliseres locaux, de sortir de latomisation etde fonder une identit collective) ; dautrepart la ncessit tout aussi imprieuse de nepas se cantonner au simple retrait du CPEet dtendre la lutte dautres secteurs, cequi impliquerait douvrir les assemblespour en faire des ples de convergence eturtout de ne plus se considrer en tant

    qutudiants. Dans les universits les pluscombatives (qui correspondent aux lires

    offrant le moins de dbouchs) limmenseajorit des usagers sont salaris, souvent temps partiel, beaucoup viennent dea banlieue, certains sont sans-papiers...et tous ne sexpriment pourtant quentant qutudiant. Si, individuellement,beaucoup des acteurs actifs portent descritiques qui sortent du cadre tudiant, laposition collective exprime nivelle celaau plus petit dnominateur commun.Concrtement cela signie que les facs occupes et bloques le sont avecaccord de ladministration, dailleurs ce nestquune partie des locaux qui est concde

    pour l occupation et selon des modalitset des horaires ngocis consensuellementavec elle (les amphis ne sont pas pris

    ais quelques uns sont accords par leprsident, les piquets sont tenus sous

    le contrle des vigiles qui en rglent lesmodalits, les grvistes semploient ceque soit respect le rglement intrieur- interdiction de fumer, de grafter et decracher par terre, respect des horaires etmme contrle des cartes dtudiant pouraccder certains couloirs), les AG sedroulent parfois sous la surveillance devigiles ou du prsident lui-mme, voiremme sous le regard de camras de scurit.Enn on ne va pas rentrer dans tous lesdtails, le fait est que le blocage ne sefait jamais contre la direction de la facmais est toujours considr comme unedcision dmocratique prise par lAGreprsentative des tudiants laquelleladministration serait cense treoblig de se plier. Et rciproquement,les modalits de la lutte doivent se plierau droulement normal de luniversit,en respecter es ocaux, es oraires, ahirarchie... les usagers de luniversit(grvistes et non-grvistes, tudiants et

    profs, personnel et direction administrative)occupent dmocratiquement leurs facs.Cest bien le fait de sorganiser en tantqutudiant, en produisant une identitcommune ctive et en reproduisantla sparation davec les autres (les faux manifestants ?), qui cimente uncorporatisme qui pose quune fraction desexploits un segment de la classe auraitdes intrts propres dfendre (pourquoidevrions-nous subir le CPE, nous quiavons des diplmes ?). Dans loscillationtoujours prsente dans la frange active dumouvement, entre le discours didentication

    lensemble des exploits (le CPE estune mesure entrant dans le cadre duneprcarisation gnralise) et lorganisationur la base restreinte de la dfense dune

    condition dtudiant (devant tout de mmeoffrir quelques garanties supplmentairespar rapport au prolo lambda), cest toujoursle second terme qui lemporte. Cest ce quifait que les jeunes banlieusards ne peuventtre considrs que comme extrieur aumouvement au mieux on proposera quele mouvement tisse des liens avec eux,ne les traite pas totalement en ennemis).Quand les syndicats, les mdias et les

    partis politiques emploieront les vocablesd lments extrieurs , de fauxmanifestants ou de faux lycens pourdsigner ceux qui, bien que participant lalutte, ne voulaient ou ne pouvaient pas secouler dans le moule unitaire (unis autourde la gure de ltudiant responsable), il fautbien constater que, si cette novlangue napas t particulirement reproduite dans lesAG, elle na gure choqu et quen tout casaucune voix ne sest leve pour sy opposer. linverse, dans cette lutte qui, de faonchizode, dit se battre aussi contre la

    prcarit gnralise, la prsence des futurspatrons et cadres suprieurs reprsentspar les AG des grandes coles na posaucun problme.

    Retour sur le mouvement anti-CPE

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    Cette Semaine septembre 2006

    Par contre lultradmocratisme bureaucra-tique empchera toute liaison avec leslycens de banlieue qui mnent au mmemoment et quelques stations de RER dedistance une lutte extrmement massive(plusieurs dizaines de milliers hyperactifs) etdynamique. Ils dvelopperont leurs modesdorganisation et leurs actions de manirecompltement parallle. Les banlieuesparisiennes vivent au ryt me oca esmanifs sauvages, caillassages, affrontementsavec la police, actions offensives etblocages des voies de circulation sansque les tudiants parisiens nen soientaucunement informs. Quand des lyces setrouvent dans labord immdiat dune fac,des actions coordonnes sont organisesconjointement, cest dire quil y a allianceentre les deux entits (lycens et tudiants)qui restent distinctes, mais jamais fusion.Les que ques tentatives A communes(Nanterre et Tolbiac) furent un vritablebordel. Les lycens tant videment

    incapables de se couler dans le moulelniant et ultra-polic du modedorganisation tudiant, il y fut mis unterme immdiatement.

    Ce que na pas produitla dynamique du mouvement

    Le dmocratisme est la cause delautolimitation du mouvement, elle en estaussi la consquence. Nous sommes face un cercle vicieux o limpossibilit tant deconcevoir la lutte comme la constructiondun rel rapport de force que de percevoir

    la dynamique de lutte comme radicalisationdes conits est produite par le consensusam iant autant que e e repro uit. Ledmocratisme empche de crer les basesmatrielles dune relle dynamique de lutte,et labsence de ces bases matrielles interditde se passer du consensus dmocratique.Cest bien labsence de conits ou mmede dbats entre les deux tendancesinternes au mouvement (affrontementde classe ou amnagement des intrtscatgoriels) qui permet dempcher toutdpassement. Les deux tendances sec toient ans c aque instance et moment

    du mouvement, elles continuent traverserchaque individu parti prenante, sansquaucune maturation ne se produise.Les syndicats ne sy tromperont pas, ils segarderont bien de dnoncer le gauchismeet lextrmisme de la coordinationnationale. La force dinertie de la massetudiante, le fonctionnement extrmementlourd des dbats et lisolement catgorielpos en principe se rvlant des moyensauto imitation ien p us puissants que es

    vieilles mthodes de magouilles politiques,les syndicats tudiants peuvent abandonnerles AG aux radicaux en se rservant la

    reprsentation mdiatique, les ngociationsavec le gouvernement et la diffusioncapillaire du discours limit au refus du CPE.Le conit est galement lud au sein desuniversit entre tudiants et administration.

