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LES BASES ONTOLOGIQUES DE LA THÉORIE DE LA LIBERTÉ DE LEIBNIZ

Author(s): André DozSource: Les Études philosophiques, No. 4, RECHERCHES (OCTOBRE-DÉCEMBRE 1979), pp. 453-464Published by: Presses Universitaires de France

Stable URL: http://www.jstor.org/stable/20847633 .

Accessed: 01/10/2013 21:21

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?TUDESCRITIQUES

LES BASES ONTOLOGIQUESDE LA TH?ORIE DE LA LIBERT?

DE LEIBNIZ1

Les ouvrages int?ressants sont de deux sortes : ceux qui sont indiscutableset ceux qui donnent envie de les discuter. Celui de Christos Axelos entre pourmoi dans la deuxi?me cat?gorie. C'est

pourquoi,

devant en rendre compte,

jeprends leparti, plut?t que de donner un r?sum? pr?tendant, sans yparvenir,? l'exhaustivit?, de m'en tenir aux points principaux et de m'attarder de

pr?f?rence sur les passages qui doivent ?mes yeux susciter un d?bat; esp?rantseulement en dire assez pour donner au lecteur led?sir de lire le livre.Du reste,forceme sera? car il faut me limiter de laisser de c?t? m?me certainsd?tails que je juge discutables.

L'avant-propos ?nonce clairement l'intention inspiratrice : l'auteur est ? la

recherche d'une th?orie ? rationaliste ? de la libert?, accord?e aux exigencesde la ? conscience moderne ?, c'est-?-dire, en l'occurrence, conciliant libert?

et n?cessit?. Nous ne pouvons plus, en effet,estime Axelos, nous en tenir ?concevoir la libert? sous la forme d'une lacune de lan?cessit?, ni nous satisfaire

du dualisme kantien; par l?m?me lemod?le rationaliste leibnizien, qui r?ussit? ins?rer l'acte libredans la trame cosmique sans lui faireperdre son originalit?,reprend son actualit?; et, sur le plan historique, Axelos entend montrer,contre certains interpr?tes, qu'il y a bien chez Leibniz une th?orie de la libert?

digne de ce nom. De celle-ci il convient d'abord de chercher les bases onto

logiques, conquises dans la discussion des solutions imparfaites, et qui consistent en une th?orie de la possibilit? et de la contingence. D'o? les quatre longschapitres constituant le principal de l'ouvrage : I. ? Les quatre principalespossibilit?s de d?finir lepossible ? ; II. ?La gradualit? du possible ? ; III. ? L'unification de contingence et d?termination ?; IV. ? La th?orie de la libert? ?.

Jediscuterais volontiers certains

points

de

l'analyse que

faitAxelos de la

probl?matique de la libert? telle qu'elle se pr?sente de nos jours; mais jeme

. Christos AxELOS, Die ontologischen Grundlagen der Freiheitstheorie von Leibniz, Berlin

New York, 1973, 385 p.

Les Etudes philosophiques, n? 4/1979

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454 Andr? Do%

bornerai ?signaler

les r?servesque

suscite enmoi cette id?e de ? conscience

moderne ? ? quoi Ton fait appel; car comment la d?finir? Et jusqu'? quelpoint est-elle ? bon droit normative ? Et ne se pourrait-il que la ? conscience

moderne ? soit ? certains ?gards une ? inconscience moderne ? ?On voit, en

tout cas, nettement l'intention d'Axelos lorsque, reprenant une formulesouvent cit?e ? propos d'un autre philosophe, il oppose en Leibniz un ? noyaurationnel ? ? une ? enveloppe mythologique ?, th?me sur lequel il reviendra

plus d'une fois, et pour lequel aussi je laisse pressentirmes r?serves, ? tout le

moins, pour m'en tenir l?, sur leplan historique.Je laisse de c?t?? malgr? son int?r?t un ? essai introductif? consacr?

? une discussion de l'ouvrage de Dilthey Leibniz et son temps (Leibniz und sein

Zeitalter) pour aborder le chapitre I. Son grand int?r?t tient au propos del'auteur qui est ici de syst?matiser les conceptions du possible que Leibniz a

rencontr?es et qu'il a ?t? amen? ? discuter. Il semble bien, en effet, ue cette

syst?maticit? soit essentielle : il y a, selon Axelos, principiellement (grunds?tzlich, p. 84) deux voies ouvertes pour concevoir la possibilit?, deux voies

qui comportent chacune deux variations principales, ce qui fait finalement

quatre grandes d?finitions. La premi?re voie consiste ? d?finir le possible en leramenant aux causes et conditions de l'actuel (je traduirai ainsi das wirkliche);la deuxi?me voie ? veut expliciter le sens de la cat?gorie de possibilit? en

rapport ? l'actuel lui-m?me et comme tout ? (p. 84); elle comporte deuxth?ses : il y a une diff?rence effective

(wirklich)

entre le

possible

et l'actuel

? cette diff?rencene concerne pas le contenu (p. 95). Le sens de la d?finitionde la deuxi?me voie n'est pas, ce me semble, imm?diatement clair; je pense

qu'il faut l'entendre ainsi : la possibilit? est un statusparticulier, ? un certain

niveau ontologique, de la chose m?me que, par ailleurs, on trouvera, le cas

?ch?ant, en ?tat d'actualit?. La premi?re modification de la premi?re voieidentifie la possibilit? ? l'existence de la totalit? des conditions de l'actuel

(d'o? ? Leibniz contreHobbes ?), la deuxi?me modification l'identifie ? l'existence d'une partie des conditions, ou plut?t ? ce qui r?sulte dans l'esprit dela connaissance de cette partie (d'o? ? Leibniz contre Spinoza ?). La premi?re

modification de la deuxi?me voie met au premier plan la notion de facult?,

celle-ci pouvant ?tre prise comme potentialit?

? cequ'il faut entendre

ausens o? n'est potentiel que ce qui s'actualise in?vitablement ?

