Affaire Chapin Et Charpentier c. France

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    CINQUIME SECTION

    AFFAIRE CHAPIN ET CHARPENTIER c. FRANCE

    (Requte no40183/07)

    ARRT

    STRASBOURG

    9 juin 2016

    Cet arrt deviendra dfinitif dans les conditions dfinies larticle 44 2 de la

    Convention. Il peut subir des retouches de forme.

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    En laffaire Chapin et Charpentier c. France,

    La Cour europenne des droits de lhomme (cinquime section), sigeanten une chambre compose de :Angelika Nuberger,prsidente,Khanlar Hajiyev,Erik Mse,Andr Potocki,Faris Vehabovi,

    Sofra OLeary,Mrti Mits,juges,

    et de Claudia Westerdiek,greffirede section,Aprs en avoir dlibr en chambre du conseil le 10 mai 2016,

    Rend larrt que voici, adopt cette date :

    PROCDURE

    1. lorigine de laffaire se trouve une requte (no 40183/07) dirigecontre la Rpublique franaise et dont deux ressortissants de cet tat,MM. Stphane Chapin et Bertrand Charpentier ( les requrants ), ont saisila Cour le 6 septembre 2007 en vertu de larticle 34 de la Convention desauvegarde des droits de lhomme et des liberts fondamentales

    ( la Convention ).2. Les requrants ont t reprsents par MeC. Mcary, avocate Paris.Le gouvernement franais ( le Gouvernement ) a t reprsent par sonagent, Mme E. Belliard, directrice des affaires juridiques au ministre desAffaires trangres, laquelle a succd M. F. Alabrune.

    3. Les requrants allguent en particulier la violation de larticle 14combin avec les articles 8 et 12 de la Convention en raison de lannulationde leur mariage.

    4. Le 7 avril 2009, la requte a t communique au Gouvernement. Lesparties ont soumis des observations sur la recevabilit et le fond de laffaire.

    5. Le 31 aot 2010, la chambre a dcid dajourner sa dcision sur la

    tenue dune audience dans lattente de larrt dans laffaire Schalk et Kopfc. Autriche(no30141/04, CEDH 2010).

    6. Le 8 avril 2011, le prsident de la chambre a dcid, comme le permetlarticle 29 3 de la Convention, que la chambre se prononcerait en mmetemps sur la recevabilit et le fond. Les parties ont soumis des observationscomplmentaires.

    7. Le 24 octobre 2012, le prsident a dcid dajourner lexamen de larequte dans lattente de ladoption du projet de loi permettant le mariageentre personnes de mme sexe.

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    8. la suite de la promulgation de la loi du 17 mai 2013 ouvrant lemariage aux couples de mme sexe , les parties ont prsent de nouvelles

    observations complmentaires.9. Des observations communes ont galement t reues de la FIDH

    (Fdration internationale des ligues des droits de lhomme), de la CIJ(Commission internationale des juristes) de lAIRE Centre (Advice onIndividual Rights in Europe) et de ILGA-Europe (European Region of theInternational Lesbian and Gay Association), reprsents parM. R. Wintermute, que le prsident avait autoriss intervenir dans la

    procdure crite en tant que tierces parties (articles 36 2 de la Conventionet 44 3 a) du rglement).

    EN FAIT

    I. LES CIRCONSTANCES DE LESPCE

    10. Les requrants sont ns respectivement en 1970 et 1973 et rsident Plassac (Gironde).

    11. En mai 2004, les requrants dposrent un dossier de demande demariage auprs des services de ltat civil de la mairie de Bgles (Gironde).Le 25 mai 2004, lofficier dtat civil de la mairie publia les bans dumariage.

    12. Par actes dhuissier dlivrs respectivement les 27 mai et3 juin 2004, le procureur de la Rpublique prs le tribunal de grandeinstance de Bordeaux fit notifier son opposition au mariage lofficierdtat civil de la commune de Bgles ainsi quaux requrants.

    13. Le 5 juin 2004, malgr cette opposition, le maire de Bgles, en saqualit officier dtat civil, clbra le mariage des requrants et le transcrivitsur les registres de ltat civil.

    14. Le 22 juin 2004, le procureur de la Rpublique fit assigner jourfixe les requrants devant le tribunal de grande instance de Bordeaux en vuede voir prononcer la nullit du mariage.

