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Physiopathologie de l’infection urinaire
François CARON
Infectiologie & EA2656
1COL.BVH – Paris - 19 juin 2015
Physiopathologie de l’infection urinaire
François CARON
Infectiologie & EA2656
Liens d’intérêt : néant
2COL.BVH – Paris - 19 juin 2015
3
Physiologie
● Arbre urinaire :
- normalement stérile
- à l’exception de l’urètre distal :
. flore digestive : entérobactéries, entérocoques ± anaérobies
. flore cutanée : staphylocoques à coagulase négative,
corynébactéries
. flore génitale : lactobacillus et streptocoque B chez la femme
=
«flore périnéale»
F. Caron Med Mal Infect 2003;33:433-46
4
● Défenses contre le développement d’une «infection ascendante»
- longueur de l’urètre
- effet mécanique de la miction
- composition de l’urine : inhibition croissance et adhésion
- immunité locale et exfoliation des cellules urothéliales infectées
- sphincter vésico-urétéral
- effet antibactérien des secrétions prostatiques
Physiologie
F. Caron Med Mal Infect 2003;33:433-46
5
Arbre urinaire
6
• Infections ascendantes + + + +
- germes de la flore périnéale
• Infections parenchymateuses hématogènes
- staphylocoques ++
• IU sexuellement transmises
- gonocoque
- E. coli
Physiopathologie des IU communautaires
7
Facteurs favorisant l’IU ascendante :
(1) facteurs physiologiques, liés à l’hôte
- femme : . brièveté de l'urètre
- femme enceinte : . action relaxante de la progestérone
. résidu post-mictionnel
- femme âgée : . carence oestrogénique
. modifications de flore
. pression intra-uréthrale
F. Caron Med Mal Infect 2003;33:433-46
cystite une fois,
cystite vingt fois ?
8
9
Nombre d’épisodes d’IU chez la femme durant
toute une vie : 0 à 2… ou alors de multiples
In : Preventing urinary tract infection : progress toward an effective E. coli vaccine
Brumbaugh & Mobley
Expert Rev Vaccines 2012 ; 11 : 663-76
50 % des femmes font
1 IU dans leur vie
20 % d’entre elles
(i.e., 10 % de toutes)
en font une 2ème
30 % d’entre elles
(i.e., 3 % de toutes)
en font une 3ème
80 % d’entre elles
(i.e., 2 % de toutes)
en font 4 et plus
10
Facteurs favorisant l’IU ascendante :
(2) facteurs pathologiques, liés à l’hôte
- toute anomalie organique ou fonctionnelle de l’arbre urinaire :
.résidu
. reflux
. tumeur
. lithiase…
- certains terrains défavorables :
. diabète
. immunodépression
F. Caron Med Mal Infect 2003;33:433-46
IU du vieillard hospitalisé(i.e., tout sujet > 50 ans)
=
« bladder-scan »
ou
décompte bactérien précis
11
12Marschall et al CID 2012 : 54 : 1692-8 [USA]
Rationnel : ● Lourde mortalité des bactériémies à E. coli (5 à 25 % des cas ; 36 000 dc/an
aux USA)
● FDR de progression d’une IU à E. coli vers une bactériémie imparfaitement
connus
Méthode : ● Etude monocentrique (HU) prospective, en 2009-10.
● Inclusion de tous les adultes hospitalisés ayant une bactériurie significative à
E. coli avec hémoculture (à discrétion des cliniciens) prélevée de J-1 à J+1.
● Analyse des données cliniques et des isolats urinaires en BM : détection de
14 gènes de virulence.
Résultats : ● 154 cas de bactériémies à E. coli, surtout féminins (70 %) et âgés (19 à 98
ans, médiane : 66 ans)
● 24 cas (15 %) avec bactériémie.