    Il est surprenant de constater quaprs deuxmois d occupation les occupants ne se sont rien appropri des locaux, lematriel reste gr par la direction qui,selon son bon vouloir, le concde auxgrvistes. Rien nest remis en cause dufonctionnement de linstitution universitaireet personne ne se permettrait de hausserla voix devant un vigile. Il faut avoir vucomment es activistes estu iantinssadressent aux membres de la directiondune universit en baissant les yeux etle ton de la voix pour comprendre ceque signie pour eux une occupation.Les AG se radicalisent en vase clos :produisant une compilation derevendications dans le vent, les AG et laCoordination nationale ne sadressentqu ses composants par des vux pieux.Au bout de deux mois et demi de lutte, lesdiscours et actions des minorits activesont inuenc une bonne part des tudiantsprsents aux assembles, mais faute de se

    traduire par un changement de pratiqueau quotidien (dans les occupations, dansles formes dactions comme dans les AG)cela nentranera aucune dynamique. Mmeaprs la quasi viction de lUnef-majo etde la CE tant des AG les plus combativesque de la coord, on laissera gentimentle monopole du planning des chancesnationales et rgionales au cartel des 12syndicats coopts par le gouvernementpour mener les ngociations. La volontdlargissement se traduit (du dbut la n)par un appel ce que les grands syndicatsreprsentatifs lancent un appel la grve

    gnrale. Le problme est que les acteurs deterrain nont gure le choix sils ne veulentpas se retrouver compltement isols... maisen ne sortant pas de ce cercle vicieux (craintede lisolement/dpendance envers la gaucheinstitutionnelle/dpossession des leviersde mobilisation/encore plus disolement/dpendance toujours accrue) la coord se

    condamne produire des dclarationsoujours plus dconnectes des pratiqueselles dans les facs (o mme lUNIarticipe aux AG, o les occupations ont concdes par ladministration, o lesiquets sont parfois tenus avec les vigiles,

    etc.), voter des modalits dinterventionans rapport avec les forces rellementmpliques. Jamais les AG parisiennes (saufce e e a or onne en exi ne se poseronta question de ce quelles peuvent faire artir de leurs propres forces, jamais ellese se demanderont comment dvelopper unel rapport de force. On peut dire la mme

    chose de la Coordination nationale.

    Un facteur de lenlisement (et de ladisparition soudaine) du mouvement, a thgmonie de la composante tudiante surcelui-ci, et notamment sur la composanteycenne, beaucoup plus nombreuse etactive. Si le processus qui a permis cet tatde fait est facile cerner (les tudiants sont

    ieux structurs et dans des tablissementslus centraliss, ils sont rentrs les premiersdans la lutte) en revanche, on peutinterroger sur ce qui a empch quiloit remis en cause. Pour comprendre ilaudrait se pencher sur les pratiques etes modes dorganisation des lycens, sures coordinations dpartementales ou deecteur quils ont mises en place... nousen avons quune faible ide travers laecture des journaux locaux qui rapportentdes centaines dactions, daffrontementset mani estations, par ois e mi iers eersonnes...

    lapoge du mouvement (lorsqueara oxa ement a situation evientellement contradictoire quelle signie unearalysie/agonie du mouvement) on assiste

    lalliance de toutes les composantesauchistes, no-syndicales et agitationnistes

    contre les gros syndicats. Cela saccompagnedune certaine radicalisation du discourset des formes dactions, dun abandonelatif de lunitarisme systmatique et

    dune critique du fonctionnement ultra-dmocratique. Mais cela nira jamais jusqua remise en cause exp icite u centra isme

    dmocratique induit par les seules instancesexistantes de dbats, dorganisation et dedcision que constituent les AG de TOUSes tudiants (et deux seuls), en fait ceonctionnement a t tellement idologisquil est devenu la marque de fabrique de la minorit activiste qui voit dans cetteseudo horizontalit un gage de radicalit.

    Ce sont toujours des tudiants mobiliss enant qutudiants, sur leur lieu de travail etenant prserver leurs locaux et leur

    auto-organisation qui tentent dsesprmentde dpasser une situation dans laquelle ilse sont eux-mmes enferms.

    [Texte paru le 7 juin 2006 sur le site de laevue Meeting]

    Retour sur le mouvement anti-CPE

  • 7/31/2019 Cette Semaine N90

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    ON ENTEND PARFOIS les vieux militants conter nostalgiques lagloire des mouvements passs. Sans remonter plus loin, il ya eu des poques fastes comme la n des annes 90 (CIP en 1994,rves e cem re , mouvement es sans-papiers e 6-97, mouvement des chmeurs n 1997-dbut 1998) puis le creuxratiquement jusqu la mobilisation lycenne de 2005, suivie des

    meutes de novembre et du mouvement anti-CPE cette anne (passonsur les journes syndicales contre la rforme des retraites de 2003).

    Entre temps, es mo es permettent e continuer sagiter : expu sions,quats, prisons, nouve es tec no ogies M, iomtrie, prsent esanos sont par exemp e es sujets e contestation, ans or re ou e

    dsordre, mls ou pas. De mouvement en mouvement, de luttehmatique souvent charge de racket motionnel (urgence, rapportsersonnels, impuissance face au monstre) en lutte-parcellaire-faute-e-mieux, e mi itant pourrait ainsi presque a er jusqu a retraite,atis ait u evoir accomp i.