    15. Par jugement du 27 juillet 2004, le tribunal fit droit cette demande.Il constata que selon le droit franais la diffrence des sexes tait unecondition du mariage, estima que cette condition ne constituait pas uneatteinte aux articles 12, 8 et 14 de la Convention tels qu interprts par laCour et conclut que, si lvolution des murs ou le respect dun principedgalit pouvait conduire une redfinition du mariage, cette questiondevait faire lobjet dun dbat et ncessitait lintervention du lgislateur. Enconsquence, le tribunal annula le mariage des requrants et ordonna latranscription du jugement en marge de leurs actes de naissance et de l actede mariage.

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    16. Par arrt du 19 avril 2005, la cour dappel de Bordeaux confirma lejugement. Elle constata en premier lieu, comme le tribunal, quen droit

    franais la diffrence de sexe tait une condition de lexistence du mariage.Examinant ensuite cette condition au regard des articles 12, 8 et 14 de laConvention, la cour dappel releva tout dabord que la lgislation franaise

    permettait, notamment au travers du concubinage et du pacte civil desolidarit, ouverts aux personnes de mme sexe ou de sexe diffrent, demultiples possibilits de vie en couple, avec ou sans enfant, la loi assurantune gale protection pour tous, avec jurisprudence adapte, droits gaux

    pour les enfants , si bien quelle ne dcouvrait aucune discriminationdans le droit de fonder un couple, de vivre en couple, de mme sexe ou desexe diffrent, ni de fonder une famille librement choisie naturelle oulgitime, avec possibilit dadoption.

    17. La cour dappel ajouta ce qui suit : La spcificit, et non pas discrimination, provient de ce que la nature n a rendu

    potentiellement fconds que les couples de sexe diffrent et que le lgislateur (...) adsir prendre en compte cette ralit biologique et dterminer ses formes enenglobant le couple et sa consquence prvisible, les enfants communs, dans uneinstitution spcifique appel mariage, choix lgislatif maintenu dans le temps (...)

    Tous les couples de sexe diffrent, ainsi concerns par une ventualit de filiationcommune, sont traits galit puisquils ont libre choix et libre accs au mariage.Certes, les couples de mme sexe, et que la nature na pas crs potentiellementfconds, ne sont en consquence pas concerns par cette institution. En cela leurtraitement juridique est diffrent, parce que leur situation nest pas analogue.

    Mais ils disposent par ailleurs du droit de voir reconnatre leur union dans lesmmes conditions que tous les couples de sexe diffrent ne dsirant pas se marier, si

    bien que la distinction rsultant de cette spcificit est objectivement fonde, justifiepar un but lgitime et respecte un rapport raisonnable de proportionnalit entre lesmoyens utiliss et le but vis.

    18. Enfin, la cour dappel examina les consquences prvisibles notamment sur plusieurs dispositions du code civil de linfirmationventuelle du jugement, qui aboutirait, sans prparation lgislative, un bouleversement des principes rgissant les rgles de la filiation etestima, comme le tribunal, quil ne lui appartenait pas de trancher un

    problme de socit qui ne pouvait que faire lobjet dun dbat politique et

    dune intervention du lgislateur.19. Les requrants se pourvurent en cassation. Dans leur mmoireampliatif, ils invoqurent les articles 8, 12 et 14 de la Convention et sefondrent sur la jurisprudence pertinente de la Cour.

    20. Par arrt du 13 mars 2007, la Cour de cassation rejeta le pourvoi, enrelevant notamment que selon la loi franaise, le mariage est l union dunhomme et dune femme et que ce principe ntait contredit par aucune desdispositions de la Convention et de la Charte des droits fondamentaux delUnion europenne, dont elle souligna quelle navait pas en France deforce obligatoire.

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    II. LE DROIT ET LA PRATIQUE INTERNES ET INTERNATIONAUXPERTINENTS

    21. lpoque des faits, larticle 144 du code civil tait ainsi rdig :

    Lhomme avant dix-huit ans rvolus, la femme avant quinze ans rvolus, nepeuvent contracter mariage.

    22. Par ailleurs, larticle 75 du mme code, relatif la clbration dumariage, disposait en son dernier paragraphe que lofficier dtat civil devaitrecevoir de chaque partie la dclaration quelles veulent se prendre pourmari et femme.