(? LeibnizcontreDescartes ?, puis King, Bayle etLeibniz), soit comme virtualit?, ce quis'entend au sens de la force d'abord emp?ch?e par quelque obstacle (Bramhall,

Hobbes et Leibniz); la deuxi?me modification consiste ? entendre la r?alit?

du possible comme ? purement logique ? (? Leibniz contre Arnauld ?).Le lecteur est amen? ? se poser quelques questions. Tout d'abord; o?

Leibniz se situe-t-il lui-m?me ? Serait-ce sur une voie encore diff?rente? Cela

semble exclu par le caract?re apparemment exhaustif du syst?me; il faut donc

que sa solution rel?ve d'une version am?lior?e de l'une des deux voies principales. De fait,Leibniz ?carte express?ment la premi?re voie lorsqu'il d?clare :

? Quand on parle de la possibilit? d'une chose, il ne s'agit pas des causes quidoivent faire ou emp?cher qu'elle existe actuellement ? (Th?odic?e, ? 235); maisd'une part cela n'est que n?gatif, d'autre part il semble qu'alors Leibniz

n'envisage, en fait, d'autres fa?ons d'entendre la possibilit? que la sienne

propre; cependant ildoit en existerd'autres, en lesquelles ilne se reconna?tpas.Et du reste, la syst?matisationpropos?e me laisse un peu surma faim.Est-elle

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La th?oriee la libert? 45 5

la seule possible ?Et quelest son

principe ? Jene

vois pas la division principaleni les subdivisions se d?velopper ? partir d'une r?flexion fondamentale sur lanotion de possible. On se demande aussi ? et c'est sans doute une cons?

quence de cela? si tous les cas de figure sont homog?nes et vraiment comparables :a-t-on affaire,ici ou l?, ? une d?finition nominale, ou ? une th?se, ou ?

quelque mixte des deux ?On pourrait poser la question, notamment, en ce

qui concerne la diff?rence qu'il faut voir entreHobbes et Spinoza. D'autre

part les deux voies se recoupent parfois; Axelos le note lui-m?me ? proposde Hobbes, qui figure deux fois. Et a-t-on radicalement diff?renci?deux voiesen opposant la cause de la chose ? la pr?sence du futur dans le potentiel ?La chose n'est-elle pas ? potentiellement ? pr?sente en sa cause ?La diff?rence

devrait alors ?tre red?finie. Et enfin le syst?me propos? en est-il un pourLeibniz lui-m?me ? Ou n'a-t-on pas affaire? un compromis, syst?matisationapr?s-coup des donn?es historiques, et plus ou moins bien ajust?e ? Je ne nie

pas que ces questions puissent recevoir une r?ponse satisfaisante; je dis

simplement que la r?ponse n'est pas imm?diate.

Je ne voudrais pas quitter ce chapitre sans porter la discussion sur deux

points plus pr?cis, l'un d?tail mineur, l'autre plus essentiel.

Dans le paragraphe consacr? ? la discussion de Leibniz avec Bayle, Axelosfait ?tat (pp. 105-106) de Tb?od., ? 234, o? Leibniz cite Bayle d?veloppant une

th?se d'Ab?lard : ?Donc la pers?v?rance d'Adam dans l'innocence a ?t? tou

jours impossible;donc sa chute ?tait

in?vitable,et ant?c?demment m?me au

d?cret de Dieu, car il impliquerait contradiction que Dieu p?t vouloir une

chose oppos?e ? sa sagesse : c'est au fond la m?me chose de dire : ceci est

impossible ? Dieu, et de dire :Dieu le pourrait faire, s'il voulait, mais il ne

peut pas levouloir. ? Et Leibniz fait suivre une parenth?se :? (c'est abuser destermes en un sens, que de dire ici :on peut vouloir, on veut vouloir; la puissance se rapporte ici aux actions que l'on veut. Cependant iln'implique pointcontradiction que Dieu veuille, directement ou permissivement, une chose

qui n'en implique point, et dans ce sens il est permis de dire que Dieu peut la

vouloir) ?. Comment Axelos comprend-il la parenth?se de Leibniz ? L'explication qu'il en donne est particuli?rement claire pour la deuxi?me phrase,

mais je pense ne pas trahir son interpr?tation de la premi?re en en proposantla formulation suivante :Bayle entend ici le pouvoir de fa?on trop restreinte,

puisqu'il le limite au domaine de ce que Dieu veut effectivement; ainsi il

manque le v?ritable objet du pouvoir, qui est le non-contradictoire quelqu'il soit, et il s'?te le droit de dire ? on peut vouloir ?. Et la deuxi?me phrasecontient la th?se de Leibniz :Dieu peut vouloir m?me ce qu'il ne veut paseffectivement, et, comme formuleAxelos, ? la proposition ?Dieu a la possibilit? de vouloir tout possible ? est possible ?.

Cette th?se est bien leibnizienne; mais ce n'est pas ici lepropos de Leibniz.

Dans la parenth?se Leibniz fait une remarque d'ordre linguistique; il s'en

prend d'une mani?re g?n?rale ? la locution ? pouvoir vouloir ? (? quoi il ajoutela locution similaire ? vouloir vouloir ?, qui ne se trouve pas dans le texte cit?de Bayle); locution impropre parce que le vouloir n'est pas en toute rigueur

l'objet du pouvoir, pas plus qu'il n'est l'objet du vouloir. Ce qui a un sens ici? c'est-?-dire dans le contexte de la question du pouvoir

? ce sont des

locutions telles que ? pouvoir faire ? ou ? vouloir faire? ;par exemple ? on peutfaire ce qu'on veut (faire) ?,mais tout aussi bien, s'il y a lieu :? on ne peut pas

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456 Andr? Do%

faire ce

qu'on

veut

(faire)?, ou encore : ? on peut faire ce

qu'on

ne veut

pas(faire) ?. Leibniz avait d?j? dit lam?me chose au ? 51 :? Pour ce qui est de lavolitionm?me, c'est quelque chose d'impropre que de dire qu'elle est un

objet de lavolont? libre.Nous voulons agir, ? parler juste, et nous ne voulons

point vouloir (...). ? Cependant, dans la deuxi?me phrase, Leibniz fait une

concession : si quelque chose est non contradictoire, donc possible, il est non

contradictoire, donc possible, qu'on laveuille, et il estpermis de dire, encesens,? pouvoir vouloir ?; concession qui ne vaut pas seulement pour :?Dieu peutvouloir ce qu'il ne veut pas (faire) ?,mais aussi pour : ? Dieu peut vouloirce qu'il veut effectivement (faire) ?; car dans tous les cas il ? peut vouloir ?