    Et pourtant, quelque chose ne tourne pas rond ces derniers tempsur la plante mouvementiste : beaucoup ont suivi les feux de lavolte de novembre en spectateurs, avant de constater quils taientien munis quant eur contri ution possi e. Puis, orsque eouvement anti-CPE a impliqu bien plus que les tudiants, avec

    entre en scne des lycens et dune frange plus ou moins nombreuseet organise (selon les villes) dindividus nervs venus simplement endcoudre ou foutre la zone, nombre de militants ont tent dappliquereurs recettes tra itionne es assem e, tracts, occupation, cortge,appe s 1, mais avec ien peu e succs.

    Ce qui leur donnait habituellement une raison dagir, radicaliser leouvement, mettre lpreuve leurs modes dorganisation et leursots dordre, se divertir certainement, engranger des forces pour la

    uite aussi, a sem souvent pass par e mouvement re .Et pourtant, eure o es eux e novem re se i usaient esriphries de Paris aux centres urbains de Lille ou Toulouse, destropoles aux petites villes, des voitures aux commissariats, transports

    en commun, coles, postes et entrepts, les ides dintervention prsde chez soi pour participer la fte en cours ne devaient pas manquer.

    ais encore au rait-i ne pas rserver e monopo e e ces rvo tes une catgorie sociale fantasme, forcment extrieure soi, ni uneul mode daction, forcment de masse ou de communaut de non-ie. Les petits groupes mobiles ne sont inaccessibles qu la personne

    atomise, pas lindividu et ses compagnons. Le feu et ses cibles neont pas encore revets, ni exc usi s es autres armes c assiques ea su version u sa otage a c e, u tournement agitationur la voie publique). De mme, lheure o le rapport de force

    contre le CPE se jouait essentiellementdans la rue, o la spontanitrsidait les manifs sauvages, o les diffrents blocages de lconomietaient pas uniquement conditionns par le nombre, o la prisee a rue o rait souvent es possi i its in ites, mettre accent sur

    des assembles/occupations (assembles tudiantes puis EHESS etuivants) a caricaturalement montr les limites des formes dauto-

    praxis, mais un organisme dcisionnel : si une minorit dcide avaitpu seule bloquer une universit, cest pourtant lassemble qui par

    la suite dcidait au nom dune quelconque souverainet de laissertravai er a ministration ou e oquer es ieux temporairementou dnitivement), dcision quon ne pouvait l gitimement a ouerous peine de fascisme aggrav. On a aussi pu assister dautres

    assembles, dont lunique objectif semblait tre leur propre existenceet leur rptition sans n, ds lors quelles taient rduites de fait e simp es c anges e points e vue connects e toute vo onte pratiques.

    La caricature parisienne de la forme assemble a surtout t cesassembles tudiantes ouvertes tous... les tudiants non-bloqueurs,bureaucrates ou dsireux de continuer leur train train, en prsence desvigi es ou to res o a prsi ence e vou ait et ses con itions

    oraires, c oix es sa es amp is pour es questions e scurit,non-fumeurs,...). Lassemble y a jusquau bout t une n en soi, une

    auto-mise en scne blase de la lgitimit, de la respectabilit citoyenne(votes, tours de parole, ordres du jour, comptes-rendus, bureau) quioccupait lessentiel de son temps, dlguant dobscures commissionsenjeux es uttes e pouvoir organisation es ameuses actions es

    ocages ou prises e rue sauvages et statiques auxque es tout ontudiant anti-CPE se devait de participer en en sachant bien peu.Ctaient incarnes et exprimes l toute la pratique dmocrate dela soumission la dictature du nombre, du respect et de la faussega it es eux c ts e a arrica e oqueurs et anti- oqueurs,casseurs potentie s et services or re syn icaux , et toute a miseen application du dispositif citoyen dune socit civile orc mentimaginaire (sans classes, sans dsirs ngatifs de destruction et dutopiesrvolutionnaires) qui tirerait dune lgitimit en construction doncfragile, prserver et largir son droit exiger dun gouvernement

    moins gitime e retrait u PE. I nest s ors pas surprenant queles militants des diffrentes chapelles du gauchisme et du syndicalisme,mme rouge et noir, naient pu y tenter que dtendre gnralementen vain la liste des revendications, ou de se crer une base par unactivisme dmonstratif, rejouant aux ingnus le coup de loppositionentre mocratie irecte et ausse mocratie : errire ce mauvaisjeu e mot se cac e en e et toute eur am igut e ureaucrates,aspirants gestionnaires e que que c ose, u moment que a vient ela masse, den bas plus ou moins gauche.

    Les brves assembles de lEHESS occupe (du 20 au 24 mars) ontreprsent autre caricature e cette orme assem e comme nen soi, cette ois non p us comme mini-par ement singeant ce ui ela domination, mais comme instrument creux et ftichis, volont

    dauto-organiser ex-nihilo ce qui ne pouvait (et ne voulait ?) ltre.Lassemble comme outil de la lutte de classe prenait gnralementcorps et intrt lorsque des individus auto-organiss en ressentaienta ncessit, en vue e se coor onner, c anger eurs expriencesconcrtes, de confronter leur praxis. Ctait dans ce cas un outil qui serajoutait aux autres, et notamment tout le jeu des rapports informels

    vant puis autour de lassemble. Cette force supplmentaire,ne perspective anti-autoritaire, ne constituait de plus pas unsuprieur aux groupes a nitaires, en ne sexprimant pas en

    m, en nayant aucune possi i it e cision et en nayant pasjecti e nom re.