    23. Saisi le 16 novembre 2010 par la Cour de cassation dune questionprioritaire de constitutionnalit portant sur ces dispositions du code civil, le

    Conseil constitutionnel les a dclares conformes la Constitution pardcision du 28 janvier 2011. Il a notamment considr que le droit de menerune vie familiale normale nimpliquait pas le droit de se marier pour lescouples de mme sexe, quen maintenant le principe selon lequel le mariageest lunion dun homme et dune femme, le lgislateur avait estim que ladiffrence de situation entre les couples de mme sexe et les couplescomposs dun homme et dune femme pouvait justifier une diffrence detraitement quant aux rgles du droit de la famille et quil ne lui appartenait

    pas de substituer son apprciation celle du lgislateur.24. Aprs ladoption de la loi no2013-404 du 17 mai 2013 ouvrant le

    mariage aux couples de personnes de mme sexe, le nouvel article 143 du

    code civil se lit ainsi : Le mariage est contract par deux personnes desexe diffrent ou de mme sexe. 25. Aux termes de larticle 515-1 du code civil, le pacte civil de

    solidarit (Pacs), institu par la loi du 15 novembre 1999, est un contratconclu par deux personnes physiques majeures, de sexe diffrent ou demme sexe, pour organiser leur vie commune. Le Pacs implique pour les

    partenaires un certain nombre dobligations, dont celles de maintenir unevie commune et de sapporter une aide matrielle et une assistancerciproques.

    Le Pacs confre galement aux partenaires certains droits en matirefiscale, patrimoniale et sociale. Les partenaires forment ainsi un seul foyer

    fiscal ; ils sont par ailleurs assimils aux conjoints maris pour lexercice decertains droits, spcialement au titre de lassurance maladie et maternit etde lassurance dcs. Certains effets propres au mariage restentinapplicables aux partenaires du Pacs, la loi notamment ne crant pas de liendalliance ou de vocation hrditaire entre partenaires. En particulier, ladissolution du Pacs chappe aux procdures judiciaires de divorce et peutintervenir sur simple dclaration conjointe des partenaires ou dcisionunilatrale de lun deux signifie son cocontractant (article 515-7 du codecivil). De plus, le Pacs na aucune incidence sur les dispositions du code

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    civil relatives la filiation adoptive et lautorit parentale (Gas et Duboisc. France, no25951/07, 24, CEDH 2012).

    26. Quant au concubinage, il est dfini par larticle 515-8 du mme codecomme une union de fait, caractrise par une vie commune prsentant uncaractre de stabilit et de continuit, entre deux personnes, de sexediffrent ou de mme sexe, qui vivent en couple.

    27. Un expos du droit compar en la matire, ainsi que des textespertinents du Conseil de lEurope et de lUnion europenne, se trouve danslarrt Oliari et autres c. Italie (nos 18766/11 et 36030/11, 53-64,21 juillet 2015).

    EN DROIT

    I. SUR LA VIOLATION ALLGUE DE LARTICLE 12 COMBINAVEC LARTICLE 14 DE LA CONVENTION

    28. Les requrants estiment que le fait de limiter le mariage auxpersonnes de sexe diffrent porte une atteinte discriminatoire au droit de semarier. Ils invoquent les articles 12 et 14 combins de la Convention, qui selisent ainsi :

    Article 12

    A partir de lge nubile, lhomme et la femme ont le droit de se marier et defonder une famille selon les lois nationales rgissant lexercice de ce droit.

    Article 14

    La jouissance des droits et liberts reconnus dans la (...) Convention doit treassure, sans distinction aucune, fonde notamment sur le sexe, la race, la couleur, lalangue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, loriginenationale ou sociale, lappartenance une minorit nationale, la fortune, la naissanceou toute autre situation.

    29. Le Gouvernement soppose cette thse.

    A. Sur la recevabilit

    30. Dans ses observations initiales, le Gouvernement a soulevlincompatibilit ratione materiae de ce grief avec les dispositions de laConvention.

