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^ Mirecourt, Eugene de Paul de Kock PQ

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^

Mirecourt, Eugene de

Paul de Kock

PQ

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1^9^^ ^ti<^^

m mimmwu\ HOMM ES OE LETTRES. PUBLICISTES, ETC., ETC.

PAUL DE KOCKEUGENE UE MIRECOUUT

AVK<: II ^ P0RTH.*1T ET UN A IIT O G 11 A P H K

>ixif;hI': eiiItion

&• eentinies

PARIS

GUSTAVE HAVARD, EDITEUR/ 15, R II F. G U E N £ G A I' D , 15

1856

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PAUL DE KOCK

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EN VENTE CUE? LE m6ME I-IHRAIRE

CONFESSIONS DE MARION DELORME

PAR EUGENE DE MIRECOURT

60 livraisons a 25 centimos, avec gravurns.

18 fr. I'ouvrage coniplel par la posie.

Paris. — imp. simon racoi et comp., rue d'ehfurtii, 1.

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LES CONTEMPORAINS

I'AIt

KUGilNli iJli MlUliCOUHT

PARISGUSTAVE HAVARD EDITEUU

15, RHE CPENEfiADD, 15

L'Aiifpnr et I'^diteiir <>o rnserTenl loul droit He reprnduclion.

1856

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PAUL DE KOCK

muse l^gere, muse d^braill^e ! es-

piegle et petulante grisette, qui es venue

te joindre effrontemenr a la troupe des

neuf soeurs, et que les puritains de la

critique ont en si piteuse eslime ! muse

de Casanova, de Pigault-Lebrun et de

Paul de Kock, est-ce a toi que nous al-

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« PAUL DE KOCK.

Ions aujourd'hui deraander des inspi-

rations ? Faut-il te suivre dans le sen-

tier des amours faciles, oil tu marciies

le nez en I'air, la robe retroussee, I'oeil

mutin, la gaudriole aux Ifevres? II nous

semble, friponne, que tu soufflettes asscz

gaillardement la morale et que tu te

permets de frender la vertu?

— Eh ! non, dit la muse, je suis bonne

fille. Parole d'honneur, on me calom-

nie ! J'ai I'allure franche, le mot vif, le

geste risque ; mais, apres tout, le coeur

est excellent. Mon Dieu, la vie n'est pas

deja si amusante! il faut bien rire el

plaisanter un pen.

— Oui, sans doute, pourvu que nous

restions, ma chere, dans les limites de la

decence

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PAUL DE KOCK.

— Bah ! s'ecrie-l-elle, « si la volupte

est dangereuse, les plaisanteries ne I'ins-

pirent jamais! »

Et la foUe, apres avoir fait jJreuve

d'erudition en citant M. de Voltaire

,

nous quitte pour aller courir la pretan-

taine.

Malheureusement, sous le double rap-

port de la decence et de la morale,

M. de Voltaire nous semble d'une autorite

contestable.

Interrogeons a present le heros de

cette biographic ; nous le trouvons de la

m^me opinion que sa muse.

« — Lisez mes livres, nous dira Paul

de Kock ;je suis beaucoup plus moril

qu'on ne pense. »

A-t-il raison ? Voila ce que la suite

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3 PAUL DE KOCK.

nous apprendra. Le moment n'est pos

venu de critiquer ses oeuvres. II s'agit de

raconter son histoire.

Charles Paul de Kock est ne a Passy,

prfes Paris, ie 21 mai 1794.

Son pere, riche banquier hollandais,

s'etablit en France, ou le general Dii-

mouriez, son ami, lui obtint la fourni-

ture de I'arm^e du Nord. M. de Kock

suivit Dumouriez dans ses premieres

campagnes ^, et le quitta malheureuse-

ment, vers la fin de 93, pour venir tou-

cher a Paris les sommes qui lui etaient

dues par la Convention.

Mais la Convention payait ses dettes

1 Le pfere du romancier avail le grade de colonel. II

s'est battu it Jemmapes et a Valmy.

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PAUL DE KOCK. 9

a sa maniere : elle se faisait donner

quittance par la hache du bourreau.

Arrache des bras de sa femme, le

banquier hollandais fut une des viclimes

de cette ^poque sanglante. Madame de

Kock elle-merae, eraprisonnee a I'Ab-

baye, ne dut qu'a son etat de grossesse

de ne point 6tre envoyee a la guillotine

par les terroristes.

Paul de Kock, avant de naitre, sauva

les jours de sa mere ^

.

II avail un frere aine que la famille gar-

dait en Hollande. Ce frere embrassa la

carrifere des armes et partit pour les

- Madame de Kock est morte, I'an dernier, k I'Sge de

quatre-vin^-neuf ans. Elle^taitd'origine Suisse et son

nom de famille ^tait Imhoff. Un de ses oncles tenait

a Geneve ce fameux h6tel des Trois-Rois, dont parle

Casanova dans ses Mimoire$.

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10 PAUL DE KOCK.

Indes, oil il donna les preuves du plus

eclatant courage. Devenu general et

gouverneur de Balavia, il fit triompher

le drapeau hollandais dans plusieurs

batailles contre les Hindous, revint en

Europe, fut cree baron, et remplit pen-

dant quinze ans a La Haye les fonctions

de ministre de I'interieur. II conserva

ce poste eminent jusqu'a sa mortV

Le general baron de Keck etait tres-

orgueilleux de la renommee de son frere

I'ecrivain.

Comrae I'auteur de Sceur Anne d^teste

les voyages el n'a jamais ^te, de sa vie,

plus loin que Versailles, le ministre du

roi de Hollande passa la frontiere en

' U niourul en 1844.

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PAUL DE KOGK. 11

1840, et Vint rendre visile au romancier,

sous les ombrages de Romainville.

On a vu rarement une ressembiance

pins merveilleuse que celle de ces deux

hornmes. lis avaient mdme taille, m^mo

physiononiie, meme son de voix, meme

regard et meme sourire.

Paul de Kock pouvait prendre le chc-

min de La Have et se presenter au ca-

binet du roi, le porlefeuille du baron

sous le bras ; sa Majeste Uollandaise I'eut

pris a coup sur pour son minislre.

On aurait lente I'experience peut-^tre,

si le general avait pu terminer le roman

du Tourlourou, dont les premieres

feuilles etaient sous presse.

Mais Barba s'opposa formellement a la

substitution.

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12 PAUL DE KOCK.

Rien dans le caractere de Paul de Kock

enfant n'annonQait le romancier grivois

et facetieux dont le monde entier con-

nait aujourd'hui les oeuvres. II se mon-

trait fort timide , observait beaucoup,

parlait peu et pr^ferait I'etude a tous les

amusements de son age.

Sa mere, dont il etait I'unique affec-

tion, ne voulut pas se separer de lui pour

I'envoyer au college. Elle lui donna des

precepteurs a domicile.

Un de ces derniers, au lieu de faire

traduire a son eleve le de Viris illustri-

bm, pr^f^ra lui mettre quelques romans

entre les mains, afln d'avoir tout le loisir

possible pour en lire Im-mSme.

En mSme temps il lui apprenait a fi-3-

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PAUL DE KOCK. 13

donner de magnifiques couplets, dans le

genre de celui-ci

:

Qa'on est beureux,

Qu'on est joyeux,

Tranquille

A. Romaioville

!

Ces bois cliarmaiits

Poar les amants

Offrent mille agr^ments.

Paul, a force de chanter la romance,

voulut que son precepteur le conduisit

sur les lieux memes qui avaient inspire de

si beaux vers.

Madame de Kock n'babitait plus sa

maison de Passy. Elle demeurait alors

sur le boulevard, non loin du Chateau-

d'Eau'.

1 Dans la maison oil est aujoard'bai le restaurant

TrnclKjt.

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14 PAUL DE KOCK.

Tous les inaliiis le precepteur et soi

61eve gagnaient le faubourg du Temp'e

emportant cinq ou six volumes de Dr

cray-Dumenil , avec des provisions d(

bouche pour la journ^e. lis passaienl 1;

barriere, gravissaient la cote de Belle-

ville , et ne tardaient pas a gagner les

bois charmants de la romance, ou pro-

visions de bouche et volumes se d6vo-

raient a I'ombre des jeunes chines.

Voila ce qui explique le gout persistant

de Paul de Kock pour la for^t de Romain-

ville.

A I'age de dix ans , il y faisait I'ecole

buissonniere , de complicity avec son

maitre;plus tard, il y egara ses premieres

amours, et finit par y dresser une tente,

qu'il habile encore.

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PAUL DE KOCK. IS

Le gout de la lecture avait remplace

chez lui le gout de I'^tude serieuse.

II lisait en mangeant, il lisait au lieu de

dormir; il emportait un livre avec lui

dans les salons oil le conduisait sa mbre.

— Comme votre fils est studieux ! dit

a madame de Rock un ancien ami du

banquier son epoux. Que lis-tu la, mon

petit homme?L'histoireromaine,jegage!

— Non , repondit Paul, je lis Alexis

ou la Maisonnette des hois.

— Un roman ! s'^cria le personnage

tout scandalise. Vous laissez lire des ro-

mans a un enfant si jeune, madame?

— Son precepteur le lui permet , re-

pondit la mere un peu confuse.

— Eh blen: son precepteur merile

d'etre casse aux gages I

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16 PAUL DE KOCK.