    t pu en tre ainsi de lassemble de lEHESS, si des contenust auparavant dgags dans ce mouvement, permettant de seter sur es pratiques j existantes ou es vo onts e et sures thoriques communes au sein de la partie non-tudiante du

    ment. Mais ce ntait pas le cas, et cette assemble/occupations eu qu devenir une vaste foire o chacun venait vendre saEsquisse de quelques possibles non advenus :

    imites du mouvementisme : les assembles

    ans le bordel anti-CPE Paris

    Retour sur le mouvement anti-CPE

  • 7/31/2019 Cette Semaine N90

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    Cette Semaine septembre 2006

    Plutt que de radicalisdabord le CPE non, on veun vrai DI en ni PE,

    DI, ces ases communauraient pu ainsi tre

    dvelopper une critiqurontale du travail (du tyon veut pas bosser du tout

    couple dautres modes de rappropriation que la dpouille. Ladernire assemble de lEHESS sest par exemple droule au soir desaffrontements dInvalides, justement parsems de quelques dpouillesarfois sauvages. Or il y a plus t question de stigmatiser ces formes

    assez grgaires et drisoires, en crant un espce de sujet collectifgati qui en serait auteur, que y opposer es rappropriations quieraient ntres, conservant la bonne ide de proter de ces moments

    de rupture de la normalit pour dvelopper dautres perspectives.Pour mmoire, il y avait par exemple eu plusieurs autorductions deupermarchs pendant le mouvement des chmeurs, et mme un essaie pi age en rg e un ash onverters Basti e. e ut aussi e cas

    cette fois-ci Toulouse par exemple.De mme, plutt que davaliser le bloquons l conomie avec soncorps nu lorsquil tait dj dans lair et que nous y participions(occupation des gares par exemple), un contenu commun aurait putre de dvelopper une critique du capitalisme et dun de ses pointsai es qui est a circu ation es marc an ises, en a coup ant autres ormes attaques comme e sa otage ou a estruction, etisant plus large que la seule circulation routire/ferroviaire).

    Enn, si diffrents groupes afnitaires et informels avaient ressenti leesoin de se coordonner an de dpasser des limites vcues les joursrc ents, cest un tout autre projet e aire merger un momen

    organisationne partir e ce esoin commun, que e crer uneassemble ouverte aux vagues gens en lutte nomms h t rog n it en vue de sagencer et sorganiser. On peut citer de mmoire quelquesquestions qui revenaient alors au cours de discussions informelles, et

    auraient pu constituer un autre point de dpart : comment sortir dupectac e ritue es rites type or onne au pro t par exemp e ealades sauvages ravageuses au cours ou la n de manif (comme ation le 18 mars), quelles initiatives dvelopper pour ne pas attendre

    es manifs des mardis et jeudis, comment dvelopper une mobilitographique qui dpasse le cadre troit de Paris et sy mler un

    antagoniste p us ouvert autant que certains compagnons vivent enrip rie .

    Ces quelques points ne sont pas poss l pour refaire lhistoire. Si cesendances et possibles esquisss nont pu se dgager comme bases

    dune assemble, cest pour souligner que les limites de lassembleoccupation e EHE ont na ement t ce es e ses initiateurs

    la perspective mouvementiste, qui y entrinaient logiquement les

    imites du mouvement lui-mme. Car dfaut de contenu autonomeau sein de ce dernier (voire en dehors : ntant pas tudiants poura plupart, et se foutant du CPE comme beaucoup) et de dsirsexpriences nouve es partager ans espace pu ic, assem ee EHE ne pouvait qu tre cette coqui e vi e o es in ivi us

    cohabitent sans navoir rien dautre faire ensemble qu mimer unemblant de radicalisme verbal collectif ou se juxtaposer dans unrand squat. A lheure o se dgageaient des ruptures de la normalitoujours plus prometteuses, mais o la seule communaut de lutte dea partie non-tu iante ne se trouvait que ans es a rontements et eslocages de rue, une assemble se donnant pour objectifs d inventer

    des ormes de luttes adapt es la situation en sadressant justement lhtrognit ne pouvait que se heurter ses propres limites :absence de perspectives et les moyens de les mettre en uvre.

    i est une orce e in ivi u, au sein e cette socit qui prsentea double caractristique datomiser et de massier la fois (lesersonnes sont toujours plus spares les unes des autres et vivent enme temps toujours plus des vies identiquement normalises), cest

    a capacit dvelopper une autonomie base sur ses propres dsirs

    et afnits. La capacit artager ces dsirs avecautres in ivi us, ie

    une connaissance et uneconance rciproques,

    eut, avec un minimumde volont partage,crer et mettre en uvre

    des projets offensifs. Et lorsquun mcontentement gronde, quunmouvement social clate, ces groupes afnitaires peuvent dcider dyparticiper, sur leurs propres bases et objectifs.Les affrontements lis la foule, au sentiment collectif phmre depuissance, notamment au dbut devant la Sorbonne et aux alentoursou p us tar ors e a a a e e Basti e Montmartre, nous ontenthousiasms et lancs dans la bataille, pour ceux qui taientencore rticents ce mouvement longtemps spciquement tudiant.La rptition de ces affrontements, toujours plus spectaculaires etverrouills, plaidait cependant selon nous assez rapidement pour noneu ement mu tip ier es possi i its e mener avec p us agi it nos

    activits antagoniques existantes avant le mouvement, mais aussi pouramplier autrement la rupture de la normalit, indispensable basepour apprendre de nouvelles manires dtre ensemble et de lutter,dentrevoir un monde totalement diffrent et de construire les basesdes rvoltes futures.