(faire), ce qui n'implique point contradiction.

Je viens au second point. La controverse avec Arnauld est pour Leibnizl'occasion de pr?ciser le statutdu possible en tantque, quoique objet de pens?esans existence actuelle, iln'est pas un pur en rationis.Cependant lorsqueArnauld

incline ? consid?rer les possibles leibniziens comme des chim?res, ce n'est pasle statut de tous les possibles qui est en jeu : c'est celui des possibles ? la

mani?re de Leibniz, et, comme Leibniz lui-m?me l'a parfaitement not?, la

difficult?d'Arnauld porte sur la pluralit? des ? Adams ? et g?n?ralement sur

la notion de substancepossible; et peut-?tre la pens?e d'Arnauld n'est-elle pastr?s coh?rente, mais le fait est qu'il ne fait pas lam?me difficult?pour ? les

modificationsqui sont dans la puissance des natures cr??es ? (cf. Lettre du

13mai 1686) que pour les substances elles-m?mes. Ce point, cependant, n'est

pas d'une importance extr?me; ce qui est clair c'est que le statut du possibleconsiste pour Leibniz en cette sorte d'existence qu'a le possible dans l'enten

dement divin, qui peut ainsi ?tre dit ? pays des r?alit?s possibles ? (cf. Lettre?Arnauld du 14 juillet 1686) ou regio dearum(cf.De rerumoriginationeadicali).Axelos argue du faitque Leibniz assortit ces locutions d'un ? pour ainsi dire ?ou d'un ut sic dicam pour en conclure qu'il s'agit d'un ? chiffre au sens de

Jaspers ce qu'on peut admettre, encore que je pr?f?re parler iciplus simplement de m?taphore; mais le ? d?chiffrage ? qu'il con?oit prend l'allure d'une? d?mythologisation ? (p. 152) o? c'est finalement ?Dieu ? lui-m?me qui est le

chiffre d?chiffrer(p. 145).Dans le cas pr?cis c'est abuser des textes. Le ? pourainsi dire ? ou le ut sic dicam

signale que?pays

? ou ?r?gion

? est uneimage;mais ? entendement divin ? n'a rien d'une image et c'est dit au propre.

A l'appui de sa tendance d?mythologisante, et en v?rit? d?th?ologisante,Axelos cite (p. 152) une phrase de laR?futation in?dite e Spinoza : ? Essentiae

quodammodo sine Deo concipi ossunt. ? Leibniz le dit, reconna?t Axelos, avec

pr?caution : et de fait le quodammodo est d'importance 1On le commentera

pertinemment, ce me semble, en citant Th?od., ? 184 :? (...) c'est, ?mon avis,l'entendement divin qui fait la r?alit? des v?rit?s ?ternelles (...). Il est vrai

qu'un ath?e peut ?tre g?om?tre. Mais, s'il n'y avait point de Dieu, iln'y aurait

point d'objet de la g?om?trie; et sansDieu, non seulement il n'y aurait rien

d'existant, mais il n'y auraitm?me rien de possible. ? Certes on a le droit de

chercher, dans ce que Leibniz a dit, ? ce qu'il a voulu dire ?; et de voir dans cequ'il appelle ?Dieu ? le ? chiffre de la loi rationnelle immanente au monde,et dans la r?gion des possibles, une couche profonde de r?alit? incorpor?e? la structure de ce monde existant (cf. p. 146).Mais maintiendra-t-on ainsi

le statut du possible ?Le possible peut-il avoir une subsistance hors actualit?s'il ne l'emprunte ? celle d'un Soi subsistant et existant ? Et Leibniz d?my

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La th?oriee la libert? 457

thologis?est-il en mesure de rendre les services

qu'onattend

de lui?Avec le chapitre II nous atteignons ce concept clef qu'est celui de la? gradualit? du possible ?. Quatre paragraphes d'in?gale longueur exposent laliaison de la th?se de lapluralit? des possibles avec leprincipe de raison liaison prenant la forme du m?canisme m?taphysique; la parall?lisation de degr?de perfection etdegr? de possibilit? ; lapr?tention du possible ? l'actualisation ; le

concept leibnizien de lapossibilit? comme prolongement du d?part aristot?licien.Cette notion de gradualit? du possible est incontestablement leibnizienne;

elle est attest?e par certains textes? ? vrai dire, ? ma connaissance, peunombreux, et que Axelos n'exploite pas toujours. Elle s'enracine dans l'affinit?

(comme dit Axelos, cf. ? III, 3) des notions de r?alit?, essence, possibilit?

? affinit?qui, du reste, n'est pas sp?cifiquement leibnizienne. Toutefois cetteaffinit?ne suffiraitpas ? justifier e passage de ? degr? de r?alit? ? ? ? degr? de

possibilit? ?; car on pourrait se demander si la notion de possibilit?, dans ce

qu'elle a de plus propre, et dans lamesure o? elle implique une concurrenceentreplusieurs, ne requiert pas l'?galit?. La gradualit? du possible ne se justifieelle-m?me que soutenue par l'ensemble de l'?difice; et le point de vue de la

diff?rencede degr? me semble compl?mentaire d'un point de vue de l'?galit?? ce que Leibniz sugg?re ? samani?re lorsqu'il parle d'un ? droit ?gal ? des

possibles (cf.De rerumoriginatione..., erh. Philos., VII, p. 303).Dans le chapitrepr?c?dent Axelos avait not? (p. 109) que dans leDiscours dem?taphysique,? 30,Leibniz avait d'abord ?crit :?