— Pourquoi cela, je vous prie? de-

manda Paul, avec uii accent de resolu-

tion qu'on ne lui avait jamais connu

jusqu'alors. Je lis des romans, monsieur,

parce que je veux en faire, et j'ap-

prends mon metier l De quoi vous mS-

lez-vous ?

La reponse ^tait viva.

Madame de Kock gronda son fils et ne

parut pas tres-emerveillee de la vocation

qu'il annon^ait.

EUe renvoya le precepteur, pour en

choisir un autre, qui avait un systeme

d'enseignement moins romanesque.

Adieu les promenades a Romainville

!

adieu les attrayantes lectures sous I'om-

brage! II falluten revenir bon gre mal

gre aux themes et aux versions. Les vo-

.-JUt

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PAUL DE KOCK. 17

lumes de Ducray-Duraenil furent cruel

-

leraent arraches des mains de Paul, et,

deux annees apres, on le fit entrer dans

une maison de banque, afin d'eteindre

sous les glaces de larithmetique el du

calcul le feu de I'imagination qui ^cla-

tait dans cette jeune tele.

A quinze ans, il etait commis chez

MM. Scherer et Finguerlin.

Ces financiers avaient etabli leur

comptoir au coin de la rue Taitbout

,

dansce vaste hotel occupe depuis par un

Russe raillionnaire, M. Demidoff, qui

denienagea vers i 822 pour ceder la place

au Cafi de Paris.

Sachanl que sa mere avait une fortune

mediocre, et ne voulant pas lui resister

dans la direction quelle donnait a son

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18 PAUL DE KOCK.

avenir, Paul sembla prendre gout aux

arides travaux de la maison de banque.

Mais, sous les grands registres oil ses

patrons lui faisaient ecrire des comptes,

se cachait plus d'un volume que n'avail

pas signe Barreme ; et , dans une poche

du portefeuille aux negociations, les re-

gards indiscrets auraient pu d^couvrir

certain cahier mysterieux, sur les pages

duquel notre admirateur de Ducray-Du-

menil traitait des questions un peu

moins seches que les questions finan-

cieres.

Paul ecrivait un ctiapitre entre deux

bordereaux, additionnant ou dialoguanl

tour a tour, se consolant des chiffres par

la phrase, et negligeant un total pour

meiux calculer une peripetia.

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PAUL DE KOCK. l:i

Les comptes etaient faux ', mais If

chapiire finissait bien.

Chaque jour le manuscrit devenaii

plus considerable, et Paul n'osait pa.-

emporter au logis maternel ses 61ucu

brations secretes, dans la crainte qu'oi

ne les trouvat en son absence et que l

feun'en fit justice.

— Eh ! mais , lui dit , un matin

M. Scherer, en frappant sur le porlo-

feuille mentionne plus haul, il est doii;'

venu par le courrier beaucoup do man-

da ts de la province ?

— Non, monsieur, pas plus que d'ha-

bilude, repondit Paul deconcert^.

• Paul de Kock , depuis son sejour dans la maison

tic banqne, conserve la pretention d'etre excessivement

fort en calcal.

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CO PAUL DI-: KOCK.

— Que diable, pourtanl, cc porle^

feuille est plein ! Vous en avez la clef

,

voyons un peu.

II fallut obeir. Le manuscrit fut de-

couvert.

— Je ne me trompe pas... c'est un

roman que vous ecrivez la, jeune

homme?

— Pardon, murmura Paul;

prcncz

garde, je vous prie... Vous allez dechirer

les feuillets.

— Le beau malheur ! cria le banquicr

qui passait de la surprise a la colere el

tournait avec violence les pages du ma-

nuscrit. Vous ne rougissez pas de perdre

a de telles soltises le temps que voiis

devez consacrer ici aux affaires serieu-

ses? rEnfant de ma femme. On ose

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PAUL DE KOCK. 21

fabriquer die/ inui un romaii qui a pour

litre VEnfant de mafemmel C'est d'une

immorality notoire. Et les litres de cha-

pitre, ecoutez ceia, je vous prie : La

Ferme et le Grenier d foin!... Que se

passe-t-il dans voire grenier a foin ?. .

.

La Xante de Jcanneton!... Cette Jean-

nelon n'esl probabiement qu'une gour-

gandine?

— Je vous prie, monsieur, dit Paul,

de vouloir bien vous dispenser de toule

espece de commenlaire. S'il ne vous

plait pas qu'un de vos commis ecrive

des romans, je vais a Tinstant meme

quitter vos bureaux.

— Ah I monsieur me met le marche a

la main ! Soil. Vous n'etes plus attach^

a ma maison de banque.

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92 PAUL DE KOCK.

— El j'en suis dans le ravissement I

dit Paul avec uii salut profond.

II sortit pour aller apprendre cette

nouvelle a sa mere, et lui declara que

tout son temps a I'avenir serait consacre

a la lilterature.

— Yoila mon premier roman, lui dit-

il, et ce ne sera pas le dernier. Si tu

pleures, lu m'oteras mon courage; il

vaut bien mieux rire ! Ecoule seulement

lin chapitre.

Une demi-heure aprfes, madame de

Kock se tordait sur un fautenil et riait

auxlarmes.

Son fils venait de se reveler a elle

avec toute son originalite comique et sa

trerve desopilante.

Des le jour meme. Paul se mil a la

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PAUL DE KOCK. 23

recherche d'un editeiir; mais il n'en

Irouva pas un seul qui daignat examiner

son oeuvre. II se heurtait a I'eternel

obstacle que I'ecrivain rencontre au

debut de la carriere.

'.< Un bon editeur ne doit pas savoir

lire ! » C'est le triomphant axiome que

tous ces messieurs vous jetlent a la tfite.

Avant de vous imprimer, ils exigent

que vous soyez connu. Or, comment

serez-vous jamais connu, si Ton ne

vousimprime pas? Ceci n'est plus leur

affaire ; ils vous laissent empfitre dans le

cercle vicieux.

Madame de Kock avait quelques eco-

nomies devant elle.

— Prends mille francs , dit-elle a

Paul, et porte ton manuscrit a un im-

pnmeur.

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24 PAUL DE KOCK.

Le jeune homme no se fit pas repeter

deux fois cette bienheureuse iavitalion.

Mais il n'etait pas au bout de ses

peines.

Une fois un livre imprime, I'essen-

tiel est de le vendre, et VEnfant de ma

femme ne trouva point d'acheteurs. Paul

deposa vainement ses exemplaires dans

les principales maisons de librairie.

Jamais un edileur ne pousse un livre

dont 11 n'a pas fait les frais.

Cependant notre hcros ne perd point

courage.

II ecrlt un second roman qui a pour

litre : Georgette ou la Fille du label-

lion ; mais ceux auxquels il le propose

lui repondent

:

— Attendez au moius que le premier

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PAUL DE KOCK. 25

soil vendu ! Nous avons encore tous vos

exemplaires au grand complet.

Paul de Kock attendit deux ans.

Vingt fois il fut sur le point de livrei

aux flammes cette pauvre Georgette,

dout la folle histoire at les malheurs ont

depuis excite tant d'eclals de rire et fait

couler tant de larmes.

Une circonstance inattendue rendit

tout a coup les libraires plus favora-

bles au jeune ecrivain.

Las de frapper conlinuelleraent a leur

porte sans resultat, Paul avait pris le

parti de travailler pour le theatre, et on

melodrame de sa composition, Cathe-

rine de Courlande^. re^u a I'Ambigu-

* Paul de Kock, avant cette piece, en avait dejii

f iit juuer qiiel<|UL>$ autres. dont voici les litres : Ma-

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86 PAUL DE.KOGK.

Comique, obtint un succes etourdis-

sant.

Ce ne fut plus alors le jeune homine

qui alia frapper a la porte des editeurs,

ce furent ces messieurs qui vinrent liy

rendre humblement visite et lui acheter

1ft droit d'imprimer sa piece.

— Ne m'avez-vous pas autrefois, lui

dit Barba, propose certain ouvrage?...

— Oui, mon roman Georgette.

— Est-ce que vous I'avez toujours?

— Le manuscrit est la dans mes car-

tons.

(lame de Yalnoir (sujet emprunte a Ducray-Duraenil),

— le Moulin de Mansfeld, — la Bataille de Veil'

lane, — Monsieur Uouton, — Monsieur Graine de

Un — et les Epoux de quinze ans, Les trois pre-

mieres sont des uielodrames, les autres sont des

raurtevilles.

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PALL DE KOCK. ^

— Je m'occupe a peu prfes exclusive-

ment de pieces de theatre, dit Barba;

mais je puis vous trouver un editeur de

romans.

— En verite? s'ecria Paul avee joie.

— Combien lui vendrez-vous ce

livre ?

— Ce qu'il m'en offrira.

— Vous etes sur alors de traiter avec

mon homme. Je vous i'enverrai.

Le lenderaain Paul de Kock vit entrer

Chez lui I'edileur Hi^bert de la Galerie

de bois. qui debuta par se plaindre de

I'indifference du public pour les li-

vres.

— Ah ! monsieur, dit-il, aujourd'hui

les romans ne se vendent plus, et les

affaires sont detestables

!