    31. La Cour rappelle que, dans larrt Schalk et Kopf c. Autriche(no 30141/04, 61, CEDH 2010) elle a admis, en se rfrant notamment larticle 9 de la Charte des droits fondamentaux de lUnion europenne, quelarticle 12 sappliquait au grief des requrants (voir galementHmlinen

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    c. Finlande [GC], no 37359/09, 110, CEDH 2014 et Oliari et autresprcit, 191). Elle ne voit aucune raison de conclure diffremment dans la

    prsente affaire.32. Ds lors, lexception du Gouvernement doit tre rejete. La Cour

    constate en outre que ce grief nest pas manifestement mal fond, au sens delarticle 35 3 a) de la Convention et quil ne se heurte par ailleurs aucunautre motif dirrecevabilit. Elle le dclare donc recevable.

    B. Sur le fond

    1. Arguments des parties et des tierces parties

    a) Les parties

    33. Les requrants estiment avoir fait lobjet dune discriminationfonde sur leur orientation sexuelle pour leur interdire le bnfice du droitau mariage garanti par larticle 12. Ils font valoir que, sils avaient eu uneorientation htrosexuelle, ils auraient eu accs trois rgimes de protectiondu couple (le concubinage, le Pacs et le mariage) et soulignent que la

    protection juridique offerte par le Pacs est infrieure celle du mariage. Ilsconsidrent que cette discrimination ne vise aucun but lgitime (et quen

    particulier la protection de lquilibre juridique relatif la famille et lafiliation, cite par le Gouvernement ne constitue pas un tel but) et quellenest pas proportionne.

    34. Sappuyant sur larrt Schalk et Kopf prcit, et sur laffirmationquy fait la Cour que larticle 12 nimpose pas au gouvernement dfendeurlobligation douvrir le mariage un couple homosexuel tel que celui desrequrants , le Gouvernement en dduit que les requrants ne peuvent se

    prvaloir dune quelconque discrimination leur encontre du fait que lalgislation franaise rserve le mariage aux couples constitus d un hommeet dune femme. Dans ses dernires observations, il souligne qu la suite delentre en vigueur de la loi du 17 mai 2013, les requrants peuventdsormais conclure un mariage conformment aux lois de la Rpublique.

    b) Les tierces parties

    35. Les quatre organisations tiers-intervenantes ont fait parvenir desobservations identiques celles quelles ont dposes dans laffaire Schalket Kopfprcite ( 47-48).

    2. Apprciation de la Cour

    36. Dans larrt Schalk et Kopf ( 58-63), la Cour a dit que, silinstitution du mariage avait t profondment bouleverse par lvolutionde la socit depuis ladoption de la Convention, il nexistait pas deconsensus europen sur la question du mariage homosexuel. Elle a

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    considr que larticle 12 de la Convention sappliquait au grief desrequrants, mais que lautorisation ou linterdiction du mariage homosexuel

    tait rgie par les lois nationales des tats contractants. Elle a retenu que lemariage possdait des connotations sociales et culturelles profondmentenracines susceptibles de diffrer notablement dune socit une autre etrappel quelle ne devait pas se hter de substituer sa propre apprciation celle des autorits nationales, mieux places pour apprcier les besoins de lasocit et y rpondre. Elle a donc conclu que larticle 12 nimposait pas augouvernement dfendeur lobligation douvrir le mariage un couplehomosexuel tel que celui des requrants (voir galement Gas et Duboisc. France, no25951/07, 66 CEDH 2012).

    37. La Cour a ritr cette conclusion dans les rcents arrtsHmlinenet Oliari et autres prcits. Dans larrt Hmlinen( 96), elle a rappel

    que larticle 12 consacrait le concept traditionnel du mariage, savoirlunion dun homme et dune femme et que, sil tait vrai quun certainnombre dtats membres avaient ouvert le mariage aux partenaires de mmesexe, cet article ne pouvait tre compris comme imposant pareille obligationaux tats contractants.

    38. Dans larrt Oliari et autres ( 192-194), elle a affirm que cesconclusions restaient valables malgr lvolution graduelle des tats en lamatire, onze tats membres du Conseil de lEurope autorisant dsormais lemariage entre personnes de mme sexe. Elle a rappel avoir dit dans larrtSchalk and Kopf que, pas plus que larticle 12, larticle 14 combin aveclarticle 8, dont le but et la porte sont plus gnraux, ne pouvaitsinterprter comme imposant aux tats contractants lobligation douvrir lemariage aux couples homosexuels. Elle en a dduit que la mme approchetait valable pour larticle 12 combin avec larticle 14 et a rejet ce griefcomme tant manifestement mal fond ( 194).