[la volont?]a le

pouvoirde faire autrement ou

de suspendre encore tout ? fait son action, l'un et l'autre parti ?tant ?galementpossible ?; et qu'ensuite il a substitu? ? et demeurant ? ? ? ?galement ?a; et d?j?ce changement ?tait donn? comme un t?moignage en faveur de la gradualit?du possible. Cependant rien n'indique que la substitution ait eu pour motif

d'?liminer l'id?e d'?galit?; dans Tb?od., ? 7, Leibniz ?crit bien :? car cemonde

qui existe ?tant contingent, et une infinit? d'autres mondes ?tant ?galement

possibles et ?galement pr?tendants ? l'existence, pour ainsi dire, aussi bien quelui (...) ?. La m?me chose ? 45. Or la Tb?odic?e est post?rieure au Discours et

il semble ainsi attest? qu'il faille faire droit aux deux points de vue.Cela dit les analyses d'Axelos sont excellentes lorsqu'il souligne que la

quantit? de perfection n'est pas ? prendre dans la ligne d'une simple additionde contenus, mais tout autant et plus encore dans la richesse des liens des

contenus, et dans l'alliance de cette richesse avec l'unit?; et lorsqu'il soulignel'importance du ?

principe de tol?rance ? dans la d?termination du degr?sup?rieur. Cependant son propos le conduit une fois ? insister sur la notiond'intensit? au d?triment de celle de contenu d'une fa?on excessive, et l'exempleest assez int?ressant pour m?riter qu'on s'y arr?te. Il s'agit d'un point de lacontroverse avec Arnauld, dont nous avons d?j? parl?, concernant la pluralit?des ?Adams ? possibles. A la lettred'Arnauld du 13mai 1686 font suite deuxtextesde Leibniz tr?speu diff?rents : lesRemarques surla lettre eM. Arnaud, etc.et la lettredat?e du 4-14 juillet 1686.Axelos consid?re (p. 190) que lesRemarques

2. Axelos entend ? et demeurant ? en ce sens que le parti qui n'a pas ?t? pris reste possible

apr?s l'action effective. Le contexte sugg?re plut?t que, m?me avant que l'action ait eu lieu,elle est d?termin?e, sans ?tre n?cessit?e, et que, alors m?me qu'il est certain qu'un parti ne

sera pas pris, ce part? demeure possible tant que la d?cision n'a pas eu lieu. Cela n'exclutcertes pas que le possible non actualis? subsiste comme possible dans l'entendement divin,

qui est, de toute fa?on, son lieu intemporel.

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458 Andr? Do%

sont post?rieures ? la lettre, et t?moignent d'une pens?e plus m?re et d'un

plus haut degr? de pr?cision. Tout indique au contraire que les Remarquessont ant?rieures et constituent une premi?re ?bauche (cf.Lettres deLeibniz ?

Arnauld, ?dit?es par G. Rodis-Lewis, Paris, 1952; Discours deM?taphysique et

correspondancevecArnauld, pr?sent?s par G. Le Roy, Paris, 1957).Mais laissons

m?me la question de l'ordre chronologique; de toute fa?on l'intervalle quis?pare les deux textes n'a pu exc?der quelques semaines, et il est peu vrai

semblable qu'en sipeu de temps la pens?e de Leibniz ait chang? notablement;tout au plus peut-on s'attendre, en effet,? une diff?rence dans le degr? de

pr?cision, comme formule Axelos (p. 190). Mais qu'en est-il du contenu?

Rappelons le probl?me. Leibniz avait dit pr?c?demment? que la supposition

delaquelle

tous les ?v?nements humains sepeuvent

d?duire n'estpas

celle de

cr?er un Adam vague, mais celle de cr?er un telAdam d?termin? ? toutes ces

circonstances [c'est-?-dire : toutes les circonstances ayant trait ? l'individuel]choisi parmi une infinit?d'Adams possibles ?.Arnauld demande :en quel sens

peut-on parler de plusieurs Adams, siAdam est une nature singuli?re ?Leibniz

r?pond : ? En parlant de plusieurs Adams, je ne prenais pas Adam pour un

individu d?termin?... ?. Ici, une l?g?re diff?rence entre les deux textes.La lettre encha?ne :? ...Mais pour quelque personne con?ue sub rationeg?neralitatis sous des

circonstances qui nous paraissent d?terminer Adam ? un individu, mais quiv?ritablement ne le d?terminent pas assez, comme lorsqu'on entend par Adam

le premier homme que Dieu met dans un jardin de plaisir dont il sort par lep?ch?, et de la c?te de qui Dieu tireune femme.Mais tout cela ne led?termine

pas assez, et il y aurait ainsi plusieurs Adams disjonctivement possibles, ou

plusieurs individus ? qui cela conviendrait. ?

Les Remarques continuent :? (...) Quand on consid?re enAdam une partie de sespr?dicats, par exemple

qu'il est le premier homme, mis dans un jardin de plaisir, de la c?te duquelDieu tira une femme, et choses semblables con?ues sub rationegeneralitatisc'est-?-dire sans nommer Eve, le paradis et autres circonstances qui ach?vent

l'individualit?), et qu'on appelle Adam la personne ? qui ces pr?dicats sont

attribu?s, tout cela ne suffitpoint ? d?terminer l'individu, car il y peut avoir

une infinit?d'Adams, c'est-?-dire de personnes possibles ? qui cela convient,diff?rentesentre elles. ?