Neanmoins,

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28 PAUL DE KOCK.

comme Barba s'interesse a vous, je

veux bien iraprimer Georgette; maisje

ne vous paierai pas le manuscrit bien

Cher.

— Combien? demanda Paul.

— Deux cents francs.

— En especes?

-Non pas! Je vous ferai un rfegle-

ment a huit mois de date. II faut me

laisser vendre mon edition.

— Fort bien. Mais si vous la vendez

toutentiere? •

— Alors je vous compterai deux cents

francs de plus.

— Voila mon manuscrit, emportez-le,

dit le jeune homme.

Notre libraire de la Galerie de bois

s'en alia, tres-satisfait de la rondeur de

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PAUL DE KOCK. 20

Paulde Kock on affaires. 11 piiblia Geor-

gette de compte-a-demi avec Barba. La

vente fut magnilique. An bout de six se-

maines les associes eurent environ millc

ecus de benefice net.

Seulement il se trouva que I'edilion

n'etait jamais entierement epuisee. Tou-

jours on avail des volumes de Georgette

a montrer a I'auteur, quand il reclamait

les deux cents francs supplementaires.

II faut, dans I'interet des ecrivaius a

venir , devoiler ces peliles ruses de

librairie, auxquelles nous nous sommes

tons laisse prendre.

Apres Georgette, Paul de Kock donna

successivement a ses lecteurs Gustave

ou le Mauvais sujet, — Frere Jacques

et le Voisin Raymond. Le succes dc ces

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30 PAUL DE KOCK.

deux (lerniers livres ful iuiniense, el

I'auteurse vit lilt^ralement assiege par

les libraires,

C'etait une course au clocher pour

avoir ses manuscrits.

Barba resolut d'en finir avec toules

COS rivalit^s commerciales. II avail le

premier d^couverl la mine ; en conse-

quence il se mil en mesure d'exploiter a

lui seul le talent de Paul de Kock el de

ne pas laisser aux autres le plus leger

filon.

— Vous avez quelquefois en ma pre-

sence, lui dit le fin libraire, manifesle le

desir de louer dans les environs de Pa-

ris une maison de campagne?

— A Romainville. Barba ! oui, c'esl

monr^^'e!

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PAUL DE KOCK. 31

Qu'on est heureux

Qu'on est joyeux...

— Je connais la suite, interrompit I'e-

dilcur. U est certain que la-bas, sous ia

verdure, aux cotes d'une petite femme

aimable, vous travailleriez comme un

ange.

— Mieux qu'un ange, Barba, beau-

coup mieux, raon cher

!

Ces bois charmants

Pour les amants...

Mais vous m'avez dit que vous con-

naissiez la suite. Pourquoi diable venez-

vous ainsi renouveler mes douleurs?

La femme est pr^te ; mais la mai-

son?... Je depense dcja plus que je nc

gagne; un double loyer me ruinerait.

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32 PAUL DE KOCK.

— Bah ! si je vous fais des rentes?

— Vous voulez me faire des renies,

gcnereux editeur. Touchezla, j'accepte!

— Par exemple, il faut vous engager

a ne travailler que pour moi.

— Tout ce que vous voudrez, Barba !

Ma maison de Romainville, et je suis a

vous, encre et plume, jusqu'au dernier

chapitre

!

L'editeur lira de sa poche un traite

dont toutes les clauses etaient preles.

Paul de Kock se liait par cet acte, pour

dix annees entieres, et chacun de scs

ouvrages ^ etait achete d'avance au prix

de deux mille six cents francs.

— Bravo!.... c'est convenu, Barba!...

» En qaatre volumes in-douze.

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PAUL DE KOCK. 33

je signe des deux mains, et je pars pour

Romainville \

— Allons, voila ma fortune faita ! pensa

I'editeur.

Monsieur Dupont, public deux mois

apres, se vendit a six milie exemplaires.

Le jour oil I'on mettait en vente un

reman de Paul de Kock, il y avait una

veritable emeute en librairie. On courait

prendre les volumes par centaines, et les

cabriolets brulaient le pave pour aller

repandre I'oeuvre nouvelle d'un bout de

Paris a I'autre. L'affiche etait presque

simultanement coUee a toutes les vitres

des cabinets de lecture, qui achelaieni

quelquefois jusqu'a dix exemplaires du

' Paul de Kock n'eut ccpendant sa maison qne bier

dts annees eusuite, commo on k verra tout i I'heure.

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U PAUL DE KOGK.

merae ouvrage, sans pouvoir contenter

I'impatience des lecteurs.

Jamais romancier n'eut une vogue plus

universelle et plus soutenue.

Apres Monsieur Dupont vinrent le

Barbier de Paris,—Jean, — la Laitiere

de Montfermeil, — Soeur Anne, ~ la

Femme, leMari et I'Amant, — la Mai-

son blanche, — Andr6 le Savoyard, —VHomme de la nature et VHomme po-

lled, ~ Madeleine et le Cocu \ litre au-

1 Tons les romans dont nous doniions ici la liste

nnt et6 publies par Barba pere, de 1816 a 1827. Atette 6poque, Barba flls conclut avec le romancier un

nouvcau traite, a des conditions pecuniaires plus fortes,

et publia les ouvrages dont les titres suivent : Un ton

Enfant, — Zizine, — I'Homme d, marier, — la

Jeune homme charinant, — le Tourlourou, — I\'ija-

mais ni toujours, — la Pucelle dc Belleville — et

les Maurs parisiennes. Paul de Kock, a I'expiration

lu traite d:; B.iiba Ills, ne voulut plus so Iier par au-

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PAUL DE KOCK. 35

dacieux qui epouvanta les lectrices, mais

que I'auteur conserva sur toutes les edi-

tions du livre, en s'appuyant, a tort ou

a raison, de I'exemple de Moliere.

Celles de ces dames qui n'osaient pas

prononcer le mot, disaient, en entrant au

cabinet de lecture •

— Voulez-vous, je vous prie, me don-

nerie derni&r de Paul de Kock?

cun engagement. II vendit ii differents libraires, et

souvent a des prix enormes, la Jolie Fiite du fau-

bourg, — I'Homme aui trois culottes, — I'Amou-

reux transi, — Ce Monsieur, — Carotin, — Hon

ami Piffard, — Jenny ou les Trois Marchis aux

fieurs, — Sans cravate, — la Famil/e Gogo, —I'Amant de la tune (paye viiigt-deux mille francs par

le libraire Baudry), — CAmour qui passe et I'Amour

qui vient, — Taquinct le bossu, — Vne Gaillardc

— Cerisette, — la Hare d'Auteuil, — les Etuvistes

(roman dans le genre da Barbier de Paris), — no

Monsieur tres-luurmente — et la Bouquetiere du

Ckdtean-d'Eau Les oenvres completes de Paul de

Kock forment jiius de cent volumes iu-octavo.

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3R PAUL DE KOCK.

El Dieu sail comme le rouge leur

montait au front, quand un malin corn-

mis s'exclamait devant quinze ou vingt

lecteurs de journaux :

« — C'est le Cocu que vous deman-

dez? Voici le Cocu, madame! »

On n'alla plus cliercher le iivre soi-

raeme ; on I'envoya prendre par les

femraes de manage et par les con-

cierges.

Nous venons de raconter les fails sans

appreciations, sans commentaires. Dans

la litterature de haul parage, on a pour

Paul de Kock un dedain superbe. II

faut voir le sourire de pitie qui contracte

certaines levres lorsqu'on prononce le

nom de cet ecrivain. Paul de Kock, al-

lons done ! Est-ce aue Paul de Kock sail

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PAUL DE KOCK. 37

^crire ? C'est le romancier des cuisi-

nieres, des valets de chambre at des

portiers

!

La-dessus on fait une pirouette , et

notre auteur est condamne sans miseri-

corde , en dernier ressort.

U n'y a plus d'appel possible.

Ceux m^me qui ont eprouve quelque

plaisir en lisant ses ouvrages n'osent

point en faire I'aveu, dans la crainte de

passer pour des sols ou pour des gens

de mauvais gout.

Jusqu'ici, dans nos petits livres, nous

avons eu la parole franche, et nous con-

linuerons de formuler notre pensee net-

tenient et sans ambages. Loin de nous la

pretention ridicule de nous poser en

juge infaillible ; mais cc quo nous pou-

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38 PAUL DE KOCK.

vons affirmer sans crainte, c'est que le

prejuge, la mauvaise foi, I'envie n'ont

sur nous aucun empire.

Nous etudierons, en consequence, les

oeuvres de Paul de Rock, absolumeiit

comme si nos grands seigneurs de let-

tres n'avaient pas donne leur avis avant

nous ^

U est certain que I'auteur de Fr^re

Jacques et du Voisin Raymond ne cul-

live que mediocrenient le style et soigne

^ Un seul a toujours rendu justice a Paul de Kock,

c'est M. Alexandre Dumas. Un soir, aux beaux jours

de Saint-Germain , un flatteur disait k sa table :

« Maitre, il ne restera que trois roraanciers de notre

sifecle, vous, madame Sand et Balzac. — Veuilicz, re-

pondit I'amphitryon, en ajouter un quatrieme. — Qui

cela? — Paul de Kock; il vivra plus longtemps que

nous. Si vous no partagez pas men opinion, c'e?t que

vous ne I'avez point lu. » Cette anecdote est parfaite-

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PALL DE KOCK. 89

fort peu ses periodes ; il ne recherche ni

I'tclat, ni la purele, ni la correction. Le

mot arrive, il I'^crit comme il se pre-

sente. Sa phrase est sans gSne ; elle se

rit de toutes les delicatesses de la forme,

et marche cavalierement, a I'hurluberlu,

sans s'inquieter ni de I'elegance, ni de la

tournure, ni de la methode.