    r ce ou e mouvement augmenter nos possi i its a itue es,perturber aussi autrement la normalit nest justement effectif quenconservant notre autonomie au sein du mouvement, sen sy diluer. Leproblme pos par le mouvementisme, par ceux qui veulent radicaliserle mouvement en sy organisant ou simplement tre l o a speedele plus, est que notre rapport nest p us ia ectique, onction e notreana yse e ce qui se passe et e nos perspectives, mais que nousnous lions la masse, avec ses forces (comme certains affrontementsouverts ou balades de plusieurs heures) et ses faiblesses (comme sacapacit tre mene dans des piges ics ou se retourner contre

    nos pratiques).Un tract istri u ors e a reprise Jussieu rappe ait ingnumentque cette fac de sciences est comme les autres blinde de labos derecherche, tandis que dautres nous ont fait remarquer que le toit delEHESS abrite une gigantesque antenne de tlphonie mobile qui afait lobjet dune tentative de sabotage, ou que des profs de cette colep euraient sur es rec erc es per ues avec eurs isques urs. esimp es cas e nuisances auxque es a main avait p us aisment accs

    au cours e ce mouvement o rent un ana exemp e e comment uneperspective rvolutionnaire peut dvelopper la fois son autonomiedans un mouvement, et tenter de dpasser ses limites (le nimecontrat prcaire, le rituel daffrontements toujours mieux grs para po ice en re iant ce qui est gnra ement spar, ici une critiquepratique de la techno-science par le sabotage ou le vol, lintrieur

    dun mouvement concentr sur la prcarit et pratiquant surtout desoccupations de lespace urbain.

    e qui ut gnra ement intressant ans es mouvements sociaux eces ernires cennies a rarement t eurs intentions ensives ,mais bien plutt la perturbation de la normalit du quotidien quilsont engendre. Nous pouvons alors choisir de rpter linni despratiques qui sinsrent dans leurs limites initiales, en essayant de lesradicaliser et en se contentant de suivre lodeur des gaz lacrymognesports par autres, ou ien au contraire sortir en n e cette ogiquepour a rmer notre propre praxis en ia ectique avec ces mouvements,ce qui signie dun ct largir et intensier collectivement cetteperturbation sur nos bases, et dun autre afrmer individuellementnos dsirs, rages et attaques en protant de son existence.

    un rard

    . Nous parlons ici partir de lexprience parisienne, certes un peuparticulire par le nombre dagits et la diversit des possibilits.

    Retour sur le mouvement anti-CPE

  • 7/31/2019 Cette Semaine N90

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    2ette Semaine septembre 2006

    i de nombreuses personnes ont exprimeur solidarit avec les (ex)habitants

    de la rue du Gazomtre ce nest pas par

    ur humanisme. Une grande partie deeux qui vivent dans le bas-Montreuilavent pertinemment que lexpulsion

    de pauvres du quartier sinscrit dansn projet dj bien entam qui, brve

    chance, signie des conditions toujourslus invivables pour les proltaires. Laolitique de lextension de Paris vers

    a proche banlieue (on appelle dj leas-Montreuil le 21e arrondissement),

    installation des siges dentreprisevoulue par la mairie, impliquent dedonner notre environnement un visage

    rsentable, conforme aux critres envigueur dans le monde du management.Cela signie lhyginisation du quartier(clture des squares, grilles et digicodes

    qui transforment les cits en couloirsde prison, occupation policire... etbientt, fermeture des sandwicheries minuit) et la dportation despauvres et des immigrs pour queles bobos puissent se sentir enscurit. Nous parlons l dunprocessus qui est dj largemententam, tous les habitants ont

    dj eu subir laugmentationvertigineuse des loyers (le mmeprix dans le bas-Montreuil et le bas-Bagnolet qu Paris, cest--dire pasmoins de 750 euros pour le plusminable des F2) et on ne compte plusles chantiers en cours avec leursprojets de rsidences et immeublesde bureaux tout de verre et dacier.

    Cest pour cette raison que nousavons t si nombreux nous opposer lexpulsion du centre Louns-Matoub par les CRS et la police...

    ous tions l, non pas en soutien (parur humanisme), mais en solidarit parce

    que nous sommes concerns et que nousavons bien que lexpulsion des 8 familles

    du Gazomtre nest que lun des pisodesde notre expulsion programme tous etque si nous ne rsistons pas ce moment

    ous naurons plus qu retourner notreisolement en attendant quon vienne noushercher un un. Il y avait l une bonneccasion de se rencontrer, de se compter,

    de discuter... cest dailleurs ce que nousavons fait. Nous avons rsist quand

    es ics racistes et arrogants ont frappertains dentre nous, nous ne nousommes pas contents de nous offusquer

    de ce dysfonctionnement de notre belledmocratie car nous subissons cette

    violence au quotidien. Il y avait l uneccasion de contrer la terreur que nos

    dirigeants nous imposent en permanence

    et, malgr le fait que cest principalementous qui avons pris les coups, nous

    eur avons au moins signi quil nestas vident quils pourront toujours seroire tout permis. Par la suite nous nous

    sommes empars du square pour y passerune soire ensemble, pour y faire ce queNOUS y avions dcid, cette fois ce fut la

    rojection dun lm mais nous pourrionsy faire bien dautres choses collectives si

    ous le dcidions.