13
Retention =
FDR dominant
Marschall et al CID 2012 : 54 : 1692-8 [USA]
14
Chez les sujets hospitalisés avec IU ou colonisation
urinaire, un titre bactérien élevé dans les urines
est prédictif d’un trouble de la vidange vésicale
F. Caron et al Diagnostic Microbiology and Infectious Disease 2015 on line
miction normale = résidu post mictionnel (« PVR ») < 100 mL
15
Chez les sujets hospitalisés avec IU ou colonisation
urinaire, un titre bactérien élevé dans les urines
est prédictif d’un trouble de la vidange vésicale
≤ 105 cfu/mL =
69 % (35/59) de
miction normale (PVR < 100 mL)
F. Caron et al Diagnostic Microbiology and Infectious Disease 2015 on line
16
Chez les sujets hospitalisés avec IU ou colonisation
urinaire, un titre bactérien élevé dans les urines
est prédictif d’un trouble de la vidange vésicale
≤ 105 cfu/mL =
69 % (35/59) de
miction normale (PVR < 100 mL)
>106 cfu/mL =
77 % (40/52) de
miction anormale (PVR > 100 mL)
F. Caron et al Diagnostic Microbiology and Infectious Disease 2015 on line
17
Facteurs favorisant l’IU ascendante :
(3) facteurs liés au microorganisme
• E. coli
Facteurs d'adhésion à l'épithélium urinaire :
- souches « uropathogènes » = une ou plusieurs adhésines
- pili de type 1 => colonisation urinaire basse
- pili de type P => PNA (par modification du péristaltisme urétéral )
pili type 1 pili type P
flore digestive rare rare
cystite de la jeune femme +
pyélonéphrite de la jeune femme + +
pyélonéphrite du petit enfant +
18
Facteurs favorisant l’IU ascendante :
(3) facteurs liés au microorganisme
Proteus mirabilis
uréase => colonisation urothéliale
développement de lithiases
Staphylococcus saprophyticus
uréase => colonisation vésicale
hémagglutinine (rare) => colonisation rénale
IU hématogènes
Anomalies de l’arbreou
Terrains particuliersIU «compliquées»= à risque de complication= avec FDR de complication
UropathogèneIU «simples »= IU « non compliquée »
IU communautaires
IU communautaire =
infection endogène
à partir du réservoir intestinal
très soumis à la pression environnementale
20
21
Antibiorésistance des isolats urinaires
d’E. coli selon l’exposition antibiotique
préalable :
● jusqu’à 1 an pour cipro et TMP
● corrélée au nombre de cures
Vellinga et al JAC 2012 ; 67 : 2523-30 [Irlande]
22
● 3384 isolats d’E. coli collectés d’IU non compliquées
en Europe et au Canada
● 34 (1 %) souches résistantes au mécillinam (n = 13)
ou à la nitrofurantoïne (n = 21)
● Très grande diversité génétique en MLST
● « Ces résultats indiquent une faible probabilité
d’une diffusion clonale de la résistance au
méticillinam et à la nitrofurantoïne »
Poulsen et al JAC 2013 on line May 2 [Suède]
Antibiotiques & « effets collatéraux » sur les flores :
- C3G +++
- fluoro-quinolones +++
- amox-clav ++
- cotrimoxazole (TMP-SMX) ++
- fosfomycine ≈ 0
- nitrofurantoïne ≈ 0
- pivmécillinam ≈ 0
D’après K. Gupta et al Clin Infec tDis 2011;52:e103-20 [USA] 23
24Ruppé et al Emerg Infect Dis. 2009 May;15(5):741-8
861 ECBU « tout venant »à l’Institut Pasteur de Phnom Penh
194 positifs
163 E. coli
93 E. coli d’infections communautaires
34 BLSE (37%)4 « clusters » regroupant 22 souches (9+8+3+2)
IU communautaires à E. coli BLSE (CTX-M) au Cambodge
25Ruppé et al Emerg Infect Dis. 2009 May;15(5):741-8
861 ECBU « tout venant »à l’Institut Pasteur de Phnom Penh
194 positifs
163 E. coli
93 E. coli d’infections communautaires
34 BLSE (37%)4 « clusters » regroupant 22 souches (9+8+3+2)
IU communautaires à E. coli BLSE (CTX-M) au Cambodge
Explications potentielles :
- automédication
- médicaments frelatés
- défaut d’hygiène (égouts saturés durant les pluies)
Tous les coli ne sont pas piégés
26
27Marschall et al CID 2012 : 54 : 1692-8 [USA]
Rationnel : ● Lourde mortalité des bactériémies à E. coli (5 à 25 % des cas ; 36 000 dc/an
aux USA)
● FDR de progression d’une IU à E. coli vers une bactériémie imparfaitement
connus
Méthode : ● Etude monocentrique (HU) prospective, en 2009-10.
● Inclusion de tous les adultes hospitalisés ayant une bactériurie significative à
E. coli avec hémoculture (à discrétion des cliniciens) prélevée de J-1 à J+1.
● Analyse des données cliniques et des isolats urinaires en BM : détection de
14 gènes de virulence.