C'est un tort sans doute, un tort tres-

grave, et Paul de Kock en est le premier

puni, puisqu'il n'a point I'estime des

hauts barons litt^raires.

ment anthentique, et les occasions de f^liciter M. Da-mas sont trop rares, pour que nous nc saisissions pas

celle-ci avec empressement. Ah! si les oeuvres de Paul

de Kock avaient seulemenl cinquante ans de plus,

quelle abondante moisson M. Dumas pourrait > cueil-

iir ! Da reste, certains auteurs ne se gfinent pas pourd^pouiller Paul de Kock de son vivanl. Nous citerons,

eutre autres, Maximilieu Perrin et M. Cbirvillc.

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40 PAUL DE KOGK.

Mais, entre nous, et bien bas, de peur

que ces messieurs ne viennent a nous

entendre, croyez-vous qu'une renommee

s'etablisse suruneechelle aussi vaste, et

qu'un 6crivain soil lu d'un bout du

monde a I'autre, sans avoir des qualites

reelles, un merite incontestable ?

Chut! Parlons toujours a voix

basse.

Les qualites de Paul de Kock sont

precisement celles que beaucoup de ces

messieurs n'ont pas. II est d'un naturel

exquis ; ses caracteres ont un cachet

de verite saisissant. Vous avez vu ses

types, vous les connaissez ; ils sont au-

tour de nous, on les coudoie. Cela mar-

che , cela palpite , cela respire. Hier,

vous les avez rencontres, demain vous

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«AUL DE KOv-'K. 41

les rencontrerez encore. L'auteur lob a

pris tout grouillants dans la soci6t6 vi-

vante pour les transporter sur ses livres.

Moeurs, allures, langage, originalite po-

pulaire , malice parisienne , bonhomie

campagnarde , sottise bourgeoise , tout

est reproduit, caique, daguerreotype le

plus fidelement du monde, au physique

comme au moral. Paul de Kock ignore

la convention et la fantaisie, il ne sail

que la nature. Ses ceuvres sontun miroir

oil une multitude de personnages peu-

vent s'admirer de pied en cap.

S'ils font la moue, s'ils refusent de se

reconnaitre dans leur niaiserie ou dans

leur extravagance, le voisin se met a rire

et lesreconnait toujours.

Ce m^rite complet d'observation chez

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43 PAUL DE KOCK.

un ecrivain est sans contredit ime puis-

sance enorme, et le succes de Paul de

Kock s'explique d^ja plus facilement. Si

vous joignez a cela une science parfaiie

de I'ame, une sensibilite veritable, une

delicatesse merveilleuse a toucher les

cordes du coeur, vous conviendrez avec

nous que les partisans exclusifs du style

ont mauvaise grace a ne pas lui tenir

compte de ces ressources precieuses de

son talent.

Ne riez pas , messieurs, quand on

vous parle de la sensibility de Paul de

Kock I

Si vous avez lu I'histoire de SamAnne, et si vous n'avez pas et6 profon-

d^ment emus par les soufl'rances de cette

pauvre muette, dont Tame tout enti^re

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PAUL DE KOCK. 43

est pass^e dans le geste et dans le re-

gard, vous Stes plus a plaindre qu'a

blamer.

Si Denise , la gentille Laitiere de

Montfermeily avec son candide amour,

ne vous semble pas un type ravissant et

plein de grace ; si les scenes de la Chau-

mifere, la marmite de Coco , la chevre

blanche qui dort aux pieds de I'enfant,

tous ces tableaux naifs d'innocence vous

laissent froids et insensibles ; si vous ne

pleurez pas a I'arrivee d'Auguste, mal-

heureux et ruine, chez ces bons villa-

geois qui I'aiment, nous n'y comprenons

plus rien.

Necessaireraent il vous manque quel-

que chose au coeur.

Le Cocu lui-meme , en depit de son

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44 PAUL DE KOCK.

litre risqii^, est un chef-d'oeuvre de sen-

timent, un drame plein d'emotions, une

etude de premiere force, un tableau si-

nistra qu'une femme ne pent envisager

sans fremir , et donl cliaque detail est

une menace ou une legon.

Retranchez la phrase leste et le mot

grivois que Paul de Kock a I'habitude

d'employer trop souvent; enlevez de ses

livres quelques situations saugrenues,

coupez Qa et la quelques scenes decol-

letees, el vous aurez, quoiqu'on dise, un

ecrivain moral \ qui n'attaque ni la re-

ligion, ni la societe, ni la famille.

^ « Le sage, (li^on, n'afllrrae rien sans preuve. » On

sera curieux peut-etre d'appiendre quel a 6te le but

moral de Paul de Kock dans quelques-uns de ses ro-

mans les plus en vogue. — Georgette est la vie d'une

femme entretenue, dont la fin terrible est une cruelle

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PAUL DE KOCK. 45

Nous lie pretendons pas dire qu'il

faille, pour cela, doniier ses oeuvres aux

jeunes personnes, afin de leur former

I'esprit et le coeur.

Mais, puisque les romans pullulent

autour de nous, puisque la France en

est couverle; puisque le hasard, malgre

ponition de ses erreurs. — Guslave montre le danger

des folles amours, rhati(^-cs par I'infortune quand I'a-

mour honnfite obtient sa recompense. — Frere Jacques

est riiistoire de deux fre.cs, dent I'un, g;1te par ses

parents, tombe, de debauclie en debauche et de crime

«n crime, jusqu'au bagne, tandis que celui quils

avaient dcslierite de leur affection devient nn modcle

de probite, de yerlu et d'honneur. — Uoa Yoisin nay

mond est I'apologie complete et le triomphe de bfemme vertueuse. — L'Homme de la nature et

I'nomme police fail ressortir les heureux resultats Ue

I'education. — La Femme, le ilari et I'Amant est

nne le^on pour les maris, toujonrs perils k d^laissei

nne compagne aimante, devoui-e, fldele. — Dans (In

ton Enfant, Paul de Kotk veut corriger les caracteres

faibles, qui, sans itre absolament vicieux, descendent

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46 PAUL DE KOCK.

la surveillance la plus active, peut les

faire tomber a chaque minute entre les

mains de nos femmes et de nos fllles,

mieux vaut encore qu'elles lisent le Com

et Monsieur Dupont que certaines oeu-

vres de madame George Sand ou de I'au-

teur A'Afitony ^.

parfois jusque sur la pente du crime. — On tronve

dans Andre le Savoyard le type le plus fouchant do

la reconnaissance pour un bienfait. — Cerisette est

une jeune fllle que la s(5duction et la misere ont fait

tomber jusqu'aux derniers rangs de la soriete , et qui

se releve k force de bonne conduite, de travail et de

rcpcntir. Nous ne pousserons pas plus loin cctte

elude. Un seal des ouvrages de Paul de Kock ne ren-

ferme pas une lecon de raoralite satisfaisante : c'est la

Pucelle de Belleville. Souvent il exprime le regret

davoir ecrit ce livre.

* « Nous sorames biencertaiH, dit M. Louis Huart

dans la Galerie de la presse, qu'Antony a cause plus

de dcsordre dans la society que tous les romans de

Paulde Kockreanis. >

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PAUL DE KOCK. 47

De deux maux, a dit la sagesse des

nations, il faut choisir le moindre.

Lo livre qui s'attaque aux croyances

et qui les seche dans leur racine par le

souffle ardent de la passion ; le livre qui

excuse le vice et le couvre du manteau

du paradoxe pour le deguiser en vertu;

le livre qui apprend a mentir a soi-

mfime et a sa conscience ; le livre qui

desole, le livre qui deprave, voila celui

qu'il faut condamner, celui qu'il faut

proscrire.

Jamais Paul de Kock n'a ^crit de ces

livres-la.

Si parfois il evoque de folles images,

elles s'envolent presque aussitot sur un

eclat de rirc. II ne les entoure pas des

ombres provoquantes du r6ve, des voiles

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48 PAUL DE KOCK.

hypocrites du myslere, pour mieux y

arreter la reflexion etla pensee. De page

en page une folie chasse I'autre, et I'on

irrive a un denoument serieux, irre-

)rochabIe, Apres avoir saut^ par-dessus

ia boue sans se faire de tache, on se re-

jouve sain et sauf sur le grand chemin

de la morale, du devoir et de I'hon-

neur.

Peut-^tre allez-vous nous dire qu'il

6tait parfaitement inutile de traverser

pour cela des sentiers fangeux.

C'est notre avis.

Nous expliquons I'auleur de Geor-

gette, nous ne le justifions pas. II nous

est permis de mentionner ses merites,

sans qu'on soit en droit de nous dire que

nous prenons parti pour ses torts. Comme

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TALL DE KOCK. 49

6sultat de lecture, il est moins a crain-

Are que beaucoup d'autres; voila ce que

nous prouvons, et nous ne voulons rien

prouver au dela.