De plus la lettre fait suivre les lignes d?j? cit?es de la phrase : ? Cela est

vrai, quelque nombre fini de pr?dicats incapables de d?terminer tout le reste

qu'on prenne, mais ce qui doit d?terminer un certain Adam doit enfermer

absolument tous ses pr?dicats, et c'est cette notion compl?te qui d?terminerationemgeneralitatis ad individuum , phrase qui n'a pas d'?quivalent dans les

Remarques. Apr?s quoi les deux textes s'?quivalent.Et voici le parti qu'Axelos tiredes diff?rences. Dans la lettre c'est la per

sonne qui est con?ue sub rationegeneralitatis\ epassage ? l'individu d?termin? se

faitpar

l'attribution despr?dicats,

dont chacun a uncontenu,

et il ne faut en

laisser aucun de c?t?, il faut les apporter tous, c'est-?-dire leur infinit?.DanslesRemarques, ce sont lespr?dicats qui sont d'abord con?us sub rationegeneralitatis,et laquestion de leurnombre n'est pas d?cisive ;pour parvenir ? l'individud?termin? il ne suffitpas d'apporter tous les pr?dicats, il faut faire intervenirune diff?rencequi n'est plus de l'ordre du contenu et ne se traduitpas par de

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La th?oriee la libert? 459

nouveaux pr?dicats. Cette diff?renceest celle de l'agencement et de la coh?sion

des contenus, elle est de l'ordre de l'intensit? et du degr? de r?alit?.Quant ? lalocution ? une partie de ses pr?dicats ?, il faut l'entendre non pas au sens obvie

de ? un certain nombre seulement de pr?dicats, inf?rieur? la totalit? ?,mais de? une partie seulement du contenu de significationdes pr?dicats d?terminants ?;autrement dit, tous lespr?dicats y sont,mais chacun n'y est qu'incompl?tement.En finde compte lapersonne ainsi d?termin?e est bien, d'une certainemani?re,

compl?tement d?termin?e, sans ?tre pourtant ? un individu d?termin? ?,absolument singulier; elle laisse encore place ? des variations qui, sans constituer de nouveaux pr?dicats, fournissent la d?termination ultime; elle se situe

donc entre l'Adam vague et l'Adam individuel d?termin?.

Je crains fortque cette ex?g?se ne soitpas recevable. Tout d'abord, commeje l'ai d?j? dit, il n'est pas vraisemblable que les deux textes pr?sentent une

diff?rencequi, assur?ment, ne seraitpas simplement de pr?cision mais bien decontenu. Ensuite il n'est pas vraisemblable que la locution ? une partie de ses

pr?dicats? ait un autre sens que son sens obvie. Enfin rien n'autorise ? penser

que ce qui d?termine un pr?dicat soit autre chose qu'un nouveau pr?dicat;au contraire, la fa?on m?me dont Leibniz pose le probl?me de l'essence indi

viduelle est r?sum?e dans le principe praedicatum inest subjecto. Il n'y a donc

pas lieu de concevoir un interm?diaire entre l'Adam vague et les Adams

compl?tement d?termin?s jusqu'? l'individualit?, dont chacun appartient ? l'un

des mondes possibles qui en comprennent un. Ce qui constitue un th?me

susceptible d'une infinit?de variations, c'est l'Adam vague lui-m?me, ou plut?tcette part commune ? tous lesAdams qui serait un Adam vague si elle ?tait

prise isol?ment. Ce qu'on peut dire c'est qu'un Adam vague peut ?tre plus ou

moins vague, selon le niveau de d?termination o? il est pris.Un autre point me retiendra encore. Dans la ligne qu'on a d?j? vue concer

nant le statut des possibles, Axelos propose une interpr?tation ? d?mythol?

gisante ? du m?canisme m?taphysique qui r?gle la s?lection des possibles

pr?tendant ? l'existence ?. Le ? noyau rationnel ? serait ici une ? structure

dynamo-t?l?ologique ? immanente (pp. 168 sqq.). Je ferai lesm?mes r?serves

que tout ? l'heure. Comparer cem?canisme ? la s?lection naturelle ? laDarwinest amusant sans ?tre ?clairant. Ce

m?canisme, dit-on,se

produit

? de soi7m?me ? (von sichaus). Mais qu'est-ce que ce ? soi ? ? Pour que lem?canismedes possibles ne soit pas une absurdit? il faut que les possibles aient une sorte

d'existence et une force que soutient l'?tre du Cr?ateur; il faut qu'ils aient,

pour le dire en termes h?g?liens, un ? ?tre pour soi ? qui en m?me tempsn'en est pas un parce qu'il est ? supprim? ? dans le ? soi ? absolu de Dieu.Et Leibniz est on ne peut plus net sur ce point, qui ?critdans laTh?odic?e, ? 201 :? (...) aussit?t queDieu a d?cern?de cr?erquelque chose, l y a un combat entre les

possibles, tous pr?tendants ? l'existence ? (soulign? parmoi)3.

3? On peut dire, il est vrai, que, par la d?cision de cr?er, Dieu se borne ? donner le signaldu combat, ilne conf?re pas la tendance ? exister ni la force de combattre. Cependant cette ten

dance et cette force viennent aussi de lui, source des essences (cf.De rerum origitiatione..., p. 305).Il est vrai aussi que lorsque Leibniz dit ? essentiam per se tendere ad existent?am ? il s'agit,

semble-t-il, d'une loi ontologique qu'on pourrait juger ind?pendante de tout fondement

th?ologique. Mais une investigation plus pouss?e montrerait, ?mon avis, qu'en profondeur

l'ontologique ne peut se s?parer du th?ologique et que cette unit? manifeste la structure

? onto-th?ologique ? de la m?taphysique, sur laquelle a insist? Heidegger et dont j'aurai? reparler plus loin. Mais je ne puis ici aller au-del? de cette simple indication.

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460 Andr? Do%

Apr?s la gradualit? du possible, l'autre base ontologique de la th?orie de

la libert? est l'unification de la contingence et de la d?termination : la libert?est un cas particulier de la contingence ainsi comprise. C'est cette unification

qui fait l'objet du chapitre.Cependant l'expos? d'Axelos s'appuie fr?quem

ment sur des textes qui d?j? traitentde la libert? (c'?tait d'ailleurs d?j? le cas

de l'expos? consacr? ? la possibilit?); il en r?sulte une complexit? qui rend la

lecture de ces pages difficile.

Axelos commence parmontrer comment Leibniz rejette les fa?ons ? inau

thentiques ? d'unifier contingence et d?termination ? telles celle qui les

distribue en des temps diff?rentsou celle qui tente de m?nager pour la contin

gence une ? ?le ? dans la cha?ne de la n?cessit?, et qui peut se prolonger en un

dualismede ? deux mondes ?.