    Une manifestation sest organise sans

    quil y ait eu besoin de rien de plus quedimprimer un tract et de faire appel auxonnes volonts pour le distribuer. Sans

    service dordre, sans porte-parole, sansaucune ngociation, sans autorisation,sans responsable. Parce que nous

    ous sommes retrouvs ensemble, nousavons pu constituer une force, remettre(un petit peu) en cause la normalit, la

    assivit, lindiffrence. Cela nous lavonsait dans nos ttes et dans nos actes, cestela quon appelle tre en lutte. Cest deela que la mairie, lEtat et les patrons onteur, et cest normal. Ce qui est moinsormal cest la panique qui sempare

    des militants associatifs, syndicauxet politiques devant ce qui chappe eur petit train-train. Comment a ! nousourrions dcider par nous-mmes,omme a, sans quils puissent jouer leurle dorganisateur ou de mdiateur ?our eux il y a toujours quelquun

    dautre qui dtient la lgitimit poure faire : le responsable, le comit, lesamilles expulses1, la dlgation partie

    en ngociation... Tous ces militantsnt un rle tenir : se substituer aux

    ens en lutte, ramener les formes et lesontenus de la protestation quelquehose de compatible avec les ncessits

    des pouvoirs en place.

    Aujourdhui les militants, petits cadresassociatifs, politiques ou syndicaux sesont constitus en comit de soutien,e comit se runit rgulirement an

    dassurer le suivi des ngociations. 50ersonnes runies dans une salle de

    a bourse du travail. Voil, cest fait, lautte est enterre, plus de rencontre

    entre les habitants, plus de bordel, plusdinitiatives, plus de dbats. Il ne restelus qu assurer laccompagnement

    des familles dans les mandres duabyrinthe bureaucratique.

    ncore faudrait-ilquil y ait une lutte !

    Le 11 octobre 2005, huit familles

    ivoiriennes du passage du

    Gazomtre Montreuil se sont

    aites expulser de limmeuble elles vivaient depuis cinq ans,

    prs avoir rgl pendant deux

    ns un loyer de la main la main

    un marchand de sommeil. Un

    jeune ivoirien sans titre de sjour

    st arrt. Les familles la rue

    ccupent alors avec des voisins

    t amis le centre social Louns

    Matoub. Le cabinet du maire,

    Brard lexpulseur communiste

    muscl des Roms qui a aussi fait

    molir le foyer africain Nouvelle

    France, propose trois nuits dhtel

    isperses en Ile-de-France. Le refus

    es familles entrane lintervention

    es CRS qui frappent dans le tas

    t coursent en ratonnant une

    manifestation spontane rue dearis. Les habitants du Gazomtre

    improvisent alors un campement

    place de la Rpublique. Le 14

    ctobre, elles lveront le camp

    contre 35 nuits dhtel payes.

    Sest alors mont un comit de

    outien, compos dhabitants du

    uartier mais aussi dassociations et

    e syndicats, en vue de faire avancer

    la situation des expulss.

    Le texte ci-contre, crit par un

    camarade du coin, revient sur

    les mcanismes denlisement et

    e pourriture des tentatives de

    luttes, qui ne sont pas propres

    Montreuil et sa gestion municipale

    ssociativo-maeuse.

    Nouvelles de la guerre sociale

  • 7/31/2019 Cette Semaine N90

    13/40

    3 Cette Semaine septembre 2006

    A la limite nous pourrions concderque cette tche est ncessaire, quilaut par la ngociation et sans user dun

    quelconque rapport de force jouer sura mauvaise conscience des membres

    de lappareil bureaucratique... nousy croyons pas, mais aprs tout si

    quelquun veut sen charger, pourquoias si nous continuons paralllement

    aire vivre un rapport de forces. Mais ceest pas a que les petits cadres ontropos, ce quils imposent cest que la

    orme comit de soutien (nuvrantque dans les limites lgalistes de cequi est compatible avec les intrtsdes pouvoirs en place, pour uneolution humaine des problmes

    individuels, au cas par cas) se substitueau processus dauto-organisation des

    abitants semparant de leurs problmesollectivement. Leur no-syndicalismeleurnichard (les pauvres victimes) nest

    en outre absolument pas consquent : ilaudrait quils nous expliquent commentils comptent obtenir la moindre avanceur les dossiers spciques des familles

    de la rue du Gazomtre en restantdans le cadre troit des ngociations

    olices avec la mairie, la prfectureu le conseil gnral alors que ce quiaractrise la majorit des expulss

    en question est justement quils fontartie (selon la lgalit quils tiennentellement respecter) de cette catgorie

    de proltaires pour qui la dmocratie a

    rvu des camps de rtention, le travailau noir, des charters et labsence dedroits sociaux. Dj on a pu constaterque le cas des clibataires est quasiment

    ass la trappe (ce qui est la suiteogique du discours de diffrenciationoit-disant humanitaire sur les pauvres

    enfants qui dorment dehors, les jearle en tant que mre de famille etoutes les simagres dmagogiques et

    victimistes). Nous noublions pas quila fallu que les extrmistes snerventors des runions pour que les cas

    des sans-papiers arrts soient prisen compte. Il faudrait galement quees petits cadres nous expliquentourquoi il faudrait orienter lactivit duollectif vers lobtention de nouvellesromesses alors que jusqu prsenti la mairie, ni la prfecture nont tenu

    aucune de celles quils avaient faites.ous savons tous que dans peu de

    emps (au plus tard le 14 novembre)ien naura t rsolu.

    anmoins une occasion a t manque,ous tions sortis de notre isolement et

    de nos petites botes o le systme nousa parqus... et nous savons que cela

    e se fait pas si facilement. Mais nousavons expriment que cest toujours

    ossible, que nous ne sommes pas tels

    des moutons quon mne labattoir, desocataires que lon dplace au gr desuctuations du march de limmobilier,

    des citoyens sujets de monsieur leaire qui dcide pour nous de comment

    ous devons cohabiter, des usagersdun espace public que les gestionnaires

    ous concdent parcimonieusement heures xes pour garantir la bonne

    arche du commerce. Il nous resten peu de patience pour attendre larochaine occasion de nous assembler

    et agir collectivement, et recommencerde plus belle en nous inscrivant dans ladure. Malheureusement, cela ne se fera

    as en partant de ce comit de soutienqui mne en bateau aussi bien lesamilles expulses que la potentialit qui

    a merg sur la place de la Rpublique.ous connaissons dj les rsultats du

    ong et dur travail daccompagnementdes familles dans leurs dmarches :

    le dcouragement force de prendredes vessies pour des lanternes envoulant arracher toutes forces des

    romesses qui de toute faon negleraient en rien la question ;

    la division force de faireystmatiquement de la diffrenciation

    entre les familles et les clibataires,entre les expulss et les soutiens(et bientt, cest la suite logique ducas par cas, entre les situations

    gociables et celles que lesouvernants auront dcrtes nonrsentables) ;

    la paralysie de lenfermement dans lediscours idologique responsable (non-violence, lgalisme, victimisme, respectdes hirarchies et racisme rebours).