Un des caracteres les plus saillants du

genie de Paul de Kock est cetle facilite

prodigieuse qu'il possfede de pouvoir

presque sans transition, passer du co-

mique au serieux et du rire aux lar-

mes.

Apres des scenes burlesques et d^sc-

pilantes comme celles de la mfere Tho-

mas Chez son fils, M. de la Thomassi-

niere, arrive un episode comme celu!

d'Auguste Chez le vieux Dorfeuil. L€

coeur est satisfait, lame est conlenle. On

rit beaucoiiD mieux aprfes avoir pleure

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50 PAUL DE KOCK.

Paul de Kock sail comme on fait

Ics crfipes dans la chambre d'une gri-

selte.

II vous donne un specimen de I'or-

ihographe de ces demoiselles, qui ecri-

vent sur leur porte :

« Je cuis Chez la voisine. »

Et les foiles promenades a Romain-

ville, aux pres Saint-Gervais, sous les

lilas, dans les champs, le long des sen-

tiers sablonneux! et les eclats de joic,

les sauts, les gambades, les culbules sur

I'herbe! et ces turbulentes descriptions

des Champs-filysees, des barrieres, du

vieux Tivoli qui n'existe plus, oil retrou-

verez-vous tout cela, si ce n'est dans les

romans de Paul de Kock?

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PAUL Di: IvOCK. 51

El les soirees bourgeoises, comma il

salt les peindre I

Et ce bal du Cadran-Bleu, oil M. Ro-

blneau perd sa perruque ! et le bilboquel

dans la gibelolte ! et le tabac dans I'oeil

!

et le fromage mou sur la face ! et les

culottes trop 6troites ! et les robes trop

courtes ! et ces innombrables incidents,

oil le ridicule, toujours saisi a point

nomme, provoque forcement I'eclat de

rire

!

Savez-vous comment notre heros en-

tame un livre? ficoulez, nous allons

vous en donner un exemple :

Le pere Lucas, brave payf-an, chevauche

sui" une rosse abominable — Hue, Z^phire!

hue done I mais Z^phire ne va pas mume au

trot. Tout u coup, un poids nouveau tombe

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53 PAUL DE KOCK.

sur la croupe de ranimal, et la sccoussesem-

ble iui donner des ailes. Zephire galope pour

la premiere fois de sa vie. Lucas veut crier;

deux bras I'entourent et le serrent fortement

:

le pauvre villageois croit avoir le diable en

croupe. Mais un dclat de rire le rassure. H

tourne la tete, risque un oeil et voit, au lieu

du diable , un jeune homme dont la raise est

un peu en d6sordre, mais dont le visage n'a

rien d'effrayant.

— Morgu6, monsieur, il faut avouer que

vous m'avez fait une fiere peur

!

— N'est-ce pas, mon gros pere?

— Qu'aurail dit not' femme, si all' m'avait

vu revenir morl a la maison?

— Parbleul elle se serait consol^e...

Oh ! Qa, c'est possible

!

Et le dialogue continue sur le dos de Z(5-

phire. Soudain le galop de plusieurs chevaux

se fait entendre. — C'est moi que Ton pour-

suit! s'6crie le jeune homme. II bourre de

coups la monture de Lucas; mais Zephire,

qui n'estpas habitude a un pareil traiteraent,

se livre ^ une noble fureur. Eile.regimbe

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PAUL DE KOCK. 53

gambade, rue, brise son mors et emporte ses

cavaliei-s vers una mare, ou barbotenl tran-

quillement une dou7aine de canards. Lucas

crie : — Arretel arrete! On crie derriere nos

voyageurs: — Arretez! arrelez! Z^phire eu-

tredans la marc; elle s'embourbe, tombe de

c6t6 ; les cavaliers en font autant ; on roule

sur les canards, on en ^crase quatre, on se

mouille, on se crntte, on crie, on ne s'entend

plus.

Voila comment debute le roman de

Gustave.

Le mauvais sujet, on le devine, est en

plein dans ses aventures ; elles vont con-

tinuer a la ferme de Lucas.

En vain, loncle de Gustave, un vieux

colonel, sermonne son neveu pour le

faire changer de conduite.

— Asseyez-vous la, Goslave, devant moi.

Restez tranquille si vous pouvez ; mais mor-

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ii' PAUL DE KOCK.

bleu! ne m'interrompez pas! -- Mon olier

oncle, je sais trop ce que je vous dois...

Silence! Votre mere, ma sceur, etnit una

femme aimable, rang6e, 6conome... — Elle

avail toutes les qualit^s.— Taisez-vous, mon-

sieur! Aveugl^o par son amour pour son clier

fils, elle ne voyait pas qu'il 6tait emporl6,

menteur, joueur... — Ah! mon oncle! —Morbleu! vous tairez-vous! J'ai pass6 une

partie de ma vie h I'arm^e . Lorsque , dans

les fares voyages que je faisais a Paris, j'al-

lais voir ma sceur, vous preniez mon 6p6e et

la metliez ci la place de la broche. Mon plu-

met devenait la proiedu chat; mon chapeau

changeait de forme, mes Epaulettes n'avaient

plus de grains; je trouvais k mes pistolets du

fromage de Gruyere pour pierre, et de lacen-

dre dans le bassinet. Tout cela n'6tait que

bagatelles. Je m'apercevais que vous n'appre-

iiiez rien. Votre mere vous avait donn6 des

professeurs que vous n'Ecoutiez point; vous

dansiez avec voire maltrc de latin et d'his-

loire; vous tiriez des pdtards au nez de votre

maitre de violon ; vous meltiez des bouts de

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PAUL DE KOCK. .15

chandelle dans les poches de voire maitre de

dessin ; vous faisiez le diablo enfiu ! Je disais

h ma soenr de vous corriger. Pauvre Hor-

tense! elle vous trouvait charmant! — Ah!

luon oncle, toutes les dames 6taient de I'avis

de ma mere! — Oui!... c'esl pour cela que

vous les aimez toutes g^neralement? — C'est

par reconnaissance, men oncle.

On voit que si Paul de Kock n'a point

de style, comme le crient sur les toils

nos severes aristarques , il parle nean-

moinsle francais tant bien que mal.

Cela suffil a la masse des leclcurs qui

devorent ses livres.

Mais c'est a I'etranger surtoul que

lauteur de Soeur Anne oblient un

succes colossal. Chez nos voisins, son

defaut de style disparait sous la tra-

duction ou s'lmpute au traducteur

,

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Se PAUL Dli KOCK.

et Routes ses qualites lui restent, c'est-a-

dire sa verve chaleureuse et son inepui-

sable gaiete.

Les Italiens, les Allemands, les Rus-

ses, les Anglais, les Americains nelisent

que du Paul de Kock , absolument

comme , en fait de theatre , ils ne veu-

lent entendre parler que de M. Scribe.

A Rome, le predecesseur de Pie IX

avail toujour? entre les mains un livre

du joyeux romancier.

Quand un Frangais de distinction

demandait audience et se pr^sentait au

Vatican pour baiser la mule du Saint-

Pere, le premier mot que lui adressait

le pontife etait toujours celui-ci :

« — Come sta U signor Paolo cln

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PAUL DE KOCK. 57

Kock? Lei devra conescerlo? Commenf

se porle M. Paul de Rock? Vous devez

le connaitre ? » '

Les contrefacteurs beiges , avant la

promulgation de la loi tardive qui a

mis un terme a leurs emprunts, expor-

taient regulierement en Amerique vingi

ou trente mille exemplaires de chacun

des livres de Paul de Kock, ce qui re-

presente, en y ajoutant ce qu'ils ven-

daient en Europe, un total de douze a

quinze millions de volumes, pour les-

quels ces aimables partisans de la lit-

terature a bon marche ne donnaient pas

un centime a I'auteur.

Encore pretendaient-ils que celui-ci

leur devait de la reconnaissance, pour

ravoir populariai.

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58 PAUL DE KOCK.

Un autre mot serait plus juste, mais

beaucoup moins original.

A force de lire les oeuvres du celebre

romancier, les Americains voulurent

avoir quelques renseignements sur sa

vie intime. Or, comme on manquait de

details biographiques, on se permit d'en

fabriquer a New-York, et Ton publia

surtout un volume dont le titre va faire

bondir nos lecteurs :

« Les Amours de George Sand et de

Paul de Kock ! »

Notez que le pere de Monsieur Du-

pont n'a jamais vu de sa vie la mhre

d'Indiana, et que, s'il tient compte au

premier bas-bleu de la France des char-

mes de son style, en revanche il deleste

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PAUL DE KOCK. 59

cordialement ses principes, soil en poli-

tique, soil en nwrale.

II n'y a done jamais eu entre eux de

rapprochement possible.

Paul de Kock a ecrit una multitude

de pieces pour le theatre ;presque tou-

tes sont tirees de ses livres et portent le

mfime litre *,

> Parmi celles dont le SDJet n'a pas He emprunt^ i

ses romans, nous citerons le PhUosophe en voyage, —$^s Enfanti de maiire Pierre, — le Uutetier, irois

operas-comiques, dont Mengal, Pradher et Herold on

ecrit la partition ; — le Caporal et la Payse, — Un

tuari perdu,— le Commis et la Grisetle, — la Garde-

malade, — les Bains a domicile, — Un bal de gri-

settes, — la Salle Yenladour, — la Famille Fanfre-

iueke, — fAuberge de Chantilly, — les Jeui inno-

cents, — la Femme a deux maris, etc., etc. Ces der-

nieres pieces ont ite jouees avecbeaucoup de succesan

Palais-Royal, au Vaudeville, aux Varietes et au Gym-

nase. Les drames de Paul de Kock, outre ceux que

nous arons deji cit^s, sont : Tout on rien (3 actes),

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60 PAUL DE KOCK.