Jene

puis m'?tendresur ces

analysesriches et

denses. Jem'arr?terai davantage sur le ? II, qui a trait au nexus universalis

par le biais de la th?se que r?sume une proposition d'un opuscule ?dit? parCouturat (Opuscules...,p. 2) : (...) radicemcontingentiaesseinfinitumnrationibus?.

H convient, remarque Axelos, de pr?ciser ce qu'il faut entendre par cette

infinit?de raisons. Cela le conduit ? distinguer trois interpr?tations possibles :

1)une cause complexe r?sultant d'une infinit?de causes partielles; 2) une s?rie

de causes et d'effets successifs; 3) un syst?me comportant une cause principaleet un sous-syst?me de causes accessoires, lui-m?me structur? de la m?me

fa?on ad infinitum. 'est la troisi?me interpr?tation qui est la bonne selon

Axelos. Mais remarquons tout de suite que l'on est pass? sans transition de

ratio ? causa, et que ce passage, justifi?assur?ment par de tr?snombreux textesde Leibniz, demanderait malgr? tout quelques pr?cautions et qu'il faudrait

scruter plus g?n?ralement le passage, si important chez Leibniz, de l'ordre

des propositions ? l'ordre des choses.

La distinction de la cause principale et de la cause accessoire permet ?

Axelos de rejoindre le principe de la spontan?it? de la substance, spontan?it?qui peut ?tremodifi?e sans ?tre annul?e. Cette consid?ration est tout ? fait

justifi?edans la mesure m?me ou elle ram?ne ? la racine de lamonadologie,selon quoi chaque monade exprime ? samani?re l'infinit?de toutes les autres ;

mais alors ilme semble que ladistinction de cause accessoire et de cause principale est elle-m?me d?pass?e :

l'extrins?que

et l'intrins?que se rejoignent. Et

lorsqueAxelos commente lan?gation leibnizienne de l'influxphysique, on peutdifficilement lui accorder que cette n?gation concerne seulement lapossibilit?,pour une substance, de conf?rer ? une autre de l'activit? ou, au contraire,de lui en enlever, et qu'elle peut se compl?ter positivement par la th?se que? les substances actives peuvent, de par leur confrontation avec d'autres

substances actives, ?tre emp?ch?es d'atteindre leur telos et ?tre d?termin?es? un moindre degr? de maturit? ? (p. 278) :un tel emp?chement serait encore

l'effetd'une cause externe; et, comme tel, il convient de le comprendre en se

tenant strictement ? la perspective de l'harmonie pr??tablie.Mais il me semble qu'en tout cela l'on s'engage sur une voie o? ce qu'il

s'agit de comprendre est la spontan?it? de la substance,en

tant qu'ellese

concilie avec la connexion universelle, spontan?it? qui est avec l'intelligenceet la contingence l'une des composantes de la libert? (cf.Th?od., ? 288)

? maisce n'est pas la contingence elle-m?me. Et d'ailleurs il ne me semble pas que,dans l'ordre des consid?rations pr?c?dentes, l'infinit? joue un r?le d?termi

nant; or elle doit en jouer un en ce qui concerne la contingence. Je ne nie pas

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La th?oriee la libert? 461

que cette infinit? dans les raisons, qui exclut la r?solution des v?rit?s contin

gentes en identiques, soit li?e ? l'infinit? des substances que chaque substance

exprime; mais cela ne donnerait que l'incapacit? de l'espritfini ? tout expliquer,et non pas encore une v?ritable contingence, si enm?me temps la contingencedu monde entier, en tant qu'il est l'un parmi l'infinit? des mondes possibles,ne s'inscrivait en chaque substance et en chaque v?rit? de fait. Et ce qu'ilfaudrait, c'estmontrer le lienprofond de ces deux infinit?s :celle des substances

du monde et celle des mondes possibles.Resterait d'ailleurs ? se demander si la contingence de l'existence m?me

d'un monde entre dans le champ de ce que vise Leibniz lorsqu'il d?clare quela racine de la contingence est l'infini dans les raisons. On peut en douter

si l'on consid?re qu'alors le choix porte sur la simple alternative du ? rien ?et du ? quelque chose ?; et qu'ainsi l'infinit? des raisons vaudrait selon la lignede la raison pour laquelle ceci existe plut?t qu'autre chose, mais non dans la

ligne de la raison pour laquelle il existe quelque chose plut?t que rien.Danscette question se fait jour le statutparticulier des propositions existentielles.

Cependant si l'on se rapporte ? la d?cision divine de cr?er, si l'on consid?re

que ce qui porte Dieu ? cr?er est l'abondance de sa bont? (cf. Remarques sur

le livrede l'originedu mal..., ? 7), il appara?t bien que l'infini y entre en jeu,bien que peut-?tre cet infinine doive pas alors se d?ployer en une s?rie infinie

de raisons. Mais peut-?tre qu'en ce cas le singulier peut s'allier au plurielassez pour que Leibniz puisse ?crire : ? car tout doit ?tre expliqu? par sa

cause, et celle de l'univers ce sont les fins de Dieu ? (Remarques sur la lettredeM. Arnaud). Mais je ne fais ici que des suggestions, la question demeurant

pour moi ouverte.