Résultats : ● 154 cas de bactériémies à E. coli, surtout féminins (70 %) et âgés (19 à 98
ans, médiane : 66 ans)
● 24 cas (15 %) avec bactériémie.
28
Surreprésentation
clones virulents
Marschall et al CID 2012 : 54 : 1692-8 [USA]
29
Rationnel : ● Chez E.coli :
- virulence particulière certains de groupes phylogéniques : B2 et D
- résistance aux F-quinolones particulière du clone ST131 (B2)
● Bactériémies post-biopsie de prostate à E.coli :
- fréquentes (0,1% - 3,5%)
- malgré prophylaxie, habituellement par F-quinolone
Recherche d’une sur-incidence de la R, et du clone ST131
Méthode : ● Etude rétrospective de toutes les bactériémies communautaires à
E.coli de l’homme > 35 ans sur 5 ans (2006-2010) dans la région d’Auckland.
D.A. Williamson et al. CID 2012;54:1406-12 [Australie]
Escherichia coli bloodstream infection after
transrectal ultrasound-guided prostate biopsy:
implications of fluoroquinolone-resistant
Sequence Type 131 as a major causative pathogen
Bactériémie à E.coli
post-biopsie (n=47)
autre (n=211)
p
Prophylaxie préalable
dont cipro
43/47(92 %)
40/43 (93 %)
ND
ND
Résistance
amoxicilline
ceftriaxone
meropénème
ciprofloxacine
gentamicine
cotrimoxazole
44/47 (94 %)
5/47 (11 %)
0
29/47 (62 %)
20/47 (43 %)
28/47 (60 %)
111/211 (53 %)
11/211 (5 %)
0
30/211 (14 %)
14/211 (7 %)
55/211 (26 %)
< 0,001
0,18
< 0,001
< 0,001
< 0,001
ST131 18/47 (41%) 6/45 (13%) 0,004
Durée d’h°moyenne 4,87 j 7,25 j 0,03
Mortalité à J30 0 21/211 (10 %) 0,02
Pas de regroupement
temporo-spatial des cas
« ST131 est un clone pandémique prospère, hautement transmissible,
antibiorésistant, capable d’intégrer blaCTX-M15 et blaNDM-1 ».
« Le plus probable est que l’antibioprophylaxie ait sélectionné un clone
préexistant dans la flore ».
« Il faut envisager une étude préalable de la flore rectale afin d’anticiper le risque
de la biopsie ».
D.A. Williamson et al. CID 2012;54:1406-12 [Australie]
La colonisation urinaire peut être bénéfique,
y compris par un clone non uropathogène d’E. coli :
« approche vaccinale naturelle »
31
32
Cipro 7 j (n = 73) Cipro 14 j (n = 83)
Âge 46 ans (27 – 62) 41 ans (23 – 58)
IU compliquée
dont diabète
5 %
3 %
12 %
8 %
Fièvre (°C) 39,2 (38,2 – 39,7) 39,0 (38,5 – 39,6)
Lombalgies 95 % 95 %
CRP 100 (56 – 199) 128 (68 – 227)
Bactériémie 22 % 32 %
Eradication clinique
précoce
tardive
97 %
93 %
96 %
93 %
Bactériurie (≥ 105)
post traitement
n = 4
0 cystite / 0 PNA
n = 4
1 cystite / 0 PNA
Candidose 0 % 6 %
« Cipro 7 j efficace dans la PNA de la femme, y compris avec fièvre élevée et bactériémie »
« Efficacité non démontrée dans les infections davantage compliquées »
« L’ECBU post-traitement peut être oublié chez les patients cliniquement guéris ».
Sandberg et al Lancet 2012 ; 380 : 484-90 [Suède]
33CAI et al CID 2012 ; 55 : 771-7 (15 September) [Italie]
Rationnel : ● Très peu de données sur les conséquences d’une bactériurie
asymptomatique (BA) chez la jeune femme ayant des cystites récidivantes.
Méthode : ● Patiente de 18 - 40 ans, consultant pour cystite récidivante, diagnostiquée en
situation de BA (2 ECBU à uropathogène ≥ 105 cfu/ml)
● Abstention versus antibiothérapie selon l’antibiogramme
● Critère principal : délai sans cystite
Critères secondaires : espèce colonisante
qualité de vie
34
A = Abstention (n = 312)
B = antiBiotique (n = 361)
CAI et al CID 2012 ; 55 : 771-7 (15 September) [Italie]
• Beaucoup moins de récurrence
en cas d’ Abstention (p = 0,003).