    ous avons constat que dans ce comit,i lon trouve intolrable que quelquunuisse hausser la voix lorsquil sadresse

    un de nos gouvernants, on manieinsulte et la calomnie avec aisanceorsquelles sadressent ceux dont onense (peut-tre tort) quils ne peuvent

    as se venger. Protons-en pour fairene petite mise au point : ce qui nousemble puant l-dedans ce nest pas queon se fasse insulter (on a lhabitude),on, cest que ce sont les mmes quious insultent et que lon a vus faire desourbettes devant le reprsentant duouvernement gnocidaire ivoirien ouirer les pompes de ladjointe au maireo-responsable de la mise en dtention

    dau moins deux sans-papiers, deslessures graves et lgres de nombreuxamarades et davoir dclench une

    atonnade policire dans les rues deontreuil durant plus de trois heures. (titre dinformation, depuis quelle nous fait massacrer, Mme Attia passe sesjournes au caf de la place dont elle a

    fait son ef, au grand dam dune bonneajorit des habitus mais aussi en

    sattirant la sympathie de bon nombredes cadres associatifs, ce qui nous faitvomir).

    Nous savons que dans ce comit il y aune forte tendance mnager la mairie

    our des raisons de calculs politiciens,

    our des intrts lectoraux ounanciers (les subventions distribuesgnreusement) et tout simplement pourdes raisons de carrire personnelle(comment peut-on, Montreuil, avoirdes activits associatives si on esten guerre avec la mairie qui contrletout ?). Nous avons pu constater que,dans ce comit, sont prsents des relaisde la mairie : la FSU et leur proposition decomit de suivi qui est en fait une idesuggre par Brard, la CGT et son tractgrossirement mensonger afrmant queest linitiative de la prfecture quevacuation du centre Louns-Matoub

    aurait eu lieu et que le relogement seraitexclusivement du ressort de lEtat.

    ais nous ne disons pas pour autantque parmi les militants il ny a que desrapules froides et calculatrices, enevanche force est de constater quees habitudes bureaucratiques, le rle

    quils se sont eux-mmes attribu, leurirrationnelle foi dans les instancesdmocratiques et leur culte du respectformel des rgles (quelle quelles soient)en ont fait les fossoyeurs de la lutte.

    Parce que la volont des petits cadreset lalination propre aux classes

    oyennes (les aspirants bobos) sesont unies pour quil ny ait pas deutte mais seulement une protestationitoyenne visant la gestionumanitaire dun problme particulier

    et isol en partenariat avec les instancesgulirement lues, nous navons rien

    faire dans cette instance de pacicationsociale.

    Cest ensemble que les gens concernsdtermineront les modalits de leurutte. Et ensemble ne signie enien lunanimisme des grenouillagesoliticiens qui est en fait lalignement

    sur la position la plus conciliatrice.

    24 septembre 2005,Quelques futurs expulss

    du bas-Montreuil en rsistance

    1. Entendons-nous bien, nous ne dnions pasaux personnes directement concernes lepouvoir e cision sur ce qui es concerne(dailleurs qui arriverait leur imposer ce dont

    e es ne veu ent pas , mais ce a ne eur onneaucune lgitimit pour dcider si chacun

    entre nous oit se aisser matraquer sansragir, ni tolrer la prsence de lambassadeurgnocidaire ivoirien, ni mme quelle heuredoit se passer la manif ou que sais-je encore.

    Nouvelles de la guerre sociale

  • 7/31/2019 Cette Semaine N90

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    ette Semaine septembre 2006 Nouvelles de la guerre sociale

    Nouvellese la guerre sociale

    3 juillet, Marseille

    presse La permanence UMP de Renaud

    Muselier, premier adjoint au maire de Marseille,t presque entirement dtruite par un

    incendie criminel dans la nuit de dimanchelundi, a-t-on constat hier. Daprs les

    moins, deux jeunes gens en deux-roues se sont

    arrts devant le btiment vers 2 h 30 du matin,explique Renaud Muselier. Ils ont cass la vitree mon bureau et ont jet des cocktails MolotovLe feu a presque entirement dtruit le local,

    aisant scrouler une partie du toit. Seule lasalle de runion, au fond du btiment, a trelativement pargne. Ancienne permanencedu maire Jean-Claude Gaudin, le local de larue Sainte-Ccile (5e) tait aussi le sige de la

    dration UMP des Bouches-du-Rhne.