Mais ici nous rejoignons un point auquel Axelos va porter lui-m?me sa

r?flexion au chapitre suivant, et qu'il avait d'ailleurs d?j? rencontr? ailleurs.D?s l'avant-propos, commentant un passage de Tb?od., ? 320, o? Leibniz

rejette la libert? de pleine indiff?renceparce que ? vouloir qu'une d?termination vienne d'une pleine indiff?renceest vouloir qu'elle vienne naturellementde rien ?, Axelos avait rejet? la th?se de Jalabert selon laquelle la cr?ationex nihiloest impliqu?e dans la preuve a contingentia undi qu'on trouve dans leDe rerum

origine etaussi dans

Tb?od., ? 7); car,disait

Axelos, Kontingentchez

Leibniz, ? la diff?rence de Zuf?lligkeit chez Kant, ne signifiepas le caract?re

d'une existence d?riv?e d'une cause ext?rieure (p. 18, n. 21), et, continuait-il

(pp. 19-20), le concept de la cr?ation par Dieu ? partir du n?ant absolu est

l'enveloppe mythologique dont lenoyau rationnel est le concept de lanaissancedes choses ? partir du n?ant relatif impliqu? dans la gradation infinimentdiversifi?e d'un d?veloppement. Autrement dit ? si je comprends bien,

d'apr?s le contexte? dire : ? Si quelque chose vient du n?ant absolu, c'est

surnaturellement ? est simplement une mani?re exot?rique de dire :? en fait

il n'y a que des passages naturels, c'est-?-dire des passages graduels, n'admettant que du n?ant relatif ?. Axelos reprendmaintenant la question plus direc

tement : ? La reprise de la doctrine selon laquelle la cause universelle (Dieu)produit m?me lamati?re lors de la cr?ation dumonde ne doit pas nous conduire

? pr?ter ? Leibniz la th?se de la creatioex nihilo,car, comme Leibniz le souligne

toujours ? nouveau : coexistente et co?ternelle avec Dieu est la r?gion des

v?rit?s ?ternelles, lesquelles, bien qu'immat?rielles, ne sont pas inactives,

puisqu'elles ont le pouvoir de d?terminer le pouvoir et l'agir divins, exer?ant

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462 Andr? Do%

une force attractive etmettant des bornes ? la toute-puissance; le domaine de

l'essence est donc pour ainsi dire une mati?re id?ale : ? C'est la r?gion des? v?rit?s ?ternelles qu'il fautmettre ? la place de lamati?re, quand il s'agit de? trouver la source des choses ? (Th?od., ? 20). C'est ?galement ? partir de la

coh?rence immanente du syst?me qu'il faut comprendre que Leibniz doit nierla cr?ation ? partir de rien, car quand, et aussit?t que, il a ?tabli la loi de

continuit? et n'a admis que le changement, comportantm?diation, d'une choseen une autre, le passage par saut, brusque et sansm?diation, du pur n?ant ?

Yexistentia, de la compl?te inactivit? ? l'actualit?, ne peut plus semaintenir;

par l'?laboration de la doctrine de la compossibititas a doctrine de la cr?ation? partir du n?ant est rejet?e par Leibniz de fa?on plus d?cisive qu'elle ne le fut

jamaisdans la

philosophie grecque,

car

parcette doctrine il est

prouv? quesi un contenu de pens?e (realitas) passe ou est produit au statusontologiquede l'actualit? (existentia) ce n'est ni ? partir du pur n?ant, ni ? partir du status

de la possibilit? (possibilitas), mais ? partir du plus haut rang, confinant ?

l'actualit?, du domaine de la possibilit?, c'est-?-dire ? partir de la compossibili as? (p. 339).

Il est clair qu'Axelos se heurte ici aux affirmations expresses de Leibniz,

par exemple ? celle-ci :?Dieu produit des substances de rien? (Th?od., ? 395).

J'ai d?j? dit que jene lui conteste pas le droit de s'essayer ? ?d?mythologiser ?

Leibniz; mais le Leibniz d?mythologis? est-il en outre un Leibniz ?sot?rique ?A celui qui le soutiendra incombe la charge de lapreuve. Or lapreuve apport?e

dans les lignes pr?c?dentes ne vaut pas. En affirmant la cr?ation ex nihiloLeibniz ne se contredit nullement. La loi de continuit?, la n?gation du saut

brusque ont une validit? intramondaine, elles ne s'appliquent pas quand il

s'agit de l'existence m?me du monde. Et quant ? dire que la cr?ation se faitnon ? partir de rienmais ? partir de cette sorte de mati?re qu'est la r?gion des

v?rit?s ?ternelles, autant dire que la cr?ation ne se fait pas ? partir de rien

puisqu'elle se fait ? partir de Dieu.Nous ne nous sommes qu'en apparence ?loign?s du sujet du chapitre III,

car nous retrouvons lam?me th?matique dans le ? IV de cem?me chapitre,consacr? ? la critique leibnizienne de la cause efficiente (critique envelopp?edans l'id?e du nexusuniversalis)et qui d?bouche curieusement, comme on va le

voir, sur une critique de Heidegger. En effet, apr?s avoir pris comme filconducteur l'id?e d'une s?rie ou d'un syst?me de causes Axelos rappelle fort

opportun?ment qu'en rigueur m?taphysique ce ne peut ?tre pour Leibniz

qu'une fa?on de parler, ?tant donn? que les substances n'agissent pas les unessur les autres.Mais, selon Axelos, cette critique de la causalit? efficiente etlin?aire interdit de concevoir Dieu simplement comme la cause efficiente

supr?me, ce qui est l'interpr?tation de Heidegger. Notons d'abord que si

Leibniz rejette, en rigueurm?taphysique, la causalit? efficientequ'une substance

finie exercerait sur une autre, c'est justement qu'il concentre la causalit?efficienteen Dieu; cf. Discours de m?taphysique, ? 14 : ? Chaque substance estcomme un monde ?

part, ind?pendantde toute chose hors de Dieu ?, et

De rerum...,p. 305, o? la causalit? efficienteest express?ment attribu?e ?Dieu.

Heidegger (Le principe de raison, 4e heure), se r?f?rant aux premi?res des

Vingt-quatre th?ses de m?taphysique (GP VII, pp. 289 sqq.) d?termine Dieucomme prima causa-,? quoi Axelos fait observer que Leibniz avait justement?vit? cette formule au profit ? ultima ratio-,et cette substitution attesterait un

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La th?oriee la libert? 463

parti pris pourla cause efficiente.Mais non seulement causa est

associ?,dans

le texte, ? ratio,mais encore prima causa se trouve dans la th?se 23 ; et quant ?

l'?change de ? premier ? et ? dernier ?, il est dans la nature de la chose, et il estaussi chez Leibniz, comme on vient de le voir et comme on peut le revoir

par exemple dans Th?od., ? 7 : ? Dieu est la premi?re raison des choses. ?