• Qualité de vie : A > B (p<0,001)
Diminution d’E. coli au profit d’ E. faecalis
en cas d’ Abstention
« Nos résultats montrent qu’il ne faut pas traiter une bactériurie asymptomatique
découverte chez une jeune femme souffrant de cystites récidivantes. »
35CID 2012;55:778-80 (15 September) [Allemagne]
● « Nowadays, asymptomatic bacteriuria is considered a stable bacterial
colonization of the urinary tract, similar to commensalism at other mucosal
sites ».
● « Loss of expression or decay of virulence genes facilitate long-term carriage
and adaptation to host environments ».
● « The antibiotic treatment of asymptomatic bacteriuria in young women
with recurrent UTI is not only unnecessary but harmful ».
36
ECBU positif à streptocoque B
au cours de la grossesse : - quel que soit le titre
- quel que soit le terme
- quel que soit le tableau clinique
= haut risque de colonisation vaginale
= prévention de l’infection néonatale
37
PERENNISATION
ACQUISITION
Physiopathologie des IU nosocomiales
« IU » sur sonde : 80 % des IU associées aux soins (IUAS)
3 modes de contaminations
Maki Emerging Infectious Diseases 2001;7:1-738
bactériurie/sonde : acquisition à l’insertion
● Flore exogène + :
- manœuvre septique
● Flore endogène +++ :
- colonisation du méat
(80 % après désinfection ?)
● Incidence variable :
- taux de bactériurie après sondage en «aller retour» :
. sujets sains < 1 %
. sujets âgés hospitalisés 20 %
39
bactériurie/sonde : voie endoluminale
«système ouvert» (Foley 1929) 100 % de bactériurie après 3 jours de sondage
«systèmes clos» (1950-1960) 100 % de bactériurie après 30 jours
différence = limitation du risque endoluminal
mais risque résiduel :
• violation du système clos +++
• rôle probable du sac collecteur
40
bactériurie/sonde : voie extraluminale
Trois comateux avec SAD
J0 : inoculation de Serratia dans l’aire périurétrale
J2-3 : isolement de Serratia des urines de la sonde
migration par capillarité
dans le film muqueux contigu à la sonde
Kass N Engl J Med 1957;256:556-7
41
Tambyah Mayo Clin Proc 1999;74:131-6
1497patients récemment sondés
surveillance de flore prospective
115 épisodes de colonisation-IU/S
acquisition endoluminale
34 %
acquisition extraluminale
66 %
bactériurie/sonde : modes d’acquisition en «drainage clos»
42
Les sondes et autres dispositifs
favorisent non seulement l’acquisition
mais la pérennisation de l’IU
● Perturbations du transit urinaire
● Altération des moyens de défense vésicale
● Production d’un biofilm
43
Bactériurie sur sonde :
le plus souvent « asymptomatiques »
Tambyah Arch Intern Med 2000;160:678-82
1034 patients récemment sondés interrogeables
bactériurie + bactériurie -
(n = 89) (n = 945)
fièvre > 38,5°C 18 % 19 %
douleurs urétrales ou pelviennes 5 % 6 %
impériosités 6 % 8 %
dysurie 6 % 8 %
44
IU sur sonde : chez un quart des colonisés
des complications parfois graves
● Suppurations locales (A/R, SAD)
prostatites, épididymites, ...
● Bactériémies (A/R, SAD)
- 0,3-4 % selon les séries
- origine rénale, voire vésicale
urosepsis, chocs septiques, décès
● Infections chroniques obstructives (SAD)
cystite chronique, métaplasie, cancer
pyélonéphrite chronique, insuffisance rénale
● Infections à distance (A/R, SAD)
infections du site opératoire (IU 3 % des ISO ?)
F. Caron Med Mal Infect 2003;33:438-4645
46
Physiopathologie des IU : messages clés
- IU communautaires :
. soit un résidu (ou autre facteur de terrain)
. soit un coli piégé (ou autre souche très uropathogène)
- IU associé aux soins :
. la faute aux instituts de sondage
- Maintes conséquences pratiques :
. en clinique : cf recos SPILF 2014 & 2015
. au laboratoire :
- oublier les ECBU de contrôle post-traitement
- oublier le dépistage de la plupart des colonisations
- quantifier le titre au delà de 105 ufc/mL ?
- évoluer vers des études de flore ???
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