    39. La Cour ne voit aucune raison darriver une conclusion diffrentedans la prsente affaire, vu le bref laps de temps coul depuis les arrtsquelle a rendus dans les affaires Hmlinenet Oliari et autres. Elle noteau surplus que, depuis lintroduction de la requte, la loi du 17 mai 2013 aouvert le mariage aux couples homosexuels (paragraphe 24 ci-dessus) et queles requrants sont dsormais libres de se marier.

    40. Il sensuit quil ny a pas eu, en lespce, violation de larticle 12combin avec larticle 14 de la Convention.

    II. SUR LA VIOLATION ALLGUE DE LARTICLE 8 COMBINAVEC LARTICLE 14 DE LA CONVENTION

    41. Les requrants estiment avoir t victimes, dans lexercice de leurdroit au respect de leur vie prive et familiale, dune discrimination fondesur leur orientation sexuelle. Ils invoquent larticle 8 combin aveclarticle 14 de la Convention. Larticle 8 est ainsi rdig :

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    1. Toute personne a droit au respect de sa vie prive et familiale, de son domicileet de sa correspondance.

    2. Il ne peut y avoir ingrence dune autorit publique dans lexercice de ce droitque pour autant que cette ingrence est prvue par la loi et quelle constitue unemesure qui, dans une socit dmocratique, est ncessaire la scurit nationale, lasret publique, au bien-tre conomique du pays, la dfense de lordre et la

    prvention des infractions pnales, la protection de la sant ou de la morale, ou laprotection des droits et liberts dautrui.

    42. Le Gouvernement conteste cette thse.

    A. Sur la recevabilit

    43. Dans ses observations initiales, le Gouvernement a soulev

    lincompatibilit ratione materiae de ce grief avec les dispositions de laConvention.44. Au vu de sa jurisprudence en la matire, la Cour estime tabli que les

    faits de la cause entrent dans le champ d application de la notion de vieprive ainsi que de celle de vie familiale au sens de larticle 8 et que,ds lors, larticle 14 combin avec larticle 8 trouve sappliquer (Schalk et

    Kopf prcit, 95, Vallianatos et autres c. Grce [GC], nos 29381/09 et32684/09, 71, CEDH 2013 (extraits) et Oliari et autresprcit, 103). Ily a donc lieu de rejeter lexception souleve par le Gouvernement.

    La Cour constate en outre que ce grief nest pas manifestement malfond, au sens de larticle 35 3 a) de la Convention et quil ne se heurte

    par ailleurs aucun autre motif dirrecevabilit. Elle le dclare doncrecevable.

    B. Sur le fond

    1. Arguments des parties et des tierces parties

    a) Les parties

    45. Les requrants estiment faire lobjet dune discrimination fonde surleur orientation sexuelle dans la mesure o le mariage ne leur est pas ouvert.

    Ils admettent avoir accs au Pacs, mais font valoir que la protectionjuridique quil offre est largement infrieure celle rsultant du mariage. Ilsnumrent les diffrences entre les deux rgimes, notamment en matire dedroit au sjour, de nationalit, de pension de rversion ou de rgime des

    biens acquis durant lunion. Ils estiment que la diffrence de traitementquils ont subie na aucun but lgitime et nest pas proportionne.

    46. Le Gouvernement cite larrt Schalk et Kopf ( 101), dans lequel laCour a conclu que larticle 14 combin avec larticle 8 ne pouvait trecompris comme imposant aux tats contractants lobligation douvrir lemariage aux couples homosexuels. Il fait valoir par ailleurs que la

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    52. Ds lors, la Cour estime quil ny a pas eu en lespce violation delarticle 8 combin avec larticle 14 de la Convention.

    PAR CES MOTIFS, LA COUR, LUNANIMIT,

    1. Dclarela requte recevable ;

    2. Ditquil ny a pas eu violation de larticle 12 combin avec larticle 14de la Convention ;

    3. Ditquil ny a pas eu violation de larticle 8 combin avec larticle 14 de

    la Convention.

    Fait en franais, puis communiqu par crit le 9 juin 2016, en applicationde larticle 77 2 et 3 du rglement de la Cour.

    Claudia Westerdiek Angelika NubergerGreffire Prsidente