A calculer le nombre des voiumos el

des actes, on pourrait croire que nous

sommes en presence de I'un des ecri-

vains de I'epoque les plus laborieux ct

les plus infatigables.

Erreur!

Notre heros est la paresse incarnee,

la flanerie en bonnet grec et en robe de

chambre.

Seulement il ecrit avec une facilite

prodigieuse ^. Vingt-quatre heures pour

— la Veille de Wagram (4 actes), — la Bohemieune

de Paris (5 actes), etc. II est aussi I'aufeur d'une

f6erie tres-remarqtiable, intitulee la Chouelte et la

Colombe. II a eu pour collaborateurs dans quelques-

unes de ses pieces MM. Variii , Boyer (pseudonyme

d'un homme tres-aimable attaclie k I'un des premiers

hopitaux de Paris), Couailhac et les freres Cognard.

1 Jamais il ne relit ses phrases. II compose avec

une rapidite de douze pages a I'lieure, et ses manus-

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PAUL l)E KOCK. 61

unc piece, quinze jours pour un livre

;

jamais plus, quelquefois moins, voila sa

regie.

Lors du premier traite signe avec

Barba pere, et daus son desir d'avoir a

Romainville une maison de plaisance,

vous croyez peut-etre que Paul de Kock

se ha la de livrer, annee commune, cinq

ou six romans, qu'il pouvait ^crire sans

gene et sans fatigue? Detrompez-vous.

La maison du bois etait son reve ; mais

le reve amenait la paresse , la paresse

n'ainenait pas I'argent, et I'impossibilitd

d'avoir deux domiciles ne faisait que

s'accroitre de jour en jour.

crits n'ont point de raturi's. Sur scs ^preuves, jamais

de changeineiits. Les compositeurs d'imprimerie par-

lunl dc lui elever une statue.

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6P PAUL DE KOCK.

Paul dc Kock 6laitjeune; il aimaitle

plaisir.

Enfant cheri des dames,

II fut dans tout Paris

Fort bicn avec les ferames,

Mai avec les maris.

II eut une quantite d'aventures extrS-

mement piquantes, dont la plupart ont

trouve place dans ses roraans. Voici,

nous ne disons pas la plus curieuse,

mais une de celles que nous pouvons

raconter.

Paul de Kock adore les chats '.

' II aime aussi beaiicoup les clievaux; mais cette

scconde passion lui a cause nombrc de mdsaventurcs.

Voulant a tout prix devenir bon cavalier et fair j avec

ses amis des jiroraenades aux environs de la capitale,

il choisissait par prudence la rosso la plus abominable

du manege. « Au moius, disait-il, voila un cheval qui

ne s'emportera pas ! » Mais, corame il se piquait d'a-

mour-propre et voulait galoper a la suite de ses com-

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PALL DE KOCK. 63

Son gout pour ces aniraaux etait deja

connu en 1823. Voici le singulier pou-

let qu'il regut un jour

:

pagoons, la rosse Qediissait prcsqae toojonrs sar ses

jambes de devant, etie romancier lui passait par-dcs-

sus la t^te, pour aller, ii dix pas plus loin, rouler dans

la poussiere. II tomba quarante ou ciuquante fois dc

suite, sans perdre courage, et Unit par caracolcr avec

tODte la grice dun eruyer du cirque. Seulenient, nn

soir, i Montmorency, apres avoir un pcu trop dine

Chez Lednc, il laisse au garcon traiteur le soin de sau-

gler sa monture. On arrive sans cncombre a Paris;

mais sur le boulevard, au beau milieu d'un galop

triomphal execute par nos dineurs, la selle tournc et

Paul de Kock, pour la cinquante ct unicme Tois, va

mesurer le sol. U se rcltjve sain et sauf. Malheureu-

sement, son cbeval effrayc se precipite contre an tas

de pierres, entasse pres de la par ies paveurs, etse

blesse aux deux genoux. Paul de Kock no pcut sc re-

mettre en selle. II ramene piteusemcnt sa inoiUurc

tout le long des boulevards. On le reconnait, et Ies

gamins crient : « C'cst M. Paul de Kock qui a cou-

ronnt} son cbeval! — Bien, mes amis, je le paierai ! »

repond notre beros, un pcu confus de I'aventurc. En

elTct, il Ic paya fort cber. Ccci le degouta des cbe-

vaux; il reports toute son aOTection sur Ies chats.

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CI PAUL DE KOCK.

« Je suis une pauvre chatte bien malheu-

reiise, et je veux absolument sortir de la si-

tuation dans laquelle je me trouve; j'ose es-

pdrer que vous m'y aiderez; c'est pourquci jo

me confie k vous. Je suis jeune et gentille,

j'ai le poil noir et les pattes blanches; je fais

faciiement ron7on quand on me flatte. Par

grclce, venez au rendez-vous que je vous

donno. Je vous attendrai tant6t sur le boule-

vard entre chien et loup. Je ne signe pas,

mais je mets ma griffe.

»

Notre heros demeurait alors oil il de-

meure aujourd'hui.

Depuis trente-quatre ans, il n'a pas

quitte la maison n" 8 du boulevard Saint-

Martin.

II descendit a la brune, se doutant de

(juelle espece etait la chatte qui lui avail

onvoye le message. Nombre de ces da-

mes, apres la lecture d'un roman. se

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PAUL DE KOCHr. Cj

picnneiU d'une belle tendresse pour

I'duleur, et se figurent qu'il va la par-

lager. Leur illusion nest pas longue.

Paul de Kock se trouva bientot vis-a-

vis d'une pronieneuse elegante, vetuc

d'une robe de satin noir, portant un ca-

chemire noir, un chapeau de cr^pe noir

et des gants blancs.

C'eJait la chatte qui avaitecritle billet.

Lorsqu'elle ecarta son voile, 11 recon-

nut une personne assez jolie, a laquellc

il adressait rarenient la parole dans les

cercles oil il faisait sa rencontre, pr^ci-

s6ment parce qu'elle lui semblait Stre

une de ces natures exaltees qui gravis-

ser.i lusqu aux sonimets les plus etour-

dissants de la passion.

I'aul de Kock ainie les amours Oi!

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66 PAUL DE KOCK.

plaine ; il veut pouvoir les fulr ft son

gre, sans se casser le cou dans les pre-

cipices.

Toutefois, comme la dame n'avail pas

menti, comme elle etait jeune et gen-

tiile, comme elle possedait des cheveux

du plus beau noir, comme elle otait un

de ses gants avec coquetterie pour lais-

ser voir sa main blanche ; comme, au

bout du compte, elle se montrait eiTec-

tivement tres-chatte et miaulait a ravir,

il ecouta, pendant toute la soiree, la con-

fidence de ses peines.

Mais cela ne suffisait pas a la cbatte

noire.

Elle fit jurer au romancier qu'il I'en-

leverait le lendemain , et qu'il ne la

quitlerait plus.

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PAUL DE KOCK. 67

Oi", en pareilles occasions, le sermen',

de part el d'autre, est assez ordinaire-

mentde i!a fausse monnaie. Paul de Keck

inra lout ce qu'on voulut. La chatte af-

fligee devail se trouver le lendemain, a

hull heures du soir, dans une voiture

close, au coin de I'all^e des Veuves.

— J'aurai soin de ne pas y 6tre, se dil

toul bas le romancier.

Neanmoins, il ne pouvail laisser la

4ame se morfondre dans son v^hicule.

II fallail trouver un denoument a cette

bizarre intrigue. Le lendemain, sur le

point de diner avec cinq ou six vaude-

villisles de ses amis, Paul de Rock leur

demanda I'appui de leur experience el

de leurs lumieres.

— Te voila bien embarrass^ ! lui dil

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G8 PAUL Di; KOCK.

I'uii d'eux ; envoie iiiai a la place au

rendez-vous.

— Vraiment, tu consentirais...

— Oui, certes. ficris une lettre d ck-

cuses. Jc me charge du rests.

— GarQon ! cria Paul de Kock , une

plume et de I'encre

!

— Un instant, messieurs, nous mou-

rons de faim, dirent en chceur les autres

vaudevillistes. Paul est le plus gour-

mand de la bande, c'est lui que nous

chargeons de la carte du diner.

— Soil, je vous dicterai cela tout en

faisant ma lettre.

En moins de deux minutes, les excu-

ses a la chatte noire etaient ecrites et la

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PAUL DE KOCK. G9

carte se trouva dictee. L'ami complai-

sant regarda sa monire.

— Sept heures, dit-il, je n'ai pas de

temps a perdre. Dinez sans moi!

.

II part, extremement satisfait de sa

mission, et court allee des Veuves. Deja

la voiture est a son poste ; il prononce

le mot d'ordre ; on ouvre une portiere,

qui bientot se referme sur lui. Le co-

cher fouelte ses chevaux, et la voiture

s'eloigne au grand trot.