    3 juillet, ulnay-sous-Bois

    L interpellation mouvemente dun hommeAulnay-sous-Bois Seine-Saint-Denis dans

    la nuit de lundi 3 mardi 4 juillet a donnlieu des scnes de violences urbaines.Selon une source policire, un policier a tbless larcade sourcilire, alors quil tentaitdinterpeller un homme rfugi dans un halldimmeuble du quartier de Mitry-Ambourgetde la cit des Mille-Mille Aulnay. Daprscette mme source policire cet hommeroulait grande vitesse au volant dune Clio en

    brlant des feux et a t pris en chasse par unvhicule de police La Courneuve vers deuxheures du matin. Arriv la cit des Mille-mille, lhomme aurait fonc sur un vhiculede police plac en travers de la route pour luiaire barrage. Les policiers nauraient eu que letemps de se jeter au sol avant que la Clio nepercute leur voiture.oujours selon la source policire, un quart

    dheure aprs linterpellation du chauffard, desviolences urbaines ont secou la ville. Uneboulangerie a t entirement dtruite parune voiture blier incendie.La prfecture

    indiqu quune auto-cole avait tsrieusement dgrade, ainsi que la faadedune agence du Crdit lyonnais.

    Juillet, ravages anonymes dOGM

    (presse)Une parcelle de mas OGM de la socitMonsanto France a t fauche par desinconnus dans la nuit de mercredi jeudi 29

    juin Montech Tarn-et-Garonne , annoncela socit dans un communiqu en annonantquelle allait porter plainte.

    Suite une destruction partielle deson champ de mas transgnique situ surla commune dAntoingt Puy-de-Dme ,survenue dans la nuit de dimanche lundi 3

    juillet, la socit Biogemma, liale du semencierLimagrain, a dpos plainte lundi matin auprsde la gendarmerie, a-t-on appris auprs deBiogemma. Les recherches de ce champ de

    mas transgnique de 6.500m2 unique dansle Puy-de-Dme, portent sur la prcocit

    de la oraison et la tolrance du mas lascheresse.

    Aprs les parcelles de Montech et Lojac(Tarn-et-Garonne) ces derniers jours,un nouveau champ de mas transgniquede Monsanto a t rcemment fauch Beaumont-sur-Lze Haute-Garonne , annoncemercredi la socit qui dit avoir dpos plainte.Il sagissait de deux essais du programmede recherche sur du mas biotechnologiquequi ont t partiellement dtruits ... , trsprobablement au cours du week-end des 1eret 2 juillet derniers.

    4 aot, Marseillepresse La permanence du dput-

    maire des 15e et 16e arrondissements deMarseille, le communiste Frdric Dutoit, at endommage par un dbut dincendievolontaire, a-t-on appris samedi auprs de lapolice et des pompiers. Vendredi vers 18H00,les marins-pompiers sont intervenus sur unlger sinistre, qui serait parti de la bote auxlettres du local, situ dans le quartier populairede la Belle de Mai. Les ammes naissantes ontt bloques par le rideau mtallique mais ontentran lclatement dune baie vitre.

    5 aot, Cluses

    presse Un conseiller municipal FN deScionzier (Haute-Savoie) a t bless duncoup de couteau dans le dos peu aprs unealtercation avec un jeune qui il reprochaitduriner sur la vitrine dun bistro Cluses,selon la gendarmerie. Aprs avoir t soignpour une entaille de cinq centimtres dans ledos, llu, Jean-Paul Frison-Roche, a pu sortirdimanche matin de lhpital. Son agresseur,qui a russi prendre la fuite, tait toujoursrecherch. Les faits se sont drouls samedimatin vers 06h30 Cluses Haute-Savoie .

    11 aot, Montigny-ls-Metz

    presse Une cole maternelle de Montigny-ls-Metz Moselle a t endommage par unincendie dorigine criminelle dans la soire dedimanche, daprs la mairie et la prfecturede Moselle. Le feu a dmarr dans un localtechnique de lcole maternelle Marc Sangnierdimanche soir vers 21h00, ont indiqu lespompiers. Ce local a t dtruit, tout commele hall de ltablissement, et quatre salles declasse ont t trs endommages, a ajoutune source policire.

    23 aot, Pessac

    presse Le commissariat de Pessac victimedun coup de feu. Dans la nuit de lundi mardi,une balle a travers la vitre du poste de policepour se cher dans un mur. Personne na tatteint. Une enqute ralise par le parquet

    [Permanence marseillaise de lUMP, 3 juillet 2006]

    de Bordeaux est en cours an de dterminerlorigine du tir et la nature de larme. Le syndicatSynergie ofciers rappelle que ce commissariatnavait pas de vitres blindes comme leprconisent les normes de scurit.

    3 septembre, Fontenay-sous-Bois

    presse La permanence du dput-maire UMPPatrick Beaudouin Fontenay-sous-Bois Val-de-Marne a t vandalise dans la nuit desamedi dimanche pour la troisime fois depuisnovembre 2005, daprs la mairie.Des coups, visiblement de barres mtalliques, ontt ports contre les vitres de la permanence,qui ont rsist mais portent des traces dimpact,selon M. Beaudouin.

    4 septembre, Savigny-le-Temple

    presse Deux incendies criminels se sontdclars dans la nuit de dimanche lundi lamairie et dans un centre social de Savigny-le-Temple 77 . Des traces de produits incendiairesont t releves, la mairie est partiellementdtruite, de nombreux dossiers partis en fume.

  • 7/31/2019 Cette Semaine N90

    15/40

    5 Cette Semaine septembre 2006Nuisances techno-industrielles

    ESMULTIRCIDIVISTES Monsanto, Pioneer et Biogemma recommencent nous envahir avec leurschimres transgniques qui ne prsentent aucun intrt, except pour ceux qui les produisent et

    es commercia isent et ont e ut est e ren re irrversi e a po ution gntique pour supprimer

    oute opposition a mainmise nitive es mu tinationa es e agroc imie sur agricu ture.Dans le Tarn et Garonne n juin ont t mises hors dtat de nuire une parcelle de mas NK 603

    ontech et une autre Lojac ainsi quune parcelle de mas MON 88017 et de mas MON 88017MON 8 0, toutes e Monsanto.

    Les promoteurs es OGM ont o tenu cette anne e nouve es autorisations essais et e mises enrande culture commerciale de la