Heidegger remarque ensuite que Leibniz pr?sente une sorte de cercle : le

principe de raison englobe tout, y compris Dieu (Dieu a sa raison en lui

m?me), et d'autre part, d'apr?s la th?se 2, les principes ont une efficiencequirequiert une cause, laquelle estDieu; donc : le principe de raison vaut seulement dans lamesure o? Dieu existe. Cette interpr?tation ne tient pas, dit

Axelos; d'abord, du fait de la place qu'elle fait ? la causalit? efficiente ce ?

quoi on vient de voir ce qu'il y a lieu de r?pondre; ensuite, parce qu'elle pr?te? Leibniz une incons?quence dans l'application du principe de raison et l'id?e

que la s?rie des causes efficientes s'interrompt brusquement pour faire place? une cause supr?me qui, jouissant de son as?it?, ferait exception au principe.Rien de tout cela ne se trouve chez Heidegger Heidegger dit simplementque Dieu et le principe de raison se soutiennentmutuellement; cercle qui n'arien d'un cercle vicieux, mais qui exprime la structureonto-th?ologique de la

M?taphysique. Un peu plus loinAxelos fait ?tat de lapr?f?rence de Heideggerpour les formulations br?ves du principe de raison telles que ? Ratio est in

Natura curaliquidpotius exist?t quam nihil ?, o? il semble que Leibniz oppose?

quelquechose,

quoique ce soit,

quelque

chose

g?n?ralement parlant

? ?l'absence compl?te de toute chose, tandis que dans les formulations plusd?velopp?es il appara?t que Leibniz oppose en fait ? cette chose-ci existante ?? ? cette chose-ci non existante ?, comme c'est le cas dans Th?od., ? 44 :? (...) c'est que jamais rien n'arrive sans qu'il y ait une cause ou du moins uneraison d?terminante, c'est-?-dire quelque chose qui puisse servir ? rendreraison apriori pourquoi cela est existant plut?t que non existant... ?; texte qui,s'interpr?tant dans une perspective intramondaine, n'appelle pas la cr?ationex nihilo.Remarquons alors qu'ici Leibniz a bien dit en effet : rien n'arrivesans raison, ce qui s'applique mieux aux ?v?nements intramondains (le mot? ?v?nement ? figure d'ailleurs aussit?t apr?s)

? encore que la cr?ation puisse

aussi ?tre consid?r?e comme un ?v?nement. Mais les textes ne manquent paso? il est clair qu'il s'agit de l'existence du monde et de quelque chose en

g?n?ral (cf.De rerumoriginatone...,p. 304; Principes de la nature etde la Gr?ce, ??7et 8; textes qui sont d'ailleurs pertinents pour toute la question ici ?voqu?e).

Avec le chapitre IV nous atteignons enfin la th?orie de la libert? proprement dite. La performance de Leibniz est que, d'une part, la volont? n'est passimplement ramen?e ? un processus cosmique plus g?n?ral, sans consid?rationde sa sp?cificit?,d'autre part, est ?vit? l'?cueil d'un volontarisme irrationaliste.Suivant la m?thode d?j? adopt?e pr?c?demment, Axelos montre d'abordcomment Leibniz se situe lui-m?me face aux ?mauvaises ? th?ories :positionfataliste de l'argument paresseux, th?orie de l'?vidence imm?diate (Descartes),

concept ? pragmatiste ? (Locke) ? qui ne concerne que la libert? de faire ,concept d?cisioniste (libert? d'indiff?rence). Gr?ce ? quoi la solution leibnizienne appara?t dans son originalit? et sa sup?riorit?. Elle consiste ? concevoirla libert? humaine comme ? r?volution dans la fa?on de penser ?; cela nousvaut une analyse pr?cise de la psychologie leibnizienne de la volont?, de

l'?quilibre subtil qu'elle ?tablit dans l'action r?ciproque de la volont? et de

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l'entendement, de l'art de contourner l'obstacle int?rieur.A ce niveau c'est

la th?orie de l'inclination pr?valente qui est la clef; finalement la libert? estessentiellement processus de conversion rationnelle associ? ? l'unification

g?n?rale de la contingence et de la d?termination.Ce dernier chapitre est des plus ?clairants. S'il m'est permis de faire encore

une critique, elle ne vaudra que comme l'indication d'une r?flexion ? poursuivre. Ce que je ne vois pas encore assez bien, au terme de la lecture du

livre, c'est comment le statutg?n?ral de la possibilit? et de la contingence se

trouve int?rioris? dans la libert? de la substance spirituelle. Lorsque Sextus

(cf. la fin de la Th?odic?e) prend un certain parti, ilpourrait en prendre un

autre.Mais s'il en prenait un autre il ne serait plus ce Sextus-ci, mais ? un

Sextusapprochant

?. Il faut donc admettreque

ce ? Sextus

approchant?,

quiexiste en quelque fa?on dans la r?gion des possibles, et dont Dieu dispose,Sextus lui-m?me, ce Sextus-ci, en dispose aussi en quelque mani?re; tout se

passe comme si la substance spirituelle, capable de se r?gler consciemmentsur le bien, f?t-il seulement apparent, communiquait en quelque mani?re ? la

source des possibilit?s et des existences; ce qui sans doute tient ? samani?re

particuli?re? et particuli?rement intense d'exprimer cette source. J'incline

donc ? sans y ?tre n?cessit? ? ? penser que la th?orie leibnizienne de la

libert? ne peut ?tre ais?ment priv?e de son ancrage th?ologique, non plus dureste que la th?orie g?n?rale de la possibilit? et de la contingence. Si, parailleurs, une th?orie ? rationaliste ?,mais d?li?e de toute th?ologie, de la libert?

est possible, je ne vois pas encore comment on pourrait, pour la constituer,extraire du leibnizianisme des fragments suffisammentcoh?rents; il y faudrait,en tout cas, une refonte compl?te que l'?tude historique d'Axelos ne pouvait

pr?tendre fournir.Peut-?tre nous sera-t-elledonn?e dans un prochain ouvrage ?

Andr? Doz.