Cependant la dame ne tarde pas a clrc

surprise du silence de son compagnoii,

qui se borne a lui pressor tendrement

la main. EUe le questionne, point de re-

ponse, L'inquietude commence a la sai-

sir; elle parvienl, malgre I'obscurite, a

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70 PAUL DE KOCK.

voir le visage de celiiiquivient de s'ins-

taller a cote d'elle et pousse un cri d'ef-

froi.

— IlMs^ricorde I qui 6tes-vous, mon-

sieur?

— De grace, madame, calmez-vous.

Paul de Kock est mon ami. Dans I'im-

possibilite oil il etaitde venir ce soir....

— \ous mentez ! vous eles un impos-

teur!

— Non, madame, je vous le jure ; et

la preuve, c'est qu'il m'a charge pour

vous d'une lettre...

Sans le laisser poursuivre, la chatte

noire lui arrache vivement des mains le

papier qu'il lui presenle, fait arreter la

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PAUL DE KOCK. 71

voiture, descend, court au premier re-

verbere, et lit ce qui suit

:

« Madame, je vous airae toujours

Pourtrois c'est assez. . . Vos traits sont gra-

ves dans mon cceur.... T^te de veau na-

turelle... Mais ne pouvant alier vous re-

joindre, je vous envoie... un homard...

qui vous exprimera mes regrets... a la

sauce ou a I'huile... »

La chatte noire ne veut pas en lire da-

vantage.

Elle saute a la figure du malencon-

treux rempIaQaut de Paul de Kock, lui

applique deux superbes coups de griffe

etquatresoufflets, chiffonne la lettre avec

rage, la lui jette au nez, remonte en voi-

ture et disparait, le tout en un clin d'ceil,

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75 PAUL DE KOCK.

sans que le vaudevilliste ail cu lo Icmps

de revenir de sa stupeur.

II ramasse le billet du romancier, le

lit a son tour etcomprend tout.

Paul de Kock, ecrivant d'une part et

diclant de I'autre, a mSle dans sa pre-

cipitation le menu du repas a ses ex-

cuses.

Afin de ne plus eire lourmente par les

cliattes noircs ou blanches, noire heros

semaria.

Sa vie, des ce moment, fut moins dis-

sipee et plus laborieuse. Les baptemes

arrivaient tous les neuf mois ; il admira

la fecondite de son hymen et se piqua

d'emulation.

Plus sa femme lui donnait d'enfants,

plus il ecrivait de livres.

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PAUL DE KOCK. 73

De 1828 a 1835, madame de Kock fut

sixfois mere, et lesedileursdeson epoux

veudirent dix-huit ouvrages nouveaux,

trois romans coinplets par bapteme.

L'accroissement de la fortune marchail

en raison direcle de la progeniture.

Au lieu de louer a Romainville la po-

lite maison tant souliaitee, on la fit cons-

truire sur un terrain achele a beaux de-

niers comptant, et Paul de Kock avec

sa famille alia courir et gambadcr sous

I'ombrage.

lis ^talent a peine inslalles qu'un trai-

leur de Bagnolet se presenta Ires-hum-

blement, en veste blanche et la toque

traditionnelle a la main.

— Monsieur Paul de Kock, s'il vous

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74 PAUL DE KOUK.

plait? demanda-t-il en s'adressant au

romancier lui-meme.

— Que lui voulez-vous, mon ami?

— Lui souhaiter le bonjour d'abord,

— Vous le connaissez done?

— Si je le connais, je crois bien ! il a

fail ma fortune.

— Et comment cela, mon brave?

— Ah! voici, dit le traiteur : figurez-

vous que Paul de Kock dine chez moi

tous les dimanches.

— Tous les dimanches , vous en etes

sur?

— Parbleu! puisqu'il dine avec son

Spouse.

— La preuve est excellente! s'^cria

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PAUL DE KOCK. 75

I'auteur de Scmr Anne en eclatant de

rire. Tu entends, ma chere amie?ajoula-

t-il en se lournant vers madame de

Kock.

Elle assistait a cette scene curieuse.

— Mais oui ! mais oui! reprit le trai-

teur, et je puis vous affirmer qu'ils

mangent comma des rois ! Je leur re-

serve toujours les morceaux les plus de-

licats... Peste!... et jamais d'addition...

Vous comprenez? Je fais des affaires

dor. Cent cinquante personnes dined

Chez moi le dimanche, et ces gens-la

payent volontiers leur echo double

,

quand je leur montre M. Paul de Kock.

Aiussi, des que j'ai su qu'il 6lait notre

voisin, je me suis dit : Peut-^tre con-

senlira-t-il a venir pliislours fois la

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76 PAUL DE KOCK.

semaine. Je vais lui presenter mes res-

pects.

— J'accepte vos respects, mon bravo,

dil le romancier en lui frappant sur I'e-

paiile; mais il est bon de vous dire

qu'uu autre que moi a mange vos di-

ners.

— Un autre que vous... Cost jusle...

Pardon!... je no comprends pas.

—Vous me comprendrez mieux quand

je vous aurai dit qu'on vous frompe.

Rcgardez-moi. M'avez-vous jamais vu?

— Non.

— Eh bien ! je suis Paul de Kock.

— Bonte du ciel!... est-ce possible?.,.

Ah! le brigand!... il m'avole! s'ecriale

Iraiteur.

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PAUL DE KOCK. V"?

— Non, puisque vous avez fait d'ex-

cellentes affaires. C'est vous qui venez

cle le dire.

— Sans doute, mais quel dom-

raage!... Douze ou quinze mois encore,

et je vivais de mes rentes!

— A present que vous §tes desabuse,

n'allez pas lui servir de compere au

moins, dit Paul de Kock avec beau-

coup de s^rieux, ou je previendrai la

police. Quand je dine au restaurant, je

paye ma carte.

II congedia le pauvre traiteur, qui s'en

alia repetant

:

— Quel dommagel quel dommage!...

Ma foi, je vendrai la gargote

!

Depuis vingtans bientdt, quand le so-

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78 PAUL DE KOCK.

leil d'avril fait pousser les feuilles, no-

tre romancier quitte le boulevard Saint-

Martin pour aller retrouver sa chore

villa, son petit jardinet, dont il a plante

tons les rosiers ; ses arbres at sa v igne

qu'il depouille de leurs meilleurs bour-

geons, mais qu'il tient a emonder lui-

meine.

Sa femme est morteen 1844, la m^meannee que son frere le ministre, et, de

tons ses enfants, il ne lui reste plus

qu'une fille et un gargon.

Mademoiselle Caroline deKock estune

aimable et douce personne, qui a refuse

plus d'un riche mariage pour ne pas

quitter son pere. EUe a tons ses gouts

simples; elle jardine a ses cotes, cul-

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PAOL DE KOCK. 79

tive les roses et fait les honneurs de Ro-

mainville avec une grace parfaite.

Comme I'auteur de Frire Jacques, elle

aime beaucoup les chats.

Mortimer, son 6norme matou, la suit

dans ses promenades. II a les moeurs

d'un caniche. Seulement on ignore pour-

quoi elle lui donne le nom du fa-

rouche Anglais qui a fait assassiner

Edouard II.

Quand les cbaltes du voisinage sont

par trop prolifiques, au lieu de noyer

les petits, on les jette par-dessus le mur,

dans le jardin de Paul de Kock. On salt

que le pere et la flile n'hesitent jamais a

se charger de leur education \

Ou a vu jusquk trentc cbatsii Romainville. Qael-

<j««HJDsrtevienDentMinv«?fesetTonth!ibiferlebois. Lcj

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eo PAUL DE KOCK.

Henri, le fils du romancier, esl 6cvi-

vain par droit de naissance.

II a signe deja beaucoup de romans,

dont les plus remarquables sont Minette

rt Brln d'amour. Au theatre, ses pieces

obtiennent du succes.

La vie de Romain villa est tout a la fois

arlistique et bourgeoise.

Paul de Kock faitadinirablement diner

ses holes ; le vin de sa cave est delicieux.

On n'est jamais oblige de regagner Paris

apres boire ; il y a dans la maison des

chambrcs d'amis, et la table de bouil-

favoris out dioit d'entriic au salon. Paul de Kock

en a fuit pcindre un, qu'il avail, pendant huit jours,

appris il poser debout, les pattes appuyees sur le aos

d'uue (liaise.

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PAUL DE KOCK. 81

lotto tiont eveill^s ceux qui ne veuleni

pas dormir.

Les uns jouent, les autres dansent.

Ouand le maitre du logis est d^cave,

on quand la montre le chasse au quart

d heure, il prend son violon pour faire

polker les dames, et chante au piano

des chansonneltes dont il compose la

musique.

Quelques-unes sont devenues aussi

populaires que ses livres.

11 suffit de citer VAnglais en bonne

fortune, — le Caissier, — le Maitre d^-

cole et les Concerts-Monstres.

A Romainville, Paul de Rock ccrit

ses roraans a I'ombre des arbres, ^tendu

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83 PAUL DE KOCK.

sur la mousse fraiche ou sur un tapis

de gazon. De temps a autre, a la fin des

chapitres, il prend un fusil, qu'il n'ou-

blie jamais d'apporter avec sa plume,

et fait une guerre a oulrance aux oiseaux

du bois, tirant vingt ou trente coups

pour tuer une fauvette ou un rouge-

gorge ^;

puis il se recouche a plat

ventre, et reprend la plume.

— Ah ! pardieu ! lui dit un jour son

medecin, vous allez attraper de jolis

rhumatismes, en travaillant ainsi sur

I'herbe.

1 Paul de Kock a fait soigneusement empailler tous

les pauvres volatiles qui, dans I'espace de vingt ans,

out succombe sous ses plombs de chasseur, et les

montie avec orgueil. II y en a quarante-Iiuit, doiit

vingt-cinq pierrots.

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PAIL DE KOCK. 83

— Allons done ! s'ecria Paul de Kock,

vous rfivez, docteur!

Mais le docteur ne rSvait pas, et le

mal est venu. Notre roraancier ne s'en

montre guere plus triste.

— J'ai gagn6 cela, dit-il, a faire rire

les autres ; du diable si j'en pleure !

Et il continue a se rouler sur I'herbo,

quand la circonstance I'exige.

Vers 1845, il fit une remarque alar-

mante. La commune de Romainville,

aulorisee d'abord a vendre quelques

portions du bois et a batir sur les ter-

rains defriches, prenait gout aux bene-

fices que lui rapportait ce commerce el

demandait chaque annee au ministere

de nouvellcs autorisations.

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84 PAUL DE KOCK.

— Si je n'y prends garde, dit Paul

de Kock, ces gaillards-Ia ne me laisse-

ront plus un pied d'ombre I

Ce fut alors qu'il ecrivit VAmant de la

lune, pour acheter une partie de sa

forSt bien aimee. Les vingt-deux mille

francs du libraire Baudry servirent a

payer au conseil municipal cent cin-

quante metres carres, plant^s d'ormes

ct de chenes, et qui sont aujourd'hui

sauv^s du defrichement.

Paul de Kock les a fait entourer de

murs et de palissades.

Au milieu de ces ombrages s'^leve un

theatre champetre, oii son lils, sa fille

et ses botes jouent la comedie.

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PAUL DE KOCK. 85

chestre se compose de Paul de

tout seul, arme de son violon.

nt au public, 11 s'assied en plein

r les terlres verdoyants.

dant les representations, tons les

eois d'alentour escaladent les

et parfois 11 leur arrive de briser

ilissades: mais le proprietaire ne

le pas.

Ze\a prouve, dit-il, que nos acteurs

lu talent et que nos pieces sont

es.

froid seul pent chasser Paul de

; de Romainville. On regagne le

nent de Paris vers le milieu de no-

bre, et, quatre mois apres, on re-

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86 PAUL DE KOCK.

tourne ci la campagne, lorsque la pri-

mevere commence a poindre.

Paul de Kock a solxante ans, mais il

en parait quarante.

Vif, alerte, plein de verdeur, il n'a

rien perdu ni de sa verve, ni de son es-

prit, ni de son entrain joyeux.

Sa figure est belle , son exterieur

plein de distinction.

Presque toujours il observe ou refle-

chit ; son premier abord a quelque

chose de froid et de serieux. II ne laisse

echapper aucun ridicule, aucun trait de

sentiment et de caractere.

On I'a vu Tester cinq heures de suite

a sa fenetre du boulevard.

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PAUL DE KOCK'. 87

« Immobile comme un Turc qui fume

sa pipe, dit i'auteur de la Galerie de la

Fresse, il regarde passer les omnibus,

les cabriolets, les bonnes d'enfants, les

tourlourous, les marchands de coco et

les actrices de I'Ambigu. »

Jamais il ne parle de ses ceuvres ; il

semble . ignorer I'immense reputation

dont il jouit. C'estrbomme leplusmo-

deste qui soit au monde. II n'a pas ia

croix , parce qu'il faut la demander

pour I'oblenir.

Paul de Kock est un compose de Be-

ranger, de La Fontaine et de Moliere.

Un soir, dans le salon de madame de

Recamier, la conversation toroba sur

I'auteur de Soeur Anne, et Chateau-

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88 PAUL DE KOCK.

briand se mil a dire : « Paul de Kock

est consolant. Jamais 11 ne presente

I'humanit^ sous le point de vue qui

attriste. Avec lui, on rit et on es-

pere. »

On rit surtout, voiia ce qui est cer-

tain.

Nous d^fions le rigoriste le plus outre,

le misanthrope le plus incorrigible et

I'hypocondre le plus morose d'ouvrir un

livre de Paul de Kock, sans ^tre imme-

diatement saisi par la gaiete communi-

cative de I'auteur et sans pouffer de rire

a la premiere page.

Essayez de lutter centre sa verve co-

mique ; tenez-vous a quatre, froncez le

sourcil, haussez les epaules, serrez les

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PAUL DE KOCK. 89

l^vres, allons done! la saillie part, le

feu est a la trainee de poudre, et vous

^clatez comme un mousquet, dont Paul

de Kock tient la meche.

Vous avez beau pester contre vous-

m6me, il faut rire.

Prenez le temps de la reflexion;

soyez sur vos gardes , attendez I'en-

nemi derriere le rempart de gravite

le plus solide : une autre bouffonnerie

renverse lout. Vous ^tes vaincu, Paul

de Kock triomphe ; vous riez , vous

rirez encore, vous rirez touj ours.

Tenez-vous les cotes et n'en parlons

plus.

Beaucoup de docteurs fort habiles

prescrivent a leurs malades le regime

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90 PAUL DE KOCK.

suivant : « Deux chapitres de Paul de

Kock le matin, trois chapitres le soir,

sans tisane et sans cataplasmes. » lis les

adressent au cabinet de lecture, au lieu

de les envoyer chez le pharmacien.

Les malades suivent I'ordonnance et

guerissent.

FIN.

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NOTE SUR L'AUTOGRAPHE.

La lettre ci-contre a ete ecrite h M. Eiis-

tache Lorsay, I'un de nos jeunes dessinateurs

les plus distingu^s, et I'un des h6tes assiduade Romainville.

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LES CONFESSIONS

MARION DELORMEPAH

EUOXNE DC KXRXSCOVaT.

Le roman moderne a failli a sa tkche. Au

lieu d'organiser et d'instruire, il a, sur toute

la ligne, accompli une mission de boulever-

sement et de mensonge. Parrai ces innom-

brables volumes jet6s, depuis vingt ans, en

p&ture a la foule, trouvez une oeuvre con-

sciencieuse, un livre 6cril a la fois pour

I'esprit et pour le coeur, qui vous instruise

en m6me temps qu'il vous amuse, et laisse

en vous quelques id6es f6condes.

Cette oeuvre, on la cherchera vainement

dans le bagage de nos faiseurs ; ce livre, ils

ne I'ont pas 6crit, ils ne I'ecriront jamais.

Done , c'est a une autre generation litt6-

raire qu'il appartient de r^habiliter la muse

du roman. M. Eugene de Mirecourt est a la

t^te de ces courageux litterateurs qui ve'i-

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lent une renaissance et qui consacrent leurs

efforts a I'acconiplir. Son livre des Confes-

sions de Marion Delorme a su joindre a rint(5r6t

soutenu du r6cit I'fitude s6rieuse de I'his-

toire. Le respect des traditions et des chro-

niques , la peinture de caracteres la plus

expressive et la plus fidele sont les traits

distinctifs de cet ouvrage. Tout un regne se

d6veloppe aux yeux du lecteur avec les p6-

rip6ties saisissantes qu'il a fait naltre, avec

les episodes gracieux ou terribles dont les

m6moires du temps out gard6 la trace. Au-

tour de Marion Delorme , et dans le cadre

dont I'auteur a fait choix, resplendissent les

grandes figures historiques du cardinal de

Richelieu, de Louis XIII, d'Anne d'Autriche,

de Buckingham , de M°" de Chevreuse , de

Bassompierre et de cent autres. Le drame et

la com^die se donnent la main dans ces pa-

ges curieuses. Tout I'esprit de I'epoque s'y

r6sume. On y retrouve les traditions verita-

bles, les details authentiques, les piquantes

anecdotes, les scenes intimes, les moeurs, les

coutumes et le langage du siecle. Tout est

reproduit dans cette forme si color6e, si at-

trayante, et avec ce style simple, 616gaDt et

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rempllde verve, qui caract6risentles oeuvres

de M. Eugene de Mirecourt.

Nous avons acquis de I'auteur des Contem-

porains et de M. Gabriel Roux, son ancien

6diteur, le droit d^illustrer les Confessions de

Marion Delorme , et la publication par livrai-

sons nous a paru la plus convenable pour

6diter ce livre.

La premiere livraison paraitra le 31 juil-

let 1855.

Conditions de la sonserfptlon <

Les Confessioi\s de Marion Delorme, par Eugfene

de Mirecourt, formeront 2 volumes grand in-8»

j^sus.

20 gra%'ures sur acier et sur bois, tiroes k part,

dessinees et gravees par les meiUeurs artistes,

illustreront cet ouTrage, qui sera public en 60livraisons a 25 centimes.

Chaque livraison contiendra invariablement

16 pages de texte. Les gravures seront donnasen sus.

Une ou deux livraisons par semaine.

L'ou'«Tage complet 15 francs.

Chez GUSTAVE HAVARD, Editeur,15, ruk gukmeciud, 15,

E( thex ((01 !«i lib'airti de la France et de I'e'trangtr.

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